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AC4DEMIE ROYUE
DES SCIENCES, DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUK
COMMISSION ROYALE DIIISTOIRE.
MM. Le baron de Gerlaciie. President
Gachard. Secretaire e! Tr&orier.
De Ram
Lv ehanoine be Smet.
I)i Mortier.
BORMANS.
BORGNKT.
L Introduction . coraprenant un Essai sur la vie et les oeuvres de Jean d'Oulremcusc,
paraitra avec le prochain volume.
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CORPS
DES
CHRONIQUES LIEGEOISES,
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LY
MYREUR DES HISTORS,
CHRONIQUE
l)E
JEAN. DES PREIS DIT DOUTREMEUSE ,
PUBL1KE TAR
Ad. BORGNET,
MEMBRE DE L' AC A DEM IE ET DE LA COMMISSION ROYAI.E D'HISTOIRE.
TOME I.
BRUXELLES,
M. HAYEZ, IMPR1MEUR DE L'ACADEMIE ROY ALE DE BELGIQUE.
1864.
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LY
MYREUR DES HISTORS,
CHRONIQUE
DE
JEAN DES PREIS DIT D'OUTREMEUSE.
LITRE PREMIER.
Gh'est li promier libre des croniques de pays del evesqueit de Liege. f©i. 4 r».
Chi commenche ly promier partie de myreur des hystors f .
Portant que maintes gens oient volentirs racompteir en prendant solas
et delectation en oyr parleir, racompteir, reciteir ou pronunchier anchienes
hystors, croniques ou auctoritais et chozes anchienement passees et ave-
nues le temps chi-devant, nous Johans desPreis, dis d'OuItre-Mouse, clers Premier comment 1,
ligois publes des autoriteis apostolique et imperial et del court de Liege mMehHJarUr 01 *"
notairs et audienchier, et par le grasce de Dieu et del majesteit imperials
nobles contes palatiens , vos vorons demonstreir et despondre chesty pre-
sent croniques, que nos avons translateit de latien en franchois, et mys en
phiseurs * volummes ou libres dependant ly unc del autre, affin que toutes
1 Ces deux lignes soot tfcrites a Tencre rouge. Stavelot, et que j'indiquerai par l'initiale B.
Elles manquent dans le MS. Berlaymont, avec le * Quatres libres. B^
texte duquel je vais collationner eelui de Jean de
i
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2
CHR0N1QUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
trais.
maniers de singnour et aultres gens, qui de latien n'ont nulle cognissan-
che, le pussent entendre. — Lyqueis presens croniques at esteit pris et ex trais
^m?t MtoTt ex* ^ es cron > c l ues 1'evesque de Liege Hue de Pirepont, les abbeis Engoran de
Sa ins-Den ys en Franche et Seguyn de Meauz en Brie, si coqi depart eaux
fut fais et acopuleis, enssi que ilh an (est) fait mension a leur temps chi-
apres '. — Et deveis savoir qu'ilh trahirent le veriteit de toute l'isle de Eu-
rope, en que nos habitons, et d'autres, enssi en corregant les erreurs. Et
fut chis presens croniques fondeis , assavoir : sor les croniques et escrips
Josephus, de la parlie des Juys; item, de Tyti Livii; item, des croniques
Orasiens f ; item, des croniques le pape Damasque '; item, de Paulin, dya-
ques *; item, de Bonitus, 1'evesque de Sutre 5 ; item, de Rasses •; item, de
Gilbert, poete 7 ; item, de Richart, moyne de Clygny •; item, de Gervaise *;
item , de Estodien l0 ; item, de Godefroit de Viterbe ; item , de frere Vincent,
moyne de Bealvais 11 ; item , des croniques Suetoniens 11 ; item, de frere Mar-
tin, penitenchier de pape, del ordre des precheurs ". — Et deveis savoir que
chis parolent de pluseurs mateirs, et par especial des papes et des empe-
reurs de Romme. Item, encors pris enssi des croniques Pliniens ", le grant
philosophe, qui parollent generalment de tos croniques, et maiement del
fondation de Tongre et de ses roys jusques a sains Materne, li premier
evesque de Tongre, et s'y fait mension del fontaine l5 qui fut a Tongre. —
1 Chi apres en second libre. B.
* Paul Orose , historien du cinquiemc siecle.
8 C'est probablement unc allusion au livre De
vilis romanorum pontificum attribne au pape Da-
mase.
4 Paul Warnefried, plus connu sous le nom dc
Paulus diaconus, historien du huitieme siecle.
* Bonizio ou Bonitius, eVeque de Sutri, e'en-
vain du onzteme siecle, a aussi fait une histoire
des papes.
* Or asses. B. Peut-etre Idace, chroniqueur du
cinquieme siecle.
7 Un moine de Saint-Amand sur le compte du-
quel on peut consulter X Histoire litteraire de la
France, t. VII, p. 124.
8 Benedictin qui ecrivak vers 1460 et qui a
compose une chroniquc du commencement du
monde jusqu'au temps ou il vivait.
9 Gervais de Tilburg, auteur des Otia impe-
rialia, vivait au treizieme siecle.
10 Estodius ou Exlodius, chroniqueur dont Mar-
tin Polonus dit avoir use.
11 Godefroid de Viterbe et Vincent de Beauvais
sont suffisamment connus.
1> II est assez probable que le Suetone indique
ici n'est pas l'historien des Cesar*, mais un chroni-
queur signale par Liebrecht dans son edition des
Otia imperialia , p. 414.
15 Martin Polonus, chroniqueur du treizieme
siecle , et auteur d'une chronique summorufn pon-
tificum atque imperatorum romanorum.
14 Pline le naturalisfe.
15 Ce mot se trouve dans le manuscrit B. Notre
te&te porte par erreur fondation.
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LIVRE PREMIER.
Item , des croniques Bernardi Guidon , precheur inquisiteur des eretiques
el royalme de Franche 4 ; item, des croniques Richars 1 ; item, de Prospe-
rian, le prestre 8 ; item, de Eusebe, evesque de Cesare; item, des croniques
Arnoul Francar de Saxongne 4 ; item, des croniques Sigur de Hongrie 1 ;
item , de frere Baldewin de Dannemarche *, qui tos generalment parollent
de toutes histors et de tous pays. Item, de Bede, le venerable prestre,
des croniques d'Engleterre ; item, de Odain, evesque de Viene 7 ; item, de
Elymant , del royalme de Franche especiaulment; item, des chroniques
saint Augustin; item, de saint Jerome; item, de saint Gregore le pape;
item, de saint Ambrose, archevesque de Melan; item, de Sergius le pape,
seeonde de chi nom ; item , de Guilhaume de Puylaurenche \ — Item , de
grant docteur Ysidoriens 10 ; item, de Rogier de Salerne; item, de Metho-
diens d'Avergne 11 ; item, de Sigillitaire 4i , moyne de Gemblouz; item, de
Turpin, archevesque de Rains; item, frere Guilhaume de Nangis, moyne
de Saint-Denys en Franche; item , des croniques Pire la Foy, com dit Yro-
nice; item, de Fortin et Henris, freres des precheurs 45 ; item, de Pom-
peius l'Espangnois; item, des croniques Affi, le grant poete ". — Item, des
1 Bert tardus Guido, dominicain francais du
milieu du quatorzieme sieclc , auteur d'un Chro-
nicon summorum pontificum.
* Je ne vois qu'un chroniqueur qui puisse
convenir ici, c'est uu benedictin anglais du qua-
torzieme siecle, auteur d'un Speculum historiae.
* Prosper A quit aniens qui a e*crit Chronicon a
mundi ortu ad annum 485.
4 Je trouve un Arnoldus, abbe de Saint-Jean,
a Lubeck, qui a continue la chronique slave de
Helmold. Est-cclui qui est designe ici?
5 Inconnu. Reste a savoir si , comme pour plu-
sieurs autres, le nom n'est pas estropie.
6 Je ne sais qui Jean d'Oatremeuse indique ici.
Est-ce Baudouin d'Avesnes, chroniqueur du trei-
sieme siecle, ou Baudouin de Ninove, premontre,
qui vivaitdans le meme siecle ^et a Icrit Chronicon
a Christo nota ad annum 4294? Gela est possible.
7 Adon , archeveque de Viennc , auteur du neu-
vieme siecle, a ecrit une chronique De sex mundi
aeCatibus.
* EKmant, Elinant, Helinand, plusieurs formes
pour designer un moine du diocese de Beauvais,
qui , au treizieme sieclc , a ecrit Chronicon ab ini-
tio mundi ad annum 4264.
• Wilhclmus de Podio Laurentii, chroniqueur
de la seconde moitie du treizieme siecle, a ecrit
Chronica super historian negotii Francorum adver-
sus Jlbigenses, de 4099 a 4274.
10 Isidore de Seville est assez connu.
11 Je ne connais pas ces deux derniers chroni-
queiirs.
" Assurement, sans les trois mots qui suivent,
on aurait peine a reconnaltre ici Sigebert de Gem-
bloux.
11 J'ignore completement quels sont les trois
derniers chroniqueurs indiques ici par Jean d'Ou-
tremeuse. Guillaume de Nangis et Tarcheveque
Turpin sont suffisamment connus.
14 Encore deux personnages que je ne connais
nnllement. Pompeius l'Espangnois designerait-il
Trogue-Pompee , originaire de la Gaule narbon-
naise?
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4
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Fol. i V.
Content chis libre fat
extra is de I tares de
tout lea maiatres de-
vantdit.
Coment ilh futordineit
lea VII englieae qui
devoient mettre en
esc rip t tout lea aven-
turea.
Cbi libre commenche
a la destruction de
Troie.
croniques Harigeriens, abbeis de Lobles, qui, de temps saint Nogier, eves-
que de Liege, regnoit, qui escript les croniques de Tongre, de saint
Materne, ou Plinius les lasat, jusques a temps saint Remade, evesque de
Tongre; item, des croniques Anseals', docteur en theologie et scolaste
de Liege, qui escript de saint Remacle jusques a Wazo, evesque de Liege ^
item , des croniques Giles, moynes de Orvals *, del evesque Wazo jusques a
Henri de Geldre, evesque de Liege, qui fuitdeposeis; item, des croniques
sires Johan, preistre et vestis del englieze de Warnans ', et maistre Johan
de Hokesemme % canoyne et scolaiste de Liege, de temps Henri de Geldre
jusques a temps Engebert del Marche. — Et d'oultre en avant pris les fais et
les aventures que nous avons veut a plus pres que nos avons peut. Item ,
avons pris les vies d'alcuns sains et le decreis que lout avons chi mys
ou li mateire le requirt. Item, la lidit maistre Johan d'Oultre-Mouse les
laisat, Johan de Stavelot , moyne et coste de Sains-Lorent par-deleis Liege,
les recommenchat, et les ramynat jusques a temps Johan de Los, le LlII e
evesque de Liege, qui regnoit l'an MCCCC et XLVI \
Apres encor deveis savoir que , de tous ches croniques des maistres de-
seurdis, fut exstrais et copuleis chis presens croniques. Et fut ordineis que
dedont en avant ne sieroit riens escript dedens, se veriteit n'ont. Et furent
la meismes constitueis VII ca pi ties, assavoir : 1'engliese de Romme, 1'en-
glise de Sains-Jakes en Gomposlel, Sains-Denis en Franche, et Rains,
Liege, Trive etGollongne, lesqueis si devoient mettre en escript, chu qui
avenoit a plus pres de caschon , et envoiir aux aultres, et chu par tout lisle
de Europe. — Item, de ches croniques oit li evesque Hue de Pirepont une 7 ,
qu'ilh intitulat : les Croniques des vavassours. Et ja soiche que chiz pre-
sens croniques prendent leur commenchement a la destruction de Troie,
portant que cheaux, qui de Troie soy partirent apres la destruction, si vin-
1 Anseauls, B.
1 Harigere, Anselme et Gilles d'Orval ont ete
publies par Chapcaville, dans ses Gesta pontificum
Leodiensium.
* Le manuscrit B ajoule : et regnoit chis esco-
lastre a temps saint A vonne, arcltevesquede Cologne,
La phrase ne peut s'appliquer qu'a Wazon meme,
qui avait etc ecolatre avant d'etre 6veque.
4 La chronique de Jean de Warnant, le Johan-
nes presbyter de Chapeaville, est inedite.
* La chronique de Hocsem se trouve aussi dans
la collection de Chapeaville.
• Inutile, sans doute, de faire remarquer que
cette derniere phrase a et6 introduite par Jean de
Stavelot dans le texte de son prede'cesseur, et ne
se trouve pas en effct dans le manuscrit B.
7 Ce mot, qui est necessaire et se trouve dans le
manuscrit B, a ete omis par Jean de Stavelot.
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LIVRE PREMIER. 5
rent en Europe habiteir, combien qu'ilh avoit ja gens habitans 4 et avoit
oyut devant par 1 espausse de XV cens ans et XXX VII. — Et y avoit ja
trois royalmes, assavoir : le royalme de VII montagnes, ou Romme fut Deiui premiers royai-
• ■ i i •¥• ■ • i i metdeEurop.
puis fondee; la seconde, le royalme des Latiens, eft la tierche, le royalme
de Toscaine. Et estoit Trive en Allemangne fondee, et pluseurs aultres;
mains ch'estoit choze petit, et estoient fondee trop long 1'une de Fautre,
enssi que nos deviserons chi-apres. — Nientmains, por la cognissanche
avoir de cheaux qui fondarent les trois royalmes et citeis deseurdictes , nos
vorons declareir comment ly ysle de Europe fut promiers habiteis, par comenti yy siedeEu-
queiles gens et a queile temps, et par queile maniere et ocquison. Et le w&e. u pr0B,ier
volons plainement demonstreir, affin que chascon le puist entendre, jus-
ques a tant que cheaux de Troie y vinrent habiteir por le destruction de
leur citeit; et dedont en avant de greit en greit, si com Josephus et les
aultres deseurdis le dient en leur croniques.
En cheste partie, dist li comptes des croniques, Josephus et les aultres
parlant de chesti mateire que Noe, ly amys de Dieu, qui list Farche, oit &• «©••* <*« *** oc-
trois fils, desqueiles ly anneis fut nommeis Gam, de coy lignie issirent les DeChamjianoeu fi»
grans agoyans ' et les gens qui sont si contrefais et si contre nature four- "'
meis, qui habitent en diverses ysles de mere. — Li secons fis Noe fut nom- Ly mcoo & n« fut
raeis Sem , dequeile les patriarches et les pueples d'Israel yssirent ; et
portant tient-ons Sem por le plus grans de tos les freres, que la Vierge
Marie issit de sa lignie sainte. — Ly thiers des fis Noe fut nommeis Japhet ; et Ly "i«fiis Noe fut ja-
de chesti issirent et sont issus presque tous les cristiens, et par especial del
ysle d 'Europe; et fut nominee li lignie Japhet 8 li noble generation, et li
lignie Sem la sainte generation , et la lignie Cam la maldit generation. —
Et deveis savoir que, a temps de chesti Noe, envoiat Dieu le delueve des Dei delude Noe.
grandes ay wes sor terre , et avoit ja Noe d'eaige Vl c et II ans, et si n'avoit Fo1 ' * r "'
enfant qui n'awist cent ans. Si avoit li side dureit, puis le creation Adam,
H m 11° et XLI1 ans. — Ors avient apres le delueve que tous li monde fut
peris, excepteit tant seulement Noe, sa femme et ses enfans, fils et filhes.
Enssi fut tout li monde noies en terre, el portant les trois fils Noe. qui Comemies trois enfant
. . i . * Noe partirent toul la
pluseurs enfans avoient, partirent tout la terre en trois part. — Apres la terre en trois.
1 Les quatre mots qui precedent ne sont pas avec^doux, s'est conserve a Liege; a Namur on
dans le manuscrit B. dit aurjowms.
* deans dans le manuscrit B. Le mot agoyaus, * Jean de Stavelot a ecrit par erreur Josaphat.
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6 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
mort de leur peire, si oit chascon a la volenteit Gam qui donnat a Sem,
sem ©it Asi«. son frere, Asie — car maintes gens dient que Sem estoit anneis, et les altres
dient que Gam estoit anneis — le partie de Asie, qui estoit la lierche partie
de la terre, et tient ortant que les II altres parties, car ilh contient la molie
de la terre et plus. Mais chu ne fut pas por le grant bien qu'ilh vousist a
son frere , mains portant que chu estoit unc diverses et savaiges pays. —
cham ©it Affrique. Et Affrique, qui estoit l'autre parchon, dettent-ilh por luy, portant qu'ilh
j«phet oit Europe, estoit bons et beals. Et Europe, qui estoit li altre partie a senestre , donnat-
ilh a Japhet. Enssi oirent-ilhs tout le monde por eaux, et y alarent tan*
toist habiteir Gam et Sem en leurs terres , et commencharent fortement a
regneir. — Et issirent d'eaux dois grandes generations. Mains Japhet ne
vient nient si tost decha mere habiteir en nostre ysle de Europe, ains alal
habiter deleis Gam, son frere, unc pau de temps. Mains Gam, qui estoit
fels et orgulheux, temprement l'encachat , portant que Japhet ne se voloit
mettre en sa subjection.
cus u fis cham oit i Chis Gam oit, entres les altres siens enfans, I fil qui fut nommeis Gus,
prot. et chis Cus oit I fis qui fut nommeis Nemprot, qui fut I grans agoians ',
de XXIII pies de long et une toise de large. — A temps de chis Nemprot,
vient promier Japhet habiteir en Europe; si amynat awec ly dois de ses fils,
japhet viem habiteir qui furent nommeis Jabam et Rachem. Et vinrent awec eaux Janus, li
en Europe awec II * ■ •/»«*■ ■ • » i
fi*- fis Jabam, et Janus, li fis Rachem, et pluseurs altres de la nation Japhet;
De Romme comment et vinrent en droit lieu ou la citeit de Romme fut depuis et est fondee. —
Et edifiat la chascon tabernacles, sicom vilheltes petites; et furent toutes
nommeis apres leurs nommes des II Janus, excepteit une qui fut nominee
Recheane, apres Rachen. Mains ilhs n'oirent nient la habiteit une an,
que grant multitude de serpens et altres biestes vynemeux les racacharent
oultre mere, dont ilh astoient venus. Et alarent tous habiteir en Asie,
excepteit Rachem , qui alat es parties de septentrion ', et fondat une citeit
que ilh nommat par son nom Heseponde, qui est a dire en franchois Re-
fuyt, portant qu'ilh estoit refus 8 ; et la habitat jusques a tant qu'ilh revient
en Europe, si com vos oreis chi-apres. — Et deveis savoir que la terre ou
Ma R c ^ m efutftilptr Rachem fondat Refuyt est maintenant la terre de Machidone, qui fuit puis
1 Geanz. B. » fiefuys. B. Cette version indique mieuxlesens
* Septrion, par erreur, dans notre lexte. du mot, qui signifie refugie.
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LIVRE PREMIER. 7
unc gran royalme; et la fut neis ly roy Alixandre, qui conquestat tant cle
pays.
A eel temps que Japhet vient en Europe, avoit-ilh ja Ul c ans d'eaige, et
ehu fut sour Tan del origination de monde II m 1111° et XLVIII ans, qui fut
li an del delueve Noe 11° et VI. — Item, Jabam, le fis Japhet, avoit VII** et D«enfa M ja P bet.
1III ans, et Racbem, li altre fis Japhet, avoit XGII ans, et Janus, fis Jabam,
avoit XLVIII an, et Janus, le fis Rachem, avoit XVI ans. — A eel temps
astoient mors tous les enfans Noe, excepteit Japhet, qui temprement apres
morut en une vilhe qu'ilh avoit fondee sor mere; et le nommat-ons apres
luy Japhe 1 , qui siet a XVI lieu pres de Jherusalem. — Item, a eel temps
que je dis, regnoit en Asie Heber, qui fut li fis Arphaxat, le fis Sem. Et d« Heber, u fi. Ar-
en Asie meisme regnoit Nemprot, de quoy nous avons fait mention desus, DeNemprotiajoian.
qui estoit si grans que tout le monde le doubtoit *; et a wee chu estoit foux
et orgulheux; et commandat par tout son pays que tous les peuples le Foi. s *-.
venissent aoreir eom Dieu. Ghis pays n'estoit mie son pays; mains ilh
I'avoit enforchiet a Heber, qui ne li oisat eontredire, et le tient a forehe.
— Por vos faire mies entendre, nos le vos declarrons la maniere plus par- u»« declaration de*
7 ... beurs dei enfans Woe.
faitement. Ilh est veriteit que Sem et ses heurs, desqueis ilh yssirent les
Juys, les Galdiens et les Greches, tinrent pasieblement la terre d'lnde, de
Mesopotame, de Sirie, de Palestine, d'Armenie et toutes les provinches
d'Asie, excepteit une provinche dont nos parlons, que Nemprot enforchat
a son eusin; se le nomme-t-ons le provinche de Babylone le maiour ', ou
li thour de Babel fut fondle, enssi que vos oreis. — Et awec eel provinche
tient Nemprot, qui fut ly fis Cus le fis Cam, tout la terre d'Affrique, assa-
voir d'Egypte, Ethioppe, Nubie. jusques en montant vers Orient a la
Roge mere. Et Japhet, dont ilh sont issus tous cheaux qui sont en lisle
d'Europe, tient Espangne , Bethongne *, Aquitaine, Bretangne, Germaine.
Belgique, Galle, Togaine, Brataine 8 , Gilsapine, Transalpine, Pannonie,
Hongrie, Ytaile, Rurie*, Ligurie, Dalmatie, Murique 7 et tout Europe
entirement. Et enssi aveis chu que les trois freres tinrent, et chu que
1 Jaffa ou Joppe en Palestine. Gascognc ?
* Cremoit. B. Meme sens que doutoit ou redou- * II doit fore ici question de la Gallia Togala et
taiL de la Gattia Braccata.
* Le tuptriour. B. • L'£trurie sans doute.
• * B t thing t. B. S'agit-il du pays Basque ou dc la 7 Sans doute pour Norique.
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8 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
DeNemprothetuthour Nemprot enforchat a Heber. Si vos diray avant la matiere de croniques del
• y one. thour de Babylone.
Nemprotfutiipromier Chis Nemprot soy fist coronneir com roy sour toutes altres nations, et
roy e mou e. ^ ^ promirs roy de monde, et coroneis a droit an de son eaige VI** et 111 ,
qui fut li an de monde II m I II 1° et LX. — Adont entrat-ilh en si grant pre-
sumption d'orguelhe chi roy Nemprot, qu'ilh porpensat en son foul cuer
qu'ilh feroit edifyer une thour si hault qui monteroit aux ciels; et de eel
thour guerriroit-ilh Dieu, et le cacheroit fours de paradis, ou ilh le tenroit
de luy. Et finablement ilh fut fait, ear ilh mandat ouvriers partout; et le
fist faire a sa volenteit en Ynde, en provinche de Babylone le superiour. —
coment Nemprot fist u Et deveis savoir qu'ilh fist faire grant citeit awec la thour grant et large
yone. ^ eS p£ s# g e ] e voloit monteir jusques a ciels; et vuet-ons dire que el fut
montee pres jusques al cercle de la lune. Mains Dieu y demonslrat my-
racle, dont ly ovraige demorat imparfait, si com racompte Orosius en ses
croniques; et vos l'oreis, car nos le vos dirons. — Orosius dist enssi : ilh
n'est mie en humain corps le sens ou le subtiliteit de croire la veriteit del
construction del thour et la citeit de Babylone, et ausiment del destruire,
ne vertu humane ne poroit subtilisier I'ovraige mervelheux qu'il y avoit;
Dei pandeche et itr- car eel citeit, qui seoit aux plains champs sor la riviere d'Eufrates, qui est
uns des flus qui vient de paradis terrestre, astoit si large de mures, si hauls
et si espes, et de quarree forme; les murs astoienl espes cinquantes cubites,
et hals LI cubites ', et astoient fais de terre cuyte, c'ons appelle tueles; et le
mortiers estoit fais de colle et de butyne \ — Et avoit en front del murs C
portes de erain, et tenoit la circuite 1 1 II C et HII" stadiens, qui est unc
terme de mesure qui tient cent et XXV pas, et chascun pas tient V pies.
Et tant de mervelhes en at escript Orosius, que ilh n'est cuers morteis qui
le posiste croire.
coment Dieu toy coro- Ensi que ons faisoit la citeit et la thour de Babel, et la citeit astoit si
chat contre Nemprot. 1 i 4 - # * •- • • * r*. i -
hault montee que nos avons compteit, si avient que Dieu soy corrochat
encontre Nemprot dez LXXII maistres ovriers qu'ilh avoit la ovrant, sens
Foi.3r*. les manovriers qui adont astoient tous donne lengue, et tout le monde
Coment
itonsappeiutie oussi , ch'est assavoir le lange de nature de Ebrie, que encor parollent les
a^m&ebeT. reu Juys ; et l'apellat-ons enssi apres Heber desusdit d'Affrique , qui mult l'avoit
1 Le raanuscrit B porte seulement : Astoit si quante cubites, et hats ll e cubites.
ample et large, et de ffiures si hals et si espes chin- * Bitume.
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LIVRE PREMIER. 9
esclarchiet. — Mais adont Dieu donnat a chascun ovriers une lange de par-
leir por ly, sy que ly uns ne pooit entendre l'autre, car Dieu le transmuat
en LXXII langaiges. Et convient par forche lassier I'ovraijre qui, par c©»«* Dieu tnns-
D . . i i i • • i • • ■ moat unc lengagcea
orguelh, fut enssi commenchiet, et les gens habiteir ■ en la citeit et en la lxxu ie ng »ige*, et
Ihour longtemps, jusques al temps Chires le roy, qui le destruit por I sien Babyiooe.
chevalier qui estoit noies en le riviere d'Effrates, si com oreis chi apres.
Enssi fut lassiet li ovraige de confusion sor Tan del creation de monde
II m II ll c HII** et II. — En chesti an meismes revient Rachem, le fis Japhet, Rtchem,iefi ? jtphet,
en Europe par le commandement de Dieu, qui li envoiat certain signe, par ro P , en Ytaiie ou
lequeile ilh fist vuidier de son pays tous les serpens, et sen alerent en
Orient. Se prisent puis ches serpens habitation en la thour de Babel ,
con nommoit adont la thour de confusion. — Chis Rachem fist mult de
habitation en Europ, en la partie c'on nomme Ytaiie, ou Romme siet; et
governat ses gens LXII ans , et puis morut , sor Fan del origination de
monde Il m V c et XLIIII, qui fut li an de son eaige IX" et VIII ans.
Apres la mort Rachem, vient Janus son fis, et Janus li fis Jabam, son Apres vinrem en e u -
cusin, en Europ; et acceptarent le gubernation de peuple Rachem por le piusieaA • w m e
besongne et necessiteit que li peuple en avoit, qui encor astoit asseis petis.
Et regnarent ensemble ches dois cusiens, com soverains de peuple, par
lespause de XCVII ans; et puis morurent a unc seul jour, Fan de monde
Jim VI C el XLI an , quy fut li an del eaige Janus , le fis- Jabam, II C et XLI an ,
et del eaige Janus, le fis Rachem, 11° et VIII ans. — Ches dois cusiens fon-
darent unc pa la is en leur regne, lequeile ilh nommarent Janyculum; et
en droit lieu de chis palays siet ors li engliese Sains-Johan al Janycul. —
Apres le mort des dois dis Janus , furent gubernateurs de peuple de Europ De* u governed de
Phalec, li fis Janus fil Jabam , et a wee li Mathiabam, fil Janus le fil Rachem , urop '
par lespause de XGII ans; puis morut Mathiabam sor Fan del creation de
monde II m VII C et XXXI 1 1 ; si regnat son fis Rachen awec Phalec deseurdit
LXXIII ans. Adont morut Phalec; si regnat son fis Jaban awec Rachen "
deseurdit LIX ans; et furent mult simples. — Ches dois governeurs edifiont
a leurs temps II vilhes qui furent nommeis Jab et Rachet; et fisent mult de
grandes boymes * dedens les grandes montagnes , en queiles ilh habitont
plus volentiers qu'en leurs edefisses et vilhes.
1 11 faut probablement lire hatoterenl. ne comprends pas le sens.
* II y a ici dans les deux textes une s dont je * Bonnes dans le manuserit B.
2
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10 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
A eel temps astoient si simples les gens qui regnoient en Europ, qu'ilh
comentcheauxdcEu- soy maintenoient com biestes. Mais cheaux d'Affrique et d'Asie, qui estoient
rop estoient mult • ** • * wi r 11 11 n i
jmpiesgen^etebee yssus de Cam, astoient tres - subtils , felles et orguueux. Et cheaux qui
toientfeiiesetorgui- estoient issus de Sem, estoient plains de grant sanctite et proidhons. —
Apres , sor Tan del origination de monde ll m VI 11° et LXV, morut Rachem ;
si regnat son fis Japhet awec Jabam deseurdit XCIII ans. Puis morut
Jabam sor l'an II m IX° et LVIII ; si regnat son fis Janon awec Japhet de-
seurdit XXXI II ans. — Item , vos deveis savoir que ches governeurs avoient
pluseurs enfans, fis et filhes, desqueiles li regne multipliat fortement; se
ne faisons d'eaux nulle mension, portant que toudis regnoit li anneis fis;
el se ne savons les nommes d'eaux, si nos en covient abstenir. Et se vos
disons que nos ne racomptons nuls fais qu'ilh fesissent adbnt, car ilhs ne
fasoient nuls, et viskoient simplement si.com biestes, en mangnant rachines
Foi. s r>. et herbes, et poymes savaiges , et teils viandes. — Item , sor l'an del monde
H m IX° IIII" et XI morut Japhet; si regnat son fis Matiphalet awec Janon
deseurdit LXI1I ans.
DeThare,iepereAbn- A eel temps regnoit en Affrique Thare, le pere Abraham, le patriarche.
Item, l'an de monde III m et LIITI morut Janon; si regnat Janon, son fis,
ThirevintdeffloreireD awec ledit Mathiphalet LXXIX ans. — En eel an meismes vient Thare de-
la terre de Caldee. *
moreir en la terre de Caldee , en une citeit e'on nommoit Hur, qui est a dire
en franchois Feu. — Item, Fan III m C et XXXfUI morut Matiphalet; si
regnat son fis Sem IIII 1 * et II ans. Et al cinquanteime annee del regnation
De Abraham quant uh ledit Sem, fut neis Abraham, li fis Thare. A laqueile nativiteit nos prende-
rons nos dautes d'ors en avant. — Item, Fan del nativiteit Abraham XXXII,
morut Janon deseurdit; si regnat son fis Jabam awec Sem XLIX ans , puis
morut ' ; si regnat son fis Heber awec ledit Jabam LXII ans.
D*royNyn«»q»»fo»- A eel temps dont je parolle astoit roy de Asserie Nynus, liqueis fondat
en sa terre marchissant a la thour de Babel, une mult belle citeit, qui fut
ly plus grant de monde ; et le nomat solonc son propre nom Nynyve. Mains
Tenebrous de Asie commenchat guerre al encontre de ly, sy orent batalhe
en laqueile li roy Tenebrous fqt mors, et ses gens desconfites. — Et adont
coment ly roy Nynus en t rat li roy Nynus en Asie, et le cohquestat; et prist a femme Semira-
eonqnestat Asie, et r. ~ _ _ i ♦ m T
enfatiypromierroy. monde, la ulhe le roy Tenebrous. — Item, chi roy JNynus fut mult valhans ,
1 Ge dernier membre de phrase ne se trouve pas dans le manusertt B.
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morut.
LIVRE PREMIER. 11
et fut ly promier roy qui fill en Asserie; et fut si sub tils que ilh trovat les Ly ^mie^iTfiu 7e
batalhes et les guerres, qui depuis ne fallirent. Et devant luy estoient toutes » uerres el ***"»•••
les gens en paize par universe monde.
Item, l'an Abraham XXXIIII, commenchat la royne Semiramonde a D ~ Uh semrramonde
1 1 * royne, la femme le
edifyer une citeit de la grande thour Babel a l'autre costeit vers Orient, et «>yNynu».
vers la citeit de Nynyve, que li roy Nynus avoit jadit fondeit; etastoit li
plus grande de monde. Et prist la royne le fachon des murs, et le fist venir
toute a une citeit awec le promier Babylone que JNemprot avoit fondee,
si com jay dit desus, de teil haulteche, de teile espesse de murs: mains el
demorat a parfaire, car li roy Nynus, son maris, morut le promier an quelle
fut commenchie. — Si regnat apres luy sa femme, la royne Semyramonde,
XLII ans, et fondat dedens Aisie, dedens cheli terme, XXXIII citeis, dont la
promier fut la grant Babylone deseurdit; et adont fist-elle de eel chief del
royalme de Asie. — Ors est raison que je vos die comment ly roy Nynus cometi \ y roy Nynus
morut. Je vos dis que li roy Nynus fut li plus noble roy de monde et li
plus valhant ; se guerriat tout sa vie ses voisiens, lonche et pres, et fist-ilh
tant que d'Asie fut- ilh roy et sires soverains. Ilh conquist le roy Tene-
broux et son pays, qui estoit roy d'Asie, si com nos avons dit desus. Apres
ilh conquist Zoroastes, le roy de Batrianoir ', qui estoit I gran agoians, et
estoit uns enchanleur : ilh l'ochist et conquist son pays. Et conquist tous
les pays de la Roge mere al costeit vers medis jusques vers septentrion, a
la citeit de Pentecuye * que ilh asseit , et a derain le trahit uns albastrier
de eel citeit une saiete , si l'ochist; et enssi fut mors ly roy Nynus.
La royne Semyramonde estoit mult valhant damme, et en armes mult d« semyramonde.
bonne; si maintient XLII ans les armes; et chu entreprist-elle por Nynus,
son fis, quelle avoit del roy Nynus, qui encor estoit jovenes enfens de une
an et demy. Se li voloit gardeir son pays ; car li roy Nynus avoit I aultre
fis de sa promier femme, la royne de Caldee, qui estoit nommee Trebetas,
et li fis estoit nommeit Treberis. — Ghis Treberis vot prendre a femme la coment Treberit con-
royne Semyramonde, sa maraste *, mains el le refusat et l'encachat de son
pays; et ilh s'en alat, car ilh estoit mult bon chevalier; si conquist mult de
pays en Affrique, ou ilh alat par forche d'armes, luy et ses gens de Caldee,
1 La Bactriane. s'dcarte ici de la tradition qui pr&ente Semiramis
* Pontecuye. B. comme d&irant le manage et Treberis comme le
* 11 est assez singulier que Jean d'Outremeuse refdsant.
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12 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
Fo1 4r *- enssi que faisoit ly roy Nynus. — Et li royne Semyramonde, qui adont
^oyne. 3 ^ 1 " " e * (regnoit) 1 , edifioit citeis tout son vivant; et la plus grant fut Babylone,
qu'elle adjondit a l'autre citeit de Babylone et a la thour de Babel, si com
nous avons dit par desus, et en fist chief de tout le royalme d'Asie; et prent
Babyiooe fut le pro- son edifisse le royalme de Babylone, qui fut li promirs des quattres grandes
^rant r ° 7 ro^a1me Z de royalmes de monde, don I Josephus et Orosius parlent. — Et la seconde fut
roonde, la II* Carta- /-,.. . tx i *• i * am>*»i*i*«i i
ge,enAfrique,iain« Lartaige , que la royne Dydo fondat en Affrique "; la tierche fut la royalme
Homme. ' de Machedoine, vers septentrion, que Alixandre le roy com men chat; et le
grant Homme, vers Occident, que Romulus commenchat, qui en fut le pri-
nter roy. Des queiles IIII royalmes ly promiers et li derain sont les plus
grandes et plus poisantes, et les dois moiens sont les plus pe tiles. — Mains
procba futiy premier Orosius clisl que Romme prist son nom a roy Procha, qui fut ayons 8 Ro-
f#J aie * mulus; et fut li promier roy dTtalie, enssi que nos deviserons chi-apres;
ja soiche que chu n'avenist dedens granment de temps apres chu dont nos
parlons, nientmains, puisque nos astons a la matere, si en parlerons main-
tenant, si qu'ilh soit mies et parfaitement entendue.
Demy Cyrus. Sachies que apres chu longtemps oil I roy en Mede. qui fut nommeis
Dea proobetes Esdras Cyrus, chest a dire Ghires, qui regnat al temps Esdre et Zacharie, les pro-
phetes , qui entral en Orient ; si conquestat grant partie d'Asie , et vient jus-
ques a la thour de Babel et la citeit de Babylone, qui estoit la plus belle de
toutes les aultres. Mains ly flus d'Efrates, qui estoit grans et parfons, li fist
mult d'encombrier, et maiement I sien chevalier, que ons disoit estre li plus
beal, fors, hardis et victorieux de tout son oist, enlrat en Faiwe, se quidat
passeir, si fut del aywe sorpris, si qu'ilh noyat li et son cheval, dont ly roy
fut yreis : si vowat a ses Dieux que, por la venganche de son chevalier, illi
metteroit le flu en teile point que une femme le passeroit a piet, sens avoir
comem iv roy Cyrus del ay we oultres les genos. — Et tout en teil maniere le fist-ilh, car ilh fist
fratesen iiu<etLx faire par les champs IIH C elLX grant voies et chavee*, parmy lesqueiles li
flus yssoil deses droites metes natureis; et soy partit* en diverses chemiens,
et laisat la voie qui le conduisoit parmy la citeit, qui privee fut de son flu.
1 Cc mot ne se trouvc dans aucun de nos deux le Brabant wallon skavte indique encore un che-
textes; il me para It necessaire pour completer la min creux, xhavee en liegeois.
phrase. * Le chroniqueur veut dire que les travaux or-
* En 4/friquc vers medis. B. donnes par Cyrus forcerent le fleuve a sc partager
* Grand-pere, aieul. Aiol dans Roquefort. en plusieurs bras.
4 Fosses. Roquefort donne le verbc c haver. Dans
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LIVRE PREMIER. 13
— Et adont entrat en la citeilpar chist voie meismes ly roy Cyrus et son oist;
et le prist et ochist le roy. Si en fut roy XXXIHI ans. En teile maniere et OooientuciteitdeB*-
. • . . • • by lone fut gangnie
al temps que je dis fut gangnie la citeit de Babylone la superiour. Et adont p« ■« «>y Cyrut.
fut accoinplie la prophetie Abacuc, le prophete, enssi que nos vos dirons
chi-apres le daute quant chu avient; mains or m'en taray, et dirons avant
de nostre droit mateire.
Revenant a nostre droit mateire , dist li conte 1 que, sor Tan del nativiteit
Abraham XL1X, astoit la royne Semyramonde, qui demoroit en la grant coment i» roync se-
citeit de Babylone dont nos parlons, en grant estat, assemblat grans gens fist ie roy dePerwe,
iii i Tfc • • i ii ii n o- et destruit sa terre.
et chevalchat sor le roy de Persie ; et oit batalne a luy, et le desconnst. Si
destruit sa terre, et ochist ses hommes; et ne s'en parlit en XIII mois, tant
que tout l'oit conquesteit. — A eel temps conqueroit fortment Tyberis *, le fis
le roy Nynus deseurdit, parmy Affrique XVI ans tous plains; puis s'avisat
qu'ilh estoit mult riche, mains ilh s'en yroit a grans gens en Europ.por
veioir le lieu inhabiteit. Car vos deveis savoir que Europ n'astoit en nulle Comeot Tybem vim
_. . en Europ et visentat
part habiteit, forsque en Ytaile; par tout Galle. con nome ma in tenant lepaysounuiiusne
Franche, ne par tout la grant Bretange, Flandre, Brabant, ne Germaine,
con nome maintenant Allemangne, n'avoit yilhes, citeis ne cas teals, ne
nulle habitation. Si vient la es parties d'AUemangne, et allat visenteir les
lieu qu'ilh y avoit mult beals. — Et entres les altres trovat I lieu , sus le Mu-
sel*,une riviere qui coroit la. Ety avoit uneplache etune vallee mult belle, Foi. ♦*•.
qui estoit bien servie d'aiwe et de bois et de montangnes tout altour regar-
dant. Si fut si sorpris d'amour a chis beal lieu , que ilh oit grant devotion coment Trivem fun-
j i* i i • !•*» t^ • i ii i «n m • dal la citeit deTrive.
de la habiteir; et edifiat la une citeit mult belle, laqueile ilh nomma Irive
apres son nom, sor Fan del nativiteit Abraham LVII ans. — Et mist ens
gens habiteir, qui astoient awec luy venus. Et estoit desquendut de la lignie
Gomeir, le fis Japhet, le fis Noe. Et celle fut li promier edifiement qui fut
fais en lisle d'Europ, excepteit Ytaile; et maintenant est nominee Trive en
Allemangne. — Chis Tyberis oit I fis qui fut nommeis Hero, qui succedat
1 Cettc expression : li conte des chroniques pour * La Moselle. Jean d'Outremeuse doit avoir
les chroniques revient assez souvent dans le texte pulse ses details sur 1'origine de Treves a la raeme
de Jean d'Outremeuse. source que Jacques de Guise, (/innales de Hai-
1 Plus haul Treberis, orthographe plusconforme naut, liv. I, chap. XV 1 1.) On y trouve nierae, com roe
a la tradition fabuleuse recueillie par notre au- plus haut p. 7, Rurie pour itrurie ct Murique pour
teur. Norique.
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14
GHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Coment Hero fondat le
promier alteit, et fist
malt de chasteal et
citeis par Europ.
Chis Hero fist 1 ymage
de pire que ses gens
adoront promier com
Dieu.
Coment Trive fut ly
chief de tot Europ.
De Crete, le roy de
Caldee. qui tou pro-
mier aaorat Jupiter.
son peire en sa principaliteit et domination, quant ilh fut mors. Et fut beal
hons et bons en armes, bien ressemblant son peire; solonc l'orde* des Zara-
siens ou des paiens 1 , chis Hero fut li promier qui fesist faire alteit et aoreir
les dieux. — Et fist faire une ymage de piere al forme de Belis, son ayon ,
le roy de Caldee; et commenchont ' ses gens eel symulacre aoreir com Dieu.
Et ilh escript chu en table demarbre,por donneir perpetuel memore dechu
que li roy Nynus, la royne Semyramonde, Treberis et Hero avoient fait a
leur temps, et comment ilh avoit fait de Trive le chief de tout l'isle d'Eu-
rop. Apres Hero regnat son tis, qui fut nommeis Anceritate; chis fist alteis,
oil ilh fit aoreir Jupiter et Mars.
Ghis Hero oit 1 frere qui oit nom Treberis; et chis Treberis oit II fis : li
unc oit a nom Trivas , et li altre Treberis. Ghis Trivas fut sires de Treve; se
le nom mat, solonc son nom, Trive, et puis morut sens heures. Si fut son
frere Treberis sires; se l'apelat Trive, solonc son nom; sique e'est Trive
en Allemangne. Ghu ne fut pais ' fait si toist; mains nos le vos avons con-
teit en ordre, por mies entendre. — Or revenray-je a ma mateire, e'est de
Hero, qui fondat mult de belles citeis par Allemangne. Si" commenchat
Tan Abraham LXIII, et visquat jusques a Tan C et I, toudis edifians chas-
teals et citeis. Et fist unc granpaiis, et puis morut; se regnat son fils deseur-
dis. — 'Item, Tan Abraham C etXLVI, fondat Heber I cite it que ilh nommat
solonc son nom Hebruel. Item, Tan Abraham XLIIII, XLV, XLVI et XLVU,
avoit I roy en Caldee qui fut nommeis Crete , liqueis fondat 7 une citeit en
son regne, qu'il appellat Crete apres son nom 8 . Et les trois altres annees
deseurdit XLV, XLVI et XLVII , fondat-ilh trois altres, et les parfist en
temps apres. — Etdeveis savoir que chis roy Crete astoit yssus et desquendus
par succession de la lignie Japhet , le fis Noe. Et fut ly promier par tout le
monde qui adorat Jupiter 9 , et apres le fist le sires de Trive, si com je ay dit
1 L'ordonnance, le reglement
* Cette assimilation des Sarrasins aux paiens
est frequente dans les chroniques du moyen age.
Le manuscrit B ne porte que le mot paiens.
* Commandat. B.
4 Pour pas.
5 Peut-elre au lieu de si faudrait-il ecrire chis.
* Ici le manuscrit B contient de plus cette
phrase : Item Vain Abraham C et XLIII morut
Jabam li gubernatour de Ytale ; si regnat ses fis
Japhet avec Heber deseurdit LIX ans.
7 Liqueis fondat Van XLIIII deseurdit une ci-
teit. B.
8 On lit dans la chronique d'Eusebe: Creta dicta
a Crete indigena, quern aiunt unum Curetarum
fuisse, a quibus Jupiter absconditus est et nutritus.
Mais il s'agit ici d'une ville; Jean d'Outremeuse
voudrait-il indiquer Cretopolis en Pamphylic?
9 Jupiter, et si en fist en sa citeit unc temple en
honour Jupiter, et apres, 0.
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LIVRE PREMIER. 15
desus. Item, Tan Abraham C et XLIX , fondat li dis roy Crete une citeit en
son rengne, qu'il nommat Nause. — A eel temps fisent cheaux d'Egipte leur ^ eu f gip Jj™ r * renl
promier roy, qui devant avoient esteit governeis par gubernateurs ou pas-
teurs. Et deveis savoir que tous les roys de Mede, d'Egypte, de Caldee, de *
Perse, de Surie et de tout le monde, qui adont regnoient, fors cheli de Gn SS£^J\!!? %
Asserie, e'est de la grant Babylone, astoient tous yssus de la lignie Japhet ,
le fis Noe, dequeile oussi ches de Europ sont depuis yssus. — De Sem yssi-
rent les sains patriarches , et les prophetes ei les rois de Judee, qui covre- comentdeSemi»irent
r> m T i> a • i5 • • • t Vr let patriarchs etpro-
nont les Juys. Et ly roy JNynus d Asserie, ch est Assie, issit de INemprot, phetes.
enssi que j'ay dit desus.
A eel temps, Fan del nativiteit Abraham CLXXVI ans, regnoit Treveris 1 EMOr ^TrWe.
a Trive en Allemangne. Si fondat unc ehasteal mult fort; si le nommat
Trive, et la citeit qui fut promier, sicom nos avons dit, fut nommee Trive.
Et apres Trive ostat son nom, et le fist nommeir Trives ', et soy fist coron- TreTemquifutiypro-
. mier roy de tout Eu-
neir roy le promier de Europ. Si avoient luy et'ses ancesseurs tant fondeit de ">p*
vtlhes et de chasteals, qu'ilh avoit unc grant pays a governeir. — Item , Tan
Abraham U° et II, qui fut l'an del nativiteit Ysaac, le fis Abraham, C et II, Foi.sr*.
el ly an del nativiteit Jacob, le fis Ysaac, XLII, et ly an del creation
de monde III m III LXVHI, et Tan del delueve Noe MC et XXVI, morut l« daut« de temps
Heber, li uns des gubernateurs de Ytale. Se regnal son fis Hercules awec *"""
Japhet deseurdit LXI an. — Item , l'an Abraham 11° et XXIIII mourut ly roy
Crete de Caldee; si fut roy apres son fisPicus ', qui regnat LXVHI ans. Kent i y u« roy de
Ghis roy Picus fist I noveal royalme en son pays, que ilh nommat le leroyaimede Crete.
royalme de Crete, et jondoit a son royalme de Caldee. Si en fut la citeit Boia citeit de Crete fut
i r* * i ■ • r r ■• • g% r* • • * promier roy Orius.
de Crete, et le chief en fut roy li promiers son fis Onus, qui fondat une
citeit qu'ilh nommat Oris, et regnat L 4 ans.— Item, l'an Abraham II C et XL,
commencharent cheaux de Trive a edifyer et ovreir entour leur citeit de
Trive, et fisent vers aquilone fermeir de quareez pieres grandes, et thur DetfermeteurdeTrive.
massiches * et nobles portes, solonc sa gr^ndeche, ont edifyet fortereche
1 Le chroniqueur n'ecrit plus ici Treberis. » nom et le fist nomcir trives. »
* 11 y t peut-etre ici un jeu de mots que j'ai le * 11 ne sagit pas sans doute ici du Picus, que la
malheurde ne pas saisir. Pour ceux qui jugeraient legende de Rome place parmi les predecesseurs
la chose plus importance qu'elle ne me pa rait, je d'Enec en Italic.
vais reproduire le texte avec ses abr^viations et # 4 Cent. B.
les diff^renls caracteres : «si le no mat Trive, et la * Massives. Voy. a la suite du Godefroid de
» citeit.... fut nomee tve et apres triue ostat son Bouillon, le Glossaire de Gachet au mot mastis.
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16 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
long a merwelhe; et celle porte, qui est le Noire porte, ilh le nommarent
Mars, laqueile est tant fort que les pires et li cyment a fer et a plonc astoient
agrappee 1 . Et par cest porte passoient les gens quant ilh soy devoienl aleir
• combattre, car c'estoit la porte Mars, le Dieu de batalhe. Et li campangne
De«pone ft deTme. dehors avoit de long et de large belle plaiche, ou ons aprendoit les no-
veals hommes d'armes, enssi com chevaliers. — Item, la seconde porte vers
orient oit III thours belles, deleis la porte awec lee edifiie. Et par la reve-
noient les victorieux des batalhes a grant Heche; et portant le nomme-
t-ons la blanche porte. La tierche porte vers medis fut edifiie a grandes
thours haultes et fermes, et siet assets pres de Marchiet, et por chu le
nomme-t-ons la porte de Marchiet. La IIII e porte as to it vers Occident, sor
la riviere del Muselle, qui de mervelheux ovraige fut faite a grandes thours
incomparable aux aultres de bealteit, car toutes les aultres portes sormon-
toit de bealteit; et portant fut el appellee la Noble porte, car el fut point et
faite a oyle de fine oir ', qui rendoit grant clarteit noblement aux navies
^ffl^tfuS del P orte del Muselle. — Et la astoit li capitoils grans et les temples des
dieui Mercure. ydolles, en quelle ilh n'en avoit nient moins de cent ydolles. Generalment
tout li peuple les aoroit, et leur demandoit respons de leurs fais, et ilh 5 les
doftnoient responsion : et ches ydolles astoient faites en 1'honeur de Mer-
cure. que ilh appelloient leur soverain dieu, qui entre dieux et hommes,
enssi que moiens et arbites, faisoit les pais en vollant.
D fig*£*et™eVon d mer ^el ymage de Mercure estoit en unc cyboire* grant et hault, qui estoit
veiheux temple. j ou j ^ e fefo gj p U j s es to;t |j ymage de Mercure mervelheux grant, enssi
que vollant en aire et pendant. Et puis avoient faite le temple a II II costeis,
et le pavement et le vosure * deseur de pire d'aymant, qui teilement de sa
nature trahoit le feir de tous costeis, que ilh ne poioit traire a Tunc cos-
^Sprtoiit^ti^itVu te ** ne * ' autre > a * ns demoroit pendant tout en aire. — Et puis se fisent unc
sieunaitre»choses. p 0ns SQr j e Muselle de piers tant fors et si beats, que ne poroit jamais estre
1 Attachees au moyen d'agrafes. v° chiboire, avcc le ciborium de Ducange. 11 s'agit
1 Car elle fut peinte et faite d'huile d'or fin. ici d'une eapece de temple support^ par des co-
Allusion possible au fond d'or des peintures by- lonnes. Voir aussi les Gesta Trevirorttm, liv. I,
zantines. Le manuscrit B, au lieu du mot oyle, huile, chap. IV, ou Jean d'Outremeuse para it avoir puise
porte stoile, qui ne me paralt presenter aucun sens ces details locaux. Je cite I'edition de Wytten-
raisonnable. bach.
8 Les idoles. * Voute , vouhure dans Roquefort.
4 Sur le sens de ce mot com p. Roquefort,
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LIVRE PREMIER. 17
destrus, ne nus flus ne le poroit destruire. Apres ont fait par diverse lieu
fortes thours et hault capitole , palais et temples thermes et bommes ' par-
desous terres alantes dedens la citeit et defours. Et Olevie, une riviere de-
sous la montangne Jurano , fisent passeir et devisee en pluseurs parties,
tant qu'ilh passoit mult d'aiwe parmy la citeit; et uns aultre riweseal%
que ons nom Roverias 8 , qui coroita unc mile de la citeit, par voies qu'ilh
fisent et bien muree de tulees ', fisent venir par les ruwes de la citeit, et ^ r ^J j r f" riwe
constituunt familiars domes tiques, qui avoient bonnes pensions, en la
burse de prinche, qui gardoient tousjours ches condus nes 5 : et, se par nulle
aventure astoit troveis nul defaute en chu, li garde qui chu devoit faire
estoit tantoist decapiteis sens nulle excusanche. — Enssi fut cest citeit faite
et aournee, nient tant seulement de labure d'homme et subtiliteit garnie,
mains ossi des flus natureis venans illuc , et bois et montangnes ardues , et Fo1 - * v °-
sy estrois chemyns que chu estoit mervelhes. Si nos en tayrons et parle-
rons de Ytale et de leurs governeurs.
Sor Fan Abraham 11° et XLVI fut neis Joseph , li fis Jacob, qui astoit li Dwjfoverneursdepays
an del eaige Jacob MI" et VI ans. — Sor Tan Abraham II C et LXI1I morut
Japhet, li governeur de Ytalie en Europ; si regnat son fis Sem awec Her-
cules XLVI II s . En chist an meismes fondat Hercules I citeit qu'ilh nommat
Valeriane, en lieu c'on dist desous le Capitole. — Ghis Hercules oit I fis qui
fut nommeis Sadoch, qui fut chevalereux, et qui conquist depuis tout la Coment s.doch CO n-
terre de Argins 7 en Greche; si en fut roy. Et chis Sadoch oit I fis qui fut fat roy.
nommeis Theophalet, qui puis fut roy de Greche, et desquendirent de luy
cheaux qui puis destrurent la grant Troie. — Item, l'an Abraham II C et
XCII, morut Picus, li roy de Caldee; si fut roy son fis Orius, qui estoit roy DeroydeCaideeetde
de Crete, et regnat en II royalmes XXXVI ans. Item, l'an Abraham III C et
X , morut Hercules, li governeur d' Ytale; si regnat Janus son fis awec Sem DegoyemcardYuiie.
deseurdit XLIIII ans. — Item, l'an Abraham III et XXVIII, morut Orius, li
1 Ce mot qui revient encore plus loin , et que seaux Olivia et Ruvcria. II y est fait aussi mention
nous avons (p. 9) vu dcrit boymes, indique des deces travaux souterra ins auxquels Jean d'Outre-
grottes ou travaux souterrains. II est reste* dans mouse donne le nom de bommet.
notre wallon pour indiquer des excavations. En * Tulees doit signifier ici, non des tuiles, ma is
France (dep* du Var) on trouve la SP -Bourne. des carreaux de terre cuite.
* Ruisseau. * Sans doute pour nets, propre, en bon etat.
s Voir l'edition citee des Gesta Trevirorum • Ant doit ^tre ici sous-entendu.
(I, 5). On y trouve le mons Juranus, et les ruis- * Argos, sans doute.
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18 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Derpyde Crete etCai- FO y d e Caldee et de Crete; si fut roy en II regne son fis Japhet, qui regnal
DegovemeurdYtaiie. XCU ans. Item, Tan Abraham III et L1III, morut Sem li governeurd'Ylul:
si regnat son fis Hercules awec Janus deseurdit LXVIII ans. Nous passons
nos dautes avant Iegierement, portant qu'ilh ne faisoient riens a eel temps
qui soit a inettre en raemore, excepteit es parties de Germaine fesoient
DeTriTe. cheaux de Trive mervelhe de fais d'armes, qui plus plainement sont con-
lenus en leurs croniques que chi; car se nos voliens mettre tous les cro-
niques de monde chi-dedens, nos ariens trop a faire, et seroit nostre
mateire trop prolongiet; mains de tous vos parlerons compedieusement et
clerement chu que nos en dirons. — Item, Fan Abraham III1 C et XX, morut
De Crete et Caidee. Japhet , Ic roy de Caldee et de Crete ; si fut roy son fis Mathiaphet LXXII
Degoveroeurd'Yiaiie. ans. Item, Tan Abraham IIII C et XXII, morut Janus, li governeur dYtal; si
regnat son fis A vent-ins ' awec Hercules deseurdit XLIX ans , et puis morut
Hercules sor 1'an Abraham IIII C LXXI; si regnat Japhet son fis avec Aven-
DeUciteUAventineo tins LI1 ans. Adont fondat Aventins une citeit en Ytale qu'ilh nomma
Avenline, et le hst sor I montangne, lequeile montangne ons nomme encors
Quant les Mires de» apres la citeit Avenline. — A eel temps furent promiers Irovee les letlres
Hebreux furent tro- - .
Tees. en bnez \
Sor Tan Abraham IIII C et XCII, morut li roy de Caldee el de Crete Ma-
thiaphet; se fut roy son fis Cydoine 1111** ans. Item, Ian Abraham V c et
XXIII, morut Aventins d'Ytale; si regnat son fis Ragam awec Japhet de-
seurdit LVIIl ans. Item , Tan Abraham V C LXXII , morut Cydoine, le roy de
Caldee et de Crete; si fut roy son fis Gaban, et regnat XC ans. — Chis
DeGaban qui fut moult Gaban fut uii mult gran clerc astronomien, et cognissans les planetes et les
M.tii clers.
estoiles et tout le movement de firmament. Et oil I fis qu'ilh appellat
Porquoy le pianetc Saturnus, apres le nom de la plus hault planete: et fut chis Saturnus I graft
Saturnus fut eussi . r .
apeiiee, agoans de XXI pies de long et de XVIII de tour, et por sa grandeur ful-ilh
oussi sovent et commonement nommeis INemprot com Saturnus; encor dont
n'estoit-ilh desquendus de nulle coste de Nemprot, mains entirement de
De Ytaie. Japhet le fis Noe. — Item, Fan Abraham V C IIII* X et I, morut Japhet li gou-
verneur d'Ytale; si regnat son fis Seruge awec Ragan deseurdit XL VI I ans.
1 CYstprobablcment lememe personnagc quV/- bablemcnt lire hebreux, puisque c>st le mot qu'on
ventinus, indique par Eusebe comiue fiis aine de lit dans le sommairc a la marge. Dans le manuscrit
Reraulus ou Arcmulus, roi des Latins. B enbricz ne forme qu'un mot.
* Le mot est trcs-lisiblement ccrit. II faut pro-
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LIVRE PREMIER i9
Et puis morut Ragan; si regnat son fis Naehor awec Seruge LXV1II ans.
— Item, Tan Abraham VI C et LXII, morut Gabam, le roy de Caldee et de Decreet caMee.
Crete ; si fut roy Saturnus son fis, li agoans , XX 111 ans. Chis Saturnus Nem-
prot avoit 111 fis : ly anneis oit nom Jupiter, li aultre Pirus et li tierche
Mabiabam. Si avient que, quant ilh oit regneit XXI II ans \ Jupiter son fis,
qui se dobtoit que son peire ne departist sa terre a ses HI fis enwalmant,
si trahit a luy partie des hommes de paiis, et fist son peire Saturnus escol- comemjupUer fist son
i .... . . P eire Saturnus es-
hier 1 ; portant quedont estoit li usaige que, quant uns roy estoitenssi atour- co,hier -
neis, ilh ne pooit tenir royalme, ne donneir a altre, si com a son fis an- Foi.ei-.
neis. — Puis encbachat Jupiter son peire et ses freres, qui s'enfuyrent vers coment Jupiier enca
chat son oere ot ses
Europ. Si morut en la voie son fis Mabiabam, et chu fut en lieu ou Rome freres vers Europ.
fut puis edifiie; et siet en muchant luy et son fis en bussons 3 et en ronxhes,
portant qu'ilh estoit honteux de chu qu'ilh estoit escolhies , sy soy abscon-
soit des gens; et portant ilh nommat puis le regne Ytale, qui est a dire en
franchois absconse; ja soiche que nos aions parleit chi-devant pluseurs Porquoyyuiefutenssi
fois dTtale, chu estoit por vos donneir plaine cognissanche de la mateire;
car Saturnus le nommat promirs Ytale, mains ly peuple le fist puis habi-
le ir entres eaux, et ilh leur fist mult de grans bien profitaibles.
Chis Saturnus fist a peuple mult de biens, car ilh les trovat simples comem saiumus csi
* r # # - i • m b»«ns a ses
et bestials, se les induit et endoctrinat de labureir les terres, planteir les gJJJj* 1 Ie$ endoc ~
vingnes, habiteir en mansons et vivre si com hommes; car le temps devant ,
si com nos avons dit, ilhs habitoient dedens les bommes et les trais 4 des
montangnes, et lassarent les vilhes qui astoient la fondeez; et mangnoient
glans de chaynes , pommes savaiges, rachines et altres chouses si com bies-
tes. — Adont fut aoreis Saturnus de peuple si com Dieu , et li fut donneit de fcjjjj* ff 1 "™^^
part le peuple le tierche partie de leur rengne, en droit lieu ou Romme Keuou Homme «et.
siet; si fondat asseis pres une citeit qu'ilh nommat Saturne apres luy, et
maintenant elle est nominee Sutre \ Et la ilh semat son promier gran , et
enssi usont-ilh alle maniere que Saturnus les avoit apris , jusques a temps
Virgile de Bugie, qui les aprist a ahanneir' les terres enssi c'on fait main-
1 Je supprime ici un second que qui est de trop. * Passages , defiles.
* Chatrer. Ducange donne le participe exco- 5 Sutri.
h'atus. ' Labourer, ensemencer. Ce mot est reste dans
* Et quand il se reposait, il se cachait dans des 4e wallon. Voir Grandgagnage , Diet, itymologiquc
buissons, etc. de la langue waUone, v° ahanz.
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20 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
comeni saiurnus fon- tenant. — Apres fist Saturn us de la terre 111 royalmes, si les nommat les 111
dat III royalmes en ■ ' \
Tune et de leurs royalmes d'Ytale ; s'en oit I Saturnus, ou ilh regnat XL ans, et les II go-
verneurs orent les II altres, et leurs heures. Apres Saturnus le fut Latinus,
son fis, et apres Sabinus qui regnat XXXI1II ans, et apres Pints' qui regnat
XL1X, et Sabinus son fis le fut apres XXXV II ; et chis regno it*, quant Eneas
comeDt les u gover- y vient apres la destruction de Troie. Chis Latinus nommat sa terre le
neurs d'llaile orent i i t • ■« a « » , . •
n royaimes. royalme des Latins, apres son nom. — Item, en retournant a nostre mateire,
les dois governeurs qui estoient al temps Saturnus, dont li uns estoit nom-
meis Serog et li altre Macor, orent les II altres royalmes; et Serug promier
regnat XI ans com roy; et apres luy le fut son fis Galdebadach, et chu est
a dire en franchois septes montangnes , et regnat LXX ans. Apres regnat
son fis Salatrop XLV11I, et puis regnat son fis Evande XXI an; et chis re-
En chi temps fut Troie gnoit quant Troie fut destruit. — Apres retournant a la tierche royalme,
conraiNam nit ray dont Nacor * fut ly promier roy, et regnat LVI ans, puis regnat son fis Mathi-
dei.tiercheroy.ime. phalet XLIX ans puis regnal son fis x uscus XXXV ans. Chis nommat son
Dei roy.ime de Tus- rengne solonc son nom Tuscaine. Apres regnat son fis Turnus XXI ans; et
mm ' chis regnoit a la destruction de la grant Troie; car quant li grant Troie fut
destruit, si coroient les dautes a la fin del regnation de derains nommeis
trois roys d'Ytale, ch'est assavoir sor Fan del origination de monde III l m et
XIX, qui' fut ly an del delueve JNoe MVII° et LXXV1I, et del nativiteit
Lez dautes des temps Abraham , VIII C et XXXV, et del nativiteit Ysaac VI C LXXV, et del nativi-
Lini?M que Abdon leii Joseph, le fis Jacob, V° 1111** et VII. Al thier an que Abdon* astoit due
fc'xkniie jo™de ^ e P eu p' e Israel, le XX1I11 jour de mois de septembre, fut Troie adont
dStirSk 9 ' roie destruite. Mains por vos informeir alconnement comment et porquoy el fuit
destruit, nos retournerons devant , et vos compterons briefment la maniere
et le fait.
De Troie, comment et Vos aveis bien oiit , et vos avons deviseit le fondement del generation del
tr°uT° ye e u w ysle de Europ, comment el fut de promier habiteis, jusques a la propre
1 Sans doute par erreur pour Picus : Euscbc fut Latinus, li fit de Sabinus XXXI III ans, et
cite corame rois des Latins, avant £n6e : Janus , chis regnoit, etc. B. Cette version est raieux en rap-
Saturnus , Picus, Faunus et Latinus, enumeration port avec la legende romaine.
qui ne repond pas tout a fait a cellc de Jean d'Ou- * Plus haut Macor.
tremeuse. 4 Ou plutdt Labdon qui, dans la seric des juges
* Apres Saturnus fut roi Pirus XL IX ans, et d'israel, precede Samson*
Sabinus ses fis le fut apres XXX VI I ans. Puis U
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LIVRE PREMIER. 21
annee que Troie flit destruit et desert; mains encor dont portant que nos
volons faire entendre a tout gens comment et por quelle raison el fut des-
truite, et comment cheaux qui sen partirent vinrent habiteir en Europ, Foi. cv.
nos en ferons mension briefment et entendablement ! ; et puis apres porsui-
rons nostre mateire de greit 1 en altre toudis avant, enssi que ilh le requiert.
— Et promier vosdisons que, al temps que ly roy Laomedons, roy de Frise
et de Troie, qui fut le peire a roy Priant, regnoit a Troie si com roy, adont
avoit en Greche III empereurs qui regnoient ensemble com freres, et d«* hi emperere* ^
avoient le royalme departie en HI 5 si tenoit chascon une partie. Si avient
que li uns, qui fut nommeis Peleus, tenoit sa tierche partie marchissant
a la royalme de la grant Frise s et de Troie, fours tant que la mere les de-
parloit. Chis avoit unc cusien, fis de son frere Theseus, qui fut nommeis
Jason, qui fut a son temps ly myedre chevalier del monde, conquerans
armes partout od ilh les savoit, et si n'avoit que XXXV ans d'eaige. — Et
portant que Jason por sa bonne chevalerie astoit ameis de tos les barons de
son oncle, si en oit son oncle grant dobtanche, qu'ilh, par sa proieche,
ne li lolist son rengne; si s'avisat unc jour comment ilh le destrueroit, et
le mandat que ilh venist a ly, et chis y vient.
Et ilh li dest : « Beaux cusiens 4 , vos aveis le nom que vos esleis li plus
» preux del monde, et c'est bien raison, car vos aveis conquis maintes
» proieches; mains je say I proieche, se vos le poies faire, eel passe rat
» toutes les altres, et chu est del conquerre le muton qui at le toson
» d'or, qui est en lisle de Colcos, que nuls ne pot oncques conquerre, comcat jason , i e bon
1 • */»• • 1 ***•* •• J • i_ 1 chevalier, s'en alat
» lyqueis est fais par nigromanche , et at esteit envans de mams bons cbe- pour conquenr ie
» valiers. » — Quant Jason entendit chu, si jurat que mais n'aresteroit si qui^TrwcfuYdw"
l'aroit envaiit, et fist son harnois aparelhier, puis montat sor mere, et
awec li son compagnon Hercules et XXX chevaliers 5 , et nagarent envoie \
Et enssi qu'ilh en alloient par mere, les prist unc gran oraige qui les jet tat
a terre en la royalme de Troie. — Adont yssirent de leur neis, et tendirent
1 Intelligiblement. Entendiblement dans Roque- * XXX que chevalier que etkuwier. B.
fori. * Nager pour naviguer. Envoie, expression tiree
* Pour degre. directement du latin, qui est restce dans notre wal-
* Ici, corame encore quelques lignes plus haut, ldh; ellc a le sens de dehors. Ainsi nager envoie
par la Frise il faut sans doute entendre la Phrygie. c'est quitter le pays pour prendre la mer.
4 Beats niez. B.
truit.
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22
CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE
lislede Colcosoii ly
moulon estoit.
Comcnt Jason fist le
siege a Troie , et le
destruil.
leur treif deleis 1 fontaine en 1 preit, asseis pres de la citeit de Troie:
mains quant Laomedons, qui estoit roy de Frise et de Troie., le soit, et li
fut dit que gens d'armes astoient en son pays logiet, si se dobtat, et por-
tant les mandat qu'il vuidassent son pays, ou ilh sen poroientbien repentir.
Adont yuidarent les Grigois , mains Jason jurat, quant ilh auroit son affaire
acomplit, ilh amonroit les Grigois devant Troie, et le destruiroit. — Atant
comeni Jason vint en nagarent avant, et n'arestarent; se vinrent en lisle de Colcos en la citeit
de Jasonite. Si trovarent le roy Orest. qui les fist mult grant fieste. Chis
roy Oreste avoit une filhe, qui oit nom Medea, qui lant savoit d'yngre-
manche f que nus en poioit savoir. Cel enamat Jason , quant el le vit , por sa
grant bealteit, et s'acontarent f teilement que Jason jut 8 awec et le cognut
carnelment, et li oit enconvent de prendre a femme, portant quelle li aidat
qu'ilh conquist le moton dor; mains ilh ly tient mal covent; car quand ilh
oit accomplit son vowe , ilh retournat en Gresche , et laissat la damoiselle
en son pays. — Adont assemblat Jason O Grigois , par le consentement des
trois roys de Gresse , et sen allat a Troie ; mains les labureurs dou pays
le muncharent a roy de Troie Laomedons, qui vient contre les Grigois a
XXX m hommes a chevals , et les corut sus. Mains les Grigois soy partirent
en trois pars : les dois soy combatirent aux Troiens, el les altres entrarent
en la citeit de Troie; se le destrurent, et la furent Troiens desconfis et
mors, et ly roy Laomendons oit le chief copeit. Enssi orent les Grigois vic-
coment ly roy Tela- toir, et r a la rent en leurs terres; mains ly roy Telamon enmenat awec luy
u°fiihe , 3u ft roy X La , o^ en Gresche Exiona , la filhe le roy Laomendon , et le tien en songnetage por
fair despit aux Troiens.
Adont fut contee la novelle a Priant qui estoit en guerre, et avoit assegiet
Foi.7r*. unc casteal qui oit nom Colenart; si lassat tan tost le siege et rcvient vers
Troie, et mandat tan tost ouvrirs de toutes pars, et fist la citeit refair et ree-
coment Troie fut des- difyer X fois plus fort, plus belle et plus grant com devant. Et fut destruite
la citeit de Troie deseurdit, la promier fois, sor Fan del origination de
monde Ul m IX 1111" et IHI, qui fut li an Joseph, li fis Jacob, V c et LIU;
et avoit adont li roy Laomendon deseurdit regneit XXVII ans. — Enssi fut
Deirefachon de Troie refaite la citeit de Troie, et tenoit XXIII lieues de circuite , et seioit a plaine
1 Necromancic.
* Et s'aconterent si bien li unc de V autre. B.
5 Concha*
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L1VRE PREMIER. 25
terre, et si estoit emmy ■ une halt forteresche sor unc roche, qui estoit si
halt que unc engiens n'y posist avenir al jetteir, qui avoit a nom Ylion.
apres f le roy Alus,qui fut ayon a roy Prian , qui lavoit fondeit a son temps.
Et les murs de la citeit astoient de 1111" pies hals ; et avoit desus IIII cS tours
et VI portes coliches 4 , et al defours fosseis parfons de XL pies. — Puis soy
list Priant coronneir a roy ; si regnat XXXV ans , et fist partout proclameir et Pn«i » y thi conmeir
manifesleir que tous cheaux , qui en ladit citeit venroient habiteir, seroient Troie.
afranquis de tous servages; et chu fist-il portant qu'ilh voloit sa citeit
puepleir. Puis soy mariat le roy Priant; se prist a fern me Ecuba, le filhe le *****. Ector, p.™,
roy Ector de Garpe, de laqueile ilh oit V fis : Ector, Paris, Troielus, Dey- ct Heienu$. eyp
phebus et Helenus; et trois filhes : Cassandra, Andrometa et Polixena. ^AD^rTmeucrpon-
A eel temps, unc pou devant, assavoir sor Fan del origination de monde cuw«"«niwiero> «j*
III™ VI C et II, oit moult grant guerre entre Chirus, le roy de Mede, et R£ et ,e rov de
Astiages ', le roy de Pers , son ayon , por le cause de chu que Astiages voloit
ochire Chyrus son neveur; s'orent moult de batalhes ensemble, mains en
la fien fut Astiages ochis. Adont vient Chyrus , et copquisl le royalme de
Persie, et fut siene. — Apres, Chyrus alat vers Babylone por conquere, se
s'i noiat • unc sien chevalier en le riviere d'Effrates, de quoy ilh fut coro-
chies ; si departit la riviere en 'tan t de parties que nos avons desus fait men-
tion. — Et adont avoit en Oriens et en Asie, e'est en Babylone 7 , une royne
qui estoit nommeit Thameris, qui chevalchoit en amies, enssi com roy; De Thame™ ia royne
mains elle avoit grant pueple a governeir en la royalme d'Asie qui estoit
siene; mains en la royalme de Amasonie, dont elle estoit aussi royne,
n avoit nuls hommes , fours que femmes. Si avoit lassiet une altre damme
por lee en Amasonie por combattre a roy Chyrus, et defendre sa terre de
Babylone a eel temps de dont.
Ors est raison que je vos die porquoy ilh n'avoit en Amasonie nulle De Amasonie.
homme fors que femmes, et je le vos diray solonc chu que sains Euseibe, Porquoy uh n-«t en
i ^i • ■ - • a i • * « Amasonie nus hom-
evesque de Cesaire, le tesmongne en ses cromques; et dist que ons trueve mes.
en anchienes hystoirs, que en pays de Amasonie soloit avoir unc roy et
1 Et il y avail au milieu, au centre. cullis.
* D 'apres le nom da roi llus. Alu* dans le texle. * Astrages dans le MS.
* Sic. Qoatre-vingts serait deja bien raisonna- * Si se noiat, B.
b)e. 7 Assavoir en Babilone. B.
* Herses, ce qui se dit encore en anglais Port-
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24 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
hommes a planteit, si com en altres pays. — Si avient que sor Tan del ori-
gination de monde III" 111° et IX, qui fut li an del delueve Noe M et LXV1I
ans, chu fut V1I° et X ans anchois que la grant Troie fust destruite la
seconde fois, avoit uns roy en pays de Hircayne, qui fut nommeis Jayr;
et en Amasonie avoit uns roy, qui fut nommeis Gora. Ches II roys orent
grant guerres ensembles, et dure et long, et orent mult de batalhes * ; et la
cause si astoit que li uns l'autre volloit mettre en tregut*. Et li roy Gode de
Senechie estoit awec le roy Jayr d'Hircaine. Si avient que en la fin orent
une batalhe ensemble. Si entrat li roy de Senechie awec X m hommes en
unc bois, si se corrurent sus, 'et sorvinrent la les X m hommes. Si fut ly
roy d'Amasonie enclous et ochis, luy et ses hommes nobles qui astoient
awec ly.
Quant Ahide, la royne de Amasonie, veil que son sires astoit mors et
awec ly tous les nobles de son rengne, si qu'ilh n'avoit en son rengne fours
que villains, si at pris toutes les femmes 8 des nobles qui mors astoient, et
les fist armeir et leur dest : « Ochions tous les villans de nostre pays, et
» vuidons nostre pays d'hommes, et que jamais hommes ne habite awec
» nous.» Et tantoist fut fais. Si sont des puis governeez par 1 royne valham-
ment, et sont miedres en armes que chevaliers; et soyes certains qu elles
sont melheurs combattres 4 a piet et a cheval, et plus crueuses assets que
Fo1 7 x °- hommes. Rtens ne puet dureir contre elles , tant sont felles , trenchant et
Co £ront le a S Trofe 80116 ? a 8 ues *• — Et dist sains Eusebe' qu'elles furent a Troie por socorir le roy
socoririeroyPriini. Priant , por I'amour de Ector que la royne de Amasonie amoit por sa grant
chevallerie. Et deveis savoir que quant elles welent fiestoyer, et estre en
solas 7 awec des hommes, si les font venir en leur ysle par une nave, et
demoreir III jours; et quant elles ont enfant ,<se c est uns fis, elles Fochient
ou elles lenvoient le peire, et se c'est une femelle, elles le nourissent. — Et
sachies, s'elle est noble, elles li ardent d one chaut tier la mamelle senestre,
1 Mult de batalhes ensemble. B. dans Roquefort et signifie subtil.
9 Tribut. Trehus dans Roquefort Le mot tre- 6 Je crois inutile de faire remarquer que noire
gut ou trigut est restd en wallon, raais avec une chroniqueur met sur le compte d'Eusebe beaucoup
autre signification. de details dont celui-ci ne dit mot. Ainsi il signale
8 Les molhiers. B. Intervention des Ainasones en faveur de Priam ,
4 Combalrcsse. B. mais rien de plus.
* Ce mot, qui vient du latin aeutus, se trouvc 7 Solas dans le MS.
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LIVRE PREMIER. 25
por mies porter son escut en batalhe, et s'elle est vilaine, elles li ardent la
diestre mamelle por mies traire de larch. — Item, vos deveis savoir que,
quant li roy d'Amasonie et ses hommes furent ochis en la batalhe devant-
dit, les femmes s'armarent tantost, et incontinent corurent sus les II roys
de Hircaine et de Senechie; si orent teile aventure quel les les ochirent
andois et leurs hommes. et conquestarent tous leurs pays et les metirent comem Amines con-
• i j a - . | * quisenldevanlTroie
en tregut, que dedont en avant paiont al royne de Amasonie et les servent nroy^etcoDquUent
en batalhes.
Enssi regnarent dedont en avant les dammes d'Amasonie valhamment,
et tant qu'elles conquisent mult de pays , et par especial elles conquisent et
tinrent longement le royalme d'Asie et de Babylone. Si avient que a temps
le roy Chirus deseurdit astoit royne des Amasones Thameris deseurdit,
qui fut mult corochie que Chirus avoit enssi destruit et departie la riviere
de Effrates. Si at defendut sa terre valhamment contre Chirus, et alat la
rivier defendre contre * Chirus et ses hommes I'entree de son pays*; car comem u royoed'A-
por la grant fianche qu'ilh avoit en la multitude de son peuple, et en desers Cy^euw gen 9 roy
et en strois lis 8 de son pays ou nuls ne poioit passeir, elle estoit plus
hardie; et se trahit d'unc costeit, et lassat passeir oultre le roy et son oust.
— Et , quant ilh fut passeis le flu , la royne se trahit aux pas , si tend it la ses
trefes '; et ly roy Chirus prist 1111 grans cas teals, et les emplit de vi tallies 5 .
Quant chu fut dit a la royne, si at fait venir son fis a tout son oust; et,
quant ilh fut venus a grant gens , la royne soy trahit avant vers les casteals
que ly roy Chirus avoit conquis, et se les reconquist; car ly roy Chirus
avoit assegiet (une citeit) • en la terre ladit royne qui fut nominee Semy-
ramonde, car la royne Semyramonde l'avoit jadit fondee. Enssi reconquist
li fis la royne Thameris les casteals , et departit la vitalhe a ses gens , qui le
mangnarent et burent. — Mains li roy Chirus le soit; se vient sour eaux si
subtillement, qu'ilh ochist tous cheaux qu'ilh trovat dedens les casteals, et
le fis enssi de la royne , qui fut nommeis Rogas.
Rogas fut ochis et ses gens, dont la novelle vient a la royne Thameris, Deia royne Thamaris.
1 Ce mot est intercale. * Tentes, pavilions. Tref dans Roquefort.
2 Si at defendut sa teire valsaltnent contre Chi- * Vitailhe mult delicieux. B.
rus et ses hommes I'entree de son pays. B. • Je supplee ces deux mots d'apres le manu-
5 Et estrois lis. B. Lis est ici pour lice, qui doit serit B.
signifier frontieres.
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La royne Martesa et
Tambedo.
26 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
qui ne plorat pas son fis, enssi que les femmes ont a coustumme , mains el
allat a tous ses oust vers le roy Chirus, et le roy Cbirus contre lee a grans
gens; mains quant ilhs soy approcharent, si soy findit la royne et ses gens
del fuir, et ly roy et ses gens les cachont, et elle fuit toudis jusques aux
destrois, qui astoient si mesaistes que ch'estoit mervelhe por les grant
montangnes. — Et quant elle vient la, se sa raloiat ensemble 1 ses gens, et
corut sus le roy Ghirus et ses gens qui astoient tous desroteis, et soy com-
batirent longement; mains en la fin fut ly roy Chirus mors et ses gens,
desqueiles ilh fut lll m et 111° que oncques unc seul ne demorat qui renun-
chier en posist la novelle : en teile maniere fut mors li roy Chirus et ses
gens. — Et la royne en son pays demorat en pais tout sa vie, et ne ralat puis
en Amasonie; ains enlist une altre royne, qui fut nominee Martesia, et une
altre apres qui fut nominee Tambodo, par teile maniere que li une devoit
alleir en armes, a grant oust, et conquerre le pays a tour d'elles, et ly aultre
La royne Ephysanie. devoit gardeir le pays de perilbs. — Apres y oit I altre royne qui fut nomee
Ephisanie % qui fondat I citeit qu'elle appellat Ephese; mains die nest mie
celle ou sains Johan ewangelist fut puis ensevelis. Apres y oit 1 altre qui
La royne ondria. fut no mm ee Oridria ; et gueroiat Hercules le grigois; mains Hercules li
comentHercniesochut ochist C m amasonne, et le royne prist-ilh vive, et le rendit a sa soreur; et
o Amasones. appes l'envoiat en la terre de Siche a la royne de Siche, qui li prestat tant
de gens d'armes, que ons ne les poioit nombreir, por guerroier Hercules , et
li delivrat son propre fis Hercanel, qui conduisoit les oust. Mains Hercules
l'oyt dire, se s'enfuit en Gresche. — Item, apres eel y oit une altre qui fut
La royne Penteaiiee nom mee Pentesilee, et eel alat sorcorir le roy Priant a Troie, ou elle fut
qui aoreont Priant 1 J i
rfroie, etfutochis ochise par Aneilles 8 , le fis Pire , et furent mortes awec lee LXX m amasonnes.
etLXX™ Amasones. ■ 1
La royne Thaiistridi*. — Item apres fuit royne Thalistridis, et eel oit pais a Alixandre le Gran.
Or vos avons deviseit des dammes d'Amasonnie tout la veriteit, jusques a
la destruction de Troie; si vorons retourneir a nostre mateire ou nos
1'aviens lassiet, et compteir avant tout ensiwant briefement.
Ilh est assavoir que quant les enfans le roy Priant furent en eaige, qu'ilh
assemblat tous ses hommes et leur dest qu'ilh volloit vengier le despit que
les Grigois lui avoient fait, et a chu demoront tous ses barons deleis luy ;
1 Si toy raloiat ensemble. B. fils de P616e. Une autre tradition, beaucoup plus
* Ephesaine. B. ancienne, fait penr Pentbisilee sous les coups de
* A cilia. B. Ancilles le fis Pire doit dtre Achille, Neoptoleme , fils d'Achille.
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LIVRE PREMIER. 27
et, par leur conselhe, ilh envoiat en Gresche a roy Thelamon dois mes- ^nchIt iu «t^ C0 K»
saiges : assavoir, Eneas, le fis Anchises, de Talme, et Polidamas e9toit li GrigobetTroiem.
altre nommeis. — Et li mandat qu'ilh li renvoiast sa soreur Exiona, et li
amendast chu que ilh li aroit forfait; mains de chu ne volt riens faire le
roy Thelamon, ains dest qu'ilh tenroit Exiona en leur despit. Adont fut
la guerre commenchie entres les Grigois et Frisons 1 et Troiens, qui fut
mult dure; et chevalcharent les enfans Priant ' pluseurs fois sour les Gri-
gois. Si avient que sor Tan del nativiteit Joseph V c et LXXV1I , qui fut li an
del coronacion le roy Priant XXV, que Paris, le fis le roy Priant, ravit comem Pans r«mtHe-
Helene, la soreur le roy Castor el le roy Peleus \ Et de chu enchafat la
guerre, et montarent sor mere les II roys Castor et Peleus et C m hommes,
por aleir a Troie. Mains nos ne savons qu'ilhs devinrent, car ils ne furent
oncques depuis veus, n'en ne oyt-ons novelles. — Et adont Paris esposat
Helene, de quoy la soreur Paris, Cassandra , dest que leur dieux li avoient
demonstreit, se Paris avoit une femme de Gresche, Troie en seroit destruit;
mains les barons n'y vorent entendre. Si avient que cheli an meisme Troie
fut assegie par le roy Menelaus, le marit Helene, et les Grigois. Se durat Meneia us eties Grigois
cheli siege X ans. Si oit entres eaux mult de batalhes: mains en la fien ' dur»tii siege xa'ns,
G # et le destruirent par
furent les Troiens desconfis, et Priant et tous ses fis mors, et leur citeit chiton.
destruite par trahison , enssi qu'ilh contient plainement en la gieste qui est
de chu fait , qui asseis est vraie. Adont reprist ly roy Menelaus sa femme *
Helene , et le remy nat awec ly.
Vos deveis savoir que quant Troie fut destruit, si soy partirent des c*mm\ t *w*u6M-
# . * , . iimi r* truction de Troie,
Troiens de la, assavoir : Anchises, li dus de Talme, Eneas son fis. Ascanus poseurs nobles che
7 7 ' ' yalier sen alerent
h fis Eneas, Franco li fis Ector, Turcus le fis Troiolus, et Anterior lis fis na 8 ant « n !*>■•"»
7 . . altres pays.
le dus de Sorve 8 ; lesqueis se misent sor mere en XII naves , et ariverent en
Sizille. Et la morit Enchises, le peire Eneas, de la plaie qu'ilh avoit oyut en
la desconfiture; si fut la ensevelis. — Puis ses 7 partirent et vinrent vers
Ytailes por habiteir, portant que ly pays y astoit bons , crasse et delitaible*.
Et estoit adont Europ petitement habitee. Si avient que li oraige de la mere
1 Si Frise signific Phrygie , Frisons doit signi- * Sa molhier. B.
fier Phrygiens. ' Antenar U dus de Some. B. On peut lire aussi
2 Je suppI6e ce mot d'apr&s le manuscrit B. Sorve comme Sorue dans notre texte.
* Sans doute poor Pollux. 7 Ses pour ces > ceux-ci, ils.
* Al detain. B. * Delicieux. Du latin dekctabilis.
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28 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
comentDydojofem le jettat en Affrique. Si demorarent la unc pou; et adont fondat Dydo, la
me Eneas, fondat en _ * ^ ¥ . • , V1 wv i • t •
Affrique la citeit de femme Eneas, I citeit qu elle nommat Dydaine solonc son nom, qui puis
fut nominee Cartage al temps le roy Cartago d'Orient, qui le fist plus grant
et le fermat de murs. — En ceste citeit demorat Dydo, et les altres soy par-
tirent et vinrent en Europ, et puis soy partirent en di verses parchons; car
coment Franco, lyfis Fran co , li fis Ector, awec III m bommes alat habiteir en Galle, que ons
Eclor, avec III" ' ' # ' *
hflMnmw ▼ iBt cUmo- apelle main tenant Franche \ Si fondat vilhes et cas teals, et regnat Xans;
Coment ly pays de et fut tout son visquant son pays nommeis Franche, et ses gens Franchois
mieirnommeUFran" solonc son nom. — Mains quant ilh fut mors, ilbs soy nommarent Galliens
fJi.TtT* 8 ranC ° et leur pays Galle, cum de promirs, jusques al temps de due Priant, que
ilh furent publement nommeis Franchois por le franchise de tregut, de-
coment Antenoir an- queile ilhs furent affranquis, si com vos oreis chi-apres. — Item Antenor
▼at en Allemangne * * 1 r #
et^ fondat i citeit arivat en Allemangne, oultres les palus de Metiopes \ Si fondat une citeit
qui oit a nom , apres & > r r
s cimbre Safe^,me, V 1 ^ nommat Sycambre, solonc le nom de sa femme, et nommat ses
gens Antenoriens; mains, quant ilh fut mors, ilh s'appelarent Sycam-
briens, selonc le nom de leur citeit; et puis lassarent leur citeit, se vin-
rent habiteir en Galle awec les Gallyens. Si astoient appelleis Gallyens com
les altres, enssi que vos oreis chi-apres.
coment jurquins, le Turquins, li fis Troiolus, soy remist sor mere. Si arivat en parties orien-
tal sy a^etat son tales , et y fondat pluseurs vilhes. Si nommat son pays Turquie, et ses gens
ques. uy ur Turques solonc son nom. — Item, Eneas et son fis Ascahus ariverent en
Ytaile, ou ilh avoit III roys, assavoir : le roy de VII montangnes, le roy des
^eTYta&^uh'd^ ^ at * ns e * * e ro y de Tusquaine. Si avient que une vois dest a Eneas, une
moroittroisroys,et nuyt en son dormant, de part ses dieux, en teile maniere : « Eneas, va-t'en
les conquestat leurs f ' r ? ?
p*> 9 - » a roy Evandre de VII montangnes qui guerie contre Latinum, le roy des
» Latins, et Turnus, le roy de Tosquayne, et li fais socour, car toutes les
» III royalmes sont a toy, et en seras roy anchois LX jours; et affin que
» tu me croie , je toy donne signe que en la voie ou tu en y ras tu troveras
» desous une arbre, c'on nom ylex, qui porte les glans, une blanche troie
coment Eneas fondat » awec XXX blans porcheaux. » Quant Eneas entendit chu , ilh montat
II citeis : Enoch et r o- • n j •
Aibaine. tantost lendemain luy et ses gens. Si vient vers le roy Evandre; si trovat
desous 1'arbre chu que la vois li avoit dit, et portant ilh fondat la puis
1 11 est assez remarquable que cette origine tard dans Fredegaire.
troyenne des Francs ne se troave pas dans Gre- * Palus-Meotide.
go ire de Tours, et qu'elle n'apparaisse que plus
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L1VRE PREMIER. 29
II citeis. Si nommat Tune solonc son nom Eneoch, et 1 autre Albaine,
c'est-a-dire blanche, por le blanche troie et porcheles. — Ors avient quant
li roy Evandre veit venir Eneas, ilh fist armeir ses gens, et le vot sus
corrir; car ilh quidoit que ilh fust son annemis; mains Eneas prist une
renseal ' de olyvier, qui senefie pais en anchienes bystors, et adont vient
li uns vers l'autre, et fisent teile acontanche 1 que ilhs sen alia rent ou li
oust de leurs annemis astoit; si orent batalhe ensemble. — En eel batalhe
ochist ly roy Turnus de Tusquaine Palliens le fis le roy Evandre ; et si
trueve-on en escript, quant ilh chayt mors, que la terre trembiat; car chu
estoit I gran agoian de XXJIII pies de halt. Chis fut ensevelis en la citeit
de Jano, ou ilh fut puis troveis al temps l'empereur Henri li seconde de
chi nom , si com ilh fait mencion chi apres , ou ilh parolle de chel empereur.
Et quant Eneas veit le fis le roy ochis, si ferit Turnus teilement qu'iih li
tollit le chief, et chayt mors. Chis Turnus, li roy de Tusquayne, devoit Emm ^«p"»i !• «»»*
avoir a femme Lavine, la filhe a roy de Latins; mains Eneas ochist oussi
Latinum, et esposat la dammoselle. Si oit les II regnes des Latiens et de
Tusquayne, desqueiles ilh avoit ochis les II roys. Et oussi li roy Evandre
morut dez plates qu'iih oit en la batalhe, dedens les dis LX jours, si que li
peuple list homaige a Eneas. — Enssi fut Eneas roy de tout Ytaile tou Eneas fut roy de tot
seuls; si regnat HI ans, puis morit. Et apres son decesse Ascanus, son fis de
Dydo, sa promier femme, fut roy, et regnat XXVI ans; et fut coronneis
al temps que Sampson li fors estoit juge de peuple Israel. — Chis fist tout
son rengne appelleir le royalme des Latiens; mains quant ilh fut mors, li
uns le nommat des Latiens et li altre le nommat de Ytale. — A eel temps
guerrioit fortment Sampson, li dus de Israel, les Phi I is ly ens. car ilh estoit d« *■• Simpson d*it-
mull fors. Si vot-ons dire qu'iih avoit ortant de forches d'hommes, quant
cheveals ilh avoit sour son chief 8 ; mains quant ilh estoit raseis, se n'avoit
que le forche d'onne homme; et estoit desquendus de la lignie Dan, le fis
Jacob. — Item , le nuit que ilh fut engenreis , dest une vois a son pere et
a sa mere qu'iih gardassent leur fis de boire vin et de tondre ses cheveals
toute sa vie, et, se ilh ne faisoient chu, ilh en varoit pies 4 . Et enssi en
1 Rensel. B. Petit rameau. Voir Roquefort, * II avait la force dautant d'horames qu'il comp-
v rainnel. tait de cheveux sur la t£te.
* Conversation, et par suite convention. Aeon- * Valoirpire £quivaut ici a valoir mains, avoir
foment dans le supplement de Roquefort. moint de force.
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30 CHRON1QUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
FoK9r °- avienl; car ilh fut trop mal gardeis, et fut par sa femme meismes, qui
amoit I Philistyen ', ennyvreis de vin, et puis tondus. — Et adont le prirent
coment Sampson oit les Philistyens que ilh avoit mult guerroiet aidant 1 son peuple, se li cre-
ereveis les veux. 1 ■• • 1
verent les oux% et le misent en la prison, ou ilh demorat tant que ses
cheveals furent recrus, et sa forcbe li fut rendueve, dont ilh debrisat la
prison par forche. Apres se fist myneir en palais par I garchon, et prist le
pyleir qui sortenoit tout le palais et l'abatit; si chayt le palais sor le roy
des Philistyens et sor ses gens. Si en fut ochis lll m et Sanse meisme fut
ochis a wee, qui avoit adont regneit XIX ans.
Sor Tan del nativiteit Joseph V c et XC1I1 fondat Ascanus , li roy des
Latin . une citeit que ilh nommat Ascanon , et II ans apres fondat 1 altre
asseis pres de la citeit de Eneoche, qu'ilh nommat Sydaine. Item, Tan del
Li premier due de nativiteit Joseph V c XCVII, morut Franco, li promier due de Galle: si re-
Galle moral, Franco. ^ «»•■»■ ■ ■» ... I
gnat apres luy son fis Melus LI an. — Item, Ian del nativiteit Joseph
V c XCV1I1, oit Ascanus de sa femme Eutrop, filhe le roy Evandre deseur-
Meius ie ii< due. dit, 1 fis qui fut nommeis Menelaus 4 ; et li dus de Galle Melus oit en cesti
an meismes (I fis) de sa femme A us trope, filhe le roy Bosses d'Athenne,
et fut chis fis nommeis Borgors. — Item, Tan Joseph VI C et IIII, oit grant
batalhe entre Melus le due de Galle, et An tenor le due de Sycambre; et la
fut ochis Antenor, et ses gens desconfite. — Item, Tan Joseph VI C et XI,
issit Sampson fours de la prison des Philistyens, et abatit le palais enssi
DeHeiy,jugedisr»ei. que dit est par deseur; et la fut mors. Si fut dus d'Israel Heli, ly sove-
rains evesques de la loy, awec ses II fis Offines et Finees 5 ; si regnarent
XXXIX ans. — A eel temps et devant al temps de la destruction de Troie,
et 1 pou devant, estoient les saraines' apparante aux gens, et les dechi-
Debons Samuel le pro- voient et par especial les mareniers. — Item, Fan Joseph Vl c et XII, fut
neis Samuel le prophete le IIII e jour de decembre. Item, Fan VI C et XI1II,
Meius ie due de Gaiie sen alat Melus, li dus de Galle, oultre mere et arivat a Troie la deserte. Si
trovat la Ydonus et Satilus , les enfans Antenor de Sycambre, qui la estoient
fuys por le paour del due Melus : et les chargat a reedifyer la forterecbe
Ylon , que les fis Antenor avoient ja commenchiet a refaire.
1 J'efface ici un second et fut, qui doit 6trc une quefort
faute de copiste. * Melanus. B.
* Je supplee ce mot d'apres le manuscrit B. 5 Ophnis et Phinee.
5 Yeux. Cette forme ne se trouve pas dans Ro- 6 Sirenes.
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LIVRE PREMIER. 51
Sor Tan del nativiteit Joseph VI C et XVI, oit batalhe entre Bosses le roy ^^J^ 1 *?^
d'Athenne, et Ascanus le roy dTtale. Si avoit Bosses X m hommes et w Aie * B ;»» p°f *.•
" J femme qu ilh voloil
Ascanus en avoit VII m ; si fut Ascanus ochis et ses gens disconfite. Et ceste avoir -
guere estoit commenchie portant que li roy Bosses voloit avoir a femme
Grata, la filhe Ascanus, et Ascanus ne li voloit otriier. Si avient que ly
roy Bosses assist dedens la citeit de Eneoch , qui estoit la plus grant del
regne dTtale, Menelaus \ le fis Ascanus, qui astoit jovene de XVIII ans;
mains, quant ilh veit chu, se vient a sa soreur Grata et li dest : « Ma chire
» seure, se vos n'asteis d'acord de prendre le roy Bosset a maris, je et vos
» astons mors et nos pays exilhies. » Et la respondit Grata: « Beals f re ire.
» vos saveis que le roy que donneir me volleis par mariage at ochis mon
» pere, et comment le poroit done mon cuer ameir?» A chu respondit
Menelaus : « De dois mails doit-ons faire le mainre * por le plus grief
» lassier; ilh vaut mies que chu soitvostre maris, que vos soyes ochis et
» nostre pays gasteit. » Et eel respondit quelle feroit son plaisir. — De
chu le remerchiat mult Menelaus; puis mandat al roy Bosses que ilh li don-
roit sa soreur s'ilh voloit issir de son regne, et cis ly otriat; enssi furent
accordeis, et oit Bosses Grate a femme, et rendit sa terre Menelaus por
estre roy. Mains Silvius, li fis Eneas de Livine la seconde femme, qui ja
avoit XXVI ans d'eiage, assemblat gens et corrut sus Bosses, et le des-
confist mult laidement; et remynat Grata la pucelle, quant ilh oit ochis
Bosses; et vient el regne d'Ytale. Si encachat Menelaus, son neveur, qui s'en coment Menelaus fo»-
fuit fors del regne, et fondat une citeit qu'ilh nommat Melan apres son ian.
nom , en laqueile ilh habitat tout son vivant. Et Silvius fut roy dTtale , si
regnat XIX ans valhamment 8 .
Ghis roy fut nommeis Silvius Postivus : Silvius, por tant qu'ilh fut nouris D«siivius, ie n« roy
en unc bois, et Postivus, por tant qu ilh fut neis apres le mort de son peire;
car Eneas, son peire, laissat sa femme Lavine enchainte de ly; et por Foi.9r«. l
l'amour de li tous les roys d'Albaine sont nommeis Silvii, ceste-a-dire
Silvestre, qui est ortant a dire que de boscaige. — Item, Fan del nativiteit
Joseph Vl c et XXI, prisent les femmes d'Amasonie une citeit qui fut DesAmasones.
nomme Do let; si fut dedont en avant nominee Ephesse com devant; car
1 Melanus. B. * Bien vassalment com ban chevalier. B.
* Moindre. Maindre dans Roquefort.
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32 CHR0N1QUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
la royne Ephesaine l'avoit fondeit. Si l'avoit li roy de Perse gangniet jadit ,
se le nommat Dolet. — Apres, sour l'an Joseph VI C fct XXIII, oit Silvius,
le roy d'Ytale, a femme Odela, la filhe Melus le due de Galle, et por son
amour ilh fondat l'an apres une eiteit en son regne qu'ilh appellat Odelin.
— Item , Tan Joseph VI C et XXVI , Odela oit de roy Silvius unc fis qui fut
siiviusjirovdiuiie, nommeis Broncus. Chis Broncus fut chis qui puis fondat la Grant Bre-
nom Broncus, iy- tangne, c'on nom main tenant Engleterre, enssi com vos oreis chi-apres.
Sueis fondat la Grant ~ _. . ... vv«n» • /"\ i i i o«i • ■ *» •*•
retangne,cestEn Item, sor Ian Joseph VI C et aaVH, oit Odela de Silvius 1 fis qui fut
nommeis Eneas le postis. -*- Item, l'an Joseph VI C XXX, priat Borgons, li
fis le due de Galle, a son pere qu'ilh li vosist donneir terre, ou ilh posist
Borgons u fis ie due fondeir vilhes et casteals por habiteir: et chil li otriat I certain terre grant
de Galle, fondat pro- * 1 D
mieriepaysdefeor- e t lone, ou ilh fondat pluseurs vilhes ou les gens habiteroient. Si en fut
gongneet en fut pro- ^ G J r D
mier sires. sires. Si nommat son pays Borgongne apres son nom, ou ilh oit puis regnant
III roys ensembles, si com vos oreis chi-apres. Chis Borgons oit I fis qui
Ecl ons l %tjd\f l Tro[e ^ ut nomme * s Ector, qui puis fondat Troie en Borgongne. — Item, l'an
en Bo^oogne. Joseph VI C et XXXV, morut Silvius, ly roy dTtale. Si regnat son fis Eneas
apres, qui estoit encors jovenes de IX ans; mains Menelaus, son oncle, li
aidat tant qu'ilh oit eaige, et regnat XXXI an. Broncus, son frere, astoit
anneis: mains ilh ne vout oncques tenir terre, s'ilh ne le conqueroit ou
edifioit de novel.
Eneas ie fis le ro y Chis rov Eneas s'en allat 1 jour cachier en I bois, et awec li * cent hom-
d'Ytale,rescoiitLon- . J * . ■ i ■■ .
darde del main de mes; si trovat que III murdreurs avoient une mult belle pucelle qu'ilh
111 lauron , et 1 es- ■ • • i • n •
posat, et apres tee voloient violeir; et li roy les fist prendre, si les demandat qui la pucelle
Lombardie. estoit. Chil respondirent que ch'estoit le filhe l'empereur de Gresse, et
I'avoient robeit al port de Gresse. Adont les fist li roy coupeir les pungnes,
les langues, si que de part eaux ne fust dit jamais novelle de la damoiselle.
— Apres demandat li roy a la pucelle comment el estoit nommee; elle res*
pondit quelle estoit nommee Lombarde, et li roy li dest qu'ilh (la) pren-
deroit 1 a femme, et I'amynat awec li. Si l'esposat solonc sa loye; et, por
Lombardie. la grant amour qu'ilh. avoit a lee , ilh appellat son paiis Lombardie , et y
fondat pluseurs citeis et casteals, entres lesqueilles ilh fist I belle, en droit
Pavie lieu ou ilh avoit sa femme trovee; si l'apellat Pa vie, par le raison de
chu qu'ilh avoit la passeit, ilh avoit sa femme savee la vie. — Item, l'an
1 O luy. B. * Qu'il I'averoit. B.
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LIVRE PREMIER. 33
Joseph VI C et XL ', mo rut Bosses, le roy d'Athennes, fis a roy Bosset que
Silvius ochist. Apres la mort Bosset vout eistre roy Andromart de Boiesse ■ ,
et gueroiat longement le peuple d'Athenne; mains ilh furent secorus par
I chevalier de Galle qui fut nommeis Melompus, fis de la soreur le due
Melus, liqueis chevalier ochist en batalhe le due Adromart. — Et quant
le peuple de Athenne veit chu, se fis en t Melompus roy; et ilh les governat
bien et gentiment. Et deveis savoir que ons faisoit el roy d'Athenne par
election ; mains le peuple le donnat a Melompus por sa grant proieche
et a ses heures dedont en avant ; et adont 8 fut cassee li election. — Item ,
Tan Joseph Vl c XLIIII, conquist Melompus toute la terre de Boresse 4 , et
le mist awec la sien. Item, Tan Joseph Vl c et XLVIII , morut Melus, li due De due de Gaiie.
de Galle, qui fut le fis Franco, le fis Ector de Troie, qui avoit regneit
LI an.
Chis dus Melus avoit II fis de sa femme, qui furent nommeis : li anneis
Borgons, et li altre Bosses. Borgons avoit pris terre altre part, sique Bosses
fut dus de Galle, et regnat XXIIII ans. — Chis Bosses oit IIIl fis : li
plus anneis oit nom Ector, li altre Priant, ly altre Polus et li altre Ale-
manie; mains Priant et Polus morurent jovenes, si qu'ilh n'en oit que
II, qui mult furent valhans en armes. — Item, Tan Joseph VI C et L en Foi. ioi*.
novembre*, orent batalhe li peuple dTsrael et les Philistiiens ensemble;
si orent les Philistiiens victoir, et furent les fis dTsrael desconfis, et leurs l« Pbiiistueos orent
II juges ffines et Finees ochis. Et quant Heli leur peire le soit, si en
prist teile coroche que ilh en morut. Et avoient gouverneit XL ans; et
apres leurs mors fut eslus Samuel % qui fut li sov^rains prophete de son stmuei fut fais juge
temps. — Item , Tan Joseph VI C et LIII , priarent les peuples dTsrael a leur
juge Samuel qu'ilh leur vosist donneir I roy, qui les menast en batalhe
contre leur annemis, enssi que les altres nations avoient. Et Samuel leur Exeupie.
otriat, mains ilh prist III jours de conselhe. Dedens ches trois jours, Samuel
priat a Dieu devoltement que ilh li donnast a cognostre queile homme ilh
poroit eslire por estre roy; et Dieu li demonstrat 7 que ilh presist Saul, smi ie premier roy
qui estoit de sa lignie desquendus. Quant Samuel I'entendit, si fist tan-
1 Le troisieme jour de marche , ajoute le manu- * Plus haut B otitic.
scrit B. * Le thier jour de novembre. B.
5 Boresse, B. Beotie? * Fut eslus juge Samuel B.
* Apres dedont. B. 7 Et Dicx li envoiat. B.
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34
GHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
La nascenche David ,
qui puis fuit roy.
Des Latins.
toist roy de * Saul , qui governat le peuple bien unc pau de temps. —
Item, Fan Joseph VI C et LVII, allat Alemanie, le fis le due Bosses de Galle,
josteir trois cops de lanches contre 1 chevalier qui fut nommeis Andol. et
se n avoit lidis Alemaiue * que VII ans; si brisat sa lanche et ne chayt
point; dont pluseurs chevaliers dessent qu'ilh seiroit eucor valhan, enssi
qu'ilh fut, car ilh conquist puis tout Germaine, et le multipliat mult
AiiemaiD,ie£sdedue fortement de citeis. Si l'appellat solonc son nom Allemaingne, et ses gens
Aiicmangie. Allemans, et conquist mult de terre entour li le temps qu'ilh regnat.
L'an Joseph Vl c et LX fut neis David, qui puis fuit roy de peuple d'ls-
rael; et fut le fis Ysay 8 , et par altre nom ilh fut nommeis Jesse; et fut
David neis en la citeit de Bethleem, et issit de la lignie Juda. — item,
Tan Joseph VI C et LXV1, morut Eneas, li roy des Latiens, qui avoit regneit
XXXI an, qui estoit li an de son eaige XL. Et apres luy fut roy son fis
Le premier roy de Co- Latin ', qui regnat L ans. En cesti an meismes fisent cheaux de Corinthe
leur promier roy, car oncques n'avoient oyut roy, et fut nommeit Aletes,
DedusdeGaiieetGer- et regnat XXXV ans \ Item, l'an Joseph Vl c LXXII, morut li dus de Galle
Bosses. Si regnat son fis Ector, li anneis , XVI ans; et, quant Alemanie , son
jovenes frere, soit que son pere estoit mors, et que son frere estoit dus de
Galle, si allat en Germaine et le conquist; si en fut dus, si com j'ay dit
desus. — Item , l'an Joseph VI C LXXVU, morut li roy Melompus d'Athennes;
si regnat son fis apres Gasdros % a cuy cheaux de Pulaine 7 gueriont long-
temps; mains al dierain' ilhs 1'ochirent en batalhe. Item, l'an Joseph
VI C LXXXVHI, morut Samuel, qui fut grandement 9 ploreis de peuple
Israel ". En eel an meisme, oit li dus Ector de Galle batalhe contre son
frere Alemaine, qui le guerioit por le sien part de la terre de Galle; si
furent les Gallyens desconfis, et Ector ochis. Si fut dus Alemaine fais " de
1 Ce de, qui se trouve aussi dans le manu-
scrit B, me paralt de trop.
* Sic. Plus haut Alemanie,
* Isal.
4 Le copiste aura sans doute omis le signe abre-
viatif representant la finale us.
6 Le manuscrit B contient ici de plus cette
phrase: Item I'anJosephe VI e LXIX fut Saul coro-
nets aroyde Judee de part Samuel et les en fans d' Is-
rael, et fut li premiers rots que li pueple d' Israel oit.
* Codrus sans doute.
7 Pellene?
• L'adjectif dierain ou derain existe encore en
wallon et signifie dernier. Roquefort donne de-
raina (a la) , qui doit e'tre une faute typographique.
8 Durement. B.
10 Le manuscrit B ajoute ici : qu'ilh avoit go-
vreneit.
11 Sans doute pour : Si fus Alemaine fail dus.
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LIVRE PREMIER. 35
pars les chevaliers; si regnat XXII ans. — Item, Tan Joseph VI C XC1, fut ^J^^ 1 ^ 1 * en
la grant batalhe en mont Gelboee de Saul, le roy Israel, encontre les Phi-
listiiens; si tournat le mal sour le peuple d'Ysrael, car Gerblo, Sanse, et
Grandons et Jonatas 4 , les enfans Saul, furent ochis en la batalhe, et grant
quantiteit' de peuple Israel a wee. Et quant Saul veit chu, se priat a son
escuwier que ilh le tuast, et chis ne I'oisat faire. Adonc prist Saul son
espee,etse soy tuat luy-meismes, et le peuple fut desconfis. — Chi fine le
thier eaige de monde, qui contient de la nativiteit Abraham jusqua David, Deim-eaig* demon-
quant ilh fut coronneis, IX C et XL ans. Si commencherons nous dautes
sour Tan que David fut coroneis a roy de peuple Israel, qui fut li an del
origination de monde lIII m G et XX1III.
Le promier an que David fut coronneis, oit grant batalhe entre luy et Ly roy David fut coro-
ii- ■ - ■ /> o i • *•*! • • •■ •• neiscomll'royd'Is-
Hisboset, le ns Saul, qui encor estoit demoreis en vie; mams ly poioir raei,quioitmuitde
David cressoit toudis , et Hisboset 8 decressoit et amerissoit * ; si avient al *""**'
dearain que Gerpho et Saligons, dois des sorjans Hisboset, se corocharent
a luy I jour, si I'ochisent en dormant, et presentont son chief a roy David,
dont ilh quidarent a luy acquerir grant serviche *; mains David, qui astoit comentDiTidfiitjus-
loial. lez fist demembreir de pies et de mains, et puis les fist pendre a 1 ar- oeMiwt son anne-
mis.
bre. — A eel temps habitoient en Jherusalem diverses gens qui n'astoient Foi. iot«.
pas des fis Israel. Si assemblat li roy David grans gens , et assit la citeit de ^nq^iliih^wm.
Jherusalem , la V e annee de sa coronation ; et le prist asseis legierement ,
fours mys une fortereche qui estoit appellee Syon. Gelle prist Joab • , le
fis de la soreur David, et por chu en fist li roy son seneschaus de sa che va-
leric — L'an del coronation David VII, fist faire David en Jherusalem une
edifisse, en laqueile ilh plaisoit a demoreir dedens, oil ilh n'avoit one-
ques demoreit: ains avoit demoreit devant en Ebron lesdis VII ans du- Darid fist jherusalem
1 7 . chief de son rengne.
rans ; et fist de Jherusalem le chief de tot son regne. — A eel temps que je
dis avenoit asseis pou de choises qui soit por racompteir, et dont ons sache
parleir es parties de cha, portant que ilh y avoit encor pau de gens. Si
1 La Bible {Regum, 1. I, cap. 31) cite seule- * Pour amenriitoit, diminuait. Ameniaoit dans
ment trois fits de Saul : Jonathan, Abinadab et le manuscrit B.
Milchisua. Ces noms, sauf le premier, ne ressem- * Dont ilh le quidarent bien avoir servil encon-
blent guere a ceux de notre chroniqueur. ire. B.
* Plant eit. B. • Joal dans notre texte, ma is Joab dans le ma-
• Isboseth. nuscrit B.
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36 CHR0N1QUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
passerons avant tout legierement de greit en greit, en teile manire que
d« doc d« Gftiie. jfh avenoient. — L'an le roy David XI , morut Alemaine ', le dus de Galle,
et puis regnat son fis Castor XXX ans. En chist annee fut fais li roy de
C "o^dit d c••tA GtUe, Corinthe Ysron, liqueis regnat XXXV ans \ — Item , Tan David XXI11 , fon-
dat Castor, li dus de Galle, 1 citeit qu'ilh nommat Castre. L'an David XXV,
morut Latinus, li roy des Latiens, qui avoit regneit L ans; et apres luy
regnat son fis Siivius li Blans XL ans. Chis roy Silvius fut mult bon jus-
tichier, et amat mult ses gens, et les tient bien en pais contre leurs annemis,
si com valkant prinche. Item , XII ans devant , prophetisarent Natan et
De prophet*. Nathan Gad, II prophetes de grant nom; et al temps de chesti Silvius, vers la (in,
etGad. morut David; si regnat son fis Salomon, quant David fut mors, qui re-
gnat XL ans.
La citeit d'Ephese fut L'an David XX VIII ans, fut faite la. citeit de Ephese,en laqueile sains
Ephesus. Johan , ewangeliste, fut puis ensevelis ; et le fondat Ephesus , le roy de Balke.
Discon entre David et — Item , Fan David XXIX , oit grant discorde entre le roy David el Salmon ,
son fis, por lequeile discorde ilh le banist hors de sa terre. Si soy parti t
Salmon, et allat demoreir ' en la royalme de Corinthe; la ilh fut bien ve-
nus, et y demorat III ans. Si fist son pere del paine asseis. — Item, l'an Da-
vid XXX , astoit roy li prinche Cartago d'Affrique. Si demoroit et habitoit
DeDydanie. en la citeit de Dydanie, que Dydo, la femme Eneas, fondat a son temps, si
com dit est. Si s'avisat le roy Cartago et le fermat de murs, et le regrandist ',
carugo. et le nommat Carthago, qui est maintenant le soveraine evesqueit d'Affri-
que. — Item, l'an David XXXI, s'avisat Salomon qu'ilh dechiveroit 5 son
Devoiie, eomentubs pere. Si vat tant subtilisiier, qu'ilh trovat la maniere comment ons feroit
par salmon. voile •; car chu fut le promier qui fist voile; et alat faire des hanas de voile
1III chereez 7 , et les envoiat en Jherusalem pasieblement, par II garchons
auxqueiles ilh dest chu qui li plaisoit qu'ilhs fesissent; et les endoctrinat
si bien, qu'ilh furent bien ensengnies de chu que leur maistre plaisoit a
1 Van del coronation le roy David XI fut fays la citeit, si Vengranditt et le fermat de mures. B.
rois de Corinthe Ysron, liqueis regnat XXX VI ' Tromperait. Roquefort donne decheoir et de-
ans. Item Van David XIX morut Alemaine. B. cevoir.
* Cette derniere phrase ne se trouve pas dans * Verre. Ainsl les hanas ou hanaps de voile dont
le raanuscrit B , qui l'a donnee quelques ligncs il est question plus loin sont des vases de verre.
plus haut. En wallon on se sert encore de 1'expression veule.
3 Si vuidat Salomon et se trahit a demoreir. B. Roquefort donnc voire.
* Si s'avisat li rois Cartago qu'ilh regranderoit ' Charretees. Charrees dans Roquefort.
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LIVRE PREMIER. 37
faire. — Ghes vinrent en Jherusalem, se misent en leur hosteit leurs hanap-
pes , et vinrent lendemain devant le temple David ; et misent la une table
et I nape, et par-desus III de leurs hanaps de voile, en demonstrant qu'ilh
n'en avoient plus. Les Juys regardoient mult ches hanaps ', qui tant astoient
beals et clers que ch'estoit mervelhe del veioir. Et David , qui astoit aux fe-
nestras de sa thour, regardat chu; si apellat I sien camberlain, qui astoit
nommeit Josse, et l'envoial veioir queile chouse les gens regardoient en la
rue. Ghis y alat et revient a David, et li dest que chu estoient III joweals.
les plus beals qu'ilh veist oncques, que ons voloit vendre.— Quant li roy
David l'oyt, se li at dit qu'ilh les alast achateir, que qu'ilh costassent; et
chis s'en alat parleir aux marchans, et demandat le pris des 111 hanaps. Ilh
dessent 111 bessans d'or. Dest Josse : « Chest chascon cent besans. » A eel Foi h f.
point prent I des hanaps et le regardat mult, se le voit beal et cleir; si dest :
a Donneis-moy chesti por L besans ; e'est por le roy David. » Ly uns des
garchons , qui astoit ftommeis Jonas , prist le hanap que Josse tenoit et
dest : « Par chis hanap ne blameroit jamais nos denree de la motie de pris; »
et puis alat le hanap si roidement jetteir contre les pires, qui le brisat en
pluseurs niches *. Quant Josse le voit, si fut tous enbahis en disant : « Ne comem lesii ha„» P s
i ., . •■ it « \t • ■ furent brisiies.
» vos corochies, amis, pour quelle pris aura-ge 1 autre? » — « Vos aureis les
» dois por 11I C besans. » — « Vors 5 , dest Josse, vos ne prisies ors 1'unc que
» cent besans, ors le presies G et L, et je vos prie que Tunc moy donneis por
» cent besans ». A tant mist le main al unc; mains Joseph, li aultre gar-
chon, li ostat des mains et le jettat a terre, enssi com 1'autre fut debrisies.
— Adont dest Josse : « Por queile pris aurai-ge eel derain? » Respont Jo- conem jmm »ci»ut
nas : « Por III besans. » Adont li at Josse donneit 11I C besans, et enportat iii'tam/ar™''
le hanap. Si racomptat a roy David comment les dois altres astoient bri-
siet, et tout chu que je ay compteit; dont li roy David dest qu'ilh ne soy
mervelhoit point s'ilh avoient mal tieste ', car ilhs savoient faire trop sub-
tilhe ovraige. — Et lendemain, al matin, ont lesdis marchans aporteit leurs
1111 chareez de hanaps, et les ont vendut a tous commonement les XII
unc besans d'or, et puis s'en sont raleis leurs voies. Enssi perdit li roy Da-
vid 111 besans, car lendemain li furent presenteis par son peuple plus de
1 Esgardoient ches hanaps. IL 8 Pour voir, vraiment?
* Qui se brisat en plus de cenlptechcs. B» 4 Si e'etaient de mauvaises tetcs?
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38 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
quattres dosaines; se dest que ch 'estoit des jeux Salomon son fis et de ses
experienches.
Le roy de cartage. Apres, sor 1'an David XXXI III, morut Cartago, le roy d'Affrique, et
regnat apres Ysbron, son fis, XL ans, et fut proidhons. Item, Tan David
De roy Yram qui^fut XXXVI , fut eslus a roy de Thir Yram : chis fut li grans amis a David et
a Salomon , son fis. Chu fut chis qui li envoiat les cedres et les bois * dont
le temple Salmon fut fais. — Item, Ian XL, morut li roy David de Jheru-
coment ly roy David salem , el XL an qu'ilh avoit esteit coronneit. Chis fut I bons roy qui amat
Dieu, et Dieu I'honorat, enssi que ses fais et ses ovres sont escripte en la
bible, et en le somme des roys ' veritablement qui les veut savoir. — Et fut
ensevelis en Jherusalem par Salomon, son fis, mult noblement, et fist
mettre en son sepulcre VIII tressors dor et d'argenl. Solonc chu que Jose
phus tesmongne, de la lignie le roy David issit le royal lignie dont la
De roy salmon qui E»t virgene Marie issit. — Apres David, tient le regne Salomon, son fis, XL
le temple dedens VII *> % r 7 . , . .
an*. ans, a cuy Dieu donnat sens et scienches, pais et mens temporeis , plus que
a nulle altre roy qui oncques fut devant luy ne apres. — Item, 1'an del
coronation le roy David XLUIl, commenchat Salomon a faire le temple de
Jherusalem, le XIX jour de mois de marche, liqueile temple fut mult
mervelheusement deviseis 8 et de trop grant riceche aourneis; et mist-ons
Guere entre due de septes ans al parfaire. — Item , 1'an David XLIX , oit grant batalhe entre
Galle et le roy des* iii^in o»i • ■ ■ . «i
Latins. Castor, le due de Galle, et Silvius, le roy des Latiens, por tant que Sil-
vius voloit que Castor fust subgis * a luy et li paiast tregut de sa terre; et
li dus Castor disoit que li roy Silvius devoit mies rendre a luy tregut, car
ilh n'astoit pas desquendus de la droit royal lignie enssi que Castor astoit,
qui estoit desquendus de roy Priant de Troie ; et Silvius estoit desquendus
de Eneas, qui astoit unc due et chevalier a roy Priant. Celle batalhe fut en
Ly roy des Latins oit mois d'avrilh & , et fut tout emmy Borgongne; mains toutli mals retournat sor
Castor, car ilh fut ochis et ses gens desconfis, et s'enfuirent les Gallyens en
leur pays, en la citeit de Pygarie que Franco fondatjadis, et la esluirent a
due de Galle Ylion , le fis Castor, qui regnat XL ans, com valhans prinche.
1 Les martens. B. Ce mot, M airien dans Roque- s Diviseis. B. Deviseir vaut mieux; e'est un
fort, designe le bois propre aux constructions. verbe auquel repond le substantif devis , descrip-
* II s'agit evidemment ici du livre des rois. tion detaillee d'un ouvrage a executcr.
Somme, qui vient directement du latin, signifie * Pour subject.
ordinairement Tessentiel d'une chose. 5 En mois d'avrilh le XI jour. B.
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LIVRE PREMIER. 39
Chis Ylion defendit mult bien son pays; ilh astoit grans de XV pies, ilh DeYiion,ducdeCaiie.
prendoit 1 homme a ses mains parmy les flans et le rompoit enssi que chu
fuist paistre '. — Item, l'an David LI, fut parfais li temple Salmon en Jhe- Foi. h v.
rusalem, et fut le premier dicause * celebree le primier jour de marche, u t £IJIto € M?on* e en
qui adont astoit le premier jour de Tan; car adont ilh n'avoit en l'an que JheruM,em
X mois. — Item, Fan David LVIII, prophetisat le prophete Acayias que le
regne Salomon seroit apres sa mort deviseis en II parchons. Item , l'an &«« i™ nobles edi-
LXII, fist faire Salmon en Jherusalem trois edifisses de grant saingnorie : salmon 6*t fai™.
la primier oit nom le maison Rurauz 8 , en laqueile demoroit li roy; la se-
conde fut faite por la filhe Pharaon, que Salomon avoit a femme, et fut eel
maison apellee Prela; et la tierche fut apellee la maison de Libain : en
cesti astoient les armeures et les tressors le roy Salomon. — A eel temps
estoit moult grant la guere entre le roy des Latin Silvius et le due de Guere entre i* roy de
Galle Ylion; et astoit Silvius moult appresseis de due Ylion, qui l'avoit Gaiie.
assis, en la citeit de Eneoch; et tant se travelhat li dus Ylion et ses gens
que ilh prisent la citeit l'an David LXV \ Adont fut-el gastee et les gens
desbareteez, etfut Silvius ochis. — Quant Ylion oit enssi vengiet son pere,
se prist-ilh Gazet, la femme Silvius, et l'esposat solonc sa loi; et la damme
ly priat qu'ilh vousist a son Bis Egyptus rendre son royalme, sique chis
que en estoit drois heurs *, et Ylion li otriat. Enssi fut Egyptus coroneis a
roy, et regnat XX1I1I ans. Apres chu s'en ralat Ylion en Galle et emenat
sa femme awec li. — Item, Fan David LXVII, morut Yram, le roy de Thir,
a cuy Salomon avoit donneit en la terre de Galilee IX casteals por l'amitie
qu'ilh avoit entre eaux. L'an David LXXIIII, conquisent cheaux de Trache
le mere 6 , si en furent saingnours XIX ans et maistres.
Salomon le roy avoit pluseurs femmes qui n'astoient mie de la lignie De roy salmon qui co-
d'Ysrael , ains adoroient les faux dieux et ydollez; si fisent tant a Salomon ™oh qu'iih P adorat
qu'elles li fisent faire temples et alteis en l'honeur de leurs faux dieux, de por-M *""***'
1 Moineau, passereau. Paisse dans Roquefort. s Ce peut 6tre aussi bien Ruranz.
Du latin passer. Je crois cette interpretation preTe- * L'an David LXV le quart jour del mots de
rable a celle qui proposerait de lire plaistre , platre. may. B.
* Dicasse et ducasse, dicause et ducause existent ' Heritier. Her dans Roquefort,
encore en wallon. Ces mots ont le sens de const- * Conquerir'la mer, expression appliquee en-
cration et par extension celui de fits. Ici dicause core plus loin aux Rhodiens, puis aux Ph^niciens,
signifie consecration, dedicace. doit 6tre I'dquivalent de dominer sur la mer.
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40 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
quoy Salomon corocha mult Dieu. Se li en fut son rengne tollut apres sa
mort a ses heurs; ains en oit la plus grant partie I sien servans '. — Item ,
Tan David MI**, morut Salomon. Si fut apres roy son fis Roboam; mains,
quant ilhs le durent sacreir solonc leur loy, se li priarent pluseurs grans
prinches de sa terre que ilh les vousist alligier d'alcon servage, de quoy li
roy Salomon son pere les avoit argue is. Et ilh respondit qu'ilh sen con-
EiftmpiumderojRo- selheroit. Puis se conselhat a ses barons anchiens de la terre, qui de con-
boain qui creit Ic m m /
ronsdhe de« jone$. selhe son pere avoient esteit, lesqueiles li conselharent que ilh fesist la
volenteit de son peuple. — Roboam apres soy conselhat aux jovenes barons,
qui a wee li avoient esteit nouris; et li conselhont que riens ne deportast
ses gens f , et ne fesist rien por eaux , anchois les aggrevast de plus griefs
servage que devant. A eel conselhe se tient Roboam ly roy, de quoy ilh
fist mal. — Et respondit a ses hommes mult fellement que ja ne les feroit
avantaige, anchois les aserviroit plus que son pere n'avoit oncques fait. Et
quant li peuple veit chu, si soy department de li les X lignie de Ysrael, et
Les x unagez soy de- fisent roy uns poissant homme de la lignie Effraym, qui longement avoit
boam. servit Salomon, et estoit nommeis Jheroboam; et remanit soilement a
Roboam ' les lignies Juda et Benjamyn , et regnat XII ans. Adonc fut acorn-
plie la prophetie Acarias.
Kxempium coment ly L'an del coronation David MI" et VI, amynatZusac *, li roy d'Egypte,
qmst jhfruMiemei grans oust 8 desus Robooam , le roy de Judee, et si assist Jherusalem ; se li
^espou a e tem- -^ tantost rendue sens cop a ferir ; et ch'estoit li principal citeit et li chief
de tout le regne Roboam. Et fist li roy Zusac porteir awec luy en Egypte
les prechieux vasseals d'or et d'argent, dont ons amministroit en temple,
et Il c grans eskus jostereches • de fin or, que Salmon avoit fait faire por
Foi. it v. nobleche 7 , et les avoit pendut tout al thour de son palais , que ons nommoit
ne due de Gaiie. le saut de Libain. — Item, l'an David Ml" et IX, Ylion, li dus de Galle,
morut. Si regnat apres son fis Alienoir XXVIII ans. Chis oit I femme qui
fut nominee Lyliane, qui fut la filhe Gaudo, le roy d'Angel. En chist an
meisme morut Egyptus, li roy des Latiens; si fut apres son fis Silvius li
1 Sergant. B. * Ecus jostereches signifient sans doute des ecus
* Que de riens ne deportast sa gent. destines aux joules. II en est question dans le pas-
* Et li rois Roboam tient tant seulemenl. B. sage des Parol, cite a la note 4.
4 Sesac, Parol. f II, 42. 7 Les quatre mots qui precedent ne sont pas
* Oust pour ost, armee. dans le manuscrit B.
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LIVRE PREMIER. 41
Polhus 4 , qui regnat XXVHI ans, de temps Roboam et Ozie en Judee roys.
— L'an David XC, furent faites et edifyes II citeis en Asie, qui furent apel-
leez Furine et Samas; se les fondat Ango, le roy de Asie. — Item, Fan
David XCIJII, fondat ly dus Alienoir de Galle I moult beal casteal, en 1
lieu qui fut nommeis lisle de Brukanne. Si avient que ons faisoit le fon-
dement, se vient la sa femme, la duchesse de Galle , al jetteir le promier
piere; et quant li dus veit sa femme, que ilh amoit mult fort, se dest: ExempiumdeLibiant.
« Ma chier damme, vos soyes li tres-bien venue; par nostre foid vos jet-
» tereis le promier pire del fondement, se n'en venrat se bien nom » f . Et la
damme prist le pire et le jettat; et sor eel pire fut li casteal edifiies, qui fut
nommeis Libiane ', solonc le nom de la damme. — Et est encor une bonne
vilhe * qui est nominee Lisle, en Flandre, car li ysle de Brukanne 5 fut Luie «n Fitndr*.
puis appelleis Flandre , enssi que vos oreis chi-apres. — L'an David XGVII ,
morut Roboam, li roy de Judee, et fut ensevelis deleis ses ancesseurs en d« roys d« judee.
la citeit de Jherusalem : chis roy Roboam fut orgulheux, et n'avoit en luy
nulle hardileche de chevalerie, et partant fut-ilh tous jours subgis a altruy.
Quant Roboam li roy de Judee fut mors, si fut coronneis Abia, son fis,
qui regnat III ans. — Item, l'an David XGVIII, oit une grant batalhe entre
Abia, le roy de Judee, et Jheroboam, le roy de peuple Israel; et la fut
Jheroboam desconfis, et perdit L m hommes; mains par le volenteit de Dieu
Jheroboam escappat de la batalhe, et dedont en avant ne revient puis la
royalme aux heurs Salomon. — Item, l'an David C, morut Abia, li roy de
Judee, et fut ensevelis awec ses ancesseurs. Si regnat son fis Aza apres o«t wide judee et
XL1 : chis fut droturiers et loial envers Dieu, car ilh destruit toutes les
ydolles et les symulacres que Salomon avoit faites et estorees en Jheru-
salem por ses femmes. Chis roy Aza tient sa terre en pais les X promiers
ans. — Item, l'an David CIII, morut Jeroboam li roy d'Ysrael, qui avoit
regneit XXII ans et bien governeit les enfans d'Ysrael, tant com des X
lignies dont ilh astoit roy. Chis Jeroboam donnat congiet a son peuple de
adoreir les ydolles , portant qu'ilh ne voloit mie qu'ilh soy retrahissent vers
1 Le poilu. * Notre texte porte Borgogne, et je le corrige
* Se bien nom cquivaut a sinon bien. d'apres le manuscrit B. Ce doit dtre, du reste, une
* Liliane. B. faute de copiste, car plus haut, en parlant de la
* Et ancour I'apelle-t-ons ensi mainlenant , et meme He, il ecrit Brukanne.
at en tour I bonne vilhe, B.
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42
CHR0N1QUE DE JEAN DODTREMEUSE
De roy Silvius des La-
tins qui fondat Co-
lumpne.
Des malvais roys d'Ys-
rael.
Excmplum coment ly
roy Aza eommandat
2ue cascon servist
lieu.
De due de Galle.
Gosaioe.
De roy Silvius dei La-
tins.
Fol. 12 t«.
Dez roys de Judee et
d'Ysrael.
De dus de Galle.
Jherusalem. — Apres Jeroboam fut roy d'Ysrael Nabath ft , et fut appelleis
ly secons roy d'Israel; si regnat II ans. — Item, 1'an G et MI, en marche f ,
commenchat a fondeir li roy des Latiens Silvius I citeit, et I'apellat * Co*
lumpne en Gampangne \ — Item , Tan C et V, en avriih % oil grant batalhe
entre le roy d'Ysrael Nabath et I prinche qui fut nommeis Baasa § , et la
fut Nabath ochis et ses gens desconfites. Si fut roy chis Baasa, et regnat
XX1I1I ans; mains si les 11 altres roys devant luy avoient esteis malvais
encontre Dieu , encor le fut cbis plus. — Item , Tan C el X oit batalhe entre
Gispel , le roy de Ethyoppes el le roy de Judee, el fut en octembre 7 ; et oit
Aza victoir. Quant Aza veit qu'ilh oit ses annemis desconfis, et ilh fut
rapeiries sains el sauf , si eommandat a son peuple que chascon servist Dieu
en bone foid, et renonchast * les faux ydolles; car par la grasce et ayde de
Dieu avoit ilh oyut victoir contre ses annemis. — Item , 1'an G et XII, morut
Alienoir, li dus de Galle, qui avoit regneit XXVI II ans.
Apres la mort Alienoir fut fais dus Gossain, son fis, qui regnat XII ans.
Chis dus fondat I citeit, qui siet en Pulhe, qui est nomm6e Gosaine. En
eel an en decembre • morut Silvius, li roy des Latiens, qui avoit regneit
XXVIII ans. Si fut coronneis par les chevaliers son fis qui fut ousi nom-
meis Silvius Carpentons , et regnat XVI ans. — Item , Tan David C et XX
morut li roy de Corinthe Baffo qui avoit regneit XXIII ans, si fut roy
apres son fis* Bach is 40 . — Item, 1'an David C et XXIIII oit grant batalhe
entre Baasa le roy d'Ysrael et Aza le roy de Judee. Si oit victoir le roy Aza ,
et desconfit les altres. Si s'enfuit ly roy Baasa en la citeit de Ebron, et Aza
retournat en Jherusalem, et demorat la 1111 ans, puis assemblal ses oust,
et assegai Ebron ; se le prist et ochist Baasa. — L'an David C et XXV1U ,
quant Baasa fut mors, si regnat son fis Hela II ans, puis morut; se fut en-
sevelis en Ebron. Apres regnat li fis Hela, Amri ", XII ans. — L'an David
C et XXIX morut Gosain , li dus de Galle. Si regnat apres son fis li anneis.
1 Nadab.
* Le XX* jour de marcJie. B.
5 Et Vappellat quant die fut fait. B.
4 Couloromiers en Champagne.
6 Le I Ilh jour de avriih. B.
* Baasa filius Anise dc domo Issachar. Begum,
III, 45.
7 Et fut le XI P jour de octembre. B.
8 Bclausast. B.
8 Le I UP jour de decembre. B.
10 Baffo m'est inconnu, raais Bacfm ou plutol
Bacchis , cinquieme roi heraclide, est le fondateur
de la dynastie corinthtenne des Baochiades.
11 Amri n'etait pas fils d'£la, mais princeps mi-
litiae. Begum, HI, 46.
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LIVRE PREMIER. 43
qui fut nommeis Ector; et ly jovene, qui fut nommeis Alienon, fut sires
de Castel del Ysle, que li dus Alienoir avoit fondeit, enssi que dit est par-
devant. Enssi partirent-ilh leur terres. Chis Ector, li dus de Galle, regnat
XIX * ans. — Item, l'an David C et XXXIII morut Silvius, li roy des Latins;
si regnat apres son fis Tyberius Silvius V11I ans. Item, Tan C et XXX1III,
fondat Amri li roy d'Israel I citeit qu'ilh apellat Samarie; si en fist le Amryroydisraeicom-
» * ... j mcnchat la royalroe
chief de son regne , ensi que Jherusalem estoit chief del regne de Judee. d « sam.ric.
— Item , l'an David G et XXXVIII , astoit aleis chevalchier li roy des Latins;
si avient qu'il devoit passeir aux weis d'onne rivier qui corroit par-dele is
Enefoch; se cheit en 1'aiwe f , si fut pres noyes et finablement ilh escapat,
mains ilh en chayt en une maladie dont ilh morut, por quoy de chi jour
en avant fut la riviere nominee Tyberis solonc le nom le roy, et encors li rivier Tyberu, par
J i i is devant Amble ve.
le nomme-ons; mams par-devant estoit son nom Ambleve 5 . — Item, Ian
David C et XLI, morut Aza, li roy de Judee; si fut ensevelis en Jherusa-
lem a wee ses ancesseurs. Et apres luy regnat son fis Josaphat XXV ans; se
resemblat bien son pere del ameir Dieu et servir. En eel an morut Tybe-
rius Silvius; si regnat apres son fis Agrippa Silvius XL ans. — Item , l'an
David C et XLII, morut Amri li roy d'Ysrael; se fut apres roy Abach \
son fis. Chis roy Abach d'Ysrael et Josaphat, roy de Judee, farent toutes
leurs vies bons amis et en pais; car ilhs fisent albianches ensemble par
mariage; car Joram, li fis Josaphat, oit Athalie la filhe Abach. A eel temps
regnoient II grans prophetes : Micheas et Helie, et pluseurs altres bons Michets, Heiws.
clers. — Item, l'an David C et XLVIII, morut Ector, li dus de Galle; si DeGaiie.
regnat apres luy son fis qui oit nom Athanaise XXI ans. — Item , l'an David
G et LIII defiat Alienon, li oncle Athanaise, ledit Athanaise, portant que
ilh voloit estre dus de Galle. Mains Athanaise ne le dobtat gaire; ains assem-
blat ses gens et assegat le casteal de Ysle , et affamat ens son oncle et ses
gens; si morurent dedens de fain. Et quant Athanaise oit pris le casteal,
se le tient a sien et mist ses gens dedens. — A eel temps estoit empereur de
Gresche Reboche, qui oit une filhe qui oit nom Ysaine, laqueile estoit tant
belle , que ons en savoit parleir de sa bealteit par tout le monde. Tant que la Exempium de Ysaine.
1 XXIX. B. dont notre chroniqueur estropie les noms propres,
* Eau. Cette forme est restee en wallon. Roque- car il est clair qu'il a voulu traduire 1'ancien nom
fort donne aive, crigue, aique, etc da Tibre, qui est Albula.
s On a encore ici un exemple de la maniere 4 Par erreur pour Achab.
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44 CHR0N1QUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
novelle en vient al due Athanaise, qui illuc envoiat II prinches et VI che-
valiers ', et mandat al empereur qu'ilh voloit faire de sa filhe damme sove-
raine de Galle, de quoy ly empereur fut moult lyes, et envoiat sa filhe a
Franco de Gaiie. due Athanais qui le prist a femme; se en oit I fis qui oit nom Franco.
— Item, l'an David CLVII1, morut Reboche, li empereur de Greche, qui
avoit regneit XL1I1I ans; si regnat apres luy son fis Castor XLI an. Item,
Tan David GLXI an, conquisent cheaux del ysle de Rode la mere, et le
tinrent par l'espausse de XXIII ans. — Item, l'an David CLXIII, oit grant
Gucre cmre Sune et batailhe entre Benadas *, le roy de Surie, et Abach, le roy d'Ysrael^ et
awec ly Josaphat de Judee. De eel batalhe prophetisat Mycheas , quant ons
le dut commenchier, que li roy Abach de Israel seroit ochis en la batalhe,
se ilh y aloit; et les faux prophetes disoient al roy et li fasoient entendant
le contraire, et qu'ilh auroit victoir. Quant li roy Abach entendit les II pro-
phetes, si adjostat plus grant foid a eaux, — assavoir sont : Andromars et
Verones, et enssi y fut Alarich — que ilh ne fesist a vraie prophete My-
Foi. 13 r«. cheas. Si fist Mycheas prendre et mectre en prison, et li dest qu'ilh I'ochi-
roit al revenir; puis avient que la batalhe se fist en avrilh 8 , en laqueile
batalhe Abach fut ochis et ses gens mors.
De eel batalhe escappat Josaphat, le roy de Judee, car ilh s'avoit * tous-
jours penneis 8 de faire le voloir de Dieu, fours tant qu'ilh astoit aloyes a
roy Abach d'Israel , qui oncques n'avoit creut ne ameit Dieu ne ses pro-
Guere em™ ie roy de phetes. Apres' Abach fut roy dTsrael son fis Ochozias. — Item, Tan David
C et LXIIII, oit I grant batalhe entre Benadas deseudit, le roy de Surie,
et Ocozias, le roy de Ysrael. Si fut Ocozias desconfis, et se s'enfuit; et
Benadas oit la victoir. Si soy relrahit tout belement en son pays; et gue-
riat li unc Fa utre dedont en avant mult fort. — Item, l'an David C et LXVI,
chayt li roy Ocozias d'Ysrael aval ses greis, si qu'ilh morut; si tient son
fis Joram le regne. En cesti an meismes morut Josaphat, le roy de Judee;
si fut ensevelis awec ses ancesseurs. Si fut roy son fis apres luy Joram ,
qui avoit a femme Atalie. la sereur ie roy Joram d'Ysrael. — Item, Tan
1 VI clers. B. ici sont de l'invention du chroniqueur.
1 Benhadad. Regum, 111, 20. * Ilh astoit. B.
1 Le promier jour d'avril. B. Surcette scene voir s 11 s'etait toujours applique. Pener dans Ro-
le chap. XXII da livre HI des Rois. II y est bien quefort
question de faux prophetes, mais les noms donnes
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LIVRE PREMIER. 45
David C et LX1X, en mois de marche ', morut Athanaise, li dus de Galle, DeducdeGaiie.
qui avoit regneil XXI an. Si regnat apres son fis Franco X ans. Chis fut
valhans hons et amat son pays, et governat bien ses gens. — Item, Fan Kiempium de Yborus.
David G et LXX, prit a femme li dus Franco Ydoneas, le filhe Agrippa , le
roy des Latins, qui estoit tres-belle damme; et en oit Tan apres I fis qui fut
nommeis Yborus. — Item, Fan David CLXX1I, le XVI I e jour de septem- HeKasfutnms.
bre, fut ravis Helias le prophete en unc chaire qui sembloit plains de feu,
etles chevals qui le trahoient le chare I'emportarent en I'aire; ettoutchu
veioit Heliseus le prophete, li disciple Helias, qui lantoist apres chu soy
retrahil en la citeit de Jerico, ou les aywes astoient tant ameres que nuls o>meniHeiiseu*fi$iie.
n en poioit bo ire; si prist de seil et les salat, en faisant son orison a Dieu; «*toientamers.
et les aiwes devinrent tantoist douche por boire \ Adont commenchat li
usaige de faire I'aiwe benoite, et encor le maintient Sainte-Engliese. —
Item , Tan David C LXX II II , morut Joram . ly roy de Judee; si regnat son Guere em™ u roy de
z» • •. * • '•**•*• Judee et de Sune.
ns apres, qui oit nom par trots nommes, assavoir: Ocozias, Azanas,
Aasaias, VII ans. Item, Tan David GLXXVII, oit grant batalhe entre le
roy Ocozias et le roy de Surie; si oit Ocozias adont vicloir, et fut ochis
Benadas, li roy de Surie. Si regnat apres son fis Achas XXII ans. — Item,
l'an David CLXXIX, morut Franco, li dus de Galle. Si regnat apres son DeducdeGaiie.
fis Yborus, qui encors estoit jovenes en l'eaige de IX ans; mains ilh oit
mambors, qui le governat tant que ilh fut en eiage por luy a governeir. Et
quant ilh fut a parfaite eiage , se morut enssi que vos oreis chi-aprcs. —
Item , Tan David CLXXXI, morut Ocozias li roy de Judee; si regnat apres Des royt de judee et
son fis anneis Joram. En eel an meismes morut Agrippa, li roy des La-
tiens, qui avoit regneit XL ans noblemen t; et apres lui regnat son fis -
Azelinus Silvius par 1'espause de XIX ans. — Item, l'an David GLXXXI1 ,
entrat en unc heremitaige Jonadad , li fis Recab * ; et fut li primier heremite Li promier heremite
qui entrat oncques en heremitaiges. En eel an fist Dieu florir par myracle
le corps sains Homeriens en Gresche, ou ilh gisoit. — Item, Tan David
C * If II" et HI, morut Joram, li roy d'Ysrael; si fut apres son fis Geu * roy, Geu roy ochwt tou.
qui regnat XX VIII ans : chis ochist tous ches qui astoient issus de la lignie w^u roy Achat.
1 Le IX* jour del mois de marche. B. * H est question de ces deux personnages da as
* Ici on lit dans le manuscrit B : Item l'an David le livre IV des Rots , ch. X , v. 1 5 et suiv.
CLXXl oit Ydoneas del due Franco J filhe qui fut * Le C est omis.
nommeis Yborus. Adont * Jeliu.
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46 CHRONJQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
le roy Achab et Jezabel, sa femme. — Item, l'an David GLXXX1I1I, fist
la royne Atalie de Judee ochire tous les enfans que son fis Ocozias avoit,
piteit grant dechu que dont li I astoit roy de Judee, qui oit nom Joram; desqueiles enfans ilh
escappat une qui ful nommeis Joias , qui drois heurs estoit del regne , et
Exempiumcomentjoia- astoit jovenes , et fut nouris de Joiadas, le soverain evesque de la loy. Et
das gardat 1 dea en- . . *■•■ ■ 1TI ,
fans de roy et le fist ones VII ans durant tient la royne Atalie le regne; et apres les VII ans
passeis, Joiadas fist faire le peuple homaige a Joias. Chis Joias, tent que
Joiadas li evesque vesquit, fut-ilh en cremeur de Dieu; et quant Joiadas
Foi. is > > fut mors , adont se mist Joias a maile a faire , et fut asseis contraire a Dieu ;
et retient pou des biens que li evesque li avoit assengniet et apris par res-
pause de VII ans et plus.
Sor l'an David CIIII** et VII , qui fut li an del origination de monde
IIII m III C et Xll ans, et li an del nativiteit Abraham MC et XXIX, et li an
del destruction de Troie II C 1111" et XIIII par I mardi , le deraine journee
de may, astoit Yborus, li dus de Galle, aleis chevalchier et cachier en unc
bois awec ses barons. Si vient en unc lieu plain sor une riviere que ons
nomme Saine, ou ilh faisoit moult beal et joli, fours tant que en plus beal
del plain avoit croliches ' et palus s que ons apelle lintes 8 : chu sont enssi
que mares. Si plaisit mult bien a due Yborus, et dest qu'ilh y feroit, por
Tamour del belle plache et del riviere , la fondeir I citeit en droit lieu ou
les mares astoient; et mandat ovriers de tout manieres a chu apartinant.
Yborusjy dus de Gaiie, Se le fist commenchier, et fut parfaite dedens II ans la apres; et le nommat
Paris. Lutesse, solonc le lieu ou ilh seoit, qui puis fat par grant nobleche Paris,
et encors est-el ajourd'huy, enssi que vos oreis chi-apres. — Item , l'an
David GXG1 , oit grant batalhe entre le roy Azelinus des Latiens et son
Guereentre le due de cusin le due Yborus de Galle, por tant que li roy Azelinus disoit que li
Latins.* 1 e *** M dus Yborus avoit edifiiet la citeit de Lutesse deseurdit sor sa terre, et que
il auroit la citeit; et Yborus li contredist. Si oit Yborus victoir contre
luy, et fut Azelinus desconfis; si enfuit sa voie, et perdit ll m hommes et
ses II fis Aurelius et Ascanus, et ne li demorat que unc seul fis, qui oit
nom Aventinus. — Item , l'an David C et XGIIII , morut Yborus ; si regnat
Dea dus de GaUe. apres son fis Antenoire XVII ans. Ghis Yborus , li dus de Galle, avoit III fis :
ly anneis, Antenoire, regnat apres en Galle; li altre, Franco, regnat en
1 Ce mot, resit dans le wallon, signifie mare, * Mot latin signifiant marais.
fondriere. Roquefort donne la forme croliz. * Landes?
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LIVRE PREMIER. 47
casteal del ysle; et li jovene, Melacons , regnat en Allemangne. Mains
Franco et Melacons ne $oy voirent mie tenir a celle parchon ; si se sont
alloyes ensemble, et commenchont a gueroier leur frere, qui bien soy de-
fendit. Si avient qu'ilh * oirent batalhe ensemble; mains Antenoir oit vie-
toir, et furent ochis Franco et Melacons.
Sor Fan David II C , morut li roy de Latiens Azelinus par une effoudre *
qui chayt seur luy et le tuat; si regnat apres luy son fis Aventinus XLI ans.
— Item, l'an David 11° VI, fondat Aventinus, le roy de Latien, I citeit
qu'ilh nommat Aventine; et ful edifiiel deleis Eneoch et les altres que ses Aveniinefuiedifiin.
devanttrains roys avoient fondeit, dont ilh en estoit plus de XI1II citeis
qui seioient pres Tune de l'autre; et se fist eorrir 1'aiwe d'entres les mon-
tangnes de Albanie parmy eel citeit. — Item, Tan David 11° et XI, morut
Geu 5 , ly roy d'Ysrael; si fut roy apres luy son fis Joatas, qui regnat VII ans. Desro>* disraei.
En eel an morut li dus de Galle Antenoire; si regnat apres son fis Yolens
XLHI ans. — Item, Tan David 11° et XVII, conquisent clieaux de Gypre la
mere, et le tinrent par 1'espausse de XXIIII ans. Et Tan David II C XIX
morut Elizeus le prophete, qui, apres sa mort, resuscitat unc mort homme, coment ueiiseusresu
si com Josephus le tesmongne. En eel pays ou li corps Heliseus gisoit, avoit Lon. omme * ptm
des larons habitans qui avoient I homme desrabeit; et apres 1'avoient ochis
et jetteit le corps de luy dedens la sepulture Heliseus , si com Dieu le vout;
et oussitoist que chil corps adesat' et tochat al corps le prophete Heliseus,
ilh resuscitat de mort a vie; et, quant li corps fut enssi resusciteis, ilh le
racomptata saingnour de la lerre; et oussi les hommes et les larons qui
I'avoient ochis , quant ilhs veirent le myracle , ilh soy relrahirent de male a
faire de eel jour en avant. Et deveis savoir que chil myracle ne avient mie
tantost que Heliseus fut trespasseis ; anchois avoit ja esteit en terre V ans ,
car chu fut Ian David II* et XXIIII. — Item, Tan David II- el XXVII , fist
ochire li roy Joas de Judee Zacharie, li fis Joiada, qui nouri 1'avoit. Et zachane fut ochis.
l'an David II C et XXIX morut Joas, ly roy de Judee; si fut roy apres luy
1 Si avint que tour Van David C et XCVIII tremeuse sc sert de 1'expression wallone alumyrc,
iUi. B. par exemple, plus loin a propos de la mort de Ro-
* £clair. Le mot se trouve avee ce sens dans mulus. Mais le root revient dans le recit de la mort
Roquefort. J'avais d'abord lu cffbndre, qui signi- de Tullus Hostilios, et iei le doute n'est plus pos-
fle ecrouletnent (voir le Glossaire de Gachet) , et je sible : e'est effoudre qu'il faut lire,
croyais d'autant plus pouvoir le faire que com- s Jehu , comme precedemmeot.
inunement, pour designer la chose, Jean d'Ou- * Adeser est dans Roquefort et signifie toucher.
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48 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
son fis qui oit a nom Amazias. — Item, Tan David II C et XXXV, oit mult
™ «♦ **- grant batalhe entre le roy Joas d'Israel et le roy Amazias de Judee ; et durat
u j e u r dee n erisr e a cL y e de matin, enssi que a heure de prime, jusques a tant que la nuit les departit
par forche; et la perdit chascon des II parties tant de gens que les amb-
dois parties s'enfuirent com desconfis; et demorat enssi la guerre par les-
pase de VI ans. — Item, Fan David II C et XXXVIII, fondat li roy des
De i a ciieit Ayeniines. Latiens Aventinus une citeit deleis la citeit de Eneoch, qu'ilh appellat
Aventinois , mains elle fut plus grande de Tautre \ car el tient III lieu de
circuitut. Celle an meisme fut neis Agirofle le philosophe. — Item, Fan
David II C et XLI, fut la grant batalhe entre Joas, le roy d'Ysrael, et Ama-
zias, le roy de Judee; et fut a cest fois Amazias desconfis '. Adont fist Joas
abatre grant partie des murs de Jherusalem, et prist unc grant tresor qu'ilh
trovat en temple Salmon.
En eel an meismes morut Aventinus, li roy des Latiens, en decembre*;
si fut apres luy roy son fis Procha, qui regnat XXV ans. — Item, Fan David
Exempium de jonas i|c e t XLVII ans , le XX e jour de may, fut Jonas le prophete jetteis en mere,
■»««• en laqueile ilh demorat III jours et 111 nuit en ventre d'une cete*; e'est I pes-
son que ons nomme altrement balayne, qui a chief de trois jours le vomist
et le rejetat sour terre tou vif. Et quant ilh fut enssi escappeis, si s'en allat
loiant Dieu; et vient en la citeit de Nynive, ou Dieu l'avoit envoyet, et la
annunchat-ilh la parolle de Dieu pour convertir le peuple, qui creoit en
faux ydolles. — Item, Tan David II C et XLIX, fondat ly roy Pallus de Surie
De* citeis dc sardainc JI citeis; si appellat Tune Sardaine 5 et I'autre Tharse. Desqueiles commen-
chat grant mals et guere entre le roy Pallus de Surie deseurdit et le roy
Ancises de Medes, porlant que ly roy Ancises disoit que Tharse seioit sor
sa terre, et le voloit avoir; mains li roy Pallus le defendit a lespee: et
durat celle guerre IIII ans. Et elie fin 6 en mois d'avrilh \ oit entres lesdites
II roys batalhe mult grant par-deleis ladit citeit de Tharse; mains ly roy
Le roy Anci^ at des- Ancises de Medes oit plus de cens, si oit-ilh la victoir, et li roy Pallus fut
confis le roy Pallus. r ° 1 1 J
1 Ce membre de phrase, depuis le mot mains , forme du latin cetus.
est supplee d'apres le manuscrit B. ' Sardona, B. Sardcs?
* Le tcxte portc descondis, qui doit dtre une 6 Pour en la fin, enfin.
faute de copiste. 7 Et al fin, assavoir sor Van David IF et LIU
5 Le derainjour de decembre. B. le seconjour del mois d'avriU B.
4 Le chroniqueur explique lui-merae ce mot
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LIVRE PREMIER. 49
desconfis; si que li roy Ancises de Mede oit la cileit, car ilh le gangnat a
1'espee, et li roy Pallus s'enfuit en la citeit de Sarde, et fist faire I gran feu
enqueile ilh s'ardit par desperanche. Enssi morut-ilh.
Apres le mort le roy Pallus de Surie regnat son fis Odesa XL ans : chis
recommenchat la guerre encontre le roy de Medes. — Item , Tan David II C
et LIUI morut Yolens, li dus de Galle; si fut dus apres Prian , son fis, et De a™ de Gaiie. .
regnat XVI ans. Item, Fan David II C LVI, en marche 1 , morut Amazias, li
roy de Judee; si regnat apres luy son fis Ozias LII ans. Chis fut mult pois- De om», ie boo roy
sans hons; si conquist grant avoir, car ilh metit tout sa vie sa cure en bien
faire ses terres ahanneir'. — Item, Tan David II C et LVII, conquisent cheaux
de Fenix 3 la mere. — A eel temps conqueroit fortement par-decha ly roy des De ro r d€ L » lin *-
Latiens entour luy sor ses voisiens , car ilh astoit si combattans et si redob-
(eis que les altres nations obeissoient toutes a luy, excepteit le roy de Galle.
Chis n'y obeissoit de riens a li, anchois se defendoit sy bien, luy et ses gens,
que li roy Procha mult le doubtoit; car ilhs astoient si poissans et si
vertueux, les Galliens et les Sycambiens, que chascons les dobtoit. Et DeX e ^^ hede%Sy
regnarent en chesti gran vertu jusques al temps Constant Cesaire, le fis
1'empereur Constantin le Gran, qui donnat Rome al pape et a Sainte-En-
gliese *. — Item, l'an David II C LXII1 , avoit en Gresce uns roy qui astoit
nommeis Gregus 5 , qui savoit mult de loys; si en donnat pluseurs aux Gri-
gois. Chis roy Gregus buit unc jour si grant planteit de vin, que ilh fut
tous yvres. Et quant ilh quidat alleir parmy son palais, ilh chaiit si roi- Ly t ^ r ^[*5J^ s f ** ^1
dement que ilh soy blechat mult durement, si soy cuchat dormir; et quant * neSfn *°np«y»-
ilh oit dormit et ilh fut desivreit 6 , si commaudat que chascons copast
toutes les vingnobles entour Gresche. — Item, l'an David II C et LXVI,
morut Procha li roy des Latiens, qui avoit regneit XXV ans.
Chis roy Procha fut mult poissans hons; ilh conquist dedens les XXV
ans qu'ilh regnat X liewes lout al tour de luy, et si en tenoit bien XX liewe, Foi. 14 y°.
ch'estoit XXX liewes qu'ilh tenoit tout entour de luy \ — Apres Procha, le
* Le quart jour de marche. B. 8 Lycurgue sans doutc.
* Labourer. Nous avons deja rencontre ce mot > * • Quoique l'expression ne se trouve pas dans
p. 19. Roquefort, je nc sais s'il est necessaire dc dire
5 Phenicie. qu'elle dquivaut a desenivre.
* Au temps de Jean d'Outremeuse, on ne son- 7 Cela revicnt a dire qu'il possedait primitive-
geait gucre a contester Pauthenticite de la dona- ment vingt lieues de territoire, et qu'en ayant
tion de Constantin. ensuite conquis dix, il en avait alors trcnte.
7
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SO CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
LyroyAmeiiusdeLft- roy des Latiens, regnat son fis Amelius LX ans. Chis fist mult de mer-
d° pa~s? qui8 mu velhes en son temps ; car se Procha, son pere, fut valhans, chis le fut asseis
plus, et conquist tant de terre qu'ilh tenoit plus tot 1 seul que toutes les
altres nations ne fasoient ensemble; et se n'avoit nation en tout Eur op que
ilh ne rendist tregu a luy, fours que les Gallyens et Sycambriens. — Item,
Lvroy.imedcpavsde l'an David II C LXVIII, commenchat promier le royalme de Machedoine;
Macoedoinecomaien- • !•.■• • • ir * * v vmir a ■
chfttachitemps. si en fut li promier roy nommeis kereamus, et regnat AAV III ans. A eel
Desquattresprophetes temps astoient ches prophetes Ozie, Amos le peire Ysaie, Jonas et Nayum * :
et Jonas ei Naym. s i prophetizoit li uns en Judee , ly altre en Israel et les altres altre part. —
DeGaiie. Item , l'an David II C et IHI", morut Priant, li roy de Galle; si regnat apres
Les mature* et pesans son fi s Yborus XXXII; et Fan apres furent promirs troveit en Gresche les
furent promier tro- *
vci »- mesures et les pesans. Item , Fan David II C HII" et II , cachat ly roy Ami-
Coment Mars engross* t >• ■ * t * *, • #» « • m*» •« • « ■ w\ * *
Rea,auiestoit?irgue, lius de Latiens son frere , qui fut nommeis Mimtoir % de son regne. Portant
muius e* n Remus. °" que chis Minitoir avoit une tres-belle filhe virge, qui oit nom Rea, se le
fist entreir en temple de Mars, leurs dieu, et toute nue devestire; et Mars
li dieu couvertement et sponsement 4 ghut s awec charnailement; se Ten-
Romeias et Remus, grossat de dois enfans marles, dont li promirs nasquans fut nommeis Rome-
lus, et li derains fut nommeis Remus; de ches II germeais * parlerons chi-
apres. Mains totvoie 7 la mere fut enfoiie tout vive por eel inceste sorlonc
la loy, et li pere Minitoir fut ban is, car ons ne le pot tenir : ch'estoit I gran
clers 8 ; si fist chu por chu qu'ilh savoit bien que elle conchiverort enfans de
Meryeihe comment un e grant valeur. — Lesqueiles germeals, quant ilh furent neis, furent al com-
ii eofans. mendement de roy jetteis en dois bussons qui astoient al entree d'unc gran
bois sor la riviere de Tyberis , et la les alaitat une leuve par VIII jour et
plus. Adont les trovat une pastureals , qui fut nommeis Faustulus , qui les
De ia belie Laurenche portat en son maison a sa femme, qui avoit a nom Laurenche, qui les
dis enfans". ro ** nourist et alevat '. Ceste Laurenche estoit la plus belle femme de tout le
pays ; mains elle estoit tout commune a tous hommes por argent gangnier ;
1 Tot pour lout, plus a lui lout seul * Jumeaux. Encore un mot reste dans notre
1 Nahum. wallon.
8 Le mot est tres-lisiblement ecrit II s'agit ce- 7 Toutefois.
pendant de Numitor. * Ce membre de phrase et le suivant doivent
4 Maritalement, ou pcut-etre volontairement. s'appliquer a Amulius, non a Numitor.
' Pour jut, coucha, que nous avons deja ren- * On dit encore en wallon aelever pour clever.
contre, p. 22. Alever, dans Roquefort, a un autre sens.
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LIVRE PREMIER. 81
et gangnat tant que ch'esloit mervelhe. Et por le raison quelle estoit si com-
mune, se voisiens lapellarent leuve, et sa maison lovetrie; a laqueile prisent
leur nom toutes les maisons ou femme se laissent congnoistre comraonne-
ment por argent.
Enssi furent Romulus et Remus aleities de dois leuves : promier de la
beiste, et apres de Laurenche; enssi que nos le vos avons deviseit. le clisl-
Martin, le penitanchicr del pape, en ses croniques, et Tytus Livus et plu-
seurs altres; et dient que ons le troive a Romme enssi en escript, en mar-
bre et altres pires, que ons le truve la a perpetuel memoire. — Item, Tan
David 1I C I1II" et III, conquisl li roy des Latiens Amilius tout Allemangne.
et le metit en tregut, et demorat en tregut bien V ans. — Item, Ian David
1I C 1111" et V, morut Jheroboam, le roy d'Ysrael; si fut apres luy roy son
lis Zacharie VI mois, puis fut ochis par unc priache, qui fut nommeis
Manachen ': si regnat apres Sellum, son fis *, unc mois, qui fut oussi ochis
par le prinche deseurdit qui se metit en la royalme d'Ysrael, et le tient
X ans. — Item, Tan David II C IIII" et VIII, fondat li dus de Galle Yborus
1 casteal en Galle, et lapellat Flexis s . — Item, Fan David II C XCI, alat li
roy Amilius en la Grant-Bretangne por conquesteir, el le conquist, se le
mist en tregut. En eel an meisme, edifiat li roy des Latiens une citeit deleis
les altres deseurdit, et Fapellat Romeck, et apres encor I altre. — Item, Tan
David II C XCVI, al$t li roy Amilius des Latiens en Galle por couquesteir;
mains ilh fut trois fois desconfis dedens I an. En eel an meisme, conqui-
sent cheaz de Egypte la mere. En eel an morut ly roy Manahen d'Ysrael ;
si fut roy apres luy Facheas 4 , son fis, qui regnat X ans. — Item , Tan David
Ill c fut eslus a roy d'Egypte I prinche, qui oit nom Bochoris, qui instablit
les lois en son regne. Et II ans apres, morut Yborus, ly dus de Galle, en Foi. «r*.
une batalhe. Se le tuat Amilius, li roy des Latins, qui astoit Tan devant
raleit la seconde fois en Galle por conquerre : si fut V fois desconfis , et a
la V e fois, combien qu'ilh fust desconfis, fut ochis li noble dus Yborus, et
Amilius en son pays soy retrahit: si jurat que jamais ne rentroit en Galle,
car chu estoient gens esprovees. — Apres la mort Yborus, fut dus de Galle DedusdeG«iie
son fis Ector, qui regnat L ans. En eel an meisme esposat li roy de Latins
1 Manahem. Lc m^mc mot est bien ecrit sans c * S'agit-il ici de La Fleche, en latin Flexia?
quelques lignes plus loin. 4 Phaceia.
* Ses freres. B.
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52 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
Amilius Oderne, )e femme li dus de Galle Yborus, et mere a due Ector de
Galle, en confirmant la pais entre le roy et le due. — Item , Tan David III C
Dei agneai qui pariai. et III, le III e ! jour de may. oit en Egypte I angnel qui parlat tout le jour
jusqu'a le nuit, et disoil chu que ons ii demandoit; et puis a la vespree ilh
morut, dont ilh en orent par toute Egypte grant mervelhe, et altre part.
oiimpiade; queue daute — Item, 1'an David III c et V fut promirs faite et instaublie en Gresche la pro-
mier oiimpiade : ch'est une daute qui conlient IIII • ans de Tonne a 1'autre;
et estoit eel oiimpiade extrait d'onne fieste qui fut la meisme instablie que
loutes les gens del regae de Gresche alloienl joweir de diverses jous en
1 citeit qui astoit nominee Helide. Si fut a eel temps en Gresche lassie la
daute de la destruction de Troie, dont ilh en Gresche 8 usoient por leur vic-
toir, et prisent dedont en avanl aux olimpiades leurs dautes, enssi que nos
prendons en Franche aux indiction, dont ilh est XV *. — Item, eel fieste fut
appellee partout oiimpiade, portant que iy temple seoit ou ons oroit Ju-
piter en la hault montangne de Olimpe, deleis la citeit de Helide deseurdit.
Et fut chasconne de IIII ans, enssi com nos avons dit; et ches IIII ans se
ne font qu'une seul oiimpiade. Et deveis savoir que ons compte les oiim-
piade en teile maniere le promier an de la promier oiimpiade, le seconde
an de la promier oiimpiade, le thier an de la promier oiimpiade, le quart
an de la promier oiimpiade; el enssi sont-el com p tee toutes les oiimpiade
l'une apres Fautre jusqua chi. — Item, Fan David 111° el VI, astoit aleis
joweir li roy Amilius des Latins en la citeit de Remech, et la engenrat-
ilh en corps de sa femme, le XV jour de may, a une fois II enfans, lesqueiles
furent al chief del terme neis en une altre citeit qui oil nom Romech; et,
quant li roy veit que sa femme Oderne estoit delivree de dois enfans marles,
se nommat le promier qui nasquit, solonc la citeit de Romech en laqueile
ilh astoit neis , Romelus; et Fautre ilh nommat Remus, solonc le nom de la
citeit deRemeche, ou ilh furent engenreis. Ches dois enfans, Romelus et
Remus, furent freres a dus Ector, le due de Galle, de part leur mere; si
furent noun's et alleveis sique fils de roy. — Item, les altres Romelus et
Remus, qui furent enfans de Mars leur dieu engenreis, si com nos avons
1 Le secon. B. dentc, que je corrigc d'apres le man user it B.
a Le raanuscrit porte par erreur III. Plus loin * Cela veut dire que Fepoque ou le chroni-
on trouve IIII. qucur ecrivait, repondait a la 15" indiction.
* Troie dans noire lexte. Cest une erreur evi-
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LIVRE PREMIER. S3
(lit, en corps de Rea, la filhe Minitoir, frere a roy Amilius, sont ens en
I>o is nouris de Laurenche , le femme al pastour, dont nos parlerons quant
temps list f .
Sor Tan David III C et VII, ful ochis Fachias, le roy d'Ysrael; si regnat
1 altre apres, qui enssi astoit nommeis Fachias, qui estoil fis Romelie,
I prinche de Judee, liqueis regnat XXIII ans. Chis roy Fachias ne fut pais
hard is, nebien gardant son pays: car a son temps conquist ii roy de Surie
Obesa une grant partie d'Ysrael , et menat la lignie Gad en chativison *, et
la lignie Ruben ensi, et presque la motie de la lignie Manasses, qui habi-
toient on It re le Hum Jordan. — Item, Tan David 1I1 C et VIII, morut Ozias, Ii Eiempium comment
roy de Judee, par maladie de la lepre, c'on dist altrement meselerie; et fut i<p»*-
si batus de eel maladie, por tant qu'ilh voloit a Dieu faire oblation, qui par-
tenoit del faire al prestre de la loy; et Dieu, por sa presumption qu'ilh vit
en li, le balit de chesti maladie, voiant le peuple 5 qui presens astoit a faire
le oblation al temple Salmon; et por eel mefiait ne fut mie ensevelis awec
ies altres roys; ains fut ensevelis d'altre costeit, et. apres sa mort, fut fais
roy son fis Joachim, liqueis regnat XVI ans : chis edifiat a temple Salmon
une belle porte. — A eel temps astoient en grant auctoriteit II prophetcs : De \$ai»s et j<*i.
Ysaias et Joiel. Item, Tan David 1 1 1° el XI1II, oit grant batalhe entre le
roy Joachim de Judee et Facheas, le roy d'Ysrael; si fut Facheas desconfis
et ses gens ochise pres de la motie. — Item, Fan David II I c et XIX, fondat
Joiachim I citeit que ilh nomat Joac. • — Item, l'an David III C XXIIII, morut Foi. is v.
Joachim, li roy de Judee; si regnat apres son (is Achaz XVI ans : chis Achaz DercydejudeeAchw
fut mult malvais et ydolatres sor tous les roys qui devant luy avoient esteit qm
en Jherusalem, car ilh fist cloire le temple Salmon, et defendit que nuls
n'y fesist oblation ne sacrifische a Dieu. — Item, l'an David III et XXV,
transmuat Mars, le dieu des balailhes et li dies des Latins, les figures Ro-
melius et Remus en la semblanche des figures de Rom el us et de Remus, les Grant merreihe com-
enfans le roy Amilius, tout entirement de corps, de vestimens, de parolles, ^{ Marti °y lrant -
de sens et de tout; et se les fist demoreir awec le roy une nuit en dormant,
si que le matinee ilh furent ansi adeistre * a la court que doncque fussent
1 Sans doute pour iert, sera. Le man user it E * C'est-a-dire : a la vue du peuple,
porte : quant tempt et lis en serat. 4 Propre a quelque chose, habile a. Voir Ro-
1 Captivite. Chctifvotion dans Roquefort. quefort, v° adestre.
r
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U CHROMQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Ies altres. Et les aultres, qui astoient drois fis de roy, ilh mist demoreir
a wee Laurenche, en le maison le pastour, ensyment * transmueis. Et chu
fist— ilh portant que li roy Amilius devoit morir, qui morut Ian del coro-
nation le roy David II1 C et XXVI.
Apres Amilius furent fais roys les dois germeais Romelus et Remus;
mains Romelus, por tant qu'ilh nasquit devant, voloit eistre roy tot seul. Si
Romdus eocachat son encachat son frere, et fist crier I bam par tout son remrne, qui poroit
freire Remus. • iiii»»»ii s\ r% *•
Remus son frere ochire , ilh le feroit nche home. — Quant Remus entendit
teiles noveles, si s'enfuit en la terre le due de Galle por tant qu'ilh n'astoit
point en la subjettion le roy des Latins, et vient a Lutesse; si trovat Ector,
le due son frere, car ilh quidoit estre le fis al roy Amilius de Oderne, la
mere Ector *, et li comptat comment son frere Romelus l'avoit decachiet
por tant qu'ilh voloit avoir la terre tout seuls. Et Ector li respondit : « Beais
)> frere, ne vos esmayes pas, car je vos donne tout la terre de Champangne,
» qui est uns beais pays. » De chu le remerchiat mult Remus. Si habitat en
Champangne, ou ilh avoil des vilhes asseis; mains Remus fondat 1 noble
coment Remus ie frere citeit qu'ilh apellat Rains soloiic son nom, etc'estRains en Champangne. qui
Romulus, fondat Rains * f . . ___ vv|rni . . • *T •
•n campangne. fat parfaite 1 an David 1II C et AAVIII , le quart jour de marche, qui fut ly an
del origination de monde IIII m 11 U c et LU ans. — Et quant elle fut parfaite,
si sen alat vers Romulus, son frere, proyer et requerir qu'ilh li vosistde-
livreir peuple por puepleir sa cileit; mains, enssi qu'ilh venoit al entree de
Eneoch, le recognuit I pastureal qui la gardoit les beistes, se prist I ros-
teais *, se le ferit et le tuat. En teile maniere fut Remus mors; mains, quant
Romelus le soit, se le fist ensevelir, et puis alat contre son commant, car
ilh fist le pastureal pendre. — Ors vous avons deviseit tout le faite et l'en-
genrement de Romelus et de Remus , et leur nascenche et leur estat tant que
Romelus fut roy, enssi que Tytus Livus et Martin, le penitanchier le pape,
le devisent en leurs croniques. Mains Orosius dist ensi , excepteit qu'ilh ne
parolle nient de dois germeais que ly roy Amilius oil de Oderne, sa femme;
ains conclut a chu que, sor Tan David III C et XXVI deseurdit, Romelus et
Remus, qui, del heure qu'ilhs furent percrus grans, devinrent laurons et
robeurs de bois, assembleit se sont*, I jour qu'ilh seurent que li roy Amilius
1 Egalement. core rusteai en wallon. Plus loin cependant on trou-
9 Comp. avec ce qui est dit plus haut p. 52. vera rosleal pour designer le gril de saint Laurent.
3 Ge root doit indiquer un rateau, qui se dit en- * Us ont r&tni, ils ont attire* a eux, etc.
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L1VRE PREMIER. 55
devoit aleir cachier en bois ou il^is habitoient, tous les pastureis et larons
qu'ilh porent avoir; si assalhirent le roy Amilius, qui avoit leur ay on, le
pere de leur mere, qui fut nommeis Minitoir, banit, et Rea leur mere en-
foye tot vive et jetteir el rivaige ' del Tyberis, enssi que dit est; se l'ochi-
rent, et se soy fisent roy, et remandont leur ayon et le remisent en regne.
A eel temps astoit li peuple des Latins si grans et si poissans et si orgul-
heux, qu'ilh ne soy poioit recognostre; et s'avisarent I jour que presque
toutes les nations de monde astoient en leur subjection, et que Romelus
astoit li soverain roy de monde et li plus poissans, et par la nobleche de ly
ilh devoit bien monteir en honneur. — Adont de common assent et acorde
de tous, ilhs fisent uns empereur de leur roy, qui avoient esteit simples Li JJ^'^ l '" | SJJJJ|} r
roys des le temps Saturnus, devant la destruction de la grant Troie et jus-
ques a Romulus; mains Eneas n 'astoit mie de eel nation, ains astoit F©i.i6r».
Troians, si que Romelus astoit dequendus de Eneas, et partant tous les
empereurs de Romme nommat-ons Eneade; et fut Romelus li promier em-
pereur fais de part ses gens, enssi que dit est, et IIII ans apres chu qu'ilh
oit esteit roy, assavoir Fan David IH° et XXX, et regnat com empereur
XXXVI ans. — En eel an meisme morut Facheas,ly roy dTsrael, el fut
fais roy apres son fis Ozee qui regnat VI ans. — Item, l'an David III C et
XXXI1II, fut li peuple de VII lignie d'Ysrael, qui demoreis esloit de X
lignies, mis en chaptivison en estrangnes terres; si leur tollit leur terre de
promission, que Dieu les avoit donneit, ly roy de Surie Salmanazar, por
tant qu'ilh n avoient mie bien ten us ne wardeis les oommans de la loy que
Dieu les envoiat par Moyse. A eel temps astoit Thobie, qui astoit de la DeThobi*.
lignie Neptalim; et avinrent adont toutes les histoires qui sont trovees en
ses fibres, qui bien sont a croire. A eel temps commenchat une grant guerre
entres les Grigois et les Mesines * qui durani longtemps.— Item, Tan David
1II C et XXXVII, plovit sane en Ysrael III jours. Apres, Tan David III C et XL,
morut Achas, li roy de Judee; si regnat apres son fis Ezechias XXVIII ans :
chis roy Ezechias fut bons et justes et religieux, et fist rovrir le temple
que son peire avoit fait cloire, et commenchat 1 a faire les sollempniteis
qui astoient contenues en la loy. — Item, l'an David III et XLIIII, fut
1 Et eaux getit al rivaige de Tiberis. B. * Comtnandat. B.
* LesBfess&iiens. Merinos dans le manuscrit B.
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Leeoaneaebeneatde
RoauM par Rosa-
56 CHRON1QUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Romelus en la terre de Gresche, et le volt conquerre, mains ilh ne pot a
cest fois.
Sor Tan del coronation le roy David 1II C et XLVII, commenchat Ro-
■«*• """ melus a edifier la grant citeit de Romme; si mandat ouvrirs par tout
Europ, et assemblat toule la mateire que ilh besongnoit a son ouvraige;
se fist encloire de murs toutes les citeis que ses devantrains avoient fon-
deit. dont la plus grant astoit Eneoch, que Eneas fondat; et toutes les
altres qui la altour astoient fondees, por tant qu'ilh gisoient toutes en unc
reon f a une liewe ou demy pres, et si en estoit par compte XXXVI citeis,
encloyt ou fist encloire Romelus; et en fist une seul citeit, et leurs tollit
leurs nonis, quant elle hit parfaite, et appellat solonc son nom celle citeit
Rome,et encorat-ilh a nom Romme. Mains nosen parlerons plus place-
ment a la perfection, quant ilh serat parfaite, car ilh mist XII ans al faire;
si revenrons chi-apres a la mateire. — Item , I'an David III C XLVIII instablit
L«»prMBirt9ematears. Romelus des senateurs, cent chevaliers des plus saiges et plus souflissans
qui fussent a Romme. Ches senateurs astoient al maniere de juges, enssi
que les hommes I'empereur et de son conselhe : si en fut cent a cest fois.
— Item, Tan David, 1II C XLIX, prisenl les Grigois la citeit de Mesine par
leur forche; et, Tan David I1I C et LI, amennat li roy de Surie Salmanazar
unc gran oust sor le roy de Judee. Se li envoiat ly roy de Judee Ezechias,
. quant ilh le soit venant, III C besans d'argent et XXX besans de fin or, et,
parmy chu, ly jurat li roy Salmauazar a tenir pais a tousjours; mains ilh
avient qu'ilh morut en Fan meismes; si regnat apressou fis Sennacherib
qui ne vol point tenir la pais que son peire avoit faile et juree al roy de
Judee Ezecias, anchois envoiat sour luy 11 de ses prinches a grant gens.
Quant ly roy de Judee soit que li roy de Surie le voloit guerroier, si soy
esmaat* mult, et awist a luy envoiil unc gran tressoir, si ne fuisl Ysaias le
prophete, qui mult le reconfortat, et li dest que li roy de Surie seroit
ochis en brief temps, et ilh fut enssi par ses II fis, por quen ' li oust se
partit de Jherusalem et s'en ralat en Surie : enssi fut en pais li roy Ezechie
de Judee et delivreis de ses annemis. i — Item, Tan David IU C et L1I en
1 Reon pour rayon, avec le sens que lui attri- * Pour esinayat, cooformcment a la forme em-
buerait l'idiome moderne, me parait impossible, ployee plus haul : ne cos esmayes pas.
et je crois quil Taut mieux y voir le mot rond, * Ces deux monosyllabes nont pas toujours le
pour a la ronde. mcme sens-, ils signifient ici : c'est povrquoi.
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LIVRE PREMIER. 57
marche % morut li dus Ector de Galle , que ons nomme ors Franche, liqueis De due de Gaiie.
avoit regneit par l'espause de L ans, et n'avoit faite riens dont ons pusse
parleir, fours que bo ire et mangier. Apres Ector regnat son fis li anneis qui
oit nom Ylion, qui regnat XL ans. Chis Ector oit III fis : li anneis fis oit
(nom) Ylions *, li secons Nay, li thirs Ector, et oit II filhes mult belles qui
furent nommeis Oderne et Sybile, qui morut sens maf ier 8 , et Oderne oit le
roy Gaffre d'Affrique. Et Ector et Nay priont a leur frere Ylion , le due, que
ilh leur donast terre, et ilh leur donnat. — Quant les II freres orent terre, Foi. le**.
ilh y alarent, et fondat Ector en son promier an une noble citeit; et, quant
elle fut fondee, si §oy avisat comment ilh I'appelleroit. Eossi que ilh se
cooselhoit a ses hommes de donneir nom la citeit, atant est venus unc
oyseal vollant qui soy assist sor une des toretes * des murs, et y demorat par
l'espasse que uns hons poiroit aleir unc bonier de terre, puis soy levat et
vollat III tours entour la citeit, et apres soy remist sor la torete. Quant
Ector le veit, se dest que $a citeit seroit nominee solonc le nom del oysel
qui la astoit venus, car ilh avoit aporteit le droit nom a la citeit. — Adont
demandat Ector comment ly oyseal astoit nommeis ; et son fakeniers s li dest
que chu estoit unc Iymoge *, et dest Ector: « Je velhe que la citeit soit
« nominee Lymoge. » Enssi fut Lymoge fondee, et par le rason deseurdit Ector deGaiie fond»t
nominee Lymoge, et encor ly nom-ons. — Item, Ir altre frere, Nay, fondat * CI "' e ymoge '
unc castel qui avoit une mult belle grosse tour, et le nomme-ons le tour
Nay; mains puisdit 7 fondat la uns altre prinche une citeit qui fut nominee
la citeit de Tornay, et encor le nom-ons Tournay, jasoiche que pluseurs Tumay.
gens vuelent dire que Tournay at oyut pluseurs nommes, anchois que ly
nom de Tournay, sauf le grasce de tous cheaux qui chu voroient dire, car
chu fut le promir nom que ilh oit, et ne li fut oncques oisteis ne cangies.
— Item, Fan David 1II C et LIIII, oit li roy Ezechias de Judee une grant
maladie dont ilh quidat bien morir; si fist a Dieu son orison que Dieu li
vosist encor sa vie relongier, car ilh n'avoit nulle heure de son corps por
1 Le secon jour de marche. B. • Je n'ai pu decouvrir d'oiseau de ce nom. Lin-
' Ge membre de phrase, depuis et inclus : qui nee emploie le mot limosa pour designer les Ichas-
regnai, est supplee" d'apres le manuscrit B. siers. Est-ce d'un animal de ee genre qu'ii est ici
* C'est-a-dire eelibataire. question?
4 Petites tours ? 7 Ensuite. Puistedil dans Roquefort.
* Fauconnier.
8
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38 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
lenir son regne apres luy: et Dieu, portant qu'ilh estoit plains de grant
E«^mpiumcomentDieuloialteit et de grant religion, li mandat par le boche de prophete Ysaias
chi.s xy ans por sa que sa vie seroit relongie XV ans. Et portant qu'ilh en fuist plus segure,
ilh fist retourneir arier le soleal XV heures, car ilz astoit heure de none; si
retournat li soleal en Orient. — Item, le UH e an apres, assavoir Fan David
III cens et LVI1I, oit li roy Ezechias unc fis qui oit nom Manasses. — Ors
est raisons que nos devisons de la perfection de la citeit de la grant Romme,
qui fut parfaite chi endroit.
De Romme comment Romme la grant fut fondee , enssi que nos vos disons, sor Tan del origi-
elle fut parfaite. ^.^ ^ ^^ jjj^ jjjje jjjj^ eJ; ujj qu ; fu j jj ^^j deluve ^ „.
1I C et XLII ans, qui fut Ian del naliviteit Abraham M et III , qui fut Tan
del nativiteit Ysaac, le fis Abraham, M et II C , et Fan del nativiteit Jacob, le
fis Ysaac, MC et XL, et l'an del nativiteit Joseph, le fis Jacob, M et LI1,
et Fan del destruction del grant Troie IIII C et LXV, et Fan del coronation
le roy David 11I C et LXV, le thier an de la XII1 C olimpiade, al XX e annee
del coronation le roy de Judee Ezechias, le fis Achas; le promier jour de
junne, fut tout parfaite et sollempnisie solonc leur loy, et fait grant Geste,
et fut apellee Romme apres Romelus, et fut faite le chief chatedrail de lout
Le fachon de Romme. (empire de Ro in me. — Ors est raison que nos devisons la fachon de
Romme, solonc chu que Estodiens le dist en ses croniques : et promirs
ilh parolle des thours qui sont en la citeit, dont ilh fut III et LXI, et y
sont encors. Etvosdirons chi les coises ' que ilh fist a Romme*, et qui furent
et sont faites, le temps succedant, par Romelus et ses successeurs apres
luy. Ilh fist tout promier venir habiteir a Romme, por peupleir, les nobles
linages que vos oreis, assavoir : les Sabinois, les Albinois 8 , les Campinois
les Lucans et tous les nobles d'Ylaile a wee leurs femmes et en fans.
Des thours de Romme. Ors revenons a nostre matiere. Ilh oit altour de la citeit de Romme trois
cens et LXI thours faites sor les murs, fortes et belles, tout a la circuit. Et
tenoient Ie$ murs XLII milh de circuite, sens ens compteir trans Tyberim
et le citeit Leonine, et tout ensemble ilh lenoit XLII mil *. — Et dist Tytus
Livus, en prolonge de ses croniques ou ilh parolle de Romme, que al temps
1 Choses. Roquefort donne coses. tanois, les Celemens, les Sicarwis et les Tamartnoit.
• Ilh fist doit avoir ici Ic sens d'un verbe im- 4 Le texte du manuscrit B donne, comme le
personnel. n6tre, deux fois le chiffre XLII, oe qui doit '6tre
■ Le manuscrit B ajoutc : let Tusculans, les Poli- une erreur.
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LIVRE PREMIER.
59
de povreteit, c'est-k-dire quant Romme n'astoit mie si riche, ilh n'estoit
nulle aultre lien plus confirmeit en bonteit ne en bons ex em pies, ne plus Foi.nr.
riche de suffissanche que Romme astoit. Et quant de toutes chozes ilh
avoit moins, tant moins de convoitiese avoit; et quant elle devient riche,
elle devient avarichieux et luxurieux, et rebelle encontre son droit sain-
gnour.
Apres, sont les portes de la citeit de Romme teiles : promirs,le porte Dei pones deRonme.
Carpane *, que ons nom maintenant le porte Sains-Poul , deleis le sepulture
Remus % le frere Romelus; item, le porte d'Apie 8 , qui vat a Domine, quo
vadiSy ad cathecumbas *; item, le porte de Latins 8 , deleis laqueile sains
Johans ewangelist fut cuys en oile ; item , le porte Asineuse • de Latram ; item ,
le porte Metrona 7 , la li rive influit en la citeit; item , le porte con dist Leni-
cana % que ons dist que c'est la plus grant, et est maintenant dite la porte
Sainte-Crois; item, la porte c'on dist Laurenche oil Tyburtine, que ons
1 Jean <f Outremeuse a sans doute voulu desi-
gner la porte Capene. Mais cette porte, qui appar-
tient a la vieille enceinte de Servius Tullius, se
trouvait plus pres de la porte Saint-Sebastien que
de celle de Saint-Paul, qui s'appelait precedem-
ment porte d'Ostie. Notre chroniqueur a puise* la
plupart de ses renseignements sur Rome dans une
relation anonyme du XIII 4 siecle, publiee deux sie-
cles plus tard sous le titre : De mirabiUbu* Roma.
Je n'ai pu me procurer que le texte insere par
Montfaucon, dans son Diarium Ualicum, auquel
je renvoie.
1 Ce doit 6tre une allusion a la pyramide de
Caius Cestius, qui peut-^tre, a Tepoque de notre
chroniqueur, passaH pour e'tre le tombeau de
Remus.
* Porta Jppia, aujourd'hui la porte Saint-Se-
bastien. Elle donnait sur la voie Appienne.
4 11 s'agit de la chapelle a laqueile s'applique
la touchante legende de l'entrevue de saint Pierre
avec Jesus-Christ. CeTiant a un moment de fai-
blesse, le chef des apdtres fuit de Rome pour
echapper au martyre. A l'endroit ou la voie Ap-
pienne se bifurque pour former la Via Ardea-
tcnsis, il rencontre le Sauveur portant sa croix, et
lui demande : Seigneur ou aUez-vou* (Domine, quo
vadit)? — A Rome pour y Stre crucifie (Romam
rcdeo ut crucifigar), lui repond son maitre. Cette
chapelle se trouve a peu de distance des cata-
combes de Saint-Calixte, qui sont a la droite de la
voie Apienne.
1 La porte Laline, ainsi nommee parce qu'elle
conduisait dans le Latium. A droite de cette porte
se trouve en effet l'eglise de Saint-Jean in oleo.
• Porta Atinaria y a cause des nomb reuses bites
de somme qui y passaicnt pour transporter des
legumes sur le mont Celius. Elle se trouve dans le
voisinage de la basilique de Saint-Jean de Latran.
1 Plutdt Metronia. Cette porte, qui existe en-
core, est situee entre les portes Asinaria et La-
Una. Par li rive qui influit en la citeit, Jean
d'Outremeuse designe la Maranna, ruisseau qui
entre en ville tout pres dc la et va se perdre dans
la cloaca maxima.
• Ce doit 6tre la porte Majeure, formee de deux
arcs contigus donnant acces aux voies Labicane
ctPrenestine. J'ignore si elle a porte jamais le nom
que lui attribue Jean d'Outremeuse; mais il est
vrai que l'eglise Sainte-Croix en Jerusalem n'en
est pas eloignec.
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60
CHROMQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
apelle le porte Saint-Loren * ; item , le porte Minientane f , qui vat a Sainte-
Agnes; item , le porte que ons dist Sal aria, qui vat a Sainte-Sabine 8 ; item ,
la porte Ponciane \ qui siet deleis 1'engliese Sains-Felix en Pincine; item , le
porte Flamy ne 5 , qui siet a Sainte-Marie de Peuple, et vat-ons par la a pont
des Chevaliers; item, la porte Colin *, qui siet vers le temple Adrian l'em-
pereuretversle pont Sains-Pire 7 ; item, en la citeit trans Tyberim* sonttrois
portes, el en la citeit Leonine ' trois oussi. Chi sont les portes de Romme.
Les plus grans mons qui sont a Romme sont cheaux : ly mons Aventin,
que ons dist Sainte-Sabine; mons de Cavals l0 , c'on dist a Sains- A lexis: mons
Sains-Estiene !l ; mons de Capitol "; mons de Gran-Palais 1 '; mons de Sainte-
Marie le Maiour "; monsde Rivelais ", ou Virgilhe fut sachies en la corbilhe.
De S pon$ de Romme. — Item, les pons de Romme s'ensiwent : li pons c on dist des Juys , ly pons
Sains-Fabiane , li pons des Senateurs, li pons Valentin, li pons Theodosii,
li pons Sainte-Marie l6 .
Des mons de Romme.
1 La porte qui conduit a Tivoli (Tibur).
1 Ou plutot Notnentane. Notre chroniqueur
ecrit Minientane, sans doute conformcment au
principe qui plus haut lui a fait emre Minitoir
pour Numilor. La porte Nomentane est aujour-
d'hui la porte Pie.
' Jean d'Outremeuse fait errcur. L'eglise Sainte-
Sabine est sur le mont Aventin, dans unc direc-
tion tout opposee a cellc de la porte Salaria. II
faut probablement lire : qui va dans la Sabine.
CesX par la porte Salaria qu'Alaric entra dans
Rome.
4 Porta Pincia, situee sur le Pincius. II est
probable que le chroniqueur a voulu designer
1'eglise des percs capucins, appelce Sainte-Marie
de la Conception ct ou repose le corps de saint
Felix.
* La porta Flaminia s'appelle aujourd'hui la
. porte du Peuple. L'eglise Sainte-Marie forme
un des coins de la place sur laquelle ouvre cette
porte : Quant au pont des Chevaliers, Jean d'Ou-
tremcuse a voulu sans doute indiquer l'ancien
pont Miluius, aujourd'hui ponte Molle.
• La porte Colline est bien connue, mais elle
n'oceupaR pas la position que lui assigne Jean
d'Outremeuse, et se trouvait dans la vieille en-
ceinte de Servius Tullius. La seule porte qui se
trouve dans la direction indiquee ici est la porte
Castello, muree depuis longtemps; mais ellc est
dans la cite* Leonine, que le chroniqueur semble
exclure de cette enumeration.
7 Sous ce nom , Jean d'Outremeuse indique le
pont Saint-Ange, a reritree duquel se trouvent
les deux statues de saint Pierre et de saint Paul.
Cest en effet le nom que portait cc pont au moyen
*ge.
• Le Transtevere.
* La cite* Leonine est le quartier du Vatican.
10 Le monte Cavalh, partie de l'ancien QuirinaL
Mais Feglise Saint-Alexis est sur V Aventin.
11 S'agit-il du mons CaMus ou est situee Feglise
Saint- iZtienne-le-Rond t
11 Mons-saint-Estevene , en cheli monte moii* de
Capitol, B.
11 Le Palatin t Peut-e'tre aussi la partie du Qni-
rinal, aujourd'hui appelee Magnanapoli*
14 VEsquilin.
15 Le Viminal?
u II y a six ponts a Rome. Je ne vois de bien
clairement indique par Jean d'Outremeuse que
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LIVRE PREMIER.
61
Les palais des empereurs de Romme et des altres saingnours s'ensient en d« p«iai».
teile maniere. Premier estoit li palais maiour *, qui seioit emmy la citeit en
signe de monarchie qui demon tre jus tiche: chis astoit composeis al maniere
de crois, car ilh avoit IIII frons, et en chascon front astoient cent portes
de arren • doreez. — Item, li palais Romulus % qui siet par-deleis I petit
maison de boveres \ — Item, li palais Neron, que ons appelle Lateranense,
deleis Sains-Marcelle et Sains-Pire 8 ; et est apelleis Lateranense por I rame
que Neron engenrat en eel palais. une raine, enssi qu'ilh en fail mension chi-
apres a son temps; et siet devers septentrionale. — Item, le palais Susurria-
num, e'est-a-dire des rimeurs 6 ; la main tenant est 1'engliese Sainte-Crois en
Jherusalera \ — Item , le palais de Pais 8 , ou Romulus metit l'ymaige de luy
tout d'or ; et par-deleis fist puis Virgile une columpne, et sus une ymage de
virge,et dest: a Quant une virge enfant aurat, chest ymaige 9 chairat; » enssi
que vos oreis chi-apres a temps de Virgile. — Item, le palais Trajan l0 . Item ,
le Ponte rotto, autrefois appele* pont Sainte-Marie
et pont Senatorial. Le pont des Juys doit e'tre le
pont Fabricius (quatlro capi), ou le Ghetto aboutit,
et le pont Valentin pourrait bien e'tre aussi le pont
Cestius (5. Bartolomeo), puisqu'il fut reconstruct
au quatrieme siecle par les ordres des empereurs
Valentinien et Valens. Restent trois ponts encore
indiques par notre chroniqueur, et auxquels res-
pondent Ic pont Saint-Ange, le pont Sixte et les ves-
tiges de l'antique SubUcivs. Comp. du reste avec le
textede la relation reproduitc dans le Diarium ifa-
licum, p. 284.
1 Le palais des Cesars, dont il reste quelques
vestiges sur le Palatin, dans cette propridte bien
eonnue aujourd'hui sousle nom de jardin Farnese.
1 Airain.
* Le temple de Romulus, aujourd'hui l'cglise
Saint-Theodore? La relation reproduce dans le
Diarium itaticum (p. 284) le place inter S. Ma-
Ham novam et S. Cosmatem.
* Ne faut-il pas lire bouresses, lavandieres?
* 11 est certainement question ici du palais de
Latran, dont l'eglisc Saint-Marcellin et Saint-Pierre
n'est pas cloignee. Get Edifice rapelle le souvenir
de Constantin, et pour Neron, le construeteur
de la maison dorfc, il n'y a que la fable passa-
blement stupide conservee par notre chroniqueur.
Jean d'Outremeuse doit avoir mal copie. Dans la re-
lation dejamenlionnee (Diarium itaticum, p. 284),
le Latran est indique* comme l'ancien palais de
Constantin , et le palais de Neron est place , ainsi
qu'il doit Telre, dans le quartier du Vatican, «6i
ett agutia (Vobe'tisque) S. Petri.
• Pour rumeurs.
1 La basilique de Sainte-Croix en Jerusalem fut
construke par les ordres de sainte Helene, sur
remplacement meme de son palais appele Sesso-
rianum, mot transform^ par Jean d'Outremeuse
en Susurrianum.
• La tradition rappclee ici par Jean d'Outre-
meuse sc rapporte a un autel eleve par Auguste
dans le temple de Jupiter capitolin, devenu, comme
nous l'avons dit, Teglise d'^ra Costi. Sur Pempla-
cement de 1'autel, on lit une inscription latine rela-
tive a la vision d' Auguste, decrite plus loin (p. 72)
par le chroniqueur.
9 /chest columpne. B.
10 Sous ce nom , Jean d'Outremeuse vcut peul-
eire designer la basilique du Forum construit par
cet empereur.
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62
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Fol. 17 ▼•.
Ie palais Adrian , ou est li columpne f . Item , le palais Claudii *, deleis Pan-
theon. Item, le palais Anthoine, ou est li aultre coloumpne \ Item, le palais
Nero, sour le hospitail de Saint-Espir * jusques a Sains-Pire. Item , le palais
Camille *. — Item, le palais Julius-Cesaire% ou ilh repouse. Item, le palais
Cromatii, ou est li cheval de erain doreis 7 . Item, le palais Euphemii 8 , en
mont d'Aventine. Item, le palais Tytus * et Vespasianus, fours des murs ad
cathecumbas. — Item , le palais Gonstantin ", ou est ly cheval doreis que ons
dist que ch'est Constantin ; mains ilh ne Test nient, car c'est des mervelhes
Virgile fist a Rom me, enssi que vosoreis chi-apres, quant temps iist". Quant
les consules et les senaleurs govrenarent Romme, avoit I homme d'armes
de tres-grant fourme et vertut, et plains de hardileiche, qui prist unc pois-
san roy qui avoit assegiet Romme , et astoit une pasieble heure aleis par-
faire le secreit mestier de nature a lieu acoustumeil a chu; chis gran hons
prist le roy et l'emportat par-dedens Romme, et chis gran hons requist aux
Romans que en memoire perpetuel fust faite une ymage en eel palais des
Olimpiades ". — Item , le palais Domitian en trans Tyberim al miche dor ".
1 Cc doit 6tre la colonne Trajane. Quant aa
palais Adrien, je ne saisa quel Edifice Jean d'Ou-
tremeuse fait allusion. Le texte reproduit par Mont-
faucon (p. 284-) porte : palatium Trajanum, ubi
e$t columna ma.
■ Lc palais Claudii designe peut-e'trc le temple
de Claude, devenu Teglise Saint-£tienne-le-Rond;
mais F&lifice ne se trouve pas dans le quartier du
Pantheon. Le texte de Hontfaucon le place entre
le Col i see et Saint-Pierre-aux-Liens.
3 Sans doute la colonne de Marc-Aurele, die-
vee dans le Forum d'Antonin devenu la Piazza
colonna.
* L'hopital du Saint-Esprit, dans le borgo de ce
nom, est situe* entre le chateau Saint-Ange et l'd-
glise Saint - Pierre au Vatican. La relation du
Diarium (p. 284) signale en effet un palais de
Neron dans ce quartier.
5 Inconnu.
6 II est possible que Jean d'Outremeuse veuillc
designer ici une basilique du Forum de Clsar,
situe* entre le Forum d'Auguste et eclui de Nerva.
7 Sans doute la belle statue equestre de Marc-
Aurele qui, decouverte dans les environs du Fo-
rum , a ete transportee sur la place du Capitole. Je
ne sais ce que peut designer le palais Cromatii. Le
texte de la relation inseree dans le Diarium ita-
licum porte : ad Sanctum Stephanum in piscina
palatium Chromatii prwfecti. II s'agit de l'eglise
Saint-£lienne in petcinola.
I L'eglise Sainte-Euphemie? Elle n'est pas situee
sur TAventin.
9 Les tbermes de Titus?
10 Le palais de La Iran donne par Constantin au
pape Sylvestrc? Au temps de Jean d'Outremeuse,
la statue de Marc-Aurele etait sur la place de
faint-Jean de Latran. Mais le chroniqueur aurait-
il fait deux statues diffcrcntes d'une seule et meme
statue?
II Nous avons deja rencontre cette forme, qui
a le meme sens que iert, sera.
11 Edifice inconnu.
18 Le Forum de Domitien? Mais il n'etait pas
dans le Transtdvere. La miche est un petit pain,
et la miche d'or parait elre une enseigne connue
a Tdpoque de Jean d'Outremeuse.
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LIVRE PREMIER.
63
— Item, Ie palais Octovian, ou est li engliese Sains-Silvestre a la tieste \
Item, le palais Venus*, ou est li escolle grigois. — Item , le palais Cyceron 3 ,
ou est maintenant li maison des enfans Pire Lyon. — Item, le palais Kathe-
line, ou est Iy engliese Sains-Anthoine *, deleis laqueile est li lieu c'on nom
Infiers, portant que de 1'anchien temps astoit-ons illuc devoreis les gens;
et la venoit sy grant soufflemens et si pervelheux B aux Romans que ch'astoit
mervelhe; ou Marcus Tuitius*, affin que la citeit fust delivree par les res-
ponsions des dieux, soy jettat tout armeis en la fosse; et tantost fut la
terre reclouse, et li lieu n'y fut plus, ains en fut dedont en avant la citeit
delivree. — Item, les palais que ons nom Terme sont chi apres contenus,
assavoir : Terme Antoniane , Tyberian , Nepotiane, Domytiane, Maximiane,
Luciniane, Dyocleciane , Olimpiadane , Agrypiane, Alexandriane 7 ; Capito-
liiim, qui astoit li tieste de monde, ou les senateurs et consules chi -apres
demoroient, et avoient a govreneir le monde; lequeile Capitoile avoit la
faiche droit de murs hauls et fermes de voir et dois 8 partout covers, enssi
com chu fust unc myreur tous regardans.
Les ars triomphales • s'ensient oussi. Ilh est a Romme li ars dor Alexi a LesarsdeRomm*
Sains-Celse *°. Item, li ars Valeriane, Gratiane et Theodosiane, empereurs ".
1 L'eglise Saint-Sylvestre in capite a etc" con-
struite sur des ruines qu'on croit etre cclles d'un
edifice cleve par Domitien ct non par Octave. Le
texte de la relation reproduite par Montfaucon
(p. 284) place le palais d'Octave dans le qua r tier
da Corso ad S. Laurentium in Lucina, et pres
de la , sur remplacement du palais Ottoboni ,
se trouvaient des ruines appelces palais Domi-
tien.
* Le temple de Venus et de Rome? Mais Fecolc
grecque, qui se trouvait pres du pont Sublicius
{Diarium llaU, p. 486), etaitassez loin de la.
* Inconnu.
* Sans doute l'eglise Saint - An toine, abbe,
situee pres de Sainte- Marie -Majeure. Le palais
Katkeline doit 6tre la traduction dc palaiium Ca-
fiUma.
* Je supprime ici un second venoit.
* Tuithu sans doute pour Curtiut. Mais le lac
de Curtius, qui rappelle la legende inseree ici,
ctait au bean milieu du Forum et non sur TEs~
quilin.
I Les thermes d\4ntonin Caracalla, de Diocle-
tien, d'Olympiade, dAgrippa et d f Alexandre Se-
vere sont connus. Je nc puis en dire autant des
cinq autres que mentionne Jean d'Outrcmeuse.
Comp. avec le texte dc Montfaucon , p. 285.
* Le root est fort lisiblement ecrit dans les deux
tcxtes que j'ai sous les ycux. 11 est cependant pro-
bable qu'il faut lire d'oir : de verre et d'or partout
couvert.
• Principals. B*
10 II y avait, en effct, pres dc l'eglise Saint-
Celse et Saint- Julien un arc construit par Gra-
tien , Valcntinicn II et Thcodose. A Uxi est pour
Alexandri, que donne le texte de Montfaucon.
II Le texte de Montfaucon ajoute : ad S. Ur-
mm fori$ Appiam porlatn ad templum Marlis.
Au lieu de Valeriane , il faut lire Valentiniane.
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64
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Item , li ars Constantin \ Item, li ars des VII Lucernes \ ou ilh est li cande-
labreMoyses,awec les arches qui on t VII branches en piet de tours. — Item ,
li ars Julin Cesaire s et les senateurs , a Sains-Martin. Item , li ars Octoviane
et Anthoine , a Sains-Lorent en Lucena *. — Item , ilh sont alcuns ars ■ qui nc
sont mie triumphales, mais memorials, enssi com li ars de Pieteis \ Item,
li ars a Sainte-Marie la Raonde 7 , ou I femme vient une fois a 1'empereur qui
Deifemmequideman- aloit la, et li dest, en cheant a ses pies en plorant : « Sire, anchois que tu
fisquHy'fat ochiv" « vois avant, fais-moy raison.» Et li empereur li respondit: « Je toy promey
» loialment de faire droit al revenir. » Et , quant li empereur revient , se dest
a la femme : « Dis, de quoy vues-tu avoir droit? » Elle respondit : « J'avoie,
» Sire, I beal fis qui est ochis par le tien fis. » Li empereur respondit , et dest
par sentenche: «Mort soil li homicide! » Et tan tost fut pris et emmeneis vers
la justice por morir; mains la femme vient avant, et dest : « Delivreis-moy
» cely vivant,por faire morir en lieude mon fis mort.» Li empereur li otriat,
et atant, senestre partie % se l'emenat awec lee, et se l'esposat.
Les theatres. Les theatres qui sont a Romme sont teiles : promier, le theatre Tytus et
Wespasianus ad cathecumbas. Item, le theatre Tarquin a VII soleais. Item,
le theatre Pompee, a Sains-Lorent en Damase. Item, le theatre de Flavie f .
1 L'arc de Constantin est situe pres du Colisee,
a Fentree de la via di S. Gregorio.
* D'apres les details que donne le chroniqueur,
Tare signale ici est Tare de Titus, situe* a rextre*-
mite du Forum , vers le Colisee.
s Probablement Tare de Septime Severe , con-
struit au pied du Capitole, non loin de l'eglise
Sainte-Martine et Saint-Luc.
4 L'eglise Saint-Laurent in Lucina avait jadis
dans son voisinage Tare de Marc-Aurele, detruit
par le pape Alexandre VII.
5 Les mots qui precedent, depuis Octoviane,
sont onus dans le manuscrit B.
• Je connais un temple, mais non un arc de la
Piete.
7 Je ne sais quel arc Jean d'Outremeuse veut
indiquer ici. Quant a Tcglise, il veut designer le
Pantheon , appele aussi Sainte-Marie de la Ro-
tonde. Le texte de Montfaucon place Tare de la
Piete ante S. Mariam rolundam, tandis que notre
chroniqueur en fait deux monuments differenls.
8 Ces deux mots me semblent signifier que la
femme etait pour le fils de Tempereur un contra-
dicteur de^agreable, une partie sinistre; a moins
peut-^tre qu'il ne soit permis de lire : et atant t'en
eit partie.
9 On sait ou etait le theatre de Pompee : sur
ses mines a 6te construit le palais Pio pres du
Campo di fiori, et pres de la se trouve Teglise
Saint-Laurent dite : in Damaso, parce qu'elle est
dediee aussi a saint Damase, pape. Quant au thea-
tre de Flavie, ce pourrait bien 6tre le Colisee, aussi
appele amphitheatre Flavien. Mais cette supposi-
tion n'est guere admissible, puisque plus loin le
chroniqueur le range parmi les temples. Montfau-
con (Diarium, p. 299) pense que le theatre de
Titus et de Vespasien indique le cirque de Cara-
calla, et celui de Tarquin, pres du Septizoniwn,
le Circus maxima*. Pour ce dernier, la supposition
du savant benedictin paratt fondee; elle ne doit
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LIVRE PREMIER.
65
In summitate archis Capitolii, c'est-a-dire al deseur del archc « de Capi- DeitempiwdeRonmie.
toil , fut li temple de Jupiter \ en laqueile estoit ly ymage dor Jupiter seant
en unc trone d'or, ou astoit oussi li temple Asilum % en queile fut mors Ju-
lius Cesaire 4 . — Item, desous le Capitoile. ou lesymulaclirefut 5 de marbre,
fut li temple Jupiter*. — Item, ou est Sainte-Martine, fut li temple de Desti-
neez 7 . Item, la ou est li engliese Sains- Adriane, fuit li temple de Refuite 8 .
Item , a Saint-Sergien fut ly temple de Concorde 9 . Item, en Patechenais fut
li temple Gheleris i0 . Item , le temple des Vestimens fut en lieu c'on nom
Enfier *\ Item, ou li engliese Saint-Cosme est, fut li temple Asyli **. Item ,
derier l'englize Saint-Cosme fut li temple de Pais i5 , et al deseur astoit le tem-
pas retre pour l'autre, et il est probable que Jean
d'Outremeuse a voulu designer le cirque de Ro-
mulus , fiis de Maxence , situe" pres des cata combes
de Saint-Calixte et du tombeau de Cecilia Metella.
Une inscription dccouverte , il y a peu d'annccs ,
a fait connaltre le vrai constructeur d'un monu-
ment, qui peut fort bien avoir e*te, au moyen age,
attribue a Vespasien et a Titus.
1 Arche (arce dans Roquefort) signifie ici for-
leresse, citadelle. C'est un mot forme directement
du latin arx.
* Le temple de Jupiter Capitolin.
* Le texte de Monfaucon place le Templum
asyli tantdt sur la roche Tarpciennc, tantdt sur
1'emplacement de l'eglise Saint-Cdme, pp. 288,
293,294.
4 Encore une allusion a quelque tradition fabu-
leuse. Jules Cesar fut assassin^ dans la Curie de
Pompee, bailment attenant au theatre ci-dessus
indique.
* Ce mot fut ne se trouve pas dans le manu-
scrit B.
* Sans doute Jupiter Stator. Les trois magni-
fiques colon nes, que le touriste admire au milieu
du Forum, sont, dit-on, les restes du portique de
ce temple.
7 L'eglise Safnte-Martine, dite aussi Saint-
Luc, situee a l'entree du Forum, pros de Tare de
Septime Severe, paralt avoir e*te construite sur les
mines du temple d'Adrien. Je ne connais pas de
temple dedie au fatum. Le texte de Montfaucon ,
p. 293 , cite pres de la prison Mamcrtine un tem-
plum fatale , qui doitdtre ledificc indique ici par
notre chroniqueur.
8 Refuite doit signifier refuge, asile. Je ne con-
nais pas de temple qui eut cctte destination spe-
ciale, et Feglise Saint-Adrien se trouve aussi a
l'entree du Forum, pres de l'eglise Sainte-Mar-
tine. Ce temple de refuite ne fait-il pas double em-
ploi avee le templum asyli?
9 Le temple de la Concorde e*tait au commen-
cement de la voie sacree. L'eglise Saint-Sergius ,
dite aussi Sainte-Marie del pascolo, est sur la place
Sainte-Marie de' monti, dans la vallee comprise
entre le Quirinal et FEsquilin.
10 J'ignore ce que signifie le mot Pateclienais.
Quant a Cheleris, il faut lire Cereris, ce que prouve
le texte du manuscrit B qui ajoute : et tulluris,
(telluris). Le texte de Montfaucon place le temple
de Ceres et de la tcrre in Cannapara.
11 Par VEnfer, Jean d'Outremeuse ddsignc ,
comme on l'a vu plus haut, le lac de Cur this.
11 Ce temple est deja mentionne* quelques ligncs
plus haut, et dans une autre position, puisqne
l'dglise Saint-C6me, in Campo vaccino, a etc* con-
struite sur le temple de Remus. Jean d'Outremeuse
aura sans doute encore ici mal copie*.
'* Voila au moins une indication exacte, et le
temple de la Paix se trouvait en effet dans cette
partie du Forum, ou se trouve l'eglise Saint-Cdmc.
9
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66
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Fol. 18 T*.
pie Romuli 1 . — Item, oil l'engliese Sainle-Marie-Nove est, fut li temple de
Concorde et de Piteit*. Item, asseis pres fut le Cartherelle 5 , portant que chu
astoit unc puble lieu desqueis ilh en avoit en la citeit XXVIII. Item, devant
Coloseum fut li temple de Soleal 4 : la fasoit-ons les cheremonies des symu-
lachres, qui astoient al summe de Golosei coroneis d'or et de gemmes pre*
chieux, le mains et la tieste desqueis sont en l'engliese de Latran. — Item,
Septisolium 5 , qui fut des VII ordes des columpnes, fut ly temple de Soleal
et de la Lune \ Item , asseis pres est Sainte-Babilonie 7 in Albeston, ou fut
Mutatorium Cesaire; et la fut fait li candelabre de Albeston, une piere pre-
chieux qui est de teile manere ou nature que , quant ilh est une seul fois
esprise et desous les dieux mise, jamais par nul art ilh n'estinderat , liqueis
lieu est por chu nommeis Albeston , portant que la oussi faisoit-ons les
blanches estoiles * imperials. Item, la est tantost apres l'ateit 9 en l'engliese
Sainte-AIbine lo ly ymagedeNostre-Salveur Jhesu-Christ, divinement pointe.
Devant cesty temple astoit li ars Prisci Tarquini , droit entre le mont Aven-
tin et le gran palais lf , ou ilh avoit 11 portes, l'une vers orient et lautre vers
1 Le temple de Romulus, aujourd'hui l'eglise
Saint-Theodore, est du cote du Forum oppose*
a celui ou se trouve l'eglise Saint-C6me.
* Le texte de Montfaucon (page 294) fait de
ccla deux temples situcs Tun et Tautre dans le
Forum. Le temple de la Ptete etait cependant dans
un autre quarlier, pres du theatre de Marcellus.
8 Traduction du latin Charlularium. Jean d'Ou-
tremeuse ne fait que traduire le texte public
par Montfaucon : Ideo dicitur chartularium , quia
fuit ibi bibliotheca publica, de quibus XXVI fuere
in urbe.
4 Le texte de Montfaucon ( p. 294) porte aussi :
Ante Coliseum , templum solis , ubi fiebant ceremo-
niae simulacrorum , quod ttabat in fastigio Colisei.
5 Pour Seplizonium , nom donne a un portique
construit par Seplime Severe, au pied du mont
Palatin.
6 II existc, pres de Tare de Titus, quelques frag-
ments de deux edifices que Ton suppose avoir 6l6
les temples du Soleil et de la Lune. lis n'etaient
pas fort eloignes du Seplizonium , maisjc ne saisis
pas le rapport distant entre ccs trob edifices.
7 Probablcment pour Sainte-Balbine. On lit
dans la chronique de Martin Polonus (I, 7) : Ibi
prope fuit Sancla BaVbina in Asbeston, ubi fuit
mutatorium Caesaris. Ibi fuit candelabrum factum
de lapide Asbeslon, qui semel accenms et sub diva
positus nulla arte exlinguitur; qui locus inde dictus
Albeston, quia ibi ficbant albae stolae imperato*
rum. Sur cette pierre Albeston ou plutdt Asbest,
voir une notede Liebrecht, dans son edition des
Otia imperialia de Gcrvaise de Tilbury, p. 97.
8 On voit, d'apres le passage de Martin Polo-
nus, que le mot etoiles est celui dont se sert Jean
dOutremeuse pour traduire le latin stolae.
9 Tout pros de l'autel.
10 Encore pour Sainte-Balbine?
11 II est ici question du grand cirque, dont la
construction est en effetattribuee a Tarquin l'An-
cien. Les details donnes par Jean d'Outremeuse
no font que traduire encore le texte reproduit par
Montfaucon, p. 294-.
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LIVRE PREMIER.
67
Occident, qui astoit de mervelheux bealteit, et qui par teile maniere astoil
disposeit que nuls Romans ne poioit defendre li uns l'autre a veioir les jeux
que ons faisoit illuc. — Item, la esloient II chevals de erain doreis en la hal-
teche del arch et des portes eleveis, li uns vers orient et l'autre vers Occi-
dent, qui, par leur disposition et Tart de quoy Virgile les avoit faite,avoient
le vertu de provoqueir les chevals a corir, lesqueis chevals Constantin les
portat awec luy en Constantinoble. — Item, en Exquelin mont, qui est
entre 1'engliese Sainte-Marie le Maiour et I'engliese de Latran, ou alqueils
colompnes et ymages aparent encor, fut li temple que ons nommoit Cym-
brum, porlant que li Cymbre, cest assavoir les Germains, avoit degeteis '.
Item , la ilh est maintenant li engliese Sainte-Marie li Maior, fut li temple
Cymbales \ Item, a Sainte-Marie de la Fontaine, ou li symulacre parlat a
Julin Cesaire et le dechuit,fut li temple des Temples '. Item, li temple Venus *
fut en I'engliese Saint-Piere aux Loyens *. Item, en mont de Celie, ou ons
dist maintenant le table 1'Emperere , fut li.temple Jupiter et Dyaine 8 . Item ,
entres les chevals de marbre fut li temple Saturne et Bachi, ou ilh gisent
maintenant les symulacres de ches chevails; et le cause por quoy les che-
vals furent fais de marbre vos vorons deviseir briefement. — Sachies que al Exempium des ciievai*
temps Tyberius Cesaire vinrent a Romme II jonecheaz philosophes, qui
astoient nommeis Presicelles et Sibia ', que ons veioit clerement eistre tous
nus; ilh furent meneis devant 1'emperere, et, quant li emperere leur de-
mandat porquen ilhs astoient nus, ilh respondirent et li disent que toutes
les chouses sont nues et a eaux ouvertes, et que l$s chouses mondaines
avons en despit entirement, et nos ne possidons riens, car tout chu que
tu dis en secreit nos est tout aovers, et en avons cognisanche. Et, quant li
emperere entendit chu, se les fist examineir; et, quant ilh trovat leurs
1 Lc texte reproduit par Montfaucon (p. 295)
porte : In Esquilino monte fuit templum Marti,
quod nunc vocatur Cimbrum eo quod vicit Cimbros,
Comp. cc passage avec Implication qu'en donnc
lediteur, p. 409.
* Pour Cybkle. Le texte de Montfaucon porte :
Ubi est sancta Maria major, fuit templum Cy-
bfles.
s II convient de reproduire encore ici le texte
de Montfaucon : Ad sanctam Mariam in Fontana
templum Faunii(Fauni), quod simulacrum locutum
est Juliano et decepit cum, Le temple des temples
serait done eclui de Faune , et Julin Cesaire l'em-
pereur Julicn.
4 Je ne connais aucun temple de Venus sur
l'emplacemcnt de SaintrPicrre-aux-Liens.
5 In Ilio monte fuit templum Jot is et Dianae,
quod nunc vocatur Imperatoris. Diarium, p. 295.
6 Cest ainsi que noire chroniqucur cstropie les
noms de Praxitcle et de Phidias.
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68
CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
Pol. 18 y.
parolles estre vraies, se les (lest qu'ilh demandassent tout chu qu'ilh vo-
roicnt avoir, car ilh les promeltoit del donneir; et ilh demandarent les
II chevals de marbre. — Item, la maintenanl est ly engliese Sainte-Marie le
Reondc, fut li temple Cybeles ! , qui fut le mere des dieux; dequeile temple
le construction trovereis al temps Domitian l'empereur, qui chi-apres s en-
siiet. Item, aux gradelles * fut li temple de Soleal. Item, la ou est Sains-
Estiene-Reont, fut li temple Fanum*. Item en Eliphant fut li temple Cybale.
ct li temple Citionis \ la ou mainlenant est li maison le fis Pire Lyon. Item,
la ou est li chartre Tullianc ■ et li engliese Saint-Nycholai , la fut ly temple
de Jupiter. — Item, a Saint-Apgele • fut li temple Severiane 7 . Item , a voile
dor. fut li temple Minerve 8 . Item , en ponl des Juys, fut li temple Famii \
Item , a Saint-Estiene en la Pissine l0 , fut li temple que ons apelloil Olene-
cum ou Olovilreum rotondum, fait de cristal et dor; la asloient les astro-
nomyens et lous les signes de chiels que Virgile fist, que sains Baslien
awec Tyburtii le fis Cromalii destruirenl ". — Item, a Sainte-Marie trans
Tyberim fut li temple Ravennant", et fut la maison de deserle, ou ons
deservoil aux chevaliers chu qu'ilh faisoient por les senateurs, et ctemo-
roient la lesdis chevaliers. — Item, desous le Janicole fut li temple Gor-
gon '!. Item, en 1'isle " fut li temple Jupiter et Esculapii ". Item, al temple
1 On a yu plus haul cc temple place* a Sainte-
Maric-Majeure.
* Ad Gradellat fuit templum SoUs, porle le texte
do Montfaucon, p. 295. Quelle est cctte localite?
Je Tignore. Elle doit sans doute son nom a des
marches ou degres. S'agirait-il du cdlebre cscalicr
qui se (rouve pres de Saint-Jean de Latran?
5 II faut lire Faunu Yoir le Diarium. Ibid.
4 II faut lire Sibylle et Ciceroni* , car on lit dans
le texte de Montfaucon : In elephant o templum Si-
byllae et templum Ciceroni*, p. 295. Quant au quar-
ter que scmblc indiqucr le mot Eliphant, il m'est
inconnu.
* Le Tullianum , ou prison Mamcrtinc , au pied
du Gapitole.
8 Saint-Angc in Petcheria.
7 Templum Severianum, dans le texte de Mont-
faucon, p. 295. Ces mots indiquent le portique
d'Octavie qui, detruit par un incendic, fut rc-
construit sous le regne de Septime Severe.
* Ad velum aureum templum Minervae. Ibid.
Le velum aureum indiqucrait-il le Velabre?
9 II faut sans doute lire Jani. Du moins le texte
dc Montfaucon porte : In ponte Judaeorum tern-
plum Jani. S'agirait-il dc Tare de Janus Quadri-
fons?
10 L'eglisc Saint-fitiennc in Pescinola.
11 11 a deja etc question de cc Cromatiue, que )c
texte dc Montfaucon qua li fie dc praefectut. Pour
des details sur cc pcrsonnage ct son fils Tiburce,
on en trouvera dans la Ligende doree, article
Saint-Scbastten.
,f Templum Ravennantium , et f undent oleum,
ubi ett Sancta Maria in Transtiberim. Diarium ,
p. 287. L'cglise Sainte-Maric , dans le Transte-
vere, est batic sur remplaccment de la Taberna
meritoria, sortc d'hfitel des invalides.
11 Inconnu.
14 L'lle^Iu Tibre, a laqucllcconduisentlcsponts
Fabricius et Cestius.
" L'eglise Saint-Barthclemy-cn-llc occupe rem-
placcment du temple d'Esculapc.
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LIVRE PREMIER.
69
Alixandre furent 11 temples, le I de Flore et li aullre de Solea, entour le
palais Virgile. ou la conche fut que ons apelle maintenant Nova Roma'.
— Item, ad concham per Jovis fut li Cymee % de mervelheux grandeur
et bealteit; ly monument de cely fut li temple Apoloine. Item, li engliese
Sains-Ursin 8 fut li secretaire Neron. Item, li engliese Sainte-Sophie fut li
temple Mars *, ou les consules des kalendes de jule jusques as kalendes de
jenvier demoroient. — Ghu et altres chouses tant de palais com de temples,
des empereurs, des consules, des senateurs, de citains de Romme, qui
furent de mervelheux bealteit dor et d argent, de yvoire, de albaisle et de
pieres prechieux, et de marbre de diverses coleurs, furent jadis fais a
Romme par lesdis empereurs et altres succedans. li unc apres l'autre; et
jasoi che que nos ayons mys chi tous a une fois , chu que dit est et chu qui
s'ensyet ne fut mie fais tout a une fois : mains nos l'avons mis et metterons
encor tout Festal de Romme, des englieses et d'aultres choises, por avoir
la matiere tout ensemble et miedre memore del retenir.
Ly capitoil fut le chief de tout le monde, ou les consules et senateurs DeCapiioii.
demoroient por conselhier la citeit et le monde oussi. Si avoit dedens
I temple que ons disoit que ilh valloit le ticrche part de monde, ou ilh
avoit ortant de ymaiges qu'ilh avoit de provinches en monde, que Virgile De temple ou ;ih avoit
. A r ° \ t * . . . ■• i orUntd'ydollw quilh
compoisat par mgromanche; et avoit caschony mage unc tenlen a son col avoit de provinches
pendant; et avoit de la terre de pays unc signe que chascon ymage repre-
sentoit en sa main. Si astoient atour de palais les visaiges tourneis vers
lymaige del empcrere, qui esloit tout emmy sor une colompne; et astoit
1 Le texte dc Montfaucon (p. 292) porlc : Ante
palatium Alexandri fuere duo Templa Florae et
Phaebi. Post palatium , ubi nunc est concha, fuit
temp I am L'ellonae ubi tculplum fuit :
lluma vttusta fui , serf nunc not a Roma cocvbor :
Eruta ruderibu* euhnm ad alia fero*
1 Ge mot doit kidiquer tin monument rappc-
lant le souvenir de Cneus Pompee. On lit dans le
JJiarium (p. 292) : ad concham parionis (sic) fuit
templum Cnei Pompei mirae magnitudinis et pvl-
cJtritudinis ; monumentum veto iltius, quod dici-
tur majusj tarn dccenlcr ornatum, fuit oraculum
Appollinit. La 6 e region [none) de Rome s'appclle
Parionc, et comprend la plaec Navone^ eclebre
par ses abondantcs fonlaines.
5 Inconnu.
4 II y avait plusicurs temples consacres a Mars.
Je ne sais auqucl il est fait ici allusion, et ne con-
nais pas deglise Sainte-Sophic.
* 11 faut prononcer tintin; e'est la traduction
du mot latin tinlinnabulum employe par l'auteur
de la relation reproduitc par Montfaucon , et que
Jean d'Oalrcmcuse traduit a peu pres litterale-
ment. Quant au monumenl doer it ici par lui, il
s'appclait Saloalio Romae. Voir a ce sujet la tra-
duction de l'ouvrage dc Dunlop par Felix Lie-
brecht : Geschichte dcr Prosa dictungen, p. 186.
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70
CHRON1QUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Oil Octovian veit le
vision en ciel.
faile par teile maniere que, quant alconne region astoit ou voloit est re
rebelle aux Romans, son ymage tournoit le dos vers I'ymage del empe-
rere, et sonnoit son ten tent; et les gardes qui gardoient le palais le disoient
aux senateurs, et ches envoioient la les chevaliers a chu deputeis por
corregier celle region; enssi qui ferat • expressement mension de chu et
d'autres fais de Virgile a son temps chi-apres, portant ne voray plus parleir.
— Item, a Sainte-Marie del capitoil furent II temples, assavoir de Phebus
et de Carmetis f , la ou Octovian veit la vision en chiel 5 ; et si fut la ly temple
qui astoit garde de Capitoil, car sour tous cheaux de monde resplendisoit
de sapienche et de bealteit merVelheusement.
Coliseum ' fut I temple de la Lune et del Soleal, dont jay parleit chi de-
seur si que des temple 5 . Mains chi veulh redire chu que Colisee dist : chis
Dc coliseum unc mult temple fist Vireile de grant bealteit et de mult grandeche, et diverses
niervelheux temple. r *> . . i » . , . .
cavernes convenables; et astoit tout coviers de unc chiel de erain doreit,
par ou les tonieres et les allumeurs 6 et les clarteis venoient, qui se fasoient
par buses de plonc subtils, et enssi la ploive que ons faisoit venir par
ingromanche 7 . Et dedens le ciel astoient la lune et le soleal et les planetes;
et en le moyne * estoit Phebus , ly dieu de soleal qui tenoit une pale • en sa
main, en faisant signe que Romme governoit tout le monde. Mains grans
temps apres li pape Bonifache, le 111 6 de chi nom, le commandat a des-
truire affin que ons n'y aorasse pour l'anchien edifisse: et les tiestes et les
mains des ydolles fist mettre en palais de Latran. Item , devant le colesien
stat li temple Tropi l0 , ou les gens soy plaindoient leurs querymones 4I ly
uns de l'autre.
Pantheon est I temple qui, al temps des consules et senateurs, fut fais en
1 Sans doute pour que feray.
* Carmentis dans le Diarium , pp. 289 et 293.
Quid?
5 Voir plus loin (p. 72) le recit de cette tradi-
tion.
4 [/initiate de ce mot est bien un A dans nos
deux textes, raais la lignc suivante prouve que
e'est une faute, et qu'H faut a cet A substituer
un C.
5 Si que temple. B.
6 Plutot allumieres, eclairs. Le mot est reste en
wallon , avec allumer pour eclairer.
I Precederament yngremance, necromancie.
• Pour moyen, milieu. Moiene dans le manu-
scrit B.
9 Ce mot en wallon designe une beche ; ici il a
evidemment un autre sens. Peut-6tre faut-il lire
palme ?
10 Un nom sans doute encore estropie.
II Ce mot, qui vient directement du latin queri-
monia, signifie plaintc, procte. Roquefort donne
querimonie, mais avec un sens plus restreint.
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LIVRE PREMIER.
71
teile maniere : Agrippa, le prefecte de Romme, les Suavres et le Saynes !
metit al desous, et U c altres peuples awec 1 1 1 1 regions; et, quant illi revient,
ly tenten del ymage de Perse alat sonneir mult fort, et li garde le non- d* pantheon M ui fui
\ ^o ■) fais par I victoir en
chat aux senateurs, et les senateurs qui veirent I y mage tournee le dos se Peme.
liserent la lettre, se veirent que ch'estoit del region de Perse; si vinrent a
Agrippa, et li desent qu'ilh alast a grant gens encontre les Persiens. Et Foi. i9r«.
chis les condist, en disant qu'ilh n'y poroit aleir; et toutvoie ilh fut si des-
t rains et tant, qu'ilh demandat 1'alerme de III jours. Dedens ches trois
jours, ly avient que ilh dormoit une nuit en son lit; se li vient devant une
femme qui li dest : « Agrippe, que pens-tu? prens confort en toy et moy
» promesse a faire I temple teile que je toy monstray,et tu aras victoir
» contre les Persiens. » — Et Agrippa dest : « Qui es-tu , sires? » Celle dest : « Je
» suy Sibiles 1 , le mere des dieux; or me fais sacrifiche, et Neptuno 8 , le dieu
» de la mere. » Et chis respondit : « Je le feray volentirs, damme. » Alantest
leveis lecheusement * et dest aux senateurs qu'ilh yrat contre les Persiens;
et lendemain sen alat et desconfist tous les Persiens, et les remetit tous
desous le tregut des Romans. Et, revenus a Romme, ilh fist faire le temple
qu'ilh apellat Pantheon, et le dedicassat a leur loy en 1'honcur de Sibeles
et Neptunii. — Mains Boniface le pape 1111° de eel nom , qui veit le temple si Le Pn * Bonifache fist
terrible, et revenoient tant de dyables dedens qui feroient 5 les cristiens,
alat al emperere en li depriant que ilh li donnast cely temple; liqueis li
otriat tantost; et ilh fist faire de cely temple une engliese en I'honeur de
la virge Marie et de tous les sains; et fut consacree le promier jour de
novembre. — Et ordinal li pape que a cheli jour dedont en avant a faire en
ladit engliese le fieste Nostre-Damme et de tous les sains, et lendemain le
commemoracion de toutes les armes; et statuat que a cheli jour, cascon an,
s'acommengnast li peuple de Romme, et que li pape celebrast la messe *
a chi jour.
Iheon.
1 Suevcs et Saxons.
1 Pour Cybele, qui se trouw dans lc texte re-
produit par Monfaucon et trad u it encore ici par
notre chroniqueur.
5 II est a remarquer que dans des passages tra-
duits du latin corarae ici, Jean d'Outrcmeuse con-
serve souvent aux noras propres la physiono-
mic que leur donnent les cas de ridiome traduit.
4 Gaiement, joyeusement, avec licsse.
5 Frappaient.
9 Je supprime ici un ccucon qui doit etre de
trop, a moi^s de supposer que lc chroniqueur
ait voulu repctcr le cascon an de la lignc prcce-
dente.
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72
CHR0N1QUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Exempium de s.inie De Sainte-Marie en Capitoil vous voirons parleir; et vos disons qu'ilh
Mane en Capitoil. m * m r *
fut faite al temps Octovian qui fut mult beais; et les senateurs regardont
entre eaux Octovian 1'emperere, et se le veirent de si grant bealleit et de
teile prosperiteit que nuls ne soy poioit defendre contre ly, ains tenoit
tout le monde desous luy en tregut. Se vinrcnt a luy, et li disent : « Nous
» toy volons aoreir, car li deiteit est en toy; et, se en toy n'estoit la dei-
» teit, ilh ne toy venroient nient les honneurs et prosperiteis qui toy vin-
» rent. » — Quant li emperere les enlendit, si demandat jour de li a ' conse-
LesRomaosToreni ado- Ihier et de respondre dedens III jours. Et puis apellat Sybile de Tyburtine f
dedens les III jours qu'ilh avoit pris de respit, et se soy conselhat a lee; et
elle li dest : « De chicl venrat li juges par les siecles futures par lequeile
» signe madiserent de sueur, assavoire en chaire present, et chis doit
» jugier le monde. » Adont regardat Octovian le chiel, dont grant res-
plendeur li vint; et si veil en chiel une virge tenant une enfant stesant '
sour une alteit, et oyt une vois disant en teile maniere : « Chis est li
» alteit de (is de Dieu. » Et li emperere, quant ilh I'oyt, ilh chayt a terre
en aorant Jhesu-Crist venant. Chest vision dest li emperere aux senateurs.
et fist mettre ceste vision en sa chambre, ou est li engliese Sainte-Marie
en Capitoil; et partantle nom-ons Sainte-Marie en I'aleit de chiel l .
Ly temple de tout terre est cheli al porte de Flavie, et y fist ly emperere
Octovian 1 casteal que ons nommat Auguste 8 , la ons ensevelissoit les empe-
reurs; si fut edifiiet de taubles de marbres , et al deseur avoit escript : « Chi
» sont les osseauls et cendres et verses 6 des emperers , et les victoirs que
» cascond'eauxatfait. »Enlemoyne 7 astoil li chayrla Octovian seioit;et la
astoit ly prestre de la loychantant et faisant leur sacrifiches. — De toutes les
parties de monde mandat Octovian de la terre plain I ban * que ilh melit
sor ledit temple, en signe que toutes les provinches de monde astoient a
Romme tributaires.
De Sainte-Marie a I'au-
teit Dieu.
Exemplum de temple
de tout terre.
1 fndusse de li a. B.
* Tibur, Tivoli. Sur cette tradition relative a la
Sibyllc, on peut consulter Mist, eccles., de Nice-
phore (L, 17) et celle d'Orosc (VI, 20).
3 Participe present du verbe ster, se tenir, du
latin stare,
1 L'eglise Sainte-Marie duCapitole est, en effet,
designee sous le nom d'Ara Cceli.
s II s'agit sans doute du mausolee d 1 Auguste,
et la porte Flavie, dans cette hypothesc, serait la
porte flaminiennc , plus connue sous le nom dc
porte du peuple.
9 Vers, inscriptions.
7 Nous avons dej a rencontre ce mot, qui signi-
fie milieu.
8 Ban, pour banse, manne.
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L1VRE PREMIER. 73
Septisolii fat I temple dequeile nos avons desus fait mension ' : ons y
aoroit la I tine et le soleal , et si y avoit VII ordines de columpnes une sour
1'autre , de quoy Ovide dist que chu estoit li regne de Solea ; anchois astoit-
ilh le temple de Fortune; la devant estoit li Mutation * Cesaire, et devant De temple de Fortune.
les termes astoient II temples : ly uns en l'honeur de Ysidis et li altre de
Serapis. — Et en paradis sains Pire 8 est li Cantarus que fist faire sains Cor-
nelin , pape promier de eel nom. Si est faite a columpnes perforeez et aour- Foi. 19 >°.
nees de taubles de marbre et de biestes, sicom griffons et dalfins, fachon-
nees. Et astoit a li annexeis unc chiel de erain doreis, ovreis a follies et
flours ' qui jettoient aywe a planteit. — En la moienne s de eel Cantarus
avoit 1 toneal de erain et d'ore qui covroit le chiel. En foramen de Pantheon ,
c este a entendre Sainte-Marie le Reonde in Pinta% amministroit-on l'aiwe a
une buse en terre plumbee qui revenoit par pluseurs trais , et de eel aywe
faisoit-ons les bangnes 7 des empereres.— llh y at mult d'autres mervelheux
choises a Romme que nos n'avons nient deviseit, qui, por leurs antiquiteit
et le destruction d'elles por enforchier la foid catholique, ons ne puet co-
gnosce por quen Romme chief de tout le monde estoit; si portoit la
monarchic, assavoir le signe de monde, sicom ches vers dient :
Roma decus, mutala secus quam prima fuisti, Versus.
Roma, caput mondi, super omnes omne novisti.
Se vos dis que en lee avoit mult de choises mervelheux, plus al dire ver-
teit que nos n'avons deviseit deseur; si nos en tairons a tant, et se devise-
rons 1'estat del Engliese, qui puis fut a Rome et est, que noble et sainte
doit-ons clameir.
Chi apres s'ensiwent les indulgenches des englieses de Romme. Et deveis Les indulgences de
savoir promierement que en la citeit de Romme sont II11 C et LXXII en-
glieses, entres lesqueiles ilh en y at VII previlegie devant les altres de
1 C'est le Septizonium de Septime Severe, dont * Mime sens que plus haut a Fexpression en le
% il est en effet question, p. 66. moyne.
1 Plus haut Mutatorium. • II doit 6tre ici question du Pantheon , qui ,
* Sur le Paradis de Saint-Pierre, Edifice que je comme nous l'avons dit plus haut, s'appelle aussi
ne.connai^ pas, et son Cantarus, voir la relation Sainte-Marie de la Rotonde.
reproduce par Montfaucon, Diarium, p. 291. 7 Bains, encore une expression wallonne.
* Feuilles et fleurs.
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74 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
grasce et de sainctiteit, que ons dist estre royals , car des papes et des em-
pereres sont construit et maiement cumulee par divine grasce. — Entres
De rengiiese S'-Pirc lesqueiles la pro niier et la principal engliese est Sains-Pire, le prinche des
apostles, qui syet en propre lieu ou sains Pire fut crucify et; et est situee
en piet de mont que ons nom proprement le mont Vaticanus, si que ilh y
at une grant montee ' al engliese de XXIX greis. — Et toutes les fois que
uns cristiens mont ches greis ou deskent, par cause de devotion ou oration ,
ou de peregrination, ilh at VII ans de indulgenches de part le pape Alix-
andre, le tiers de chi nom ; et sont teiles indulgenches que merchialment ' li
sont relaxee, de chu qui li serat injonte pOr penitanche. — En eel meismes
at 1111" alteis, et a cascon des alteis sont XXV111 ans et ortant 3 de quadra-
gemes de indulgenches; entre lesqueis ilh n'y at 4 VII qui sont de special
grasce doyes : li promirs est li alteis Sains-Symon et Saint-Jude aposteles 5 ,
li secons est li alteit Saint-Grigoire , li thirs est li alteit Saint-Andrier la-
post le, li quars est li alteit Saint-Leon, li V* est li alteit la benoite virge
Marie, li Vl e est li alteit Sainte-Crois , ly VH e est li alteit desous le suaire
Nostre-Sire Jhesu-Crist; lesqueils VII alteis cascon at VII ans de indul-
genches specialment donnee. — Item, en ledit engliese sont II alteis aux-
queiles sont grandes indulgenches, dont li unc est li alteit Nostre-Damme,
qui siet de drier • I'ateit de suaire Nostre-Saingneur; et li altre est de Sains-
Marche 7 , la ons soloit coronneir l'emperere. — Item, li pape Grigoire con-
cedat a tous venans oreir le grant alteit Sains-Pire Tapostle, le remission
des pechies oblies, de vowe brisies, le corochier peire et mere sens mettre
main, cent et XXVIII ans, et ortant de quadragemes % et le tirche partie
del remission de tous ses pechies. — Item, del Ascension jusques aux ka-
lendes d'auguste , sont tous les jours XIIII m ans de indulgenches, et a toutes
les fiestes sains Pire at M ans; et ens octaves del Sains-Martin , quant ladit
engliese fut benit et consecree, sont VII m ans et ortant de quadragemes,
et le remission awec de tous pechies. — Item, quiconques tenrat le suaire
1 Jean d'Outremeuse donne a ce mot le sens souvent dans noire chroniqueur. ■
qu'il a conservd en wallon , eclui d*escaUer. 5 ApelUs par erreur dans notre textc. Je cor-
' Avec miserioorde, merchiablement dans Ro- rige d'apres le manuscrit B.
quefort. • Pour derriere.
5 Pour autant. 7 Sans doute pour Marc.
* Pour it y en a, cette forme se rencontre assez 8 Quarantaines.
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LIVRE PREMIER. 75
Nostra- Saingneur Jhesu-Crist, jamais ne serat messeais ne si chairat de
la caduc ', ne de feu de infer ne serat tochiet; et quiconques vterat le pro-
pre faiche de li en terra, ilh le vierat en chiel, se ilh est fidele. — Item, de
tenir le suaire at-ons Hl m ans, et des altres parties de cascon lX m ans;
mains de decha les moins * et oultre mere en at-ons XH m , et le remission de
tous leurs pechies. Item , en quaremme , toutes les indulgenehes de Romme Poi. so r.
redoblent.
En 1'engliese Sains-Poul, defours les murs de Romme, en tous les de- ** s*ins-poui.
greis sont VII ans, et al grant alteit sont XL VIII ans et ortant de quadra-
gemes. Item, le jour Sains-Poul l'apostle sont M ans, et al conversion
Sains-Poul C ans, et le jour des Innocens XL ans, et en Foctave de Sains-
Martin, quant li englise fut consecree, VII m ans, et le remission de tous
pechies. — Item , qui continuelment vat et devotement acquiere les pardons
cascon jour, ilh en at tous les dymengnes d'onne an ortant de indulgenehes
qu'ilh auroit s'ilh alloit a 1'engliese Sains-Jake en Compostel.
En 1'egliese Sains-Johan de Latran est remission de tous pechies. Item , De s*in« joi.™ <ie La
li pape Grigoire et li pape Silvestre, qui eel englise edifiunt, donnont a
lee tant des indulgenehes, que ons ne le poroit compteir par nul homme
fors que Dieu seulement. — Li pape Bonifache le dest que se li hons savoit
les indulgenehes que ons acquirt la, ilh ne le eonvenroit mie aller al sains
sepulcre oultre mere en Jherusalem.
En 1'engliese de Nostre-Salveur Jhesu-Crist 9 , at tant de tres-sains santuars d* r«iiqu«t «ie i\»-
n i •■• 19 i ghese Sains -Johan
dont elle est nobihtee , que ch est mervelhe : promier y est li ymage Nostra- 3e L » lr * n
Saingneur Jhesu-Crist, pointe nom par main d'homme mains divinement *;
et si at des reliques que ons ne monstre point 5 .— Tout promiers li arche
federis Nostre-Saingneur y est; item VII candelabra qui furent en devan-
train tabernacle de vies testament. Item, le table de viel testament; item,
une buret dor plaine de manne que ilh avoit en saint tabernacle, que
1 Je crois devoir diviser en deux ce mot qui Sancta sanctorum, au-dessus de l'escalier du pre-
n'en fait qu'un dans le texte. toire de Pilate.
' Moins pour monts. * Ces reliques qu'on ne montre pas sont tenues v
3 Cest toujours de Teglise Saint-Jean de Latran comme apocryphes par la cour de Rome elle-radme.
quil est ici question, eglise souvent appelee Bast- Jean d'Outremeuse oublie la plus singuliere a coup
lica Salvatoris. sur : le prepuce de Jesus-Christ.
4 Cette image est dans la chapelle appelee
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76
CHROMQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
ons disoit sancta sanctorum. — Item , la virge Moyses , de quoy iih ferit
II fois la saxe ', et aywes yssirent fours, delqueile ilh fist mult de mer-
velhes en le peuple de roy Pharaon. — Item, la virge Aaron, de quoy ilh
fist folhier * le bussons ars , que Vespasianus et Ty tus aporterent de Jhe-
rusalem avec III1 grandes columpnes de erain, qui sont par-deleis le
grant alteit, la ilh at de V pains de orge , de quoy Dieu soulat * V m hommes.
— Item, le cotte inconsutil * que la virge Marie fist por son fis. — Item, del
berchoul Jhesu-Crist. Item, de lieu ou Nostre-Sires montat en chiel. — Item,
dessaintes cendrcs de corps ars de sains Johans-Baptiste, et li haire de
li qui est de poulh de chamos*. Item, delle manne del sepulture sains
Johan ewangelisle. — Item, les ymages des apostles sains Pire et sains Poul.
Item , del eluit • or et argent de quoy Constantien , li siervan de Dieu , fist
faire les ymages al honneur de Nostre-Seigneur Jhesu-Crist et ses disciples
et des altres santuaires. Item, y at des altres reliques que ons monstre et
que ons puet bien veioir : promirs, li alteit des apostles, liqueis est co-
viers d'argent, et que les sains proidhoms ont eut, en queile ilhs celebront
reponsement 7 , por les persecutions et le rage tres-crueux. Et deseur est la
table Nostre-Seigneur, ou ilh cenat sus a wee ses disciples; et les ymages
sains Pire et sains Poul, que sains Silvestre monstrat a Constantin lejn-
perere, cuy ilh aparurent en dormant 8 . — Item, la chemyse que Nostre-
Dame fist a son fis. Item, le chief Zacharie , le peire sains Johans-Baptiste.
Item, le chief sains Patricii, martyr, qui sonnat 9 par III jours qui li en-
gliese de Lalrain fut ars. Item , le cope ou sains Johan bevit le venyn.
Item, le rosteal 10 sains Lorent, sor lequeis ilh fut rostis tout entier. Item,
le tunicke sains Johan ewangeliste, de quoy ilh resuscitat III mors qui
1 Du latin saxutn, pierre.
* Pousser des feuilles.
* Rassasia.
4 Tunique sans coutures.
* Poil de chamcau.
6 Ce mot indique le metal le plus pur.
7 Sccretement. Roquefort donne responacement
et respunsement dans 1c Supplement. II s'agit de
Kautel de bois sur lequel, dit-on, saint Pierre officia.
Cette relique ne se trouve plus au Sancta sancto-
rum , mais au milieu mdme de la basilique de La-
tran ; elle sert de table a l'autel papal qui est avant
le choeur.
* Par somme. B. Les teles de saint Pierre et de
saint Paul sont encore Ik ou le ehroniqueur les
place. Quant a la table de la Cene, elle est aujour-
d'hui placce dans une partie laterale de Teglise ,
ou on la montre a travcrs tin grillage.
• Sanat. B.
10 Gril. Roquefort donne rostier. Cette relique
est aujourd'hui dans l'eglisc Saint-Laurent in l<u-
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L1VRE PREMIER. 77
avoient but de venyn ; et le chayne dont ilh estoit loyes , quant ilh vient de
la citeit Ephesi a Romme; et les forset * desqueiles ilh fut tondus a Domi-
tian. — Item , le linchoul f de quoy Dieu suat les pies de ses apostlez. Item ,
le corchiet 8 que la virge Marie portat sor son chief, dont elle estoit et fut
enwollepee entour les gampes de son fis , quant ilh pendit en la crois , a
maniere de braies*. Item, le suere que Joseph de Aramatie meit Dieu
sor le chief, quant ilh fut poseis en sepulcre. Item , le pieche de baston
arondine 5 dont Dieu fut ferus en la maison Pylate. — Item , le circoncision
Nostre-Saingneur, etmult d'autres reliques qui ne puelent estre comptee
por le grant multitude delles. Item, eel engliese dist-ons de Nostre-Sal-
veur Jhesu-Crist, le roy des roys, et le nom-ons le basilique annexee ou
Constantino, quar par Constantin 1'emperere elle fut dedicassie et conse-
cree. Ons le nom oussi le temple et li englise des englieses aposloliques ,
instruite par les apostles par divine doctrine. — Ons le nom le siege aposto- Foi. so ▼•.
lique, car nuls n'y puet seoir; ons le nom 1'engliese de Romme et le siege
de Romme; 1'autre Latrain li patriarcheit est nominee; et eel dist-ons le
universale engliese, car el at poioir de jugier de tout universelment; por-
tent le nom-ons le chief des engliesez, car a lee tout les altres englieses
prendent nourechon. — Item, Constantin dest a sains Silvestre : « Jay or-
» dineit ma maison en 1'engliese. » Quant ilh loit dedicassie : « En eel
» engliese, beaux peire, infundeis vostre large main el benediction a cheaz
» qui le venront visenteir. » Sains Silvestre respondit et dest : « Nostre
» Sires Jhesu-Crist, par sa grant miser icorde, toy mundat et purifiat de la
» lepre; enssi mondefie et purifie tous venans en cheli lieu, en queile
» temps que chu soit, de tous leurs pechies, et nos, del auctoriteit de Dieu
» le tou puissans et des apostlez sains Pire et sains Poul et de la nostre,
» remittons et concedons remission de tous leurs pechies lesdis venans
» visenteir chesti sains lieu. »
En l'engliese de Nostre-Damme le Maiour, a grant alteit, at XLVII1 ans et DereogUwe desire
Damme-lt-Maiour.
1 Ciseaux. Voir Ducange, v° forfexk (v° corcelhu) le corset ou courcel d&igne un v^te-
* Pour Hnceuil, designant un morccau de toile. meat qui rccouvre la tete.
Le mot avec cette signification est reste* dans le 4 Quoiqu'on devine ce que le chroniqueur vcut
wallon. dire, la phrase paralt incomplete. Enwolleper pour
* Je ne saurais definir ce que Jean dOulre- envelopper est reste en wallon.
meuse entend par ce mot, mais d'apres Ducange * Du latin ammdo, roseau»
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78
CHR0N1QUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
ortant de indulgenche '. Item, a chascon des fiestes de temps del nativiteit
INostre-Saingneur et de la resurrexion jusques al octave, donnont sains
Grtgoire et sains JNicholai, papez, XIII C ans et ortant de indulgenches de
quadragemes \ — Item al fieste del assumption Nostre-Damme, en auguste,
jusques al nativiteit Nostre-Damme, en septembre, sont tous les jours
XJI1I milhes ans, et le tirche part del remission de tous les pechies entie-
rement.
Lengiiesedes^crois. Ly engliese Sainte-Crois en Jherusalem * tous les dymengnes et tous les
merquedis de l'annee 11° ans; et cascon altre jour del semaine continue!-
ment C et XXXVII ans, qui font tout ensemble LVI" VIII et IIII" ans,
tous les ans , et ortant de quadragemes. — Item , li pape Estiene, qui morut
la, y dorniat le remission de tous pechies. — Item, le pape sains Silvestre, al
supplication de sainte Heleyne, edifiat eel engliese, et les indulgenche dit
confirmat, et y concedat de sa part VIU m ans. Item, encor chascon jour
dcz IIII temps C et XXVII ans, et ortant de quadragemes. Et en quareme
tous les jours les indulgenchez redoublent; finablement, ilh y a tant de
indulgenche qu'ilh ne sont nient a nombreir.
Ly engliese des matyres sains Estiene et sains Lorent, ou ilh repoisent,
at grans pardons mis par sains Silvestre, par sains Pelaige et par sains Ny-
cholai, papes, qui eel engliese consecrarent; ilhs y concedont VII m ans de
indulgenche, et le remission de la tirche partie de tos les pechies. — Ghes
indulgenches , et tout chest des altres englieses de Rom me, en chascon
fiestes des dois martyres et a leurs dicauses, et aux IIII temps, et en la
fieste delle Toussains, et en quareme, redoublent. Et se alconne personne
visentoit devoltement tous les merquedis de une an, ilh puet oister 1 arme
de purgatoire.
En 1'engliese Sains-Sebastin, promierement, portant que li angle de Dieu
s'aparut la a sains Grigoire, pape, en celebrant la messe, et dest : « Chis
» lieu est vray remission des pechies ; car remission , splendour et lumier
)> perpetuel et fine Heche qui ' at deservit ly martyr de Dieu sains Sebastin; »
si est chesti engliese illumynee et doyee, de part Dieu, deXL ans de indul-
genche et ortant de quadragemes. — Item, la est ly puche ou les corps de
De S'-Laurent.
De St-Sebasle.
1 De quadragemes de indulgenche* B.
* Et attretant de quadragemes* B.
8 Je suis dispose a suppleer ici le verbe at.
4 Sans doute pour que.
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L1VRE PREMIER. 79
JI sains mar tyres, sains Pire et sains Poul, furent jetteis, et la gurent '
absconsement par 1'espause de VII ans ; et est la donnee tant de indulgen-
ces qu'ilh en at en 1'engliese de sains Pire a Romme; par unc dymengne
en mois de may, est la le remission de tous pechies, a pena et culpa, c'est
de paine et de colpe. — Item , del ascension Nostre-Saingneur jusques aux
kalendes d'auvoste*, sont la tous les jours XIIII m ans. Item, sains Gri-
gore, sains Silvestre, Alexandre, Pelage, Honorien et Mychiel, papes, don-
nont et donnat chascon par ly M ans. Item , la gisent XLVI papes donnans
chascons ses indulgenches ; item, la gisent pluseurs corps sains, martyrs,
confes et virges, qui furent la ensevelis en la cymiteir, lequeile ons nom Foi.iir*.
le cymiteir Sains-Calixte, de quen ons obtient remission une grant partie
de ses pechies.
En 1'engliese Sains-Pire-aux-Loyens sont VH m ans. Item, le promier De s» Pire « -loien*.
jour d'auguste est la ly remission de tous pechies. Item , en moiseal z ou
ilh furent ochis, Vll m , desqueiles sont milh tous les jours jusques al octave
sens les fiestes et stations, et ortant de quadragemes; et, le merquedit
apres, le remission de tous pechies. — Item, a la Sainte-Potentiane 4 que
lesdis sains Pire et sains Poul consecrarent 8 sont tous les jours plus de IIl m
ans de indulgenches, et le tirche part del remission de tous les pechies.
Item, in Sancto-Angele , sont III™ 6 . — Item, in Sains- Anastaise 7 as trois
Fontaines, ou fut decolleis sains Poul, sont VII m ans awec pluseurs altres
indulgenches. — Item, aies sovenanche que ly ymage de la benoite virge Dei ymage Nosire-
Marie, qui est en 1'engliese Sainte-Marie-Ie-Maioir, sicom nos avons dit de- LucT*. que
seur, est eel que sains Luke, li ewangeliste, a la proier des apostles, apres
(assumption de la benointe virge Marie, poindit al vif, par lequeile plus
grant memore et ens en leur cuer la prechieux virge plus fortement avoir
posissent. Et chest eel meisme que sains Grigore le pape fist porteir k pro- Exempiumdeidityma-
cession al mortoire * des hommes , por le infection del aire qui fut en la L porter ai"|rT e
citeit de Romme , del engliese de Latrain jusques al engliese sains Pire , me.
1 Prononcez jurent, rcposerent. cette denomination : celle de TAnge gardien et
1 Poor awotte, augutte, aout. celle de Saint- Ange in pescheria.
* Cemot ne de«igne-t-il pas une localite? 7 Cest l'eglise Saint* Vincent et Saint -Ana-
* Pour Pudentiennc. stase.
1 Ce mot, qui se trouve dans le manuscrit B, s Mortalite, epidemic Mortuaire dans Roque-
est omis dans notre texte. fort.
* II y a deux eglises auxquelles peut s'appUquer
ant
■om-
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80 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
awec le clergerie et le peuple tout entirement, que nostre sires le mor-
toire fesist cesseir, en chaotant les tetanies, et en plorant et en orant de-
voltement : de quen ly ymage. que ons portoit tant de vertu en issit, que
sa fache * toute nulee * et obscurteit del aire, et toute espesseur et infec-
tion tantoist s'enfuoit; et, apres chu, chest ymaige oit grant sereniteit,
clarteit el joieuse chire B enssi que chascons poioit veioir. Et oussitoist tout
le peuple qui astoit de malaire infichies astoit garis, et si sentoit l'espir de
vie. — Et quant li pape parvient a pont Sains- Pi re, chi jour qui astoit le
comeni le* ao$ies cbau jour de la Paske , ilh oyt les angeles chanteir deseur ladit ymage : Regina
e 9 ma c* i. ^. f efare ^ et cetera. Et , quant ilh oyt chest doulche melodie , ilh soy lassat
coment rangie s'appa- cheioir a terre tout plorant, et criant : Ora pro nobis Deum. Quant chu fut
tenant lespeeensan- faite en la halteche de casteal , apparut visiblement li angle qui en sa dies-
Ire maintenoit une espee ensengletee, laqueile ilh mist en la wayme*, en
disant que Dieu avoit le peuple dez Rommans pardonneit son yre, por l'a-
niour de sa mere qui Ten prioit 5 .
Des mynoirs engiiese» Apres, deveis savoir que de menoirs englieses de Romme sont chi
nommee les prmcipauls, assavoir : sains bupphciens, sains raushens,
sainte Beatris. En ches englieses repoisent VII m martires que sains Suppli-
ciens, martyr et pape, recolhit et mist en ches englieses ; et si donnat a tous
requerant et visentant ches englieses, contris el vraies repentans, cascon
jours XLV 6 ansde pardons. — Item , al defours del engliese Sainte-Juviane 7
donnat li pape Honorius li thirs, qui eel engliese consecrat, HI m ans et
ortant de quadragemes, de venredi devant le passion Nostre-Saingneur
jusques a I octave del Paske.
En Tengliese Sains-Julien, ou est ses mentons % sont II1I" ans de indul-
genche, et en legliese Sains-Macherib ', ou est sa diestre main et li bras
sains Christofre, sont milh ans et ortant de quadragemes. En Fenglise
Sains-Viti et Modes te sont contenus les indulgenches en ches vers :
Ecclesia sancti 10 Viti simul atque Modcsti
Versus. Martiris illesa ,! sunt VII milia cesa,
1 Le verbc fut doit avoir ele omis. 8 XLV™. B. La somme mc parait un peu forte.
1 Couverte de nuage. 7 Probablcment par erreur pour Bibiane.
8 Visage, mine. Chkre dans Roquefort. • Son menton?
4 Plutot waigne, gatne. • Quel est encore ce saint?
5 Sur cctte tradition, voir un travail de Mass- l0 Testi dans notre texte.
mann, dans la Germania de Vonder Hagen, vol. VII, " Lesa dans notre tcxtc.
p. 237.
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LIVRE PREMIER. 81
Virgine Praxede capicntc flumen ( in ede,
Ipsa hec turbis Anthonius caput urbis*.
Nos meritis horum habeainus regna polorum ,
Quisque, beatorum qui corpora visitat horum,
Nos deHctorum laxamus quarta suorum.
— En l'engliese Sainte-Potentiane repoisent plus de III™ sains corps, por
chascon desqueiles corps sains Grigore concedat I an, et apres li pape
Innocens qui consecrat cest engliese, et concedat le remission del tirche
par tie des tous pechies. Et en chesti sains lieu furent herbegies pro-
mierement, quant ilh vinrent a Rom me, sains Pire et sains Paul, et ledit
engliese et cymetere apres chu consecrarent. — Item, en l'engliese Sainte-
Praxede est escript que li pape Innocent le tirche instituat, tous fideles
visentant l'engliese Sainte-Praxede virge, sains Cyril et sains Johan, le quart Foi. si *•.
part del remission de ses pechies. — Item, le pape Nychol le quart part
oussi, le merquedi devant le Paske jusquez a jour del Paske, et del fieste
sainte Praxede jusques al VIII jour, assavoir por chascon sains la repoi-
sans I an et XL jour; et la dedens gisent des sains corps en tour II m et III C .
Item, en ledit engliese at une cape lie, et la est une partie de la columpne
ou Dieu fut loyes et flagelleis; et ne entrent pont femme la-dedens.
En l'engliese Sains-Martin-en-Mont est escript que desous le grant alteit, Des*-M.rtin.
par-defour en la cripte, repoisent des sains corps des papes, assavoir: sains
Silvestre, Martin, Estiene, Fabien, Leon et Thy mote, qui fut disciple a
sains Poul, et mult d'aultres, por le merite desqueis ilh y est concedeis
V1II C ans et ortant de quadragemes. — Item, en l'englise de Sains-Salveur,
qui est de Sainte-Lucie, sont milh ans et ortant de quadragemes. Item,
en l'engliese Sains-Lorent, desous le temple Cybel, la ou ilh enlumynat les Dei engliese s'-Lorent.
avoigles, et le tressoir del engliese donnat aux povres, est escript que al
temps Turquin et Prisse 8 , empereurs de Romme , sains Silvestre consacrat
eel engliese, et se y concedat des indulgenches HI m ans, por le reverenche
des sains martirs qui furent mors et la dedens ensevelis , al temps del per-
secution \ Item, en l'englise Sainte-Marie de Minerva sont IH m ans.
Chi apres sont les peregrinate de trans Tyberim : promier en l'engliese d« indulgenches qui
r r O ?> J r O sont trang Tyberim.
1 Flumine dans notre texte. Tarquin Tancien.
1 Vers incomplet et inintelligible. 4 Ici le roanuscrit B ajoute : et le nomons le
5 Sans doute par erreur pour Tarquin le prisce, vile canarie.
a
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82
CHROMQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Les indulgencbes de
Champ
Lorent
gei
F!
lori a S»-
Sainte-Marie est escript que li pape Innocent eel engliese consecrat, et
furent presens II1 C et LXVI evesques, desqueis chascon concedat ses indul-
genches chu qu'ilh poioit. Et al grant alteit repoisent les sains corps mar-
tires, assavoir sont : Calixte pape, Calapodius prestre, Quintin evesque, et
Julien pape. — Item, ilh est la une fontaine, qui at II fenestres ' de fier, qui
influit oyle en jour de Noyel, quant Dieu fut neis, et la sont 1111° ans. —
Item, en 1'engliese Sainte-Cecile, ou son corps repoise, est li corps de sains
Urbain pape, et les corps Tyburtii et Valeriani, et la sont cent ans. —
Item , en (engliese Sains-Bertremeir est escript que li emperere Octovien le
sains corps de sains Bertremeir de Bonivent * Fa porta t en lisle de Gason *,
le mist en une belle tombe glorieusement. Et en eel engliese sont les corps
sains, assavoir: sains Poul evesque, Marcelli, Superantii et Alberti, et la
sont milh ans et ortant de quadragemes.
Chi sont les peregrinages de Cliamp-Flori par-devers Sains-Johan de
Latrain : promier li engliese de Sains-Lorent en Damaso V cens ans. Et la
• repoise Damasus pape, qui fist et consecrat ledit engliese, et pluseurs altres
corps sains. — Item, en Fengliese Sains-Linart et Sainte-Marie de Bealteit 1 ,
deleis le plache des Juys, est que toutes les fiestes de sains LinarJ est la
consecration de ches II englieses 5 ; et at a chascon VIII ans et ortant de
quadragemes. Item, en Tengliese Saint-Angele sont les reliques de sainte
Feliciteit awec ses VII fis, des reliques de sains Simphorin 6 , lesqueiles reli-
ques li pape Innocent le thier la les mettit, et se consecrat Fengliese. —
oil saint pire et saint Item, en la capelle que ons dist le warde Mamertin 7 , ou sains Pire et sains
Poul et saint Lorent * ^
furent emprisonneil.
1 Je ne coniprends pas des fenetres qui versent
de Thuile, ct il faut probablement donner au root
fenestres le sens dc lampes, lampadis genus, comrae
on trouve dans Ducange v° fenestra. Le Diarium
itatiewn (p. 270) fait aussi mention de cctle tra-
dition, niais il s'agit la seulement d'une fontaine
dhuile.
* Be*nevent?
* Casos dans la raer Egee? Le manuscrit B
porte : Use Licason qui mc paralt inintelligible.
J'avoue ne pas comprendre non plus ee voyage
impose aux restes de saint Barthelemy, qu'on ferait
a Her de Benevcnt dans File de Casos pour revenir
ensuite a Rome. En tout cas, e'est lempereur
Othon III qui les a fait deposer dans Teglise a Ia-
quelle le nom du saint est reste attache.
4 Je ne connais pas d'eglise dediee a saint Leo-
nard. Quant a Fautre, cc doit etrc celle de Sainte-
Marie in Cacaberis , situee en effet pres de la place
des Juifs.
5 II doit y avoir ici une lacune, mais la phrase
est la meme dans les deux textes.
• Le chroniqueur s'est trompd sans doute, et il
a voulu dire les reliques de sainte Symphorose
et de ses sept fils, qui se trouvent en effet dans
reglise Saint-Ange in Pescheria.
7 La prison Mamertinc dont il a deja ete ques-
tion.
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LIVRE PREMIER.
85
Poul furent emprisonneit, sains Sixte, sans Lorent et pluseurs allres, la at
li™ ans d'indulgenches. Item, en I'engliese Sains-Cosme et Sains-Damien
sont cent ans. Item, en I'engliese Sainte-Marie Nove, cent ans. — Item,
en I'engliese Sains-Clament', ou sonx;orps gyst, sont ll m ans. Item, en 1'en-
gliese desIUIcoronneis'X ans et ortant de quadragemes. Item, en I'engliese
Sains-Esliene *, en mont Celion *, sont milh ans. Item, en {'hospital Sa ins-
Thomas et Sains-Martin sont cent ans et ortant de quadragemes. Item, en
I'engliese Sains-Grigore , ou ilh dest mostier de vie, quant ilh le consecrat,
et si donnat XX ans. Et awec chu ilh empetrat a Jhesu-Crist chesti previlege Nou qui eniur.t chi
que quiconques eslirat la dedens sa sep\ilture com vraie cat hohque, jamais niertcomd«m P neis.
ne serat condampnees 8 . Item , la virge Aaron perforce par lequeile ilh rechi-
voiten celebrant le sane Jhesu-Crist. — Item, en I'engliese Sains-Salveur, qui
regarde vers Sains-Poul , est li remission de la tirche partie de tous pechies.
Item, en I'engliese Sains-Alcxis, en mont Aventins, repoisent sains Alexi, foi.mi*.
confes, et Bonifache, martyr, awec pluseurs altres, et y sont milh ans. Et
li pape Honorien le thier y donnat XL jours, et li pape Sergien G ans.
Item, en I'engliese Sainte-Sabine li pape Grigorey concedatl an et XL jours.
— Item, en I'engliese Sainte-Marie 6 del escolle greche, ou sains August in
governat VII ans les escolles, sont X ans. Item, en I'engliese Sains-Agnes
virge XX ans et ortant de quadragemes, et en sa fieste III C ans. Item, en I'en-
gliese Sainte-Marie 7 , laqueile consecrat li pape Pascalis, a venredi apres le
thier dymengne de quaremme jusques al octave del Paske, sont milh ans.
Item, en I'engliese Sains-Urbain *, qui siet deleis Sains-Sebastin , sont III m
ans et III C et LXXX ans. — Item, en I'engliese Sains - Mark l'ewangelist
sont V ans. Item, en l'englise Sains-Blaise II anp. Item, en I'engliese Sainte-
Marie-de-Puche • II ans. Item, en I'engliese Sains-Lorent en Lucine, VII ans De i'engliese s»-l<>-
et ortant de quadragemes. Item, en I'engliese Sains-Lucie, II ans et XL
1 L'eglise Saint -Clement, Tune des plus an-
ciennes, est situee dans la rue Saint-Jean de La-
tran, derriere le Colisee.
* L'eglise des Quatre Saints Couronnes est si-
tuee, non loin de la p recede nte, dans une des trois
rues qui conduisent du Colisee a la place Saint-
Jean de Latran.
* Saint- £tienne-le-Rond, jadis le temple de
Claude.
4 Sic pour Ccelius ou plutot pour Cclio.
6 Le manuscrit B porte Contenipneis, el il ajoutc,
ce qui ne se trouve pas dans notre texte : en cellc
engliese est et giesl le lit saint Urbant et son brat.
6 Menne par erreur dans le manuscrit. II s'agit
de l'eglise Sainte-Marie in Cosmedin.
1 Laqueile? II y en a plus de cinquante.
8 Sans doute l'eglise Saint -Urbain a la Caffa-
rella, hors des raurs, pres de la fontaine d^gerie.
9 Sans doute la qualification aura change.
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84 CHR0N1QUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
jours. Item, en l'engliese Sains-Johan et Sains-Poul, freres, cent ans. Item,
en l'engliese Sains-Agisse \ trois ans. Item , en l'engliese Sains-Nicholai , VII
ans et ortant de quadragemes. Item, en l'engliese Sainte-Babline * virge.
VII ans et ortant de quadragemes. — Item , en casteal a pont Sains-Pire 3 est
une cape lie , al sommyron * ou li angle apparut a sains Grigore le jour de
la Paske, quant ilh le consecrat, et y concedat VII ans, mains en la fieste
de sains Mychiel doublent-ilh. Item, en l'engliese Sains-Marie le Raonde.
I an ; mains le jour de tous les sains y est le remission de tous pechies.
Dei engticse pantheon. Note is unc chouse que ons nomme Pantheon, qui se fait par II mos gri-
gois en unc en latien; car pan en grigois ch'esl a dire tout en franchois. et
theos ch'est a diere Dieu ; portant les paiens qui regnoient a Romme et qui
edifiont Pantheon, si com nos avons dit, le fisent en l'honeur de tous les
dieux s et le dedicasont a leur loy, si le nomont Pantheon qui est tous les
dieux en I mot assis. Et, quant elle fut engliese apres, si fut dedicaussie
et nommee Agrippine, portant que Marchus Agrippa le fist faire quant ilh
revientdeoultremere,ou ilh avoit victoireobtenue. — Item, a Saius-Eustaise
sont milh ans : la est une des buret ou li aywe fut muwee en vin. — Item , en
£xempiunideien g iic»e l'engliese Sainte-Marie al alteit dechiel 6 . la Octovien l'emperere veitle circle
Nostre-Uamme al a!- 9 ° . # ' . . *
teit de duel. d'or environneit de soleal le jour que Dieu fut neis, al proier de Sibille le
prophetesse fist I engliese ou maintenanl est li convens des freres myneurs,
et sont la M ans. Item, en l'engliese Sains-Adrian, II C ans. Item, en l'en-
gliese des Apostles, I an. Item, en l'engliese Sainte-Constanche, III ans.
— Item, en I'englise Sains-Auguslin, M ans. Item, en l'engliese Sains- Jake
de Succamano , M ans , et le quarte part del remission des pechies. Item , en
I'englise Sains-Grigore, lll c ans. Item, en l'engliese de Saint-Espir, VII ans.
Item, en I'englise Sainte-MarieTraspadaine 7 la ou sont les ymages anchienes
et les estaiches ou sains Pire et sains Poul furent flagelleis, et sont la M ans.
— Item , en l'engliese Sains-Mychiel, M ans. Item, a Sainte-Marie de Pas-
saige 8 , VII ans et ortant de quadragemes. Item, a Sainte-Celse, cent ans. Et
la sont les pies sainte Marie-Magdalene. Item, en Fengliese Sainle-BIaise.
1 Sans doute Saint-figide dans le Transtevere. dedicasont, etc., d'apres le manuscrit B.
* Par erreur pour Balbine. * 6 Toujours Teglise Ara caslu
8 Le chateau Saint-Ange. 7 Par erreur pour Transpontine, c'est-a-dire
4 Sommet. Sommeron dans Roquefort. au dela du pont Saint-Ange.
5 Je supplee ce mcmbre de phrase depuis : et le ° Sans doute Teglise Sainte-Marie in tta.
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LIVRE PREMIER. 85
C ans. Item . en I'engliese Sainte-Marie-Magdalene . C ans. Item , en I'engliese
Sainte-Marie a Salvra f ou sains Poul fut decolleis, ou est li convens sains
Anastaise, H m ans. Item., a jour del dicause est remission de tous pechies. —
Item, en I'engliese Sa ins-Thomas, milh ans. Item, en lengliese Saint-Salveur
XI C ans. Item, en lengliese Sains-Johans devant ia porte de Latins une
delivranche d'onne arme de purgatoire. Item , en I englise Sains-Pire-aux-
Loiens, la sont les loyens dont sains Pi re fut loyes, et cheii jour est li re-
mission de tous pechies. — Item, en I'engliese Sains-Silvestre, ou est ia tieste
Sains-Johan-Baptiste, et quant on le monstre a peuple, si at remission de
tous pechies. En teile maniere que nos avons dit deseur fut commenchie et
fondee la citeit de Romme, et les palais, et les temples, lours et portes par
les empereres de Romme, li unc apres 1'autre par succession, et apres les
englieses par les papes et fes emperers, et les reliques et pardons donneis
a elles, enssi com nos avons deviseit. Si est de raison que nos laisons atant Foi. a* v.
chu , et revenons a nostre matiere ou nos le lasammes.
En retournant a nostre matiere ou nos le lasammes, al deviseir la fon-
dation de Romme, vos disons que a eel temps dont je fay mention, avoit Guerre enirtieroyd?
grant guerre entre le roy Ezechias de Judee et le roy de Surie Agades *, le
fis Sennacherib ; mains Agades fut tant de fois desconlis , que ilh le con-
vient accordeir et venir al merchi a roy Ezechias, et li.rendit grant partie
de ses damaiges. — Item, sor Fan del coronation le roy David II l c et LXVL
le promier jour de avrilh , morut H promier emperere de Romme, Romulus, Komuius, i v mumier
qui avoit regneit XL ans, assavoir I II I ans com roy des Latins et XXXVI mor^i^merveihe^-
ans com emperere, et ilh morut sens heurs; et porlant qu'ilh astoit ochis
done tempeste a Palude 3 , ou unc tonoir et alumyre 4 senlevat, si fut pris
et enclouz de nuleez tout enlour son corps, siqu'ilh ne paroit riens de ly, et
enssi fut-ilh ochis. Et apres revient la clarteit a ses gens qui le veirent la
mors , li et son cheval ; si I'emportarent a Romme. Enssi fut mors Romulus, mieremenTesii"itwnt
. . ■ ■• i hi n < senaleurs de son con-
qui fut mult valhans, hardis et entreprendant emperere. — Ilh list grant *eihe.
honneura Romme, car ilh y enlisit cent senateurs, tous grandes gens et
Des senateurs de Rom-
me.
1 Leglise Sainte-Marie Scala cceli, conslruile 3 Ad Caprae paludetn dit Tite- Live (I, i6).
en eflfet pres de Teglise Saint Paul, que la tradi- Notre chroniqucur a fait de palus un nom de lieu,
lion indique comme Tcndroit ou Tillustre apotre * Nous avons deja cu occasion de signaler le
souffrit lc martyre. mot ahumire qui sign i fie encore eclair en watlon.
* Asaraddon, dans la Bible, Hey urn , IV, 49.
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86 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
nobles, qui astoient de son consellie. Apres ilh eslisit milh chevaliers, qui
defendoient le pays f .
Apres le mort Romulus, qui astoit mors sens heures, le senateurs gover-
nont le regne sens emperere eslire par Fespaisse de I an et demy. Et al
ncNvfna,iciieempc- chief dedit terme enliurent entres eaux, de common acorde, Nyma Pom-
rere, que les sens- . . . . ,. |# _ .
teursesiirent. pilius , qui estoit tres-puissant et noble; et fut h uns des plus grans sena-
teurs Jiqueis regnat XL ans. — A eel temps regnoit Ezechias en Judee. Chis
emperere Nyma ordinat, Tan David III C LXV1II, comment ies chevaliers
doivent aleir en sadee, et servir les prinches par sadeez * et por bien faire 8 ,
de quoy ons n'avoit oncques devant useit. — Item, Fan David 11I C LXIX,
Des ro> de judee Ex« morut Ezechias, li roy de Judee; si fut sa sepulture fait en Jherusalem mult
chiaset Manasses qui .... . .. . . «
«5t ochier Ywias le belle deseur tous les roys qui avoient esteit devant luy depuis le temps le
roy David de Judee. — Apres Ezechias fut fai4 roy son fis Manasses, qui
avoit XI ans d'eaige ; et regnat LII ans. Chis roy Manasses fut mult contrarre
a son bon pere Ezechias, car ilh restaurat toutes les ydolles que son pere
avoit destruit, porquen Ysaias li prophete leblasmat, et Ten repristmult;
mains Manasses sen corochat, se le fist por chu soyer parmy le chief d'onne
soye de bois , sor Fan David HI C LXX \
i\vma remperere ad En eel meismes an adjostat Nyma Pompilius li emperere al an 11 mois :
jostat al an II mois : e , . . , .. -v • 19
jeimer, febrier. assavoir, jenvidr et febrier; car adonc n avoit que X mois en Ian, mams
ortant avoit de jours en X mois com ilh avoit en XII. A eel temps regnat s
De sibiihe le prophe- Sibile Enychee 6 , qui fut I grant prophetesse et clergresse. — Item, Fan David
HI* LXXi , fut fondee le citeit de Colemede 7 , et Fan David 111° LXX1III, fut
fondee la citeit de Susse, en Ynde; se le fondat li roy Ethiope de Mede.
