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GIFT OF
HORACE W. CARPENTIER
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HISTOIRE
DES
BERBÈRES
ET DES
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DE L'AFRIQUE SEPTENTRIOITALB
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HISTOIRE
DYNASTIES MUSULMANES
ET DES TRIBUS ARABES ET BERBÈRES.
TJUBUS ET DYNASTIES HBRBÈRES DE L'AFRIQUE
SEPTENTRIONALE.
T^OTICB ms BBllI*IIA€B£D-IBIf«aOSAllVBD ^
Nous interrompons ici i^histoire des tribus badtnides, pour
consacrer ira artide aux Beni-Rached, vu que ce peuple a lou-*
jourd partagé le sort des Beni-Abd-el-Ôuad auxquels il a cons*
iammeni montré le dévouement d'un allié fidèle. Nous avons
mentionné ailleurs* que Rached, Tancâtre des Beni-Rached, était
frère de Badin et que ses descendants s'étaient exclusivement
attachés aux Abd-el-Ouadites*
Les Beni-Rached habitaient une montagne qui s^élève dans
le Désert et qui porte encore le nom de leur aïeul '. Les Me-
dtouna, tribu de race berbère, occupaient le territoire situé
1.1 I i< Il t 0 *i.
< Dans le texte arabe, on lit de plus : IbnBadin; il faut remplacer
ces mots par Zc^hhik-Ibn-Ouaçîn,
* Tome m, pp. 302, 303.
' Yoy. Raehed dans la table géographique du premier volume.
T. IV. I i
4^582S
•'• • ••••••• •
! •«• ••••••••
• ••«-••^•.♦••* • • •
Z BISTOIRB DKS BKRBfiRES.
au Midi de Teçala, et les Beni-Oarnid, branche de la tribu des
Demmer, séjournaient dans la région qui s'étend au Midi de
Tlemcen, depuis cette ville jusqu'à Gasr-Saida ^ La montagne de
Hoouara avait pour habitants les Beni-Iloumen *, peuple qui
fonda un royaume, ainsi que nous l'avons déjà raconté '.
Quand la puissance des Iloumen fut anéantie, les Beni-Bached
se transportèrent de leur montagne vers les plaines qu'occupaient
les Mediouna et les Beni-Ournîd ; puis, après une longue guerre
et de fréquentes incursions, ils en expulsèrent ces deux tribus et
les forcèrent à se réfugier dans des régions moins faciles à abor-
der. Les Mediouna se fixèrent alors sur la colline de Teçala ;
les Beni-Ournid prirent pour séjour la montagne qui domine
Tlemcen, et les Bached, après s'être emparés des plaines qui sont
au Midi de ces localités, s'établirent à demeure dans la monta-
gne qui porte leur nom.
Vers le commencement de l'ère musulmane, ce haut plateau
formait le territoire des Beni-ifren, rois de Tlemcen. Âbou-Gorra,
chef sofrite dont nous avons déjà parlé ^, appartenait à la fa-
mille ifrenide, ainsi que Yala-Ibn-Uohammed qui, à une époque
plus récente, fut assassiné par Djouher le sicilien^, général des
troupes fatemides. Au sujet de Tala, on peut consulter la notice
des Beni-lfren [ci-devant, t. m, p. 244]. La ville d'Ifgan, qu'il
avait fait bfltir dans cette montagne, fut détruite, le jour même
de sa mort, par le général Djouher.
En prenant possession de la montagne, les Bcni-Bached s'y
étaient établis comme dans une forteresse, et ils continuèrent à
parcourir avec leurs troupeaux la région qui touche au cêté
méridional de leur demeure jusqu'à ce que les Arabes leur
* On voit par les manoscrits qu'il faut lire Saida dans le texte arabe
imprimé.
^ Jloumenoiï Ihuman est le pluriel berbère d7/oumt.
3 Voy. t. lu, p. 293.
* Tome III, p. 199.
^ Variante : Vesclaron,
LB9 BBNI-RACHBD.
cnlevèreni ces pâturages et les forcèrent à se tenir sur les
hauleurs qu^ils avaient choisies pour asile. Cet événement eut
lieu de notre temps. Les Beni-Rached effectuèrent la conquête de
ces contrées peu de temps avant l'entrée des Beni-Âbd-el-Ouad
dans le territoire du Maghreb central, et, devenus partisans et
alliés de ce peuple, ils le soutinrent constamment dans ses guerres
avec les Toudjtn et les Beni-Merîn.
La famille qui exerçait chez eux le commandement s'appelait
les Beni-Amran. Lors de leur arrivée en Maghreb, ils eurent
pour chef Ibrahtm-lbn-Amran. Ouenzemmar, frère d'Ibrahtm,
lui enleva toute l'autorité et la transmit, en mourant, k son fils,
Mocatel-Ibn-Ouenzemmar. Celui-ci tua son oncle Ibrahtm et
amena, par ce forfait, une scission dans la tribu, dont une frac-*
iion reconnut pour chefs les enfants d'Ibrahim et l'autre ceux de
Ouenzemmar. L'influence des Beni-Ihrahtm prédomina toutefois
sur celle de leurs rivaux. Ibrahim eut pour successeur son fils,
qui portait aussi le nom de Ouenzemmar H qui vivait du temps
de Yaghmoracen*lbn-Zian. Ouenzemmar mourut k un Age très-
avancé, dans la quatre-vingt-dixième année du septième siècle
(I291J. Le commandement passa entre les mains de son neveu,
Ghanem-Ibn-Hohammed. Mouça, fils de Yahya et petit-fils de
Ouenzemmar, devint ensuite chef de la tribu, mais je ne sais s'il
succéda immédiatement à Ghanem ou non. Lors de l'expédition
des Mérinides contre Tlemcen * sous la conduite de leur sultan
Abou^-l-Hacen, les Beni-Rached firent leur soumission à ce mo-
narque. Us avaient alors pour chef Abou-Tahya, fils de Mouça,
fils d'Abd-er-Rahman, fils de Ouenzemmar*, fils d'Ibrahtm. Les
Benî-Kerdjoun-Ibn-Ouenzemmar, cousins d'Abou-Yahya, s'en-
fermèrent alors dans Tlemcen avec les Beni-Abd-el-Ouad. Après
la chute de ceux-ci et la dispersion de leurs partisans, les Méri-
* Le texte arabe dit : Quand les Mérinides firent leur dernière expàdi"
Uon contre Tlemcen* L'auteur a eu tort d'y insérer les mots aJchira
zahfihim,
* Dans le texte arabe, il faut lire Ouenzemmar à la place de Ouéii-
%emmon.
4 BISTCMEB DIS BBRBftVBS.
nides déporièrcnt en Maghreb - el - Âcsa tous les ebefs xeoa-
•tims. Les Beni-Ouenzemmar, qui en élaienida nombre, pes-
tèrent en exil jusqu'au second rélablissement de l'empire
•alMl-^-ouadite, révolution qui s'effectua sous les auspices do
Mouçe-4bD*Yooçof, surnommé Abou-Hainniou II. Sons le règne
de ce prince, les Beni-Rached eurent pour cl>ef Zîan, Bis du
même Abou-Yahya-Ibn-Mouça dont nous venons de faire men-
ftion. Ztan sortit alors du Magbreb et embrassa le parti des Âbd-
^ei^Miadites ; puis, ayant donné lieu de soupçonner qu'il entrete-
f}a»t des intelligences avec les Beni-Merin qu^il venait d'aban-
donner, il fut emprisonné ci Oran par l'ordre d'Abou-Hammou.
Parvenu à effectuer son évasion, il rentra dans le pays qu'il
avait quitté et passa quelque temps au milieu des nomades mé-
«rinides. Plus lard , il obtint d'Abou -* Hammou des lettres de
gr&ce et le commandement des Beni-Rached. En l'an 768 (1366*
^7), il fut mis à mort par Abou*Hammou qui l'axait fait empri-
soimer de nouveau. Avec lui, finit le pouvoir qu'exerçait la fa*
nuBe^le Ouenzenmar^lbn-lbrahîm.
Paasoos à la famille de Ouenzemmar-lbn-Amran. Mocatel, fils
•de Ouenzemmar, eut pour successeur sqn frère Tourzeguen, le-
quel transmit le commandement à son fils Youçof. Après celui-
<i^ d.'aatreft<;hefs, dont les noms ne me reviennent pas, exercé-
rtatle commandement. Ensuite, les descendants de Ouenzem-
mar-Ibn-lbrabtm leur enlevèrent l'autorité. I>e nos jours , les
•descendants d'Amran ne conservent plus le privilège de corn-
roiander aux Be»i-Rached, trib^i qui est maintenant rédfiite à
la soumission et contrainte à payer l'im(i6t au sultan.
mSTOIBE 1XBS VSni^TOUnjtN , TRIBU BAOtNIDE , ET DE LA SOCVSKAI-
WETÉ qu'ils exercèrent DANS LE MAGBREB CENTRAL.
Las Bcni-Toudjîn, une des pins grandes ramifications de la
tribu des Badtn, habitaient les deux bords du Clielif, dans la
localité où cette rivière coule au Midi d« Onancbcrîeh, en traver-
sant le plateau du Seressou. De nos jours, cette branche du
CheVil est nommée le Nehf-Ooacel (rivière de Quacel). Â TOttestf
delà partie du Seressoa qu*occupaténi les Toudjto se trouvaient
plusieurs fractions de la tribu des Louata ; mais elles- se làissà*»^
rent enlever leurs territoires par les Oudjedtdjen etleslfatmâta.
Mus tard, les Toudjtn s'emparèreni des mêmes territoires^ toQt
en gardant la région qu'ils possédaient |déjà ; de sorte que b-
partie méridionale de leur pays s'étendail depuis le territoire dea
Benî-Rached. jusqu'au Mont Derrag.
« Lors de la domination des Sanhadja [ztr ides], dit Ibn-er*
» Rakik, tes Toudjin eurent pour chefs Aila-^t-Ibn^Dafliten et
» son cousin, LocmHn-Ibn-eMfotezt. Pendant la guerre qwi eut
» lieu entre Hammad 4bn*Bûloggutn et son onole^ Badls, celui-
» ci sortît de Gairouan pour combattre son adversaire ; et, er-
» rivé au bord du Chelif, il attira sous ses drapeaux les Toudjtn-
» qui, jusqu'alors, s'étaient distingués par leur bravoure en
» soutenant la cause de Hamoiad. Le pouvoir de Locmati em-
» portait alors sur celui d'Atïa, et les Toudjtn avaient mis en
3» campagne plus de trois raille hommes de guerre. Avant la
» bataille, Locman envoya son fils Yeddep à Badîspour hn aiH
» noBcerqueles Toudjtn se joindraient à lui ; aussi, quand léft
1» partisans de Hammad furent mis en déroute, Badîs témoigna
» sa haute satisfaction ï toute la tribu, en lui permettant de
»' s'approprier le butin fait dans cette journée. Il confirma Loo-»
» man da-ns le commandement des Toudjin et du territoire qu*ife-
» occupaient, et l'autorisa à garder toutes les conquêtes qu'il*
» pourrait effectuer en combattant pour la dynastie ztride. »
A une époque plus récente, le ooounandement des Toudjtn^
passa, sans partage, aux descendants de Dafliten lequel^ dit«on,
était fils d'Abou^-Bekr-Ibn-Ghalb. Sous les Almohades, cette
tribu eut pour chef Atïû<-t-lbn^Menad-Ibn-el-Abbas-Ibn**Dâflîten|-
surnommé Atïa-l-el-Hîou*. De son temps, les Toudjin eurent à
^ Lisez : son neveu,
* L« mot lîiou est peut «être une altéra tien berb&re de l'adjectif «rabe
S modeste.
6 HISTOIRK DBS BBRBÊRES.
souteoir uue guerre contre les Beni-Âbd-el-Ouad, guerre sus-
citée par Adouï-Ibn-Igotmen-lbn-el-Cacem, chef de celte der-
nière tribu.
On verra par la suite que ces hostilités se prolongèrent jus-
qu'au triomphe définitif des Beni-Abd-el-Ouad, qui firent ta
conquête du pays des Toudjtn. Après la mort d^4tïa-t-el-Htou,
son fils et successeur, El-Abbas, signala son administration par
des incursions dans les plaines du Maghreb central et par sa ré-
sistance h la domination des Almohades. Il ne cessa de leur faire
la guerre jusqu'à l'an 607 (1210-1), quand il mourut assassiné
par les sicaires d'Abou-Zeid-lbn-Youwoddjan *, gouverneur de
Tleracen. Abd-el-Caouï, fils et successeur d'EI-Abbas, devint
alors chef unique des Beni*Tondjtn et transmit le pouvoir à ses
enfants, comme on le verra plus loin.
A cette époque, les tribus toudjinides les plus remarquables
étaient : 1* les Beni-Meden, composés des Beni-Idlellen, des
Beni-Nemzi, des Beni-Madoun. des Beni-Zendak, desBeni-Oucîl,
des Beni-Gadi et des Beni-Mamet*; 2' les Beni-Reçoughen qui se
partageaient en Beni-«T}gherîn , en Beni-lznaten et en Beni-
Mengoucfa. Les Beni-Zendak appartenait en réalité à la tribu des
Maghraoua, bien qu'on ait rattaché son origine h la souche toud-
jinide. La tribu des Mengouch donna le jour h l'émir Abd-el-
Caouï-el-Mengouchi , fils d'El-Abbas, fils d'Atïa-t-el-Hîou. Je
donne cette filiation sur l'autorité d'un historien des Zenata.
Quand l'empire fondé par Abd-el-Moumen commençait à tom-
ber en décadence, toutes les tribus toudjinides obéissaient à
Abd-el-CaouY, fils d'El-Abbas, et elles vivaient ensemble dans
les régions méridionales que nous avons déjà désignées.
Les Maghraoua profitèrent alors de l'affaiblissement dont la dy-
nastie almohade venait d'être atteinte et s'emparèrent de la Me-
* Dans le texte arabe, tant de l'édition imprimée que des manuscrils,
ce nom est mal ponctué.
^ Dans le texte arabe, lisez iU^Jt à la place de aâmJI. L'auteur au-
rait dû écrire îUxmJ!.
LES BCNl-TOUDillf. 7
Udja et ensuite du OuaDcherîch. Abd-eUCaouï, . soutenu par son
peuple, .leur disputa la possession de cette montagne, et, quand
ii eut remporté la \ictoire; il y établit les Beni-Tlgherin et le»
Beni-Mengouch. Plus tard, les Toudjin conquirent le Mindas et
y installèrent les diverses tribus qui formaient la grande famille
des Beni-Meden^ Parmi celles-ci, la prééminence appartenait aux*
Beni-Idielten, lesquels eurent pour chefs les Beni-Selama. Quant
aux Beni-Irnaten, ils restèrent dans leur ancien territoire, aw
Sud du Ouancherich.
La famille d'Atïa-t-el-Hîou eut pour confédérés les Beni-
Tigherin dont l'appui lui était assuré d^uoe manière spéciale, e^
ensuite les Aulad-Aztz-Jbo-Yacoub. On désigne ces tribus coa-
lisées par le nom d'El-Hachem.
Les Toudjin, conduits par Abd-el-Gaouï-Ibn-el-Abbas, sou^
mirent une grande étendue de pays et chassèrent les Magbraoua-^
deMédéa, du Ouancherîch et de Taferkntt. Ayant occ^apé ce»
localités, ils tournèrent leurs armes vers l'Occident et se ren-^
dirent maîtres du Mindas, d'£l*Djâbat et de Taoughzout. Abd-
el-Caouï se forma ainsi un royaume qu'on pouvait regarder,
comme nomade; car il ne voulut jamais renoncer à Tusaga des.
tentes et à l'habitude de parcourir le pays avec ses troupeaux,
tout en passant l'été dans le Tell et l'hiver dans le Désert. PeD*i
dant cette dernière saison, ses tribus restaient dans le Zab etr
dans le pays des Mozab ; puis, à l'approche des chaleurs, ils re-
visit^icnt leurs territoires du Tell. Après lui, son fils Mohammed*
mena le même genre de vie.
Quand Mohammed mourut el que ses descendants entamèrenl^
une.lutte pour le pouvoir, lutte, dans laquelle ils employàreni^.
l'assassinat pour se débarrasser les uns des autres, le peuple
abdrcl-ouadite réussit à conquérir tous leurs territoires et à
soumettre toutes leurs tribus. Les Beni-Irnaten et les Beni-Id-
lelten ayant ensuite acquis une grande supériorité sur les autres
Toudjinides, embrassèrent le parti des Abd-el-Ouad, et leurs
descendants, continuèrent à habiter le Ouancherîch jusqu'à W
ruine de leur puissance. Plus loin, nous parlerons en détail de
tous ces événemeuls.
8 HlSTOlftl DES BBRBtRBS.
Après avoir enlevé le Ouaochertch aax liaghraoun, Abd««t«
Caeulf bâtit la cîtaclelle de Merat, ville dont Mendtl le magbra^
eoien avait posé les fomlements. Mohammed, fila d'Abd-el-
CaaaT, acheva la eonstruetioD de cette place forte.
A la smïe de l'oaurpatton par laquelle les Hafsidea établirent
leur «itorilé en Ifrfkïa an détriment des khalifes atmohades,
Fémir Abou^Zékéiïa envahit le Ha£i;hreb central et reçut la sou-
mission de» tribus sanhadjiennes. Pour châtier les Zenata qm
s'étaient enfuis pour éviter sa rencontre, il ravagea leurs terres
et, dans une de ses courses, il parvint à faire prisonnier Abd-el-
CaQUJ(4bn-el-Abbas. Après avoir détenu cet émir à Tunis pen-
dant cfuekjne temps, il le relâcha afin de gagner, par son entre-
mise, Tamitié des Toudjin. Ceux-ci embrassèrent la cause do
sultan hafside et restèrent toujours fidèles à lui et à ses succès-
aeiirs; ils Taocooipagnèrent mémo dans son expédition contre
TLemeen et no le quittèrent qu'après la chute de cette ville. En
repartant pour sa capitale, il investit Abd-^UCaouï du comman-
dement de la tribu et du pays des Toudjîn ; il l'autorisa aussi à
prendre les insignes de la ix>^yauté , bonnem* dont les Tondjin
n'avaient pas encore joui.
Cette tribu était tantôt en guerre, tantôt en paix avec le»
Beni-iÂbd-^el-Otiad ; mais après la. mort du suhan mérinide, Es-
Satd, qcû fut tué par les gens de Yaghmoracen, elle répondit h
l'-appel de ce chef qui inyita tous les peuples zenatiens à marcher
avec loi contre le Maghrek. Elle partit, Tan &47 (1249-80), ao-
'compagne de son chef Abd-el-GaouY, et se rangea sou» les dra*-
paaus d» Taghmoracen, qui voulut entrer dnns le territoire des
Mérinides avant de leur laisser le temps . de se préparer h \è^
résislance^
L'armée zenatienne pénétra jusqu'à Tèza d'où elle rebix^ussa
chemin, ayant trouvé- devant elle les troupes d'Abou^^Tahya-
Ibn-Abé-^et-Hack, émir des Beni-Merin. Ce chef poursuivH
les envahisseucs jusqu'au pays d'Angad et les attaqua si vigoiK^
reusemeni. qu'il mit toutes les tribus badinides en pleine dé-
rouie.
Nous avons parlé do cette bataille dans rhistoire des Bent^
LKs beni-toudjIn. 9
Abd-el-Ouad^ Abd-el-Caouï rentra dans le territoire de sa tribu
et mourut, la même année, à Mahnoan *, localtlë appartenant aux
Tondjtn.
Alors, son fils Youçof s'empara da pouvoir; mais, une se-
maine plus tard, il fut assassiné sur le tombeau de son père* Le
meurtrier, qui se nommait Mohammed et qui était aussi lib
d'Abd ^ el - Gaouï et son successeur désigné, prit le oomman*
dément. Saleh, fiU de Youçof, s*enfttit avec ses enfants vers
le territoire des Sanhadja et trouva un asile dans les montagnes
deMédéa.
Le nouveau che£, Mohammed-lbn-Abd-el-CaouV, se Ht redotir-
ter de ses voisins par la ténacité qu'il montra dans l'exécutbo
de ses projets. En l'an 649 (1251-2), il s'enferma dans Taterlc-
ntt et soutint un siège contre Yaglimoracen» Secondé par son
petit-fils, Ali - Ibn - Z)an, et par une bande de Toudjiaidet,
il y fit une si belle défense qu'au bout de quelques jours il Ibrfa
son adversaire à la retraite. Quand la paix (ut rétablie entre
les Toudjtn et les Abd-él-Ouad, Mohammed suivît l'exemple de
son père qui avait soutenu Yagbmoracen dans^ une expédition
contre les Mérinides et, sur l'iovitalioa de ce chef, il se «ôi en
campagne, l'an 657 (1259). S'étant joint, avec les Toudjîn etles
Maghraoua, aux troupes de Yaghmoracen, il s'avança jusq^u^à
Keldaman, endroit situé entre Tèza elle Bif. L'armée des coalir-
sés se rencontra dans cette localité avec les Mérinides comman-
dés par Yacoùb-Ibn*Âbd-el-Hack et essuya une défaite.
La guerre ayant éclaté de nouveau entre Mobammed-Ibn->Abd-
el-^Caouï et Yaghmoracen, celui-ci alla dans le OQancherfek,.à
plusieurs reprises, pour attaquer son ennemi ; et, dans ses nom-
breuses courses, il insulta toutes les parties du territoire Uxud-
j,inide. L'élévation de Yaghmoracen au trône de Tiemcen et son
ambition de commandera tous les peuples d'origine zenatienne
empêchèrent désormais toute espèce de coalition entre les deux
^ Tome uf, p. 352. Voy. aussi dans 1 histoire édS Mérinides^ cl^rès.
^ Variacie : Mahioun,
40 HISTOIRE DES BERBÈRES.
chefs, bien que leurs tribus, les Toudjia et les Abd-el-Ouad,
reconoaissaieul également la suprématie des khalifes hafsides.
Mohammed-Ibn-Abd-el-Caouï était toujours bien disposé pour
le sultan El-Moetancer. En l'an 668 (1269-70), quand les Fran-
çais débarquèrent auprès de Tunis avec l'intention de prendre
cette capitale et qu'EUMostancer appela tous les princes zena-
tiens à son secours, Mohammed y répondit avec un grand em-
pressement : il rassembla les guerriers de sa tribu, leva des
troupes chez les autres peuplades qui habitaient son territoire
et accourut auprès du souverain hafside^. Dans ses rencontres
avec les ennemis de l'islamisme, il déploya une bravoure qui
lui assura une haute réputation en ce monde et la faveur divine
dans l'autre. Après le départ des chrétiens, il se disposa h ren-
trer dans son pays, quand il reçut du sultan eu fief les villes de
Maggara et d'Aoumach, avec un riche cadeau et d'abondantes
gratifications pour ses troupes et pour ses ofliciers. Depuis lors,
il se montra parfaitement dévoué à El-Mostancer et toujours
prêt à le soutenir.
La conquête des villes du Haghreb par les Beni-Merîn et là
consolidation de leur puissance en ce pays leur assura enfin la
supériorité sur les Abd-eUOuadites et l'appui de Mohammed-
Ibn-Abd-el-Caouï dans leurs guerres avec Yaghmoracen. En
ces occasions, Ztan, fils de Mohammed, leur amena toujours un
corps d'armée. En Pan 670 (1274-2), quand Yacoub-lbn-Abd-
el-Hack fit la rencontre des Abd-el-Ouad à Isly, dans l'Angad,
et livra la bataille dans laquelle Pares, fils de Yaghmoracen, per-
dit la vie' Mohammed -Ibn-Abd-el-Caouï se mit en marche afin
d'opérer sa jonction avec le sultan mérinide ; et, en passant par
£l-Bat'ha, qui était alors une des places fortes du royaume de
Tlemcen, il 'la détruisit de fond en comble. Yacoub, qui se trou-
vait alors sous les murs de Tlemcen et qui était entouré de toute
la pompe d'un souverain, lui fit l'accueil le plus honorable. Ils
« Voy. t. u, p. 366, note 2.
* Supprimez le mot ila daus le texte arabe.
LES BENI-TOUDjtK. 4t
assiégèrent la ville pendant quelques jours ; et, voyant qu'elle
continuait à résister, ils prirent le parti de s'éloigner. Le sultan
mérinide autorisa son allié d'emmener les troupes toudjinides ;
et, pour les garantir contre Yaghmoracen, il promit de mainte-
nir le blocus de Tiemcen jusqu'à ce qu'elles fussent rentrées
dans leur pays. Quand elles allaient partir, il les combla de dons
et leur distribua cent chevaux de race richement caparaçonnés,
un millier de chamelles laitières, une quantité de robes magni-
fiques, do tapis, de pavillons, do tentes et de bétesde somme.
Mohammed-Ibn-Abd-el-Caouï, étant de retour dans son pays,
le Ouancherich, harassa les étals de Yaghmoracen par des in-
cursions souvent renouvellées ; et, tant que durèrent ces hosti-
lités, il envoyait à Yacoub-lbn-el-Hack de fréquents témoi-
gnages d'amitié , de beaux chevaux et les produits les plus
recherchés du pays. Le sultan mérinide porta si haut son
estime pour le chef toudjinide, qu'ayant négocié on traité de
paix avec Yaghmoracen, il déclara que la moindre démonstra-
tion hostile faite par les Beni-Abd-el-Ouad contre son allié se-
rait regardée comme une déclaration de guerre contre lui-même.
Ce fut h cause des Toudjinides que Yacoub entreprit son ex-
pédition de Tan 680 (128^-2). Gomme Yaghmoracen hésitait
d'admettre aucune stipulation Bn leur faveur, il marcha contre
lut, le battit à Rharzouza et le contraignit à s'enfermer dans
Tiemcen. Mohammed-ibn-Abd-eUCaouï vint le joindre à El-
Gaçabat et Taida à ravager les environs de la capitale dbd*el-
ouadite ; puis, ayant obtenu la permission de s'en retourner
dans le Ouancherîch, il effectua sa retraite sans obstacle, grâce
au soin que le sultan avait mis à tenir la ville étroitement blo-
quée. Ils ne cessèrent de se conduire de la même manière jusqu'à
la mort de Yaghmoracen, lequel finit ses jours à Chedtouïa, dans
le pays des Maghraoua.
La supériorité que les Beni-Mertn s'étaient acquise dans leurs
conflits avec les Beni-Abd-el-Ouad permit à Mohammed-Ibn-
Abd-el-Caouï de bien asseoir son autorité et de soumettre les
localités occupées par les Sanhadja dans les montagnes de Mé-
déa. Il chassa les Thèleba do la montagne do Ttteri après avoir
ti BISTOItB DES BBRBÈRB8.
fait mourir leurs chefs dans un guet-apens, et les envoya dâiW'
les plaines de Melfdja. H s^empara aussi de Hédéa (El-Mtd^a)^.
forteresse ainsi nommée parce que ses habitants s'appelaient Un
Lémédïa. Ce peuple était de race sanhadjienne; leur ville eut
pour fondateur Bologguin-Ibn-Ziri. L'émir toudjinide en ayant
pris possession, ainsi que des environs, y installa les Aulad-*
Aztx-lbn-Yacoub, tribu qui faisait partie des- Hachem sous ses
ordres, et leur en confia le commandement.
Ses neveux, les Beni-Safeh, qui s*é(aient réfugiés chez les
Sanhadja après l'assassinat de leur grand^père * Youçof , pas-
sèrent alors en Ifrîkïa où ils furent très-bien accueillis par le
gouvernement hafside. Le khalife leur concéda des terres aux
environs do Gonstantine et s'en fit ainsi des partisans très--dé-
voués en cas de guerre. Les membres de cette famille qui s'y
distinguèrent le plus étaient Omar-Ibn-Saieh, ses fils Saieh et
Yahya et son pelii-fils Yahya-lbn-Saleh. Leurs descendants
habitent encore la province de Gonstantine et sont employés au
service du gouvernement hafside, soit comme militaires, soit
iH>mme administrateurs.
Le chef des Aulad-Azîz auquel fut confié le commandement de
Médéa, se nommait Hacen-Ibn-Yacoub. Il eut pour successeurs
ses fils Youçof et Ali* Celle tribu s'établit alors dans une localité
située entre la ville de Médéa et leur aocien lieu de séjour,
Uahnoun.
Les Beni-Idlelten qui s'emparèrent des châteaux d*El-Djâbat
et de Taoughzoul, appartenaient aussi h la tribu des Toudjin.
Leur chef, Selama-Ibn-Ali, s'établit dans Taoughzout et reconnut
l'autorité de Mohammed - Ibn - Abd ' el -Caouï, dont le pouvoir
s'élendait ainsi sur les plaines du Maghreb central, depuis le
territoire des Beni-Rached jusqu'à Médéa, dans le pays des
Sanhadja; et, au Midi, depuis les montagnes et la plaine du
Seressou jusqu'au Zab. Tous les hivers, Mohammed allait cam-
per à Ed-Doucen ou à Maggara, ou bien h El-Hecila.
* Voy. cinlevant, p. 9. A la place de m^ctel abihi^ dans le texte
arabe, il faut lire mactd abihim^ ou bieu mactel akhihi.
Apràft la mort de Taghmaracen, la guerre éclata entre son fils
Otbmaa et le (hei des Toadjin. En l'an 6&2 (4283-i), Othman
bloqua son adversaire dans le Ouancliericli et porta le ravage
par toute cette montagne avant de rentrer à Tiemcen.
En l'an 684 (4285*6), eat lieu la mort de Mobammed-Ibn-
Abd-el*Caouï et Tavànement de son fils, SéYd-en-Nas. Environ
"Use année plus tard, le nouveau chef fut assassiné par son frère,
Mouça. Celui-ci gouverna les Toudjin pendant deux ans. Ayant
remarqué que les habitants de Merat étaient les plus intraitables
et les plus perfides de tous ses sujets, il crut pouvoir se déli-
vrer d'un grand embarras en exterminant leurs chefs. Cette ré-
solution prise, il se rendit au milieu d'eux, mais il y trouva
une réception à laquelle il ne s'attendait guères. Les habitants,
•avertis de son intention, coururent aux armes et se battirent
avec le courage du désespoir ; puis, l'ayant criblé de blessures,
ib le poursuivirent jusqu'au précipice cpii borde leur forteresse
el le forcèrent à se jeter dans l'abime. Après la mort de Mouça*
Ibn-Mohamraed, son neveu, Omar-Ibn-lsmatl-lbn-Mohammed,
gouverna pendant quatre ans et fut assassiné par ses cousins,
les fils de Zfan-Ibn-Mobammed. Ibrahim-Ibn^Ztan, l'atné de ces
frères, régit ensuite la tribu aveo une telle habileté qu'on l'a
regardé comme le plus capable de tous les successeurs de Ho-
bammed4bn-Abd-<el-CaouY.
Pendant ces changements, les Beni-Abd-el-Ouad avaient ac-
quis la supériorité sur les Toudjtn. Aussitôt après la mort de
Mohammed, fils d'Abd-el-Caouï , le souverain de Tiemcen,
Othman-lbn-Yaghmoracen, fit peser sur eux le poids de sa puis-
sance. En l'an 686 (4287), il les bloqua dans le Ouanohertoh,
dévasta leur pays et en transporta tous les grains dans ses ma-
gasins, à Mazouna, ville qu'il venait d'enlever aux Maghraouâ.
Ayant ensuite rois le siège devant Taferknit, il se fit remettre ^
cette place par le commandant, Ghaleb l'eunuque, afifranchi de
Séïd*en*Nas-lbn*Mohammed. Rentré alors à Tiemcen, il en
sortît de nouveau pour assiéger Taoughzout ; et, après s'être
^ ■ I. I ■ Il ■ ■ I I ■ ... ■ ■ I I I ■■! ■ ■ I »
* Li6€« melekeka dans le texte arabe.
44 HISTOmB DBS BBRBËRES.
présenté devait cette forteresse h plusieurs reprises, il en reçut
la soumission des chefs, les Aulad-Selama, qui, jusqu'alors,
étaient demeurés fidèles à la famille de Mohammed -Ibn-Abd-eU
Caouï. Pour les attacher à son parti, il leur concéda les impôts
des Beni-Idlelten ; et, suivant son habitude, il travailla à semer
la discorde parmi les tribus toudjinides. Leur chef, Ibrahtm-lbn*
Ztan, contre lequel il était parvenu à diriger leur mécontente-
ment, avait à peine achevé le septième mois de son commande-
ment quand il fut assassiné à El-Bat'ha où il venait de faire une
expédition. Il mourut de la main.de Zeghdan-lbn-Aadjemi,
cheikh des Bcni-Madoun.
Les Beni-Tigherîn proclamèrent alors l'&utorilé deMouça-Ibn-
Zerara, petit-fils de Mohammed-lbn-Abd-el^aouï ; mais ils no
purent faire agréer ce choix aux autres Toudjinides. Le nou-
veau chef ne resta pas au pouvoir une année entière. Othman-
Ibn-Yaghmoracen profita de ces dissensions pour gagner suc-
cessivement un grand nombre de leurs tribus ; puis, il alla
s'emparer du Ouancherich. Mouça-lbn-Zerara voulut se réfugier
aux environs de Médéa, mais il mourut avant d'y arriver. En
Tan 688 (1289), Othman se rendit maître de cette ville avec le
concours des Lémédïa sanhadjiens qu'il avait amenés à trahir
les Aulad-Aztz. Sept mois plus tard, ceux-ci rentrèrent en pos-
session de Médéa avec Taide des Sanhadjiens qui les avaient
trompés ; et, pour détourner la colère d'Othman, ils s'empres-
sèrent de lui envoyer l'assurance de leur soumission et la pro-
messe de lui fournir le même subside qu'ils avaient eu l'habitude
de payer à Mohammed-Ibn-Abd-eKCaouï et h ses successeurs. Le
prince abd-el-ouadite était parvenu à réduire sous sa domina-
tion tout le pays des Toudjinides quand il se vit lout-à-coup
exposé aux attaques des Beni-Mertn et de leur sultan Youçof-
Ibn-Yacoub.
Un descendant de Mohammed - Ibn -Abd-el - Caouï, nommé
Abou-Bekr-lbn-Ibrahtm-lbn-Mohammed, prit alors le comman-
dement des Toudjîn ; et, pendant deux ans, il gouverna ce peu-
ple avec une tyrannie qui les glaça d'effroi. Aussitôt qu'il fut
mort, les Béni -Ttgherîn proclamèrent son frère, Atïa-t-el-Asamm,
LES BENI-TOCDJIN. 45
mais les Aulad-Aztx el les autres tribus toudjinides repoussèrent
celte nomination, prirent pour chef YouçoMbn-Ztan-lbn-Mo-
hammed et bloquèrent Âtïa et les Beni-Tighertn dans le Ouan-
cberîch pendant plus d'un an.
Yahya-lbn-Alïa, chef des Beni-Ttgherin et la même per-
sonne qui avait porté celte tribu à proclamer Atïa*-t-el-Asarom,
se fatigua enfin d'être assiégé de cette manière ; sachant de
quelle puissance les Beni-Herin pouvaient maintenant disposer,
il se rendit auprès de Youçof-lbn-Yacoub qui faisait alors le
siège de Tlemcen, et le pria avec instance de prendre possession
du Ouancherich. Le sultan mérinide v donna son consentement
et plaça un corps de troupes, d'abord sous les ordres de son
frère Abou-Serhan, puis, sous les ordres d'Abou-Yahya , un
autre de ses frères, et autorisa le chef tigherinide d'emmener ce
secours. En Tan 701 (4031-2), Abou-Yahya se mit en marche
et, après avoir envahi les provinces orientales [du Maghreb
central], il retourna sur ses pas, pénétra dans le Ooancherfch
et en détruisit les places fortes avant de ramener son armée.
Dans une seconde expédition, il chassa les Toudjîn de leur pays,
accepta la soumission des habitants de Taferknh; el, s'étant
porté, delà, sur Médéa, ville qu'il reçut à composition et dans
laquelle il construisit la citadelle qu'on y voit encore, il alla re-
joindre son frère, le sultan. Aussitôt qu'il fut parti, les gens de
Taferknit répudièrent la domination mérinide.
Les descendants d'Abd-el-Caouï se décidèrent alors à se ren-
dre auprès de Youçof-Ibn-Yacoub et à lui offrir l'hommage de
leur obéissance. En les congédiant, ce prince leur accorda des
fiefs et désigna Ali-ibn-en-Nacer-Ibn-Abd-el-Caouï comme
gouverneur des Toudjin. Celui-ci se laissa enlever l'autorité par
Yahya-Ibn-Atïa, chef que Youçof lui avait assigné comme vizir.
Après la mort de l'usurpateur, qui était parvenu à se maintenir
au pouvoir, le sultan Youçof nomma Mohammed, fils d'Atla-t-
el-Âsamm , au commandement de la tribu. Pendant quelque
temps, Mohammed servit lesMérinides avec dévouement; mais,
en l'an 706 (4306-7), peu de temps avant l'assassinat de leur
souverain, il poussa sa tribu dans la révolte.
46 HISTOfU DES BIKBftKBS.
Après la mort de Youçof-lbn-Yâçoub, radministraiton méri-'
nide abandonsa aux petits-fils de YaghmoraoeD toutes les villes
du Maghreb doDt ^le s'était emparée. Les Âbd-el-Ouad éloi-r
gnèrent alors de ce pays les divers chefs qai y avaieni exercé
des commandements et forcèrent les descendants d'Abd*^eI-
GaouY h passer dans le royaume des Hafsides. Les réfugiés fu^
rent accueillis avec une grande considération à la cour de Tunis ;
et un de cette bande, le nommé El-Abbas*-ibn-Mohammed-Ibn •
Abd-el«CaouY, jouit, pendant toute sa vie, de la haute faveur
des souverains hafeides. Ses descendants continuèrent toujours
à servir dass l'armée du sultan de Tunis. Après Téloignement de
ces notables, Yahya-lbn-Atïa, petit-fils de Youçof-lbn-el-Mansour
et chef des Beni-Tîghertn, se rendit mattre du Ouancherîch. On
prétend que la famille de ce chef fut simplement agrégée k la
tribu de Tfgherîn et qu'El-Hansour, dont le vrai nom était
Ahmed-Ibn-'Moharomed, descendait de Yala-lbn-Mohammed, le
sultan ifrenide. Yahya ne gouverna que peu de temps. Après
sa mort, le commandement passa à son frère Othman-lbn-Atïa
qui, en mourant, transmit le pouvoir k son fils, Omar-tbn*
Othman. Pendant que ce chef et son peuple dominaient sur
le Ouânchertch, les Aulad-Azîz, commandés parYouçofet
Ali, tous les deux fils ' de Hassan-Ibn-Yacoub, se tenaient dans
la ville et dans les environs de Médéa. Les deux tribus re-
connaissaient également la souveraineté du sultan abd-el-oua-
dite, Abou-Hammou, lequel avait dompté par les armes leur
esprit d'indépendance et enlevé aux descendants d'Abd-el-Caouï
le droit de commander.
Quand Hohammed-lbn-Youçof, petit-fils de Yaghmoracen, se
révolta contre son cousin Abou-Hammou I et se rendit chez les
Aulad-Aztz, il reçut des chefs de cette tribu le serment de fidé-
lité et obtint, par leur entremise, Tappui d'Omar-Ibn-Othman,
chef des Beni-*Tlghertn et seigneur du Ouânchertch. Cet exemple
entraîna ^adhésion des Achar, des Mengoucha et des Beni-
* Dans le texte arabe, il faut remplacer Ibn par i6fiat.
tES BfiM-TOUDjiK. 17
ïrnaten. Toutes ces tribus marchèrent av^ le prétendant eonUe
AboQ-Hammou, qui était alors campé sur le Nehel\ et mireoi
les Abd-el-Oiiadiles ea pleine déroute. Pour la suile de ces éri*
Déments et de la guerre que ces pcfuples firent au aiiltan, on peut
revoir Vhistorre des Beni^Âbd*el^aad *.
Abou-Tachefto, fils et successeur d'Aboo^fiamnoo, entreprH
une expéditioa contre les insurgés, et Omar-^Ibn-Othman, jatouX
<k la faveur que Mohammed-Ibn-Youçof témoignait aux Aulad^
Aztz, fit secrètement avertir ce priace qu'il passerait attx Abd<^
etOuadites. Ëiïectivement, quand ceux-ci eurent pris positi<»li
-au pied de la montagne et que Mohammed-lbn-Youço[ se fut
enfermé dans Toukal» le chef des Tigherfn alla trouver le sultan
et le conduisit, par une voce secrète, dans 14atérie«ir de la for-
teresse. Mohammed, abandonné par tous ses alliés, fût amené
priaonnier devant Aboa<-Taohefto et tué à coups de taboe sous
les yeux de ce monarque. Ceci eut lieu l'an 749 (4340). Là tète
du perturbateur fut envoyée à Tlemcen el son corps fut atta<^é
& un poteau que l'on planta au milieu de Toukal.
Omar^lbn-Othman devint alors seigneur du Onancharloh et
resta toujours fidèle à Abou^Tâchefln. Il mourut h f lemcen ea
•repoussant une dés atlaques que les Mérinides, sous les ordres
<lu sultan Abou-'l-fiaeen, dirigèrent contre cette viHe*
Lors de la Conquête du Maghreb central par les B6nt^Merlb> le
sultan Abou-'UHacen donna le gouvernement du Ouanchertoh k
Kasr, fils d'Ibn-Omar. Gelui-^î ae montra bon adminiatrateur
et sincèrement dévoué auxMérinides ; consacrant tous ses soins
à développer la prospérité de sa province et à en augmenter leS
revenus*
Après le revers qu'essuya Abot»-'l^Hacen auprès dé Gairouan^
les princes senatiens conçurent l'espoir de rétablir les royaumes
fondés par leurs ancêtres, et Adi-Ibo-^Youçof, petit-fils de Ztan»
ibn-Mohammed-lbn-Abd-el-Caout , s'empara des euyirons de
* Variante : Tehel
• Voy. t. m, p. 395,
T. IV. t
^8 niSTomE des berbères.
Médëa. Ses prétentions répondirent si bien dux désirs d'un
peuple déjà mûr pour la révolte, que les Âulad-Az}z et leurs
voisins, les Beni-irnian, se réunirent autour de son drapeau et
marchèrent vers le Ouancherîch. Ils voulurent surtout châtier
les Hachem qui les avaient remplacés dans le commandement de
cette montagne et qui avaient aidé le sultan de Tiemcen à ruiner
leur puissance. Nasr-lbn-Omar-Ibn-Olhman, chef des Hachem,
j)roclama aussilàt l'autorité de Masoud-Ben-BonZeid, pelit-tils
de Khaled-Ibn-Mohammed-lbn-Abd-el-Caouï, qui s'était enfui
du camp de son parent Ali*Ibn-Youçof , dont les partisans
avaient voulu le tuer. Les Hachem soutinrent alors une ^^uerre
contre Adi-Ibn-Youçof et Unirent par le repousser.
Quand Abou-4-Hacen débarqua à Alger après avoir quitté
Tunis, Adi se joignit à lui ; mais son rival, Masoud, garda la
neutralité et, lors de la reprise de Tiemcen par les Abd-eU
Ouad, sous les ordres du sultan Abou-Satd-Olhman-lbn-Abd-
er-Rahman, il reçut de celui-ci le commandement du Ouanche-
rich et le titre de roi. Vaincu, plus tard, par Abou-£inan, Ma*
soud chercha un asile chez les Zouaoua ; mais il dut enGn faire
sa soumission au sultan mérinide et prendre avec lui la route de
Fez. Par la chute de la famille de Mohammed-Ibn-Abd-el-Gaouï,
fut achevée la ruine de l'empire que ces princes avaient fondé.
Pendant le règne d'Abou-Einan, Nasr, (ils d*[Omar-Ibn-]
Othman, gouverna le Ouancherlch au nom de ce sultan, et il
resta au service des Mérinides jusqu'à ce qu'Abou-Hammou H
Peut obligé à reconnaître l'autorité de l'empire abd-el-ouadite.
Entre les années 770 (4368) et 780, les Beni-Abd-el-Ouad re-
commencèrent à faire la guerre aux Arabes qui avaient embrassé
le parti d'Abou-Ztan, (ils du sultan Âbou-Satd et cousin d'Abou-
Hammou. Nasr-Ibn-Omar se rangea du côté du prétendant, et,
quelque temps après, il perdit la vie dans un combat. Son frèrect
successeur, Youçof-lbn-Omar, a suivi la même ligne de con-
duite ; et, aujourd'hui, en l'an 783 (1384-2), il gouverne encore
le Ouancherîch, se montrant tantôt soumis, tantôt hostile, au
sultan Abou-Hammou.
LES BBNI-SELAMA. 19
BfSTOIRB DES BEl^I - 8BLAM1 , SEIGNEURS DE LA FORTERESSE DE
TAOU6HZO0T ET CHEFS DES BBNl-IDLELTEN.
Les Beni-ldlelten, tribu nombreuse et paissante, tenaient le
premier rang parmi les familles toudjinides. Leur droit h cet
honneur fut si bien établi que les Beni-Abd-el-Caotiï ne pensèrent
jamais à le méconnaître. Quand les Toudjinides envahirent le Tell
après la ruine des Iloumi et des Ouémannou, deux de leurs
grandes fractions, les Cadi et les Madoun, s'établirent dans le
territoire de Blindas. Les Idlelten y arrivèrent sur leurs traces ot
occupèrent El-Djâbat et Taoughzout. A cette époque, ils eurent
pour chef Nasr-Ibn-Sohan-lbn-Ëïça. Après la mort de Nasr, son
fils Menad exerça le commandement et le transmit à son frère,
Aiî-lbn-Nasr. Ibrahîm, fils d'Ali, succéda au pouvoir et eut
pour successeur, en mourant, son frère 5elama-Ibn-AH. Celui-
ci revêtit Vaulorilé à l'époque où la famille d'Abd-el-Gaooï avait
consolidé la sienne. Il établit, en même temps, la puissance de
sa tribu par la construction de Taoughzout. Cette forteresse,
appelée aussi le château des fils de Selama, n'était d'abord
qu'un simple hermitage (rihat) occupé par quelques Arabes
soueidiens qui avaient renoncé au monde.
Les descendants de Selama se représentent comme membres
adopttfs de la tribu des Toudjtn et comme appartenant en réalité
à la tribu arabe des Beni-Soleim-Ibn-Mansour ^ Leur ancêtre,
disent-ils, se nommait Eïça-Ibn-SoItan< et avait quitté son peuple
pour éviter les conséquences d'un meurtre qu'il avait commis.
Le cheikh des Beni-Idlelten l'accueillit comme un frère ; et après
la mort de son hôte, il en éleva les enfants. Ce fut là une des
circonstances qui assurèrent à Selama et à sa postérité le com-
mandement des Idlelten.
Après la mort de Selama-lbn-Ali, l'autorité passa à son fils
* Voy. 1 1, p. 28 et soiv.
^ Il faut remplacer le mot mu par bin dans le texte arabe.
20 BISTOIBI DES URBÈRES.
YaghmoraceD. Ceci eut lieu vers l'époque où les Toudjîn, ayant
perdu leur grand sultan, Mobâmmed-Ibn-Abd-el-Caouï, Gom-
mencèreot à fléchir devant la puissance des Âbd-el-Ouad.
Othman-lbn-Yaghmoracen[, le sultan abd-el-ouaditc,] fil alors
plusieurs expéditions contre les Toudjtn ; et, dans une de ses
courses dévastatrices, il se présenta devant le ch&teau des Se*
lama. Taghmoracen-Ibn-Selama y fit une vigoureuse résistance ;
•t le souverain oiériuidey Youçof-Ibn-Yacoub, profita de l'éloi-
gnement du prince abd-el<ouadite pour mener une armée coaire
Tlemcen. Othmau leva aussitôt le siège de la forteresse et se
hâta de rentrer dans sa capitale avant l'arrivée de TeiHiemi.
Yaghmoracen sortit à la poursuite des Abd-el-Ouadites deat il
voulait harceler larrière-garde , mais, arrivé à Teltouan, il fut
attaqué à son tour et perdit la vie.
Mohammed-Ibn-Selama, frère et successeur do Yaghmoraoen,
abandonna le parti des Beni-Mohani^ed*lbQ«Âbd--el-CaouY pour
eelui d'Othnno-Ibn-Yaghmoracen, auquel il promît de remettro
l'impdi que les Beni-Idlelteu avaient payé jusqu'alors à leurs
anciens alliés. Sâd-Ibn-Selama passa en Maghreb ; et» plus tard,
il servit dans Tarmée qui, sous les ordres de Youçof-lbu-Ya-
coub, assiégea si longtemps la ville de Tlemcen. Ce monarque
témoigna au transfuge sa haute satisfaction en le nommant chef
des Beni-Idlelten et commandant du Casr-Ibn-Selama« Moham-
med-lbn-Selama, frère de Sâd, se jeta dans le Hont-Bached et
y resta jusqu'à la mort du sultan Youçof.
Les Beni*Abd-el-Ouad rétablirent alors leur autorité dans le
Maghreb central et soumirent à l'impôt les Beni-Toud)îo, qu'ils
réduisirent ainsi au rang des peuples tributaires. Abou- Tache-
fin, successeur d'Abou-Bammou, voulant se venger de Sàd» le
remplaça par Mohammed .-Ibn-Selama qu'il fit venir du Moni-
Rached. Sftd, qui passa encore dans le Maghreb, rentra plus tard
dans le paya d«s Abd-el-Ouad, aveo l'armée du sultan Abou-'l-
Hacen, et obtint le commandement des Beni-Idlelten pendant que
son frère, Mohammed, se tenait enfermé dans Tlemcen avec
Abou-Tachefin. Mohammed mourut daqs un des combats qui se
livrèrent pour la défense de cette place forte. Après la chute de
UE9 BEia-SKLAVA. 21
l'empire abd-el-ouadite, Sâd fit le pèlerinage de la Mecque avec
TaulorisatioD do saltan mérinide , et, an moment où il rentrait
dafts son pays, il rendii le dernier soupir. En roonrant, il re«
commanda ses enfants aux bontés d'Abou-'l-Haeen et pria Artf«-
Iba-Yahya, émir des Soucid et ami du sultan, de se charger du
message et de parler en leur faveur. Il en résulta la nomination
de son fils, Soleiman, au commandement des Bcni-Idielten et
du château des Beni-Selama.
Après le revers qui brisa la puissance d'Abou-'UHacen, les
émirs Abou^Saîd et Abou-Thabet, fils d'Abd-er-Babman, relevè-
rent l'empire de leur aïeul Yaghmoracen[Ibn-ZtaD] ; et, dès lors^
Soleiman se montra tantôt leur ami, tantôt leur adversaire. Les
Arabes Soueid étaient voisins et alliés des [Idlellen] dont le
territoire s'étendait immédiatement au Nord de celui qu*ila
occupaient eux-mêmes ; mais, à cette occasion, leur cheikh,
Ouenzemmar-lbn-Artf, conçut l'espoir de conquérii^ le territoire
des Beni-Idlelten. Soleiman lui opposa une vive résistance et
finit par le repousser. Aboa-Einan soumit alors le Maghreb
centrai ; et, pour récompenser Ouenzcmmar de s'être attaché àii
parti des Mérinides, à l'exemple de son père< Artf, il loi concéda
le ciiâteau des Beni-Selama, le territoire qui en dépend et les
impôts que les Beni-Idielten devaient fournir è l'empire* Solei'-
man-Ibn-Sâd obtint, vers la même époque« un haut commande-
ment dans l'armée du sultan.
Après la mort d'Abou-Einan, Abou-Hammon II releva l'em-
pire abd-el-ouadite et rétablit Soleiman dans le commandement
des Beni-Idlelten et de leur château. Se voyant ensuite déborder
par les Arabes, il soupçonna paturellement la fidélité de Sotei-
man. Celui*ei en fut averti et se réfugia chea les fils d'Artf ;
puis, étant rentré dans le devoir, il fut arrêté et mis à mort par
l'ordre du môme sultan.
Me pouvant plus résister aux Arabes, qui lui avaient enlevé
presque tout le Maghreb central, Abou-Hammou tàcba de se
Dans le texte arabe, lisez ahihi à la place à'ibnihi^
22 HISTOtlE DSS BERBÈRES.
concilier les 61s d'Arif , et, dans ce bat^ il leur céda le château
des Selama et le commandemeDt des Beni-IdleltCD. Ensaite, il
leur donna comme sujets les Beni-Madoun ; pais, il leur remit le
territoire de Mindas. De cette manière, les Toudjinides deyinrenl
serfs des Soueid et durent se soumettre aux corvées et impôts.
Les Beni-Tigherin, habitants du Ouancherich, furent les seuls
<}ut évitèrent cette dégradation. Ils ont maintenant pour chef
Youçof-lbn-Omar, le même dont nous avons déjà fait mention.
Abou-Hammou enrôla dans son armée les membres de la famille
Selama ; et, au lieu de solde, il leur concéda El-Caçabat, localité
voisine de TIemcen. Telle est aujourd'hui la position de cette
tribu.
HISTOIRE DES BENMRIflTER, IVTRE BRANCHE DE LA TRIBU DES^
TOL'DjtN,
Parmi les tribus toudjinides, les Beni-Irnaten se distinguèrent
par leur nombre, leur bravoure et leur grande renommée. Quand
les autres branches de la grande famille toudjinide vinrent s'é-
tablir dans le Tell du Maghreb central, les Irnaten restèrent
dans leur ancien territoire, au Midi [du Tell], entre Mahnoun,
Ouzina et Ydoud *; et, ils parcoururent les deux bords du Ouacel,
branche supérieure du Chelif. Ils prenaient leur chef dans la fa-
mille de Youçof-Ben-Bou-Noual , et, à cette époque, ils obéis^
saient à Mohtb, fils de Nasr, fils d'Ali, Gis de Temtm, fils de
Youçof.
Les deux grands émirs toudjinides, Abd-el-Caonï et son fils
Mohammed, montraient toujours une grande prédilection pour
cette tribu, à cause delà haute considération dont elle jouissait et
delà valeur dont elle avait fourni bien des preuves. Mohammed
la plaça sous les ordres des Hachem, Aulad-Aziz, de sorte que
* Uq des manuscrits du (exle arabe, aiosi que le texle imprimer
portent ici Yaotul^un,
LES BBNl-lRKATBN. 29
pendant son règne et celui de ses iîls, elle eut pour chef Obbou*
Ibn-Hacon-lbn-Aztz. Hohtb, fils de Nasr, épousa une fille d'Àbd*
el-Caouï et eut d^elIe un fils qu'il nomma Nasr. L'avantage
d'avoir Mohammed- Ibn-Abd-el-Caouï pour oncle maternel se
manifesta par l'élévation de Nasr au commandement des Irnaten.