Item, Fan David UI C LXXX1I, morut le roy Myda, portant que ilh but de
L V roy morut poriant sane de toreal , car ons li avoit dit , qui beveroit de sane de unc toreal qu'ilh
qu'ilh but de sane de . * . ... - .
toreai. moroit. oi ne le wot point croire, anchois en buit; si en morut dedens
Roy dAthenne. thier jour. Rem, Fan David III LXXXV1H, fut roy de Athene Flexias, qui
regnat VII ans. Et vos dis que nos passons legierement sens racompteir
grant choises , car ilh avenoit a eel temps mult pou de choses qui soient
1 Apres ilh cnlisit mil chevaliers combatlans que * VII* jour en novemhre , ajoute le manuscrit B.
por le nombre de mil ilh appellat milites , che sotit * Regnat et est Varchist Sibile. B.
chevaliers qui defendoient le pays. B. • Pour £rythr4e.
* Pour sauddes, soldees, solde. 7 Tolometa, l'ancienne Ptolemais?
5 Por bien fais. B.
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LIVRE PREMIER. 87
por racompteir; mains, quant ilh venrat a nostre cognissanche , si les di-
rons mult volentirs. — Item, INyma Pompilius edifiat une citeit et I'apellat Dej«im>erere ,coment
Ponpee, et fut fondee cest citeit l'an David 1II C et LXXXIX. Item, Tan David Romans.
III C XC et XCI et XCII, ordinat Nyma Pompilius, qui astoit uns gran clers
et saige, les loys, et les donnat aux Romans. Et chis fut li promiers empe-
rere qui donnat aux Romans loys, enssi que dist Ysidorus. — En eel an
meismes f morut Ylion, li dus de Galle; si fut fais dus apres son frere Nay, DeducdeGaiie.
car li dus Ylion estoit mors sens heurs; et regnat chis dus JNay XXX1I1I
ans. Item, Tan David I1I C XCV, fut mors li roy Flexias, li derain rcty de Foi.a3r°.
..■ « j a. • * •£ r Ly darain roy d'Athe-
Athenes, sens heurs de son corps; et si n avoit pere ne mere, ne frere, ne „ es .
oncle, ne fis d'oncles, ne fis de frere, ne nulle prochaine person ne; siqu'ilh
estoit cheue en la main des barons del regne li election de faire roy- Si
savisarent entres eaux que ilh ne feroienl jamais roy, ains feroient enssi
qu'ilhs fisent par common accorde IX balhies des IX plus valhans prin- Notadesixbaibie«dA-
* * • i ■ i • • i • tnennea qui avoient
ches de tout le regne et des plus nobles, lesqueis prinches goverfteroient i* po$»anche com i
le regne li uns apres (autre perpetuelment , assavoir, chascon I an lant
seulement, et enssi dan en an jusques a IX ans; et apres, a la X c annee,
commencheroit * a regneir chis qui promier regnat, et tous les altres apres
toudis en porsiwant. Et avoient ches prinches poioir en tot le regne, leur
an durant, en teile maniere que li roy avoit; et quant li uns de ches IX
prinches moroit, les altres VIII enlisoient I altre dedens III jours. — Item, De Tempered qui fon-
Tan David 11I C et XCIX, fondat li emperere Nyma Pompilius une citeit en mais.
Alemangne, et le nommat solonc son nom Nymay. Item, Tan David IIII C ,
vot li roy Pompilius mettre en tregut par forche ches de Galle; mains ilh L y du |?. e If G . ,, jfJ l es "
ne pot et fut desconfis III fois en batalhe. Si revient a Romme mult triste; rere -
si y ralat la l'an David 1111° et II , et fut encors desconfis , et perdit bien V m
Romans; si revient enssi a Romme. Item, Fan David 11U C et IIII , fut neis
Ardosses, li poiete, qui mult regnat. Item, Ian David Hll c VII, morut
Nyma Pompilius, li secons empereur de Romme, qui avoit regneit XL ans
bien et loialment; et avoit le siege vaqueit apres le mort Romelus I an et
demy , si que chu fut l'an David II1I C et VII.
Apres le mort Nyma Pompilius fut fais emperere son fis Tulius Hosti- Tuiius, ie iii«em P e
* J * \ m retire de K«»mme.
lius, liqueis regnat XXXI an. Item, Fan David 11II C et XI pluit sane par
1 En eel an meisme XCII. B. a Et apres a la X' annie si rccommencheroit. B.
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88 CHROJNIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
Ill jours, et si fist grant movement de terre, et fut veyut 1'estoile comete;
Mortaiiteit et move- et l'atre an apres fut si errant mortaliteit que les gens chaioient mors parmy
les ruez. — Item, Ian David IIII C et XIII, fut commenchiet en Gresche h
usage d'aleir a nus pies, que ilh ne fasoient point par-devant; et chu fut
i>.., i a mortaiiteit fut commenchiet por le mortaliteit, car ilh avoit esteit plus grant en Gresche
a nus pies en Gre»- que altre part. — Item, l'an David 1I1I C et XVII, commenchat li emperere
Tuiiu* i emperere <jui Tulius a vestir purpre; et chis fut li promier emperere qui le vestit et qui
rv~urpre? m,er te mist en usaige. Item, Tan David MI* XXI, morut Manasses, li roy de
Judee, qui fut en sa jovente mult plains de mals et de diversiteit ', mains
ilh se remist al bien faire X ans anchois sa mort. Apres luy regnat son fis
Amon XI ans, qui tous les jours de sa vie fut malvais, et ne soy retrahit
De 4ur de Gaiie. onques de male a faire. — Item , Fan David IUI C et XXVI , morut li dus de
Galle Nay, si regnat apres son fis Alymodes LXXIIII ans. Chis Alymodes
oit a femme Helion, la filhe Andorachi, uns des plus valhans senateurs de
Rom me* si en oit I fis, qui fut nommeis Aquitains. Item, Tan David II1I C
Guerre enire Romans et XXVII, recommenchat li empereres Tulius a repareir ses gueres qui
longemeut avoient esteit en pais, et gueriat fortement les Albaniens, qui
habitoient pres de Romme a XVIII lieu, et les Fedenante * qui habitoient a
XII mil de trans Tyberim, et les desconfist tos vigereusement; si mist
III ans al conquiere. — Item, Fan David IIII C et XXXIII , fut ochis Amon,
le roy de Judee , par cheaux qui le siervoient; mains li peuple en prist grant
But* de josia* et de venganche. Apres Amon regnat XXXII ans son fis Josias, qui n 'avoit
rojs«e u ee. j^ge » q Ue VII ans; et portant qu'ilh astoit si jovene fut-ilh si bien endoc-
trineis en la cremeur de Dieu , que ilh ne fist oncques se bien non * en re-
Nou del effodre qui semblanl son bon ancesseur le roy David. Item , Fan David 1111° XXXVIII,
ieUK r eHlperere chayt unc elTondre sour Tulius, le III 6 emperere de Romme, ou ilh seioit
a table en son palais; et la fut-ilh liet ses gens et le palais enlirement jus-
ques en terre tous ars et ochis. En teile maniere que je vos ay deviseit , fut
ochis ly emperere Tulius ; et fut ars luy et tout sa maison. Apres le mort
de luy fut fais li quars emperere de Romme Anchus Marchus, qui esloit
Foi. «f. son fis; si regnat XXIII ans, de temps Josie, le roy de Judee. Item. Tan
1 Ce doit etre le substanlif de l'adjectif divers, * Le chroniqueur ecril plus souvent eaige.
cruel , mechant , qu'on trouve dans les glos- 4 Nous avons deja rencontre cette locution qui
saires. equivaut a : si non bien.
* Pour Fidcnates, habitants de Fidencs.
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LIVRE PREMIER.
89
David IIH C et XXIX, fut neis I prophete. qui fut nommeis Talemilesius f .
En chist an meismes commenchat a prophetizier le valhan prophete Jhe-
remias. qui fut sanctifyes anchois qu'ilh fust neis; et prophetizat , Tan
David IIII C et XLVI, que temprement seroit H peuple d'Ysrael my neis en
prison en Baby lone, et si prophetizat la venue del Incarnation Jhesu-Crist.
— Item, l'an David IIII C etXLVIII, fondat Acquitanus, le fis le due de Guile,
une citeit quelle nommat Anconne % et habitat ens et pluseurs casteals; si
en fist en pou de temps unc gran pays; se le nommat solonc son nom
Acquitaine 8 ; mains ons y at depuis fondeit pluseurs citeis nobles, si com
Tholouse, Pyragore * et mult d'aultres. — Item, Tan David IIII C et LI, fist
faire Josias, li roy de Judee, une grant sollempniteit dedens le temple de
Jherusalem, et fut li XI jour en jenvier; et fut la plus grant qui onques y
euwist esteit depuis le temp Salmon, le fis David. Adont trovat li evesque
Elchie' unc libre endit temple, ou les loys Moyses astoient escriptes, qu'ilhs
avoient long-temps entrelassiiet '; si commandat li roy Josias a son peuple
que les commandemens, qui astoient en chi libre escrips, fussent songneus-
sement tenus et gardeis. — Item, Fan David IIII C et LV, commenchat a es-
clarchier et avoir grant nom une altre sibile, Samia \ Item, Fan David IIII C
LVI, fut fondee Bisantium, qui maintenant est nominee Cons tan tinoble,
se le fondat le roy despartonoire 8 . Item , adont a XLVI mil pres de Romme
fondal li emperere Anchus une citeit, quelle nommat Hostie; et en l'an
apres fist faire le promier pont trans Tyberim entre le mont de Aventine et
Janiculum. Item, Fan David II1I C et LVIII, oit grant batalhe entre le roy
de Judee Josias et le roy de Surie Gad; et oit li roy Josias victoir, et li roy
Gad et ses gens furent ochis.
Sor Fan del coronation le roy David IIII C et LX, en avrilh ', morut An-
chus, ly quars emperere de Romme. Apres fut fais le V e de son fis Priscus
Jberemias propbeUt
I' incarnation Jhesu-
Crist, et a Juys le
captiviteit en Baby-
lone.
Anconne.
Acquitanus. le fis le
due de Gafle, fondat
Acquitaine, Tholouse
et Pyragoire.
Alchie trovat en tem-
£le I libre ou ly loy
loytes estoit , et le
fisent let Juys.
Sibile.
Bisantium ou Constan-
tinoble.
La citeit Hostie.
De 1III* et V« empe-
rere de Romme.
1 II s'agit sans doute de Thales de Milet, trans-
forme en prophete d'Israel.
* Sans doute la ville de ce nom dans le depar-
tement de la Drome, en France.
* Et encor le nome-t-ons. B.
4 Jean d'Outr erne use veut-il parler du comte
de Bigorref
* Le grand pontife Helcias. Voir le r^cit de cc
fait dans la Bible, Begum, IV, 22.
• Roquefort donne ce mot comme substantif
signifiant interruption.
7 C'est-a-dire de Samos.
• La fondation de Byzance est attribute a
Byzas, fils de Neptune. Je ne sais qui Jean d'Ou-
tremeuse veut indiquer ici.
• Le second jour d'avriUi. B.
42
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90 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Tarquinus, et regnat XXXVII ans. Item, Tan II1I C et LXIII, fist li empe-
rere Tarquinus faire murs en tour la plache que ons apelle ad ludos a
Romme, et le fist bien encloire; et y fist faire des basses chambres, que
ons nom altrement chambres secreez ou privees, ou les gens alloient faire
chu que mestyer leur astoit; et y fist faire des conduis qui condusoient
parmy toutes les plueves qui plovoient, et la merde de Romme aleir en la
Lunpererefift faire ie riviere del Tybre '. — En eel an meisrae fist faire a Romme li emperere le
Capitoile, dont nos avons parleit devant; et fut nommeis Capitoile por
tant , com enssi con foioit ' le fondement , fut trovee une tieste d'homme
sens corps en la terre, et ons apelle I chief en latien caput; si oit por cest
L'empererefistxxse- raison a nom Capitoile. — Item, Fan David IIII C et LXIJII , fist li emperere
dit .wee iez aftres Tarquinus unc nombre de senateurs de XX, se les adjondit awec les cent
que Romelus avoit ordineit; si qu'ilh en fut VI". Item, Fan David IIII C et
LXV, oit grant batalhe entre Josias, le roy de Judee, et Nechas *, le roy
josias fut en bataihe d'Egypte; si oit Nechas la victoir, et fut Josias ochis, et son corps fut
raporteis en Jherusalem et ensevelis awec ses ancesseurs; se le plorat tout
son peuple mult fortement, et sor que tos * Jeremias le prophete, portant
que Josias estoit proidhons. — Et deveis savoir que alcons le nomment
Josue, et les altres Jozias; chest tout une personne. Ghis roy avoit III fis,
Eiiaehim et jeconias assavoir : ly anneis oit II nom : ilh fut nommeis Eliachim et Jeconias; li
secons fut nommeis Joacas, et li thirs fut nommeis Sedechias s ; se tient le
regne Joacas III mois tant seulement, puis le prist le roy d'Egypte, et le
mist en sa prison, ou ilh morut; et adont les barons de Judee coronont
son frere qui avoit II noms, se le nommont le roy Joachim, liqueis regnat
XI ans. — Item, Fan David IIII C LXIX, morut le roy de Babylone le grant
DeroyNabupodonosor et de Egypte Nechas; si fut roy apres luy son fis Nabugodonosor , qui en
qu^conquist em- k r j e f t em p S a p res conquist Jherusalem. Item, Tan David HI1 C et LXXVI,
oit grant batalhe entre Nabugodonosor, le roy de Babylone et de Egypte,
Foi.atro. et le roy de Judee Joachim; si oit ly roy Nabugodonosor victoir, et fut
Joachim mors, et une grant partie de son peuple awec, et si en furent
1 Allusion a la construction de la grande cloa- * Necbao.
que, que lhistoire attribue en effet a Tarquin Tan- 4 Locution equivalant a surtoul, par-dessus tout.
cien. * Tout ccla n'est pas conforme au recit de la
" Le verbe foi, fouir, becher, est reste en wal- Bible. Voir Begum y IV, 23.
Ion.
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LIVRE PREMIER. 91
meneis pluseurs en prison en Baby lone; entres lesqueis prison irs furent les
prophetes \ et III altres jovenecheaux qui furent nommeis Ananias, Aza- Jeiwhiei Daniel pro-
rias et Mysael , qui puis furent en Babylone en grant honneur. — Apres l«« Juy» furent eon-
Joachim fut roy de Judee son fis Joachim, liqueis regnat HI mois; puis le nei,enBab y ,0I,e -
prist Nabugodonosor et le mist en prison en Babylone ; se vient le rengne
a son oncle Sedechias , qui fut frere a Joachim , pere a cheluy Joachim ;
liqueis Sedechias regnat X ans. A son temps oit mult a souffrir Jeremias Jeremia«oUisonrir.
le prophete, qui astoit en une chartre en bray * jusques al menton, por
tant qu'ilh avoit prophetiziet que li roy de Babylone prendroit en brief
temps Jherusalem.
Sour Fan David HII C LXXVIII fut fondee la citeit de Marsel sor la mere,
et le fondat Marselas, ly roy de Cypre. Item, l'an David 1II1 C LXXXI1I,
oit grant batalhe entre le dus de Galle Alymodes et l'emperere de Romme G Q^*°}^R ^ d s e
Tarquinus, portant que li empereir voloit que ilh rendissent a ly tregut ei furent Romawdes'
de leur terre. Si avient que li emperere fut desconfis; si s'enfuit a Romme.
Dedont en avant furent les Gallyens et Sycambiens si malvais, portant
que ilh avoient desconfis l'emperere de Romme et tous ses devantrains tant
de fois, ne oncques ne porent avoir une victoir contre eaux, si que nuls
ne poioit dureir pour eaux ; car ilhs astoient si vertueuses que ilhs des-
truoieht tous cheaux qui avoient a eaux a faire. Et fisent tant que leurs
dus tenoit grant terre, et astoit poissans saingnour. Item, Fan David IIII C
II1I M et VII, assegat Nabugodonosor la citeit de Jherusalem , portant que u eitdt <ie jberusa-
Sedechias li refusoit a payer son tregut. Si fut la citeit prise et destruite, et tniite et ie temple
li temple ars, en teile manere que li sains prophete Jeremias (et) Ezechias Lyrov sedechias et ses
avoient devanl prophetiziet ; et fut pris li roy Sedechias , et tous ses en- m iy M r^?'ditraei
fans par devant luy ochis, et ilh meisme oit les yeux creveis, puis fut *onV Josleit * * y
mys en chartre ou ilh morut. Adont defalit li regne des fis Ysrael, et
fut ly royalme de Judee adjostee awec le royalme de Babylone. Cest des-
truction fut appellee la transmigration. Enssi furent les fis Ysrael en capti-
viteit qui durat jusques al temps Daire, le roy de Persie , qui donnat congiet
aux fis de Ysrael de reedifyer le temple de Jherusalem et de raleir la, De /J t ra °™^i l m 3^
enssi com vos oreis apres. Iin " VIe * x an8 -
1 Le manuscrit B donne les noms de ccs pro- qui se trouvait in vestibulo carceris. Voir dans la
phetes : £z&hiel et Daniel. Bible, Jeremias, cap. XXXVIII.
* En prison dans la boue. Cest lc locus lutosus
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92 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Chi fine li quars eaige de monde, qui contient, de la coronation le roy
David jusques a la transmigration de Babylone, I1II C 1III M et VI ans par-
fa is, et li VII C n'est mie parfais; car, tantost que une an est entreis, on le
compte, et doit-ons entendre et dire en Tan ou sour Fan, jusques a sa fin
qu'ilh est parfais ; car qui sommeroit les VII awec le date del coronation le
roy David ', nos commenchames sor le derain annee imparfaile de la daute
devant, assavoir de la Nativiteit Abraham; si que li derain an de Abraham
fut li promier de David , et li derain de David ful li promier del transmi-
gration de Babylone. Et la cause porquoy nos disons chu n'est mie por les
gens saiges ne subtils, ains est por les malicieux qui quident tout savoir,
et veulhent toutes les choses tempteir. Si poroient calculeir nos dautes, si
lroveroient plus et trop I an a chascon terme qu'ilh ne devroit avoir, car
ilh compteroit I an dois fois al derain et al promier que les I ans sont
imparfais, enssi que nous disons, et que les saiges et subtils le sevent bien
entendre. Se nos tairons a tant de chu , et dirons de chinqueme eaige de
monde , qui contient de la transmigration de Babylone jusques a la Incar-
nation Jhesu-Crist V c II1I" et VIII ans. Nous prenderons nos dautes de chi
en avant a ladit transmigration de Babylone. — Sor Fan David IH1 C III I" et
Lan del trao»migra- VII imparfaite commenchat le promier an del transmigration de Babylone,
w° eomiMench "iiieiit qui est li V e eaige de monde, ou ly royalme defalit de peuple Ysrael; si
de. que le promier an del transmigration , qui fut le XVII jour de mois d'avrilh ,
je°rem?«7ut lapideis. lapidarent les juys Jeremie le prophele, qui apres fut ensevelis en Egypte
awec les roys d'Egypte. — Item, l'an del transmigration de Babylone MI,
En chi temp. e»toient defalit la clarteit de soleal a cleir jour. Et astoient en chi temps Jezechiel
e" Ebyione Daniel et Daniel, prophetes, en grant auctoreit en Babylone. Item, Fan del trans-
Ies. ezcc ,e prop *~ migration IX , morut Nabugodonosor li roy de Babylone; si regnat apres
luy son fis Elmedorach \ — Item, sachies que totes les dautes chi apres
escriples jusques al Incarnation Jhesu-Crist sont del transmigration de
Babylone, dont nos avons commenchiet; mains , por tant que ches dois dic-
tions : transmigration Babylone sont mult long a metre sovent en escript ,
se nos en deporterons de nommeir fours que les dautes simplemenl.
En Fan del transmigration de Babylone XI morut Priscus Tarquinus,
1 IcilemanuscritBajoute:tectoute*eroi7/aM«se; * Elmcrodach. B. Plus correctement Evilmero-
que chu soil veriteit quant nos commenchames les dach.
dautes le roy David, nos, etc.
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LIVRE PREMIER. 93
li V° emperere de Rommc; si fut fais li VI e par les senatcurs, qui fut nom- DeSemus,ie vieem-
meis Servius Tulius, li fis Priscus, et regnat XXXII. Hem, Fan XII re-
grandit li emperere la citcit de Romme, et, dois ans la apres', Fencloyt
de fosseis al tour des murs de Romme. En cesti an meisme morut li dus
de Galle Alymodes, qui avoit regneit LXXII11 ans. — Chis dus Alymodes Deducde Gaiie Aiy-
•t 1111 / • -IL *i ' • * /l- I modes et de ses en-
oit 1111 enfans; mains ilh morurent tous jusques a unc qui astoit li plus '«■«•
anneis d'eaux, qui fut nommeis Acqui tains, qui avoit ja edifyet le pays
d'Acquitaine. Chis Acquitains astoit drois heurs dc Galle; mains ilh ne fut
mie dus portant qu'ilh a*voit LX et XII ans d'eage; mains ilh avoit I fls qui
fut nommeis Orlins * : chis fut dus de Galle, et regnat LIIU ans. — Item,
Tan XV morut li roy de Babyloine Elmedorach, qui VI ans avoit regneit.
Si fut roy apres luy son fis Ballhasar. Item, Fan XVII, ordinat li emperere
Tulius que ous levast dedont en avant certains cens de hiretages, qui
n avoit oncques esteis fais ne veus. — Item 1'an XVIII , edifiat li dus de
Galle, Orliens, I noble citeit quelle appellat apres luy Aureliane, et chest LydusdeGaiieOriin*
r\ ■• n ■ • • i i* • • fondat Orliens.
Orlien; et y fist habiteir de ses gens et le pays la entour ahaneir ; ensi en-
grandissoit et enforchoit son pays de cileis et caslials. — Item, Fan XXVI,
le X11I1 6 jour de fevrier, tenoit li roy de Baby lone Ballhasar unc grant Ex l ha 9 ttelL^ y io i ne"
courte en son palais, et avoit deleis ly de ses nobles barons grant quantileit,
et la par-devant tous s'apparut une main, laqueile commenchat a escriere
dedens une parois; mains oncques li roy ne cheaux qui furent la ne porent
lire le lettre, ne savoir qu'ilh y avoit escript; et encor dont avoit la grant
planleit des prophetes. — Adont mandal le roy Ballhasar le prophete Da-
nyel, qui a eel temps et devant astoit habilans en Baby lone, el li priat
que ilh vosist dire et declareir chu que la lettre voloit dire. Et, quant
Danyel oit veue Fescripture, si at dit a roy : « Sire, je vos dis par veriteit Daniel de»t a B-Miusar
» et fay savoir que eel escripture demonstre que en brief temps serat vostre roit.
» regne destruit et mis en altres mains que en voslres. » — Celle nuit
meisme fut la citeit de Baby lone prise, et le roy Ballhasar; et le prisent
dois roys : ly unc fut nommeit Cyrus, dont j'ay parleit deseur, qui roy de
Mede astoit, et li altre fut Daire ou Pire 8 , le roy de Persie. Adont avient
la chose de la citeit de Baby lone et del Ihour de Babel, en teile manere
1 Assavoir Van XI III, ajoute le nianuscrit B. s Je ne vois pas le rapport qui existe entre Dairt
* Plus loin Orliens. et Pire, ordinaircment employe pour Pyrrhus.
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94 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
que nos Favons deviseit par deseur al temps que Babylone fut edifye. Se
avient que Gyrus fut roy de Babylone et de Mede tout quitement par Fes-
Ly roy Cyrus est je^ pause de XXXIIII ans. — Item, Fan XXXII, donna t ly roy Cyrus congiet
temple. a peuple d'Ysrael , qui habitoit en la captiviteit de Babylone , de raleir en
Jherusalem et de repareir et de reedifiier la citeit et le temple.
Adont en ralont en Jherusalem Zorobabel qui astoit yssus del royal
lignie le roy David, et awec li grant planteit de peuple de Judee, et com-
mencharent a reedifiier le temple; mains cheaux qui la habitoient, qui
Foi. as r°. astoient de diverses nations et nient de peuple Ysrael , les empecharent si
fortement , qu'ilh les covient lassier leur ovraige jusques al temps le roy
Daire de Persie et d'Egypte, qui les donnat congier de reedifiier le temple,
Aggeusetzachariasiei enssi que vos oreis. — A eel temps regnoient Aggeus et Zacharias, pro-
phetes, lesqueis astoient en Babylone en grant auctoriteit. — Item, Fan
XXXVI, fondat li dus de Germaine, qui est ors nominee Allemangne ', qui
Ly dus saxo fondat avoit nom Saxo , une citeit que ilh nommat Saxongne, qui fut fait dedens
Saioogneetpluseurs * * V* ■
««•»■ II ans apres; et fondat apres une altre quilh nommat Brab, apres le nom
de sa femme qui avoit a nom Brabine. Et apres fondat une altre citeit, et
l'apellat Polles, et encor I altre que ilh nommat Padok; et, quant ilh oit
, fondeit ches trois citeis, si en fist I conteit, et le nommat solonc son nom
Saxongne, qui puis fut et encor est une noble conteit. — De chi pays de
Edoio ii promier dus Saxongne fut li promirs conte Edolo, le fis Saxo; et apres luy ses heurs,
qui pusedit edifiarent pluseurs citeis endit pays; et raultipliat lidit pays de
mies en mies. — Item, Fan XLI11 , avoit I gran prinche a Romme, qui estoit
Tarquiniusochistrem- uns senaleur, liqueis fut apelleis Tarouinus li Orgulheux. Ghis se conten-
perereTulius, sy Tut .
i^AYi« don9 cmpe ~ a * * l'emperere Tulius tant que ilh le tuat de une cuteal, et, quant ilh
I'oit ochis, se fist tant par son sens et par les grans dons qu'ilh donnat aux
altres senateurs ses compangnons, qu'ilh fut eslus a emperere, et futcoro-
neis a Romme : chis Tarquinius fut li Vll e emperere de Romme, et regnat
XXXV ans. — Item, Fan XLV, prist li emperere de Romme a femme
Helyodes, la filhe l'emperere Odeles de Greche, qui dedens le terme de
III ans oit 1 fis de l'emperere de Romme, et fut nommeis Saldones *. Et,
Fan XLIX, oit ladit emperes I filhe 8 , laqueile oit nom Wierbel; mains de
1 Mlemagne, et ausi asloil adont ensi que nous * Le XV* jour de jenvier, ajoute le nianuscrit B.
avons declareit desus, liqueis dus astoit Saxo, une s XIX 9 jour de may, ajoute le manuscrit B.
citeit. B.
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LIVRE PREMIER. 93
celle filhe fut la damme si travelhiet de maladie , que les saiges dammes
disoient que elle en moroit. Quant Tujrquin * entendit chu que sa femme *
moroit, si fut mult esmayes, et vowata son Dieu Venus que ilh vowist sa
femme delivrer, et ilh feroit fondeir en plusors lieu de son empire une
conteit. Adont soy delivrat la damme de la fille Wierbel desusdile. et li De Beiwier.
emperere tantoist fist sa conteit 8 .
Enssi que je vos dis, mandat l'emperere a planteit' d'ovriers, puis en
allat en Allemangne , portant qu'ilh savoit bien que ilh y avoit asseis de lais
lieu; car illuc estoient les palus et lais lieu plus que altre part. Et fondat
la Y citeis qui furent nominees : la promier, Sardelle; li altre, Bella; la
tirche, Atroppa; li quarte, Ansel; li V e , Cesaine; mains puisedit ont-ilh
esteit changies de nommes par les saingneurs qui ont la regneit. — Et puis comentiypaysdeBeai-
donnat li emperere Tarquinius chesti conteit a unc sien senescal, qui fut en fut Dromier conte
nommeis Origoules, qui fut li promier conte de chis pays. Et li emperere
dest a dit conte que ilh donnast nom a son pays , et ilh respondit que
solonc raison li pays devoit estre nommeis apres le nom de celle par
cuy ocquison ilh avoit esteit fondeit, et chu estoit Wierbel, la filhe l'em-
perere. — Quant li emperere entendit chu, si respondit : « Et nos 1'otrions
» que ly pays soit nommeit solonc le nom de ma filhe , fors tant que je
» welhe retourneir le nom : c'est le promier sillabe de drier, et le derain
» promier a nom le Wierbel , et li pays serat nommeis Belwier. » — En
teiie manere fut li pays fondeit, et fut nommeis Belwier \ Item, Tan LV,
fondat li dus de Galle qui fut nommeis Orliens unc casteal lequeis ilh
apellat Clermont. Item, Fan LX, fut ochis ly roy Cyrus de Baby lone: si
I'ochist une royne qui fut nominee Gazel, et fut le femme le roy Damyns
de Snrie, que li roy Cyrus avoit ochis en une batalhe qu'ilh avoient oyut Exempium comem i y
ensemble. — Si vos diray comment li roy Cyrus fut ochis. Quant li roy p« i f«"«« fen>me.
Cyrus oit ochis le roy Damyns, si vol avoir a femme la royne; et la royne
qui de luy se voloit vengier li fist une fause fieste, et li mist la tauble en
disant : a Sires , soyes bien aise et faite grant fieste, se vos m'ameis, car vos
» sereis mes maris s'ilh vos plaist. » Et li donnat boire mult so vent. Et ilh Foi. kv.
1 Sic. * Mandat planteit. B.
* Que sa femme que ilh amoit tant. B. 5 Le manuscrit B ajoute : ancoret content que on
* Et H emperes ne volt targier, aim fist sa con- le nomme Bealvier, one le doit nommeir Belwier et
text. B. le nomment Belwier li gene de paiis de la.
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96 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
respondit : « Ma damme, je ne desier aultre choise, et vos remerchie des
)> biens que vos me prometteis. » Et toudis la damme li donnoit a bo ire; et
entre chu, une fois ' que ilh bevoit, la royne qui seioit deleis le roy le ferit
d'on cuteal en la gorghe, et ly coupat la gorge, et si 1'ochist. En teile
manere fut ly roy Cyrus ochis; et fut roy apres luy son fis qui fut nommeis
Ghambises, et asloit par altre nom apelleis Nabugodonosor : chis fut con-
trable aux Juys, el les defendit a refaire la citeit et le temple de Jherusalem.
a cd temps avient — A eel t eiiips avient 1'hystoire de Judith, comment el ochist Holofernes,
1'hystoire de Judith, ^1 ■ • iwi i • • ■
comment ei ochist que li roy Lambises ou nabugodonosor avoit envoiet en la terre de Judee
Holoferne. ■ ■ i • * n wm • ^
por le pays encors plus destruire. Item, Ian LXV1, conquist ly roy Cam-
bises ou Nabugodonosor de Babylone le royalme deEgypte tout entirement,
car ilh ne tenoit adont que seulement le royalme de Babylone. — Item ,
Tan LXVI1I, morul Gambises ou Nabugodonosor, li roy de Babylone, qui
avoit regneil VIII ans. Si regnat apres luy Hermedes, qui estoit uns des
VII electeurs qui le roy enlisoient, quant ilh moroit sens heurs \ Chis Her-
medes tient le regne Vll mois tant seulement par mult grant malisse \
enssi com vos oreis chi-apres *.
comoDt Hermedefi fut Chis Hermedes fist entendant aux altres VI electeurs que li roy Gambises
de Bab^Tone. 11 * roy avoit 1 heure qui astoit trop jovene, se ly avoit recargiet a nourir, tant
qu'ilh euwist eage d'estre roy. Et ches le creirent legierement com leur
confrere et compagnons; et ilh menlit, car bien estoit voir que li roy
Gambises avoit oyut 1 fis, mains ilhs ne savoient mie que ly enfes fut mors,
enssi qu'ilh astoit; car ly roy Gambises, son pere, I'avoit ochis a son vivant
por aucon meffait. Et chis Hermedes le savoit bien , car ilh y avoit esteit
coment ly roy Daire presens al ochire. — Mains por dechivoir les prinches electeurs, chis Her-
fut subtilement fa is , •«¥/»* * r • •* • i « •< ■• i* i *. 1
rovetvowatiiDieu, medes avoit 1 us jovene, et faisoit croire que chu astoit li hs le roy; et chu
dinrou coo^w del durat VII mois. puis alat Hermedes morir. Si quidat lassier le regne a son
refaire Jherusalem „ . • ri i_ • «n r *. *. •. i
et le temple, et le fis, qui astoit nommeis Gambises, mains ilh fut racompteit aux prinches
que ch'astoit le fis Hermedes, et que Hermedes avoit malvaisement tenuit
le regne. — Quant les prinches electeurs sorent la veriteit, si ochisent l'en-
fant Gambises, puis prisent conselhe entre eaux de faire unc roy; et fut ly
1 Une fie. to. 3 Notre texte, par errcur sans doute, porte
' Ici le manuscrit B ajoulc : enti que Cambisses malissi.
astoit mors sens heure. * Ensi que puis aparut si comme vous oreis. B.
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LIVRE PREMIER. 97
conselhe teis : les sept prinches et electeurs de roy prisent conselhe entre
eaux que ilhs yroient tous sept lendemain sor leurs chevals monteis, et
venroient tous ensembles en la plache devant le palais royal; el chis cuy
ly cheval hynneroit promier d'eaux sept, chis seroit roy. Enssi finat ly
conseaus des VII prinches. — Si avoit ' entres les prinches unc qui fut
nommeis Daire, qui astoit mult valhans hons; chis vowat a Dieu, s'ilh le
voloit aidire a estre roy, ilh donroit congier a peuple d'Ysrael de reedifiier
la citeit de Jherusalem et le temple Salmon. Apres chu, chis Daire fist
prendre une jumenle, et le fist metre en la plache tout par nuit ou ilhs
devoient lendemain venir ensemble tous sour leur chevauls. Quant li ju-
mente fut mys en la plache, vers meynuit que ly temps est plus pasieble
et les gens astoienttous cachies, Daire montat sour le cheval, sor lequeile
ilh devoit lendemain venir la awec les altres. Et quant li cheval veit le
jumente, si commenchat a salhir et a frappeir; adont fist Daire son tour,
puis revient a son hosteil, qui pres de la en le frontier del plache estoit,
puis fist oisteir le jemente et revenir. — Et lendemain , quant ilh fut temps
et les altres prinches furent monteis sour leurs chevals, Daire montat sour
son cheval, puis vinrent en la plache devant le palais royal; mains aussi-
toist que li cheval Daire chosit * le lieu ou ilh veit le jumente, ilh Ten
resovient, et commenchat a hennir mult fort et a frappeir et a sailhir,
presque ilh ne gettoit Daire a terre. Quant les altres prinches electeurs Foi. wr*.
veirent chu , se dessent que chu estoit grant myracle et grans signifianche
que chis cheval soy mentenoit enssi. Adont fut Daire coronneis a roy de
Babylone et de Persie, et regnat L ans \ — Item, Tan LXIX, en jenvier 4 ,
morut Aurelian, li dus de Galle; si regnat apres luy son fis, qui oit nom oedusdeGaiu.
Avrengnas, et regnat XIIII ans. Item, Tan LXX, commandat li roy Daire a
Zorobabel qu'ilh fesist reedifiier la citeit et le temple de Jherusalem, et, se La uconde jhemsa-
nuls le voloit de riens enpechier, qu'ilh fust tantoist ochis; car ilh avoit mapdement i« roy
voweit a Dieu des Juys que, s'ilh astoit roy, que il le lairoit refaire entire- h£™ p * r
ment. Quant li peuple d'Ysrael entendit la bonne volenteit de roy Daire,
si soy retrahirent vers Jherusalem, et commencharent a parfaire l'ovraige
Si avient que ilh avoit. B. li royame de Egipte , si qu'il fut rois de III
Sans doute pour coisit. aoercut. decouvrit. rovalme. B.
13
1 Si avient que ilh avoit. B. li royame de Egipte , si qu'i
* Sans doute pour coisii, apercut, decouvrit. royalme. B.
8 Et regnat par I'espasse de L ans, et oit avecque 4 Le I III 9 jour de jenvier. B.
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98 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
qu'ilh avoient commenchiet devant, al temps le roy Cyrus; et fut parfais
Le scconde dieause do dedens LXX1II ans. Si futadont celebree la seconde dicause.
Sour 1'an LXXV11I morut li VII 6 emperere de Rom me, Tarquinius li
Tous ies tourmens fu- Orgulheux : chis trovat a son temps toules les manieres des tormens ,
rent aviseis a chi ° *
temps. chaynes, exilh , chartres et ceppes, la ons butoit les pies et les jambes des
malfaitoirs. Ilh morut sens heures, car une effoudre avoit ochis son fis
Saldones, et Tharquinus, son altre fis, estoit forbanis fours de Rom me
Lucreciefutdeforchie. sens rapelleir, por tant quilh avoit corrompue et violeit Lucrecie a forche,
qui estoit une noble femme et de grant linage. Se sen plendit ladil damme
apres a son peire, qui astoit I des plus grans senateurs de Romme. et a son
marit awec et a ses parens; et apres soy tuat por la doleur qu'el oit del
honte. Et Tarquinius, qui astoit banis, si doubtat les amis de la damme,
si sen alat a Porcerum, le roy de Glusine ', et s'aloiat a luy ; et ilh ly oit
encovent de luy a aidier contre les Romans. — Si assemblat grans gens de
Tarquiniusii vu«em- Tusquayne, son pays, et d'altres, et se • vient contre les Romans de chi al
F y dierain. rivage del Tybre entour Janicle. Si en orent les Romans grant paour; mains
les Romans fisent tant qu'ilh orent pais a li. Si alat assegier Aretines s . Et
Wierbel, la damme le filhe lemperere, astoit mariee; si astoit son maris le
roy Alibrons d'Argenel *. — Quant Tarquinius li Orgulheux fut mors, si
chi faiirenties empe- defallirent les empereurs, et cessat leur regnation, qui avoient regneit H c
avoient regneitiieet et II 1 1 ans; si ordinont les Romans et les senateurs de faire des consoles.
1111 ans. ,
chicommencharenties Chi endroit cessarent les empereres a regneir. Si ordinarent les senateurs
a°re^ne7r,et regno"! et li peuple des Romans qui sieroient governeis par II consules, qui regne-
Jai?. ue8a UIUS *" roient al manere de roys d'an en an, assavoir chascon an I noveal awec
I des vies, et que nuls ne le poroit estre que II ans en ordene, car li I qui
dcmoroit awec le noveal esluit estoit pour luy instruire; liqueile guberna-
tion durat jusques al temps de Julius Gesare emperere. — Item, les promirs
prinches qui governont furenl nommeis Luciun et Brutun. Ghes dois gover-
narental manere de roys I an, et fut osteis li uns; si regnat apres encor li
altre I an awec I noveal, que ons enlist. — Et deveis bien savoir que les
senateurs, et cheaux qui chu ordinarent, lassoient demoreir chascons II ans,
aflin que li vies informast le noveal de la loy de Romme ; et oussi ne
1 Pour Porsenna ct Cliisium. * Le manuscrit B porte seulemcnt !e nom <T^-
2 Le dans le MS. librons.
3 Sans doulc Arrelium.
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LIVRE PREMIER. 99
poloient demoreir plus de II ans, por tan I que ons ne voloit mie que por la iihfutordiueiiqueiet
long demoree ilh mootassent en orguelh por la domination. Et y avoit une "»»««* que u an*,
. • i7 • . .. . afBn qu'ilh ne nion-
altre raison que ons en y mettoit 11, qui astoit et fut teue : se h uns en fait *«»<*« « D orgueib.
de la loy ou del common profit excedoit ou pou ou trop, qui li altre son
compangnon le restrendoit. Romme adont lenoit a paine jusques a XV pires
imperials; se destinct-ons ches pires I somme por I mil en teile manere
que maintenant en alcon lieu ons atermine les bonnirs de terre; mains nos
ne trovons mie plus cleirement chesti fait que dit est. — Item, Tan 1111 st *
et II, morut li dus de Galle Avrengnas, qui a la mort priat son fis Yborus Dc dUb de Ga,,e -
qu'ilh fondast une citeit deleis le casteal de Clermont, que son pere Orliens
avoit fondeit; et ilh le fist. Quant li dus Avrengnas fut mors, si fut fais dus
Yborus, son fis* qui regnat XL ans. — Item, Tan 1III" et 111, morut a pi ^*°™ s morut ■
Romme Pictagoras, le philosophe. Item, Fan I11I XX et VIII, fondat Yborus
la citeit deleis le casteal de Clermont, et le nommat Clermont, enssi que
son pere li avoit priiet; puis le donnat a I chevalier qui oit nom Ylion, a
cuy son pere li avoit chargeit del donneir. Et chi prinche Ylion, quant
ilh oit la citeit, portant qu'ilh avoit pou de terre, si demandat entour ' terre
a due Yborus; et li dus Ten donnat X liewes entour sa citeit. Quand Ylion
oit tant de terre que ilh li plaisit, portant que Yborus li avoit donneit al
requeste de son pere Avrengnas , ilh apellat sa terre et son pays Avergne , i>« pays de Avergne
* . ° . ... . iiijA qui prist son noma
et encors le nom-ons Avergne; mains puisedit conquisent les dus d Avergne J«c de Gaiie.
plus avant terre que Ylion n'en awist donnet, et y furent puis fondeit plu-
seurs bels citeis.
Enssi com je vos dis fut Avergne commenchie, et prist enssi son nom a
due de Galle; si est puis mullipliie fortement. — Item, Tan MI" et XII, fut
nombreit li peuple de Romme a X m hommes d'armes. En eel an furent les
Egyptiens rebelles a roy Daire, qui astoit leurs sires; si enviat sour eaux
son fis Serses, qui tous les desconfist, et remist leurs terres en la poisanche
le roy Daire son pere. — Item, Tan XCIII, morurent par venien a Romme
Ambalay et Ephesone *, II philosophes , que ons donnat a boire en une
chartre ou ilh gisoient prisonnirs. Item, Tan XCVIII, morut li prinche
Ylion d' Avergne, si fut prinche apres luy son fis Gricoles. — Item, Tan
1 Jncors. B. caches sous ccs deux noms.
9 Jignore quels peuvent etre les personnages
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100 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
del transmigration de Baby lone cent, adjondit li vasal Serses le royalme
de Egypte a la royalme de Baby lone et de Persie, com ilh astoit devant.
Ly roy Daire a vu« m Item, Tan C et 1 , assemblat li roy Daire etson fis Serses les oust del regne
homines enlrat en Si- JrfcLI t w\ • i r»
fuiMbls 61 fin ' lh y Baby lone, de Persie et d'Egypte, qui furent nombreis a VII C milhes
hommes, et entrat en la terre de Silhie por mettre en tregut a luy ; mains
la ly avient grand encombrier, car quant ses batelhirs l soy durent assem-
bled, se li prist si grant pavour qu'ilh se mettit al fuir; et se perdit bien
HI I" milhes hommes, et revient enssi en Persie. — Item, Fan C et 111
L "V?o ?to?d?M q ci? rasem klat W ro y Daire grant gens, et entrat en la terre de Machedone,et
done - le conqucstat tout, et ochist en la batalhe le roy Maratoine Lachedomenes \
Et la oit mult de batalhe Daire encontre chascon; mains al derain fut Daire
desconfis par le fis Lachedomenes, qui enssi astoit nommeis Lachedomenes.
Et fut mors des gens le roy Daire Il c milhes hommes; si s 'enfuit par naves,
si,,iie - et ralat en Babylone qui marchisoit a Sithie. — Sithie at pueli viel 5 , et
siet en Orient, et est bien enclouse; car a Tunc costeit* est la mere et a
(autre les montagnes de Rixsor s ; al dos at Asie et le fluus de Thanase ',
Enchispaysatoitpiu- el a Fautre costeit, al promier y habitat Magoge, le fis Japhet. Et se dient
saigesgens. alcons que alcon fois y oit mult de sages gens et paisiebles qui ne labu-
roient point les terres, car ilh ne le savoient faire, et ne fasoient nulle
pechies; ilh n'avoient nulles mainsons, et mangnoient lac et myel, et as-
Le merveihe de gens toient vestis de peals de biestes. et avoient asseis d'or et d'argent et de
de pays de Sithie. m r ' # ...
pieres prechieux et tout altre crasse 7 ; et si ne convotoient mie les biens
d'altruy, car ilh astoient tous riches. Ilh ne soy melloient point de luxure
par fornication ou adulteire, mains a leurs femmes tant seulement. A nul
emperere ne sont subgis. Apres, enssi que pluseurs dient, ilh fut jadit unc
l,h seurTfo?8 fi i r e e 8 n io p, de * em P s c I ue ' es 8 ens ^ e c ^* s P a y s f ur ^nt si plains de crualteit, qu'ilh man-
Babiione. gnoient char humaine et bevoient leur sane. Ilh fisent fuir Daire, le roy de
Babylone et de Persie, mult de fois, trop laidement desconfis; et perdit
1 Batailhes. B. 5 Rixti. B. Cela indiquerait-il les monies fit-
1 Cette phrase est la meroe dans les deux textes. phaei?
11 faut prubablement lire : el ochist en la batalhe ' Le Tanais?
Maratoine le roy Lachedomenes, 1 Notre chroniqueur substituant parfois le c au
* Puelevicl. B. Je re nonce a interpreter cette g, commea la page 114 ou crasse pays equivauta
expression qui forme deux mots dans notre texte gras pays, jc pense qu'ici allre crasse equivaut a
.et uh seul dans le manuscrit B. autres graces, et que ce dernier mot a le sens de
4 A I'une deleis, B. vivres (grascie en ilalien),et par extension richesses.
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LIVRE PREMIER. 101
mult de ses gens, com nos Favons tochiet desus. A eel temps demoroit
aucy awec Filaistre, se maistre, qui Finstruoit et Faprist; si avoit Feage de Foi. vr.
XVIH ans. — Item, 1'an C et V, entrat ly roy Daire en la terre de Sithie,
et la royne de Amasonie awec li, et orent batalhe ensemble '; mains Daire
fut desconfis, et perdit C ra homines et des femmes a grant nombre, et li u.ire futjiesconru et
meismes fut navreis grandement, dont ons disoit qu'ilh esloit mors; mains
ilh fut enporteis en le regne de Persie, et fut regaris *. Item, Tan C et X,
oil li dus de Galle Yborus unc fis, qui fut nommeis Frisones. — Item,
Fan C et XI, orent les consules de Romme et les Romans grant balalhe
contre Yborus , le ducde Galle. portant qu'ilh voloient les Galliens mettre LydusdeG»iieatd«-
. m ' 7 * # * # ■ ennfift le* consules.
en tregut si que les empereres avoient fait devant par maintes fois; et ortant
y gangnarent cheaux, car ilh furent desconfis et mors, et s'enfuirent tristes
et dolens vers Romme.
Sour Fan C el XIII, murmeront les Romans entre eaux sour les con-
sules et les senateurs por celle desconfiture de Galle, et disoient qu'ilh y
avoit oyut trahison; de quoy les consules et senateurs en fisent 1I C mettre
a mort; de cheaux qui avoient dit si fais parleirs; si soy taisirent les altres
unc pou de temps. — Item, Fan C et XV, asloient prophetisant en Alhenes
mult de prophetes et philosophes de grant auctoriteit, sicom : Soffbcles,
Euripides, Dyagoras, Bacilides et pluseurs altres. Item, Tan G et XVI,
assemblat li roy Daire grant gens de tout pays'; si entrat en la terre de
Sithie, et oil batalhe a eaux par pluseurs fois; si perdit mult de ses sens, et Ly roy Daire on grant
• ♦ * • •■ vii f _._ D . balalbe a ches de
fut navreis a eel fois tenement qu ilh en mo rut dedens III ans apres; mains sahie, et y perdit
* m * mult , car tin en mo*
oncques dedens les trois ans ne soy levat de son lit. Si fut apres luy roy de «■••
Persie et d'Egypte Serses, son fis li anneis, qui regnat XX ans: et son altre
fis plus jovenes, qui fut nommeis Daire, chis fut roy de Baby lone. —
Item, Fan G et XVIII , morut li dus de Galle Yborus; si regnat son fis apres oe Gaiie.
XXVIII ans. Item, Fan C et XXV, morut ly roy Serses de Persie; si regnat
apres son fis Arthabanus VIII mois tant seulement, et apres regnat son
frere, qui a nom Arlharserses. — Item, Fan C et XXVII, visquoit uns phi—
losophe * qui oit a nom Socrates, qui fuit puis li maistre Plato. Item, Fan G Socrates.
et XXIX, defalit a cleir jour le clarteit de soleal. Item, Fan G et XXXII.
fondat li dus de Galle une citeit en Campangne, qu'ilh nommat Frise^ %«£iSSll!
1 Orent batailhe li une pucple d Vautre. B. * De tous set paiis. B.
* Et fuX garU en la fin. B. * Unc philosophes fut ttcis. B.
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102 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
solonc son nom, el le peupliat bien de gens; se les nommat Frisons, el
donnal la citeit a unc prinche qui oit nom Ygonas. Item, Ian C et XXXVI,
oe E»dra». ful li valhans prophele Esdras , qui fut mult endoctrineis es libres de la loy ,
et amendat pluseurs libres qui avoient esleit ars a la destruction de Jheru-
salem; si trovat ensi des novelles let Ires en Hebrie, qui encors sont en
usaige. — Item , Tan G et XXXIX, envoiarent les Romans en Alhenes, por
aporteir les loys que les Grigois tenoient adont; et furent aportees a Romme
en escript en XII tables. — Item, Tan C et XL1III, servoit uns puissans
lions de la lignie d'Ysrael , qui oit nom Neemias a roy de Persie , liqueis
M ?^t p diiraMr «o ^eemias priat al roy qui III ly donnast congier de raleir en Jherusalem
jherusaicmporrair« p OUr f a i re enclore la citeit de murs: et li roy li otriat volen tiers, car illi
encloure la cileil. * 7 . „
astoit proidhoms. Et chis en ralat et rencloyt la citeit '.
Sour Fan CXLVIH, laissat li prinche Ygonas la citeit de Frise en Cam-
pagne, portant qu'ilh avoit pou de terre, et sen allont awec luy ses gens.
lant qu'ilh vient oultres les Palus Meotides, ou ilh trovat beal lieu et qui
YionasapeiM ies gens bien ly plaisit; si fondat la II citeis, et appelat Tune Ygonas, solonc son
de son pavs Frisons. .
nom, et 1'aulre Fresnie; et nommat son pays Frise, et ses gens Frisons,
solonc le nom de sa citeit qu'ilh avoit laisiet en Champagne. — Item, Tan G
Deroy Daire. t et XL1X, morut li roy Daire de Babylone, li secon de eel nom, qui avoit
regneit XXXIIII ans; si fut apres roy Daire ly thier, son fis, qui regnal
Foi. «7 *°. LXX ans. Item , Tan C et L, morut ly dus de Galle Frisones. Si regnat apres
son fis Flambo XL VIII an$, et prist a femme * Helarich , la fille de Alarich ,
unc senateur de Romme; mains elle morut eel an meisme; se reprist la
# soreur Gapola le due de Burgongne, qui fut nommee Drepola. — Item, l'an
C et LVI furent refaite les portes de Jherusalem. Item, Tan CLVIII, fut
Ypomas fut nei*. neis Ypocras, qui fut li soverans maistre de phisique. Item, Fan C et LX,
assemblat li roy Daire grans gens jusques a I1I C milh hommes, et en alat
ne?. batches le roy en Sithie 5 , et oit batalhe a eaux et les desconfit: et les recachat en leurs
" lau 4 , qui tant astoit fors que onques nuls n'y pot entreir, excepleit ly roy
Cyrus, Clarius, Daire et Alixandre: car ly roy Alixandre y entrat enssi
com ons dirat a son temps chi-apres. — Quant ilh veit qu'ilh avoit desconfis
1 La cileil forlement. B. S'il faut lire Irau , version <Tun de nos deux textes ,
* El prisl a femme ran C ct LI II. B. je dirai que e'est la premiere fois que je le vois
5 En Sithie el les eitvaiit, $i oil batailhe. B. employe pour designer un chateau fort ou une for-
4 Trau. B. Le sens du mot lau m'est inconnu. teressc.
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LIVRE PREMIER. 103
les Sithiens, et qu'ilh furent raleis en leur fortterre *, se les assegat de plus
pres, et seil la XVIII ans. — Item, Tan CLXII, li peuple Sabeiens ont
envayt les Romans asprement et en appert, por quoy les Romans fisent unc
dicteur qui passe et voise devant le peieur * des consules, car ilh avoient
grant liayme aux consules por les gens quilh avoient fait decolleir et
morir, si com nos avons dit chi-desus.
A eel temps s'escafatsi fort ly peuples de Rom me, que grant discention
mo n tat entre le peuple et les senateurs; et li peuple ' at fait des juges qu'ilz Les promir* juges uu
ont nommeit tribuni, qui avoient ortant de poioir * com les consules; les-
queils tribuni yront devant les consules entirement. — A eel temps li dus
de Galle Flambo^ et awec li Zenone et Bremo, ses dois frere, soy com- Lydnjde6jii««tdw-
# 7 7 J confis les Romans, et
batirent aux Romans sour la riviere de Albe B , si furent les Romans des- fut p™* »•»»••
confis et recachies en Romme; et fut par les Gallyens prise Romme, fours
que li capitole, lequeile ilh euwissent aussi gangnyet, si ne fust le cris des
gaites • qui commencharent a crier si fortement que les Romans, qui dor-
moient grassement por la lasseur qu'ilh avoient oyut, soy envoilhont al
grant clameur de ches gaites. Adont sorvinrent les Romans et corurent sus
les Gallyens qui astoient en Romme; mains li dus Flambo se dobtat que
ons ne tendist les chaynes de rues, et portant oussi qu'ilh astoit nuit et
qu'ilh ne savoient les voies par la citeit, si bien que fesoient les Romans,
si soy retrahit aux champs por le plus segure, et lendemain revient vers
son pays. — Item, Tan CLXIII, orent les Romans grant balalhe a cheaux
de Penestre 7 la citeit; se furent cheaux de Penestre desconfis droit sor la
riviere de Albe et leur citeit de Penestre awec VII altres qui pertinoient a *
eaux furent gangnies, et adjoute aux Romans. — A eel temps fut grant
pestilenche et mortaliteit a Romme; et si avient que en la moyneteit 8 de pestiienrbe.
la citeit de Romme est la terre subitement overt, enssi que uns infers, et
la apparut mervelhe, cir ilh en issit teil fleireur et pueur que ilh oehist Dei grant fiaireur qui
mult de gens enssi qu'ilh est noteis desus, la ilh parolle des palais*. En Romme.
1 Sans doute pour forlerc&tc r car cela ne forme gulier que notre chroniqueur, si enclin au mer-
qu'un seul mot. vcilleux, ne parle pas des oies sacrees.
* Poioir. B. T Sans doute Pnbicsle.
* Et finalement li peuple. B.. * Milieu. Nous avons deja rencontre avec le
4 A treteil poioir. B. meme sens les expressions moyne et moyene.
* Pour Allia. • Allusion a un passage de la p. 63.
* Gardes , gens qui guettaicnt. II est assez sin-
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iOi CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
eel an meisme, oit grant batalhe entre le due de Borgongne Gapola et le
prinehe de Cleremont; si fut desconfis Gapola, li due, et oehis. — Item,
Ian CLXIIII, revinrenl a Romme les Gallyens com devant a grant gens; si
avint que I prinehe de Galle prist une batalhe a iencontre I noble prinehe
de Romme corps a corps, et soy combatirent longement; si oit li romans,
qui fut nommeis George f , la victoire; et li gallyens, qui oit nom Sanse,
DeiTorquin^deRom- fut ochis. George prist adont une torquen dor, que li mors avoit en son
coul , et le mist en son coul ; et dedont en avant chis romans et tous cheaux
Fui. wr». de son lynage furent appelleis Torquins. — Et adont li dus de Galle at
litanm?. 1 " assegonl assegiet Romme, el y seiit pres de demy an; mains ilh n'y fist riens; si
ardit les vilhes et le pays la-entour, et apres revient en son pays, car les
Romans reftisoient prendre batalhe a eaux, portaut qu'ilh astoient si poi-
sans et si viclorieux.
Fortement tient le siege devant Sithe ' le roy Daire de Babylone, Tan
CLXV; et y avoit ja siiet 1111 ans. Si avoit oyut sovent batalhe a Iencontre
d'eaux, et les avoit desconfis par pluseurs fois. Or avient que Tan CLXV1
Gram batalhe desroys oit une batalhe centre eaux; si furent ly roy Daire et ses gens presque
a » } one. desconfis, et si perdirent II hauls prinches, entre lesqueis li cusiens Daire,
le roy Artaserses, y fut mors; mains en la fien obtient-ilh la victoire.
Quant li roy Artaserses de Persie fut mors, si fut apres coronneis son fis
Serses; mains ilh fut ochis en une altre batalhe dedens II mois apres, puis
fut fais roy Zodianus, son frere, qui fut oussi ochis de ladit guerre dedens
VII mois apres. Et adont fut li plus jovene des III freres fais roy, ly queis
avoit a nom Daire; chis regnat XVIII ans. — Item, Fan CLXVII, fut neis
Dragoles 8 , li fis le dus de Galle; mains ilh morut eel an meisme. — Et,
puto rut neis. Tan CLX1X, fut neis Plato, le philosophe, qui fut li desciple Socrates et le
maistre Aristol. Item, Tan CLXX, oit une grant batalhe entre le roy Daire
de Babylone et cheaux de Asie, — mains porlant que ons congnostre plus
Grant bataihe entre commonnement Babylone, se l'escrisons-nos a l'encontre des Sithiens, —
thiens. ' e ' qui fut forte et malasie et enssi aventureuse *. Si furent les Sithiens tous
desconfis et ochis a grant planteit, et refuirent en leur tau *•; et li rfcy et
1 Singuliere transformation du nom de Man- * Aventureme, el fut le VI jour de mois de oc-
lius. tembre. B.
* Sithie. B. * Trau. B.
5 Vregoles. B.
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LIVRE PREMIER. 103
ses gens entrarent awec eaux en leur fort pays bien parfont 1 ; mains li
paysastoit si grans et si fors, enssi com nos avons dit desus, que chu ne les
tochat gaire, et encordont astoient endit pays plus de XII liewes, et fisent
la siege. — L'an CLXXIH , oit uns roy en Greche qui avoit I fis, qui astoit
nommeis Marche, qui astoit al eaige de XXIII ans. Chis priat a son peA
que ilh li donnast terre, ou ilh posist faire et fondeir aucuns pays, et ly roy
li otriat. Adont chis se trahit par mere en parties septentrionals, ou ilh
fondat une citeit qui nommat Apellopel , et habitat dedens li et ses gens tout
sa vie; mains ilh neviscat que IIII ans, si en fut apres li son fis sires, qui
fut nommeis Dam. — Item, Fan CLXXVIII, fondat II citeis, l'une nomat
SersesV, et Fautre Hoples; et fondat oussi V casteals. Item, l'an CLXXIX,
furent cheaux d'Egypte si rebelle 5 a roy Dai re de Persie et d'Egypte, por-
tant qu'ilh ne venoit point vers eaux prendre la possession del regne, ains
demoroit tou quois en Orient en la terre de Sithie, por laquiele cause ilh
ont fait unc roy, qui oit nom Amaritecas, qui regnat sour eaux VI ans. Et
en eel an meisme revient li roy Da ire et ses oust de Sithie, car ilh ny
poioit rien faire; se laiat toutes ses gens cascons raleir en son pays. Si fut G u « r r e ent ™ ,e , r °y
dit al roy Daire de Persie et d'Egypte que les Egyptiens avoient faite I roy; «▼«»•
si en fut corochies, et assemblat grant gens; si descendit en Egypte Can
CLXXXI, si oit batalhe a eaux, si oit Daire victoir, et furent les Egyptiens
desconfis, si s'enfuirent en leur citeit. — Item, Fan CLXXXIII, fondat Dam
deseurdit une citeit si grant, quelle tenoit bien V liewes de circuit; et quant
elle fut edifiie, se ne trovat gens qui dedens vosissent habiteir, portant Dam, iefi» i« rorde
qu'ilh avoient fait leur habitation dedens les altres citeis; portant ne fut ga7me e ' fon - dal ai ~
mie habilee le quarte part.
Grant fut la citeit fondee et vuid de gens, sique li prinche deseurdit le
nomat Nalgarnie, portant quelle estoit de gens vuid et raal garnie. Adont
priarent les barons de eel pays a Dam qu'ilh vosist donneir nom a son
pays, enssi com les aultres nations avoient fait, et ilh dest que ilh seroit
nommeis solonc son nom et le nom son pere, qui avoient esteis les II pre-
mirs fondateurs, et ly sien nom yroit devant; si mettit les II nommes en chisDam apeiut son
l ■• *• • r « * t\ L • 'ir < P a y* Dannemarche
une seule diction, qui fut nommee Danemarche; mains ilh nomat ses gens ouDanoii.
1 Bien avant. 8 RelU, par erreur sans doute dans noire ma-
f Sersc. B. nuscrit.
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106
CHRONIQUE DB JEAN D'OUTREMEUSE.
Fol 28 v».
Chis Assuerus roy te-
noit Persie et Judee.
De Hester.
De roy danois.
Grant guerre entre let
Grigois et Persiens.
Socrates morut.
De dus de Galle.
Arislot.
Movemeut de terre.
De prinche dez Da-
nois et de leur pro-
micr amachour.
Danois, solonc son nom, qui avoit a nom Dan. — Item, I'an CLXXXV,
morut Daire, ly roy de Persie; si fut roy apres son fis, qui oit nom As-
suerus, qui regnal XL ans. Chi roy Assuerus tenoit le royalme de Persie
et de Judee jusqu'cn Egypte et jusqu'en Etyoppe. Et encors astoit-il roy
4'Egypte, mains ilh avoient fait uns altre, si com dit est; si avoit en son
regne C et XXVII provinches. A eel temps avient le histoire de Hester, qui
se contient en la bible \ qui trop seroit long a racompteir. — Item , Tan
CLXXXV1II, morut Dam, li prinche de Danemarche, qui avoit regneit
XI ans. Apres regnat son fis Aronguies \ Item, I'an GXGI, prist li roy As-
suerus de Persie une femme, qui fut li une des Giles d'Ysrael, qui oit nom
Hester : par cest reyne fut puis deporleis ' de mort li peuple d'Israel qui
par le roy astoit commandeit a destruire. — Item, Tan CIIII" et XIII, oit
grant batalhe entre le roy Ylion de Gresche et le roy Assuerus de Persie^
por la terre de Judee que li roy Assuerus tenoit; et li roy Ylion disoit que
ilh le devoit tenir. En eel balalhe fut ochis li roy Ylion et V m hommes de
ses gens, et les altres s'enfuirent com desconfis; et les Grigois fisent I altre
roy de Marcheneaux, le fis de Ylion. — Item, Fan CXCV, morut par venym
Socrates, qui astoit I mult bon proidhomme, et n'oit oncques cure des
biens temporeis ne des richeces , portant que les riceches ensongnes trop
les cuers des personnes, et oiste de estudier et des scienches acquerre et
aprendre. Item, Tan GXGVUI, morut li dus de Galle Flarabo*; si fut dus
apres son fis Flandroc, qui regnat XXXIII ans.
Apres, sour I'an del transmigration de Babylone II , fut neis Aristot, ly
valhan philosophe , qui tous les altres sourinontat de bonne eloqnenche.
Item, I'an 11° et II. fut si grant movement de terre que pluseurs cileis
chairent en plaine. — Item, Fan 11° et VI, fut ochis li prinche de Dane-
marche en Saxongne en une batalhe; si fut prinche apres son fis Egen.
Item, I'an Il c et IX, morut Egen, li prinche de Danemarche \ Adont
s'ayisarent les barons de pays que leur pays astoit bien -poissanspor avoir I
plus grans saingnour que I prinche; se fisent 1 amaohour * de Ebroch, le
1 Avient li histoire qui est contenue en tivre Ues-
ter. B.
* Orongniez. B.
« Respiteit. B.
4 Le thier jour de marcJie , ajoute le manu-
scrit B.
5 Ce mot, employe frequemment dans les do-
cuments du moyen Age, emporle lidee dun com-
mandement superieur. Plus loin, p. i 12, apparalt
comme synonyme le mot amyral, aussi employe
sous la forme atnirant*
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LIVRE PREMIER. 107
fis Egen. En eel an avient si grant pestilenche el mortaliteit a Romme et la Mortaiiieu.
entour, que les gens moroient subitement parmy les rues; si avient que le
X e jour de fevrier qu'ilh y nasquit si grant flaireur que les gens soy refor-
eharent de morir plus fort que devanl. — Item, Tan II C et XIIIl, morut
li dus de Borgongne Arbrans 1 ; si fut apres dus son fis Areola \ Item, De Borgongne.
Tan II C et XV1U , commenchat Aristot a estre disciple a Plato son maislre. Ariitot.
Item, 1'an II C et XIX, morut li roy d'Asie et de Babylone qui fut nomeis
Daire li thier, et fut tres-bon chevalier, et avoit regneit LXX ans valham- Deroy Daire.
ment; si fut roy apres luy Daire son fis, li quars de chi nom, li queis
regnat XLII ans. Item, Tan 11° et XXII II, morut Assuerus, li roy de Persie; *>e roy A«»ueru S .
si fut apres roy son fis Echus, liqueis regnat XVIII ans. — Item, Tan II C
et XXIX, fut fais roy de Machedone Philippe, qui fut li pere Alixandre,
liqueis Philippe regnat XXVI ans. Item, Tan 1I C el XXXI, morut Flan-
droch, li dus de Galle; si regnat son fis apres LIX ans. Item, Fan II C et De due de Gaiie.
XXXIII, fut neis Alixandre, le fis Phelippe de Machedoyne, de la royne DAiixaodre ie Gran.
Olimpiades ; chis Alixandre fut li plus excellens en proieche et en largeche
que nuls qui oncques euwist esteit devant luy puis le temps Ector de Troie,
et qui enssi fut apres luy jusques al temps Carle le gran, emperere de
Romme, et roy d'AUemagne et de Franche, a cuy temps ilh regnat la fleur
de chevalerie. — Item, Tan 1I C et XXXVII , fondat li dus Turrus de Galle Ly<iu»deGaHefoodat
7 1 Tours en Torenche.
une citeit, laqueile ilh apelat solonc son nom Tours, et le pays a tour
Torene; et donnat la citeit et le pays a I sien chevalier qui oit nom Fle-
tique; chis en fut li promiers prinche. — Item, Tan II C et XXXVIII, recon-
quist ly roy Daire le royalme d'Egypte, et en refuit roy enssi com ses
anlicesseurs; car li roy Daire, son cusiens, I'avoit perdut portant qu'ilh
avoit esteit en Sithie awec le roy Daire le pere chesti. — Item, Tan Il c XLV
morut Plato.
Sor Fan II C et XLVII, fut Jaddus, uns philosophes, fais sovrains evesques Ja ^®™ 9quede Jbe "
de Jherusalem. — Item, Fan II C LI, morut ly roy Echus * de Persie; sy fut m. «9r«.
roy apres luy son fis Arges*, qui regnat III ans. En chesti an fut nombreis De ny de Pers,e *
li peuple de Romme; si fut troveis que dedens la citeit O et LX m hommes \
Item, Ian 11° et LXV, morut Philipe, ly roy de Machedone; si fut apres roy
1 Arban*. B. * PIul6t Arses.
* Dertola. B. * II manque, parait-il, un verbe a cctte phrase :
* Ochus, Artaxerxes HI. i7 y avail, ou quelque chose de semblable.
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i08 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
Aiixandre fut roy. son fis Alixandre. Item, Tan ll c LVI, morut li promier amachour de Dane-
D derD« e o r ir achour marche, Ebroch; si fut apres amachour son fis Galiies. — En eel an com-
menchat Alixandre a regnier et a conquerre tout le pays atour de luy el
altrepart; si oit sa promier balalhe le XIII 6 jour de jenvier encontre Daire,
le roy de Babylone, de Persie et d'Egypte; car Arges, son cusiens, as toil
II ans par devant mors sens heurs; sique li regne astoit venue a roy Daire.
En cesti batalhe fut ly roy Daire desconfis , et la oit ly roy Alixandre sa
promier victoir, et avoit adont l'eaige de XXIIII ans imparfais. A ceste fois
conquisl li roy Alixandre pluseurs citeis del royalme d'Asie. — Item , Tan
Alixandre jiorut ho- n° LVI1 , assegai li roy Alixandre la citeit de Thir, et la li fut racompleit
jberusaiem. que Jaddus, li soverains evesque de Jherusalem estoit del ayde le roy Daire
eneontre luy, et avoit faite a luy certains alianches por luy greveir. Quant
Alixandre entendit teiles novelles, si prist II nobles messagiers et les en-
voiat en Jherusalem eaux bien infourmeis del fais, et les rechergat que ilh
desissent a levesque Jaddus que ilh cessaist de aidier le roy Daire encon-
tre ly, et li envoiaste socour de gens et des vitalhes: et, se tout chu ilh ne
faisoit , ilh ly juroil sour son Dieu, en cuy ilh creioit, que la citeit de Jhe-
rusalem, qui siene estoit, sieroit la premiere assegie de part ly, apres la
citeit de Thir.
Respond par levesque. Quant Jaddus, ly soverain evesque de Jherusalem, entendit les mes-
sagiers Alixandre, comment ilh li mandoit par ses lettres saieles de son
propre seial secreit, si fut mull esbahis, et non porquant ilh remandal a
roy Alixandre qu'ilh soy vosist deporteir de la citeit de Jherusalem a des-
truire, car ilh astoit veriteit que en cas ou ilh le voroifc destruire, que ons
ne li poroit deffendre ne luy contresteir; mains ilh astoient alloyes si fort
por seriment entre luy et ly roy Daire, que ilh ne poioit eistre encontre
li en nulle manere, ne luy grever tanl qu'ilh sieroit en vie; et, se chest
alianche ne fuste en teile manere faite entre eaux, ilh fesist volentier chu
Alixandre fut corocbiet qu'ilh li mandoit : enssi remandat Jaddus a Alixandre. — Quant Alixandre
Fentendit, si en fut mult corochiet, et fist tantoist ses gens movoir et pren-
dre leur chemyn vers Jherusalem. Adont le nonchat I hons alle evesque,
dont ilh en fut mult esbahis, car ilh doubtoit Alixandre, et n 'avoit oussi
cure de fauseir son seriment del alianche; si ne soy savoit conselhier com-
C °clieil V dl °jhe°r n usl- men t *'h en poroit ovreir que sa citeit fust si garnie et gardee del destruire,
Ai?xa f ndreieGr e an de sens ^ r * s * er son seriment. Si soy porpensat d apelleir son peuple, et l'a pel-
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LiVRE PREMIER. 109
lat par-devant li, et les menat oreir en temple Salmon, et la fisent-ilh tant
de priier a Dieu, que Dieu les vosist jetteir de chis perilhe; el Dieu, qui
leurs proiers oiit, donna t a cognostre a Jaddus qu'ilh fesist ovrir toutes les
portes de Jherusalem, et qu'ilh fust tantoist revestis des aournemens Aaron,
el enssi fesist revestir awec ly tous les preistre de la loy, puis yssissenl de
la cileit et alassent tous a piet encontre le roy Alixandre, quant ilh appro*
cheroit le citeit de Jherusalem et ilh vieroit le myracle que Dieu y feroit
por 1'amour de luy. Tantoist le fist li evesque et les preistres, enssi com
dit est. — Et , quant ly roy Alixandre et sa chevalerie aprepont ' la citeit de
Jherusalem, li evesque et les prieslres soy misent tous a piet al chemien.
Quant Alixandre veil chu, et voit l'evesque qui devant venoit tous aour-
neis, el ilh recognuit que ch'astoient de sains vestimens Aaron, le promier
priestre de la loy, si desquendit de Bucifal son cheval, et soy mist a terre
en genols encontre l'evesque, de quoy ses prinches orent mult grant mer-
velhes, car ilh quidarent qu'ilh fust decheus ou enchanteis: si corurent
vers luy et ly demandont porquoy ilh obeissoit tant al evesque, puisqu'ilh
le voloit destruire et son pays tollir. — Quant li roy Alixandre entendit ses
barons, si les at dit que ilh ne le faisoit mie por le personne del evesque, Foi.»v.
mains por honneur porteir a cheluy de cuy ilh font 1'oflisce, car ilh est
revestis et aourneis en teile manere qu'ilh dewist faire oblation. — Et
encor leur dest Alixandre qui * Dieu ly astoit enssi aparus revestis anchois coment Dieu s « Ppa .
,•■• • i m* i i »»n •• • i • i i»ii i rut a Alixandre.
qu ilh soy partist de Machedone, et qu ilh li avoit donneit hardueche * de
chu entreprendre qu'ilh avoit entrepris de conquerre la terre d'oultre mere.
— Atant vient Alixandre a l'evesque, et li pardonnat son matalant por
1'amour de Dieu, qui a chu l'avoit espireit, et donnat congier aux enfans AH t " t Ddred fi ^
dTsrael de tenir tous les status de leur loys , enssi que leurs anlicesseurs
les tenoient. Apres chu soy partit Alixandre de Jherusalem; si entrat en la
terre de Samarie, et le conquist al espee : eel terre de Samarie astoit pro-
chaine a la terre de Judee donl Alixandre venoit. — Item, l'an ll c LVUI ,
Apius Claudius, consules de Romme, fisent a Romme la voie d'Apie, et
Arimire en Romanole et Bonivent en Sapinie *. Item, Fan II C et L1X, avient
1 Dq latin appropinquare , approcher. Le ma- Roquefort, qui donnc hardemment.
n user it B portc furent pres de. 4 Sans doute Arimire est la pour Rimini, Roma-
* Sic pour que. note pour Romagne, Bonivent pour Bcnevent et
8 Hardiessc. Cettc forme ne se trouve pas dans Sapinie pour Sabine.
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140 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
l histoid de paons. tout I'hystoire ou li paons fut lueis et voweis de la chevalerie, dont ons al
tant parleit mainte fois, qui Irop long seroit a racompteir. Et, portant
qu'ilh en sont fais des libres qui continent la matere asseis veritable, si
l'avons droit chi lassiet a mettre. — Et deveis savoir que pawons fut ochis,
et li vowe fais le promier jour de may l'an desusdit. Et fut adont commcn-
d« wiboui. ehiet ly usaige que ons fait et tient encor des wilhos * leveir le promier
jour de may, por cest raison que II chevaliers qui amoient une pucelle qui
astoit a chesti fieste, et la pucelle les faisoit semblans d'ameir ambdois, et
elle ne faisoit d'eaux que sa coveture, car elle amoit I altre qui fut nom-
meis Por us, qui astoit roy d'Ynde; et si astoit chis Porus cely qui avoit
trait le pawon. Et, quant li fais fut descovers, si furent apelleis wihos ches
II chevaliers; et furent leveis com wihos, et wihos en leur lengaige , ch'est
en franco is vaut ortant que musars. — Et astoient nommeis les II cheva-
liers musars, qui amoient la pucel, ly unc Cassanius et li altre Balderains f :
et la damoisel astoit nomec Ephesonas. — Je vos racompteroy bien tous
ue Aiixandre ie Gran, les fais de Alixandre, mains ilh n'est pas besongne, car il en est fais des
libres en latin et en franchois qui racomptcnt bien tout la matere veritable.
Plaisist a Dieu que ons ne metist point en franchois giestes moins veri-
table! Et de tous ses fais, qui furent mervelheux et strennueux 8 , et de son
estat en est fais I libre por li mult especial, et portant nos ne parlerons plus
de luy, fours tant seulement la li cas le requierat. — Sachies que li priache
en monde qui plus grevat Alixandre fortement , chu fut li roy Daire, por-
tant qu'il astoit bon chevalier sour tous les altres, et astoit roy de Persie,
d'Aysie et d'Egypte , et avoit mult de gens. Et Alixandre n'awist ja poioir
a ly, si ne fuist chu que Dieu avoit enssi ordineit que Alixandre devoit
toute Orient conquerre, car li roy Daire avoit plus de gens et de noble
chevalerie awec ly II fois que Alixandre n 'avoit. — Si oit balalhe II fois a
ly, dont nous avons dit Tune chi-devant qui fut la promier batalhe que
Alixandre fesist oncques, el la seconde fut Tan II C et LXI. Et la fut Daire
desconfis et ochis awec III C milh hommes de Persie, de Babylone et d'Egyp-
tiens; et a eel seul batalhe gangnat Alixandre les 111 royalmes le roy Daire.
— Adont edifiat li roy Alixandre une citeit mult noble en Egypte qu'ilh
1 Wihos. B. Cocu. Witlot dans Roquefort. * Courageux. Mot fornie directement du latin
* Baldanis. B. strcnuiu.
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LIVRE PREMIER. HI
nommat solonc son nom Alixandre. — Item, l'an II C et LXIIII, conquist Aiinmdre u citeit.
Alixandre tout le royalme d'Ynde que Porus tenoit, qui tant fut bon che-
valier. Item, l'an II C LXV, passat Alixandre avant en desers d'Ynde ou ilh
parlat aux arbres de so lea I et de la lune ', qui li dissent que ilh devoit morir
temprement, por laqueile raison ■ ly roy Alixandre revient en Babilone que
ilh avoit devant chu conquis. Chest Baby lone fut la grant Babylone, ou
la grant tour de Babel fut edifiiet, de laqueile Babylone li roy Da ire et ses
devantrains avoiont esteit roys; et soy clamoient roys d'Asie, por chu que
Babylone estoit li chief ; jasoiche que li roy Cyrus l'abatistet le defigurast, Foi. 30r-.
astoil toudis chief del regne d'Asie et d'Orient. — Item , deveis savoir que
li roy Alixandre oit grant paine et travalhe dedens XII ans qu'ilh regnat Aij*«ndr« conquwi lot
J ^ . . . '* lcrre dc oullre
en conquerant tout la terre d'Orient, c'on dist de oultre mere, qu'ilh con- ■««. el P ui * ro «-
quist toute. Etproposat entres ses barons a conquerre toute Occident, niedis
et septentrion; mains ilh fut ochis par venyn sour l'an 11° LXVIII, a XII
an et demy qu'ilh avoit commenchiet a conquerre, car sa promier con-
quesle fut contre le roy Daire, en cuy regne Alixandre morut 8 ; et morut
le IIII e jour de may, al XXXIIII e ou XXXV* an de son eaige.
Quant Alixandre veit que ilh ly cove no it morir, si devisat tout la terre
qu'ilh avoit conquis en XII ans et VI mois que ilh avoit regneit en XII par-
ties f etles donnat a ses XII prinohes qui l'avoient siervit, et avoient esteit
de son conselhe, qui astoient hauls prinches. Adonc Pholomes * oit Egypte De promier phoKmie*
en son parchon; si en fut roy et regnat XL ans. Chis promirs Pholomes fist
la principal citeit de son regne del citeit d'Alixandre , et trestous les roys
d'Egypte, qui regnarent par long temps apres chesti Pholomes, furent tous
apelleis Pholomes, queil nom qu'ilh euwissent devant. — Item, l'an ll c et
LXX, li roy d'Egypte Pholomes vient en Jherusalem, et fist entendant aux Phoiomesg.ngnatjiie-
enfans dTsrael que ilh venoit por faire sacrificbe al temple Salmon. Se le rUMenipar
lassarent ens entreir, car li peuple quid at que ilh leur desist voir, sique
cheaux qui ne tendoient a nule male; mainS quant ilh fut en la eiteit <le
Jherusalem, enssi que dit est, ilh escriat ses barons qui astoient armeis
1 Sur ccs arbres qui d6voilent l'avenir, voir la * Qui fut tar l'an II* et LV1, ajoute le raanu-
traduction de Touvrage de Dunlop (GeschiclUe der scrit B.
Prosadichtungen) par Liebrecht, p. 34 A f et les 4 C'est bien Torthographe adoptee par noire
auteurs cites dans la note de la p* 503. chroniqueur pour le nom de Ptolemee.
1 Je supplee ee mot d'apres le manuaerit.B.
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112
GHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
De Dannemarche.
Grant liatalhe.
par-desouz leurs chappes, et ses hommes defularent' leurs chappes, et coru-
rent sus cheaux de la citeit par grant trahison enssi com malvais trahitres,
et gangnarent la citeit de Jherusalem. Enssi com je devise fut la citeit
conquise de part le roy Pholomes d'Egy pte , liqueis prist par forche grant
planteit des plus poissans de peuple d'Ysrael, lesqueils ilh fist meneir en
Egypte et mettre en prison a gran destroit, et ordinat une grant partie de
ses gens en la citeit por gardeir qu'ilh ne le perdist. — Item , Tan II C et
LXX1I, Apius Claudius, li senateur et consule de Rome, fist venir en la
citeit de Romme aywe chaide V Item, Fan II C LXXIII1, morut Galien *, li
secons amachour de Danemarche; si fut apres luy amachour son fis qui
fut nommeis Galaffre. Item, Tan II C LXXVII, conquist li roy Pholomes
d'Egypte la royalme de Gypre et la jondit awec son regne. Item, Fan Il c
LXX VH1 , fut fais roy de Surie Silentius \ En chesti an fut coroneis An-
thionus 8 , li roy d'Asie. — Item , Tan II C IIII" et III, oit grant batalhe entre
le roy Silentius de Surie et le roy Anthionus d'Asie. Si fut Anthionus des-
confis et perdit de ses gens XL m hommes; mains ilh s'enfuit, et chu le fist
escapeir del mort; etmaintient puis lone temps la guerre encontre Silen-
tius. En chesti an morut li thirs amachour de Danemarche Galaffre, et
avoit regneit IX ans. — Cliis oit III fis : li anneis fut apelleis Hongrech, li
altre Honleke et li thirs Seleke '. Et fut li anneis Hongrech amachour, car
chu astoit raison; si vorent les II altres freres avoir terre por habiteir; si
priarent a leur frere qu'ilh leur vosist pristeir de ses gens, car ilh voloient
aleir querir I plaisant pays por habiteir, ou ilh edifieroient citeis et cas-
teals: et ilh leur otriat et donnat a chascon d'eaux VI m hommes, puis s'en
alerent.
Lesdis II freres eramment s'en allont en la basse Allemangne, et allarent
toudis avant, et la fondarent chascons d'eaux pluseurs citeis et casteals a
fuison, ou ilh habitarent awec leur peuple chascon en son pays; et apellat
iioniechfondatiepays Honlech son pays Hollande, et Zelech le sien pays Zelande. Et fut chascons
iechzeiandV. 6 "" nommeis amyrals de son pays, et enssi leurs heurs apres eaux. Et furent
DezamiraUdesdispays. c j ies jj p a y S ^ d on t nos avons chi parleit, commenchies a fondeir sour Tan
De Dannemarche.
De Holande et de Ze
laodf.
1 Defublerent. B.
* Jig he chaude. B.
8 Plus haut, p. 108, le chroniqueur a ecrit Go-
Hies.
4 Seleucus.
5 Antiochus.
• Si avient que U anneis Hongrech volt estre
amachour, enti qu'ilh fut, car. B.
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LIVRE PREMIER. 143
«
j]c mi" el ]|jj q U j f u t | j an j e j f on d a tion de Romme 1111° ans et X, et si
fut parfais sour Tan 11° MI" et VIII. Si fut la fais I beal commencement,
mains apres y furent fais mult de beals edifisches par leurs successeurs. —
A eel temps dont nos fesons mension, assavoir sor Fan II C MI** X, fut Foi.sov.
fondee la citeit d'Antyoehe qui siet dela ' mere; et le fondat ly roy Sileueius yoc e u on •••
de Surie. En ehesti an morut Turnus, li dus de Galle, qui avoit regneit De dm de Gaiie.
LIX ans. Chis avoit II fis : ly anneis fut nomeis Brugen , et ly altre Amynus.
Brugen fut dus de Galle , et regnat XV ans , et Amynus fut prinche de la
citeit del Isle et enssi de Tournay et de pays la altour. — Item, Tan II C XCII ,
commenchat li amachour de Danemarche, qui oil nom Hongrech, a edifiier
pluseurs citeis en son pays,entre lesqueils ilh fondat une qu'ilh nomat
This, et fondat unc beal casteal sour une roche qu'ilh nomat Monlusant, tuu.
portant que ons le veioit de mult long; et al desous ilh fondat une citeit
qu'ilh nomat Multbelle, et pluseurs altres citeis. Et donnat chi pays a unc
sien fis qui fut nommeis Zelo, qui en fut prinche dedont en avant; et
apeliat ehesti pays Hongrie et ses gens Hongrois ou Hongresis. Item, Deprimier prinche de
Fan II C XCV, envoiat Pholomes, ly roy d'Egypte, ses messages a Romme,
pour faire certains alianches aux Romans de pais et d'amisteit. Si furent les
messaiges noblement rechus depart les Romans; car, quant ilh veirent
que ly roy Pholomes voloit avoir a eaux teile amisteit, si furent mult
joians , et fisent les alianches tantost confirmeir depart les tribuniiens , les
consules et les senateurs de Romme, et les revoiarent a roy Pholomes. —
Item. Tan II C XCVi, orent arrant guerre les Romans, qui astoient le plus LesRomaosoreotguer
. . \ c •*• • • * 1 • ♦ r • reaSampniliens.
puissans de monde, a Sampmtiens , qui sient en la moiene entre Campame
et Puilhe, qui enssi astoient tres-poissans et orguilheux, et qui avoient
armes dor et dargent *; et orent une batalhe en ehesti an en jule 8 , et chu
fut por le cause de Campaine,qui est uns crasse pays et bons terrois et
bons pors de mere, et mult d'altres biens al utiliteit et profit de cheaux a
cuy chis pays est De laqueile terre de Campaine ilh astoit li chief la citeit
de Capua, qui astoit equaile a Romme de grandeur ou a Cartaige. Se Capua chief del terre
voloient avoir les Sampnitiens cheli pays, et osteir des mains des Romans
qui le possidoient; et furent en eel batalhe desconfis les Sampnitiens. — Et
1 Pour au dela de. C'est ainsi que plus loin excrcitus erant : scuta alterius auro, alterius ar-
(p. 1 49) on trouvcra dechd pour en deed, de. gento caelaverunt.
* Allusion au passage de Tite-Live (ix. 40) : duo * Le thier jour de jule. B.
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114 CHROINIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
en chest an f , qui fut li an del edification de Romme IIII C et XXVI, en jule *,
oit encore une batailhe entres les parties deseurdit; si furent les Romans
desconfis. De chu orent-ilh si grant despit, qu'ilh soy rasemblarent et re-
vinfent encor ensemble; si orent les Romans victoir; et les altres soy ra-
semblarent, si corurent sus les Romains, mains les Romans orent la victoir
En teile manere orent XV batalhes dedens VI samaines. que toudis orent
Les sampniiiens d M - les Romans victoir, foursmis II 8 batalhes ; car al dierain furent les Sampni-
ronfis par les Ro- m . . . .
maD9 - tiens par les Romans si folleis et abatus, qui en fut mors en chesti deraine
batalhe XXlIII m homines, et ens aultres devant O et XXVI m et 1111
hommes ; et fut leur roy pris awec grant summe de gens , et la citeit et
tous li pays destruittes et abatus. Et ly roy et ses gens morurent en la
prison des Romans. Et deveis savoir qu'ilh est veriteit que les Romans
n'orent oncques piour annemis ne plus crueux que les Sampniiiens. —
Item, Tan II XCVII , astoit aleis Amynus, li prinche de Turnay, vers
Romme por prende a femme la filhe Archales, ly uns des consules; si le
trovat mariee, et avoit pris a maris I gran senateur. Quant Amynus enten-
dit chu, si retournat arire, et alat tant qu'ilh entrat en I gran bois dont
ilh ne pot yssir luy ne ses gens dedens XIII jours. Et le covenoit mangier
herbes et rachines et boire aiwe de fonlaines; et les chevals mangnoient
herbes, et enssi les pluseurs morurent de famine, que ches viandes ne
porent gosteir; mains al derain issirent de bois, et vinrent aux plains
champs, non mie a leur droit chemyn, car ilh l'avoient grandement eslon-
Amyens fondee par giet. — Tant clievalchat Amynus qu'ilh trovat I lieu qui mult bien li plaisit.
Si fondat la une citeit que ilh nomat Amy ens solonc son nom, en laqueile
ilh habitat, car ilh n'osoit raleir a Turnay ne al Ysle son pays, por son
Foi. 31 t: frere le due de Galle, qui le voloit ochire por le raison de chu qu'ilh avoit
enssi falit a sa femme avoir; car a eel lemps astoit en usaige, quant uns
hons voloit avoir a femme alconne pucelle et el l'escondissoit, ons tenoit
chil homme por enssi malvais que chu fust uns murdreur.
En teile manere demorat Amynus en la citeit d'Amyens; mains quant
Brugen, son frere, le soil, se le manechat fortcment, et entrat en Lisle
et a Turnay, et mist dedens ses gens com sien et son pays. — Item, l'an UK
1 Et en chesti an meisme IJ e et XC VI qui. B. 8 Fors mis une. B.
2 Le XX* jour de jule. B.
Amynus.
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LIVRE PREMIER. H5
fondal li dus de Galle une citeit dedens son noveal pays, qui avoit esteit son
frere Amynus; et le fondat sour I bras de mere qui la venoit, et encor y
vient-ilh, et le nomat Bruges selonc son nom, et y mist gens dedens por Brugefonde pirBru-
habiteir. Item, Tan III et III, fisent et fondont les Romans en pays de
Bonivent I citeit, et 1'apellarent Bonivent, qui est belle solonc I'usaige de Bonivem.
adont. — Item , l'an III et VII, morut Pholomes, li roy d'Egipte, qui fut li
promirs de eel nom ; si regnat apres luy son fis qui fut nomeis Abech ;
mains al coroneir fut nomeis Pholomes Abah , et regnat XXXIII ans \ Chis Pboiomw Ab.h e t ie»
secons Pholomes mist sa cure et entendement en diverses escriptures a oyr
et aprendre, et voloit avoir tous les libres dont ons savoit parleir, et fist tant
et profitat si bien, qu'ilh fut astronomiens miedre que nuls altres qui a son
temps regnast. Si en fist alcons libres en tratiant de chesti matere qui mult
sont profitables. et necessairs a cheaux qui se veil lent melleir de chest
scienche. — Chis Pholomes soy porpensat, et fist querir LXX Juys des plus
saiges que ons posist troveir, et qui fuissent les mies apris de leur loy et
des escriptures; et, quant ilh les oit tous ensembles, ilh les prist et les
departit en LXX cambres, chascuns por luy, ou li uns ne poioit l'autre
veioir ne regardeir ne oyr. Et mist par-devant chascuns les libres de leurs
loys qui adont astoient escript en hebreu; si les commandat que ilh les
translatassent en grigois. — Et deveis savoir que ilh les mist enssi et departit
en pluseurs lieu, portant que illi les vot esproveir, se ilh feroient loialment
chu qu'ilh les avoit commandeit, et que li uns ne sewist al altre de riens '.
Si avient que Dieu fist la myracle teile par le grasce de Saint-Espir, et Miracle.
demonstrat si droitement aux Juys deseurdit la vrai matere de la Sainte-
Escripture, que quant les Juys orent tout translated, et li roy Pholomes
voit oiir chu que chascuns avoit fait, ilh trovat que les LXX maistres se
concordarent si plainement que se ilh l'ewissent fait ensemble en I seul
lieu, chu que chascon avoit fait par luy sens riens mesprendre. Et de chu
oit li roy trop grant mervelhe, et tient chest Sainte-Escripture en grant
riceche et reverenche; et fut chu enssi translateit sor Fan III et XII com-
menchieit sor le quart jour de jenvier, et furent parfais dedens le mois de
novembre et publiies le XXIII 6 jour de decembre. — En l'rfn III et XV 8 ,
•
1 II s'agit duPtolemce, surnommd Philadelphe. • Le XII IP jour de marche, ajoutc le manu-
* Ne te pouwist conseilhier al aultre de riens. B. scrit B.
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146 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
rnorut li dus de Gal Brugen, qui avoit regneit XXV ans. Apres luy fut
fais dus son fis Duanus, qui regnal XXXVI ans. Item, Tan III et XVII,
conquisent les Romans II citeis, si fut ly une appellee Mesine, et l'autre
Li premier monoie a Galabre. — Item , Tan III et XIX , fut promirs faite a Romme monoie dar-
Homme. J# ^ * • i i >
gent, de quoy ons navoit oncques devant useit; car devant chu ons ny
faisoit altre monoie que de paste * enprintee des saieles des consules qui
regnoient por le temps sicom empereurs. En eel an meismes alat li uns des
consul de Romme a XX m hommes, et soy mist sour mere; si nagont tant
que li tempeste de la mere le gettat en la royalme de Zesile, et en conqui-
L« Romans en zisiie sent grand partie. — A eel temps astoit eel royalme de Zesile de la royalme
q«><"». d'Affrique et en la subjection ; si en astoit ly roy d'Affrique sires soverains;
sique cheaux de Zisiie mandont a roy Gebil de Cartaige le perde qu'ilh
avoit faite et rechut par les Romans. Et, quant ly roy l'entendit, si man-
dat par son pays ses hommes; si en assemblat jusques a XXX m hommes,
Foi.3! yo. et puis nagat tant qu'ilh vient en Zisiie, et la astoient encor les Romans.
Si oit en Ire eaux grant batalhe; mais les Romans n'astoient que XX m
hommes, si ne l'euwissent ja endureit ceste batalhe, quant ilh leur vient
en ayde de leurs anemis, enssi comme vos oreis. Car enssi com les Romans
et les Affriquiens soy combatoient ensemble, avient que les gens de la citeit
de Nope , qui est de la royalme de Zesile, dont ilh astoit bien VIII m et plus,
et venoient por aydier les Affricans vers la batalhe. Mais oussitost que les
Affricans les veirent , ilh quidarent que chu fussent Romans, et soy misent
Leroy Gebii de Car- al fuir vers leurs neis et furent enssi desconfis; et les Romans en ochirent
mm. MCon 8 e plus de XX m ; et la fut mors li roy Gebil d'Affrique. Et conquisent les Ro-
mans XL neis chargies d'avoir et de vitalhes; si ramynont tout chu a
Romme , ou ils furent noblement recheus.
Apres la disconfiture, les Affricans s'en ralerent en Cartage, qui astoit
Hanibaiie fi$ Gebn. ly chief de leur regne, et fisent roy le fis Gebil, qui avoit nom Hanibal :
chis fut uns mult fors hons et grans, et qui savoit mult de fais d'armes,
et qui fist mult de paines et damages aux Romans. Et vengat mult bien le
mort de son pere, enssi com vos oreis; car anchois qu'ilh commanchast sa
guere, les petis enfans de son rengne laissat parvenir a eaige et forche por
porteir armes, car ilh lassat enssi la chouse par 1'espause de XVII ans. —
1 Sans doute de la terre cuite. Comp. a?ec le Lexique de Suidas, v° aroapja.
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LIVRE PREMIER. H7
Item , Fan III C et XXIII , morut li quars amachours de Danemarche , Hon-
grech, qui avoit regneit XL ans. Et quant ilh fut mors, si s'avisarent les
barons de pays que leur terre astoit fortement multiplyet et peuplee, et
qu'ilh astoient bien digne d'avoir I roy; si fisent roy par common accorde Le n P^ e h r c roydeDa "
de Gaffa, le fis Hongrech , qui regnat XIIII ans. — Item , l'an III et XXVII ,
fondat li dus de Galle Duaynus une citeit, laqueile solonc son nom ilh
nomat Duay. Item, l'an III et XXX, morut Zelech, le promier saingnour Du» y .
et fondateur de pays de Zelande ; si regnat apres luy son fis Archanon.
Item, l'an 111° et XXXI, fut fais ly promier roy de la terre de Parthe, et
fut nommeis Arsaches. En eel an, morut ly dus de Galle Dayanus: si fut
dus son fis apres luy, qui oit nom Camberacion, qui II ans la apres, assa-
voir Fan III et XXXIII, fondat la citeit de Cambray ; si regnat LV ans. — cambmy.
Item, Fan III et XXXIIII, oit grant mortalileit et pestilenche de malvais
aire par tout le monde, sique les gens, maiement les grans saingnours et
les sanguins ', moroient par les rues subitainement, et tant que chu en
astoit grant mervelhe. Item, Fan III et XXXVI, oit grant batalhe sor mere
entres les Romans et les Affricans; et la furent les Romans desconfis et woman* dt*conii$ «or
' # mere.
mors, et la gagnarent cheaux de Cartage sour les Romans nonantes neis
plaines et cargies de vi tallies et d'avoir; el conduisoit a chest fois les Ro-
mans I prinche qui astoit nomeis Marcellus f . Chis escapat, car ilh s'enfuit.
A chest fois commandat ly roy Hanibal de Cartage a aleir vers Rom me et
pour destruire; et ses barons fisent son commant et vinrent a Romme. et
Fasegarent a LX m hommes.
Quant cheaux de Zesile sorent que Hanibal, leur saingnour, avoit asse- H»nib»ias.ege Romme.
giet la citeit de Romme, si sasemblont et vinrent a Romme en Fayuwe le
roy Hanibal bien a C m hommes et plus, a piet et a cheval. Quant cheaux de
Romme veirent chu , si assemblont et ordinont leurs oust, et yssirent fours
de la citeit tous rengies; et astoit bien des Romans III milhe pitons et
XL m chevaliers a chevals et pluseurs altres nobles gens; et fut celle batalhe
en mois de may 8 Fan III XXXVIII. — Quant ly roy Hanibal aparchut si
grant peuple des Romans qui venoient enssi rengies, si s'avisat et fist armeir
toutes ses gens; si en fist entreirC m en unc bosquet, et les LX m fist traire
avant vers les Romans tous rengies, et les fist conduire son fis Arises, et
1 Sanguins signifie sans doute les hommes de ■ Mentellus. B.
sang noble, les notables. 5 Le XXV I I* jour de may. B.
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US CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
ly commandat que, oussitost que ilh astoient adjosteis aux Romans, que
ilh fuissent et tournassent les dos por les Romans a desroteir ', et ilh les
venroit tantost sorcorrir a tout les C m hommes qui astoient en bosquet sour
l'afaire V A cest parolles soy partit ly roy Hanibal de son fis, et entrat en
Foi.str*. bosquet, et son fis soy aconlat aux Romans et les Romans a li , qui pou le
dobtont, car ilh avoit pou de gens envers eaux. Si assemblont leurs oust li
uns contre les altres; la fu rent abatus mains horns hauls et bas de ambdois
parties; mains ly pieur tournat sour les A Africans, car ilh en fut grandement
ochis; et fussent tous mors, quant Arises, qui les guyoit, lassat cheioir sa
banire et soy mist al fuir, et ses gens apres luy. Et quant les Romans
veirent la disconfiture, si les cachont les alqueis ; mains la plus grant partie
soy retrahit vers les trefs aux Affricans pour eaux a derobeir, et la soy
department les Romans en divers parchons pour gangnier. — Mains enssi
qu'ilh astoient a la gangne, adont est venus li roy Hanibal a C m hommes,
issant de bosquet, et se vat ferir luy et ses gens aux Romans, et les com-*
menchat a descopeir et ochire, oussi legirement com chu fussent berbis,
et a mult grant planteit, car oncques nus des Romans ne soy defendit,
fours seulement unc noble prinche qui fut nomeis Meltellus. Ghis soy de-
fendit, et ochist le cheval le roy Hanibal, et ochist oussi grant planteit
d' Affricans; mains chu ne ly valut riens, car ilh fut la ochis de la main le
roy Hanibal. Et furent la les Romans desconfis et mors; et fut la somme
des mors des Romans II C mille hommes a piet et XXX m a chevauls. Enssi
Merreihe. que Orosius tesmongne , li roy Hanibal envoiat en Cartage, sa citeit, trois
muys et demy de aneals d'or que ilh fist osteir fours des dois des chevaliers
et des nobles barons romans qui la furent mors. — En cest temps, assavoir
Tan III C et XXXVI, devant chest grant batalhe des Romans et de roy Ha-
nibal ou les Romans furent desconfis, enssi com nos avons dit, ly roy de
DesT.rentiiweideroy Tarente soy oppoisat contre les Romans. Les Tarentins, assavoir le peuple
de Tarente, soy prendoient mult pres de resisteir les Romans; car ilh
ochioient les messagiers et les copoient leurs barbes et les langues, et les
crevoient les yeux, et fasoient en tout manere despit aux Romans qu'ilh
poioient. Si ont fait alianche a Piere 8 , le roy de Gresche, qui vient awec
* Notre texte porte : por les Romans el a desro- * Sour le faire. B.
teir. J 'efface la conjonction , qui mc paralt dtre dc 3 Pyrrhus.
trop.
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LIVRE PREMIER. il9
eaux en Ytaile a grant gens, assavoir a HI C milhes homnies a piet et a VII 10 Grant i»uihe.
a chevals, et XX olyphans qui furent les premiers qui fussent oncques
decha mere ameneis, ne que ons y awist veyut. Et la fut commenchie ba-
talhe tres-terrible contre les Romans , qui durat de malin jusques a vespres;
si furent en la fien les Grigois et les Tarentins desconfis, et cheaux des
Grigois qui porent escappeir en ralarent meschamment ' en leur pays.
Adont s'avisarent les Tarentins et eslurent XII barons, et les envoiarent
en Affrique faire alianche al roy Hanihal, car ilh avoient entendut que
lidit roy voloit vengier la mort de son pere que les Romans avoient ochis;
et en teile manere fut-ilh fait ; dont ilh avient maintes dures batalhes et
maintes despis et damages mult grans aux Romans, car les altres ne soy
reposarent mie, enssi com vos oreis. — Et tout chu ne fut mie fais si en
secreis, que ilh ne le fuist lassies savoir aux Romans, qui tantost assem-
blarent grans oust et soy misent sour mere, en disant qu'ilh ayment mies
assalhir les Affricans que estre assalhis par eaux. Et d'altre part Hanibal
venoit par mere a tres-grans gens et XXX olyphans; si est Venus en la
terre de Zesile, ou son peire fut ochis par les Romans, el les dois consules
de Romme, qui furent nomeis Gue et Gay *, le sorent; se le corurent sus.
Si fut disconfis ly roy Hanibal, et si perditses neis, en queiles ilh astoil H«nib»i depone
venus, et tant d'hommes mors que luy-meisme a paine en pot fuir. En teile
manere furent les Affricans mors et peris; et li roy escapat, qui en l'autre
an apres rasemblat gran gens et revient par mere; mains les Romans, qui
avoient leurs despies 8 par tout pays, le savoient bien. — Si astoit adont
consules Atilius Regulus; chis montat sour mere a grant gens, et sen allat
vers Affrique, et passat sy bien qu'ilh n'encontrat mie le roy Hanibal ne ses
gens. Si vient devant Cartage, sy l'assalhit fortement; et elle estoit wide Foi. s*
de gens por unc teile oust a sostenir ne contresleir; finablement, ilh le
gangnat et conquist. Et se conquist par le royal me d' Affrique 1111" et IIII
citeis; et si ochist III roys awec leurs gens, dont ilh en estoit grant multi-
tude. Et conquist tout le pays jusques a flu qui at nom Baginda *, ou ilh
1 Meschantemmt. B. U faut rattacher cet ad- du reste, rectifier le recit des guerres puniques,
verbe au substantif tneschief, et lui donner le sens ni tout ce que notre chroniqucur donne pour de
de maUieureusement. lhistoire.
9 II est probable que sous ces deux noras se * Pour espies, espions.
cachent un Cneus et un Caius. Je n'entends pas, 4 Pour Bagrada.
les Romans.
par
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120 CHRONJQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
avoit des serpens de cent et XX pies de long; si en ochisent pluseurs, car
ilh avoient ja bien devoreit II1 C hommes de ses gens; se fist le cure de
De auhus Reguie. 1'onc aporteir a Romme \ — Mains, enssi que Atilius Regule faisoit enssi,
cheaux de Cartage vorent faire pais a ly, et ilh le refusat. Adont ilh soy
trahirent de unc costeit , et s'avisarent qu'ilh les courroient sus , car ilh
avoient gens asseis; et vinrent a li et 1'assalhirent. Et se orent adont victoir
por eaux, car les Romans furent abatus et ochis , et Atilius, leur consule,
pris et mis en prison a Cartage.
Et, quant Emulius * le soit, qui astoit son compangnon consule, ilh fut
mult corochies; si assemblat grans oust, et apellat a wee luy Fulvius, qui
avoit esteit consule l'an devant; se s en allat a I1I C naves plaines de gens
d'armes en Affrique. Enssi qu'ilh vinrent sor mere, si avient qu ilh encon-
trarent le roy Hanibal, qui avoit oiit novelle de la perde qu'ilh avoit recheut
en son regne. qui avoit grant multitude de gens. Etlase sont assembleis,
et soy combatirent sour mere, qui asseis durat ; mains en la fin furent les
Le$ Romans desconfis Romans desconfis et mors, et la conquestarent les barons de Cartage sour
les Romans XC naves plaines et chargies de vitalhes et d'avoir. — Adont
commandat Hanibal a ses oust del aleir devers Romme, enssi que dit est
chi-desus; et quant ilh oit desconfis les Romans devant Romme, apres la
batalhe, li roy Hanibal soy retrahit arriere tout ardant le pays dont ilh
fut pou saige; car, enssi qui racompt Orosius, les Romans furent a chest
fois si desconfis et abatus, folleis, mors et ochis, qu'ilh ne furent oncques
Hanibii avec *» oust en nulle batalhe si meneis a la fin de leur poioir, car ilh astoient ochis li fleur
devers Romme. iiir* • • i • t^
et les plus nobles de Romme, tant enssi com je vos ay dit desus. Et, par
especial, ilh astoient mult mors des prinches, consules et senateurs de
Romme, si com Luciens, Emuliens, Paulins, Publiciens, Tarrentiens, Varro
et Meltellus, qui tous avoient esteit consules de Romme; porquen se Ha-
nibal fust aleis apres la victoir vers Romme, ilh n'eust troveit nulle obstacle
qu'ilh ne 1'euwist conquestee. — Et furent a chest fois si despereis les Ro-
mans, que ly remanant vot fuir fours de la citeit a l'autre costeit des anemis,
De scipioi'Affrican. si ne fust Scipio 1'Affrican, qui astoit tribunyen de Romme, et alcons che-
valiers, qui par coroche et a l'espee les rastraindirent si fort qu'ilh n'osa-
1 Si fist aporteir le cure del unc des plus grans a * Marcus iErailiu*.
Rome. B. Cure pour cuir, peau.
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LIVRE PREMIER. 121
rent fours yssir. Et finablement ilh fut acordeit a Romme que tous les
vendus aux chevaliers publement por argent, et tous larons murdreurs et
quelconques pecheurs ou mailsfaiteurs, qui astoient pour leurs meffais de
Romme banis, li tribunyens les absolit tous , et les fist frans , mains qu'ilh
venissent a Romme habiteir, et seroient tous quittes des debtes qu'ilh
devoient \ Adont en revient bien jusques a VI m hommes.
Ensiment que je dis fut Rome afflit; si nos en ta irons atant et reven-
rons a nostre matere. Si vos disonsque, quant ilh avientalcons mala une Grande pioive • Rom-
persone, ilh y vient volentier unc altre. Apres sachies que ilh avint a
Rome une sodaine destruction, f sor Tan tantost apres, assavoir l'an III C
et XXXIX; car dedens III jours plovit une si grant ploive que Tyberis,
la riviere de Romme, fut si grant qu'elle redondoit par tout Romme, en
wastant Romme vilainement, et tous les edifisces qui astoient ens es palus
de Romme degettat et abatit. Si astoient adont consules de Romme Lucaius
Gatulien et Auliens Maule 8 . — Item, en cest an meismes, les Gallyens ardi-
rent Romme tout chu qu'ilh avoient fours de leurs murs; si astoient con- Foi. asr*.
sules fais noveal Simpronii et Valerien. Et adont les Romans issirent fours
de Romme tous rengies, et se soy combatirent a eaux; et furent les Gal-
lyens desconfis, dont chu fut grant mervelhe; car, sicom dit Orosius, les
Gallyens astoient les plus felles et crueux qui fussent en toutes les nations
de monde, et les plus hardis et entreprendans, combatans et victorieux.
Et chu astoit a commenchement de la batalhe; mains vers la fin si astoit
leur virtus plus petit que le virtu des femmes.
De Hanibal et de ses fais vos dirons en partie. Quant ilh soy fut partis DaHuibai.
de Romme apres la grant batalhe, ilh sen ralat tout ardant le pays par-
tout sor cheax qui avoient esteit en 1'aide des Romans, et qui astoient leur
bien vuelhans. Si vinrent en Espaine, ou ilh fisent grant haire florentis- D'Espaine.
sine * une citeit dont ly peuple estoit amis aux Romans , et l'assegont; et y
fisent tant qu'ilh l'ont affammee crueusement, prise et desertee, ne les
1 Et de tous for fais, ajoule le manuscrit B. suppose que notre chroniqueur aura eu a traduire
9 Je supprime ici un car, qui est de trop et ne un texte latin portant : destruxerunt florentissi- '
se trouve pas dans le manuscrit B. mam civitatem. Dans cette hypothese, il faudrait
* Lisez : Lutatius Gatulus et ^lius Manlius. changer notre texte et lire : ilh fisent grant haire
4 II s'agitsans doute de Sagonte. Haire signifie une citeit florentissine. Sur le sens de haire, voir
peine, violence, par extension destruction, et je le glossaire deja cit6de GacheU
16
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122 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
abbassateurs , que cheaux de la citeit li envoiarent, ilh ne les vot oncques
veir ne escuteir. Apres, al temps que Gornelhiies Cypion ' et Simpronii
astoient consules de Romme, retournat Hanibal et ses gens vers Romme,
H»nn>ai en Ytaie. e t est passeis les niontangnes a grant labeur et par forche de batalhe, et
tant que ilh vient aux plains de Ytalie. Si astoit son oust de O hommes
a piet et XX m a chevals. Adont le consule Cypion Corneliiens, qui astoit I
valhan prinche, et ses gens qui astoient awec li, les corit sus droit a la
citeit de Citine, et al commenchement ilh les navrat griefement et les des-
confist; et Hanibal s'enfuit et perdit bien XL m hommes. — Adont Sympro-
niiens, le consule de Romme , qui astoit en Zesile a grant gens, entendit
la novelle que son compangnon Cipion s'astoit combatus et avoit obtenuit
symproniiensdesconfis la victoir,*est partis de Zesile et revient a Treberie 1 , le flu de Plaisanche,
a Treberie. 7 J ^ . , 1 7
et se soy combatit a Hanibal; si fut desconns et toutes ses gens mors, et
a paine pot-ilh tot seul escappeir. — Apres Hanibal, en procedant avant
vers Tusquayne, passat le mont Dapine * ou tant de nyve chait que, por
le grant froit qui fist, tous les oliphans et les jumens sont mors. — Et la
vient assavoir a Hanibal que li consule astoit en unc casteal la pres. Si soy
hastat del assegier; mains quant ly consule Flamynens veit chu, si issit
fours a lieu de Peruse, et enssi est aleis sa voie; et Hanibal at pris le cas-
teal, et crueusement ochis XXV" Romans, et VI™ en at pris.
Hannibal assege Rom- Sour Tan III et XLI , revient Hanibal en Campaine, en Ytaile, a trois myl
pres de Romme, et assegat la citeit de Romme. Quant les senateurs et li
peuple de Romme veirent chu, si sont de hisdeur et de pawour teilement
ferus de desperanche qu'ilh ne soy puelent aydier , et les femmes en pigna-
cles, — ch' est el sommiteitdes palais, — se sont comes, portantawec elles
pires a grant planteit, et d'estre apparelhies de jecteir les pieres des murs
sour leursanemis. — Adont Hanibal vient avant atout son oust jusqu'a la
citeit, en lieu c'on dist a la porte de Coline: mains quant Silvius, le procon-
sule, le veit, se dest aux Romans : « Ne soyes point enbahis, ains prendeis
)> cuer en vous et hardileche, et ysseis de la fours awec moy combattre nos
)> anemis; fortune nous aiderat. » Tant les sermonnat qu'ilhs yssirent fours
1 Ce n'est pas lc premier exemple d'une orlho- * II faut savoir qu'il s'agit des Apennins, pour
graphe differente pour le meme nom. lc deviner sous ce deguisemcnt.
* La Tre*bie.
me.
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LIVRE PREMIER. 123
a grant gens que Silviusemenat. — Etenssi qu'ilh yssoient de la citeit tant de
ploive et de grisel ' mixteit 1 chaiit sour eaux , que li assemblee fut teilement
perturbee que a paine porent ralleir en la vilhe; mains li temps pasieble
revient, et les Romans one altre fois disposeis a la batalhe fussent venus;
mains ilh vient la une tempeste de violenche qui chaiit la, si qu'ilh covient
les ambdois parties renfuir vers leurs tentes. Adont vat Hanibal aperchivoir
que a conquerre la citeit de Romme n'astoit mie en la forche d'hommes,
mains en la divine miseration, si retourneroit et lairoit la citeit en pais,
mains s'ilh en trovoit les gens ilh s'en vengeroit en tous cas; enssi retournat
ariere *.
Enssi com ches choises avenoient , Scypio li Affricans , consule de Romme Foi. 33 >•.
VIII mois devant, s'avisat et sen alat a grans oust demetant * que Hanibal
astoit en Ytaile, et chevalchat tant qu'ilh vient en Espaine. Et de promeir scypio en Elaine.
fait la Nove Cartage qui astoit a Hanibal ilh conquestat, en laqueile tous les
tressoirs d'or et d'argent por les soldeez des chevaliers largement a payer le
temps future at-ilh troveit; et trovat oussi en eel citeit Magoine 5 , le frere
Hanibal; se le prist et l'envoiat a Romme. — Scipion, apres les victoirs d'Es-
paine, passat en Affrique ou ilh conquist mult de batalhes, entres lesqueiles A P r <* « Affriqu*.
ilh soy combattit a roy de Pennoir • qui avoit XL 111 hommes , qui furent tous
ochis par Scipion et ses gens. Et quant ilh oit tout depeupleit et dewasleit
les pays, li peuple de Cartage mandat le fait a Hanibal, en suppliant a luy
qu'ilh revenist por sorcorir le pays. Quant Hanibal entendit le fait, se plorat Hanibiireieoquimaie.
fortement et relenquist Ytale et s'en ralat vers son pays ; et tous les che-
valiers romans qu'ilh avoit pris com prisonirs, qui ne le voirent suire,
ochist-ilh. — Et revient en Cartage, a chu point que les Cartagiens traitioient
de pais a faire a Scypion qu'ilh les traitiast plus a my able men t; mains
Scypion n'y voloit entendre. Quant Hanibal vient la, ilh corut sus Scipion b*uil<..
el ses gens et cheaux de Cartage awec; mains Scypion oit la victoir, et les
desconfist mult laidement, et Hanibal s'enfuit awec Jill chevaliers, et
Scypion ardit tout Cartage, et enportat For et l'argent et les joweals et tout
1 Gr61e. Grisil dans Roquefort. * Pendant que. Roquefort donne dementiers.
* Roquefort donne le substanlif mixture. * Magon.
* Tout ce qui precede depuis : Dc Hanibal et * S'il est ici question de Syphax , j'avoue ne
de ses fats, etc. (p. 121) manque dans le manu- pas comprendre pourquoi. Ce roy de Pennoir ne
scrit B. serait-il pas la traduction d'un rex Pamorum ?
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\ 24 CHRONIQUE DE JEAN D OUTREMEUSE.
Tavoir. Et y trovat en prison Tulius ' Regulus, le consule de Romme, qui
avoit, siconi jay dit desus, esteit pris en Cartage; et seen ramenatawec
XXII C prisonnirs de Cartage. Ches victoirs oit Scypion, qui astoit uns
jouenes hons en I'eaige de XX VII ans, et revient a Romme atant, ou ons
Tat fortement fiestoiet et fait grant honnour.
Han.bai revient en c«r Hanibal fuit sa voie, tant que Scypion fut yssus de son pays; puis revienl,
et trovat Cartage arse et destruite el desrobee, et tout son pays gasteit. Si
savisat qu'ilh avoit en unc fors casteal sour mere XIIII prisonnirs qu'ilh
avoit amyneit d'Ytaile, mains ilh les yroit vendre en Greche, et de chu
qu'ilh les venderoit ilh referoit faire Cartage; car altrement n avoit point
d'argent ne nuls jowals, car les Romans 1'avoient tout desrobeit et pilhiet;
De* Yuiiiens prison- enssi disoit Hanibal. — Et enssi fut-ilh fais, car ilh vendil les Ytaliiens aux
Grigois. Mains tout enssi que ons les emmenoit en Greche. ilh encontrarent
le consule Flamy ne qui venoit de Machidoyne, ou ilh avoit oyut mult de
batalhes, et toudis avoit desconfis les Machidoniens; si avoient fait pais a
luy, et astoient remis en tregut com devant. Si revenoit vers Romme par
mere; si encontrat les Grigois qui condusoient les prisonnirs achateis, qui
avoient leurs chiefs et leur grognons * raseis , les cheveals tous jus, en signe
de servitude; et astoient loyes li uns a 1'autre enssi par cople com ilh de-
wissent conduire I cherue. Adont Flamyne corut sus les Grigois et les
ochist tous, si regangnat les prisonnirs qu'ilh ramenat awec li a Romme.
— Item, Fan 1II C et XLI1I, fut racompteit a Hanibal comment, I'annee de-
vant, les prisonnirs qu'ilh avoit vendut aux Grigois astoient delivreis. et
les Grigois mors et ochis par le consule qui venoit de Machidoine; dont
Hanibal, quant ilh 1'oiit, en fut mult corochies, et dest qu'ilh yrat en Europ
en alcon costeit faire damaige en despit des Romans 2 , car contre les Romans
Hambai en Espaine ei ne voloit plus aleir, car Dieu astoit por eaux. — Adont assemblat ses oust Tan
deseurdit, et montat sor mere; mains li tempeste les getat en Espaine. Si
assemblat la encors gens aux citeit qui haioient les Romans, et soy mist au
chemyn tout ardant et destruiant queile part que ilh venoit, et li vient en
De dns Gamberacions. yolenteit que ilh arderoit jusqu'en Galle. Chu fut nonchiet a due Cambera-
1 Atiliu*. B. gnon signifie en wallon museau*
* Grenons. B. Cette forme me semblc preferable. s Et despit at Romaim. B.
Grenons designc les moustaches, la barbe, et^ro-
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LIVRE PREMIER. 125
cion. — Quant li dus Fentendit, si assemblat ses homines par son pays, et Foi. s*f.
fist tant qu'ilh en oit bien XL m tant settlement; et puis vint al encontre de
Hanibal, et le corut sus mult valhamment; et tant fisent les Gallyens et '
Sycambiens — car ilh astoient fort gens et bons guerrioirs et hardis — qu'ilh
desconfirent Hanibal, et li ochirent ses gens, et li crevarent I oelt, et li
eoparent unc pongne a cobattre; si s'en refuit vers son pays meschamment.
Apres chu que les Sycambiens orent conquesteit les Affricans et leur
avoir, ilh devinrent plus orgulheux asseis que ilhs n'astoient devant: en-
cor dont astoient-ilh orguilheux par-devant fortement, encor le furent-ilh
plus por la grant proieche qu'ilh avoient la fait, que nuls de leurs voisiens
ne poioient dureir por eaux; et conqueroient tout enlour eauz, et fesoienl
cascuns estre subgis a eauz. — En cest an meismes fisent les Romans savoir
a toutes nations de l'ysle de Europ que quiconques venroit habiteir a
Romme ilh seroit quitte de tous servage et de tout iniquiteit; et chu fai- Rommerepupi*
soient-ilh por repupleir de gens leur citeit. Por chesty franchise y alcrent
demoreir mult grant peuple; maiement 1 de pays de Galle en allat a plus
grant fuison que de nul altre pays, dont li dus en fut corochies; si com-
menchat fort a guerroier les Romans. — Et les Romans le lassont asseis
longement convenir, portant qu'ilh le dobtoient luy et ses gens por leur
grant firteit, car nuls ne poioit dureir a caux; et d'altre costeit les Romans
n'avoient mie grant cure ne grant poioir de gueroier a eauz, chu leur sem-
bloit. Item, Tan III C et XLV, morut Pholomes, roy d'Egyple; si fut fais
roy apres luy son frere Yrcanus, qui fut apelleis ly thirs Pholomes, liqueis
regnat XXVIII ans. % — Item, Tan 1II C et XLVI1I, oit grant batalhe entre le
ducEbrok de *Borgongne et Cambracion le due de Galle, laqueile durat
de matin enssi qua prime jusques a heure de vespre; mains li dus Ebrok
fut mors et ses gens desconfis, et gangnat li dus de Galle tout le pays de
Burgongne, et le mist en sa subjection dedont en avant. — Item, Tan III C
LII, fut neis Jhesus, le fis Syrach, I poetes, liqueis fut li plus saige juys JhesusSync.
qui fust en monde a son temps; et fist unc libre de sapienche que ons
nome Ecclesiasticus. Item, Tan II1 C LVII, morut li secon roy de Dane-
marche Ogen, qui avoit regneit XX ans, car son pere Gaffa , li promier roy,
morut Tan 111 XXXVII. Apres Ogen fut roy son anneis fis Ogen, qui regnat
1 On. B. ' Principalement. Mcsmement dans Roquefort.
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126 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
XXXV ans, et son altre fis ' qui fut nomeis Agrippa , chis fut amachour de
Li drHon%ie machour Hongrie, et en fut ly promier. — Item, 1'an IJI C et LX, oit grant batalhe
entre les Romans et les Gaily ens, qui durat longement; et par fine * forche
orent les Gaily ens victoir , et furenl les Romans desconfis, qui avoient bien
1111 hommes encontre unc. Item, Tan 1I1 C LXU , entrat li dus Camberacion
a LX m homme en Romenie, si conquestat pluseurs citeis, car cascons soy
rendoit a luy com a leur saingnour, et destruioit le pays en teile manere
par 1'espasse de une an. Et adont les Romans assemblont leurs gens al
somme de Il c milhe hommes, el assalhirent les Sycambiens de Galle devant
sycambiens desconfis Pavie , ou ilh les troverent, et la furent les Sycambiens desconfis. Si en fut
bidn mors XL m et plus, et fut li dus pris et les plus hals barons jusques a
VI m ; et les altres s enfuirent com gens desconfis. Et deveis savoir que Scy-
pion guy oit les Romans en chesti batalhe enssi com prinche et consule. —
En teile manere furenl desconfis les Sycambiens de Galle qui longement
avoient esteis si fiers et si orgulheux que nuls ne poioit dureir por eaux;
et fut eel batalhe en novembre * Tan III C el LXUI. Quant les Romans orent
desconfit la batalhe, enssi com dit est, ilhs en ralont a Rom me, et misent
le due et ses gens en prisons; et furent enssi en prisons par 1'espasse de
II ans 4 ; et apres les II ans, les Romans fisenl I acorde en teile manere que
Accord dc» Romans a dedont en avant li due de Galle et ses heures apres luy tenroient le pays
de Galle des Romans en tregut, et qu'ilh renderoient cascon an por cas-
Foi. 34 v*. conne personne de pays I denier d'argent. Enssi fut fermeis ' ly acors, et
li dus fours de prison et ses gens; et en ralat en son pays. A eel temps
furent les Romans saingnours et soverains maistres de tout Europ, car ilh
n'y avoit nul nation que ilh ne rendist tregut a eaux. Item, Fan IU C LXVI1I,
morut Sileucius li roy de Surie; si fut roy apres luy son fis Anthiocus,
Item , Ian III C LXXII , morut le HI e roy Pholomes d'Egypte ; si regnat apres
luy son fis Jason XXI an , et fut nomeis Pholomes li quars.
Sor Tan I1I C et LXXV, fondat li-promirs amachours de Hongrie une
Agrippa cest Colon- citeil en Allemangne qu'ilh nommat Agrippa solonc son nom, qui fuit puis
apellee Colongne, enssi com vos oreis. A eel temps, s'avisarent les Romans
qui avoient asseis de gens en leur empire, pour vengier le honte que cheaux
1 Et il avoit I altre filmasneis qui fut. B. * Assavoir jusques a Van IIP el LXV^ que li
* Vive. B. Homains fisent. B.
* Le quart jour de novembre. B. 5 Rendu ferme.
gne.
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LIVRE PREMIER. 127
de Cartage les avoient faite; si assemblarent grant gens; si entrarent en la
royalme de Cartage a II milhe homines, et conquisent pluseurs grans pays.
Item, 1'an III et LXXVIII , conquisent les Romans la citeit de Seracuse et
la citeit de Caple 1 , et tout la terre de Zesile, et les misent en leur subjec-
tion. En eel an, conquist ly roy Anthiocus de Surie tout la terre de Judee,
et si oit grant batalhe conlre Pholomes, le roy d'Egypte, en laqueile An-
thiocus oit victoir. — Item, 1'an III III1" et VI, morut li dus de Galle Cam-
beracion; si regnat apres luy son (is Bretanges X ans. Item, Fan III III1"
et VIII, fondat li dus de Galle pluseurs citeis sor unc brach de mere, et y
mist gens habiteir, et le nomat solonc son nom le pays de Bretangne, et Breungoe.
les gens firutons. Cest Brutangne est la petit Brutangne, car la grant Bru-
tangne que Broncus fondat, dont Artus fuit puis roy, qui maintenant est
noinee Engleterre; mains li altre Brutangne que li dus de Galle fondat,
enssi que dit est, siet sour mere en parties de Galle en Europ. — Item,
Tan III IIII" et IX, passarent mere les Romans et commencharent a con- Let Roman* enEgypic
querre en Egypte et en Asie; mains quant ly roy d'Asie le soit, qui astoit
nomeis Attalus, si mandat des triwes aux Romans, et dedens les triwes ilh
s'acordat et fist alianche a eaux , et Pholomes s'acordat a eaux, et en allont
essemble en Affrique; si commencharent tout a destruire et a ardre. Mains
quant les Affricans le seurent, si assemblarent les gens et soy combatirent
aux Romans; mains les Romans orent victoir; si furent les Affricans des-
confis et s'enfuirent cheaux qui porent f escappeir. Et la fut bien ochis II m
chevaliers et des altres a cheval XX m et des pitons C m . Adont fut vengiet
li grant outraige que li roy Hanibal avoit fait aux Romans, enssi que dit
est, jasoiche que ly consule Scipion l'ewist asseis et mies vengeit par-de-
vant.
Apres cest batalhe et cest desconfiture, chevalcharent les Romans avant,
et assegarent la citeit de Cartage, qui est la principal citeit d'Affrique, et
le prisent f , puis le destruirent toute, et si astoit novellement refaite; et al c.ruge d^iruiie.
derain cheaux de Cartage awec tous cheaux d'Affrique fisent pais aux Ro-
mans, et paiarent tregut a eaux dedont en avant, et tinrent leur pays des
Romans par grant long temps. Apres toutes ches choises, les Romans soy
1 S'agirait-il de Zanclc, ancien nom de Messine ? les supplee d'aprcs le manuscrit B.
* Ces deux mots sont onus dans notre tezte. Je * A I XI' jour, ajoule le manuscrit B.
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D6
128 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
partirent, et donarent congiel lez rois d'Asie el d'Egypte, et revinrent a
Romme. — Item, Fan II I c XCII , morut Ogens , le thier roy de Danemarche;
si fut roy apres luy son fis Negel ', lyqueis regnat XVI ans. — Item , Tan III C
XCIII, morut li quars Pholomes; si fut apres roy son fis Accopa 1 , qui regnat
XVIII ans. Chis fut li V e Pholomes : chis roy Pholomes reconquist la terre
de Judee alencontre Anthiocus; mains li roy Anthiocus le reconquist en
™L Fri0ibl1 des brief temps encontre Pholomes. — Item, Ian III C XCIUI, refisent cheaz
Latins.
de la terre des Latins I roy par le congiet des Romans ', et le fisent de unc
senateur de Romme qui oit nom Franibal, liqueis regnat XII ans; chis fut
mult prodhons et vrais justichier, et fut de grant sane, car chu fut ly fis
de roy Enoch de Trachie. Enssi orent roy les Latins , qui n'avoient oyut
nul puis le temps Amilius, le peire Romulus. — Item, Tan III C XGV, fisent
Foi. 55 r. pais entre eaux ly roy Pholomes et ly roy Anthiocus, et fisent entres eaux
alianches par I mariage , car Pholomes oit a femme Gleopatram , la filhe
Anthiocus; et fut doyee de III I royalmes, assavoir : Fenix, Judee, Surie
et Samarie. — Item, Fan III C XCVI, morut Brutangnes, li dus de Galle,
qui fut I bons chevalier et governat bien.
Chis dus Brutangnes avoit III fis et une filhe, qui fut nomee Alexandre;
si oit le roy des Latins a marit, qui oit unc fil de lee qui fut nomee Jobal,
qui fut roy et regnat XXII ans. Item, des III fis le due de Galle, ly an-
neis oit nom Gletus, qui fut due de Galle apres son pere, et regnat XX ans.
Tornay. Item, ly altres fis apres oit nom Flandrin; chis fut prinche de Brukaine*,
calbray Duay, Bru ou ilh avoit et astoient fondeit mult de castels et de citeis, assavoir ; Tur-
f e, Lisle. na y^ c am bray, Duay, Bruge et le casteal de Lisle, qui toutes astoient ap-
pendantes a la saingnorie de Brukaine *, enssi com leurs devantrains les
avoient edi flies. — Item , li altre fis li plus jovenes fut conte de la petit Bru-
tangne; enssi furent tos asseneis sens debat. — Item , Fan 1II C XGVIII, fon-
dat ly dus de Brukaine une citeit mult belle ; si avient que, quant ons duit
1 Ses fis Negel. B. Lc mot fis est orais dans no- * Je ne connais pas de fait his tori que auquel
tre texte, et je le supplee d'apres le manuscrit qui puisse se rattacher cette tradition accueillie par
me sert a le contr&ler. notre chroniqueur.
1 Le quatrieme Ptolomee est surnomme Philo- 4 Brabaine dans le manuscrit. Je n'ai pas hesite
pator et le cinquieme tpiphane. Je ne sais ou a corriger une erreur evidente d'apres ce qui suit.
Jean d'Outremeuse a ete trouver le nom VAccopa, Lc manuscrit B porte des ysle de Brukaine.
donne* a celui-ci. 5 De eel ysle de Brukaine. B.
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LIVRE PREMIER. 129
assier et jecteir la promier piere de fondement, que li prinche y as to it
present, et priat a maistre qu'ilh ly lassast la promier pire asseoir luy
meisme; si descendit ' en la fosse. Mains al asseir la pire qui pessoit en-
portat awec lee le gant de la dieste main le prinche Flandrien, sique li
pire chaiit sour le gant et li gant fut al desous de la pire, dont seroit la DeGant.
citeit fondee desus la gant, si astoit raison quelle fust nomee Gant. A chu
respondit Flandrien le prinche que ilh le voloit nomeir solonc son nom,
mains, puisqu'elle avoit pris altre nom qui li astoit venus de droite aven-
hire, ilh ne li voloit point tollir, car el sieroit nomee Gant.
En teile manere fut fondee la tres-nobl6 vilhe de Gant,et, quant elle
fut faite, si morut li prinche Flandrien par maladie de fievre qui la ly pri-
sent. Si s'avisarent les barons que ilh avoient pays asseis por I conte; si fisent
I conte de I noble hons, qui fut nomeis Drionel , car Flandrien astoit mors
sens heurs : chis prinche Drionel fut li fis Hercol, le due de Borgongne,
et fut li promirs conte de lisle de Brukaine. Chis Drionel fut unc jour
priies de ses barons qu'ilh vosist apelleir son pays solonc son nom , por tant
qu'ilh en astoit ly promier conte. Et ilh respondit qu'ilh estoit bien voir
qu'ilh astoit conte, mains onques n'avoit riens fondeit en pays, se ne devoit
mie estre apelleis solonc son nom; mains portant que les dus de Galle
1'avoient fondeit et multipliiet, ilh serat nomeit solonc le nom de cheli qui
en avoit esteit li derains prinche devant li, qui avoit a nom Flandrien, si
aroit tout son pays a nom Flandre , et seroit dedont en avant ly et ses sue- Fimdre.
cesseurs nommeis conte de Flandre. En teile manere fut Flandre baptisie
sor Fan III C XG1X. — Item, Tan del transmigration de Babylone II1I C en
mois de may *, oil grant balalhe entres les Romans et le roy Anthiocus de Bttaihe entre ie« r<>-
■ • * i /» i- mans et le roy An-
Surie; mains li roy Anthiocus fut desconfis et ses gens mors, et u roy An- ttiocw.
thiocus fut pris, et furent ochis en eel batalhe XV m hommes a chevals et
XL m a piet. — Et deveis savoir que les Romans euwissent esteit desconfis,
se chu ne fut Gletus, le bon due de Galle, qui la astoit awec les Romans a
XX m hommes; si vos diray comment. Quant les batalhes furent rengies
d'ambdois pars, li dus Cletus prist ses Gaily ens et en fist I balalhe, et les
(rahit entres II grans tiertre * asseis pres de la citeit de Pavie; et quant les
1 Les huit mots qui precedent sont omis dans * Inutile de faire remarquer que e'est le meme
noire texle. Je les supplee d'apres le manuscrit B. mot que le moderne terlrc. Roquefort donne la
* Le XII* jour de mois de may. B. forme tcrtrie.
n
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130
CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
Suriiens desconfis.
Fol. 55 v«.
batalhes furent assembleez , si furent les Romans pilhies laidement, car ilh
astoit bien des Suriiens XII encontre unc Romans. Quant li dus Cletus veil
les Romans presque desconfis, si at trait avanl sa batalhe bien rengie et
ordinee, et se ferit en promier front. Et jostat li dus Cletus a Ysradra, le
frere Anthiocus, qui astoit mult bon chevalier; mains Cletus li tramist sa
lanche oullre le corps piel et demy, et l'ochist ; puis fisent enssi tos ses
barons. Et fisent (ant que la batalhe fut desconfis, et Anthiocus fut pris,
enssi com dit est; car les Sycambiens astoient adont de teile virtut que
nuls ne poioit avoir encontre eaux poioir, car ilhs savoient d'armes plus
que nuls altres gens.
En eel batalhe fut pris, enssi com jay dit, li roy Anthiocus, li roy de
Surie, et Anthiocus son fis, et grant partie de sa chevalerie des plus val-
hans; et furent ameneis a Romme. Mains dedens brief temps fut fait une
Ptit entre Anthiocus pais enlrc Anthiocus le roy, et Anthiocus son fil, et ses barons d'unne
part, et les Romans et les senateurs da It re part, en teile manere que li roy
Anthiocus tenroit son pays des Romans en tregut, cascon an a payer milh
besans dor; et, pour eistre les Romans plus segures, ly roy laissal son fis
Anthiocus en gaige a Romme. — Quant loutes ches choises furent faites, li
Li <ius cietofl ami- dus Cletus de Galle araisonat les Romans, ch est assavoir les consules et
tonne les Romans. # # \
senateurs, lesqueils consules astoient nomeis Gorgos et Nerva, et leur dest
enssi : « Saingnours , vos saveis que je tieng mon pays de vos en tregut
» parmy I denier d'argenl cascon an par cascon personne chief de son
» hosteil, el enssi Fasservit li dus Camberacion, mon ayon, sens raison.
» Et enssi vos saveis, se je ne fuisse awec nies barons, li roy Anthiocus
» ouwist toute le pays de Romme destruite et conquis, el fussent les Ro-
» mans tous mors, ou li plus grant partie d'eauz, et neussent jamais oyut
» pais a eaux, se ilhs neussent rendut grant tregut aux Suriiens, si qu ilh
» fussent vilainement aservis , qui sont les plus frans de monde. Or est ave-
» nus que por l'aide de mes barons que vos aveis la victoir obtenue, et tregut
)> aveis sour eaux; et por la raison de chu et en remuneracion de tous les
» bons serviches que je vos ay faite et puy faire encor, et que mon perc
» Camberacion vos fist, quant ilh desconfist Hanibal et I'affollat vilaine-
» ment, vos vouroie proier el requerir que vos le tregut de mon pays me
» vosissier quitteir. »
Quant les Romans el senateurs et consules, qui astoient adont les sove-
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LIVRE PREMIER. 131
rains de monde, entendirent chu, iih respondirent tout sens prendre nulle Response des Romans.
conselhe que de chu ilh ne feroient Hen , ains se lairoient costeir dois tans
d'altre costeit '. — Quant li dus Cletus entendit chu, si fut mult corochies,
et jurat en halt a tous ses dieux : Jupiter, Venus et March, en la presenche
d'eaux, que jamais ne paieroit ne envoiroit le tregut aux Romans; et s'ilh
sembloit aux Romans qu'ilh les fesist tort, si en fesissent des pies 1 qu'ilh en
poroient faire, car ilh ne les dobtoit I denier; et silh mandoient le tregut,
ilh penderoit leurs messagiers en despit d'eaux, ou ilh les coperoit les gre-
nons. — Quant Gorgos et Nerva, les II consules, entendirent chu, sachies
qu'ilh en eirent t res-grant despit, et corurent sus le due Cletus et ses gens;
mains li due soy tournat a wee luy ses gens a une partie' de Romme, et
fist ses gens armeir, dont ilh astoit plus de XX™, puis soy traihent fours de
la citeit, et ordinal ses gens mult bien; et les Romans issirent fours bien
aXL m hommes, et cressoient toudis, car ilh avoit grant peuple a Romme. —
Atant soy corurent sus et commencharent I batalhe mult pesarite et orible, Batalhe.
car les Romans cressoient toudis; et astoient bien I II I Romans toudis con-
tre one Sycambiens; mains ils astoient fors et redobleis, et leur dus Cletus
astoit si poissans que nuls ne duroit contre son espee, qui faisoit les
Romans fortement esmayer. Mains chu ne les vault, car ilh y oit mains
hommes reverseis et ochis, dont les chevals enfuyrent parmy les champs.
Mains les gens Cletus astoient mult travelhiies, jasoiche qu'ilh fuissent
virtueuses. En veriteit ilh eussent esteit desconfis , si ne fust li dus Cletus
qui s'avisat done mult beal fais d'arme, car ilh entrat en la plus espesse
batalhe, en brochanl radement son diestrier droit vers Gorgos et Nerva,
les II consules ; si ferit Gorgos de son espee amont son hyame par teile
virtut qu'ilh Tat fendut jusques en la poitrine. — Quant Nerva Tat veyut, se
escriat ses gens, et ferit Cletus amont son hay me 4 et le fausat, et le navrat
en chair; et Cletus, qui fut mult valhans, se tournat et ferit Nerva, si
qu'ilh li trenchat son hyame et le coffre 5 , et ly copat I orelh, puis 1'apro-
chat et l'aherdit aux bras, et li mist son espee en fondement, si qu'il
loch is t.
1 Dots tans d'aullre chouse. B. Tans sign i fie ici 4 Heaume est ainsi ecrit de deux facons diffe-
/*•*• rentes a deux lignes d'intervalle.
* Pour pis, pire. s g ans doute la coiffe qu'on portait sous le
5 Dans un quartier de Rome. heaume.
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132 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
Foi. 56 r«. Quant ly dus Cletus oit ochis lez II consules, si escriat ses gens : « Or y
» fereis, barons, a cheaux faux Romans; car ilh sont vencus, la journee est
» nostre. » Quant les barons Font entendut, si ont reprit hardileiche 4 , et si
sont ferus aux Romans, et si en ont tant ochis que li remanans est des-
Les Romans deseoDEs confis. Si s'enfuyrent, et les Sycambiens les cachent jusques a la porte de
par les Sycambiens. » » r i • *•■!•• ■
Homme. La en fut tant ochis, que pou en escappat; ilh en gisoit sour les
champs XXIX m , et les a 1 Ires rentrarent dedens Romme et cloirent leurs
te dus cietus assege portes. — Adont ly dus Cletus fist tendre ses trefs, et assegat Romme, et
le fist assalhir mult firemen t; mains les Romans soy defendirent mult bien
encontre, et quant li dus Cletus veil que la citeit astoit mult fort, et ilh
avoit pou de gens, si poroit plus perdre que gangnier, si dest a ses gens
qu'ilh en voloit ralleir, mains temprement revenroit a si grans gens que
ilh destruiroit Romme, et si metteroit les Romans en tregut a luy a tous-
jours mays. Enssi disoit ly dus Cletus, qui puisdit acomplist en parties de
ses parolles, non mie toutes; car ilh destruite des terres apartinant aux
Romans une grant partie, et les mist en sa subjection. Mains les Romans
et la citeit de Romme ne pot-ilh onques conquesteir, ja soiche que les
Romans n'eusent point de poioir encontre ly ; car ilh ne le gueroient mie,
ains soy tenoient tous quois en leur citeit, sens fours yssir ; si lasserent le
due Cletus convenir, ardre et conquere tout leur paiis. — Et quant Cletus
fut mors, si maintenirent la guerre ses successeurs dus de Galle apres ly,
et durarenl ches Sycambiiens en teile orguelhe et virtut, regnant enssi en
fortune par I'espause de cent XLI an, assavoir jusques al temps de Julin
Cesaire, qui les remist en tregut plus grant que ilh n'eussent oncques
esteit, enssi com vos oreis chi-apres.
LesSycambienssovre- Lendemain al matin se sont tous les Sycambiens apparelhiies, et ont
trayenl Ters Gal. # . % * *~ r #- 7
trosseit leurs harnois, et se soy misent a enemy n vers leurs pans de Gal,
mult manechant les Romans; et vinrent passant parmy le terre de roy des
Latins qui marchissoit aux Romans, et sejournarent la VIII jours deleis le
roy Franbal son seroige, et deleis la royne Alexandrine sa soreur. — La soy
plandit * li dus Cletus mult fort a roy des Romans, et li priat qu'il li vosist
aidier a chu qu'ilh fuissent destruis , et qu'ilh fust quitte del tregut de son
pays. Quant ly roy entendit son seroge, se li at respondut que de la des-
1 f/ardiment. B. s Clamat. B.
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LIVRE PREMIER. 133
truction des Romans ilh ne soy volloit point melleir, mains vollentier tra-
tieroit-ilh de pais, se ilh le poioit faire, awec la quiltanche del tregut, et
renvoiroit * a Cletus chu qu'il auroit troveit aux Romans dedens II ans; et
que li dus Cletus n'envoiast point de tregut jusques a tant qu'ilh ly aroit
renvoiet la response des Romans. A eel sentenche s'acordat bien ly dus
Cletus, qui de la soy partit et en rallat en son pays. — Item , Tan IIII C et 1 ,
mo rut li amachour de Hongrie, qui avoit regneit derainement, et as to it
nommeis Sartago. Si fisent apres les barons I roy qui fut nomeis Ebronus, Lepromin* roy deHon-
liqueis regnat XLV ans; et fut li promirs roy qui fut en Hongrie. En eel
temps 1 meismes, chevalchat li roy Franbal des Latins a Romme; si mist
ensemble tous les senateurs et les consules, et leur dest la raison Cletus, b* ">.v Franbai de«
son seronge, ensi qu'ilh est declereit desus, et leur donnat cleirement a
entendre que s'ilh ne quittoient le tregut aux Sycambiens, qu'ilh perde-
roient plus asseis qu'ilh ne valhist. — Quant les Romans entendirent les
grandes maneches que li roy des Latins leur faisoit, por et en nom de due
Cletus, si respondirent enssi : « Sire roy latinois, portant que lidis dus
» Cletus est frere a madamme vostre femme*, si nos asteis venus manechier
» en nostre palais meisme, dont vos ne faite mie bien , et nest pais a prisier:
» car se vos voleis vostre seroge aidier contre nous, vous nos deveis mane-
» ehier de vos-meismes et nient des aultres desqueis nos astons tous mane-
» chies, car ilh sontnos anemis; si les greverons el les destruirons quant
» nous porons, et vos awec, se vos les voleis assisteir. » — Quant li roy m-****.
Franbal entendit ches parolles, si en fut mult enfraees, car ilh dobtoit mult
les Romans; si les respondit : « Saingnours, soiies certains que je suy chi
» venus por mettre acorde el pais entre vos et cheaux de Galle, et por noti-
» (iier vostre grevanche ou je le saroye , et por altre choise nient; car se je
» ne fuisse, li dus Cletus euwist mandeit Unites ses gens et son paiis, et
» fust entreis a grant forche en vostre paiis et vos ewist tous destruis , se
» vos ne vos fussies defendus. Vos saveis bien queile ilh est, et le pu'ssan-
» che de ses gens et de son paiis, et le grant sane dont ilh est desquendus.
» Porquen en remirant son poioir et son valeur, et enssi le serimenl que
» j'ay a Romme, dont j'ay esteit senateur, je ewis volenliers rosteit le debat
1 Remanderoit. B. * Ma damme la roine vostre molhier* B.
* En eel an. B.
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134 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
» dentre vos, se je posisse ; et veyeis chi la cause qui me muet a chi venir.
)) Et puisqu'ilh ne vos agree, je manderay a due Cletus qu'ilh faiche chu
» qu'ilh li plaist, car je ne men velbe pas entremeleir ; dolans suy que tant
L krovF^nbt?d"tra- >} en a y ^ a * le - w — Quant les Romans 1'entendirent, se li dessent que chu
h,w astoit par trahison chu qu'ilh en faisoit; mains ilh comparoit tout chu que
les altres les avoient raeffait, et s'ilh ne fust venus sicom messagier, ilh le
penderoient. Adonc respondit li roy qu'ilh n'avoit en tout la citeit de
Romme homme, ja fust si pussans, qui fut digne del combatre a luy : et,
s'il y avoit homme qui li vosist ametlre ' de trahison ne de malvaisteit, que
ilh ne le deust proveir par son corps seul contre cheli que ilh mentoit fau-
sement, ains astoit sens coulpe de tot chu.
A cest parolle que li roy des Latins respondit enssi, se vat leveir I des
consules de Romme qui fut nomeis Aristo, lyqueis fut li fis Nerva le con-
sule que li dus Cletus ochist devant Romme, sicom dit est; chissalhit avant,
et dest a roy que ilh feroit contre ly la batalhe ; mains ly roy le nommat
tantost garchons, et qu'ilh n'astoit pas digne de son soleir a lachier *. Quant
chis l'entendit, si en fuit corochies 8 et soy retrahit arrier. — Mains Astro-
bolus, ly fis Gorgos, qui astoit li altre consule, vient avant, et soy por-
offrit de faire la batalhe; mains ilh li dest qu'ilh n'estoit mie digne de son
piet a deskachier, dont chis fut mult dolans. — En apres, soy levarent les
senateurs li uns apres 1'autre, qui sont et asloient mult nobles person nes:
mains li roy Franbal en refusat LXXII, Tunc apres 1'autre tous en ordre;
AiixandreitfisGar mains al derain soy levat en pies Alixandre, le fis Gardro ly roy d'Athenes,
qui astoit senateur, et devoit apres son pere estre roy d'Athenes. A cheli
s'acordat ly roy Franbal, et l'afliat solonc leur loy. Et le champ loiiet, si
fut ly jour nomeis a I mois de faire la batalhe; et oit enconvent ly roy
Franbal del revenir a Romme a jour nomeit. Et, chu fait, ly roy recheval-
chat en son renghe, puis mandat ses hommes par tout son pays; se leur
comptat tout le fait, enssi com desus est compteit.-*- Quant ses barons l'en-
tendirent, si en furent mult corochies, de chu que les Romans li avoient
fait et dit teil despit, et ont tout le fait mandeit al due Cletus en Galle, que
por luy ly roy avoit a souffrir teile injure.
1 Accuser, inculper, d'ou le substantif amiese , * De lacer son Soulier,
citation, assignation, que nous avons rencontre s Iroux. B.
dans la chronique de Jean de Stavelot.
De
dro,
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LIVRE PREMIER. 135
Franbal, li roy des Latins, quant ly jour approchat, est chevalchiet
vers Romme a V c chevaliers por sou honneur et son conselh a gardeir, et
ja soiche que les Romans li ewissent faite teile despit, nient moins illi
avoit en la citeit grant partie des bons amis et des prochains; maiement
entre les VI" senateurs till avoit des prochains asseis , et Alixandre meismes ,
qui devoit a li champir, astoit son cusin en droit terche '. — Si astoit li roy Dei MkUta <ie i™
Franbal uns des mies elinagiez f et de plus grant nation qui fust en monde ,
et qu'en valroit le contredire , ilh oil plus grant partie a Romme des nobles
et puissans, sicom consules et senateurs , qui a ly avoient esleit contrables
qui overtement soy trahirent a sa partie, car ons dist que li bons cuer ne
puet menlir, se che nest conlre sa volenteit et a son en vis. — Quant la droit FoK 37 r °-
journee fut venuee, si furent les dois champions armeis mult richement,
et furent mis dedens unc champ; si oit li roy Franbal al entreir en champ
plus grant siiet 8 des hauls barons que ly roy Alixandre n'ewist, car tous
ses amis astoient tourneis awec ly. Chis fut li promirs champs qui fut fait Li promirs ch*mp».
en Europ corps a corps. Et quant ilh furent en champ, si fisent les sena-
teurs proclameir que nuls ne soy movist sour le haire * jusques a tant que
ly champs seroit fineis. Adont se vont tous acquosier 5 ; et ly roy Franbal
araisonnat de promier Alixandre, et ly dest : « Alixandre, que vues-tu dire
» sor moy et de moy aultre chouse que bien et honneur? » Respont Alixan-
dre : « Je dis et mentin-ge que lu es trahitre, et que por trahison as enor-
teit aux Galliiens qu'ilh nos vosissent destruire por eistre qui tie Je leur
tregut, et nos as-tu a eaux vendut, et nos devons livreir dedens II ans,
qui tost seiront passeis; et tout chu je dis eistre vray , et le vorai-ge pro-
veir de mon corps contre le tien. » — « Alixandre, dist Franbal, tu ne
» fus oncques presens en lieu ou je fesisse teile malvaisteit, et portant lu
n'es mie sage del combatre a moy por les fauses parolles d'aultruy ; si
ten repenteras, quant tu ne poras; car je dis de tout chu que tu as dit
le contrable, et que tu mens et as mentit, et le toy feray encor desdire
publemenl et overtement. »
1 Ou thier degreil. B. Gette rersion sert a ex- * II faul sans doute ratlacher cc vcrbe a Tad-
pliquer noire lexte. jectif cot et lui donner le sens de se tcnir tran-
* A ppa rentes, unis par lignage. qui lie. Achoiter dans Roquefort a un sens actif :
* Suite, cortege. Sieute dans Roquefort. tranquilliser.
4 Sous peine de la hart.
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136 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
A ches parolles ont brochiet ambdois en deffiant li tine ('autre, lanche
bassie ; se soy sont encontreis et asseneis sour leurs escus par teile manire
et teile virtut que ilhs les ont ambdois fendus et traweis 4 , et les habiers
rompus et desquiries, et leurs corps ambdois sovineis* sour le culs des
chevals sens faire a I Ire grevanche. — Ghu fait, ilh ont sachiet leurs espees et
se sont requis mult aigrement ly 1 1'atre. Si vos diray le gros de la batalhe,
sens racompteir tous les coulps qui furent la donneis et recheus. Ly roy
Franbal assenat le promier colp d'espee Alixandre sour son hyame, si
qu'ilh ly at fauseit, et le navrat I pau en chair; et Alixandre le rassenat
eussi amont son hyame, si qu'ilh le trenchat jusqu'en la coeffre 5 % mains
ilh ne fut mie en chair. — Et apres chu ly unc lanche a l'autre plus de cent
colps jusqu'en chair bien so vent, et teilemenl qu'ilh sangnoient mult fori
par les plaies dont ilh en avoient a planteit; tant que entres les aultres
avient, quant ilh oirent asseis esquermit, que ilhs desquendirent de leur
volenteit de leurs dois diestrirs a piet, et soy assalhirent mult firemen t. Et
trove-ons en I'escripture que lesdis dois chevaliers as to i en t mult pussans;
mains Alixandre as toil plus poissans por la jovente qui li donnoit et faisoit
grant avantaige, et astoit plus grans et plus membrus; mains li drois astoit
a roy Franbal, qui astoit li plus hard is de monde, et astoit bien fais et
bien tourneis, mains deltas astoit. — Or avient que Alixandre li donnat
I coulp si grant qu'ilh ly talhat le hyame et le coefre de halbert, et li prist
de la chair et des cbeveals; puis dest a Franbal : « Ilh toy seroit plus bel
» de cognostre la grant trahison que tu as porcachiet, que del morir chi
» mechamment; car ilh toy convenrat maintenant morir. » Quant Franbal
entent Alixandre, se le court sus, et li donnat I colp de l'espee a dois
Alixandre rut ochis. mains , et mist tout en aventure par teile virtut, qu'ilh li trenchat le chief
desus les espalles et le lanchat plus de XL pies long. Adont fut grant ly
huee et li cris de tout pars.
Et les parens Alixandre s'encorurent fours de Rom me mult honteuse-
ment, et jurarent la mort le Franbal al ralleir en son paiis. Ches astoient
Les n aren» Alixandre bien ll m , tant por parage com por priier, qui de Romme sont yssus, pour
t»i agaitier le roy Franbal et les barons qu'ilh avoit ameneit. — Apres le camps
1 Troues. * Sans doute to coife, commc prccedemment.
* Sovinou. B. Souvin dans Roquefort
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LIVRE PREMIER. 137
est Franbal issus de champ par le congiet des senateurs, jasoiche qu'ilh
en ewist pluseurs qui vosissent qu'ilh fat pendus. Apres soy desarmat, et at
tout osteis les armes del champs, et se soy arm at d'aultres armes, et ses Fo1.s7t».
barons enssi, et issit fours de Romme, et soy mist al chemien awec V c che-
valiers qu'ilh avoit ameneit; sens les escuwiers; car ilh dobtoit fortement
le lynage Alixandre d'Athenes, que ilh avoit conquis et ochis. — Mains de
tout chu se soy devoit dobteir ! , car ilh li donront tant a faire temprement
que chu sierat pieteit et demaige. Ilh en alloient parmy les plains champs
de Cosdre , costoient * unc bosquet ou les parens Alixandre as to i en t enbus-
siet. Atant est venus Piramus d'Athenes, cusin germain Alixandre a lanche
bassie fort esporenant 5 , etcriant aux murdrers qui avoient son cusin mur-
drit. Ly roy Franbal 1'entendit et voit chu; si escrie ses hommes : « Sain-
» gnours, defendeis-vos, nos summes agaities. » Atant at brochiet vers
Piramus et chis vers luy, et se sont si bien asseneis sour leurs escus, que
ilh les ont ambdois perchiet; mains Piramus brisat sa lanche, et ly roy li
lanchat sa lanche * parmy le corps et l'ochisl. — Quant les II milhirs s qui
astoient enbussiet veirent 6 la perdre, ilh corurent sus les gens le roy Fran-
bal, qui mult bien soy defendirent sicom chevaliers eslis; car ilh avoit
ameneit awec luy les miedres 7 chevaliers qu'ilh pot troveir entre III m qu'ilh
en avoit en son rengne, les melheurs de monde, et tant finablement ilh fut
ochis XIIII C Romans; et encor dont furent les Latins, qui lasseis astoient, Le ro „ Franbii d«-
en la fin desconfis et ochis jusques a XXXIII , qui enfuirent et qui emy- con s '
nont leur roy oultre son volonteit.
Enssi fut desconfis li roy Franbal, et les Romans qui avoient la victoire
quidarent avoir ochis le roy Franbal; si ne plandoient mie la perdre qu'ilh
avoient recheue, et sen rallont atout VII C qu'ilh en astoit demoreit, en
jurant qu'a eel esteit prochain ilhs iront tout conquere la terre des Latins.
— Mains ilh ne sevent mie la doleur et pessanche que ly dus Gletus de Gal
leurs ferat, par cuy ocquison tout chu at esteit commenchiet, qui les donrat
•
1 Ne Vestuet dobteir. B. 4 Li guiat sa lanche. B.
* II faut sans doute prononcer costoiant, car 5 Milhiers. B. Probablement pour railliers ,
il est a remarquer que le copiste emploie souvent mille.
dans ee cas Ye pour Ya. • Choiserent. B.
s ^peronnant. En wallon on dit sporon pour 7 Meilleurs. Mieudre dans Roquefort.
eperon.
18
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138 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Desmessagiersenvoiet tant a fa ire qu'ilh neD ore nt onques tant. — Si at tantost li roy Fraubal
al dus Cletus deGalle. ....
pris II nobles prinches ', si les at envoiet en Galle al due Cletus, et les at
chargiet lettres enqueils ilh at eseript tout l'affaire comment ilh at aleit
puis qu'ilh soy partit de ly , enssi com nos avons deviseit. Les messagiers
s'en vont, et ont tant chemineit qu'ilh sont venus a Lutesse et ont troveit
le due Cletus; se li ont presenteit les lettres, et ilh les prist, so brisat les
seials et les lisit mult diligemment; mains, quant ilh voit le fait enssi qu'ilh
at aleit , si fut tout espris de felon ie. et par especial de chu que les Romans,
apres le champt outreit, avoient agaitiet Franbal et ses barons ochis. —
Adont at jureit ses dieux March, Jupiter et Venus que ilh n'aresterat, ne
esteit ne yver, si arat destruis cheaux qui teile despit ont fait a son seronge,
et al ocquison de ly. Et at rechargiet aux messagiers qu'ilh dient al roy
qu'ilh assemble toutes ses gens, car ilh s'en yrat tantost a oust banist \ por
- aleir sour les Romans el eaux et tous ses altres anemys destruire. — Atant
ont pris les messagiers congiet, et se sont partis; et li dus Cletus at man-
deit tous ses hommes partout. Ilh mandat Lidryonel, le comte de Flandre
et le comte de Bretangne, le due de fiorgongne et tant d'aultres, qu'ilh
assemblat bien C m hommes, qui tous se misent al chemfen; et se n'ares-
larent, se vinrent a Gasdre la citeit plus principaul del rengne le roy Fran-
bal qui ja avoit, a la relation des messagiers , mandeit tous ses hommes; et
fist le due Cletus mult grant fieste.
Grant fieste fait Franbal a Cletus et a ses gens, et soy plandit s a luy des
Romans, et li comptat tout le fait, enssi com vos aveis oiit par-desus. Et li
dus Cletus li respondit qu'ilh en prenderoit teile venganche, qu'ilh en sie-
roit parleit railh ans apres sa mort ; et chu ly jurat sour ses dieux Jupiter
et Venus, car ilh astoient tous Sarasiens, et Machomes, en cuy les Sara-
siens creirent apres, n'astoit encors neis , et ne fut la apres dedens V1II C ans
Fo». sa f. dont je parol I e maintenant. Mains a eel temps doht je parolle, et par long
temps devant, creioienl en unc enchanteur, enssi que fut Machomes, liqueis
fut nomeis par II noms , car ilh a nom Dyonises et oit nom oussi Lyber*. —
Dy<> n »^» Oilier lydieu Chis Liber dont je fay mention regnat en Judee sor I'an del origination de
1 El H rois Franbal chevalce tant, qu'il vient on documents du moyen age.
son paiis. Si at tantost pris , etc. B. * Clam at. B.
* Avec une armee convoquee par le ban. Cest * 11 s'agit de Bacchus, Dionysos en grec, Liber
le herbann des Germaias, et le heribannium des en latin.
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LIVRE PREMIER. 139
monde III- VIII C LXII , qui fut Ian del nativiteit Abraham VI C et LXXV1II
et Tan del nativiteit Joseph 1111° et XXX. Item, Tan del nativiteit Joseph
1III C XLl, conquist li deseurdis Dyonises Liber par son enchantement la
terre de Judee , et al conquere oit awec li grant parties de femmes des
Amasonnes; et tantost qu'ilh oit la terre conquestee, ilh fondat I citeit
qu'ilh nomat Nysa '. — Item, Tan del nativiteit Joseph 1111° et LXXIIII, Ny M .
morut chis Dyonises Liber, dont je fay mension; et, quant ilh fut mors,
les Sarasins, qui adont astoient nomeis Agariiens, l'aoront com Dieu por Agariem.
ses enchantemens qu'ilh avoit fait. Et fut ensevelis en temple de leur dieu
Apollinin; et fisent entour luy et desus le figure d'onne femme '. Chis
Dyonises Liber regnat al temps que jay deviseit. Et a eel temps meismes
regnat I roy qui fut nommeis Tros, qui selonc son nom appellat Troie le t«w.
grant; car Troie ne fut mie nomee Troie quant elle fut fondee a la pro-
mier fondation. — Celle citeit fut fondee longtemps devant le roy Priant,
ne Laomedons son pere; mains Priant le redifiat, quant les Grigois l'orent
destruite al ocquison de Jason, enssi que dit est par-desus.
Sour l'an del origination de monde III m VII C et XIX, qui fut Tan del
delueve Noe milh III LXXVII, et Tan del nativiteit Abraham V c et
XXXVII, et cent et XLIJ1 ans anchois que Dyonises Liber, li dieu des Sera-
siens, regnast , al temps queGelanoir astoit roy des Argins, et devans astoit
roy de la royalme d'Argife, droit leXXIX c annee que Aaron fut consecreis
promier evesque de la loy, la XXXII I e annee que Moyses veit la vision
de buson ardant en la terre Madian, et chu estoit Dieu qui s'apparut a luy
et li commandat qu'ilh sen alaist en Egypte et desiet al roy Neutres que ilh
lasast le peuple d'Ysrael yssir de sa terre qui adont astoit apresseis de
grant servaige, le VIII annee oussi que Aristobolus, qui promier trovat
l'usaige de attelleir chevals aux chaires et aux altres chouses, et fut roy
d'Athenes; a eel temps que je dis avoit unc roy en Asie qui oit a nom Dos: Deroy Dos.
chis oit I fis qui oit a nom Darmadis. Chi roy Dos encachat son fis et le
banist hours de son paiis, portant que ilh avoit ochis I homme qui astoit li
sien maistre qui l'instruoit, qui oit nom Abdos. Quant Darmadis fut enssy
banis , ilh s'en allat en altre pays tant qu'ilh vient en droit lieu de B la haulte
1 Ville de l'lnde , citce comme le lieu ou Bac- tant qu'il menat volentiers avecque luy en batailhc
chus fut eleve. grant planteil de femme.
1 Ici on lit en outre dans le manuscrit B : por- • Par erreur pour ou T
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140 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
Friese siet, et vient en droit lieu sor mere, ou la grant Troie siet puis;
et fondat illuc une citeit et pluseurs casteals, laqueile citeit ilh apellat
DarmantfondeparDar- solonc son nom; si en fut roy, et oit a nom la citeit Darmant, et y regnat
XXXIII ans 1 . — Item, a temps cely roy Darmadis, sor Tan del nativiteit
DeMoyseietdeAaron. Joseph II C XCIIII, morul Aaron, li promier evesque de la loi *, et fut ense-
velis en une montangne qui est apellee Hur; et apres Aaron fut fais evesque
son fis Eleazar; et apres le mort Aaron trespassat son frere Moyses, mains
ilh n'est horns vivans qui oncques pousist savoir ou son corps fut ensevelis,
et le ploront les fis Israel XXX jours. Apres Moyses, governat Josue le
peuple d'Ysrael XXVII ans. Apres ches chouses morut li promier roy de
Darmant, qui oit nom Darmadis, sour Fan Joseph III C etX. Apres li regnat
son fis Alymodes XI ans. — A temps cheli A ly modes, vinrent en la terre
de promission II lignies de peuple Ysrael , assavoir les lignies de Ruben
et de Gad; et prisenl habitation entre le flu Jordan et le peuple 8 . Item,
Tan Joseph II1 C et XXI, morut Alymodes li roy de Darmant; puis regnat
le fis Alianad, sa soreur, qui oit nom Sator, et regnat XVI ans. A son
temps morut Josue li dus dTsrael; si governat apres le peuple Othonyel,
ly frere Caleph, XL ans. — Item , Tan Joseph II I c et XXXVIII, morut Sator,
ly thirs roy de Darmant; et fut roy apres luy li maris de sa fille Sapora
XL ans, puis morut; si fut son fis roy V c Dardanus, et regnat XX ans :
chis oit pluseurs batalhes a Polops *, le roy de Greche.
cbi commenchent les A temps cheli Dardanus commencharent cheaux d'Ejrypte a eistre roys
empereursdeEgypte. * # ^•f r J
Foi.58?«. al manere d'empereurs, qui astoient devant nomeis Pharaons 8 . — Item,
Tan Joseph III XCVIII , morut Dardanus, li V e roy de Darmant; si fut roy
apres ly son fis Ganymydes, lyqueis regnat VII ans, puis morut sour Tan
Joseph fill et V. Apres luy fut roy Vl e Tros, de quoy jay parleit desus; et
fut li fis Jason frere a Ganymydes. Chis Tros regnat XXXVIII (ans); et, al
X c annee qu'ilh fut coroneis, ilh fist regrandier mult grandement la cileit
Darmant c' eat Troie. de Darmant, et le fist mult fort reforchier de murs, puis le nomat solonc
son nom Troie. A eel temps cheli Tros regnat Dyonises Liber dont jay fait
par-desus mention, que les Sarasins, que ons soloit nommeir Agariiens
1 Laqucil citeit ilh appellat solonc son nom Dar- * Et le peuple Israel. B.
mani. Si en fut rois, si regnat XXXI II ans. B. * Pelops. B.
* Le manuscrit B ajoute ici : le promier jour 5 Et li promiers emperere oit nom Setus, ajoutc
de quinteel c*on nomme maintenant jule. le manuscrit B.
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LIVRE PREMIER. I4f
et Hismaelites, qui ' aoroient adoocques. Pluseurs gens ne seven t mie la ontsoioimommeiries
raison por quoy uh fa rent promirs nomeis enssi; si en parlerons briefe-
inent. — Sour Tan del origination de monde III m 11° LXXI, qui fut 1'an Dei generation de*s*-
del deluve Noe milh et XXIX, et Tan d'Abraham IIII" et VII, engenrat ly
dis Abraham I fis, qui oit nom Ysmael, en une siene ancille qui oit noni
Agar; ly queis Ysmael s'en alat habiteir en altre pays; si oit une femme qui
oit nom Sara, qui fut filhe a Zedom, I prinche de Caldee. De chesti Sara
et Ysmael issirent cheaux qui , apres le nom Ysmael , furent nomeis Ysmae-
lites, et cheaux oussi qui, apres Agar, le mere Ysmael, furent nommeis
Agariiens, et une altre nation encor, qui, apres Sara, furent nomeis Sara-
sins. Ches Sarasins multipliont mies que les II altres nations, et orenl mult
grant poioir long temps apres chu dont je parolle ; si qu'ilh destrurent les
Agariiens et les Ysmaeliens , si regnarent tous seuls , et apellarent tous
cheaux de leur loy Sarasins *. — Item, quant ly Vl e roy de Darmont *, qui
fut li promirs roy de Troie, qui oit nom Tros, oit regneit XXXVIII ans,
puis morut, si fut roy son fis apres luy, qui oit nom AIus, qui regnat
XXXII ans. Quant ilh fut mors, sy regnat son frere Laomedons XII ans,
et fut coroneis 1'an Joseph IIII C LXXV \
Al temps ceil roy Laomedons regnat Dandalus*, qui fut si subtils; et
apres la mort Laomedon fut roy son fis Alus, qui regnat XXXIX ans. A son
temps furent faites en Gresse les promirs nefs por entreir en mere; si appel-
lerent les nefs argons portant que Argones les fist; adont entrarent pro- L « pr°«n<« ■«&.
mirs les Grigois sour mere. — Item, 1'an Joseph V c et XVIII, fondat li roy
Alus a Troie une fortereche que ilh apelat Ylion; et, Tan V e et XXVI de
Joseph, morut ly roy Alus; si regnat Laomedon son fis apres luy XXVI I
ans. Item, en cesti an meismes, oit li roy Laomedon une fis de Ector sa
femme, qui fut apelleis Priant, portant que sa mere s'en delivrat si angos- De priam.
sousement en priant a ses dieux qu'ilh ly vosissent aidier. — Item , 1'an
Joseph V c et XLIX, montat Jason, I prinche de Gresse. sour mere por
conquere le mouton qui avoit le tasson d'or, et arivat por repoiseir en la Demoionaita*soii<ior.
terre le roy Laomeudon , enssi que dit est par-desus, qui li mandat qu'ilh
1 Ce qui me para it superflu. 4 Le thierjour de may, ajoute le mnouscrit B.
* Tout ce qui prdcede depuis : che$ Sarratins Ce me'me texte ne parle pas d'Alus et fait succeder
multipUont est omis dans le manuscrit B. Laomedon a Tros.
* Preccdemmcnt Dormant. * Dedalc,
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^°P£
Tl.ir.
142 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
vuidast son pays; porquoy la guerre commenchat mult pesant, et costal
maintes vies d'hommes. — Item, Tan Joseph V c et LIU, passat lidis Jason
mere a grant planteit de Grigois et destruite la eiteit de Troie, qui avoit
ja dureit puis le temps que Darmadis l'avoit fondee jusques adoncques 1I C
et LXV ans. Et la fut mors ly roy Laomedon. Apres la mort Laomedon fut
coroneis Prians a roy ! , qui astoit en altre terre enssi que jay dit altre fois.
et regnat XXXV ans; et fist Troie redifiier plus belle, plus forte et plus
grande quelle n'awiet onques esteit, et affranquist tous cheaux qui voroient
dedens venir demoreir de tous servaiges, enssi que dit est a commenche*
ment de chi libre \
Al temps que ly roy Prians regnoit, fut fondee la eiteit de Thir en la
terre de Fenix 5 ; si le fondat Thyro li philosophe, qui fut li pere Orpheus le
poete, qui fut disciple Museus. Item, al temps cely roy Prians, fut la
bataihe entre Hercules, qui fut pres enssi fors que Sampson, d'onne part,
et Anthemyn \ unc prinche de Troie, cuy la forche redoubloit toutes les
fois que ilh chaioit a terre; si oit Hercules victoir, car ilh astoit plus subtilh,
si qu'ilh ochist ledit Anthemyn. — Item, Fan Joseph V c LXII, fut Helaine
ravie par Cuseus 5 le roy d'Athenes ; mains elle fut tantost rescosse par ses
11 freres Castor et Pollux, II roys de Gresse. Apres chu fut ravie ladit royne
Paris. Eloyne de part Paris, le fis le roy Priant de Troie, enssi com nos avons
desus faite mention : et fut ravie sor 1'an Joseph V c et LXXV1I , et de chu
orent les Grigois grant despit, et oussi le fist Paris por a eaux faire despit,
de 6 chu qu'ilh avoient destruite Troie et ochis son tayon Laomedon, pere a
La guerre de Troie. Priant son pere, par chest ocquison commenchat la grant guerre entres les
Grigois et les Troyens, qui ja soy hayoient por les raisons desusdictes. Et
assemblont les Grigois leurs oust, et vinrent assegier Troie; et astoit awec
eaux Menelaus, li maris Helaine, et durat chis siege X ans tous acomplis.
— Item, Fan Joseph V c et LXXIX, vinrent a Troie les femmes amasonne
et ly roy Mennepy de Ethyope sorcorir le roy Prians; mains tout chu ne
valut riens a roy Prians, car tous ses fis, Ector et les altres, furent tous
1 Quant li rois Laomedon* fut mors, li barons s'agit ici de Tyr cri Phenicie.
de Gresse repairont, et Prians se fist'eoroneir a 4 Antee, fils de Neptune, transform^ en prince
roy. B. troyen.
8 De ches presens croniques. B. 5 Thesee.
* Inutile sans doute de faire remarquer qu'il 6 Notre manuscrit porte et.
Fol. 39 n\
De Helaine qui fut ra-
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LIVRE PREMIER. 143
mors, et luy-meismes, et sa citeit vendue et trahiie par ses gens meismes,
et fat tout destruite par les Grigois sor 1 an del nativiteit Joseph V c 1IU" et
VII et II mois; et se soy partirent de la les Grigois, et remynat ly roy Me-
nelaus sa femme Helaine. — Or vos avons deviseit tout l'estat de Troie com-
pendieusement , portant qu'ilh en sont fais pluseurs libres en franchois,
desqueiles ilh y at unc, qui briefement parolle, qui contient veriteit; mains
tout voie ilh ne faite point de mention de la promier fondation, ne des roys
qui regnarent en la citeit, ne des dautes. Portant nos le vos avons deviseit;
car ons truve bien des hystoires qui ne sont point approveez, qui dient
altrement et qui donnent altres noms a cheaux qui y furent, et sont oussi
en grandes diffiprenches des dautes et d'aultres chouses pluseurs, si ne sont
point a croire. Or est raison que je me taise de chu , se die et revengne-je
a ma mateire que je ay unc pou entrelassiet por chascon plus plainement
enfourmeir de chu que j'ay deseur dit, c'on cjpit oyr volentier.
Puisque je doy revenir a ma droit matere, dont vos voray parleir de roy
Franbal des Latins et de due Gletus de Galle, qui ont assembleit grant gens
et se sont mis a chemyn, et ont tant esploitiet que ilh ont assies Rotnme a Rominefut assies.
cent et LX m hommes, de quoy les Romans furent mult esmaies; mains ly
uns des senateurs, qui oit a nom Aristo, les conselhat que ilh yssent de la
citeit a chu de gens qu'ilh avoient, et corissent sus les gens dehours tant
qu'ilh sont lasseis et travelhies de chemyneir. Et enssi fut-ilh fais; car ilh
issirent fours de la citeit a LX m hommes, et ly remanans demorat en la
citeit por lee & gardeir. — - Quant les Sycambiens veirent les Romans, si sont
tan tost armeis et rengies, et ordinarent III batalhes : ly roy Franbal guyat
la promier a LX m hommes, la seconde guyat Jobal, (is a roy Franbal, a
LX m hommes, et li dus Gletus de Galle guyat le tirche a XL m hommes.
Quant iihs furent enssi ordineis , si assemblarent les batalhes aux Romans,
et soy corurent sus d'ambedois pars; la oit mains nobles barons reverseis
et ochis d'onne part et de 1'autre; et fut le secon jour d'avrilh l'an del trans-
migration de Babylone I III et 11. — La oit fort batalhe, et si ne durat mie Bataihe.
unc pou, car elle commenchat enssi com a heure de prime, et ne falit jus-
qu'a soleal cuchant que la nuit les deparlit. Les Romans soy combatirent
mult bien, car les aultres astoient travelhies mult tres-fort, et en orent les
Romans le melheur jusqu'a heure de none car toudis leur yenoit gens, et
ochirent bien XX m des leurs anemis; mains, quant les Sycambiens veirent
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GQogle
Hi CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
chu, ilhs escriarent Galle, et furent si repoiseis de grant coroche,que illi
ne sentirent nulle travalhe, car ilh avoient * gens mult virtueux. — Atant
s'asemblarent jusqu'a XL m tout en unc tasse, et assalhirent les Romans par
si grant ahir *, qu'ilh les fisent recouleir plus d'onc bonir de terre, et si en
Foi. 39 v. abatirent bien XX m et plus , qui tous furent mors a grant doleur. — Quant
les Romans sentirent teile forche, si furent mult esbahis; nientmoins 8 ilhs
soy defendirent mult gentilhement, qui riens ne leur valoit, car les Sycam-
biens les ochioient mult asprement, dont ly dus Gletus et li roy Franbal
avoient grant joie a leurs cuers; si escriat adont cascon son ensengne, et
se ferirent en I'estour.
Ly dus Cletus ferit 1 senateur, qui oit a nom Gay us, par teile virtut que
ilh le fendit jusques en pis ; puis at ochis I altre senateur, qui oit nom
Parcheval, et pluseurs chevaliers awec. Et ly roy Franbal, chis ochioit les
Romans a teile randon * que eh 'astoit mervelhe a veioir. Quant les Romans
veirent 8 l'estat de roy Franbal , qui astoit vesture de sable a unc lupar
dor, se le conurent bien que chu astoit chis por cuy la guerre venoit: si
Ly roy Franbal est l'encloirent et ly lancharent dars et espirs ' tant qu'ilh Font abatut et ochis,
anchois qu'ilh fust apercheus de ses gens. Puis se soy reforchat la batalhe,
car les Romans reprisent cuers en eaux et corurent sus leurs anemis;
mains quant les Sycambiens aperchurent 7 leur firteit, si en orent grand
despit, et se sont ferus entre eaux par teile virtut qu'ilh en abatirent font
que li champs en fut tous coviers. Et la fuissent tous les Romans ochis
quant la nuit les departit, si que ilh sont en la citeit rentreis; mains des
LX m qu'ilh furent des Romans, ne n'est pais rentreis en la citeit XX m
hommes : tous ly remanans astoit ochis. Aussi avoient bien perdus les
Latins XX™ hommes, et leur roy awec; mains des Sycambiens ne fut mors
que VII C et XL hommes. — Enssi fut la batalhe departie. Si furent les Sy-
cambiens mult dolans de roy Franbal, qui mors astoit; si en fisent mult
grant deul tout la nuit jusques al jour, et lendemain ilh le fisent quere par la
batalhe; et, quant ilh fut troveis, si Font enbaisemeit, quant ilh orent sa
1 Par erreur sans doute pour estoient. Le ma- * Choisirent. B.
nuscrit B porte erent. « £pieux, javelots. Roquefort donne espti, mat's
1 Pour air, colere, violence. notre forme provient directement de rallemand
3 Non porquant. B. specr.
* Fuison. B. T Choisirent. B.
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LIVRE PREMIER. i4S
coral he ostee fours de son ventre. Quant ilh orent tout chu fait, li dus
Gletus de Galle prist la coronne, et coronnat son (is Jobal a roy des Latins,
qui astoit fis de sa soreur Alexandrine, que ly roy Franbal avoit oyut a
fern me et encor viscoit. Ghis roy Jobal regnat XII ans. et fut bon cheva-
lier, et soy fist de ses gens mult ameir. — Apres chu fist ly roy Jobal par
XL de ses chevaliers ' raporteir le corps de son pere en son pays, et la
fut-ilh honorablement ensevelis en temple Venus, enssi qu'ilh afferoit a
luy ; mains, quant la royne Alexandrine veit son saingnour mors, si pasmat
dois fois sour ly, et a la tirche fois morut-elle; se fut ensevelie deleis le
roy son marit, et fais leur service solonc leur loy que ilh tenoient adont,
car ilh esloient Sarasins, si creioient en diverses ydolles. A eel temps
n'avoit en monde que Juys et Sarasins. car ch'astoit devant 1'incarnation
Nostre-Seigneur.
Or vos diray de cheaux qui sont devant Romme la citeit, qui assalhent
par jour et par miit a forche et a poioir, et les Romans soy defendent
noblement. Enssi demorat li siege mult longement que les Sycambiens ne
porent la citeit avoir ne emperier *; se prisent unc conselhe entre eaux que
ilh leiront 5 le siege et yroient destruire tout le pays de Romenie, puis re-
venroient al siege. Et adont sont departis de siege. Si sen vont par tout le Les sycambiens sont
pays de Romenie, et ont tout destruite les citeis Melan et Pavie et pluseurs ep * 8 * 1,ife *
altres, awec grant partie des casteals * et de fortes mansons; puis commen-
charent a destruire d'aultre costett jusques a la mere de Brandis 8 , et misent
a chu a destruire I'espausse de VI ans. — Item , Fan del transmigration de
Babylone II1I C et IIII, morut li gran Anthyocus, ly roy de Surie; si regnat
apres son anneis fis Sileucius XII ans. Item, Pan 1111° et V, oit grant batalhe
et orrible entre les Hongrois et les Danois , por le raison de chu que li roy
Negel de Dannemarche voloit avoir la terre de Bulgarie, que ly roy de DeNegeietEbronus.
Hongrie Ebronus tenoit. Si fut celle batalhe en septembre 8 , et Negel fut
desconfis; sy perdit grant partie de ses gens. Adont enforchat mult leur Fonor*.
guerre, et jurat cascons des dois roys que tant qu'ilh seroit en vie ly aultre
ne seroit en pais, et ne faroient 7 de guerre. Quant Lydrionel, ly promier
1 J'eflace un second fist qui doit etre de trop. 8 Roquefort ecrit lairont.
* Roquefort donne le substantia Quant auverbe, 4 Chats teats. B. Cette forme est toute wallonne.
il est la pour emparer transforme en vcrbe actif, a s Brindes, en latin Brundusium.
laoins qu'on ne prefere lui donner le sens de domi- • Le promier jour de septembre. B.
ner, tore emptreur, e'est-a-dire raaUrc. 7 Ne manqueraient de guerroyer.
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146 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
conte de Flandre, soit la certain raison de la guerre des Hongrois el Da-
nois, si assemblat ses gens et menat son oust en leur pays, et conquist sor
le roy de Dannemarche la lerre de Holande et Zelande, et y mist dedens
ses gens por gardeir, et puis revient * en son pays; et chu fut sor l'an 1111°
et VI. — Mains, quant ly conte fut revenus en Flandre, et ly roy de Danne-
marche en soit la veriteit comment ilh ly avoit son pays robeit, ilh assem-
blat ses oust, et reconquist tout la terre de Holande et de Zelande, et fist
copeir les chiefs de tous les Flamens que ly conte Lydrionel y avoit mis.
— Apres chu que ly roy Negel oit reconquis sa terre, si commenchat forte-
men t a chevalchier sor le roy hongrois et ardre son pays; mains, quant
Ebronus le soit, si vient contre luy a mult grant gens, et s'enoontrarent en
Pannonie, ou ilh faisoit les gens morir a grant dolour. Mains quant les
II roys s'aprocharent *, cascons at fait armeir ses gens et se sont sus corus.
La commenchat mult grant batalhe '; mains les Hongrois avoient plus
grans gens que lesDanois; si furent les Danois desconfis, et fut li roy Negel
ochis par Ebrok, le fis le roy hongrois, qui ly colpat le chief. — Quant les
Danois veirenl le grant encom brier, si soy misent al fuir dedens leur pays;
et quant ilh vinrent a Malgarnie, si coronont a roy de Danemarehe An-
thenoir, qui fut li fis le roy Negel, qui futly V* roy des Danois et regnat
XXX ans. — Et * eel batalhe ou li roy Negel fut ochis, fut en may ' sor l'an
1I1I C et VIII. — Item, en eel an meisme revinrent les Sycambiens par-
L ?ufpi^erMiRom- Levant Romme, qui par VII ans * avoient destruite le pays de Romenie;
me ' et quant les Romans veirent chu , si envoiarent I chevalier en Athennes a
roy Agilfo, qui novellement astoit coronets, qu'ilh les vowist aidier en-
contre les Sycambiens qui les avoient assegies. Quant li roy fut informeis,
si assemblat ses oust et vient a Romme, et aidat les Romans defendre leur
citeit encontre les Sycambiens qui les avoient assegies, et y amenat,XL m
hommes; mains ilh ly venist mies qu'ilh awist gardeit son pays, car ly roy
de Gresse l'avoit longement guerroiet, qui grandement le haioit. Se li fut
dit que ly roy Agilfo astoit aleis a Romme por sorcorir les Romans contre
Cletus, le due de Galle. — De chu fut ly roy Synaslor de Gresse mult
1 Reparat. B. 4 Le texte porte en.
1 Mams quant li II rots et leur gens soy inn- * Fut le VI 9 jour de may. B.
rent. B. • Par VI ans. B.
• Uric fier estour. B.
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L1VRE PREMIER. 147
joians ; si assemblat C m hommes et montat sour mere , et vient en Athennes;
se le conquestat tan tost, et tout le pays tout en lour, puis en fist roy son fis ,
qui oit nom Poleno. Si fist toutes les gens de pays faire a ly homaige et
seriment, et puis en ralat en Gresse. — Et les Sycambiens qui astoient
devant Romme assalhoient tous les jours la citeit, et se ne le poloient em-
peirier. Si avient que li dus Gletus se fist par nuit mettre par une scailc * en
la citeit. Et, quant ilk fut dedens, ilh escriat ses gens, et tous cheaux qui
devoient la citeit gardeir l'assalhirent ; et ilh soy defendoit si fortement, que
ilh astoient tous encombreis en tour luy. Et enssi qu ilh soy combatoit, tous
les Sycambiens montarent dedens la citeit, puis escriont: trahis, trahis.
Atant ont crieis aux amies par tout la citeit, et ilh soy sont armeis; mains
chu ne leur valut, car ilh furent sopris; si en furent mors et ochis LX m et
les aultres s'enfuirent fours de la citeit. Enssi fut Romme conquestee par Romme fut conques-
les Sycambiens qui tant astoient virtueux; et acquisent la grant honeur Tan
1I11 C et X en awoust \
Adont ly dus Cletus donnat Rome et tout 1'avoir awec et la sangnorie a
ses dois anneis fis, assavoir Alixandre et Flandrins, et les laissat deleis
eaux mult de ses gens de Galle et de ses saiges prinches, por eaux aconse-
Ihier, et puis soy partit, et en ralat en son pays 8 . — Item sachies que les
senateurs et consules, qui s'en astoient enfuis, n'osoient revenir por le
dobtanche de due Gletus, qui ont paour qu'ilh ne revenist Romme asse-
gier , s'ilh avoient ses enfans hours buteis * et ochis. — Item , Tan I1II C et XI ,
morut ly V° Pholomes d'Egipte. Si regnat apres son fis Salmon XXXVI ans,
et fut apeleis li VI° Pholomes. — A eel temps regnoit I poete en Galle, qui Foi. *o v.
oit nom S tali us, et fut chis Statius en grant auctoriteit a Melan en Lorn- Desutiusie poete.
bardie. Et fut ladit citeit refait par son conselhe qui devant avoit esteit des-
truit par les Sycambiens , et ilh morut el dit citeit. — Item , Tan 1111° et XII ,
morut Lydrionel, li promier conte de Flandre, qui avoit regneit XI1II ans.
A eel temps fisent pais les II roys de Danemarche et de Hongrie, par teile
condition que ly roy hongrois oit Bulgarie, et ilh donat lettres a roy Danois
que ilh le tenroit de luy tout sa vie et tous ses heures successeurs apres luy
1 Pour scale, echelle. roy Jobal en ralat en son pans. B.
* Le X* jour de mots d' awoust. i Prononcez bouteis, qui se trouve dans Roquc-
5 Puis s'en partit et rallat en son paiis , ct li fort.
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148
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Anthiocui li malvtis.
De YU freres martirs.
en tregut, et le doit servir a cent hommes tout fois quilh en auroit mes-
tier, et awec chu cascon an cent besan dor. Item, Tan 1 1 1I C XII1I, morut
ly roy Jobal, si regnat apres son fis InviduS * XX1III ans. — Item, 1'an 1111°
et XV, furent rebelles ches d'Athennes a leur noveal roy; se les fist colpeir
les chiefs tous cheaux qui avoient esteit de celle conselhe. Si vinrent les
aultres a merchi. Item, l'an IIII C et XVII, morut Sileucius, ly roy d'Asie
et de Surie; si regnat apres luy Anthiocus, son frere, qui avoit esteit a
Romme en ostaige, enssi que dit est par deseur; si regnat XI ans. — Chis
Anthiocus fut mult crueux envers les Juys, et se mist sovent grant paine *
de leur loy a destruire, et fist metre en temple Salmon ydolles, et les com-
mandat qu'ilh les adorassent, et que ilh ne fesissent sacrifices ne oblations
aultres dieux, el qu'ilh mangnassent les viandes qui les astoient defendues
en la loy, et les commandat qu'ilh ovrassent en jour de Sabath; et, qui ne
le voloit faire, chis fust tantost ochis.
Adont furent martirisies les VII freres Machabeiiens , dont Sainte-En-
gliese faite la fieste le promier jour de mois d'awost, car a chi jour ilhs
furent martirisiies. — Item, l'an IIII C et XVIll en fevrier 5 , morut ly valhan
dus Gletus de Galle, qui sa terre avoit tenut si franche, enssi com dit est.
Apres Gletus, regnat son fis li plus jovenes, qui fut nomeis Franco, car
les II altres astoient regnant a Homme, enssi que dit est. Ghis Franco re-
gnat LIII ans. — En eel an meisme fut racompteit aux Romans et sena-
teurs, qui fuys astoient de Romme quant elle fut conquestee depart le due
Gletus, que li dis dus Gletus astoit mors. Quant ilhs entendirent chu, si
Romme reconquestee acquisent promier partie en la citeit par forche d argent, puis vinrent a
Romme par nuit a tout chu de gens que ilh porent avoir en decembre *
Fan 1111° et XIX — car adont ons comptoit le promier jour del an en mois
de marche — et entront en palais par nuit, car li porte les fut ouverte pasie-
blement. Adont tantost ilh mourdrirent les II saingnours de Romme, qui
astois fis a dus Gletus, Alixandre et Flandris, qui ja avoient regneit IX ans.
— Et deveis savoir que ches Romans ewissent bien reconquis leur citeit
plus tempre par trahison , enssi qu ilh fisenl ors; mains ilh n'osoienl por le
ptr les Romans.
1 On peut aussi bien lire Juvidus. Du rcstc la
chose, jc crois, importe peu.
* En paine, B.
8 Le XII 1 I* jour del mois de fevrier. B.
4 Le thicr jour de mois de decembre* B.
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LIVRE PREMIER. 149
dobte de la crualteit de due Cletus. — Quant li dus Franco de Galle soil la D««h» Franco.
veriteit de ses dois freres qui enssi astoient ochis, ilh dest qu'ilh les ven-
geroit; mains illi n'en fist riens, ear ilh dobtat les Romans. Et les Romans
ne mandarent point de tregut a luy portant qu'ilh soy dobtoient, ear ilh
ne dobtoient en monde nulle nation tant que les Sycambiens ; et guerroient
loudis fort cascons a cheaux de Gartaige et pluseurs altres, enssi com vos
oreis; mains la guere des Sycambiens ne voloient nullement avoir. — Item,
Tan II I l c et XXI , en mois de jenvier *, oit grant batalhe entre le roy Anthio-
cus de Surie et ses gens, car ilh ly furent rebelle por chu qu'ilh les faisoit
fauseir leur loy; si 1'encacharent, et ilh fuit en Egypte al roy Pholomes,
et fist alianche a luy qu'ilh ly aideroit a tousjours, et ilh ly vosist aidier a
destruire ses gens. Adont vient awec ly le roy Pholomes a oust bani , et les
destruite, et remist le roy Anthiocus en sa possession. Et adont ilh fut plus
fels aux Juys que devant. — Item, l'an IIIl c et XXII, prist ly roy Anthio-
cus a femme Eliza , la filhe al roy Pholomes de Egypte, qui n'astoit pais de Foi. 4i r*.
sa lignie ne de son loy.
Apres, sour Tan del transmigration de Babylone U1I C et XXIII , avoit en
la citeit de Mondin * unc puissans hons qui fut nomeis Matathyas , qui avoit
V fis : ly promirs oit a nom Johans, ly secon Symon, ly tiers Judas, ly Mataihias, jobans, s y
rTi 1 xr » i m r - i • « * • mon, Judas, Eleazar,
quars Lleazar, ly V° Jonathas. Ches enfans ne vorent onques lassier a faire Jonatas.
les commandement de leur loy por le roy Anthiocus; ains se tournarent
enconlre luy a defense, et orent contre luy mult de belles vicloirs; et fut
par eaux a eel temps sourtenue la loy, enssi qu'ilh contient plus plainne-
ment ens hystoirs de Sainte-Engliese qui de chu font mention. — En cesli
an, en may *, morut Poleno ly roy d'Athennes, qui fut fis le roy de Gresse
Synastor. Adont remandarent les barons d'Athennes leur aultre roy Agylfo,
qui demoroit a Romme et n'osoit revenir puis le temps que ly roy Synastor
avoit conquis son rengne. Adont revient-ilh et fut rechus par ses hommes
et remys en son siege et en sa digniteit, dont ilh esmut puis grant guerre
entres les Grigois et cheaux d'Athenne. — Item, l'an II1I C et XXIII1, en
avrilh*, morut Flandris, ly secons conte de Flandre; si fut conte apres luy
son fis, qui oit nom Lydrel, lyqueis rognat XIX ans. Item, l'an 1111° et
1 Le XVIII* jour de mots degenvier. B. 5 Lc quart jour de may. B.
1 Modin, en Palestine. * Le X* jour de avrilh. B.
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150 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
De roy sewisior. XXV, assemblat ly roy Senastor O Grigois, et vient en Athenes, et des-
(ruite le pays, et assegat la citeit; mains, quant ly roy Agilfo choisit* le
siege, ilh envoiat III I messagiers a Romme por querre socour; mains ilh
avient que les messagiers soy partirent par nuit de la citeit, se cheval-
choient parmy les oust des Grigois, si fnrent aperchus des gaites, qui les
cacharent de si pres que ly unc en fut pris, et les altres trois escappont.
Cheli qui fut pris fut meneis devant le roy, alqueile li roy demandat ou
ilh aloient ly et ses compagnons ; et chis li dest la veriteit. Quant ly roy
entendit que cheauz d'Athennes* mandent sourcour aux. Romans, si s'est
aviseis et at escript lettres qu'ilh envoiat en Gal a dus Franco, et ly man-
dat qu'il vengne vengier le murdre de ses 11 freres que les Romans ly
avoient murdris, car ilh ly aideroit. — Enssi envont tous les messagiers , et
ont tant aleit que ilhs presentont leurs lettres a Romme et en Gal a Lu-
tesse. Et li dus qui volentier les voloit vengier, assemblat son oust, et se
soy mist a chemyn vers Athennes; mains anchois que ly dus Franco fust
eslongies son paiis 1111 journeez, sorvint a ly grant damaige, enssi com vos
oreis.
DedusGaborensetde A eel temps avoit 1 due en Burgongne qui oit nom Gaborens, qui astoit
(is Gabor, unc senateur de Romme qui avoit esteit ochis par les Sycam-
biens , quant Romme fut conquestee , enssi com dit est par-desus. — Chis
Gaborens haioit fortement les Sycambiens, et avoit grant volenteit de son
peire a vengier; si assemblat grans gens, et entrat en pays de Galle, et
destruite grant partie de pays, et conquestat Lutesse et pluseurs altres
citeis, et ochioit tous cheaux qui ne ly voloient faire homage. — Mains les
altres s'enfuirent en Flandre a conte Lydrel requere aide, si que chis qui
faire le devoit, car ilh ten oit son pays d'on due de Gal qui luy et ses predi-
cesseurs avoient fondeit. Quant li conte Lydrel entendit chu, si assemblat
tous ses Flamens et vient en Galle; se mandat jour de batalhe a Gaborens,
et fut le Xll e jour ' de septembre Tan deseurdit; et astoient bien des Flam-
B.t a ihe pordev.ni Lu mens LX m hommes et les altres erent bien UII" M, et la batalhe fut par-de-
vant la citeit de Lutesse. — Mains quant les gens de Lutesse veirent les Flam-
mens, si sont issus hours por eaux aidier, et se soy trahirent vers le banier
1 Pour com/, unedeces formes anciennes que lc sions plus modernes, comme vit } apercut, etc.
texte du manuscrit B a conserves , et que le n6tre, * Que li rots d' Athene*. B.
au contraire, remplace souvent par des exprcs- * El fut par unc venredit le XII 9 jour, B.
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LIVRE PREMIER. 151
le conte de Flandre, qui adont portoit I sens d argent a IX ras de sable; et
li dus de Borgongne lei * portoit d'asure a I dragon de goules. Celle batalhe
fut mult fort; mains les Flamens furent desconfis, et furent reculeis jus- FUmensde^onfi*.
ques aux baires de la citeit en laqueile ilh entrarent * et se fisent fermeir les
portes , et ne furent point esbahis , et soy fisent desarmeir : ilh n'avoient mie
perdut X m hommes, car ilz furent desconfis par le defaulte de leur banne-
reche qui portoit leur banier qui s'enfuit; et fut nomeis Gaza de Bruge. —
Ghis Gaza s'enfuyt et n'arestat: se vient en Athennes, por nonchier al due Foi. «i v.
Franco le fait que ly due de Borgongne destruoit son pays. — Ors vos diray
de dus Franco et des altres; se vos iaray esteir des Borgengnons qui ont
assiese la citeit de Lutesse, et les Flammens le defendent mult bien. Et les
Romans ont tant chevalchiet, qu'ilz sont venus en Athennes; et ont la sour- Athene* . SS€g ,e par
journeit I mois, portant que gens les accressojent toudis, et ilhs ne qui-
doient pas que les Sycambiens les venissent greveir ne aydier les Grigois,
car ilh n'awissent pas tant ratendut qu'ilh ratendirent. Anchois que ly mois
fust accomplis, vient ly dus Franco, et awec ly ' XL™ hommes a chevals.
Quant les Grigois les veirent, si en fisent grant joie et noble fieste.
Dedens VIII jour apres la venue des Sycambiens, fut la citeit d'Athenes
assegie et assalhie des Grigois , et fut pres conquestee , quant les Romans
et ches d'Athennes issirent fours tous armeis et corurent sus les Grigois
qui bien soy defendirent. La oit orible estour qui durat de medy jusqu a
la nuit, et furent les Romans desconfis; si en fut ochis XL 10 , tant des Ro-
mans com des Athennois \ et ly re ma nans s'enfuirent. A celle batalhe fut
mors ly roy d'Athennes et ses dois fis Agilfris et Aloxa, et bien XXX des
senateursde Rorarae, etXL m hommes awec. — Adont savisaren ties Romans M»ii»ciiede» Romans
qui s'enfuoient d'one grant malische, car ilh vinrent al porte ou les naves *
des Grigois ou ilh astoient venus et en devoient raleir, et les alerent toutes
traweir en pluseurs lis *, et puis les estoparent de gomme d'Arabie tous les
trais 7 et de chire, portant qu'ilh ne voloient mie que li ayweentrast si tost
1 Pour H, lai. • Pour litis, lieux, endreits.
1 Ilh rentrarent, B. ' II y a ici un jambage de trop ou un de moins.
* hty, B. fividemment le chroniqueur parle de trous fails
4 Que Remains que Alhenois. B. aux vaisseaux des Grecs, trau4 ou tras en walloD.
s Li dromons. B. II faut sans doute suppleer ici Le manuscrit B porte trout.
le verbe astoient*
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132 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
dedens, jusques a tant qu'ilhs seroient sour la hault mere que les grandes
ondes les destopperoient; et astoit cascons des trais oussi gran que unc
homme y posist bouteir son pongne. — Quant les Romans orent chu fait,
ilh prisent I messagier qui savoit bien parleir grigois, et le fisent aleir de-
vant Athennes a roy grigois dire et raconteir que ly roy Anthiocus de Surie
avoit assegiet son pays et le destruoit. Adont soy partit li messagier, si
revient 1 vers la citeit d'Athennes. — Or vos diray de roy Sinastor de Gresse,
el de due Franco et de leur gens qui sont entreis en la citeit d'Athennes,
et ont coroneit a roy d' Athennes Castor, le fis Synastor, et ly ont fait espo-
seir la filhe le roy Agilfo, que ilh ont troveit en la citeit, qui ful nomee
Ca theme 1 , qui mult astoit belle. Apres en fist-ons les noches a la loy que
ilh lenoient adont. Et avoient jureit ensemble ly roy de Gresse et li dus de
Galle d'aleir ensemble assegier Romme et deslruire; mains atant vinrent
la dedens VIII jours dois messagiers li uns apres 1'autre : Bacuda de Pavie
et Gaza le banereche de Flandre, qui ont bien fait leur messaiges, ly I de
menchongne et ly altre de veriteit. — Quant li roy et li dus entendirent les
Grigois etsycambiens dois messagiers , si sont mult enbahis; si falit enssi leur alianche, cascon
ne8. en ralat en son pays. Departis sont les II oust; les Grigois en vont vers la
mere, et les Sycambiens s'envont vers Borgongne. Chu futsor Tan IIII C et
XXVI, en fevrier 5 , que les Grigois et les Sycambiens soy partirent d'A-
thenes. — Or, vos diray des Grigois qui sont venus a rivaige a Brandis, et
sont monteis sour mere a plustost qu'ilh porent por socorir leur pays; puis
ont leveis leur voiles, et si s'envont. Et allarent plus de II * liwes anchois
que les trais fussent destoppeis; et quant ilh furent destoppeis, adont en t rat
ly mere dedens en milh lieu, et furent asseis toist affondreis toutes les
naves * que oncques n'en escappat une seule ne I seul homme. Enssi fut la
d« roy Synastor et de noyes ly roy Synastor, awec luy • C m Grigois, et grant avoir perdut. Enssi
furent vengies les Romans des Grigois; et li dus Franco at tant aleit qu'ilh
est venus en Bourgongne, en Avergne et en Limosins, et at tout destruite,
car ilh ne truve nuls defendeurs se pou non ; car ly dus Gaborens astoit
Fo1 ♦* r °- devant Lutesse qu'ilh avoit assegiet. — Quant ly dus Franco oit chu fait, si
1 Si acolhit son chemien. B. 4 Plus de IP. B.
1 Probablement pour Catherine. * Li dromons. B.
5 Le XII' jour de fevrier. B. * luy. B.
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LJVRE PREMIER. {53
t
fist ses gens chevalchier vers Lutesse, oil ilh trovat les Borgengnons; si les
cor it sus, et cheaux se sont bien defendus. Adont issirent fours de Lutesse
les Flammens, et se ferirent en l'estour; la fut ochis ly dus Gaborens et ses Borgengnons desconHi.
trois fis Gobrelio , Gobot et Goghota et ' XL m Borgongnons et plus ; et les
alt res soy rendirent a prisonnirs, car ilh n'en porent fuyr. Apres chu , les
Sycambiens et les Flammens sont tous rentreis au Lutesse ; et fist la li dus
Franco grant fieste et reverenche a conte de Flandre Lydrel, qui son pays
li avoit tenseit*. — Chis conte Lydrel avoit une fllhe qui oit nom Lydeon,
et li dus Franco avoit I fis qui fut apelleis Ector. De ches II fut fait li ma-
nage, et les donnat ly dus Franco tout la terre de Burgongne, Avergne et
Lymosin. Item , Tan IIII C et XXVII , en mois d'octembre 5 , morut ly malvais
roy Antiochus de Surie et d'Asie. Si regnat apres son fis Anthiocus Empa-
tar * I an. Adont fist Judas Machabeus osteir les ydolles que ly roy avoit
faite mettre en temple, et commandat a faire les oblations et les sacrifiches
en temple solonc Tensengnement de leur loy.
Adont fut celebree en Jherusalem la tirche dicause, et en Tan apres La tirche dicause de
morut Empater '. Si regnat apres luy son fis XII ans, qui oit nom Deme-
tres. Chis roy Demelres envoial en la terre de Judee unc sien prinche,
qui oit nom Bachides 6 , a XX m hommes , por la terre a conquesteir que
Judas Machabeus tenoit. Si oit Judas batalhe contre luy et ses freres a wee; Judas Machabeus.
mains en celle batalhe fut ochis Judas, qui astoit li soverains evesques et
prinche de la loy de peuple Ysrael; et furent mors awec li V1U C de ses
hommes. Chis Judas avoit governeit le peuple d'Ysrael XIX ans, et avoit
oyut maintes belles victoirs, sicom la bible en fait mention. A eel temps
regno it en la citeit de Garthaige en Affrique ly noble poete qui oit nom
Terentius. — Item, Tan IIII C XXX, mo n tar en t sour mere XIIII in Grigois, Teremius.
por aleir en Athennes savoir novelle de roy Synastor et de ses gens, et
pourquoy demoroient tant longement. Et ilh astoient tous noyes UII ans
devant, enssi que dit est desus; mais nuls ne le savoit portant qu'ilh n'es-
toit escapeit nuls d'eaux. Si ont tant nagiet par mere et aleit par terre, qu'ilh
sont venus en Athennes; si ont troveit le roy Castor, et ly demandarent
1 Le texte porte a. 5 Pour Eupator, comme je l'ai dit plus haul.
' Proteger. Tamer dans Roquefort. Le texte du man user it B porte ici : morut Anthio-
* Le XXI III 9 jour del mois de octembre. B. cm* Empater qui fut li an II lb et XXVII L
* Antiochus V, surnomme Eupator. s Voir a ce sujet la Bible. Machab., I, 9.
20
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154 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
novelle de Synastor le roy, son pere; et ilh leur dest qu'ilh avoit 1111 ans
que ilh en estoit raleis vers Gresse por sorcorir son rengne contre le roy
Anthiocus de Surie, qui i'avoit assegiet, enssi quilh ly fuit nunchieit par
messagier. De ehu mult soy mervelharent les barons de Gresse, et se desent
que oncques ly roy Anthiocus ne les avoit assegiet ne riens forfeite. Quant
ly roy Castor entendit chu , si fut esperdus et mult esmaies. — Adont orent
les barons conselhe que ilh feroient al temple aleir uns hons, por savoir a
leur dieux novelle de roy Synastor et de ses gens.
Menreihe. Ala nt ont pris Ardossa, I chevalier grigois; si Font envoiet a leur Dieu ,
car chis en savoit bien la manere; si fist ses oblations et ses dyableries, lant
que li malvais Sat hanas vient dedens leur ydolle , qui li devisat comment
li emperere et ses gens furent en meir noiies par les Romans, enssi com
dit est par-deseur. — Quant Ardossa soit chu, se le nunchat a roy; adont
jurat ly roy que ilh les vengeroit; si assemblat O hommes, et se soy mist
De roy Casior et des al chemyn , si s en allat droit vers Romme. — Quant les Romans sorent chu ,
ilh mandarent pais et acorde a roy Invidus des Latins, que ilh les vosist
aidier contre cheaux d'Alhennes, et ilh li feroient amende a sa volonteit de
chu que ilh ly avoient forfaite , teile que luy seroit et ses heurs soverains
senateurs de Romme. Quant ly roy Invidus entendit chu, se mandat ses
hommes et vient a Romme a XL™ hommes. Apres y vient ly roy Godosa de
Pavie a XL m hommes, et ly prinche de Melant a XX m hommes; et les
Romans assemblont leur .gens al somme de O hommes. Et quant les
Romans furent tous ensemble, si furent-ilh sommeis 1 a 11° milhes hommes.
Foi. 4 2 v o. — Adont soy partirent les Romans de Romme et cheva lea rent contre leurs
anemis, portant que ilh ne voloient mie estre ensereit dedens leur citeit,
et oussi afin que leur anemis n'ardissent leur pays. Et sont aleis logies en
la fin sor le marche de leur pays por mies a gardeir; et y demoront pres
de VIII mois * anchois que leur anemis venissent 8 . En la fin vinrent cheaux
d'Alhennes a C m hommes; et quant ilh veirent les Romans, sy ont leurs
Grant bataihe. gens ordineit, et les Romans les leurs. Si soy corirent sus; la oit grant
bataihe*, ou ilh morut cent et XL 01 hommes, tant d'onne partie com de
1 Esmeis. B. 8 Anchois que ilh veiiuent leur anemis. B.
* Ce mot, que nous retablissons d'apres le ma- 4 Fire bataihe.
nuscrit B, est omis dans notre texte.
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LIVRE PREMIER. 155
1'autre; mains cheaux d'Athennes furent desconfis, et li roy Castor ochis.
Adont escapat de cheaux d'Athennes et des Grigois XLIX * hommes tant
seulement. — Apres la desconfiture alarent les Romans devers Athennes;
se prisent tout le pays et ochisent Synastor le fis le roy Castor, de Catherne,
sa femme, et son frere Agilfo, qui astoit jovene d'eaige. Et fut eel batalhe
en jenvier * sor Fan 1111° et XXXII. Enssi com je vos dis fut la batalhe des-
confite, et fut Athennes conquestee, que les Romans ont donneit en sicne Athennes conquest**
. , , t ■• • • ii i • n i psr les Romsns.
de pais a Invydus, le roy des Latins, qui mult les en remerchiat. Et ly roy
le rendit a Innelus son fis, qui prist a femme Catherne la femme Castor;
puis se sont tous departis et raleis chascons en son pays. Et al departir fut
fais Invidus , ly roy des Latins , sovrains senateur de Romme. — Item , en
cheli temps , commenchat grant discorde entre cheaux d'Affriques et le roy
Pholomes d'Egypte; et ly cause del discorde si astoit teile, que ly roy Pho- D ™° T f e eBl jJ j£™> s
lomes voloit estre soverains de la terre d'Affrique, et qu'ilh ly rendissent «"> n -
tregut. Si sen esmut mult grant guerre, car les A Africans com m en c ha rent
a destruire la terre d'Egypte, et les autres destruisoient la terre d'Affrique.
En teile maniere durat-ilh bien III ans, toudis ardre et destruire et con-
quirre terre li uns sour 1'autre, sens batalhe avoir; mains al d era in 5 les 11
parties s'encontrarent, chascon partie a X m hommes * qui venoient de des-
truire ly unc 1'autre. Si orent grant batalhe ; mains ly roy Pholomes fut des-
confis, qui s'enfuit, et ly roy Dannemon d'Affrique sen ralat et emynat
ses oust en son pays, et fut chu en mois de may * Fan I11I C et XXXV. —
Item, le roy Pholomes, quant ilh fut revenus en son pays, ilh fist alianche
a Demetres le roy de Surie, qui li pristat XL m hommes, et sen ralat en
Affrique a C m hommes, et destruit le pays. Mains quant les Affricans sorent
sa venue, si assembtarent leurs hommes, et furent oussi bien C m , et ly
roy d'Arabes les vient aidier a XL m hommes; puis issirent de la citeit de
Cartaige, ou ilh astoient assembleis , et la ilh s'en alont devers les Egip-
tiiens et les corurent sus. La oit fort estour, qui durat de matin jusques al
heure de vesperes, et fut bien ochis des Affricans XL m ; mains ils orent la
victoir, car leurs anemis furent desconfis; si en fut mors LXXIIII m , et si LesEgiptuensdescon-
se noiat en mere plus de X m . — Adont s'enfuit ly roy Pholomes a chu de
1 Le manuscrit B donne XL. wallon.
* Le XVI* jour de jenvier. B. * A XL* hommes. B.
* A la fin. Derain, dernier, est reste dans le * Le XXI IT jourde may. B.
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156 CHROMQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
gens que ilh avoit de remanant, et les Affricans les suyrent mult firemen t:
inais ilh escapparent. Quant li roy Pholomcs vient en Egypte, son regne,
si voit bien qu ilh avoit tot perdut, et qu'ilh ne poroit endureir le siege des
Affricans, si le venoient assegier; si envoiat le roy de Surie Demetre aux
Affricans por faire la pais. Cel desconfiture fut en febrier ' Fan Illl c et
XXXV, car febrier astoit adont le derain mois de Tan *.
Enssi com nos vos devisons avient-ilh, et s'en allat ly roy de Surie en
Demetre le roy de Su- Affrique; si vient en Carthage a V c chevaliers, et procurat la pais, qui en
teile maniere fut ordinee, que ly roy Pholomes d'Egypte paieroit a roy Dan-
nemon d'Affrique milh besans por ses despans, et II m por les damaiges
qu'ilh avoit soustenuit en ly defendant de la fause demande que ly roy
Pholomes li faisoit. Et (fut) fait ladit pais Fan Illlc et XXXVII \ — Item,
Foi.43f. j' an IHIc e t XXXV11I en awost 4 , morut ly V c roy de Dannemarche, qui
avoit nom Anthenoir. Si fut roy apres luy son fis Godosa, lyqueis regnat
XXVIII ans. En eel an meisme, en febrier 5 , morut ly roy des Latins, Invy-
dus. Si fut apres ly roy son 6s lnvydel, qui regnat XII ans. — Item , Tan
1111° et XL, morut ly roy Demetres de Surie et d'Asie, en fevrier 8 ; si fut
adont grant discorde entres ses enfans, donl ilh en astoit trois : Alixandrc,
DestroisfisderoyDe- Anthiocus et Demetres. Chis Anthiocus astoit ly anneis; par chesti raison
devoil succedeir son peire el regne; mains Alixandre, qui astoit ly anneis
apres astoit tanl chevalereux, et avoit fait a Jonatas tant de biens et de
bons serviches, et fors 7 en ses gueres que ilh 1'amoit fortement, et enssi
faisoit ly peuple de Judee, tant que finablement ilh le coronarenl roy de
Surie et d'Asie, sour Fan I1U C et LXI en marche °. — Et fut de chis discors
sentenchiet que Anthiocus, li anneis fis, le perdoit, porta n I que ilh ne
savoit nient gueroier ne governeir le pays, car ilh n'astoit point chevale-
reux. El li altre, Demetres, le perdoit portant que ilh astoit jovenes, et
que Alixandre astoit anneis de ly. Enssi fut Facordanche faite , et les
dois freres demoronl awec le roy Alixandre leur frere. — En eel an
1 Le premier venredy de fevrier qui astoit le XIV 4 Le secon jour d'auwosL B.
jour de che mois. B. * Le XXVI 9 jour del mois de fevrier. B.
1 Et de la daute de la transmigration dc Babi- • Le XXV jour de fevrier. B.
lone, ajoute le manuscrit B. 7 El fort. B.
* En moy de marche , et ne say queil jour dedit 8 Le XVI V jour de marche.
mois, ajoute le manuscrit B.
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LIVRE PREMIER. 157
iheismes *, vient a Romme Joras, unc prinche qui astoit del conselh le roy d« jor«.
des Latins, et venoit de Chartaige en gueres sicom sodoier 1 . Si avoit illuc
demoreit tout le temps apres le pais faite enlre les Affricans et les Egyp-
tiiens, jusques a eel temps qu'ilh astoit revenus, et avoit oyut parleir les
prinches de Chartaige en eaux vantant que ilhs astoient les plus puissans
de monde, et avoient bien puissanche d'eaux a vengier de leur anemis, et
comraencheroient a eel esteit prochaine a plus puissans de leur annemis —
chis astoient les Romans — et conqueroient Romme et le deslruroient tout,
et puis ilh conquesteroient Galle et le deslruroient toute; et enssi ilh par-
toient 8 et prendoient. — Mains ilh avient tot le contrable, car Joras le dest
enssi aux consules qui astoient appelleis por Ian nee adont To ranee, Luciien
Censornien et Marche Mauliiens, lesqueis orent grant mervelhe, quant ilh
entendirent chu; se dient que Scipion, jadit consule de Romme, avoit a
son temps destruit Cartage, mains ilh faisoient a Dieu seriment que ilh
yroientasi grant forche qu'ilh le redestruroient, aussi bien que leur sain-
gnour et compangnon Scipion avoit jadit faite, ou ilh sieroient ochis: si
allarent assembleir grant gens, et se soy misent sour mere.
Or s en alerent les Romans fortement nagant vers Cartaige, et tant ont lm Romans en Affri
nagiet qu'ilh sont la venus ; si ont ars et destruite le pays par tout le regne.
Et entres les aultres une flotte * de XX™ Romans chevalchoient parmy 1
plain; si enconlrarent X™ homme de Cartage, qui de si long qu'ilh les
veirent ilh se ont desarmeis , et ont jetteit leurs armeis a terre, el s'en sont
enfuys; et chis astoit uns amyraus, qui venoit a tant de gens servir le roy
Dannemon de Cartage por alleir awec ly a Romme. — Ches Romans orent
grant ammiration qu'ilh poioit fallir 5 ches gens qui fuyoient tant fort; et
toutevoies ilhs ons pris leurs armes, et se sont aleis a rivaige; si ont troveis
les nefs ou ilh astoient dedens venus, et XL hommes qui les gardoient, si
les ont pris, et apres leur demandarent queiles gens chu astoient. Ilhs res-
pondirent que ch astoit 1'amyrauz de la citeit de Cypuly, ly uns des raiedre
chevalier de monde, et qui at awec ly bonnes gens d'armes; si s'en vat en
Cartage, ou ly roy assemble ses gens por aleir destruire Romme. Et leur
1 En mois d'avrilh , ajoute le raanuscrit B. * tvidemment il s'agit ici dune armce. Ccst
* Cela doit significr : oti il avait fait la guerre la premiere fois que je vois le mot flotte employe
eomme solde. dans ce sens.
• Parloient doit avoir ici le sens departageaient. 5 Manquerv
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458 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
desent les Romans : « Barons, or en aleis a roy de Cartage et li dites bieh
» que ilh ne voise point a Romme por lee destruire, anchois demeurt en
» Cartage , si le defende contre les Romans , qui sont tou pres ardant son
» pays, et veulent, enssi com ilh ont jureit a leurs dieux, destruire Car-
» tage; et oussi dire is al amyraus de Cypuli, s'ilh est si bons chevalier et
» ses gens , com vous dite, se vengnent contre nos reconquerre leurs armes
roi.4s»*. » et leurs naves et tout I'avoir qui est dedens, lequeile nos prenderons
» tan tost, et les garderons bien jusques a tant qu'ilh auront la volenteit
» de reconquerre. » — Ches XL chevaliers sen alerent, et n'oiserent riens
dire; si fisent bien leurs messaiges al roy, qui savoit ja la venue des Ro-
mans. Si oit sour chu conselhe ; mains quant ly amyraux soit la perdre de
ses naves et de son avoir, si fut mult dolans, et dest, s'ilh avoit des armes,
qu'ilh soy combatteroit aux Romans, et les reconqueroit ou ilh y moroit.
Adont, par defaulte de fier, fist ly amiraus armes faire d'or et d'argent; et
les Romans qui astoient al rivage ont pris tout I'avoir et l'ont enporteit.
Le siege de Cartage. Le siege de Cartage, enssi qu'ilh 1'avoient redifiiet apres la destruction
que Scipion en avoit fait, si est teile : ch'est assavoir quelle astoit avironnee
de murs contenans tout altour XXX m passe *, dont chascon passe tenoit V
pies ; et se font oussi les cent pas et XXV le stadiiens; et est toute encengl^e
sus la mere de medis, qui toute altour le circuite presque tout; et tient tant
sens compteir les fautes ' qui astoient de III m passe apparans ; et astoient
les murs de XXX pies espes, et si avoit des roches a la quarure de XL cu-
bites de haull; et si astoit li ars 8 que ons disoit Birsie unc pau plus grans
que II milhe passe. — Cest citeit fut assegie, mains el ne fut mie tan tost con-
q ues tee: et acordont 4 , puisque je suy a la mateire, je deviseray tout le fait
sicom ilh fut. Sachies que les Romans seirent bien III I ans devant la citeit
sens batalhe, et ne poioient troveir voie par quoy ilh defendissent a entreir
vitalhe et gens d'armes dedens la citeit par mere et par terre, et portant ilh
y sirent si longement. Al fien des 1111 ans avoient cheaux de la citeit assem-
bled tant degens d'armes, qu'ilh les semblat que ches to it veriteit 5 qu'ilh
avoient plus de peuple que les Romans. Si yssirent hours le thirs jour de
1 Passe pour pas. * Jncordont. B. Ce mot est ordinairement ecrrt
* Fautes. B. encordont.
5 Forteresse, arce dans Roquefort. 5 Et ch'est oit veriteit. 3.
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L1VRE PREMIER. 159
may, et soy combattirent aux Romans , et la fut mors XX m Romans ; mains
ils orent la victoire, car cheaux de Cartage furent desconfis, et en fuit bien
ochis O. — Et, affin qu'ilh ne morissent mie tous de cet pestilenche, les
Romans en prisent bien XXX m hommesr et XXV m femmes, qui se rendirent
a eaux en servaige; et tous les altres furent ochis en la batalhe, ou ilh se
sont jecteis de volenteit en feu; si sont ars et en la mere si sont noiies : ilh
amoyent mies enssi morir que les Romans a servir. Adont fut pilhiet tout c«ru g e piihet et ar*.
ly avoir de la citeit, et li feux butteis par tout la citeit qui ardit XVII jours,
et fut teilement ars que toutes les pires des murs calcinarent et soy misent
en poudre menue. Et puis sont ' les Romans revenus.
Le temps des 1111 ans durant, dan en an fesoient les Romans stesant a
Romme teurs consules et tribuniiens. Sr avient que eel propre an que Car-
tage fut destruite et devastee, qui fut 1'an 1I1I C et XLV, astoient consules
Guyon Corneliien et Lucan Luculo, qui a grant gens alarent en Corinthe, corinthe.
le plus beals et le plus riche pays de tout la terre , et Font prise et devastee ,
et tout Achaya mise al subjection des Romans. Et por le grant multitude
de statue et colompnes des symutachre fais d'or et d 'argent, ilh Font tout
arse; dont chu fut grant damaige don teile pays que de Corinthe, si riche
et si beals que nuls n'astoit parelhe a ly. — Et par especial tous les metails
de monde avoient illuc leur nascenche a grant influenche *, et encore est la
trovee une genre de noveal metal; et se fait la que ons nomme de Corinthe ,
de quoy ons fait des beals vassealz qui sont grans et Ions que ons apelle
vasseals de Corinthe. Et puis sont les Romans revenus. Entour chely temps,
al temps que Servie et Flamto ' astoient consules de Romme , nasquit Merveih.
unc enfe d'onne ancille, qui aportat sor terre 1111 pies et 1111 mains, 1 1 II Foi.ur-.
yeux, II membres naturels. et astoit marie, et le nommons monstre teils
creatures qui en nature superhabundent ou defalent. — Item, en chi temps,
en Sezile, le mons de Etna cominenchat a jecteir si grant flamme de feux et Be zesiie.
si fort, qu'ilh absconsoit ses voisins de la fumee. Item, a eel temps, oit
en Sezile une batalhe des serf contres les altres, car, enssi com dist Oro-
sius. li noise des serfs tant est plus petit tant est plus crueuse, et ilh mop-
1 Ce mot, qui se trouve dans le mamiscrit B, ne se trouve pas dans lc manuserit B.
esl onus dans noire texte. s Flavito. B.
* Tout ce qui precede depuis : el par especial, etc.,
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i60
CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
dent quois taisant 1 en Irahison. Ilh venquirent li serf a chesti fois, de quoy
toutes les nations soy espaentonl'; si avient que li paiis fut en subjection
aux tirans, et li serf acruis 5 , et tous les remanans fut chaitis. Et depuis li
ysle de Sezilh at esteit miserable, et ne fuit depuis en estat de droit long-
temps qu'ilh ne rechaist en la subjection, Tune fois des serf , 1'autre des
tyrans maintenant la sangnorie.
Nos vous avons dit le fail de Cartaige entirement; se vorons retourneir al
annee, ou nos avins lassiet nostre matere. Chu est Fan IUI C et XL1 que les
Romans alarent en Cartaige. car adont avient que les Grigois soy avissarent
et assemblarent gens ; si montarent sour mere por venir a Romme et gan-
gnier et destruire, car ilhs quidoient qu'ilh n'y ait point de peuple et qu'ilh
Les Grigois der.nt fussent tous en Affrique. Si sont venus devant Romme; mais les Romans
issirent fours a C m hommes, et les corurent sus et les desconfirent; car les
Grigois perdirent cuers, quant ilh aparchurent si grant peuple; et encor-
dont astoient bien les Grigois cent et LX milh hommes. Si en fut ochis
LXX m , et les aultres s'enfuyrent, que les Romans cachont en jurant que
jamais ne relourneroient, se aront tout Gresche conquesteit. — Si ont man-
deit partout naves et les font ariveir a porta Brandis, et se sont bien por-
veus de tout chu qui les besongne ', puis montarent sor mere, Tan III1 C et
XL11 en mois de junne 5 . Et vinrent droit en Gresse; et la conquisent les
Machidone eonquestee Romans toute le regne de Machidoue, dont li valhan Alixandre fuit roy.
Apres vinrent a eaux les Grigois, et se rendirent, et porlarent les clefs de
leurs citeis en la main des Romans. Et ilh les ont rechus, et Paterno , li roy
grigois, at faile homaige aux Romans sens cop ferir : chu fut grant chouse.
Quant ly roy Pholoraes d'Egypte entendit comment les Romans conques-
Aiianche de roy pho- loient tout le pays atour de ly, ilh mandat aux Romans qu'ilh voloit a eaux
lomes aux Roman*. # * *> * . *
irapetreir amisteit, sor telle manere que s ilh avenoit quilh eussent be-
songne d'ayde decha mere ne dela, et ilh le mandassent, que ilh les aide-
roil a XL m hommes; et de chu ilh les envoial leltres sailees de son seal.
Quant les Romans veirent chu, si furent bien conlens de luy, et leurs plaisit
mult bien; se lassarent son pays en pais. Apres y vient Jonatas, le prinche
par les Romans.
De Jooathas.
1 Se tenant coi.
* Roquefort a la forme espaventer.
* Accrus, grandis, puissants.
4 Roquefort donne ail verbe besogner un sens
actif. II signifie ici tire ndcessaire.
5 XI* jour de mow de June. B.
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L1VRE PREMIER. 161
de Judee , et renovelat et reconfermat les alianches que Judas Machabeus ,
son frere, avoit faite a ' eaux en temps devant par bonnes lettres. Adont les
Romans fisent a Jonatas grant fieste, et reconfermarent mult volentiers les
alianches. Item, Fan III I c et XLI1II, donnarent les Romans le royalme de
Vil * a Sobalh, unc prinche qui les avoit bien servit , liqueis astoit de la terre
de Vil. Et ly roy Rebroch astoit adont mors sens heurs 5 .
Item, 1'an IIll c etXLV, prist ly roy Alixandre de Surie a femme Thes- DeroyAii*»ndre.
dela, la fille le roy Pholomes d'Egypte; mains puisdit ly retollit ly roy Pho-
lomes sa fille et son rengne. Item Fan I1I1 C et XLVI, morut Ebronus li pro- DepromirsroydeHon
mier roy de Hongrie; si fut apres luy roy son anneis fis Ebroch, qui regnat g " e '
XIII ans; et son altre fis, qui oit nom Jason , fut dus de Bulgarie. — En
cest an meismes donnarent les Romans la royalme de Cartaige, qui tout
astoit destruit, a Gazon le fis de senateur Alixandre de Pavie, qui bien les Deroy Ga*>n.
avoit servit, par teile manere et condition que ly dis Gazon, qui astoit
noble et valhant prinche, devoit ladit royalme reedifiier, et peupleirde gens
des Romans; et devoient rendre tous les ans tregut aux Romans, tant et si
longement que ly royalme seroit reedifiiet et en bon point remys, cascon
an de IU m talent de fin argent; se mont li talent L libvres pessant d 'argent.
Enssi rendirent teile tregut Gazon , li roy noveal de Cartaige, et ses heurs
aux Romans par 1'espause de XX ans qu'ilh misent al reedifiier le royalme. Foi. 44 v.
Et apres les XX ans passeis, ilhs furent quittes et en pais. Et chi grant
tregut les fasoient payer les Romans, portant qu'ilh voloient qu'ilh soy has-
tassent de redifiier plus toist por estre quicte de leur tregut. — En cellean
meisme, ly roy de Sezilh, qui avoit nom Gero*, entral a grant gens en DeroyGero.
Ytaile et commenchat a gasteir le pays; mains les Romans envoiarent con-
tre luy gens d'armes, LX m hommes por combalre a eaux; se les condui-
soit Lucien Corneliien et Entulien Fulvius, consules. Ches les encontrarcnt
el regne de Ligurie, et la les Romans, et les Liguriens awec eaux, soy
combatirent a cheaux de Sezilh; sen ochirent XXXIlI m , et en prisent V m
prisonnirs. Enssi furent-ilh desconfis. Si sen ralarent devers Sezilh, ou
ilh troverent le montangne de Etna, qui jettoit plus grant flammes le motie
que devant.
1 Au dans notrc tcxle. * signours, ajoute le manuscrit B.
* Bit. B. * Hierou, sans doute.
5 Si astoit cheyue en la main des Ho mains sique
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462 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
chi commencheat les Jt em i' an HI|c e t XLV1I , chevalcharent les Romans a grant gens devers
guerres d Espangoc. 7 7 © ©
Espangne, et conquisent tout le regne d'Espangne et ses appendiehes; et
Ly^primir roy cow»- orent pluseurs batalhes contre le roy Corsados, qui en fut ly promirs roy,
qui fut ochis de Luciien, le consul e; et furent mors des Espangnons LX m
Franb«iieiieroydEs- hommes. Adont les Romans donnarent le royalme d'Espangne a Franbal.
pangne. «/ r o
le fis le roy Invidel des Latins. — Quant les Romans furent revenus a
Rom me, si orent conselhe entre eaux qu'ilh yroient en Gal, eaux vengier
des Sycambiens et reconquerre leur tregut, que ilh ne voloient mie payer.
Si en alerent enssi en Galle; mains ilh fut anunchiet al due Franco. Adont
Guerre entre les Ro- mandat li dus Franco a conte de Flandre qu'ilh li vengne aidier; et ilh y
mans et les Galliens. 1 r» g* • 1
vient a LX m hommes Flammens. Puis mandat en Burgongne son lis. le due
Ector, qui y vient a LX m Burgungnons, et en Avergne et en Lymosins. Et
ly dus Franco assemblat llll m hommes f ; si oit plus de 11° milh hommes.
Et les Romans avoient C m hommes , et fut ordineit jour de batalhe le
X11I 6 jour de decembre, I'an 1I11 C XLVIJ. Se conduisoit les Romans le
Quinte * Scipions et Guyon Manlien, consules; car les devantrains consules
astoient vers Espangne a C m hommes , sicom dit est. Cesti estour commen-
chat apres soleal levant, et durat jusqu'a apres heurs de medy. Et furent
les Sycambiens pres desconfis a promirs \ Et la fut mors li conte de Flan-
dre Lyndrel et dois de ses fis : Jochan et Zonas; et ly thirs, qui oit nom
Lydoneus, escappat, et fut conte de Flandre apres son pere; si regnat XLI
ans. En eel batalhe perdit ly dus Franco XL™ hommes, et fut pres des-
confis. — Mains quant les drois Sycambiens, qui astoient de la droit nation
de Galle, veirent le mechief, si soy habandonarent * aux Romans, teile-
ment escriant Galle et Sycambre, que les Romans furent desconfis, et se
soy misent al fuyr vers le bois; si perdirent LX m hommes. Et les Sycam-
biens en ralont en Lutesse, por le doubtanche des Romans; et les Romans
chevalcharent tout par nuit, por eaux salveir. Les Romans astoient mult
fors et redoubteis par tout le monde, foursmy en Galle: et encor y astoient-
1 ////** milh hommes, B. * Habandoner doit avoir ici le sens de se pre-
* Notre textc portc quite; mais il y a au-dessus cipiter sur quelqu'un. Les glossaires de Ducangect
de Yu et de Yi un signe abreviatif qui me parait de Roquefort ne lui attribuent pas pr£cisement
indiquer un n. Seulement je me demande a quoi cette signification. On peut consulter aussi le glos-
sert ici Particle le? saire de Gachet, v° Battdon (d).
* Et furent li Sycambiens laidis de promiers. B.
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LIVRE PREMIER. 163
ilh assez doubteis, jasoiche qu'ilh ne vosissent mie obeyr a eaux por leurs
orguels. — Item, Tan desusdit, tolit ly roy . Pholomes d'Egypte a roy DeAiix»odreetdero y
Alixandre de Surie sa terre et sa femme,, qui astoit sa filhe. Quant Alixan-
dre veit qu'ilh astoit deshireteis de sa femme et de son pays, se fist alianche
a Jonathas, le prinche de Judee, et assalhit gentilment le roy Pholomes,
et orent batalhe; si fut Pholomes ochis et ses gens desconfis. — En teile
manire reconquestat ly roy Alixandre sa femme et sa terre. Apres la mort
Pholomes, fut coroneis son fis Tymotheus, et fut apelleis ly VII Pho-
lomes, et regnat XXVIII ans. — Item, Fan 1111° et XL VIII, commenchat a
redifiier Cartage ly roy Gazon, qui ja avoit paiet aux Romans le tregut
deseurdit. — Item, Fan 1III C et XLIX, fondat ly roy de Hongrie II casteals
entre sa terre et la terre son frere Jason , porquen grant discorde sen muet
entre eaux; car Jason disoit qu'ilh astoient fondeit sour sa terre. Se les
assegat; mains ilh avoit dedens des Hongrois qui les gardarent bien jus-
ques atant que ly roy Ebroch les sorcorit, et ochist son frere, et prist le
possession de sa terre de Bulgarie. Item, Fan IIII C et L, morut ly roy
Alixandre de Surie, qui avoit regneit IX ans. Apres luy regnat son fis
Anthyocus, qui futasseis contrable al peuple d'Ysrael. En eel an meismes, Foi.45f.
morut Jonidel ', ly roy des Latins; si regnat apres son fis Jonyus XXXI an.
Item, Fan 1111° et LII, prist a femme ly roy de Hongrie la filhe de due
Franco de Galle, et oit la damme a nom Edea. En cest an meisme fut ochis
li prinche de Judee Jonatas, enssi com Josephus le dist en ses escrips, ou
ilh parolle plus plainement de sa regnalion, et de ses freres et de leurs fais,
lesqueiles escriptures vos trovereis a Sainte-Engliese, et la en sareis ta veri-
teit*.
Apres Jonatas fut prinche de Judee son frere Symons, qui astoit de tous De prince symons Ma-
les V fis Mathatie seuls demoreis en vie; et regnat VIII ans. Chis Symons
avoit III fis, non plus : ly anneis oit nom Johans, et fut li promirs hons lepromin johans.
de monde qui fut enssi appelleis; ly altre oit a nom Judas, et ly thirs Ma-
thatie. Item, Fan 1111° et LIU, morut Ector, li dus de Burgongne; si
regnat apres luy son fis Franco, qui fut saige et chevalreux. — Item , Fan
IIU C et LV, morut li due Gedos de Bretangne, qui avoit regneit plus de
1 Ce doit dire le meme personnage prccedem- s Et lit vous revoions por savoir la veriteit. B.
jnenl appele Invydel, p. 456.
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164 CHROMQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Lepromin roydeBre- XXX ans. Apres sa iuort, fisent les Bretons 1 roy de Vaucuelh, son fis.
qui regnat XLVII ans. Chis Vaucuelh fut li promirs roy de Bretangne, et
vaucurih. fondat la citeit de Vaucuelh ' II ans apres sa coronation , assavoir Fan IIII C
et LVII. Et Fan apres, conquist Johans, ly fis Symon, le prinche de Judee,
tout la terre et le peuple de Syrcanie ', et fut apelleis dedont en avant Johans
Hircans. — Item, Fan 1I1I C et LIX morut Ebroch, li secons roy de Hon-
grie; et fut li thirs roy apres son fis Bulgus, qui regnat VII ans. A eel temps
astoit Symon, li prinche de Judee, fortement hays de roy Pholomes d'E-
gypte, portant que Symons astoit proidhons et ferme. Si avoit teile envie
sour luy qu'ilh le tuast volentier, s'ilh posist; si s'avisat li roy d'on sien fel-
lon 8 , qui astoit nommeis Tymotheus *, enssi com li roy astoit nommeit
anchois son coronation. Chis fellon astoit li voisin Symons, et astoit ly
plus feles tyran et ly plus crueux qui fust en monde; ly roy s'acontat a
luy, et ly priat que Symon fust ochis, et chis li promist qu'ilh le seroit
symons Machabcusfust temprement. — Atant vint Tymotheus en Judee en unc casteal qui astoit
ochis en trabison. •* d~\ * » o • •*» •^aiiii* <• *.
nommeit Gazo *, ou Symon seioit a mangmer a tauble deleis sa femme et
ses II fis •; se le feril Tymotheus en trabison don cuteal, et Fochist; et puis
prist luy et ses compangnons qu'ilh avoit ameneit awec ly, la femme et les
II fis Symons, et les emenarent en prison. — Adont fut ly peuple d'Ysrael
mult esbahis, car Johans, ly anneis fis, estoit en Hircaine; si orent teile
conselhe qu'ilh envoroient IIII messagiers en Hircaine apres Johans, qui
tantoist vienet en Judee ; et assemblat tous cheaux de Hircaine et de Judee,
et se soy mist a la voie, et assegat Tymotheus en son casteal. Chu fut sor
Fan 1IJ1 C et LX que Symons fut ochis, le XVII e jour de mois d'avrilh.
Lemurdreurassegeen Johans assegat le murdreur le secon jour de resalhe mois 7 , mains Tymo-
theus ne pot endureir la forche de Johans; se s'enfuit par nuit en casteal de
Agon °, mains Johans le porsuit si pres qu'ilh assegat dedens. Et li casteal
astoit de si grant forche que nuls ne le pot oncques prendre par forche; et
faisoit Johans assalhir le casteal tous les jours, et ly meisme assalhoit mult
enforchiement. Mains , quant Tymotheus veioit que Johans faisoit assalhir
1 Vaucelles, dans le department du Calvados, 5 Gazera, ville de la tribu dEphraim.
en France. • Ou Symon seoil a desueir a table joste dedon
* Par erreur sans doute pour Hyrcanie. sa moilluer et ses dots manneis fis. B.
8 Filhoul. B. T Le secon jour de quartet que ons uppellc main-
1 Plutot Ptolemee, gendre de Simon. Sur ces tenant June ou resalhe mois. B.
faits voir la Bible, Machab., I, 16. * Dagon, chateau fort pres de Jericho.
casteal de Agon.
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L1VRE PREMIER. 165
plus aigrement, ilh prendoit (a mere Johans et ses II freres; se les despul-
hoit tous nus , et les baltoit de scorgiers ' fortement , sique li sane en chaioit
(out contreval; et, quant Johans veioit sa mere et ses freres si durement
tourmenteir, si faisoit lassier I assault, car ilh ploroit de piteit quilh avoit
d'eaux, et de chu quilh li covenoit lassier son assault. — Adont se fist Johans Johans Hircaine roro-
wmriff • i neit com princhc de
coroneir com prinche de Judee, et les governat AaVIII ans. Apres jurat le Judee.
siege, que jamais ne soy partiroit*, s'aroit pris le ca steal ; adont enforchat le
siege grandement, et mandat par tout le pays vitalhe. Chis siege durat par
1'espause de VII ans, que oncques Johans n'y forfist por I denier de da-
maige, lant astoit li casteal fors et poissans. — Chis Johans fut mult proid-
hons, et Josephus le recommande en trois manieres : assavoir eh prophetie, ^ *» *••
... „ . 119 «•*!•■ i • i Le recommendation
en religion et en sens governant son peuple, chestoit pnilosophie morale, johans Hirraine.
— Item, Tan 1 11I C et LXI, se relevont* les Grigois encontre les Romans,
dont les Romans alarent a grant gens en Gresse. Si orent pluseurs batalhes
auz Grigois, ou ilhs perdirent mult de leur gens; mains en la (in orent
victoir, et remisent les Grigois en leur subjection et tregul. Et en pendi- L 7 a ® r ^ t * "J^r".
rent IH m et plus des plus grans, qui chu avoient bresseit, et a chu faire ilh """>*•
mettirent II ans, puis revinrent. Item, Tan IUI C et LXII, a Fluviiens *
Pitenne apparut que ly ciel ardoit par-deseur Cartage , et que cheaux de
Cartaige voloient apparelhier leur batalhez contres les Romans; et le veil-
ons encor ardre de grant clarteit par-deseurs Sardine; et sembloit qu'ilh
voloient rebellier contre les Romans.
Chu fut tout veriteit, car cheauz de Cartage astoient presque reedifiies, et
astoient Romans et de la nation de Romme; et nientmons ilh avoient eyut
entre eaux conselhe comment ilh poroient greveir les Romans. Mains leur
poioir astoit encor trop petit; si le lassarent enssi a chest fois, et paiarent
encor le tregut avant, sique Fluviiens Piterne, le consule qui avoit veyut
la vision, quant ilh veit le tregut qu'ilh envoiarent. si soy taisit de sa
vision; et tant com des Sardins, ilh y fut envoies Mallius et Tarquarus
Gayus, les consules, qui par batalhes les remisent en tregut com devant.
— Item, Fan IIII C LXU1I, assemblat li dus Franco de Galle grant gens; si
1 Fouets. Le mot scorie existe encore en wallon. raemc dans les deux texles.
* Ne faut-il pas lire : apres jurat que jamais ne * Se rcvelont. B. Probablement pour rebelont.
soy partiroit de siege? Je n'ai pas fait de chan- 4 Flumiiens. B. Ces noms si etrangement estro-
geraent, parce que la phrase est exactement la pics cacheraient-ils un Flavins Pelronius?
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166 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
en aliat devers Rom me por vengier 1 injure qu'ilh li avoient faite, quant ilh
le vinrent assalhir en son pays, ou ilhs ne gangnarent gaire. Ilh sont venus
B °d n ez m GaUieos assegiel * R° mme i e t ^ on ^ assegiet; et si ont tout ars jusques a le capitoile, et le
capitoile meisme; et ewissent faile mult grant damaige, quant Emulus, le
consule, a grant gens les corut sus, et soy combatit a eaux. Si oil victoir,
et furent les Sycambiens desconfis; si en fut mors XL m , et pris lll m . Si sen
sont raleis; et Emulus, le consule, prist le torques de pires de perles et
dor que les mors prinches de Galle avoient entour leur col; se les offrit a
son Dieu Jupiter por le grasce et gloire de la victoir quilh avoit la obte-
nue, oussi bien que les Sycambiens avoient les torques des Romans, qui
avoient esteit mors devant Lutesse, fail present a Mars leur Dieu. — Les
Les svcambiens des Sycambiens furent adont si desconfis quilh ne soy combalirent aux Romans
en grant temps la apres, jasoiche que chu fuissent les plus corageux et
crueux, et poisans de corps, que toutes les allres nations. Ly dus y perdit
I de ses fis , qui oit nom Marc, de quoy ilh fut mult dolans. Et encor ne fut
chu riens; mains, quant la batalhe se fist a Romme, les Sycambiens prisent
1 consule, qui oit nom Marcellius; quant Marcellius soy veit pris, et eistre
en lapoioir des Sycambiens, ilh salhit tout emmy ses annemis, de grant
hardileche, et ochist I des fis Franco, qui avoit nom Trodamaire, qui de-
voit estre dus de Galle apres son peire.
Sour Tan 1111° LXI1I1 , fondat li conte de Flandre IIII cileis et XII cas-
tels, et les donnat a son fis, qui avoit nom Arthesa. Item, Tan IIII C LXV,
morut Godeza, le VI e roy de Dannemarche f ; et regnat apres Nabugodo-
nosor, son fis, qui avoit a femme la filhe Godeza, qui oit nom Calix. Chis
Nabugodonosor fut le fis Pholomes d'Egypte; si regnat XL ans, et fut li
VII e roy des Danois. — Item, Tan IIII C et LXV1 , fut parfaite le royalme de
Cartage en Affrique; se fist crier f partout ly roy Gazon , s'ilh astoit nuls qui
vosist habiteir en son regne, ilh ly assenneroit manson et habitation solonc
sod estat, et seroit tenus frans sens tregut ne servaige paiier. A eel fois en y
vint tant, que ly paiis fut si bien puepleit quilh avoit onques esteit devant.
En eel ans meismes morut Bulgus, li III 6 roy *de Hongrie; si regnat apres
son fis Natora XIIII 8 ans. — Item , Fan 1III C LXVII, le XX e jour de mois de
1 Li promier jour de marche , ajoute lc raanu- 2 Proclamcir. B.
scrit B. 3 XIII. B.
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LJVRE PREMIER. 167
marche, oit dureit le siege que Johans Hircaine avoit jureil devant le cas-
teal de Agon , ou ilh avoit encloit Tymotheus , qui son peire li avoit ochis
Vli ans devant. Si avienl que ilh covient Johans lassier le siege par forche Foi. 46r«.
et retraire en Judee, portant que chis ans as to it de la loy forieis *. — Et Joh ^ n ; Hircaine reirait
Johans, qui ne voloit mie la loy brisier ne effrandre, si en ralat luy etses
gens. Et. quant Tymotheus veil chu, ilh oit grant dobtanche qu'ilh ne
revenist a plus grant poioir, et ilh ne poroit al long dureir contre luy. Et
se veioit bien que ly roy Pholomes ne li osoit aidier ne luy defendre *
contre Johans, por le dobtanche des alianches que Johans avoit aux Ro-
mans, que Judas Machabeus avoit a son temps impetreit, et Jonatas les
avoit apres fait reconfermeir.
Mult bien rem i rat Tymotheus tout ches choses, porquen ilh dest clere-
ment qu'ilh ne poioit plus demoreir en la terre contre Johans. Et portant
ilh prist adont la mere Johans, et Judas a wee Matathias, ses II freres; se les s« mere et *e* <k>i*
ochist malvaisement, et puis sen alat demoreir 8 en la terre de Fialdelfiie \ ochis.
a unc tyrant qui sires en astoit, qui fut nomeis Zenon \ Et quant Johans
soit que Tymotheus avoit ochis sa mere et ses freres, si oit mult grant
deulh, et jurat que, puisqu'ilh astoit widiet son paiis, ilh ly destruiroit le
sien paiis, car a aultre chouse ilfrne soy poioit vengier. — Adont li destruile
sa terre que ons apelloit Jherico, et abatit le casteal de Agon que Tymo-
theus tenoit de roy de Surie, qui manechal Johan et qu'ilh ly abateroit
Jherusalem. Atant se revint Johan en Jherusalem, qui quidat mult bien Guem-de johans Hir-
estre en pais; mains ly roy Anthiocus le voloit gueroier, et quant Johans Si^i^ydes^
le soit, si assemblat ses gens, et vint contre Anthiocus, le roy de Surie. Si
le corutsus, et chilh soy defendit; mains, nonobstant sa defense, ilh fut
desconfis et y perdit XL m hommes, sy s'enfuit. Mains ilh revient lempre-
ment, car ilh assemblat tous ses hommes en Surie et en Asie dont ilh astoit
roy, et assegat Jherusalem a si grant forche, que Johans ne le posist endu-
reir; et puis lassat savoir a Johans que ilh ly demandoit son paiis de Jhe-
rico, que ilh ly avoit destruite. — Quant Johans entendit ches novelles,
si soit bien qu'ilh avoit forfait, puisque li paiis de Jherico, que ilh avoit
1 Allusion a unc prescription de la loi mosaique * Manoir. B.
rappelee dans YExode, ch. XXIII, y. 44, et dans 4 Philadelphie, dans la Coeleayrie.
le Levilique, ch. XXV, v. 4 ct 3. * Surnomrae Cotylan.
* Tenseir.B.
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168 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
destruite, astoit de sa terre, et Johans quidoit que chu fust de la siene.
Adont prist Johans conselhe a ses homines comment ilh poroit faire
en vers chely roy, qui assegiet les avoit, qui avoit amyneit tant de gens que
ii ne powist avoir poioir contre ly, car il n avoit mie tant de gens; et awec
chu la citeit de Jherusalem n astoit mie si fort, que elle powist dureir
longement contre les gens qui assegiet Tavoient. Si fut ly conselhe teile-
menl conclus, que ons fesis pais a roy teile que ons le poroit avoir, mains
que la citeit ne fusse point rendue. Et Johans mandat a roy Anthiocus
journee de parlement; et fut le XI e f jour de decembre Fan IIII C LXIX,
La pais fut faiie. alqueile jour fut faite pais, en teile manere que Johan donroit a roy An-
thiocus, por son paiis de Jherico a reedifiier, J1I C besans d'or. — Quant
chu fut fait, se revint Johan en Jherusalem; si effondrat. par le conselhe
de ses barons , le grant tressoire des V1H tressoirs que ly roy Salomon
avoit faict mectre deleis la sepulture son pere le roy David. Se en ostat
hours III 10 besans, desqueiles ilh donnat le roy Anthiocus III besans, el
del remanant ilh fist faire les hosteleriies en la citeit de Jherusalem, por
herbegiier les povres gens de son regne et eaux sourtenir; car adont n avoit
en Jherusalem nulle habitation por les povres gens : si s'apensat qu'ilh ne
poioit les besans mies employer, sens avoir le hayme ne blayme de son
Promirs hosieries en peuplc. Chu furent les promirs hosteleries que oncques fussent faites en
Jherusalem. — Item, Tan IIII C et LXX, morut Gazon, le roy de Cartaige:
De roy de Cartaige si fut roy apres luy Anynal *, son fis, qui astoit mult crueux et hayoit les
Romans; et avoit jureit a son pere, deis qu'ilh n'avoit que XX ans, que,
oussi toist qu'ilh se poroit combatre, lantoist ilh guerriroil les Romans; et
ilh avoit adont XIX ans. Si que tantpisl qu'ilh fut coroneis, ilh s'appa-
relhat de faire guere aux Romans ; se les en fist depuis asseis. — Item ,
Fan Illl c LXXI, le XIIII e jour de mois de fevrier, morut Franco, ly dus de
Foi.46v°. Galle; si fut dus apres son fis Prians, qui regnat LVl ans. Item, apres
chu que ly roy Anthiocus fut partis de Jherusalem, vient I Egyptien qui
racomptat a Johan comment ly roy Pholomes d'Egypte avoit faite faire le
De johans Hircane. murdre de son pere, par trahison de trahitre Tymoteus. — rEt quant Johans,
1 Le venredi le XI 9 . B. bien certainement le nom d* Anynal. Parfois il est
9 Je ne me charge pas d'expliquer pourquoi difficile de distinguer Yu de Vn; mais ici le doute
Jean d'Outremeuse dedouble Annibal. Le person- n'est pas possible.
nagc qu'il introduit mafntenant sur la scene porte
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L1VRE PREMIER. 169
chu entendit, si en fut mult corochies al cuer. Si mandat ses hommes, el
en allat en la terre d'Egypte, et destruit pluseurs citeis, et par especial ilh
conquist toute la terre de Samarie, et le destruit et abatit tout les forte-
reches et les casteals; mains grant temps apres le redifiat Herodes, et en
fist une royalme qu'ilh apellat le royal me de Samarie, et y fondat 1 citeit
qu'ilh apellat Sebaste \ qui fut la principal citeit de son regne. sebaate.
Quant ly roy Pholomes entendit que Johans avoit enssi destruit sa terre,
si mandat ses hommes, et vint encontre luy ; et orent batalhe ensemble,
en laqueile batalhe fut ochis ly roy Pholomes, et ses gens desconfites et LeroyPhoiomesochi*.
mors la plus grant partie; ly remanant s'enfuit. Et coronont a roy Tymos,
le fis Pholomes; si fut appelleis li VIII 6 Ptholomes et regnat XVI II ans.
Enssy soy vengat Johans, et revient en Jherusalem, et tient son regne de
Judee mult honoraublement et fortement contre ses annemis, tanl com ilh
viscat. — Item, l'an Iiil c LXXII, assemblat Anynal, ly roy de Cartaige grans Anynai en s«iih.
gens jusqu a O et XX m *, et vient en Sezilh, qui apartenoit aux Romans , car
ilh l'avoient gangniet apres la destruction de Cartaige a cuy ilh astoit, si
que Anynal disoit que chu devoit estre siene; car quant les Romans dona-
rent la royalme de Cartaige a Gazon, son pere, ilh ly donnarent a toutes ses
appendiches et apartenanches; se le voloit ravoir, et par chest raison se le
voloit conquerre com siene. — Adont cheauz de Sezile le mandarent aux
Romans, qui fortement se mervelharent, et escrisent a roy Anynal qu'ilh
soy gardast del mesfaire aux amis des Romans. Bien voir astoit quant Car-
taige fut destruite ilh le conquisent, et que par-devant astoit en tregul de
Cartage et de sa subjection, et maintenant astoil-elle de tregut et de la sub-
jection des Romans; et quant ilh donnarent a Gazon, son pere, Cartage,
ilh astoit a eaux, ilhs ne li donnarent point les acquestes faites par les roys
de Cartage jadis ; et portant ilh demandoit tort et encontre raison , et relas-
sier Ten convenoit, ou ilh sen repenteroit. A chu donnat Anynal dure et mal
response, en concludant qu'ilh l'airoit ', car raison astoit. — Adont avient
une grant mervelhe en la citeit d'unne femme qui alloit et travelhoit d'en- Merveihe.
fant : et astoit ja li enfes a moilies neis et fours de ventre de la mere, si
est rentreis subitement en ventre de sa mere. Qui signifiat, enssi com les
1 Cest le Dom que prit la ville de Samarie , sous ■ C milh. B.
le regne d'Hcrode le Grand. s Probablement pour qu J il Vaurait.
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170
CHRON1QUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
clers de la citeit desent, que la citeit seroit temprement prise , si qu'ilh fut
lendemain. Mains li oust des Romans se vint a poioir , se les conduist Tybe-
rien Simphonien, (ant quilh vinrent en Sczile;si orent batalhe ensemble,
et furent cheaux de Cartage desconGs et mors, et se s'enfuit ly remanans.
— La fut mors 1II1 XX M homme de Cartage et LX m Romans : chu fut I fors
Diversessignesenchiei. estours. Et adont se monstront en chiel diverses signes mult crueux, des-
queils les Romans furent mult pcrturbeis, car li ruwe ' de soleal apparut
estre plus petit; et y apparut oussi le semblanche d'onne main d'homme,
et le soleal et la lune combattre ensemble, enssi com ilh apparoit. Et a
Capene, de jour, sont apparut en chiel 11 lune, et en Sardine, II escus ont
sueit sane; et a Faliche*, le chiel apparut oviers. Adont vient Anynal en
fuant par Tuscanne, et la at encontreit Flamien, le consule, qui venoit a
V c hommes; se les at ochis, et puis s'en allat vers Cartaige. Chu fut 1'an
1111° LXXIII, en mois de fevrier, que ladit batalhe avienet 8 . — Item. Ian
II11 C LXX1III, fist et fondat Arthesa une citeit qu'ilh nommat A r tense, et
son pays Artois , et ses gens Arthesiens. A eel temps oit pluseurs batalhes
entres les Romans et les Sycambiens; mains les Romans en avoient toudis
de peiour, et astoient desconfis. — Item, 1'an II1I C et LXXV, en mois de
marche, revient Anynal , le roy de Cartage, en Ytale, a grant gens, en des-
truant le pays. Se prit une ville, que ons nomoit Sarque; se trovat dedens
Igneum Fulmynum *, une consule de Romme, et XI Tribuniiens vies et
noveals, et XVlI m hommes; si les ochist tous, et puis se soy partit et allat
avant. Et a thier jour ilh encontrat Marcellien , le consul , qui aloit a grant
gens vers Sarque pour faire sourcoure a eaux; si soy corirent sus, et soy
combalirent jusques la nuit, qui les departit. — Et lendemain, oussitoist
qu'ilh veirent le jour, se rasalhirent a la batalhe, et se soy combalirent
jusques a medis. Et la fut Anynal desconfis: si s'enfuit, et perdit bien XX m
hommes. Adont s'enfuit-ilh vers Pulhe et Calabre, et illuc conquestat-ilh
mult de citeis. — Enssi qu'ilh faisoit chu, ly roy de Machidone ly envoiat
son messagier, et ly mandat qu'ilh ly feroit ayde ' encontre les Romans; et,
Arlhense.
Artois.
Anynal en Hale.
Fol. 47 r°.
Sa desconfiture.
1 Roue, disque. * Ce qui precede depuis : chu fut, etc., est omis
* Capenc et Falisce sont deux villes de Tan- dans le manuscrit B.
cienne fitrurie, aujourdhui nominees Civitella et 4 Sans doute pour Cneum Flaminium.
Gallcsc. * Jhide. B.
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LIVRE PREMIER. 17|
silh les puet vaincre, ilh ly aiderat encontre les Grigois; et en teile ma-
nere escrisent cheaux de Sardine. Mains les messagiers chevalcharent tei-
lement, qu'ilh chairent en l'oust des Romans; si furent pris et leurs lettres
luites, et soierent ' tous leurs secreis. Sour quoy les Romans orent teile
conselhe qu'ilh misent les messagiers en prisons, et puis envoiarent en
Machidoyne March et Valerien, et en Sarde Tute et Mallilorquant, con-
sules. a grans gens; et lez remanus des Romans sen allont vers Calabre,
ou Anynal gesoit.
Tous ches trois oust orent a I jour batalhe en 1111 parties , assavoir : les
Romans en Calabre, contre Anynal; en Espangne, contre Asdrual, le frere Asdrual d'Espmgne.
Anynal; en Machidone, contre le roy; et en Sarde, contre les Sardinois,
et Asdrual , frere natureil Anynal , qui astoit bon chevalier. Si avient que
chis Asdrual ochioit tant dez Romans, que les Sardinois en avoient grant
joie; porquen Tyte et Mallilorquant tynrent Asdrual si pres qu'ilh 1'abati-
rent, et le prisent a prisonnier. Adont furent les Sardinois desconfis; si en
fut mors milh et V1I C chevaliers et nobles gens, et XII m d'aultres, et pris
awec Asdrual VII R Et adont fut Sardine mise en tregut dez Romans. — Et
en teile manere fisent cheauz qui astoient en Machidone, et cheaz qui
astoient en Espagne; et en Calabre orent les Romans victoir, et s'enfuit
Anynal. Chis Anynal fut uns dyable, et de mal condition piour qui ne fuist Anyn«i qui donnat
** a a ffrandciDcnt & fair
oncques Hanibal. Et si astoit de la nation de Romme . enssi com nos avons »«* Romans.
dit deseur. Et furent les 1111 devantdit victoirs Tan IIII C LXXV1I en avrilh*.
Item, Fan 1IU C et LXXVI11, conquist li conte de Flandre la terre de Ze-
lande, et le tient VI ans. Item, l'an 1II1 C LXXIX , morut ly roy Janyus des
Latins; si regnat apres son fis Junyus V ans. — Item, Tan III1 C et MI" le
XIII jour de mois de novembre fut neis I gran philosophe, qui fut nom-
meis Cycero 5 , et l'an III1 C 1111" et I , le promier jour de may, fut neis Pom- cycero fut neis.
peyus, qui fut uns des grans prinches de Romme. En eel an meismes, orapeyus *
revient Anynal en Tarenche *, en Ytaile, et le prist, en laqueile ilh trovat
tant d'avoir qu'ilh n'est mie a nombreir. Se ochist Cartalon, le due de
Taranche, et prist bien X m prisonnirs, qu'ilh vendit; s'en oit grans argens,
1 U est probable que le copiste aura par erreur 8 Le membre de phrase relatif a la naissance
ecrit soierent pour soiretU , sweat. de Cic^ron est omis dans le manuscrit B.
* Le XI I 9 jour de avrilh. B. * Tarente. B.
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172 CHRONJQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
de quoy ilh paiat ses sodoiiers. Et la vinrent les Romans, et y quidarent
Iroveir Anynal; mains ilh en astoit fuys, quant ilh entendit la venue des
Romans. — Adont reconquisentles Romans toutes les citeis qui soy astoient
rendue par paour a Anynal, et misent gens dedens, et vinrent a Taurin,
le castel ou Asdrual, ly frere Anynal, astoit en prison; se li trencharent le
chief, et lependirent a casteal defours. Ons le racomptata son frere Any-
nal, et quant ilh I'oit entendut, et ilh soit que les Romans astoient partis,
se chevalchat devant le casteal, et veit le chief son frere, dont ilh fut mult
confus; et se s'enfuit, car ilh n'avoit point la volenteit del combattre aux
Romans; car ilh n'avoit point d'esperanche d'avoir victoir contre eaux.
Adont s'enfuit Anynal et ses gens awec ly en Brisse ', en Lombardie.
Ceste deraine guerre durat II ans ou HI, car ilh durat jusques al an II 1 1° et
1111" et HI, et encor en la fin. Se vous disons que les Romans, qui astoient
poissans, prisent* adont fortement a regneir; et avoient unc consul qui
Foi. 47 y°. astoit nommeis Pompilium Cornelium, qui a grant gens alat en Bresse
apres Anynal, qui sen astoit fuis. Se reconquist toufes les citeis qu'ilh
avoit conquis en Bresse; et faisoit tant de mervelhes d'armes que ons disoit
h* consul Fompiiius commonement qu'ilh parloit aux dieux. — Chis Pompilius Cornelius passat
mere, et alat en Cartaige; et vous deveis savoir que Gartaige est I royalme
en Affrique 8 est une ysle, enssi qui est Europe de cha et Asie de la; et,
enssi com nous avons desus * deviseit, enssi com Romme est chief de tout
lisle d Europe, enssi est Cartage chief de toute lisle d'Affrique, et com
Babylone le grant est chief de tout Asie; mains ilh at pluseurs citeis es
royalmes d'Asie, d'Affrique et d'Europe, sens le chief et principals. Si qu'en
concludant ilh avoit mult de royalmes en Affrique, a I Ires que Cartaige, qui
toutes astoient tributairs a Cartage par tregut. Si arivat Pompilius en la
royalme de Carsodo ' en Affrique, dont ilh astoit roy Adacolo, qui son pays
defendit sicom chevalier hard is; mains ilh n'avoit de comparison a Pom-
pilium ne aux Romans, qui astoit uns grans et fort peuple. Si fut ly roy
Adacolo ochis et ses gens oussi, et son pays ars el deslruis; et puis revin-
rent les Romans par-decha vers Cartaige, car ilh astoient ariveis plus haulte
1 Brescia. ' en Affrique qui est une ysle.
* Prendre a ici le sens de commencer. * Tout ce qui precede depuis : est une ysle, etc.,
8 Je crois que pour rend re cc passage intelli- nc se trouve pas dans le manuscrit B.
gible, il faut ajouter ici un qui, et lire : / ivyalme * Cardoso. B.
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LiVRE PREMIER. 173
vers Egypte. Si soy combatirent al due Annone de Brisquelhem en Affri-
que, et l'ochist Pompilius et Xl m hommes awec luy; et si en prisent
XXHH m , entre lesquels li fis Agilfo, li roy de Munyda * en Affrique, et
destruit et pilhat tout son pays.
Adont orent paour cheaux de Cartaige; si envoiarent a Pompilion por ci.eaux He cartaig*
avoir pais, et li noble consule leur donat XV jour de Iriwe * et repleit 5 , si en
allassent a Romme pour fairc al volonteit des senaleurs; cheaux y alarent,
mains les senateurs les revoiarent a la volonteit de Pompilion \ — Quant
Pompilion oiit le response des Romans, ilh donnat pais a cheauz de Car-
taige, sour teile condition qu'ilh devoienl donneir cascon 5 L milh pesans
de (in argent, assavoir por unc pesans I libre comptant por tregut; si en
paieroient tantost I paiement, et le paiont, et donnarent oullre VII I c naves
toutes chargies de vitalhes; et enssi se sont les Romans partis et revenus
vers Romme. — A eel temps astoit Anynal fuys en Galle, et ly dus de Galle Anynai encore en itaie.
et les Sycambiens l'avoient rechut honorablement, car ilh li ochirenl XX m
hommes et le rechacerent en voie tout deseonfis. Si s'en ralat en Carlaige,
et quant ilh soil qu'ilh avoient faite pais aux Romans, si fist pendre (ous
cheaux qui l'avoient faite, et en fut bien pendus jusqu a VI C hommes. — Et
se rasemblat gens , et se revient en Ytaile Fan IHI C I1II XX I1II. Quant Pom-
pilion le soit, si assemblat gens, et soy combattit a ly a Melant et le des-
confit, et ochist toutes ses gens 8 , et luy-meismes fut pris. Si demandat
adont avoir pais, et Pompilion li dest que awec les L milh libres d'argent condign* de ia pi*
ilh pairoit aux Romans cascon an C milh libres d'argent por chesti novelle
(rahison qu'ilh avoit faite aux Romans, et le grant despit qu'ilh avoit fail a
ses gens qu'ilh avoit pendut, ilh seroit enssi pendut ou ilh paieroit (ant,
et awec chu lairoit a eaux tout 1'avoir qu'ilh avoit pilhiet en Ytaile, qui
sieroit en ses easteals troveit de present, et renderoit tous les casteals a
cheaux a cuy ilh devoient estre.
Adont dest Anynal qu'ilh le feroit enssi , puisqu'ilh leur plaisoit; enssi en
furent faites lettres fortes et saieleez de Anynal, en rendant les clefs des
1 Munda? ordinassent a sa volcntcit. B.
* Induse. B. 5 Le mot an me parait manqucr ici. II se Irotive
5 Delai, repit. Roquefort donne dans cc sens le plus loin, a l'occasion d'un second trait e de paix.
vcrbe rcspleiter. 8 Ce qui precede depuis : et soy combattit, etc.,
4 Les revoiarent a Pompilion et vorent qu'ilh en est omis dans le manuscrit B.
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174
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Fol. 48 r°.
casteals. A tant soy parti t et sen ralat en Cartaige; et fut troveis ens es
casteals cent et XX m libres d'argent et XL m libres d'or, sens les joweals,
dont ilh astoit tant et de si grant valoir que chu astoit sens extimation. —
Adont revient Pompilion a grant gloire et mult ensauchies '. En eel an
Menrdiiedunsavaige meismes astoit aleis li dus de Galle voleir * en bois de Lutesse; si trovat
unc savaige homme, qui li criat et dest : « Dus Prian, tant com tu viveras,
ne rendront les Sycambiens tregut auz Romans; mains ilh isseratde toy
teil fruit, a cuy temps li tregut serat reconquis sor ton pays par les Ro-
mans; et le paieront tes gens tant et si longement qu'ilh aurat I due en
Galle qui sierat nommeis Prian , sicom tu es, a cuy temps ilh serat abatus
a tousjursmais; et croiserat dedont en avant ly honneur de Galle, tant
qu'ilh seront les plus grans de toutes les nations de monde. » Quant ly
dus entendit chu, si fut mult enpenseis '; si vot encor parleir a savage
homme, mains ilh envanuit \ Si en ralat * ly dus Priant a Lutesse tout
enpenseis \ — En eel an meismes morut ly HIJ e conte de Flandre, Lydo-
neus; si fut conte apres luy son fis ly anneis, Lydrel. Mains ilh morut en
eel annee meismes; si futjeonte son altre frere \ qui oit nom Sargondus.
qui regnat XXXII ans. En eel an morut Junyus, ly roy des Latins; si fut
roy apres son anneis fis Janyanus, qui regnat XL ans. Chis roy Janyanus
oit II (is et une filhe : ly anneis oit a nom Janyanus, et fut roy apres son
pere; et li altre oit nom Theodegus. Chis fut roy de Barbaste; et la filhe oit
nom Julia, et fut mariee * a unc grant senateur de Romme, qui fut nom-
meis Cesaire.
Vos deveis savoir que ly roy Junyus morut le promier jour de mois que
ons nomoit adont quartel, portant que ch'astoit le quarte mois de l'an, le
promeir mois compteit a marches car li monde fut fais en marehe, le
XVIil e jour. Ly roy Junyus rostat a chi mois son nom, et le nommat
Junyus, apres son nom; e'est resalh mois. — Item, l'an 1III C 1111" et VI,
Le V* conte de Flan
dre.
De mois Junyus.
1 J dont revient Ponplius et sa gens a Romme,
qui fut recheus a grant gloire et ensachiez dure-
ment. B. Ensauchier (essaueer dans Roquefort)
signifie exaltcr.
* Voter doit s'appliquer ici a la chasse au
fau con.
5 Mult pensi. B.
4 Mains ilh astoit envanuys. B.
5 Si reparat. B.
• Tos pensis, B.
7 Son altre fis. B.
• Fut mariee parses dots freres et li donerent I
grant senateur, etc. B.
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L1VRE PREMIER. 475
fut neis Julius Cesar : chis fut nommeis Julius portant que sa mere fut JuiiM Cesar fui d«*.
nominee Julia, qui astoit filhe a roy des Latins Junyus, et soreur a roy
Junyanus et Theodogus de Bar baste; et oit nom Cesaire, apres son pere
Cesaire deseurdil. — item, Fan 11II C III I" et VIII, morut Johans Hircaine, Johans Hircansmomt.
li dus de Judee. Chis Johans, quant ilh morut, avoit V fis de sa femme :
ly anneis avoit nom Arislobolus, li secons Anthigonus; cheaz astoient die- Aristobolus.
valiers, mains les aultres trois astoient ' jovenes. Portant ordinat Johans
que sa femme, qui astoit mult saige, tenroit toute sa terre en sa main jus-
qu'a tant que les enfans sieroient tous en eaige del tenir leurs terres. —
Mains de chu oil grant despit Arislobolus, de chu que son pere les laisoit
desous la sengnorie de sa mere. Adont trahit de sa part grant compangnie "
de gens, et vient a sa mere; se le prist awec ses 111 moiens * fis, et les mist
en sa prison; et la morut sa mere de mesaise. — Quant Aristobolus oit chu »«* r nfans Johau Hir
fait, si donnat a son frere Anthigonus une partie de sa terre; mains ilh Aristobolus.
n'en volt riens, ains en alat en Galilee por conquerre proieche d'armes : Anth, ? om,s
car ilh astoit beal chevalier et bons. Si que la terre demorat entirement a
Aristobolus, son frere, qui fel astoit et crueux. Et se soy Gst coroneir a
roy et nommeir roy de Judee 5 , revenue en royalme, qui astoit cheyue del
royalteit en ducheit longtemps devant, assavoir puis la transmigration de
Babilone, quant Sedechias fut pris et mis en la prison Nabugodonosor.
Enssi fut Aristobolus ly promier roy de Judee, puis la revenue del caplivi-
teit * de Babyloyne. Et nientmoins Aristobolus ne fut roy que une an tant
seulement, por la grant malvaisteit qu'ilh avoit fait a sa mere, quant ilh
le fist morir en sa prison, dont ilh astoit mult hays de ses gens el ablas-
meis; mains oncques por chu ne soy amendal, et loudis " devenoit plus
malvais que devant.
Et, quant ly roy Aristobolus oit regneit une an, ilh chai't en une grant Ly roy Aristobolus
maladie. Se soy Gst porteir en la tour David por mies repoiseir, portant
qu'ilh ne voloit mie oiir chu que ses gens disoient de li , car ilh savoit bien
qu'ilh astoient asseis liies et joians de son maul. — Enssi qu'ilh gisoit ma-
laide, revient en Jherusalem Anthigonus, son anneis frere, de la terre de
1 Erent. B. revenue en royalme. Telle est la version du nia-
* Masneis. B. * n user it B.
5 El nomtner roy de Judee et ses peires n' avoit 4 Le repairemcnl de la chativison. B.
esteit que dus. En teil maneire fut la terre de Judee * A des. B.
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176 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
A "jhe?uwiem evient en Galylee t °" i'h avoit esteil IX mois. Et sy avoit fait mult de proeches,
com valhant chevalier. Si entrat en Jherusalem le jour d'onne grant fieste
de la loy, armeis d'onnes armes ' tout noires mult avenantes; et venoit
enssi armeis, portant qu'ilh voloit faire honneur el plaisier a son frere le
roy; car ilh ne savoit rien de sa grant maladie, et voloit que li peuple veist
la bealleit de ses armes. — Adont avient que les envieux, qui avoient sour
FoK48 ^ luy envie por sa proieche et hardileche, en furent dolans de chu qu'ilh
revenoit en teile estat; puis alarent a la royne Jona, femme de son frere,
et ly racontarent comment Anthigonus astoit rentreis en Jherusalem tout
Maiuce de femme. armes. — Et eel qui mult le hayoit , portant que ilh l'avoit ameit le temps
devant et requis d'amour , et qu'ilh gesist awec ly ; et ilh ly avoit respondut
vilainement et escondit awec en jurant, se jamais Ten arasonoit, que ilh
le diroit a son frere; et por esquiweir le fait, ilh astoit enssi aleit en Ga-
lilee; de chu qu'elle lavoit refuseit avoit-ilh teile duelh la royne, quelle se
pennoil en toutes les maneres qu'elle poioit de sa mort porchachier. Et par
cheli cause, quant elle enlendit la novelle qu'ilh astoit a sa revenue entreis
en la citeit armes , elle allat a son sangneur le roy Aristobolus el laraison
nat enssi :
La royne jona arai- « Sires, mervelhe poreis oiir de vostre frere Anthigonus, qui at enlendut
sonne le roy son san- * •■■■Vii«i
g««ur- » que vos deveis monr. Si est retourneis de la terre de Galilee, et est
» entreis en vostre citeit de Jherusalem tous armeis a grant compangnie
» de gens awec ly por vos ochire, portant qu'ilh veult avoir la rengne
» apres vos mort, et se vos le voleis esproveir, je vos aprenderay comment
» vos le poreis savoir : vos le mandereis qu'ilh vengne parleir a vous tous
» desarmes, puis metteis en ceste chambre * de vos servans s armeis, a cuy
» vos commandereis , se vostre frere vient armeis, que ilh 1'ochient tan-
» toist sens nul excussanche, et s'ilh vient desarmeis, se le (assent passeir
» oultre et venir a vos parleir. En teile manire poreis mult bien savoir
» queile volenteit* vostre frere at, et la veriteit de ly. » *— Adont, por le
conselhe et I'amonestement de la royne, furent les gardes mises en la cham-
bre tous armeis, par ou li bons Anthigonus devoit passeir; et sy leur fut
1 Pour (Tune armure. ce que lc chroniqucur enlcnd ici par soutertxrin.
* Lc manuscrit B porte ici soustnc, et plus loin , * Sergans, B.
sans abreviation , sousierin. En comparant ce recit 4 Talent. B.
avee eclui de Fl. Joseph (XIII, 19), on comprendra
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LIVRE PREMIER. 177
commandeit de part le roy que. s'ilh venoit amies, que ilhs Fochissent.
Apres chu ly roy apellat uns sien siervan ', et li dest : « Va-t-en a mon
» frere Anlhygonus, et li dis qu'ilh vengne tantoist parleir a moy, et se
» soy garde bien qu'ilh ne vengne point armeit, car ilh en moroit. » Et
chis soy parti t. Mains la maile royne sen vat apres le servan, se le relrait
en une chambre et li dest : « Amis, dis a Anthygonus qu'ilh vengne tous
» armeis, car ly roy son frere voloit veioir comment les armes li ave-
» noient; » et elle ly donroit tant qu'ilh seroit riche hons a tousjours mais,
et ses heures apres luy. Et chis fut mult convoiteux, si oit en convent a la
royne de faire sa volenteit del tout, sicom ilh fist. — Car ilh alat a Anthi-
gonus , et li fist le messaige enssi que la royne voloit. Lyqueis Anthigonus
s'armat tous sus al mies qu'ilh pot, et s'en vat vers le tour David, oil son
frere gisoit. Mains a eel temps avoit demorant en la citeit de Jherusalem De Judas i> divineur.
unc divineur * qui astoit nomeis Judas, qui avoit sortit 5 et dit que Anthi-
gonus seroit ochis le XIU e jour de jenvier, a heure de medis, sour Fan IIII C
1111" et VIII; et astoit adont la propre journee et ly heure de medis. Si
veit Anthigonus aleir vers son frere si noblement armeis que chu sembloit
1 angle.
Quant Judas le veit, si fut tout enbahis; si entrat en sa maison, puis
sescriat com forsenneis : « Hahay, las! chaitis, d'ors en avant je ayme mies
» morir que vivre, quant ma veriteit est tournee a menchongne, que * onc-
» ques mais plus ne m'avient, ne mesdis ne furent esproveis en fauseteit
» qua chesti fois : car je voy la Anthigonus tout vis, et j'avoie devineit
» qu'ilh seroit ajourd'huy ochis, al heure de medis, qui ja est entree. » —
Et Anthigonus s'en aloit entrant en la thour, et passat devant la chambre 5
ou les servans astoient, qui le veirent armeis. si l'ont ochis; et la novelle
s'en vat par la citeit. Quant Judas I'entendit , si fut mult lyes et menat grant Antigonus fut <*».
fieste. Et la royne le dest a roy que son frere astoit mors, car ilh astoit
venus armeis, oultre le forcommandement de luy. — Quant ly roy Aristo-
bolus soit que son frere astoit mors, si en fut dolans et reforchat son maile
mult fortement, car les entralhes ly rompirent de coroche, si qu'ilh ren-
doit sang par le boche et le neis. Et quant ilh oit tant sangneis qu'ilh fut Foi. *9r°.
1 Sergant. B. 4 Pour ce qui.
* Divineour. B. * Lc manuscrit B remplace encore ici ce mot par
* Tirer au sort. Sortixscr dans Roquefort. celui que j'ai rappele dans une note de la page 176.
23 ,
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178 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
enssi com mors, ly uns des servans " recolhit son sang et le jetlat d'aven-
ture en lieu ou li sang Anthigonus astoit espandus, si que ons poioit bien
cognostre Tunc en vers l'autre; et chu fut al entree deldit chambre \ —
Quant ly peuple veit chu, si commenchal a crieir en disant que Dieu pren-
doit de roy droit venganche, quant par le sang de son frere avoit esteit
ly sien cspandut. Ly roy oiit le cry des gens, mains ilh ne Fentendit mye;
si demandat que chu astoit; mains nuls ne li oisoit dire le verileit. Adont
les commenchal ly roy a manechier, s'ilh ne ly disoient de quoy li peuple
faisoit teile cry. Se ne ly oiserent les servans plus celeir, se li ont dit chu
que ly peuple disoit de ly. — Quant ly roy 1'entent, sy commenchat forte-
ment a ploreir, et dest enssi : « Hahay! beal sire Dieu, vos ne voleis mie
» que ma desloialteit et felonie soil longement cellee; ains I'aveis descovert
)> en dureche et en venganche, quant vos faite le mien sang despandre en
» la venganche del sang mon freire, que je ay fait ochire com trahilre. Si
» est bien raison que je mure a doleur, car jay fait ma mere morir en mon
» prison par mesaise et famyn, et mon frere par moy est morl 8 . Et chu
» sont les dois pechies porquoy ma fin doit eistre laide et honteuse: mains
» encor me seroit bien avenus, se je rendoie mon sang a une seule fois,
» si que je posisse morir tantoist, car li sangneir unc pou * et a tant de fois
DeimortAiixandre. )> me redouble ma doleur. » Quant ilh oil fineit son dit, si palmat, et les
servans qui erent entour luy le corurent releveir hasliement; si trovarent
qu'ilh astoit mors. Adont fut-ilh noblement apparelhies selonc leur loy, et
fut ensevelis enssi qu'ilh afferoit a luy 5 .
Mult fut dolante la royne de la mort son saingnour, portant maiement
quelle n'en avoit nulle enfant de li por tenir la terre, et 1 avoit mult ameit ;
et por son amour elle delivrat ses trois freres que ils avoit tenus en sa
Aiuandre et jamicns. prison, sicom dit est par-deseurs. Si en coronat les dois anneis, Alixandre
et Jamiens; et Hircaine, qui astoit ly thirs, portant qu'ilh astoit trop
jovenes, mist-elle demoreir awec lee; et les II roys soy mariarent dedens
les promirs trois mois. — Alixandre prist a molhier femme de mult grant
lynaige qui fut nomee Salite, et Jamien prist une altre de grant nation, qui
oil nom Alixandrine. — Chis Alixandre fut roy de Judee; si regnat XXV II
1 Garvhons. B. * Petit. B.
* Sousterin. B. Le mot est tres-lisiblement ecrit. * Sur les faits qui precedent, voir Thistoire de
* Et mon frere ai-je mort. B. Fl. Joseph, XIII, 19.
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LIVRE PREMIER. 179
ans; mains Jamien , qui astoit rois f awec ly, ne regnat que I an , car Alixan-
dre, son frere, 1'ochist le XXVU e jour de septembre * tan tost apres siwant,
par l'oquison qu'ilh avoit dit que sa femme astoit de plus hault lynage que
la femme Alixandre, son frere, et qu'ilh ochiroit Alixandre, si seroit roy
tou seul. Chis Alixandre fut plains de felonie et de si grant crualteit que Dei muiteit Aiixan-
nuls ne poloit dureir por ly ; ilh fist ochire dedens VII ans plus de L m proid-
hons de tout sa terre ", portant qu'ilhs ly blamoient ses folhyes et mervelhes
qu'ilh faisoit; et tant fist-ilh que ses gens le haioient mult fortement. —
Item, Tan 1II1 C HI!" et IX, alat a grant gens en la terre de Machidoyne ly Guerre des Roman* e»
consul Tytus, por prendre venganche de roy Philippe, qui soy astoit par
lettres aloiez a Anynal , quant ilh guerrioit les Romans. Si le desconfit en
batalhe, et ly gangnat ses citeis et vilhes, et destruit son pays, et prist le
roy et son fis, qui avoit nom Demetre; mains ilh fuit fait pais par teile
man ire * que ly roy Philippe devoit rendre aux Romans les prisonnirs que
Anynal avoit pris sor les Romans, com dit est par-deseurs, et les avoit
vendut aux Machidoniiens; et que jamais ' ne feroit batalhe aux Grigois ,
car les Romans les prendoient en leur saulve -garde; et n'aroient jamais
dedont en avant que L naves sour mere, el les aullres donroient aux
Romans; et awec chu par X ans donroient aux Romans cascon an IHI m
libres d'argent.
A tant soy partit Tytus et chevalchat en la royalme de Lachedemonie, e«»» en Lwhedemo-
oil ilh fist maintes batalhes ' et destruit pluseurs beals pays ; et en la fin ilh
soy comhatit al roy, si le desconfist et le mist en la subjection des Romans
par my le tregut paiant de VI m mars d'argent cascon an a payer; el astoit
li roy nomeis Nabidiens '. Adont revient Tytus a Romme, el se ramynat
awec luy tous les prisonnirs vendus par Anynal, et Arnemen le fis Nabi-
dyen le roy. — De la sen rallat es regnes de Insubres et Boyens et oussi
Camany •; si gangnat Cremoine et Plaisanche, et les mist el subjection des Foi.49^.
Romans por le tregut de VI m libres d'argent. Et tout chu fut fait en trois
ans. Si revenrons a nostre mateire. — Item, Fan IIII C III!" et X, morut
1 Je supplee ce mot d'apres le manuscrit B. scrit B. Le ndtrc porte, par erreur sans doutc : et
* Le XVII 9 jour de decembre. B. que jamais ne seroit n'en ne feroit batalhe.
* LX m de plus proidhons de toute sa terre. B. • Estour. B.
4 Forme. B. T Le tyran de Sparte, Nabis.
* Je substitue ici a notre texte celui du manu- * Cemani. B. Les Cenomans.
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180
CHROiMQLE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Matera , le quars roy de Hongrie; si regnat apres Anthenoir, son fis, X ans.
Chis Anthenoir fut mult fels : ill) oit grant guerre a roy de Dannemarche
Nabugodonsor, et si ochist II de ses (is; si orent pluseurs ba tallies en-
semble. Si avient que, sour Fan III1 C III1" XII, orent mult grant et orible
balalhe, ou les Hongrois furent desconfis; et la fut ochis LX m Hongrois et
\L ,n Danois, et oit li roy hongrois copeit la destre main: se li copat Eneas,
le fis le roy dannois. Et por chu demorat ly roy hongrois dedonl en avant
en son pays, sens faire guere aux Dannois. — En eel an meismes, conqui-
sent les Romans le regne de Trachie, et le misent en la subjection des
Romans , por tregut de VI m libres d'argent a payer cascon an, et les con-
Lcs Romans en suric duisoit CycillHens Galabiicns '.— A eel temps montarent les Romans sour
mere et vinrent en Surie;si orent mult a faire, car ly roy Anthyocus de
Surie et ses gens soy defendirent valhamment; si conduisoit les Romans
Pompilion et Tytus consules. Si demorarentla III ans, car ilhs conquisent
en la fin toute la terre le roy Anthyocus, les dois regne d'Asie et de Surie,
et les misent el subjection des Romans *, et tributaire de X m libres de fin
argent: et de chuxlonnarent * bon segure. — En eel an meisme, Anynal, le
roy de Gartaige, oit volenteit de brisiier la pais qu'ilh avoit faite aux Ro-
mans et saielee de son saieal; si soy trahit vers Prusse a roy Brilhyme *,
et ly requisl ayde; et chis li dest qu'ilh le delivroit as * Romans, com trahi-
Dei mon Anynai. tre. Anynal , qui doubtat qu'ilh ne fuist livreis aux Romans, but unc hanap
tout plain de venyn , si soy tuat. Enssi fut mors Anynal , et apres luy fut
coroneis son fis, qui oil a nom Anynal enssi com son pere; et chu astoit
unc vilain nom et foul. — Item, Tan 11II C XCI1I, morut ly VIII Pholomes
d'Egypte: si regnat son fis apres, qui oit nom Gezon *, et fut nommeis li
lX e Pholomes.
Item, Tan III 1° XC1I1I, Perseus, li fis Philippe le roy de Machidoine, qui
astoit roy, car son pere astoit mors I an devant, soy rebellat aux Romans;
et avoit fait alianche a Contun le roy de Trache et a Genlien le roy de Yli-
rien 7 , con t re lesqueiles les Romans ontenvoiet Pompilion etLutiien Paulin *
awec grant gens. Et mandarent awec eaux le roy Anthiocus de Surie et
Dc Perseus.
1 Cicilius Glabrius?
* Et les fisenl subgite as Romauis. B.
5 Donroicnt. B.
4 Cest-a-dire vers Prusias, roi de Bithynie.
* Des dans noire texte. Jc corrige dapres le ma-
nuscrit B.
6 Si regnat ses fis Geson X ans. B. II s'agit de
Ptoleme'e, surnomme Physcon.
7 Gentius, roi d'Ulyrie.
* Popillius Laenas et Lucius Paulus ( Paul fimile).
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UVRE PREMIER. 181
Pholomes le roy d'Egipte, el 1c roy Brithymie de Prusse, et se soy com-
balirent; mains le promier jour furent les Romans desconfis, mains la nuit
les deparlit a pou de perde. — Mains lendemain al matin les Romans coru-
rent sus leurs annemis, si les desconfirent, et furent ochis XX m homines;
si en fut pris XIl m hommes, entres lesqueiles furent pris III roys de Mache-
doine, de Trechie et de Ylirje, qui vorent chaioir ' aux pies des Romans
consules; mains ilhs ne les voirent point souffrire, ains les fisent seioir
deleiseaux, non mie sicom prisonniers, mains sicom amis; car ilhs les
iassarent venir a pais, parmy le tregut qu'ilhs rendoient par devant cascon
de ches III roys; si qu'ilh apparut bien que les Romans ne soy combatoient
point por avarisce, mains por justiche a faire et tenir. Et fisent tous les roys
et tous leur enfans creanteir d'aleir an prison a Romme, el les envoiat la.
Puis s'en allont sour le roy de Eperie *, et conquisent LXX citeis en eel
royalme et les destruirent, et puis revinrent a Romme; si amynarent le
nave Perseus, qui astoit si grant qu'ilh avoit dedens XVI ordines de rymes 5 .
— Item., l'an I11I C XCV, s'en allat a grant gens Pompilion vers Espangne, Pompiiio,. en e»i»h-
ou ilh conquist LXIX citeis, et ochist mult de peuplc; et tou seul contre gne
I gran ago) an * ilh soy combattit, et le conquist. En eel an morut Iy roy
de Munidar, qui astoit nomeis Maximien 8 , qui avoit L fis. — Item, l'an
1111° XCVI , uns pasteur, qui avoit nom Viriatus, se combattit en Espangne
eontre les Romans awec leur anemis devant la citeit de Munanchie • ; mains
ilh fist tant de fais d'armes que ch'estoit grant mervelhe. Et si n'asloit mie Poi.wr-.
gran hons, mains tant astoit fors qu'ilh talhoit une homme en dois tron-
clions: ilh ochist les consules et tant de chevaliers de Romme tant que
trop 7 : et astoit uns gardeur de berbis. Si avient que I jour par envie qu'ilh
fut ochis par les chevaliers meismes de sa parlie, a tauble ou ilh man-
gnoient; se les blasmoit durement et se soy prisoil; chu fut la cause de sa
mort. — Item, Tan I1II C XCVII, chevalchat Iy consule Manchius * a grant Dei cite* «rK$ P ov <>»
gens vers la citeit d'Espoy * en Espangne, et l'assegat; si yssirent fours les
1 Tomber. La forme ordinaire est eheir. • Numancie. B.
* Epire, sans doute. 7 Tanl que e'etait trop.
8 Rangs de rames. 8 Host. Maneinus.
4 Geant. 8 D apres un passage qui se trouve un pcu plus
* Maximuse. B. On voit qu'il s'agit de Masinissa loin dans ce meme alinca , ce scrait un second nom
et de son royaurae de Numidic. de la ville de Numancc.
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182
CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
villains 1 qui desconfirent les Romans. Se leur convient une villain pais faire
a eauz, laqueilc pais les senateurs et li peuple de Romme rompirent, et
commandarent que Manchius, qui celle pais avoit fait, funst livreis auz
Numanchirs, et fut enssi fait; car ilh devestirent Manchius, et li loiarent
les mains et les pies , et le misent devant la porte de la citeit, ou ilh demorat
jusques a la nuit que les Numanchins ne 1'ostarent oncques; mains soy
moquoient de luy les Romans et Munanchiens. — Adont se sont les Romans
aux Munanchiens ' combatus plus de X fois que les Romans fuoient toudis
ches fortes gens. Et al d era in vient Pompilius 8 en 1'oust des Romans, et
soy combatit aux Munanchiens dedens VIII jours; si les disconfist si enti-
rement, que les plus fors et puissans * furent tous ochis, et ly remanant
soy retrairent en la citeit, et Font douse, et se sont ochis, ly uns d'espeez
ou de glaves, les altres de venien, et les aultres de feux. Et enssi fut la citeit
gangnie, et en furent pris lll m prisonnirs, entres lesqueils ilh avoit 1 qui
fut nomeis Tyresi , qui astoit I prinche mull saige et valhant.
Chis Tyresi fut enquis par Pompilion por queile cause les Munanchins
n'avoient leur citeit perdue aux promirs fois, et al dcrain, porquoy fut-
elle gangnie. Et Tyresi a chu respondit briefement : « je vos dy que con-
Deroncordeetdiscorde. » corde donne victoire et discorde donne la morl \ » — Et fut priese eel
citeit de Munanche I'an I11I C XCVIII , le III jour de may, qui astoit une de
plus fort citeit de monde, et altrement astoit nomee d'Espoy. A chest fois
Pompilion at destruite mult de citeis en Espangne, et oussi en at pluseurs
mises en la subjection des Romans par tregut. En eel an meisme oit une
grant batalhe en Sezile entres les serfs et les lieges ; si fut la envoiet Camp-
fulminiens 6 , li consule, a grant planteit de Romans, li queis en at ochis
XX ra hommes et s'en at cinquant mis en crois. — Item, Tan 1111° XC1X, oit
en Aisie et par tout le pays entor si grant multitude de lewestes 7 , qui devo-
Des lewestes.
1 Ce mot indique ici les habitants de la ville.
* Je m'attache a reproduire exactement le texte,
ct fais remarquer que la premiere syllabe est tan tot
Num, tan tot Mun.
3 Notre chroniqueur attribue, je nc sais pour-
quoi, a un pretendu Pompilius la destruction de
Numance, qui fut le fait de Scipion Emilien, le
destructeur dc Carthage.
* Je corrige d'aprcs le manuscrit B. Notre texte
porte par erreur : les plus fors et les plus fors.
5 El partant est elle gangniet, ajoute le manu-
scrit B.
• Ce nom cacherait-il celui du consul L. Cal-
purnius Piso?
7 Ce nom, parfaitement lisible, indique les sau-
terelles ou locustes, mot directement tire du latin.
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LIVRE PREMIER. 185
ront tous les biens; nient tant settlement les bleis, mains enssi les herbes
et foul lies, et les tenres rains f ont tout mangniet et consummeit ; et enssi
les ameires scorches et arbres sechoient et rongoient *. Si vient illuc I vent
qui les portat en Affrique, et la se sonl jetteez par le mere et par les riviers
desparse 5 de quoy ilh vient une si grant mortaliteit de gens ', qu'ilh mo- Mortaiiteit.
roient subitement par les voies 8 ; et en la citeit de Cartage en sont mors
VIH m hommes. — Item, Tan del transmigration de Babylone V c morut
Anthinoir, ly V e roy de Hongrie; si regnat apres luy son fis Pollux XVII Levi«roi<ieHongri<-.
ans. En eel an fist faire Vicute, li fis le due de Galle, unc pont de naves sor
la riviere del Roine, et le faisoit mult ferme; et avoit bien en son pays cent
et LXX m hommes d'armes eslus sens les altres, et sens les prinches qui
avoient leur terres qu'ilhs tenoient de luy, qu'ilh devoient servir, porquen
les Romans avoient grant desplaisanches d'eaux de leur poioir. Si envoia-
rent ou ilh edifioient leur pont Galliiens et Dometiens % II consules, a grant
gens. — Si avient que sour Fan V c etl,qui futli an del edification deRomme
VI c etXXVH,que ilh vinrenl enlres les ovriers sus le Roine, la ons faisoit le
point; chu fut le promier jour de septembre. Si avoient cent et LX hommes
d'armes, qui les devoient tenseir et wardeir; mains les Romans les ont sus
corut, et en ont ochis C et L hommes, et noies tous les ovriers; et se
prisent Vicuite, le fis le due, qui les gens d'armes gardoit, se leminarent a
Romme. — En chist an meisme morut ly roy Ector d'Athennes; si regnat
apres son fis Virgils, qui astoit mult poisans de corps.
Tantoist que ly roy Virgile fut coronneis, se li priarent ses prinches que Foi. so%».
ilh ly plaisist a prendre une femme \ de laquelle ilh posisl avoir enfans De roy virgile «i a-
qui tenroient sa terre apres luy. Et ilh leur respondit qu'il astoit prest del
prendre del lout a leur volonteit, se li querissent a luy apartinant une
bonne '. Adont desent les barons qu'ilh avoit uns roy en Sezile qui avoit
XII fis, dont les VI astoient senateurs de Romme, et les altres VI asloient
roys; et avoit III fillies : Alexandrine, Edena et Polena; laqueile Polena si
n 'astoit pais mariee, mains les aultres II I'astoient, car Alexandrine avoit a
1 Barnes. B. Branches. * Cauchies. B.
* Et arbres sechez rongoient. B. • Gallus et Domitius.
z J'iraprirae le mot tel qu'il est ecrit. Serait-ce 7 A prendre moilhier. B.
un nom propre?Ccla signifierait-il disperse*, epars? * Se li quesissent une bonne solonc li. B.
4 Teis mortoires des gens. B.
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184 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
•
maris le roy Trynagus de Hermenie, et Edena avoit le roy Castor de Scer-
vies \ — Quant ly roy Virgile entendit chu, si at demandeit qui est chis
roy ct comment at-ilh a nom, et les noms de ses fis. Adont parlat Gondris,
uns vilhars, dus de Palatie * en Athennes, et dist enssi : « Sires, ly roy de
» Sezile est nommeis Virgile, enssi com vos esteis, et fis Alienus 1'empe-
» rere de Gresse. C'est ly plus nobles et li plus puissans de corps, d avoir,
De xii iu ie roy vir- » d amis, de gran sancg et nation qui soit en monde. Et at XII fis dont ly
» anneis at a nom borgiles, qui est roy de Bugie, et est li plus grans clers
» qui soit en monde, car en son pays at escolles de toutes scienchcs. Chis
» at une femme mult belle * qui at a nom Geda, et est la soreur a Pompi-
» lion, le noble * donseal de Romme. — Ly secons fis at nom Grigoires:
» chis est roy de Bil le maiour, et sa femme est nomee Vexa 5 , la filhe le
» roy de Dannemarche. — Ly thirs at nom Castor; chis est roy de Pavie,
>» et n'esl pais mariees. Ly quars at nom Sartagonus de Cartage, et sa
» femme Polexa est filhe a roy de Dannemarche. Ly V e roy at nom Alienus
» de Valsidone, qui at a femme Feda, la filhe le roy de Mavaire; et li plus
» jouene est appelleis Paris, qui est roy de Bascle ' en Espagne, et at a
» femme Gelbora la filh le roy d'Egyptc. Ors aveis les VI roys, si vos diray
» les aultres. — Sachies que ly promirs des VI fis le roy Virgile de Sezile.
» qui sont senateurs, est nommeis Casdus, et les aultres apres : Ebrock,
» Virgile, Ybonus 7 , Sadoneus et Amadoneus. » — Quant ly roy Virgile
dAthenne entendit la grant nobleche de roy Virgile de Sezile, se li plaist
De Poiena m fiiie. mull a avoir sa filhe Polena a femme; se li mandat par 1 1 II dus, VIII conies
et XL chevaliers, lesqueiles le demandont al roy de Sezile en nom de roy
d'Athennes. Et ilh ly envoial volentirs, et ly roy d'Alhenne l'esposat selonc
sa loy. — Chis roy Virgile d'Athennes 6it puis de sa femme Polena VIII fis
lous chevaliers; et les aultres enfans, freres, soreurs orent oussi mult d'en-
fans de leurs femmes, et par especial li roy de Gorgiles de Bugie oit IIII fis
et XI fillies, enssi com vos oreis chi-apres. — En eel an meisme li roy Vir-
gile d'Athennes oit II fis a I porture % et furent nomeis Casdon et Ezoma.
En eel an oit li roy Grigoires de Bil unc fis qui oit nom Yboneus. En eel
1 Sans doutc pour Servie, commc a la ligne pre- s On peut aussi bien lire Bera.
cedente Hermenie pour Armenie. * Le pays Basque.
1 Plalic. B. Platee? 7 Yborius. B.
3 Chis al moilhier mult noble. B. * ./ une fie. B.
4 Le jovene. B.
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L1VRE PREMIER. 185
an oit ly roy Alienus de Valsidoine de sa femme Feda a une seul fois III fis,
qui puis viscarent tous plus de XL ans \ et furent nomeis Virgile, Amenus
et Paris. Item, Tan V c et II, morut I des senateurs de Romme, qui fut
nommeis Pallo, qui astoit enssi consule. Adont fut eslus Consule par les
senateurs de Romme li roy Grigoires de Bil, qui grant partie avoit a
Romme, car VI des senateurs erent ses freres, si en astoit plus fors.
A eel temps, assavoir Fan V c et 111, morut ly IX e Ptholomes * d'Egypte;
si regnat apres son fis Esdron X ans, et oit nom ly X e Ptholomes 5 . —
Item, en eel an, fut eoroneis a roy de Bil Ector, li fis d'onne des senateurs
de Rome, a cuy li roy Grigoire le donnat, liqueis regnat XXII ans. — Sor
1'an del transmigration de Babylone V c et I1II, furent rebelles cheaux de
Rains en Campangne del payer le tregut aux Romans, et encommenchat
grant guerre entre les Romans et eaux par 1'annortement * des Sycambiens,
qui aux Romans avoient hayme. Adont astoient roys de Rains Humbris et d« Humim et Ton -
Tongris , qui furent les fis le roy Hongris de Rains. Adont commencharent g " 8,
les Romans fortement a chevalchier sour eaux; et ly roy Grigoirs condui- Foi.5ir*.
soit les Romans, si com soverains consule; et avoit awec luy VI de ses
freres senateurs, et V roys awec leurs enfans 5 . Si avienl que les Romans et
cheaux de Rains orent batalhe le XIIII e jour de junne Fan V c et V. La fut
mors mult* de chevaliers et d'aultres gens; mains les Romans gagnont 7 , et
desconfirent leurs annemis. En eel batalhe fut ochis li roy Humbris; et ly
roy Tongris, son frere, s'enfuit et rentrat en la citeil de Rains, tres-forte-
ment navreis. La perdirent cheaux de Rains XL m hommes et leur roy. —
Adont retourna rent les Romans vers Rome, por le dobtanche des Sycam-
biens qui avoient faite alianche a cheaux de Rains por les Romans a des-
truire. Item, en eel an, fondat ly roy Alixandre de Judee une mult fort Le tour Bans.
tour sour une roche, et le nommat le tour Baris *, laqueile fut de si grant
forche que II hommes, qui y eussent asseis a mangier, le defendissent en-
contre tout le monde; et le fondat por le paour de ses gens, qui mult le
haioient por sa grant malvasteit et fellonie, qu'ilh sourjournoit sovent en
eel thour.
■ Qui puis visqucrent XL ans H plus jovenes. B. 5 J tout leurs enfans. D.
* C'est seulement ici que le copiste ajoute a ce * Grant planted. B.
nom le t, qui lui a fait defaut jusqu'a present. 7 Orent le melhour. B.
3 Et regnat VI ans, ajoute le manuscrit B. * Le tour de Baus. B.
4 ISenort. B.
24
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186 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Belle thour fut eel thour. de quoy Tytus l'emperere blamat les Juys, et
tient a recreans portant qu'ilh 1'avoient enssi guerpie; et dest que elle ne
fust ja prise par li ne par altre. — Chi roy Alixandre demandoit sovent a
ses gens par queile manire ilh poroit avoir pais a tons eaux ; mains ilhs
respondirent mult fellement que ilh seroit a eaux apaisies, s'ilh astoit mors,
et nient allrement; por chest response fist-ilh prendre par forche IIII" de
plus grans proidhommes qui fussent en la citeit de Jherusalem, et awec
eaux toutes leurs femmes et leurs enfans, et les fist ochire. — Item, Tan V c
et VI, morut Nabugodonosor, li roy de Dannemarche; si regnat apres luy
son (is Eneas XV ans. En eel an lesit a Romme uns gran clers qui oit a
PUto - nom Plato, portant qu'ilh astoit si gran clerc, et lesit Fart de rethorique.
Chi Plato ne fut mie le maistre Aristotle, mains chu fut ly maistre Cyceron
le philosophe. En eel an oit ly roy Gorgile de Bugie I fis de sa femme qui
fut nomeis Aristobes. — Item, Tan V c et VII assemblat ly dus Prians de
Galle et li roy Tongris de Rains leurs gens; si entrarent en Ytale et des-
truirent pluseurs citeis ; mains li roy Grigoirs leurs vient a lencontre agranl
orihiebataihe. gens. Si oit batalhe a eaux mult orible droit a Pavie, qui durat jusqua la
nuit; et furent les Romans desconfis, et si en fut mors XL m . Si s'en rale-
rent li remanans a Romme, et les Sycambiens revinrent vers leurs pays; et
fut eel batalhe le XII jour de mois d'avrilh l'an devantdit. — Mains quant li
roy Grigoirs veit qu'il astoit desconfis, si assemblat grant gens et revient
en Galle, si conquist Borgongne et Avergne et mult de pays, et vient jus-
qu'en Campangne.
A eel temps n'avoit en monde altres gens que sarasins, payens et juys,
el demoroient les juys seulement ' en la royalme de Judee et de Surie; et
d<* juys encimi* « s sen avoit enclous lv roy Alixandre entres les montangnes de Caspie* ou ilh
montangnes de Cas- , * •> -iiii
en at XLI1II regions, el sont enclouz don costeit de la haulte mere et de
la u I re de roches; et si at I porte que ons ne puet ovrir; et toutes les aultres
gens ' decha mere et dela astoient tous sarasins et paiens , si que cheauz * de
Galle et les aultres en l'isle d'Europ astoient payens. — Et li roy Grigoirs
vient a grant gens parmy Campangne, et ly dus Prian et li roy Tongris
1 Ce mot ne se trouve pas dans le manuscrit B. que les portes Caspienncs sont placets a peu pres
* Jean dOutremeuse rappelle ici une tradition au centre dc la chaine du Caucase.
fort connue au moyen age. Sa description semble * Tot li monde. B.
se rapporter au fameux defile de Dcrbend, tandis 4 Si que li Romains et cheaux. B.
pie.
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LIVRE PREMIER. 187
vinrent contres les Romans , et ordinarent leurs ba tallies ; et la commenchat
I de fort batalhe * qui fust oncques faite; et chest la promier batalhe qui
fuist oncques declaree. Si vos dirons comment chu fust. Les dois oust s'a- Ly p^mir gram b*-
. i i l i • i ^ uc ul 0I,e
semblarent li unc a (autre; la oit grant labeure de colpeir escus et hyames, declare.
et hommes et chevauls ochire a grant planteit. Tongris fut bons chevaliers
et hardis; si brochat vers Amandoniers, I senateur frere a roy Grigoire;
et chis le voit, se broche vers luy. Enssi la se sont ferus par teile manire,
qu'ilh ont les escus fendus et les lanches tronchonees; mains li senateur
fut mors et chaiit a terre. — Adont Tongris, qui astoit poisans, soy ferit en Foi. si *•.
1'estour si enforchiement que chut fut unc tempieste, et abatoit tous mors
tous cheaux qu'ilh encontroit, ne nuls ne l'oisoit aprochier. Et enssi faisoit
ly dus Prian de Galle et ses gens awec les Campinois, encontre les Romans
qui bien soy defendoient; et ly roy Grigoire faisoit mult de fais de cheva-
lerie, et fendoit ches tiestes et ochioit les Campinois 1 . Chi en orent les
Romans de peiour, car Tongris at ochis Godras le senateur el Herdant de
Puciez; mains que vault chu? la fortune leur fut contraire. — Car les Ro-
mans astoient tous tourneis al desconfiture , quant une estrangne hisdeur '
vient a cheval Tongris ', si qu'ilh soy mist al fuyr tout contreval les camps , DeI f uite ,e ™y Ton-
si fort que ly roy Tongris ne le pooit oncques tenir ne ravoir; car li che-
val astoit chals et bolans 5 , et fut espoenteis, se ne targat del fuyr jusqu a
la ntiyt. Et quant les Romans Font enssi veyut fuyr, si Font juppeit et
hueit.
Sycambiens furent adont mult esmaiies de eel fuite que Tongris faisoit;
et li uns dest que ilh est vaincus ou despereis, et li aultre dest : « An-
« chois at trahit et nous vult dechivoir, nous serons tous ochis. » Adont sywabieni dewonc*.
soy prisent tous al fuyr a une fois, et furent desconfis, et les Romans ont
repris cuer, se les ont cachies et en ochirent pluseurs 6 . — Et puis sont
les Romans a Romme raleis, por faire fieste a Jupiter de grant myracle
qu'il avoit faite, de chu qu'ilh avoit 7 encachiet le roy Tongris de la batalhe
apres chu qu'ilh avoit le roy Grigoire navreit si vilainnement; car Tongris
jostat a Grigoire si fort qu'ilh chairent ambdois a terre, et le ferit teile cop
1 Et la commenchat li unc de fier batailhe. B. 4 Vient Tongris a son destrier. B.
' Les Campinois et Sicambiens a grant mer- * Chaud et bouillant
telhe. B. • Les ont cachies et tueis a planteit.
* Frayeur. Hideur dans Roquefort. 1 Quant ilh avoit. B.
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188 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
de son espee, quant ilhs furent releveis, qu'ilh li copat 1'orelhe el le masal •
et le johe tout jus; si fut emporteis en I casteal en Tynpol, enssi le nom
Lv dus Pmn coro ons. — Et ly dus Prian en astoit mult corochies, et manechoit fort Tongris
qu'ilh en perderoit la lieste. Quant ly roy Turnus qui astoit ayon de roy
Tongris — car ly roy Hungris de Rains, qui fut peire aux roys Humbris et
Tongris, oit a fcmme la filhe le roy Turnus Andelis — quant ilh entendit
dies manaches, si prist congiet et se soy partit; car ilh ne poioit oiir ches
paroles, et ne soy voloit corochier a due Prian, car ilh li astoit trop forte.
— Et Tongris s'en vat fuyant, et Turnus le vat sywant; si le rachusut al ma-
tin a casteal de Gastinois *, et li at racompteit le fait et les manaches del due
Prian; de quoy Tongris at teile deulh qu'ilh soy fuist ochis, quant Turnus
li tollit son espee et li conselhat qu'ilh allast demoreir en alcuns lieu, tant
que ly dus Prian fuist refroidies; et li dest que ilh feroit la pais. Et Tongris
le creit et desquendit en Allemangne, et Turnus awec ly ; si allarent tant les
boscaiges qui astoient adont parmy les paiis que ons nom maintenant Hes-
bain, qu'ilh trovarent une mult belle plache alqueile la mere batoit, et y
amenoit cascon jour gran planteit de peisons 5 . — Quant ly roy Turnus le
veit, si dest : « Veichi une plache qui est attempree por habiteir gens, et
» siet en crais* pays; bon y seroit del faire une citeit par ma foid. » Et
Tongris dest : « Je y feray faire une citeit; anchois qui passent XV jours
» sierat commenchie, si plaist a Jupiter. »
DcTongre. Tongre fut commenchie a fondeir, et fut jettee la promier pire del fonde-
ment sor Tan del origination del monde V m C et XVII , qui fut li an del
delueve Noe II m VII1 C LXV, et li an del nativiteit Abraham mil IX C et
XXX1III ans, et fan del nativiteit Ysaac M VIII C el XXXV, et Fan del na-
tiviteit Jacob M VII° LXXII1, et l'an del nativiteit Joseph M VI° IIII" et V,
et Fan de la destruction de la grant Troie M II1I" et XVIII, et Fan del co-
ronation le roy David IX C XCIII, et le deraine annee de cent et LXXU
olimpiade, et Fan del coronation Romulus sicom emperere VI C et LXIII,
Foi. 54 r«. et Fan del edification de la citeit de Romme VI C et XXXIII, et Fan del
1 Mat ale, qui signifle ordinairement joue, doit dans le departement de Seine-et-Marne, en France,
designer ici la m&choire. Voir Grandgagnage , 8 Une mult belle plache la mer a li battant , qui
Diet. etym. de la langue wallone. cascon jour venoit a flu grand planteit de poisons, ft.
1 Sans doute le Gfitinois, englobe aujourd'hui * Crais poor eras, gras.
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LIVRE PREMIER.
189
transmigration de Babylone V c et VII le XHI e jour de mois de fevrier, qui
astoit le derain mois de Tan. Adont ful Tongre commenchie a edifiier par
VI C ovriers que Tongris avoit mandeit por les melheurs de pays, et qui
toudis onyement 1 ovroient par tous temps; les carpentirs et les machons
targoient * trois mois, et dedens chu ilh aparelhoienl leur ovraige, assavoir
novembre, decembre et jenvier, por ovreir a la saison, sicom de talhier
pires, faire mortier et glutineir 8 ; et se misent bien VI ans anchois quelle
fuste parfaite. — Mais al chief de 1111 ans se soy fist Tongris coronneir a roy Tongm- «*o™^ *
de Tongre, et Tapellat enssi apres luy, anchois qu'elle fuste parfaite. Se le
coronnat le roy Turnus, qui astoit son ayons; si oit la mult grant fiesle et
sollempniteit, puis soy partit ly roy Turnus, si sen ralat en sa terre en
Galle '.
Ly roy Tongris avoit fait jetteir en la belle plache ou Tongre seioit', avoit
tout promeir fait par les ovriers circuier la circuit et le tour de la grandeur
de la citeit. Si ful troveit qu'elle tenoit XXX miles de circuitude dedens les
murs, et sens compteir ens les superbiens 6 , chest a entendre les forbos
stesans al defours des mures ; elle tenoit ortant de grandeur y ne sen falloit
que XII miles que elle ne fust del grandeiche de Romme. — Et dist Plinius
le philosophe en ses croniques qu'elle astoit plus belle, et plus gratieux, et
de miedre edifis, et plus gentis que Romme n'estoit. Et parole Plinius de
une fontaine qui astoit a Tongre dedens les mures de la citeit, et qui astoit Dei fontaine de Ton-
bien aournee d'or et d'argent, et bien enfermee 7 de pieres prechieux, qui
faisoit aparamment myracle et garisoit de toutes maladies de monde, se
mort n'y astoit, queilconques por boivre de ly; et se ly maladie astoit de
navreir ou de plaies, ons le lavoit del ay we, si garissoit legierement. — Et
asloient les mures halt de L cubites plantiveusement 8 , et espesses de
XX cubites. Si avoit a I tour XX portes aux entrees de la citeit; et avoit d« port** de Ton^e.
1 Tous ensemble, egalement. Onniement dans
Roquefort
* Targer, qui est rest& dans notre wallon et si-
gnifie geneValemcnt retarder, rtttcr en arriere, a
ici le sens de suspend™ son ouvrage.
• C'estra-dire faire du gluten, travailler a quel-
que ingredient agglutinatif.
4 En Franche. B.
s II semble manquer ici un regime direct, mais
les deux textcs etant con formes % jc n'ose proposer
une correction. Jetteir a pcut-£tre un sens absolu,
mais dans cctte hypothese, en serait de trop.
• II n'y a pas de doute sur le sens de ce mot,
qui doit equivaloir a sur biens ou biens au-dessus.
7 II s'agit sans doute d'un bassin etitonre dc
pierres precieuses.
* Pour plantureusement.
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190 CHROMQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
a tour des mures LX grosses thours et mult fortes, et tenoit cascon par de-
Deicasub. dens II pies de largeche. Et si avoit XII casteals grans et puissans et mult
fors desus les XII maistres portes de la citeit, desqueiles cascon casteal
< con tenoit demy bonnier de porpris. — Item , ilh y avoit IIII palais de roys a
DezpaUis. IIII costeis d'orient, d'occhident, de medis el de septentrion, et y avoit
Dex temple*. trois temples ' : ly unc de Jupiter, I'autre de Mars et le thier de Venus; et
tenoit ly marchiet VI bonier plantivoisement. Et passoit parmy le marchiet
la mere; si avoit tout al delonque, sour la rivaige decha et dela, murs hauls
de LX pies, et des aneais de fer alachies dedens les mures, la ons arivoit,
lez naves venantes la, sour mere. Et avoit XII posliches es mures decha et
dela, par ou ons alloit al rivage. — Apres astoit asseis pres de rivaige une
grosse thour et grant, ou les juges seioient; et al encontre avoit une altre
thour et uns gran palais * ou les gens d'armes habitoient. Et y avoit beals
plains 8 par la citeit, qui puis furent mainsonneit. Et y vient demoreir a
chesti fois, de borgois nobles et ignobles, jusques a la somme de LXX m horn*
mes. Ilh sembloit que les maisons de la citeit fussent casteals.
Tant de nobles edifis oit en la citeit, si com racompte Plinius, et tant de
mervelhes, que ons n'aroit mie racompteit en long temps chu qu'ilh y avoit;
et tant que chu astoit la soveraine citeit de monde de bealteit et de gentis
edifi cesses. Et fut de tout Allemangne, hault et basse , la principaul citeit el
capitaine, et compteit une des trois plus grant citeit de monde * et la plus
belle des trois : ^'astoit Romme, Cartaige et Tongre. Romme fut li plus
grant , Carlaige fut la plus annee, et Tongre fut la plus noble. — Ches trois
Foi.5t ▼•. citeis furent les plus grandes de monde al temps que Tongre astoit, car la
citeit de Nynyve, que ly roy Nynus fondat, et la citeit de la grant Baby-
lone, qui furent les II plus grant de monde, astoient adont destruites, se
ne les comptoit-ons mie. Nous ne parlerons plus de Tongre tant com aors \
car ons le fail jusques a tant qu'eile serat parfaite; et parlerons d'aultres
Dei guerre des Romans mateires. — Item. Fan V c et VIII, envoiarent les Romans Bestiol le consul
encontre Jugurthan. % 1 7
a grant gens el royalme de Numydie combaltre a roy Jugurthan , portant
qu'ilh avoit ochis son frere qui astoit bons amis aux Romans; mains, quant
1 Y avoit III palais ou temples. B. * Pour plaines.
1 Et al droit opposite astoit une altre lour et 4 Une des trois maionr citeit de monde. B.
palais grande. B. 5 Maintenant, a cctte heure.
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LIVRE PREMIER. *9i
ilh fut la venus, li consul ne se voult pas combaltre a Jugurthan, anchois
fist pais a ly, et si prist grans biens dor et d'argent et de joweais; iaqueile
pais fut par les Romans derote f etanychilee. Siy fut revoies Cecilien Alar-
cellien *, qui soy combatit a Jugurthan par pluseurs fois, et le desconfist,
et pilhat tout sa citeit et le departit a ses gens; et prist Jugurthan et ses
II (is, et les fist loiier aux cbwes des chevals et troteir apres luy jusques
a Romme, ou ilh fut mis en prison, en Iaqueile ilh soy estrenglat. — En
eel an meismes Elminus, uns borgois de Romme, a wee sa femme et sa Mem>ihe.
lil he alioit de Romme en Puihe; et ly alumure 8 consuit sa filhe, si morut;
et gisoit despoulhe de ses vestimens tout nue, et ses vestimens gisoient
d'aultre part sains et entiers , dont chu fut grant mervelhe del veioir.
Item, Tan V c et IX, morut ly X° roy Ptholomes d'Egyple; si fut roy apres
luy son fis Palamedes, liqueis fut nommeis Ptholomes ly Xl°, et regnat
XXXI 11 ans. — Item, Fan V c et X, assemblat ly roy Grigoirs et Guen
Milius, consules de Romme, grant gens et vinrent contres les Cymbre,
une nation de gens tissons '.
Sachies que les Romans aloient combattreCymbres en leurs tissons pays,
et astoient rebelles aux Romans, car ilh astoient aloyes a Sycambiens; si
les conduisoit Ambrones, ly fis al due de Galle; el astoil awec ly Alixandre,
son frere. La oit grant bataihe el forte et de grant gens; mains enssi qu'ilhs
soy combattoient, vient ly dus Prian derier les Romans a XX m hommes. Bauibe de* Rom» n »
Si en ochist une grant partie, ains que les Romans FaparQussent. Et al SJn" re e * )m
derain, quant ilhs se sont apercheus, si soy misent al fuyr com desconfis.
Et fut mors des Romans 1111** milhes hommes; et Guens li consule y fut
mors, et awec li ses II fis; et enssi y perdirenl les Sycambiens et les Cym-
brins XL m hommes \ — Adont sen est ralleis fuant ly roy Grigoire a
Romme, a pou de gens, et rentrarent en Romme Ife XIX e jour d'avrilh, Fan
V c et XI, et cloirent les portes, car ilh astoient si desconfis qu'ilh avoient
paour que les Sycambiens et les Cymbrins ne venissent apres eaux sicom
ilh fisent, car ilhs soy remetirent ensemble, et furent plus de II C milhes
hommes qui ne cessont d'alleir; se vinrent a Romine. Et quant ilh vinrent
1 Pour deroutie, rompue, brisce. doit avoir le sens de foudrc.
* Cecilien Mtlellius. B. * Pour tihons, cest-a-dire, thiois.
* Etplut6t aloumirt, qui existc encore en wal- • Et le fit du due Priant Ambrones, ajoulc ie
Ion. Ce mot signifie proprement eclair; mais ici il manuscrit B.
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192 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
la, si fa i so it sy froit del fort jalee qu'ilh faisoit, que les gens moroient de
froit; si soy affluboient 1 tout jour. Mains Grigoire et Catuliens consules
alarent pasieblement sus corir leurs annemis, si que anchois qu'ilhs fus-
sent ordineis furent desconfis. Et la en fut mors C et LXX m , que mors que
Tcmpie nuniicum. pris ; et por eel victoire fisent les Romans, a memoire perpetuel, le temple
myrificum, e'est li temple de mervelhes, que ons apelle maintenant le
Cymbrun *, qui siet asseis pres de INostre-Damme le Maiour, en mont de
Exquilien. — Item, Tan V c et XII, oit ly roy Grigoire de part cheaux de
Galle deflianche especial, faisant mention qu'ilh as to it bien voire quilh
astoient awec les Cymbrins devant Romme, ou ilhs avoient esteit train's,
et en trahison assalhis et ochis presque tous ; mains des Sycambiens n as to it
mors que XI m 8 , « porquen nous avons grant poioir, et vowons a Dieu que
» nos vos coperons les chiefs, et deslruirons Romme, se nous poions. » —
Pour eel mandement mandat li roy Grigoire tous ses freres et ses amys , et
si leur diet le mandement; si fut acordeit portant que la diffianche astoit a
roy Grigoire, si que luy et nient consule de Romme, ilh devoit maintenir
la guerre par luy. Se li pristat cascon d'eaux XX m hommes; mains quant
Foi. 53 r«. ly dus Prian soit les novelles que ly roy Grigoire avoit teile peuple, ilh
dest que ilh ne ly avoit point escript le terme de la batalhe; si quilh ne
voloit mie encor commenchier. Et enssi remanit la choze longement.
En eel an meisme oit li roy Gorgile de Bugie III filhz de sa femme, a
une seule porture, qui furent nommte Virgilia, Roboana et Saledena.
Tongre fut parfaiie. Item, Fan V c et XIII , fut Tongre parfaite; et fut le promier jour de may
sollcmpnisie et publiie que li roy Tongris I'avoit nommee Tongre apres son
nom. Et a la fieste portat Tongris coronne, et tornoiont tous les saingneurs
qui la furent, assavoir : le roy Turnus, le roy Pollux, le roy Hongrois, le
roy de Dannemarche Eneas, le conte de Flandre, le conte de Loherainc
que ons nommoit adont Germaine, le conte d'Altimont, et tant d'aultres
nobles barons qu'ilh ne sont nient a nombreir. — Et \h publiont ly roy Tur-
nus et li roy Tongris, et envoiarent partout messagiers, que tous hommes
sieront frans, qui venront habiteir dedens la citeit de Tongre par HI ans,
1 S'affaiblissaicnt. Roquefort donne Tadjcctif ' II est question dc cct edifice plus haut, p. 67.
flebe, et nous avons en wallon fid we cl flaitwc, qui * lei vient un discours dont le commencement
ont le mdme sens. scmble manquer.
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LIVRE PREMIER. 493
sens reclameir de trestous servaiges; et s'aroient hosteils, et manandies, et
terres por gangnier et a eaux a governeir. Adont y vient teile peuple que ,
anchois qu'ilh fuist passeis III ans, fust li mies peuplee citeit qu'ilh euwist
en Europe ilh y vient bien demorer ains les III ans plus de LXX m hom-
ines '. Enssi fut Tongre peuplee. Et Tongris en fut roy XII ans tant seule- u *™* [ * r roy Tol ~
ment, et ly roy Turnus porcachat forlement le pais Tongris a due Priant;
mains Priant ne le voloit prendre a excusanche nulement, et le nommoil
trahitre et qu'ilh le penderoit s'il le tenoit. En eel an fut mult grant morta-
lileit* en parties d'Asie et d'Egypte. Item, Fan V c X1III, oit encors li roy
Gorgile de Bugie II fillies, qui furent nomeez Alexandrina et Phelomena; et
astoient toutes de sa femme Geda, le soreur Pompilion de Romme. — Item,
Tan V c el XV, prist Alixandre, le roy de Judee, une grant maladie awec
laqueile li mixtarent les fievres quartaines. Se quidat que eel maladie ly
fust priez 8 , portant qu'ilh avoit son corps repoiseit trop longement et pou
travelhiet en armes, car ilh avoit passeil longtemps qu'ilh n'avoit porteir
armes.
Adont s'apensat ly roy que ilh yroit en armes. Se commanchat a guer-
roier et a porteir armes, por le maule a travelhyer; mains chu ne ly valut
riens, car plus enforchoit toudis le mals et tant que ilh en morut. De la- DdmortiyroyAiixan
queile mort les Juys ne furent mie dolans; ains en furent fortement joians,
car ilh astoit et avoit esteit, tout le temps qu'ilh avoit sour caux regneit, trop
felles et crueux. — Quant ly roy Alixandre astoit malade et gisoit a lit de
la mort, et ilh perchuit bien que ilh moroit ', ilh ly ramembrat des grant
malvaiseteit que ilh avoit fait, enssi com dit est, a son peuple; si soy dobtat
que ses enfans, dont ilh en avoit II de Salite, sa femme B , assavoir : Hircans
et Aristobles , ne posissent estre hays por son meffait. Portant ilh apellat
sa femme Salite, se li recommendat la terre de Judee, a gardeir et main-
tenir la royalme, tant que ses dois fis fussent en eiage de tenir terre '. Et ilh
savoit que sa femme si saige damme astoit, et de peuple si fortement amee
et presie, que enssi sierat la choze bien. Enssi fut la royne damme de toute
la terre de Judee, et le gouvernat mult loyalment par 1'espause de IX ans
1 Ilh y oil bien LXX m homines ains les trois ans 4 QtiiUi le eonvenoil morir. B.
drmorant. B. » Dont ilh avoit II fis de sa femme Salite. B.
* Fut unegrande pestilenche de mortoire. B. • Sur ces fails, voy. le chap. 23, livre XIII de
* Prononccz prise. l'histoire de Flavius Joseph.
25
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i94 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
que ses enfans furent en eaige , qui fisent puis mult de mervelhes et de
D "e V Fia e d VIIt conle mau ' s ty uns * 1'autre, en ssi com vos oreis chi-apres. — Item, Tan V c et
XVI en June \ morut Sargondus le Vl e conte de Flandre ; si regnat apres
luy Sartagondus son fis XXX ans. Item, en eel an, le XXVII jour de
Caion ie phiiosophe. mois de fevrier, fut neis Caton, uns gran poete et philosophe. Item, Tan
V c et XVII , le XIIII jour d'avrilh , morut Pollux li Vl e roy de Hongrie.
Chis avoit II fis et I filhe; si donna t a sa filhe la citeit de Blastet awec Sagon
son marit qui astoit Grigois, et la damme astoit nomee Zelada. — Item, ilh
u demion de Hon- ordinal a son anneit fis Pollux estre roy de Hongrie, et a son aultre fis
Foi. 53 ?•. Anthenoir estre prinche deMonluisant. Enssi fut dividee et departie la terre
de Hongrie, et regnat chis roy XXII ans. — En cest an assemblat li roy
Grigoire, consul de Rom me, LX m Romans. Si vient en Galle, si commen-
chat fortment a ardre le pays; mains quant li dus Prian le soit, si assem-
blat ses * gens, et mandat a conte de Flandre qu'ilh ly venist servir; et ilh
vient a XL m hommes, et ly dus Prian en assemblat XL m et plus. Si vient
sus le Royne, ou ilh trovat les Romans; si les corut sus, qui laidement
Romans desconCs sus furent desconfis: et la furent des Romans ochis XL m . et ly remannant
!e Royne. , . £ 7 J
s enfuirent.
Nos vos deviserons la choze clerement, jasoiche que les croniques en
parollent obscurement 8 . Quant li roy Grigoire fut desconfis, sicom diet est,
si soy refuioit vers Romme, si encontrat Elymant, le consul, atout LX m
hommes qui venoient por aidier le roy Grigoire en sa guere; car anchois
que Grigoire soy partist de Romme por venir en Galle, ilh avoit mandeit
tous ses freres por venir awec luy por la grant dobte qu'ilh avoit des
Sycambiens. Et puis ilh n'attendit point ses freres; si vient avant vers
Avergne, plus en cha sour la riviere del Roine ou ilh fut desconfis \ Et sour
Tan del origination de monde V ra cent et XVII, par I dymengne, en mois de
may, qui astoit li an del transmigration V° et XVII, et enssi qu'ilh s'en-
fuoit com desconfis , si encontrat Elimant et V roys freres a Grigoire et des
Dei roy Grigoire etde senateurs de Romme awec LX m hommes, droit a Salengne \ — Quant Gri-
goire aparchut ses freres, se les festiat, et leur racomptat tot son mechief.
Quant ses freres l'entendirent, se li ont respondut qu'ilh s astoit trop has-
1 Le detain jour dejune. B. * Detcondis par erreur dans°notre texte.
* Sens dans le manuscrit. * Salernes, dans le departement du Var, en
* Ob$curent par erreur dans notrc texte. Fraoce?
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LIVRE PREMIER. 195
teit, car les Sycambiens ne sont mie gens com les aultres; mains nient-
moins, s'ilh plaist a Jupiter et Mars, ilh sierat bien vengiet. A tant se sont
trais vers Galle. — Ors vos dirons de roy Turnus qu'ilh fist. Quant ilh en-
tendit que les Romans retournoient, ilh at tantoist mandeit Tongris qu'ilh
vengne a XX m homme siervir le due Prian et sorcorir sa terre, et son corps
represented a due Prian. Quant Tongris entendit le mandement de son
ayon Turnus , se vient a XX m hommes. Et la astoit ly dus Prian et Alixan- Grunt batalhe.
dre son fis, et li conte de Flandre, qui astoient trais aux champs droit
en Bretangne; et se sont rengies les Romans contre les Sycambiens. Si se
sont tout enssi, sens ordineir batalhes, sus corns; mains les assemblies * des
lanches fat si grief, qu'ilh y oit de cascon partie X m d'abatus.
Apres les lanches sacherent les espeez. Si soy tuent de grant cuer, et ly
dus Prian coroit par la batalhe, si n'encontroit homme de ses anemis qu'ilh
ne l'ochist ou affolast : ilh faisoit plus de fais d'armes que lez plus jovenes,
et astoit tant vies qu'ilh rordissoit ' tout. Alixandre son fis et ly roy Turnus
et li conte de Flandre y fesoient mull de fais d'armes. Et les Romans main-
tenent bien leur estat; ly roy Grigoire et tous ses freres et Elymant, le
consul, et leur gens soy deffendent mult valhamment. Ly dus Prian at ochis
saingnour Gombart, uns senateur, et Androc le prevost de Boliart. La est
sorvenus li roy Gorgile de Bugie; si firt le due Prian, si qu'ilh li copat le
neis et la balevre 8 , et 1'abatit tout a terre. — Quant li dus se sentit enssi
navreit, ilh at ferut Gorgile, si qu'ilh ly rasat les chevels, et li ochist son
cheval, si chait a terre; mains tantoist ilh resalhit sus, et ses freres Font
socorut et remonteit. Adont fat corochies ly roy Grigoire, quant ilh veit son
frere anneit a terre; se dest: « Je vowe a Dieu Jupiter, se je soy a chest fois
» desconfis, je ne moie armeray jamais; car je voy que nos en avons del
» piour, ne jamais ne seray consul de Romme. » Puis rentrat en l'estour, et
commenchat a ferir si despereement, qu'ilh at les Sycambiens reculeis. Ly
dus Prian le voit, si escrie ses hommes; mains chu ne li vault, car toudis
reculent vers le bois por fuyr en bois a salveteit. — Atant vient a ferant ' le
roy Tongris a XX m hommes, qui se fiert en la batalhe. Tongris at aperchut
Grigoire , si broche vers luy, si le connuit bien * et le haioit plus que nule
1 Assemble a ici le sens de conflit, combat. balevre le sens de menton.
• Sans doute pour roidissoit, devenait roide. * A ferant, e'est-a-dire d cheval.
* Le neis et alabalevre. B. Roquefort donne a * Tongris at choisit Grigoire* , si broche vers hay
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196 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
aultre, se prent une lanche et vient vers luy; la oit fiere joste, car ilhs ont
M.54r«. fend us leurs escus, et ont brisiet leurs lanches, puis ont trait les espeez,
si se sont assalhis asprement, car ilh sont convoiteux de ochire li uns l'autre.
La se sont mains colps ferns et donneis , car ilhs astoient * bons chevaliers;
comment Tongris toat mains en la fin at Tongris ochis le roy Grigoire et jettat sa tieste a tout le
hayme a terre. Aussitoist qu'ilh chaiit. le Romans furent desconfis, et
Tongris prist son chief, se Tat fichiet en une lanche, se l'envoie le due Prian.
Ly roy Tongris At ochis le roy Grigoire; si at envoiet le chief al due
Priant, puis at regardeit al treversant ' de la batalhe; sy voit le due Prian
que les senateurs avoient pris et loyet, et 1'emynoient a prisonirs. Adont
les corutsus li roy Tongris; si at ochis Gondras, Gombart, Juchart, Fle-
gons, Ydoneas, Cossadroch , tous senateurs, et mult d'aultres ochist, et les
jettat tous a terre 8 . — Et puis at remonteit le due Prian, et li presentat le
tieste le roy Grigoire et dest : « Sires, veis chi le chief le roy Grigoire vostre
» annemis, de quoy je Tongris de Rains vos ay vengiet. A lautre fois par
» mon cheval furent vous gens desconfites : chu ne fut mie par mon culpe ,
» mains le defalt de mon cheval que li vief dyable conduisoit, car oncques
» n'y pensay folhe 4 ; et de chu je suy preste del jureir sour sains. » Quant
ly dus Prian l'entent , si en oit grant joie , et dest : « Sires Tongris , Jupiter
» vos donne joie; je vos veulh tenir por excuseit, et a veis bien amendeit
» le meffait de vostre cheval. » — Atant se sont departis, et ont rassalhis les
Romans. Adont Tongris at ochis Galadu et Ebroch, et tant des altres qu'ilhs
se misent al fuyr; si lassent la grant nobleche des mors et grant avoir dor
et d'argent, de pieres precieux et d'aultres joweals, car la ilh fut mors li
roy Grigoire et XXXVIII senateurs, desqueiles les VI astoient freres a roy
Grigoire, assavoir sont: Casdus, Ebroch, Virgile, Yborus et Sadoneus et
Amadoneus. Et quant ilhs revinrent a Romme, ilhs fisent des noveals sena-
teurs del sane le roy Grigoire , et en y oit pluseurs 5 . Puis fut eslus consul ,
en lieu de roy Grigoire, Pompeyon I noble prinche de Romme, la cuy
et encontrat Godras une senateur. II Vat ochis, puis ne se trouve pas dans le manuscrit B.
en ochist tant et gete a terre, que che astoit mervelhe * C'est-a-dire ta valeur d'une feuilte, pas du
de veoir. Ly roy Grigoire le voit venant vers luy, si tout, ^expression serai t equivalente a riens nee qui
le connut bien. B. apparait souvent dans le poemc de Godefroid de
1 Event. B. Bouillon. Voir le glossaire de Gachet, v° Riens.
8 Sans doute pour au trovers. * En y oit grantment. B.
* Ce qui precede depuis : et mult d'autres, etc.,
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LIVRE PREMIER. 197
soreur Geda avoit a fern me li frere le roy Grigoire li roy Gorgile de Bogie ,
ly peire Virgile qui fut si gran clers. l« p*«-« virgiie
Chis Pompeyus fut XXV ans consul, assavoir qu'ilh astoit 1 an consul, et
Fautreapres non, et le thier le rastoit, et le quart non. Quant li roy Gor-
giel * soit que Pompeyon son seroige astoit soverain consule de Romme ,
sicom avoit esteit son frere li roy Grigoire, adont apparelhat-ilfrmull de
naves, et mo n tat luy et Geda sa femme, qui astoit enchiente de 1'enfant
Virgile; et s'en alat a grant chevalerie a Romme, ou ilhs mynarent grant
fiestes. — En eel an meismes, car ilhs sorjournarent illuc II ans, fut neis
Virgile qui fut si soflisans clers , assavoir l'an V c et XIX , le VI C jour de may, vir g u« fut nci 5 .
et fut neis en palais a Romme. — Item, Tan de la disconfiture, s'en ralat a
Lutesse ly dus Prian, ou ilh plorat la bonteit le roy Grigoire , jasoiche quilh
ly ewist faist maintes desplaisanches ; et disoit, en jurant ses dieux , quilh
astoit la flour de tous les chevaliers dont ilh avoit oiit parleir. Et n'y oit
adont si orgulheux, quilh ne plorast de piteit. Si ont pris sa tieste, el la fist
li dus Prian une grant gentilheche, car ilh fist ensevelir le corps Grigoire, Mem-ihr.
et fist le chief encasseir en or et en argent et prechieux pieres de grant
valeur, puis l'at revoiiet 1 a Romme. De chu ont faite les Romans grant
fieste, et dient entres eaux : « Et qui quidasse Prian si proidhomme et loial
» qui nos at renvoiet le chief de nostre consule enssi aournee, qui astoit
» l'homme en monde qu'ilh haioit le plus! » Pompeyus li consul devoit ra-
sembleir gens por revenir destruire Galle, mains ilh at sa pensee muweit \
car celle grant bonteit et cortosie li roistat la felonie de son cuer. — Quant
tout chu fut faite, Tongris li roy soy departit de Lutesse par le greit de
due Prian , et en allat a Rains; la Font ses barons mult fiestoiiet, et li prient
que ilh demeurt awec eaux et les governasse sicom leur saingnour. Et ilh Foi.54%».
leur respondit qu'ilh avoit une aultre regne a governeire ; mains ambdois
les governeroit si bien com I loial saingnour doit faire. Et puis soy parlit
et en rallat vers Tongre.
Ors revenant a nostre matere , disl li compte que, l'an V c et XX , envoiat
li peuple des Romans Luchien Cornelien consules contre les Pithences *
(Marsi Peligni) } qui avoient esteit par mult danneis en tregut des Romans,
1 Plus haut Gorgile. * Besplitict. B.
* Tramis. B. 4 Sans doute les habitants da Picenum.
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m CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
et adont requeroient alcunne liberteit, porquen I crudeile guere en est
suscitee, qui durat III1 ans. Et al V e annee ilh prisent fin, et furent remi$
Mcrrdheui iigncs en servaige com devant. — En eel an meismes apparurent des crueux si-
gnes, car en la par lie d oriente ilh apparut I feux tout reon, qui oit grant
resplendeur en ckiel vers Aretine; et dehours des pains, quant ons le fen-
doit, si coroit sane fours, com chu fust d'unne plaie de corps d'hommes; et
puis par VII jours continueils ilh chairent pieres et testeals l de chiel awec
sclaides, et devastarent grant ptrtie de chest terre; et sy veit-ons flammes
issir de terre en pluseurs parties mult oribles, et monteir en hault a la
region de feu qui siet sus l'aire enssi qu'ilh vosiste monteir a chiel, por
laqueile toutes les biestes mues ', qui astoient aconstummeit del demoreir
et de vivre entres les gens, issirent de leurs estaubles, les alcunnes sont
corues es montangnes, et les aultres aux bois se sont absconseeis. Et les
chiens oussi, qui sens les hommes ne puetent vievre , aloient ruweir ' awec
les leux, et huleir' par les cachies', bois et montangnes. — Et quant les
VII jours furent passeis, si fut troveis par les clercs que chu segnifioit crueux
batalhes entres les cifains de Romme. Et enssi en avient, car en chest an
meisme vers la fin, assavoir en mois de jenvier, commenchat chest guere
Dei guerre entre Ma- entres II consules, assavoir Narius et Scillus. Et en eel an meisme est com-
menchie la guere entres les Metridaciiens del ysle de Ponti •, et Scillus le
consul qui astoit aleis en Aisie, oil ilh as to it envoyes de part les Romans.
Si laisat Asie et vient en Campaine en Ytalie, el la est absconseis par alcuns
jours; el Mariens l'autre consul, a cuy ly debas astoit, desiroit que on Fen-*
voiast combattre contres les Metridaciiens, la ons avoit envoiet Scillus,
dont ilh astoit yreis et fortement destobleis. — Adont s'avisat Scillus, se
vient a Romme atout ses gens d'armes et por combattre contre Mary ens. Et
(antoist de plaine venue ilh at ochis Sulpityens le consul qu'ilh encontrat ,
qui astoit del ayde Maryens. Et Maryens soy mist al fuyr; mains apres soy
comprisent 7 ensemble tant de fois , que chu fut mervelhe des gens qu'iths
1 Tessons. Cela rappclle le monte Testaccio de * Crier. Roquefort donne le substanlif hulSe.
Rome. * Cachie, en liege&s, signifie chauuee, route.
* Muettes? Mais qu'entendre par beUes tnuettes ? • Inatile sans doute de faire remarquer qu'il
s Roquefort donne a ruveir le sens de prier. s'agit icide Mithridate, roi dePonU
Pour quil ait ici cette signification, il faut sup- 7 Roquefort donne compretser, presscr, tour-
poser a Jean d'Outremcuse lintention de plai- menter, signification qui convient asses bien id*
santer. Le manuscrit B a ecrit ruyre.
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LIVRE PREMIER. 199
ochioient ly 1 l'autre cascon jour. — Item, 1'an V c et XXI morut Eneas,
le VIII 6 roy de Dannemarche; si regnat apres son fis Audax XVIII ans.
En eel an meismes soy partit de Rom me ly roy Gorgile de Bugie, se
montat sour mere awec sa femme et son jovene enfant Virgile: et li prinche
Pompeyus, son seroge, le con voiat jusques en son pays a LX m hommes
d'armes, portant que ly roy Gorgile astoit hays de roy Bronchus de An- De roy Bronchus.
thioche. Et cesti conduit ly fut profitauble ' , car ilh trovat le roy Bronchus
ardant et destruant * son pays. Se le monstrat a Pompeyus , en deplandant
de roy Bronchus a li sicom prinche de Rom me, qui doit subvenir tous les
amis des Romans contre leurs annemis. — Et Pompeyus jurat Jupiter, en
cuy ilh creioit, qu'ilh serat amendeit. Atant vinrent en Bugie; mains, quant
Bronchus le soit, si sen ralat en son pays; et Pompeyus sen allat apres, et
jurat qu'ilh ne retourneroit , se l'auroit destruit. Enssi soy partirent le roy
Gorgile et Pompeyus, et nagont tant 8 qu'ilhs vinrent en Antyoche anchois
que ly roy Bronchus y revenist ; car ilh astoit par I tourment de mere
eslongiet son chemyn. Si trovarent les portes oviertes, et entront ens de
plaine venue; si Tat conquesteit et faile subgite aux Romans. Mains dedens
VI jours qu'ilhs sorjournont la revient ly roy Bronchus; et enssitoist que Foi. 55 r «.
Pompeyus le veit, se le corit sus, luy et ses gens, et les ochist tous, et y
oit bien XX m hommes * ochis que noiies. Enssi fut vengiet li roy Gorgile de
Bugie. — Adont vient a Pompeyus I chevalier de Armenie, qui ly priat
merchi en disant que cheaux d'Armenie avoient ochis leur roy et ses en-
fans, et qu'ilh les vosist aleir corregier de celle for fa it,
Pompeyus entrat en la royalme de Armenie, se le conquiste, et prist si ^^p^'
grant venganche des maulfaisteurs que chu fut mervelhe, et metit tout le
rengne en tregut des Romans. Et chi roy de Armenie qui fut ochis astoit
nomeis Mitridath, qui astoit roy de Ponti et d'Armenie. Et I'avoient ochis
portant qu'ilh ne voloit conquere et osteir 8 a roy Nycomedes de Brithine ',
qui astoit amis aux Romans. Et, quant ilh 1'orent ochis, si s'en alerent les
Armeniens al regne Nychomedes por conquere. Et avoient ja pris Capa-
doche, et si en jettarent Ariobar, ayon le roy qui vies hons astoit. Et puis
1 Li astoit mestier. B. * Faire la guerre, d'o*/, armee. Roquefort donne
* Extlhant. B. ostoier.
8 Et Pompeyus nagai taut. B. * La Bithynie.
4 //• hommes. B.
fUi et tit*
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Scilla
Itomme.
200 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
si ont dissipeit tout le regne de Brithine; si ont encachiet Nychomedes et
son frere Philomene. — Tout chu fut dit a Pompeyus, et Pompeyus s'en alat
illuc; et si en pendit XXIII m aux arbres par les bois et les jardins, et se
remist Nychomedes en son rengne, et a Philomene donnat le regne d'Arme-
nie, et a Ariobat donnat-ilh le regne de Antyoche, et les mist en possession.
A eel temps avoit grant guere a Romme entre le peuple meismes : si en
estoient capitains les dois consules Mariien et Scilla. Quant je dy consule,
si entendeis que chu sont les consules por le temps present ou chaux qui
ont esteit consules; car quiconques ait esteit consule de Romme, ilh serat
a tousjours tant com ilh viverat nommeis consul. — Sour Tan V c et XXII ,
Pompeyus, qui veioit les Romans perturbeis de guere, si regardat le tort
et le droit quant ilh fut revenus de coregier cheaux deseurdit; se fist, par
banni fours dc sentenche qui n 'at point de rapel, bannir fours de Romme Scilla awec tout
sa par tie, ou ilh avoit mult de nobles consules et senateurs, et saingnours
awec leurs femmes et leurs enfans. — Quant ilhs furent vuidies, si com-
mencharent la guere contre les Romans, et orent une batalhe a eaux I jour;
si conduisoit les Romans Norbans et Tirmaine ' consuls; si furent le Ro-
mans desconfis, et perdirent par ochision VI m homme£, et en fut pris VI m a
prisonnirs. Et la fut mors Marien le consule, et Norbains; si fut consul apres
luy Mariens son fis, qui la guere maintenoit.
Pompeyus adont astoil en Athenes, ou ly peuple astoit rebelle; et ilh
n'y at nulle des aultres consules qui les puisse tenir en pais qu'ilh ne gue-
rient. Si avient que Fan V c et XXIII oit I batalhe entre Scillan et Marien ,
le fis Marien devantdit, et Pirus Carbo s ; si oit Scilla la victoire, et ochist de
ses annemis XV m hommes; et des siens furent mors IIII C . — En eel an
meismes morut Tongris, li promier rgy de Tongre; si regnat apres luy
H Ton r re n "' roy dc Humbris son fis com secons roy de Tongre VIII ans. Et son aultre fis Her-
nebant fut roy de Rains, ly et ses heurs jusques al temps sains Remy qui
convertit le pays a la U>y Jhesu-Crist \ Quant Tongris fut mors, son fis li
fist faire une tombe de jaspe et de crestal; et de chu astoit ly senescal
soverains 4 de Tongre, et fut nomeis maistre Thibals de Rains deviseur. Et
1 Le colleguc dc Norbanus elait Scipion. Materne qui convertit Tongre ausyment.
* Papirius Carbon. * Ce mot doit £tre un substantif signifiant pre-
* Ici dans le manuscrit B est intercalee cctte sident, gouverncur ou quelque chose de scmbla-
phrasc : Et Humbris le fut jnsques al temps saint blc.
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L1VRE PREMIER. 201
fut fait un temple cathedral, ou Jupiter seioitsour unc cheval, et Venus,
d'autre costeit, vestis d'onne robe de ccndal vermelhe a I roge capel et a
I mantel blewe '. — En eel promier annee fondat ly roy Humbris Ml vilhes :
Tune a pel la t solonc son nom Hambreux, l'autre nomat-ilh Ains, la tirche Hambreux Ains, Hoi-
1 x lengnoul et Hollon-
Hollengnoul et la quarte Hollongne : celle fut sour la rivier que ons nom g»«-
le Gaire*. — En eel an meismes remist Pompeyus cheaux d'Athenes en la
subjection des Romans, et s'en allat par mere en Surie. Si vient a luy Que-
tellus % li fis Philomene, le roy d'Armenie, et ly dest que son peire astoit
mors, se devoit eistre roy; mains ses gens ne le voloient mie, anchois
voloient avoir Tygranus, qui astoit annemis aux Romans. Quant Pompeyus
1'enlendit, se li donnat lettres sailee de son sael, et li chargat V c chevaliers
por ly a mettre en la possession del royalme. Si en alerent et fut fait enssi. f©i. w *•.
Mains les chevaliers ne furent pais II journees en revenant,que cheaux d'Ar-
menie ochirent leur roy, et fisent roy Tygranus, dont la plus grant parlie
des gens de pays en furent mult dolans. Se le mandarent a Pompeyus en
Surie, ou ilh faisoit I conte por gardeir Surie *, qui tout astoit aux Romans , .
lyqueis conte fut nomeis Taurus.
Quant Pompeyus entendit lesdit novelles, si entrat en la royalme d'Ar- De ^Jj** 118 et T >"
menie, et destruite tous cheaz qui avoient esteit a conselhe del ochire le
roy Querillus, et avoient eslus a roy Tygranus, lequeile ilh fist escorchier
tout vief, et le laissat enssi; se morit a grief tourment. Apres tout chu ilh
coronat a roy I Romans, qui fut nomeis Alixandre. — A eel temps guerioit
fortement Scilla tous les Romans , enssi ses amis com ses annemis , et les scau a u porte co-
ochioit tous al defours de Romme ', devers la porte Coloine \ Adont Cam-
pino, ly dus de Savinia 7 , soy combatit a luy; se li ochist Scilla et ses gens
VIH m homme, et tantoist en l'heure ilh entrat a Romme, et y ochist
III m hommes qui astoient sens armes et n'astoient nient culpauble de la
guere. Catulus Quintus adont dest a Scilla a hault vois et astoit de sa
1 Un manteau bleu. * Et ocioit tout luy et sa gens al dehors de
% Hologne sur Geer, Hognoul et Ans sont faciles Romme. B.
a distinguer. Hambreux doit etre Ombret, village * La porte Colline ou Scylla livra sa dcrniere
situe sur la Meuse et peu 61oigne des trois prece- bataille, celle qui lui valut definitivement le pou-
dents. voir.
* Plus loin Querillus. 7 S'agirait-il ici des Samnites et de leur heroique
4 Cemembrede phrase depuis :ouil faisoit, etc., chef Pontius Telesinus? Les Samnites ^taient un
est omis dans le manuscrit B. peuple de race sabine, et Savinia equivaut a Sabinia.
26
loine.
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202 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
partie : « Desqueis hommes astons-nos victorleux, qui ochions le peuple
» de nostre pays? » Adont en fut dolens Scilla, et dest que li peuple nient
culpaible lasseroit en pais. — Apres I jour at Scilla pris March Marien de
Cyeurecase, sy Tat fait loyer les mains, et le fist porteir a fluve del Tybre ',
cruaiteit. et commandat a son peuple qui la logoit qu'ilh ly crevassent les yeux, et
tous les membres ly tallassent Tunc apres l'autre crueusement, si qu'ilh
morist a grant tourment \ Et enssi fut-ilh fait. Apres une altre jour Mariien,
ly fis Mariien le consule, oit batalhe contre Scilla; si fut desconfis, si sen
fuit a Preneste, et Scilla le suit et l'assegat dedens le casteal de Preneste.
Si laisat k casteal gens por tenir le siege, et vint a Romme a la porte Coline;
si soy combattit a Lampoine et Carmat, roys de Mariaine, qui avoient grant
gens. Scilla en ochist LVl m , et en prist XIHI m ; Pirus Carbo adont fuit.
Enssi que ches chouses se fasoient, avient que Pompeyus rapassat mere
et vient en Ytaile, et entendit la guere eistre recommencing; se vient a
Romme, et corut sus Scilla, et ly copat la tieste, et toutes ses gens ochist
partout sus le Tybre el a la porte Coline ; et en Greche mandat al roy
qu'ilh les metist tous cheats de leurs compangnie a mort. Enssi fynat la
guere de Scilla le valhan guerieur. — En chi temps movit grant guere *
entre la rqyne Salite de Judce et de ses II fis, por la terre de Judee tenir
apres la mort de Ieur mere qui ancors visquoit; car cascons voloit eistre roy,
DeHh-cMiuset Arista- assavoir : Hircanqs voloit eistre roy portant qu'ilh astoit anneis, et Aristo-
bolus portant qu'ilh astoit hardis et chevalereux. Et Salite, la mere, amoit
plus Hircanus qu'ilh ne faisoit le jovene. Partant le Ost-elle evesque de la
toy, car il estoit anneis et plus debonnars et mies altempreis que li aultre;
et li promist que ilh seroit roy apres sa mort. Et ly peuple astoit favorauble
a Aristobolus por sa proieche; si voloit entirementque ilh fust roy. — Quant
la damme chu aparchut, si cncachat son fis Aristoble fours de la terre; et
puis fuit aux Juys mult fel et contraire, ortant quelle oit esteit debonnaire
al temps le roy Alixandre son marit; et affin que la royne fust plus fort
encontre le peuple, elle fist alianche a une nation de gens qui a cheli temps
Pharisiens. habitoient en son pays, qui astoient nomeis Phariseiiens , qui est a dire
gens desevreis, car ilh astoient desevreis des aultres Juys, partant qu'ilh
1 A flu de Tiberit. B. * Sur tous ces faits voir l'ouvrage de Flavius
* Si qu'ilh perd/ut we en plus grant dolour. B. Joseph, livre XIV, chap. 1 a 12.
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L1VRE PREMIER. 203
ne creioient nient bien la toy. Par le conselhe de celle gens ovroit la royne
en toutes chouses, et se tenoient li unc 1 autre, affin que tes Juys le dob-
iassent plus. — Et quant la royne savoit une homme qui avoit esteit amis
le roy Alixandre, elle le faisoit pendre ou morir '. Quant les Juys veirent
chu, si furent esmaies, et tant que li pluseurs s'enfuirent a Aristoible, por Foi.scf.
avoir ayde de Iuy. Quant Aristoble entendit ses barons, si vient a grant
compagnie de gens, tant de la terre com de strangnirs *, par-dedens la terre
de Judee por la terre prendre; et dest qu'ilh se feroit coronneir.
Quant Hircains le frere Aristoble soit la venue de son frere , se vint a
Salite sa meire la royne, et ly criat merchi, en disant que 5 son frere li voloit
tollir sa terre, dont ilh devoit eistre roy sicom ly anneis. De chu prist la
royne si grant despit que del yreur elle en chayt en une grant maladie, de
chu que Aristoble * oisoit faire teile chouse. Sique de celle maladie el en
morut eel annee meismes; mais en sa maladie fist prendre Gephas la femme La royne saute morut
Aristoble et ses enfans qui astoient en la citeit, et metre en prison, en
juranl que ilh ne ysteront jamais sens mort, se Aristoble ne lassoit son
frere la droiture de la terre qui astoit siene com anneis heure. Dont Aris-
toble fut mult corochies por sa femme et ses enfans, car ilh doubtoit mult
que sa mere ne les fesist ochire; et lassat la guere, et donnat sa mere bons
ostagiers que jamais ilh ne clamerait riens a la terre de Judee, se son frere
ne moroit devant luy sens heure. — Apres chesti accorde ne demorat que
HI jours que la royne morit, et morut en septembre Tan V c et XXIIII. Et
quant la royne fut morte, enssi com dit est, se mabdat Aristoble toutes
ses gens qu'ilh pot avoir, et en assemblat plus que l'autre fois; si allat
contre son frere vigereusement; mains, quant Hircains le soit, se dest que
ilh avoit mentit sa loy des convens qu'ilh avoit a sa mere. Adont mandat
Hircains toutes ses gens; si oit batalhe a son frere, qui fut dure et pesante;
si oit des mors et des navreis d'onne partie et d'autre. — En chesti estour
oit Aristoble plus de gens et plus crueux 8 que Hircains , et portant fut Hir- Hircains d«confis.
cains al derain desconfis ; si sen fuit ly et ses gens en la citeit de Jherusalem,
et Aristoble l'assegat tout entour. Mains les barons d'onne part et d'altre ne
1 De une altre mort, ajoute le manuscrit B. * Que une maladie liprent del yreur el del coroche
* Etrangcrs. que Aristoble. D.
* Tout ce qui precede depuis : »e vint a, etc. , 5 Chevalereux. B.
manque dans le manuscrit B.
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204 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
porent plus souffrir le discorde; si soy mellarent de faire pais par le con-
sentement dez dois rois en teile maniere. — Ilh fut promirs ordineit en la
pais que les II freres seroient ambdois roys , et tenroient ensemble la terre
sens departir, mains Aristoble sieroit coronneis et porteroit la coronne
com roy, portant que ilh astoit hardis; et Hircains demoroit evesque de
la loy, et auroit les rentes de lout le roy a I me, et sieroient despendues par
son conselhe que Aristoble ne poroit prendre por I denier, se chu n 'as to it
par le consentement de Hircaine; et n'aroit Hircain nulle sengnorie par
tout la terre, citeis, casteals ne fortereches.
En teile manere fut la pais ordinee entre les dois freres, qui mult pau
durat; car ilh ne durat pais dois mois, enssi com vos oreis. Hircains ly
De Antipater. evesque avoit en sa court I chevalier, qui astoit nommeis Antipater, par
cuy conselhe il faisoit tous ses affaires , portant qu'ilh astoit saige et subtils.
Si avient que Aristoble soy aperchutt de son conselhe , et comment son
frere soy mentenoit tres-saigement par le conselhe de chely chevalier; si
fut en grant doubtanche que li chevalier ne donnast aqueile conselhe par
lequeile ilh posist eistre desavanchis * de son regne; si queriste volenttrs
ocquison de li ochire ou de cachier fours de la terre; siqu'ilh fust de la
Maiisce. compangnie son frere osteis. — Mains Antipater astoit tant saige de Iuy
gardeir qu'ilh n'en poioit a chief venir; et tant monstrat Aristoble de ma-
nieres que Antipater sen est apercheus; si est venus a Hircains, et ly dest :
« Sires, vos esteis mors, se de eel pays n'en fuy^s, car vostre frere porcache
» vostre mort. » Quant Hircain l'entent, si fut mult esbahis, et demandat
conselhe que ilh poroit faire; et ilh ly dest : « Sires, nos en yrons entre
» vos et moy a roy Ereche d'Arabe, qui marchist pres de chi; se li crieis
» merchi, et deveneis ses horns par teile condition que ilh vengne a tout
» son gran barnaige conquerre la regne de Judee, et vos le tenreis de luy :
» enssi poreis vostre royalme recovreir, car je ne puy en aultre maniere
» veioir vostre recovranche. » — Hircains pensat 1 pau , et puis ly semblat *
Foi. se *•. que chis ly avoit donneit mult bon conselhe, si respondit qu'ilh le feroit; et
le lassarent enssi jusques a meynuit en promier somme qu'ilh s'en alerent
entre eaux dois, tant qu'ilh vinrent en Arabe, ou ilh ont troveit le roy
1 Desavancer dans Roquefort, qui donne au quelque chose de semblable*
mot le sens ftempkher. II signifie ici entraver ou * Li fut avis. B.
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L1VRE PREMIER. 205
Ereche f dedens 1 casteal qui astoit nomeis Lapirc '; car chis astoit ly lieu
ou li roy sojournoit plus volentiers. La sont venus sour Tan deseurdit
VIII jours en mois de fevrier, et criat merchi a roy Ereche, et devient ses d* roy Ereche.
hons de toute la terre de Judee, donl son frere Aristoble lavoit deshireteit.
Et ly roy le rechut mult volentirs, puis assemblat ses oust et vient en Judee
mult enforchiement por remettre Hircain en sa sengnorie.
Et chis roy et ses gens prisent une grant partie de la terre de Judee, et
assegat la citeit de Jherusalem altour, et 1'euwist prise, si ne fust Taurus', I
due de Romme, qui fist leveir le siege par sa forche. Chis Taurus astoit
balhiers de Surie par le commandement des Romans; car Pompeyus li
consule li avoit intaublit depart les Romans, a cuy la terre de Surie astoit
adont par tregut, et avoit ja esteit par 1'espause de XXVI ans que les
Romans Favoient conquiese, sicom dit estdeseur. — Chis Taurus choisat 4 la
guerre qui astoit entres les freres roys de Judee; si s'avisat que ors astoit-
ilh temps del conquere la terre en nom des Romans; portanl fist-ilh le
siege departir des Arabiens, et puis commenchat al chevalchier a grant
gens sour la terre. Quant les dois freres sorent la venue de eel Taurus, si
envoiat cascons d'eaux a ly qu'ilh ly vosist aydier; mains porlant que De Taurus baiihier»de
Aristoble enviat a Taurus awec les messagiers III besans d'or, et Hircain
ne ly envoiat riens, se demorat de la partie de Aristoble, et chantat a
Hircain : « Beais sire, niquet, niquet, point d argent, point de valoir, ne
» point de varlet B . » Et chu fut adont que ly balhiers Taurus mandat par
ses lettres al roy Ereche qu'ilh soy partist del siege , car, s'il ne sen par to it ,
ilh manderoit son sangnour Pompeyus qui astoit en Armenie • ; se ne ly
lairoit plain piet de terre a destruire. Adont soy partit ly roy Ereche de
siege por le doubtanche des Romans, et emynat awec ly Hircains et Anti-
pater, et les donnat terres por eaux. — Apres avient que Pompeyus re-
vient d' Armenie, et vient a Damas. Et quant cheaux de pays soirent sa
venue, se vinrent contre luy, et ly priarent merchi que ilh vosist aidier Hir-
cain encontreson masneit frere Aristoble, qui ly avoit tolue sa terre par
trahison; et si astoit Hircains anneit de luy, et li avait sa mere lassiet a lit
1 Aretas. point de valoir, ne se trouve pas. lei en marge le
* Pctra. eopiste a ecrU : Nola. Ou il n'a point d' argent, la
* Scaurus. n'a-t-il point de serviche. Quant au mot niquet, ce
4 Sans doute pour choisit a prononcer coisit. doit etre 1'allemand nichts.
* Dans le manuscrit B, le membre de phrase : * Ilh manderoit son tignour le fait. B.
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206 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
morteile qui l'avoit tenuit IX ans apres la mort Alixandre son marit, qui a
. lee l'avoit lassie. Grandes proiers et requestes oit Pompeyus depart Hircain
qu'ilh le remetist en sa terre.
Et Aristoble ne s'obliat mie, ains vient a Damas, et fist a Pompeyus
grant honneur; mains Pompeyus ne ly fist mie belle chier, car ilh ne le
tient mie a roy de Judee. De quoy ilh anoiat mult fort a Aristoble, et le
tient a grant desdengne. Et s'est partis sens congiers prendre , et puis se
mist en Alixandre portant que chu astoit la plus fort fortereche de son
pays ; se quidat que Pompeyus ne le prenderoit ja par forche. — Et quant
Pompeyus oyt dire que Aristoble voloit contre luy tenir fortereche, si
r^semblat ses oust et alat apres luy pour prendre luy et le casteal. Et
envoiat devant I messagiers en Alixandre a Aristoble, se Ii mandat par ses
v lettres que ilh venist parleir a ly; et Aristoble ly remandat qu'ilh n'ysleroit
*pais de son casteal , ne s'y n'yroit point parleir a luy. — Quant les barons
crueuwrcponsedeAris- Aristoble meismes entendirent la crueuse reponse que Aristoble respondoit
ompeyus. ^ p r j nc he de Romme , se li blamerent mult, et ly dessent qu'ilh issist de
son casteal et si alast parleir a luy; car Pompeyus astoit trop fors et crueux,
et s'ilh le prendoit par forche ilh 1'ochiroit tantoist, portant qu'ilh seroit
remeis sour chu qu'ilh avoit defendut. Par le conselhe de ses barons issit
Aristoble de son casteal, et laissat ens mult bonnes gardes por ly defendre,
auxqueis ilh fist faire seriment que le castel ne renderont a nulle homme,
se ilh ne le disoit de sa bouche, ou le mandast par son seaul. — Et quant
Foi. 57 rv Aristoble fut issus de son casteal, si n'alat mie parleir a Pompeyus; anchois
sen alat vers Jherusalem, et garnit la citeit sicom por defend re. Mains quant
Pompeyus le soit, si tournat eel part son chemyen. Quant Aristoble le soit,
si en oit mult grant paiour.
Grant paiour at Aristoble de la venue Pompeyus; si issit de la citeit, se
vient contre ly, et awec luy ses plus nobles barons, et de si long qu'ilh
Aristoble eric merchis veil Pompeyus, ilh ly chaiit aux pies, et ly criat merchis, en promettant
qu'ilh ly donroit mervelheux tresoir qu'ilh avoit lassiet en Alixandre.
Quant Pompeyus, qui astoit convoiteux, entent chu, ilh soy laissat apaisier,
puis envoiat en Alexandre quiere le tresoir par Gabiens 4 , unc sien cheva-
lier. Et quant ilh vient devant Alixandre, si voult ens entreir, mains, par
1 Gabinius. Voir a ce sujet Fl. Joseph, 1. XIV, cb. 7.
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LIVRE PREMIER. 207
chouse qu'ilh posist oncques dire ne faire, ne pot entreir dedens. — Adont
soy retournat Gabiens, et vient a Pompeyus; se li comptat tout yreis com-
ment Aristoble l'avoit gabeit. — Quant Pompeyus l'entent, se mist le siege
a 1 tour de Jherusalem , et jurat que jamais ne sen partiroit se l'auroit con- JheruiMem rut »*se-
questeil. Pompeyus n'oit gaire siet devant la citeit, que ilh montat grant
discorde entre cheaux de la citeit; car ly une partie soit tenoit a Aristoble, Wicor*.
et ches voloient defendre la citeit, et 1 autre soy tenoit a Hircains, et
cheaux voloient rendre la citeit a Pompeyus et a Hircain; et tant qu'ilh se
corurent sus. Si oit la victoire li partie Hircaine; si encacharent la partie victoire « Hircain.
Aristoble de la plache, lesqueis fuirent en temple. Et les aultres alerent
ovrir la porte et donnarent les cleis a Pompeyus, qui les rcchut a mult
grant joie. — Si entrat en la citeit ly et ses gens , et fist assalhir le temple ;
mains cheaux qui astoient dedens soy defendirent teilement qu'ilh y oit
grant planteit d'ochis, anchois qu'ilh fust pris. Et puis fut depechies, et
entrarent dedens les Romans, et prisent tous cheaz qui astoient dedens
sique oncques I seul n'en escapat que ilh ne fuist pris ou ochis. En apres
quant les Romans les orent tous trais hours de temple, se fisent-ilh de
temple stabulerie ' de leurs chevals. — Ors nos tesmongne li escripture que
oncques puis celle journee Pompeyus sy n'entrat en batalhe , ou ilh posist
avoir victoire, et que tous jours ne fus desconfis, qui devant ne l'avoit
oncques esteit; ains avoit esteit uns des aventureux chevaliers qui portaist
oncques armes le temps devant.
Lendemain entrat Pompeyus en temple, et regardat les beaux aourne- Pompeyus entre em em
mens qui ly plaisirent mult bien, ne onques riens n'en voult enporteir
fours; ains commandat que li temple fuist netoies el cureis. Apres apelat
Hircain et le fist evesque, sicom devant al vivant de sa mere. Et puis ilh
prist Aristoble, et 1'emmenat awec luy loyet com uns chaitif, et oussi ses
II fis Alixandre et Anthigonus, et II filhes oussi qu'ilh avoit. Et instablit
que Taurus deseurdit fust sires de Judee, et li laisat milh hommes por
gardeir la terre. Enssi furent les II heures ' deshireteis de la royal me de
Judee. — Apres tout chu soy partit Pompeyus, et s'en ralat devers Romme
dont ilh astoit consul; mains ilh ne fut gaire eslongiet la terre, quant
Alixandre, ly anneis fis Aristoble, escappa par grant aventure. Si soy
* Etable, ecurie. * Pour heurs, heri tiers.
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208 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
^ruiobte™' ,y fis retourna *9 e ' P u * s porcachat et assemblat tant de gens que chu en fut
mervelhes, et les menat en la terre de Judee; si commenchat a ardre la
terre; et tant fist-ilh, qu'ilh trahit a ly les plus fors casteals del regne. —
Mains quant Taurus le soit, si envoiat contre luy Gabin, son eskeniscal ',
et li commandat qu'ilh ne retournast nient, se Fait mort ou pris, ou cachiet
fours de la terre. Adont sen alat Gabin, et le cachat en casteal d'AIixandre,
et puis mist le siege tout entour; et fist tant que Alixandre et ses gens afa-
marent tous, et si en niorut asseis. Et quant la mere Alixandre veit le me-
chief, se dest a son fis qu'ilh sen alaist a Gabin , et se soy metist en son
merchis; car chu ly conselhoit-elle, et Alixandre le fist et rendit son casteal
^uV^e^urenubauts * ' u y* — Adont fist abatre Gabin toutes les fortereches del regne de Judee
porunefemme. p ar | e conselhe de la mere Alixandre, affin que nuls ne recommenchast
jamais la guere sor le fianche des casteals. Celle damme servoit Gabin mult
bien, etli faisoil grant honneurpor le raison qu'lh li aidaist a ravoir son
Foi. 57v. marit Aristoble, et les aultres chaitifz que Pompeyus avoit emeneit a
Romme, anssi que dit est. — Apres chu soy partit Gabin de la terre, et
commandat a Hircain la terre et le temple del gardeir, et tout chu que a
Les juys furent de- temple apertenoit. Et puis departit le peuple des Juys a * V signories,
siqu'ilh oit en la terre V saingnours. Et chu faisoit-ilh por abattre 1'orguelh
des Juys. Apres chu repara* Alixandre, et Gabin s'en ralat en Arabe ou
Antipater demoroit et tenoit grant terre de roy Ereche, qui avoit une filhe
qui astoit nominee Heroda. — Quant Antipater veit Gabin, se li fist grant
fiest et mult grant honneur, et tant qu'ilh fut si amyable * a Gabin que
Amipater oit a fcmme Gabin l'amoit mult fortement , et qu'ilh li porcachat d'avoir a femme He-
roda, la filhe le roy d'Arabe, qui mult fut belle damme et saige. Et oit de
eel damme Antipater MI fis et une fille; et furent nommeis les fis : Faciaux,
Herode qui fut en sornom appelleis Ascalonien, Josipes et Ferolas, et la
filhe Salome. — A eel temps, assavoir sour l'an V c XXV, morurent dois
des consules de Romme, assavoir Ceciliien et Macelliien, en guere qu'ilh
avoient li une en Espangne, el li aultre en Machidone, enssi com je diray
juiius Cesar fut fais chy apres en retournant a la mateire. Enssi demorat Pompeyus tout seul,
mains les Romans en eslirent II aultres, assavoir Juliens Cesare et Carsus s
1 Senechal. s Partit, retourna. Roquefort donne reparier.
* Je supplee ce root d'apres Ic manuscrit B. * Acointe. B.
Stir tout ccla voir lc ch. 1 1, liv. XIV de Fl. Joseph. 8 Crassus.
consul.
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LIVRE PREMIER. 209
uns des senateur de Romme, car a eel temps avoit a Romme ' III prinches D R "|j" nches de
-qui regnoient com empereurs, II consules et I tribuniien. Si astoit ly tribu-
niien deseur les II consules, et Fastoit loud is ly plus anneis; si aloient
tousjours les II consules conquerre terre et pays, et ly tribuniien demoroit
a Romme sens partir, se chu n'esloit por necessiteit. Et astoit ordineis que
nuls d'eaux ne poioit demoreir que V ans sens revenir a Romme, et prendre
novelle commission et congiet. Et, quant ilh demoroit plus de V ans, Hit
perdoit son honneur, et li cloioit-ons les portes quant ilh revenoit. Et por
celle constumme fut la guere entre Pompeyus et Julius Cesaire, enssi com
vos oreis chi-apres.
Celle constumme fut instaublie en temps passeit XX ans s ; se le tinrent
mult fermement sens embrisier portant qu'ilh astoit novelle, car les no-
vclles chouses sonl volentiers plaisant jusqu a tant que ons en est plains. ,
En eel an morit Ector, ly roy de Bil; si lassat tout sa terre aux Romans de
sa propre volenteit. — En eel an meismes morurent les II consules de
Romme Ceciliien et M&rcelliien dont nous avons desus fait mension, et
morurent en teile manere. En 1'annee devant astoient-ilh en I mult novelle
guere en Espangne contre les Romans, (autre en Pamphile s , le tirche en
Machidoine, le quarte en Dalmatie; car Sartoriien, le roy de Mariane*,
movit la guerre en Espagne, encontre lequeile sont envoyes Ceciliien le
consule awec Monchel, son fis, qui avoit desconfis devant Jugurthain le roy.
Et Marcellien fut envoiies en Machidone, et awec luy Luciien Dominich 5 ,
lyqueis Luciien fut en la promier batalhe ochis par Yrtalogon, le roy, et
tous les altres senfuirent. Apres soy combatit en Espangne le consule
Cecilien et ses gens contre le roy Sartorien; la perdirent les Romans, car sartorien roy <tes-
ilh en fut tant mors qu ilh ne demorat en vie que Monchel le fis Ceciliien pangne '
tou seul, qui s'enfuit a salveleit, et laisal son peire Cecilien le consule et ses
gens mors a champs. — Adont y fut renvoiies par les Romans, quant ilh le
soirent, Pompeyus et Quinte Marcellien. Cheaux gangnarent toutes lesciteis
d'Espangne, et les submisent del tout auz Romans. En Machidoine fut en-
1 Le texte du raanuscrit D porte : car a eel s El en Cilisse, ajoute le manuscrit B.
temps (si com nous creons avoir dit altrefois desus, 4 Mauri tanie? Avant de transporter la guerre
et se nos ne V avons dit si le dirons chi) ilh avoit a en Espagne, Sartorius avait cherche a soulever la
Homme.... II s'agit ici du premier triumvirat. Mauritanie.
1 Ou entouTj ajoute le manuscrit B. 5 Lucius Domitius.
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240
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Fol. 58 r».
Silicon.
Mariciane.
voiiet Claudien, ear Marcelliien astoit mors; si soy com menclia rent a com*
battre toute promier contre les Vaires, I maniere de gens qui habitoient en
provienohe de Rodop; si fut oeliis Claud i en, et ses gens al derain descon-
files. — Apres fut envoyes en Pamphile et Gilisse Servilius, uns hons tres-
noble, qui soy combattit a eaux. Et si en prist milh et le$ desconfist, et
ocbist Xllll m hommes. Et puis assegat Hispaselidam , line forte eiteit,
laqueile ilh prist , et Olympie et Corache, ches grans citeis. Et en Gelisseet
en Asarie ' at gangniet et fait tributaire aux Romans ; et por eel raison Gaien
Asariens 9 fut-ilh nomeis dedont en avant. — Apres alat en Dalmatie, se le
eonquestat tout. Et Saloine 8 la eiteit at prise, et puis revieat a Rorome;
si trovat que ons avoit fait de Julius Cesaire et de Carsus* 11 consules, por
les mort de Ceciliien et Marcellien.
En eel an meismes ont fait les Mytrtde brisant la pais aux Romans, par
lequeile ilh as to i en t en tregut; si ne le veulent mie payer plus avant, et
grand despit ont fait aux Romans, car ilh ont prise Bithimaine * eo Asie.
Si ont les Romans envoyes a Guadius Luciien, Marcusien et Aureliien % et
en la promier batalhe ont desconfit les consules ; et 7 les Mitride fuirent en
la eiteit de Scitioons •, et lez consuls Font assegiet en pensant que se la eiteit
de Sciticon ilh puelent prendre, que tout Aisie sierat en leor poioir. Et por-
tant qui avoient • a I costeit Sciticons la eiteit, et a Tautre Bitanchie l0 , que
ons nom matntenant Constantinoble, si astoit plus fort a prendre. — Mains
cheaux de la eiteit issirent fours, et soy combatirent aux Romans, et furent
desconfis les Mitride; et furent mors de leurs gen$ LX m hommes, et en fut
pris a prisonnirs X m , ou ilh oil 11 dus et LXXHII chevaliers. Et y conques-
tarent grant avoir, et conquest arent Vesubtum " la montangne, et misent
tout el subjection des Romans; et vinrent par la cileit Mariciane et le con-*
questont, et grant avoir awec. Et ochirent mult de peuple, et si fisent mult
de inceste et de adulteires; dont mult de femmes se tuont elles-meismes ,
1 Cilicieet Isaurie.
* Caius Isauricus.
8 Salone, ville de la Dal ma tie, ou se retira Dio-
cletien, apres son abdication.
4 Crassus.
5 Sans doute pour Bithynie, une province prise
pour une ville.
6 Lucius, Marcus et Aurclius.
I Tout ce qui precede, depuis Luciien, Marcu-
gien, etc., manque dans le manuscrit B.
• Cyzique?
9 1 Pour qu'ils avaient.
'• Byzance.
II Cela scmble indiquer le Vesuve ; mais le
Vesuve est loin des pays dont parlc Jean d f Outre-
meuse.
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L1VRE PREMIER. 241
car par forche furent-elles violeez '. — Apres, en revenant vers Romme, vin-
rent a la citeit Artiane , qui astoil tres-noble; si assemblarent X m sagittairs
et nonante milh combatans; si les conduisoit leur sires, qui avoit a nom
Tygraine,si soy combatirent aux Romans, mains les Romans les ont tous
desconfis; si perdirent bien L m hommes. Et si en ont pris les Romans XV m ,
puis sen ralerent en Armenie, portant con leur dest qu'ilh y avoit mult
de gens fuys ; si ont prise la citeit et tout mys a sacremanne *; et revinrent a
Romme a grant honneur 5 et gloire. — L'an V c et XXVI, le VI 4 jour de
marche, commenchat Virgile, le fis le roy Gorgile de Bugie B a frequenteir virgiie ™i *i escoiu.
les escolles, en une ysle de mere, awec grans maistres qui la demoroient a
eel temps. Si fut la nouris et instruis • depart eaux, et mult bien y aparut
apres chu. — Adont estoit par tout le monde constumme que nuls petis
hons ne mettoit son fis aux escolles por y estre clerc; car nuls n'oisoit ten-
dre a clerjrerie, se ilh n'astoit fis de roy, de due, ou de comte, ou de prince. Nuimepoioiteitreroy
.... in ■ ■ ouprinche,s'ilhn'e§-
qui dewist governeir grant terre et grant peuple. Et portant les roys et les toitden.
aultres saingnours faisoient clers pluseurs de leurs enfans; car nuls ne
poioit eistre roy ou due ou comte, ne nul terre de peuple governeir, s'ilh
n'estoit cleirs. Et durat eel constumme longtemps. Et encors le maintinent
les grans prinches, et font volentirs clers leurs enfans, qui apres eaux doient
governeir leurs pays; et par especial les empereres de Romme est mult
convenable de estre 7 tousjours bons clers, et enssi les roys de Franche;
mains I autre chouse ne maintient-ons nient bien, car cascons, soit povre
soit riche, fait de ses enfans clers con 8 ne soloit nient faire. Adont n'astoit
mie tant de clers com maintenant , et si astoient plus saiges adont que main-
tenant. Et encordont les clercs de maintenant ont grant avantaiges , car
ilhs truvent les libres tous fais et corregies de toutes les scienches qui sont,
que leurs devaintrains ont fais a grant travalhe. — Item, en eel an V° et
XXVI , oit oussi grant guere , fel et malvaise entres les Romans et cheaux Grant guere.
de Machidoine, portant qu'ilh astoient rebelles del payer leur tregut. Se y
fut envoiiet Lucien Luculus , qui soy combatirent contre Beusos 9 , le roy de
1 Cognewe charneliment. B. T Est dans notre maouscrit Le texte du ma-
1 Ou mieux saequemaime , saccagement nuscrit B porte : Li emperers de Romme est tous
5 Fieste. B. jours bon clers,
4 Le XI*. B. • Pour ee qu'on.
i Bougie? • S'agirait-il du Pseudo-Peraee?
' Ensengniez. B.
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212 CHRONIQUE DE JEAN D OUTREMEUSE.
Machidoine; se le desconfirent, et second a ire ' la citeit conquestarent et le
vastarent tout; la gangnont grant avoir, et destrurent mult d'aultres citeis
de lours pays jusques a la Denawe f , qui est la plus grant riviere de monde
d'aighe douche. — Apres desconfirent les peuples babitans ens montangnes
Maiiegens. de Rodopeis, qui sont gens tres-oribles 8 a veioir. Et quant ilh prendoient
alcons Romans, ilh le decolloient et magnoient la tieste, et apres tout le
corps, et bevoient le sane, enssi qu'ilh bevissent vin. Toutes chesgens ilh
Foi. 58 y. ont conquis, et conquisent les citeis qui astoient sus le rivage de la mere.
Et destrurent Apolix, Galacie, Parthenopolin, Ystrutoine et Burzioine 4 ,
qui astoient d'or et de pieres prescieux, si les ont prise. — Item de la en
sont aleis en Crete, ou ilh rebelloient : la soy combatirent I an, et ont con-
quis tout le pays, et conquis tout l'avoir de monde. En eel temps revient
aux Romans le royalme de Gartaige en Affrique, car Apius, li roy de Car-
taige, dest a lit morteil, quant ilh morit, que ilh voloit que toutes les citeis
d'Affrique qu'ilh tenoit fussent subgis aux Romans. Et les citeis qui vinrent
aux Romans sont celles : Cartaige, Pheloma, Eurene" et pluseurs aullres.
Mains quant ly roy fut mors, si fulracompteit aux Romans que ly roy tenoit
plus de citeis qu'ilh n'en eussent la possession. — Adont y fut envoyes
Julius Cesar, qui les endamagat fortement; et en oit encors XIIII citeis
De Julius Cesaire. qu'ilh n'avoient mie devant. Et apres Julius Cesar s'en est aleis el regne de
Arthaxarchem , qui ne tenoit riens des Romans. Et se soy combatit a roy
Tinygrade •; mains ly roy prist sa coronne tantoist, et le jettat devant les
pies de Julin Cesar, et dest en hault : « Je ne me weulhe mie combattre a
» vos, » et se mist en genos devant luy. Mains Julius ne le voult point soffrir,
ains I'at releveit mult honorablement. Et ordinarent la une pais que ly roy
paieroit dedont en avant III™ libre de fin argent; et ilh le saielal volentiers,
et awec chu les donnat toute la terre de Surie et Feniche. Et ly donnat
VH m libre d'argent por departir a ses gens. — Apres vient le consul Julius
et ses gens contre Broden, le roy de Albanie, et le desconfit; mains, quant
ilh duit destruire son pays, si soy rendit a ly parmy de III™ libre d'argent.
1 Probablement pour secondement, ensuile. toine cachent peut-elre GalUpoli et Chiustangr,
* Le Danube sans doute. autrefois appelee Istropolis.
* Tret crueuses et tret oribles. B. 5 Cyrene? mais Pheloma !
* II y avait en Macfdoine une Jpollonie et une * Tigrane , comme plus haut Arthaxarchem
Parthenopolis, etdans la Moesie inferieure unevUle pour Artaxerxes. A quels fails reels cela peut-il
appelee par Eulrope Burz\aone % Galacie et htru- s'appliqucr?
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LIVRE PREMIER. 213
Apres ilh conquist Yberie, Yturcas ', Arabe, Arm erne le petite; se le donnat
a Degotaire, le roy de Galatie % qui ly avoit aidiet al conquesteir. Apres
ilh conquestat Sileucie, Antyoche, et puis revient a Romme a grant gloire.
— L'an V c et XXVII, morut Prian, li dus de Galle, qui gran temps avoit
regneit. Si fut dus apres son fis Yborus, et regnat XL ans. Chis defendit
mal son pays contre Ies Romans; car tout le temps que ilh regnat, ilh ne
fist chouse de quoy ons puist parleir par honneur ne aulcuns bien dire. Et
lassat son pays recheioir en tregut des Romans, qui grant temps devant ne
l'avoient leveit. — Item, l'an V c XXVIII, fut neis Orasses 5 , 1 gran poete. Oraase*.
En eel temps commenchat une grant guere qui longement durat entre
Hanygos, le roy de la petite Bretangne, et le roy Theodogus de Barbaetre Theodogus dEspan-
cn Espangne, oncle a Julius Cesaire, frere a sa mere Julia. En eel an
meismes fut envoies Julius Cesaire en la grant Bretangne, c'on nom main- De Julius c«*ar.
tenant Engleterre, awec X legions de Romans : chu sont LX m , car ly legion
solonc les anchiens fait VI m . Si passat oultre el regne de Elnatie * , et la
des con fit le peuple, et le metit en tregut des Romans. Et puis vient en
Bretangne, si soy combatit a Turlingue Lacobege et Murache, son fis, des-
queis iih et les Romans ont ochis XL m hommes, et li remanans s'enfuit. —
Apres ilh desconfist Ariovistum* le roy, mains nous ne savons dont ilh Ariovistus,roy.
astoit roy, car le croniques ne le devise mie; et nos le melons enssi, mais
bien est voire qu'ilh devise que chi roy Ariovistum avoit grant gens en son
ayde, que Julius et les Romans desconfirent. Et les fisent fuir, et les ca-
cherent • bien XL mile de terre tout ochiant. Et se li prist Julius II de ses
femmes et II de ses filhes, et gangnat son pays. Et vos disons que nos met-
tons briefement ches his tors, car vos les trovereis enssi briefs ens es cro-
niques qu'ilh at V° ans qu'ilh ont esteit escriptes; et les gens soloient mettre
les fais enssi briefement. Et ilh y a de cheaux qui mettent leurs fais asseis
clerement , et cheaux nos mettons enssi bien clerement.
Apres Julius Cesaire vient en Germaine, ou ilh trovat grans gens assem- De juiiw.
bleis por defend re leur pays, car tousjours ont esteit les Germains, que De* Germans.
ons nomme maintenant Allemans, grans combateurs. Si en astoit en une
1 Vlturie, entre la Sy He et le desert arabique. 4 Helv6tie? Lc texte porte bien Elnatie, sans
9 Dejotarus, le client de Ciceron , etait roi de doute erreur de copiste pour Elvatie {Eluatie).
Bithynie. * Le Sueve Arioviste.
3 Horace. • Pour cheuserent, poursuivircnt.
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214 > CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
Foi. go to i, assemblee LXX11 1 " 1 bona combatahs. Si astoient derier unc bosquet enbus-
siet, et tous rengies ilh corirent sus subitement les Romans, qui commen-
Dc juiius. charent a fuyr. — Mains quant Julius les veit, se les res is tat; car en Julius
Cesaire astoit et fut tout la fleur de chevalerie : fors, poissans, gen tils,
hardis et chevalreux et entreprendans, plus que nuls qui awist esteit devant
ly , ne Ector de Troie ne altre. Ilh est bien voir que Ector fut plus fors et
poisans de corps, mains Julius astoit plus saige.combatteurs, et si faisoit
plus saigement ses fais. Sique Julius, qui fors astoit, les LXXII™ Allemans
reculat teilement qu'ilh furent par les Romans tous ochis. — Apres Julius
les Albergosjes Lixovios* et les Canlhabriens at-ilh desconfis,et en at ochis
XXX m . Et toutes ches regnes met it Julius Cesaire en la subjection des Ro-
mans par tregut. Chis Julius conquist mult de pays por les Romans a son
temps, plus que nuls aultres consules qui fust a Romme. Ilh est bien veri-
teit que Pompeyus conquist bien par forche vers Orient, et en partie par
Dexxiiregne. dela mere, XXII royalmes; encours en * conquist plus Julius. Apres vient
Julius oultre le Rien, et conquestat tout. — Item, Fan V c XXIX, le XVI*
jour de may, escapat Aristoble que Pompeyus tenoit a Romme; si repar&t
en la terre de Judee; si assemblat grant compangnie des Juys, puis s'en
alat en Alixandre, son casteal, et le commandat a refermeir de noveals
inures. Et enssi que ons le refermoit en alat la novelle a Gabin , qui astoit
sire d'unne partie de la terre de Surie desous Taurus. Et quant Gabin le
soit, ilh appellat Anthoine, son senescal, et ly cargat gens, et I'envoiat
contre Aristoble; et ilh soy combatitpar teile maniere qu'ilh le desconfit,
et prist li et ses dois fis ; si furent remeneis a Romme en prison com devant.
d' xristobie. — Adont jugarent les senateurs que Aristoble fuist mis en chartre perpe-
tuelment, portant qu'ilh avoit trop erreit contre I'honneur des Romans.
Adont soy trahit la femme* Aristoble a Gabin, et ly priat quelle posist
ravoir ses II enfans, et Gabin li creantat, si les fist rameneir; et chu fut
quant ilh rendit a Gabin le casteal de Alixandre.
Et quant les enfans furent revenus , Alixandre li anneis commenchat les
1 Le feuillet 59 manque, et Ton voit qu'il a et6 forche, etc., manque dans le manuscrit B.
coupe. II n'y a cependant pas de lacune dans le texte. 4 Ici , dans le manuscrit B, moilhier encore au lieu
* Les Allobroges et les habitants du territoire de femme. Inutile, je crois, de signaler davantage
de Lisieux. cettc variante.
s Tout ce qui precede depuis : conquist bien par
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L1VRE PREMIER. 215
Juys a guerroier, et leur fist pluseurs mauls, et voult oisteir a Hircain, son
oncles, sa terre et digniteil que Pompeyus ly avoit rendue. Et fist tant que
Gabin en oiit novelle, qui astoit de Egypte revenus, ou ilh astoit aleis
ostoier. — Quaul Gabin entendit les clameurs qui vinrent a luy d'onne part
et d'aultre, si fist * tant par son sens que ilh racordat ensemble les Juys , et
les enfans Aristobleset Hircain, leur oncles. A eel temps multipliarent les
gueres fortement entre le roy Thegedus ■ de Barbastre et le roy Hanigos
de la petite Bretangne; et tant que le XIIII* jour de mois de junne, sor
Fan V c et XXX, orent batalhe ensemble mult orible et pesante. Mains les B*unie en Bretangne.
Bretons furent desconfis, et si en fut mors que pris LX m , et ly remanant
s'enfuit. — Adont mandat ly roy Hanigos al due de Galle Yborus amour et
alianche conlre les Espangnois; si furent les raessagiers noblement rechus, Gu ^^ % ^. Bnlws
et fut ly alianche saielee; puis a&semblat ly roy 3 Yborus ses gens tout chu
qu'ilh en pot avoir, tant com a cheval, si soy mist al chemyn. De chu ne
soy donnoit garde li roy Theodogus, portant que les Bretons avoient esteis
tous ochis. Si quidoiWh que jamais ne ly dewissent riens forfaire, si avoit
toutes ses gens renvoies en leurs terres qu'ilh avoient a governeir. Et avoit
renvoies les soldoiers que Julius Cesaire, le fis de sa soreur, et Junianus
son frere, li roy des Latins, ly avoient envoiet, dont ilh perdil sa terre. —
Item, Ian V c et XXXI, morut Humbris, li secons roy de Tongre; si regnat Tongris re iiitoj de
apres luy son fis Tongris XI ans. Chis roy Humbris acquist a son temps la
conteit de Hasbain, par le raison de chu que Tongre gtsoit tout emmy, et DeicomeitdeHesbain.
se l'aquist al due des Ardenois, eon nomme maintenant le due de Lu-
cembor *. — Et Tongris, son fis, regnat vassalement en bien et en honeur*
Ses peire li roy Humbris avoit a son temps fondeit des beals molins, sour le Moiins.
riviere 5 qui corroit par-deleis Ains. Si fist Tongris la line vilhete qu'ilh
apellat Moiins. Chis. Tongris amoit armes, amours et dammes : ilh aidat
le due de Galle contre Julin Cesaire. — Item, l'an V c et XXXII, le quart Foi.eov.
jour de may, se misent sour mere les Bretons et les Sycambiens , qui
astoient • bien C m hommes ensemble, et entrarent en Espangne en faisanl
grant destruction. Uhs ardoient vilhes et abatoient casteals; et le misent
tout en exilhe jusques a Barbaistre la citeil que ilh ont assegiet, dont ly roy Les Burtons vom en
1 Esploitat. B. 5 La Legia. Le nom dc Moiins est encore en
* Theodegut. B. eflfcl celui (Tune partie de la commune d'Ans.
■ Li dui. B. • Erent. B.
4 Luxembourg.
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216 CHROMQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
ful mull enbahis. — Forte enbahis fut ly roy Theodogus de grant peuple
qu'ilh veioit, et se soy mervelhe dont ilh vient, car ilh n'avoit mie passeit
gramment de temps qu'ilh avoit les Bretons desconGs et ochis, et mainte-
nant ilh sont plus poissans que en devant; se ly annoie que ilh avoit ses
grans oust renvoiet. Nienlmoins* ilh demonslroit bonne volonteit del
defendre sa citeit ; mains chu ly valit pau de chouse *, car ies Sycambiens
qui astoient fais ' de guere ont assalhit ia citeit par teile vertut que ilh en
fisent anchois trois jours les mures creventeir, et Font conquestee. Enssi
Themiogusicroyd'Es- fut La citeit de Barbaistre prise, el ly roy Theodogus s'enfuit en une
temple de leurs dieux; mains chu ne ly valut riens, car Hanigos le suwit
a mult grant gens, et li coupat le chief dedens le temple meismes; dont
ilh fut pris depuis grant venganche, enssi com vos oreis. — Chis roy
Destrois6sTheodogu*. Theodogus avoit trois fis : ly anneis oit nom Junyus, ly aultre Julius et ly
plus jovenes Peleus; les dois plus anneis orent coupeis les tiesles. Mains
quant ly jovenes veil chu , se s'enfuit en 1 estauble de cheval , et vestit une
maul cotte d'on garchon, et puis ordat* sa chair et soy massurat 8 , et
montat sus une cheval • ; el fist tant qu ilh issit de la citeit, et mult bien fut
venus del roy Hanigos, del due Yborus et de mult d'aullres qui cuy-
doienl que chu fust I povre garchon, et fust de leurs gens meismes qui
chevalchast le cheval son maistre. Atant s'en alat Peleus, et at tant esploi-
peieus a Homme. teit sa besongne qu'ilh est venus a fiomme. — Quant Peleus vient a Romme,
si estdescendus el venditson diestrier, et puis at achateit des beals vesli-
mens 7 , enssi qu'ilh afferoit a ly; et montat en palais, et trovat Pompeyus et
Julius Cesaire, son cusin, qui puis II mois astoit revenus de Allemangne,
ou ilh avoit mult conquis , sicom dit est. Atant s'engenulhat Peleus devant
eaux, et puis dest a Julin : « Sire, je suy li fis de vostre oncle Theodegus,
» roy de Barbastre, cuy les Bretons ont coupeit le chief. » Et li comptat
tout le fait. — Quant Julius entendit ches novelles, si fut mult corochies, et
jurat tous ses dieux que ilh destruiroit les Bretons et les Sycambiens , et
metteroit leurs pays en tregut et en servaige des Romans. Atant fist assem-
1 Nonporquent. B. * Plutdt machurat (noircit), qui se trouve dans
' Mult petit. B. Roquefort et est reste* en wallon.
8 II doit manquer ici un mot. Le manuscrit B * Destrier. B.
porte : qui de guerre event enduis. 1 Draps. B.
* Salit. Ordoer dans Roquefort.
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LIVRE PREMIER. 217
bleir tous les senateurs en palais, et leur requist le congiet aconstummeit,
solonc les status de Romme, por aleir sour les Sycambiens, qui tant
avoient fait de despit aux Romans, et paine et damaige; se les voloit mettre
en leur tregut. A tant ly fuit otryet le terme de Romme, chu est de V ans ',
et tant poroit-ilh demoreir et nient plus.
Apres chu assemblat ses oust de X legions — chu sont LX m de esluites De J u,iu » c« Mr -
gens — et se soy parti t Tan V c et XXXI II ; et li aultre consule Carsus astoit
devant partis, si astoit aleis en Surie por la terre gardeir, car Gabin le
senescal astoit mors. Et Pompeyus, li thiers consul tribunien, demorat a
Romme por gardeir. Et Julius Cesaire commenchat tout promier vers la
petite Bretangne; et quant ilh fut la venus ilh ardil et destruit * la terre, et
conquestal pluseurs vilhes, et prist par forche toutes les fortereches, et
ochist tous les hommes que ilh y trovat. — Si prist le roy Hanigos , et le
fist tout devestir; et chis ly criat merchis, et li presentat a donneir mult
grant tresoir s . Mains Julius li respondit: « Je auray teile merchi de toy,
» com tu ois de roy Theodogus, mon oncle, et de mes cusiens ses enfans. »
Adont en fist prendre teile venganche que tous ly monde en soit* parleir, et
qui fist dedont en avant mult doubteir Julius. — Julius fist prendre 1 rasoir
bien trenchant, se fist cuchier le roy Hanigos sur une tauble, et bien loiier ; Foi. ct r«.
et ly fist sour le dos talhir I coroie de son cure 8 IIII dois large, et del chief
jusques aux pies; et puis fist la plaie laveir de vinaigre, et apres bien saleir
de vief chaux, et lassier enssi jusqu'a lendemain qu'ilh fist talhier une aul-
tre, et refaire toutes les sollempniteis deseurdites, et enssi de jour en jour *
jusqu'a IX jours; et li faisoit donneir a boire et a mangier, por medicine
confortative , electuars qui le sortenoient en vie. — Apres IX jours, le fist Grant martyr <u roy
Julius pendre par les cheveals 7 a une pileir, et li fist I jour traire tous les
dents de la bouche a tenelhes d'achier. Apres li fist sachier lout la barbe ,
une pou a cop % et osteir toutes les ongles des pies et des mains par forche.
Apres li fist colpeir la langue et les dois orelhes, et creveir le yeux. Apres
1 Terme effectivement assigne a la duree du pre- * Cuir, peau.
mier triumvirat. • Et enssi de jour en jour une coroie. B.
* Degas tat. B. * Cheveux. Ce mot est souvent ecrit cheveais ,
• Et li oit a donneir si grant tressoire qu'a mer- forme restee en wallon.
velhe. B. » Un peu chaque fois, a chaque coup.
4 Cest-a-dire en sut
28
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218 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
li fist copeir I brache * deleis 1'espalle , et buteir * en la plaie unc chaut fier.
Adont ne pot plus vivre, et morit de grant angosse. Et puis Julius li fist
trenchier le chief, et puis ardre en poure, el le fist jetteir al vent desus la
mere. Chu fut la grant justiche et venganche que Julius Cesaire prist del
Dc '«»•«• roy Hanigos de Bretangne, por la mort de son oncle le roy Theodogus de
Barbastre.
Et quant Julius oit chu fait, si donnat la royal me de Bretangne a Theus ,
unc sien chevalier, por tregut paiant aux Romans d'an en an. Et puis soy
partil Julius, et s'en alat chevalchant awec ly * ses gens vers Allemangne,
et passat le Riens. Si fist faire sour le Rien 1 pont mult beal, la ilh posist
passeir al retourneir, et y laissat gens pour 1'ovraige a parfaire. La conquist-
ilh mervelhes de pays, assavoir : Transalpine, Cysalpine et Yliriche *, qui
sont trois grandes regions, et les metit aux tregut des Romans, enssi com
i>« cue. Suetonius dist en ses croniques, la ilh dist plainnement la maniere \ Cheaux
de Galle sorent chu que Julius Cesaire conquestoit toute Allemangne, qui
ne pot oncques estre conquise, si sont enbahis, car ilh ont doubte que ilh
ne retourne sour eaux. Si ont mandeit aux Germains et aux Allemans
alianches contre Julius, et les oat obtenues, et, se ons les mandoit, que ilhs
juiius conquests les yroient aidier. — Et Julius at conquis la citeit d'Aggrippine, que ons
nom maintenant Gollongne; et se conquist Hongrie, Bulgarie, Pannome,
Frise, Saxongne, Dannemarche, Hollande, Zelande, Trive, Mes, Tongre et
pluseurs altres, qu'ilh metit tout en la subjection des Romans par tregut.
Et y metit HI ans al conquere tout chu deseurdit, car ilh ne les conqueroit
mie si legierement, com nos le disons. — Apres entrat Julius en la terre de
Galle, qui ors est apellee Franche, sor Fan V c et XXXVI. Si astoient ja
passeit HIT ans qu'ilh astoit partis de Romme, se que ilh n'avoit que I seul
an a demoreir des V ans que les senateurs ly avoient donneit de terme; si
fut mult esmaiies de raleir vers Romme, ou de demoreir en sa conqueste
et conquere avant; car ilh avoit troveit si fort gens et pays, que dedens la
certain terme luy statueit ilh ne le poroit faire.
Dejuiiui en Gaiie. Adont s'avisat Julius que ilh ne retourneroil point a Romme, si auroit
faite sa conqueste en Galle. Si entrat ens, et commenchat a ardre et exiliier
1 Unbras. * O fay. B.
* Mettre. Prononccz bouter, mot qui se trouve 4 Illyrie.
dans Roquefort. * Mateire. B.
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LIVRE PREMIER. 219
toute le pays; et y sorjouraat bien V ans et 1111 qu'ilh avoit ja esteit, chu
fut IX ans. Et ly dus Yborus assemblat grant gens, si soy combattit plu-
seurs fois aux Romans; mains les Romans n'awissent point de poioir aux
Sycambiens, se Julius ne fuist la qui tous les desbaretoit; car ilh astoit tant
poisans, fors et hardis et victorieux, que quant ilh astoit armeis sour unc
cheval, et ilh entroil en batalhe, ilh faisoit ses annemis reculeir demy-
bonier, et les faisoit fuyr. — Chis Julius prendoit en une batalhe I chevalier
de ses annemis, a queile costeit que ilh le voloit choisir, conlre la volenteit
de tous ses annemis, et l'emportoit fours de la batalhe. Ilh resembloit asseis
de forche et de proieche Ector de Troie; mains Julius avoit encor plus de
sens et de manires en ses fais. — Grant estour oit le journee entre le consule
Julius et le due Yborus et leurs gens; mains ilh ne soy poioient conquere. Foi. ci t *.
Si demorat enssi Julius Gesaire en Galle V ans, anchois que ilh le poisist
avoir conquis. — A eel temps , assavoir 1'an V c XXXVI I , s'emmuit une grant G»«t guere entre c«-
guere entre Carsus *, le comte de Surie, qui astoit li uns des III consules de
Romme, d'onne part, et les Turs' de l'autre part. Si avient que Carsus
vient en Jherusalem; si astoit informeis que ilh avoit mult grant tressoire
en temple Salmon demoreil deis al temps David et Salomon. Se le prist tout
et 1'emportat, malgreit les Juys et l'evesque Hircain. Puis soy partit de Jhe-
rusalem , si entrat en Turquie, et assegat la citeit de Carres 5 , qui astoit mult Cmw assegie.
forte, et tant y demorat qu'ilh astoit bien pres del prendre; mains li sires
de la vilhe, qui fut mult saige prinche qui astoit nomeis Abdos, chis savoit
bien en partie del nature * que Carsus avoit de convoitiese dor. Se vient a
luy, et li dest que s'ilh se voloit del siege partir, que ilh li donroit tant d'or
que ilh n'en demanderoit plus. Et ilh respondit que ilh le prendroit volen-
ti™, et se soy parteroit del siege.
Abdos entendit chu; se li dest qu'ilh entrast en la citeit luy thiers des
hommes de son secreit conselhe ', car plus n'en y entroit , et ilh ly mons-
teroit volentiers son tressoir, et ly tenroit convent. Et chil le fist, car ilh y i grant trahiwn.
entrat luy thiere des compangnons; et Abdos fist les portes fermeir, et luy
1 Crassus toujours, Fun des triumvirs. 4 La nature. B.
* Les Parthes sans dou.e. * C'est-a-dire avec deux de ses conseillers ,
• Carrhce est en effet le lieu ou Crassus fut de- trois en tout, lui compris.
faitettud.
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220 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
loiir * sour I tauble, et puis fist fondre en I crissoul * del or, et li fist jetteir
en la bouche tout bolant, etpuis li dest : c< Cars us, or t'ay prom is, et or te
» dong a honte % et se plus en vues , se le demande , car tout chu que tu en
» demanderas, tu 1'aras, car je tu lay enconvent. » Enssi disoit Abdos;
mains Carsus n'en demandat plus, et ne poioit parleir, car ilh moroit; et
Coment Canus morit enssi fut mors par convoities. — Si fut apres luy esluit en Surie, por le pays
gardeir, uns prinche qui fut appelleis Cassius; mains Pompeyus ne woult
souffrir que celle election fust confirmee a Romme, fours com conte de
Surie, et non mie consule; car ilh ne voult nule aultre consule eslire, se
seroit retourneis son compangnon Julius Cesaire. Et chu faisoit Pompeyus,
porlant qu'ilh ne voloit nulle consule en lieu de Carsus; car il avoit ja trait
partie a Romme entre les senateurs que ' Julius Cesaire avoit forfaite le
siene, car ilh avoit esteit plus de V ans, et avoit desobeit aux Romans, si
perderoit son honneur; si que Pompeyus, quant ilh retourneroit a Romme,
si 1'enchaceroit et rengneroit tou seuls consuls, si soy feroit coronneir a
emperere; et enssi demorat li tiers sens esliere.
De juiius qui cooques- Julius Cesaire chevalchoit fortement par Galle et Borgongne, en Avergne
et en Elymosin \ Si avient que Tan V c et XXXVIII, en mois de may, ilh
conquestat Lymoge, la citeit, et tout le pays altour, et le mist par tregut
el subjection des Romans; et si entrat en pays avregnsas, si conquist Cle-
remont, en mois de septembre eel an meismes, et tout le pays, et le mist
en tregut des Romans. — Et vient en Galle Tan V° et XXXIX, si assegat la
citeit de Lutesse qui mult astoit forte tant com de fosseis, car adont n avoit
aultre fermeteit. Par-devant ceste citeit seit longtemps; et oit pluseurs
batalhes contre le dus Yborus et ses horns. En eel an meismes morul
Ardax *, li IX* roy de Dannemarche; si regnat apres son fis Ogeus LVI1 ans.
Item, en eel an meismes, morut Pollox, le VI 1° roy de Hongrie; si regnat
apres luy son fis Hongres XIII ans. — Item, Tan V c et XL, le XllU e jour
de june , oit batalhe entre les Romans et les Sycambiens , en laqueile li dus
Yborus perdit LX m hommes, qui ne porentendureir la forche Julin Cesaire.
1 Pour later, lier. donne a honte.
* Un creuset. [/expression employee par Jean 4 Car dans le senat s'dtait deja forme un parti
dOutremeuse est formee da latin croscllus. V. Du- poor soutenir que, etc
cange a ce mot * En Auvergne et dans le Limousin.
5 Cest-a-dirc : je t'ai promis de Tor et je t'en • Audax. B.
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LIVRE PREMIER. 221
Si fut Yborus desconfis, qui senfuit a petit compangnie jusques sour le Dei dus Yboru*.
mont de Laon. Sour eel mont avoit une forte vilhe que I chevalier, qui oit
nom Landinus, avoit fondeit par-devant. — Et quant Julius Cesaire veit la
desconfiture, et que la victoire astoit a luy ', ilh entrat, luy et ses gens,
dedens Lutesse, se le conquestat et le mist en la subjection des Romans par
tregut. Apres li fut raconteit comment ly dus Yborus astoit fuys sor le mont
Landinus*, se mynat la ses oust. — Si avient que sour 1'an V c XLI, en Foi.6*r«.
mois de jenvier le XXII e jours, ly dus Yborus qui n'avoit mils gens et point
de vitalhes soy rendit a Julius Cesaire, salveit sa vie. Adont fut fait une
acorde que ly dus Yborus remanroit due, mains chu seroit parmy tregut
paiant aux Romans. Puis s'en ralat Julius vers Romme, et quant ilh vient
a Romme , si trovat les portes douses.
Sour 1'an V c et XLI1, le XVI e jour du mois de junne, revient Julius
Cesaire a Romme, qui quidoit trop bien estre fiestoyez por lez mervelheux s
conquestes et vicloirs qu'ilh avoit faite; mains ilh trovat les portes douses.
Et chu avoit fait Pompeyus,qui voloit demoreir tout seul consul por regneir
com emperere, sicom dit est. Quant Julius veit chu, si assegat la citeit de J«i*«* »««*»* Romme.
Romme, par teile manere que nuls n'en oisoit yssir fours dedens XV jours.
— Et adont assemblat Pompeyus ses Romans qui astoient de sa faveur; car
Julius avoit grant partie dedens Romme, et disoient qu'ilh astoit digne
d'eistre emperere, qui avoit tant de pays conquesteit a une fois, et avoit les
Sycambiens remis en la subjection des Romans par forche, que les aultres
devant luy ne porent oncques faire. Et Pompeyus n'entendoit pais a ches
parolles; ains assemblat XL m hommes a piet et a cheval cent milh. Et
Julius en avoit rameneit des LX m qu'il emynat XLVH m , et se Fen vient del
royalme des Latins XL m ; chu furent dois grans oust. — Et Pompeyus issit
de la citeit tous rengiens ses gens ; et Julius rengat les sienes, quant ilh les
veit. La oit une horrible et pesante estour; mains Pompeyus fut desconfis
et senfuit. Et astoit adont le promier jour de quintel; se 1'apellat Julius por De mois de juiiet.
eel belle victoire : ch'est li mois de jule, et encor le nom-ons enssi. Et enfuit
Pompeyus par le Thyre en Aisie, puis repassat en Gresche, et laisat Aisie,
car Julius y avoit trop de bienveulhant. — Et quant ilh fut en Gresche. si fist
1 Astoit desa part. B. * Oribles. B.
1 Laon toujours, en latin Laudunum.
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222
CHROMQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Tongre.
De Lemhor.
De Viseit.
Serang.
Grant batalhe entre Ju
tius et Pompeyus.
tanl al roy qu'ilh li prestat ll c milh homines, si vient el les amynat en la
Ju EmMh n u terre dc * erre ^ e Emath ' ; et Julius , qui astoit recheus par les senateurs , a Romme,
entendit la novelle de Pompeyus, si assemblal C m hommes, et alat encontre
luy en la terre de Emath. — En eel an meismes, assavoir en la batalhe de-
sedro* ,ie mi* roy de vant Lutesse , fut ochis par Julius Cesaire Tongris, le HI roy de Tongre;
si regnal apres son fis Sedros de la filhe le due d'Ardenne, c est ly due de
Lembor f , dont la ducheit d'Ardenne ly esqueit apres la mort le due, sique
Sedros avoit grant terre qui s'extendoit de Rains jusqu'a Trive en Alle-
mangne, et regnal XXV ans. Si fut plains de proieche et de chevalrie, et
amatson peuple loialment;et faisoit aux estrangnez qui venoient habiteir
en son regne grant cortoisie et ayantaige. — Chis fondal la ville deTaxan-
drine , c'on nom maintenant Viseit sour Muese; et fondat Tiules et Meriwe *
sour Ourte la riviere, et Serang 4 sour la riviere de Muese, et habitoit la
volentiers.
Julius vient atout ses oust en la terre de Emath, ou Pompeyus astoit;
si soy corurent sus. Et la fut la plus grant batalhe et oecision d'hommes,
d'unne part et de l'autre, qui fust puis le temps Hanibal de Cartaige. Mains
Pompeyus fut desconfis, et VI" milh Grigois ochis. Et Julius perdit XL m
Romans. Adont s'enfuit Pompeyus oultre mere en Egypte; se trovat que
le roy Plholomes astoit mors dois mois devant sens heures. Si astoient les
barons en grant discort del eslire I roy; car ly une partie voloit avoir Ebron,
et ly altre une altre chevalier, qui astoit fis a Jonea, soreur a Ptholomes.
A eel discort vient Pompeyus, a cuy ons fist grant reverenche, car ons le
tenoit a saingnour de Romme; se ly dissent qu'ilh donnast la royalme ou
ilh li plaisoit miez. Et ilh le donnat a chevalier, dont Plholomes astoit
oncle, liqueis fut nommeis li XII e Ptholomes, si regnat XIX ans. — Adont
s'avisat Pompeyus que ilh auroit bien socour al roy Ptholomes , par ses
gens con t re Julius Cesaire; se li requist pasieblement que ilh li voisist
assembleir ses gens, car ilh voloit aleir conquere cheaux d'Athennes, qui
astoient rebelles. Et chu, disoit-ilh, portant qu'ilh ne voloit mie que Tho-
lomes 8 sawiste la guere entre luy et Julius. Se li otriat volentirs tantoist.
Pompeius s'enfuit en
Egypte.
1 L'£mathie, district de la Macedoine situe au
fond du golfe Thermaique. II s'agit de la bataille
de Pharsale; mais Pharsale se trouveenThessalie,
cl non en Macedoine.
* Limbourg.
« Probablement Tilff et Mery.
4 Seraing.
s Pour Ptholomes, comme plus haut.
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LIVRE PREMIER. 223
Et enssi qu'ilh mandoit ses gens, li dest 1 chevalier de Rom me, qui astoit Foi. cav<».
a wee Pompeyus meismes, la guere de Julius et Pompeyus. Et por chu soy
dobta Ptholomes qu'ilh n'awist mal fait de chu qu'ilh I'avoit tant sourtenut
contre Julius Cesaire, et que Julius ne quidast qu'ilh sewist le debal *, et
qu'ilh vousist aidier Pompeyus contre luy» — Encors ne passat gaire apres
que uns chevalier d'Egypte revient de Romme, et racomptat al roy Ptho-
lomes que Julius assembloit grant gens por venir sour luy ; car ons li avoit
dit qu'ilh sortenoit son annemy Pompeyus. Quant Ptholomes entendit chu ,
se ne li soit conselhier f , puis s'avisat; si prist une espee, se vient pasieblc-
ment et ochist Pompeyus ou illi dormoit, puis en prist la tieste, se l'eiivoiat Pompeyus r u t mour
a Julius Cesaire. Et quant Julius veil chu, se pardonnat a Ptholomes son
ma talent, et retournat a Romme : chu dist Tytus Livius. — Mains Plinius
dist aultrement, car ilh dist que quant Julius Cesaire veit le chief Pom-
peyus, qu'il plorat por la grant chevalrie de Pompeyus, et gueroiat Ptho-
lomes, se le voult pendre ; mains li acors se fist entre eaux, se revient adont
Julius Cesaire a Romme.
Adont revient Julius Cesaire a Romme. se fuit hays de cheaux qui
amoient Pompeyus, et fut ameis de cheaux qui amoient chevalrie et tous
les fais que Julius savoit faire. Que vos diroit-ons long compte? Ilh fut
racompteit a Julius que Pompeyus avoit fait et conselhiet chu que fais
estoit, portant que ilh voloit demoreir seul consul et de luy faire emperere.
Sique Julius, qui ne s'avisoit mie de teile chouse, dest-ilh, puisqu'ilh
astoit demoreis seul consule, par cesty meismes raison ilh devoit eistre juiius cesaire fut co-
emperere. Et adont soy fist-ilh coronneir com emperere par les senateurs ronne,s cm P crere -
meismes, qui. amoient plus Pompeyus mors que Julius vief. — Or fut Ju-
lius coroneis a emperere, et regnat par forche; et fist ses oflichiens de ses
annemis les amis Pompeyus. Si soy vengat d'eaux mult bien , car quant ilhs
l'avoient desservit 8 , ilh les faisoit pendre ou coupeir les chiefs. Enssi soy
vengat-ilh deses annemis, et toutvoie ilh en demorat toudis asseis, car Pom-
peyus s'avoit fait bien ameir, et ses amans ne le porent oncques relenquir a
vie ne a mort. — Item , quant Julius fut coronneis, ilh avoit d'eaige LVI ans.
1 Je corrige ici <f apres le manuscrit B. Notre * Si ne se soit conselhier. B.
texte porte : et que Julias ne sewist le debat, ce qui * Ce root manque dans notre textc. Je le sup-
donne un sens incomplct. plee d'apres le manuscrit B.
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224 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Nos trovons bien des croniques qui dient que Julius Cesaire morut al LVI e
an nee de 6on regoe ', mais nos trovons des altres qui dient qu'ilh fut coron-
neis a emperere de Romme al LV1 an de son eaige, et regnat puis com
emperere V ans. — Item, la promiere chouse que ilh fist, chu fut que ilh
geltat de prison Aristoble, roy de Judee, que Pompeyus avoit condampneit
en chaitre perpetuee. Se le renvoiat en Judee, et li donnat milh hommes por
reconquesteir la terre; mains entres les milh hommes oit des amis Pom-
peyus, qui haioient Aristoble portant qu'ilh as t oit en serviche de Julius
Cesaire, qui avoit leur saingnour fait ochire. Si donnarent Aristoble del
Dc Ariuobie mort pir venyn a boire, dont ilh morut , et puis le misent sour terre ou les salvaiges
biestes le mangnassent; mains Anthoine, le senescal de Surie, le fist hono-
rablement enbasmeir et ensevelir com roy.
Nos vos avons deviseit eomment Julius Cesaire fut emperere de Romme,
qui commenchat a regneir fortement. Se entendit que les amis Pompeyus,
qui habitoient en Espangne, soy combatoient auxamis Julius, et disoient
juiius en Espangne. qu'ilh avoit fait morir Pompeyus malvaisement contre raison ; si chevalchat
Julius la, et leur fist tous colpeir les tiestes, et puis revient a Romme. Et
ne demorat puis gaires que Alixandre, li anneis fis Aristoble, fut ochis en
la citeit d'Antioche, de Commangnez * le sangnour de Antyoche, qui en
avoit oyut lettres de part Pompeyus a son temps, qui faisoient mention que,
queil part que Alixandre fust troveis , qu'ilh fust ochis sens plus atendre. —
Et Antygones, li frere Alixandre, s'enfuit, awec ly ses soreurs, demoreir
a I valhant prinche, assavoir Ptholomes, roy de Nubie, qui les retient et
Foi. 63 v. prist a femme Alexandrine , la jovene soreur , qui mervelheusement as to it
belle damme. De celle damme oit Ptholomes 1 fis qui oit nom li Saisnes,
DeJi.eru5»i e ni. qui puis fuit prinche de Abynie 8 . — Item, 1'an V c el XL11I, vinrent grant
partie de gens devant Jherusalem, dont Hircain astoit sires. Si avient que
Antypater, dont jay fait deseur mention, astoit en Jherusalem, por nun-
DAntipaier. chier a Hircain le mort de Aristoble son frere. Adont assemblat Antypater
toutes les gens qu'ilh pot avoir en la citeit de Jherusalem , et issit fours de
1 De son eage. B. celui de Fl. Joseph., liv. XIV, chap. 44 a 44. U y
* Concongnez. B. C'est Scipion qui fit mcttre a a sans doute encore ici un nom de pays, Comma-
mort Alexandre, fils d'Aristobule. Du reste, sur gene, substitue a un nom de personne.
cette periode dc rhistoire des Juifs, il faut contrd- * Sans doute pour Abyssinie.
lcr le recit dc Jean d'Outrcmeuse au moyen de
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LIVRE PREMIER. 223
la citeit, et corit sus les annemis, et les desconfist. Et tant fist-ilh que
Julius Cesaire oiit parleir de sa proieche et de son sens; se ly mandat que
ilh alaist en Egypte pour prendre le casleal de Predos ' , qui astoit si fors
qu'ilh guerioit bien le pays tout entour. — La fut envoyes Antypater, et
awec ly le roy de INubie Plholomes, qui avoit a fem me la plus jovene filhe
Aristoble, jasoiche que Antygones le frere le royne hayst Antypater, car ilh
avoit, chu ly sembloit, tousjours esteit de conselhe Hircain son oncle, a
I'encontr$ de son peire, et quidoit que Antypater euwist fait ochire son
peire; et de chu le rechitat depuis par-devant Julius de trahison, enssi com
vos oreis chi-apres.
En eel batalhe dont je fay mension le fist si bien Antypater, que par tout D i f h n ^P a ^ ll c ^E menl
pays fut parleis de sa proieche; et fist tant que ilh conquist les Egyptiiens, *>«"•
et les remist en tregut des Romans. — Apres chu entrat chis Antypater en
le haulte Egypte, ou ilh soy combatit aux Egyptiiens maiour. Et fut si
dure cede batalhe et tant pesante, et y oit mult grant occhision d'hommes
d'ambdois parties. Et la souffrit Antypater tant de paines que sa chair fut
sy plailee ' de glaives, d'espeez et de cuteals, que cascons qui le veioit disoit
que ilh moroit; et combien qu'ilh fuist enssi navreis, conquist- ilh les
Egyptiiens et tout leur terre. — Apres revient Antypater a Romme, et mist
en la main Julius Cesaire toutes les terres qu'ilh avoit conquis. Et la tes-
mongnarent ses compangnons qu'ilhs n'avoient onques veyut ne oiit parleir
de nul chevalier qui tant ewist fait de fais d'armes; et portant fut-ilh si bien
ameis de Julius Cesaire, que ilh faisoit de luy tout chu qui li plaisoit. —
Chis Antypater fut ly plus prisies de la court l'emperere; et puis apres li d« »» proieche Anty-
gueredonat ly emperere mult bien son bon serviche, enssi com vos oreis; et
otroiat aussi ly emperere, por l'amour de ly, a Hircain et a ses heures le
royalme de Judee. Et quant Antygonus li fis Aristoble le soil, se vient a
Romme et soy plandit 8 de ly a I'emperere, en disant qu'ilh avoit faire ochire
son peire Aristoble et son frere Alixandre en trahison , et par son conselhe
ilh avoient esteis mors. Quant Antypater oiit chu, se salhit en piies, et
dest qu'ilh astoit bien garnis de bons tesmons, par lesqueiles ilh proveroit
qu'ilh n'avoit faitenvers ly nul trahison, ains avoit esteit loialment en le
1 Sans doute Tile de Pharos , a. l'embouchure * Plutot plaiec comme porte le manuscrit B.
du Nil. * Clamat. B.
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226 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
serviche Femperere. — Adonl soy partit Antypater de la saule, et les altres
comment monstratiih quidoient qu'ilh alast quere des chevaliers pour ly tesmongnier et descul-
peir; mains ilh soy devestit tous mils, puis revient en monstrant al erape-
rere et a tous ses barons son corps qu'ilh avoit deplaileit * et detrenchiet en
pluseurs lieu % sique les cicatriches y aparoient; et dest que tout chu avoit*
ilh souffert pour l'amour de I'emperere et des Romans, quant Antygonus
astoit fuys en aultre terre. Adont dessent tous les chevaliers que li ouvre s
et la loialteit se monstroit bien. — Quant Femperere veit chu , se fist Anty-
pater senescaul * de Judee, et donnat a Sixte 8 , 1 sien chevalier et cusien, la
saingnorie de tout Surie entirement, et a ses heures apres luy. Adont priat
Antypater refist let Antypater a Femperere que ilh li plaisist que ilh redifiast les fortereches de
Judee, par tout ou ilh avoient esteit abatues; et ilh ly otriat. Adont revient
Antypater en la terre de Judee; el instablit tantoist son anneis fis Fasias*,
De Fasias et Herode conistauble de Jherusalem desous luy, et Herode son aultre fis prevoste
qui furent freres. ^ ' *
de Galilee. Ghis Herode fut mult preux en armes, et fut fels et crueux.
Chu fut chis qui fist ochire les innocens, enssi com vos oreis. Et puis fist
D ^ ai * vi y i,e » quant Antypater porteir coronne com roy. — A eel temps, soy partit Virgile, le
fis Gorgile le roy de Bugie, des escolles, portant qu'ilh n'avoit clers ne
Foi. 63 %•. maistres , en tout Libe 7 ou ilh avoit apris , que Virgile ne rendist contre luy
raison de toutes questions, de queile scienche que chu fuist; et oppoisoit
contre tous les plus grans maistres, qui meismes Favoient apris chu que ilh
Dei renue virile en savoit awec sa subtiliteit. — Chis Virgile fut 1 mult belle personne. Si soy
roy alme des Latins. • 1 • •■■ • • ■ • • %
avisat 1 jour que ilh voiroit aleir quere a venture; si montat sour mere a
grant compangnie, et nagat tant que Faventure l'aportat en la royalme des
Latins. Et astoit ly roy oncle de Julius Cesaire, et la li fut compteit la
nobleche de Julius Cesaire, tant qu'ilh dest qu'ilh yroit a Romme. Et fut
le secons jour de septembre, sor Fan V c etXLHII; puis soy partit et vient
a Romme le XVIII jour de mois de fevrier. Chis Virgile fut mult gran clers
virgile fut propheie.et de toutes scienches, et fut des septes ars mult expers, et fut 1 gran phi-
propheluat del mcar- 7 ,.„.*.. jmi
nation jhesu Crist, losoplie et naturiens 8 ^ et fut en la sainte Escripture si vraie, quilh pro-
1 Plaiet. B. Joseph, XIV, 47. Ce chap. 17 doit servir a con-
1 En mains lis. B. troler encore ici le recit de notre chroniquetir.
8 Louvre. * Phazael.
4 St otriat Anlipatcr le senescachie. B. 7 La Lihye.
5 Sextus Cesar, gouverneur de Syrie. Voir FI. * Naturaliste.
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LIVRE PREMIER. 227
phelisat la venue del incarnation, enssi com vos oreis chi-apres. Et fut awec De M £««*»•<>»•
chu ly mies neis, et de plus grande noblece qui fuist a son temps en monde;
et si astoit ly plus beals de corps que ons posist regardeir, drois, grans, gros
et alignies, fours tant que ilh astoit curbes f , car ilh bassoit les espalles et
le chief I pou. Et fut de tous bien ensengnies, douls, debonnairs, frans
et humble; et se soy faisoit ameir de cascons; et savoit parleir de tous ^tViMMigeV^'
langaiges, et n'entendoit a aultre chouse que a studier. — Grant fieste
fist-ons a Virgile a Romme quant ilh fut congnus. Si fut mult bien fiestoiez
de tous, et par especial de Julius 1'emperere et des senateurs; car li pluseurs
as to i en t de son sane issus. Quant Virgile astoit a court, il savoit mult bien
faire honneur aux barons et a tous cheaux de la court, solonc chu aux per-
sonnes apartinoit \ — Et fut Virgile mult prisies de Romans. La novelle de
li alat jusqu'a la filhe 1'emperere Julin, qui par son nom fut apelle Phebilhe, De Phebiihe, u sihc
qui mult fut de Virgile soprise', quant elle oiit dire que ilh astoit si parfais.
— A eel temps multipliat gran debas entre le roy de Trive en Allemangne, De roy de Trive.
et les contes de Agrippine et de Argentine 4 , Basele ', Spire , Warmaise • et
Maienche porta nt que ches VI contes soloient rend re tregut a roy de Trive,
qui longtemps devant les avoit conquesteit par forche et mys en sa subjec-
tion par tregut; et ilhs astoient defallant del payer, portant que Julius Cesar
les avoit conquis novellement et mis en tregut des Romans. Se disoient que
ly roy de Trive les dewist avoir defendut contre les Romans, et ne se pot
defendre por luy-meismes; car enssi bien fut-ilh mis a tregut par Julius
Cesaire , com furent lesdis contes. Et durat cest guere XXX ans que lesdts
contes ne vorent oncques payer tregut a roy de Trive, et se soy defen-
doient fortement. Si avoient sovent batalhe ensemble, et li une fois perdoit
li uns et I'autre fois les aultres. Et durat, enssi com dit est, XXX ans, dont
ilh astoient passeit XII ans; car ilhs commencharent, quant Julius les oit
conquis, sor eel an meismes qui fut V c etXXXU. Si le lairons enssi jusqu'a
tant que les XXX ans seront tous passeis. — En eel an meismes deseurdit,
Phebilhe, la filhe Julien Cesaire, qui 7 amoit Virgile si fort qu'elle ne poioit DeVirgiieetPhebiihe.
1 Curve z. B. bourg, Jrgentoratum et Argentina.
* Solonc chu que chu cascons astoit. B. 5 Bale.
* £prise. • Worms, en latin Wormantia. **.
4 Cologne , en latin Cotoma Agrippina, et Stras- T Ce qtri doit 6tre de trop.
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228 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
plus, et ne lavoit oncques veyut; mains al oiir prisier la grant bealteit,
sens , man ere, gentilheche et debonnaireteit de ly, elle lavoit enssi enameit.
Si s'avisoit quelle manderoit Virgile, et ly diroit comment el 1'amoit; et
elle astoit tant belle damoisel et si hault de sane, que par raison ilh ne le
devroit point refuseir. Adont prist 1 messagier, si at mandeit Virgile qui
vient tantoist a grant compangnie de noble gens. Et la dammoisel vient
contre luy et le saluat, et Virgile l'enclinat mult genlinement.
Celle at tout mis en aventure et at pris Virgile par le main, et Fat fait
seioir de coste lee \ et parloient ly uns a l'aulre et tant quelle dest : « Sire
» Virgile, dites-moy se vos aveis amie; car se vos me voleis avoir *, je suy
» vostre por prendre a femme ou estre vostre amie; s'ilh vos plaiste. » Et
chis ly respondi t qu'ilh n'avoit nulle entente de femme prendre, mains, se
Foi. 64r«. chu astoit son plaisier, ilh lameroit volentiers. — Tous les parleirs qu'ilh
orent ensemble ne say pas racompteir, mains la chouse alal tant que Vir-
gile fist de la damoisel tout son plaisier, et mynarent leurs desduit a gran
comment virile es- joie 1 pou de temps. Puis avient que Phebilhe requist encor Virgile de lee
prendre a femme, mains Virgile ly escondit, de quoy elle oit grant despit;
mains elle le dissimilat, et pensat a chu que elle le puist escarnir 8 . Mult soy
dementoit * Phebilhe tos les jours ; mains Virgile ne donne une nois , car ilh
n'at aultre entente que del studier tousjours, et de monstreir sa scienche
aux Romans, dont ilh powist avoir honneur. Se le requist Phebilhe une
autre fois de le prendre a femme , et ilh respondit que enssi esteir ilh plai-
soit bien, et le serveroit et lameroit bien loialment; et n'avoit en monde
femme qu'ilh emast tant com lee 5 ; et s'il avenoit par aventure qu'ilh pre-
sist femme a espeuse, ilh ne prenderoit aultre de lee; et chu faisoit-ilh por
le a reconforteir, et elle en chu mult soy desconfortal \ Enssi demyna-
rent leurs amours mult longtenxps sens gabries 7 . - Apres, sor l'an V c et
XLV, le XIX e jour de mois d'avrilh , commenchat Virgile a demonstreir a
Des n iiomme* «ie Romme sa scienche, en faisant promiers II figures d'erain, qui avoient
fourme d'homme, qu'ilh mist sour II portes de Romme, regardant li une
1 Seoir de jouste. B. * Femme amee de luy fors lee. B.
* Ameir. B. • Et elle en chu reconfortat mult. B.
* Eslaurir. B. Ce mot ifa pas de sens, et noire 7 Sent voisdre. B. Ce mot est sans doute le meme
version est la bonne. que voisdie et bo is die qui sont dans Roquefort.
4 Dement e. B.
condit Phebilhe.
erens.
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LIVRE PREMIER. 229
l'autre : et tenoit li une une mache que ilh jettoit l'autre le samedis a none;
et (autre samedis apres, enssi a none, li aultre li rendoit, et enssi de Tone
samedi a l'autre, toutes les ouwetaines f , li rendoit li une l'autre celle mache;
ilh sembloit que ilhz fussent en vie; et chu astoit par astronomie, et par
1'art de nygromanche awec.
Virgile fist les dois ymaiges, portant que ilh voloit que tous ovrieres soy
relassent* d'ovreir le samedis a none et le dymengne, enssi que Dieu fist
quant ilh ordinat le monde , car ilh oit parfait le samedy a none. Et les
gens de Romme faisoient adont leur ovraige le samedy jusques a la nuit. —
Apres, sor Tan deseurdit, le XVI e jour de mois d'awost, commenchat De myreur vir g u*.
Virgile a faire une thour a Romme, sor laqueile ilh astoit 3 une myreour *
sour cent pilers de marbre; et par cede myreour ons veioit bien quant
gens d'armes ou aultres venoient sour mere. Se cheaux de Romme ewissent
bien gardeit eel myreour, ilhs ewissent esteit a tousjours les soverains de
monde; mains ilh leur fuit destruis. — Item, Tan V c et XLVI, morut Sar-
lagonus, li VII e conte de Flandre; si fut conte apres luy son fis Florent,
qui regnat XVI ans. En eel an meismes, en mois de may, fist Virgile a
Romme I mult beal joweal ', portant que ons li avoit conteit des Sycam-
biens et de Hanibal de Cartaige et de mult d aultres gens qui venoient
a Romme subitemenl, que ons n'en savoit riens, dont les Romans astoient
sovens dechus. Si mist Virgile a chu remeide en teil manere : ilh fist Deca P itoieetd«>ma-
1 capitole a Romme ou I temple en une seul nuit, ou ilh avoit ortant des
ymagenes qu'ilh avoit de provienche 8 en monde. Et avoit casconne ymaige
a son coul pendant I ten ten te 7 ; et avoit casconne ymaige emy le front,
entres les dois yeux, escript le nom de pays cuy ilh representoit. Si astoient
tout altour de palais les visaiges tourneis vers l'ymaige I'emperere, qui astoit
tout emy le palais sour une scolumpne 8 , et faisoit visaige 9 tout entour l0 ;
et s'ilh avenoit que aulcon region fuist rebelle aux Romans, son ymaige
* Huitaincs. • Province.
1 Se rel&chassent, cessassent de travailler. 7 Sonnette. Nous avons deja rencontre cette ex-
* Ilk assist. B. pression.
4 Miroir enchantc dans lequel se repcrcutaient 8 Us doit dtre de trop, et i) faut lire columpne.
des faits qui se passaient au loin. * C'est-a-dire regardant.
* Bijou, et par extension ici une chose deprix. ,0 Si astoient tout altour le palais sour une co-
Juel dans Rocquefort. lompne, et faisoit visage tout entour. B.
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230 CHRON1QUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
%?rgiic eit enten que tournoit ie dos lymaige de l'emperere, et sonoit son tentent, et espandoit
la terre que iih tenoit en sa main. Et les gardes qui a chu pensoient ' le
disoient aux senateurs , qui tantoist y envoient les chevaliers a chu ordineis
por corregier eel region, en teile manere que jay fait mention deseur * ou
jay parleit des capitoiles de Romme. Et enssi savoient les Romans leur
grevanche , enssitoist que li pensee venoit aux rebellians. Et chu estoit fait
par nigromanche.
D VbaTnX q MJ e v?r- Apres chu fist Virgile a Romme I homme de coevre 5 , seant a cheval , et
gi,e - sembloit al regardeir qu'ilh fuist lous viefs, qui en sa main tenoit I grant
balanche, qui a Romme fist grand bien, car ilh mantenoit veriteit et gar-
doit le droit de cascon; car se I marchant avoit a vendre une marchandise,
et 1 aullre le vosist achateir, queilconques marchandiese que chu fuist, tout
sens prisyer ne offrir, ons mettoit en Tone des bachins de la balanche le
Foi. 64 v. denree, et metoit-ons I'argent en 1'autre bachin; et assitoist que ons y avoit
mis le propre valoir que chis avoir valoit, a eel heure ly bachins a pris
d'argent avaloit vers la terre; et adont prendoit cascon chu qu'ilh devoit
prendre, et enssi ne perdoit oncques marchans a vendre ne al achateir. —
Grant fieste fail k vir- Grant fieste fist Julius Cesar, et les senateurs et tous les aultres de chu
que maistre Virgile avoit fait, et disoient qu'en monde n'avoit homme de
si grant scienche 4 . — Ilh avient I jour que les senateurs de Romme devoient
rendre I jugement; si mandarent Virgile et li dissent leur jugement, solonc
1'usaige qu'ilh avoient adont a Romme; et Virgile leur blaymat mult eel
usage, se les ordinat loys certains plus a droit ' que li leur n'astoit, chu
dest-ilh; si en usarent a Romme. — Item, une aultre fois mangnoit Vir-
gile enlres les senateurs; se ly demandarent por solas dont ilh astoit neis.
Dei nobie generation Et ilh leurs co in p tat tout sa nation, enssi com nos l'avons compteit devant,
de quoy ilhs furent mult esjoyes, car ilh y avoit des senateurs qui astoient
cusiens germain a Virgile, fis de leurs oncles. Adont li priarent que ilh
presist terre et fesiste habitation por luy a demoreir ; et tant li priarent que
Dei mauon virgile qui ilh at fait une rechet, lequeile ilh apellat Casdrea 6 . Adont en furent tous
fut fait en 1 nuit. . ...
ses amis mult lyes ; chu fut la plus belle maison et ly myes edifiie qui fust
1 Faisaient attention , veillaient. 4 Homme de son sens. B.
* Voir p. 69. * Plus justes.
* Cuivre. • Plus loin Cassedrue.
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LIVRE PREMIER. 231
a Romme de chu qu'ilh tenoit, et fut fait en une nuit Et lendemain, quant
ilh mangnoient ensemble a baptisier la maison, si demandarent entre eaux
qu'ilh donnast a entendre alcon chouse de son sens, de secreis de vivre { ,
qu'ilh le metissent en leur memoire.
Tant Font priet qu'ilh leur dest ensi : « Barons, vos demandeis que je
» vos die chu que vos ne creieis point, et je le vos diray bien temprement,
» quant temps sierat. » De celle response furent les senateurs contens. —
En eel an meismes, le Xll e jour de jule, fourmat Virgile tout emy Romme
1 gran feu qui toudis ardoit, por les povres gens a aysier; mains nuls n'en De f«. u que vi^iie n>%
poioit prendre feu a cheli, fors que por ly a chaffeir et ses viandes cuires;
et fuit fais por dureir a tous jours mais *. — Et par-deieis le feu avoit fait I
ymaige d'on vilain de coevre, tout droit stesant sus ses pies; et tenoit unc Deihommederainqut
dart entenseit ' et I arch qui lignoit droit vers le feu, et avoit escript entre rfl e
ses dois yeux. :
Qui me fierat tantoist traray ,
Et tout le feu estinderay.
— Adont alat la novelle parmy Romme, tant que Phebilhe le soit; mains
chu ne li plaisoit mie, car tant plus l'oiioit prisier, tant plus se dobtoit de
li perdre. Et astoit jalotte 4 d'onne aultre femme qu'elh quidoit quiamast DePhebiihcquiastoii
Virgile, et Virgile lee, et por chu le desdangnast Virgile; si l'amoit-el plus
ardamment com devant. Si oitmult de penseez ordes et vtlaines, et disoit
quelle troveroit volen tiers voie et manere quelle li posist faire despit mult
grans; mains elle le manderoit encors, et li requeroit que ilh le prende a
femme, ou elle arat aultre conSelhe. — Enssi mandat Virgile, qui vient
tantoist; elle li fist grant fieste, et ly dest : « Sire, merchi; ains que vos vo
» parteis de moy, me weulhies dire se vos entendereis a my del prendre
» a espeuse; mon peire moy weult marier, dont je en suy fortement coro-
» chie, car je ne weulhe avoir aultre de vos, jasoiche que vos n'aiez cure
» de moie; se vos prie que moy dite vostre pensee, car je le weulh savoir,
» et ne moy plaist plus a maintenir l'estat que j'ay maintenu s : je suy
1 De secreis del oevre divine. B. M. Felix Liebrecht. Voir aussi dans le Gervaise dc
1 Perpetueement. B. ce dernier une note p. 406.
* Une fleche prdte a partir. Au sujet de cette 4 Jalouse. Roquefort donne jalox.
tradition, voir Dun lop, Geschichte der Prosadich- * Meneit. B.
tungen, p. 186. Je cite la traduction allemande de
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232
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Virgile donne la prali-
quedegangnicrterres.
*)ez XII ymages Vir-
* gile.
Fol. 65 r<>.
De XII mois de Tan.
JenTier.
Fevrier.
Marcbe.
Avrilh.
May.
Juuet.
Julet.
Aw oust.
Septembre.
Octembre.
» belle et bonne assets por vos. » Et Virgile ly respondit : « Damoiselle,
» ill) moy convienl penseir a aultres chouses ', car je ay a faire des beson-
» gnes ardues , et quant elle seront faites , si revenray a vos, et ferons tant
» que les chouses venront bien. » Ghu ploisit bien a la damoselle.
Enssi que ches chouses avenoient, fut Virgile requis des Romans qu'ilh
lour donnast la practique de hanneir * les terres et cultiveir, et leurs donnat
Fart et la practique, qui est ors encors en usaige de faire. Je ne feray mie
mension de tout chu que Virgile fist a Romme, car ilh en est trop, dont les
ensengnes sont encors a Romme apparantes; mains je en diray les plus
notoirs qu'ilh fist. — Item, ilh fist XII ymages de coevers 8 , et les mist sor
les XII portes de Romme, qui signifioient les XII mois de Tan, desqueis
cascon faisoit a sa nature. Car jenvier a godet bevoit, et soy chaffoit a unc
gran feu; si avoit deleis ly le signe de chiel que on apelle Aquarius : chis
est uns hons qui tient unc pot, et versoit fours aighe. — Fevrier talhoitles
vingnes , et II pissons astoient les signes. — Marche semoit les marchaiges '
et sartoit les juxhiers B , et son signe astoit le mouton. — Avrilh venoit
apres, et tenoit en sa main fleurs d'arbres et de herbes; et ly toureais •
astoit son signe. — May astoit enssi com menestreit de vielhes \ et li signes
astoit ly germais bangnant en une cuevre 8 . — Junet astoit I hons tous
chaus, qui colhoit* rouses a fuison, plains les bansteals <0 , car ch 'astoit sa
saison; et li greveche 4I astoit son singne. — Julet tenoit une fachilhe, et
si avoit unc capeal ,f de four ou de fain l8 , et ly lyon astoit son singne. —
Awoust, chis colhoit les bleis, et son singne astoit une virgue stesant
droit, et soy miroit en unc myreur, et tenoit I palme. — Septembre semoit
les bleis, et son signe astoit une balanche. — Octembre colhoit les roisins,
1 Ailhours. B.
1 A hanneir. B. Cette forme, qui est restee dans
le wallon , est preferable a celle de notre texte.
Roquefort donne cependant hannier, laboureur.
La tradition est une allusion aux G6orgiques.
* Cocvre. B. Cuivre toujours.
4 Marsages, grains qu'on seme en mars.
* Sarclait les jachercs, jouxhires encore en He-
gcois.
6 Plutot toreai, qui est reste en wallon.
7 Ccst-a-dire que mai eHait represent^ en cos-
tume de menestrel jouant du violon.
* Les jumeaux baignant dans une cove.
9 Cueillait
10 Diminutif de banse, panier d'osier, manne.
Banse et bansleai existent encore en liegeois.
11 L^crevisse. Encore un mot wallon.
11 Couronne, guirlande. Voir Ducange, y ca-
pellus.
18 Fain doit signifier foin et serait employe ici
pour expliquer le mot four qui a le meme sens, et
est rest^ en wallon.
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Vir-
1III
LIVRE PREMIER. 233
et faisoit le noveal vin, et son singne astoit I scorpion. — Novembre pop- Novcmbre.
toit I porceal a son col, dont ilh fait bacon en son tardier, et li signe astoit
unc sagittaire : ch'est une ymaige k motiS partie ' de cheval et d'homme.
— Et decembre tue I buef, et li signe est unc capricorne. — Ches XII Decembre.
ymagines furent stesantes sour les XII portes de Romme, enssi com dit
est. Et prist I pomme d'achiel * qu'ilh donnat jenvier a Ten tree en sa main
diestre, et le portat XV jours; et puis le mettoit en sa main senestre, et le
portoit jusqu'en la fin; et puis le jettoit a fevrier, et fevrier le portoit jus-
ques en sa fin, sicom jenvier; et puis le jettoit a marche, et enssi le jettoit
ly unc a l'autrc jusqu'en Ja fin de Fan que decembre le rendoit a jenvier. D*jeimer,ie promier
Et ly fut demandeit porquoy ilh metoit jenvier por le promier mois de Tan ,
quand marche astoit ly promier solonc leur loy. Ilh respondit que tem-
prement nasqueroit teil fruit qui remueroit tous les estas , et par espe- Dei pmphetie virgiie.
cial li mois de jenvier sieroit ly promiers mois dedont en avant perpetuel-
ment.
Apres fist Virgiie III1 ymagines de ches XII ymagines et signes qui signi- Des mi ymapes
fient les IIII temps; chu sont : fevrier por printemps, may por esteit, lemps.
awost por waym ou autompne, et novembre por yvier. Por ches IIII temps *
fist une pomme qui le XXII e jour de fevrier le wolt aux II pissons donneir,
qui le tinrent jusque a XXV e jour de may, que les pissons le jettarent aux
germais, qui tant le tinrent que li soleal entre en la virge. Et apres chu est
XXII jours d'awost; et puis se le jettoit la virge qui le tient jusqu'a XXlII e
jour de novembre, qu'ilh le jette le sagittaire, qui le tient jusqu'a XXH e
jour de fevrier, qui le jette com de promier aux pissons. Enssi furent or-
dineis les IIII temps figureis solonc astronomie; mains li engliese aposto-
lique apres poisat a chu certains compas 8 par cause, dont ons at useit
longtemps en Sainte-Engliese. — Apres avient que les senateurs dessent a
Virgiie qu'ilh les voisist aprendre aulconne chouse de son sens, et faire
entendre si qu'ilhs posissent dire qu'ilh avoient apris a luy et de son sens
et retenut en memoire. — Adont fist Virgiie a ches proiers une ymage de l« prophede virgii
coevre, qui avoit la semblanche d'unne virge, qui avoit une lamme 4 emmy
le pis, ou ilh avoit escript en latien chu qui chi-apres s'ensiet en romans :
1 Mi partie. B. 4 Cest le mot latin lamina. Cela veut done dire
■ D'achier. B. que la vierge portait sup la poitrine une plaque
* Ordre. ou se trouvait l'inscription.
30
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234 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Che ymaige chi ne chairat
Jusqu'en virge enfant aural.
Puis le fist metre sour I peiron de marbre, et les senateurs et les hauls
barons et les borgois de Romme, qui lisoient ' la lettre qu'ilh avoit escript,
avoient de chu grant mervelhe; si en faisoient leur gaberies, et tinrent tout
chu a fantasies et disoient que chu jamais n'avenroit; mains Virgile dest
aux senateurs que tout enssi ilh avenroit, car ilh le covenroit eistre enssi.
— Adont leur dest comment chu seroit enssi que puis avient, et comment
la virge porteroit, et le convenoit enssi porteir le soverain Dieu de nature.
Adont, quant chu avenrat, chairat ly ymage. Et ilhs demandarent queile
seroit la virge; et ilh leur respondil en teile manere : — « Saingnour, je vos
La confession katoii- » ay so vent dit que tous les dieux que vos creiees et les aultres gens par-
Foi. 6s *•. » le monde , excepteit le Dieu des Juys , sont tous fantosmes et adevines '
» et fais par hommes; mains ly Dieu des Juys est ly vrai Dieu de nature,
» qui fist le chiel et la terre, et tout chu qui ens est. Chils Dieu si des-
» quenderat en la virge, sens corrompre sa virginiteit. Elle porterat Dieu
» le Peire, le Fis et le Sains Esperis, c'este la saincte Triniteit en une uni-
» teil, unc seul Dieu, de sa nature et de sa substanche tout parfait, en
» queile je croy et si croiray, et en celle creanche moray. Ilh fourma
» Thomme et la femme, et les hommes fourment les dieux en queis vos
» creieez, de bois et de pires et de pontures '. »
Adont demandarent les senateurs : a Est-ilh saingnorie plus grant que ly
)> nostre aultrepart? » Respont Virgile : c< Oilh, cent milh fois plus; la
» saingnorie de Dieu est tout seul, et comprend tout le monde, chiel et
» terre, et est toudis partout, et est sens fien et sens commenchement. Ilh
» comprent tout le monde; mains li monde ne le puet comprendre; et *
» partout ou ilh est, est joie et saingnorie; et la ilh at duelh ou tristeche
» ou nul maul , n'est-ilh pais 6 . Et est ly honnour, li amour et la signorie
u prophesie virgiic » de Dieu toudis permanable. Ilh ferat redemption de cheaux qui sont en
» infier par inobedienche ; et si venrat chis Dieu de cuy je parolle dedens
1 Ou lire oioient, ajoute le manuscrit B. sens different, Ponde et pondeu (peindre et pcin-
3 A fantommes. B. tre) sont restes en liegeois.
8 Tous fantosmes adevineis. B. * Je supprime ici an est qui est de trop.
4 Peintures. Roquefort donne le mot avec un • Pais pour pas.
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LIVRE PREMIER. 238
» XL111 ans prochainnement venant, et a jour qu'ilh nasquerat se chairat
» ceste ymage que j'ay fait. » Et ilh * dest voir, car sitoist que Nostre- Lymwge del rirge
Damme saincte Marie oit enfanteit, ly ymaige chaiit jus de pyleir et de- Crist fut oeis.
brisat tout. Encor dest Virgiie que chis Dieu seroit li chief des Ebriens \ et virgiie prophetic u
r| ■ ■ »n i •!• crucifixion Jhesu-
encordont les Ebriens ic tueront et le crucifieront. « Et chu que je dis out.
» Font tout par escript des prophetiens anchiens, et ne le voront enten-
» dre a la veriteit; ilh le metteront en unc sepulcre, et la diviniteit soy
» departirat de corps; sy yrat brisier infeir, et osteir ses amis de la prison
» d'infeir; puis rentrerat en son corps la diviniteit, si soy releverat al thier virile dest que jhe*u-
» jour. Et al XL e jour ilh remonterat en chiel, ou ilh menrat ses amis, et rat.
» rechiverat a tousjours; chis qui en luy fermement creirat, et baptisiet
» serat a la novel loy, ilh yrat en eel paradis; la Dieu est, en toute joies,
» solas, desduis, plaisanche, signorie et riceches. » — Tant prophetisat comment virgiie e<m-
. . »•■■ i • * ■ i • » • v crtit les senateurs
Virgiie, qu ilh at pluseurs senateurs convertit a la loy, qui encors nastoit jf .baptesme jhesu-
venue, car s'ilh fuist venue, ilhs euwissent pris baptesme; et fisent tout
mettre en escripte chu qu'ilh avoit dit, et le fisent gardeir a leurs enfans
qui furent les promirs qui presissent baptesme.
A eel temps avient a Rom me. quant ons fendoit I pain, qu'ilh en issoit Merreih de sane qui
_ . . , • • issoit fours de pain.
sane 8 a fuison; et braioient les biestes mues par les bois et altrepart, ilhs
sembloient eistre enragies. Et durat chu III jours et III nuites. Adont vien-
rent les senateurs a Virgiie, et li priarent qu'ilh leur vosist dire la signi-
fianche que chu signifioit. Et ilh leur dest que ly pains signifioit Julius
Gesaire, qui seroit ochisanchois I an acomplis, en temple ou ilh devroit faire
reverenche a leurs dieux; et les biestes signifioient que III jours anchois sa
mort venront diverses signes a Romme, et que li peuple ploroit Julien
Cesaire apres sa mort. — Quant les senateurs entendirent chu , si furent tous
enbahis, et si n'oysarent oncques chu manifesteir, mains le tinrent mult
bien en secreit. Encors avient a Romme a eel temps que une manere de
biestes, al manere de moxhes', entrarent en la citeit de Romme et la entour, Merveih des moxhesen-
. . .. •■! i ii • i i • trant es boches des
que tanloisl que les gens les veioient ilhs balhoient, et les moxhes entroient gens.
es boches des gens, si moroient subitement. Et durat chu mult longement,
et moroient les gens par les rues si espesse que la terre en astoit toute
1 Je retranche ici un se qui est de trop, et ne 4 Mouches.Sur cette tradition voir le Dunlop de
se trouve pas, du reste, dans le manuscrit B. Liebrecht, p. 186, et la note 32 de ses Otia im-
1 Hebreux. periaUa de Gervaise de Tilbury, Hanovre. Rumpler,
■ Pain, par erreur, dans notre texte. 1856.
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236 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
coverte. — Adont soy trahirent li emperere et les senateurs a Virgile , et li
criarent merchi qu'ilh les delivrast de eel tempieste , s'ilh le polo it faire.
Et Virgile, qui ne leur poioit riens escondire, fist I moxhe de era in de
Dei moxhe virgile dv teile vertu, et le mist sour les champs defours la citeit de Romme, que
oussitoist qu'ilh fut la mise, Unites les. moxhes se prisent a aleir eel p&rt,
Foi.eer*. et aussitost que ilh aprochoient, ilh moroient. Et enssi fut Romme quite
de ches moxhes par Virgile , dont les Romans mult le prisarent. Enssi que
De Pbebiibe. dies chouses avenoient , Phebilhe oioit mult prisier Virgile ; sy issoit (fours)
de ses sens d'amour, et dest que li temps astoit passeit qu'ilh li avoit pro-
mis de respondre silh le prenderoit a femme ou nom. Se le mandat, et ilh
vient tantoist a lee, et elle li dest : « Si m'ayt Dieu, Virgile, nos astons
» acuseis, et mon peire m'at mult blastengiet, et je ly ay dit que vos me
» voleis prendre a femme. De chu est-ilh trop eorochiet, si m'at batu et
» vilonee, de chu que je lay oiseit dire qu'ilh vos otriast mon corps a
» femme qui suy filhe d'emperere. » — Quant Virgile 1'entent, tantoist sceit
bien qu'elle ment, mains elle welt alconne chouse bresseir; si dest a Phe-
bilhe : cc Vos asteis lourde, quant vos con trove is teiles fables, dont veneis
)> a dire vostre peire que je vous veulhe prendre a femme; je ne le pensay
» oncques en ma vie, ne ja ne feray, car a marier ne poroy entendre; ilh
Des femmeset de ma- » me faroit iassicr l'aprendre, et me tolroit l'estudier. Et certe ilh soy des-
mge * » truit qui femme prent; je n'ay cure de mariage, car j'aroie malaven-
» ture ! ; mains tous jours vos voray servir, s'ilh vos plaist, enssi que j'ay
» fait le temps passeit. »
Quant Phebilhe l'entendit, si est esprise de ma talent; mains el noise
comment phebiihe descovrier son coraige, et le dissimulat, et fut apparelhie del dechivoir
weit dechivoir virgile. yj r gjj e ^ s ' e || e puet, si fort que ons en parlerat longtemps apres. Si dest:
« Certe, Virgile, vostre suy en tous estas sens departir, s'ilh ne vient de-
» part vos. Ors at la chouse tant aleit que nos astons accuseis, el mon
» peire m'at commandeit de nient plus parleir a vos, et moy covient en-,
» treir en eel thour por demoreir. S'ilh vous plaisoit et moy ameis tant
» que vos veusies venir prendre solas deleis moy, je vos en voroie proier,
» et vos y poreis venir toutes les fois que vostre plaisier sierat, que ja
» mon peire n'en sarat riens; j'ay fait une corbilhe que je laray avaleir de
1 Ici le copiste a ecrit sur la marge supe>ieure : trimonium, ne incurram infortunium.
Qui feminam ducit, ipse se destruit; non euro ma-
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LIVRE PREMIER. 237
» la feniestre aval, et vos sereis sus sachies stesans dedens; et vos prie que
» a nuit weulhyes venir; si vereis comment vos devereis faire dorenavant. »
— Quant Virgiie li oiit chu dire, si pensat tot chu que voir astoit; si at co-
vert son corage, et li dest : a Dame, chu soit a vostre plaisier, car par ma
» foid vos asteis douche et debonnaire. » Et si fut miez ' li heure a la nuit.
Et al departir dest Phebilhe qu'ilh vengne a pou de compangnie. Et Vir-
giie respont : « Volentirs, mains bien se garde qu'elle ne fache chouse la
» ilh ait blamm n'en ne soit deshonereez, car li despit li seroit si chier
» vendut, que li uns sen repenleroit. » Et puis soy partit tantoist. — Et
revient Virgiie a la vespree, et at emyneis awec luy pluseurs senateurs
qu'ilh avoit fait invisible par charmiens *; et Phebilhe fut a la fenestre, tout
entour lee grant planteit de pucelles, qui avoient grant joie et grans ris
ensemble; et disoient qu'ilh feront Virgiie teile honte, que jamais n'aurat
honneur. Virgiie et les senateurs I'entendirent bien, et adont leurs dest
Virgiie : « Barons, ors viereis la subtiliteit de Phebilhe qui moy quide
» amont traire par son malisce, enssi com je vos ay compteit, mains par
» ma foid je feray chi devant vos une figure teile et si fait com je suy,
» que je metteray en la corbilhe, et vos vereis qu'ilh en avenrat. »
Atant at fait la figure qui astoit semblant a Virgiie en tous cas s et teis
vestimens, et le mist en la corbilhe, puis tirat la corde et s'en partit atant d«i figure
awec les senateurs, et revient en sa maison Casdrea '. Et quant Phebilhe
sentit tireir la corde, si sent la corbilhe pessante; si at sachiet la corbilhe
amont lee et ses damoiselles, plus qu'al moien * de la thour, et puis vont
atachier la corde a unc piler de marbre. — Puis dest Phebilhe : « Or poieis
» veioir, beais maistre, se je vos tien en mon poioir; or vos faut faire ma
» volenteit, ou avoir ortant de vilteit et de honte que oncques nul hons
» oit. » En la figure avoit I maul espir qui at dit : « Ay, madame, merchie,
» ne moy faite mie morir, car se vostre peire me truve chi, je moray; se
» vos prie que vos me sachies sus, ou moy lassies jus 6 . » Respont Phebilhe : foi. 66 <
« Dont moreis, faux trahitre , sens merchi; tu m'as honie, et se ne me vues
» prendre a femme ; or moy vengeray de toy, car tu seras pendus ou decol-
» leis. » La figure savoit com li avoit dit, si le fait 7 , car ilh ne le poloit lais-
1 Mise, fixee. 5 A moitie de la hauteur de la tour.
* Charmes, sortileges. * Que vous me tiriez en haul, ou me laissiez
* Qui avoit telle fauture en tos ecu que Virgiie. B. aller en bas.
4 Et revient a Ccusedrue. B. 7 Savait ce qu'on lui avait dit, et le faisait.
corbilhe.
Virgiie
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238 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
sier ne fair plus avant; si laisat Phebilhe payer la muse ', et parleir a sou
virgiie $c findit d«i voloir qu'ilh ne disoit riens \ — Et la nuitpassat.etly jour vient.et Phebilhe
traihire par Phebilhe. * • ■■ • • - . • i n
commenchat lee et ses damoiselles a crier et faire grant noise ; et la figure
qui la pent li prie quelle soy taise, car ilh li fait grant travalhe a cuer, et
s'elle voloit cesseir ilh feroit tout sa volenteit; mains, que vault chu? Tant
se humelie plus, de tant y truve plus de vilonie, et s'enforchoit del crier
plus fort 5 . Tant at crieit et breit, que les gens si assemblont a grant fuison ,
et la fayme soy multiplioit de rue en rue que Virgiie astoit troveis awec la
fille Temperere. Tant alat celle murmure, que I'emperere le soit; se criat
a ses barons qu'ilh sen allassentaux armes, et en alat a la thour, et la
royne Marie sa femme awec. Et li emperere et ses barons, qui astoient
tous a cheval, se firent tot parmy la presse *; se crie a sa filhe quelle lasse
jus la corbilhe, car ilh li trencherat le chief. Et cede li respont : « Se je ne
'» suy vengic del blasme, je seray desert 5 , car ilh me voloit tollir mon hon-
» neur. » Adont avallat la corbilhe, et quant ilh fut chaius, li roy le ferit
nd flairure del figure del espee en la tiestc. Et chis laissat fours de sa boche une bruyne espesse
et si flairant 8 que toutes les gens en furent esbahis , car ons n'y veioit gotte,
dont les Romans soy mervelharent mult.
Marie, la royne, reclamat ses dieux mult haltement qu'ilh li donnent
venganche de Virgiie. Adont li emperere et tous les aultres sont trais arrier,
por la grant pueur qui la astoit. Et Phebilhe lait la corbilhe raleir a terre,
et crioit venganche a son pere que ilh le prende vief; la figure adont soy
monstrat, et si s'apparut a Phebilhe que ilh n astoit mie Virgiie, elle ne
soit qu'ilh est devenus. Et quant ilh avaloit, ilh remontoit tout seul; ilh
alloit et venoit amont et aval, et faisoit mult mervelhes; ilh allumoit chan-
delles, puis les stindoit 7 , et faisoit nuit par semblant * c'on ne veioit li unc
('autre ; et la royne en oit grant duelh , si est pamee. — Quant li roy le voit, si
l; roy assaihat ia fi- escrie ses hommes et assalhat la figure, et la figure remonte; quant li em-
perere le voit, se quidat que sa filhe retrahist le corbille, si le creioit moins';
1 Perdre son temps. • Puant. Roquefort donne flaireur, mais avec
* C'est-a-dire parler tant qu'clle voulait sans un sens different de celui que le mot a conserve
rinterrompre. en li^gcois.
* Plus il s'humtlie, plus il recoit d'injures, et 7 £teignait Stindre est encore un mot wallon.
Phebille ne fait que crier plus fort. 8 De sorte que.
4 Se jettent tout parmi la fouie. 9 Du moins il le croyait
6 Delaissee, ruinee, deshonoree.
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L1VRE PREMIER. 239
et enssi font les pluseurs, car ilh apert evidcmment quelle le veulhe gar-
deir de maul. Adont dest le roy : « Lassiel avaleir », et eel le lait avaleir. Qui
dont le veist avaleir et remonteir cent fois et plus, et le roy et les Romans
sour li frappeir cent milh cops, et luy jetteir fumee de son corps puante,
ilh awist grant mervelhe; car I'emperere et les Romans furent si lasseis
qu'ilh dessent que chu n'astoit mie Virgile, ains astoit 1 dyable, et lasse-
rent tout esteir por eaux repoiseir. — Et Virgile astoit a Casdrea f , sa mai-
son, awec grant compangnie de jovenechais de sa lignie, et les senateurs
qui faisoient la grant fieste de Mars, le dieu de batalhe, tout nuit et tout
jour, et sient a lauble, en mangnant a grans solas, quant la novelle vient de
cheaux qui dient que Virgile est troveis awec Phebilhe, et encors pent en
la corbilhe. — Quant les senateurs oirent chu, si alerent par le congier de
Virgile veioir que chest; et leur dist qu'ilh dient al emperere, luy excu- DeVirgUe.
sant , comment ilh at tout nuit esteit awec eaux. Cheaux le fisent enssi ; mains
li emperere ne les croit mie, et dist que c'esl Virgile. Se le fait assalhir, et
la figure mont tout amont, si entrat en la fenestre de la thour, et si entre
en palais , et muche desous I escamme; la demorat la figure, et li espir sen- lj *s P ir de i, « P ure
vanuit. Adont les Romans entrarent en la thour, et le quisent tant qu ilhs
trovarent la figure qui faite astoit de stoppes \
Les aulcons des Romans dessent que ch'astoit fantasme , et les altres di-
soient le contrable, tant queOctovien, li fis I'emperere, envoiat Eroias awec De oeiovien fi> iem-
les senateurs a sa matson 3 , por savoir se Virgile y astoit. Et apres y alat li Foi. G7 r».
meismes Octovien; si le trovarent et parlarent a luy. — Puis vient Octovien a
son peire, et blastengat sa mere et sa soreur, et al roy at dit qu'ilh man-
dast les senateurs et parlassent de pais a eaux, car ilh avoit tort. Tant fist-
ilh qu'ilh les mandat lendemain al matin, car ilh astoit si lasse qu'ilh se
voloit la nuit repoiseir. Al matin vinrent les senateurs; mains ilhs y fisent
pou, car la royne avoit ja tourneit le roy, et commenchat a crieir sus Vir-
gile venganche. Elle fut bien castoie de Octovien et des senateurs; mains y
n'y valoit riens, ains manache Virgile de la tieste a copeir. — Atant ont dit Des senateurs qui ex-
les senateurs qu'elle ne sceit quelle dist , car Virgile est del tout sens coulpe CU5en rg ' *'
1 Cassadrue. B. Le mot casa, qui est latin et * £touppes. Stouppes dans Roquefort,
■(alien , doit Sire la racine de ce pretendu nom de * A Cassedrue. B.
lieu.
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240 CHRONIQIE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
dc chi fait; et s'ilh en astoit coulpable, se ne le poroit-ons mettre a mort
solonc la loy de Romme qu'ilh ne iairoient brisier par nul homme; et
d'aultre part, s'iih avoit la mort deservie, se li devroit-ons pardonneir por
les grans biens qu'iih at fais a Romme; et se ons ne li voloit pardonneir, si
naroient ja les Romans duree a luy 1 qu'ilh ne les destruist tous par sa
scienche, et enssi par ses amis dont ilh at (ant que cascons le sceit. « Se vos
» prions que vos le lassies acordeir. Que vos sieroit detryet li fais » *? Ilh y
fault propoiseir, replicheir, respondre et argueir 8 de Tune part et de l'autre;
et tant finablement que Julius Cesaire n'en voult riens fa ire. Tant qu'en la
fin sont retourneis les senateurs a Virgile, et li ont dil tout le fait et les ma-
naches que li roy fait de luy a destruire. — Et dest Virgile : « Lassies-moy
» convenir, et vos teneis bien aises a vos boverages * en tour Romme. car a
D« \irgiie comment » Romme ne ferat mie beal demoreir. » Atant at pris en feu I carbon tout
Rom" '" ' e ™ * ardant et le cargat Pynalatin , puis soy partit. Quant ilh est venue a la porte
des Latins, si prent le carbon et le mist a terre en souffiant, puis jettat sus
del pousier et passe sus; si I'estient, et tantoist est li feux falis a Romme.
Ly feu fut estiens k Ly feu fut estiens a Romme, et Virgile en alat son chemien droit a Bis-
quason, a I bonne hosteit qui astoit Malatius Bu tours ', qui les at fait grant
fiestes, et les Romans sont mult despasenteis por le feu: ilh ne sevent ou
cuire leurs viandes, ne esprendre une candelle por ardre a luminaire de
leur fiestes Phebus et Mars; de quoy Julius fut si lourmenteis, qu'ilh at
mandeit les senateurs, et finablement les at cargiet del faire la pais, mains
que ons reuste 6 le feu. — Enssi fut fait la pais par les senateurs sour teile
fourme : qui plus y avoit mis plus y avoit perdut, chu fut tout quitte; et
Le feu raportat vir- devoit Virgile revenir a Romme et raporteir le feu, mains ilh ne serat mais
tenus d'aleir al court. Enssi est Virgile revenus a Romme et li feux dont li
peuple fut resjoies, et fisent les Romans fieste lendemain aux temples. —
Et Virgile prist unc escript, si le donne Py mala tin, et li dist : a Va-t'en aux
» temples . et mes cest escript a promier pas dedens le seul ; » et li donnat
1 Duree a ici le sens de resistance. * J'ignore quel personnage peut eire cache sous
5 A quoi sieroit-il de refuser la chose? ce nom, comrae aussi sous celui de Pynalatin ou
3 Ilh y fut propoiseit, replichiet, respondit et ar- Pymalatin.
gueit. 6. * Imparf. da subj. du verbe ravoir qui, dans
* B overage doit etre ici pour boverie } ferme, le francais moderne, ne possede que le present de
mctairic, maison de campagne. Tinfinitif.
Rom par Virgile.
gile a Homme.
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LIVRE PREMIER. 241
I petit pire qui le gardat con ne le veit nient mettre '; et chis Fat tout fait
enssi. Et les senateurs li demandent queis est li escript, et ilh leur dest :
« Vos le veireis demain, se vos aleis a temple oreir. » — Les senateurs ont
mandeit les damme et les filhes de Romme qu'elles vengnent oreir au tem-
ple; et la fut faite li fieste * de leurs dieux; la royne et sa filhe Phebilhe y
furent, mains chu fut tart. La avient par le virtus del escript que toutes Les damn.es de Rom
les dammes dissent ' tous leurs secreis overtement et tot hault, et maie- giie de leur fomica-
ment de tous les hommes qui les avoient cogneue carneilment et quant fois;
et la fut par Phebilhe publyet clerement comment et quant fois Virgile Phebiih dest quanta*
1'avoil ewe * carnelement. — Item , en eel an , assavoir V° XLVII, soy rebel- caraefement!'
larent les Latins contre les Romans; et enssi li roy Gardans et Meliadans son
frere, roys de Caldee et de Tharse. Si vinrent a Romme a 1I C milh hommes .
et li emperere alat encontre a grant fuison de gens; et Virgile y fut, qui
mult bien soy portat en la batalhe. Et Julius laisat a Romme por gardeir Grant bauihe.
Octovien son cusin ; et (si) Octovien son fis et luy moroient en celle batalhe , Foi. 67 v.
ilh li lassoit l'empire. Et enssi en avient, car Julius fut navreis et ses III
fis furent mors; mains encordont ilh orent victoir, et furent mors ou pris
leurs anemis, entres lesqueiles ilh furent mors 111 roys de la main Virgile.
— Apres cest desconfiture , revinrent les Romans a Romme; si ont raporteit
Julius l'emperere sus une letiere chevalcereche * malaide; mains ilh fut tan-
toist garis, et visquat puis III mois, et apres mo rut enssi com vos oreis.
— A eel temps avient que en Galilee 6 avoit I maistre laurons qui astoit
nomeis Ezechiel 7 , qui avoit grant compangnie de laurons awec ly ; si avoit
fait tant de maul dedens la terre, que ilh astoit si fors dobteis que nuls n'oi-
soit aleir par les chemiens, s'ilh n 'avoit ensengne de luy 8 . Si avient qu'ilh
fut pris par forche par H erode, le fis Antipater, et li coupat le chief luy DeHerodeje tiihAn-
et tous ses compangnons. Et tant fist Herode que la terre fut si en pais,
que cascons disoit que Herode astoit uns empereres. — Mains quant Fasiens,
son freire, veit les biens que Herode faisoit, si en oit grant envie, por tant
1 Sur les pierres qui re n dent invisible, voyez 4 Sic pour eue.
Liebrecbt : Otia impcrialia de Gervaise de Til- 5 Littere portee par des chevaux.
bury, p. 144. * Galle par errcur dans notre texte. Je corrige
* Ces deux mots, que je supplce d'apres le ma- toujours d'apres le manuscrit B.
nuscrit B , sont omis dans notre texte. 7 fezechias. Sur ces fails voir Fl. Joseph, XIV, 4 7.
5 Encore un mot omis dans notre texte , et que * Un signe quelconque emanant de lui, un sauf-
je retablis d'apres le manuscrit B. conduit.
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242 CHROMQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
que iih n as to it ortant prisiet en la sien terre. Et aussi Anti pater, leur petre,
astoit tant ameis et prisies que ilh fuist roy f ; ne oncques Hircain, ly roy
de Judee, n'en oit damaige, anchois li procuroit son preu en toutes ma-
niere : dont chu fut grant mervelhe quant uns proidhomme puet meneir
longement sa bonne vie, que les malvais et les felons n'en aient mult grant
envie , qui sont si mordans en trahison. — Si vos voray plus plainnement
declareir la raison por quoy je ay chu dit. Hircain avoit en sa maison des
gens fellons et envieux , si leur pesoit de la saingnorie que Antipater avoit
en la terre. Si vinrent a Hircain, et li dessent que ilh malvaisement soy
mynoit, et mult poioit avoir grant dueihe; car ons I'apelloit roy et sain-
gnour de Judee, mains ilh ne Fas to it nient, four que de nom, anchois en
avoient Antipater et ses enfants les profis et grandes honeurs; et tant ilhs le
Trah^on. losengarent * que ilh les creit. — Se mandat Herode, qui astoit prevoste
de Galilee, que ilh venist a sa court respondre a chu que ons li ametoit s .
Quant Herodes oyt les novelles, si alat a Sixte 4 , qui astoit sire de Surie,
et li dest que Hircain si l'avoit somont en sa court, et ne savoit por quoy.
siitedonnat a Herode Adonc ly donnat Sixte ses lettres , et mandoit a Hircain que ilh ne creist
e res pour ircam. ^ fl eroc | e nulles malvais parolles, ains le tenist chier et l'honorast com son
chevalier loial; puis viertt Herodes, et donnat la lettre a Hircain.
Hircain luit les lettres, si veit chu que Sixte li mandoit, se le jugat en
pais s et retournat en Galilee, et tient la terre puisedit longtemps 6 ; mains
Sixte le fist senescal de tout Surie, bien toist apres chu que dit est. — Adont
resovient a Herode de cheaz qui li avoient amis 7 de felonie a Hircaine;
si sen vengat, car ilh fut mult crueux, et enssi ilh fut bons chevalier et
ferme: ilh ne li fallit que I point que ilh ne fut mies enformeis de veriteit,
De juiius Cesar qui fut quant ilh fist ochire les innocens. — Item, Fan V c et XLVII deseurdit, le
VI1° jour de mois de octembre, astoit Julius Cesaire emperere de Romme
leveis al matin, et aleis orcir au temple ou la maistre ydolle astoit; et chis
temple seioit en capitole. Si avient, enssi qu'iih entroit dedens, que II che-
valiers qui astoient nomeis Cassianus et Brutus, et aweceaux XXII hommes
que ons voult dire qui astoient senateurs, le ferirent de greffes 8 d'achier
1 C'est-a-dire : comme s'il eut etc roi. 5 Anime de sentiments pacifiques.
8 Losengnerent. B. • Puisedit grant pieche. B.
8 Ons li mettoit sus. B. Amettre a le sens de T Participe passe da verbe ame^re signal e plus
accuser. haut.
4 Sextus Cesar, gouverneur de Syrie. 8 Stylets.
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LIVRE PREMIER. 245
dont cascons avoit une, et I'ochirent malvaisement en trahison. Les alcuns
vorent dire que ch'astoit pop Virgile, les altres vorent dire que ch'astoit
pour Pompeyus; mains ons n'en soit oncques la veriteit por quoy cbeaux
I avoienl ochis, altrement que ons see it bien que cascons avoit une greffe
d'achier de I piet de long; se li donnat cascons I cop. — Item, Julius Cesaire,
quant ilh entrat en temple, ilh trovat devant luy a terre gisant I escript
que ilh levat, et le mist en sa main tout ployet sens regardeir dedens; par
aventure, se ilh l'eust leut, ilh ne fust mie mors; ilh aloit oreir, chu li
defendit a lire 1 ; car ilh astoit escript en la leltre que ilh moroit t em pre-
ment, et ellez furent troveiten sa main clouse el ploye. — Item, les Romans
furent de la mort Julius mult corochies et le plorarent trois jours. Atant Foi.es ro.
vient Virgile et les senateurs qui dessent que chu seroit piteit, se les ver-
miens * mangnoient le chair de si noble chevalier et teis que Julius Cesaire,
qui a son temps avoit esteit le melhour espee del monde, et avoit tant con-
quis que oncques nuls ne conquist font de luy. — Adont par le conselhe
Virgile ilhs ardirent le corps en poudre, et le poudre de luy misent en une
pomeal 3 , lequeile pomeal asseirent sus une colompne de XX pies de hault, juiiuifutensertiis.
et les aultres dient de C et XX pies de hault, que Julius avoit fait faire a
son temps, tout emmy Romme et poisees sus son ymaige que une tonoir
avoit aba tut le letre capitate de son nom, dont Virgile avoit dit aux sena-
teurs que ilh ne viveroit mie longement. Et le thier jour devant sa mort
les feniestres de sa chambre par forche de vent ovrirent et recloirent, qui
astoient bien fermee, par teile man ere que ilh salhit sus tous nus, car ilh
quidat que son palais dewist tou afondreir. — ■ Item , adont apparurent en Merveihe.
la citeit de Romme, vers Orient, lendemain que ilh fut ochis, III soleas,
dont Virgile dest que li temps venroit briefement que la triniteit s'appa-
roit 4 . — A eel temps parlat li vens aux senateurs des bleis , et leur dest
que li temps venroit que les hommes faroient 8 plus toist que les f rumens;
et altrepart est escript que chu fut 1 buef qui traihoit a la cherue, et parlat
a cheluy homme qui conduisoit la cherue, et li dest quant ilh le poindoit
d'estomble 6 : « Porquoy me oppresse-tu si fortement? Ilh ne serat nient
1 Cest-a-dire : il allait coromencer sa pricre , * ApparaitraiL
ce qui rempechait de lire 1'ecrit. * Pour fauroient, fauldroient , manqueraient,
1 Prononcez vermines. • Aiguillon. Estombel dans Roquefort.
* Globe. Voir Ducange, v° Pomellus.
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244 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
» povreteit de vivre en brief temps ', car les grans hommes defalront plus
» toist que les frumens. » — Item deveis savoir que Julius Cesaire ne fut
emperere que III ans et VII mois, et fut ochis en LXI e an de son eaige;
altrepart lyst-ons LVI ans. Item, le centeisme jour tout a point devant sa
m or t, vient li Ihonoir et chait deseur la pire f , si abatit la promier lettre de
son nom. Et tout chu fut dit a Virgile, qui dest qu'ilh ne viveroit mie lon-
genient. — Item, vos veulhe dire encors une mult grant nobleche de Julius
Cesaire. Vos saveis qu'ilh conquist Tongre, et le mist en tregut des Romans
D de iTre ,ll|e roy a ' t em P s Tongris , le thier roy de Tongre. Si vos diray de Sedros, qui en
fut li quars roy, et de Julius Cesar, qui astoient les dois miedres chevaliers
de monde. Chis Sedros, roy de Tongre, fut li fis Tongris, qui enssi fut
mult bons chevalier, larges et plantiveux, et qui en sa terre fondat, Tan V c
et XXX, le casteal de Chievremont, qui fut mult fors; mains ilh ne le
De chievremont. parfist mie tout sus, anchois le parfist li roy Sedros, son fis, Tan XXXIII
et XXXIIII; si le nomat Chievremont, portant que hons ne biestes n'y
poioit monteir par-devant, et li chievre y montoit bien, se ne poioil des-
Dei fondation de piu- qucndre. — Apres fondat Tongris, nient apres mains devant Fan XXVII,
XXVIII et XXIX, assavoir quant li roy Humbris, le peire Tongris , vis-
quoit, ches vilhes : Hacure, Nyvelle, Lixhe, Votemme, Harens, Othey,
Dei bataihe a Miimort. A wans , Hutain , Wonch , Eurlemmes, Rokelenge, Miimort 8 ; et celle fut
apellee Milhemort, portant que en temps que ons le edifioit oit la I bataihe.
ou ilh oit milhe homme mort entres les parties : chu fut de Tongris a Fen-
contre de conte de Flandre. — Et apres la promier annee qu'ilh fut coroneis
roy, si fondat Molins, enssi com dit est, et de Chievremont laissat lovraige
de son greit; et Sedros le parfist, vivant son peire; puis fist Sedros Taxan-
drine, c'ons apelle Viseit, et fist sour 11 rivieres corantes, qui ont nom
do Namui et de piu- Mouse et Sambre, 1 vilhe qu'ilh apellal Sedros, qui puis fut nommee Namut;
et fist Seray sour Mouse, et Tuile 4 et Meriwe sor Ourte, et Halois, la vilhe
1 Bientot il n'y aura plus de pauvrele, on vivra Herstal. Hutain doit ctrc Houtain-Saint-Simeon ;
richement. il est situe* dans le canton de Fexhe-les-Slins,
* C*est-a-dire la colonne dont il est parle plus comme Othee et Miimort. Wonck et Roclenge-sur-
haut. Geer sont situes dans rarrondisseraent de Ton-
8 Toutes ces localites sont faciles a reconnaitre: gres. Eurlemmes designc sans doute Heure~le Ro-
Hacconrt, Lixhe, Voltem et Awans sont situes a main,
peu de distance de Liege. Nivelles et Hareng sont * Plus haut Tiule.
des hamcaux dependant Tun de Lixhe, laulre de
seurs aullres.
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L1VRE PREMIER. 245
con nom ors Cynay ' , Thyhangne, Amaine', Fosse, Tuwien, Covien 5 et
Walecourt. Tout chu fondat-ilh a son temps, et encors pluseurs aultres que
je ne stjay nomeir, car les croniques ou nos les presiens astoient si vielhes
et dilacereis, que nos ne les powissiens mie lire, car les pieches y faloient
en pluseurs lieu.
Apres, assavoir sor Tan V c etXLlIII, fut rebel le Sedros de paiier le tregut
aux Romans que Julius Cesar avoit a son temps conquis al roy Tongris, le ***• 68 *<>.
peire Sedros, et ne l'avoit oncques volut paiier a son temps. — Portant Ton s re ful **>n***>
Julius Cesaire vient assegier Tongre Tan deseurdit, et mandat al roy Sedros
que de luy veulhe tenir sa terre : ilh est emperere et doit le monde lenir de
li; portant port-ilh en sa main tout le monde; et ilh seit bien que li roy
Sedros est bons chevalier; se le veulh payer par amisteit, ou ilh le vengne
defendre. Enssitost que Sedros veit chu, ilh fist son peuple armeir, et vient
tous rengies et se sont sus corus. La commenchat batalhe qui fut a dobteir Gram bataihe.
entre les Romans, qui sont O hommes, contre les Tongrois, qui sont LX m .
Qui la veist Julius Cesar comment ilh ochioit les Tongrois el copoit en dois,
ilh desist que c'estoit li miedre chevalier de monde, car ilh detrenchoit le
Her com chu fust plonc. Mains Tongris le demontat dois fois, sen avoit
displaisanche ; et d'aultre costeit astoit Sedros, qui faisoit morir les Ro-
mans, com mult esmereit chevalier. La fut mors Tygris, ly sires de Molins.
et Arnars, le sires de Tuiles *, et plus de XXI1U altres; si les ochist Julius
Cesaire. Et li roy Sedros ochist des senateurs Tybault et Fonqueris, Calas-
drus et Ebroch, Gardiens, Engorans, et tout cargiel les preis " des aultres,
et feroit toudis aux plus hardis. — Julius Cesaire le voit, si prent une espier Grant &*>**«"*** se
r 'II dros et Julius.
et broche a Sedros qui ne le dobte I denier; mains ilh at pris une lanclie.
si at brochiet vers luy, et se soy donnarent des grans cops, si qu'ilhs se
sont ambdois abatus. De quoy Julius fut corochies , car oncques ne fut plus
abalus par I seul homme; mains ilh soy coroche sens raisons, car ilh at
josteit a une oussi fort de ly et oussi hardis; et si avoit Julius adont LVII1
1 Au premier abord, on pourrait croire que Ha- Sambrc-et-Meusc.
tow est donne comme le nom ancien de Ciney j mais 4 II doit toujours dire ici question de TiJff, pre-
il s'agit de H alloy, hameau dependant de la com- cedemment Tiule et Tuile.
mune de Braibant. * Preis, aurait-il ici le sens de preu, vaillant?
* Tihange et Amay, pres de Huy. En ce cas, la phrase pourrait signifier que Sedros
3 Thuin et Couvin, deux petites villcs de Fan- chargeait toujours les meilleurs des autres,
cien pays de Liege , dans le district appele l'Entre-
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246
CHRONIQUE DE JEAN ffOUTREMEUSE.
Sedros se combat a Ju-
lius Gesairu.
ans d'eaige. llh ne regnat apres chu que III aiis. — Adont ilh vient mult
yreis a Sedros et ly dest : « Dans roy, laisons celle contention, retraiheis
» vos gens et nos retraiherons les nostres ; si revenons de matien entre nos
w dois et nos combatons acerte par teile maniere : se je vos conquis, vos
» tenreis vostre terre de moy en tregut enssi qui font les aultres; et se je
» suy conquis, nos le vos quittons. » « En nom de Dieu, dest Sedros, enssi-
» ment l'acordons. » Atant cornent la retraite les dois parties '.
En Tongre sont rentreis les Tongrois, et les Romans a leurs trefs; si se
sont repoiseis celle nuit, et lendemain se sont les II roys armeis, et sesont
combatus mult fierement. A I'assembleir se sont ambdois abatus ; ilh sont
resalhis sus, si ont sachiet leurs espeez; li uns corut sus l'autre, et se sont
donneis maintes cops d'estoch et de talhe, et sovent del esquermire*. La
batalhe fut forte, car Julius astoit mult poisans, et Sedros astoit hard is,
fiers et remuans. Ilh at ferut Julius si que ly hayme li trenchat; se li espee
ne fust tournee, ilh fust mors. Julius sentit le cops, si fut yreis, et ferit le
roy Sedros amont son hayme; se ly at trench iet, et le habert fauseit et
enporUS tout jusqu'a terre. Et Sedros en alat chancelant, et fut pres engen-
nelhies; mains ilh reprist cuer, et fiert Julius amont son hayme 8 ; se li at
trenchiet et le habier fendut et enporte tout jusqu'en terre , et vat trenchant
les armes, et li talhat de la char, et des cheveals li sane li court aval le fache.
— Et Julius s'enclinat vers terre; si vat en son cuer fortement prisant le
roy Sedros , et dist que oncques en sa vie ne trovat horns de si bonne con-
venanche en tous cas, mains, s'ilh puet, ilh ly ferat sentir son espee; se li
donne I cop, si qu'ilh ly at desquireit toutes ses armes desus l'espalle
diestre. L'espee desquent, Sedros le sent, si est guenchis arire en costiant *;
chu ly at gardeit que li bras ne fut trenchies; et rent 1'emperere chu qu'ilh
ly at presteit, car ilh I'at si bien asseneit de tout sa forche qu'ilh le fist en-
1 Li une partie et li altrc. B.
9 Ce mot doit ici faire opposition a cc qui pre-
cede. Les coups d'estoch et de tailhe signifieraient
une attitude agressive, et esquermir une attitude
defensive , ce qui rattacherait l'etymologie du mot
a l'allemand schirmen. On peut voir, du reste, dans
Ducange, v° Ensiludium, des passages ou les ex-
pressions escremir et esmoucher paraissent avoir le
sens que je viens d'indiquer.
8 Ce qui suit, est tel dans le manuscrit B : si le
vat tronchonant arme qu'ilh ail ne li sont aide qu'ilh
n'ait pris de la char et des cheveais li sane li court
aval la fache.
4 Cest-a-dire : il s'est penche en arriere en ap-
puyant sur le c6te.
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L1VRE PREMIER. 247
gennulhier. — Quant Sedros le voit enssi , se li demande : « Sire, comment
» vos est? je vos prie que vos laisies celle estour, car ilh poroit trop cos- ™. <#<■•.
» teir, car se vos moy tueis, j'ay bien qui moy vengerat, et se je vos tue,
» jamais a moy ne faurat guere '; et enssi cascon de nos puet gangnier a
» lassier l'estour. Et por l'honeur de vos et del coronne que vos porteis, je
» moy reng a vous por conquis. » Atant li donne son esp^e. Ly emperere le
voit, si le prent et dist : « Tu as le pris; mains tu es proidhomme, se le seis J«^»» '"» conqui* v* r
» bien monstreir la nobleche de ton estat, et tu gangneras asseis. Tongre
» tenras de moy, altrement ne sierat sens tregut *; car ja tregut ne paieras, Tongre fut ww tregut.
» ty ne tes heures perpetuelment, et de chu je toy donray lettres saieleez. »
— Quant Sedros lentendit,se s'engenulhat, et li rendit de chu grant merchi,
et li fist homage. Enssi fut fais li acors; si sont tous entreis en Tongre, la
furent-ilh mult fiestoiet, et ilhs demoront HI jours a Tongre. Dedens eel
termes at ordineit de faire I palais a ses despens , et fist finanche del argent Li empewe t»t i P a-
a I sien chevalier, qui demorat la tant que ilh fut parfais , et puis retournat
a Romme. — Chis palais fut mult grans, ilh n'avoit a Romme nulle plus
grans; et le fist Sedros faire si que la riviere del Jeire coroit tout entour.
Sedros fut mult valhans hons, qui governat son pays mult noblement, et
astoit grans a tous, se chu fust 8 son enfant propre. — Ors deveis savoir
comment, quant Julius l'emperere vient a Romme, devant les senateurs
ilh at mult prisiet Sedros, et les at compteit la balalhe. en jurant Mars et
Jupiter que, s'ilh ne fust acordeis, ilh l'euwist conquis. Quant les senateurs
l'oyerent enssi prisier, si 1'enlisirent a senateur de Romme soverain, et le sedrosfm csi us $ena-
mandarent. Et ilh sen alat vers Romme; si laisat son regne a Lotringe,
son fis, tant qu'ilh revenrat. — Quant ly roy Sedros vient a Romme, ilh
fut fais senateur; mains Julius Cesaire fut tantotst apres mors, com nos
vos avons ditdesus. Apres sa mort, enlisirent les senateurs I valhans jove- DeOctomnicii «m-
necheal qui fut nomeis Octoviain , qui fut li fis Galant le senateur, de He-
lain 4 le soreur Julius Cesaire, si qu'ilh astoit cusin a Julius; si li devoit
succedeir sique plus prochain; et enssi Julius li avoit donneit son empire,
1 C'est le substantif guerre et eon l'adverbe s Comme si c^tait.
gutre. * Octave avait pour mere Atia, fille d'une soeur
9 Cela doit sigoifier que si Tongres est poss^de cadette de Cesar. Le nom du pere doit dtre aussi
par un autre ou donne d'autre facoo , il payera reel que celui de la mere.
tribal.
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248 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREJHEUSE.
en cas ou ses enfans seroient ochis en la batalhe deseurdite, ou ilhs furent
ochis. Et se fut esluis par tous les senateurs sens debas : enssf par trois
maniers ilh fut emperere. Ghis fut proidhoms et loiais, large et plant iveux,
et regnat LVI ans.
DeiproiecheOctoriain. Chis Octoviain fut H secons emperere de Rom me; si oit nom Octoviain
Cesaire, et apres chu oit-ilh a nom Octoviain August, por une victoir qu'ilh
oit enssi com vos oreis chi-apres. Chis Octoviain fut mult preux aux armes,
car ilh n'avoit en monde nacion de gens, s'ilh astoit rebel les aux Romans,
qu'ilh ne l'assalhe tantoist. Ilh conquist Cornialhe 1 , et la Grande-Bretangne
et bien VI royalme en son promier annee. — Oncques ne travelhat ses gens
de piet, mains toudis menoit gens d'armes et estrangnes sodoiers *, et lassoit
ses gens gangnier a leurs labeurs, les proidhommes amoit et honneroit:
ilh portat le roy Sedros de Tongre grant faveur, et toudis l'avoit deleis luy
comment lemperres to- et l'amoit mult fort. — Item, quant Enye I'emperres, la femme Julius Ce-
v.ain. saire , veil que Octoviain astoit coroneis. si s'oppoisat al encontre, et dest
qu'elle devoit regneir et governeir I'empire tant com elle viveroit, ne li
election de Octoviain ne devoit valoir ne lee porteir prejudisse; se dest
qu'elle soy marierat a I poissans hons, s'elh le puet troveir, qui bien li gar-
virgiie povoiat ai em- derat son droit. — Quant Virgile soit qu'elle avoit chu dit, se dest que ons
pwre *' le laisse convenir. Si apellat Poytain , son messagier , et ly tyndit ■ et cangat
sa figure d'altre coleur, et l'enfourmat de chu qu'ilh devoit dire a Enye,
ou ilh 1'envoioit. Poytain alat a Enye, et ly dest son message tout de men-
songnes, en teile manere qu'ilh le fait toute tressalhir de la joie qu'elle at:
car ilh ly dest : « Damme, monsaingnour ly roy Mabal * de Caldee at oyt
» dire que Julius vostre maris est trespasseis de chi siecle, etque ons vos
» fait gran tors de la terre , et que vos n'a veis nul aidans ; ilh soy paroffre a
Foi. 69 v°. )> vous; mains que le weulhies ameir et prendre a marit, ilh vos aiderat, et
» ilh est bien tant poissans de corps que X hommes n'averoient ja poioir
» encontre ly seul , et at grant peuple desous luy. » — Quant la damme
Le royoe presentat a l'entent, si fut mult joieux et presentat a messagier I mult noble coursier,
messagier I coursier . ,p rt , ■ • n u i * • * i • u
et i aneai. e t vat deffermeir I coffre plains d ors et 1 en donnat asseis, et chis 1 en remer-
chiat; et envoiat I aneal d'or en signe de druerie a sou sangnour.
1 Cornouaille. & Teignit.
* Mains ilh trevoit bien sa gens dont ilh paioit 4 Mabel. B.
ses sodoiers. B.
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LIVRE PREMIER. 249
Enssi soy partit Poitain de Enye, et vient a Virgile qui astoit al court de-
leis Octoviain, se li donna t l'aneal et li comptat tout chu qu'ilh avoit fait:
de quoy ilhs ont asseis ris. Adont at Virgile I espir priveit pris. et I'envoiat
en la chambre Enye ou ons ne le poioit veir; et ilh voit et oit bien chu que
la damme et sa filhe font et dient. — Si dest la royne : « Enssi je metteray
» mon corps a estre drue a unc gentilh homme dont j'ay oyt novelles, qui
» tenrat Virgile et Octoviain si a point qu'ilh en moront. » Et li espir soy Dei espir aue virgiie
• , X7 . ,. . . • envoiat al royne.
partit atant et revient a Virgile, et li comptat tout chu que la royne avoit
dit, qui ' tantoist y tramist Poytain, et li dest chu qu'ilh doit faire. Et chis
sen vat. Mains Virgile envoie l'espir apres por escuteir comment ly parle-
mens soy prenderat. Tant fist Poytain que la royne Enye ist fours de son
sens, et li dest que ly roy Mabal vengne awec ses oust por ochier Virgile
et l'emperreur. Et tout chu fut racompteit a Virgile. — Et Virgile dest a
l'emperreur : « Par ma foid je vos mostreray le grant merchi que Enye
» auroit de nos, s'elle en astoit al deseur. » Adont at revoiet Poytain a la virgiie fist meneiiie.
royne, et dest que demain al soir sierat li roy Mabal a grant gens devant
Romme. Gelle fut mult lie et joiante et orgulheux; et lendemain envoie
Virgile jusquen a * X chevalier awec Poytain tous batans 8 , et dire a Enye et
asa filhe que elles vestent draps royals; elles le fisent. — Adont vient Vir-
gile et Octoviain, et chevalchent vers la royne, et dest Virgile a Octoviain : virgiie et o.to^-in
« INaiies dobte de chouses que vos veieez, je diray a la royne que je suy royne.
» ly roy Mabal , et ly remosteray l'aneal que elle m'envoiat par Poytain. » —
Les dames astoient au temple, et Virgile fist une vois venir en temple, qui
dest aux dammes : « Que oreis chi? por quoy n'aleis encontre le roy Mabal,
» qui est chi dehours por parleir a vos? » Gelles sont tantoist levees, et sen
veulent aleir; si ont encontreit Virgile et 1'emperere; et fist la apparoir Vir-
gile si grans oust de gens que ch'astoit mervelhe. Atant parlat Virgile, se
dest : « A markin linet et madrinek jus et dyneth. » Quant la royne l'oyt,
si fut mult resjoie, si respondit : « Parleis nostre lengaige; nos ne vos
)> entendons point; que vos soiies ly bien venus. »
Virgile entent la damme, se dest : « Madamme, je parleray en vostre virgiie futmerveihe.
» lengaige puisque vos le voleis , car vostre volenteit veulhe-je faire del
1 Cest-a-dire Virgile. 5 En hale. Voir le glossaire de Ducange, v° Ba-
1 Vourjusqu'a. tare.
32
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250 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
» tout; si vos reng promiers merchi del grant honneur que vos m'aveis fait.
)> Sy suy chi venus por vos forfais amendeir, et faire venir a merchi vos
» grevans partout ; mains regardeis promiers se nos poiens avoir une
» bonne pais, s'ilh vos plairoit mies, sens combatre; car se nos no comba-
» tons et ilhs aient victoir, ilh n'aront de vos point de merchi. » — La royne
respondit : « Sires, que ch'est-a-dire? Que chevalier preux et hard is, et qui
» at si valhant amie, ne doit mie parleir si cohardement : vengies-moy, car
» tout Romme serat vostre. Si m'ochies Octoviain I'emperere et Virgile
» awec , car por tout l'avoir de monde ne les lairoy venir a pais; et weulhe-
» je que vos me presenteis leur II chief; et aleis faire tendre vostre trefs,
» car je vos envoray vitalhe asseis. » — Atant fait Virgile tendre trefs par
semblant, et fait II oust de gens : li uns astoit Virgile et Octoviain awec
les Romans, chu sembloit a la royne, et li altre astoit ly roy Mabal; fina-
blement ilh se sont sus corus. Si furent les Romans desconfis, et Octoviain
Knye fut mult u<-. et Virgile pris et loiies; de quoy Enye ' fut mult lie, et criat aux barons :
« Trenchies leurs chiefs. » Et Virgile dest : « A vostre commandement. »
Foi. 70 rv Enye quidoit parleir al roy Mabal ; si parloit a Virgile qui li dest : « Damme,
» veneis awec nos. » Et celles s'en vont tantoist de rue en rue parmy
Romme, si pensent alleir parmy les champs, et vinent a Gassedrue '. La fist
Virgile ses gens aleir a nient, car ch'astoient tous espirs. — Puis demandat
Virgile aux dammes se ches prisonniers moront ou auront resplis 8 , et Enye
dest qu'ilh moront tout maintenant; por milh libres ne les garderoie jus-
Merveihe dcs ii mas- ques al demain. Et Virgile prent I espee, se le sache tout nue, si le donne a
Enye. Celle le prent et dist a Virgile : « Faux leire, vos honiste ma filhe. »
Adont fiert I grant cop sour I gran mastien 4 que Virgile avoit transmueit
a sa semblanche, si l'abatit mort; chu fut Phebilhe qui quidoit avoir ochis
Virgile ; et puis donnat 1'espee a sa mere qui quidat ferir Octoviain , si ochist
1 mastien. Et tantoist qu'elles orent chu fait, si at defait Virgile son sort.
La veirent les dammes partis * del poioir Virgile les II mastiens qui sont
mors. Adont ont fait mult de proiers les senateurs et les barons qui sont la
por les dammes, dont Octoviain li roy soy corochat; et Virgile fist sonneir
1 Je retablis cc mot d'apres le manuscrit B. repit, trevc.
5 Notre texte prend ici la forme donnce au mot * Pour mastin, matin, chien?
dans le manuscrit B. 5 Partis doit 6trc le participe du verbc partir,
8 Seront respiteis. B. Resplis est ici pour respis , separer, soustraire.
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. L1VRE PREMIER. 251
son disnier, et li barnaige s'aseit en palais, si disnarent la. Apres disneir
demandat Virgile al emperere et aux barons conselhe qu'ilh devoit faire de
ches dammes, qui avoient esteit de teile nature et tant felles qui avoient
ochis Virgile et l'emperere si outrageusement, car elles quidarent que ilh
fussent chu. — A tant vient uns Romans qui dest a Virgile que les dammes Comem ies damme f u
* ° . . rent perdue? .
sont emblees et perdues; de chu fut Virgile si corochies qu'ilh dest et jurat
qu'ilh vuiderat Romme, ne mais n'y demoirat. Et laissat a son cusien Py-
matin Cassedrue, et tout chu qu'ilh avoit a Romme. Octoviain li priat mult
et les senateurs del demoreir, et ilhs li liveroient Ies dammes; mains ilh
dest qu'ilh at jureit chu qu'ilh tenrat. — Atant est monteis et departis de v, |if a om ^ e val fou "
Rome, et les dus, contes, chevaliers et barons les plus nobles sont monteis
awec luy, qui sont dolans de sa departie; et disoient entre eaux que le feu
de Romme oisterat. — Et Virgile araisonnat les senateurs et leurs dist :
« Sangnours, jug ies a point solonc la loy de point en point : vous m'avez
» tollues les dammes contre raison , ons le sceit bien , et m'aveis trop mef-
» fait; d'ors en avant vos gardeis del meffaire, droture jugier deveis, et
» ne deveis hommes forjugier, s'ilh n'at contre la loy meffait. » Atant
sen est tourneis et s'en vat. Les senateurs sont tourmenteis, et li des-
sent que li renderoient les dammes volentiers, mains reprendre ne les virgile refusal ies dam-
veult. L'emperere chevalcat apres, et li alat encors proier del retourneir;
et ilh li dest que jamais ne rentrat a Romme : « Gar je me veulhe vengier
» de Phebilhe del despit quelle m'at meffait; et portant je moy part de
» Romme que je ne veulhe avoir tant de proiers que je aroie, se je demo-
» roie. Ors est enssi que j'enporte le feu de Romme , que ons ne rarat virtue «»i»rt*t
Romme.
le feu
» jamais s'ilh n'est reprise a ku Phebilhe; mains aleis fours de Romme I
» pou de temps demoreir. » — Atant s'en vat Virgile, et l'emperere retourne
a Romme et prent sa femme et ses enfans et tout son estat ; si est aleis de-
moreir a Jubelin, une belle maison qu'ilh avoit fours de Romme, car Virgile
at tout subitement privee Romme de feu, et se le tient trois mois; et alat
demoreir a unc sien casteal qu'ilh avoit devant edifyet, qu'ilh apellat Agensi. virgiiesenaiatAgen»
La demorat Virgile a grant solas.
De chu fut li peuple de Romme desconforteis, si vinrent criant merchi ' a
l'emperere, et suppliant qu'ilh vosist mettre remede a chu qu'ilhs rawis-
1 Not retabli d'apres le manuscrit B.
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Fol. 70 v*.
232 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
sent le feu, et envoier la clergerie et les secateurs a Virgile, qu'ilh li plai-
sist tant faire por vos et le peuple de Romme , qu'ilh rendist le feu parmy
amende a son plaisier. Ly em p ere re le fist, et envoiat a Virgile Milotin leur
evesques et Cyceron le philosophe, qui fisent le messaige en teile manere
que le peuple le requeroit, et li dessent siqu'en manechant. De quoy Vir-
gile le prist en despit, pour l'orguelhe de maneche. — Si leur dest Virgile :
« Saingnour, por manechier ne poreis faire vostre besongne, car vos ma-
» neches me sont asseguranches; je vos puy tous mettre en dangier, ochier
» et tempesteir a I seul mot. Mains je vos veulhe faire grasce et rendre
virgile soy vtngat de » bien por mal . et encontre orguelhe mettre humiliteit: si vos dis : pren-
» deis de II chouses la milhour et vos aureis le feu. Promiers, vos mette-
» reis Phebilh en la thour halt a la fenestre, a laqueile ma figure fut sachie
» a la corbilhe, le cuel defour tout descovierte jusques a la chinture, si
» c'on veirat tout son eislre et la feniestre qui oevre sens braire, si que
» les gens poront clerement veioir le croissant, et a celle croissant covenrat
» prendre le feu a chandelle; et ne le ppirat li uns prendre a Tautre ne ren-
» dre, mains tous cascons venrat por ly a la feneistre del ventre prendre
» feu qui le voirat avoir, et aultrement ne Taront. Et cascon jour fereis
» enssi II fois. Et cheaux qui demorront a Gassedrue aront de feu asseis
» sens prendre la, mains ilhs n'en poiront reporteir aux aultres. Et li
» secons poins, si est que, se vos ne voleis faire chu que je ay dit, si soiies
V 'l g ku phJGIh dre fcu " con ^ or l e ^ de jamais a Romme a avoir feu. » Cheaux dient qu'ilhs veu-
lent le promier. — Si ont pris le congiet et se sont partis , et Font fait enssi
com dist est; car elle fut mise a la fenestre, enssi com Virgile avoit dit.
La prist de feu qui le voloit avoir, dont li peuple at fait si grant fieste en
disant que oncques a teile lieu ne vinrent prendre le feu. Phebilhe dest
quelle s'ochprat, et sa mere fut mult perturbee. Et Fanie, qui astoit royne
des Latins, oiit la novelle; se vint a Temperere, et li dest : « Sire, je suy la
» filhe Julius Gesaire, vostre oncle, et soreur a Phebilhe, a cuy ons faite
» teile honle, dont vos n'aveis point d'honeur; si vos prie que vos aidies a
phebilhe merit de » chu quelle soil ostee. » — Et Temperere appellat Frosse I'emperres, et
I'envoiat reconforteir Phebilhe, mains elle astoit mor deduelh. Adont ont
tant fail a Enye et a chu menee, qu'ilh l'ont meneit devant Temperere crieir
merchi, et apres a Virgile qui astoit en son casteal Agensi, ou ilh demorat
VII ans : enssi fut la pais confirmee. Item, en eel an meismes, le XII e
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LIVRE PREMIER.
255
jour de jenvier, fut neis I gran poete qui oit noni Ovidius, qui fist mult de DeOYidien
mervelhes a son temps. — Item, Tan V c et XLVII1, fist Virgile une mult
belle estude a Agensi. En eel an meismes fut fais emperere de Constanti-
noble, assavoir de Greche, Pollux le fis le roy d'Athennes. Item en eel
an vient a Romme I jovene hons ', qui de sa jovente avoit exerciet V ba-
talhes civile : 1'une contre les Mutinens % l'atre contre les Philippiens 3 , la
tirche contre Parasiens*, la quarte contre Syculiens % et la V e contre les Atri-
tiens 6 , assavoir la premier etla derain encontre MarcheAntoine 7 , la seconde
contre Bruciens el Cassiens 8 , la tirche awec Luques Anthoine 9 et la quarte
contre Sixte Pompee i0 . Et partout avoit meneit les batalhes civieles affin "
encontre les chevaliers deseurdis, qui guoient les parties deseurs nomees.
Ons apelle batalhes civiles, quant les citains d'onne citeit soy com ba tent ly
uns contre les aultres. — Ly emperere Octoviain fist a eel enfant mult grant
fieste et honneur, et le retient deleis ly. Et deveis savoir que Bruciens et
Cassiens, qui ferirent les promiers cops al ochire Julius Cesaire, mynoient
la seconde batalhe deseurdit; si furent ochis. Chis jovenecheaux oit une
legation encontre Hirisiens " et Pansa, dois consules qui avoient esteil al
ochier Julius Gesaire. Si oit grant batalhe, ou ilhs furent ochis les dois con-
suls; et tant fist, qailh ochist tous les mourdreurs qui avoient mourdrit
Julius Cesaire. — Item, l'an V c et XLIX, morut Cycerons, li gran philo-
sophe de Romme, qui astoit ly uns des senateurs de Romme, qui mult
traitiat de la pais Julien Gesaire et de Virgile et de ses antecesseurs; car
ch'astoit I vies hons. Si escript tout jusqu a sa mort, et de sa mort en avant
les escript Ovides le philosophe, qui viscat plus avant que Virgile ,s . Enssi Foi. 7i r*.
fut ly histoire de Virgile de Tunc chief jusqu a 1'autre , e'est assavoir jusques
Dez batalhes civilhes.
La venganehe de Ju-
liu» Cesar.
1 II doit etre ici question dOctave , dont le chro-
niqueur a cependant deja dit l'avenement, p. 248.
1 Allusion a la bataiile livree a Antoine sous les
mursde Modene (Mutina), et oil pcrirent les con-
suls Hirtius et Pansa.
• La bataiile de Philippes, ou perirent Brutus
et Cassius.
4 I^a bataiile de Perousc, oil fut defait Lucius
Antonius, frere du triumvir.
5 Allusion sans doute a la bataiile de Melazzo
(Mylae) y en Sicile, oil Scxtus Pompee fut defait.
• Je ne vois que la bataiile d' Act i urn qui puisse
etre indiquee ici.
7 Marc-Antoine le triumvir.
• Brutus et Cassius.
9 Lucius Antonius, le frere du triumvir, indi-
qud dans une note precedente.
10 Sextus, le fils du grand Pompee.
11 Sans doute pour a fin.
,f Hirtius.
18 Ce qui precede depuis : et de sa mort, etc.,
manque dans le manuscrit B.
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284 CHROJNIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
a sa mort, mise en escript par II valhans maistres autentiques. — En eel
an meismes vient en Surie Cassiens, qui en avoit esteit sires f . Sy amynat
awec luy tout son poioir. Si commenchat le pays a gasteir et guerroyer, en
disant qu'ilh ne sen partiroit jusqu'a tant que les Juys ly auroient donneit
De Herode et d«« Cas- HI* besans d'or *. Et quant Herode en tend it la novelle, si alat encontre luy,
et li portal C besans d'or et ly presentat, dont Cassiens mult Ten remer-
chiat: et raanechat les aultres, qui ne ly astoient venus presenteir de leur
avoir. Adont emynat awec luy Herode, et li promist la terre de Judee,
quant ilh l'auroit conquise; de quoy Herode Fen remerchiat grandement.
De Malices. — Apres avient que Hircain , qui astoit sires de Judee. avoit demorant awec
luy I sien priveit amis qui fut nomeis Malices 8 , en queile ilh se fioit mult,
et chis li procuroit sa mort, car ilh avoit esperanche de avoir alcuns de ses
honneurs apres luy; et pluseurs foit le voult ochire, quant ilh li sovenoit
que chu seroit maul fait tant que Antipater visquoit. — Puis s'apensat qu'ilh
donroit promier Antipater boire de venyn, et puis Hircain. Et apres chu le
Antipater eiHircainfu- fist *, car ilh empuisonat le bon Antipater, dont ilh morit. Quant Herode
ren anpo ionei . ^ ^.^ § . ^ ^ mult dolans de la mort son pere, et alat ou ilh avoit esteit
ochis. Si n'en mescreioit aultre personne que Malices; mains ilh sen excu-
soit mult fortement, et disoit se nuls Ten voloit ameltre, ilh soy defende-
roit. Et portant ne le voult point ochire Herode sens jugement, se rescript
a Gassien.
Herode at mandeit ' a Cassien que ilh ferat de cheluy qui son pere avoit
enpusonneit et ochis; et Cassien li remandat qu'ilh soy vengast del trahi-
tour par trahison. Adont ne passat gaire , assavoir le XX° jour de octembre ,
sor 1'an V c et L, que Herode mandat a mangier Hircain et Malices; et ilhs
vinrent. Mains enssi que Hircain seioit a tauble, si regardat deleis luy, et
Dei mort Malices. voit que Malices astoit mors ; de quoy ilh fut si enbahis, que ilh ne pot par-
leir en grant pieche 6 . Et puis mandat 7 Hircain a Herode porquoy ilh l'avoit
faire ochire; ilh ly respondit que Cassien l'avoit enssi commandeit, por son
pere Antipater que ilh avoit ochis par puison. Adont dest Hircain : « Benois
1 Cassius avait en effet obtenu de Cesar le gou- * Et puis Hircain* apres. Si le fist. B.
vernement de la Syrie, en me* me temps que Dec. * Pour demande.
Brutus celui de la Cisalpine. • Un long espace de temps.
• Sur tout ceci voir PI. Joseph, XIV, 18-20. 7 Encore pour demanda.
* Malichus.
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L1VRE PREMIER. 255
» soil Cassiens, car je voy bien qu'ilh mat ma vie respiteit; je suy certain
» et ay bien pluseurs fots apercheut qu'ilh me voloit enpuisoneir. » — Item,
I'an V c et LL le Xl e jour de mois de julet, commenchat Virjrile a fondeir virgiiefondatu citeit
une citeit qu'ilh fist mult belle sus la mere, et ie nomat Naple : chest fut
edifye noblement sor 1 port de mere et sour I oef de ostriche \ lequeile oef
ilh mist apres chu en 1 castel que ilh fondat enssy deleis Naple. en I pileir DecasteideOef.
entretalhiet; se le nomat castel d'Oef; et encor y est-ilh, et dist-ons qui
moveroit l'oef la citeit croleroit. — En eel an meisme se cuchat Herode d« Herode qui fut ma-
laide a Damas.
grandement malaide a Damas; si avient que Hircain mandat a Fenis*, le
frere Malices cuy Herode avoit faite ochire, qu'ilh soy vengast de la mort
son frere. Adont assemblat Fenis chu de gens que ilh pot avoir; et Hircain
1'enchargat enssi asseis; si entrat en la terre Fassians 8 le frere Herode, et le
commenchat a destruire. Mains quant Herode fut repasseis de sa maladie,
si le chaqat; et quant ilh soit que Hircain ly avoit aidiet encontre son frere,
se le difliat, et commenchat entre eaux hayme et guerre. — Item, Tan V c
et L1I , morut Hongres , li Vlll e roy de Hongrie; si regnat apres luy son fis Dei vm«roy hongrois.
Cormant XXXII1I ans, et fut 1 mult poissans roy.
En eel an meismes fut faite la pais entre Hircain de Judee et Herode. —
Item , Tan V c et LIIL fist Virgiie I pont parmv une aighe * tout pendant en virgiie fist i pont qui
aire par nigromanche, qui fut li plus grans de monde et h plus beal; mains
ilh n avoit et n'at ovriers ne jometriens en monde qui saroit aviseir par f©i.7h».
quelle manere ilh astoit fais li commenchemens en aighe ne en terre. Et
pendoit tot en aere, et ne savoit nuls dire comment ilh soy sortenoit; si
passoit-ons tout parmy a grans gens, et mult de pessans faus 5 enssi bien et
mies que sour 1 altre pont. — En eel an meismes fist Virgiie une jardin et virgiie fist i jardin fer-
11 r I? i • * • -i raeitdaire.
lenfermat, se 1 encloyt tot altour de pure aire; et astoit fail par teile ma-
nere que chu sembloit a cheaux qui le regardoient que che fust I mure. Et
fist dedens venir toutes herbes, tous fruis de monde queilconques qui est
par tous temps floris, espanis et meurs. Et si fist murs a li visible, qui a
tous aultres fut invisible, car nuls n'y veioit ne murs ne pires; et si avoit
1 subtilh entree que nuls ne savoit, fours que Virgiie et cheaux a cuy ilh le
1 Sur cetle tradition , voir le Gervaise de Lie- 5 Phazael.
brecht, pp. 106 et 161, et un article du meme * Cest-a-direou-desttwd'unceau, d'un lac. Sur
dans la Germania de Pfeiffer, vol.. V, pp. 483 et ce pont jetc en Pair et le jardin entoure d'air, voir
suiv. le Gervaise de Liebrecht, p. 16, et la note p. 106.
* Felix. 5 Faix, fardeaux.
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256 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
monstroit. — Si vos diray qu'ilh en avient 1 jour. Ilh avoit unc pastureal '
qui demoroit la pres, qui gardoit les asnes al defours de jardien Virgile,
1)6 conviTC Vir *' ,e qui asloit adont en son jardin mynant grant fiestes awec chevaliers et gran
fuison de gens de Naple awec leurs femmes. Si avient que X chevaliers de
[Naple mult valhans, qui n'astoient nient pryes a la fieste, et * alerent sovent
altour de jardin; si ne porenl dedens entreir, car ilhs ne porent troveir
I entree; mains Virgile le soit tantoist. Si envoiat 1 garchon a la porte, por
faire venir avant les chevaliers; et ly garchons y alat, et les fist avant venir.
Dei jut vir 9 iic. j^ p t- ns veir I beal jeux que Virgile fist subitement. — Virgile fist sem-
bleir * a eel heure que les X chevaliers fussent X grans draghons, qui
venoient vers ses gens erant que ilh avoit a mangier en son jardin; chu
sembloita eaux, et ilh sembloit aux X chevafiers que les cent chevaliers,
dainmes et borgois fussent lyons. Si orent paour de cha et de la, et fuyrent
les ambdois parties par le jardin; mains li jeux fut fais par teile manere,
qu'ilh n'y at cheLuy a cuy li paour tochast ne fesist maul apres. Et quant
ilh eut dureit unc pou, se le deffist et fist grant fieste a X chevaliers, et
demandat qui les faisoit enssi fuyr : « Sires, dessent chevaliers, vos aveis
» transmueis les corps de celles gens en fourmes de lyons ramaiges *, et
» portant nos fuyens. » Et ilh demandat as aultres qu'ilh leur faloit; ilhs
respondirent que ches X chevaliers leurs sembloient eistre dragons. De teils
jeux faisoit Virgile bien sovent, si honiestement qu'ilh ne meffaisoit a
hommes ne a femmes. — Item, chesti jour meismes, enssi qu'ilh seioit a
De. asnes don viiain. tauble, prist Virgile son varlet, si l'envoiat fours de jardin aux champs
por amyneir les asnes d'onc vilain qui dormoit tout estendut au solea; et
chis les amynat, et tanttoist qu'ilhs furent en jardin, se commenchont a
mangier les cardons qui astoient en jardin; et ilhs les mangnent volentiers,
car ilh n'avoit nuls dehours le jardin, ma is en jardin Virgile en avoit asseis ,
et de tout les aultres manieres de herbes qui sont en monde. — Quant les
asnes furent en jardin , Virgile fist esclarchir les murs del crossure 5 de
jardin , si que ses gens veioit tout mangnant le pasteur qui dormoit; et quant
ilh oit asseis dormit, si sault sus. Mains, quant ilh ne voit ses asnes, si com-
menche a crier : « Hey my ! mes asnes sont perdus , de quoy je moy devoy
1 Paisant. B. 8 Fit qu'il semblat
1 Cette conjonction, qui parait surabondante, 4 Sauvages. Ramages dans Roquefort,
se trouve dans le texte. s Sans doute pour clossure, cloture.
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LIVRE PREMIER. 257
)> chevir! » La commenchat a ploreir en disant : a Laurons le mes ont
» desrobeit, demeytant que l je dormoye : chi somelhe m'at costeit XXX
» asnes. » Atant court et racourt, partout quiert ses asnes, et parloit a
eux en disant : « Dain Bernars *, ou asteis aleis? » Finablement ilh at tant
corrut parmy les champs, qu'iih est tout lasseis. — Si est venus al mure de Demursde jardin vir-
jardin Virgile, qui ly astoit invisible. Se si jostat si fort, qu'iih chaiit a terre.
Ilh sentoit bien le mure, mains ilh ne le veioit point; et dest qu'iih avoit
bien LX ans qu'iih fut neis, mains ilh ne veit oncques mures la, et ne le Foi.7«r«.
sentit plus. Quant li vilain fut a mure qui fut entre luy et ses asnes, Vir-
gile fist les asnes recanneir, chu est a dire hennir. Adont li vilain les oiit;
se li semble que chu fust long de la , si soy mettit al corrir.
Quant les barons qui astoient en jardin veirent chu, si en ont faite grant
fieste et grant risee, si ont pryet a Virgile qu'iih li rende ses asnes. Adont
fist Virgile niyneir les asnes fours sour les champs, et quant ilh furent la
venus , si sont chaiifs com mors; et quant ly vilain corroit et racorroit, por
savoir ou ilh oyoit hennir ses asnes, ilh passoit a point, si qu'iih at troveit
ses asnes. Si les voit mors et escorchies , et les pealz osteis; chu ly sambloit. l«« »»««* sembiem
Adont ilh commenchat fort a ploreir, et s'envat vers son hosteil, et le
comptat a sa femme qui fortement en plorat. Et adont Virgile tantost 8 re- *-«* asnes ravisquirem
mist les asnes a la creppe de leur estauble a l'hosteil de vilain; et y man-
gnoient, sicom ilhs en avoient l'usaige. Et chu ne savoit nulluy ; et quand la
proidfemme alat d'aventure en l'estauble, si trovat les asnes mangnant. Si
huchat son marit et li monstrat, de quoy ilh fut mult liies; si fut en pais
de son corroche, et en rendit grasce a ses dieux \ — Hem, eel an meisme, Desiicirgczetieiampa
fist Virgile dois chierges ardans perpetueis por nient jamais a estindre, et irgil%
une lampe ardant enssi a tousjours sens estindre et sens amenrir; si les
encloiit desous terreen son jardin deseurdit. — Item, Virgile fist I tieste 5 qui Dei tieste qui i respon-
parloit et respondoit a ly de tout chu qu'iih ly demandoit que ilh avenoit
par tout le monde, car ilh mist dedens des espirs priveis. Celle tieste li dest
I jour que grans debas astoit a Romme por lez dammes mariees , qui soy
1 Tant que. B. L'expression mitant, desmiiant, 8 Incontinent. B.
pendant que, est encore usitee en wallon. 4 Et loiat ses dies tout. B.
* Bernars ne serait-ii pas ici pour Baldewin, * Voir a ce sujet un travail de Liebrecht, dans
nom de Fane dans le roraan du Renard f V. Grimm, la Germania de Pfeiffer, IV, 272.
Btinhart Fuchs , p. ccxlit.
33
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258 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
lassoient en adulteire cognostre a aultres hommes que a leurs maris , sicom
ilh avoit esteit esproveit par veue, et ilh est veriteit. « Si venrat chi mais-
» tre Grigoire ly senateur, qui vos requierat depart les Romans que vos les
Dei tieste de coe?re. » veulhiies subvenir. » Quant Virgile Foil, si commenchat a rire, et fist une
tieste jusqu 'a la poi trine de coevre,qui avoit une grant geule et tout ovierte;
^[/y""* •* Ie che ~ P u * s fis' ' cheval ', et sus I homme grans et tout armeis qui tenoit l'espee
traite, et qui chevalchoit ou ilh voloit, enssi com ilh viscast.
Atant vinrent les Romans droit sor Tan V° et LIIII, si ont troveit Virgile
qui soy esbatoit aux Neapolins; si 1'ont enclineit et salveit, sicom ilh affer-
roit, et ilh les rechuit mull liement. Cheaux li ont compteit tout leur affaire,
Vi mil e at i9t r qu e a fem e ' ^* r g*' e ' eur respondit qu'en femmes gieste f grant dechivanche. « Or
lion - » vos diray le remede que y fereis. Promirs moy salueis tous les Romans,
» et se leurs portereis eel tieste qui accussurat les fais des femmes marieez
» et des pucelles enssi, et vos assiereis le tieste en mure del thour ou Phe-
» bilhe me quidat traire en la corbilhe, sicom vos saVeis; et puis toutes
» femmes mariees et a marier, qui sieront mescreue 8 de fornication et
» d'adulteir, seront amyneez devant la tieste, et bulteront leur main dedens
» la boche 4 ; s'ilh est sens coulpe del fait, elle s'en parti rat tan toiste, et
» s'elle en est culpauble, elle ne porat sa main oisteir de la bouche, si aurat
» gehit tout la veriteit del fait de mot a mot. — Et portant que teils fais
» avinent del nuil, si faut a Romme 1 ban crieir que nuls ne voise par
Df chevai qui coroii del » nuit apres la cloque sonnee; et s'ilh avient qu'ilh ly avengne maul, se le
dui par tcioi. ^ porte, car ilh n'en aurat aultre chouse; et vos mettereis celle cheval et
» 1 homme armeit stesant desus droit al coron del peron , et le lassies la: et
» vos veircis chu qu'ilh ferat. » Enssi fist Virgile aux Romans qui sorjour-
narent deleis luy V1I1 sammaines. — Et dedens chesti terme li dessent qu'ilh
avoit voie obscure et peruelheux entre Romme et Maple, et par especial
par les montangnes de coites 8 ; et ons mette al monleir et al avaleir VI
journeez, « si que vos dertioreis maul chi por les Romans, car les Romans
Foi. 7*f. )) veulent amendeir tout chu que ons vos puet avoir meffait a Romme, si
1 Voir encore la Germania de Pfeiffer , IV, 263. Sainte-Marie in Cosmedin. Voir a ce sujel le Dunlop
2 Prononcez giste, git. de Liebrecht, p. 187 , et la note 383 du traduc-
* Soup^onnees. Mescroirc dans Roquefort. teur.
4 C'est de la Bocca della verilb qu'il s'agit ici ; * Je ne crois pas qu'il s'agisse ici d'un nom pro-
elle se trouve a Rome dans le peristyle de Teglise pre, mais des montagnes situees le long des c6te*.
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LIVRE PREMIER. 259
» veulhies revenir. » — Respont Virgile : « Je ne rentray jamais a Romme,
» mains je suy a leur commandement tant que je viveray, et les montan-
» gnes de coites ne sont mie maulhonieste por passeir, chu moy semble;
» or y prendeis garde. Apres je vos feray chu que jamais ne faurat , se ons
» le garde bien; car vin et oyle qui serat a Naple jel feray aleir a Romme,
» et le vin qui serat a Romme jel feray venir a Naple parmy les buses que
» je feray, et les airay fait en chest nuit. Si at distanche entre Romme et
» Naple IIII XX lieux et plus '. » De chu le remerchiarent les Romans. Et dest
encor que chu que ons metteroit dedens les chenais, serat de Naple a d* chenais faite par
Romme dedens 1 heure de jour. Et chu fut fait en mois de septembre Tan
deseurdit. — Adont at Virgile parleit a ses espirs et commandeit qu'ilhs vir ? iic P aroiiease$c$
travent * les montangnes parmy, et tout emy fachent une voie large ou II
chars se puissent bien plantiveusement passeir awec les cherons 8 qui les
conduiront, et si veulhent tantabatre de la roche, que IIII hommes a piet
ou a cheval y puissent passeir a front, et qu'ilh ait encor bonne espause de
voie entre les cherons et eaux des dois costeis \
« Apres meteis une cedule de creanche qui deviserat qui devers Romme
vorat entreir, en chesti voie ilh tenrat la diestre main, et chis qui venrat
de Naple al diestre main enssi soit a cherete, ou a cheval ou a piet. Et si
soit cascons segure de tous murdreurs, laurons ne altre vilain cas, car
ilhs en sieront bien gardeis. — Apres, moy fachies dois chenais qui por-
tent Tune oyle et vin de Romme a Naple, et l'autre de Naple a Romme. »
Quant Virgile l'oit commandeit, tantoist ilhs le fisent, car anchois que li
soleal fust leveis sont faites le chenais et la voie; et misent les escript aux
II entrees. Et deveis savoir que la voie est de lone dois lieues ou plus, et
si fait si obscure con n'y perchoit nulluy ; et n'y fut oncques homme mur-
drit ne desrobeit. Ancors durent les chenais et la voie a jour d'huy, chu
dient cheaux qui les ont veyut; et passent bien en demy-heure dont parmy
la montangne mettoient VI jourz ou VII. — Quant ilh vient al matin, les Le«Roman*sc partem
Romans se sont partis de Virgile. Si en vont tant, qu'ilhs vinrent a la mon- e ,rgl c *
tangne de coites; si le truvent trawee, et si ont veyut la lettre qui devise
1 De lieues franchou , ajoute ici le manuscrit B. designer les char re tiers.
* Plutot trawent (trouent), comme on dit encore 4 II est ici qnestion du tunnel antique construit a
en wallon. travers lePausilippe. Voir a ce sujet le Gervaisc de
5 En wallon on se sert encore de ce mot pour Liebrecht, p. 47, et la note, p. 108. Hanovrc,4856.
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;Ie,
260 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
chu que jay dit. Dedens entrent, si sont passeis en demy-heure, et ont
tant aleit qu'ilh sont venus a Romme en demy-heure, ou ilh avoit bien
IJIl" lieues '. Et les festient mult li emperere el les senateurs, et deman-
ded de Virgile qu'ilh fait. Et cheaux respondent : a llh fait enssi com saige
~ » cleire, et ly plus subtilh de monde, et vous salue tous, car jamais ilh
)> ne revenrat plus a Romme; ilh Tat jureit, et nos at faite grant fiesle VIII
» samaynes que nos avons esteit deleis luy. Savons veyut JNaple et tous
» ses estas, qui est mult belle citeit et grande, seante sour I bras de mere;
» si at casteal beal et fort, que ons nom ca steal de l'oef. » El la leurs corap-
tarent tout chu que j'ay dit par deseur , et de jardin el de tout chu qu'ilh
at fait. Apres ont dit de la voie de la montangne de coites, et de chenais
de coevre qui le vin et l'oyle doienl porteir. — Quanl ilhs orent tout chu
dit, si ont dit le fait por lequeile ilhs astoient la aleis, et monstrarent la
tieste d'erain, et comment ons le doit atachier en mure, enssi com j'ay dit
desus, et apres de cheval; et ont tout dit par queile maniere ons en doit
faire del tout.
Apres ont fait le bant crieir qu'ilh ne soil horns, ne vies ne jovenes, qui
isse de sa maison del nuit apres le son del cloque *; et se ilh y vat, chu serat
sor son perilh. En teile maniere fut useit a Romme de la tieste et de cheval
que nos disons. Si en furent acuseez mainles dammes et damoiselles par la
Foi.75r«. tieste, et mains hons ochis par le cheval qui tout nuit coroitaval Romme.
Et ne poioit nuls escappeir, et lendemain a soleal levant ralloit esteir a
DeSaiuste. peron. — Item, Fan V c et LV, morut Saluste, I grant poetes latins qui
i>e chcrai virgiie. gieste 8 a Romme le grant. — Item , en eel an meisme , le XXV e jour de mois
d'awoust, fist Virgile I cheval d'erain qui garissoit tous les chevals de toutes
maladies qui li poioient venir par queilconques ocquisons, oussitoist que
ons le lavoit del aighe de son bangne; se le mist a Naple. — Item, l'an V c et
Dc Herode am prist a LVI , le XII e jour de mois de junne, donnat Hircain le roy de Judee a He-
rode II C besans por impetreir a luy amisteit. — En eel an meisme soy mariat
Herode, et prist une femme qui oit nom Dolsida, qui astoit de petit lignie,
mains tant astoit belle que por sa bealteit le prist-ilh. Ghis Herode ne fut
1 Ces mots : en demy-heure f ou ilh avoit bien II II" ' D'onne campaine. B.
lieues, doivent 6tre ici de trop et ne se trouvent * Git, comrae plus haul,
pas dans le manuscrit B.
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L1VRE PREMIER. 261
mie de la nation de Israel; anchois asloit de part son pere Antipater de la
citeit de Ascallon, et de part sa mere astoit-ilh de Arabe. — Item, Tan V c
LV11, leXVH jour de decembre , commenchat Virgile a edifiier une maison Le maison virgiie «
sour la mere, asseis pres de la citeit de Naple : se fut tout reonde , la plus
belle et legiere et lencheuse de monde, mains elle n'avoit que une entree.
Et avoit une pont leviche desus la mere devant la maison; et a celle entree
fist II vilains de coevre qui tenoient II flaieis * en leurs mains, dont ilhs Desdoisviiainsquife-
batoient fort toudis sens cesseir ne targier; et batoient enssi si fort pres
qu'ilhs ne debrisassent le piers de la porte que ilhs defendoient que nuls
n'oisast entreir dedens, s'ilh ne vosist eistre ochis ou tous defrossies. Et
durat chu longement vivant Virgile, et apres sa mort tant que Sains-Poul DeSaimPoui.
l'apostle les fist cesseir apres ('incarnation Jhesu-Oist, enssi com vos oreis.
— En celle maison voult Virgile demoreir et estudier XIIII ans depuis
qu'ilh viscat la apres *. En eel an meismes oit Dolsida, la femme Herode,
I fis cuy Herode fist nomeir Antipater apres son pere. — Item , Tan V c et
LVIII, en mois d'avrilhe, envoiarent les Egyptiiens une noble abbatiait de
jiobles gens a Virgile 8 , aportans lettres de creanches et disant que, enssi
com * Ptholomes avoit fait 1 compte d'oir s de la lune, qui a son temps virgiie, decouple dor.
I'avoit mis et ensereitla, ons ne le poioit troveir; si voloient priier les
Egyptiiens a Virgile, en l'honeur de March leur Dieu, qu'ilh vosist fa ire
1 compte d'or qui assengne la lune prenans.
Virgile respondit cortoisement : « Barons, en nom de March, ne de
» Jupiter, ne de Venus, ne feray-je riens, car chu ne sont pais Dieu de
» nature, mains estoiles et planetes, qui n'ont nuls virtus aultre que Dieu
» qui • fist chiel et terre leurs donne; se ne creieis mie bien; mais li vray
» Dieu, li tous poissans, est Dieu qui fist le firmament et le monde de
» nulle chouse. Chi Dieu la triniteit astoil et est dedens une unileit, qui
» astoit anchois le monde fais, tous temps fut, sens commenchement, sens
1 Fleaux a batlrc le grain. Sur cette tradition * Et disent ensi que. B.
voir le livre de Dunlop : Geschichte der Prosadich- 5 Le Ptolemee dont il est ici question est le
tungen, p. 187. Je cite la traduction allemande eclebre g6ographe. Quant a l'operation rappelee
de M. le professeur Liebrecht. Berlin, 1851. par le chroniqueur, elle porte sur un calcul astro-
* XIIII ans que ilh visquat puis. B. nomique qui a pour objet de trouver cc qu on
* Envoiarent li Egiptiiens grans abbassateurs a appelle le nombre d'or de la lune.
Virgile. B. * Mot supplee d'apres le manuscrit B.
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262 CHROMQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
comcaihoiiquefutvir- » fin et sierat : tous biens et (ous virtus desquendent de luy, qui est de
g iep pams ^ jjj p ersonnes en unc seu j £)j eu . chjjs es t £)j eil omnipotent, et puis est
» Fis, et puis Sains -Esperis en uniteit, qui est advenus et advenir est,
» advenus par deiteit, advenir par humaniteit. Et chu venrat a XX e ans
» apres chu que je seray mors, lequeis j'ay creyut, croy et creray; si meg '
>» mon arme a son commandemenl, a la grasce et loienge de luy. » — Quant
cheaux de Naple et cheaux d'Egiple oirent comment Virgile desdengne leur
Dieux, et se croit en uns aullre. a Virgile ont demandeit qui est chi Dieu
del triniteit qui s'asemble en une unite! t? Respont Virgile : « Chu est voir
» que ches trois Dieux sont trois revenant a unc seulement; et chu est la
Fo, - 75vc - » triniteit parfaite en uniteit, toute portraite de triniteit en trestous cas,
vi ?riniieit l del Saint " }> car ''** est P^re* i'h est Fis t ilh est Sains-Esperis, qui est uns seul Dieu
» sens division, de sa substanche tous poisans, tous parfais, de tout bonteit
w et vertut, sens quantiteit, sans qualiteit, sens fin, sans coramenchement,
» Alpha et Omega at nom, qui est fontaine de scienche, qui venrat dune
» virgene nastre, et XXX II ans et trois mois yrat par terre salvation querre
)> por son peuple, et morat. Apres chu ilh briserat infeir, si en jetterat sej
» subgis, enssi que my et les aultres qui la mys sieront , et y ont esteit par
» le pechict Adam , qui por Eve sa femme fut inobediens a Dieu. Apres
» nous ma in rat en paradis awec luy, et en nom del sainte baptisement de
virgile $oy baptist. » Peire et de Fis et de Sains-Epirs, je preng celle aighe qui est la triniteit
» enssi bieii que je fuisse adont vivant, quant ilh serat sa foy prechant. »
•Enssiinent je lay dit a Romme aux senateurs que je le dy a vos.
Quant les Egyptiiens entendirent chu , se dessent a Virgile : « En nom
» de eel Dieu el de tout ses virtus, nos fais le compte dor por avoir per-
vir^iie tut le compte •» petuel memoire. » Adont leur respondit Virgile que volentier le feroit en
une kalendier solonc la novelle loy advenir; et le voirat ens asseir por si
que ly angle le garderat, et ilh demonstrerat 1'an tout altour al thier de la
lune novelle \ Enssi fist-ilh le compte d'or, et les Egyptiens en virent 5 la
coppie et le portarent en Egypte. Et Virgile envoiat la coppie a Romme.
nehangncsvirjiiequi et H principaul demorat a Napple. — Item, Tan V c et LIX, edifiat Virgile
mVudin? e m une vilhete quilh appellat Puchoul 4 , et encour le nom-ons enssi. En celle
1 Pour tneis. 5 En orent. B.
* A I thier jour lune nmelle. B. 4 Pouzzoles; en latin Puteoli.
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L1VRE PREMIER.
263
vilhe edifiat-ilh des bangnes sub tils, la ilh se bangnoient toutes gens qui
malaides astoient de queilconques maladies qui puet venir, hommes et
femmes; se mors ne est, ilh fait tout le mal issir fours; et si astoit escript
deseur cascon bangne, de leltre de laiton, de queile maladie ilh garissoit;
qui puis durarent longement, et puis furent destroys par le phisichiens de
Salerne, qui par faux ribaux II sent embleir les I a mines de tous les bangnes
ou les escriptures astoient '. Onques depuis ne fut nuls qui soy oisast ban-
gnier plus dedens les dis bangnes, car ons ne savait auqueiles maladies ilhs
astoient bons ou malvais *; mains les bangaes sont encors tous la. — Item ,
apres chu estudiat Virgile sens issir de son hosteil, fours que quant ilh alloit Dei hostel virgjic.
disneirou souppeir awec les gens de Nappies, ou eaux awecly; la faisoit-
ilh des jeux si beals et si mervelheux, que chu sieroit grant enlongement s
de ma mateire del tout a racompteir; car Tune fois faisoit venir al disneir Dwjeuxvirgiie.
uns veneurs cornant, puis venent bisses et cherfs lanchantes 4 parmy les
tables sens touchier nuls viandes. Apres faisoit venir menestreis tres-jolie-
ment trompant , et musanl, et violant 5 tous instrumens de musiques. Et les
chierfs, et levriers, et braches • devenoient incontinent et visiblement da-
moiselles noibles et dameseaux, qui dansoient de mult noble affaire; et si
tenoit cascon une escuele plaine de roisins tantoist colhus de pays ou ilh
astoient meurs, car a iNaple point ne cressoient a eel temps, car ch astoit
en marche. — Item, Tan V c et LX, le XV1° jour de may, donnat Hircain a
Herode une siene cusin k femme, qui fut nominee Mariane; et oit Herode Desfemm«He«Hie.
II femmes. De eel Mariane oit Herode une fis qui fut nommeis Alixandre.
En eel an meismes soy fist Herode circoncir a la loy des Juys por Tamour
qu'ilh avoit a sa femme Mariane, qui astoit juee \ — Item , Tan V c et LXI ,
en mois d'avrilh, fist Virgile I disneir a ches de Napple tous femmes et Deconvhevirgiie.
hommes pres de II C milhes , en son jardin qui ne tenoit que I journal de
1 II est question de ces bains de Pouzzoles dans
plusieurs auteurs du moyen age, et notaniment
dans le Speculum historiale de Vincent de Bcau-
vais, VI, 61.
' Ces trois derniers mots ne se trouvent pas dans
le manuscrit B.
8 Prolixiteit. B.
* Ce mot peut a la rigucur avoir le sens de cou-
ratU. Ne faudrait-il pas mcttre un accent aigu sur
Ye, et voir ici des animaux enchantes ?
5 Le chroniqueur designc probablcment par cos
trois expressions les instruments a bouche de cui-
vre, puis les instruments a vent et a cordes.
6 En donnant le son dur au ch on saura quelle
espece de chiens est indiquee ici.
7 Juivc.
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264
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Fol. 74 r».
De diverse pays.
Dez annet Virgile
terre, et y seirent bien aise et plantiveusement a taubles tous. Promirs ons
aportat a tauble pain, vin et seil , qui tout subitement furent mis al tauble;
incontinent les me$ Tuns apres 1'aulre aporteit, et les devanttrains si repor-
tent si honcstement et si hastiement, qu'il n'y awist tant seulement que C
De/xviiimesvirgiic. hommes seant a tauble nient plus * n'astoient encombreis del siervir ou del
deservir. Et si servit de XVIII mes, dedens compteis les entre-mes; mains
queiles ilhs furent je ne le s?aroy dire, mains bien s<jay que teis mes y oit
qui vient d'Indre, et de Persie, et de Libie, d'Etyoppe, de Nubie, de Baby-
lone, et d'Ybernie, el d'Aquilone. — Car d'Yberne vinrent annettes *, qui
la croissent sour les arbres qui les portent enssi com fruis , qui sont solonc
les riviers qui les gardes; car quant ilh sont meurs, ilh chient 8 ; se ilhs
chient a terre, ilh purissent, et s'ilh chient en l'aighe, ilh prendent vie,
et se noienl tantoist. Et est viande que ons mangnoit mantenant le venredi
et en Quaramme, sicom fruis d'arbre. Virgile se les donnat rosties et ste-
Dozpommezde Nubie. chinees 4 de basmes qui vient d'Egypte. Et Tautre mes, qui furent pommes
de Nubie que ons appelle Lipte 5 , qui de si noble sawour sont que les gens
en vivent del oudeur •; bien furent serviz de tous mes, et de beals jeux a
Lhommeensepeiiwde grant planteit. Entre lesqueiles Virgile fist que toutes les femmes vestirenl
famine etalencontre. . * o *
les vestimens et les braies des hommes, et les hommes les veslimens des
femmes, et n'avoient point dc barbes, mains les femmes avoient barbes;
Apres rinremiosnus. j e c h u orent grant mervelhe et grant joie. — Apres tantoist se vinrent tous
nus danseir, salhans et trippans a grant joies, et leurs membres natureis,
que ons se doit honstier del monstreir, veirent tout clers. Et quant tout chu
fut fait, ilhs se voient seant a tauble, mangnant et bevant, car ilhs n'as-
toient encors movis de la table, mains li jeux astoit fais par semblanche.
Sour Tan V c et LXI deseurdit, assemblat li emperere Octovian Cesar
1 11 doit y avoir ici un sujet omis ou sous-cn-
tendu , et la phrase me parait signifier qu'on ser-
vit lc diner de facon qu'il n'y eut jamais plus de
cent convives a la fois assis a table.
* ,J nnes. B. Mot forme du latin anas, aneta
dans la basse latinite. Sur ccs oiseaux aquatiques ,
presentes comme les fruits de certains arbres plan-
tes le long des rivieres, voir le Gervaise de Lie-
brecht, ch. 423, etla note, p. 463.
5 Pour chaient, tombent.
4 Si Ton pouvait supposer une operation culi-
naire qui appliquait le basme d'£gypte comme le
lard aujourd'hui, il serait permis de voir dans le
participe stechinecs, la traduction du verbe alle-
mand sleeken , piquer.
' Jc mets une capitale a ce mot, qui me parait
designer cette partie de la Nubie ou se trouve le
promontoire de Lepte.
6 Sur ces peuples conformed de fa^on a vivre
par Todorat, voir Pline le naturaliste, VII, 2.
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LIVRE PREMIER. 263
grans gens et montat sus mere, et ly roy Sedros de Tongre awec ly, et
laisat garde en sa terre Anthone son escaniscal * par teile convent se ilh le
gardoit bien, ilh ly donroit a sa revenue une partie de son empire, mains DeOctorianetsedros.
ilh ne porteroit point de coronne. Puis soy partit Octovian, si arivat en
Egypte, el conquist tout la. terre ^si ochist Sedros le roy Ptholomes. Adont
defalirent les Ptholomes en Egypte, qui avoient regneit depuis Alixandre le GhidefaUrentiesPtho
roy; et fut la terre d'Egypte mise en la subjection * des Romans; et y mist
li emperere unc balhier. Et ful eel batalhe le promier jour d'awoust, Fan
deseurdit. — Adont choisirent 8 les Romans qu'ilhs astoient saingnours de
tout le monde, et qu'ilh n'avoit jusqu'en Orient, en Occident, en Medis
et en Septentrion, nation qui ne fuist subgis a eaux \ Et avoit fait leur em-
perere eel derain conqueste mult grant, et toudis en acrossant *. Si ordina-
rent que li emperere porteroit publement le monarchie, qui est le forme
del monde; si le porta t sens crois; et maintenant y porte sus ly emperere Porquoy r emperere
I crois, et que dedont en avant 4ous les empereres le portassent commune-
ment que nient ne faisoient devant. — Et por la grant victoire qu'ilh avoit Porquoy <*» apeiie
. ••■? ■ ■ i • I'emperere Awoust.
oyut le promier jour d awousl, ly et tous les empereres apres luy auroient
a nom Awoust*, dedont en avant, awec leurs propres noms; et Awoust
vault aultant que en croisant 7 , sique Octaviain, s'appellat enssi en ses let-
tres dedont en avant : « Octoviain , emperere romains toudis en croisant, »
et les aultres apres enssi ; mains les cristyens soy escrient : « Karle le
» promier, ou li secon, ou li thier, par le debonnaires faveur divine, era-
» perere Romains toudis en croisant. » Et enssi fut-ilh adont ordineis, et
encour tient-ons chu a present.
Sour Fan V c et LXII, en mois de June, chaiit teile noise et teil tempeste d« grant tcmpesie et
de chiel, qu'ilh at tout destruit les vingnes et les bleis en parties d'Alle-
mangnez, car ilh chaiit pieres oussi grosses que tiestes d'hommes et plus.
Et chaioient oussi espesses que plove a Basele, Strasborch, Maienche,
Warmase 8 et Colongne que ons nomoit adont Agrippina, et furent bien
XII m mansons tempesteez et confondue, dont le peuple des Vciteis dient
1 Encore une nouvelle forme du mot sene'chal. * En croissant. B.
1 Subgite. B. • Augustus mentis en latin.
* Nous avons deja rencontre ce mot, qui doit 7 Allusion aux rapports existant entre les mots
etre prononce coisirent, virent. Augustus et augere.
4 Aux Romans dans notre texte. • Worms.
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266 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
i>e tregut de Tme. et croient ferraement que chu ont fait les dieux de Trive, portant qu'ilhs
avoient refuseit * de payer par l'espasse de XXX ans le tregut qu'ilh devoient
a cheaux de Trive; si qu'ilh furent a chu conselhiies qu'ilhs le veulhent
Foi.74ro. payer d'ors en avant, et satisfaire del tregut de XXX ans devant, et enssi
le fisent. Cheaux de Trive, quant ilhs furent payet de XXX ans, si ont oyut
grant avoir, et de eel avoir ont intablie une ymage de marbre, e'est a en-
tendre une colompne, et sus eel columpne ont esleveit d'or le ymage de leur
dieu Jupiter, dois pies de long, qui tenoit en sa main une brievelel*, ou
avoit ches parolles chi en lalin : Jovi vindici Treverorum, ex censu quinque
urbium per tria decennia denegato, sed celesti igne et terrore extorta, pla-
cabile holocaustum; ch'est-a-dire en franchois : « Jupiter, le dieu de Trive,
» par les cens de V citeis qu'ilhs astoient demoreis et targiies de paiier par
» XXX ans, at vancut les V citeis de feu de chiel, et del terreur del arsure
» ont fait chesti plaisant sacrifice. » Et puis ont fait entour feu et toute
poudre de espesses odoranles, dont la fumee montoit al ymage de Jupiter,
De* ftiianchei entre — Item, en eel an meismes, confirmarent cheaux de Trives et cheaux de
Trive et Rains. . .
Rains en (jhampangne, une mult grant amisleit entre eaux ensemble, par
le volenteit de leurs dois roys, que ly uns ne faisoit riens sans l'autre. Et
fisent cheaux de Rains une porte a Rains, qu'ilh apellarent par son nom
Trive , car cheaux de Trive et de Rains sont les principauls en Galle ba-
telhiiers ' ou Belgique.
L? declaration dezpays Nos vos vorons declareir de Galle que ch'este, et quant en est, el ou ilh
siet solonc Ysidorus et les aultres ; et tot promier est Belgique-Galle % qui
est enssi appellee apres une roy de Trive qui astoil nomeis Belgique 5 , — et
portant dist-onsTrieve Belgique — , a wee lequeile Belgique • mult grans gens
s'en allat des Galliciiens. Et passat li roy Belgique en Gresse a son temps
qu'ilh regnoit; si conquestat tan I de terre, ou ilhs habitarent, dont dedens
brief temps fut-ilh bien II1 C milhes hommes , desqueiles por querir noveais
sieges ilhs de chesti peuple une partie envoiarent en Ytaile, qui encachat
1 Detenut. B. dans le manuserit B.
* Brievei. B. Un petit bref , un petit e\jrit 4 Plntot Galle-Belgique.
5 Je ne sais ce que signifie ce moL Serait-ce 5 C'est-a-dirc Belgis, et cela d'apres Fhistoire
une sorte de jeu de mots fonde sur la ressemblance legendaire, bien entendu.
exterieure que presentent les expressions Belgique 9 Ne pas confondre le pays avec le roi j e'est du
et Bellum? En tous cas, le mot ne se troure pas roi Belgis qu'il est ici question.
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LIVRE PREMIER. 267
les Tuscains fours de Tuscaine, et gangnarent les citeis de Melant, Ari- Dei irou caiiw.
mine, Com, Bresse, Verrone, Pergamum , Trente et Vincente, et les pupliat
toutes de ses gens. Chest Galle est devisee en trois, asscavoir : Com ate.
Brachate et Togata. — Item , chi apres s'ensiet chu que Ysidorus en dist, car
Galle en Grigois chu est a dire en franchois, lait; portant que lait est blans,
si est appelleis Galle; car les montangnes et les riguere de chiel a eel partie
excluit l'ardeur de soleal, affin que les blanqueurs des corps ne prendent
point de coleur. Et les montangnes deMongni defendevers orient, eta soleal
couchant vers Occident; incluit a medis les desrubanz des roches, a septen-
trion li flus del Riens et de Germaine enssy 4 . — Si en est li commenchement
Belgique et li fin Aquitaine, la region est unc wasons de bonne viande ' et DeBeigique.
convenable aux corrageux. Si est des fluis et des fontaines grant planteit, et
espandues de dois grandes riviers et fluis , ly Riens et le Roine. Belgis est
une citeit en Galle, a quoy Belgique est dite, enssi com dit est par deseur; Beigis.
chest Trieve. Et nom-ons chu qu'ilh at decha les montangnes, Cisalpina ou
entour les montangnes; et outre les montangnes, nom-ons Transalpes.
Reatine, qui est deleis le Riens, nom-ons Reatine apres le Rien , et Aqui-
taine, por les crombes aighes et fluis, sicom le Loire, est enssi apellee 8 , enssi
que dist Ysidorus en livre XIIII e , a V e capitle. Et fait encor distinction des
Gal les; ilh dist qu'ilh en est trois par les hystorioghaphiens d esc ri pies,
desqueils ly une est Belgique et les aullres Celtique et Aquitaine. — Galle De Ga,,e Bc, « ic i» e -
Belgique at vers orient le fluis del Riens et Germaine, et a Europe 4 les
montangnes, et a medis le provinche de Nerbonnes, et a soleal cuchant
le provinche de Lyon. Tout chu qui est del Rien jusques a le Loire est tout
Belgique, en queiles sont toutes ches provinches : promiers les quattres
provinches qui sont de Lyon, dont ly promier et ly chief est Lyon; del
seconde provinche est li chief Soyson, del tirche Ruanz 5 en JNomendie, et ™.™«*-
1 Voici le textc d 1 Isidore dont ce passage doit 5 Voici encore le passage d'Isidore : Rhetia vero
elre la traduction. On verra corabicn Jean d'Ou- quod sit juxta Rhenum, Aquitania autem ab obli-
tremeuse, ou peut-etre son copiste, denature sou- quis aquis Ligeri fluminis appellate.
vent ses autoritcs : Hanc (Galliam) ab oriente AU 4 Je ne sais ce que le chroniqueur entend ici
pium juga tuenlur; ab occasu Oceania incbidit; a par le mot Europe, et je suis dispose" a y voir une
meridie prerupta Pyrenei, a septentrione Rheni erreur, soit de lauteur, so it des copistes. Quant a
fluenta atque Germania. Isidore, je n'ai trouv^, dans son XIV« livre, aucun
* C'cst-a-dire un pays fertile : Regio gleba uberi, passage qui traite de cette division de la Gaule.
dit Isidore, ac pabulosa ad usutn animantium apta. * Rouen.
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268
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
De Galle-Celtique.
De Galle-AquiUine.
De Espangoe.
Dec fluis de Galle.
ly quars est Thours sus Loire. Et sont encors en Belgique-Galle dois pro-
vinches que ons apelle Trieve et Rains. — Item, sont en Germaine dois
aultres que Julius Cesaire nommat enssi, transportant le peuple a Ger-
maine le Grant, qui siet oultre le Rien , et les fist la habiteir; desqueils dois
provinches Maienche est ly une ', et Agrippine Taultre \ Et ches VIII pro-
vinches tient Galle Belgique. — Et 1'autre Galle, qui at nom Celtique, est
tout chu qui est a la nascenche del Royne le fluit, jusques a la mere Med it e-
ranie est compris ; en laqueile sont ches provinches : Besenchon , Torenche %
Viane sus le Roine, Nerbonne le seconde, et Nerbonne le premier, Ays en
Provenche et Ebredunensis 4 ; ches VII provinches sont en Galle Celtique.
En la tirche Galle, qui est nominee Acquitaine, que le Loire une tres-
grant partie de septentrion en orient circuit, y at trois provinches; des-
queiles la promier est Bituricensis", la seconde Bordeais, li this Populunne*,
que ons nom allrement Annytana 7 en Espangne, de quoy Tytus Lyvus en
son XXII livre parolle. Ancor at Acquitaine Tureman ' et Tholouse, et chu
qui est entre le fluis de Loire et Geronde et le montangne Pireneez que
Galle Espangnois est nommee, et jusques a la mere Occeane, est tout de
pays d'Acquitaine.
Mains ilh est bien veriteit que, entres les parties d'Acquitaine, est une
aultre Acquitaine qui a fluis de Loire et Geronde et le mere se circuit, chu
dient alcuns; mains solonc Ysodorum et les anchiens, Narbonnes et Bitu-
ricenses astoit subgit a ly, si queilh contient ens decreis IX° '. Mains Carle
mist la ducheit de Nerbonnes oultre Geronde, jusqu'a le Roine qui est de
provinche de Nerbonne. Et les plus grans fluis de Galle sont le Riens et ses
termes ,0 : la Muselle H , Mouse, Sayne, Loire , Geronde et le Roine. — Galle
1 Basse. B.
5 La lialte. B.
8 Orange?
4 Embrun , Ebredunensc castrum.
* Berry.
6 La Novempopulanie.
7 Anyitana. B. Je ne sais ce que veut dire le
chroniqueur, et je ne vois rien dans le livre XXII
de Tite-Live qui puisse servir a eclaircir le pas-
sage, dnnytana serait-il la pour Septimaniaf Mais
le nom de Septimanie s'appliquait a la premiere
Narbonnaise, non a la Novempopulanie.
8 Quid? II y a dans les Pyrenees un passage
appele Tourmalet, mais il s'agit ici d'une ville.
8 11 doit elre question ici d'une decretale de la
collection fabriquee au lX e siecle par le Pscudo-
hidorus.
10 Le mot latin terminus designe les fnmtihres
et aussi les pays. Le chroniqueur vcut-il indiquer
ce que nous appelons le bassin du fleuve?
11 Cette riviere ne se trouve pas dans Tenume-
ration du manuscrit B.