Ali, fils et successeur de celui-ci, eut un fils nommé Nasr, un
second nommé Anler et plusieurs autres que Ton désigna par
l'appellation des Enfants de Tacerghint, car tel était le nom de
leur mère- Nasr, fils d'Ali, succéda à son père et gouverna très-
longtemps. Pendant son administration, les Abd-el-Ouad profi-
tèrent de la mésintelligence qui régnait entre les descendants
d*Abd-el-Caou'î pour leur enlever toute espèce d'autorité. Les
princes des peuples zenatiens [tels que les Beni-Merin et les Béni*
Abd-el-Ouad] montrèrent à Nasr de grands égards et contri-
buèrent ainsi è TinQuence qu'il s'était déjà acquise et qu'il
transmit à ses descendants. Il laisse treize fils, dit-on, les uns
vaillants guerriers, les autres, jeunes gens de grande espé-
rance ^ Omar, le plus distingué de ces frères, fut mis à mort
dans la ville de Merat par le suUan Abou-*l-Hacen, auquel on
l'avait dépeint comme un traître qui voulait l'assassiner. Ce fut
en vain qu'il avait cherché son salut dans la fuite ; il ne put
échapper aux gens qui s'étaient mis à sa poursuite. Mondîl, nO'
autre de ces frères, fut tué par les Beni-Tigherin h l'époque où
ils prirent pour chef Ali-Ibn-en-Nacer. Obbou, fils de Hacen-lbn-
Aziz, mourut avec lui. Einan, le troisième frère, perdit la vie
au siège de TiCmcen, sous le règne d'Abou-Tachefin. On re-
marqua encore parmi ces frères, Masoud, Mohib, Sàd, Dawoud,.
Mouça, Yacoub, El-Abbas et Youçof.
Anler, frère de Nasr-Ibn-Ali, eut plusieurs fils, dont l'un,
nommé Abou-'l-Fotouh, fut père d'Eïça-lbn-Abi-Fotouh, lequel
devint, plus tard, chef de la famille. Une belle esclave apparte-
nant à cette maison, tomba au pouvoir d'Othman-lbn*Yaghmo-
* Cest par conjecture seulement que nous rendoDS ici le sens d'u»
moi arabe dont la vérilable orthographe est incertaine*
mSTOttE DB9 BBSBfiSBS.
racen et donna le jour à oo enfant dont le père, dtsatt-el)», étBÎt
flon ancien maître, Abou-'l-Fotouh. Cet enfant reçut le nom de
Moarref et fat élevé dons le palais du souverain abd«el-otta-
dite.
Devenu grand, il servit Abon^BanuBoo en qualité de vinr et
remplit les mêmes fonctions auprès du fils et suocesseur do eo
sultan. Parvenu i exçrcer une înAuenee extraordinaire dans l'ad-
ministration de l'empire, il reçut du peuple le surnom d'El^
Kebtr (le grmid}. Lors de son visirat, sous le règne d'Abou-
Haraajou 1, il aecoeiliit chez lui son frère Eïça qui avait quitté
lia tribu dans on moment de colère ; et, par ses démarches, il lui
procura le commandemenl des Beni-Raebed, la jouissance do
l^impAt four» par le territoire de ce peuple et l'autorisation
d^lablir sa résidenee dans la viHe de Satda. Eïça laissa quatre
filS| Abou«Bebr, Obbou, Taker et Quenzemmar. Le sultan méri-
nidcy Àbou-4-Hacen, ayant subjugué les Beni-Abd-eUOuad,
confia à ces frères successivement le commandement des Beni-
Irnaten.
On qe dit pas que les enfants de Tacergutni aient exercé
quelque autorité dans leur tribu ; l'on rapporte seulement qu'une
de leurs esclaves tomba au pouvoir de la famille d'Aboa*Tache*
fl^ et y donna le jour k un fils. Cet enfant reçut le nom d'Atîa,
fils de Monça ; et, dans le palais où il fut élevé, il porta le sur-
nom dnpeHt-^h de TaeergkM* H déploya les plus belles qua-
Klés dans le service des Abd-eNOuadites ; et parvenu, sous
leur patronage, aux plus bauts emplois, il gouverne maintenant
la région du Gkeltf au nom d'Abou-Hammou IL
Les Arabes dominent actuellement sur tout le territoire des
Imalen, auxquels ils ont enlevé Tao«Kl et Mahnoun. On trouve
eep^ant toujours quelques restes de cette tribu dans la
montagne près d'Oucîna *. Gouvernés par un descendant de
Nasr-'Ibn-Ali, ils paient l'impôt au sultan et un tribut aux
Arabes.
* Cest à tort que, dans le texte arabe, on a imprimé Ourina.
LIS BKNI-VBRilf. S5
etN^ALOG» DES BBIf I * WEtilf | PEUPLE QUI GOUTERRA tE HAGffUB
ET l'bSPA€NB.
Nous avons mentionné qoe les Beni-Merin forment une des
branches de la grande tribu de Ouac}n, peuple dont noua avons
rattaché la généalogie a celle des Zenata [de la seconde raee]^.
Merîn, avons^nousdit', était filsd'Ourtadjen, 6b de Makhoukh,
fils d'Oudjedtdj >, fils de Faten, fils de Yedder, fils de Yakhfot,
filsd'Abd*Allah, fils d'Ourtntd, fils d^EUMagguer^ fils d'Ibrabtm,
fils de Sahhik ^ fils d'Ouacin. Nous avons dit aussi * qoe les
Beoi-Mertn étaient frères des Iloumi et des Medîouna, fait qui,
do reste, se laisse deviner quand on sait que ces tribus, avant
d'avoir fondé des royaumes, étaient voisines les unes des autres
et habitaient le territoire qui est situé entre te Za et le MolouYa.
Nous avons mentionné aussi que les Beni-Merîn se partagèrent
les plaines et les déserts [du Maghreb] avec leurs frères, les Beni-
Badtn-Ibn* Mohammed, et que ces deux peuples se firent la
guerre pendant de longues années. La victoire se déclara d'a-
bord pour les Beni-Badîn parce qu'ils avaient l'avantage du
nombre. En effet, ils formaient cinq familles : les Beni-Abd-eU
Ooad, les Toudjto, les Mozab et les Beni-Zerdal, auxquelles on
peut mâme ajouter leurs cousins, les Beni-Rached-lbn-Moham*-
med. Ces derniers occupaient alors le Tell du Maghreb central,
pendant que les autres se tenaient dans le Désert et que les
Beni*Merîn avaient leurs lieux de parcours dans la région qui
* Voy. t. III, p. 304 .
* Tome III, p. 302.
3 Dans le texte arabe, la première lettre de ce nom a été ooifsc par
mégarde.
* Dans les manuscrits et le texte imprimé, on lit El^Moëzz; cet le
mauvaise leçon proYtent du déplacement d'un point.
" Variantes : Zahhikj Zcddjik.
^ Tome m, p. 293.
26 HISTOIRE DES BERBÈRES.
s'étend depuis Ftgufg à Sidjilmessa et, de là, au Molouïa. Quel-
quefois aussi, les Beni-Merin se dirigeaient, dans leurs course?
nomades, jusqu'au Zab.
Les généalogistes de cette tribu rapportent qu'à une époque
très-reculée, elle eut pour chef Mohammed-lbn-Ourzîz *-lbn-
Fekous-Ibn-Koumat-Ibn-Merîn. Ce Mohammed, disent-ils, avait
plusieurs frères, appelés les fils de Tenaleft du nom de leur
mère. Les Beni-Oungacen-lbn-Fekous étaient ses cousins. Il eut
sept fils, dont deux, Hammama et Asker, naquirent de la même
mère; les autres, nés de concubines, se nommaient Sengman,
Segmtan, Soggom,Ouragh etCazount^. On désignait ceux-ci par
l'appellation de Tirîghin^, mot qui, dans leur langue, signifie
bande. Les mêmes généalogistes racontent qu'après la mort do
Mohammed, Hammama, son fils aîné, prit le commandement de
la tribu. Asker lui succéda et eut trois fils . Noggoura*, Bou-
Igni, surnommé Ël-Mokhaddeb (qui se teint les cheveux), et
Ali, surnommé Laàder s. El-Mokhaddeb devint chef de la tribu
après la mort de son père, et il l'était encore quand les Almo-
hades travaillaient à fonder leur empire. Abd-el-Moumen, qui
assiégeait alors Tacheffn-lbn-Ali dans Tiemcen, ordonna au
cheikh Abou-Hafs de marcher contre les Zonata du Maghreb
central. Les Beni-Badin, les Iloumi, les Beni-Merîn et les Ma-
ghraoua rassemblèrent leurs forces pour repousser cette inva-
sion, mais ils essuyèrent une défaite qui leur coûta la plupart de
leurs guerriers. Les Iloumi et les Badin firent alors leur sou-
» VarîaDte : Ourzin. Ailleurs, ce nom est écrit OursiSj ce qai prouve
que notre auteur a dû écrire ici Ourziz.
* L'orthographe de ces Doms est incertaine.
3 Ce mot est écrit d'une manière diflfèrente dans chacun de nos ma-
nuscrits ; et, malgré nos recherches, nous n'avons pas pu en recon-
naître la véritable orthographe,
* Variante : Togaum,
^ Ce surnom n'a aucun sens ni en arabe ni en berbère^ il faut sup-^
poser qu'il a été mal écrit par l'auteur ou par ses copistes.
iES BEni^MBftÎR. 27
mission, mais les Beni-Merin se jettèrent dans le Désert. Quant
aux Beni--Âbd-el-Ouad, ils «^étaient déjà attachés aux Àlmo-
hades et les servaient avec zèle et dévouement.
Abd-el-Moumen, ayant ensuite fait la conquête d'Oran, s'em-
para des trésors que les souverains alrooravides y avaient dé-
posés et les expédia, avec le reste du butin, à Tinmeleh, mon*
tagne qui avait été sa résidence et le berceau de sa puissance.
Les Beni-Merîn apprirent cette nouvelle dans le coin du Zab où
ils s'étaient réfugiés, et leur chef, £UMokhaddeb-lbn-Asker,
prit la résolution de s'approprier toutes ces richesses. S'étant
mis en route avec ses troupes, il poussa jusqu'au Telagh et
enleva le convoi. Abd-el-Moumen réunit aussitôt ses alliés ze-
natiens à un corps d'Almohades et les expédia tous vers cette
rivière afin de reprendre ses trésors. Les Beni-Abd-el-Ouad
firent partie de la colonne et se distinguèrent par leur bravoure.
On atteignit les Beni-Merîn dans la plaine de Messoun et on les
obligea à prendre la fuite*. Ël-Mokhaddeb fut tué^ et les tentes
de sa tribu devinrent la proie des Abd-eUOuad. Celte rencontre
eut lieu en l'an 540 {\ \ 45-6).
Les vaincus s'enfuirent vers le Désert; et, arrivés dans leurs
terres de parcours, ils prirent pour chef Abou-Bekr, fils do
Hammama-Ibn-Mohammed et cousin d'El-Mokhaddeb. Après la
mort d'Abou-Bekr, son fils Mahiou obtint le commandement. Il
gouvernait encore les Beni-Merin, qui lui obéissaient avec dé-
vouement, quand El<Mansour[, le khalife almohade] appela cette
tribu à la guerre sainte. Dans la journée d'El-Arka^, ils mon-
trèrent la plus grande bravoure, et leur chef, Mahtou, y reçut
une blessure dont il mourut après son retour au désert du Zab,
Tan 594 (1195). L'autorité passa à son fils, Abd-el-Hack, qui la
transmit à ses descendants.
* Tin mellél signifie puits bîanc^ en langue berbère. La position de
cette localité est indiquée dans la table géographique du tome i.
* Voy. t. II, p. 180 et t. m, p. 328.
« Voy. t. II, p. 243.
28 BISTOIIK DES BERBÈRES.
ABD-EL-HACK PBEIVD LE COMSANDEHENT DES BBNI-HERiN. SON
FILS ET SUCCESSEUR OTHMAN TRANSMET LE POUVOIR À SON FRÈRB
«OHASIirED.
Mahtou, fils d'Abou-Bokr, laissa trois fils : Abd^i-Hack[-Aix»u-
Melak], Oucenaf et Tahyatoa. Le premier, qui en était Tainé,
prit le comm^indetnent des Beni-Merio et travailla sans cesse à
les rendre heureux. Il respecta leurs biens^ corrigea leurs mœurs
et, par une sage prévoyance, il parvint h leur assurer une pros-
périté durable.
En Tan 6f0 (12t3-4), quand En-Nacer, le quatrième kha-
life des Aimohades, mourut en Maghreb, après son expédition h
£l-Ooab, OQ proclama la souveraineté de son fils, Youçof-el-
Moslancer. Ce jeune homme, h peine sorti de Tenfance. négligea
le gouvernement de l'état pour s^abandonoer aux folies de la
jeunesse, oubliant tout-à-fait les règles de la prudence et le soin
des aiïaires publiques. Les Aimohades profitèrent de son carac-
tère débonnaire et indulgent pour le traiter avec une familiarité
qui touchait à l'insolence; ils usurpèrent toute Vautorilé, laissé^
rent, en même temps, dégarnir leurs frontières, dépérir leur
armée ; et, par cette insouciance coupable, ils amenèrent la chut»
de l'empire.
A cette époque, les Beni-*Vertn parcouraient eu nomades le
désert qui sépare Figuîg du Molouïa et du Za. Lors de l'établis-
sement de l'empire almohade, et même auparavant, ils avaient
rbâbitude de monter dans le Tell afin de visiter les localités qui
s'étendent depuis Guercîf jusqu'à Outat. Ces voyages leur per-
mirent de faire connaissance avec les débris do l'ancienne raco
zenaticnne qui habitaient la région du Molouïa et de se lier d'a-
mitié avec les Miknaça des montagnes de Tèza et les Beni-Irnîan,
tribu maghraouienne qui occupait les bourgades d'Outat, dans le
haut Molouïa. Tous les ans, pendant le printemps et Tété, ils
parcouraient ces contrées ; ensuite, ils descendaient dans leurs
quartiers dliivcr, emportant avec eux une provision de grains
LES beni-mehIn. 21)
pour la subsistance de leurs familles. Dans ces courses, ils eurent
Toccasion de reoonnaîlre la faiblesse de l'empire almohade ; et,
profitant d'un moment favorable , ils quiuèrent leur désert,
traversèrent tes dëGIés de la frontière et se répandirent dans lo
Tell. Cavaliers et fantassins^ tous se précipitèrent s«r le pays
cultivé^ saccageant les campagnes et couvrant les plaines de
ruines. Les habitants, refoulés dans leurs montagnes et autres
lieux de refuge, s'épuisaient en plaintes et en lamentations.
Le gouvernement d'El*Hostancer, poussé enfin à bout, résolut
d'agir contre les envahisseurs et d'intercepter leur retraite.
Abou-Ali-lbn-Ouanoudin reçut le commandement de l'armée aU
mobade, rassembla les troupes qu'on avait levées dans la pro>-
viflce de Maroc et marcha contre l'ennemi. Il prit la route de Fez
afin d'obtenir la coopération du cld Abou-Ibrafatm, fils de Yoo*
çof-Ibn-Abd-el-Moumen et gouverneur de cette ville. D'après les
instructions du sultan, ils devaient marcher ensemble contre les
Mérinides et les exterminer jusqu'au dernier. Ces nomades se
trouvaient dans le Rlf el le pays de BotouYa quand ils apprirent
cette nouvelle ; sur-<le-champ, ils déposèrent leurs bagages dans
le château de Tazouta el allèrent au-devant des Almobades. Les
deux armées en vinrent aux mains près de la rivière Nokour,
et la victoire demeura aux Mérinides. Les prisonniers almobades
furent entièrement dépouillés par les vainqueurs, et ils rentré*
rent à Tèxa ei à Fez, sans autre chose pour couvrir leur nudité
que de feuilles d'une plante que l'on nomme mecherla^ dans le
Maghreb et qui avait poussé en grande abondance cette année-là.
C'était dans la saison où les champs étaient couverts de céréales
et d'herbes de toute espèce ; aussi l'année de cette bataille fui
nommée V Année du Mecherla.
* Variante : Mechàlû, Les natifs du Rtf marocain que nous avons con-
sultés au sujet de celte plante, ne la connaissent pas. On ne la trouve
pas indiquée ni dans Touvrage d'ibù-Beitar, ni dans celui d'ibn-el-
Aouwam. Peut-être est-ce une espèce d'acaatbe ou bien le seneeis
gic^(m^tu8 de Desfonlaines ; Flora atlanticaj t. ii, p. 373. — ^ Le combat
dont il est question ici eut lieu Tan 613 (1216*7).
30 niSTOIBE DBS BERBÈRES.
A la suite de celle affaire, les Benî-Merfa marchèrent sur Tèza
et remportèrent une nouvelle victoire sur les troupes qui en
formaient la garnison. La mésintelligence se mit alors entre leurs
chefs : la famille d^Âsker-Ibn-Mohammed, indignée de voir ses
cousins , les Béni - Hammama , exercer le commandement qui
avait appartenu à Àsker et à son fils , El - Mokhaddeb , com-
mandement qu'elle avait eu le vain espoir de conserver, aban-
donnèrent leur émir Abd-el-Hack et passèrent aux Almohades.
Parmi les tribus auxquelles le gouvernement du Maghreb
avait confié la garde du pays, on comptait les Rlah, peuple qui
conservait encore la rudesse et la fier lé de la vie nomade et
qu'Ël-Mansour avait tiré de Tlfrikia pour l'établir dans les pro-
vihces d'El-flebet et d'Azghar. Les Beni-Asker se joignirent à
eux et marchèrent, Pan 644 (1217-8), contre leurs frères, les
Mérinides. Dans le combat acharné qui s'ensuivit, Témir Abd-
el-Hack et son fils aîné, Idrîs, perdirent la vie ; Hammama-Ibn-
IsUten des Beni-Asker et Témir Ibn-Mahtou-es-Soggomi déployé*
rentune valeur héroïque jusqu'à ce que les Mérinides, brûlant
de venger la mort de leur chef, chargèrent avec tant d'impé-
tuosité qu^ils mirent les Rîah en déroute après avoir tué les
plus braves de leurs guerriers.
ils choisirent alors pour chef Othman-Aderghal , second fils
d'Abd-el-Hack. Aderghal est un sobriquet et signifie borgne
dans leur jargon barbare'. Abd-el-Hack eut neuf fils et une
fille nommée Ourtadltm. Idrîs, Abd-Allah et Bahhou lui na-
quirent de Sot-en-Niça, femme de la tribu des Beni-Ali ; Oth-
man et Mohammed avaient pour mère une femme des Beni-
Oungacen nommée En-Nouar, fille de Tesalit; la mère d'Abou-
Bekr s'appelait Taghzount , fille d'Abou-Bekr-lbn-Hafs de la
famille deTenaleft; Zîan eut pour mère une femme des Beni-
Ourtadjen; Abou-Aïad était Gis d'Omm-Feredj, des Béni-
Ouellou, branche des Beni*Abd-el-Ouad, et Yacoub reçut le
Aderghal signifie aveugle en berbère, langue qo'Ibn-Rhaldoun dé-,
signe ici par le nom de Retana (jargon) . De nos jours, le mot retana est
employé par les Arabes pour débigoer toute espèce de dialecte berbère.
LES BESI-HERÎN. 31
jour d'Omm>el-Yomn, Glle de Moballi le botouïen. Idrîs, l'aloé
de tous, perdit la vie en même temps que son pore.
Aussitôt après la mort d'Abd-el-Hack, Hammama-Ibn-Islttea
etLemir^-Ibn-Mahiou réunirent les cheikhs de leurs familles res-
pectives et proclamèrent son Gis Olhman chef des Beni-Merla.
Celle nomination faite, ils se mirent à la poursuite des Rtahet
en tuèrent un grand nombre. Olhman en frappa plusieurs de sa
propre main et assouvit ainsi la soif de vengeance dont il brû-
lait depuis la mort de son père et dé son frère. Les Btah s'em-
pressèrent d'implorer la paix et ils obtinrent celle grâce moyen-
nant un tribul annuel. Dès ce moment, la puissance des Béni-
Merîn devint formidable à l'empire almohade.
Dans toutes les parties du Maghreb, on vit alors éclater Tes-
prit de la révolte ; les peuples refusèrent d'acquitter les impôts;
des troupes de brigands infestèrent les grands chemins ; les
émirs et les agents du gouvernement, depuis le sultan jusqu'aux
moindres fonctionnaires, s'enfermèrent dans les villes ; tout le
pays ouvert tgmba au pouvoir des Mérinides, et les gens de la
campagne restèrent sans protection. Les envahisseurs, trouvant
le pays »ans défenseurs, s'empressèrent d'en prendre posses--
sion ; et, sous la direction de leur émir Abou-Saîd-Othman, ils
parcoururent les grandes routes et les sentiers du Maghreb en
prélevant des contributions chez les habitants. Bientôt, la
majorité de la population fit sa soumission ; les ChaouYa (pas^
leurs) nomades et les grandes tribus de Hoouara et de Zegaoua
prêtèrent au chef mérinide le serment de fidélité. Leur exemple
fut suivi par les Teçoul et les Miknaça ; les Botouïa et les Fich-
tala présentèrent ensuite leurs hommages au vainqueur ; puis,
les Sedrala, les Behioula et les Medîouna le reconnurent pour
maître. Olhman leur imposa le khoradj en sus de l'impôt ordi-
naire et installa chez eux des percepteurs. Fez, Tèza, Miknaça
(Mequinez)^ Gasr-Kelama et plusieurs autres villes consentirent
h lui payer tribut annuel afin de se garantir contre des hosti-
lités et d'avoir leurs communications libres.
■ II. . I . ■ I II I —
' Lemir est la formo berbère du mol arabe eUAmir.
33 HISTOIBB DES BERBÈftES.
En l'an 6â0 (t22â) , OihnxBn toarna ses armes contre les
Zenala nomadeS; et les mena si rudement qu'ils renoncèrent à
leurs brigaiHidges et firent leur soumission. Croyant ensuite que
la mort de son père n'était pas suffisamment vengée, il attaqua
lesBtah d'Âzghar et d'EUHebet avec un tel acharnement qu'il
faillit les exterminer. En l'an 637 (1239-40), il poursuivait en-
oore sa carrière victorieuse quand il fut assassiné par un esclave
d'origine chrétienne.
Moharamed-lbn-Abd-el-Hack suivit le système de son frère
et prédécesseur, Othman ; travaillant à soumettre toutes les par-»
ties du Maghreb, il obligea les habitants des villes à lui payer
tribut et forçâtes nomades, les campagnards et les autres classes
de la population à supporter le poids des impôts et des contri-
buttons*
L'émir Abou-Mohammed-Ibn-Ooanoudtn nommé par le kha-
life £r-Rechîd gouverneur de Miknaça ^ et chargé de faire la
guerre aux Hérinides, se rendit à sa destination et accabla la
peuple d'impôts. Les Hérinides se présentèrent» alors devant
Tidjedoughîn, place forte située dans la plaine de Miknaça,
et invitèrent la garnison à sortir pour les combattre. Leur
défi fut accepté et eut pour résultat un combat dans lequel les
deux partis firent de grandes pertes. Mohammed - Ibn * Idrts,
petit-fils d^Abd-el-Hack, se mesura avec un officier de la mi*
lice chrétienne et le tua du premier coup. Lui-même reçut de
5on adversaire un coup de sabre sur la figure ; et, comme il en
garda toujours la marque, on lui donna le sobriquet de Bou-
Darbfi (le batafré). Les Mérinides chargèrent ensuite sur les
Almohades, les mirent en fuite et forcèrent Ibn-Ouanoudîn à
rentrer dans Miknaça.
Pendant ces événements, Tempire fondé par Abd-el-Moumen
tombait en décrépitude et pouvait h peine se défendre. Il laissa
cependant paraître une lueur de son ancienne pnissance, ainsi
qu'une bougie jette un dernier éclat avant de s'éteindre. Voici ce
Probablement Mequinez. L'aulre Miknaça était près de Tèza.
DT)fA8TlB HÉBimDB. — ABOC-trÀVTA-nH*ÀBD-BL*JllACK. 33
qui se passa : Er-Rechfd mourut en 6i0 (1242), et son frère,
Ali-^es-Sttd, ayant été prodamé sullan, prit la résoiution d*at-
laquer les Beoi-Merîn et de leur Mer Tenvie de s'établir en Ma-
ghreb. Bn l'an 64S, it se mit en marche, h la lé(e d'une armée
de vingt mille hommes, dit'-on, dans laquelle il avait fait entrer
les troupes almohades^ les contingents des tribus erabes, les
ixmtingents des Masroouda el la milice chrétrentie. Les Beni-
kferib allèrent au-devant de lui et l'eCtaqnèrent auprès de la
rivière Taback. Des deux cAtés, l'on se battit avec un égal achar-
nement ; l'émir Mohammetf-Ibn-Abd-el-Haick fut tué dans la
mêlée par un officier de la milice chrétienne, et ses troupes,
forcées de prendre la fuite, n'échappèrent aux coups des rain*
queurs qu^à la faveur de la mrit. EHes se réfugièrent dans les
oMmtagnes de Ghialha, «ux environs de Tèca, et y restèrent
plusieurs jours ; ensuite, elles se dirigèrent vers les régions du
Désert, après avoir pris pour chef Abou-Vahya, fi)s d'Abd-el^
Back.
AVfiNBMBlfT DB L'Énit ABOU-TAÉTA-IBN-ABD-BL^-UACK, yOBDATEUB M
L'nflAB mBrikiob.
Abou-Tahya, fils d'Abd-el-Back, fut nommé émir des Béni*
Mcrtn l'an 642 (4844*5). Vivement préoccupé des intérêts de
son peuple, il commença son règne par concéder i chaque
grande famiKe mérinide une portion du territoire maglirebin,
^vee le droit d'en jouir h perpétuité et de s'approprier (es itfr-
pois que payaient les tribus de cette tooalité;. Ainsi iavorisées,
<des familles curent de^ moyens sufisants poifr équiper et nioriter
tous leurs hommes de guerre et! pour organiser leurs dépendants
<»n corps de fantassins. De^eette manière, le nombre des trtiupes
«lérvnîdes fut considéraUemeut augnenfé.
La jaloosto se miialors parmi les tribus mérinides, et les Bom-
Asker, ^i étaient passé du cêèé des Almohades, entratnèreni
ceux-ci dans une guerre contre Abou-Tahya et les Beni-Ham-
cnama. Sur l^invitation du gouK^rnement almohede, Taghim>ra-
T.IV. 2
34 HISTOIRE DSi BERBllRBS.
cen-lbn-Zlaa amena tontes ses forces èi Fez et se plaça sous les
ordres du général qui y commandait. De même que les Béni-
Asker, il consentit h fournir des otages comme garants de sa
fidélité et du zèle qu'il mettrait à combattre les partisans de Te-
rnir Abou-Yahya. Le chef almohade se mit à la tête de Tarmée
combinée et passa dans la province de Garet, après avoir tra-
versé le Ouergha ; mais, ayant vu que Tennemi évitait sa ren-
contre, il reprit la route de Fez. Yaghmoracen, qui venait d^étre
averti que les Almohades tramaient sa perte, profila de cette oc-
casion pour décamper avec ses troupes et celles des Beni-Asker.
L'émir Abou-Yahya marcha au-devant d'eux jusqu'à la rivière
Sebou, mais il n'osa pas engager le combat. Les Almohades, de
leur côté, se mirent à la poursuite des transfuges ; puis, ils re-
broussèrent chemin, parce que le bruit s'était répandu dans leurs
rangs que le sultan Es-Saîd venait de mourir. Anter l'eunuque,
client du khalife et général de ses armées, reçut alors l'ordre de
partir avec une bande d^archers et un peleton de la milice chré-
tienne, afin de ramener les Abd-e!-Ouad et les Beni-Asker par
la voie de la persuasion ; mais ceux-ci s'emparèrent de lai et de
son escorte, tuèrent les chrétiens et retinrent prisonniers les
autres soldats, avec l'intention de les échanger contre les otages
qu'ils avaient livrés aux Almohades. S'étant ainsi fait rendre
leurs enfants, les Beni-Asker rentrèrent sous l'autorité de l'émir
Abou-Yahya, pendant que Yaghmoracen continuait sa marche
vers Tlemcen.
Les Beni-Merfn cherchèrent alors à consolider leur puissance
et visèrent à la possession des grandes villes du Maghreb, après
en avoir occupé les. provinces. Conduits par Abou-Yahya, ils
pénétrèrent dans la montagne de Zerhoun et sommèrent les ha-
bitants de Mequinez è reconnaître la souveraineté de l'émir
Aboo-Zékérïa, seigneur de l'Ifrlkïa. Il faut savoir qu^à cette
époque, Abou- Yahya admettait la suprématie du khalife hafside.
Ayant investi la ville de manière h lui couper les vivres, œt
émir harassa les habitants par de fréquentes attaques et les con-
traignit ainsi à capituler. Ce fut par l'entremise de Yacoub-Ibn-
Abd-el-Hack, frère d'Abou-Yahya, qu'Abou-'l-Hacen-lbn-Abi-
1>1rifA6TIB HËniNlDB. — ABOV-TAHYA-fDK-lBD-EL-HlCK. B&
M-A(Ta, gouverocur de la place, fut amené h se rendre. Le cadi
Abou-'l-MotarreMbn-Omefra dressa, au nom des habitants,
4'acCe par lequel ils ofFraicnt à l'émir AboQ-ZékérIa rassurar.cô
de leur dévouement. Pour récompenser les bons services de
Yacoub, le sultan[f son frère,] hii concéda un tiers de TimpAl
fourni par la ville conquise. Dès lors, Abou-Yahya ressctitit le^
mouvements de Pambîtion ; et, voyant sa tribu animée par l'es-
prit de la domination, il s'entoura des insignes de la royauté.
Consterné de la perte de Mequinez, le khalife Es-Satd cônvo*
qna ses grands officiers et leur fit un discours dans lequel il cx«
posa comment l'empire s'étaft avancé pas à pas vers sa ruine ':
tt Le fils d*Abou-Hafs, leur dit-il, nous enleva Pifrîkïa ; Tagh-
» moracen-lbn-Ztan et ses Beni-Abd-el-Ouad détachèrent en-
» suite de notre royaame.fa province du Maghreb central et la
« ville de Tlemcen ; ils y proclamèrent même ia sotiveraineté
» du chef hafside et lui firent espérer qu'avec leur appui, fi
1» pourrait effectuer la conquête du Maroc. Ibn-Houd nous ar-
1» racha [une parti de] l'Espagne pour y faire reconnaître la
1» suprématie des Abbacides ; et, dans une autre partie du même
» pays, Ibn-el-Ahmier s'est posé comme partisan des Hafsides.
9 Toici maintenant les Beni-Merîn qui ont soumis les campagnes
9 du Maghreb et qui aspirent à posséder nos villes. Leur émir,
D Abou-Yahya, vient de prendre Mequinez, d'y établir l'auto-
» rite des Hafsides et de s'arroger les insignes de la royauté.
1» Si nous souffrons davantage ces hximiliations, si nous fermons
D les yeux sur des événements aussi graves, c'en est fait de
ji notre empire et peut-être même de notre religion. » A ces
paroles, les assistants poussèrent un cri de douleur , et, brûlant
d'indignation, ils demandèrent à marcher contre l'ennemi.
Es-Saîd se hâta de rassembler les contingents arabes^ les
troupes almohades et les tribus masmoudicnnes ; puis, en l'an
645 (1247-8), il se mit à leur tête et quitta Maroc. Son but était
tle reprendre Mequinez aux Beni-Merîn, d'enlever ensuite la ville
de Tlemcen à Yahmoracen et de terminer sa campagne par la
<;onquéte de l'ifrtkïa. Il était déjà parvenu h la rivière Beht, et il
passait ses troupes en revue, quand Abou-Yahya pénétra dans
36 HISTOIRE DBS BERBÈRES.
lo camp sous un déguisement. A l'aspect d'une force aussi impo-
sante, Témir mérinidc reconnut l'impossibilité d'y résister ; et,
^'étant rendu à Tazouta, dans le Rtf, il envoya aux diverses
fractions des Beni-Merin Tordre de venir le rejoindre.
Quand Es-Saîd parut sous les mors de Mequinez, les habitants
se hâtèrent de lui offrir leur soumission et d'implorer une am-
nistie. Pour exciter sa commisération, ils envoyèrent au-devant
de lui leurs enfants, portant chacun un Coran sur la tête ; à côté
d'eux, marchèrent les femmes souillées de poussière, la figure
découverte, les yeux baissés, et témoignant par leur air humble
et soumis, de toute la profondeur de leur affliction. Le sultan ac-
cueillit cette députation avec bonté et fit grâce à tous les habir
tants. Il se dirigea ensuite vers Tèza, où il espérait atteindre les
Mérinides; mais Âbou**Yahya s'était empressé de les emmener
vers le pays des Beni-lznacen . Ce prompt mouvement du chef
mérinide eut lieu à la suite d'une communication secrète par
laquelle Mohtb, chef des Beni-Autas, l'avai^. averti que cette tribu
complolait sa perte par haine et par jalousie. Ai^rivé à Aïn-^es*-
Sefa, Abou-Yahya réfléchit sur sa position et vit la nécessité de
faire la paix avec les Almohades* D'après ses ordres, les cheikhs
mérioides partirent pour Tèza, afin de présenter à Es-^Satd la
soumission de leur peuple et de s'engager à marcher contre Yagh-
moracen. Le sultan almohade agréa cet oil're et consentit à oublier
les méfaits ^ dont ils s'étaient rendus coupables ; mais comme
ils lui proposèrent ensuite de se charger oQx-mdmes du soin de
mettre les Beni-Abd-el -Ouad à la raison, pourvu qu'il leur four-
nît un corps de lanciers et d'archers, il y soupçonna un piège
enfanté par cet esprit de corps qui porte les tribus de la màme
race h se soutenir entr'elles ; aussi, leur ordonna-t-il de venir
et de marcher sous ses ordres. Abou-Yahya choisit alors dans
les tribus mérinides cinq cents guerriers cl chargea son cousin,
Ahou-Aïad^lbn-Yahya, petil-fils d'Abou-Bekr-lbn-Haminaraa,
de les conduire au camp ahnohude. Es-Satd les rangea sous ses
1. I
En arabe, el-àjéra'ir. Le texte imprimé porte el djAzmr.
DYNASTIE UÈRINIBB. AB0U-YÀHYA*1BN-ABD-BL-HACK. 37
drapeaux et partit de Tèza avec Tintention de passer jusqu'à
Tlemcen et môme plus loin ; mais il fut tué dans la montagne de
Temtezdekt par les Beni-Abd-eUOuad, ainsi que nous Tavons
raconté dans Thistoire de ce peuple*. L'armée almobade dé-
campa alors précipitamment et prit la route de Maroc après avoir
reconnu pour chef Pémir Abd-»Allah, fils d'Es-^Satd, qui avait
pris part à celte expédition en qualité d^héritier du tr6ne.
Abou-Tahya apprit cette nouvelle chez les Beni-Iznacen où
son cousin, Abou-Alad, était venu le rejoindre avec la troupe
mérinide qu'il avait emmenée pendant la confusion causée par la
catastrophe de Temzezdekt. Bans perdre un instant, il alla $e
poster à Guercif pour y attendre l'armée almohade ', et, au mo-
ment où elle passait, il l'attaqua vigoureusement et la mit en^
pleine déroute. L'équipage du sultan, les bagoges et les armes
des troupes tombèrent au pouvoir du vainqueur ; la milice
chrétienne, ainsi que le corps d'archers ghozzes, entrèrent au
service des Mérinides. L'émir Abd-Allah perdit la vie dans Cette
mêlée sanglante. Dès lors, il ne resta plus aux Almohades le
moindre espoir de rétablir leur domination.
Abou'Yabya envahit aussitôt le tfaghreb pour ne pas donner
k Yaghmoracen le temps d'y pénétrer^ car il savait cominMt les
Almohades avaient enseigné aux Abd^-el-OuaditeS le chemm du
pays. En effet, cette dynastie les avait employés à combattre les
Beni-Merin, et elle avait permis que toute la région située entre
Tèza, Fez et El-Gasr, fût violée et foulée aux pieds par les
troupes de>Yaghmoraoen. Ce chef et sa tribu espéraient bien
s'emparer du Maghreb entier, mais leurs tentatives échouèrent
toujours contre la valeur* des Beni-Mertn.
Abou«Yahya commença alors ses opérations par la conquête
du territoire des Outat et par la prise des bourgades que cette
tribu possédait sur le Molouïa. Après avoir soumis la montagne
occupée par le même peuple, il marcha sur Fez afin de Tenlever
« Tome m, p. 348.
^ Lisez bas au lion de fas dans le texte arabe.
3& HISTOIHC DBS BKRBÈRBS.
aux descendaats d'Abd-el-Moumen et d'y faire proclamer la^sa-
prématie du khalife bafside, ainsi que dans tous les pays voisins^
Etant arrivé avec sa cavalerie devant la ville, qui avait alors
pour gouverneur Le ctd Abou •« '1 - Abbas ,. il y pratiqua des in-
telligences et fit promettre aux habitants une administration,
paternelle dont ils n'auraient qu'à se louer et une protection^
efficace contre toute espèce de violence. N'ayant plus aucun es<-
poir d'être secourus par les Almohades, ils acceptèrent avec
empressement les offres de l'émir et renoncèrent à la dynastio
d'Abd-el-Moumen pour celle des Hafsides. Abou-Mohammed el-
Fichiali [personnage vénérable par la sainteté de sa vie] se
rendit auprès d'Abou-Yahya et lui fit prendre Dieu à témoia
qu'il remplirait ses engagements par le soin qu'il aurait des ha^
bitants de Fez,, par la protection qu'il leur accorderait et par sa.
conduite juste , paternelle et généreuse à leur égard. La dé-
marehe de ce saint homme amena la solution de cette affaire
difficile ; elle attira même sur les parties contractantes une bé-
nédiction dont les bons effets s'étendirent à leur postérité. Ce fui
h Er-Rabeta, en dehors de la porte de Folouh que Ton prêta le
serment de fidélité à L'émir Abou-Yahva. Au commencement de
l'an 646, deux mois seulement après la mort d'Es-Said (août-
sept. 1248), on installa dans la citadelle de Fea le premier sou^
verain mérinide. Le ctd Abou^^l-Abbas eui l'autorisation de se
retirer, et il se fit prêter une troupe de cinquante cavaliers pour
l'escorter jusqu'à L'autre côté de l'Omm-Bebià.
Après avoir effectué cette conquête, l'émir Abou-Yahya mar-
cha sur Tèza, ville où le cld Abou-Ali exerçait le commandement.
Quatre mois de siège suffirent pour la réduction de ce ribat; et;.,
comme la garnison s'était rendue h discrétion, on en passa une
partie au fil de l'épée. Abou-Yahya répara les fortifications de
Tèza ; et quand il eut rétabli l'ordre dans les environs, il le
concéda, avec les bourgades du Molouïa, à son frère Yacoub-lbn-
Abd*el-Hack. Rentré à Fez, il reçut une députalion de cheikhs
appartenant à la ville de Mequinez, qui vinrent lui offrir leurs
hommages et renouveller leur serment de fidélité. Peu de temps,
a^pcès, Salé et Ribat-clrFcth lui envoyèrenl leur soumission.
DYNASTIE XÊRIMDE. AB00-Y1BYA-I81f-ABD-EL*HACK. ^ 39
Devenu mattre des quatre principales villes du Maghreb et de
toutes les campagnes de ce pays jusqu'à rOmm-Rebià, l'émir
Abou-Yahya y fit proclamer la suprématie du khalife hafside,
et il en instruisit ce prince par l'envoi d'une ambassade.
Les Beni-Mertn prirent ainsi possession du Maghreb-el-Acsa,
pondant que les Beni-Âbd-el-Ouad occupaient le Maghreb cen-
tral, que les Hafsides tenaient Vlfrtkïa et que Tempire fondé par
Abd-el-Moumen penchait vers sa ruine.
DÉFAITE DB TA6BH0BACEN A ISLT. — BJSYOLTE ET SODHISSIOU
DB FBZ.
En l'an 616 « (1248-9), après la mort d'Es-Satd, l'émir Abou-
Yahya, fils d'Abd-el-Hack, se trouva mattre des provinces ma-
ghrébines et de la ville de Fez. Dans la même année, le ctd
Abou-Hafs-Omar-el-Morteda, fils du ctd Abou-lbrahtm-lsliac,
fils d'Abou-Yacoub-Youçof , fils d'Abd-el>Moumen , quitta la
citadelle de Bibat-el-Feth. près de Salé, où il avait été placé eiï
qualité de gouverneur par Es-Satd ; et, s'étant rendu à Maroc sur
l'invitation Ides Almohades, il y fut inauguré comme sultan,
avec le titre d'El-Morteda. Son père, Abou-lbrahtm, fut celui
qui commanda l'armée almohade dans l'année du Mecherla.
Abou-Yahya se mit alors en campagne afin de réduire Fazaz-
el-Mâden* et de soumettre le pays des Zanaga'. Avant de
partir, il confia le commandement de Fez à son client, Es-Saoud-
Ibn-Khirbach, membre de la communauté des Hachem qui vi-
vait sous la protection des Beni-Mertn et qui lui était tout-à-
fait dévouée. Il y laissa aussi les troupes almohades pour faire
le service comme auparavant ; mais il éloigna le prince qui les
* Dans le texte arabe, insérez un a/i/ avant le ra d'ourbaïn,
^ A la place de Fazaz oua^'l-màdctif il faut ^ire Fazaz-eî-mâden.
' Dans le mot zenata du telle arabe, il Taul remplacer let'S par un
ârdur 3.
40 * USTOIRS DIS BBBBftUS.
aTail coes sous ses ordres. Ud déiacbeaiieot de la milice chté-
tienne, commandé par le nommé Ghana, faisait partie de eette
garnison et, de mdme qœ les antres eorpa, il sa mit à la disposî**
tion d'Es-Saottd. Quelqaes habitants de la ville, gens dévoués
aux Almohades, formèrent alors on complot aveo ces mécréants
à reffet d'assassiner Es-Saond et de proclamer l'autorité d'El-
Horteda, prince qui devait bientôt céder devant ses rivaux et
succomber dans la carrière. Les chefs de cette conspiration étaient
quatre : Ibn-Haschar-el-Mocherref et son frère, Ibn^Abi-Tatou,
et son fils. A la suite d'un conseil tenu cbei le cadi, Abou«Abd-
er-Bahman«el-Maghtli, ces individus allèrent trouver le com-
mandant des chrétiens et l'engagèrent èi tuer le gouverneur. Afin
d'accomplir ce forfait, ils entrèrent dans la salle de la citadelle
où Es - Saoud donnait audience et loi adressèrent quelques
paroles afin de le mettre en colère ; alors le chrétien se jeta sur
lui et le tua. La tôte de leur victime fut portée par toutes les rues
de la ville, sa maison fut pillée et son hmr€fn violé. Ceci se pas$^
dans le mois de Gboual 647 (janv.-fév. 4250). On chargea le
chef chrétien du commandement de la viUe et on envoya an kbft*
life El-Morteda une adresse de fidélité et de dévouement.
A la nouvelle de cet événement, l'émir Abou-Yahya leva le
f iégo de Fazaz et accourut avec son armée sous les murs de Fei.
Les habitants, se voyant cernés de toutes parts, demandèrent
des secours à EUMorteda ; mais ce prince, ne pouvant leur être
utile, garda le silence. Il se borna à prier Yaghmoracen-lbn-
Ztan de marcher contre Abou-Yahya, espérant délivrer ses su-*
jets fidèles du danger qui les menaçait, en employant les armes
d'un chef qui s'était toujours montré l'ennemi des Mérinides*
Yaghmoracen, enchanté d'avoir l'occasion d'envahir le Maghreb,
rassembla ses troupes et partit de Tlemcen avec l'intention de
faire lever le siège de Fez. Abou-'Yahya, averti de son approche^
laissa quelques escadrons dans les alentours de cette ville dont
le blocus durait déjà depuis neuf mois, et se porta rapidement
vers la frontière du Maghreb afin d'empêcher les Abd-el-Ouad
oe la franchir. Les deux armées se rencontrèrent à Isly, dans la
plaine d'Oudjda et s'attaquèrent avec une ardeur peu commune.
DTNASTIB Irtlllin»!. *— ▲BOU-TARTA-'lBll-ABD-IL-RACK.^ 44
Abd-*el-flack, fils de Mohammed-lbn-^Abd«-el-Hack, fnt tué par
Ibrahtm^bn-Hicbam l'abd^el-oaadite, mais les troupes de Yagh-
iBoracen perdirent nn de leurs priaoipaux cheikhs, Yaghmora*
cdD-^Ibn-Tachefio, et abandeanàrent ie champ de bataille. Leur
chef ooumt se réfugier dans Tlemcen» et l'émir Aboa-Tahya re-
vint à Fez pour en continuer le siège.
Les habitantSi ayant alors perdu tout espoir d'être secourus,
ne virent plus d'autre moyen de salut qu'une prompte soumis-
sion. Une amnistie générale leur fut accordée à la condition de
rembourser cent mille pièces d'or qu'on avait pris dans la mai-
son d'Abou-Yahya le jour où la révolte éclata. L'émir mérinide
Gt son entrée dans Fec au mois du [second] Djomada 648 (sep-
tembre 1 260) ; el| trouvant que les habitants tardaient de réunir
la somme dont il exigeait le paiement, il déclara l'amnistie de
nul effet et usa de son droit. Le cadi Abou-Âbd<^r-Bahman sobit
la peine de mort, ainsi que ses complices les Ibn-Abi-Tatoa
père et fils, et les deux Ibn-Haschar. Leurs têtes furent plantées
sur les remparts de la ville, et les habitants durent payer» bon
gré malgré, l'argent qu'ils avaient enlevé. Ce châtiment fut une
des causes qui amenèrent l'asservissement dn peuple de Fer et
assurèrent leur soumission à la dynastie des Beni-Merln ; encore
aojourd'hni, ils se le rappellent avec effroi et jamais ils n'ont
osé ni élever la voix, ni résister aux ordres do gouvernement
ni tremper dans des conspirations.
abou-tahta prbkd et pbrd la tillb db sllt. d6faitb
d'bl-hortbda.
Après avoir achevé le siège de Fei, l'émir Abou-Yahya alla
reprendre celui de Fazaz et fiùit par s'emparer de cette villoé II
soumit aussi le territoire des Zanaga ^ et y préleva l'impAt après
* Le texte arabe de rédilion imprimée et des manuscrits reproduit ici
. la même faute qui vient d'être releyée daos la note 3, page 39. Sous
le mot Sanhwija de la table géographique, nous avons fiit mention
des Zanaga»
42 HISTOIRE DES BBRBfiRBS.
en avoir fait disparaître le mal cause par les fauteurs du dé«
sordre. En Tan 649 (42S1-2), i) marcha contre Salé et s'en ren-
dit maître, ainsi que de Ribat-el-Feth, forteresse qui couvrait
la frontière almohade. Alors il donna à son neveu, Yacoub-Ibn-
Abd-Allah-lbn-Abd-el-Hack, le gouvernement de Rihat et des
contrées voisines.
E)-Morteda ressentit une vive inquiétude h \a réception de
cette nouvelle ; et, après avoir consulté les chefs de la nation
almohade, il prit le parti de la guerre. En l'an 650 (4S5SI-3),
les troupes qu'il fit marcher contre les Mérinides leur enlevèrent'
la ville de Salé, et un des grands cheikhs almohades^ Abou-Abd*
AUah-Ibn-Abi-Yalou, en reçut le commandement.
Déjà, Vannée précédente, El«Morteda lui-même s'était mis a
la tète des Almohades et des autres troupes de l'empire, aGir
d'aller combattre les Beni-Mertn , et, arrivé à Imelloultn, il avait
vu son armée mise en déroule par ce peuple qui était venu à sa
rencontre. Ce fut h la suite de cette campagne que Salé fut pris
[par Abou^Yahya, frère d'Abou-Youçof-Yacoub,] et repris par
les Almohades.
Voyant que les Beni-Merfn agrandissaient tous les jours leurs
possessions par l'envahissement du territoire de l'empire, El-
Morteda fil dresser ses tentes en dehors de Maroc et envoya des
agents dans toutes les provinces pour y lever des troupes. Ayant
enfin rassemblé une multitude innombrable d'Almohades, d'A-
rabes et de Masmoudiens, il quitta sa capitale, l'an 653 (1S55),
et se porta en avant jusqu'aux montagnes de Behloula, près de
Pez. L'émir Abou-Yahya partit avec les Béni* Merin et les troupes
de ses alliés pour repousser cette armée, et il l'attaqua, dans
cette localité, avec tant do vigueur qu'il ta mit en pleine dé-
route. Les Almohades prirent la fuite, sans penser h couvrir la
retraite de leur souverain ; de sorte que ce princo rentra h Ma-
roà après avoir perdu ses tentes, son trésor et ses bâtes de
somme. Enrichis des dépouilles du camp almohade, les Mérinides
devinrent plus puissants que jamais.
A la suite de celte journée, dont les conséquences furent im-
menses; une colonne mérinidc envahil Tcdla et dévasta Abou-
DTMA6T1B HfitlNIBB. — AB0U-TÀBYA-1BM-ABD*EL*HACK. 43
Nefts, YÎlle appartenant aux Beni-Djaber. Comme cette tribu
djocbemide avait été chaînée de garder ia province de TedU,
elle sacrifia les plus braves de aes guerriers en essayant de re-
pousser TeDDemi ; et, depuis Iors> eile n'a jamais pu se relever.
Ce fut pendant cette guerre qu'Ali, fils d'Otbfi&an et petit-fils
d'Abd-el-Hack, fut mis à mort. Il avait tramé un complot con-
tre son oncle, Aboo-Yahya, el celui-ci, en ayai>t eu connais*
sance, recommanda secrètement à sou fils, Aboo*Hadid-Miftah,
de le débarrasser d'un parent aussi dangereux. Ali fui assassiné
aux environs de Miknaça (Mequinez), l'an 654 (4953).
PftISB M SlDilLHBSSA BT COKQDÉTB DBS BtGlOAS
»U SDIK
Les descendants d'Abd-el-Moumen ayant enfin perd» l'espoir
de reprendre les provinces du Maghreb que les Mérinides
avaient enlevées, consacrèrent alors leurs efforts b la conserva*
lion du territoire qui leur restait encore et qui ne manquait pa»
d'exciter la convoitise de l'ennemi.
Tout le Tell maghrébin avait subi le joug des Mérinides
quand l'émir Abou-Yahya entreprit une expédition dans les
pays du Midi. En l'an 653 (1255), il se dirigea de ce côté avec
l'intention de conquérir Sldjilmessa, le Der el les contrées voi-
sines. Etant alors parvenu h corrompre Ibn-el-Kitrani *, il se fit
livrer l'olScier almobade qui commandait dans Sidjilmessa et
obtini ainsi possession de la ville. U soumit aussi le Der& avec le
reste de cette région méridionale et en confia le gouvernement à
son fils Aboo-Hadtd.
L'année suivante, El-Morteda plaça le cheikh almohade, Ibn-
Attoucb, à la tôle de l'armée et lui ordonna de partir pour Sid-
jilmessa et d'enlever aux Mérinides les contrées dont ils venaient
de s'emparer. Cet ofiBcier se mit en marche, mais, ayant appris
»• Voy. l. u, i>. 2iîK
44 nSTOI» BB8 BBKBfeEKS.
qu'Ab<m*Yahya et son fils Aboa->Hadtd«*liîftah venaient à sa
rencontre» il s'empressa de rentrer à Maroc.
En 655 (4 857), Abou-Yahya se dirigea contre Yahmoracen et
Ini infligea nn séyère châtiment à Aboo-^Seltt. Il eut même la
pensée de le poursuivrOi mais il en fut détoarné par son fràre
Yaconb-lbn-Abd-el-Hack, qui s'était lié d'amitié avec le chef
abd-el-ouadite. Ayant donc rebroussé chemin « U arriva au vil-
lage de Macarmeda, localité oh je me trouve maintenant; et M,
il apprit que Yaghmoracen avait écouté les sollicitations de
quelques habitants de Sidjilmessa et marchait sur cette ville
avec l'espoir de s'en emparer. U partit aussitôt à la tète de ses
troupes et entra dans Sidjilmessa la matinée du même jour oii
Yaghmoracen s'y présenta. Ce fut avec un extrême chagrin que
l'émir de Tlemcen renonça à l'espoir d'enlever cette place, où il
trouva son adversaire déjà installé. Il livra toutefois aux Méri-
nides plusieurs combats dans lesquels les succès furent balancés
par les revers. Soleiman-Ibn*-Othman-Ibn«Abd-el-'Hack, neveu
de l'émir Abou*Yahya, mourut dans cette campagne. Yaghmo-
racen reprit alors la route de sa capitale et Abou-Yahya se mit
en marche pour Fez, après avoir placé Sidjilmessa, le Derft et le
reste de ce pays méridional sous le commandement de Youçof-
Ibn-Irgacen^. Pour la perception de l'impôt dans les mêmes lo-
calités, il fit choix d' Abd-es-Selam-Ibn-Auraï * et de Dawoud-
Ibn-Yooçof.
HOBT DE l'ÉSÎR AVOU-TIHTA BT ATÈNBnHt DB SON 9UÈKB,
TACOUB-IBH-ABD-BL-HACK.
Après avoir combattu Yaghmoracen à Sidjilmessa, l'émir
Abou^Yahya revint à Fez où il passa quelques jours. Ensuite, il
se rendit de nouveau à Sidjilmessa aGn d'inspecter les loca-
^ Yariaole : Izgacm.
' Ce mot est probablement alicré.
DYKASTIB MfiRINIDB .«-^ àBOU*T00ÇOf-YACODB-IBN-AllD-BL-HACK . 46
hié9 qui ooUTraient cette frontière et il s'en reloorna très-
malade. Il mourut à Fez, dans le mois «de ftedjeb 656 (juillet
A 258), au moment où il allait aooomplir de vastes projets et s'é-
lever au pouvoir suprâme. Conformément à ses dernières to*
lontés, on Tenterra dans le cimetière de la Porte de Fotouh, à
côté du tombeau d'Abou'Hohammed-el-Ficbtali *•
Son fils Omar, se voyant soutenu par tous les Mérinides de la
classe inférieure, voulut s'emparer du commandement, mats il
ne put obtenir l'appui ni des cheikhs, ni des hauts fonctionnaires
dont les vœux favorisaient son oncle, Yaooub«lbn-Abd-el«Hack.
Quand celui-'ci apprit la mort de son frère, il quitta Tèia en toute
bAte et se rendit à Pec, où tous les grands de la tribu le reçurent
avec les plus hauts égards. Cet accueil excita la jalousie de son
neveu Omar qui, ayant prêté Poreille aux conseils de ses parti-
sans, résolut de l^sassiner. Yacoub se vil donc obligé de se ré*
fugier dans la citadelle ; et, ii la suite d'un arrangement auquel
«es amis et ceux d'Omar travaillèrent également, il renonça à hi
prétention de commander en chef et accepta le gouvernement de
Tèza, du territoire des Botoula et de celui du Molouïa. Quand il
fui arrivé à Tèza, il se vit entouré de tous les chefs mérinides
et, vaincu parleurs r^roches, il prit la résolution demdttreà
l'épreuve leurs promesses d'appui et leurs assurances de dé*
vooemenl. Ayant annoncé sa résv>lution de saisir le pouvoir, il
reçut leur serment de fidélité et se mit en marche pour Fei.