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LIVRE PREMIER. 269
de Lyon jusques en Acquitaine est Roine et Loire. A Belgique, Matroine et
le Saine entre Meuse et le Rien est Austrie, mains de Mouse a le Loire est
JNeustrie. — En revenant a nostre mate ire, puisque nos avons declareit de
Galle queile ilh est et quantes , si vos disons que eel an meismes V c et LX1I
morul Floveus, le VIII e conte de Flandre; si regnat apres son fis Flamens Deiix«contedeFian-
XXII ans. En eel an meismes oit Herode 1 fis de Mariane , sa seconde
femme, qui fut nommeit Aristoble. En eel an fut fait la division de la pro- La divisions d«r«-
messe que Octoviain avoit fait a Anthone, son senescal, en teile maniere et Anthone.
que Octaviain tenroit Ytaile, Galle et Espangne, et Anthone tenroit Pon-
ton ! , Aisie et Orient. — Item, Tan V c et LXIII, prist Herode la IH e femme
qui fut nomee Machate', qui fut mult grant damme; si en oit en eel an
meismes I fis qui fut nommeis Arehelaus. En eel an meismes fut Cassiens
ochis en Judee par alconnes gens qui le haioient: mains quant Hircain le
soit, si envoiat a Romme porteir la novelle, et impetreir a l'emperere
Augustus l'amisteit des Romans. — Item, Fan V c et LXIIII, fut envoyet
Anthone en Surie por la terre a gardeir, et por avoir la saingnorie. Adont
vinrent a Anthone les maistres des Juys; si accusarenl Herode et Fassians Decode eiFassians
son frere, en disant que entre eaux dois rechivoient les rentes et les issues "°° rer@ *
de la terre, et Hircain qui en avoit esteit et astoit sires n'en avoit que le
nom , et cheauz en avoient tous les profis.
Et quant Herode soit chu, se vient a Anthone, se li donnat mult grant
avoir, et ly priat qu'ilh ait merchi de ly por l'amour de Antipater son pere,
cuy ilh avoit tant ameit; chis le fist, et remist Herode et son frere en pais.
— Item, eel an meismes s'avisat Virgile que ilh n'astoit nient vies, et si
astoit par I'estude eontinuel et le travalhe de labure' brisies a mervelhe; Coment virgiie soit son
si voult savoir quant ilh morat. Si est venus a sa tieste deseurdit, qui li 6 * pM '
rendit response de tout chu qu'ilh ly demandoit. Et ilh ly demandat tout Foi.75v.
erant queile temps ilh poroit encors vivre; et ilh ly respondit line chouse vi ff , % f " tdecb 5 8 e p * r
de laqueile ilh dechuite Virgile, car ilh n'entendit mie la glouse 4 , de la ties,e -
parolle qu'ilh dest : elle dest que Virgile dedont en avant gardast sa tieste
de solea. Quant Virgile 1'oiit, si dest que jamais sa tieste ne venroit a soleal ,
1 Le Pont. * Je supprime ici un est , qui me paratt <Hre de
* Joseph (XVII, 2) donne les noms de plusieurs trop.
des femmes de Herode. Quant a la mere d'Arche- 4 Glose, explication, interpretation,
laus, il dit seulement qu'elle etait samaritaine.
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270 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
et ilh entendit la tieste qui li donnoit responsion; car s'ilh entendist sa pro-
dps fenime* Hcrodc. pre tieste, ilh sawist bien entendre et prenostigier le fait. — Item, Tan
V c LXV, prist Herod e pluseurs femmes awec les siene tant qu'ilh en oit IX,
en t res lesqueiles ilh oil une qui fut nomee Cleopatra; de laqueil Cleopatre
ilh oit l'annee apres, le XIIII 6 jour d'avrilh, 11 fis a une fois, qui furent
nomeis, ly 1 Herode Antipas, qui puis fist Johan-Baptist decoleir, et l'au-
tre Philippe Herode, qui fist sains Jaque le gran decoleir. — Item, en eel
an meismes laisat Anthone , qui tenoit Aisie et Orient, la soreur Octoviain
I'emperere qu'ilh avoit a femme, et se prist a femme Cleopatre, la royne
d'Egypte. De quoy ilh mut ' grant guere entre Octoviain et Anthone; mains
virgiieeditiatvenumc. ilh s'apassat 1 pou de temps, car Anthone reprist sa femme. — Item, en
eel an meisme, edifiat Virgile I casleal qu'ilh nomat Ventoise, et I borch
desous qui fut fais en HI ans, et parfais 1'an V c et LX1X, car ilh ne fut mie
fais par nigromanche, ains fut fais par ouvriers. Si avient que Virgile, quant
ilh fut parfais, en mois de julet que ly soleal est chaux, se ly enchafat son
virgiihe fui maiade. cerveal qui mult li grevat, car ilh en morul dedens II ans apres. Quant
ilh senlit la maladie, se vient a sa tieste ou li espir astoit; se li demandat
dont ly venoit la maladie, et s'ilh en poroit eistre aidies.
in. fait virgiie morir, Adont li respondit la tieste : « Tu es venus a ton finement, tu as maul
3ui maul avoit gar- * ...
eit^oncervei. „ gardeit ta tieste de soleal qui Tat si enchauffeit qu'ilh ten covient morir;
^fS"S uiu^TiiSt w car na ' ure ne P ue ' soffrir que tu nos puisse plus avant travelhier, car
de nuu com de vir „ oncques ne fummes si travelhies par homme. » Quant Virgile 1'entend,
virgiie conjuration si fut mult corochiet; si at fait I sort et at appelleit tous les espirs priveis
espens et conbnsat , . . • ' - r i - - I
i.M.este. qu ilh avoit entreclous, queis qu ill) soient, en teu, el aire, en terre et el
aighe, et leur at dit : « Sachies que je vos loie, sicom larons qui tout
» aveis dechuit le monde, que jamais ne soiez * travelhiet creatures d'ors en
» avant; soies tous loies en abisme sens partir. » Puis prist le tieste et le
conbrisat, et les autres enclosure 8 , et li espirs en alarent. — Item , Fan V c et
LXVI, en mois d'awost, astoit Anthone en Antyoche, et la astoit Hircain,
^rfflc'ei Fasians et Herode, et grant partie de leurs Juys; et la vinrent devant An-
Fassian*. thone cent des plus grans des Juys de la terre *, et soy plandirent a luy de
1 Movit. B. * C'ert-a-dire les autres objets ou ils elaient
2 C'est^a-dire : que jamais creatures ne soient rticlos.
dorenavant travaillees par vous. * Et de la terre. B.
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UVRE PREMIER. 271
Herode et de son frere Faisians, et les enculparent de faux blames. Et An-
thone demandat a roy Hircain la veriteit, et aux aullres enssy ; si trovat que
les Juys avoient tort, et les II freres furent troveis en loialteit, por quoy
Aathone mult les enamat. — Adont fist Anthone de Herode et de son frere
prinches qui devant n'avoient esteit seulement que prevost : si fut Herode Herode rut prince de
prinche de Galilee, et Faisians fut prinche de Judee. Et puis s en ralat
Anthone a Romme. — En eel an meismes avient que Palchorus, ly roy de
Turquie ', passat a grans gens le flus d'Effrates par forche; si entrat en
Libie, mains Lisasnes *, qui puis fut prinche de Baby lone, qui astoit li fis
Alixandre, le fis Aristoble, frere a roy Hircain, astoit ja grans; si alat
encontre le roy de Turquie, et ly donnat V c besans dor, et awec chu li
promist V c pucelles, se ilh voloit aidier Antygonus son oncle que ilh reuse
la royalme de Judee, qui avoit esteit Aristoble son pere. — Adont prist li
roy de Turquie l'avoir, et fist les convenanches ; et livrat a Antygonus
X ra hommes, lesqueils ilh mynat en Judee. Si y fist mult de mals par la
lerre, et misent le siege en tour Jherusalem; mains Hircain qui en astoit Foi. 76 f.
sires gardoit le temple, el Herode gardoit le gait et les mures, et Faisians
gardoit le palais le roy. Et cheaux de defours assailhoient fortemenl. et les
aultres soy defendoient gentilment.
Grant planteit y oit des navreis et d'ochis d'unne part et de l'autre; et
durat chis siege jusqu'a 1 jour que les Juys fasoient une grant fieste, que
ilhs ne brisassent pour riens solonc leur loy , et astoit I semedis, le XI e jour
de may; si covient les Juys aleir el temple celebreir. Et enssi qu'ilhs as-
toient 8 la, se vinrent les annemis et assailhirent les mures qui astoient des- jiiemsaiem fut *«-
garnis et vuides de gens, tant qu'ilhs entrarent dedens la citeit par forche. qui! er ° y
Et cheaux de temple, quant ilhs oirent le cry, si sont corns aux armes, et
vinrent droit sour le marchiet. Et la fut la batalhe si grant que nuls ne veil
oncques en teile plache plus grant, qui durat jusqu'a la nuit. — Quant He- De Herode qui soymut
rode veit chu , ilh soy trahit arriere, et Fasians et ses chevaliers; si se misent
en la tour royal. Et Hircain el ses gens se misent en temple, qui astoit mult
fors. Adont commencharent les barons a parleir de la pais d'unne part et
1 Pacorus, roi des Partkes. eh. 24 et 25.
* Lisanias, fils de Phtolemee Menneus. Voir Fl. * Erent. Ik
Joseph, XIV, 23, et, pour les fails qui suivent, les
en la tour ro>al.
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272 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
d'aultre; mains Antygonus dest qu'ilh soy metteroit de toute en toute sour
le roy de Turquie. Et Hircain se mist enssi sour 1 de ses amis, et al matin
se sont mis a la voie ' Hircain, Fasians et Antygonus por parleir a roy de
oe Bfariaoe la fem me Turquie. Mains* Herode n'y voult mie aleir, car Mariane sa femme li de-
fendit, et li disoit que ja n'awist en Turch fianche, car ilhs astoient train-
tours; si priat a Hircain et a Fasians qu'ilhs n'y alassent mie. Mains ilh ne
le vorent oncques croire, et ilhs en furent dechus, car ilhs furent en leurs
chemyn assalhis dez Turques qui le gaitoient; et furent pris et myneis al
roy de Turquie par forche. — Quant Herode le soit, si s'enfuit par nuit a
De Herode qui s'enfuit. promier sompne ly et ses femmes, ses enfans et ses gens awec tous armeis;
mains ilhs furent aparchus des Turques del siege qui les cacharenl forte-
ment, et ochirent de ses gens grant planteit en la voie. Mains Herode aloit
tousjours par derriere et sourtenoit les fausse *; si n'y perdit mie ne femme
ne enfans dans la voie. Quant Herode fut long de Jherusalem, si oit grant
duelh et gran honte de chu qu'ilh fuoit; si commenchat a ploreir mult ten-
rement.
Adonl ilh reprisl cuer en li; si dest qu'ilh amoit mies eistre ochis par-
devant, que navreis par-deriere. Adont escriat ses gens et assalhit les Juys ,
qui le cachoient asseis plus fel lenient que les Turques; car ilh y avoit grant
planteit des Juys , et ilh n'y avoit que X m Turques : lez Juys astoient venus
awec* Antygonus et Sasnes'. Gheaux at assalhit Herode, etla oit fortba-
Deia grant Ticioir He- talhe, et oit Herode la victoir; si furent les aultres desconfis; si en fut tant
mors que la terre en astoit tout couverte; si avoit toudis VI Juys encontre
I des gens Herode. — Et pour eel grant honneur el victoir fist puis Herode
fermeir en eel plaiche 1 casteal qu'ilh apellat Herodium. Adont Herode soy
partit de la et cevalchat tant qu'ilh vient a I casteal, qui oit nom Massada,
que Josippus 4 son frere tenoit, ou ilh laisat ses femmes et ses enfans en la
garde de son frere. Puis s'en alat en Arabe, et vient a castel de La Pire %
ou ly rois ' d' Arabe astoit qui mult amoit Herode, car ilh astoit son cusin
germains; et enssi remanist-ilh en Arabe awec le roy. — Item, quant Pal-
chorus, ly roy de Turque, veit comment Hircain et Fasians astoient pris,
1 En voie , en chemin. ' Joseph.
1 Fosse. B. 5 La ville de Petra.
3 Sans doule pour Lisasnes dont il est question • Mot supplde d'apres le manuscrit B.
plus haut.
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L1VRE PREMIER. 273
ilh rend it a Antygonus la terre de Judee, et li delivrat les II prisonniers
Hircain son oncle et Fasians. Et Antygonus copat a Hircaia sod oncle ses
dois orelhes tou pres de la tieste, si qu'ilh ne poioit jamais eistre evesque
de la loy. Mains quant Fasians veit chu, ilh soy ochiast volentirs, se ilh
neuvvist les mains loiies; et nonporquant ilh fist tant, que ilh ferit son
tieste si fort a une grosse pire qu'ilh soy ochist. Enssi fut mors Fasians, Foi. 76t«.
le^frere Herode. Apres chu fist semblant Antygonus a Hircain son oncle Trahiwn.
que ilh astoit dolans de chu que ilh ly avoit copeit ses orelhes; si prist
des cyrurgiens, et les fist fischiner ', mains ilh fist les plaies envynemeir,
si Ten covient morir. — Quant Herode soit les mors de Hircain et de
Fasians, si en fut mult yreis, et si en fist grant duelh; si s'apensat que
ilh yroit a Romme quere sourcure et aide, comment ilh poroit estre ven- Herode rati Homme.
giet de Antygonus. Adont mo n la I sour mere; mains ilh n'oit pais aleit
lendemain jusqu'a nonne , quant unc gran orage ' le prist qui tourmentat
la mere; et ilh commencharent a nagier jusqu'a une isle qui est nom-
inee le isle de Felix '; mains quant ilhs vinrent pres, leur nef hurtat a
une roche qui astoit deleis celle isle si roidement, que la nef fut tout
combrisiet. Si en fut pluseurs des gens noiies, mains la plus grant parlie Herode fut ported
escappat, et en eel isle demorat tant Herode et ses gens que la nef fut
refait.
Chu fut sour I'an V c LXVII en junne \ En eel an meisme, le VIII e jour
de julet, morut Yborus li dus de Galle, qui longtemps avoit regneit, assa-
voir XL ans. Apres luy fut Franco, son anneis fis, dus, qui regnat XXVIII \f™ co ' dus de
ans. Et li altre fis, qui oit nom Sedrich, fut dus de Bourgongne; car Eli-
sena, filhe al due Dodo de Burgongne, fut sa femme. — En eel an s'avisat
Sedros, ly roy de Tongre, qui astoit a Romme, et li prist volenteit del raleir
a Tongre; se le dest a Octoviain 1'emperere, qui tantoist jural qu'ilh n'en i/empcrerevienuwec
• » • 1 -IU 1 •* • • r\ U 1' U- * leroySedro.iTon
riroit mie sens luy, car ilh voloit veioir son rengne. De chu 1 en remerchiat gn.
Sedros; si sont apparelhiies et se soy misent al chemyn, et sont venus a
Tongre. Et si tenoit Octoviain court plaine, el astoit awec luy Helaine sa
mere , qui avoit chainte une coroie que ly roy Amorandin d'Espangne li D'Es P »n g ne.
1 Esgardeir. B. Le mot fischiner doit 6tre la tra- deux sens me parait ici le plus convenable.
duction du latin fasciare, cntourer de bandes. II * Mot suppled d'apres le manuscrit B.
y a aussi le verbe fatcinare, ensorceler, d'ou pro- * Ce doit dtre Hie de Rhodes,
vient le francais fasciner; mais le premier de ces * Le XXX 9 jour de mots en June. B.
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274 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
avoit jadit donnee, qui valoit bien XXX m besans d'or \ Celle coroie donnat
la damme al temple Venus a Tongre : Mars si seioit deleis a unc des leis,
et Jupiter a l'autre. Celle chainture fut riche, car elle fut tout d'or a char-
niers, et si astoit ovree de pires prechieux. — Adont Octoviain donnat son
nom a la citeit de Tongre, et le nommat Octoviane. Et ne fut oncques
Co octotu°nT eoilIloni ^epuis n <>mmee Octoviain, mais ilh fut nommeis August Cesar, et la royne
Helaine si at cangiet oussi son nom , et fut nominee Octoviane. Or fut ly
Tongreperditsonnom. nom de Tongre cangiet, car ons le commenchat a nommeir Octoviane, et
oit enssi a nom , tant com li emperere viscat ; mains apres sa mort fut rapel-
lee Tongre, com de promier. Et portant jasoiche qu'ilh fust nommee enssi,
aflin que nos n'aions nuls debat en nostre matere por male entendre, si le
nommerons Tongre toudis. — Enssi com ches chouses avenoient, avient que
sedros moral deuja- por trop boire et mangier li roy Sedros oit le foid enchaufeit; si fut sy
sourpris qu'il morut de la janisse , dont ly emperere August et tout ly peu-
L °To^ ge ,e v * roy de P' e ' u ' mu "' perturbeis. fit fisent roy de son fis Lotringe, qui regnat X ana.
Adont en ralerent li emperere August Cesaire a Romme, et sa mere et ses
gens awec luy. — Item , quant la nef Herode fut refaite , si montat sour
mere et alat par mere et par terre tant que ilh vient a Romme; si trovat
Anthone qui l'avoit fait prinche de Galilee.
Herode comptat a Anthone chu qui ly astoit avenus ; si en oit Anthone
grant piteit, et se soy mervelhat mult de la mesaventure qui avenue li astoit.
Adont prist Anthone par le main Herode, et le menat devant Auguste Cesar
qui astoit en son palais, et ly priat que ilh fesist Herode roy de Judee, car
ilh astoit proidhoms et loial; si seroit a luy bien emploiiet la royalteit.
Herode rut rais roy de — Quant Augustus l'entent, si prist Herode par le main diestre et Anthone
Foi^-Tr*. P ar ' e senestre, et adont le coronat; et l'emmynarent entre eaux dois a grant
compangnie de gens en capitol, et la fut confirmeis a roy par les senateurs.
— Quant chu fut faite, Anthone chargat a Herode grans gens, et si envoiat
awec luy dois prinches de Romme, qui le devoient de son rengne mettre
en la possession. Et chu fut sour Fan V° et LXVIII en mois de may, que
Herode arivat en Galilee. Si commenchat tantoist a chevalchier sour ses
De Herode comment iih anemis. — Mains quant Antygonus soit qu'ilh amynoit les dois prinches de
Romme pour delivreir la terre, si fut mult enfraieis et esmaieis; si s'avisat
et alat enconlre les dois prinches de Romme, et fist tant que ilh parlat a
1 Ce mot n'est pas dans le man user it B.
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LIVRE PREMIER. 278
plus hault qui astoit nomeis Frixlons 4 , et li donnat mult grant avoir par
convens teile que ilh soy tenist a luy, et chis ly otriat. — Quant Frixlons oit
(avoir, si commenchat a querir ocquison envers Herode, et ne li voloit De»viriache.
aidier a sa besongne que ilh avoit entrepriese. Et nonporquant Herode
fist tant qu'ilh assegarent Jherusalem, en eel an meismes , le XVII 6 * jour de Herode atsegit jheru-
mois de septembre; mains les Romans ne vorent oncques assalhir, et di-
soient qu'ilh ne poroient ostoier por le froidure del yvert, et oussi avoient
pou de vitalhe : por ches chouses dessent les Romans qu'ilhs ne poroient
plus aresteir la. Et enssi soy departirent del siege, si alerent sorjourneir en
Galilee. — Mains por chu ne fut pas Herode enbahis, ains alat par la terre Herode ochioit tow ie«
ochiant les larons, dont li paiis astoit tout plains, et desroboient les gens;
en t res lesqueils larons avoit unc vilhart qui avoit V lis, que Herode cachat
tant que ilh les fist entreir en une boyme 8 desous la terre, et les ratendit
tant * al yssue que ilhs orenl si fain que ilh ne porent plus dureir ; si issirent Des v urons.
fours, et Herode les coupat tous les tiestes, et ochist leur mere.
Enssi delivrat Herode des larons le paiis , puis s'apensat qu'ilh riroit a
Komme soy deplaindre 5 a Anlhone des Romans qui ne li voloient point
aidier. — Item, Fan V c et LXIX, fondat Lolringe, le V e roy de Tongre, Lotringie, v roy de
I castel qu'ilh apellal solonc son nom Lotrenge, qui puis fut une ducheit; de Lounge.
mains ilh ne parfist mie le casteal a son temps, por chu qu'ilh morut
anchois qu'ilh fust parfais. — Item, en eel annee meisme, prist la grande vir ^« ful m « u m »-
maladie a Virgile, quant ilh oit son cervel enchaffeit, sicom j'ay dit par-
deseurs. El ilh est verileit que nuls ne meurt volentiers, et si astarge cascon
eel heure tant qu'ilh puet. Adont commenchat Virgile fort a estudier, por
savoir se ilh poroit troveir remeide al encontre; mains ilh trovat, par le
jugement d'astronomie, chu que la tieste ly avoit dit qu'ilh ne viveroit plus
II ans, mains viveroit lout a point XXII mois, et puis se renderoit Pespir.
— Adont reprent Virgile cuer en ly, si dest : « Vraie Dieu, qui fist le monde Prison virgile.
» et le firmament el tout chu qui est dedens, et fourmas Adan et Evain de
» sa costeit, qui brisarent obedienche; si en furent-ilhs condampneis eaux virgiiecreutotufoid
» el leurs semenches aux enfers , dont tu aras piteit ja bien tempre, car ilh
» est certains que la Virge. qui toy porterat. si nascerat apres mon trespas
' Siion, dans Joseph, XI V, 26. caverne. Pour ces fails, voir Joseph, XIV, 27 et 28.
* Le VII*. B. 4 Mot supplee* d 'apres le manuscrit B.
* Nous avons deja rencontre ce mot qui signifie 5 Clamer. B.
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276 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
» 1111 ans I1II mois et II jours; et quant elle enfanlerat, si chierat I'ymaige
» que jay fait a Romme, meire sierat de Dieu et d'homme. Chis est ly
» Dieu en cuy je croy, et ay creiiut et creray, et moray en eel creahche;
» et si vraiement ait-ilh piteit et merchi de mon arme. » — Apres, Virgile
escript tout la foid catholique entirement; si Tat enfermeit en une armaire,
et si apparelhat de jour en jour chu que mestier li fut , si que al terme qu'il
virgiie cusit une pot. duit morir ilh astoit tout apparelhies. — Item , Virgile cuisit un gran terrien *
de terre et de cendre, et mist dedens del terre apparelhie a son man ire, puis
Dei herb* qui sont plantat dedens des herbes a fuison que nos ne savons nommeir, fours tant
qu'ilh y oit balme; et y avoit des altres herbes de si fresse nature que ilh
ne les fairoit jamais rafressier, car sens aighe sieront toudis verdes. — Et
Foi. 77v. puis fist une belle chaiier tout de cypresse, a pires prechieux : saphirs,
Del chaiier Virgile. ■• i * . L a J J • a • J " • c L l
rubis, medes, achates , enches % dyadicos *, paridos, jacincte, bleux, csme-
rades et pirophilos; si astoient dedens sculpteit les hauls noms de Dieu, et
virgiie oit cognisanche | e sa | u t q Ue Gabriel fist a la Vierge Marie, en disant : Ave. qratia plena. Et
del annunciation de * # . •
sat 1 ? aI Virfe et de as ' ,0 > en ' ; 1* I'ymaige de la Virge et del angele entalhies et figures, sicom
ilh stesoienl puis en temple des Juys. Apres fut ly ymaige del Virge tenant
virgiie del risitation une verge en sa main, et comment elle alat visenteir Elizabeth en temps
Elisabeth. ° ' . . •»•■■•
future. Et finablement, de greit en greit, tout enssi qu ilh avienel apres
jusques al Assumption Nostre-Damme. — Virgile figurat tout chu en sa
cheier, et puis fist I grant mangnier * en sa maison , car ilh fist estargier
les vilains de batre de leurs flaieis; et astoit le V e jour de may, Tan V c et
LXXI. Ilh n'avoit a vivre que 1 jour, ch'astoil jusques a VI e jour de may;
ly mangnier fut mult gratieux el plantiveux, et at fait des jeux asseis. —
Vi fftiM»^de™i ^ qwant ilhs orent mangniet, tantoist Virgile leur dest * : « Barons, je vos
»• mort. n a y assembleit por dire une secreit, et chist est que demain a none je de-
» vieray et plus ne viveray ; je vos commande lous a Dieu , qui toist venrat
virgiie annunchat ie » tenir le lieu de monde com vray Dieu et lions; sa mere, la Virge, demo-
i h U e ,r su-cri8t! , m e * » rat sens corruption de nature. Sachies que celle nascerat de demain en
» III1 ans III1 mois et 11 jours, et dedens XV ans elle aurat enfant qui
)> sierat Dieu le Peire, le Fis et le Sains-Esperit, la parfaite Triniteit de
1 D'aprds le sommaire mis a la marge, il sem- s Diadites. B.
ble que un gran terrien sign i fie un grand pot de 4 Et puis ticnt I grant disneir. B.
terre. * Et quant Wt orent disneit sens contredit f si dist
» Caches. B. Virgile. B.
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LIVRE PREMIER. 277
» trois dieux en une unileit, en laqueile je croy et croray, et toudis y ay
» creyut. » — Adont les at monstreit sa chair, et les expoisat tout chu qui
astoit ens entalhiet, et les priat tous, chevaliers et borgois, qu'ilh pensent
bien a chu qu'ilh dist, et si prendent baptesme tantoist que ilh loront prc-
chier; si auront sainteit et salvement de corps et d'armes. — « Et affin que
» mies vosme creieis, je me veulhe est * recreieis ; » puis prent del aighe en I ^X' 1 *-^^*"^^
bachin, et apres huchat Constantin, qui astoit uns proidhons chevalier, et p«w,K»ets«ii*-E*-
li dest : « Prendeis eel aighe, verseis sour moy. » Et chist le fist; et Virgile
dest : « En nom de Pere, de Fis et de Saint-Espir, ch'est Triniteit, prenge-
» je bapteme en l'esperanche que Dieu moy rachaterat awec ses aultres
» amis, et moy monrat 1 en sa glore. » — Atant soy partirent cheaux de
JNaple, et Virgile remist ches vilains a labure qui commencharent a flaieleir ;
puis prent son terrien aux herbes et le mist desus 8 le chaire qui fut traweit
en fons, puis prist une buse d'erain qui al unc de chief oit unc coviercle
qui tout covroit le terien et les herbes, et l'autre chief de la buse si ranpoit Memihede vi^iie.
desus parmy le trau de la chaire. Et Virgile s'asit sour le trau; se li entrat la
buse en trou de son fondement, si qu'ilh entrat bien dedens son ventre plus
de II palmes. Apres ilh avoit pareit son lachenieres * de tous libres de toutes
scienches, et par-devant li at poiseit I libre de theologie. Si astoit noblement
vestus d'onne bleu robe. Si avoit a son seniestre bras une grant fenestre lout
ovierte,paroules gensle regardoient cascon jour, etdisoient que ilh n'astoit
mie mors, ains estudioit com devant, car ilh avoit son capiron sour ses eux.
Enssi morut Virgile, li gran clers, et demorat enssi en sa chaire LIX vir R' ,e raorul -
ans , assavoir jusques al temps que saint Poul aloit prechier, apres chu que
ilh fut converlis; et ilh avoit devant veyut en Halappe 8 , unc libre d'epistes 6
que ons disoit que Virgile avoit fail. Chu le fist venir par-devers Naple. ou
ons ly assengnat la maison; si vient la, si regardat a la fenestre, et voit
Virgile qui estudioit fort, chu li sembloit. Si le huchat mult douchement, De sains Poui qui r «r-
...... . . . Ml « Virgile.
et dist : « Maistre Virgile, beal amis, lais-moy entreir li-dedens por parleir
» a toy. » Et ilh ne respondoit rien, car ilh astoit mors. — Apres vient sains
1 Sic sans doute par erreur pour eslre. duction du mot flamand lessenaer, pupitre.
* Menera, conduira. * En Hanapple. B. Sans doute Haleb (Alep),
* La contexture dc la phrase prouve qu'il faut en Syrie.
lire dessous, * Probablement un livre d'SpUres, de lettrcs.
4 Ses lacheniers. B. (Test probablement une tra-
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278 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE
Poul a la porte; si at de pari Dieu commandeit aux vilains qu'ilhs cessent
Foi. 78 f. del flaieleir, et vient a Virgile qui seioit la. Si Tat tireit par le chapiron, et
lantost li corps est tous cheiiu^en cendre, demorant la sens plus les ous-
siauz \ Quant sains Paul le veit, si en fut tout enbahis; si at regardeit le
terrien enssi vers et bien odorant que a promier jour que ilh y fut nays ,
puis at regardeit les escriptures Virgile d'aslronomie et de nature, et cheaz
de nygromanche et de teils ars ilh ardit tantoist. — Et voit devant luy I libre
de thiologie ou ilh estudioit quant ilh morit, et regardat la talhe de la
sains Poiptroiieivir cheire qui ly semblat tres-bonne. Ilh regardat tout etdest en criant : « Tres-
» gratieux maistre Virgile, qui fus li fis a roy Gorgile, se en vie t'awisse
» troveit, tant que merchi awisse robeit a Dieu et ton corps baptisiet, et
» Dieu creyut et deproiet, queile homme awisse a Dieu rendu t! Vray Dieu ,
» par le vostre verlut aiez de luy misericorde, car a nostre loy fortement
» s'acorde son escripture et tous ses dis, ilh n'y at de riens contraible. »
Enssi disoit sains Poul, car ilh quidoit qu'ilh ne fuist mie creant en nostre
loy, combien qu'ilh avoit troveit en escript comment ilh avoit prophetisiet
pluseurs fois. — Apres alat sains Poul al armaire ou Virgile avoit mis la let-
De *»ins Poi ce quiih tre qu'ilh avoit escript de sa main ; si le trovat et le leisit. Adont dest sains
Poul qu'ilh creioit oussi parfailement com ons devoit croire, si en fuit bien
aise; puis prist tous ses libres, se les donnat a sa maisnies, qui les enpor-
tarent awec luy; puis prist ses osseals *, se les enfermat en I couffre, et mist
le couffre sus la chaiere et l'escripture autenlique qu'ilh avoit, et com-
mandat del gardeir a cheaux de Maple, et que nuls ne regardast dedens.
Dwells virgile. — Atant soy partit sains Poul , et alat a la mason Virgile, qu'ilh avoit faite
derainement sour mere al manere d'on casteal ; la furent mis les osseals
Virgile. Encors y sont-ilhs, qui font la mult de tourmens 8 ; car quant ons
Den tourmens quiih l es soloit remueir de la chaire, la mere enfloit tantoist et venoit a casteal:
font. 1
et se ons les levoit en hault, la mere cressoit si haullement que ly casteal
noiast, se ons ne raseist le couffre. Et quant ilh astoient en leur droit lieu ,
. la mere se rapaisoit. Enssi fut Virgile mors; sy men teray a tant, et re-
venray a ma mateire droit chi; se vos diray avant.
Revenant a ma mateire, sour Tan V c LXIX , astoit en Anthennes Anthone
1 Ossenicnts. Ous dans Roquefort. 8 Tourmente, temp&e.
9 Plus haut otusiauz.
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LIVRE PREMIER. 279
deleis la royne Cleopatre, sa novelle femme, que ilh amoit sy fort que ilh
lassoit la citeit de Romme, et tenoit en Athennes por l'amour de lee; et
refusat et laisat la soreur l'emperere August, qui astoit sa femme, por eel :
dont puis Ten avient mal. — En eel an meismes, le XXIH e jour de mois Herode *oy P i.inditi
de julet, vient Herode en Athennes; si trovat la Anthone, et h comptat
comment Frillons f li avoit falit par la grant eonvoitiese qu'ilh avoit d'or
et d'argent. De quoy Anthone fut corochies quant ilh enlendil chu, se
ehargat Herode Josie 1 , son senescal et awec grant planteit de gens qu'ilh
emynat vers Judee. En ehesti an meisme, enssi com Herode porcachoit
ches chouses, avient que Josippe s assemblat chu de gens qu'ilh poit avoir,
et soy combatit contre Antygonus. Mains ilh fut desconfis et fut pris par
le senescal Antygonus qui oit nom Paiens 4 ; si l'envoiat a son sangnour An-
tygonus qui le batit tant de ses esporons qu'ilh l'ochist, se li fut tourneit
a grant crualteit. — Item, I'an V c et LXX, en mois d'avrilh, vient Herode
en Judee atout son poioir. Mains quant Paiens, le senescal qui avoit pris
Josippe, le frere Herode, le soit, se vient contre Iuy, et se soy com bat tit:
si fut Paiens desconfis et pris , se li coupat Herode le chief, et l'envoiat son Herode oit ia victoir.
masneit frere Ferolans 5 por la mort de Josippe son frere. — Apres chu
Herode assegat Jherusalem tout al tour; mains la citeit fut si bien garnie Herode assegai jhe™-
qu'ilh ne le poit avoir dedens V mois tous en tiers; puis fut-ilh prise a VI*
mois. Si entrarent dedens les gens Herode; et les Romans, que Josie avoit Foi.7*vo.
amyneit, en astoient si corochies de eel siege, que ilhs n'encontrerent
hommes qu'ilhs ne les tuassent. Adont descendit Antygonus de Ia thour;
se vient a Josie, se li chaiit aux pies. Chis Josie ne volt oncques avoir mer-
chi de Antygonus, ains le fist prendre et loiier pies et mains, en disant
qu'ilh avoit trop regneit.
Adont vinrent les chevaliers et les sergans qui astoient venus en son
aynJe*, et voulrent perchoier le temple por le tressoir a avoir; mains Herode Herode defendiiietem-
ne le voult point souffrir. Anchois soy mist al entree, 1'espee en sa main
toute nue, defendant a forche l'entree. Si fut vilainement traities et ferus
tant, que grandement fut navreis dedens le corps; dont les novelles vinrent
1 Plus haui Frixlons. * Pappus.
* Sosius, uu lieutenant d'Anloinc. * Pheroras, frere cadet d'Herode.
* Joseph , frere d'Herode. * En saudeez. B.
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280 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
a Josie qui tan tost alal la, si les deparlit. Et clieaux dessent que la gangne
devoit eistre leur. Adont dcst Herode qu'ilh les paieroit bien del sien, et
tant qu'ilhs en sieroieut bien conlens. Mains quant Josie veit les plaies que
Hf et°hardu muU preu * Herode avoit , et comment son escut et son hayme li cheioient par pieches ,
se le tient a grant proieche de chu qu'ilh avoit tant soufflet \ — Item, Ien-
demain departit Herode tout Tor et 1'argent que ilh poit avoir aux gens
Josie, et tant qu'ilhs sen loiareut grandement a Josie. Adont l'asseit Josie
en la grant chaiere, et ly rendit lout sa terre, puis sen parlit. Et retournat
a Anthone en Alhennes, et livrat Anlygonus a Anthone, qui li chaiil aux
pies, el li priat merchi. Mains Anlhone le haioit tant qu'ilh ne le poioit
veioir ; si prist une handle* qui unc garchon tenoit; si en feril teil cop Anty-
Hprod rntmir n8i " de 8 onus qu'ilh le trenchat jusqu'en la poitrine. Enssi fut Herode vengies de ses
anemis, et se remanit roy de Judee. — Item , 1'an V c LXXI en mois de may,
le Vl e jour fut ly jour que ly subtil cler Virgile morul, sicom j'ay dit desus.
Deohamp* esmuisenire En eel an meismes , le XIII jour de julet vinrent devant August I'empe-
rere de Komme Johans March 5 , prinche de Antyoche , Grispart * d'Egypte,
prinche de Farinonde *, dois gentilshommes et bons chevaliers et hardis de
corps, et grant gens por loiier I champt de batalhe enlre eaux dois devant
I'emperere, a cuy ilhs astoient ambdois siervans; et si astoit li champs enlre
eaux esmuis sour des parolles que Johans disoit et maintenoit, que Julius
Cesaire avoit esteit myedre chevalier qui ly roy Alixandre, et plus conquisl
a son temps de fours • paiis. Et Grispart disoit que Alixandre avoit plus de
fors paiis conquis trois fois que Julius Cesaire, et avoit esteit miedre de la
Doi empererc coment main. — Mains ly emperere prist le debat sour ly, en disant que ons ne se
ilh prist ledebat sour . * * * . . . . . , , . .
i>. doit point combatre por tens chouses, ams en doit-ons avoir solas a prisier
Tunc et l'aulre; car ilhs furent ambdois mult a prisier : « Vos saveis, par
» vehueevidente,que Julius mon oncle conquist mult de terreset de paiis; »
la les alat declareir tous les paiis, et rechiteir Tunc apres l'autre en orden,
en teil maniere com je Fa declareil desus.
Apres, quant ilh oil tout declareit de Julius Cesar, se destque Alixandre
1 Souffcrt. pres d'Alexandrie.
* Uoe hache. 6 Fors. B. Celle yersion paralt meillcure que la
5 Marsus, gouvemcur de Syrie? noire. Du rcsle, le mot est ainsi dcrit a la ligne
4 Agrippa? suivante.
* Pharillon, nom modcrne de Tile de Pharos f
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LIVRE PREMIER. 281
par sa nobleche avoit mervelhe conquis a son temps plus que nuls altre qui *>« conquest Aiuan-
oncques awistesteit. Si commenchat a dire son conquest, solonc les escrip-
tures; mains, portant que nos ne Favons mie declareit a son temps, et vos
avons renvoiet a l'escripture, nos en deviserons en par tie, et todis a la cor-
rection de l'escripture a laqueile nos renvoions. — Promierement dist Au-
guste que Alixandre, roy de Machidone, conquist Ynde qui est I pays
lontains et fours 1 ; la conquist-ilh de gens de horrible regars, de flarans
goste, de fais 1 tres-hisdeux ; mains chu fut la volenteit de Dieu, qui plus
li aidat que li poioir de humaniteit. — ■ Alixandre astoit mult combatable.
Si trovat mult de genre et manere de combalre; ilh mettoit mult sagement
les chiens en batalhes , sicom chevaliers , qu'ilh avoit instruis del combat-
tre , et les armoit com gens , et les pors aussy faisoit combattre aux hommes, f i. 79 r«.
et les fesoit armes de cures bolis, si les en vestoit. — Alixandre trovat pre-
mier a contrefaire les sagittars 8 d'hommes armeis enssi de cures bolis et Merveihc des bataib«*
11 Tii 1 • * • Alixandre.
monteis sour dromedars et chamos. Ilh soy combattit a ches gens qui
avoient arcs et saietes pour traire, et les faisoit conduire olyphans plu-
seurs. Et cheaux sont gens qui ont tiestes de chiens, et des aultre qui n'ont
que 1 oelhe qui stat emmy le front, les aultres a unc piel qui est si gran
qu'ilh en font umbre a leur chief encontre le soleal, les aultres les tiestes
dedens les espalles seant, et la bouche en la poi trine, et les oelles * aux
dois espalles; mains ilhs por l'apressement 5 de la tieste portent de eel cuire
bolit, nient tant 6 qu'ilh soient mult enforchies de combattre. — Tous ches
hommes monstrueux true-ons 7 encors ens ysles d'Affrique ; et si true-ons
des aultres qui ont faiche d'homme , le corps et les pies de lyon , le couwe 8
de scorpion , trois dens joins ensemble. Ches gens nient tant seulement
mangnent les herbes, mains ilhs mangnent oussi les arbres. — Quant Alixan-
dre les veit, se dest que chu astoient chouses destineez 9 , qui ne poroit eistre
conquise par forche. Si at troveit une arc l0 de milh myreurs de fier blan-
1 Toujours pour fort. se trouve dans Roquefort.
1 Facon, structure. 6 Cela equivaut a : ce qui ne veut pas dire
8 Cela doit sign i fier qu' Alexandre in vent a , pour que , etc
combattre les sagittaires, un mode d'armement 7 Trouve-t-ou.
que le chroniqueur deceit. s Queue.
4 Les yeux. • Choses produites par magic?
s Substantif du verbe ajoprewer, comprimer, qui 10 Sans doute pour arche, coflfre.
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282
CHRONJQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
quis et bien nettement brunis , se les fist porteir contre le soleal al encontre
de ches gens ; si les ont tous ablawis * et ars a poudre , car ons les nomme
Mendhe des myreurs my re urs ardans; si ardoient a cent cubites devant eaux. Et deveis savoir
que les casteais et les hommes et les biestes ardirent tous; si en oit Alixan-
dre victoir.
Vos deveis savoir que les pays que Alixandre conquist sor si faites gens,
sont plus grans * que toute la conqueste que Julius Cesar fist oncques tout
son temps, car ilhs sex ten dent par les dots pars d'Affpique; encors y de-
morat XXII royalmes a conquiere, desqueils cascon roy at VIU° dus desous
luy, et cascon dus at cent milh homme combattans. Quant Alixandre veit
teile puissanche. malgreit tous ses adversairs * ne soy voult oncques com-
De5 innumerable* P eu- battre a eaux , et se les encloiit tous ensemble, par sa proiere qu'ilh fist a
endollentreies a roon e Dieu regardant vers le chiel ; si que Dieu omnipotent entendit les parolles *
aspies. Alixandre, et encloit les montangnes ensembles, excepteit qu'ilh demoront
XV passe, lesqueils Alixandre encloiit artificielment par portes d'erain. et
les absconsat si forte de pires que nuls ne les puet troveir, car les usuries &
des portes remanont plus fortes saielees, que fier soldeit * par force de feu ly
De Goche et Magoche. unc a 1 'a utre ne sieroit. Et chu sont les montangnes de Goche et Magoche 7 ,
lyqueis Goche soy combat d'espee a Magoche, qui commande benediction
et malediction ; et Goche et Magoche sont les noms de dois principals roys ,
Le/noms de» xxu roy et est chu en Orient. — Item, le promier roy des XXII fut nomeis Ano-
ghil : chis avoit gens de XII cubites de hault, qui soy combattent aux
griffons. — Ly seconde roy avoit nom Ageteit : chis avoit fortes gens que
ons nom Agrotps et Bramotos % qui le vie de chesti monde donnent Dieu ,
et se s'ardent en feu por son amour. — Ly thirs roy oit nom Cavenagon ,
qui at des gens que ons nom Cenochephalos , qui ont tiestes de chiens et
corps d'hommes. — Ly quars roy oit nom Dapar • : cheaux sont gens a ly
de Caspies.
1 Ablauwis. B. Eblouis.
* Si tient plus. B.
8 Ost-a-dire probableraent : malgre 1'opposi-
Hon qu'on lui faisait pour le forcer a combattre.
4 Le vois, B.
* Usseries dans Roquefort, qui explique le mot
par bates des portes,
6 Soude\
1 Sur Gog et Magog voir , dans le Gervaise de
Liebrecht, la note 17, p. 185.
8 Bramotos semblc designer les Brahmanes.
Quant a Jgrotos, je ne sais s'il designe un peu-
ple reel. II y avait dans la Drangiane (Iran) une
ville nominee Agriaspw, mais entre ce mot et celui
<TAgrolos la parente parait bien eloign^e.
• Daper. B.
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L1VRE PREMIER. 283
apartinant qui * ochient leurs peires et leurs metres quant ilhs sont vies ,
et les mangnent; et qui ne le fait ilh est jugies a grant paine. — Ly V e est
dit Apodineir, qui at des gens qui ont a nom Andrios, qui mangnent les
peissons tons eras, et boivent la mere salee. — Ly VI e roy oit nom Libnius ,
qui at des gens qui ont nom Palmos, qui ont VIII dois en leurs mains et
es pies. — Ly VII e roy est Limius, qui at gens qui ont nom Arismapos, Foi.79y».
qui ont une oelhe en leur frons. — Ly Vlll e roy est dit Pariseus, qui n'at
qu'on piet, et ses gens enssy; mains chi piet est si gran qu'ilh en font
umbre contre le soleal f , sicom en Affrique. — Ly IX e roy at nom Declocius,
et ont ses gens a nom Agapites, qui sont tous polhus par leurs corps, ex-
cepted leur col : cheaux ont les bouches, et nees, et oeux emmy le pis. —
Ly X e at nom Zarmeus, qui at des gens c'on nom Bivos et Sachinos, qui
ont tiestes cornues enssi com loche ', et n^es et oeux emmy le pis, le pis al
forme d'hommes, les coxes * et les pies enssi com boche. — Ly XI e roy est
dit Thebeus, qui at des gens qui sont nomeis Centauros, qui le tieste et
le pis ont d'hommes et le corps de cheval. — Ly XII 6 roy est dit Carmatius :
chis at des gens qui le chair des biestes crue mangnent, et soy combatent
aux grans serpens, et les devorent enssi com corbaux. — Ly XIH e roy at
nom Calcoenus, qui at des gens qui ons apelle Cumetos, qui ont le corps
daysnes et les gambes et les pies de lyons. — Ly XlIII e roy est Amardeus,
qui gouverne les Tantaleus entre lesqueis est Cariama, une bieste qui at
les pies de une olyphan, les masselles cornues de la longeche de II cubites.
— Ly XV e roy est dit Germarons : chis at des gens que ons nomme Elchios,
qui ont tiestes d'hommes et corps de lyon et d'olyphan. — Ly XVl e roy est
dit Anafragius, qui at les noires Mardinigos , et si ont awec eaux I maistre 9
de meire que ons nomme Manticora * : et at fache d'homme et trois dens
en ordre, corps et jambes de lyon et couwe de scorpion, oeux senglans.
— Le XVH e roy est dit Alfagius, qui at des gens qui ont nomme Obfaresos 7 ,
qui ont tiestes de cheval , qui sont useis de traire de saiettes et de ars. — Ly
1 Chis at gens qui. B. Stir ccs peuples voir, dans * Pluldt mostre comme dans le manuscrit B. On
le Gervaise de Liebrecht, la note 18, p. 84. comprend mieux tin monstre de tner qu'un maitre
1 Pline (VII, 2) les appelle Sciapodes. de tner.
8 Probableroent par erreur pour Boc, bouc. * Mantichoras est un animal fabuleux cite par
4 Les cuisses ( en lat. coxae) , et par extension Ctesias.
les jambes. ' Abfaresoiz. B.
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284 CHROMQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
XVIII* roy est dit Alaneus, qui at des gens qui sont nomine Mylvos, qui
ont pies de griffons et sont valhans combatteurs. — Ly XIX e roy est dit
Canibus, qui at des hommes de bonne manere, et anient grandement les
reverentes gens, et ne regardent mie qu'ilh fachent maul pour leur amour.
— Ly XX e roy est dit Philonicus, et ses gens ont nomme Glaciiens, qui
ont fache d'hommes et corps de toreal; et awec eaux est I maistre ' de mere,
qui est nommeis Menochetos qui at Ie corps de cheval , pies d'oliffans et le
tieste de chierf , et at une corne emmy le front acuit f et resplendant. —
Ly XXI e roy est dit Artineus, et ses gens ont nom Bellions. — Et ly XXH e
roy est dit Saltarius, qui at des gens qui ons nom Syrenos *, qui a chanteir
font les gens dormir.
ch cham? e,fe * enicion Toutes ches generations de gens devant dit sont del generation Cam, le
fis Noe; les roys sont del generation Israel que ons apelle infernal Goche
et Magoche, enssi com sains Johan dist en I'Apocalips que en les derains
temps, por les pechies de peuple, soy releveront Goche et Magoche qui
preoccuperunt la terre. Item dist une altre escripture que les Ysmahelit
venront, et possideront le sainctuare de Dieu. Dont mult de generations
D Vo C i!tan nt foiit u ^ e testes farent awec eaux enclouse; mains renars ly vulpis n'y fut mye
enclouz , qui * de malvais enforchement foiit tant la montangne , qu'ilh le
trawat et vient la dedens awec les altres, lequeil fait ilh tinrent por myracle.
Si vinrent apres ly jusques aux portes, si aporchurent I'yssue par la divine
puissanche, si voirent fours yssir; mains Dieu qui veil leurs malisches, si
les fermat celle entree que ons appelle le porte deCaspie, si qu'ilh ne pue-
lent fours issir jusques devant le jugement, que renard les assengnerat la
voie'dont ilh isseront. — Dieu at fail mult de mervelhes a monde, ons ne
MeneihedwSicropes. sen doit point mervelhier, car ons voit les Sicropes * qui n'ont que une
oelhe, qui ne voient nient mains que cheaux qui ont II oeux; et tout enssi
Mervcihedc8Pigmeaux.com nos tenons les Pigmeauxpour nains, por tant qu'ilh sont si petis, tout
enssi nos tinent-ilh por geans. — Entres les Elyopiens, les plus noires sont
Foi.Mr*. les plus beats a eaux. — En Ybernie sont oyseals ens arbres nasquans com
1 Mostre. B. Mdrne observation qu'a la 5* note formees en hommes.
de la page precedente. * J'efface ici un est qui mc paralt dtre de
s Pointu, d'acutus. Roquefort donne le sub- trop.
stantif acute. 5 Cyclopes.
8 Voici les gracieuses sirenes grecques trans-
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L1VRE PREMIER.
28S
fruis '; quant ilhs sont meurs ilh chient en l'aighe, el se commenchent a
volleir; la chair de ches oyseals ons mangnoit en Quaremme. Et de chu
nont nulle ammiration cheaux qui la frequentenl. Toutes ches conquestes
fist Alixandre, et encors pluseurs aultres, car nos n'avons riens dit de chu
qui est notoire a cascon , et se n'avons riens dit des ysles de mere de Aisie ,
de Affrique et d'Europpe, ou ilh conquist et ou ilh at a conquere mult de
paiis beals, et bons, et fors.
Portant que je suy chayus en chesti matere, et que pluseurs gens ne se- D«tous paiis de monde.
vent mie queils paiis ilh at par le universe monde, si vos voray dire et
declareir briefement solonc l'escriptures une partie des ysles, et enssi com
Dieu qui tout 1c monde porta en sa main, qui 9 est partis en trois par le
mere, enssi le vos parlirons; et deviserons particulierement ches trois par-
chons, dont ly une, qui siet vers orient, medis et septentrion, at nom Aisie,
et contient plus de la motie de la terre; et li aultre, qui at nom Affrique , et
la tirche, qui at nom Europpe, tinent 1'aulre motie, assavoir cascon 1 quar-
tier. Et siet Affrique vers medis et occidens, et Europpe vers septentrion et
Occident *. — Terre est enchainte et environnee de la mere, et deveis savoir
que chest la grant mere qui est appellee occeane, de quoy sont extrait les
aultres qui sont parmy la terre en diverses parties, qui sont enssi com bras
de li *, dont chis qui vient par Espangne en Ytaile et en Greche est ly plus Dei mere et<wsi>. a *.
grans que les aultres. Et por chu est-ilh apeleis la grant mere, et est oussi
appellee Miteraine ', portant qu'ilh vat parmy la terre jusques vers orient,
si devise et departe les parties de la terre, et chu sont Aisie, Affrique et
Europpe. — Mains, enssi com j'ay dit desus, chu n'est mie parchon ingale,
car Aisie tient ortant com les dois aultres, deis le lieu ou li fluis del Nyl chiet
en mere en Alexandria; et de cheli lieu ou li fluis de Tanain * chiet en mere
1 II a d£ja 6te* question de cette tradition , p. 264.
* C'est-a-dire le monde.
* La description geograpbique qui suit est em-
pruntee au Trhorde Brunetto Latini. II a d'abord
paru de cetouvrage trois traductions italiennes,
en ill A, en 4528 et en 4533, et une qualrieme
a Venise, en 4839 (Bibliotheca classica itaUana
di scienze, lettere ed arii, vol. I et II). Aucune
d'elles ne se trouvant a ma disposition, j'ai cu
recours au texte original franca is reste in&lit,
quoique, en 4856, le Comite de la langue, de
Tbistoire et des arts de France en ait annonce la
publication procbaine. Ce texte, de la main de
Jean de Stavelot, rcmplit un volume in-folio in-
scrit parmi les manuscrits de notrc Bibliotheque
royale sous le n* 40547.
4 Bras de la titer oceane.
* La Mediterranee.
6 Le Tanais, qui en effet constituait pour les an-
eiens la ligne de demarcation entre TAsie et TEu-
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286
CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
a bras Sains-George vers orient, tout jusques en la mere occeane et en pa-
radis terrestre. Les aultres dois parties sont le remanant de la terre vers
Occident partout jusques a la mere occeane. — Mains elles sont departies par
la grant mere qui est entre dois; et celle partie qui est de la vers medis
jusques en Occident, si est nominee Affrique; et l'autre qui est decha vers
le transmontaine , qui est vers seplentrion vers soleal cuchant, est Europpe.
Ors vos vorons declareir briefement de cascon partie por ly cbu qu'ilh y
De paiis d Aisic. at ; et promierement d'Asie, qui est la promier et la plus grant, et com-
mencheray de chief qui est vers medis, ou elle se part de Affrique 1 a fluis
del Nyl et a fluis de Tygris , qui est en Egypte \
DeEgypte. En Egypte est la citeit de Baby lone, del Caire et Alixandre et pluseurs
aultres vilhes; etsachies que Egypte est une terre qui siet contre medis, et
s'extent vers le soleal levant. Et par-derier est Etyope, et par-desus court
De Nyie ou Gyon. \i fl u j s de Nyle ou Gyon, qui commenche desous la mere occeane, ou ilh
fait I lac qui est apelleis Nylides, et toutes chouses semblant a cedes que
nos veions a fluis del Nyle et environ de la terre d'Egypte. Et por chu
dient ypluseurs que chis fluis est 8 de chis lac, mains les aighes de lac sen
entrent par terre, en corant par voies douses dedens la terre, tant que ilhs
apairent a Chesaire*, ou ilhs soy demonstrent toutes ensemble a promier
lac, et illuc soy entrent sous terre et sen vont par lontaines terres qu'ilh
n'en issent hours jusques a la terre de Etyoppes ou ilh apert; et fait la I
fluis qui at a nom Tygris , qui devise la partie d'Aisie de la partie d' Affrique.
En la fin soy part en VII, et s'en vat tout oultre par medis en la mere de
Egypte, car ilh n'y at aultre fluis ne plues, raison comment 9 . — Quant li
DeUcroisementdeNyie. soleal entre en signe del Greveche, XIIIl 6 jour en junne % chis fluis com-
Foi. so t». menche a croistre, et tousjours croiste jusqu'a tant que ly soleal entre en
Lyon , en mois de julet. Ilh at si grant forche, de 111 jours devant les ka-
rope. II est vrai que cc fleuvc tombe dans la mer
assez loin du detroit de Constantinople ; mais le
chroniqueur n'y aura pas regarde daussi pres, et
le bras Saint-Georges indique ici toule la mer dont
ce detroit fcrme l'cntree.
1 Ccsl-a-dirc qu'il commencera par le sud, a
Tendroit ou TAsie se separe de I'Afrique.
* Je ne m'attacherai pas a rectifier toutes les
erreurs de noire chroniqueur : la geographic qu'tl
suit est celle de son epoque. Je t&cherai seulement
de corriger les noms estropies par lui.
5 Sort Du verbe issir et non du verbe eslre.
4 Cesaree de Palestine , sans doute.
* C'esi-a-dire : voici la raison pourquoi.
• X jours a Veissue de junne, porte le teste de
Brunetlo Latini.
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LIVRE PREMIER. 287
I e odes d'awoust jusques al XI e jour al entree , qu'ilh isl outre le siet' de son
cours cha et la, tant que ilh arouse toute la terre, et enssi fait-ilh tant com
ly soleal remaint en Lyon. — Et quant ilh entre en la Vierge,si commenchea
decroistre cascon jour, tant que li soleal entre el Libre ' en septembre; adont
rest s ly fluis dedens ses metes. Portan t dient les Egyptiiens que, en eel annee
que li fluis del Nyl croiste et que ses acroisement soy demonstre* oultre
XV1U pies de hault, que les champs ne portent nient tant de fruis , por la
mosteur s des aighes qui gisent trop longement sour terre; mains quant ilh
croiste moins de XI III pies, adont ne puelenl eistre les champs bangnies
partout sicom est besongne, et por chu avient la famyne en eel terre et la
defaule des bleis. Mains quant ilh croiste XVI pies ou la entour, adont est
planteis de lous biens. Cheli est ly fluis d'Egypte de cuy dient ypluseurs
que la nascenche de ly ne puet eistre trovee oultre che lieu ou li Tygris soy
part en VII , et que ly Nyl commenche a voie 6 en paiis d'Arabe, qui s'apar-
tient a la mere Roige.
Sachies que eel mere est roge non mie par nature, mains par les terres d«i luge mere.
que sont roges ou ilh fait son cours, et chis est regors goufle 7 de la mere
occeane, qui est devisee en dois bras : ly uns est de Perse, et l'autre d'Arabe *.
Et sachies que, en la rive de la mere Roge, est une fontaine de teile nature
que se berbis en boivent, tantoist ilhs commenchent a mueir de coleur de
toison de la berbis et dedens la pelle 9 ; et celle coleur croiste et nient ly
aultre. — En eel paiis croiste li encense, et li mastique, et la canelle, et la Deiencenweuaneiie.
habit ly fenix, qui est 1 yoseais " dont ilh n'at que I tout seul al monde. Fcnix.
Encors est oultre cheli lieu ly mont de Casses " ou est Jaffe ", le plus an- Jaffa.
chiene citeit de monde. — Ancors y est Surie et Judee; chu est I grant pro- surie, judee.
vinche, ou li balme naste. Et si est la citeit de Jherusalem, Betheem et ly jherusaiem.
fluis Jordain, qui enssi est apelleis por dois fontaines, desqueiles ly une a Fiuu jordain.
nora Jor et li aultre Dan, qui se jondent ensemble, et font eel fluis; et
1 Son lit 1 Regors et goufle ont lous deux Je sens de golfe.
* La Balance, en latin Libra. * Le golfe Persique et le golfe Arabique.
* S'est remis, est revenu. • Peau.
4 Demesure. B. 10 Probablement pour oyseait, oiseau.
* Moiteur. M Ily avait effectivement dans 1'figyple infe-
* Plutot, comme dans le manuscrit B, sa voie, rieure uu moru Casius ou Cassiiu.
son cours. '* Jaffa , en Palestine.
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288
CHR0JN1QUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Del mere Bforte.
La mere Saliuaire.
Palestine.
A sea Ion. - Philistiien.
Sodomme. - Gomor.
Seluche.
Gasse.-Antyocbe.
Effrate.
Fol. 81 i*.
Meaopotanie.
Tygris.
nassent sous le mont de Lybain, el f devise 1$ pays de Judee et d'Arabe,
et en la fin chiet en la mere Mort pres de Jherico. — Sachies quelle est
nominee mere Morte portant qu'ilh n'engendre et ne rechoit en lee nulle
chouse vivant, et toutes chouses qui sont sens vie chient en font; ne nuls
vens ne le puet movoir, car elle est enssi tenant ' que bures 8 , portant est-
elle appellee oussi la mere Salinaire, et ly lac de Alfalet \ Et sachies ' que
li bures 6 de cheli lac est si glutineux que se uns hons en prendoit une fiole
de voile ilh ne sen partiroit jamais , ains se teqroit a la fiole sens partir,
se ons ne le tochoit de sane menstrueux de fern me, qui tantoist le feroit
depart ir- et chis lac est en parties de Ynde. — Apres est Palestine, oil est la
citeit de Ascalon, qui jadis furent appelleis Philistiiens. Et y sont les V
citeit de Sodomme et de Gomor dedens Judee vers soleal couchant. Les
Esseniens qui par leur grant sapienche soy desevrarent des gens por escu-
weir les delis 7 , car entre eaux n'at nuls femmes, ne monoie n'y court et n'y
est conuwe : ilh vivenl de palum 8 , et jasoiche que nuls n'y voise, portant
ne fault mie la multitude des gens, et se maintes gens y vinent, ons n'y puet
manoir longement.
Apres vient ly paiis de Seluche 9 , ou ilh at une montangne hault, qui est
appellee Casse 10 , qui sietasseispresde Antyoche, qui est si hault qu'ilh ton It
le veue de soleal; par Ik cour ly flu is de E Urates, qui naste en Hermenie ";
le grant sour Zisanie fi , asseis pres de mont Catoten ", et entre parmy Baby-
lone et s'en vat en Mesopotanie, el si bangne lout le pays, tout enssi comme
JNyl fait en Egypte, et en eel temps meismes Saluste dist que Tygris et
Euffrates issent de Hermenie d'unne meisme fontaine. Tygris et Euffrates ,
1 Dans le manuscrit B qui remplace et.
* Tenanche. B.
* Beurrc.
4 La mer Morte s'appelait en effet mare Salina-
rum et locus Asphaltitus.
5 Mot ajoute d'apres le tcxte de Brunetto Latini.
* Burt ici ne signifie pas beurre, mais biturae
ou aspbalte.
7 tviter les del ices, se sonstraire aux voluptes.
II doit manquer un verbe dans cctte phrase.
8 Le texte de Brunetto Latini porte palinus ou
paliuus, probablement pour paUurus, ronce.
9 Selcucie.
10 Outre le mons Casius ou Cassius cite a la page
precedente, il y en avait un second, celui dont
parle ici le chroniqueur, situe* pres de rembou-
cbure de TOronte, entre le Taurus et le Liban.
11 Armenie.
" La province appel6e autrefois Susiana? Tout
ce qui precede, depuis : asseis pres de Antyoche,
manque dans le manuscrit B.
18 S'agirait-il du Caucase? Ces deux noms : Zi-
zanie et Cacoten ou Catoten se trouvent aussi dans
le texte de Brunetto Latini.
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LIVRE PREMIER.
289
le Nyl c'on nom Gyon, et Phison c'on nom Ganges *, sont les II I i fluis qui Dei uii nui» de P ar»-
issent de la fontaine de paradis terrestre; et d'elles vinent toutes les dou-
ches aighes et fontaines de monde. Et portant at I fontaine en Hermenie ,
qui naste de Tygris*; et Tygris se relive illuc, et court par le marche des
Mondiens *, tantqu'ilh chiet en lac qui est apelleis Aretuse *, qui soustient Ar.tu^.
toutes chouses \ et court si fort parmy chi lac que les peissons del unc
n'entre mie en 1'autre. En cest manere s'en vat Tygris corant com effoudre ,
tant quelle true montoir • al encontre; adont entre-ilh desous terre, et list Montuir.
fours d'altre part a Zemonde 7 ; puis entre desous terre et appert de Ara- AZemonde.
biens et Jabeniens 8 . Apres vient Ciliche % une grant terre ou montoir siet,
qui a diestre regarde l0 septentrion; de eel part est Caspie u a seniestre, et cwpie.-Hircin
regarde " medis. En eel partie est Amasonie les rengnes l8 des femmes. Et Am.fonie.
ses frons regarde medis, et enchaufe fort por le soleal. — Mains de 1'autre
part, qui regarde septentrion, n'at que vens et ploue; la est la terre des
cite is " ou li moins de Chiniere " est qui par nuit fat grant fumee. Et la
terre de Aisie la petite 16 , ou est Ephesum et Euroie l7 et la terre de Galache, Ephesum.-GaUche.
de Bithyne et la terre de Perfelgoste ", et eel de Gapadoche et la terre de Bl ? y "^ erfc !f^ le -:
Assire *• en quoy est Arbelit ,0 , une region ou Alixandre venquit le roy Arbem.-iiede.-cas.
1 Phison est le nom qu'on donnait aussi a PA-
raxe.
' Le texte de Brunetto Latin i portc : Tygris
est un fluis qui eslieve son chief en Ermenie d'une
noble fontaine qui est eslongiez.
5 II nc peut 6tre question ici des Mondi, peu-
ple d'Afrique, mais des Medes : le texte de Bru-
netto Latini porte aussi Mediens.
4 II y a en effet un lac du nom d'Ardthuse, en
Armenie.
* Combien qu'elles soient grief et pesans, ajoute
le texte de Brunetto Latini.
• Montagne.
7 Le texte de Brunetto Latini porte Axtmode
en un sen] mot, ce qui doit indiquer Asemona,
villc de la Judee meridionale.
1 Ilya ici une lacune qu'il faut combler au
moyen du texte de Brunetto Latini : et appert en
la terre des Jabeniens et des A rabiens. Les Jabeniens
sont le peuple habitant le territoire de Jabni f ville
de la Judee meridionale, aujourd'lmi IbneoujGcbne.
• Cilicie.
10 Esgarde. B.
1 ' Caspie et Hircaine. B.
" Esgarde. B.
11 Notre texte porte par erreur les II regnes.
Ce // ne se trouve ni dans le manuscrit B, ni dans
Brunetto Latini.
14 Gela n'a pas de sens. Le texte de Brunetto
Latini porte : la terre des Cices. Ne peut**on lire
terre des Licesf ce qui indiquerait la Lycie.
15 Plutot Chimere, nom d'un ancien volcan dc
la Lycie.
" L'Asie Mincurc.
17 Ephesim et Troie, portc le texte de Brunetto
Latini. Euroie ne pourrait indiquer qu'Euranium
en Carie, ville sans importance historiquc.
19 Galatie, Bithynie et Paphlagonie.
" L'Assyrie.
■• Arbelle.
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288
CHROJNIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Del mere Bforte.
La mere Salinaire.
Palestine.
Ascalon. - Philistiien.
Sodomme. - Gomor.
Seluche.
Casse.- Antyoche.
Effrale.
Fol. 81 r*.
Mesopotanie.
Tygris.
nassent sous le raont de Lybain, el " devise 1$ pays de Judee et d'Arabe,
et en la fin chiet en la mere Mort pres de Jherico. — Sachies quelle est
nommee mere Morte portant qu'ilh n'engendre et ne rechoit en lee nulle
chouse vivant, et toutes chouses qui sont sens vie chient en font; ne nuls
vens ne le puet mo voir, car elle est enssi tenant * que bures 8 , portant est-
elle appellee oussi la mere Salinaire, et ly lac de Alfalet \ Et sachies s que
li bures 6 de cheli lac est si glulineux que se uns hons en prendoit une fiole
de voile ilh ne sen partiroit jamais , ains se teproit a la fiole sens parti r,
se ons ne le tochoit de sane menstrueux de femme, qui tantoist le feroit
depart ir; et cliis lac est en parties de Ynde. — Apres est Palestine, ou est la
citeit de Ascalon, qui jadis furent appelleis Philistiiens. Et y sont les V
citeit de Sodomme et de Gomor dedens Judee vers soleal couchant. Les
Esseniens qui par leur grant sapienche soy desevrarent des gens por escu-
weir les delis 7 , car entre eaux n'at nuls femmes, ne monoie n'y court et n'y
est conuwe : ilh vivent de palum *, et jasoiche que nuls n'y voise , portant
ne fault mie la multitude des gens, et se maintes gens y vinent, ons n'y puet
manoir longement.
Apres vient ly paiis de Seluche % ou ilh at une montangne hault, qui est
appellee Casse 10 , qui sietasseis pres de Antyoche, qui est si hault qu'ilh toult
le veue de soleal; par Ik cour ly flu is de Effrates, qui naste en Hermenie ";
le grant sour Zisanie if , asseis pres de mont Catoten l5 , et entre parmy Baby-
lone et s'en vat en Mesopotanie, et si bangne tout le pays, tout enssi com me
iNyl fait en Egypte, et en eel temps meismes Saluste dist que Tygris et
EufTrates issent de Hermenie d'unne meisme fontaine. Tygris et Euffrates ,
1 Dans le manuscrit B qui remplace et.
1 Tenanche. B.
* Beurre.
4 La mer Morte s'appelait en effet mare Salina-
rum et locus Asphaltitus.
* Mot ajoute d'apres le tcxte de Brunetto Latini.
* Bure ici ne signifie pas beurre, mais bitume
ou asphalte.
7 Eviter les d^lices, se soustraire aux voluptes.
II doit manquer un verbe dans cctte phrase.
* Le texte de Brunetto Latini porte palinus ou
paliuus, probablement pour paliurus, ronce.
9 Seleucie.
10 Outre le mons Casiiis ou Cassius cite a la page
precedentc, il y en avait un second, celui dont
parlc ici le chroniqueur, situe pres de rembou-
chure de TOronte, entre le Taurus et le Liban.
11 Armenic.
11 La province appelee autrefois Susiana t Tout
ce qui precede, depuis : asseis pres de Antyoche,
manque dans le manuscrit B.
18 S'agirait-il du Caucase? Ces deux noms : Zi-
zanie et Cacoten ou Catoten se trouvent aussi dans
le texte de Brunetto Latini.
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LIVRE PREMIER.
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le Nyl con nom Gyon, et Phison c'on nom Ganges ', sont les II I i fluis qui Dei un iiuis de P ar»-
issent de la fontaine de paradis terrestre; et d'elles vinent toutes les dou-
ches aighes et fontaines de monde. Et portant at I fontaine en Hermenie,
qui naste de Tygris ■; et Tygris se relive illuc, et court par le marche des
Mondiens *, tant qu'ilh chiet en lac qui est apelleis Aretuse ', qui soustient Amu*.
toutes chouses *, et court si fort parmy chi lac que les peissons del unc
n'entre mie en 1'autre. En cest manere s'en vat Tygris corant com effoudre,
tant quelle true montoir • al encontre; adont entre-ilh desous terre, et iist Montoir.
fours d'altre part a Zemonde 7 ; puis entre desous terre et appert de Ara- AZemonde.
biens et Jabeniens 8 . Apres vient Ciliche % une grant terre ou montoir siet,
qui a diestre regarde l0 septentrion; de eel part est Gaspie u a seniestre , el cas P ie.-Hirc«i n
regarde " medis. En eel partie est Amasonie les rengnes l8 des femmes. Et Anionic
ses frons regarde medis, et enchaufe fort por le soleal. — Mains de I'autre
part, qui regarde septentrion, n'at que vens et ploue; la est la terre des
citeis " ou li moins de Chiniere " est qui par nuit fat grant fumee. Et la
terre de Aisie la petite 16 , ou est Ephesum et Euroie l7 et la terre de Galache, Ephesum.-G.uche.
de Bithyne et la terre de Perfelgoste ,8 , et eel de Gapadoche et la terre de Bithyne.-pcrfeigoste.-
Assire *• en quoy est Arbelit ,0 , une region ou Alixandre venquit le roy Arbem.-Mede.-ca*
1 Phison est le nom qu'on donnait aussi a TA-
raxe.
* Le texte de Brunetto Latini porte : Tygris
est un fluis qui eslieve son chief en Ertnenic d'une
noble fontaine qui est eslongiez,
5 II nc petit etre question ici des Mondi, peu-
ple d'Afrique, mais des Medes : le texte de Bru-
netto Latini porte aussi Mediens.
4 II y a en effet un lac du nom d'Ardthuse, en
Armenie.
* Combien qu'elles soient grief et pesans, ajoute
le texte de Brunetto Latini.
• Montagne.
7 Le texte de Brunetto Latini porte Axemode
en un seul mot, ce qui doit indiquer Asenuma,
ville de la Judee meridionale.
• II y a ici une lacune qu'il faut combler au
naoyen du texte de Brunetto Latini : et appert en
la terre des Jabeniens et des A rabiens. Les Jabeniens
sont le peuple habitant le territoire de Jabne', ville
de la Judee meridionale, aujourd'hui IbneovLjGebne.
• Cilicie.
10 Esgarde. B.
1 ' Caspie et Hircaine. B.
»■ Esgarde. B.
" Notre texte porte par erreur les II regnes.
Ce // ne se trouve ni dans le manuscrit B, ni dans
Brunetto Latini.
14 Cela n'a pas de sens. Le texte de Brunetto
Latini porte : la terre des Cices. Nc peuUon lire
terre des Licesf ce qui indiquerait la Lycie.
15 Plutot Chimere, nom d'un ancien volcan dc
la Lycie.
" L'Asie Mineurc.
17 Ephesim et Troie, porte le texte de Brunetto
Latini. Euroie ne pourrait indiquer qxi'Euranium
en Carie, ville sans importance historique.
u Galatie, Bithynie et Paphlagonie.
" L'Assyrie.
,0 Arbelle.
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290
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Daire. Et la terre de Mede est a diestre de montoir et le porte de Caspie *,
ou ons ne puet aleir que f 1 petit sentier qui fut fais a forche par mains
d'hommes.
Chis sentiers at bien de long VIII™ toises; puis y at une espase de VItI m
passe de terre, par ou ilb n'at ue puches ne fontaines. Et sachies que quant
printemps vient les serpens de paiis si vinent celle part, porquoy mils
homme ne puet aleir aux porles de Caspie, se ehu nest en yvier. Et est la
terre de Caspie vers orient, et est en unc lieu ie plus ' plantiveux de toutes
chouses qui sont sus terre , qui est appelleis Oliren 4 . — Apres est la terre de
Teremegite 5 , qui est si tres-douche et delitauble que Alixandre y fist faire
sa promier habitation, qui at nom Alixandre', qui ors est appellee Celice.
— Apres est Baudie, 1 paiis qui fiert con t re la terre de Jude ; entres les Bau-
triens est Parde, une vilhe de Sogdiaman \ ou li roy Alixandre fit la tirche
Alixandre 8 , por demontrer le fin de ses ouvres et de ses aleures % car plus
avanl n'avoit nuls gens habitans par-dela. Et la soy retourne 10 la mere de
Seche et celle de Caspe " en la mere Oceeane; et au commenchement sont
Lea grans desers- Les les tres-grans nois et parfonde "; apres y sont les grans desers, et puis les
antropefagiens : chu sont gens qui sont mult aspre et fires. Apres y at une
situcns. grant terre qui est plaine de biestes savaiges, qui at nom Situens "; et ons
Les i erres inhabitable*, n'y puet passeir por les biestes. — Apres sont les grant solitudes et les terres
De Caspie.
Teremegite.
Alixandre I !«.- Celice.
Bautie.
Parde.
Alixandre le UK
1 Le texte de Brunetto Latini est plus intelli-
gible : et la terre de Mede. Encore sont a diestre
de montoir les partes de Caspe. Les portes Cas-
piennes etaient en effet a Test de la Medie , vers
THyrcanie.
1 Ou ons ne puet alleir fours parmy, porte le
texte de Brunetto Latini.
8 Mot supplee d'apres lc manuscrit B.
4 Le texte de Brunetto Latini porte Ctiren ou
Clireu. Quel est ce lieu?
5 S'agirait-il de la ville de Termesus ou Termis-
sos, en Pisidie? La premiere Alexandrie (Alexan-
drette) n'en eta it pas fort eloignee.
ft Fist faire sa promiere Alixandre. B.
7 Ce mot doit indiquer la Sogdiane, et il s'agi-
rait ainsi de Bactre et des Bactriens. Mais quel
moyen de concilier tout cela avec le voisinage de
la Judee? Si lc texte de Brunetto Latini ne portait
bien lisiblemant/ud^e, je proposerais de lire Inde
au lieu de Jude, ce qui serait perm is, l't se con-
fondant avec le j et Vn avec I'm.
* Alexandre construLsit en effet une Alexandrie
a Textremite de la Sogdiane.
9 La fin de ses aleures. B.
10 Se tourne. B.
11 La mer de Caspe est sans doute la mer Cas-
pienne. Mais qu'entendre par mer de Seche? A la
rigueur, ou peut lire Sethe (Scythe). Encore ne
vois-je pas de mer a laquelle s'applique cette de-
nomination.
11 Nois doit signifler neige, roais le sens de la
phrase m'eehappe.
18 Les Scythes?
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LIVRE PREMIER.
291
inhabitables vers orient. Apres toute chu est troveit une habitations de
gens qui sont nommeis Sere *, qui par leur subtiliteit font de fuelhes et de sere.
escorches d'arbres layne bonne et delye, dont ilh font vestimens, et en sont Merveihede vestimens.
bien vestis. Ches gens sont amyables et pasiebles entre eaux, et refusent
toutes compangnies d'aultres gens; mains les marchans vont en leurs fluis,
et trovent sour le rivaige toutes manieres de marchandieses que ons puet Noble marcbandie.
troveir altre part; et le priesent justement par escript, se le mettent sour
la denree, et quant les marchans regardent le pris de chu qu'ilh welent
avoir, se le mettent la, et enssi enportent leur marchandies, et en teiles
manieres vendent-ilhs leurs denrez. — Apres chu est la terre de Orache sour La icrrede orache.
la mere *, ou ly aire est mult atempreis; et ly paiis de Symenitoine 3 est entre . symeniioine.
celle terre et Ynde; et vient-ons de la en Ynde, qui dure des montangnes Ynde.
de Medes jusques a la mere de medi *, ou li aires est tant bons qu'ilh y at Fo,,8! v °*
dois esteis en Tan et II messons. Desiieitewetu'iuM-
Ly aires y est si bons en Ynde, que ilh n'y at point de yvert fours que Denobie paiis dYnde
uns douls vent etsuef 5 . En Ynde at V milhes vilhes bien peupleez et habi-
teez de gens. Et chu n est mie mervelhe por les grans fluis qui sont en
Ynde, com Ganges, ch'est Phison , Yndus et Hispanus fl , et les fluis de Gam-
bendes 7 , ou Alixandra Achat ses bonnes sour la riviere, si qu'ilh monstrent
apertement. — Chis peuple Gambendes est appelleis solonc la riviere, et est l« Gambende*.
li derain peuple qui est en Ynde en I isle de Ganges et en la terre de Jupres, Ganges et jupre*.
et en Perliborde et en Moncinatel. — Les gens qui habitent entour le fluis
de Yndus, devers medi, sont de verde coleurs 8 : et hours de Ynde sont dois Yndu».
1 Apres cheluy oullre toute habitations des hom-
ines sont une gens trovee qui sont nommeis Sere. B.
Les anciens donnaient le nom de Serique a un pays
qui comprcnait le nord de la Chine actuelle. Les
Since habitaient les provinces du Sud.
* Cela doit indiquer TArachosie , ou se trouvait
une ville nommec Hora, Peut-6tre aussi la Carma-
nie, qui avail le long de ses c6tes meVidionales Tile
d'Oaracta, aujourd'hui Kisem, a Tentre'e du golfe
Persique.
* II y avait a l'ouest de l'lnde, en dec, a du
Gange, un promontoire appele* Sincylla. Serait-ce
la le pays designe par notre chroniqueur ?
4 Mer du Midi ou meVidionale ?
5 Probablement le meme mot que Roquefort
ecrit sueys, doux, agreable.
6 L'Hyphase , sans doute.
7 Alexandre s'arrdta dans le pays des Ganda-
riens , sur la partie superieure du Jaxarte , ct il y
avait une ville du nom de Gabw , dans la Sogdiane.
* Ce passage doit avoir e*te* mal copie\ Le texte de
Brunetto Latini porte : Caubendes sont le dierain
peuple qui sont en Indre. En Visle de Ganges et en
la terre d'Enpres et de Perliborde et demont Marcel,
Us gens qui habitent entour le fluis de Indus devers
medi sont de divers coleurs. Du reste, dans Tune
et Tautre version , je ne sais a quels pays appli-
quer ces noms de lieux.
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292
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Mervclhe de II ysles.
La li poirre croiste.
DeYode.
Approbaine.
Des piers prechieux.
Carmenie.
Les cacatris.
Parthe el Caldee.
Babylone et Babel.
De paradis terrestre.
Merrelheux fonlaine.
ysles mult horrible et argeten ', ou ilh at mult grant avoir de tous metailles,
et tant que yplusieurs quident que tout la lerre soit ors et argent. — Et
sachies que en Yndre, et en ches paiis de la oultre, at maintes diversiteit
de gens, car ilh n'y at pluseurs qui ne vivent fours que de crus peissons,
et de cheaux qui ochient leurs peires quant ilh sont vies et les mangnent,
et des altres qui habitent es montangnes, et ont unc piet * si grant qu'ilh
at VIII dois; et la sont les contrefaites gens dont jay desus parleit que
Alixandre conquist. — Et sachies que en chis paiis, ou ly so lea I soy lieve,
croiste li poivre. Encor at en Ynde une aultre Ynde qui est, appellee
Approbaine * dedens la Roige mere, ou ilh court parmy unc fluis, et d'unne
part sont les oliffans et biestes savaiges, et d'altre part sont les hommes.
Et y at mult de pieres prechieux de toutes les maneres qui sont et qui pue-
lent eistre; et sont les plus prechieux qui puelent eistre en monde 4 . — Se
y est li desers de Carmenie ou ilh at I terre roige entre Medis et Carme-
nie ', ou ilh at trois ysles, enqueiles nasquent le cacatris ', qui tinent XX
pies de long; puis est la terre de Parthe 7 et la terre de Caldee, ou la citeit
de Babylone et la thour de Babel siet a XI miles pres °, et court en cely lieu
li fluis de Euffrates, qui vient de paradis terrestre 9 .
En paradis terrestre at de toutes maniers d'arbres , de fruis et d'herbes
qui puelent ou sont en terre, et plus, car ilh y at des teils qui ne sont mie
altre part; maiement y est ly arbre de vie, que Dieu commandat l0 a Adam
qu'ilh n'en mangnast; et n'y at ne froit ne chaut, mains y est perpetuel
attempranche. Et emmy lieu est la Fontaine qui toute arousinee " par.ses
IIII fluis deseurdis. — Item, ilh at en Aisie mult de Fontaines et de riviers;
1 II ne pent y avoir de doute sur cette lecon ;
inais clle doit elre mauvaise , et en effct le textc
de Brunetto Latin i porte : hours de Yndre sont 11
isles , Erille et A rgitte , ou ilh at, etc. Je ne sais cc
que petit designer Erille. Quant a Aroitle, c'est
pcut-6tre VArgenlea regio, que Ptolemec fixe dans
llnde au dela du Gange.
* Et chil qui habitent a Montalinez ont un piet. B.
5 Taprobane , sans doute. Ccylan. Cette He n'cst
pas dans la mer Rouge , a coup sur, mais dans la
geographic de ce temps, c'est une bagatelle a la-
quelle il ne faut pas s'arreter.
4 Et sont les plus precieuses dc monde. B.
* Carmenie est la Carmanie. Quant a Medis, j'y
vois un nom propre Mtdie, et non le subs tant if
commun rmdi.
• Cocatris , dans Brunetto Latin L Crocodile.
7 La Parthie.
8 Et la terre de Caldee, ou la cite de Babylone
sciet qui at XI mille pies environ, lit-on dans Bru-
netto Latini.
■ En eel lieu est paradis terrestre. B.
10 Yea. B.
11 Qui toute arouse. B. Le texte de Brunetto La-
tini porte : el enmy le lieu est la fontaine qui tres-
tout Varouse, et de celle fontaine nassent 1111 fluis.
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LIVRE PREMIER. 295
si est une en la terre de Samarie ou at I fontaine qui mue sa coleur II II fois
I'annee, assavoir : verde, sanguine, blanc turbes et limpidum, qui fait
mervelheux et altemptable remuanche aux oeux. des regardans. — Item,
estdeleis le mont Libain, entre II citeis, Siarchos et Raphanean, I fluis Lii>a. n .
qui court mult radement. et qui habonde de grandement d'aighes, que ons
nomme Sabarique f , portantque VI jours en la samaine ilh ne donne point sabanque.
d'aighe; et le semedis ilh en donne tant et si habundamment * que c'est
mervelhe. Ilh y at oussi une riviere qui par tous temps engalle del nuit si Merveihedonermerc.
fort que ons vat bien sour le glache, et de jour retourne tout en aighe; et
y at vers orient I fluis qui jette eraines 5 d'or. — Item , ilh est une fontaine
es partyes d'orient de cuy aighe ons fait le feu grigois, qui est si ardant De feu g rigoi».
que ons ne le puet estindre, se chu n'est par vinaigre ou urine d'homme
et savelhon ', laqueile ons vent grant argent. — Ilh y at des fontaines qui
medient et sanent les plaies, et des aultres qui sanent les mals des oeu\. Nobler, medicines.
et des aultres qui les rendent plus clers , et des altres qui rendent la me-
moire, et des altres qui font oblier toutes chouses, et des altres qui font Foi.s*r*.
sterilles femmes avoir enfant, et des altres qui luxure augumentent. et des
altres qui rafrenent luxure \ — Item, y at II fontains, quant brebis en
bo vent, si devient noire Tune, et li aultre devient blanche. Ilh y at des lac
qui vinent de fontaines; la nuls chouses de monde ne puet noier • ne aleir Merreihez a<>< u*. n
desus, mains se traihent toutes aux fons. Ilh y at des aultres ou tout chouse
noie et riens n'y affondre. — Item, ilh y at des lac enqueils trois fois le
jour les aighes devinent ameire, et trois fois le jour douches. Ilh y at des
fontaines chaudes qui sanent les ceux, et aweglent 7 les laurons, car qui
noie 8 une larechien par seriment et ilh soil parjures, ladit aighe I'avoigle
al regardeir. — Ilh y at I fontaine qui est mult pasieble et coie, et se ons
sonne par deleis I tymbre ou altres instrumens, ly aighe soy esleverat al
son del instrument, com ilh soit vive. — Item, ilh at une fontaine en Orient
qui at nom Sapharon, et une en Nubie qui at nom Basiliscon, ou ly coke
1 Plus eorrectement Sabbatique, fleuvc de la * Pour arenes, sable.
Phdnicie septentrionale. Les deux cites dont parle * Sable. Le mot est reste en wallon.
a cette occasion noire chroniqueur, sont Arcwa et ' Qui luxure ochient. B.
Rophanea. II est fait mention de ce fleuvc dans Fl. ' Nager, surnager.
Joseph, VII, 2*. 7 Et arguetU. B.
* Si fori subitement. B* • Nie^
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CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
basilique jette ses pires, quant ilh les at porteit son terme; si nom-ons la
pi re Saphiron ou Basiliscon . lequeile que ons welt. En unc terreur d'Acre '
at unc sablon dont ons faite voire cleire et bon a wee afghe de mere. — Item ,
at des fontaines en Aisie, qui sont si chaude que por escodeir*; et tout pres
at del si froid qui semble que chu soit glaiche. Si en fait- ons des beals
bangnes, tout enssi com a Aise 3 en Allemaigne, et ches bangnes font grant
myracles , car qui dedens soy bangne trois fois ou plus , ilh donnent san-
teit aux gens — Et y at des noires fontaines que ons boit por puison,
et font bonne purgation. Et y at pluseurs altres fontaines d'altres vertus.
Item , ilh at une fontaine en Egypte mult mervelheux qui chandelles
esprise estindent, et les estintes resprendent. — Apres sont en Aisie mult
Des serpent. d e monstres et de serpens que nos avons deviseit par-desus, et pluseurs
aultres que nos deviserons chi-apres. Promier ilh y at monstre que ons
apelle Senachor *, qui at faiche d'homme et corps d'homme, mains ilh vat a
terre de pies et de mains, et at II grandes cornes en chief; et est chu en
Des merveiheux gens. Ynde del costeit de la Roige mere. Et la meismes at des sagittars, le motie
devantrains d'homme el le derains de cheval qui trait. — Item , asseis pres
at des arbres de soleal et de la lune qui parlont al roy Alixandre 8 , des mous-
es Gromat«. tres que ons nom Gromates 6 , qui ont corps et fache d'hommes, et sont
cornus et tinent I heppe 7 en leurs mains, et mult d'aultres monstres et ser-
pens, com cokes basilisque, dragons, griffons, pantheire, alerions, linx qui
voit sa proie oultre trois mures, dont ly compte soy (airat. Si volrat par-
leir des altres partiez de la terre, et tout promirs d'Auffrique.
De pans dAffrique. Auffrique est la seconde partie de la terre * qui gieste a diestre, quant
ons se tourne vers orient. Si vos disons promierement que d'Espangne est
li trespas en Libe, qui est terre de Auffrique, ou est la terre de Maritaine 9 .
Et sont III Maritaines : ly une fut la citeit de Sitin i0 , l'autre ou fuit Cesaire
de Tingi fl , et celle que nos avons devant dit, qui finist en la hault mere
Mnritaine.
1 En lerreu d'aulre. B. Je crois que le chroni-
queur a voulu parler du territoire de la ville d'Acre.
f fichauder, bruler.
* Ais-le-Grain. B. Aix-la-Chapelle.
* Senachoir. B. Quid?
5 II a ete parl^ de cette tradition, p. 144.
* Encore un monstre qui m'est inconnu.
7 Mot wallon designant une sorte de coupcret.
* Ces trois mots sont supplies d'apres le ma-
nuscrit B.
9 Mauritanic.
,# Plut6t Sitifis, aujourd'hui Sdtif, capitate de
la Mauritanie sitifienne.
11 Je ne comprends pas bien ce teite. Julia Ca-
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LIVRE PREMIER.
295
d'Egypte. Et commenche chesti Libe, ou ilh at grant f mervelhe. car la
mere y est asseis plus grant et plus hault qui n'est la terre; et se soy sour- Meneihe <ie h«ut*
tient dedens ses metes en teile manere, qu'ilh ne chiet et ne gote sour la
terre. En eel paiis est Athlanus le montangne emoiy les nues, qui dure AthUnus.
jusques a la mere Occeane, et puis y est Mynudi *, qui est une mult hault Mynuui.
montangne s . — Et sachies que toule Auffrique commenche sus la mere
Occeane, aux columbes * Hercules, et de la se tournet-ilh vers Tunes et
vers Bugee * et vers la cite it de Geptis % tout encontre Sardangne. jusqua
la terre qui siet contre Sezilhe; de la soy devise en deux parties, une qui
est appellee la terre Chano 7 , et l'autre qui sen vat entre les dois Sirtes, les chano.-sirtes.
terres ou ons ne puet alleir en nulle manere por les fluis de mere qui ors
croissent, ors descroissent si peruelheusement, que nuls n'auroit poioir la
por la diversiteit des fluis qui ne vienent pas ordineement 8 . — En teile ma-
nere dure tout le paiis d'Auffrique, entre Egypte et le mere d'Espangne, Foi.s***.
en coiste 9 nostre mere; mains par-derier, vers medis, sont les desiers de Desdesiende Etyoppe.
Etyoppe sus la mere Occeane , et le fluis de Tygris qui engendre a Tunc cos-
teit 40 qui devise la terre d'Affrique et eel de Etyoppe. — Et sachies que tout
la terre qui regarde vers medis, est sens fontaines et nue d'aighes et povre
terre; mains devers orient est la crasse et plantiveux de tous biens. Dedens
les partyes d'Auffrique sont comptees les dois ysles Cirtes " de cuy li comte
at fait mention, et se muche en 1'isle de Mene ", ou est ly fluis Lechen ";
de quoy les anchiens dient que ch'est ly fluis d'Ynfeir, et que les aymes qui
sarea (Cherchel) et Tingis (Tanger) sont les capi-
ta les des deux Mauri tanics cisarienne et tingitane,
et Jean d'Outremeuse n'eu fait qu'une seule villc.
1 Oti ilh at trop fire. B.
* Numidie.
8 Le tres-hals minudiens. B.
4 Plutot columpneSf colonnes.
i Tunis et Bougie.
* Ceptis aussi dans Brunetto Latini. II faut ee-
pendaot lire Leptis, et y voir la ville de ce nom
situee dans la Byzacene.
7 Chane dans Brunetto Latini. Ce mot est-il la
pour Cham ? La terre de Cham e'est rfigypte, pays
qui est indiquc sous ce dernier nom quelques
ligncs plus loin.
* Mains sans certainiteit, ajoute le manuscrit B.
• Toujour* en coiste. B. Cest-a-dire toujours co-
loyant.
10 Qui engenre alun , porte le textc de BruncKo
Latini, ce qui se comprend mieux que notre ver-
sion.
11 Les deux Syrtes sans doutc, deux golfes
trans formes en lies.
11 Et se miche et Vysle de Meire. B. Cette version
est aussi inintelligible que Tautre. On lit dans le
Trisor de Brunetto Latini : et Somiche et Visle de
Mene. II y avail sur les cotes de lfitliiopie une ile
Menu; ma is que peut designer Somiche?
18 On peut fort bien lire Lethen. En tous cas,
e'est bien du flcuve Lethe qu'il est ici question. Seu-
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296
CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
Gcrieincn*.
Mfrvelhe d'une
tainr.
cn boivent perdent les ramembranches de chouses passees, et ne n'ont plus
memoire quant elles entrcnl dedens *, solonc le opinion des mescreans.
La sont les gens de Muazona * et Trogoidete ', et les gens des Amans qui
font les maisons de seth \ Puis est apres Gersemens 5 , une vilhe ou ons
truve une mervelheuse fontaine; car ly aighe en est si tres-froide par jour
fon _ que ons ne le puet souffrir, et del nuit el est si tres-chaude con ne le puet
endureir, et vient par une seul eraine. — Ors aveis oiit comment li comte
devise le region de la terre d'Auffrique, et comment el est environnee de la
grant mere : celle grant mere est appellee Occeane, jasoiche que ses nom
cange et mue en pluseurs lieu , solonc les nommes des paiis ou clle vat. Car
De» mem qui sont sour promierement la ilh vat a la terre d'Arabe, ons le nom le mere d'Ynde, et
puis le mere de Hircaine fl , et puis le mere de Caspie, et puis le mere de
Scite, et la mere d'Allemangne, et puis la mere de Galle, et puis le mere
d'Engleterre, et puis la mere de Achaus 7 , et puis la mere de Li be, et puis
la mere d'Egypte; et c'est tout une mere qui at nom Occeane. — Et sachies
que, es parties d'Ynde, ceste mere croiste et decroiste mervelheusement, et
fait si grant fluis por chu que la forche de chaut le sortient en haulte sicom
pendant, ou por chu que en chis paiis at grant habundanches de fluis et
de fontaines. Et sour chu dobtent les saiges, porquoy chu est que la mere
Occeaine faice ches fluis , et puis les retrait une fois ou II entre jour et
Ktyoppe. nuit sens defineir. — Encor y est Etyoppe, qui est une grant terre, et des
Athalans • qui sont noirs com Moires % et por chu sont-ils appelleis Mors,
por la prochaineteit de so leal. Et sachies que les gens de Etyoppe et de
»o manage. Garemans " ne sevent que chest de mariage; mains ilh ont commonement
lenient il n'cst pas precisement a 1'entree de l'Ely-
see.
1 En autre corps. B.
' Namazona, lit-on dans Brunetto Latini. Sans
doute les Nasamons.
* Les Troglodytes.
4 Ce mot Amans doit dtre un nom propre. Pline
(VI , 20) cite entre Flndus et THydaspe un peuple
qu'il appelle Amanda; mais je suis plus dispose a
croire qu'il s'agit de TYe'men, en latin Amania, ce
pays etant plus rapprochd de celui des Troglodytes
ou il y avait, ditDiodore de Sicile (111, 4tt), une
tribu icbthyophagequi se construisait des maisons
avcc des cotes de baleines ; eetus en latin, celc en ro-
man, et ici seth, sans doute une faute de copiste.
5 Garama , la capitale du pays des Garamantes.
' [/enumeration de ces differentes mers, dans
les deux manuscrits, ne differe qu'en ce que Tor-
dre n'est pas le meme.
7 Plus probablement Jtlans, la mer Atlantique.
8 L'expression mons Athalans, qu'on trouve
dans Brunetto Latini , indique T Atlas.
• Pour Mores ou Maures. Cela s'applique naturel-
lement aux habitants de la terre des mons Athalans.
10 Precedemment Gersemens. Ce doit toujours
6tre Garama.
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LIVRE PREMIER.
297
entre eaux les femmes trestoutes li uns apres laulre, et portant n'y at nuls
qui cognosse son peire; si sont por chu appelleis les avanis nobles ' de '
monde. — Et sachies que en Etyoppe est unc grant toron, qui jette grant
planteit de feu ardant sens estindre; entre Etyoppe et Affrique sont tres-
grans desiers % ou nuls ne puet alleir, jusques en Arabe. Etyoppe siet al
deseur d 7 Affrique, apres Nubie, deleis la Roige mere, qui est I gran paiis.
Etyoppe est une partie d'Affrique; a une partie meridionalc deleis la
mere Occeane est uns paiis de grant espausse, Etyoppe, que ons nom aul-
trement Auxinitana, et Gandacis et Troglotidos 5 , lesqueiles parties yplu-
seurs ont descripte des philosophes, et nos, solonc Fhystoire del Gastoire 4 ,
vos weulhe demonslrer enqueiles parties et quantes B citeis sont et ont esteit
teiles com sont Auxime 6 , Pronuastria 7 , Philoseph, Marcon, Marata, Adu-
lum 8 . — Item , par eel partie passent pluseurs fluis, assavoir Gyon \ Nyli ,
Cheremetis et Muchul. Al front de Etyoppe Trogloditoire est I grans her-
mitage con nom Trevesis, et siet devers Egypte l0 , qui li gieste a seniestre,
ou ilh sont ches citeis : Alixandre, Exaole, Nyleodin ", Ermupolis, Ar-
sino, Bucolia, Naucreatis, Ermucis, Corumbo, Phiche**, Armos, Pichin,
Sale, Necropolis, Miche, Ybion, Secta, Pholotetis, Marelon et pluseurs
aultres, jusques al somme de II C et LXX1I1I citeis, tout par nom qui sc-
roient long por escrire chi. — Item, par-deleis les rains de Etyoppe, vers Foi. 83 i
la mere Occeane, est Etyoppe Garamantum, que ons dist establiste, qui est
confine de Etyoppe et de Trigloditaine; en laqueile partie Garamantum,
nient long de la mere Occeane, ly fluis de Jet " court fortement. Et la sont jet.
les montangnes que ons nom Nannanon. Et y at I lac qui at nom Letum ,
et I aultre qui at nom Augita ", que les gens qui la habitent escrient por le
1 Le lexte de Brunetto Latini porte : let mains
(inoins) nobles, ce qui se comprend un peu micux.
* On lit encore dans Brunetto Latini : outre
ches gens (ceux des pays dont il a parle) sont les
Ires grans desers.
* Sans doute les habitants du tcrritoirc d'^ti-
xume, les Candei et leurs voisins les Troglodytes.
4 L'histoire de Castorius, tin grant clerc qu'il
cite un peu plus loin. En effet, ce qui suitet con-
ccrne encore 1' Affrique, n'est pas emprunte au
Trctor dc Brunetto Latini.
5 Alquantes. B.
• jinxuire, B.
7 Pronuatristia. B.
* Je ne reconnais la dedans que Auxume ct
Adults.
9 Agion. B.
10 11 doit 6tre ici question de la Thebaide, ou
s'etablirent les premiers solitaires.
11 Tout ce qui precede depuis Trochloditoirc ,
manque dans le manuscrit B.
» Phise. B.
" Le Niger?
14 II y avait dans la Cyrenalque un fleuvc Le-
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298 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
grandeur. — Item, a front de Garamant sont des desiers seches, et mon-
tangnes que ons appelle Narmarides, Nassamenes, Letofagi et Blegimes ';
et ne fut oncques la fait citeis por le secheur de 1 desers. Item, deleis la mere
Occeane est Etyoppe Biblobatis , qui se confine awec Ies desers con disl
Garamant, en laqueile est li lac de Tanges, oil ilh at mult de desiers. Et la
sont les montangnes de Tulliatodi ; et court assets pres le fluis de Jet. Item,
al front de eel partie Biblobatis at mult de desers jusques as pays que ons
appelle Affrique, ou ilh at mult de philosophes qui escrient le pays el chu
qu'ilh y avient de jours en jours.
Auffrique est uns pays ou ilh at grant planteit de clers, entre lesqueils
ilh y fut Gastorius, apres cuy escripture nos avons escripte chu que nos
faisons ou disons de paiis d'Affrique, voire en-parlie; car tout son escrip-
ture n 'avons mie pris por la prolixiteit, enssi bien com nos n avons faite
del escripture d'Asie, qui est trop long chouse. Je vos nommeray en partie
des citeis d'Auffrique, solonc Castorium , qui toutes les nom; si en est cent.
Promiers y est Tragulis, qui est confine a rivaige de la mere grant, Arissi-
lenoir s , Sirencasium, Sagassanie, Palma, Ysiri, Sacomadis, Pretorium,
Misal, Disio, Nadalus, Leptis ', Poreo, Orea, Neapolis, Cartaige le grant,
Tyraria; et al aultre costeit at oussi des citeis teils, apres Cartaige qui siet
sour mere emmy lieu del rengne : Marche, Afais, Agarius et mult d'altres.
— Item , del aultre part, en paiis c'on dist Munidiam, at Ml" et V citeis,
que nos ne nommons nient par briefteit, etXXV fluis. Et al aultre costeit
at tant de citeis qu'ilh en est tout ensemble XIIII paiis 8 et III royalmes,
dont Cartaige est soveraine, et sans compteir Etyoppe et Nubie et Egypte,
qui ne sont mie del rengne d'Auffrique; mains ilhs sont situee en Tisle
d'Affrique, assavoir dedens la tirche part de la terre. Et si at III I ysles,
trois lac et XXXII fluis et V c HII" et II citeis. — Item , en Affrique at plu-
seurs diversiteit et fontaines, car la sont tous les monstres semblans en
Dei femmes dAffri- tous cas a cheaux d'Orient, et si sont les femmes qui portent leurs enfans,
quant ilh sont neis , devant unc serpent en cede paiis; s'ilh est bastars, ilh
Mcnreibe de serpent, l'eztranglent, et s'ilh est de son marit, ilh le fiestienl; et y at 1 serpent que
thon ou Lafhon, et une ville VAugila dans la * Et au lieu de de dans le manuscrit B.
Marmarique. » Jrefilenor. B.
1 Probablement M armarique, Nasamoncs, Loto- * Neptu. B.
fages et Blemmyes. * XIII I parties de paiis. B.
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LIVRE PREMIER. 299
ons appelle vivere 1 , qui estrangle les hommes, et puis se les pleurs tant
qu'ilh muert. Et si est oussi li linx, et desaultres mervelhes tant que ons
n'en croiroit mie la mo tie; portant nos en tairons a present. — Item, ilh y
at mult de fontaines entres lesqueiles est I en Etyoppe, qui fait pire de
I'aighe si bonne que por faire mures. Ors nos tairons atant d'Auffrique,
si vorons parleir de la partie de Europe , jasoiche chouse que A lixandre
ne conquist rien en Europe ilh conquist en Aisie , ou ilh at bien mainte-
nant plus de II C regions. Et si conquist Auffrique, enssi com nous avons
dit: mains portant que Europe est li tirche parchon de la terre, et que c'est
nostre paiis, je le deviseray de grasce, et enssi cogniscerons miez le paiis.
Europe fut li parchon Jafet. le fis Noe. Europe est divisee de la terre De paiis de Europe.
d'Aisie, la ou est li destrois de bras Sains-George, et es parties de Gonstan- LebrasSain*Geor g e.-
, °. r , Constant inoble, Gres
tinoble et de Gresche, et s en vient vers septentrion par tout le mere decha <?he.
jusques en Espangne sus le mere Occeane. En chesti partie* est Romme, EnEspangne.-Romme.
qui est li chief de toute crisliniteit. — Et por chu dirons tout promier de
Ytalie, chest ly paiis entour Romme, qui est vers medis, la Grant mere en Yuiie.
coste. Et vers septentrion vat la grant mere de Venise, qui est appellee la venise.
mere Andriane * por la citeit de Atri \ qui fut la fondee. Et chel milieu est La mere Adriain.
es chans de la citeit de Roiante 5 . — Et sachies que Ytaile fut jadis appellee *°i- w* -
Greche la grant, quant les Grigois le tenoient. Et est la fin vers le soleal Grechc.
couchant, et vers soleal levant, vers les montangnes de Provencheet vers Ve p s ra ^ in AUem7n r9
Franche et vers Allemangne fl ou ilh at grant terres; entres les aultres y at « ne -
II fontaines 7 , del une vers Lombardie naist I fluis mult gran , qui se passe De. n fomaines.
par Lombardie et rechoit en ly XXX fluis , et si entre en la mere Adriane.
Et chest li fluis 8 que les gens appellent Eridaine, mains en latin ilh est Eridaine.
appelleis Padus. — De l'autre montangne vers Franche est li fluis del Roine, p*dui.-Le Roine.
qui sen vat vers Borgongne et par Provenche, tant qu'ilh soy entre en la Borgongne.
grant mere de Provenche f si roidement qu'ilh enporte les nefs dedens la La mere de Provenche.
1 Pour vipere? vers soleal couchant, au jondant des monlagnes qui
* De Europe, ajoute ici le manuscrit B. De la sont vers Provenche, et vers Franche, et vers A lie-
tcrre, porte le teftte de Brunetto Latini. mangne.
5 Mot suppled d'apres le manuscrit B, et aussi 1 Ou ilh at une grant terre entre les autres qui
d'apres le texte de Brunetto Latini. at II fontaines. Ibid.
4 Ou Jdria, la ville des Vdnetes. • Notre texte porte par erreur paiis.
z Pour Reate, Rieti? 9 Cette phrase : tant qu'il soy, etc., ne se trouvc
* Le texte de Brunetto Latini porte : et est fine'e pas dans Brunetto Latini.
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300
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Ytaile.
Toscaine.- Rommt.
Tyberis.
Hostie, Albane, Savine,
Tusculane, Palestine.
Des cardinals de Rom.
Jenenes.
Champangne , Alan-
ine, Gaiele.
Aprus. *
Y polite. -Aisie.-Reatc.
Ancbone.
Asculi et Orbins.- La-
bour.
Bonivent, Salerne.
Puilhe, Otrenr.
Galabre.
Cosens.
Sesilhe.
mere pres de V lieues, et si delient sa doucheur jusques la. Et por chu
dist-ons que chest unc des HI gringnour fluis de Europe. En Ytaile at plu-
seurs provinches dont Toscaine est li premier, ou Romrne est tout devant f .
Et parmy Romme court ly Tybre, et soy entre en la Grant mere, et ' des
citeis sicom Hostie, Albane, Portes % Savine \ Tusculane, Palestine *, qui
furent mult bonnes citeis anchienement; mains Romme les at a ly submise.
Clies citeis sont toutes pres, et dedens la citeit de Romme ' y at XLV1I
englieses , ou ilh at XXVIII priestres et XX VIII 7 dyaques qui tous sont car-
dinals de Romme. Et des VII citeis deseurdittes sont VII evesques cardinals.
— Apres chu sont XXI evesques sens Pise qui est uns archevesques , et at
111 evesques desous luy. El sachies que ly deraine evesqueit de Tuscane
est 8 eel de Lune 9 qui marchist a Jenenes l0 . Et oultre Romme est la marche
de Champangne ", ou est la citeit de Alangne " et de Gaiete et VII aultres
evesqueit. Apres est la terre de Aprus l5 , ou ilh at VII archevesques u . —
Apres est la ducheit de Ypolite l5 ,ou est la citeit de Aisie et Reate l6 , et VII
aultres evesqueit. Apres y est la marche de Anchone, ou est la citeit de
Asculi et Orbins ,7 , et XI aultres evesqueit. Apres est la terre de Labour,
ou est la citeit de Bonivent " et Salerne, et pluseurs altres citeis mult grant,
ou ilh at VII archevesqueit '\ — Apres est ly rengne de Puilhe 80 , ou est la
citeit de Otrent", sus la seniestre costeit de Ytalie. Et sachies que en Puilhe
at VIII " archevesques et XXX evesques. Apres est Calabre ou est larche-
vesque de Cosens" et II aultres archevesques et XVI evesqueit. — Apres
est I'isle de Sezilhe entre le mere Adriane et la nostre, ou est l'archeves-
1 Tout avant. B.
11 Campanie.
1 Cette phrase est incomplete. On lit dans Bru-
11 Anagni.
netto Latini : et sachies que li pape et apostle de
15 Les Abruzzes.
Home at desouz lui VII evesques qui sont cardinals :
14 Ou plutot evesques, commc dans le texte de
celui de Osle, etc.
Brunetto Latini.
* Portici?
15 Spol^te.
4 Pour Sabine, nom de pays applique a une
18 Assises et Rieti.
ville.
17 Ascoli et Urbin.
5 Palestrine, Tantique Preneste.
18 Bene vent.
• Je supprime ici un el qui est de trop.
'• Oti ilh y at VII evesqueit et vesqueit. B.
7 Le teste de Brunetto Latini portc XVIII.
" La Pouille.
* Mot supplee dapres le manuscrit B.
11 Otrante.
• Luna, ville de Fancienne Etrurie.
" VII. B.
19 Genes.
M Cosenza.
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LIVRE PREMIER.
501
qucit de Palerne. et celle de Meschine et de Mont-royal ', et IX evesquiet.
Apres est li moot Gibel % qui toudis jet feu par II bouches, et y at noise
desus tousjours. Et sy y est la fonlaine de Aratuse *. Et sachies que entre
Sezilhe et Ytalie at I petis bras de mere emmy qui est appelleis li far de
Messine, porquen ypluseurs dient que Sezilh n'est mie de Ytaile, ains est 1
paiis par ly. — En la mere * de Sezilh siet ly ysle de Vulcane 5 , qui est del
nature de feu; et tient * toute la lerre de Sizelh VII C milles que les Fran-
chois appellent liewes, mains ilh ne sonl mie parelhes. Encor est en Ytalie
la terre de Romangne sus la mere Adriane, ou est la citeit de Arime et
Ravenne et Ymele 7 et X aultres evesqueit. — Apres y est Lombardie, ou
est Bolongne le Crasse, et HI aultres evesqueit, et Farchevesqueit de Melan
qui dure jusques a Guyne 8 , et la citeit de Saone 9 et de Albige ,0 , et puis
jusques a la terre de Ferraire, oil ilh at XV III evesqueit. Apres y est la
marche de Truise ", qui est al patriacle de Aquilee.
En eel marche de Truise at XVIII evesqueit, qui touchent les parlies
d'AlIemangncs el de Jarre " et de Dalemache " sus la mere. Encor est en
Ytaile Farchevesquiet de Jenes u , awec III evesques, et puis si est Fisle de
Sardangne et de Corsique, ou ilh at III archevesqueit et XV evesqueit. Et
la ou Ytaile finist a la mere de Venise, si est la terre d'lstre * 5 , de Fatre part
de la mere, ou est Farchevesqueit de Jardre 16 , et II aultres archevesqueit
etXV evesqueit l7 . — Apres est la terre de Sclavoine , ou ilh at dois l8 arche-
vesques et XIII evesqueit. Apres y est la terre de Hongrie, ou ilh at II
archevesques et XI evesqueit. Apres y est la terre de Pulaine ", ou ilh al
1111 archevesques el VIII evesqueit. — Ors soy tairat li conte de chu, si
Palerne.
Gibel.
Araluse.
Vulcane.
Romangne.- Arimc.
Ravenne.- Lombardie.
Bolongne.- Melan.
Savoie.- Albige.
Ferraire.
Truise.
Jarre.- Dalmarche.
Jenes.
Sardangne.- Corsique.
Fol. 8* r°.
Distre.
Jardre.
Sclavoine.
Hongrie.
Pulaine.
1 Palcrme et Messine sont faciles a distinguer.
Quant a Mont-royal, il designe Montreale.
* L'Etna, appele aussi Mongibello.
* II y a en effet, pr6s de Syracuse, une fon-
taine a laquelle est attache le nom d'Arethusc.
4 Notre manuscrit porte terre. Je corrige d'a-
pres le manuscrit B et le texte de Brunetto Latini.
' Volcano , une des lies Lipari.
* Pour contient.
7 Imola?
* Guyene dans le manuscrit B, et Gyene dans
Brunetto Latini. .Ce doit ^tre G6nes.
• Savonc.
10 Albenga.
11 Trevise.
" Jadera, en Dalmalie?
18 Dalmatie.
14 Genes.
15 Istrie.
18 Jadera est ici mieux indique que plus haut.
17 Tout ce qui precede depuis lEtlaou Itaile, etc.,
manque dans le manuscrit B.
"• III. B.
" Pologne.
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302
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Greschc.
Tre>sal.
Machidone.
Alhenne.-OIimpc.
Traiche. - Les Barba-
rins.
La Danube.
Calistre.
Galdade.-Oritige.
Cribria.-Minoa Fhxon
Athos.
Dp VIII paiis de Gre-
che.
Del altre parlie de Eu-
rope.
retournerat a sa mateij-e desus, ou ilh le laisat de Sezilh a la fin d'Ytaile.
Oultre Sezilh est dedens Europe la terre de Gresche, qui commenche aux
rnons de Karnes ', et define sus les pors : la est la terre de Tressale, ou
Julius Cesar soy combatit a Pompeiius, et Machidone, en quoy est la cite it
de Athenne, et mont Olimpe qui tousjours reliust. Et est plus hals que
li airs en quoy lez oysels volent, solonc chu que les anchiens dient que
alcunne fois par subtiliteit montarent sus. — Apres est la terre de Trache
ou les Barbarins sont en Romanie et en Constantinoble. Et sachies que en
la terre de Traice vers septentrion court la Danube : ch'est I grant fluis neis
.en Allemangne. Puis est dedens la nostre mer * lisle de Gresche, ou le Aes s
regnat promier, solonc chu que ons true en escript. Apres est Calistre 4 et
l'isle de Galdade, qui est apellee Oritige \ ou les Grigois enterin c furent
promierement troveis. Puis est ly isle de Cribria 7 et Minoa et Flaxon et
Melo 8 et Carpathe • et Levino l0 , ou li mons Athos est, qui est plus hauls
que les nues. — A chu puel-ons bien entendre que en Greche at— ilh VIII
paiis; ly premier est Dalmache vers Occident, ly secons est Piros, ly thiers
est Flados, ly quars Tensale, ly V e Machidone, ly VI e Aquaie fl , et dois en
mere : chu sont Creta et Cyglades. Et si at en Greche VI diversiteit de
lengaiges.
Droit chi commenche I altre parlie de Europe sus le pors " : ch'est 1 lieu
en la mere qui depart Aisie et Europe, et n'at plus de larges que VII es-
tages l5 , ou ly roy Cyrches " fist 1 pont de nefs ou ilh passat, puis si enlar-
1 Haines. B. Quid?
* Mot supplee d'apres lc tcxte de Brunctto La-
tini.
* Liaes, porte le texte de Brunetto Latini. S'agi-
rait-il de Laius, le pere d'OEdipe?
* V\\e de Thera, appelee plus anciennement
Calliste.
5 L'ile de Delos, qui s'appelait en effet aussi
Ortygia, Je ne sache pas qu'elle ait jamais porte le
nom de Galdade ou Cardade, comme on lit dans
le Tresor de Brunetto Latini. Pcut-dtre le chro-
niqueur a-t-il confondu le nom de Hie avec celui
du groupe auquel il appartient : les Cyc lades.
* Entier, vrai, primitif?
7 Terbria, dans Brunetto Latini. Inconnu, a
moins qu'on ne vcuille indiquer Thera, deja men-
tionnce sous lc nom de Calistre.
8 Minoa designe Paros, qui porta it ces deux
noms; Melo, M61os et Flaxon, peut-dtre Naxos.
9 L*lle de Carpathos, au sud-ouest de Rhodes.
t0 Lemino , dans Brunetto Latini , Lemnos. Lc
mont Athos n'est pas dans Tile de Lemnos, mais
dans Acti, Tunc des trois peninsulas de la Chal-
cidiquc.
11 On peut reconnaltre assez bien la Dalmatie,
rfipire, la Thessalic, la MacSdoine et FAchaie;
mais que peut designer Flados f
" Sur lepont, la mer?
15 Probablement pour stades.
14 Xerxes.
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LIVRE PREMIER.
505
gist la mere desmesureement; mains chu fut I pou long, car ilh devient
estroit unc pou oultre que ilh ne tient que V c pas ' ; si est nommee Goulfe de Couire.
Greche, par ou li roy Daire portat la grant habundanche \ — Et sachiies
que ly Danuwe est 1 fluis qui altrement est appellee Ysdre 5 . qui naist es Y»«ire.
grans mons d'Allemangne vers Lumbardie, et rechoit en ly XL fluis, tres-
tous si grans que nuls n'y puet alleir, tant que ilh se part en sept, et sen
entre vers orient, dont les till y entrent si roidement qu'ilh maintinent
leurs doucheurs XX lieues dedens la mere. — Et oultre chu, al entree
d orient, est la terre de Site 4 ; desous est li mons Rifer et li Perborier $ $•■«••
oil les oyseias grif 8 n assent; mains ilh est proveis por les saiges que la
terre de Site est de Aisie, solonc chu que li conte dist chi-devant, jasoiche
que ly isle de Site, qui sont decha la Danuwe LXX miles pas Ions de
Bo i fire et Traiche 7 , ou est la mere Norte 8 . Apres tantoist est la terre de Boiffie,Tn,iche.
Senne • sus la Danuwe, qui dure jusques a fluis del Rien. — Et sac hies que ^ mere cong»iw.
en Allemangne est 1'archevesqueit de Maienche et Trive et Colongne, et Tme.-Maienche.-co-
VII aultres archevesqueit, et bien LIUI evesqueit jusques a Mes et Verdon,
qui sont en paiis de Loheraine. Apres Allemangne, oultre le Rien, est
France, qui fut jadis appellee Galle; en quoy est promieremgnt Borgongne , Fram-he.-Gaiie.-Bor-
qui commenche aux montangnes entre Allemangne et Lombard ie. a fluis
del Roine, al archevesqueit de Ouarentaine et de Besenchon et de Viane Q«arent»ine, Be*™-
• ■ ill* clion, Viane.
et de Umbrom 10 , ou ilh at XI evesqueit. — Et puis commenche la droit
Franche a la citeit de Lyon sour le Royne, et dure jusqu'en Flandre et la Lyon.-Fian.ire.
mere d'Engleterre , en Picardie, en Normandie, en la Petit-Brelangne, el picardie. Normandie.-
Angou et Poitou, jusques a Bordeal sour Geronde, et jusques a Noslre- p«itou.-Bord«.»i.
1 Le texte de Brunetto Latin i est plus clair :
puis s'eslargist la mer desmesureement, mats ce n'est
gaires, car pmi oultre devtent-elle si stroite que che
n'est que V c pas.
* Grand nombrc de soldats?
5 Ister.
* Scythie.
5 M onts Ripheens et Hyperboreens.
* Griffon, en latin gryps.
7 Dou boiffre (Bosphore) de Trace, lit-on dans
Brunetto Latini.
9 Ou est li mer conyalde que li phueurs appel-
ant la mer Morte. B. Ce nora etait autrefois donne
a une mer au nord de la Germanic Voir a ce sujet
Bergman n , Les peuples primitifs de la race de Ju-
fele. Colmar, 4853, p. 48.
• Senne doit tore ici pour Saisnes, forme em-
ployee dans la langue romanc pour designer I< s
Saxons. La terre des Saxons n'est pas sans doutc
sur le Danube, ma is notrc chroniqueur n'y regardc
pas de si pres.
10 On reconnatt facilement Besancon, Vicnnc
et Embrunj Qitarantaine est Tarentaise. La villc
de ce nom, siege dc Parcbeveche, ayant etc rui-
nee, Parchevdque alia setablir a Mous tiers en Sa-
voie.
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304
CHRON1QUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Kol. 84 »•.
A,,.
Provenclie. -Arle. -Ner-
bonne.
Monpelier.
Espangoe.-Aragon.
Navaire. - Portingal.-
Caslel.
Tolele.- Compostel.
Galpc.-Albine.
La Grant-Bretangne,
c'est Engleterre.
Cantorbie.
Yrlande.- Marchie.
Casseles.-Tueni.
Kscoche.- Norwenge.
Damme de Puys, ou ilh at VII archevesqueit et chinquant et unc evesqueit.
Apres est Provenclie jusques a la mere, ou est Farchevesqueit de Ays
en Provenclie et de Arle, awec XIII evesqueit, de Nerbonne ou est ly paiis
deToIouse, etMonpellier et IX aultres evesqueit. Apres ches terres com-
menche le paiis de Espangne, qui dure par tout le terre de roy de Aragon
et del roy de Navaire, et de roy de Porlingal et de Gastel ', jusques a la
mere Occeane. ou est la cileit de Toletes, et Compostel ou gieste li corps
sains Jaque le Gran. — Et sachies quilh at en Espangne II II archevesques
et XXXVIII evesques de cristiens, sens les Sarasiens qui sont la entours*.
et qui est la fien de la terre, solonc chu que les anchiens Font proveit. Et
meismes le tesmongne la terre de Calpe et de Albine 8 , ou Hercules fist
jadis ses columpnes, quant ilh vanquit tout la terre, en lieu ou nostre mere
est 4 de la mere Occeane, et s'en vient parmy ches dois mons ou sont les
ysles grandes et les columpnes Hercules; en teile manere qui laisse les
marches et la terre de Auffrique a diestre et Espangne et tout Europe a
seniestre, ou ilh n'at pais VIII m passe de large et XV m de long; et ne fine
jusques es parties d'Aisie, et se conjoint a la mere Occeane. — D'aultre
part, par le terre de Franche, vers septentrion, vat la mere Occeane, et
por chu ilh fut jadis la fin de la terre habitee, jusques atant que les gens
crurent et multipliarent, el qu'ilh passarent en une isle qui est en mere,
et at de long VII1 C miles : chu est la Grant-Bretangne, qui ors est appellee
Engleterre, ou est l'archevesqueit de Cantorbie, et eel de Bruic 5 et XVIII
evesqueit. — Apres est Yrlande ou est l'archevesqueit de Marchie et de
Dintelin et de Casseles et de Tuem 6 el XXXVI evesqueit. — Apres est
Escoche ou ilh at IX evesqueit. — Apres est la terre de Norwenge, ou ilh
at uns archevesqueit et X evesqueit. Et sachies que la plus grant partie de
toutes ches isles, et especialment en Yrlande n'at nuls serpens, et por chu
dient les persans 7 se ons leur porteit des pires de la terre de Yrlande 8 ,
nuls serpens ne poroit la demoreir. — Ilh at mult de ysles oultre Bretangne
1 Castille.
* Qui y sont encors, lit-on dans Brunetto Latini.
8 A byla , cettc puinte du continent africain qui
forme, avec l'antique Calpe, le detroit de Gibraltar.
4 Nous avons deja vu ce mot avec le sens de
sorlir. Le tcxte de Brunetto Latini pofltaen effet w/.
5 Bntic ne peut Sire autre chose que York.
6 Armagh, Dublin, Cashill et Thuam.
7 Sans doute par erreur pour paisans. A cc su-
jet voir le Gervaise de Liebrecht, pp. 40 et 88.
• Tout ce qui precede, depuis : n'at nuls ser-
pens, etc., manque dans le manuscrit B.
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LIVRE PREMIER. 305
et oultre la terre de Norwenge, mains l'isle de Thisle 4 est la derain , qui Thisie.
est si durement en profont de septentrion que en esteit, quant li soleal
enlre en signe de Cancre, al plus long jours la nuit y est si petit qu'ilh est
enssi que nient; et en yvert, quant li soleal entre en Capricorne, as longes
nuit li jour y est si petis qu'ilh at pou d'espasse entre levoir ' et cuchier.
Et est eel marche congallee. — Apres est l'isle de Budes 5 ou les hommes Budea.
qui y habitent n'ont nulles bleis, mains ilhs vivent de poissons et de lait,
Encors y sont les ysles Orchades ou nuls gens n'abitent par nuls temps, orch.de*.
Apres deveis savoir que nos awisiens bien plus declareit de Europe des
archevesqueit et vesqueit, et des aultres paiis et citeis, fluis et riviers que
nos n'aions, mains en astons a tant passeis enssi bien com d'Aisie et d'Auf-
frique por dois chouses : 1'une si est qu'ilh en fust tant d'escriptures que
ons n'en venist nient a fin, car ilh n'at en monde citeit, fluis, riviere, lac,
fontaine, monslres, arbre»ne aultre diversiteit que les philosophes ne les
nomment par nom; et 1'autrc cause si est que ilh sont en latin si savage.
que nos ne les poions remanchier 4 , maiement les citeis et les fluis. — Si
vos dis qu'ilh at seulement en Europe milhe IIll c et LXXV citeis toutes
nominees par nom, sens les vilhes fermees, casteals, opide et forteres. Et
si at LII parties de paiis, et de fluis cent et XLV1II, uns isle; mains es fins
des marches sus la mere at Europe mult de ysles : ilh y est l'isle de Sar-
dine ou ilh ne vint nuls serpens, et se ons en y porte ilhs morent. Item,
y est l'isle de Thile ", 911 les arbres sont todis folhus, ne se n'y chaient onc-
ques les fuelhes jus des arbres. Item, ilh y est Sezilh ou la montangne de
Ethna art toudis. — Item, y est Ybernie ou ly purgatoire Sains-Patris est.
Item, ilh y at pluseurs mervelheux fontaines, entre lesqueils ilh at une en Foi.wi-.
la petite Bretangne, de cuy aighe encontre une pire jettee fait plovoir et
(honoir •. — Item, ilh at une fontaine en septentrion , qui fait ardre I feu al
jctteir dedens. Item, ilh at une a Malmondie 7 deleis Stavelot, cuy ly aighe DeMamedie.
1 Thule. de cette ile que veut probablement parler notre
1 La levie, porte le texte de Brunetto Latini. chroniqueur; raais il la place en Europe, dans la
Le lever et le coucher du soleil. Mediterranee, et celte de Plinc est dans le golfe
* Plus correcteuient Visle d'E budes, les He- Persique.
brides, en latin Ebudae insulac. • II s'agit de la fontaine de Barentan, sur la-
* Pour romanchier, traduire en roman. quelle on pcut consul ter le Gervaise de Liebrecht ,
5 NulU arborum folia ibi decidunt, dit aussi p. Ii6.
Pli ic dc Hie dc Tylus(XII, 40 et 41). C'estdonc 7 Malmedy. II y a, dans les environs de cette
39
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306
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
devint pire si grant ou si petit con weult; car ons fait une fosse en la terre,
et jet-ons dedens la fosse del aighe, el soy convertil en bonne pire por mu-
DeTongre. reir. Item at une a Tongre en Allemangne, qui garist de toules maladies,
sicom Plinius li philosophe dist. Item, ilh est une fontaine en Ytaile. qui
garist des surons 1 qui vinent dedens lez oeux. — Item, ilh at une fontaine
en Norwe ' qui convertit en pire tout chu que ons mette dedens, queilcon-
ques chouses que chu soit, et les propres draps; et si fut chu exproveit par
1'emperere Fredrich. Ilh at 1 en Loheraine de cuy aighe, se vos le boleis en
une paile 3 , ilh devenrat seil beat et bon. Ilh at des chouses mult mervel-
heux a monde, qui seroient long a racompteir; si nos en tairons droit chi,
et retournerons a nostre mateire, ou nos I'aviens lassiet al an V c et LXX1I.
Vosaveisoiitchu que nosavons declareit del mappemonde, por le champt
qui astoit esleveis d'Alixandre et de Julien Cesar al ocquison d'eaux, de
quoy ly emperere Augustus prist le perilh sou^luy, et dest que les com-
pactions sont odieux; mains les dois empereres Alixandre et Julien Ce-
saire avoient esteit valhans et preux en tous cas, et avoient mult conquis,
et li uns plus que li aultre, mains ilh n'en diroit plus; atant soy partirent
de la plaiche. — Item, Tan del transmigration de Babylone V c et LXXII
De discorde entre m»- deseurdit, esmut grant discorde entre Mariane le femme Herode et Salome
nane et Salome. w» i ■» • n ■ 11
la soreur Herode, et tant que I jour elles soy contenchont ensemble: et
dest Salome a Mariane qu'elle estoit fille de vilain, et Mariane appellat
Salome orde putain. Si s'avisat Salome por plus grant despit fa ire a Ma-
riane; si fist evesque de la loy de son frere qui astoit nomeis Jonatas. Et
tout chu faisoit Salome par le conselhe Doliside, le premiere femme a He-
rode qui le haioit. — Atant vient Mariane a Herode, et dest que jamais el
De Herode oui cachat n'auroit joic s'ilh ne cachoit Dolside en sus de luy et son fis Antypater. Et
sa femme Doliside.
quant Herode oiit chu, se les jeltat de son r£ngne, assavoir fours de Jhe-
rusalem ; et se les fist jureir que ilhs ne entroierent en la citeit fours que
petite ville, plusieurs sources d'eau ferrugineusc
placees, le Pouhon surtout, dans des sites fort pit-
toresques; mais je n'en connais aucune qui puisse
etre considered comme incrustante. C'est cepen-
dant a une source de cette categoric que semble
s'appliquer la tradition recueillie par Jean d'Ou-
tremeuse.
1 Pour surgeons, sources , ce qui indiquerait les
fistules lacrymales? La source est probablemenl
celle que cite Pline, XXXI, 2, et qui se trouvait
dans une villa de Ciceron , pres de Pouzzolcs.
* Norwege.
8 Cela doit signiCer : si vous la faites bouillir
dans un seau. Le mot pail, dans le sens de seau,
est rcste en anglais.
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L1VRE PREMIER. 307
trois fois Tan , assavoir aux trois fiestes de la loy por oreir. — En eel an
meismes, le Xl e jour de June, soy mariat Anne qui fut soreur a Esmarie
charnel 4 , filhe a Achar, de la lignie Juda, la mere Elizabeth et Eliud; de
Eliud, qui fut frere a Elizabeth, Emyb f nasquit, et de Emyb nasquit sains La generation de sain*
Servais, qui fut evesque de Tongre ; le siege astoit seant a Treit sour
Mouse 5 . — Item Elizabeth, la filhe Esmarie, oit Zacharie le prestre de la
lay a marit, dont nasquit saint Johan-Baptiste en Jherusalem. Et (autre Dc ti ^ nl JouansBa P-
soreur chest sainte Anne, qui a jour deseurdit soy mariat, et prist son
promier marit Joachim, desqueis nasquit la benoite virgue Marie. Et ^^S^JJ^""!
quant Joachim fut trespasseis, si soy remariat Anne a Cleophas, et Marie cbe -
sa filhe esposat Joseph, frere a Cleophas. De cheli Cleophas et Anne nas-
quit Tautre Marie, qui fut la femme Alphei, de quoy nasquit sains Jaque
le Pelis et Joseph; et sa mere fut nomee Marie-Jaqueline, portant qu'elle
fut mere a sains Jaque le Petit, et fut enssi appellee Marie-Joseph. Et
por chu je le devise enssi por la diversiteit des ewangelistes, car enssi
est-ilh nommee en I'ewangeile de la messe de Nostre-Dame : Marie-Cleophe.
— Et quant Cleophas fut devies, si soy remariat Anne a Salome, de cuy
nasquit l'autre Marie, le femme Zebedei, le mere sains Johans ewangelisle
et sains Jaque le Gran , qui gyst en Compostel. Et por chu est-ilh appellee Foi.85v».
Marie-Salome et Marie-Zebedei. Enssi oit sainte Anne 111 barons, et de cas-
con oit une Marie, et enssi furent trois Marie, dont la promiere fut la mere
Jhesu- Crist, le salveur de tout le monde, et les aultres ' vos ay dit desus.
Sour Tan V c et LXXI1I, le XV e jour de mois d'avrilh, vient Salome a
Herode son frere 5 , et fist tant a ly que ilh ly fist ochire Jonatas le frere Ma- Decode qui fistochire
riane sa femme, de quoy ilh avoit fait evesque de la loy, portant qu'elle ly wnSaiome.
fist entendant qu'ilh ly voloit tollir son rengne ; et dest encor a Herode que
Mariane sa femme avoit escripte a Anthone, et l'avoit assegureit de sa mort.
— Quant Herode entendit chu , se dest qu'ilh yrat veioir se chu est voirs ; se
livrat sa femme Mariane, qui astoit ly miez amee de toutes, al marit Salome
sa soreur por lee a gardeir, et li donnat une certaine ensengne, et li com-
mandat que quant ilh li commanderoit chel ensengne que Mariane fut tan-
toistochise; et chil li otriat. Puis s'en partit Herode et alat a Anthone, et
1 C'cstra-dire : scBur charnelle d' Esmarie. * Et les dots aultres. B.
* Emynar. B. Emyeu dans Brunetto Latini. 6 Sur cette partie du regne d'Herode , voir Fl.
5 Maestricht. Joseph, XV, 44.
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308
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
H erode fist ochire sa
femme Mariane et
son seroge.
La conception Nostre-
Damme.
Dieu formal Adam.
y demorat grant pieche que onques ne se pot arporchivoir de chu que ilh
queroit. En chi terme que Herode astoit a Athenne deleis Anthone, avient
que li maris Salome descovrit a Mariane chu que Herode li avoit comman-
ded de lee ochire. — Puis avient que Herode revient sor Fan V c et LXXIIII;
si avient qu'ilh gisoit une nuit a wee sa femme Mariane, et elle commen-
chat a plore.ir , et Herode ly demandat qu'ilh li falloit. Adont dest-elle que
elle ploroit, portant que ilh avoit commandeil sens cause a marit Salome
que ilh I'ochesisl, et se li nommat les ensengnes. — Adont fut Herode mult
yreis, et salhit jus de son lit. Et vient a Salome sa soreur, et li commandat
que elle ly desist veriteit, coment sa femme Marianne s'astoil contenue en
temps que ilh avoit esteit hours. Et Salome ly jurat que son maris avoit
jeut 1 awec lee en temps que ilh Tavoil oiiut en sa garde, enssi apertement *
que ch'astoit sa femme. Quant Herode oiit chu, si le creist; adont les fist
ambdois ochire. — Mains quant sa femme fut morte, si en prist-ilh si grant
duelhe, que sovent avenoit que ilh en issoit de son sens et durement en fol-
lioit par li misons 5 , car ilh n 'avoit oncques nulle riens tant ameit. Et durat
longtemps chest dierverie ', mains en la fin Ten garist I juys; mains non-
porquant ilh fcn fut mult empiries et laidis toute sa vie, en vers chu que ilh
soloit eistre devant.
En eel an meismes, le VIII e jour de decembre, engenrat Joachim de-
dens le corps de sa femme sainte Anne la beuoit virge Marie, mere a
Jhesu-Crist, sicom vos oreis. Chis proidhons Joachim issit de la royal
lignie le roy David, qui desquendit de la lignie Judas le fis Jacob; et por-
tant que pluseurs gens ne sevent mie dont ches lignies vinent, et que chu
est a dire., si en voray 1 pau declareir par recapitulation que chu est. — Pro-
mierement est assavoir quant Dieu oit fait le chiel et la terre, le soleal et
la lune, et estoiles, planetes, arbres , herbes, et toutes mines de terre, que
droit a VI e jour ilh fourmat une ymage de terre en jardin de Damas, et
le fist a son semblanche, et apres le sengnat 5 ; et ilh salhit sus en eaige de
XXX ans, et fut enssi parfais en tous poins que dont ilh fuist en l'eaige
1 Participe passe* du verbe jesir, coucher.
* Notre textc porte par erretir : enssi apparoil-
ilh. Je corrige dapres le manuscrit B.
3 Le copiste ecrit en un seul mot Hmisons. Je
crois qu'il faut en fa ire deux et lire : li misons ,
et cela signifierait que, dans sesacces de demence,
Herode allait parmi sa tnaison.
4 Folic Roquefort donne Tadjectif dicrve.
* Le ben it.
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LiVRE PREMIER. 509
deseurdit. Et dist sains Jherome que Adam fut fais de VIII parties des
chouses, assavoir : de lymont de la terre, de la mere , de soleal, des nues,
des vent, de pires, de Saint-Esperit et de la clarteit de monde. — La pre-
mier partie, que nos disons de lymont de la terre, chu est celle dont la
chair fut faite. La seconde partie, qui fut de la mere, fut le sane. La tierche
partie, qui fut de solea, furent les oeux. — La quarte partie, qui fut des
nues, furent les pensees. La V e partie, qui fut le vent, fut ly alaine. La
VI e partie, qui fut pires, furent les osse. La V1I C partie, qui fut de Saint-
Esperit, che est celle assavoir Tame qui est mise en cascon personne, et
qui donne vie en chi siecle. Et li VIII partie, qui fut de la clarteit de
monde senefie tristeure. — Ors doit-ons savoir que s'ilh at en une homme
plus de lymon, ilh serat pirecheux et fastidieux; et s'ilh y at plus de la Foi.wr*.
partie de la mere, ilh sierat saige; et s'ilh y at plus de la partie de solea,
ilh sierat beais; et s'ilh y at plus de la partie de nues, ilh sierat pensis; et
s'ilh y at plus des vent, ilh sierat yreux; et s'ilh y at plus de la partie des
pires, ilh serat (lures, avers et lers; et s'ilh y at plus de Saint-Esperit,
ilh sera bons bachellihers et remplis de divine escripture; et s'ilh y at
plus de la clarteit de monde, ilh serat beais 4 et bien ameis des femmes et De* complexions de
d nommes, et sierat luxurieux, legiers et apiers. — Lt quant noslre sire oit
fourmeit Adam de teile chouse, si dest qu'ilh li falloit avoir nom, car ilh
n'avoit point; adont apellat nostre sire 1 III angles, et leurs dest : « Aleis, Po A X£ D««r»p«iti
)> et se quereis nom a chist homme. » Sains Mychiel allat en orient, se
veil uneestoile qui astoit appellee Anatholim; de celle ilh apportatla pro- Anaihoiin.
mier lettre, e'est A. Gabriel allat en Occident, si apportat la promier lettre
d'onne estole qui fut nominee Disis qu'ilh veit; sen apportat la promiere Disi$ -
lettre, chu fut D. Raphael allat en septentrion; si apportat la promier lettre
de une stoile que ilh veit, qui oit nom Achitus, chu fut A. Et Uriel allat a,i„ius.
en medis; si aportat la promier lettre de une estoile qu'ilh veit, qui oit a
nom Musibrion, e'est M. Puis furent les IIII lettres adjostees ensembles, et Musibrion.
nostre sire commandat a Uriel qu'ilh le nommast, et chis dest Adam. Enssi
fut appelleis li promier hons Adam, dont nos astons tous issus. — Et puis
fist Dieu Evain del coste Adam; se les mettit en paradis terrestre, qui Co £™£ f Dieu a * 1
est I lieu es parties de Orient raemplis de toutes dhoucheurs et de delis,
1 Je supplee cc mot d'apres le manuscrit B.
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510 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
dm mi flus depara- u ilh at line fontaine qui jette uns fluis, de quoy ilh issent quattres grans
fluis de paradis, qui s'espandent en 1111 parties de la terre. Ly promier est
Pfa. ton. nommeis Phison : chis court en mult de lis dedens terre et defours jusques
Gyon- en Judee. Ly secons est nommeis Gyon : chis court en Egypte et Etyoppe.
Tygru. Ly thiers est nommeis Tygris : chis court en la terre de Surie. Et li quars
Eufrates. est nommeis Eufrates : chis court parmy la terre de Babylone Ie maiour.
Adam fatjetteit fours — De chesti plaisaiit lieu fut fours jetteis nostre promier peire Adam, por
le pechiet de inobedienche , et ly fut commandeit depart Dieu qu'ilh alast
Adam visquit ix< et labureir la terre ; et ilh le fist , car ilh visquit IX C et XXX ans. Chis Adam
XXX ans. - • .
et Eve, quant ilhs furent jetteis fours de paradis, ilh ploront continuel-
ment VII jours; et quant ilhs orent ploreit VII jours, ilhs firent 1 taber-
nacle por dedens habiteir. Apres les VII jours, ilhs com mencha rent a avoir
AdametEveorentfain. fain, et queroient a mangier, et ne trovoient riens. Adont dest Eve a
Adam : « Beais sire, j ay gran fain ; vas se quiere a mangier alconne chouse,
» jusques atant que nos veirons se nostre sires Dieu aurat merchi de nos,
» et nous rappellerat en lieu o nos astiemes. »
Adam soy levat, et alia par VII jours par toute cellc terre, et ne trovat
mie teile viande qu'ilh avoit en paradis, et revienl a Eve. Et quant Eve le
veit, se dest : « Sires, je pense que nos morons de famyne. Plaisist a Dieu
» que je moris tout seule! Par aventure toy remetteroit Dieu en paradis,
» car por la defaute de moy est Dieu yreis a toy; mains, se tu vues, se moy
» ochis, car por le cause de my tu es jetteis fours de paradis. » — Adam
Adam reconfori Eve sa » respondit a chu : « Eve, ne dis mie teils parol les, que plus grant male-
» diction ne nos envoie Dieu. Coment poroit eistre que je metteroie mon
» main a toy? Je feroie injure a mon propre chair. Lieve-toi, et si querons
» a mangier ', de quoy nos puissons vivre. ». — Adont s'en vont ambdois.
Si ont quis par les VII jours, et si n'ont riens troveis, enssi qu'ilh avoienl
De* viandes Adam et en paradis; et toutvoies ilhs ont troveit teiles viandes que les biestes man-
gnoient. Adont dest Adam a Eve : « Chu donne nostre sire aux biestes por
» vivre , mains li nostre astoit viande d'angeles. Si nous plaindons digne-
)> ment el justement devant nostre saingnour Dieu qui nos ait fait, et fai-
Foi. 86 to. » sons penitanche * de forfait que nos avons faite; par aventure aurat mer-
1 Et si querons de viandes. B. de Von dcr Hagcn , Gesatnmtabenteuer, pp. lxix
* Sur cette penitence d'Adam , voir Fouvrage et suiv.
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LIVRE PREMIER. 3H
» chis de nos et nos pardonrat, si nos dispoiserat de quoy nos viverons. »
— Adont dest Eve a Adam : « Beais sire, or moy dit queile est chel peni- Eve p* rol,e ■ Adam -
» tanche et comment le porons-nos faire. Se nos entreprendons labeur que
» nos ne puissons faire, et ne soions mie escuteis a Dieu, se nos tourne sa
» faiche; car chu que nos li aviens promis n'avons mie acomplit, mains
» nientmons, ortant que tu as proposeit de faire peni tanche. je le veuloussi
» faire, car je t'ay amyneit a labeur et al tribulation la tu es, et moy awec. » Dei peouanche Eve ei
Et respondit Adam : « Tu ne porois tant de jour peniteir com je feray, mains
» fais tant que tu sois salvee, car je juneray XL jours; et toy lieve, se vas
» a la riviere de Tygris, se prens une pire, si toy assies en l'aighe desus
» jusques au coul el plus profoht, et ne parolle nujle mot de monde, car
» nos n'astons mie digne del faire priier a Dieu, car nos lebres inmonde
» sont faites de bois de vie; et si estas XXXIIII jours en l'aighe, et je seray
» en fluis Jordan XL jours; par aventure aurat Dieu merchi de nous '. »
— Eve sen allat en Tygris, et fist chu que Adam ly avoit commandeit. Et
Adam s'en allat en fluis Jordan, et seit sour une pire en l'aighe jusques a
coul, et dest al aighe : « Je toy dis, aighe de Jordan, que tu moy weulhe
» condoleur',et vosassembleis deleis moy tous les noians qui asteis en fluis.
)> Jordan ilh moy circuient, et si pleurent awec moy! Ilh ne soy plandent
» mie, mains moy plandent, car ilh n'ont mie pechiet. » Tantost vinrent
toutes les biestes entour luy , et enssi estut-ilh de eel heure sens movoir
XVIII jours.
Adont soy transfigural Sathanas en une angele reluisant, et s'en allat a l> ^abie vatparieir
fluis de Tygris a Eve et le trovat plorante; mains ly dyable, sicom dolans.
commenchat oussi a ploreir, et dest a Eve : « Isse fours de eel fluis et toy
» apaise, et dors en avant ne pleure plus. » Et oussitoist quelle Toil par-
leir, elle cessat de sa tristeur et de gemir. Et ly dyable li dest : « Por-
» quoy asteis vos sy songneux, ty et Adam, del ploreir? Dieu at oiit vos
» gemissement, et at accepleit vostre peni tanche; et nos, tous les angeles,
» avons priiet por vos en depriant Dieu, qui mat chi envoiet 5 por vos
» oisleir del aighe, et vos donnasse les alymens et les viandes que vos
» oyut en paradis : or isse fours del aighe, et je toy monray a lieu qui est
1 Tout ce qui precede depuis : et je scray en * Condouloir daos Roquefort.
fluis, etc., manque dans le manuscrit B. * Tramis. B.
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312
CHROINIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
» apparelhies de bonnes vyandes. » Quant Eve I entent se le creit, et se
soy partit del aighe; et quant elle en fut yssue, elle chaiit a terre; et ly
diable le relevat el le conduisit a Adam. — Mains quant Adam le veil, et
a wee lee le dyable, si commenchat a crieir en plorant, et dest.: « Eve,
Evefuidechutencor. » ou est ly ceuvre de ta penilanche? Coment es-tu de rechief rechaiute 1 par
• » nostre adversaire , par cuy nos avons perdut nostre habitation de paradis
» el la joie perpetueil? » Quant Eve oiit chu, si cognut que ch'estoit ly dya-
ble qui l'avoil faite issir del aighe, si chail jus a terre devant sa fache •; et ly
dyable gemissoit et ploroitsadoleur 5 . — El Adam soy escriat etdest: « Elas!
Adamparoiieidyabie. » dyable, porquoy tu combas enssi a nos? Que t'avons forfait? Porquoy
» nos fais-tu si grant persecution 4 ? Que avons a faire de ton malisce? Nos
» ne t'avons mie osteit ta gloire, et se ne toy avons fait sens honneur *, que
» nos porsuis-tu annemis jusques a la mort? » Adont respondit ly dyable
et dest : « Adam, tout me maulvaisteit je meteray en toy, portant que
» por toy je suy osteis de ma gloire et alieneis de clarteit, laqueile je avoy
» eiiimy les angles, et par toy je en suy dejetteis. » Adam respondit :
« Qu'ay-je done fait et queile est mon culpe, et quelement es-tu greveis et
Ly dyabie respont. » navreis por moy ? » — Ly diable respondit : « Tu qui moy dis : Que tay-
» je fait? Por toy suy-je dejetteis de paradis. Quant Dieu soufllat en toy
» Fespir de vie, et que ta faiche el similitude fut fait al ymaige de Dieu,
Michiel l'archangle toy conduisit et toy fist aleir en la presenche de Dieu
aoreir. Quant Dieu dest proprement : Veischi Adam que jay fait al
ymaige de noslre similitude; et Mychiel dest, en huchant tous les an-
geles : Aoreis le ymaige de nostre sires Dieu, enssi com ilh 1'al comman-
ded. Et Mychiel tout promier toy adorat et moy appellat, et se moy dest :
Aore 1'ymaige de Dieu; et je ly respondi : Doy-je dont aoreir Adam?
Enssi com Mychiel moy destrendoit del adoreir, se ly ay dit : Que moy
deslrains-tu? Je ne adoray mie piour de my et le derain de toutes les
creatures. Es-tu ignorans que je sui devanlrains de chesti, et anchois
qu'ilh fuist fais, si qu'ilh s'ensiiet qu'ilh me doit aoreir? Et Mychiel
respondit : Adoir lymaige de Dieu; se tu ne l'adoires, ilh soy coro-
Sains Michiel
Fol. 87 r°.
Argu entre Tangle et
le dyable.
1 Retombec. Le manuscrit B porte dechuite,
decue , trompee.
* C'est-a-dirc : la figure en avant.
5 Et est doblee sa dolour, gemissement et plan-
tcs. B.
4 Si dolente porsuites, B.
8 Cest-a-dire : nous n'avons rien fait contrc
ton honneur.
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L1VRE PREMIER. 313
» cherat a toy nostre sire. Et je li respond is ' : S'ilh se coroche a moy,
» je metteray mon siege desus les estoiles de cliiel , et se sieray semblans a
» Dieu. Porquoy fut Dieu corochies a moy, et commandat que je, awec
» mes angeles, fusse mis et constrains del aleir fours de nostre gloire. Et
» voisla * la cause por lequeile nos summes expulhiies de nostre habitation ;
» et tantoist je chay en labeur et en doleur, car je suy despulhiies de tout
» gloire et cheyut de tous delis, et riceche veioir je ne puy. Et portant je
» vien a la femme, et se toy fis osteir par lee de tous delis et de joie, oussi
» com je astoie osteis de ma gloire. » — Quant Adam oiit chu, se criat en
plorant fortement et dest : « Beais sires Dieu, ma vie est en tes mains;
» fais que chis adversaire soit long de moy, car ilh convoit 8 a avoir mon
» arme et pierdre, et moy donne la gloire qu'il at pierdue. » Et tantoist
ly dyable ne comparut plus, ains s'envanuit. Et Adam , perseverant en bien ,
demorat en I'aighe de fluis Jordan XL jour; et Eve li dest : « Sire, vis \ car
» ilh toy est concedeit del vivre, car ne a promier ne al secon tu n'as esteit
» varians ne dechus; et j'ay esteit prevaricante et dechuite, et si ay mal
» gardeit le commandement de Dieu; et main tenant moy departiray de
» toy, et se yray vers soleal couchant demoreir jusqu'a la mort. » — Et
adont soy mist a chemin vers Occident, et commenchat a ploreir et gemir;
et at fait I tabernacle, car elle astoit enchainte d'onne enfant de trois mois: Ere futenchaintc.
et quant elle approchat le temps d'efanteir, et elle sentit les doleurs et les
angousses, si criat : « Vraie Dieu, ayes merchi de moy, et se me veulhe
» oiir et aidier. Hey las! qui nuncherat chuchi a Adam mon saingnour! Je
» vos prie, lumynaire de chiel, quant vous alleis en orient, que vos chu-
» chy anunchies a Adam. » — Adam entendit la plainte par le volenteit de
Dieu, si dest : « Je moy dobte que ly serpen ne soy combat a Eve. » Si soy
commenchat a alleir, tant qu'ilh vinl a lee; se le trovat en grant travalhe.
Eve li dest quant ilh le veit : « Puisque je toy voy , sires, moy arme est
» refroidie 5 , qui astoit mise en grant doleur de travalhe. Beais sire, prie
1 Notre manuscrit portc : Ly dyable respondit. nuscrit B, preferable a la n6tre : vou-tu.
Mais cetle version , que je remplacc par celle du s Prononccz convoite.
manuscrit B, est evidemment mauvaise, puisqu'il 4 Notre tcxtc porte vief, ce qui neprcsente pas
s'agit d'un rccit fait par le diable meme , qui ne dc sens. Je corrige d'apres le manuscrit B.
peut parler de lui a la troisieme person ne. 5 Refroidie doit avoir le sens de rafraichie,
* Je crois cette version , que j'emprunte au ma- soulag6c.
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314 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
» a Dieu por moy qu'ilh moy veulhe oiir et regardeir, et moy delivreir de
Dieu enroiat ii angles » ma tres-grant doleur. » Adont priat Adam a Dieu por Eve, et vinrent
tantost dois angeles de gran virtus qui stesoient deleis Eve ; et sains Mychiel
stesoit a diestre, qui touchat sa fache jusques al pis, et Ii dest : « Eve, tu
» es bien awireux por Adam , car ses proiers sont grandes, et por ses ori-
» sons suy-je tramis a toy depart Dieu por toy faire aide; lieve-toy et t'apa-
» relhe por delivreir de unc fis. » Elle le fist; si oit 1 fis qui fut nommeis
Eve cnfaniat caym. por son nom Caym, qui tantoist qu'ilh fut neis salhit, corit et soy assiet,
et fist mult de mervelhes. — Adont prent Adam Eve et Caym, et Ies mynat
en Orient. Et Dieu les at tramis par les angeles pluseurs scienches, et leur
demonstront le labeur del ahaneir les terres, si qu'ilh ewissent fruis des-
Eve enfantat Abei. queiles ilhs viveroient eaux et leurs generations. Apres conchuit Eve, et
oit I aultre fis qui fut nommeis Abel; et demorarent Caym et Abel en I
Fo1 - * 7 *•• tabernacle. Ors avint 1 jour que Eve dest a Adam : « Sire, j'ay veyut en dor-
» mant une vision al manere de sane, qui venoit de Abel, nostre fis, et
» astoit es mains Caym. » Adam respondit : « En aventure que Caym ne
)> tue Abel, deseurans les ' et leurs factions ' singuleirs maisons. » Adont
fist de Caym uns ahanier de terre ' et de Abel uns pastureal, aflin qu'ilhs
oiyin ochit Abei son fussent separeis; por chu ne demorat point que Caym ne luast Abel. Quant
Abel fut ochis, avoit Adam cent et XXX ans, et Abel en avoit XXII. — Et
quant Adam veit que Caym avoit ochis son frere Abel , si fut mult yreis ,
et dest : « Tous mals moy vinent par cesti femme; je ne le cognisceray
» jamais carneilement. » Adont soy tient bien Adam de sa femme a co-
gnoistre 11° ans 4 continueis. Apres lesqueils, par le commandement de Dieu,
E»e enfantat Seth et j|h | e cognuit: si en oit 1 fis qui fut nommeis Seth : chis Seth fut douls et
apres Calmana. i ■ • • r* * f n r^
debonnars, dobtans et siervans son peire com fis obediens. Et Caym, qui
oit Calmana sa soreur a femme, en oit tant d'enfans, desqueis ilh issit plu-
seurs lignies qui se misent a maul faire; mains la deluve Noe le coregat
apres.
Caym ochist son frere Abel de 1 ohale ' d'onc cheval, et se l'ochist portant
qu'ilh faisoient sacrifiche ensemble de la deyme des fruis dont ilh usoient
caym ochist Abei. cascon , Caym des bleis et Abel des agneals. Si avient que Caym quist une
1 Separons-lcs. 4 Le manuscrit B porte : cent ans, cc qui est
* Je supplde cc mot d'apres le manuscrit 6. deja bien assez.
* Un labourcur. * Un os. On dit encore en liegeois ohai.
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LIVRE PREMIER. 31 5
fois le plus chaitif jarbe qu'ilh oit, si en fist sacrifiche; et Abel le fist de
1 angneal, le plus beal et melheur qu'ilh avoit. Si fut accepteit de Dieu
en greit le don Abel , et refuseit le Caym; si en oil Caym envie, se tuat son
frere Abel. — Et apres chu s'apparut Dieu a Caym ; se li demandat ou son Dieu paroiie a caym.
frere Abel astoit. II li soy doubtat, se respondit mathement ' qu'ilh ne savoit,
car ilh ne l'avoit mie pris en sa garde. Adont dest Dieu a Caym : « Tu l'as
» ochis, et ly sane de ly crie a moy venganche. » Adont le maldit Dieu luy
et sa generation. — Adam oit III fis et 11 filhes qui oirent a nom sens les aul- Desenf.os A«um.
tres\ Et les fis furent Caym, Abel et Selh; et les filhes furent nommeez
Calmana, qui fut la femme Caym, et Delbora qui fut la femme Selh, car
Abel n oit ne femme ne enfans. De Caym issit grant generation , car ilh oil I
fis qui fut nommeis Enoch, et Enoch engenrat Yras, et Yras 8 Maniabel, et
Maniabel Matusael, et Malusael Lamech, qui fut aveugle, qui tuat Caym a
traire d'onne saiete. — Adam oit des altres enfans , fis et filhes , car apres
Seth ilh engenrat XXX fis et XXXI filhes, si que chu furent LXIUI ' enfans
qu'ilh orent Eve et Adam. Et Caym oit oussi pluseurs enfans et fis et filhes,
dont je ne fay point de mention fours que des cheaux qui astoient anneis ,
dont ons posist declareir sa generation. Item, Abel n'oit nulle enfant, car
ilh morit jovene. — Et Seth engenrat Enos , et Enos Caynam , et Caynam
oit Malaleel', et Malaleel oit Jareth, et Jarelh oit Enoch, et Enoch oit
Matusale, et Matusale oit Lamech, le peire Noe. Selh oit encor des aultres
enfans, dont ilh issirent pluseurs aultres 6 que je ne nomme nient. — Si
avient I jour que Adam dest a Seth : « Ors entens , fis , je toy diray chu
» que jay veyut et oyut, apres chu que je fuy jetteis de paradis. Quant je
» asloie en orison et ta mere Eve venoit a moy, je vey Mychiel l'angele et
» I chart qui corroit plus toist que le vent, et les rues 7 astoient ardantes,
» qui moy prisent et moy enporlat en paradis de justiche, ou je vey Dieu Adam paroiie a s«th.
» qui avoit regars de feu intolerable , et pluseurs milhirs d'angeles a diestre
1 Pour mechamment? ne me charge pas d'expliquer cette addition non
' Cest-a-dire sans compter les autres. Le ma- plus que l'autre.
nuscrit B porte : denommeis sois les altres. * Malabrel. B.
• Ces deux mots, ndcessaires a la filiation , sont * Sethe oit des altres enfans et si enfans ausy. B.
omifl dans les deux tcxtes. 7 Roues. Le copiste donne frequemment a Vu
4 Le manuscrit B donne un total de LXIII , le son d'ot*.
apres avoir mentionne* XXX fis et XXX fillies. Je
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316
CHROMQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Adam paroiie a Dicu.
Dieu respont,
Fol. 88 i*.
» et a senestre. Quanl je vey chu, je trembla tou de paiour; si com-
» menchay adoreir Dieu sor le fache de la terre '. » Et adont me dest Dieu :
« Vois.chi tu morais , car tu as forpasseit mes commandemens, et as oiit
» la vois de ta femme, et si as obeit plus a lee que a moy \ »
« Et quanl je oii teiles parolles, je chaii a terre en orant Dieu, et ly ay
» dit : Douls sires. Dieu pitieux et misericors 8 , que mes nom ne soit osteit
» de ta memoire, et garde m'arme ' quant je moray, et mon esperit iscerat
» de mon corps 5 ; sc ne le jette pais en sus de ta fache 6 , car tu le fesis de
)> lymon de la terre, et l'as nouri de ta grasce; entens a ma parolle. — Adont
» me dest Dieu 7 : La figure 8 de ton cueur ayme la scienche; portant ne
» serat mie osteis ly lions de ta semenche ' de mon serviche, qu'ilh ne moy
» serve jusqu'en la fin de monde. Quant je entendi chu, je moy jetta plus
Adam paroiie a Dieu. » plas a terre, et adora Dieu en disant : Tu es Dieu perpetuel et eterneil,
etsoverains de toutes les creatures: a toy soit ly loyenge et ly honneur
spirituel, tu es deseurs toutes chouses le vray lumire et la vie incom-
prensible, qui n'at commenchement ne fin, plains de vertus, qui vit et
regne par tous les siecles des siecles. — Apres chu Mychiel Tangle vient
» a moy et dest : Viens-en awec moy. Adont moy menat fours de la vision
» de Dieu, et tenoit I virge en sa main; si en ferit sus les aighes qui as-
» toient entour paradis, et tantoist conjalarent. Adont je passay sus les
» aighes, et sains Mychiel passat awec moy et moy remis en lieu ou ilh
Adam paroiie a seth. » m'avoit pris. — Entens Seth, beais fis, le remanant des misteires futures,
» et des sacramens a moy reveleis que par le fust l0 de scienche je les ay
» cognut et entendues, chu que ons doit faire al Createur et que ly Createur
» doit faire a humaine lignie, et comment Dieu s'apparut en flamme de feu
» et parloit de majesteit. » — Enssi dest Adam a Seth en prophelisant tout
le remanant qui astoit advenir jusques al jour de jugement. Et quant Adam
oit visqueit IX C et XXX ans, si morut Adam , nostre promier peire en le was
Ebron ".
De sains Mychiel.
1 La face contre terre.
' Et si as obeit a U et mes parolles as fasseiL B.
* Did* tous puissans, sains, pieu et misericors. B.
4 Mon ame.
' De ma boche. B.
* Loin de ta face.
7 Mot supplee d'apres le manuscrit B.
8 La nature, le caractere?
9 C'est-a-dire les generations qui proviendront
de toi.
10 Le bois, Tarbrel
11 Vaus de Ebron, dans le manuscrit B. Vat,
vallon.
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L1VRE PREMIER. 317
Adam, quanl ilh soil le jour de sa fin, si appellat tous ses enfans, et
parlat a eaux et leurs donnat sa benichon. Et Seth , son fis, li dest : « Beais
» peire , voleis que je voise en paradis terrestre querir de fruis que vos
» soliies useir? » Adam li respondit : « Nenil, fis: je le desire, mains jay
» grant doleur en mon corps, car je suy fortement malaide. » Et li de-
mandat queile doleur. « Beais fis, quant Dieu me fist et ta mere, ilh nos
)> mist en paradis, et nos donnat por vivre tous les fruis des pommiers qui
)> astoient la-dedens, et nos commandat que nos n'athocassiens les fruis de
» I'arbre bons et mals, qui est em my paradis '; et nos deyisat paradis a Adam paroiie a s*th.
» moy le partie vers orient, et a ta mere le parlie vers Occident, et nos
» donnat dois angeles por nos a gardeir. Ilh vient ly heure que les angeles
» montarent en chiel devant Dieu oreir; tantost vient ly dyable, nostre
>i adversaire, en l'absenche des angeles, et fist tant a ta mere qu'elle man-
» gnat de fruit de I'arbre que Dieu nos avoit defendut, et moy en donnat,
» et je en mangnay. — Adont fut Dieu mult yreis contre nos, et vient a
» moy et me dest : Portant que tu as refuseit mon commandement et ma
» parolle que je toy avoy dit et commandeit , et mal gardett , portant je toy De» maiadye* Adam.
» donray LXX plaies de diverses doleurs en ton corps, al commenchement
» de ton chief et des oeux et des orelhes , jusques aux ongles des pies.
» Ghu dest-ilh a nos dois, moy et ta mere, a nous enfans et a tout humaine
» lignie; si que je ay et seng les doleurs. — Or toy diray, beais fis Seth,
» tu yras en paradis, et dirais a Cherubim, qui garde le bois de vie atout
» une espee de feu , et ly diras qu'ilh moy envoiet ' del oyle de miseri-
» corde qui Dieu moy promist, quant ilh moy oistat de paradis. » Seth
soy mist tantost a la voie, et sen alat vers paradis toute la voie que son
peire ly avoit monstreit parmy une verde voie. ou astoient encor les pas
de Eye et Adam tous seches , por le pechiet d'eaux al venir fours de pa-
radis, que oncques herbes n'y poil depuis croistre par ou ilh passarent. Et
Eve ploroit deleis Adam , qui disoit : « Beais sires Dieu , tu welhes mettre
» les doleurs de monsangnour Adam a moy, car j'ay pechiet, et vient tout
» le maul de moy. »
1 Le manuserit B porte settlement : tous les rubm qui garde let bois de vie atout une espee de
fruis des arbres de scienches bons et mals qui sont feu. Seth respondit .» « Beais peires , je iray volen-
etnmi paradis. tiers; mais dites moy que je le doy dire. * Et U peire
* Le texte du manuserit B differe un peu : Che- li dist : «• Tu lui diras qu'il moy tramete, etc. »
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318 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Adam paroiie a Eve. Adam li dest adoncques : « Lieve-toy, et vas awec ton fis Seth jusques
>» aux portes de paradis; » et elle en allat apres, et le seuwit tantoist, car
elle savoit mye f la voie que ilh ne fesist Seth. Enssi qu'ilh en aloient, si
vient ly serpens dyabolique et mordit Seth; et quant Eve le veit, si com-
menchat a ploreir et dest : « Elas! miserables sont tous cheaux qui ne gar-
Foi. 88 v. » dent les commandemens de Dieu ! » — Et dest Eve a serpent a grant vois :
« Hahay ! serpent, bieste maldite, porquoy n'as tu doubteit de mettre tes
LabiesteparoiieiEve. n dens en 1'ymaige de Dieu? » Respont la bieste a grant vois : <c Eve!
» n'est mie contre nos ton malisce et le fereur f de nos ! Dis, Eve, comment
» fut apparelhie ta bouche a mangier del fruit qui toy astoit defendut de
seibparoiieaiabieste. » part Dieu? » — Adont dest Seth a la bieste : « Blameir toy puist Dieu!
» Clouse ta bouche 8 maldite, serpens annemy de veriteit, et si toy pars
» del ymaige de Dieu, jusques a tant que commandeit te sierat de part
» nostre sires Dieu. » Et li serpent respont : « Je repereray arier, enssi
seihawat ▼«« para- » com lu dis a facie y ma gin is Dei. » — Adont s'en alat Seth vers paradis;
si fut tous steilis * de la grant clarteit que paradis jettoit, qu'ilh creioit estre
ardeure de feu; mains ilh alat avant, tant qu'ilh vient a Cherubim, se li
dest : a Mon peire est vies et malaide ; sy m'envoiet a toy en priant que tu
L.ogdep.roi ie» seth. » ly envoie de l'oyle de misericorde a ly promis de part Dieu. » Ly angele
respont : « Seth, entre ens la voie de paradis. » Seth tantoist y entrat,
et alat en parties de paradis et si voult prendre de l'oyle de misericorde;
et si furent jusques aux portes de paradis, nient plus avant. Si prisent del
pulvre de la terre, et le mettirent sour leur ties tes, Seth et Eve; et soy
cucharent a terre et commenchont a plaindre et a gemir grandement, en
priant a Dieu que ilh ait merchi de Adam et li veulhe aidier en ses doleurs,
et qui weulhe envoier son angele qui leurs donne del oyle de misericorde
Mychieir augie paroiie en orant Dieu. — Adont sains Mychiel I'archangle vient tous appareilhiet
et dest : « Je suy envoiiet a vos de part Dieu bien constitueis * sor le corps
» Adam ; et sy toy dis Seth , hons de Dieu , et ty Eve ne velhies plus ploreir,
)> oreir ne deproier por l'oyle de misericorde ; je toy dis que maintenant
1 Pour tnies, mieux. * £ tonne, roide de surprise comme s'il eta it
1 Cela veut dire, je erois : ne laisse pas sortir gele.Le mot ainsi in terpr^ serai t forme de stilfat
contre nous et notre fiert^ ta malice. Est n'appar- glace, que donne Ducange.
tient pas an verbe itre, raais au verbe issir. * Avec des pouvoirs suffisants.
8 Guele.h.
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LIVRE PREMIER. 319
» tu ne pues avoir jusques al temps no veal, qu'ilh sierat acomplis de la
» creation Adam V m 11°, I seul mons, de annees f , car adont vftnrat sour
» terre ly tres-hauls Cs de Dieu, vray et vief, qui resusciterat Adam, et
» awec luy mult de corps mors. Adont li douls Jhesus, li fis de Dieu vief ,
» sierat baptiziet en fluis Jordan, si qu'ilh adont ilh Fonderal del oyle de sa
» misericorde qu'ilh promist a Adam et a touz cheauz qui croiront en luy.
» El chu serat 1'oyle de misericorde de generation en generation , qui ferat
» renaistre cheaux qui seront baptiziet en aighe, en nom del Sainte-Trini-
» teit, el vie eternel. » — Et puis saint Mychiel desta Cherubim : « Vas al sa.n*M yc hieip,roiica
» husserie de paradis, et lais dedens buteir le chief de Seth, tant seule-
» ment por veoir chu qu'ilh at chaens \ » Et chu fut fait; si buttat Seth
son chief dedens paradis terrestre, ou ilh veit si grant bealleit que langue
humane ne le poroit dire, qu'ilh y avoit en di verses generations de fruis,
de fleurs et de douls chans de toutes vois. Et veit la fontaine qui nasquoit
emmy paradis, dont les III I fluis deseurdit nasquent; et astoit deseur la
fontaine une arbre qui astoit mult ramus, mains ilh astoit defuelhies et de Lei'arbrede paradis.
la scorche denueis. Si demandat Seth porquoy chist arbre astoit enssi des-
pulhies? Ilh ly fut respondut : « Por le pechiet de ton pere et de ta mere. »
— Quant ilh entendit chu, si est retourneis al angele, et se li dest dili-
gemment lout chu que ilh avoit veyut; et li angele li commandat que ilh
retournast a la porte, el diligemment regardast chu qu'ilh vieroit. Et quant
ilh y fut retourneis, si veit que li serpen asloil tortelhies entour I'arbre
qui enssi astoit denueis. Quant ilh oit chu veyut, si revient sicom fatueux * ;
mains ly angele li commandat lirchement que ilh retournast a la porte.
Porquen ilh retournat; se veil I'arbre deseurdit jusques a chiel esleveis, et
al sommiteit del arbre avoit sicom une enfant jovenes, qui astoit neis et
enwolpeis de drappeals \
Quant ilh oit veyut chu sicom enbahis, enssi comme ilh regardoit vers DeSeth «> qu'ilh veit
terre, si veit les rachines de chist arbre meisme entreir dedens la terre , et
jusques aux infers partir '; et ilh regardat en la parture *, si veit 1'arme de
1 Cest-a-dire, Fan cinq mille deux cents moras * Drapaille dans Roquefort. Draps qui serve nt
un. a emmaillotter les enfants.
' Pour veoir chu quen et queilee chouses ilh soni * Diviser.
ehiens et H apparont. B. • Partuis dans Roquefort. L'ouverture qu'a-
8 Fou , de fatuut. vaient faite en terre les racines de Tarbre.
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320
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Fol. 89 f.
L'angle donnat a Seth
III grains.
Cedrc, cypresse, pyns,
olyviers.
Seth rerient a Adam.
son freire Abel. Et enssi est retourneis la tirche fois al angele, et chu qu'ilh
at veyut ly af demonstreit; se li desl ly angle : a Chis en fan que tu as veyut,
)> chest li fis de Dieu. Et Abel pleure les pechies de son pere et sa mere. »
— Adont prist Tangle trois grains de pomier, de quoy Adam mangnat la
pomme, et li' donnat en disant a ly : « Dedens trois jours apres chu que
» tu seras revenus a ton pere, ilh expirrat ; adont tu li metteras ches trois
» grains en sa bouehe.de quoy ilh nastront trois verges, de quoy ly une
» serat cedre, ly aultre cypresse et li tirche pins, qui est aultrement nom-
» meis oliviers. Or vas a ton pere, et fais chu que je t'ay dit, et tu vierras
» mervelhe. » Et puis saint Mychiel est deparlis de Seth, et Seth est re-
tourneis awec sa mere; et si raportarent des espies ' bien odorant, assavoir
nardum *, saffran et canelle. — Quant ilhs furent revenus a Adam, qui as to it
mult malaide, Seth ly enfant li racomptat tout chu qu'ilh avoit veyut et
oyut depuis qu'ilh en allat. Dont Adam fut mult joieux, et rist ortant qu'ilh
avoit oncques fait en toute sa vie , et commenchat a crieir en disant : « Vray
» Dieu, ilh moy soufliiel ma vie 5 ; oste mon arme de mon corps. » Atant
expirat-ilh, et tantosl ly soleal et la lune devinrent tout tenebreux, et les
estoiles perdirent leur lumiere par VII jours. — Atant vient sains Mychiel,
et desl a Seth : a Lieve-toy et viens awec moy por regardeir ton pere, et
)) chu que Dieu disposerat de ly et de sa faiture *. » Adont regardat Seth,
se veil la main de Dieu sus son chief, et le livrat a sains Mychiel en disant ' :
« Je le mes en ta garde jusques a jour de ma disposition; quant je mette-
» ray * les pleurs en joie, adont sierat-ilh en siege de cheli qui le sup-
)> plantat. » Et dest apres : « Aporteis till sydoines 7 , et se vesteis Adam
» et Abel, son fis, de dois, et le thier poseis sour eaux, et puis les enseve-
» lisseis en la vauls de Ebron tous les engeles et archangeles, thrones,
» potesteis et dominations. » — Adont Seth li mist les trois grains desous
la langue, desqueiles nasquirent en brief temps trois vergelet de la Ion-
Eve merit vi joun geche d'onne olne. Et VI jours apres que Adam fut mors, morut Eve, qui
a la mort dest a ses enfans que sains Mychiel ly avoit dit que Dieu feroit
Adam morit.
Adam fut enserelis.
Des III grains.
apres Adam.
1 Dcsepices.
9 Le nard, plante aromatique.
8 Souffiet pour suffit, ce qui equivaut a dire :
j'ai assez vecu.
4 De son ceuvre.
* Cela veut dire : il vit la main de Dieu sur le
chef d'Adam, et Dieu livra alors Adam a saint
Michel, en disant.
• Cest-a-dire, je changcrai.
7 Suaires, du latin sindon.
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LIVRE PREMIER. 321
II jugement ', dont ly uns sieroit par aighe et ly aultre par feu; mains nuls Desiijugement.
ne savoit liqueis sieroit devant.
Et porlant Eve conselhoit a ses enfans que ilhs fesissent des taubles et Eve » P rent set enf.ns.
escriassent leurs vies ly uns apres Fautre, et les vies de leurs peires et
mere, et chu qu'ilh avoient dit a la mort; et fesissent II columpnes, Fune de
marbre et Fautre de tueles *, se metissent dedens leurs escripts, si seroient
gardeis, de feu et de Faighe. Quant el oit chu dit, elle jondit ses mains vers
le chiel et rendit son espir en orant Dieu; et ses enfans commencharent a Evemont.
ploreir. — Adont vient sains Mychiel et huchat Seth, et ly dest : « Hons
» de Dieu, Dieu ne veult que vos ploreis que VI jours les mors; car ly VII C St i n s e * ychiel paroUe
» jour est la resurrexion de siecle future, et cheli jour soy repoisat Dieu
» a ses oevres. » Quant Seth oit visqueit IX C et XII ans, ilh fist les taubles
et escript dedens tout chu que dit est , et de jour en jour chu qu'ilh avenoit ,
qui apres la delueve Noe furent trovees, et furent veues et luttes de plu-
seurs gens; mains ilh ne furent mie lehutes 3 de cascon. Ly saige Salmon
veit les lettres; se priat a Dieu qu'ilh li demonstraste que ch'estoit, et qu'ilh
signifioient. — Atant vient uns angle qui dest : « Je suy chis qui tiene le Lyingie P » P oiieaSau
» main de Seth quant ilh escrioit ches lettres, et tu sieras tant sciencheux
» que tu leiras et cognisceras tout chu qui est dedens escript. » Et Salo-
mon appellat ches lettres Achabaidas, c'este a dire doctrine sens libre de
Fescripture Seth de son doit 4 . — En chi libre fut troveis le prophetie, qui
prophetisat Enoch, ly VII e apres Adam de la generation Seth devant la
delueve Noe de la venue Jhesu-Crist, en disant enssi : Ecce veniet dominus
in Sanctis milibus suis facere judicium et arguere omnes impios de malis
operibus suis; c'este a dire en franchois : « Veischi Dieu venral atout ses
» sains miles * faire le jugement et argueir tous les malvais 6 de leurs mauls
m oevres. » — Ors je revenray de parleir de Adam.
En la bouche de Adam esturent lesdictes verges jusques al temps Moyses, *oi.«9 v.
que oncques ne cressirent, ne oncques leurs verdeurs ne perdirent. Et D ^ b |"££* e5 del bo "
quant Moyses le prophete ramynat le peuple d'Ysrael de Egypte del servi-
tude Pharaon parmy le Roge mere, si noiont tous les Egypliiens 7 , et Moyses
1 Devant le grant jugement, ajoutc le manu- 4 De sa main, de la main de Seth.
scrit D. 5 Avec ses mUliert de saints.
9 Des briques. * Les impieu, B.
s Lehutes et luttes pour lues. 7 Le texte du manuserit B est un peu different :
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322 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
en la terre de promission s'en vient en Ebron , ou Adam fat ensevelis , et
veit les trois verges qui de la bouche Adam nasquoient; ilh vat abrechier *
MoiM*prophetiMtdes les III verges, et el esperit de prophetie ilh dest : « Ches trois verges
)> demonstrent la sainte Triniteit; » et quant ilh les extrahit hours de la
bouche Adam , si grant bon odeur de aromatique issit de luy, qu'ilh rem-
plist toutes les gens qui la astoient, si qu'ilh en astoient tous yvres, et
qu'ilhs ne savoient ou ilhs astoient. — De quoy Moyses fut mult Hies; si les
prist et les affulat de 1 drappe bien nette enssi com chu fussent reliques,
et les tient deleis ly tout le temps qu'ilh fut en desiers, assavoir XL * ans.
Gr«n myrade dw hi Et quant alcuns de son peuple astoit poins ou mors des serpens ou des ver-
miens, ilhs venoient basier les verges et astoient tantoist saneis. — Ilh
avienet enssi que al aighe contradictoire 8 , quant les alcuns de peuple Ysrael
murmurarent encontre leur saingnour, porquoy Moyses fut promous a yre
et leur dest : « Entendeis a moy qui asteis rebelles el incredulles : mes
» verges, dont vos murmureis si fort, feront issir del aighe de chist pire
» dure dont vos aveis si grant mesaise 4 . » Atant ferit II fois la verge sus
la pire; si vient tantoist une belle fontaine qui jettat aighe a gran fluis, si
que ly pueple et les biestes en bevirent asseis. — Et quant chi myracle fut
Dicu 8'app.mt a Moy- fais , nostre sire Dieu s'apparut a Moyses en disant : « Portant que tu n'as
» mie sanctifiiet mon nom devant les fis Ysrael, tu ne introduiras mie ton
» peuple en la terre de promission. » Adont respondit Moyses : « Qui les
» introduirat dont, sires? » Dieu ly dest : « Nuls de eaux ny entrerat en
» la terre de promission, fours que Galeph et Josue. » — Quant Moyses
1'enlendit, si veit bien que li tcrme de sa vie approchoit; se vient al rachine
del mont de Oreb, et si plantat la ses verges, et par-deleis le cave * fist faire
Dei mon Moyses, et son sepulture, en laqueile ilh entrat, et tan tost expirat. Ches verges estu-
wrges. ^^ ^.^^ ' x \\ uc m ilhe ans, assavoir jusques al temps David le prophete,
Et quant Moyses liprophetesramenatle peuple d'Y$- tristesse. Je crois qu'il a ici celui qu'a conserve
rael de Egipte de servitute Pharaon parmi la Roge en wallon le mot tnezdhc, besoio. Les Israelites
mer r laisat Pharaon atout ses oust qui les volt suire n'etaicnt pas en peine du rocher, ma is ils avaient
parmi le vote de la Roge mer, si noiont tous. besoin d'eau.
1 Aherdeir. B. * Je ne sais cc que le chroniqucur en tend par
* XLIIII. B. la cave ou la grotte creusee au pied du mont
8 Haec est aqua contradicttonis , ubi jurgati sunt Horeb. La Bible (Deuteronome , XXXIV, 5 et 6)
filii Israel contra Dominum. Nombres, XX, 45. dit que Moise mourut et fut enseveli dans la terre
4 Roquefort donne a ce mot le sens de peine, de Moab.
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LIVRE PREMIER. 323
qui regnat en Judee milhe ans apres la mort Moyses le gran prophele.
Amonesteit fut ly roy David par le Sains-Esperit, qu'ilh sen alaist en
Arabe jusques al mont de Oreb, et si coulpaist les verges que Moyses avoit
la planteit, et les apportaist en Jherusalem, par lesqueiles Dieu porvieroit
le salvement de humaine lignie en la sainte crois. Tantoist y alat David
et vient a lieu. Si at troveit les verges a IX e jour, les soiat; atant en est comment David soiat
issus teile odeur que David et ses gens en furent teilement raemplis qu'ilh
en orent mult grant ammyration ! . Adont sonnarent instrumens de musi-
ques, et David commenchat a salhir el a trippeir, et le nom de Dieu appel-
leir. Et quant ilh revinrent en Jherusalem, ilh accorirent mult de gens
malaides de diverses infirmiteis , qui par le vertu de bois de la crois sa-
noient. — Adont s'apensat David en queile lieu ilh poroit planteir ses verges
a honeur; si les plantat en la cysterne encontre se thour par nuit, a (fin
qu'ilh se posist aviseir lendemain le lieu ou ilh les planteroit. Et lende-
main les at raies; si at troveit les rachines en la cysterne, oussi bien qu'ilh
awissent la esteit plantee I an. — Quant David veit chu, si les laissat, car
ilh veioit bien que ilh plaisoit a Dieu le lieu. Quant David fut mors qui a
son temps avoit commenchiet le temple, mains Dieu li defendit portant
qu'ilh astoit hommecide par Urie qu'ilh avoit faire ochire por avoir sa
femme. — Si regnat Salmon apres luy en Judee , et parfist le temple. Si Des &ain 8 arbres cre«-
. , . . sus des III verges.
avient que les ovriers couparent Farbre qui astoit cressut de l'une des
verges, portant que ilh tenoit bien XXX cubites de long. Et ilh leur falloit
a leur ovraige unc plus long que ilhs ne powissent troveir par tos les bois
de la entour. Et chis sains arbre astoit plus long une cubite qu'ilh ne falloit
a leur ovraige; mains ilh fut troveis al mettre en l'ovre trop court I cubite.
Si fut osteis, et fut talhies unc des aultres 11 si long, qu'ilh astoit plus long Foi. 90 r*.
1 cubite que les mairiens qui astoient en I'oevre; mains quant ilh fut appor-
teis, si fut trop cours. Et ly thirs fut coupeis, et enssi en avient com des
altres, si les ont mis en temple de Jherusalem. — Ilh astoit certains termes
constitueis en Jherusalem de venir la adoreir ; si vient ly unc de ches termes
qu'ilh y vienet gran peuple. Si avoit une femme qui astoit nominee Maxi-
milla,«qui tant seit sour 1 'arbre que ses vestimens commenchont a ardre. Myr.de de Muimiiia.
Quant elle veit chu se commenchat a crier par vois de prophete : « Mon
1 Que ilh creoient qu'ilh soient diet fait. B.
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CHR0N1QUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
» Dieu, mon Dieu Jhesus. » — Et quant les Juys entendirenl que elle huchoil
De ie r n°^ e jh™sui yrpor J' lesus i *'h ' e prisent et 1'enhercharenl l fours del citeit et le lapidarent; et
elm fut le promier martyr qui por le nom de Jhesus morut. Adont train-
rent Tarbre fours de la citeit et le jeltarent en une piscyne, ou ons lavoit
les mortes biestes que ons offroit au temple; mains Dieu fist le nobleche
de chi bois perdre * unc jour entre lirche et medis por les angeles osteir de
Merveihc de sains »r la pischine, en movant l'aighe par teile manere que quiconques se bangnoit
dedens ilh astoit garis apres le movement, de queilconque maladie que
ilh fust entachie. Et les gens de peuple, quant ilh veirent le myracle, se
prisent le bois ou les angeles l'avoient mis, et le misent tout parmy l'aighe
De la royne Saba. al manere de unc pont. — Et la jut-ilh tant que la royne Saba de Austrie
vient en Jherusalem oiir la sapienche Salmon, et entrat en la citeit par la
parlie ou li pont astoit. Et quant elle veit le pont, elle s'enclinat et Fadorat,
et rewastal' ses vestimens, et le passat a nuis pies, et a vois de prophete
escriat en disanl : Judicii signum tellus sudore madescet, etc. Et quant elle
oit veyut et oyut la sapienche et le nobleche Salmon, si sen rallat la royne
en son paiis. Enssi demorat chis arbre jusques al temps del passion Jhesu-
Dei generation Scth e t Crist. — Or vos avons compteit de Adam et de sa mort. Si est raison que
nos retournons a nostre mateire de Seth et de ses enfans deseurs nom-
meis. Et toutvoie de la generation Gaym fut li dierain nommeis Lamech , li
avoigle; et del generation Seth fut li derain nommeis Lamech, qui fut ly
pere Noe. — Mains Lamech li avoigle * fut longtemps devant; ilh alloil par
les forestes et se soy faisoit myneir par I garchon; car ilh ne veioit gotte,
et savoit si bien traire que escappeir ne ly povoit nulle savesine 8 . Si avient
que sor Tan del origination de monde M et IX ans astoit aleis chis Lamech
en I forest. Se le mynoit 1 garchon qui fut nommeis Balach, et Gaym habi-
de ses enfans.
1 Le hercharent. B. Cette forme me paralt meil-
leure que celle de notre manuscrit. Le verbc her-
chi, pousser, est rcste" en liegeois.
1 Je ne vois d'autre moyen d'expliquer ce pas-
sage que par une faute du copiste, qui aurait sub-
stitue le mot perdre a celui de paradis. En effet,
le bois, Tarbre dont parle le chroniqueur prove-
nait, on Ta vu plus haut, dun des trots grains de
pommier de quoy Adam mangnat la pomme , et
remis a Seth par l'archange saint Michel. Cela
admis, le passage signifierait : Dieu fit un jour,
entre tierce et midi, oter de la piscine par ses anges
ce noble bois de paradis.
8 En liegeois, ce verbe signifie 6ter. 11 ne peut
elre ici question que des vdtements servant a la
cbaussure.
4 Je supplee ces deux mots d'apres le manu-
scrit B.
6 Gibier a plumes. Sauvagine dans Roquefort.
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L1VRE PREMIER. 325
toit en ceste fores te; si aparchut Lamech, si s'enfuit en 1 buson, sicom
chis qui astoit honleux de la presenche des gens por le malediction Dieu.
Lamech entendit alconne chouse en busson remueir. Si demandat a Ba-
lacli queile part celle savesine astoit que ilh oioit, et chis li assengnal droit
le busson ou Caym se hontrissoit '; et Lamech prent se sagette et trait en
celle busson et le consuit; mains Caym meismes fut ochis, devanl le Deimortciym.
delueve Noe M ans. Et doit-ons savoir que Caym visquit M ans et plus
apres chu que Dieu Toit maldit, et fut al derain ochis par une homme qui
astoit issus de son linaige meismes. Et quant Lamech trahit Caym parmy le
ventre, ilh commenchat a braire por le grant doleur qu'ilh sentit. — Quant
Lamech l'oit, si fut mult enbahis , porlant qu'ilh oiit le cry d'unne homme.
Se vient a Caym et ly demandat cuy ilh astoit; et chis li respondit : « Je
» suy Caym , li chalis et confus par le malediction de mon Createur, por-
» tant que je tua mon frere Abel. » Quant Lamech l'entendit , si en fut mult
dolans, car ilh astoit issus de sa lignie : enssi morul Cayrn. — Item, chis
Lamech fut li promiers bigamus, car ilh oit 11 femmes : la promier oit a Lamech, i y urumim
nom Olda f , de cuy ilh oit 1 lis qui fut nommeis Jubalcaym ; chu fut chis qui sefiHe! remmet e
promirs trovat les concordanches de musique et de tous instrumens et de l«z promirs concor-
chantde bouche. La seconde femme Lamech oit nom Sella; de eel oit La-
mech 1 fil que ons nommat Tubalcaym : chis trovat promirs la subtiliteit Lepromin instrumens
de ovraige de fier et de tous metailes, et fist par nygromanche les promirs foksoV."
uslilhes, de tenalhes, mar teals, englomes et tous aullres instrumens. — Si
avint une fois qu'ilh ovroit et frappoit de son marteal sour une englome
Tune fois plus fort que l'autre, si que li martel sonnoil diverses sons; el la
astoit presens Jubal, son frere, qui les sons des marteals entendoit, et la comem r»ri de musi-
prist-ilh la subtiliteit solonc les sons des marteals, ilh trovat l'art de que "
musique. — Ors voray parleir de Seth qui oit 1 fis qui fut nommeis Enos, De Enos, ie fis seib.
sicom jay dit desus. Chis Enos a son temps comniandat a reclameir Dieu
en tous fais, et faire orisons a ly; et fut ly promier qui fourmat ymagene Enos Est u premier
en la ramembranche de Dieu. Chis Enos oit I fis qui oit nom Caynam, qui ym * gc
fut li pere Malaleel , lyqueis Malaleel engenrat Jareth , et Jareth engenrat
Enoch, qui visquat 1II C et LXV ans, et puis fut ravis et translateis en paradis Enoch fut ram en P a-
terrestre, dont Adam fut dejeleis par-devant : e'est chis qui en la fin de
1 Ce mot doit signifier : se cachait tout honteux. * Jde. B.
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326 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
monde sourtenrat awec Helie la loy de Dieu, a Fencontre d'Antecrist '.
Anchois que Enoch fust ravis , ilh avoit des enfans entre lesqueis ilh
avoit 1 qui oit nom Matusale, qui fut ly pere Lantech. Chis Lamech que je
LaiutiviteitNoe. dis engenrat Noe, sour l'an de origination de monde milh VI C et XL. Chis
Noe fut 1 justes hons et poissans, et fut amis a Dieu; et bien li monslrat
Dieu qu'ilh l'amat, car a son temps, assavoir l'an del origination de monde
Le deiueve Noe, ran Hm j[c e t XLIl ans , qui astoit ly an de la nativiteit Noe Vl c et II ans, fut
del origination de ? T «f 7
monde ii- a* et tous li monde destruis et peris par le deiueve des grandes aighes qui,
dedens XL jours, ne cessarent de croistre, si que toutes les plus haultes
montangnes de monde en furent couvert. Et misent enssi XL jours al re-
traire et plus. En che perilh salvat Dieu Noe, por la bonteit de luy, sa
femme et ses enfans, qui tous furent neis cent ans devant la deiueve. —
La mmd?finat*X de- ^em , a celle deiueve finat ly promier eage de monde, et commenchat li
,ucve secons. Et deveis savoir que, apres la deiueve, ne demoral al monde nuls
gens fours que Noe et sa femme et leurs trois enfans awec leurs trois
Des in generations ie$ femmes ; desqueils trois fils ilhs issirent trois grandes generations, car
ses trois fils multipliont mult fort. — Apres la mort de Noe f fut la terre
partie en trois, enssi com j'ay autrefois deviseit. Si oit cascon de ses fis
une parchon, qui furent nomeis : Sem, Cham et Japhet. Et promirs Sem
oit I fis qui oit nom Arfaxat, et pluseurs altres apres; et Japhet 1 qui fut
nommeis Jabam, et pluseurs altres apres; et Cham oit I fis qui fut nom-
DeNemproti.. meis Clius , qui fut ly pere Nemproth *, l'ajoiant *, qui fut ly promier roy
de monde , qui commenchat a fondeir la thour de Babylone *. Awec les
femmes de la generation Cham se venoient mult sovent cuchier les anemis
Dont ies diverges gens d 'in fie i' ; si engenroienl diverses figures et monstres : les alcuns sens tiestes,
nasquiren . ^ altres a grant orel lies, les aultres a I oreille et a 1 piet, les altres a piet
de pore ou de cheval, les aultres ajoians et de teiles figures qui sont par
les ysles de Aisie, qui tous desquendirent de Cham; car sa lignie fut enssi
Noe fut ii promier qui en pechie par Cham , qui fut maldis de son pere Noe; car ilh se moquat de
u ye™ e nn. ^^ pere, quant Noe son pere oit planteit la vingne, et fut ly promier qui
fut yevre de vin. — Si avient 1 jour que Noe avoit buit de vin , si astoit
ons ne cachoit nuis endormis en I jardin, et ons ne cachoit * adont nuls braies; si avient I jour
braies.
1 Et ses aidant, ajoute le manuscrit B: * Lc geant.
* Deux mots supplecs d'apres le manuscrit B. 5 Babel. B.
5 Memphroth . par crreur dans notre texte. • Chaussait.
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LiVRE PREMIER. 327
que les paneas ' ou les baiier* de la robe Noe astoient oviertes, si con
veioit son membre natureile. Et ses trois ills passoient la. Si regardat Cham
son pere enssi gisant; si dest en riant el en moquant, et li monstrat aux
dois aultres en disant : « Veieis comment Noe giest eny vreis. » El Japhet
tournat son visage d'allre part, et Sem estopat ses ceux et le recovrit.
Apres vos dis que Arfaxat, qui fut ly fis Sem, oit 1 fis qui oit nom Sale, safe.
lyqueis fut ly pere Heber, qui fondat pluseurs citeis, et apellat son pays Hcber.
apres son nom Hebries 5 . Item, chis Heber engenral Phalech, a cuy temps Hebreu.- phaicch.
ly roy Nemproth commenchat a faire la thour de la grant Babylone, en Babyione.
Orient. Et n'astoit a eel temps que I seul lengaige, chu estoit hebrie; mains 1 wui lengaige.
Dieu muwat leur lengaige ou les langues des ovrieres en diverses len- Foi. 91 f.
gaiges, sicom nos avons dit aultresfois desus, ou nos avons parleit de ladit
fondation plainnement. — Item, Phalech oit I fis, qui oit noni Rogam *, Pnaiech.-Rogani.
liqueis engenrat Sarug, et Sarug engenrat Nacor, et Nacor engenrat Thare, sarag.-iwr.-Thare.-
qui futli pere Abraham le patriarche, lyqueis fut neis Tan del origination Abraham, ran del ori-
de monde 111™ cent 1III" et II1I, qui fut ly an del delueve Noe IX* et rn-^nu« nd et
XLU, et fut li thirs eage de monde. — Abraham fut neis en une ville que Lyiee0Bde eagc final
ons nommoit Hur, en la terre de Galdee. A cheli Abraham s'apparut Dieu,
et ly promist que de ly isteroit grant lignie, et que Dieu ameroit mult
sour Unites les aultres. Et chu fut sor Fan de la naliviteit Abraham LXXV
ans, et chis an fut appelleis dedont en avant Tan de remission. — Chis l»« de remission.
Abraham avoit une femme, qui fut nomee Sara. Item, Abraham oit sour Abraham, Sara.
Tan de sa nativiteit 1111" et VII, d'unne sien ancelle qui oit nom Agar, 1 fis Agar.
qui fut nommeis Ysmael, dont les Sarasicns sont yssus, enssi com dit est Ysmaei.
par-deseurs. Item, I'an del nativiteit Abraham cent I moins, futcomman- La circonci«on.
deita Abraham et a cheaux qui isteroient de luy la circoncision; chest le
baptemme des Juys. Item, Ian Abraham cent, furent ars les citeis des
Sodomiltes, dont Loth escappat, qui astoit li fis Aram, le frere Abraham. Loth.- Aram.
En eel an meisme engenrat Abraham I fis qui fut nommeis Ysaac. — Item, ?»"•
Fan Abraham C et XXVI , commandat Dieu a Abraham que ilh ly fesist le
1 Roquefort donne panel signifiant, dit-il, par- valoir a paneas.
cellc, gucnille. En wallon pania signiOc proprc- 8 Hcbietis, portc notrctcxte. Jc corrigc d'apres
ment pan de chemise. lc manuscrit B.
* Baie, ouverture? Ou bien ce sera it un root 4 Reu, dans la Bible. Genese, c. XI.
qui ro'est inconnu, et qui, en tout cas , doit equi-
a Abraham.
Hur.
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328 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
sacrifiche de son fis Ysaac. Quant Abraham Font, si prist Ysaac, et l'en-
Le sacrifice Abraham, mynat en line montangne on Dieu ly avoit dit, puis trahit I'espee pour
coupeir le chief de son fis ; mains ly angele ratient I'espee et li monstrat une
agneal que ilh sacrifiat.
saramorit. Apres chu , Tan Abraham cent ct XXXVIII, morut Sara, la femme
Abraham et mere a Ysaac; si fut ensevelie en Ebron, en la terre de Cha-
Abraham soy remariat naan ; mains Abraham, en Tan apres, prist une aultre femme, qui fut
Y*aac oit a femme Re- nomee Cetura. Item, Ian Abraham C et XLV, prist Ysaac a femme Re-
becca,iafiihBaiuei. ^ecca, | a fjj| ie J$ a t ue | , dont Abraham astoit oncle, car ch'astoit li fis Nacor,
son frere. — Item, Fan de Abraham C et LXI, engenrat Ysaac en sa femme
Des enfans Rebecca. II fis a une fois , et fut chu le L jour de Fan. Lesqueis enfans soy combat-
toient en ventre de leur mere, anchois qu'ilhs fussent neeis: mains quant
leur mere sentit chu, se priat a Dieu qu'ilh ly donnast a cognoistre que
chu signifioit, et Dieu li mandat que elle portoit II fis desqueils ilh isse-
roit II peuples, dont ly plus grant serveroit le mynoir. Et ly promier qui
Esau et Jacob furent nasquit de dies dois enfans fut nommeis Esau, et li secons Jacob; mains
Jacob fut nommeisYs- longtemps apres ly fut son nom mueis, et fut appelleis Ysrael, et portant
fut ly peuple qui issit de luy nommeis Ysrael. — Chis Jacob oit II femmes :
Lia et Rachel, soreurs, fillies de son oncle Labam, frere a sa mere Re-
Jacob oit de sa femme becca. Si oit Jacob de sa promier femme Lia I fis, qui oit nom Ruben, et
Lew^^das^saca"; I altre qui oit nom Symeon, et I altre qui oit nom Levi, et I aultre qui
oit nom Judas. De quelle Judas issit le royal lignie, dont sainte Anne,
mere a la benoite virge Marie, issit, et Joachim son maris et Joseph le
Baiaoitiifisdejacob: maris Nostre-Damme. — Apres oit Jacob dois fis a une fois de Bala, l'an-
celle Rachel , sa seconde femme , dont ly promier fut nommeis Dan , de cuy
lignie isterat Anticrist, solonc FEscripture; et ly aultre fis oit nom Nep-
jacob oit de ceipba talim. Item , Jacob oit de Celpha , le ancelle Lia , sa promier femme, ir fis :
ly promier oit nom Gad et li secons Azer. Item, oit encor Jacob de sa pro-
mier femme Lia, II fis, qui furent nommeis Ysacar et Zabulon, et une
Jacob oit de Rachel jo- filhe qui oit nom Dyna. — Item, Jacob oit de sa femme Rachel II fis :
seph et Benjamyn. * J '
Joseph et Benjamyn; de cheli morit Rachel. Ors vos avons (dit) de cuy des-
quendirent les XII lignaiges Ysrael, assavoir des XII fis Jacob, et vos ay
dit de cuy lidit Jacob descendit; si voray revenir a ma droit matere de-
seurdit.
Mouvement de terre. Sour Tan del transmigration de Babylone deseurdit,V c LXXV, oit en
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L1VRE PREMIER. 329
Cypre si grant mut ' de terre, que pluseurs citeis en furent reverseez* et
abatuez, et fut chu en mois de may. En eel annee meisme, le VIIl e jour de u nascenehe Nostre-
mois de septembre, fut nee la benoite virge Marie; de laqueile nativiteit
nosdevons faire grant fieste et grant joie, car aultrement ne fussiens mie
delivreis des grandes paines d'ynfeir. — A eel temps avoit esteit Herode
mult malaide por l'amour de sa femme Mariane, et astoit mult bien garis. Foi.oiv.
Se remandat sa femme Dossid * et son fis Antypater que ilh avoit dejetleit, De Herode qui reman-
a la proier Mariane, hours de Jherusalem; et les II fis que ilh avoit oyut
de li, Alexandre el Arisloble, cheaux prist-ilh et les vestit mult riche-
ment, et leurs donnat beauz chevals et belles armes, et or et argent a grant
planteit. El apres les envoiat a Romme por aprendre les ars de clergerie.
De chu que Herode avoit ochis Mariane, sa femme, le commenchat mult a
haiir la royne Cleopatre de Athenne, cuy Anthone, le saingnour Herode,
amoit mult fortement. — A eel temps astoit roy d'Arabe Gadus, qui astoit
cusiens germains a Herode. Si s'avisat la royne Cleopatre comment elle Demaiiwhecieopatra.
poroit faire ochire Herode; se priat a Anthone que ilh fesist alleir Herode
chevalchier sour le roy d'Arabe, por sa terre conquesteir : et chu faisoit-
elle portant que elle quidoit que Herode ne dewist pais faire chu ne aleir
sour le roy Gadus, qui astoit son cusiens germains, dont Anthone ly deust
trenchier la lieste. Mains ilh navient pas enssi , car Herode y alat oussi-
toist que Anthonne ly oit commandeit; chu fut sour Fan V° LXXVI, et
demorat la bien I an. — A eel temps mut grant guerre entre l'emperere Grant guerre em™ ce-
r* • ai «•■«•« * §aire et Anthone.
Augustus Lesaire et Anthone , por 1 empire de Romenie a avoir, car An-
thonne voloit avoir plus a l'empire que Augustus; et chu faisoit-ilh por
le conselhe Cleopatre, la royne.
Adont assemblal cascons ses oust el se soy combatirent li unc contre
l'autre, entre Gresche et Romenie, a unc castelle qui astoit nommeis An-
tyons *, sour Fan V c LXXVI I, en mois de jule; a celle batalhe ne fut mie
Herode, car Anthonne l'avoit envoiiet en Arabe, enssi com dit est. En celle
batalhe fut Anthonne desconfis et vancus. — Mains quant Herode le soit, si
soy partit d'Arabe et vient a Romme mult dolans, car ilh amoit Anthonne Herode *ient a Romme.
plus que nulle homme de monde; et ilh avoit droit, car par luy avoit-ilh
1 Tremblement. Sans doute da latin molus. * Precedemraent Doliside.
* Cravenl&z. B. 4 Actium.
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550 CHROMQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
oyut la saingnorie que ilh tenoit. En eel qn meismes, le III jour de sep-
Loinwe, le vi» roy tembre , morut ly V e roy de Tongre; si fut roy apres son fis, qui fut nom-
Hcrode paroiie k rem- meis Lotringe : cliis regnat XX ans. - Item, Tan V c LXXV1I1 entrat Herode
perew. ^ Romme, en mois d'avrilh, et la vient-ilh par-devant Augustus, et se soy
despulhat de ses riches vestimens royals, si reveslit des malvais vesti-
mens f , sique ilh sembloit bien hons de douls *, puis dest, sens riens sal-
weir 8 : « Gesaire, Gesaire, vos aveis Anthonne, mon saingnour, desconfis,
» chu poise moy. Oncques en ma vie je n'oy si grant douls, car je n'amay
» oncques tant homme, com je fasoy luy, et bien le vos eusse monstreit a
» la batalhe sour Ancyon, se je y awisse esteit; car je li awisse fait aide
» contre vos a mon poioir, et se ilh me vosist avoir creyut, mes cuers
» et mon poioir li fust habandoneis, car ilh awist ochis la dammoselle *
» Cleopatra, por cuy conselhe ilh at commenchiet chu dont ilh at esteit
» desconfis; car elle ne voult oncques souffrir que ilh fust bien de vos, ains
» at fait tosjours discors entre vos dois. Si vos prie, puisque mon sain-
» gnour est desconfis, que vos me tolleis mon honneur, car je moy rens
» por vancus, et por chu suy venus a vos; car, puisque mon singnour est
» venus a honte, je ne veulhe mie estre a honneur. Ors me veulhies tollir
» la vie; car sachies , se la vostre vie astoit en ma balhie ', je le vos tonroie
» el melteroie vostre corps a grant vitanche 6 , a plus tost que je pouroie. »
LEmp«rere paroiie a Quant Cesaire oit escuteit Herode, si Fen prist grant piteit, se dest:
« Herode, grandement m'aveis manechiet et assalhit de parolles, et por
» mon chief vos n'aureis ja maul por moy, car je voy bien que vos amies
» vostre saingnour de loial amour; et partant je vos ren vostre honnour, et
» encor le vos accresceray ains que je mure 7 , car en vos at grant loialteit,
» quant vostre saingnour voleis faire compangnie, oussi bien a maul com a
» bien. Et Anthonne vostre sire fist maul de chu qu'ilh duit 8 quant ilh creit
» mies le conselhe de la royne Cleopatra que le mien et le vostre; car par
Foi. 99 f. » sa conselhe est-ilh alleis a maul , et je en ay gangniet de quoy je suy
Herode fut d« conieihe » joians. » Enssi retient Cesaire Herode de son conselhe et de son hosteit f ,
I Emperere. J
1 Robes mavaises. B. * Pour viuie, vilte qu'on trouve dans Roque-
* Voir a cet egard Fl. Joseph., XV, 40. fort : abjection.
* Plut6t salueir, comme dans le manuscrit B. 7 Avant que je meure.
4 La desloyal B. * Ce qa'il dut.
* Je corrige d'apres le manuscrit B. Notre texte ' Et de sa maisnie. B.
porte bouche.
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LIVRE PREMIER. 331
et mult l'amat ; se le creit et ovrat de son conselhe. — Item, Tan V c LXXIX ,
en inois de marche, alat li emperere Augustus Cesaire en Egypte, etemy-
nat awec ly Herode, por conquesteir la lerre tout entour; la siervit si loial-
ment Herode Cesaire de son corps, de son avoir et de ses amis, que Cesaire
sen mervelhoit, et disoit que ilh n avoit oncques veyut hons de si tres-
grant serviche et loialteit.— Cesaire ne prist oncques en chi pays-la chasteal
ne citeis par forche, que Herode ne fust toudis ly promier qui entroit
dedens. Et quant ons astoit en batalhes, Herode le fa i so it si bien que ons
ne parloit de nuls bien fait se del sien nom '. Et enssi Herode porveioit
sy bien l'oust de chu qu'ilh y falloit, que oncques n'y fallit viandes al
alleir ne al revenir. Si saigement servit Herode Cesaire, que Cesaire mult
Tamoit.
Et quant Cesaire Augustus oil conquis Egypte et tout le paiis altour, si
soy retournat a Romme a grant joie , puist fist-ilh ochire Anthonne et Cleo-
patra. El alcuns dient que Anthonne soy desperat et soy ochist apres chu
qu'ilh fut desconfis, et que la royne Cleopatra , apres le mort de Anthonne,
soy vestit et s'apparelhat de ses beais draps d'or royals, et sen allat a
Romme alle emperere Augustus, portant quelle quidat que Augustus de- Maiisce de femme.
wist prendre plaisance en lee, car elle astoit mult belle damme et jovene.
Mains li emperere ne le voult mie laissier venir en sa presenche, anchois
mandat quelle fuist prise; mains alcuns li laissat savoir, si s'enfuit et re-
vient en Egypte, si soy fist mordre de 1 serpent que ons nom aspis, de
quoy elle morut tantoist, el se soy fist ensevelir en la sepulture de son
marit Anthonne. — Apres, quant ly emperere fut revenus a Rome , vinrent
les Romans al emperere et li dessent que ly regne Herode astoit trop petis,
et que grant terre apartenroit bien a I si valhant homme. A chu s'acordat
bien Cesaire, et appellat Herode et ly donnat la terre de Traconie * et la terre
de Marcune 3 ; si fust adont Herode sires de 1111 regnes. — Puis en rallat Herode fut fais roy de
Herode en Egypte, si y fondat I mult belle citeit que ilh appellat Cesaire; Herode fondatiaciteit
et eel est Cesaire Palestine, dont sains Eusebe et sains Cornilles furent Cc8tire *
puisevesques, ly I apres 1'autre longtemps.
En eel temps, en Trans Tyberim a Romme, apparut I fontaine qui jettoit Dei fontaioe Trans tj-
oyle.
1 Sinon du sien. * Samarie, construile sur ^emplacement d'une
* La Trachonite. ancienne ville noramee Mareon.
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332 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
oyle a si grant planteit, que li riwe en corroit par si grant habundanche
Destroiseerciesdeieis que ch'estoit mervelhe. Item, adont apparurent trois cercles entour le
soleal, sicom ly arc Dieu '. A eel temps fist Herode el citeit de Cesaire, en
la maistre porte, une thour mult riche, tout de blanc marbre, encontre la
venue Augustus Cesaire, portant que ilh devoit entreir par celle porte en
Des edifiches Herode. la citeit. Et fut chu sor Fan V c LXXIX '. — Item , Herode apres chu restablit
la citeit de Ascalonne, et y fist I gran palais, car ilh astoit de Ascalonne
neis; et fut chis Herode appclleis Herode Ascalonita 5 , portant qu'ilh sour-
DeLotringe,ieroyde journoit mult volentier en chis palais. — Item, Tan V c et 1III" recommen-
g«. chat ly roy de Tongre a porfaire son casteal , que son peire avoit commen-
chiet sour une roche seiant sour Mouse, qui fut appelleis Lotringe apres
son nom et le nom de son pere, qui puis fuit destruis par les Huenx \ —
Dei thour Agrippe en En eel an meismes fist Herode en Jherusalem I thour que ilh appellat
Aggrippe, apres le nom Agrippe, le senescal de Cesaire; et si avoit par-
devant fait faire une altre qu'ilh appellat Anthonne, qui ors est nommee
la thour David. Apres chu fist faire Herode une aigle dor, et le mist sour
le grant porte de temple, en ('honour des Romans; car ly emperere de
Dcs armes lemperere Romme portoit une aigle en ses armes, encor font \ qui est noire sour or.
De chu furent les Juys mult corochies sour Herode, car ilhs ne porent
oncques ameir les Romans. — Apres chu, sour 1'an MI 1 * et 1 fl , morut li
Lotringe, roy de Ton- poete Orasses, qui fut mult saige cleirs, et fut disciple a Virgile. En eel
^oup4,iitc?~ an meismes commenchat 7 a fondeir Lotringe, ly roy de Tongre, ches
Foi.wvo. vilhes : Ougnee 8 , Gemeppe, Flemaile, Engis, Awir, Horion, Floyne *,
Gc r 7uL P uri altos' vu- Chokier, Ramey, Tayniers, Asseneur et Amechiens i0 ; et ne cessat d'ovreir
L ^ e b s M tant que ilh oit tout faite. Et puis se fist Lobbe et pluseurs aultres vilhes
Geneffe. en chi paiis del amont ". Et puis se fondat Jehain et Geneffe , Thys , Stirs et
Bovengniestiers ". — Item, Fan V c IIII" et II, commenchat a faire Herode
une casteal mult beal et noble, droit en la plache ou ilh avoit desconfit les
1 Ly arc ce les lias. B. Sans doule Tarc-en-ciel. manuscrit B.
* En ntois d'octembre , ajoute le manuscrit B. 7 Fondat ou commenchat. B.
* II s'agit toujours de Herode surnorame le * Ougree, sans doute.
grand, et je ne sais ou Jean d'Outremeuse a et^ • Flonc.
prendre le surnom $A$calon\te. 10 Tavicrs r Assenoisouplut6tEsneuxetAmpsin?
4 Les Huns. " Que je ne say altrement nommeir, ajoute le
5 Ce qu'ils font encore. manuscrit B.
$ Le XVII* jour du mots de fevrier, ajoute le " Jehay, Jeneffe, Thys, Ster et Bovenistier.
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LIVRE PREMIER. 333
Juys, qui le cachoient quant son frere fuit mors por ' Antygonus, quant
Hircans futpris, ou ilh * alloit parleir al roy de Turquie.
Cheluy casteal fist Herode mult fort et mult noble, et puis le nommat Le casteal Heroine.
Herodiane, el ramembrance de son nom; en lequeile casteal ilh fut ense-
velis, quant ilh fut mors. En eel an meismes, grant guerre s'enmut entre Guerre entre Franco et
Franco le due de Galle, et Flamens le comte de Flandre; si orent batalhe
ensemble, mains ly dus Franco fut desconfis et ses gens livreis al mort. Et
fut eel desconfiture trop mervelheux, car li conte de Flandre portoitadont LesarmesdeFUmdre.
I'escut d'oir semeit de ras de sable; si fist en eel batalhe armeir X m hommes
a teils amies, et enbussier en unc bosket; et quant che vient que la batalhe
fut la plus grant, si vinrent les X m hommes en escriant : « Aux ras! aux
ras 8 ! » et se firent 4 en la batalhe. Quant les Sycambiens, qui as to i en t
lasseis, les perchurent, se furent mult enbahis et se misent al fuir. — En
Thoneur de eel victoire, fondat li conte de Flandre, en propre lieu ou li Li co " le de n™*™
batalhe fut, une citeit que ilh nommat Arras, et encor le nom-ons enssi;
et fut fondee Tan V c 1111° et II, en mois de decembre, jenvier et fevrier.
Mains, longtemps la apres, furent cheaux qui habitoient en ladit citeit hon-
teux de chu que leur vilhe avoit I si maulhonieste nom , se le nommarent
Atrabatum s apres leurs saingnour ; et encor le nom-ons enssi en (alien , Atrabatum.
mains tousjours en roman l'apelle-ons Aras. — Item, l'an V c IIII" et 111 n
fist faire Herode I casteal que ilh appellat Fasel, apres son freire Fasiau. En Decani F»»ei.
eel an meismes, redifiat Herode tout le royalme de Samarie, que Johans
Hircain avoit destruit et fondue jusqu'a terre; et le remidrat ' d'unne grant
citeit que ilh nommat Sebaste, qui fut et est ly chiest 7 del regne de Sa- sebaste chief de sa-
marie. Et portant 1'apeIIarent les alcuns longtemps le royalme de Sebaste.
— Item, Herode fist en eel citeit de Sebaste I riche temple en l'honeur de De Herode qui ii»t i
1 riche temple a Se-
Gesaire, et encor fist-ilh I aultre temple , sour l'an V c IIII" et IIII , en mois haste -
de junne, deleis Tunne des fontaines dont ly fluis Jordan sourt : et fut tous
de blanc marbre, mult bien ovreit et polit. Long chouse seroit del tout
1 Probablement par errcur pour par. Allusion ras. Je ne sais a quel seigneur d'Arras le chroni-
a ce qui est rapporte p. 27 1 . queur fait allusion.
1 Au moment ou il (Herode) allait, etc. • Sans doute un verbc qui a le sens attache par
5 As ras! As ras I B. Roquefort a retnerir, recompenser.
1 Se portcrent , se jeterent. ' Pour chief, t^tc, capitale. Le manuscrit B
* Plus correctement Atrebalum, nom latin d'Ar- porte en effet chief.
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334 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
racompteir chu que Herode fist a son temps, car ilh n oil bonne vilhe en
son paiis que ilh ne fesist alconne riche chouse en J'honeur de Gesaire. —
En eel an meisme, morut Flameps ly conte de Flandre 1X C ; si regnat apres
luy son anneis fis, qui fut nommeis Clovenus, et regnat XXIIII ans. Et son
Heoawc. aultre fis, qui fut nommeis Aras, fut sires d'Aras et sire de Henawe, qui
adont astoit petite. Sour Tan V c IIII" et V, fut trovee et provee en propre
adulteir Alibaine, la filhe Augustus l'emperere; mains quant son pere le
soit, se I'envoiat en Ysrael \ — Item , Fan V c IIII" et VI , morut Quormant,
le IX e roy de Hongrie; si regnat apres luy son fis Sedroc, IX ans \ — En
Grant reparation ai eel an meismes , fist Herode grant reparation al temple de Jherusalem, et
temple de Jherusa- m 7 .
,em - y donnat mains noble doins et riches, dont ly temple fut plus honno-
reis qu'ilh n'avoit esteit longtemps devant. En eel an meismes. en mois
d'awoust, revinrent Alixandre et Aristoble , les dois fis Herode, del estude
de Romme; puis soy mariarent : se prist Aristoble la filhe Salome, son
antain ', et Alixandre prist la filhe de roy de Capadoche \ — En eel an
meismes, muet grant discorde entre les dois freres deseurdit al ocquison
de la terre que Herode leur pere tenoit, qui encor astoit en vie; et disoit
cascons d'eaux dois qu'ilh averoit tout la terre apres leur pere. Herode le
Foi.93r«. soit, de quoy ilh soy corochat mult a eaux, et leur dest que ch'asloit sens
Herode fust corochies raison qu'ilh soy combatoient, car Antipater, son anneis fis, sieroit roy
eneontresestroisfis. . ... - •-■ r • - • * r* *
apres luy, car ilh ly avoit pluseurs fois otnet. For ceste raison se coro-
chont les dois freres a leur pere, et subtiliarent 5 plus d'unne an comment
ilhs poroient ochire leur pere; mains unc chevalier, qui savoit leurs secreis,
l'at a Herode dit et reveleit. — Adont les mandat Herode, et ilhs vinrent
Herode banit S es en- Tan V c MI" et VII , le IX e jour de mois de jule. Et quant Herode les veit,
ilh les encachat et les banist fours desa terre; si s'en alarent a Romme, et
soy plandirent de leur pere a l'emperere Cesar, et ly demonstrarent le tort
que ilh leur faisoit. Mains chu ne leur valut riens, car ly emperere ne voult
DeducdeGaiicetdes nient entendre a eaux. — En eel an meismes, assemblat ly due de Galle,
Flamens. 1 J 7
Franco, son oust, et entrat en la terre de Henawe; se le conquist et coupat
le chief Aras, qui en astoit prinche, et puis entrat en la terre de Flandre,
1 II s'agit certainement ici de Julie qui, pour * Sa tante. Aristobule epousa en effet sa cou-
scs galanteries , fut releguee dans rile de Panda- sine germaine , une Berenice,
laria. * Elle s'appelait Glaphira.
* X an$, B. * Singenierent, comploterent. Se penercnt. B.
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L1VRE PREMIER. 335
et grandement le destruit fl . Mains Cloveus *, le conte, assemblat ses gens,
si alat enconlre luy : si orent batalhe ensemble et furent les Flamens des-
confis. Adont fist li dus de Borgongne la paix entres les Flamens et les
Sycambiens, qui fut mult bonne.
Droit a eel temps, assavoir sour Fan V c Ml" et VIII, fut grant muet s
de lerre vers le paiis de Judee, dont pluseurs citeis et casteals chairent.
Item , Tan del transmigration de Babylone V c I1II XX et IX, le XXIII1 6 jour
de mois de septembre 4 , al XXI e an del coronation le roy Herode, astoit
I hons religieux , qui astoit priestre et faisoit a eel jour oblation en temple
de Jherusalem : si astoit nommeis Zacharie, et sa femme astoit nommee De zacharie et Ei.za-
Elizabeth; et astoient mult vies, car cascons avoit bien cent ans d'eaige, si
n'avoient oncques oynt enfans, car Elizabeth astoit brehangne 5 , se ne poioit
fructifiier. Et ne plaisoit mie a Dieu que ilh awist enfant, jusqu a tant que
temps sieroit por ly. — Si avient enssy que Zacharie ly priestre astoit en zacharieeniempiefist
temple et faisoit oblation de incense ', et veschi sains Gabriel I'angele vient
et s'aparuit a ly devant l'ateit, et dest en teile manere : « tu, Zacharias,
)> entens a moy. Dieu tu mande que quant tu as fineit son serviche, se toy
» retrais arrie en ton hosteit et toy cuche a wee ta femme; et Dieu toy
» donrat I teile fruit, qui de luy 7 serat tant ameis que ilh vorat prendre Wangle annunchat i a
, I '— . • , . - conception saint Je-
» baptemme de ly en fluis Jordan, et se le nomme par son nom Johans. » h»n-Ba P tiste.
— Quant Zacharie I'o'it, se dest a Gabriel : « Comment porat chu eistre que
» tu m'as dit? Nos summes si vilhes 8 ambdois et si floibles, que je ne moy
» puy sourtenir, et s'ilh est enssi que j'aroy en chist eaige enfant, chu ne
)> poroy-je croire. » Adont dest li angle a Zacharie : « Et tu en auras teile
» gueridon * por te non creanche que tu ne parleras, ains seras-tu mueis zacharie decent mueis.
» jusqu a tant que li enfes serat neis, et portant que tu ne vues croire que
» Dieu ait bien poioir de toy faire avoir enfant; et quant ly enfes serat cir-
» conchis et nommeis Johans, adont parleras-tu com devant. » — A tant
est ly angele departis, et Zacharie fist le serviche de Dieu, puis issit de
temple; mains oussitoist que ilh issit de temple, par levolejiteit de Dieu
1 Et le destruite mult durement. B. £ais modcrne.
* Plus baut Clovcnus. * Encens.
5 Mouvemcnt, tr emblement. 7 De Dieu.
4 Decembre. B. s Vieux, plus baut vies.
1 Sterile. B. Brehaigne est reste" dans le fran- • Pour guerdon, salaire.
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336
CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
ilh fut mueis et laisat le parleir, de quoy ly peuple en oit grant mervelhe;
et puis soy cuchat awec sa femme. Et adont fut engenreis sains Johans 7
et ne nasquit oncques plus grans de femme fours que Jhesu- Grist. —
chi fine ii v eaige de Item, chi fine ly V e eaige de monde, qui contient del transmigration de
Babylone jusques al incarnation Jhesu-Crist. Et deveis savoir que ly pro-
mier eaige de monde, chu est de la formation Adam, nostre promier pere,
jusqua le delueve Noe, qui contient II m 1I C et XLI1 ans. Item, ly secon
Deseaigesdemonde. eaige de monde ^st de la delueve Noe jusqua la nativiteit Abraham le pa-
triarchy qui contient 1X C et XL11 ans. Item, ly Ill e eaige est de la nati-
viteit Abraham jusqu'a la coronation le roy David, qui contient IX C et XL
ans. Item, le IIII e eaige est de la coronation le roy David jusques al trans-
migration de Babylone, qui contient 1111° et III1" ans. Item, le V e eaige
Foi.rev*. est del transmigration jusques al incarnation Nostre-Salveur Jhesu-Crist,
quant l'angele Gabriel annunchat a la virgue Marie le salut del Ave Maria;
lyqueis quinte eaige est chis que nos * avons chi-desus pris nos daules
derainement, qui contient V c II11 XX et IX ans. Lesqueis V eaiges montent
ensemble a la somme de V m et Il c ans I moins , assavoir V milh cent no-
nante et nuef, que li monde avoit esteit origineis et Adam fourmeis, enssi
com dit est par-desus. — Ors est raiSon que nos parlons de la benoite
incarnation Nostre-Saingnour Jhesu-Crist, par lequeile tous le monde fut
rachateis et osteis des grandes poins * d'infier.
Chi-apres s'ensiet ly VI e eaige, qui dure jusqua la fin de chu monde.
Chi commenche ly an del tres-sainte incarnation Jhesu-Crist 8 .
De vi« eaige de monde. A la gloire et loienge de la sainte Triniteit, de Pere, Fis et Saint-Esperil,
vorons commenchier et deviseir le VI e eaige de monde, et le derains solonc
I'Escripture, car ilh dureral jusqu'al fin de monde; et vos vorons declareir
les dautes comment ilh commenchoient chi-devant, el par queile raison.
Vos saveis que toutes les dautes des V eaiges deseurdis commenchent en
mois de marche le XXV e jour, portant que marche astoit ly promirs mois
de Tan, et portant enssi que Adam fut fais et fourmeis le XXV e jour de
marche; et oussi ilh morut a cheli jour, sour Fan del origination de monde
IX C et XXX; et fut a chis propre jour Abel ochis par Caym; et si ouffrit
1 Ou nos, B. s Ces deux lignes sont ecrites dans le texte a
* Pour poines (mot wallon), peines. Paines dans Tencre rouge, et ne se trouvent pas dans le roanu-
lc manuscrit B. scrit B.
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LIVRE PREMIER. 337
Melchisedech pain et vin, et Ysaac fut mis sour l'auleit por coupeir son
chief en nom de sacrifiche; et que sains Johans-Baptiste fut decolleis, et
sains Pire 1'aposlle fut mis fours del prison, et sains Jaque fut martyrisiies,
et li passion Nostre-Sires Jhesu-Crist que ilh souffrit mort en la crois por
tout humaine lignie, et la victoire sains Mychiel conlre le dyable, et que
les enfans d'Ysrael passont mere tout a seche. Tout chu fut fait a cheli
meismes jour XXV e de marche, en diverses annees. — Mains encor y fut
fais ly plus grans, ly plus precieux, ly plus benigne et ly plus glorieux fais
qui oncques fut fais a monde, car a eel propre jour, le XXV e jour de mar-
che, vient Gabriel ly archangle aporteir a la virgue Marie le salut del Ave
Maria, sicom vos oreis chi-apres, sour Tan del creation de monde V m II C ,
1 moins, parfais, et V m 1I C imparfais. Si voray faire entendre aux ignorans Des ans parfais ei im-
briefment la differenche entre parfait el imparfait. — Nos vos avons desus
dit que toutes les dautes anchienement prendoient leurs commenchement
a leur fin en mois de marche le XXV e jour; et coroit cascon daute I an ,
sy finoit au XXIIU e jour \ et tout Tan qu'ilh coroit astoit an imparfait, et
quant ilh venoit al dierain jour, ilh astoit acomplit et parfait. Et enssi vos
dis-je que ly an V m et II C , 1 moins, finat le XXIIII e jour de marche, et fut
parfais ; et lendemain , le XX V e jour de marehe , quant Gabriel vient , com-
menchat Tan imparfait V m Il c , qui corit * l'annee lout ensuivanl. Et chis fut
ly promier an del incarnation. Et chu fait-ilh bon savoir et entendre por
les debas des annees parfailes et imparfaites, car ons auroit tantost mes-
compteit une an qui n'y penseroit.
En revenant a nostre matere, le promier an del incarnation Nostre-Sain-
gnour Jhesu-Crist imparfait, et le promier jour del an, assavoir le XXV C
jour de mois de marche, al heure de messe solonc alcuns, desquendit Ga-
briel, a commandement deDieu, faire l'anunciation a la benoite et glorieuse Lammciation a Nostre
virge Marie, qui astoit entree dedens son orateur ', en la citeit de Nazareth ,
et tenoit I psaltier en sa main, et avoit de eaige X1III ans et Vll mois, VIII
jours moins, que el avoit e§teit nee. — Et la elle commenchat mult parfai le-
nient a oreir Dieu et deproiier. Et ly vray Dieu, qui l'avoit fait et fourmeil
a sa volenteit et edifiie en son cuer, deis al commenchement de monde, com
1 Mot suppler d'apres le manuscrit B. * Dedens le temple. B.
* Coroit. B.
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338 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
celle de cuy iih voloit faire sa mere et sa filhe, fist a eel propre heure el
chiel ovrir. Si envoiat sains Gabriel dedens le temple , qui jettat mult grant
Foi. 94 r*. clarteit, et vient devant Marie, sicom ditest. Si l'apeliat mult douchement
et dest : « Dieu toy sault, Marie plaine de grasce, Dieu est awec toy. » —
De sainte Marie ce Adont oit la benoite virge Marie grant paiour. car elle quidat, sicom alcuns
■ju'elle quidoil de » . * if 4 • i * 1
rangie. escriptures dient, que chu fuist I enchanteur qui adont regnoit en pans,
qui astoit nommeis Turquins \ qui, toutes les fois qu'ilh ly plaisoit, se fai-
soit sembleir uns angele , et s'aloit sovens cuchier awec les pucelles. Sc
quidat Marie del angele que chu fuist cheli Turquins qui le vosist dechi-
voir, si demandat en conjurant de Dieu que s'iih astoit Turquins que ilh ly
desist; mains Gabriel li respondit qu'ilh astoit vray et certains messagier
de Dieu. — Quant Marie oiit chu, se fut plus asseguree, car ly angele ly
dest: « Ne t'enmaies nient, Marie, car Dieu est en toy desquendut^ et se toy
» mande que tu as conduit unc lis toute virge ; et al enfanteir demoras vir-
Langie paroiie a Nos » gue , et enssi apres 1'enfantement , et sainte virge tou s jours demoras. et
» ton fis sierat roy de paradis; et ne mescrois mie chu que je dis, ains
» regarde Elizabeth, la cusin , qui est brehangne et vielhe de cent ans, et
» at conchut de son saingnour unc mult noble enfant. » Adont respondit
sainte Marie : « Comment poroit chu eistre? Je n'oie oncques cognisanche
» d'hdmme, et ay a Dieu voweit casteit, sique je moy mervelhe comment
» virge poroit enfant avoir sens a touchier a homme, ne sens fauseir virgi-
» niteit ne faindre. » — Adont ly dest ly angele Gabriel : « Dame, Dieu
» at bien poioir de tot faire et defaire; ilh veult de toy faire sa mere, si
» qu'ilh serat ton fis, et serat oussi ton pere, et enssi ne perderas riens de
» chu que tu as voweit; ilh garderat mult bien ta casteit. » Et quant Marie
oiit chu, se dest : « Ancelle je suy a ly, si fache de moy son plaisier. »
Atant s'en est ly angele aleis, et Marie demorat conchuit et engrossie de
Merreihe de Nostre- Dieu , qui en ses flans s'aombrit en celle heure; et entrat Dieu en Marie par
1'orelhe, car par 1'orelhe entendit l'angele, et enssi que li sons de la vofs
entrat en 1'orelhe, enssi entrat awec la sainte Triniteit de Pere, Fis et Saint-
Dei yirginiieii Nostre- Esprit, car de chi fait ne soit riens ly membre natureit de la virge Marie,
ne sa fleur virginal.
1 II s'agit ici dc la tradition juive accueillie par d'Origcnc contre Celse, liv. I, pp. 25, 26 et 54. Je
les paicns, et qui donnait pour pere a Jesus-Christ cite Fed i lion de Cambridge, 4677.
un soldat du nom dc Panthera. Voir Touvrage
Damroc.
Damme.
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LIVRE PREMIER. 339
Gascons doit savoir que enssi que ly soleal trespasse la voiriere qui est
saine el entier, et resplendist sa clarteit oultre , et puis soy retrait sens le
voire emperier ne rompir a passeir; enssy soy mist Dieu en corps de Marie Di L u a ® nl " l r e " c! C hc p8
par l'orelhe ou elle conchuit la parolle, et resplendist dedens li et espandit
sa vertut et clarteit de la sainte Triniteit, sens violenche faire a virginiteit.
Et ilh soy retrahist cest al enfanteir: ilh issit fours par l'orelhe ou ilh astoit
dedens entreis, virginiteit demorant sens rumpre ne casseir en nulles des
parties. — Item, a eel temps astoit la loy teile que, se une femme fust
grosse d'enfant et elle n'awist marit, elle fust lapidee ou arse, et ja n'en
posist escappeir, ne pour avoir ne por grandeur. Si avient que tous les
barons de paiis et ly evesque de la loy astoient 1 jour aleis au temple por Ce que Dieu mandat
oreir; adont vient une vois qui leurs dest en hault : « Sangnours, Dieu
» vos mande que vos donneis Marie I marit de la lignie dont elle est nee, »
et atant soy partit la vois. — Et li evesque at mandeit tous les barons de la
terre, par le conselh de I juys qui astoit mult saige. Atant vinrent vies et
jovenes, grant et petis , et mult en y vient qui n'avoient cure del marier ' ;
mains quant ilhs veirent la pucelle, se n'y avoit si gran saingnour qui ne comentNosire-Damme
le vosiste avoir esposeit, tant astoit belle et plaine de la grant grasce de
Dieu. — En eel conrois est venus I dammoseais qui fut nommeis Joseph,
qui astoit venus por veioir le mariage et nient por la pucelle a avoir, car ilh De mark Noswe-Dam-
astoit trop vies, ilh avoit bien II C ans ou plus; chis Joseph soy mist deleis I <"»'•
pileir, portant qu'ilh se doubtoit que les gens menues ne 1'abatissent a terre Foi.94^.
al presse.
Mult fnt Joseph escarnis et degabbeis des enfans et oussi des bachelleirs
et des dameseais: mains ilh n'y acontoit riens. Quant tous les barons furent
enssi assembleis, se dest li evesque : « Saingnours, je vos ay chi mandeit
» par le commandement de Dieu ; si veulhies proier a ly que ilh nos veulhe
» donneir a cognoistre qui digne est de la pucelle Marie esposeir et avoir. »
— Atant ont fait leur orison , et enssi qu'ilh astoient la , si leur dest I angele :
« Barons, Dieu vos mande par moy que cascon de vous prende une verge Ly«MiepiroHeipeu-
» en sa main, et chis en cuy main la verge florisseroit, chis aurat la pu-
» celle sens con t red it. » Et tantoist ont pris verges en leur mains, puis se
sont recuchies en orisons; et puis fist li evesque une sermon, et fait cascon
1 Qui n'avoient songne de marier. B.
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340 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
sa main leveir en hault awec la verge; et Joseph, qui ten oil son bordon de
quoy ilh s'apoioit, si le levat en hault. La oit I garchon qui degaboit Joseph,
et tant que Joseph en voult aleir sa voie; mains tout enssi com ilh soy tur-
L y bordon Joseph com- noit, commenchat son bordon a florir et fruit porteir, et s'asseit par-desus
menchat a florir et .... • «...
fruit porteir. 1 blan colon, qui signifioit Jhesu-Crist, et la verge signifioit Marie. — Mains
quant les Juys veirent chu, si allont apres luy et le firent retourneir, se li
dessent que ilh auroit la pucelle, car Dieu le volloit. Adont ont pris la
verge atout la flour, qui jettoit si grant odour que ilh sembloit a cascon
que ilh fust en paradis. Gette verge fut presentee al evesque; mains enssi
com ly evesque le monstroit a peuple, la verge * salhil fours de ses mains
et se entrat ens es mains Marie, la benoite virge. — Adont desquendit li
La vierge Marie fute»- evesque , si at esposeit la meismes Marie et Joseph. Chis Joseph n'astoit
posee a Joseph. ». «• » .
mie riche hons, si aloit aide quiere a ses amis por faire ses noches; si de-
morat pres de trois mois. Et quant ilh fut revenus, si s'aperchut que sa
femme astoit enchainte; si en fut mult corochiet, se li blamat * mult dure-
ment, car ilh n'avoit oncques jut awec lee, puis s'en alat altre part cuchier
por dormir.
Ly angle pariat a jo- Celle nuit vient 1 angele a Joseph et ly dest : « Joseph, ne t'esmaie nient
» de chu que ta femme est enchainte, car chu est del Saint-Esperit, et el
» porte Dieu en ses flans; si serat li enfe quelle porte le fis de Dieu, si
)> sierat nommeis Jhesus, et serat sires de tout le monde. Et porlant Dieu
» toy mande que tu garde la pucelle castement, car elle est et serat toudis
» virge parfaite. » — Grant joie en oit Joseph, quant ilh entendit chu; si
vient a lit Marie, et li priat merchis de chu qu'ilh li avoit dit. Et la damme
ly pardonnat volentiers, et li priat que ilh le vosist myneir veioir sacusin
Elizabeth, le femme Zacharias, qui ne poioit parleir, laqueile astoit en-
Marie risentat Eiiia- chainte d 'enfant; et Joseph l'y mynat. — Et quant Marie devoit entrer en
la maison Zacharie, se li vint Elizabeth al entree al encontre de lee, et se
1'acolat et ly fist grant fieste en disant : « Hee Dieu! que m'est-ilh avenus *
» grant joie et grant honneur, quant la mere Dieu, le roy de chi monde et
De sains iohans qui » de chief, me vient veioir. » — Sains Johans, qui encor astoit en ventre sa
mere, cognuit son Saingnour, si soy drechat sour ses dois pies, et puis
pariat en Tent re sa
mere.
4 Nous trouvons en le Scripture que li verge. B. 8 Qu'ilh tn'est avenus. B.
• Et le tenchat. B.
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LIVRE PREMIER. 541
s engenulhat et jondit ses dois mains vers son Sangnour, et li priat merchi
et dest : « Sires, bien vengnies tu qui m as tant de vertus donneit que je
» me puy drecher chaens ; or sai-ge bien que tu es venus por tes gens
)> salver? » Et commenchat sains Johans f a dire le Magnificat anima mea i>ei augment.
Dominum; et si hault disoit tout chu que la vois en venoit fours de la
bouche Elisabeth sa mere V Chu fut en la citeit Juda % en la maison Za-
charie, le promier an del incarnation Jhesu-Crist, le XXIII I e jour de mois
de junne. — En eel propre jour fut saint Johans neis, et les parens alerent
a temple por nunchier a Zacharie que son fis astoit neis, et li demandont Foi.wr*.
comment ilh ly plaisoit que ilh fust nommeis. Et Zacharie, qui ne poioit
parleir, escript en une tauble de chire que ilhs le nommassent Johans.
Adont fut-ilh bapliziet solonc leur loy, et fut nommeis Johans; et oussi-
toist qu'ilh fut circonchis, son pere Zacharias reparlat. zacharie repariat.
Chis sains Johans fut mult proidhons , et puis baptizat apres \ Et quant
sains Johans oit XV ans d'eaige, ilh entrat en 1 hermitaige por servir Dieu; Dei sainte vie johan-
et ne vestoit aultre vesliment que de foins mariens et de poilhe de chamos,
et se ne mangnat oncques de pain ne alt res via rides, fours que rachines
qu'ilh prendoit por les boscaiges. Quant saint Johans fut neis, si soy parti t
Nostre-Damme del maison Zacharie 5 , et revient en Nazareth et demorat
illuc. — A eel temps avient que Augustus Gesaire mandat par tout le
monde a ses prevost et balhiers que ilhs rechussent et levassent a cascon de
chief d'homme et de femme I denier d'argent; et chu fasoit-ilh por savoir Augurs ii>t ie des-
.. * . „ criplion de monde,
le nombre de cheauz qui astoient en sa subjection et desous sa saingnorie ,
et combien sa terre poroit valoir. Et commandat que tous cheaux des cas-
teals, des vilhes et des boch * apportassent leurs deniers aux citeis desous
lesqueiles ilhs astoient demorans. Chis deniers astoit d'argent et valoit X
petis deniers cursaibles, et astoit dedens ches denirs enprinteit I'ymaige
del Emperere, et escript son nom tout altour. — Se avient que cheaux de
Nazareth et de paiis environ furent somons del paiier leur deniers en Beth-
leem, car la le devoit rechivoir Turnus, qui prinche astoit de chi paiis.
1 Notre texle porte sainte Marie, ce qui n'est 5 En Bethleem. B.
pas en rapport avec le sens du passage. Je fais la 4 Baptizat Dieu. B.
correction d'apres le manuscrit B. ' De Bethleem. B.
' Ces trois mots, necessaires au sens, sont sup- * Pour bore, bourg.
pices d'apres le manuscrit B.
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342 CHROJNIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
Joseph ei Marie s>n Adont y alat Joseph , et se y emmynat sa femme Marie awec ly. Et quant
ilh vinrent alle entree de la citeit, si est la benoite vierge Marie demoree
desus une blanche pire, et ratendit la Joseph qui as to it aleis en la citeit
por avoir hosteil; mains ilh y avoit assemblet tant de gens que ilh ne pot
hostet avoir; si revint a la vierge Marie et li dest. — Et Marie respondit
qu ilh troveroit bien hosteit; si entrarent ambdois en la citeit, et trovarent
la filhe done riche hons, a cuy Marie priat que elle li vosist presteir une
anglechon ' en sa maison. Et elle respondit qu elle n'astoit mie damme del
hosteit. mains s'elle poioit, elle prieroit tant son pere que ilh li presteroit.
Atant vint la filhe a pere, et li priat; mains son pere li dest que sa maison
astoit trop plaine de gens, et la filhe li dest qu'ilh les metleroit bien en
I estauble des mules, et chis li otriat. — Atant entrarent dedens Marie el
Joseph, et la filhe les mettit en stauble, et leur fesist la pucelle volentier
ayde, se elle posist; mains elle n'avoit nuls mains, et touvois elle leur fist
Gran myracie de Nos- aporteir pain et vin, et de teils biens qu'ilh avoit al hoisteit '. Et quant chu
vient enssi que le meynuit, si descendirent en le stauble III candelabre de
fin or, et par-desus III grans cierges alumeis, qui jettoient oussi grant
clarteit que le soleal fait a medis. — Et est chu veriteit, car li une des trois
Merveihedestroischir-chirges art devant l'auteit Sainte-Sophie, en Gonstantinoble s , et les dois
aullres devant les dieux des Sarasins, a Mech * ; et ardent todis nuitet jour,
et ne amerissent riens, et remanent todis tout entiers.
Ches el urges arderoient al fons de la mere, ne ons ne les poroit esteindre,
tant sont-ilh de grant digniteit. Enssi com droit a meynuit, ou la entour,
s'enveilhat sainte Marie, et priat a Joseph que ilh vosist appelieir la pucelle
qui astoit filhe del hosteit; et Joseph le huchat III fois. Quant celle l'en-
Deia puceiie de Beth- tendit , si soy levat et s'en vient droit a Marie, se li dest: « Damme, de
» moy areis petit ayuwe, mains je feray chu que je poray, car je n'ay mils
» mains. » — Atant vient acourant la pucelle devers la virgue Marie ; mains
quant elle vient la, elle trovat 1'enfant deleis la mere qui ja astoit neis,
car chu fut ouvre divine; et issit ly enfe par I'orelhe, ou elle avoit con-
chuit. Tout enssi com ons voit que ly soleal passe parmy une voriere, la ilh
1 Un petit coin. n'en signale qu'un qui brule devant les dieux des
* Pain, chair et vin a fuison, B. Sarrasins.
8 Ce membre dc phrase manque dans le ma- * La Mecquc.
nuscrit B qui, apres avoir parte de trois cierges,
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LIVRE PREMIER. 343
est ia plus saine, tout en teile maniere soy delivrat Nostre-Damme , car Poi.osv.
elle demorat virgue, ne oncques ne fut violees. — Illuc avint gran myracle,
car la pucelle, qui sens mains astoit, vout prendre l'enfant az dois toignons '
de ses bras, et Dieu ly rendit ses dois mains. Enssi nasquit Jhesus en 1 Jfa«"« «»; myr«ie «
povre lieu % le promier an del incarnation, le XXV e jour de mois de de-
cembre, enlour I i'heure de meynuit. Adont furent toutes acomplies les pro-
pheties de la nativiteit Jhesu-Crist, qui longtemps devant avoient esteit Lm propheties sont
r ' i o r acomplies.
denunchies par les sains prophetes. — Adont chaiit 1'ymaige que Virgile
avoil faite a Rom me, enssi com jay dit deseur *, ou ilh avoit escript que :
Quant viergc enfant auroit,
Que ladit ymage chairoit.
— Item, quant Jhesus fut neis, ladit pucelle le cuchat en une creppe et
I'enwolepat de blans drappeais. Geste pucelle que je dis fut nominee Anes-
tause, et c'esle la virgue * sainte Anestase, qui vient corrant a son pere, qui
astoit I des maistres de la loy, se li monstrat ses mains. Se li dest : « Qui
» tat rendue novelles mains? » Et eel respondit : « Pere, ly Salveur de
» tout le monde, qui maintenant est chaens nets de mere. » — Quant chis Gram myraeie du pen-
entent sa filhe, se ne le voult mie croire, ains fut mult corochies, si prent e ,a pucelle '
une espee et dest que ilh trencherat sa filhe ses mains, car elle faulsoit leur
loy vilainement; mains quant ilh le quidat ferir, si avoiglat et ne voit got 5 ,
si criat a sa filhe merchi. Gelle respont que jamais ilh ne seroit relumy-
neis 6 s'ilh ne creioit en la virgue Marie, de cuy Dieu astoit neis. Ly juys
dest : « Filhe Anestaise, je croy fermement que tu as tenuit a tes mains le
» soverain roy de monde, qui de la vergue est neis sens luxure et sens
» pechiet, mains en pure virginiteit. » Et tantoist qu'ilh oit chu dit, se
revient a ly sa lumyre. En Festauble ou Dieu naquit, avoit II biestes mues,
I buef et une asne 7 , qui le rechafoient de leur alaines, car adont fesoil
mult froit, ch'astoit ly plus frois temps de l'an.
Dieu ly soverain roy fut neis en petit estat, chu nos signifiie humiliteit.
1 Moignons. e'est un uoaunn qu'il faut lire. Je donne la pre-
1 En I basse maison. B. feVence a Vu, qui ne doit pas empecher de pro-
* Voir p. 23i. noncer virge.
4 Le chroniqueur ecrit le mot de direrses fa- * Goutte.
cons. La lecon la plus frequente est celle qui se 6 Returner dans Roquefort,
presente ici. Seulement il y a doute si apres le g 7 Une mule. B.
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544
CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
gli*e.
Del four sour quoy
Dieu jut.
^S'fuifaiM 1 "^ 1 ^' ( ' eveis sav oir que ly estauble ou la creppe estoit fut depuis ediGiet une
engliese en laqueile giest sains Jherome, ly noble docteur qui enlumynat
sy forte m en t sainte engliese f de sa bonne doctrine; et y gist oussi ma-
damme sainte Paule et sainte Eustoche •; ches trois gisent en droit lieu ou
la creppe fut. — En celle engliese fut mis ly fain ou ly four 5 sour quoy
Dieu jut quant ilh fut neis ; mains depuis le fist sainte Helene , le mere I'em-
perere Constentin *, porteir a Romme et mettre en l'engliese Nostre-Damme
le maiour. — Celle jour que Dieu fut neis, vienl I angle aux pastureals, el
se leurs nunchat que Dieu astoit neis de virgue en Bethleem, et la I as-
sent adoreir. — Adont est aparut I estoile deseur Bethleem la citeit, qui fist
les pastureals corir vers Bethleem; si troverent Jhesum droit en 1'estauble,
Deicirconcisionjhesu- sen furent mult joians. Al VlII e jour fut-ilh baplisiet ou circonchis solonc
le loy des Juys 5 ; si vos diray comment ilhs ly trencharent del peais de son
inembre naturel; chu estoit la baptemme des Juys, et Dieu qui fut extrais
des Juys fut baptisies ou circonchis solonc leur loy. A eel citeit de Beth-
leem fut la joie mult grant faite por eel nativiteit, et disoit cascons que
chu astoit ly fis Joseph; mains chu astoit gas. — Item doit-ons savoir que
ons true en la sainte escripture que le jour quant Dieu fut neis avient a
Romme mult grant myracle, car les riwes e qui coroienl la, et par especial
aierveihedc in Taba- la Tybre , et une fontaine que ons nom la Tabarite emeritoir 7 qui siet en
rite emeritoir. ^ ' a a
1 Mot supplee d'apres le manuscrit B.
f Sains Eusteches. B.
8 Lc chroniqueur a deja employe cette forme
d'indiquer une seule et mcrae chose : le foin, par
deux expressions differentes.
4 Mot supplee d'apres le manuscrit B.
5 A VHP jour le fisent li Juys baptesier a leur
loy. B.
• Riviers. B.
7 II a deja etc" question de cette fontaine, p. 354.
Quant aux mots Tabarite emeritoir, ils sont la tra-
duction passablemcnt defiguree de Taberna meri-
toria. On designait par la une especc d'hospice
pour les soldats invalides. L'cmpereur Alexandre
Severe en fit don au pape, et sur cet emplacement
s'eleva Feglise de Saintc-Maric en Transtcvcre, la
premiere ou les Chretiens pratiqucrent publiquc-
ment leur culte. On Tappela primitivement Basi-
lica fontis olei y a cause d'une source d'huile mine-
rale qui y jaillit subitement Tan de Rome 753,
comme Fat teste P. Orose dans son histoire (VI, 20).
Jean dOutremcuse fait ici allusion a cet evene-
ment. Aujourd'hui encore sous le premier degre
du choeur, au-dessus d'un soup i rail de la crypte,
on lit Tinscription : Fons olei. Je dois ces rensei-
gnements, et d'autres dont j'ai precedemment fait
mon profit, a Tobligeance d'un ami, M. Tabbc
Cajot, desservant de Teglise Saint-Jacques a Na-
mur. Ce jeune et savant eccldsiastique a fait scs
etudes tbeologiques dans la capitale du monde
chretien , et il y a mis son sejour a profit de telle
facon, qu'il en connalt les antiquites aussi bicn
que le premier archeologue de cette cite eclebre
entre toutes.
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LIVRE PREMIER. 348
Trans-Tyberin, devjnrent oyle, et par tout le jour jetton t grans riwes 1 . — Et
enssi apparut I circle entour le soleal, al manere del arch celeste. Item en
la citeit de Jherusalem entrat a chi jour une bieste que oncques nuls hons
n'avoit plus veyut, n'en ne savoit-ons dont elle venoit, ne queile bieste chu
astoit : elle coroit par la citeit de Jherusalem, et disoit que Jhesus astoit
neis de virgue, qui venoit tout le monde rachateir. — A eel jour astoit ly
roy Herodeen Jherusalem, qui oit mult grant duelhe de chu que la bieste oe Hwode qui Youioit
disoit, et jurat que ilh feroit l'enfant qui neis astoit ochire. — Adont regar- For^T*. "
dat Herode vers Orient, si at veyut le stoile flammant*; si appellat I sien d«i stoiie flamnwnt.
siervan, et li dest qu'ilh fesist les pas bien gaitier, car qui poroit prendre
l'enfant qui astoit neis, ilh donroit a cheli si grant terre qu'ilh seroit riche
a tousjours, car ilh voloit l'enfant ardre et exilier. — A eel temps astoit
roy de Tharse en Perse uns valhans hons qui astoit nommeis Melchior en Meichiorieroy.
hebreu; chu est a dire en grigois Sarachin et en latin Damasticus. Si avoit
1 aitre roy en Arabe qui astoit nommeis Jaspar en hebreu; ch'est en gri- j« P *r.
gois Malgalat, et en latin Appelliens. Et avoit I aitre roy en la terre de Saba 8 ,
chis fut nommeis en hebreu Ballhasar ; chu est en grigois Galgalat, et en Baiusar.
latin Amerus. Ghes trois roys astoient si grans clers qu'ilhs astoient nom-
meis devineurs, e'est ortant a dire com philosophe. — Ghes trois roys Les troiirois ten toot.
veirent i'estoile qui s'apparut en Orient, le jour que Dieu fut neis, et le
veirent tous oussitost ly uns com l'autre. Adont se mist cascon de ches
trois roys al chemyn, pour aleir ou li estoile les conduroit, car ilh disoient
que Dieu astoit nasquis de virge qui le monde devoit rachateir; se le vo-
loient aleir adoreir a la citeit de Gassath * en Ynde. S'y soy trovarent ches
trois roys, et s'asemblarent par bonne compangnie, quant ilhs soy cognu-
rent et oirent dit li uns a l'autre leurs opinions 8 , et astoient tous d'onne
opinion. Celle citeit de Gassath siet a LII journeez de Bethleem , et nun- cassath u citeit.
porquant Dieu fist a trois roys grant myracle, car ilh vinrent en Beth-
leem a XIII journee droite; car ilh avoient ja aleit III ou fill journees,
anchois qu'ilhs s'encontrassent a Gassath. — Tant alerent ches trois roys que Les in ro is viorent en
ilh entrarent en Judee; si ont troveit aux passaiges grans gens d'armes qui
1 /to. B. « Calsach. B.
* Flaboaint. B. 5 Et s'oirent conlez leur opinions. B.
s Sable . B.
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346 CHRONIQUE DE JEAN DX)UTREMEUSE.
Herode parallel mm. les prisent, et les my n a rent devant H erode, qui leurs demandat cuy ilhs
astoient et qu'ilh queroient. Promier parlat Jaspar et dest : a Sires, nos
» summes rois qui allons querant I jovene damoiseal, qui est neis novelle-
» merit, qui justicherat nos et vos et tous cheaux qui sont et qui sieront,
» car illi est roy de tout le monde. » — Quant Herode entent chu se fut mult
enbahis, et dest-ilh par trahison que chu ne poroit-ilh croire neis plus que
uns cappons ne poroit del escuel ou ilh astoit apparelhies * por mangnier,
Mincie a Herode. salhir de la tauble a la perche chantant. La demonstrat Dieu gran myracle ,
car ly cappons salhit en plummes com de promier, et volat a la perche
chantant*. Adont dest Herode aux trois rois par grant trahison qu'ilhs alas-
sent tant querant qu'ilh le trovassent, et quant ilhs l'avoient troveit se re-
tournassent par la, et ilh l'iroit aoreir. Et les trois roys li oirent en convent;
puis soy parlirent de luy, et soy misent alchemyn droit ou ilh veirentl'es-
toile flammant, tant com ilh sont entreis en Bethleem. Et li estoile s'abas-
sat, si les mynat tout droit sour la maison ou Dieu astoit, puis chaiit li
estoile en I puiche; et les trois roys entrarent en la maison, si ont troveit
Marie qui alaitoit Dieu, son enfant.
Lesiiiroysoffrirenta Atant prist cascons des 111 roys ses joweals qu'ilh. avoit aporteit, et ly
esus earsjoweas. £p r j ren t . jy anne i s Melchior offrit encense, et Jaspar myrre, et Balthasar
oir, et ilh * les prist; lesqueis trois dons ont trois grandes signlfianches :
car ly oir signifie qu'ilh sierat roy de tout le monde, ly encense signifie
Lesignifianchedesiu que ilh feroit la vielhe loy chaioir, et estaubliroit une novelle, et li mirre
dons ' signifioit que ilh sieroit mors en la crois por le peuple a rachateir. Item nos
trovons en 1'escripture que quant Melchior ouffrit a Dieu encense, ilh ly
semblat qu'ilh fust en I'eage de 11 ans, et ilh semblat a Balthasar qu'ilh
ewist V ans, et ilh semblat a Jaspar qu'ilh ewist VII ans. — Apres chu se
sont les trois roys partis , et ont pris hosteit en Bethleem meismes ; et quant
ilhs furenl al repouse * se dest Melchior aux auLtres : « Bien doit yestre chis
jhesus sengnat les 111 » enfes roy de tout le monde , car ilh est mult saige , quant nos sengnat de
roys * » sa diestre main qui signifle qu'ilh morat en crois, et enssi qu'ilh moy
» semble ilh at bien d'eage II ans. » Enssi demoront 5 et se sont aleis cu»-
1 Atoumeis. B. 8 Dieu, Teofant Jesus.
1 Sur cette tradition fort repandue, voir un 4 Retires. Roquefort donne repous et repon*,
article de Liebrecht, dans les Gdttinger Gelehrte cache, repoustailles , retraite.
Jnzciger; 1864 , p. 873. * Demorat. B.
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LI VRE PREMIER. 347
chies. — Mains quant chu vient a meynuit , se vient uns angle aux trois roys , Foi. 96 ▼•.
qui leurs dest: « Barons, Dieu vos mande que vous n'en raleis mie par%Y£ys 8 . appirttltu *
» Judee, car Herode vos ochiroit f ; mains raleis-en par aultre voie, et Dieu
» vos garderat de tous perilhes \ » Quant les trois roys entendirent chu , ilhs
se sont leveis, et puis en ralont par altre voie, et sains Mychiel les con-
duisit jusques en leurs paiis. — A eel temps astoit la constummes, quant
les dammes soy relevoient d'enfant marie , qu'elles portoient au temple dois
colons ou turturelles, si en faisoient oblation, car le colon signifie humi-
liteit et la turturelle casteit ; sique la virgue Marie , quant el oit jeut 8 Marie presenut jhe-
XXXIX jours, si alat al XL e al temple ou astoit gran parage. — Adont vint
I angle a sains Symeon, Tevesque de la loy, et ly dest qu'ilh soy appare- Langies'apparotasaiM
lhast, car ilh troveroit 1'enfant qui astoit li (is de Dieu. Atant vint sains ymwm eTe8q,,e,
Symeon au temple , si at encontreit Nostre-Damme qui venoit a noble com-
pangnie. Al entreir en temple fist Dieu gran myracle, car sains Symeon Gran myracie de tains
veit clerement, qui par-devant astoit si floible et si vies qu'ilh ne veioit
gotes, et ne soy poioit sourtenir sens baston ; mains oussitoist que la virgue
Marie li oit son enfant offiers , Uh le priste et l'enportat sour 1 auteil enssi
fortement com ilh fuist en l'eaige de XXX ans. Sains Symeon portoit che-
luy qui meisme le sourtenoit, car ilh portoit son saingnour qui li donnoit
forche et vigeur,chu astoit son Dieu son salut' qui ly donnoit si grant vertu,
que ilh portoit et sourtenoit cheluy qui porte et sourtient tout le monde.
Dieu amat mult sains Symeon, quant son corps laisat a luy ouffrir. En
teile manere fut Dieu ouffert al temple par sains Symeon , qui longement
I'avoit mult desinramment ratendut et demandeit.
Or puisque je vos ay la veriteit compteit del incarnation et de la nativi-
teit Nostre-Saingnour Jhesu-Crist , si est raison que je die chu que alcons
alligent en chi fait, qui revient tout a unc. — Ilh est veriteit qu ilhs ont mult De u nativiteit jbesu-
de croniques qui ont esteis fais par pluseurs grans clercs et docteurs , et
par especial : Ysidorus , Tytus Livus , Eusebius , Orosius, Beda le venerable
priestre, Paulus le dyaque cardynale, Johans Crisostomus, Rogerius de
Salerne, Methedius 8 de Avergne, qui ont grant differenche ens es dautes.
1 Vos exilheroit. B. * Au commencement de ce livre , la ou l'auteur
9 Vous mainrat & salveteit, B. indique ses sources , ce nom est ecrit Metho-
5 (^uand elle fut rested couchee. diens.
4 Cc mot doit avoir ici le sens de sauveur.
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348 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Si vous d irons promier comment dist Tytus Livus ' que Dieu fut neis Ian
XLII del coronation 1'emperere Octoviain, que ons appelle Augustus Ce-
saire. Ilh dient veriteit Tan XLII parfais et Fan XLIII im par fa is, car Dieu
fut neis le XXV e jour de decembre, et adont Octoviain avoit esteit XLU ans
emperere le XX e jour de mois de octembre, si qu'ilh coroit el XLIII e an-
nee chu qu'ilh at de XX e jour de octembre jusques a XX V e jour de de-
cembre. Et fut neis par nuit entre le dymengne a meynuit devant le lundi ,
si que ilh fut incarneis le venredi et neis le dymenche, et circonchis le
lundi, et morut leXXV e jour de marche, qui astoitl venredi, par teile jour
qu'ilh fut incarneis. Enssi demorat-ilh awec nos sour terre XXXIII ans
et III mois solonc 1'ewangeile qui dist : J lies us erat incipiens quasi anno-
rum XXX"*, etc. , ch'est-a-dire que Jhesus commenchat a faire ses appa-
Jh xxxiff i8l n vi6q m rans m y rac ' es de XXX ans, enssi com vos oreis chi-apres. — Enssi visquat
■ oil - Jhesus XXXIII ans et III mois, mains les alcuns comptent ches trois mois
por demy-an qui n'y puet eistre , car XXV e jour de decembre devant son
crucifiement astoient acomplis XXXIII ans qu'ilh avoit esteit neis; et puis
oit de jour de sa nativiteit jusques a sa passion jenvier, fevrier et marche
awec VII jour de decembre, qui cressoient oultre les XXV jours , et ilh
faloient a marche; chu sont trois mois tout a point, et enssi ilh auroit le
terme que je ay desus devisett que je true estre veriteit. — Et chu est solonc
1'ewangeile * el solonc Ysidorus, qui fut I gran docteur, qui dist qu'ilh as-
toient passeis del origination de monde , quant Dieu fut neis , V m et U c ,
une an moins, enssi com jay dit par-deseurs. Et Orosius et sains Eusebe
Po1 * * 7 r * le dient lout en teile maniere, qui ont les anchiens histoires mis en escripte.
Et Tytus Livus le dist oussi. — Et Beda dist : Unum tolle datis a mille quin-
que ducentis nascenti Deo tot Beda dat prothoplasto. C'este-a-dire : Tols
unc del daute de V m et 11°, tant donne Beda de promier fait homme jus-
ques a la nascenche de Dieu. Item Paulius dist enssi : Anni novem nona-
ginta centum quinque milia, tern pus erit quando venit qui creavit omnia.
C'est-a-dire chu la meismes que Beda dist, car ilh dist : V m cent nonante et
nuef sierat li temps qui venrat chis qui tout at creieit. — Item ilh sont bien
LXX docteurs de celle opinion, et li englise le tient enssi com dit est;
1 Le copiste a ecrit Lyvus et Tytus; et plus bas, pris Tite-Livepour deux historiens different*. Jc
au lieu de : Et Tytus Livus le dist aussi, on lit corrige d'apr&s le manuscrit B.
encore : Et Tytus et Livus le dient oussi. II a done * L'engHese, B.
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L1VRE PREMIER. 349
mains ilh y at unc Rogiers de Salerne, qui le dist tout en teile manere com ^/ il u e ^.J : e r | g n l asccn *
Beda, qui fut uns de souffisans philosophe de monde. Item Plinius, le gran
philosophe, le tient enssi com Beda '. — Item Methodius de Alvergne f dist
qu'ilh y oit V m II C et XXVIII ans, et les Hebreiens dient IIII* VIII C et
LIIH ans, et les aultres dient VI m ans. — Item ilh astoient passeis VII C et Qu»nsan*Komfutfait
1 . . . , . • . dovant Jhesu-Crist.
XXV ans que Romme avoit esleit commenchie anchois le nativiteit Jhesu-
Crist; enssi le dist Paulius en ses histoires de Romme; et Orosius l'escript
enssi a Augustius. Item ilh y at des aultres qui dient VIl c et XXX1III ans,
et des altres VII C LII ans- Mains Paulius et Orosius escrient vray des
anneez parfaites; mains anneis imparfaites ilh en y at VII C et XVI. Le pro-
mier jour de junne fut Romme parfaite. Si oit en junne devant le nascenche
Jhesu-Crist VII C etXV ans, et oit awec chu qu'ilh atentre ledit promier jour
de junne jusques al XXV e jour de decembre, car ch'astoit sour une annee
corrant, portant que la daute soy renoveloit a XXV jour de marche; et
aux oiimpiades asloit le centesime et XGIII Ian nee seconde; et nos disons
et l'avons calculeit 8 que ilh astoit, quant Dieu fut neis, cent et XCII oiim-
piades la tirche annee de la troiseme part. Chu avons chi declareit , por-
tant que li aulcuns truvent alcuns escriptures qui soy contralient, qui sont
so vent revenant a unc propoise de une intention, quant ons l'at bien cal-
culeit. — Or retournant a nostre mateire, vos saveis que nous avons parleit
desus de unc seul regiment de Romme, assavoir del temporaliteit; et chi *>* regimen tempo.
apres est a parleir de double regimen, assavoir temporeis et spiritueis : ly
spiritueis regimen se ferat par les papes del auctoriteit pontifical , et ly tem-
poreis par les empereres. Laqueile spirituel rengne ou regimen de monde
commenche a Jhesu-Crist, qui fut ly promirs tenant la digniteit pontifi-
cauls de tous presens et tous futures biens. Et ly temporeis commenche a
Octoviain, qui est ly promier emperere, commenchant son rengne a la
venue Jhesu-Crist; si mettons son introite adont, et lassons chu qu'ilh avoit
par-devant regneit.
Sour l'an del origination de monde V ro 11° imparfait, fut neis Jhesu-Crist, Jbesu-cmi i, promirs
* pontifex.
1 En disant : anni ducenti minus uno milUa nuscrit B differe; on y lit : El as olympiades astoit
quitique, processit tuinasccnlis gatidia Christo. C'est le centesme et XCII I le promier olympiade solonc
ce qu'ajoutc le manuscrit D. che que alcons escripvent; mains sains Jerosme es-
* Toujours le mdme que Methodiens. eript cent et XCII II I'annte seconde, et nous disons
§ Pour le passage qui precede la lecon du ma- et V avons calculeit, etc
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350 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
ly lis de Dieu, ly promiers et soverains pontifex, qui tient le siege XXXII 1
ans et III mois. — A celle temps astoit Augustus Cesaire — qui astoit del
La generation Octo- generation de Romme de Gallant, le senatour , fis Octoviain, et sa mere fut
Helaine, le soreur Julius Cesaire, del generation Eneas, le due de Troie,
desquendus — emperere, qui regnat apres chu que Dieu fut neis XIII ans,
octoviain astoit sire de et sen avoit re erne it XLIII; chu sont ensemble LVI ans. — Chis Octoviain
tot le monde. •
astoit a chi temps sire de tout le monde, de orient en Occident, de medis
en septentrion , et par tout le cercle occeaine ; et toutes les nations des
gens le tenoient a saingnour, tout en pais sens contradiction nuls. Et quant
Jhesus fut neis, si oit a monde dois bons governeurs : chu sont dois fortes
glaives spirituels et temporels, qui suffient a regiment del Engliese : chu
D monde lumyll,ir * de sont * es ( ^ ' s ' um y nars <l ue Dieu a * m * s en firmament, lesqueiles sont del
auctoriteit pontificaule et del poioir imperiale. — Et enssi com ly soleal est
ly gran lumynaire qui a chiel emperial * prent sa clarteit, et la lune le petit
lumynaire qui prent sa clarteit a soleal * ; enssi est-ilh de pontifical qui
represents le soleal et prent aj diyiniteit sa clarteit, et ly emperere qui re*
presente la lune et prent a soleal sa clarteit; e'este a entendre que ly em-
perere prent sa clarteit et son bien a pape, chest a Sainte-Engliese. Et enssi
Foi. 97 t-. at dois fortes espees en terre venues a chi noveal regyment. — Augustus
De octoviain aui con- Cesaire conquist plus de terre et de paiis que nuls altre devant luy, et ly
quist mult
in aui con- Cesaire conquist plus de terre et de paiis que
epaus. ( j onna j j)j eu 1'auctoriteit que ilh se potappel
que ilh se pot appelleir sire de tout de monde,
car ilh conquist al empire de Romme les royalmes de Egypte, de Calabre,
Dalmatie, Pannonie, Acquitaine, Yliricum, Gresse, Wandalicos 5 et tous
les pors de mere et leurs citeis. Ilh desconfit les Daucos * qui pluseurs
fois avoient les Romans desconfis et ochis, et si en prist teile venganche
qu'ilh en ochist O et si en prist XL™, se les amynat oultre le Riens en
Galle *. — Augustus conquestat tout Persie, que nuls devant luy ne pot
onques conquiere, et Armenie et Parthis •; et conquestat Sythie et Judee,
qui devant ne cognissoient les Romans; et conquist Barbarie 7 et Palestine,
1 Pour empyree? s Armenie a Parthis restoit, ajoute le manu-
* C'est U comparaison superbe que faisait Gre- scrit B.
goire VII, pour expliquer l'obeissance qu'il r^cla- • Ces deux pays ne figurent pas dans le manu-
mait de Tempereur Henri IV. scrit B, qui les place ail leurs, comme on Tient dc
* Vindelicie. le voir.
4 Les Daces, sans doute. ' Le pays des Berberes.
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LIVRE PREMIER. 381
et tout chu que les aultres navoient point conquis k leurs temps. Chis em- Ly plus be»is how de
■ ■ • i i 11 * 1 i monde, Augustus.
perere fut li plus beais hons de monde de corps et de tous ses membres , et
tenoit X pies de hault, et astoit gros et reons, et si bien fais qu'ilh n'y
falloit riens; et tout sa plus grant bealteit li gisoit en ses yeux, car quant
alcuns le regardoit es ses yeux, ilh ly sembloit que chu fussent raez de so-
leal qui issoient de ses yeux. Si avint une fois que I chevalier parloit a ly; Deoctoviajnetduche-
si regardoit la bealteit de ses yeux, si tournat sa faiche d'altre costeit, et
quant ons ly demandat porquoy ilh faisoit chu , si respondit portant que
la lumiere de ses yeux ne poioit regardeir nient plus com le soleal. — Et
jasoiche qu'ilh astoit beais et bons, nientmoins ilh avoit grant default de
visches ', car ilh astoit I pou maul patiens et yreux, et couvertemeut en-
vieux et dechivable; ilh avoit convoities de domineir plus que nuls aultres.
Toudis prendoit delectation en jeux de taubles '; ilh avoit abstinenche de
boire et de mangnier et de dormir ; et astoit mult luxurieux, car entre XII
concubines ou filhes ' avoit a constumme del dormir. — Ilh avoit refuseit *
sa femme, qui avoit a nom Scriboine *, de sa compangnie, et si tolltt une
altre femme a son marit , qui avoit nom Labia, laqueile Lalia 6 avoit de son Dc sa femme Labia.
marit II fils, dont ly I astoit nommeis Tyberius et li altre Druse. Et
jasoiche qu'ilh fust mult luxurieux, toutvoies faisoit correxion a cheaux
qui astoient troveis en fornication et en adulteir, si stroitement solonc la
loy que ch'astoit mervelhe^de parelhe fait envoiat-ilh Ovide, le poete,
en exilhe si long que onques ne revienet a Romme. — Teils fut Octo-
viain; mains de corps et del main fut ly miedre chevalier de monde a son
temps et qui plus conquestat, si com dit est, et se mist paix par tout le Paiipartoutiemondc.
monde. Et mult de roys de tous paiis le venoient servir, por son beal-
teit a veir 7 . Ilh ne voloit movoir nule garre encontre nulte personne, se
ilh n avoit juste cause; de chu disoient ypluseurs qu'ilh astoit mult orgu-
Iheux 8 .
1 Le chroniqueur dit ici le contraire de ce qu'il * La premiere femme d'Auguste s'appelait en
veut dire, difaut de vices signifiant manque de effet Svribonia.
vices; aussi le man user it B porle-t-il : avoit ilh * tvidemment il s'agit de Livie.
aulcones viches. 1 Et mult de roys de Penchexoir, de Persie et
* Une espece de jeu de trictrac, connu des les des parties d' Orient le venoient veoirpoursa beateit
plus anciens temps chez les peuples germains. et servir. D.
* Baselctes. B. * Au lieu de cela, on lit dans le manuscrit B :
4 Hosteit. B. ons li tournat mult sovent a orguelh.
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352 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Chis Octoviain, devant chu que Dieu fust neeis, se voloit faire adoreir
com Dieu de vie, et si en oit sa conscienche mult en muit ', car ses gens
LesRoflwnsTeienudo- 1'enmovirent a chu qui tousjours ly disoient : « Nos toy volons adoreir, car
» lu es Dieu de vie; et se tu ne 1'estois, les grandes prosperiteis que tu
» as ne toy venroient mie enssi de jour en jour succedant. » Mains ilh le
refusoit toudis , tant que une fois ilh en demandat respli * del respondre
De sibiiie Tyburtine. dedens III jours; si mandat Sibilhe Tyburtine 8 , la sage clergeresse, et
ly dest * chu que les senateurs ly requeroient del faire, a cuy elle Si-
bilhe demandat III jour de respit, et puis se responderoit al emperere. —
ce quelle di$t a ocio- Apres les III jours revint Sibilhe al emperere, et dest en teile manere:
Judicii signum tcllus sudore madescit,
Et celo rex adveniet per secla fu turns, etc.
Tan tost quelle oit chu dit, ly chiel s'aovrit si clerement que Octoviain le
yeit, et grant splendeur en lanchat sor ly, et veit en chiel une tres-belle
vergue estante sour I alteit, une fis tenant entre ses bras. De chu oit grant
Poi. 98 r«. mervelhe Octoviain; mains ilh oiit une vois qui li dest : Hec ara filii Dei est,
L.uteit de chiei. ch'est-a-dire : « Chis alteis est ly fis de Dieu. » Tantoist que Octoviain 1'en-
tent, ilh ne se pot sourtenir , ains chaiit a terre en adorant Dieu. Quant ilh
destcelle vision aux senateurs, s'en ont oyut mult grant mervelhe; si las-
sarent alleir la requeste que ilhs faisoient al emperere de luy adoreir, et
demorat la chouse enssi. Celle vision fut elle propre chambre Temperere
Octoviain en capitoil, ou maintenant est li engliese Sainte-Marie, al alteit
de Dieu de chiel 5 . — Apres ceste vision , ne passat gaire que Octoviain
alat en Orient, et le conquist, sicom dit est par-desus, quant ilh soy fist ap-
pelleir al revenir Augustus. Deispuis celle heure qu'ilh oit (a vision veyut,
ocioviaincreitenDieu. creit Octovian en Dieu , mains ilh ne l'oisoit dire; sovent li sovenoit de Vir-
ion u. gile et de sa doctrine. — Item, le seconde annee del incarnation Nostre-
DeTyrus, roi d'Espa- Saingneur Jhesu-Crist, en mois de may, avient que ly roy de Magonchie 6
gne.
1 Nous avons deja rencontr6 ce mot avec le sens * Recital, B.
de mouvement. * L'egLise est en effet appelee ara cash. Voir plus
8 Delai. Roquefort donne le verbe respleitcr. baut p. 72.
Le manuscrit B porte : induis. ' Ce nom ne peut designer que Mayence (Ma-
s Sur cette tradition relative a la Sybille, voir gonlia et Moguntia), qui certes est assez eloignee
ce que le chroniqueur a deja dit p. 72. de TEspagne.
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LIVRE PREMIER. 353
en Espangne as to it alleis cachier en unc forest; si s'enbatit si avant qu'ilh
enlongat mult sa citeit. Si commenchat a regardeir en I'aire, car ilh astoit
mult Sons astronomiens ; se veit ly roy, qui astoit nommeis Tyrus, que
s'ilh gisoit awec une femme celle nuit, ilh engenroit une enfant qui venroit
en grant prosperiteit, et averoit grant signorie ' en pluseurs provinches et
ysles de mere. Mains portant qu'ilh astoit trop eslongiet de la citeit de
Magunche, se ne poroit gesir awec sa femme; se corit tanl parmy le forest,
qu'ilh trovaj la filhe de I moisnier* qui astoit nomeePyla, awec laqueile comment pa»te fut en-
ilh soy cuchat ladit nuit; si engenrat I fis qui fuit puis en grant prosperi- » enreit -
leit. — Lendemain al matin, quant ly roy soy parti t, se dest al femme
quelle gardaste bien le fruit qu'elle avoit conchuit, et quant ilh astoit neis
se le nommast Tyrus, apres luy, et ly envoiaste tantoist. Puis s'en partit
ly roy, et la femme 5 revient a la maison son pere, et portat son temps. Et
quant li enfe fut neis, et ons le duit nommeir. si avoit la femme obliet le
nom de roy, altrement qu'elle disoit que ilh ly sembloit que ilh astoit nom-
meis Tus, ou bien semblant. Se dest que portant que elle n'astoit pais de
chu certaine, se li donnat le nom de son pere, le moisenier. qui astoit nom-
meis Poncius; chu fut son proprejiom; et le sournommat apres lee Pila, et
dest qu'ilh ly sembloit que ly roy astois nommeis Tus, se li mettit awec le
sien nom : si oit nom Pilatus. Et chu fut chis qui depuis fut prevost de
Judee, sicom vos oreis. En eel an meismes, envoiat Pila son fis a son pere,
le roy de Magunche, et ilh en fist grant fieste, et (e fist bien nourir awec
unc sien frere, enfant de son eaige, cuy ly roy avoit engenreit en la royne
sa femme; mains pusedit avient grant mechief entre eaux dois. — Item, a
eel temps, avoit en Judee I homme qui astoit issus de la droit lignie Judas, De 4udM qui lrthil
le fis Jacob; si astoit nomeis Ruben, et sa femme Cyboria; si astoient ,be$uCrist -
bonnes gens selonc leur loy. Si avient que le thier an del incarnation Jhesu- L»n in.
Grist, le VII jour de mois de junne, ly proidhomme jut awec sa femme,
si engenrat 1 fis; puis endormirent; si vient a la femme a vision en son-
gnant * qu'ilh li fist pawour. Si despertat ", et commenchat a souspireir et a u mere judas veit <-.
rision cbu qu'ilh fe-
roit.
1 Noire texte repete ici le mot prosperiteit, ce Notre texte porte : puis en vision, en dormant,
qui doit 6tre une erreur. Je corrige d'apres le ma- veit sa femme en songant , ce qui n'est, certes, pas
nuscrit B. bien intelligible.
1 Masoincr. B. * Ce mot a probablement ete mal ecrit. II faut,
5 La damoisette. B. je crois, lire : si dispiertat, s'eveilla. Voir Grand-
4 Je corrige cette phrase d'apres le manuscritB. gagnage, Dktionnaire etymologique , y dispierter.
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354 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
gemir, enssi com gran maul li dewist advenir. — Quant Ruben entendit
comment sa femme soy maintenoit, se li dest : « Je moy mervelhe comment
» et por coy tu essi corochie. » Et celle ly respondit : « Quand tu jesis a
» nuit awec moy, je s^ay bien que je conchus I fis qui, par songne, me
» faite entendant que ilh destruirat le peuple des Juys. » Responl Ruben :
cc Chest uns mauls esperit, et chu que tu le dis demonlre grant felonie,
» car ilh n'est mie digne del racompteir; je voy bien que tu es templee de
» maule esperis. » Adont jurat Cyboria, s'ilh astoit neis, que e[le l'ochiroit
ou le feroit ochire par altruy, car elle 1'avoit enssi songiet, et bien creioit
qu'ilh avenroit trestout enssi.
' Enssi ratendit Giboria le jour de son enfantement a poine et en tristeur ',
et tant quelle s'acuchat, le VII e jour de marche tantost ensiwant, d'onc mult
judas fut enfanteit. beal fis f ; et astoit la lune novelle. — Ruben s'avisat adont, et dest que chu
sieroit trop grant doleur, se tant de maul avenoit par son fis , com sa femme
judas fut mis en i ba- avoit songiet; et si avoit del ochire tres-grant piteit. Atant le mist en unc
batel, sens circonchier ne baptizier, mains ilh escript en unc brieflel que
ilh astoit nomeis Judas; et enssi ilh le nommoit, car ilh astoit descendus de
la lignie Judas, le fis Jacob; puis mist en bateal grant planteit de beais
draps d'oir et de soie , com se ilh fuist fis de roy, puis le laisal alleir par
mere. Et les ondes le jettarent en une isle, qui est appellee 8 Scariolh; et a
cheluy isle prist Judas son sornom, car quant ilh sen parti t, ilh cuidat
judas arivat en lisle eistre neis el isle deseurdit. — Enssi com Judas astoit ariveis en l'isle Sca-
rioth, avient que la royne de la terre vient a rivaige awec ses pu eel les; et
quant elle veit l'enfant qui flotoit sour l'aighe, se le prisent et dessent qu'ilh
sembloit bien eistre issus de royal lignie, quant el les regardarent les draps
et qu'ilh trovarent la lettre. Si veirent qu'ilh astoit nommeis Judas; se dest
la damme : « Se je avoie solas d'homme de si noble lignie, je awisse enfant,
» sique ma terre ne fuisse mie perdue apres moy. » Celle royne ne pot
encques devant avoir enfant , sique cascuns disoit qu'elle astoit brehangne.