Omar, à la tête de ses partisans, alla au-devant de lui jusqu'à
Mesdjidein ; mais, quand les deux armées se trouvèrent en pré-
sence, il vit la sienne prendre la fuite. Alors il se hala de rentrer
h Fez et fit avertir son onele qu'il était prêt à abdiquer, pourvu
qu'on lui accordât le gouvernement de Miknaça [Mequinez?].
Cette proposition fut agréé et Abou-Youçof^Yacoub, fib d'Abd-el-
Hack, entra dans Pez avec les honneurs de la souveraineté. Ceci
se passa en Tan 657 (4259). Tout le Maghreb, depuis le Mdotiïa
jusqu'à rOmm*Rebïa, et depuis Sidjilmessa jusqu'au Casr-
Kclama, reconout rauiorilé du nouveau sultan.
•»-
* Voy. ci- devaul, p. 3S.
/
/
16 BiSTOItB ftfiS BBRBfitn:
Omar ne reista pas longtemps en possession de Miknaça, ayant
été assassiné, Tannée suivante, par trois de ses cousins parce
qu'il avait versé le sang d'un de leurs parents. Les auteurs de
cette vengeance étaient Omar-Ibn-Othman-lbn-Abd-el-Hack ,
son frère 1brahtmetEl-Âbbas-Ibn*Mohammed-Ibn'-Abd-el-Hack.
Débarrassé alors d'un rival redoutable, l'émir Yacoub consolida
promptement son autorité et n*eut plus à craindre aucun compé-
titeur.
Aussitôt que Yaghmoracen eut appris la mort de son adver-
saire, Abou-Yahya, il rassembla les Beni-Abd-el-Ouad et fit
lever des troupes chez les Toudjtn et les Maghraoua. Son inten*
tion était' d'envahir le Maghreb ; mais, pendant qn^il encoura^
geait ses soldats par la perspective d'un riche butin, il ne se
doutait pas qu'il allait les entraîner dans une tanière de lion.
S'étant avancé jusqu'à Keldaman, il eut une rencontre avec l'ar-
mée du sultan Abou-Youçof- Yacoub et, ne pouvant lui résister,
il abandonna le champ de bataille et opéra sa retraite en bon
ordre. Traversant le pays des Botouïa, il brûla et dévasta tout
ce qui se trouvait sur son passage.
Le sultan Yacoub rentra à Fec , et, pour se conformer aux
desseins de son frère, il se mil à conquérir les villes et les cam-
pagnes du Maghreb. Dans le commencement de cette entreprise,
il obtint du ciel la faveur d'expulser les chrétiens de Salé et de
s'acquérir ainsi une gloire immortelle.
LA VILLE DE SàLÉ, SUKPRrSE PAft LES CHBfiTIBllS, EST BtLrfRfiB PAR
LE SULTAN ABOU-TOUÇOP.
Quand l'émir Abou-Yahya s'empara de Salé, il en donna le
commandement à son neveu, Yacoub-Ibn-Abd-Allah. Les AJ-
mohades reprirent la ville peu de temps après, et Yacoub se mit
& en parcourir les environs, dans l'espoir de pouvoir surprendre
la garnison et les habitants de la place. Après l'inauguration do
son onde, Abou-Youçof , il s'offensa de quelque injustice que ce
prince lui avait faite et alla se fixer à Gheboula. Pour accomplir
DTNASTIR UfiRINIDB. ABOU-TOUÇOF-YACOUB-IBN-ABD-EL-HACK. 47
, ses projets de yengeance, il employa d'abord toute son adresse
afin de rentrer en possession de Salé el de Ribat-el-Fetb» Ses
stratagèmes lui réussirent, et le gouverneur, Ibn-Yâkra, s'em-
barqua pour Âzemmor avec tant de précipitation cp'il abandonna
ses trésors et son harem.
Devenu encore maître de Salé, Yacoub»Ibn-Âbd-AiIah voulut
se mettre en mesure de soutenir un# lotte contre le sultan et fit
un contrat avec des négociants Mropéeus pour la fourniture
d'une quantité d'armes. En l'an 658 (4260), le port se remplit
tellement de leurs navire» que le nombre des matelots dépassa
celui des habitants de la ville. L'occasion fut trop favorable aux
infidèles pour être négligée ; et, h la fin de Ramadan (commen-
cement de septenbre), pendant que tout le monde était à célé-
brer la fête de la rupture du jeûne, ils s'emparèrent de la ville,
enlevèrent les femmes et mirent tout au pillage. Yacoub-Ibn-
Abd-Âllah s'enferma dans Ribat et expédia un courrier au sultan
Abou-'Youçof pour l'informer de ce malheureux événement et
pour lui demander secours.
Abou-Youçof était à Tèza, d'où il surveillait les démarches
de Yaghrooracen, quand cette nouvelle lui fut apportée. Il ras-
sembla aussitôt ses hommes de guerre et partit au grand galop ;
de sorte qu'au bout do vingt-quatre heures, il arriva sous les
murs de Salé*. De nombreux renforts, tant de troupes soldées que
de volontaires, accoururent auprès de lui ; et, après avoir as-
siégé la ville pendant quatorze jours, ils l'emportèrent d'assaut
et massacrèrent tous les infidèles qu'ils purent atteindre. Le sul-
tan donna ensuite l'ordre de fermer par un ouvrage en maçon-
nerie la brèche de la muraille occidentale qui avait permis à
l'ennemi de pénétrer dans la place ; et, pour mériter encore plus
la faveur divine, il y travailla de ses propres mains. Ayant alors
placé une garnison dans Ribat-^l-Feth, forteresse que Yacoub-
Ibn-Abd-Allah avait abandonnée par crainte de sa colère, il se
* Entre ces detix villes, il y a cinquante-cinq lieues de distance en
ligue directe.
48 BiSTOIRB'DEfl BBlVtlKS.
remit en campagne pour soumettre la province de Temstia et la.
ville d'Anfa.
Taooub se réfugia dans Aloudan, ch&teau situé sur une des
montagnes des Ghomara, et y fit les préparatifs d'une vigou*
reuse résistance. Le sultan ordonna à son fils, Abou-Malek-Abd-
el-Ouahed, de partir avec Ali-Ibn-Ztan et de mettre le siège
devant cette forteresse, pendant qu'il se rendrait lui-même au-
devant de Yaghmoraeen afin de négocier une suspension d'ar-
mes avec les Abd-el-Ouad. Il rencontra ce chef à Ouamharman
et conclut avec lui un traité de paix avant de rentrer en Ma*
ghreb.
Ensuite eut lieu la révolte des Aulad-Idris, neveux du sultan,
lesquels, s'étant retirés dans le Casr-Ketama avec leurs gens et
partisans afin de soutenir la cause de leur cousin, Yacoub-Ibn-
Abd-Alfah, avaient pris pour chef leur frère atné, Mobammed-
Ibn-Idrts. Le sultan AboU'-Youçof marcha contre eux et les con-
traignit à se jeter dans les montagnes des Ghoroara. Etant en-
suite parvenu ii dissiper leurs appréhensions, il les attira auprès
de lui; et, en Tan 660 (4264-2), il plaça Amer^Ibn-Idrts, Tun
de ces frères, à la tête de plus de trots mille volontaires mé-
rinides auxquels il avait fourni des chevaux et des fonds pour
les mettre en état de faire la guerre sainte. Ce fut \h une bonne
œuvre, digne d'aller de pair avec celle de la reprise de Salé.
Cette troupe fut le premier détachement des Beni^Mertn qui
passa en Espagne ; elle s'y distingua par son zèle et ses bons
services, donnant ainsi un exemple que leurs successeurs dans
la même voie s'empressèrent d'imiter.
Yacoub-Ibn-Abd- Allah refusa de faire sa soumission et il ne
cessa de courir le pays jusqu'à l'an 668 (4269-70), quand il fut
tué à Saguïa-Ghaboula, près de Salé. Il mourut de la main de
Talha-lbn-Hohalli, qui délivra ainsi le sultan d^n grand em-
barras.
Quant au khalife El-Morleda, il avait essuyé tant de revers
dans ses rencontres avec les Morinides qu'il s'était résigné à
rester derrière les murailles de Maroc, sans chercher à com-
battre et sans désirer l'honneur d'assister à une bataille. Il per-
^TNASTiB ■fiRlHIDB.-'— ABOU-TOCÇOF-TiCOUB-lBN-ABD-IL-HACK. Id
mit amsî aux BeAÎ-Merin de s'acharner sur les débris de soti
empire ei de venir Tattaquer dans sa capitale.
sitQB DB KABOC PAB LB SULTAN iBOU-'TOUÇOlP-TACOUB-IBN'ABD-^BL-
HACK. — RtTOLfB D*ABOU*DBVBOUS BT MORT D'BL-VOBTBDA.
Le sultan, ayanl étouffé les révoltes suscitées par quelques
Biembres de sa propre famille, convoqua toutes les forces de sa
nation, afin d'assiéger E4-Morteda et les Almohades dans ki
capitale de leur empire. Il sentait bien que c'était là le merlleui*
moyen de r^iverser leur pouvoir et de fortifier le sîen. Aussi,
en l'an 660 (1261-2), il rassembla les Mérinides, réunit les con-
tingents fournis par les autres peuplades de ses états , et, s*étant
mis en marche dans le meilleur ordre possible, ii s'avança jusqu'à
Iglfz, endroit d'où l'on pouvait voir la résidence des khalifes
almohades. Etant ensuite descendu dans la plaine, il forma ie
blocus de la ville.
Pour repousser cette attaque, £l-Morteda fit choix de son
cousin, le ctd Abou-4-Ola-Idi4s, surnommé Abou-Debbous, fils
du ctd Abou-Abd-Aliah, fils d'Abou-Hafs, fils d'Abd^l-Moumen.
Ge prince disposa sa cavalerie en bon ordre, fonna ses troupes
en colonne et sortit de la viHe pour livrer bataille aux Mérinides.
Des deux cAtés, l'on so battit avec un acharnement extrême ,
mais les Mérinides, ayant enfin perdu l'émir Abd-Allah, fils de
leur souverain et surnommé Àttuijoub * dans leur idiome bar-
bare, en furent tellement consternés qu'ils abandonnèrent leurs
positions et prirent la route de leur payn. Arrivés à l'Omm-
Bebiè, ils trouvèrent une armée almobade, sous les ordres de
Yahya*lbn-Abd-Allab-Ibn-Ouano«dtB, qui se tenait prête à leur
en disputer le passage. Le conflit s'engagea dans le lit même de
la rivière el finit par la déroute des Almohades. Comme les sol-
* Atâd^oub, Tadjoub et Dadjoub sont aiitabt de formes berbérisées de
l'adjectif arabe aàfib (merveilhux),
T. IV. 4
n
50 HISTOIRE DES BBRBltRES.
dats y avaient remarqué des petits îlots que Teau avait laissés
à découvert et qui avaient tous la forme d*un pied [ridjel) sor-
tant de Veau, ils donnèrent à ce combat le nom de la bataille de
la mère aux deux pieds [Omm-er-Ridjelein) [au lieu de rap-
peler la bataille de VOmm'-Rebiû].
Quelques intrigants essayèrent alors d^indtsposer El-Morteda
contre son cousin et général, Âbou-Debbous, qu'ils dépeignirent
comme un ambitieux^ prêta s'emparer du trône. Instruit de ces
menées et craignant la colère irréfléchie du khalife, le caïd
Abou-Debbous se retira, Van 661 (1262-3), auprès du sultan
Abou-Youçof-Yacoub, qui venait de rentrer à Vet après sa ten-
tative contre Maroc. Quand il eut passé quelque temps chez son
protecteur, il lui demanda de Targent, un équipage royal et un
corps de troupes ; lui promettant, en retour de cette faveur, la
moitié du butin et du territoire dont il pourrait effectuer la con-
quête. Abou-Youçof mit à sa disposition cinq mille guerriers
Mérinidos, une grosse somme d'argent et un équipage magni-
fique ; il invita même les Arabes et les autres tribus de son em-
pire à prêter leur concours au prince almohade. Ce fut à la tête
de cette armée qu'Abou-Debbous se présenta devant la capitale.
Les partisans qu'il y avait conservés et une faction almohade
dont il avait gagné l'appui, prirent les armes sur une invitation
secrète qu'il leur adressa et chassèrent El-Morteda hors de la
ville. ,
Le khalife déchu courut à Azemmor dans l'espoir de se faire
soutenir par son gendre, Ibn-Attouch, qui gouvernait cette place;
mais ce traître le fit aussitôt arrêter afin de l'envoyer auprès
d'Abou-Debbous, qui venait de s'installer dans la capitale. Ceci
se passa dans le commencement de l'an 665 (oct. 4266). Moza-
hem, affranchi de l'usurpateur, alla à la rencontre d'Ël-ltforteda ;
et, l'ayant trouvé en chemin, il lui coupa la tête.
Voilà comment Abou-Debbous arriva au khalifat et s'empara
des débris de l'empire qu'Abd-el-Moumen avait fondé. Ayant
reçu du sultan mérinide l'invitation de remplir ses engagements,
il s'y refusa avec beaucoup de hauteur et de la manière la plus
offensante. Abou-Youçof partit avec ses troupes mérinides et
k
DYNASTIE HfiBITflDB. ABO0--YOUÇ0T-YACOnB-^IBK-ABD*fiL-nAGK. 51
Tnaghrebines afin de se venger ; el, pendant plusieurs jours, il
tint son adversaire assiégé dans Maroc. Ensuite, il se mit à par-
courir les contrées voisines pour en détruire les moissons et
enlever les vivres. Abou-Debbous, ne pouvant plus se mesurer
avec lui , invita Yjghmoracen-Ibn-Zîan à dégager la ville en
dirigeant une attaque contre le territoire mérinide. Il espérait
qu'une démonstration de cette nature paralyserait les efforts du
sultan et Tobligerait à lever le siège afin de courir à la défense
de ses frontières.
LE SVLTAir ABOU-TODÇOV RENCONTBB TAGHHOBACBlf A TELAGB BT
LUI LIVBS BATAILLE.
Pendant que le sultan Abou-Touçof-Tacoub-Ibn-Abd-el-Hack
tenait Maroc assiégé et se disposait à saisir celte riche proie,
Abou-Debbous ne vit d'autre moyen de salut que d'inviter
Yaghmoracen et les Beni-^Abd-el-Ouad à opérer une diversion
en sa faveur, par une démonstration hostile conlre le territoire
mérinide. Cette prière fut accompagnée d'un cadeau. Le seigneur
de Tlemcen y répondit avec empressement • et, pour dégager le
souverain almohade, il fit plusieurs courses dans les provinces
maghrébines où il mit tont h feu et à sang. En attaquant ainsi le
sultan mérinide, il irrita un lion terrible et éveilla un esprit dont
les résolutions étaient inébranlables. Abou-Touçof leva anssitAt
le siège de Maroc, revint k Fez et, après y avoir passé quelques
jours à faire les préparatifs d'une expédition et k réorganiser
son armée, il partit au commencement de l'an 666 (sept. -octo-
bre 4267) et marcha sur Tlemcen. Après avoir traversé succes*-
sivement la ville de Guercff et la plaine de Tafrata, il rencontra
les troupes de son adversaire auprès de la rivière Telagh. Pen-
dant que les guerriers des deux armées se mettaient en ordre
de bataille, leurs femmes couraient de rang en rang, la figure
découverte et, par leurs cris, leurs gestes et leur aspect, elles les
animaient au coftibat. Vers le soir, les Abd-el-Ouadites, accablés
1
52 HISTOIRE DES BBRBÈMBS.
par la multitude des troupes maghrébines, cédèrent le terrain et
finirent par tourner le dos. Abou-Haf8*Omar, fils atnë de Yagb-
moracen et son successeur désigné , perdit la vie dans cette
journée, ainsi que plusieurs autres membres de la même famille.
Yaghmoracen couvrit lui-même la retraite de son armée et la
ramena à Tlemcen sans l'avoir laissé entamer. Les Abd-el-Ouad
rentrèrent dans leur capitale au mois de Djomada [second] de
cette année (mars 1268), et le sultan Abou-Youçof-Yacoub alla
reprendre le siège de Maroc.
LR SULTAN TACOUB ST EL - HOSTANCER , RRALIFE DE TUIflS , S Rlf-
TOIBNT DES AMBASSADES ET CONTRACTBIfT ENSEMBLE LN TRAITÉ
DR PAIX.
L'émir Abou-Zékérïa-Yahya, fils d'Abd-el-Ouahed, fils d'A-
bon-Hafs, s'était déclaré .indépendant , è Tunis , en Van 625
(1228); et, depuis cette époque, il ambitionnait la possession
de Maroc, capitale du royaume des Almohades, siège de leur
kbalifat et berceau de leur puissance. Avec Tassistance des Ze-
nata, il espérait effectuer cette conquête ou, tout au moins,
affaiblir la puissance de la dynastie d'Abd-el-Moumen et re-
pousser les attaques que les souverains de celte famille pour-
raient diriger contre lui. En Tan 640 (1242-3), il s'empara de
Tlemcen, admit Yaghmoracen-lbn-Ztan au nombre de ses parti-
sans et forma avec lui une alliance défensive.
A Tezemple de Yaghmoracen, les chefs des Beni-Merîn se
mirent en relation avec le souverain de Tunis pour traiter la
question qui l'intéressait le plus, et ils lui promirent, comme
une chose très-facile, de le garantir contre les efforts du gou-
vernement almohade et de faire reconnaitre son autorité dans
Fez, Mequinez, EUCasr et les autres villes du Maghreb qui
pourraient tomber en leur pouvoir. Le monaïque hafside, de
son celé, leur fit parvenir de riches présents avec des lettres
très-flatteuses et accueillit leurs envoyés de la manière la plus
DTNASTIB MÉRIIflDB. — ABOU-TOUÇOP-TAGOUB-IBN-ABD-BL-BICK. 53
honorable. Tenant ainsi h leur égard une conduite entièrement
opposée à celle que suivaient les descendants d'Âbd-el-Moumen,
il les encouragea à lui écrire souvent et à lui envoyer leurs pro«
elles parents comme ambassadeurs. Son fils, El - Hosiancer,
adopta le même système ; bien plus, il poussa les Mérinides k
entreprendre le siège de Maroc et promit de faire les frais de
l'expédition. Effectivement, il leur expédia, selon son habitude
invariable, plusieurs charges d'argent et d'armes, ain»! qu'un
grand nombre de chevaux de somme parfaitement équipés.
Quand Abou-Debbous rompit ses engagements avec les Hé<*
rinides, le sultan Abou-Youçof-Yacoub résolut d'aller l'assiéger
dans Maroc ; mais, avant de se mettre en campagne, il envoya
une ambassade au khalife El-Mostancer pour l'instruire de ce
qui venait de se passer et pour obtenir adroitement un envoi de
fonds. Amer-Ibn-Idrts-lbn-Abd-el-Hack, neveu du sultan, &i
partie de cette députation , ainsi qu'Abd-Allah-Ibn-Kendouz
]'abd-el*ouadite, chef des Beni-Gommi et ennemi juré de la fa-
mille de Yaghmoracen. Nous avons déjk mentionné que Yagh-
moracen avait fait tuer Kendouz, père d'Abd-Allah, pour venger
la mort du sien *. Nous devons ajouter qu'Abd*AUah arrivait
justement de la cour d'El-Moslancer ei avait trouvé une hono-
rable réception chez le sultan mériniJe. Le troisième membre
de la députation fut le secrétaire Abou-Abd-Allah-Mohammed-
Ibn-Mohammed-el-Kinani, ancien protégé et serviteur de la fa-
mille royale des Almohades, lequel, ayant vu la puissance de ses
maîtres prête à s'écrouler, avait passé du côté de l'émir Abou«-
Yahya, frère et prédécesseur du sultan Abou-Youçof. Son nou-
veau patron l'installa dans la ville de Mequinez et s'en fit un
compagnon et un ami. En un mot, le sultan Âbou-Youçof composa
cette ambassade de diplomates habiles et d'orateurs distingués
afin de la rendre digne de lui. En l'an 665 (1 266-7), les envoyés
arrivèrent à la cour d'El-Mostancer et communiquèrent à oà
prince Tobjet do leur mission ; ils lui annoncèrent, en mémo
» Voy. t. m, pp, 3i9, «92.
5i HISTOIRE DES BERBÈEES.
temps, le prochain triomphe des Hérinides et i'échec que le soi*
tao de Maroc allait éprouver d&zîs sa carrière.
EUMostaucer fut teilement ému de cette nouvelle qu'il tres-
saillit sur son troue et, dans l'excès de sa joie, il accabla les en-
voyés de prévenances et de marques d'honneur. Aussitôt après
l'audience, il donna h l'émir Amer-ibn-Idrts et au cheikh Abd-
AIlah-Ibn-Eendouz leur congé de départ; mais il garda EU
Kinani auprès de lui, afin de le renvoyer plus tard en Maghreb
avee une ambassade hafside.
El-Kinani resta assez longtemps avec le sultan, et ce ne fut
que vers la fin de l'an 669 (juillet- août 4271) et après la prise
de Maroc, qu'il partit pour le Maghreb avec les envoyés du gou*
vernement hafside chargés de se rendre à la cour du sultan
Abou-Youçof-^Yacoub. Cette ambassade se composa d'Abou-
Zékérïa-Yahya-lbn-Saleh le hintatien, grand cheikh des Almo-
hades [hafsides] et de plusieurs autres personnages appartenant
au même corps. Elle devait présenter au sultan plusieurs che-
vaux de race et une quantité d'armes et d'étoffes d'un travail
admirable ; tous les objets enfin pour lesquels on connaissait sa
prédilection ei dont on savait que la possession lui ferait plaisir.
Ce cadeau fut très*bien reçu et fit l'admiration du public. El-
Rinani entama alors un sujet très-délicat : l'insertion du nom
du khalife El-Moslancer dans le prône solennel qui se faisait
chaque vendredi dans la grande mosquée de Maroc. Il amena
cette négociation à bonne fin et ce fut avec le plus vif plaisir
que les envoyés de la cour de Tunis entendirent célébrer la
prière publique dans cette capitale au nom de leur souverain. Ils
reçurent alors leur congé et s'en retournèrent enchantés de l'ac-
cueil honorable et bienveillant que le sultan leur avait fait.
Pendant le reste de son règne, El-Mostancer envoya réguliè-
rement des cadeaux au sultan Abou-Youçof-Yacoub. Son exem-
ple fut imité par £l-Ouathec, son fils et successeur qui, en l'an
677 (1278-9), chargea le cadi de Bougie, Abou-'l-Abbas-el-
Ghomari, d'aller présenter au sultan mérinide une collection
d'objets extrêmement précieux. Cette offrande fut très* ad mirée
et rendit le nom du cadi célèbre dans le Maghreb.
DYNASTIE MfiRlNlDB. ABOU-YODÇOF*TACOUB-IBN-ABD-EL*nACK. 56
PUSS DB MAROC* — MORT D'aBOU^DBBROGS BT CIUTB DB l'BIIPIEE
ALliOBADB DU MAGHREB.
Le sultan Abou-Youçof, élêDi rentré de sa dernière expé*
ditiod, crut avoir amorti l'ardeur belliqueuse de Yaghoioracen
et'mid un terme aux manèges dont ce chef s'était servis pour
soutenir son allié Abou-Debboos, prince aussi rusé que lui ; et,
ne s'occupant plus que d'un seul projet, la reprise du siège de
Maroc, il quitta Fez à la tète de son armée, dans le mois de
Cbâban 666 (avril-mai 4268). Après avoir traversé l'Omm-
Rebift, il lança ses escadrons [dans les provinces marocaines]
et autorisa ses cavaliers et ses fantassins à ravager le pays.
Pendant le reste de Tannée , il parcourut ces contrées aCn
d'y détruire les moissons et de tout ruiner. Ayant ensuite atta-
qué et dépouillé les Kbolt, fraction des Arabea^Djochem qui ha*-
bftait Tedb, il s'avança jusqu'au Ouadi-'l^AMd et, de U, il alla
dévaster le pays des Sanhadja*
Sa cavalerie ne cessa d'insulter et de saccager les provinces
marocaines jusqu'à ce que les descendants d'Abd«^UMoumen et
les Alûîobades en furent consternés. Sur la prière de leurs
alliés, les Djochem, ils se décidèrent enGn à faire marcher le
khalife en personne contre les envahisseurs. Ce prince quitta
Maroc ii la tôte d'une nombreuse armée et tAcha d'atteindre
Abou*Touçof qui, voulant éloigner son adversaire des localités
où il pourrait trouver des ressources, l'attira par une fuite si-
mulée jusqu'au bord de l'Aghfou. Alors lesMérinides firent volte-
face et mirent en déroute les troupes marocaines. Abou-Dobboos
s'enfuit du champ de bataille et prit la route de sa capitale ; mais
il fut jeté à terre par un coup de lance, et il y resta étendu, la
figure dans la poussière. Le soldat qui le frappa lui coupa la
tête. Amran, vizir du khalife, et Ali-Ibn-Abd-Allah-el-Maghtli,
son secrétaire, se firent tuer sur le corps de leur maître.
Les Almohades, informés que le sultan Abou-Youçof- Yacoub
marchait sur Maroc, se réfugièrent sur la montagne de Tinmelel
et proclamèrent khalife un frère d'El-Morteda, nouimé ishac.
5& HtSTOIBE 08S BBRBtKBS.
Ce fantdme de souverain y resta quelques aooées ; maisi en 67#^
(.4.275-6), il tomba entre les mains des Mérinides etrfirt eonduif,
avec son cousin^ AbourSaid-Ibn^Âbi-'r-Rebià-el-Cabaïli^ et ses.
enfants, devant le snltanqui les fit tous mettre amorti Ainsi
finît la dynastie fondée par Abd-el-Moumen.
Après la défaite de l'armée commandée par Abou-Debbous-,
les grands officiers de Tempire et les membres du conseil gou-
vernemental allèrent ai^- devant du sultan et implorèrent s»
miséricorde. Touché de leurs supplications, Abou-Yooçof leur
accorda une amnistie générale , et, les ayant fait marcher k s»
suite, il entra dans Maroc au milieu d^une foule immense qui
était sortie pour le recevoir. Ceci eut lieu^ au commencement de
l'an M8 (septembre 1269).
Devenu matlre di> royaume qui avait appartenu aux enfanta-
d'Abd-el-Moumen, le sultan Abotb-Touçof-Yacoub, fils d'Abd-
el-Hack, étendit son autorité et sa protection sur tous les peuples
du Maghreb^ et il resta dans la ville conquise jusqu'au mois de
Ramadan (avril-mai 4270). Diaprés ses instructions, son fils,
Abou-Malek, envahit la province de Sous et la parcourut dans
tous les sens afin d'en achever la soumission. Bn quittant Maroc,
le suUan prit la route du Derâ et, dans une bataille qu'il livra^
aux Arabes de cette province* et dont on garde encore le souve-
nir, il leur fit éprouver des pertes qu^ils ne purent jamais ré-^
parer. Après une absence de deux mois, il revint à Maroc et,
comme il avait l'intention de se rendre à Fez, si^e de son em-
pire, il confia le gouvernement de l'ancienne capitale almohade
ei des provinces environnantes à Mohammed-Ibn-Ali, chef tout
dévoué aux Mérinides et allié, par mariage, à la famille de leur
souverain. On verra, dans le chapitre que nous consacrerons à
cet officier, qu^il était membre du corps des vizirs. Le sultan
« Dans le texte arabe, lisez I^Axi».
* loi, le texte est altéré : il fdut lire, avec le Cartas, tjy — nJt Jt
tj^ ^'^^. Ces nomades avaient commencé à dévaster la province e|
à slempaccr des bourgs et des cosour.
BT1TA8TIB MtUlIlDBv — ABOU-YOUÇOF^TACOU»-IBN-ABIHBL*HACK. 57
l'ÎDStaUa dans la citadelle, plaça sous ses ordres les iroapes qui
occupaient les pays voisius et \e chargea de réduire les localités
qui n'avaient pas encore fait leur soumission et d'exterminer ce
qui restait de la famille d'Abd-el-Moumen. Il prit alors la route
de Fez ; et, arrivée Salé, il s'y reposa cpelque temps.
U SULTAir DÉSIQ1VB 80H FILS, IBOU - MALBK , GOVIIB BtBITIBR DO
TB^« — LBS AULAD-IDftts, MBSBRBS DB LA FAXILLB BOTALB ,
SB mftVOLTBlIT BT PASSBIfT . BR B8PA6KB.
Revenu de son expédition victorieuses le sultan Abon-Touçof-
Yacoub s'arrêta à Salé pour donner du repos à son escorte. Il y
était encore, quand il ressentit un accès de fièvre ; et, lors de sa
convalescence, il convoqua les principaux membres de sa tribu
et leur déclara qu'ayant reconnu dans son fils aine, Abou-Malek-
Abd-el-Ouahed, toutes les qualités requises pour commander à
une nation, il le nommait son successeur. Alors, sur sa demande,
les assistants offrirent leurs hommages au jeune prince et ce fut
de très-bonne volonté qu'ils lui prêtèrent le serment de fidélité*
Les Aulad-Abd-Allah et les Aulad-Idrts, neveux du sultan et
petit-fils de Sot-en-Niça, furent les seuls de la famille royale
auxquels cette nomination ne plut pas. ils virent avec peine le
commandement se perpétuer dans la branche cadette et échapper
à eux-mêmes qui formaient les deux branches aînées. S'imagi-
nant que la priorité de naissance devait donner la priorité de
rang et qu'ils avaient ainsi plus de droits au pouvoir que les
autres membres de la famille, ils cédèrent à la jalousie, se reje-
tèrent dans leurs anciens égarements et refusèrent leur adhésion
au choix du sultan. Etant allés se retrancher dans l'Aloudan,
une des montagnes du pays des Ghomara, ils s'établirent dans
le même nid [de sédilion] où ils avaient déjà couvé la révolte et
* L'auteur^ ou son copiste, a fort maladroiiement employé ici les
mots ribat-el ^feth. Celte eipression, outre la significatioD que nous
venons de lui dooaer, sert de nom à la citadelle yis-à-vis de Salé,
58 mtrof» dm ntmktkus.
fait oaltro b rébellion. A eelie époque, e'est-à-dire en 669
(1270-4), les chefs do ces doux fsmill^i élaieot Mohammed-lbo-
îdrls et Mouç«*lbQ-R9hbou-Iba--Abd'AUah. En partant pour
Aloudati, iU eûtratoéreot arec eux do de leara parents, liU
d'Ahou-Eïad et petit-fils d'Abd-el-Hack.
Aboo-Yacoub-Yoaçof, fils da sultan, reçut alors de son père
le commandement d'un corps de cinq mille hommes et alla blo-
quer les insurgés dans leur forteresse. Bientôt après, il fat rejoint
par un corps d'armée sous les ordres de son frère, Abou-Malek.
Masoud-lbn-Kanoun, chef des Sofyan, vint aussi lui donner
son appui. Le sultan Abou-Youçof arriva ensuite et opéra sa
jonction avec eux à Taferga. Le siège d*Aloudan dura trois jours
et ooûla la vie h Heodll, fils d'Onrtadllm • . Les révoltés, se voyant
cernés de toutes paris, demandèrent grâce, et le sulian s'em-
pressa do leur pardonner. Il les traita ensuite avec tant d'égards
qu'il réussit h éteindre jusqu^aux dernières étincelles de mé-
contentement qui étaient restées dans leurs cœurs ; et, les ayant
ramonés à la capitale, il leur accorda rnutorisalion d'aller à
Tlorocon pour y cacher la honte qu'ils éprouvaient au souvenir
de leur conduite extravagante. Bientèt après, ils reçurent la per-
mission de passer en Espagne, mais Amer-lbn-Idris, sachant
que le sultan avait de l'amitié pour lui, resta dans cette ville
jusqu'à ce qu'il obtint ses lettres de grâce. Après le siège de
Tiemcon, [en l'an 670 (4S72),] il lui fut permis de rentrer dans
le soin de la famille mérintde.
Les Beni-ldrts, les Beni-Amer et leur cousin, Ibn-Eïad, arri-
vèrent en Espagne dans un moment où les provinces de ce pays
avaient besoin de défenseurs, vu que l'ennemi [chrétien] s'a-
charnait sur elles et se croyait sur le point de s'en emparer. La
présence de ces guerriers changea l'aspect des affaires : braves
comme dos lions, ils avaient appris dans la rude école de la vie
nomade â se mesurer en combat singulier avec les adversaires
les plus redoutables et à manier dos épées dont chaque coup
* Voy, ci-devaot, p. 30.
DYNASTIE «fiRlNIDE. ABOU-YOI3ÇÛF-¥A€OlB-inN-AiSD-£L-UACK. 59
donnait la mort, lis allèrent preadre poeition eu avani des ré-
gions les pins exposées et ils en repoossèrcni les infidèles aux*
quels ils laisaieni un mal énorme , aussi les musulmans de ce
])ays d'oulre-mer, affaiblis et opprimés, conçurent encore Tes-
poir de résister au roi chrétien.
Voisins assez incommodes du souverain de l'Andalousie, ces
Mérinides le forcèrent à leur laisser la possession de tout ce
qu'ils pourraient conquérir en pays ennemi, et à leur céder le
commandement de toutes les fractions des tribus berbères qui
étaient passées en Espagne. Us se firent marne accorder une
portion de l'impôt pour leur tenir lien de solde, et, jusqu'à ce
jour, iU ont continué h se distinguer par leur ambition autant
que par leur bravoure. Le lecteur en apprendra davantage s'il
veut parcourir nos chapitres sur les collatéraux de la famille
royale*.
La révolte de ces princes étouISéa, le sultan médita- une expé->
dition contre Tiemcen.
U SOLTAff ABOC-^TOUÇOF HAACBS SUR TLEKGBTV. — DtFAJTB Dl
TAGaaiORACBir a islt.
Le sultan Abou*Youçof, étant rentré h Fez après avoir pris
Haroc et renversé la dynastie d'Abd*el-Houmenf se rappela
avec indignation le trait perfide de Yaghmoracen et des Abd-el«
Ouad par lequel ils étaient parvenus k déranger tous ses plans
et k l'arrêter dans l'exécution de ses projets. Ne se trouvant pas
assez vengé par la victoire qu'il avait remporté sur eux à Te*
lagh, il résolut d'employer la puissance qu'il venait d'acquérir
et de les écraser, en réunissant contre eux toutes les forces du
Haghreb. Ayant fait dresser ses tentes en dehors de Fez, il en*
voya ses vizirs et ses grands officiers à Maroc, avec son fils
Abou-Halek, afin de lever des troupes dans les villes et les cam-
' Voy. les derniers chapitres de ce volnme.
60 HISTOIRE DBS BBEBÈRES.
pagnes des provinces marocaines et de rassembler les contins
genls des peuplades qai habitaient ces centrées. De cette ma-
nière, il se procura une armée composée d'Arabes, de Uasmouda,
de Beni-Oura, de Ghomert, deSanhadja, des débris de l'armée
almobade qui se trouvaient dans Maroc, de la milice chrétienne
et des archers ghozzes, deux corps qui formaient les garnisons
des villes de ces pays.
En l'an 670 (4274-2), il quitta Fez à la tête de ce vaste ras-
semblement de troupes et se porta sur le Molouïa où il fit halte
pour laisser arriver les autres contingents, tels que les Djochera,
peuple arabe établi dans le Temsna et composé de Beni-Sofyan,
de Rholt, de Beni-Âcem et de Beni-Djaber, les Athbedj, les
Doui-Hassan et les Chebanat, tribus makiliennes du Sous-el-
Acsa et les tribus rtahides installées dans les provinces d'Azghar
et d'El-Hebet. Après avoir organisé et passé en revue toutes
ces troupes qui formèrent, dit-on, une armée de trente mille
hommes, il les mit en marche et se dirigea vers Tlemcen. Par-
venu dans l'Angad, il reçut une ambassade envoyée par Ibn-el-
Ahmer et une députation des musulmans d'Espagne, qui vin-
rent implorer son appui et le secours des musulmans du Maghreb
contre les ennemis de l'islamisme. Il fut tellement ému de leurs
plaintes qu'il aurait voulu renoncer à toute autre affaire pour
entreprendre une guerre aussi sainte ; il désira même faire la
paix avec Yaghmoracen et, quand il consulta ses officiers lè-
dessus, il les trouva tous plus disposés h combattre les chrétiens
qu'à faire le siège de TIemcen. Une députation, composée de
plusieurs cheikhs, se rendit, en conséquence, auprès de Yagh-
moracen afin d'effectuer un arrangement entre les deux souve-
rains, en calmant leur animosité mutuelle. Les envoyés trouvè-
rent le prince abd-el-ouadite campé en dehors de TIemcen et
entouré de tout l'appareil de la guerre. Il avait déjà fait ses
préparatifs de marche et tenait réunis sous ses drapeaux les
Beni-Abd-el-Ouad, ses confédérés, les Arabes zoghbiens et les
Zenata de ses provinces orientales, tels que les Beni-Rached et
les Maghraoua. Fier du nombre de ses troupes, il repoussa toute
espèce d'accomodemcnt et se porta au-devant des Mérioides.
DTRAST» HfiElNlDB.-^ABOU-^TOUÇOF-TAGOUB-IBll-ABD-BL-HACK. 64
Ce fut dans la plaine d'Oudjda, auprès de la rivière Isly, que
les deux armées se troavèreni en présence. Le sultan Abou-
Youçof avait déjà rangé la sienne en ordre de bataille et, s'étant
réservé le commandement du centre, il avait placé les ailes sous
les ordres de ses (lis, les émirs Abou-Malek et Abou-Yacoub.
Dans la bataille sanglante qui s'ensuivit, Fares, fils de Yaghmo-
racen et une foule d'Abd-el-Ouadites perdirent la vie. L'armée
de Tlemcen, accablée par les troupes almohades et par les nom-
breuses bandes que les Mérinides avaient levées dans les tribus
du Maghreb-el-Acsa et des provinces marocaines, finit par lâcher
pied et tourner le dos ; mais la milice chrétienne, encouragée
par la présence du sultan Yaghmoracen, tint ferme et se laissa
broyer sous la menle de la guerre. Bîrnebes *, le commandant de
ce corps, fut fait prisonnier. Yaghmoracen, soutenu par une
petite troupe de guerriers, couvrit la retraite de son armée jus-
qu'à Tlemcen , et, en passant auprès de son camp, il y mit le
feu et abandonna à l'ennemi ses tentes et son harem.
Le sultan Abou-Youçof ne partit d'Oudjda qu'après l'avoir
ruiné de fond en comble. Reprenant ensuite sa marche, il ra-
vagea toutes les contrées par où il passa et fit beaucoup de butin
et de prisonniers. Pendant qu'il s'avançait ainsi sur Tlemcen, il
perdit son principal vizir, Eïça-Ibn-Maçaï. Ce hardi cavalier,
dont on rapportait avec admiration les nombreux traits de bra-
voure, mourut dans le mois de Choual de l'an 670 (mai 1272).
Le siège de Tlemcen était déjà commencé quand Mohammed-
Ibn-Âbd-el-Caouï le toudjinide arriva au camp à la tête de tous
les guerriers de sa tribu et d'un cortège militaire dont il se mon-
trait justement fier. Depuis quelque temps, ce chef avait imploré
le secours des Mérinides contre Yaghmoracen qui, par un abus
de puissance, Tavait vaincu, humilié et dépouillé d'une partie
de ses états. Lors de son approche, les troupes du sultan mon-
tèrent à cheval, en grande tenue, et allèrent au-devant de lui pour
ajouter à l'honneur de la réception que leur maître lui réservait.
* Ce nom est, sans doute, altéré.
62 mSTOIRE DES BBftBtoBS.
Mobaiximcd assista au siège pendant plusieurs jours, jusqu'à ce
qu*Abou-Youço{ fut déconcerté par la vive résislanoede la garni-
son et ren9noa à son entreprise. D'après les oonseib de oe prince,
il s'empressa d'emmener les Toudj inides et de rentrer dans son
pays avant que l'armée mérinide eut quitté ses positions. Au
moment de partir, il reçut da sultan, pour lui->méme et ses gens,
une quantité de riches cadeaux, une centaine do chevaux splen-
didement harnachés, un millier de chamelles laitières, un grand
nombre de robes d'honneur, d'habits magniGques, de belles
armes, de pavillons, de tentes et de montures. Abou-Youçof *
resta encore quelques jours sous les murs de Tlemcen, a6n de
protéger les Toodjinides contre Yaghmoracen, qui aurait pu se
mettre h leur poursuite et les atteindre avant qu'ils fussent ren«
très dans le Ouanchcrfch.
Vers le commencement de l'an 671 (août 1272), Abou-Youçof
revint h. Fez ; et, peu de temps après son arrivée, il eutia dou-
leur de perdre son fils et successeur désigné, l'émir Abou-Maiek.
Bio*n que cette épreuve loi fût très-sensible, il la supporta avec
une patience exemplaire, et, reprenant bientôt son ancien train
de vie, il se remit è compléter la conquête du Maghreb. Dans
cette derniëro expédition , il s'était rendu mattre de Taount,
forteresse appartenant aux Matghara, et, comme cette place
touchait à la frontière du pays qui formait le royaume de son
ennemi Yaghmoracen, il l'avait rempli d'approvisionnements et
en avait confié le commandement à Baroun, fils de [Mouça] et
cheikh des Matghara. Ce fut alors qu'il reprit la route de Fez
et qu'il s'empara de Meltla, forteresse située sur le littoral du Rtf.
Haroun s'installa dans Taount et, bientôt après, il y proclama
son indépendance ; mais il y fut si souvent attaqué par les
troupes de Yaghmoracen qu'en l'an 675 (1276-7), il livra la
place et se rendit auprès du sultan Abou-Youçof. Dans notre
chapitre sur les Matghara, nous avons raconté l'histoire de ce
chef*.
* Voy. t. I, pp. 230, 240, où noire auteur place la reddition de
TaouDt en Tan 67'2.
DYT^ASTIB HÊRINIDB. ABOU-YOUÇOF-VACOUB-IBN-ABD-EL-HACK. 63
«
FBISE S>Z TAK6EB. -— CEUTA EST SOUMIS AU
TBKBUT.
Dôpuis ravènemoDt d'Abd*«l-MoumeD,Geuta et Tanger avaient
toujours été regardés comme les gouvernemeats les plus im-
portants de l'empire almohade, puisqu'ils étaient, à la fois, for-
teresses maritimes, ports de mer, arseoaux de oonstroction et
lieux d'embarquement pour ceux qui voulaient prendre part à
la guerre sainte. Aussi, le commandement de ces places fat-i)
toujours donni à des princes de la famille royale. [Par une ex-
ception h cette règle,] Abou-Ati*Ibn->Khalas, natif de Vatence,
fut chargé par Er*Bechtd d'administrer b ville et la province de
Ceuta, ainsi que nous Tavons dit ailleurs * , et, en Tan 640
(1243}^ après la mort de ce khalife, il reconnut pour souverain
Vémip Abou-'ZékérYa, qui venait d^ëriger t'ifrtkïa en royaume
indépendant. Il fit partir son fils Abou-'l-Cacem avec un acte
d'hommage et une somme d'argent destinés au monarque haf-
side, et il confia le gouvernement de Tanger à Youçof -el - Hem-
dani, fils do Mohammed ^lbn-Abd*Aliafa-Ibn*- Ahmed, et sur-
nommé Ibn-el-Amtn*. Cet officier prit le commandement de
la troupe andalousienne qui y tenait garnison et sinstaila dans
la citadelle.
Plus tard, Abou-Zékérïa donna le gouvernement de Ceuta h
son parent Abou-Yahya, fils d'Abou-Zékérïa, petit^fils de Yahya-
es-Chehid et arrière petit-fils d'Abou-^Hafs. A celte époque ,
l'ancieo" gouverneur, Ibn-Rhalas, ne vivait plus: craignant pour
TavofTir et profondément affligé de la mort de ^on fils, qui avait
pérj/dans un naufrage en se rendant auprès du sultan hafside, il
s'hait embarqué pour Tunis et, ayant descendu à Bougie >, il y
a^ait rendu le dernier soupir. Ceci eut lieu en 646 (1248-9}.
« Voy. t. Il,, p. 24Î.
« Voy. t. Il, p. 323.
3 Ou bien à Oran. — Voy, t. n, p. 323.
84 nsTOifte dbs bbkbArbs.
Selon un autre récit, il mourut h bord et fat enterré à Bougiôv
L'année suivante , quand El-Môntecer monta sur le trône,
après la mort de son père, Abou-Zékérïa, les habitants de
Geuta lai refusèrent obéissance, chassèrent leur gouverneur,
Abou-Tahya-Ibn-es-Ghehtd, massacrèrent les fonctionnaires que
ce prince avait à son service et proclamèrent la souveraineté
d'El-Morteda.
Celte révolution eut pour auteur Hadjboun«er-Bendahi, qui
Pavait entreprise à l'instigation d'un homme très-considéré dans
Geuta et président du conseil dos cheikhs. Abou-M-Gacem-^l-
Axéfi, c'est ainsi qu'on le nommait, avait été élevé sous les yeux
de son père, le vertueux et savant jurisconsulte, Abou-'l-Abbas-
Ahmed, et, tant que vécut cet excellent précepteur, dont le sa-
voir égalait la piété, il s^était nourri l'esprit de bonnes études. La
mémoire d'Abou-'l-Abbas fut tellement vénérée et le mérite de son
fils était tellement évident que les habitants de Geuta se lais-
sèrent guider par les conseils de celui-ci dans toutes les affaires
difficiles.
Heureux d'apprendre l'établissement de l'autorité almohade
dans Geuta, El-Morteda accorda le gouvernement de cette ville à
Abou*'l-Gacem-el-Azé& ; et comme il avait une entière confiance
dans le dévouement de ce personnage distingué, il jugea inutile
de le placer sous le contrôle d'un prince de la famille royale ou
sous la surveillance d'un officier almohade. Hadjboun-er-Bendahi
obtint du même souverain le commandement de la Ootte ma^
ghrebine, charge qu'il transmit à ses fils. v
El-Azéfi profita de sa haute position pour susciter ^s em-
barraaaux fils d'Er-Bendahi et il les contraignit enfin à q)|iitter
Geuta. Les uns se rendirent à Halaga auprès d'Ibn-el-Ahni^r ;
les autres allèrent se fixer à Bougie sous le patronage des Hàf*
sides ; et, par les services qu'ils rendirent à leurs nouveaux soii'*
verains, ils se montrèrent dignes de la réputation dont ils jouis
saient comme administrateurs habiles.
Devenu seul dépositaire de l'autorité à Geuta, le jurisconsulte
Abou-'I-Gacem*el-Azéfi la laissa en héritage à ses enfants, ainsi
que nous le raconterons plus loin.
OTNASTlt MiftimOE. — ABOU^T0DÇ0F-tAC0VB-lB!f-ABD-BL*HACK. 65
DttDs tottte» les cirooDStances, Tanger agissaîl comme mie dé*
pendtaoce de Geuta ; aussi, le gouveraenr de cette ^iHe, Ibn-el-
Amb, reeoMtti tout d^ab^rd l'autorité d'Abou-*l»Gacem. H
chADgea cependant d'avis avant Texpiration de l'année et fit
célébrer b prière poUiqne au nom du khalife hafside ; ensuite,
il y proclama la souveraineté des Âbbasides et il finit par se
déclarer souverain indépendant. Pour le reste, il se conduisit
dans Tanger de la même manière cpi'Ibn-el-Azéfi dans Ceuta.
Les choses continuèrent en cet état jusqu'à l'arrivée des Béni*
Iferin qui, s'étant répandus dans le Maghreb, en soumirent tout
le pays ouvert et commencèrent à réduire les châteaux et les
places fortes. Après la mort d'Abou-Tahya-Ibn-Abd^l-Hack,
événement cpii fut suivi p^r ceHe de son fils Omar, les enfants
de cebi«<i allèrent s'établir entre Tanger et Azlla. S'étant cam-
pés dans la plaine avec leurs familles, leurs partisans et leurs
servitenrs, ils commencèrent à^iller les voyageurs, è rançon-
ner les habitants et h saccager le pays. Pour mettre un terme à
cea brigandages, lbn*el-Amtn consentit à leur payer un tribut
annuel tant qu'ils respecteraient son territoire et protégeraient
les voyageurs. Alors, ces Mérinides prirent l'habitude de so
rendre à Tanger pour acheter les objets dont ils avaient besoin,
et ils finirent par organiser un complot afin de s'emparer de la
ville. Un certain jour, ils y entrèrent avec des armes cachées
sons leurs manteaux et assassinèrent Ibn-el-Amîn ; mais, au
même instant, ils furent assaillis à leur tour et massacrés par la
populace indignée. Ceci se passa en l'an 665 (1266-7}. Les ha-
bitants se rallièrent autour du fils d'Ibn-el-Amtn ; mais, cinq
mois plus tard, ils laissèrent tomber leur ville au pouvoir d'El-
Azéfi dont la flotte et l'armée de terre étaient venues en même
temps pour les attaquer. Le fils d'Ibn-el>Amtn s'enfuit à Tunis
et chercha un asile auprès d'El-Mostancer. El-Azéfi établit alors
h Tanger un do ses oiBciers pour y remplir les fonctions de gou-
verneur, et lui adjoignit comme conseillers les notables de^a ville' .
Les manuscrits portent Ail^t; le tradactear lit \^[^\.
T. IV. 5
66 BlfiTOIKB DBS BBKBÈKBS.
En TaD 666 (4267-8], rémir Âbou-Malek assiégea Tanger
pendant six jours sans pouvoir s'en emparer ; mais, [quelques
années plus tard,] le sultan Abou-Youçof, ayant soumis toutes les
provinces du Maghreb, pris la ville de Maroc, renversé la dy-
nastie d'Abd-el-Moumenet réprimé Taudace de son ennemi,
Yaghmoracen, tourna ses regards vers cette forteresse et résolut
de rincorporer dans son empire. Au commencement de Pan 672
(juillet-août 4273), il mit le siège devant Tanger, qu'il regardait
comme la clef de la plaine par laquelle il fallait passer pour at-
teindre Geuta. Quelques jours après, il pensa être obligé à dé-
camper ; mais au moment où il allait pliec, ses tentes, la popu-
lation de la ville fut saisie d'une terreur panique et, pendant le
désordre, une pariie des archers qui garnissaient les remparts
se mit à pousser le cri de guerre employé par les Mérinides. En*
courages par cette démonstration, les plus actifs parmi les as-
siégeants s'élancèrent en avant et parvinrent à escalader les
murailles ; pendant toute la nuit, ces braves eurent à soutenir
les attaques de la garnison, mais, au point du jour, ils furent
dégagés par leurs camarades qui avaient livré un assaut et en-
levé la ville. Le sultan se hâta d'y rétablir l'ordre et de faire
proclamer une amnistie générale.
Ayant effectué de cette manière la réduction de Tanger, Abou-
Youçof plaça son fils, l'émir Abou-Yacoub, h la tête d'une ar-
mée nombreuse et l'envoya contre Geuta. El-Azéfi s'y défendit
vigoureusement pendant plusieurs jours et déclara enfin qu'il
était disposé h payer un tribut annuel, mais qu'il ne consentirait
jamais à se rendre. Le sultan accepta cet offre ; et, quand il eut
ramené ses troupes à la capitale , il tourna ses regards vers
Sldjilmessa, ville qu'il désirait enlever h la domination des Abd-
el-Ouad.
81DJILVBS8A BST PRISB POUR LA SECONDS FOIS, MALGRE LA RÉSIS*
TANCB DBS ABD-BL-OUADITBS ET DES ARABES HONBBBAT.
Nous commencerons ce chapitre par un résumé des faits que
nous avons déjà rapportés au sujet de Sidjilmessa. L'émir Abou-
P DTNASTR- MftRIR IDl . — ABOO-TOOÇOF^YACOUB-IBII-ABB-BL- HACK . 67
Yahya, fils d'Abd-el-Hack, ayant soumis celte ville ella province
da Derfly en confia le commandement ainsi que Vadminislration
de toute la région du Sud k Youçof-Ibn-lzgacen. Il laissa son fils,
Abou-Hadtd-Mif tah, avec cet oflBcier et mit sous leurs ordres
plusieurs cheikhs qu*il avait chargés de la défense du pays. En
l'an 65i (4266)| El-Morteda plaça son vizir, Ibn-Attouch, à la
tAte d'une armée et l'envoya reprendre Sidjilmessa ; mais cet
officier, ayant su que l'émir Abou-Yahya venait à sa rencon*
tr», rebroussa chemin. En 655, après la bataille d'Abou*SeItt,
Yaghmoraoen marchait sur Sidjilmessa avec Tintention d'y pé-
nétrer à l'improviste par un endroit qu'on lui avait représenté
comme mal gardé; mais Abou- Yahya s'empressa d'y arriver
avant lai et déjoua ce projet. Le chef abd*el*ouadite dut effec-
tuer sa retraite, après avoir vu ses espérances frustrées et ses
troupes mises en dérouie.
Iburlzgacen avait gouverné Sidjilmessa pendant un an et demi,
quand l'émir Abou- Yahya le remplaça par Yahya-Ibn-Abi-Hen-
dtl, chef des Beni-Asker. Cette famille mérinide était une branche
collatérale de celle dont l'émir Abou - Yahya faisait partie ,
Mohammed*lbn-Oorziz étant leur aïeul commun. Deux mois plus
tard, Abou-Yah>a Ata le commandement h Ibn-Abi-Mendil et le
confia à Mohammed-lbn-Amran-lbn-Abla, membre d'une tribu
protégée et favorisée par les Mérinides, celle des Irnîan. Il
nomma, en même temps, Abou-Taleb* Ibn-el-Habci receveur-
général des impôts fournis par ces provinces et il chargea Abou-
Yahya-el-Ritrani de l'administration militaire et du commande-
ment des troupes.
Pendant deux années, rien ne se changea dans la position de
ces fonctionnaires ; mais, après la mort d'Abou-Yahya , El-
Kitrani conçut la pensée de se rendre indépendant et, voyant le
sultan Abou-Youçof doublement occupé par le siège de Maroc et
par la guerre contre Yaghmoracen, il forma un complot avec
quelques brigands et, s'étant assuré le concours de Youçof-Ibn-
Feredj-el-Azéfi, il fit assassiner Ammar-el-Ourtedghrabi ', pré-
* L'orthographe de ce nom est incertaine.
68 HISTOIRE DBS BBRBÈRU.
sideal du conseil de la ville. MohaBuned-lbn*AmraD s*enfttii de
Sîdjilmessa en apprenant que les conspirateurs délibér^iient à
son sujet et il alla rejoindre son maitre, le sultan. El-Kitrani
s'empara alors ie l'autorité suprême ; mais, en l^an 658 (4 260)^
environ dix-huit mois après son usurpatiao, il fut tué pir le
peuple qui s'était soulevé au nom du khalife El-Mortada. Ce
mouvement avait été préparé par le oadi Ibn-Haddjadj et par
Ali-Ibn-Omar auquel Ël-Morteda donna ensuite le gouverneinent
de la ville.
En l'an 660 [h 261-2), les Hérinides, commandés par le sultan
Abou-Youçof, parurent devant Sidjîlmessa et dressèrent leurs
machines de siège ; mais la garnison mit le feu à ces engins re-
doutables et se défendit avec tant de résolution qu'elle força les
assaillants à décamper.