— Et portant elle prist l'enfant qui jovene astoit, et le fist.nourir; et disoit
partout sa terre que chu estoit son fis. Et ses gens en estoient mult lies, et
ly roy meismes le cuidoit, car ilh avoit esteit longlemps fours de son paiis;
1 Et a destreche. B. relatives a Pilate ct a Judas, voir deux poemes
* D'on mult beal vale ton. B. latins publies par Mone, Anzeiger, VII, 526 et
* Qui fut appelleit. B. Sur ces deux traditions, 733.
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LIVRE PREMIER. 385
et la damme ly faisoit croire qu'ilh l'avoit lassiet enchainte. Ne demorat
gaire apres que la royne conchuit, de son saingnour le roy de Scarioth,
unc fis qui ne fut mie XIII mois plus jovene que Judas. Ghes dois crurent
ensemble et aleveis ', mains pusedit furent ambedois perdus, enssi com yos
oreis chi-apres.
Le quarte an del incarnation Jhesu-Crist, mandat ly roy Herode tous les La n im«.
maistres de la loy, portant qu'ilh oiit dire que ly roy des Juys astoit neeis, ^^ens! ° hirc le '
et leur demandat s'ilh savoient ou ly enfe devoit naistre de la Virgue.
Adont respondirent les maistres que les prophetes assengnoient que ilh
nastroit en Bethleem. — Quant Herode chu entendit, ilh soy dobtat mult
de sa signorie qu'ilh ne li tollist; se mandat mult de gens d'armes *, et se les
fist gaitier tout nuit. Et chu fut le XXVI 11° jour de decembre, al adjournee.
Et leur dest Herode que ilhs ochissent a matin tous les enfans qui sieroient
troveis en 3 la citeit de Bethleem. — Celle nuit vint I angele a Joseph, et ly jhesusescapat.
dest que tantoist ilh s'en alaist fours de la citeit, luy et Marie et Jhesus,
car Herode feroit demain al matin ochire tous les enfans de la citeit Beth-
leem, portant qu'ilh quide ochire Jhesus. « Et s'en vas droite vers Egipte,
» et ne toy en depairs jusqu'a tant que je le toy nuncheray. » — Quant
Joseph 1'oi't, se soy levat tantoist, se mist la Virgue sour unc mule awec
son enfant. Mains quant ilh devoit issir de la citeit, si at troveit les gens
Herode qui gardoient les portes tous armeis; se alat a I porte que Dismas 4
gardoit, qui astoit asseis fellons; mains Dieu 1'esperat 5 teilement que ilh
lassat Joseph aleir, car ilh ne savoil cuy ilh astoient. Et Joseph se prist
fortement a chemyneir. Et quant ilh fut jour, si entrat Herode , et ses gens
awec ly, en Bethleem, et ont ochis tous les enfans desous 1111 ans. Adont fut
acomplie le prophetie Jeremie, qui dist : « Une vois fut oiie en Ramme en
» grant parleur et cris ; car Rachel , la dierain femme Jacob , ploroit les jo-
» venes mors. » Et furent a chi jour ochis des innocens VII" et IIII milhirs,
solonc 1'Escripture. — Innocens ne sont mie appelleis martyres, jasoiche que
ilh fuissent martyrisies, car ilh deservirent le merite de Dieu, en morant
et nient en prechant. — En paiis de Judee avoit une pucelle qui oit nom De Gonis u puceiie.
1 C'est-a-dire : grandirent et furent Sieves en- * Ce Dismas, -qu'on verra figurer plus loin en-
semble, core, est le bon larron qui porte en effet ce nom
* Grant planteit d'hommes. B. dans l'Evangile de Nicodeme.
§ Lienfans qui scroient desous f Iff ans en, etc.B. ' L'inspira.
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356
CHROMQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Pol.- 99 r*.
Del enfant de chirc.
Gonis, filhe de 1 noble hons de paiis; quant elle veit comment ons decol-
loit les innocens, si oil grant dolenr que elle ne fuit si tempre mariee quelle
ewist enfant qui fuist decolleis awec les aultres, en disant: « Hee Dieu! qu'a
» bonne heure fut nee celle mere ly cuy enfe bien awireux f qui * chi morat
» por vostre amour! » — Puis est la pucelle avisee; si at faite 1 enfant de
chire, se le cuchat en unc berchoul, et li mist sa mamelle en sa bouche,
enssi com ilh fust vief. Gran myracle demonstrat la Dieu, car ilh 8 donnat
chaire et sane a celle figure, et vertu de parleir, si qu'ilh parlata Gonis et
dest : « Pucelle et yirgue bien awireux, a bonne heure fus-tu nee, car
)> ajourd'huy tu as fait bonne journee , car por ton amour m'at Dieu don-
» neit vie; or ne moy fais pas circonchier, car je veulhe morir por l'amour
)> de ly ; je suy huy neis , si seray demain ochis , si moy baptizeray en mon
» sane. » — Enssi demorat jusques a lendemain, que les gens Herode sont
la venus; sy ochirent par le vilhe tous les enfans, dont gran cri$ est esleveis.
Et la oit pluseurs dammes qui voirent leurs enfans gardeir, se les misent
Des enfant qui devien- par les forestes ens bussons; de coy Dieu soy corochat, et devienrent sin-
gnes *. Mains quant la pucelle Gonis veit les gens d'annes Herode, si com-
menchat a chanteir et a berchier son enfant; et les gens Herode qui l'oirenl
sont eel part aleis , et ont pris l'enfant , si Font ochis : mains de chu soy mer-
velhat tout le peuple que oncques li enfe ne sangnat. — Adont vient I che-
valier a Herode, et li dest qu'ilh avoit ochis 1 enfan si beal que oncques ne
veit teil, et n avoit gotte sangneit, et li avoit buteit l'espee en ventre; mains
quant ilh l'oit ochis , ilh veil le chiel ovrir deseur ly, et venir les angeles
qui avoient 1'arme de eel enfant presenteit a I saingnour, qui astoit mult
beais. Quanl ilh oit chu dit, Herode sen moquat. — Et Noslre-Damme sen
alloit tendant vers B Egypte mult espawentee, et Joseph le conduisoit. Si
ont tant alleit, que ilh vinrent passant deleis I proidhons qui des bleis
semoit; Marie le saluat et li demandat le chemin vers Egypte, et li proid-
» hons li dest mult douchement : « Vos en yreis toudis le chemin que vos
» aleis, tant que vos trovereis une arbrespine 6 ; puis tenreis le chemien a
rent singoes.
De proidhons qui se-
moit des bleis.
1 Ce mot , que nous avons deja rencontre plu-
sieurs fois , et qui signifie : heureux , est reste en
liegeois. Voir Grandgagnage, v° aweure.
* Ce qui doit e"tre de trop.
* Elle, par erreur, dans notrc tczte. Je corrige
d'apres le manuscrit B.
4 Singes.
* S'en alloit le grant chemien vers, etc. B.
6 Mauvaisc ortbograpbe, pour albespine.
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L1VRE PREMIER. 357
» diestre, en costiant les boscaiges; apres trovereis unc riweseal, qui est
)> de fluis de paradis terrestre. Quant vos sereis passeis celle aighe, se
» sereis a segure, car nuls larons n'y oise habiteir. »
Atant sont partis. Mains Jhesus huchat Joseph, el li dest qu'ilh dit a chis jhesus pwoiieii Joseph.
proidhomme que se les gens le roy Herode le demandent s'ilh nos at veyut
passeir, si responde oilh quant ilh semoit les bleis ; ly proidhons entendit
bien Jhesus, si li dest: « Enfes, par ma loy, volentirs. » Atant sen vont:
mains ilh ne furent gaire long, quant les gens Herode sont la venus, et
demandent a proidhomme s'ilh avoit la veyut passeir I homme qui condui-
soit une femme sour unc mule et I enfant, que ons leur avoit racompteit Grant myr« c iedejhe-
qu'ilh s'en aloient par la. Quant li proidhomme les oiit, se respondit :
« Oilh, chi les vey passeir, quant je semay chesti frument que vos veies
» maours por colhir; depuis je ne vey chi personne passeir. » Enssi retour-
narent les gens Herode, et ly proidhons veit mult bien que chu astoit Dieu
qui la avoit passeit le matin; se dest que ilh yroit apres luy et le sierverat,
et refuserat 1 femme et ses enfans. — Lendemain, droit al matin, s'en allat
ly proidhons apres Nostre-Saingnour; si trovat en son chemien les pas que
ly mule avoit faite, et li proidhons s'abassoit a terre et les baisoit, en de-
priant Dieu que ilh ly laisast retroveir la mere et 1'enfant. Tant alat liDe proidhons, comment
proidhomme, qu'ilh at passeit le pont del aighe qui departoit les terres. Et ve "
la encontrat-ilh sainte Marie qui tenoit son fis Jhesus , se les saluat et dest :
« Damme, laisies-moy alleir awec vos *, se vos serveray ; je suy li hous qui
» hire matin semoit le frument , qui ja est maours ; portanl suy venus apres
» vos que je s<jay bien que chest Dieu que vos teneis, par qui salveis sierat
» tout le monde. » Quant Marie entendit le proidhomme, se Tat retenut
awec lee. — Chis proidhons fut puis ly gran amis de Jhesu-Crist, car Dieu
l'endoctrinat et 1'ensengnat tant, que ilh fist messe chanteir et son santisme Poi. 99 v.
corps sacreir. Et fut chis hons nommeis Amadus, et chest. sains Amadus.
— Item a eel temps n'avoit dammes en Egipte qu'elle n'awist en sa cham- l«* ydoiie.de Egi P u
bre ydolles faites d'or ou dargent, de coevre ou d'erain, que elles ado-
roient tous les jours a matin et al vespree; mains oussitoist que Jhesus
1 Et guerperat. B. 11 est probable que le mot abandonnera.
refuserat de notre texte a le meine sens que le * Damme, lait-tnoy aleir o toy. B.
guerperal du manuscrit B, et signifie : laissera,
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358
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
relevat.
entrat en la terre, toutes les ydols criarent si fort que ly peuple en fut
tout enbahis, et puis chai'rent tes ymages a terre et debrisarent en piches.
Adont avoit en Egipte I juys qui astoit mult saige, qui dest a peuple
qu'ilh avoit veyut en la scripture que quant Dieu nasqueroit de virgue, qui
debriseroit les ydolles. « Et portant ons puel clerement veioir que ilh est
De juys qui demoroit » neeis ; se priies a li devoltement qu'ilh soy lasse veioir. » Atant priarent
( tout la nuit a Dieu que ilh se vosist a eaux demons treir. Ghu fut en une citeit
qui oit nom Cayr *, qui siet en Egipte , et Nostre-damme et Jhesu-Crist awec
Joseph vinrent a la porte de celle citeit, droit a meynuit; mains elle astoit
fermee, sique ons ne voloit dedens lassier entreir nulle personne jusqu'al
Miraciedemoriquisoy jour, ne oussi issir por I guere qu'ilh avoient a 1 hault prinche. — Dedens
celle citeit avoit-ons novellement ensevelit I mors hons, qui soy relevat de
de sa sepulture et appellat le peuple, et leur dest : « Saingnours, por-
» quoy ratendeis-vos de ovrir la porte ou Dieu atent? Que ons le laisse
)> dedens entreir, qui m'at fait resusciteir pour chu nunchier. » Quant
ilh oit chu dit, ilh meisme alat defermeir la porte et Dies y entrat*. — En
jhesus demorat ei ci- celle citeit sourjournat sainte Marie, et Jhesus son fis awec Joseph, unc
pau de temps tant qu'ilh li plaisit 5 ; puis s'en parti t, enssi com vos oreis
quant je seray la tourneis. Item , l'an IIII deseurdit le XI e jour de decern-
bre, morit Sedrich, le due de Burgongne, qui avoit regneit XXVI ans. Ghis
Sedrich fut ly fis Yborus le due de Galle, et Franco son frere astoit due de
Galle. Apres Sedrich fut due de Burgongne son fis Eneas. — Celle an
meismes, en mois de marche, vint Antipaler a Herode son pere, et li fist
entendant que Alixandre et Aristoble, ses dois fis, procuroient sa mort
occultement \ Et chu disoit-ilh portant qu'ilh n'amoit mie leur compan-
gnie, car ilh devoit eistre roy apres son pere; se soy dobtoit que ches ne
le nuysissent. Et toutvoie le creit Herode, et se soy tournat encontre ses
dois fis en mult grant hayme; mains portant qu'ilh avoit fait paix a eaux
par-devant Augustus Cesaire, ilh n'oisoit d'eaux faire justiche , se de luy ne
li astoit concedeis; portant escript-ilh a Cesaire en plaindant a luy de ses
dois fils, de chu qu'ilh le voloient enpuisoneir. — Adont envoiat Cesaire en
teit de Cayr.
L'an 1111.
De Antipater et He-
rode.
Fauseteit.
1 Le Caire.
* Ce qui precede depuis : pour chu nunchier, etc.,
manque dans notre tcxte. Je le supplec d'apres le
manuscrit B.
5 Tant qu'ilh U vint a greit. B.
4 Sur ces evenements tragiques du regne d'He-
rode, voir FI. Joseph, XVI, 17 et 18*
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LIVRE PREMIER. 359
Judee dois de ses barons, et mandat a Herode que ilh inandast tous les plus
saiges hommes de sa terre, si jugasse, par leur conselhe et de ses dois De Herode , qui jugat
i »n ■• •• i • ni i i «ni • i ses dois fis.
barons que ilh Ii envoioit, ses dots tils de chu dont ilh les poroit attendre \
Enssi le fist Herode. car ilh assemblat tous les plus saiges hommes de sa
terre, et fist somonre ses dois fis devant eaux. Et quant ilhs furent venus,
se les attendit * Herode de * tout chu que ilh les avoit amis.
Adont les fist Herode prendre et mettre en prison , par le conselhe des Herode £»i emorison-
dois barons de Romaic qui li dessent qu'ilh en fesist sa volenteit, sens eaux cheaux qui ies a-
a faire morir. Adont Herode fist prendre tous cheaux qui amoient ses dois
fis, et les enprisonnat a Sebaste deleis ses dois fis; et puis les fist mettre a
gehinne, pour savoir se chu astoit veriteit que ses dois fis procuroient sa
inort. — Ilh oil la unc qui cognuit que Alixandre ly avoit promis grant avoir
por luy enpuisonneir ; et apres, son barbiers cognut que Aristoble ly avoit
promis grant avoir, por luy a colpejr la gorge, quant ilh le reseroil la barbe,
car ons ne devoit mie bien entendre a teile vilhart, qui faisoit faire sa barbe 4
por eislre plus jovene. — Quant Herode entendit chu, si commandat que
ons aminast ses enfans, et quant ilh furent amyneis, ilh leur fist trenchier Herode ocbist ses en-
leurs tiestes. Quant Herode oit chu fait, si fist somonre tous ses hommes,
et instaublit devant eaux que Ahtipater, son anneis fis, seroit roy apres Foi. iooi*.
luy et tenroit tout la terre. Et chu fut Tan V del incarnation le XXHII e jour i/an v.
de junne. Et Antipater prist la fealteit des hommes que ilh le tenroient a
saingnour *; mains les gens ne le porent ameir, portant qu'ilh avoit faite
ses freres ochire. — Quant Herode veit que son peuple haioit enssi son fis
Antipater, si s'apensat qu'ilh avoient droit, si le commenchat oussi for-
tement a hair, et mult li pesoit de chu qu'ilh l'avoit instaublit a roy. Mult
volentirs s'en repentist Herode s'ilh posist, et ilh n'avoit mie tort; car
Antipater avoit si malvais coraige, que ilh vosist bien que Herode son
pere fuist mors. — Et portant que ilh astoit demoreit dois enfans de Aris- Des enfans ahsioWc
toble son frere, 1 valeton et I baselete, si astoit li valeton nommeis Herode ochis^rjaqu^et
Agrippa; et chu fut chis qui puis fist decolleir sains Jaque, a la requeste "ste! ° an ~ ap ~
de Herode Philippe son oncle. Et la filhet fut 6 nommee Herodias; chu
1 Convaincre. Atteindre dans Roquefort. * Sa barbe hosteir. B.
* M6me sens qu'au mot attendre ci-dessus. * Apres le mort sonpeire, ajoutc le manuscrit B.
* A dans noire texte. Je corrige d'apres le ma- • Et la pucelle astoit. B.
nuscrit B. .
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360 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
fat celle, solonc 1'Escripture, por cuy fut decolleis sains Johan-Baptiste.
De Herode, Agrippa Ches dois eofans amoit mult Herode, et les trahoit et tenoit plus pres de
luy que Antipater, ne que nuls des aultres trois eofans Herode. Et de chu
astoit Antipater tantdolans, qu'ilh en haioit son pere Herode; et fist tan t que
ilh mist grant hayme entre Herode et Ferolas 1 , son frere, qui amynoit lesdis
enfans al amour Herode, et que Ferolas soy partit de Herode, et en alat en
L'mv. sa terre oultre le fluis de Jordain. — Item, Tan deseurdit le XII e jour de
mois de octembre, soy partit Joseph et la virge Marie, awec son enfant
jhesuset Marie soy de- Jhesu-Crist, del citeit de Cayr ou ilh avoit habiteit; si entraten son chemien
5teit. B e a,r * ou ilh allat 1III journeez, et al quatreyme journee sont-ilhs entreis en unc
Les xii larons. bosquet, ou ilh avoit XII larons partans * ensemble; et gaitoit ly uns apres
DeDismas, le bon it- l'autre le chemien , si desroboient les marchans. A eel jour que Nostre-
Damme y passat gaitoit Dismas, ly uns de XII larons : chu fut chis qui
lassat passeir Nostre-Damme a la porte de Bethleem , et qui puis fut pendus
deleis Jhesu-Crist a diestre, et li priat merchi. — Enssi com Joseph passoit
Joseph fut suscorus de par le boscaige, ilh vient a unc ponte 8 deleis unc flos 4 mult parfont, et
I'assalhit li leires de son agait atout unc gran cuteal. Si vint a Joseph et li
dest : « Tu es leire , car tu as embleit chist enfant ; se moy diras ou tu las
» pris, et moy lairas chu que tu enporte. » « Beais amis, lais-moy aleir,
» dest Joseph; je ne s$ay embleir enfant, et oussi n'ay-je point d argent. »
Atant vint Nostre-Damme avant, et voit Dismas, si quidat bien morir, si
appellat son fis en souspirant, et dest : « Beais fis, que ratens-tu? ne
jhesusdeiiYrat Joseph » vois-tu mie que chi leire veult ochire Joseph? » Et Jhesus respondit :
« S'ilh plaista Dieu, mon pere, ilh ne li ferait ja maul. » Quant Dismas
entent l'enfant, qui astoit si jovene et qui parloit si saigement, se li priat
merchi, et Dieu ly pardonnat; atant emynat Jhesus et sa compangnie en
sa maison, et li fist grant fieste, en laqueile ilh sourjournat III jours. —
Dei fontaineou jhesus Chis Dismas avoit en son jardin une fontaine; en celle fontaine bagnat
aitgme Nostre-Damme son enfant tout vestit : la fist Jhesus unc de ses promirs
Lepromirsmyraciejhe- myracles, car li aighe qui degottoit de iy et de ses vestimens sus la terre,
quant ons l'oit oisteit fours de la fontaine, devenoient fleurs de diverses
manere, sicom rouses, lis, fleurs de glay, violetes et aultres diverses fleurs.
1 Pheroras, frere d'Herode. * Pont
* Partageant, faisant cause commune. 4 Pour flus ou fluis, fleuve, riviere.
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LIVRE PREMIER. 361
— Item , chis leire Dismas avoil sa mere, qui asloit et avoit esteit longtemps
messelle par l'espause de VII ans; celle vint a la fonlaine, si fut tantoist
garie. — Item , en chis jardin ' prist el colhit Nostre-Damme les fleurs et les La mere Dismas rm
herbes , dont el fist l'ongement de coy Marie-Magdalainc oindit les pies Nos-
tre-Saingnour. — Item, chis Dismas avoit I enfant, qui tous jours deispuis L'ongement «ium jhe-
que ilh fut neis avoit esteit esploreis, ne oncques la mere ne le pot faire taire
ne mangier. Adont la benoite virge Marie demandat qu'ilh falloit chist
enfant? La mere respondit qu'elle ne savoit. Adont prist Nostre-Damme sa porraiaiteu.emiso*tre-
mamelle et alaitat l'enfant, et li enfe endormit entre ses bras mult douche- bim!!!!g*ri%. en * n%
ment: chis enfe, solonc chu que sains Jeromme racompte, chu fut sains Fo,!00v °-
Salveurs. — Quant Nostre-Damme oit demoreit trois jours en la mason Dis- Nostre-Damme soy par
mas, si soy partit, et entrat en son chemyn awec sa compangnie, el Dis-
mas les conduisoit tant qu'ilh furenl a salveteit; mains al departir elle
donnat a la femme Dismas la boiste al ongement, en disant : « Teneis celle
» boiste et le gardeis bien , encors en poreis avoir mestier. » Et elle soy
dest voire, car puis ly fallit son avoir, si portat la beuste * en Jherusalem,
ou Marie-Magdalaine I'achatat. — Parmy le boscaige s'en vont la sainte
compangnie, qui * astoit si plaine de nief et de jalee, que ons ne savoit ou Les arbres soy cndi-
ly chemyn astoit; nientmoins ilh n'oit endit forest arbre qu'ilh ne soy encli- "^Tet n *a nil™
nast ericontre Jhesu-Crist et sa mere, et florissoient enssi com chu fuist en el flor,sso,ent -
mois d'avrilh. Et chu astoit le XIX e jour d'octembre. Et adont chantoienl
tous les oyseals de bois encontre la venuwe Jhesu-Crist, sicom chu fuist en
may. Et toutes les biestes savaiges de bois sont venues en genos devanl le Lcsbiestesvineotaio
i • •* vi ^i • * * s\ l- i • ' ri» • reir Jhesu-Crist.
mule, qui portoit Jhesu-Crist et sa mere. — Quant li leire Dismas veit que
Jhesu-Crist faisoit teiles myracles, se dest a Nostre-Damme : « Damme,
» balhiies-moy chist enfant, et le moy lassies unc pou porteir, et ilh moy
» pardonrat tous mes pechies. » Atant delivrat Nostre-Damme a Dismas
son enfant jusques al defours del forest, puis le rendit a la virge Marie, et
soy partit d'eaux et retournat vers sa maison. — Atant sen vat Nostre-
Damme; mains elle n'oit mie chemyneit unc liewe, que elle at encontreit
une pucelle qui ploroit mult tenrement, seiant desous une arbre, portant
1 En celle vergier. B. ecrit boiste.
' Je ne sais pourquoi le chroniqueur emploie * Ce 9111 sapplique au boscaige et non a la
cette forme, apres avoir, deux lignes plus baut, compaingnie.
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364 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
que uns laron , qui oit nom Ysacars, ly avoit tollut ses vestimens et ly
voloit faire chu que mie ne ly plaisoit; et ly avoit son frere empuisonneit,
si qu'ilh sembloit mors.
Quant Nostre-Damme veit chu, se escriat a lairbn que ilh laisast la pu-
celle esteir; et chis li respondit qu'ilh n'en feroit riens por lee, et que de
lee meismes auroit son mantel et son mule. — Adont dest Nostre-Damme :
« Tu parolle follement, mains je yray parleir a chevalier qui giist desous
Myracie de i« puceiie. M chis arbre, savoir se ilh est mors ou vief. » Atant desquendit la virge, et
benit le chevalier trois fois, puis prist le main de son enfant, se le touchatal
chevalier, et ilh salhit tantoist sus , et ou ilh veit le laron si court vers luy,
et le ferit teilement de son espee, si qu'ilh le fendit jusqu'en la chinture.
— Atant se part Nostre-Damme , et at tant alleit que le XXII* jour doc tem-
bre, droit a none, est-elle venue a casteal d'Orient ', ou Elizabeth sa cusine
demoroit, qui grant fieste li fist, et a grant joie 1'at rechut, car chu astoit la
Merveihe en casieai flour de son linaige. — En iardin de chi casteal n'oit arbre qui ne soil ployes
^Orient. . % * . n r /
et enchneis vers Jhesu-Crist; et les biestes en lassarent toutes le mangmer ,
et les petis enfans laissarent tous le laitier *, et les poissons de vivier et de la
fontaine de vergier lassarent le noieir ' et vinrent gesir sour le gravier; si
dps vmages qui ». en prist qui avoir en vot. — Item, saint Jerome nous racompt que en mar-
toient en la maho- . . , , , • . . .. . • a1 1 • -
nierie. chiet de chi casteal avoit une mahomerie que les Juys adoroient, mains
toutes les y mages qui astoient la dedens soy debrisarent toutes; la avoit I
viel juys qui veit chu , se dest : « Unc Dieu doit naistre d'une rirgue pu->
» celle qui ches ymaiges doit debrisier. Si est neeis, chu moy semble bien:
chi demorat jhesus ii )> je ne sijay ou ilh est. » Quant les Juys oirent chu, si furent esperdus et
dient entre eaux que chu astoit contre la venue Marie; enssi furent-ilh en
grant debal. En celle casteal demorat Nostre-Damme dois ans tous acomplis.
L'anv. En eel meisme an, le VII 6 jour du mois d'octembre, avient en casteal
d'Orient que les jovenes enfans alarent joweir a une fontaine qui astoit
Foi. ioir<>. en ver gier Joras, unc grant juys; et en celle compangnie astoit Jhesus et
Johans, li fis Elizabeth, qui fut nommeis Sains-Johans-Baptiste , et avoit
cascon porteit awec ly unc vaseal de voile por boivre. — Quant les enfans
furent a la fontaine, si fist tant cascon que sa buret fut plaine; et Johan-
1 De Orion. B. • Cesserent de nager.
1 Le lait, la mamclle.
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LIVRE PREMIER. 363
Raptiste prist lc siene buret, se le reversat en la fontaine. De chu fut en-
gramis Jacob, li fis Joras, cuy la fontaine astoit, qui astoit asseis orguil-
heux; et vint a Johans, se le butat en la fontaine, et Johans, qui enfes
astoit, en plorat et issit de la fontaine al mies qu'il pot. — Quant Jhesus veit De$ pochons q... r u .
que Jacob avoit enssi fait ' a son cusm , si en fut corochies , si prist tons les Jhesus et refai*.
pochons ou burettes aux enfans et les debrisat; et les enfans commencha-
rent a criier et ferir leurs mains ensemble. — Adont parlat li plus jovene de
tous les enfans, qui fut nommeis Judich, et dest : « Jhesus, par ma foid,
» chi at malvaise compangnie , et cierte jamais ne vos suirons. » De chu oit
Jhesus piteit; si appellat tous les enfans, et leurs dest : « Se vos voleis
» remettre les pieches de vos pochons ensemble, ilh sieront refais. » Et
cheaux respondirent oilh; el en furent mult Hies et joians les enfans. Si
ont mise les pieches de pochons toutes en I mont devant Jhesus, et ilh les
sengnat; si furent tantost tous entiers, et truvons en TEscripture qu'ilh en
fut par compte XIX \ De teils myracles fa i so it Jhesus asseis en sa jovente;
se doit-ons bien avoir fianche en luy, car en nos puet-ilh 8 faire, defaire et
refaire chu qu'ilh ly plaiste. Apres chu sont tous les enfans ralleis * en
leurs maisons, joians et esbaudis de leurs pochons qui astoient refais/
Sour Tan deseurdit, le XI e jour de mois de jenvier, vient Antipater a L'mv.
son pere Herode, et prist congier a ly; se li dest qu'ilh voloit alleir a
Rom me, car ilh avoit la mult a faire, et son pere li otriat. — A celle temps De renc.nteresse.
avoit une enchanteresse en la terre de Judee, laquelle astoit d'Arabe, et
savoit plus mies empuisonneir" que nule aultre : a celle femme vint Anti-
pater et li donnat tant de son argent, que celle li donnat de venyn quelle
avoit en une boiste, qui astoit si morteil que ilh n'astoit nuls hons, se ilh
en gostoit, que tantoist ne fust mors. Cheli venyn que je dis emportat An- Ami P .ier procurat de
tipater a la femme Ferolas, son oncle, et li priat qu'elle procuraste a chu P umcrcso,, P erc
que son pere en mangnast; et celle respondit : « Volen tiers. » A tant en alat
Antipater a Romme. — Et sachies que ilh ne fisent nient si bien leur fait
ne si saigement, qu'ilh ne fuissent apercheus d'unne chambrire que la
femme Ferolas avoit; se li veit donneir la boiste, et faire la proiere qu'ilh
1 Etui laidit. B. * Repaweis.
* Si com li ewangele le tesmongne, ajoulc le ma- * Et savoit plus de faire puissons. B. Voir Fl.
nuscrit B. Joseph, XVII, 6.
5 Car ensi nos puet-ilh. B.
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564 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
fist. Atant s'avisat la fern me Ferolas, et vot saier * se ly venyn astoit vraie; si
en mist en la viande son marit, qui tantoist que ilh en oit gosteit morit.
Lanvi. — Item, Tan VI del incarnation, en mois d'avrilh, le XIII e jour, mo rut
Franco, ly dus de Galle; si regnat son fis apres luy, qui oit nom Trojolus,
lyqueis regnat XXIX ans. Item, en eel an meismes, le IX e jour de may,
qui astoit en mardit, avient que Jhesus ly enfes, awec luy Johans-fiaptiste
et plusieurs aultres jovenes enfans, aloient joweir ensemble aux champs.
De i.ntenir*. Se avient que ilh passoient parmy une rue, ou ilh demoroit I tintenirs ' de
draps qui tindoit a chi jour; et avoit ses cuwes mises el tot apparelhiet por
tindre les draps qui la gisoient, et astoit aleis en son jardin coupeir une
vergelet 5 de quoy ilh avoit mestier entour son ovraige, si astoit sa maison
seule demoree. Et Jhesus vat dedens entreir awec Johans-Baptiste, si ont
pris tous les draps et les ont jetteis en la choudier; mains ly tinteniers y
sourvient, qui n'en fist point de fieste, car ilh ne voloit mie jetteir tous
ses draps en une choudier, car ilh les voloit tindre en diverses coleurs. —
Et portant ilh fut si corochies que ilh prist I cutuel , se le lanchat vers Jhe-
De pomier que jhesus sum ; mains li cutuel ferit en une peron de marbre, et oussitost ilh 4 issit
Foi.'io' "."" de peron en droit lieu ou li cuteal tochat, un beal pomier vers et floris, si
poissans qu'ilh awist XX ans que ons lVwist planteit.
Quant li tinteniers veit chu, si fut mult esbahis, et puis corit vers sa
chaidire, si en gislat ses draps que Jhesus y avoit jetteit, qui astoient tous
Myracie des draps de liens et coloreis de diverses coloires, teiles com li tinteniers les demandoit;
si en oit grant mervelhe, si appellat ses voisiens et leur dest chu que li
astoit avenus, et B ilh dessent que chu faisoit Jhesus, ly fis Marie. Por cheli
myracle portarent les Juys grant honneura 1'enfant, etdisoienl ypluseurs
Lao vi. que ilh astoit le fis de Dieu omnipotent. — En eel an meismes, en mois de
june, avient que la femme Ferolas soy corochat a sa chambriere, et si fort
que la chambriere soy partit et alat a Herode, et li comptat de venyn com-
ment ilh en astoit. Atant envoiat quere Herode son seroge*, et li comman-
1 Essaycr. Le mot saier est restc en wallon. * Si appellat ses voisius, et si les monstrat,
* Teinturicr. el, etc. B.
* Une petite verge , une baguette. Vergele dans * Ce mot s'applique ici a une femme, la veuve de
Roquefort, verjale en liegeois. Pheroras, frere d'Herode. Le manuscrit B porte :
4 Qu'Wt par erreur dans notre texte. Je corrige sa seroge. Sur cct episode voir Fl. Joseph, XVII, 6.
d'apres le manuscrit B.
tintenier.
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LIVRE PREMIER. 365
dat quelle rendist le venyn. Et ccl respondil quelle n'en savoit riens. Atant *>* Herode ei de u
* * .... femme Ferolas.
jurat Herode, s'elle ne le rendoit, qu'ilh le feroit ochire. De chu fut la
damme mult enbahic, car el savoit bien, s'elh le rendoit ou non, elle y
moroit; se sapensat qu'elle li diroit que el 1'iroit quiere, se soy tueroit en
la vote. Se li dest, puisqu'ilh li plaisoit, elle 1'iroit quere, et Herode envoiat
awec lee grant compangnie de gens qu'elle ne s'enfuist. — Atant en allat la
damme, si montat sor I halt degreis en sa maison, et prent del regardeir '
d'avale les degreis, en pensant qu'ilh valoit mies qu'elle-meisme soy tuast,
que chu que Herode le fesist morir de plus terrible mort. Si jont les pies
et salt cha jus, si soy debrisat tous les membres; mains cheaux qui le de-
voient gardeir le prisent et l'aportarent devant Herode; se parlat et Ji dest
en teile manere : « Sire, mon maris Ferolas, vostre frere, quant ilh duit
» alleir morir, ilh moy priat que je ardisse la boiste atout le venyen, en
» teile manere que Antipater moy l'avoit balhiet, et je ly oy en convent;
» mains je ne le fis mie, ains en retieng I pou en aventure , portant que je
» ne savoie que ilh moy astoit k advenir. » Et quant elle oil chu dit, si
trait de son sain une fiolete de voile ' ou li venyn astoit, puis le donnat a
Herode.
Ghes menchongnes dest la damme, portant quelle volloit Ferolas son
marit ablameir qui mors astoit; car ilh n'en soit oncques rien de chu jqu'elle
dest, ains avoil luy-meismes esteit evinemeis 8 de cheluy venyn, si qu'ilh Herode prem son au
en morut. Et Herode veit comment Antipater, son fis, li procuroit sa mort, ^ ym e.
et en mult de manere esprovat sa malvaisteit; et porchu le prist Herode en
si grant hayme que ilh soy partit de Dolside, la mere Antipater, et jurat
que Antipater en seroit mors. — En eel an meismes, en mois de June de-
seurdit, astoit Jhesus aleis joweir aux champs awec Johans-Baptiste et bien De jhems comment .1
cent aultres petis enfans; se soy sont assis defours les murs de casteal d'O- de»i«ii. 8USunree
rient en t res les arbres en unc jardin, et ly soleal luisoit beal et chaut, sicom
ilh afferoit a eel temps, si jettoit ses rees grans et clers. Adont montat Jhesus
sour unc arbre ramut, parmy lequeile les rees de soleal trespassoient;
atant salhit Jhesus sus le ree de soleal, et le commenchat a chevalchier en
teile manere com chu fust unc marien 4 de bois. — Quant Jacob, le fis de
1 Prent a. B. Commence a regardcr. * Empoisonne. Roquefort donnc envc timer.
* Nous avons de"ja rencontre ce mot avec lc * Mairien dans Roquefort,
sens de verre, comrae ici.
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366 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
prevost 1 , veit chu, si vot enssi faire et chevalchier le ree de solea. Atant est-
ilh monteit sour I arbre, et voit I ree qui deleis ly aparoit et radissoit ';
si est desus salhis, mains tan to is t que ilh perdit 1'arbre ilh chayt a terre,
et point le ree de solea ne le sourtient. De chu fut Johans-Baptiste Hies,
portant que devant chu l'avoit butteit en la fontaine, enssi com dit est. —
A eel cheioir que Jacob fist ilh chayt sour son bras, sique ilh le brisat.
Adont commenchat fortement a crier, et disoit : « Jhesus , Jhesus, por Dieu
Jacob chayt et fust « merchi ! je s<jay bien que tantoist m'areis garit, se ilh vos plaist. » Atant
est Jhesus descendus et prent Jacob par le main, se le lieve sus sains et
haities. Quant les aultres enfans ont chu veyut, si sont alleis en casteal et
ont tout chu racompteis aux Juys, et por chu 1'honoront plus les Juys com
Foi. toif. devant. — Item, 1'an deseurdit, le quars jour de jule, avient que Jhesus
soy parti t de sa mere sainte Marie, et s'en alloit. Si encontrat en sa voie le
jhesus encontrat le dyable Sathanas; mains oussitoist que Jhesus le veit, se Tat bien recognut.
Et ly dyable vient deleis luy , se le prist et l'emportat sour une hault mon-
tangne, et la ly monstrat-ilh le paiis tout altour et li dest : « Se tu volois
» croire en moy et aoreir et tenir a sangnour , je toy donroy tout chi paiis
» que tu vois. »
« Foux, — dist Jhesus, — tu es trop orgulheux; porquoy vues-tu que je
» tu aoire , com je suy ' ton saingnour, et tu es mon sierf? Tu es trop felons,
» quant tu m'as enssi tempteis, mains je croie que tu ne seis cuy je suy. »
Respont ly dyable : « Je le s<jay mult bien, tu es li fis Marie. » Et dest
Jhesus : « Tu cognos bien ma mere, mains bien ne sceis-tu qui est mon
» pere fours que Dieu 4 . » Dest Sathanas : « Ton pere est Joseph, li vies
» enchanteur. » Adont dest Jhesus : « Tu ne sceis que tu dis, faux glos;
» je toy commande que tu m'enreporte de chesti montangne ou tu m'as ja
» tenus XL jours , car je ay fain , se veulhe mangier. » — Quant Sathanas
entendit Jhesus, se le prist et le portat sour une altre montangne, ou ilh
li monstrat les pires et dist * : a Se tu es li fis de Dieu , se fais que ches pi res
» soient pain , se mangnois, si poras ton fain del lout perdre. » Adont dest
Jhesus : « Sathanas, maile aies-tu, car poior n'as-tu de moy a tempteir;
» ains convenrat que tu moy serve et aoire, et je te commande que tu ten
1 Li filh le prevosie de Castelhe. B. 4 Autres que Dies. B.
* Rayonnait. * Je supplee ces deux mots d'apres le manu-
1 Et je $uy. B. scrit B.
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LIVRE PREMIER. 567
» vois arire* » Tantost sen alat Sathanas , qui plus avant n'oisat demoreir,
etlaisat Jhesum sour la montangne; mains les sains angeles vinrent qui le
reportarent en casteal d'Orient, ou sa mere astoit fortement esmaiet, por-
tent quelle ne le poioit retroveir. Et quant elle le veit , si fut grandement
joiante et Hie, et ly fut dedont en avant defendut del issir de casteal; se
n'alat plus joweir awec lez petis enfans, — En eel an, en septembre 1 , revient H ^ r %^E|[? f0 * n,i "
Antipater de Romme. Quant Herode le veil, se 1'apellat de si grant trahi-
son com de sa mort procureir qui astoit son pere '; et la as to i en t les plus
grans et saiges de sa terre 8 , ety astoit Varrus ly I des peires de Romme,
qui a eel temps astoit prinche * de Surie. La fut teilement parleit, que An-
tipater fut accuseit de ladit malvaisteit, et le fist Herode prendre et enmy-
neir en sa prison , com ons nommoit a Bericonte. — Adont fist Herode
prendre 5 tous cheaux qui portoient faveur a son fil, por faire morir awec Herodech» y t en grant
luy; mains enssy que ons les devoit alleir querir, chaiit Herode en une
grant maladie qui li destoublat toute sa volenteit a faire; et oussi ilh astoit
asseis vies, car ilh avoil d'eaige LXX ans; et oussi ly duelh et les annoiez'
qu'ilh avoit oyut par maintes fois 1'avoient grandement avilhit et afflaibit.
Nuls ne poroit dire que Herode astoit grandement malaide , car ilh sembloit
qu'ilh morit 7 X ou XII fois le jour. — A eel temps avoit en Jherusalem dois
Juys qui mult soy faisoient saiges de la loy *. Quant ilhs veirent que Herode
astoit si grandement malaides, ilh prisent avec eaux grant compangnie des
Juys, si alarent al temple et abatirent a cordes une aygele doree que
Herode avoit mys sour le grant porte del temple en l'honeur des Romans;
et disoient qu'ilh n'y devoit pais y estre, car chu astoit contre Dieu et leur
loy. — Quant Herode le soit, si en prist teile coroche en luy qu'ilh obliat
tout son maladie, et dest que tous cheaux de la cite it comparoient le mef-
fait. Quant li peuple soit chu, si a fere n I a luy priier merchi por Dieu qu'ilh
ne comparassent aultruy meffait^ mains cheaux qui avoient fait la folie le
comparassent. — Adont fist Herode prendre les dois maistres et tous cheaux Herode tutardre m U u
de son peuple.
1 En la moiene de septembre. B. s Quere. B.
* II l'accusa de grand e trahison, d'avoir com- * Ennuis. Anoi dans Roquefort. Anui dans le
plote* la mort de lui, HeYode, son pere. roanuscrit B*
* Li plus proidhomme de sa terre. B. 7 Sens retpit, ajoutc le manuscrit B.
4 Client. B. Varus £tait en effet gouverneur de * Fl. Joseph (XVII, 8) donnc leurs noms :
Syrie. Sur ce jugement d' Antipater, voir Fl. Jo- c'£tait Judas, fils de Sariphee, et Mathias, fils dc
seph , XVII, 7. Margalothe.
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368 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
qui chu avoient fait, et se les fist trestous ardre. Et quant ilh oit chu fait,
si soy recuchat plus griefement malaide qu'en devant, et li prisent pluseurs
Foi. io* f. maladies, car ilh avoit les fievres quartaines, et astoit si plains de rongnes
Vr^deHer^de. ieu que nuls ne le saroit dire, et avoit les pies et les mains si enflees que ch'as-
toit mervelhe; et avoit I altre maladie qui li purissoit tout son fondement,
et si avoit unc si doloreuse tousse qu'ilh sembloit, quant ilh li prendoit,
que toutes les entralhes li rompissent ! . Teile venganche prendoit Dieu de
Herode, por les malvaisteit et fellonies qu'ilh avoit faite en sa vie. — Quant
Herode veit qu'ilh ne garisseroit mie, se mandat tous les maistres fese-
chiens ' qu'ilh savoit, et quant ilhs furent venus, ilh emplirent une euve
d'oile ne trop chaut ne trop froid, puis misent Herode par-dedens por
bangnier; mains enssi com ilh seioit en I'oyle, se li defalit ly cuer et son '
poioir de tout son corps, si qu'ilh ne poioit traire a ly ne pies ne mains,
et si sembloit que ilh fuist mors, car ilh ne poioit le oeux ovrir, ains les
avoit tous tourneis en la tieste. Et quant ses servans veirent chu, ilh com-
mencharent a crier, car ilhs quidarent qu'ilh fust mors; mains quant ilh
oiit le cry, si ovrit ses oeux, et les regar; et fut mys four de la cuve, et se
soy fist porteir en Jerico por gesir plus paisieblement.
Apres chu fut dit a Herode que les Juys avoient joie 4 de son maladie,
et ratendoient le jour de sa mort por faire joie et grant fieste par toute la
Herode fist tous les 6s terre. Quant Herode oiit chu, ilh fist tous les fis des hauls barons de Judee
e£ U prisonT s ™ n mettre en prison en la chartre d'Ocerne 5 , puis commandat a Salome sa
soreur que, tantoist que ilh seroit mors, elle les fesist tous decolleir: car
ilh voloit que ons fesist doeulh par tout sa terre de Judee le jour de sa
mort, car ilh savoit bien que ses gens ne ploroient mie pour ly, si feroient
duelh por leurs enfans et leurs amis. — En eel an meismes, en decembre,
vinrent dots messagiers de Romme en Jerico, ou 6 Herode les avoit envoy et,
por savoir a August Cesar qu'ilh feroit de Antipater son fis qui le voloit
empuisoneir. Ches dois messagiers dessent a Herode que ly emperere ly
mandoit qu'ilh en fesist son plaisier, de luy ochire ou envoyer en exilhe.
1 Et si avoit I altre enfirmiteit de quoy ti geni- les faits qui suivent voir Fl. Joseph , XVII, 8 et 0.
t aires li pourissoient , et avoit si grant tousse et si ' Li. B.
doloreuse qu'ilh sembloit, quant ilh le Cenoit, que * Astoient liez. B.
toutes les entralhes li rompissent. B. * Dans l'Hippodrome, dit Joseph.
* Pour physiciens, e'est-a-dire les medecins. Sur * Cet ou se rapporte a Rome et Don a Jericho.
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LIVRE PREMIER. 369
Quant Herode oiit chu, si fut I pou plus aise, car ilh n'amoit mie son fis.
— Atant demandat Herode a mangnier, et ons ly donnat une pomme , car
ilh ne mangnoit riens tant volentier que pommes, et commenchat la pomme
a pelleir d'on cutel. Enssi qu'ilh paroit la pomme, se li prist son gran tousse
si angousseuxment qu'ilh sembloit qu'ilh dewist estindre; si hauche le cutel
et soy volt ferir parmy ses costeis , quant unc sien cusien qui le gardoit ly
oistat. Adont palmat Herode de la grant angosse de chi tousse, sy que ons
quidat qu'ilh fuisse mors, si soy levat le cris par le palais que ilh astoit
mors. — Cheluy cry oiit Antipater en la prison ou ilh astoit, si en oit grant
joie. Atant appellat le gardeir ' del prison qui le gardoit, et li dest que ilh
ly donroit tant d'avoir que jamais ne seroit povre, s'ilh le volloit laissier
fours de la prison *; mains chis ne le vot point faire, et dest que par luy
n'en enseroit 5 ja, jusqua tant qu'ilh saroit por certain se Herode astoit
mors ou nom. Tant allat celle parolle, que Herode en soit parleir; si fut
corochies de chu que son fis faisoit joie de maul qu'ilh soffroit si gran , puis
commandat Herode qu'ilh fuist amyneis devant luy, et ilh ly fist tantoist Herode fist oehire An-
coupeir la tieste et fist porteir son corps en Hircaine; la fut-ilh ensevelis. ipaer
Apres la mort Antipater, envoiat Herode quere Archelaus, qui anneis
astoit de ses trois fis qu'ilh avoit encors en vie. Et quant ilh fut venus, veiant
tous les Juys, ilh le eslaublit que ilh seroit roy apres sa mort; mains ilh
ly fist jureir qu'ilh ne seroit coroneis, jusqua tant que ilh auroit esteit a
Romme releveir la terre de Augustus. Puis ne visquat Herode que V jours l« mors Herode.
apres la mort Antipater, et a Vl c morit-ilh , en le XXVII 6 annee qu'ilh avoit
esteit coroneit roy de Judee. — Apres la mort Herode , Salome sa soreur Foi. 105 r«.
jettat fours de prisons tous les enfans des hauls barons qui Herode avoit
faite enprisonneir, enssi com dit est par-desus. Adont mandat Archelaus
tous ses barons, et, quant ilh furent venus, se fist mult grant duelh et De Archelaus roy.
grant plainte de la mort son pere Herode , puis enbasmat et aournat son
corps * mult richement et honorablement, com corps de roy doit eistre
pareis B ; et puis le fist porteir en casteal de Herodian , la le fist ensevelir,
et fist mettre sour luy une tombe royale. Et demorat Archelaus la VII
' Concierge. Roquefort donne gardier. Le ma- scrit B porte : ne isteroit.
Duserit B porte : le chartrier. * Puis grea le corps. B.
* Par teile convent que ilh le getast de prison. B. * Conraieis. B.
* Sans doute pour isteroit, sortirait. Le manu-
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370 CHRON1QUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
jours, et retient awec luy tous cheaux qui furent awec luy al corps de son
pere ensevelir, a ses frais ! et a ses despens, taut que les VII jours duront ;
teile astoit adont la constumme. — Mult sagement soy mentenoit Arche-
laus; si portat grant honneur a ses barons, et donnat a pluseurs povres
bachelers des beaux dons; et tant fist-ilh qu'ilh acquist l'amour de tous ses
Archeiaustou blanks- hommes. Et apres les VII jours ilh sen alat al temple vestus d'unne robe
lus com roy novel. .. ■ ■ % ■ • i « 1 • •»-,«••
tout blanche, et la le rechuit son peuple a mult grant joie. Et disoit cascon :
<c A bien soit venus nostre sire le roy. » Atant Font assis sour une chayer*
tout doree; et puis leur dest qu'ilh ne voloit mie eistre clameis roy, ne
estre coroneis, jusqu a tant que Augustus Cesaire li metteroit sour son chief
la coronne. — Item , quant ses gens li requeroient alcunne fois d'auconne
chouse, ilh les otrioit mult douchement, sicom chis qui se voloit enforchire
de acquere l'amour de son peuple, car ilh savoit bien qu'ilh ne poroit Ion-
gem en t dureir, se ilh ne les detenoit a son amour 5 ; et partant soy enpenat
mult de eaux a atraire jusqu'a tant qu'ilh en fuist al deseure. — Item,
Lanvii. Fan VII del incarnation Jhesu-Crist, le XIII 6 jour de mois de may, muet
Guere dex roys Hon- une grant guerre entre le roy Ogens de Dannemarch , d'unne part, et le roy
grois et Dannemarche. oiijn • _i' * j. o # J" f\ i* J
aedrocn de Hongrie, d autre part, bi vos diray porquoy. Ogens, li roy de
Dannemarche, avoit une filhe qui fut nominee Alexandrine, et li roy de
Hongrie avoit I fis qui oit nom Mereomes. Si en fut parleit de mariage tant,
que li roy de Hongrie dest qu'ilh n'avoit plus d'enfant que Mereomes, si
qu'ilh li donnoit le royalme de Hongrie en dit mariage awec Alexandrine;
mains ilh voloit oussi que li roy Ogens donnast le moitie de son royalme
contre Yborus, son fis, qui roy devoit eistre apres luy, a sa filhe en dit
mariage.' Mains ly roy Ogens n'en vot riens faire, et dest que son fis Ybo-
rus seroit roy apres luy tout entirement. Enssi soy depart! rent corochies
li uns de l'autre.
Lesdis roy soy defiarent pour chest cause , et mandat cascon ses hommes.
Mereomes ardit une vilhe qui oit nom Audoxa, que li roy Audax avoit
fondeit a son visquant; et li roy de Dannemarche, awec ses gens, entrat en
Grant bataihe. Hongrie a bannier desploie , si ardit pluseurs vilhes. Mains li roy Sedroch
vient contre luy a gran gens , et la oit grant bataihe, et mains hommes
1 Costeis. B. Pour costes. * Se ilh ne les trahoit pres de luy. B.
« Faudestuet.B.
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L1VRE PREMIER. 371
mors d'ambdois parirs '. En la fin vient Mereomes par la batalhe vers le roy
Ogens, et le ferit teile coup de son espee que ilh le fendit jusques al bal-
dreit \ — Quant Yborus le veit , si escriat ses gens et cor it sur ses annemis ,
et tant qu'ilh les reculat mult grandement, et les cachal toudis tant qu'ilh
les at desconfis. Adont fuirent les Hongrois; et dist li escripture saint Eusebe
que ilh fust ochis de la partie le roy de Hongrie IX" chevaliers et XX m
hommes; etde la partie des Danois fut ochis li roy Ogens, et XIIII cheva-
liers et 11° hommes. — Item , en eel batalhe furent pris com prisonirs le
roy Sedroch et son fis Mereomes, qui furent enmyneis en Dannemarche.
Et voirent les barons de paiis que li roy fuist lassies fours par teile convent,
que son fis Mereomes seroit roy de Hongrie et s'aroit Alexandrine a femme.
Enssi le vot bien faire le roy Sedroch. Mains Yborus desl qu'ilh prenderoit
venganche de son pere le roy Ogens, ne ja sa soreur n'auroit chuluy qui
li avoit son pere ochis. A tant les fist ambdois coupeir leurs tiestes, puis
soy fis coroneir a roy des Dannois et des Hongrois, et fut roy des Danois
VIII ans; mains la royame de Hongrie donnal a sa sereur Alexandrine, et
li donnat I chevalier a marit, qui fut nommeis Porus, qui astoit li fis pomic xi*ro>Hon-
Troialus , le due de Galle. Chis Porus fut ly XI e roy de Hongrie , et regnat pofVoi ▼•.
XL ans. — Item, en eel an enmut 8 grant discorde entre Archelaus, le fis De H ^|£ Uu$ ' ,c fi *
Herode, et une partie de ses gens; car ilh soy coinplendoient mult de son
pere Herode, qui les avoit esteit trop fel et crueux 4 . Si en ablamoyent son
arme , car ilh les avoit fait ochire les dois grans maistres de la loy por 1'aigle
d'oir qu'ilh avoient abatue, et leurs avoit instaublit contre raison unc
evesque de leur loy; si voloient que chis evesque fut oisteis, porqu'en
ilh n avoit li digniteit rechuite de par Dieu, mains de part Herode. Ghes
novelles alerent tant que le jour de leur sabba, et quant ly peuple fut
assembleis en temple, se ne vorent pais souffrir les Juys que chis evesque,
que Herode avoit mis, rechusse B les offrandes, ne que ilh fesisse le serviche
de Dieu. Et finablement ilhs le jettarent fours de temple par forche. Quant
ilh fut fours jetteis, ilh vint a Archelaus, et li demonstrat le honte et le
1 Sic probablement pour parts ou parties, et 6 Pour esmut. B.
en effet on lit dans le manuscrit B : d'onne part et * Sur les fails d'Archelaus voir FJ. Joseph ,
d'altre. XVII, II.
* Baudrier. On lit dans Je manuscrit B : jus- * Rechevisse. B.
ques en dent.
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372 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
desplaisanche ' que les Juys ly avoient fait. Dont Archclaus fut mult coro-
chies, car ilh ly scmbloit que chu astoit honte a ly et despis, car son pere
li avoit donneit 1'evesqueit. — Adont envoiat Archelaus son senescal awec
1'evesque al temple, por ensaiier se ilh poroit metre acorde entre eaux;
mains ilh n'en pot a chief venir; si soy corochat, et leur commandat de
part Archelaus que ilhs lassassent al evesque son saingnorie, enssi qu'ilh
avoit al temps Herode esteit. Quant les Juys oirent chu, se batirent vilai-
nement le senescal, si que ilh fut fortement navreis. Atant s'enfuit ly senes-
cal et vint a son sangnour, el li monstrat les plaies et les batures que les
Juys ly avoient faite en son despit. — De chu fut si fort corochiet Arche-
laus, qu'ilh sembloit bien que ilh dewist forsenneir, en disant s'ilh ne soy
redrechoit a celle promire honte, dont n'astoit digne' qu'ilh tenist terre ne
sengnorie. Atant ' at-ilh fait armeir ses chevaliers et ses gens *, car ilh en
avoit asseis en sa maison, car volentirs les tenoit chiers et pres de luy; et
les commandat d'aleir en temple, et ochire tous cheaux qui avoient forfait
al evesque et a son senescal. Atant vinrent en temple, et corurent sus les
ArcheUui ochist IX- Juys et en ochirent bien IX m , et le remanant s'enfuyrent en leurs maisons.
Juyi en temple.
Et fist proclameir Archelaus qu'ilh n'y awist nuls qui entendist a la fieste
a faire. Enssi remanit la fieste de sabba que ons devoit faire par grant reve-
De Archelaus comment renche. — En eel an meismes, en mois de jule s , montat Archelaus sour
ilh allat a Romme. i ■ • % r* 1 i i * i
mere , por alleir a Romme por prendre la possession de son rengne et la
coronne de la main Augustus Cesar. Et emynat awec ly Nycholas et Ptho-
lomes, qui avoient esteit conselhirs priveis a Herode son pere, et Salome
son antain et ses enfans; et chu faisoit-ilh por tesmongnier les conve-
nanches qui avoient esteit entre ly et Herode son pere. Et quant ilh duit
monteir sour mere, si appellat Philippe Herode son frere, et ly recom-
mendat sa terre a gardeir tant que ilh revenist.
Archelaus nagat tant qu'ilh vient a Romme, si trovat Herodes Antipas ,
son aultre frere, qui astoit ja devant venus, et avoit priiet al emperere*
qu'ilh li fesist avoir son parchon el rengne son pere. Adont vinrent les dois
freres devant l'emperere; mains Archelaus astoit ftnneis, si parlat promirs,
1 Laidure. B. 4 Grant planleit de chevalier* et de gens. B. .
a Dont n'astoit-il raison. B. * Entour le XVI 9 jour, ajoute le manuscrit B.
* J 'efface ici un second tant, qui me parait de 6 Et si i' astoit clameis a Vemperoure. B.
trop.
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LIVRE PREMIER. 373
et dest que ilh devoit avoir le rengne, enssi com son perc l'avoit tenus par
pluseurs raisons : promirs portant que ilh astoit troveis anneis fis, secon-
dement portant que son pere Herode ly avoit donneit a son visquant et
instaublit roy devant les plus grans de Judee; et par ches dois raisons ' ilh
demandoit a avoir le rengne, se le court imperials disoit que drois fust.
car tout chu ilh voloit par bons tesmons sufflssament proveir. — A chu
respond it Herode Antipas enssi que le regne ne devoit pas avoir Archelaus iierode Antipas <ie-
por chouse qu'ilh euwist encore dit; car a jour que leur pere avoit fait le n^e? ***" un a
don del regne a Archilaus, ilh gisoit a lit dont ilh morit, et astoit si sour- Fo1 ' !04r °
pris de maladie que ilh avoit perdut son sens et ne savoit chu qu'ilh faisoit,
car celle jour propre que ilh fist le don, se soy vot-ilh ochire de unc cute!
que ilh tenoit en sa main; et por chest raison ne doit yestre de nulle valoir
chu que ilh fist adont. — Et, d'aultre part, se ilh astoit enssi, qu'ilh ne con-
fessoit nient, que Archelaus awist droit el rengne, si l'avoit-ilh fourfait, car
ilh avoit sens cause raisonable ja mis a mort IX m Juys des plus proidhommes
de la terre; et plus avant ilh avoit oussi priese la possession de la sengnorie
sens le congiet de l'emperere , et par celle meffait ilh devoit bien eistre
ataint de perdre tout chu qu'ilh y poioit demandeir, se le court imperial
disoit que chu fustloy. — Quant l'emperere Cesaire les oit oiis, si appellat
ses barons et leur dest que ilh conselhassent le melheur de ceste busongne
comment ilh en debvroit faire : ou del tout donneir a unc, ou casoon son
parchon. Atant sont les homines trais a I conselhe; et dementant* entrat
en palais I messagier, et dest a Archelaus que Matathie, sa mere, astoit
morte. Et quant Archelaus l'oiit, si en fut mult dolens, si fut remeneis a
son hosteil, si que ilh ne fesist mie son duelhe devant l'emperere; enssi
demo rat li jugement.
Alcuns poroient demandeir, puisque Archelaus alat vers son hosteil por
sa mere qui astoit morle, pourquoy puisque Herode Antipas astoit son
frere ne astoit oussy retrais. Nos respondons enssi que ilh astoient freres
de unc pere, mains ilhs astoient de dois meres, car Herode oit pluseurs
femmes : mains I'Escripture n'en parolle que de quatres , dont ilh oit ses
enfans qui visquarent, c'est assavoir : la promier, Dolside, le mere Anti- l«i femmes Herode.
1 Mot ajoute (Tap res le manuscrit B. demetant, demitant, et ici demtntant y signifiant :
* Nous avons deja rencontre* cette expression : pendant ce temps, dans rentrefaite.
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374 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
pater; le seconde, Mariane, le mere Alixandre et Aristoble; le tirche,
Matathie, le mere Archelaus; ct Cleopatre, la quarte, le mere Philippe
Herode et Herode Antipas. — Enssi com ches chouses astoient, avient qu'en
la terre de Judee avoit dois chevaliers qui tousjours avoient esteit de la
court Herode, si furent nommeis Ester et Zonas; se soy fisent roys de Judee
ambdois, car li uns coronat l'autre. Et disoient qu'ilhs astoient riches et
puissans asseis por eistre roys ; et la terre de Judee astoit remese ' sens con-
selhe qui alast contre eaux. — Et avoit oussi en la terre de Judee unc laron '
Do mi homines qui qui avoit iiom Judas de Galilee, qui avoit esteit (is a cheli laron que Herode
*oy firent coroiicir * . * . .
^na^eVj^dM el oc h' s t quant ilh revient de Romme, quant Cesaire li avoit rendue sa terre.
Baidaza. Chis Judas soy fist oussi coroneir, et chevalchoit par le terre sicom roy. Et
en la terre oultre le fluis Jordan avoit I hons qui avoit esteit de l'osteil
Herode 3 , qui mult astoit preux et hardis; et avoit nom Baldaza de Jadiel *.
Chis chevalchoit par la terre a grant gens, et se soy faisoit cremir com roy
en tous lieu ou ilh venoit; se le nommoit-ons le roy des pastours. Enssi
furent estaublis en la terre de Judee 1III roys, qui soy fasoient nommeir
roys, et se n'y avoient riens; mains ilhs quidoient que les en fans Herode
se dewissent entre eaux destruire, dont la terre demorast sens heures. —
Quant Varus, qui astoit adont prinche de Surie, soit chu, si envoiat
quere Philippe Herode, le frere Archelaus, en cuy main la terre astoit
remese a gardeir, et ly commandat qu'ilh sen allast a Romme et desist
ches novelles a I'emperere. Chis dest que volentirs yroit, sy s'en allat; mains
chu fut plus portant que I'emperere departoit la terre a ses freres que por
aultre chouse, car ilh en voloit oussi avoir son part.
Philippe Herode vai a En teile manere alat Philippe Herode a Romme, et en alerent awec ly
LIIII Juys des plus hauls hommes de la terre. Et quant ilhs vinrent a
Foi. 104 y. Romme, ilh trovarent bien VII m Juys qui la astoient venus comme chaitif.
et astoient affuis" de la terre de Judee. — Ches VII m Juys alerent a Romme
awec Philippe; mains quant Cesaire soitqu'ilh voloient venir devant luy,
ilh enlrat en temple Apolien, et awec ly son conselhe, portant qu ilh les
1 Ccst-a-dire : restait. B Avoit I sergant qui avoit esteit de la tnasnie
1 Notre texte porte baron, mais laron , qui se Herode. B.
trouve dans le manuscrit B, est mieuxen rapport 4 Ce person n age porte le nom d'Alronge dans
avec ce qui suit Voir d'ailleurs Fl. Joseph, XVII, Fl. Joseph.
\ 2. s Pour enfuis.
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L1VRE PREMIER. 375
voloit veoir tous apparamment \ Quant ilh furent tous venus en temple, se
criarent les Juys merchi al emperere , et la li racomptarent les grans mauls
que Herode avoit faite en Judee, et des enfans que ilh avoit ochis, dont ilh Des mauisque Herode
en fut VII" M et IIH m tous innocens marles; et Archelaus, son fis, avoit
ochis IX m Juys des plus hauls homines de la terre. Si voloient priier, com
cheaux qui trop longement avoient esteit en subjection , qu'ilh les vosist
mettre desous le sengnour de Surie, queis qu'ilh fuist, et que ches dois
terres fussent d'unne sengnorie, ou que aulcun des prinches de Homme
venist en Judee por la terre a governeir. Quant li emperere entendit chu,
se dest qu'ilh auroit sour chu si bon conseilhe qu'ilh n'en seroit point
blameis. — A eel temps avoit en la terre de Sydoine * unc bacheleir qui De Nembroth de s>-
astoit Juys, qui oit nom Nembroth ; chis resembloit si parfaitement Alixan-
dre, le fis Herode qui Herode fist ochire awec son frere Aristoble, que nuls
hons ne posist dire que nul riens y falist que chu ne fust Alixandre. A
cheli vint uns Juys qui astoit nommeis Herode Liber, qui savoit mies
toutes les rentes et les esplois de la terre de Judee que nuls hons qui fust
en vie ; et li dest que, s'ilh voloit , ilh le mainroit a Romme et ly feroit avoir
le rengne de Judee, car ilh resembloit parfaitement Alixandre, le fis le roy
Herode, qui mors astoit et astoit anneis de Archelaus. — Que feroit-ons
long compte? Ilhs se sont accordeis et aleis a Romme, et entrarent en la
citeit le propre jour que Philippe y entrat, sicom j'ay dit; et chu fut sor
Tan deseurdit, le XXVl e jour d'awost. Quant ilhs furent venus a Romme, Merveiheux avis de
les Romans qui cognissoient Alixandre voient Nembroth , si soy missent de
sa part, et dessent que chis astoit anneis, si devoit eistre roy; si qu'ilh oit
grant compangnie des Romans awec luy qui li faisoient fieste, car Alixandre
avoit en sa jovente demoreit a Romme awec son freire Aristoble.
De chu alat la novelle par tout Romme que Alixandre le fis le roy He-
rode astoit venus. Et quant Archelaus le soit, si oit grant paour, car ilh
savoit bien que ilh astoit anneis de luy, et devoit avoir la singnorie, et le
convehroit iestre en sa subjection. Gelle nuyt alerent as hosteis tous les
Juys, et lendemain vinrent al court Archelaus, Philippe et Antipas, les
trois freres; mains ilh fut dit a l'emperere que Alixandre, li anneis fis He-
1 Veoir plus plainement. B. XVII, 44, qui n'en donne pas le nom.
1 Sidon. Sur cet imposteur, voir Fl. Joseph,
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576 CHROMQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
rode, asloit venus a Romme, ct quant Cesaire l'entendit, se le mandat devant
Iny. — Quant ilh fut venus, si soy jettat aux pies l'emperere, et li priat
com a son sangnour droit qu'ilh li rendist le rengne, enssi com son pere
Herode 1'avoit tenue. Atant le fait lever Cesaire, puis ly demandat com-
ment ilh astoit escappeit de la prison Sebaste, ou ilh avoit esteit, luy et
Aristoble son frere. A chu li respondit que <c chis qui nos devoit coupeir
» les chief oit merchis de nos, et nos li jurammes que, se nos poiens jamais
» revenir a nos honneures, que nos li remerisseriens la bonteit que ilh
» nos faisoit. Enssi astons escappeis \ et coparent les chiefs a dois aultres
» qui astoient en prison awec nos. Et quant nos fumes escappeis, mon
» frere Aristoble sen alat en Gresse, sique je ne $<jay s'ilh est mors ou vis;
» je ne le vey oncques depuis. » — Quant Cesaire entendit chu, si le com-
menchat a regardeir mult parfaitement, com chis qui mult bien soloit co-
gnoistre Alixandre, car ilh le cognissoit de son enfanche, et quant ilh plai-
diat a Herode son pere devant luy; et tant le regardat, qu'ilh li fut avis
que chu n'astoit pais Alixandre, jasoiche que ilh le resembloit mult bien.
Atant le prent par le main , se le mynat en une chambre, et li dest en teile
manere : « Ilh toy covient dire veriteit, car je s<jay bien que tu n'es mie
» Alixandre ; et se tu moy cognois veriteit et par cuy conselhe tu as chu
» fait, ta vie serat salvee; et se tu ne le cognois, tu en moras. » Et chis,
Foi. 105 r». qui se dobtoit, respondit qu'ilh diroit veriteit par teile convent que nuls
mauls n'en venroit a ly. Et l'emperere li oit enconvent que ja n'en perde-
roit la vie ne membres *.
dc Herode Liber qui Adont ly dest Nembroth que vraiement ilh n'astoit mie Alixandre, ains
avoit conselhiet Nem- - •■ w i Ji* J a J x • • •!!_ * •*. J J • l
astoit I Juys de la terre de Sydome; mams ilh astoit venus demandeir le
rengne, enssi com I Juys li avoit conselhiet et fait entendant que ilh resem-
bloit bien Alixandre le fis Herode, et mies 8 ne pot oncques hons resembleir
l'autre. « Et astoit chis Juys chevalier de la terre de Judee, qui avoit long*
» temps servit Herode, et sceit tout l'estat de luy et de sa terre, si qu'ilh
» moy in format de chu que j'ay dit par-devant vos. Et est nommeis li che-
» valier Herode Liber. » — Atant est issus l'emperere de la chambre , et
se fist prendre chis Herode Liber, et le fist tan tost metre a mort, portant
1 Ensi nous laisserent aleir. B. 8 Le manuscrit B porte ici : Ensi que unc Juy*
* Ces deux derniers mots sont ajoutes d'apres li avoit fait entendant que ilh rettembloit Alexan—
lc manuscrit B. dre le fit Herode, si bien que tnies, etc.
hrolh.
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LIVRE PREMIER. 377
que ilh avoit donneit conselhe a Nembroth d'entreir en 1'honeur ou ilh n'a-
voit nulle droiture. Et quant ilh oit chu fait, ilh appellat cheluy Nembroth
et le retient de sa maisnie; et le fist sportier de son palais, portant qu'ilh
astoit plaisans de corps et apiers, et oussi portant qu'ilh li avoit dit et
cognut tout veriteit. — Chi jour meismes apellat Augustus-Cesaire son con-
selhe, et dest qu'ilh voloit delivreir les enfans Herode, et voloit faire a cas-
con d'eaux raison et droiture. — A cheluy conselhe oit teils qui dest que
Archelaus devroit eistre sire de tout la terre, et teils y oit qui dest que ly
anneis des dois altres l'ewist, car Archelaus le devoit perdre portant qu'ilh
astoit atains des dois dis ' forfais; et si oit des aultres qui jugarent que li
uns en devoit avoir ortant com l'autre, car ilh leur estoit esqueyut ensem-
ble de leur anneit frere Antipater, en cuy main ilh avoit esteit. — Mains
quant ilh oirent tous parleit, si parlat l'emperere et dest : « Signours, je
» ne m'acorde a chouse que vos aiies dit, ains en voray dire et jugier a ^i" 15 ^™*^ Augus "
» droit loy. Et portant que Archelaus est demoreit anneis heures apres la
» mort Herode, je dis en mon jegement qu'ilh soit roy de tout la terre
» que Herode tenoit a son visquant, si en ait la sengnorie et la coronne;
» mains ilh n'aurat pais toutes les rentes, ains en aurat tant seulement le
)> mo tie, et les dois altres freres en auront l'autre motie; et serat cascon
)> d'eaux sire de sa part del regne, com prinche et nient com roy, car ilh
» n'aurat en tout la terre altre roy que Archelaus, qui est ly anneis, qui le
» tenrat de moy et del empire; et ses dois freres tenront de luy leur par-
)) ties, et ilh serat leur saingnour. Enssi remanront-ilhs bons amis. »
Puis que Gesaire oit chu dit, nuls ne l'oisat contredire, ains s'i acordarent ArcbeUus fut roy de
tous. Atant appellat l'emperere Archelaus, et li donnat la vesture de tout wn^ST 8
le regne entirement com roy et drois sire, et se le coronnat par teile con-
dicion que ilh li dest qu'ilh n'auroit que la motie des rentes , assavoir : la
terre de Judee et la terre de Ydumee, et ses dois frerez auroient les rentes
de l'autre motie; assavoir que Herode Antipas auroit les rentes et seroit Noble ordinance que
prinche desous luy de la terre oultre le fluis Jordain , et de toute la terre fanT Herode!
de Galilee; et Philippe Herode auroit les rentes et seroit prinche desous
luy de tout la terre Ycnite* et Traconite. Enssi rechuit Archelaus de Cesar
1 Dots dis ne doivent-ils pas etre reunis? Us * L'Auranitide , an nord-est de la Palestine,
signifieraient les deuxdits forfaits. vers Damas.
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378 CHRONIQIJE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
la coronne et la sengnorie de tout le rengne que son pere avoit tenut; et
la meismes ilh donnat a tenir de luy a cascon de ses freres la partie de la
terre en teile manere que Cesair l'aveit jugiet. — Apres soy deplaindirent
les trois freires devantdit a Gesaire des laurons qui chevalchoient parmy
leur terres, et se soy faisoient clameir roys. E( Cesaire leurs donnat congiet
de les mettre tous a mort, s'ilh les poioient avoir; et leur priat li emperere
qu'ilhs soy maintenissen t loialmen t envers l'empire de Romme, et humble-
ment envers leurs peuples 4 . Atant sont partis les trois freres, et sont alleis
cascons en son paiis que ilh avoit a governeir. Et tantoist qu'ilh y furent
venus, assamblarent leurs gens, et chacarent * tant les I III roys qu'ilh les
prisent et le misent a mort tous quattres. — Apres chu vint Archelaus en
Dti cruaiteit Arche- sa terre, et regnat com roy IX ans : chis Archelaus fut mult fel et crueux,
et mult soy pennat de greveir cheaux qui a Romme avoient esteit contre luy.
Et se Herode son pere avoit esteit dures et sens piteit au* gens de la terre,
chis le fut ortant 5 , car a cascon ne desloialteit que Herode son pere avoit
Foi. los vo. fait, chis en faisoit dois fois plus. Enssi furent-ilhs ambdois malvais.
Lanvii. Al promier an que Archelaus fut coroneis, assavoir l'an deseurdit, en
^t^es'usTewia^rie m0 ' s de jenvier, envoiat Dieu I angle a Joseph , et li mandat que ilh en
Urael ralaist ariere vers Bethleem , et ilh le fist. Et entendit luy et Marie que Ar-
chelaus tenoit la terre de Judee, cuy Joseph tenoit mult fel; se ne vot aleir
plus avant, car ilh dob to it mult la felonie de Archelaus. Adont revint li
jhesuset Marie vinrent angle et dest a Joseph qu'ilh sen allast en Galilee. Atant sen alat Joseph
awec Jhesus et Marie en Galilee demoreir, en la citeit de Nazareth, ou ilh
L*an viii. avoient promiers demoreit *. — Item, Fan del incarnation Jhesu-Crist VIII ,
A 7cmlnrMwiw " en mois de julet, enchacat Archelaus sa promiere femme Mariane, qui avoit
esteit la filhe Aristoble, sen frere. Et chu fist-ilh por fellonie, et en despit
de ses dois freres, portant que elle estoit leur neiche, car ilh les haioit
grant de fait de Romme 3 . — En eel an meismes 6 , prist Archelaus a femme 1st
filhe Theoduin, le roy de Capadoche, qui avoit nom Galaffre 7 , qui avoit
1 Le man user it B ajoute ici : car s'ilh chu fat- * Esteit arestable. B.
soienly ilh les croisteroit son honour dcheli qui chu * Et il les haioit durement pour le fait d^
feroit. Romme. B.
* Chasserent. Ordinairement le chroniqueur ' En mots de decembre, ajoute le manuscrit 15- —
emploie la forme cacher et encacher. 7 Glapbyra.
3 Chis ne leur fut mie plus debonnaires. B.
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LIVRE PREMIER.
379
esteit la femme Alixandre, son frere. Et quant Alixandre fut mors, si oit
a maris I roy qui oit nom Goras, le roy de Nubie '. — Item , Tan del incar- Lan IX
J * 1 J Lotnnge le VI* roy de
nation IX, en mois de may, le XVII e jour, morut Lotringe, le Vl e roy de Tongre.
Tongre : chis roy Lotringe fut chis qui fondat le casteal de Lotringe, enssi
com dit est par-desus, qui astoit si hault que une cornelhe ne volast pais
si hault. Et morut chi roy par venyn qu'ilh buit. Ilh laissat dois fis : ly
anneis oit nom Jupilha, et li aultre Lotringe. — Jupilla fut roy apres son
pere, et regnat XXIX ans. Et ly altre, qui fut nommeis Lotringe, fut due Jupiiu qui fut h viie
de Lotringe, car son frere li donnat, com chis qui mult l'amoit, et aussi
faisoit luy. Et quant Lotringe fut en la possession de sa terre, qui astoit
adont une conteit, mains depuis fut une ducheit, car ilh l'augumentat si fort
que chu fut la plus grant ducheit de monde. — Chis dus Lothringe fondat
en eel an meismes une vilhe en sa terre que ilh nommat Lembor, en Sarazi-
nois , e'est-a-dire en franchois : bien assies. — Item, Tan X, fondat Lotringe f , Lembor fut fondee.
une mult fort vilhe; apres le nom de son frere ilh l'apellat Jupilhe , e'est- LanX '
a-dire en franchois : chief. Et portant fist-ilh de Jupilla chief de tout son Jupiihe.
ducheit de Lotringe, et ch'est Jupilhe qui maintenant siiet asseis pres de
Liege; mains le lieu ou Liege siiet maintenant astoit adont, et longtemps
apres, tout bois, croliches 8 et grans mares.
Gelle an meismes mandat Lotringe mult d'ovrieres, et fist edifiier Dolhen .
Hestat, Cheretal *, Wandre, Fleron et Herves, et mist son palais principaul
des iugement qui puis fut li chief d'Austrie , enssi com vos oreis; et fist I
thour a Jupilhe, qu'ilh appellat Gierlecoque 8 , ou les mairs et les esqueviens Giedecoq
rendoient leur finaubles jugement, auqueile n'avoit point de rapeal. Apres
fondat une vilhe et une fort thour en sa terre, qu'ilh appellat Bellecoste 6 ,
Dolhen, He si.. I, Che-
relal , Wandre , Fle-
ron , Herve>.
1 Juba , roi de Mauritanie.
1 Ici, dans le manuscrit B, on lit cette phrase
incidente : en mois de June fust-elle parfaxte,
1 Croliz dans Roquefort Ce mot designe or-
dinairement des lieux marecageux, et le chro-
niqueur parle immediatement apres de grands
marais.
4 Dolhain, Herstal et Chertal, dependance de
Herstal.
s On appelle encore Gilecoqw, a Jupille, Immi-
nence au haut de laquelle a 6l6 construit l'edifice
assez modeste qui continue a dtre qualifie de cha-
teau, et Ton rattache dans la commune le nom du
lieu a Fassassinat de saint Lambert Les meurtriers
etaient convenus de se reunir au chant du coq.
Une servante, qui entendit leur complot, voulut
empecher le crime en tordant le cou a la pauvre
bdte qui devait en donner le signal , et repondit a
ceux qui s'enqueraient de ce qu'il etait devenu :
u Ici git le coq. » Nous donnons I'etymologie pour
ce qu'elle vaut.
6 Elle porte aujourd'bui le nom de la mere de
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380 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Beicoiie, Uppey. ch'est Uppey * maintenant. — Item , sachies qui voloit aleir de Tongre a
Jupilhe ilh y comptoit adont VII ou VIII liewes , et passoit-ons en droit
lieu ou li vilhe de Treit fat depuis fondeit sour Mouse, la ilh siet mainte-
nant. Item, ilh fondat encor I mult fort casteal sour Mouse, qu'ilh appellat
ciennom. -Beraawe. Golonsce, chu est mainteuant Clermont; et tout derain ilh fondat Bernawe*
la vilhet 8 . — Chis dus Lotringe engrandist mult son pays et y fondat mult
de vilhes, qui toutes astoient del ducheit de Lotringe, dont Jupilhe astoit li
chief. El maintenant sont d'aultres sengnories, et est la ducheit de Lotringe
anychileit, fours que de nom: car c'est li plus gran tytle que li due de Bra-
Lanxi. bant at, ch'est Lotringe, et por altre chouse n'est-ilh dus. — Item, Tan del
incarnation XI , muet grant discorde entre cheaux de Romme et d'Athennes;
si orent les Romans victoir encontre eaux plusieurs fois; si fut al derain
en mois de septembre faite pais, et furent mys a mort tous cheaux qui
Foi. 106 i*. avoient fait le descerde. — Item, en eel an meismes, commenchat li due
de Galle Troielus a edifiier une citeit tout emmy unc bois, sour unc bras
Antwerpe. de mere qui la coroit, et le nomat Antwerpe, c'est en franchois devant
mere. Et fondat encor la deleis VII altres vilhes et III casteals, et en fist
Brus. sire et prinche son fis, qui oit nom Brus. — Item, Tan del incarnation XII,
LanXI1, en mois d'avrilh , Joseph et Marie emynont awec eaux Jhesum en Jheru-
salem , por faire leurs orisons et donneir leurs ouffrandes *.
jhetus ei Marie aiont Alant s'en allont tous trois vers Jherusalem, et sont entreis el temple;
erusaem. ^ ^^ ^.^ leurs orisons et presenteit leurs ouffrandes. Mains, enssi qu'ilh
fasoient chu, Jhesus li enfe, qui astoit en l'eaige de XII ans, soy emblat et
issit de temple , puis est assis entre les Juys; si commenchat a disputeir et a
jhesus desputoit as demonstreir les escriptures , les loys et les commandemens. Et quant les
uy *' Juys entendirent chu que ilh leur disoit, si orent mult grant mervelhe de
la sapienche qu'ilh avoit en ly. Enssi qu'ilh astoient la assembleis, vint la
Marie qui le queroit, et qui avoit grant destoublier ' de cuer de ly. Mains
Charles Mariel, AJpaide, et Ton montrc encore la fondat, etc., est omise dans le manuscrit B.
fen&re ou se tenait la dame attendant le retour de 4 Le texte du manuscrit B differe un peu : «>*»
son frere Dodon et des meurtriers de saint Lam- vient Joseph d la virgene Marie, ditani qu'ilh ala&~-
berL sent en Jherusalem , et menassent avec eaux Jh&~
1 Oupeye. sum pour faire leurs orisons et donneir leur offran&^j
1 Berneau, dans le canton de Daelbera. el la virgene li olriat volentiers,
8 La phrase qui pr6c£dc depuis : Item , ilh 5 Inquietude. Destourbier dans Roquefort
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LIVRE PREMIER. 381
quant elle le veil enlres les Jays, si en oit grant joie, et li demandat : « Fis,
» que fais-tu la entres les Juys, je toy queroy ? » Et Jhesus li dest : « Certe ,
» mere, je fay les commandemens de mon pere de paradis. » Atant sont
departis de temple et sont raleis vers Galilee, en la citeit de Nazareth. —
Item, Tan del incarnation XIII, en mois d'awoust, s'avisat Richirs, le fis Lan xm
Jupilha, qui astoit roy de Tongre,que ilh voroit alleir a Jupilhe la citeit,
veoir son oncle Lotringe. Si montat a grant compangnie de chevaliers, car
a son temps ch'astoit li miedre chevalier de monde, et chevalchat a Jupilhe
ou ilh fut bien festoiet; et demorat illuc mult longement, por les beaux
enbattement qu'ilh avoit la des bois et des rivieres ou ilh alloit sovent ca-
chier. — Si avient 1 jour qu'ilh astoit aleis cachier en bas forest, ou la citeit
de Liege siet maintenant, si enlevat 1 unc chief* et un pore sengleir droit a
piet d'unne montangne qui syet en la citeit, en lieu con- dist de fours Cas- comment u voie fut
teal 8 , ou ilh avoit une belle fontaine, ou ilh trovat bangnant la savesine *. et jupiibe.
Quant ilhs oyrent les chiens glauteir 5 , ilh se drecharent en la fontaine, et
atendirent la tant que Richier vient a la fontaine. Si les voit, si les quidat
attendre; mains ilhs s'enfuirent tout amont la montangne, et Richier val-
hamment les siwoit de pies, et tant que les dois biestes issirent de bois aux
plains champs, et Richier toudis apres. — Quant Richiers vient fours de
bois, sy avient qu'ilh regardat devant luy et veit la citeit de Tongre, dont
son pere astoit roy; et encontrat Ganesse qui guioit une asne de palais son
pere, dont ilh quidoit bien eistre VIII • liewes lonches; et tantoist deman-
dat a Ganesse dont ilh venoit et ou ilh alloit. Chis respondit : « Je vay al
« aighe fresque por le palais. » — Atant relournat Richier et vient al entree
de forest, droit ou la porte que ons nomat Paien-porte 7 fut depuis; et trait
l'espee et coupat le bois plantivoisement , de l'amont jusques a la fontaine
qui siet en fons. El la soy repoisat Richfer unc pou.
Apres Richier s'en allat vers Jupilhe; toudis talhant les bois; et chu fai-
soit-ilh por mies a recognestre la voie. Ilh est venus a Jupilhe; se dest a
son oncle qu'ilh avoit veyut Tongre depuis que soy parti t de luy, et la li
1 Si acqiselhit. B. * Crier, japper. Glatire dans la basse latinite,
* Un cerf. glaper dans Roquefort, glawer en liegeois.
5 La rue hors chateau. • XX. B.
4 Nous avons deja rencontre ce mot qui signi- 7 Ancien nom de Hocbe porte, celle qui ouvre
fie : gibier. Sauvagine dans Roquefort sur la route de Liege a Tongres.
r
,<^V /TV S~*
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382 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
racomptat tout chu qu'ilh avoit fait, enssi com nos l'avons dit. Mains 1H1
ne le creit mies et dest : « Richier, beaux amys , tu ne sceis que tu dis. »
« Sire , dest Richier, je vos y menray bien, s'ilh vos plaist tout mainte-
» nant. » — Atant sont monteis et sont chevalchies a Tongre. Si out troveit
le roy, se li ont compteit le fait; mains ilh en rist en disant : « Chest une
comentuvoiede viu » faible 1 ," mains lendemain l'iroit esproveir. Ilh y alat lendemain; si trovat
que ch'estoit verileit, si en oit grant mervelhe qu'ilh aloient VIII liewes , et
Lebiason Richier qui I'avoient enssi dleit longtemps por III liewes*. — Se fist talhier en pire unc
Irovat le voie enlre ... . ? ■ i • i * * *«
jupiihc et Tongre. chevalier seiant sour I cheval, armeis de toutes armes, une escut a son
coul , qui astoit d'or a I griffon de sy noble; ch'estoit li blason Richier. Et
Foi iogv. puis le fist asseir desus la fontaine, et si fist faire et enclore la fontaine
toute de pire. — Encor fist-ilh la pondre en une taible le caiche de Riche-
ron . et fist escrircvcesse s vers en sarazinois , c'est a dire en franchois * :
Verj. Par la chaiche de Richeron ,
Qui en la fontaine aquelhit K de savesin grant fuison ;
Jupiter a chu Tesperit 6 que voie at troveit
De raison de Tongre a Jupilhe qui s'ensiet.
DeRicheroo Fontaine. — Ches chouses durarent mult longement, pres tant que Liege ful fondee;
mains li cheval et li chevalier durarent plus. Encor est eel fontaine a piet
de la montangne dedens la citeit de Liege, par-deleis le maison et mostier
des freres myneurs, et le nom-ons Richeron-Fontaine. Quant la citeit de
Liege fut fondee, fut li blason Richier repoins, car la plue et la gvisil
I'avoient destient. Si durat longtemps 7 . En la fin alat a nient el cheval et
chevalier; si y fut puis point la caiche de ponture 8 , et Richier awec plu-
seurs fois , li une apres Tautre.
Richier fut marie S . En eel aiinee meismes fut Richier maries; si oit a femme Enea, la filhe
Troielus, le due de Galle, et li donnat li due de Galle le paiis d'Avergne.
Item, Fan XII1I, en mois de may, avient que ly roy Tyrus de Magunse,
1 Ch'est vaitu. B. • * Accueillit, prit. AccoilUr dans Roquefort.
* Sy soy enmervelhat mult qu'ilh aloient VIII 6 L'iiispira?
liwes, et avoit aleis lone temps pour II Hwes et 7 Ces trois mots, qui semblent necessaires, sont
demie. B. supple d'apres le manuscrit B.
5 Sic pour ces. 9 Si y fut poins de pointure la cache. B.
4 Qui dient ensi en franchois. B.
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L1VRE PREMIER. 383
qui avoit II fis : l'uncde sa femme, qui fut nommeis Jaspar, etcheli avoit-
ilh oyut de sa femme, et ly aultre astoit nommeis Ponche Pylate, qu'ilh DePonchePyute.
avoit oyut de Pyla, la filhe de monsenier, sicom jay dit desus; si avient
que ches dois enfans astoient en l'eaige de XII ans , si jowoient sovent en-
semble; mains, tout enssi com Jaspar astoit plus noble de Pylate 7 tout
enssi astoit plus apeirs et plus subtils de tout chouse, dont ilh soy melloit.
Et Pylate ne soy poloit coubrir f a ly de nulle chouse, dont Pylate astoit
mult destoubleit de son sens 1 . — Adont avient que Pylate et Jaspar, son frere,
astoient I jour en unc vergier, et avoient joweit aux escas; si fut Pylate
mas et desconfis, dont ilh fut corochies, et commenchat a dire Jaspar
vilonie. Et chis le nommat bastart. Adont le jettat Pylate d'unne pire qui
le quidat navreir, et chis le rejetat d'unne aultre pire a la fonderne 8 , tant
com Pylate fut navreis en chief. Quant Pylate veil qu'ilh astoit navreis , si coment p y iaie ocimt
prist I cuteal et le butat son frere en ventre , si l'ochist. — Mains quant ly
roy Tirus le soit, si en oit gran duelh, et demandat a son conselhe qu'ilh
en feroit. Et tout le peuple commenchat a crieir qu'ilh fust ochis , car ons
li devoit le chief coupeir. Atant s'apensat ly roy que s'ilh rendoit fellonie
contre felonie , chu seroit trop graji maul ; mains ilh s'apensat qu'ilh devoit
1J1I C besans d'or aux Romans por le tregut de sa terre, si l'envoiroit illuc
en ostaige , si que parmy luy ilh seroit quitte de son tregut et ne seroit mie
culpauble de sa mort. Enssi envoiat ly roy Tirus Pylate, son fis, a Romme,
qui puisedit fist pluseurs gran mals, enssi com vos oreis chi-apres. —
Item, Fan deseurdit, le XVI e jour de jule, morut ly secon emperere de Lanxim.
Romme, Octoviain, que ons nomat Augustus Cesar, qui avoit regneit octoviain mora.
LVI ans; et quant ilh morut ilh avoit d'eaige LXX et VII ans, et morut a
Arcelle 4 en Ghampaine, et fut ensevelis en champt Marsch. A son temps
furent compteis les chiefs des Romans citains; si en fut troveis, si com dist u nombre de P eu P ie
1 de Romme.
Martiniain en son croniques, a X fois III C et LXXX milh par bon compte.
Tybeirs Cesar fut ly thiers emperere de Romme; si commenchat son Tybers, iein» em P e
reir.
1 Coubrer dans Roquefort, saisir, se rendre 8 Sans doutela fontanelle, lafontaine de la tele,
maitre, et ici Femporter sur quelqu'un. On pour- 4 Artmnum , Braeeiano? Mais Braeciano est
rait lire aussi couvrir, ce qui signifierait que situe au nord de Rome, et non au sud dans la
Pylate ne se pouvait defendre, mettre a couvert, Campanic. 11 est difficile de reeonnaitre ici Nola,
contre Jaspar. ou mourut Auguste.
1 Dont Pylat quidoit bien marvoier de son sens. B.
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384
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Fol. 107 r°.
regne en mois d'octeiribre Tan deseurdit. Et regnat solonc Martiniain XVIII
ans , assavoir jusques a Tan que Jhesu-Crist fut crucifiies. Et chu ne se puet
faire, car ilh y fairoit ' II ans. Mains Tytus Livus dist qu'ilh regnat XX1I1I
ans, et que Dieu fut crucifiies le XVIII an de son rengne; et chis dist veri-
teit, ilh ne sen fallit que I mois, assavoir, ilh fut coroneis en octembre
Tan XIIII, si morut Fan XXXVIII en septembre. — Chis Tybeirs Cesar fut
ly genre de Octaviain, son predicesseur; car ilh oit sa filhe a femme. Et
alcuns croniques dient que chu fut li fis Octavian. Mains ons doit entendre
que chastoit son fis *, car ilh avoit sa filhe a femme. — Chis Tybeirs fut unc
gran beveirs de vin , chu dist Tytus Livus, oussi fait Martiniain; mains aux
armes astoit-ilh preux et hard is, et fors et todis bien fortuneux s , car ilh
astoit gran clers, et la clergerie li aidoit grandement de saigement ordineir
ses besongnes. Chastoit li plus beais cleir en parleir de noble faconde et
eloquenche de monde; mains tout voies ilh fut fel et crueux * et avaritieux
agaiteurs 8 de parolles; et se soy findoit qu'ilh voloit une chouse dont ilh
Meneihe de Tybeirs. n avoit cure. Cheaux a cuy ilh astoit, yreis et qu'ilh haioit, fasoit-ilh bonne,
chire et lencheuse •; et cheaux qu'ilh amoit, apparoit-ilh yreux de chire
Chis Tybeirs Cesaire, jasoiche qu'ilh fust bons en armes et conquesist
asseis, mains chu ne fut mie por ly, ains envoioit des legauls aux gens 7
d'armes encontre ses annemis. Ilh avoit une manere, s'ilh faisoit ou con-
stituoit offichiens queis qu'ilh fuist por les provinches, a poines les rapel-
loit jamais •. — Sor l'an del incarnation XV, en mois de junne, avient que
Archelaus, le roy de Judee, gisoit awec sa femme une nuyt 9 . Si vient a lee
une vision qu'elle veioit Alixandre, son premier marit, esteir devant lee,
L'an XV.
1 Pour fairoit } fauldroil, manquerait
9 Le mot est omis dans notre texte; je le sup-
plee d'apres le manuscrit B.
8 Heureux dans ses entreprises. C'est le sens
attache dans Ducange au mot f or tuniosus, dont for-
tuneux n'est que la traduction.
4 Avers, B. Cela signifie, je crois, que Tibere
epiait les discours des autres, tout en etant mana-
ger de ses paroles.
* Roquefort donne le verbe agaiter, cpier, ten-
dre des pieges.
• Lecheuse. B. Cela ne veut pas dire : bonne et
friande chere, comme on pourrait Interpreter.
Le membre de phrase suivant assigne a chire {chere
dans Roquefort) le sens de figure, visage, et je
crois ainsi que les mots auxquels se rapporte eette
note signifient : bonne et joyeuse mine. LencheM**
ou lecheuse est Tadjectif de lieche ou liesse, plaisir,
gaiete\
7 A gent. B. A dans le sens de avec.
8 C'est-a-dire qu'il ne les rappelait presqo 6
jamais, a peine.
• Voir Fl. Joseph., XVII, 15.
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LIVRE PREMIER. 385
et li disoit : « Galaffre, assets deuist avoir de my quant je toy oris: mains Merveiheux vision »i
. 1 i j i • i • i J • • ferarae Archelaus.
» oirs as-tu pns mon frere com pule desloiai, si toy en dewisse avoir gar-
» deit; et sache que tu ne m'es pais del toute escappee, ains comparas chu
» que tu as forfais al encontre de moy. » — Et al matien Galaffe racomptat
a Archelaus son songne, et li dest les parolles que vos aveis oiit; de quoy
Archelaus fut tous enbahis. Et Galaffe voit chu , si oit si gran paiour quelle
soy cuchat malaide, et si morit droit le secon jour apres. — En eel an
meismes, en mois d'octembre, le XVI e jour, morut ly XI e roy de Danne-
marche Yborus; si fut roy apres luy son fis Ogens, qui regnat LIU ans. —
Item, l'an del incarnation XVI, fut accuseis Archelaus, ly roy de Judee, i^nxvi.
de diverses cas a Tybiers, Femperere de Romme. Adont ly mandat l'em-
perere par ses lettres que ilh venist par-devant luy a jour ordineit, por res-
pondre a chu que ons li demanderoit. Si avient que, V jours anchois qu'ilh
fuist somons, gisoit-ilh en son lit: se songat qu'ilh veioit I buef qui man- vi«on * Archelaus.
goit les espis des bleis. Et, quant ilh oit chu songiet, ilh mandat tous les
clers de la terre, et leur demandat que chu poioit estre de chi songe; et
ilhs li respondirent qu'ilh ne le savoient. — Entres ches clers oit' I qui
mult astoit saige qui se metit avant, et li dest que ilh ly diroit mult bien
I'entendement l de son songe, mains qu'ilh n'en dewist avoir maul greit. Et
ly roy ly creantat que non. Atant li dest li clers, qui fut nomeis Symon
de Jherico *, que ilh sewist por certain qui ly buef et li espit signifye
muanche de chouse, et fuist tout certains que ilh perderoit sa terre tern-
prement et en seroit oisteis. et puis apres ilh moroit sens terre, et chu vie-
roit-ilh en brief temps.
Enssi com Symon l'oit dit, avient-ilh; car droit a V e jour apres vinrent
les lettres dont ilh fut somons; si alat a Romme, et la fut-ilh accuseis de-
vant Tybeir Gesair de multes excesses enormes, dont ilh fut atains. Dont Archelaus rut pmeis
Gesaire soy corochat mult a luy, et le cachat fours de sa terre; si 1'envoiat €S01sm,flle
en exilh a Viane *, en une citeit qui siet en Galle. — Apres chu mandat
Gesair Philippe H erode, et le fist roy de Judee, et li donnat tout la sain- Philippe, son frere, fut
gnorie que Archelaus avoit. Si regnat XXIII ans. De chesti font mention les roy e tt **'
ewangeiles de la souffranche Jhesu-Grist. Mains Gesaire, qui toudis soy
1 L'exporition. B. 3 Vienne, en Dauphine.
a Voir Fl. Joseph, XVII, 15.
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386 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
dob to it des enfans H erode et de leur felonnie, envoiat en la terre de Judee
jhesus^commench.t a awec Philippe 1 sien prinche qui fut nomeis Compoymes'. — En eel an
meismes, commenchat Jhesus a preehier. Si vient unc jour en eostiant la
mere de Galilee , ou ilh trovat dois pesseours qui astoient freres : ly uns
jhesus appeiut saint astoient nommeis Pires Symon, et li aultre Andrier. Quant Dieu les veit.
Pireet saint Andrier ^ . , . -
porestrese^ apostles, se leur dest : « Sangnours, je suy venus le monde salveir et des grandes
Fo1 ,07r °- » paines d'infeir delivreir; je vos prie que vos m'aidies preehier, et se las-
» sies le pesquier, car je feray de vos teis pesseours que vos en sereis awec
» moy en paradis. » — Quant cheaux l'entendirent, se ly ont dit : « Sire, nos
» summes prestes de toy a servir et faire ta volenteit. » Atant sen alerent
awec luy preschant la foid et la loy, et convertirent depuis sens nombre
de gens \ — A celle temps fasoient les Juys mult grant sollempniteit de la
Pasque : ilh lassoient toutes oviertes les portes dou temple le vigiel de la
l an xvii. Pasque. Si avient que droit sour Tan XVII del incarnation v le vigiele del
Pasque, remanirent oviertes solonc la constumme; si entrarent dedens la
De temple. citeit de J he ru sale m , a heure de meynuyt, alcunnes gens samaritaines qui
emplirent le temple de osseaux 3 et de ordure contraire a la loy, puis sen
ralerent en leurs terres. De chu furent les Juys mult corochies en leur con*
scienches \ et portant ne vorent oncques depuis lassier le temple sens grant
planteit de gens por gardeir ; ne oncques puis les portes ne furent oviertes,
fours que a cleir jour, portant qu'ilh ne voloient mie que ons leur fesist
plus despis. Apres chu sen allat Gompoynes , ly prinche, a Homme; si ne
vot plus eistre prinche de Judee, et Gesaire y envoiat I aultre qui fut appel-
leis March 5 . — Item , eel an meismes, morut Salome, la soreur Herode. En
eel an fut oisteis March de Judee , ou ilh ne voloit plus eistre prinche. Si y
fut I altre qui oit nom Alus 6 .
L'anxviiimorototi- Sor Tan del incarnation XVIII morut Ovidius, ly bon poete, en exilhe;
si fut ensevelis deleis une citeit qui avoit nom Thomas 7 . Ghis Ovide fut
mult saige et subtil cler, et fist mult de beais libres qui encors sont en
grant auctoriteit *; et fut disciple a Virgile, et parfist le histoire de Virgile
1 Coponius. Fl. Joseph, XVIII, 4. 4 Condition. B.
1 Une quantite innombrable, sans nombre. Le * Marcus Ambivius. Fl. Joseph, XVII I, 5.
manuscrit B sc contente de dire : maintcs per- ' Annius Rufus.
sonnes. 7 Tomiswar, en Bulgarie, ancienncment Tomi.
8 Ossements , os. * En usaige. B.
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LIVRE PREMIER. 387
jusques en la fin de sa roort. — En eel an meismes, en mois de jule, vers DejudasScariotb.
le XI e jour ou la entour, avient que Judas Scarioth, qui trahit Dieu, astoit
deleis le fis de la royne del ysle de Scarioth a cuy Judas cuydoit eistre fis;
et tant jowarent les II jovenecheaux ensemble, que Judas fist ploreir le fis
de la royne. Mains quant la royne le soit, si en oit grant desdengne ' de
chu qu'ilh astoit tant hardis; se li dest : « Ors, troveis % porquoy as-tu fait
» mon fis ploreir? » De chu oit Judas grant honte qui quidoit eistre son
fis, et soy taisit; mains eel jour meismes ilh ochist le fis de la royne tout pai-
sieblement 3 . — Apres n'oisat demoreir en la terre, si s'enfuit et soy s'acom- De judasqui ochist ie
pangnat a wee cheaux qui portoient le tregut en Jherusalem; et demorat la
longement ou ilh pot, jusques a tant que Pylate fut prevoste de Judee,
enssi com vos oreis. En eel an meismes morut Alus. le prevoste de Judee,
si y fut revoiet uns altre qui fut nomeis Valus * et astoit grigois. Ghis fut
prevoste desous Philippe par l'espause de II1I ans, et fut si convoiteux d'a-
voir argent, qu'ilh vendoit les cymiteirs des mors, et ne poioit nuls avoir
provende 5 al temple, se ilh ne li donnoit lowier; et tous ches que ilh y
trovat mist-ilh fours de cheaux 6 qui ne ly voloient riens doneir, se y remist
des aultres 7 qui li donont lowier. — Sor Tan XIX, morut Gloveus, ly X e conte L'»n xix.
de Flandre; si regnat Alixandre son fis anneis apres XXV ans. — En eel an
meisme, en mois d'awoust, avient a Romme que Ponche-Pylate ochist Pagi-
nus, qui la astoit oussi envoiet en ostaige por le tregut son peire Paginus, p y uie ochist ie g s u
le due de Burgongne , et l'ochist portant qu'ilh ne voloit nient eistre son uc e r % m % m *
compangnon a mal a faire 8 .
Adont prisent les Romans entre eaz conselhe, se ilhs ochiroient Pylate
ou non. Si orent teile conselhe en la fin, portant qu'ilh astoit fis de roy, que
ilhs l'envoroient en l'ielh de Pontos 9 por estre prinche de eel terre, ou ilh pylate futprinche de
avoit des si malvais gens qu'ilhs ne poloient souffrir nuls juges deseurs eaux
qu'ilh ne fust tantost ochis s'ilh leurs forfesoit riens; et ilhs tenoient Pylate
si dissolus que tantoist y seroit ochis. — Mains Pylate, qui bien enquist a
1 Mepris, et plutot ici colere. Desdaing dans dans le manuscrit B.
Roquefort. • Mist-ilh hors portant. B.
* Enfant trouve. 7 Un altre. B.
• Tot coyement. B. • Portant que chis ne le voloit mie croire a male
4 Valerius Gratus. faire. B.
5 Prebende , benefice ecelesiastique. Prtvoire , * Le royaume de Pont?
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388
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Fol. 108 r*.
La grant subtiliteit Py-
late.
L'an XX.
De malisce Philippe et
Pylate.
Pylate regnat en Ju-
dee.
Guerre entre Francbois
et Flandrois.
L'an XXI.
Brus , le roy de Bre-
tangne , fist Brus-
cala.
Antwerppe.
Bruselle.
queiles gens ilh astoit envoiet, se soy gardat de chu mult bien par sa sub-
tiliteit; car, quant ilh fut la venus, ilh regardat ses gens en remyrant leur
condition, se fist d'eaux trois parchons dedens son cuer, assavoir : les grans,
les moiens et les petis. Aux grans ilh donnat tant qu'ilhs furent ses amis,
en tous cas: aux moiens fasoit-ilh proieres secreement por les grans, tant
qu'ilh fisent par leurs priieres que chu furent ses amis; et aux petis fist— ilh
des maneches par les grans et les moiens, et tant qu'ilh les mettit tous en
grant subjection. En teile manere sormontat Pylate chas gens par sa sub-
tiliteit, que oncques nuls devant luy ne sen partit sens morir; et les go-
vernat si bien que ons en parloit par tout le mondc. En eel an meismes,
chairent en la terre de Aisie pluseurs grant citeis par le muet de la terre.
— Item, l'an del incarnation XX, oyt dire Philippe Herode, le roy de Ju-
dee, la novelle del grant subtiliteit de sens Pylate; si en oit grant joie, car
li roy Philippe astoit oussi mult malitieux, et ons dist que cascons fait tou-
dis joie a son semblans. Adont Philippe envoiat lettre a Pylate qu'ilh venisse
tanloist parleir a ly ; et, quant ilh y fut venus, Philippe li donnat l poioir
par tout sa terre. Enssi commenchat Pylate a regneir en Judee desus f Phi-
lippe, de quoy Philippe en fut puisedit dolans, car ilh sen trovat dechuit
par luy-meismes de Pylate, qui puisedit ly tollit une partie de sa terre. —
En eel an muet grant guerre entre Troielus, le due de Galle, et Alixandre,
le conte de Flandre, porlant que Alixandre avoit fait robeir I filhe que li
dus avoit, et l'avoit priese a femme, qui oit a nom Heleine; et chu astoit con-
tre la volenteit de due. Mains enssi com ilh se guerioient, vient la passant
li emperere Tybeirs Cesaire qui s'en aloit a Tongre'; si en fist le paix*. — -
Item, l'an XXI, fondat Brus, li dus de Bretangne, I citeit qu'ilh nomat Brus-
cala \ e'est a dire en franchois bien faite. En eel an meismes chevalchoit li
princhetjui astoit nomeis Brus, li fis de due Troielus de Galle, qui astoit
prinche de ladit terre novelle qui astoit nomee Antwerpe, por la citeit qui
enssi estoit nome. Chis chevalchoit parmy unc bois en sa terre meismes,
el y fondat une mult belle vilhe que ilh nomat Bruselle en sarazinois, e'est
a dire en franchois vilhe d'aventure, porlant que d'aventure ilh cheval-
1 Adont fist Philippe* promeltre grans dons par
messagiers a Pylate, et li donnat. B.
* Par erreur pour dessous ?
8 Deux mots ajoutes d'apres le manuscril B.
4 Si les apaisat. B.
* Brucourt dans le Calvados?
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LIVRE PREMIER. 389
choit la ; se li plaisit si bien li lieu que iih fondat la chist noble vilhe. — Item
Fan del incarnation XXII, s'avisat Pylate et vient a Romme par mere; et L*nxxn.
donnat a Femperere tant d'or et d'argent que ilh le fist prevost de Judee
hiretaiblement, et que Phelippe li roy de Judee ne Ten posiste faire tort.
Mains quant Pylate en fut en Judee raleis et Philippe le soit, sy furent Discorsenuepyiateet
annemis li uns a Fautre; et esmut entre eaux dois une guere qui durat jus- jad*?!"*' e r ° y
qu'a eel jour que Nostre-Saingnour Jhesu-Crist fut livreis a Pylate. Enssi
fut Pylate prevoste de Judee, par la grant subtiliteit qui en luy astoit de sa
jovente. — Quant Pylate fut revenus en Judee, ilh aporta awec luy les Des ymages pyiaie.
ymages que ons aoroit a Romme ' ; car les Romans astoient adont payens.
Et quant ilh les oit estaublies en Jherusalem, et les Juys le seurent, si en
furent mult corochies; et vinrent a Pylate et li criont merchi, en disant
por Dieu que ilh ostasse ches ymaiges, car les aultres saingnours devant
luy n'avoient ancques aporteit teiles ymaiges, et astoit chu contre leur loy.
— Adont fist aporteir Pylate son faudestuet, et mandat gens d'armes qui
le vengassent des Juys, se besongne astoit. Atant commandat aux Juys
qu'ilh voisissent aoreir ses ymaiges; et les Juys respondirent qu'ilhs aroient
plus chier a morir, car ilhs briseroient leur sainte loy. Quant Pylate les
veil si ferme, se les tient com bonnes gens, et oistat les ymages. — Item,
Fan XXIII , en mois de junne, s'avisat Pylate et vient en temple de Jheru- i/mxxiii.
salem et debrisat le lieu ou ly tresoir David astoit, se prist tout chu qu'ilh
y trovat; si en fist faire unc conduit de coevre, por amyneir en Jherusalem Pvi«ie prist ic tresoir
une fontaine qui astoit de une liwe longe de Jherusalem. Et ilh faisoit chu e empe *
por bien, car ilh veioit qu'ilh avoit grant defaulte en Jherusalem d'aighe.
Quant les Juys veirent chu , se vinrent a Pylate et ly dessent qu'ilh ne fai-
soit mye bien, et qu'ilhs s'en plainderoient a Fempereur de Romme. De
quoy Pylate mult soy corochat. Si assemblat ses gens d'armes , et corit sus
les Juys; si en ochirent XI m IX C et LXXIII Juys, et si en navrarent VI C pyiateocimtxi^juy.,
et XIII. Et fist a tant cesseir * le oevre qu'ilh avoit commenchiet; car ilh e pm '
se doubtoit que les Juys n'alassent a Romme plcndre de luy a Femperere.
— En eel an meismes, vint Judas Scarioth servir a la court Pylate; sy en fok iosv.
fist Pylate son chamberlain et son maistre conselhier, portant qu'ilh avoit pyime 6»t * n cham-
entendut que Judas astoit subtis et malicieux. — Item, Fan del incarnation m as
1 Voir Fl. Joseph, XVIII, 4. * Remanoir. B.
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390
CHRON1QUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
L an XX1III.
Jhesu-Crist preeboit.
Sains Maxhier devint
disciple a J hesu Crist.
Des Phariseins, Sadu-
cheins, Asseriens.
XXIllf , en mois dawoust, viot Jhesus en tine citeit des Juwis, qui avoit
a nom Godoza \ Et la commenchat-ilh a demonstreir la loy , tant qu'ilh con-
vertit * a luy mult des Juys et des Sarasins. — En eel citeit avoit unc changeur
mult riche, qui fut nomeit Maxhier : « Chis Maxhier chait nostre sire aux
» pies et sen alat awec luy, et fut unc de ses disciples » Mult de gens le
nomment sains Mathier l'apostre et ewangeliste; mains ilh at a nom pro-
prement Maxhier. Enssi aloit prechant Nostre Saingnour Jhesu-Crist awec
ses apostels , car ilh avoit adont mult de gens creant en diverses loy. — A eel
temps avoit en la terre de Judee trois manieres de gens qui n'avoient mie
(eile creanche li unc com ly altre , et astoient tous contraires aux Juys :
ly une des maneres astoit nommeit Phariseins, et les aultres Saducheins
et les altres Asseriiens *. — Promir les Phariseins astoient gens de povre estat *
et de petit vivre, qui portoient aultres vestimens que les aultres, et les
ponteloient* tous des spines qui les pondoient* en la chair quant ilhs les
avoient vestus. Et chu fasoient-ilh portant qu'ilh voloient avoir sovenanche
des 7 commandemens de Dieu. Et astoit leur creanche que toutes les choises
qui venoient aux gens venoient par destinees. dies gens portoient grant
honeur a leurs anneis, et a cheaux qui astoient en honneur 8 , et creioient
bien que ly jour de jugement venrat et sierat; mains ilh dissoient que
I arme astoit chouse morteile, et qu'ilh moroit awec le corps 9 . Teile crean-
che, com je dis, avoient les Phariseins. Et portant qu'ilhs astoient enssi
varians aux altres loys, astoient-ilh nommeis Phariseins, qui est ortant a
dire en franchois comme desevreis. — Item , les Saducheins avoient altre
loy et creanche , car ilhs ne creioient mie que toutes chouses fussent me-
neez par destinee; ains creioient que ilh fussent a la volenteit de l'homme
de bien ou de male faire. Et creioient que ja ayme ne soufferoit tourment,
puis que ilh seroit partie de corps 40 , por maile que li corps awist faite ; car
1 Encore un nom estropie sans doute. Tout ce
que nous savons de saint Matthieu, a qui le chroni-
queur assigne Godoza pour domicile, e'est qu'il
habitait une localite de la Galilee, pres du lac de
de Genesareth.
1 Trahit. B.
' Comp. tout cela avec Fl. Joseph, XVIII, 2.
Le manuscrit B porte Esserien*, ce qui se rap-
proche plus d'Esseniens.
* De povre atour. B.
s Garnissaient de pointcs.
6 Piquaient. Le mot est reste en vvallon.
7 Qu'iUi voloient qu'ilh les ramenbrast des. B.
* Qui avoient grant hauteche. B.
9 Mains ilh croient que li arme soit chouse mor-
tee, et qu'elle morissent avecque les corps. B.
10 Cest-a-dire : apres qu'elle aurait quitte le
corps.
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LIVRE PREMIER. 391
quant ly ay me issoit de corps, ilh rentroit en unc aullre corps, et enssi
duroient les aymes jusques a jour du jugement. Et celles qui seroient a
eel jour trovees mailes seroient mise en perpetuel chartre. Et dissoient que
a jour de jugement ne venroit nulle personne, s'ilh n 'astoit dont f vief; car
jamais les corps trespasseis ne soy releveroient de terre por venir al juge-
ment. Encor ilh disoient que ilh n astoit nuls angeles ne archangeles, et ne
creioient nuls escriptures de monde fours que les chinques libres Moyses.
A cheaux adjostoient-ilh grand foid , et les tenoient et les esgardoient. Et
quant ilhs astoient ensemble, ilhs soy tenoient por les plus proid homines
de monde et les mies creians. Et portant soy faisoient ilhs appelleir Sadu-
cheins, qui est a dire en franchois : juste.
Les Asseriens astoient d'aultre manere, car ilhs n'avoient cure de femmes
prendre. Et encordont disoient-ilhs que ons se polloit bien marier et faire
noiches, car ilh savoient* que sens chu ne poroit le monde multiplier ne
dureir; mains eaux ilh ne se voloient mie jondre a femme par mariage,
portant qu'ifh voloient escuweir les folies et les malvaisteis des femmes.
Gar ilhs disoient que ja homme ne troveroit en femmes vraie loialteit, ains
astoient-elles plaines de riottes et dechivanches 5 . — Ches gens n'avoient
nuls biens por eaux , ains astoient tous en common, et portoient vestimens
blans; et leur sembloit que chu astoit grant honneur et gran religion. Et
se ne dormoient en nulle vilhe aux hosteil, car ilhs avoient en cascunne
vilhe en Judee une habitation ou ilhs herbegoient. Etne parlassent jamais
par nuyt anchois le soleal levant. Et dissoient leurs orisons sens parleir a Foi. 109 .
nulluy. et prioient a soleal qu'ilh soy levast. Quant li soleal astoit leveis,
ilhs 1'aoroient jusques a heure de medis, et adont ilh lassoient oevre \ — Et
ches gens lavoient mult bien leurs corps , et sovent de froide aighe ; apres
ilhs aloient mangier ensemble sans parleir. Ches gens ne juroient nuls seri-
ment, car ilhs dissoient que ly jureir astoient I gran pechiet. Et ne rechu-
voient nulle homme en leur compangnie, devant que ilh avoit esteit une
an esproveit, et apres Tan ilhs le rechivoient. Et quant ilhs reprendoient
unc de leurs freres de aulcon pechiet, ilhs l'enchachoient de leur com-
1 Alors. Le chroniqueur emploie plus frequem- s Disputes et tromperies. Le manuscrit B porte :
roent la forme adont. plaines de tricherie et de trahison.
* Je corrige d'apres le manuscrit B. Notre texte 4 lis cessaient de travailler. Ovrer est reste en
repete ici le verbe disoient. walloo.
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392 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
pangnie * , et ne souffroient que ilh y revenist plus; ains li donnoient en pe-
nanche que ilh visquast d'erbes et de rachines jusqu a la mort. — Ches gens
ne rachoient * mie devant eaux, ne oussi a la diestre parti e, mains derier
eaux ou a la senestre partie. Et gardoient si entirement le sabat que ilhs ne
voloient mie aleir a chambre tot le jour de samedis. Et quant ilhs voloient
les aultres jours alleir a chambre, ilhs faisoient une fosse ' en terre, et oussi-
tois, qu'ilh avoient ens faite chu que mestirs leur astoit, ilhs le recovroient
de unc piel de terre, portant que ilhs ne voloient mie que les reis de soleal
se ferissent en chis laide lieu. — Ches gens Asserins avoient plus chier a mo-
rir por droiture maintenir, que vivre por refuseir droiture. Et creioientque
toutes les aymes des gens astoient creiez des a commenchement de monde.
et que elles entroient es corps quant elles nasquoient, et que les bonnes
aymes, quant ilhs issoient des corps, aloient en unc lieu en Orient, qui
astoit estaublis a leurs solas et a leur joies, et les mails aymes s'en alloient
par pires et par feu et par espines. — Entres ches gens avoit teiles qui
dissoient aux gens chu qui les astoit advenir; et teiles y avoit qui gisoient
awec femmes, mains chu astoit a certains temps. Teiles manires de gens
que je vos ay deviseit regnoient en la terre de Judee, al temps que Jhesu-
i/an x\v. Crist' preschoit la foid awec ses apostles. — A eel temps , assavoir Fan XXV,
prist a Pylate une grant maladie qui mult le travelhoit. Si avient unc jour,
en septembre, que Pylate astoit monteis aux fenestres de son palais; si
De pylate et juda*. regard at vers le jardin Ruben, le peire Judas; mains nuls ne savoit que
chu fust son peire, ne Judas meismes. En eel jardin veit Pylate unc pomier
qui portoit des mult belles pommes, desqueiles ilh prist Pylate mult grant
desier. Et vient a Judas et li dest : « Judas, va-t'en en eel jardin et m V
» porte de ches pommes por mangier, ou je moray. » — Et quant Judas en-
lendit chu, si s'en alat en jardin et prist des pommes; mains Ruben vient
la, a cuy ly jardin astoit, si soy commenchat a corochier 5 a Judas, et tant
judMochistRubenson que Judas soy mancholiat 6 et prist une pire, si en ferit Ruben, qui astoit
pere.
1 Tout ce qui precede depuis : devant que il ploie le mot dies plus souvent que celui de Jhesu-
avoit esteit , etc., manque dans le manuscrit B. Crist.
* CrachaienU Le verbe racher est rest^ en wal- * Escarnir. B.
Ion. • Sans doute pour melancholiat, sechagrina,
* Mot supplee d'apres le manuscrit B. s'irrita. Corochat. B.
* Al temps que nostrc dies. B. Ce textc em-
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LIVRE PREMIER. 393
son peire, par teile vertut sour son tiest que ilh I'ochist. Atant soy partit
Judas, se laisat son peire mors, qui la demorat enssi jusqu'a vespre que
ilh fut troveis mors; si quidarent les alcuns que ilh fust mors subitement.
— En eel an meismes, s'avisat Pylate de Cyborea, la fern me Ruben, qui
astoit mult riche; et Judas l'avoit bien servil, si seiroit bien raison que
Judas en vausist mies * de son bon serviche. Adont fist espouser Pylate
Judas, son chamberlan, Cyborea, la femme Ruben, qui astoit sa mere et Judas prist »amere a
l'avoit porteit en ses flans. Et le fist saingnour de tous les biens qui avoient
esteit Ruben son peire. Adont ne s<javoit riens Judas que eel fust sa mere,
ne que Ruben awist esteit son peire; et jut a wee sa mere, enssi com les
hommes ont a constummes del gesir awec leur femmes espouseez, par l'es-
pauses de trois mois. — Puis avint que unc jour, qui astoit unc mardis, et
astoit en mois d'avrilh, Tan del incarnation XXVI, gisoit Judas awec sa l'«xxvi.
femme; et adont revient en sovenanche a Cyborea des doleurs qu'elle avoit *«<*« cognuit quiih
oyut , si commenchat fort a ploreir. Et quant Judas veit chu , se ly deman-
dat porquoy elle ploroit. Et eel ly racomptat comment son enfant avoit
esteit jetteit en mere, et tout chu que j'ay chi-devant longtemps racomp-
teit,et apres comment elle avoit troveit son baron mort; « et por chu pleur- Foi. 109 v.
» je. Et encors plus , dest-elle , portant que ons mat a vos donnee contre
» ma volenteit. » Enssi que Cyborea parloit, pensat Judas unc pou 9 que les
ensengnes, teiles et queiles que elle ly avoit nommeit, avoit-ons troveit en-
tour luy en bateal, quant ilh arivat el isle de Scarioth, enssi com dit est.
Et parmy toutes ches chouses ilh veit bien que chu astoit sa mere que ilh
avoit esposeit , et que chu astoit son peire que ilh avoit ochis. Adont con-
fessat Judas a sa mere cuy ilh astoit ; de cuy Cyborea oit grant duelh en
son cuer plus com devant. — Quant Cyborea veit et soit tout chu que son
fis avoit fait, se li dest en plorantque ilh s'en alaist awec Jhesus li prophete,
qui prechoit la loy por espanir ' les pechies. Adont devint Judas disciple a
Jhesu-Crist, qui adont aloit par terre awec ses apostles. Chis Judas ne laisat Judu decent disciple
inie toutes ses malvais manieres, car ilh avoit une burse, ou ilh mettoit et
embloit l'argen et les doniers que ilh devoit donneir aux poevres. Enssi
fut Judas disciple a Jhesu-Crist, et puis le traihit, enssi com vos oreis'chi-
1 En valut mieux, e'est-a-dire en profitAt. s Punir. Espanetr dans Roquefort.
* Pensat unc petit et s'avisat que les ensengnes. B.
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394
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
LaoXXVlI.
Jhesus alat aux not-
ches.
apres. — En Tan deseurdit, XXV I e jour de mois d'octerabre, fist l'emperere,
Tyberius Cesar, prinche de Romnae unc sien frere qui oit nom Drusus;
mains ilh fut eel an a Rorame envy nemeis *. Item , l'an del incarnation
XXVII, le VI e jour de jenvier, sen alat Jhesu-Crist de costeit la mere de
Galilee awec ses disciples. Si avient que I juys nunchat a saint Pire que ilh
avoit asseis pres de la une esnoiches f , qui astoient de paraige leur prophete.
Adont vient saint Pire a Jhesu-Crist, et li dest : « Sire, je toy prie que nos
» alons mangnier aux noiches des queiles Archedeclin est botelhiers, car
» Johan, ton cusien, li fis Marie Salome, prent la femme. » Et Jhesu-Crist
ly otriat tantoist mult volentiers.
Adont y vient Jhesu-Crist et Marie, sa mere , awec ses apostles — chu
qu'ilh en avoit, car ilh ne les avoit mie encor tous — aux noiches dedit Ar-
chedeclin. Mains quant Johans li maries le soit, si vient encontre luy a
mult belle compangnie * , et ly fist grant fieste en remerchissantdel honneur
qu'ilh li faisoit. — A ches noiches avient que ly vin y falit; de quoy ly bo-
telhiers Archedeclin fut mult enbahis , et le dest tout en hault : « llhs n'ont
» point de vin. » Quant INostre-Damme Tentendit, se vint a son fis et li
dest : « Beaux fis, je toy prie et requiere que tu weulhe demonstreir ychi
» de ta poissanche, car ilhs doient mies valoir de ta venue a leur beson-
» gne. » — Adont fist emplir Jhesus tous les jusces* d'aighe, puis les
sengnat, et ilh devint mult fors et bon vin. Puis dest Jhesus aux servans :
cc Prendeis cely vin, se le porleis a Archedeclin et le serveis aux taubles. »
Et ilhs le fisent enssi; mains cascon s'en mervelhat, et meismes Arche-
declin, et disoient que oncques n'avoient buyt si bon vin. Et fut ly boteU
hier mult blameit que ilh ne servit al promier de chely vin. Adont racomp-
tarent les servans le myracle comment ilh astoit venus de Jhesu-Crist, le
johan ewangeiute fut bon prophete *. — Quant saint Johans les entendit, qui astoit li maries, si
corut vers Jhesu-Crist, et li criat merchi ; et s'en alat awec li , se ne jut mie
awec sa femme, qui astoit la plus belle que ons sawist par nuls paiis veioir.
Et chu fut Marie Magdelene, qui oit si grant despit de chu que son marit
l'avoit enssi relenquit, quelle fut tant corochie que de cuer et de volenteit
Jhesu-Crist fist d'aighe
vin aux noiches.
apostle.
1 Em poison ne.
1 Sic dans notre text*; faute de copiste sans
doute, car le manuscrit B porte : une* noiches.
5 A mult belle conroy. B.
4 Oraches. Encore un mot reste en wallon.
5 Le toverain roy. B.
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LIVRE PREMIER. 398
elle convoitaf tous les septes pechies morteils '. — Item, 1'anXXVlll, en mois l»» xxvm.
de June, soy departit Herode Antypas por aleir a Romme. Si passat par la DePhiUppeet Antypas
terre Philippe, son frere, le roy de Judee, qui li fist grant fieste. Mains
Herode fist tant que Herodias, la femme Philippe, li promist et donnat son
amour ; et Herode li oit en convent que, tantost qu'ilh revenroit de Romme,
ilh le prenderoit a femme *. Enssi soy partit Herode et vint a Romme. —
Enssi com Herode astoit a Romme, avient que sa femme Dogmada, qui astoit
la filhe le roy de Damas, qui oit nom Arethe *, entendit les convenanches
que son maris avoit fait a la femme de son frere, se dest puisque son maris
le voloit enssi laissier, ilh valoit mies que elle le laisast devant. Enssi ne
voult pas Dogmata atendre la revenue de Herode, son marit; ains s'en alat a
Damas a son pere le roy Arethe. — Item, en eel an revient Herode Antypas de
Romme; si passat par la terre Philippe son frere, et emynat awec ly Hero- Foi. nor*.
dias. Gelle Herodias fut la filhe Aristouble, frere a dit Philippe Herode Herode toiiiUfon fere
et Herode Antypas; chis Aristouble oit a femme la filhe Salome son antain, l,ppeM €mme *
de laqueile celle Herodias issit et Herode Agrippe son frere. — Celle Herodias De linaige Herodias.
avoit esteit prom ier marie t a uncsien oncle, qui fut fis de vies Herode qui fut
nomeis Herode le prevoir *; car li vies Herode l'avoit oyut de la filhe Symon
le prevoir, et quant chis Herode le prevoir fut mors, Herodias sa femme
reprist le roy Philippe deseurdit. Et chu fut eel Herodias par cuy sains
Johans-fiaptiste fut mis en prison et decolleis, enssi com chi apres serat
demonstreit. — Item , l'an del incarnation XXIX , envoiat Dieu son esperit i/an xxix.
a Saint-Johans, le fis Zacharias, en desert ou ilh habitoit, et li revelat que ^J^ft 1 ^
ilh alast preschier le salut des gens par terre. Et astoit Johans vestus d'onne chier *
haire, qui astoit faite de polhe de chamot ', et avoit une chainture sus les
rains, qui astoit de cure ' de berbis atout le poilhe. — Et vivoit saint Johans
mult saintement, car ilh ne mangnoit que de une manere de rachines; et
bevoit de l'aighe qui plovoit des nues, plus sovent que aultre aighe. Gel vie
mynoit mesire saint Johan, pour conquere le regne de chiel et l'amour
Jhesu-Oist qu'ilh atendoit por salveir le peuple d'Ysrael.
Adont soy partit saint Johans de deseirt ou ilh astoit, et se vint vers le saint johan vim vert
le flus Jordain.
1 Le manuscrit B ajoute : car elle fust caste pu- ■ Aretas, roi de Petra.
celle, mains elle perdit virgwUeU, a la convoitise * Prdtre. Provoir dans Roquefort.
de luxure. « Un vfitement de poil de chameau.
* Voir Fl. Joseph, XVIII, 7. • Cuir, peau.
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396 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
flus Jordain, ou ilh trovat XII pieres, qui la astoient mises anchienement
en la ramembranche de chu que les XII linaiges des fils Israel passarent la
jadit a pies seich. — Entour Ie flus Jordain et solonc la mere de Galylee
commenchat saint Johans a preschier, de laqueile terre de Galilee Herode
Antypas astoit prinche , qui mult amoit sains Johans. — Item , en eel an ,
morut Brus, ly promier prinche d'Anwerpe, qui avoit regneit XVII ans.
Et apres luy y regnat son fis Yborus XLII ans. A cuy temps furent fondeez
pluseurs citeis et vilhes que les gens, qui la venoient demoreir, faisoient
faire. — A eel temps avoit en Flandre une femme qui astoit nominee Go-
doza , qui astoit asseis jovene. A eel femme fut avis que sa loy ne valoit I poys,
et que ly Dieu ou ons devoit croire aloit par la terre de Judee preschant
la foid que ons devoit croire. — Quant eel pensee fut venue a eel femme, el Ie
fist tant quelle passat mere, et vint en Judee droit sor Tan del incarnation
L.nxxx. XXX. Et alat tant par la terre de Judee, quelle trovat saint Johans -Bap-
tiste qui preschoit la foid par Galylee solonc le flus Jordain. Et quant elle
veit saint Johans, elle quidat avoir troveit Jhesu-Crist, et l'apellat com son
saingnour; mains sains Johans ly dest qu'ilh n'astoit pais Jhesu-Crist, ains
astoit unc de ses disciples , mains Jhesu-Crist astoit asseis pres d'eaux, car
ilh ly avoit mandeit novellement que ilh seroit anchois 111 jours deleis luy.
DeGodoiaaui puis fui — Enssi com sains Johans et Godoza astoient en Galylee, en 1 casteal qui
est nommeis Salvis, enqueile Melchisedech, li priestre et roy cuy Dieu amat
tant, fut neeis, vint Jhesu-Crist. Et quant sains Johans le veit, ilh le mons-
trat a Godoza qui li criat merchi, et li dest : « Sire, je croie en toy; si toy
» prie que te moy monstre la loy que je doy tenir depart toy qui es mon
» Dieu et mon sires. » Adont le prist par la main Jhesu-Crist, et l'enmy-
nat a flu Jordain, et puis apellat saint Johans- Bap tiste. — Atant vint la
uns angle , qui aportat a Jhesu-Crist feu et cremme. Et nostre sires le prist
et le mist en flu Jordain, et le sengnat de sa main diestre. Apres chu Jhesu-
johans-Baptistebap- Crist soy devestit, et se soy fist en flus Jordain baptizier. Et le baptizat
ltelu^rinMohin*. sains Johans-Baplisle, et partant fut-ilh dedont en avant appelleis sains
Johans-Baptisle. Apres chu Jhesu-Crist baptizat saint Johans -Baptiste.
Apres soy baptizarent la ypluseurs des disciples et des aultres, portant que
Jhesu-Crist astoit baptiziet, qui astoit leur maistre. — Adont dest Jhesu-
Crist a Godoza, qui la astoit venue de la terre de Flandre, que eel bap-
temme astoit ly fondement de la loy que ilh preschoit, et quelle le presist ,
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LIVRE PREMIER. 397
et puis soy melist sour la mere, et , queile part que la mere le getast, fesist Cri * il ™ '»« i»p*«»*t
la son habitation en laqueile elle se metis t, et le servist la et y anunchast Foi. novo.
sa loy. — Apreschu baptizat Jhesu-Crist Godoza; mains Jhesus li changat
son nom, se l'apellat Cristina, et c'est sainte Cristine, dont ons fait la fieste
le XXJ1II jour de mois de julet. Apres chu vint et montat celle Cristine
sour mere, et arivat en Flandre dont elle astoit venue. Et chu fut la volen-
teit de Jhesu-Crist. Et fist faire uns heremitage en drois lieu ou elle arivat
sor le rivaige en mere meisme; et le nomat-ons dedont en avant le maison
1'Escluse. El la preschoit-elle la foid Jhesu-Crist. Longtemps apres fut fait LEsciuse.
de eel heremitaige une abbie de nonnes, qui encors y est sour le port de la
mere d'Engleterre. — Apres chu s'en ralat Nostre-Saingnour Jhesu-Crist !
awec ses disciples, et d'altre costeit sen allat sains Johans-Baptiste, p res-
chant et baptizant les gens *, Juys et Sarazins, (ant que ch'astoit mervelhe. De jhesus et joi.ans-
Et quant Jhesu-Crist fut baptiziet, ilh s'en alat awec ses disciples en unc api e
desert qui siet entre J Jerusalem et Jherico, et en eel deseirt ilh junat XL
jours tous acomplis. En la ramembranche de celle June, fut en Sainte-En-
gliese estaublie a juneir tous les ans le XL e devant Pasque. — Item, Tan Jhe 8U sjunatxL jour,
del incarnation XXXI, en mois de may le XV e jour, vint sains Johans- w>s enstien*.
Baptiste a Herode Antypas, qui prinche astoit de Galilee, et le reprist mult Sa ™ g Johjms _ Ba lisle
honteusement de chu qu'iih faisoit si grant desloialteit a son frere quant £P™ 1 JjJ e ™„ ^ ^J
ilh ly avoit tollut sa femme, luy vivant, et le tenoit contre sa volenteit; phi,i PP e .
se li priat et li conselhat que ilh ly rendist, car ilh ne le poioit nen ne le
devoit tenir tant com son frere visquoit, car ch'astoit mult gran pechiet. Et
de chu le blastengat mult fortement que oncques Herodes ne s'en corochat .
ains l'escutoit volentier et pasciemmeht, car ilh 1'amoit mult portant qu'iih
savoit bien que ch'astoit unc proidhom.
Par 1'amonestement sains Johans-Baptiste s'astoit Herode relaisies de
faire mult de mauls. Et faisoit enssi pluseurs biens por 1'amour de luy. Et
encor a chesti fois awist Herode tant creyut sains Johan que ilh awist son
frere rendut sa femme, se ne fust chu que Herodias le soit par unc sien
cusin qui li dest comment sains Johans porcachoit que elle se fut enlongie
de Herode , et revoiet a Philippe qui astoit son marit. — Adont vient Hero-
dias a Herode et li priat mult affectueusement que ilh voisist Johan le pro-
1 Por Galilee, ajoute le manuscrit B. a Probablement pour gentils, en latin gentes.
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398 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
phete ochire. De chu fut Herode multcorochies, car ilh n'oisoit a Herodias
escondire chu qu'ilh li plaisoit; et d'aultre part ilh n'osoit saint Johan
ochire, portant qu'ilh astoit si sains proidhom. Si respondit Herode qu'ilh
ne l'ochiroit mie , car ilh n'avoit de rien deservit la mort. Adont li priat
Herodias qu'ilh fust mys en prison, et Herode li dest que chu feroit-ilh
johan-Baptiste fui mis bien volen tiers. — Enssi fut sains Johans pris et mys en prison, sens cause
en prison. m * " ■
de raison, ou ilh demorat trois mois, assavoir jusqu'a XXIX jour de mois
d'awost, a laqueile journee Herode tenoit grant fieste des nobles gens de
sa terre por le jour de sa nativiteit, qui astoit a chi jour. Et quant chu vint
que ons devoit mangnier, ons disnat, et puis oistat-ons les taubles, et adont
commenchat grant joie par le palais, si que ly uns chantoit et li aultre dan-
soit. — Et la filhe Herodias, que el avoit de son promier baron, vint a eel
joie que ons faisoit, ou ilh avoit mult de dammes et de chevaliers et d'aul-
tres nobles gens. Celle damoiselle, qui nommee astoit Alexandrine, fut
mult belle femme et si gratieux, que tout chu quelle fasoit mult bien li
convenoit. Elle vient devant Herode, et commenchat mult bien a danseir
et a balleir et faire si grant melodie , que ilh plaisit mult bien a Herode et
a tous les aultres qui la astoient. — Et quant elle oit asseis danseit el elle
sen voloit raleir, Herode l'apellat et li dest : « Demande chu qu'ilh toy
» plaiste, car queile chouse que tu demanderas tu l'airas, se je en puy
» fineir, car tu l'as bien deservi , oussi se tu demandois la moitie de mon
» royalme. » Et elle respondit que elle soy conselheroit a sa mere Herodias.
Aiexandrinedemandat Et sa mere li dest qu'elle demandast le chief saint Johans-Baptiste, et aultre
le chief Johan-Bap- * . J .
tiste. chouse ne presist. — Celle revint devant Herode, et dest qu elle demandoit le
Foi. in r*. chief Johans-Baptiste. Quant Herode l'entendit, si en fist mult laide chire
et estrangne, car chu ne li plaisoit point, jasoiche que ilh ne vousist mie
brisier chu qu'ilh avoit jureit et en convent, car ilh li fust tourneis a trop
gran blame. Atant apellat Herode unc sien servan et li commandat que ilh
alaist Johan-Baptiste coupeir le chief, et puis li aportast devant luy en unc
johan-Baptiste rut de- plateal '. Et chis fist son commandement et li presentat le chief, enssi qu'ilh
l'avoit demandeit.
Adont fut Herode corochies, et prist le chief, se le donnat a Alexan-
1 TcUheur. B. Ce mot, ecrit jttus correctement velot. C'est le motallemand Teller, en flamandTH-
tailioir, signifie assiette, et donne toujours le meme loor.
sens que Fexpression dont s'est servi Jean de Sta-
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L1VRE PREMIER. 399
drine en garidon * de son dansaige ; et celle le portat a sa mere qui teile
joie en oit , que de la grant joie elle commenchat a danseir et a balleir lee
et sa filhe. Mains leur joie tournat en deulh et en tristeur, car elles soy jet-
toient encontre la terre en houtrissant 9 et criant com enragies, et leurs Herodiasetsafiiheen-
mains mordans et magnant a grans boques et a gros morseals '; et moru-
rent miserablement dedens IX jours, en teile maniere qu'elles ne cessont
jour et nuit a menere teile vie, que nuls ne les oisat oncques reconforteir en
nulle manere. Et enssi fut sains Johans decolieis. Adont vinrent les dis-
ciples saint Johans et prisent son corps, et 1'enportarent en la citeit de
Sebaste ou ilh fut mult honorablement ensevelis. — Et deveis savoir que saios johans fut en*e-
* velis entre Heliseus
sains Johans fut decolieis en Arabe, en le casteal de Macherouz *; et fut et Abdie.
sains Johans ensevelis entre Helizeus et Abdie les prophetes, et son chief fut
enterreis en Jherusalem, deleis le maison Herode. Et grant temps apres
chu, assavoir a temps Julien li Excommugniet, avient que les Juys et les
Sarasins misent le corps sains Johans fours de son sepulture; et prisent les ix* <>»$*** saint jo-
osseais de luy, se les espandirent avaul le plaiche ou ilh gisoit, por le des-
plaisanche que ilh avoient des myracles que ilh faisoit el que Dieu faisoit
par luy en lieu ou ilh gisoit. — Et quant ilh les orent enssi espandus, si
leur semblat que ilhs n'astoient pais bien vengiet. Et portant ilh alerent
raconquelhir 8 tons les osseais de sains Johans et les ardirent; et puis mon-
tarent sour une hault montangne, et enventarent toutes les cendre 6 sique
li vent les enportat Et chu fut une altre manere de martir, car ilh astoit
mors et se le tourmentoient encor. Et de chu fait-ons encor cascon an en De saint johan-Bo P -
paiis de la 7 son ramembranche a sa fieste , car ons conquelt les osseais par-
tout ou ons les truve, et les art-ons a grant joie et a grant compangnie
de gens. Et deveis savoir que chu fait-ons por le remembranche que les
siens osseais furent ars. — A celle temps dont je parolle que les Juys con- Deiossea.^.mt joi.an-
quelhirent les osseais saint Johan-Baptiste por ardre, demoroient en Jheru-
salem pluseurs moynes qui astoient bonnes gens et religieux. Ghes moynes
soy misent awec les Juys, et commencharent a rasemblcir les osseais de
sains Johans; et quant ilhs les oirent tous rasembleis , si en emblarent plu-
1 Pour guerdon, recompense. Ruben.
* Mot wallon qui signifie se demenant. s Recueillir.
8 A grandes bouches et par gros morceaux. * Venterent toutc la poure. 6.
* Machera ou Machaenu, ville de la tribu de 7 En pays d'outre-raer.
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400
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
De dois saint Johan
Baptiste.
seurs,etle remanant ilhs rendirent aux Juys, a (Tin qu'ilhs ne voloient mie
que 6ns s'aparchust de chu qu'ilhs en avoient pris et embleit.
Entre les osseais que les moynes emblarent fut li dois saint Johan-Bap-
tiste, de quoy ilh monstrat Jhesu-Crist. quant ilh dest: « Vechi 1'angneal
» de Dieu. » Gheluy doit aportat depuis madamme sainte Tecle aux mons
de Monguy , et est en l'eglise Sains-Marien \ — Et astoit a chely temps
evesque de Jherusalem sains Philippe. A cheluy aportarent les moynes les
osseais deseurdis; et chis sains Philippe evesque les envoiat, par Julien son
dyaque, a sains Athanaise qui adont astoit evesque d'Alexandre. — Apres
chu, quant Athanaise fut mors, si fut Theophilus evesque d'Alixandre.
Chis Theophilus levat les osseais sains Johan -Baptiste, et les mist mult
honorablement en unc fietre que ilh fist faire en l'honeur de sains Johan;
et chis fietre awec lesdit reliques ilh les mist en temple Scerappe % dont les
ymages que les Sarasiens s adoroient avoient novellement esteit osteez par
le commandement Theodoise , qui adont astoit emperere de Romme. — Gar
tout chu que jay dit n'avient pais tantoist apres chu que sains Johan fut
decolleis, ains avient mult longtemps apres. Et longtemps apres chu , assa-
voir de temps le prinche Marlien , avient que dois moynes vinrent d'Orient
en Jherusalem en pelgrinaige, et a eaux revelat mon saingnour sains Johan-
De chief saint johan- Baptiste oil son chief astoit. Mains jasoiche que ches dois moynes le pre-
sissent et 1'emportassent awec eaux, non porquant ilhs le perdirent, et leur
fut tollue et ostee par les gens de la terre de Fenix qui le misent en unc
pot dedens terre; et fut enssi enfoit en la citeit de Emisse \ — Item, long-
temps apres , de temps que sains Honoreis fut evesque del citeit de Emisse ,
avient que sains Marceal fist la uns heremitaige, et augumentat tant, que de
son heremitaige ilh fist une abbie de XII moynes awec luy, et ilh en fut
abbe. A cheluy sains Marceal demonstrat sains Johan son chief, et sains
Marceal le nunchat al evesque sains Honors, liqueis y alat awec luy.Et la le
prisent mult reveremment en faisant grant joie, et l'aportarent en l'egliese;
Fol. Ill v».
Baptiste.
1 II doit s'agir ici des Alpes et de l'eglise de Saint-
Jean de Maurienne. Voici en effet le passage de
VHistoriascholastica de Comestor, d'ou notre enro-
ll i que ur a extrait la plupart de ses renseignements
sur la vie de Jesus-Christ : Inter quae (ossa) etiam
digitus quo Dominutn monstravit fuisse perMbetur,
quern post beata Tecla inter Alpes attutit et dicitur
esse in ecclesia Mauritanie.
* Serapis.
5 Patens. B.
4 Horns ou Hems, Tancienne Emesse, dans le
pachalik de Damas.
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LIVRE PREMIER. 401
et fat mies en or et en argent, et puis l'envoiat en Constanlinoble entres
les aultres santuaires ou ilh en avoit mult a temps dedont '.
Puis plaisit a Dieu et a monsaingnour sains Johans que son chief fat Ly chief saint johan
• n i ,, .. l • • 19 a • rfc* ■• futaporteisenFran-
aporteit en Franche; et la est-ih encor en la citeit d Amiens en Picardie. che.
Ors aveis oyut la vraie matiere comment saint Johan-Baptiste fat decolleis
et par queile ocquison. Et vos avons dit tout en orde comment ses osseais
et son chief farent porteis de unc lieu en l'autre, jasoiche que chu ne fat
mie tout a unc temps; mains nos l'avons dit a une fois por miez entendre.
Et encors en parlerons des propres dautes* quant chu avient chi-apres,
quant nos parvenrons a droit temps quant chu avient. Mains je lairay chu
esteir, et veulhe revenir a ma droit matiere. — L'an del incarnation XXXII, v*n xxxu.
commenchat Jhesu-Crist a faire ses apparans myracles, enssi com les sains Jhesu-cmt fait ses ap -
ewangelistes racomptent en leurs ewangeiles. — En eel an meismes vint
Jhesus en Bethanie, et la trovat-ilh Martha et Marie-Magdalene qui ploroient
leur frere le laisdre % qui as to it mors et gisoil en biere. Et astoit ja li quars
jours que ilh avoit esteit ochis a une jouste, car chu astoit uns hardis che-
valier; mains ilhs l'avoient tant lassiet, portant que elles ratendoient Jhesu-
Crist. — Et quant Martha entendit que Jhesus venoit, ilh alat encontre luy
et ly dest : « Sire, se tu fusse venus plus tempre, mon frere ton bon amis
» ne fust pas mors. » Adont li respondit Jhesus : « J'ay bien la poioir delle
» resusciter. » Et Martha dest : « Je s<jay bien qu'ilh resusciterat a jour de
» jugement. » Et Jhesus respondit : « Je suy li vie et la resurrexion de
» cheaux qui croient en moy. » Adont vint Jhesus a la sepulture ou li corps
Lazaron gisoit mors, et la plorat Jhesu-Crist, et apres chu ilh le sengnat de
sa diestre main. — Et puis dest Jhesus a laisdre : « Relieve-toy, car je suy jbesu-cristreaugciut
»> por ty mull travelhies. » Adont salhit sus li laisdre et dest a Jhesu-Crist :
« Beais sire, tu soies li bien venus, car je suy par toy d'ynfeir issus, ou Merveihe de laisdre.
» j'ay esteit en tourment par l'espause de I III jours tantseulement; mains
» ilh moy semble que je y ay esteit IUl m ans. » Mult fist Jhesus de grans
et mervelheux miracles, dont les ewangelistes et Sainte-Engliese font men-
tion, qui sieroient mult long a racompteir, de temps qu'ilh alat par terre
1 Dont ilh y avoit grant planteit adont. B. * Cette qualification ne se trouve pas dans le
1 Et aticortpuet bien estre que nos parlerons des manuscrit B, qui se sert constamment des mots
propres dautes. B. Lazare et Lazaron.
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402 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
awec ses apostles; desqueis je moy taray a chest fois, et vous diray com-
ment iih souffrit mors por nos.
La passion Jbesu-Cmt. Sour Fan del incarnation Nostre-Sangnour XXX11I ', la vigiel de la Pasque
Florie, appellat Jhesus dots de ses disciples et letur dest: « Saingnours, aleis
» au casteal qui est devant vos, et moy amineis I'aisne et son faon que vos
» y trovereis a une estaiche loies, car demain vorai-ge aleir en Jherusalem
» sour eel bieste, ne je n'y veulhe aultre cheval avoir; car je ne suy mie
» desquendus de chiel cha jus por orguelhe ne por felonie ne por riceche,
» fours que por eistre en tristeche por mes amis qui en ynfeir sont en
*•!• n * *•• » prison a delivreir. » — Adont sont tourneis les dois disciples et vinrent a
casteal, et ont troveit la beste et son foan et lesonl amyneis. Et lendemain
est Jhesus sus monteis , et est venus vers la citeit de Jherusalem , et tous ses
disciples vinrent apres. — Et deveis savoir que le venredi apres, assavoir
le XXV jour de marcheque ilh fut incarneis , et si morutachi jour adont
que la daute del incarnation commenche, qui laisoit son annee parfaite;
et recommenchoit une aultre inparfaite et corant tout I'annee, sique la
venredi apres la vigiel del Pasque Florie commenchat Fan XXXIII.
Celle bieste dont je vos ay parleil senefioit la vielhe loy , et ly faon sene-
jhesus vint en jboru- fioit la novelhe loy. Quant les Juys entendirent la venue de Jhesu-Crist, si
en fisent mult grant joie, et ont les voies jonchies et de pailes et de beais
draps aourneis ou Jhesus devoit passeir. Et issirent de la citeit encontre
luy en chantant et faisant grant fiestes; et les maistres des Juys ly por-
toient grant honeur. Adont entrat Jhesus en temple, et demonstrat a eaux
les saintes escriptures; mains ilh ne pot oncques tant faire qu'ilh en posist
a luy convertir adont une tou seul. — El les gens menues et les dammes
chantoient et demynoient si tres-grant joie que chu astoit grant mervelhe;
mains quant Jhesus veit la grant fleste que dies fasoient, ilh commenchat
jhesus piorat «or jhe- a ploreir. Adont soy mervelhat sains Pire et dest a Jhesu-Crist : « Beais
» sires , porquoy ploreis-vos ? vos veiais la grant 6este que ons vos faite. » —
Jhesus respondit mult douchement : « Je pleure por ches gens qui si grant
» joie font de chu qu'ilh auront chi-apres si grant tristeche de fain, que la
» mere mangnerat son enfant. » Sains-Pire dest : « Sire, or moy dis dont
» leur venrat teile fain. » Jhesus respondit : « Portant que cheaux qui la
1 Date omise dans notre texte.
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LIVRE PREMIER. 403
» sont, moy trahiseront et moy crucifieront; de quoy pechiet ilh en serat ^ al ^} eurde Jheru '
» teile venganche priese, que chesti citeit en serat tout destruit, et n'en
» remanrat pire sour pire qu'ilh ne doit estre reversee '. Mains chu serat
» apres ma mort, portant que ilh m'ochiront a tort; et se tu astoit adont
» en Jherusalem, tu y vierois si grant doleur descendre, que les femmes
» mangneront leurs enfans quelle auront en leurs flans porteis. » — Atant
entrat Jhesus en la citeit, et les Juys commencharent a jatteir devant luy
des palmes et des rains des arbres que ilh copoient, sique tout la voie en
fut plaine; et li fasoient les Juys sy grant fieste, que ch'astoit grant mer-
velhe. Et apres chu Jhesus et ses apostles herbeghont en la maison Symon
le lepreux; et oit la unc grant mangier, et fut Marthe la kensseresse \ —
En Jherusalem avoit a chi jour une grant pecheresse, qui astoit enta- DeMarie-Magdaiene.
chie de VII pechies mortels; celle astoit nommee Marie -Magdalene, et
astoit la soreur au Lazaron et a Martha. Quant Marie oyt la novelle que
Jhesus astoit en la maison Symon. si at achateit le plus prechieux onge-
ment que elle pot avoir, et se soy mist desous la tauble, et prist les pies
Jhesu-Crist qui mult astoient creveis. Et por luy servir en greit, et affin que
ilh ly pardonnast ses pechies, elle commenchat mult fort a gemir et plo-
reir, et tant que de ses larmes furent les pies Jhesu-Crist tous molhies, et Marie unties pies jhe-
• it • I? r* ii ii su-Cristde ses larmes.
puis elle jettat sus longement. Lt en apres elle les resuat de ses cheveals;
adont jettat chis ongement teile oudeur, que tout la maison en fut raem-
plie. — Et de chu soy taisirent bien tous les apostles fours que Judas, qui
demandat a Jhesu-Crist por quoy ilh souffroit a degasteir si prechieux on-
gement qui valoit plus de 1I1 C deniers; mies vasist que ilh fust donneis aux judaspariatdeiwe-
povres. Adont ly respondit Jhesucrist : « Judas, laisies esteir Mane, car elle ong*.
» a tant faite que e'est mon amie; je ly pardonne tous ses pechies que elle
» at faite. » — De chu oit Judas mult grant duelh, et dest entre ses dens, J«dass'apensatdetra-
sique nuls ne l'entendit fours que Jhesu-Crist, et dest en son cuer : « Je vos Foi. h« v*.
» venderay aux Juys, qui moy donront de bon argent de vos. » — Adont
soy partit Judas de la maisou Symon et vint aux Juys, qui entre eaux par-
loient coment ilhs poroient ochire Jhesu-Crist. Enssique ilhs parloient,
vint Judas et leur dest : « Saingnours , que moy voleis donneir de vostre
1 Que chetti citeit en serat csprise et li murs * Pour censeresse, mot wallon signifiant fer-
aUmt le palais craventeis. B. miere.
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404 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
» argent, se je vos lievre mon maistre? » Etcheaux li dessent : XXX de-
niers de leur monoie.
Adont furent faites les convenanches de Judas et des Juys; et les Juys,
qui orent doublanche que ilh ne soy repentist , li donnont tantoist les XXX
judas vendit jhesu- doniers. Apres chu retournat Judas et revint a Jhesu-Crist, qui ja savoit
sa pensee. Adont appellat Jhesus dois de ses apostles, Piron et Johan, et
leur dest : « Saingnours, aleis en la citeit, et dittes a une homme, que vos
» encontreis al porte qui enporte une jusce, que je * veulhe a nuyt mangier
» ma cene en sa maison. » — Adont sen sont aleis les disciples, et ont faile
Dc jour del One. chu que Jhesus leur avoit commandeit. Et quant vint al vespree, si vient
Jhesus et est entreis en la maison ; et puis se saieyerent tous a mangier.
Judas ne s'aseiit pas derier, ains est assis par-devant Jhesu-Crist, et man-
gnat en la propre escuel Nostre-Saingnour; car nostre sire l'amoit mult.
Adont est endormis Johans ewangelistes sour les genos Jhesu- Grist, le
roy de paradis. — Adont parlat Jhesus et dest a ses disciples : « Mes freres,
» sachies que jamais ne mangneray plus awec vos jusqu'a tant que je seray
» resusciteit de la mort que je soufferay por vos. » Adont prist Jhesus le
jh^us fist de pain son pain et le benite, et puis leur donnat et dest : « Useis chi pain, car chu est
chair et sane. ■ * m i •
» mon corps que vos mangles, et chu que vos beveis est mon sane, par
» lequeile vos sereis salveis, se vos reteneis bien comment vos deveis faire
» por I'amour de moy cheluy sacrement par-desus l'auteil; car chu est la
» novelhe loy que je veulh que vos teneis de moy. Enssi aureis en ramem-
» branche le corps de moy, quant vos me tenreis, et vos sovenrat de la do-
» leur que vos me vereis souffrir, car ly uns de vos me trahirat et aux Juys
» me liverat; mains mies venist por luy que ilh ne fust oncques neeis. »
Quant les apostles entendent chu, si en furent tous enbahis; n'y at celuy
qui n'oit paour, et li demandat cascon por luy se ilh astoit chu. Et ilh leur
respondit : « Ilh mangnoit et boil awec moy chi qui trahyr me doit, et qui
» la felonie at penseit de trahir le fis Marie. » A ches parolles at dit Judas :
« Suy-je done chu, maistre? » Dit tu las, Judas, » chu li respondit Jhesus.
— Enssi lassarent les disciples chu esteir , et demandarent a Jhesus ly-
queis d'eaux astoit tenus por plus grans, plus sains et plus loial? Jhesus
prist une petit enfant et l'aseiit devant luy , et dest a ses apostles : « Gheaux
1 Que vous encontereis a une des portes, queje.... B.
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LIVRE PREMIER. 405
» seront les plus prisies qui soy humilieront enssi corn chis enfant ', et qui
» soy tenront bas et petit; ches qui sont garnis de si grans sens seront
» les plus grans en la royalme de chiel. Et chiaux qui maintenant soy por-
» tent grans et veulent eistre ensachies *, cheas seront humiliies et pau y
» gangneront; mains cheaz qui soy humilieront seront ensachies. Mains je
)> vos prie que vos soyes petis et humele, enssi qui est chist enfant, et
» enssi parvenreis a la gloire. » Chis enfes sour cuy Jhesus mist sa main fut
sains Marseal, qui convertit la terre de Lymosin a la foid Jhesu-Crist,
et fut ly disciple saint Pire; et giiest son corps en Lymoge. — Apres chu jhesus uvat ies P ie»
est Jhesus leveis de la tauble, et mist del aighe en un bachin , et vint aux w a P° 8t «-
pies sains Pire por laveir; mains sains Pire li dest : « Sires, lassies chu
esteir, car ja vostre corps ne laverat mes pies. » Et dest Jhesus : « Se je ne
les leve, done n'aras-tu ja part awec moy. » Adont sains Pire at respondut :
« Jay plus chier que tu moy leve pies et mains, que chu que je ne part a
» toy; mains fais ton plaisier de moy. »
Adont Jhesus lavat les pies sains Pire et des aultres apostles , et les resuat
de linchoux dont ilh astoit chiens s . — Et puis s'est mult douchement assis' Foi. m r*.
entre eaux et leur dest : « Vous m'apelleis maistre et saingnour, dont vos
» demonstreis grant amour; mains se je moy suy engenolhies devant vos
» et vos ay laveit vos pies , e'este exemple que je vos donne que enssi vos
» vo deveis ly uns 1'autre et eistre humeles, se vos voleis eistre awec moy
» en chiel la-sus. — Saingnours, dest Jhesus, ilh serat toist temps que je
» vos veray tous esbahis ; et de grant paour cascon de vos moy refuserat 4
» et vos enconvenrat fuir por le paour del morir 8 . Mains thier jour apres,
» moy quereis en Galilee , car la me poreis-vos troveir. » Adont li dest
sains Pire : « Sire, ja ne m'avengne que je m'en doie enfuir ne toy lassier. »
El dest Jhesus : « Pyron, anchois que li cos chante, tu moy renoieras
» trois fois. » Et dest sains Pire: « Sire, chu ne dis mie, car je moy
» laroy anchois ochire. » — « Saingnours, dest Jhesus, lassies chu esteir;
» mains cascon de vos aporte une espee 6 por luy a defendre, et qui n'at
1 Ce membre de phrase : qui soy humilieront..., * Moy guerperat. B.
manque dans le manuscrit B. s Le manuscrit B ajoute ici : car quant li pais-
1 Exhausses. tre est fel ferus, les biestes son plus esmaries. Je
' Et les resuat de ses drops. B. Erreur de copiste, sofferay pour vous tous morl , mains...
sans doute pour cheins, ceint, revdtu. * Glave. R.
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406 CHRONIQUE DE JEAN DWTREMEUSE.
» nulle, se vende sa cotte et achatte une. » Et aportont dois espees, et
Jhesus dest qu'ilh en avoient assets. Puis sont tous entreis en unc vergier
que ons nommoit le mons Olivet , foursinis Judas. Et quant ilhs furent la
venus, Jhesus apellat Pire, Johan et Jaque son frere, et les mynat unc pou
long des aultres, et leur dest : « Mes freres, saehies que ma chair at poieur '
» del morir, mains remaneis chi unc pou li uns deleis 1'autre. » — Adont
s'enclinat Jhesus en orison et dest : « Beais peire, je croy bien que tu pues
» faire tout ta volenteit, et que je ne moroie pas se ilh toy plaisoit; mains
Lez angles confortont » ta volenteit en soit faite. » Adont vinrent les an&eles conforteir Jhesu-
Jheiu Crist. . . . . f
Crist; mains tout les fois que la paour li revenoit en sovenanche, ilh oroit
son peire de grant cuer, et en souffroit teile angousse que son corps en
suoit goltes de sancg jusque en terre. Et celle grant doleur ilh souffroit por
nous pechies. — Apres, soy levat de son orison, et vint a ses disciples et les
trovat endormis; puis apellat sains Pire et li dest : « Pire, amys, enveile-
» toy; ne pues-tu une heure voilier awec moy? Envoilies-vos et oreis a
)> Dieu por vos pechies. » Puis soy retournat Jhesus, et recommenchat
a oreir a son peire. Apres retournat, et trovat ses disciples endormis. Et
quant ilh veit chu.se soy remist en orison en priant tenrement a son peire.
Et a la tirche fois ilh les appellat tous ensemble, et leur dest : « Saingnour,
» vos dormeis, mains Judas ne dort mie; ains vint et amaine les Juys a
jhegusfutprisetemy- » cuy ilh mat vendut, por moy livreir al mort. » — A ches parolles vint la
Judas a grant compangnie des Juys que ilh amynoit; et apportoient belles
lanternes et falloz por miez a veioir. Et Judas leur dest : « Saingnour,
» cheluy qui je baseray prendeis-le vos. » Atant vint Jhesus devant eaux
et leur dest : « Cuy quereis-vos? » De celle parolle que Jhesus dest
furent les Juys si esbahis, que ilhs soy lasserent cheioir a terre. Et quant
ilhs furent releveis, se li respondirent : « INos querons Jhesum. » Et
Jhesus dest : « Ghu suy-je chu. » Adont le baisat Judas en la bouche, et
Jhesus ly dest : a Tu moy bais et se m'as trahis. » A chest parolle fut
Jhesus emyneis; mains quant sains Pire chu veit, si sachat son espee et
ferit uns Juys, qui oit a nom Malchus, si que ilh li coupat l'orelhe; mains
Jhesus li sanat la-meismes. — Puis fut Jhesus enmyneis en unc jardfn, et
fut mult examineis des Juys. Et la le moquoient et despletoient ' les mal-
1 La forme paour est plus frequente. wallon. Grandgagnage donne aossi le verbe dis~
* Lui faisaient du depit, de la peine, displi en peeler, outrager. Comp. avec Roquefort v° despire.
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L1VRE PREMIER. 407
vais Juys '. Et li fisent une coronne des branches d'unne arbre espine , qui
en cheli jardin creissoit, et avoit ja des fuelhes. Et eel eoronne ilhs ly Jh 5* u i s / U e t coroneis
misent sour son chief, les espines tourneis vers la tieste; et si trencham-
ment ly pressarent, que li sane en issit en pluseurs lis, par fache, par les
espalles et par le coul, desquendant jusqu'a terre. — Et par eel coronne at
ly arbre espine mult de belles viertus, et par especial qui sour luy le porte, Foi. mv.
ilh n'at garde d'oraige, ne d'alumeur, ne de tempeiste, ne en la maison ou L y «£ u d<l arbre e *
li arbre espine est ne puet mauls espirs approchier.
En eel jardin astoit Jhesus entre les fauses Juys; et tous ses disciples
astoient enfuis et l'avoient lassie t, fours que sains Pire et sains Johans;
ches dois le siwoient de long V Mains la soy doubtat sains Pire del morir ; se
le laisat et entrat en une maison, et soy asseit au feu entre les Juys. Adont sainsPjrerenoiatJhe
li dest une femme que ilh astoit des disciples Jhesu-Crist. Adont jurat sains
Pire que ilh ne cognoissoit Jhesus. Mains Malchus, cuy ilh avoit coupeit
I'orelhe, est avant salhut et li dest : « N'es-tu pas cheli qui moy ferit de
» ton espee, en jardin ou li prophete Jhesus fut pris? » Et sains Pire jurat
grant seriment en disant : « Par ma foid,che ne suy-je pas. » Atant s'est
sains Pire de la partis qui les Juys doubtoit *. Mains enssi com ilh s'en
devoit alleir, une aultre femme vint avant et jurat en disant : « Ghis hons
» est uns des disciples le prophete Jhesus. » Et sains Pire respondit : « Par
» ma foid, je ne le vey oncques plus fours que a jour d'huy. » A eel propre
parolle, li cos chantat , et Jhesus regardat saint Pire. Adont veiit-ilh bien
que ilh avoit forfait; si s'aseit et commenchat amoreusement a ploreir, et
plorat tant que chu fut mervelhe. — Apres chu fut Jhesus myneis par les Jhesus fut mcrveiheu-
- , . •iii sement despleties.
Juys en uns allre jardin , devant les evesques et les maistres de la loy. Et
fut encors examineis, et puis moqueis et delaidengies , et coroneis d'unne
coronne de une espine blanche que ons nom berberis *, qui cressoit en cheli
jardin. Et puis ilh fut myneis en jardin Cay p has, et la fut-ilh coroneis de De coronne de bimc
une coronne d'aigletier k ; la fut-ilh examineis mult fortement. Et veissent Dei coronne de en-
mult volentiers que ilh le poissent entreprendre, parmy que ilhs awissent gailier -
ocquison de ly mettre a mort. — Et ly ametirent • que ilh avoit dit que ilh
destraroit le temple Salomon, et le reedifieroit dedens trois jours. Apres
1 Et Id le moquarent li ribaus Juys. B. 4 Nom scientifique de 1'cpine-vincttc.
* De pre*. B. 5 figlantier.
* Cremoit. B. * Du verbe amettre, accuser.
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408 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
D Voiuc X jh C esTcriSt n " C ' IU tesmon g narent ^ aux lesmons, et que s'ilh n'avoit aultre chouse forfait
ne dit, si avoit-ilh deservit la mort; chu disoient-ilhs entre eaux.
Apres chu demandat Gayphas a Jhesu-Grist que ilh voloit a chu respon-
dre? Et Jhesus ly respondit : « Je ny veulhe aultre chouse respondre, fours
» que chu que j'ay tousjours preschiet est vray, eussi com tu Fas plusoirs
» fois oiit chu que je ay sermoneit. Et se tu ne las mie oiit, se enquiers
jhesutfut buffed. » comment chu at esteit. » Atant salhit avant uns des servans Cayphas, et
hauchat la palme et ferit Jhesu-Grist, et li donnat une grant buffe en disant:
« Qui toy fait si fellement respondre a nostre evesque? » — Encor de-
mandat Gayphas se ilh astoit le fis de Dieu? Et Jhesus respondit : « Voire-
» ment je suy li fis de Dieu, et se jugeray et viefs et mors a jour de juge-
» ment; et seront salveis cheaux cuy je voiray salveir, et seront dampneis
» cheaux cuy je voray dampneir. » — Quant Gayphas entendit chu, si at
saisit Jhesu-Grist, et le sachat mult vilainnement. Et les aultres Juys ly ont
covert le visaige, et le feroient des grandes buffes en demandant : « Pro-
jhesus fut myneis a » phetise qui est cheli qui t'at ferut? » Adont fut Jhesus de tous costeis
frappeis et moqueis. — Puis fut Jhesus pris, et fut enmyneis devant Pylate
en sa chambre; et la fut Jhesus assis en une chayer par les faux Juys. Et
ly vestirent une manteal de purpre , et ly fisent une coronne de joins ma-
riens, desqueis joins la chambre Pylate astoit jonchie. Puis s'engennulhoient
devant luy par mocquerie, et disoient : « Je toy salue, roy des Juys *. »
Le coronne dejons mi- Et celle coronne des joins mariens fut eel que Jhesu-Crist oit sour son
chief quant ilh fut mys en crois, et souffrit mors por nos a racheteir des
paynes d'ynfeirs; porquoy ons doit tenir eel coronne a plus prechieux que
nuls des trois altres devant dittes. Et est cest coronne departie, car la motie
est en Gonstantinoble, et 1'autre motie est en la citeit de Paris. — Adont
fut Jhesus regardeis de Judas qui bien aperchoit que ilh avoit maul faite.
Foi. n4 r*. Si est venus aux Juys et leur dest : « Saingnours, por Dieu reprendeis tout
» vostre argent que vos m'aveis donneis, car j'ay vilainement trahit Jesu-
» Crist, si en seray dampneis. » Adont respondirent les Juys : « Que n'apar-
» tient au nos de chu que tu Fas enssi vendut, tous les pechies en sont sour
» toy. » — Quant Judas entendit chu, sy entrat en temple, et se rejettat
la tout leurs argent, puis sen parti t; et soy desperat de chu qu'ilh avoit
1 Dies gardeis le roy des Juys. B.
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LIVRE PREMIER. 409
faite. Apres prist Judas sa chinture et le loiat en son coul, et se soy pendit Judas soy peoda par
» « , , r% • 9 • • • i i • desperanche.
a unc arbre que ons nom sahus '; et dest que Dieu n avoit poioir de li par-
donneir si tres-grant trahison qu'ilh avoit fait et procureit.
Quant Judas fut pendus, li ventre li partit parmy, par ou son espirs issit
fours; car ilh n'yssit mie par le bouche, portant qu'ilh en avoit baisiet la
boche Nostre-Saingnour quant ilh le livrat aux Juys. Et apres chu prisent
les Juys les XXX doniers que Judas avoit la jetteit, et dessent : « Ou met-
» terons dies donirs f , car ilh ne doit estre pais mis en temple, portant
» qu'ilh vint de trahison? » — Adont parlat uns des maistres des Juys, et Des xxx denirs.
dest qu'ilh en achateront unc lieu por pendre et destruire les malfaiteurs;
et la ilhs metteroient les corps de cheaux qui moront en la citeit de Jhe-
rusalem, de strangnes gens, sicom pelerins et auUres. Adont fut par les
Juys achateit unc lieu qui astoit nomeis li mons Calvaire, ou Jhesus souf- DemoDtCaiva.ro.
frit la mort et gran passion por nos. Et la fut li argent aloweit *. — Apres,
en revenant a ma matere, Pylate apellat Jhesus et demandat : « Prophete,
» dont es-tu? N'ois-tu mie * comment chez Juys toy accusent? Dis-moy se
» chu qu'ilh dient est voir, ou ilhs le dient por malvaisteit. » A chu ne res-
pondit riens Jhesus. De quoy Pylate mult soy mervelhat; puis apellat les
Juys et leurs dest : « Saingnours, chis hons n'at mie deservit la mort,
» solonc chu que je puy a luy veioir ne enquerir; mains prendeis luy et
» l'enmyneis a Herode Philippe, le roy de Judee. » — Adont fut Jhesus Jhesus fut enmyneis *
enmyneis devant Herode Philippe , qui en fist grant fieste et dest : « A bien
» sois-tu venus, prophete, j'ay mult oiit parleir des grans myracles que tu
» as faite de mors resusciteir, des avoigles relumyneir, et pluseurs aultres
» grandes mervelhes; si toy prie que tu veulhes faire devant moy aulcuns
» myracles, sique mes gens les voient, et je toy feray delivreir. » Adont
ne respondit Jhesus riens; de quoy Herode Philippe fut mult corochies, et
revoiat enssi Jhesu-Crist a Pylate. Et adont fut fait la paix entre Herode Lapai* emre Herod.
et Pylate, ou ilh avoit longtemps esteit grant guerre. — Adont Pylate man- e J * '*
dat les maistres de la loy et leur dest : « Saingnours, que demandeis a chist
» homme? Je ne puy en luy troveir ocquison par laqueile ilh oit la mort
» deservit. Se vos voleis, je vos le renderay; si soit batus et delaidengies,
1 Uo sureau. * Enployet. B.
* Oti porat estre chis avoir mis, B. 4 Vois-tu mie. B.
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HO GHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
» et puis sen vois quitte solonc vostre loy. » — A eel temps as to it la con-
stumme, quant ons prendoit une homme a la Pasque, qucilconques chouse
qu'ilh awist fait, et li peuple li vosist ravoir, que ons ne le poioit escondire;
et portant Pylate leur voloit rendre Jhesu-Crist. Mains ilhs ne le voirent
mie avoir, ains commenchont a crieir que Jhesus fust crucifiies ; et si leur
fust rendus fiarrabas, qui en prison astoit, portant que ilh avoit ochis une
L & djr i ble vot "fif"*' komme, — "em i ' tt nuit, quant Jhesus fut pris, s'aparut Bel zebus, le prevos
G " st - dynfeir, devant le lit de la femme Pylate, et li dest : « Garde bien que
» Jhesus ne soit ochis, car se ilh est ochis, mies vairoit ' por toy que tu ne
» fusse oncques nee; car tu en seras livree a perpetuel tourmens; mains
» fais tant a ton saingnour Pylate que ilh ne soit mie ochis. » Tout chu
Deit femme Pyitte. veit et oiit la damme en dormant; si en oit teile paour que elle envoilat *,
puis plorat et sospirat jusques a jour. Et quant elle fut levee, elle mandat
Foi.my. tout chu a Pylate, que de chu soy gardast que ly sains prophete ne soit
ochis; et ly mandat tout chu que dit est, et comment ly dyable li astoit
apparut en dormant et mult I'avoit manechiet. — Quant Pylate entendit
chu , si fut mult esbahis , et voit bien que par envie astoit Jhesus enssy
meneis. Et vient aux Juys , se leur dest : « Saingnours , quels mauls at fait
» chis hons, cuy vos voleis ochire? Ilh ne puet enssi estre mys a mort sens
» jugement; mains lasiel aleir. »
^JhMwm^uT^mort Enssi com Pylate parloit aux Juys, vint Sathanas, li prinche d'infeir, et
si enortoit et conselhoit les Juys que ilhs metissent Jhesus a mort, et ne le
laiassent mie escappeir. Adont les Juys ont respondut a Pylate, que Jhesus
soit encors bien examineis et diligemmeot. Et Pylate li demandat : « Ors
» moy dis se tu es li roy des Juys? » Et dest Jhesus : « Tu ; le di$, voirement
» le suy-je. » Et dest Pylate : « Que as-tu fais contre le loy des Juys qui
» toy ont livreit a moy? » Et dest Jhesus : « Je ay prechiet. la loy solonc
o l'Escripture; car mon rengne nest pas cha-jus, ains est en paradis la-
» sus. » — Adont dest Pylate az Juys : « Saingnoura, lassies Jhesu-Crist
» alleir, car je ne true en ly qcquison de mort. » Quant les Juys oirent
chu, si commenchont a crieir en disant : « Grucifiiet serat li faux pro-
» phete. )> Adont lavat Pylate ses mains devant tous les Juys, et leur dest :
« Chi moy delievre-je de sa mort , car vos 1'aveis a tort accuseis et con-
1 Sic pour vairoit, vaudrait. * Qu'elle s'eveilla.
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LIVRE PREMIER. 411
» dampneis. » Adont ont escriet les Juys : « Sa mort et son sane soit sour
» nous et sour nos en fans; car chu nest mie pechiet de luy ochire. » Adont
leur livrat Jhesu- Crist. — Puis fuit Jhesus myneis en une plache, et la
fut-ilh devestut et tout loiiet a une estaiche; et la fut-ilh crueusement batus Jbesut fut bnus de
de scorgiies \ Apres Font rasis en une chaier, et li fut sa coronne remise coronoefs.
sour son chief. — Puis vint encors Pylate, et le prent par la main et dest :
« Chis hons que vous volets ychi enssi ochire n'at miemort deservit; laissies
» son corps aleir. » Adont criarent les Juys : « Ilh soy fait roy de nostre
» royalme, et nos n'avons aultre roy que Cesar. Se tu le lais escappeir, tu
» ne seras jamais ly amys Cesar. » Et adont dest Pylate : « Ors ilh soit
» crucifiies; mains, par ma foid, ch'est vostre roy. » Et respondirent les
Juys : « Nous n'avons aultre roy que Cesar. » — Adont fut la crois aportee.
Si vos dirons comment et de queile bois el fut faite. Nous trovons en la
Sainte-Escripture quelle fut faite de quattres manieres de bois, assavoir : De queue bois u croi*
de cypresse, de palmier, de cedre et de olivier. De ches III! manieres de
bois fisent les Juys la crois tout de certaine scienche. — Si vos dirons por-
quoy : promirs, ilhs quidarent que Jhesu-Crist dewist la demoreir pen-
dant, tant que son corps poroit dureir. Et portant ilhs fisent le piet de la
crois de cedre, car cedre est bois qui ne purist point en terre, ne en aighe,
ne en seche, ne en fresse; et ilhs voloient qu'ilh durast la longement pen-
dant, por feire a ly plus grant despit. — Secondement, ilhs quidoiept que
ly corps Jhesus dewist tant pendre, que ilh dewist pourir et flaireur jetteir.
Si soy avisarent portant que ilh feroient le boige * de la crois de bois de
cypres, qui est uns bois bien odorans, affin que la flaireur de son corps ne
grevast aux trespassans la voie *. Et portant qu'ilh li voirent faire plus grant
despit, ilhs ne vorent mie prendre ne coupeir aultre arbre de cypres, fours
que cheli que gisoit en fosseit, enssi com dit est *, qui astoit lais et obscure.
Mains jasoiche que ilh astoit ordeis, ilh astoit mult plus digne que nulle
aultre que onsposist avoir eoupeit. Et oussi Dieu voloit avoir celuy-meismes
qui venoit de la bouche et de frut, delqueile li moride astoit dampneis, et Foi.mr.
le 5 voloit en cheluy rachateir. Et chu fut chestuy, car les grains vinrent • de
1 Fouets. « Voir p. 324.
* Le tronc, le Mt. Voir Grandgagnage, v° Boge. * C'est-a-dire, le monde.
s Cest-a-dire : ne fut desagreable a ceux qui • Mot supptee d'apres le manuscrit B.
passeraicnt par la.
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412 CHROJNIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
propre arbre de quoy Adam mangat la pom me; lesqueis grains furent mis
en la propre boche qui mangnat la pomme, dont chis arbre issit, enssi
com dit est chi-devant '. Et en teile manere , de la pomme et de la boche
qui le siecle dampna , issit le bois qui portat le fruit qui le siecle rachatat,
et de celle dampnation le jettat. — Tirchement, les Juys fisent le treverse
de la crois de palme, portant que en vies Testament, quant aucuns avoit
victoire ons le coronoit de palme: et ilhs quidoient avoir vancut Jhesu-
Crist, portant fisent-ilh le treverse de palme \ — Quartement, ilh fisent
le table de son title de olivier, portant que li olivier signefie paix, ensi que
li hystoire de Noyel le lesmongne. quant li colons aportal li rain de olivier
qui signifioit estre pais ' entre Dieu et homme; et par enssi les Juys qui-
doient avoir pais apres la mort Jhesu-Crist; car ilh disoient que Jhesus
avoit mis discorde entre eaux et grant guerre en muit, de quoy ilhs le
haioient.
Quant la crois fut enssi faite, si fut Jhesus appelleis, car ilh n'y oit Juys
qui la crois vosist porteir; et portant ilh le misent sour les espalles * Jhesu-
ihesus portat s. crois. Crist. Et ilh l'emportat jusques en monte Calvaire. Et enssi com Jhesus
montoit la montangne en portant la crois, mult de bonnes femmes en plo-
roient. Mains Jhesus leur dest : « Ne ploreis pas pour moy, car je vay ou
» je veulh et doy aleir; mains de vos et de vous enfans ploreis del grant
» doleur qu'ilh vos avenrat, car li temps venrat que ilh diront : Las! por-
» quoy fummes oncques neeis ne conchus ne engenreis. Et poront avoir
» grant joies celles qui oncques n'orent d'enfans. » Enssi disoit Jhesus ; mains
oncques por chu les Juys ne soy amendarent; et enmynoient awec eaux
dois larons por crucifiier deleis Jhesus. — Et quant ilhs furent venus siis
jhesus fut eitweis en le mont de Calvaire, si ont Jhesus claweit B en la crois, et puis ont la crois
amont drechiet. — Adont escript Pylate deseur la crois : Jhesus Nazare-
nus, rex Judeorum. Mains les Juys ly escriarent : « Tu n'as pas droit
» escript, car ilh n'astoit mie roy des Juys; mains escris que ilh I'astoit.
» enssi com ilh disoit. » Adont dest Pylate ; « Chu que j'ay escript, je Fay
1 Voir p. 320. pensable au sens qui manque dans notre lexte, et
* Ce membre de phrase depuis : et ilh qui- que je supplee d'apres le man user it B.
, floient, etc., manque dans le manuscrit B. * Desus le coule. B.
* Voici ma in tenant, depuis les mots : ensi que 5 Cloue.
li hystoire, etc., tout un membre de phrase indis-
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LIVRE PREMIER. 415
>i escript. » — Adont vint la unc chevalier qui astoit nomeis Longis, qui LbngiiWUh^u-crisi
gotte ne veioit, ains astoit avoigle. Chis demandat une lanche, et le fist
asseneir contre le costeit de Jhesu-Crist, puis le ferit ' par teile virlut, que
ilh li perchat le costeit et ovrit la chair, sique sane et aighe en issit et vint
parmy le hauste de la lanche et coulat sus les mains Longis; et ilh en frotat
ses yeux, et tantoist ilh fut relumyneis. Se priat Jhesu-Crist merchi ; et ilh *y«cie.
ly pardonnat tous ses pechies. — Enssi com les Juys crucifiioient Jhesu-
Crist, avoient-ilh toudis Sathanas deieis eaux, qui les enortoit del faire de
pies que ilh poioient; car ly dyable ne savoit mie que ilh dewist tant per-
dre a la mort, com ilh perdit. Et se le faisoit portant que ilh voloit I'arme
Jhesu-Crist porteir en ynfeir*. — QuantSathanas veit bien que Jhesus astoit
pres de la mort, et que ilh ne poioit escappeir, ilh soy partit de la et vient
droit en ynfeir. Et dest aux aullres dyables que ilhs fesissent grant joie; sathanas nunchat ax
•> * * r •* i m. •■■ " • l - * • i. - ■» li- «nfew la venue de
« car jay tant fait, dest-ilh, que vos vereis bientoist venir larme de chi larmejhtsucrist.
» prophete cha ens, dont les gens fasoient si grant fieste por les mervelhes
» qu'ilh faisoit, les avoigles relumynoit et toutes aultres maladies regaris-
» soit. Maintenant ilh mourt en la crois; les Juys par mon enortement le
» font crucifiier, et son arme veireis maintenant cha ens avaleir. Si en
» devons grant fieste myneir. »
Belsebus, quant ilh entendit chu que Sathanas le dest, si commenchat a
crier: « Laron puanl, tu as esteit trop nonsachant, car se li prophete
» mourt et son arme vengne cha ens, nos serons tous perdus en tous
» poins; car ilh romperat toutes nos portes, et si oisterat touies les armes Foi 115 v.
» que nos avons des sains peires, patriarches et prophetes. Ne sceis-tu
» pais quant Lazaron fut mors se.vint son arme cha ens; mains 1111 jours
» apres ilh nos le retollit , et le remist en corps Lazaron et le resuscitat; car
» chu est Jhesus, qui est li droit fis de Dieu? » — Adont fut Sathanas emy-
neis devant les aultres dyables, et fut tant batus que, se ilh posist morir, saihanas fut muit ba-
ilh fust mors. Et li fut commandeis, puisque par son enortement astoit
Jhesus mors, que, s'ilh descendoit aux ynfers, que ilh ly alast defendre
I'entree. Enssi fut Sathanas batus. Et Jhesus pendoit en la crois, qui com-
mendat sa mere a saint Johans ewangeliste , et dest : a Femme vochi ton
» enfant; » et puis dest a sains Johans : « Vochi ta mere. » — Apres tout
1 Puis le but at. B. * Ilh voloit que li arme Jhesu-Crist alast en infier B.
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414 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
jhesusrendiuoaetpir chu commandat Jhesus son espir es mains de son peire. Et quant ons ly
oit donncit fel et asil ', ilh rendit son espir. Adont tremblat la terre, et ly
soleal et la lune obscuront, les pires fondirent, les oyseals lassarent le voleir,
et avinrent tant de signes que tous cheaux qui la astoient furent mult
sains Deny* deit que h esbahis. — Adont astoit en Athennes sains Denys, qui la tenoit les escolles de
k »offnr. philosophies qui dest que li Dieu de nature avoit trop a souffrir a celle heure
ou li siecle defineroit; si edifiat unc alteit en nom de Dieu nient cognuit.
cheli jour meismes que Dieu fut crucifiies. — Et enssi , com a heure de ves-
pre, vient Joseph de Arymathie a Pylate, et li priat qu'ilh ly vosist donneir
le corps de Jhesus en gueridon de chu que ilh I'avoit servit si longement.
jowph eiNychodeiDus Quant Pylate entendit Joseph, se li olriat et li donnat le corps Jhesus. Apres
en*evelirent Jhesu- ..jitvtii ■ ■ • i
Crist. apellat Joseph Nychodemus et pluseurs aultres, et oistarent Jhesus de la
crois; et fut enwolpeis en unc mult belle syndonne f , puis fut mys en unc
monement de pire tout nuef, ou nuls n'avoit onques jut. — Et quant les
Juys veirent que Pylate avoit donneit le corps Jhesus a Joseph , et que
Joseph l'avoit ensevelit, se quisent Joseph, et cheaz qui awec luy avoient
esteit, pour lapideir. Mains Nychodemus s'apparut promier a eaux, et chis
astoit unc des prinches des Juys, et leur demandat qu'il avoient a beson-
gnier en la synagoge, et qui les avoit assembleit sens luy? Ilhs respondi-
rent : « Por toy a lapideir et Joseph, qui aveis consenti del dependre Jhe-
» sus. Et vos volons de nostre compangnie oisieir, et volons que vostre
)> compangnie soit awec Jhesus en siecle advenir. » — Respont Nychode-
mus : c< Je le veulhe et prie-je a luy que ilh me l'otroie. » A celle parolle
vint Joseph , et dest aux Juys : « Saingnours , por quoy asteis-vos corochies
» encontre moy, portant que j'ay demandeit le corps Jhesus k Pylate? Je
» lay mis en monement, et l'ay enwolpeit en unc beal syndone. Si ay mys
» une pire sus le monement ■; et, par ma foid , vos n'aveis mie bien ovreit
» envers luy, qui I'aveis crucifiiet et ferus de la lanche. » — Quant les Juys
l'oiirent enssi parleir, si furent mult corochiet, et 1'awissent lapideiL
* silh ne fust chu que ilh astoit semedis, car ilhs ne voloient mie brisier
le sabbat. Et le prisent en disant : « Nos ne volons mie meffaire contre
)> toy, portant quilh est li jour de sabbat *; mains apres chu nos toy cru-
1 Ce mot, 6crit tr^s-lisiblement, doit signifier * Si ay mis une pire al entree de monement. B.
vinaigre, en latin acetum. U y a peut-e'tre la une 4 Si le eommandarent a prendre et agardeirjus-
faute de copiste. que* apres leur tabbed. B.
1 Suaire. Sydoine dans Roquefort.
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LIVRE PREMIER. 415
» cifierons et donrons ta chair aux oysealz de chiel et aux biesles de la
» terre ; car tu n'es mie digne d'avoir sepulture, » Respond U Joseph : « Gest
» parolle est semblant a la parolle I'orguelheux Goliad , qui devant David
» deleidengat Dieu. Et Dieu dest par le prophete : a moy serat la ven-
» ganche, et je le renderay. »
« Pylate , vostre prevost, — dest Joseph, — ne dest-ilh mie a vos, quant
» ilh devant le peuple lavat ses mains : Je n'ay culpe de la mort de chest
» homme juslesP El adont vos respondis a grant vois : Sa mort soit sour
» nos et sour nous enfans. Dont je ay grant paour que ly ire de Dieu ne
» descende sour vos et sour vos enfans, sicom vos aveis dit, et Dieu l'at
» bien oiit. » — De chu soy corocharent les Juys; si ont enclous Joseph en f<>i. ner*.
une mult petit et obscure chartre \ en laqueile ilh n'avoit nulle fenestre ne
aultre issue que 1'ussurie, laqueile fut bien fermee par les Juys et sailee par
les maistres de la loy. — Apres misent les Juys des chevaliers tous armeis
devant le sepulcre Jhesu-Crist por gardeir ; mains ilhs ne le porent si bien
gardeir que a thier jour Dieu ne le resuscitast. Et issit de sepulcre, quant ahesu* resuscUat.
retourneis fut de puant infeir. Vos saveis comment Jhesus morut en la crois,
et li parti t li arme de corps quant ilh dest : Consummatum est; laqueile
arme de Jhesu-Crist, sicom arme d'homme, s'en allat droit aux infers des-
quendant, le corps de luy demorant en la crois pendant mors, del heure de
none qu'ilh espirat jusqu'a heure de vespre qu'ilh fut jus oisteis. — Et tout
enssi qu'ilh desquendoit vers infers, si a p pa rut aux sains * qui en infeir L'«me d« jh<»u-cr»t
astoient, une coleur de clarteir semblant a or, qui avironat toutes les tene- esc " '
bres, enssi que puis le racomptarent Carius et Alexius, les enfans sains
Symeon , qui le veirent en infeir, awec chu qui chi apres est contenut.
Quant Adam nostre promier pere et Abraham , Ysaac, Jacob et les aultres
patriarches, prophetes et sains veirent chu, ilhs commencharent tantost a
myneir grant joie en disant : « Ceste lumyere est de cheluy qui at fait la i^sain»parienti;
» lumyre permanable, Laqueile ilh nos prom is t a veioir et envoier. » —
Atant commenchat a parleir Ysaie le prophete et dest : « Terre de Zabulon
» et terre de Neptalim de oultre le flus Jordan, le peuple qui astons en
» tenebres, avons veyut une grant lumyre qui vint de cheluy qui doit tout s
1 En une petite mamonel B. * Mot supplee cTapr&s le manuscrit B.
* As patriarcles. B.
une
a I'autre en infeir.
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416
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
sains symeonparut. » rachateir. » — Puis parlat sains Symeon et dest : « Glorifiies Nostre-Sain-
» gnour Jhesu- Crist, le Fis de Dieu, lequeile je rechus a temple en mes
» mains quant ilh astoit enfant. Et enssi com je le tenoie, li Sains-Espir
» descendit deleis moy, qui me fist dire a Jhesu-Crist : Sire, ayes merchi
» de vos servans. » Quant la grant multitude des saintes armes qui la
astoient entendirent sains Symeon, se s'esjoyerent mult fortement de la
venue de l'arme Jhesu-Crist.
s^ns johansBapiiste. Adont parlat sains Johans-Baptiste, et dest : « Saingnours, je fuy here-
mite en desers et prophete del haute sangnorie de chis sangnour qui
vient devant son avenement, por fair savoir a son peuple le remission
de leurs pechies, et le veis venir a moy; de quoy je fuy de la vertut de
Sains -Espir raemplis, quant je disoie : « Veischi le benoit angneal
Dieu, veschi qui osterat de monde les pechies; et apres je le baptizai en
flus Jordan, etvey, quant je lebaptisoi, le Saint-Espir desquendre sour
luy en la semblanche d'unc colon; et puis vey quant ilh fut baptisiet
qu'ilh issoit del aighe. Adont je oiis une vois qui venoit de chiel qui
disoit : Chis est mon chier et bien ameis Fis, en quoy j'ay mon plai-
Adamparoiie. » sanche ', et ch'est chis qui tantoist vos venrat visiteir. » Quant Adam
entendit chu que sains Johans disoit que ilh avoit Jhesu-Crist baptisiiet,
si apellat son fis Seth, et li fist racompteir tout chu que li angle li avoit
dit, quant ilh l'envoiat aux portes de paradis terrestre demandeir del oyle
del arbre de misericorde, por son corps ondre qui astoit malaides. — Et
scthparoiie. adont dest Seth : « Je alay aux portes de paradis, et priay al angle por
» avoir de oyle de misericorde, por ondre le corps Adam, mon pere, qui
» gisoit inalaide. El la moy respondit ly angle, et destenssy: Seth, ne
» labeur mie por avoir del oyle de misericorde por ondre Adam , ton
» pere, et luy a garir de la doleur de son corps; car tu n'en poras point
» avoir jusques al derain jour, quant V m et 11° ans seront acomplis. Car
» adont venrat sour terre li tres-douls Jhesus, li Fis de Dieu, et prescherat
» XXX111 % et demonstrerat sa loy, et morat en crois, dont ton pere et
» les aultres amis de Dieu seront jetteis des paines d'infeir. Adont aront
» del oyle de misericorde tous cheaux qui croiront en luy et qui sieront
1 Je me delite. B.
* Sic dans les deux textcs, avec le mot ans sous-
entendu.
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LIVRE PREMIER. 4i7
» baptisiet en 1'aighe de Sains-Esperit, et auront la vie permanable. Adont
» descenderat Jhesus en terre, et enmenrat Adam ton pere en paradis al
» arbre de misericorde. » — Quant les patriarchies et les prophetes oirent
chu, si en oirent grant joie \ Et enssi com les patriarclies et prophetes et
les altres avoient grant joie, vient Sathanas ly prinche d'ynfeir, et appellat
Lucifer leur maistre, et dest : « Sire, aparelhe-toy por rechivoir Jhesu- sathanparoiieuLuci-
» Crist, qui chaens vient glorifyer les patriarches, car ilh se fait le Fis F oi. nev.
» de Dieu. Et ch'est uns hons qui oit paour de la mort; car ilh at dit :
» M'arme est trist * jusques a la mort. Et at esteis tousjours mult con-
» traires a moy jusques a la mort, et in 'at fait mult de mauls; car quant je
» avoie travelhiet uns avoigle ou I cotrais s ou lepreux ou aultres gens, ilh
» les garissoit tantoist. Et portant j'ay porcureit sa mort; si vint chaens
» condempneis awec les aultres qui y sont. »
Adont respondit Lucifer a Sathan : « Qui est chis qui est si poisans et qui Lucifer respont a s>-
» at poioir sour la mort? Tous les plus poisans de la terre sont subgis a
» moy, et Les tin-ge par ma poisanche. Mains se chis Jhesus, que tu dis qui
» est si poissans, est homme et at poioir sour la mort, comment puet-ilh aleir
» contre ta poisanche ?» — Adont respondit Sathan et dest : « Sire, solonc saihan respont.
» chu que Belzebus dist, ilh est si poisans que nuls ne le puet contresteir
» ne sa diviniteit, et at la poissanche de Dieu; et encordont je le vey avoir
» pawour de la mort, jasoiche que ilh le vosist souffrir. Enssi en serat do-
» leur a toy, solonc chu que Belzebus moy dist. Et adont tu moy fesis
» batre , et se ne sijay porquoy. Tu toy doubte mult fort a rechivoir Jhesu-
» Crist ton anemis et le mien; je ne le doubte pointe, je le tenray et seray
» contre luy par envie et par yre awec mon anchien peuple des Juys. Et
» se toy dis que je fis la lanche awesier *, de quoy ons le ferit en costeit; et
» fis melleir le feil et l'asiel, por luy donneir a boivre; et fis aparelhier le
» bois por luy a crucifiier et les claus por luy a claweir. Et encor tantoist
» le feray-je morir, car je l'amonray a toy, et serat subgis a moy. » Adont
dist Infers 5 : « Tu dis mervelhe, car tu dis que chu est chis qui m'at tollut Ynferparoiie.
» les armes des mors par sa seule parolle, et larme Lazaron qui avoit ja
1 Si en menerent grant fieste. B. * Ces trois mots, indispensables au sens , man-
* Mon arme est dolente. B. quent dans notre texte. Je les suppl6e d'apres le
* Le manuscrit B emploie le mot clos, boiteux. manuscrit B.
4 Aiguiser. Augusier dans le manuscrit B. ,
S3
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418
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Lucifer parolle.
David parrolle.
Ysaias parolle.
Fol. i 17 r>.
La II e vois.
» esteit chaens IIII jours. » Sathan respondit : « Sire , oilh chesti chu
)> vraiement. » -*- Quant Lucifer oiit chu, se fut mult enbahis, et dest a
Satan : « Je toy conjure, par mes vertus et les tienes, que tu ne amaines
» mie Jhesus chiens; car je tremble tou, et toutes mes pliantes offichines
» tremblent awec moy. Car je s$ay vraiement qui ly hons qui chu puet
» faire est Dieu , li tous poissans et salvcur del humaine lignie. Et se tu
)> l'amoine chi a moy, tous cheaux qui chaens son t enclous por leurs pe-
» chies , seront par luy desloiies et oisteis. » — Enssi com Lucifier et Sathan
disoient chu, vient la unc tonoire, et unc cris espirituel fut oyut qui disoit
en teile manere : « Prinches d'infers, ouvreis vos portes et esleveis vos
» portes eternels. Se y entrat le roy de gloire. » Quant teile cry entendit
Lucifeir, se dest a Sathan : « Va-t'en ensus de moy, et isse fours de mon
)> manandie; car tu as porchaciet la mort de cheluy par cuy nos serons des-
» truis. Et se tu as poioir del combatre, vas sy toy combas a luy, qui est
» roy de gloire, por savoir se tu le porois contresteir par nulle manere. »
Adont issit fours Sathanas. Et Licifeir, que ons nom aultrement ynfers.
commandat a ses crueux officiiens que ilhs cloissent les portes d'erain et
d'abismes, et abassassent les ferus 1 de fier et contrestesissent le roy de
gloire, « sique nos ne demorons mie chaens chaitis ne vancus par nous
» defaultes et choardies. » Ches parolles entendirent mult bien les pa-
triarches et prophetes, et les aultres sains qui la astoient. Si commencba-
rent a blasmeir Lucifer et dessent : « Ouvres tes portes, si lais ens entreir
» le roy de gloire. » — Adont dest David a sains prophetes f : « Je vos pro-
» phetisay, quant je fuy a siecle, que Dieu debriseroit les portes d'erain et
» les ferus de fier, et oisteroit les gens de la voie de iniquiteit. » — Apres
parlat Ysaias et dest : « Quant je astoie en vief , je anunchaie que les mors
» soy releveroient, et cheaux qui sont ens monemens et cheaux qui sont
» en terre feroient grant joies ; car la rosee qui venroit de Dieu seroit san-
» teit a eaux. » Quant tous les sains oirent la parolle Ysaie, si ont dit a Lu-
cifer : « Ouvre tes portes, tu es vencus; et demoiras chi, et n auras jamais
» poioir. » — A ches parolles revient encor une aultre vois qui dest :
« Prinches d'ynfer, ouvreis et osteis et eleveis vos portes eterneiles; se y
1 Les verais. B.
9 Tout ce qui precede depuis : et les aultres
sains qui let astoient, etc., manque dans le manu-
scrit B.
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L1VRE PREMIER. 419
» entrerat ens ly roy de gloire. » Quant Licifer veit que la vois avbit ja II
fois crieit, se fist com chis qui riens n'en savoit, et demandat aux pro-
phetes cuy chis roy de gloire astoit? Adont respondit David et dest : Je David piroiie.
c< cognoy les parol les de cheluy cry par le Sainte-Escripture, et le saint
» Esperit de cheluy dont ilh vinent; et portant toy dis, enssi com jay dit
» par-devant : Ghu est Nostre-Sangnour, ly poissans roy de gloire, qui de
» chiel at regardeiten terre r et at oiit les gemissemens de cheaux qui sont
» loiies en chatre. Si vuet-ilh delivreir et delivrerat les fis des ochis. Or
» ouvre tantost tes portes, puans ynfer, sy lais dedens entreir le roy de
» gloire. qui toutes les debriserat et toy deshirterat. » — Enssi com David Jheausdewendiienyn
disoit ches parol les, descendit Jhesus ly roy de gloire en ynfeir; puis avi-
ronat les tenebres permanables et desrompit les loiiens, et visentat ses
amis f . Mains quant Lucifer et les puans officiiens et leurs mynistres vei-
rent la grant clarteit, si oirent grant pawour en leur royalme meismes. Et
quant ilhs veirent Dieu en propre personne sy toist entreir en leurs tene-
bres , si commenchaxen t a crier : « Nos summes vancus. » — Et Lucifer dest : Lucifer pamiie.
Qui es-tu, qui nos reus con f us envers Dieu? Qui es-tu, qui si nos rens
desconfis, sens commenchement de corruption, et es venus condampneir
nostre poissanchg? Qui es-tu. qui si grans es et si petis et si humles?
Qui es-tu, qui es si hauls emperere et chevalier, si mervelheux combat-
teurs * , et si es en fourme de serf et roy de gloire qui jamais ne moirat ,
ains viverat a tousjours? Qui es-tu, cuy la crois porta t, mors et giest
mors en sepulcre et maintenant es descendus a nos tous vief? Qui es-tu,
qui a ta mors fesist trembleir toutes creatures , et toutes les estoiles et
les planetes se aombrarent? Et ors en droit es-tu sires et frans entre les
mors? Qui es-tu, qui destruis nos portes 8 et fais trembleir nos legions?
Qui es-tu, qui desloie cheaux qui astoient loiies por l'original pechiet, et
cheaz qui astoient avoigles par les tenebres de pechiet? Or en droit as-tu
relumyneis par ta diviniteil resplendissant? Qui es-tu , qui rapelle les Lucifer soy merveih?
chaitis en franchise qui astoient decha en arriere en servaige? Qui es-tu , »u-cn§t.
qui as enssi espawenteis toutes les legions de chaens? » — A ches parolles Tow i*s dyibiwment.
commencharent tous les dyables a crieir a une vois en disant en teil ma-
1 La phrase qui precede est omise dans le ma- * Balelhiers. B.
n user it B. * Nous poioirs. B.
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420
CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
Jhesus at destoubleit
les dyables.
Fol. 117 v».
Les dyables soy des-
perenl tous.
Lucifer crie horible-
ment.
nere : « Dont es-tu , Jhesus , qui es si fors hons et si rcsplendissans et si
)> clers en ta majesteit, qui es sens taiche de pechiet? Ly monde teriens,
» qui jusqu'a or at esteit subgis a nos et qui nos paioit nos tregut, ne nous
» envoiat oncques teile horn me mors, ne oncques mais ne donnat a nous
» teile don. Qui es-tu dont qui si hardiement es entreis sens nuile poioir
» en nostre domy nation? Tu ne double mie tant seulement nous tour-
» mens, mains tu vues osteir hours de nos loiiens tous les dampneis. Par
» a venture, tu es chis Jhesus de cuy Sathan nostre prinche at mailvaise-
)> ment ovreit. » — A tant passat Jhesus avant, et defollat Lucifer et tous
les dyables; puis ilh prist Sathan, et le livrat loiiet aux poisanches d'infer.
Apres ilh apellat tous ses amis, et les mist en sa clarteit. Adont rechuit
Lucifer Sathan , et le commenchat grtmdement a delaidengier, et ly dest :
Hahay ! prinche de perdition, dus de tou mauls, comment osais-tu faire
teile choise de faire crucifiier Jhesus, le roy de gloire, par le mort que ilh
at souffert? Par ton enortement nous as-tu tous despoilhies, chaitis, foux
et maul awireux! Tu ne sceis chu que tu as fais. — Ors y prens garde,
car ilh encache toutes les tenebres de la mort par la grant clarteit de sa
diviniteit. Et si at toutes conbrisiet nos cartres; si en at foursjetteis les
chaitis prisonniers, et at desloiiet leurs loiiens. Et cheaux qui soloienl
eistre tourmenteis desous nous soy gabent de nos, et ont grant joie de
nous mauls; et astons mult travelhies por leurs proiiers. Et enssi tout
nostre royalme est tout vancue, et jamais nuls del humaine lignie ne
repairerat chaens. Et apres les mors, qui ne soloient mie estre contre nos
orgulheux, et les chaitis, qui chaens ' ne poioient avoir joie, nos mane-
chent ors endroit. » — Puis apres commenchat Lucifer encor plus fort a
crier et dest : « tu Salhanas, prinche de tous mauls, porquoy fesis-tu
chist chouse dont cheaux, qui del commenchement de monde jusqu'a or
avoient esteit despereis de jamais eistre salveis ne de vie avoir, ne sont
mie maintenant oiis chaens braier ne crieir? Sathan, prinche et pos-
sesseurs de cleis d'infer, comment oysas-tu procureir a faire chu dont
tu as perdue les cleis par le bois de la crois? — Toutes les richoises que
tu avois acquis , par l'arbre de quoy Adam mangnat la pomme , as-tu a
chest fois perdue, portant que tu y pendis Jhesus; si en as mult forfait.
1 Tout ce qui precede depuis : Et apres les mors, etc., manque dans le manuscrit B.
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L1VRE PREMIER. 421
Mains sache bien que tu auras d or en avant tant de tourment, que nuls
ne les poroit nombreir. Sathan, prinche de nos, serf de mort, nas-
senche d'orguelh, tu dewisse promirement avoir enquis se chis avoit
faite nuls mauls; et puisque tu ne trovois en luy mile choise de maule.
porquoy astois-tu sy hard is que tu le crucifias a tort et sens nule rai-
son, et amynas-tu a nostre region I'homme innocent et juste dont nos
avons perdut tous les maulfaiteurs et tristeours ' de monde? » — Atant iheiU% paro n e , Sa .
parlat Jhesus ly roy de gloire a Lucifer, et dest : « Sathan serat desous ! aD el a Luc,fer
> ton poioir a tousjours, mais en lieu de Adam et ses justes enfans; car ilh
) at procureit que Adam mangnat la pomme, dont ilh desquendit chaens
> luy et ses enfans tous. Apres ilh at procureit que j'ay esteit crucifiies.
> dont vos aveis perdut les armesde mes amis. » — Quant Jhesus oitchudit.
Ih estendit sa main etdest : « Veneis a moy tous mes amis, qui aveis 1'ymage
> de moy, qui par le bois et 1'anemy aslies dampneis. Or asteis par le bois
del crois rachateis, et l'anemis qui est vancus at la morte sourmonteit *. »
A chest parolle s assemblarent tous les sains desous la main Nostre-Sain-
gnour Jhesu-Crist. Et Nostre-Sire prist Adam par le main desire et dest :
Paix soit awec toy et a tous mes bons et justes enfans. » Atant soy jettat
devant ses pies et commenchat a ploreir, en priant Nostre-Sangnour mer-
his; puis dest a hault vois et douche :
« Sire, je vos ensacheray dors en avant, car vos m'aveis rechuit awec vos, Adam paroiie
et si n'aveis lasiet mes anemis avoir poioir sour moy. Sire Dieu, j'ay
mainle fois crieit a vos % et vos m'aveis salveis. Sire, vos aveis mon
arme osteit d'ynfer. » Apres dest Adam aux prophetes : « Tous les sains
de Dieu faites fiestes de Jhesu-Crist INostre-Salveur, et recognisseis la
grandeche de Sa Majesteit, » Adont soy misent tous les sains en genos,
et dessent tous a une vois: « Rachateur de monde, ors asteis a nos ve-
nus; si aveis aemplit, parfait et acomplit tout chu que vos aveis dit par
le loy et par les prophetes; vos nos aveis rachateis vief par la crois. Et
par la mort de la crois vos asteis a nos descendus, affin que vos nous
reoisteis d'ynfer par vostre mort et par vostre majesteit. » — Puis des-
sent encors les sains : « Sire, enssi com vos aveis loenge et puissanche en
1 Trichcoirs. B. . * Ici, dans le man user it B, Adam tutoic Dieu
* Ont astcit par le fust et Vanemis qui est vancus et coutinue sur ce pied.
rachateis et est li mort sonnontee. B.
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422 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
» terre de nos rachateir par le crois, enssi, beas Sires, metteis en ynfer
» signe de la victoire de vostre crois, sique la mort d ynfer n'ait dors en
Foi. i is r>. » avant pins de sengnorie sour nos. » — Adont estendit nostre sire sa main
destre, et fist le signe de la crois soar tous ses sains, et dest qui serat vraies
creans, se fesist sour luy le signe de la crois, chis n'aroit garde del art ne
jheMis deiivr»t se« de la poioir de dyables. — Adont Jhesus prist Adam par le main deistre et
amis d infer. • •
\ soy partit d'ynfer, et tous les sains le sewirent en chantant : Alleluya, alle-
luya, alleluya. Et cascuns des prophete chantoit une novel I e chanson; et
les aultres sains respondoient : Amen, alleluya. — Apres emynat Jhesus
tous les sains en l'aire, et les mist en paradis terrestre; et dest a sains
Mychiel qui les gardast jusques a jour del Ascention, que ilh monteroit en
duel awec luy. — Ghu fait, Jhesu-Crist sen ralat en sepulcre, et rentrat
• en son corps glorieux et glorifiies. Et resuscitat le dymengne al matin , le
XXVII 6 jour de mois de marche. Et ilh avoit esteit crucifiiet le venredi
La resurre*ion jhesu- devant, le XXV e jour de marche. Et a teile jour soy incarnat-ilh en la
henoite virgue Marie.
Bien awireux, bien glorieux, bien benoite et bien sainte fut la journee de
la resurrexion Nostre-Sangnour Jhesu-Crist por humaine lignie, por trois
poins; car elle fut en dymengne, elle fut au thier jour, et se fut al racha-
tement et salvement de la lignie humaine, passeit, presens et a venir. Si en
devons loier et rendre grasce a cheli qui resuscitat Notre -Saingn our
Jhesu-Crist, des biens qu'il adont nos fist et nous fait cascon jour. Si en
devons bien salweir de une Pater noster et une Ave Maria la virgue qui
IX mois le portat, que ilh nos garde tous vrais cristiens de paynes d'ynfer,
desqueiles nos serons bien gardeis, s'ilh ne perist en nostre defaulte. —
Item, chi meismes jour que Jhesu-Crist resuscitat, pluseurs corps sains
resuscitarent qui par-devant astoient mors, par lesqueils mors le secreis
que Jhesu-Crist fist en ynfer furent a pluseurs publiies et reveleis. — Item,
la promier chouse que Jhesu-Crist fist, apres sa resurrexion, fut chu qu'ilh
De Joseph d'Anma- allat a la prison ou les Juys avoient mys Joseph de Arymathie; et le ravil
fours, et le fist porteir par ses angeles en la citeit d'Arymathie de laqueile
ilh astoit; mains Dieu li dest qui ne soy partist de son hosteit dedens XL
Gram myracie de jo- jours. — Et quant che vint le dymengne al matin , Annas et Cayphas com-
S ep e Arymat le. manc | aren t q Ue ons j eurs amy nast Joseph, car li sabbas astoit passeis ; car ilhs
en voloient faire solonc la loy, com de cheluy qui sa loy avoit fauseit. Adont
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LIVRE PREMIER. 425
vinrent les Jays, et ovrirent les hays qui astoient fermees et mult diligem-
ment sailees, et ne les avoient defermeis depuis que Joseph fut dedens mys;
mains encordont ilhs ne trovarent point de Joseph. Quant chu entendirent
les gens qui la astoient venus, si en furent mult enbahis, car ilhs avoient
troveit les buys diligemment fermees et sailees. — Enssi com les Juys
astoient en teils debas, vient la unc des chevaliers qui avoit gardeit le sepul-
cre, qui dest tout hault en le synage * aux Juys : « Sangnours, enssi com
» nos gardiens le monement Jhesu-Crist , la terre commenchat a trembleir,
» puis nos vient Tangle de Dieu, qui oistat la pire desus le monement et L'«u g ie »'a F prut a
» s'asist sour la pire : et avoit regart com effoudre et ses vestimens enssi <ioient u> sepuiere
1 ® . . Jhe.u-Criat.
» com nois. — Apres veismes trois femmes venir an sepulcre qui sem-
» bloient eistre mult triste, auxqueiles li angle dest : IN'aies mie paour, je D«iniuriw.
» s<jay bien cuy vous quereis : Jhesus de Nazareth qui fut crucifiiet; ilh
» est resusciteis, enssi com ilh l'avoit dit. Enssi le dites a ses disciples, car
» ilh venrat encontre vos en Galilee. » — Quant chu entendirent les Juys, si
appellarent tous les chevaliers qui gardoient le sepulcre, et demandarent :
« Qui sont les femmes a cuy li angle parlat? por quoy ne les presist-vos? »
A chu respondirent les chevaliers : « Portant que nos fumes sicom mors
» de la grant paour que nos awisme del angele. » — : Adont dessent les
Juys : « Goment done vit Jhesus? par nos foys nos ne le creons mie. »
Respondirent les chevaliers : « Vos aveis veyut et oiit que Jhesus at fait
» tant de myracles et se ne les aveis mie creyut ; et comment nos croiries
» done vos? Mains sachies encordont que Jhesus, cuy vos aveis cruciflieL
» vit. — Et oussi nos avons bien entendut comment vos encloist Joseph Foi. mv.
» qui ensevelit Jhesu-Crist en une petit chartre, et puis fermast et sen-
» gnast les huys. Et quant vos les ouvrist, vos ne le trovast mie. Et por- Arguscntresiescheva
» tant que vos ne le volets croire que Jhesus , qui est Dieu , n est mie
» escappeis et resusciteis , nos vos disons : Rendeis-nos Joseph , cuy vos
» en fermast, et nos vos renderons Jhesus que vos nos commandast a gar-
» deir. » Adont dessent les Juys : « Ors nos assengnies Jhesus , nos vos
» assengnerons Joseph en la cileit d'Arymathie. » Respondent les cheva-
liers : « Se vos nos assengnies Joseph en Arymathie, nos vos assengnons
» Jhesus en Galilee, enssi com nos entendismes al angle qui le dest aux
1 Par erreur sans doute pour synagogue.
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424 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
» feinmes. Et encor plus avant dest li angle; car ilh dest que, enssitoist
» que li arme fut departis de son corps en la crois, ilh descendit aux
)> ynfers, si les at tous debrisies et desros. Et en at fours mis ses amys,
» lesqueils ilh at mis en paradis terrestre '. Et puis revint a sepulcre huy a
» matin, et rentrat en son corps, et resuscitat et alat osteir Joseph de la
» prison ou vous la vies mis. » — Quant les Juys entendirent chu, se des-
sent entrez eaux : « Ne souffrons mie que ches novelles soient publiies ne
Les juvs donnareni » manifestoes, car tout le peuple croiroit en luy. » Atant prisent les Juys
aux chevaliers grant 7 r * • J * *
•limnt^ue'jhMuI g raut argent, et le donnarent aux chevaliers qui avoient gardeit le sepul-
moitrrfeveii. cre ? en disant : c< Nos vos donnons chist argent, portant que vos direis par-
» tout que ses disciples l'ont embleit par nuyt, de temps que vos dormies :
w car se Pylate savoit qu'ilh fuist resusciteit, nos seriens honis. » — Et les
chevaliers , quant ilh oirent largent, ilhs desent la chose enssi qu'ilh astoit,
et a Pylate et a tout le peuple 8 .
Par chest chouse fut diffamee chest parolle entre les Juys, porquen jus-
qu'a jour d'huy qu'ilhs dient que Jhesus fut embleis par ses disciples. —
FinecsetAddietARcns Apres chu unc priestre qui fut nomeis Finees, et awec iy Addi ly com-
dessent aux Juys * 1 ■ ■ * i • ■ •* •*
auiih avoient veyut mandeurs de la loy et Agens ly dyaques, ches trois entrarent en la cileit
de Jherusalem; et venoient de Galilee, et entrarent en temple, et a pel la-
rent tous les prinches des Juys el le peuple, et leurs dessent: « Certaine-
» ment nos avons veyut Jesu-Grist, cuy vos aveis crucifiiet, et awec luy
» ses XI disciples, parlant et disant a eaux : Alleis par tout le monde, et
» prechies l'Ewangeile a toutes creatures ; et qui le croirat et baptiziet serat,
)> ilh serat salveis; et qui ne creirat en ly, ilh serat condampneis. Et quant
» ilh oit chu dit, nos le veismes monteir en chiel. » — Enssi desent ches
trois; mains ons doit entendre que chu avoit esteit XL jours apres sa mort
que ilh fut resusciteis, assavoir le jour delle Ascension. Mains nos l'avons
chy mys por porsiere le tesmonnage de eaux; si retournerons a nostre
matere. — Gar sachies que le propre jour qu'ilh resuscitat ilh s'aparut a ses
disciples par V fois, et apres encor V fois anchois qu'ilh montast en chiel.
Et puis montat en chiel a V c jour de may, qui astoit en judy, et coroit ly
dymengne sour li 8 . Et la astoient present les trois devantdit que je vos ay
1 En I'aire. B. I'auire peuple. B.
* Et H chevaliers prisent les denicrs et fisent chu * Je corrige ici cTaprcs le manuscrit B. Notre
que li Juys les ensegnerent a Pylate et ousy a tout texte portc : coroit ly dymengne sour b.
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LIVRE PREMIER. 425
nommeit, qui aux Juys en raportarent les novelles, enssi com dit est. —
Et diray encor chesti chouse, et puis retourneray a ma matere. Les Juys
furent si entrepris des parolles que les trois personnes devantdit leur desent,
qu'ilh donnarent a eaux grant argent, affin qu'ilhs ne parlassent plus de
chest ascention. — Apres s'asemblarent entre eaux, et desent li uns a I'autre
queile signe chu poioit estre qui astoit enssi avenus en Israel. Adont fut
entre eaux prisconselhe qu'ilh en la montangne d'Olivet yroient, por veoioir
que les espirs n'awissent ravis Jhesu-Grist; mains oncques ne le porent tro-
veir ne veioir. Et renunchont aux altres Juys qu'ilh ne l'avoient nient tro-
veis '; « mains nos avons troveit Joseph en la citeit d'Arymathie. » Quant Foi. n9r«
chu entendirent les prestres et les prinches de la loy et tout le peuple , si en
orent grant joie , et en glorifiarent Dieu de chu que Joseph qu'ilh avoient
enclous en chartre astoit troveis; mains Jhesus n'astoit mie troveis, car ilh
ne soy voloit mie aparoir. — Adont desent les prinches entre eaux : « Com- Lesjuysenvoieoujo
» ment poriens-nos ameneir Joseph a nos et parleir a luy? » Puis orent scp etlFe
conselhe ensemble et li envoiarent une lettre qui parloit enssi : « Paix soit
» awec toy et a tous cheaux qui sont awec toy; nous savons bien que nos
» avons pechiet en Jhesu- Crist et en toy, si toy prions que tu dengne
» venir* a tes peres et a nos, et a tes enfans et tes amis; car nos as tons
» mult mervelheux comment tu aspiras de nos. Et nos savons bien que
» nos avons fait maule envers toy; et portant Dieu toy rechut et toy deli-
» vrat de nostre malvais conselhe. Sire 8 Joseph, tu as pais de tout le peuple
n d'Israel. » — Chest lettre fut envoiet a Joseph par VII * notables hommes.
Et quant ilh l'oit luit, si dest : « Benois soit Nostre-Sire Jhesu-Crist , qui
» at delivreit et gardeit Israel, qu'ilh n'espandirent mie mon sane, et moy
» covrit desous ses eyles de sa debonnaireteit. » Atant s'en alat Joseph en
Jherusalem, et les Juys a grant honneur vinrent encontre luy en disant :
« Sire Joseph , paix soit a ton venue. » Et ilh les respondit : « Dieu donne
n paix a tout le peuple dTsrael. » Adont le basarent tous et l'emynarent en
la maison Nychodemus, qui benignement et a grant joie le rechuit; et la
ly demandarent que ilh leur desist comment ilh astoit avenus , depuis le
1 Si le dissent as Juys ly messages. B. ce qui ne se comprend pas.
* Mot supply d'apres le manuscrit B. 4 Par une. B.
8 Notre texte, par erreur sans doute, porte si,
u
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426
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Mervelhe de chu que
Joseph dist aux Juys.
jowph P aroiieauxJuy8.jour que ilh l'avoient enclous. — Adont dest Joseph : « Sangnours, vos
saveis coment je priay a Pylate qu'ilh moy donnast le corps Jhesu-Crist
le venredi a vespre ; et puis le dependi de la crois awec Nychodemus ,
se le cuchammes a complie en monement que j'avoy achateit tout nuef.
Et vos * le sawist lendemain, se moy mandaste et m'encloiste por lapideir
quant li sabbas seroit passeit. Adont avint que le dymengne al matien,
enssi com je astoy en orison, esclarchist mult cleir la chartre oil je astoie
enclous. El je vey la Jhesu-Crist, enssi com le raye de solleal; si en oye
teile paour que je en chay a terre. Et adont moy prist Jhesus par le
main , et moy levat de terre et m'arosa et suwa ma fache \ Et puis moy
baisal et moy dest : Joseph , nay point de paour, regarde-moy bien , car
je suy Jhesu-Crist s cuy corps tu as ensevelis. Adont je commenchay a
avoir doubtanche se chu astoit-ilh, se ly ay dit : Or done monstre-moy
le sepulcre ou je t'ay mis. Ilh me prist par le main , et moy menat a droit
lieu ou je l'avoy ensevelit; et moy monstrat le corechiet * en queile j'avoie
son chief enwolepeit. Adont je cognoy bien que chu astoit Jhesus. si
l'aoray et li ay dit : Sires , tu sois benois qui es venus en nom de Dieu.
Atant moy livrat a II1I angeles qu'ilh avoit par-deleis luy, et moy fist
porteir en ma maison en Arymathie. Et moy commandat de nient a issir
de ma maison dedens XL jours, et puis moy dest : Je m'en vois a mes
disciples, et vieng d'ynfer jetteir fours mes amis qui longtemps y ont
esteit. » — Quant chu entendirent les Juys, si furent mult esbahis, si
chairent tous a terre et commencharent a crieir entre eauz, et dissoient :
Queis signe est chi qui est venus en Israel? Coment puet eistre Jhesus
Dieu? Nos cognissons bien son pere Joseph et sa mere. » Atant dest unc
dyaque : « Je ay mult bien cognuit tout son parage : chu sont gens qui
toudis sont en orisons, et dobtent mult Dieu, et off rent sovent sacrifiche
a Dieu. Et enssi quant Symeon li gran preistre le rechuit au temple et
ilh le tient entres ses mains, ilh li dest : Sire, solonc tes saintes parolles
tiens maintenant tes serfs en paix, car mes yeux ont veyut que vos sal-
Les Juys furent mult
nbabis
Joseph.
des parolles
Fol. 119 V.
1 Mot supplee d'apres le raanuscrit B.
5 Et m'arosa ma fache d'aighe. B.
8 Et je le regarday el Raboin Helios , etUh diet
a moy : je ne suy mie Helios, mats je suy Jhesus
cuy.... B.
4 Ce doit 6tre le meme mot qui se trouve dans
la cbronique de Jean de Stavelot, sous la forme
coursier. Le glossaire de Ducange fait du courcet
un tegmen capitis, et eette definition s'applique
parfaitement au corechiet de notre texte.
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LIVRE PREMIER. 427
» vereis le monde. — Et puis benit Marie, la mere Jhesus, el desl : Je toy
w anunche de chesti tien enfant que mult de gens dlsrael feront de ly
>> grant murmure, et encontre luy et contre sa resurrexion. » Atant furent
les prinches des Juys mult esbahis; mains Joseph leurs dest : a Vos aveis jowphparoiieauxjuys
» oyut grant mervelhe de chu que ons at dit que Jhesus est monteis en
» chiel; mains ons se doit plus mervelhier de chu qu'ilh n est mie resusci-
» teit tou seul, anchois at resusciteit pluseurs corps de leurs monemens,
» qui ont pluseurs fois esteit en Judee quant ilhs visquoient. Car cascuns
» sceit bien que Symeon le gran preistre oit II fis : Garinus et Alexius; et
» fumes a leur sepulcres ou ilhs furent ensevelis, et encordont sachies cer-
» tainement que ilhs sont ambdois en la citeit de Arymathie. » — Quant
les Juys oirenl chu, ilhs en orent grant joie, et dessent que ilhs les man-
deroient et les conjureroient teilement que ilhs parleroient a eaux. Adont
alarent Annas el Cayphas , Nychodemus et Joseph aux sepulcres ou Garinus
et Alexius avoient esteis mys le jour de leurs obit; mains ilhs ne les trova-
rent mie. Si alerent en la citeit d'Arymathie, ou ilhs les trovarent en orison
en genos; si les amynarent en Jherusalem a grant honneur, etcloirent les
portes.
Adont ont pris les Juys la ioy de Dieu en leurs mains, et aconjurarent L "^ q 7e n jhwil-cn^
sus les dois freres par Dieu Adonay que ilhs desissent qui les avoit resus- ™V£ iux dedireve -
citeit. Quant ilhs entendirent chu, ilhs commencharent a trembleir; puis
regardarent le chiel, et fisent de leurs dois sour leurs langes le signe de la
crois; puis parlarent et dessent : « Donneis-nos dois folhes de papires ou
» de parchemyn ', et nous escrirons dedens chu que nos avons veyut et
» oyut. » Puis leurs donarent de parchemyn, et s'aseirent et escripsent a ^ e d Jhi^riJ t n i
chu que Jhesus avoit fait en ynfer, enssi com dit est par-deseur. — Et quant ™ •« y nfers
ilh I'orent escript, Garinus donnat le siene a Annas et Gayphas , et Alexius
donnat le siene a INychodemus et a Joseph; puis s'envanuirent et ne furent
depuis veyus; et quant chu(fut) luis devant eaux, les prinches 1 des Juys issi-
rent de temple en batant leurs culpes ; et alat cascon en sa maison en grant
paour et mult fort tremblant. — Mains Nychodemus et Joseph alarent a Py-
late le privoste, et li dessent tout chu que dit est par-desus. Et quant Pylate
1 Le manuscrit B porte seulement : dois folhes ■ On lit dans le ma miser it B : et quant chu fut
de parchemien. fats, li prinches....
chu
avoit
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428
CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE
Pylale escript a I'ein-
perere la mort Jhesu-
Crist.
La letlre.
Fol. 120 t*
P\late envoiat la letlre
a Homme.
1'entendit, si fut mult enbahis, et se soy dobtatque ly emperere Tyberius
Cesar ne le sawist, dont ilh posist pies valoir. — Adont s'avisat Pylate qu'ilh
escriroit lettre a Tybeir Cesar ou tout le fait seroit, et soy escuseroit en
ses lettres; se fist une lettre ou ilh disoit enssi : « Je Ponche-Pylate mande
a monsaingnour Cesar Tybeir, roy et emperere, salus. Com ilh soit
avenus, y n'at gaires \ que je ay esproveit l'envie des Juys, et que ilhs, et
cheaz qui venront apres eaux, sont dignes de crudeile dampnation; car
com leurs peires euwissent unc Dieu *, et Dieu leur promesist que ilh
leurs envoiroit son fis en terre, qui seroit leurs drois roy, lequeile ilh
leur promist a naistre de une vergue; chi Dieu nasquit y n'at gaires,
ilh at environ de XXXI11 ans, et regnoit par Judee de temps que jay
esteit privoste, et oussi devant. Et les Juys quant ilhs veioient cascon
jour qu'ilh enlumynoit les avoigles , mondoit les lepreux , curoit les para-
litiques, encachoit les dyables fours des gens, resuscitoit les mors,
comandoit les vens, aloit a seches pies sour les aighes et faisoit mult
d'aultres myracles, ypluseurs orent envie sour luy, jasoiche que ilhs
creyssent qu'ilh fust le fis de Dieu. Et les prinches des prestres Facusa-
rent, et puis apres les Pharisyens le prisent et I'amynarent devant moy;
et moy commencharent a racompteir mull de choses de luy, et disoient
que ilh as to it enchanteur et que ilh mefaisoit encontre leur loy. Et je
les crey, se le livray a tourmenteir a leur volenteit. Et ilhs le crucifia-
rent, et puis misent wardes a son monement ou ilh fut ensevelis. Et enssi
com II1I chevaliers le gardoient ilh resuscitat a thier jour; et les Juys
furent plains de si grant fellonie. que ilhs donnarent aux chevaliers grant
argent, portant que ilhs desissent que les disciples Jhesus avoient embleit
le corps; mains jasoiche que ilhs presissent 1'argent ilhs ne s'en porent
(aire, ains disoient chu qu'ilhs avoient veyut. Et portant je vos mande
le fait par escript, aflin , se les Juys vos voloient aultrement infourmeir,
que vos ne les croies mie leurs menchongnes. »
Quant la lettre fut faite , Pylate apparelhat une nef , se mist dedens mult
de nobles joweals, et prist uns sien servan qui oit nom Adrian , et li chargat
I'avoir et la lettre por conduire a Romme. Chis Adrian ou Albain * soy mist
1 N'at encore gaires. B.
* Euwissent creyiU en Dieu. B.
8 Les mots : on A Ibain ne sont pas dans 1c ma-
nuscrit B.
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L1VRE PREMIER. 429
en mere, si oit vent contraire a luy; si arivat en la terre de Galisse, dont
Wespasianus astoit sires et roy . En cheli paiis astoit la coastumme a eel l* g«*t« ** wespasia
temps que, se alcuns arivoit en ladit terre, que ly et son avoir astoient a
saingnour de paiis. — Et portant chis Albain ' oit grant paour de perdre la
vie , car ilh fut tantost pris et enmeneis devant Wespasianus. Et quant ilh
vint en sa presenche, si dest : « Sires, je s<jay bien que my et mon avoir
» est tiens par le loy et la constumme de ton paiis; si toy prie que par ton
» greit tu me weulhe otryer que je men puisse alleir sains et sauf de mon
» corps, et li avoir toy demoirat. » Adont ly demandat Wespasianus :
cc Qui es-tu , et dont viens-tu , et ou vas-tu ? » Et dest Albain : « Je suy
» de Jherusalem, se vieng de celle part et quidoie alleir a Romme;. mains *
» li vens m'at esteit contraire qui chi mat amyneit. » — « Amis, dest
» Wespasianus, tu viens d'unc paiis ou ilh at mult de saiges gens et qui
» sont bons maistres; et portant je croy que tu me saras bien garir de
» ma maladie. » Chis Wespasianus avoit de son enfanche une manere de cm* /wespasianus as-
viers que ons nomoit waspes dedens ses narines, et portant ilh fut nomeis
Wespasianus. Chis Albain respondit : « Sires, vraiement je vien del terre
» des saiges gens, mains je ne sijay mie medicines *, si ne vos s^aroy garir;
» car se je vos poioie garir, je le feroy volentier. — Mains je vos dis que
» l'autre jour, ilh n'at mie encor gaire plus de quattre quarantaine, avoit
» en nostre paiis uns hons qui mult astoit a honnoreir; et, se vos l'eussies
» tant ne quant cognuit, chu nest mie doble que ilh vos awist saneit de
» vos t re maladie. » Et dest Wespasianus : « Se tu ne moy garis, ilh toy
» convenrat morir. » Adont fut Albanus mult enbahis, quant ilh entendit
qu'ilh le covenoit morir, se ilh ne faisoit chu que ilh ne poioit nen ne
savoit faire; et nonporquant ilh respondit : cc Chis qui enlumynat les avoi-
» gles, sanat les malaides, mondat les lepreux, ensaucha les povres et par-
» donnat les pechies, sceit bien que je ne suy mie medes 5 : aussi vraiement
» moy puist-ilh delivreir de chesli perilh de ma vie. » — Respondit Wes-
pasianus : « Qui est chi dont tu parolle de si grant scienche el poioir ? » Res-
pont Albain : « Chu fut Jhesus de Nazareth qui flit prophete poissans en
» ovres et en parolles, cuy les Juys ont mis a morl par en vie; car ilhs ne
1 Le manuscrit B continue a appeler le person- 3 Medecin. Plus haul maistre, qui a le memo
nngc Jdrianus. seiib.
* Je ne suy mie miedes. B.
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430 CHRON1QUE RE JEAN D'OUTREMEUSE.
» trovarent oncques en li cause de mort. » Et Wespasianus dest : a Or nioy
» dis se tu crois, se chis hons Jhesus astoit vief, que ilh fuist poisans de
» nioy a salveir f ? » Respondit Albain : cc Sire, je croy encor plus; car je
» croy fermement, se vos creieis en luy, que vos aureis sa grasce et siereis
» garis. » — Et dest Wespasianus : « Je croy bien que chis qui resuscitat
)> les mors at bien poioir de moy a garir de chesti maladie, et que ilh nioy
» garirat bien s'ilh vuet. » En celle propre heure que Wespasianus disoit
wespasianus fut garis chu, les wespes et les vers par le sainte grasce de Dieu ly chairent fours des
narines, et fut tan tost garis. El quant ilh sentit chu. ilh en oit grant joie
et dest : « Je suy certains que chis fut ly fis de Dieu; et portant a plus toist
» com je poray je empeteray congiet a Cesaire et assembleray mes gens;
» et si deslruray tous les train tours qui metirent Dieu a mort, et le ven-
» geray crueusement. » — Puis dest Wespasianus a Albain : cc Va-t 7 en en
» ton paiis sains et sauf , et prens l'avoir que tu as amyneis, car chest
» mien et je le toy donne en droit don. » Et Albain ly respondit, luy
Foi. i» to. enclinant a ses ptes : « Sire, Dieu le vos merist al corps et al arme. »
Atant soy mist Albain sour mere; mains ilh n'alat mie a Romme, ains
ralat atout chis grant avoir en son paiis; car ilh disoit que li avoirs astoit
siens , car Wespasianus , qui gangniet l'avoit par droit, li avoit donneit por-
tant qu'ilh astoit ariveis en sa terre.
Puisque nos avons parleit plainement comment Jhesus fut meneis et de
pluseurs aultres chouses, si n'avons mie declareit 1'ystoire tout en droit \
portant que je ne voloie mie derompre la matere de quoy j'ay parleit; si
DeiavirgeMarieetdes revenray et recommencheray droit al Ascention. — Quant nostre sire fut
monteis en chiel, ilh laisat cha jus sa benoite mere et XI de ses apostles;
car ly XII°, qui fut nomeis Judas Scarioth , astoit pendus par luy-meismes,
enssi com dil est. — Si avint que, le mardy apres I' Ascention, fuit esluis
sains Mathiasfutesiuis par les XI apostles uns mult proidhons, qui fut nomeis Mathias, et chis
Les nom de xii apos- fut remis en lieu de Judas. Ors en furent XII com devant, assavoir : Piere,
Andrier, Thomas, Bertremeir, Symon, Judas son frere, Jaque le gran,
Jaque le petis, Johans gwangeliste, Maxhier, Philippe et Mathias. Chis sont
et furent les XII principals apostles. Ilh furent pluseurs aultres apostles
qui prescharent la foid Jhesu-Crist, qui furent mull proidhons; mains ilhs
1 De may taneir. B. * Tout en ordre. B.
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L1VRE PREMIER, 431
ne furent mie de nombre des XII apostles; ne sains Poul ne fat mie de
nombre des XII, qui tres-grandement illumynat sainte Engliese '. — Item,
le chinquantemme jour apresla resurrexion Nostre-Sangnour Jhesu-Crist,
assavoir le XV e jour de mois de may, astoient les apostles tous ensemble, et
la les envoiat Dieu son Sains-Espir, de quoy ilhs furent tous raemplis de la
deiteit. Et la les commandat Dieu qu'ilhs allassent preschier la foid par tout c?™*^ D»eu envois
* l r le Saint Espir a Chin-
le monde. Et ilhs le fisent, et commencharent tantost a preschter en nom quemme.
de Jhesu-Crist, et parloient de tous langaigesa toutes les nations des gens; <-•» a g n 8t,e . 9 P arleni
et convertirent a cheli jour meismes en la citeit de Jherusalem IIII m V c et Et convertirent bien,
XVII personnes. Et dedens les VII jours apres ilhs convertirent VI m 1X C et xViiVuii^Tvi
LXIX personnes; puis soy department al VIII 6 jour que ons dist le jour de ver3mms -
la Triniteit. Et s'en allat cascon en paiis ou ilh fut commis de part Dieu,
et la prescharent la foid Jhesu-Crist, et convertirent mult de peuples. Sains sains j aq ue futeves-
Jaque li petis fut al departir des apostles, le jour del Triniteit, esluis eves-
que de Jherusalem *, lyqueis y regnat XXVIII ans. — Item, en eel an
meismes, en mois de jenvier le XXV* jour, fut sains Poul convertis a la sai„ s p 0U i fut conver-
foid Jhesu-Crist, qui par- devant y astoit mult contraire 8 ; et avoit esteit
a lapideir sains Estiene devant le thier jour d'awost, qui fut li promier
martyr; et fist tantost apres mult grant persecution aux cristiens. Et apres
fut-ilh bons, et preschat la foid mult diligemment; si fuitdepuis compan-
gnon a saint Pire jusqu'a la mort, et furent ochis ensemble a unc temps. —
Item, l'an del incarnation Jhesu-Crist XXXV 6 , prist une grant maladie a Lanxxxv
Tyberius Cesar, l'emperere de Romme; et astoit de meselerie si entachies Lemperere Tybeir fut
et si travelhies, qu'ilh faisoit quere par tout le monde des bons meidres qui mu tmaUde
de chu le posissent garir. Mains ilh ne pot onques troveir nuls tant fusse
soffisans qui le posist garir; et tant plusymetoient leurs cures et leur mains,
tant plus empiroit et aggrevoit la maladie. Et onques dedens une annee ilh
ne pot troveir maistre,qui ly posist assengnier coment ilh poroitestre garis.
— Puis avint que sour l'an del incarnation XXXVI, en mois de may, vin- Lanxxxvi
rent novelles a l'emperere Tybeirs que unc chevalier, qui astoit de Galle, li
racomptat qu'ilh avoit esteit IIII ans la devant en la terre de Judee; si avoit
illuc veyut uns maistre prophele, qui tantost I'aroit garis; car ilh resusci-
1 Qui fut I grant luminars de Sainte- EngHse. B. * Astoit si contraire que plus ne poioii. B.
* Mot omis dans notre texte.
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432 CHR0N1QUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
toit les mors et curoit les messeauz, les avoigles et tout aultres maladies ';
et ne faisoit aultre chouse qu'ilh sengnoit les gens; et avoit nom Jhesus.
— Quant 1'emperere entendit chu, se en oit grant mervelhe et en oit grant
Foi. 121 to. joie ; si apellat unc sien prinche, qui astoit nomeis Albanus, et li dest qu'ilh
L'emperere envoiat a s'en alast en Judee, et desist a Pylate qu'ilh ly envoiast cheli maistre qui
voiast jhesus. garissoit les gens de diverses maladies , qui avoit a nom Jhesus. Et Albanus
s'en alat et passat mere; se vint en Judee et trovat Pylate en Jherusalem;
se li dest que 1'emperere ly mandoit qu'ilh li envoiast le grant maistre qui
avoit nom Jhesus. car ilh astoit tou plains et mult travelhiet de mesellerie,
si qu'ilh moroit.
pyiatc fut enbahis. Quant Pylate oiit chu, si fut mult enbahis et oit grant paour; puis de-
mandat respit al messagier del respondre dedens X1I11 jours, car ilh
n'oisoit sitoist respondre a messagier l'emperere, sens avoir le conselhe
des Juys. Enssi demorat la chouse, et oit Pylate jour del respondre Xllll
jours , jasoiche que Albanus desist a Pylate que del respondre a chu qu'ilh
requeroit ne devoit demandeir point de respit, car ilh savoit bien s'ilh le
voloit envoier ou nient. El li emperere astoit si malaides , qu'ilh moroit pres
Aibanus eo<juirt apres tous les jours ; in a i ns Pylate soy taisit les XfHI jours. — Chu ne plaisoit
mie bien Albanus, qui astoit saige prinche et loiaul envers son saingnour.
Si commenchat a enquerir par la terre de Jhesus ou ilh astoit; mains nuls
n'en oisoit parleir overtement, car les maistres des Juys avoient defendut
que nuls ne parlaist des fais Jhesu-Crist, affin que nule maule renommee
d'eaux n'en veinst en clarteit *. Et nonporquant Albanus enqueroit toudis
avant mult ardamment apres Jhesus, se nuls en savoit riens ou ilh astoit
et en queile lieu ilh le troveroit. — A derain avient que une femme , qui
avoit esteit mult familiare a Jhesus et bien oussi cognuit de Jhesus , estoit
DesainteVerone. en la terre, et avoit nom Verone, qui astoit de noble sane et mult caste et
de bonne conversation ; celle damme fut monstree a Albanus. Et chis l'arai-
sonnat, et li demandat diligemment de Jhesus queis hons ilh astoit et ou
ilh astoit, et ou ilh le poroit troveir? Quant celle oiit de Jhesus parleir, si
sainte Verone pa roiie commenchat a gemir et a sospireir, et dest : « Chis astoit mon sires et mon
» Dieu que tu vues cognoistre; le temps que ilh conversoit par terre , ilh fat
» pluseurs fois en mon maison , et demoroit awec moy, se moy confor-
1 Les avoigles, paralitiques et toute alire gens. B. * Pour chu que leur mal renommee ne chaiit. B.
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L1VRE PREMIER. 433
» toit; mains Pylate, qui est plains d'envie, le condampnat sens cause de
» raison et le fist crucifiier par les puans Juys; et fut mors en la crois.
» Mains ilh resuscitat a thier jour de mort a vie, et sat monstreit puisedit
» pluseurs fois a ses disciples , lesqueiles mult amoit. Et conversat en terre,
» apres chu qu'ilh fut resusciteit, XL jours. Et k XL e jour ilh montat en
» chiel , et fut veyus monteir en chiel sus le mont d'Olivet de cent et XIX
» personnes qui encor visquent '. »
Quant Albanus entendil ches parolles, si en fut mult corochies sour Py- Aibanut fut codeines
late; se dest Albanus a Verone : « Femme, ne moy dis-tu que Jhesus montat
» et est en chiel? Et Pylate mat demandeit XIII1 jours del respondre al
» mandement monsaingnour l'emperere \ » Respondit la dame : « Pylate
» at fait tous ches mals, se redobte grandement 1'ireur de l'emperere. Et
» portant qu'ilh ne savoit respondre sens le conselhe des Juys, at-ilh de-
» mandeit cheli respit. » Et dest Albanus : « Je moy retourneray arrier,
» sens nulle esperanche de nulle confort a reporteir a monsaingnour I'em-
» perere , qui est si plains de meselerie que plus ne puet. Si n'avoit fianche
» en nulle aultre mede 3 de monde de soy garir de sa maladie qu'en Jhesus. »
— Adont dest la damme Verone : « Qui at esperanche en Dieu ilh ne serat verone ptroiie a ai-
» mie confondus; ors ait esperanche en Dieu , et ilh ly donrat chu que son
» cuer desire. » Dist Albanus : « Damme, je ay trop gran duelh de chu
» que je ne puy rien faire de chu que monsaingnour demandoit. » Et dest
Verone : « Mon douls sires Jhesus et mon bon maistre anunchat sa passion
» longtemps anchois qu'ilh fust crucifiies. Et portant que je voloye avoir
» ramenbranche de luy, je pry unc drap et le portay a unc pondeur pour
» faire poindre la figure de son viaire, a laqueile je moy powis reconfor-
» teir; et enssi que je enportoie le drap por faire poindre, monsaingnour Foi. «if.
» Jhesus vient encontre moy, et moy demandat que j'enportoy. Et je ly ay
» dit ma volenteit. Adont prist-ilh le drap, et le ploiat en trois et le jondit
» a sa noble fache; si fut sa fache oussi proprement enprintee oultre les comentjhetusenprio-
» trois draps 4 que chu fust-ilh luy-meisme. Lequeile drap je l'ay deleis
» moy, et se say bien, se ton saingnour regarde ledit ymage par devotion,
» ilh serat tantosl garis et oussi sains com ilh fut oncques. » — Adont fut
1 Qui sont ancor en celle paiis. B. mon singnour.
* Le manuscrit B ajoute ici : et m'avoit ausy s Mot omis dans notre texte.
promii al chief des XII J I jours I'envoieroit Cesaire * Oultre les trois phis. B.
55
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434 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Albanus mult joians, etdest : « Est li ymaige teile que ons le posist avoir
» por or ou por argent? » Sainte Verone dest : « Nenilh, mains ons I'au-
» roit par grant desiere. Si vos diray comment vostre sire l'aurat : je en
» yray awec vos a Romme, se vos voleis, et emporteray a l'emperere
» veioir l'ymage.,» Quant Albanus l'entendit, si en rendit grant grasce
a Verone, et dest : « Madamme, puisqu'ilh vos plaist enssi, je le vos sup-
Aibanus amvnat Mime » plie, mains je ne 1'oisasse avoir requis. » — Puis apparelhat Albanus sa
net, et se soy mist sour mere , et awec h Verone. Et ont tant nagiet que
ilhs sont venus a Romme. Et monteit est Albanus en palais, mains ilh las-
sat Verone en la citeit a une hosteit: et si est Albanus awec ses hommes
entreis en la saule, ou ilh trovat l'emperere Tybeir, qui gisoit en son lit,
et li nunchat ches chouses. Et ly emperere qui mult asloit travelhiet' de sa
maladie le salwat tout promier, arc ilh cuydoit qu'ilh amynast Jhesus, et
Albanus paroUe a rem- li fist grant fieste. — Mains Albanus ly dest que ilh n'amynoit point Jhesus;
et ly racomptat chu qu'ilh avoit troveit, et dest a l'emperere en teile ma-
nere : « Sires, chely Jhesus que tu desirois a avoir, sicom j'ay troveit, astoit
» uns hons bons et justes, et cuy Dieu amoit mult. Et faisoit tant de my-
» racles, que mervelhe est et seroit del racompteir. Ch'estoit ly Dieu de
» Hebreux , et astoit purs et innocens; mains Pylate et les Juys le trahirent
» et le tourmentarent malvaisement, et puis le pendirent en la crois ou ilh
» morut; et ly ametirent que ch'astoit uns enchanleurs, et de chu le van-
» quirent ■ par faux tesmons. » Tybeir l'emperere 1'entendit, si en fut mult
corochies, et dest : « Que feray-je done, seray*je jamais enssi, et ne seray-je
» nient garis? » — Albanus dest : a Si sereis, sire, s'ilh plaist a cheluy
n Jhesus qui est vray Dieu ; car une noble et valhanle femme qui mult est
» a honnoreir, et qui fut ancelle a cheluy Jhesus, est venue awec moy
» por vos aporteir sainteit. Celle at une mult beal drap, enqueile ilh at
» proprement la semblanche de Jhesus. » Et la ly racomptat la manere
comment, et puis li dest : « Se vos le regardeis devobtement, vos sereis
» tantoist garis et sains et haities ', car e'est 1'ymage de viaire de Jhesus,
» lequeile elle t'aporte a regardeir. »
Quant Cesar l'emperere entendit chu , si commandat a aporteir 1'ymage
1 Angussou*. B, 5 Haiti en wallon , sain , bien portanL
s Vaincre, employ^ dans le sens dc convaincre.
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LIVRE PREMIER. 435
Nostre-Saingnour Jfoesu-Crist, et fist espandre parmy le voie ou Verone
devoit passeir pluseurs nobles vestiraens de purpre. Atant vient Verone,
et li monstrat l'ymaige de la fache Nostre-Saingnour Jhesu-Crist. Et chis
ly priat merchis, et tantoist ilh fut sains et garis. — Quant l'emperere veit L'«mperer« fut gam.
les grans myracles de Dieu, et comment ilh astoit garis par le regars de
Veronique ', se dest tout en hault : « Chis Jhesus astoit mult grant maistre,
» et le devoit-ons bien nomeir Dieu; car ilh avoit mult grant poioir, quant
» son ymage sour unc drap at teile vertut. » Adont racomptat Albanus et
Verone comment Jhesus avoit esteit governeit de commenchement jusqu'en
la fin \ Et apres Albanus racomptat comment Pylate avoit demandeit XIIIl
jours de respit de respondre. — De chu fut l'emperere mult corochiet, et
I'anunchat aux senateurs de Romme coment ilh astoit garis, et le grant
myracle que Dieu avoit fait a luy. Mains les senateurs prisent chu en dis-
plaisanche 8 , et li dessent qu'ilh metist a mort tous cheaux qui creioient en
cheluy Jhesus, car chu astoit une fause creanche. Et Tybeir leur respondit
que chu ne feroit-ilh mie, anchois destruroit-ilh tous cheaux qui aux cris- Poi. mr«.
tiens feroient maule; car ons veioit bien a ses myracles que ch'estoit Dieu.
— « Et enssi quant Virgile de Bugie fist le myreur a Romme et les aultres De virgii«,exem P ie.
» nobleches ', si fist-ilh une ymaige sour unc pyleir ou ilh avoit escript :
Quant une virgue enfant aurat
Yceste ymaige chaierat.
» Et dfist encor Virgile que chis enfant, que celle virgue aurat, seroit le fis
» de Dieu, et que ons devoit en luy croire, et que les Juys le metteroient a
» mort. Et nos avons bien veyut cheste ymaige cheioir, sy que ilh covient
» que la virgue ait oyut enfant. — Apres chi nos poions veioir que les Juys
» ont mis a mort Jhesus, qui soy disoit fis de Dieu. Et chu ilh monslroit
» overtement par apparans myracles, si que chest li Dieu en cuy ons doit
» croire, et que Virgile commandat a croire, et en cuy ilh creoit. Entre
» vos senateurs ilh le prophetizat, en le presenche de vous peires qui a eel
» temps astoient senateurs, et fist tout chu enregistreir a memoire perpe-
» tuel. Et portant je ne weult que nuls ne meffache riens aux cristiens,
1 Par le Veroniques. B. * Li furtnt contraires, B.
1 Avoit esteit myneit de chief en altre. B. * Et des altres joweais. B.
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436 CHROMQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
» car chu sont bonnes gens. » De chu hairent mult les senateurs et les
Romans leur emperere , car ilhs voloient destruire les crestiens; mains ilhs
ne ly oisent demonstreir, si soy taisoient atant. — Adont revoiat 1'emperere
sainte Verone en ra- Verone, la noble damme, a grant compangnie de chevaliers en son pairs,
et leurs commandat que al retourneir ramynassent awec eaux Pylate loiiet
et enchayneit. Et enssi com 1'emperere l'avoit commandeit le fisent les che-
valiers, et ramynarent Pylate a Romme. Et fut mis en prison, jusqu a tant
pyiate fat amineit i que sentenche seroit de luy rendue par jugement de queile mort ilh inor-
Romme et mis en ^ . J . * J ° *
prison. roit. Et chu fut Tan del incarnation XXXV11 , en mois de June, que Pylate
Lan xxxvii. fut ameneis a Romme l et mis en prison. — Et sachies que 1'emperere Ty-
beir as to it uns grant philosophe de philosophie morale et natureile. Si
enquist a Veronne, quant elle astoit deleis ly, de la fourme et de la fachon
Jhesu- Crist; et elle ly dest. Et en teile manere le devisat sains Pire
1'apostle; si fut mis en escript. — Et dest qui fut de corps moiens et de
Le fourme etie fachon regardables viaires, que les remyrans ameir poioient et dobteir: les che-
veals avoit de coloir de noir melaine qui soit presque meurs tos plans
jusques aux orelhes , et des orelhs ilhs astoienl crespes 8 de coleur cerule *,
et resplendissans aux espalles ventelans *; et emmy le tieste avoit I ligne
qui departoit les cheveals a la manere de cheaux de Nazareth; ilh avoit le
frons plain et tres-pures, et le fache sens roie ne taiche, et en astoit la
rogeur moderee; et le neis et la bouche de tout en tout beals sens repren-
dement; et la barbe avoit copeie et nient long; mains al menton astoit-illi
forchue. Et avoit regart simple et meure *, les yeux avoit glauque et vers
et clers, extesans entre pation terrible 7 , et al movoir blans et amyables et
leicheux. Teile fois ploroit-ilh, mains ilh ne rist onques. La stature de son
corps astoit droit et alignie; les mains et les bras avoit avenans, et deli-
tabLe la veue, et la parolle gries et moderee; et solonc le prophete ilh estoit
de belle fourme sour tous les hommes. Teile fourme avoit Nostre-Singnour
Jhesu-Crist.
1 En palais a Romme. B. 4 Ou latin caeruleus, signifiant ici noir bleu.
* M tiers. B. Couleur de mures? 5 Retombant sur les epaules.
8 Frises. Ce mot est en opposition avec le mot * Mur, e'est-a-dire serieux.
plans (planus) de la ligne prec&lente. Ainsi cette 7 Et restant tels au milieu des tourments de sa
phrase indiquerait des cheveux plats jusqu'aux passion?
oreilles, et frises plus bas.
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L1VRE PREMIER. 437
Apres 1'emperere Tybeir assemblat tous ses pr inches de Romme et les i/emperere assembut
senateurs, por jugier de queile mort Pylate moroit. Si oil debas entre eaux, jugieTpyUuT pour
car ilh y oit mult des prinches et senateurs qui disoient que Pylate n'avoit
mie deservit mort. qui avoit crucifiiet uns enchanteur qui soy faisoit ' Dieu.
Enssi com celle discention astoit entre les Romans, vint et entrat en la
saule Wespasianus, le roy de Galisse, qui venoit prendre congiet a I'em-
perere de aleir destruire Judee et lous cheaux qui la habitoient. — Quant
li emperere et tous les senateurs veirent Wespasianus, sedessent de com-
mon accord qu'ilhs s'en metoient sour luy de leur debat, et tenroient pour
ferme chu qu'ilh en diroit. Atant ont compteit a Wespasianus tout le fait
de leur debat; se dest en sa sentenche que Pylate moroit enssi com ilh Foi. imv«.
i • .- »ii •- • r •* i r • i ml •«. Wespasianus rend it
deviseroit, car ilh avoit pies fait que oncques nuls ne resist, car ilh avoit sentenche que p y -
Dieu mis a mort sens cause. — Adont fut Pylate amyneis devant eaux; Pybt e fuum^e?s f de.
mains enssitoist que ly emperere le veit, ilh soy levat et s'engenulhat H a &V^n7fieTte? ui
encontre luy, et tout enssi tous les senateurs et tous les prinches qui la
astoient, et li fisent grant fieste. Apres fut remis en prison. Mains quant
ilhs ne le veirent plus, li emperere et les aultres prinches, et par especial
Wespasianus, furent si corochies qu'ilh sembloit qu'ilhs dewissent asontir*.
Si fut encor remandeit, et tantoist qu'ilh soy representat, ilhs soy enge-
nulharent tous encontre luy com devant; et fut encor remyneis en prison.
— Adont inspirat Dieu Waspasiain; etdest que Pylate avoit vestit le cotte
Jhesu-Crist. Si qu'ilh fut remandeis la tirche fois; et Wespasiain salhit wespasianus jeiutPy-
avant en la voie, anchois qu'ilh soy presentast, et l'ahierdit, se le jettat a
terre, puis li fendit tous ses vestimens d on cuteal; si trovat qu'ilh avoit
a sa chaire vestue la cotte Jhesu-Crist, se li demouchat 8 et le mist en unc
drap mult honestement *. — Apres ilh fist avaleir I cuteal parmy les joxhes 5 coment p y ute rut
Pylate, et puis coupeir la gorge crueusement. Apres li fist coupeir la tieste ; " ls *
apres fut loiies en unc noiel *, et fut jetteis el rivier del Tybre. Mains tan-
toist les malvais esperis vinrent la, et prendoient le corps Pylate multMerveiheuseschosesfa-
sovent et le portoient parmy celle aighe, et fesoient esmovoir les ondes coi^Pyiate?
enssi com chu fust la mere; et a la fois l'enportoient en l'aire dedens les
1 Qui se clamoit. B. 5 Joues.
* Qu'ilh ne puelent plus estrc. B. Asontir est • Ce mot m'est inconnu ; mais voici ce que
sans doute ici pour assotir, devenir fou. (ch. 53) porte la legende doree dont tout cela est
8 11 la lui 6ta. extrait : Moli ingenti alligator, et in Tyberim flu-
4 Si li at ostee et le mist mult honor ablement. B. men immergitur. Voir Tedition de Graesse, p. 244.
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438
CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
Ly corps Pylate fut
jetleis el Royne.
Gehenna.
nues, et adont s'elevoit tern pes te si grans de tonoir et de grisels, que ies
gens en avoient teile pauour que ilhs ne le poloient porteir.
Adont orent les Romans teile conselhe que ilh ie rewastarent del Tybre,
puisle jettarent * en une aultre rivier c'on nom le Royne, qui n'at point de
fons et court parmy Lorabardie, et veult-on dire que ilh vat jusqu'en infer.
Et le propre lieu ou ons le jetta astoit appelleis le lieu de malediction , si
que par raison ons y devoit bien jetteir les maldis. — Et avoit deleis cheluy
lieu I citeit qui avoit nom Gehenna, ch'est-a-dire voie d'ynfeir*: la fut
jetteis li corps Pylate; mains les malvais espirs y revenoient en faisant teile
tern pes te, que les gens de la citeit ne porent souffrir chu, ne la pueur ne
la destempranche de 1'aire qui la astoit, por les enbatemens des malvais
espirs. — Adont les gens le prisent et l'envoiarent a Losanne; mains cheaux
oussi ne porent souffrir les assals des dyables qui toudis astoient entours
le corps; se le prisent et le jettarent en unc puche mult parfont, qui astoit
environeit de grant montagnes. Et la habitarent les dyables, et encor font.
Et enssi com ypluseurs dient, qui la ont esteit, voit-ons la apparoir mult
grandes ordures, et oussi grant puours que les dyables font sovent dedens
chi puche. Et est chi puche tou pres de une montangne qui at nom le mont
de Tresquie 8 , portant que ch'est uns des plus hauls mons de chi paiis. —
Item, Martinian, le penitanchier de pape, dist en ses croniques que uns
history ens, se le nom allrement son nom, dist que Pylate fut nees de Lion
sus le Royne, et que quant ilh fut accuseis a l'emperere par Albain et
Verone que l'emperere 1'envoiat en exilhe a Viane en Burgongne ; et por
la grant tourment que ons li faisoit soffrir, soy ochist de sa propre
main. Mains ilh n'est mie enssi veriteit; ains est veriteit que Herode, le
prinche de Galilee , et sa femme furent por le mort de saint Johans-Baptiste
mandeis a Romme, en l'annee apres chu que Pylate fut condempneis, et
furent envoies en exilhe a Viane, ou ilhs morurent miserablement. Et chest
chu qui vueltdire chist hystoriens que Martien escript. — Apres, quant ly
wespasianusreuUren ju&ement fut fait de Pylate, enssi com dit est, Wespasianus prist congier
gier la mort Jhesu- J » i l i . * i • * • * I
a lemperere daleir prendre la venganche de tous cheaux qui astoient cui-
De Pylate.
De Herode Antipas.
Fol. 1*3 r».
Cnst.
1 Ensi com par derision, ajoute le manuscrit B.
* Le chroniqueur a encore ici mal rendu le
terete de la legende doree t qui porte (1. 1.) : qua-
propter Roman* y cum a Tyberis fluvio extrahentes,
derisionis coma ipsum Viennatn deportavcrunt , et
Rhodano fluvio imtniserunt. Vienna enim dicitur
quasi via Gehennae, etc.
8 Ce nom designe peut-6tre quelquc monUgne
des Alpes.
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L1VRE PREMIER. 439
paible de la inort Jhesus. Et I'empereur li sailat que ch'astoit sa volenteit,
puis retournat Wespasianus en son paiis. — En eel an meismes, morut ly T ™ ,U8 el ciob€riu»,
dus de Galle Troielus, si regnat apres luy Cloberius \ son fis, XLV ans. —
Item, Tan del incarnation XXXV111, mois de may, morut Jupilla, ly VII e l™ xxxvm.
roy de Tongre; si fut roy apres luy son fis Trectulus, et regnat XII ans. ^tobVw™ 1 " ° y
En eel an meisme, en mois de septembre . morut Tyberius, ly thiers empe-
rere de Rom me; si en furent les Romans mult joians, car chu astoit uns
hons mult yreux et de sa volenteit faire*; et avoit par sa crualteit faile
ochire pluseurs des plus grans senateurs de Romme. — Apres Tyberius fut G«yus iy iiii< emp«-
(Jayus, son fis, emperere, liqueis fut coroneis le IHI e jour apres chu que
son peire fut mors, qui astoit le XXVIl* jour de septembre. Si regnat 111
ans unc mois et VIII jours. — En eel an meismes esmuet grant guerre en Ire
Herode-Philippe et Herode-Antipas , son frere, qui jadit ly avoit toilut sa
femme; et orent pluseurs batalhes ensemble; si perdoient toudis ly uns et
li aultre mult de gens. Si avient que sains Jaque le Gran, apostle, vient a
Philippe Herode, qui roy astoit de Judee, et le voult faire baptiziet. Et
li dest s'ilh voloit croire en Jhesus ilh auroit victoir, mains altrement ilh
seroit toudis desconfis. — Quant Philippe-He rode entendit chu , sy en fut Herode r.,t decoieir
mult corochiet, et fist saint Jaque decolleir en despit de Jhesus. Puis oit
l'endemain batalhe encontre son frere; et son frere oit victoire, et fut
Herode-Philippe ochis en la batalhe ', qui ja avoit regneit XXIII ans. — Chis
Philippe avoit I fis qui fut nomeis par droit nom Herode Agrippa, qui vout w «°« *» 1 ^ {J^:
eistre roy apres son peire: mains Herode- Antypas, son oncle, ly enforchat Amy pat.
et soy fist coroneir a roy. Et quant Agrippa veil chu , ilh dest qu'il devoit
prendre la coronne a Gayus, l'emperere de Romme; et la ilh i'ajournoit. et
li voloit contresteir que ilh ne devoit mie eistre roy. Adont dest Antypas
que ilh seroit roy, ne ja ne releveroit de l'emperere, ains le tenroit francque
de luy-meisme. — Quant Agrippa veit chu, ilh m on tat sour mere et vint a
Romme; si racomptat a Gayus l'emperere comment Antypas son oncle ly
avoit ochis son peire, et avoit tolue sa terre, sy s'avoit fait coroneir com
roy sens congier , et disoit que ilh de luy ne tenroit riens. — Adont man-
dat l'emperere Antypas, et le fist par forche amyneir po riant que ilh ne
1 Ce nom dans le manuscrit B peut dire lu Clo- cela fait allusion au caractere despotiquc dcTibere.
veius. * Tout ce qui precede depuis : encontre sou
* Ne manque-t-il pas ici un adjectif? En tout cas, frere..^ manque dans le manuscrit B.
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440 CHRON1QUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
voloit mie venir a son mandement, puis l'envoiat en exilhe a Lyon sour
"^deSuSw^'^* ' e R°y ne ; e ' ^ s ' ro y de Judee de Herode-Agrippa le fis Philippe, lyqueis
regnal VII ans; et fut coronets en mois d'avrilh, le XV e jour Fan del incar-
L ^™f r Glyu> My nation XXXV111. — Chis Gayus Gesaire Gallicula fut unc lyrans; ilh soy
fist aoreir enssi com Dieu , et fut crueux a toutes gens. Et astoit mult luxu-
rieux • ; ilh cognuit charneilement ses II soreurs, et oit del une une filhe,
LanXL - et apres tout chu les envoiat en exilhe. — Item, Tan del incarnation XL,
sainsPirefutfaiiete- e n mois de fevrier, le XXlI e jour, vint sains Pire l'apostle en la citeit An-
que de Aotyoche. 7 * 7 m r
Por quoy ons fait u tyoche; et la fut-ilh fais evesque et assis en la chaiier, porquoy sainte En-
cheque. ' gliese faite tous les ans la fieste a celle journee. Et la furent-ilhs promier
appelleis cristiens , solonc le nom Crislus leur maistre. Et la celebra sains
^h Pater NwteV^u- P* ere messe, en disant la Pater noster tant seulement. Et si avoit par-devant
lament. en par ties d'Orient prechiet IIII ans. Et la dest-ilh le promier messe. Et en
Les promirs ordes par * . J . mr ..... . ■■■ A •
samt pire. Antyoche ilh tient le siege IIII ans et VIII jours. Ilh fist apres en mois de
Foi. lisv. septembre les ordres, ou ilh ordinat VII evesques, X preistres et VII dya-
ques. Et escript sains Pire en Antyoche dois epistles que ons nom canonicas.
V hbfrth™i^*n ^ n ce * an me * smes escriat sains Maxhier son ewangeile , et oussi saint
et oussi saint March. March fist le sien ewangeile, car chu fut son adjuteur. Et se le lavat saint
^a^nrs'^he^Kirri ^' re ^ e baptesme, si fut son parin. — En eel citeit de Antyoche prophetizat
lThamp?on e kwu e crisi[ sa * ns ^* re ' e nascenche Karle le Gran qui puis fuit roy de Franche. Et
et samte-Engiiese. pronunchat que Dieu donroit a cheli , por le vraie creanche que ilh auroit,
si grant forche, qu'ilh auroit a son temps la flour del chevalerie de monde,
par lesqueis la loy cristine seroit mul enforchie et ensauchie ; entres les-
queis seroit ly champion Jhesu-Cri^t et de Sainte~Engliese, qui seroit nom-
Lc prophetie saint meis Ocier de Dannemarche. — En eel an meismes sains Pire prophetizat.
Poul dc Ogier le Da- . . ...
°<>»- Astoit sains Poul en Athenes, en mois de may, et la prechoit-ilh la foid de
Jhesu-Crist, et tant que ilh dest que ons devoit bien croire en luy ; car a
cheaux de sa loy donroit-ilh leile vertut que nuls ne poroit encontre eaux
avoir poioir, se ilh astoit ferme creans. Et dest que ilh le voloit mult bien
proveir, et que ons metist chu que ilh diroit en escript por savoir s'ilh disoit
veriteit. — Et donnat eel exemple, et dest que droit sour 1'an del incarna-
tion VIII et XLIII, en mois de may, le XX 6 jour, auroit une batalhe en
Galle, qui adont serat nominee Franche, de dois hommes corps a corps,
1 Et astoit si tuxurieux que plus tie poioit.
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LIVRE PREMIER. 441
en unc champ, des dois plus fors hommes qui jamais seiront chi apres ne
sont a present ' ; desqueis ly unc serat I roy sarasins, qui aurat nom Bre-
hier, qui de grandeche tenrat XIX pies et de gros al avenant, lyqueis con-
tresteroit bien XII chevaliers tous armeis. Et ly aultres serat 1 noble prinche
cristiens, qui serat nomeis Ogier ly Danois, qui serat X pies gran.
Chis Ogier serat le champion de Dieu et de Sainte-Englise , et par sa Merveihe de o g .er ie
ferme creanche que ilh arat en Dieu ilh con que rat le roy sarasin et l'ochi-
rat. — Et dest encor sains Poul que chis Ogier ochiroit adont en la batalhe
unc sarasien contrefigureit et engenreis de unc dyable, qui fut nommeis
Cordich, en unc dragon: si oit a nom Cordraghon ; dedens lisle de Bracha *
enssi prophetizat sains Poul. — Et encor dest sains Poul que chis Ogier
seroit li mies creans en Dieu et li plus ferme en la loy que tous les aultres
chevaliers de monde, et oussi li plus vertueux, et auroit plus de paine en
sa vie que nuls aultres chevaliers , et cheaux a cuy ilh feroit honneur et
amisteit ly feroient male a leur poioir; et que chis Ogier sieroit une grant
estache 8 por cristiniteit, et sourtenroit et sorcouroit pluseurs fois la loy
cristiene; et seroit sour tous aultres chevaliers la fleur de netteteit, de gran
sane, de proieche, de hardileche, de loialteit et de vraie creanche sour
tous aultres chevaliers. — Item , Tan del incarnation XLI , ly emperere De Gayus remperere.
Gayus montat en si grant orguelh, qu'ilh soy voloit faire aoreir com Dieu.
Et commandat a faire son ymaige por tous les temples de son empire. Se
fisent alcuns de ses prinches conspiration contre luy, et l'ochirent le 1111°
jour de novembre, Tan XLI ; car ilh as to it grandement de ses prinches hays, i/an xli.
— Apres la mort Gayus fut coroneis a emperere Claudius, dont Gayus astoit ciaudiasieiin«empe-
oncle ou peire ou neveur, car de toutes ches manieres en dient ypluseurs ; rere *
mains la plus grant partie dient que Gayus astoit son oncle * ; lyqueis regnat
XII1I ans VI mois el XXVHI jours. — Item, Tan del incarnation XXXIX, Lanxxxix.
fit Tractulus le casteal de Louz, et fondat Bolsee et Lonchins. — Item, Lous, Boisee, Lon-
Trectulus, li VIII* roy de Tongre, fondat, Tan XLII, la ville de Treit % et L ^ n
le nomat enssi apres son nom , laqueile giest asseis pres de la citeit de Ton- Treit.
gre, sor la riviere de Mouse qui la court. Et apres, Tan XLI II, ilh fondat
1 Des dois plus fors hommes qui scroient ne ou- r Pieu, eolonne, et par extension soutien.
roient esteit devant ne apres en monde. B. 4 Que ilh astoit oncles de Gayus. B.
* Brachia , une lie de TAdriatique , aujourd'hui " Maestricht.
Brazza.
36
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442 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
ouitreit. encor en sa royalme une citeit, se l'apellat Oultreit', qui est maintenant
une evesqueit. Et deveis savoir qu'ilh les commenchat adont a fondeir,
^Aii«nd^ conYertil mains elles ne furent mie tantoist parfaites. — En eel an meismes fist sains
March son ewangeUe, et se 1'alat prechier en Alixandre, une citeit d'Egypte,
ou ilh, par sa predication, convertit mult de peuple. — Item, Ian XLIIII,
s ^wP'»»y p^t le Vl e jour de marche, soy partit sains Pire l'apostle, Ie fis Johanne, del
« Romme. provinche de Galilee , qui astoit del rue de Bedsaida de la citeit d'Antyoche,
ou ilh avoit tenuit le sjege IIII ans et VIII jours. Et sen alat a Romme ou
ilh prechat la foid par l'espause de XXV ans, assavoir jusqu a XIII e an del
regnation I'emperere Neron, le fis Claudius, et anunchat la foid Jhesu-
Crist.
s,ioi P d?R e promier Chis sains Pire fut li promier pape de Romme, et li secons apres Nostre*-
Saingnour : car Jhesu-Crist fut ly promier, sicom nous l'avons deviseit
desus. Et Dieu le constituat por luy son vicaire en terre; et tienet le siege
De« cardinals de pape. tout son temps mult castement : si ordinal promirs troisdigniteit' des car-
dinals a Romme qui seroient son conselhe , assavoir (des evesques) qui le
devoient assisteir coin evesques, et des preistres qui le devoient assisteir
com prestres, et des dyaques qui le devoient assisteir sicom dyaques. Les
evesques sont assesseurs deleis le pape et usent de chaiers; et les preistres,
cascon en sa samaine, dist messe devant le pape; et les dyaques adminis-
trent entour l'auteit, et vestent le pap$. — Et sont VII evesques specials a
^tIen Y ^?p e8 H — P a P e ' so ' onc ' a promier institution, assavoir : le cardinal de Hostie, qui
▲iba'io.— sabin.— est li plus digne, et si use de pallion , et chis consecre le pape; puis si est
-Tuteniiine. li evesque de Portuen •, et ly evesque de Sabine, et ly evesque de Prenes-
tre, et li evesque de Sainte-Rufine , et li evesque de Tusculaine. Che sont
les VII evesques cardinals ; mains a jour d'huy n'en esUilh que VI : car Por-
tuen et Sainte-Rufine ne font que une. — Ches evesques sont sicom vicaires
de nostre sains peire le pape ; et les dymengnes et les fiestes et les princi-
pals sollempniteit doient deservir al alteit Sains-Salveur de, Latran. — Et
les preistres cardinals sont en leur nombre XXVIII 4 , et si sont IIII intituleis
DetcardinaUdeRooime les principals del engliese al celebreir. Ches VII doient celebreir en l'eglise
qui sont preistre.
1 Utrecht. nlcessaire pour completer le nombre sept.
* Trois genres. B. 4 Qui font deviseit par septime, ajoute le ma-
5 Le manuscrit B ajoute ici : li evesque de Al- nuscrit B.
baine, qui a ete omis dans notre texte, et qui est
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LIVRE PREMIER. 443
Sains-Pire, assavoir : les preistres cardinals Sainte-Marie-trans-Tyberim ,
Sainte-Anastaise , Sains-Loren enDamaise, Sains-March, Sains-Martien en
Monte, Sains -Grisogonne, Sainte-Cicile. — Et ches aultres septes sont
cheaux qui deservent Sains-Poul, qui doient aT grant alteit la messe :
Sainte-Sabine, Sainte-Prisce , Sainle-Balbine, Sains-Nerei et Acilhei, Sains-
Sixte, Sains-Marcelle, Sainte-Susanne. — Chi apres sont les VII priestres
cardinals qui doient deservir 1'engliese Sains-Loreijt defours les mures :
Sains-Lorent en Lucine , Sainte-Croix en Jherusalem , Sains-Estienne en
Celimonte, Sains-Johans et Sains-Poul, les Sains IIII Coronateurs, Sainte-
Praxede et Sains-Pire aux Loyens. — Chi apres sont les VII cardinals preis-
tres qui doient deservir Sainte-Marie-le-Maiour, ly cardinal del engliese des
XII apostles, Sains-Cyriach en Termes, Sains-Eusebe, Sains-Potentiane ,
Sains-Vitale, Sains-Marcelli et Sains-Pire, Sains-Clement. — Puis s'ensiwent d«* cardinals qui sont
les dyaques cardinals qui sont les administrateurs de pape deputeis, des- y * que$ "
queis ilh en sont XVII , assavoir sont :
Ly promier dyaque cardinal est intituleis de Sainte-Marie en Comte, et
chis est archedyaque des aultres : Sainte-Lucie de Jardin *, Sainte-Marie-
Nove , Sains-Cosme et Sains-Damien, Sains-Adrian, Sains-George % Sainte-
Marie al escolle grigois, Sainte-Marie en port, Sains-Nycholay 8 , Sains-Eus- Foi. \u v».
taise, Sains-Angle, Sainte-Marie en Aquaire, Sainte-Marie en large voie,
Sainte-Aghisse 4 , Sainte-Lucie *, Sains-Querin , Sainte-Sabine et Sains-
Theodoriens. Ors avons deviseit les cardinals evesques, preistres et dyaques
qui doient eistre en serviche de pape; si revenrons et dirons avant de nos-
tre matere. — En eel an meisme morut Alixandre ly XI e conte de Flandre;
si regnat apres luy son fis XX ans, qui oit a nom Clovis, qui fut beaux che- uo xlv.
valier et grans; mains ilh ne fut mie combatans ne hardis. — Item, Tan XLV, ^S^pSYemoT
envoiat sains Pire unc de ses disciples en Antyoche por estre evesque, de *
lyqueis fut appelleis Mondius; et encor en cascon paiis ilh envoiat de ses i/mxlvi.
disciples, enssi com vos oreis chi-apres. — Item, Tan XLV1, morut Herode-
Agrippa, le roy de Judee, si fut roy apres luy son fis Agrippa, liqueis Gram famyne.
regnat XXVI ans. En eel an meismes fut par tout le monde grant famyne,
de quoy chu fut grant doleur a veir; car ilh convenoit les gens mangnier
1 Sainte-Lucie en jardin de palait deleis les sept * Saint-Nycolay en la charire Tuiiain. B.
folhes. 8. * Sainie-Agalhe. B.
1 Saint-George ad voile d'oir en patais. B. * Sainte-Lucie in capite. B.
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444 CHR0N1QUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
herbes, rachines et foulhes d'arbres cuites. Et vint celle famyne par grandes
Gram aighes. aighes, qui fut al manere del delueve; car ilh commenchat a plovoir en
mois de junne al entree, tous les jours continuelment, jusqu'en mois de
fevrier ensiwant; et plovoit toudis oniement une menue ploive. Ilh ne
chaioit mie grant fasse ' d'aighe, mains toutvoies astoient les terres si mol-
hies et si destemprees *, que tous les biens de terre furent puris et riens
ne pot venir a mavvoqreteit *; et enssi ons ne pot l'annee apres semeir, ne si
ne pot fructifyer chouse que ons metist en terre.
sains Luc escript son L'an del incarnation XL VII, fist et escript sains Luc son ewangele. En
Lan xlvii. eel an meismes, morut Porus, ly XI e roy de Hongrie; si fut roy apres son fis
Bauihe entre Romans Eneas , qui regnat XXXVI ans. — En eel an meismes oit une grant batalhe
entre l'emperere Claudius, d'une part, et les Bretons que ons nom mainte-
nant Englois, d'altre part, por une terre et I ysle que ons nom l'isle d'Or-
chaide 4 , que les Bretons avoient enforchiet aux Romans. En eel batalhe
fut desconfis li peuple de Bretangne, et Claudius oit la victoire et submist
une isle al empire de Romme que ons nom l'isle Archades 8 , que oncques
Julius Cesar, ne les aultres devant luy ne apres, ne porent avoir ne ens
De Claudius. entreir. — Etportant fut-ilh si ameis a Romme, que quant ilh fut mors si
fut consacreis awec lez dieux. Ilh n'avoit point de memoire; car quant sa
femme fut ochise, une pou apres astoit aleis cuchier dormir, se ne li sove-
noit que sa damme fust mort, se dest : « Porquoy ne vient ma damme? »
Chis Claudius mangnoit toutes maneres de viandes, et bevoit vin en tous
temps et a tout heurs; astoit mult entalenteis 6 , et pensoit fortement a insti-
tuer loys par queis 7 ilh donnast poioir de sofllemens de ventre lassier fours?
car par trop a mangier et a boire astoit si tasis *, qu'ilh sembloit qu'ilh de-
wist partir, et puoit si fort que ons ne poioit dureir deleis luy. Sa femme
Messalaine, enssi com ilh escript Juvenal is, astoit si tres-grandement luxu-
rieux el si ardente apres, que elle alloit de bourdeaux a bordeals, occul-
1 Fardeau, quantite. • Ce mot doit signifler ici instruil, savant, et
1 Pour destemprees, comme plus haut destem- non empress^, rdsolu, comme Pindique Roquefort.
pranche pour destretnpanche. 7 Notre texte porte : par queu.
5 Maturite, de maour ou mawour, mur, qui est s Je ne trouve pas ce mot dans les glossaires.
reste en liegeois. C'est peut-dtre la me 1 me chose que test, taise, qui
4 Les Orcades ou Orkney. est rcstl dans lc dialecte namurois, et signifie ras-
5 II s'agit probablement encore des Orcades. sasie, repu.
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L1VRE PREMIER. 445
tement al promier et apres tout publement, lee ouffrir aux hommes grans
et petis, tant quelle revenoit nient assasie, mains si lassee quelle ne poioit
esteir sour ses jambes. Et les nobles femmesa chu faire elle traihoit. — Item,
1'an XLVI11, commenchal sains Thomas l'apostle a prechier la foid cris- LanXLviu.
tiene en Judee 1 , ou ilh convertit mult de gens. Item, Tan XLIX, sains e ti e am omasap ° s "
Pire ordinat evesque saint Clemens, et l'envoiat el Loheraine, ou ilh en fufr J£^jj^
promier evesque, et convertit mult diligemment le peuple dedit paiis al
loy Jhesu-Crist. Item, en eel an meismes, fut veyus en Egypte ly oyseal
qui est nomeis fenix, dont ilh n'at que unc tout seul a monde : si 1'avoit- i>efeni».
ons veyut devant chu VI C ans en Arabe. Ons dist qu'ilh vit V c ans, et puis Foi. issr*.
soy art, et a thier jour ilh rest en vie. II est al manere de une aigle , mains
ilh at des plus belles plummes.
L'an del incarnation chinquante fut Tan de grasce que la benoite virgue i/assumption iwtre-
Marie, la glorieux mere del sainte Triniteit, trespassat de chis morteile
siecle, si montat en chiel deleis Dieu, son douls fis, qui advocans est por
nos : et chu fut en mois d'awoust, le XV e jour. Si vos diray briefment le
manere de son trespasse, enssi com sains Jerome et les altres docteurs le
dient. — Promirs, vos saveis que quant Jhesu-Crist pendoit en la crois ilh
commandat sa mere a sains Johans ewangeliste , son bien ameit disciple .
agardeir, et ilh le gardat bien jusqu'a son trespasse; et demorat en la
maison de sains Johans qui as to it en Jherusalem , et la elle trespassat. Et
sains Johans ne ly fallit oncques de sa compangnie. La damme aloit tout Lan l.
les jour a temple Dieu oreir mult devoltement. Et tant le fist qui vient ly
an chinquante deseurdit, qu'ilh plaisit a Dieu del avoir sa glorieux mere
deleis luy en sa gloire; si envoiat I angle le XII 6 jour de mois d'awouste en
temple, ou Nostre-Damme Sainte-Marie oroit, qui ly dest : — « virgue et
» damme, mere, filhe et espeuse a tres-douls roy de tout le monde, Jhesu-
» Crist mat tramis a toy; si t'envoie chesti palme et toy fait savoir que
» tu toy apparelhe, car ilh Joy veult avoir dedens thier jour deleis ly en
» corps et en arme. » El la damme ly demandat : « Qui es-tu, amis? » i/tngie. et Nottre-
Et ilh respondit : « Je suy ly messagier de ton fis, por toy porteir el enwmbi«. par cnl
» rengne de chiel lasus*. » Respondit la Virgue : « Convient done que je
1 Ce mot est fort lisiblement ecrit dans les Vi avec lc j et de I'm avec Vn aura trompe le co-
deux textes. II s'agit cependant bien certainement piste.
de rinde et non de la Judee. La ressemblance de * En regne lassw. B.
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446 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
» moy depart dedens le jour que tu as dit '? » Dest ly angle : « Oilh,
» damme, dedens III jours, et tous les apostles vostre fis seront chaens
» deleis vos, por conforteir et honoreir al departir de chi siecle. » — Atant
se parti t ly angle , et Marie prist le pal me et issit de temple. Se vat vers
son maison, puis apellat une femme, se li dest qu'elle ly aportast en sa
- chambre del aighe et une pegne ; et celle le fist. Adont la virgue Marie soy
devestit tout nue, et la vat bien tout son corps et pegnat son chief , puis
soy cuchat sour son lit, et soy commenchat a oreir en teile manere en
Nostre-Damme sapa- disant : « Beaux et douls fis, qui es vraie Dieu et vray hons, grasciies et
e pormonr. ^ glorifites et honoreis soit ton nom! Quant tu m'as mandeit, veulhes moy
» gardeir del poioir des dyables et de leur vehue , al departir mon arme de
» mon corps, et qu'ilhs n'aient ja domynalion sour moy. » — Quant elle
oit chu dit, elle issit de sa chambre; et appellat les dammes qui astoient ses
voisines et les hommes oussi, et leurs dest quelle le covenoit partir de chi
siecle, car son fis l'avoit mandeit qu'ilh le vploit avoir dedens thier jour.
« Portant vos ay-je chi assembleis , que je vos veulhe remerchier des biens
» et de la compangnie que vos m'aveis fait ; et vos veulhe proier que vos
)) voilhies awec moy sens dormir, car les angles venront asseis toist qui
» moy voiront enporteir. » Quant les gens l'entendent, si commenchont a
ploreir, et la Virgue leur dest : « Ly ploreir rien n'y vault ; car mon peire,
» mon fis et espeux moy veult avoir. » Atant laissat le parleir.
Sains Johans adont tantoist entrat en la chambre , et vint devant son lit,
se les trovat tous plorans , et voit la virgue qui ploroit. Si at ploreit awec
eaux. Adont s'engenulhat a ses pies , et li demandat : « Que font chi ches
Nostre-Damme paroiie » gens? » — Adont li dest la virgue tout le fait, et li dest : « fieais cusins,
geilite. ,ohan5 ewa °" » mon fis rechargat mon corps a toy por gardeir, et encor le fault mies
» gardeir, car mon arme monterat asseis toist en chiel; je toy lairay mon
» corps cha-jus, se le garde bien, car les Juys dient qu'ilh l'arderont,
Foi. 135 t*. » car ilhs moy haient grandement. » Enssi fut la virgue jusque a XIIII e
jour d'awoust a la vespr^e quelle demandat une drap; si en coupat uae
pieche et le donnat a sains Johans , et puis ly donnat la palme que ly angle
ly aportat, et dest qu'ilh le tenist devant lee quant elle deveroit trespasseir.
Les aposties furent ai — Entour la meenuit se trovont tous les apostles en la maison ou Nostre-
trespas Nostre-Dam-
me.
Quant me convient alleir? At Uh prefigiet nutte tempi f B.
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L1VRE PREMIER, 447
Damme astoit, dont sains Johans fut mult Hies; etles fiestiat de grant cuer
et leur racomptat le fait, tout enssi com nos l'avons desus deviseit, et puis
les demandat : « Goment asteis-vos venus si ensemble, et ou asties assem-
» bleis? » Sains Pire respondit : « Je astoie a Romme, et avoie grans
» gens assembleis por sermoneir; si lisoie des auctoriteis, et tout lisant
» suy-je chi aporteis. » Atant sont entreis en la chambre, si ont la virge
salweit. — Quant la damme les voit, si soy levat douchement, si les
salue et les baisat en plorant, puis les dest : « Saingnours, veischi la palme
» que mon fis m'at envoiet; aleir m'en doye en chiel, si vos prie que vos
» enterreis mon corps si parfont en terre, que les Juys ne le puissent tro-
» veir, car ilhs le veulent ardre. » Et les apostles ly oirent enssi en con-
vent Apres dest la virgue : « Saingnours, faites esprendre les lumynars. »
Et ilhs le fisent. Adont soy recuchat la virge, et ilhs sont tous assis en tour
lee. Et commencharent a oreir devoltement en plorant
Adont desquendit en la chambre une oudeur tant douche, que ons ne le uoe muit bonneodeur
• • i • r* i ' %r + T • i) * desquendit en la
saroit racompteit, si que tous sont endormis. Et le XV° jour dawoust, chambre ia virge
droit al heure entre tirche et medis , se s'enlevat une thonoir de quoy la
terre tremblat; et la virgue esvoilat les dormans. Adont vint ly prinche Lwi e desquendit ei
° . chambre la virire
des angeles en sa chambre, et la virgue le regardat, se l'at bien raviseit, Marie.
se l'enclinat mult parfont et puis le salwat en teile manere : « Benois sois-tu
» et l'heure quant tu nasquis. » La virgue dest : — Sires, tu es mon peire, La virge paroiie * son
» mon espeux et mon fis ; tu es chis qui fist le monde promier, chiel et
» terre , et tout chu qu'ilh at dedens. Et puis feais-tu les angeles qui gar-
» dont maul obedienche et chu que tu les desis, si enchai'rent en ynfeir.
» Et puis fesis Adam et Evain , si leurs donnas paradis. Mains les dyable
» les dechuit, dont ilhs furent chaitis et cheaux qui d'eaux desquendirent
» jusqu'a ton salvement. Mains a ta venue les salvas tous, se t'en devons
» rendre grasce trestous, beais douls fis; tu moy diras chu que je doie
» faire. » — « Meire, dest Jhesu-Crist, por vos je suy chi venus ; awec moy son fis i y respont
» vos en welhe emyneir, si commandereis a mes apostles vostre corps. »
Et Nostre-Dame ly demandat : a Dit-moy, beais fis, se je veray le
» dyable? » « IN on vos, dest Jhesus, je vos feray chu que ly fis doit
» faire a la mere, car vos sereis damme et royne de monde; et toutes les
» personnes por cuy vos voreis priier, queilecunque forfait qu'ilh ait mef-
» fait, sens riens excepteir, a la vostre priier je leurs pardonray tout. Et
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448 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
» vos si vos serveront tous les espirs d'infeir, et tous mes angeles et ar-
» changeles feront tous vos commandemens ; je les ay amyneit , et vos en-
» porteront et vos garderont a mon commandement. » — Adont levat
Jhesu-Crist sa main, si donat benichon a tout person ne qui la astoit pre-
sens. Atant soy partit 1'arme de corps Nostre-Damme; si montat contre-
mont vers le chiel, plus reluisant mille fois que le soleal. Et Dieu le livrat
a sains Mychiel, le prevoste de paradis, et awec sens nombres d'angles et
d'archangles qui l'emportoient en chantant melodieusement. — Et adont
dest Dieu a saint Pire : « Je toy fay maistre de tos tes compangnons mes
» apostles, et recommande a vos tous le corps de mon espeux ma mere 1 ,
Foi. H6r«. )> se lensevelisseis en le vaul de Josaphat bien parfont en terre; et n'aiez
No*tre Damme fut en- » mie paour de ches Juys. » — Atant s'en montat vers le chiel, et la com-
mit en osap a ^ me nchat ly plus glorieux chant et lant melodieux, que les apostles qui
astoient chaval * demoreis, en furent tous enyvreis et obliez *, et demora-
rent une grant pieche enssi com ravis, qu'ilh ne veioient et n'entendoient
a riens fours que a la dit melodie.
Li corps Nostre-Damme sainte Marie fut douchement laveis de trois
virgues pucelles , et fut mis en vaseal 4 , si fut ens.evelis en la vaul de Josa-
phat. — Adont sains Johans fut des aultres apostles ly promier apelleis, en
disant : « Prendeis cest palme * car porteir le deveis. » Puis mandont leurs
proismes et leurs amis; apres alumarent les chirges et leurs chandelles,
sen alarent parmy Jherusalem en chantant a hault vois : « In exitu Israel
» de Egypto, etc. » — Quant les Juys entendirent tele chant, et voient le
corps Nostre-Damme que ons enportait a grant assemblee, ilhs salhirent
tous fours et demandent : « Que chest chu la? » Et y fut respondut que
ch'astoit le corps Marie qui astoit fineit. Adont soy corirent armeir et jurent
qu'ilh arderont le corps et en venteront les cendres al vent; car par lee
Myracie. et par le trahitour, son fis , astoient dechuis vilainement. Adont ont assalhut
les apostles; mains Dieu les aidat, car ilh envoiat de chiel une compangnie
teile, que pres tous les Juys furent mors et disconfis. — Entre eaux avoit
une qui astoit prinche d'eaux, qui mist le main au biere ou li corps gisoit ;
mains tantoist y demorat sa main pendant. Ghis commenchat a crier merch i
1 Le corps ma mere et mon espeuse. B. deperdus.
* Pour ci aval, ici-bas. 4 Vaisseau, e'est-a-dire cercueil.
3 Ob Hz. B. Oublies a sans doute ici le sens
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LIVRE PREMIER. 449
a sains Pire en disant : « Merchi, merchi, en l'honeur de cheluy que tu
» renoias trois fois. » Respondit sains Pire : « Se je pechay en luy, je
» Ten priay merchi en grand repentanche, sy moy le pardonnat. Ossi li
» prie merchi et si crois en ly, et je priray a ly por toy qu'ilh toy par-
» donne le meffait. » Quant chis 1'entent, se dest : « Je croie en ly fer-
)> mement, et ly prie merchi. » — Adont li dest sains Pire : « Prens le
» palme que tu vois chi, se le porte awec toy entre tous tes compangnons,
» et leurs dis que cheaux qui croire volront le sains Sacrement et la virge
» Marie, ilh serat garis et salveis. » Chis vint qui par-devant avoit esteit
si enderveis, qu'ilh ne savoit qu'il faisoit et at prechiet; les autres en di-
sant : « Saingnours, creieis en Jhesu-Crist qui fut neis de la virgue Marie, Grtnmyrjciedecorp
» cuy nostre parage et nos amis ont fausement crucifiiet. Ilh debrisat
» ynfeir, apres ilh resuscitat. Regardeis le myracle qu'ilh at fait main-
)> tenant a moy-meismes. » Tant les sermonat que cent milhe s'en bap- om miihe wn \ ba P -
tizat. — Atant s'en vont tous en la vallee Josaphat : ch'est une vaux qui
siiet entre le mont de Syon et le mont d'Olivet, ou ilhs ont le corps de la
virge Marie ensevelit, et bien ' saileit de pires et de chyment. Adont les
apostles et leurs amis ploront fortement; mains Dieu descendit cha jus, et Le» apottiea piorom
ii i ' i i ■• • • » v? • * fortement.
mult de ses angles awec, et at les apostles tous salweis et Daisies. Et puis
les acovrit de une nuee de chiel, et les angles re por to nt tous les apostles Lesapottieefurentre-
.. . ° r r porteis en leurs peiis.
tan tost, cascon en pans dont ilh astoient venus.
Apres, ly vraie Dieu Jhesu-Crist sachat luy-meismes le corps de sa mere ^ureiusciutiecorp*
fours de terre, et le donnat aux angles et archangles qui I'ont porteit en poneitenciei.
chiel. Et Dieu l'asseit en plus hault trone, et remist l'arme en son corps, et
puis le coronat a son diestre. Chut fut grant joie et fieste por la lignie hu-
maine, car ch'est ly advocaux de peuple por priier por eaux que Dieu leur
pardonne leurs pechies '. Elle at le dyable malteit, vancut et desconfit por
pecheurs a reconforteir pluseurs fois puisedit. — Ors aiies en memoire eel
sainte dame virgue et royne, et le reclameis en vos necessiteit fermement
el en grant fianche , et l'ameis et le serveis et le creeis , et elle prierat por
vos a son douls fis Jhesu-Crist, tant quelle vous ferat obtenir vos requestes fol ite?*.
justes et rasonables. Que lee et son enfant soit loies et benis en siecle des
1 Le texte porte biet. pechcour.
* Le man user it B porte seulemcnt ; de peuple
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4S0 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
De roy <ie Tongre. siecles. A mm f . — Item, en eel an meismes f , morut Trectulus, ly VHl e roy
de Tongre : chis avoit unc fis qui astoit jones et n'estoit mie hons, ne en
eaige por governeir la royalme; si fut son mambor Richiers, son oncles;
mains en eel an morut ly enfes qui astoit nomeis Doga. — Apres sa mort,
Lan LI - fist Riohier roy son fis Colongus , lyqueis regnat XV ans et fut ly IX e roy de
CoI To g n U ri e lX roy de Ton g re - Item i l ' an U, K dit roy Colongus fist fermeir Colongne tout altour
de mures, qui adont astoit appellee Aggripine en Germanie, et l'apellat
solonc son nom Colongne : car vos deveis savoir que Colongne et tous li
Jupiiiaiepromierconte paiis altour astoit del royalme de Tongre. Et si en fist conte une sien frere
qui oit nom Jupilla : chis ea fut le promier conte. Si le tenoit del roy de
Tongre, car nos vos disons que I roy de Tongre le conquestat jadit al
guerroier al saingnour d'Agripine. Et conquestat tout la terre Jupilla
Baolle; si fuit si destruite que pou de gens y habitoient, si que a eel temps
L "JJd n e d To h n <? te !royal * ' e re ^ st Colongus enssi com jay dit. — Et duroil la'royalme de Tongre
adont de Rains jusques a Trive en Allemangne, et jusqu en Boheyme a
1'autre leis, et tout entour a tous les costeis.
G Ten9 II,yneporver " ^ n ce ' an me,smes oit en la citeit de Romme, et en paiis la altqur, mult
grant famyne por alconne manere de vermyens qui mangnoient tous les
biens en terre, si qu'ilh ne s'apparut riens eel annee defours terre. — Item,
L ' anL »- l'an Lll, envoiat l'emperere Claudius unc sien chamberlan en la terre de
Judee por estre prevoste, qui oit nom Felix. — A eel temps soy com-
wwjwtianuj^a^- menchat fortement a apparelhyer Wespasianus, por alleir vengier la mort
fn e jude?° rt ,he8US Nostre-Saingnour Jhesu-Crist en Judee. Si avoit tant targiet por une ma-
ladie qui li avoit tenut longe temps. Si mandat ses homines; mains Claudius
li mandat, quant ilh l'oiit dire, qu'ilh ne li plaisoit mie que ilh alast des-
truire Judee. Enssi deiriorat Wespasianus, qui n'oisat faire contre le coal-
man de son saingnour; mains puisedit y alat , enssi com V03 oreis chi apres.
Lan liii. — Item, l'an LIU, fut accuseis sains Poul a Feli^, le prevoste de Judee,
que ilh prechoit contre la loy des Juys; se le fist mettre en prison. — Ea
La fondation de Dy- eel an meismes commenchat a fondeir Colongus, ly roy de Tongre, la vilhe
d'Arche ; et oit enssi a nom, portant qu'ilh le fist en la terre que ons nomoit
le rains d'Arche ', qui duroit plus de X liewes de long; et est maintenant
1 Soit loies et bents, qui vit et regne en siecles de 5 Canton de la Belgique encore appele la Ren-
siecles. Amen, B. darche.
* En mois d'octembre, ajoute le manuscrit B.
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L1VRE PREMIER. 451
appelleit Dynant. Ilh en fist une conteit, et le donnat Richier, son fis, qui RichierUpromierconte
en fut li promier conte. — Et fondat apres dan en an pluseurs altres vilhes,
assavoir : Hasselt, Blise f , le vilhe et le casteal de Stokehem, Brede, Eyke, H ^ t ^"* E S w£"
Rulemonde, Fene, Doudrach *, Fulmonde,chu est maintenant Saint-Trond, gjJjJIJj 6 '&$!£
et puis ceiles de Seronchant 8 , et le casteal de Oridon et la vilhe awec, que R°chefon.
ons nom maintenant Rochefort. — En eel an meismes, envoiat * sains Pi re,
l'apostle de Romme, LXX1I de ses disciples par universe terre; et cascon d«i lxxii duplet.
envoioit 8 en certain lieu ou ilh aloit por prechier et augumenteir et ensa-
chier la foid catholique, enssi com Dieu l'avoil commendeit a faire. Pro-
mier ilh envoiat sains Appolinaire en la citeit de Ravenne, qui adont astoit Apoiooiare.
en Ytaile mult grant et pueplee, et apres Romme la plus grant de tout
Ytaile. Sains Syrien envoiat a Pavie et sains March en Egypte, ou ilh fondat syrien, March.
la promier engliese en Alixandre. Apres ilh envoiat en Galle sains Savi- ^ij^" 1 ' Pot6 S| ian ?»
niain, Potentians, Altimans, Syrocymans et Adaldrans, et par especial en m » n »» Adaidran*.
la citeit de Soison, ou sains Saviniain prechat devoltement la parolle de
Dieu, et conVertit sens nombre de gens a la foid de Dieu. Sarocinians et
Aldrans ordinat-ilh dyaques, et edifiont la une engliese en l'honeur de
sains Pire, laqueile ons nom encor a jourd'huy 1'englise Sains-Pire-Vis,
portant qu'elle fut edifiiet sains Pire encors vivant.
Apres chu sains Pire envoiat Altinans et Odaldins a Orlins , et Seroci- Aiunan* , odaidin»,
1 1 Serocinans, Poten-
nans et Potentians a Troie en Borgongne, qui orent grant travalhe, et edi- liww -
fiont et consecrarent une engleise en nom des XII apostles. — Et les aultres,
qui furent envoiez en la citeit d'Orliens, convertirent mult de gens, et y
edifiont une engliese en l'honeur de sains Estiane le prothomartyr. De la
vinrent-ilh a Ghartre, et de la a la citeit de Paris, que ons apelloit adont
Lutesse, ou ilh precharent et y convertirent mult de peuples, et edifiarent
pluseurs englieses en l'honeur de la virgue Marie. Et puis revinrent a Soison De Soiwn.
a leur maistre Savinianus, et la edifiarent enmy la citeit trois englieses :
une en l'honeur de la virgue Marie, Fautre de sains Pire et I'autre de sains
Estiene. Et apres la meismes sains Savinian et ses aultres compangnons,
apres chu qu'ilh orent mult de gens convertis par mervelheux myracles et
1 Bilsen. Fagne ou Fange quelconque.
* Br&, Maeseyck et Ruremonde sont faciles a » Serainchamps.
reconnaltre j mais que ddsignent Fene et Doudrach f * Mot suppled d'apres le manuscrit B.
Fene est peuMtre la pour veen, et designerait un * Dcstinoit. B.
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452 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
predications, ilhs furent martyrisiies glorieusement. — Apres sains Pire en-
Marti » K voiat en pluseurs parties de Galle pluseurs evesques, assavoir : sains Mar-
thial; chu fut chis cuy Jhesus, a jour del cene, statuat f et mist sa main
desus son chief, enssi com nos avons dit desus. Chis fut envoiet a la citeit
de Lymoge, en laqueile ilh convertit innumerable peuple et resuscitat VI
unichisou Nathaniel, mors. — Et sains Ursichius, qui est aultrement nommeis Nathanael, de quy
Jhesus dest : c< Veeis chi le vray Ysraelitique, en queile ilh n'at nule do-
juUan et Symon ie » leurs \ » Apres, sains Pire envoiat Julian et Symon le Lepreux *, ly unc a.
Bery et Taut re aCenomannis*. La sains Julian resuscitat trois mors, lesqueis
mors awec sains Julian furent asseis tost apres martirisiies. — Puis envoiat
clement. sa i MS p," re Clemens patruus, ch'est-a-dire le frere de peire sains Clemens,
Mansuetude. qui puis fut pape de Romme , a Messe en Loheraine. Puis envoiat Mansue-
saint pire enroiat 4 tude aTowe § deleis Messe. — Apres sains Pire envoiat sains Euchars, Valeir
Tneve Euchara, Va- , . # * • n
leir et Materne. et Materne a Tnve en Germain, assavoir : Euchars sy com evesque, Valeir
dyaque, et Materne com subdyake. — Euchars, ly evesque de Trieve, awec
ses 11 desciples et compangnons en alarent vers la citeit de Trive, por pre-
chier la foid Jhesu-Crist, car adont ilhs astoient tous Sarasiens. Enssi com
ilh en aloient ens es parties de Germaine, en prechant la foid, astoit sains
Materne aleis unc jour prechier la loy en unc casteal que ons nomoit El) -
ganoir •; et enssi qu'ilh faisoit sa predication, ilh ly p risen t le maladie des
s«ins Materne morut. fie v res, dont ilh morut la meismes. Mains quant sains Valeir et Euchars
veirent chu, si en furent mult dolans, et se I'ensevelirent en unc noble
E "«o^rtkKZ?m? sarcus 7 , puis soy retournarent et en ralarent a Romme, et demonstront a
sains Pire mult tristement comment Materne astoit trespasseit.
Adont les donnat sains Pire son baston, en disant en grant devotion :
<c Vos en yreis a la tombe Materne et le sengnereis de cheluy baston , en
» disant en grant devotion : Materne, lieve-toy sus depart Jhesus de Naza-
» reth , le roy de monde et de paradis , qui a thier jour de sa mort resus-
» citat, et resuscitat awec luy ses amis, en nom de Dieu le Peire, le Fis et
1 Cod sacra? s'agit dune province de France transformee ici en
' Wi n'at point de fraude. B. Cette version as- ville.
signe au mot doleurs de notre texte le sens de s Toul?
dol, tromperie. f Heiligenroth , dans le pays de Nassau?
« Julianus qui fut Symon le lenipreux. B. T Sepulture. B.
4 Ce mot indique h Mane. Quant a Bery, il
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L1VRE PREMIER. 453
» le Sains-Espirs. Et ilh soy se releverat et serat haities com devant. »
Et puis dcst sains Pire que lidit baston fust ly baston de pasteur de chi
pays dedont en avant. — Puis sont retourneis a la turn be Materne sains saiu Matm* rut re-
ri i ir ■ • *••■ -Tfc-i • i • susciteit par le b«»-
buchars et Valeir, et ont fait chu que sains Pire leurs avoit commendeis ; et ton taint pir*.
(antoist resuscitat par le signe que Euchars ly fist de baston pontificate.
Par eel resurrexion creirent en Dieu et furent baptizies V m IIII C et XIIII f ^JEJJJ^^
personnes. Et commencharent a edifiier, en propre lieu ou sains Materne ^j^™" * n " e
fut ensevelis, une engliese, et le nomarent en son propre noin l'engliese de
Resurrexion. — Et puis sains Euchars, Valeirs et Materne s'en alarent mult
diligemment, prechant la loy novelle par tout chi pays. Et deveis savoir
que sains Materne jut en terreXL jours — car ortant misenl-ilh al ralleir Sa . in8 Materne jut xl
* •» J jours en terre.
et revenir de Romme — et por les XL jours ilh visquat apres XL ans. — Foi. 1*7 *•.
Apres sains Pire envoiat Sirus en la citeit de Rains, et Franco a Pira- Dei disciples ? ue»ai n »
gorre *, et en Cathalongne Memnius et a Tholouse Saturninus. Et sains chier: syrus, Fran-
Marchial deseurdit, quant ilh fut entreis en Acquitaine. ilh enportat awec tuiinm.
ly de propre sancg sains Estiene et de pluseurs aultres reliques. Et si avoit
awec ly uns des disciples Jhesu-Crist, qui avoit a nom A mans, et sa femme
astoit nommee Verone, qui astoit et esteit avoit bien favorable amie a la
glorieux sainte Vierge Marie, lesqueis conjoins, assavoir Amans et Verone,
aportarent awec eaux de lacheal 3 Nostre-Damme, de ses cheveals et II de De Nostre-u.mme no-
» 7 Dies et saintes reli-
ses soleirs. — Chis sains Marchial fohdat une engliese en l'honeur de la *i ues
benoite virge Marie, en la vilhe que ons nom en latin * Podium, et en D ^a^ nc \YJ q n 7 a s t • in,
franchoys Puy ; et por l'honour Nostre-Damme ons Fat depuis nommeit le
Puy-Nostre-Damme; la true-ons asseis de bonnes pires prechieux. En ledit
engliese mettiUons une des soleirs Nostre- Damme; en Fautre engliese
Nostre-Damme de Ruchenne que ilh fondat ons mettit l'autre soleirs. Et
des chevals Nostre-Damme ilh en mettit une partie en la citeit d'Avergne
qui est maintenant appellee Gleremont, et Fautre en la citeit de Minimate *.
— Chis sains Marcheal dedicassat cheslIII englieses en l'honeur de la virgue
Marie : Lymoge, Bery, Ghartres et Tholouse, et en I'egliese Sains-Estiene
ilh y metit les reliques de ly. Ghes englieses ne faisoit mie tout en une an ,
' V m B. 4 En grigeois Rupe anilum, et en latin.... fi.
' Dans le Bigorre? * Mende, chef-lieu du department de la Lo-
* Du lait. Lesai en liegeois, lasia en namurois. zere, en latin Mimalum.
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454
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Dieu dest a sains Mar-
ckeal que sains Pi re
astoit Buy crucifiies
a Romme.
De sains Adrier.
De sains Aman*.
Verone fut recluse.
L'an LV.
Sains Thomas conver-
tit Yndre.
mains aflin que ons le retengne mies ou ons 1'entende mies , je les ay mis
tout en ordre, puis retourneray a ma matere com par-devant. — Si vos dis
enssi que sains Marcheal prechoit une fois a Poitier. Et s'apparut a luy
Jhesus et li dest : « Sache que a jour d'huy est sains Pire k Romme cruci-
» fiies por et en nom de moy; et en l'honeur de luy fais chi une engliese. »
Ilh le fist. — Apres avint que sains Marcheals fist une engliese a Bordeal
sour Geronde en l'honeur de sains Estiene, en laqueile sains Severins fut
ensevelis. Et fondat encor une aultre ' en l'honeur sains Pire. — Se ly
apparut sains Pire et li dest : « Sache que mon frere Andrier est a jour
» d'huy, en la citeit de Patras , en la crois leveis por l'amour de Jhesu-Crist,
» en cuy honeur eel engliese tu toy haste del consecreir. » Et ilh le fist.
— Sains Amans ou Amandus, qui fut ly maris Verone, sen alat en une
roche que ons nom maintenant le roche Amados, et la mynat-ilh vie soli-
taire, et y fondat une alteit en l'honeur de la Virge Marie. Et astoit adont
uns ors lieu et masier * et desers, et maintenant chu est uns beal et nes lieu
et honorable. Et fut lidit alteit consecreis de sains Marcheals, et sains
Amadus com reclus finat la sa vie. — Et sa femme Verone porsuit toudis
sains Marcheal en tou lieu ou ilh alloit prechant la foid , tant quelle vient
en terreur de Bordeal sour Geronde. Et adont elle astoit tant annee quelle
ne poioit plus avant aleir; si fist la une chelle 8 sor la mere, et fut ens mise
par sains Marceal. Et consecrat en sa chelle une alteit en l'honeur de la
virgue Marie, se l'apellat-ons et encor l'apelle-ons Salac \ car ilh mettit la
ens le seul lac 8 Nostre-Damme; car toutes ses aultres reliques avoit donneit
aux englieses deseurdit, enssi com dit est. — En apres, revenant a nostre
mateire, vos disons que sour Fan LV convertissoit sains Thomas 1'apostle
mult de gens parmy le hault Ynde, ou ilh prechoit la foid de Jhesu-Crist.
Si avint qu'ilh astoit entreis en une citeit qui astoit et encor est nominee
Calamie, qui est une mult belle citeit. En celle citeit prechoit sains Thomas
1 Et volt une altre faire. B.
1 Miserable. Ce mot est emprunte au latin miser,
misellus; et mesel, qui en provient aussi, a, outre
le sens de lepreux, la signification que nous ve-
nons d'indiquer. Diez, au mot mats, donne aussi
la forme metre.
8 Pour celle, maisonnette , cellule.
4 Saleich, dans le departement de la Haute-
Garonne.
* Le chroniqueur avait sans doute devant les
yeux un texte latin, et il aura oublie de transfor-
mer le mot lac en celui de lacheal, dont il se sert
plus haut.
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L1VRE PREMIER. 453
la foid de Jhesu- Crist et convertissoit mult de proidhommes. — Mains Merv«ihed« sains tlo-
entres les altres ilh avoit la unc sarasin mult de putaire et de maul condi-
cion, qui prist del ordure ' en sa main et le jettat sains Thomas en visaige, Fo1 - i«f.
de quoy ly apostle fut mult corochies. Apres cheluy serasin, qui fut nomeis
Badus de Tharse, jettarent ypluseurs gens merdre et ordure apres sains ^J,,™^ 1 * pour
Thomas. Mains Dieu y fist teile myracle que IX C et XI personnes chai'rent
mors subitement de cheaux qui chu faisoient. Quant les aultres sarasins
veirentchu, si furent mult enbahis de chu qu'ilh veioient leurs parens et
amis enssi mors; etdessent a sains Thomas que s'ilh ne les faisoit resusciteir
qui seroit lapideis.
Adont s'engenulhat sains Thomas l'apostle, et priat a Dieu qu'ilh ly
vosist aidier, se chu estoit son plaisir. Mains enssi com ilh astoit en orison,
ly vient une vois qui li dest: « Thomas, Dieu toy mande que ilh toy covient
» chi estre martyrisiiet por l'amour de ly, car ton siege est aparelhies en
» paradis; car tu as diligemnient prechiet la foid catholique. Si toy mande
>i Dieu , se ches gens de putaire ont fait a toy teile despit, que ilh en sarat
» bien prendre la venganche. Mains chu serat longtemps chi-apres, assa-
» voir Fan VIII C , que Dieu envorat en chi pays unc chevalier de Franche
» qui serat son champion, et si serat nomeis Ogier, qui serat li fleur de Prophet de o g ier ie
aaI L i • i ••••■^ ° , * . . Danois par sains
» tout Ie chevalerie de cnstimteit. Et toy mande Dieu que chu soit par ta Thomas.
» bouche prophetiziet aux sarasiens tout publement, en teile manere que
» ilh contient en chel lettre que Dieu t'envoie. » — Adont donnat sains
Mychiel uue lettre a sains Thomas, puis s'envanuit. Apres chu soy drechat
sains Thomas, et regardat la tenure de la lettre entyrement, et araisonat
les tyrans serasins en teile manere : « Malvais gens de putaire, porquoy
» alleis mon corps degabbans , se je vos vien anunchier la voie de vostre
» salvement, et moy voleis lapideir a tourt, sans cause de raison, enssi
» com les faux Juys fisent a Nostre-Sangnour Jhesu-Crist, de quoy ilh
» prenderat temprement mult cruel venganche? Et enssi vos dis que vos
» moy martirisies ychi sens cause. De quoy Dieu en temps future pren-
» derat grant vengement, car sour Fan del incarnation Nostre-Saingnour
» Jhesu-Crist VIII C et XVI ans venrat en chi pays uns chevalier, ly cham- sains Thomas anun-
» pion de Dieu et Sainte-Engliese, qui serat nomeis Ogier ly Danois : chis duou par VBMbu
relererat christini-
teit.
Del ordure de mierdre. B.
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436 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
» Ogier serat ly estaiche de cristiniteit, liqueis par VII fois sourcurat et
)> releverat cristiniteit encontre les serasiens et iist * mult crueux contre
)> eaux; et ensaucherat la foid Jhesu-Crist plus que nulle chevalier qui fut
» oncques devant luy, ne apres doit estre neeis. Ilh serat noraeis li fleur
» des fleurs, ly ors de tout chevalerie, ly plus parfais, ly plus hardis et
» poissans, foirs et bieu creians en Dieu, proidhons, veves et orphenirs
» leurs drois defendans, de si gran sang de nation, de gentilheche que
°^JSSm U 7 i d XV M J ama > s doit eistre en Franche. — Chaitive gens , chis Ogier conquerat, al
•ams Thomas. „ temps que je dis, XVII * royalmes en chi paiis sour sarasiens que tous
» croironten la loy Jhesu-Crist; et destruirat toutes vous faux ydolles en
» quoy vos creieis; et serai a vostre faux loy mult fel et creweux % et le
)) metterat mult a basse, si que jamais apres ne soy releverat en paiis ou
» ait esteit. » Tout enssi com nos le disons le prophetisat ly apostle sains
Thomas; et leur jettat la lettre qui contenoit tout chu qu'ilh avoit devant
Gr Th(Si y a racledftMin9 ^ — Mains les sarasiens jettarent celle lettre en unc feu ardant, et le
quidarent ardre; mains Dieu y fist myracle, car oussitoist que la lettre
touchat a feu, ly feu soy levat en l'aire et salhit a visaige de cheluy qui la
lettre avoit en feu jetteit, par teile vertut qu'ilh li crevat les dois yeux.
saiofThomasfutoehis. — Adont fut sains Thomas martyrisies mult crueusement, puis fut ense-
velis en une tumbe. Et misent la lettre deleis luy en sa tumbe, et demorat
enssi pres de VIII C et XVI ans, assavoir jusques a temps que Ogier conquist
cheli paiis , qui ilh levat son corps , et le fist mettre en unc fietre dor et
^u^oa'u^misui ^'argent et de pires precieux. En queile fietre li corps sains Thomas de-
corps sains Thomas. mora t dedens une belle engliese que lidit Ogier edifiat et estaublit en Flio-
Foi. its v. neur de luy, bien par Fespause de III C ans que les Assiriens , une manere
cement ii corps saint de gens, le conquestarent sour les Yndins * par forche, et le portarent en
teitenpiuseursiieu. leur royalme de Mesopotame, en laqueile royalme ilh demorat par l'espause
de LXVIII ans dedens une citeit qui at a nom Edisse. — Apres, sour Tan
del incarnation XI et LXXXUII ', le reconquestarent les Yndins, et se le
remisent en son fietre en l'engliese deseurdit que Ogier avoit fondeit de-
dens la citeit de Galmie '. Et portant que les Yndins en voirent estre mies
1 Forme indiquant lefutur comme ert. Le ma- * Le manuscrit B, au lieu d" Yndins, dit Yn-
nuscrit B porte : lerotV. dois.
'XV.B. s Ou eniour, ajoute le manuscrit B.
* Cruel. B. ' Plus haul Calamie.
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LIVRE PREMIER. 457
creus que ilh le ravoient, ilhs misent le main qu'ilh butat en la plaie Nostre-
Saingnour, quant ilh s'aparut a ly apres sa resurrexion, defours le fietre,
si que ons le voit. Et par chesti main ilhs font leurs jugement en leurs paiis ^™*l { £Yon%* *!!?**
de la en teile manere. Promirs je vos diray comment ' ilh font leurs juge- m»in sains Thomas.
ment par myracles, enssi com vos oreis. — Quant aucunes gens ont a faire
ly unc a l'autre et ilhs plaidient, et ons ne puet savoir lyqueis at droit ou
tort, portant que cascunne partie sourtient que ilh at droit, adont ons fait
cascunne des parties escriere sa demandie en parchemyn , puis ons met les
dois escrips en lemain sains Thomas, et tantoist le main jette le tort lonche'
fours de sa main et retient le droit et la veriteit, jusqu a tant que chis qui
ly at mis en sa main Ten oste. Et enssi vinent la de bien long paiis, por avoir
jugement des choses dobtaubles. En teile manere que je vos ay dit fut
martyrisiiet sains Thomas.
Sour Fan del incarnation LVI, le derain jour de marche, avient que i/mlvi.
Claudius, 1'emperere deRomme, qui tousjours astoit enorteis de sa maule
femme Agrippina a chu que a son visquant ilh fesist Nero, qui avoit sa
filhe, emperere de Romme, et li resignast le droit del empire a present et
advenir 8 a prendre et a avoir apres sa vie. Et tant finablement elle le de-
mynat qu'ilh Fotriat, ses dois fis legiltimes que ilh avoit de une altre
femme, assavoir Bruthanich et Granus, deshiretant et privant de leur droit Claudius reseat iem-
, * pire a Nero, son fil-
paternel, et cheluy concedant et donnant a son genre, qui avoit sa filhe a hist, et en private
espeuse. — Et quant ilh oit chu fait, INeron s'avisat et dest que Claudius vis- Nero enposionat ciau-
• - £ • u - i • i j • ,. tl .. dius qui li avoit fait
quoit trop; si 1 enpusonat le secon jour de mois de junne, si quilh morit; urn Jhoneur.
et les aultres dient que chu fut sa femme meismes qui le fist. Quant Nero Nero 9 °y f,il coroneir.
Foil ochis, si soy fist coroneir, et regnat XIII ans et VII mois et XXIX
jours. Et Granus, le frere de sa femme *, qui astoit roy d'Austrie 5 , en alat
en sa terre, et Bretanich alat en le royalme de Machidoine qui astoit sien. —
Item, Tan LVII , chevalchat Granus vers Ostriche son paiis , se passat en la L'an lvii.
plaiche ou Aise siiet. Si trovat des chaides aighes qui coroient la, si fondat Ays u eiteit.
une eiteit et l'apellat Aquisgrani, por les aighes qui la astoient chaides; et
1 Tout ce qui precede depuis : en leur paiis , diction avec la fin de la phrase,
manque dans le manuscrit B. * Ses fis, porte le manuscrit B.
* Loin. 5 Che est maintenant le duchcit de Allemangne,
* Les mots a present et advenir manquent dans ajoute le manuscrit B.
le manuscrit B. lis semblent en effet en contra-
88
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488 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
oris le nom maintenant Ays le Grain, car Granus le fondat. Mains ilh «'es-
toit mie encor parfaite, quant les messagiers Nero Femperere vinrent a ly et
ly dessent que Nero, son seroige, le mandoit pour grant amour et por son
Nero fistochire Granus, bien. Et chis y alat, et Nero li fist grant fieste II jours, et a III e ilh com-
son seroge. " • •
mandat a Gapoza, unc sien servan, que ilh ochist Granus. Et chis l'ochist
par nuit, en dormant; et quant Gapoza oit chu fait, Nero le fist pendre a
une arbre, portant que ilh ne voloit mie que ilh le racusast En eel an
Nero ochist sasoreur. meismes ochist Nero sa soreur Colompnia. — Chis Nero fut tant malvais
Des mahraisteis Nero. - . A . ... r . , • j r a !_•*
que onques ne fuit pieur hons : car ilh fut leires, murdrers, faux, trahitres,
luxurieux, avaricieux, crueux, homicide, destruceurs de Sainte-Engliese
et ardeur de son paiis meismes , et plus de mauls que ons ne poroit dire
DeAys. avoit en luy, enssi com vos oreis chi apres. Cel citeit de Ays que Granus
fondat fut puis destruite par les Hoinx \ et fut apres reedifiiet et refait
depart Gharle le Gran, qui fuit roy de Franche et d'AUemangne, et est
encor Ays en Allemangne.
Lan lviii. Sour l'an LVII1, fut mis sains Poul fours de prison, et se l'envoiat Felix,
Xpr£ l on. utim8 ° urs li prevost de Judee, a Romme devant I'emperere, ou ilh avoit le prevost
Foi,is9r«. appelleit. Adont ly tient compangnie sains Luch ly ewangeliste, mains ly
prevoste ne vient point a la journee; si fut portant sains Poul quitte, et la
LaoLix. ilh s'acompangnat a Saint-Pire le pape. — Item, Fan LIX, ochist Nero sa
Ne fe°rame! $l " proin,er promier femme, qui astoit la filhe Claudius Femperere ja dit. Se reprist
deleis luy a sourjante f le mere de sa femme ' deseurdit, qui tant fut luxu-
Nero dormoit awec 5a rieux et plus que nule aultre ; et porsuoit les bordeals vestie altres draps
que les siens. Et quant Nero le soit, se l'ochist; et prist sa propre mere
qui le porta t, et gisoit awec lee; car ch'astoit une des belles dammes de
LanLx. Romme. — Item, Fan LX, fondat Clemens, Fevesque de Mes, une en-
De sains ciemens. gliese en l'honeur de Sains-Pire. En eel an meismes fist Femperere Nero
Nero ochist xvii sena- ochire XVII des plus grans senateurs de Romme sens cause. — Item, Fan
LXI, en mois de marche, le XVIII 4 jour vinrent a hosteita Tongre Gu-
duain, ly conystauble de Flandre, et Ywain, le maislre chamberlain ledit
conte, et X aultres Flamens awec eaux, qui alloienl en Hongrie; si passa-
' Les Huns. que nous rencontrerons a la p. 470.
1 Concubine. Mauvaise orthographe probable- s Tout ee qui precede depuis: qui astoit la filhe,
merit pour suignante. Voy. Diez , ▼* togna. Roque- manque dans le manuscrit B.
fort etDucangc donnent song nent age, concubinage, 4 XXVII, porte le manuscrit B.
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LIVRE PREMIER. 459
rent a Tongre, et hostelont la jusqu'a lendemain. Mais alcunne contrever-
sion s'en muit — ne scay par quelle cause vient — entre eaux al encontrecbucommenchat guerre
T J * * 9 # • ■ i- entre FIamen»etToD-
de trois chevaliers de Tongre, et tent qu'ilh ochisent les trois chevaliers g™»*
de Tongre; si furent tantoist prist. Et quant ly roy le soit, se les fist tous
XII decolleir. Et quant ly conte de Flandre le soit, si at jureit que jamais
ne mangnerat de pain en citeit ne en vilhes, foursque en tentes et en treis ,
se serat li fais vengiet et vendut sy chier qu'ilh aparurat.
Fortement fat corochies li conte flamens Clovis , si est venus a XL m
hommes d'armes en la royalme de Tongre unc jour ardre, et puis s'en ralat
en Flandre, et puis est revenus. Quant ly roy Colongus le soit, si at assem-
bleis ses homines et les corut sus, et mult noblement sorcorit son paiis,
droit en mois de septembre; ly Flammens y ont grant gens perdut, et encor,
se la nuit ne fuist venue, ilhs fuissent tous mors. Qui la veist Tongrois et
maiement le roy Colongus et Tremus, son fis, eaux defendre encontre les
Flammens et decoupeir ches tiestes , ches bras , et de jetteir a terre Tune
mors sour l'autre, ilh posist dire : « Chevaliers sont eslus. » 11 h trenchat al
conte Clovis le neis et I'abatit a terre, mains ilh fat remonteis. — Tremus fat
mult poissans, et dient les Flammens que ch'astoit ly fleur de monde; se le
dobtoient mult. Ilh y furent mors Sanaris ly castelain de Lisle, Haar ly
sire de Cuchy, cuy ly roy Colongus ochist. Mains ilh fat luy-meismes for-
tement navreis et aba t us, et pris par XX Flammens; et se I'emynoit-ons
loiiet, quant Tremus les encontrat; si en ochist XVI et rescoiitson peire,
se le livrat a Thyri de Roy, se le fist reconduire a Tongre, car ilh astoit tant
plaielet que plus ne poioit sens morir. — Puis entrat Tremus en l'estour, si
at ochis Ermelay le neveur * le conte de Flandre, Guychar le prinche Vau~ iwois desconfirem
cleir, et uadus son frere, et mult daultres que je ne say nommeir. Adont
soy misent Flammens al fair com desconfis.— En eel an meismes LXI s'en l'« lxi.
muit une grant gerre entre le roy Eneas de Hongrie et le roy Ogens de Guerre entre Hongroi*
Dannemarche l'onc contre l'autre, por le raison que ly roy Ogens voloit
avoir a femme Eda, la filhe le roy de Hongrie, et Eneas, ly roy de Hon-
grie, ne li voloit mie donneir; ains le voloit donneir a uns valhans hons qui
faitnommeis Sadora, qui astoit conte de Pannonie, car la filhe l'amoit. Si
avint qu'ilhs orent batalhes ensemble, en mois de junne Fan deseurdit.
1 Neveu, sans doute.
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460 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Si fut ly roy hongrois desconfis et pris, el X m hommes mors de ses gens.
Et la fut mors Sadora, qui voloit avoir la dammoisel; si l'ochist ly roy
Ogens de sa main propre, et fut fendus jusqu'en la potrine. De chi gran
coup soy mervelharent grandemenl les chevaliers qui la furent et tous ly
peuple qui la astoit, car ilhs n'avoient oncques oyut parleir de si gran, de
temps devant. — Atant fut mis li roy hongrois en prison ; mains dedens
Edea gentnh fcrame. chesti terme vient en Danemarche Edea, la filhe le roy de Hongrie, et se
soy presentat al roy Ogens en disant : « Gentis roy, je toy prie merchis
Foi. its v*. » que tu welhes mettre mon pere fours de prison, et Fen lais raleir en sa
» terre, et je demoray chi awec toy por ly, et se seray del tout a ton com-
» mandement. » — Quant ly roy entendit la damoiselle, se li dest : « Belle,
» voleis-moy avoir a marit, et je vos feray royne de Dannemarche et en
» lairay vostre peire raleir quitte et lige en Hongerie? » Respondit la dam-
moiselle : « Je moy accorde a vos. » Adont fut ly roy mis fours de prison
et amyneis en palais, et fut la fais ly accors que ly roy Ogens oit la damoi-
selle a femme. Parmy chu fut bonne pais entre eaux dedont en avant , et
sen ralat ly roy de Hongrie en son paiis a sa volenteit.
En eel an meismes , en mois de jenvier, vient Jupilla , le conte de Co-
Tremusetjupiiuardi- logne, que Tremus, son neveur, avoit mandeit a grant gens d'armes. Si
entrarent en r Iandre a feu et a Damme, iremus a unc de costeis et Jupilla
a Fautre; et destruirent grandement le paiis '. Et ly conte assemblat ses
gens , et vient contre eaux a grant forche ; mains pou * ly valut, car ilh fut
desconfis et ses gens ochises jusqu'a IX m hommes. Et s'enfuit ly conte Clovis
a Lutesse en Galle, et priat al due qu'ilh ly vosist aidier contre le filh le
roy de Tongre. — Quant ly due de Galle entendit chu, se li respondit que
ja ne ly aideroit, car ilh avoit le tort quant ilh avoit teile guerre commen-
chiet, por XII mourdreurs ddnt ilh avoit faite justiche; mains, s'ilh voloit,
ilh en feroit la paix. Et Clovis respondit : a Je le desier grandement. »
Adont cevalchat ly due de Galle vers Flandre, et vient a Tenremonde; la
ly dest Frongnars que Tremus astoit devant awec son oust, et ly due v
chevalchat; si at trovet Tremus a cuy Ysonars li sire de fieri, fis al prinche\
la venue le due ly nunchat; si que Tremus alat encontre awec luy de ses
1 El gasterent laidemeni le paiis. B. s Fis alprinche Boudar. B.
* Mot supplee d'apres le maniiscrit B.
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LIVRE PREMIER. 461
prinches: Arnars, Sanaris, Jacob et son fis Symonar, et honorat mult le
due. — Ly dus ly dest : « Tremus, beais fis, li conte de Flandre est foux
» qui prent gerre a vos; mains, beais sires, je vieng faire le paix, je vos
» prie que vos raleis en vostre paiis et moy donneis la gerre '; si soit paix
» entre vos, et qui le briserat se soit serf a son compangnon. » Quant
Tremus l'entendit, se li plaisit bien, et fut fait la paix. — Item, Fan LXII, l'mlxii.
le promier jour de mois de may, fisent les Juys de Jherusalem monteir sains Detain* jaquei'ap<*ti»,
Jaque le Peti, leur evesque, par-desus le pingnon de temple de Salmon, ep " 1
por prechier et anunchier les parolles de Dieu. Mains enssi com ilh pre-
choit diligemment, les faux Juys qui I'avoient la fais monteir le butarent
jus de pingnon de temple, et chaiit jusqu'a terre, et la fut-ilh martirisies La mort sain* j aq ue.
et ochis des malvais Juys, et la ensevelis. Si en fait Sainte-Engliese sa fieste
le premier jour de may tons lesans,awec sains Philippe 1'apostle. — Item,
Tan LXIII, en mois de may, chaiit unc gran effoudre devant l'emperere i/milxiii.
Nero de Romme, en son palais ou ilh seioit a tauble, mains ilh ne grevat DeNcro.
onques a nulluy. En eel an meismes morut sains Marck ly ewangeliste;
si fut apres luy evesque d'Alixandre Anyanus XXII ans. En eel an morut
Perses, li saige poetes. — Item, en eel an, furent rebelles les Galliciens *
del payer leur tregut aux Romans. Quant l'emperere Nero veit chu, se le Lea Ghii.™, r«rentnv
plaindit a ses gens; mains ilh astoit si haiis de ses hommes, que les Romans t u«Tr^ empsdt
amarent mies que les Galiiens fussent quittes de leur tregut, que ilhs aidas-
sent leur emperere. Et enssi demorarent en pais les Galiiens jusques al
temps Constant Cesar — qui fut li fis l'emperere Constantin le Grant, qui
donnat Romme a pape et a Sainte-Engliese — par le defaute des Romans
qui, por le hayme qu'ilh avoient a leur saingnour, lassarent enssi defal-
queir leurs droitures en ches parties de Galle. — Adont montarent les Gal-
liiens en si grant orguelh , portant que ons les laissoit enssi en paix, qu'ilhs
ne lassarent prinches entour eaux a guerrier, et misent pluseurs paiis en ch M de Gaiie m^m
leurs subjection; car ilhs astoient si fors et si virtueux, que nuls n'avoit 8 p U i^S!" senle "
poioir a eaux; mains puis furent remis en servaige, enssi com vos oreis Poi. isor*.
chi-apres. — Item, en chi temps prechoient diligemment parmy Germanie D e prechement sains
le parolle de Dieu les trois sains proidhommes Euchars , Valeir et Materne ; ?S'm JSn ' :' cir
et convertissoient mult grant peuple, car Dieu faisoit par eaux tant de my-
1 Cest-a-dire: faites-moi le sacrifice de vos pre- f Par erreur pour Galiiens, commc le prouve
tentions belliqueuses. la suite du rccit. *
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462 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
racles que chascon prendoft baptesme : car ilhs sanoient les lepreox , illu-
Trive fut convertie. mynoient les avoigles, et tant finablement qu'ilh ont convertie Trive et
mult d'autres vilhes la entour par leurs predication. Et fnt sains Euchars
evesque, et Valeir dyaque^ et Materne subdyaque; car enssi les avoit ordi-
neit sains Pire l'apostle qui astoit pape de Romme, et en fut ly promiers.
L.nLxiiii. — ftem, Fan LXI1II, en mois de novembre, avient que une femme, qui
astoit nommee Albaine, et astoit nee de la citeit de Trive, s'en vient apres
les HI sains proidhommes deseurdis et les criat merchis, en disant qu'ilhs
venissent faire resusciteir unc sien fis qui astoit mors subitement, et elle
croieroiten la loy Jhesu-Cristi Adont vinrent Ih les trois sains proidhons .
sains Euchar ei »es ii et ilhs depriarent Dieu que ilh por eaux vosist demonstreir myracle par-
citont unc mow. devant tout le peuple. Adont ly vraie Jhesu-Crist, qui oiit la priier des trois
sains proidhons, fist la aparante myracle, car ilh fist resusciteir cheluy qui
iih baptisarent vii- la gisoit com mors et sens espir. Por chesti myracle soy baptizarent et
»«>nne*. furent converlis a Dieu VH m VHI C et XLVI personnes, tant hommes et
femmes com petis enfans. Et adont furent lesdis trois sains hommes tenus
en plus grant auctoriteit com devant en toutes ches parties. A eel temps que
je dis misent cheaux de Galle en leur subjection tout Burgongne. — En Tan
sains Lueh conrertit deseurdit prechat sains Luch l'ewangeile * et la parolle de Dieu en la Grant-
mult de gens en En- * • n ■ •»■
gieterre. Bretangne , que ons nom mamtenant Engleterre, et y convertit mult de
gens. Si avient que ly roy de chesti paiis commandat qu'ilh fust mys k
mort, portant qu'ilh tournoit enssi ses gens a sa loy. Adont fut pris sains
Luch et mys en prison ; mains ilh avient chesti jour que la royne de chi
paiis chaiit a tauble mort subilement, par-deleis son marit le roy Morodab,
dont ly roy fut mult corochies, car ilh n'amoit tant riens que l^e; la astoit
presens unc chevaliers qui avoit nom Jaspar, qui mult amoit sains Luch,
et dest al roy que s'ilh voloit croire en Dieu et prendre baptesme, qu'ilh
aiderat bien a chu que sa femme revenroit en sainteit, awec Taide de Dieu
en cuy ilh avoit grant fianche.
Et quant ly roy entendit Jaspar, si en fut mult Hies et dest : « Amis Je
» ne say chouse en monde que je ne dewisse faire , se je le poloie ravoir,
» sens riens excepteir, car je l'amoie trop fortement; mains je toy prie que
» tu fais de moy ton plaisier, mains que je puisse ravoir ma femme et ma
1 Li ewangcliste. B.
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L1VRE PREMIER. 463
» damme en vie. » Adont vient Jaspar a la prison ou sains Luch astoit
mys, et se l'amenat en palais, et ly racomptat chu que jay deseur dit
coment ilh poroit, se ilh voloit et Dieu oussi ly vousist aidier, convertir a
luy tout le paiis de la Grant-Bretangne. Quant sains Luch entendit chu ,
ilh fist son orison a Dieu, et ly priat que ilh vosist faire la pour ly myracle.
— Et puis sen vient sains Luch a la royne qui la se gisoit com mort, et dest :
« royne, lieve-toy sus en sainteit et en vie, de part Dieu le Pere et le sains Luch fut deii-
~ m J f vreit parte roy Moro-
» Fis et le Sains-Espir. » La demonstrat Dieu gran myracle, car la royne <*»*> a \J?r£ n »P. or ~
tantoist soy relevat com eel qui ne sentoit maul ne dolour. Et quant ly roy »» femme; et adont
veit chu, se dest a sains Luch : « Sains hons, je croy qu'en toy est Dieu ',
» et toy requierg baptesme; et je t'ay en covent que je feray par tout mon
» royalme coupeir les chiefs de tous cheaz qui ne volront prendre bap-
» temme. » Adont apparelhat sains Luch del aighe et le benit, en laqueile
ilh baptizat le roy et la royne. Mains leurs noms leurs furent changies ; car
ly roy oit a nom Luch, et la royne fut nomee Marie, qui devant avoit Paf ^i^}./" l ^ a
nom Gazonas. Et fut chesti Marie la promier de la loy cristine. Ghesti jour tiM de chi nom -
meismes soy baptizat la endroit IX C chevaliers et XVIU m hommes awec Foi. uso *>.
les femmes; et lendemain soy baptizat sens nombre de gens. — Chis roy Sams Luch baptiwtie
Luke, qui fut ly promier roy criestien de monde, fist tant par le proier gieterre, ettout u
7 * •/ r j ^ ' ^ m. * royalme toy con?er-
sains Luch, son parien, et portant oussi quilh ly avtit en covent, que an- mi Dieu.
chois V mois ons ne trovast par tout la Grant-Bretangne une seul personne
qui creist en aultre creanche fours qu'en la foid Jhesu-Crist. Ghis paiis fut
ly promier paiis par tout le monde ou ons creist promier en Dieu et el loy Engieterre u promier
" r m r * * * paiis qui creit en
Jhesu-Crist, e'est assavoir commonalment. »><".
Chis paiis de la Grant-Bretangne fondat promier Brutus *, ly fis Silvius, Brutus fondat Engie-
lyqueis Silvius fut fis a Eneas, le due de Troie. Et apres luy fuit-ilh apel-
leis Bretangne, et le nom-ons la Grant Bretangne, portant quilh avoit et
encor at par-decha es parties de Galle une Bretangne , qui nastoit mye sy Dei Gram Bretagneet
grant, que ons nomoit la Petit Bretangne. Chu fut de chesti Grant Bre-
tangne dont fut roy ly roy Artus. — Item, en eel an morutClovis, liX° conte
de Flandre. Si fut apres luy conte son fis anneis, qui fut nomeit Juliens,
qui regnat XXI an. — Apres , sor Tan LXV, en mois de may, entrat Julien 5 , fan lxv.
1 Je croy en ton dieu. B. * Julius. B.
* Brocus. B.
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464 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
li conte de Flandre, en la terre le roy Coiongus de Tongre, et brisat la paix
Guerre enire Fiaodrois qui avoit esteit faile entres eaux, car ilh commenchat a destruire et a ardre
et Tongrois. * iim «*• i ^ii ■••
la terre et la royalme de Tongre. Mains quant ly roy Coiongus le soit, qui
astoit encors mult malaide de l'autre guerre, ilh assemblat ses gens, se vient
luy et Tremus, son fis, en unc plain ' asseis pres dj» Tongre, ou Tremus
Tremus fondat sken- fondat depuis trois villes, assavoir : Skendremaul , Juprelle et Verney *. La
dremal, Juprelle et \ 7 7 r , 1/3
verney. trovont-ilh les Flammens; se les corurent sus, et Flamens sont defendus.
La oit fiere batalhe et grant occhision de gens. Tremus escrioit a hault
vois 3 et disoit : « Tous y moreis, faux glotons, vos aveis brisiet la paix qui
» li dus de Galle fist. » — Et quant Julien l'entendit, se dest qu'ilh yroit
vengier son peire Clovis, a cuy ilh coupat le neeis, prent une lanche por
venir vers Tremus; mains quant Tremus le veit, se prist sa lanche, se
vinent ly unc encontre l'autre josleir com lyons. Mains ly conte de Flandre
brisat sa lanche, et se soy laisat cheoir; et puis sy est sus salhis et muchies
entre les Flammens. Et Tremus se fiert entre les Flammens, et detrenchoit
tout a diestre et a seneistre; tant at fait que les Flammens sont reculeis.
Et les Tongrois ont bien pris LX prisonniers, et en ont ochis plus de milh.
A Tongre ont myneit ches de Tongre leurs prisonniers.
Arnalius de Bruge, qui' astoit uns poisans hons, at pris a wee luy X m
Flammens des melhettrs del oust, et se ferit en l'estoure; aux lanches ont
abatus pluseurs Tongrois, puis ont traites les espees, si ont ochis Gadus et
Guerles *, advoueis, et tant d aultres que chu fut mervelhe; et les ont recu-
leis jusqu'a Tremus. Quant Tremus veit Arnalius, se le cognuit bien, si
brochat vers luy et ly assit unc coupe ' desus son hayme, se l'ochist*. Puis
corut sur les aultres; si at ochis Galerant de Tournay et Clement de Ysle 7 ,
Saldus de Mons et Pire et Vincent de Bruge et XXX1I11 aultres; et enssi
fut-ilh fortement navreis, et son cheval ochis desous luy. — Mains adont ilh
salhil en pies, se tient francquement l'espee et embreche l'escut; si se fiert
tout emmy eaux par teil virtut qu'ilh en at ochis XIIII , puis se at escrieit :
« Tongre! » Son peire I'entent, se vint a X m hommes a ferant 8 ; et remontat
1 Pour plainc. * Gadus de Guerle. B.
s II faut probablement lire Hermit, village * Lui assena un coup,
situe a peu de distance de Xhcndrcmacl et de Ju- 6 Quant Tremus voit, si le por fentjusqu'en pis. &.
prelle. 7 Lille sans doute.
3 Escrioit Tongre, B. * Des hommes a cheval, des cavaliers.
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L1VRE PREMIER. 465
Tremus, et ilh rentrat en l'esteur ' par teile manere qu'ilh at reculeis ses
anemys. Et fent ches haymes et escus, et jette mors ches Ffamens a terre a
si grant nombre, que ch'astoit mervelhe a veioir. Et ly roy son peire soy
mentient loyalment : ilh encontrat le conte de Flandre, se le ferit de son
espee, si qu'ilh ly coupat ses surchelles f ; et le conte le referit si qu'ilh le
navrat en chief et li fausat la tieste. Atant se trait ly roy arrie 8 . — A chi coup
vient Tremus, et ferit le conte si qu'ilh ly coupat la massel, et i'orelhe, et Fo1 - !3! r °-
les baleure 4 . Adont li conte soy laisat chaioir enssi com I panlhonier, et sy
gisoit a terre. Les Flammens quidarent qu'ilh fust mors, si ont pris la fuit.
Et les Tongrois revinent a Tongre, ou ly roy Golongus astoit grandement
malaide et morut bien tempre Ik apres, car ly cerveal ly coroit fours de la
plaie. Quant Tremus veit son peire mort, ilh fist seriment que jamais ne
faroit la guerre entre luy et les Flammens tant qu'ilh vive. Puis fut-ilh co- Tremus, ie x« roy de
roneis a roy de Tongre le X e ; si regnat HI ans et nient plus. Elle 5 batalhe
devantdit perdirent les Flamens XII m hommes et furent desconfis, et les
Tongrois ne perdirent que HI m hommes, et gagnont la batalhe; mains ly
roy fut teilement navreit en chief qu'ilh en morut, enssi com dit est. —
Item, en eel an, s'avisat I'emperere Nero de unc mervelheux et mult grant Dei gram maivaisteit
malvaisteit; car ilh avoit oyt racompteir del destruction de la grant Troie
comment elle avoit esteit ars et destruit; se li prist en volenteit qu'ilh voloit
veioir se ly feux avoit esteit grans, et ly cris horrible des gens qui la avoient
esteit ars, grans et petis. Adont fist JNeron esprendre Romme a unc des cos- NeroestardreRomme.
teis, et commandat que ons ne laisaist hommes et femmes ne bestes partir
de sa maison. Et puis montat Nero en son palais, sy regardat le gran feu et
oft et entendit le grant doleur des gens qui crioient terriblement; se dest :
« Ilh oit a la destruction de Troie mult grant doleur, quant ilh avoit la
» endroit si grans cris et sy gran doleur. » Enssi fist Nero par sa grant mal-
vaisteit ardre une grant partie de la citeit de Romme, por savoir la grant
destruction et doleur qu'ilh oit a la citeit de Troie. Ilh fut malvais en tos
cas, et faisoit mult volentier male a cheaux qui ly avoient fait bien et qui
I'amoient. — Item, l'an LXV1, commenchat a edifiier ly roy Tremus Ver- i/mlxvi.
1 Probablemcnt faute de copiste pour estour. * En arriere.
Le manuscrit B porte : en la caple. * Le menton. Batkwres dans Roquefort.
* SurchiU. B. * Locution wallonne signifiant : dans la.
59
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466 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
nay ', Juprelle et Skendremaile, et y mist tant d'ovriers en ouvre qu'ilhs
furent faites. — En eel an meismes avoit en la citeit de Trive unc esquevien
noble et poisans, qui astoit nommeis Pas tore, qui veit en unc soige une
vision; et ly sembloit qui stesoit devant ly unc homme a chiere elev^e, si
astoit vestis de blans vestimens, clers, resplendissans, tenans en sa main
*°Eu hln\l\ i* in * une cro ' s en disant a ly : « C^es trois hommes prechans en la royalme de
sainsMateme. „ Trieve sont trois proidhons chi envoies pop vostre salut, $t se vous tous
» voleis escappeir la mort et parvenir a la vie permanable. sy soyes obe-
» diens a leurs commandemens. » Et adont s'envanuit. Et lendemain ly
T 7»Vwf*^uIjhesu e esc PJ ev i en l e dest, et le revelat par teile manere que tout ly paiis at pris
C ro!dhS^« llldil baptesme. Et fut consecree une riviere, et fut dedont en avant nomee
Cesme Oliva, por le sainte oyle que ons y metit al consecreir. Et de la en
avant portont grant honeur a leur evesque Euchars, et ses II compagnons
Valeirs et Materne f . Item, en eel an, entrat Tremus, ly roy de Tongre, en
la conteit de Flandre a LX m hommes; se livrat sa baniere a Symon de
Brelangne, qui astoit conte d'Osterne, ehu est maintement la eonteit de
T lS u VoV oy ei e e T fort ^ouz. Et s'en vat solonc le rivaige de la mere, et at assagiet Marlines, se
sour to riameiis. j e ga n g na t, et tantoist le mist awec la royalme d© Tongre. Et la apres y
remanit pres de XI I c an$, sens oncques deparlir, nen ne voirent faire
homaige a une conte de Flandre. — Apres , Tremus at assegiet Teremonde
et si Tat conquestee par assalt, et sont rendus a luy et fait homage. Apres
ont assegiet Gourlray, Aloust et Ypre, l'unne apres l'autre, se les at toutes
conquestees, et finablement ilh at tout conquist le paiis jusques a Bruges,
et la est venus tendre ses trefs. Tremus avoit I fis qui fut noble chevalier
et preux , et avoit nom Cornulo. Chis a XX m hommes d'armes * sen alat a
Lyle en Flandre; si Tat ars et destruite et tout le plas paiis gasteit, puis
retournat a Bruge ou Tremus seioit, qui la seit 1 mois anchois qu'ilh awist
batalhe a Julien, le conte de Flandre. — Ors avient que Fan deseurdit, le
111® jour de junne, issit Julien de Bruge a grant gens, si at assalhit Ton—
Foi.istv. grois. La oit mult de gens reverseis, abatus et mors et navreis. — La oi t
grant batalhe; car ilh y oit bien C et L milhes hommes des Flamens; la
oit si grant occhision de gens et de chevals. qu'ilh nest pais a croire ne a
1 Nous avons deja rencontre ce nom de lieu et s Valeire et Materne ses disciples. B.
suppose qu'il desigoait le village de Hermee. * D'Ardenne. B.
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L1VRE PREMIER. 467
nombreir. Et ly roy Tremus et son fis Cornulo y font sy noble fais de che-
valerie, que chu en est grant mervelhe del veioir; ilh ne firent coup qu'ilh
n'ochient homme ou cheval. — Adont prist Cornulo V c hommes, sy en allat GrantguerreemreFia
» 7 * mens et Tongrois.
passans deleis unc pal us, si fiert les Flamens aux dos tous ensemble, s'en
abatent a mult grande planteit, tant qu a Pes tan dart des Flamens s'en est
venus et Fat assalhut fortement, lequeis Butors, le castelains de Gant, por-
toit : si avoit entour luy L chevaliers qui le gardoient, mains tantoist ilhs
furent desconfis. Quant les Flammens le veirent,al fuyt sont tourneis.
La en fut sens nombre abatus; mains ilh en est ly plus escappeis, car ilh
n'en fuit mors que VI m , et ly remanant s'enfuit a Gant. Et Tremus et ses
gens demoront a siege devant Bruge, et l'aseghat mult pres. Et la seit-ilh
par Fespause de XIII mois anchois qu'ilh le presist, enssi com vos oreis
chi-apres. — En eel an meismes revient li conte de Flandre Julien par-devant
Bruge a grant gens, por la vilh desegier de roy de Tongre et de ses gens qui
Favoient assegiet. Et fut chu en mois de decembre; et la oit grant batalhe
entres les II parties. Si perdit ly roy de Tongre plus de gens que les Flam-
mens; encordont furent les Flammens desconfis et s'enfuirent devers Gant,
et s'encloirent dedens la vilhe. Et ly roy Tremus fist Bruge assalhir plu-
seurs fois, et perdit mult de gens a dies assault; et encordont ilh ne le pot P ^S J^K d^tn »
oncques avoir por assault, ains l'oit par le discorde qui s'enmovit f entres les w^u^ATer . 11816
gens meismes de la vilhe, sique el fut rendue et livr^e aux Tongrois le XI e
jour de mois de junne Fan LXVII; et la devinrent cheaux de Bruge de la
royalme de Tongre et hommes a roy Tremus. Mains ilhs n'y demoront mie
longement, car anchois une an ilh se vorent parjureir et le bon roy trahir.
enssi com vos oreis. — Et adont ly roy Tremus envoiat son fis Cornulo a
Tongre assembleir ses grans oust, et les amenat. Et enssi d em or at Tremus
II ans tous plains en Flandre, sens partir. — Or avient al derain que Flamens
de Bruge vont troveir la subtilileit del roy Tremus a trahir ' et del livreir a
conte; et unc jour enortont tant le roy Tremus qu'ilh allast assegier Gant,
et si tuast le conte qui dedens astoit fuys. Ly roy les creit, sy chevalchat
vers Gant a XXX m homme, car son fis n as to it pais encor revenus awec ses
grans oust. Quant ly conte le soit, si issit fours a Fencontre a XX m hommes
1 Surdit. B. Le manuscrit B porte : vont trover vote del roy
* C'est-a-dire : decouvrent un moyen de trahir. Tremus trahir.
L'an LXVII.
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468 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
et plus, et se sont sus corus; sy voit Tremus qu'ilh soy combattoit tout
seul, et que ses gens n'avoient cure de capeleir ', car ch'astoient de cheaux
de Bruge qui mies amoient le conte que luy; et a voit lassiet ses gens a
Bruge. — Quant ly roy aperchut la trahison, ilh leur tourne le dos, et s'en-
fiert ' son cheval devers Tongre ou ilh a voit bien long, dont ly conte en fut
plus esbahis com par-devant; si dest : « Jay mon paiis perdut, car Tremus
» a may rat tant de gens qu'ilh deslruirat tout. » Adont ly dest Gaudros,
ly prevoste de Ghambray : « Mandeis vostre cusien, le prinche de Lovay *,
» si l'envoies faire paix a roy de Tongre. » Et dest li conte Julien qu'ilh
le feroit. Se mandat tantoist le prinche Jonadab, et ly priat qu'ilh alast a
Tongre faire la paix, queile chouse qu'ilh costast ilh demandast asseis 4 .
— Quant ly prinche Tentendit , si chevalchat a Tongre , si at troyeit mort
le roy et mys mult honorablement en terre : et morut en mois de may,
L.nLxvui S our Tan LXVIH. Et apres sa mort fut fais roy Xl e son fis Cornulo, qui
•Kn^. y * roy e regnat IX ans. A cheli at tratiiet de paix ly prinche de Lovay. Et Cornulo
juroit qu'ilh metteroit tout Flandre en arsure, ains qu'ilh entendist a la
paix. — Mains finablement ly prinche de Lovay le menat tant par douches
parolles, que al derain s'acordat a la paix, qui fut teile que ly roy auroit
Marlines quiltement adjostee al royalme de Tongre, et ly conte raroit
toutes les altres vilhes que Tremus avoit conquesteit; si les tenroit en fiies
Foi. i3«f. de roy de Tongre. El enssi fut la pais fait des II parties. Et fist li conte de
Flandre homaige a roy de Tongre; mains eel homaige quittat depuis ly
roy a conte , car ilh ly donnat en mariage le conte awec une siene filhe
qu'ilh oit a espeuse.
LanLxvi. Retournant a nostre matere, sour l'an del incarnation LXV1, morut
Lucmu.morit. Lucanus , le gran poete, qui parolle delle batalhe Julien-Cesar encontre
Pompeius, de laqueile ilh fait desus mention. — Item, l'an LXV1I , s'avisat
Seneca, ly gran philosophe , qui avoit esteit ly maistre Nero, et l'avoit
myneit a l'escolle de jovente et maintenant le instruoit en la philosophie ,
se ilh y volsit entendre qu'ilh demanderoit al emperere a cuy par sa bon
serviche ilh cuidoit avoir unc grant salaire; et ilh ly demandat par amis-
1 Combattre. Chaployer dans Roquefort 8 Louvain.
* Sans doute pour s'enfuiL Le manuscrit B * Faire pais al roy et li fache asseis d' amende. B.
porte : Et s'envat coranL
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LIVRE PREMIER. 469
teit queile salaire ilh auroit de chu qu'ilh 1'avoit apris et servit. Et Nero ly
respond it : « Maistre, regardeis les beais arbres qui sont en chesti jardin
» alqueile vos voreis eistre pendus; car portant que vous m'aveis apris, je
» vos penderay al queile que vos voreis. Et chu serat ly salaire que vos
» aureis de chu que vos m'aveis fait et apris; et encor me deveis savoir bon
» greit de chu que je vos penderay a election. » — Quant Seneca entendit
Femperere, si en oit grant mervelhe, et dest : « Sire f a quoy ay-je deservit
» la mort? Je ne vos fis oncques maul. » Et dest Nero : « Vos dit voire, et De ie m»waisteit Nero
l ' encontre Seneca, son
» portant ne vos feray ja bien; car ch'est ma nature, car a tous cheaux «•»!».
» qui moy feront bien je leur feray maul. » — Quant Seneca l'entendit, se
li dest : « Sire, chu seroit trop grant malvaisteit, par ma foid , et aveis con-
» trable nature a droit et a raison et de qualiteit ', qui moy voleis pendre
» qui n'ay riens forfait. » De chu fut Nero mult corochies, si sachat une
espee et fist semblant del trenchier la tieste de son maistre. Mains Seneca ,
qui toudis guenchisoit, ly dest : « Sire, pour amour, merchi, je suy vostre
» maistre. » Et dest Nero : a Maistre, maistre, porquoy guenchiseis-vos
» contre le coup? » Seneca dest : « Sire, portant que dobte la mort, car je
» suy hons et ay pris vie, se muere-je envis. » Respont Nero : « Maistre *,
» chu n'y vault riens. Ilh vos covient morir, car je ne poroy jamais vivre
» a segure tant com fuissies en vie. » — Adont dest Seneca : « Sire , puis-
» qu'ilh est enssi que ilh moy covient morir, je vos prie que vos me veil-
» hies faire morir de la mort que je deviseray. » Et dest Nero : « Or devise
» apertement, je toy J'otroie. » Quant Seneca l'entend, si en fut mult Hies, °K^iSn € l5w
et fist faire unc bangne; si entrat dedens, et puis soy fist sannier en dois <>n une bangne.
bras, et soy laisat tant sanneir par dedens l'aighe qu'ilh morit, enssi com
ilh alaist dormir, sens doleur. Enssi morut Seneca, qui asloit ly plus gran
philosophe qui fuist a son temps, de grant aucloriteit et de grant reve-
renche. Item, en eel an * morut Ogens, ly roy de Dannemarche; si fut apres
roy son fis Nabudas, lyqueis regnat XL ans. — Item, Tan LXVIH, s'avisat
l'emperere Nero de grant foursennerie 5 , car ilh commenchat a museir et Nero fist ochiresa mere
soy a mervelhier de quoy ilh astoit venus, et queis astoit ly vasseals en "<*"•
1 Notre texte porte si. faute de copiste.
1 Et aveis contrable nature de raison et de qua- * En moys de fevrier, ajoute le manuscrit B.
Hteit. B. * Fureur extravagante. Forcennerie dans Ho*
* Notre texte porte sire, ce qui doit 6tre une quefort.
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470 CHROMQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
queile sa mere I'avoit porteit, et comment ilh avoit esteit conchus et noun's
dedens la matrise. Adont mandat Nero sa mere par-devant luy, car ilh le
tenoit en songnetaige l ; et enssi ilh mandat ses phisichiens et les com-
mandat qu'ilhs ochissent sa mere, car ilh ly astoit pris sens et en volenteit
del veioir les secreis de ventre sa mere, et comment uns enfes se fait ens
en matrix. Atant fut sa mere ochiese; car ons ne 1'oisoit laisier qui ne
voloit eistre ochis. — Et quant ons ly oit overt le ventre, ly emperere veit
dedens le matrix enssi com sachelets tout polhus dedens, et s'i avoit VII
entrechaistres * ou chambretes qui toutes astoient ensengnies de humaine
forme, qui ja astoient apparelhies al VII 6 enfantement. Si Ten prist grant
indignation et dest : « Je suy venus de unc ort vasseal. » Et puis avalat ses
Foi. 13**0. braies, si ordat en ventre de sa mere. De chu fut mult repris des phisi-
chiens qu'ilh avoit fait ochier sa mere, et qu'ilh avoit ordeit en son ventre;
car tous drois defendent que ly enfes ne doit touchier ne oussi regardeir
par matalant son pere ne sa mere, car la mere s'en delivre a trop grant
doleur et a grant poyne. — Adont respondit Nero, et dest a ses phisichiens
N di£ qi'iih'enfan- et aux philosophes : « Ors faites que je soy tantoist gros d'enfant, car je ne
tat une nine. w p U y cro i re q Ue femme ait si grant doleur al enfanteir com vos me dites;
» et portant je le weulhe savoir. » Quant les phisichiens entendent chu, si
respondirent : « Sires, ons ne puet faire ensyment les chouses contraire a
» nature , et ne puet-ons savoir chouse ou raison ne s'i consent. » — Nero
respondit : « Je vos feray morir a grant doleur, se vos ne faite chu que je
» demande, car je veulhe savoir par les doleur que je souffray queiles
» doleurs ma mere souffrit de moy. » Et quant les phisichiens 1'entendirent,
si furent mult esbahis; et nientmoins ilhs astoient saiges, si ont aviseit
entre eaux qu'ilhs fisent unc puson 8 par leur art, lequeile ilh fisent gosteir
Nero. Et oussitoist qu'ilh l'oit pris, commenchat a naistre par dedens son
corps une raine obscure; et oussi tost que la raine commenchat a naistre,
ly ventre Nero commenchat a enfleire, car ly ventre ne puet souffrir en
luy chouse qui soit contraire a sa nature que ilh n'enfle tantoist. — Adont
quidat mult bien Nero avoir unc enfan en son ventre , tant fut-ilh diverse *;
«
1 Concubinage. 8 Un breuvage, non un poison.
1 Lechroniqueurexpliquelui-meme la locution, * Plus correclement divers, qu'on trouve dans
dans la formation de laquelle entre le mot charlre Roquefort, avec des acceptions qui ne paraissent
ou cartre. pas; du reste, convenir parfaitement ici.
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LIVRE PREMIER. 471
si commenchat a avoir grant paour de la doleur que ilh devoit souffrir al
enfanteir. Si commandat aux phisichiens que ilh le haustassent, et le fesis-
sent tantost la meismes sens attendre enfanteir : « Car jay, dest-ilh, si grant
» doleur en mon ventre que je ne puy plus dureir, ne a payne puy-je
» ravoir mon alayne a pou que ly cuer ne moy part. » — Et quant les phi-
sichiens entendent chu, se prisent unc aultre pusement que ilhs avoient
apparelhiet, et ly fisent prendre. Et oussitoist qu'ilh l'oit pris, si commen-
chat a vomir et jettat fours de sa bouche une raine laide et hisdeuse, com
celle qui astoit en sane et en chaleur nourie et de viande d'homme. Et rendit
son estomach, qui astoit esmuit por vomir, tout enssi com viandes. Et quant
Nero veit chu qu'ilh avoit enfanteit, ilh en oit grant hisde \ et soy mer-
velhat mult de teile monstre; si dest aux phisichiens : « Issi-ge done enssi
» de la matrix ma mere? » Et ilhs respondirent : « Sire roy, oilh. » —
Adont fist Nero coupeir les tiestes de tous lesdis saiges phisichiens des- Nero . . fi »* or,ure se «
queils ilhs en astoit XII, et dest : « Ch'est le vostre salaire que vos aveis sy.
» bien faite chu que je voloie, car de bien faite doit-ons rendre malvais
» lowier. » — Apres fist I'emperere prendre la rayne , et le fist mettre en
unc beal pot de pire, et la le fist-ilh bien et noblement nourir. Et deveis
savoir que ilh mist jus sa noble porture en gran palais de Rom me, et 1'ap-
pellat-ons dedont en avant le palais de la rayne, car Nero esponsement * soy
delivrat de la rayne en eel palais; se le nom-ons en latin Palatium Latera-
nense*. — Item, Fan LXIX, en mois de junne, le XXIII 6 jour, ochist Nero i/anLxix.
sa seconde femme tout enchainte, por veoir et savoir encor plus chertaine- Nero ochist sa second
. . p A . . . , ■•.1*1 femme tout enchainte,
ment comment unc enfant gisoit en ventre sa mere; se le veit adont clere- por savoir comment
-o p .- i •*• rii'lh astoit en ventre
ment. oa promier femme oit nom, et sa mere oussi, Agrippa. — En eel an samere.
meismes, le penultime jour de mois de junne deseurdit, furent a Romme
martyrisies sains Pire et sains Poul , enssi com chi-apres s'ensiiet. Si les
fist martyrisier Nero I'emperere, por le raison que vos oreis. Ilh avoit a eel
temps uns enchanteur a Romme, qui fut nommeis Symon Magus, qui par
ses enchantemens avoit Nero si dechuis que ilh faisoit de luy chu qu'ilh Foi. 133 1*.
voloit; et aoroit cheluy Symon enssi com Dieu. Chis disoit qu'ilh n'astoit
1 Frayeur. Hide dans Roquefort. aurait-il ici le meme sens?
* Quid? Absconsemenl , qui se trouve plus haut 8 II est precedemment (p. 61) fait allusion a
(p. 79) sign i fie : cache, en secret. Esponsement cette tradition.
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472 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
aultre Dieu que Nero, et anchois unc mois feroit tant que Nero seroit im-
morteil et viveroit toudis. — A chu respond it s$ins Poul que chu ne poroit
eistre, car la figure de monde soy deloierat par feu. Ilh avient a eel temps
que sains Poul dest devant Nero et en sa presenche que ilh faisoit pluseurs
chouses contre raison, et sa fien seroit malvaise, par oussi voire que la
fien de la figure de monde auroit par feu deloiement. Sains Poul disoit que
la fien de monde, et de tout chu qui est dedens, serat affineis et desloies
par feu , dont ne poroit Nero estre immorteile. — Chis enchanteur Symon
enortoit tousjours 1'emperere Nero que ilh metist a mort les dois apostles
sains Pire et sains Poul, qui a eel temps astoient a Romme; car sains Pire
fut ly promier pape qui fut a Romme , et avoit a chesti temps tenut le siege
par l'espause de XXV ans. Et sains Poul astoit la acompangniet awec luy;
et convertissoient a mies qu'ilhs poioient les gens a nostre loy novelle par
leurs predications. — Par 1'enortement de chesti Symon mandat 1'emperere
Jes dois dis apostles. Et quant ilhs furent venus par-devant luy, si oit grant
Nero fist despiieir wins controversion entre eaux et Symon; car ilh disoit qu'ilh astoit Dieu, et
symon. qu'ilh avoit plus grant poioir que le Dieu cuy ilhs anunchoient. Mains
lesdis apostles disoient qu'ilh soy mentoit, car chu qu'ilh faisoit estoit par
enchantement des dyables et aultrement nient. Et quant Symon entendit
chu , sy en fist ses gaberies , et les commenchat a mettre devant pluseurs
apertes mervelhes qu'ilh avoit fait, veiant 1'emperere Nero, et que nuls ne
pordit faire chu qu'ilh faisoit, se ilh ne fuist Dieu; et finablement ilh dest
que ilh leurs monstreroit unc de ses myracles. — Adont montat Symon en
une thour que Nero ly avoit faite faire, qui astoit nommee Colosus \ qui
tenoit C et LX pies de hault; se dest que de eel thour ilh monteroit en
chiel, et puis se revenroit et amenroit ses angeles, si feroit awec ly empor-
teir en chiel 1'emperere Nero, si seroit roy de paradis. Et quant Symon oit
chu dit, ilh soy meltit en 1'aire et commenchat a voleir vers le chiel, car
les malvais espirs l'emporloient. — Mains quant les dois sains apostles
veirent Symon enssi voleir, se fisent a Dieu leurs orisons en depriant que
les malvais esperis qui portoient Symon n'awissent plus poioir de avant
symon l'encbanteur porteir, ains le laiassent cheoir devant tout le peuple. Adont chaiit chis
chaiit de l'aire cha » A • _i «. • * a*. * • »
jus, si qu'ilh morut. Symon a terre sy roidement que son corps rompit en quattre parties, et
1 Allusion sans doute au Colosseum ou Colysee.
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LIVRE PREMIER. 473
fut mors. — Mains quant l'emperere Nero veil chu, sy fut mult corochies, Nero fist ochire tous
et commandat lantoist que tous cheaux qui creioient en Jhesu-Crist fussent
ars ou ochis; et fist tantoist sains Pire mettre en la crois oil ilh y morit. Nero &i ochire »ain«
7 ... ^ ire el 8a,ns p° u| -
Et portant que sains Poul astoit gentilshons, ilh le fist decolleir. Sains Pire
fut ensevelis en la voie de Aurelie, deleis le palais Nero, en Vatechine \ ou
ilh fut crucifiies; et sains Poul futaux aighes saleez, en la voie de Hostie f ,
ensevelis; et chu fut deleis le palais Nero, et y est a present l'engliese
Sainte-Marie en Therebintin 8 . Enssi furent mys a mort les dois sains apos-
tles sains Pire et sains Poule, sour Fan LXIX deseurdit, le XXIX e jour de l™ lxix.
mois de June. — A temps le pape Cornelien gens de Greche vinrent a
Romme, et emblarent les corps des dois sains apostles por porteir en L 7,~ l £ r £j Vmilwi
Greche; mains les dyables qui habiloient dedens les ydoles de Romme, eten unc puche jet-
constrains par la divinileit de Dieu , commencharent a crieir : « vos, gens
» de Romme, sourcoreis vous dieux que ons enporte. » Chu entendirent
les sarasiens et les cristiens de Romme. S'en alarent apres les Grigois, car
les cristiens entendirent bien que ch'astoient les apostles, et les sarasiens
entendoient leurs dieux; portant sen alarent les ambdois parlies apres. —
Quant les Grigois les aparchurent, si jettarent les corps des apostles en unc
puche, en lieu que ons dist cathacumbas *. Mains li papa Cornelien les fist
fours traire, si les trovat en un sach butteis tous les osseals ensemble, si
que ons ne savoit lesqueils astoient sains Pire ne lesqueiles sains Poul ; Fo1 - m v °-
mains les cristiens soy misent en orisons et en junnes, en priant a Dieu co ment °? 5 ™*™ il
J ... lesosseais sains Pi r«
qu'ilh leurs vosist par divine inspiration demonstreir 8 . Si fut dit • que les SSmTKui che> dc
plus grans astoient sains Poul, et les petis astoient sains Pire. Enssi furent
recognus les corps des dois sains apostles.
Adont furent mis en leurs dois sepultures les osseals de Tunc et de
l'autre, et sains Silvestre apres y fondat II englieses sour leurs corps : l'une smm siivwtw fundti
7 ■ «f © i let U englieses sains
en 1'honeur sains Pire, et l'autre en I'honeur de sains Poul. Enssi furent pireetsainsPouia
7 m Romme sour leurs
marlyrisies les II dit apostles sour Fan LXIX; et les altres dient Fan LXX cor P»-
et les altres LXXI, Tan del passion Jhesu-Crist XXXVIII, et sains Jerome
et Beda dient XXXVII , et nos disons XXXVI parfais et XXXVII imparfais.
1 Le qua r tier. da Vatican. dans le quartier du Vatican.
* L'eglise Saint-Paul hors des murs se trouve * Voir plus haut, p. 79.
en effet sur l'ancienne route d'Ostic. s Qu'il vousut chu mettre al cleir. B.
8 Traduction de ad Terebinlum, localite situee c Par divine inspiration, ajoute le manuscrit B.
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474 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
saint Pire oHinat k — Sains Pire ordinat, quant ilh visquoit, de iunneir XL jours devant
juneir lea advens et # ' * ..
le quar»nteine. Pasque, et trois samaynes et le quatreyme imparfait devant le Noyel, a
junneir tous les ans el ramembranche de promier et de second advens
Nostre-Saingnour Jhesu-Crist. — Apres la mort desdis apostles, ly college
de Rom me fut mult triste et dolans de la mort * desdis apostles. Si furent
Lynus fut esius pap« en grant emmay * qu'ilh feroient 8 . Adont ilhs eslurent a pape unc sains
apres saios Pire. ...
proidhomme, qui oit a nom Lynus, et astoit de la nation Ytaile, del region
de Tuschie. Et son peire oit a nom Osculain; et tient le siege XII ans dois
mois et XI jours. Et encordont ons true en escript que sains Pire a sa vie
ordinat Lynum et Gletum evesques, pour aemplir les deforaines misteirs;
mains de parolle et de boche ilh appelloit, enssi com dist Damaise en ses
croniques , Clemens son successeur pape apres sains Pire *. Porquen les
alcuns dient que Lynus et Cletus ne furent mie papes, ains le fut Clemens;
et les altres dient que Clemens fut li quars pape, comptant le promier sains
Pire, enssi com dist chis vers :
Disputat hie raundus si quarlus sitve secondus.
Ors laissons les altercations sour Dieu, car ly Engliese tient que Lynus
fut pape apres sains Pire, et enssi faisons-nous. — Ilem, en eel an fist
Nero senfuit fours de Nero prendre XI11I" de plus grans et poissans de Romme, et les voloit
Rom me por ptour, * % * ° m * #
etsoyochist. faire mettre a mort sens cause. Mams quant les Romans veirent chu.se ne
le porent souffrir, se fisent grant assemblee sour luy. Mains ilh s'enfuit. et
ilh le cacharent fours de la citeit; et enssi qu'ilh s'enfuoit, sy s'avisat qu'ilh
soy ochiroit luy-meismes. Adont prist-ilh unc paulh sour le champs que
ilh trovat, et 1'aguisat a ses dens, car ilh avoit esteit si sourpris que ilh
n'avoil aporteit ne espee ne cuteal. Et quant ilh oit chu fait, ilh prist le
paulh, se le mist contre unc fosseit, se le buttat parmy son ventre. Enssi
morut Nero, sour l'an deseurdit, le derain jour de mois de decembre. —
Chis Nero fut mult malvais; je croie que oncques hons ne fist tant de
Nero fut mangniet de* maule com ilh fist. Et portant furent grandement liies les Romans de sa
1 Ces trois derniers mots sont omis dans notre 3 Le texle du manuscrit B est plus clair; il
texte. porte : et ne torent que faire.
* Trouble, inquietude. Emai dans Roquefort. * Pape apres li. B.
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LIVRE PREMIER. 475
mort; se revinrent arrier, et le lassarent mangnier les leux et les altres
bestes savaiges aux champs.
Apres la mort Nero, eslurent les Romans a emperere unc noble prinche Anasuise emperere.
qui fut nomeis Anastaise ', lyqueis regnat V mois et II jours. Al temps de
chesti emperere furent rebel les les Juys del terre de Judee aux Romans.
Si fut envoies la encontre eaux Wespasianus et Tyfus , son lis , a errant plan- wespamnus et T V tu*
. . r ••■!»■ entrent en Judtie
teit de gens de 1 eraperreur, qui commencharenl a gasteir la terre de Judee;
et assegarent promier une citeit en Judee, qui oit nom Jotapatam % de
laqueile ilh astoit sire et governeurs Josephus, qui fut mult saige. — Chis
Josephus issit de sa citeit a grans gens, et soy combaltit aux Romans; Josephs soy combat
mains les Romans orent la victoire, et' furent les Juys desconfis, et soy
refuirent en la citeit ou ly siege fut la assis longement. Et avoient tous les
jours esquermuches Tunc a 1'autre; et prendoit Josephus mult sovent des
chevaliers Wespasianus, si les boloit en oyle ' et les faisoit a grant doleur
morir. Mains apres fut la citeit prise des Romans. — Et quant Josephus veit
chu, si prist awec luy XI Juys; si entrat en une boyme * desous terre, ou Josephs entrat en
ilhs demoront trois jours; et, les trois jours passeis , les Juys ne vorent ne
ne porent plus la demoreir por le famyne qui les tenoit. Si dessent qu'ilhs
avoient plus chier a morir plus honestement que enssi, ou que Wespasia-
nus les metist a vilaine servitude. El portant que Josephus astoit ly plus
digne de eaux , tous dessent que ilh le voroient sacrefiier a Dieu et espan- Foi. 134 r*.
dre son sane. — Mains Josephus, qui astoit saige et subtils, s'en soit mult Josephusfistgraatsen*.
bien gardeir, car ilh ne voloit mie morir; si dest : « Saingnours, je vos
)> aprenderay mies lyqueis morat de nos tous : vos jettereis dois en dois
» les los; enssi sarons-nos lyqueis devrat morir, car ons ne doit mie faire
)> sens grant besongne sacrifiche a Dieu d'homme. » Enssi soy fist Jose-
phus par son sens juge des altres, et si eslongat sa vie. Atant commencha-
rent les Juys a jetteir les los dois a dois , ly uns apres 1'autre ; et les los
astoient livreis a mort jusqu'a derain , tant que Josephus duit traire aux
los. Et quant ilh veit qu'ilh le covenoit traire, ilh tollit a chely l'espee, et
ly demandat lequeile ilh amoit mies ou vivre ou morir. Quant chis l'en-
1 Je ne sais quel person n age le chroniqueur * II les faisait bouillir dans de l'huile.
veut designer ici. Serai t-ce V index? 4 Nous avons deja rencontre ce mot avec le sens
1 Jotapat, ville de la Galilee, que l'historien de grotte. Voir pp. 9 et 17.
Josephc fut en eflfet charge 1 de defendre.
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476
CHROJNIQUE DE JEAJN DOUTREMEUSE.
tendit, ilh dest : « Je ayme mies vivre, se par vostre grasce je puy etres
» saveis. » — Et Joseph us ly dest : « Nos serons toist saveis. » Atant sont
wespasi.nus pmt a i ssus d e la boyme et sont venus a plain f . Et Josephus vient Wespasiain,
merchi Josephus. # •* * * j • • c»
et ly priat merchi por ly et por son compangnon par telle condition : « Se
» vos n'asteis temprementesluis emperreur de Rom me, je veulhe estre mys
» a mort. » — Quant Wespasianus en tendit chu, sy soy mervelhat mult, et
dest a Josephus : « Tu es unc prophete ; porquoy dont ne prophetisas que
josephus prophetitat. chest citeit seroit en ma subjection? » Respondit Josephus : « Je le pro-
» nunchay plus de XL jours devant vostre venue. Se mestier en est, j'en
» ay des tesmons asseis. » Adont amynat-ilh bien<XXX tesmons, par les-
queiles ilh provat le jour et l'heure que la citeit seroit prise. En teile ma-
nere le lassarent, mains Wespasianus fist mettre en prison Josephus tant et
l emperere morit. si longcment qu'ilh avenroit chu qu'ilh avoit dit. — Item, quant ly VII e em-
perere de Romme, qui oit a nom Anistaise, oit regneit V mois, si morut
sour Tan LXX, le II e jour de junne. Si muet grand discord entre les Ro-
mans por fair election; et avoient fait 1111 parties, et cascon eslisit uns
emperere, assavoir : cheaux de Romme eslesirent unc prinche qui oit nom
Otlon, et cheaux devers Espangne eslesirent uns aultre qui oit a nom
Gabba, et cheauxde Germaine eslesirent uns aultre qui oit a nom Vitellus.
et cheaux qui astoient on lire mere eslesirent Wespasiain qui conquestoit
fortement, et avoit ja conquis tout Judee, fours mys Jherusalem. — Quant
Wespasianus veit chu , si laissat Josephus fours de prison, et commandat a
son lis Tytus ses gens, et ly priat del conquerre avant; puis soy partit et
Lan lxxi. revient a Romme, et y entrat droit le jour de Noyel, Fan LXXI. Quant ilh
vient a Romme, ilh trovat la chouse enssi com je l'ay deviseit : promirs
ilh trovat que Anastaise astoit mors ', enssi com dit est; si avoit vaqueit le
siege VII jours par le grant discorde del election. Et totvoie astoit demo-
Gabba ,i y vui« empe- reis , et fut coroneis Gabba, qui regnat VII mois et VII jours tant seulement;
rerc, morut. * ° •
et chis astoit neis d'Espangne de grand lynaige. Si fut agaities par Olton ,
qui oussi astoit eslus; et fuit ochis tout emmy le marchiet de Romme, si
fut ensevelis en sa maison meismes, qui astoit en armeile voie*. — Puis
otton, ie ix« empc f u t H s i e ge vaque VIII jours, si fut coroneis chis Otton deseurdis : chis fut
1 A plain, cest-a-dire an jour.
* Le secon jour de June I'annee devant, ajoute
le manuscrit B.
8 Sans doute la voic Aurelienne. Le manuscrit
B porte : en aurelie vote.
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LIVRE PREMIER. 477
noble, et plus de part sa mere que de part son peirc. Chis regnat VI mo is
et 1III jours, et, le XXII1I 6 jour de junne, fut ochis par luy-meismes : car
ilh soy combattit contres les parens Vitellii , dois dus qui astoient venus
a Romme; si orent victoire, si fut Otlon disconfis et ses gens mortes, et
portant s'ochist-ilh luy-meismes. — Apres vacat li siege XXI jours, puis fut viteiiu* ie ^j^p*-
coronais Vitellus, le XV 6 jour de jule; se regnat jusques a la nativiteit
Jhesu-Crist que Wespasiain vient a Romme, et trois jours apres. Chis fut
mult crueux, si fist les Romans pluseurs crualteis; et si astoit laron, et
mangnoit et bevoit bien ortant que VI hommes, et n astoit mie chevale-
reux. Chely trovat Wespasiain a Romme; sy prist batalhe contre luy \ le
XXVIII 6 jour de decembre, et le desconfist em my la citeit, et par le peuple
fut traineit par tout Romme, et puis fiiit-ilh jetteis en la Tybre por sa
crualteit grant \
Adont fut coroneis Wespasianus emperere de Romme XI e ; et regnat Foi. 134 v>.
IX ans X mois et XXII jours. Enssi fut Wespasianus emperere de Romme , ^ewcdeRommi!
et Tytus, son fis, conqueroit par Judee. Si oiit dire Josephus que ilh fuisl
joians, car son peire astoit volentiers rechus a emperere, et astoit coroneis.
— Quant Tytus l'entendit, si en fuit tant Hies, que de la grant joie qu'ilh
en oit aovrit son cuer tant. que tous les nerfs des jambes ly retrahirent par Tytus r mt ie» fivre*
' * del joie qu'ilh oit tie
froidures; et de chesti maladie ilh perdit une cusse, et enssi ilh fut mult son pere ; mums jo-
malaide s . Mains quant Josephus le soit, si demandat la cause de la maladie,
et en quelle temps ilh ly astoit prise; et ons ly dest que chu ly astoit
avenus quant ilh entendit que son peire astoit emperere, de la joie qu'ilh en
oit astoit-ilh cheyus en celle maladie. — Adont aperchut Josephus la cause
de la maladie, si avisat une chouse de phischinerie * : se dest que toutes Tout chouses contrail
chouses contraires soy garissent par aultres conlraires, si que por chu qu'ilh
ly astoit par joie avenus , ilh le covient garir par le contraire 5 , et ly farat
avoir subitement grant coroche. Atant demandat Josephus a tout sa mais-
nie, s'ilh astoit nuls qui l'awist corochiet le temps devant, que ons ly ami-
nast. Si fut amyneis uns servans qui avoit nom Jobal, qui avoit si grande-
ment corochiet Tytus, qu'ilh le haioit tant qu'ilh ne le poioit veioir, ne oyr
1 Le texte ne dit pas ce que le chroniqueur veut sephe et de Su&one .
dire, et sy prist s'applique a Vespasien, non a 8 Paralitiqtie , porte le manuscrit B*
Vitcllius. * Phisique. B.
1 Le manuscrit B invoque ici Tautorite de Jo- * Par opposii. B.
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478 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
parleir de luy. Et Josepbus vient devant Tytus en disant : « Sires, je vos
» gariray bien , se vos voleis ; mains je vos prie que nuls n'ait maile par
» vos qui chi venrat awec moy. » Et Tytus iy respondit : « Je weulh
» que tous. cheaux qui venront en ton compangnie n'aient garde et soient
» tous assegureis. » — Quant chu fut fa is , Josephus le laisat enssi jusques
a lendemain que tout chu fuit oblieit. Et lendemain, enssi con faisoit
J Tc^ h a U mSradil Tytus Tytus a mangier, Josephus prist la viande et le chargat a Jobal,et K dest :
a Porte chu devant Tytus. » Et chist le fist. Mains quant Tytus veit que
chis cuy ilh haioit si fort le servoit, si oit teile yreur ' que ilh tremblat tout
de gran duelhe \ Et ilh avoit esteit devant refroidies de joie, si s'eschaufat
maintenant de coroche, et fut enssi com tous fourseneis; adont ilh s'ex-
tendit si fortement, que tous ses nerfs soy restandirent par caleur qui ly
avoient esteit retrais por joie.
En teile raanere fut garis Tytus, sy pardonnat Jobal son matalent: et
Josephus fut delivreis de sa captivison 5 , et oit la grasce Tytus dedont en
corncio,roydeTongre, avant. — En eel an meisme, fist Cornelo , ly roy de Tongre, pluseurs viHies,
fondat Vileir, Em- . . ' • o n i »
bour, Lovengneet, assavoir sont : Vileir que ons nomat apres mesire Symon ', Lmbour. Lo-
Soognee, Huffalye, * ■ r* i «•
Bastongne,ie Roche, vengneez, Songnee , Huffalye, Bastongne, le Roche en Ardenne, Haneffe,
cheir t Aodege' Mo- Stiers, Doncheir, Hodege, Momale, Henricourt et Thys, et pluseurs aultres
male, Henricourt et / 7 r, « >.n n * •
Th y» dont je ne say les noms. Et fist tant quilh les parfist a sa vie. — Item,
sains Eusebes dist en ses croniques que chis Josephus deseurdit fut uns
mult saige Juys; et fut chis qui escript des histoirs sens nombre, et astoit
dus des batalhes des Juys. Ilh pronunchat 5 la mort Nero, enssi qu'ilh fuit.
Nobiechede josephus. — Et sains Jerome dist enssi en livre ou ilh parolle des nobles hommes
que chis Josephus fut ly fis Mathier, prestre de Jherusalem, qui fut pris
par Wespasiain et delivreit par Tytus.— Chis Josephus, quant ilh vient a
Rom me , se fist VII livre des Juys que ilh donnat a Wespasianus et a Tytus
empereres. Chis fist tant qu'ilh oit la gloire de paradis et son ymage a
Romme. Ilh escript XX aultres livres des antiquiteit del commenchement
De josephus. de monde jusques al XIIII 6 an de Domitian emperere chi-apres nomeis,
1 Tantd'ayr. B. Pour air, ire, colore. pr& de Liege. Quant aux aulres localites, elles
1 Duele. B. sont faciles a reconnaltre. Slier* designe Sier, el
5 ChaiUvison* B. Cette forme est plus ancienne Doncheir, ou plutot Donchierf, est Tancien nom de
et se rencontre plus frequemment. Donceel.
* II s'agit du village de Villers-Saint-Simeon , * Predit.
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ron-
tus,
LIVRE PREMIER. 479
et I aultre livre ou ilh sont declareis les martyrs des Machabeiens, et mult
d'aultres livres. — En cesli an morut Jonab, ly prinche de Anwerpe; si fut
prinche apres luy son fis Cletus. En chesti an fut fais evesques de Antyoche
uns sains hons qui astoit nomeis Ignasce. Item , Tan del incarnation LXXII , De Mins ignasce
conquist Tytus la citeit de Jherusalem et toutes les provinches de Galylee,
et destruite tout. Et tous les Juys qui astoicnt et avoient esteit, eaux et Jherusalem fut <
J * m . quettee par Ty
leurs predicesseurs, coupable de la mort Jhesu-Crist ilh metit a mort, et etdestrmt.
abatit tout Jherusalem, et enchachat tous ses anemys en temple Salmon; Fo1 - 135r °-
et puis ardit le temple et tous ses anemis dedens. Et porlant que les Juys l» terrible * en ** nc d h e *
avoient Nostre-Saingnour achateit XXX doniers a faux Judas, Tytus don- mort jiesu-cnst.
noit XXX Juys por unc donier a tous cheaux qui les voloient avoir ou
achateir. La oit ypluseurs qui achatarent de dies Juys, et puis les fisent
ovrir les ventres; si trovarent tant d'avoir d'or et d'argent qu'ilhs avoient
avaleit et mangniet, qu'ilh en furent tous riches. De chesti destruction en
fist Josephus I livre , en queile ilh contient et racompte plainement de com-
menchement jusques a la fien de toutes ches besongnes.
A chesti destruction furent les Juys si destrains de famyne , que la mere La meromaDgnoit son
mangnat la son enfan en la citeit de Jherusalem por destrendement ' de
famyne; et orent en toutes maniers tant a soffrir que nuls ne le poroit dire.
Enssi fut Jhesu-Crist* vengies, et les rendit le geridon de chu qu'ilh avoient
mys a mort le salveur de tout le monde, Jhesu-Crist, et ses disciples enca-
chies de leurs terres et les aucuns ochis. Nostre sires ne soy vengat mie
tantoist *; car ilh oit, entre chu que ilh fut crucifiies jusques a jour qu'ilh
fut vengies, XXXIX ans parfais. — A eel destruction furent mors et peris
XI C milhes Juys, tant parbatalhe com par famyne, et C m tant vendus com xiOmorfetoyeD-
mis en prison : chu fut tout ensemble compteit XII C m . En chesti an meis-
mes revient Tytus a Homme por veioir son pere, qui regnoit adont com
emperere. — Item, 1'an LXXIII, en mois d'avrilh , assemblat Cloberius, ly L'an lxxiii.
dus de Galle, mult grant gens, et com men chat a conquerre la terre des Goem entre Gaiiyent
Normans; et oit encontre eaux batalhes pluseurs fois, mains les Normans
furent toudis desconfis, el les metit li dus en sa subjection. — En eel an, en-
trat li dus Cloberius en la terre de Gascongne a XXX m hommes; mains ly
1 Por dcttrenche. B. 8 Aossil^t, tout de suite.
• Diex.B.
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480
CHRON1QUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Coment les GaHyens
orent a nom Fr»Q-
chois.
Cloberius, due deGalle,
conquestat grant terrc.
Det sains Euchars, Va-
leir et Materne.
L'an XXV.
Sains Euchars morut.
L'angle s'apparut a
sains Euchars.
Sains Valeir fut ercs-
que apres Euchars.
Grant myracle de sains
Euchars.
dus de Gascongne, qui bien avoit LX m hommes, ne se pot onques defen-
dre aux gens de Galle, que ons nom maintenant Franchois, tant astoient-
ilhs si gentis et durs aux armes. lib n'avoit gens en monde qui posist avoir
poioir a eaux. — Item , Fan LXXIIH , conquist ly dus Cloberius toute Gas-
congne, et les mettit en sa subjection. Chis dus Cloberius fut mult bons
batelhiers ', et mainlient mult bien son paiis en paix, et conquestat sour
ses voisiens grant lerre. — Chis Cloberius fut chis qui afranquit son paiis
de tregut que ilh rendoit aux Romans, por le servaige en queile Julius-
Cesar 1'emperere * les avoit mys enssi son temps, enssi com dil estpar-desus.
En eel an meismes, convertissoient fortement les gens en Germayne a la
foid Jhesu-Crist les trois sains proidhons : Euchars, Valeir et Materne; et
faisoit Dieu tant de myracles par eaux que ch'astoit grant mervelhe a tout
gens 8 . Or avient que, quant les trois sains deseurdis orent prechiet XXIII
ans le peuple devers la citeit de Trieve , que Euchars , ly so vera ins paistre
d'eaux, trespassat de chesti siecle, sour Fan LXXV. — Et deveis savoir que
uns angle s'apparut a sains Euchars, une nuyt anchois que ilh trespassast,
qui ly dest que Dieu ly mandoit que ilh devoit trespasseir ; et ly nomat le
propre jour. Adont vint sains Euchars a ses dois compangnons \ et leurs
dest que Dieu ly avoit mandeit que ilh trespasseroit, et les nomat le jour.
cc Si vos prie, chiers freres et amys , dest-ilh , que vos ayes toudis ferme
» foid et vraie cariteit entre vos , por l'amour de Jhesu-Crist, et vos gardeis
» des erreurs des dyables , que vos ne soyes par luy dechus ; car mon corps
» est d'hour en avant recommendeit a la terre, et recommande mon esperit
» a Dieu et a vos saintes orisons et proiers. Et apres je recommande a Va-
» leir le baston pastoraile, et ly prie que ilh garde sainte Engliese loial-
» ment et castement, si qu'ilh n'y ait a son temps nuls erreurs. Et faites
» tant que vos puissies avoir a bon fien la gloire de paradis \ » — Enssi com
sains Euchars disoit chu, si avient la et apparut subitement entre eaux une
cleire lumire, enssi com alumire, qui durat par I'espause de une heure:
1 Nous avons deja rencontre ce mot avec le sens
de combattant, comme ici.
1 Li noble batelhiers, B.
8 Ici il y a dans le manuscrit B les reflexions
suivantes : Et encor seroit de croire , jasoiche que
chu fust pure veriteit ; car Dies at poioir de toute
faire et defaire a son plaisier, et faisoient chu por
sa toy ensachier. Si que ons doit bien croire que
Dies demonstroit par eaux mainte miracle.
* bisciples. B.
5 La gloire celestine. B.
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LIVRE PREMIER.
481
et awec chesti clarteit fut des sains angles enportee ly arme de luy , et en
allant ilh dest : « Freres, soyes loials et proidhons, car je vos lay en chi
» triste siecle, et men vois awec Dieu en la gloire de paradis. » — Atant
sen allat la clarteit, et demorat la ly corps tous vuys * sens arme. Et chu fut
sour Fan deseurdit, le V e idus de decembre. Adont celebrarent ses disciples Foi. 135 v.
ses exeques devollemenl, et ensevelirent son corps en l'egliese Sains-Johans
ewangeliste, que ilh-meismes avoit fondeit devant etal defours de la citeit
de Trieve devant le moiene porte; et tout entour avoit benit la cymiteire
et aournee. Et la furent dites maintes ymnes et orisons, et plorarent mainles
larmes pour Euchars.
Apres la mort sains Euchars, fut Valeir prestre et evesque de tout le sainaVaieirfuii^con
.. 1 , 111 1 • • i> evesque de Trieve.
pans, et prechat le peuple devoltement, et mynat mult sainte vie par I es-
pause de XV ans; et dedens chi temps ilh convertil mult grant peuple a la
foid cristiene par Germaine et par Galle, por les signes et myracles que
Dieu demonslroit par luy. Et si parloit tant douchement et saintement , que
chascon soy convertoit * a ly ; et queile part qu'ilh alloit le siwoient mult de
gens 3 . — Chis sains lions futde mult bonne vie et multipliat grandement 4 la De sains vaieir.
loy Jhesu-Crist, com proidhons et sains et de bonne memoire. — Item, en
eel an, Wespasianus I'emperere entrat en la terre de Sezile a grant cens, et wwpawamis ronqimt
Krant lerres.
le conquestat par forche , et les mist en la subjection des Romans a cuy ilhs
astoient rebelles. — Et, en marche apres \ ilh entrat en la petit Bretangne,
que ly dus de Galle Cloberius avoit mys en sa subjection ; et les reconquist
Fan LXXVI, le promier jour de may. — Puis ilh entrat en la terre des Nor- fan lxxvi.
mans, et les remisl en sa subjection, Tan deseurdit, en mois de jule \ —
Apres ilh entrat en Bourgongne, et remist en sa subjection Borgongne,
Avergne, Lymosins, Gascongne et tous les paiis la alour. Et allat tant qu'ilh
entrat en Galle. Mains ly dus Cloberius ly vient a rencontre et le corut sus,
et oit la grant batalhe ; et y furent mult de gens mors des dois parties. Mains Guerre des Guii.»en>
les Galliiens astoient si poissans , que al derain les Romans ne porent endu-
reir leur forche; ains furent tous desconfis et sen refuirent vers Ron\me.
1 Vuez. B. Vuide sans doute.
* Trahoit.B.
* Et avoit grant siet apres luy* B.
4 Durement. B.
5 Dans le mois de mars suivant.
6 Ici vient dans le manuscrit B la phrase sui-
vante que ne contient pas notre texte : Item con-
questat ilh celle an meisme Trache et Acaroide ct
les mist en sa subjection.
61
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489
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Grant movement de
terre.
Le casteal de Coraul-
hon fut fondeis oil
sont lesCartroux.
Tongris, ly XII™* roy
de Tongrc.
LanLXXVIH.
L'an LXX1X.
L'an II1I".
Mervelhe.
De pape Lynus.
— Adont en ralat Wespasianus a Romme mult corochies de son maulaven-
ture; et ly dus Globerius reconquist tout chu que les Romans avoient con-
quist, se les remist tous en sa subjection. — Item, l'an LXXVI1, en mois
de June, fut si grant movement 4 de terre, que trois cite is chairent en la
terre d'Egypte et pluseurs fors cas teals. — En cesti an meismes , en mois
d'awoust , morit Cornulo , ly XI e roy de Tongre , en temps que ilh faisoit
faire unc casteal beais et joJis assets pres de Jupilhe, qui puis fut parfais
par aultre *, si fut appelleis Cornulo * apres ledit roy, ou les freres des Char-
troux sont a present fundeis deleis le pont d'Amercourt et de la vilhe 4 de
Pevilhe, — Apres Cornulo fut roy de Tongre son fis, qui oit nom Tongris.
et regnat XX ans. A eel temps astoit evesque de Mes Clemens, qui mult
astoit sains hons et mult bien demonstroit sa creanche et la foid de Jhesu-
Crist a toules gens de bonne volenteit : si baptizoit mult de gens par sa
predication. — Item, l'an LXXVIII, fist ly dus de Galle une grant assem-
ble , et sen allat vers Romme por prendre venganche de chu que ly empe-
rere Wespasiain ly avoit fait; mains quant ilh vient a Melan en Lorn bardie,
ons ly dest que Wespasiain astoit mutt bien ameis de ses gens, et que ilh
venroit encontre luy a si grant forche des Romans que ses gens ne le po-
roient souffrir. Adont oit Cloberius teile conselhe, que ilh retournat et
donnat congier toutes ses gens qui en rallont cascon en son paiis. — Item,
Tan LXXIX, recommenchat Tongris, ly roy de Tongre, a faire et parfaire
le casteal de Cornulo, et le nommat enssi apres son pere qui ravoitcom-
menchiel. — Item, Tan 1I1I XX en mois de fevrier, morut Cloberius, ly dus
de Galle, qui avoit regneit XLV ans; si fut apres dus son fis Ector qui regnat
XLVI1 ans. — Item, Can LXXXl en mois de jule, issit feu et flamme si grant
de une montangnequi seioit en Romenie, si que de gran feu la montangne
rumpit 5 et ferit fours el ardit pluseurs vilhes la entour, et pluseurs gens y
furent mors et bruis 6 . — En eel an meismes, le XXIII jour de mois de sep-
tembre, morut Linus ly thier pape de Romme, comptant le promier Jbesu-
Crist.— Chis fist a commandement de sains Pire , son predicesseur , que fcs
1 Muet. B.
* Notre texte porta : auUruy.
5 Coroilhon , hospice siiue au pied do la Char-
treuse, tout pres dc Liege.
4 Et de fa bonne citeit. B.
5 Iicmplit j par erreur dans notre texte. Je cor-
rige encore ici d'apres le manuscrit B.
6 Allusion a Teruption du Vesuve, qui detruisit
Pompei et Herculanum. Elle eut lieu en 79 et non
en 81.
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L1VRE PREMIER. 485
femmes velees entrassent en 1'engliese. Dieo fist mult de myracles par chesti Grans myraci«.
pape; car ilh faisoit les dyables fair des corps des gens, les mors resusci-
teir, et tant d'aultres myracles que sens nombre de gens soy baptisoient. — Fo ' ^ r °-
Et par especial uns des consules de Romme, qui avoit nom Saturne, avoit
une filhe qui avoit le dyable en corps; ilh Ten delivrat, mains Saturne
dest que ch'astoit enchantement, se le prist et l'enprisonat, et en la fin ilh Lyny Hpapfc fut de-
le decolat. Enssi fat martyrisyes Lynus, et son corps fat promirs mis en
Vaticane par-deleis la sepulture sains Pire; mains apres chu le fist Gregoire,
ly cardynal deHostie,a mult grant sollempniteit des clers esleveir; et fut
porteis en Hostie , en l'englise Sains-Lorent.
Apres, quant Lynus fat ensevelis, si fut eslus et fais pape Cletus, qui cietus fut fais pap e.
astoit de la nation de Romme del rue Patriciain % et fut son peire nomeis
Emilianus, qui * fat pape XII ans I mois et XI jours; et les altres dient XVII
ans trois mois et VIII jours, et les aultres XI ans. — Chi pape, par le com-
mandement sains Pire, ordinat XXI preistre a Romme en mois de de-
cembre. — En eel an prist a l'emperere Wespasianus une maladie de flu de wespasian morut
ventre que ons appelle la corenche 8 , de laqueile ilh languist pres de IX
mois; et puis se morit le XVI e jour de moi$ de novembre, qui fait ly an de
son eage* LXIX. Chis Wespasianus avoit dois fis : Tytus, ly anneis, et Dei . d « i§ fis We5 P a -
Domitianus, l'autre, qui astoient contraire de nature; car Tytus astoit de-
bonnaire, gratieux et plaisans, et soy faisoit de cascon ameir, et Domitianus
astois fels, malgratieux ct displaisans, et se soy faisoit de cascon hayr. —
A thier jour que Wespasianus fut mors, assavoir XIX jour de novembre,
fut fais Tytus emperere et coroneis; si regnat III ans, II mois IX jours. Chis Tytu§,i y xn-«empe-
fut bien endoctrineis de parleir latien , romans et grigois, et fut plantiveux
del donneir, et disoit qu'ilh avoit perdut son jour, quant une journee ly
passoit sens donneir beals dons a altruy. — Item, Tan MI** et II, s'ert i/Miiiii«etii.
allat Tytus l'emperere h grant gens sour le due de Galle; mains ly dus Li J n u fi s s t1esR a omanr
Ector, ly fis Cloberius, qui astoit preux et hardis, assemblat ses gens et
corrit sus Tytus et le desconfist; et retournat a Romme a grant perde.
Item, en eel an, morut ly prinche d'Antwerpe qui fut nommeis Cletus; si
1 Probablemcnt le vicus patricius , continuation et non a son pere.
de la via scelerata. s Dyssenterie. Le mot est reste en wallon.
* II n'est peut-etre pas super flu de fairc remar- 4 Je corrige d'apres le manuscrit B. Notre texte
quer que ce pronom relatif se rapporte a saint Clet porte rengne.
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484 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
J T b S o fi n lL?vay chicf ' u ' P" nc ' ie a P r ^s luy son fis Jonab. — Item , en eel an , fist ly prinche Jonah
chief de son paiis de Lovay f , portant que ilh astoit plus volentiers la habi-
tant en la vilhe de Lovay que altrepart; et oussi ilh y avoit esteit neis. —
En eel an s'avisat Domitianus, le frere Tytus l'emperere, et oit grant envie
de chu que son frere astoit plus grans sires de luy; se prist une puison et
Domitiain eopuisonat le donnal a la femme Tytus, qui fut nomee Gadoza, qui fut filhe Eneas,
la femme Tytus et . . .
se$ ii enfans. le roy de Hongrie , laqueile damme morut dedens III jours ; puis en donnat
ly faux Domitian a dois enfans Tytus, qui astoient mult beais dammoiseais
Wespasiain et Tytus et Gabos * si morurenl. Et quant li faux parjures oit
tout chu fait, si soy prist pres del donneir a son frere Tytus; mains ilh
n'oisat, car ilh ne savoit en queile manere ilh li poroit donneir. — Adont
soy avisal de une mult grant mervelhe, ear ilh prist le puison et le venien,
si entrat en la eusine de palais l'emperere, si jettat tout chi brodium 3 en
Domitiain enpuisonnat la viande que ons devoit drechier por servir en palais; et puis soy partit de
tout lefamiihe Tytus, , ^ . r . . r j.
et Tytus escapat par la, et sen allat parmy Homme joweir jusques apres-dyneir.
Ly emperere Tytus et tous ses hommes sont assis al dyneir, et ons servit
des viandes plaines de venyn par-devant l'emperere et par-devant tous les
aullres grans et petis; mains ly venyen astoit teile, que ons ne le sentoit mie
tantoist jusqu'a trois jours ou plus. En teile manere fuit enpuisoneis Tytus,
et tout sa masnie por 1'amour de luy. Si morirent tous; mains Tytus soy
dejunoit toutes les matineez de une medeeine, donl ilh astoit gardeis de
puisons tout le jour, se ne morut mie adont. — Adont fut Domitiain dolans,
quant ilh veit que tous sont mors les hommes qui avoient esteit al dyneir,
fours que Tytus *. Mains Tytus fut bien malaides gisant a lit; si dest qu'illi
ont esteit enpuisonneit par les coques B , si les fist mettre a mort. Quant
Foi. i36vo. Tytus fut garis, si chevalchat vers Jherusalem sor Tan IIIl x * et III, et
Tytus aDorut tous le aportat de Jherusalem, qui astoit destruite, si at pris tous les aournemens
]er a a Ro d mmS* r " sa " q u * astoient la qu'ilh avoit mys el garde de Josephus, si les at aporteis a
Komme, et furent mys en temple de Pais '. Chis Tytus edifiat a Romme
1 C'est-a-dire : fit de Lou vain la capitale de son Voir aussi le glossaire de Ducange, v° Broda.
pays. 4 Tout ce qui precede depuis : mains Tytus *oy
* Voila trois noms au lieu de deux qu'annonce dejunoit, etc., manque dans lc manuscrit B.
le chroniqueur. Les deux textes sont ici conformes. B Par les cuisiniers. Du latin coquus.
s Toute cette ordure. Brodi est reste en wallon, • Sans doute le temple de la Paix, dans le quar-
et Roquefort donne avec ce sens le mot brodier. tier du Forum.
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LIVRE PREMIER. 485
amphitiatrum '. — Item, Tan Ml** et MI, fut Tytus encor unc pau malaide
de venyn, et Domitiain son frere qui le visentat. ly dest qu'iih voloit faire
I'expruve devant luy dedont en avant, car ilh voloit mies qu'iih morisl
que luy. Tytus fut bien contens de chu, si le laisat faire I'expruve devant ^^^x"^* " 81
ly. Si avient que, en eel an meismes en mois de jenvier, faisoit I'exprue
Domitian devant l'emperere Tytus son frere, et portant que ilh astoit son
frere se ly laisoit faire 1'expruve a son propre hanappe * ou ilh avoit buit; si
qu'iih avoit a eel heure de venyn fort sour son doit, dont ilh reforbit s le
hanap quant ilh oit fait I'expruve. Si le donnat Tytus en la main si que a
boire, qu'iih fist 4 : ilh fut envynemeis * dont ilh morut dedens trois jours.
assavoir le XXVHI e jour de mois de jenvier deseurdit. Adont fist semblant
Domitiain qu'iih astoit mult dolant de la mort de son frere.
Et quant Tytus fut mors , si fut coroneis Domitian , son frere, qui regnat Domitiain fut i y xiii*
*■ » ' ... emperere et fut li
XIII ans X jours moins. A eel temps oit Sainte-Engliese unc secon Nero weonNwo.
qui ly donnat mult a souffrir; car ilh fut mult felon et contraire aux cris-
tiens, sy en fist pluseurs mettre a mort. — Ilh oit a femme Genoda, la filhe
de dus d'Acquitaine, a laqueile ilh confessat en secreit comment ilh avoit
enpuisonneit son frere Tytus. sa femme et ses enfans. Et ly dest encor Domitiain d e >i a *a
■ # . . . , . . . fpmroe tous les mals
qu'iih avoit donneit certain puison a son peire Wespasianus, de laqueile la qu'iih avoit fait.
maladie dont ilh morut ly astoit prise et li dist qu'iih avoit fait murdreir
sa propre mere qui l'avoit porteit 6 . — Quant la damme entendit chu, si fut
mult espawentee, car ilh dobtat que ilh ne fesisl enssi de lee. Si mandat
son pere le due d'Acquitaine, se li dest tot chu; mains ly dus ne le woult
mie croire. Et celle le fist encloure une nuit en sa chambre pasieblement,
et quant elle fut cuchie awec son marit l'emperere, se li demandat com-
ment ilh pot enssi avoir ochis son pere et sa mere, son frere awec sa femme
et ses enfans. Adont ly racomptat tout Domitian comment chu fut, si que
ly dus 1'entendil bien, et lendemain dest a sa filhe qu'iih ly avoit dit veri-
teit, mains de chu n'awist nulle dobtanche \ car ilh ne ly feroit ja maul,
1 Le Colysee. 4 Saos doute pour : cc qtTil fit.
* Et reforboir le hanap ou ilh avoit buit , ajoute s Entoxiteis, B.
le manuscrit B. * Ce membre de phrase, necessaire au sens et
3 Gar nit, frotta. £videmment e'est le meme mot que me fouroit le manuscrit B, est omis dans no-
que fourbir et refourbir, qui sont rested en fran- tre texte.
cais avec un sens un peu different. T C'est-a-dire : qu'elle ne devait rien craindre.
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486 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
solonc chu que ilh poioit veioir. Adont soy partit et s'en rallat en son paiis ,
Nota desfemmes. e t la damme demorat a Romme deleis l'emperere son marit. Elle resemblat
les femmes, et a chascon, qui devant ly venoit, elle disoit comment son
saingnour l'emperere ly avoit tout racompteit comment ilh avoit fait tous
ches mauls deseurdis. De quoy chascon s'enmervelhoit. En eel an morut
Eneas, ly XII e roy de Hongrie, qui avoit regn oil XXXVI ans; si regnat
Goubas son fis apres luy XXIX ans. — Item a eel temps fut Romme tout
plaine del famme que ly emperres ' avoit fours jetteit sour l'emperere, et
Domitiain tist ochire tant que l'emperere le soil; si en oit grant coroche, et fist sa femme fendre
del bodine * jusques a la boche, si que toutes entralhes ly issoient hours de
son ventre; et apres le fistardre, et le pourdre venteir en voie. Et fut chu •
sour Tan LXXXIIII, en mois de marche. Mains quant ly dus d'Aquitaine
soil la veriteit, si fut mult corochiet, et jurat tous ses dieux que ilh ferat
allianche al due de Galle por guerroier Domitiain, et enssi le fist-ilh asseis
tern pre la apres.
En Tan LXXXV, reprist ly emperere Domitiain une aultre femme, qui
fut nomee Gendora, et fut la filhe le roy d'Athennes. De cest damme oit-ilh
une fis qui fut nomeis Nerva, et fuit puis emperere de Romme apres son
peire. En eel an, en mois de may, morut li conte de Flandre Julius; si
regnat apres luy son fis Jonadas XXXI an. — En cesti an meismes , alat ly
dus Abron d'Aquitaine en Galle, et demonstrat a due Ector comment ly
emperere Domitiain avoit my» a mort sa filhe que ilh avoit a femme , et
Foi. 137 r>. comment ilh ly avoit oiit cognostre que ilh avoit malvaisement son pere,
sa mere, son frere et la femme son frere ' awec ses dois enfans mis a mort,
et awec chu bien V c hommes qui tous furent enpuisonneis awec Tytus,
son frere. Tant fist ly dus Abron , que ly dus Ector ly oit encovent de luy
aidier et demandeir ses hommes. — Adont s'avisat encor ly dus Abron , et
sen alat en Hongrie a roy Gombas, et li dest tout le fait, et comment Do-
mitiain avoit mis a mort par puison sa soreur Godoza. filhe a roy Eneas son
Guerre entre le dus pere , que Tytus avoit a femme. Quant ly roy Gonbas entendit chu, si fut
Roman* 1 " 6 e e * mult corochies et dest que ilh vengerat sa soreure, et priat al due Abron
1 Prononcez Yemperresse, rimpe>a trice. On voit s Notre texte porte et sa femme, ce qui doit etre
que, dans l'orthographe suivie par le ehroniqueur, une faute de copiste. Jc corrige d'apres le manu-
le feminin differe peu du masculin. sent B.
* Le nombril. Boudine dans Roquefort.
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L1VRE PREMIER. 487
qu'ilh sen ralaist en son paiis; si entrat en l'empire a unc des costeis, et
ly dus de Galle a l'autre, et ly roy de Dannemarche a l'atre costeit, leur
cusien *. Enssi fut faite. Its ont mandeit leurs oust de tous paiis, en cheval-
chant vers Romme sour l'an IIII" et VI ; et entrarent en l'empire a trois Lan Iin " el VL
costeis a feu et a flamme. — Quant Domitiain le soit, si assemblat ses gens
bien C m hommes et plus , et sen allat promiers a costeit ou ly roy hongrois
et danois venoient droitement; et se soy combattit a eaux mult firemen t, et
oil a chest fois victoire. Et ly roy hongrois y perdit dois fis et VI m hommes,
et ly roy danois y perdit unc frere et IIII m hommes, et ly remanant en
rallont en leurs paiis. — Apres allat 1'emperere contre cheaux d'Aquitaine,
et oit batalhe a eaux et Ies desconfist encors : et fut la mors ly dus Abron
et XIII C de ses hommes. Chu fut l'an IIII** et VII. Apres cest victoire s'en i/tniui^i vn.
allat Temperere contre les Galliiens et oit batalhe a eaux; mains les Romans Gallons omdesconiis
furent tantost desconfis, car les Galliiens astoient poissans, si les abatoient
enssi com brebis. Et y perdit ly emperere XI m hommes , et furent prison-
niers VI™ ; si refuirent ly remanant a Romme. — Adont assegat Romme li £<*<* a s «*g at Rom -
dus Ector de Galle , et y seit XV samaine qu'ilh n'y pot riens forfaire. Et
puis soy partirent, porlant que ons leur dest que ly roy d'Athennes venoit
aidier son genre Domitiain, qui avoit sa filhe a femme; et sy amynoit awec
ly HI aultres roys qui amynoient tant de gens que toute terre en astoit
coverte. Et chu le faisoit-on croir? al due, affin qu'ilh soy deslogast. Atant
retournat Ector et revient en son paiis; et laisat le siege par te conselhe de Ector mioit ie con
* seihe de 8*8 barons ,
ses barons, car ilh faisoit volentiers le conselhe de cheaux cuy ilh avoit <*r >ih 1. astoient
troveit bons et loyals. — Quant Domitiain fut enssi quitte de siege, si rat
mult Hies, et devient adont plus malvais com devant n'avoit esteit. Ilh fut
oussi malvais ou plus que onques n'awist esteit Nero, qui tant fist de maul.
— Item, l'an UH XX et VIII, fist Domitiain Temperere banir fours de son Laniin^et vm.
empire tous les philosophes et les nygromanchiens qui astoient a Romme, ho \£ u $\onph™ l ?i
et fist ochire et mettre a mort XXI des plus grans senateurs et prinches de °£™£ Romme! 11 *
Romme, portant qu'ilh le reprendoient des mauls que ilh faisoit. Et envoiat
encor en eel an pluseurs prinches et senateurs en exilh. — Item, l'an IIII"
et IX, en mois de marche, fut commenchiet a faire en la citeit de Romme
1 Et priat al due Abron qu'il s'en ralast en son dus de Galle a l f autre, et ilh enteroil al tierche et
paiis , et entrust en l'empire a unc des costeis , et li avecque luy son cusien le roy de Danemmrch*. B.
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488 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Ly Gapitoie et Pan- le Gapitole et une aultre edifisse qui fut nommeis Pantheon, et pluseurs
theon furent fais • - ■- 4 ■ ■ •• ~ r . • ,
Romme. aultres temples, lesqueues furent parfais en mois de jule lannee apres,
LanLxxxx. assavoir Can LXXXX. En tous ches temples fist mettre ly emperreur
ymaiges d'emperrere faites a sa sem blanche, d'or et d argent, et faisoit par
son orguelh aorer ches ymaiges com dieux. — Et, eel an, s'avisat l'empe-
De Domiiiain. rere Domitian, et assemblat ses oust; si alat en Aquitaine et exilhat la terre,
mains les gens de paiis soy misent en la subjection de son empire par tregut,
enssi demoront-ilhs en pais. Puis montat sour mere, et jurat grant seriment
qu'ilh yroit destruire Hongrie et Dannemarche, et si revenroit par Galle
destruant tout. Mains unc chevalier, qui astoit cusien a Ector le due de
Galle, soy partil de l'emperere pasieblement ', et vint a Lutesse, et comptat
Foi. 137 vo. a i d uc Ector tout chu que Domitiain avoit dit et jureit.
Quant ly duc entendit le chevalier, sy fut mult corochies; se fist grant
seriment sour ses dieux Jupiter et Appollin que ilh en yrat en Hongrie et
en Dannemarche querre son anemis , ne ja ilh n'atenderat que ons le vengne
assalhir en son paiis. Ghis dus Ector fut mult valhans hons et poissans;
si assemblat ses gens et soy mist a la voie; mains anchois qu'ilh venist en
Hongrie, astoit ja venus ly emperere et les avoit desconfis en batalhe et
l an uii-et xi, mis en la subjection des Romans. Et fut la batalhe Tan UII" et XI , en mois
Domitiain mist Hon- de may. — Et quant Domitiain oit enssi mys les Hongrois en sa subjection,
hontaige. ilh s'en partit et vint vers Dannemarche. Si oit batalhe aux Danois, en
mois de decembre, et les desconfis t; et s'enfuyrent ly roy et ses gens en
une citeit qui oit nom Paladas, en laqueile ly emperere les asseghat, et y
seit VI mois devant qu'ilh n'y pot riens forfaire. — Et en chi terme vint la ly
L'an mi« at xii. dus de Galle, sour Tan MI™ et XII , en mois de junne. Et deveis savoir que
ly dus Ector n'avoit mie tant de gens de motie que ly emperere avoit; et
finablement ly dus Ector les corit sus, et si desconfist les Romans; et fut
Ector de Gaiie pri»t ly emperere pris par forche, car ly dus Ector l'abatit al josteir, et ses gens
Domitiain etdeseon- J . r r r 1 J . . . J 7 . °
fist ses gens. le prisent. — Adont fut ly emperere myneis en la citeit , et la fut faite entre
eaux une accorde que ilh donnat lettres aux Danois, et oussi envoiat le
parhelles aux Hongrois, que jamais ilh ne demanderoit a eaux tregut, et
les quittat le servaige ou ilh les avoit mys, sens jamais riens a demandeir
por li ne por ses successeurs; et quittat en teile manere le duc Ector son
1 Coyement. B.
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LIVRE PREMIER. 489
tregut qu'ilh devoit aux Romans '; mains chu ne poioit-ilh faire de due dc Domitiain qui tut a Hon
Galle, solonc la constitution de Romme de chouse publique , portant qu'ilh Kiwi leuM^t £>r
ne l'avoit mie conquis. Si que ilh les quittat sa vie tant seulement, car sonranc 0B *
Julius Cesar le conquist a son temps , ch'est-a-dire le reconquist; car de-
vant Julius l'avoit conquis uns altre roy de Romme, enssi qu'ilh fait men-
tion chi-devant. — Si que portant lyemperere Domitiain ne le poioit quitteir
perpetuelment solonc la loy qui astoit adont a Romme. Et portant dist-ons
et le truet-ons en l'escripture, jasoiche chouse que ly dus de Galle Clobe-
rius por sa forche ne vosiste point payer le tregut a son temps, nonporquant
ilhs n'astoient mie affranquis, ains astoient tousjours retributars aux Ro-
mans; mains ilhs ne le voloient mie paiier por leur forche, et enssi demo-
ront-ilh en pais jusques a temps Constan le gran Cesar , que ilh furent remis
a paiier, enssi com chi apres serat deviseis. Mains Dannois et Hongrois
poioit-ilh bien quitteir, puisqu'ilh les avoit conquis, et anchois qu'ilh re-
tournast a Romme, car s'ilh astoit retourneis a Romme, ilh ne les poroit
quicteir. — Item, l'an IIII" et XIII, en mois de marche le derain jour, i/miiiii«xiii.
revient ly emperere a Romme, de quoy les Romans furent mult dolans; et
en devant ilhs astoient liies et joians de chu qu'ilh quidoient que ilh fust
mors en la terre de Dannemarche, ou ilh avoit esteit desconfis. Et adont
ilh les fust plus fel que ilh n'avoit oncques esteit le temps devant.
En eel an meismes defendit Domitiain que nuls ne plantast vingnes Domitian defemiit H ur
dedens Romme, por son malvaiseteit et fellonie. — A cheli temps astoit gne.
pape de Romme li thiers pape Cletus, qui devant avoit esteit evesque de cietuspape.
Mes. Chis pape ' Cletus blamoit mult et reprendoit l'emperere Domitiain
de chu qu'ilh faisoit; de quoy l'emperere soy corochat fortement a luy.
Et le fesist mult volentier ochier, mains ilh n'oisoit; car chis pape Cletus
astoit mult bien ameis de toutes gens, portant qu'ilh les demonstroit si
douchement a toutes manieres de gens la voie de salut. — Chis pape Cletus cietusfutmaitbons.
avoit si grant amour et cariteit aux cristiens, dont ilh astoit sovrains peire,
que tous les povres qui avoient rechiiit le sacrament de baptesme ilh les
avoit en son escript, et les aidoit a sourtenir de tout chu que besongne
leur astoit; car ilh ne voult oncques souffrir que nuls cristiens fust men- Fouwf.
1 Mot omis dans noire texte. Cletus est omis dans notre textc et retabli
* Ce membre de phraser depuis : li thiers pape d apres le manuscrit B.
62
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490 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
dians a cheaux qui n'astoient mie en vraie loy ne en bon foid creians. —
& ibte io n!!hauY!Sr k' an """ e * XIIJI , commenchat sains Johans ewangeliste a reprendre
pereresa ioy. fortement 1'emperere Domitiain de chu qu'iHi ne creioit en Dieu, et que ilh
ne soy faisoit baptisier et Unites les gens de son empire; de quoy ly era-
perere soy co roc hat mult fortement. Si avient unc jour que ly emperere
demandat a sains Johans qu'ilh ly devisast sa loy. Et sains Johans ly devisat
mult diligemment, et dest finablement que cheaux qui ne creiront en Dieu
qui fut crucifiies et ne prenderont baptesme, serons tous condampneis aux
ynfers com chaitis, ou ilhs auront a tousjoursmais paynes, duelhe et
angousses; et cheaux qui creiront fermement en Dieu, le roy de gloire,
Jhesus , qui por tous ses amis a jetteir des paynes et del ordure d'ynfeir
souffrit mort et passion en crois, et oussi qui prenderat baptesme en son
nom, cheaux serontsalveis et auront en paradis vie permanable % qui jamais
ne prenderat fin , ains y serat chascon en joie. — Adont dest 1'emperere a
sains Johans : « Or me dis : tous cheaux qui ont pris baptesme et croient
» en ton Dieu sont-ilh salveis et vont leurs armes en paradis sens aultrez
» chouses fa ire? » Sains Johans respondit : « Qui croit en Dieu fermement
» et ait baptesme , ilh serat salveis, s'ilh est de bonne vie. » Et dest Domi-
tiain : « Que vues-tu dire de bonne vie, et queis estas puet chu eistre?»
Respont sains Johans : « De eistre proidhons. sens faire a nulluy maul sens
» cause, et rendre grasce a Dieu des biens temporeis qu'ilh ly envoie. » Et
dest Domitiain : « Queile grasce ly doit-ons rendre? est-chu or ou argent? »
Sainsjobansexpoitea Et dest sains Johan : « Nenylh, mains de dire a luy bonnes orisons et
I emperere le samte . .
Escripture. » loienges, enssi com ilh les at estaublit en terre. » — Et dest 1'emperere :
« Or, me dis queiles sont ches orisons, et que chu est a faire? » Respont
sains Johans : « Ilh en y at depluseurs manieres, et toutes sont bonnes. »
Et dest 1'emperere : cc Lesqueiles sont les plus especiauls? » Respont sains
Johans : « Ilh y est la pater nosier que-Dieu fist luy-meismes, qui est teile. »
Adont ly devisat sains Johans la pater noster, enssi com ilh giest en escript.
Mains ly emperere ly dest que ilh ly declarast en romans chu qu'il disoit. —
sains johans expoisat Adont ly expoisat sains Johans el dest enssi : « Pater noster, quies in celts,
a I emperere en ro- J ■ ' *
man la pater noster. » sanctificetur nomen tuum. » Et puis dest : « Ch'est-a-dire : Peire nostre,
Pater noster, qui es in . ■ • i 1 * • . «•/»•# j * » 1 •
cdis, sanctificetur » qui es en chiel, clonne que ton nom soit sanctities; cest-a-dire que nos,
noroen tuum.
1 Perpetuie. B.
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LIVRE PREMIER. 491
» qui summes appelleis cristiens apres le nom de Jhesu-Crist, aions recla-
» mour a la grasce de Sains-Esperis, qui sanctifiie l'arme et ly donne volen-
» teit de Dieu servir et ameir. Gar ly nom de Dieu est toudis sanctifiies, et
» luy-meismes tous jours parfaitement; mains nos n'estons mie santifiies ,
» jusqu'a tant que nos serons en paradis. Enssi s'ensiet que nos ly priions
» qu'ilh nos donne paradis. » — Adveniat regnum tuum; ch'est-a-dire : Adveniat regnumtuum.
« que Dieu nos maine en paradis. Car ch'est-a-dire : Sire Dieu , donne que
» sainte Engliese, chu est aux cristiens en cuy il rengne, vengne al
» royalme de paradis; car Dieu ne soy regne mie en tous hommes , anchois
» y regne ly dyable, sicom ens pay ens, sarasiens et juys et tous mauls
» creians, et oussi es mauls cristiens qui sont en pechies morteils, ou Dieu
» ne regne mie jusqu'a tant que ilhs sont confesseis. — Fiat voluntas tua, Futvoiunustua sicut
» sicut in celo et in terra; c'est-a-dire : sires, donnes-nos que ta volenteit
» soit faite de toutes chouses en terre enssi com en chiel. Car en chiel est-
» ilh faite sa volenteit parfaitement des angeles, des archangeles, des
)> thrones, des principals, des potesteis, des virtutes, des dominations,
» des cherubins et des seraphins, des patriarches, prophetes, apostles,
» martyres, confes, vergues et veves, et tous les esluis qui vivent devant
» Dieu et obeissent a ly, et n'ont jamais talent del penseir ne faire le con-
» traire que sa vol on teit et son commandement. Et portant li priions : soit
» fait ta volenteit en terre enssi com en chiel , car en terre at bien des
» gens qui ne font mie tout la volenteit de Dieu. — Panem nostrum coti- Foi. t38*>.
» dianum da nobis hodie; c'est-a-dire : nostre pain cotidiain nos donne Panem nostrum coti-
» huy. C'est-a-dire que ly hons, qui est de dois natures corporeile et spiri- die. ano s °
» tuele, demande a Dieu qu'ilh ly donne cascon jour le pain de corps et del
» arme : ly pains del arme si est sainte doctrine et les predications ' de Dieu
» faire et mettre a oevre, car de chu vit ly arme; et le pain de corps est la
» substanche de corps. — Et dimitte nobis debita nostra, sicut et nos dimil- Eidimitu nobis debiia
* # nostra sicut et nos
» timus debitoribus nostris f ; c'est-a-dire : sires, pardonne-nos tous nos dimiuimusdebiiori-
» meffais , enssi com nos pardonnons nos meffaiteurs. Chi poies savoir que
» chis qui vuet Dieu ly pardonne ses meffais et ses pechies, ilh covient
» qu'ilh pardonne cheauz qui ly ont meffait; et s'ilh ne vuet pardonneir,
1 Le manuscrit B porte : les predications des ' Le manuscrit B n'a pas reproduit ce fragment
commandemens. du Pater-noster, ni ceux qui suivcnt.
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492 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
» dont priiet-ilh a Dieu son dampnation ; car ilh ne prie altrement que Dieu
» ly pardonne ses meffais, enssi com ilh pardon ne a cheaux qui ly ont
ei nc nos inducasin » meffait. — Et ne nos inducas in tentaiionem: c'est-a-dire : sires, deli-
tempt at ion em. .
» vreis-nos, et ne souffre que nude temptation nos jette en pechies, et que
Se Amen ra ° os a n,al °' w 'y dyable Iia it poioir sour nos. — Sed libera nos a malo; c'est-a-dire :
» sires, delivres-nos des mals etdes paynes, qui sont en chi siecle et en
» l'autre. — Amen; c est-a-dire : sire , otroie-nos et si confirme toutes les
» chouses que nos requerons a Dieu desus en la pater-noslre. »
Et quant Sains- Johans oit enssi expoiseit la pater-nostre a l'emperere, se
ly demandat l'emperere Domitiain : « Or, me dis : n'est-ilh rendus a ton
» Dieu aultre serviche que dire teiles chouses? » Respons sains Johans:
« Cascon fait penitanche solonc chu que sa conscienche ly apporte de faire,
» por acquiere pardon et la vie permanable ou les grandes joies sont. »
chi eipoiwt sains jo- Adont demandat l'emperere : « Queiles sont les joies de paradis? » — Res-
ban a Domitiain les m ... ..
joies de paradis. pondit sains Johans : « Sire, chis qui ferat tant qu'ilh ait paradis por son
» habitation , ilh aurat toudis perpetueilement toutes les joies de monde
» que ons poroit deviseir; mains une partie vos en deviseray. Qui serat en
» paradis ilh aurat toudis jour sens nuyl, sapienche sens defaute, jovente
» sens vilheche, santeit sens maladie, vie perpetuele sens morir, liieche
» sens tristeure, gloire sens molieste, assasis ' sens mangnier ne bo ire,
» la noble compangnie de la virge Marie, la mere de Dieu, des angles, ar-
» changles et tout le court de paradis, sens departir a tousjourmais , le
» loienge de Dieu sens cesseir, la cognissanche de la sainte et parfaite tri-
» niteit, le cleire veue de Dieu, toutes joies perpetuelment et repouse sens
» labeur , et tant d'aultres innumerables ' joies, qui n'est orelhe qui les po-
» roit oir, ne oelhe qui les poroit veir, ne si ne poroit en cuer d'homme
» monteir ne penseir les joies que Dieu at apparelhiet a cheaux qui l'ame-
» ront; et aronl si grant poioir, qu'ilh seront tantoist ou ilh voront; et
» passeront parmy les mures et toutes chouses sens rompir ne enperier, ne
n enssi traweir; et serat cascon corps VII fois plus cleire com ly soleal ne
L'emperere demandat » soit. Tout chu est en paradis, et tout le contraire est en infeir. » — Adont
a sains Johan I'estat *
dynfeir. demandat ly emperere : « Queue est ly estas dynfeir? » Adont ly dest
sains Johan : a II n'a estat en ynfeir que hisdeux et terribles paynes, car
1 Rassasie. * Infinitimes. B.
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LIVRE PREMIER. 493
» tos cheaux qui y sont a tousjours y sont travel hies, mangnies de ver-
» mynes, de raynes, coluevres, crapaux, serpens, basiliques, dragons et
» scorpions ; et apres y sont les paines del grant paour et del hisdeur de la
» veue des dyables, et les paines des erreurs, et les paine de famynecrueux,
» et la paine de seuf 4 ardant, qui toudis dure sens solere *, et la peine de
» froit sens extimation , et la paine de feu ardant que ons ne poroit estin-
» dre, et la paine de flareur de souffre, et les lis 8 tenebreux, et la com pa n-
» gnie des dyables, et les enlongemens * de paradis, et les paines d'aighe
» variant, et la paine del privation eterneile de la veuwe de Dieu, qui est
» ly plus grant de tout les altres. — Encor y at des altres paines, car les
» dampneis sont plus dolans de leurs paines que les salveis ne soient de
» leurs joies; et auront tosjours plus grant tristeurs de chu qu'ilh auront Fo, « l39r# -
)> perdu t paradis sens recouvranche. L'atre paine serat de chu que ons
» moral toudis , et ne cesserat ja par chu cest mort. Et tant d 'a litres p&ines
» at en ynfeir, que ons ne les poroit dire. »
Puis dest sains Johans a Domitiain : « Sire, je vos ay deviseit les gran des 8, jj£^ D ^^
» joies que ons at en paradis et les grans biens, et oussi par queile voie ons
» y puet parvenir; en apres les grandes paynes et tourmens que ilh at en
» ynfeir, et la voie par laqueile ons y puet legierement parvenir. Se vos
» prie que vos oyeis et entendeis les parolles de Dieu , c'est-a-dire que
» vos vo retraiheis de maul et serveis Dieu , si lassies vous faux ydolles
» qui n'ont forche ne vertut; car les response qu'ils rendent chu est por
» vos a dechivoir, car chu sont dyables qui parollent dedens et se sont
» fait vos ydolles dor et d'argent, de coevre ou de fust. Si les ont fait les
» hommes, el Dieu at fait les hommes qui ont fait vos ydolles par les
» noms des planetes de chiel que ly vraie Dieu at fait , comme ly soverain
» createur; mains chu fait ly dyable qui les fait apelleir enssi, qui tegne
» en elles. — Vous aoreis Jupiter et Mars, et Apolliien et Venus : chu sont
» 1111 planetes et creatures de soverain createur nostre sire Jhesu-Crist;
)> mains elles ne s'en songnenl de riens, sicom jay dit, ains chu est ly
» dyable qui parol le en vous ydolles et qui vos dechoivent et ont dechut
1 Seuf pour soif. 8 Pour lieux. Nous avons deja rencontre" cetle
• Soller dans Roquefort. II est ici question (Tune expression,
soif inextinguible. * Pour eslongement.
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494
CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
» vos antecesseurs jusqu'a chi. Mains oieis et reteneis la parolle de Dieu
» qui fist chiel et terre et paradis et tout chu que dedens est, et hommes
» et femmes, beistes et oy seals; et fist oussi les dyables tout promierement
» et les jettat aux infeirs por leurs arguelh, sique leur creatour; laisies le
» serf, si creieis le maistre, et metteis a oevre chu que je dis, se yreis en
» paradis, car altrement yreis en ynfeir, se vos teneis vostre loy, que ja
» n'avengne.
» Beaux sires , fachies le dyable bien gran duelhe avoir al oiir parleir
» de Dieu, car qui est de Dieu ilh oil volentier parleir de Dieu, et qui
» nest de Dieu ilh ne le puet oiir. Bonne oevre fait chis qu'il oit, quant ilh
» retient et le met a cure; et qui ne sceit les conimandement de Dieu, si
» les demande , car chis qui les demande ilh deraande la voie de paradis ,
» et chis qui les ensengne et les dist ilh ensengne la voie de paradis. Et
» quant ilh remainte en bonnes oevres ilh en rechoit la coronne , car qui
» sofferat en chis siecle temptation, el ilh soit ferme et exproveit, ilh
» aurat la coronne que Dieu at promis a ses amis ; car Dieu qui est vray
)> juge ly donrat a perpetuiteit. » — Adont dest Domitiain a sains Johans :
« J'ay bien entendut chu que tu as chi declareit, et toy dis que je moy
» voray aviseir et toy responderay dedens HI mois. » Atant soy partit sains
Johans qui quidat bien avoir convertit le dyable et endormit; mains ilh
fut tout altrement, car ly vief dyable, qui tous jours est aparelhies del
faire mal et del defendre le bien a faire, entrat unc jour en une des ydolles
et dest a Domitiain : — « Empereire , porquoy tu lais enssi dechivoir de
» chesti mescreans qui toy vat sermonant de ses faibles, et toy fait croire
» en son Dieu qui est a moy subgis? Gar je suy ly soverain Dieu qui soit,
» si toy prie que en moy aies ta creanche ferme ; si auras apres ton obiit
» ton habitation en mon paradis, et je veulhe que tu faiche tout ton vis-
» quant savoir a tes gens, com Dieu je toy constitue et te fais aoreir por
» moy. » Enssi enortat ly dyable Domitiain Femperreur tant que, al chief
des trois mois que sains Johans revieneta ly, ilh ly responditque ilh ne
faisoit que mentir et que sa creanche astoit malvaise. — Adont soy partit
sains Johans tout corochiet de Femperreur, mains unc pau apres ilh revient
a Femperere, et ly prioit todis de croire en Jhesu-Crist; lyqueis le refusat
por le conselhe de dyable, qui ly enortat de sains Johans mettre a mort
Domitiain mist saios par martyre; se le fist bolir en oyle. mains ilh ne ly cravat riens.
Johanbolirenloyle. r J ' J 1 J D
Domitiain parolle
sains Johans.
Ly dyable parolle
Domitiain.
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LLVRE PREMIER. 495
Sy avient que ly dyable en or tat tant Domitiain , qu'ilh envoiat sains Foi. 139 ▼•.
Johans en exilhe en une isle ' de mere, qui est appellee en latin * Pathmos, Domitiain envoiat sains
Tan 1IU* X et XV. — Si avint unc jour que sains Johans dormoit, et vint
une angle a ly, et ly prist et ly ravit son arme de son corps, et Ferny nat en Langie ravit sains j -
paradis et ly dest : Quod vides scribe, ch'est-a-dire « escris chu que tu vois. »
Et la le mynat ly angle par tous les lis de paradis, si qu'ilh veil les secreis
de Dieu; et puis le ramynat en son corps et rentrat ens; si en fist unc libre
que Sainte-Engliese appelle l'apocalips sains Johans. Et chi libre contient sainsjohansfistiapo-
lous les secreis et overs 8 de paradis. — Et par especial ilh contient en chi
libre que ilh veit I citeit qui chaioit en unc puche d'abysme, laqueile asfoit De ^ n t * i v t ^ t MC8ains Jo "
en trois parties , et en cascon partie avoit IX voies. Et est ly fons d'abysme
infeir, et la citeit qui chaioit en puche seront les gens qui seront dampnees
et perdus a jour de jugement. Et qu'ilh astoit en trois parties devisee
signifiie trois manires de gens : sarasiens, juys et cristiens. Et dist que les
cristiens l'aront piour que n'aront les juys ne les sarasiens. Etchu est raison,
car ilh ont teile chouse promis a Notre-Sangnour que les juys ne sarasiens
ne promisent oncques. Et ches sont les faux cristiens qui bobent* Dieu. —
Et les IX voies sont les IX paines d'ynfeir, dont la promier paine sy est de Desix P i.inesd>fers,
feu qui tant est chaux et grans, que se toutes les aighes de monde coroient
loudis parmy n'en stinderoit mie unc seul carbon. Et portant dist nostre
sire : « En ynfeir est ly feu qui jamais n'estinderat. » De eel peine doient
avoir grant paour les useriers; car sains Johans meismes en dist : « Fuons, contre i« useriers.
» fuons, car ly chiel et terre ardent. » Par le chiel ons entent les amis de
Dieu qui ardent del amour nostre saingnour por avoir et acquiere. — Ly La second* paine est
seconde paine est de froidure, qui est sy froide que se toutes les montan-
gnes de monde astoient unc carbon ardant, et fuist la, si seroit-ilh tantoist
estins , oussitoist que ly oulh clout ou ovre \ De chesti payne doient avoir
paour les orgulheux. Et por chu dist Ysai'e ly prophete : « La forche de Contre ie* orgulheux.
» pueple descenderat aux infers, et les orgulheux seront haiis et abassies;
» enssi com ly fors vins dechuit cheluy qui trop en boit, seront les orgul-
» heux decheus ; mult est uns y vre hons decheus, car ilh ne part mie soile-
1 Ces mots : en une isle, sont orais dons noire et qu'il faut lire ovres, oeuvres.
texte et retablis d'apres le manuscrit B. 4 Se moquer de Dieu. Roquefort donne le sub-
* En la sainte escripture. B. stantif bobc, plaisanterie.
* Jc suppose qu'il y a transposition de la lettree * Ce qui equivaut a dire : en un clin d'oeil.
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496 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
» ment le sien , ains depart awec tout son sens et cognissanche. » Et si
avient oussi pluseurs fois que ilh chiiet en la merde et la longangne ', sique
les gens soy gabbent de luy. Et encor est plus decheus ly orgulheux, car
par orguelh puet-ons perde le siege de paradis et les riceches permana-
bles; et se chiet-ons par orguelh en la merde et ordure d'ynfeir, et s'en
gabent les gens. Et porta nt dist David que les droiturieres sont joians de la
La tirche payne soot venganche que Dieu prent des orgulheux gens. — La tirche payne est des
vers et serpens. m • « • ■-• t» • ■
viers et serpens et dragons; de quoy nostre sires dist : « En ynfeirs est ly
contreiesdetracteui*. » veirs qui ja ne morat. » De chesti paine doient bien avoir paiour cheaux
que ont malvais langues , qui les mals parolles diient de leurs voisiens en
derier \ Et portant dist sains Jaque que a unc petit frain puet-ons meneir
unc grant cheval, et a unc petit govrenal tourneir une grant nef, et a unc
Dei mai lengc. petit feu ardre unc gran bois. La lengue est unc petit membre, mains elle
at mult grant forche; ly langue est ly feu qui embraise tout le corps; les
langues sont les plus trenchant espees qui soient, car ons fait de une langue
. (eile plaie, e'est-a-dire ons en dist teile parol le, que jamais ne serat sannee.
— Ilh n'at femme en monde si bonne, que une lengue ne Fafolle de chi al
cuer par males parolles de diffamation , que jamais n'arat honneur et sens
cause. Ons ne puet plaie de laingue resaneir , qui auroit tous les cyrurgiens
de monde. Ilh est ' de trop maul venyn de celle langue meisme de quoy
Poi. i4o r°. nos loions Dieu , et de quoy nos disons nous orisons et benissons Dieu ; nos
en disons maul et diffamons nos gens , qui sont fais a la semblanche de
Dieu ; et e'este contre nature, car un$ hons ne doit mie eistre bons et mal-
vais ensemble, nient plus que de une fontaine ne puet issir dois aighes,
De u laingue. ameire et douche. El ly arbre qui bon fruit porte ne doit mie malvais fruit
porteir, et enssi bouche qui bien dist ne doit mie dire maul. Et s'ilh savoit
bien meismes que chu fuist veriteil, e'est trop grief pecchiet de diffameir
aultruy, car ly mai avoigle et* estaint le bien. Et portant dist sains Augustin
que ch'est gran pecchiet de jugier les coraiges des gens, et grant fellonie
de reprenre aultruy par suspicion. -
La quarte payoe. La quarte payne est de puour ou de flaireur, qui est si grant, car qui
auroit toutes les ordures de monde ensemble, si seroit chu pou de flai-
1 Boue, cloaque. Loingaigne dans Roquefort. 5 Toujours pour ist, il sort.
* Par-derriere. * A t par erreur dans notre texte.
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LIVRE PREMIER. 497
reur envers la puour d'ynfeir. De chesti payne doient avoir grant paour Com™ u* luxuries.
les luxurieux. Et dist sains Johans Crisostome que ly hons soy delite en
luxure. enssi com li erase pors fait en la longangne. — La V e payne est LaVpaineestbamrs.
batures, car tout enssi com les fevres battent tendamment ' le fier quant
il est chaut, ains qu'ilh refroide, tout enssi battent les dyables les armes de
cheaux qui encontre les commandement de Dieu ont visqueit, desqueiles
ilh nesont venus a confession et a cognissanche de penitanche et de satis-
faction \ De eel payne doient avoir grant paour cheaux qui sont plains de Contre ies yreu*.
yre et de maule volenteit et de mals penseez. Et cest paine est mult grant
et mervelheux. — La Vl e payne si est des tenebres, qui sont tant espesses La vi* est de tenebres.
et obscures que ons les puet apongnier et tasteir com le graval 8 . Et portant
dist sains Poul 4 : « Les convoiteux sont fontaines sens aighes; a cheaux
» sont apparelhies les tenebres d'ynfeir. » Et portant dist sains Jerome que Contre ies avancieu*
toutes riceches que ons tient en avarische sont riceches de fellonie et de
boisdie, se ons ne les donne aux povres pour I'amour de Dieu. Et David
dist que cheaux qui soy fient en la grant riceche , que la mors permanable
les mangnerat. — La VII e payne si est de honte; et de eel doient avoir paour Lavn« payne est honte.
cheaz qui ont honte de pechier devant les gens, et si n'ont point honte de contre ies avoiies de
pechier devant Dieu , qui sceit le coraige de hommes et les voit. — Ly VII I e Ly vm« est P ao«r.
payne est de paour; de chesti doient avoir paour tous cheaus qui plus
dobtent les hommes que Dieu, et por les gens laissent-ilh pluseurs choses
a faire que ilh ne lassent mie por Dieu, et n'ont point de honte de jureir contreiesparjures.
et de parjurier Dieu. Et portant dist Ysidorus que chis qui jure par Dieu
seulement, ilh fait le plus grant seriment que ons puet faire; mains encor- ei centre ie»jureurs.
dont tinent les simples * a plus grant seriment quant ons jure les ewange-
listes ou les aultres sains, mains chu nest mie voire, carles ewangelistes
ou les aultres sains n'ont mie fait Dieu, anchois les at Dieu fait etcreeis,
et se n'ont nulle force s'ilh ne leur vient de Dieu. Et la forche de Dieu ne
vient mie de eaux. Et portant chu est plus grant seriment de jureir le crea-
tour, que ilh ne soit de jureir les creatures. — La lX e payne est des loiiens La , ^ g ^ n e s 8on!
ardans, desqueiles les pecheurs seront loiies par leurs membres dont ilh Des membra dont on«
* r * at pechiet serat-ons
loiiet.
1 Avec tension, ardeur. 4 Sains Pire li apostle. B.
■ Et a cognissanche et penitanches, ausyde satis- * Tient ons a plus grant serement tant com si
faction. B. simple gent qui jure.... B.
3 Sable.
63
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498 CHR0IN1QUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
aurontplus corochietDieu.De chu dist sains Augustin qu'ilh y at de cheaux
qui dient qui ne les chaut del salveir les armes d'aultruy, mains qu'ilh
puist le siene arme rend re a Dieu. Et de chu sont foux, et ne les sovient
inie de maul pecheour qui n'avoit recheut c'on seul Ijesant, se le refoiit
desous terre, si en fut acuseis; mains ilh ne fut mie acuseis por chu que
ilh awisl perdu I, mains por chu que ilh le gardat sens gangnier; por chi li
commande Dieu a loier les pies et les mains, et jetteir en la fornaise tene-
breuse d'ynfeir.
Chis reponte ' le besant son sangnour desous terre, qui li sapienche et
I'entendement que Dieu ly at donneit enploie ens es chouses terrines, et
Foi. i4o r*. ne travel he son corps des chouses celestines aqueir, ne del salut des armes
a proier; car ilh part a tous les biens que tous cheaux pour cuy ilh puet
Qui pro alio orat pro prier font entirement. Et por chu dist-ons : qui por aultruy prie por luy-
meismes labure. Or vos ay deviseit chu que la citeit que sains Johan veit
fan im» et xvi. chaoir en puche signifiie. — Item, Fan MI™ et XVI, commandat par tout *
son empire Domitiain 1'emperere que ons ochesist tous les Juys qui astoient
issus de la royal lignie le roy David : portant les faisoit ochire, que • nuls
hons ne fust demoreis apres la destruction de Jherusalem , qui les Juys
vosist jamais rassembleir por leur regne tenir. — Item, Fan 1III* X et XV1I C
Trecanus, H xiii* roy morut Tongris, ly XII roy de Tongre; apres luy fut roy son fis Trecanus,
mi» et xvii. lyqueis fuit ly XIII roy de Tongre, et regnat XII ans acomplis. — Item,
vos deveis savoir que les Romans n astoient mie juys , ains astoient sara-
sins. Et oussi astoient tous cheaux qui habitoient adont par tout 1'yle
Tout«s ies nations de d'Europe; car nus juys ne demoroit par-decha mere et toutes les nations
Europe sont issus r ' J J r
des sapiens. q U i son t par-decha mere sont tous issus des Sarasiens. — A eel temps astoit
s ; un 9 mm cme fut eve*- sains Materne evesque de Trieve, car sains Valeir trespassat Tan 1111" et X,
en fin de jenvier, et nos comptons XVII : ja astoient passeit VII ans que ilh
astoit trespasseit, et que sains Materne fut fais evesque. Alqueile ilh prist,
Tan 1111" et I III, une grief maladie; car ilh ne devoit plus vivre por les
XL ans qui astoient passeis que Dieu ly avoit prolongiet sa vie, quant ilh
Dieu reiongh.t u vie f u j resusciteit enssi com dit est. A chesti fois fusUilh mors, se Dieu ne ly
sains Materne XXX # i »i t • ■ • •
»ns »wec les xl ja- a wist encors prolongeit sa vie XXX ans awec les till que ilh avoit regne it.
1 Cache. * Que pour afin que.
9 Mot ajoute dapres le manuscrit B.
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LIVRE PREMIER. 499
Et sachies que sains Valeir fat ensevelis deleis son predicesseur sains Eu-
chars; si avoit regneit, quant ilh morut, XV ans. En eel an meismes morut
ly dus d'Escoche , qui astoit bon chevalier. — Quant sains Materne fut fait ^ "jjftj 9 ££* r '
evesque, ilh prechoit mult diligemment la foid Jhesu-Crist, et fist plus
asseis a son temps que ilhs n'avoient eaux trois fait le temps devant, enssi
com vos oreis chi-apres.
En eel an Ml** et XVII, morut l'emperere Domitiain qui avoit regneit Domitiain fut ochi*.
XIII ans, X jours moins. Si fut ochis de ses gens meismes dedens son pa-
lais, seiant a tauble, le XV e jour de jenvier; car ilhs ne poloient plus endu-
reir la grant payne, honte et travalhe qui les faisoit toudis traire '. Adont
jugarent les senateurs que tout chu que ilh avoit fait en sa regnation qu'ilh
ne fuist de nulle valeur, car ilh n'avoit riens fait par conselhe ne par juge-
ment, fours que par forche f . — Adont fut rappelleis sains* Johans ewan- 8a ,^ J d ° e h "* exiihT"
geliste, qu'ilh avoit envoiet en exilhe; mains enssitoist que ilh fut fours
de exilh, ilh s'en alat demoreir en la citeit de Ephese, en laqueile ilh pre-
chat la foid Jhesu-Crist et convertit mult gran peuple a Dieu. — Item,
tantoist quant Domitiain fut mors, les Romans coronarent Nerva, son fis,
lyqueis regnat une an trois mois et V jours. Ilh fut asseis proidhons solonc
sa loy, et ne resemblat de riens son peire Domitiain; ains defist etdonnat
congier del defaire tout chu que son peire avoit faite. — Item, en eel an s«insjohans convert
• /?»•¥! ? • . i n i 111 i totla citeit d'Epheae.
meismes, fast sains Johan en la citeit de Lphese mult de beaux myracles,
parmy lesqueiles ilh fist tant qu'il convertit tout la citeit entirement; car
entres les altres ilh resuscitat 1111 mors qui astoient mors subitement. —
En eel an edifiait sains Johan, en la citeit de Ephese, une engliese en S * { «*J Jg 1 ^ 1 ' en *
l'honeur de Dieu et de sa benoite Virge mere. — Item, l'an IIII" et XVIII, iiii« xviii.
en mois d'avrilh , tremblat fortement la terre en Surie. — En eel an meismes,
le XVIII* jour de decembre, morut Cletus ly pape de Romme, si fut ense-
velis deleis le tombe sains Pire 5 . Chis fut ly promiers qui escript en ses l» P ap« ordinal.
bulles : Salutem et apostolicam benedictionem , e'est-a-dire : Salut et bene-
diction apostolique. — Apres Cletus fut esluis Clemens, ly evesque de
Hostie. Alcuns quident que chis Clemens fust evesque de Mes, mains chu
1 Traire a ici le sens de souffrir. II est dans devant citeit simple prestre. Cette phrase, que nous
Roquefort. empruntons au manuscrit B, est omise dans notre
* Et de mats volenteit, ajoute le manuscrit B. texte. Nous ne Vy ins^rons pas, la trouvant assez
8 Chis pape Cletus fut mult proidhons , et avoit insignifiante.
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300 CHRON1QUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
ciemen», ly in i«pa P e. fut son oncle. Chis fut de la nation de Romme del region de Celimonle *.
Si oit nom son pere Faustin, et tienet le siege HI ans dois mois et VI jours.
— Item, Fan 1III X * et XIX, en mois de may le XXX e jour, morut Nerva, ly
Foi. ui r«. emperere de Romme: si fut apres luy coroneis son frere Trajanus, le fis
Trajanus, le XV« em- r . . ' * A xilll ' n.- ™ -a
perere. Uomitiam, qui regnat AlA ans et VIII jours. — Chis pape Clemens envoiat
sains Fortien a Lyon sus le Royne por prechier la foid Jhesu-Crist, et a
Nerbonne Paulus — mains che ne fut mie sains Poul 1'apostle — et a Thours
De qi?i l ih 1 St! ' e pape ^ratiain. — Chis Clemens fist les VII regions devideir par les notaires feables
et curieux d'escrire les giestes des martyres. Et si ordinat a dire en la messe :
Teigitur. Te igitur, devant le consecration de hoste \ Chis Clemens , jasoiche qu'ilh
fuit esluis depart sains Pire a eistre pape apres luy et del tenir le siege de
Romme, toutevois ilh destraindit Lynus a chu qu'ilh tienet le siege, et
Cletus apres. *
sains ciemens pape fut Chis pape Clemens fut envoiet en exilh en l'isle de Crisone \ et si fut al
jetteis en la mere. j • • • » ...
derain jetteis en la mere 4 , ou ilh jut longement; et puis si fut troveis par
sains Cyrille, evesque de Moraine, et mis a salveteit jusques a temps le pape
INicholay, le promier de chi nom , qu'ilh fut raporteis a Romme en son
engliese que ons avoit fondeit en nom de ly, ou ilh fut ensevelis honora-
L fi^it^ C a h mleba 11 " Element.— Chis Clemens ordinat la confirmation apres la baptesme, et que
te9me cascon vray cristien soy fesist confermeir. — Item , Tan del incarnation
Lancem. cent, assemblat l'emperere Trajanus ses oust et passat mere; si entrat en la
"onanist e ?Cs^n terre d'Egypte et asseghat Babylone et la citeit del Caire, et les remist en
P&I1S< sa subjection com par-devant, parmy tregut paiant. Apres ilh entrat en Aise
et conquist grant partie de la terre; et puis conquist Surie et Hermenie et
Mesopotaine et jusques a la Roige mere, puis revient a Romme. — Item,
Lancet i. Fan C et I, en mois d'avrilh, fondat Materne, evesque de Trieve, une en-
DesamsMiierne. g|j ese ^ Trieve , en l'honeur de sains Pire l'apostle. — A eel temps astoit
De sains johan ewan- sains Johans ewangeliste en grant auctoriteit en la citeit de Ephese, dont
ilh astoit evesque. — Item, Fan deseurdit CI, en mois de fevrier le XXllI e
jour, fut envoiet en exilh ly pape Clemens, enssi com dit est par-dessus,
quant ilh oit visqueit el papaliteit trois ans dois mois et VI jours; et visquat
1 Sans doute le quart ier de la porta CceUmon- ' Cela d&lgnc la Chersonese taurique.
tana par laquelle on se rendait dans la Campanie, 4 (Test en effet ce que rapporte la tradition sur
1 Llioslie. saint Clement.
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LIVRE PREMIER. 501
apres en exilh V ans XI mois et 1111 jours. Porta nt dist Martiniain en ses
croniques qu'ilh fut pape IX ans, II mois et X jours, mains ilh marist*
enssi; c'est bien voire qu'ilh visquat tant de jour qu'ilh fuit esluis pape,
mains ilh ne fut mie toudis pape, car quant ilh fut envoiet en exilh, si
eslisit ly college uns aultre, Anaclelus, qui fut del nation grigois, del Anacietu*, i y v* pap e.
royalme de Athennes. Et oit son pere a nom Antyochus, et tienet le siege
dois ans II mois et XIII jours, et si vaquat le siege XXI II jours.
Ors vos vuelhe dire et declareir que ch'est a dire de celle siege vacant : u«? chest a dire k
* ° sige vacant.
ch'est le terme qui pent entre l'obit del pape et le election del aultre, car
qui ne les mettroit ilh auroit grant empechement et erreur. Et encor n'y
sceit-ons si bien prendre garde, que ilh n'y ait del erreur asseis par le de-
faulte de calculeir les dautes parfaitement. Car nos prendons maintenant
que chis pape Anaclelus regnat dois ans II mois et XIII jours; si fut con-
secreis le XXI V e jour apres chu que Clemens fut envoies en exilh, qui XX
jour en mois de marche et XXV jour en mois de marche mue li daute; et
les 11 ans qu'ilh regnat metteis awec les cent et 1 qu'ilh fut consacreis,
chu serat cent et trois. Or vint apres sour V jours le muanche del an , en
queile muanche ilh regnat II mois et XIII jours, si qu'ilh morut en Fan C
et 1111 imparfais. Et chu ly unc l'entent bien et ly aultre Content male ou
ne le vuelt entendre. — Et, d'aultre part, sains Eusebe en ses croniques se
taiste de chis pape Anacletus, et dist que e'est Cletus; mains ly pape de D'Anadems.
Rome, Damase, en ses croniques des papes qu'ilh escript a sains Jerome,
le met Cletus et Anacletus por 11 papes. Et enssi furent-ilh dois * que chu f©i. mi *».
so it voirs : Cletus fut de la nation de Romme, et fut ly fis Mylian 8 , et Ana-
cletus fut de la nation grigois de Athennes, et son * peire oit nom Antyo-
chus; si que ch'est grand differenche et raison a esgardeir. Mains vraiement
nos creions que sains Eusebe estoit de sa tieste et tenoit trop fort son opi-
nion, car ilh soy discorde mult fortement aux aultres croniques en pluseurs
lis. — Encors dist sains Eusebe en ses croniques de sains Clement le pape,
1 Marir, marrir a iei le sens de : se tromper, des six premiers si&cles, et surtout la note a la fin
faire erreur. du volume.
* Sur cette question on peut voir cc que dil le 8 Plus probablemcnt timiliain, comme on lit
savant Lenain de Tillemont, dans son article sur dans le manuscrit B.
saint Clement, au commencement du tome II de 4 Soy dans notre texte. Ses peire dans le ma-
ses Memtrires pour servir a Vhistoire ecdesiastique n user it B.
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502 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
qui fut envoies en exilh , qu'ilh tienet le siege XI ans II mois et XI jours.
Et les aultres, assavoir : Damaise le pape et I'archeveque de Tusantin, et
solonc I'escripture et l'ystoire de Sainte-Engliese et ens croniques sains
Jerome, ont escrit VIII ans; ilh escrisent ens aultres croniques, specialment
Martiniain, IX ans II mois X jours. Et fait Martinian mension de Ana-
cletus , car ilh escript qu'ilh regnat IX ans II mois X j6urs: c'est altretant
ne jour plus, ne jour moins, mains ilh met a Clemens nos creions, et que ly
erreur vient par les escrivens '.
Anadeiu. ordinal les Cliis pape Anacletus ordinat a Romme que tous clers alassentet fussent
cleri del rateirleur r ■ m . .
coroones et barbes. se ns barbes et les fesissent sovent raseir, et fesist cascon une coronne sour
son tieste, por ensengne avoir, et por Savoir lyqueis est clers ou nom. —
Item, chis pape ordinat et amonestat tous clers par epistles escript que de-
Que ons doit honoreir seurs toutes aultres gens fussent honnoreis les priestres, en disant que ilh
sacrificent Dieu; se les doit-ons portant plus presier que nuls aultres gens,
et porteir plus grant reverenche. — Et ordinat que nuls priestre ne sacri-
NuUne doit dire messe fiaste Dieu, c'est-a-dire ne desist messe sens tesmons, et maiement les
sens tesmons. .
evesques, aflin que ilh ont sacrifiiet Dieu tout parfait provent V — Item, Tan
Lancetu. C et II, fist Dieu savoir a sains Johans ewangeliste par le Saint-Espir que
ilh trespasseroit de chi siecle, et ly nomat le propre jour. Adont assemblat
L VaM P ewan "utV " 8a * ns Johans le peuple cristien qui par luy astoient convertis, par-dedens
l'engliese que ilh avoit en eel citeit fondeit, et chantat messe par-devant
eaux. Et apres la messe ilh leur commandat a faire une fosse en terre de
coste I'ateit. Et quant elle fut faite sains Johans entrat ens, et soy mist en
genols, si jondit ses mains vers le chiel et fist son orison a Dieu. — Adont
vint la une si grant clarteit que nuls ne pot vers la fosse regardeir par le
espause de une heure. Apres finat chest clarteit, et, quant elle fut finee,le
peuple qui amoit fortement sains Johans vient a corant a la fosse por savoir
que ilh ly falloit; mains, quant ilh vinrent la, si trovarent la fosse plaine
de manne ', ne oncques puis nuls d'eaux ne veis sains Johans, ne se ne pot
fan quant sains jo- oncques en la fosse aultre chouse troveir. En teile manere trespassas sains
Johans, ly vraie disciple Jhesu- Crist, qui avoit les dignes previleges de
1 Maim qu'ilh met a Clemens nos creons qu'ilh • On pcut encore sop cette tradition consulter
errent par les escrivains del original B. Lenain de Tillemont t dans Farticle consaeri a saint
1 Sic dans les deux textes. Jean , tome I" de ses Memoires cites plus haut.
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LIVRE PREMIER. 503
I'amour Jhesu-Cris. Et trespassat en Ian de son eaige IIII" et XIX parfais
et imparfais cent; et fuit ly derain de tous les XII apostles qui soy partit de
chi siecle morteile. Encors ajourd'huy qui yroit en l'engliese de Ephese tro-
veroit-ilh de coste l'auteit la fosse plaine de manne, par quoy pluseurs gens
vuelent dire que ilh est monteis en chiel en corps et en armes. Et les alcuns
dient que ilh giest en la fosse tou vief , portant que ly manne soy remuet et
crolle toudis si fort que ons le voit. Et de ' ches II chouses feroit bien Dieu
se ilh ly plaisoit a faire; car ilh en ovral a son commandement , et chu fut
droit. — Item, Tan C et III, en mois de ma re he le XXH e jour, entrat Tra- cm.
janus l'emperere de Romme en la terre d'Espangne; mains ly roy Agildoras Tr d1" 8 7ier^dEspSn-
vient contre ly, et orent batalhe ensemble. Si fut ly roy Agildoras des- Rno *
confis, si s'enfuit en la citeit de Castelloppe \ qui mult astoit grant et forte; ,
si assemblat la si gran gens, que ilh oil plus grans oust que ly emperere
n'avoit, puis vint contre l'emperere qui son paiis ly voloit mettre en tregut. Foi. u*r«.
Si orent encor batalhe sor 1'an deseurdit en mois de julle, laqueile batalhe
fut mult pesante et orrible des dois parties; mains ly pieur en chaiit sour
les Romans, car ilh furent 8 desconfis et perdirent Xl m hommes, et ly re-
manant s'enfuit vers Romme. Et ly roy d'Espangne demorat enssi en paix; oeroy d'Espangne qui
mains ilh y perdit IIII m hommes, et al promier batalhe, quant ilh fut des-
confis, Xll m hommes. — En eel an oit grant batalhe ly prinche de Anwerpe,
qui astoit nomeis Jecoras, contre le conte de Flandre Jonadas. Si fut la
guerre portant que li conte voloit que le prinche relevast sa terre de luy Guerre enireieDrinche
et Ten rendist tregut; mains ly prinche, qui astoit issus de sane de Sycam- deFiWre. e
biens de Galle, le refusat et dest qu'ilh n'estoit mie serf ne issus de servaige,
et n'avoient ses anticesseurs riens tenut des contes de Flandre, et ja n'en
tenroit. En celle batalhe fut lidit prinche desconfis, si s'enfuy a Lovay et le
fermat; et ly conte I'assegat dedens Lovay, et y seit trois mois. Sy avient
que en mois de septcmbre les Flamens astoient si fort endormis por une
fieste de sains Johans que ons faisoit adont, car les sarasiens ont tousjours
ameit sains Johans-Baptiste et le festioient, et encor font; et cheli jour
avoient les Flammens fait * la grant fieste sains Johans et B esteit en grant
1 Ce de ne setrouve pas dans le manuscrit B. tcxte porte re furent.
* Castellote dans TArragon? 4 Ce mot est orais dans notre tcxte.
* Nous corrigeons d'apres le manuscrit B. Notre * Encore un mot omis dans notre texte*
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504 CHRON1QUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
joie. si astoienl si anoies' que ilh dormoient fortement. — Adont li prinche
s'avisat et issit fours de Lovay, enssi com a la meynuit, a XII m hommes.
Si assalhit les Flamens a leurs treifs qui dormoient, et entrarent en I'oust si
pasieblement que oncques les gaites, qui chest nuit gaitoient, ne les veirent,
subtiis fois d'armes. ca r ilhs astoient trestous enyvreis; si astoient aleis joweir lone fours di
Toust por eaux solachier. car ilh ne quidoient mie que cheaux de Lovay
deussent fours issir. Et quant les Flamens oyrent le bruit des espees, si
furent tous enbahis; ilhs sont sus salhis et se sont armeis, puis vinrenl
vers 1'estour; mains enssi com ilh venoient chi XX, chi XXX, les ochient
cheaux qui astoient bien armeis et rengies. Et quant les Flamens veirent
chu, si ont crieit : Trahi, trahi, a une vois, puis s'en sont enfuis.
Le prinche de Lovay Mains quant les gaites entendirent les vois* se vinrent la corant tous
at descunhs Flamens. .... • «
desroteis; si en astoit V c , mains ilhs furent tous mors et mis al espee. En
eel batalhe perdit bien ly conle de Flandre VI m hommes; de quoy ilh fut
mult dolans et corochies. Et ly prinche Jecoras fist trosseir tous les trefs et
les pavilhons des Flammens, et leurs vita I lies oussi; si s'en alat vers Flandre,
et at jure it que ilh les guerrirat * de leurs vitalhes meismes. — Adont en
alat 8 li prinche vers Bruge et I'asseghat; mains li conte n'y astoit mie,
ains astoit fuys a Lisle. Et ly prinche Jecoras fist pluseurs fois * assalhir
Bruge, mains ilh y avoit si fors fosseis que ilh n'y forfaisoit riens. Et cheaux
de la vilhe fisent grans engiens, et jettoient pres jusques al oust des Loven-
gnis, si en ochirent pluseurs; por quoy ly prinche se desloghat, et fichat
ses trefs plus airier II bonniers, puis fist traire III grans engiens et fist
jetteir parmy la vilhe; si ochirent pluseurs person nes, et tant que nuls
Lancetiu. n'oisoit aleir par les rues. Et chu fut en mois d'avrilh Fan cent et IIII, car
ilh seit bien la XI mois, tant devant com apres. — En eel an meismes, en
mois de may, assemblat ly emperere de RommeTrajanus ses oust, si montat
Trajanusiemperereat sour mere et arivat en Cartaige. Si commenchat la terre a ardre et exilhyer;
desconfis Jonas, le. »■••• • » i
roy de canape. mains quant ly roy Jonas le soit, si vint contre luy a grant gens et le corut
sus; mains ly emperere oit la victoire, et ly roy Jonas fut mors et ses gens
desconfis. Sy s'enfuirent dedens Cartaige, mains l'emperere I'asseghat. —
1 Non ennuyis mais fatiguis. On dit encore dans s S'caheminat. B.
ce sens nogi en namurois et nohi en li^geois. 4 Sovent. B.
* Pour guerroiera.
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L1VRE PREMIER. 505
En eel an, le Vl° jour de junne, morut Anacletus li pape de Romme; si
fut ensevelis deleis la sepulture sains Pire. ETaristui,i y vi« pap e,
... ' u| *******
Sour eel an meismes, le XII e jour de junne, enlisit li college de Romme
unc pape qui fut nomeis Evaristus, qui fut de la nation de Greche, le fis fommt*.
d'on juys qui fut nomeis Juda, qui fut del citeit de Bethleem '. Ghis tienet le
siege par Tespause de X ans VII mois et II jours, solonc Martinian, et solone
le pape Damasse IX ans VI mois et II jours, et solonc Jheromme IX ans et
solonc sains Grigore VII ans VIII mois et XII jours; et se vacat le siege
XIX jours. — En eel an meismes ordinat lidit pape que quant II personnes lihfutoniineisqueons
i • - »• ' t it • -11 + • 4 i deroitproclameirsor
se voloient adiondre ensemble par manage, que ilhs soy fesissent procla- rengiiewcheauxqu;
meir sour lengliese par le cureis, trois fois par trois jours de fiestes ou
dymengnes; se nuls savoit entre eaux chouse por quoy ly mariage dewist
eistreastargiet, que ilh le denunchast; et apres esposeir par le preistre, et Et comment on* doit
a celle mariage assembleir pluseurs gens et maiement les prochains des II JJ£ >se,rpar epreis
personnes, qui enssi venoient ensemble. Et ordinat toutes les sollempniteit
a chu afferantes. Et chu fist ilh portant que ilh voloit que mariage fust fais
plus publement, et que cascon en sawist parleir, car devant chu toutes
gens, tant cristiens com aultres, ne faisoient a chu nulle sollempniteit, ains
soy traihoient ensemble quant ilhs soy plaisoient. Et chu creantoient par
leur foid que ilhs ne soy faroient ', mains apres tenoient unc mangnier de
leur amis; mains portant que nostre loy est de Sainte-Engliese ordinat-ilh
chu qu'ilh soy fesist par Sainte-Engliese. — En eel an meisme, en mois De prinche de Lovay
d'octembre, prist ly prinche de Lovay la vilhe de Bruge par assault, par- 3e u «n a?ant u ?al
devant laqueile vilhe ilh avoit siet XI mois. Et quant les Lovengnis furent vay. -
en Bruge, si corurent sus les Flafnens; mains ilh soy rendirent a eaux.
Adont s'apellat ly prinche de Lovay conte de Bruge, se prist homage de
tous cheaux de la vilhe. — En eel an meismes, en mois de fevrier, sen
alat ly conte de Bruge vers Lyle en Flandre, ou ly conte de Flandre gisoit
malaide de duelhe, de chu qu'ilh astoit si gran sire envers le prinche
de Lovay 8 , et avoit 1111 tant de gens que ly prinche n 'avoit ', et avoit ly
prinche fortune por ly, si que ilh conqueroil son paiis, ly conte avoit bien
1 Tradition jugee fausse par Lenain de Tillemont. * Le comte dc Flandre eta it malade de tristesse ,
3 Qu'ils ne se roanqueraient pas de foi. parce que, etanl plus puissant que le prince et
8 Lea mots de Lovay nc se trouvent pas dans lc ayant une armee quatrc fois plus forte, il avait ce-
manuscrit B. pendant lc dessous.
64
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506 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
gheut ' une an en chest maladie. Et ses gens qui n'avoient pointe de chief
se tenoient tous choies * en leurs vilhes, car ilh ne les voloit pointe livreir
de capitaine. Atant vint la ly conte de Bruge et assalhit s Lyle et le fist for-
tement assalhir.
Lancv. En Fan C et V, le XVI e jour de may, prist Fern per ere Trajanus et fut a
Trajanuspmtcariaige. jy ren d ue | a iteit de Cartage, et se misent tous en sa subjection par tregut,
enssi com ilh avoient devant esteit. — Adont fist I'emperere roy en Car-
thage * de unc sien cusin qui fut nomeis Salomadis qui k terre governat
tot sa vie, et apres luy ses heures. Et apres chu ly emperere naghat vers
De chcs de Gam. Dannemarche. — En chest an s'avisarent cheaux. de Gant en mois d'awoust
qu'ilh faisoient mal de enssi laissier le prinche de Lovay prendre leur paiis
et avoir saingnorie en leur terre. Si assemblarent leurs gens, et se vinrent
a Lyle en mois de septembre le VII 6 jour, si se corurent sus. Mains cheaux
de Gant en eurent de peiour. Et fussent desconfis quant eheaux de Lyle
issirent fours et corurent sus les Lovengnis par-derier, si en ophirent une
grant quantiteit. Et quant les Lovengnis se veirent enssi sopris et enclous,
si furent enbahis et se misent al fuyr com desconfis : enssi orent les Flamens
victoir. Si fut racompteit a conte, qui en fut mult Hies. Adont s'enfuit ly
prinche en la ville de Bruge qui avoit perdut II m homines; mains la plus
grant partie en astoit de cheaux de Bruge 5 . — Item, en eel an, en moisde
Dei'emperereTrajanus.decembre, asseghat I emperere Trajanus la cite it de Baladas * en Danne-
marche; mains quant ly roy des Dannois le soit, si assemblat ses hommes
et vint vers Temperere; si soy sont sus corus : si oit ly emperere vic-
toire, et furent Danois desconfis. Adont s'enfuit ly roy des Dannois et ses
hommes en une citeit que ons appelloit Gadabas. Cest batalhe fut grant;
car ilh y oit mors IIII m Dannois et XL1X Romans, et fut le IU e jourde
Foi. H3I*. mois de jenvier Fan deseurdit. — En chi mois meismes, le XXVII 6 jour,
prist Temperere la citeit de Badalas 7 que ilh avoit asSegiet, et le mist en sa
subjection del tout par tregut. En cesti an meismes " fut bien regaris ly
1 Participe passe du verbe gesir. II faut pro- supplees d'apres le raanuscrit B.
noncer jut. s Si demorat a Bruges com sires et soverains de
* Ce mot ne figure pas dans le man user it B. II la ville, ajoute le manuscrit B.
faut sans doute lire cotes, coi. 6 Badalas. B.
3 Asseghat. B. 7 Plus haut Baladas.
4 Ces trois mots , ndcessaires au sens , sont • En mois de marche, ajoute le manuscrit B.
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L1VRE PREMIER. 507
conte de Flandre. Si assemblat ses gens, se assegat Bruge en marche, dedens
laqueile ly prinche de Lovay astoit; si furent les Flamens qui astoient en
Bruge en grant esmay, car ilhs voient bien que ly prinche ne les porat
defendre l contre le conte qui trop grant gens avoit ameneit.
Adont orent conselh ensemble que ilhs renderoient Bruge a conte de
Flandre; mains ly prinche les priat que ilh se vosissent tenir a luy, ilh les
seroit bon sires et isseroit fours awec eaux , si courroit sus les Flammens.
Tant fist li prinche , que les gens de Bruge ly orent enconvent de luy a
aidier contre leur saingnour. — En Tan cent el VI, en mois de June, assegat i/a* cvi.
ly emperere Trajanus une altre citeit en Dannemarche, qui astoit nominee Trajanus iem P erere
... ; ,, . , . . . conqueste eo Dan-
Ligaine, et le prist en mois dawoust; puis asseghat une altre, qui oit nom nemarche.
Galastre, ou ilh avoit une fort casteal tout enmy la citeit. La tient ly em-
perere VIII mois le siege. — En eel an meisme, en mois d'octembre le
XVIII 6 jour, issit le conte Jecoras de Bruge, et oit batalhe orrible aux
Flamens; car ly conte y perdit VH m hommes, et ly prinche y perdit III m .
Et fut li prinche ochis, el ses gens desconfites, et s'enfuyrent vers Lovay.
Si firent leur saingnour de fis Jecoras qui fut nomeis Arnuls, qui dest A ™ uU > P riDche d « L °-
puisque son peire avoit esteit nomeis conte de Brughe ilh ne voloit mie
reculleir, et d'or en avant feroit de son paiis une conteit, et seroit appelleis
conte de Lovay. Et le fist, sy en fut le promier conte. et regnat IX ans. — ®»* wy fist promir
I? I • -J U 1 VV • •* 1» T apelleir conte deLo-
Ln eel an meismes, en mois de marche le XX e jour, prit 1 emperere Tra- ™y-
janus la citeit de Galastre par faute de vitalhe; car s'ilh awissent vitalhes
asseis, ilh ewissent sis f XX ans devant ains qu'ilh l'ewissent eut. — Apres
asseghat la citeit de Gadabas, la ly roy astoit fuis, sour Tan C et VII en mois fan c et vh.
d'avrilh. Si fut ly roy dannois mult dolans, car ilh n'avoit mie gens por
issir fours encontre l'emperere; se le tient la ens enclous jusqu'al XII H* De Tm j™ u » len jp*-
I 7 «• * rere et de toy dan-
jour de June, qu'ilh envoiat par le conselhe de ses hommes a Trajanus 1'em- nois -
perere dire s'ilh ly voloit rendre sa terre ilh le tenroit de luy sens payer
tregut, fours le servir en batalhe ou ilh en auroit mestier; car li emperere
Domitiain li avoit donneit lettre sailee del seial l'emperere Domitiain. Et
quant l'emperere oiit teiles novelles, se ly remandat qu'ilh apportast ses
lettres, et solonc chu ilh feroit. — Adont aportat ly roy dannois lettre sailee
del seal Domitiain l'emperere ; mains quant Trajanus les veit, se dest qu'ilh
1 Tetueir. B. f Siege, de sdir (sedere).
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808 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
voloit tenir tout chu que Domitiain avoit saileez, mains ilb relevast sa
terre et demorast en pais; car ilh avoit esteit bien jovene qui Hi n avoit
monstreit ses lettres tout al promier quant ilh entrat en sa terre. Enssi fut
fait la pais entre 1'emperere Trajanus et le roy Nabudas, par teile convent
que ly roy Nabudas fist homaige a 1'emperere, et ly oit enconvent del
servir en batalhe ou mestier ly seroit. Et adont en ralat ly emperere awec
ses gens vers Romme , si rentrat le III 6 jour de decembre Fan deseurdit.
AiiianchesentreArnos, — Item, l'an C et VIII le XXVIII 6 jour de march e, assemblat ly conte de
le promier conte de 7 j 1 j
Ie ro y de t ToI^ a e IIUS, ^' an dre ses oust, et entrat en la terre le conte de Lovay; mains quant ly
coirte Arnos le soit, si montat sus unc cursier, et vient vers Tongre al roy
Trecanus, et ly priat merchi qu'ilh ly vosist aidier contre le conte de Flan-
dre, qui son paiis ly voloit metlre en tregut sens cause. Tant fist ly conte
que ilh sont bien assembleis ensemble et acordeis, car ly conte de Lovay
prist a femme Trena, la filhe al roy de Tongre. — Et ly roy de Tongre man-
das t son oust, si s'en allat vers Lovay a grant gens; mains oussitoist que
Foi. 143 y. ly conte de Flandre soil le fais, sy en est alleis contre le roy. et soy plaindtt
a ly de conte de Lovay, qui avoit oyut une peire qui ly avoit laidement sou
paiis destruit. Atant prist ly roy de Tongre le debat en sa main, et les ac-
cord at $i bien qu'ilhs furent bons amis ensemble. — En chesti an le XV 6
jour de jule, morut Nabudas, ly roy de Dannemarche; si regnat son fis
apres luy, qui fut nommeis Ogens, XXI an. — En eel an, en mois de no-
vembre, fut mult gran movement de terre en parties de Greche; et y chat-
rent II citeis qui furent nommeis Zedoc et Baza. Et en paiis d'Aise en
chairent 1111 citeis, qui furent nomeez Geldora, Zenoda, Galadis et Bada-
fancetix. chas. — Item, Tan C1X, fut martirisies sains Ignasce, li evesque de An-
a iir 8 isif? a9ce u mar tyoche, en teile manere : 1'emperere Trajanus le fist mettre en unc porchet •
awec bestes savaiges qui le devorarent, et son arme montat en chiel. Ghis
De »ins Meterne, eves- fat ly disciple sains Johans ewangeliste. — A eel temps regnoit saint Ma-
que de Trire el Co- J r . . . ° . r , ®
longne. terne en la cite it de Trieve, dont ilh estoit evesque, et a Collongne, dor>t
ilh astoit oussi evesque; car ilh lavoit convertit une an chi devant. Si
1 Je ne sais comment expliquer ce mot. Les enclos ou soot renfermes les pores, et notre chro-
actes de saint Ignace disent qu'aussitot apres son niqueur aura peut-dtre employe* ce mot pour de-
arrivee a Rome, il fut expose* dans l'amphith&tre signer ramphitheatre.
et devore par les bdtes. Porchet doit indiquer un
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LIVRE PREMIER.
509
ic oit
De la citeit de Mes et
Tou.
astoient retourneis de la foid '; se revint adont sains Materne a Collongne,
que ons nommoit adont Aggrippine. Si vos diray porquoy ilh avoit a nom P< 3°J Co,lo "^ <!
Aggrippine. Quant ly roy Colongus de Tongre le reed i fiat, se le nomat
apres luy Colongne, sicom nos avons dit desus. Mains al temps que Trieve
fut fondee, et longtemps apres, fut uns roy de Trive qui avoit nom Aggrip-
pinus : et devant y avoit oyut unc qui oit a nom Magontinus. Ghes dois roys
a leurs temps * edifiarent, ly uns la citeit de Magunche, que ons apelle
Maienche, et li altre roy fist la citeit d'Agrippine, que nos nomons Gol-
longne. Et enssi vint a eel temps meisme unc roy de Albaine, qui as to it
nomeis Metius Suffitius, qui edifiat la citeit de Mes en Lhoraine. — En
apres Tullius, ly roy des Romans, edifiat la une citeit a XV liewe de Messe
qu'ilh appellat 8 Tou la citeit.
Sains Materne vint a Collongne, sicom nos avons dit desus. et prechat a d« wins Materne, qui
° 7 m 1 * converlil Collongne
peuple mult saintes et bonnes parolles; et fist Dieu tant de myracles par p»rmyraciei,etTon-
ly, si com de mors resusciteir, les avoigles renlumyneir, et kotrais et bos-
tois drois ralleir 4 , et mondoit les lepreux. Quant ly conte Hiraire de Col-
longne el la contesse et tout ly peuple veirent chu, ilhs creirent et deman-
dont baptesme. Adont sains Materne les baptizat tous, et adont ly conte le
fist evesque de Gollongne , et demorat conte temporeis. Apres commenchat
sains Materne a prechier le paiis en tour Collongne, et convertit tous les Tongw fat eonwtie.
casteals et vilhes jusqu a Tongre, la noble citeit.
Adont s'avisat sains Materne par le inspiration de Dieu, et commenchat
a prechier parmy Tongre. Si avint que mult de gens le siwoient, por les
beaux exemples et myracles que ilh monstroit '. Adont une fois y oit mult
de gens qui ne voloient mie croire; et oussi y oit des cheaux qui bien le
creioient. Si avient que adont ilh y oit pluseurs grans saingnours qui des-
serent • a roy Trecauus que ilh fesiste a chis prophete osteir la langue, car
1 Cest-4-dirc : qu'ils avaient delaissc le chris-
tian ism e pour reprendre leur ancienne croyance.
* Motomis dans notre texte, et retabli d'apres
le manuscrit B.
* Tullius aprh luy, et c'he$t en franchois.... Ce
membre de phrase, emprunte' au manuscrit B t
n'est pas dans notre texte, et ne paralt pas indis-
pensable au sens.
4 Les cloz alleir, porte le manuscrit B, au lieu
du membre de phrase qui precede. Le mot kotrais,
qui m'est inconnu, doit signifier : boiteux, houle
en liegeois. Quant a bostois ou mieux bossois^ il est
encore usit6 dans certains dialectes locaux du pays
wallon pour designer les bossus.
1 Que dies avoir demostreit par li en plusieurs
Us, ajoute le manuscrit B.
• On pent lire desseront. En tous cas, ce mot
signifie dirent*
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510 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
par sa langue ilh tournoit toutes ses gens a une novelle loy. — Quant ly roy
enlendit chu, si fut mult yreis; si vint ou sains Materne sermonoit, tenant
en ses mains une maiche '. Si commenchat ses gens a battre, et en battant
ilh en ochistXLIX; et fist prendre sains Materne et ly dest : « Vilhars, tu
» as confondus nos dieux et notre loy, tu y moras, et promier toy talheray
» la laingue qui at mes gens dechuites. » — Atant prent ly roy I cuteal ,
G^ntniyraciede sain* et li voult la langue coupeir ; mains Dieu y demonstrat myracle, car ly cul-
teal li lanchat fours des mains et salhit le roy en diestre oelh, se ly crevat
l'oelh. Et quant ly roy sentit son oelh creveit, si fut mult enspauwenteit * ;
et awec le paour que ly roy oit, se l'espirat Dieu quilh escriat a sains Ma-
terne en disant : « Sains hons , je toy prie merchi, et veulhe pryer ton Dieu
Foi.i44ro. » quilh moy rende mon oelh, enssi com je avoy devant, et je croray en
» ly et moy feray baptizier. » — Sains Materne entendit le roy % sy en fut
mult liies; puis fist son orison a Dieu quilh demonstrat myracle al roy.
Atant revient a roy son oelh, et ly raporlat une colon, et ly rasit en son
Ly ba°Llet T °S gre ' ut c h* e f- Adont soy baptizat ly roy, qui fut nomeis Pire, apres sains Pire; et
Materne. f u t proiclhoDS et loial, et ensachat nostre loy. — Item, li roy Pire fist crier
une bain * qui prenderoit baptesme ilh le quitteroit de tous servaige. Atant
Lx°> baptizies. prendent tous baptemme : si en fuit bien baptizies LX m hommes et f em mes.
et ortant de jovenes enfans. Tant fist sains Materne, qui sont tous baptizies,
nii« m vine et xlv de jour en jour, tout le peuple de Tongre, qui en la fin montat bien III1 C M
V1I1 C et XLV hommes et femmes. Et fut sour Tan C et X , le XVHI e jour
de mois d'avrilh.
De Tongre la conversion fut faite a la manere que j'ay deviseit. Et ly roy
Pire appellat une jour sains Materne, et ly dest : « Sire, por l'amour de
» Dieu Emanuel , je vos donne eel citeit qui est belle et bonne , et que vos
» et les aultres evesques apres vos en soient sires entirement et perpetuel-
» ment, tant spirituel com temporeile; car en sereis evesque, et sereis
» sires spiritueis par tout mon rengne , si avans que vos en poreis con-
» vertir le peuple, et vos successeures 5 . — Sachies que j'ay une fis et HI
» filhes qui auront de mon paiis tout la temporaliteit, cascon sa part; si
1 Machxte.B. * Pour ban, proclamation.
2 Espaenteit. B. * Et si aurtis mon tresoir pour edifier engfise,
8 Loy par erreur dans notre texte. ajoute le manuscrit B.
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LIVRE PREMIER. 5(1
n en auront assets, car ilh n'at si grant decha mere, fourmys l'empire de
» Rom me. Je demoray awec vos en servant Dieu et la virge Marie, sa be-
» noite mere. » Ors fut sains Materne evesque de Trieve, Collongne et de sains Mate™ fut ve<-
Tongre. Et ly roy Pire, tantoist en mois de junne, commenchat a fondeir longneetiJngre.
une mult belle engliese en l'honeur de sains Pire, son parin; si fut parfaite L'« g iisesain$ pire.
Fan G et XII11. Et sains Materne fondat tantost une en Thonneur de son
predicesseur sains Euchars et sains Valeir, deleis le Marchiet, en lieu que
on dist en hanche \ — En eel an meismes C et X, a ly emperreur Trajan L*«nCct x.
envoiet une prinche de Romme, qui fut ndmmeis Plinius, qui fut uns gran
clers et hystoriographins , en une provinche a gardeir appartenant al em- Twj«nenvoi«tpiinius
pire de Romme. Se ly commandat ly emperere que ilh ochesist tous les «»«»•
cristiens que ilh troveroit en chest provinche. — Et quant chis Plinius fut
venus en chest provinche, si commenchat a ochire les cristiens; mains de
chu oit mult grant mervelhe, car plus ochioit des cristiens, plus en reve-
noit lendemain. Chu envoiat-ilh dire a l'emperere, et ly mandat qu'ilh les
faisoit a petit cause ochire, car ilhs n'astoient a reprendre que de dois
chouses : ly une, sy astoit de chu qu'ilh ne voloient mie faire sacrifice aux
dieux de Romme, et ly aultre astoit de chu qu'ilh soy relevoient par nuit
por aoreir leurs Dieu et rendre grasce a luy T qui est contre les usaiges de
Romme. Quant Trajain lemperere oiit chu , sy radouchist sa fellonie , car
ilh en fut tout apasenteis \ Et de la en avant commandat-ilh a tous les prin- Trajainiempererecom
dies qui astoient desour luy, que nuls d'eaux ne meffache de riens aux fache nm aux cm-
. .. .. • • * ■ .11 i tiens, par le conselhe
cristiens, ne qui * enquisist plus avant de leur loy. piinius.
Enssi rapasentat Plinius l'emperreur. Chis Plinius fut chis qui escript a piinius qui script i e
Wespasianus le libre de natures, une tres-belle hystoire. Chu fut chis qui iluhnden™*™*
escript le hystoire de Tongre, de Tongris, le promier roy, jusque al 1111°
annee que sains Materne y vint; et li fins de ses croniques finat Tan del
incarnation C et X1I1I. La parolle-ilh de la fonlaine qui astoit adont a
Tongre en son libre, et de la nature des aighes, et dist en teile manere * :
« lib at a Tongre une citeit, en laqueile ilh at une fontaine mult noble de De venutdei font*,..,
» pluseurs bullons boilans et jettans sawour de fier; ilh at teile virtu t,
1 En hauche. B. n'est pas de trop.
1 Apaise\ satisfait. Jpaer dans Roquefort 4 Le manuscrit B donoe d'abord le texte latin,
3 Sic sans don le pour que, si toutcfois ie mot empnintealhisloireDaturelledePline, XXXI,2.
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512 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
» quant ons le boit, ilh purge le corps des fievres tirchaines, et garist le
» gravalle et pluseurs altres maladie; et ledit aighe chaufee a feu et ostee
» devint toublee ', et en apres devient tout roige. » — En eel an meismes,
assemblat I'emperere Trajain ses gens, et sen allat en Espangne, et asseghat
Foi. lu y. l a citeit de Bucaine, et le prist par forche, Fan C et XI, en mois de may, et
Tra uilt InllSfdrdtob m ' st P ar ^edens ^ e ses 8 ens 9 U ' ' e gardont. — Et puis soy partit I'emperere
en Espangne. e t a || a t assegier la citeit de Momatas *, devant laqueile ilh seit par Fespause
de trois mois, tant astoit foirt; et ilh le prist en mois d'awoust. Et puis
asseghat la citeit de Laudaluf, qui astoit mult fort; mains quant ly roy
d'Espangne, qui fut nomeis Bosados, et son fis Agildoras le soirent, ilhs
assemblont leurs gens et vinrent devant la citeit ou ly emperere seioit, et
oit a ly batalhe mult pesante; mains les Romans orent la victoire. Si s'enfuit
ly roy d'Espangne a chu de gens qu'ilh ly remanit, car ilh avoit perdut
Xll m hommes; si ne s a res tat, se vient en la citeit de Calangus, qui fut
Lucerne in citeit. depuis nommee Luserne, qui astoit une des fortes citeit de monde, et ne
dobtoit nulle siege; se 1'avoit fait edifiier a son temps le roy d'Espangne,
qui oit nom Luserniain. Devant cest citeit seit ja ly roy Karle de France
Vll ans *. Et portant que cest citeit astoit si forte, entrat dedens li roy
d'Espangne. Et puis mandat Sedroc, le roy d'Egypte, que ilh ly venist
aidier encontre I'emperere de Romme, qui ly destruoit son paiis; car ilh
ly avoit enconvent qu'ilh ly aideroit et qu'ilh seroit quitte de tregut qu'ilh
rendoit aux Romans. Ly messagier fat envoiet; et ly roy d'Egypte assem-
blat ses oust et vint en Espangne, Fan C et XII le IIII jour d'avrilhe. —
L'anCetxi. Item, Fan C et XI, en fevrier le XXV e jour, morut ly VI e pape a Rome,
y^pape ram us mo- £ var j stus ^ et f ul mar tj r i s te s p ar | e s servans de I'emperere , de temps que
I'emperere astoit en Espangne; si fut ensevelis deleis la sepulture sains
Dei ordede manage. Pire. Chis pape ordinat que cheaux qui se voloient prendre par manage,
que ons les esposast publement devant les gens et en Fengliese, et fussent
sollempnement benys par le preistre. Et oussi ilh ordinat en la citeit de
Romme des preistres et des dyaques qui devoient gardeir Fevesque, quant
ilh prechoit, qu'ilh ne fuist par ses anemis trahis en anonchant la parol I e
1 Turbe. B. ■ Devant cliest citeit teitja Karl UroisdeFranche,
1 Qui fut puis nommie Covindre , ajoute le ma- et asy de Romme et d'A Uemangne empereur, par
nuscrit B. Vespause de Vll ans. B.
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L1VRE PREMIER. 513
de Dieu. — Apres la mort le pape Avaristus ', quant ly siege oit vakeit
XIII jours, si fut consecreis a pape de Romme Alixandre, qui fut de la AI dVRommt. Vlfiptpe
nation de Romme, le fis Alixandre qui astoit prinche de la royalme de
Ghivretaine *, lyqueis tienet le siege par l'espause de VIII ans V mois et
II jours; et fut mult proidhons. — En eel an conquestat l'emperere Trajan De Trajain rempewe.
par forche la citeit de Laudaluf , le XVI I e jour de marche , puis sen alat
vers Galangus; mains ilh encontrat en sa voie le roy d'Espangne et le roy
d'Egypte, si oit batalhe a eaux, et la fut mors ly roy d'Egypte et bien
XIIII m hommes d'Egypte et d'Espangne. Et encordont fut Trajain l'empe-
rere desconfis, et si perdit de ses gens jusqu'a VII m hommes; car ilh astoit
tant des aultres, que les Romans ne porent endureir leur forche. — Adont
s enfuit l'emperere et ses Romans a Laudaluf, et envoiat par mere messagiers
a Romme et en Affrique et en Dannemarche quiere soucour. Quant les
messagiers vinrent la ou ilhs astoient envoies , si assemblont cascon leurs
oust et montarent sour mere, et vinrent nagant vers Espangne. Et adont
les Egiptiiens fisent roy de Eydroc, le fis leur roy qui astoit mors, puis
vinrent assegier Laudaluf ou l'emperere astoit awec ses gens, qui mult astoit
fort. Adont fut pluseurs fois assalhie; mains les Romans le defendirent gen-
timent bien XI mois. — En eel an, en mois de octembre 8 , morut Gombas,
le XIII roy de Hongrie; si regnat apres son fis Porus XXVI ans. En eel De roy de Hong™.
an, le XIIII 6 jour de marche, entrat ly roy Ogens de Dannemarche a unc
des corons 4 de Espangne; et Salomados, ly roy de Gartaige, entrat a unc
aultre costeit, et les Romans apres B ; et commencharent le paiis a destruier.
Si avient que ly roy d'Espangne le soit, se fut mult enbahis ; si fist faire des
fosseis entour son oust mult porfons.
Adont 1'an C etXIH, en mois de junne le IX e jour, oit ly roy d'Espangne l'mcxui.
et ly roy d'Egypte batalhe a l'emperere Trajain , qui avoit awec ly tout son
soccour : et la fut ly estour fort, qui durat de la journee jusques al vespree.
Et la furent les Espangnois mult laidement desconfis; et y fut ochis ly roy Espangne fut descon
1 Et mieux Evaristus, comme plus baut. qu'emploie notre chroniqueur.
1 Ontit, d&Dsies Annates cccldsiwitiques de B&ro- * Le XI 9 jour, ajoutele manuscrit B.
nius (tome II), qu'Alexandre 6tait ne* dans celui des 4 Bout, extremity.
quatorze quartiers de Rome auquel on donna it le * Je supprime ici un second a V autre costeit qui
nom de Capitis tauri ou de Capita bubula. Je suis doit 6tre dc trop, et ne se trouve pas dans le ma-
il me demander quel rapport pcut exister entre nuscrit B.
I'unt ou Tautre de ces deux denominations et celle
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514 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
d'Espangne et ly roy d'Egipte et awec de leurs gens XVI m hommes; et ly
emperere awec le roy de Cartaige y perdirent lX m hommes. Et apres les
remist l'emperere en son tregut tous com devant. Adont fist-ilh de Soladas'.
qui astoit roy de Cartaige, roy d'Espangne, et de son frere Ignodas fist-ilh
roy d'Egypte V Et quant tout chu fut fait, l'emperere remerchiat mult a roy
de Dannemarche de son bon serviche. Atant se sont deparlis et cascons en
est raleis en son paiis; et rentrat l'emperere en la citeit de Romme, en mois
L'.n cctxiui. de may, Tan C et XI111. — En eel an morut ly roy Pire de Tongre, qui fuit
'ToDgramwit! 07 e ly dierain roy; se fist son testament en teile manere. Gar la ducheit d'Ar-
denne , qui duroit de Trieve jusque en Boheyme, donnat-ilh a Tremus, son
Corament u royaime fis anneis, qui devoit eistre roy apres luy. Et laisat a Blanche te, sa filhe, et
panie. a son marit tout la conteit d'Osterne, qui duroit d'aultre costeit de Tongre
jusqua Trieve. — Eta Emetine, son altre filhe, laisat-ilh la ducheit deLo-
tringe qui fut grande, car ilh duroit jusqu'a Rons en Champangne. — Et a
l'autre filhe, qui fut nominee Tongrine, laisat-ilh la terre de Condros et
Famenne,qui duroit jusqu'a Maisier sour Mouse : si en astoit tout ly paiis
de Huy, de Muhal, de Sedroch, qui est maintenant la conteit de Nammur,
la ville d'Arche et tot le paiis del Randar et d'Arche *, que ons apelle main-
tenant Dynant. Et astoit dedens tout la terre de Wallecourt, et tant daul-
Les annet de roy de tres pans que ch'estoit mervelhe. — Et laisat al engliese son blason , qui
ongre. astoit unc escut d'or, sens nulle altre enlresengne; et si enlisit son sepulture
en l'engliese Sainct-Pire qu'ilh avoit fondeit, et avoit esteit parfaite cest an
Aiixandreiy pape or- meismes, — En cesti an statuat et ordinat ly pape Alixandre del faire a
dinat del faire le be- , »-* i« i • * •■ i i i •■!■•*
noite aighe le dy- sainte Engliese la benoite aighe tous les dymengpe de seilh Jbenite. et que
toutes les gens en asperghassent el en jettassent par leurs mansons. — Ghis
Lao cet xv. pape converlit la plus grapt partie des senateurs a Dieu. — Item, Tan C
Arnusjypromierconte et XV, morut ly promier conte de Lovay, qui fut nommeis Arnus; si fut
ovay,mont. a p res j U y ^u^ son fi s q U i encors astoit jovene, qui oit nom Trecanus ei
Gram movement de regnat XXIII aiis. — En eel an, fut si grant movement de terre en mois de
^ jule, que la citeit de Antyoche fut pres tout reversee et pluseurs a I tres.
De sains Euttause. A cheli temps avoit* unc prinche a Romme, qui astoit nomeis Eustaise
1 Plus haul, Salomados. d'Eyipte, et le royaime d'Espagne ilh rendit <i
* On lit dans lc manuscrit B : Adont fist-ilh Jonozas le filli leroy qui mart at toil.
Soladas roy de Carthage, qui astoit fis al roy qui • \ip\\ilol del rain dearche(Rcndarclie),commc
astoit mors, et de son frere Ignodas fist-ilh rots on lit dans le manuscrit R.
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ttuse.
LIVRE PREMIER. 515
Plaisans \ qui avoit esteit mult secreis et priveis a l'emperere Trajain, et
avoit longtemps demoreit fours de Romme par le commandement de Dieu,
car ilh avoit pris baptesmes par grant myracle, sy vos compteray comment.
— Sachies que longtemps devant le daute dont je parolle maintenant, avoit
a Romme unc valhant prinche qui astoit nommeis Placid us, chest-a-dire
Plaisant % lyqueis astoit maistre de la chevalerie l'emperere, et astoit drois
pay ens, creans ens es ydolles, enssi com les Romans fasoient a cheli temps.
Et si avoit a constumme que ilh alloit volentirs awec les aultres chevaliers
cachier a bois a la venison. Si esmut unc jour pluseurs cherfs ensemble et
les aultres chevaliers awec ly, entres lesqueiles Plaisans veit unc cherf dont
ilh fut convoiteux de ly prendre, tant astoit gran et beaux; si le commen-
chat a cachier, et ly chierf s'enfuit parmy les bois, et mo n tat sus une grant
roche et haulte. La vint Plaisant, qui 1'aprochat durement, car ilh veioit Le vie de sains eus-
que le chierf le ratendoit. — Et quant ilh fut pres, si regarde entre les dois
branches de ses cornes, sy voit la semblanche de une crois et 1'ymaige de
Jhesu-Oist ens clawee; de quoy ilh fut mult mervelheux, car ilh n'avoit f©i. U5t
oncques veyut teile signe a nulle aultre chierf. — Adont parlat Jhesu-Crist
par le boche de chierf a Plaisant , et ly dest : « O Plaisans , que moy por-
» suis-tu? quide-tu que je soie unc chief ramayge ' com les aultres? mains
» ilh n'est mie enssi, ains suy-je Jhesus, cuy tu ne cognos et de cuy tu es
» ignorans. » Quant chu entendit Plaisans, sy oit teile paour qu'ilh chaiit
de son cheval a terre; mains ilh soy relevat, sy regardat le chierf, et dest,
sicom chis qui astoit raemplis de la grasce de Dieu : « Beaux sires, qui fesis
» chiel et terre et tout chu qui est dedens de nulle chouse, et qui por le
» pechiet de l'homme tu desquendis en terre et recheus mort en crois , dont
» a III 6 jour tu resuscitas, je toy prie merchi. » Adont dest Dieu a Plaisans :
« Amis, tu en yras a Romme, et prenderas baptesme en nom de moy a
» unc des evesques que tu y troveras. »
Quant Plaisans entendit Nostre-Saingnour, se li dest: « Sires, vues-tu
>-> que je die chu a ma femme et a me? dois enfans *? sy croiront en toy. »
1 Notre texte porte : Eustaise mult plaisans. * La traduction est un peu libre.
Je corrige d'apres le manuscrit B, et la correction B Sauvage. Ramaage dans Roquefort. Chief par
est du reste en rapport avec la suite du recit. Sur erreur pour chierf.
la legende de saint Eustache, voir N.-L. Holland : 4 A mes dois /is. B.
Crestienvon Troies (Tubingen, 1854), pp.93etsuiv.
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816 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Et respondit Jhesus : « Plaisans , tu les feras baptisier, et si revenras de-
» main droit chi, et je venray a toy, et toy demonstreray chu qui test a
» venir f . » Adont revient Plaisans vers sa fern me, et ly dest chu qu'ilh
avoit troveit. Et quant la damme I'entendit, se li dest : « Sires, tu as veyut
» Jhesu-Crist, qui fut crucifiiet en la crois por tout le monde, et je en teile
» manere l'ay-je oussi a nuit veyut en mon dormant , et se moy dest :
« Viens demain a moy awec ton marit et tes dois enfans. Et adont je co-
» gnuit que ch'astoit ly vraie Dieu Jhesu-Crist, en cuy les cristiens croient,
)> et cuy loy ilh prechent. » — Adont passat cheli jour et vint la nuit, et
enssi que entour meenuit Plaisans s'en vient a unc des evesques de Homme ,
et soy fist baptesier, awec ly sa femme et ses dois enfans , lyqueis evesque
astoit nomeis Eustause; et apres luy vot estre et fut nomeis Plaisans Eus-
tause. Et sa femme, qui astoit la plus belle damme de Rom me, fut nomee
Theospit; et li anneis des dois enfans fut nomeis Agapis, et It aultre Theo-
pit, enssi com sa mere. — Et lendemain al matin s'en allat Eustause vers
le bois awec ses chevaliers, sicom ilh avoit a constumme; mains, quant
ilh vient pros dou lieu oik ilh voloit alleir, sy soy perdit et emblat de ses
hommes, et vient a droit lieu ou ilh trovat Dieu, et ilh ly dest : « Sire,
» dis-moy chu que tu mas promis. » Adont ly dest Jhesus : « Eustause,
» tu as mantenant surmonteit le dyable, par lequeile tu astois laidement
» dechus si devant; or, amis, tu l'as surmonteit par ta foid et tes biens *;
» mains ilh convenrat mult souffrir por toy adouchier et humilier de la
» vanileit en quoy tu as tant esteit. Se ne sois mie defalans a chu, car par
» toy me covient et veulhe monstreir unc secon Job. Et quant tu seras bien
» humiliies, je revenray a toy; si regarde se tu vues maintenant prendre
» les temptations, ou en la fien de ta vie. » Quant Eustause entendit chu,
se respondit: « Sire, se chu covient eistre, je le veulhe maintenant prendre;
» mains je toy prie que tu moy donne vertu de pascienche a avoir. » Res-
pondit Jesus : « Ne toy dobte mie, je toy garderay bien. » A ches parolles
Dieu raontat en chiel , et Eustause revient en sa raaison ; si nunchat chu a
sa femme, qui douchement en merchiat Jhesu-Crist.
Ne passat gaires la apres que tous ses families, varies et ancilles, sont
1 Et demonstreray a toy des chouses futures. B. et tes biens. B.
* Et desermais, amis, aparait fortement ta foid
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L1VRE PREMIER. 317
tous mors, et toutes ses biestes pelites et grandes, de quelle manere que
chu fust. Et quant Eustause veit chu, se prist se femme et ses dois enfans,
et sen allat vers Egypte , et soy partit de Romme par nuit. Ors avient , enssi
com till s'en aloient, quilhs vinrent a une rivier ', sy entrarent en une neif f
por passeir et alleir vers Egypte, portant qu'ilh ly sembloil qu'il ne seroit
mie si bien cogneus en cfaesli terre com a Romme; mains ilh avient a luy
la teile contraire que, quant ilh duyt payer son nevage *, sy ne trovat point
d'argent en sa bourse, si qu'ilh ne soit de quoy paiier. — Adont ly mar- Foi. ho*.
nier 4 , qui fut nomeis Naucleir, prist la femme Eustause et le retient por son
navaige. Quant chu veit Eustache, si fut mult dolans, mains ilh ne le pot
amend eir; se prist ses dois enfans et soy partit de la nave, et laisat sa femme
mult envis. Si alat tant qu'ilh vient a une flu d'aighe qui mie n'astoit gran
ne large; mains encordont ilh n'oisat ens entreir a tout ses dois enfans. Si
lasat 1'anneit a rivaige, qui oit nom Agapit, puis prist 1'autre a son coul
et entrat dedens l'aighe et 1'emportat dela 1'aighe; et quant ilh vient dela
oultre, se le mist sus terre, et puis retournat arriere en revenant quere
1'autre. — Mains, anchois qu'ilh fust par-decha l'aighe, voit venir, fours de
une bois qui la astoit, une gran lyon ramaige s qui prist Agapit et 1'em-
portat en bois. Quant Eustause veit chu, si fut mult despereis; si retournat
arriere vers son jone fis; mains anchois qu'ilh fust l'aighe passeis, si veit
une leux issir de bois qui enportat son enfant. Et quant Eustause veit qu'ilh
avoit perdut ses dois enfans, si fut si corocbies qu'H commenchat ses che-
veals a deraier 6 et luy battre et ferir; et ja s'awist jetteit en l'aighe, quant
Dieu ly envoiat une bonne pensee. — Adont avient que les pastureais qui
gardoient sur les champs leurs beistes , aparchurent le lyon qui enportoit le
fis anneit; se le cacharent tant atout leurs chiens que ilh ly tollirent, et les
cherewiers 7 , qui ahanoient * leurs terres , tollirent a leu 1'autre. Et adont
avient la chouse si droitement, que les dois enfans furent ambdois nouris
1 A la met. B. pea plus haut
* En une ponton ou une nave. B. • Devenir fou. Le merae mot sans doute que
* Probablement pour naivage, e'est-a-dire : le Roquefort ecrit deroyi. ^
salaire du au naiveu, expression liegeoise signi- T Laboureurs , hommes qui manient la charrue
fiant batelier. (cherowe et chereuwe).
* Pour maronier, comihe il est ecrit un peu * Labourer. Nous avons deja rencontre ce mot ,
plus loin. qui est reste* en wallon.
* M^me signiOcation qu'au mot ramayge un
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SI8 CHR0N1QUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
en une rue pres Tunc de ('autre. Et leur peire, qui ne savoit ou ilh astoient,
et nonporquant ilh s'en allat tout plorant, et vient en une vilhe qui astoit
. assets pres de la vilhe ou ses enfans astoient nouris. En cest vilhe s'amassat '
Eustause en la maison de une proidhons, si com pasturerais, et ly gardat
ses biestes par l'espause de XV ans. Et dedens celle temps morut Naucleirs,
ly maroniers qui avoit en garde * la femme Eustause; mains, par la grasce
de Dieu, ilh n'oit onques earneile compangnie a lee, et quant ilh fut mors
la femme Eustause soy trahit par-deleis une hosteleresse et le servit.
Adont avoit a Romme grant murmur de chu que Eustause s'en astoit
enssi alleis. Et le faisoit Trajanus 1'emperere requerir par tous pays, car ilh
astoit mult bon chevalier et saige; et avoit ly emperere mult grant duelh
de chu qu'ilh I avoit enssi perdu t, et ne savoit mie que ilh fuist devenus
cristiens 5 . Et ly emperere Trajanus n'avoit adont gaires esteit emperere,
se ly annoioit apres ly. Sy promist a tous chevaliers de monde qui poroit
troveir Plaisant — car ilh ne le cognissoit par aultre nom — ilh ly donroit
tant d'avoir qu'ilh seroit riche a tousjours. — Adont soy movirent pluseurs
chevaliers et entrarent en la queste de Plaisant a troveir par tous paiis. Si
avientque dois chevaliers vinrent a chief de XV ans en la terre de Egypte,
et chevalchoient parmy les champs ou Eustause gardoit ses biestes; mains
quant Eustause veit les chevaliers, se les recognuit et soit bien que chu
astoient des chevaliers de 1'emperere que ilh soloit governeir. Se dest enssi,
quant ilh ly sovient de la grant digniteit qu'ilh soloit tenir : « Beais sires
» Dieu , si voirement que je soloie ches chevaliers governeir a wee les aul-
» tres , et que je les cognoy bien , si moy donneis que je puisse encor veioir
» ma femme et mes enfans, car je ne say que croire de mes enfans, se ilh
» sont mors ou vief. » — Atant vient la desquendant une vols qui li dest :
cc Eustause, aye fianche en Dieu, car bien tempre tu raveras ton honneur,
» ta femme et tes enfans. » Adont fut mult joians Eustause et rendit grasce
a Dieu. Atant vinrent la lesdit dois chevaliers, et demandarent a ly se ilh
savoit nulle hons qui fust nommeis Plaisans, qui avoit une femme et dois
Foi. i4cv°. enfans. Quant Eustause entendit chu, si dest qu'il n'en cognissoit pointe;
1 Cest sans doute le mime mot que Roquefort * En gage. B.
ecrit amaser et atnasuer. II signifie proprement 5 Que ilh creist Dieu. B.
batir et presente ici le sens de loger.
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L1VRE PREMIER. 519
mains jasoiche qu'ilh soy celaste, nientmons ' ilh les fist herbegier en la
maison son maistre, lyqueis fist por son amour aux dois chevaliers mult
grant honnour; mains enssi com Eustause venoit veioir les chevaliers, se ly
sovenoit de chu qu'ilh ly astoit avenut, se ploroit fortement \
Quant les chevaliers veirent Eustause ploreir, sy le commenchont mult
fort a rewardeir, se le recognurent a une plaie dont ilh portoit l'ensengne
emmy le front. Adont le prisent a accolleir et baisier en plorant et en di-
sant : « Sires, si tu es Plaisans, le bon chevalier qui soloit estre le maistre
» del chevalrie 1'emperere, se le dis. » Adont leur confessat Eustause que
chu astoit-ilh , et leurs comptat tout comment ilh avoit fait et comment ilh
ly astoit advenus*, puis l'heure que ilh fut baptisiies jusques adont. — Adont
mynarent si grant joie et teile solas, que ly hoste vint veioir qu'ilh les faloit
entre eaux 4 . Quant les chevaliers veirent I'oste 8 , se ly dessent: « Amis, vous
» ne saveis queile pastureal vos aveis oyut. » « Et qui est-ilh dont? » dest
ly hoste. « Sire, dient les chevaliers, ohu est ly miedre chevalier de monde:
» chu est Plaisans , ly maistre del chevalrie l'eroperere de Romme. » Et
quand ly hoste entendit chu , si chaiit Eustause aux pies, et ly criat merchi ;
mains Eustause ly dest que ilh avoit tant fait por ly, que ilh ly seroit encors
remeris bien temprement. La sourjournarent XV jours. — Puis desent les
chevaliers a sains Eustause le manderoent de 1'emperere. Et Eustause res-
pondit qu'ilh voloit obeiir; et sont revenus a Romme devant 1'emperere a
grant joie. Quant 1'emperere Trajain veit' Eustause, son maistre, se le com-
menchat a abracbier et a baisier 7 , puis ly demandat por queile raison ilh
astoit vuidies et absenteis de luy, et comment ilh avoit depuis regneit.
Eustause li dest tout son fait jusques a chi jour comment ilh avoit erreit.
— Quant Trajain entendit comment Plaisans, son maistre, avoit parleit de
Dieu * et astoit baptisies, si en fut dolans, et nonporquant ilh I'amoit tant
que ilh le laisat enssi et le remist en son estat ou il avoit esteit; car ilh
fut maistre de la chevalerie. Enssi com je vos ay dit, revienet Eustause a
Romme, I'an C et XV, et fut remis en oussi grant estat qu'ilh avoit oncques Lan c xv.
1 Nonporquant. B. qui precede.
* Durement. B. • Choi sit. B.
* Comment ilh avoit fait et ereit. B. 7 Si le courit embrachier et le baisat aeseis* B.
4 Vint veoir qu'ilh avoient. B. ■ A Dieu. B.
1 Plus correctement hoste, comme dans la ligoe
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520 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
esteit et encors plus. — Item , Ian G et XVI ', soy rasemblarent ensemble
tous les Juys, qui, apres tout la destruction de Jherusalem que Tytus fist,
astoient foys en Egypte, en Alixandre et dedens pluseurs aultres citeis et
regions. Si esmurent batalhe contre les Romans qui habitoient en Judee,
et orent les Juys victoire pluseurs fois.
Adont envoiarent les Romans qui astoient en Judee a l'emperere, en di-
sant que les Juys astoient rasembleis et gastoient tres-vilainnement son
pays de Judee , et si en astoit tant qu'ilh les avoient desconfis pluseurs fois.
Et quant * l'emperere entendit chu, si appellat Eustause Plaisant, son
maistre, et uns aultre prinche qui fut nomeis Lysias, et leur dest que ilh
presissent gens et allassent sorcorrir ses gens oultre mer contre les Juys; car
Trajanus astoit unc pan malaide. — Atant assemblarent asseis des Romans *,
et passarent mere, et commencharent les Juys a destruire, et les citeis
qu'ilh avoient conquis sor les Romans a reconquesteir , entre lesqueiles ilhs
assegarent la cite it de Bethalas. Adont envoiat Eustause a toutes les citeis
qui astoient par-dela mere obeissantes aux Romans , que ons ly envoiast
tous cheaux qui voloient gangnier. Adont y vint tant de gens que chu fut
mervelhe. Entres lesqueis y vinrent les dois fis Eustause, car en la rue ou
ilhs demoroient en alloit ly cris; et ilh astoient fors, hardis et apiers \ et
astoient mult beaux et resembloient mult bien ly unc l'autre. Et oussi ilh
soy amoient tant com chu fussent freres germains, enssi que ilh astoient;
mains ilh ne le savoient mie,car ly uns ne savoit cuy ly aultre astoit, aultre-
Foi. U7 r«. ment que ilhs avoient esteit nouris en une rue. Ghes dois enfans vinrent en
roust leur peire, et la fisent tant de nobles fais d'armes que leur peire mult
les amoit, et se ne savoit cuy ilh astoient. Tant fisent Eustause et ses gens
que la citeit fut prise, et mis a mort tous les Juys qui furent ens troveis.
— En eel an meismes, en mois d'octembre, morut Jonadas, ly conte de
Lancxvui. Flandre; si fut comtes apres luy ses fis Badut XVIII ans 8 . — Item, Tan G
Tous juys furent des- et XVIII, furent tous les Juys destruis en la terre de oultremere de part
truis. _.
Eustause et ses gens, sy soy retrahirent arier. En eel an retournat Eustause
1 XVII. B. 4 Adroits. Apart Dans Roquefort.
* Mot necessaire au sens, et suppled d'apres le * Ce membre de phrase : si fut comtes..., omis
manuscrit B. dans notre texte, est supplee d'apres le manu-
5 Atant assemblarent tant de Romans qui asseis scrit B.
en orent. B.
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LIVRE PREMIER. 521
vers Romme. Se avient que ilh soy loghat en la citeit ou sa femme demo-
roit. Adont par la volenteit de Dieu alarent les dois fis Eustause herbegier
en l'hosteit ou leur mere demoroit qu'ilh ne cognissoient mie. Si avient
qu'ilh astoient entreis en unc jardin de chesti hosteil , et commencharent
a parleir de pluseurs chouses.
Tant parlarent ensemble, que ly anneit demandat au jovene se ilh astoit
neis de la citeit ou ilh ambdois demoroient et avoient longtemps demoreit.
Et ilh respondit : « Nennilh, et ne say cuy je suy, ne dont je suy; mains de
» plus long qu'ilh moy puet sovenir, chu est que quant je fuy jovenes enfes,
» que mon peire estoit chevaliers et mult noble ctpuisans,et ma mere astoit
» mult belle damme; et avoient II enfans, moy et I aultre. Si avient que
» ilhs soy partirent par nuit de leurs roaison , sy emportarent moy et mon
» frere qui astoit plus anneit de moy, mains j'avoy bien VI ans, et soy
» misent al chemineir. Mains al passe ir une aighe je vey que ma mere
» demorat la, se ne say porquoy, et mon pere m'emportat awec mon frere
» tout plorant, mains ne say porquoy '. Et tant que nos venismes a une
» aighe : se moy mist a terre et prist mon frere, se l'emportat oultre l'ai-
» ghe, et puis me revient de cha 1'aighe requiere; mains uns leux moy
» prist et m'emportat, mains je fuy rescosse* par cherewiers qui ahanoient
» les terres , awec lesqueis jay demoreit jusqu'a chi et m'ont nouris. Et
» aultre chouse je n'en pou oncques savoir de my, ne oussi je n'oy oncques
» depuis novelle de mon pere, de ma mere ne de mon freire. — Quant
ly anneit entendit chu, sy commenchat a ploreir et dest : « En veriteit,
» solonc chu que je puy entendre a tes parol les, je suy ton frere, car je
» fuy enporteis del aighe par unc lyon alqueile les pastureals moy tolli-
» rent, et si m'ont nouri jusqu'a chi. » Adont sont sus salhis ambdois, et
soy allont accolleir et baisier. Adont leur mere, qui les escutoit et les avoit
bien entendut, oiit comment ilh avoient deviseit leur enfanches; si les
commenchat grandement a regardeir se ilh poroient nient estre ses dois
fis, car elle ne savoit parleir de lyon ne de leux qui les enfans avoient en-
porteis, sicom ilh disoient- se les regardat longement, mains elle ne les
pot raviseir 1 . — Adont s'avisat-elle quelle yroit a maistre de la chevalrie del
1 Ce second ne say porquoy n'est pas dans le 8 Ce mot doit avoir ici le sens de reeonnaitre.
raanuscrit B. II est reste dans ie wallon , mais avec le sens de
1 Delivre. Reseous dans Roquefort. ressembler.
66
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822 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
houst, et ly prieroit que ilh ly voisist remeneir ' a Romme dont elle estoit,
et la enqueroit de son mark et de ses enfans , car elle quidoit bien qu ilh
en fust raleis. Lendemain droit al jour sen vient la damme a Eustause, son
marit, que elle ne cognissoit, ne Eustause lee, tant estoit-elle descoloree;
et ly priat la damme que ilh ly plaisist lee remeneir a Romme : «car je suy
» nee de la citeit. » — Quant Eustause entendit la damme, se le regardat, et
en regardant aparchut la damme l'ensengne de la plaie que Eustause avoit
emmy le front; si 1'aprochat et li dest : « Sire, je toy prie, por le Dieu qui
» fat mors en la crois, que tu moy die ta vie, et comment tu as enssi er-
» reit; car je croy fermement que tu soies Eustause Plaisans, mon loial
» saingnour et marit, le roaistre de la chevalrie de Romme, qui soy con-
» vertit et baptizat ly et moy et nos dots enfans en teile manere. » Et li
dest la manere , com celle qui bien le savoit. — Quant Eustause l'enten-
dit, sy voit que chu est sa femme, se le commenchat a accolleir et baisier,
tout en plorant. Adont ly demandat la damme : « Sires, ou sont nos dois
» enfans que vos emmynas a wee vous, quant vos moy perdis? » Respon-
dist Eustause : « Ilh sont mors, car ilh moy furent oisteis par unc lyon
Foi. i47v. » et I leux al passeir une aighe. » Quant la damme Pen tend it, si dest:
ci Sires, her soir a la vespree, je oii dire dois jones enfans, en parlant en-
» semble en jardin de maison , qui devisoient leur estal. » La ly racomptat
tout chu que elle avoit entendut, et ehu que j'ay deseur deviseit. — Quant
Eustause l'entendit, se vat chest part corant*, se les trovat, si enquist a
eaux de leur enfanche; et la soiUilh * de certain que ch'astoient ses enfans y
se les baisat et accollat mult doucbement, et enssi fist la mere; et en aUat
la novelle par I'houst 4 de chu que dit est. Si en orent les chevaliers grant
joie et en fisent grant fieste. En eel citeit sourjournat Eustause et ses gens
VIII moys, por ['amour de sa femme et de ses enfans a repoiseir et renou-
rir. — Et dedens eel temps ilh mandat cheaux qui avoient nourit ses dois
enfans, et cheli cuy ilh avoit gardeit ses biestes, se les donnat cascon une
eiteit a gardeir, et les fist saingnours d'elles et chevaliers oik ilh gangne^
roient grant avoir B par an, si en furent grandement arichies f ; et I'houste 7
1 Renomeir par erreur dans notre texte. un h a ost r arm6e, et le rctranche a hoste, hdte.
s Cest-a-dire : courant du c.6\6 qui lui etait * Grande* gaudees. B.
indique. • Enrichis. Nous avous deja trouv^ cette forme
5 Sut-il, apprit-il. dans Jean de Starelot. Voir le glossaire.
4 Le copiste, si pas le cbroniqucur, met parfois 7 Et le hoste* B.
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LIVRE PREMIER. 823
ou sa femme demoroit, donna t la citeit meismes en laqueile ilh loghoient.
Et enssi les arichist tous , et puis apres ilh revint a Romme.
En Fan que Eustause loghoit en Judee, quant ilh retrovat ses en fans et LmCetxviii.
sa femme, assavoir Tan G et XVIII, le VII 6 jour de junne, morut Trajain
l'emperere, qui astoit ly XV® emperere de Romme. — Chis emperere fut mult
proidhons solonc la loy, car ons true en escript en la vie sains Grigoire que L, J^^{ tf j£ e £
l'arme de chesti emperere, qui oncques n'avoit rechut baptesme, ne Dieu <w»v*«
aore, ne Sainte-Engliese honore, fut delivree des paines dynfeir par les
priiers et les grandes habundanches de larmes que sains Grigoire fist a Dieu
por luy, qui fut pape de Romme apres la raort de chesti emperere IIII C
et III1" ans ou la entour. — Apres Trajain fut emperere de Romme XVI e ^K^rSI 1 ^'"
Adriain Helius ', le fis del parente Trajain, lyqueis regnat XXI an VIII mois
et XX jours. Chis Adriain fut mult bien endoctrineis en latin et en grigois,
et proidhons et hardis en armes. En eel an revient a Romme Eustause et smm bohm* revim
* * Romme.
ses gens awec; si trovarent que Trajain l'emperere esloit mors, et estoit*
Adriain emperere. En eel an, en mois de fevrier, fist l'emperere Adriain
refaire la citeit d'Alixandre que les Romans avoient destruite. — En eel an
fondat sains Materne, ly promier evesque de Gollongne et de Tongre et le ^i" 1 "'{g^ fomUl
lll e de Trive, dois englieses en la citeit de Collungne : Tune en l'honeur
de sains Pire , qui raaintenant at a nora sains Victors, et l'autre en l'honeur
de Dieu et de la Virgue Marie, qui maintenant est a pel lee l'engliese Sainte-
Cicile. — En eel an , le jour de la Nativiteit Nostre-Saingnour , et les aultres Grantmyradede sains
escrient le jour del Pentechostes , fut sains Materne porteis par les angles
aux trois englieses dont ilh astoit evesque, assavoir : Trive, Golongne et
Tongre; si qu'ilh fist et y celebrat la divine offiche mult devoltement et
saintement. — Item, Tan C et XIX, fondat sains Materne une engliese en la saiw Materne fondat
1 ' © pluseurs enghses.
vilhe de Treit-sour-Mouse 8 en l'honneur de sains Pire l'apostle, en lieu c'on
dist en la voie royale \ — En eel an , commenchat sains Materne a edifier en
la citeit de Tongre une mult belle engliese en l'honeur de la benoite virge
Marie; et true-ons en escript que chist engliese fut la promiere fondee en
1 Et mieux Melius. vicille paroisse de Saint-Pierre, qui n'en est pas
* J'efface ici deux mots : re fats de, qui ne sont Soignee. D'apres l'auteur des Etsais hittoriques et
pas dans le manuscrit B, et me paraissent super- critiques sur le departement de la Meuee-lnferieurc
flus. (p. 461 ), il y avait, dans Pancienne enceinte de
* Maestricbt. Maestricht, une porte royale (Koonings-Poort), ap-
4 II s'agit peut-^tre de la voie romaine et de la pelee aussi Porte de la chaussee (Cassei-Poort).
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324 CHR0N1QUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
toutes ches parties ' en l'honeur de la virge Marie. Et est voire que toutes
les englieses, que sains Materne fondat en la cileit et dyoceise de Tongre,
furent toutes consecrees en lhoneur de la virge Marie principalment, ex-
l«cxx. cepteit II ou III. — Item, Tan C et XX, le XXII jour de mois de junne,
Gran piore. commenchat a plovoir, et plovoit tous les jour * jusques a la Sains-Bertre-
meir; si furent les aighe plus grant qu'ilh n'avoient oncques esteit depuis
Aiixandrc ie pape mo- le deluve. — Item , en cest an , le XI l e jour de mois d'awoust , morut ly pape
Alixandre, si fut ensevelit deleis la sepulture sains Pire. — Chis pape Alixan-
Foi. u«f. dre fut uns sains proidhons, et fist mult de belles chouses que ons tient
Dei aighe que ons met encor a jourd'huy . — Chis pape ordinal que ons metist del aighe awec le vin
unc pau a faire Toblation de la messe. Chis fut mys en chartre a comman-
dement Adriain ; et Hermes , qui soy convertit par sa predication a nostre
loy et fut fais pries tre, et Theodolus 8 dyaque, qui avec le pape Alixandre *
et pluseurs aultres, quant ilhs oirent esteit grandement tourmenteis, furent
sixu pape viu« fut tous martyrisies le jour deseurdit. — Apres la mort li pape Alixandre, vacat
le siege XXXV jours, et puis le X VI e jour de septembre fut consacreis a pape
de Romme unc proidhons que ons nomat Sixte, lyqueis fut de la nation de
Romme; si oit nom son pere Badoza, qui fut unc pastorais de la region de la
large voie 8 , et sa mere fut nominee Gada, qui fut d'Athenes. Et tient le siege
ordinat *anctus, unc- IX ans V mois et XI jours. — Chis ordinal en son promier que ons desist
ft** i MflCflM. * 1 *
en la messe les Sanctus, Sanctus, Sanctus, et que nuls ne touchast les
administrations de sacrament, fours que les ministres a chu ordineis et spe-
cialment deputeis. — Item, Fan CXXI, soy parlit sains Materne de la citeit
de Tongre, et commenchat a prechier par sa terre de la royalme de Tongre
de tous les costeis; et allat visenteir pluseurs vilhes, awec ly sa raaisnie.
Sams Materne tiat a Se avient que ilk viebt a Huy promierement, qui astoit une belle vilhe qui
La fondation de Huy. seioit € sour le rivier de Mouse , qui astoit mult anchiene ; car elle fut fondee
anchienement, devant l'lncarnation Nostre-Saingnour Jhesu-Crist LX ans
et plus, assavoir apres la grant victoire que Julius Cesar oit contre cheaux
de lialle, enssi comme le tesmongne Beda , li venerable priest re, dedens les
1 C'est-a-dire : dans toutes ces contrdes. dre, est supplce sur i'autorite du man user it B.
* Onyement, lit-on dans le manuscrit B. * La via lata, a Rome, est une partie de cette
• II s'agit dc saint Herme et de saint Th&dule, longue rue qui s'appelle aujourd'hui le Cor$o.
qui furent en effet martyrises sous Trajan. • Tout ce qui precede depuis : ta maisnie...,
4 Ce membre de phrase : Qui avec lepape Alixan- manque dans le manuscrit B.
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LIVRE PREMIER. 525
hystors des Engles. Et fut la vilhe enssi la fondee entre les thiers * et roches
sour Mouse, par eheaux qui s'enfuirent de la desconfiture de Galle; si Tap-
pel la rent Huy, solonc le nom de une riviere qui court parmy , laqueile est
nominee Hoyoul.
Gesti vilhe convertit sains Materne a nostre loy par ses predications, car saintMatemeponver-
ilhs astoient adont tous sarasiens; en laqueile vilhe de Huy sains Materne iLti^bamLT *
y edifiat une engliese en l'honeur de la virge Marie. Et deveis savoir que
ilh le commenchat, et laisat les ovriers a ses despains faire avant l'ovraige ;
si en allat prechier aultre part jusqu'a tant quelle fuist parfaite, et adont
ilh revient et le consecrat. — Item, Ian CXXII, fisent cheaux de Tongre l'mcxxii.
•sour Mouse * 11 pons, assavoir une devant Cherat et 1' autre devant Amain \ oetiiponssour Mouse.
et furent de pire. — En eel an vient sains Materne en la vilhe d'Arche, wm Minnie vinta
ou ons aoroit les ydolles, entre lesqueiles ydolles ilh y avoit une en laqueile
ilh creioient mult fortement ; si avoit a nom Nam. — Et y avoit la une ser-
pent, qui faisoit mult de maul a cheaux de la vilhe; car ilh en devoroit tant
et les tenoit si pres, que nuls n'oisoit issir de la vilhe, se ilh n'astoit garnis
solonc chu. Cesti serpent quidoient cheaux de la vilhe mettre affin * par le
vertu de leurs ydols et par elles depriier; mains tant plus prioient a leurs
ydolles, tant plus astoient greveis de serpent. Atant vint la sains Materne,
et commenchat a faire sa predication, et voloit le peuple a ly convertir;
mains ilhs soy moquoient et faisoient de luy leurs derisions, et tant que
sains Materne dest que oncques ilh n avoit troveit sy cornues ' gens ne si
estrangnes. — Ilh recommenchat lendemain sa predication , et enssi 1'onc
iour apres l'autre a continueir: mains toudis soy mockoient de luy. Si avint Ly » er P ent <*»»'*« *
• i i • * • * 4 i • w t iu-i i • Dico,in VI " cl x
que une jour ly serpent vient, si entrat en la vilhe et assalhit les gens, si en personnel.
ochist 1111" et VI11; puis entrat en la synagoge des ydolles, si en ochist
XL11I qui la aoroient les ydolles, et jettat par terre toutes les ydolles si
roidement que ilh les defroissat 6 toutes. Atant vient la sains Materne , qui
tenoit son baston pastoraul; si assalhit le serpent tout seul, par-devant tout
1 Montagnes. Voir le glossairc de Jean de Sta- 4 Sic en un seul mot, pour & fin, & tnort.
velot s C'eat la traduction du mot latin cornuius
■ II faut lire : Cheaux de Tongre fisent sour qu'on trouve dans Ducange. Le chroniqueur lie-
Mouse.... geois Zantvliet Tapplique auz Uaydroits, comme
* Cheratte et Amay, deux villages, Tun en aval, un terme de m^pris.
Tautre en amont de Liege. ' Brisa. Defrouer dans Roquefort.
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526 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
sains Mateme ochut le peuple, si I'ochist et le mist a fin par le vertu de Dieu. — Et quant ly
chca e JT n de P Dunt peuple veit chu, se criat raerchi et prisent bap tern me tous ensemble. Et ly
pnseo a P em me. conte j'Arche , qui avoit a nom Agilfo , et la contesse avoit a nom Agripine ,
Foi. 148 vo. si prisent bap tern me; et fut ly conte nommeis Materne, et la contesse Marie.
sains Mateme fondat — Puis fundat sains Mateme en la vilhe de Dynant dois englieses : 1'une en
saina-Estiene a Dy- Fhoneur de la virge Marie, et l'autre en Fhoneur de sains Estiene que ons
apelle maintenant 1'engliese Sains-Memmy, portant que sains Memmeus •
fut al fondeir, uns evesque \ — Et fondat sains Materne I'englise Nostre-
Damme, en lieu ou ly synagoge estoit; mains anchois ilh vint a Nam, le
dieux qui astoit en cely temple, et ly dest : Die, nam, ad quid hie stas,
e'est-a-dire en franchois : « Dis, Nam, a quoy stas chi? tu n'y demora plus. »
PorquoyArchefutap- Adont le frappat de son baston pastoraul unc coup, si chaiit tout en pie-
ches; et ly dyable s'en allat bruant et criant com tonnoir et tempeste. Et
portant fut la vilhe d'Arche dedont en avant nominee Dicnam , que sains
Materne 1 avoit enssi araisoneit en disant : Die nam. Et fut longe temps
nominee enssi ; mains li usaige des gens 1 changat, car ou ilh devoient dire
Dicnam ilh disoient Dynant, si que ch'est Dynant-sour-Mouse. — En eel
Lescorporeisdeiaiteit an ordinat ly pape Sixte que les corporeils 4 de Falteit fussent faisde fil de
de iin ct bians. Hn et tous blans, sens teinture et nient de soie. — Item , quant sains Materne
oit convertit Dynant, se vient aval Mouse jusqu'a la vilhe de Sedroch, ou
ilh avoit une ydolle en quoy Nam estoit regnant, enssi bien com a Dynant;
mains, quant ilh astoit a Dynant, ilh donnoit en l'ydolle response aux
gens chu que ons ly demandoit, et a Sedroch ne donnoit pointe de parolle.
Sa N^mSut%?iewn- Sains Materne vient la awec ses disciples et pluseurs gens de Dynant, qui
vertit a Dieu, ei les d esse nt a cheaux de la vilhe comment sains Materne avoit mis a raort le sei^
baptixat.
pent et avoit destruit toutes leurs ydolles, et les avoit tous baptisies. Que
vos diroie tant? Cheaux de Dynant dessent et fisent tant, que cheaux de
Sedroch fisent grant fieste et reverenche a sains proidhons sains Materne.
— Adont sains Materne les commenchat devoltement a prechier en leur
Grant myracie. synagoge ou leurs ydolles astoient. — Mains , enssi com ilh prechoit, fist et
1 11 doit s'agir ici de saint Memmius, evdque fut al fondeir.
de Chalons. Toutefois je ne connais pas a Dinant * Des temps. B.
d'lglise qui lui soit dediec, mais bien a saint Men- ' On trouve dans Roquefort : corporaUer, botte
gulfe. a terrer Us corporaux. Le chroniqueur rent peut-
* Lisez encore : Sains Memmeus*, uns evesque, dtre parler de renveloppe m^me des boltes.
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LIVRE PREMIER. S27
demonstrat Dieu grant myracle la-endroit; car toutes les ydolles soy leva-
rent, com ilhs fussent vives , et soy combatirent en jostant ly une a l'autre ,
tant com ilh furent toutes combrisies en pieches, et ardirent la meismes
toutes les pieches en poure menue. Adont quant cheaux de la vilhe vei-
rent chu, se criarent merchi a sains Materne, tant furent-ilhs espireit del
amour de Dieu , et dessent que ilhs se voloient baptisier et croire en Jhesu-
Grist, qui astoit ly soverans Dieu de monde et sires de paradis. Adont furent
tous baptizies mult devoltement; et fut chu sour Fan del Incarnation G et Lancxxiu.
XXIII, en mois d'avrilh, le XIX e jour. — Quant tous furent baptisies, si
commenchat sains Materne a fondeir et edifiier, en propre lieu ou ly syna- i/engiiese de Namur
goge des ydolles estoit, une mult belle engliese en lTioneur de la benoite parMin
virge Marie. Mains sains Materne , aiichois que ilh fondast son engliese , vin t
a la grant ydolte ou Nam astoit, se le conjurat et ly demandat qu'ilh que-
roit la; mains ilh ne respondit pointe. Portant dest sains Materne : Nam
mutum, c'est-a-dire en franchois : Nam est mueais, ou nammute; mute
c'est mueais. Si ont portant appelleit leur ville Nammutum, c'est Namute;
mains ons l'apelle maintenant plus communement Namur. Mains chu sont
gens ignorans qui enssi l'apellent, car cheaux de chi paiis-la et les aultres
qui le cognussent 1'apellent tous Namute. — En eel an constituat ly pape Lafemmenemieestre
Sixte que nulle femme ne fust secretaire entour 1'auteit, et n'atouchast les * ecrea,rca mm *
vasseals sacreis. — Item , ilh ordinat que quiconques evesques, qui soit
citeis ou appelleis a Romme, ne soit jamais recheus en son engliese, jus-
qu'a tant que ilh aporterat bulles et lettres papailes sour chu qui astoit bien Foi. uq *.
comparus a jour dela citation. — Item, ordinat encors que nus preistre ne l<» ordinanches de
celebrast messe fours que sour uns alteit sacreis , et encor pluseurs aultres plpe
choses. — Item, Fan G et XXIII , astoit sains Materne aleis en la vilhe de
Emordas-sour-Mouse; la ilh prechat la foid, et convertit le peuple et leur sains Materne
saingnour, qui astoit sire de la vilhe, qui estoit nomeis Mege, et les bap-
tizat tous. Adont at sains Materne conjureit Nam, par tous les hauls noms
Jhesu-Grist, qu'en l'aighe la devant se soit flastris et que toudis y demeurt
et ue sen part jamais. Adont ly dyable Nam est en Taighe salhis, et ly aighe
referit eaconAre com tonoir, et ondat a grandes ondes; et at depuis toudis
ondeii, ja soit li temps si pasieble. Et sains Materne at la vilhe nomeit Porquoy ei oit nom
solonc les noms de leurs dieux et de leur saingnour ; si l'apellat Nammege '.
1 Nani6che , village en aral de riamur.
conrer-
tit Nameche.
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S28 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Et siet sour Mouse devant unc casteal qui est nomeis Sansons, qui puis fut
la fondeis sour une haulte roche deseur Mouse. Alcuns vuelent dire qu'ilh
oit a nom Namege por chu que sains Materne disoit, quant Nam fut salhis
en l'aighe : Nam submersum, c'est-k-dire en franchois : Nam noies. — Sains
Materne commenchat la une engliese a edifiier, et puis en ralat a Namute,
la ly engliese Nostre-Damme estoit parfaite; si le consecrat et le benit. Et
Le jour de u Triniteit y fut la promier messe dit et celebree, de part sains Materne, le jour de
Damme a Namui. la Triniteit. Puis en ralat a Namege, et benit l'engliese et le consecrat
anchois qu'elle fust parfaite, por le cause que je diray. — Or, vos diray
le cause por lequeile sains Materne consecrat l'engliese de Namege ains
qu'elle fuist parfaite : chu fut portant que, en temps que ons le faisoit, si
vint unc .prinche parleir a sains Materne, et ly criat merchi et li dest :
« Tres-sains hons, amis de Dieu, j'avoie hier al matin V beais fis tous
» viefs de ma femme, tous de une seul porture; si les amoy tant que je en
DeiriihedeChyoee. » nomoy ma vilhe Ghynee f , en la ramembranche des V enfans qui asloit
» d'onne nee. Or avient que ilh soy bangnoient en une petit riviere, la ons
» aboivre les chevals, qui est defours ma vilhe ; si furent soupris de dyable
De sire de chyne«. » et noyes. Se vos nos les poleis rendre vief, nos prenderons baptesme
» et creierons en Jhesu-Crist, je et eaux et tout le peuple de mon paiis. »
« Sire, dist ly prinche qui avoit nom Clement, je suis sire de Ghynee, se
sedros.roydeTongre, » le tient de rov de Tongre. Sedros, le noble roy de Tongre, le fondat et
fondat (Jhynee. 1 f . . 8 ' . J 8 ' .
» le nomat Halois; mams el restauration je y ay fondeit unc casteal qui
» at a nom enssi Halois; si en veneis, je vos en proie, awec moy. » — Et
sains Materne susciut sains Materne s'en vat vers Chvnee, et la fist Dieu por luy teile myracle
V enfans a Chynee, . . i 1 i • ■
et y fondat I'engiise que les V enfans sont resusciteis devant tout le peuple, qui en at rendut
Nostre-Damme. * • ••••
grasce a Dieu; si se sont tous convertis a Dieu et baptisie. Et sains Materne
fondat la une engliese en l'honeur de Nostre-Damme, en la vilhe de Ghy-
nee, aux despens de dit chevalier, qui le voult payer; mains sains Materne
fondat les aultres englieses de gran tresour que ly roy de Tongre ly laisat.
sains Estiene dest en p u j s revient sains Materne a Namege. — Puis avient que sains Materne
vision a sains Ma- ° *
teme qa'iih ly resist astoit une nuyt cuchiet et dormoit; et en son dormant s'aparut a luy sains
une engliese. J 1 v J
Estiene, lyqueis ly dest qu'ilh edifiast une englese en son honour, en la
vilhe de Namege , ou ilh avoit fondeit une engliese de Nostre-Damme. Al
1 Comp. avec la note 1 de la p. 245. II parait d'Outremeuse, est bien le premier nom de Ciney,
que jc me suis trompe et que Halois, d'apres Jean eerit la Cynay et ici Chynde.
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LIVRE PREMIER. 529
matin, quant sains Materne fut leveis, ilh fist edifiier ledit engliese, et y
celebrat la promier messe sour Fan deseurdit. — Apres desquendit sains
Materne a Awir-sour-Mouse *, et y convertit le peuple ; se y voult edifiier
une engliese en I'honeur de IN ost re-Dam me, en laqueile ilh celebrat messe
de la Triniteit, l'an C et XXVI, le IX e jour de may. Apres chu que sains
Materne oit chu fait, se revient a Tongre por ses gens prechier plus sovens.
L'an C et XXI III, commenchat sains Materne a prechier parmy le paiis ^^SJdeLow
de la conteit d'Osterne, c'est a present la conteit de Louz en hault paiis que et Hesbay.
ods apelle maintenant Hesbay ; si convertit lant de vilhes que chu fut mer- R>i. 149 v.
velhe, et y faisoit dedens pluseurs des englieses* en l'honeur de Nostre-
Damme. — Et enssi ilh fondat ches vilhes et leurs englieses, assavoir : s ^™ *j£™ w™£-
Waremme, Puchey, Blaree, Oley, Kemexhe, Foux, Berses, Selins et Fexhe 8 , Ei£j^;^:
deleis Foux a halt cloquier \ Et fondat encor des aultres : Glons, Othey, ^^otheV^Ro-
Rokelenge, Bachenge, Bors, Enbemmes 8 et pluseurs aultres la-en tour. — B^$i£mtl!!'
Apres s'en allat sains Materne a Golongne et a Trieve por visenteir son
peuple, et puis sen allat en Friese por prechier la loy Jhesu-Oist; mains
ilh astoit a roy de Dannemarche qui passoit la a eel heure qu'ilh prechoit.
Et quant ilh l'oiit parleir et veit qu'ilh faisoit tourneir les gens al loy Jhesu-
Crist, sy en oit grant despit. Si at faite trosseir sains Materne sour unc
cheval, et l'emynat en son paiis en Dannemarche, et la le mist en prison. L y™y J? I °2J[J , 5JJ"
Adont oit la uns Sarasiens qui Dieu espirat, si chevalchat vers Tongre et u«e «t remyntt «n
les vat dire le fait. — Quant les Tongrois l'entendirent, sy commencharent
a crier : Fenganche, Penganche; et se sont trais a conselhe; si passat entre
eaux qu'ilh ayment mies a morir que ilh ne reconquestent leur evesque. Si
orent teile conselhe qu'ilh ont mandeit le due d'Ardenne et le due de Lo-
trenge a XL m hommes. Et sont en leur chemyn entreis, en jurant Dieu qu'ilh
raveront leur evesque, et serat amendeit la grant injure, ou tout Danne-
marche serat mies en exilh; en teile manere disant vinrent en Danne-
marche. — Si ont commenchie la guerre, car ilh ont arse Argalon, Gemde-
1 Les Awirs, village en amont de Liege. Bleret, Foox et Slins.
* Et faisoit engliese* en alcunes. B. * Et Feche deleis et aussy Feix a halt cloquier. B.
* Waremme, Oleye, Kemexhe et Fexhe n'ont * Glons et Rocklenge sont faciles a reconnaltre.
pas change* dorthographe. Les autres villages de- Les autres villages, egalement situes dans leur voi-
signes ici, et qui sont tous voisins, sont: Pousset, sinage, sont : Othee, Bassenge, Boir et tbeinc.
67
pnton.
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330 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
LcsTongroisdestruent lach et Sourgaine ', trois riches et nobles citeis ; puis ont assegiet Ligane, la
Dannemarcb por sains .... . « ■ i • • •
Mateme, leur eves- citeit , dont la novelle vient al roy. Si at ses hommes assembleit, si vient
a LX m hommes a Ligane. Et quant les Tongrois le soirent, sy en orent
grant joie ; se fisent lendemain trois batalhes, en non del Triniteit : Jy bons
dus Henris de Lotringe conduisil le promier, et Guichars, conte d'Osterne,
la seconde, qui * avoient a femmes dois des filhes le roy Pire de Tongre
jadit ; et la lirche conduisoit Tremus , ly dus d'Ardenne. Et les Dannois ont
faite II batalhe : la promier guiat Ogens, ly roy Dannois , et Melion son fis
Tongrois om la victoir, l'aufre. — Les batalhes se sont aprochies et sus corue: mains al promier
el ont reconquesteit * .
sainsMateme. e n orent les Tongrois del peiour et furent grandement reculeis. Tremus,
ly dus d'Ardenne, tient l'espee en son pongne, et a sa batalhe guee d'amont,
et se fiert genlymenl entre les Dannois, et coupent chiefs, bras, et espan-
dent ches cerveals; si at ochis Culpin, le cusin de roy. Et Melion, le fis de
roy, le voit, se fiert Tremus sus son hay me, sy coup tout jusqu'en la chair :
si Ih ne fust gerenchis 8 , ilh fust mors. Tremus refirt Melton, mains ilh fau-
sal, si consuit le cheval, si fut ochis. Et Melion chiet a terre, et Tremus
LesarmesdeducdAr. lassalt. Mains les Dannois Font soucorrutet remonteit, et Tremus soy re-
denne Tremus, c'est n - i* . ■ , - - « • * « » r i» «
Bullion. fiert en 1 estour. La monstrat son escut qui fut roge a une fause d argent;
cesl mainlenant Bulhon, et chu astoil adont Ardenne, mains puis Ardenne
Les armes de due de fut la ducheit de Lembour *, et encor est. — Et Lotringe portoit Tescut
d'argent, a une fause* roge de geule, qui sont maintenant les armes le
Les armes deviane. co nte de Viane 6 ; ilh les oil par succession. Puis apres soy provat Tremus
si bien, qu'ilh rendit cuer et corage 7 ses gens, si fort et teilement qu'ilh
ont reculleis les Dannois. Et Tremus encontrat le roy Ogens, se le fiert
sour son hayme si fort qu'ilh l'at tout desros % si Tat fendut jusqu'en pis.
Mains Melion, son fis, qui fut bons chevaliers, le fait compareir aux Ton-
grois, car ilh at ochis Jafroy de Lembor et Clement son fis, Arnadin le
palade, Tybaux et Vincent l'orgulheux. Et Pharons, le fis Tremus, chis at
1 Gaudelach et Sourganie. B. et les armes de Lembor. B.
* Ce pronom se rapporte aux deux personnages * Fosse. B. Pour face, comme deux lignes plus
qui vienneut d'dtrc indiques comme chefs des haut.
deux premieres batailles. ' Viandcn.
5 Par erreur pour guenehis, comme porte le 7 Revigorat. B.
manuscrit B. * Brise , rompu. Desroupt dans Roquefort
4 Mains puis Ardenne fut la ducheit de Lembor
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LIVRE PREMIER. 531
ochis Gucidos f de Malpont , qui fut a roy parens , Gebas , Andelos, Nyquars
et Guisdens del Altretins et Pales. Puis at regardeit, si ataperchut My lion Fo1 *&>*••
qui ochioit les Tongrois. Si prent une lanche, se le vat lanchier *, si qu'ilh
le navrat en costeit mult parfont, si qu'ilh chaiit a terre pasmeit. Adont
les Tongrois Font pris et retenus ; et les Danois sont desconfis, car ilhs n'ont
nuls chiefs; si en ont pris XXX C des plus grans 5 . Adont les Tongrois vin-
rent a leurs trefs mult lasseis, si se sont repoiseis tout la nuit. — Et lende-
main vient Tremus aux prison niers, si leur dest : « Tous perdereis le chief
» et lout pour l'amour de nostre evesque cuy vos aveis enprisonneis, qui
w la tres-sainte loy Jhesu-Crist alloil prechant par tous paiis; vous en mo-
» reis tous, et puis arderay tout le royalme des Dannois. » — « Sires,
» respont Melion, vos fereis chu qu'ilh vos plairat; mains, puisque nos
» summes prisonniers rendus et rechus, ilh n'est mie raison que nos rechi-
» vons mort, mains devons passeir et escappeir par ranchon ou en per
» petuel prison.
» Beais sires, s'ilh vos plaiste, vous avereis por moy et por tous les aul-
» tres X sommiers tous chargies de monoie, et ravereis Vostre evesque;
» prendeis la voire, beais sire. » Quant Tremus l'entendit, si fut I'avoir
convoitans et s'acordat a la paix. Ensyment ont les Tongrois reconques-
teit leur evesque awec le grant avoir; se soy sont retourneis a Tongre et
ont rameneit 1 evesque sains Materne, se ly ontdonneit I'avoir de X sum-
miers por fondeir des englieses et acquerir rentes por doyer *. — Apres avient
que sains Materne, en mois de septembre, en allat sus le Riens, et y pre-
chat tant qu'ilh y convertit mult grant gens. Et y edifiat IX englieses en
l'honeur de la virge Marie, et les commenchat endil mois, et laisat la II
siens disciples por parfaire l'ovrage. Si revient arire a Tongre, si edifiat une
engliese enssi com capelle en Publemont en l'honeur sains Pire, sour une
thier qui siet deleis Liege maintenant et a Liege, car ilh dure de Sains-
Giele tout aval jusqu'a la thour le officiaul , et en amont jusqu'a Sainte- saio* Materne ediGat
•! * Hug capelle a Liege
Walbure en desquendant par Sains-Serval 5 jusques en Marchiet de Liege. ««. ••* i« engi«es«
— En celle capelle alloit oreir mult sovent sains Servais , qui venoit de
1 Guidos. B. ' * Doter. Doer dans Roquefort.
* Et vat assetnbleir a luy. B. * Saint-Servais. B.
8 De grant nom. B.
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532 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSR
Treit, a lieu ou Liege siet maintenant, qui astoit unc gran bois adont, et
Sa iun M H leroe n f (!hi al ' on gl em P s apres quant sains Servais visquoit. — Item , ith fondat II englieses
vremonte. en Chievremont-le-Casteale : ly une estoit en l'honeur de Nostre-Damme
et l'autre de Sains-Johans ewangeliste. Et metlit en chascune XX canoynes,
lesqueiles ilh arentat grandement * de ses biens. Et chu fist-ilh sour Fan
lmcxxv. CXXV et XXVI. Puis s'en allat a Treit repoiseir, car ilh amoit la vilhe de
Treit; et edifiat a Treit pluseurs englieses, sicom dit est, entres lesqueiles
ilh celebroit volentier messe en l'engliese Sains-Bertremere, que ons dist
main tenant Sains-Servais a Treit. — En eel an C et XXV, assemblat l'em-
AdriaiQrempereres'en perreur Adriain son oust nor alleir sour cheaux de Galle, car ons ly avoit
vat en Galle por con- * • ■ ■ ■ • j ■> *
questeir. dit que llhs soloient payer et rendre tregut aux Romans; mains ilhs l'a-
voient lassiet des al temps Nero l'emperere de Romme. Atant s'achemynat
et entrat en pans* de Galle, et commenchat a destruire (a terre de due
Ector, lyqueis assemblat ses gens quant ilh le soit; si vient encontre l'em-
perere qui avoit II hommes encontrfe unc, et le corrit sus tres-valhamment
et puissamment.
La batalhe fut de forte assemblee aux lanches et pub aux espees : la ort
tant d'abatus d'unne partie et de l'autre que la terre en estoit coverte. La
furent mors II des fis l'emperere, qui avoient a nom Trajain et Nerva; et
l'emperere ochtst le due Ector d'unne lanehe a * josteir, dont ses gens furent
mult dolans; mains por chu ne furent-ilh mie desconfis, ains prisent cuer
en eaux, et assalhirent les Romans par teile ahir ', qu'ilh en abatirent plus
Foi. lso v. de X m a celle empointe. — Atant vinrent par la batalhe Ector et Franco ,
les dois fis al due Ector qui mors estoit, por vengier leur peire. La furent
Romans ochis et reculeis, et la furent ochis XVIII des plus grans senateurs
de Romme; et ochisent le cheval desous l'emperere, et 1'ewissent ochis, si
ne fust la grant poioir de ses gens qui le remontarent. Cesti batalhe dura
tant que la nuit les departit, si que cascuns retraiit ses gens aux trefs. —
Et lendemain al matin les Sycambiens fisent due Ector, ly anneis fis le due,
lyqueis regnat jusqu'a medis. Apres soy rengarent les Romans et les Sy-
cambiens, et soy corurent sus, et la fut mains coups donneis et rechus.
Qui adont veisl les Sycambiens assalhir les Romans et faire fuyr devant
1 Planiiveutement. B. • Al B.
* Et parties. B. 4 Pour air, col&re, violence.
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LIVRE PREMIER. 533
eaux! que vos diray-je long chouse? Les Romans sont reculeis plus de trois
bonniers; et adont les cachat ly jovene dus Eclor si avant, qu'ilh fut d'eaux
enclous et ochis. — Mains chu ne valut riens, car les Romans furent des- LydiwdeGaiieatdes-
1 conns Romans.
confis, et en fut mors XV m . Adont s'enfuyrent vers Romme; et quant ilhs
vinrent la, si furent petitement 1 festoies et recolhis par cbeaux qui avoient
leurs amis perdus en la batalhe deseurdit. Et les Sycambiens retournarent
a Lutesse, et fisent leur saingnour de Franco, qui astoit noble chevalier, si F ?°f,° e fut faisduc de
as to it drois heurs de la terre, lyqueis regnat XXV ans. — Item , Fan CXXVI , i/an cxxvi.
fist faire 1'emperere a Romme une columpne, laqueile ilh apellat Adriain,
enssi com Trajanus avoit a son temps fait une qu'ilh apellat Trajana, en
laqueile columpne Trajanus fut ensevelis.
En eel an oil grant batalhe entre 1'emperere de Romme et Esache, le roy ^^^^^^
d'Athennes, por leur tregut payer. Et furent les romans desconfis, et per-
dirent mult de gens et se revinrent a Romme fuant. Et ly roy Esach et ses
hommes les ont siwet, et ont assegiet la citeit de Romme. Si avient que ly
emperere issit fours une jour a grant gens , et oit batalhe a ses anemis ;
mains les Romans furent encors desconfis , de quoy la novelle en vient a
Romme. — Et quant les cristiens qui astoient a Romme entendirent chu, si
orent grant paour que ilhs ne fussent soupris et ochis en la citeit; si desent
entre eaux que ilh voloit mies que ilhs morissent a honneur en la batalhe,
que a honte en la citeit. Adont s'ont toua les cristiens par accord armeis et
sont issus de Romme; si en fut bien jusqua VIII . La fist Dieu gran my- Granimyradedwcns
racle por l'amour des cristiens ; car oussiloist com les cristiens entrarent
en la batalhe, leurs anemis furent desconfis et soy mysent al fuyr, et en
fuyant ilhs chaioient mors par la volenteit de Dieu, enssi espes com gresilh
chiest. — Quant les Romans veirent chu qu'ilh s'enfuoient com desconfis,
si sont tantoist relourneis et ont raeompteit a 1'emperere comment les cris- Cf jj!^ M orenl ,a vic ~
tiens ont leurs annemis desconfis. Adont revient ly emperere a Romme, Les cristiens furem
et fist des cristiens grant fieste; et commandat ly emperere a tous ses priii- acquis™ ™ 8
che, qui astoient desous luy, et par toutes les provinches de son empire,
qu'ilh ne fust nuls que de c he I i. jour en avant mesfesist riens aux cristiens ,
et que nuls cristiens ne fust mys a mort, s'ilh n'astoit accuseit et bien pro-
veil de alcon cas dont ilh deservist la morl. En teile manere furent Les
1 LaidemenL B*
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534 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
cxxvu. cristiens plus francs que oucques n'avoient devant esteit. — Item, Fan C et
XXVII , oit ly roy Myleons de Dannemarche grant batalhe aux Frisons, qui
astoient rebel les ' en con (re luy. Si furent les Frisons desconfis; et astoient
Sa EuchatreTvaie" en S rans g ens - — ^ em i en ce ' an * estoit sains Materne en la citeit de Golongne ;
visiun - si avient que une vespree ilh estoit en l'engliese, ou ilh disoit ses heures,
droit enssi que a meynut qu'ilh endormit; et en dormant s'aparurent de-
vant luy sains Euchars et sains Valeir, ses predicesseurs , qui rendoient
grant clarteit, en disant : « Materne, apparelhe-toy. les XXX ans sont
» portent 8 passeis que Dieu toy donnat derainnement por vivre, ilh toy
» covient morir a siecle, le XIX e jour de septembre 8 , et venir en la gloire
» de paradis deleis nous. »
Fo1 - ,5i r ° Adont estoit ly XVI e jour de novembre, si que ilh le covenoit morir le
thier jour apres. Et les alcuns dient que ilh morut 1'an G el XXX , le XVIU e
L Vnw pii iaini Ma " talende d'octembre,chu est ly XIIII jour de septembre. Et droit lendemain
ilh ordinat et dispoisat tout chu que a sainte Engliese apartinoit ', et dest a
ses disciples qu'ilh le covenoit morir; mains ilh leur priat que son corps
fust ensevelis a Trieve , deleis ses dois predicesseurs. Et quant chu vient a
la nuit, sains Materne soy cuchat entres ses amis et ses disciples, qui tout
nuyt voilont B entour luy. Et enssi droit al ajournant 6 vint la une vois que
dest, si que cascon l'oiit : « Or, t'en viens, Materne, chiers et bien ameis
» de Dieu. » — Adont quant sains Materne l'oiit, ilh rechut et usat le corps
Jhesu-Crist, etatantl'arme tantost soy partit, laqueile les angeles l'enpor-
Co Matcrne ftTriai * areilt en c ^* e ' toul chantant. — Adont oit mult grant discors entres cheaux
Trive sens marnier. j e Trieve et de Colongne et de Tongre , pour avoir le corps sains Materne
et ensevelir en leurs englieses. Enssi com ilh estoient en teile discors, vint
la uns proidhons qui fut nomeis Clemens, qui mult astoit saige; se dest
que ons presist le corps de sains evesque Materne, et si fust tantoist 7 mys
en une nave dedens la rivier del Riens, et a cheluy a cuy Dieu otriroit a
avoir le corps, se l'awist. Adont fut-ilh enssi faite, et fut la nave miseen
le Riens , et le corps sains Materne dedens. Mains oussitoist que chu fut fa is,
1 Notre texte porte relies. Je corrige d'apres le formes,
manuscrit B. * Ilh ordinat des eslas de sainte Engliese, B.