Ali-lbn-Omar mourut après avoir exercé les fonctions de gou-
verneur pendant trois ans [et, à la suite de cet événement, les
Arabes Monebbat décidèrent les habitants k reconnaître l'autorité
de Yaghmoracen-lbn-Zian]. Après avoir enlevé Tlemcen et le Ma^
ghreb central à la domination des Almobades, Yaghmoracen avait
rallié à sa cause les Monebbat, peuplade appartenait à la tribu
des Douï-Hansour, branche de la grande tribu des MaLil. Tous
ces nomades avaient pour lieu de parcours dans le Désert le ter*
ritoire qui touchait aux pâturages des Beni-Badtn ; mais ils se
virent forcés d'abandonner cette région quand Yaghmoraœn eut
décidé les Beni^Amer à quitter la partie du Mozab appelée Belad-
Beni-Yeztd pour se rapprocher de lui. Ceux-ci forcèrent la tribu
des Makil à sortir des pays aux environs de Fîgufg et du Za, où
elle s'adonnait à la vie nomade, et la contraignit à se trans-
porter dans la contrée qui est située entre Sidjilmessa et le
Molouïa.
Après l'établissement des Makil dans leurs nouveaux terri-
toires, Yaghmoraœn rompit avec les Doui-Obeid-Allab, une de
leurs principales tribus, et s'attacha les Monebbat qui, depuis
lors, se montrèrent alliés fidèles et partisans dévoués de 1-em-
pire abd-eUouadite.
La ville de Sidjilmessa se trouvant dans la région occupée par
DTNÀSTIB MÉBINIDB. ÂBOC-TOUÇOF-TACOOB-IBN-ÀBD-BL-HACK. 69
fe» Monebbat, servait et lieu 4e patHemeat à leors familles et h
leurs troupeaux ; eUe obéissaii même, jusqu'à on certain point,
aoccordres de^ cette tribv, ce ^ui eut lie« après k mort d'Ali-
Ibft-Qmir, qnmd led Mcuebbst firent reeotiDaUre aux habitants
l'autorité deT Yagkmoraoeft. Sur leur invitation, ce chef partit
a'^v^eo son armée et il arriva chez eux presqu'à l'improviste.
Ayant pris^ possession data ville, il y établit deux gouverneurs,
Yaghmeracen-Ibn'-Hammama* et Abd-el-Helek. Celui-ci étaiifils
de M obafiMued -> ïbn - Ali - Ibn -CaoeDd- Ibn-Derâ, l'un des Beni-
Vobammed-Ibn-Zegdan-lbn-ttdoukcen, et il portait le surnom
de Fils de HanUia» Sa mère, Hanîna, était soaur de Yaghmora-
een.
. Avec ees deux officiers, le chef abd-el-onadiie y laissa son
jEts, Pëmir Yakya, comme représentant de t'avtorité royale.
/Douze meiis plus lard, Yahya fut remplacé par son iîrèi^,
parce que Yaghmoracen avftit pour habitude de faire alterner
ses enfants dans le commandement à l'expiration de chaque
année.
Le sultan Abon-Youçof étant enfi» parvenu h efiactuer la con«
quéie Al Maghreb, en réduisant les villes de ce pays, en renver-
sant la djnestie d'Abd-el-Moumen, en* s'emparant du siège du
klalifat almohade, eo prenant Tanger d'assaut et en faisant ca*-
pituiler Geuta, port d» passage et boulevard de la frontière, con-
çut alors l'espoir de soumettre les pays du Sud et d'enlever Sid-
jiimessaarux Beni-Abd-el-Ouad. Aussi, dans le mois deBedjeb
672 (janv.-fév. i'274), il se dirigea contre cette ville, k la télé de
tous les contingents du Maghreb : ks Zenata, les Arabes et les
Berbère» marchèrent sous ses ordres, ainsi que les troupes Mé-
rînides et les divers corps de milice. Arrivé dans le voisinage de
la ville, il dressa contre elle ses machines de siège, telles que
catapultes, balistes et l'engin à feu qui lance du gravier de fer.
Cette mitraille est chassée hors de Tàme de la pièce par le moyen
' Dans le texte arabe , il faut lire» avec les œaouscrils,
70 HISTOIBB DIS BBKBÈMS.
de là poadre enflammée dont la propriété singulière opère des
effets qui rivalisent avec la puissance du Créateur ^
Tous les jours, pendant une année entière, le sultan continua
ses aUa<}ues ; et un pan de mur de Tenceinte ayant été abattu à
coups de pierres lancées par ses catapultes, il fit doûner l'assaut
et emporta la place. Cet événement eut lieu dans le mois de Safer
673 (août-sept. 4274). La garnison fut passée au fil de Pépéeet
les habitants furent réduits en esclavage. Les deux gouverneurs,
Abd-el-Melek-lbn-Hantna et Ydghmoraoen-Ibn-Hammama, per-.
dirent la vie ainsi que tous les Abd-el-Ouadites et tous les émirs
des Monebbat.
De cette manière, le sultan Abou-Youçof acheva la conquête,
du Maghreb. Dans tout ce pays, il ne resta plus une seule place
qui reconnût une autre dynastie que la sienne, plus un, seu^
homme qui osftt fixer ses espérances sur un autre prince que
le sultan mérinide. Ce fut ainsi que Dieu mit le comble à ses
grâces en accordant à Abou-Youçof la totalité du royaume da
Maghreb.
Pour témoigner sa reconnaissance de tant de faveurs, ce mo-
narque résolut d'aller combattre les ennemis de Dieu et d'aider
les musulmans d'outre«mer à secouer le joug qui les accablait.
En conséquence de cette détermination, il s'en retourna de Sid-.
jilmessa à Maroc et, de là, il se rendit à* Salé. Peudant le peu de
jours qu'il passa dans cette dernière ville afin de se reposer et.
d'en examiner les ressources tout en faisant restaurer les forti-
fications, on vint lui annoncer qu'Abou-Taleb-el-Azéfi était ar-
rivé i Pez chargé d'une mission de la part de son père, Abou-'l-
Cacem-ei-Azéfi, seigneur de Geuta. Il se hâta aussitôt vers cette
capitale, afin de recevoir l'envoyé ; et, l^ayant accueilli avec de
grands égards, il le congédia chargé de dons et pénétré de re-
connaissance.
Alors il se disposa à faire passer son fils en Espagne pour y
* Ce passage a élé cité par MM. Reinaud et Favé dans leur ouvrage
sur le feu grégeois, p. 73 et suiv.
DTNASTIB HftftlNlDB, — ABOU-YOCÇOF*TACOUB>-1BN-ABO-BL-HACK. 71
combattre les chrétiens. Cette expëdilioa formera le sujet dû
ohapitre suivsBt.
LE SULTAN ABOU - TOCJÇOF BlfTBBPRBND LA QDEBftB SAllfTS ET RBM-
POBTB mE GtANDB TICTOIRB SUE LB8 CBEÉTIENS. — MORT DB
LEUR CHEF DO!f NUKO.
Depuis l'époque où TEspagoe fut couquise par les musulmans,
eette r^ioa d'oulre-mer a toujours été une frontière* de leur em*
pire, le théâtre de leurs guerres saintes, un champ de martyr et
une porte dn bonheur éternel pour leurs soldats. Les établisse-
ments musulmans dans ce pays étaient constamment sur un bra«
sîer ardent*, pour ainsi dire, placés comme ils étaient entre les
griffes et les dents des lions de l'infidélité. Entourés d'une foule
de peuples hostiles, les vrais croyants de l'Espagne se trouvé^
rent encore séparés de leurs corréligionnaires par la mer. [Peu
d'années après la conquête de cette péninsule, le khalife] Omar-
Ibn-Âbd-el-Aztz songea à en retirer les musulmans, vu leur
posi'jon isolée et la difficulté de faire parvenir des secours dans
une contrée aussi éloignée. Ayant consulté à ce sujet les princi--
paux Tabès ' et les chefs des Arabes, il les trouva tous de son
avis; et, sans sa mort prématurée, il aurait exécuté son projet.
Malgré les dangers qui menaçaient l'islamisme en Espagne, ei
malgré l'hostilité des mécréants, ses voisins, cette religion s'y
maintint en vainqueur tant que dura la domination des Arabes
appartenant, les uns à la famille de Koreich et à la raco de Moder,
les autres aux tribus du Yémen. La puissance et la gloire des
musulmans espagnols furent portées au plus haut degré sous les
* Lisez 1;^ àans le texte arabe.
* Quand les aocîens Arabes voulaient faire bouillir dn lait, ils y jetaient
des pierres fortement chauffées par l'action du feu. Quelquefois, ils po-
saieol des tranches de viande sur une pierre semblable afin de les faire
cuire. Les pierres employées à cet u^age se nommaient roéf^ mot que
noir eauieur emploie ici.
» Voy. t.i, p, ÎW.
li Kwroiu ABs nattus.
Oméïades , dynastie célèbre qoi, pendant a^riron trois aaot»
ans, éteodit ses ailes protectrices sur les rivages des deux ooo^
tinents et qui succomba dans le cinquième siècle de Phégire.
Alors se brisa Punité de Tempire espagnol ; la puissance musul-
mane d'outre-mer s'étant affaiblie à mesure que la domination
arabe tombait en décadence et que ^autorité des Berbères s'é-
tendait sur le Maghreb.
Les Almoravides, observateurs zélés des pféœptes de Hofaam-
flMd, ayaal rétabli en Hagbreb l'unité de la naiion musufanane,
é|>ièrent atteiUivemeal l'ooeaston de prendre part & la guerre
sainte et <le seconrir leurs frères, les musolmanB espagnols.
Trav-ersaol anfin le Détroit, ils combattirent l'ennemi avec une
bravoure admirable, déârent k Zellaca et aîlleiirs le roi Al-
phonse, réduîsireni plusieurs lorteresses, en reprirent d'autres,
détrônèrent les roitelets muMilmans et réunirent en an aenl cm-
jpire les états de l'ACrique et de l'Espagne.
Leurs soceesseurs» les Almohades, suivirent les mêmes bons
.fMribeipes -ei se eouvrirent de gloire dans leurs guerres avee le
roî chrétien. YiScoub-el-Mansour le vainquit dans b journée
d'EUArk/il'/arcoi^ * etdans pluaîeurs autres reneontres ; ouiîs la
vigueur de la nation ailmohade finit par s'épuiser» leur royaume
fut déchiré par des divisions iiklestinea, et les princes de la £i-
ttiUe d'Abd-el*Moumen qui ooaHBaadaient en Espagne se dis-
putèrent mutuellement le trâne du khalifat. Pour obtenir l'appui
d« roi chrétien, ils lui cédèrent un si grand nombre de ibrle-
ressas que les musuloians espagnols, se voyant exposé à périr,
al^uèrent les Almohades et les expnlsàrent do pays.
L'auteur de cette révolution fnt lbn-&oud« seigneur de Murcie*
et de l'Andalousie orientale, le même qui fit proclamer dans tous
ses états la souveraineté des Abbacides de Baghdad. La partie
de cette Histoire universelle qui traite de l'Espagne, renferme
une notice de ce chef.
Quant à l'Andalousie occidentale {El-Gharbia)^ elle était trop
■ ■ ■ ■ ' I I ■ lin ■ I II — ^»i^—r ^Ml— I I I — ip— ii^-^—— I
« Voy. t, n, p. 213.
' Pour iu^l/^. f lisez iu.%^, dans le texte arabcv
DTNASTll ]IÉRlNlDB.-*-ABOU-YOUÇOF«TACOIIB*lBlC-ABD-EL-QACK. 73
éloignée du royauiue <l'ibB«Hoiid pour éUre gecoume par ce
princQ qvi, du resie, n'y avait pas de parlisan pour le aec6nder,
ai aasex d'ezpérieaoa palitique poar bien se oondttire daaa qb6
eairepnse aussi difficile. La discorde régnait parmi les roosul^
maoB, le roi chrëtiea s'achanaaii à îasoUer leurs territoires et les
deeoeodante d'Abd-el-MMoieuélaient trop préoccupés du pro*
grès de la triba de Merfo pour penser è eux, quand Mohammed-
lba-Yoa9of*Ibn-*eUAbmer releva l'Andalousie occidenlale et
s'empara d'Arjona, sa ville natale. Brave, ferme ei entreprenant,
il prit au bond la balle que lui lança ibn-Houd : en l'an 629
(423t-e3), il rejeta* la suprématie des Abbacides et reconnut
pour khalife Témir bafside, Abou-Zékérïa. Jusqu'à la mort de
son adversaire, événement qui arriva en 635 (1237-4)^ ilaou-
tifti contre lui une lutte iocessanle et lui disputa la possession
ile l'Andalousie, province par province. Pendant oe temps, l'en-
nemi commun insultait toutes les parties de la péninscde et avait
imposé un tribut annuel de quatre cent mille pièces d'or à Ibn-
Houd, tout eo se faisant céder par ce cbef trente forteresses
appartenant aux musulmans.
Crsignaat de succomber, si Ibn-Houd obtenait l'appui des
chrétiens, l'émir Ibn^l*Abroer se mit sous la protection * de leur
roi et, pour chAlier le peuple de Séville, il marcha avec son
nouvel allié contre cette ville. Après la mort d^Abou-Zékérïa,
il répudia la souveraineté des Hafsides, se déclara indépen-
dant ei prit le titre d'J?inir-e/-Jtfo«tor»iii (commandant des
musulmans). I>ans l'Est, il eut à combattre les fils d'ibn-
Houd et d'Ibn-Merdeotch ; et, par une dure nécessité, il livra au
roi chrétien tonte ia région d'Bl-Fron tiers >.
* Lisez ^^^ dans le texte arabe.
* Daos le texte arabe, remplacez »il.»^J^ par slLmJiy
^ A cette époque^ tout le basaio du Guadalqaivir, depuis Jaën jus-
qu'à la mer, formait une des frontières qui séparaieoi le terriloire
chrétien de celui des musulmans. Le souvenir de cet état de choses se
conserve encore daos les noms de deux villes très-conoues, Arecs de
la Frootèra et Xérès de la Frontèra.
74 HISTOIKB DBS Bt&tftRBS.
Dans la période qaî s'écoula entre les années 622 (1 225) et
670 (4274*2), les masalmans espagnols eurent à subir la prise
de leurs forteresses, la violation de leur territoire, la perte de
leurs provinces, Toceupation de leurs^ villes et la ruine de leurs
propriétés. Leurs richesses devinrent la proie de l'ennemi, ou
bien elles servirent à payer des contributions forcées et à acheter
des trêves. En l'an 633 (4 236) S le fils d'Alphonse [St-Ferdinand]
s'empara de Cordoue ; en 644 (4246-7)*, il prit Jaenet, deux
années plus tard, il occupa Séville. En 637 (4238), le comte de
Barcelone [Don Jaymel, roi d'Aragon,] soumit la ville de Va-
lence. Tout ce qui était situé entre ces métropoles, tels que chà^
teaux, centres de population et forteresses sans nombre, passa
entre les mains des chrétiens.
Dans l'Andalousie orientale, la puissance des chefs indépen-
dants fut détruite, et, dans l'Andalousie occidentale, les forces
d'ibn-el-Ahmer ne suffirent pas à couvrir les contrées en deçà
des vastes plaines de la Frontèra. Reconnaissant que la défense
de ce pays exigerait plus de troupes qu'il n'en avait à sa dispo-
sition et qu'elle briserait ses moyens de résistance au point d'en-
courager encore davantage les tentatives de l'ennemi, il la livra
au roi chrétien pour obtenir la paix. Toulant alors se mettre à
l'abri des attaques, il emmena les musulmans dans la région ac-
cidentée et difficile qui avoisine la mer et, s'étant choisi pour
résidence la ville de Grenade, il y bâtit le ch&teau de l'Alhamra
pour lui servir de lieu de séjour. Mats de tout ceci, nous avons
parlé ailleurs <•
Pendant cette époque de malheurs, Ibn-el-Ahmer ne cessa
d'invoquer l'appui de ses coreligionnaires de l'Afrique ; et, à
plusieurs reprises, les notables de l'Espagne se rendirent en dé-
putation à la cour de TEmir des musulmans, Abou^Youçof, pour
* Notre auteur a écrit, par erreur, en l'an 636.
* Les historiens ne sont part d'accord sur Tannée de ia prise de laën«
'Dans la partie inédite de celle histoire universelle se trouve une no-
tice des dynasties chrétiennes et musulmane? qui régoérenten Espagne.
DTRAST» MfiRUIlDB . — ABOU^TOUÇOF-TACOUB-lBN-AilD-BL-HACK. 75
le prier de secourir l'islamisme et de sauver leurs femmes et
leurs enfaote. Le prince mériaide se vit d'abord dans Vimpossi-
bilité de répondre è leur appel : après avoir lutté contre les Al-
mohades, il lui fallut combattre Yaghmoracen et achever la con-
quête du Maghreb ; mais, en Tan 674 (4272-3), quand la mort
enleva Ibn-eUÂhmer (Abou-Abd-ÂlIah-Mohaouned-lbn-Youçof-
Ibn-el-Ahmer, surnommé le cheikh et Abou-Debbous,) il avaît
effectué la soumission du Maghreb et, n'ayant plus à craindre
son ancien adversaire [le chef des Abd-el-Ouadites], il se trou-
vait en mesure de prendre la défense des musulmans espagnols.
D'ailleurs, la guerre sainte avait de grands attraits pour les
Mérinides : déjà, en Tan 664 (4262-3), les Beni-Idrts, qui
avaient répudié Tautorité de leur parent, Yacoub-lbn-Abd-el-
Hack, et qui avaient ensuite fait leur soumission* , s'étaient pres-
que tous empressés de suivre le conseil du sultan qui leur re-
commandait d'aller au secours des vrais croyants qui habitaient
la péninsule espagnole. Pins de trois mille volontaires mérinides
partirent avec eux et formèrent un corps redoutable dont le sul-
tan [Yacoub] donna le commandement à Amer-Ibn-Idrts. Ar-
rivés en Espagne, ces guerriers se distinguèrent par leur bra-
voure et par le mal qu'ib firent h l'ennemi.
Avant de mourir, Ibn-el-Ahmer le Cheikh adressa des con-
seils à son fils et successeur désigné, Mohammed-el*-Fakth [le
juriseoneulte^ ainsi nommé parce qu'il avait étudié le droit
étant prince royal,) et lui recommanda de se mettre sous la pro-
tection de l'Emir des musulmans, Ahou-Youçof, dont l'appui et
celui des Mérinides pouvaient seuls délivrer les vrais croyants
espagnols des attaques continuelles du roi chrétien. Aussi, quand
El-Fakîh eut rendu à son père les derniers devoirs, il réunit les
principaux cheikhs de l'Andalousie et les envoya auprès d'Abou-
Youçof. Ces hommes respectables parurent devant le sultan mé-
rinide au moment où il venait de mettre le sceau à la conquête
du Maghreb par la prise de Sidjilmessa. Pendant qu'ils le sup-
< Voy. ci-devant, p. 48.
76 ttlSTOlKB DBS BUBÈE£S.
pliaient de venger l'islamisme et qu*iU lui fftÎBaient on lablow
affligeant des maux dont les chrétiens av»îeAk accablé les ni»*'
sulmanSy il ressentit vivement le plaîsîr que Uur arrivée tvi
avait causé ; pais, emporté par le désir d'acoonplir la volonté
divine et de gagner le paradis, il répondit à lear prière avec le
plus grand empressement.
Le fait est que, depuis le commencement de sa carrière, Aboo*
Youçof n'avait jamais en qu'un seul éésir, celui de faire la
guerre aux infidèles ; et> pour obtenir ce bonheur, il autait 8»^
crifié toutes ses espérances mondaines. En Tan 643 (4245'*6),
après la prise de Mequines, il avait demandé à son fiire, Abeu-
Yahya^ Tautorisation de passer en Bspagne pour eombadtrc les
chrétiens et;, ne l'ayant pas obtenue, il s'était mis à fe léte de
ses domestiques, de ses dieots et de ceux de ses parents qui lui
étaient dévoués, afin de se rendre dans ce pays. L'émir Abou-
Yahya transmit alors à Abeu-Ali-lbn-'Khalas , gouverneur de
Ceuta» l'ordre de refuser à cette troupe les moyens de passer te
Détroit, et un saint persoena^, Yaooob-Ibn-Haroon-el-*Kheîrt,
étant allé trouver Abou- Youçof, qui venait d'arriver à Casr-^
Djonas, le décida à revenir en lui prédisant qu'il ferait la guerre
sainte plus tard en qualité de conquérant et d'Emir des mu-
sulmans. Dès lors, Ahou« Youçof eut l'esprit toujours préoc-
cupé d'une expédition en Bspagne ; aussi, quand il vit arriver
cette députaiion, il se décida sur-le-champ à prendre les armes.
Pendant que ses agents parcouraient les provinces pour y
lever des troupes, il quitta Fec dans le mois de Choual 673
(avril 4275) et se rendit k Tanger. Ayant alors équipé et soldé
cinq mille Mérinides, il les plaça sous les M'dres de soa fils, Men-
dil, et les fit transporter à Tarifa dans une vingtaine de navires
qu'Ibn«el-Axéfi, seigoeor de Ceuta, lui avait envoyés h la pre-
mière réquisition. Ces troupes passèrent trois jours à Tartfa
pour se reposer et partirent ensuite pour le territoire de l'en-
nemi oii elles mirent tout à feu et à sang. Arrivées dans la plaine
de Xérès, elles forcèrent la garnison à s'enfermer dans la ville,
puis elles s'en retournèrent au camp d'AIgésiras, chargées de
butin et ramenant une foule do captifs et de bétes de somme,
DYNASTIE MÊHimDt. — AMU-TOU^F-yACOUBMBK-ABD-BL-QiCK. 77
ainsi qu'une grande quanlité d^armes. Les musulmans de l'Es-
pagne regardèrent ce sucois comme un suffisant dédommage-
raeotde leur défaite h El«Ocdb<; mais ils ressentirent, peu de
temps après, une joie bîfen autrement vive quand un châtiment
des plus terrilllea tomba suY les infidèles.
A la nouvelie de ootle inoursion si heureusement accomplie,
lémir Aboo^Vouçof réaolut d'assister en personne \ la guerre
sainte et, pofur garantir ses frontières contre les tentatives do
Yaghcaoraoen, il chargea son petit-fils, Tachefîo-Ibn-Abd-el-
Ouahed, de se rendre auprès de ce chef à la tète d'une dépu-
tation mérmkle et de oégocier aveo hti un traité de paix. Yagh-
moracen accueillit Tolontiers les ouvertures d'une suspension
d'armes et envoya plusieurs chefs abd-el-ouadites auprès du
sultan pour kii offrir un cadeau magnifique et pour assister à la
ratification du traité.
Abou-Yoooof reœentil un plaisir extrême d'avoir ainsi ré-
tabli le bon accord entre les musulmans et obtenu pour lui-
même le loisir de gratifier sa passion pour la guerre sainte et
de s'occuper d'œuvres méritoires. Après en avoir rendu à Dieu
des actions de grâoe et répandu de nombreuses aumônes, il
aanma les peuples du Magreb, Zenatiens, Arabes, Almohades,
Masmoudiens, Sanhadjiens,Ghomariens, Aurébiens, Miknaciens,
tribus berbères, troupes soldées et volontaires h venir tous afin
de participer aux mérites de la guerre sainte.
Ayant réuni toutes les forces de son empire^ il s'embarqua
avec elles h Tanger, dans le mois de Safer 674 (juillet-août
4275), ei aborda au rivage de Tarifa. Cette ville, ainsi que la
forteresse de Honda, venaient de lui être cédées par le sultan
Ibn-el-Àhmer pour lui servir de centres d'opération ; une con-
vention à cet effet ayant déjà eu lieu h l'époque oii le monarque
andalousien avait envoyé la grande députation de cheikhs au-
près de l'émir mérinide pour solliciter son appui. A cette occa-
sion, Abou^Youçof avait posé comme condition essentielle de son
« Voy. t. II, p. 214.
78 HISTOIRE DBS BERBÈRES.
intervealioii la remise de quelques-unes des forteresses qui bor*
dent le Détroit. Ibn-Hicham, seigneur d'Algeciras, passa la mer,
trouva le sultan mértinde aux environs de Tanger et lui céda sa
ville en le reconnaissant pour souverain.
Abou-Mohammed-lbn-Cbékllola, seigneur de Malaga, s'eni*-
pressa d'offrir sa soumission à l'émir Âbou-Youçof et de lui
transmettre, par une députation, les hommages des habitants et
rinvitation de venir h leur secours. Ce chef ayant ainsi embrassé
la cause des Mérinides, la servit avec un zèle et un dévouement
parfaits *. Quelque temps auparavant, lui et son frère Abou-
Ishac, gendre du sultan Ibn-el-Ahmer, avaient soutenu le mo-
narque andalousien, et leur père, Abou-'l-Hacen, fut le principal
meneur de la révolte contre Ibn-Houd et de la conspiration our-
die par les habitants de Séville contre leur chef Ibn-el-Badji *.
Ibn-eUAhmer nomma Abou-Mohammed au gouvernement de
Halaga et Abou-lshac à celui de Guadix ; mais, quand il eut raf-
fermi son pouvoir et vaincu les autres chefs andalousiens, il se
brouilla avec les deux frères'. Abou-Mohammed se fit alors
proclamer souverain de Malaga et de la Gharbïa (poys occt-
dental) qui dépend de cette ville ; mais, toutes les fois qu'il s'a«
gissait de combattre le roi ctirétien, les deux frères prenaient
le parti de leur ancien maître. Abou -Mohammed, ayant alors
appris que le sultan Abou-Youçof-Tacoub venait de traverser
le Détroit, lui fit porter sa soumission.
L'armée qui prit terre à Tarifa avec le souverain mérinide fut
si nombreuse qu'elle occupa tout le terrain qui sdpare cette ville
d'Algeciras. Quand le débarquement eut lieu, le sultan Ibn-el-
Ahmer-Mohaimne^-el-Fakih , fils d'Abou-Debbous*Mohammed-
es-Cheikh et seigneur de Grenade, accourut auprès du sultan
Abou-Youçof| ainsi que le raïs Abou>Mohammed-lbn-Chékt-
« Quelques lignes plus loin, dans le texte arabe, oa trouvera le pas-
sage dont ce paragraphe est la reproduction.
« Voy. t. II, p. 320.
* A la place de WUj U , le traducteur lit U^âaj^ «^ U.
DYNASTIE MÊRINIDI.-— ABOC-TOCÇOP-TACOUB-IBN-ABD-BL*HACK. 79
lola, seigneur de Malaga, et son frère, Âbou-Ishac, seigneur de
Guadix. Tous ces princes témoignèrent au sultan mérinide une
soumission sans bornes et une joie extrême de le voir. Abon*
Youçof s'entretint pendant quelque temps avec les deux frères
au sujet de la guerre sainte et les renvoya aussitôt après dans
leurs étals respectifs, mais il reçut Ibn-el-Ahmer avec tant de
froideur que celui-ci en fut blessé et repartit pour Grenade.
Après cette entrevue, le sultan mérinide poussa en avant jnt-
qu'à El-Fronlèra, et son fils, l'émir Abou-Yacoub| aoqiiel il
avait confié un détachement de cinq mille hommes, alla porter le
ravage dans les plaines et les vallées [du territoire chrétien]. Le
jeune prince passa auprès d'Almodovar, de Badxa et d'Ubeda, en
détruisant les moissons, abattant lat arbres, saccageant les mai-
sons, balayant les troupeaux» toant * les hommes qui avaient pris
les armes, et enlevant les femmes et les enfants. Il emporta
d'assaul le fort de Belma {Huelma), dévasta tous les châteaux
qui se trouvaient sur son passage et revint sur ses pas, tratnant
à sa suite une foule de captifs. Il venait de passer la nuit auprès
d'Ëcija, ville sur les confins de l'ennemi, quand il apprit que le
grand chef. Don Nufio, avait rassemblé toute la population cbré<-
tienne, jusqu'aux vieillards et aux enfants, et quil s'était mis k
la poursuite des musulmans afin de leur arracher les prisonniers
et les dépouilles.
Le sultan envoya le butin en avant, précédé de mille cavaliers^
et il le suivit avec le reste de l'armée. Voyant enfin parattre
derrière lui les étendards de Tennemi, il mit ses troupes en or-
dre de bataille et parcourut les rangs de ses guerriers en les
encourageant par le souvenir de leurs anciennes victoires. Les
Zenata montrèrent alorscelte bravoure qui les avait tant illus-
trés autrefois ; et, dans ce combat pour la cause du Seigneur et
de la religion, ils déployèrent la valeur par laquelle ils s'étaient
déjà signalés dans des batailles sans nombre. Peu de temps leur
suffit pour remporter une nouvelle victoire et procurer à la cause
< Il faut lire J^jJù^ dans le texte arabe.
80 lUSTOIRB DES BBIBfiRES.
de Dieu ua nouveau sujet de triomphe. Les bandes chrétiennes
furent mises en pleine déroute ; leur chef, Don Nuno, fut tué
avec une foule d'autres infidèles, et une prompte fuite put seule
soustraire les débris de cette armée aux glaives qui moisson*
naient ses rangs. Après la bataille, on compta le nooibre de
morts et on trouva que six mille chrétiens avaient succombé ;
quant aux musulmans, une trentaine seulement lurent asser
heureux d'obtenir le martyr*. Ce fut ainsi que Dieu favorisa les
sieaSt qu'il exalta sa religion et qu'il apprit aux chrétiens ce que
peut faire une troupe de guerriers qui combat pour sa religion
et pour la parole divine.
L'émir des musulmans, Âbou-Youçof ^ envoya la tète de Don
Nuno à Ibn^eUAhmer qui, dit*on, la rendit secrètement aux
chrétiens, après l'avoir fait embaumer. En agissant ainsi, Il céda
aux mouvementâ de l'amitié qu'il leur portait, au désir de con*
server leur bonne opinion et a la haine qu'il éprouvait pour
l'Emir des musulmans^ sentiments dont les indices se montré*
rent très^dairement dans la suite, ainsi que nous aurons l'oc*
casioa d'en faire la remarque.
Vers le milieu de Rebift [premier] de la même année (commen-
cement de septembre 4275), Âbou-Youçof revint k Algeciras;
et, après s'être conformé aui préceptes du Coran et à l'exemple
du prophète, en prélevant, au nom du trésor public et pour sub-
venir aux frais de la guerre, le quint du butin, des prisonniers
et des bétes de somme, il en distribua le reste h ses troupes
On assure que, dans cette expédition, les musulmans prirent
cent vingt^quatre mille bœufs, quatorze mille six cents bétes de
somme et sept mille huit cent trente captifs. Quant aux mou-
tons, le nombre en fut trop grand pour être compté ; mais on
raconte que dans la ville d'Algeciras, ils se vendaient à un di-
rhem (60 centimes) chacun. Il en était de même à l'égard des
armes dont on avait rapporté une quantité immense.
* Selon les historiens chrétiens, l'armée du sultan était beaucoup
plus forte que celle de Don Nuno de L$«ra et avait fait des pertes très-
considérables.
BTNASTIK MÊBlNtD£. — iBOt-YOUÇOF-YACOrB-IBN-ABD-BL-nACK. 81
L'émir des musulmans passa quelques jours dans Algeciras^
et a'élant remis en campagne, au mois de Djomada [premier]
(oct.-nov. {275), il marcha sur Séville dont il ravagea tous les
environs S ensuite, il alla dévaster le territoire de Xérès et, do
là, il revint k Algcciras, après une absence de deux mois.
Voulant alors posséder, sur le bord de la mer et auprès du
port; uoe ville où il pourrait installer ses troupes et les tenir
isolées, de manière à garantir les habitants du pays contre leurs
videoces et teors exactions, il choisit nn emplaoement dans le
voisinage d'Algeciras et donna l'ordre d'y élever les bAtiments
nécessaires. Cette nouvelle ville fut construite scxus la direciion
d'un homme auquel il pouvait se fier, et elle reçut le nom d'£/-
Binya {l^édifioe).
Dans le mois de Rcdjeb 674 (déc.^janv. 4%75*6), Abou-
Youçof rentra en Maghreb, après une absence de six mois, et
s'arrêta quelque temps à Casr-Masmouda. Il donna alors l'or-
dre è Ibrahtm-lbn-Eïça, diefdeU famille Ousnaf-Ibn-Mabfou,
d'élever uîie muraille autour do Badis, port dé mer et de pas-
sage situé dans le pays des Ghomara. Arrivé dans Fez, au mois
de Ghâban(janv.-fév.), ils'oocupa des afialres du royaume, de
la soumission de quelques révoltés et de la construction d'une
ville où il pourrait s'établir avec sa cour et toute sa maison.
""TOimATION DE LA TlLLE-nSOTB (bL-BEXB^-BL^DJBDÎd), PBfeS BB FBX.
[dRSTBUCTION PUIALE bu PikRTI ALKOHAM.] «— tVÉKBHCNTS
niTBB8«
Quand l'émir Abou- Youçof eut combattu les infidèles et ob-
tenu de Dieu la faveur d'avoir donné à l'islaaiisme un nouveaa
sujet de triomphe et d'avoir relevé par les armes la puissance
des musulmans espagnols, il rentra en Maghreb pour goûter en-
* L'expression l^^^^^ ifi^ , employée dans le texte arabe, est tiiéd
du Coran^ sour. 47, vers, 6.
T. IV. €
-82 mSTOIRB DES BBRBÈEE».
oere un bonheur en apprenant le sacccs des troupes comman-
dées par ses officiers et l'extinction dos foyers de sédition qui
menaçaient la sûreté de son royaume. Cette nouvelle grâce éiaii
•di|^ne de oelle qui venait de lui être accordée et elle servait Ji
couronner les bontés dont le Seigneur l'avait comblé.
Après la prise de Maroc , les derniers restes de la famille
•d'Abd-el-Moumen s'étaient jetés dans la montagne de Tiamelel,
premier siège de leur puissance , berceau de leur secte , cî-
fnetière de leurs khalifes , capitale de leurs aïeux , demeure
de leur imam et temple de leur Hehdi. Cette localité avait tou-
jours été pour eux un lieu saint et, chaque fois quSls voulaient
entreprendre une expédition militaire, ils allaient visiter le tom-
beau de rimam, dansTespoir d'adirer perses mérites une béné*
diction sur leur tentative et d'assurer le succès de leurs armes.
Ils regardaient même ce pèlerinage comme un de leurs plus
saints devoirs.
Tous les Almobades qui avaient pu échapper aux coups des
-Mérinides se réfugièrent dans cet asile et proclamèrent souve-
rain un descendant d'Abd-el-Moumen nommé Ishac. En Tan
669(4270-4), ils prêtèrent le serment de fidélité h leur nouveau
khalife, qui était frère d'Omar-el-Morteda. Bien que la nomind-
iioD de ce prince eût lieu sous les auspices les plus défavorables,
ses partisans nourrissaient l'espoir de prendre leur revanche et
de relever l'empire ahnohade. Le vizir Ihn-Altouch fut le prin-
cipal meneur de cette tentative désespérée. ^
La première chose que fit Mohammed-Ibn-Ali-lbn-MohalIi,
après avoir été installé dans le gouvernement de Maroc par le
sultan Abou-Youçof , fut de tourner ses armes contre les Almo-
bades insoumis et de travaillera leur enlever les partisans qu'ils
conservaient encore. En l'an 674 (4 2'/ 5) , il fut assailli, à l'im-
proviste, par les Almohades, mais il les repoussa de manière à
refroidir leur ardeur tout-à-fait ; puis, dans le mois de Rebiâ
( oct. } de la même année, il pénétra dans leurs montagnes et,
après un long siège, il emporta d'assaut leur forteresse qui, jus*
qu'alors, n'avait jamais succombé. Ibn-Attouch mourut les
armes à la main, mais leur fantûme de khalife fut fait prisonnier,
DtlfASTU XÉBllfIDB. — ABOU-YOUÇOF-TACOCB-lBIf-ABD-BL-VACIC. 83
«vec son cousin, Abou-Satd, fils d'Âbou-'r-Bebîft, et les parti-
sans qui lui restaient encore. Tous ces malheureux eurent la tète
coupée en dehors de la porte [de Maroc] , nopimée Bab-es-CheriA,
et leurs cadavres furent attachés à des poteaux. Le secrétaire
Ei-Cabaïli et ses fils se trouvèrent dans le nombre des sup-^
plîciés.
Les troupes mérinides jMrtèrent la dévastation par toute la
montagne de Ttnmelel ; elles ouvriront même les tombeaux des
khalifes, descendants d^Abd-el-Moumen, et en retirèrent les corps
de Touçof et de son fils Yacoub^el-Maifôour, afin de les dé(»»
piter. Cette profanation eut pour auteur Abou-Ati-el-MHtani ■
<|iii, après sa révolte k Hiitana, s'était réfugié i la conr du sultan
Abou-Yooçof et avait olUenu de ce prince la sonveraineté de la
viHe d'Aghmat. Il prit part à cette expédition et, pour se venger
d'avoir été chassé de Miltana par les Alniohades-Hafsides, il
erat ne pouvoir mieux fair« que de violer les tombeaux de ces
khalifes et de mutiler leurs cadavres. Le sultan fut scanda-
lisé démette action, mais il ferma les yeux dessus par la consi-
dération qu'El-Miltani était son hftte. Il affecta même de traiter
la chose comme une de ces extravagances auxquelles son protégé
l'avait habitué.
Bentré dans sa capitale, après avoir fait sa première expédia
dition en Espagne, le sultan apprit presque simultanément la
défaite des Alin<>hade8 et la destruction de la famille d'Abd-el-
Houmen. Ces nouvelles le comblèrent de joie et lui inspirèrent
une profonde reconnaissance envers le Seigneur.
Quand la révolte fut étouffée et le Maghreb pacifié, Abou*
Yottçof vit sa puissance consolidée, sa domination étendue sur
toutes les parties de ce pays, son royaume agrandi et le nombre
de sa suite et de ses visiteurs considérablement augmenté. Il
jugea donc nécessaire de bâtir une ville pour servir de résidence
h lui-même, aux gens de sa maison et aux grands ofBciers qui
soutenaient la dignité du trône et le poids de l'administration.
Par ses ordres, on commença la construction A^El-Beled'-el-
» Voy. t. m, p. 316.
84 HISTOIBE »iâ BBRBtRBS.
Ljjédid (la viUeneuve), immédidleittenli k eôté dd Fez, ol auprès
do la rivière qui traverse celte capitale. On eo posa les premières
pierres, le SCboual» 674 (22 mars 4276), et on y employa une
foule d'artisans e4 d'ouvriers* Le sultan avait même fait venir des
devins et des astrologues afin de commencer la fondation de sa '
ville dans un moment où les planètes oiïriraient un aspect pro-
pice < Parmi oes hommes , on remarqua deux grands mattres
fimamsj dans la science astrologique : Abou-el-«Haoefi»lbn*el-*
Gattan et Aboti*Abd-Àliah4bn*eUHabbak. La ville, construite sur
un plan dressé par le sultan tui-oiémei lui plat beaucoup et, en
l'an 674, elle devint la résidence de la famille royale. Où y avait
élevé de grandes maisons et d'autres habitations, ainsi que des
palais traversés par des courants d'eau ; aussi , -nous ofFre-
t->eUe le saonument le plus grand et le plus durable de la dynastie
mérihidè%
Ce travail achevé* lesultaafit aussi tôt commencer la eonstruc^
tion d'une citadelle dans la ville.de Méquinet.
Au moment où il traversait )e détroit pour rentrer en Maghreb ,
Talha-lbiHHôhalU s'était mis en révolte et était allé joindre les
Zenata du mont Axouer, tribus incorporées dans la population
sanhadjienne [de l'Atlas]. Pour étouffer ce mouvement, il partit
sur le champ afin de cerner la montagne et, au bout<i'un mois, il
obtint la soumission de Talha moyennant une amnistie et une
haute position à ta cour. Il donna ensiitte le tftre de vizir à son
oiieat» Feth-^AIIah-es^d^ati) et lui accorda le traitement ordî^
nairede cet emploi.
Qaelque temps après, il envoya à Yaghmoraoen l'équivalent
du cadeaQ qu'il avait reçu de cet émir , au moment de partir
pour l'Espagne ; ses occupations pendant la dernière campagne
no hii ayant pas permis de répondre plus tôt à cette m^irqne de
coasidératîon^ L^ofFrande qu'il fil présenter à l'émir Abd«el-
Ouadile se composa d'une tente magnifique de fabrique maro^
caine, plu^urs mors de cheval, les uns dorés, les autres argen-
tés^ trente mules et mulets très-actifs , les uns portant des
selles à la persanoe pour hommes , les autres portant des
selles de femmes, plusieurs ballots de cuirs apprêtés de la
DYUaSTIB hAmiiiidi. — abou*touçof-tacoiib-ibn-abd-xl-hack. 86
maniera diie drcassienne, et one quanlité de ces autres objets
préoieaz que les souverains de l'Afrique recherchent ë Tenvi et
qu'ils sont fiers déposséder. En Tan 675 (4276-7)!, Mohammed-'
lbn*AbdH»l«Gaouï, ëmir des Beni-Toudjtn e( seigneur du Ooan-
çhertoh, envoya au sultan quatre chevaux, les plus beaux qu'il
put trouver dans tout le Maghreb [central]. Ce cadeau, bien
que composé d'un petit nombre d^objets. ne manqua pas de faire
grand plaisir.
Pendant ce dernier temps, Abou-Youçof organisait «ne
expédition contre les chrétiens et, h la suite de ses préparatifs,
il mil en mouvement les populations de toutes les provinces du
Maghreb.
SfiCONPB SXHOITION DE l'SV» DBS mSULflUNS BK BSPAGIIB.
L'Émir des musulmans étant rentré de sa première expédiw
tion en Espagne, dompta les insurgée du Maghreb, et rétablit
Tordre dans les frontières de ce pays. Ayant alors envoyé d^w
cadeaux aux princes qui {régnaient sur les pays voisins] et fopdé
la Ville^Neuve pour iuj servir de résidence, il se rendit k Maroc,
vers le commencement de Tan 675 '(juin-juillet, 1276], afin de
pourvoir à la sûreté des pr.ovinees [qui entourent cette capitale]
et de prendre les mesures nécessaires pour en assurer la soumis*
sion. Il passa ensuite dans le Sous, pays dont il fit visiter
toutes les parties par un corps de troupes sous les ordres de son
viiir Feth'^AIlaa.
Ayant alors repris le chemin de sa capitale, il somma toutes
les tribus du Ma^rebde lui fournir descontingents pour la guerre
sainte. Comme leur empressement ne répondit pas à ses désirs,
il renouvela Tappeletse rendit a Ribat-el-Feth, pour en attendre
le résultat, mais il s'impatienta bientôt de lenr lenteur et partit
avec sa suite pour CBsr-el-Medjaz. Quand ces contingents furent
* C'est à tort qac le texte arabt?, tant des roanoscrits qtie de Tim^
primé, porte la date de 676.
M mSTOlM DB8 BKtKfiRKS.
enfin arrivés, il traversa le détroit et débarqua a Tarifa vers ht
fin de Moharem [676] (juin-juillet, 1277). Delà il marcha sur
Ronda, en passant par Algésiras, et, dans la première de ces
villes il trouva les deux frères Abou-lshae-Ibn*Chektloula, sei-
gneur de Gomarès, et Abou-Bfobammed, seigneur de Malaga,
qui étaient venus pour le seconder dans cette expédition.
Au jour anniversaire de la naissance du Prophète (40 du pre-
mier Rebift — 44 août 4 277) , Varmée combinée campa sovs les
murs de Séville, forteresse dans laquelle le roi de Galice, fils
d'Alphonse * , s^élait enfermé pour éviter une bataille rangée.
L'émir Abou-Touçof ayant reconnu que Pennemi opérait une
sortie afin de protéger les habitants de la ville , mit son
armée en ordre de bataille, plaça son fils, Témir Abou-Ya-
coub, à la tête de Pavant-garde et se porta en avant. Par cette
attaque il fit reculer les chrétiens, et les ayant poursuivi
jusqu'à la rivière, il les força à rentrer dans la ville. Pendant
toute la nuit, la cavalerie musulmane parcourut les environs de
Séville il la lueur des incendies qu'elle avait allumés. Au lende-
main, le sultan passa dans l'Axarafe ' et s'y tint campé avec son
armée jusqu'à ce qu'il eut dévasté et ruiné toutes les^ parties de
cette région en y lançant de nombreux détachements. Après avoir
enlevé d'assaut te Hisn-Galantana,te Hisn-Djeltana et le Hisn-eN
Coléïa ' , il repartit pour Algéciras où il fit son entrée vers la
fin du même mois (fin d'août 4277) , suivi d'une fdule de prison-
niers et d*un butin énorme^.
< C'est Don Alphonse X, roi deCastille, que Tauteor veut désigner.
* L'Axarafe de Séville est un vaste côieau, couvert d'oliviers, de
figuiers et de vignes. Il s'éteod à Toocident de cetie ville et jusqu'aux
environs deNiebla.
» Peut-être Alcala de Goadaira.
* Ceci est le somoiaire de tout on chapitre du Carias, Dans ce
dernier ouvrage, l'aoleur ne respecte pas toujours la vérité; il avait à
ménager les Beni-Merlo. à les exalter, à les flatter, afin de se faire par-
donner le crime d'avoir composé une histoire de leur dynastie. L'on sait
qu'ils avaieût défendti aux auteurs de traHer un pareil sujiet.
DTKA&TIB HÈMINIDB. — ABOC-TOtÇOF-TACOUB*lBN-lBD>SL-BACK. 8T
Vers le milieu du mois de Rebià second (sepiembre) , quand if
eut laissé reposer ses troupes et partagé les dépouilles, il envahit le
territoire de Xérèset/pour faire goùler aux habitants de cette leca*
lité toute Tamertume de la guerre» il abattit leurs arbres et brftla>
leurs maisons; ravageant ainsi toute cette région dont il mas-
sacra une partie de la population et traîna le reste en esclavage.
D'après ses ordres, l'émir Abou-Yacoub partit avec un détache-
ment de l'armée afin d insuliet* les environs de Séville et leschâ*-
teaux situés sur la rivière [le Guadalquivir]. Le jeune prince
livra au pillage les forts de Hota \ de Chelooca, de Ghallana eti
et d'EI-Canater^, ensuite il ravagea la banlieue de Séville et s'ea
retourna auprès de son père. Ils rentrèrent ensemble à Algéci-
ras pour donner du re|K)s à leurs guerriers et faire le partage
du butin ; puis^ ils organisèrent une expédition contre Cordoue.
Pour exciter l'ardeur de ses troupes, Abou-Youçof leur fit un.
tableau séduisant du beau pays qu'elles allaient envahir et des
richesses dont jouissaient les habitants de celte région favorisée.
Voyant que toute Tarmée répondait avec joie h son appel, il quitte-
Algéciras, vers le conimenoemeni [du second] Djomada (com-
menoément de novembre 4277), et se mil en marche, après avoir
invité Ibn-el-Ahmer à lui amener des renforts. Il fil la rencontre
de ce monarque dans le voisinage d'Archidona et l'accueillit avec
grandes marques d'honneur, en lui exprimant sa vive ^atisfac»
tion de le voir si empressé à combattre les infidèles. Ils mirent
alorsle siège devant le Hisn-Beni-Bechir et l'ayant pris d'assaut,
ils passèrent la garnison au fil de l'épée, réduisirent les femmes
en esclavage et mirent l'édifice en ruines après avoir enlevé tous
les trésors qu'il renfermait. Abou-Youçof envoya alors plusieurs
détachements dans les plaines voisines afin d'y porter Te ravage
et de faire du butin. L'armée s'enrichit promptement de cette
^Variantes : Ourla^ Zouta.
* Ce dernier nom signifie ies ponts y les arcades, — Le tradncteur ne
trouve pas ici, è Alger, les moyens de fixer la position et de recon-
naître les noms modernes des châteaux andalousieos donlF il est
mention dans ce chapitre.
98 mSTOlRI DES BEUftRES.
façon et coDliniia sa marche jusqu'à Cordoue en fouillant les vil-
lages etlesl)9l>itations qui se trouvaient sur son passage. Quand
elle arriva devant cette ville, dont la garnison se tenait à l'abri,
derrière les remparts, le sultan fit dévaster les fermes et les vil-
lages des contrées voisines par de nombreux détachements. Le
ehâleau de Berkouna fut emporté de vive forée; Ârjona subit en-
suite le même sort, et une troupe envoyée du c6té de Jaen fil
souffrir à cette ville un châtiment semblalileàceluido Gordoue.
Le roi chrétien évita toujours do risquer une bataille et laissa
dévaster ses provinces ; puis, ayant acquis la certitude que tout
son pays allait éiro ruiné, il sollicita une suspension d'armes.
L'Émir des musulmans profita de cette occasion pour témoigner
ses égards à Ibn-el-Ahmer d'avoir assisté à la guerre sainte, et
lui fit parvenir cette demande en Tautorisant d'y faire telle ré-
ponse qu'il jugerait convenable. Le sultan espagnol se décida
pour la paix, avec l'approbation de son allié auquel il démontra
les grands avantages qui devaient en résulter aux habitants de
l'Andalousie qui, du reste, la désiraient depuis longtemps.
Après h ratification du traité, l'Émir des musulmans évacua
K3 territoire chrétien et se dirigea vers Algéciras. En passant par
Grenade, route qu'il avait choisie afin de faire honneur à Ibu-el-
Ahmcr, il hii présenta tout le butin enlevé pendant cette campa-
gne. Il fil son entrée à Algéciras le 1*' Redjeb de la même année
(98 novembre 1 277] et, quand il eut fait reposer ses troupes, il alla
mettre des garnisons dans ses forteresses et prendre possession
de Malaga.
IBN-CBEKILOLA CÈDE LA VILLE DE OALIGA AG SULTAN HÉRINIUE.
Les fils de Ghekîlola* , rivaux d'Ibn-el-Ahmer. appartenaient
à une famille tellement puissante que les musulmans espagnols
Le mot Echekilola ou Chékilola paraît être une aUéralion du sobri-
quet e&fiagnol Ckica Lola(lapelUe Lolotte, la pelUe Dotores). L'aïeat
l><>tarnel de eci i^inccd cUiil probabletiieot luic enclave clu'élienao.
DYNASTIE 1IÊE1»1]>E.^-*AB(HI--YOI]ÇOF-YACOIJII-1BN-ABD-BL*BACK. 89
Pi^vaifiiit oru assez forte pour les protéger contre les chrétiens.
Ils se nommaient Abou-Mohamaied*Abd-Allah el Aboii*-Isbac-
IbraMm. Lear père, [Aii-}lbii-Cbektlola , portait te snrnom
d'Abou-'l^Haoen. Aboa*-Mohammed ëpoosa la fille d'[lbo-el-
Abmer le Cheikh]j etaequil, ainsi que son frère*, les bonnes grâces
àùGQ souverain el partagea avec loi le pouvoir suprême. A IMns-
tar de leur père, les deux Chekîlola soutinrent franchement le
soUafi de Grenade dans ses guerres contre Ibn-Houd et les autres
chefs qui aspiraientà Pempire; mais ce prince, quand il eut affermi
son trône, leur enleva tonte ',l*autori té el les réduisit au rang de
simples visirs« Son gendre, Abou-Mohammed, reçut alors le
gouvernemeoi deâlalaga et de la Gbarbiâ ; son beau-frère, Abon-
^1-Hacen, obtînt celui de Guadix, et Abou-Ishac-lbrahtm, fils
d'Aboii-'l-Bacen, fut sommé gouvernear de Comarès. Bien que
ces chefs fussent très<>mécontents de la conduite du sultan h leur
égard, ils se tinrent tranquilles, sans chercher à lui nuire; mais,
après sa mort, événement qui eut lien en 674 (4272-3) , ils for-
mèrent le projet d'enlever le pouvoir k son fils et successeur,
Mohammed^eUFaktb.
[L'aanée suivante,] le sultan Abou-Youçof était h faire le siège
de Tanger quand il reçut la visite d'AbDu-Sa}d[-Feredj] , fils du
seigneur de Halaga, qui vint avec Abou-Abd-Allah*lbn-Acdértl*
pour lui communiquer un message de la part de son père Abou-
Mobammed. Il accueillit ces envoyés avec de grands témoignages
d'égard et les congédia en leur faisant des promesses magni-
fiques.
En l'an 673 (f274-&), à la suite de cette ambassade, Abou-
Mobammed fit porter an souverain mérintde une déclaration
d'obéissance signée par lui-même et par les habitants de Malaga ;
et, en retour, il reçut un brevet qui le confirmait dans son gou-
vernement. Abou-Saîd-Feredj , fils d'Abou-Mohammed, passa
* Son frère, Abon-Iâhac, avait aussi épousé une fille du mémo snl
tan. Voy. ci-devant, page 78.
' Yar»ute : Aidril.
90 HISTOIU DES BEtiftKBS.
dans le pays de chrétiens, mais il revint avant l'expiratîo»
d'une année et fut tué à Malaga.
En 674, Abou--Youçof étant débarqué en Espagne pour la pre-
mière fois, rencontra Âbou-Mohammed è Algéciras avec Ibn-el*
Ahmer et, après les avoir consultés au sujet de la guerre sainte,
il les renvoya dans leurs états. En 676 (4 277) , lors de sa seconde
expédition en ce pays, il trouva Abou-Mohammed, seigneur de
Malaga, et Abou*Ishac, seigneur de Guadix et de Gomarès,
qui Tattendaient k Algéciras. Ces chefs le suivirent h la guerre
sainte. A leur retour, Abou -Mohammed tomba malade et, au
commencement du mois de Djomada de cette année (oct'-nov.) il
cessa de vivre. Quand le Ramadan (février) fut passé, son fils
Mohammed alla trouver le sultan Abou-Youçof qui se reposait à
Algéciras, après son expédition, et le pria d'accepter sa dé-
mission et de prendre possession de Malaga. Abou-Ztan-Mendft
fut nommé par son père, le sultan, au commandement de cette
ville et partit avec un détachement de troupes pour s'y installer.
Avant de se rendre auprès du sultan, Mohommed, filsd'Abou-
Mohammed , avait donné Tordre h son cousin, Mohammed-eU
Azrac, fils d'Abou*-l-Haddjadj-Youçof-lbn-ez-Zerca, de faire
apprêter plusieurs chambres dans la citadelle pour la réception
du sultan; ce qui fut exécuté dans Tespace de trois jours. L'émir
Abou-Ztan, étant arrivé sous les murs de la ville, y fit dresser
ses tentes, pendant qu'une troupe de Mérinides, conduite par
Mohammed-Ibn - Amran -Ibn - Abla , allait occuper la citadelle.
De celte manière, les Mérinides devinrent maîtres de Malaga,
ville dont le sultan espagnol avait espéré obtenir possession lors
de la mortd'Abou-Hohammed-Ibn-Chektlola, surtout en pensant
que son neveu s'y prêterait volontiers. Quand cet espoir fut
déçu, son vizir Abou-SoUan-Âztz, natff de Dénia, se rendit au
camp d'Abou-Ztan, en dehors de Malaga, et pria cet émir de
remettre la ville au souverain de Grenade. Le prince s'y refusa
avec beaucoup de hauteur et, trois jours avant la fin du Rama-
dan, il fit son entrée dans la place. Abou-Soltan s'en retourna
après avoir fait une démarche inutile* .
« Littéralement : il en revint avec les boUeé A Honein, — En Irac,
DTNASTIB MtUniDl» — ÀBOIHTOOÇOV^YAGOUB-lBN-Atflh^L-HACK. 91
AaoommeooemeDi du mois suivant, le saltan Âboa*YoaçoC
àortit d'Âlgéch-as et, six jours après, il arriva aux environs de
Malaga. Les habitants furent tellement heureux de passer sous
son autorité, qu'ils ornèrent les façades de leurs maisons et sor-
tirent en foule pour le recevoir. U y resta jusqu'à la fin deTarroée
et, en partant, il y installa une garnison sous les ordres du nou-
veau gouverneur, Omar^Ibn*Yabya--Ibn-Moballj, client et pro-
tégé de la famille royale des Beni-Mertn. Il plaça auprès de cet
oflRcier on corp» de guerriers mérinides commandé par Ztan-Ibn*
Abi-Âïad, auquel il recommanda de traiter Mohammed-Ibn-
Chektiola avec de grands égards.
En Tan 677 {i 278- 9) , il rentra en Maghreb après avoir exalté
en Espagne le drapeau de sa souveraineté et soutenu la cause de
l'islamisme. Tout le monde fut rempli de joie eu apprenant son
arrivée et tous les cœurs ressentirent la plus haute admiration
devant les faveurs dont le Seigneur l'avaient comblé. Ces grftces
excitèrent, néanmoins, la jalousie d'Ibn-el-Ahmer et amenèrent
une rupture entre les deux sultans.
dans la ville de Blra, demearait uu cordonnier nomoié Hooetn. Un
arabe bédouin, monté sur on chameau, vînt lui acbeier une paire de
bottes. L*on ne s'accorda pas sar le prix. Ton se dit de gros mots, et
l'arabe finit par s'en aller. Donein voului alors jouer un tour à celte
mauvaise pratique : il prit les deux bottes, sortit de la ville et en dé-
posa Qoe sur la route que Tarabe devait prendre pour se rendre au
douar. A une lieue plus loin, il jeta l'autre par terre et se- cacha.
L'arabe partit le soir, monté sur son cLameao, et vît ooe botte sur le
sable. Par Dieu 1 s'écria-t-it, voilà une des botles d'Hooeio; siTautrey
était aussi, je descendrais pour la ramasser. Il continua sa route et
trouva Taulre botte : Ah I dit-it. j'ai bien eu tort de ne pas prendre
raoïre botte! j'aurais maintenant U paiie. Après avoir réfléchi un
instant, il fit agenouiller son cbamean et, pour ne pas le fatign?r,
il le laissa là et s'en fut chorcber la botte qu'il avait vue d'abord. Bo-
nein profita de son absence pour voler le chameau. Le bédouin
rentra chez loi avec une paire de bottes de plus et on chameau de
moins .
9% BISTOIIS DXS mBftRBS.
ttlf-*BL«ABMBR COIlTaACTK UIIB ALLUlfCt ATBC LB ROI CHBÉTIBH ^
BT YAGmOBACBR, B'AGCOB» AYBC BTZ, KNTBATB £BS OPBBATIOBff
D'aBOO TOUÇOF POCB L^BHPtOlBB Ml QDITTBB LB MAGSBBB. "^
OBFAITB IB TAGHBIOBACBII A KHABZOCZA.
Quand l'Émir des musulmans/ Abou«'You(of, pas» en Espagne
pour ia première fois, il eut une rencontre aveo les chrétien»
auprès d*Ecija, ei, dans ce conflit qui coûia la vie k Don Nuno, il
remporta une victoire sans égale et une gloire inunorteUe. Ibn*-
el-Âhmer fut bien loin de s'attendre h un pareil succès et com-
mença à craindre le vainqueur: ne pouvant pas oublier comment
Youço{-Ibn-Tacbefin et les Almoravides avaient traité Ibn-Abbad,
sultan deTAndalousie'. Ses aprébensions augmentèrent davan-*
tage quand il s'aperçut que les fils doChekîlola et plusiàjars autres
chefs étaient disposés à reconnaître Pautoriié du souverain mé-
rioide. Le bon accord qui avait régné entre les deux sultans fut
tellement troublé par ctit esprit de méfiance qu'à Tépoque ou
Abou-Youçof revint en Espagne pour la seconde fois, Ibn-el-
Ahmer s'abstint d'aller le voir. ^
Une correspondance poétique, conçue en forme de remon-
trances et dans laquelle les secrétaires qui l'avaient rédigée par-
laient au nom de leurs maîtres, s'établit alors entre les deux
cours. Nous allons indiquer ici le» pièces dont elle se composa.
La première est un poème adressé par le sultan Ibn-el-Ahmer k
l'émir Abou-Youçof, en l'an 674 (1275-6), h l'époque où celui-
ci se disposait à rentrer en Maghreb après la défaite des chré-
tiens et la mort de Don Nuno. Ce morceau eut pour auteur
Abou-Omar-lbn-el-Morabet, secrétaire du Sultan de Grenade.
Ecrit SOUS Tiniluence de la crainte que l'ennemi inspirait encore
et composé dans Tespoir d'amener un rapprochement entre les
deux souverains, il fut, rétilé devant Abou-Youçof dans une
■ ■ ■ ■ m'mm-f^^rmnntrvm
* Voy. t. II, p. SO. -^ Pour rhisloire des Abbadides, il faut surtout
consulter la riche coilectico de docomenls arabes que M. Dozy a pu-
bliée en 1852, sous le litre de Scripiorum arabum loci de Abbadidis,
K
DTIf AftTIB ■£RIN1DB . — ABOU^Y OUÇOF-TACOUB-IBIV-ABD-BL- HAGK . 93
soirée, peadanl son séjour à Algéctras. Nous la reprodaisous
ici :
Parmi ceux qui vont au Tehama ou dans le Nedjd^ , y a^^t-it
un ami qui veut seconder [mon] amour ?
ramonr [m^]appetle! qui [m']aidera à [lui] répondre et à
[me] tourner vers lui? qui [me] soutiendra?
Voici le sentier du salut clairement tracé; y a-t*t/ en Bs^
pagne ou en Afrique un homme disposé à suivre la honme voie ?
Un homme qui désire le bonheur étemel * dans le jardin dU
Parodié et qui craigne de voyager vers la Géhenne embrasée ?
0 toi qui désires remporter sur l'ennemi une glorieuse vio-
toire, réponde à la voix directrice ; tu y trouveras la force
et le bonheur,
Marche avec espoir et d^un pas rapide vers le salut ; être
iien dirigé, e'eêt le salut pour celui qui se laisse guider,
0 toi qui dis : A demaio jé me tournerai vers Dieu, sans
aveir reçu la certitude que tu vivras jusqu'à demain^
Ne te laisse pas égarer par l'oubli de la mort ; si le moment
d'acquitter cette dette n'est pas encore arrivé ^ il est bien près
de Pure 1
Tu as devant toi un long voyage^ quinese fait pas deux foie;
Commence tes préparatifs.
Ife sais-tu pas que teut voyageur a besoin de provisions ?
fais donc les tiennes.
Voici la guerre sainte, première des (mtvres pies I fais-en
taprovisionj afin que U voyage soit heureiÀX.
Voici le bivac dans le pays de P Andalousie; pars de là, re-
vienS'^y, pour plaire à Dieu t
* Pour les aa^ieDB poètes de i* Arsl>ie, le Nedj, pays de hautes col*
Hoes, et le Tehama, basses terres du côté de la mer, semblaieat être le
monde eoUer. Yonlaient-ils désfgoer la totalité de la Dation arabe, ils
disaient teux qui montent dons h Nedjd et ceux qui descendent dans le
Tehama. Ponr exprimer 1» même idée, ils emptoyaient les mots :
raîhoun oua ghadoun, c'est-à-dire ceu9 qui arrivent et ceux qui s'en
Vùnt.
* Lisez iWJt dans le texte arabe.
94 HISTOIRE DBS BBRBfcHBS.
Le9 péchés ùnt noirci ton visage; fais en sorte de paraître
blanc dans la présence du Seigneur.
Bffàee tes fautes par des larmes; c'est par des larmes
qu^on efface les fautes volontaires.
Qui veut renoncer au péché pour se tourner vers le Seigneur?
gui veut imiter V exemple du Prophète? qui veut trouver la
bonne voie?
Qui veut purifier son âme par la ferme résolution de sou-
tenir la religion de Mahomet ?
Pourras-tu admirer les villes du pays de P ennemi, tant que
Dieu n'y sera pas adoré ?
Mépriseras-tu les pays des musulmans ? subiras^tu les tn-
sultes des trinitaires^ oppresseurs de ceux qui croient au Dieu
unique ?
Que ]de mosquées dans cette terre qui ont été converties en
églises / meurs^en de douleur! n^y sois pas insensible!
[Ici, dans les manuscrits, se troave une lacune de deux vers.]
On voit le prêtre et la cloche sur le haut du minaret ; le vin
et le porc au milieu de la mosquée!
Hélas I on n'y entend plus les prières des gens pieux qui se
baissent j qui se relèvent et qui se prosternent.
On voit à leur place une foule de réprouvés ^ pleins d'arro^
gance, qui jamais de leur vie n'ont fait profession de la
vraie foi.
Chez eux, combien de captifs^ hommes et femmes^ qui dé-
sirent la liberté sans pouvoir se faire racheter !
Que de jeunes filles appartenant à notre peuple * , qui
vivent enchaHiées chez eux et qui voudraiefU être dans la
tombe !
Que d'enfants que leurs parents regrettent d'avoir mis au
monde!
Que d'hommes dévots , liés avec des chaînes ^ qui pleurent
le sort de leurs voisins chargés de fers !
* A la place dejjtMt^il faulsubstiluerj^&À*
MHASTII ■tRINlDI.--*ABO0-TOi;COF-TACOUB-IBll-ABDHtL*flACK. 95
Que de tnartyrs auxquels la pointe de la lance et la lame
de l'épée ont départi la mort sur le champ de bataille I
Les anges du ciel gémissent de leur état^ et les hommes à
^œur de roche compatissent à leurs maux.
Frères! vos eceurs ne se fendent^ils pas de douleur en n/ms
voyant décimés par la mort et par l* apostasie ?
Ne penserex-vous pas aux liens d'amitié ^ d'affectiùn et de
-sang qui vous unissent à nous ?
Est-ce ainsi que les chrétiens secourent leurs frères ? eux
dont les glaives vengeurs ne dorment jamais dans les four-
reaux.
Hélas I la fierté de l'islamisme s^est éteinte y fierté si ardente
autrefois I
Où sont vos fermes résolutions^ qu'elles ne s'accomplissent
pas ? Le glaive peut^il couper à moins d*étre dégainé ?
Enfants de Merîn! vous êtes nos voisins ; c'est de vous les
premiers qtÂe nous devons implorer secours»
La guerre sainte vous est prescrite comme un devoir ; hâlez^
vous de la faire, afin d'accomplir l'obligation la plus essen^
tielle, la plus rigoureuse.
Choisissez entre les deux bonnes choses [la victoire et le
martyre] ; que Dieu devienne votre débiteur et recevez [de lut\
les belies vierges [du Paradis] .
Voici les portes de ce jardin qui s'ouvrent ; regardez les
houris assises qui vous attendent.
Qui veut se vendre au Seigneur ? qui veut acheter de lui la
la félicité étemelle ?
Dieti a promis de soutenir la vrai religion ; sa promesse est
sûre^ hdtez-en l'accomplissement.
Voici nos frontières qui se plaignent à vous de votre [oubli],
comme les pauvres se plaignent aux riches qui vivent dans
Vopulence.
Pourquoi, dans ce pays, les musiUmans sont-ils divisés ^ pen--
danfque les infidèles vivent dans une union parfaite?
[Ici, dans los manuscrits, se trouve une seconde lacune de deux
lignes.]
96 IQSTOIBB DBS BBlBËUtS.
Vatit é(es Us troupes * d^ Dieu, [assez nombreuses] pour rem-
plirVunivetSi et if ous gémissez sur U sort de la rtHgùm
admirable et uMquel
Comment pourrez^vous ^ demain^ vous justifier auprès de
notre Prophète ^ vous fui n^avez pas encore préparé votre
excwe ?
Que répondrez^ous, s'il voi^ dit : « Pourquoi avez-^vous
» négligé mon peuple? pourquoi Vavez-vous abandonné à lu
» perversité de l'ennemi *? »
J'en jure par Dieu qtie, même sans avoir une punition à
craindre, ta honte qu'on éprouverait devant le Prophète serait
[un chdtùnent] suffisant !
Frères ! invoquez sur lui la bénédiction divine et demandez
son intercession au jour du jugement ,
Travaillez àsoutenir sareligion, et y lors de la résurrection ^il
votM abreuvera des eauœ les plus douces du lac céleste.
La réponse à cette pièce fut composée par Abd-el-Aitz, poèto
du sdtao Abou-Youçof ; aous eo donnons ici le texte :
Nous voici I nous voici ! ne crains pas l'ennemi pervers !
etc. 3
Malek-^Ibn-Morahhel répondit aussi à la mémo pièœ par le
poëme suivant :
Que Dieu en soit témoin^et toi, 6 terre! porte témoignage! etc.
Pour répondre à ces deux derniers poèmes , Ibn-eUMornbet
composa celui-ci .-
Dis aux tyrans et aux ennemis jaloux^ etc.
En Pan 676(1277-8), quand Abou-Youçof passa en Espagne
pour la seconde fois, Ibn-eUAhmer désira se raccommoder avec
lui ; aussi, le jour où ils se rencontrèrent, ibn-Morabet récita au
solUain mérittide le poôme que nous reproduisons ici :
* Pour ga^6*- lisez {fiyts
* Pour 3«X#a3 lisez ^Sjiii
> Pour 4IU4JJ lisez «^J,
reste de cette pièce.
DimASTR ■tRmiDK. — AB0IJ*T0(;Ç0F-TAC0UB«1BN-ABD-EL-HACK. 97
BoniMnouoêlUpour les partisans^ de Dieu el pour la foi I etc.
La séance terminée, AboQ-Tooçof ordanna à son poète Abd«
«1-Asti décomposer une réponse à celte pièce et, dans une seconde
réunion, 'A la Gl réciter devant Ibn-ei-Abiner. En voici le texte :
Aujourd'hui, sois dans la joie et dans la sécurité^ etc.
Après la mort d'Abou-Mohammed-Ibn-Cbéktlola, le sultan
Aboa-Yonçof se rendit niaitrede Malaga et de la Gharbïa, acqui*
aitions dont il appréciait haateihent l'importance ; mais Ibn*el-*
Ahoier en éprouva tant d'inquiétude et do mécontentement qu'il
^M)ntracta une alliance avec le roi chrétien. Par ce nouveau traité,
les denx souverains s'engagèrent k combiner leurs efforts afin
d'expulser le sultan Abou-Yottçof de r Andalousie, etlbn-eUAhmer
M vit ramené à la position sobordoocée que son père avait oc*
x^upéo comme allié des chrétiens. Il croyait cependant garantir
ainsi son autorité <«t s'ossurar no appni que, saoe cela, il
n'aurait pas pu espérer en sa qualité de musulman. Le roi chré-
lien profita de cette occasion pour rompre la trêve qui subsistait
entre lui et Aboa- Yooçof et pour donner l'ordre h sa flotte d'aller
bloquer la garnison mérinide qni se trouvait dans Algéciras. Peu*
dant que les navires des chrétiens se tenaient mouillés dans le
Détroit pour couper les communications entre ces troupes et le
territoire africain, le govvernenr mérinide de Malaga, Omar-Ibn-
Yehya^Ibo^Hobalii, abandonna le parti deses compatriotes.
LesBeni-Mohalli, une des principales familles de la tribu des
Botouïa, avaient été confédérés et alliés de la famille [mérinide]
de Hammama-lbn-Mohammed, depuis l'époque où celle-ci vint
s'établir «Q Maghreb. Abou*Melak-Abd-el-Back épousa Omm-el-
Yomen (mère de la félicité), fille do Mohalli, et ce fut d'elle que
naquit Abou-Youçof-Yacou&'lbn-Abd-el-Hack. Femme d'une
grande piété, elle fit le pèlerinage do la Mecque en l'an 643 [i 245-6)
et revint en Maghreb l'an 647. Cinq années plus tard, elle partit
pour rOrient une seconde fois, et fit un pèlerinage de suréroga-
tioo ; puis, ayant repris la route de son pc fs, elle mourut au
» Pour <T>^ lisez «-^-^
T. IV.
98 HISTOIRE DBS BBBtltRBS.
Caire, Tannée suivante. Tous les parents de celte ferame joiïis^
saient d'une haute faveur auprès du sultan Abou^Youçof, tant à
cause de TalfinUé qui existait entre euiL et lui que delà grande in^
fluence qu'ils exerçaient dans leur tribu. Aussi, quand ce mo-^
narque eut effectué la conquête du Maroc, capitale desAImohades,
ii confia le gouvernement de cette ville et de toutes les provinces
qui en dépendent à Hohammed~lbn-Ali, petit-fils de Mohalli. Ce
fonctionnaire administra avec une rare habilité, depuis l'an 668
(1 269) jusqu'à 1 an 687 (4288-9). Il mourut sous le règne du sultan
Youçof-lbn-Yacoub.
En l'an 676 (4277-8), quand Moharamed-ibn-Chéktlola se ren-
dit ii AlgéciraSy après la mort de son père, le raïs Abou-Moham-
med, et livra au sultan la principauté de Malaga, ce monarque,
avant de rentrer en Maghreb, fit choix d'Omar, fils de Yahya et
petit-fils de Mohalli, pour gouverner sa nouvelle acquisition ainsi
que toutes les places fortes étions les districts de la Gharbïa.
Talha-'Ibn-Yahya , frère d'Omar et homme d'un caractère
hardi, résolu et hautain, profita de sa parenté avec le sultan pour
obtenir sur lui un grand ascendant. Ce fut de sa main que mou-
rut Yacoub-lbn-Abd-Allah-Ibn-Abd-eUHack\ àGhabouIa, en
l'an 668 (1269-70). Quatre années plus tard , il aida-Peth-
Allah-es-Sedrali, client et vizir^du sultan, à combattre, sur le
Kodia-t-cI-Araïch, auprès de Fez , le gouverneur du Maghreb,
Abou-'l-Ala-lbn-Abi-Taiha.lbn-Abi-Coreich,EnTan674(4275-6),
il se révolta lui-même et passa dans le Monl-Azouer, au moment
où le sullan rentrait de sa première expédition en Espagne.
Gracié bientôt après, et admis do nouveau dans la société intime
du sultan, il oublia ces faveurs en Tan 676, se rendit d'Algéciras
a Grenade et se fit ensuite transporter dans le Rtf. Ceci eut lieu
vers l'époque où le suUan rentrait de son voyage h Malaga. Du
Rîf, il passa dans le pays du Sud et, après avoir vécu quelque
temps au milieu des Beni-Toudjtn, il repartit pour l'Espagne,
< Voy. p 48 de ce volume. — Dans le lextc onbe, il faul insérer les
mois (jjj M *XAfi après le mot t->i "
DYUaSTIB ■fiRlNIDI.-*-Am)U-YOV)ÇOF-T:iCOini-IBN-ABD-IL*HACK. 9^
l'an 677 (4S78-9), aa moment où le suUan Âboa-Youçof allait
faire la guerre à Ibn-el-Ahmer et an roi chrétien.
La flotte chrétienDe avait déjà pris position dans le Détroit
po«ir empêcher les troupes mérinides en Espagne de commuai-*
quer avec l'Afrique, quand Omar, le gouverneur de Malaga ,
cuBiprîi que l'équipée de son frère l'exposerait lui-même à
la colère du sultan Abou- Youçof et, pour éviter ce danger, il se
mit en relation avec Ibn-el-Ahmer, qui venait de rentrer à Gre-
nade, et consentit à kii céder la ville de Malaga en échange de
Salobrena et d'AImunecar. Cette négociation fut entamée et cou-
dnite par Talha, sur les instances du sultan espagnol. Quand les
troupes de Grenade parurent devant Malaga, Omar 6t arrêter
Ztans-Ibn-Abi-ETad, commandant de la garnison mérinide, ainsi
que Mohammed lbn*Chékflola, et remit alors la ville à Ibn-^-
Ahmer. Ce prince y fit son entrée vers la fin du Ramadan de Tani
(677 — février 4279). Omar-lbn-Mohalli alla s'installer dans
Salobreiia et y transporta, avec ses trésors, tout l'argent et tout
le matériel militaire qu'Abou-Touçof loi avait confién.
Ibn-el*Ahmer et le roi chrétien se donnèrent alors la main
pour empêcher le sultan mérinide de rentrer en Espagne et,
s'étantj'adressés h Yaghmoraoeo, seigneur de Tlenncen, ils le dé»
cidèrent à rompre avec Aboo-Youçof et h lui créer des embarras
en faisant des courses dans le territoire du Maghreb. Par ce
moyes, ib espérèrent empêcher les Mérinides de passer en Es*
pagne pour y faire la guerre sainte. Les trois princes se firent
réciproquement de riches cadeaux : Yaghmoracen envoya k
Ibn-el-Ahmer trente chevaux de race avec une quantité d'étoffîifs
de laine, etcosnilaB lui expédia dix mille pièces d'or, comme
équivalent de ce don. Le chef Abd-el-Ouadile, ne voulant pas
accepter de Targeni en retour d'un cadeau, chargea Ibn-Me-
rouan, l'envoyé grenadin, de rapporter celte somme à son
maître.
L'émir Abou-Youçof se trouvait à Maroc quand on vint lui
annoncer l'alliance des trois souverains et l'interruption des com-
munications avec l'Espagne. Il était arrivé dans cette ville en
Moharrcm 677 (mai-juin 1278), bienlêt après son retour de la
400 mSTOIRB DK3 BBRBftRM.
goerre sainte. Sa présence y était devenue nécessaire b cause des
brigandages auxquels les Arabes-Djochem de la provindo ée
Temsna se livraient sur les grandes routes. H venait de les faire
rentrer dans le devoir quand il apprît la trahison d'Ibn-Mohallî
à Malaga et le siège d'Algécîras par le roi chrétien.
Le 3 Cboual (47 février, i^l9) , il se ihit en route pour Tan-
ger et, en passant par Tcunsna, il apprît ^uo l'ennemi avait com-
plété rinveslissement de la forteresse espagnole le 6 du même
mois, «t qu'il devait bientôt la prendre parce que sa flotte la
tenait bloquée depuis le mois de Bebiâ (juillet-août 1^6).
Comme la garnison demandait avec instance l'envoi de secoure,
Abou- Youçof (it ses dispositions pour traverser le Détroit, mais,
en ce moment même, il lui arriva encore une contrariété : Mas-
oud«lbn-Kanoun , émir des Djocbem^Sofyan se mit en révolte à
Nefts, chez les Hasmouda, le 5 Dou-'l-Càda (24 mars 4279), et
rassembla autour de lui les gens de sa tribu et une foule d'autres
guerriers. A cette nouvelle, il partit pour combattre le rebelle,
après avoir fait prendre les devants è son petit*iils, Tacheftn^
Ibn-Abi-Malek, et è son vizir, Yahya-lbn-flazem. L'approche de
l'armée mérinide suffit pour disperser les insurgés, qui prirent
la fuite en abandonnant leurs tentes et leurs bagages. Une frac*
tion des Sofyan, les Hareth, fut complètement dépouillée. Masoud
se jeta dans la montagne de Sekciouï où il fut bientôt cerné par
les troupes du sultan. L'émir Abou-Zian**Mendil , qui passa
alors dans le Sous pour y rétablir l'ordre , rejoignît son père,
Abou-Toaçof, vers la fin de l'année.
.Algéciras était alors sur le point de succomber, et les faabi*
tants, découragés par la longueur du siège, l'acharnement de
l'ennemi et le manquede vivres, avaient (ué [allaient tuer] leurs
enfants pour les sauver do l'esclavage. Un si triste état de choses
exigea un prompt remède ; aussi, le sultan ordonna -t-il à son fils,
l'émir Abou-Yacoub, de quitter le Maroc et d'aller au secours
des assiégés pendant que la Oottu irait attaquer celle de l'ennemi.
' Dann le texte arabe il faut supprimer le root ^^
* ••« «-"*■.• • ■••
mrilASTIB KfiRmiDC. ABOO-ltMrÇOr-TACobB-lBK-ÂBD-FL-nVcs/lOf '
Arrivé à TaogBriUos Id mois de Sa(er 678 (juiQ-juiltct 4279),
ee prÎBoe Ci porter à toutes les villes de la cAtc l'ordre d'équiper
J^urs Aâvires pour une expédition et de les réunir à Ceota, k
Tanger et à Salé. Il distribua en même temrs de l'argent aux
troupes et Uor remonta tellement le moral, qu'elles se décidèreni
èr eombaUre jusqu'à la mori. Le légiste Abou-Uatem^eUAtéfi, sei-
gneur de Cauta, déploya le plus grand zèle à remplir les ordres
éa aulian et il embarqua dans la flotte tous les guerriers de sa
ville, juaqti'aux jeunea gens et aux vieillards.
BMI-^*Abmer apprit avec douleur la position des musulmans
mferviés daoa Algéciras et regretta vivement d'arotr contribué h
leurs malheara par aoo alliance avec le roi ehrétien. Pour répa-
rer sa iaute, il rompit le traité qui Tattacbait aux infidèles et fit
équiper des navires dans les ports d'AlmuQecar, d' Alméria et de
Malaga, dans le but de secourir le$ vrais croyants,
La flotte musulmane, an nombre d'environ soixanle*dix béti-
■lents parfaitement équipée , se réunit enfin dans le port de
Geuta et s'étendit ensuite d'un bord du détroit jusqu'à l'autre.
L'émir Àboa-Youçof lui confia son propre drapeao et, le SRebiA
premier (4 9 juillet 1279) il donna Tordre de mettre à la voile.
Ces navires quittèrent Tanger et abordèrent à Gibralfar, la veille
d'un jour fortuné, de l'anniversaire delà naissance du Prophète
40B«bîA premier -«-24 juillet). Au lendemain, tous les marins
«adossèrent la enirassc et la cotte de mailles } puis, ayant écouté
les exbortationa de leurs prédicateurs et fermé la résolution de
soutenir bravement la cause do Dieu, ils entamèrent le combat en
poussant leur cri de guerre : El-Djinna I El4>jinna I {le paradis !
Uparadit / ). Il ne leur fallut qu'un instant pour joindre la flotte
ennemie, oonposée de quatre cents voiles, pour accabler lescbré-»
tiens d'une grêle de flèches, les mettre en déroute, les noyer, les
•abfer et prendre leurs navires. Ensuite, ils forcèrent l'entrée du
port d' Algéciras et jetèrent ainsi une grande perturbation parmi
les assiégeants. Le roi chrétien, n'osant ])as attendre l'arrivée de
l'armée commandée par l'émir Abou-Yacoub [fils du sultan],
abandonna ses positions et leva le siège. Les femmes, les enfants
et la garnison de la ville se répandirent au dehors et ramassa*
• • • • ^» •
• I • • • •
HUTOIU DBS BBHBfcUff. *
rent une telle quantité de blé, de fruits et d'autres vivres laissas
par Tennemi, que les marchés de la ville en furent parfaitement
approvisionnés pendant plusieurs jours, jusqu'à ce que les lieux
voisins purent y envoyer des convois.
L'émir Abou-Yacoub s'enopresaa de traverser le Détroit et
contribuer par sa présence à Feffroi des inGdètes ; mais, avant
d'envahir leur pays, il résolut de châtier Ibn-el^Ahmer. Pour
effectuer son projet plus facilement, H offrit la paix au roi chré-
tien el lui proposa de réunir leurs forces et de mettre le siège
devant Grenade. Le roi, intimidé par la puissance des Mérinides
et très-coorroucé contre Ibn-el-Ahmer d'avoir secouru la vilh»
d'Algéciras, accepta la proposition et envoya une compagm'c
d'évèques au camp mérinide pour conclure le traité. L'émir
Abou-Youçof fit conduire ces personnages auprès de son père le
sultan, qui n'avait pas encore quitté le Maghreb ; mais ce monar*
que désapprouva complètement le projet d'alliance, disgracia
son fils et congédia les envoyés. Abou-Yacoub revint en Afri-^
que avec une députation composée d'habitants d'Algédras
et trouva son père le sultan dans la province de Sous, où
il l'avait laissé.
Abou-Zîan-Mendtl, fils d.' Abou-Youçof, ayant alors reçu de
son père le conunandement des troiipes mérinides en Espagne^
s'établit dans Algéciras, conclut un traité de paix avec le roi
chrétien, et entreprit le siège de M arbella *, forteresse appartenant
à Ibn-el-Ahmer. Après avoir bloqué celte place par terre et par
mer, il dut renoncer à l'espoir de s'en emparer à cause de la ré-,
sistance qu'elle lui opposa. Quand il fut rentré à Algéciras, les
places fortes de la Gharbïa s'empressèrent de reoonnattre son
autorité afin de se garantie contre le roi chrétien. L'arrivée des
renforts expédiés du Maghreb lui permit alors de mettre le
«iége devant Ronda , et, pendant qu'il faisait tous ses efforts
pour réduire cette place, I0 roi chrétien, soutenu par les Ghékt-
* Telle est la bonne leçon. Dans l'édition du texte arabe il fautsup<
primer la première ;par.tic de. la nqle (1}.
DYHàSTIB lift RIMIOB . — ABOU-y OCÇOF^ YICOUB-IBN-ABD-BL* H ACK . 4 03
lola et par Ibn^ed-Deltl, envahit le territoire musulman afin
d'attaquer Ibn-el-Âhmer dans Grenade.
Le sultan andalousien comprit aîors la nécessité de se récon*
cilier avecles Mérinides et invita Témir Abou-ZIan à une confé-
rence. Nous parlerons, plus tard, do cette entrevue qui eut lieu
dans le voisinage de Marbella.
Le sultan Abou-Youçof leva enfin le camp qu'il avait établi au-
pied du. Mont Sekctona et alla faire quelques courses dans le Sous
avant de rentrera Maroc. Il attendit dans cette ville la fin de lir
guerre contre les Berbères-, et partit ensuite pour Fez, d'où il
envoya des proclamations dans toutes les parties de son empire
afin d'appeler le peuple à la guerre sainte. Dans le mois d&
Redjeb678 (nov.-dée. 4279), il fit son entrée dans Tanger et
put alors juger de la mauvaise tournure que les affaires de l'Es-
pagne avaient prise depuis son départ de ce pays. Il reconnut que
le roi chrétien avait obtenu une grande supériorité sur Ibn-el-
Ahmer et qu'il visait h la conquête de toute la péninsule.
En 679 [4280-'4) , le roi chrétien marcha contre Grenade sur
la prière d'Aboa-H«-Hacen*-Ibn*Abi-Ishac-Ibn-CbéktIola, seigneur
de Guadix, mais, après avoir assiégé cette ville pendant quinze
jours, il abandonna Tentreprise. Pendant son expédition il avait
eu pour alliés tous les princes de la famille Chéktiola, rivaux
déclarés du souverain de Grenade. Dans sa retraite il eut à corn*
battre les troupes zenatiennes au service d*Ibn-el-Ahmor. Ce
corps de guerriers, voulant soutenir dignement son ancienne ré-
putation, se mit en marche , sous les ordres de Talha-lbn-
Yahya-lbn-Mohallîet deTachefîn*Ibn-Moti, chef des T}rbtghtn«.
Ils atteignirent Tennemi auprès du château de Moclin * et lui
tuèrent sept cents cavaliers. Dans cette rencontre, oii Dieu as-
sura la victoire aux musulmans, Othman-lbn-Mohammed-Ibn**
Abd-el-Hack, prince de la famille des Beni-Mérin, remporta la
couronne du martyre.
* Variante: riri^/Mn. Voy. ci- devant, page 26.
• Moclin : les hi.storiens arubes ce? ivent Bt-^MoihHn (^^aXaI^
En Tan 680 (1281-2) ïc roi chrétieD mit le siège décent G
nade à la prière du rais Aboo-Mobaminod-Âbd-Allah[-ibii«Ché^
ktlola], seigneur de Guadix, et, bien qu'il y r^neneftl au boul de
quelques jours, il n'ei» conserva pM moins une grande supério*'
ri lé sur les musulmans espagnols. Le suUan Abou-Yonçof fui
pénétré de douleur à Ta^peci de leurs malheurs, el, voulant dé*
livrer Ibu-el-Ahmer des humtliaiions dont l'ennemi l*abrenvait^
il lui fit proposer une suspension d'armes et an traité d'alliance..
Celte offre fut repoussée parce que le sultan mérinide avait de-
mandé avant tout, que la ville de Malaga loi fût rendue.
Abou «Youçof se remit alorsà travailler afin d'apf^nir les obsta-
cles qui auraient empécbé une nouvelle expédition contre les*
chrétiens. Un de ses plus graves embarras fut Tatlitode peu
rassurante de Yaghmoracen, dont il avait appris d'une manière
eertainOi les liaisons avec Ibn^l-Ahmeret le neveu d'Alphonse*.
Le chef abd-el-ouadite auquel il proposa un nouveau traité de
paix, dévoila toul-è*fait ses intentions hostiles el déolarft
ouvertement qu'étant devenu l'ami des Espagnols , tant mu«^
sulmaus qu'infidèles^ il était bien résolu h envahir le Maghreb*.
L'Émir des musulmans, se trouvant ainsi dans Ifr nécessité de
marcher contre lui, rentra a Fez, vers la fin de Choual ( 679 -— ^
février 1281), après avoir passé trois mois il Tanger. Voulant
toutefois se ménager un prétexte pour commencerdes hostilités,'
il envoya un ambassadeur k Tlemcen avee la commission de
sommer Yaghmoracen à faire la paix avec les Beni-Toudjin,
alliés de l'empire mérinide, et à retirer ses troupes de leur pays«.
Cette demande excita au plus haoi degré l'indignation- du prince
abd-el-ouadite el le confirma dans son égarement.
Vers la fin de l'an 679 (avril 4284 ) , k suHan expédia de Fee
une armée sous les ordres de son fils^ Abou-Yaooub, et, peu de
* Le texte arabp perle le fils du frère d^Alphonse, L'auteur aurait dû
écrire le roi. Les historiens arabes rapportent souvent d'une manière
W-ès-inexacte les noms des rois chrétiens.
DIHASTIB MBINiDB. ABaU*YOeÇ^-TàCQ0B*>iBN-ABD-BL-BACK. 40K
temps après, il alla la rejoindre à Téza. Parvenu au Molouïai il
s'arrêta pour laisser arriver toutes ses troupes et ensuite il se
rendit à la Tafna eu passant par Mama. Tagbmoracen vînt kit
offrir bataille à la tête desZenata et de ses alliés arabes, lesquels
traînaient après eux leurs lentes et leurs troupeaux. Les princi-
paux chefs des deux armées se mesurèrent d*abord, les armes à
la main; ensuite, les soldats montèrent h cheval et s'élancèrent
au eombat. La rewxuilre «ut Ueu à RharBouia, dans le Melab-
Tafna, L'ftmir des musdmaM avait placé la oavalerie de sa
garde sur une des ailes de Varmée^ et, sur l'autre, les escadrons
ecosmaïKlés par so» fils Abou-YaoMib. Le conflit se prolongea jus*-
ija'att soir, mais, au momenl où l'os atlaîl se livrer au repos,
les Beni*Alxi^l*Oaad eoaimenoèreni leur retraite en abandon^
oanl bagages, bétes de somme^ armes et tentes. Pendant toute
oeile nuit, les trovpes d'Aboii-*Toaçof restèrent à cheval et,
au point du jour, elles se mirent à la poursuite des fuyards. Tous
les trottpeeux des Arabes nomades tombèrent au pouvoir des
Hérioîdes. Le vainqueur pénétra dans le pays de Yaghmo-
racen, puis dans celui des Zenata, et rencontra Mohammed-^bn-^
AbdHïUGaouï le toudjtnide à Bl* Caçabat. Aecompagné par ce chef,
il porta le ravage dans le territoire abd>-el-ouadite et, Payant en*
suite congédié avec les troupes toudjinides, il tint la ville de
Tiemcen étroitement bloquée jusqu'il ce que ses alliés fussent
rentrés dans le Ouancfaertoh, région où la vengeance de Yagh*
moracen n'était plus à craindre. H décampa alors et revint à
Fez dans le mois de Ramadan 680 (déc.-jdnv. 4284-2).
Au commencement de l'année suivante (avril 4282), il se ren-
dit de Pez à Maroc d'où il envoya son fils, Abou-Yacoub, dans le
Sous, afin d'y rétablir l'ordre. Il était encore à Maroc quand il
reçut un message du roi chrétien qui» obligé maintenante soute^
nir une lutte contre son propre fils {DonSanche), implorait le
secours des Mérînides. Heureux de pouvoir entretenir la dis-
corde parmi les chrétiens et gratifier en même temps son amour
pour la guerre sainte, il consentit volontiers h secourir son an-^
cien ennen^i et partit sur le champ afin d'entrer en Espagne le
plus tôt possible.
406 msTWfts tan iBtttÊiis:
Boif SANCiu [Chandja] si RÉyoLn coktkb son ptas, lb roi
CHBATIBR. — SDR LA PRIBBB DB CBLUI-CI , L^ÉIIIR ABOU-TO€ÇOF
PA8SB BK BSPAGHB POUR LA TROISilUiB FOIS.
Après son expédUîon coDtre Tlemcen, le suliao Abou-Yonçof
revint * à Fez d'où il partit pour Maroc. Pendant son séjour dans
cette dernière ville^ une ambassade, composée de patrices, de
grands et de comtes du peuple chrétien, vint lui exposer que
Sanche, fils de leur souverain, s'était mis en révolte et, qu'ayant
été soutenu par une partie de la nation, il avait vaincu son père.
« Notre roi, ajoutèrent-ils, se voit donc forcé d'implorer le se*
» cours de votre majesté ; étant convaincu qu'avec l'aide de
» l'Émir des musulmans, il doit recouvrer son royaume, i»
Le sultan s'empressa d'y donner son consentement, dans l'es*
poir de pouvoir faire tourner à son propre avantage la désunion
qui régnaitparmi leschrétiens*et, s'étant rendu àCasr*el-HedjaB,
il traversa le Détroit, après avoir invité ses sujets è le suivreet à
prendre part aux mérites de la guerre sainte. Débarqué à Aigé-
ciras, dans le mois de Rebiâ second 684 (juillet-août 4283), il^
réunit les garnisons de ses forteresses espagnoles et alla se poster
h Sakhra4*EYad >• Le roi chrétien y vint le trouver, en s'humi-
* Dans le texte arabe H faut remplacer le mot j^^^par
* Dans une dépêche officielle adressée par le sultan Abou-Youçof à
Philippe-le-Hardt, roi de France, dépêche qui se trouve encore dans les
archives du royaume, le monarque africain déclare qu'en prêtant son
appui au roi Alphonse, il n*avail agi ni par aucune vue d'intérêt, ni
pour agrandir ses états, mais uniquement pour soutenir ce prince in-
forloné. Voy. le mémoire composé sur ce sujet par M. de Sacy et
inséré dans le recueil intUulé : Mémcnrés de V Académie des Inscriptions
et Belles^Lettres, tome ix.
s Variante : Sakhra-tr-Eibad. Celte forteresse était probablement
située dans le voisinage de Sévillc.
]»THÀ8TIISi«IinDB.^-A10U*T0IIÇ0P-TlC0im-IiR-AllD^L-aÀ€K. 407
liaol devant la puissance de l'islamisme el en mettani tout son
espoir dans Pappni dn snltan. Âbon^YonçoC racoueillit avec les
honnears dos à ud grand souverain^ mit à sa disposition une
somme de cent mille [pîàces d'or} qu'il tira du trésor publio, et,
pour en assurer le remboursemeot^'^il reçut en gageais oouroono
du roi, la même couronne qui se conserve encore dans le palais
des Mérinides et qui forme on de ces titres^de gloire dont la pos-
térité dn sultan est justement fière. Accompagné du roi, son pro-
tégé, le sultan mérinide envahit le pays de l'ennemi et mit le
siège devant Gordoue, ville dans laquelle Sanche s'était enfermé
avec ses partisans. Après avoir attaqué laTplace pendant quel-
ques jours, il se mit k en parcourir les environs et, s'étant ensuite
dirigé vers Tolède, il en dévasta les alentours. De le, il poussa
en avant jusqu'au château de Madjrtt [Madrid) sur l'extrême
frontière, et, dans cette course, il enleva tant de butin que le
camp en regorgea. Dans le mois de Ghftban (novembre) de la
même année il revint à Algéciras.
Ibn-el-Ahmer ayant appris qu'Omar-lbn-Moballi avait re-
connu l'autorité du sultan mérinide, déclara U guerre è ce chef
et loi reprit la ville d'Almunecar. Au commencement de cette
année (avriUmai) , il le tenait assiégé [dans 9abbrena],roais il dé-
campa à l'approche d'une Qotte que le sultan y expédia aussitôt
qu'il fut rentré à Algéciras. ibn-Hohalli étant alors accouru au-
près de son sauveur, lui offrit sa soumission avec les hommages
du peuple de Salobrena* et, en récompense de cette démarche,
il reçut sa confirmation dans le gouvernement de la >ille ; mais,
oubliant bientôt la grâce qu'il venait de recevoir, il se déclara
pour Ibn-el-Ahmer dans le mois de Choual de la même année
(janvier 4283). Cette défection lui procura encore do la part du
sultan espagnol, le gouvernent d'Almunecar.
LS SCLTAN FAIT LA PAIX ATSG IBN-BL-AHMR , UTS LI Blfiai DB
■AlAGA BT BBFBBITD LA OUBBBB 8AIRTB.
L'appui que le sultan du Maghreb venait de donner au roi
408 msTOiAB Dfes inBitii.
ehrélien réveilla lesappréhdMton8|d'tbii-el-Ahinef à on tel point
qa'il forma ane alliaDce avee Don Sanche et, bian qa^il ne reo^
dtl attoan service à œ prince, il n'attira pas moins les malheurs
de la guerre sur VAndalousie* Le roi chrétien ayant emporté de
grands avantages sur son fils, revint [vers Algéciras] avec Abou-
Youçof qui prit aussitôt ses dispositions pour faire le siège de
Malaga.
Vers le commencement de Pan 688 (avril 4Î83), Abou-You-
çof sortit d'Algéciras h la tête de son armée et, quand il eut
réduit toutes les places fortes de la Gharbïa , il investit la ville
de Malaga. Ibn-el-Ahmer ressentit alors les dangers de la posi-
tion dans laquelle il s'était mis et, prévoyant les conséquences
fâcheuses de ses intrigues avec Ibn-Mohalli au sujet de Malagar
il essaya d'éviter l'abtme vers lequel son imprévoyance Tavait
conduit. Le seul moyen de salut qu'il put imaginer fut de s'adres-
ser b Abou-Yacoub^ (ils et succcesseur désigné du sultan méri-
nide, en le priant de travailler h un raccommodement qui per-
mettrait aux peuples musulmans de combiner leurs efforts contre
l'eanemi commun.
Heureux de mériter la bénédiction divine par l'accomplisse-
ment d'une tâche aussi louable, Abou-Yacoub quitta le Maghreb
k ^instant même et, dans le mois de Safer [mai], il débarqua en
Espagne et trouva l'Émir des musulmans campé sous les murs de
Malaga. Son intervention fut d'autant plus elBcace qu'Abou*
Yooçof soupirait après le bonheur de combattre les infidèles
et de mériter la faveur divine en contribuant an triomphe
de la parole de Dieu. La paix, promptement conclue , mit le
comble aux vœux d'Ibn-^el-Ahmer et releva le courage des vrais
croyenls.
Rentré à Algéciras, le sultan de Maghreb lança plusieurs dé-
tachements sur le territoire chrétien et , vers le commencement
de Bebià second, 682 (commencement de juillet), il partit lui-
même, h la tête de l'armée, et marcha sur Tolède. En passant
C'est à tort qu'on a imprimé AbotÂ^Youçof ûtïtis le texte arabe.
^ imiASTIB HtinfIDB. — ABOII-tOIIÇOr*YACOOI-JBlf-ABI>*BL-HACK. 409
auprès de Gordoue^ il en dévasta les environs et prit cpMiqiies
châteaux ; pais, s'élant dirigé vers El-^Btra, il laissa un eorpe de
troupes pour observer Baésa et poussa rapidement en avant.
Après avoir traversé un pays tont^è-fait désert, il arrivai le
troisième jour, à El-Btra, ville située dans les dépendances de
Tolède K Ses cavaliers parcoururent les plaines voisines et les
laissèrent couvertes de sang et de ruines; aussi, avant que Par-
mée eût atteint Tolède, elle se trouva tellement chargée de butin
qu'elle ne put plus avancer. Pour s'en retourner, elle prit une
autre route et elle arriva devant Ubeda après avoir saccagée!
massacré tout ce qui se trouvait sur son passage. Le sultan,
voyant que l'ennemi ne voulait pas s'aventurer hors de la ville,
revint au camp, près de Baéza et, après avoir passé trois jours
è dévaster les environs de cette place et k couper les arbres,
il se tourna vers Algéciras, où il arriva dans le mois de Bedjeb
(octobre 4283). Quand il eut fait le partage du butin^ il con6a
à son petit-fils, Eïça-Ibn-Abi-Malek, le commandement d' Algé-
ciras, puis, le cinquième jour après sa rentrée de cette expédi-
tion, il s'embarqua pour le Maghreb. DeuK mois plus tard, Eïça
mourut eu comballaut les infidèles.
Parti de l'Espagne au oommencement de Chàban (fin d'oct.) ,
le sultan descendit à Tanger avec son fils, Abou-Ztan-Mendtl, et
après s'y être reposé trois jours, il prit la roule de Fez. Arrivé
dans sa capitale, vers la fin de Chaban (nov.) , il y resta pen-
dant un mois, afin d'accomplir le jeûne et les dévotions du Ba^
madan; et puis, ces devoirs remplis, il partit pour Maroc avec
l'intention d'inspecter ses provinces méridionales et d'y rétablir
l'ordre. Voulant jeter d'abord un coup d'œil sur les districts de
Salé et d'Azouer, il passa deux mois à Bibat-el-Feth avant de se
rendre h sa destination.
Au commencement de l'an 683 (mars-avril 4284), il fit son
* Dans l'édition imprimée du Cartas on Mi El-Beréh^ à la place à'EU
Bira, Celte localité, située à Iroîâ journées de marche de Baéza et à une
journée de Tolède, nous est introuvable.
440 HISTOlilB DBS BBRBfcRBS.
entrée à Maroc où il apprit qae le roi chl^étien, fils d'Alphonse ^,
venait de mourir et queSanche, cefilsdénataré, avait réuni souà
son autorité toute la population chrétienne. A cette nouvelle, il
sentit renattre sa passion pour la guerre sainte; mais avant de
s'y engager, il envoya contre les Arabes du Sous, son fils Aboû-
Tacoub, afin de mettre un terme à leurs brigandages. Ce prince
poursuivit les rebelles jusqu^à Es-SaguTa-t-el-Bamra, extrême
limite de la partie habitée de celte région, et les contraignit à
se jeter dans le Désert où beaucoup d'eotre eux moururent
de faim et de soif. Ayant alors entendu dire que le sultan
était malade, il reprit la roule de Maroc, mais, en y arrivant,
il le trouva parfaitement rétabli et prêt à recommencer la
guerre sainte par reconnaissance de la grâce que BieU venait de
lui accorder.
LB StLTAN PASSB BN BSPAGltB POUft LÀ QUATRIÈMB FOIS. SIÉGB
DB XÉBÈS. — AUTBB8 OPftBATlONS HILITÀIBBS.
L'Émir des musulmans ayant formé la résolution de passer
encore en Espagne, fitTinspeclion de ses milices et des troupes
do sa maison, afin de compléter ce qui pourrait manquer à leur
équipement. U invita aussi toutes les tribus du Maghreb à venir
se ranger sous ses drapeaux. Dans le mois de Djomada second
683 (août -sept. 4284), il quitta Maroc ; vers le milieu Chà^
ban (oct.-nov.), il descendit à Ribat-el*Feih où il fit le jeûne
du Ramadan ; de là, il se rendit à Goçour-Masmouda et, vers
la fin de l'année (février 4285) , il commença à envoyer en Es*
pagne ses troupes soldées cl ses [volontaires. Débarqué lui-
môme h Tarifa, le 4*' Safer 684 (7 avril), il alla passer quel-
ques jours à Âlgéciras. S'étant alors mis en campagne, il poussa
jusqu'à la Guadalète d'où il expédia plusieurs détachements de
* Notre auteur aurait dû écrire le roi chrétien, Alphonse, fils de Fer-
dtnand.
'DTHÀ8T1S MiRIlf IDB . — ASOII-TOIIÇOP-TACO0B^B!f-ÀBD-BL-H ACK . 141
cavalerie pour ravager les plaines voisines. Après avoir pillé^
incendié et dévasté toute.cette partie du pays chrétien, il investit
Xérès et en fit dévaster les environs.
Les garnisons qu'il avait laissées dans ses forteresses espa-*
gnôles et qu'il venait de rappeler auprès de lui, commencèrent
alors à arriver, et son petit-fils, Omar*Ibn-Abi*Malek*[Âbd-èl«
Ouahed], lui amena une foule de guerriers maghrébins, tant ca-
valiers que fantassins. Ël-Azéfi, de son côté, lui fournit un con-
tingent de cinq cents archers. Quand Ichjs ces renforts furent
arrivés, le sultan fit tenir à son fils et successeur désigné, Aboii*
Ya^onb, Tordre d'appeler à la guerre sainte tout ce qui restait de
musulmans en Maghreb et, vers la fin du mois de Safer, il donna
un drapeau de commaudement et mille cavaliers à son petit^fib,
]fansonr-Ibn-[Abi-Malek]-Abd*el*Ouahed,et le dirigea contre
Sévilie. Cette troupe ramassa un butin considérable et, à son
retour, elle traversa le territoire de Garmona ^n pillant, en mas-
sacrant et en faisant descaptifs, de sorte qu'elle rentra au camp
chargée des dépouilles de l'ennemi.
Le vizir Hohammcd-lbn-Ottou reçut alors du sultan l'ordre
partir avec Mohammed>lbn-Amran*lbn*Abla, et de faire la re-
connaissance du cbAteau d'El-Ganater et [de la ville de] Rota.
Sur leur rapport que ces places étaient en mauvais état et mal
gardées, Abou-Youçof donna, pour la seconde fois, à son pelit-
fils, Omar-Ibn-[Abi-Malek]-Abd-el-Ouahed, le commandement
de mille cavaliers et l'envoya, le 3 Rebià (40 mai) dans la plaine
de la Guadalète. Après avoir tué beaucoup de- monde, dévasté
tout le pays, brûlé les ifloissons, arraché les arbres fruitiers et
détruit les maisons, on rapporta de cette expédition assez do
bulin pour remplir tout le camp.
Le8 Rebiâ [premier, 15 mai 1285) un détachement de Tannée
surprit le chàleau d'Arcos cl enleva tout ce qu'il renfermait. Au
lendemain, Téinir Abou-Moarref fut placé par son père, le sultan,
à In tèiede mille cavaliers et partit pour surprendre ^ et ravager
* Dans le telle arabe il faut lire I^aU
412 llttOIM WB BBMlin.
las environs de 6ë ville. La garnison se iint enfermée dans la place
et laissa dévaster les campagnes, brAIer les moissons, couper les
arbres, enlever les paysans, ei emmener les troopeaax ; aussi,
lesmnsnlmans en rapportèrent un bntin énorme.
?ers le milieu de Rebift [premier], le sultan confia, pour la
troisième fois, un détachement à son petit-fils, Omar, et lui or*
donna d'attaquer un château situé dans le voisinage du camp. It
lui fonmit, de plus, une compagnie d^archers, un corps d'où*
vriers avec leurs outils, une bande de Masmoudiens et les guer-
riers de Geuta. Le cb&teau. fut emporté d'assaut, la garnison
passée au fildel'épée , les femmes et les enfants furent emmenés
en esclavage et tes murailles de la forteresse renversées à
terre.
Le 47 du même mois, le sultan monta h cheval et marcha
contre Sacout «, château pea éloigné du camp. Il y mit le feu,
en tua la garnison et emmena les habitants en captivité.
Le 20 du même mois, Abou-Tacoub, prince héréditaire, ar-
riva du Maghreb avec une armée très^nombreuse et composée
de levées faites dans toutes les tribus. L'Emir des musulmans
vint à cheval au devant de lui pour le complimenter et, le même
jour, il passa ces troupes en revue et reconnut qu'il y avait treize
mille Masmoudiens et huit mille Berbères du Maghreb, tous vo*
lontaires qui désiraient prendre part à la guerre sainte. Il plaça
alors sous les ordres de son fils [Àbou-Yacoub] cinq mille hom-
mes de la troupe soldée, deux mille des volontaires, treize mille
fantassins et deux mille archers, en le chargeant de porter la
dévastation dans les environs de Sévill^. Abon-Yacoub entra en
campagne, précédé par des éclaireurs, et, arrivé h sa destina-
tion, il se mit k ravager, h tuer et à faire des captifs. Il prit d'as-
saut et pilla plusieurs châteaux et, s'étant tourné vers les coteaux
de TAxarafe et le bocage delà plaine de Séville, il y détruisit les
villages et emporta encore quelques places fortes. Quand il eut
vaincu toute résistance et fait un butin immense, il revint au
camp du sultan.
' VariaDtes : Micaut, MontacmU,
DTNÀSTIE MÊRnflDB.— ABOU-TOUÇOV-YlCOUB-nN-ABD-EL-HACK. 1 1 3
Le^cleBebiàsecond (44 jttin),rémir Abbu-Zîan-Mendtl ar*
riva de Tarifa à la tête d'une atmés musulmaDe très^oombreuse.
Le lendemain, il fut confirmé dans le commandemonl de cette
troupe par le sultan et; s'étant fait appuyer par un autre cnrpa,
il se jeta sur les territoires de Carmona et du Guadalquivir. La
garoisoB de la ville sortit pour le repousser, mais elle fut vigou-
reusement ramenée et contrainte à s'enfermer dans la place. On
attaqua alors une tour située près de Carmona et, au boat
d'une heure, on y pénétra de vive force. Âbou-Ztan continua
l'ouvrage de dévastation en parcourant les lieux cultivés et alla
déboucher dans le territoire de Séville. Recommençant alors ses
ravages, il y fit des dégâts énormes et prit d'assaut une tour d'oà
on avait l'habitude de guetter les mouvements des musulmans.
Il mit le feu à cet édifice et rapporta au camp un grand butin. Le
43 deBebift second, l'émir Abou->Yacoub se mit en marche, par
Tordre du sultan, et pénétra de vive force dans l'Ile de Kabtour^.