* Pour port ant. Le manuscrit B porte pres. * Vigilont. B.
* D'apres la ligne suivante , il faudrait, parait-il , 6 Et ensi que droit sour le jour. B.
ecrire : novembre. Mais les deux textes sont con- 7 Isnelement. B.
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LIVRE PREMIER. 333
la nave, en laqueile ilh n'avoit ne homme ne femme, fours que le sains
corps qui n'avoit point de vie en ly, sen alat contremont et contre le cou-
rant del aighe, et nagant 1 tant par le myracle de Dieu qu'ilh arivat a Trieve,
asseis pres delle engliese ou ses dois predicesseurs furent ensevelis , assa-
voir en l'engliese Sains-Johans ewangeliste. — En droit lieu ou ilh arivat
ches de Trieve edifiarent une engliese, laqueile engliese ilhs appellarent Le 8 ,iese i e f ,orcni . enl '
© 7 * o rr ousam» Materne giest.
Plorement, portant que cheaux de Cologne et de Tongre, qui la astoient
venus, ploroient si tenrement de chu qu'ilhs avoient enssi perdut le sains
corps de sains Materne et que cheaux de Trieve l'avoient. En teile manere
fut ensevelis ly corps de glorieux confesse, sains Materne, deleis ses dois
predicesseurs. — Mains ons trueve dedens les croniques de Trieve que, coment n corps **in*
., ■■• -• 1riTT vvv - ... ■•%»• ■ » Materne fut transla-
sour 1 an del incarnation VIII C et AAA, fut-ilh translated a Liege en 1 en- <eit a Liege.
gliese Sains-Lambert, en laqueile engliese ilh est encor ajourd'huy. — Ghis
sains Materne fut tres-nobles hons; car ons ne faisoit mie nuls clers, s'ilh
n'estoit fis d'emperere, de roy, dus, conte, marchis ou banereches. Et ilh
fut le fis de conte de Pavie, en Lom bardie, qui puis fuit royalme. Et por- u lymw* «t i« «rm«
toit li conte de Pavie adont unc escut d 'argent a une aigle * d'asure. Et sa
mere, qui fut nominee Materne, et fut la filhe le saingnour de Moide *, en
Lombardie, lyqueis portoit tout teils armes , adjosteit une estoit * de geule.
Les ancesseurs Materne furent tous pay ens, mains sains Materne soy fist
baptisier par sains Pire 1'apostle. Et ilh astoit si gran clers que por sa cler-
gerie sains Pire l'envoiat a Trieve awec Eucharet Valeir. — Les croniques comentiescvesquesde
j. . ,.,» .. \Ttmm , m ,, ., . Triveet Colon gne soy
dient quiln oit VIII evesques a longre, lunc apres 1 autre, tantoist apres departirent de Ton-
sains Materne, qui tous furent evesques de Trieve, de Colongne et de
Tongre. Et uns 8 altres coroniques dist qu'ilhs furent evesques de Trieve et
de Tongre tant seulement, et que Colongne avoit renunchiet a la conjunc-
tion, por chu qu'ilh n'avoient pointe oyut le corps sains Materne. Et uns
altre dist que cheaux de Trieve fisent unc archevesque, et cheaux de
Colongne unc en teile manere. — Et cheaux de Tongre fisent uns evesque
de unc proidhomme et sains bons clers et de grant nation, car chu fut le Navitus,iyseconeve$-
fis de roy de Tongre, le derain sens unc de la filhe le due de Galle, qui q " e e ° ngM
1 11 faudrait nagat; mais les deux textes por- 4 Par crrcur sans doute pour cstoile, com me
tent nagant. on lit dans le man user it B.
* Aight. B. * Ens. B.
* Mode. B.
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536 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
cxxvui. fut nomeis Navitus, qui regnat LXVI ans. — Item, Fan GXXVIII, oit grant
batalhe entre le due de Galle et lemperere Adriain ; si furent les Romans
desconfis. Et apres la disconfiture fut fais uns accors que Franco ly due
auroit a fenime Trajana, la filhe lemperere, et ilh seroit quitte de son
!°! fS * v °. ,., tregut, le vie de lemperere. — En eel an edifiat sains Navitus, ly secon
Sains Navitus edifiat j m * m i»
un« eogiies« a Tun- evesque de JTongre, une enghese a Tongre en 1 honeur de tous les sains; et
exxix. fut ledit engliese parfaite et dedicasie Fan CXXIX ans \ — Item, eel an,
Ly decoHeb* te ful chi ' e ^^VH e jour de mois de fevrier, morut ly pape Sixte, qui fut matyrisies
defours le porte d'Apie *, ou Dieu s'apparut a sains Pire, quant sains Pire
ly demandat : Domine quo vadis? En eel lieu oit-ilh le chief coupeit, si
Lcv ?n q f!ft s ma'rtiris^r ^ u *"^' 1 ensevelis deleis le tumbe sains Pire. — Chis pape envoiat Peregrin,
uns evesque de Romme, en Galle, ou ilh avoit si grant persecution sour
les cristiens, que a paines trovoit-ons nuls qui oisast congnostre qu'ilh fust
cristiens. Et chis Peregrin prist awec luy pluseurs compangnons, qui con-
vergent pluseurs a la foid; et en la fin fut-ilh matirisies.— Apres la mort
ceiefoms, ie ix« pape. l e pape saios Sixte vacat le siege II jours, et puis fut reluys et consacreis a
pape uns proidhons qu\ fut nommeis Geleforus 8 , qui astoit de la nation de
exxx. Romme; et tient le siege X ans III mois et XXII jours \ — Item , Tan CXXX,
prechoit Navitus, li evesque de Tongre, en paiis de Wassefale 8 ; se ly
donnat uns tyran une buffe •, sy qu'ilh sannat mult fortement; mains la
De pungne qui buffat demonstrat Dieu myracle, car une lyon vint tantoist a chely et ly mordit le
sains Navitus el li • , T . ,
presenut une lyon; pungne tou jus . et l'enportal devant tout le peuple a Navitus a ly presen-
et en furent conver- ro j * r r r «^^r
lis xn» hommes. ( an t humelement en genos. De chis myracle soy convertirent bien XII m
hommes : si fondat la saint Navitus une engliese en l'honeur de sains Pire.
cxxxi. — it em ^ i' an c et XXXI , ordinat et instituat li pape Geleforus que dedont
tfimttseTejoVfe en avant ons celebrast a Sainte-Engliese, cascon an, le jour de la Nativite
Nostre-Saingnour Jhesu-Crist, trois messe : assavoir, que la promier fuist
tout el nuit, et la seconde del nuit et de jour, et la tirche tout de jour a
heure de grant messe, et que ons le main ten is t enssi tous les ans a tous-
1 Item sow Van C et XXIX fut celle engliese * Et fut li siege vaque II jours, ajoute le mana-
parfaite et dedicassiee al chief de XXI mois qu'ilh scrit B.
avoit esteit commenchiet, B. * Westphalie.
1 La porte Saint-Sebasticn qui ouvre stir Tan- ° Pronoucez bouffe. Mot reste en wallon et signir
cionne voic Appienne. fiant un soufflet
5 Sic dans les deux textes pour Teleform.
Le
I
Noel.
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ou amour.
LIVRE PREMIER. 537
jours '. — A eel temps regnoit I philosophe qui estoit nommeis Secundus 8 , De secundum ie P biu>-
qui fut mult gran clers. Si astoit revenus XII1I ans devant, por le raison
de chu que ilh lisoit en unc libre por unc jour; si trovat par escript que
toutes femmes astoient de legier movement par nature, et soy tournoient a Qu f *J,h 8 e / 6 ™, n ** 8 ™!
maule faire qui bien les requeroit et cacheroit, et que par don ou par J, u e r c e h ;,*i le *JJf e a l ^J
amour elles soy lairoient dechivoir. — Geste parolle entrat mult le philo-
sophe en son cuer, et dest a luy-meisme que chu ne poroit eistre, et que
chu ne creieroit jamais; car ilh ne poroit nullement croire que nuls hems,
ja tant fust subtils ne beais, posist sa mere — qui porteit l'avoit — dechuire,
ne oussi aultres bonnes dammes. Chis philosophe entrat en teile erreur sour
chest mat ere, qu'ilh jurat qu'ilh esproveroit se chu poroit eistre veriteit.
— Adont ly philosophe al manere de pelerin soy mist, et ne finat d'aleir
jusqu'a tant qu'ilh vint a Romme, ou ilh avoit esteit neeis 8 . Et prist hosteit
droit a la maison de sa mere, qui n'avoit pointe de marit, car ilh estoit
mors. Et sa mere ne le cognut pointe, por son barbe que ilh avoit sy grant
que ch'estoit mervelhe; et oussi fut-ilh de si deverse * habit que ons ne le
poioit recognostre. — Et quant ilh vint, enssi com al vespree, que ilhs
orent mangniet et souppeit, Secundus s'avisat comment ilh poroit sa mere
♦exproveir; car chu n'estoit mie une petit fern me de basse lignie, ains estoit
nee de prinche et de senateur de Romme, estoit li mere et ly pere Se-
cundus 5 . — Adont appellat Secundus une des femmes chamberies qui ser-
voit sa mere, et li dest secreement : « Se tu pues tant faire que je gise a
» nuit awec ta maistresse, la damme de chaens*, je toy donray tantoist
» VI doniers dors, et je donray ta damme L bons donniers d'or. »
Quant la basellette entendit chu, si fut convoiteuse de gangnrer et prist
les VI donniers d or, puis vint a sa damme et ly dest enssi : « Madamme,
» chis pelerin vos donroit L donniers d'or, se vos le volies a nuit lassier
» cuchier awec vous. » Que diroie-je mult de parolles? tant fist la basellet, Fo1 - is* «••
que la damme ly otriat, et ly dest : « Prens tes donniers d'or, et apres le fais
1 Sens enfrandre. B. cela equivaut a dire qu'il avait changd d'habits au
1 Dans cette tradition le chroniqueur a proba- point de se rendrc m6connaissablc.
blement envue Plinele naturaliste, CajusPlinius * Ains astoit nee de prinche et senateurs de
Secundus, Romme li peire Secons. B.
5 Ou il etait ne. * Chaens toujours pour ceans.
4 Deverse doit ^trc ici pour diverse, different;
68
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538
CHR0N1QUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
Secundus gardat si-
lenche tout sa vie.
CXXXII.
» venir en ma chambre dormir awec moy. » — Atant vint la base! let a
Secon ^ et li dest chu qu'ilh avoit troveit; et ilh ty donnat les donniers,
puis enlrat en la chambre, et soy cuchat awec sa mere. Et quant Secons
fut cuchiet avec sa mere ', si veit bien que chu qu'ilh avoit troveit en escript
devant esloit veriteit; car ilh veioit bien que ilh ne tenoit fours que a luy
qu'il ne fesist de sa mere tout chu qu'ilh ly plairoit, com de sa femme. Et
quant la damme veit que ly pelerin ne giroit awec lee charneilement, se
ly at dit : « Amis, porquoy esteis-vos cuchies awec moy, se vos ne faites
» tant que voslre or soit bien deservit que vos m'aveis donneit? » Quant
Secon oiil chu, si fut encors plus corochies com devant, portant que sa
mere le requeroit, qui avoit nom delle melheur et plus honeste damme de
tout Romme. — Adont commenchat Secon mult tenrement a ploreir, et
commenchat a baisier les mamelles de sa mere, sens aultre chouse faire,
jusques al matinee que Secon soy commenchat a muchier ' et vestir. Quant
la damme chu veit, se li dest : « Amys, aveis juyt awec moy por dechivoir
» et tempteir. » Adont ly respondit Secon : « Damme, salve vostre grasce,
» je en ay ovreit solonc nature, car je ay baisiet vos mamelles, lesqueiles
» je avoy altrefois asseis baisiet; mains se je awis gehut awec vos char-
» neilement, je awisse faite contre nature 3 . » — Quant la damme l'en-
tendit, si fut tout enbahie, se ly demandat : « Qui es-tu done? » Et ilh
ly respondit : « Je suy li vostre fis Secon. » Quant la damme l'entendit, si
en oil si grpnt honte que del honte ilh en t rat en une maladie de fivre,
de quoy elle morut dedens III jours. — Quant Secon veit chu, se dest qu'ilh
estoil coulpauble de la mort sa mere, et que elle estoit mort por sa parolle;
si en fut grandement corochies, car s'ilh soy fuisl tays tou quois et alleis
sa voie sens parleir teiles parolles, elle ne fust mie mort. Si vowat a Dieu
que por chu tout sa vie ilh tenroii silenche, et ne parleroit jamais. — Adont
entrat Secon en unc bois deleis Romme, ou ilh fist une habitation % et
faisoit la sa penanche qu'ilh avoit ja fait en tour XVI ans; sique Fan CXXXII
revienet l'emperere Adriain de Athennes a Romme, si passat deleis le habi-
1 Ce membrc de phrase : et quant Secons..,,
omis dans notre texte , est supplee d'apres le ma-
nuscrit 6.
* Sur le sens de ce mot, voir le glossaire de
Jean de Stavelot.
* Carje fuisse rentreis en propre vasseal de quoy
je issis, ajoute le manuscrit B.
' En une habitation qui seoit defors Romme a
Ventree d'un bois. B.
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LIVRE PREMIER. 859
tation Secon. Et la ly fut compteit comment Sccon avoit erreit et sa mere
exproveit, dont elte estoit mort; si avoit voweit que ilh ne parleroit jamais,
ains tenroit scilenche tout sa vie.
Quant I'emperere Adriain entenditchu,si dest qu'ilh vorat exproveir se
ilh ly poroit en nulle manere faire brisier sa penanche. Adont le mandat
I'emperere par dois chevaliers, lesqueiles Font amyneit. Et quant I'empe-
rere Adriain veit venir Secon, si soy levat tantoist encontre luy, portant
que ilh quidat que Secon dewist dire : « Sires, seieis-vos, » ou allres par-
lers. Mains Secon ne dest riens. Quant I'emperere veit chu, se ly dest :
cc Dains f philosophe, parolle a moy si que je puisse alcun chouse de * toy
» a prendre; car chu que tu fais ne doit mie eistre par droit, car tu ne dois
» mie tenir en scilenche ta clergerie, car ons ne puet manifesteir la chouse
» en taisant. » Secon entendit bien chu que ly emperere disoit, mains ilh
ne respondit nient. — Adont dest encor I'emperere : « Secon, anchois que
» je venisse chi, astoit-ilh bien saison que tu toy taisisse, car tu n'avois
» mie si glorieux auditeur de moy, qui soy posist aresteir a tes parolles,
» ne aleir encontre, sicom je puisse faire; mains ors suy-je chi qui mult
» desire que tu parolle , si eslieve ta vois en sa vertut, et parolle a moy. »
Mult bien entendit Secon I'emperere, mains oncques por chu ne parlat.
Et quant I'emperere veit qu'ilh ne feroit mie de Secon sa volenteit, si
apellat tantoist unc de ses prinche, que ons appolloit Tyrpons, et li dest en
teile maniere : « Amis, dest-ilh, je toy prie que tu fais tant que chis hons
» parolle a nos a mons 8 une seule parolle, soit ou en bien ou en mat. » Foi. i«iv<>.
— Adont passat avant Tyrpons et dest enssi : « Secon, parolle; chu est
» sotye de si longement tenir scilenche , car tu sceis bien que les lyons ,
» lupars et toutes altres biestes et les oyseals convoitent que ilh posissent
» parleir enssi com les gens; et tu, qui sceis mult bien parleir, tu tiens sci-
» lenche! Chu n'est mie sageche, car ilh n'aparlient mie aux philosophes
» del tenir scilenche, ains doit parleir et sa scienche generalment publiier. »
Secon entendit bien Tyrpons, mains ilh ne respondit riens. Adont apellat
Tyrpons unc de ses servans, et ly dest : « Je toy commande que chis hons
» soit tantost decolleis, puisqu'ilh ne vuelt parleir a I'emperere. » Et li sor-
gant li respondit qu'ilh seroit tantoist ochis. Atant vint I'emperere meismes
1 Pour Dom. Le manuscrit B porte sains. nuscrit B.
* Notre texle porte d. Je corrigc (Tapres le ma- s Au moins.
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540 CHROMQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
a sorgant, et li dest enssi : « Je toy commande en amisteit * que tu parolle
» tant sour le voie a Secon et fais tant, se tu puis, que ilh parolle. Et se tu
» pues tant faire que ilh parolle, se li coupe tantoist la tieste, et se tu ne
» le pues faire parleir, se le ramaine arrier a moy. » Et chis respondit :
c< Volentiers. » — Puis soy partit ly sorgant , et emynat Secon devers le lieu
ou ons faisoit les justiches de Romme; et en allant ilh arguoit mult Secon
del parleir et disoit : « Ey, Secon. porcoy tu lairas enssi ocbire por parleir?
commenisecundusfut » Je toy prie, parolle et tu viveras: et, se tu ne parolle, tu moras. Or
mancchies del monr ^ \ ' r ■ ■ m • i i ■
siih ne parioit. » donne vie a toy par parolle. Tu vois , le arondes et les altres oyseals ont
» vois qui leur est donnee por releichier * leurs vies; ne oussi nulle chouse
» n'est en vie qui n'ait vois. Se toy reprens et parolle, ilh te doit bien
» soufiier 8 le temps que tu as gardeit scilenche. » De teiles parolles et
d'aultres l'arguoit li sorgant, mains oncques Secon ne voult parleir. —
L&graniconstaDchede Atant sont venus droit a lieu ou ons tourmentoit les malfaiteurs, lequeis
Secundus. . •n*i» 11 1 r\
lieu ons nomoit Pirram. Et quant ilh vmt la, se ly dest le sorgant: « Ors
» estens le hatreal ', Secon , » en monstrant l'espee traite. Quant Secon le
voit, si estendit le hatreal tou cois taisant,car ilh neprisoit riens sa vie,
ains desiroit la mors. Adont hauchat li sorgant l'espee et li dest : « Secon,
» rachate ta vie par parleir. » Et Secon soy taisoit tou cois, qui bien 1'en-
tendoit et qui pou aconte a ses parleir K . — Et quant ly sorgan veit chu, se
le prist et le ramynat a 1'emperere en disant : « Drois emperere , je vos
» ramaine Secon en teile point que vos le moy livrast, car ilh at gardeit
» scilenche jusqu'a la mort. » Adont soy mervelhat mult Adriain de la
continanche de philosophe Secon, se vient a ly et ly dest en teile manere :
cc Secon, lieve-toy sus, lu as en propois a gardeir ta scilenche enssi com
» loy qui ne te puet estre tolue. Et portant je toy prie que tu prende teils
» taubles c , et se escrips et parolle a moy par lettres. » Adont prist Secon
ses taubles et si escrips en teile manere :
« Adriain, certe je ne toie crieme 7 pointe, jasoiche que tu moy puis
» bien ochire se ilh toy plaist, car tu es sires et emperere de chi rengne
1 Coiement. B. * C'est-a-dire : qui ne pre'te pas attention a ses
1 Delivrer, relaxier dans Roquefort Le manu- paroles,
scrit B porte eslechier. 6 Che$ tablet. B.
3 Suffire. 7 Crains. Crcmer dans Roquefort.
4 Le col. Hasterel dans Roquefort.
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LIVRE PREMIER. . 541
» por le temps. Et portant je toy fay savoir que je scjay bien que tu moy
» puis bien mettre a mort, se tu vues; mains tu n'as mie la poior de moy
» a faire parleir. » Quant ilh oit chu escript, se le donnat a l'emperere '
qui le luil; et quant ilh oit chu entendut, se ly respondit : « Par ma loy
» tu es bien escusseis; mains puisque enssi est, je toy veulhe faire au-
)> connes demandies teiles coin tu oras : — Promirs, je toy demande queile
n chouse est ly monde? » Secon respondit par 'escript en teile manere : Li disposition demon-
cc Adriain, ly monde est estaublissemens de chiel et dc la terre, et de
» toules les chouses qui dedens sont trovees. Et est ly monde avironemens
» qui oncques ne cesse, et at si grant hautenche ' con ne puet voioir. Et si
» est ly jugemens par ly enfourmanche de mult de fourmes et perdurau-
» bles teneurs, et avironnemenl sens erreur, la lumiere de soleal; et si est
» jour et nuit, estoiles, tenebres, terre, aighe et aires. — Apres te dis que
» la grant mere est enbrachement de monde termines, coroneis et loyes de
» chouses estrangnes, avironeis de toute nature, estaiche * et sostenement
» de monde. Et sest s ly hordemens de monde *, sentiers de toutes divisions Fo1 - itt3 *••
» de regnes, hosteis de fluys , huys de plueve, refus emperins et sest grasce
» de delis \ » Quant chu oit enssi escript, se le donnat a l'emperere, lyqueis
le luit et puis li dest enssi: «Tu mas donneit mult bonnes solutions, or moy
» dis encor avant que chest Dieu, et queile chouse puite chu eslre? » —
Adont respondit Secon et dest : « Adriain, Dieu est pensee nyent mort, Q»«c« s tDieu.
» hauteche c'on ne puet veioir, fourme de mult defourmeis • et esperis de
» mult de ploies inquisitions, nient porpensables et feles sens reponse, et si
» contient en luy toutes chouses, et est clarteis et jours awec biens. »
Adont dest l'emperere : « Or moy dis que ch est jours? » Secon respondit Que cest le J° ur -
par Fescript : « Che est journee et estaublissemens de travalhe; et est re-
» tournemens des XII signes commenchemens de cascon jours et perdu-
» rabies conte, lyqueis jour prent et at sa clarteit a soleal qui reluisl. »
— Adriain demandat : « Queile chouse est ly soleal? » Secon respondit Q "^ cboit ••* B 80 "
1 Sans doute pour hautesce, elevation, qui se * J'avoue humblcment ne rien eomprendre aux
trouve dans Roquefort definitions du philosophe, et je ne puis que feli-
* Poteau, colonne. citer Tempereur Adrien d'avoir trouv^ cela une
s Sic pour c'est, comme encore a la ligne sui- bonne solution de sa question,
vante. • De forme$, B.
*• De vie. B.
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342
CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
Que c'est la lune.
Que c'est la terre.
par escript : « Ly soleal est isnels * de chiel enfremeteis del nuit, avironne-
» men t de chaleur, flamme nient defalans , resplendeurs sens dechaiement *.
» celestiens trespasseurs *, aournemens de jour, bealteit de chiel, grasce de
» nature et departeurs des heures. » — L'emperere demandat : « Que ch'est
» la lune ? » Secon ly respondit : « La lune est enssi en chiel com la
» porte de chiel, manson de soleal, anemie aux malfailteurs, confors de
» commenchemens et adrfeche de temps et de cheaux qui nagent, signe des
» solempnileis, recommenchemens des mois, euils del nuit, eslargeresse
» de rosee, message de temps. » — Et l'emperere demandat : « Que chest
» la terre? » Secon ly escript : « Terre est ly fondement de chiel porpen-
» sante de monde, commenchement de vie, garde de mere et nourice des
» fruis, covreture d'infeir, desnoieresse * de toutes chouses, mere des nas-
» sans, nouriche des vivans, chambre de vie. » — Et demandat l'emperere :
cr Quelle chouse est le chiel? » Et Secon ly escript: « Ly chiel est rondeche,
» tournable, comble, liaus et grans, terre des vivans. » — L'emperere de-
mandat : a Queile chouse est bealteit? » Secon escript : « C'est naturele pru-
» dene he, fortune de petit temps, fleur marcissant et humaine convoitiese. »
L'emperere demandat : « Queile chouse est uns hons? » Secon escript :
« Hons est pensee de chair et en chair veioir arme plaine de travalhe.
)> habitacle de petit temps, receptacle de esperit, fantomme 8 de temps,
» mireour de vie, portiers de lumiere, devastanche de vie, perdurable
» mors, servans de mors, trespassans aleirs et hosteis de luy-meismes. »
— Quant l'emperere entendit les responses de Secon, se ly at dit : « Sains
» hons, ilh moy dest voire chis qui dest que tu es proidhons et grans philo-
» sophe , je croie que en chi monde n'at parelhe de toy; mains ch'est grant
» damaige que tu ne parol le v car adont chu seroit grant chouse de toy; et
» portant je toy donray certaines rentes et gens qui toy serviront tous les
» jours de ta vie, car je voie bien que tu ne parleras jamais. » Adont li
assennat rentes et gens qui le servirent tant com ilh viscat. Enssy soy de-
partit l'emperere de Secon. — Item, l'an C et XXXIII, en mois d'awost, in-
de f ch!Ii£!fG/^SI stiluat ly pape Celeforus a chanteir a la messe : Gloria in excelsis Deo. —
excelsii al messe.
Que c'est le chiel.
Quest bealteit.
Quest 1 homme.
L'an CXXXIU
Celeforus pape ordinal
1 Jsnete, ordinairement employe" comme adjec-
tif et donne comme tel par Roquefort, doit 6tre
ici employe substantivement et signifie : chaleur.
* Diminution?
• Voyageur?
* Qui denoue?
5 Fonlayne. B.
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LIVRE PREMIER. 343
Item, en eel an, en marche *, morut Baldat, ly XV° conte de Flandre; si fut
conte apres luy son fis Palamides, lyqueis regnat XXI II ans. — Item , Tan
C et XXXIII1, soy rasemblarent les Juys de diverses paiis ou ilhs astoient L " J ^ n J as ^ lu J*
enfuys, et fisent entre eanx unc prinche et soverains qui fut nomeis Go- mais
chebas s ; puis vinrent en la terre de promission et de Judee, et la orent-ilh
batalhe contre les Romans a cuy 1'emperere avoit chargiet la terre a gar-
deir. Adont priarent les Juys aux cristiens, qui la habitoient, qui les vosis-
sent aidier contre les Romans; mains les cristiens 1'escondirent, de quoy
les Juys furent mult corochies , si en fisent pluseurs souffrir martyr. Adont,
assavoir l'an CXXXV, en vint la novelle a Adriain 1'emperere; si assemblat tancxxxv.
ses oust et passat mere et vint en Judee, se mist les Juys a mort chu qu'ilh
en pot troveir, puis revint a Romme. Mains les Juys s'avisarent adont et
envoierent a Romme unc de leurs prinche, qui fut nomeis Jophas, por trai-
tier a I'emperere de ravoir la terre de Judee. Adont vint Jophas a Romme
en mois de jule Fan CXXXVI, et fist tant par forche d'or et d'argent a
I'emperere, que I'emperere pardonnat tous fourfais aux Juys, et les otriat
la terre de Judee. — Mains quant les senateurs oirent dire que ly empe-
rere estoit enssi corrumpus par forche d'argent, se le reprisent laidement
et ly disent que Wespasianus et Tytus son fis, qui avoient esteit emperrers,
n'avoient mie enssi fait, ne si follement ovreit 8 . — Quant Adriain entendil Foi. <b3v.
teile nom que ons disoit qu'ilh astoit pioir que Wespasianus 4 . si oit teile jherusaiemfutdestruu
i ii • ii- j-ii i • • o- ii • par Adriain I'empc-
duelh qui sembloit qu uh duwist enragier. Si assemblat ses oust et vint en "re.
Jherusalem, se le destruit tout de rechief chu qu'ilh avoient commenchiet
a redifiier, et encachat tout les Juys qu'ilh trovat la a cuy ilh avoit la terre
r endue, lesqueis ly desent que ilh avoit malvaisement pris leur avoir, quant
ilh les cachoit enssi fours de la terre qu'ilhs avoient bien achateit.
Adriain I'emperere n'acomptat riens a leurs parol les, ains soy partit et
revienet a Romme. Et chu fut sour l'an CXXXVII , en mois de septembrc, cxxxvu.
ApreS chu que I'emperere fut retourneis a Romme , sy rasemblarent les
Juys qui astoient escappeis mult de gens de leur loy, et revinrent en
1 XVI jours, ajoute le manuscrit B. lecture publique de la Bible.
* Le nom veritable de 1'imposteur est Bar 8 Et qu'il avoit laidement et pervelheutement
Kochba, Quant a cet argent donne a Adrien, e'est ovreit, ajoute le manuscrit B.
probablement un dcho de la tradition accueillie par 4 Entent que ilh avoit teile nom que se* fais as-
Tertullien dans son Jpotogdtique, et qui presentc toient piours que li Wespasiain. B.
les Juifs comme ayant achete la permission de faire
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544 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Judee en mois de novembre por redifiier la citeit de Jherasalem : mains
enssi com ilh vinrent la, si trovarent tout entour la citeit mult de crois, et
^^jheJilLrem^et ^nt en y avo ^ i *I ue '* '* eu de ' a citeit en estoit tout plaine. Si en furent si
deieuriigne6aoche. esbahis qu'ilh s'enfuyrent; et chu senefioit que par la crois ilh avoient
perdue la terre, car ilh l'avoient perdue portant qu'ilh misent a mort le
salveur de monde. — Apres chu trois jours revinrent encor les Juys en lieu
Meneibe dez crois. deseurdit; mains enssitost que ilhs vinrent la, les crois qui astoient sour la
terre s'aherdirent aux draps des Juys, assavoir cascon d'eaux une crois tout
desangletee \ De chu furent les Juys encor plus espawenteis coin al autre
fois, et soy remisent al fuyr leur chemyen. — Item, lendemain revinrent
Le in* signe terribi« encor les Juys devant Jherusalem por la citeit redifiier; mains a cest fois
issit feu ardans de terre , qui en ardit et ochist pluseurs *; mains cheaux qui
escappont redifiont la citeit mult bien, et prisent dedens habitation et de-
morarent en la citeit. — Et quant I'emperere en soit la veriteit,si en fut mult
jberusaiem fut encor corochies. se rasemblat ses oust, se passat mereet vint en Jherusalem la
destruit, et lex Juys ' # * • g%
r° m* er p * r Ad " ain ^ vc ^ e f°' is e * ' e deslruit et mist tous les Juys a mort, et puis fist parmy la
terre semere seil * : Chu fut el signifianche que la terre estoit sterille sens
porteir fruit dedont en avant. A eel destruction furent les Juys si destruis,
que oncques depuis ne sen porent ravoir. Et perdirent adont la terre de
promission que Dieu leur avoit donneit por sa bonte, enssi qu'ilh I'avoit
promis a leurs anticiesseurs Abraham , Ysaac et Jacob. Et fut cest destruction
cxxxvin. en mois de may Tan CXXXVIII. — En eel an, en mois d'octembre, refist
jherusalem fut refait I'emperere la citeit de Jherusalem mult noblemen t, et ly muat son noin,
se l'apellat Helie \ Apres ilh mist en la citeit une signe de victoire, par
lequeile ons poioit cognostre que elle apertinoit alle empire de Romme, et
que les Juys n y poloient dedont en avant Hens demandeir. — En eel an
De Hongrie. morut 5 ly roy de Hongrie Poms qui avoit regneit XXVI ans. Si fut fais ly
XV e roy apres son fis Jacoles, qui regnat XXVII ans. — En eel an, en mois
De Trecanus, le n« de decembre, morut Trecanus. li secon conte de Lovay: si regnat son fis
conte de Lovay. 7 ' • i i- t
Alixandre apres XXII1I ans, et fut bon chevalier et hardis. Item, Tan
CXXXIX, en mois de jenvier le XVIlI e jour, morut Adriain le XVI C em-
1 Ensanglantee. Encore une tradition mutilee le manuscrit B.
t;t empruntce a Theophanc 1c chronograpbe. * Plutot Aelia CapitoHna.
* Et en ochist gramment. B. * Le XI I' jour de mois de novembre, ajoute le
' Mot omis dans notre textc, et supplee d'apres manuscrit B.
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LIVRE PREMIER. 54S
perere de Romme. Et apres sa mort fut coroneis a emperere de Romme Anthone, iexvii*e ra -
• vv * , perere de Romme.
XVII e Anthone ly Pyus ! , lyqueis regnatXXII ans V — Item, Ian C et XL,
le promier jour de mois d'avrilh, mo rut Celeforus ly IX e pape de Romme;
si fut ensevelis deleis les aultres papes chi-devant. Et apres sa mort, vacat
li siege VII jours, et apres lea VII jours, c'est-a-dire le VIII e jour de mois
d'avrilh, fut consacreis a pape de Romme X e unc proidhons qui fut nomeis Huguynspape x«.
Hyguyns • qui fut de la nation de Greche, lyqueis tient le siege IIII ans,
trois mois et VIII jours. — Item, Fan GXLI, en mois de may, fist-ilh si
grant orage en paiis de Romenie par plueve et par effoudre, que pluseurs orage.
vilhes ardirent del effoudre, et de la plueve furent tous les biens de la terre
Iaveis et exilhiez; si en vaut grandement piies tout ly paiis pluseurs annees
la apres. Et fut en fut * si chier temps, que unc pain que ons vendoit devant
1 denier, apres forage on le vendoit XX deniers, et encor, qui plus astoil,
ons ne poioit recovreir por argent. — Item, en eel an, en mois de jule,
instituat ly pape Lygynus * que ons portast les enfans, quant ilhs seroient Lyp»pe ordinal wrm*
neis, baptisier en 1'egliese, et que ilhs fussent leveis d'hommes et de * ier *
femmes, lesqueiles ilh apellat parins et marines. — Item, instituat que
cheaux qui loient • aux enfans leurs bendeals, quant ilhs sont confirmeis, Foi. t54r*.
que ilhs soient oussi bien parins des enfans que ilhs les ewissent leveis de Et deaul y confime^r n
sains fons. — Item, instituat li pape que ly hons ne puist avoir par Sainle-
Engliese la femme qui soit sa commere, et n'ait li femme 7 a marit son
parin, ne ly homme sa marine. — Item, en eel an, en mois de novembre,
Anthone ly Pyus, Femperere de Romme, mandast • a due Franco de Galle
qu'ilh ly envoiast son tregut de toutes les annees que ilh avoit esteit defal-
lans, et venist a Romme amendeir le forfait, et chaist a ses pies pour luy
merchi avoir de chu qu'ilh 1 avoit tant lassiet a payer. De chu mandement
fut ly due Franco mult corochies, se prist tantost les II chevaliers qui
avoient le mandement aporteit, et leurs fist tantoist coupeir leurs dois gre-
* Antonin le Pieux. note quelques lignes plus haut.
9 Et XX jours, ajoute le manuscrit B. • Lient. Roquefort ne donne que le participe
* Plus loin Lygynus. Le successeur de saint loic.
Telesphore fut saint Hygin. ' Ges mots li femme sont supplies d'apres le
* II faut probablement lire : et fut ensuite.... Ce manuscrit B.
passage est omis dans le manuscrit B. * Mot omis encore dans notre textc, et supplee
* II s'agit de saint Hygin, dont l'avenement est d'apres le manuscrit B.
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346 CHROMQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
nons, puis les renvoiatarier : car adont astoit li coupeir les grenons li plus
grans despis que ons poioit faire a l'homtne.
Grant guerre emraRo. Al departir dest ly due Franco aux messagiers : « Saingnours, vos direis
» a vostre falis emperere que je ly mande que jamais, tant com je vive,
» ilh n'aurat en chi paiis tregut; et s'ilh li semble chu est tort, si vengne
» encontre moy a wee ses grans oust, se verat se je l'oiseray ratendre. Et
» encor, ly direis que ilh ne doit mie a moy demandeir tregut, ear ses
» ancesseur n'astoient mie afferans aux miens : car je suy issus de droit
» sane Franco, le fis Ector qui fut fis le roy Priant de Troie; et vostre
» emperere est issus de sane Eneas, unc due qui fut liges bona a roy Priant;
» et enssi ont esteit anchienement ses ancesseurs subgis aux miens. Et
» portant ilh n'afiert pas a ly de moy si vilainement demandeir tregut. »
— Atant soy departirent les messagiers, et vinrenta Romme; si ont dit a
1 emperere tout chu que ly due Franco ly mandoit, enssi com j'ay dit.
Quant 1'emperere oiit ches novelles, si fut mult corochies et dest que
Franco estoit trop orgulheux, mains, s'ilh puet, ilh sen repenterat bien
temprement. Adont mandat li emperere ses hommes, et assemhlat mult
grans oust, et vienet droit ' vers Galle pour destruire la terre; mais ilh ne
fut mie enssi, car ly dus Franco, qui bien quidoit que ly emperere ven-
roit, mandat ses hommes partout son paiis et se mist al chemien; si se
logat a la fin de son paiis * por sa terre gardeir. Et 1'emperere cheval*
chat tant awec ses gens, que ilh est venus a Gleremonlen Avergne, ou
li dus Franco astoit: et tantoist que ilh veit les Romans se les corut sus :
Lancxui. chu fut en mois de marche le XXVIII jour Tan CXLIL La oit mult grant
batalhe, en laqueile li emperere perdit Adriain f son frere et I III cheva-
liers ^ et des aultres Xll m hommes; et ly dus. Franco ne perdit mie grant
gens \ car ilh avoit mult de bonnes gens. Adont fut. 1'emperere desconfis et
LemperereAntbonefut s'enfuit tout parmy les bois, et ses gen& daultro part, cascon;OU ilh se pot
deaconfis par le dus »■.-■•- • i i i #• •* r •
Franco de Gaiie. mettre a salveteit, en disant : a Ly dyable nos fait cascon fois revenir sour
» cheaux de Galle, et se ne poions avoir encontre eaux poioir ne victoire,
» mains toudis sont nos Romans desconfis. » — Et ly dus Franco entrat en
1 Et s'achetnenat la droitc vote. B. nuscrit B.
* Cc membre de phrase depuis : et setnist...., 8 Anions. B.
omis dans notre tcxte, est suppled d'apres lc ma- 4 Mie gramment. B.
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LIVRE PREMIER. 547
I empire et commenchat la terre a exilhier. Mains, quant l'emperere le soit,
se le dobtat grandement, et fist Rorame fermeir; puis mandat ses hommes
par mere et par terre par tout son empire, entre lesqueiles ilh mandat le
roy d'Espangne et le roy d'Egipte, le roy de Hongrie, le roy de Cartaige,
le roy de Dannemarohe, le roy de Sezilhe et pluseurs aultres, qui vinrent
a plus toist qu'ilhs porent. Mains ly dus Franco et ses gens fisent mult de
mauls aux Romans anchois que socours leur venist, et prisent Pavie le IX e
jour de fevrier, et puis prisent Melant le XI I e jour de may l'an GXLI1I. —
Et avient que, enssi que li dus Franco et ses gens se devoient partir de
Melan por aleir a Romme, que unc messagier leur dest que grans gens
d'armes passoient al deseur de Melant, qui s'en aloient vers Romme por
les Romans sourcorir. Quant Franco oiit ches novelles, si escriat ses gens
el dest : a Saingnours, assalhons ches promiers anchois qu'ilhs soyent a Noble ethardie gems.
» Romme; sy en serat l'emperere plus floibes, car tant plus en ochirons
» tant moins aurons d'annemis. »
Atant sont les Sycambiens monteis a chevals et sont venus aux champs ;
si ont veyut les Espangnons, car chu estoit ly roy d'Espangne et de Danne- Gram bauihc.
marche, a XXX m hommes. Quant cheaux les veirent venir, ilhs se sont
armeis et rengies; mains chu ne leur valut, car les Sycambiens les ont sus
corut mult enforchiement, et la oit tant d'abatus que chu fat mervelhe.
Cest batalhe fat l'an deseurdit le XVH e jour de may, et fat mult fort et Foi. i»4v.
peruelheux ; mains fortune astoit amie adont a cheaux de Galle , quant nuls
ne les poioit contresteir \— Et ly dus aloit par la batalhe ' en sa main une
hache : si encontrat le roy Sadalas d'Espangne, se le ferit amont son
hay me, se ly fendit en deux 1 . Quant les Espangnois chu veirent, si assal-
hunt le dus Franco et ly ochisent son cheval desous luy, si qu'ilh chaiit a
terre; mains ilh resalhit tantoist en pies, et fiert entour luy de sa hache
com bons chevaliers; et la ochist-ilh XI hommes et en demontat XIIII.
Mains tout chu ne li valoit, car ilh fat abatus par forche, et la fut-ilh ochis *,
quant ly prinche de mont Londine, que ons dist maintenant le mont Laon,
vint la et soy ferit entres les Espangnois en criant : « Galle et Lutesse a la
1 Ne poioit avoir defense a eaux. B. s Si le fendit jusquet en dens. B.
9 Sic dans les deux textes. II doit y avoir ici un 4 Et la eut-il £te tue, quand
mot omis, comme : tenant.
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548 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
» rescosse. » — Quant les Sycambiens entendirent la vois, se vinrent la bro-
chant plus de X m a une fois sy roidemenl, que ilhs ont reculeit les aultres
plus de demy-bonier, et sy en ont tant abatut que la plache en estoit tout
coverte. Et la fut ly dus Franco remonteis, si rentrat en la batalhe, et ferit
le roy Meleon de Dannemarche de sa hanche ' si qu'ilh Fat fendut en deux 1 .
De chu furent les Dannois desconfis, et soy misent al fuyr. Et quant les
Espangnois les veirent fuyr, si s'enfuy rent oussi , cascons vers son paiis ,
et nuls deaux ne soy tournat devers Romme. — Et ly dus Franco retournat
a Melant, et la sourjournat-ilh XV jours por ses gens a repoiseir. Et quant
les Dannois revinrent en leur paiis, si ont fais roy le fis Meleon, lyqueis
Franco, du»deGaiie, regnat XLV ans. Quant ly dus Franco fut reposeis, si soy partit de Melan
a»eg a ^ ^.^ ^ Romme et Fasseghat. Adont fut racompteis a Femperere comment
ly roy d'Espangne et de Dannemarche astoient mors et desconfis, si en fut
mult corochies. — Enssi que le siege estoit devant Romme, assavoir : Fan
cxLiiu. CXLIIII en mois de jenvier, vint ly roy Dogas de Cartage et ly roy Bro-
doras d'Egypte; et avoit ja li sige dureit VII mois. Mains quant ilh fut dit
chu a due Franco, se fist ses gens armeir et les corut sus. Et la fut ochis
ly roy d'Egypte et li roy de Cartaige, et XI m hommes; et les aultres s'en-
fuirent honteusement f . Ilh fut mors en eel batalhe mult de nobles prin-
ches, mains je lairay a cest fois leurs noms 4 . — Adont revient vers son treit
ly dus Franco, qui grandement 5 estoit navreis, si que ilh quidoit bien
morir : et astoit la plaie desous la mamelle. Quant les meidres • orent la
plaie veyue, ilhs dessent al due Franco que ilh retournast vers Galle, car
ilh soy dobtoient forlement de luy.
Adont retournat ly dus Franco vers Galle, et ses hommes a wee, mult
corochies, car ilhs astoient de luy mull en bah is qu'ilh ne morist. Quant
Femperere entendit la novelle par unc chevalier qui li dest comment ly
dus Franco s'en raloit grandement navreit a mort, et comment cheaux de
Cartage et d'Egypte estoient mors et desconfis, si fut joians et dolans :
joians de chu que Franco s'en raloit navreit, et dolans que ses amis estoient
mors. Enssi revient ly dus Franco en Galle, et fut si bien governeis qu'ilh
fut temprement garis. — Adont arivat ly roy hongrois a Nappies, et vint a
1 Pour hache, * Mains ith ne noinme mie les noms, B.
* Si qu'ilh at fendut jusques en dens, B. 5 Durement. B.
* Vilanement. B. * Medccins.
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LIVRE PREMIER. 549
Romme. Mains quant ly emperere le veit, se li dest coment les aultres roys
astoient mors. Et ly roy de Hongrie respondit a l'emperere : « Si alons en
» Galle vengier les mors et le honte que ons vos at fait. » — Et ly empe-
rere le creit, se prist ses gens, et vinrent 1 vers Galle; et quant ilh fut
entreis, si commenchat a ardre et exilhier le paiis. Mains ly dus Franco,
qui astoit bien garis vient contre luy a grant gens, et les corut sus devant
Lyon, ou ilh les enconlrat; se les desconfist por maule ordinanche, car ilh
n'en fut mors que VI C Romans. Si soy partirent de la et alerent vers
Orliens. — En eel an meismes, le X e jour d'awost, morut a Romme li p&pe Li pape Liginus mora.
Lyginus *, et fut ensevelis deleis les aultres asseis pres de la tumbe sains
Pire. Chis pape escript a tous ses fideles une epistle de Dieu, de trois noms
et del incarnation Dieu le Fis, en 8 toute la foid catholique est tout place-
ment. Et fut martyrisiet a Romme, le jour deseurdit. — Et apres sa mort Foi. issf.
vacat le siege HI jours, et puis fut consecreis unc proidhons a pape, qui Pyus,iexi« P apc.
fuit nommeis Pius, e'est-a-dire Pieve, qui astoit del nation d'Ytalie, de la
cite it de Aquilee; si oit nom son peire Rutins. Et tienet le siege XI ans III 1
mois et 111 jours '. — A eel temps escript Hermes les libres en queiles ilh
contient, entres les aultres chouses, que ons ne doit mie celebreir la resur- ona ne doit cciebmr
rexion Noslre-Saingnour, fours que en dymengne. — Item, Tan CXLV, en qu-en dymengne.
mois de may, oit une grant batalhe a Orliens entre les Romans et Sycam- XLV '
biens, qui durat del matinee jusqu'a la nuil B . Et dist le hystoire, se la nuit
ne fuist venue, les Sycambiens fussent desconfis, car ilh l'avoient oyut et
encor l'avoient de piour.
La avient une grant trahison al temps de dont : car quant les Sycambiens De grant tnhison.
furent cuchies por reposeir, et leur gait fut monteit, si fist ly roy de Hon-
grie tout pasieblement • armeir les Romans, et puis tout a pies entreir en
roust des Sycambiens; se les sourprisent et en ochirent tant que tout la
terre en estoit coverte. Adont soy levarent les Sycambiens tous enbahis,
et soy misent al fuyr vers Lutesse, qui mult long estoit de la. — De chu fut Gu «" e en t e chei dc
iji7 ■ 1 • 11 **alle et Romans.
ly dus r ranco mult corochies; sy rasemblat ses gens, et mandat les Flamens,
1 S'acheminat. B. conforme au notre.
* C'est toujours du pape saint Hygin qu'il est 4 XII jour t. B.
ki question. * Que la nuit les departit, ajoute le manuscrit B.
* II faut, je crois, a en ajouter laqueille, ou le * Coyement.B.
transformer en ou. Le manuscrit B est du reste ici
hkb
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550 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
les Lovengnis, Jes Normans, les Bretons et cheaux de Rains et d'Ardenne
et tears saingnours, si assemblat grans gens; en eel an meismes, oit une
L'empererefutdescon- grant batalhe entre Femperere et le due de Galle, mains Femperere fut
desconfis, et soy mist al fuyr vers unc bois; et ly dus Franco et ses gens
rentront en Lutesse, par le conselhe de ses hommes, car ilh fust mult vo-
lentiers aleis apres. Enssi s'enfuit li emperere Anthone, et renvoiat ses gens
en leurs terres, chu qu'ilh en estoit demoreis, et dest que jamais ne vuet
cxlvi. rentreir en Galle, car chu sont trop mals gens. — Item, Fan,CXLVI, le XI e
sains MatemeB'aparut j ur de mois de may, s'aparut sains Materne a Navitus, son successear.
a Navitus , son sue- J .
cesseur. evesque de Tongre, en dormant, et li dest, en depriant, que ilh edifiast en
S di n Ton av e U fun e d"2ne ' a c ^ ei ^ de Tongre une englise, et le consecrast en l'honneur de luy. Et li
Terne* 6 de S * ins M * evesque Navitus ne mist pas chu en oblit, car tantoist lendemain ilh
mandat des ovrieres a grant plantejt, et commenchat Fengliese; et fut
parfait dedens II ans, assavoir Tan CXLVIII, le XVIII e kalende doctembre:
et le consecrat en Fhoneur de sains Materne, et y mist XII canones. Item,
en eel an , fist li emperere Anthone faire une columpne a Romme en son
ue Navitus, revesque nom , laqueile ilh apelat Anthonie. — Item, Fan CXLVIl, fist Navitus, li
cxlviii. evesque de Tongre , encor I altre engliese \ Sour Tan CXLVIII fut consecree
Fengliese sains Materne a Tongre, et ovroit-ons fortement a Fautre engliese
que ly evesque avoit commenchiet. — En eel an avienet mult grant perse-
Grant persecution sor cut ion sour sainte Engliese, car ypluseurs prinches de la terre fisent mult
!es cnstiens. • A ■ • • • •
de chouses encontre sainte Engliese, et ochisent sens cause tant de cnstiens
que chu estoit grant pieteit. Et estoit encor sainte Engliese ortant et en
aultre manere grevee par cheaux meismesqui le devoient defendre et aidier,
car a chi temps vrnrent aulcuns philosophes qui rechurent baptesme; et
Grand*, erreurs et he- puis se mettoient en leurs dis diverses erreurs contre le foid', lesqueiles
erreurs ilhs voloient sourtenir por leurs clergries. — Adont farent decheus
par eaux pluseurs simples gens, et apellat-ons teiles adversaires contre
sainte Engliese, entres lesqueiles furent Valentins, Cerdon et Marcion, qui
a eel temps astoient a Romme. Cheaux disoient, entres les aultres erreurs,
que ilh estoit dois dieux, dequeiles ly uns estoit plus grans et plus sove-
1 Fist Navitus, li evesque de Tongre, et commen- * Et puis se mettoient en diverses erreurs contre
cluU une englise a edifiier qui fut fait Van XL IX, le foy. B. -
et faisoit ons V englise 5. Materne desseurdit. B.
resies nassirent.
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L1VRE PREMIER.
m\
rains que ly aid t re, et estoit ly uns de dies dieux bons ', et l'autre justes.
— Item, en chi temps, avoit en Alixandre uns allre philosophe, qui fut
nomeis Basilides : chis disoit et voloit sourtenir que Jhesu -Crist n avoit
mie morf souffert \ — Item, Fan CXLIX, consecrat ly evesque INavitus
de Tongre son engliese en l'honeur de sains Johan ewangeliste, et y mist
raoynes estrangnes de diverse habit; car adont n'asloient encors troveez
nulles ordines. — En eel an, en mois de June le XI 1 11° jour, chairent trois
effoudres : I en Alixandre, et teile fut chis tempeste que tout les maisons Terrible or« g e.
de la citeit tremblarent et crolarent mult fort. De chesti effoudre furent Foi.«»v.
ochis Madatus, Gaudas, Sixte et Castoras, les quattre grans philosophes qui *>« "* effoudres.
les erreurs contre la foid voloient sourtenir. — Item ilh chaiit une effoudre
en Athennes, par lequeile furent ochis VIII philosophes, assavoir : Johans
Dalpes, Paul us, Symon, Jesocoras, Fremetus, Calixte, Judeson, Telofo-
rus. — Item ly thier effoudre chaiit a Romme, et la furent ochis Martion,
Astrodoy v Maltus. Petrus et Galatris 5 , grans philosophes et cristiens con-
traires a la foid. En teile manere prist Dieu venganche de ses anemis. Et
deveis savoir que de ches trois effoudre ilh ne fut personne ochis , fours que Grant myracie de* he-
cheaux qui la foid de Dieu voloient deetruire. Et ne furent mie tous ochis ,
car a Romme et aultrepart demorat pluseurs philosophes mult contraires
a la foid; mains cheaux que jay nommeis y astoient plus contraires. —
Item, Fan CL, en mois de marche, commenchat JNavitus , li secon evesque cetL.
de Tongre , a fonder une englise, laqueile ilh consecrat en l'honeur de sains Tongra, faX e P iu*
Jaque le grant; si mettit des religieux de gries habis. Et apres fondat une
aultre en l'honeur sains Andrier l'apostle, en lieu c'on dist en sovrain
marchiet de Tongre; et fut eel une engliese parochial, ou Dieu fut mull
ensauchies. A eel temps avoit-ons tantoist fait une engliese, car ons ne les
faisoit mie grandes, ains les faisoiUons polities et basses etsimplement,
seurs englieses.
1 Lons, B. il doit y avoir ici une fautc , — juste
peut-dtre au lieu d'injuste — car il n'y a pas d'op-
position entre le caractere des deux dieux. En tout
cas, Maroion soutenait rexisteaee d'un dieu sup<-
rieur, principe du bien , et celle d'un dieu inft-
rieur, principe du mal.
1 Une partie des Basilidiens enseignaient en
effet comme les Docetes, que la passion de Jesus-
Christ n'avait ete qu'apparente.
* Je ne sais quels personnages sont caches sous
tous pes noma, corrempus a ooup sur, s'ils ne sont
mime pas ficlifo. Symon et Marcwn aont d$a noms
connus, mais qui ne peuvent se trouver dans la
categorie des henHiques indiqucs ici. Quant a At-
trodaycthMaltus, indiqucraicnt-ils \esAscodrobe*
et les Masbotheens ?
■*m •Ait-
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[q^
552 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
Fnneo, liduideGaiie, sens faire nulles jolieveteis. — En eel an. maodat Iy das Franco de Galle
asseghat encor Rom- . * ' *
»•• ses hommes, et leur dest qu'ilh voloit chevalchier sur les Romans. Si fat
chu nunchiet a l'emperere Anthone, qui en fut mult enbahis, se fist garnir
toutes ses vilhes et chasteals. Quant li dus Franco fut venus devant Romme,
si fist tendre ses treis, et si loghat com chis qui voloit la citeit greveir.
Adont s'avisarent les senateurs, et desent que chu estoil grant fortune quant
ly emperere de Romme, qui estoit le chief de tout le monde, estoit enssi
gasteit et travelhiet par unc seul due, qui par droit devoit eistre en la sub-
jection de lempire. Si s'acordarent a chu , et desent que ilh voloit mies que
ly empire fuist destruite a une fois, se ilh le devoit eistre, que chu que
ilhs fussent longement en teile langueur. — Adont parlat unc des senateurs ,
qui oil nom Henris, qui amoit la foid Jhesu-Crist 1 ; mains ilh n'estoilmie
encor baptisiet. Chis Henris dest tout en audienche que, se ilh estoit creus,
ilh diroit une chouse qui mult bonne seroit, et dest : a Qui feroit armeir
» tous les cristiens, foursmys les clers, et les fesist aleir en batalhe, je
» vuelhe que ons moy trenche le chief, se ly dus de Galle et ses gens ne
» sont desconfis. » Quant l'emperere et les aultres senateurs entendirent
chu, si furent mult corochies et desent enssi : « Henris, que dit-vos?
» Voleis done vos croire que ly Dieu des cristiens est melheur que ly nos-
» tre? » « Saingnours, dest Henris, je ne dis mie chu que vos dites, ne se
» ne le desdis mie; mains ons sceit bien et at esteit veyut n'at mie long-
» temps , que les cristiens nos fisent grant sourcour contre cheaux d'A-
» thennes, qui nos avoient desconfit et awissent Romme gangnie et des-
» truite , quant ilhs furent par les cristiens desconfis et ochis ; et portent
» disoy-je chu. » — Respondirent les senateurs : « Ilh ne serat ja veyus
» que nos aions ens es cristiens tant de fianches , que nos les doions my-
» neir awec nos en batalhe, car nos dieux soy corocheroient trop encon-
» tre nos; mains nos yscerons fours demain al matinee, et courons sus nos
» anemis, sens faire cohardie. » Enssyment fut acordeit, et ysserent fours
lendemain ; mains les Sycambiens les corirent sus mult hardiment \ La
Grant myrade. demonstrat Dieu mult grant myracle, jasoiche que ly une partie ne ly
aultre ne fussent mie en Dieu creant, mains por leur malvaisteit a demon-
cli. streir. Cest batalhe fut sour Tan CLI, le XII f e jour de mois d'avrilh; si
1 Qui trahoit ja a la toy Nostre-Signour Jhcsu- " Let rechuirent mult enforchement. B.
Crist. B.
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LIVRE PREMIER. 883
fut mult terrible et doloreuse, car ilh y fut mors Xll m Romans, entres
lesqueiles oit III C chevaliers et XLII1 senateurs des plus grans; et des Sy-
cambiens ne fut ochis personne, ne grans ne petis. Adont s'enfuirent les
Romans et rentrarent en Romme com desconfis. — Et quant Henrys ly
senateur veit chu, si en fut mult lies, et vient a I'emperere et li dest :
« Monsaingnour, chu est grant mervelhe que vos ne voleis croire bon con-
» selhe; sy en sereis en la fin bonis, car vos creieis chu qui vos est con- Foi.iwr*.
» traires, par l'orguelhe de cheaux de voslre conselhe. Je vuelhe que vos
» moy faite mettre en prison, et puis ysseis demain de la citeit et coreis
» sus les Sy cambiens , mains que les cristiens soient a wee vous ; je vuelhe
» que al revenir moy faite coupeir la tieste, se vos n'aveis victoire. » —
Quant ly emperere entendit chu, si Tout asseis volentiers. Se prist adont
conselhe que ilh en feroit, et son conselhe ly respondit qu'ilh esprovast se
chu poroit eistre veriteit. Adont lendemain al matien ilh fist armeir les
cristiens et tons ses barons , puis issirent fours et corirent sus les Sycam-
biens. La fut ly batalhe mult grant devant Romme, et si fut mult de gens
ochis, de l'unne partie et de (autre; mains que vous diray-je longs pa-
rol les? Les Sycambiens furent desconfis par le volenteit de Dieu, qui por Les sycambiens f U -
... . ,. . ,, in i 1 * 11 j- * rent desconfis devant
ses cristiens aidier demonslrat la grant myracle. En eel batalhe furent Romme par ie* cri$-
ochis XVII m Sycambiens, et le remanant soy mettit al fuyr vers Galle; et
Franco, leur due, juroit, s'ilh venoit en Galle, ilh assembleroit tant de
gens qu'il hen auroit asseis , et puis revenroit en l'empire a si grant forche *
que ilh destruroit tous les Romans. Enssi furent les Sycambiens desconfis
que jay dit; et les Romans rev in rent a Romme, en faisant grant fieste.
— Adont vient Henris ly senateur devant I'emperere, etly dest : « Sires, Hennsiy senateur aui
. . T i- r\-n donnat le conselhe
» que vos semble? aveis oyut victoire? » Ly emperere respondit : « Oilh, deuicioire.
» grasce aux cristiens, car chu sont bonnes gens et moy ont mult bien
» servit; et portant ilhs seront afrankis del tout de chi jour en avant. »
Adont fist I'emperere crieir parmy la citeit de Romme, et oussi ilh le man- Le ^ r n i ^ en * furenl
dat par toutes les provinches de son empire, que tous les cristiens fussent
frans dedont en avant, et que nus ne forfesist riens a eaux sour perdre le
chief, et que ons les laisast faire et tenir leur loy a leur volenteit, car chu
estoient bonnes gens. — Et commandat encor avant I'emperere qu'ilh ne
1 Si enforchcement. B.
70
Ifch.
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S54 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
fust personnes qui destournast les cristiens a prechier leur loy , et que
cheaux qui voroient en leur loy croire ne fussent mie punies , ains lasast-
ons cascons croire solonc sa conscienche. — Quant Henris ly senateur en-
tendit chu, si soy fist tan to is t baptizier et sa femme et ses enfans, et awee
nil-, hommet furent luy bien llll m hommes dedens VIII jours, qui avoient enameitla loy cris-
baptiziet por les II . J , it* . .
vietoirsdez cristiens. tiene por les II victoires que les Romans avoient oyut par eaux si tres-no-
toires : assavoir , l'une contre cheaux d'Athennes , al temps l'emperere
Adriain, et l'autre a cesti temps contre cheaux de Galle. Enssi furent les
cristiens mult affrankis par l'aide de Dieu, qpi en devant avoient esteit si
Franco, dusdeGsiie, crueusement martirisies. — En eel an meismes, en mois de novembre,
assemblat mult de - #
pnnches, por con- assemblat ly dus franco de Galle tous les prinches que lib pot avoir por
selhe avoir contre les * . ^i . «• #r . .
Romans. prendre conselhe que lib feroit des Romans. Ghis conselhe fut en la citeit
de Laon sour le montangne: si furent presens ly dus de Lotringe, ly dus
d'Ardenne, ly dus de Bretangne, ly dus de Normendie, ly conte de Flan-
dre, ly conte de Lovay, ly conte de Clermont, ly conte de Lymoge, ly
conte de Bolongne , ly dus de Burgongne et pluseurs altres. A chi parle-
ment soy deplandit ly dus Franco de l'emperere de Romme, de chu qu'ilh
li avoit meffait, et le demonstrat la; si priat a tons lesdis prinches mult
humelement que cascon li vosist aidier contre les Romans, et ilh les aide-
roit oussi a chu que cascon d'eaux seroit qui ties des grans tregut que ilhs
devoient aux Romans.
A eel parlement y oit pluseurs prinches qui sacordarent biea a chu que
ilh aidassent le due Franco; mains la plus grant par tie, et oussi tous les
plus grans saingnours d'eaux, dessent tout overtement * que ja ne sieroient
rebelles a l'emperere ne a son empire, ilhs ne ly oiseroient solonc leurs
seriment riens forfaire, car ilh covenroit, se ly emperere les mandoit, que
Tous les nrinchesrefu- ilh l'alassent aidier a son commandemement De eel opinion furent tous
^GaiiVconiresiw \es prinches de parlement, (burs tant seulement ly dus de Bretangne et ly
om*®s. ^^ ^ Normendie et ly conte d'Avergne. Enssi soy departit ly parlement
que ly dus Franco ne fut aultrement assegureis de sa guerre, ains demorat
tou seul, et les aultres en ralont, cascon en son paiis. — Adont revint ly
Foi. i86v. dus Franco a Lutesse mull fort corochies, si com ilh y aparut; car de la
grant tristeur 1 qu'ilh en oit ly prist une fievre qui li tienet si angousseu-
1 En oiant. B. s D% la mirancolie. B.
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LIVRE PREMIER.
555
semen t V mois, qu'ilh en morut, Tan CLII, le XVIII 6 jour 1 de mois d'a-
vrilh. Et fut lydis due Franco ly miedre chevalier qui awist esteit puis le
temps Julius-Cesar en tous cas, foursmis qu'ilh n'estoit mie cristriens.
Apres Franco, fut dus de Galle son anneis fis Anthenoir, si regnat XXXI
an ■ ; et ly aultre fis Franco oil a nom Ector, qui puis fut dus de Borgongne.
— Sour Tan CLIII, consecrat Navitus, ly evesque de Tongre, Fengliese paro-
chial desusdil en l'honeur de sains Andrier. — En eel an vint a Rom me
promiers Galien, un gran meides, qui estoit neis de Pergaime, et fut a
Romme puis en grant auctoriteit. — En chi temps vint a Romme Pompeyus
Trogus 5 qui estoit de Espangne, qui les histoires de tout le monde escript,
commenchant a Nynus, le roy de Surie 4 , et porsiwant tout jusques a le
monarchie Cesar, qui continent XLII1I libres; mains Justinus, son disci-
ple , les abreviat mult. Apres lyqueis Justin Anthone le Pieu , emperere ,
fist et donnat I libre de la religion cristiane '. — Item, Tan CLII II , en mois
de june, fut fais unc mariage en Galle de Ector, le frere le due Anthenoir,
et de Gandalas, la filhe a due de Burgongne, lyqueis n'avoit plus d'efans;
si fut Ector apres luy due de Burgongne. — Item , en eel an , fut racomp-
teis a l'emperere comment ly dus Franco estoit mors de duelhe, et com-
ment tous les prinches ly avoient fallit, foursmis cheaux de Bretangne, de
Normendie et d'Avergne. Quant ly emperere entendit chu, se fut mult coro-
chies sour cheaux qui s'astoient acordeis a due Franco por destruire son
empire; se jurat que ilh les destruiroit, se ilh poioit; et fut mult lies que
Franco , cuy ilh tant dobtoit, estoit mors '.
Adont assemblat l'emperere Anthone ses oust, sy en alat tout promier
en Normendie. Quant les Normans entendirent chu, se mandarent a due
de Galle que ilh les sorcorist. Et quant ly dus Anthenoir l'entendit , si
assemblat ses gens, el en alat celle part a grans gens; mains, anchois que
CLII.
De Anthenoir, le dus
de Galle.
De Navitus, evesque de
Tongre.
Gallien,le gran phUi-
chien.
Pompeius Trogus, li
gran hUtoriogra-
phins, et Justinus,
son serran.
CLIII.
L'emperere Anthone
a wee ses gens vint
vers Normendie et le
conquestat et Bre-
tangne.
Anthenoir, le due de
flalle, reconquesta
Normendie.
1 Le XXIX* jour. B.
J XXI an. B.
• Et micux Trogus Pompejus.
4 D'Asserie. B.
5 Le chroniqueur fait ici allusion au livre d'An-
tonin le Pieux, intitule* : Ta e/; iaurdv (Commen-
tarii ad se ipsum). Quoique FEmpereur fut trop
humain pour persecuter les chr^tieus, il ne les
avait pas en grande estime. On trouve neanmoins
dans son oeuvre des maximes qu'on croirait em-
pruntees a l'Evangile , et qu'il peut du reste avoir
puisdes dans YApologie que lui adressa Justin le
martyr. Jean d'Outrcmeuse semblc con fond re ce
dernier avec son homonyme Thistorien.
4 La redaction de cette derniere phrase differe
uu peu dans les deux textes j au fond les deux ver-
sions disent absolument la meme chose.
Ikia^
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886 C0RONIQUE DE JEAN DWf REMEUSE.
ilh y venist, fat ly paiis conquesteit et ly dus ochis; et soy rendirent les
Normans a 1'emperere de Romme, el ilh les donat unc de ses prinche a
due et saingnour, qui fut nomeis Bados. — Et puis sen alat ly emperere
vers Bretangne, et fist tant que ilh le conquestat. Et enssi que ly emperere
conquesloit Bretangne, si entrat ly dus Anthenoir en Normendie. Mains ly
noveal dus Bados, cuy ly emperere y avoit mys, assemblat ses gens, et
vient encontre ly, et oit batalhe a ly le IX e jour de marche, 1'an deseurdit:
mains ly dus fut ochis, et ses gens mors et desconfis. Adont soy rendirent
les Normans a due Anthenoir; et ly dus Anthenoir rendit la terre a Gappa,
le fis de due euy 1'emperere avoit ochis. — Enssi com ilhs astoienl la, vint
unc messagier, qui estoit bretons, qui dest al due Anthenoir que ly empe-
rere de Romme destruoit Bretangne, et que ly dus mandoit a ly sourcour.
— Adont sen alat ly due Anthenoir vers Bretangne, et awez luy Grappa, ly
dus de Normendie, a grant gens; mains quant ilhs vinrent la, si trovoot
que 1'emperere l'avoit conquestee. Et ly dus fut pris par forche , se priat
merchi a 1'emperere; mains ly emperere ly dest quilh auroit enssi merchi
de luy que ilh awist oyut de ly, se ilh le tenist en son merchi, car ilh le
mainroit en Avergne, et la le metteroit a morl solonc loial jugement, awec
le conte d'Avergne qui l'avoit aidiet a trahir. Adont ly fist mettreunc car-
LanCLv. cain en son coul, et le fist menier apres son oust tout a pies. Ghu fut Tan
CLV, en mois de may ; se sen alat vers Avergne. — En eel an, en mois de
Lrzordinancbesiep.pc decembre le XXll e jour, morut ly pape de Romme Pyus : chis pape ordinal
a son temps que se unc heretique ou unc juys plains de heresie demandast
baptesme, que ons ly donnast. — A son temps vint a Romme ly evesque
de Epheze Policarpe, qui fut disciple a Sains- JoKans ewangeliste, qui
mult rapelat des heretiques del heresie Valentein et Cerdons. A son temps
Achi temps furentpo- furent a Romme dois sainte virgues, sainte Potentiane et sainte Praxede.
Apres la mort le pape Pyus vacat le siege XV jours, et apres, assavoir
Anadeiusxu* pape. le Vl° jour de jenvier, fut consecree a pape de Romme Anaeletus * XII C , qui
fut de la nation de Surie, fis a unc valhant chevalier, qui fut neis de la
citeit que ons nomine Mirre, et oit nom Johans'; et tienet le siege X ans,
Foi. tern*. HI mois et XXI 11 jours. Et les aultres dient qui fut consecrees, L'an CLXV,
et se tient le siege XI ans, III mois et II II jours. Et ly hystoire de Sainte-
1 Lisez Anicetus, qui fut en effet le douzieme * Platina appelle le pere du pape Anicet : Jo-
pape. hannts de Vicomurco vel Humisia.
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LIVRE PREMIER. 557
Engliese dist en quart libre qu'ilh regnat X ans , et vacat li siege XV jours.
Et les altres dient qu'ilh vacat XXI I II jours. Mains toutes ches differenches
revinent tout a pointe a l'an parfait et inparfait; car ly unc compte Tan del
incarnation, et ly aultre l'an del nativiteit. — Item, l'an del incarnation
C et LVI , entrat ly emperere Anlhone en la terre d'Avergne , et commen- CL y ! -
chat la terre a destruire; et faisoit myneir tous jours tout a piet le due de 6 cn,perere
Bretangne, et Je faisoit tous les jours battre trois fois. — En eel an, intrat
li due de Galle en Bretangne, ou ilh quidoit Iroveir l'emperere ; mains ons
li dest qu'ilh avoit le paiis conquesteit et sen aloit vers Avergne; et ly
dessenl encor que ilh enmenoit awec ly leur due, leur saingnour, en grant
povreteit et a gran doleur. Ly emperere vint en Avergne, si commenchat L ^J* r % e vinl en
la terre a destrure; mains li conte prist tantoist pluseurs messagiers, se les
envoiat le promier a conte de Flandre, l'autre a due de Borgongne; et fist
les messagiers dire que ly dus Anthenoir de Galle les mandoit, car ilh
savoit bien que ly dus Anthenoir estoit fours de son paiis et qu'ilh ven-
roient tantoist a son mandement; car ly dus Anthenoir avoit a femme la
soreur a conte de Flandre, et le frere le due Anthenoir avoit a femme la
filhe le due de Borgongne. Adont s'en alerent les messagiers ou ilhs furenl
envoies; si fisent si bien leurs messages que li dus de Borgongne et li conte
de Flandre vinrent a toutes leurs gens vers Avergne. — Et li due de Galle De dus de Gtiie.
oussi entrat en Bretangne et se le conquist tout; et trenchat le tieste al due
cuy ly emperere y avoit mis, et puis s'en alat devers Avergne. De tous cos-
teis entrat ly soucours en Avergne; si fut nunchiet a l'emperere qui fut de
chu mult corochies; se fist ses gens ^rmeir et vint contre cheaux de Bor-
gongne, se let corit sus el les desconfist, et fut leur due ochis. — Adont
retournat a Clermont, et I'asegat le XVIII 6 de may l'an CLV1I. Adont
venoit ly dus de Galle a banier desploie mult asprement; si encontrat les
fuans de Borgongne, qui ly dessent comment leur saingnour estoit mors
et eaux desconfis.
Adont demandat ly dus Anthenoir se son frere Ector estoit mors. Et ilh De Anthenoir, duede
J Galle.
respondirent que nenilh , car ilh n'avoit mie esleit en la batalhe , ains estoit
demoreis en Borgongne por gardeir le paiis. Adont soy hastat ly dus
Anthenoir ses gens, et alat lant qu'ilh encontrat dois chevaliers, qui ly
dessent que ly conte de Flandre venoit a grant gens por luy aidier contre
les Romans; si en fut mult liies. Se prist unc messagier, se l'envoiat a
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f
588 CHROMQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
conte de Flandre, et ly mandat que ilh fuist a unc certain jour devant
Clermont que ly emperere avoit assegiet; car ilh le voloit a chi jour, se ilh
poioit, dessegier. Enssi fut la chouse ordinee que ly dus de Galle et ly
conte de Flandre vinrent a une fois devant Clermont, et corurent sus les
Romans qui bien soy defendirent. Mult grant fut la batalhe et ruste * : car
ilh y oit maintes hommes mors et navreis. Et si avint que les Romans de
promier en orent de melheur, et furent les aultres reculeis. Et la fut ochis
Palmades *, ly conte de Flandre, de quoy les Flamens furent mult esbahis.
Adont furent pres les Sycambiens desconfis; mains cheaux d'Avergne issi-
rent fours de la citeit de Clermont, si corurent sus les Romans. EJnssi furent
les Romans enclous de dois costeis, si furent mult esmayes; si soy misent
al fuyr de plus toist qu'ilhs porent. Et ly emperere, quant ilh veil chu, se
entrat en unc bois ; mains ly dus Anthenoir le sewit mult toist et ly escriat :
« Emperere Anthone, retourneis a moy, je suy ly dus de Galle, je suy ly
» fis le valhant due Franco, que ons disoit estre le melheur espee de
» monde; retourneis a moy 1 coup de lanche; se vos josteis a moy, vous
» n'en n'areis ja reprovier, je suy asseis gentis hons. » — Quant l'emperere
l'entendit, se retournat son cheval vers ly mult firemen t; les chevaliers
Lemperere en u fin en ambdois fiers et orgulheux si soy vinrent sens plus parleir ly unc vers
etiyd C i^eG e aTie D re! l'autre a lanches basies, et se soy donnarent teils colps que ilh ont romput
tin e& son pans. escus e j habiers , et aux chevals cengles, poitreals, et tout jetteit en unc
mont, eaux et leurs chevaulx, emmy les champs sy roidement, qu'ilh sont
Foi. 157 t«. ambdois pasmeis et jurent 5 la une grant pieche ; puis revinrent a eaux et
salhirent sus, sy soy combattirent aux espeez mult longement. — Dedens
chi temps astoient les Sycambiens mult corochies, et demynoient grant
duelhe de chu qu'ilh ne savoient que ly dus Anthenoir eatoit devenus, ne
s'ilh estoit mors ou nom. Et enssi les Flamens faisoient grant duelhe por le
conte de Flandre, leur saingneur, qui mors estoit Enssi fut ly duelhe mult
seui « »eui bataihe en- angousseux en la citeit de Clermont. Et Anthenoir soy combattoit a l'em-
thenoi>rie r dac de perere a forche de bras et d'espee. Et dist ly hystoire que ly emperere en
avoit de pejour, car ilh estoit vies , et Anthenoir as to it encors uns jones
hons, fors et poisans. Enssi com ilhs soy combattoient, vinrent a passant
1 Violente, impetueuse. Ruiste dans Roquefort. * Girent, resterent etendus.
1 Palamedes. B.
Galle.
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560 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
cheaux qui chu les avoient conselhiet' furent ochisa grant tourment. Apres
chu revinrent les Romans a Romme. — Item , Tan CLIX, assemblat ly dus
Request del dusAnthe- Anthenoir tous les plus grans de tous les Flamens, se leur priat et requist
que de chi jour en avant ilh ne paiassent plus le tregut qu'ilh avoient
aconstummeit del payer aux Romans; et 6e les Romans le voloient calen-
gier, ilh les abateroit oussi bien que ses predicesseurs avoient abatut cheluy
de Galle. Adont respondirent les Flamens al due en teile manere : « Sires
» dus, ch'est bien voire que vous anticesseurs furent rebelles *, del payer le
» tregut aux Romans, et l'ont longtemps detenuit sens payer, et encor le
» deteneis; mains nos ne disons mie que ilh soit abalus; ains est enforchie
» et detenus par forche, enssi com ilh fut jadis devant le temps Julius
» Cesar, qui le remist en servaige et el subjection des Romans. Et enssi
» porat faire uns aultre emperere qui chi apres venrat, qui serat plus con-
» querans que Anthone ne soit. Et portant oussi que vos ne voleis et aveis
» volut, vos et vous predicesseurs, payer le vostre tregut, se ne fuistes onc-
» ques en paix, anchois asteis tousjours en gerres encontre les Romans,
» et sereis tant que vos ne paireis le vostre tregut; et enssi sieriemes-nos ,
Foi. 158 f. » se nos astiens defalant de nostre tregut a payer. Et portant que nos
)> volons eistre en pais, sens nulle guerre esmovoir par nostre coulpe,
» nos volons bonnement payer le tregut, enssi com nos le devons; car nos
» avons guerre asseis de la vostre. Vous esteis nostre sire, se covient, se
» vos aveis guerre, que nos vos aidons, et nos ne vous faurons mie; mains
» que nos doions esmovoir une guerre par nostre volenteit , chu ne ferons
» jamaie. » Quant ly dus entendit ses gens, si s'apaisat; mains encordont
ilh en fuit mult corochies, se ilh le posist amendeir bonnement. Et eel
LanCLx. request fut fait Fan CLX, le IX e jour de may. — En eel temps estoit a
Sains Policarpe des- -^ **•*•*• r* i* • «. •* 1
truite muit de here- Romme en grant auctoriteit sains Policarpe, qui encor estoit demoreis en
vie des disciples sains Johans ewangeliste. Chis sains Policarpe destruite *
a Romme pluseurs heresies, que les faux cristiens philosophes avoient
esmutes le temps devant, lesqueiles * heresies chis sains hons destruite et
se les remist a la vraie foid Jhesu-Crist, car B ilh les anunchat la vraie foid
1 Assailhiet. B. porte les.
* Le mot est ici eerit en entier. * Et si le remist a la vraie voie de nostre foid
5 Chis sains Policarpes, sour Van cent LX, asor- plusieurs cresliens qui de ches erreurs astoient <Je-
vit... B. chuis, car.... B.
4 Je corrige d'apres le manuscrit B. Notre texte
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L1VRR PREMIER. 564
en (eile man ere que ilh le lenoit des apostles, auxqueiles ilh avoit esleit
disciple. — Item , Tan CLXl , sains Navitus , evesque de Tongre, fondat une De sains Na*ue.
engliese en Ihoneur de sains Clement. Et en chi temps prechoit I yd it eves-
que fortement par Allemangne. — En eel an , le XIX e jour de mois de L'empewe Anihone
inarche, morut a Romme ly eraperere Anthone ly Pieu, qui fut ly XVII e .
Chis emperere Anthone ly Pieu fut proidhons, solonc sa loy; si oil chest i
sournom , portant qu'ilh estoil tant pieu et debonnairs qu'ilh faisoit amisfeit \
et cortoisie a cascon, et sour caucion ilh relaxoit les debteurs leurs debtes
a paiier a leurs aise. Ilh fut genre a l'emperere Adriain, car ilh avoit a
femme sa filhe, et estoit riche prinche anchois qu'ilh fust emperere. Si
morut a une siene vilhe qui oit a nom Orte \ qui siiel a XII milles de
Romme; et quant ilh fut mors, si fut enlre les dieux consacreis et renomeis.
— Chis Anthone oit une filhe qui oit nom Faustine, qui veit II hommes De Famine, ia fiibe
* * l emperere, comment
combattre ensemble; si en fut ly uns ochis, dont elle enprist teile paour ^/^ e cur<le de sa
quelle en ardoit tout, et en chaiit en l'aighe ' et y jut longtemps. Mains al
derain elle le dest a son marit, et ly dest la cause de son maladie; et son
maris s'en conselhat aux meides de Caldee, qui ly dest que ilh fesist ochire
chis hons qui avoit ochis la u I re, et en presist le sane, sy en ondist le corps
de Faustine sa femme, si seroit garie. Chis le fist, et oussitost que elle en
fut onte. sy fut tout garie de sa langueur.
Al temps de cheli Anthone estoit en errant auctoriteit a Romme Ptho- coment pihoiomes, ie
r o philosophe, adjoslnt
lomes, qui fut uns divins et mult soufiisans en Tart de mathematique , qui ™" n t mie aisonsias
adjoslat a astronomie plus de raisons qu'ilh ne trovat en escript faite par les
altres devant luy. Chu fut le plus mervelheux et soufiisans clers qui onc-
ques fuist en astronomie. Et fut d'unne stature moderee et blans de coleur ;
et estoit yreux en par tie, et estoit de petit vivre; et avoit son alanne aro-
matique odorant mult douchement. — Chis fist mult de libres, assavoir : *>«> libm <iue chis
* . 1 Ptholomesfist.
Almageste et le Perspective, et en jugemens le Quadrupertitum et Centih-
gium et pluseurs aultres; et visquat IIII" el III ans. Ilh fut maistres des
proverbes, deseurs tous les aultres 5 . — Chis emperere Anthone oit II fis DeremperereAnihone,
1 II y avait dans le Latium une ville nommce comme a la fin de cet alinea.
Orton et Ortona. Mais Antonin est mort a Lau- * De proverbet de li fut till nobiliteit deseur tout
Hum , qui est en effet situe a douze milles de Rome, let altres. B. Tous les litres indiques dans ce passage
* II doit y avoir ici une faute. Le manuscrit B da cbroniqueur sont ceux d'ouvrages attribu^s en
porte tange, et il faut probablement lire langueur, effet a Ptolemee. D'abord ses XIII livres d'astro-
7i
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362
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Porqpoy ilb fut ordi-
neit de etleir dois
emperreurs.
Les XVlU'emperreirs,
les II fis Anthone :
Marcus et Aurelius,
qui regnont •icom I
seul eroperere.
CLXII*
De I1II* conte de Lo-
ray.
Fol. 158 y.
CLXIII.
De sains Policarpe.
Ly oraige et ly rois de
chiel blastenghat Au-
relius l'emperere.
qui arabdois estoient bons chevaliers, et furent porteis a une porture et
neis a une heure, si que ons ne pot determineir lyqueis devoit devant re*
gneir, car les dammes ne savoient lyqueis estoit nasquis devant. Et por cest
raison regardarent les senateursune teile chouse que ilhs ordinont et con-
fermont entre eaux, que dedont en avant ons esliroit II emperreurs a
Rom me, qui rengneroient ensemble; et quant ly uns defalroit, que ons y
remetteroit tantoist une aultre. Enssi fut adont ordineit: si furent adont
coroneis les II (is l'emperere Anthone par accort, lesqueis orent cascon
d'eaux (rois noms; car ly uns fut nommeis Marcus Anthonius Verrus, et ly
altre esloit nommeis Aurelius Lucius Commodus *. Si regnarent ensemble
par l'espause de XIX ans Illi mois et IX jours; et ja fust que ilhs regnoieot
enssi ensemble com dois empereres, nonporquant ilhs ne fasoient que une
entre eaux dois, et n'astoient compteis que por une seul emperere.
Sour Can CLXII, en mois de may, morut ly thiers conte de Lovay
Alixandre; si fut conte apres son fis Jonadas, qui fut beal chevalier et
regnat XVI ans. — Item, en eel an, en mois de septembre, s'aparut en
Athennes une traiche de feu en laire, qui s'estendoit, sicom ilh seinbloit,
de orient jusques en Occident. A chi jour estoit en la citeit d'Athennes ly
une des empereres de Romme, Aurelius, et faisoit sacrifiche a ses dieux.
Chis emperere estoit asseis piour que son frere Marcus, et faisoit volentier
persecution aux cristiens. — Item, Fan CLXUl, soy partit sains Policarpe
de Rome, por le grant malvasteit qu'ilh veioit ens empereres, et en alat
parmy Lombardie en prechant la foid, et alat tant que ilh s'arestat en
Borgongne; et y demorat pres de IIII ans, et y convertit mult grant peuple.
— En eel an chevalchoit l'emperere Aurelius, se ly chaiit par-devant luy
uns grans effoudre, qui ly ochist son cheral, et ilh en chant a terre; et
adont ly dest une vois : « Aurelius, porquoy es-tu si malvais a peuple
nomie, intitules : Meyaiij <juvrcrf;ii , ce dont les
traducteurs arabes ont fait J Images te. Puis vien-
nent lc traite De Optica, le Quadriparlitum ct les
Centum sentenliae. Ces deux dcrniers ouvrages
traitaient de I'astrologie judiciaire, indiquee par
Jean d'Outremeuse sous la denomination : Juge-
ments. Quant a la qualification de maitre de pro-
verbet, e'est encore une allusion aux Centum ten-
tentiae, provcrbes etant ici la traduction du latin
sentenliae. Sur tout ce!a,voir la Bibliotheca Grctca
de Fabricius, IV, 46.
1 Encore une tradition fabuleuse. Lucius Veros
et Titus Annius Verus, connu plus tard sous le
glorieux nom de Marc Aurele, netaient que le*
fils adoptife d'Antooin.
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LIVRE PREMIER. 563
» Jhesu-Crist? Se tu ne toy retrais de maule a fa ire, tu en moras de maul
» mort. » Quant ilh entendit chu, si fut mult enbahis. Et la vois s'en-
vanuit atant et s'en alat. — Adont vient Aurelius a Romme; si trovat son
frere I'emperere Marcus, se li racomptat chu qui ly estoit avenus, et com-
ment ly effoudre chaiit devant ly. Quant Marcus l'etendit, si fut mult
corochies et ne le voult mie croire ; ains dest que son frere ly disoit chu
par fiction, portant qu'ilh voloit croire en Jhesu-Crist. Adont jurat Aure-
lius grant seriment que non faisoit, car ilh n'oit onques volenteit de croire
en Jhesu-Crist; car ilh ameroit mies que ilh fust pendus que ilh creist en
Jhesu-Crist. En teile manere demorarent ches parolles 7 et n'en fut adont
plus parleit. — Sor Fan CLXII1I. convertit sains Policarpe al loy Jhesu- saios Poiicarpe con-
*, . * . i vertit a Dieu tot Bor-
Crist, par ses predications que ilh faisoit si diligemment, toules les gens goDgoe,ianCLxiiii.
de paiis de Borgongne 1 . — Adont fut-ilh racompteit a I'emperere de Romme
Marcus que Policarpe , uns hons qui avoit esteit disciple as Jhesu-Crist \
avoit par ses ruses et fables convertit a la loy de Jhesu-Crist presque la
motie de Borgongne, etle convertiroit tout se ilh visquoit longemenl. Quant
I'emperere entendit chu, se dest qu'ilh manderoit a due de Borgongne que
luy et ses gens ne relenquissent mie la loy de Romme par les menchon-
gnes de chi tiran qui les sermonoit, el ly envoiast le sermoneur, car ilh le
feroit de mal mort ochire. Enssi ly mandonl les 11 empererers de unc com-
mon assent et acorde. — Et ly messaige fut fais a Ector, le noveal due , qui
estoit frere a due de Galle Anthenoir, qui les respondit en teile maniere :
« A vos empereres dites que ja n'obeiray tant a eaux que je les envoye unc
» sains proidhons; et, por faire aux empereres plus grant despit, je prende-
» ray baptesme et feray baptizier tous cheaux de ma grant ducheit. Et qui
» ne soy vorat baptizier, ilh aurat coupeit le chief. » — Adont at ly due
Ector tanloist mandeit sains Policarpe, et le fist sermoneir en la presenche
des messagiers des empereres. Apres le sermont que ly proidhons oit pre- Ly du g^^° t r f $ -° r g "t
chietde la loy Jhesu-Crist, se soy fist ly dus Ector baptizier; si fut nom- oit nom joi»m.
meis Johans. Apres ilh fist baptizier toutes ses gens qui vorent Jhesu-Crist
adoreir, et qui non ilh les fist crueusement et fellement ochier.
Et ne s'en fallit gaire que tous cheaux de sa terre ne presissent baptesme,
1 Toute Borgongne et toutes Us gens qui astoient * As apoistles. B. Cette version est, a coup sur,
dedens, habitant les quatre citeis. B. mieux ctablie que cello de notre texte.
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564 CHRONIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
car sains Policarpe les avoil ja devant mull bien infourmeit. Et fut chu sor
clxv. Ian CLXV, en mois de jenvier. Atant parlat ly dus Johans de Borgongne
aux messagiers, et dest : « Barons, vos direis a vos empereres que ilhs ne
» doient mie mandeir a moy nulle amisteit, car je les hay commes mor-
» lei Is anemis; je suy frere al due Anthenoir de Galle, et porlant je les
» deffie depart mon Dieu Jhesu-Crisl et de tous mes amis et de moy, et
johtnsjyducdeBor- » que temprement je les yray visenteir awec mes gens. » Atant sont les
Son*ne, envoiat def- ^ r • ■ ■« «n • • r>
r mmc mperercs de messa g iers departis de la; et quant ilhs vmrenl a Homme, se ontracomp-
teit as empereres tout chu que j'ay dit deseurs. — Quant ly emperere Marcus
enlendit chu, si fut mult corochict; se dest que ilh nalenderoit mie tant
que ons le vengne assegier, ains yroit en Borgongne, a baniere desploies.
— En eel an, le XXIIl e jour de marche, morut Anyclelus, le pape de
L«$ordinanchesdeAny-Romme, si fut ensevelis en la cymiteir Calixte* en la voie de Apie. — Chis
clelus le pape. ii-i i i • »
ordinat que tous les clers aient leurs coronnes et barbes toudis rasees, et
soit la coronne reonde. — Item , ilh ordinat que nuls evesques ne soit con-
Dei consecration des sacreis qu'ilh ii y ait 11 evesques *, car enssi le sentencharenl les apostles s ;
et se ch'est uns archevesques, que tous les provincials y soient. — A son
Foi. 159 f. temps governat Tenglise de Lyon Yreneus, uns gran docleur del nation
de Greche*. — Apres la mort Anyclelus, vacat ly siege trois mois et X
jours; et puis fuil consacreis le promier jour d'awoust a pape uns proidhons
De sot her, ie xiii* qui fut nommeis Sother, qui fut de la nation de la Campine s ; et oit nom son
pere Concorde, neis de la cileit de Fonde 6 , et tient le siege XII ans VIJ
mois et XX jours; et les allies dienl IX ans VII mois et XXI jour; el les
altres dient VIII ans; et les altres dient XI ans et 111 jours. — Item, Tan
De roy de Hongrie , CLXV deseurdit, en mois de junne, morut Jacoles, ly roy de Hongrie; si
regnat apres luy son fis Alixandre XXXI an. — Item, Tan CLXV1, en mois
De pape Sother, qu'iih de jenvier, ordinat ly pape Sother que nulle nonne n'alouchast les palles
ordinal deznonnains. ,,,.., •--*•- i? » i> • i ' » il
de lauteit sacreit, et ne metist pointe dencense a lencenseir, et queues
Et dc manage. portassent des voul \ Et ordinat que ons ne tenist nulle femme estre legil-
1 Les catacombes de Saint-Calixte , les plus cu- un Grec de TAsie Mineure , probablcment ne a
ricuses peut-dtre de Rome, sont en effet sur le Smyrne.
cote de l'ancienne voie Appiennc. 5 La Campanie.
* 11/ evesques. B. • Fondi, petite ville sur la frontiere dc I'ex-
* Car si, com ilh dit, les apostles le sentencha- royaume de Naples, vers les fitats remains.
rent. B. 7 Des voiles. Vouelt dans Roquefort.
4 Saint Iren^e ctait un Grec, il est vrai, mais
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LIVRE PREMIER. 565
time de son marit, se elle n'estoit par unc prestre benite, et soil de peire clxvi.
et delle mere sollempnement donnee a marit. — Item, en eel an, assemblat
I'emperere Marcus ses hommes, et enlrat en Borgongne a feu et a flamme. L '*™{££ on ne
Quant Johans le due entendit chu, se appellat sains Policarpe et ly de-
niandat conselhe s'il manderoit son frere, le due de Galle, ou non? Et illi
ly respondit : « Sires, se vos me voleis croire, je vos ay enconvent que vos
» mettereis affin * les Romans. » Respondit ly due : « Je vous croiray del
» tout. » — u Sires, dit sains Policarpe, faite armeir vos gens et isseis fours
» de vostrc citeit; sy correis sus vos anemis, et se vos sovengne de Dieu
» le tous-poissans , qui s'aservit por le salut des pecheurs. » — Et dest ly
dus Johans : « Je ay bien Dieu en ma memore, et por mies estre assegu-
» reis, je feray portraire en toutes mes baniers Jhesu-Crist, enssi com ilh ^^gneki^m-
» fut claweis en la crois, sique je en veray la semblanche en la batalhe. » n[ r yVe°su-cr?st ba "
Enssi com vos dit, ilh fut fais.
El quant les ban ires furent fait, sy sont aleis corir sus les Romans. Et la Jo ^fi;J^^ R d u ^ a n 8 e5 "
oit grant batalhe, qui durat longement; mains les Romans furent desconfis.
el refuirent vers Romme. Adont dessent les senateurs a I'emperere que
jamais ilh ne ralaisl contre le due de Borgonge, car ilh estoit delle sane de
Galle, qui at fortune por luy regnant, ne nus ne puet avoir victoire contre
eaqx. Cest batalhe fut Tan CLXVI 1, en mois de decembre, le XVII e jour. — i/anCLxvii.
Et quant sains Policarpe soit la victoire, si fut mult Hies *; si soy parti t de comem sains Poiicarpe
r» • l • ■ i i • • l* i i • i r • 8 cn ra,at a Pavic en
Borgongne et vient droit en Lombardie, si commenchat a prechier la foid Lombard^, «t fui i»
de Dieu^ et voloit convertir le peuple a la loy Jhesu-Crist. Mams ly roy de «••
Pavie, qui estoit cusins aux empereres de Romme, quant ilh le cognut ilh
le Gst prendre et loiier mult fort, et puis I'envoiat a i'emperere Marcus.
Adont fut mult liies I'emperere Marcus qu'ilh avoit en sa poissanche 8 cheluy
qu'ilh haioit le plus. — Adont fisent faire les empereres unc feu tout emmy
Romme *, et fisent jetteir dedens sains Policarpe; mains oussitoust qullh Aprcs iih fut jeitcis en
■ r i r • i • i .«. ,.. unc ^ u » «* apres de-
sentit le feu, ly feu estindit, et devient oussi frois que oncques n awist esteit «>iei».
espris. Quant les empereres veirent le myracle, sy furent mult esbahis:
mains , portant que ilhs ne vorent mie que les Romans awissent en luy
1 Nous avons deja rencontre cette forme pour evidemment est de trop.
a fin. 4 Et fut sourcelle ans meisme, le XXV h jour
* Que plus ne pointe, ajoute le manuscrit B. de mois dejenvier, ajoute le manuscrit B.
* Je supprime ici un seeond qu'ilh avoit , lequel
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566 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
creanche, ilbs le fisent tantoist decolleir; et puis dessent que c'estoit uns
enchanteur. Chu fut Tan deseurdit, le XXVI e jour de mois de jenvier. —
clxviii. Mains quant ly dus de Borgonge le soit, sy en fut mult corochies, et jurat
Jhesu-Crist que ly roy de Pavie, qui chu avoit fait, le comparoit. Si assem-
blat ses gens et entrat en Lombard ie et asseghat Pa vie, I'an CLXVIII, en
mois d'octembre; et durat le siege VIII mois ' ; puis le prist *, et [fut] priese
johansjcducdcBor- par famyne. Adont fist ly dus Johans prendre et escorchier leroy Moderas
gongne, fist escor- ■ *> J v J
chiericroydePavic, d e Pavie , et sa femme et ses enfans et tous cheaux de sa Hgnie ochier. Et
por sains Polycarpe . . . . ?
quiihaToitiivreitas quant ilh oit chu fait, se retournat arier en son paiis. Enssi fut vensiet la
mort de sains Policarpe, qui avoit esteit unc gran lumynare en sainte
coment ivdit due jo- Engliese a son temps. — Item, Fan CLXIX, fist faire ly dus Johans une
giiesesa Dy«on. engliese a Dygon 5 , en l'honeur de sains Policarpe. En eel an meismes, lidit
due edifiat encor a Dygon I engliese * en l'honeur de Nostre-Damme. En
eel an fut Pavie refait, que lydit dus Johans avoit tout destruite 1'annee
Ly oraige ochist les devant. — Item, Fan CLXX, le IX e jour de mois d'awoust, aloient les II em-
chevalsdes llempe- i r* » ivr i i • •■•• «» i
reres de Romme. pereres de Homme a INapples en unc chaire; si chant uns grans ettoudre
sour les chevals qui tous les confondit. Et en fut unc pau consul * Aurelius,
Foi. 159 y*. ly I des empereres; si en fut sy espawenteis, que del pawour ly prist une
maladie delqueile ilh fut en langueur XII ans, et en la fin ilh en morit. —
clxxi. Item, Can CLXXI, oit ly dus de Galle unc fis qui fut nomeis Clodas, qui
Gram bataihe entre le f u t bon chevalier. — Item, Fan CLXXII, en mois de may, oit une grant
roy de Bretangne et 7 7 J1 °
descoche. bataihe entre le roy Symon de la Grant-Bretangne, que ons nom a present
Engleterre, de une part, et le roy Yrchois de Scoche *, d'altre part. Et vos
diray por quelle raison la guerre vient entre eaux : ly roy Symon avoit une
belle filhe, qui fut nominee Hedea, que ly roy de Scoche voloit avoir a
femme; mains la dammoiselle ne s'y voloit mie accordeir. Portantcom-
Ly roy de Bretangne menchat la cuerre , qui mult costat ; car la damoiselle estoit cristine , et ly
fat oehis et ses gens « \^ . ' .
defconfite,etijre- r0 y de Scoche estoit patens 7 . En cest bataihe, qui se fist tout promiere-
manant fuit a Lon- •* * * * *
dreetfutLondreas ment. fut ly bon roy Symon ochis et ses gens desconfite; et les fuans
1 VI mois oupres. B. * Touche, atteint. Consent dans Roquefort
* En celle an meisme, en la moyenne de marc lie, ' ficosse.
ajoute le manuscrit B. 7 Dans le manuscrit B cette phrase i car la dt-
5 Dijon. moiscUe.... vient imm^diatement apres les mots :
4 Mot om is dans not re tcxte, et supplee dapres mie accordeir. La construction a coup sur vaut
le manuscrit B. mieux.
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LIVRE PREMIER. 567
s'enfermarent en la citeit de Londre, oil la damoselle Edea estoit, qui
demenok grant duelhe. — Adont fut la citeit assegie des Escochois mult
fortement. — A eel temps, avoit uns roy en Dannemarche qui avoit unc fis
qui fut nomeis Valentiens , qui astoit ly myedre chevalier qui oncques awist
esteit depuis le temps Julius-Cesar; car ons truve, es croniques de Danne- d« Valentin, ic r, s i<-
i * , . ro y " c Dannemar-
marche, que ilh coupoit unc homme tout armeis jusqu'en cheval a unc seul che -
coulpe. Et estoit grans de XI1II pies. Ghis Valentien s'avisat en eel an et
montat sour mere en unc bateal, et s'en allat nagant awec unc seul escuwier,
et tant que la mere le jettat par le volenteit de Dieu a port de Londre. Et
la ly fut compteit, par unc sarasin que ilh encontrat, coment ly roy de
Scoche avoit assegiet la citeit de Londre, et voloit avoir la pucelle a femme
contre sa volenteit, et ossi comment ilh avoit ochis son peire en batalhe.
— Adont demandat Valentien se la dammoiselle estoit la filh de roy de la
Grant- Bretangne. Ghis respondit : « Oilh , et est la terre del tout a lee. »
Quant Valentin en tend it chu , si fut convoiteux de avoir la terre en sa par-
chon; se en allat vers la citeit, et fist tant al portier que la pucelle vint a
ly parleir sus la porte. Adont ly dest Valentien : « Ma dammoiselle, jay
» entendut que ly roy de Scoche vos fait tres-grant desplasier, et vos at
» vostre peire ochis, et puis vos at enfermeit, si vos wet avoir a femme
» contre vostre volenteit; mains je suy venus chi por vos deffendre, se chu
>i estre vostre plaisier , car je vos quide mult bien delivreir de vos anemis. »
Quant les barons qui estoient de conselhe la dammoiselle entendirent chu, coment Valentin c «n-
^ ^ m 7 voitat la filhe le roy
se ly demandarent : « Amis, qui esteis-vos, et de queile pays? Bien sem^ •f e B m r 2 e aDgnedavo,r
» bleis vos bon chevalier et poisans. » — Respondit Valentin : « Je suy
» ly fis le roy de Dannemarche, et suy nommeis Valentin. Se m'en aloy
» joweir par mere, et m'at chi jetteit ly vens; et m'at racopteit uns hons
» I'aventure de la dammoiselle de chi paiis; se moy presente a lee; s'elle
» moy wet rechivoir, je suy preste de lee y a aidier. » Et quant les barons
entendirent chu, sy dessent entre eaux que leur dammoiselle seroit bien
mariee a chis prinche ', mains qu'ilh creyst en Dieu, car ilh estoit de tres-
grant sane, el estoit bons chevalier et beaux. — Adont fut Valentien appel-
leit, et ly ont dit : « Monsangnour, se vos esties cristiens, sicom nous
» summes, nos prenderins volentiers vostre aiide, et vos donriens. nostre
1 A chest i vassal. B.
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568 CHROMQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
» dammoiselle a fern me, et sieries roy de chi pays, puis le defenderies com
» vostre regne. » Quant Valentien entendit chu, se dest tout en riant:
« Saingnours, ovreis le porte et moy lassies entreir dedens ma citeit, car
» puisque je en puy estre sires por le cause que vos dit, dont est-elle myene,
» car j'ay creyut en Jhesu-Crist , ilb at passeis VII ans; mains oncques plus
» ne 1'oisay diere, et portant me soy partis de Dannemarche que je ne poioy
Valentin fut baptisies, » plus dcmoreir entres les paiiens qui ne croient en Jhesu-Crist. » — Quant
et esposat la filhe de r r . 7 .„ .
™y. les barons entendirent chu, si ovnrenl les portes, et uh entrat ens mult
douchement. Adont fut-ilh baptizies, mains ilh ne changat mie son nom :
et puis esposat la filhe de roy, Edea, qui bien s'y accordat, portant qu'ilh
estoit cristiens, et beals et bons et de royal lignie. Enssi furent faites les
Foi. 160 r». noiches. Adont avoit ly siege dureis presque une an. — Et a quart jour
clxxiii. apres les noiches, assavoir Fan CLXXHI, le XIllI e jour de may, issit Va-
lentin awec ses gens tous armeis. Et estoit ly roy armeis des armes de la
Grant-Bretangne. Quant ly roy de Scoche veil les Bretons issir fours tous
rengies, se fist ses gens armeir et rengier: mains ilh soy mervelhat gran-
dement dont venoit chis hons, qui si gran estoit et avoit pris les armes de
chi pays. — Adont corut sus ly uns 1'autre, et la oit grant hatalhe; mains
les Bretons ne perdirent que bien pau de gens \ car Valentin estoit en la
grant presse, qui fendoit les Escochois * en dois jusques aux chevals s . De
ches coupes furent les Escochois mult esbahis , et leur roy estoit mult es-
mayes qu'ilh ne fust desconfis. Tanl ferit et frappal Valentin, que ilh abatit
Valentin ochist le roy l'estandart des Escochois ; et se ochis le roy et ses HI fils et mult d'altres
fi$t ses gent. nobles : enssi furent desconfis le Escochois, et s'enfuirent. Et les barons *
en ralont en la citeit de Londre a grant joie, en disaut que a bonne heure
vienet Valentin en Bretangne , que enssi les avoit vengiet de leurs annemis.
Mains la damme Edea fist son noveal saingnour grant fieste oultre mesure.
Enssi fut Valentin , ly fis le roy de Dannemarche , roy de la Grant-Bre-
tangne ; et regnat longtemps et fut mult proidhons et loial ; si amat tous-
jours sainte Engliese, et tout chu qu'ilh devoit ameir par raison. — En eel
Mortaiiteit a Romme. an, oit a Romme grant mortaliteit, car les gens chaioient mors par les
1 Ne perdirent si pou non. B. 8 Jusqu'en destrier. B.
* Correction faile d'apres le manuscrit B. Notre *■ Bretons. B. Cette version me paralt preferable,
texte porte : escus , ce qui n'a pas de sens.
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L1VRE PREMIER. 569
rues, enssi com ilhs fussent pasmeis. Et durat de mois de may jusques en
decembre. De ceste mortal ite it morut bien XL m hommes. — Item, l'an
CLXXIIII, en mois de junne, edifiat Navitus, li evesque de Tongre, une De d f T Y ^. eyf8que
engliese a Colongne, en I'honeur de sainte Cecile. — Item, en eel an, en
mois de marche, edifiat Johans, dus de Borgongne, une engliese en I'honeur d* johans dus de Bor
de sains Johans ewangeliste, en la citeit de Lengres. — Item, Tan GLXXV, clxxv.
oit ly roy Valentin de la Grant-Bretangne de sa femme Edea I fis , qui fut
nommeis Andrier, qui puis fut bon chevalier. En eel an, en mois d'avrilh,
commenchat une si gran plovaige, qui durat XXXVI jours sens aresleir; gmo pioraige.
et chu fut tant seulement en Ytaile et en I'empire de Romme. De cest ploive
furent les terres sy detempreeis, que tous les biens furent noiies et perdus.
Si fut ly bleis sy chire que une pain , que ons soloit devant vendre une de- c° ir « lwn P»
nier, ons le vend oit dois souls. Et par chest default mangnarent asseis de
gens del chaire sens pain ; car ons donnoit adont asseis de chaire por pou
d argent, et les aultres gens magnoient rachines cuites en aighes et fructes '.
De cheaux, qui furent enssi nouris de teile ntanere, en morit tant* que
mervelhe ; car ilhs estoient tous enfleis de famyne. — Item , eel an , le V e
jour de mois d'octembre, commenchat une grant jal^e es parties d'AUe- Grant gaiw.
mangne que ons nommoit adont Germaine, qui fut sy resde 8 , que toutes
les aighes grant et petites furent engallees, foursmis celles qui ne puelent
engaleir. Et durat jusques a IX e jour d'avril l'an CLXXVI. — Item, eel an ,
edifiat Valentin, roy de la Grant-Bretangne, une mult belle englise, que DeroyVaienUndeBre
ilh fist consecreir en I'honeur de sains Poul , en la citeit de Londre. —
Item, l'an CLXXVII, le secon jour de may, commenchat sains Navitus, clxxvii.
i n\ % !•*»• i-i • • i if • i De sains Navitus, eyeg
evesque de Tongre, a edifiier une engliese en la citeit de Maienche, en quedeTongre.
I'honeur de sains Clement. Et en chist annee meismes commenchat * une
altre en la citeit de Mes, en I'honeur de sains Materne. — Item, en eel an
meismes, en mois de fevrier le XX e jour, morut Sother, ly pape de Romme; 8 ^;£ I C£' morul
si fut ensevelis en l'engliese Sains-Pire. — AI temps de cheli pape Sother
furent le cathafrigiiens 5 heretiques, une gens qui furent neis en Frise •, le D 7 ri h *en 8 'Tt^« c uurs
provinche la ilhs prisent leur nom. Cheaux disoient que ly Sains-Espir ne »««»»««•
1 Fruits. * La scele est plus connue sous le nom de Mon-
* Quant che vint al yvert, ajoute le manuscrit B. tanistes.
* Roide. * Lisez Phrygie, ce qui est un pen different.
4 En mois d'octembre, ajoute le manuscrit B.
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570 CHROINIQUE DE JEAN DOUTREMEUSE.
fut oncques donneis aux apostles, fours que 1 a Prisca et Maximille*, qui
sortenoient chis heresie. Chi pape Sother fut martirisiet. — Apres sa mort
vacat ly sige XXII jours, et puis apres, le XIIII* jour de marche, fut con-
De Eieuth«nu$, le sacreis a pape de Romme Eleulherius, qui fut de la nation de Greche, de
Ny copal la vilhe; et oitson peire a nom Habondan 8 . Lyqueis Eleutherius
tienet le siege XVI ans, VII mois et XII jours, et fut mult proidhons. La
promier annee de sa pontification mandat Luciien \ le roy de Scoche qui
puis fut roy de Bretangne, a pape qu'ilh voloit prendre baptesme a son
Foi. leo v. mandement. Dont ly pape en rendit grasce a Dieu , et y envoiat II religieux
Luciien,roydeScoche, hommes , Frigaine et Damyain \ qui le roy baptisarent et sonpeuple. Ilh
et son peuple furent . • ° J 1 1 n «
cristiens « chi pape avoit adont en Escoche XII evesques des ydolles que ons apelle flamines.
entres lesqueiles avoit trois archeflamynes ; mains les sains religieux de-
seurdis, de mandement apostolique, la ilh avoit des flamynes ilhs ordinont
des evesques, et la ilh avoit des archiflamynes ilhs fisent des archevesques.
Et enssi l'avoient les apostles fermeit 6 , et par leurs decreis ordineit.
clxxviii. Sour Fan CLXXVI1I, en mois de may, mandat ly emperere Marcus son
tregut aux Allemans, qui mie ne I'avoient paiiet en ceste annee; se ly re-
voiarent dire les Allemans que ilhs n'en paieroient point, car ilhs estoient
desquendus de oussi franche lignie que cheaux de Galle estoient, qui es-
l emperereMtrcussen toient quittes de leur tregut. Quant ly emperere entendit chu, se assem-
alat contre les Alle- n . ?,i -in ... '
mans: I'emperere oil blat ses gens et vienet en Allemangne, et oit batalhe aux Allemans en mois
de novembre, Tan deseurdit. Et y furent bien ochis XIII m hommes, des-
queis la plus grant partie furent Allemans. Et alcuns diient que ilh fut
ochis des Romans XIII m . Et encordont furent les Allemans desconfis, et
perdirent bien XX m hommes. Et avoient awec eaux le due de Bealwier, de
Saxone, de Frize, Holande etZelande. Apres cest batalhe soy racordarent
les Allemans a I'emperere en paiant leur tregut; mains ilhs furent plus
serf que devant. Apres chu sen ralat I'emperere a Romme. — En eel an,
1 Le manuscritB donne avee Iesnomsdc Prisca (I, 4), un roi des Bretons du nom de Lucius,
et Maximille celui de Mont ante (Montan). qui fit au pape £leulhere la demande rappelee ici
* Priscilla et Maxim ilia , les deux femmes se- par Jean d'Outremcuse.
duites par Montan et qui devinrent les pr&resses 5 Bede nc donne pas les noms des apotres en-
de cette secte immoralc. voyes par le pape £leuthere.
8 Lisez Nicopolis et Habondius. ' fitabli. Ce n'est pas tout a fait U sens que
4 II y eut en effet f d apres Bede le Venerable Roquefort assigne a fermer et a firmer.
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LIVRE PREMIER. 571
morut Jonadas, ly conte de Lovay; si fut conte apres luy Leganos, son De Leganos, conte de
fis, qui regnat IX ans. Chis oit a fern me la filhe Anthenoir le due de Galle, Tay
qui oit nom Alexandrine et fut mult belle damme. — Item , Tan CLXXIX ,
furent rebelles a lemperere de Romme ly due d'Aquitaine et ses gens;
mains ly emperere Marcus vient en leur pays et les desconfist; si ochist le ^JJ^^JJ™ '^""
due Andoras, puis en fist due de son fis, qui oit nom Anthone '. Et quant q««««»«.
lemperere fut revenus a Romme, ilh dest a ses chevaliers : « Barons, vos
» m'aveis loyalment servit ors et altrefois; et portanl que je veulh que
» toudis vos soiies volen trues *, je vos feray grant bonteit, car je vos feray
» sy frans que vos, ne vos successeurs apres vos, ne paieront jamais tregut
» a lemperere de Romme. » Adont fist aporteir ly emperere Marcus tout
les lettres et cartres des tregus de sa chevalrie de Romme; puis apelat
tous les senateurs et les aultres juges, et les ardit toutes en leur presenches
emmy Romme, et les clamat tous quittes; et en prist en tesmongnaige tous
cheaux qui furent la presens. Et tantoist la chevalrie en fist faire chart re,
lesqueiles furent saileez de dois empereres et des senateurs; et furent miese
en la garde de pape en tresorier Sains-Pire. — Item, Tan CLXXX, en mois
de may, commenchat ly roy Valentien de la Grant-Bretangne a edifier unc De roy Valentin de
casteal mult beal; mains quant ilh fut tout fais jusques al covrir, et ilh se
levat une matinee, se veit que son chasteal astoit tout entreis en terre jus-*
ques a comble; si oit de chu teile pawour qu'ilh fist tout emplir de pire
et de terre la fosse qui estoit grant. Et alcuns ly faisoient entendant que
ch'estoit l'enlree d'infeir.
En Tan CLXXXI, le promier jour de Junne, morut 1'emperere Marcus De amodw,iexix«
Anthonius Verus. Et apres sa mort vacat ly siege VIII jours, et puis fut
fais emperere ' Commodus, son anneis fis^ qui regnat XIII ans II mois et
VI jours. En eel an morut Valentin, ly roy de Bretangne; si fut roy apres
luy Luciiens, ly roy de Scoche, et regnat X ans, tant que Thomas, ly fis le
roy, qui estoit jovenes fut en eaige; et puis le fut lydis Thomas, et regnat
com roy XXX ans. Chis fut bon chevalier et convoiteux de ensauchier la
loy crisliene. — En eel an fut dit a roy Thomas que ly roy de Cornualhe ^co°^X! lallgncel
1 Mains li emperere Marcus assembled sa che- ' Volentriez. B. C'est probablement le mime
valrie. Si oit batalhe a eaux et les desconfist, et ochist mot que Roquefort Icrit volentieus et volentrieus ;
le due Andoras, puis fist due de son filh maineit il doit signifier : soumis , affectionne.
qui fut appelteit Anthoine. B. * Le IX 9 jour de June, ajoute le manuscrit B.
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572 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
avoit la plus belle dammoiselle a filhe qui fuist en monde, qui avoil nom
Alienoir. Adont mandat ly roy Thomas a roy de Gornualhe Sadaris, que
ilh ly envoiast sa filhe, et le feroitroyne de Bretangne et seroit sa ferame.
Quant Sadaris entendit chu, se respondit aux messagiers se ly roy Thomas
voloit renoier sa toy que ilh tenoit, ilh ly donroit sa filhe, et altrement
ilh ne l'aroit ja. Adont revinrent les messagiers a roy Thomas, sy ont tro-
veit le roy en son palais, se ly ont compteit chu que lydis roy Sadaris
Foi. let r*. mandoit. Et quant ly roy Thomas entendit a raessagier chu que Sadaris dit
avoit, pour chu se dest : « Par ma foid mult moy tient li * vilhars Sadaris
» a foul ou a legier, qui moy weult faire renoyer cheluy qui tout at creeil ;
» et par la foid que je ay a Jhesu-Grist, ou ilh morat, ou je moray se ilh
Guerre entre le roy de » ne croit en Jhesu-Grist. » — Adont assemblat ses gens ly roy Thomas et
<ie cornuaihe. en allat en la royalme de Gornualhe , Fan GLXXXU; puis commenchat la
terre a gasteir et a ardre \ Et quant ly roy Sadaris soil la novelle, sy mandat
ses gens, se vint encontre lay : si orent ensemble grant batalhe. En eel
baialhe se prova mult bien ly jovene roy Thomas, car ilh estoit bon che-
valier; se n'encontroit homme qu'ilh ne l'abatist a terre, vief ou mort; ilh
s'aquittoit si valhammenl 8 , que cascon lefuoitet ne l'oisoil aprochier. A cest
Bretons oni U victoire. fois * furent desconfis cheaux de Cornuaihe, et s'enfuirent en leur citeit.
' — Adont demandat Alienoir la pucelle a unc des Sarasiens comment les
cristiens s'avoient porteis contre leurs gens? Et chis ly dest : « Mult bien,
» car nos estons tous desconfis. Ilh ont unc roy 8 qui est jovene et n'at mie
» X ans, mains ilh est tant fors que chest grant mervelhe, car ilh at plus
» de forche que II chevaliers, et est pres de X pies de hault; se ilh estoit
» porfourmeis, chu seroit ly plus beais chevalier qui oncques fust. » Tant
prysat ly sarasin Thomas que la dammoiselle l'enamat sy fort que elle ne
puet dureir; mains elle n'en fist nulla semblant. — Ghis Thomas, chu est
bien voire, n'avoit pais X ans d'eiage a chi temps, mains la forche que ilh
avoit ly vienet par beneichon qu'ilh oit a sa nassenche des esperis invisi-
1 A vilhars, par crreur dans notre texte. Je a ardre, B.
corrige d'apres le manuscrit B. • Ilh faisoil teil essarU B.
1 Adont assemblat ses oust, el issit de son paiis * Mot omis dans notre texte, et supplee d'apres
le IX' jour demarche, Van CI 111" et 11, et at tant le manuscrit B.
alleit banire desploii que Wi enlrat en la terre de * Mot suppled d'apres le manuscrit B. ^
Cornuaihe, puis commenchat la terre a gasteir et
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LIVRE PREMIER. 573
bles, qui ly otriarent que de X ans ilh auroit la forche de II chevaliers, et
seroit ly plus beais de monde a son temps.
Adont asseghat ly roy Thomas la citeit de Gadasis, en laqueile ly roy
Sadaris estoit awec sa filhe et ses gens apres la batalhe; et fut en mois de
septembre, et durat ly siege XXV mois. Item, Fan GLXXX1U , en mois de
may, morut Antenoir, ly due de Galle et conte de Flandre. Et apres sa
inort fut dus de Galle son anneis fis, qui oit nom Ector, et regnat V ans; et ^ d du fi e( §j| le,leo,lle
son aullre fis, qui oit nom Anthenoir, fut conte de Flandre et regnat
XVIII ans. — En cest an , fut fais archevesques de Lyon unc gran clers de
grand auctoriteit, qui oit nom Hyreneus *. — Item, Fan GUI** et III1 *,
fut prise la citeit de Gadasis en Gornualhe par le roy Thomas , et fut lout c ^^^^^ s
le mahomerie qui la estoit destrutte, et ly roy Sadaris ochis, car ilh ne vot {£* r J l e he peup,c * e
oncques croire en Jhesu- Crist. Adont prist ly roy Thomas la pucelle a
femme, mains ilh le fist anchois baptizier; si fut nomee Marie de Cornualhe.
Apres , ly roy Thomas fist baptizier tout le peuple de la royalme de Cor-
nualhe, et qui ne vot prendre baptemme ilh le fist tantoist raettre a mort;
el adont soy fist ly roy Thomas coroneir com roy de Cornualhe. Et apres
ly roy edifiat en ladit citeit une engliese en l'honeur de la Triniteit, de la
Virgue Marie, des XII apostles et des 1III ewangelistes. Et fut cest engliese
fait Tan CHI1" et V. — Item , ledit an commenchat * a edifiier lidit roy clxxxv.
Thomas en ladit citeit une engliese de nonan * que ilh apellat Mont-Jolie :
cest engliese fut consecree en l'honeur de sains Jaque le Gran, sour Tan
CI1II" et VI , en mois de may. — En cesti an defiat ly dus de Ybernie le roy B*^ |h « cnlr « '< «>y d *
. . . . J Cornualhe et ly dus
Thomas, portant qu'ilh avoit esteit fis al roy Valentin. De chesti defianche ^ Ybemie.
ne fut mie ly roy Thomas esmaiez; ains assemblat ses homines de ses dois
royalmes, sy cntrat en la terre de Ybernie, sy oit batalhe a ly et le descon-
fist, le XVIII* jour d'avrilh sour Fan CIIII" et VII, et fist paix ly dus • et
mettitsa terre en la subjection de roy Thomas. — Item, en eel an, en mois
d'octembre, morut Leganos, ly conte de Lovay; si fut conte apres luy son De come de Lov ay .
fis, qui oil nom Ector, qui regnat XVII ans. — En eel an, en mois d'oc-
tembre • le XIX e jour, chaiit unc gran effoudre sour le Capitol de Romme;
1 Saint Irenee, plus haul Yreneus. * Ly roy, par erreur dans notre texte. Je pour-
' En mois de novembre, ajoute le manuscrit B. rais faire la correction a coup sur, sans inVoquer
* Je supprime ici un lydit roy, qui est de trop. l'autorite' du manuscrit B.
4 Pour nonnain. • Decembre. B.
Nik,
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574 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
DeducdcGaiie sy lard it tout et pluseurs mansons awec. — Item, Tan CIIII" et VIII, en
clxxxviu. mo j s j e j u j e moru t E c tor, ly dus de Galle; sy fut Franco son fis apres
duc t et regnat VIII ans. Chis dus Ector, qui mors estoit, avoit dois freres:
ly plus anneis estoit nommeis Clodas. Chis estoit uns des bons chevalier de
nionde, et devoit estre par droit, sycom anneis heures, apres son peire
Anthenoir, due de Galle; mains ilh le refusal, car ilh. ne voloit avoir nulle
terre a justichier, ains voloit estre chevalier erans, et par tos paiis quere
Fo1 ,ti! v * les aventures et les profeche d'armes. Et portant que Clodas le refusat, se
le fut Ector, sycom ly plus anneis d'eaux III apres Clodas. Et ly thiers, qui
oit nom Anthenoir, chis estoit conte de Flandre. Enssi fut Ector dus de
Galle; et apres luy le fut Franco, enssi com dit est. Je vos ay chu enssi
deviseit, portant que je vuelhe mies enfourmeir et plus entendaiblement
Gu JXet l »ononde1e ^* re c ^ u *I U * c hi- a P res s'ensiiet. — Quant ly dus Franco fut fais dus de Galle,
come de Fiandre.' son oncle, qui estoit conte de Flandre, le defiat et ly mandat que ilh repor-
tast sus sa terre ou ilhj'ochiroit, car ilh ne devoit mie estre dus, et ly vot t
proveir par teile raison com vos oreis.
Chis conte Anthenoir dest que Ector, ly peire Franco , n 'avoit mie esteit
drois dus de Galle, car Clodas, leur anneit frere, le devoit eislre, lyqueis
I'avoit refuseit, sique ilh estoit apres venue a Ector, sycom plus anneit
apres, non pais hiretaibblement, mains tant seulement son visquant, et
apres sa vie la terre devoit venir a luy Anthenoir, car ilh devoit aleir de
Tunc frere a 1'autre, non pais de frere aux enfans; car, quant Clodas I'oit
refuseit, ilh chaiit a Ector, non pais as enfans Clodas, qui ja estoit maries.
Quant Franco entendit chu, se mandat a son oncle Anthenoir que ilh ten-
roit, tant com ilh poroit dureir, la terre qui ly estoit esqueue par droit
succession de son peire. — Quant Anthenoir entendit chu, si assemblat ses
gens por aleir en Galle sour son naveur *; et d'aullre part ly dus Franco
mandat ses gens , entres lesqueiles ilh mandat Ector, le conte de Lovay, que
ilh le venist aidier encontre son oncle Anthenoir, et ilh prenderoit a femme
Ly v»cto S irt% G ifurent t ie8 Gada, sa fi'h e - Quant ly conte Ector entendit chu, ilh mandat ses gens et
r^ont"*^ 0068 ** yien ^ en Galle a gran gens*; et sy amenat awec ly sa filhe. Et quant ilh
vint a Lutesse, se dest al due Franco en teile manere : « Sires dus, vos
1 Sic pour neveur, neveu. grant ou$t. B.
* Ilh mandat $es hommes , si vient en Galle a
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LIVRE PREMIER. 573
)> m'aveis mandeis , et chu que vos m'aveis mandeis je suy prest delle acom-
» plir; je vos ay ameneit ma filhe Gada et oussi tous mes oust; or pren-
» deis ma filhe com vostre femme, et puis aray melheur ocquison de vos a
» aidier. » Quant Franco l'enlendit, sy dest : « Volentiers , je ne demande
» aultre chouse que la damoiselle a avoir et oussi le vostre aiide. » Adont le
prist a femme et l'esposat solonc leur loy ; si fut la grant fieste faile. — En
eel an, en mois de decembre, morut ly roy de Dannemarche Andromas, D«royde Dannemar
qui avoit regneit XLV ans, qui fut ly XVI e . Et apres le fut son fis Jonadas,
car son anneis fis Valentin, qui avoit leur loy relenquie et avoit esteit roy
de la Grant Bretangne et oncle a Thomas, le roy d'Engleterre, estoit mors.
Ghis roy Jonadas regnal XXXI ans. — Item, Fan GLXXXIX, en mois de
marce, entrat ly conte de Flandre Anthenoir en pays de Galle; et quant
Franco son neveur le soit, se ly mandat par le conte de Lovay et par le
conte Agilfus d'Avergne que ilh vosist issir de sa terre , sens ly a forfaire ,
et ly laisast sa terre possideir pasieblement, com son peire avoit fait : s'ilh
ly plaisoit chu faire ilh en seroit joians, car ilh le voloit ameir, servir et
honoreir en toutes besongnes et encontre tous saingnours com son oncle.
et veroit volentier bon amour entre eaux: et se chu ne voloit faire, dont
ilh metist journee de batalhe, et ilh yroit contre luy. Enssi fut fait ly mes-
sage; mains onques ly conte Anthenoir n'en fut se plus fels non, car ilh
quidoit que son neveur awist paour. — Et adont fut mise la journee de
batalhe a unc mois. Dedens chely terme s'aparelherent mult bien les dois
parties, puis vinrent ensemble a jour nomeis devant la citeit de Lutesse.
La oit grant batalhe, en laqueile ilh fut mors sens nombre de gens; mains
en la fin furent les Flamens desconfis, et fut pris * par forche ly conte An-
thenoir et mys en prison a Lutesse. — Mains tantoist fut faite la paix entre
eaux; et le fisent les hauls barons, car ly valhans due Franco ne haioit
mie son oncle, ains desiroit avoir a luy paix et amour; et ly conte estoit
en prison, se desiroit defours issir. Et sachies que chis accors fut teis, que
cascunne partie sourtient les damaiges que ilh avoit oyut; et apres furent
bons amis. Et quant ilhs furent acordeis, en ralat ly conte Anthenoir a
Bruge, et se le reconduisit ly dus Franco et tous cheaux qui estoient awec
ly, contes et prinches et ses hauls barons. Et la fut faite mult grant fieste, Foi. ie*r
1 Mot omis dans noire texte , et supplee d'apres le raanuscrit B.
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576 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
clxxxix. et furent les Flamens mult joians de la paix , car ilh avoient envis ' gerre.
ongenes futncis,qui — En eel an, en mois d'octembre, le XIX jour, fut neis Origenes, qui puis
fut clers de grant auctoriteit et ly plus reverens f qui fuist a son temps re-
gnans. Chis Origenes fist a son temps mult de beais libres, desqueiles les
alcuns furent condampneis , enssi com nos dirons chi-apres plainement;
car ches libres, qui enssi furent condampneis, furent fais par aullres clers
apres la mort Origenes, par envie por faire a Origenes blasmes. Si dessent
que Origenes les avoit enssi fait, portant qu'ilh estoit et avoit esteit sy
presiet, et chu fut apres sa mort que les clers le dessent. — Item, Tan
Lemperere Aureiius CLXXXIX *, enmoisde may, morut l'emperere Aurelius Lutius Commodus,
qui longtemps avoit esteit malaide, enssi que j'ay chi-devant fait mention.
— Item, eel an, en mois de julle, prist motion * a roy Thomas de la Grant
Bretangne d'aleir en Dannemarche a grant gens, por veioir s'ilh poroit le
paiis mettre a la loy Jhesu-Crist et son oncle convertir. Se mandat mult
de chevaliers de Borgongne et d'altre part la ons creoit Jhesu-Crist. A eel
temps estoit en Bretangne s uns de valhans chevaliers de monde, et chis
estoit Clodas, ly Galois, oncle a Franco le due de Galle, et frere a Anthe-
noir le conte de Flandre. Chis Clodas regnoit par tous paiis ou ilh savoit
aventures. Quant ilh entendit les novel les, se ly prist en motion de croire
ciodw fut baptist, en Dieu, et apres aleir aidier le roy Thomas, qui estoit oussi ly uns des
bons chevalier de monde. Atant soy fist baptisier; mains ilh ne vot oncques
avoir autre nora que le sien, car ilh fut tousjour nomeis Clodas. — Quant
Clodas fut baptisies,se ly livrat ly dus Ector V c hommes d'armes, por
aidier le roy Thomas de Bretangne; puis s'achemynat Clodas, et alat tant
par mere et par terre, que ilh vint awec ses hommes a Londre, le XVI jour
de mois de junet l'an C et XC '. Quant Clodas fut venus a Londre, et ly
roy le veit, et ilh soit cuy ilh estoit, se ly fist mult grant fieste et ly por-
tat mult grant honneur, car ilh avoit asseis oiit parleir de sa proieche, si
1 Envis est ici adverbe et signifie : a regret, a Ici le chroniqueur paralt 1'employer dans le sens
coDtre-coear. B. de : prendre le parti de , se decider a. L'expres-
s Li plus renommeis. B. sion revient quelques lignes plus loin , too jours
8 Cent et nonante. B. avec ce sens.
4 Ce doit dtre la traduction de Texpression mo- * En Borgongne. B.
tionem sumere de la basse latinite\ Le continua- * C et XCI. B.
teur de Ducange explique cela par e loco moveri.
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LIVRE PREMIER. 577
qu'ilh fut mult lies que ilh 1'avoit en son aiide. — Et quant tous les oust
furent assembleis, sy sont monteis sour mere et ont (ant ' nagiet que ilhs
sont ariveis en Hongrie. Quant ly roy Thomas veil qu'ilh estoit en Hongrie,
sy en fut mult lies; si sont issus de leurs nefs, et sont entreis en la terre a
feu et a flam me. Et les gens s'enfuirent en la citeit de Targont, ou ly roy
estoit adoncques, et ly dessent la novelle comment ly roy de Bretangne Bataiheentreieroyde
# *■ ' J m m . ■ . Bretangne et le roy
estoit entreis en son paiis. — Quant ly roy de Hongrie entendit chu , sy en de Hongrie.
fut mult esmaies; si assemblat ses gens et vint contre les Bretons a grant
gens, et les corut sus le lX e jour de fevrier Fan C et XC1II. — Cest batalhe cetxciu.
fut grant et peruelheuse; et en orent les Hongrois de melheur, et furent
les Bretons reculleis, et ja fussent-ilh desconfis, quant ly roy Thomas et
Clodas entrarent en la batalhe, qui par leur forches recularent les Hongrois
plus de unc bonier; et jettoient tout en unc mont cheaux qu'ilh encon- Hongrois furent
des-
troient, et tant fisent que les Hongrois furent desconfis. — Adont quidat
bien ly roy Alixandre avoir perdut son paiis; si sen alat fuant par les
champs-, et dest que ilh yroit a Romme a l'emperere Comodus querir sour-
cour. Enssi sen allat ly roy vers Romme. Et ly roy Thomas asseghat la
citeit qui bien estoit fermee : si durat le siege XV mois. Et ly roy de Hon-
grie, qui mult estoit esmaies, chevalchat tant qu'ilh vint a Romme; se
trovat la l'emperere Gommodus, se ly chaiit a ses pies et li dest enssi :
c( Tres excellens sires, se vos ne moy soucoreis, je ay perdut mon rengne,
» car les cristiens de la Grant Bretangne sont entreis en mon paiis et ont
» ars mes vilhes, et ay oyut batalhe a eaux ou jay perdut VII m hommes,
» et se suy desconfis; et encordonl ilhs fussent a promier desconfis, quant
» leur roy, et uns aultre cristiens qui portoit une crois d'or sor une escut Le roy hongrois aiat
,, . i ■ li • l queiresoucouralem-
» de synable, vinrent en la batalhe; et par eaux dois furent mes hommes pererede Romme, qui
» desconfis. Car chu sont les II plus fors et poissans de cuy je oy onques
» parleir : ilhs abatoient mes hommes, enssi com chu fussent brebis. » —
Quant l'emperere entendit chu, se dest : « Sire roy, je vos aideray, car
» chu est drois. » Adont mandat ses hommes l'emperere, et montat sour FoMesv.
mere, et naghat tant qu'ilh vint en Hongrie, ou ly roy Thomas faisoit
sovent assalhir la citeit; mains ilh n'y pot oncques riens gangnier. — Apres
le fist une aultre fois assalhir en mois d'octembre, et unc altre fois en
1 Mot supplce d'apres lc manuscril B.
73
in
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878 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
mois de jenvier Tan C et XCI1I , et I altre fois en fevrier, mains ilh ny pot
oncqiies riens forfaire; anchois ilh y perdit mult de ses hommes, et ly-
meismes ilh y fut navreis , mains ilh fut tantoist garis. — Adont s'avisat ly
roy Thomas qu'ilh soy departeroil de la citeit , car ilh n'y poloit riens gan-
gnier; se fist detendre ses trefs, et sen partit Tan deseurdit en mois de
may. Et enssi com ly roy et ses gens en aloienl, atant vint devant luy unc
chevalier qui ly dest : « Monsaingnour, faites vos hommes armeir, car
» I'emperere de Romme vint chi contre vos a grans gens, et mult vos ma-
» nache. » Quant ly roy entendit chu, si fut mult lies, et dest que I'em-
perere ou luy morat anchois la vespree , se ilh le puet veioir. — Atant at
fait ses gens armeir, et livrat sa baniere a Glodas le Galois. Si ont tant alleit
qu'ilh ont encontreit les Romans sus le rivaige qui se venoient isnelement.
Quant les uns veirent les altres, ilhs se sont sus corns. Et la fut la batalhe
grant et orible de Tonne parlie et de (autre; mains les crisliens en orent
Les Breions orent vie- toudis la melhour, car Thomas et Clodas faisoient tant de fais d'armes que
etHongrois,etoirent ilhs fendoient I homme en dois moties jusqu'en braier * et legierement ius-
le milliour. . • i . vn - . • r\
quen la potrine, el adont les sembloil qu ilhs avoient faiseit'. — Quant
I'emperere Commodus veit enssi ochire ses Romans , sy brochat avant et
vint a Glodas, qui portoit la baniere ; se 1'at sy bien asseneit, que ilh ly fen-
dit son hay me et son habier, et le navrat en chief. Quant ly roy Thomas,
qui estoit tou pres, le veit, sy en fut mult corochies; si ferit par mult grant
ahir 1 I'emperere, sy que ilh ly trenchat toutes ses armes et ly fist l'esp&
entreir jusqu'en la selle de destrier. De eel coup furent les Romans enbahis,
et soy misent al fuir com desconfis. Enssi fut la batalhe outree el les Ro-
mans vilainement desconfis, l'an deseurdit le XX1I1I* jour d'awoust.
DexyemperereEiyus Adont revinrent les Romans a Romme, qui furent escappeis; et quanl
les senateurs seurent que ly emperere estoit mors, sy fisent emperere de
son fis Elyus Pertinax et awec luy Severus. Mains Elyus ne regnat que VI
mois , et Severus regnat XVIII ans V mois et X jours; et fut ly sige de Tem-
pire vacant II mois. Et quant I'emperere Elyus fut coroneis, sy fut mult
1 Le meme mot probablement que celui que croyaient avoir manque leur coup, quaod ils do
Roquefort ccrit braiel et qui est reste dans la langue coupaicnt un homme en deux que jusqu'a la poi-
moderne sous la forme brayetfe. trine.
* Le manuscrit B porte fauseil , ce qui vaut * Nous avons ddja rencontre eclte forme pour
mieux. Le sens de la phrase est que ces paladins air.
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LIVRE PREMIER. 579
fels et outrageux. — Et quant ly roy Thomas veit que les Romans estoient
desconfis, sy fut mult lies, et retournat devant la citeit qu'il avoit altrefois
assegiet; se jurat que jamais ne sen parti roit, sy l'aroit prise. Adont estoit
ly roy Alixandre dedens rent re is, qui estoit mult esmaies. — En eel an,
en mois de decembre, morut Navitus, ly secon evesque de Tongre, si fut
ensevelis en l'engliese Nostre-Damme de Tongre. — Et apres luy fut eslus De masque <ie Ton
et consecreis evesque uns mult proidhons , qui oit nom Marcel et fut fis de
prinche de Nammut, de la filhe le conte d'Arche, que ons apelle raaintenant
Dynant, lyqueis tient le siege VIII ans. — Item, Fan C et XC1II1 , morut et Le v **J e • m P ereM Se ~
fut ochis en son palais a Romme ly emperere Elyus Pertinax; sy regnat tou
seul Severus, son compangnon, qui astoit de la nation d'Affrique; et tous
les aultres empereurs devant luy avoient esteit Romans. — Item , en eel an ,
le XVIII e jour de mois de marche, morut a Romme le pape Eleuterius, et
fut martyrisiies. Et fut ensevelis deleis la tumbe Sains- Pire; et VI jours
apres sa mort que ly sige vacat, fut consecreis ly XV e pape, lyqueis oit
nom Victoir 1 le promier de chi nom. Et tient le sige X ans II mois et II Vicloir » ,e XVt p*P e -
jours; et fut de la nation d'Affrique enssi com l'emperere Severus. Et Vin-
cens dist qu'ilh fut de la nation de Greche, et Martiniain et Domasticus f ,
dient qu'ilh fut de la nation d'Affer. — En eel an, en mois de may, fut ren- L « roy Thomas g*n-
% m . . 8 nat Targont.
due a roy Thomas la citeit de Targont en Hongrie ; et la fut accordeit entre
luy et le roy, par le conselhe de Glodas, que ly roy tenroit encor la loy
que ilh avoit tousjours tenue, car ilh voloit mies morir que prendre bap-
tesme; et ilh releval sa terre de roy Thomas , et rendit a luy tregut.
Adont soy partit ly roy Thomas, et s'en alat ■ vers Dannemarche; mains f©i. ««*••
ilh ne plaisoit mie a Dieu que ilh y alassent, portant que chu n'estoit mie
leur profit; se les enlevat uns oraige qui les jettat par mere dedens IIII mois
en paiis de Romme \ Et quant ly roy Thomas veit chu , se commenchat la
terre a exilhier; mains ly emperere Severus assemblat ses gens, sy vint Bauihe eot™ Bretons
encontre eaux; sy orent batalhe, et perdit ly une partie et l'autre mult de
1 Victor. tremeuse invoque souvent l'autorile dans les ques-
* Vincent de Beaovais est bien certainement tions de chronologic Voir notamment p. 805.
indique ici. Quant au* deux autres noms, je crois s Et se mettit sour mere et s'en cUlat. B.
quils indiqucnt Martin Polonus, qui a ecrit une 4 Si les enlevat unc orage qui 1111 mois les getat
chronique des souverains pontifes, et le pape Da- par la mere, et al chief des HI I mois iUi ariverent
mase (Domasticus pour Damasius) dont Jean d'Ou- as parties de Romme. B.
fa*.
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580
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE. •
C et XCV.
De roy de Hongrie.
De dun de Galle.
De Clemens, le maistre
Origenes.
Le casteal Binfondeit.
Grant secbeur.
Les Romans encha-
chont leur emperere
fours de Romme.
gens; mains al derain furent les cristiens desconfis. Adont soy retrahirent
les cristiens en leurs nefs, et en ralarent en la Grant Bretangne; et revinrent
a Londre ' Tan deseurdit, le XX1I1I 6 jour de marche, et II jour la apres
entrat ly annee del incarnation C et XCV. Adont furent bien fiestoies : sy
orent grant joie cheaux qui ravoient leurs amis, el les aullres orent doleur 1
por leurs amis qui estoient mors. Dedont en avant demorat Glodas awec
le roy Thomas en son paiis, sy furent loials compangnons. — En eel an, en
mois de julle , ly roy Alixandre de Hongrie envoiat a Romme les osseais de
1'emperere Gommodus par XII chevaliers qui 3 avoit esteit mors en Hongrie
en son serviche, sycom dit est; et furent ensevelis a Romme en une co-
lumpne qu'il avoit fait faire. — Item , Tan C et XGVI, en mois de marche le
derain jour, morit lydis Alixandre roy de Hongrie ; sy fut roy apres luy son
(is Brohadas , qui regnat XVI ans. — En eel an , en mois de junne , morut
Franco , ly dus de Galles, qui avoit regneit VIII ans; apres Franco fut dus
son fis Troiolus, lyqueis regnat XXVII ans 4 . — A eel temps commenchat a
eistre en grant auctoriteit uns preislre del engliese d' Alixandre, qui eslois
nomeis Clemens 5 , lyqueis fut ly maistre Origenes, qui fut tent bons clers.
— Item, Fan C et XCVI1, en mois de fevrier, fondat ly dus Troielus * de
Galle unc mult beal casteal en sa terre, lequeile ilh appellat Bienfondeit,
et fut fondeit sus le Royne desus une grant roche; et fut ly plus fors qui
fust en tous chi paiis. De chi casteal oil puisedit grant mestier le due Ogier
de Dannemarche, de quoy ons parlerat chi apres asseis , car ilh fut ens assis
depart Karle le grant, roy de Franche 7 ; et sy durat le siege VII ans. Si
estoit adont nomeis chi casteal : le casteal fort qui siet sus le Royne en che-
myn de Lyon. — En eel an fist sy grant secheur que ilh ne issit herbe ne
bleis ne aullres biens de terre; se en fuit ly temps si chier, que ons vendoit
XX donieres en sols chu que ons vendoit devant unc petit donier. — En
eel an soy reballarent les Romans contre lemperere, portant que ilh voloit
1 Et ralcrent vers la Grande Brctangnc , et arri-
verent a Londre. B.
* Fisent duel. B.
• La construction de cette phrase dans le ma-
nuscrit B est plus reguliere : Envoiat a Romme
par Xll chevaliers les osseais de Vemperere Com-
modus, qui*....
* Celte dcrniere phrase : apres Franco,., man-
que dans le manuscrit B.
' Clement d'Alexandric fut en effet le mailre
d'Origeue.
• Plus souveut Troiolus.
1 Et emperere d'Allemangne , ajoute le manu-
scrit B.
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LIVRE PREMIER
581
a eaux tollir et osteir toutes leurs franquies que les aullres empereres devant
luy leurs avoient donneit. Si fut encachiet fours de Rom me; si s'enfuit en
A therm es, et fist tant que ly roy de Athennes ly oit enconvent que ilh ly
aideroit; se mandat toutes ses gens, se ' vinrent sour les Romans et orent
batalhe; mains ly emperere fut desconfis, et ly roy d'Athennes mors en la
batalhe. Et cheaux d'Athennes fisent leur roy del emperere Severus, se ly
dessent : « Sires, governeis-nos , et soyes nostre roy; se vos aveis perdut
» vostre empire, se sereis roy d'Athennes et nos vos aiderons al mies que
» nos porons. » — Quant l'emperere Severus enlendit chu, sy fut mult lies ,
et dest : « Barons, je n'escondie mie vostre aiide ne vostre royalme oussi. »
Adonl fut coroneis roy d'Athennes Severus, sour Fan C et XCVI11 , en mois
de marche. — Puis rasemblat ses gens de tous costeis et revint a Romme,
si commenchat le paiis a exilhier de tous costeis; et les Romans le lasserent
adont covenir* uncpou de temps, portant que ilh quidoient que Severus
dewist aleir en la terre de Galle, si que les Sycambiens awissent batalhe
a luy, sy que ilh fust ochis. — En eel an , assemblat ly pape Victoir unc
conchielhe de tous les preistres de I'empire, en la citeit de Alixande en
Egypte. A chi conciele fut presens ly pape Victoir et March ises le patriarche
de Jherusalem, Theophilus, evesque de Gesaire, et Hireneus, evesques de
Logd 5 , et Marcel, evesques de Tongre. Et la fut ordineis en queile temps
ons devoit faire le quaremme *, et Paske celebreir; car a eel temps les fasoit-
ons en diverses paiis diversement. Adont fut-ilh confermeil que dedont en
avant ons les celebrast solonc le court de la lune, si que tous jour chaiist la
journee de Pasque en dymengne, et que ilh fust entre le XllU e et la XXR
— Item fut encor ordineit que ly quaremme fut cascon an sy bien apointie,
que ly jour del Paske ne chaiist mie plus tempre que le XXI e jour de
marche, ne oussy plus tart que le XXV e jour d'avrilh; mains entres ches
dois jours ons poroit tous les ans faire et celebrier le jour le Pasque et ' la
Et puis fut refais roy
d'Athennes, quant ilh
fut desconfis des Ro-
Ly pape assemblat unr
conciel en la citeit
d'Alixandre.
L'ordinanche de qua-
remme et de Pasque,
Jjuant ons le doit
aire.
Fol. 163 v«.
Coment Pasque et qua-
remme se doient te-
niretquela lune »oit
plaine.
1 Si mandat ses hommes , et assemblat mutt
grant oust, se,.. B.
1 Conveneir. B. D'apres le gloss a ire de Ducange,
convenire a, entre a litres significations, cclle de fre-
quenter venire, et ici notre mot covenir ou convenir
parait signiCer : courir, faire des incursions.
3 llereneus evesque de Logh. B. Le d final semble
accompagne d'un signe abreviatif. En tout cas , ce
mot indique Lyon, en latin Lugdunum, et Hire-
neus, saint Ircnee, l'apotre de la Gaule.
4 La quarantaine. B.
* Notre texte porle a; mais la conjonction et
du manuscrit B me semble preferable.
kt.
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[le'
582
CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
en Lombardie.
quaranteyme par-devant, mains que toudis so it la chouse enssy ordinee
que ly jour del Paske soit toudis en dymengne, car adontest-ilh a son droit;
et ossy que la lune soit toudis plaine. Et portent que pluseurs gens ne
porquoy iiMu^ordi- sevent mie porquoy la lune doit eistre plaine, jevos dyray porquoy ilh
nlaine , le jour de la f u J ordineit.
Paske.
Pluseurs gens sevent, et oussi cascon le doit savoir, que quant Jhesu-
Crist fut mors en la crois, que ly soleal et la lune obscurit, et fut ly temps
et ly jour tous ombreux. Et por faire et avoir cascon an le jour de bon
venredy ombreux, se fut ordineit que ons awist teile lune que dit est, sy
que ly jour en seroit plus ombreux '. Apres le concielhe, les preistre de
tout Orient et de Asie commencharent a faire le Paske, en teile manere com
ordineit estoit par le pape et le concielhe qui ordineit l'avoit f . — Item,
l an c et xcix. Fan C et XCIX, le XII II 6 jour de may, conquist ly emperere Severus Melan ,
L quST C p7u!eurs U ci C te?s et fist tant que les gens se trahirent awec luy, et en June apres ilh conquist
Pavie; et puis conquist Pise et tout Lombardie. Et les Romans le lassoient
convenir, portant que ilh quidoient qu'ilh s'en dewist aleir vers Galle, si
seroit ochis. Chu estoit mal penseir, car ilh conquist tant qu'ilh fist son
rengne retourneir a luy. Si assemblat tant de gens qu'ilh amenat devant
Romme plus de XL m hommes, et assegat Romme Tan CC, le XXVI 6 jour
de may. — Mains quant les Romans veirent le grant siege, sy orent paour.
Si orent teile conselhe que se ly emperere leurs voloit lassier leurs fran-
chises, enssi com ses devantrains les avoient donneis, ilh le rechuroient
com leur saingnour, et s'ilh ne voloit chu faire, dont envoroient-ilh mes-
sage 8 a due de Galle Troielus qu'ilh assemblast toutes ses gens que ilh
poroit avoir, et se les venist sorcorir contre Severus, et ilh le feroient
emperere de Romme. Quant Severus entendit chu , se soy laisat a la paix
aplichier, por le dobte des Sycambiens. Et fut rechus Severus a emperere
par les Romans, et tient grant court. Et puis remist-orts 1'emperere Severus
en son siege imperial, dont ilh avoit esteit priveis III ans. — En eel an, en
mois d'awost, morut Anthenoir ly conte de Flandre; si fut conte apres luy
Priant, son fis, qui regnat XXXII ans. — Item , Fan Il c et 1 , assemblat Fem-
L'an CC
Com en I V emperere Se
▼erus asf igbat Hom-
me.
De conte de Flandre.
Il'etl.
1 Toute cetle phrase : Et por faire... est omise
dans lc manuscrit B.
* Estoit dans noire tcxte. Je corrige d'apres le
manuscrit B.
5 Mot suppled d'apres le manuscrit B.
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LIVRE PREMIER. 583
perere Severus ses oust, et montat sour mere por aleir en AflFrique, qui
estoit relle 4 de payer son tregut. — En eel an, en mois de marche, morut
Marcel, le III evesques de Tongre; sy fut ensevelis en l'engliese de Nostre- Deiui^vesquedeTon
Damme a Tongre, lyqueib fut apres canonisies por les grans myracles que
Dieu faisoit par luy. De queile sains Marcel ons en faite la fieste le 1111° jour
de mois de septembre. — Apres sains Marcel fut consacreis a evesques de
Tongre ly II U c uns proidhons et valhans clers de noble sane, qui fut nomeis
Metropolien, qui fut fis de Metropolin le due de Lotringe (et) de la filhe le
roy de Hongrie et soreur a Alixandre — si estoit nominee Edua — lyqueis
regnat IX ans. — Item, Tan Il c et II, conquist l'emperere Severus la terre de Dei>mpereres«v«rus.
Cartage, se le remist en sa subjection , puis entrat plus avant en AflFrique et
oit batalhe a eaux; se perdirent cheaux d'Affrique XIII m hommes, et fut leur
roy ochis, qui avoit a nom Salgodas '; sy donnat l'emperere la terre a unc
sien cusien, car l'emperere Severus estoit de la nation d'Affrique. — Apres
soy partit l'emperere d'Affrique, et montat sour mere et nagat tant qu'ilh
vint en Escoche, ou ch'estoient cristiens qui estoient en la subjection le roy
Thomas de la Grant Bretagne. Quant Severus entendit chu, se jurat qui les
remetleroit en sa subjection et a sa loy. Adont entrat en ladit terre 1'an U c
et HI; si commenchat la terre a deslruire et a ardre. Adont en estoit prevost
uns chevalier, qui estoit cusien al roy Thomas, qui avoit nom Adulphe :
chis vint contre les Romans a grant gens en mois de junne, si oit a eaux
batalhe, et soy provat mult valhamment s ; mains ilh avoit trop pou de gens
contre les Romans, sy fut desconfis; mains, anchois qu'ilh s'enfuist, perdi-
rent les Romans plus de IX m hommes. — Adont apellat lydis Adulphe ses f©i. <64r«.
gens et ses barons, et leur dest : « Saingnours, entreis 4 en la cite it de Sargas
» qui est mult fort el bien garnie : ilh ne serat ja prise par hommes de
» monde dedens C ans, se chu n'estoit par famyne; et vos aveis del garni-
» sons asseis por X ans, et je men yray qui ere socour en Bretangne a
» roy Thomas, qui nos venrat sourcorir contre nos anemis. » Quant ilh oit
chu dit, s'y sen allat brochant vers Bretangne, et ses gens entrarent en la
cileit et le fermarent bien. Adont assegarent les Romans la citeit — Et
Adulphe chevalchat tant que ilh est venus a Londre la citeit, el ra com plat
1 Toujours pour rebclle. * Vassalment. B.
1 Galgodat.h. * Barons , vos entereis. B.
Jn.
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584 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
al roy comment les Romans estoient entreis en Escoche. Et quant ly roy
consdhe de bauihe. I'entendit, sy en fut mult«dolans, si apellat ses hommes por luy a consel-
hier ; mains Glodas ly galois ly dest : « Sires, de quoy vos voleis conselhier?
» veis chi tout le conselhe : mandeis vos gens d'armes, et puis les partons *
» en dois; sy men donneis une part, se m'en yray dedens 1'empire de
» Romme et destruiray ortant de la terre Severus , comme ilh at destruite
» de la vostre; et vos aureis l'autre part, se en yreis contre l'emperere. »
Tout enssi com Clodas le devisat fut-ilh fait; car Glodas soy mettit sour
mere a XXX m hommes , et ilh en demorat a roy Thomas XL m hommes.
n« et mi. Clodas arivat en 1'empire Tan II C et IIH, sy commenchat tout a destruire
jusques a Pavie qu'ilh assegat, et le prist et le destruite; et 1'ardit loute sy
Qu t™arim a i 8 re '!iha*" q u i'h n 'y remanit maison; et puis destruite Melan et Mode et Chatelon et *
segat Romme. jusques a XLIX citeis , ains que ilh venist a Romme, lesqueiles toutes ardit,
et puis ilh asseghat Romme. — Apres, ly roy Thomas chevalchat tant qu'ilh
vint a Sargas, ou ly emperere seioit, qui fist ses gens tantoist armeir quant
ilh les veit, sy en allat encontre luy, et oit la grant batalhe; mains ly
emperere oit bien dois Romans contre unc Breton, mains chu n'y valit,
car ly roy Thomas de ses grans coups faisoit les Romans reculeir et traire
ariere. Adont aloil ly emperere parmy la batalhe, et ochioit les Bretons a
gran fuison, car ilh estoit bons chevalier, el les Bretons le fuioient et ly
faisoient voie.
Mains quant Thomas le veit, se vint a luy et ly dest : « Faux emperere,
» porquoy ochis-tu mes gens, et se moy lais ychi? prens une lanche, sy
G 7«L erVreVt \V£? }) j 0s ' e contre moy se tu es gentis. » Adont prisent II lanches et puis bro-
Bretoos. charent les diestrieres *; et vinrent sy roidement qu'ilhs ont leurs II escus
frossies. Et ly emperere rompit son lanche en tronchons; mains ly roy
Thomas le ferit par teile virtu t, que ilh ly rompit escus el habiers et se le
navrat en costeit, et 1'awist ochis; mains ly cengles et ly polrais * rompi-
rent a l'emperere, si qu'ilh chaiil a terre lous estoneis. — Atant sal hi rent
bretons avant qui le vorent prendre; mains les Romans furent plus fors,
et remontarent a cheval leur emperere; mains a la rescosse furent ochis
1 Et puis le parliez en dois. B. designe sans doute Modene, et Chatelon, Chatil-
1 Tout ce qui precede depuis : jusques a Pavie Ion, dans Tarrondissement d'Aoste, en Savoie.
qu'ilh assegat...., manque dans le manuscrit B. * Les destriers , les chcvaux.
Quant aux deux derniers noms de villes, Mode 4 Poitrail.
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LIVRE PREMIER. 585
Vl m homines, si en furent le Romans esbahis et reculeis. Adont issirent les
Escochois de la citeit, sy assalhirent ies Romans par derier; si en ochirent
tant que toute la terre en estoit coverte. Atant soy misent les Romans al Bretons oot descooEs
* . i • i • i • .les Romans.
fuyr com desconfis, et les Bretons les encachoient toudis en ochiant; puis
retournarent les Bretons mult joians, et les Romans s'enfuyent toudis mult
ababis f et dolans; et ont tant fuyt, que ilh sont rentreis en leurs naves et
montont sour mere et vinrent a terre droit a Napple. — Si montarent a che-
vals et chevalcharent devers Romme. Mains adont estoit Clodas departis
de Romme, et gastoit le paiis la atour *; si encontrat des gens d'armes de
1'emperere V c hommes qui revenoient devant. Quant Clodas les veit, se les
at suscorut et les at ochis et pris; et puis leur demandat comment 1'empe-
rere avoit fait en Escoche; et ilh ly dessent que ly emperere estoit desconfis
et avoit toutperdut et revenoit mult dolant. Adont dest Clodas : « par lafoid
» que je doy a Jhesu-Crist et a roy Thomas, se je vis encor unc pau de temps,
» ilh sera encor plus dolans. » — Adont fist Clodas armeir ses gens , et che-
valchat tant qu'ilh encontrat 1'emperere qui volentier s'en alaist une aultre
voie , se ilh powist, mains ilh ne poioit. Adont dest 1'emperere a ses gens :
« Saingnours, et ne voy-je mie la baniere le roy Thomas? Queiles dyables
» 1'ont or sy toist chi aporteit? Ilh moy covint combattre a luy, et sy n'en
» avoy cure. » Adont se sont sus corus, et commenchat la grant batalhe, ciodas dewonfii encor
.,,,.,. , ,. . lesRomtins.
qui durat del matinee jusques a la vespree, et toudis cressoient gens aux f i. 164.
Romans, car chu estoit en leur paiis; mains chu ne valt, car Clodas tenoit
ses gens ensemble , et les reconfortat de ses grans coups. — Et al derain ,
Clodas s'enbatit mult avant et fist tant de fais d'armes que chu estoit mer-
velhe, car chu estoit ly miedre chevalier qui fut en monde, foursmys le
roy Thomas qui estoit bien oussi bon chevalier com Clodas. Et tant fist
Clodas, que ilh aba tit a terre cheluy qui portoit la baniere 1'emperere, si
que la baniere chaiit jus sus le sablon, se ne fut pais adont relevee.
Apres, Clodas ochist trois senateurs qui furent nomeis Gadas de Palus,
Josue d'Atrab et Madarans d'Abilos, et mult aultres; et sy navrat 1'empe- ciodw desconEt lem-
rere, et ly ochist son cheval, sy qu'ilh chaiit a terre, mains ilh fut tantoist pererte ies « eni -
remonteis. Adont s'enfuirent les Romans, et Clodas les volt cachier; mains
1 Nous avons deja rencontre ce mot avec le sens * Par errcur pour alt our, comme on lit dans le
de : ebahis. manuscrit B.
74
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586 CHRONIQUE DE JEAN D'OUTREMEUSE.
Grant persecution sor ses barons ly dessent que ilhs s'en ralassent en leurs terres, car ilhs estoienl
victoir fut ochw et bien et noblemen t venjries. — Clodas creit conselhe, sy montat sor mere
pluseurs aultres. © » J
et alat tant par mere * awec ses gens, qu'ilh vinrent en Escoche ou ilh tro-
varent le roy Thomas, qui les fist grant fieste. Et la racomptat cascon chu
qu'ilh avoit faite, si en fut fait grant fieste des ambdois pars. — Et ly em-
perere revint a Romme tous corochies et dolans por sa perde , et por cest
cause ilh en fist grant persecution aux cristiens, et en martyrisat sens
nombre. Et tout promier fist martirisier le pape Victoir, le III 6 jour de
porquoy on* dist le junne, en despit de roy Thomas : sy fut ensevelis en la cymiteir Sains-
cymiteir Sains -Ca- J 7 r . m J J • r • ■•
»«te. Lahxte. qui estoit enssi nommee portant que sains Gahxte, qui fut puisedit
pape de Romme , le consecrat a son temps ; car elle n'estoit encor adont
pointe consacree, n'en n'astoit pointe apellee la cymiteir Sains-Calixte , car
En cas de necessiteit Calixte n'estoit encors mie neis. — A eel temps dont nos parlons, chis pape
on puet baptisier ■ • • 1
en toutes aywes. Victoir ordinat que , en cas de necessiteit , ons posist baptisier tous homnies,
soit en flus ou en fontaine , ou en mere ou en sane, quant ons le fait martyr,
se en la cristiene confession * le requiert sicom vray creans.
1 Ces cinq derniers mots sont supplees d'apres meat ou, par le martyre, il confesse la foi chre-
le manuscrit B. tienne.
1 C'est-a-dire : s'il demande le bapteme au mo-
■ raaxaiCM ■ —
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APPENDICE.
LA GESTE DE LIEGE.
PREMIER LIVRE.
Signours, ors escouteis por Dieu le Creatour
Quy format lout le monde enssi qu'il fait son thour *,
Et che quy dedeos est en termes de sept jours,
De lymon de la terre Adam noire ancessour *,
5 Puys Eve de sa coste, par la cuy folle errour 3
De paradis lei-restre perdirent le surjour
Oil Dieu les avoit mis par son digne vollour;
Par inobedience fureut en leils tristour,
Que par dedens enters, et lous leurs successours,
10 Fureol il babitans les grands et les mynours ,
Tant que misericorde abaiil par doulcbour
1 Notre texle porte :
A riiooocur dt Dieu le pere notre rreie Creotoire
Quy formal lout le monde, eo-ame il etl de noloirc.
Je corrige ces deux vers d'apres le manuscrit 10989 de la Bibliolhequc
royale, qui meservira de texte comparatif, etquej'indiquerai dorenavanl
par les initiates BR. Je dirai ailleurs les raitons de la preference accordee
an texteque je suis. II n'en est pas inoins vrai que , pour les trois premiers
couplets surlout, j'aurai plusieurs fois a le corrigcr. Le premier feuitlet,
eopie plus moderne et peu intelligent , qui doit avoir reniplacc un feuillet
decbire , est fort incorrect. Aiusi , dans le premier couplet le copiste a
transforme la rime our en oire, en faisant, ce qui est evident quand un
examine de pres lecrilure de notre manuscrit, de \'u un t et un r, et de
IV un e. Je n'besite done pas, sur l'autorile du texte comparatif, a recti-
fier ce qui est pour moi une erreur manifesto.
Justice, que oil mis au ceur de Dieu I'yrrour *
Doot le peuplc gissoit en mor telle teoebrour.
Tant fit misericorde, piteit et vraie amour 5 ,
15 Que Dieu soy incarnat en la Vierge d'bonnour,
Et puis sy en naskit qu'oncques n'en ot do Hour
Sens virginiteit perdre, nuls n'en soil en cremour G .
Celle tressaincte Vierge, mere, fille et serour 7 ,
Vraie espeuse et ancelle ful a vraie salveour 8 ;
20 Et fut auz povres peuples perpetuels sorcours
Par sa saincle porlure, quy morrut en langour 9
En l'arbre de la croix par les Juys trahitours.
* Parentoire , dans noire texte.
5 Notre texte porte la au lieu de sa , fault au lieu de folle, et par quy la
au lieu de par la cuy.
4 L'ire, la colere de Dieu. L'erroir dans notre lexte.
3 II y a, dans noire texte, au commencemenl de ce vers, un puis qui
evideromenl est de trop.
6 Encore un vers singulierement de figure dans notre lexte, ou on
lit:
De uiat virginiteit null n'en soil rn reuneire.
7 Etpuis teure, porte noire texte.
8 Creatoure , dans notre texte.
9 MI f ut mort a langour. BR.
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388
APPENDICE.
De celluy Dieu de gloire , de sa vertu majour,
Soy en t tous ceulx gardeis de toute deshonnour
25 Quy raoi entenderout , clerement saius clamour,
Recordeir vraie hystoire que oncques n'ot milbour.
C'est de Tongre el de Liege et de tout la enlbour \
Et la fuodatiou del rengne qui est majour,
Les graodes aventheurs, noblesses et haul tours *,
30 Acquestes, signories, victoirs el grant labbours
Qu'en paiis ont esteit, qui est de telle 3 vigour
Que de tous aullres rengnes est il nommeil la flour,
Sycomme le corronicques , qui est de grant vallour 4 ,
Vraie et bien aproveit — ja non ayes paour B — ,
35 Fermement le tesmongne 6 .
Signours, coronicques est bistoire sains mensongne
Quy dist certainement que, en Franche ne Gascongne,
Des port 7 de Normendie, en Affricque, en Borgongne,
Ne par my la Lorraine, ne j usque en Arragongne,
40 N'al il paiis ne rengne de si noble resongne 8
Comme la vesqueil de Liege , ne parlout Allemangne °.
Moult il sont d ebon na ire quant ce vinl au besongoe;
Se bon conseille avoient, par tous les sains d'Anlongne l0 ,
Pais ne s'entremellroienl de tant diverse songne
45 De quoy lament fois la comone s'ensongne ".
II n'est nuls se estrangnes, s'ilz venoit de Saxongne,
D'Espaingne ou d'Angleterre, de Rome ou Calhelongne,
« TrttlouU la vreiour. BR.
* Notre texle porle :
fct lea grant aventheora tout nobles et haultoura.
5 Gram, dans noire texle.
* Savour. BR.
r > Notre texte porle pour le second hcmisliche : comme pollei* parchevoir.
6 Sure went rout racompte, porte notre texle. Je donne la preference au
tcxte du manuscrit BR. Inutile de faire remarquer que la rime d'un cou-
plet est loujours annoncee par le dernier denii-vers du couplet qui precede.
7 Porte*. BR.
8 Notre texte porte tergongne, qui ne me presente aucun sens. Retogne
a du rapport avec le rerbe resongner, et peut designer un pays assez fort
pour etre craint
9 Apres ce *l«n« vers vienl, dans le manuscrit comparalif, tout un pas-
sage sup prime dans le notre, et je vais en avoir encore bientot un autre
non moins extraordinaire a signaler. Je m'expliqucrai ailleurs sur la cause
probable de ces suppressions En attendant, voici le passage en question :
F.seepteit una ehoeae, par lea aaina de Boloigne,
Que de eelle ereaquell trealoulte la eomoigne ,
Non pais let bona borgola, mains la gena de eonehoigae
Qui n'ont mie vallbana de tout biena uoc bolgne ,
Sont sa sooprls d'orguell et da folle yvreioigne
Que rontre Sainete-Englla ont toudis jaragoign<> ,
Et ae linent lea noblea vUlemeat en vergoigne.
Que le peuple " de Liege; maius que ons le sommongne
Ne s'en doit ensongnier, et tant fait sa besongne ,G
50 Que paix il y met, ou les bons conseille doue u .
Dieu les vueille retraire, et les sains de Collongne,
Sy que nuls d'eaux jamais telle follie u'enpongne ,
Ne aultre ou il n'ayt droit.
Se le peuple de Liege point ne s'entrcmelloit
55 Fors seulement de ce qu'a luy apartenroit .
Et se laissat la choeze ainsy comme estre doit ,
Et toute gens joiir de ce qu'a eaux scroti,
Je crois qu'en tout le monde sy bon pays n'aroit;
Car c'est un franc paiis, meilheur ons ne troveroit ";
60 Sy at gens debonnaire; quy ainsy les lairoit ,
Comme doit teils gens laissier, et les conscilleroil
Leurs bonneurs et profit, sy comme faire ou solicit ,
Cerle ly propre peuple asseiz mieux en va Id roil,
Car cbacun son proffit et sa gaigne < 8 feroit.
65 Or prions tous a Dieu , qui morrul a destroit ,
Que teils cons<*il y mette qu'a la louenge soil
De ce noble paiis; quy escuteir void roil
De sa fundation du temps qu'il eommenchoit ,
L'aclbeur dit fermement que partie en diroit.
70 II nous racompte ossy * 7 , quy bien Tentenderoil,
T res toute la substance jusqu'a temps or en droit,
Les causes et les raisons comment ce advenroit.
Certes e'eat grand domalge qu'en eai at tant d'antroigae.
( ar mull eont debonnatre
Je suppose que eonchoigne esl la pour eo*icAteure,salete, ordure; omit
conchoigne signi6erait : gens de Hen, canaille. Hoigne, aojpit est one
ecaille d'oeuf, de noix , etc., un objet sans valeur. Jaragoigne, que jeral-
tache a jargauder, jargonner (Roquefort), me parait signifierdwpropw
mediants. Quanl a antroigne, ce mot, queje ne connaispas, est iri pott
orjrueil, outrecutdance.
10 Antoing? Notre texle porte, ce qui parait difficile a comprendre:
Ft bonne eonseila doonent par pluaienr* bom» eena d'bowmt.
11 On lit dans notre texle :
Payx entrelenoient par toot pays et sains soiagne
Se conrieni lament fola la eomune eat en songne.
** Paiis , dans notre texte.
»s El tant feriren coigne. BR.
14 Ce vers est omis dans le manuscrit BR.
15 Aulieudccedeuxiemehemisticbe,on lit dans notre lette: plamsdefn-
ment el (Toirge, ce que n'autorise nullement la rime adoptee pour le couplet.
18 Son gaignage dans notre texle, cc qui donne au rersunesy Habere trop.
17 Chose etrange, le manuscrit de la Bibltolheque royale donne le no"
de Jean d'Outremeuse, omis ict :
Johan dit d'Oultrerooese, que pirlir an »3toM ,
Nona en racompte chjr
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APPENDICE.
LA GESTE DE LlEGE.
Signours, ors escouteis por Dieu le Crealour
Quy format tout le monde enssi qu'il fait son thour \
Et cbe quy dedens est en termes de sept jours,
De lymon de la terre Adam notre ancessour 2 ,
3 Puys Eye de sa coste, par la cuy folle errour 3
De paradis terrestre perdirent le surjour
Oil Dieu les avoit mis par son digne vollour;
Par inobedience furent en teils tristour,
Que par dedens enfers, et tous leurs successours ,
iO Furent il habitans les grands et les mynours ,
Tant que misericorde abatit par doulchour
• Notre texte porlc :
A I'honnenr de Dleo l« pere oolre rrele Creatoire
Quy formal toot le monde, tonn« il est de notolre.
Je corrige ces deux vers d'apres le manuscrit 10989 de la Bfhliotheque
royale , qui me servira de texte comparatif , et que j'indiquern dorenavant
par lea initiates BR. Je dirat ailleurs les raisons de la prefefence accordee
au texte que je suis. II n'eo est pas moins vrai que, pour lei troia premiers
couplets surtout , j'aurai plusieurs fois a le corriger. Le /premier feuillet,
copie plus moderne et peu intelligente, qui doit avoir rimplace un feuillet
deehire , est fort incorrect. Ainsi , dans le premier eWplet le copiste a
transform© la rime our en oire, en faisant, ce qui est evident quand on
examine de pres Tecriture de notre manuscrit, de Yu un t et un r, et de
IV un e. Je n'hesite done pas, sur l'autorite du texte comparatif, a recti-
fier ce qui est pour moi une erreur manifeste.
Justice, que oil mis au ceur de Dieu l'yrrour *
Doj/t le peuple gissoit en mortelle lenebrour.
Tint Gt misericorde, piteit et vraie amour 5 ,
15 Ijue Dieu soy incarnat en la Vierge d'bonnour,
/ Et puis sy en naskit qu'oncques n'en ot dollour
/ Sens virginiteit perdre, nuls n'en soit en cremour 6 .
y Celle tressaincte Vierge, mere, fille et serour 7 ,
\ Vraie espeuse et ancelle fut a vraie salveour *;
4p Et fut auz povres peuples perpetuels sorcours
Par sa saincte porture , quy morrut en langour 9
\En Tarbre de la croix par les Juys trahitours.
* Par, eniotre , dans notre teite.
5 Noire texte porte la au lieu de »a, fault au lieu de folle, et par quy la
au lieu d&par la cuy.
• L'tre , ta colere de Dieu. L'erroir dans notre texte.
B 11 y a , dans notre texte, au commencement de ce vers, un puts qui
evidemment est de trop.
6 Encore un vers singulierement defigure dans notre texte, ou on
lit :
De ftaiot virginiteit nala n'en Mil en remolre.
7 FA puis *eure , porte notre texte.
" Crtatoure, dans notre texte.
9 Qui fut mort a langour. BR.
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588
APPENDICE.
De celluy Dleu de gloire, de sa vertu majour,
Soyent tons ceulx gardeis de toute desbonnour
25 Quy moi entenderont, cleremeot sains clamour,
Recordeir vraie hystoire que oocques n'ot milhour
Cest de Tongre et de Liege et de tout la enthour \
Et la fundalion del rengne qui est majour,
Les grandes avenlheurs, noblesses et haultours *,
30 Acquestes, signories, victorrs et grant labbours
Qu'en paiis ont esteit , qui est de telle 5 vigour
Que de tous aultres rengnes est il nommeit la flour,
Sy comme le corronicques, qui est de graul vallour *,
Vraie et bien aproveit— ja non ayes paour 5 — ,
35 Fermeraent le tesmongne •.
Signours, coronioques est bistoire sains mensongne
Quy dist certainement que, en Francbe ne en Gasconguc,
Des port 7 de Normendie, en Affricque, en Borgongne,
Ne parmy la Lorraine, ne jusque en Arragongne,
40 N'at il paiis ne rengne de si noble resongne 8
Comme la vesqueit de Liege, ne partout Allemangne *.
Moult il sont debonnaire quant ce vint au besongne;
Se bon conseille avoient, par tous les sains Dantongne f °,
Pais ne s'entremettroient de tant diverse songne
45 De quoy tament fois la comoue s'ensongne ".
II n'est nuls se estrangnes , s'ilz venoit de Saxongne,
D'Espaingne ou d'Angleterre, de Rome ou Gatbelongne,
1 Trestoute la vreiour. BR.
* Notre teite porte :
Et les grant aveotheors loot aoblei ct baulteurs.
5 Grans , dans notre teite.
* Savour. BR.
8 Notre teite porte pour le second hemisticbe : comme polleis parchevoir.
6 Surement vous racompte, porte notre texte. Je donne la preference au
texte du manuscrit BR. Inutile de faire remarquer que la rinie d'un cou-
plet est toujours annoncee par le dernier demi-vers du couplet qui precede.
7 Porles. BR.
* Notre texte porte tergongne, qui ne me presente aucun sens. Resongne
a du rapport avec le verbe retongner, et pent designer un pays asses fort
pour etre craint.
9 Apres ce quarantieme vers vient, dans le manuscrit comparatif, tout un
passage supprime dans le ndtre, et je vais en avoir encore bien lot un autre
non moins extraordinaire a signaler. Je m'expliquerai ailleurs sur la cause
probable de ces suppressions. En attendant , voict le passage en question :
Exeepteit one eboese, par les sains de Boloigoe.
Que dt Mil* eresqaeit trestoutte la eomoigne,
Hon pals les bons borgols, mains la gens da coacboifne
Qui n'oat mlt railnans da tons Mens one hoigne ,
Sont se soapri* d'orgoeil et de folle rrretoigne
One contra SaJnete-BngUs ont tondis Jaragolgne ,
Et as tiaeat las nobles rillement on rergoigne.
Que le peuple ** de Liege; mains que ons le sommongoe
Ne s'en doit ensongnier, et tant fait sa besongne il
50 Que pais, il y met ou les bons conseille y doue ".
Dieu les vueille retraire, ct les sains de Collongne,
Sy que nuls d'eaux jamais telle follie n'enpongne ,
Ne a al Ire ou il n'ayt droit.
in.
Se le peuple de Liege point ne s'entremelloit
55 Fore seulement de ce qu'a luy apartenroit,
Et se laissat la choeze ainsy comme estre doit ,
Et toute gens joiir de ce qu'a eaux seroit,
Je crois qu'en tout le monde sy bon pays n'aroit;
Gar e'est un franc paiis, meilneur ons ne troveroit ";
60 Sy at gens debonnaire ; quy ainsy les lairoit
Comme doit teils gens laissier, et les conseilleroit
Leurs honneurs et proffit, sy comme faire on solloit,
Certe ly propre peuple asseiz mieux en valdroit,
Car chacun son proffit et sa gaigne «• feroit
65 Or prions tous a Dieu, qui morrut a destroit,
Que teils conseil y mette qu'a sa louenge soit.
De ce noble paiis, quy escuteir voklroit
De sa fundation du temps qu'il commenchoit,
L'actbeur dit fermement que partie en diroit;
70 11 nous racompte ossy ,7 , quy bien l'entenderoit,
Trestoute la substance jusqu'a temps or endroit,
Les causes et les raisons comment ce advenroit.
Certet e'est grand domaige qn'eu eat al tant d'antroigae,
Car malt sont debonnaire
Je suppose que conchoigne est la pour eonchieurt, salele , ordure; gent 6e
conchoigne signi6erait : gens de rien , canaille. Hoigne , kogne est not
ecaille d'oeuf , de noix, etc., un objet sans valour. Jaragoigne, que j* rat-
tacbe a jargauder, jargonner (Roquefort) , me psxa.it signifier des propm
mechants. Quant a antroigne, ce mot, que je ne connais pas, est id poor :
orgueil , outrecuidance.
10 Notre texte porte , ce qui parait difficile a comprendre :
Et bonne eonsells donaent par plnsleurs bons eeas d'hoanme.
11 On lit dans notre texte :
Pajrx eotretenoient par tont pays et sains soingne
Se eonrient tament fois la eomuae est oa songne.
'* Pays , dans notre texte.
15 Et tant ferir en coigne. BR.
14 Ce vers est omis dans le manuscrit BR.
** Au lieu de ce deuxieme hemisticbe, on lit dans notre texte : pUiutdtfr*
menteid'oirge, ce que n'autorise nullement la rime adoptee pour le coopM.
16 Son gaignage dans notre texte, ce qui donne au vers one syllabe de trap.
17 Chose etrange , le manuscrit de la Bibliotheque roynle donne Ve mm
de Jean d'Outremeuse , omis ici :
Johan dit d*Oaltremoese, qae partie en saroit ,
Moas ea raeompte eby. . . .
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LA GESTE DE LIEGE.
589
En nom del Triniteit, ires parfaict et benoit ,
Gommencherons les giestes a forche et a exploit
75 Oil commenchier doit on ', car qui ne vous diroil •
L'origination, trop mal vous paieroit.
Portant le vous dirons, mains qu'il ne vous anoit
C'esl raison et droiture.
B«l eltalC *© Toaffr*.
Barons, or faites pais, s'entendeis Pa venture
80 Comment la grande Tongre vint promier en failure.
Uns prinche qui * issit de la propre engenrure
Franco le fils Hector, che est chouse seure,
Ot par succession enfans de nourelure
Dont puis issit Tongris, a la grande estature,
85 Qui fonda la citeit de Tongre en la verdure,
Ensi comme vous oreis se ne faites murmur.
Mains anchois vous diray la matere tres pure
Comment la chouse avient, trestot sens covrelure.
Sour Tan tot droit, singnours, che nous dit l'escripture,
90 De la nativiteit Adam sens mesprisure
MI" et XIX, de che soies segure,
Fut la grant Troie prise par traison obscure ;
De laqueUe fuirent, comme en disconfiture,
Mains prinches et barons, ce nous dist la lecture ,
95 Nagant parmi la mer par mervelheux ardure.
En maintes regions, cascun a sa nature,
Ont habitation prises sens usurpure.
Eneas iy Troians, fils Anchises le sure,
Chis vint dedens Ytaile, oil trovat guerre dure,
100 De bon roy Evander, a cuy faisoit injure
Turnus, roy de Tuscanne, a la gente figure,
Qui ot Lavine a femme a la gente aprisure ,
Ne * puis ot Eneas par sa grande atraiture;
Fil a roy Latin fut la douche creature,
105 Plaisante et debonnaire.
A temps dont je parolie, par le corps sains Hilaire,
rTavoil par decha mer, ne maisou, ne repaire,
Ville, casteal, citeit, publes ne secretaire,
Fors le roy de* Latins qui fut de grant affaire;
1 10 Et puis le roy d'ltale qui n'astoit mie maire
t On lit encore dans noire teite : or commtnchier voit-on.
* Ce mot, eniierement efface dans notre lexte, est supplee d' apres le
manuscrit BR.
» Punrct.
♦ Flos probableneot Tutcaine.
Que roy de sept montagne, li coronique desclaire,
Et li roy de Costaine 4 qui as toil necessaire.
Ces trois regnes y furent, se m'aiit saint Imaire,
Quant Eneas y vint, qui pour proesce faire
115 Ot a femme Lavine, qui ot plaisant viaire.
Roy Turnus ses maris, par fortune contraire
Fut ochis de la guerre qui tant fut deputaire.
Grande fut ceUe guerre que le voroit retraire;
Mains a notre matere de nulle riens u'apaire ,
120 Si que raison ensengoe que je m'en doie taire,
Car che que je recite de cesti exemplaire,
Si est pour miez descendre a ma giest , et parfaire
L 'origination dont ilh se vout extraire.
Or escuteis, por Dieu qui en mont de Calvaire
125 Morut dedens la crois a paine et a grief baire,
S'oreis vraie chanchon qui a cascun dois plaire;
Oncques ne fut plus vraie, depuis le temps Cesaire,
Si comme poreis oiir; mains que vous, sens meffaire,
Teneis pais et silencbe, et si vuilhies substraire
130 Murmur hors de vous, et trestous biens atraire;
Car de beaux mos oir * se doit bon cuer refaire,
Vfiaude est delitable.
Urn Balas mm Ckaap«i|i«,
Ensi comme je ay dit, bonne gens honorable,
Fut Eneas le dus en Ytale habitable;
135 Roy des Latins astoit, et d'ltaile sens fable;
Maintes citeis fonda t, en son rcngne * heritable,
En trois ans qu'il regnat li bons roy amiable.
Apres trois ans morut; Ascanus li estable,
Qui fut ses fils aisneis, fut apres luy regnable;
140 Et puis, Tun apres l'autre, jusqu'a XV notable.
Ly XV e ot (a) nom Amiles Tagreable;
Apres vint Romulus, qui tant fut verluable,
Et Remus li sien freres, ly preudomme favorable.
Or escouteis, signours, pour Dieu Pes peri table :
143 Chis dois freres furent l'uuc l'autre felonable ,
Germeax d'unne porture, c'est chose veritable,
Furent, si que cascun le roiialme totable
Demandoit a avoir, et tant qu'en permanable
Covient ilh par forche Remus estre plus able \
150 Car sa partie avoit Romulus plus dotable *.
Si decachat son freres et li fut si cruable,
5 Probablement pour our, ouir, comme on lit trois vers plus baut.
6 Ren, dans notre lexte.
* Habile.
8 Redo u table.
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590
APPEND1CE.
Qu'en Champangne s'enfuit, uns paiis convenable
Oil fondat la elicit de Reos la venerable.
Ly sien nom li donat , rois en fut avenable;
155 Le Gibe a due de Galle, qui ot a non Mirable,
Ot Remus a moulhier ; s'en ot un fil contrable
A trestoute bonteit.
De lonalu rolo de Iomm*.
Ensi fut Reus fondee que je vous ay com p lei I.
Remus si en fut roy; Mirable at esposeit
160 De quoy issit Laudas qui tant ot crualteit;
Dont par succession issit, e'est veriteit,
Tongris apres lontemps, si comme est ordineis
Cbi apres en l'istoire de noble auctoriteit.
Or escuteis, barons „por Dieu qui fut peneit,
165 Roy d'ltaile sa femme ' Romulus est clameit
En apres Eneas quant fut de jovene aiet;
Si a fait senateurs qui out sens natureit,
Pour prendre a eaux conselb les at institueit.
La furent senateurs promierement prove! t;
170 Trestoutes les vilnettes, casteals et fermeteit,
Que tuis ses ancesseurs orent devanl fondeit,
Fist enclore de mur par grant nobiliteit;
Si en fist de son regne le cathedral citeit ,
Romme apres le sien nom Tat Romulus nommeit,
175 Sour Tan certainement de la nativiteit
Adam, no premier pere, IIII m bin esmeit *
IIII« et LX et IIU ans; autreteit
Ains que Dieu en la Virgue sacbies fut incarneit
VII« XXXV ans, n'y at riens mesconteiL
180 De Romme empereur est Romelus appelleit,
Et ses heures apres jusqu'al septieme greit
Continuelement.
Ly premiers empereurs de Romme voirement,
Puis qu'elle fut enclouse de mur teilement,
185 Fut nommeis Romulus, qui ains son finement
Fist ochire Remus, son frere, a grief torment;
D'un effoudre morut apres crueusement.
Nyma Popilius fist apres regnement,
Qui jenvier et fevrier adjostat noblement
190 Dedens le kalendier, car adont seulement
* Sueceueur. BR.
* Nombreit. BR.
* Pour tubtilement, comme on lil dans le manuscrit BR.
4 Ce doit elre le me me mot que eonraer, amreer> auquel le glossaire
Avoit X mois en Tan. Or entendeis briefment :
VII empereurs ot a Romme vraiement,
Trestot fun apres l'autre regnant mult fortement,
Dont Tarquins Torguilbeux regnat derainement.
105 Et quant Tarquins fut mors, pris ont avisemem
Ly senateurs de Romme, de quoy lib astoit cent,
Qu'H prenderont entr*eaux altre government;
Dont cessarent ly roy. Si regnont publement
Cascun an dois consules, eslis commonement
200 Par certaines raisons que ne diray nlent;
A ma droite matiere n'apartient nulement,
Trop grant prolixiteit seroit d'enpescbement.
Plus de IIU* ans regnont enlirement
Chis consules a Romme, governant sutilement s
205 Jusqu'a Juliius Cesar, dont oreis tempremenu
Or comenche matere de noble sentement;
Benit soit qui Torat , sains faire encombrement,
Por ly mieux retenir.
Tribuniens et consules regnarent sens mentuir
210 IIU* ans et plus. Mult vorent conquerir;
Decha mer et dela misent tuit a martir.
Tout le monde fisent aux Romans asservir,
Et por rendre tregut tous les ans obeiir.
Nation n'ot en monde qui puist contre eaux lenir,
215 Region ne paiis, ne par forcbe oonrir 4 ;
Tout mettent en tregut, nuls ne se puet garfr;
Et se nuls fut rebelle de son tregut offrir,
Destruit astoit son regne errant 8 sens abstenir.
Or avient que sour Tan que Dlex, par son plaisir,
220 Dengnat Adans creer, qui puis ot a soffrir,
V» C et XII ans, auchois que Diex fiorir
Dedans la Viergue pure fesist le Saint-Espir
IIII" et VII ans, bin Toze maintenir,
Ot en Sisielbe 1 roy qui mult fist • a cremir :
225 Virgiles fut nommeit; ons ne savoit cnousir
En monde son parelbe. Si vous doit on gebir
Qu'il avoit XII fis, dont li VI obtenir
Vorent VI royaltes que vous poreis oiir.
Ly aisneis fut Gorgiles qui ne savoit blandir;
230 Chis fut roy de Bugie, bin le vout contenir,
Et fut peire Virgiles, qui voult Romme tollir
Tout le feu a unc jour, por la dame honir
Qui dedens la corbilbe le vout faire morir,
roman de Ducange assigne, entre autres significations , celle de »
au combat. Conrir signifie done combat! re.
8 Subtle. BR.
6 Fut. BR.
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LA GESTE DE LIEGE.
391
Si comme en ses histoires puit on mult bin veiir
355 Qui les seit esgardeir.
•e« aeaatoars dm Iowm.
Ly secons fils le roi de Sisielh a vis cleir,
Si ot a non Gregoires , qui mult fist a ameir ;
Roy de Bile fut chis qui siet dessus la meir.
Ly thiers ot nom Castor de Pa vie l'escleir;
240 Ly quars Sartagonus de Cartage et d'Agleir * ;
Ly quins Alenous , qui mult fist * a doubter,
Roy fut de Valsitanne *, tot sens rien controveir.
Ly aultre fut Paris : Bastle ot a governer.
Ly autre VI furent proidhons sens vitupeir;
345 Tons furent senateurs de Romme sens celleir.
Or escuteis por Dieu qui se lassat peneir,
S'oreis vraie chanchon qu'on ne puit amendeir.
Barons, a ycel temps, comme oiies deviseir,
Fut fait ly roy Gregoires de Bile, sens erreir,
250 De Romme uns des consuls. Si comme vorent useir,
Sus les Romains vout chis tres vassament regneir;
Maintes terres et paiis vont son temps conquesteir,
Et l'onor des Romains forment augmenteir.
Tout le paiis de Galle, c'on vuit France or nommeir,
255 Et trestoute Germaine vont ilh suppediteir;
Borgongne et puis Champangne , rins ne puit escapeir.
De quoy ly roy Humbris quidat vis * forsenneir,
Quant oiit les novelles qu'on li voult raporteir.
Ilh astoit roy de Rains, si savoit bin capleir;
260 De deffendre sa terre se vat ilh porpenseir.
A Gregoire at mandeit que ilh ne vuilh entreir
Par dedens son paiis, n*y poroit profiteir.
Quant Gregoires l'entend, si vat les feux bouteir
Dedens la terre Humbris.
B« Teagrla.
265 Barons , or entendeis por Dieu de paradis :
Le roy Humbris de Reus , de quoy je vons devis ,
Ot I frere germain qui fut nommeit Tongris;
Ambdeux furent fils de Rains a roy Hongris 5
* & AnqUir. BR. C'est mds doute Alger qu'on a voulu indiquer ici.
* Fut. BR.
3 Wahtioyne. BR.
* Pour vif, comme od lit dans le manuscrit BR.
5 La rime a exige du poete one inTersion un peu forte ; il faut'en effel
lire : a roy Uongru de Rain$.
6 Le puis$ains. BR.
7 Qu'il a recherche 1'alliance de....
H Le manuscrit BR ici se comprend mieux : sen vont tout avec li$.
De sane a roy Remus fut descendus jadis;
270 Hongris, li roy de Rains, at a femme Andelis
La filhe a roy Turn us, qui fonda puissedis
La citeit de Tournay, dont beaux est li porpris.
Adont fut dus de Galle Prians ly poestis fl ,
Qui tant haiioit Romains, qu'il alianche at quis 7
275 A roy Humbris de Rens et a tos ses amis.
Teils covens furent la fermeis, dont puis ochis
Furent d'ambdois pars mains barons singnouris.
Ly roy Humbris de Rens at mandeit ses subgis ,
Contre le roy Gregore s'envat trestout admis 8 .
280 Signours, a ycel temps n'astoit pais Jhesu-Cris
Encor venu en terre, si qu'en tout ly paiis
Qui furent decha mer, li grans et li petis ,
N'avoit fours Sarasins prois, valhans et hard is;
Et par dela la mer en ot mult, ce m'e6t vis 9 ;
285 Tous furent Sarasins dela partous les lis ,
Fours seul dedens Judee, ou furent ly Juwis,
Et en mont de Caspie , che nous dist li escris.
Or escuteis, por Dieu qui en la crois fut mis :
Ly noble roy Gregoires ne si est alentis ;
290 Par Champangne chevalche o 40 ses oust fervestis ,
Si at gasteis la terre, mains chasteaux at bruis.
Contre lui s'en alat Humbris, li roy de pris,
A mult grande puissanche.
XII.
Batallfce.
Ly Romains chevalchent a mult grande bubanclie " ;
295 Grigore les conduit qui fut plains de valhanche,
En royalme de Rens fait grande desordinanche ,
Tous le paiis destruit et met en grande pesanche.
D'autre part vint Humbris a la fire semblanche,
O luy Tongris son frere en cuy iih at fianche;
300 Et Tumus y astoit, qui ot la barbe blauche.
Tant chevalchent ly oust, cascun at apparanche
Et voit siens annemis, bin en at cognissanche.
Quant ly uns chousit " Tautre, mult grant fierte le lancbe;
Ilh ont tendut leur treis, cascun fist arestanche,
305 A XL boniers Tun de l'autre s'avanche.
Roy Gregoires at fait crier sens oblianche
9 Advit. BR.
10 Et. BR. J'aurai ailleurs a parler de I'anteriorite de notre texte. En
passant je signalerai ce monosyllabe o qui Mgnifie ici avec , et dont le co-
piste du manuscrit de la Bibliotheque royale n'a pcut-etre pas compris le
sens.
11 Bubanche doit avoir ici le sens de : abondance, grand nombre de
guerriers.
11 Pourcoissf, Tit.
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592
APPENDICE.
Que cascun s'aparelhe et fache porveancbe ,
Por faire aux annemis lendemain acointanche ;
Et puis ont ordineit , par nulle coovenanche
310 Que prisons on ne prendre, por nescune aliancbe;
Mains c'ons destrue tot , por plus faire grevancbe
A roy Humbris de Rens et plus grans desplaisancbe.
Ly roy Gregoire atant n'y at fait detriancbe;
A lendemain mandat batalbe et defianche
315 Aux nobles campions qui de luy n'onl doutancbe.
Ensi fut ordoneis par bonne assegurancbe ,
Et d'un costeil et d'autre leur vint a grant plaisancbe,
Car de vie loir avoir ot cascun esperanche ;
Enfre chi qu'al demain l font ensi demorancbe
320 Qu'il sont trestuis armeis, par belle contenauche
Sont tuis rengies aux champs.
XIII.
Item.
Ly oust d'ambdois pars, Campingnois * el Romans,
Sont par dessus les champs mult noblement regnans;
La veissies tant hiames brunis et reluisans,
325 Tant escus pinctureis et tant diestrier corans ,
Baniers et pennons a touts vents balians ,
Et tant riches vassauls dessus les auferans ,
Ces ensengnes crieir et par les preis frappaus.
Ly dois oust sont rengies qui sont durement grans.
330 A LX" hommes fut ens cascune as mans s ,
Cascun fut one esquele * seulement ordinant.
Grigores li consules fut sa gens conduisant,
En premier front cbevalcbe, bin semble entreprendant ;
lib brocbe le cheval , la lanche fut bassant
335 Quant Tongris l'aperchut, si. fut esporonaut ;
Comme esfoudre viennent Tuns a l'autre bruant ,
Par dessus les escus sont si bin assenans,
Fendut les ont parmi comme che fust 1 gans .
Et si ont desmailhiet les habiers jaserans.
340 Fors sont li chevaliers et li cops sont pesans,
Et les lanches sont roides ne les sont tronchenant;
Cheyus sont ambdois sua les preis verdoyant,
« Le mot enfrt se troure dans le glossaire roman de Ducange , qui donne
pour exemple ee vers :
Wol plus Itnel * nfw ei e'A Paris.
Dans notre teste ce passage doit signifier : de ce moment, jusqu'au len-
demain , ils sont restes jusqu'a ce qu'ils se fussent tons armes....
* Notre telle porte Compangnont. Je corrige d'apres le manuscrtt BR. II
s'agil en effet des soldats du roi Humbris de Reims.
3 En mont. BR. At mam doit etre ici pour as tnons , au moins , man* a
cause de la rime.
lib sont salhis en pies si ont sachies les branc ;
Mains les dois oust, qui vont firement assemblant,
345 Chils les ont departis cascun fut remontant.
La comenchat estour qui fut lontemps durant ,
Aux cops des lanches ot abatus mains Persans;
Tuis furent Sarasins , bin se vont requerant;
Apres les lanches ont sachies les brans trenchant,
350 La fut ly caple fier.
Fiers fut l'estour dessus le sablonneux herbier;
Romains y Grent 5 fors qui mult sont a prisicr,
Car dont n'avoit en monde nul melheur guerroyer,
Fours seul li Sicambiens qu'on voit Francbois ouncbier;
355 Chis astoient la flour de trestous chevaliers.
Or escuteis, barons, por Dieu le droilurier :
Mult bin sont defendus li Campinois legier;
Ly roy Humbris, leur sire, ne fait que detreochier
Hyames, escus, habiers, et bommes et destrier;
360 Si fait Tongris, ses frere, qui fist a mervelhier;
Et Turnus ensiment ne si vout espargnier.
La veissies estour qui fist a resongnier.
Grigores, li consules, fait ces hiames frossier,
Si font tous ses barons a cens et a milhier;
365 Tongris le vavassour tenoit li bran d'achier,
Parmi les rens s'envat a guise d'adversier,
Diestre et seneistre part mult en fait tresbuchier ;
Unc senateur de Rome li vint al encontrier
Qui fut frere a Gregore, cascuns 1'oiit huchier;
370 Si l'assenat Tongris dessus l'elme vergier ',
Ne trestoute ses armes ne ly porent aidier,
Jusques en pis li mist le branc a celle promier,
Mort le trebuche a terre cuy qu'il doie annoier;
Puis entrat en I'estour oh fut li plus planier T ;
375 Cuy qu'il atende • a cop de miede • n'at mestier.
Romains ly ont fait voie , bin le seit castoier,
Par devant luy fuient ; il les cache derier
Et ochist sus la pree.
4 Escadron , corps de troupes. Etchiele dans Roquefort.
8 Peul-etre faul-il lire furent.
• £Jmedesigne le heaume, le casque. Mais je ne tais quel sens stlnburr
a vergier, employe ici comme qualificatif.
7 Le plus plein , le plus rempli , e'est-a-dire : ou il y avail le p*«s d«
monde.
» Atteint.
9 Plutotmeufc , medecin.
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LA GESTE DE LIEGE.
593
XV.
Grins et fors fut li caple et fire la mellee.
380 Qui la veist Tongris qui maoie l'espee,
Roy Turnus et Humbris et cbeaus de leur con tree,
Et Romains d'autre part qui furent gens loee.
Grigoires tint l'espfe qui astoit afilee,
Fier et frappe a tons leis ; n'y at triwe donnee.
385 Des Campanois tantoist al ochis dois caree *,
Blandalach de Sagoire a doneit teil colee ,
Le tiesle aveque la heaume at en sablon voice;
Puis at ochis Brugas et Servus d'Aquilec;
Tant en abat a terre berbe en est acouvertee *,
390 Don I je ne say les nons, par la Vierge bonoree.
Ly roy Turnus y Tint qui ot la chire yree,
Si at ferut Gregore del espee tempree,
Ly byame li trencbat et la coffe at fausee
Ses chevaux li rassant, et la char at navree;
395 Mors fust se li espee ne fust adont tornee.
Grigoires Tat veiiut, mie ne ly agree;
Si at ferut Turnus par teile destinee
Que jusques en la char at les arme copee ;
Si at copeit en dois la fort targe listree,
400 Sus l'arcbon de cheval est ly espee allee ,
La tieste ly trencbat si cbiet de randonnee.
Roys Turnus salt en pies qui ot la chire enflee ;
De luy venger se paine, Tesp^e at entesee
Et fiert le roy Gregoire, mains ne forsist riens nee;
405 Car ses chevals salhit tot parmi l'asemblee,
Et Romains assalbent Turnus sens demoree ,
Qui se Tat defendant par mult fire pensee,
Car chevaliers fut bons.
Romans assalbent fors Turnus qui fut hauls bons ,
410 Qui tout a piet tenoit encontre eaus caplison;
Lanchiet li ont espies et lancbes a fuison.
Vassament soy deffent comme chevaliers proidbons 3 ;
' Deux charretees.
' La mesure exigerait : couvcrtee.
5 Proidkomm* dans noire teste , ce qui ne rime pas.
* Son aueign*. BR.
5 EnvaUr, par erreur daut noire texte.
6 Notre texte encore par erreur porta Lumbrii.
7 L'oiie. BR. Cetle version indiquerait ici une legere corruption dans
Mains mors fust en la fin, quant Tint aus esporons
Tongris, li vavassour, qui fiert en la tencbon;
415 Dieslre et seneistre ochist Romans de teil randons,
Qu'il ont guerpit Turnus, et Tongris li barons
Le remonte a cheval qui astoit morelhons;
Osteit Tot a unc due qu'il ot mis en tronchon.
En I'estour sont ferus ly nobles compangnons;
420 La recomencbe estour qui fut asseis felons.
D'ambdois pars y ot grande occision.
Nonporquant li Romans, si comme lisans trovons ,
Si en ont del peour a cest instablison.
Ly roys Humbris de Rains y at fait targisons ,
425 Quant perchoit que Romans vont a perdition
Et qu'il sont reculeis contrevals le sablon ;
lib escrie s'ensogne * et ferit Sfnagons,
Unc senateur de Romme, par teile devision
Que jusqu'en pis le fent , bin li fait mostrison
430 Qu'il n'at amour a li qui valbe dois boton ;
Puis referit unc autre qui fut nommeis Guydon ,
Et le thier et je quart; tant fist a ces corons
Que Romans reculent, qui n'ont entention
De plus faire envaiie *.
XTII.
435 Humbris • ly roy de Reus faisoit grande eslormie ,
Les Romans reculat al espee forbie;
Ja fuissent desconfis, si com la gieste crie ,
Quant Gregoire y sorvint qui voit la baretrie;
A roy Humbris criat : < trabitre plains d'envie
440 » Cbi vous covient morir, ensi n'en ireis mie. »
Adont li donne unc cop amont dessus l'aiie 7 ,
Li byaume li trencbat qui astoit de Pavie ,
Le coiffe de babier at toute desartie 8 ,
Surcis, neis et balevre a la terre li guie.
445 Humbris senti le cop a pou qu'il n'en marvie;
Hardis rat et puissans, s'a r espee hachie •
Unc cop donne a Gregoire qui foment le trivie <°,
Car le heame copat et la coffe at trenchie,
Sa diestre orelbe gette desus la praiierie,
notre texte : a pour o et 1'oim serait la pour l'ouie, l'oreille.
8 Ce mot a probablement le sens de : desarticule , deboile , brise.
9 Hauase, leve.
10 On peut lire aussi timie, ce qui ne me presente aucun sens. Trivie ,
au contraire , a du rapport arec le latin terere, et signifierait : briser, fairo
dommage.
75
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594
APPEND1CE.
430 Li brans d'achier desquent sus la targe voiie \
Ensi comme I viel sach le tranche en dots metiie *,
Sus l'archon de cheval l'espee soy tornie,
Le col prent a destrier qui astoit de Surie,
Homme et cheval abat trestout a une fte.
455 Quant Romans l'ont veut, la cnire en out irie,
Roy Humbris assalhent X» a une fie;
La anient grant mescbief, sachies sens gaberie,
Ne l'osent aprocbier mains cascuns le costie,
Gros espies li lanchent et lancbes aguissie,
460 Perchiet ly ont le cuer, si at perdut la vie :
La morut roy Humbris quiconque pleur ou crie;
Adont fut la batalbe fire recomencbie
Par dessus l'ierbe drue.
• Grande fut la batalbe qui mult soy revenue 5 ;
465 La mort le roy Humbris Romans foment aiieu 4 ,
Et les Campinois grieve quant l'ont apercheu.
Roy Turnus et Tongris ont la nouvelle oiieu,
N'y at celuy n'en ait la pensee esperdue ;
En I'estour sonl entreis par teile convenue 5 ,
470 N'y a celui d'eauz doit 1111 Romans ne tue.
Cascun tenoit l'espee qui astoit esmolue,
Diestre et seniestre abat com cbe soient lailue ;
La mort a roy Humbris les ont si cbier vendue ,
N'y • a si fier Roman n'ait sa vigour perdue;
475 Car roy Gregoire astoit en sa tente mossue,
Navreis ftit teilement a paine soy remue.
Que vous seroit la chouse si longe portendue?
Romains ons le peoir leur pensee les mue,
Ilh fuissent desconfit et la toute vencue,
480 Quant li jours est fans et la nuit est venue;
Le retraite ont sonneit trestout parmi l'ierbue;
Cascun vint a ses treis , leur arme ont devestue ,
Ilh ont but et mangiet, car li fains les argue,
Et li Romans ont toist leur tentes detendue;
485 Si ont trosseit Gregoire sus la mule velue,
Toute nuit chevalchent fuant sens attendue,
Vers la citeit de Romme ont leur voie tenue.
Lendemain al matin est de leurs treis issue
1 Voutee.
* Moilie.
3 Devient plat forte.
4 Sic, sans doute pour aiiue, aide. Le man user i I BR porte ayvor, ce
que je ne comprends pas.
Celle gens campingnoise pour estre fervestue,
490 Quant ne truvenl Romans en plache ne en rue,
lib en ont teil irour, que cascun en tressue
Qu'ensi les ont perdus.
Ly Campingnois furent durement irascus,
Quant ont perdu Romans qui soot ensi venous;
495 lib ont ensevelit roy Humbris le membrul,
Et fait solonc leur loy que ilh soot maintenus.
Sor l'an no pere Adam V», tout sens refus,
Aveque C et XI I II, VIII jour d'avrilb nen plus,
Coroneis fut a roy Tongris et esleus;
500 Del roy Humbris n'astoit altre beur remannus.
Puis alat roy Tongris, et avecq luy Turnus,
A Luitesse tot drois que fondat Yborus,
Qui nominee est Paris, ohe fut par grant desduiis.
A due Priant at fait, qui bin astoit ses drus,
505 Qu'il ly at en convent d'estre lui sorcorus.
Tous ses hommes mandat Prians li noble drus,
Et roy Tongris les siens, les grans et les menous.
Ill ans apres le terme que je ai dit dessus,
En terre des Romans entrent par grant argus
510 AC m barons armeis et fervestus;
Vilheet citeis ardent, casteals aba tent jus;
Quant Gregores le sot li consules corsus,
Ses hommes assemblat, C m en fut conduis;
Jusqu'a Pavie vint, la s'ont apercheus
515 Les nobles compangnons que tot furent destruis
Le grant paiis atour, Romans en sont confus.
La nuit s'ont reposeit, et quant est aparus
Lendemain ly soleal, ils s'ont armeis trestuis,
Sonent cors et busines, mult demainent grant bus;
520 Ly paiis en tentist 7 , tant astoit grans ly bras,
Ly noise et ly huslins.
Rengies sont ly dois oust armeis sus les ronchins
Li dus Priant de Galle, ly noble palazins ,
Ordinal trois batalhes entre les Sincambins
5 Pour con venan J, disposition.
6 Ly dans notre texle , ce qui est une erreur, et je n'hesite ps$ a la «*
riger d'apres le manuscrit BR.
7 Relentit.
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LA GESTE DE LIEGE.
595
535 Et les francs compangnons qui astoient frairins :
Tongris at la premiere, car ly dieu ' astoit fins;
La seconde oit Prians, qui sayoit mult d'engins;
L'autre ot li roy Turnus, qui Romains n'aime rins.
Et Gregoires n'atarge, li gentes Sarasins,
530 Ensiment ordinat ses Romains de frans Una ,
Car trois batailhes fist puis yinent leurs chemins :
La premiere guiat ses frere Amadonins,
Unc nobles senateors qui fat plains de grant bins ;
L'autre guiat ses frere senateur Yborins,
535 Et la tiercbe Gregoire, mult ont Romans cuer fins.
Amadonins brocbat le cbeval sueriin ,
Gontre lay vint Tongris qui ne fut pais mesquins,
Roidement ont branlit les lances de sapins,
Et s'ont bin assenneis en escos lymoains,
540 Fendut les ont parmi ensi come parcbemins;
Sa lanche troncbonat ly Romans barbarins ,
Et Tongris s'apoiat de trestous ses maintins
De pis, de corps, de bras fut bateis ly mayrins *,
Or que fauseit en fat ly babiers double tins,
545 Et la cbar endammee par sy pessant destins,
Que le cuer ly percbat; cnis cbaiit mors sovins.
Tongris crie s'ensengne ly yalnans Angevins,
Et puis at trait I'espee qui donne grant latins.
En l'estour est entreis; ancbois qu'il die rins >
550 En a X trebucbies.
Tongris les rens depart comme cbe?alier presies,
lib assalt ces Romans, mains en at detrencbies;
lib n'encontre persone ne soit mors on plaiies.
Atant de tons costeis s'ont ly oust aprocbies,
555 Et s'ont d'ambdois pars erramment destrenchtes.
Aux cops des lanches ot X m de mebangnies,
Et autretant et plus de navreis et plaiies.
Apres les lancbes ont le brans d'achier sacb& ;
Romains et Campingnois s'ont entreauz acointies,
500 Et par felon estour durement ensaiies.
La yeissies estour qui mult fut enfbrcbi& ,
Copeir et detrencbier tlestes, bras, costeis et pies,
L'un mort par deleis l'autre mult espes arengies.
1 Car Ujtux aBioit fin$. BR. Je comprends eette version , et non celle de
noire teste.
9 JfieyrtKj doit e"tre iei poor main, expression qui sert a designer tout
chef en general.
5 Ce tots et lea cinq suivants manquent dans le mauutcrit BR.
Singnours, li regardeir si fut trop grant piteis.
565 Tongris vat par Pestour son brans fort erapoognies ,
Godras le senatour, qui n'astoit mie vi6s ,
At ilb si assenneit, que voleis en est li chiefs ;
Puis at ferut Herdant qui astoit de Putins 5 ,
Jusques en pis li est li brans d'achier glicbtes.
570 Ly dus Prians de Galle fut leis luy acostigs,
Gbis n'encontre Romans, ja taut soit babregies *,
Que luy ou le cheval ne cope en dois moities.
Turnos d'autre costeit si est bin esveilbies,
De ces Romans abat tous les plus envoisi£s 5 ,
575 De quoy ly Romains soot durement esmaies.
Ly roie Gregoire en fut a son cuer mult iries;
Si entrat en l'estour flamans et corochi^s,
Ches Cbampingnois abat , bin at sa gens veogies
Qui furent en esmay.
580 Fors fut et grant l'estour desus les plains d'Orglay,
Par deleis la citeit de Pavie la gay.
Gregores et ses bommes i font mult grant esmay,
Mains le piour en ont, ja ne le celeray,
Gar Sycambins sont fors et hardis sens deslay.
585 Dus Prians leur singnour y demainne grant glay,
Et ausi fait Turnus qui puis fondat Tornay.
Roy Tongris escrioit, ensi comme troveil Pay :
« Trabitre roy Gregoire de toy me vengeray
» Quant deyant moy toy truve, jamais ne te lairay
590 > Si t'aray mort tot froit, car bin le poior ay;
» Gerte ton grant orguilbe ancuy abateray,
» Tous tes Romains trabitre erant 6 desconfiray,
t Et la singnourie de Rome destruiray;
» Soverains en seray et pour my le tenray,
595 t Trestoute ton linage a fin je meteray,
t La mors mon frere Humbris ensy toy venderay. »
Grigores l'entendit; si at dit : « je ne say
» Coment tu le feras, mains je le saveray,
» Gar je vowe a mon dieu , et piecba le voway,
600 » Que jamais en ma vie solas je ne manray 7
» Si t'araie affineit, autre ne prenderay
» Que te seras ochis ou toy assenriray,
4 Converts de hauberts , e'est-a-dire armes.
5 Les glossaires donnent k ce mot le sens de : gai , joyeux ; il doit signi-
fier iei : court geux.
6 Ce mot s'ecrit plus souvent trrant, et signifie : prompteroent, de suite.
7 Pour mamUrai, demanderai.
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596
APPENDIGE.
> Ou bors de too pays bonis toy cacheray ;
» Ensi serat, oq je en la paine moray;
605 » Je toy promey par foy que ja ne t'eu faray.
Atant brocbe morea).
XXIII.
Grigoires at brochiet le sien cbeval isnel,
Vers Tongris le roy vat son escut en cancel ' ;
Roy Tongris at vers luy brochiet le sien griseal.
610 Cascun ot one lancbe de quoy li fiers santel *,
Sus les escus se sont assenneis bin et bel,
Fendut les ont parmi comme une vielh astel 3 ,
Les haubiers ont fasseit , par deleis la forcelle
Sont ly fiers aresteis, et li dois dammoisel
615 Se sont de plains eslas getteis bors de leur selle;
Cascun salhiten pies, se remont en poutrel,
Puis sachent les espees a la bonne alamelle;
Si ont requis Tun l'autre par forche de cembel.
Tongris le roy, qui fut encor I jovencel ,
620 Donnat a roy Gregoire de l'espee I merel
Amont son beame a or, trenchiet Tat tout un pel ;
La couffe li percbat , par dessus le musel
Est ly brans deskendus qui trestout derasal *
Vers Torelhe copee, la jouxbe 5 sans rape!
625 Ly at getteit en champ et toute la massel.
Grigores ly consules palmat de tel morsel;
Ses bommes Tont porteit en Tympaul 1 chasteal ,
Et Tongris en l'estour demaine son reveal G ,
Ilh detrencbe les chief, jambes et musteal 7 ;
630 Si fuit le roy Turnus et Prians de Rochel ,
Et tous ly Sicambins qui sont sus le preal.
Li Romans reculent par de cosle I vascel 8 ;
Pour Gregore ont esmay, sachies tot sens gabel ,
Que Tongris ot navreit comme mangons porcbel °;
635 Et Tongris tint l'espee, qui avoit li pommel
Entretalhiet a or.
* Je crois devoir rattacher ce mot au verbe canceller, annuler une ecri-
ture au moyen dune croix. 11 est possiblo que tenir Yecu en cancel, e'etait
le tenir dans quelque position semblable par rapport a la lanee.
* Probablementpourtctntei/e, etincelle.
5 Ce vers et les cinq suivanU sont encore omis dans le manuscrit BR.
4 Ce mot doit signifier : couper ras.
5 Joue.
6 Joie , rejouissance. Voir le glossaire de Gachet v° reviau.
7 J arret. Ce mot, reste dans notre wallon, a donne bien de l'embarras
a M. Paulin Paris , dans la publication d'un de ses Boman$ de* douse
XXIV.
Ly caple fut pesaus, che raconte Tistoire.
Ly roy Tongris y fieri a l'espee a poior,
Diestre et seneistre abat et met trestot en fort ";
640 Romains sont esbabis quant le vont perchivoir,
Et dist ly uns al autre : « chis est fors comme yvoir,
» A luy n'arons polour, on le puit bin veoir
> Quant at son bran d'achier, qui tranche que rasoir,
» At ensi mebangniet le consule Gregoire;
645 » Chis pays metterat del tot en noncbaloir. »
c Qui poroit, dist ly autre, paisihle voie avoir?
» Miedre seroit la fuite que chi plus remamioir. >
Atant sont reculeis li Romans et li loir ",
Et Tongris les detrenche et met en grant doloir;
650 Si fait le roy Turnus et Prians son devoir,
Les Romains demainent del tot a leur voloir,
Tout abatent a terre : blons, blans , gris , roge et soir ",
Et ly jours defalit qui les donnat espoir.
Or avient la mervelbe qu'on doit ramentivoir :
655 Tongris fut en l'estour ou Romans desespoir,
La prist a son cbeval une telle bistoir,
Qu'ilh soy met a fair et ne le puit ravoir,
Ne le puit attenir tant fut en grant chaloir.
Tongris s'envat fuiant jusques a la nuit noir;
660 Ly Romans Font bueit quant le vont perchivoir,
Forche et vigour ont fait de tot leur non poior.
Sicambins le voient, si quident bin savoir
Que Tongris soit vencus, ou que tot soy despoir,
Ou qu'ilh les ait trahit et vuilhe dechivoir;
665 Si s'enfuiont apres.
Singnours, or escuteis un mervelbeu procbes :
Tongris, outre son vuilhe, si s'en fuiot ades,
potrt lie France.
8 Cela indiquerait-il un marais , un lieu ou il y avail de la to* '
9 Que Tongris a blesse, comme boucher blesse un pore.
10 En peine? Ce mot fori, outre son sens bien connu, a aosri celoi <k
difficile , malaise.
" Loir me parait elre ici pour lew,
** Est-ce une erreur, et faut-il lire noir? Je ne le pense p», to* 8 *
teites donnanl la meme version. Sotr «lors doit etre iei pour isr, }>•»*.
roussatre.
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LA GESTE DE LIEGE.
597
Sa fuit a desconfit trestout, maistres et varies,
llh n'y at si bardis que ne fache reces '.
670 Et Romans ont pris cuer, si devinrent plus fes,
Les fuians Sicambiens ont cachiet de si pres
Qu'il en ont bin ocbis la metiie soupres;
Des mors Sicambiens sont li cbamps tous espes.
Quant la nuit fut venue son Dent cbes moiines *,
675 Romans s'onl rabies qui de joie sont ties;
A casteal u s Gregore fut devenus prefers,
Vinent li senatours qui li dient l'exces ,
Comment Jupiter at fais la miracle expres
Qui Tongris enc achat par le val Hercules,
680 Dont Sycambins sont mors, et navreis, et mult bles.
Grigore ol mult grant joie de ce que dist Jov^s ;
Gonbars et Gudelin , et le viel Ancises ,
Vers Romme sont raleis, li Romans puis apres ;
Et Sycambins fuent qui sont trestos miles.
685 Ly dus Prians a cuy asloit cnaus li coppes 4 ,
Manacbe fort Tongris, et jure Jupines
Que s'ilh le puit tenir, ilb averat teil noes
Que ses hommes ont out qui gisent abaiies s :
« Car ilh nous at trahit, sire, dist Anlhones;
690 » De nous ensi trabir fut ilb assets simples ,
» Car ilh n'y gaingnerat valbissant II alhes 6 ;
» Ses paiis en serai destruit jusques a Robes ,
» Et se jamais y entre, en toy je ly promes ,
i La tieste perderat comme vilain felones ,
695 » Car c'est raison et droit. »
Itmwt sieor de Toayrit.
Forment est mannecbies Tongris li noble roy,
Qui, oultre son voloir, est ensiment fuois;
Deleis le roy Turnus fut Prians li norois
Qui mannacbe Tongris; Turnus en fut destrois,
700 Mains ilb n'ose riens dire, par le corps saint Benois , '
Car trop dobte la forche des Sycambins malois.
A Prians pris congiet, partis est demannois.
Apres Tongris en vat trestot parmi l'ierbois ;
Al matin consult al castel gastinois,
705 Compteit ly at Turnus le fait tout maleois
4 Kelraite, du latin r«ctuu$.
* Je suppose que c'est le meme mot que moinel, dans Roquefort, petite
trosspe , espece de cor de chaise.
5 Pourou.
* Le sommet , Is tete?
5 Sans doute pour aharm, fatigues, de ahan, peine.
Et comment le manuache Prians , le dus francbois.
Teil corocbe at Tongris, quant il entent la vois,
Jasoy fust ilb ocbis errament d'une espois,
Quant Turnus li tollis, li bons roy maginois 7 ;
710 Forment le confortat et li dist sens deffois :
« Sire cusins, dist ilh, alons le sablonois,
« Lassies voire paiis ensiment trestot quois ,
» Tant que li dus Priant soil de s'iroir plus frois,
» Que nous ferons acorde, beauz sire, entre vous dois;
715 » Che vale hons en Germaine, oil sont grant li marois;
» Se nous trovons un lieu qui soil beauz et adrois
» Pour fonder une vilhe, faite soit orendrois. »
a Sire, respont Tongris, valbans estes el cortois;
» Or y alons en nom de mon dieu Jupinois. »
720 Atanl s'en vont brochant, si viennent ains I mois
En paiis de Germaine.
CmmbI T«as^re fa* foadae.
Mult cbevalcbent ly rois et endurent grant paine;
En Germaine al entree, par les sains d'Aquitaine,
Coo nomme ors Allemangne, ont truveit une plaine
725 Qui siet entre foreistes qui ont voie incertaine ;
Ne seroient passeis en plus d'une samaine.
Une riviere y fut, de mere mult prochaine,
Qui tous les jours venoit, mult de poisons amaine;
Plus eras paiis n'avoit jusques en Loberaine.
730 c Par toy, ce dist Turnus, ilb n'at jusqu'en Pulaine,
» Plus atempreis paiis, che esl cbouse certaine,
» De tout cbe que boins est et pour vivre gens bumaine;
» Or y faisons citeit qui serat doucbe et saine ,
» En commencbant une regne d'oevre bonne et saine ,
735 » Qui bon porat estaindre 8 en terre mult lontaine :
» De eel regne serat la citeit soveraine,
» Et la cleif principal et la maistre fontaine. »
Ly roy Tongris respont 9 : t par ma loy excellaine,
» Chis conselhe ne vint pais de pens£e vilaine ,
740 » Car ensi serat fait, ne serat cbouse vaine;
» Commenchiee serat anchois une quinzaine. »
Atant mandat ovriers plus d'une quarantaine ,
Tous les plus suffissans, et trestous les enpaine 10
6 Un ail ou un fruit d'alixier? En tous cas, un objel de minime valeur.
7 Sur le sens a donner a ce mot, voir le glossaire de Cachet a la suite
du Godefroid de Bouillon.
8 Eitendre. BR.
9 Mot oasis' dans notre texte.
10 Pousse, excite. Empoindre dans Roquefort.
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598
APPENDICE.
De commenchier l'ovrage et la cileit foraine,
745 Qui serat de Germaine la plus maistre convenlaine ',
Toute la principals et la plus capilaine.
Que vous diroie tant? les ovriers taut demaine
Que l'oevre ont entrepris qui ful asseis grevaine;
La circuit ont pris trestoute premeraine,
750 Et toute la grandeche qu'il arat deforaine
Voiiant Tongris le roy.
Le tour et la mesure, et forme sens buffoy
Ont ly ovriers getteit si grans en bonne foy,
Que pris ont la grandeur de la grant Romme en soy;
755 Puis fat ly fondemens getteis par grant aloy ,
Tours, casteals et palais y ot le noble aroy;
Si oit si beauz hosteis, par le corps sains Eloy,
Que cbe fut ly plus belle et de mieudre esbanoy
Des trois citeis majour , li coronique l'otroy :
760 Romme, Cartaige et Tongre celle furent, je croy ,
Les III plus principals de moude sens deffoy.
Apres la grant Nynive, Pa destruile Abeloy,
Tongre fut la plus belle, celeir ne le vous doy,
Romme ne fut ains belle ne de noble conroy.
765 Quant Tongris et Turnus, les roy dont je disoy,
Voient l'ouvrage fait, mie n'en ont annoy:
t Par ma foid, dist Tongris, ly dieu de noire loy
» Si m'ont en greit servit, quant je ma cileit voy ;
» Miedre et plus belle asseis que dire n'oseroy ;
770 » Mes convens m'ont emplis plus que ne demandoy. »
Atant l'a baptisiet par mult noble denoy *;
Tongre Tat appeleit et dist : « ensi que moy
» Arat nom ma citeit j pour quoy le celleroy ? »
Dont mandat chevaliers et barons en requoy;
775 Si at solempnisiet fleste, jouste et tornoy,
Et donat beauz joweals, palefroi et chevals
Aus barons qui Ik sont.
Roy Turnus et Tongris grant Qeste meneit ont
A la citeit nom me, et Tongre l'apellont,
780 Sor Tan que le monde fist dieu qui tot sormont
* Mot forme du latin convtntut, chef-lieu, capitalc.
* 11 faut probablement ecrire donoy, comme il parait l'etre dans le ma-
nuscritBR, et lui donnerle tens de: don, present, Dtnot ,*au contraire,
rignifie : deni , refus.
V" et C aveque et XX111 par bon 8 conpt.
Tous li noble barons qui droit la torniont,
Tongris a roy premier de Tongre coronont,
Ly queis regnat X ans; sa gens forment ramont.
785 Or est drois que les prinches la presens je raconte :
Promier y fut Turnus qui pais ne soy reponl,
Pollux li roy hongrois a cuy le pris donnont,
Le roy de Dannemarcbe Eneaus le felon,
Et ly coute de Flandre, ly conle braibechoii,
790 Le conte loherains, ly conte d'Alemonl,
Et des nobles barons autres a grant fuison.
Roy Turnus et Tongris al tornoy publiont ,
Et mandarent partout , messaige y envoiont
Que trestous hommes francs qui la venir voront,
795 Pour la citeit pupleir par dedens demorout
Pour I an tot entier, se de nul reclain n'oni,
Francs de trestos servage a toujoursmais seroot,
Hosteis et manandie en la citeit aront,
Et lerre pour gaingnier de quoy governeront,
800 Eauz et trestous leurs hews ja rins ne payeront
Ensi fut fais li cris par Germaine parfont.
Adont y vim teil puple qui droit la habitont ,
Qu'il n'avoit tot a tour, ne aval ne amont,
En terme de trois ans jusques en Aigremont,
805 Miex puplee citeit que fut Tongre en sablon.
Tant de bin les at fait Tongris, que tuis juront
Qu'il eaus, ne leur enfans, jamais ne partiront
Par bises ne par vens.
Singnours, or faites pais pour dieu omnipotens.
810 Or fut Tongre fondee oil ilh ot mult de gens :
LXX m hommes y ot ains HI ans Yoiremens,
Qui tous par dedens Tongre orent habitemens.
tJrande fut celle citeit u * teil puple habile ens.
EUe tenoit de tour de stadiies 1I C ;
815 (Test bin milhe nonniers et plus a mien ensiens.
Or fut Tongre parfaite, qui fat le fondement,
Origination et drois commencberoens
De treslout le paiis oh nous astons presens.
Collongne issit de Tongre treslout printipalnlbot,
820 Et les plus grans ousi de tot le tenemens
* Lon , dans notre texle. Je donne la preference a la renioa <
scril BR.
4 Encore pour ou.
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LA GESTE DE LIEGE.
599
De Germaine la noble , si comme oreis briefment ;
Car apres en feray si vraie recordemens
Que nuls par veriteit ne puit dire : tu mens.
Johan ', qui cesti gieste mist chi honeistemeni ,
825 Fut del bin ordineir si forment diligens :
Si avoit coroniques des Romains excellens,
Lumbardie et de Francbe et del paiis flamens,
De trestout Allemangne, Trive, Colongne et Hens,
Hongrie, Dannemarche , Bobeme et Lohcraius;
830 Amisteit de Lombars avoit ilh a son temps,
Qui par trestout paiis prendent berbergemens,
Car a eaus est compains ly or et li argens.
Par celle amisteit ot copie overtement
De mainte vraie histoire , si ne fut negligens ;
835 Car mult en translate t et rysmat ensimenl,
Tot al plus pres qu'il pot plus veritablement ,
Sens bourde ne fallache.
Barons, or entendeis : que Jesus bin vous fache,
Kt pour le miez oiir vers moy tomes vos fache ;
840 Car miez entent celuy . bin vuilb cascun le sacbe,
Qui le parlant esgarde, ausi plus soy solachc,
Que chis qui ne le voit et n'en at que la tracbe,
Et ly serable qu'il oie parleir dedens 1 sacbe.
A ma droite ma tie re le mien cuer moy resache.
845 Roy de Tongre est Tongris qui sa gens mult ensache,
Et les Romains toudis mult forlement manache ;
Sovens jure sa loy a cuy le sien cuer lacbe ,
S'ilh a?oit tant de puple com le roy de Grenache,
Romme iroit assegier qui siet en plaine plache,
850 Si pres l'aprocheroit qu'il y lairoit le trache.
Ensi disoit Tongris le bon roy Firebrache *,
Et roy Turnus astoit en Galle, oil ilh porcache
Le pais a dus Prians, priant qu'il se delache
De si haiir Tongris et plus ne le decache ;
855 Aidier ly puit encore s'a Romains soy ralache.
Ly dus Prians respont, li vielhar plains de glacbe,
1 Ici apparait le nom de t'auteur dissimule aa commencement.
' Firtbrache doit etre employe ici comme epithete.
1 Poor m est.
* L'aceusatioD.
5 lujarie. Laidengier dans Roquefort.
• Et leur recommande de venir chacun a ton secours avec vingt mi He
homines.
S'est 3 refroidies et dures, et felons et umbrachc ,
Que de cbe ne donroit une vielbe fenache
Que Tongris le train tre, s'il le tient, ne mefTache
860 Et ne le met a mort ou d'espee ou de mache.
Dolens fut roy Turnus quant entent le raquachc »;
Ne dist pais cbe qu'il pense, que le bin nc deflaehe.
Or escuteis, singnours, pour les sains d'Audrenache ,
Que Dieu garde vos arme que diable n'y forfacue;
865 S'oreis chancbon bien fait, qui les boos cuers assache
Alle veriteit entendre, com al voleir Tagache;
Car nature I'ensengne.
xxxu.
CIs rovlat Qrlarolr* ea Francko,
Al temps dont je parollc, en may droit 1 dimengne,
Entrat ly roy Gregores en la terre d'Ardengne,
870 Et de la vinl en Galles oil mult de gens mehaingne
Porlant que Priant fut si viez se ne ladengne 5 ,
Car bin cuide jamais nulles armes n'enprengne,
Si destruit son paiis et forment le desdengne.
Dus Prians ot une fil qui entend la bargangne.
875 Alixandre ot (a) nom : chis prist gens de s'ensengne ,
Son paiis defendit, et, ains qu'il soy refrangne,
At descouns Romans qui s'enfuent la plengne.
Je le vos dis briefment n'ay cure que le tengne
A ma droite matiere covient que je revcngne.
880 Quant desconfis furent celle gens de Romengne ,
A Romme sont fuis comment que ilh avengne.
Tous ses freres mandat Gregore, et les asseugne
Cascun d'eaus sorcorir a XX m hommcs vengne 6 .
Or garde bin Gre^re qui Piians ne sovengne,
885 Car ilh soy deffendrat comment que li plais prengne.
Tous ly freres Gregore vinrent jusqu'a Selcngne
Cascun a XII" hommes, n'estut 7 c'on me l'aprengne,
Sor Pan V« et C et XXVII effengne *
Les at livreit Gregore en la terre Aquilengne 9 ,
890 Pour logier jusqu'atant que ilh vos *° eaus sorveugue.
X» Romains at Gregoire en la porprenghe
Conduit et ammeneit, car refuseir ne dengne
7 II ne convient pas, il ne faut pas qu'on me I'apprenne.
s Quid?
9 Sic dans let deux textes. Est-ce par erreur pour Aquilengnt, Aqui-
taine?
to p our co< sans doute, c'eit-a-dire: pour loger jusqua ce qu'il veuille
les faire $vrvtnir.
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600
APPENDICE.
Que ilb ne toque feux lain que durerat league ! ,
Se treslot devoil arilre le forest de Marleugne
895 Et d'Ardenue la gente.
XXXIII.
Item.
Singnours, or escuteis pour la vierge excel lente.
A X m Romains s'en vint toute la senle
Roy Gregoires ly consules; tant chevalche la sente,
Qu'a Salengne est venus oil trovat dessus 1'enle *
900 V roys qui sont ses freres, dont cascun ly presenle
X milh hommes armeis mult tres joliemente.
Or at LX™ de bonne gens fervente ;
En Galles est enlreis erant sens nul atente ;
Or avient que Turnus, qui savoit bin Tentente,
905 Avoit mandeit Tongris sans nul atargemente
Venist a XX m hommes en Galle propremente ,
La terre sorcorir, el son corps represente 3
A riche dus Prians qui fut de sa parente.
Parmi eel mandement Tongris, que je ne menle,
910 A XX m hommes vint vers Galle, que tormente
Mult fort ly roy Gregoires (qui) tot la terre esprente.
Ly dus Prians s'armat a cuy la terre apente,
Et son fils Alixandre qui astoit de jovente.
Ly cuens flammens y fut, et de sa gente exeule
915 XL 08 et plus, car issu fut del enle 4
Ly noble dus Prians, ja uns ne nVen demenle.
XL m avoit Prians ausi de rente 5
De valhans Sycambins dont un valh d'autres XXX.
Sus les champs sont venus en la terre dolente
920 Bretangne la pelite , qui de Galle depente.
Romains sont acointies, car cascun s'appresente
Aus nobles Sincambins quMl nomment gens pulente ;
Al bin faire cascun d'eauz tous soy rata lente,
Et mostreir fire chire al combalre s'assente ,
925 Si comme noble vassale.
xxxiv.
Batallh*.
Ly oust d'ambedois pars de Sycambe et d'Ytale,
Sont rengies sus les champs tot parmi contrevale.
• 11 ne veut pas les empecher de faire du feu aussi longtemps qu'il y
aura du bois.
* Appuyes sur le bois de la lance. Voy. le glossaire de Gachet , v° Ante.
5 Je corrige d'apres le manuscrit BR. Notre texte porte settlement pre-
nente, ce qui donne au vers one syllabe trop peu.
4 De la famille : ente, greffe , dit Roquefort. On peut , je crois , ajouter :
ce qui est ente, une branche, un rameau.
5 Gente. BR. Je comprends cette version , non 1'autre.
La possissies veoir tant piogoons 6 de cendal,
Tant elme a or brunit, tant escul a esmale 7 ,
930 Et lant nobles barons armeis sus le cbeval ,
Qui ne demandeut ombre de palais ne de sale.
Que vos eslongeroie la chouse communale?
Sens batalhe ordineir mains tot en batistale *,
Rengies procurement, comme gens principale,
935 Sont sus corus Tun l'aulre par mervelbeux assale;
Mains aux lanches brisies fut ly caple pongnale,
L'estour mult perilhoux, la batalhe mortale.
X m en ont perdu t Romans imperial ,
Et Sycambius a tant, la chouse est paringal;
940 Les espees ont traites qui ont dure metal ,
Si commenchent estour qui mult fut criminal.
Ly dus Prians y fieri de grant portevinale 9 ,
lib n'encontre Romans ne ly fache conlrale;
Alixandre ses fis, qui fut princbe loyal,
945 Ly roy Turnus y fiert tout as plus cathedrale ;
Si fait ly cuens flammens, qui fut de sane royal ,
Cascun y fait grant caple, e'est chose veritable.
D'autre part ly Romans maintiennent bin Testate ";
Ly roy Gregore y fiert a l'espee de Bale,
950 Roy Gorgile ses freres qui fut orientale,
Et tuis ly autres freres desquils especial
Y ot V senatours de son droit orinale,
De tous costeis at fait li estour mull de ma! ,
Contra ire el grant dammage.
955 Forte fut la batalhe en preit desus Herbage.
Bin y firent Romans qui sont de bon corage ;
Si font ly Sicambins, car bin en ont l'usaige;
Bin si pruve Gregoire, o luy son grant linage.
Si fait li dus Prians et son noble parage;
960 Viels fut et rafrongnus, mains en tresot I'ostage
N'avoit homme qui luy osast prendre le gage.
lib a ferut Gambar, qui fut del singnorage
De Romme senateur; fendut li at la targe,
Et le babier fauseit et 1'auqueton 11 savage;
6 Pennons.
7 £mail.
8 Se tenant sur la defensive? Battalienx, dans Du Cangc,
fortifications, et peut s'appliquer a tout ce qui concerne la * '
9 De branch potentate. BR. II faut probablement lire :
epees du Poitou etaient en grand renom.
*» La place.
11 Hoqueton , casaque.
o*
.'to
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LA GESTE DE LIEGE.
601
965 Arme dont soit armeis ne ly font avaotage t
Jusques en pis le fent, sens prendre respitage,
Sus Tierbe 1'abat mort, puis ferit Andronage,
Provost de Boliart qui siet deleis Cartage,
Le chief aveque le heame jettat sus le praaige.
970 Lutesse a escriet mult halt en son lengage,
Puis se fiert en Testour, sicom I prinche sage.
Alixandre ses fls, qui fut de jovene eage,
Fiert et frappe en 1'estour, caple, fait mult marage «;
lib detrenche ces tiestes , pies et bras , et visage.
97 5 Ly roy Turnus y fut, qui point ne s'asuage f ;
Tant en aba t a terre , que ce semble I orage.
Si fait ly cuens flamens, chis faisoit bon ovrage;
Homme et cbeval porfent, enfrecbi qu'en la nage 5 .
D'autre costeis Romans , qui sont de grant barnage,
980 Ochient Sicambins et Flammens a outraige,
Mult les font compareir leur doloreux voiage ;
Auz brans forbis d'achier les envoient message ;
Coverte en ont la terre tout solonc le rivage.
Mult convoite Gregores de remettre en canage *
985 Ly noble due Priant et tot son heritage;
Mains je croy temprement y averat honlage :
Pourquoy le celeroie.
Grande fut la batalhe sur Herbe qui verdoie.
Ly dus Prians de Galle sa grant forche desploie;
990 Si font tuis ses barons, n'y at nuls qui se ploie.
Ly Romains d'autre part huent a mult grant joie ,
Car le milhour quident avoir, sicom je croie.
Gorgile de Bugie son espee branloie ,
Et fiert le due Priant qui la fut toute voie ,
995 Ly at trenchiet le heame et la brongne defifroie ,
Le neis el la balevre a terre li envoie ,
Si que tot son harneis de sane foment rogoie.
Mult fut Prians puissans , si at preus cuer en soie ,
Et at ferut Gorgile que le brant ly embroie 5
* Marance dans Roquefort. Affliction, peine.
* Qui point ne se calme , ne s'apaise.
* Nag% pour noioe, fesse. Cela veut dire, je crois, qu'il pourfend jus-
que-la hommc et cbeval.
* Daos leschaines?
5 Cest probablement le meme mot qu'embronchier, auquel le glossaire
roman de Ducange assigne le sens de : embarrasser, entortiller et aussi
c.icbcr, divers sens qui peuvent conrenir ici , en faisant du verbe actif un
\erbe pronominal
6 Pour r ovale , descend.
1000 Parmi heame et haubier, et la tieste costoie:
Se li brans ne tornast, fendus fust jusqu'en foye;
Les chevals li rasalt, et li brans soie ravoie 6
Sus le col de cheval , mort le giet en Tierboie.
Gorgiles sat en ptes, al deffendre s'apoie;
1005 Sorcorus Tont ses fils — pour quoy en men I i roy —
Et se Font remonteit a cuyconque ilh anoie ;
Grigores fut dolens, et a son dieu deproie
Que ilh la le sorcour, ou de tot le renoie :
« Romans ont ly pieur, dist-ilh , de celle proie
1010 * Se je a cesti fois desconfis je astoie ,
» Je vou et si promes que mais ne m'armeroie 7 ,
» Ne consules de Romme plus avant ne seroie. »
Ensi disoit Gregores; maius ychi vous convoie
Que ilh venrat bin tempre a che que ilh supploie 8 .
1015 En Testour est entreis, fiert et frappe et capploie,
Et gette en la campangne les mors que ilh forvoie 9
A forche de ses bras.
Fire fut la batalhe , l'estour et ly debas.
Ly Romains ont perdus asseis de leur prelas «°,
1020 Des plus grant senateurs qui gisent mort tot plas,
Et autres grant fuison; mains Sy cam bins sont las,
Unc pou sont reculeis que ne tient pais a gas
Ly dus Prians leur sires, ains dist : « Isnel le pas "
» Defendeis vous, barons, Romans seront ja mas. »
1025 Mains che ne ly valoit — soy6s certains — II as,
Car ades reculent en defendant le pas ,
Si comme bons guerroyers se tinent en un (as,
Reculant vers le bois bellement a compas ,
En aba t tant Romans qui n'en ont pais solas.
1030 Que vous seroit ichy eslongtes ly estas?
Ja fuissenl Sycambins desconfis et tot quas ,
Quant es Romains se fiert par derier a eslas
Ly roy Tongris de Tongre, armeis de tous harnas.
Ly roy Tongris avoit XX«» hommes a repas ",
7 Que je ne m'armerai?
8 Qu'il supplie.
9 £garer, etc., par consequent : meltre hors de sa voie , eloigner de soi.
10 D'apres Ducange, pralalio ayant le sens de : domination, le mot prelat
peut signifier : chef.
11 Pour isnelement , promptement. Mais le trouvere ayant besoin dune
rime en as, a prefere traduire litteralement 1* expression latine : ignito
pa$$u. Voy. Roquefort , ▼• I$nel.
'* C'cst-a-dire, repus; ce serait une traduction du latin : curati el
pransi.
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602
APPEND1CE.
1035 Qui sunt fres et noveal pour eudureir travaz;
En Roinaus s'ont ferus qui en dient : helas!
Tongris atant s'escrie, et disl : « N'y dureras
» Grigores, faux trahitre, ancuy le comparas
» Se je toy puy tenir mais ne m'escaperas. »
1040 Atant entre en Pes tour; si ferit roy Gondras,
Unc riche senateur qui fut neis de Duras;
Parmi li at fendut ly roy son talevas,
Et le habiers perchiet come che soil I vies sas ;
Mort le trebuche a terre disant : t Icbi giras
1045 » Et ton trahitre maitre I po attenderas;
» Se je puy esploitier, temprement l'averas
» A mult grande compangne. >
Forte fut la batalbe sus les preis de Bretaugue.
Ly dus Prians y fiert a la barbe griffangne \
1050 Mains Romans a ocbis gisant dessus la plangne
Or raconle l'istoir, ou veriteil se bangne ',
Qu'ilh as to it desconfis el pris par grant engangne,
Quant Tongris et sa gens dedens I'estour s'enfangne.
Si at ochis Gondras le senateur de Nangue,
1055 Puis vat parmi Testour a Tespee barbangne 3 ,
Romans et Ytaliens trestot met en coquangne *;
A sa vois bault escrie trestot parmi la cangne s :
c Oil es aleis, Gregores roy de Bil en Espangne,
« lib toy covient morir, ancbois que plus remangne
1060 » Le noveal roy Tongris de Tongre en Allemagne. »
Gregores Pen tend it dedens sa gens romaDgne,
Qui plus bayoit Tongris com triacle I'arengne 6 ;
llh at pris une lancbe u pendoit une ensengne,
A Tongris est corns qui forment le desdangne.
1065 Quant Tongris le percboit si ne fut pais estrangne,
Le cheval a brocbiet qui astoit de Campangne,
Si at bassiet la lancbe qui fut fait en Bebangne,
Par-dessus les escus, qui sont de noble ovrangne,
S'ont ly rois asseueis, fendut les ont comme langne;
1070 Les lancbes ont brisies, n'y at cbilb qui s'en plangne;
Les espees ont traites d'ovraige de Saxangne.
La commencbat bcstour, Tun 1'autre mult bangne 7 ,
1 Ala barbe menacante. Voy. Dicz , v« grif, II , 330.
* Se delecle. Le mot se trouvc dans le glossaire roman'de Ducange.
3 Intrepide. La qualite de celui qui tient lepee transportee sur Tepee
mcme. Voir le glossaire de Gachet , v*> Barbe.
* Le mot se trourc dans Roquefort avec le sens de : querelle , dispute.
II doit avoir ici celui de : deroute, confusion.
Cascun est convoiteux son compangnon mehaogue,
L'un at l'autre plaiiel.
XXXIX.
1075 Ly dois roys paiens sont firement acointies :
C/est Gregore et Tongris qui ne sont mie a piet,
Gar ilh ont boins diestriers sus quy cascun d'eau2 siel.
Gascun d'eauz at Tescut firement enbrachiel,
Az brans d'acliier se sont laidement damagiet;
1080 N'y at celuy qu'il n'ait mains grans cops emploiies.
Roy Gregores le consules si n'est mie aquoisiet *,
lib at ferut Tongris qu'il ne Tat espargneit ,
Le beame ly trencbat, la coffe at desquiriet,
Char et cbeveaus ly rasse, puis le fut araisniet :
1085 « Tongris, cbe dist Gregore, ja seras detrenchiet,
» De mort tu ne puis estre nullement respitiet,
» Trop ay esteit par toy vilhement mehangniet :
» Tu m*as en dois estours dois orelbes talhiet,
•» Ly neis et les balevres, dont je suy emperiet;
1090 » De la venganche prendre suy bin encoragiet. *
Respont ly roy Tongris : « Che n'est pais droit mercbiet
» Quant tu pars et si prens, tu es trop renoiet •;
n Eosi ne serat pais , comme tu as chi traitiet
» Ta sentencbe seray a mon brant retraitiet,
1095 » Je copay tes orelbes ne le seray noiet,
» Or averay ton chief sens plus estre alargiet »
Dont at ly roy Tongris son espee haucbiet,
Sus Tespalle Gregore si droitement 1'assicl ,
Que le tieste et le heame at sus Tierbe lancniet.
1 100 Gregores cbaiit mors, dont fu grans ly mescief;
Romans sont desconfis quant cbe ont regartiet.
Tongris at pris le chief, se Tat erant ficbiet
Par-dessus une lanche, Priant Tat envoyel
Le noble due vielhair.
XL.
lOMiM MBt leMOBlf.
1 105 Or est Gregore mors ly roy de bonne part,
Romans y ont damage et doloreux essart.
Tongris et tuis ses hommes, qui sont fresque et galbarl,
8 Parmi le champ de bataille?
6 11 haissait Tongris , autant que l'araignee hait la theriaqu*
? Hait.
* Apaiser. Aehoiter dans Roquefort.
9 Ce n'est pas un marche loyal , quand tu partages et que tu prwi*.
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LA GESTE DE LIEGE.
603
Les abatent a terre erant de unite part.
Roy Tongris at ocbis le senateur Gomhart,
iilO Flegons et Ydoneauz Cassadroch et Guichart,
Qui enminoient prins dus Priant le lyart ' ;
Tongris Tat remonteit, puis dist — ne fut cohart — :
« Sire, vechi le chief de Gregore le musart,
» Vos morteil annemis plus hardis que lupart;
iiio » Je suis Tongris de Rens qui par dessus le gait *
» Ay rescosse vo corps et vous gens lez trois quart,
t Et si vous ay vengiet des Romans achopart 5 .
» Se je par mon cheval je suy vous gens espart
• Par-devant Lombardie, ce fut sens mavais art,
1120 » Ains u'y pensay folie ne oevre de renart;
» Je suis pres del jureir ilh n'est mie trop tart. »
Quant dus Prians Ten lent lous de joie tressart :
« Sire Tongris, dist-ilb , Jupitre se vous garlj
» D'or en avant sereis de mon regne estandart,
1125 » Car bein I'aveis conquis publement en apart *. »
Atant ly unc 5 del autre eminent soy depart.
Romans soul assalhis par mervelheux esgart 6 :
Roy Tongris at ocbis Galadu le cornart ,
Le senateur Ebrocb qui fut lis Mertenart.
1130 Romains prendent le fuit trestout parmi le sail 7
A mult grant desboneur.
Ly RoinaDS s'enfuent, n'y at chil qui demeure;
En Bretangne onl lassiet mult grandement de leur;
Gregores y fut mors et xxxvm senateurs.
1155 Al retourneir a Romme fut grande la doleur;
Des senateurs out fait noveals de gens d'honeur,
Del sane le roy Gregore y furent ly pluseur.
Puis fut eslus consules de Romme le maicur,
En lieu de roy Gregore, Ponpeyus, qui^ hauteur
1140 Et nobleche ot en li ; si avoil sa sereure
A moulhir esposee Gorgile sens ereur,
Ly boos roy de Bugie dont je ay dit deseure ,
Qui fat pere Vergiles, que vout mellre en tristeur
Par-dedens la corbilhe la filhe al empereure;
1 Gris, grison, chenu.
* Malgre la garde , malgre les ennemis.
5 Pour achopes, arreles?
4 Pour en appert , ouvertement.
5 Mot omis dans noire lexte.
6 Conseil, avis.
7 A trarers champs. De ce mot tart, reste en wallon,provient : essarter.
8 Je corrige d'apres le manuscrit BR. Notre tcite porte le.
1145 Chis fut unc grans poiete et plaius de grans saveure.
Cel an propre fut-ilh neis a Romme en vigeure,
Mult fist de bins a Romme par scienche et labeur ;
Mains de che ne diray, mes cuers a chu s'abeure *
Que del bon dus Priant vous die la baudure ,0 .
1150 A Lutesse est venus, oh de grant joie pleure
La bonteit de Gregoires qui li ot fait foleure,
Et jure tous ses dicux Gregore astoit la fleure
De tous les chevaliers qui onque orent clameur. .
La tieste ont erant pris qui ot laide coleure;
1155 N'y at celui si fire ne pleure de tenreure,
Et dist li due Priant : « Par le dieu que j'aeure,
* Dolens suy que Gregore est en teile langueur
» S'ilb ne moy gueroiiasse. »
Singnours , pour Dieu oiies , bonne gens baut et basso.
1160 A Lutesse, la vilbe oh dus Prians s'amasse,
Astoit ly roy Gregores tous mors en une nasse n ;
Ly corps ont entereit affin qu'il nc flairasse,
Et puis ont le chief pris et mis en une casse ,s
D'or et de fin argent; trestot gisant en masse
1165 De pires pretieuses y avoit a grant tasse.
Bin fut enbalsemee affin <Ju'on ne I'odasse " ;
A Romme Pont tramis anchois que ly an passe ;
Fiesle en ont fait Romans, disant : « Or qui quidasse
» Due Priant si preusdhomme qu'il ensiment ovrasse 1
1170 » Loiialment at ovreil, quiconque racontasse
» Le contrale de kiy, je croy c'on Tacordasse »
Ponpeyus ly consules ja sa gens assemblasse
Pour destruire Priant ains que ly an passasse,
Ne fust la grant bonteit de Priant qui le quasse **
1175 Et at perchiet le cuer si que sa voie en lasse.
Ensi par grant douchour dus Prians soy rapasse
Del yreur aus Romains qui mult le travelbasse,
Sa terre et son paiis forment li damagasse,
Et la guerre mortel mult longement durasse;
1180 Ensiment demorat unc grant terme d'espasse.
Portant se me tenray, si en feray trespasse ;
9 Se souhaite. Voir le glossaire de Gacbet, v° Aeurer.
10 La rejouissance , la joie. La valeur. BR.
*< Un petit bateau. Sur ce mode d'ensevelissemcnt , voir lc Gervaise dc
Liebreclit y p. 149.
•* Une cliasse , un coffre.
** Oder est reste en wallon , mais avec la signification intransitive, et il
signifie : sentir mauvais , comme phis haut flairer.
14 Le brisc , Vemeut.
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604
APPENDICE.
Del roy Tongris diray qui tie rius ne mespasse \
Par amont est partis de Lutesse la crasse ,
A Rt'ns est-ilh veuus; ancbois qu'ilh arestasse
1185 Si homraes Pout festiiet, et que la sorjornasse
Ly out mull suppliiet et si les governasse
Com leur singnour plus hault.
Karons , li roy Tongris ot de ses gens assaul :
« Sire, fonl-iih a luy, se nostre Dieu vous saut,
1190 ■> Demoreis chiendrois *, celle terre tant vail;
» S'aveis pais a Priant qui conlre vous ful cbaut. »
Et resent roy Tongris : « se vous Dieu me consaut ,
» Je vous governeray, si que I'areis por raut 5 ,
» Aveque mon autre regne qui est de grant estat. »
11 95 lib les tient bin covcnt c'ouques ne les tit faut,
Des dois regnes fut roys , ly prinche noble et baut ,
Taut com viskat a sicle; mains quant li mors 1'assaut ,
Si le covienl tineir et salhir le grant saut.
Partant le dis, singnours, que Tongris li vassalt
1200 Morut a Tongre, droit en palais principalt,
Sour Tan V m et C et XXX11I sens deffaut.
Ilh ot mult noble tombe de jaspe et de cristaut
Que la fist ordineir de Rens maistre Thibalt,
Qui del regne de Tongre fut soverains senescaut.
1-205 Si ful la tombe faile en temple calhedraut,
U Jupiter astoit seanl sus un chevall,
D'autre costeit Venus en robe de cendal,
A unc roge capel sicomme un cardinalt,
line manteal ot vestut lachiel a unc esmaul ;
1210 Ly paiiens qui le voit d'humiliteit tressaut.
Tongris avoit dois fils, Humbris et Ernebaut,
Qui sont valhans et preux.
XLIV.
D« mcou rola *• Toagr*.
Apres la mort Tongris , ly promier roy tongreux ,
Fut coroneis Humbris qui astoit siencheux
1215 L'autre fut roy de Rens Ernebaut li corteux;
Luy et ses heurs apres tient de Rens les lerreux
Jusqu'al temps sain Remy l'archevesque endoireux *,
1 Ola veut dire, je crois, qu'il ne mefait en rien.
* En cet endroit-ci.
* Ce doit etre la traduction du latin : ratum habere, ratifier, con6rmer.
* Ccla doit signifier : riehe , possesseur dun grand douaire. Je rattache
ainsi ce qualificattf au verbe endoairer , assignor un douaire.
Qui convertit le regne a la toy glorieux ;
Et Tongre tient Humbris ly bons roy savereux 3 ,
1220 Et ses heures apres frans et victorieux ,
Jusqu'al temps sain Materne Fevesque fructueux,
Qui Colongne et puis Tongre convertit ambdeux,
Si com je vous diray si m'aiit sains Beneux.
Oiit aveis comment li regne deliteux
1225 Aus enfans roy Tongris fut, qui estoient ambdeux;
Si que de Rains laray le pails curieux ,
Et vous diray de Tongre le regne plantivenx.
Or comencbe cancbon des fais delitieux,
Qui, en cesti paiis plaisant et amoreux,
1230 Sont des puis avenus que Tongres li pileux
Morut, jusqu*a temps d'ors ou at des rault griDgnetn,
Des beans, des lais aussi et des aventureux.
Del entendre doit estre cascun mult fameleux,
Et al bin retenir estre de cuer songneux;
1235 Et qui riens en oblie ne soit mie honteux
De moy redemandeir, negligens ne ouseux •;
Car apprendre le bin ne fut onque nuseux 7 .
Qui bin le retenrat s'en puit estre joiieux ,
Car nuls de bin aprendre ne serat soffraiteux :
1240 Si voit-ons pau de gens qui soient somelheux
A che qui les delit.
Barons, or escuteis pour Dieu qui ne meniit.
Humbris fat roy de Tongre, li chevalier eslit,
Lyqueis regnat vm ans en faisant grans profit
1245 A son regne de Tongre, et torment l'engrandit :
1 III vilhes fondat qui mult ly abelit.
L'une appelat Hambrons qui fut i lieu petit,
Che ful solonc son non et son bon apetit ;
L'autre nommat ilh Ans, sachies sens conlredit;
1250 La terche est Hollengnoule emi unc grant porprit :
Et Tautre ot nomm Hollongne. Celle derainc assit
Dessus une riviere qui la endroit corit;
Si est Geire nomme, dedens gens instablit.
A temps de celuy roy li dus Prians morit ;
1255 Yborus le sien fil erant ons enlisit,
Qui regnat XL ans , chis Francbe detrahit '.
5 Pour savant , puisqu'il est, cinq vers plus haul, qualiBe wewArm-
6 Ose,hardi.
f Nuisible.
8 Diminua , traduction du latin detraxit.
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LA GESTE DE LIEGE.
605
Simples fut et cohars, trestout le bien perdit
Que dus Prians ses peres a son temps conquerit.
A temps cely roy meismes Humbris, qui fut gentis,
1260 Fut fait consule a Romme unc prinche beneit :
Che fut Julius Cesar qui Romans bin servit,
Sycambins en sewage apres che remettit.
Ses compains Pompeyus li fist I teil despit,
Que les portes de Romme encontre luy cloiit;
1265 Dont une si grant guerre entre eauz dois se movit.
Pompeyus oultre mer come mateis s'enfuit ,
Si que Julius tous seuls consules remannit,
Si que toute la terre a luy tot attrahil,
Et luy empereur estre soy pretendit,
1270 Et si regnat son temps ensi tot sens desdit.
Empereur morit, si comme je seray dit
Chi apres sens faintise.
W SmUmu Ceur.
Julius fut empereur qui, par sa grant franchise ,
Mainte terre et paiis at aux Romains submise;
1275 Par luy fut toute Galle en servaige remise,
Et trestoute Germaine en subjection mise.
Les histoires de Romme devisent bin la guise
De tot che que Julius conquist, mains ma porquise ',
Ne ma droite matere que je ay chi comprise,
1280 Riens n'afliert a eel feit de Romme et de I'aquise * ;
Si me tairay s atant , par les sains de Venise;
A ma droite matere, qui est noble et rassiese,
Me yoray retorneir, je Pay ja toute quise.
Ly second'roy de Tongre at mult grant terre aquise
1285 AI due des Ardennois; si nommat la porprise :
La conteit de Hesbain ; por che Tat entreprise
Que Tongre giest enmy al costeit devers bise.
Apres VIII ans morut le roy que je tant prise,
Puis fut fais roys Tongris ses fis de bonne aprise ,
1290 Qui toute vilonie et maiseteit desprise.
Chis regnat vassalment de volonteit es prise,
Loyal teit et honour toudis son cuer artise *.
Par deleis Ans fondat molins , et sens enquise *
Pour 1 molin qui fut droit la , si at reprise
1 Recherche. Roquefort donne le verbc porquerir et porquier.
J De Rome et de ses conquetes ou acquiiilions ?
5 Je eorrige ici d' apres le manuscrit BR. Notre teite porte tenray ,
tiendrai.
4 Son coeur brule de loyaute et d'honneur.
5 Enquete, information.
« Antise. BR.
1295 La vilhette le nom de Molin par atise 6 .
XI ans regnat tot plains, l'istore le devise;
Sa terre I seul denir ne fut par lui deuisse 7 ;
Mult fut bons chevalier et de bardie emprise,
Volenteit ot friante.
m* IIII roll *a Tm*t«.
1300 Chis secont roy Tongris oit maniere plaisante
Armes et amors amoit et dammes avenante.
Le due de Galle aidat en sa guerre flamante
Gontre Julius Cesar, qui le fut ochiante
Sor Tan V m et C et LI I avante 8 .
1305 Apres lui fut fait roy li quars, par sainte Amante,
Sedros, li fis Tongris de sa femme gatante ,
Filhe le due d'Ardenne; Sedros, barbe ferante 9 ,
A celuy esqueit la ducheit suffisante
D'Ardenne tot entour, si comme est marchissante,
1310 De Rains jusques a Trive en aval desquendante.
Or at Tongre grant regne , et terre sormontanle
Les autres regnes tous, ausqueis astoit joindante.
XX et V ans regnat roys Sedros dont je chante;
II fut plains de tous bins, proieche ot apparente,
1315 Sa gens amat forment, forment fut acroisante
Sa noble singnorie , et a luy atraiante
Trestoute gens estrangne , qui sa terre habitante
Vont de trestous costeis et mult augmentante.
Chis fondat Taxandrinne , c'on vat or appellante
1320 Viseit, seant sour Mouze; puis fust edifiante
Tilve et apres Mery desus Ourte seante.
Serang par dessus Mouse fondat , la fut manante
Sa damme la roiine , a gent cuer acreante ;
De la astoit sovens a Tongre repairante,
1325 Et ausi autre part oh aloit delitante
Son cuer et son repos.
XLV1II.
Mult fut proidomme Sedros , che tesmongne la glose ,
Solonc la loy qu'il tint qui tant astoit rebrouse l0 .
Mult amat la roiine qui nominee astoit Rouse;
1 Endettee, engagee? Je rattache ce mot au parfait: dui> j'ai du.
8 Avanl, d'apres Roquefort, peut signifier : sans prejudice. Ici il doit
avoir le sens de : et plus.
9 Sedros a la barbe piquante.
10 Ce doit etre la traduction du mot reburtut ou reburrus de la basse
latinite , signifiant : herisse, crispe, horrible a voir. On peut consul ter a ce
sujet Ducange, v* reburrui.
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606
APPEND1CE.
1330 Gar mult fut proide femme, li coronique I* expose.
En bon estat regnat chis roys dont je vous bouse * ;
A sa gens defendit que Tun l'autre ne vouse *.
Al temps de roy Sedros, qui de bonteit arouse *,
Fist ses grandes mervelhes — tot che est vraie chouse —
1335 Virgiles le poete, ensi c'on le propose
Pars dedens ses histoires , ou ilh at mainte oppouse 4 .
Dedens Romme habitat, mult fut plains de rachouse 5 ;
Ly plus grans fut de sane qui fust en monde enclouse,
Et de sienche aussi rins ne li astoit clouse.
1340 A ycel temps, singnours, je le vous interpouse
V» C et LIII1 , tout sens nouse °,
Astoit la vraie daute que je chi vous compouse
Que ly empereour Romans, qui fut tant ouse 7 ,
Che fut Julius Cesar de rins ne soy aquoise 8 ,
1343 O hommes assemblat et si bin soy dispouse,
Qu'ilh at assegiet Tongre qui astoit en requouse 9 .
Ains n'ot payet tregut che devise la prouse ,
Car novel astoit faite ; or fut de si grant louse I0 ,
Que mie ne doit estre, che dist Julius, exclouse
1330 De la grant singnourie de Romme a la perclouse ".
Quant ly roy Sedros voit sa terre ensi dexclouse ",
Sachies que de vilteit is tous ly cuers li bolouse u ;
Sa gens at fait armeir et de rins ne s'aquouse 15 ,
Tantost va four issir.
XLIX.
Jalivs Cesar yrlmt 4«v*Mt Toafrci.
1333 Julius Pempereour ne se vout alentir :
A roy Sedros mandat de luy vuilhe tenir
Si comme de roy de Romme sa terre, et obeiir
Aus Romans com soveraius parmi tregut offrir;
S'ilh li plaist ensi faire de la vorat partir,
1360 Et se che ne vuit faire si le vengne assalhir.
Quant Sedros Tentendit , se vat avant venir
* Louse. BR. Je ne comprends pas bouse. Dontje vous loute peut signi-
fier : dont je vous fais I'eloge.
* Pour voiae, aille.
3 Qui se distingue par sa bonte. Arrester dans Roquefort.
4 Pour oppresse , embarras , dispute. Compouse dans le manuscrit BR.
5 Pour rancceur, rancune ?
6 Pour noise.
7 Ose, hardi.
s Tranquillise , apaise. Acltoiser dans Roquefort.
9 Pour en requoi, en repos , tranquille.
10 Pour los , reputation , renonimee.
11 A la fin. Parclose dans Roquefort.
rt Ouverte , ravagee.
Bien rengies et sereis, pour estour maintenir.
L'emperere le voit ne se vout abstenir,
Tantoist les corit sus et les vat envaiir;
1363 La comenchat estour qui mult fist a cremir.
Aus cops des lances font mainte targe crossir ";
Apres les lanches vont les brans d'achier saisir.
La veissi£s ces heames et habiers desaitir l7 ,
Tiestes , pies, bras et pongne et jambe en preit salhir,
1370 L'un mort par dessus Fautre a la terre flastrir;
Romans sont O homme qui sevent bin ferir,
Tongrois L m qui ne sevent fuiir;
Ly roy Julius Cesar les faisoit a soffrir.
Ly promier empereur de Romme, sens menUr,
1375 Mult fut noble et puissans; si fait les rens fremir,
Car nul arme ne puit contre ses corps ** garir.
Ses barons escrioit, bin les soit resjoiir;
Des mors Tongrois faisoit toute terre covrir,
Et Tongrois I'asalhent par mervelheux air ,? ;
1380 Dois fois Pout desmonteit, s'en at grant desplaisir.
Roy Sedros d'autre part faisoit Romans morir,
Car contre luy ne puit nul harnois garantir;
Tant en abat a terre que Romans fait guenchir;
Nuls ne Tosoit a lend re, bin les seit desservir
1385 Tout sens faire amisteit.
Forte fut la batalhe et ly estour morteis.
Ly roy Julius Cesar, al brans qui fut letreis «°,
Detrenchoit aus Tongrois jambes, bras et costeis;
llh at ochis Tigris, 1 chevalier membreis
1390 Qui sire de Molins astoit et advoweis;
Puis at ocbis Arnalt de Tilve l'enforceis ",
Et plus de xxiiii que ne saroie nommeis.
Ly roy tongrois Sedros faisoit tout autreteis M :
15 Honte.
14 Son cceur bout.
15 Plus haut aquoite.
16 Rompre, casser. Croissir dans Roquefort. Le manuscrit BR pe^
frossir.
17 Pour deter lir, rompre , detruire?
« Coups. BR.
19 Pour air, ire, col ere.
*° Oroe, borde. Le mot se troure dansle glossaire de Gacbet, oa I "^
fait avec raison la remarque que e'est un qualificatif toujours joial ■ **«■•
•» Notre texle porte : et Tilve CenforteU. Tilve etant unnomdeWolHe.
j'ai prefere la variante du manuscrit BR.
** Paieillement. Autresi dans Roquefort.
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LA GESTE DE LIEGE.
607
Des secateurs ochist Tibaut et Fouquereis,
1395 Calasdus et Ebroch, Engorant et Gaudieit,
Et tant des autres aussi cargies en est li preis.
L'empereur le voit si fut l'espiel cobreit,
Droit a Sedros brochat qui n'en donne dois deis,
Ains at pris une lanche , vers Jul in est aleis ;
1400 Grant cop se sont donneit sus les escus lisleis,
Si qu'il les ont fendul et ambdois traweis,
Entr'abatus soy sont par Gne poesteis;
lib sont salhis en ptes, Julius fut ahireis,
Car ons truve en escrips de vraies auctoriteit
1405 Onque uns seuls homme ne fut Julin plus demontcis.
Ce fut I des IX preus et des plus renomraeis.
Hector et Alixandre et luy, c'est veriteit ,
Furent ly 111 paiens. Ly juwis furent teils :
David, Macbabeus et ly preux Josueis.
1410 Ly cristiens furent de grant nobiliteit :
Ly promier est Artus qui plains fut de bonteis,
Charles ly eicellens rempereir dobteis,
Godefroid de Bulhon fut ly derains esmeis;
Cascun fut nobles hon.
1415 Barons, or escuteis pour Dieu et pour son non.
Ly promier empereir de Rorame eu preit Noiron ',
Cbe fut Julius Cesar de quy nous vous chantons ,
Ly plus puissant qui fust a sa regnation;
Si qu'il est mult hies en sa condition ,
1420 Qu'ilh astoit desmonleit par unc tot seul baron,
Ains ne Tot plus esteit des qu'ilh fut enfanchon;
Mains vies fut devenus, si ot flori grenon,
Se n'at mie teil forche que quant fut donselhon.
A Sedros est venus par dessus le sablon :
Roy de Tongre, dist-ilh, lasson celle teuchon,
Retraiies votre gens et nous ensi feron ,
Et demain al matin, sicomme dois campions,
Revenrons chi nous dois faire une caplison ;
Se moy poies conquere , toute vo region
Parmi tregut tenreis des Romans de cuer bon ,
» Ensi com font li autres et aval et amont. »
« Sire, cbe dist Sedros , ensimenl I'acordons. »
1 Sur le pre Noiron, voir la Table alphabets que des norm de lieux a la
fin do vol. Ill de Godefroid de Bouillon, \° Noiron.
* Je laisse imprimer le mut tel qu'il est dans notre teste.
3 Poor eaquermie.
* Voile. Qu'entendre par le voile d'un casque ? Le manuscrit BR porte :
1425
1430
Atant content retraite, et sens arestison
En Tongre sont rentreis li Tongrois de renon.
1435 Julius Cesar at fait tendre son pawelhon;
Reposeis sont la nuit sens contradiction.
Lendemain li dois roys s'ont armeis a bandon ,
Assembleis sont es preis desus les aragons;
Ly uns deffiat Fautre, n'y ot fait Ion sermon,
1440 Les chevals ont brochiet qui courent de randon, x
Si bin s'ont assenneis sus les escus reon
Qu'il les vont porfendant.
LIl.
ltea.
Ly nobles champions vont leurs escus trawant,
Les habiers ambdois vont ilh aussi fausaut ,
1445 Leis les costeis tous nuls vont ly dois fiers passant,
Toutes plaines leur lanches se vont entr'abalant;
lib sont salhis en pies et vont les brans sachant ,
Ly unc corut sus l'autre comme chevaliers valhani.
Mains cops se sont donneis de stoc * et de talhanl,
1450 Et puis del eschermie s se vont entr'assaiaut.
La batalhe fut forte car Julius fut puissant ,
Et Sedros astoit fiers , hardis et combattant ;
lib at ferut Julin quMl ne vat espargnant,
Ly heame ly trenchat, le Irene 4 vat perchant ;
1455 Ly espee tornat che le vat garissant,
Car ilh Teuwist fendus jusques en pis devant.
Julius senti le cop , li cuer li va enflant,
Ly roy tongrois ferit sus son heame luisant ,
Ne heame ne habier ne li valent 1 gant,
1460 Tratot a de trench iei; ly roy vat guencissant ,
Et ly espee vat jusqu'en terre coulant.
Ly roy Sedros del cop alat tout chancellant,
Mult petit s'en falit ne soit engengnelant 5 ;
Ilh reprent cuer en ly, Julin vat assennant
1465 Amont sod heame a or, tot le vat decopant,
Arme qu'il ait en chief ne le vat sorcoraut
Que la char et cheveals ne voise jus rasanl,
Le sane en siet sus l'ierbe qui le vat rogissant.
Tant fut ly cops pessant Julius vat enclinant,
1470 En son cuer vat le roy Sedros forraent prisant,
Et dist qu'onque en sa vie de raiedre covenant
Chevalier ne trovat.
la coflre, sans doute pour coiffe.
8 Le manuscrit BR porte engenoillant , ce qui peut scrvir a interpreter
l'expression de notre teite. Plus loin , v. 1487, il est mieux ecrit : engen-
gnolhat.
/"
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608
APPENDICE.
Fire fut la batalhe, l'estour el li debat.
L'empereir Julio dedens son cuer prisat
1475 Sedros le roy tongrois, mains pour che n'atargat;
Unc grant cop ly envoie qui trestout detrencbat
Heame, escut et habier, et le chief ly navrat;
Dessus I'espalle dieslre l'espee s'arestat.
Quant Sedros le sen tit arire soy lornat ;
1480 Che li gardat le bras, fortement se doblat,
L'empereur ferit et si bin assenat,
Que par arme qu'ilb l ait Julin nul garant n'ai
Qu'il ne sente Tespee qui en sa char entrat ,
Ly cleir sane de son chief a la terre volat;
1485 Ly roy tongrois si fort cesti cop envoiat,
De pis, de bras el d'armes si bin si apoiat ,
Vuilh Julin ou non en pre it s'eugengnolhat :
' « Sire, che dist Sedros, dittes comment vous vaV *
» Or lassons eel eslour ou trop cosleir porat.
1490 » Se moy tuweis, je ay qui bin moy vengerat;
» Se vous tue, a mon corps mais guerre ne fa rat.
>> Si qu'a lassier l'estour cascun mult gannerat ;
» Je moy rens pour couquis, vo corps l'onour arat. »
Atant prent son espee et se ly presentat;
1495 L'empereur le voit, errament l'acolat
Disant : <* Tu es proidomme, car tes corps le pris at
» Et se le donne a moy, tu es de noble estat,
» Si gaingneras asset's ensi c'on toy dirat.
» Tongre tenras de moy, autrement ne serat ,
1500 i Franchement sens servage, ensi ons le feral ;
» Oar ja toy ne tes heurs tregut ne paiierat,
» Franc et lige seras, ons le saiielerat. »
Quant Sedros 1'entendit forment Ten merchiat
Droit la sens plus attendre.
LIV.
1505 Ly roy Sedros de Tongre, en cuy tot bin s'engendre,
At Julin l'empereur volut grant merchi rendre
De che qu'il ly at fait, et que tot sens constraindre
Ly at donneit del caple l'oneur, et sens reprendre *
Atant ly fait hommage, n'y at volut mesprendre;
1 Je supplee ce qu'ilh sur l'autorite du manuscrit BR.
- Relevcr un fief en rendant hommage, lit-on dans Roquefort.
3 De quoi aucun mal ne put provenir.
4 Vanter, celebrer. C'est un des sens du verbe latin vaidere.
1510 Sa terre tient de luy ligement sens offendre,
Sens rendre nul tregut, ne riens qui puist comprendre
A nulle servitude , ne chouse qui descendre
Poroit de vilain cas , ons n'y puit mal entendre.
Ensi fut fait l'accort sans Hen plus entreprendre ;
1515 N'y at celuy d'eaus dois qui s'en puisse rins pleodre.
En Tongre sont entreis, erament sens remendre
Fist Julin unc palais, chil de Romme fut mendre.
La vont li empereur mult largement despendre,
Car onques unc tornois ne volt al bon roy prendre ,
1520 Puis retornat a Romme', et Sedros fist encbaindre
Le palais de la Geire qui tout le voul porprendre.
Mult fut Sedros valhant et vout a honeur tendre;
Onques ne fist de quoy posist nul mal dependre*,
Proidomme fut et loyaus, pour teil le puit on vendrc *.
1525 Tant ot de bin en luy qu'on ne le puit sorvendre 5 ;
Son pays governat, si Ion qu'il vuit entendre,
Si frankement, que nub de che qu'il vout emprendrf ,
Ne poit sa volenteit onques brisier ne fendre;
Quiconque faisoit mal , tantost le faisoit pendre,
1550 Et fust son propre enfant , ou son frere, ou son gendre,
Tant ot ferme manniere.
LV.
JkIIn C*mp e» revat * Wkmammm.
Singnours , or escuteis en l'onour de saint Pire.
A Romme vint Julin, rempereir a vis fiere;
Entre les senatours de Romme son empire ,
1535 At mult prisiet Sedros a la plaisante chire.
Del estour at compteit sicom j'ay volut dire ;
Mars et Venus jurat, et Jupiter son sire,
S'ilh ne fust acordeis mis Peuwist a martire
Sedros par forche d'arme , ons ne le puit desdire.
1540 Quant chis Font entendut, forment le vont presier:
Si dient bin qu'ilh est loyaus, proidons, entier,
Portant le vont d'acord a senalour eslire
Trestout le soverain , et a luy vont escrire
Que tantoist vengne a Romme sens plus avant destrire*.
1545 Quant Sedros Tentendit mie ne vout rescrire;
Vers Romme chevalcha, son regne vout lassire 7
A Lotringe son fil, tant qu'il revengne arire.
Et quant ilh vint a Romme , Sedros sens contredire
Fut pris a grant honeur et assis en chaiire ;
8 D'apres le sens assigne au mot vendre du rers precedent, on doil«
conclure que sorvendre signifie sumuUer, vanter a Texces.
6 Pour detrier, retarder.
7 Laisscr.
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LA GESTE DE LIEGE.
609
1550 La fat fait senateur qui bin li doit suffire,
Malt bin sarat de Romme la raison anonchier.
Or, escnteis avant par le corps saint Ligier.
A ycel temps mist Routine Virgile en grant dangier,
Car le feu en ostat pour la damme legiere
1555 Qui dedens la corbilhe le cuidat balancbier.
A son membre secreit pour ly plus despitire \
Fist reprendre Virgile le feu et la lumire.
Qui savoir vuit le vraie, son istore puit lire;
La troverat le fait comment se Tout vengire,
1560 Et son honour aussi defendre et calengier,
Et amendeir 1'injure c'on li volt porcachier
Sens raison et a tort.
Al ocquoison de cbe que je chi vous recort,
Fut Julius rempereur ocbis et mis a mort.
1565 Pbebille fat sa nine , qui par son grant discort
Fist a Virgile injure — dont mavais morsel mort — *
En prendant feu a ly morut en desconfort
L'empereur Julin si oit pou de confort ;
XXXIII senateurs del grant linage fort
1570 Virgile le poete, en temple sens resort 3
L'ont ocbis eramment, sour Tan que j'ay estort 4
V™ et C avecque LVII ; al fort 8
Fut Julio cest ploreis, li duls tantoist amort 6 .
Haiis astoit forment pour le Virgile enort.
1575 Apres la mort Julin, Romains par esconfort 7
Ont fait unc empereur qui fut de reconfort,
Nobles bomme et valhaot , et plains de grant effort ;
Octoviiens oit nomm en cuy bonteit ne dort,
Proidommes fut et loyauls et jovenes sens renort *,
4 .Pour desptfer, mepriser, ou plutot faire du depit.
* Dont elle mord un mauvais morceau , c'est-a-dire , dont elle se re pen -
tira.
3 Sans erainte , du verba : retoigner.
* Mltabli, du rerbe ettorer que donne le glossaire roman de Ducange.
5 A a forum.
6 Fut ce Julin pleure, le malheur attache. Au lieu de ce$l , le manu-
tcrit BR porte tott, ee qui vaut peut-elre mieux.
7 Probablement le memo sens que confort, soulagement , consolation.
9 Plat probablement remort, comme porte le manuscritBR, c'est-i-dire :
sans debat.
9 Demeure , reside.
io Pour ro6ert« , tromperie , supercherie.
11 Se rejouir, se delecte.
»* S' attache.
1580 Larges et plantiveux, tous bins en ly remort 9 .
Ses oncles fut Julin qui en terre s'endort,
Que senateur ont mort par unc pou de robort ,0 ;
Helaine sa sereur, oil health soy deport ",
Fut mere Octoviiens restore le recort;
1585 Et unc grant senatour, Gallant, qui fat del cort,
Fut peire Octoviiens ou proeche s'amort lf .
Loyal teit et honour todis son cuer tresmort *»;
LVI ans plens regnat en grant aport u
Pour une grande victoire qu'il ot en Langefort ,
1590 Fut nommeit Augustus par mult tres-noble a cort
Affin qu'il ne mescalbe ,s .
Ci secont empereur Octoviins, sens falhe ",
Desconfist a son temps tant de grande batalhes
Que nommeis Augustus fut-ilh par entretalhe ,7 ;
1595 Car en augmentant regnat a grant travalhe.
Ilh n'at paiis en monde qui hors de ses mains alhe
S'a Romans est rebelles, que li roy ne l'assalhe
Et le met a meschief; conquis at Cornualbe,
Et la Grande-Bretangne, et le paiis d'Avalhe »*;
1600 Ilh conquist VI royalmes drois en moy de resalhe,
L'an qu'il fut coroneis mult gangnat grant batalhe ,
Onques de ses Romans ne travelhat pitalhe ,9 ,
Toudis par ses gens d'armes faisoit son avantalhe 10 ,
Mains as vilains faisoit sovent crenez et talhes
1605 Pour ses gens sodoiir paiir a sa vitalhe.
O luy mennoit le grain, et si lassoit la palbe
Pour la citeit gardeir toudis valhe que valhe.
Onque por lui pitons " n'issirent de leur balhe,
Por quilconque besongne qui li vengne ne salhe.
15 Tremble , treuaille.
14 En grande assurance , puissance. Apporl signifie : affluence de biens
comme de personnes.