Le 2 de Djomada (premier — 7 juillet) le sultan confia le corn-
mandemeal d'un corps de troupes k Talha-Ibn-Yahya-Ibn-
Mohalli. Ce chef qui, en l'an 675 * avait pris une part si active
^ux intrigues de son frère Omar, relativement à la ville do Ma-
Jaga, était allé h \a Mecque pour aocomplir le devoir du pèlerin-
nage et, en l'an 682 (4283-4), il était revenu à Tunis avec l'in-
tention de rentrer dans son paye. Ayant encouru les soupçons
de l'usurpateur, lba*Abi<-Omar^, qui se trouvait alors dans cette
oapttsAe, il fut mis en prison. Relâché quelques temps après, par
l'ordre de celui qui l'avait fait arrêter, il passa en Maghreb et
rentra dans le sein de sa Iribu. Ensuite , il accompagna le
sultan dans ses expédiiians contre les chrétiens , et obtiot
le commandement de deox cents cavaliers afin d'éclairer la
marebe de l'armée jusqu'à Séville. Le sultan lui fournit aussi
< Kabiour (Caput Taurt) (?)estle nom d'une lie près de Séville. Elle
s'appelle maintenant Isla Mayor, — (Traduction de Maccari par Gayan-
go8,vol. I, p. 363.)
* Voy. ci-devant, pages 98, 99.
T. IV. 8
H 4 HISTOlftB DES BERBÈRES.
plusieurs espions, les uns juifs, les autres chréiteus tributaires,
qui devaient lo tenir au courant des mouvements du roi Sanche.
Pendant tout ce temps, TÉmir des musulmans pressait tesiëge
de Xérès, et,, depuis le matin jusqu'au soir, il s'occupait è com-
battre, à dévaster le pays et à envoyer des partis de cavalerie
dans les terres de Tennemi. Pas un jour ne se passa sans qu^il
mit en campagne une troupe ou un détachement; aussi, était-il
parvenu à ruiner tout le territoire chrétien et ë ravager les cam-
pagnes de Séville, deNiebla, de Garmona, d'Ecija , les coteaux
del'Axarafe et toute la Fronlèra. Dans ces expéditions, deux
chefs se distinguèrent par leur bravoure : Eïad-el-Âcemi, cheikh
des Djochem, et Khidr«cl-Ghozzi, émir des Kurdes*. Les guerriers
de Geuta se signalèrent particulièrement ainsi que les autres vo-
lontaires et les Arabes -Djochem.
Après avoir pillé et dévasté tout le paysj le sultan se décida à
partir, en voyant que l'hiver approchait et que les convois de
vivres cessaient d'arriver. Vers la fin de Redjeb (fin de septem-
bre), il leva le siège de Xérès et, arrivé à la rivière Berda, il
rencontra l'armée de Grenade, commandée par Yaia-Ibn-Abt-
Elad-lbn-Abd^l-Hack , qui venait renforcer la sienne. Il fit
un bon accueil à ces troupes et leur permit de s^en retourner
chez elles.
Ayant appris que la flotte chrétienne avait reçu l'ordre d'oc-
cuper le Détroit afin de couper les communications entre les
deux continents, il fit rassembler tous les navires qui se trou-
vaient dans les ports du Rif, de Ribat-el-Feth, de Ceata, de
Tanger, d'Almunecar, d'Algéciras et de Tarifa. Au moyen de
cette armée navale, qui se composait de trente-six vaisseaux
parfaitement équipés , il imposa tellement à la flotte ennemie
qu'elle vira de bord et s'éloigna. Au commencement de Ramadan
[novembre], il fut de retour à Algéciras».
' Voy. t. m, p. 414.
*Le Cariai nous donne des détails sur celte expédition dans une Forme
de journal qui parait avoir été tenu régulièrement pendant tout lo
VfNASTIE SÈRmiDB. — A'BOU-TOUÇO>-YACOi:B«ftlN-ABD-BL*BACK. 115
Xe peuple chrétien et le roi Sanchc furent consternés do la
raine de leur pays et, sachant qu'ris ne pouvaient plus résister
aux vrais croyanLs, ils implorèrent l'Émir des musulmans de les
épargner et de faire cesser les hostilités. Leurs démarclics pour
obtenir cette favetir formeront Tobjet du chapitre stiivant.
Pendant que le sultan faisait le siège de Xérès, il reçut la vi«
dited'Omar-Ibn-Yahya-Ibn-Mohalli, qui était encore venu lui
offrir sa soumission ; mais, s^élant méfié d^un homme qui se
jouait de serments et de promesses, il ordonna la confiscation
de ses biens et confia cette opération à Talha-Ibn-Yahya, frère
du traître. Déchu ainsi de ses espérances, Omar fut conduit a
Tarifa et mis en prison, pendant que Talha se rendait h Âlmu-
necar pour saisir ses trésors et les porter au sultan. Mouça-lbn*
Yahya; un antre do ses frères, reçut alors du sultan et pour la
Seconde fois, le gouvernement d'Almunecar, et obtint un déta-
chement de l'armée pour y tenir garnison. Après une détention
de quelques jours, Omar recouvra la liberté et, s^étant joint à la
suite du sultan, il passa en Afrique avec son frère Talha.
Mansonr-lbn-Àbi-Malek partit alors pour Grenade, sans de ^
mander la permission du sultan, son grand-père, et alla ensuite
s^installer chez Mooça-Ibn-Yahya, dans la vitio d'Almunecar.
Lesulfan fut si loin de blâmer sa conduite qu'il lui accorda l'au-
torisation d'y rester.
«HBiSfADI DU BOI dBBÉTIBN ^BOH SANCHB. — BATlFfCATrO^ DB LA
PAIX BT HOBT DU SULTAN.
les «îhréliens qui formaient la population des états apparie-
tenant an fils d'Alphonse ressentirent un effroi et une douleur
lempsque le sultan mérintda se trouvait en Espagne. Ibn-Ehaldoun
n'a fait qu'abréger ce docament en y prenant quelques passages ptfr
'oi et f»»r là.
116 HISTOIRE OES BERBllIIES.
extrêmes en voyant rÉmir des musulmans saccager leurs villa-
ges^ enlever leurs troupeaux, traîner leurs femmes en captivité,
ruiner leurs forteresses et massacrer leurs guerriers. Convaincus
qu^aucune puissance ne saurait les protéger contre le sultan, ils
se rendirent auprès de leur roi, les yeux baissés, les cœîîrs na-
vrés des disgrâces et des châtiments dont les troupes de. Dieu les
avaient abreuvés, et ils l'implorèrent de s'abaisser devant rÉmir
des musulmans afin d'obtenir la paix. « Envoyez à ce prince,
» lui dirent-ils, une députation des grands de l'empire ; autre--
» ment sa colère restera suspendue sur notre pays quand même,
» elle aura cessé de nous frapper. » Le roi accueillît cette pro-
position et consentit h une démarche bien humiliante pour sa
religion : il suspendit ses opérations militaires, et expédia une
députation de patricos, de comtes et d'évéqnesà la cour d'Âbou*
Youçof. Le sultan Gt sentir à ces envoyés le poids de son dédain
en leur refusant une audience, de sorte qu'ils durent s'en retour-
ner auprès de leur souverain et revenir une seconde fois avant
d'être admis dans sa présence. Don Sanche souhaitait tellement
la fin delà guerre qu'ils les autorisa à signer toutes les conditions
que l'on voudrait lui imposer en faveur de la religion et du
peuple musulman; aussi, le sultan, voyant qu'ils désiraient
sincèrement la paix et qu'ils s'abaissaient fraochemeni devant U
puissance de l'islamisme, se rendit à leur prière.
Par le traité qui fut dressé h cet effet, les chrétiens s'obligè-
rent ë vivre en paix avec tous les peuples musulmans, tant les
sujets du sultan mérinide que ceux des autres souverains ; à
demander son consentement avant défaire la paix ou de s'enga-
ger dans une guerre avec les rois, ses voisins ; à supprimer les
impôts dont ils accablaient les négociants musulmans qui visi-
taient leur pays, etè ne s'imuriigcer p)u6 dan» les cpaereliei qui
pourraient surgir entre les princes musulmans <.
* Selon les hisioricns chrétiens, un des articles, de ce traité portait
qae la sultan Abou-Yacoub paierait à DouSaoche deux millions dema-
ravedis. C'était, sans doute, des maravedis d argent, ou dirhems* L«
DTKASTIB ifiBlNlDB. AB0U-Y0CÇ0P-TAC0UB>1BN-ABD-IL-HACK. f 17
Abd-el-Haot-'Ibn-^t-Tordjefnan {fils de Vinterprèté), l'homme
de confiance du sultan, fut chargé de négocier ce traité, et 11 en
rédigea les articles dans les termes les plus forts et les plus
précis afin d'empêcher les chicanes que la mauvaise foi pourrait
y faire plus tard. Il était encore h la cour du roi chrétien quand
les envoyés d'Ibn-el-Ahmer s'y présentèrent avec pleins pou-
voirs de traiter au sujet d'une alliance contre l'Émir des musul-
mans. Le roi les fit introduire et alors, en la présence d'Ibn-et-
Tordjeman, il leur donna lecture du traité qu'il venait de con-
clure avec le sultan mérinidc, au détriment du peuple chrétien
et de sa religion, a Quant à vous, leur dit «il ensuite, vous êtes
D les esclaves de mes pères' et vous n'avez le droit de me parler
» ni de paix, ni de guerre. Voilé, d^aillours, l'Émir des musul-
» mans auquel je ne saurais résister et contre lequel il me serait
» impossible de vous protéger, v Après ces paroles, il les con-
gédia.
Voyant alors combien il tenait à plaire au sultan, Ibn-et-
Tordjeman lui suggéra l'idée d'aller le visiter, afin de faire con-
naissance avec lui et de ratifier le traité. H démontra si claire-
ment combien une démarche de cette nature contribuerait h
éteindre leur ancienne inimitié et à les mettre d'accord que le roi
y donna son approbation. Toutefois, avant de a'y engager, il fit
demander une entrevue à l'émir Abou-Yacoub afin d'obtenir
Vassuranco de son appui. La rencontre eut lieu, de nuit, dans
le camp musulman,, à quelques parasangs de Xérès. Au lende*
main, ils partirent ensemble pour se rendre auprès du sultan
maravtfdi d'or, ou dinar y vaudrait encore de nos jours hait ou oeuf
fraacs> et il est peu prol^ble que le souverain mérinide ait jamais eu
le pouvoir où la volonté de débourser deux millions de dinars, ce qui
ferait seize ou dix-huit millions de francs. Le Cerme tnaravedi est arabe;
ce furent les Almoravides {al-morabitin) qui frappérenl les pièces ap-
pelées el-mcrahiti, — Recherches sur l histoire de V Espagne, par M. Dozy^
tome I, pages 470,471.
' A cette époque le souverain de Grenade payait tribut au roi de
Casliile et lui fournissait un contingent de troupes musulmanes.
tfS msToiRB nus behbèweb.
qui, de son càïéj fit de grands préparatifs pour recevoir le roî
•chrétien et sa suite. Ce fut au milieu^ des insignes de rislamisme,.
entouré d'une armée nombreuse et de tout Téclat d'une nation
forte et pnissaute, qu^Abou-Youçof attendit cet hâte distingué»
Il Taccueillil avec tous les égards, tous les honneurs, que Ton
doit accorder au chef d'ua grand peuple. Le roi fit alors venir
les cadeaux qu'il destinait au sultan et à son fils. Ils se compo*-
saient des produits les plus précieux de l'Espagne chrétienne et
il y avait de plus un onagre et deux animaux sauvages de l'osi-
pèce qu'on appelle éléphant [fil). En retour de ces dons, le sultan
et Abou-Yacoub en donnèreat d'autres,, bien plus riches et plus
beaux. Le roi ayant alors accepté toutes les conditions du traité,
y apposa sa ratification ; cédant ainsi devant la puissance de
l'isiamisme ; et il rentraaa milieu de son peuple, le cœur rempli
de îoie et de bonheur.
Le sultan profila de cette occasion pour demander à- son h&te
Je renvoi de tous les livres de science qui étaient tombés entre
les mains des chrétiens depuis que ce peuple avait commencé-à
s'emparer des villes musulmanes. Le roi rassembla un
grand nombre d^ouvrages traitant de divers sujets S ^n chargea
treixe bétes de somme et les lui expédia *. Par l'ordre du
sultan, on les déposa dans le collège qu'il avait fondé à Fex pour
Képandce 1/instrnction.
« Dans lé texte arabe il iaut probablement lire l^Luat à la pbcede
l^UI
* Cela ferait onze cents volumes, en regardant une centaine de vo-
lumes comme la charge d'un mulet. Selon Tanieur da Cartas^ cette
collection de livres renfermait plusieurs exemplaires du Coran et des
commentaires coraniques tels que le Tefcir d'Ibû-Atîa, et le Tefàir
d*E(h-Tbâalebi ; un y remarqua de plus les grands recueils des tradi-
tions [hadith), le Tehdib, Vhtithkar et autres comœeolaires du Hadith^
les principaux traités de jurisprudence musulmane, plusieurs ou%Tages
sur la philologie, la gr&mmalre et la littérature arabes. Les sciences
kistoriquet, géographiques, mathématiques et médicales n'yétaieok
donc, pas représentées.
DTNASni ■ftRiHIDt. — ÀBOQ-TOU(OF-TA£OUB-1BN-ABD-BL-BACK. 449
Deui jours avant le oomaiencement du Aaaiadao (fin d'oct.
4285), le sultan revint h Algëciras où il accomplit le jeûne et lea
dëvotions'propres à ce mois, et, pendant les veilles qu'il faisait
chaque nuit» il passa une heure à s^enlretenir avec des hommes
instruits. Plusieurs poètes composèrent alors des discours qu'ils
se proposèrent de réciter en la présence du souverain , au jour
de la rupture du jeûne. Dans cette espèce de lutte , Azouz-el-
Miknaci, poète du sultan, surpassa tous ses compétiteurs, ayant
récité une pièce de vers dans laquelle» il retraça successive*
ment les hauts faits de l'Emir des musulmans^.
Après les cérémonies du Ramadan, Abou-Yonçof pourvut^ la
sûreté de ses places frontières en y établissant des garnisons*
Toutes ces troupes étaient placées sous les ordres de l'émir
Abou-Zfan-Mendil qui, d'après la recommandation de son père,
le sultan, fixa son séjour dans Zekouan, près de Ha laga, mais
avec la défense formelle de toucher en aucune façon aux posses-
sions d'Ibn-el-Ahmer. Un autre corps d'armée, commandé par
£îad-lbn-Abi-Eifad*eI-Acemi, alla s'établir dans Estepona. Ces
arrangements terminés, le sultan envoya son fils, Abou-Yacoub,
en Maghreb, afin d'y mieux surveiller la marche des affaires. Cet
émir traversa le Détroit dans le naviro du caYd Mohammed^Ibn-
el-Cacem-er-Rendahi, commandant de la marine de Geuta. D'a-
près l'ordre de son père, il fit élever un monument sur les tom-
beaux d'Abou-Holouk-Abd«eI-Hack, son aïeul» et d'idrîs, fils
d'Abd-el-Hack, princes que l'on avait enterrés k Tafertast. Cet
édifice forme une chapelle (ribat ) et renferme deux tom-
beaux sur chacun desquels est placée une dalle de marbre
portant une inscription. Plusieurs individus furent attachés
à cette fondation pieuse en qualité de lecteurs du Coran, et le
revenu de certaines fermes et terres fut affecté à leur entretien.
Sur ces entrefaites eut lieu la mort de Yahya-Ibn-Abi-Mendtl-
* Od peut voir dans le Cartaa le texte do ce poëme qui est une es-
pèce de gazette rimée cl qui reuferme ^33 vers.
420 msroiRB mis BftBVfcm.
el-Askeri, visir d» sultan, qui refodit ie dernier soupir le 45 tfflp-
inadan.
Dans le mois de Dou-«4-Hiddja (janv.-fév. 4S86), l'Émir des
musulmans, Âbou-Youçof, tomba malade envers la fiàdeMohar^
rem 685 (fin de mars), il éessa de TÎvre.
ÉfiGKB Dt? SULTAN ABOV-TACOVB. — MTOLTBS QtTI SUITHUIirr 80R
ATiRBHBRt AU TftèlIB.
L'Emir des musulmans, Abou-Youçof, tomba malade à Algé-
eiras et fut soigné par ses femmes. Son fils et successeur désigné,
l'émir Abou-Yacoub, reçut cette nocfvolle par un courrier extra-
ordinaire et se hâta de quitter le Maghreb et de passer en Espa-
gne. Comme le sultan mourut avant son arrivée, les troupes prê-
tèrent le serment de fidélité entre les mains des vizirs et des
grands de Tempire ; puis, au commencement du mois de Safcr
(avril 1286), elles remplirent de nouveau cette formalité en
offrant leurs hommages à l'émir Abou-Yacoub qui venait d^ar-
river.
Devenu ainsi dépositaire de Tautorité suprême, le nouveau sul-
tan signala son ayénement au trône par de grandes largesses el
par l'ordre de mettre en liberté tous les malheureux que l'on re-
tenait dans les prisons. Il abolit, en même temps, l'usage de
faire percevoir par des agents du fisc l'aumône de la rupture du
jeûne * , impôt dont il laissa l'acquittement h la bonne foi de
i^i*n>*a^i
' < II est d'obitgalion positive de donner pour les pauvres (le jour de
la rupture du jeûne de Ramadan) un ^a (mesure) on une poriioo âesa
(de dattes, grains, etc.) pris sur ce qui reste de la nourriture de l'indi-
vidu et aussi de la nourriture de s\ famille, (c'est-à-dire) ses proches,
SCS femmes légitimes eu concubines, les domestiques (nécessaires à ses
eufuDls et à) ses femmes, ses esclaves. » — « 11 est de convenauce de
remettre les aumônes de la rupture du jeûne entre les mains de Timam
(chef spirituel et temporel). » — Précis de jurisprudence musulmane y par
Sidt-Khalil; (raduclion du docteur Perron, tom i, pag. 450etsuiT.
DTIVJLSTIS afiMHIlMI. AB01}*YAC0tJB-Y0UÇ0P.. 4 2 1
ebê^ve individu. Il mit déplus un leroie aux actes d'oppression
et de tyrannie dont les fonolionnaires publics accablaient le pev-
pie ; il supprimai les droits de marché (mokous) et plusieurs autres
knpôtSi La s&relé des grandes routes devint aussi pour lui un
sujet dete plus sérieuse attention.
Un de ses premiers actes politiques fut de rechercher une en*
trevue avec IblHel-Afamer et, s'ëtant rencontré avec ce prince,
près de MarbeHa, dans un des premiers jours de Rebié [pre-
mier — avrilnnai], il lui témoigna les plus grands égards et lui
readit toutes les places fortes que les Mérinides occupaient en
Espagne. Algéoiras et Tarifa furent les seules dont il se ré*
serva la possession^. Les deux souverains se séparèrent alors pé-
nétrés d'amitié Tun pour l'autre.
Rentre dans Algéciras, Abou-Yacoub trouva les ambassadeurs
du roi chrétien et, sur leur demande, il confirma le traité que le
feu sultan et Don Sanche avaient contracté. S'étant garanti par
ces arrangements contre les soucis et les préoccupations que ^Es-
pagne aurait pu lui donner, il désigna son frère, Abou-'l-Al¥»*
Abbas, comme gouverneur des forteresses qu'il possédait encore
dans la Gliarbïa, et il envoya un détachement de trois mille hom-
mes pour y tenir garnison sous les ordres d'Ali*Ibn*Youçof*lbo«
Irgaoen.
Le 7 de Bebia second (2 juin), le sultan Abou-Yacoub débar-
qua à Gasr*Masmouda ai, le 42 du mois suivant, il arriva k Fax*
Au moment de s'établir dans la capitale de son empire, il eut à
combattre un rival, Mohammed, fils d'Idris et petit-fils d'Abd-
el*Hack^ lequel s'était jeté dans les montagnes du DerA avec ses
frères, aes fib et ses dépeedanls, en se déclarant héritier du
trône et en appelant le peuple aux armes. Abou-Moarref, frère
du sultan, fut envoyé contre les rebelles, mais, au lieu de les
ccHobattre, il passa de leur côté. Pour comprimer celte insurrec-
reotion, le suhaii mit successivement en campagne plusieurs co-
' n se réserva de plus Romla et puadix, dit Tautcur du CaHas, Voy.
aussi page 4il de ce volame.
422 HISTOmB DES BBRBiBfiS.
loDnes de troupes et il n'y réussit qu'après avoir employé toole
SOQ haliilclé pour détaôher Abou*Moarref du parti des insurgés
et le faire rentrer dans le devoir. Les fils d'Idrts se dirigèrent
alors, en toule hâte, vers Tiemcen , mais ils furent pris
ayant d'y arriver. L'émir-Abou-Ztan se rendit alors à Tèza par
Pordre de son frère, le sultan, et, dans le mois de Redjeb 685
(aoûl-sept.) , il iil mourir tous c/îs prisonniers h Lemli, endroit
situé hors de la ville. Cette exécution fonrnit une telle preuve de
la sévérité d'Abou-Yacoub que les autres princes du sang se dis-
persèrent dans divers pays : la famille d'Abou-'UÛla-ldris, fils
d'Abd-Allah, fils d'Abd-el-Hack, se réfugia dans Grenade, ainsi
que celle [du feu sultan] Abou-Yahya, fils d*Abd-el Hack et
celle d'Othman Ibn-Izzoul. Plus tard, les fils d'Abou-Yahya
obtinrent une amnistie et rentrèrent en Maghreb.
Dans le mois de Châban (sept.-oct,) de cette année, Mobam»
med-Aguellid*, fils de Yacoub-[Abou-Youçof]-lb»-Abd-el-Hack
mourut à Geuta, et Omar, fils d'Abou-Malok et neveu du sultan,
mourut & Tanger.
Quelque temps après eut lieu la révolte d'Omar-lbn-Otbman-
Ibn-Youçuf-cUAskeri qui s^était fortifié dans le chftteau de Fen-
delaoua en déclarant la guerre au sultan. Les Beni-Asker et les
tribus qui vivaient dans leur voisinage et dans leur dépendance
se réunirent par l'ordre d*Abou-Yacoub et cernèrent la forte-
resse en attendant l'arrivée de ce prince, qui se mit en marche
bientôt après, et vint prendre position à Nebdoiira Alors le chef
insurgé ne vit plus d'autre moyen de salut que d'implorer la mi-
séricorde de son mahre et, par l'intervention de quelques hom-
mes de bien auxquels il confia le soin de négocier son pardon, il
obtint la permission de se rendre à Tiemcenavec ses enfants et.
les gens de sa maison.
Dans le mois du Ramadan delà même année (oct.-nov. 4S86),
le sultan partit pour Maroc afin jie rétablir l'ordre dans les en-
1 Le mot berbère Aguellid signifie ros, prince. Dans le texte arabe
imprime il faut supprimer le second lam de oe mot.
VTRASTIK MfiaiHlDr* — ABOU-VALOin-YOLÇOF. 423
Tirons de cette ville. Il y arriva le mois suivant, mais, pendant
i]a'il travaillait à remettre ce pays dans les voies de la prospé-
rité, son parent, Talha,lbn-Yabya-lbn-Mohalli, passa chez les
Beni-Hassftn, tribu makilienno, et leva Tétendard de la révolte»
£n apprenant cette nouvelle, Abou-Yacoub plaça son neveu »
Mansour-lbn-Abi-Bfalek, h la tête d'une armée et, Tayant cons-
titue gouverneur de Sous, il l'envoya dans cette province aiiu
d'étouffer l'insurrection. Omar, frère de Talha, jouissait de trop
d'iniiuencc pour échapper h la défiance du sultan : il fut banni à
Grenade et, le jour mèipe de son arrivée, il fut assassiné par les
filsd'Abd-Allah-lbn.Abi.'l-Olà[-Idr}s*]
L'émir Hansour mena son armée contre les Makil et leur tua
beaucoup de monde. Le 4 3 de Djomada [second] 686 (26 juillet
4287), Talha-Jbn*Mohalli perdit la vie dans une rencontre qui
eut lieu entre les deux partis. Sa tète fut envoyée à la cour du
sultan et elle resta exposée aux regards du public dans la ville d»
Tèza.
En Ramadan (oct.-nov. 4287) le sultan marcha contre les
Makil qui s'étaient retirés dans le Derâ, au milieu du Désert, et
qui, par leurs brigandages sur les grandes routes et dans les
pays cultivés, avaient mérité d'être punis très-sévèrement.
S'étantmîsèla tête de treize mille cavaliers, il franchit l'Atlas
en traversant le pays des Ueskoura, et il surprit ces Arabes
pendant qu'ils se tenaient éparpillés avec leurs troupeaux dans
les pâturages du Désert. I) y en eut beaucoup de pris, beaucoup
de tués, dont les têtes servirent à garnir les merlons des remparts
k Maroc, h Sidjilroessa et à Fez.
Vers la fin de Chouat (commencement de décembre), Je sul-
tan rentra à Maroc et, se rappelant les trahisons do la familb
Mohalli et surtout de leur ancien chef > Talha, il fit arrêter Mo-
*L*auteur aurait pu ajouter : Ce fut ainsi qu'ils vengèrent la mort
(le leur oncle Yacoub, qui fut tué par- Talha, frère d'Omar. Voy. page
48 de ce volume.
(^^
l'iii insToriB dis BBiBfiass.
hammcd-ibQ-Ali'Ibn^Moballi, qui n'avait cessé do gouverner
Maroc depuis la conquête de cette ville sur les Almobades. Jeté
en prison au commencement de Tan 687 (février 4288) , Mo-
hammed y mourut le mois suivant. Bientôt après, eut lieu la mort
d'El-Mizouar-Cacem-Ibn- Obbou .
Le sultan donna alors le gouvernement de la ville ei des pro-
vinces marocaines è Mohammed-Ibn-Ottou-eUDjanati, client
affidé de la famille royale. Ayant confié 9on fils, Abou-Amer,
aux soins de cet officier, il partit pour Fez et, vers le milieu du
mois de Rebî (second — 20 mai 4288) il fit son entrée dans
cette capitale. Ce fut là qu'il reçut sa nouvelle fiancée, fille
de Mouça-lbn-Rahhou*lbn-Abd-AHah-lbn-Abd-el-Haek, qu'il
avait demandée en nuiriage et qui arrivait de Grenade accom-
pagnée de plusieurs visirs et d*autres grands personnages de la
cour d'Ibn-el-Ahmer. Avec elle vint une ambassade chargée par
le sultan andalousicn d'obtenir d'Abou-Yacoub la remise de la
ville de Guadix. Celte faveur lui fut accordée, comme on le verra
dans le chapitre suivant.
LA VILLE DE GUADIX EST BEMiSE A IBH-BL-AaNBlI PAR LE
SULTAN VfiRINiDB.
Abou-'l-Hacen^ibn-Ckékilola aida Ibn-el-Ahmer à monter
sur le trône et mérita par ses bons services une haute position à
lacour de Grenade. Il laissa, en mourant, deui fils : Abou-Mo-
hommed-Abd- Allah et Abou-1shac*lbrahtm. Le premier reçut
d'Ibn-^el-Ahmer le gouvernement de Malaga, et le second celui de
Comarès et de Guadix. Après la mort de leur souverain, ils en
vinrent à une rupture ouverte avec le nouveau sultan et, Abou-
Mohammed reconnut pour son seigneur le sultan Abou-Youçof.
En l'an 676 (1277-8), après la mort de ce chef, son fils ,
Mohammed, se rendit auprès du sultan mérinide et lui livra la
ville [de Malaga]. En 682f42834), lors de la mort d»Abou-
Ishac-Ibn-Chékîlola, le sultan espagnol s'empara de la forte-
DYNASTIE Mtlllfll» . — ABOl'-YACOL B-TOUÇOF. 4 25
resse de Ckunarès. Abou-'UHaccn, fils d'Âbou-Ishac, gouvernait
déjà, au nom de son père^ le canton et les cbÂteaux de Guadix ;
aussi, se Irouva-t-ii engagé dans un long démêlé avec le sultan
de Grenade et, tantque dura cette contestation, il se (it appuyer
parle roichiétien. Son frère, Âbou-Mohammed, soutenu tantôt
par Ibn-ed-Delil et tantôt par le roi chrétien, insulta plusieurs
fois le territoire de Grenade et, pendant un temps considérable,
il se maintint en guerre contre Ibn-cUAhmer. Quand les musul-
mans et les chrétiens déposèrent enfin les armes, Àbou-'l-Hacen
se vit exposé h la vengeance du sultan espagnol et, en Tan 686
(42S7) il s'assura la protection du sultan de Maghreb, en faisant
proclamer la souveraineté de ce prince dans Guadix.
Dès lors, Ibn-el-Ahmer s'abstint de tout acte d'hostilité contre
lui, mais, quand il eut gagné l'amitié du sultan Abou-Yacoub, dont
le mariage avec la fille dJbn-Rahhou avait été arrangé par ses
soins, il profila de cette circonstance pour lui demander, par
l'entremise de ses ambassadeurs, la remise de la ville de Guadix.
Le Bultao y donna sôu consee tement et adressa des ordres en con^
séquence à Abou*'l-Haccn*lbn-Chékilola. Ce chef livra la ville,
passa en Maghreb, l'an 687 (1288) et, trouvant le sultan Abou-
Yacoub h Salé, il obtint de lui, comme dédommagement, le gou-
vernement d'Rl-Casr-eUKebtr et des cantons qui en dépendent.
Celé concession est restée, jusqu'à nos jours dans la famille
d'Abou-'l-Efacen. Par la possession du pays do Guadix et dos
ob&teauxqui le défendaient, lbn-el--Ahmer se trouva débarrassé
du seul voisin eapablo do lui résister.
L'BIIIK ABOU-AMBB SB BfiVOLTB A MAROC BT FAIT BNSIIIE
SA SOUMISSION.
Yersla fiode Choual, 687 (fin de novembre 4288), quelque
temps après le retour du sultan à Fez, son fils, Abou-Amer,
entra dans Maroc et s'y fil proclamer souverain ; démarche qui
lui avait été conseillée par Mohainmed-lbn-Ottou, gouverneur de
)36 îllStOIRB DES Bl^BBftlBd.
la ville. LcsuUon so mit aussitôt en campagne, repoussa lesinsor«
gés qni ëlnienl sortis pour lui livrer bataille et tes obligea i s'en^
fermer dans la place. Après avoir soutenu un siège de quelques
jourS) xVliou-Amer se rendit au trésor, en tua le gardien, Ibn-Abi'-
V-Bérékat, empor4a tout l'argent qui s'y trouvait et so réfugia au
milieu des tribus masmoudiennes. Le lendemain, 9 de Dou-'i-
Hiddja (6 janvier 4289), Abou-Yacoub occupa la ville, publia une
amnistie et fit tout rentrer dans l'ordre.
Mansour-Ibn-Abi-Malek, qui s'était transporté de la province
de Sous dans celle de Hhha et avait soumis toute celte dernière
région, reçut alors un corps de renfort que son oncle, le sultan,
lui expédia de Maroc et, se voyant en mesure de combattre les
Zegna, peuplade berbère installée dans le Sous, il les attaqua
avec une telle vigueur que plus d'une quarantaine de leurs chefs
restèrent sur le champ de bataille. Parmi les morts, on trouva le
corps de leur cheikh, Habboun-lbn-lbrah?m.
Abou-<\mer reconnut bientôt l'impossibilité de soutenir une
lutte contre son père et s'enfuit h TIcmcen avec le vizir Ibn-
Oltou. Ils y arrivèrent vers le commencement de l'an 688
(fin de janvier 4289) et trouvèrent auprès d'Olhman-lbn-Yagh-
moracen un accueil très-empressé. Le sultan céda alors à la pitié
et, sur la prière de sa Aile, il pardonna au prince rebelle et lui
permit de reprendre la position qu il avait occupée à la cour.
Ensuite, il fit demander à Othman l'extradition d'Ibn-Otlou,
mais le souverain Abd-el^uadite refusa de trahir les droits
d'hospitalité, et, comme le porteur do ce message lui répon-<
dit d'une manière inconvenante, il le fît arrêter et emprison-
ner. Cet acte de violence réveilla enfin la colèro du sultan méri-
nide et le décida h tirer vengeance des nombreux affronts qu'il
avait eu à souffrir de la part du seigneur de Tiemcen.
1.1 GUERRE tCLATB ENTRE LE SULTAN ABOU-TACOUB ET OTHMAN 1BN«
TA4SB1I0RACEN. — SIÈGE DE TLBMCBN.
D^ns les temps anciens, quand les Beni-Mertn et les Béni- Abd'
MNASTIB MftVlMkDB . — ABOU-TACOCl^TOUÇOP. 4 H
cl Ooad habitaient le Désert et parcouraient avec leurs trou*
peaux te territoire qui s'étend depuis le MolouYa et le Za jusqu'à
Piguig et le Mozab, la discorde n'avait jamais cessé do régner
cntro ces deux tribus. Ensuite, quand ils se furent transportés
dans le Tell pour occuper les plaines du Maghreb central, leur
mésintelligence continua toujours et amena des conflits dont on
garde encore le souvenir. L'empire almohrido, à Tcpoquo do son
déclin, se garantissait conlre les entreprises de ces peupladesen
fomentant leurs querelles et, par cette politique, il réussit, pen-
dant quelque temps, h maintenir son intégrité et à prolonger son
existence. Nous avons indiqué une partie seulement des rencon-
tres et des combats qui eurent lieu entre Yaghraoracen-lbn-Zian
et Abou-Yahya-lbn-Abd-el-Hack, combats dans lesquels Yagh-
mcracen soutenait ordinairement la cause des Almohades. Los
Abd-el'ûuadites eurent alors à subir de fréquents revers, parce
qu'ils étaient moins nombreux que leurs adversaires, mais ce
désavantage ajouta encore à l'honneur que Yaghmoracen rem*
porta par sa vigoureuse résistance.
La ohuic du trône qu'Abd-eUMoumen avait légué h ses des*-
cendants et la conquête de leur empire par Abou-Youçof-Yacoub-
Jbn-Âhd-el-U;sck permirent à Tarmée mérinide de se renforcer
par l'adjonction des troupes almohades et de se rendre bien plus
forte que celle du seigneur de Tiemcen. Le vainqueur rassembla
alors toutes ses forces et, dans la journée du Telagh, il donna
une rude leçon à Yaghmoracen, leçon qu'il répéta une secondée!
une troisième fois. Ayant enfin achevé la réduction de toutes les
villes du Maghreb et consolidé sa domination dans ce pays, il so
trouva tellement puissant que le prince abd^^el-ouadite renonça à
l'espoir de pouvoir lut résister. Les nombreux échecs qu'il avait
éprouvés et les sièges qu'il avait eu h soutenir dans sa capitale
auraient suffi pour paralyser ses moyens d'action, quand bien
même les Toudjîu et les Maghraoua, tribus toujours hostiles aux
Beni-Abd-el-Ouad, n'eussent pas appuyé, en toute occasion, les
opérations do l'émir mérinide.
Ayant enfin mis Yaghmoracen dans l'impossibilité de lui
nuire, Abou-Youçof s'engagea dans la guerre sainte et ne pensa
128 lUSTOlRB DK8 BBKBËRI&.
plus h autre chose, ainsi que noos venons de le faire remarquer.
ibn-eUAhmer ne put alors regarder sans eifro! la puissance de
l'empire mërinide et, craignant pour la sûreté de son propre ro*
yaume, il conclut une alliance avec le roi chrétien. Leur but
était d'empêcher le sultan africain de passer en Espagne, et, ne
se croyant pas assez forts pour le repousser, ils entamèrent des
négociations avec Yaghmoracen et le décidèrent à créer des em-
barras à leur adversaire afin de Tobliger à rester chez lui.
Telle fut la triple alliance qui se forma contre le sultan du Ma-
ghreb.
La rupture qui se déclara bientôt après entre le roi chrétien
et Ibn-el-Âhmer plaça celui-ci dans la nécessité de faire la
paix avec Abou-Youçof, paix qu'il obtînt, ainsi que nous Tavoos
dits P^r l'entremise d'Abou-Tacoub-Yonçof , fib du sultan. Les
ennemis de Yaghmoracen dévoilèrent alors les engagements qu'il
avaitprisenvers les deux souverains espagnols et, par cette rêvé*
lation, ils attirèrent sur lui, en Tan 619, la vengeance du prince
mérinide. Battu à Kharzouza, bloqué ensuite dans Tlemcen,
Yaghmoracen vil encore ses anciens ennemis, les Beni-Toudjtn,
envahir le territoire abd-el-euadite à l'in&iigation de son adversai-
re. Il mourut en l'an 684 (4283), quelque temps après le départ
d'Abou-Yooçof pour la guerre sainte. L'on rapporte que, sur son
lit de mort, il fit entendre les conseils suivants à l'émir Othman,
son fils et successeur désigné : a Ne te Halte pas de pouvoir lutter
j» contre les Beni-Mertn ou de rivaliser avec enx. Ne sors ja-
D mais en rase campagne pour leurlivrer bataille, mais tiens-toi à
» l'abri de tes remparts s'ib viennent t^attaquer.» L'on assure
même qu'il lui adressa ces paroles: «Les Beni^Merln ont doublé
» leur puissance par la prise de Maroc et par l'adjonction de lem^
n pire almohadeà celui qu'ils possédaient déjà. Ne te laisse pas
a égarer par mon exemple; si, depuis cette époque, je suis allé
i> me mesurer avec aux, c'est parce que j'étais trop fier poor
» les éviter après avoir fait connaître au monde que j'avais pour
t Voy. page 408 de ce volume.
DTif ASTIS MftlKmV. — ABOO-YÀCOim-TOUÇOF. '4 29
>> coutume de marcher à leur rencontre et de ne jamais lesatten-
r> are. Tu n'auras à craindre aucun déshonneur en te montrant
ji trop faible pour les attaquer et trop prudent pour sortir au-
7> devant d'eux ; car, n^ayant pas pris l'habitude de les combat-
if tre, tu n^as pas une réputation d'audace à soutenir. Dirige tes
)» efforts vers la conquête dellfrtkîa, pays qui est là, derrière
n toi ; voilé une expédition à faire, si tu veux l'entreprendre*.»
t!cs conseils, dit*on, eurent pour résultat la guerre avec lesHaf-
s»ides et les tentatives d*Oihman et tle ses successeurs pour s'em-
parer de Bougie et du royaume d'ifrtkïa,
Après la mort d'Yaghmoracen, son fils, Othman, souhaita la
paix et, en l'an 68i (4286-6), il chargea son frère, Mohammed,
ée passer en ISspagoe pour en conférer avec Ai)ou-Yacoub. Cet
envoyé trouva le sultan h Arcos, négocia avec lui un traité aussi
avantageux qu'Othman pouvait le désirer et s'en retourna en
Afrique, comblé de joie et d'honneurs.
Abou-Tacoub, fils d'Abou-YouçoF, étant monté sur le trAne,
eut à comprimer des insurrections qui éclatèrent de tout cAlé;
ensuite, il lui fallut éteindre la révolte que son fils avait allumé
îi rinstigation du trattre Mohammed-lbn-Ottou, dont il fit de-
mander Textradition à Oihman-Ibn-Yaghmoracen, après avoir
ramené son fils à l'obéissance et l'avoir rétabli dans les honneurs
qu'il venait de perdre. Le refus d'Olhman exoila la colère du
sultan et le décida à lui déclarer la guerre.
Dans le mois de ^afer (S89 (iîév.-nTars 4290), Abou-Yacoub
nomma son fils, Aboo-Abd-er-Rahman, au gouvernement de
Varoc et se rendit à Fez. Yers la fin de Rebiâ (second — commen-
cement de mai), it quitta cette YÎIle, emmenant avec lui les di-
vers corps de l'armée, les milices, les contingents fournis parles
tribus et parles autres peuplades du Maghreb. Arrivé sous les
murs de TIemcen et trouvant qu'Othman et les Abd-el-Ouadites
s'étaient abrités derrière leurs remparts, il se mit à parcourir les
pays voisins, pour en dévaster les lieux habités et en détruire les
4 Voy. tome ii, page 369.
T IV.
130 msToiu jfM% BVJifftai».
moÎMODs. Ayaol abrs pria poailion è Prft**^a*Sabotta, dans U
banliena do Tiemceii, il y reato queiqnf tmipa ; eoaqite, jl s^ r^n-
diU Imaoïf qu'il bloqua pendant quarante JQora et dont il ruina
laa environs. Comm^ c^tte plaee lui r^aistaii toujours, il leva le
«i^ et partit pour le Magbr^' Arnv^ k Aïn-ea-Sefa, dana le
paja des n$Di-lzpaceq^ il y a^lébra la féie de la mptare du jeûn^
(4 Choual — 8 pctobre) e(, parvwu h Tw^ il a'acquitta de la
prière d(ifiiiçri(i€e de la fè{§ d'EMdha (40 Qott-r4-Biddja — 15
)anv. 4 20i). Ce fut de \k qu'il partit, quelque tempa après, pour
combaKrele roi chrétien.
La aOl CQRtTlRN aO^PT H PAIX. LB SDLTAN MARCHE
CONTRE LUI*
Rentré de Vexpéilition contre Tlenocep, le auH^n apprit que le
roi chfélien avait rompu la paix, envahi Iq territoire des musul-
inana et insulté leurs places fortes ; aussi, en voya-t il sur le champ
à l'émir Aji-lbn-YpuçoMbn-Irgaceq, con)mandani des garnisons
ntérinides en Espagne, l'ordre de omettre le siège devant Xérès
Qt de faire des inclusions dans 1^ territoire de Penoemi. Dans le
fnoia de Rebi|^ second 690 (avril 4^91), Ibn-Irgacen envahit
le pays des chrétiensi et j répapdit la dévastation. Dans le
mois de Pjomada (mai-juip), J^si^ta^ quitta Tèza poi^r aller te
rejoijDidre çt, arrivi^ h Caar-Maana^PMdat il y rassçnabla lesconiin-
genta des tribtta e( dea paupiadQs dt^M^ghrebt Pendant qu'il s'ap-
|M;é(ait ^ (aire transporter çfs Irçupei en l^pa^oe, la Sotte
du roi pbrètien vint couper les eomn^uoications entre les deux
payai An qptoia de CbÂban (août)» les navirea que le sultan avait
fait chercher dana les divers port^ du royaume attaquèrent la
flotte çAoemici dana le D^troil» et eaauyèrefît une défaite : Dieu
ayant vf>t(lq éprouver lea mV9ttltpans. Une seconde tentative fut
^ C*e$t à tort qu'on a imprimé ïmaten daps le texte arabe.
DTKASTIB SftftlHIOK. — >l«OI}«TACOi;i-TOUÇOF . \ 31
plaa heureuse ; Veooemi /quitta U Détroit tans riaquer un com-
bat. La flotte muauloiane devint ainsi roattreaae de ces parages et
fournit au sultan l'occaaîen de passer i Tarifa. Il y débarqua vers
ia fin de Hamadan (in de septembre) et étant aiissîtôt entré dans
le territoire cbrétieUv il prit position devant Béjer et tint cette
forteresse bloquée pendant trois mois. Après avoir satisfait sa
passion ponr la guerre sainte en faisant dévaster les environs de
Xérès et de Séville par de fréquentes incursions, il fut contraint
de iever le sié^ de Bédjer par la sévérité de l'biver et par le
•manque de vivpee. Rentré à Âlgéoiras, il se rendit de le en Ma-
ghreb, au commencement de Tan 601 (24 décembre). Poqr Tem*
pécher de rentrer en Espagne, 1bn«^-Akmer et le roi chrétien se
prêtèrent molueHenieot la main, ainsi que nons le raconterons
•dans le^hapitne suivant*
lilf-fiL-AHVER AIDB U ROI CRRaTIBlf A PtmPM LA VILLR DE
TAiwA : uns niiu mous xa rbvdb I
Le roi chrétien ressentit un chagrin extrême en voyant son
pays dévasté par les troupcjs du sultan et chercha quelque mo-
yen ponr se garantir dorénavant contre un adversaire aussi re-
doutable. Ibn-el-Ahmer, de son cAlé, craignit quelque trahison
de la part du sultan lequel semblait avoir pour but la conquête
de TAndalousie, et, sous Tinfluence de celie idée, il eut un entre-
tien secret avec le roi, son voisin. Dans cette conférence, ils re-
connurent d'abord que le sultan avait de grandes facilités pour
passer en Espagne : le Détroit n'était pas large ; les forteresses
qui garnissaient les deux bords lui appartsnaient et, même
sans avoir une flotte h sa disposition , il pouvait maintenir les
communications entre les deux pays au moyen do galères et
d'antres bâtiments. Ils convinrent ensuite que, de toutes ces pla-
ces fortes. Tarifa était la plus importante et que s'ils pouvaient
s'en emparer, elle leur servirait de vigie pour dominer le Détroit
et de station pour une flotte capable de lutter avec tons les na-
'132 mSTOlRB BBS
Tires que les ports du Maghreb pourraienl mettre en mer»
Le roi se laissa décider par ces considérations à faire le siège
de Tarifa et, s'étant ménagé Tappui d4bn-cl-Abmer, qui prit
l'engagement de le seconder et de lui fournir des vivres, à la
condition d'être mis en possession de cette place quand elle suc-
comberait, il réunit toutes les forces de son empire et alla prendre
position contre la forteresse. Il commença Tattaque par dresser
ses machines de guerre et intercepter les convois destinés aux
assiégés, pendant que sa flotte occupait le Détroitetleur 6ta Pas-
poir d'ôtre secourus par le sultan et par leurs frères, les musul^
mans. Ibn-el-Ahmer établit son camp à Malaga afin d^étre plus
rapproché du roi chrétien, et, de là, il lui fit passer des troupes,
des armes et des vivres. Un détachement qu'il envoya contre
Estepona s'empara de cette place après un siège de courte durée.
Pendant quatre mois la garnison de Tarifa résista vigoureuse-
ment, mais, épuisée enfin par la famine et par les pertes qu'elle
avait éprouvées, elle consentit h évaluer la forteresse. Le roi
chrétien lui accorda une capitulation dont il remplit fidèlement
toutes les conditions. Ce fut en Tan 691 (1292) quo Tarifa suc-
comba.
Ibn-el-Ahmer s'attendait à être mis en possession de la place,
ainsi que cela avait été convenu entre lui et le roi ; mais celui-ci
la garda pour lui-même, sans s'arrêter aux remontrances de
son allié. Il lui olFrit cependant six châteaux comme dédomma-
gement.
Indigné de ce procédé, Ibn-el-Ahmer résolut de solliciter en-
core l'alliance du sultnn mérinide et son appui contre le roi. Une
dépntion composée de son cousin le rats Abou-Satd-Féredj-Ibn-
Ismaîl-lbn-Youçof, du vizir Abou-Soltan-Aztz-ed-Dani et de plu-
sieurs notables de Grenade, passa en Afrique afin de présenter
à Abou-Yacoub les excuses de leur souverain et d'obtenir le re-
nouvellement de l'ancien traité. Ces envoyés trouvèrent le sultan
près de Tazoula, château dont il était occupé h faire le siège, et
le décidèrent h signer un traité d'alliance et d'amltië tel que
leur maître l'avait souhaité. Ils rejoignirent Ibn-ol-Ahraer en l'an
692(1293).
DTKA8TIB MiRlKIOB . — ABOU-tiCOi'B-YOIJÇOP. i 93'
t
DaDft le mois de Robift (fév.-mars) de cette année eut lieu la
mort d'Ali-lbD-lrgaceo, commandant des garnisons mérinides
en Espagne. Le sultan donna alors le gouvernement de toutes les
places fortes de cetle péninsule qui reconnaissaient encore son
autorité à son fils et successeur désigné, Abou-Amer, et, lui
ayant recommandé de les entretenir en bon état, il le fit accom-
pagner par un corps d'armée jusqu'à Casr-el-Medjaz. Ce fut là
que le prince mérinide reçut la visite du sullan Ibn-el-Ahmer.
IBN-EL-ABIIBR SB BBlin ▲ TANGBR POCR VISITBR LB SULTAIV.
Quand les ambassadeurs andalousiens furent de retour, ils ra-
contèrent à leur souverain le bon accueil que le sultan mérinide
leur avait fait et lui annoncèrent Thcureux succès de leur mis-
sion. Cette nouvelle fil le plus vif plaisir à Ibn-el-Ahmer ; trans-
porté de joie, il s'élança de son trône en déclarant qu'il irait en
pers^onne auprès d'Abou-Yacoub afin de cimenter leur nouvelle
alliance, de s'excuser d'avoir contribué à la chute de Tarifa et
d'implorer l'intervention des musulmans africains en faveur de
leurs corréligiennaires espagnols. Dans le mois de Dou-'l-Gàda
69% (octobre 4293), il traversa le Détroit et prit terre à Benyou-
nocb,.près dejCeuta. Delà, il se rendit à Tanger en se faisant
précéder par un cadeau destiné au sultan. Un des objets les plus-
précieux, dont cette oOrande se composait et qui devait être très-
agréable au souverain mérinide fut, dit-on^ le précieux manuscrit
du Coran que, selon la tradition, Othman-lbn-Affan [le trotsièmo^
khalife] avait envoyé dans le pays de l'Ouest, à l'époque où il fit
porter quatre exemplaires de ce livre saint aux quatre parties de
son empire. Ce volume était resté comme un héritage dans la-
famille des Oméïades qui occupa le tràne de Cordoue.
L'émir Abou-Amer et son frère, Abou-Abd-er-Bahmao, ac-
cueillirent le sultan espagnol de la manière la plus respectueuse,
et, bientôt après, leur père quitta la capitale et vint à Tanger
pour témoigner à ce visiteur distingué toute la considération ei
tous les égards dont il était digne. Ibn-cl-Ahmer commença alors
un discours dans lequel il essaya d'excuser sa conduite dansl'af-
93t mvTOitt fES ifetHMV».
faire «te Tarifa, mais le soltdn Moterrompil en dëckinrnt qu'iF
avait oublié le passé. Après l^éehangedes cadeaux, le souverain
espagnol eéda su suUaa les tilles d'Algésiras et de Rend», \»
province de la GharbTa et vingt ehàteaax qui afvafent déjà ap-*
portenu au gouvemefoent mérinide. Vers la fin de raa69^fnor.
déc. 4293), il rentra en^ Espagne, heureux et fier des bienfaits
dont on I*avai^ comblé. Avec lui partit une armée D»érinide des-
tinée à faire le siège de Tarifa et commandée par le célèbre vizir
Omar-Ibn-cs-Saoudi-lbn-Khtrbacb , membre de la tribu des
DJQchem. On tenta alors la réduction de eette place forte, mais
elle offrit une telle résistance qu*on fut obligé d'y renoncer.
Le sultan mertnîde dirigea ensoite soi»^alte»lio» vers TIemce»
et réscdttt d'en faire-ie siège.
IBN-BL-OViztK-BUOVATTACI S'Sa^AR BB TltOllTA, fOSTEiVSSB'
SITVfiK »AKS LB ifp, BT L*ABAlf0OinW I1?SV1TS IV SITLtAll.
La famille des Oué^r conHnandait attZr Bëni-O^ttas S trrbu
mérinide. Elle se représentait oomflEie agrégée seulement ë \»
tf ib«i des Mertn et prétendait descendre d'AAt-lbn-¥ofiçof-Ibn^
Taoheftn [le sultan almoravide}; Selon les Beni^'l-Ouéztr, la pos*
térité d*AIi adopta la vie nomade ets'ineorpora dans la tribu des
Ouattas ao point d'eti prendre loua tes ceractèrea distinctife.
Fiers de leur origine supposée, les Beni-'l>Ooéilr se distingué-
ranl par leur hastear et leur fierté. Totijoura disposés à ren-^
verser t^aulorité des émirs qni commandaient a»x Mérinide^, ils*
tramèrent la mort d*Aba#-Y8tiya«lb»-Abd*el*Back qui était
passé dans leur pays à Tépoque [où le satta» almohade] Es*Satd
fit balte k Tèza avant de continuer sa marche vers Tiemcen.
AboQ-Yabya fut avertr du complot el s'enfdit de côté do 6ba*^
<
* Variante : (Mas,
brala 0i d'Aïk^efr«StefiitdàDS k twrriiotlns des Bem*biitaa«| •! et
(ut là (f«'il «pprii la taorl d'b^td.
Qaand k9 Befli-MeHii Mvahîrèlil le Maghrab et sTé» |Mrlagè-
raal Iw proTÎnce^^ lea Beai-^Omltae oblinmil le pa;^ du RtL La
«^aifi^gM de otice r^ion leur aerTÎt de aéjoui*, ël lea celtive-
tear^t aifisî qo« lea tilles, devinrent ledra iriboUiirea* Taaouta,
oti daa cbftleaax lea |»Iaa (otià do Maghreb, s'élevaiit obes eus
daoa le Bff et afiparteMÎi aux BeuUMerla. La» prtneea néa
d'Àbd-ekBatk alUebèreirt um icUe ioaporiftiioe à la eomervatie»
de cette place qU*tla èti domièrmllQfiijeiira le eooKBàDdeiMBl à dea
officiel^ habiles et d'ue dév^Uaineal éproavé. Elle aérveil à (eotf
eii raapeet 1^ Bed'HOoatÉae et à réprioier leur» projeta Mobn
lieux* Après la mort d'Abdu-Yoofof, s»n Gis le saltaa Abou*-
Yaoonb, y imtaUa se» wTeD, Sluaseer-lbn^Abi-lisleké
A eette époque^ hé OtieOes eorent povr ehefs les frèras Omar
et Amer, Bis de Yahya-lbn-el-Ooéfîr, et, comme oe croyait
dans la trîba que la paîsaance des Mérinidcs devait seccomber
avoo celvitqiii l'avait (oadée^ iU cooeerlèreet UD ooiip de nain
contre Tatouiad afin d'être mattrescbeseai. Dans le mois Je
Ghoual 691 (sept. -cet. 4292), Omar-lbn-Yahya surprit la for^
toressc et en expuUa Mansour, après lut avoir tué tout son
ineftde* S'ëtant alors approprie l'argent qui s'y trouvait etqfni
provenait des impAta, il y installa une garnison composée de ses
gens et des principaux membres de sa famille. Mansour alla re-
joindre le sultan et mourut de honte peu de jours après.
Le vizir Omar^bd^è^-Saond'-IbnKkbirbaeh partit aossitAt^vec
Me armée et mit te aïége devéilfrTAiouta. Le suttati, son niatCre,
y arriva «esitile et dressa sdà esdi p an pieii de la pleee. Amer ,
l'utt 4es deax chefs ottattacieas^ prévit qoe la révolte fiarrait lAal
e«, passa, av«eses gens, dtt cMé dn s«ritan. Ayant ale^s reçii une
eommnnication de SOIi Mtt OÉftsr qai, se vèyasft étfôitetnént
Moqné^ avafl péCdb tout espoir de sal«t et iikrplôfait ses bons
o(Rces,'A obtint dtl sultan fal permrissrOfl d'entrer eÀêommtmîcartian
avec les insurgés afin de les amenerè la soumission. [Omar] pro-
fita de la suspension des hostilités pour emballer ses richesses,
s'enfuir h Tiemccn et laisser son frère dans la forteresse. Placé
f39 msTOiRB Ms ' niBtecB.
dans une position aussi embarrassaote, Amercraigntilà vengeance
du sultan ei, pensant qu^il allait subîp le «bâtiment dAà son frère^
ilcontinua la- résistanoe. BientAt, cependant, il reconnut Mmpos-
aibilité de s^y maintenir et, sachant qu'une flottille était arrivée
dans le port de Gliassaçeavec une députation àndalousienne, il
fit prier ces envoyés d'intercéder pour lui. Le sultan consentit h
pardonner au chef insurgé h condilion qu'il passerait en Espagne^
Bien que cette conditioD ne plût nullement k Amer, il promit de
s'y soumettre et envoya une partie de ses gens à bord des navires
espagnols en disant qu'il allait les suivre. Quand la nuit fut ar-
rivée, il sortit à la dérobée et prit ta route de Tiemcen. Le suir
tan se vengea de ce tour en faisant mourir les fils et les parents
du fugitif, lesquels étaient restés dans Tazonia ; tous les gens
que l'on avait embarqués subirent le même sort, ayant été livrés
par les Espagnols qui s'étaient indignés d'être pris pour dupes
dans cette affaire.
Ben (ré en possession de Tazouta, Abou-Yacoub y install» um
garnison avec plusieurs agents du fise et, vers la fin du mois de
Bjomada 692 (avril-mai 4293), il partit pour Fer.
ABOU-IVIR IBlNnOIflfB SON PftBE , U SULTAN , BT SB JBTTB nANS
LBS MONVAONBS BBS GBOKABi*
Après avoir enlevé Tasouta aux Boni -'1-Ouéztr, le sultan reçut
la visite d'Ibn-el-Ahmer et renouvela l'alliance entre les deux
empires en lui rendant son amitié. Il donna alors-au visir, Omar-
Ibu-es-Saoud, l'ordre d'entreprendre le siège de Tarifa et il fit
partir son fils, l'emir Abo«*Amer, du Casr-Hasmouda et l'en»
voyadans le Rif, afin d'y rétablir la tranquillité*
[Le lecteur a vu qu'en Tan 685] * les fils d' Abou^Yahya-IbiH
Abd-el-^Hack, sachant que leurs ennemis avaient aigri le cœur du
I ¥oy* page tSâ de ce volume..
DIKASTU iitellim*—- lB0U*VieOI}t— TOtÇOF. t37
tollao coolre eox, a'^nfoirent [en BapAgae d'où its^e rondirenl}
« TiemoeD. Après avoir séjourné q.iielc|iie temps dans cette ville,
ils parvinrent k se faire pardonner leur équipée et h obtenir Tau*
torisation de rentrer en Maghreb et do reprendre la haute posi-
tion qu'ils avaient occupée dans Tempire mérinide. L'émir Abou-
Amer appriicetle nouvelle dans le Aifouil était campé et. cro-
yant Caire plaisir à son père, il résolut de tuer ces princcs.cn
guet-apens ([uand ils seraient en route pour Fez. En Tan 695
(1295*6), il accomplit son projet^ les ayant surpris auprès de la
rivière Ël-Catef, dans le bassin du Holouïa. Au récit de sa tra-*
bison« le sultan laissa éclater Tindignation la plus vive ; il prit
Dieu à témoin de son innocence, en déclarant qu'il n'avait parti-
cipé en aucune façon à ce crime et ït ordonna à son ù\s de no
plus sa présenter devanl tui. Abou-Amer se retira le cœur gonflé
décolère, et traversa Te Btf jusqu'aux montagnes des Ghomara,
où, depuis lors, il ne cessa de vivre en proscrit. L'armée du sut-
fan, commandée par Meimoun-Ibn-Ouedrar, te djocbemide, es-
saya inutilement de le faire rentrer dans l'obéissance ; une se*
oonde expédition, conduite parZtguen-Ibn-el-Moutat-Tamtmount
{fiU de la dame Bfetmouna)^ ne fut pas plus heureux, ayant es-
suyé plusieurs échecs dont te dernier eut lieu à Irztguen <, en
fan 697(1297^)».
Ez-Zolaïkhi , l'historien de l'empire mérinide * , dit qn*Abou-
Amerse révolta dans tes montagnes des Ghomara, en t'an 694, et
que l'année suivante, il envoya de son lieu de retraite une bande
d'assassins qui tuèrent les fils de hémir Abou^Yahya, Dieu sait
lequel de ces renseignements mérite le plus de foi.
Quoi qu'it en soft, Abou-Amer persista dans l'insoumission
jusqu'b son dernier jour. It mourut en 698 (1 298-9), chez les
Beni-Satd. dans l'es montagnes où it s'était retiré. Son corps fut
transporté à Fez et enterré dans le cimetière royal, auprès de la
1 Variantes : Birdhikm , Berzigùen.
< Dans les maonscrUs et le texte arabe imprimé il l4Qt lire ethà à la
place de iiszà.
» L'ouvrÉge de r historien B»ZotalUii<ra Bz-Zelaïjdi|QODS est inconnu.
43ft ÉlSTOItl M9 BCniiM».
porte Bab-^I-FotMb. It {«issâ dent èàhtUê qui fWMt éleTét
sous les yem de leur grarnd-^re et qui deviârenl kbalrfee^ dans
la soHe.
NOUYBLLIS I5CUBS10NS DANS LE TBBRITOIRI DE TLEMCEN.
En Tan 689 (4290), quand le sultan eul levé le siège de Tieui -
cen et qu^Ibn-eUAhmer se fut ligué avec le roi chrétien pour
mieux résister aux Hénnides, Othman, fils de Yaghmoracen, re-
chercha Talliance des deux souverains espagnols et, en Tan 69^, il
envoya Ibn-Bertdi, ancien serviteur et client de sa famille» auprès
de Bon Sanche. Ce messager revint à Tiemcen accompagné par
un ambassadeur du roi chrétien, le nommé Ër-Rik-Htkcen * , on
des grands de cette nation. El-Hadj-Masoud , officier de la
suite d'Ûthman, se rendit alors à la c^ur du roi et ratifia le
Irailé d'alliance. Le prince deïltoicen crut s'être garanti, par ce-
coup de politique, contre les attaques d'Abou-Yacoub, mais it ne
fit qu'ajouter aux torts que ce monarque avait à lui reprocher.
Pendant quelque temps, Âbou-Yacoub dissimula son ressenti*
ment et, dans rintervafle, il se dégagea des embarras que lai
donnèrent les affaires d'Espagne et se vit délivré do son ancien
ennemi, Don-Sanche» qui mourut en l'an 699*, après un règne
de once ans. L'année suivante, il se rendit à Tangiar afin d'exa-
miner l'état de PEsjpagne, et il y reçut [encore] la visite d'ibn-
el-Ahmer. Ayant reconnu que la tranquillité régnait en Anda-
lousie, il confinca son illustre hâte dans les meilleurs sentiments
d'amitié en lui cédant toutes les places fortes que les Mérinides
occupaient en ce pays. Alors, seulement^ il commença les prépa*
ratifs de sod expédition contre Tiemcen» et, vers la ntôme épo-
* En arabe,(jy-»X;dl^l ; il faut probablement lire o*^ V'^ Er-Ro-
drigaès, Bodrtguez, évéque de Tordre de Sl-Fraoç<»id,qui, eu Tan 1290,
avdt été Goinmé aumOnfer ées seigneurs chrétiens vu tcrtfce du
roi de Maroc. — Yoy. Ferreras, tome iv, page 186.
«Don Samhe moarutao eammfûêHtusitéR Ym 1Sfi6 (f^ido rh^gfre).
^e, il prHsoasea proteelioo Tbabei-ibo-M^ndM, chef maglirflh-
ouïen qui était venu implorer l'appui des Mérinide» eonlre le fila
de Ta^UDDoraoen.
Peadaot les asoéee 693 el 693 (1298-4), k poputaiion [do
Ma^eb} eai beanooap àsouffrir de la sédieresae» mais, ensuite,
IMeu se montra miséncbrdieox envers ses créatures et leur reo-
dit ra)K>Ddaiice et I» prospérité aoxqiieUes ils les avait habituées.
Eu 694, quand Tbab^-lbiHMendll se préseota à la cour d'Abou^
Tacouh et demanda secours^ [la disette de vivres ne se faisait
plus senilr et^ ce prînee ji&la les yeux sur Moufa*}bB»Abi-Ham •
mou, un des grauda chefs de la natioa mérinidei et lui ordonna
de se vendre à Tletncen et d'iotercéder en faveur du réfugié. Othr'
man aecudillii cet envojé fort mal et le congédiade la manière lu
pl«a iDoonvenantaw Un second aa^assadeut ne réiBsil pas mieux
que soo devancier, et, comme sa présence n^avait fait qu'aocrot-^
tré rînsolence du prince de Tiemeeo« le sultan prit aiissîi6t ses
dispositions pour envahir le territoire abd-el-ouadite.
En l-an 694, il se mit eu campagne et continua sa marcha jus*
qu'à Taouriit , ville frontière do Tempi re mériatde. I>'un cAté ,
il y avait un ofieîer qui eomasaiidait au nom du sultan Abott^*
Tacoub, et, ifeTautn», uv gouverneur désigné par 0thman4btt'*
Tagbmoracen. Le sultan expulsa le tonctionilaire abd-el-oaaditev
prit possession de la ville entièreet posé la$ fondements du ehfttea»
qui a'y voit encore* Tous les jours, depuis le matin juaqu'ao
aoir^ il assista au& travaux des ouvriers employés^ lacoostruo-
«ioB de cet édifice, de sorta qu'il parvint h le faire achever dau^
le mois de Oamadan (juillet-août \ 385) de la wu&me année^ Vou-
lant faire de Taourtrt une de ses plaees ferles, il y établit!
une garnison fournie par la tribu des Beni*Asker el commandée
par son frère, Abou-Yahya-lb»-Yacottb. Ces dtsf>ositioos ter-
minées, il reprit le chem'm de sa capitale.
L^unée suivante^ il ()uitla Pexavee l^ioteniio^ide poosaer jus^
qu'à Tlemcen et, ariivé près d'Oudjda, il en fit abattre les
fortifications^ S'étant alors porté en avant, il occupa Mectfa et
Ez*Zéara, d'où il s'avança jusqu'à Nedroma. Pendant quarante
^ours, il tint cette ville assiégée et la foudroya avec ses catapulCcs-
440 BISTOIRB ras BBKBftBBS,
{médjanic) sans pouvoir la réduire } aussi, le 2 Cbooai (5 aoûl
4S96}, il décampa.
En Tan 696 (1 296-7) il marcha encore contre Tlemcen et ayant
rencontré Othroan-Ibn-Ynghmoracenqai étailsorti pour lui livrer
bataille, il lui tua beaucoup de monde et le repoussa dans la ville»
Après avoir tenu la place investie pendant plusieurs jours, il
abandonna ses positions et revint k Fez. Cette année~là, il célé-
bra la fêle du sacrifice (1 0 Dou-'l-Hiddja - 30 sept. 4 297) à Tèza ,
et il y épousa la petite fille de Thabei-lbn-Hendtl auquel il Pavail
demandée en mariage. Quelque temps auparavant, Thabet fut tué
àBahtra-t«ez-Zttoun, pràs de Fez, par un individu delà tribu des
Ourtadjenqui crut venger ainsi la mortd^un de ses parents tué-
par [les Maghroua], tribu de sa victime'. Le sultan fit mourir
l'assassin et célébra ensuite le mariage dont cous venons de par**
ter. Ayant alors donné Perdre de bâtir à Tèza le château que l'on^
y remarque encore, il partit pour Fez au commencement de Tan-
697(find»oct. 4297).
Quelque temps après, il fit une course dans le territoire des
Uiknaça et, rentré dans sa capitale, il en sortit de nouveau ,
dans le mois de Djomada (février -avril 4298) et marcha
encore sur Tlemcen. En passant par Oudjda, il donna l'ordre
de relever cette ville et d'en réparer les murailles. H y fit
aussi construire une citadelle, une mosquée et une habitation
pour lui-même. Arrivé sous les murs de Tlemcen, il entoura la-
ville de son armée, ainsi que le halo entoure la lune , et il
braqua sur elle une de ces arbalètes énormes dont la portée est si-
extraordinaire et auxquelles on donne le nom de cos-^ez-ziar {arc
à eaveçonj. Quelques ingénieurs et un grand nombre d^ouvriers
furent employés è construire cet engin dont les matériaux
faisaient la charge de onze mulets. Gomme la ville résistait en-
core malgré tous ses efforts, il leva le siège au commencement
de l'an 698 (milieu d'octobre 4 298), et, en passant par Oudjda, il
i Voy. t. m^ p. 318.
DYIf ASTIK MfiRIlllDB. — ABOU-TACOCft-TOrÇOF. 4 it
y laissa son frère, Aboa-Yahya-lbo-Yacoab avec le corps a^ke-
ride qui avait tenu garnison àTaoartrt.
D'après ses inslractions, cette troupe se mit h faire de fré-
quentes courses dans le territoire abd-el*ouadile et h dépouiller
les voyageurs. Les habitants [ de la ville de Nedroma ] perdi<^
rent alors tout espoir d'être secourus par leur souverain et en-
voyèrent une députation è l'émir Abou-Yahya. Ce prince leur
accorda sa protection, à la condition de laisser occuper leur ville
par SCS troupes et de reconnattre t^autorité du sultan. Le peuple
de Taount suivit cet exemple et, vers la fin de Djomada (mars
4299), tous leurs cheikhs arrivèrent à Fez et présentèrent leurs
hommages au souverain mërinide. Ils le prièrent en même temps
de marcher au secours de leurs frères et d'arracher leur paya
h la domination de leur ennemi, le fils de Yaghrooracen. En dé-^
crivant la tyrannie de ce prince et la faiblesse de ses moyens dé
défense, ils inspirèrent au sultan la résolution de renouveler ses
lentalives contre Tlemcen.
LONG SIÈGE DE TLBVCEN.
Le sultan ayant reconnu que rien ne s'opposait èi une nouvelle
expédition, résolut de mettre le siège devant la capitale abd-el^
ouadite et de la tenir étroitement bloquée jusqu'à ce qu'elle
tombât en son pouvoir. Après avoir appelé son peuple aux
armes et rassemblé toutes seâ forces, il les passa en revue, com-
pléta leur équipement et distribua à tous de fortes gratifications;
puis, dans le mois de Redjeb 698 (avril 4299). il se mit en mar-
che. Le 2 Ghàban (6 mai), il arriva sous les murs do Tlemcen et
dre&sa son camp dans la plaine voisine. Alors, quand il eut forcé
Olhmnn-lhn-Yaghmoraeen et les Abd-ei-ouadites à se réfugier
derrière leurs remparts, il entoura la ville entière d'un mur de
circonvallation, bordé, en dedans, d'un fossé très-profond. Il éta-
tablitdes corps de garde aux portes et aux autre? ouvertures de
cette enceinte.
m BISTOIRB VSB IBHStaM.
Les babiiaots de Honein^ contre lesquels il envoya an déUçbe^
•ment de son armée, s'empressèrent de U^ire leur soumissbn et,
vers le milieu de Cbàbao (mai), ils envoyèrent au camp une dé-
pulation de leurs cheikhs. Dn autre corps de troupes partît avec
l'ordre d'investir Orao, de parcourir les plaines qui l'avoisineni
«t d'assiéger les autres villes do cette province. Dans le mois de
Ojomada second 699 (févr.^mars 4 300) Maiouma se rendit et le
QDois de Bamadan (mai-juin) se termina par la prise de Taliout,
4l'EUGaçabat, de Temzetdekt et d'Oran. Les Mérioides parcou-
rurent ainsi tout te pays jusqu'aux environs de Bougie, en ré-
pandant l'effroi dans les diverses contrées qu'ils traversèrent
Les plaines du territoire des Maghraoua et celles qu'occupaient
les Toodjtn furent envahies par la cavalerie du sultan , et bientôt
celte région vit flotter le drapeau mérinide sur les murs de Mî-
Jtana, de Mostaghanem, deChei^chel, d'filBat'ha, deMédéa, de
TafergMtnt et sur le Ouanchertch. Ztri, qui avait usur|)é le com-
mandement à Brechk, fit sa soumission, ainsi qu'Ibn-Allan qui
a'était emparé de la ville d'Alger*. Tous les chefs qui étaient
mal disposés pour le sultan durent s'éloigner afin d'éviter sa co-
lère, mais les personnes qui lui témoignèrent des sentiments fa«
vorables furent assurées d'un accueil bienveillant.
Les Almohades de l'Ifrtkïa, c'est-à-dire, les princes hafsides
•de Bougie et de Tunis, recherchèrent alors l'alliance des Hérinides
ot tAdjbèrent de gagner l'amitié du sultan par de riches présents.
Le souverain de race turque qui régnait en Egypte lui expédia
m don magnifiqnOi accompagné d'une lettre de félicitation ; té«
moigoagede respect auqpel le sultan ne manqua pas de répondre^
ainsi que nous le dirons plus loin. Les Beni^Nemi, cbériCs de la
Mecque, hii envoyèrent aussi une députation.
Pendant le temps qui venait de s'écouler, toulcs les disposi-
tions avaient été prises pour maintenir le blocns de Tlemcen, et
l'on assure que la sultan ne risqua que trois ou quatre combats.
(In cliâttment des plus sévères fut réservé k ceux qui essaye-
t Voy. t. m, p. 385,389.
mrlVASTIB HtHUUM.-^ABOU-TACaUB-TOUÇOF. 4 43
raient de f«ire passer <le9 vivrea wx assiégés et, ain de mieux
déeouvrir rapproche des eoqvoiSf od posta des vedettes sor tou*
tes les hauteurs voisiaes. Les murs de ctroonvallatioo formaient
d'ailleurs une barrière iofranchissable, de sorte qu'un esprit,
qu'un être invisible, aurait eu delà peine h pénétrer dans la ville.
Le blocus fut maintenu pendant une centaine de mois et ne cessa
qu'à la mort du sultan.
A l'endroit où l'armée avait dressé ses tentes s'éleva un palais
pour la résidence du souverain, et une mosquée où il pourrait as-
sister k la prière. D'après ses ordres^ tout ee local fut entouré
d'un mur et rempli de grandes maisons, de vastes édiSoes, de
palais magnifiques et de jardins traversés par des ruisseaux. Ce
fut en Tan 702 (fSOS-^Sjqu'il fit bâtir l'enceinte de murs et qu'il
forma ainsi une ville admirable, tant par son étendue et sa nouK
breuse popubtion que par l'activité d^ son commerce et la solî*
dite de ses fortifications. Elle renfermait des bains, des cararan^
sérails et un hôpital, ainsi qu'une mosquée où l'on célébrait la
prière du vendredi et dont le minaret, bâti par le sultan, était
d'une hauteur exlraordinaire* • Ce fut le une des plus graadfos mos-
quées du monde. |€ette viHe} reçut du fondateur le nem é^Bl^
Mansoura (la vieioriensê)^. De jour en jour, eHe vit sa prospérité
augmenter, ses marchés regorger de denrées et de négociants
venns de tous les pays; aussi, prit* elle bientôt le premier rang
permi les villes du Maghreb.
Après la mort du sultan et la retraite de son armée, la Man*
somra fut mise en ruine par la famille de Tagbmoraeen, par une
* La toar de cette mosqaée est encore debout bien que le c6té dn
sod ea ait été âènoH par Isa Abd^^Ouadiles.
^ Une grande partie du mur qui entourait la Mâosoura est encore
debeni. Il aat oonstrqil en piaéet flanqué de tours carrées ; daei Fen-
eeinte en remarque las reines de quelques grandes maisons construHaa
au«ai en pisé. Batre h Mauaoqra et Tlt ineeo l'on reaoootre piosieora
énormes boalels de pierre qui y avaient été taocés par (09 eatapqKes
des Mérioides.
i|44 nrstoinB hes mnfBfeires.
liynasde qni, un moment auparavant, allait succomber et n^avail
échappé h sa perle qoe par Pintervenlion de ceite providence
dont la bonté sauve les malheureux prêts à tomber dans
r^ibtme.
COKQIÊTE DU PATS DES MAGITRaOCA.
Après avoir bloqué Tlomcea et soumis les plaines ainsi que
les villes de l'empire abd-el'K>uadite, le sultan ambitionna la con-
quête des pays habités par les Jtfaghraoua et par les Toodjtn.
Nous avons déjà mentionné qu'en l*an 694 , Thabet-Ibn-Mendtl
s'était rendu è Fex et lui avait promis la main de sa petîte-fiHe.
Lors de cette visite, Thabet perdit la vie et, en Tan 696, le suUan
consomma le nFiariage projeté.
Après la réduction des provinces abd-el-ouadites, 4e vainqueur
plaça un détachement de son armée sous les ordres d*Ali*lbn-
Mohammed -el-Kheiri, personnage émtoeDi de la tribu des Ourla •
djen; et l'envoya dans le pays des Maghraoua. Ce corps soumit
loute la contrée ouverte et força les habitants de se réfugier sur
les cimes de leurs montagnes. &ached-ibn-Mohammed, petit-fils de
Tbabet-Ibn-Mendtl et beau*frère du sultan, s'enferma dans Mi-
lîana et soutint un siège qui dura jusqu'à l'an 699 (1299-1300).
Il fit alors sa soumission, en stipulant que sa vie serait respectée,
ei| quand on le mena en la présence du sultan, il y trouva un
accueil très*grâcieux. H obtint même son admission dans la suite
Impériale, honneur qu'il devait h sa parenté avec le souve-
rain.
La conquête de Ténès, de Mazouna et de Cherchel eut lieu
ensuite, ainsi que la soumission de Zîri-Ibn-Hammad, qui avait
usurpé le commandement à Brecbk. Toute la plaine du Chelif su-
bit la domination mérinide, et les Maghraoua prirent enfin le parti
d'obéir au gouvernement du sultan. Le commandement de co
peuple et de toutes leurs villes fut donné à Omar-Ibn-Ouîghern-
IbD-Hendîl.
HTNASTII MftRIHiDS. — AB0U-¥âCOIW-T0l'Ç0F. 4 46
Cette DomiDaiion'déptaià Racbed-lba-Mohammedi qui croyaii
eblenir le coiBinandemeat des Mftghraoua parce qu'il B'imagideii
en aire le plas digne et parce que sa sœur était la femme
chérie da suUaa. Emporté |iar sa jalousie contre ibii-(M*
ghero, il se jeta dans ane des moniag&es de la Mettdja ai, de
là, il dirigea plusieurs attaques contre les troopea et les admiats-
Iratears que le sultan avait établis dans les pays voisial. Tous
les Maghraouiens qui étaient méoootentsde Tordre actuel se ral^
lièrent autour de. son drapeau et, dans le mois de Bebift premier
700 (novembre-décembre 4300), les habitants de Maiounu répcb-
diàrent la domination mérioide et livréreat leur ville au chef ré-
volté. Encouragé par ce succès, BacheJ marcba sur la ville de
Ouazmor, sarprit Ibn^utghera dans une attaque de nuit^ le tua
et pilla son camp. Le sultan envoya ses troupes nràrinides ooatre
les insurgea ei nomma AU-Ibn^-BaoeB-lbn*Abi«UTalaeatt corn*
atandement des Béni -Asker, tribu à laquelle cetui^i apparteeait.
Alt«lbn-Mohammed-el-'Kheiri reçut en même temps le commaa*
deraeni do sa tribu, les Bent-Ourtadjen. Gomme ces deaz ehef«
devaient agir de concert, le sultan leur adjoignit comme Conseil**
iers son client Ali-el -Bassani, Abon-Bekr-Ibn-Ibrahlm^lba^Abd^
4)l-Caouï, membre de la famille qui oommandaitaui Bent^Toudjta,
•et MoIîammed-Iba-Omdr*lba-Mendil, qu'il venait de nonimeraa
^commandement des Magbraoua.
Bached ayant appris que ces chefs marchaient contra lui, se
réfugia, avec ses partbans maghraattiens, dans la montagne dea
Bani-Bou-Said, après avoir laissé da^is .la ville de Masouaa
ses cousins, Ali et Hammou, ib de Tahya'-lba- Tbabct.
En les quittant, il leur recommanda de bieu s'y défendre pendant
qu'il se tiendrait lui-même en observaiien sur la montagne. Les
Groupes du sultan entrèrent alors dans le pays des Magbraoua^ doat
•attes soumirent toute la partie ouverte, et allèrent camper sous
les murs de tfazouna. La ville était prête à succomber quaiid Ali
et sou peuple réussirent i» surprendre et à disperser l^arméo as-
aiégeante dans une attaque de imtt. Ali-el-Kheiri resta prisonnier
eatreleurs mains* Ceci se passa en l'an 701 (4301-3).
Comme les révollés porsistcrcnth repousser l'autorité du sul-
T 4JV. ie
146 BisToin bis bekb6res.
tan, ils eurent encore à soutenir un siège ; aussi, furenl-ild enfin
réduits à un tel degré de misère que Hamoiou-lbn-Yahya sortit
de la ville et se rendit à discrétion. Ce chef fut conduit devant le
sultan et emprisonné par son ordre, Ali*Ibn-Yahya suivit l'ezera*
pie de son frère et trouva un accueil plein de bienveillance- au-
près du sultan qui espérait dissiper ainsi les appréhensions de
Rached et le décidera faire sa soumission. En Pan 703 (4303*4),
Mazouna fut prise d'assaut et un grand nombre de ses habitants
fut passé au'fil del'épée. On porta au sultan les tôtes de tous les
insurgés qui avaient succombé et, par son ordre, on les lança
dans les fossés de Tlemcen pour en intimider la garnison et la
réduire au désespoir. /
L'émir Abou-Yahy a, à qui le sultan, son frère, avait donné le
i;Oilvernement des provinces orientales [da Maghreb central] avec
la commission de soumettre toute cette région, cerna Rached dans
la montagne des Beni-Bou-Satd, mais, s'étaut laissé surprendre,
iine nuit, par le chef rebelle, il perdit une partie de ses troupea
-et fut obligé d'abandonner ses positions. Le sultan fut tellement
irrité de cet échec qu'il fit suspendre à des 'poteaux et cribler de
flèches non-seulement Ali et flammou, mais aussi tous les Ma-
ghraouiens qu'il avait retenus jusqu'alors dans ses prisons.
Quelque temps après ces événements , Rached passa dans la
[ville de] Mettdjaoà son cousin Montf-lbn-Thabet et une foule de
réfugiés maghraouiens vinrent le joindre. Le reste de la tribu se
rallia autour de Mohammed-Ibn-Omar-lhn-Mendil, l'émir que
4e sultan Abou-Yacoub avait désigné pour la commander. Les
Thàleba et les Heltkich insoumis accoururent aussi sous les dra*
peaux de Rached et de Honif, ce qui donna lieu à utie nouvelle
expédition. L'émir Abou-Yabya les cerna dans leurs lieux de
retraite et les contraignit h demander la fin des hostilités, faveur
que le sultan s'empressa de leur accorder. Montf passa en Anda-
lousie avec ses fils et tous les* dépendants de sa famille, et, de-*
puis lors, ils y sont restés. Rached se réfugia dans le pays des
flafsides, et en l'an 10& (1305-6), Mohammed-lbn^Omar-Ibn-
Mendtl parut à la cour du sultan mérinide et y trouva une ré-
ception honorable.
t^arveim eoBo à soumettre le pays des Haghrsow, AbotnYa-
«oob y établit des administrateurs mérinides. Les choses" oonti^
màrent en cet étai jusqu'à l'an 706, quand il perdit la vie.
XONQVfiTB DU PAYS DtS TOU0/flf.
dovestîssement de Tlemcea effectué et les provinces abd-rf-
•ouaditcs réduites à la soumission, [Abou-Yacoub-jYouçoMbn^
Yacoub convoita la possession du pays des Toudjfn. Otbman-
Ibn-Yaghmoracen avait déjà vaincu ce peuple, conquis le Ouan-
diertcb et obtenu le pouvoir de nommer et de destftuer à son gré
les chefs descendus* d'Abd-el-Gaoïlï.
fin Tan ^0^^30^^% [l'émir Abou-Yahya] imposa un tribut
aux Toudjfn et, par Tordre du sultan [son frère], il rebâtit la villa
d*EUBat^ «que Hohammed-ïbn-Abd-el-Caouï avait mise en
ruine. Il 6t alors un expédition vers la frontière orientale [du
Maghreb central] et, pour s'en retourner auprès de son frère, il
traversa, en l'an 702, le pays des Toudjhi et força les Benî-Abd-
el-Caouï de se réfugier dans les plaines du Désert où ils allaient
camper chaque hiver. Après avoir détruit les châteaux qu'ils
possédaient dans le OoancherJch, il se rendit à la cour du sul-
tan.
En l'an 703 (4303), les habitants de Taferguint firent leur
soumission pour éviter les maux d'un siège, mais ils se révoltè-
rent quelque temps après. La ville de Médéa reconnut l'autorité
du sultan lequel ordonna à son frère d'y construire une citadelle.
Les Beui-Abd-el-Caouï virent alors la nécessité d'obéir aux Mé*
rinides et, en cette même année, ils envoyèrent une députatiou
au sultan, qui se tenait toujours dans la Mansoura afin desur^
veiller le Moces de Tleroeen. Par égard pour leurs anciens
services ce prince accueillit la prière des Abd-el-Caouï, les ren-
• Dans le texte arabe, il faut remplacer le mot btai par henL
148 BISTOltB DES MRBfctBS.
vûya chex eux après leur avoir coucédé la jouissance de certains
îoipôls el les aTolr placés sous les ordres d'Ali-lbn*en«Nacer*
Ibn-Âbd*- el*Caottï. La consiruclion de la citadelle de Médéa,
ordonné par le sultan en l'an 704 , fut terminée Tannée
suivante (4 305-6). Dans Tintervalle, Ali-lbn-en-Nacer mourut
et Mohammed-Ibn-Arïa*t-el-Asamm reçut du sultan le comman-
dement des Beni-Abd-el-CaouY. En Tan 706, ce chef entraîna
loui son peuple dans une révolte contre la domination mérinide
et quitta le pays avec eux, mais il y rentra après la mort du
sultan.
LES PBIMCES n TUUlS ET DE BOtJUlE| SOUTERIIKS ALMOSABBS M
L'iPataTl, BRVOTEHT DBS AMBASSADES AU SULTAN «ÈBIMIDB.
Les princes hafsides qui régnaient en Ifrikïa avaient toujours
entreteao de bonnes relations avec les deux grandes nations se-
natiennes du Maghreb, les Beni*Abd-el^uad et les Beni-Merîn.
Yaghmoracen ci ses 61s leur témoignaient, de leur c6lé, une
obéissance assez spécieuse , en leur adressant des actes d'hom-
mage et en faisant célébrer la prière publique au nom du khalife
bafside. Ce dernier usage datait de la priée de Tlemcen par
Abou-Zékérïa, fils d'Abd-el-Ouahcd, et de (a conGrmaiion de
Yaghmoracen dans le gouvernement de cette ville. Il en était de
même avec les Beni-Merin : depuis Torigine de leur puissaBce,
ils montrèreat un grand attacbemeni è la maison d'Abou-Hafs;
ils entretenaient nséiae une correspondance avec Témir Abou*
2;ékérïa et, [par égard h sa qualité de kkaliio,] ils lui transmet-
taîeutles hommages de chaque ville dont ils faisaient la conquête*
Gela eut lieu pour Méquines, pour Ël-Casr et, en dernier lieu,
pour Maroc. Depuis le temps d^EUMostancer et de Tacoul>»Ibn«
Abd-eMiaek, les relations des deux cours avaient pris le carac*
tère d'une sincère amitié, et les Hafsides envoyaient des présents
an souverain mérinide, el même de Targent, afin de l'aider à con">
tinuerla guerre contre les Almohades du Maroc.
Df NASTIB ■tBiniDB. ABOU-TACOUB^-YOIÇOP. 4 49
Nous avons déjà moDlioDné qu'en Pan 665*, Abou-Yoïlçof-
Yacoub expédia au khalife hafsiclc une ambassade composée
d'Amer-lbn-Idris, d'Abd*Allah«Ibn-Keiidouzelde Uobammod-el'*
Kinani. Nous avons raconté aussi qu'en 669*, EUUostancer 6t
porter k Yacoub un riche cadeau par une députaiion de cheikhs
ayant à leur léte Yabya-Ibn-Saleh*el-Hintati, chef du corps des
Almohades. En Tan 675 (4276*7), El-Ouathec, fils d'EUMos-
lancer, choisit le célèbre Abou-'l-Abbas-Ahmed-el-Gbomari,
cadi de Bougie, pour être le porteur d'un présent magnifique des**
tiné au sultan mérinidCi.
La bonne intelligence se maintint entre les khalifes de Tlfrikta
et les princes zenalieiis jusqu'à l'époque où la discorde éclata
dans le seiûde la famille bafside, quand l'émir Abou-Zékérïa^
fils de l'émir Abou-Ishac-Ibn-Yahya-Ibn-Abd-el-Ouabed, s'évada
de l'asile qu*Othman-lbn'Yaghmoracen lui avait accordé et prit
possession de Bougie en l'an 683 ^. Ayant établi dans cette ville
k trône d'un nouveau royaume, Abou-Zékérïa fit de Gonstantine
et de B6iie les dépeadances de son empir<^ Sa fuite contraria vi«
vemeni l'émir Othman qui tenait beaucoup à l'alliance d'Abou*
Haf?, seigneur de Tunis et oncle du transfuge : il en exprima
même sa désapprobation de la manière la plus formelle.
Quand le sultan Abou- Yacoub- Yooçof eut mis le stége devant
Tiemcen et reculé les bornes de son empire jusqu'aux portes do
cette capitale, il envoya une armée à la conquête des villes et des
campagnes du Maghreb central. Les Almohades [Hafsides] res-
sentirent alors une certaine inquiétude pour leurs propres états,
et l'émir Abou-ZékérYa alla prendre position auprès deTedellis
afin de veiller à la sâreté du royaume de Bougie. Ce fut là qu'il
accueillit Rachcd-lbn-Mohammed, qui fuyait la colère du snU
* Ci-devant, page 63
* lii-aevani, pageoi.
^11 laut remplacer le mot sebd par tissà^ tant dans les manuscrits q^i
daosie texte imprimé*
* Yoy. temo n, page 100.
f50 BI6T0IBI mis BtlBÉISr.
tan Abott«Yacouln Bientôt après, les troapes mérioides arri-
yèrent à la ponrsaite du fugitif et eurent tm conflit avec les Haf*
aides auprès deDjebel-^z-Zan. Dans cette rencontre, qui eut lieu
en l'an 699 , Tarmée du prince de Bougie fut iailléeen pièces et,
pendant plusieurs années, les ossements des morts continuère»!
à blanchir le champ de bataille. Abou-ZékérYa se réfugia dans
Bougie oii il mourut vers la fin du septième siècle.
Quelque temps auparavant, une grave mésintelligence avait
éclaté entre lui et Othman, fils de Sebir, fils de Yahya, fils de
Doreid, fils de Masoud-el-Bolt, chef des Douaouida. Vers la fia
de Tan 701 , Othman alla trouver le sultan mérinide et l'engagea
fortement à diriger un corps d'armée contre Bougie. En consé-
quence de cette invitation, l'émir Abou-Yahya, qui s'occupait
à soumettre les Maghraoua, les HeUkich et les Thftleba, reçut
de son frère, le sultan, une dépêche qui lui prescrivait d'envahir
le territoire hafside. Oibman-lbn-Sebft prit part k celte expé-
dition et, autant placé h l'avant-garde avee les gens de sa Iribii,
il éclaira la marche de l'armée jusqu'au pays situé an delà de Bou-
gie. L'émir Abou-Yahya prit alors position à Tagrart dans le
pays des Sedoutkicb, afin de dominer tonte cette r^ion et,
de là, il alla se présenter devant Bougie. Pendant quelque jours
l'émir Abou-'l-Bacà -Khaled [ , fils et successeur de l'émir
Abou-Zékerïa, ] soutint les attaques de l'armée mérinide
et, se trouvant secondé par des gens qui combattaient pour
eux-mêmes et pour leur prince, il repoussa km assiégeants à
coups de flèche. Alors l'émir Aboi»-Yahya fit dévaster le Bedla,
jardin magnifique appartenant au sultan de Bougie, et il évacua
le territoire hafside afin d'aller soumettre les provinces du Mar-
ghreb centraK
Mohammed-el-Mostancer, fils de Yabya-el-Ouathec et sur-
nommé Abou-Actda, régnait alors à Tunis. Voulant raffermir les
liens d'amitié qui attachaient sa famille è celle des Beni-Mertn,
ce prince plaça Mohammed-Ibn-Akmaztr, chef du corps des Al-
mohades [Hafsides] à la tète d'une députalion de cheikhs et l'en*
voya auprès du sultad Abou-Yacoub. Cette ambassade parvint à
sa destination dans le mois de Cfiftban, 703 (mars-avril 4304).
DT1IA8TII lliftlllI0B.— AftOU-TAGOUB-TOUÇOF. t St'
L'exemple d'Abou-Actda fut imité par Abou-'l*Dacà-Khftie4»
aeigoeur de Boogie. Le sallan Gt ud excellent aocaeil à loat oea
envoyés et les congédia avec de grands honneurs.
L'année suivante, Ibn- Akmaztr se présenta une seconde fois à
la cour du sultan raérinide, accompagné par Abou-Abd-Allah-
Ibn-lrsiguen, cheikh des Almohades et ami du sultan Abott*Actda.
Avec eux vint une dépntalion composée des dignitaires les plus
éminenls de la nation hafside. Vers la même époque, le seigneur
de Bougie envoya au sultan en qualité d'ambassadeurs son ch'aow
bellan Abou-Mohammed-^r-RokbamtetEïad-Ibn-Satd-lbn-Othéi-
men, grand cheikh des Almohades du royaume de Bougie. Lé 3
Djomada (43 décembre 130i), tous ces envoyés furent présentés
au sultan. Il les accueillit avec les plus grands égards et, pour le»
avoir près de lui, il leur assigna des logements dans son palais.r
Leur ayant ensuite fait parcourir ses jardins et ses palais qiiel'oa
avait ornés et tapissés à cette occasion, il leur procura uu spec-
tacle qui les remplit d'admiration et d'un profond respect i)0ur
la puissance de l'empire mérinide^ BientAt après, il les envoya es
Maghreb afin de visiter les palais de Pei et de Mairocainsi que
les monuments laissés par leurs ancêtres, les sultans almohades.
Il expédia en même temps des instructions aux gouverneurs de
ses villes et de ses provinces, leur ordonnant de recevoir ces vo»
yageursavec de grands honneurs et de leur offrir des pré-
sents.
Vers la fin de Djomada (second « févr. 4305), les ambassadeurs
revinrent à la cour du sultan, comblés de dons, pénétrés d'admi-
ration, et ils partirent pour annoncer à leurs souverains respectifs
le succès de leur mission et raconter tous les témoignages
d'égard qu'on leur avait prodigués.
En l'an 705 (4305-6), les princes hafsides envoyèrent encore
des ambassadeurs k la cour du sultan. Abou-Abd-AUah-IbiV'
* Le sultan demeurait alors dans la Manseura, près de TIem»
ceo.
1533 BIftTOiKB Ni WBSlBBB*
Akoiaitr y parut au nom du souverain de Tunis, et EYtd-IbB*
Satd-Ibn-Otheimon au nom du seigneur do Bougie. Quand Ibn^
Akmaztr prit son congé de départ, le sultan le fit accompagner
}«sq»*à Tunis par le savapt légiste, Abou-'l-Hacen de Ténès»
mufti de l'empire, et par Ali-Ibn-Yahya de Breebk. Ces envoyéa
eurent pour mission d'obtenir le concours de la flotte tunisienne,
ils terminèrent beoreaBemciit cette négociation avant la fin do
Vanaéci et la nouyelleen fij^ rapportée au sultan par Abou-Abd-
AUah^-Meidouri, cheikh des Almohades. Vers la même époque
eut lieu le retour de Bassoun-Ibn^Mohammed-lbn-Bassomi-el-
Miknaci, client du sultan, qui avait accompagné Ibn-Otheimen k
la oourd'Abou»*I-Bacè, seigneur de Bougie. Hassoun aussi, avait
an pour mission d^obtanir le secours d'une flotte, mais les minis*
ires d'Abott-ol^Bacà l'avaient congédié en regrettant de ne paa
pouvoir satisfaire à la demande du sultan, ils le firent accompa-
gner auprès do son mattre par Abd-Allah-Ibn-Abd-el-Hack-Ibn*
Soieiman. Le sultan accueillit très*bien tous ces envoyés, seloik
iOD habitude, et transmit au gouverneur d'Oran lorJre de
traiter honorablement les équipages deB navires qui les avaient
amenés.
Les ambassadeurs prirent enfin leur congé, enchantés do )a ré-
ception qu'on leur avait faite, et le sultan se passa de la flotte
bafside parce qu'il n'avait plus besoin de bloquer les ports du
Maghreb [central]. En efiet, il était parvenu à en soumettre tout
le littoral pendant qMc les Al mohadea remettaient de jour en jour
l'envoi de leurs navires .
L'éfnîr Abeu-Ztan, qui avaient été proclamé souverain à Tlem^
cen lors de la mort de sop père, Othman^lbn-Yagiimoracen, et
qui était monté sur le trône vers la fin de l'an 703 (4304), pendant
que le siège durait encore, fut très-mèeontent d'apprendre que les
Bafaides favorisaient son ennemi au point de lui promettre io
concours de leur flotte; aussi, pour s'en venger, il ordonna la
suppression du nom du khalife bafside dans la prière publique;
abolissant do cette manière et pour toujours un usage qui avait
subsisté depuis le temps de Yaghmoracen. Quelque temps après^
eujtlieu la mort du sultan mérinide.
DTRASTIB «ÉiUllDB. — A»OU-TACO«f --TOUÇOr. Id^
LIS 900VIRA11IS DB L^ORIBNT BT LB9 ÉMIRS TURCS DR L'BOTPT»
BRTOIBNT 0BS ASBA8SADB8 AU SULTAlf.
Après avoir conquis les états et les provinces da Maghreb eea-
Irai, iesolian reçut les féltcitatioDS des souverains qui régnaient
dans les antres pays et des Arabes nomades qui fréquentaient les
plaines du Tell et les profondeurs du Désert. Un grand nombre
4e Maghrébins, voyant la sûreté des communications si bien éCn^
Uie que les caravanes se rendaient à leur destination sans. être
îoqniétées sur la route, formèrent le projet d'accompHr le p^ri«-
ROge et soliîeitèreot du sultan la permission de s'embarquer afin
d'sller à la Mecque. Jusqu'alors, les cbemins avaient été si dan*^
gereux pour les voyageurs et l'autorité des gouvernements afri«*
oains si peu respectée, que Voccasion de remplir ce saint devoir ne
s'était pas présentée depuis longtemps.
CSette demande éveilla dans le cœur du sultan le désir de vi«'
siter la viHe sainte et le tombeau du Prophète [et, comme les eir-
coitf tanoes s'y opposaient, il résolut d'envoyer un témoignage de
sa profonde piété]. Par son ordre, un habile calligrapbe nommé
Ahn\6ctibn-Bacen, transcrivit un exemplaire duCaran en grand
fermât. Ce volume fut ensuite relié avec un soin merveilleux et
garni de plipsienrs fermoirs en or sur lesquels brillaient de» grou^
pes de perles et de rubis. Au milieu se voyait uuo pierre pré*
^euseqjui surpassait tontes les autres par la grandeur, la forme
^t la beauté. Ce livre fut enfermé dans plusieurs étuis et eon*
sacré, comme donation, au temple de la Mecque. La caravane
chargée de porter ce volume à sa destination, se mit en route
^an 702(4303). Pour garantir tes pèlerins contre tout danger, le
sultan leur fournit une escorte d'environ cinq cents cavaliers ze-
nations, et il leur donna pour cadi, le savant et illustre docteur
«laghrefoin, Mohammed-lbn-Zeghboncfa. Il adressa en même
temps une lettre au souverain de l'Egypte dans laquelle il lui re-
commanda les pèlerins du Maghreb, sujets de l'empire mérinide*
464 fflSTOlBB DKS iIRBtRES.
Parla même occasion, il lui expédia un présent composé de tout
ce que le Maghreb pouvait fournir de f>lus beau en fait de meubles
"^ eld'autres objets. Il y avait aussi plusieurs chevaux arabes ci
quatre cents bêles de somme Irès-vigoureuses. Je tiens ce
chiffre d'une personne avec laquelle je me suis rencontré.
Cette caravane servit à frayer le chemin pour la grande cara-
vane du Maghreb qui partit Tannée suivante. Celle-ci quitta [la
Mansoura de ] Tlemcen dans le mois de Rebià premier 704
(octobre 4304), sous la conduite d*Abou-Zeid-el-GhafaYri lequel
tenait sa nomination du sultane La caravane de Tannée précé-
dente transporta le volume sacré à la Mecque et, dans ie mois dé
Rebi^ second (novembre \ 304), elle rentra en Maghreb. Avec
elle arriva le chérif Lebida-lbn-Abi-Nemi, qui venait de se sous-
traire^à Tautorité des Turcs [Hamioucks]. Il avait pris ce parti
en voyant arrêter ses frères, Khamtça* et Remtta, par l'ordre du
sultan turc, en Tan 701 , peu de temps après la mort de leur père,
Abou-Nemi, seigneur de la Mecque.
Le sultan mérinide accueillit le réfugié avec de grands égards
et Tenvoya en Maghreb afin de visiter ce pays et de voir les pa-
lais et autres monuments de la puissance mérinide. Il fit inéme
prévenir les commandants de ses provinces qu'ils auraient à trai-
ter ce voyageur honorablement et à lui donner des cadeaux, cha-
cun selon ses'moyens. En 705^ le chértf revint h la cour e\, s'é-
tant fait accorder son congé de départ, il se mit en route pour
TOrient, accompagné d'Abou-Abd-Allah-Fouzi, maghrébin très-
distingué qui voulait accomplir le pèlerinage.
Dans le mois de Ch&ban 705 (fév.-mars 1306), Abou-Zeid-el-
Ghafaïri, conducteur de la dernière caravane , revint de la Mec-
que. Il apporta un document par lequel les chérifs de cette ville
se reconnaissaient sujets du sultan mérinide. Ces chefs avaient
ressenti un vif mécontentement à cause de Tarrestation de leurs
frères parle souverain de TÂgypte et , pour s'en venger/ ils s^é-
1 Variante : Bamida.
BTKISTU MlRIHlDB.— AVOU-TACÔrB*YOVÇOF. f 65
taieot conformés à leur usage ordinaire en pareille circonstance*.
Nous avons raconté d'eux un trait semblable dans l'histoire d'fil-
Mostaucer le hafside*. Ils envoyèrent en ntéme temps au sultan un
vêtement fart avec un morceau du voile de la GAba. Ce fut avec
un véritable plaisir que le sultan reçut cette offrande et, pour
jouir de la bénédiction qui se rattachée un objet aussi saint, il le
porta entre ses autres habits, les vendredis et jours de fêle.
Quand le souverain de l'Egypte, EI-Velek-en-Nacer-Moham-
med-lbn-Calaoun-es-Salehi, vit le présent que le sultan du Ma-
ghreb lui envoya, il en éprouva une satisfaction extrême et, pour
répondre à cette marque d'égard par une autre, il fit réunir un
choix de tout ce que ses étals pouvaient fournir en fait d'étoffes
et d'animaux rares. Parmi les quadrupèdes , qui se distinguaient
par leur forme et leur taille, on remarqua des individus du
genre éléphant et du genre giraffe. L'émir El-Teliii , un des
grands dignitaires de l'empire égyptien, fut chargé de veiller au
transport de ce cadeau et de l'accompagner jusqu'à la cour du
sultan. Il quitta le Caire vers la fin de l'an 705 fjuin-juill. 1 306];
dans le mois de Bebift (sept.*oct ), il arriva & Tunis et, dans le mois
de Djomada second (déc.-janv. 4306-7), il parut en vue de ta
Mansoura de Yille-Neuve. Le sultan, rempli de joie, ordonna à
tout son monde de monter à cheval et d'aller au-devant d'Et-
Teltli et des émirs turcs qui l'accompagnaient, et, pour mettre le
comble à ses prévenances, il leur assigna un beau logement aveo
une table bien fournie; puis, il les envoya en Maghreb, selon
l'usage. Sa mort, qui eut lieu bientôt après , ne changea rien à
l'égard de cette ambassade ; son successeur, Abou-Thabet, en
traita les membres avec autant d'honneur qu'auparavant et les
congédia en les comblant de riches cadeaux.
Ils quittèrent le Maghreb dans le mois de Dou-'l-Hiddja 707
(mai-juin 4308), mais, en traversant le pays des Beni-Hacen, où
I Lisez metta k la plaoe de haiUi dans le texte arabe.
• Vey. l. n, p. 313.
I5Ç BtSTOlRB DBS BBBBtftBS.
ils arrivèrent en Rebiâ (sept-ocL), ils furent dévalisés par tes
Arabes du Désert et ils entrèrent au Caire dans un étai pitoyable.
Depuis lors, le gouvernement égyptien n'a plus expédié de mis*
aions en Maghreb et ne fait plus aucune attention à ce royaume.
De leur côté, les souverains mérinides sont tcllemeoi honteux de
cet événement qu'ils n'envoient plus aucun de leurs grands offi-
ciers au Caire ; ils y font seulement porter des cadeaux ; ils ea
reçoivent d'autres en retour et, dans leurs lettres, il se bornent
à. énoncer l'envoi qu'ils viennent de faire, san9 rien y ajouter de
plus.
A l'époque même où cet attentat fut commis, l'opinion, publi-?
que en désignait comme auteurs les Arabes nomades de la tribu
des Hosein; on les soupçonnait même d'avoir agi h l'instigation
d'Âbou*-Hammoa, seigneur de Ticmcen, lequel aurait voulu gra*
li&er de cette manière la haine de longue date que la famille de
Yaghmoracen portait aux souverains du Maghreb. A ce sujet»
mon ancien professeur, Mohammed-Ibn-lbrahtm-eUAbbeli, m'a
raconté l'anecdote suivante : « Je me trouvais, dit-il, dans la pré--
B sence du sultan [Abou-Hammou] quand plusieurs TIemcenois,
B qui revenaient de la Mecque, lui remirent une lettre de la part
» d'EUMelek-en-Nacer. Dans cet écrit, le souverain égyptien se
» plaignait de ce que la mésaventure arrivée à ses émirs
s avait eu lieu sur le territoire de TIemcen, Cette lettre fut ac-
» compagnée de deux Qacous remplis de baume, produit parlicu-
a lier aux états du sultan de l'Egypte, et de cinq mamlooks
B turcs, porteurs de cinq arcs ghozBÎens dont le bois, les corneB
B et les cordes étaient d'un fort beau travail. Notre maître, trou-
» vaut un pareil présent bien mesquin en comparaison de celui
B que le sultan du Maghreb venait de recevoir, fit venir son se
B crétaire, le cadi Mohammed*Ibn-Ridya, et lui parla en ces ter-
B mes : « Écris à El-Melek-en-Nacer ce que je vais te dicter et
» ne change rien h l'ordre de mes paroles qu'autant que la gram-
» maire l'exigera. Écris : Qucmt à vos reproches au sujet des
B ambassadeurs et de ce qui leur survint en route, je réponds
B qu'à l époque où ils se présentèrent chez fiioi, je leur con-
B seillai de marcher à grandes journées de peur qu'il ne leur
MNASTIK MtRtNlDI.— *ABOU*TACO0ft-TOlJÇOF. 45?
i arrwdi quelque accident ; je les avertis de tout ce que ce
» pays offre de dangereux pour les gens qui voyagent et du
i risque que l'on court d^étre dévalisés par les Arabes no.
» mades. Fiers de leur rang et de leur dignité , ils me
» firent cette r^onse : < Nous arrivons de la cour du roi du
1^ Maghreb; qu^avonS'-nous donc à craindre ?i> Ils s* étaient
» imaginés que les ordres de ce prince seraient respec*
i tés par les Arabes de nos tribus nomades l Qvuint au présent
» que vous mouvez fait, je vous le renvoie : nous sommes un
» peuple de mœurs agrestes qui ne connaissons et ne voulons
» d'autre baume que l^knile d'olives^ et, quAnt aux archers
tt mamlovkSy comme nous venons de prendre avec leur secours
n la vil le de Séville, nous vous les rendons afin que vous puis^
» sies^ faire la conquête de Baghdad. Salut ! — Tout le monde,
» rue dit El-Abelli, fut convaincu que œtaUenlat avait été commis
» avec l'autorisation de noire sultanv ei le ton, de celle lettre en-
dique assuz clairement la nature des sentiments dont ce prince
était animé.
U SULTAN ESPAGNOL ROXPT SON ALLIANCE ATBC LE SULTAN KtBl-
lOBB. *— LE rats ABOU-SAto s'bMPABE de CEUTA. — OTBJEAR*
JBN*ABI-'OLA SOULfiVE LE PATS DIS GHOHABA.
[Mohammed II] Ibn-el-Âhmer, surnommé El-Fakth, demeura
toujours fidèle au traité qu'il avait conclu avec les Mérinides, en
Pan 692f quand il traversa le Détroit et se rendit à Tanger. On a
déjk vu que la ratiGcation de cet acte d'alliance procura au sul*
tan africain assez de loisir pour s^occuper de son adversaire [in-
traitable, le seigneur de TIemcen]. Dans le mois de Chàban, 701
(avril VâOi), Ibn-el-Abmer mourut et laissa le trône de TAnda*-
lonsie h son fils Mohammed [111], surnommé [plus tard] El-Makh-
* Ci-devant, pages 133, Ul.
(58 BISTOltE M8 UMftftCS.
loué (/e dépaé). Le noaTcaa sultaD avait perdu la vue et se
Jaissait gouverner par Abou-Abd-Allah-Ibn--eI-Haktm, cheikh
delà ville de Bouda, qui hii avait servi de secrétaire sou9 le
règoedufeu souverain. Quelques-uns disent que l'aveugie était
]bn-el-Haktm. Quoiqu'il en soit, El-Hakloué fut [déposé et] mis
4mortparson frère AboB-4-DjoYouch-Nasr, en l'an 708 (4309)>i
Avec lui BMMinil Ibn-el-Haktm*.
I Un des premteni actes d^El-Hakhloué en montant sur le trône
avait été d'envoyer en Maghreb son vizir, lb«-el-Haktm, et
Abou-Soltan-Aztz-ed-Danî, ancien viiir de son père, aGn d'obte-
nir la confirmation de TaHiance que son prédécesseur avait con^
tracté avec le sultan mérinide. Ces anÀbassadeurs arrivèrent au
<»mp, sous les murs de Tlemcen, et accomplirent leur mission
heureusement. En prenant congé du sultan, qui les avait accueillis
de la manière la plus grftcieuse, ils s'engagèrent à lui envoyer un
corps de fantassins andalousiens et d'archers, gens habitués aux
travaux de siège et è tenir bonne garde*. Ce détachement ar-
riva au camp mérinide en Tan 702 (1302-3) et fit beaucoup de
mal aux Abd-el-Ouadites et à leur ville.