18 Pour qu'il ne tourne pas a mal , ou que mal ne lui arrive. Voir le
glossaire de Gachet, r° nwtquani, et le glossaire de Ducange, ?° metca-
dert.
16 Sans faute.
17 Par oultr* taille. BR. Je ne comprends pas cc que cela peut *ignifier.
Enlretalhe serait-il pour entretant, dans 1'entrefaite?
18 Le pays d'Aval ou des Avaloit ? Les Pays-Bas.
19 Pour pietailU , petit peuple.
10 Avantalhe doit etre ici pour aventure, mot par lequel on desigoait unc
expedition militaire.
11 Valets d'armee. Voir le glossaire roman de Ducange , v« Pitoulont.
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610
APPENDICE.
1610 Les proidommes honorat si haioit la merdalhe \
Et sour trestous ses prinches ne donoit une galbe *,
Mains que li roy Sedros jamais ne li deffalhe.
Le roy Sedros amoit qui haioit la frappalhe 5 ,
Car en estour ly ot servit de teal entalhe,
1615 Qu'il n'y ot espargniet ne noble ne. coqualhe *.
Les histoires de Romme tot sens adevinalhe
Les fais racontent plens , n'y faut une semalhe s ;
Mains n'affiert a mon livre , et porlant ne moy calhe 6
De plus avant compteir le valhant d'uue malbe;
1620 A ma droite matiere vuit reson que tresalhe
Et droit, si le contient.
LVIII.
Le rola 4« T«affre ravtet 4« Be
*• A TMgn.
A ma droite matiere, qui veriteit retint,
Me voiray retorneir. En tant qu'il m'en sovient,
A Romme astoit Sedros qui loyalment se tint;
1625 Ly roy Octoviiens deleis luy le detint;
Mains ilh avient sour Tan que ly daute maintint
V» C et LXXV11, que Sedros vient
A roy Octoviien , et dist : « Sire , ilh covint
» Que voise visenteir mon rengne ilh appartint. •
1630 Respont Octoviien : « Sens moy vous n'ireis nient;
» Vo rengne vuilhe veoir, volenteit m'en sorvint. »
Ly roy Sedros l'entent, tous li cuers ly revint,
Del honour merchiat li roy Octoviien.
L'empereur n'atarge, d'aleir ne soy abstint;
1635 A Tongre chevalchat, et quant droit la par viol
Sa cour y tint planiere, car ensiment perlient;
Sa mere Helaine y fut qui la coroie ot chient 7 ,
Que ly donnat le roy d'Espagne Amorandins;
XXX» besans valoit. Adont avient
1640 La damme le donnat, qui de bien ne se fint,
Al temple Veneris que leur grant loy sostient;
Mars seoit par-deleis, qui batalhe ne crient 8 ;
Jupiter d'autre part qui leur dolour extint 9 .
La chinture fut riche d'ovraige alexandrins,
* Terme de mepris dont il est inutile d'indiquer l' etymologic.
* Une noix.
* Les bouches et aussi les bras inutiles.
* Pour coquin, e'est-a-dire : ni les nobles, ni les uiendiants.
'' tin grain de semaille.
fi 11 ne ni'importe.
1 Pour ceitd.
1645 De pires precieuses y ot tous le achient ,0 ;
Onque mais n'ot si riche li bons roys Constantins,
Qui puis fut empereur, ne ly roy Justinient,
Ne Albiers de Florenche.
TtBfrc tmt ■!■■<■ OeUkvlanc.
L'empereur de Romme, qui fot de grant prudeoche,
1650 Con nommat Augustus pour la grande cresseoche
Que l'empire faisoit al temps de sa presenche,
Por celle grant honour et noble exceUenche,
A la citeit de Tongre qu'il tint en reverenche
Donnat son premier nomm en nomm de providencbe:
1655 Octaviane oit nomm trestout sens maremencbe ",
Ne onques puis li rois de grande sapiencbe
Ne fut Octovien nommeis; par celle essencbe "
Quant la royne Helaine voit la benyvolenche,
Si at cangiet son nomm, et de droite siencbe
1660 Se fist OctQviane nommeir en audienche ".
Or fut Tongre perdue, et a celle temps comencbe
Le nomm d' Octaviane, qui fut de tetl semenche
Qu'il fructifiat mult d'honeur et de plaisencbe;
XL ans ly durat le nomm sens varienche,
1665 Et puis se fut remise a sa droite nascenche,
Quant mors fut l'empereur de nobile parenche.
Mais afin que plus cleire en soit nostre sentencbe,
Et plus parfaitement entendeis la sequenche,
Nous le nommerons Tongre ades sens abstioenche.
1670 Or escuteis, barons, pour les sens de Valencbe.
Tant que ly roy romans faisoit teil residenche
En la citeit de Tongre, morut sens violenche
Le noble roy Sedros; grant duel ot et grant tenche
Par trestout le paiis, mains tost y fut silencbe.
1675 L'empereur Augustus fist roy, et sens quitencbe,
Le damoiseal Lotringe qui ot bonne loquencbe;
Proidomme fut et loyals, et sens malivolencbe;
Bien devoit estre roy ainsi par consequenche,
Car de tous bins ot los.
• Sic pour ereint.
9 Extint doit signilier : etend. ie suts plus dispose a woire qa'tl I" 1
lire ettint .- eteint. Le manuscrit BR port* : eoniienl.
10 Sans doute pour acheint , enneint , entoure.
n Pour marrement, deplaisir, chagrin.
«* Pour e$ciant, am , raison.
is Publiquement , omnibus audienlibus.
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LA GESTE DE LIEGE.
611
LX.
Le cln^iafome rols de Toagre.
1680 Roys de Tongre chinquieme fut Lolrioge a brief mos,
Lyqueis reguat X ans, mult fut gays et mingnos;
L'empereur Augustus et o luy ses gens tos
Se sont raleis vers Romme 1e tros et les galos.
Or escuteis avant, singnours barons trestos.
1685 Ly noble roy Lotringe, qui n'astoie mie sos,
Dois ans apres le mort son pere le roy Sedros ,
Sus unc grande roche — Muse * cor oil desos —
Comenchat unc chasteal ; si avoit en propos
De faire grant et fort trestout enclouz de bos,
1690 Mais ains qu'il fust parfais moril en Ardigos
Ou * sien noble cbasteal qui astoit d'aige enclos.
Signours, al temps Lotringe, qui fut et grans et gros,
Assavoir droit sur Tan c'Adam nostre prevos
Fut formeis de part Dieu , V m entendeis-vos
1695 G et LXXXlill, VIII jour cbe trovons-nos
Dedens decembre droit la Vierge de repos,
Marie la benoite, qui fut a dyable estos 3
Le peuple qui perdoit par le fol morsel glos
De la pomme qui fut de tous pechies estos 4 ,
1700 — Par le fruit que Ja Vierge portal, puis fut desros 5
Ly orible pecniet par quoy Adam fut ros 8
Droit el obedienche, dout Dieu ot grant coros,
C'Adam raetit en paine, u rechut mains soglos 7 ,
Mainte angos et travalbe ; —
QMmt aoatr* Immw ffnt eoaeftmt.
705 Sour Tan que je ay dit la damme non parelhe ,
La royne de ciel, la mere a doulx solelbe
Qui luisoit es tenebres, dont orent grant mervelbe
Tous les sains patriarcnes cuy sa clarteit esvelhe,
Fut concbuit et nasquit, parmi le Dieu conselhe,
1 Prononcei Mouse , la Meuse.
8 Pour au.
3 Pour eaioie, garde, sauve. Qui a sauve ties mains du dibble, le peuple...
* La pomme qui fut l'origine (estoc) de tous pec he 9.
5 Rompu , brise. Desroupt dans Roquefort.
6 Pour rout, participe passe du verbe router, rompre. Fut rompu est ici
pour fut rampant , rompil.
7 Pour souglos , du verbe sougloter, sangloter, que donee le glossaire
roman de Ducange.
s iVoia da os notre telle.
9 Se desomelhe pourrait etre le coutraire de s'endort; mais ce sens ne me
1710 IX mois apres tous plains la parfaite chandelhe,
La cuy clarteit esveilbe H pecbeur qui sommelhe,
Dedens septembre VIII jour nasquit la desparelbe
Entre trestoutes femmes,,n'oit s onques sa parelhe;
Sa grande humiliteit le fist de Dieu ancelle.
1715 Or escuteis avant cascun soy desomelhe 9 ,
Chi comencbe cbanchon qui n'at nulle parelhe.
Cbi vint le temps de grasce ou trestos bin sordelhe 10 ;
Dois ans apres inorit , en casteal a Gurdeihe ,
Lotringes roy chinquieme de Tongre la vermelhe.
1720 Si fut ses fils Lotringes fais roy par esmervelhe " ;
Fut cesti sages hons, nuls a luy s'aparelhe;
XX ans regnal tous plains, maintenant sen roelhe u
Plus frankement asseis, com chien en la cordelhe
A grant honour acquier tome todis l'orelhe.
1725 Chist parfist le chasteal, et mult bin apparelhe,
Que comenchat son peres sus la roche Coquelhe ls ,
Et le fist ensi halt que voile une cornelle.
lib n'ot plus forte tour entre Romme et Marselhe;
Lotringe le nommat et si le raparelhe ",
1730 Qui puis fut ducheteit qui durat jusqu'a Selhe "
Et fut puis la plus riche qui fust jusqu'a Corbelbe.
Or escuteis apres , que nuls ne s'eutortelhe
Fours a oiir ma geste.
LXll.
De I'laearsatioB JhMnerlst.
Barons, or escuteis, pour Dieu le roy celeste,
1735 Gelle novelle histoire, qui trestout manifeste
Le fondement dont vint de Liege le noble geste ,
Et tot premier de Tongre, sens noise et sens moiieste,
Oreis coment re vint trestout avant Taquieste <c .
Chi comenche l'istoire temps qu'en tos biens acreiste ,
1740 Che est le temps de grace que Dieu tous sens areste
Prist incarnation dedens la Vierge honieste,
N'ot mie encore XV ans, plus de V mois en reste.
parait pas convenir ici , et je suis dispose a croire qu'il faut lire : soil de
$ommeH y e'est-a-dire : soil endormi.
10 Sourd, sort, jaillil.
it Heme sens que mervtlhe. On trouve dans le glossatre de Ducauge le
participe esmanveille , emerveille.
1 * Sen pour son, Roelle ou rouelle , bouclier.
is J e suppose que e'est un nom propre , et j'y mets une majuscule.
14 Repare , retablit.
15 Sans doute encore un nom propre. II y a un village de ce nonitur In
Meuse , vis-a-vis d'Andenne.
1G L'acquisition .
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612
APPENDICE.
L'archangle Gabriel le saluat a diestre ,
En saluant entrat Dieux tot parmi la tieste,
1743 Comme parmi la voider le soleal soy apreste.
Celle incarnation ne nous fat pais silvieste ',
Car trestos nous gettat des tenebres rubieste ,
Le dyable corochat qui plus fel est que rieste V
Ensiment conchuit Dieu celle Vierge domiesle 5 ,
1750 Si le portal IX mois, rins plus veriteit n'ieste,
Et puis s'en delivrat sicom enfant terreistre*
Dedens Bethleem, oil at mains grant forieste.
lib astoit Dieu et homme sens cause deshonieste,
Visquat XXXII ans, Jirwis en Osent fieste;
1755 Mains puis par trahison, ainsi com apres mieste *,
Par la sainte Esc rip lure le jugerent li prestre
Et maistre de la loy, qui par leur faux tempieste 5
Mirent Jesum a mort comme mavaise bieste ,
Qui a vraie raison entendre ne sagresfe 6 ,
1760 Mains trestous bins destruit.
Singnour, sor Tan de monde, sacbies tot sens anuil,
V» II* I moins, XXV jours a nuit
Ens el mois de decembre, en mult povre desduit,
Nasquit ly roy Jesus en trestos bins enduit;
1765 Si que d'ors en avant, sachies tuis et luit,
Comencherons nos daltes, car droit le nous instruit,
A la Nativiteit qui tous bins nous conduit.
Car n'est si vraie dalte que de eel noble fruit
Que la Vierge portal, car le dyable deffait,
1 770 Et destruit son poior qui fat si fort astuit 7
Par Evan noire mere por le fruit mal const ruit.
Or escuteis, barons, diligemment trestuit.
Sour Pan que Dieu fat neis IX, a Tongre moruit
Lotringe roy siseme par venin qu'ilh buit,
1 775 De quoy a lit malade XII samaines juit.
Chis roy avoit dois tils, ensiment corame je cuit 8 .
1 C'est-a-dire, desagreable. Voir le glossaire de Ducange, v« Sylvaticut.
2 Je trouve dans les glossaires : riese , terre en friche. Mais quel moyen
de lappliquer ici?
3 Celte expression doit signifier : domeslique, qui aime la maison, le
foyer domestique.
4 Pour meU , repas. Allusion probable a la cene de Jesus avec ses dis-
ciples.
5 Excessive irritation. Voir le glossaire de Ducange, v« TempesUtre.
G Ne se dispose , ne se montre dispose a agreer.
7 Plein d'astuce , tututus.
s Pourje cuide, je pense.
Ly aisneit Jupilla fat roy son pere ensuit;
En trestoute bbnteis et mult bin li parut,
XXIX ans regnat , si fat prinches eslut.
1780 Ly autres ot nomme Lotriuges ly astruit e ;
Ses freres ly donnat Lotringe sens refuit ,
De quoy ducheteit fist et de quant qu'ouques puit
L'at-ilh augmenteit toudis a pou de bruit.
Ses freres ly aidat ensiment comme ilb duit,
1785 Et dus Lolringes Tat benignement rechut,
Lembor et Dolben fondat chis et conchuit
Herstal et Chertal , Wandre et Fleron reduit,
Et Herve tot decouste ,0 .
lxiv.
Barons, chis dus Lotringe, li pHmerin prevoust,
1790 De la ducheit novelle augmenteir prent gouste.
Mult de vilhes fondat que j'ay nommeit tantost;
Encor fondat des autres leis Lotringe qui roust "
Les dobtanche de Muese et segurteit moste ".
La plus graude nommat — qui durement li coste —
1795 Jupilla, que encor pour Jupilhe on cognoisle;
Le nomme a roy son frere li donne , et recoguoiste
Qu'ilh le tint de luy, n'a garde qu'on Ten ouste.
Le chief en fait li dus de sa ducheteit tost ,
Le palais principal y mist, qui bin demost ,s
1800 Que le chief est Jupilhe de son regne, et le bost u
Oil est le tressorier plus voire que pater nostre.
En lieu oil Liege siet , n'avoit milhe ne croste "
Al temps dont je parolle , fours foreist plains de moste ";
Pour chivres y avoit viandes asseis et broste ",
1805 Croliches et mares dessus, jus et sour coste;
Nulle habitation n'y avoit ne nul hoste,
Tuit astoit bois planter ou arbre et hierbe croist;
JupW be est la plus pres qui a eel lieu s'ajouste ,
Et puis Ans et Molins d'autre costeit s'acoste :
1810 Ly bois u Liege siet ensiment se coniouste ".
9 Heureux , tutruc en prov.
I( > Tout a cote.
11 Rotate. BR. Cela doit signifier : die.
11 Probablement pour mottre, montre.
15 £videmment pour demo$tre, ce qui vient confirmer ce que je db pfcj
haul de mottt , v. 1799.
14 Pour boisU, comme porte le maouscrit BR.
15 C'est-a-dire : ni mie ni croute.
16 Tourbe? voir Ducange , v« Mota.
17 Pature, broust. Voir Diez, \° Brozei.
18 Pour $e congnoute , se connatt.
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LA GESTE DE LIEGE.
613
A ces vilhettes chi dont ly paiis racroiste »,
Lotringes ly bon dus — mie ne (ly) descroiste —
Une vilhe fondat qui ot non Bellecoste :
Or est nominee Upey ; et puis fondat Golouste
I8f 5 Cod nomme Cleremont doqt ly mur soy decroste *,
Car or est en exilhe 8 .
Bel Btelioa f«aUkl*e.
Barons, oiies pour Dieu et la sainte Ewangilhe :
Qui dont voloit aleir droit de Tongre a Jupilhe,
Ons y conteil VIII liwes de bois et de perilhe,
1820 Car ons aloit al tour tout par-desous Sorbilbe l
Oil fut puis Treit fondle qui fut de bonne pilbe \
Et ly roy Jupilla de Tongre ot fils et filhe,
Entre lesqueis ot unc qui d'autres valoit milbe :
Richier avoit a non cuy loyalteit n'avilhe °.
1825 Bon cbevalier astoit sens fable ne coquilhe 7 ;
En estour savoit bin ferir de la facbilhe.
Sour Tan de grace XIII cbevalcba a la vilbe
De Jupilhe sus Mouse; tant demorat la, quMlh
Ly Tint en volenteit I jour d'aleir en guilhe 8 ,
1830 En bois et en riviere; atant Richier s'abilhe,
Tous seuls at pris les chins et loiies en la tilhe 9 ;
Droit vers le bois alat ou Liege siet, car ilh
Vout avoir savesine, cerf , dens 10 ou cocodrilhe.
Solonc Muse passat u avoit mainte anguilhe;
1835 A piet d'une montangne ses chiens trestot defilh,
Atant cascun des chiens a bin glaulir s'afilhe ,
1 S'accroit?
■ Decroit.
3 C'est-a-dire : il est estilhe , ravage , detruit.
* Ce!a fait I'effet dun nom de localite, mais je n'en rois aucune a qui
1'appliquer.
5 De bonne pilhe, pour bonne a piller?
6 Ne dimioue pas.
7 Est-ce le meme mot que le coquelhe du v. 1715? II parait signifier ici :
tromperie, ee qui le rattacherait a la meme racineque eoquin et coquinerie.
8 Deguise?
9 Avec de la corde.
10 Prononcer claims.
11 Le nianuscrit BR ecrit sentitce; faut-il lire ici sentilhe , ce qui se rap-
procherait de sente , sentier?
19 Ravage. Sur le sens de ce verbo tilher, roir une note dans la Chro-
nique de Jean de Stavelot, p. ill.
13 Je crois qu'il faut voir ici le mot couptl ou eoupete que donne le glos-
saire de Dueange (v° copa) et qui designe la partie superieure d'un objet
quelconque.
14 Pourboban, presomptioo.
Ly bois en tentist tous; parmi une senwilhe tx
Perchoit I pore sangleir qui forment s'entortilbe ;
Al fuir est torneis , la voie forment silhe u ,
1840 Et li chiens le siwent bin pres de la coupilbe ";
Mains li sangleis les at tant rinchiet leur bobilhe ",
Que tous les at navreis ; si fuit par une anylhe ls
Jusqu'a une fontaine se vint oil soy gonhilhe l8 ,
Ens se bangne et refroit " plus agus com acuilhe ".
4845 Et Richier chevalchat tant, qu'il voit la tremilhe ,9
Del pore de la fontaine, qui les chins agrawilhe,
A ses dens les desquir, che semble une crawilhe *°;
Atant Richier la presse.
Quant li pore voit Richier parmi la remme espesse ,
1850 El fuite soy tornat la troie fellenesse;
Tout amont la montangne fut de fuir engresse.
Richier s'en vat apres, qui ot pensee expresse
QuMlh puist la troie atandre fl qui tant fut licheresse M .
Tant s'enfuit li porcheaus que al escapeir presse
1855 Qu'ilh est issus del bois, et Richerons ne cesse
Del bois issir apres ; mains adont sa maistresse
Ne vit plus devant lui , car tant fut trahitresse
Qu'en bois soy remucbat , et Richier la bretesse "
Quant cheval puit courir, s'en vat par la maresse ";
1860 Ons n'awist pais si tost dite une basse messe,
Qu'ilh devant lui regarde ; si perchoit une aynesse
Qui astoit del palais son peire , et le poutresse "
15 Pour and, anneau. Mais quel peut etre ici le trai sens de ce mot ?
16 Ne faut-il pas lire genilhe, qui serait la pour genouille ? Le manuscrit BR
porte gohille, ce qui se rapproche de goiart, gai, et du verbe gogayer, se
rejouir.
17 Se baigne et se rafraichil. Si le manuscrit BR ne portait pas lisible-
ment refroide, je proposerais de lire retoirt, sort de la fontaine.
18 Pour aguille, comrae porte le manuscrit BR. Plus rapide qu'un trait ,
qu'une Heche.
to Pour tremeur, la crainte que le sanglier inspirait aux chiens.
90 Je trouve dans Roquefort crawatle, bande de parchemin; ce sens con-
viendrait ici.
91 Atteindre , toucher.
99 Gourmande.
*^Ce ne peut etre le mot brelescher, fortiGer, puisqu'il s'agtt du contraire ;
mais peut-etre le verbe bretter, ferrailler, chercher querelle , ce qui n'est
pas fort eloigne de : poursuivre.
94 Le marais?
95 Pour poulrain , poulain. Mais ici le mot s* applique au gardien meme ,
au poutr enter, comme porte le glossaire roman de Dueange. Et eomme il
parait quele conducteur etaituoe fille,celaexplique la terminaison en esse.
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614
APPENDICE.
Qui le guiiot conut, qui ot a non Ganesse.
Grant mervelhe at Richier, si dist : c Dites, baesse *,
1865 » Dont veneis-vous ychi si lone de to recesse? »
Respont celle : « Beaus sire, je vais a Paige fresse,
» Pour porteir a palais oil at tant de richesse.
» Ne veies-vous pais Tongre de che monde princesse?
» Regardeis devout vous le temple la dewesse *
1870 » Qui luist contre solelhe? pais n'en suy meutiresse. »
Dont regarde Richier le chasteal de promesse ,
Et del temple Venus la tour batelheresse
Voit, et puis la citeit et la porte auguresse;
Si voit la mer bruant qui mull fut frinleresse 3
1875 Tout parmi la wastine.
La Tole eatre Toajgre «t Japllfce.
Grant mervelb at Richier, s'en ol cbire sanguine
Quant Tongre voit si pres et toute la marine,
Dont quidoit estre Ion VIII liwes de termine.
Erramment relornal tot parmi la gaudine ;
1880 Al entree de bois trait Pespee acnerine 4 ,
Si decope les arbres partout oil s'achemine,
Ilh at flastrit le bois, che fut pour avoir signe
Que retorneir ilh puist sa grant voie perine 5 ,
Qui de Jupilbe a Tongre en pou d'heure destine.
1£85 Jusques a la fonlaine de Aastrir ilh ne fine
La ne puist on marir, car voisins et voisine
Vont sovent fiestoiir la dessus la bruine '.
A Jupilbe desquenl desous une arbespine;
En la sale monta , le due son oncle encline :
1890 « Oncle, che dist Richier, par nostre loy Jupine,
» Puis que de chi partis ay veiiut la saisinne
» De la citeit de Tongre , oh court la Deruwinne. •
La li con tat coment trovat la savesine,
Et coment le cachat ; tot at dit le covine
1895 Que je vous ay compteit dessus en la bruine.
Lotringe s'emervelhe, quide che soit rapine;
Mains Ricberon ses nyeis puremeut rendoctrine,
Aus cbevals sont monteis chevalcbant la serine 7 .
Sont cbemineis a Tongre cuy bealte enlumine,
1900 Si ont iroveit le roy en la saule enterine 8
* Le mauuscrit BR porte baucelle ; bae$f a probablement le meme
sens et doit signifier : jeune fille.
2 La deesse.
* Bruyante. Les glossaires ne donnent que le substantif friente.
4 L'epee d'aeier. Voir le glossaire de Gachet , v° acker in.
* La voie de pierre.
6 Sur la bruyere , ou peut-etre : a la brune.
Qui feistie son frere et cbis ly fait gehine '
De che que je ay dit de premiere racbine.
Enfrechi qu'en la fin, par sainte Catherine,
Quant tot che entendit ly roy de francbe orinc,
1905 Si dist que cbe est vains.
Ly boins roy Jupilla ot le cuer mult grevains
De che que dist ses fils et ses frere germaiDs;
Mains che ne ly valut, car li fais est certains,
Et si Pont bin proveit sans produire tesmoins,
1910 Car lendemain alat aveque eaus sus les rains;
En veriteit trovat le fais , et tot prochains
Si fist talhier en pire unc cheval gros el grans,
Et sus unc chevalier armeis nobles et frans,
Quy portoit en Pescut, dont d'or astoit li cbans,
1915 De synoble I griffon; e'est ly blason hautains
De gentilh Richeron, pais n'en suy incertains,
Par-desus la fontaine fut assis tout de plaios.
Puis nommons la fontaine trestot li puple humains
Fontaine Richeron ; encor est-ilh seans
1920 En la citeit de Liege, a piel de mont joindans
Des freres cordeliers droit defors castel 10 ; mains
La pluve et li gresalhe dout Richier fut ataius,
Li ont fait son blason desquireit el destains,
Et debrisiet en piche mains ilh durat lontaios :
1925 Ons le pot bin veoir apres IIII e ans.
Et quant fut tot destruit, de ponture fut pains
Coment Richier cachat le porcbeal qui fut sains,
Et trovat le chemin de Tongre sens bestains ".
Ensi fut par Richier, le noble chevetain ,
1930 De Tongre le chemin troveit plus capi tains,
Plus segures et cours, et profitable al mains ",
A raisonable esgars.
LXII.
m+ HUirteflre Blcktor.
Singnours, or eutendeis a moy de toute pars.
Dedens celle an meismes fut marieis Richars;
7 La soiree?
8 Parfaile. Voir le glossaire de Gachet , v« enltrtn.
9 Plainte.
10 C'est-a-dire : derriere le chceur de I'eglise des Miaeurs , hon cha-
teau.
11 Dispute. Bettenc, dans Roquefort.
11 Au moins.
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LA GESTE DE LIEGE.
615
1935 La filh al due de Galle Troielus ly escars,
C'est la bella Enea qui savoit plusieurs ars,
Ot Richeroo a femme et Aviergne en sa pars;
Si fut sire d'Aviergne qui ly valul mains mars \
Apres sur Tan XI III, en jule sens repars,
1940 L'empereur Augustus, qui fut vies et liars ■ ,
Morit tot droit a Romme , onque ne fut cohars.
Empereur fat ses fils Tyberius Gonart;
XXXI1II ans regnat ly valhans dromadars •.
A eel temps que je dy, par le corps sains Bernar,
19-45 Jhesus ly crealour fut par Syrie espars;
Maintes miracles fist le tres dous lucidars 4 .
Apres XXXIII ans et III mois, c'est I quars *,
Se le vendit Judas li trahitres coquars ,
Dont fut cruciliies par les Juwis musars.
1950 Pilates en jowat ensi com I renars,
Jhesus fut fausement jugies ly roy galbars;
Se le jugont a mors trestuis josnes el vielbars ,
Bien savoienl qu'ilh fut vraie Dieu ly ors fausars 6 .
Dont puis furent decbuis comme mavais palbars.
1955 Mains Dieu resuscitat plus bardis que lupars,
Quant ot brisiet inner comme tres saint pilhars;
En subjection mis at les diables cornars ,
Et puis montat en ciel ly champions lombars ,
Ferme , 6ns et loyauls.
LXX.
1960 Barons, or escuteis pour Dieu le spiritals.
Sour Tan que Dieu fut neis XXXVIII , li fais est vrais,
Morit le roy de Tongre Jupilla le loyauls;
Si fut roy Trectelus son fil, qui fut mult baus.
Chi fist de Treit la Tilhe dedens ses temporals 7 ;
1965 Apres luy le nommat ly bon prinche royauls,
Et si regnat XII ans mainlenant bons estaus.
L'empereur Tibers, de monde ly plus hauls,
Morit eel an meismes ; d'ire fut todis chaus.
De sa mort sont joiians Romans bons et mavais.
1 Marcs.
3 Nous avons deja donne le sens de ce mot ». till.
5 Singuliere qualification donnee a Tibere.
* Ce root do peat avoir ici le sens indique par les glossaires ; il signifie :
celui qui eclaire.
5 Je suis dispose a croire que le Irouvere a voulu dire que Irois mois
font le quart dune annee .- c'ttt un quart.
6 Les sales fourbes.
7 Pendant son temps, de son vivant.
s II feat , me parnit-il , lire : ilh ot unc ftljovtnu , Dog a...
1970 Gayus fut empereur ses fils ly dammoiseaus;
Trois ans et plus regnat, asseis fut crimminaus :
Ilh sc fist aoreir comme Dieu, li leire faux,
Si Pochisent Romans vielhars et jovencbeaus.
Ly sien fil Claudius fut empereur isneaus,
1975 Qui regnat XIII I ans comme singnour principal.
Apres, sour Tan L, par-dedeus son palais
Morit ly roy tongrois Trectelus li donseaus ;
Ilh ot unc fil Doga jovenes * qui roy fut fais,
Mains ilh morit en Pan, si que roys fut refais
1980 Colungus fil Richier, qui n'astoit mie lais,
Lyqueis regnat XV ans, honour amat el pais.
Aggrippine en Germaine, u li paiis est craus,
Fermat toute de mur, et Collongne entressaus H
L'at appelleit ly roys qui ne fut desloiial.
1985 Jupilla, unc sien frere, le donna par conseal
De son pere Ricbier, le bon conte avregnaus
Qui fut de bonne escolle.
Jupilla de Colongne fut conte , sens fri voile ,
Et ses heurs apres luy par les sains de Nycolle.
1990 Al roiialme de Tongre ne fut puis en cherolle ,0 ,
La en fut desevree et ostee de rolle;
Car, si comme j'ay dit devant en ma parolle ,
La roiialme de Tongre duroit jusqu'a Baolle " ,
De Rens jusques a Trive le commans le roy voile;
1995 Jusqu'en Boeme ausi as toil de sa gaolle ".
Or en at departit une grande incolle 1S ,
Qui ains puis ne revint dedens son agricolle u ;
En temporal! teit de tant sa terre afolle,
Mains encor en at tant ne li grieve I amolle l5 .
2000 Ly plus riches roy fut de monde, la capitolle
Delle empire exceptee qui les autres tribolle.
Des autres souveraine est , et se les defolle ,
Et ne tint de nuluy, fors Dieu, une cybolle "
Vers le Dieu oil il croit, qu'est une bestiolle
9 Pour enlresait, entretanl.
10 S'agirait il ici du chier cent dont parle Ducange? Voir v* car us census.
" Bale?
14 Cage, prison. Cela veut-il dire qu'il avail juridiction jusqu'fn
Boheme ?
,s Incole, habitant (en latin incola ) , designerait-il ici le territoire?
14 C'est- A- dire : dedans sa propriete , sous son pouvoir ?
15 Pour amande t
16 Une ciboule, un objet de peu de valeur, comme plus haut : une
amande, etc.
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616
APPENDICE.
2005 Sus unc pileii drechiet plus hault c'une beolle '.
Ancors n'ont ly Romains leur confienche molle *
A la plus douche loy que le son de violle;
(Test la loy catbolique qui est ferme que colle.
Qui entre Dieu et bomme la pais ferme racolle.
2010 Bien temprement Paront a Romme en la trepolle 3 ,
Mains ains en sera mors mains homrae, pais n'en rigolle.
Sains Pire li aposlole y fut en la cytrolle 4
Prechant la sainle loy, dont la fause loy crolle
Par son sermon devin.
LXXll *.
CIs eavoto Mlas Pf«re !«■ trots dlaelples mm Qmrtmmmjn
por le foy eotholllce establlr*.
2015 Bone gens, se entendre me voleis, par sains Martin
Je vos diray cbanchon de mult grant bien ;
Car a temps que de Romme fut empereur Claudiin ,
Astoit sains Pire a Romme qui demonstroit le bin
Tot publemenl en rommant a peule sens latin.
2020 Soverain fut des apostles , tot sont a luy enclin ;
Poioir leur avoit doneit Deu qui d'aive fit vin.
Sains Pire l'aposlle , a cuy de Deu sovin ,
Envoiat par le monde tamains vesqae frarin ,
Precbier la sainte loy entre lcs Sarasin ,
2025 Qui ont mult convertit de peule de franc lin;
Sains Pire poin n'arestat le noble palasin.
Sor Tan L1I1 del nassencbe Jhesu-Christ,
Ensi comme en printemps, saint Pire ( l'aposlle ) print
Trois de ses disciples qui orent le cuer fin :
2030 Ly uns ot nom Euchaires, et l'atre Valeriin,
Li tiers olt nom Materne qui astoit suriin.
Se fist Eucbaire evesque par santisme covin ,
Et Valeriin diake , et del boin Ma tern in
Fist sains Pire subdyake, puis les mist a chemin
2035 Por aleir en Germaine precbier la loy crislin,
Affin qu'il poissent acroistre la foid cristoiene.
Or s'en vont li proidbommes, tos sens malvais engin,
Le chemin ver Germaine qui siet desus le Rin.
Trestot prechant la loy s'en vont par boin destin :
2040 Li uns 6 preche en vilhe, l'atre desos I pin,
Et l'atre enmy lcs champs desos chaine ou sapin,
Puis decha puis dela.
* Une perche. Dehou dans les glossaires.
1 S'amollit, se plie.
3 Ge mot serait-il la pour trepeil, I'endroit ou Ton torturait? Voir Du-
eange, v° Trepalium. Oopeut lire terpolle.
* Ge mot doit indiquer la prison Mamertine. Quant a Impression
cytrolle, serai t- el lc pour ciferne, et designerait-elle le cul de basse-fosse
qui compose la partie inferieure de la prison?
LXXIII.
Ansi comme li proidbommes, que Jhesus Unt amat,
S'en vont prechant la foy, les avint grant debai;
2045 Car en unc grant casleal sains Materne entrat
Con nomme Elyganoir, et la foy anonchai;
Mais une fievre fort a cuer si li tochat,
Que il tanloist morit dont mainte gens plorat.
De ses dois compangnons cascuns le regretat.
2050 Quant ilh l'orent aseis ploreit, on l'enterat;
Cascun des altre dois a Romme retornat
Sains Euchaire a sains Pire la chouse raconlat
Mult tres-dolentement; sains Pire en larmoiat
De la grande piteit, et puis les apellat;
2055 Unc baston pastoral que croche puis on nomat
Les at doneit erant, el bin les devisat
Qu'il al sepulcre sains Materne s'en irat
Cascun d'eas , et le corps sains Materne tocberat,
En nom del Triniteit apres le hucherat ,
2060 Et point ne soient en dolle , car il se releverat
Et XL ans apres d'eage viverat,
Por le XL jours qu'en terre esteit aurat.
Ly dois proidhommes 1'entendent, cascun soy relourna,
A la tombe Materne vinrent et puis on 1'ostat,
2065 Et saint Euchaire adont de baston le hurtat ,
Que sains Pire l'aposlle, comme j'ay dit, li cargat:
« O Materne, dist-ilb et mult bait escriat,
» En nom de Peire et Fils et Saint-Esprit qui al
» La Triniteit parfait qui tos nos sal vera t,
2070 » Lieve-toy sus, amis, bin en est temps huy ja. »
Atant sainte Triniteit teil miracle monstrat,
Ly corps four de sa tombe tantoist resuscitat
En joie et en desduys.
LXXIV.
CM recooclto satat laMHM.
La resurection Materne, sacbies tuys,
2075 Florist tantoist et portat noble fruys,
Car paiens a bapteme, aucbois que vengne mm,
VII«« 1III« et XII1I at enduys.
5 A partir dece couplet, jusqu'au I86 e , vient une autre ecrilor«oBp«
plus moderne que la precedenle. La copie est moins correcte; »e»j«»<
reserve de la modifier d' apres le maouscrit BR , quand il ne ««tw*f*
defaut; je suis deja prive de ce moyen de verification pour leseoaf^-*
72 , 73 et 74, qui manquent dans ce manuscrit.
6 Notre manuscrit porle Ion tempi $ que je me permets de chaofff F*
mettre ce vers en rapport avec celuiqui suit.
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LA GESTE DE LIEGE.
617
Sor la lombe sains Materne fat un mostire ■ construys ,
De resurecliou rapelle-t-on trestuit.
2080 Puis vont li trois prechant sicomme selles en puche;
L*un vint et l'atre vat, mult ont soffiers d'anuy.
Ensi convertirent granment de peule depuys;
Mais d'eas cbi vos lairay, si vos diray plus.
Ensi quMl vont precbant la loy de Deu d'atruy •
2085 Sor Tan LV1 a Romme Claudius,
Liqueis regnal adont Xllll ans et nint plus,
Le chinquieime empereire morit, si fut eslus
Son anneis fils Noiron, qui fut en tos mals duys,
Qui sains Pire et sains Pols fist fausement destruire.
2090 XIII ans regnat Noiron qui fut de tos bins vuys s .
Unc altre fils y olt qui olt a not* Granus ;
En Germaine habita la s'en alat confus,
Murdrir le voloit Noiron ses freire malastruys.
Cis Granus fondat Ays qui at noble refuys ;
2095 Elle siet en Germaine, la vinent par conduys
Cbiertains bangne de cbaude ay we dont li peule est esduys.
Mult grant temps de sa viie fut la Granus astruys;
De denirs ly costat Ays plus de quatre muis.
Ly Honx le destrurent, sicomme oreis despuis ;
2100 Mais Cbarlemangne apres le fist reconstruire,
Sicomme je vos diray quant la seiray venus ,
Soies en tos cbertain.
lxxv.
La famdadoai 4*Ays-la.Qrala.
Barons, celle citeit nomme ons Ays le Grain,
Car Granus le fondat, a Noiron freir germain :
2105 Chu est Ays-la-Capelle, par le corps sains Germain.
Or escuteis, signours , et me soies procbain *,
La pins belle mateire qui soil en monde bumain ,
Entendeis racompteir ou mult asteis vilain.
Sor Tan LXI que Deu , le rois balten 5 ,
21 10 Si nasqoit de la virgue comme nostre cbevetain,
Tot droit en marcbe aloit chevalcbant Gaduwain,
1 M outlier, monaster©.
* Je me permets de retrancher ici un s*il xo* plaist, qui ne sort qu'a
donoer au vers trois pieds dont il peut se passer. Atruy serait-il ici pour
attires* , pareillement , en oieme temps?
» Vuide, prive.
* Prochain est 1* equivalent de proxime, qui signifie aussi : parent, et
par consequent : favorable.
5 Haulain , superieur, le roi des rois.
6 Tot dans notre texte , ce qui n'a pas de sens.
7 Ce mot ne signifie pas ici : dedain, mais : irritation. Voir Ducangn,
v* dedignalio.
Conistable de Flandre ; avoec ly fut Ywain
Qui del conte * de Flandre fut maistre chamberlain ,
Et X altre Flamens parmy Tongre le plain.
2115 En Hongrie aloient parleir a soverain.
Hosteleis sont a Tongre j usque a lendemain,
Que ly soleas lusoit par le cacbye a plain.
Ne say-ge quelles parolles, queil fait ne queil reclain,
Trois cbevalirs Tongrois, qui ne sont pais vilain ,
2120 Ont li Flamens ocis, jamais ne seiront sain.
La justice les prist qui les at tost a tain.
Quant li rois soil le fait, si en olt grant desdaiu 7 ;
Des XII Flamens at les membres capitain
Osteis de XII corps, dont cascun mors s'extain 8 .
2125 Quant li conte de Flandre entendit le refrain,
Comment XII teils borames sont mors, si les at plain ;
Tos ses dieus at jureit que mais ne mangerat pain
En citeit ne en vilhe, por amorir de fain,
Fours qu'en tentes et en treis, s'aurat le fait grevain
2130 Vengiet et cbir vendut.
Lb c«erre ato FlaaWire et ale Tamer*.
Or escuteis avant, por le corps de Jhesus.
Clovis, le conte de Flandre, fut cbevalirs membrus;
A XL" bommes qui tos sont fervestus,
S'en vint en la roialme de Tongre mult agus",
2135 Une journee ardit et puis s'en est issus;
En Flandre retournat, et puis est revenus.
Je ne saroie dire por queil raison fist chu ,
Mais en regne de Tongre rentrat a mult grans bra.
Quant le rois Colongus en a le fait sehu *
2140 Ses hommes assemblat, si les at sus com,
Et at mult noblemen t ses paiis socoru
Droit en mois de septemhre, Flamens y ont perdu;
Se ne fuisse la nuyt tos fussent confondus.
Lendemain sont rengies que plus n'ont remanu ,
2145 Et s'ont Tun contre l'atre sur les champs esmeu.
8 Sans doute pour : s'eteint.
9 Je retranche ici les six vers suivants qui ne sont pas dans le manuscrit
BR, et qui ont bien certainement ete intercales parun copiste intntelli-
gent.
Lyqaeia amat hononr et regnat XV aaa lot dm,
Et format A grippe en Germain* on li paiia eat drue,
lot da ayme at Coloogne l'at appelee 11 roia aprea lay
Par la eoneetUe de Jopllla one ain fraira membroi,
Et de eon pcire Rich Ire le boin conte Prebna
Adont II roll Colongna.
78
618
APPENDICE.
As cops de lanches ont fait grant noise et grant bra,
Et d'une part et d'altre olt asseis d'abaltu;
Apres les lancbes ont sachtts les brans tot nus.
De Flamens sout Tongrois firement assailhu,
2150 Et li nobles Tongrois s'ont mult bin defendu,
En Flamens sont feru par si grante , viertu
Que li plus preux en est de cuer tos esperdu.
Rois Golongus le caple a mull bien maintenut,
Si at Tremus ses flls qui fut prinche absolu.
2155 Cis n'encontre Flamen ne soit tos porfeudu;
llh decope ces tiesles, hyalme, balbier et escu,
Tot gette encontre terre, quand bin l'alrconceu,
Par mult virtueux tour.
La fcatalfc*.
Forte fut la batalbe et pesans li estour.
2100 Tremus ly jovene roys seiant en misadour,
Tient son espee nue a la loy de signour *.
De Bruge at consceut unc riche vavassour,
Le hyalme li fendit eramment sens demour,
Jusque en dens li mist le boin brant de colour.
2105 Ly conte quant le voit s'en olt al cuer dolour,
En caple se ferit trestot parmy l'erbour,
Dois Tongrois at ocis li conte a ceil relour,
Flandre escrie a sa vois : « fereis my gens d' honour,
» Desconfis sont Tongrois, noslre serat li jour. »
2170 Atant fieri unc vasal qui fut de grant valour,
Hyalme ne jaserant ne li ont fait socour,
Jusque en la poitrine le porfent ou entour;
Le second et le thire ocist li boin contour.
Quant Pa veyut Tremus a luy a fait son tour \
2175 De Fespee le fiert unc cop qui fut maiour,
Hyalme et coeffe trenchat li vassals de savour,
Et le neis li copal qui fist a conte tristour *;
Apres desquent Tespee sus le cbeval gringnour,
Tout parmy le trenchat, si l'abat en langour.
2180 Flament sailhent avant, res tore nt ' leur sangnour,
Ei si Pont remonteil; mais Tremus at de Tour
Ocjs plus de XL par forcbe de vigour,
Ains que soit remonteis li conte en coreour.
La recomenche estour qui fut de grande ardour;
1 Se ru$te. BR.
1 A la loy de poigneour, BR.
3 On peut lire cour, ce qui ne presente aucun sens a mes yeux. A luia
fait ton tour, peut signifier : il s'est tourne ver$ lui.
4 Mot supplee d'apres le manuscrit BR.
5 Rescoui ont. BR.
2185 Ly plus preus des Flamens at de morir paour,
Et dient que Tremus est de monde la flour,
Et nuls affierl a ly.
Mult fut puissans Tremus, corageux et hardi,
En Testour soy maintient comme cbevalirs genti,
2190 Qui ilh ataint al cop n'est mie ses amy ;
Et Flamens ne se sont nullement alenti ,
Remeneil ont le conte qui fut nomeis Clovi,
Qui olt le neis colpeit s'en olt le cuer mart
Quant li Flamens voient le conte evanuy,
2195 Je vos dis ° de ciertainJttop en sont mal balhi,
Et nonporquant se sont de defeudre aati 7 ;
Li Tongrois ansiment ne sont mie fainli.
La fut restour morteis et fire li estrif,
La veiessies barons de tos costeis flastri ,
2200 Et tant piet et pongne colpeir taut chief ansy,
L'un mort par dessus Fatre trebuchire en lain;
Ly rois Golongus est sus son cbeval flori ,
Le castelain de Lile — nomeis fut Savari —
Ferit de brant d'achire sor son hyalme bruny;
2205 D'armes nulle qu'il ait ilh ne fut garanti,
Car jusque a menlon le colpat et fendil;
Puis at ferut Huar li signour de Cuchi,
Le brache atot l'escu en Terbe li guencbi,
Et le lire et le quart at li boin rois ocbi.
2210 Quant Flament l'ont veyut si fut d'eas asalhi,
Espeis li out lancbiet et ricbe brans forbi,
En plus de XXX lies Font navreit el mal my,
Son chcval ont ocis si que li rois chayt;
Ains qu'il soit socorus mult grant paine soffri ,
2215 Et si olt mainte plaies.
Fortement fui navreis, je ne le cheleray,
Ly riche rois tongrois qui durement s'esmay ;
Retenus fut et pris et loies d'onne faie •,
Et Flamens Temminent, par decoiste une baye.
2220 Tremus les encontrat qui de volenleit gaye;
Quant recognut son peire al bien frapper s'ensaie ';
6 Mot supplee d'apres le manuscrit BR.
7 Efforcc. Roquefort donne le substantif aaiieon.
8 Faitee dans Roquefort. Une bande d'ctoffe, et probabtaneal iei "^
quelconque.
9 S'essaye.
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LA GESTE DE LIEGE.
619
En Flamens se ferit, leur deserte les paie;
Del espee jowoit comme enfant d'onne caie ! ,
Tiestes, pies et bras de leors corps detrencbe et raie;
2225 Plus toist en ocist XVI , la chouse est toute vraie,
Que li mangons unc buef trestot acoreit * n'aio;
Li altre s'enfuent, le roy lassent en braie 8 .
Tremus le remontat , livreit Tat ty uns braie 4 ,
Si le fait reconduire a Tongre sens delate,
2230 Puis jure tos ses dieus : « jamais ne fineray
» S'aray vengiet le honte, car tant en ocbiray
> Que covrel en seiront li champs, ou je moray. >
En 1'estour est entreis, si ferit Ermelaie
Neveur a conte flamen , et dit : a Je toy rend ray
2235 < Merite de boiu fait que ta gens de Courlraie
« Ont fait a roy mon peire , ja le toy mosteray. »
Atant le flert 1 cop de son espee baie ,
Le byalme li trenchat comme piche de saie ,
J usque en pies li mist , ensi tout le desraie :
2240 « Va-t-en, ce dist Tremus, plus ne toy toucheray,
» J'ay mestire allrepart, portant m'esploiteray,
» Car trop me giest en cuer li despit que je aie
> Veyut feire a mon peire. »
Forte fut li capleis et la batailbe ameire.
2245 Tremus entre en Testour en cuy bonte s'apeire 6 ,
Dedens celle batailhe at il fait les rens claire;
Ilh encontra Guichart le prkicbe de Yaucleire,
De braiit d'achire le flert, si bien le vout frappeire
Que le chief o le hyalme fait sus Perbe volcire;
3250 Puit at ocis Gandus qui fut son germain freire ,
Et le tire et le quart fail-ilh jus aterreire 6 ;
lib ny at espargniel conpangnons nc coufreire,
Trestot getle sus Terbe et parins et comeire.
Tant fut Tremus puissans, nul altre ne conpeirc
3255 A sa grande proeche, en monde n'at son paire;
Contre ses cops ne dure hyalme, escus ne bocleire 7 ,
Tot detrencbe et con font quant le puet attrapeire;
Le corps olt et les brais fail de noble mateire,
Car sa forche ferat Flamens mult tormenleire 8 ;
1 Jouet. Coyau dans Roquefort.
2 Je suis dispose a lire aoreil , mot qui a Liege signifie : fcndre la
gorge.
* En paie, lit-on dans le manuscrit BR. Ne faut-il pas lire : sent braie,
puisque dans le vers suivant Tremus lui eo rend unc?
4 Sic pour I'a-t-il. Notre texte porte : at tybue draie.
2260 Ly Flamens le prisent, cascun jure sa meire
Mult doit rois Colongus unc teil vaseal ameire,
Car bin seiroit merite qu'il fut I empereire.
Ensi dient Flamens, clerement les appeire
Que li estour por eas trestot ades empeire ,
2265 Et que tos en aront vergongne et vitupeire,
Donl sailhent en Festour, mils d'eas ne soy diffeire;
La recomenche guerre d'angouste et de miseire,
Mais Flamens sont lasseis.
Lasseis sont li Flamens et mult cspaveuteis ,
2270 Por les grans cops Tremus sont tos desconforteis ,
Trestot en combatans sont I pos reculeis ;
Et Tremus les assalt, mains en at aflfoleis.
Li senescals de Bruges astoit tos abomeis ° ,
Quant il voit desconus ses Flamens natureis;
2275 Tremus quidat ferir, mais Tremus s'est hasleis
Le senescal ferir sor son hyalme gemeis ,
L'espee li convoie j usque en my del badreis.
Quant Flamens voieut chu en fuite sont tourneis;
Ly Tongrois les cachent qui en tuent asseis ,
2280 Et puis si sont a Tongre noblement re tourneis,
Oil se sont rchaities et mult bin sejourneis.
Tremus trovat son peire, qui fut si fort navreis
Que mais ne garirat; en langueur est entreis,
Dedens grans terme apres ne fut armes porteis;
2285 Mais puis perk en guerre, ensi comme vos oreis ,
Malade alat en guere si fut plus tost quasseis.
Et Flamens desconfis sont en Flandre raleis ,
XX m hommes ont perdut , et Tongrois aloseis
Ont perdut XH m , rescript Test aprouveis
2290 Or escuteis, singnours, por Deu de majesteit.
Tremus li jovene rois at tot ses dies jurcit
Que de Flamens feroit si grans mortaliteit,
Que V c ans apres en sarat on parleis.
Ly conte de Colongne fut ses oncle charneis,
2295 Jupilla li gentis par Tremus fut mandcis,
La guerre li escript , et la grans faseteis
Que Flamens li ont fait. /
5 Apparait?
6 Eeraser, detruire en les mettant a bas. Du latin atlerere.
7 Bouclier.
8 Vers supplee d'apres le manuscrit BR.
9 Abatlu , decourage. Abomer dans Roquefort. Le manuscrit BR porte
abolleii , enflamroe.
620
APPENDICE.
Tremus li jovenes rois ne fait mie long plais,
A son oncle mandat : « coment par faus alrait
2300 » XII Flamens a Tongre furent a bosteit trait,
» Qui trois chevalirs ont ocis et tos detrait ' ;
» Al fait furent tos pris, jugement en fut fait,
» Et tos par jugement ocis pour leur forfait;
» Dont ly conte de Flandre, cuy li fait semble lait,
2305 » En regne de Tongre est entreis par mal agait,
> La terre at exilhiet , asseis nos at meffiait ,
» Mais al deirin est ilh par estour lot defait,
» Et li rois vostre freire fut en 1'estour for I rait.
» Ly maistre soy doblent que jamais santeit n'ait :
2310 * Si vos prie , si fort que vos corps m'amour ait,
■ Que ?os gens assembleis, et les soies extrais
> De vos paiis erant , car je suis lot parfait
» Por mon honte vengire et le mien grant tort fait.
» Eulreis erant en Flandre, mon corps y entrerait ;
2315 > J'ay voweit a mes dies ou li mien corps morait,
» Ou des Flamans puans grande vengancbe aray. »
Quant Jupilla entent le torment, ne delait,
Ses hommes assemblat, et dist : « en Flandre yray,
» Et trestot le paiis en carbons meteray. »
2320 Ses bommes assemblat qui sont teil et si fait,
Trestotes ses banirs at novelle refait,
Ses armes noblement y at le conte portrait ,
Si bin ja ne seiront par nulluy con tre fait;
Puis raontent a chevals, Tuns crie et I'atre brait
2325 Parmy le sablonois.
LXXX1II.
Or s'en vat Jupilla le conte Golonois *,
A XX n bommes armeis sor les chevals bongrois ;
D'altre costeit chcvalche Tremus li jovene rois,
A XL m bommes de guerre convoitois.
2330 En Flandre sont entreis, mult y olt d'Ardenois;
Maintes vilhete ont arses qui astoient de bois,
Tenremonde ont assiese , la sojournont II mois.
* Detruit.
* Benois pour beneois dans notre texte. J'ai donne la preference a la
version du manuscrit BR, paree que Jupilla est designe plus haul com me
romle de Cologne.
5 Maroi$ doit avoir le sens que nous avons precedemment assigne a ma-
rine, marais. Quand le Irouvcre a besoin d'une rime, il change la termi-
Quant li conte de Flandre entent de chu la vois,
Ses bommes assemblat; si approcbat Tongrois.
2335 Tremus quant voit Flamens si criat : « A harnois; «
Armeis s'ont et rangies trestos desus I'erbois,
Puis courent sus Flamens qui sont rangies estroil
A cops de lancbes fut li estour mult matois,
X milb en fut ocis par desus le marois *,
2340 Apres les lancbes ont trais les brans vienois;
La comenchat estour trop pessant et mortois.
Par Pestour va Tremus qui ne fait serventois;
Tot detrencbe et ocist, bommes et palefrois;
lib encontrat Symar qui fut devers Artois,
2345 Unc teil cop li donat sor l'elrae maginois ,
Que trestos ses blasons ne li valent II pois,
Jusque en piet le fent, si chaiit mors tos frois;
Puts entrat en 1'estour oil fait mult grant tournois.
Li conte Jupilla , al brans poitevinois,
2350 Cope Flamens parmy chi unc, chi dois, cbi trois.
Flamens soy defendent a forcbe et a. esploit ,
Bonne chire ont monstree.
LXXX1V.
Itaaa.
Grande fut la batailhe et dure le mellee;
La banire de Tongre at Langanoir portee ,
2355 Qui chevalir astoit de grande renomee ;
Ilh detrencbe Flamens de grande randonnee,
Avoec ly cent preus vasals qu'ont bonne pensee
Que la banire soit bin justement gardee.
Trestoute jour ne fut la cople * desevree,
2360 Ains soy tinreut ensemble comme gens bonoree.
Chu at la gens flamende forment debaitee,
Car li estour portal ou la cople est tournee;
Sont Flamens reculeis plus d'nne arbalestree.
Tremus fut d'altre part qui donne grant conlee *,
2365 Sane et cervel abat trestot parmy la pree.
Clovis li conte de Flandre at la chouse esgardee,
Sachies certainement que poin ne li agree ;
En 1'estour voit Tremus qui maine grant buee,
De son neis li sovient que Tremus a Tespee
2370 Li olt jadis copcit, s'en at le chire iree ,
naison du mol, et tout est dit.
4 Le manuscrit BR porte colpe , qui ne me donne pas un seas applkab*
ici. Cople, au cqntraire, donne le sens que voici : le couple ( Trenai €t
Jupilla) ne se separa pas de toute la journee.
5 Sans doute pour collet, comme porte le manuscrit BR : grind «*?
d'epce.
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LA GESTE DE LIEGE.
621
Loe lanche enpongnat qui fat grosse et quaree ,
Si brochat a Tremus; mains rins ne li valt nee,
D'esquermie li fait Tremus la trestournee ' ,
Et se li at sa lanche en dois tronchon copee ,
2375 Puis le ferit sus Telme que la coffe at fausee,
Une oreilhe li at copeit sins demoree ;
Li conte sentit le cop si s'enfuit al valee.
Quant sa gens le voient si fut desbartee ;
En fuyte sont tourneis Flamens a celle entree.
2380 Onque ne fut plus tost batailhe definee,
Che fut oevre piteuse.
LXXXV.
Ilea.
Flamens fuent trestos sicomme gens honteuse ,
Et ToDgrois li chachent de volenteit y reuse,
En fuant en ont mors, de mort mult doloreuse,
2385 Je croy plus de quatorze charees plantiveuse;
Et puis sont retourneis menant vie joieuse;
Tenremoude assailhent sicomme gens sangueuse,
Ly citains Tont rendu t, trop les astoit nuseuse
La guerre a maintenir qui tant fut tenebreuse.
2390 Tremus mist asseis gens dedens la vilhe useuse *,
Puis alat a Aloust la vilhe cremeteuse,
Et si Tat assegiet desus l'erbe verdeuse.
Quant li conte de Flandre sot l'oevre pervilheuse ,
Ver Galles chevalchat, la citeit deliteuse,
2395 Qui fut Lulesse dite, enlrat mult avyeuse *,
Main tenant le nomons 4 Paris la savereuse 5 .
Et li conte montat dedens la sale ombreuse;
Le due Gloverius en sa chambre amereuse
Trovat, se li requist a chire frumeteuse e
24O0 Qu'il li fache socour, con t re gens despiteuse
Qui sont nomeis Tongrois, qui par cause envieuse
Li ont gasleit sa terre qui est delicieuse.
Respont li dus de Galles : « Par Venus le corteuse ,
* C'est le substantif du verba trettourner auquel Roquefort donne la
signification de detourner, ecarter, etc.; seulement je ne me charge pas
d'expliquer la manoeuvre signalee ici par le trouvcre.
9 Pour oiteute , lache.
3 Plutot awireute. Voir notre glossaire de Jean de Stayelot, v° awireux.
<* Nous serions dispose a lire nome ont, nomme-t-on.
* Savante? Nous avons deja rencontre cette expression, v. 1319.
6 D'un air de mauvaise humeur. Roquefort donne le substantif frume.
7 Pour ne com pete , e'est-a-dire : ne tous deplaise.
* Le manuserit BR porte avoir eu$e, qui peut signifier : riche. Ewxreute
peut etre ici pour awireute, qui se trouve deja au v. 9395.
9 pour rei$e, expedition militaire, et aussi armee.
» Sire, le tors est votre contre la gens tongreuse;
2405 » Bin en suy enfourmeis et portant ne vos peuse 7 ;
f Ja ne vos ayderay, trop sont gens orguilheuse.
» Tremus, le fils le roy, at proeche ewireuse 8 ;
» Ne durereis a luy, trop est large sa reuse 9 ;
» Mais de faire le pais qui vos est glorieuse
2410 » Me voray entremettre, sMl vos semble estre preuse '
» Por vos a vostre esgare. »
LXXXV1.
Quant li conte Clovis, qui fut ferant " vilhars ,
En tent le due de Galle, si dist : • A mon regare
» Est mult bonne la pais, sire, tant que m'apare;
2415 » Or le faite, beas sire, ou ja seirat trop tare. •
Respont li dus de Galle : « Vos asleis un cokaire
» Qui contre les Tongrois cuydies gelteir hasaire ". »
Atant montat li dus, o ly s'en vat Fokare,
Tongel et Arscephiu, et le princbe Robare;
2420 A Tenremoude vint, se li at dit Frongnare
Que devant Aloust est Tremus a grant estaire.
Ly dus y chevalchat qui bin semble pilhare ;
Sa venue a Tremus at compteit Ysonare ,
Ly sire de Beri fils al prinche Bondare.
2425 Tremus alat encontre, o luy Huge et Arnare,
Savaris et Jacob, et son fils Symonare.
Mult honorat le due, onque n'en fut cohare;
Et li dus le regarde qui fut vilhe et liare < 3 :
« Tremus beals fils, dist-il, tu moy semble I lupare, '
2450 » Tu as chire griffangne, tu es tiers et gailhare;
» Fouls est li conte flamens et tos si " achopare ",
» Qui onques enprist guere a unc si fait renars.
» Je ving faire la pais, li conte est I tuilhars ,s ;
» Raleis en vos paiis, tres-noble drumedaire,
2435 » Vos asteis bien vengies de trestot votre essare u :
» Je le vos prie, sire , or ne soies pailbare ";
10 Pour preu , prudent.
11 Dur, orguetlleux. C'est la traduction de ferox. Ferain dans Roquefort.
11 Roquefort donne le verbe hater, irriter, insulter. Gelteir hataire vou-
drait done dire : faire injure , ou bien : faire peine , en supposant que
hasaire soil ici pour hatehee , que donne egalement Roquefort.
15 Ft7Aeesticipourvie/ t etnousavonsdeja rencontre le mot bars a u v. 1 1 11.
u Pour tet.
o Quid? Y aurait-il la quetque allusion aux chopineurt de biere?
16 Le manuserit BR porte cohart, que je comprends, tandis que je ne
com p rends pas tuilhart.
17 Substantif forme du verbe ettarter, ayant ici le sens de : dommage cause,
is Plutot pilhare, comme plus haul au v. 949*.
622
APPENDICE.
» Doneis-moy celle guere, et que chis soil fausaire
» Qui recomencherat, et si soil sus la hare,
> Et seryage hiretaWe. »
•• fat faite la pals.
2440 Tremus li jovene rois, qui tant fust venerable,
Entent le due de Galle qui chouse covenable
Ly dist, et li devise une pais raisonable.
A la pais s'acordat, mais qu'elle soit es table;
Por Tonour de boin due l'otriat tout sens fable.
2445 Ensi fut confermee la pais, qui honorable
Fut por Tongrois, et fut por Flamens profitable.
Onque ne le brisat Clovis li adurable ';
Mais se fils Juliiens le fut tote muable,
Etsi le brisat puis, sicomme seray disable.
2450 Or comenche chanchon bone et mult veritable;
Se vos voleis entendre, par Deu l'esperi table
Malnte aventur oreis, avoeque lamains notable f .
A temps dont je parolle li trois proidhommes feable :
Euchars, Valeriiens et Materne I'amiable,
2455 Precboient en Germanie notre loy virtuable 3 .
A mains proidhommes fut leur boin dis agreable,
Que mult s'en baptisat, qui furent caritable,
Por les tres-sains miracles que Dieu, li permanable,
Monstre oviertement entre la gens mor table;
2400 Les meseals sanioient, et la gens non veable
Reluminoit cascun, et altre especiable
Miracle precieus fut par eaus Dieu faisable.
La citeit de Trive ont convertit, oh regnable
Fut Euchars comme evesque loials et favorables,
2465 Valeriiens comme dyake qui mult fut entendabla,
Et Materne subdyake, li proidhomme riaturable
Que Dieu paramat tant.
lxxxviii.
La batallaa a Japrelle.
Li trois proidhommes sains vont nostre loy prechant,
La grande citeit de Trive out convertit erant;
2470 Euchars en fut evesque, sicomme j'ay dit devant,
1 Pour adure , iofatigable , constant.
* Tamaim pour maint$. Le manuscrit BR porte : avec aultre notable, ce
qui me parait valoir mieux.
5 Pour vertueuu.
4 Notre manuscrit porte /t'ei're, voleur, version qui ne me parait pas
conrenir tci. Je prefere celle du manuscrit BR.
*j De suite, a V instant me me.
Le peuple le serrit qui mult l'astoit amanL
Par leur parolles font li proidhommes atant
Les ydolles cheioir, qui se vont debrisant;
Tant miracles par eas alat Deu demonstrant,
2475 Que VII lieves * atour se vont tos baptisant.
Sor Tan LXI1II que Dieu, li rois amant,
Nasquit de sainte Viergue , morit Clovis li grant
Qui de Flandre fut conte; Juliiens li nonsachant
Fut conte apres li, qui fut to pais feasant;
2480 Car al annee apres fut sa gens asembtoot ,
Si enlrat en paiis de Tongre maintenani *.
Quant li rois Colongus entendit le semblant,
— Qui mult malade astoit , si alloit languissant,
Lontemps n'olt porleit armes — ses hommes va mandani;
2485 Luy et Tremus son fils sont Flamens aprocbant;
En un plain les trovat pres de Tongre seant,
Oh puis fondat Tremus trois vilhes en estant :
Vierney • et Skendremal fut le dois appellant,
Et la tierche Jupprelle, encor sont la stesant.
2490 Quant li rois Colongus vat Flamens avisant
Par dedens son paiis, si les vat sus coarant;
Flamens s'ont defendus as brans d'achire lusaDL
La olt fire batailhe et estour mult pesant,
As cops de lanches ont rompu main jaserant,
2405 El mains escus roons.
LXXX1X.
Itmwm.
Al abassier les lanches olt grande occisjoo ;
Tremus escrie Tongre qui fut mult noble hons,
Puis dist : « Tos y moreis, fauls trahitres gtotons,
» De vos ne prenderoie ne somme ne ranchoo;
2500 » Le pais aveis brisiie , bien veotr le puet-on,
» Jamais Unt comme je vive sereis en grant tenebon T . »
Juliiens li conte Flamens entendit les raison ,
Se son pere ne venge, ne se prise 1 botoo,
A cuy Tremus colpat le neis sor le men too;
2505 Uh brochat le diestrire des trencbans esporons,
La lanche fait branleir destors le confanon '.
Tremus, quant le perchoit, ver luy vint que lyon,
6 Ce nom , qui se presente deja dans la chronique en prose, 4ei» «t»
mal ecrit ; nous avons suppose qu'il designe Htrmm. Voir pins aaat U
note 1 de la p. 466.
7 Tenchon ne doit pas avoir le sens de : qnerelle , combat , que loi ***>{*
Roquefort , car iei le trouvere veut dire prectsement le contraire. II !»>
prendre ce mot comme le substantif du verbe Unctr, defendre, protefw
8 Le gonfanon deploye. Voir le glossaire roman dt Ducange, f drnttrin-
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LA GESTE DE LIEGE.
623
Sur les escus se soot asseneis li barons :
Li conte Flameos brisat sa lanche en 111 troncboo ,
2510 Puis soy lassat cheioir li trahitre felon
De son cheval a terre, puis salt sus de randon,
Entre Flamens se muche dedens la caplison ;
Et Tremus est entreis entre Flamens bricons,
Deistre et seniestre abat par desus le sablous.
2515 Flamens sont reculeis a eel establison \
Tongrois ont retenus bien LX prisons ,
Et si en ont ocis a mult grande fuisons;
A Tongre ont les prisons tramis sens targison ,
Noble et vailhante gens sont tos li compangnons;
2520 Flamens n'y acontent valissant 11 ongnons,
Ains maintinent Festour comme encresteis * griuous ,
Felons et plaius d'errours s .
Signours, or entendeis; que Deu le Greatour
Vos garde de tos mals, et fache teil socour
2525 A trestotes vos armes, que de grans tenebrours,
Del abysme d'ynfeir et del dyable et des lours 4
Les garde , et les otroie trestotes les honour
De la santisme gloire et a tos successours.
S'oreis une batailhe dont grans est li estours.
2530 Sachies que li Flamens perdissent leurs atours,
Quand Arnalius de Brughe n'y a faict Ions destouis;
Dedens Testour entrat mult fut grans sa vigours,
En sa compangne avoit X m pongneours ,
En caple se ferit oil sont li plus maiours;
2535 As cops de lanches ont abatut mains contours 5 ,
Apres les lanches ont trait les brans de colour,
Les Tongrois ochlent qui mainent grand dolours;
lib ont ocis Gandus , de Gerle ' fut signours
Bail hire et advoweis, car sachies a ces jours
2540 Fut del regne de Tongre Guerle tot sen freours 7 .
Jusques a Tremus ont li fuyans fait retours ,
Et Tremus si esgarde Arnalius, qui destours
Fasoit luy et les sins a Tongrois de valours.
Celle part at brochiet li gentis vavassours;
1 Devant cette compagnie de gens armes. Establie dans Roquefort et
Ducange.
9 Pour etscrefe* , pourvus d une crete , en latin crUtati.
3 Sans doute pour trour, colere.
4 Leurs. Lour* pour la rime, comme precedemment (v. 648) loin.
* Comtes.
« Gueldre.
2545 Arnalius sparest a cuy n'olt nul amours,
Sor son hyame le fieri, bien le virent plusours
Que par arme qu'il ait, par dobte ne cremours ,
Ne polt avoir garant ; Tremus la flour des flours
L'at fendut jusqu'en piet, mors l'abat sens demours;
2550 Les altres corit sus, si les met en langour
Sens nul delaiemenl.
En ces noveas venus, dont je fay parlement,
S'est Tremus enbatus mult ahireement ;
Galerant de Tournay et de Lile Clement,
2555 Saldus de Mont-en-Peure et de Brughe Vincent,
Et plus de XXXI 11 de cesti noble gent
At la ocis Tremus, sens nul arestement.
Mult forment Pont navreit ansy certainement,
Si ont son chevals morl desou luy proprement,
2560 Mais ilh sailbit en pies, tient le brans qui respleni ,
Sor les plus drus feroit par teil devisement ,
Qu'il en abat Xlili trestot incontinent;
Puis at escrieit : Tongre. Ses peire bien l'entent,
A X m Tongrois vint pongnant briefment,
2565 Et remonta Tremus qui sayne dinemenl;
Mais onque por chu ne volt guerpir le capleraent ,
Ses plaies restrendit * et rentrat teilement
Dedens la batailhe, qu'il recule Flamens :
t Barons fereis, dist-il , desconfis sont. » Puis fenl
2570 Hyalme et escus lusans, si nommes tendammeni *
Le siwent de mult pres , la tornat li content ;
Desus Flamens, qui sont esmaiis grandement,
Rois Golongus li vies soy maintient gentimenl,
Flamens ocist a forche , mult leur fait de torment;
2575 lib encontrat Juliiens, le conte apertement,
Li donne I teil taton l0 que le hyalme li fent ,
La coeffe li fausat, chaire et cheveals li prent,
Li sane en court a terre , Terbe en rogist forment.
Quant le conte le voit tos li cuer li esprent,
2580 Ilh slrent le brans d'achire.
7 Frayeur, crainte. Freor dans Roquefort.
* H fit bander ses plaies en y appliquant un restringent. Voir Ducange ,
v° restringitor.
9 Avec tension , effort , for lenient.
io Pour taftn, coup, qui ne se trouve pas dans Roquefort, mais dans
Ducange , v° lata.
'
624
APPENDICE.
J aliens li coute de Flandre, en cuy n'oit c'a hirier ',
Fiert le rois Coloiigus sor son hyalme vergier,
Pires et flours en at abatut en Tierbire ,
Tot panny le fendit comme 1 rains d'olivire,
2585 Puis as faseit la coeffe de bon habier doblier,
Dedens la tieste entrat; le roi se trait arier,
Chu li at fait unc pou sa vie relongire ,
Car de tel cop morut anchois le mois entire.
Atant en vat Tremus qui voit le conte lodire ■ ,
2590 Teil cop li at doneit le hyalme li vat partire ,
Chairs et cheveals li rase, tote gette en sablier,
La maselle et surchil fait trestot trebuchire ;
Ly conte se Iait cheioir qui fut I pauthonire ,
Ensi comme il fust mors se giest sens redrecbier;
2595 Tremus cuyde mors soil, en l'estour vat lanchire,
Si comenche a trencbier tieste et banepire ;
Mais quant Flamens voient Julien sor le sentire ,
Tourneis sont et enfuys , n'y at nul recovrier.
Et Tongrois en fuyant en tuent trois milbire,
2600 Jusques a la vespree ne finent de cacbier,
Et puis se vorent tos a Tongre repairier,
Oh temprement morit Colongus li princhier.
Dolans en fut Tremus, si jurat sens targier
Tant qu'il vive vorat les Flamens guerroier.
2605 Coroneis fut a rois de Tongre l'iretire 5
Tremus li rois diieseime, qui fut boin chevalier;
Ne regnat que trois ans, si comme oreis nonchier,
De quen 4 che fut damage.
Signours , or escuteis por Deu et por s'y mage.
2610 Rois de Tongre diieseime fut Tremus li marage ',
Onque Flamens sens guerre ne furent son eage;
Mult gueroiat Julien, qui giest desus l'erbage
Navreit mult durement; mais li cohars savaige
S'en alat tot par nuyt, par plaine et par boscage,
2615 Tant qu'il revint a Bruge en son plus maistre hostage;
Ses plaies fist saneir dedans la sale ombrage,
1 Le text© porte en tin mot cahirier ; mail le manuscrit BR ecrit : que
yrier.
5 Terme de mepris dont Ducange indique le sens, v° lodia.
3 L'heritier.
* De quay. BR.
* Marage doit avoir la meme signification que mayrini du v. 543.
Mult manache Tremus dont ilb n'est mie sage,
Car ilh le dolte plus que son maistre li page.
Et li boin rois Tremus n'y at fait arestage,
2620 Ses hommes assemblat par tout son hirelage,
Siisante milhe en fut qui sont de grant corage;
Sa banire lievrat a Simon de Brelage ,
Qui fut prinche d'Asterne. 6 , — qui fut grant sangnorage,
Que la conteit de Loz nomons en nos lengage
2625 Al temps de maintenant; sachies tot sens falage
Que del regne de Tongre astoit par avantage. —
En Flandre est en t re is, si at pris le Hvage,
Toudis T solonc la meire chevache a grant barnage;
Ilb aseghat Marlines et le mist en servage
2630 A roialme de Tongre, par son grand vaselage,
Qui pres XII« ans demorat puis en gaige,
C'onque a conte Flamens ne volrent faire homage;
Or est al conte de Flandre maintenant par vendaige.
Or escuteis, barons, por les sains de Cartaige.
2635 Tremus at assegiet Tenremonde en praage,
Et si Tat conquestee d'assalt, a fire visage
Tremus li noble rois.
xciv.
Item.
Tenremonde est conquise oh li gens sont Thiots;
Rendus sont a Tremus le valhant rois tongrois,
2640 Homage li ont fait, puis s'en vat demanois :
Courtray, Aloust et Yppre, et mains nobles terrois
At tout conquis Tremus, nuls ne li est renois*;
Jusque a Bruge est venus, desus le sablenois
At fait tendre ses treis d'esquerlate a orfrois.
2645 Tremus a voit I fis qui fut preux et cortois;
Cornulo fut nomeis, boins chevalirs adrois.
Tant que Tremus son peire fut a Bruge seois,
Ardit-ilh Lile en Flandre a XX 81 Ardenois ,
Et tot le plain • paiis mist-il en grant anois;
2650 Puis retournat a Bruge oh Tremus fut I mois,
Ains qu'il ewist batailhe a Julien le malois.
^ Or avint que sor Tan que Deu le benois
Nasquit virginalment LXV1 , anchois
Que fut temps de dyneir, de June le jour trois,
2655 Issit Julien de Bruge a mult noble conrois ;
• Offeree. BR.
7 Notre texte porte : condut , sans doute pour e'on diet; nous dooiwM U
preference a la version du manuscrit BR.
8 Facheux , opposant. Renot dans Roquefort.
9 Plat. BR.
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LA GESTE DE LIEGE.
625
Les Tongrois assalhit qui avoienl leur harnois,
Sor le champs sont rengies seans sur boia palfrois ,
Les laDChes ont bassies as pingnoncheas uorois.
Al asserableir des lanches y olt mull grans tournois,
2660 Mains hommes y fut vierseis qui fut ocis tos frois.
Apres les lanches ont trait les brans vienois ;
La veissies estour orguilheus.et mortois,
Tant piet tant pongne y olt copeit a ces espois *,
Ses resnes traiennant vat mains chevals bongrois
2665 Qui leur maistre ont perdut.
xcv.
Batelfce devaat Brag*.
Forte fut la batailhe et mervilheus li bus ■ .
Nos loials Tongrois sont richement detenus,
Car li Flamens sont bin le doble et asseis plus;
Mais ce ne sont pas gens d'estre estour maintenus *,
2670 Uh n'at plus cohars prinche en monde comme Julius
Qui fut conte de Flandre , ilh jowe de refus.
Par la batailhe vat li vailhant rois Tremus ,
Del brans d'achier detrenche les chaus , les cavelus ,
Tot gette contre terre cbu qa'il est conseus;
2675 Flament le dobtent mult, ne rose attendre nus :
c Fereis barons, dist-il, li Flamens sont vcnkus. »
Adont feroit Tongrois qui sembloient yrascus.
Dieu! la fut tant barons a la terre abatus,
Tiestes et ptes et bras copeit et getteis jus,
2680 Qui regardast Tremus qui le brans esmolus
Maine fortement, et son cusin Casorus,
Cornulo le sin fils , et de Mes Arnalus.
Flamens ont reculeit, adont n'est arestus
Cornulo li damsial, V* hommes eslus
2685 At pris en sa compangne passans leis I palus,
Fiert ens Flamens al dos , ensemble sont tenus.
Tant de barons aba lent de Flamens malastrus
Que mult petit s'en fait ne soient recreus ;
Julius li fas conte ne s'est mie aparus,
2690 Qui par dedens restour se tient entre ses drus.
Mai se sont proveis ciertes li felons Flamens tus ;
Al estandar de Flandre est Cornulo venus,
1 Esptois. BR. Espois, que je conserve, doit avoir le sens assigne par
Roquefort a espie , hallebarde , pique , etc.
1 Bus doit etre ici pour hustin, combat, melee.
* Eire pour avoir, comme nous l'avons deja souvent rencontre.
4 Qui sont accounts ensemble.
5 Participe passe de destordre, deployer, tirer.
Luy et se compangnons rassailhent par argus,
Si ont mains bommes mors.
xcvi.
2695 Cornulo li damseal qui fut hardis et fors,
Luy et ses conpangnons qui sont ensemble cors 4
Asailhent l'estandars que portoit sire Butors
Ly castelain de Gans; son deistrirs as toil noirs ,
Cbinquante chevalirs de mult noble deport
2700 Le gardoient atour, cbu asloit ses confers.
Cornulo et les sins ont les boin brans des tors 5
Entre eas se sont ferus par mervilheus discors;
Chis se sont defendus trestos en desconfors ,
Tantost furent ocis, blans, blons, gris, noir et sors,
2705 La banire cheiit a terre par effors,
Quant Flamens l'ont veyut errant sont tos amors e ,
En fuyte sont tourneis quant del estour sont hors ,
Cascun tendoit a metre a savement son corps ,
Mult en est abatus mains plus en est estors 7 .
2710 Ly conte Juliens est escapeis, ch'est tors 8 ;
Ver la vilhe de Gans est tourneis ses resors,
La est-ilh ensereis, en long temps n'yssit hors.
Et ly rois Tremus est a Bruge, a grans rigors
Assail tos jours la vilhe, si ardit les for bos;
2715 A deirin l'ont rendut chis dedens, par sains Mors,
Car discordans furent dedens et sens accors ;
C'est chu qui les fist rendre, et faire a roy rapors
Des clefs de grandes portes ; ensi fut li recors.
Or at li conte Flamens perdut I trop gros mors 9
2720 S'en fait moins a dobteir.
xcvn.
Covneit II rois prist Brage.
Tremus li rois de Tongre vat ,0 Bruge conquesteir;
Tos les borgois at fait, solonc leur loy, jureir
Que del rengne de Tongre ne voront mais sevreir ;
Mais il furent parjure, legire est a proveir,
2725 Car anchois VII ans vorent le boin roy adosseir ",
El le sin corps trabir, si com me oreis compteir,
6 Decourages , amortis ?
7 Delivre , sauve.
• Cest U voir*. BR.
9 Morceau.
»° Vuet. BR.
11 Surprendre, attaquer. Ador$erd*as Roquefort.
79
626
APPENDICE.
Le sieo fils Gornulo vat Tremus appelleir,
Vers Tongre le renvoie , se li fait rerameneir
Tos les grans oust Toogrois; si volt seuls demoreir
2730 A Bruge, et parmy Flandre volt dois ans habiteir.
Or avint a deirin que Flamens vont troveir
Del rois Tremus trahir et a conte lievreir.
Udc jour Font appelleit, et li vont ennorteir
D'aleir assegire Gans et le conte tueir;
2735 Car ilh ne li faront por les membre copeir.
Le boin rois les creit, sa geus vat assembleir,
Si chevalche vers Gans a XXX m escleir *.
Ly conte Juliens li vint erant al encontreir
A XX m hommes ou plus, Deu le puist mal doneir.
2740 Tremus les corut sus quant les poll aviseir,
Dedens eas se ferit ensi comme 1 sengleir ,
Tant en abat a terre qu'on ne rouse esgardeir ;
Mais che ne li valut le cuyre d'un soleir,
Car il fuist pris ou mors, quant il vat remireir
2743 Que mils de ses barons n'ot talent de capleir ;
Encontre luy les voit erramment retourneir,
Et puis voit sa banire contre terre getteir.
Quant li rois le Jrerchoit, la ne volt plus esteir,
Ains les tourne le dos.
2750 Vat seul s li rois Tremus qui se clamoit 1 sos
Quant a voit creit Flamens; faus, et cohars, et glos,
Et trabitre malvais, ensi les clamoit tos.
As esporons s'en vat plus encresteis comme cos 3 ,
Quant fut fours de leur mains si trote les galos ,
2755 Vers Tongre chevalchat Tremus li rois mingnos ,
Et li conte Flamens est enbabis a brief mos
Plus qu'il n'estoit devant, et dist : « Que ferons nos?
c Tost revenrat Tremus, destrus seirons trestos;
» J'ay mon paiis perdus, trop est en grant coros,
2760 » Quant il n'est pris ou mors del tot suy a desos,
» Car il est fondemain de Germaine et estos;
» Tantost seirat par luy tos mon paiis declos. »
t Sire, ce dist unc princbe qui fut nommeis Gandros,
» — De Carabray por le conte astoit maistre provos —
1 Proprement uclavont , mais ici indiquant toute espece de soldats.
1 Lauent dans notre teste , ce que je ne comprends pas. Vastaul dans
le manuscrit BR me parait devoir etre transforme en vat seul.
* Plus encrete qu'un coq. Nous avons plus haut (note du vers 253 1)
explique ce mot encre$tei$.
* Pour rebois, empeckement , obstacle.
5 Let grot piclrot. BR.
2765 i Mandeis voire cusin qui est si grans et gros,
» Le prinche de Lovain Jonab , et sens rebos 4
» Si Tenvoiereis a Tongre, et li cargereis vos
» De faire pais al roy qui fiert li grans cops *. >
c Sire, il at mult bin dit, che respondit Bogos. >
2770 Dist li conte Julien : « Chu est I boin propos;
> Ensiment seirat fait que sont vos entremos.
» S'a Tremus avoie pais, je seroie en repos,
» Del remanant de monde ne donroie dois clagos 6 ;
» Se pais avoie a luy, paies est li escos. »
2775 Ensi de pais avoir astoit li conte jalos,
Car del boin rois Tremus dobte mult les soglos 7
Et les colee dure.
Juliens li conte Flamens de rins ne s'asegure;
Al princbe de Lovain mandat par escripture ,
2780 Que il chevalche a Tongre, et en son nom acure*
De faire a rois Tremus une pais bin maoure;
Asseis li fache amende de la grande laidure
Qu'on li at fait en Flandre, et de tot altre injure.
Quant li prinche entendit de eel fait l'aventure ,
2785 A Tongre chevalchat de pensee mult pure;
Mort at troveit li roy a la gente figure,
De duelhe et de vergongne mordit celle morsur*.
Mult bonorablement fut mis en sepulture,
Ce fut en mois de may, che nos dist la lecture,
2790 Tot droit sor Tan de grasce la tres-sainte porture
Sisante oy wit et non plus ; or vat a poureture
Le midre chevalire, et de plus grant droiture
Qu'adont regnaist en monde ne que (durmast nature.
Cornulo le sien fils fut rois sens corupture,
2795 IX ans regnat li beirs en grande envoisure.
Ly princbe de Lovain, tot sen pensee obscure,
At traitiet de la pais et mult grande paine endure;
Car Cornulo jurroit qu'en grant descoufiture
Metteroit tote Flandre et trestot en ardure.
2800 Ly prinche de Lovain li fist douche atraiture ,
Tant quMl al deirin mist a son yrour roture •.
A la pais s'acordat qui olt bone faiture,
• Quid? Peut-etre pour clabot, clochette dans Roquefort.
7 Nous avons deja eu ce mot, v. 1708. II peut signifier les ptinet qw
Julien redoutede la part de Tremus.
8 Cost la traduction du verbe latin accurare, prendre soin, eatrr-
prendre.
9 Les glossaires donnent routure, rupture. Ne serait-c* pas plutet »
substantif forme du verbe rotter , mettre de cote?
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LA GESTE OE LIEGE.
627
Teille, comme vos oireis, sen nulle covreture ,
Se Dieu plait or endroit.
Conaeal Marl I no vtat a palls.
2805 Signours, or escuteis par le corps saint Benois.
Al deirin est li pais faite comment qu'il soil,
Sor teil furme et manire , que li conte tenroit
Del noble rois de Tongre, Flandre chu qu'en avoit
Conquis li rois Tremus, et ses bommes devenroit,
2810 Et Marline avoec chu quitement demoroit
Al roialme deTongre , heritable seroil.
Ce fut la noble pais qui bin fut solonc droit ;
Tot ensiment fut ilh nulle rins n*y faloit.
Pres de Xll c ans Marlines remanoit
2815 A paiis , jusqu'atant je croy qu'on le vendoit.
Mais de cbu qne li conte tot son paiis tenoil
Del roialme de Tongre, unc pou apres faloit;
Celie homage perdit li rois, et le quitoit
A unc conte de Flandre qui sa fllhe prendoit,
2820 Si qu'il en manage l'omage li donoit.
Or escuteis apres, por le Deu ou on croit.
Viut-noef jour de June, sor Tan que on contoit
De la Nativiteit LX1X par foil ' ,
Fist Nero 1'empereire morir a grant destroit
2825 Les apostles saint Pire et sains Pol qu'il haioit,
Tot por Simon Magus qui enchanteur estoit,
Qui contre les apostles durement arguoit ,
Si qu'en gieste de Rome tot le fait troveroit,
Qui tote la manire de chu savoir voroil.
2830 Ly colleige de Romme unc proidhomme enlisoit
Qui astoit neis de Romme : Lynus on le nomoit.
Lyqueis Xll ans, dois mois et XI jour regnoit,
Et sor eel an meisme Dieu venganche prendoit
De Neron Tempereire, qui vilhement moroit
2855 Ensi c'on vos dirat.
Nero li empereur maise vie menat ,
Onque peiour de li coroiine ne por tat :
Son peire Claudius a mort empusonat ,
Granus son freire ocist qui Ays edifiat ,
1 Parfait? Jean d'Outremeuse , dans sa chronique, distingue les annees
paiTaites et imparfaites.
* Ce vers manque dans le manuscril BR.
5 Je ne sais comment expliquer le verbe qui de&igne la sale action
2840 Nero olt dois femmes et ambedois les luat *,
Et puis ocist sa meire , car veoir convoitat
Le vasseal dont yssit, et por tan t prise Tat,
Et fist son ventre ovrir et puis le despitat ,
De fine malveseteit ses braies avalat,
2845 Cbu c'on fait al basse chambre en son ventre fait at ;
Ensi dedens le ventre de sa meire fuisat s ,
Puis ardit une part de Romme, et embrasat
Gens, maisons et joweals , onque rins n'escapat ,
Por la clamour oiir sor son palais montat ;
2850 Chu fasoit ilh portant que savoir desirat
Queil duelle il olt a Troie quant on le desiertat.
Apres ocist Nero chil qui l'endoclrinat,
Senech le philosophe que son maistre appellat.
Mult fist d'altre mervelhe dont mes corps se tairat ,
2855 Car onque peour de li en monde ne regnat;
Pres de 111° Romans a I jour decolat ,
Dont li peule romans si fort se corochal ,
Que fours de la citeit eramment le chachat.
Ilh en olt teil despit c'un baslon aguisat,
2860 Et tot parmi son ventre eramment le butat.
Ensi morut Neron qui luy meisme se tual,
Et li Romans eslirent entr'eas, sens nul debat,
Anastase I halt prinche qui V mois governat;
Mult fut noble damsials.
Vatpaalan deatrat IharaMlrm.
2865 A eel temps que je dis Vaspasians li roials,
O luy Thitus son fils et mains nobles vassas ,
Assist Jberusalem et livrat mains assas,
Por vengeir la mort Deu le peire esperilals.
En tant qu'il erent la , Tempereire Anastase
2870 Morut a Romme droit sup Tan LXX, dont mals
Sourdit entre Romains , car une partiie d'eas
Enlisirent Octon unc prinche naturals,
Cis d'Espangne Gabla 4 , qui fut de leur conseals,
Almans Vitellius qui astoit jovenchials,
2875 Chis qu'avoec luy avoit Vaspasians li roials,
Enlisirent leur maistre trestout sens debat 3 .
Quant Vespasians se voit euliet imperials,
Devant Jherusalem lassat le frank prelais G
Son fils, et ses barons qui tant lievront cemheals,
atlribuee a Neron .
4 Sic pour £ alba.
3 En communois. BR.
6 Pour prelat. Nous avonsdeja rencontre ce mot comme synonymedenbef.
628
APPENDICE.
2880 Que la citeit prk>ent, el les Juys malvais
Misent a mors jusqu'a onse cent milh ribais;
Et Vaspasian vint a Romme sus en palais ,
OU les trois empereires eslus des Romaics bais,
Furent ocis Pan l'atre d'espee et de cuteals.
2885 Adont fut coroneis sus en palais plus hals
Vespasians , et (ut leur sire principals ;
Pres de XII ans regnal et menat boin estas ,
Mult bonorat le pape et tos les cardenals,
Et tos altres prelas comme ses cathedrals ' ;
2890 llh les at presenteit mult de riches joweals,
Qui sont de mult grand pris.
La sort Ml» Boehara, ©t de Sll e ray *• Tenfre.
Barons, droit a eel temps que je ci vos devise ,
Sor Tan LXXV, cbu nos dist li escris,
Treppassat de eel side li proidhomme saintis,
2895 Eucbars de Trive evesque; li peire Jliesu-Crist
Li mandat son trespas anchois qu'il soil finis,
Sicomme ens coroniques puet on estre choisis *.
Apres luy fut evesque Valeriens eslis,
Quinse ans regnat prechant la loy de Jhesu-Crist s ,
2900 Proidhomme fut sains et vrais , et mult de Deu amis ;
J usque en Galle aloit prechant tos les paiis.
Sor Tan LXXV1I morut li frans marchis,
Rois Cornulo de Tongre XI C , ce m'est avis;
Vint ans fut se fils rois qui fut nomeis Tongris.
2905 En Tan LXXXI , a vespre unc samedys,
Morut Vaspasian , Tempereire gentis ,
Sause jour de novembre; Titus, ses anneis fls,
Fut fais empereire; trois ans bin acomplis
Regnat , et puis morut, si fut ensevelis.
2910 Domiciians ses freires, qui fut faux et malis,
Par venin le luat ; mal li doinst sains Remis.
Cis fut fait empereire, il soil de Deus maldis!
Ains ne fist plus de mals Nero comme fist chis.
Ens histoires de Romme sont trestos ses fais dis;
2915 Mais de cbu racompteir n'est mie mes profls,
D'empereires et papes ne parleray plus chis,
1 Ses chanoines? Voir Ducange, v° cathedralet.
* Notre texte porle : puet on veiir. Je donne la preference au teste du
manuscrit BR avec d'autant plus de raison que e'etait aussi la premiere
reduction de notre texte. Elle a ete rayee pour faire place a 1'autre , on ne
sait pourquoi. •
s La loy entre Arabit. BR.
* Notre texte repete ici : tent menchongne.
| Car tant y olt de pape et d'empereires anssy ,
I Trop prolixe seiroit li mien plaisans rescris.
I De Tongre parleray sicomme je ay promis,
2920 Les histoires lairay de Romme le porpris ;
i Si vos diray de Tongre sicomme li vrais cronique,
Appreneis, le tesmongne.
civ.
De pape et d'empereire et de teille besongne
Je ne parleray plus , car je ay altre songne ;
2925 Car tant en olt a Romme, sachies tos sens meDchoogne,
Mes lievre en seroit plains , par les sains de Bolongne.
De Tongre vos diray chi apres sens eslongne 4 ,
Et bin sovent ansi enlre dois par essongne
Vos diray-je de Romme, de Franche et de Gascongne,
2930 De Flandre et de Loheraine, Dannemarche ou Saxoogne,
D'Espangne, d'Oultremeire, d'Angov el Cathelongne,
D'Avergne, de Limosin, des Normans, de Borgongne,
Et mains altres paiis enfrechi qu'en Ancongne *.
Or escuteis a moy, por les sains de Colongne.
2935 Tot droit sor Tan nonante morut en Ardelongne
— Le grans palais qu'a Trieve fondat le due Bavoagne,
Qui fut fils Bavongnar qui jadis fist Hucongne —
Valeriens Tevesque qui fut de grant rasongne *.
Materne fut evesque, n'est nuls qui ne li donne;
2940 Anneis des armes Deu , ne vestit altre brongne,
Conquist mult de paiis et de gens plens d'antrongne,
Ne fait que sermoneir, n'atend c'on le somongne.
Asseis trovat de gens qui li fisent vergongne,
Sicomme faux et musars qui sont pleins d'yvretongne,
2945 Mais onque por chu ne prist a son cuer yracongne ' ;
Se il croient en Deu tos meflais les perdonne.
Par luy fait Deu miracle , car sains Materne enproigne '
A saneir les messias et les gens plens de rongne,
Cutrais, aveugles et torps •, et gens de teil coquongne l *
2950 Garist et relumine a sengnire de son poingne;
Ne trove si vilain , j usque al port de Hastongne,
Bin ne le sacbe atraire.
8 Ancone?
6 Probablement pour resongne, comme dans le manuscrit BR.
7 Pour yre, yreur, colore.
8 Pour emprend , entreprend ?
^ Clot , aveugles el tort. BR.
10 II doit y avoir la du coquin et de la coquinerie.
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LA GESTE DE LIEGE.
629
De XI II* rey d« Toifre.
Sor l'an LXXXXIII olt sains Materne grant haire * :
Une maladie olt qui li fut trop contraire;
3955 Quarant ans olt vesqut puis qu'il fut par Euchaire
Resusciteit de morl; mais Deu, por lui afaire *,
Ly reslongat sa viie XXX ans en secretaire,
Si que XXXIUI ans fut vesque debonaire,
Augmentant la loy qui tant est santuaire.
2960 Or escuteis apres, par Deu et saint Hylaire :
Sor Tan nonante et sept morut et sens retraire
Ly noble roy Tongris ; ses fils al douls viaire
Trecanus li gentis, de cuy tos bins desclaire \
Fut rois de Tongre fais XIU e sens detraire,
2965 Et si regnat XI II ans, n'olt cure de mal faire.
A temps de chesti rois, Deu grant miracle esclaire
Por Pevesque de Trieve Materne, car explaire 4
Fait trestot le paiis, a Colongne volt traire
Sor Tan LXXXX1X; mais tost en fist repaire,
2970 Car trop les trovat feils , mais apres soy repaire *,
Droit sor Tan cent et IX, tant monslrat d'exeinplaire
Qu'a tot le peule list notre sainte loy plaire.
La se fist baptisire li boin conle Helaire,
La contesse sa damme qui fut nominee Claire,
2975 Et li peule apres; puis ont fait sens defaire *
Evesque sains Materne; or en olt une paire,
Car il fut doble evesque, sens rins a Deu meffaire.
De Trieve et de Colongne fut maistre columpnaire 7 ,
Voirs esperitueis, n'y at altre salaire;
2980 Ly conte demorat temporeis sens extraire 8 ,
Riches fut cascun d'eaus, ons ne le puet substraire
Leur gpande revenue.
•alas Haterae convertit Teagre.
De Trieve et de Colongne at mite retenue °
L 'evesque sains Materne , qui forment s'eo virtue
1 Pour hate, secours, assistance.
* Poor offerer, c'est-a-dire : pour faire quelque chose qui lui convint ,
qui lui fut aVantageux.
5 Pour deselol, sort, provient.
4 Explorer?
5 Son retour.
,; Poor deffaure, sans manquer.
7 C'est-a-dire : fundamental , principal.
* Pour eelrie, titrif, sans debat.
2985 De prechier nostre loy entre gens dissolue;
Mult en at convertit et apres soy remue ,
Vers Tongre s'en alat parmy la voie hierbue ,
Les vilhetes entour si forment il argue
Que tot at convertit erant sens attendue.
2990 Dedens Tongre est entreis passant parmy la ruwe;
Le peuple le syvoit qui sa parol le ague
Escutoit volentir, li proidhomme continue,
Le peule convertit a notre loy absolue.
Symons, une chevalirs qui fut neis de Cosdrue,
2995 En est monteis erant en la sale mossue :
t Sire, dist-il a roy, or vos fault bonne ay we;
» Cba fours est une propbete qu'at une cappe vestue,
» La loy nOvelle preiche -r Jupin tout le destrue — ,
» Vo gens par la citeit soy baptise plus drus
3000 » Que li aiwe ne chait en la Geire *° de la nuve. »
Quant li rois Tentendit la cbireolt irascue,
Corant vint a sermon, si tient une macbue,
Sa gens comencbe a balre si que tos en tressue;
Ains qu'il laissaist a batre plus de XL en tue.
3005 Sains Materne esgardat a la barbe chenue,
Erament le fail prendre et puis Tevesque acue n :
« Vilbars, dist-ilh, tu as notre loy confondue,
» Si t'en covint morir a grant distanneue 1f ;
» La lenve " qui ma gens at ensi decheue,
3010 » Que ma loy ont lassiet et la toy ont recbeue,
> Perderas maintenanL »
Li rois preut I cuteal , si le vat aguisant,
La lenve vout copeir a proidhomme avenant ;
Mais Dieu nel soffrit poin , par le corps sains Amant ,
3015 Car teil miracle fut la endroit Dieu mostrant,
Que en dies ire oeilb le roy fut li cuteal lanchant,
Tantost li crevat Poeil; le roy le va sen tant,
Grant paour olt al cuer n'en soies mervilhant ,
Avoec le paour le vat Deu espirant :
9 Je ne comprends pas ce que cela signifie. Le copiste pourrait fort bien
s'elre trompe en ecrivant mile pour tuite, et en effet le manuscrit BR porte :
at tout recheue.
10 Le Jaer, riviere qui passe a Tongres.
11 Pour accuse, sans doute.
« Discowenue, porte le manuscrit BR. Cela se comprend mieux que
notre texle.
15 La langue. Linwe est la forme wallonne.
630
APPENDICE.
3020 « Merchi proidbomme , dist-il , vas k ton Dieu priant
» Qu'il moy rende mon oeilh, sicomme j'avoie devant;
» Baplisire me feray etTiray aorant,
» Et trestotes mes gens sens faire remanant. »
Quant sains Materne entent les mos si suflisans,
3025 Orison fist a Deu et le fut suppliant
Que miracle demostre de teil fait apparent ;
Dieu qui amoit I'evesque fut miracle faisant,
A roy rend it son oelb par unc colon volant,
Qui le vat a son beche en son cbief rasseant.
3030 Ly roy soy baptisat por le miracle grant,
Apres sains Pire olt nom Pires, soies creant;
Proidbomme fut et loials notre loy ensaucbaut *.
Erament fait crieir ly rois Pires 1 bant,
Qui prenderoit bapteme, tot li seirat quitant
3035 Servage et tregus c'on est a luy reudant *,
Eaus et trestos leur beurs de eel jour en avant.
Adont prisent baptesme, nuls n'en fut recreant 8 :
D'bommes y olt XXX milb et de femmes atretant,
Et encor y olt plus de leur jovenes enfans,
3040 Sor Tan que on astoit cent et dii racontant,
Que li vrais rois Jbesus fut sainlement nasquant
De la virge pucelle.
Tongre fut convertiie a notre loy novelle,
Par I'evesque Materne et le miracle belle
3045 Que Dieu demonstrat Ik par desus la praelle.
Ly rois Pire bucbat Materne a gris capelle :
« Sire, dist-ilb, por Deu le rois Emmanuelle,
» Celle noble citeit oil il at 1111 casteille,
» Siies palais et XXX tours ferniee de quarelle,
3050 » Vos donne entirment et sens faire rapelle ;
» Evesque en sereis par le dieu d'Ysraelle,
» Sire esperitueis et temporeis donsel
» De tote la citeit, je ne dis pas fabel ;
» Et encor avereis 1 mult noble morselle,
4 Nous avons deja eu ce mot signifiant : exhaussant, eaallant.
* Con est au roy rendant. BR.
5 Pour recrtu , negligent , que donne Roquefort.
4 Royaume.
5 lei notre texte contient ce vers qui n'est pas dans le manuscrit BR , et
qui ne se lie ni avec le suivant, ni avec le precedent :
Vo» et to» saeceiseort evetque teas gabelle.
6 Mertlle ou mereau, signifie ici : cachet , sceau. Et en effet le manu-
scrit BR , au lieu de merelle, porte sate/.
3060
3065
3055 • Gar de tot moo paiis, qui est 1 grant roiel 4 ,
» Sire esperitueis sereis sens nul tourbelle,
» Si long que vos precbier ferat son estincel
» La loy notre sangniour qu'anoncbat Gabriel *;
» Car je le vos otrie de fin cuer et loyeal ,
Mon tresors avereis, jk n'en seray rebelle,
Por faire edifiier englises et capelle.
Sacbles je ay I fils et si ay trois baiselle,
Qui mon paiis arout trestos , vals et moncbelle,
La temporaliteit qui vat j usque k Fudelle.
Si a vera t por li cascons d'eas son merelle •,
» Car il n'at plus grant regne j usque k Gompostelle.
» Je demoray o vous, servant la douche anc belle,
» Qui tot virginalment portat celle caudel ,
» Qui ses amis ostat d'ynfier le lieu cruelle,
3070 » Sicomme est ma creancbe. »
cix.
■alas latorM tmwtSmt •aeltasM.
Materne fut evesque, par divine puissancbe,
De Trieve et de Colongne, el de Tongre la franke;
Et li rois Pires at fondeit sens detriancbe
line tres noble englise en grant bumilianche,
3075 En l'onour de sains Pire, en cuy olt esperancbe.
Sor Tan cent et XIIII , sens nulle demorancbe,
Sains Materne fondat une altre, en ramenbraccbe
Sains Euchaire, I'evesque dont il at sovenancbe,
Et sains Valeriens, en lieu c'on dist en Hanche \
3080 Leis le marcbiet de Tongre qui est k la cointancbe *.
Adont morut rois Pires, qui fut deirine • branche
Del roialme de Tongre; mult fist bel ordinancbe,
Car la ducbeit d'Ardenne, qui fut de grant bubancbe ,
Donat Tremus son fils; et k sa filbe Blanche
3085 Donat trestot Osterne, qui est de grant vailbancbe;
A sa filbe Emeline donat sens arestancbe
La ducbeit de Lotringe, qui fut de sa substanche;
A sa filbe Tongrine donat sens defallanche
La terre de Gondros, c'on nomoit dont Ginglancbe;
7 Dans la cbronique en prose ou ce mot s'est deja presenle, p. Sit, jc
n'ai pu l'eapliquer. Des renseignements obtenus depuis l'in»pr«*suMi de U
feu ill© , me permettent de supposer que les mots en hanck* po ttr r ai e a t etre
une corruption du mot allemand eingang , entree; il y a en eflct a Too-
gres , a i entree du Marche , des restes d'une ancienne eglise.
. 8 Notre texte porte : al aeoinlanche, version qui ne presents pas ua sea»
applicable ici ; a la cointanche , au contraire , signifie : au coin.
9 Derniere.
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LA GESTE DE LIEGE.
631
3090 Totes orent maris de grande contenanche.
Son blason, qui fut d'oir sens nulle altre nuanchc,
Laissat-il al englise de Tongre sens doblanche;
Sepulture enlisit le rois par concordance
En I'englise Sains-Pire, car la olt sa plaisanche.
3095 Celle an droit cent et XV, n'en aies ignoranche,
Fut fait droit a Gberal I pont, por aliganche *
Faire a tos cheas qui ont la endroit leur chevanchc.
La ducesse Emelioe le fist par convenancbe
En droit desos Lotringe , le castel d'apparanche;
3100 Pepins, li nains petis qui puis fut rois de Frauche,
Le destruit puis apres, si en fist edifiancbe
Del englise a Harsta des pires sens vilanche;
La fist unc crucefis et son grant et semblancbe *
Encor y est, j'en fay a tos notifianche,
3105 De sa propre facbon.
ex.
-Cecil* A Coloagne.
Apres deveis savoir, tos signours de renom,
Que Tan cent avoec XV del incarnation
Ly evesque Materne, par bone entention,
Fondat droit a Golongne dois englises de nom :
31 10 En I'onour Notre-Damme Tune, bin le set-on,
Que de Sainte-Cecile mainlenant appellon;
L'atre fut de Sains-Pire, que maintenant nomon
L f englise Sains- Victeur, sicomme lisant trovon.
L'an propre que je dy, Con fasoit en commoin
51 15 De sains jour de Noiel solempnisalion,
Fist l'evesque Materne la celebration
De la tres-sainte messe par grant devotion;
A Trieve et a Colongne et a Tongre, ce dist-on,
Li angels li portat 5 par la commandison
3120 De Dieu li rois de gloire sens symulation.
L'an droit cent et XVI J, en marche jour secon,
Comencbat sains Materne, par sainte vision ,
A fondeir maim englise que chi vos nomeron :
Une en fondat a Treit, par-dessus le sablon ,
31 25 En la voie roial par vraie opinion
* Allegeance, soulagemenl.
* De eon grant et semblance, porte le manuscrit BR. Cela veut dire , je
•appose, que pour la grandeur el la ressemblance , le crucifix qui y est
encore eat reste le meme.
* JL'ange le Iransporla pour celebrer la messe le meme jour a Treves , a
Cologne et a Tongres.
+ En marge ce vers boiteux , ecrit d'une autre main , el qui ne se trouve
pas dans le manuscrit BR :
Que maintenant Salju-Serrai* nomon.
5 lei encore en marge , et de la meme main que le vers qui precede ,
En I'onour de sains Pire olt dedication * ;
Une fondat a Tongre de grande refection
En I'onour de la damme, qui no salvation
Portat en ire ses flans, par inspiration
3130 De sainte deiteit 8 , et la translation
Que al bumaniteit fist parfaite jonction ,
Qui no duel mist en joie.
CXI.
Cfcl faraat ceu de Slay baptlales.
L 'englise Notre-Damme, dont je chi racompioie,
Si fut la premire, et bin le proveroie,
3135 Qui onque fut fondee, porquen le celeroie,
Dedens la dyoceis de Tongre toutevoie.
Apres, sor l'an de grasce cent et XVIII, festoie
Sains Materne ses gens, el puis entre sa voie,
Et long et pres e del roialme aplanoie 7 ;
3140 En precbant par ces vilhes le peuple lout renoie • ;
Del regne convertir trestot son sens desploie ,
Partot alat cacbant por conquier medre proie,
Affin que la dyoceis plus grande a li s'apoie;
Partot convertist gens de que forment s'esjoie.
3145 Si at tant chemineit, que Jhesus le convoie
En la ville de Huy, qui seioit en requoie
Entre roches et aivve; a unc leis le costoie
La rivire de Muse, qui valt grande monoie.
Mult fut la vilhe anchiene, et de temps Aquiloie
3150 Ains la nativiteit Jhesus, en cuy je croie,
Bin LX ans el plus ful faite sens beloie 9 ,
Par alcun chevalirs, porquen en mentiroie,
Fuans de Galle la, par le morteil desroie
De la desconfiture qui fut desus l'erboie
3155 De part Julien Cesare, qui metit en anoie
Tos les Franchois de Galle, sicomme desus comptoie.
De la disconfiture soy parlit Andreloie
Uns prinche de Lutesse ct son cusin Gaufroie ,
Fuyant a XL hommes de leur noble conroie ;
3160 En la plache vinrent que par-dessus nomoie,
Fait ont la fermeteit.
ces deux autres qui ne son I pas dans le manuscrit BR :
Et poU one altre de Kotre-Dame par devotion
Fondat altaee en Brabant que altre efliae apellon.
• Et de longue et delete. BR.
' Ce doit etre la traduction du verbe aplanare, auqucl le glossaire de
Ducange assigne le sens de colere, cultiver, au moral comme au physique.
» Fait renter , abjurer.
« Beloie doit etre ici pour bellue , mensonge , que donne Roquefort. Sens
beloie, serail ainsi I'equivalent de tene menchongnt, expression que le trou
vere affeclionne.
a*. I
632
APPENDICE.
Quant la vilhe fut fait, sicomme jay deviseit ,
Si Pont Huy appellee, sachies en veriteit,
Apres une rivire de grande anliquiteil
3165 Qui Hoyoul est nomee, che dist Tauctoriteit.
Alcune gens dient, mais ce est fauseteit,
Que li Huen fisent Huy ; c'est uu fait reproveil ,
Car LX aus fut fait ains la Nativeteit \
Et li Huen ne furent en eel paiis enlreit
5170 Pres de 1UI C ans apres sens lasqueteit *,
Si comme oreis apres se ra'asteis escutcit;
Jusqu'alant m'en tairay que la seiray tourucit.
A la vilhe de Huy, qui fut de richeteit ,
Est venus sains Mate roe , si les at sernioneit ;
3175 Savages les Irovat et asseis degbuiseit,
Et encor a temps d'ors ne sont pas trop priveit 3 .
Sarasins erent tos , Jupiter ont oreit;
Mais tant les at Materne de la loy enfourmeit,
Que tos sont baptisies ; et puis at la fondeil
5180 Une englise santisme eu nom del Trinileit,
Et de la sainte Virge de cuy Deu fut porteil ,
Puis se partit de Huy; si est avant aleil,
Tant qu'il viut a Dynant u'est Materne aresteit.
A eel temps fut une ponl fait et bin macheneil ,
5185 Droit a Amain sur Meuse, par Tongrois alouseil,
Car trestol cis paiis fut de leur roialteit;
A Dynant vint Materne, l'evesque coroneit,
Que * ous Arcbe nomoit.
o r *
Signours, a cbi temps-la Dynant ons appelloit
3190 Arcbe par son nom propre, une conteit astoit;
Mais li conte de rois de Tongre le tenoit,
Et pres tos Condros al conteit * obeissoit.
Encor est li Reus d'Arche •; qui bien enquireroit.
Chu que je vos devise clerement troveroiL
3195 En celle vilhe d'Arche Jupiter ons creioit,
1 Apres ceU Tient un vers tronque , evidemnient inutile , et qui n'est
pas dans le manuscrit BR :
0« J beta Crist, le roii de mijettelt.
* Lacheste, lachete?
3 Apprivoises , cirilises.
4 Inutile sans doute de faire remarquer qua ce relatif se rapporte a
Dinant et non a Saint-Materne.
De bois one ydolle 7 dedens la vilhe avoit
Qui avoit a nom Nam , cuy li peule aoroit ;
Uns dyable astoit dedens qui response rendoit
Comonement a peule de cbi c'on demandoit.
3200 Desos mult grandes rocbes celle ville seioit ,
OU une serpens malis *, grans et gros babitoil ,
Qui par-dedens la vilhe mult sovent desquendoil;
Si ocioit les gens par tot et estrangloit.
Sains Materne en la vilbe la sainte loy precboit
3203 Tos jours Tunc apres i'atre ; mais de li se mokoit
Tos li peule comoin; ses parolle perdoll,
Et tant qu'il dist I jour qu'onque troveit n'avoil
Peule si tres fumeut • qui ensi s'enstrangnoit;
Mais cbu ne li valut, cascun le regrignoit l0 .
3210 Or avint-ilb 1 jour que Jhesu-Crist y ovroit :
Le serpens descend it, en peule se feroit ,
Par conte 1111" et VIII en ocioit,
Dedens leur sinagoge li peule se muchoit ,
A Nam leur deu falit cascun mercbi crioit;
3215 Mais li serpens y vint qui la gueule baioit,
Quarant-trois en at Ik meisme ocis lot froit ,
Trestotes les ydolles a la terre abatoit.
Sains Materne droit la a celle beure passoit
Qui venoit tos lasseis.
CX IV.
Bel ea«ll*e If eatre-Baumm* de lyMel.
3220 Sains Materne venoit de precbier bait et bas.
Mais li peule le gabe, si en astoit tot mas;
Ver son bosteit aloit, si passoit sens esbas,
Devant le sinagoge Sarasins voit tos quas
Qui fuyoient criant, mains en gisoit tos plas;
3225 Sains Materne les voit, ne le tint mie a gas.
En la sinagoge entre sains Materne isnel pas ;
Quant percboit le serpens ver luy s'en vat le pas.
Erant Tat asailhit sains Materne en tos cas,
Tant qu'enfin Tat ocis, dont li peule at solas;
3230 Mercbi li ontcrieit et dis : « Conquis nos as,
» Nos prenderons bapteme, mais ancnois destruiras
» Celle ydolle majour et si 1'encbacberas.
5 Aroy. BR.
6 La Rendarche.
7 Une dieweue. BR.
8 Maldii, m audit?
9 Fumeux , porte a la colore. Roquefort , t« f*wue.
«° Verbewallon signifiant : faire mauvais aecueil, etre d'hMwer&w
greable. LesGrignout sont asset oonnus dans l'hutoirede Lief«, m* 11
septieme siecle.
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LA GESTE DE LIEGE.
633
> EUe est nomee Nam; quant tu conquis 1'aras,
» Nos dirons tes Dieu est li soverains estas. »
3235 Sains Materne l'entent, avant vint par compas,
Si at dit al ydolle : t Die Nam, ad quid hie stas? »
C'est-a-dire en romans : « Dis dyables Sathanas,
» A quoy faire est tu chy, tu plus n'y demoras. »
De sa croche le fieri , adont tot a unc fas
3240 Trestote le debrise, et li dyable baras
S'en alat tos bruant, comme tempeste et eselas.
Ly peule prit baptemme, foy que doy sains Thomas,
Et puis fit sains Materne dois englises a eslas :
Oil fut la sinagoge fist Tune li prelas
3243 En l'onour Notre-Damme , et 1'atre tu oras
Chi apres desclareir.
l/engllese Salaa-KstleMe A Byaaat.
L'evesque sains Materne volt edifier
Dois englises en la vilhe c'on volt Arcbe nonchier ;
L'une fut Notre-Damme, meire a roy droiturier,
3230 L'autre de saint Eslienne, le promier martir;
Ons Fappelle altrement maintenant , sens desdire,
L'englise Sains-Menge *, si le voit-on huchire.
Apres volt sains Materne la vilhe baptisier :
Si le nomat Die Nam, sicomme volt arainire
3255 L'ydolle en son latin , quant le volt encachier.
Nomee fut Die Nam la ville en tos regnire *,
Unc mult long temps apres et tot par costumire.
On dist, por eel Die Nam, Dynanl sens mencbongnier,
Car plus legire astoit Dynant a pronunchier :
5260 Chu est Dynant-sur-Meuse qui tant fait a prisier,
Oil il at bonne gens qui sont sage et entier.
Sains Materne s'en part et volt tant esploitier
Que il vint a Sedroc , une fort et planier
Vilbe , par-desus Muse seant desus l'erbier.
3265 Del royalme de Tongre astoit eel hi re tier;
Sedros Tavoit fondee qui fut si boin guerier.
Sains Mateme prechat la loy sans atargier;
Gens de Dynant avoit o luy plus d'un milhier,
Qui a cheas de Sedroc vol rent tant anunchier
3270 Les miracles que Dieu olt volut publier,
Por che li sains proidhomme qui les aloit prechier,
Cel fait ont tant volut Dynantois tesmoignier,
f Menneus. BR. Memmeu* dans U chronique en prose , pins haut, p. 52G.
On voit, d' apres notretexte, que e'est bien de l'eglise Sainte-Mengulfe
qu'il est question , comme nous l'avons suppose alors. Memmem doit etre
une corruption du mot primitif.
Que chis sont baptisies de greis et volentir;
Droit a la sinagoge vont l'evesque adrechier.
3275 Le Dieu qui olt nom Nam trovat ; en grant dangier
Le mist sens demoree.
cxvi.
Cki f at Jtmwamr convert le.
Sains Materne l'evesque at Piddle apellee
Publement devant tos, et mult bin conjuree;
Mais rins ne respond it , ancbois est absentee :
3280 « Nam mutum, dist l'evesque, avons par chi trovee;
» Chu est I Dieu inuweas , dist-il , pas ne ra'agree. »
A eel parolle at Dieu grans miracles monstree ,
Car totes les ydolles sont erant embrasee,
Ars sont toutes en cendre, dont les gens font risee.
3285 Nam mutum ont leur vilhe par son nom renomee,
C'est Nammut en franchois; ancor est si nomee.
Si est une conteit maintenant, desevree
Fut del rengne de Tongre; puis, c'est chouse provee,
Ons trouve alcune gens simple et malsenee 3
3290 Qui le noment Namur par costumme ordinee,
Mais el at nom Nammut por cheas de la contree.
A Nammut at Materne une englise fondee
En l'onour Notre-Damme, la Virge coronee;
La est tant demoreis qu'elle fut consacree,
3295 Le jour le Triniteit y at messe chantee
L'an cent et XXI , qui fut sainte journee.
Or escuteis apres por la Virge honoree.
De Nammut est partis l'evesque sens celee ;
Si vint a une vilhe qui olt nom Enmordee *,
3300 Qui sur Muse seioit une lieue et demee
Pres de Nammut al plain , si fut mult deguisee.
Sarasins furent tos de diverse pensee ;
En Nam il croient tos par mal destinee,
Car el a chu responl c'on li est demandee ,
3305 Par malvais esperit.
ex VI I.
•e Nameelie.
Celle vilhe Emordas fut de petis porpris;
Sire en astoit Meche , unc paiens asotis.
Del rois tongrois le tient; a nos loy convertis
Tos at li sains evesque par miracle santis.
* Dans tous les £lats , royaumes , rengnet.
s Mal sensee.
4 Emordas , plus bas, v. 33t8, comme dans la chronique en prose, plus
haut, p. 557.
80
634
APPENDICE.
3310 De treslos les halt nom le roy de paradis
At il conjureit Nam, qui fut unc anemis,
Qu'en Paiwe la devant se soit tantoist flastris,
Et todis y demeur, jamais n'en soil partis.
Adont li dyable Nam est en laiwc tramis ,
3315 L'aiwe refirt encontre comme louoir ou esclis,
Ly aiwe ondat encootre, encor vos suy je dis
Qu'en eel lieu est li aiwe mal pasible todis.
Li gens soot baptisies, si fut nomeis li lis
Namecbe par le nom de Nam, leur antecris,
3320 Et de Meche, leur sire temporeis de paiis.
Droit devant Sanson siet le casteal bin assis,
La fondat une englise li evesque genlis
En I'onour Notre-Damme , meirc de Jhesu-Crist.
En temps c'on le fasoit, vint I prinche faitis
3325 Parleir a saint evesque a Nammeche en lairis ;
Se li escriat ; « Sire, je toy prie raerchis;
» Hier a matin j'avoie V beals fils trestos vis
• D'onne seule porture de ma damme de pris;
» Si les amoie tan , ja n'en seiray mentis,
3330 » Que j'en noraay ma vilbe oil ils furent nasquit,
« Cineis, en remenbranche des V enfans jolis
» Qui furent d'onne nee; or sont tos V peris,
• Dedens un grant fosseit les at li dyable sopris.
» Se de part toy pulent estre resurexis,
3335 • Moy, eas et mon paiis creirons en Jhesu-Crist
• De cuer entiremenL »
De Cfclaer.
t Sains bons, ce dist li prinche qui olt a nom Clement,
• Sires suy de Cyney et lot le tenement;
• Mois et mes anchisseurs le tenons vraiement
3340 » En flies de roy de Tougre, la tierre de luy depenl.
» Sedros, li noble rois, le fondat vraiement,
» Si le nomal Halois; mais en restaurcmenl
» Ay formeit I castel qui at nom ansiment.
» Or veneis avoec moy, sains hons, aperlement,
3345 » Socureis mes enfans. » Quant Materne l'entend,
Droit ver Cyney alat, oil li vrais sacrament
Demonstrat teil miracle, que tos V eramment
Sont revenus en viie li enfans clerement.
Devant treslot le peule qui a Deu grasce rent,
3350 Erant sont baptisies; puis fondat en present
Une englise en I'onour la Virgue dignement,
Qui porUt Jhesu-Crist trestot virginalment,
• Oeitae*. BR.
2 Francht. BR.
A frais de chevalir qui tot paiat l'argent.
Li evesque les altres faisoil, sachies brifement,
3355 Del grant tresors li rois li olt doneit ; la prent
Trestote la costenge qu'en chu faire despeot.
Puis revint a Nameche l'evesque incontinent
OU s'aparut a luy, droit unc avesprement,
Sains Estienne de Mes * qui dist secreement
3360 Que de luy une englise fesist isnelment
En Nameche la vilbe; chu li plaisoit forment.
Sains Materne Je fist sens nul respitement,
Poin ne volt refuseir.
cxix.
De Awlr.
Apres vint sains Materne qui ne volt aresteir
3365 Droit a Awir-sor-Muse, et Ik voult il fondeir,
En I'onour de la Virgue qui volt Jhesus porteir,
Une petite englise; messe y volt celebreir,
Noef jour de may sor Tan que on devoit compteir
Cent avoec XXII , on ne le peut celeir.
3370 Apres revint a Tongre sains Materne li beir,
Comenche ses gens en la fois endoctrineir,
En demonstrant la toy volt il la sojouroeir;
Puis alat a Colongne son peule visenteir ,
Et apres vat a Trieve ou ons le voult ameir,
3375 Car ces trois evesqueis avoit a governeir.
Or avinl que l'evesque s'en voloit chemineir
Ver le paiis de Frise *, por la loy sennoneir.
Ly rois de Dannemarche volt adont la passeir;
Quant il soit del evesque saint Materne a parleir
3380 Qu'il fasoit les Frisons a notre loy tourneir,
Si en olt teil despit bin cuyde forseneir.
lib venoil d'ostoier a XXX milh escleir *,
Sor I ronchin at fait sains Materne trosseir,
En Dannemarche l'at volut enprisoneir.
3385 La olt I sarasin que Dieu volt espireir,
Cist se mist a chemiu, forment prent a ploreir;
Jusqu'a Tongre s'en vint oil alat racompteir
Tote la veriteit, tot sens rins controveir.
Qui adont veist Tongrois por l'evesque crieir!
3390 A unc conseilh se vont tos ensemble auneir;
Tantost le due d'Ardenne ont-ilh volut mandeir
Et cheli de Lotringe , la vont gens asembleir,
A chinquaute milh homme vont en chemin entreir
De bone gens hardis.
5 Ce mol s'esl deja presenle, v. 3737.
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LA GESTE DE LIEGE.
635
I,a gaerre as Daaola.
5393 Or cbevalchent Tongrois a banire desploiie,
Si jurent cbeli Deu qui de mort vint a viie
Qu'il raronl leur evesque, qui qui en pleure ou riie,
El seirat amendeit la grande vilonie,
Ou toute Dannemarcbe seirat ja exiliie,
3400 Et ne rentront a Tongre, se ne l'aront bruiie.
Tant ont-il chemiueit, sicomme l'isloire crie,
Qu'en Dannemarche entreat la guere ont comenchiie;
lib ont arse Argalon, une citeit polite,
Sandelacb et Sourgaine qui f urent enricbiie ;
3405 Puis ont assis Ligaine, la citeit signorie,
Dont la novel ful a rois danois nonchie.
Ses barons asemblat, si vint par Emamie
A sisante milhe hommes de sa cbevaleriie;
A Ligaine vinrent tot droit une nutiie,
5410 Ly Tongrois le sorent, mult en ont chire liie.
Lendemain a matin que li soleas raiie \
Ont li nobles Tongrois trois ba tail he rengie;
En nom del Triniteit les ont-ilh instablye :
Ly boin dus de Lotringes Henris chire envoisie
5415 Conduit la premir, la seconde manie
Ly boin conte d'Osterne , Guichars de Pontencbie ,
L'atre li dus Tremus d'Ardenne 1'enforchiie.
Et li Danois ont fait desus le praierie
Dois batailhe , en cascune olt grande compangnie :
3 120 L'une menat Ogens li Danois a grant bie *,
Et Mileon ses fis se at l'atre encbergiie.
Ly uns aproche l'atre par grande felonie,
Les fortes lanches out isnelement bassiie
Et brocbent les cbevals.
cxxi.
Ba<alaa.
3425 Barons , or escuteis por Deu 1'esperitals.
As cops de lanches fut li estour trop mortas,
Apres les lanches traient les brans portevinals 3 ;
La comenchat estour doloreus et mortals.
A I comencbier Tongrois ont le peour sor eas;
1 Rayonne. Notre texle porle te lite.
* II ne peut s'agir de V instrument dont se servent les paveurs. Hie pro-
bablement signifie ici : effort.
3 Voyez plus haul , ▼. 949.
* Guenchitt. BR.
5 Sans doule pour rerel, plaisanterie.
3450 Formcnt sont reculeis contrevals le preals.
Tremus, li dus d'Ardenne, qui fut preux damoisials,
L'espee tint en pongne dont tailbe li cuteal.
Tongrois voit reculeir qui pas ne li est beas,
Sa batailhe at meneit en amont contrevals,
5435 Puis est ferus erant entre Danois malveas;
Luy et ses hommes ont espandus mains cbervials,
Uh at ocis Turpins, I vailhant mariscals
Qui fut cusin Ogens li Danois amiras.
Mileon le choisit qui fut preux damoisials;
3440 Tremus at asseneil sur son hyalme a esmas.
Tot parmy le trenchat ensi comme 1 cendas,
Et la coeffe at fasee, si Tat navreit dois plaies
Dedens son chief porfont dont corus li sane cbas.
Ly dus Tremus gentis * lieve le brans pongnals,
5445 Si feril Mileon, mais ne li vault dois clas;
De Mileon fa u sat, le chevals qui fut eras
Olt le cop sor le chief dont ne fail pas reveas 5 ,
Gar en dois le colpat , sicomme I rains de sas 6 .
Mileon cheiit a terre qui preux fut et roials,
5450 Et Tremus Tassailhit , mais li Danois pungnas 7
Ont erant remonteit leur sire jovenchials.
Tremus entre en Pes tour, si cope ces musteals K ,
Tiestes et bras detrenche, poitrines et batreals,
Puis escrie ses hommes, li nobles dus roials,
5455 Disant : « Fereis, singnours ! »
Grande fut la batailhe et pesans li estours.
Je croy que li Tongrois perdissent leur badours °,
Quant li boins dus d'Ardenne les fist nobles secours.
En sa compangne avoit XVllI 00 contours ;
5460 Une roge escut portoit qui donne grand luours,
Une fasse d'argent y olt par grant valours :
C'est maintenant Builbon, sachies tos sens follours.
Et chu est bin raison , car fut puis ceile jours
Que Builhon fut li chief des Ardenois terrours.
5465 Et Lotringe portoit d'argent Tescut d'honours,
Faissiet de guele roge; si porte teile atours
Li conte de Viane, car ilb fut successours.
6 Une branche de saule.
7 Puans. BR. Pugruu doit elrc ici pour poigneais, que donne Roque-
fort.
8 Voyez plus baut , v. 6*9.
* Orgueil. Baudour dans Roquefort.
>S
le
636
APPENDICE.
Or escuteis, barons, por Deu le creatours.
Tremus escrie a Ardenne • disant : « Frans pongneours ,
5470 » Fereis sor ces Danois qui tos sonl tra hi lours;
» Tos seiront desconGs , li peires salveour
» Nos don rat la victoir ! » Atant fiert sens errour
Dedens le plus espes , car mult olt grand vigour;
Tant en abat a terre que Danois ont tremour.
3475 Dont reculent Danois, la ful pris le retours.
Cascun fuyoit Tremus, li navrels font clamours,
Et il les decachoit ociant a dolours.
Si fait li conte d'Osterne , li noble vassaours *,
El li dus de Lolringe qui ne fut mie lours ,
3480 Et tos li boins Tongrois, grans, moiens et menours,
Cascun y met sa fbrche; car mult ont grant amour
Al evesque Materne qui asloit leur pastour.
Danois Pont compareis qui mourent a Testour
A milbirs et a cens.
CXXIH.
3485 Forte fut la batalbe entre tongroise gens
Et Danois sarasins, les tranitours pulens.
Tremus, li dus d* Ardenne , qui olt grant bardimens,
Cis y fiert et caploie sens faire parlemens.
Rois Ogens le percboit , s'en olt grant matalent.
5490 Tantosl Tat aprocbiet , si le ferit brifement ,
Amont son hyalme vis fendut Tat li vilains ;
La coeffe dobletine li al fait tensement,
Gar pas ne l'a fasee , et li dus excellens
Li donne teil colee, que les aournemens
5495 Ly at trestot desrot, byalme et coeffe ansimens;
Jusqu'en pies le ferit sens nul atargement.
Quant Tont veiiut Danois, si font grant ploremens,
De l'estour Font osteit, sicomme fut mors senglens.
Quant Mileons ses fis en olt entendemens,
3500 Mult en oil grans corocb et jure incontinent
Que de chu erament seirat pris vengement.
En l'estour est entreis , la fut grans li contens;
Diestre et sentestre abat a la terre a tormens.
Boins cbevalirs astoit et d'estour diligens :
5505 lib at ocis Joifroy de Lembor et Glimens ,
Arnay le palade, et Tibas et Vincens;
Sa gens at resbadit trestot oviertement.
Tongrois d'altre costeit ne font arestement;
lib orient Danois trestos generalment.
» Pour vawusour.
9 Pour pelichotiy pelisse.
3510 Pbarons le fils Tremus cist y mist se consens;
lib at ocis Guydos qui fut a roy parens,
Gobas et Andelos , Erinbrans et Guisdens ,
Et mains altres barons.
Mult fut grans li estours, bin si provat Pharon;
3515 lib at pris une espiel ou fut li coufanons,
Si at erant ferut le Danois Mileons
Qui des Tongrois avoit ocis a grans fuisons.
L'escut li perche toute , si comme I pilecbon f ;
Le haubier li fausat, rompus est l'aquetons,
3520 En costeit le navrat, si cheiit del arcbon.
lib ne fut mie mors, li Tongrois compangnons
L'ont pris et retenus sens nul arestisons ;
Tot loiiet Tont meneit dedens leur pawilboo.
Et Pbarons en l'estour fasoit grant marisons,
3525 Ges Danois ocioit li vail bant damselbon,
Cuy il ataint mors est, poin ne li fait ranchon;
Trois en at geteit mors dont je ne say les non.
Tongrois Tont percheut, si devinent fellons,
Ges Danois assailbent fausant ces babrigons;
3530 Tant font que le meilhour retinent des parchons,
Danois sont reculeis en dubitacion
De tos peirdre le viie en leur conclusions;
Tot frappant reculent , n'ont plus de defencions ,
Todis soy defendent nonporquant comme lion.
3535 La olt tant de Danois retenus comme prisons :
Trente cens de grans nom cierte y contat-ons.
Que vos seiroit taut cis eslongiel la cbancbon ?
Danois comme desconfis s'enfuyent de random,
En leur citeit rentrent en grant confusions;
3540 Et Tongrois a leur treis retournent comme proidhoos,
En lowant Jhesu-Cbrist qui soffrit passion
Par Juys nonsacbans.
cxxv.
fat
Ly estour est fineis de quoy je suis parlans,
Ly Tongrois retournent as tentes et brebans *,
3345 Ob Mileons asloit, li jovenes rois soudans,
Qui at mult grant paour d'iestre le chef perdans.
Ensiment tot le jour fut la chouse en estans;
Tongrois furent lasseis, si se sont reposans.
5 Brtehans. BR.
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LA GESTE DE LIEGE.
637
Lendemain a matin fut Tremus apellans
3550 Les XXX« prisons et Mileons li grans :
« Barons, ce dist Tremus, com vos est convenans,
i Les tiestes perdereis, tot ce seireis gangnans
» A notre saint evesque que vos fustes arestans;
» Qui la tres-sainte loy astoit ychi precnans;
5555 » Vos en moreis trestos, et si seiray ardans
> Tot le regne a Danois ' que je voy la seant;
» Puis que se peires est ocis desus les champs,
» Rois seiroit des Danois, s'il astoit escappans. »
« Sire, dist Mileons, vos fereis vos comans ;
3560 t Mais puisque prisons summes, il n'esl mie afferans
» Que nos rechivons mort, mais que nos ranchonans
» Por moi et tos mes hommes, que chi asteis tenans,
» X sommiers de monoie areis, sire, vailbans;
» Et puis si vos rendray voire evesque plaisans :
3505 » Prendeis l'avoir, beas sire, et soions acordans. »
Quant Tremus l'entendit , l'avoir fut covoitans ,
A la pais s'acordat. Ensi li Tongrois frans
Out reconquis l'evesque Materne a cuer sacbans,
Avoec le grand avoir, et puis sont retournans
3570 Vers Tongre li mesquins f .
cxxvi.
Vers Tongre retournent li Tongrois cresloiens;
A Materne ont doneit l'avoir el les Dorics,
Onque li dus ne relient vailhant HI Angevins 3 ;
As englises en donne l'evesque, qui grans bios
3575 En acquist por servir le vrais rois celestins.
Or avint que sor Pan , ce disl li parchemins,
Cent et XXVII Materne prechoil desus le Rins,
Droit en mois de septembre, ou convertoit paiens,
Unc jour wint a Colongne, oil par le Deu destins
3580 Morit le sains proidhomme, sa vie pris la fins.
Adont mult * grans debas por avoir grans bus tins,
Entre cheas de Colongne, de Trieve et les Tongrins;
Cascun voloit avoir le corps et dist cest sins *.
1 Le Danois qui est la , c'est-a-dire : Mileons.
* Je ne eonnais a ce mot aucun sens quf s'applique iei , et je crois qu'il
faut lire mestrins que donne le manuscrit BR : Tongres le maitre, le do-
minateur.
1 Dtnirt porte notre texte. Je prends la version du manuscrit BR.
* Sic dans les deux testes, fort probablementpourmtif, s'emut , s'eleva.
* Et dit qu'il eat sten, qu'il lui appartieut.
* Cest la version du manuscrit BR ; gourfuu dans notre texte ne pre
»eute pa& de sens.
Dont pres avint grans mals; mais Deu li rois divins
3585 Par le bocbe Clemens, I proidhomme de cuer fins 6 ,
At fait entendre a peule que ilb n'atarge rins,
Par-dedens une nave de chayne ou de sapin
Soit mis li corps en l'arche del evesque frarins,
Et Dieu le conduirat voians tos sens declins
3500 Ob doit aleir de droit sens nuls malvais engins.
Li peule l'entendit, si fut a cbu enclins.
Tot ensiment fut fait de part tos les voisins,
Et li neif en alat, siglant droit comme mairins,
Contremont le courant par si noble covins,
3503 Qu'il arivat a Trieve par-desus les jardins.
Cbeas de Trieve en font feiste qui ont si fait reel ins,
Et li altre pleurent , comme ce soit leur defins.
A Tongre et a Colongne retournent li voisins
Qui de eel regne sont 7 .
cxxvi I.
3000 Barons, li coroiriques par veriteit racont
Que por les ploremens que cis de Tongre font,
Cis de Colongne ausi quant le sains corps ils n'ont,
Que li borgois de Trieve englise edifiont
En droit lieu ou la neif arivat en sablont,
3605 Et par nom Ploranit proprement le nomont;
Le corps de sains Materne la endroit enteront.
Mais li croniques dist et de veriteit conpt,
Que puis fut translateis a Liege droit adont *
Que del Nativiteit coroit Ian , sens mescont ,
3610 Sor Vllle et XXX ans; cis de Liege ancor Font.
A Sains-Lambier l'englise gist-il , sens mesprison.
Or lairay de Colongne et de Trieve en eel point,
Car apres sains Materne Treverans impetront
A saint siege de Romme que une archevesque ont,
3615 Et cis de Colongne ont fait evesque en repont.
Par quen li boin Tongrois a chu s'aterminont
Que por eas une evesque d'on proidhomme feront ,
De Trieve et de Colongne separeir se voronl.
7 Le manuscrit BR donne ici les couplets txxu, txxui et lxxit, donl j'ai
constate l'absence plus haut, p. 616.
* Ici une main plus moderne , dont j'ai deja signale la presence , a ecrit
en marge :
Par Offer le danolt , le boin baroo ,
Par le coogret de papa Eatieooe que 111* cont-oa.
Puis, pour mettre cette intercalation en rapport avec le texte, elle a rature
la date 830 et l'a remplacee par la date 84S .
638
APPENDICE.
Uoc proidbomme oot eliet, Navitus l'apellont,
3620 Qui de leur nation astoit, si olt fuison
D'amis en la cHeit qui bin le servirout.
Sisante VII ans plains regnal aval et amont ' ;
Ameit l'ont cheas de Trieve, de son conseilbe usonl,
Et trestot leur paiis li onl mis a bandons.
3625 Aseis regnat entre eas faisant mult beal sennont * ;
Dieu fit par luy miracle en nobles gueridont *,
Qui todis al bin faire Tat en ais * et somont.
Mains peules par ses dis leur fas dies renoioul,
Et sont tos baptisies.
3630 Sor Tan de grasce cent XLVIII , che sachies ,
En 1'onour sains Materne , notre evesque prisies,
Fist l'evesque a Tongre une englise edifier.
En son dormant li fut sains Materne pries ,
Une altre englise fist li proidhomme affaities,
3635 En I'onour de sains Jobans qui fut tant adrecbiet;
C'est li evvangetistes, oh canones envoisies
1 lei en marge cette note : « Qui fut fib de dus de Giiie , fib de, freire le
» deirin rois de Tongre. Cis Navitus fut disciple a sains Materne et ful fais
» vesque secons de Tongre Tan del Nttiviteit Jhesu-Grist cent et XXXI , el
•> trepassat l'an de Jhesu-Grist cent et LXXXX , et ful ensevelis a Tongre. »
* Cette autre note encore : « El se fut ausi evesque de Trive l'an LI et
» se go vera at les dois evesqueit X ans. »
5 Sans doute pour guerdon, recompense.
4 Pour ai$l, aide. Art dans le manuscrit BR.
5 Je retablis ces mots el /// ratures par I'auteur des notes marginales ,
el qui sont dans le manuscrit BR.
At mis li sains evesque, oil fut bin enptaies;
Et puis fondat une altre de sains Jake le vies ,
Ob il posat redus qui orent ordes gries.
3640 Apres fondat une altre en 1'onour sains Andries,
A Tongre en une ruwe c'on dist Sovrains Marchies.
Celle fut une cure, dont la cileit valt miex;
Parochial englise fut, ou mult ensachies
Fut Jhesus et sa loy; tot cbu por voir alios.
3645 Quant olt regneit son terme, si est a mort pkaes.
Jhesu-Grist en olt Tarme par sa digne pities
Sor Tan cent et nonant et III 8 , dont mult iries
Furent tos cheas de Tongre, puis sont encoragies.
De sains Marcelle' ont fait leur paste, et rat drechies
3650 Tirs evesque de Tongre; mult lea at apaisies;
Par ses douches parolles at Ufa assuagies 7
Cheas qui por Tatre evesque astoient corocbies.
Oywit * ans regnat Marcelle al been faire aliies.
Quant il fut mors, si fut evesque portraities
3655 Metropoliens , liqueis ne fut mie forvoies.
Noef 9 ans regnat en bin , et de son corps bailies
Ly proidhomme sciencheus.
6 lei en marge 1a note suivante : ■ Cis sains Marcelle coavertit al (w>
» katbolike Luciius rois de Bretangne , avoec son paiis et les baptisat ,
» liqueis Marcelle fut nationeit de Toagre, et fat vesque elui 1'ia C et
» LXXXXI, et fut vesque XXIX ans, el se trepassat a Tongre, li il fut
•> ensevelis , Tan CC el XX. »
7 Prononces attouagiet, console.
8 Toujours de la main de I'auteur des notes marginales, on XTajoolr
avant oywit , buit.
9 Ici un Diet avant noef.
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GLOSSAIRE.
SB. Nous u'avons pas eompris dans ce glossaire la Gette de Liege dont on a cherche a expliquer,
au bas des pages memos , les mots qui offraient quelque difficult*?.
A.
Ababi, p. 585. Etonne, surpris. Voir notre glossaire
de Jean de Stavelot.
Ablawis , p. 282. Eblouis.
Abrechier, p. 322. La version da manuscrit B : aher-
der, indique le sens : saisir, prendre, embrasser.
Accrescer, p. 330. Accrottre, augmenter.
Achiel, p. 233. Probablement pour achier, aciep.
Acontanche, p. 29. Accord. Ducange et Roquefort
donnent le verbe aconter.
Acquosier, p. 135. Je ne sais si j'ai bien assigne a ce
mot son veritable sens en disant qu'il doit signifier :
se tenir coi, tranquille. Ce serai t un verbe neut re,
taodis que acoiser dans Ducange et Roquefort est
un verbe actif.
Acruis, p. 160. Accra.
Acuity p. 284. Aigu, du latin aculus. Ce n'est pas le
sens que Ducange et Roquefort donnent a ce mot
qu'ils rattacbent a acquitum.
Adevine , p. 234. tinigme. Adevinal dans Ducange el
Roquefort.
Adjourne'e {al)> p. 355. Au point du jour. Ajornal
dans Roquefort.
Affluber (#*), p. 102. S'affaiblir. J'ai rattache ce mot
au wallon flawe et flauwe , faible. C'est ainsi qu'en
a encore ete forme le subs tan tif afflowissement , cite
dans notre glossaire de Jean de Stavelot.
Agoyans, p. 5, 6, 181. Geant. Voir la note de la p. 5.
Agrappt, p. 16. Attache avec une agrafe.
Ahir, p. 144, 532, 578. Pour air, ire , colore, violence.
Aiwe, p. 43. Eau. Forme wallonne au lieu de aigue
que donnent les glossaires.
Ajoiant, p. 326. Meme sens que agoyans. Cette forme
semble indiquer le son doux a donner au g dans
agoyans.
s Alever, p. 50, 355. Elever. Sens different de celui que
donne Roquefort.
Allumeurs , p. 70. Eclairs. Substantif du verbe allum-
• mer que contieut notre glossaire de Jean de Sta-
velot.
Aloweit, p. 409. Depense. Voir le meme glossaire,
v° Alloweir. Ducange donne allouer, qui est le
meme mot.
Alumure, p. 191. Eclair.
Atumyre , p. 85. Prononcez aloumire,el vous aurez la
forme wallonne du mot qui precede.
Amackour, p. 106, 108, 112. Titre entralnant Pidec
d'un commandement superieur. Voir le glossaire de
Gachet , v° Aumagour.
Amasser (#'), p. 518. S'elablir. Sens analogue a celui
que Ducange et Roquefort assignent au mot amaser.
Amerir, p. 55, 342. Diminuer. Amermer dans Du-
cange el Roquefort.
w
640
GLOSSAIRE.
Amettre, p. 134, 242, 254, 359, 407, 434. Accuser,
imputer. Voir la note de la p. 134 et noire glossaire
de Jean de Stavelot.
Amyraus, p. 157, 158. Amiral. Voir le glossaire de
Cachet, v° Amiral.
Anglechon, p. 342. Un petit coin.
Anne', p. 454. Ag6. Le glossaire roman de Ducange
donne le mot, mais applique seulement an Tin.
Annette, p. 264. Canne, corame disent Ducange et
Roquefort. Mais ici le mot designe un oiseau aqua-
tique fabuleux sur lequel il faut consuller la note 2
de la page indiquee.
Anoie , p. 504. Fatigue. Voir la note 1 de la page in-
diquee.
Anticesseurs , p. 109. Ancetres. Ancesseurs et ancis-
seurs dans Roquefort et Ducange.
Apasenteir, p. 511. Apaiser. Voir notre glossaire de
Jean de Stavelot a ce mot.
Apier, p. 520. Adroit. Apert dans Roquefort.
Apreper, p. 109. Approcher. Voir la note 1 de la page
indiquee. Aussi notre glossaire de Jean de Stavelot.
Apressement , p. 281. Compression. Ducange et Ro-
quefort donnent le verbe appresser.
Arbrespine, p. 356. Aubepine. II faut sans doute lire
albespine.
Arc , p. 281. Ce mot doit 6tre pour arche , coffre.
Arche, p. 65. Forteresse , citadelle. Arce dans Roque-
fort
Arichier, p. 522. Voir notre glossaire de Jean de Sta-
velot
Arondine , p. 77. Roseau.
Arren, p. 61. Airain.
Ars, p. 158. Meme sens que Arche.
Asiel, p. 417. Vinaigre.
Asil, p. 414. Meme sens.
Asontir, p. 437. Devenir fou. Assoter dans les glos-
saires.
Athocassiem , p. 317. Attouchassions. Le verbe attou-
chier dans Roquefort n'a pas ce sens.
Auvoste, p. 79. Pour awoste, aoul.
Awe8ier, p. 417. Aiguiser.
Awireux, p. 314, 356, 420, 422. Heureux. Voir aussi
ce mot dans notre glossaire de Jean de Stavelot.
Ay on, p. 12, 14. Grand-pere.
Aywe , p. 73. Voir aiwe.
B.
Haiier, p. 327. Baie, ouverture. Voir la note 2 de la
page indiquee.
Bain, p. 510. Ban.
Baldreit, p. 371. Baudrier.
Baleure , p. 465. II faut probabiement lire balevre ,
menton, qui se trouve dans Roquefort
Ban , p. 72. Manne. Le veritable mot wallon est banse
ou banste. Voir notre glossaire de Jean de Stavelot.
Bangne, p. 73. Bain.
Banist (oust) , p. 138 , 149. Armee convoquee par le
ban.
Bansteal , p. 232. Petite banse.
Batam, p. 249. En hate. Voir le glossaire de Ducange ,
v° Batare.
Batelhier, p. 480. Combattant Applique comme qua-
lificatif a une partie de la Gaule, p. 266.
Batelhir, p. 100. Meme sens.
Besongner, p. 160. fitre necessaire. Voir a ce mot
notre glossaire de Jean de Stavelot.
Blewe,?. 201. Bleu.
Bober. p. 495. Se moquer.
e, p. 411. Le fut, le tronc. Voir la note 2 de la
page indiquee.
Boleir, p. 306. Faire bouillir.
Bomme , p. 17, 19. Grotte, excavation. Voir la note de
la page 17. De ce mot vient le verbe wallon bommer,
qui sert a indiquer le travail que fait la taupe.
Bostote, p. 509. Bossu. Voir la note 4 de la page in-
diquee.
Boverages, p. 240. Bien rural. Meme sens qu'a Bo-
verie , qui se trouve dans notre glossaire de Jean de
Stavelot
Boveres , p. 61 . Dans la note 4 de la page indiquee , je
demande s'il ne faut pas lire bouresse, lavandiere?
c'est plutot un mot qui sert a designer les femmes
d'une boverie.
Boyme, p. 17, 275, 475, 476. Voir Bomme.
Brache, p. 218. Bras
Braches , p. 263. Cbiens braques. Voir la note 7 de la
page indiquee.
Braier, p. 578. Brayelte. Voir la note 1 de la page
indiquee.
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GLOSSAIRE.
644
Brieflel, p. 354. Billet, petite lettre.
Brievelet, p. 266. Meme sens.
Brodium , p. 484. Ordure. Voir la note 3 de la page
indiquee.
Buffe, p. 536. Soufflet. Prononcez : bouffe.
Bures, p. 288. Bitume. Voir la note 6 de la page in-
diquee.
Butyne, p. 8. Bitume.
c.
Cacher, p. 326. Chausser.
Cachie, p. 108. Route, chaussee.
Caduc (la), p. 73. Le mal caduc.
Capeler, p. 468. Combaltre. Caploier dans Ducange
et Roquefort.
Cerule, p. 436. Noir bleu.
Cete, p. 48. Baleine.
Chaens, p. 341, 343,417, 418, 419,446,537. Ceans.
Chaioir, p. 181. Tomber.
Chair, p. 277. Chaise, fauteuil. Ordinairement :
Chaiere.
Champir, p. 133. Combaltre. Voir notre glossaire de
Jean de Stavelot, v° Champier.
Chativison, p. 53. Captivite. Chaitivite et Chelivoison
dans les glossaires.
Chaval , p. 448. Ici-bas, ci-aval.
Chave'e , p. 12. Fosse. Voir la note de la page indiquee.
Chelle , p. 454. Une maisonnette. Pour celle.
CherSe, p. 36. Charretee. Voir notre glossaire de
Jean de Stavelot , v° Charaie.
Cherewier, p. 517. Laboureur. Voir la note 7 de la
page indiquee.
Cheron, p. 259. Charretier.
Chevalcereche {littere), p. 241. Litiere portee par des
chevaux.
Cheveals, p. 217, 246, 453. Cheveux.
Chieiis, p. 418. Voir Chaens.
Chire, p. 80. Visage. Chdre dans Ducange et Roquefort.
Choies, p. 506. Tranquilles. Pour coi.
Choisit, p. 150. Pour coisit, vit.
Clergeresse , p. 86 , 552. Femme lettree. Clergesse ,
dans Ducange et Roquefort.
Clergerie, p. 80. Clerge.
Coevre, p. 230. Cuivre.
Co/fr«,p.l31. Coiffe.
Coise, p. 58. Chose.
Coliche(porte), p. 23. Herse.
Compendieusement , p. 143. En abrege. Le mot se
trouve dans le Complement du Dictionnaire de
r Academic
Contrable , p. 96 , 1 35 , 1 57, 1 63 , 239 , 278. Contraire.
Conlrefigureit , p. 441 . Defigure.
Coque , p. 484. Cuisinier.
Corchiet, p. 77. Un velement qui couvre la tGte. Voir la
note 3 de la page indiquee. 11 est probable que cour-
sier, de la chronique de Jean de Stavelot (p. 518),
est toujours une forme du mot ecrit ici corchiet.
Corechiet , p. 426. Meme mot que le precedent.
Corenche, p. 483. Dyssenterie.
Cornu, p. 525. Mot sur lequel il y aurail trop dupli-
cations a donner s'il fallait en preciser le sensT Voir
la note 5de la page indiquee.
Coron, p. 513. Bout, extremite. Le mot se trouve aussi
dans Jean de Stavelot. La signification donnee par
Ducange et Roquefort n'est pas la meme.
Corporeits , p. 526. Voir aussi la note 4 de la page in-
diquee.
Cotrai8, p. 417. Boiteux.
Coubrir, p. 383. Saisir. Voir la note 1 de la page in-
diquee.
Covenir, p. 581.Courir? Voir la nole 2 de la page in-
diquee.
Cras , p. 295. Gras.
Crosses, p. 100. Graces. Voir la note 7 de la page in-
diquee.
Crespi f p. 436. Frise.
Creventeir, p. 216. C'est le meme mot que creveteir
qui se trouve dans la chronique de Jean de Stavelot.
(Voir la note 4 de la p. 306) : seulement la elle s'ap-
plique aux hommes , ici aux murailles.
Cri880ul , p. 220. Creuset. Voir la note 2 de la page
indiquee.
Croliche t p. 46, 379. Marais. Voir a ce mot notre
glossaire de Jean de Stavelot.
Crombe , p. 267. Ce doit 6tre le feminin de crom ,
tortu , courbe.
Crossure, p. 256. Sans doute pour elossure , cloture.
Crueux, p. 76. Cruel.
Cure, p. 217, 395. Cuir, peau.
Cuteal, p. 225. Couteau.
Cyboire, p. 16. Voir, sur le sens de ce mot, la note 4
de la page indiquee.
84
642
GLOSSAIRE.
D.
Dechaiement, p. 542. Diminution ?
Dedicassier, p. 77. Faire la dedicace.
Defroisser, p. 526. Briser.
Demetant, dementant, demeytant, pp. 125, 257,
373. Pendant que.
Demoucher , p. 437. Deshabiller.
Deplaileit , p. 226. Couvert de plaies. Deploy* dans
Roquefort
Deraier, p. 517. Je crois avoir, a la page indiquee, mal
interpret^ ce mot. Deraier see chsveals , doit signi-
fier : s'arracher les cheveux. Deraier serait la tra-
duction du lathi diruere.
Derain, pp. 127 , 134, 155, 101 , 284, 336, 380, 432.
Dernier, mot conserve dans le wallon.
Derainement. Adverbe forme de I'adjectif derain.
Dans Roquefort ce mot est substantif et a un tout
autre sens.
Deroter , p. 191. Rompre, briser.
DesangleU , p. 544. Ensaoglante.
Desdengne, p. 206. Mepris. Desdainy dans Roquefort.
Desivreit , p. 49. Desenivr6.
Desnoieresse , p. 542. Qui denoue?
Despasenteis , p. 240. Le contraire d'apasenteit , par
consequent : trouble , inquiet.
Desperter {se) , p. 353. S'eveiller.
Despic, p. 119. Espion.
Despleiter, p. 406. Mepriser, outrager. Despiter dans
Roquefort.
Desros, p. 530. Rompu. Desroupt dans Roquefort.
Desrubanz , p. 267. Voir, sur le sens de ce mot , le'
glossaire de Gachet
Destine', p. 281. Produit par magie.
Destoublier , p. 380. Trouble , inquietude.
Destrendement , p. 479. Contrainte. Destraignement
dans Roquefort.
Dierain , p. 34, 1 14. Voir Derain.
Dierverie, p. 308. Extravagance, folic Roquefort ne
donne que I'adjectif dierve 1 .
Diestrieres, p. 584. Les destriers, les chevaux.
Diversileit, p. 88. Mechancete 1 . Roquefort donne sett-
lement I'adjectif divers.
Divineur, p. 177. Devin, sorcier. Divinateur dans
Roquefort.
Douls,p. 330. Deuil.
Drier (<fc) >P- 74. Derriere.
Duree, p. 240. Resistance.
Dyadicos ou Dyaditos , p. 276. Une pierre precieuse
qui m'est inconnue.
E.
Elinagit, p. 135. Apparente, uni par un lien de li-
guage.
JE/te,p.465.Dansla.
Eluit, p. 76. La partie la plus pure du metal.
Emperial (chiel), p, 350. L'Empyree?
Emperier, p. 145. Dominer.
Enbussiet,p. 137. Embusque. Embuche dans Roque-
fort.
Enches , p. 276. Sorte de pierre precieuse qui m'est
inconnue.
Enclosure, p. 270. Objet qui encldt un autre.
Enfrai, enfraieis, p. 133, 274. Effrayl.
Enhercher, p. 324. Jeter, pousser.
Enlongement, p. 493. Eloignement.
Enpener (se) , p. 370. Se donner de la peine.
Enpenseis, p. 174. Pensif.
Ensachiert p. 405, 451. Exhausser.
Ensauchier, p. 174 , 440 , 456. Bfeme sens.
Ensenghe , p. 241 , 307, 308 , 393. Signe de reconnais-
sance.
Ensyment, p. 54. l&galement, pareillement.
Entalenteis, p. 444. Docte, savant, qui a du talent.
Entendement , p. 385. Explication.
Entenseit, p. 231. II s'agit d'une Heche placee sur un
arc tendu.
Entrechaistres , p. 470. Petites cbambres, cellules.
Envois , p. 21 . Dehors. Voir la note 6 de la p. 21 et le
glossaire de Jean de Stavelot
Envoiler, p. 410. Eveiller.
Envynemeir, p. 485. Empoisonner. EnveHmer dans
Roquefort.
Enwolpeir, enwolepeir, p. 77, 319, 414, 426. Enve-
lopper. Crest encore la forme wallonne.
Erain, p. 76, 418. Airain.
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GLOSSAIRE.
643
Eraine , p. 293. Sable.
Braine, p. 296. Canal sou terra in. Voir notre glossaire
de Jean de Stavelot, v° H eraine.
Escaniscal, p. 265. Senechal.
Escolhier, p. 19. Chatrer.
Escutveir, p. 288, 391. tiviter.
Esnoiches, p. 394. Pour notches, peut-£tre une faute
de copiste. Voir la note 2 de la page indiquee.
Espirs, p. 137. £pieux , javelots. Voir la note 8 de la
page indiquee.
Esponsement, p. 471. En secret. M6me sens qu'a abs-
consement, dont Roquefort donne radjectif abscons.
Nous aurons dans le volume suivant radjectif de
notre esponsement
Esquermire, p. 246. Ducange et Roquefort donnent
le verbe, mais il s'agit ici du substantia Sur Tinter-
pretation, voir la note 2 de la page indiquee.
Estage,p. 302. Stade?
Estas, p. 311. Reste, demeure. Slas dans Roquefort.
Estoile,p. 66. tftole.
Estomble, p. 243. Aiguillon. Estombel dans Roquefort.
Esturent, p. 322. Resterent. Du verbe ester, comme
plus haut estas , et aussi estut de la p. 31 1 .
Expulhie', p. 313. Expuls£, chasse.
F.
Faiseit, p. 378. Fausse, manque.
Fakenier, p. 37. Fauconnier.
Fallir, p. 157. Manquer.
Fatueux, p. 319. Fou. Fatuaire dans Roquefort.
Faus, p. 255. Faix, fardeaux.
Fause , p. 530. Face.
Fausse , p. 272. Je crois qu'il faut donoer aussi a ce
mot la meme explication qu'au precedent : Herode
se tenait a rarriere-garde, et faisait face aux en-
nemis qui le poursuivaient.
Faute, p. 158. Fosse?
Fenestre, p. 82. Voir la note 1 de la page indiquee.
Fermeis, p. 126. Rendu ferme.
Fermeit, p. 570. titabli.
Ferus , p. 41 8. Verroux. Ferrous dans Roquefort.
Fesechien,p. 368. Physicien , medecin.
fYn,p.!26.Vif.
Fischiner, p. 273. Bander. Voir la note 1 de la page
indiquee.
Flaieis , p. 261 , 276. Fleau. Flaiel dans Roquefort.
Flairant, p. 238. Puant.
Fleireur, p. 103 , 107. Puanteur, et non pas seule-
ment: odeur, comme Roquefort interprete /latreur.
Flotte , p. 157. Armee. Flot dans Roquefort. J'ajouterai
a ce que j'ai dit a la page indiquee, que le mot
classis avail dans l'origine le m^me sens que le mot
exercitus.
Fount , p. 90. Creusait.
Folliier, p. 76. Pousser des feuilles.
Fohderne, p. 383. Fontanel le.
Forbos, p. 189. Faubourg. Forbore dam Roquefort.
Le mot forbos est aussi dans notre glossaire de
Jean de Stavelot.
Forieis, p. 167. Voir Implication a la note 1 de la
page indiquee.
Forset , p. 77. Ciseaux.
Fortterre, p. 103. Forteresse?
Fortuneux , p. 384. Heureux. Voir la note 3 de la page
indiquee.
Four, p. 232, 344. Foin.
Fructes,?. 569. Fruits.
G.
Germeais, p. 50. Jumeaux.
Glauteir, p. 381. Japper. Roquefort donne glatir et
g taper.
Glouse , p. 269. Explication, interpretation. Glose dans
Roquefort.
Glutineir, p. 189. Voir la note 3 de la page indiquee.
Crei/,p. 21. Degre.
Greveche, p. 232. Ecrevisse.
Grif, p. 303. Griffon.
Grognons , p. 124. Voir la note 2 de la page indiquee.
I
644
GLOSSAIRE.
Habandonner (se), p. 162. Se precipiter sur. Voir la
note 4 de la page indiquee.
Haire, p. 121. Destruction. Voir la note 4 de la page
indiquee.
Hanche, p. 280, 548. Hache.
Hanneir, p. 232. Labourer. Voir la note 2 de la page
indiquee.
Hardileche , p. 109, 122, 132, 166, 441. Hardiesse.
Harriots, p. 132. Bagages. Harnas dans Roquefort.
Trosser ses harnois, equivaut a la locution popu-
laire : Titer ses guttres.
Hatreal, p. 540. Gou. Hasterel dans Roquefort
Hautenche, p. 541. Hauteur.
Hayme, p. 131. Heaume.
Heppe, p. 294. Sorte de hache.
Heurs, p. 39. Heritier. Her dans Roquefort.
Hontrir, p. 325. Je crois qu'il aurait fallu lire : Hon-
trir, mot dont le sens est indique plus loin.
Hosle , p. 500. Hostie.
Houtrir, p. 399. Se vautrer, se jeter a terre en chant
Huleir, p. 198. Crier.
Hyame, p. 131. Voir Hayme.
list , p. 53 , 62 , 456. Sera. 1st dans Roquefort.
Incense, p. 335. Encens.
Inconsutil, p. 76. Sans coutures.
I.
lnftchtt t p. 80. Infecte.
Influenche, p. 159. Quantite, affluence.
J.
Jalotte, p. 231. Jalouse.
Jostereches (ecus), p. 40. Voir ('explication a la note 6
de la page indiquee.
Jotveal, p. 229. Bijou.
Ju4e,p. 263. Juive.
Jusce , p. 394, 404. Cruche.
Jttxhiers, p. 232. Jacheres.
K.
Kensseresse , p. 403. Fenniere , censeresse en walton ? Kotrais , p. 509. Voir Cotrais.
L.
Lac, p. 454. Lait
Lacheal, p. 453. Meme sens.
Lacheniers , p. 277. Pupitre. Voir la note 3 de la page
indiquee.
Lamme , p. 233. Plaque. Voir la note 3 de la page in-
diquee. Roquefort donne au mot lame un sens dif-
ferent , tout en lui assignant aussi le latin lamina
pour origine.
Lasseur, p. 103. Lassitude. Lassesse dans Roquefort.
Lencheus, p. 261 , 384. Joyeux, gai.
Lescheusement, p. 71. Joyeusement, avec liesse.
Levoeste, p. 182. Sauterelle.
Linchoul , p. 77. Morceau de toile.
Linchoux, p. 405. Meme signification.
Utiles, p. 46. Landes?
Lis, p. 25, 151, 310, 493. Lieux. Je ne crois pas avoir,
a la page 25, bien iuterprete le mot, et je suis
dispose a lui donner la meme signification qu'aux
autres.
Louche , p. 457. Loin.
Lymoge, p. 57. Sorte d'oiseau que je ne connais pas.
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GLOSSAIRE.
645
BI.
Maistre, p. 283, 284. Monstre.
Malaire, p. 82. Mauvais air, malaria.
Marir, p. 501. Faire erreur, se tromper.
Masai, p. 188. Joue ordinairemenl , mais ici peut 6tre
machoire.
Master, p. 454. Miserable.
Masselle, p. 283, 465. Joue.
Massiche, p. 15. Voir la nole 5 de la page indiquee.
Massurer, p. 216. Salir, noircir. Machurer dans
Roquefort.
Mawoureteil , p. 444. Maturite.
Mede, meide, meidre, p. 429, 431 , 433, 548. Me-
decin.
Medient, p. 293. Guerissent.
Melaine, p. 436. Noire.
Mesaise , p. 322. Besoin. Voir la note 4 de la page in-
diquee.
Meschammenl , p. 119, 123, 136. Malheureusement,
a meschief.
Messeais, p. 75. Lepreux. Mesel dans Roquefort.
Milhir,[>. 137. Millier.
Miwteit,p. 127. M&e.
MoitiSy p. 75. Monts.
Monrat, p. 277. Conduira, men era.
MonUe, p. 74. Escalier.
Montoir, p. 289, 290. Montague.
Mortoire,^. 79, 80. Epidemic
Mosteur, p. 287. Moileur.
Motion {prendre) , p. 576. Voir la nole 4 de la page
indiquee.
Moxhe, p. 233, 236. Moucbe. Mosche dans Roquefort.
Moyneteii, p. 103. Milieu.
Muchier, p. 538. S'habiller.
Muet, mut, p. 329, 333, 352,388. Mouvement.
Muse (payer la) , p. 238. Perdre son temps.
Muwer, p. 327. Changer. Muer dans Roquefort.
Myreour, p. 229. Miroir.
Myreur, p. 63 , 281 , 282, 435. Meme signification.
N.
Nevage, p. 517. Peage. Voir la note 3 de la page
indiquee.
Niquet, p. 305. Voir la note 5 de la page indiquee.
Noiel, p. 437. Un esquif? Voir la note 6 de la page
indiquee.
Noier, p. 293. Surnager.
Nois, noise, p. 290 , 301. Neige.
NuUe, p. 80. Nuage.
o.
0Aate,p.314. Os.
Orateur, p. 337. Oratoire. Ducange et Roquefort don-
nent le mot , mais l'appliquent au desservant.
Orde , p. 14. Ordonnance, reglement
Ortanl, p. 74, 285, 311, 378. Autant. A la p. 311 ce
mot paratt signifier : puisque.
Osseais, osseals, osseaux, p. 278, 386, 399, 400,
401. Voir ohale.
Oster, p. 199. Combattre.
Ou&siaux, p. 278. Voir Ohale.
Oust , p. 40. Pour ost, armee.
Ouvoetaine,?. 229. Huitaine.
Oux, p. 30. Yeux.
P.
Paile , p. 306. Seau. Pour Pex plication, voir la note 3 de
la page indiquee.
Paistre, p. 39. Moineau. Paisse dans Roquefort.
Pale, p. 70. Balle, bouie, globe.
Pa/um, p. 288. Pour la signification, voir la note 8 do
la page indiquee.
Pains , p. 46. Marais. Le chroniqueur a employe le
mot latin.
646
GtoSSAIRE.
Paridos, p. 276. Sorte de pierre prexieuse que je ne
connais pas.
Parlure , p. 319. Fente, crevasse.
Paste , p. 116. Terre cuite?
Penileir,p. 311. Faire penitence.
Perchoier , p. 279. Percer.
Pesseour, p. 386. P&heur.
Phischinerie , p. 477. Medecine.
Pirecheux , p. 309. Paresseux.
Pirophilos , p. 276. Encore une sorte de pierre pre-
cieuse, dont il est facile de signaler l'etymologie,
niais que je ne connais pas.
PoA/t*,p, 41,283. Poilu.
Poieur, p. 406 Peur.
Poindit, p. 79. Peignit.
Pokrii, p. 99, 147. Pouvait.
Pomeal, p. 243. Boule, globe.
Pondeur, p. 433. Peintre.
Pondoil , p. 390. Piquait.
Pondre , p. 382, 433. Peindre.
Ponteler, p. 390. Garnir de poinies-
Ponture, p. 234, 382. Peinlure.
Porchet, p. 308. Sur le sens de ce mot , voir la note 1
de la page indiquee.
Potrai8, p. 584. Poitrail , ou plutdt les sangles qui le
garnissent.
Pouhl,p. 76. Poil.
Prevoir, p. 393. Pritre. Provoir dans Roquefort.
Promous, p. 322. Excite\
Pup/fort, p. 267. Peupla.
Quadrageme , p. 74 , 82. Quarantaine.
Querymone, p. 70. Plain te , proces. Querimonie dans
Roquefort.
R.
Rachusul, p. 188. Rejoignit.
Raconquelhir, p. 399. Recueillir.
Radissoit , p. 366. Rayonnait.
/tote, p. 323. Arrache.
Rapeirier, p. 42. Retourner. Repairier dans Roque-
fort.
/taw«e»r, p. 521 . Reoonnattre. Voir la note 3 de la page
indiquee.
Rechaiut, p. 312. Retombe.
Reforbit,?. 483. Sur le sens a donner a ce mot, voir
la note 3 de la page indiquee.
Refroidi, p. 313. Rafraichi.
Refus , p. 6. Refugie. Roquefort donne le verbe refuir.
Refuser, p. 357. Abandonner.
Relassent, p. 229. Cessassent.
Releichier, p. 540. Delasser, amuser. J'ai mal inter-
pret ce mot a la page indiquee, en lui attribuant
le sens du verbe relaxier de Roquefort; c'est reles-
cier que j'aurais du citer.
Relle , p. 559 , 583. Rebelle. Je suppose que le copiste
a oublie une abreviation. Cependant comme ce mot
revient deux fois, j'ai cm devoir lui donner place
dans mon glossaire.
Remanchier, p. 305. Traduire en roman. (Test le ro-
mancier de Roquefort.
Remidrat , p. 333. Recompensa.
Renseal, p. 29. Rameau, branche. Rainstl dans Ro-
quefort.
Aep/ett,p.l73.Repit.
Repoins, p. 382. Repeint.
Reponse (a/), p. 346. Retire. Ce n'est pas tout a fait
le sens assigne par Roquefort a : repons.
Reponsement , p. 76. Meme signification qu'a espon-
semenU
Rescosse, p. 521. Delivre. Rescous dans Roquefort.
Resplit , p. 250, 352. Voir RepML
Reuste,p. 240. Imparfait du subjonctif du verbe ra-
voir.
Rewastat,p.Zto.Qt*.
Riweseal, p. 17,357. Riviere, ruisseau.
RosteaiSy p. 54. Rateau? Voir la note 3 de la page
indiquee.
Rosteal, p. 76. Grit
Ruwe, p. 170. Roue, disque.
Ruweir, p. 198. Voir PexplicaUon dans la note 3 de la
page indiquee.
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GLOSSAIRE.
647
S.
Sacremanne, p. 211. Pillage. Pour sacquemanne.
Sadee, p. 86. Ce mot, qui esl 6videmment le soldde
de Roquefort, est employe dans la meme ligne pour
designer la solde et l'expedition a laquelle sont des-
tines les 80udoy6&.
Sahus,p. 409. Sureau. Seu dans Roquefort.
Sanguins , p. 117. Hommes de sang noble?
Saraine , p. 30. Sirene.
Savesine, p. 324, 325, 381 , 382. Gibier. Sauvagine
dans Roquefort.
Sawiste, p. 222. Sut, imp. subj. du verbe savoir.
Saxe , p. 76. Pierre , rocher.
Scolumpne,p. 229. Golonne.
Scorgiies, p. 165, 411. Fouets. Voir la note de la
page 165. La forme scorgiers de cette page doit
gtre une faute de copiste.
Scus, p. 151. Ecu.
Seial , p. 108. Sceau, pour saial ou saiel.
Semblant (par), p. 238. De sorte que.
Sme8tre, p. 64. Sinistre? Voir la note 8 de la page
indiquee.
Sengner, p. 308. Benir eo faisant le signe de la croix.
Saingner dans Roquefort.
Seuf, p. 493. Soif.
Seul, p.240.Seuil.
Sewist, p. 223. Voir Sawiste.
Siet, p. 287. Le lit d'une riviere.
Siiet, p. 135. Cortege. Voir notre glossaire de Jean de
Stavelot y° Seute. C'est le meme mot que le sieute
de Roquefort.
Sis , p. 507. Parlicipe passe de seir que donne Roque-
fort.
Soter, p. 323. Scier.
SoWei*, p. 282. Soude.
Solea , p. 243 , 256 , 269. Soleil.
Solere, p. 493. Rassasier. Soller dans Roquefort.
Somme , p. 38. Mot employe pour designer le livre de$
Rois dans la Bible.
Sommyron , p. 84. Sommet. Sommeron dans Roque-
fort.
Songneux, p. 311. lnquiet. C'est l'adjectif du verbe
songner que donne le glossaire roman de Ducange.
Soprise, p. 227. tfprise.
Souffier, p 540. Suffire.
Souffiiet, p. 320. Participe passe du verbe qui precede.
Soulat, p. 76. Rassasia.
Sourjante, p. 458. Concubine. Voir la note 2 de la
page indiquee.
Sovineis , p. 136. Coucbe sur le dos. Souvin dans Ro-
quefort.
Soye, soyer, p. 86. Scie, scier.
Sponsement, p. 50. Je crois avoir propose une mau-
vaise interpretation, et sponsement ne doit pas
avoir d'autre sens que celui assign^ deja a espon-
sement. Apres examen, cette signification me semble
convenir au passage indique.
Slabulerie, p. 207. Ecurie.
Stadiiens, p. 158. Stade.
Slatuer, p. 452. Consacrer?
Stechind, p. 264. Voir Interpretation proposee dans
la note 4 de la page indiquee.
SteiliSj p. 318. £ tonne? Voir Implication don nee dans
la note 4 de la page indiquee.
Stindoit, p. 238. titeignait.
Stoppe , p. 239. Etoupe. Stouppe dans Roquefort.
Strangne, strangnir, p. 203, 409. Etranger.
Strennueux, p. 110. Courageux.
Superbiens , p. 189. Voir la note 6 de la page indiquee.
Surchelles , p. 465. Sourcils. Surcillieres dans Roque-
fort.
Surons, p. 306. Voir Interpretation proposee a la
note 1 de la page indiquee.
Syndonne, p. 414. Suaire. Sydoine dans Roquefort et
aussi p. 320.
T.
Tasis, p. 444. Repu. Voir la note 8 de la page indiquee.
Tasson, p.!41.Toison.
Tau, p. 102, 104. Forteresse? Voir la note 4 de la
page 102.
Taubles, p. 351. Espece de jeu de trictrac ou d'echecs.
Tables dans Roquefort.
Tendamment, p. 497. Avec ardeur, tension.
Tenten, p. 69, 71 . Sonne IU\ Voir la note 5 de la page 69.
648
GLOSSAIRE.
Tentente, p. 229, 230. Mime sens.
Terrien , p. 276, 277, 278. Pot de terre. Voir la note 1
de la page 276.
Testeals , p. 198. Tessons.
Thier , p. 525. Montague. Expression restee dans le
wallon et qui se trouve dans notre glossaire de Jean
de Stavelot.
Tissons, p. 191. Pour Tihons , habitants du pays
thiois.
Toignon. p. 343. Moignon.
Torete, p. 57. Petite tour.
Torques, p. 166. Collier.
Toureais, p. 232. Taureau.
Trais, p. 151 , 152. Pour traus , trous.
Trawer, p. 136, 151 , 259, 284. Trouer.
Tregut, p. 24, 91 , 205, 210, 213. Tribut. Trehus
dans Roqutfort.
Trespasseur, p. 542. Voyageur.
Treversant {al) , p. 196. Au Ira vers.
Tueles, p. 321. Briques.
Tulees, p. 17. Mime sens.
V.
Vancre , p. 434. Convaincre.
Vergelet, p. 320, 364. Baguette. Vergele dans Roque-
fort.
Vermiens, p. 243, 450. Vers.
Verses, p. 72. Vers, inscriptions.
Viande, p. 267. Sur le sens de ce mot, voir la note 2
de la page indiquie.
Vilhe, p. 335. VieiL
Virge , p. 76. Voir Vergelet.
Vitanche, p. 330. Abjection, avilissement.
Vivere , p. 299. Vipere ?
Voleir, p. 174. Cbasser au faucon.
Volentruts, p. 571. Soumis, affectionne. Voir la note
de la page indiquee.
Voile , p. 36 , 288 , 362 , 365. Verre.
Vors , p. 37. Voire , vraiment.
Vosure, p. 16. Voute. Voulsure dans Roquefort
Voul, p. 564. Voile.
w.
Waspes , p. 429. Guepes.
Wayme, p. 80. Gafne.
Wespes , p. 430. Voir Wasp**
T.
Yngremanche, yngromanche, p. 22, 70. Necromancie.
FIN DU GLOSSAIRE
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TABLE DES MATIERES.
Pages.
CHRONIQUE DE JEAN DES PREIS DIT D'OUTREMEUSE. — Livae premier. .... 4
Promier comment li conte palatin commenche k parleir ih.
Desqueiles libres chis libres at esteit extra is 2
Coment chis libre fut extrais de libres de tous les maistres devantdit 4
Coment ilh fut ordineit les VII engliese qui devoient mettre en escript tout les aven-
tures ib.
Chi libre commenche a la destruction de Troie ib.
Dez III promiers royalmes de Europ. — Coment ly ysle de Europ fut promier habitec. 5
De Noe* et de ses enfans — De Cham , li anneis fis Noe\ — Ly secon fis Noe* fut Sera . . ib.
Ly III'filsNoe' fut Japhet— Del deluve Noe" ih.
Coment les trois enfans Noe* partirent tout la terre en trois ib.
SemoitAsie. — Cham oit Affrique. — Japhet oit Europe 6
Cus li fis Cham oit I fis qui oit nom Nemprot ib.
Japhet vient habiteir en Europe awec II fis ib.
De Romme comment ilh fut commencing. — Machedone fut fait par Rachem. . . . ib.
Des enfans Japhet — De Heber, li fis Arphaxat, le fis Sem. — De Nemprot l'ajoian . . 7
Une declaration des heurs des enfans Noe* ib.
De Nemproth et la thour de Babylone. — Nemprot fut li promier roy de monde . . 8
Coment Nemprot fist la citeit de Babylone. — Del grandeche et largeche de Babilone . ib.
Coment Dieu soy corochat contre Nemprot ib.
Coment ons appellat le lengaige dez Ebreu apres Heber ib.
Coment Dieu transmuat unc lengage en LXXII lengaiges, et cessat l'ovrage de Babylone. 9
Rachem, le fis Japhet, vint habiteir en Europ, en Ytalie oil Romme siet ib.
Apres vinrent en Europ le fis Rachem et plusieurs altres. — Des II governeurs de Europ. ib.
82
650 TABLE DES MATIERES.
Pages.
Coment cheaux de Europ estoient mult simples gens, et ches d'Asie et d'Affrique as-
toient felles et orgulheux 40
De Thare\ le pere Abraham. — Tharf vint demoreir en la terre de Caldde t'6.
De Abraham quant ilh fut neis. — De roy Nynus qui fondat Nynyve t'6.
Coment ly roy Nynus conquestat Asie, et en fut ly promier roy t'6.
Ly roy Nynus trovat promier les fais de guerres et batalhes 44
Des fais Semyramonde royne , la femme le roy Nynus t'6.
Coment ly roy Nynus morut. — De Semyramonde t'6.
Coment Treberis conquestat mult de pays t6.
De Semyramonde la royne 42
Babylone fut le promier royalme dez 1111 grant royalme de monde, la II* Cartage, en
Afrique, la IIP Machedone, le HIP Romme t'6.
Procha fut ly promier roy d'Ytalie. — De roy Cyrus. — Dez prophetes Esdras et Zacharie. t'6.
Coment ly roy Cyrus depart le flus d'Effrates en HIP et LX fluis t'6.
Coment la citeit de Babylone fut gangnie' par le roy Cyrus 43
Coment la royne Semyramonde desconfist le roy de Persie, et destruit sa tcrre. . . t'6.
Coment Tyberis vint en Europ et visentat le pays ou nuUus ne demoroit t'6.
Coment Triveris fundat la citeit de Trive - t6.
Coment Hero fondat le promier alteit, et fist mult de chasteal et citeis par Europ. . . 44
Chis Hero fist I ymage de pire que ses gens adoront promier com Dieu t'6.
Coment Trive fut ly chief de tot Europ t'6.
De Crete, le roy de Calde'e, qui tou promier adorat Jupiter t'6.
Les fegiptiens firent leur promier roy. — Coment plusieurs roys issirent de Japhet . . 45
Coment de Sem issirent les patriarches et prophetes. — Encor de Trive t'6.
Treveris qui fut ly promier roy de tout Europ. — Les dautes de temps passeit . . . t'6.
Picus, ly IP roy de Calde'e, commenchat le royalme de Crete ib.
En la citeit de Crete fut promier roy Orius. — Del fermeteur de Trive ib.
Dez portes de Trive. — Des temples et ydolles de Trive , et de leur dieux liercure . . 46
De Mercure et de sa figure , etde son mervelheux temple t'6.
De pons de Trive, etde Capitole , palais et plusieurs aJtreschoses t'6.
Des riviers et dez riweseals de Trive. — Des governeurs de pays dTtalie 47
Coment Sadoch conquestat Grcce et en fut roy. — De roy de Calde'e et de Crete . . ib.
De governeur d'Ytaile t'6.
De roy de Crete et Calde'e. — De governeur d'Ytaile. — De Trive. — De Crete et Caldee. 48
De governeur d'Ytaile. — De la citeit Aventin en Ytale t6.
Quant les lettres des Hebreux furent trovers. — De Gaban qui fut moult gran clers . t6.
Porquoy le planete Saturnus fut enssi apellee. — De Ytale t'6.
De Crete et Calde'e. — Coment Jupiter fist son peire Saturnus escolhier 49
Coment Jupiter encachat son pere et ses freres vers Europ t'6.
Porquoy Ytale fut enssi nomme'e ib.
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TABLE DES MATIERES.
65i
Pages.
Coment Saturnus fist mult de bicns k ses gens, et les endoctrinat 49
Coment Saturnus fut aoreis de peuple en lieu ou Romme siet. t'6.
Coment Saturnus fondat III royalmes en Ytaile et de leurs roys 20
Coment les II governeurs d'ltaile orent II royalmes 16.
En chi temps fut Troie le grant destruite. — Coment Nacor fut roy de la tierche royalme. t'6.
Del royalme de Tuscane. — Lez dautes des temps passeis t*6.
Li III* an que Abdon estoit due d'Israel , le XXIIIP jour de septembre, fut Troie destruit. t'6.
De Troie , comment etporquoy elle fut destruite t'6.
Dez III empereres de Grecbe. — Coment Jason , le bon chevalier, s'en alat pour con-
querir le mouton , por cuy ocquison Troie fut destruit 24
Coment Jason vint en Pisle de Colcos ou ly mouton estoit 22
Coment Jason fist le siege & Troie, et le destruit ib.
Coment ly roy Telamon emynat Exiona, la filbe du roy Laomedon t'6.
Coment Troie fut destruite. — Del refacbon de Troie t'6.
Priant sy fist coroneir k roi del novelle Troie 23
Ses fis : Ector, Paris, Troielus, Deypbebus et Helenus t'6.
Ses filhes : Cassandra, Andrometa et Polixena ib.
Guerre entre le roy de Mede et le roy de Pers. — De Thameris la royne des Amasones. ib.
De Amasonie. — Porquoy ilh n'at en Amasonie nus hommes t'6.
Coment les Amasones furent k Troie por socorir le roy Priant 24
Coment Amasones conquisent devant Troie II roys, et conquisent leurs pays. ... 25
Coment la royne d'Amason ochist le roy Cyrus et ses gens. — De la royne Thamaris. t'6.
La royne Martesa et Tambedo. — La royne Ephysanie. — La royne Oridria .... 26
Coment Hercules ochist C m Amasones t'6.
La royne Pentesille qui soreorit Priant h Troie, et fut oehis et LXX m Amasones. . . t'6.
La royne Thalistridis t'6.
Coment la guerre commenchat entre les Grigois et Troiens. — Coment Paris ravit Hclene. 27
Menelaus et les Grigois asseghont Troie, et durat li siege X ans, et le destruirent par
trahison t'6.
Coment, apres la destruction de Troie, pluseurs nobles chevalier s'en alerent nagant
en pluseurs altres pays t'6.
Coment Dydo, la femme Eneas, fondat en Affrique la citeitde Cartaige 28
Coment Franco, ly fis Ector, avec III™ hommes vint demoreir en Galle t'6.
Coment ly pays de Galle fut tout promieir nommeis Franche, apres Franco. . . . t'6.
Coment Antenoir arivat en Allemangne et y fondat I citeit qui oit k nom, apres le nom
de sa femme , Sycambre • t'6.
Coment Turquins, le fis Troielus, en orientaile sy apelat son pays apres luy Turques. t6.
Coment Eneas arivat en Ytale ou ilh demoroit trois roys, et les conquestat leurs pays. t'6.
Coment Eneas fondat II citeis : Enoch et Albaine t*.
Eneas esposat la filhe le roy de Latin. — Eneas fut roy de tot Ytalie 29
w
■
6S2 TABLE DES MATIERES
Pagef.
De dus Sampson d'Israel '. . 29
Coment Sampson oit creveis les yeux. — Li promier due dc Galle morut, Franco . . 30
Melus le IP due. — De Hely, juge d'Israel t'6.
De bons Samuel le prophete. — Melus le due de Galle redifiat Troie ib.
Del guere qui fut entre le roy Boses et le roy Ascanus , por la femme qu'ilh voloit avoir. 31
Coment Menelaus fondat la citeit de Melan. — De Silvius, le II* roy de Ytaile . . . t'6.
Des Amasones t'6.
Silvius, li roy d'ltaile, oit unc fis qui oit nom Broncus, lyqueis fondat la Grant Bre-
tangne, e'est Engleterre 32
Borgons, li fis le due de Galle, fondat promier le pays de Borgongne et en fut promier
sires t'6.
Ector, le fis le dit Borgons, fondat Troie en Borgongne t'6.
Eneas, le fis le roy d'Ytale, rescoiit Londarde del main de HI lauron, et l'esposat, et
apres lee ilh apellat son paiis Lombardie t'6.
Lombardie. — Pavie t'6.
De due de Galle. — Les Philistiiens orent victoir contre Israel 33
Samuel fut fais juge d'Israel. — Exemple. — Saul le promier roy d'Israel .... ib.
Allemain, le fis de due de Galle, fondat li Allemangne 34
La nascenche David, qui puis f uit roy. — Des Latins t'6.
Le promier roy de Corinthe. — De dus de Galle et Germaine t'6.
Del grant batalhe en mont Gelboe\ — De IIII* eaige de monde 35
Ly roy David fut coroneis com II* roy d'Israel , qui oit mult de guerez t '6.
Coment David fist justiche de cbeauz qui ocbirent son annemis t'6.
Coment ly roy David conquist Jherusalem. — David fist Jherusalem cbief de son rengne. t'6.
De due de Galle. — Castor, due de Galle, fondat Castre. — De prophetes Natban et Gad. 36
La citeit d'Ephese fut fonde'e par le roy Ephesus. — Discors entre David et Salmon. . t'6.
De Dydanie. — Cartago. — De voile, coment ilhs furent promier fais par Salmon . . t'6*
Coment les II hanaps furent brisiie's . 37
Coment Josse acbatat I banaps de voile IIP besans d'or t'6.
Le roy de Cartage. — De roy Yram qui fut amis a roy David 38
Coment ly roy David morut. — De roy Salmon qui fist le temple dedens VII ans . . t'6.
Guere entre due 3e Galle et le roy des Latins. — Ly roy des Latins oit la victoire . . t'6.
De Ylion , due de Galle. — La promier dicause de temple Salmon en Jherusalem . . 39
Dez trois nobles edifiches que ly roy Salmon fist faire t'6.
Guere entre le roy de Latin et le due de Galle t'6.
De roy Salmon qui corochat Dieu par les ydols qu'ilh adorat por ses femmes . . . t'6.
Exemplum de roy Roboam qui creit le conselhe dez joncs 40
Les X linagez soy departirent de roy Roboam t'6.
Exemplum coment ly roy d'Egypte conquist Jherusalem et despoulhat le temple. . . t6.
De due de Galle t'6.
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654 TABLE DES MATIERES.
Pages.
Coment Remus, le frere Romulus, fondat Rains en Campaogne 54
Li promier emperreir que les Latins firent. — De Thobie 55
Le commenchement de Romme par Romulus. — Les promiers senateurs 56
De due de Galle. — Ector de Galle fondat la citeit de Lywoge. — Turnay 57
Exemplum coment Dieu relongat la vie a Ezechias XV ans por sa sainttiteit. ... 58
De Romme, comment elle fut parfaite. — Le fachon de Romme t'6.
Des thours de Romme t'6.
Des portes de Romme 59
Des mons de Romme. — Des pons de Romme 60
Dez palais 61
Les ars de Romme ' 63
Del femme qui demandat justiche de son fis qui ly fut ochis. — Les theatres .... 64
Dez temples de Romme 65
Exemplum des chevals de marbre , 67
De Capitoil. — De temple ou ilh avoit ortant d'ydolles qu'ilh avoit de provinches en monde. 69
Ou Octovian veit le vision en ciel. — De Coliseum une mult mervelheux temple. . . 70
De Pantheon qui fut fais por I victoir en Persie 74
Le pape Bonifache fist I engliese de Pantheon t'6.
Exemplum de Sainte-Marie en Capitoil. — Les Romans vorent adoreir Octovian . . 72
De Sainte-Marie a l'auteit Dieu. — Exemplum de temple de tout terre ...... i 6.
De temple de Fortune. — Versus. — Les indulgenches de Romme 73
De l'engliese Sains-Pire 74
De Sains-Poul. — De Sains- Johan de Latran 75
Des reliques de l'engliese Sains-Johan.de Latran t'6.
De l'engliese de Nostre-Damme-le-Maiour 77
L'engliese de Sainte-Crois. — De Sains-Laurent. — De Sains-Sebaste 78
De Sains-Pire-as-loiens. — Del ymage Nostre-Damme que saint Luc fist 79
Exemplum deldit ymage que saint Grigoire fist porteir al grant mortaliteit de Romme. t'6.
Coment les angles chantont : Regina celt 80
Coment Tangle s'apparut sor le casteal, tenant l'espde ensangletee t'6.
Des mynoirs englieses de Romme. — Versus t'6.
De Sains-Martin. — Del engliese Sains-Lorent 81
Des indulgenches qui sont trans Tyberitn t'6.
Les indulgenches de Champ-Flori a Sains-Lorent 82
Ou saint Pire et saint Poul et saint Lorent furent emprisonneit t'6.
Nota qui enlisrat chi sa sepulture jamais n'iert comdampneis 83
De l'engliese Sains-Lorent t6.
Del engliese Pantheon. — Exemplum del engliese Nostre-Damme al alteit de chiel . . 84
Guerre enlre le roy de Jude*e et de Surie 85
Romulus, ly promier emperere de Romme, morut mcrvelheusement t'6.
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TABLE DES MATIERES.
655
Pages.
Coraent Romulus promieremeot c&Usit cent senateurs de son consclhe 85
Des senateurs de Romrae ib.
De Nyma, le H e emperere, que les senateurs eslireot 86
Des roy de Judee Ezechias et Manasses qui fist ochier Ysaias le prophete t'6.
Nyma l'emperere adjostat al an II mois : jenvkr, febrier. — De Sibilhe le prophetesse. t'6.
Ly roy morut portant qu'ilh but de sane de toreal. — Roy d'Athenne t'6.
De l'emperere, coment ilh donnat loys as Romans. — De due de Galle 87
Ly darain roy d'Athenes t'6.
Nota des IX balhics d'Athennes qui avoient la possanche com I roy t'6.
De l'emperere qui fondat la citeit de Nymais t'6.
Ly due de Galle deseonfit III fois l'emperere. — Tulius, le III* empereure de Romme . t'6.
Mortaliteit et movement de terre 88
Por la mortaliteit fut commenchiet d'aleir a nus pi& en Gresche ib.
Tulius l'emperere qui comma nchat promier a vestir purpre t'6.
De due de Galle. — Guerre entre Romans et Albains t'6.
Nota de Josias et de roys de Jud&. — Nota del effodre qui chait sor l'emperere le III*. t'6.
Jheremias propbetat l'incarnation Jhesu-Crist, et a Juys le captiYiteit en Babylone . . 89
Anconne. — Acquitanus, le fis le due de Galle, fondat Acquitaine, Tholouse et Pyragoire. ib.
Alchie troyat en temple I libre ou ly loy Moyses estoit, et le fiseat lez Juys. — Sibile . t'6.
Bisantium ou Constantinoble. — La citeit Hostie. — De IIU* et V* emperere de Romme. t'6.
L'emperere fist faire le Capitoile 90
L'emperere fist XX senateurs et les adjondit awec lez altres cent t'6.
Josias fut en batalhe ochis. — Eliacbim et Jeconias est I roy t'6.
De roy Nabugodonosor qui conquist Jherusalem t'6.
Jezechiel , Daniel propbetes 91
Lez Juys furent emyneis en Babylone. — Jeremias oit a soffrir t'6.
Guerre entre le due de Galle et lez Romans, et furent Romans desconfis t'6.
La citeit de Jherusalem fut prise et destruile et le temple are t'6.
Ly roy Sedechias et ses enfans ochis ; chi faUit ly regne d'Israel et adjosteit a Babylone . t'6.
Del transmigration qui fut Tan del monde IIU m VI* et Xans t'6.
L'an del transmigration de Babylone est ly commeuchement de Y e eaige de monde 92
Jeremie fut lapideis t'6.
En chi temps estoient en grant auctoriteit en Babylone Daniel et Jezechiel propbetes . t'6.
De Servius , le VI* emperere de Romme. — De due de Galle Alymodes et de ses enfans. 93
Ly dus de Galle Orlins fondat Orliens. — Exemplum de roy Balthasar de Babylone. . ib.
Daniel dest a Balthasar chu qu'ilh ly avenroit t'fo.
Ly roy Cyrus fist refair Jherusalem et le temple. — Aggeus et Zaebarias lez propbetes. 94
Ly dus Saxo fondat Saxongne et pluseurs citeis. — Edolo li promier dus de Saxongne. t'6.
Tarquinius oehist l'emperere Tulius, sy fut fais par dons emperere VU« t'6.
De Belwier. — Coment ly pays de Bealwier fut fondei t, et eo fut pronuer oonte Origoules. 95
656 TABLE DES MA TIE RES
Paget.
Exemplura coment ly roy Gyrus fut ochis par I fause femme 95
A eel temps avient I'hystoire de Judith , comment el ochist Holoferoe 96
Coment Hermedes fut subtilement fais roy de Babylone. t"6.
Coment ly roy Daire fut subtilement fais roy et vowat a Dieu , s'ilh estoit roy, ilh don-
roit congier del refaire Jherusalem et le temple, et le fut t'6.
De dus de Galle. . 97
La seconde Jherusalem fut refait a commandement le roy Daire par Zorobabel . . . t'6.
Le seconde dicause de temple Salmon. — Tous les tourmens furent aviseis a chi temps. 98
Lucrecie fut deforchie. — Tarquinius li VII e emperere de Romme et ly dierain . . . t'6.
Chi falircnt les empereres de Romme qui avoient regneit IP et MI ans t'6.
Chi commencharent les consules de Romme a regneir, et regnont jusques a Julius
Cesair t'6.
Ilh fut ordineit que les consules ne govemassent que II ans, affin qu'ilh ne montassent
en orguelh.— De dus de Galle 99
Pictagoras morut a Romme. — De pays de Avergne qui prist son nom a due de Galle . ib.
Ly roy Daire a VII - M hommes entrat en Sithie, et el fin ilh y fut ochis 400
Ly roy Daire conquist le royalme de Machidone. — Sithie ib.
En chis pays at oit pluseurs fois mult de saiges gens t'6.
Le mervelhe de gens de pays de Sithie. — Ilh desconfiren t pluseurs fois les roy de Babilone. t6.
Daire fut desconfis et perdit C m hommes. — Ly dus de Galle at desconfis lez consules . 404
Ly roy Daire oit grant batalhe a ches de Sithie , et y perdit mult, car ilh en morut . . t'6.
De Galle. — Socrates. — Ly dus de Galle fondat Frise en Campangne t'6.
De Esdras 402
Neeraias priat a roy de Persie del raleir en Jherusalem por faire encloure la citeit . . t'6.
Ygonas apclat les gens de son pays Prisons t'6.
De roy Daire. — De Galle. — Ypocrias fut neis. — Dez batalhes le roy Daire . . . . t'6.
Les promirs juges ou tribuni de Romme 403
Ly dus de Galle at desconfis les Romans, et fut prise Romme ib.
Pestilenche. — Del grant flaireur qui issit de la terre a Romme ib.
Dez torquins de Romme. — Les Galliens assegont Romme 104
Grant batalhe des roys de Babylone — Plato fut neis t'6.
Grant batalhe entre lez Babilones et Sithiens t'6.
Guerre en tre le roy Daire et les Egypty ens 405
Dam, le fis le roy de Greche, fondat Malgarnie t'6.
Chis Dam apellat son pays Dannemarche ou Danois t'6.
Chis Assuerus roy tenoit Persie et Judee — De Hester. — De roy danois 406
Grant guerre entre les Grigois et Persiens. — Socrates morut. — De dus de Galle . . t"6.
Aristot. — Movement de terre. — De prinche des Danois et de leur promier amachour. t'6.
Mortaliteit. — De Borgongne. — Aristot. — De roy Daire. — De roy Assuerus .... 407
D t e due de Galle. — D'Alixandre le Grand. — Ly dus de Galle fondat Tours en Torenche. t*6.
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658 TABLE DES MATIERES.
Pages.
Les Romans amettent le roy Franbal de trahison. — De Alixandre le fis Gardro ... 434
Del feliciteit de bon cuer. — Li promirs champs 455'
Alixandre fut ochis. — Les parens Alixandre agaitient le roy Franbal 436
Le roy Franbal desconfis 437
Des messagiers envoiet al dus Cletus de Galle. — Dyonises Liber ly dieu des Sarasiens. 438
Nysa. — Agariens. — Tros. — De roy Dos 459
Darmant fonde* par Darmadis. — De Moyses et de Aaron 440
Chi commenchent les empereurs de Egypte. — Darmant c'est Troie t'6.
Ons soloit nommeir les Sarasiens Ismaelites. — Del generacion des Sarasins . . 441
Les promirs nefs. — De Priant. — De moton al tasson d'or t*6.
Thir.— DeHelaine qui fut ra vie. — Paris. — La guerre de Troie 444
Romme fut assies. — Batalhe 443
Ly roy Franbal est ochis 444
Les Sycambiens sont departis de siege. — De Negel et Ebronus 445
Les Sycambiens revenus par-devant Romme 446
Romme fut conquests. — De Statius le poete 147
Anthiocus li malvais. — De VII freres martirs. — Romme reconqueste'e par les Romans. 448
De dus Franco. — Matathias\ Johans, Symon, Judas, Eleazar, Jonatas 449
De roy Senastor. — De dus Gaborens et de conte Lydrel. — Batalhe par-devant Lutesse. 1 50
Flamens desconfis. — Athennes assegie par les Romans. — Malische des Romans . .454
Grigois et Sycambiens soy partem d' Athennes. — De roy Synastor et de ses gens . . 452
Borgengnons desconfis. — La tirche dicause de Jherusalem 453
Judas Machabeus. — Terentius t'6.
Mervelhe. — De roy Castor et des Romans. - Grant batalhe 454
Athennes conquestee par les Romans 455
Discorde entre les roys Pholomes et Dannemon. — Les Egiptiiens desconfis .... t'6.
Demetre le roy de Surie procure la pais. — Des trois fis de roy Deroetre 1 56
De Joras. — Les Romans en Affrique 457
Le siege de Cartage . . . . : 4 58
Cartage pilhet et ars. — Corinthe. — Mervelh. — De Zesile 459
Les Grigois devant Romme. — Machidone conquestee par les Romans 460
Alianche de roy Pholomes aux Romans. - De Jonathas it.
De roy Alixandre. — De promirs roy de Hongrie. — De roy Gazon. — De roy Gero . . 161
Chi commenchent les guerres d'Espangne. — Ly primir roy Corsados 162
Franbal le II* roy d'Espangne. — Guerre entre les Romans et les Galliens ib.
De Alixandre et de roy Pholomes 463
De prince Symons Machabeus. — Ly promirs Johans ib.
Le promirs roy de Bretangne. — Vaucuelh . . 464
Symons Machabeus fust ochis en trahison. — Le murdreur assege' en casteal de Agon . t'6.
Johans Hireaine coroneit com prinche de Jude*e. — Le recommendation Johans Hircaine. 465
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TABLE DES MATIERES.
659
Pages.
Les Grigois remis en la subjection des Romans 465
Romme fut assegiet des Galliens. — Les Sycambiens descoafis 466
Johans Hircaine retrait en Jud^e. — Sa mere et ses dois freres malvaisement ochis . . \ 67
Guerre de Johans Hircaine encontre Anthiocus le roy de Surie t'6.
La pais fut faite. — Promirs hosteleries en Jherusalem 468
De roy de Cartaige Anynal. — De Johans Hircane t'6.
S^baste. — Le roy Pholomes ochis. — Anynal en Sezilh. — Mervelhe 469
Diverses signes en chiel. — Arthense. — Artois. — Anynal en Itale. — Sa desconfiture. 470
Asdrual d'Espangne. — Anynal qui donnat grandement a fair les Romans 474
Cycero fut neis. — Pompeyus t'6.
De consul Pompilius Cornelius 472
Cheaux de Cartaige demandent paix. — Anynal encore en Itale. — Conditions de la paix. 4 75
Mervelhe d'un savaige homme. — Le V e conte de Flandre. — De mois Junyus ... 474
Julius C&ar fut neis. — Johans Hircans morut. — Aristobolus 475
Des enfans Johan Hircaine. — Aristobolus. — Anthigonus t'6.
Ly roy Aristobolus chait en maladie t'6.
Anthigonus revient en Jherusalem. — Malisce de femme 4 76
La royne Jona araisonne le roy son sangneur t'6.
De Judas ly divineur. — Antigonus fut ocis 177
Del mort Alixandre. — Alixandre et Jamiens 178
Del crualteit Alixandre. — Guerre des Romans en Machidoyne 179
Enssi en Lachedemonie t'6.
Les Romans en Surie. — Del mort Anynal. — De Perseus . . 480
Pompilion en Espangne. — Del citeit d'Espoy en Espangne 484
De concorde et discorde. — Deslewestes 182
Mortaliteit. — Le VI* roi de Hongrie. — De roy Virgile d'Athenne 483
De XII fis le roy Virgiles de Sezile. — De Polena sa fille 484
De Humbris et Tongris. — Le tour Baris 485
Plato. — Orible batalhe. — Des juys enclouz es montangnes de Caspie 486
Ly promir grant batalhe que fut one declare 487
Del fuite le roy Tongris. — Sycambiens desconfis t'6.
Ly dus Prian corochi^s. — De Tongre 488
Tongris coroneit a roy. — Del fontaine de Tongre. — Dez portes de Tongre. . . . 489
Dez castels. — Dez palais. — Dez temples. — Del guerre des Romans encontre Jugurthan. 4 90
Mervelhe. — Batalhe des Romans encontre les Cymbrins 494
Temple mirificum. — Tongre fut parfaite 1 92
Le promier roy Tongrois. — Del mort ly roy Alixandre 493
Dez VI e et VII e conte de Flandre. — Caton le philosophe. — Le devision de Hongrie . 494
Romans desconfis sus le Royne. — Del roy Grigoire et de ses V freres t'6.
Grant batalhe 195
w
660 TABLE DES MATIERES.
Pages.
Comment Tongris tuat Grigoire 496
Le pere Virgile. — Virgile fut neis. — Mervelhe 497
Mervelheux signes. — Del guerre entre Marius et Scillus 498
De roy Bronchus. — De Pompeyus et de Mitridath 499
Scilla banni fours de Romme. — Humbris li II roy de Tongre 200
Hambreux, Ains, Hollengnoul et Hollongne 204
De Pompeyus et Tygranus. — Scilla a la porte Coloine t'6.
Crualteit. — De Hircanus et Aristobolus. — Pharisiens 202
La royne Salite morut de grant despit. — Hircains desconfis 203
De Antipater. — Malisce 204
De roy Ereche. — De Taurus bailhiers de Surie . . ' 205
Crueuse reponse de Aristoble h Pompeyus. — Aristoble crie merchis a Pompeyus . . 206
Jherusalem fut assegie*. — Discors. — Victoire h Hircain. — Pompeyus entre en temple . 207
De Alixandre, ly fis Aristoble 208
Tout les fortereches de Jude'e furcnt abatues par une femme ib.
Les juys furent departis en V. — Antipater oit a femme Heroda t'6.
Julius Cesar fut fais consul t'6.
Des III prinches de Romme. — Sartorien roy d'Espangne 209
Siticon. — Mariciane 240
Virgile vat al escolle. — Nuls ne poioit estre roy ou prinche, s'ilh n'estoit clers . . . 244
Grant guere t'6.
Maile gens. — De Julius Cesaire 242
Orasses. — Theodogus d'Espangne. — De Julius Cesar. — Ariovistus, roy 243
De Julius. — Des Germains t'6.
De Julius. — De XXII regne. — D'Aristoble 244
Batalhe en Bretangne. — Guerre entre Bretons et Spangnois . 245
Tongris le IIP roy de Tongre. — Del conteit de Hesbain. — Molins t'6.
Les Bretons vont en Espangne t'6.
Theodogus le roy d'Espangne. — Des trois fis Theodogus. — Peleus a Romme . . . 246
De Julius Cesar. — Grant martyr de roy Hanigos 247
De Julius.— De Galle 248
Julius conquestat Agrippine et Hongrie. — De Julius en Galle t'6.
Grant guere entre Carsus et les Turs. — Carres assegie\ — I grant trahison .... 219
Coment Carsus morit par convoities. — De Julius qui conquestat Galle 220
Del dus Yborus. — Julius asscgat Romme. — Demois dejullet 224
Julius en la terre de Emath. — Sedros, le IIII e roy de Tongre. — De Lembor .... 222
De Viseit. — Serang. — Grant batalhe entre Julius et Pompeyus t'6.
Pompeyus s'enfuit en Egypte t'6.
Pompeyus fut mourdris. — Julius Cesaire fut coronneis empcrere 223
De Aristoble mort par venyn. — Julius en Espangne. — De Jherusalem. — D'Antypater. 224
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662 TABLE DES MATIERES.
Pages.
Julius fut ensevelis. — Mervelhe 245
De Sedros le IIII* roy de Tongre. — De Chievremont 244
Del fondation de pluseurs vilhes. — Del batalhe a Milmort t*6.
De Namut et de pluseurs aultres t'6.
Tongre fut assegiet. — Grant batalhe. — Grant debas entre Sedros et Julius .... 245
Sedros se combat a Julius Cesaire 246
Julius fut conquis par Sedros. — Tongre fut sens tregut 247
Li emperere fist I palais a Tongre. — Sedros fut eslus senateur t*6.
De Octoviain le II e emperere t"6.
Del proieche Octoviain. — Comment Pemperres voloit contralier Octoviain .... 248
Virgile envoiat al emperres. — Le royne presentat a messagier I coursier et I aneal t'6.
Del cspir que Virgile envoiat al royne. — Virgile fist mervelhe 249
Virgile et Octoviain chevalchent vers la royne. — Virgile fist mervelhe ib.
Enye fut mult lie. — Mervelhe des II mastiens 250
Coment les damme furent perdues. — Virgile s'en vat fours de Romme 254
Virgile refusat les dammes. — Virgile enportat le feu fours de Romme t'6.
Virgile s'en alat Agensi t'6.
Virgile soy vengat de Phebilhe 252
Virgile fist prendre feu a ku Phebilh. — Phebilhe morit de duelh . t6.
De Ovidien. — Dez batalhes civilhes. — La venganche de Julius Cesar 255
De Herode et de Cassiens. — De Malices 254
Antipater et Hircain furent enpotioneit. — Del mort Malices ib.
Virgile fondat la citeitde Naplc sor I ocf. — De castel de Oef 255
De Herode qui fut malaide a Damas. — Del VI11* roy hongrois ib.
Virgile fist I pont qui pendoit el aere. — Virgile fist I jardin fermeit d'aire .... t'6.
De convive Virgile. — Dez jeux Virgile. — Des asnes d'on vilain 256
De murs de jardin Virgile. — Les asnes semblent mors 257
Les asnes ravisquirent par Virgile t'6.
Des II cirges et le lampe Virgile. — Del tieste qui respondoit a Virgile t'6.
Del tieste de coevre. — De l'homme et le cheval Virgile 258
Virgile dist qu en femmes at grant deception t'6.
De cheval qui coroit del nuit par la citeit t'6.
De chenais faite par Virgile. — Virgile parolle a ses espires 259
Les Romans se partent de Virgile t'6.
De Saluste. — De cheval Virgile. — De Herode qui prist a femme Dolsida 260
Le maison Virgile a Naples. — Des dois vilains qui ferent 261
De Saint-Poul. — Virgile , de compte d'or t6.
Com catholique fut Virgile et plains del foid. — Virgile dist del Saint-Triniteit . . . 262
Virgile soy baptizat. — Virgile fist le compte d'or t'6.
De bangnes Virgile qui garissoient de tout maladies t'6.
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TABLE DES MATIERES.
663
Page*.
Del hostel Virgile. - Dez jeux Virgile. — Des femmes Herode. — De convive Virgile . 265
Dez XVIII mes Virgile. — De diverse pays. — Des annet Virgile. — Des pommes de Nu bie. 264
L'homme en sepelise de femme et al encontre. — Apres vinrent tos nus t'6.
De Oclovian et Sedros. — Chi defalirent les Ptholomes d'Egypte 265
Porquoy l'emperere porte le monde. — Porquoy ons apelle rcmperere Awoust ... t'6.
De grant tempeste et oraige i'6.
De tregut de Trive. — Des alianche entre Trive et Rains 266
Le declaration des pays de Galle t'6.
Des trois Galles. — De Belgique. — Belgis. — De Galle Belgique 267
De Galle-Celtique. — De Gallc-Aquitaine. — De Espangne. — Des flu is de Galle . . . 268
Del IX conte de Flandre. — La divisions des regions entre Octoviain et Anthone . . 269
De Herode et Fassians son frere. — Coment Virgile soil son trespas t'6.
Virgile fat dechus par la response de la tieste ib.
Des femmes Herode. — Virgile edifiat Ventoise. — Virgilhe fut maladc 270
lib fait Virgile morir, qui maul avoit gardeit son cervel ib.
Oncques les espirs ne furent tant travelhiet de nuls com de Virgile t'6.
Virgile conjurat tos les esperis et conbrisat la tieste t'6.
Des Juys qui soy plaindent de Herode et Fassians t'6.
Herode fut prince de Galilee. — Jherusalem fut gangnie de roy de Turquie .... 271
De Herode qui soy mist en la tour royal t'6.
De Mariane la femme Herode. — De Herode qui s'enfuit 272
De la grant victoir Herode t'6.
Trahison. — Herode vat h Romme. — Herode fut portent noiet . 273
De Franco, dus de Galle. — L'emperere vient awec le roy Sedros h Tongre .... t'6.
D'Espangne t'6.
Coment Tongre oit nom Octoviane. — Tongre perdit son nom 274
Sedros morut de la janisse. — Lotringe le V* roy de Tongre t'6.
Herode fut fais roy de Judde. — De Herode comment ilh delivrat sa terre t'6.
De avarische. — Herode assegat Jherusalem. — Herode ochioit tous les laurons . . . 275
DesVlarons. — Lotringe, V* roy de Tongre, fist le castel de Lotrenge t'6.
Virgile fut mult malaide. — L'orison Virgile. — Virgile creit tot la foid catholique . . t'6.
Virgile cusit unc pot. — Des herbes qui sont toudis verdes. — Del chaiier Virgile . . 276
Virgile oit cognisanche del annunciation de angle al Virge et de salut t'6.
Virgile del visitation Elizabeth. — Virgile soi recommendat h ses amis devant sa raort. t'6.
Virgile annunchat le jour del nativiteit Jhesu-Crist t'6.
Virgile secondement soy baptizat en nom de Pere, Fis et Sains-Esperit 277
Mervelhe de Virgile. — Virgile morut. — De sains Poul qui parloit a Virgile .... t'6.
Sains Pol parolle a Virgile. — De sains Pol ce qu'ilh dest de Virgile 278
Des ossels Virgile. — Des tourmens qu'ilh font t'6.
Herode soy plaindit k Anthone. — Herode oit la victoir 279
664 TABLE DES MATIERES.
Pages.
Herode assegat Jherusalem et le prist — Herode defendit le temple 279
Herode fut mult preux et hardis. — Herode fut vengtes de ses anemis 280
De champs esmuis cntre March et Grispart t'6.
Del emperere coment ilh prist le debat sour ly t'6.
Des conquest Alixandre le Gran. — Mervelhe des batalhes Alixandre 281
Mervelhe des myreurs ardans 282
Des innumcrablcs peuples que Alixandre encloit entre les montagnes Caspies . . . t'6.
De Goche et Magoche. — Les noms des XXII roy de Caspies t'6.
Cheaux del generacion Cham. — De renart qui foiit la montangne 284
Mervelhe des Sicropes. — Mervelhe des Pigmeaux t'6.
De tous paiis de monde. — Del mere et de ses bras 285
De paiis d'Aisie.— De Egypte. — De Nyle ou Gyon. — Del acroisement de Nyle . . . 286
Del Roge mere. — Del encense et candle. — Fenix. — Jaffe\ — Surie , Jude*e .... 287
Jherusalem. — Fluis Jordain t'6.
Del mere Morte. — La mere Salinaire. — Palestine.— Asealon. — Philistiien .... 288
Sodomme. — Gomor. — Seluchc. — Casse. — Antyoche. — Effrate t'6.
Mesopolanie. — Tygris t6.
Des IIII fluis de paradis. — Aretuse. — Montoir. — A Zemonde. — Caspie. — Hircain . 289
Amasonie. — Ephesum.— Galache. — Bithyne. — Perfelgoste. — Capadoche. — Assire. t'6.
Arbelit. — Mede. — Caspie t'6.
De Caspie. — Teremegite. — Alixandre II*. — Celice. — Bautie. — Parde 290
Alixandre le IIP. — Les grans desers. — Les antrepofagiens. — Situens t'6.
Les terres inhabitables t'6.
Sere. — Mervelhe de vestimens. — Noble marchandie. — La terre de Orache . . . 291
Symenitoine. — Ynde. — Des II esteis et II messons t'6.
De noble paiis dTnde ou ilh at V m vilhes. — Les Gambendes. — Ganges et Jupres . . t'6.
Yndus t'6.
Mervelhe de II ysles. — Li li poivre croiste. — De Ynde. — Approbaine 292
Des piers prechieux. — Carmenie. — Les cacatris. — Parthe et Calde*e t'6.
Babylone et Babel. — De paradis terrestre. — Mervelheux fontaine i*6.
Libain. — Sabarique. — Mervelhe d'one riviere. — De feu grigois 293
Nobles medicines. — Mervelhes des lacs et fontaines. t'6.
Des serpens. — Des mervelheux gens. — Des Gromates 294
De paiis d'Affrique. — Maritaine ib.
Mervelhe de haute mere. — Athlanus. — Mynudi. — Chano. — Sirtes. ..... 295
Des desiers de Etyoppe t'6.
Gersemens. — Mervelhe d'une fontaine. — Des meres qui sont sour terre 296
Etyoppe. — De mariage t'6.
Jet 297
Des femmes d'Affrique. — Mervelhe de serpent 298
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TABLE DES MATIERES.
665
Pages.
De paiis de Europe. — Le bras Sains-George. — Cons tan tinoble. — Gresche .... 299
En Espangne. — Romme. — Ytalie. — Vcnise — La mere Adriain. — Greche .... t'6.
Vers Provinche, vers Franche, Allemangne. — Des II fontaines. — Eridaine. — Padus . t*6.
LeRoine. — Borgongne. — La mere de Provenche t'6.
Ytaile. — Toscaine. — Rommc. — Tyberis. — Hostie. — Albane. — Savine. — Tusculane . 500
Palestine. — Des cardinals de Rom. — Jenenes. — Champangne. — Alangne. — Gaiete . t'6.
Aprus. — Ypolite. — Aisie. — Reate. — Anchone. — Asculi et Orbins. — Labour . . . t'6.
Bonivent. — Salerne. — Puilhe. — Otrent. — Calabre. — Cosens. — Sezilhe t'6.
Palerne. — Gibel. — Aratuse. — Yulcane. — Romangne. — Arime. — Ravenne. - . . . 301
Lombardie. — Bolongne. — Melan. — Sa voie. — Albige. — Ferraire. — Truise. — Jarre . t'6.
Dalmarche. — Jenes. — Sardangne. — Corsique. — Distre. — Jardre t'6.
Sclavoine. — Hongrie. — Pulaine *6.
Gresche. — Tressal. — Machidone. — Athenne. — - Olimpe. — Traiche. — Les Barbarins . 302
La Danube. — Calistre. — Galdade. — Oritige. — Cribria. — Minoa. — Flaxon. — Athos . t'6.
De VIII paiis de Greche. —Del altre partie de Europe t'6.
Goulfe. — Ysdre. — Site. — Boiffre. — Traiche. — La mere congale'e. — Trive .... 303
Maienche. — Colongne. — Franche. — Galle. — Borgongne. — Quarentaine. — Besenchon. t'6.
Viane. — Lyon. — Flandre. — Picardie. — Normandie. — Bretagne. — Poitou. — Bordeal. t'6.
AySi — Provenche. — Arle. — Nerbonne. — Monpelier. — Espangne.— Aragon. . . . 304
Navaire. — Portingal. — Castel. — Tolete. — Corapostel. — Calpe.— Albine t*6.
La Grant-Bretangne , c'est Engleterre. — Cantorbie. — Yrlande. — Marchie .... t'6.
Casseles. — Tuem. — Escoche. — Norwenge t'6.
Thisle. — Budes. — Orchades. — De Mamedie 305
DeTongre. — De discordc entre Mariane et Salome' 306
De Herode qui cachat sa femme Doliside »6.
La generation de sains Servais. — De saint Johans-Baptiste 307
Des parens la virge Marie et de sa nascenche t'6.
De Herode qui fist ochire Jonatas par la trahison Salome* t'6.
Herode fist ochire sa femme Mariane et son seroge 308
La conception Nostre-Damme. — Dieu format Adam t'6.
Des complexions de l'homme. — Pourquoy Dieu l'apelat Adam. — Anatholin. — Disis . 309
Achitus. — Musibrion. — Comment Dieu fist Evain t'6.
Dez III1 flus de paradis. — Phison. — Gyon. — Tygris. — Eufrates 340
Adam fut jetteit fours de paradis. — Adam visquit IX* et XXX ans t'6.
Adam et Eve orent fain. — Adam reconfort Eve sa femme. — Des viandes Adam et Eve. t'6.
Eve parolle k Adam. — Del penitanche Eve et Adam. — Ly dyable vat parleir k Eve 344
Eve fut dechut encor. — Adam parolle k dyable. — Ly dyable respont t6.
Sains Michiel. — Argu entre Tangle et ly dyable 342
Eve fut enchainte 343
Dieu envoiat II angles k Eve. — Eve enfantat Caym. — Eve enfantat Abel 344
84
666 TABLE DES MATIERES.
Paget.
Caym ochit Abel son frere. — Eve enfantat Seth et apres Calmana. — Caym ochist Abel. 314
Dieu parolle k Caym. — Des enfans Adam. — Adam paroUe a Seth 315
Adam parolle a Dieu. — Dieu respont. — Adam parolle k Dieu 316
De sains Mychiel. — Adam parolle a Seth , . t'6.
Adam parolle a Seth. — Des maladyes Adam 347
Adam parolle a Eve. — La bieste parolle h Eve. — Seth parolle a la bieste 348
Seth s'envat vers paradis. — L'angele parolle a Seth. — Mychiel Tangle parolle a Seth . ib.
Sains Mychiel parolle h Cherubim. — De Tarbre de paradis 349
De Seth ce qu'ilh veit en paradis ib.
L 'angle donnat a Seth III grains. — Cedre, cypresse, pyns, olyviers 320
Seth revient a Adam t'6.
Adam morit. — Adam fut ensevetis. — Des III grains ib.
Eve morit VI jours apres Adam t'6.
Des II jugement. — Eve aprent ses enfans. — Eve morit. — Sains Mychiel parolle it Seth. 324
Ly angle parolle Ju Salmon. — Des III verges del boche Adam t'6.
Moises prophetizat des 111 verges. — Grant myracle des III verges 322
Dieu s'apparut a Moyses. — Del mort Moyses, et des III verges t6.
Comment David soiat les verges. — Des sains arbres cresus des HI verges. . . . . 323
Myracle de Maximilla ib.
De promier martyr por le nom Jhesus. — Mervelhe de sains arbre 324
De la royne Saba. — Del generation Seth et de ses enfans ib.
Del mort Caym. — Lamech, ly promirs begamus, Olda et Sella ses femmes .... 325
Lez promirs concordances de musique. — Les promirs instrumens de metails ... ib.
Coment Tart de musique fut troveit. — De Enos, le fis Seth t'6.
Enos fist la promier ymage de Dieu. — Enoch fut ravis en paradis t'6.
La nativiteit Noe\ — Le delueve Noe, Tan del origination de monde II" II e et XLII . . 326
La promier eage de monde final alle delueve. — Des HI generations les fils Noe* ... ib.
De Nemproth. — Dont les diverses gens nasquirent . t'6.
Noe* fut li promier qui fut yevre de vin. — Ons ne eachoit nub braies t6.
Sale. — Heber. — Hebreu. — Phalech. — Babylone. — I seul lengaige. — Phalech . . . 327
Rogam. — Sarug. — Nacor. — Thare. — Abraham t*6.
Abraham, Tan del origination de monde HI" cent nil" et IHI ........ t'6.
Ly seconde eage finat k Abraham. — Hur. — L'an de remission. — Abraham. — Sara . t'6.
Agar. — Ysmael. — La circoncision. — Loth. — Aram. — Ysaac t'6.
Le sacrifice Abraham. — Sara morit. — Abraham soy remariat 6 Cetura . . . . . 328
Tsaac oit k ferome Rebecca, la filh Batuel t'6.
Des enfans Rebecca. — Esaii et Jacob furent neis. — Jacob Cut nommeis Ysrael . . . t'6.
Jacob oit de sa femme Lia : Ruben , Symeon, Levi, Judas, Ysacar, Zabulon et Dyna . ib.
Bala oit II fis de Jacob : Dan et Neptalim. — Jacob oit de Celpha Gad et Ater ... t6.
Jacob oit de Rachel Joseph et Benjamyn. — Moavement de terre .....;. •&.
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TABLE DES MATIERES.
667
Pages.
La nascenche Nostre-Dame sainte Marie. — De Herode qui remandat Doliside . . . 329
De raalische Cleopatra. — Grant guerre entre Cesaire et Anthone t'6.
Herode vient a Romme t'6.
Lotringe, le VI e roy de Tongre. — Herode parolle a l'Emperere 330
L'Emperere parolle a Herode. — Herode fut de conselhe l'Emperere t'6.
Malisce de femme. — Herode fut feis roy de III I rengnes 334
Herode fondat la citeit Cesaire. — Del fontaine Trans Tiberim, qui jectoit oyle . . . t'6.
Des trois cercles deleis le soleal. — Des edifiches Herode 332
De Lotringe, le roy de Tongre et de Lotringe. — Del thour Agrippe en Jherusalem t'6.
Des arraes Temperere de Romme t'6.
Lotringe, roy de Tongre, fondat ehes vilhes : Ougn^e, etc t'6.
Gemeppe, Flemale et pluseurs altres vilhes. — Lobbes. — Geneffe . t'6.
Le casteal Herodiane. — Guerre entre Franco et Flamens. — Les armes de Flandre. . 333
Li conte de Flandre fondat Aras. — Atrabatum. — De castel Fasel t'6.
Sebaste chief de Samarie. — De Herode qui fist I riche temple a Sebaste t'6.
Henawe. — Grant reparation al temple de Jherusalem 334
Herode fust corocbids encontre ses trois fis. — Herode banit ses enfans t'6.
De due de Galle et des FJaraens t'6.
De Zacharie et Elizabeth. — Zacharie en temple fist sacrifiche . . 335
L'angle annunchat la conception saint Jehan-Baptiste. — Zacharie devient mueis . . t6.
Chi fine li V* eaige de monde. — Des eaiges de monde. — De Vl e eaige de monde . . 336
Des ans parfais et imparfais. — L'anunciation a Nostre- Damme . 337
De sainte Marie ce qu'elle quidoit de Tangle. — L'angle parolle a Nostre-Damme . . 338
Mervelhe de Nostre-Damme. — Del virginiteit Nostre-Damme t'6.
Dieu cntrat en corps Marie par Porelhe.— Ce que Dieu mandat par Tangle .... 339
Coment Nostre-Damme fut marine. — De marit Nostre-Damme, qui oit bien IP ans . t'6.
Ly angle parolle a peuple de Marie la virge t'6.
Ly bordon Joseph commenchat a florir et fruit porteir 340
La vierge Marie fut espos^e a Joseph. — Ly angle parlat a Joseph t'6.
Marie visentat Elizabeth. — De sains Johans qui parlat en ventre sa mere t'6.
Del Magnificat. — Zacharie reparlat. — Del sainte vie Johan-Baptiste 344
Augustus fist le description de monde t'6.
Joseph et Marie s'en allont en Bethleem 342
Gran myracle de Nostre-Damme. — Mervelhe des trois chirges t'6.
De la pucelle de Bethleem t'6.
Jhesus fist myracle a la pucelle. — Lez propheties sont acomplies 343
Grant myracle du pere de la pucelle t6.
Del estable ou Dieu fut neis fut fait I englise 344
Del four sour quoy Dieu jut. — Del circoncision Jhesu-Crist t'6.
Mervelhe de la Tabarie emeritoir t'6.
668 TABLE DES MATIERES.
Pages.
De Herode qui vouloit ochire 1'enfant. — Del stoile flammanL — Melchior le roy . . 545
Jaspar. — Baltasar. — Les trois rois s'en vont. — Cassath la citeit ib.
Les III rois vinrent en Judee t*6.
Herode parolle a eaux. — Miracle a Herode. 546
Les III rois offrirent a Jhesus leurs joweals. — Le signifianche des III dons .... ib.
Jhesus sen gnat les III roys ib.
Ly angle s'apparut aux 111 roys. — Marie presentat Jhesum a temple 547
L'angle s'appamt a sains Symeon Tevesque. — Gran myraele de sains Symeon ... t6.
De la nativiteit Jhesu-Crist t'6.
Jhesu-Crist visquat XXXI II ans et HI mois 548
Des dautes del nascenche Jhesu-Crist — Quans ans Rom fut fait devant Jhesu-Crist . 549
De regimen temporeile et spirituele. — Jhesu-Crist li promirs pontifex t'6.
La generation Octoviain. — Octoviain astoit sire de tot le monde 550
Des II lumynars de monde. — De Octoviain qui conquist mult de paiis t'6.
Ly plus beais hons de monde, Augustus. — De Octoviain et du chevalier qui parloit a ly. 554
De sa femme Labia. — Paix par tout le monde t'6.
Les Romans velent adoreir Octoviain. — De Sibille Tyburtine 552
Ce qu'elle dist a Octoviain. — L'auteit de chiel t'6.
Octoviain creit en Dicu. — DeTyrus, roi d'Espagne t*6.
Comment Pilate fut engenreit. — De Judas qui trahit Jhesu-Crist 555
L'an in. La mere Judas veit en vision chu qu'ilh feroit t'6.
Judas fut enfanteit. — Judas fut mis en I bateal. — Judas arivat en l'isle Scarioth . . 554
L'an mi. Herode fist ochire les innocens. — Jhesus escapat. — De Gonis la pucelle 555
Del enfant de chire. — Des enfans qui devienrent singnes 556
De proidhons qui semeit des bleis t'6.
Jhesus parolle a Joseph. — Grant myraele de Jhesu-Crist 557
De proidhons, comment ilh alat vers Jhesus. — Les ydolles de Egipte chairent . . . t'6.
De Juys qui demoroit a Cayr. — Miracle de mort qui soy relevat 558
Jhesus demorat el citeit de Cayr. — De Antipater et Herode. — Fauseteit t'6.
De Herode, qui jugatses dois fis 559
Herode fist emprisonueir ses enfans et cheaux qui les amoient t'6.
L'«n v. Herode ochist ses enfans *6.
Dez enfans Aristoble par queiles furent ochis sains Jaque et sains Johan-Baptiste. . . t6.
De Herode, Agrippa et de Herodias 560
Jhesus et Marie soy de partem de Cair la citeit. — Les XII larons t6.
De Dismas , le bon laron. — Joseph fut suscorus de leire Disraas t'6.
Jhesus delivrat Joseph de la mort. — Del fontaine ou Jhesus fut bangniet .... t'6.
Le promirs myraele Jhesu-Crist t'6.
La mere Dismas fut garie de mesellerie. — L'ongement dont Jhesus fut oindut ... 564
Por l'alaitement Nostre-Damme fut 1'enfant Dismas garis t'6.
L'an II.
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TABLE DES MATIERES
669
Pages.
Nostre-Damme soy par tit de Dismas 564
Les arbres soy enclioent eocontre Jhesu-Crist et sa mere et florissoient t'6.
Les biestes vineot adoreir Jhesu-Crist t'6.
Myracle de la pucelle. — Mervelhe en casteal d'Orient 562
Des yraages qui astoicnt en la mahomerie. — Chi demorat Jhesus II ans t'6.
Des pochons qui furent debrisies par Jhesus et refais. — De l'eneanteresse .... 565
Antipater procurat de puniere son pere t'6.
De tintenirs. — De poraier que Jhesus fist croistre. — Myracle des draps de tintenier. 364 Lan VI -
De Herode et de la femrae Ferolas. — Herodc prent son (ils Antipater en grant hay me. 565
De Jhesus comment il chevalchat sus un ree de soleal t'6.
Jacob chayt et fust garit. — Jhesus encontrat le dyable 566
Herode appelle Antipater de trahison. — Herode chayt en grant maladie 567
Herode fist ardre mult de son peuple t'6.
La venganche que Dieu prist de Herode 568
Herode fist tous les fis hauls barons mettre en prisons t'6.
Herode fist ochire Antipater. — La mors Herode. — De Archelaus roy 569
Arch el a us tou blan vestus com roy novel 570
Guere dez roys Hongrois et Dannemarche. — Grant balalhe ib. i/an vn.
Porus le XI* roy Hongrois. — De Archelaus, le fis Herode 371
Archelause ochist IX m Juys en temple. — De Archelaus comment ilh allat a Rommc . 572
Herode Antipas demandc parchon al regne. — Les femmes Herodc 573
Des IUI hommes qui soy firent coroneir en Judee : Ester et Zonas et Judas et Baldaza. 574
Philippe Herode vat a Rom me t'6.
Des mauls que Herode fist en Judee. — De Nembroth de Sydoine 575
Mervelheux avis de Nembroth t'6.
De Herode Liber qui avoit conselhiet Nembroth 576
De jugement Augustus Cesaire 577
Archelaus fut roy de Judee apres Herode, son pere t'6.
Noble ordinanche que Cesar fist dez HI en fans Herode t'6.
Del crualteit Archelaus. — Joseph ramynat Marie et Jhesus vers la terre Israel . . . 578
Jhesus et Marie vinrent demoreir en Nazareth t'6.
Archelaus encachat sa femme Mariane t'6. L'«n vm.
Lotringe le Vl e roy de Tongre. — Jupilla qui fut li VH e roy de Tongre 579 L*an ix.
Lembor fut fondee. — Jupilhe. — Dolhen, Hestal, Chcretal, Wandre, Fleron, Herves. t'6. Lao x.
Gierlecoque t*6.
Belcoste, Uppey. — Clermont. — Bernawe. — Antwerpe. — Brus 380 L**n xi.
Jhesus et Marie alont en Jherusalem. — Jhesus desputoit as Juys t'6. fan xn.
Comment la voie fut trove'e entre Tongre et Jupilhe 381 L'an xm.
Coment la voie de VIII fut abreviet a III 582
Le blason Richier qui trovat le voie entre Jupilhe et Tongre. — Vers ib.
670
TABLE DES MATIERES.
Paget.
De Richeron Fontaine. — Richier fut mari& 382
De Ponche Pylate. — Coment Pylate ochist Jaspar, son frerc 383
L'an Xllll. Ocloviain raorit. — Li nombre dc peuple de Ronime. — Tybers, le HP empereir . . t'6.
L'an xv. Mervelhe de Tybeirs 384
L'an xvi. Mervelheux vision al fcmme Archelaus. — Vision a Archelaus 385
Archelaus fut priveis dc son rengnc. — Philippe, son frerc, fut roy de Jude*e . . . t'6.
Jhesus commenchat a prechier 386
Jhesus appellat saint Pirc et saint Andrier por estre ses apostles t'6.
De temple. — L'an XVIII morut Ovidius t'6.
De Judas Scarioth. — Dc Judas qui ochist le fis de roy 387
Pylate ochist le fis le due de Rorgongne. — Pylate fut prinche de Pontos t'6.
La grant subtiliteit Pylate. — De roalisce Philippe et Pylate 388
Pylate regnat en Judee. — Guerre entre Pranchois et Flandrois t'6.
Rrus, le roy de Bretangne, fist Rruscala. — Antwerppe. — Rruselle t'6.
Discors entre Pylate et Philippe , le roy de Jude*e. — Des ymages Pylate 389
Pylate prist le tresoir de temple — Pylate ochist XI m Juys et plus t'6.
Pylate fist son chamberlain de Judas t'6.
Jhesu-Crist prechoit. — Sains Maxhier devint disciple a Jhesu-Crist 390
Dels Phariseins, Saducheins, Asseriens t'6.
De Pylate et Judas. — Judas ochist Ruben son pere 392
Judas prist sa mere a fcmme. — Judas cognuit qu'ilh avoit esposeit sa mere . . . . 393
Judas devient disciple a Jhesus t'6.
Jhesus alat aux noiches 394
Jhesus-Crist fist d'aighe vin aux noiches. — Johan ewangeliste fut apostle 16.
De Philippe et Antypas roys. — Herodc tollit a son frere Philippe sa femme .... 395
De linaige Herodias. — Saint Johan-Baptiste commenchat a prechier t'6.
Saint Johan vint vers le flus Jordain t'6.
De Godoza qui puis fut nomme'e Cristina 396
Johans-Baptiste baptizat Jhesu-Crist, et Jhesus saint Johans t'6.
Cristine fut baptiziet de Jhesu-Crist. — L'Escluse. — De Jhesus et Johans-Baptiste . . 397
Jhesus junat XL jour, et portant le junent les cristiens t*6.
Sains Johans-Baptiste reprist Herode del femme dc son frere Philippe t'6.
Johan-Baptiste fut mis en prison. — Alexandrine demandat le chief Johan-Baptiste. . 398
Johan-Baptiste fut decolleis t'6.
Herodias et sa filhc enragont. — Sains Johans fut ensevelis entre Heliseus et Abdie. . 399
Des osseas saint Johans. — De saint Johan-Baptiste. — Dez osseais saint Johan-Baptiste. t'6.
De dois saint Johan-Baptiste. — De chief saint Johan-Baptiste 400
Lan xxxu. Ly chief saint Johan fut aporteis en Franche. — Jhesu-Crist fait ses apparans myracles . 404
Jhesu-Crist resuscitat le laisdre. — Mervelhe de laisdre. t'6.
La passion Jhesu-Crist. — Jhesus vint en Jherusalem. — Jhesus plorat sur Jherusalem. 402
L'an
XVII.
L'an
XIX.
L'an
XX.
L'an
XXI.
L'an
XXII.
L'an
XXIII.
L'an
XXII1I.
L'an
XXV.
L'an
XXVI.
L'an
XXVII.
L'an
XXVIII,
L'an
XXIX.
L'an
XXX.
L'an XXXI.
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TABLE DES MATURES.
674
Page*.
Del doleur de Jherusalera. — De Marie Magdalene 403
Marie lavat les pies Jhesu-Crist de ses larmes. . . . »6.
Judas parlat de l'ongement dont Jhesus fut ongs. — Judas s'apensat dc trahir Jhesus. t'6.
Judas vendit Jhesu-Crist XXX dcniers. — De jour del Ccnc 404
Jhesus fist de pain son chair et sane . ib.
Jhesus lavat les pies des apostles 405
Lez angles confortont Jhesu-Crist. — Jhesus fut pris et emyneis des Juys 406
Jhesus fut coroneis de spines. — Le vertu del arbre espine 407
Sains Pire renoiat Jhesu-Crist. — Jhesus fut mervelheusemcnt despletils t'6.
De coronne de blanc espine. — Del coronne de englaitier t'6.
Des faux tesmons encontre Jhesu-Crist. — Jhesus fut buffeis 408
Jhesus fut myneis a Pylate. — Le coronne de jons mariens ib.
Judas soy pendit par desperanche. — Des XXX denirs. — De mont Calvaire. . . . 409
Jhesus fut enmyneis a roy Herode. — La paix entre Herode et Pylate ib.
Ly dyable vot encombreir la passion Jhesu-Crist. — De la femme Pylate 410
Sathanas conselhe de Jhesus metre a mort ib.
Jhesus fut batus de scorgies , et apres recoronneis. — De queile bois la crois Jhesus fut. 41 1
Jhesus portat sa crois. — Jhesus fut claweis en la crois 412
Longis ferit Jhesu-Crist de sa lanche. — Myracle 413
Sathanas nunchat az enfers la venue de l'arme Jhesu-Crist — Sathanas fut mult batus. ib.
Jhesus rendit son espir a Dieu. — Sains Denys dest que li dieu de nature avoit a soffrir . 444
Joseph et Nychodemus ensevelirent Jhesu-Crist t'6.
Jhesus resuscitat. — L'arme de Jhesu-Crist descendit en infeir 41 5
Les sains parlent Tunc a l'autre en infeir t'6.
Sains Symeon parlat. — Sains Johans-Baptiste. — Adam parolle. — Seth parolle. . 416
Sathan parolle a Lucifer. — Lucifer respont a Sathan 417
Sathan respont. — Ynfer parolle ib.
Lucifer parolle. — David parrolle. — Ysaias parolle. — La II 6 vois 418
David parolle. — Jhesus descendit en ynfeir. — Lucifer parolle 419
Lucifer soy mervelhe de la poissanche Jhesu-Crist. — Tous les dyables crient . . . t'6.
Jhesus at destoubleit les dyables. — Les dyables soy desperent tous 420
Lucifer crie horiblement t'6.
Jhesus parolle a Sathan et a Lucifer. — Adam parolle 421
Jhesus delivrat ses amis d'infer. — La resurrexion Jhesu-Crist 422
De Joseph d'Arimathie. — Grant myracle de Joseph de Arymathie. ...... t'6.
L'angle s'apparut a cheaux qui gardoientle sepulcre Jhesu-Crist 423
Des III Maries. — Argus entres les chevaliers et les Juys «6.
Les Juys donnarent aux chevaliers grant argent qu'ilz ne desissent que Jhesus astoit
releveit. — Fine'es et Addi et Agens dessent aux Juys qu'ilh avoient veyut Jhesu-Crist. 424
Les Juys envoient a Joseph lettre 425
672
TABLE DES MAT1ERES.
Pages.
Joseph parolle aux Juys. — Mervelbe de chu que Joseph dist aux Juys 426
Les Juys furent mult enbahis des parolles Joseph t*6.
Joseph parolle aux Juys mervelhezement 427
Les Juys ont conjuret y dois que Jhesu-Crist resuscitat de dire veriteit t'6.
Ches dois escrisent chu que Jhesu-Crist avoit fait aux ynfers t'6.
Pylate escript k l'emperere la mort Jhesu-Crist. — La lettre 428
Pylate envoiat la lettre k Romme t'6.
La geste de Wespasianus. — Chis Wespasianus astoit mult malade 429
Wespasianus fut garis dez wespes. — De la virge Marie et des XI apostles .... 430
Sains Mathias fut esluis apostle. — Les nom de XII apostles t'6.
Coment Dieu envoiat le Saint Espir k Chinqucmme 431
Les apostles parlent tous lengaiges t'6.
Et convcrtirent bien, dedens VII jours, XI ra IIII C IIII" et VI personnel t'6.
Sains Jacque fut evesque de Jherusalem. — Sains Poul fut convertis t'6.
L'an xxxv. L'emperere Tybeir fut mult malade t'6.
L'an xxxvi. L'emperere envoiat k Pylate qu'ilh ly envoiast Jhesus. — Pylate fut enbahis .... 432
Albanus enquirt apres Jhesu-Crist t'6.
De sainte Verone. — Sainte Verone parolle k Albanus t'6.
Albanus fut corochie's sour Pylate. — Verone parolle k Albanus 433
Coment Jhesus enprintat le Veronique t'6.
Albanus amynat sainte Verone a Romme. — Albanus parolle k l'emperere Tybeir . . 434
L'emperere fut garis. — De Virgile, exemple 435
Sainte Verone en ralat vers Jherusalem. — Pylate fut amineit k Romme et mis en prison. 436
l an xxxvn. Le fourme et le fachon de Jhesu-Crist t'6.
L'emperere assemblat tos ses saiges pour jugier Pylate 437
Wespasianus rendit sentenche que Pylate devoit morir t'6.
Pylate fut amyneis devant l'emperere qui li fist grant fieste t'6.
Wespasianus jettat Pylate a terre.— Coment Pylate fut ochis t'6.
Mervelheuses choses fasoient les dyablcs de corps Pylate t'6.
Ly corps Pylate fut jetteis el Royne. — Gehenna. — De Pylate. — De Herode Antipas 438
Wespasianus veult vengier la mort Jhesu-Crist t'6.
L' an xxxviil. Troilus etCloberius,dus deGalle. — Trectulus ly VUI e roy de Tongre 439
Gayus ly HIP emperere de Rome. — Herode fist decoleir saint Jaquc le gran .... t'6.
Discors entre Hcrode-Agrippa et Herode-Antypas t'6.
Herode-Agrippa fut fais roy de Jud£e. — L'emperere Gayus soy fist aoreir 440
L'an XL. Sains Pire fut fais eveque de Antyoche. — Por quoy ons fait la fieste de saint Pire cherolle. t'6.
Sains Pire dest messe k le Pater Noster seulement. — Les promirs ordes par saint Pire . t'6.
L'ewangeile saint Maxhir fut fait chist an, etoussi saint March t'6.
Saint Pire prophetizat la nascenche Karle le gran et Ogier ly champion Jhesu-Crist et
Sainte-Engliese. — Le prophetic saint Poul de Ogierle Danois t'6.
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TABLE DES MATIERES.
673
Pages.
Mervelbe de Ogier le Danois. — De Gayus Femperere 441
Claudius le MI 6 cmperere. — Lous, Bolsde, Lonchins. — Treit t*6.
Oultreit. — Sains March converlit Alixandre 442
Sains Pire soy parlit d'Antyoche et vint a Romme t'6.
Sains Pire le promier pape de Romme. — Dez cardinals de pape t'6.
Des evesques : Hostien. — Portuen. — Alhain. — Sabin. — Prenestre. — Rufine. —
Tusculaine t'6.
Des cardinals de Romme qui sont preistre t'6.
Des cardinals qui sont dyaques 443
Sains Pire envoiat ses disciples par le monde. — Grant famyne t'6.
Grant aighes. — Sains Luc escript son ewangeilc 444
Batalhe entre Romans et Bretons. — De Claudius t'6.
De saint Thomas apostle. — De Loheraine. — De fenix 445
L'assumption Nostre-Damme. — L'angle et Nostrc-Damme parlent ensemble . . . t'6.
Nostre-Damme s'aparelhe por morir 446
Nostre-Damme parollc a sains Johans ewangeliste t'6.
Les apostles furent al trespas Nostre-Damme t'6.
Une mult bonne odeur desquendit en la chambre la virge Marie 447
L'angle desquendit el chambre la virge Marie t'6.
La virge parolle a son fils. — Son fils ly respont t'6.
Nostre-Damme fut ensevelie en Josaphat. — Myracle 448
Gran myracle de corps sainte Marie. — Cent milhe sont baptizes 449
Les apostles ploront fortement. — Les apostles furent reporteis en leurs paiis. . . t'6.
Dieu resuscitat le corps de sa mere, et fut porteit en ciel t'6.
De roy de Tongre. — Colongus le IX roy de Tongre 450
Jupilla le promier conte de Colongne. — La grandeche del royalme de Tongre. . . t'6.
Grant famyne por vermyens t'6.
Wespasianus s'aparelhe por aleir vengier la mort Jhesus en Jude'e t'6.
De sains Poul. — La fondation de Dynan t'6.
Richier li promier conte de Dynan 454
Hasselt, Blise, Stoxhem, Brede, Eyke, Rulmonde, Fene, Doudrah, S'-Tron, Rochefort . t'h.
Des LXXII disciples. — Apoloniare. — Syrien, March t'6.
Saviniain, Pontenlians, Altimans, Sirocimans, Adaldrans. t'6.
Altinans, Odaldins, Serocinans, Potentians. — De Soison t'6.
Martial. — Ursichis ou Nathanael. — Julian et Symon le Lepreux 452
Clemens. — Mansuetude t'6.
Sains Pire envoiat a Trieve Euchars, Valeir et Ma terne t'6.
Sains Materne morut. — Euchars et Valers s'en retournent a Romme t'6.
Sains Materne fut resusciteit par le baston sains Pire 453
Par le resurrexion sains Materne furent baptises VII m et IIH e personnes t'6.
85
L'an XLI.
L'an XXXIX.
L'an XLII.
L'an
XLV.
L'an
XLVI.
L'an
XLVII.
L'an
XLVIII
L'an
XLIX.
L'an
L.
L'an LI.
L'an LII.
L'an LIU.
674 TABLE DES MAT1ERES.
Pages.
Sains Materne fut XL jours en terre 455
Des disciples que sains Pire envoiat prechier : Syrus, Franco, Memnius, Salarninus . t'6.
De Nostre-Damme nobles et saintes reliques. — Des englieses que sains Marcheal fond at. t'6.
Dieu dest a sains Marcheal que sains Pire astoit buy crucifiies a Romnie 454
De sains Adrier. — De sains Amang.— Verone fut recluse t'6.
Lan lv. Sains Thomas convertit Yndre t'6.
Mervelhe de sains Thomas. — Grant myracle pour sains Thomas 455
Prophetie de Ogier le Danois par sains Thomas t'6.
Sains Thomas anunchat que Ogier li Danois par VII fois releverat christiniteit . . . t'6.
Ogier conquerat XV royalmes , se dest sains Thomas. — Gran myracle de sains Thomas. 456
Sains Thomas fut ochis. — Ogier fundat une engliese ou ilh mist le corps sains Thomas. t'6.
Coment li corps sains Thomas fut translateit en plusieurs lieu ib.
Comment les vraies jugement se font par le main sains Thomas 457
Lan lvi. Claudius resignat l'empire a Nero, son filhast, et en privat ses drois fis t'6.
Nero enposionat Claudius qui li avoit fait tant d'honeur. — Nero soy fist coroneir. t'6.
L*an lvii. Ays la citeit t'6.
Nero fist ochire Granus, son seroge. — Nero ochist sa soreur. — Des mahraisteis Nero. 458
L'an lviii. f^ \y St — Sains Poul fut mis fours de prison. — Nero ochist sa promier femme. . t'6.
. .*!! . v * Nero dormoit a wee sa mere. — De sains Clemens. — Nero ochist XVII senateurs. . t*6.
Chu commenchat guerre entre Flamens et Tongrois 459
Tongrois desconfirent Flammens. — Guerre entre Hongrois et Danois ib.
Edea gentilh femme. — Trerous et Jupilla ardirent Flandre 460
^ afV J - *"' De sains Jacque l'apostle, le petit. — La mort sains Jaque. — De Nero 464
Les Galliens furent deporteis longtemps de leurs tregut t'6.
Ches de Galle misent plusieurs paiis en leur subjection. t'6.
De prechement sains Eucars, sains Valeir et sains Materne ib.
L'an lxiiii. Trive fut convertie. — Sains Euchar et ses II compangnons resuscitont unc mors . . 462
Ilh baptisarent Vil m VIII C et XLVI personnel t'6.
Sains Luch convertit mult de gens en Engleterre t'6.
Sains Luch fut delivreit par le roy Morodab de prison, porta nt qu'ilh resoscitat sa
• femme; et adont furent baptises 463
Par sains Luch fut la promier Marie cristine de chi nora t'6.
Sains Luch baptizat le roy et la royne d'Engleterre, et tout le royalme soy convertit
a Dieu. — Engleterre li promier paiis qui ereit en Dieu. — Brutus fondat Engleterre. t'6.
Lan lxv. Del Grant Bretagne et Petite ib.
Guerre entre Flandrois et Tongrois. — Tremus fondat Skendrcmal , Juprelle et Verney. 464
Tremus, le X e roy de Tongre. — Del grant mahraisteit Nero. . » 465
Nero fist ardre Romme t'6.
Lan lxvi. Noble vision de sains Euchars, Valeirs et sains Materne 466
Tous ly paiis de Trieve est convertis a ihesu-Crist, par lea HI dit proidhomraes . . t'6.
L'an LX.
L'an LXI
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TABLE DES NAT1ERES.
675
L'an LXVII.
L'an LXVIII.
L'an LXVI.
Pages.
Tremus, le roy de Tongre, conquestc fort sour les Flamens 466
Grant guerre entre Flamens et Tongrois 467
PerueJheux chouse est une vilhe d'estre en discors, quand ons le weult gangnier. . t'6.
Cornulo , ly XP roy de Tongre. — Lucanus raorit 468
De le malvaisteit Nero encontre Seneca , son maistre 469
Coment Seneca elesit la mort al saingnier en une bangne t'6.
Nero fist ochire sa mere por veir ou ilh fut neeis t'6.
Nero fist par ses phisichiens qu'ilh enfantat une raine 470
Nero fist ochire ses phisichiens 471
Nero ochist sa second femme tout enchainte, por savoir comment ilh astoit en ventre
sa mere t'6. L'an lxix.
Nero fist despiteir sains Pire et sains Poul a Symon 472
Symon l'enchanteur chaiit de l'aire cha jus, si qu'ilh morut t'6.
Nero fist ochire tous cristiens. — Nero fist ochire sains Pire et sains Poul 473
Les corps des II apostles furent embleis et en une puche jetteis ib.
Coment ons cognuit les osseals sains Pire encontre ches de sains Poul t'6.
Sains Silvestre fundat les II englieses sains Pire et sains Poul a Romme sour leurs t'6.
corps t'6.
Sains Pire ordinat a juneir les advens et le quaranteine 474
Lynus fut eslus pape apres sains Pire t'6.
Nero s'enfuit fours de Romme por paour, et soy ochist t'6.
Nero fut mangniet des bestes t'6.
Anastaise emperere. — Wespasianus et Tytus entrent en Jude*e 475
Josephus soy combat aux Romans. — Josephus entrat en terre t'6.
Josephus fist grant sens t'6.
Wespasianus prist a merchi Josephus. — Josephus prophetizat. — L'emperere morit . 476
Gabba, ly VIII emperere, morut. — Otton , le IX° empereur t'6. L'an lxxi.
Vitellus , le X e emperere de Romme. — Wespasianus , ly XI° emperere de Romme. . 477
Tytus prist les fivres del joie qu'ilh oit de son pere; mains Josephus le garist . . . ib.
Tout chouses contraire soy garissent t'6.
Josephus garist Tytus de sa maladie 478
Cornelo, roy de Tongre, fondat Vileir, Embour, Lovengneez, Songn&, Huffalye,
Rastongne, le Roche, Haneffe, S tiers, Doncheir, Hodege, Momale , Henricourt et
Thys t'6.
Nobleche de Josephus. — De Josephus t'6.
De sains Ignasce. — Jherusalem fut conquestee par Tytus , et destruit 479
La terrible venganche que Tytus prist del mort Jhesu-Crist t'6.
La mere mangnoit son enfan. — XI C m mors et O vendus t'6.
Guerre entre Gallyens et Normans t'6. L'an lxxiii.
Coment les Gallyens orent a nom Frauchois 480
H
■8"
676
TABLE DES MATIERES.
L'an XXV.
L'an LXXVI.
L'an LXXVIII.
L'an LXXIX.
L'an IIII".
L'an IIII" et II.
L'an IIII" et HI.
L'an IIII" et VI.
L'an IIII" et VII.
L'an IIII" et VIII,
L'an LXXXX.
L'an IIII" et XI.
L'an IIII" et XII.
L'an IIII" et XIII.
Pages.
Cloberius , due de Galle, conqucstat grant terre 480
Des sains Euchars, Valeir et Materne. — Sains Euchars morut. . . . t'6.
L'angle s'apparut a sains Euchars. — Sains Valeir fut evesque apres Euchars . . . t'6.
Grant myracle de sains Euchars t'6.
Sains Valeir fut ly secon evesque de Trievc. — De sains Valeir 484
Wespasianus conquist grant terres. — Guerre des Galliiens contre les Romans . . . t'6.
Grant movement de terre. — Le casteal de Gornulhon fut fondeis ou sont les Cartroux . 482
Tongris , ly XII™ roy de Tongre. — Mervelhe. - De pape Lynus t6.
Grans myracles. — Lynus li pape fut decollcis. — Clctus fut fais pape 483
Wespasian morut. — Des dois fis Wespasianus. — Tytus, ly XII" - emperere .... t'6.
Li dus de Galle desconfist les Romans t'6.
Jonab fist Lovay chief de son paiis 484
Dora ilia in enpuisonat la femrae Tytus et ses II enfans t'6.
Domitiain enpuisonnat tout le familhe Tytus, et Tytus escapat par medicine. . . . t'6.
Tytus a porta t tous le joweals de Jherusalera a Romme t'6.
Domitiain enpuisonat son frere Tytus 485
Domitiain fut ly XIII e emperere et fut li second Nero t'6.
Domitiain dest a sa femme tous les mals qu'ilh avoil fait t'6.
Nota des femmes. — Domitiain fist ochire sa femme 486
Guerre entre le dus d'Aquitaine et les Romans t'6.
Galliiens ont desconfis les Romans. — Ector assegat Rom 487
Ector creioit le conselhe de ses barons, car ilh li astoient toudis loials t'6.
Domitiain fist banir tos les philosophes, et ochire XXI de plus grans de Romme . . t'6.
Ly Capitole et Pantheon furent fais a Romme.— De Domitiain 488
Domitiain mist Hongrois et Danois a hontaige t'6.
Ector de Galle prist Domitiain et desconfist ses gens t'6.
Domitiain quittat a Hongrois, Dannois et Galliiens leur tregut por son ranchon . . . 489
Domitiain defendit que nuls ne plantast vingne.— Cletus pape. — Cletus fut mult bons. t'6.
Sains Johans ewangeliste prechat a l'emperere sa loy 490
Sains Johans expoise a l'emperere le sainte Escripture t'6.
Sains Johans expoisat a Femperere en roman la pater noster ....'.... t'6.
Pater noster, qui es in celis, sanctificetur nomen tuum t'6.
Adveniat regnum tuum. — Fiat voluntas tua sicut in celo et in terra 494
Panem nostrum cotidianum da nobis hodie t'6.
Et dimitte nobis debita nostra sicut et nos dimittimus debitoribus nostris t'6.
Et ne nos inducas in teraptationera. — Sed libera nos a malo. Amen 492
Chi expoisat sains Johan a Domitiain les joies de paradis t'6.
L'emperere demandat a sains Johan Festat d'ynfeir t'6.
Sains Johan preche douchement Domitiain 495
Domitiain parolle a sains Johans. — Ly dyable pa roll e a Domitiain 494
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TABLE DES MATIERES.
677
Page*.
Domitiain mist sains Johan bolir en l'oyle 494
Domitiain envoiat sains Johan en exilhe. — L'angle ravit sains Johans en paradis . . 495
Sains Johans fist l'apocalips. — Del citeit que sains Johans veit t'6.
Des IX paines d'ynfers , la proraier. — Contre les useriers *6.
La seconde paine est le gran frois. — Contre lez orgulheux ib.
La tirche payne sont vers et serpens. — Contre les detracteurs. — Del mal lenge . . 496
De la laingue. — La quarte payne ib.
Contre les luxurieux. — La V # paine est baturs. — Contre les yreux 497
La VI* est de tenebres. — Contre les avaricieux et convoiteux t'6.
La VII* payne est honte. — Contre les avoiles de cuer ib.
Ly VIII' est paour. — Contre les parjures. — Et contre les jureurs ib.
La lX e payne sont loiiens ardans. — Des membres dont ons at pechiet serat-ons loiiet. ib.
Qui pro alio orat pro seipso laborat. — Trecanus, li XIII roy de Tongre 498 fan iui» et xvi.
Toutes les nations de Europe sont issus des Sarasiens ib. Lan n,, " etXV|1 -
Sains Materne fut evesque de Trieve . ib.
Dieu relonghat la vie sains Materne XXX ans a wee les XL jadit ib.
Sains Materne convertit mult de gens. — Domitiain fut ochis 499
Sains Johans fut rapeleis de son exilhe. — Sains Johans convertit tot la citeit d'Ephesc. ib.
Sains Johans fist Tenglise d'Ephese. — Li pape ordinal ib. L'an uii"etxviii.
Clemens, ly II U e pa pe. — Trajan us, le XV e emperere 500
De Clemens le pape qu'ilh fist. — Te igitur. — Sains Clemens pape fut jetteis en la mere. ib.
L'ordinanche del confirmation apres le baptesme ib.
Trajanus Temperere conquist pluseurs paiis ib. L'an c.
De sains Materne. — De sains Johan ewangeliste ib. LanCeti.
Anacletus, ly V° pape. — Que ch'est-a-dire le sige vacant. — D'Anacletus .... 501
Anacletus ordinat les clers del raseir leur coronnes et barbes 502
Que ons doit honoreir le preistres. — Nuls ne doit dire messe sens tesmons .... ib.
Le trepas de sains Johans ewangeliste. — L'an quant sains Johan trespassat .... t'6. Lan c et n«
Trajanus desconfit Agildoras, le roy d'Espangne 503 L'an Get ui.
De roy d'Espangne qui desconfit Romans t'6.
Guerre entre le prinche d'Anwerpe et le conte de Flandre t'6.
Subtils fais d'armes. — Le prinche de Lovay at desconfis Flamens 504
Trajanus l'emperere at desconfis Jonas, le roy de Cartaige t'6.
Evaristus, ly VI e pape, fust esl us 505
lib fut ordineis que ons devoit proclameir sor l'engliese cheaux qui soy voloient marier. ib.
Et comment ons doit espoiseir par le preistre t'6.
De prinche de Lovay qui gangnat Bruge; de la en avant s'appellat-y conte de Lovay . t'6.
Trajanus prist Cartaige. — De ches de Gant. — De Tempcrere Trajanus 506 fan c et v.
Trajanus l'emperere conqueste en Dannemarche 507 L'an Cetvi.
Arnuls, prinche de Lovay. — Chis soy fist promir apelleir conte de Lovay .... ib.
678 TABLE DES MATIERES.
Pages.
L'an c et vii. De Trajanus I'emperere et de roy danois . . ' 507
Aliianches entre Amos, !e promier conte de Lovay, et Trecanus, !e roy de Tongre 508
L'an Get ix. Sains Ignasce fut martirisi&. — De sains Materne, evesque de Trive et Colongne . . t'6.
Porquoy Collongne oit nom Aggrippine. — De la citeit de Mes et Tou 509
De sains Materne, qui convertit Collongne par myracles, et Tongre apres .... t'6.
Tongre fut convertie t'6.
Grant myracle de sains Materne 540
Ly roy de Tongre fut baptiziet par sains Materne t'6.
LX m baptizes.— HIP M VIII" etXLV baptizes a Tongre t'6.
Sains Materne fut vesque de Trive, Colongne et Tongre. — L'^glise Sains-Pire ... 544
L'an c ei x. Trajain envoiat Plinius ochire tos les cristiens t'6.
Trajain l'empererc commandat que nuls ne fache riens aux cristiens, par le conselhe
Plinius t6.
Plinius qui escript le hystoire de Tongre et le libre de nature t'6.
Del vertut del fontaine de Tongre t'6.
Trajain 1'emperere conquist mult de citeis en Espangne. — Lucerne la citeit .... 512
L'anCetxi. Ly papc Evaristus morut. — Del orde de manage t'6.
Alixandre, le VII pape de Romme. — De Trajain remperere. — De roy de Hongrie. 545
Lan Cec xiii. Espangne fut desconfist par rempereir. t'6.
Lan Cetxuii. Pire ly derain roy de Tongre morit. — Comment la royalme de Tongre fut departie . 544
Les armes de roy de Tongre * t'6.
Alixandre ly pape ordinal del faire le benoSte aighe le dymengne t'6.
LanCetxv. Arnus, ly promier conte de Lovay, morit. — Grant movement de terre t'6.
De sains Eustause t'6.
Le vie de sains Eustause 545
Tous Juys furent destruis 520
Lan Get xviii. L'arme Trajain Temperere fut d'enfier delivr^e 523
Adriain, le XVI 8 emperere de Romme. — Sains Eustause revint a Romme .... t'6.
Sains Materne fondat des englises. — Grant myracle de sains Materne t'6.
Sains Materne fondat pluseurs englises t'6.
Lan G et xx. Gran plove. — Alixandre le pape morit. — Del aighe que ons met en calix .... 524
Sixta pape VHP fut consecreis. — Ordinat sanctus, sanctus, sanctus t'6.
Sains Materne alat a Huy. — La fondation de Huy t'6.
L'an Cet xxu. Sains Materne convertit Huy, et y fondat Nostre-Damme. — Des II pons sour Mouse. 525
Sains Materne vint a Dicnam ou Arche t'6.
Ly serpent ocbist a Dicnam VI" et X personnes t'6.
Sains Materne ochist le serpent , porquoy cheaux de Dinant prisent baptemme . . . 526
Sains Materne fondat Nostre-Damme et Sains-Estiene a Dynant ib.
Porquoy Arche fut appellee Dicnam t'6.
Le corporels del alteit doient eistre de filh de lin et blans t'6.
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TABLE DES MA TIE RES
679
Pages.
Sains Materne vint a Nammut et le convertit a Dieu, et les baptizat. — Grant rayracle. 526
L'engliese de Namur par sains Materne. — La ferarae ne mie estre secretaire a l'auteit. 527 L'an c et xxm.
Les ordinanches de pape Sixte. — Sains Materne convertit Nameche t'6.
Porquoy el oit nom Nameche t'6.
Le jour de la Triniteit fut consecr^e Nostre-Damme a Namut. — Del vilhe de Chynee. 528
De sire de Chynee. — Sedros, roy de Tongre, fondat Chynee t'6.
Sains Materne suscitat V enfans a Chynee, et y fondat l'englisc Nostre-Damme. . . t'6.
Sains Estiene dest en vision a sains Materne qu'ilh ly fcsist une engliese t'6.
Sains Materne convertit le conteit de Louz en Hesbay 529
Sains Materne fondat ches vilhes : Waremme, Puchey, Oley, Kemexhe, Foux , Berses,
Selinset Fexhe, Gloos, Othey, Rokelenge, Bachenge, Borset Enbemmes .... ib.
Ly roy de Dannemarche prist sains Materne et l'emynat en prison ....... t'6.
Les Tongrois destruent Dannemarch por sains Materne, leur evesque 530
Tongrois ont la victoir, et ont reconqueslcit sains Materne ib.
Les arraes de due d'Ardenne Treraus, e'est Bulhon t'6.
Les armes de due de Lotringe. — Les armes de Viane t'6.
Sains Materne edifiat une capelle a Liege ou est li engliese Sains-Servais 551
Sains Materne fondat II englieses en Ghievremonte 532 L'an c et xxv.
Adriain Pemperere s'en vat en Galle por conquesteir ib.
Ly dus de Galle at desconfis Romans. — Franco fut fais due de Galle 533
Guerre en tre Romans et ches d'Athennes. — Grant myracle des cristiens t'6. fan Cetxxvi.
Cristiens orcnt la victoir. — Les cristiens furent mult honnoreis et afranquis . . . t'6.
Sains Materne veit sains Euchars et Valeir en vision. — Le trespas sains Materne . . 554 L'an c et xxvu.
Coment ly corps sains Materne s'en alat a Trive sens marnier t'6.
L'egliese de Ploreraent, ou sains Materne giest 535
Coment li corps sains Materne fut translateit a Liege t'6.
Le lynage et les armes sains Materne t'6.
Coment les evesques de Trive et Colongne soy departirent de Tongre t'6.
Navitus, lysecon evesque de Tongre t'6.
Sains Navitus ediOat une engliese a Tongre. — Ly pape Sixte fut chi decolleis . . . 556 L'an c et xxviu.
L'evesques sains Peregrin fut martiristes. — Celeforus, le IX 9 pape t'6. Ltn c et XXIX -
De pungne qui buffat sains Navitus et li prescntat une lyon ; et en furent convertis L'an c et xxx.
XII" 1 hommes. — Le pape ordinal de dire III messe le jour le Noel t'6. L'an c et xxxi.
De Secundus le philosophe 537
Que les femmes sont frailhes solonc nature , et les peut-ons decheur pour avoir ou
amour t'6.
Secundus gardat silenche tout sa vie 538
Comment Secundus fut manechies del morirs'ilh neparloit 540 L'an Get xxx it.
La grant constanche de Secundus t'6.
La disposition de monde. — Que e'est Dieu. — Que e'est le jour 541
■oo
le
680 TABLE DES MATIERES.
Pages.
Queile chose est li soleal 541
Que c'est la lune. — Que c'est la terre. — Que c'est le chiel. — Qu'est bealteit. . . . 542
L'au c et xxxill. Quest I homme. — Celeforus pape ordinat de chanteir Gloria in excelsis al messe . . ib.
Lon c et xxxv. Les Juys s'aserablunt et fisent mult de mals 543
Jherusalem fut destruit par Adriain remperere t'6.
Lan c et xxxvii. Dcs crois qui astoient par Jherusalem, et de leur signefianche. — Mervelhe des crois . 544
Le IIP signe terrible fais aux Juys t"6.
Jherusalem fut encor destruit , et lez Juys ochis par Adriain remperere t*6.
Lan Cet xxxviii. Jherusalem fut refait et fut appellee Helie. — De Hongrie t*6.
De Trecanus, le H e conte de Lovay t'6.
Anthone, le XVII' emperere de Rorurae. — Huguyns pape X e . — Orage 545
Ly pape ordinat parins et marines al baptisier. — Et de loyer les bendeals a confirmeir . t'6.
Grant guerre entre Romans et Franchois 54ti
Lan c et xlii. L'empereur Anthone fut desconfis par le dus Franco de Galle t'6.
Noble et bardie gerre. — Grant batalhe 547
Lan c et xliiii. Franco, dus de Galle, asseghat Romme 548
Li pape Liginus morit. — Pyus,leXI e pape. 549
Ons ne doit celebreir la resurrexion , fours qu'en dymengne. — De grant trahison. . t'6.
Lan c et xlv. Guerre entre ches de Galle et Romans t"6.
Lan c etXLVi. L'emperere fut desconfis.— Sains Materne s'aparut a Navitus, son successeur . . . 550
Sains Navitus, evesquc deTongre, fundat une englise de Sains-Materne t'6.
Lan c et XLVlii. j) e Navitus , l'evesque de Tongre. — Grant persecution sor les cristiens t*6.
Grandes erreurs et heresies nassirent t'6.
Terrible orage. — Des III effoudres. — Grant myracle des heretikes ochis .... 551
Lan Cet L. Navitus, evesque de Tongre, fondat pluseurs englieses t6.
Lan Cet li. Franco, li dus de Galle, asseghat encor Romme. — Grant myracle 552
Les Sycambiens furent desconfis devant Romme par les cristiens 555
Henris ly senateur qui donnat le conselhe del victoire. — Les cristiens furent afrankis. t'6.
IIII m hommes furent baptiziet por les II victoirs des cristiens 554
Franco, dus de Galle, assemblat mult de prinches, por conselhe avoir contre les Romans. t'6.
Tous les prinches refusent d'aidier le due de Galle contres les Romans t'6.
LanCetLH. D e Anthenoir, le dus de Galle. — De Navitus, evesque de Tongre 555
Gallien , le gran phisichien »6.
Pompeius Trogus, li gran historiographins, et Justinus, son servan t'6.
Lan C et Liu. L'emperere Anthone awec ses gens vint vers Normendie et le conquestat et Bretangne. t*6.
Anthenoir, le due de Galle, reconquestat Normendie t"6.
Lan c et lv. Les ordinanches le pape Pyus. — A chi temps furent Potentiane et Praxede .... 556
Anacletus XII pape #•
Lan c et lvi. De l'emperere Anthone. — L emperere vint en Avergne 557
De dus de Galle. — De Anthenoir, due de Galle t'6.
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TABLE DES MATIERES
68i
Pages.
L'emperere en la fin en ralat com desconfis et ly dus de Galle revint en son paiis . . 558
Seul a seul batalhe entre l'emperere et Anthenoir, le due de Galle t'6.
Anthenoir, ly due de Galle,'fut fais conte de Flandre. — L'emperere Anthone envoiat grant
gens contre cheaux de Egipte. — Lez Egiptiiens furent rem is en tregut des Romans. 559 L'an c et lviii.
Request del dus Anthenoir as Flamens 560
Sains Policarpe destruite mult de heresies k Romme t'6. L'an c et lx.
De sains Navite. — L'emperere Anthone morut XVII e . . • 561 L'an c et lxi.
De Faustine, la filhe l'emperere, comment elle fut cure'e de sa maladie t'6.
Coment Ptholomes, le philosophe, adjostat mult de raisons a astronomie t'6.
Des libres que chis Ptholomes fist. — De l'emperere Anthone, de ses dois fis . . . . t'6.
Porquoy ilh fut ordineit de esleir dois emperreurs 562
Le XVIII* emperreirs, les II fils Anthone : Marcus et Aurelius, qui regnont sicom I
seul emperere. — De HIP contes de Lovay. — De sains Policarpe ^ L'an c^lxiii
Ly oraige et ly vois de chiel blastenghat Aurelius l'emperere t'6.
Sains Policarpe convertit a Dieu tot Borgongne, l'an CLXIIII 563
Ly due de Borgongne soy fist baptisier et oit nom Johans ib.
Johans, ly due de Borgongne, envoiat deffier les empereres de Romme 564 L '*° c el lxv.
Les ordinanches de Anycletus le pape. — Del consecration des evesqucs t'6.
De Sother, le XIIP pape. — De roy de Hongrie Alixandre t'6.
De pape Sother, qu'ilh ordinat dez nonnains. — Et de mariage ib.
L'emperere Marcus alat en Borgongne 565 L'anCetLXVi.
Coment Johans , dus de Borgongne, fist poindre en tout ses banires Jhesus-Crist . . t'6.
Johans, lydit due, desconfis t les Romans t'6.
Coment sains Policarpe s'en ralat a Pavie en Lombardie, et fut la pris et envoiet L'an CctLXVii.
k Romme. — Apres ilh fut jetteis en unc feu, et apres decoleis t'6.
Johans, le due de Borgongne, fist escorchier le roy de Pavie, por sains Polycarpe qu'ilh L'an c et lxviii.
avoit livreit as empereres 566
Coment lydit due Johans edifiat II englieses k Dygon • • t'6.
Ly oraige ochist les chevals des II empereres de Romme t'6.
Grant batalhe entre le roy de Bretangne et de Scoche. — Ly roy de Bretangne fut ochis L'an C et lxxi.
et ses gens desconfite, et ly remanant fuit k Londre et fut Londre assegie* . . . . t'6.
De Valentin , le fis le roy de Dannemarche 567
Coment Valentin convoitat la filhe le roy de Bretangne d 'avoir k femme t'6.
Valentin fut baptises, et esposat la filhe de roy 568
Valentin ochist le roy de Scoche et desconfist ses gens. — Mortaliteit a Romme . . . t'6. L'an c et lxxiii.
De Navitus , evesque de Tongre. — De Johans dus de Borgongne. — Gran plovaige . 569 L'an c et lxxv.
Chire temps. — Grant gale'e. — De roy Valentin de Bretangne t'6.
De sains Navitus, evesque de Tongre. — Sother, le pape, morut par martyr. . . . t'6. L'an c et lxxvii.
Des heretiques cathafrigiens et de leurs heresiies t'6.
DeEleutherius,leXIIIPpape 570
86
682
TABLE DES MATiERES.
L an G el LXXVIII.
fan G et LXXXV.
Lan G et LXXXVIU.
L an G et LXXXIX.
L'an C et XCIII.
Lan C et XCV.
L'an C et XCIX.
Lan CC.
L'an CG et I.
L an GC et 1111.
Pages.
Luciien , roy de Scoche, et son peuple furent cristiens h cht pape Eleutherius. . . . 570
L'emperere Marcus s'en alat contre les Alleroans : l'emperere oil la victoire .... t'6.
De Leganos, conte de Lovay. — L'emperere Marcus desconfist cheaux d'Aquitaine . . 574
De roy Valentin de Bretangne. — De Comodus, le XIX* empereire t*6.
De roy de Bretangne et Cornualhe ib.
Guerre en tre le roy de Bretangne et le roy de Cornualhe. — Bretons ont la victoire . . 572
De due de Galle et conte de Flandre 575
Coment ly roy Thomas de Bretangne fist* baptizier le peuple de Cornualhe t'6.
Batalhe en tre le roy de Cornualhe et ly dus de Ybernie. — De conte de Lovay .... ib.
De due de Galle. — Guerre entre le dus de Galle et son oncle, le conte de Flandre . . . 574
Ly dus de Galle oit la victoire, et furent les Flamens desconfis et ly conte pris .... t'6.
De roy de Dannemarche . 575
Origenes fut neis, qui tant escript. — L'emperere A urelius mom t 576
Clodas fut baptises ib.
Batalhe entre le roy de Bretangne et le roy de Hongrie. — Hongrois furent desconfis. 577
Le roy hongrois alat queire soucour k l'emperere de Romme, qui li aidat t'6.
Les Bretons orent victoir contre Romans et Hongrois, et oirent le milhour 578
De XX* emperere Elyus et Severus t'6.
De III" evesque de Tongre , Marcel. — Le XXI e emperere Severus 579
Victoir, le XV e pape. — Le roy Thomas gangnat Targont t'6.
Batalhe entre Bretons et Romans t'6.
De roy de Hongrie. — De due de Galle. — De Clemens, le maistre Origenes .... 580
Le casteal Binfondeit. — Grant secheur t'6.
Les Romans enchachont leur emperere fours de Romme t'6.
Et puis fut refais roy d'Athennes, quant ilh fut desconfis des Romans 581
Ly pape assemblat unc conciel en la citeit d'Alixandre t'6.
L'ordinanche de quaremme et de Pasque , quant ons le doit faire t'6.
Coment Pasque et quaremme se doient tenir et que la lune soit plaine t'6.
Porquoy ilh fut ordineit que la lune soit plaine , le jour de la Paske 582
L'emperere Severus conquist pluseurs citeis en Lombardie. . t'6.
Coment l'emperere Severus assighat Romme. — De conte de Flandre t'6.
De IIII e evesque de Tongre, Metropolien. — Dc l'emperere Severus. ...... 583
Conselhe de batalhe. — Quant Clodas oit destruit l'empire, ilh assegat Romme . . . 584
Grant batalhe entre l'emperere et le roy Bretons t'6.
Bretons ont desconfis les Romans. — Clodas desconfit encore les Romans 585
Clodas desconfit l'emperere et ses gens #.
Grant persecution sor les cristiens : ly pape Victoir fut ochis et pluseurs aultrcs . . . 586
Porquoy ons dist le cymiteir Sains-Calixte t6.
En cas de necessiteit on puet baptisier en Unites aywes t'6.
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TABLE DES MAT1ERES.
683
Pages.
APPENDICE. — La Geste de Li*gb 587
Del citeit de Tongre. — Des roialme dccha la meire. — De Rains en Champangne . . 589
De Romulus rois de Romme. — De premier empereur de Romme 590
Des senateurs de Romme. — De Tongris. — Balailhe 591
Item 592
Item 593
Del mort Humbris. — Item encor batailhe 594
Item 595
Item 596
Item eneor de Tongris. — Coment Tongre fut fondle 597
Tongre fut apelike. — Comment Tongre fut puplde de gens 598
Cis revint Grigoire en Franche 599
Bathailhe 600
Item 604
Romains sont desconfis 602
Item 603
De secons rois de Tongre. ...'... 604
De Julius Cesar. — De IIII rois de Tongre 605
Julius Cesar vint devant Tongre. — Batalhe 606
Item 607
Julins Cesar en revat a Romme 608
Item 609
Le rois de Tongre revint de Romme a Tongre. — Tongre fut nominee Octaviane. . . 610
Le cinquieme rois de Tongre. — Quant nostre damme fut conchut 611
De Tincarnation Jhesucrist t'6.
De septieme roy de Tongre. — Fundation de Jupilhe 612
Del Richon fontaine 613
La voie entre Tongre et Jupilhe. — Encor de Richon fontaine. — De mariage Richier . 614
De VHP et IX e roy de Tongre 615
Cis en voie sains Piere les trois disciples en Germanye por le foy catholike establire . . 616
Chi morit sains Materne. — Chi resuscita sains Materne ib.
La fundacion d'Ays-Ie-Grain. — La guerre de Flandre et de Tongre 617
La batalhe 618
Item 619
Item 620
Item 621
Se fut faite la pais. — La batailhe a Juprelle 622
Item 623
Du X e roy de Tongres 624
Batalhe devant Bruge. — Comment li rois prist Bruge 625
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684
TABLE DES MATIERES
J
Page*
De XI e roy de Tongrc 626
Comment Marline vinl a paiis. — La mort Nero. — Vaspasian dcslrut Jherusalcm . . 627
La mort sains Euchars, el de XII* roy de Tongre. — De sains Muternc 628
De XIII* roy de Tongre. — Sains Materne eonvcrtit Tongre 629
Sains Materne fbndat cnglieses 630
Fonda tion delle englicse S ,c -Cccile a Colongne. — Chi furent ceux de Huy baptisies . . 631
Dynant fut convcrtie. — Del engliese Nostre-Damme de Dynant 883
L'cngliesc Sains-Esticnne a Dynant. — Chi fut Namur convcrtic. — De Nameche. . 635
De Chincy. — De Avvir 634
La Guerre az Danois. — Batalhe 853
Sains Materne fut reconquis 886
Del mort sains Materne. — Le secons evesque de Tongre 057
De tire evesques 658
GLOSSAIRE 639
TABLE DES MATIERES
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FIN DE LA TABLE: DES MATIEHES.
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