L'année suivante, El- Makhlouâ crut avoir des motifs de jalou*
sic contre le sultan Âbou-Tacoub et rechercha Talliance d'ibn-
el-Adfonch-Héranda-Ibn-Chandja [Ferdinand, fils de Don San-
che etpetit-filsd'AlphonseX]. Le souverain mérinide fut tellement
indigné de cette conduite déloyale que, vers la fin de la même
année, il renvoya en Espagne lo corps d'archers, après l'avoir eu
h son service pendant douze mois, et se proposa de faire sentir
au gouvernement grenadin le poids de sa vengeance aussitôt que
l'occasion se présenterait. Ibn-el-Ahmer-el-Makhloué et ses par-
tisans firent h Vinstanl leurs préparatifs de résistance.
. ' Mohammed III mourut cioq années après sa déposition. Ibn eU
Haklm fut tué en l'an 708.
^A Unir bonne garde \ la texte arabe portek>p W S^UXl ; dans
nn dos manuscrit on lit a^^UXt. Aucune de ces leçons ne nous parait
satisfaisante.
OTKASTIB MRIHIDB.— AiOD-TACOUB-TOUÇOF. 469
Parmi les membres de la famille royale de Grenade, le raïs
Abou*Satd»Feredj, fils d'Ismail-Ibo-Mohammed-lbn-NaAr et gou-
vemeor de Malaga, é(aii le seul à posséder la confiance dlbn^eU
Ahmer-el-MakhIoué. Cousin * de ce souverain, il en était aussi le
bean^frère, et il administrait avec une grande habîtelé I» proriae»
d'El-Gharbïa *. En obéissance a«x recoomiandatioiis de son sou^
veraîo, Abou-Satd fntàtp»» les habitants de Ceuta afin de sous-
traire leur ▼itte à la domination mérinide et de la faire rentrer
seiw l'autorité do gouvernement andalousicn. Il les engagea aussi
a emprisonner tous les membres de la famille Azéfi.
[Bacontons ici les événements qui dii^posèrent le peuple do
Ceuta à changer de mettre]. En Tan 617 (1 278-9), lors de la mort
d'Aboo-'l-Cacem-lbrahtm-el'Azéri, surnommé EUPakth, son fils»
Abou-Hatem, succéda au gouvernement [de Ceuta] et prit pour
lieutenant son frère, Abou-Taleb. Méprisant lui*méme les gran-
deurs humaines, il laissa le commandement à son frère dont il re-
connaistail aussi le droit d'atnesse et qui, du reste, aimait le
pouvoir. Toutefois, quand on venait lui faire des réclamations, il
ne manquait jamais de s'y intéresser. Ils commencèrent leur
administration par faire proclamer la souveraineté du sultan mé-
rinide dans tous les lieux soumis h leur autorité et, par respect
pour cemooarque, ils s'abstinrent d'habiter le palais du gouver*
nementet déporter les insignes de la dignité royale. Le caïd
Abd-Allah-lbn«*Mokhlcs, officier de bonne famille qu'ils avaient à
leur service, s'établit dan:» la citadelle par leur ordre,afinde faire
la policede la ville et d'en commander la garnison. Pendant quel-
ques années il occupa ce poste et finitpar s'attirer Tinimilié de
Yahya, fils d'Abou-Taleb. Ce jeune homme venait de soustraire
ses gens et ses serviteurs à la juridiction du caXd dont certains
«Dans le texte arabo, il faut insérer le mot /^ entre *»^ et
* La Gharlna {V occidentale) provioce du royaumo de Grenade, se com-
posait des districts situés A i'ouesl de Malaga. Il ne Tant pas confondre
celte régiun avec les Alyiurvfs, proTtnca de Portugal.
160 BISTOItB DBS lIBRBtiIBS.
{procédés loi avaient dëpla, et il poussa son père à exiger de cet
oflScier le compte des sommes provenant des impôts et destinées
k solder la garnison. Ils eurent cependant trop de confiance dans
la loyau(ë d^lbn-Mokhlès pour le soupçonner d'un autre orime
que celui de pëculat« Pendant tout ce temps, ils avaient conti-
nué à reoonnattre l'autorité du sultan et à se rendre auprès de
lut aux époques de grandes réceptions.
Le sujet de mécontentement que Beni-'UAzéfi avaient donné
au col'e^ Ibn-Mokhiès favorisa singulièrement le projet du sultan
de Grenade. Diaprés les ordres de ce prince, qui venait de rom-
pre avec le sultan mérinide, le raïi Abou*Satd, seigneur de Ma-
laga parvint à gagner le caïd et à lui faire promettre d'abandon^
nér le parti des Azéfi aussitàl que la flotte andalousienne parai*
trait devant Ceuta. Ayant plors fait annoncer que la ville de
Malaga allait être attaquée par les chrétiens, il équipa une flotte,
enrôla des soldats et remplit ses navires de eavaliers, de fantas**-
sins, d'archers et de vivres. La véritable destination de ces forces
resta secrète jusqu'à la nuit du 27 Ohoual 705 (13 mai 4306),
quand la flotte qui les portait mouilla a l'improviste dans la rade
de Ceuta. Abou-Satd les débarqua avec la connivence du
oommandant Ibn-Mokhiès , prit possession <}e la ciladelle
où il déploya son drapeau et, de là, il fit passer plusieurs
détachements dans ta ville même. Ayant alors monté à cheval, it
se rendit à la demeure des Beni-'UAzéfi et les fit arrêter tous
avec leurs eufants et leurs domestiques.
Le snltan Ibn-ol-Ahmer reçut très-promptement la nouvelle
de cotte conquête, et son vizir, Ibn-eUHaktm, arriva bientôt
«prèsàCeota^ avec la mission de tranquilliser les esprits et de
promettre aux habitants une administration juste et paternelle.
Les Azéfi furent embarqués pour Malaga d'où on les conduisit à
Orenado. Le sultan fit monter à cheval toute sa cour et Tenvoya
au-devant d'eux, et il tint une séance afin de les recevoir encore
plus honorablement. Après avoir reçu leurs hommages ci leurs
serments de fidélité, il les logea * dans son palais et leur assigna
* f)ans le tcite arabe ii faut lire istacarreM,
DTNA8T1B ■tmiHII» . — ▲10U*TACOCB*-TOl'ÇOF . 4 61
des pensions considérables. Plus loin , nous aurons à raconter
comment les Beni-1-Axéfi rentrèrent en Maghreb.
Le rol't Abou-Satd ayant obtenu possession de Ceuta , rétablit
l'ordre dans les alentours, 6t mettre la ville en bon état de dé-
fense et y proclama la souveraineté de son cousin, le seigneur de
l'Andalousie. Il y avait amené dans sa flotte le détachement des
vobntaires de la foi qui stationnait à Malaga et qui avait pour
chef Olhman-lbn*Abi4-01ft-lbn-Abd-el-HadiL, membre de la fa-
nille royale des Beni-Mertn.
Ce prince» attiré par la perspective d'un trône, essaya de con-
quérir le Magareb avec le secours des tribus ghomariennosy qui
avaient cependant montré beaucoup d'hésitation avant d'embras-
ser son parti. Le sultan mérinide apprit, dans son camp» sous
les murs de Tiemcen, la nouvelle de cette invasion et, plein d'in-
dignation, il ne pensa qu'à châtier l'attentat qu'on portait à son
autorité. Il ordonna de nouvoUes levées de troupes, plaça aon
fils, l'émir Abou-Salem, à la tète d'une armée et le chargea do
rétablir l'ordre dans le pays insurgé après avoir rallié sous ses
drapeaux les tribus du Rtf et du territoire de Tèsa. L'émir par-
Ut sur le diamp et, arrivé près du foyer de l'insurrection, il le
tint cerné pendant quelque temps; mais son armée (ut enfin mise
en déroute par les troupes d'Othman qui réussirent ^ la surpren-
dre (laos une attaque de nuiL Forcé des'en retourner, il essuya
une sévère réprimande de la part du sultan et tomba en disgrftce.
Otfansanse mit alors à parcourir le territoire de Ceuta, ainsi-que
le pays des Ghomara et, «'étant emparé de Ttktças, il marcha
contre le Casr-Jbn - Abd-eUKerlm.
Vers la fin do Tan 706 (mai-juin 4307), justement une
année après la prise de Ceuta , il arriva sous les mura
d'fil-Casr, et [dans tous les lieux qu'il traversa] , il prit le
titre de sultan et somma les habitants à le reconnatlre pour
leur souverain. Abou-Yacoub, voyant Tiemcen sur le point
de succomber , résolut d'attendre la chute de cette forteresse
avant de marcher contre le prétendant , mais il en fut em-
pêché par la mort.
T. IV. Il
462 HISTOIBK DBS BEEBÉBEt.
LtS BEHI-GOHII, TRIBD ABD-BL-OUADITB, SB BÉVOLTENT , DANS LK
ROCS , coUtbb le GOUYEBNBHENT MEBINFDB.
XesBeni-Gommi, fraction de ta tribu des Âulad-Ah\ laquelle
appartient h la famille d*Âbou-1-Cacem, forment une des bran-**
cbes de la tribu des Abd-el-Ouad. Ils eurent autrefois pour chef
Kendouz, Gis de * , Gis de Gommi. Quand le commandement
des Aulad-Âli échut à Zîan^lbn-Thabet Ibn-Mohammed, de la
famille des TA-Allab, le nouveau chef eut ^ soutenir une lutte
contre Kendouz. aGn de conserver le pouvoir que Dieu lui avait
départi, mais il traita avec trop d'indifFérenceles efforts de son
rival. Apnt pris les armes pour combattre quelques pertuba-
tours abd-el-onadites qui s'étaient ligués contre lui, il mourut de
la main de Kendouz. Le commandement des Aulad-Alt passa
alors Djaber«lbn-Youçof-Itm*Mohammed et, après avoir appar-
tenu successivement k plosieurs chefs, il rentra dans la famille de
Thabet-lbn-Hohammeii. Ce fut Abou-Ezia-Zegdan, fils de Ztau
feC petit-fils de Thabet], qui obtint le pouvoir, maïs il n'en jouit
pas longtemps avant de mourrr. A cette époque, les Aulad*6om-
mi et les descendants de TA-Allah venaient d'oublier leurs toffs
réciproques et de se réunir en un seul peuple.
Taghmoracen, fils de Ztan, reçut alors le commandement des
TA-Allah et amena toutes les tribus abd-el-ouadites k reconnattre
son autorité. Ayant ensuite pris des mesures afin de venger la
mort de son père, il fit dans sa tente les préparatifs d'un grand
festin auquel il convia tous ses frères. Kendouz, qui avait donné
la mort à Ztan, s'y rendit aussi, surl'invitation qu'i^avait reçue.
Quand tout le monde fut assis, les Gis de Ztan se jetèrent sur lui
et le tuèrent h coups de sabre. La veuve de Ztan, à laquelle ils en-
voyèrent ta tète de leur victime, assouvit alors sa haine et sa soif
' Il faut remplir ce blanc par les mots Abd-Allah,
DYNASTIK MftVllIIDI. — AftOD-TACOFB-YOCÇOF. 1 63
4e veogeauce eu meUani cette offraode saugiante h la place d'une
des trois pierres qui serveot h souteuir la marmite sur le feu *.
Les fils de Kendoaz [et leurs gens] prirent la fuite pour éviter
le sort que Yaghmoracen leur destinait et, après un long voyage,
ils arrivèrent à la cour d'Âbou-Zékérïa-Ibn-Abd-el-Ouahed, le
sultan hafside. Pendant quelques années , ils y restèrent sous le
commandement d'Âbd-Allah, fils de Rendons ; puis, entratnés
par l'amour de la vie nomade et par le désir de rentrer au mi-
lieu des Zenata, ils repartirent pour le Maghreb et s'unirent aux
Beni-Mortn, rivaux en tout temps des Beni-Âbd-el-Ouad. Yacoub-
Ibn-Abd-el-Hack accueillit Abd-AlIah-lbn-Rendouz avec une bien*
veillance extrême et le combla de bonheur en lui concédant, aux
onvirons de Maroc, un territoire assez vaste pour fournir à
l'entretien et aux besoms de toute la ribu. H confia aussi ses
troupeaux de chameaux aux soins des frères Hassan et Mouça,
fils d'Abou-Satd-es-Sobeîhi, dépendants et serviteurs de la fa-
mille Kendovx. Dès-lors, Abd-Allah, chef des Beni-Gommi, jouit
4'uiie haute faveur auprès du prince mérinide ; aux audiences so-
iMoelles on hit accordait la placed'honneur «t, dans presque toutes
las affaires importantes, c'était h lai qu'on avait recours. Ainsi,
an l'an 605 (1266-7) , il fut chargé de se rendre à la cour d'El-
Moalaaoar en compagnie avec Amer-ibn*ldrts, neveo du souvo^
raio.
Les Beni-Kendouz [Beni-Gommi] continuèrent assez longtemps
i jouir de leur bonne (brtime et h habiter le Magfareb-el-Acsa,
au ils furent rais au nombre des tribus mérinides. Après la mort
d'Abd«>Allah-lbn-Kendouz, le commandement passa k son fils
Omar.
• A l'époque où [Aboo-Yacoub-jYouçof-lbn-Yacoub avait em-
porté sur les Beni-Abd-el-Ouad et les tenait bloqués dans Tlem-
•cen, les Beni-Merto et leurs alliés exprimaient le plus grand dé-
dain pour toute la race abd oUooadite ; aussi, les Beni-Kendouz,
blessés dans leur amour-propre, répudièrent l'autorité du sultan
« Voy. t. ui, pages 329, i9i.
464 HiSTOifts HBS iKukan.
en Tan 703 (4303-4), ei pasdèreoi dans la province de Haha.
L'année aaivanie, Taïch*lbn-Yacoub, gouverneur de Maroc, ae
mil en campagne el leur livra une bataille à Taderi , puis, ayant
vu qu'ils persistaient dans leur rébellion, if les attaqua encore la
cQéme année, près de Tamatrti , et leur infligea un chAliment tel»
lement sévère que leur puissance en fut totalement brisée. Il tua
aussi un grand nombre de ces Abd-eUOnadites à Irgharen-
Bamka* , et, après avoir porté ses armes dans toutes les parties du
Sous, il détruisit b ville de Taroudant.
Celle métropole servait alors de résidence à Abd^er*Hahman-
lbn-eI*Bacen-lbn-Yedder , rejeton d*une famille d*émirs qui
avaient gouverné le Sous au nom de la dynastie fondée par Abd*
el-Moaineo *. Après la chute des Almohades , Abd«er*Bahman
essuya une alternative de succès et de revers dans une guerre
qa*il eut h soutenir contre les Chebanat et les Beni^Basaan, tri*
bus appartenant à la branche des Arabes-*Makitiens. En Tan 66S
(4209-70), Ali-Ibn-Yedder, onde d'Abd-er^Rahman , perdît la
vie dans an de ces combats, et, quelque temps après, celui*çi le
remplaça dans le commandement. Jusqu^au moment oà YaVch-*
Ibn-Yacoub soumit le Sous et ditruisit Taroudant, Abd^r-B»h«
man résista vigoureusement aux Arabes. Plus tard, il parvint à
rétablir son autorité et, en 706 (4306-7), il releva cette ville de
ses ruines.
La famille Yedder prétend avoir habité h* Sous de4>uts Tépoque
où l!avaai*garde des [premier conquérants] arabes y pénéiroi et
elle déclare que le commandement lui a toujours appartenu et
e^est transmis de père en fila. Sous le règne d'Aboo-Einan et
sous celui de son frère, Abou-Salem, je rencontrai a Fez un vieui
cheikh, fils de cet Abd-er-Rahraan , lequel m'assura que cela
était parfaitement vraietijue les Beni-Yedd4>r descendent d'Abou-
Bâkr*es-8iddic [le successeur immédiat de Mahomet]. Dieu sait
ce qui en est 1
• Variante: Argharek-Tahma . —SI nousIisonH U»U (^Ujl l^gharen-
*n*Egma^ nous aurons ua nom purement btrbèrc qui sigoifie Us p'ot-
neê du frère,
« Pourrhisloire des Beni-YedJor voyea tome ii, pige rîG.
DTHASTIB MfiBIHIDB.— AB0U-TAC0I}B*1ÛUÇ0P. f05
QuanI aax Beai-KeBdoQi [Beni-Gonmi] , il» vécureot dispersés
dans I9S déserts da Soas jusqu'à la mort du sultan [Abou-Ya-
eoub]. 'Ayant alors fait leur soumission, ils obtinrent du gouver-
nement roérinide l'oubli de leurs fautes pas^'ées et la restauration
de leurs privilèges. Depuis lors, ils ont toujours servi eet em-
pire »vee un zèla et un dévouement parfait».
IBII*Bt-nLiAll1 FAIT HOUBIB FAB VKH TBAHISOlf tBS CUnSB DBS
TBIBOS nASnOODIBVlIBS.
Dans notre cbopitro sur les Haghraoua de la seconde race,
nous avons fait conoatlre l'origine d'Abou- Ali-el-Miltani,
•t mentionné comment les troupes hafsidcs l'expulsèrent de
Miltana*, ville dont il s'était emparé. Yacoub-Ibn-Abd-el-Hacks
sultan desBeni-Mertn, raccueillit alors de la manière la plus ho-
norable et lui concéda la ville d'Aghmat à litre d'aliments. Iba-
el-Miltani y (îxa son séjour et, quelque temps après, il viola les
tombeaux des rois almobades et insulta leurs cadavres*. Le public,
ainsi que le sultan, furent très-scandalisés de cette profanation et
les tribus masmoudiennes en furent tellement indignées qu'elles
cherchèrent la mort de celui qui l'avait commise. Quand Aboa-
Tacoub -Youçof succéda h son père, Ibn-elMiliani fut chargé
par le nouveau souverain de percevoir Mmpèt chez les Masmonda
et, comme il remplit son devoir très-mal, les cheikhs masmou*
diens l'accusèrent auprès du sultan de s'être approprié les «som-
mes qu'il avait reçues. Obligé de rendre ses comptes, il fut con-
vaincu do péculat et chassé de la capitale après avoir subi un
emprisonnement. Il mourut en l'an 686 (1287).
Son neveu, Ahmcd^lbn-el-Millani, entra au service du sultan«
1 Voy. tome u, page 352 et tome ui, pag^ 315.
^ ¥oy. page 83 de ce volume.
t66 RtSTOlBB mis nBBÈBKS.
en qualité de secrétaire et dut au privilège de son oflSce ^horn«
ueur de se tenir à la porte du palais et de faire partie de la mai^
son royale. [Pendant le siège de Tiemcen], le sultan eut à scplain^
dre des cheikhs masmoudiens et transmit h sonftis, Ali, émir de
Maroc, Tordre d'emprisonner Aii-Ibn-Mohammed, chef des Rin-
tala. et Abd-el-Kertm-lbn-ETça, chef des Guedmtouai ainsi que
leurs fils et leurs serviteurs. Ahmed-Ibn-el-Miltani, avnnt eo
connaissance de celte circonstance, se hâta d'en profiter afin de
venger sou oncle. [\cv nous devons faire observer que] toos-les
écrits émanant du sultafi tenaient leur validité du paraphe im-
périal dont ils étaient revêtus et, comme les secrétaires du gou-
veniemenl avaient la réputation d'une probité h toute épreuve,
le sultan ne faisait aucune distinction entre eux ; aussi, au lieu
d'avoir un secrétaire particulier, chargé d'apposer le paraphe, il
leur laissa à tous la faculté de tracer cette marque sur les pièces
qu'ils venaient de transcrire. En Tan 697(4297-8), Ibn^el-MiDau!
rédigea au nom de son mattre, une lettre qui ordonnait h l'émir
de Maroc de faire mourir les cheikhs masmoudiens sur le cbamp,^
sans leur accorder un instant de répit* Ayant ensuite apposé le
paraphe ë cet éérit, il y ajouta le cachet et l'expédia par un cour*
rier* Aussitôt après, il s'eofuit à la Ville-Neuve [de Fez] , au grand
étonnement du public.
A la lecture de cette dépêche,, le fils du sultan fit tirer de prison
et envoya à la morlAn-lbo-Mohammed, Abd-el-Kertm-lbo-ETç»,
Ali, EYça et Mansour, tous les trois fib du précédent, et Abd-el-
Axtx, son neveu. Après cette exécution, il ordonna h son vizir de
partir en toute hftte et d'en rendre compte au sultan. Ce mqnar-
que éprouva une telle indignation en apprenant la nouvelle qu'il
tua le vizir à l'instant même et expéJia l'ordre démettre aux
arrêts Pémir son fils. Ibn^eUMiliani, sur lequel il voulut faire
tomber tout le poids de sa colère, avait déjà eu la précaution de
disparaître et de chercher un asile dans Tiemcen. Après le siège
de cette ville, il quitta ses protecteurs, les descendants de Yagh-
moracen, et alla mourir en Espngne.
Depuis cetle époque, les sultans mérinides n'accordent qu'à
iMiseul individu la faculté de parapher leurs manJats, cl ils choi-
DYNASTIE HÉ«I1IIDK. — ABOU-YACOCr-TOCÇOF. Vdl
sisseni pour cet office quelque vieux serviteur dont ils cootiais-
sent la fidélité. Âbon-Allah-lbo-Abi-Medyen, ministre d'état et
ami intime du sultan, fut le premier qui exerça ces fonctions im -
portantes. Jusqu'à ce jour, l'emploi d'écrivain du paraphe con-
tinue à former une charge à part.
SBANDBUa ET CBCTB DBS BOCASA, FAIIILLB JUIVE.
Dans sa jeunesse, le sultan Abou-Yacoub se livrait au plaisir
avec passion, mais à Tinsu de son père, prince très-religieux et
de mœurs fort austères. Il buvait du vin et faisait avec ses com-
pagnons des parties de débauclie Selon l'usage des grands per--
sonnages, il avait pour intendant un de ces juifs modhêds*
qui habitent la ville de Fez. Cet- homme , qui s^appelatt
Khalifa-lbn-Bocasa, culli%a la faveur de son mattre en lui ren-
dant des services de loute nature et en fabriquant du vin pouc.
son Qsage. Devenu le confident du prince,, il finit par ôtre en
grand crédit atiprès de lui. Abou-Youçof étant monté sur le
irâne, continua h boire en secret avec ses intimes, et il. permit 1
Khaltfa d'assister à ces réunions en qualité d'intendant du palais.
Dès lors, la pnissance de ce juif n'eut plus de bornes : il com*
naBdail en mattre aux grands digniiairea de l'empire etieor im-
posait d*une manière extraordinaire ; son influence semblait ae-
crottreavec l'augmentation de l'empire.
Je tiens de mon ancien professeur , El-Abbeli» les renseigne-
ments suivants : Khaltfa avait un frère nommé Ibrahim et un
cousin appelé Rhalifa-t-es-Saghtr {le petit). Il s'était allié aux
Benio's-Sibli^ famille dont le chef, Mouça, lui servait de lieutenant*
* Le mot moâhedin , pluriel de moàheà, sert à désigner les joifs et
chrétiens sujets d'une puissance musulmane : ils sont ainsi nommés
parce que leurs ancêtres avaient fait un traité [àhà) avec les vain-
queurs afin de s'assurer la possession de leurs biens et l'exercice de
leur relgiou.
I6B mSTOlKK PBS «BUrtftB».
Beveno eaixk des égftremoDta de Ja jeunesse, le suUan remarqoa
avec inquiétude que ces gens étaient couriisés par les chefs mé*
rioidfSf par les vizirs, les chértfs et les docteurs de la loi masul*
maoe; aussi forma-t-il la résolution de se débarrasser d*euxà la
première occasion. Son ami intime, Abd-AIIah-lbn-Al>î«Medyen,
sut deviner sa pensée et, après lui avoir dit beaucoup de mal de
ces juifs, il lui indiqua un prétexte pour les frapper tous. Dans
le mois de Ghâban 701 (avril 4302), le sultan les fit arrêter pen-
dant qu'ils étaient au camp, sous les murs de Tlcmcen, et, après
avoir mis à la question et mutilé Khalifa Tainé , Ibrahim, frère
de Kbaltfa, MouçaIbn<-es-9ibti et ses frères, il les fit mettre h
mort. Le même sort enveloppa leurs familles, leurs gens et leurs
parents; le seul qui en échappa fut KhalIfa-t-es-Saghir dont[l«
jeunesse et] la position n'avaient inspiré que du mépris. Nottft
aurons, plus tard, l'occasion de raconter comment celui-ci mou-
mt d'une mort violente. Par ces exécutions, I*empire fut délivré
d'une tache qui le souillait et d'une domination qui Tavait
avilir
lORT DU SVLTAIf ABOU^-TACOUB-'YOOÇOFHVN-TACOUir.
Abou-Yacoub avait parmi ses domestiques un eunuque nègMy
nommé Séada, qui était entré au servicedu palais k l'époque oife
son ancien maître, Ibn-et-MiUani, fut envoyé dans les province»
marocaines comme perceveiîr des impAts. C'était un éiro aussi
SUipide qu'ignorant. Le sultan souffrait la présence des eulku^
ques dans l'intérieur de sa famille et permettait même à ses fem^
mes de rester sans voile quand c^s gens-là se trouvaient dans la
chambre. Après l'affaire de son affranchi, El-Ezz, auquel il ôta
la vie parce qu'il l'avait soupçonné d'une intrigue avec une des
dames du harem ^ il se méfia de presque tous ses serviteurs et fit
emprisonner plusieurs de ses eunuques, ainsi que leur chef,
Anber-eUKebtr. Tous les autres eurent l'ordre do ne plus pa-
raitre devant le sultan sans permission. Alors ce misérable
DYHASTU StllKlM. — ABOI>aABIT. < 69
Séada, eut une înspiralion diabolique el résolut d'assassiner son
BiatUre. S'éUot rendu è la chambra du palais où le prince se
tenail ordinairement, il obtint Vantorisalion d'y entrer et le
trouva ooocbé sur le dos^ dans son lit, pour attendre que sa
barbe eut absorbé la teinture du Aanna qu*il avait l'habitude d'y
appliquer. Se jetant aussitôt sur lui » il le frappa plusieurs fois
avec un poignard et lui coupa les intestins. Après ce forfait it
prit la fuite^ mais, le soir même, il fut arrêté k Teçala par les
gens qu'on envoya à sa poursuite. On le ramena an palais où il
fut mis h mort par les nègres et les autres domestiques. Le suU
tan ne survécut à ses blessures que quelques heures et il mourut
dans la soirée du mercredi, 7 Dou-'I-Gâda 706 (43 mai 4307).
On l'enterra dans cette localité, mais, lorsque la confusion eau*
sée par sa mort se fut calmée, on transporta le corps à Ghala
pour le déposer dans le cimetière de la famille royale.
ABOU-TRàBET HONTB 80B LB TbAhB BT PAIT MOUBIB LB8 PBIRCBS
DU SANG.
Nous HYons mentionné qu'en Tan 698 (1298-9) , l*émir Abou-
Amer, fils du sultan Abou-Yacoub et son successeur désigné,
mourut en exil chez les Beni-Satd, peuple ghomarien établi dans
leRtP. Il laissa deuB fils, Amer [surnommé Abou-Thabet] eiSo*
leimao [surnommé Âbou-'r-Rebià]. Ces jeunes princes furent éle*
vés sous les yeux de leur aïeul, qui les aima d'une vive affection
à cause de leur père, il avait toujours regretté l'absence de son
fils chéri et ressenti pour lui une extrême tendresse ; aussi, ne
manqua-t-il pas d'accorder à ces enfants la première place dans
son cœur.
Aussitôt après la mort du sultan, les chefs des Béni -Ourtadjen,
oncles maternels d'Abou-Thabet-Amcr, allèrent trouver cet émir
' Voy. ci- devant, page 137.
479 mSTOlEB DBS BBRBiKIS.
qui, par le courage el Tintrépidité, était l'aigle de la* famille, et
lui prêtèrent le serment de fidélité en )e reconnaissant pour sou-
verain des Mérinides. L'émir Aboo-Yahya, fils de l'avant-dernier
sultan, Abou-Youçof-Yacoub, et [grand-]oncle d'Âbou-Tbabet,
entra par hasard dans Tendroil où se tenait cette réunion et
dut céder aux exigences de ces chefs el présenter au jeune
prince Thommage de son obéissance. S'il avait eu ses par*
tisans autour de lui, il aurait été plue près du trône que tout
autre ; mais, se voyant alors sans appui, il eut à dissimuler se»
véritables sentiments et se laissa mener par les O^irtadjen jus^
qu'à leur promettre sa coopération.
D'un autre côté, les gens de la maison royale et les vizirs qui*
se trouvèrent dans la Ville-Neuve [de la Mansoura] se hÀtèrent
d'y proclamer la souveraineté de l'émir Âbou-Salem, fils du feu
sultan : démarche qui faillit rompre l'unité de l'empire mérinide
en mettant la division dans la nation.
Après son inac^uralion improvisée, Témir Abou*Thabet en-
voya un agent dans Tlemcen afin de traiter avec Abou-Ztan el
Abou-Hammou, fils d'Othman-Ibn-Yaghmoracen, et, par suite
de cette négociation, il s'engagea, vous Ta foi du serment, h lever
le siège de Tlemcen pourvu que ces émirs lui fournissent un équi •
page royal et lui accordassent asile et protection dans le cas où
sa tentative viendraient à manquer : Abou-Hammou se pré--
senta en personne pour ratifier le traité.
La grande majorité des Beni-Mer)n et de leurs chefs se rallier
autour d'Abou-Thabet, de sorte qu'Abou-Salem resta dans la
Tille« Neuve [de la Mansoura] , sans autres partisans que les in-
times du feu sultan, les visirs, les domestiques du palais et les
divers corps de milice. D'après les conseils de ses amis, il sortit
pour attaquer son neveu qui s'était placé en observation sur la
montagne qui domine la ville. Il avait déjà mis son armée en
ordre de bataille, quand il s'arrêta tout éperdu, sans o.^er se
porter en avant, et, ayant alors promis h ses troupes de les me-
ner au combat lé lendemain, il rentra au palais. Ses partisans,
voyant qu'il n'y avait rien a espérer de lui , commencèrent à
s'évader les uns après les autres, on se dirigeant vers le camp
DTNASTIB MÊRINIDB. ABOU-TBABBT. 471
d'Âbou-Thabet et, quand le reste de ses gens s'dperçut qu'il allait
être bloqué dans ta ville , ils passèrent en masse du côté de son
adversaire.
Les divers corps de l'armée et les contingents des tribus s'étant
tous ralliés de cette manière autour d'Abou-Thabet, marchèrent
contre la Ville-Neuve* , siège de l'empire, résidence du [feu] sul-
tan, enceinte qui renfermait ses palais et terme doses entrepri-
ses. Il faisait déjà tard quand ces troupes arrivèrent devant la
place. Yakhlo(-lbn-Amran-el-Foudoudt sortit alors au-devant
d'Abou-Thabet, mats, au moment où il mit pied h terre, il fut
tué à coups de lance sous les yeux de ce prince et par l'ordre de
l'émir Abou-Yahya. Ce fut seulement dans le mois de Ghâban
706 (fév.-mars 4307), que le sultan Abou-Tacoub l'avait élevé
an rang de vizir. Abou-Salem s'enfuit alors de la Mansoura avec
quelques-uns de ses parents, et prit la route du Maghreb. La
petite bande qui l'accompagna se composait des Aulad-Rahhou-
el-Abbaci-lbn-Abd-Atlah*Ihn-Abd-eUHack, d'ÉYçii et d'Ali, fils
de Bahhou, et de Djemal-ed-Dtn-lbn-Mouça, leur neveu. Les
fuyards étaient déjh parvenus à Nedroma quand ils furentatteints
par une troupe de cavalerie qu'Abou Thabet avait lancée à leur
poursuite. D'après les instruotions qu'ils avaient reçues an mo-
ment de ievr départ, ces soldats tnèreot Abou-Salem et Djeonal-'
ed-Dtn, sans loucher aux antres prisonniers.
Le sultan Abon-Tbabet allait mettre le feu à la porte de la
YiUe-Nènve, afin d'y pénétrer de vive force, quand Abd-Allah-
Ibn-Abi-Medyen, secrétaire-d'état et intendant du palais, se mon-
tra du haut de la muraille et lui annonça qu'Abou-Salem ayant
pris la fuite, les habitants désiraient faire leur soumission. Il le
pria, en même temps, de suspendre les hostilités et de remettre
au lendemain son entrée dans la ville : « car, disait-il, si l'on
D admet les troupes de nuit, elles pourront saccager nos maisonis
> et maltraiter le peuple, d
L'émir Abou-Yabya profita de ce moment pour satisfaire la
' C'esl-à-Jire, la Maoscara de Ttcmcen.
473 BISTOIRS M8 BSRBÈaBS.
haine qu'il portait depuis loagtemps k Abou-'UHaddjadj*lbo>*
ChékHola : par son ordre, Ibn-Abi-Medyen fit arrêter ce chef :
puis, sur un second ordre, il envoya la lâle du prisonnier à cet
homme vindicatif.
Pendant toute la nuit; le sultan resta à cheval et fit entretenir
un grand nombre de feux afin de dissiper les ténèbres. Au point
du jour, il prit possession du palais et présida i Tenterrement di»
feu sultan. Voyant alors avec inquiétude la haute position
d'Abou-Yahya, prince élevé dans les habitudes d» commaodd-^
ment, il soumit ses craintes à Tappréciation d^un conseil com-
posé d'Abd-el-Hack-Ibn-Othman, du vizir Ibrahtm-lbn-Abd-el-
Djel!l-el-Oungaçni, du vizir Ibrabtm-Ibn-Eïça-el-lrntani et de
quelques autres grands officiers de l'empire. Abd* eUHack était
petit-fils de Pémir Abou-Moarref-Mohamroed-Ibn-Abd-el*Hack.
et chef reconnu de toutes les branches collatérales de la famille
royale. Cette commission pensa unanimement qu^il fallait 6ter U
vie à Témir Abou-Yahya, et cela avec d'autanD plus de raison
qu'on lui avait attribué certains propos qui décelaient l'inten-*
tion de former un parti et de guetter Voccasion afin de renversev
le sultan.
Le surlendemain du jour où le peuple prêta au nouveau sultaU'
le serment do fidélité, Abou-Yahya monta à eheval et se rendili
au palais. Abou-Thabetle prit parla main et l'emmena dans Tap-
partemeni des femmss afin qu'il pût leur offrir ses compUmeata
de condoléance sur la mort du sultan ; ensuite il le conduisit danl^
Tantichambreoù se tenaient les courtisans et le laissa avec eux.
Quelques instants après, il rentra et, trouvant qu'Abd-el-Back«
Ibn Olhman avait suivi ses instructions ''et lié Abou-Yahya bras
et jambes, il donna Tordre de tomber sur le prisonnier et de lui
ôter la vie. Le vizir Eïça-lho-Mouça-el-Poudoudi fut tué ea
même temps que son mattre.
Lebruitde cette exécution répandit la terreur parmi les autres
membres de la famille royab : Yaïoh-Ibn-Yacoub, fràre do [feu]
sultan, prit la fuite, ainsi qu'un fils du même [monarque] nommé
Othman et appelé Ibn-Gadib, du nom de sa mère. Leur exemple
fut imité par Masoud, fils d'Abou-Malek et parEUAbbas, fils de
1>T1fAftTn KtaiNlDS. — ABOU-TBABBT. 473
BaUKHl-lbn-Al>d-AIUh*lbD-Abd-«l-Hack. Us se réfugièrent Ions
tlans le pays des Ghomara, auprès d'Othmao-lbn-Abi-^WOlft.
Débarrassé de la présence de ces princes, le sultan Abou-
Thabet ramena facilemeni toute la nation mérinide sous son au-
iorité et n^eut plus d^adversaire ë redouter. Mattre du pouvoir
suprême, il remplit ses engagements envers les fils d'Othman-
Ibn-Yaghmoracen et leur rendit tontes les villes du Maghreb
central, ainsi que les pays des Toudjîn et des Magbraoua.
La cause de son départ précipité pour le Maghreb fut la révolta
d'0thman*lbn-Abi-1-0lâ, ce petit^fiU d'Abd-Allah-Ibn Abd-el-
Hackqui, peu de temps avant la mort du sultan Abou-Yacoub,
s'était fait proclamer souverain à Ceuta et qui venait d'occuper
Casr-Ketama après s'être jeté dans le paj's des Ghomara.
Au moment de quitter la Ville-Neuve [de la Mansoura], Abou-
Thabet chargea son vizir, Ibrahim-lbn-Abd-el-DjelIlde présider
à Tevacuatioa de cette place qui renfermait une nombreuse po-
pulation, quantité de magasins [remplis d'approvisionnements]
et un vaste matériel de guerre. Ce ministre exécuta parfaite-
ment la tâche confiée h ses soins : il en fit partir les habitants sue-
cessivement, classe par' classe, et, en se retirant lui>méme« il
laissa la place tout-à-fait vide. Après la rentrée des Hérinides
«D Maghreb, les Beni-Abd-el-Ouad profitèrent des intervalles de
guerre avec cette nation pour détruire la ville et en renverser les
monuments.
El*Hacen-lba-Amer*IbQ-Abd-Allah-Atadjoub, membre de la
famille royale , reçut du sultan Tordre de prendre les de-
vants avec l'armée et de marcher contre Otbman-Ibn-Abî-'U
Olà. Le 6ultaD lui-mâme resta dans la Ville-Neuvo [de la Man^
aoura] pour y attendre l'arrivée des troupes qui avaient occupé
les forteresses orientales du Maghreb central et qui devaient re*
mettre ces places aox Abd-el-ouadites. Ce fut dans un des pre-
miers jours du mois Dou-'l-Hiddja* (4 juin 1307), qu'il se mit en
I Le texte arsbe porte Dou-'l-Cdda ; nous avons préféré la date
donnée par le Carias.
47i mSTÛIRI DBS BERBÈRES.
route ei, au commeDcemeDt de Tan 707 (juiil. 4307), qu'il fit
son entrée h Fez.
TOUÇOr-lBn-ABI-BÏAD S^BJIPARE DE MAROC. IL EST VAINCU
PAR LE SULTAN.
Avant de quitter le camp à Tlemcen pour rentrer en Maghreb,
le sultan plaça ses troupes sous les ordres de son parent, El*
Hacen-Ibn-Amer, petit- fils d^Abd-Allah-Atadjoub, fils du sultan
Abou-Youçof, et les envoya contre Othman-Ibn-Abi-U-Ol&. Son
cousin, Youçof^ fils de Mohammed-lbn Abi-Eîad-Ibn-Abd-el-
Hack, à qui il donna le commandement de Maroc et des provin-
ces qui en dépendent, partit aussi pour sa destination avec Por*
dre de veiller à la sûreté et au bien-être de ces contrées. Arrivé
dans Maroc, Ibn-Abi-EYad conçut.la pensée d'y établir son indé-
pendanceet, dans le mois deDjomada 707 (nov.-déc. 4307),
quand il eut levé un nombreux corps de fantassins et de cavaliers,
il répudia Tautorilé du sultan, prit les insignes de la royauté et
fit mourir le gouverneur de la ville h coups de fouet. Le sultan
apprit cette nouvelle après son arrivée à Fei et, sur le champ, il
jÂaça un détachement de cinq raille hommes sous les ordres de
Tacoub-Ibn-Asoag et du vizir Youçoaf-lbn-EYça-Ibn-Saoud-el-
Djochemi et les envoya contre les insurgés.
Ibn-Abi-EYad ne terda pas de marcher au devant du vizir,
et à traverser TOmm-Rebiâ, mais à la suite d^une rencontre avee
les troupes impériales, il prit la fuite jusqu'à la ville d'Aghmat
d'où il passa dans les montagnes des Heskoura. Mouça-lbn-Abi-
8atd-es-Sobeihi alla le rejoindre après s'être laissé descendre par
une corde du haut de la muraille d'Aghmat. Le vizir Youçof entra
dans Maroc d'où il repartit afin d'atteindre les rebelles, et, leur
1 Ci-devant, page 163, il est question de ce personnage; voyez aussi
tome m, page 493.
OTNASTll IIÉBINIDB. ABOU-THABBT. 475
%yBuX tué beaucoup de monde dans une bataille, il força leur chef
h se réfugier [encore] chez les Heskoura.
Vers le milieu du mois de Redjeb 707 (janvier 4308), le sultan
Abou-Thabet arriva h Maroc et punit de mort tous les Auréba
qui avaient pris part ë la dernière insurrection. Makhlouf-Ibn-
Hennou, chef des Heskoura', n*osant pas protéger Ibn-Abi-EYad
contre le sultan, le fit arrêter avec huit autres réfugiés qui Tavaient
aidé dans cette révolte, et les envoya tous à Maroc. Ces malheu-
reux furent mis à mort ensemble, après avoir subi le supplice du
fouet. La tête d'Ibn-Abi-Eïad fut envoyée à Fez et plantée sur
le mur de la ville. A Maroc et à Aghmat on exécuta une foule de
personnes qui avait participé k Pinsurreclion.
Pendant ces événements, le sultan ordonna l'arrestation de
son^izir, Ibrahtm*Ibn-Abd-el Djelfl, qui lui avait donné sujet
de mécontentement. Il fit aussi emprisonner dix individus de la
famille Doultn, branche des Beni-Oungacen, et, après avoir été
la vie à El-Hacen*lbn-Doultn« il gracia les autres.
Yersle milieu du mois de Ch&ban (février), il se remit en cam-
pagne afin de rétablir Tordre dans la province de Maroc et de ré-
duire le chef des Sekctoua à l'obéissance. Ayant accepté de ce
personnage un semblant de soumission et un riche cadeau, il l'ad-
mit au service de Tempire. Son général Yacoub-lbn-Aanag mar-
cha ensuite eontre tes Zegna et les poursuivit è travers la pro-
TÎDce du Sons jusqu'au Désert, où il lea perdit de vue. Quand
cette colonne fut de retour, Abou-Thabet la ramena à Maroc avec
le reste de l'armée.
Rentré dans cette ville vers le commencement du mois de Ba-
madan(fin de février 4308), il y fit mourir plusieurs cheikhs des
Beni-Oura, et ensuite il partit pour Fez en prenant la route qui
traverse le pays des Sanhadja. Arrivé dans la province de
Temsna, Il appela sous ses drapeaux les Arabes- Djochem, popu-
lation composée do plusieurs tribus, telles que lesKholt, les Sof-
yan, les Beni-Djaber et les^Acem. Quand il les eut emmenés jus-*
' Voy. t. u, p. 1*9.
476 OISTOllK bBS BBMÈRBS.
qu'à la ville d'Anfa, il (ii arrêter une soixanlaiDd de leurs oheikhs
dont le tiers fut condamné à la peine de mort comme coupables
d'actes de brigandage. Vers la fin de Ramadan (mars), il arriva
h Ribat-el-Feth, où il extermina une foule d'Arabes nomades
dont il avait reconnu les intentions hostiles. Vers le milieu du
mois de Choual (commencement d'avril), il marcha contre les
&îab établis dans les provinces d'Azgfaar et d'El-Hebet, et,
comme il leur portait une vieille rancune, il en massacra une
partie et enmena le reste en esclavage.
Rentrée Fez an milieu du mois de Dou*1-Càda (mai), il ap-
prit que son général, Abd-el-Hack-Ibn-Olhman, avait essuyé
une défaite [en combattant Ibn-Abi-M-Olâ], que la milice chré-
tienne avait été taillée en pièces et qu'Abd-eUOuahed*el-Fou*
doudi, un des grands dignitaires de l'empire, y avait perdu la
vie. Sachant que l'influence exercée par Ibn-Abi-'l-Olà dans le
pays des Ghomara devait prendre un grand accroissement, il se
prépara à marcher contre lui.
LB SULTàH MBUBT A TANGER APRÈS AVOIR CHASSÉ IBN-ABI-'l-OLA
DB LA PROVllUIE d'eL*HBBET.
En l'an 705 (1305-6), le roï^ Abou-Satd-Feredj, fils.d'Ismail-
Ibn-Youçof-lbn-Nacer, s'empara de Geuta et y fit proclamer la
souveraineté de son cousin Mohammed-eUMakhIoué[-Ibn-eU
Ahmer], sultan de Grenade et fils de Mohammed-el-Fakîh, fils de
Mohammed -es-Cheikh, fils de Youçof, fils deNacer. Il y avait
amené le commandant du corps des guerriers delà foi qui tenait
garnison à Malaga. Cet ofiicier appartenait à la famille des Béni-
Merîn et se nommai t Othman-Ibn-Abi-'UOlâ-Idrislbn-Abd- Allah-
Ibn-Abd-el-Hack. Gomme il pouvait prétendre, avec quelqu'ap-
parence de droit, au trône de Maghreb, Abou-Satd s'en fit accom-
pagner avec Tintenlion de jeter, par son moyen, la désunion par-
miles Mérinides. Il espérait leur créer ainsi tant d'embarras qu'il
leur serait impossible de marcher contre Ceuia, ville dont le suU
BTlfAêT» lllilHIDE. — AIOV-THABET. 477
taD Ibn-d-Ahmer et le peuple aodaloasieû saohaitaient la pos^
Mssioo.
Olhmao*Ibn-Abî-1-OlA compla sar Tappui des Ândalousieua
pour s'emparer du trône de Maghreb ; aussi, quaud il débarqua
à Geuta, il laissa le commaodemeRt des guerriers de la foi ^ son
«ousin, Oœar-lba-Rahhoulba-Abd- Allah, et alla se montrer
lout-à-coup dans le pays des Ghomara* Ayant rallié à sa cause
une partie de ce peuple, il occupa Aloudan, uo des châteaux les
plus forts de cette région, et fit jurer à ses nouveaux partisans
qu'ils le soutiendraient jusqu'à la mort. De là il marcha sur
EU Araïch dont il s'empara, ainsi que d'Asfia.
Aboa-Yacoub, le suUaa qui régnait alors^ n'attacha que peu
d'importance à cette insurrection, bien que son fils, Abou-Salem;,
qu'il avait envoyé de ce côté, eût été obligé de lever le siège de
Geuta. Son frère Taïeh-Ibn-Tacoub, auquel il donna alors le
commandement d'un <x>rps de troupes, alla s'établir dans Tanger;
puis, ayant été averti qu'Othman-Ibn-Abi«'l-OlA s'avançait cour
ire loi, il évacua la place et prit la route d'El-Casr. Les cavaliers,
fantassins et archersqui formaient la garnison de celte forteresse
49e joignirent à lui ei marchèrent contre Teanemi qui appro-
chait toujours, mais, sur le bord de la rivière Oura, ils essuyé*
rent aae défiaile qui coûta la vie à Omar-Ibn-Tactn et les obligea
À rentrer dans EUCasr. Othman vint aussitôt les y assiéger et le
lendemain, il y pénétra en vainqueur.
Peu de temps après ces événements eurent lieu la mort du sul»
tan Abou-Yacoub et la fuîte de YaYcb-lbn-Yaooub qui, s'étant
méfié des dispositions d' Abou Thabet à son égiird, se réfugia au^
|>rès d'Othman. Comme la révolte d'Ibn-Abi-Eïad attirait ensuite
rattaniion d'Abou-^Thabet vers la province de Maroc, Othman-
Ibn-Abi-'l-Oift continua, pendant asseï longtemps, à se maintenir
dans le nord du Maghreb. Quand le sultan remplaça son oncle
YaYch par Abd-el-Hack-lbn-Othman-lbn-Mohammed auquel il
donna l'ordre d'aller combattre Ibn-Abi-'l-OU» celui-ci marcha
à la rencontre du nouveau général et, vers le milieu de Doti-1-
Hiddja707 ^uin 1308), il lui livra baUille, tailla en pièces la
milice chrétienne et mit en déroute le reste de l'armée. Le vto^
T. rv. 1S
478 ftMTOisB Dit nmBtfttt.
yitWi Abd-^l-Ooft}ie4-^*-Foudoii(iî, qui jomssâU d*Qii grftfid
crédit auprès du sultan, y perdit la vie. Otbman mit alors ie
ftiége devant Gasr-Kétama * et floamit loate la région qvî en dé-
l^end.
Ces événement ve&aient de «'accomplir quand le anUan ren-
tra de son e&péditîon à Maroc, «près avoircomplèlement étouEé
l'esprit de révolte qui s^était propagé dans cette partie de Pom-
pire. Il prit alors la résolution de pénétf er dans le pays desGho*
maraafin de laenverser le parti qui , en soutenant Ibn-Abi-*l^là,
portait déjà une grave atteinte à Piniégrité de l'empire ; puii,
après avoir expulsé du Maghreb cet aveotorier, il eomptatt enle*
ver Geuta au sultan de Greoade. il désirait beaucoup reprendre
cetta place, sadiaot bien que si elle restait au pouvoir des mu^
aulmans espagnols, elle servirait de raareitiepied k tout prince d^
la famille mériaide qm, s*étant d*abord rendu dans le pays
d'outre* mer, afin ^l^assisCer ^ la guerre sainte, esaayeraît
ensuite de monter sur le tràne du Ifaghneb. Vers le miKeii
lie Dou« 'l-Biddja 707 (juin 4308), il qattta Fet et, pai^
venu h Gasr-Retama, ît y retfla trois jours afin de laisser arriver
9es troupes et de les passer en revue. B' étant abrs mis à la
poarsuited'Ibn^Abi-l^là q«ri avait reculé h son approche, il
•'avança jusqu'au château d*Âtottda«, l^emperta d'a»sa«l ^ y
tua près de quatre cents hommes. La ville d'El-Demiia éprouva
le même sort ; une partie de 9^ l^rbitaots fut maBsaerée «a le
rerte tratné en esclavage, pour les punir d'^toir reeoomi la <80U*
«veraineté du prétendant et de ('aveir aidék surprendre et b piMer
£V-Casr. Au commencement de l'en 706 (juin 1308) le sultan fil
-son entrée h Tanger, et son ed^rsaires^enfermadeM Geuta avep
tons M» alMs el aes parfteaes. Les troupes mérifuides dévasiA-*
MIA tas entiiroiie de Ceiita, ^ l'on eonslruistt , par l'eFrtfre
« «Cast-Ketania, appelé aoMK CMmî^ étant déSàiomMam pourrofr
^ftMi»*abi<»VOkA, il faut supposer «fae leelle priaoaaiiiiait été éraoeée p*
4e wiietufiif .
4a wilt«n, I9 vUlo <l« Tétouao, poqr leur servir i« logement et
penr mieux bioqner cette place forte.
Feodsnt qu'Abou.YahyA-lbv'-AlM-'^-Seiier, juriscopsaita en
«bflf de U «our., se r«aclait k Ceule afin d'en négocier la remise
au gouvernement mérioide, Je suIUii tomba malade «t, le 8 d«
mws4« Sa/er 708 (28 juillet «308), il rendit le deiwer aoopir
spnès pne indisposition de quelques jours seulement. On l'en-
teri» en dehors de la villede Tanger, mais, plus tard, «a irins-
porta le corp? à Cbala pour le déposer dans lecimetière royal.
atmi PC SOLMV ASOD-'«-«au.
Anssitdt que le snhim Abou-Tbabet fui mort, son oncle AU,
fils du sultan Abea-Yacoub et appelé Ibn-Bextga, du nom de sa
aèr«, essaya de monter sur le trâne, mais les chefs mérinidcM
qui avaient qoelqu'aotorité allèrent trouver Ahon>'r.RebiA {80-
leiman] , frère du monarque décédé, et lui pistèrent le sermewt
de fidélité. Par l'ordre du bouvwu sulton Ibn-Rezîga fut enfermé
dans la prison de Tanger où il mourut, en J3^omada740 (oct.^
»ov. i3i0). Abw-'r-fiebiâ distribua alors des gralifications h
ses partisans et prit la route de Fes. Othman-Ibn-Abi-'1-0|A,
qui tenait sous la main une armée nombreuse, se mit k la pour-
suite des Mérinides et tâcha de les surprendre dans une attaque
de nuit. Le sultan («taverti de ee projet et tint ses troupes sous
les armes jusqu'au point du jour ; alors il se porta vers le chAteaa
d'Alloudan et, dans l'après-midi, il rencontra l'ennemi, lui tua
iMMCMpdemoodeetle mit«n ploine ^érwite.lefilsd'Othiban
munies Mobreia prisomiiers qui restèrent au fo«To(jr des
winqueurs. Ce fut là véritablement «ne victoire sans égale.
Afcwi-TabyMbn-Abi-'s.^aber, l'agent que le feugnltan avait
«•MpyéenSspagMpnur négocier «n traité «vee le aouveraîa de
«renade, pensait parfaititment dans sa missim, et tbn-el-Ahmer
lu{-tn«me se rendit è Algéciras avea l'intenti«»de taire unevisitj»
MMsItaB du «àgliNl^. Arrivé dans cette viHe, H appritUmort
180 HlSTOlftB DIS BBRBfiRBI.
d'Abou-^Thabet et renonça au projet de traverser le Détroit, maia
il chargea Ibn-Âbi-'s-Saber de rapporter en Afrique le traité
d'amilié qu'il venait de signer. Othman-lbn-Abi-'l-Olft quitta le
Maghreb avec tous les autres membres de la famille royale qui
avaient embrassé son parti, et se rendit è Grenade.
Le sultan Âbon«*r-Bebià reprit alors la route de Fei où il ar*
riva vers la fin dn mois de Rebiâ [premier] 708 (septembre4 308),
et, quand il eut rétabli l'ordre dans son royaume, il conclut un
traité de paii avec Houça, fils d'Olhman-lbn-Yaghmoracea et
seigneur de Tlemcen. Depuis lors, il se tint tranquille dans sa ca*
pitale.
Le règne de ce prince fut une époque de bonheur, de paix et
de prospérité pour toutl^empire. L'on acheta les immeubles avec
tant d'empressement que le prix en augmenta prodigieusement}
de sorte qu'il Fez, beaucoup de maisons se vendirent chacune
mille dinars d'or monayé [dix mille francs]. Tout le monde se
mit à bfttir de grands logements, ë élever des palais en pierre et
en marbre et à les orner de plaques de faïence et d'arabesques»
On rechercha avec passion les habits de soie, les beaux che-
vaux, la bonne chère et les parures d'or et d'argent; partout a»
répandirent le bien-être, l'aisance et le luxe. Pendant ce temps,
le sultan resta dans son palais et, jusqu'à sa mort, il s'abandonna
au repos.
■OIT ft'ABD*ALUB-IBll-ÂlI*MIDtBII.
Aboli -[Medyeii-]Choalb<IbQ«Makhlouf, da la famille des Bam-
Abi-Othman, peuplade ketanienne qui habitait aux environs d'Bl*
Casr-Hl.Kebtr, s'était adonné aux pratiquas de la haute dévotion
et avait acquis la réputation d'un saint. A l'époque où les Béni-
Merjn . vinrent occuper les plaines dn Maghreb [Aboo-Medyan*
Choalb] prit pour compagnons, les gens yartneux de oe peuple et
[repoussa] les hommes vicieux de sa propre tribu. Les fik d'Abd-
el-Hack. ayant voûta s'entourer de personnages d'une piété ^emr
VTRASTM ttftlIRlOK. — AIOU-'R-KCBIA. 484
plaire, choisireDl ChoaYb pour lear imam. YaooQb-Ibn*Abd*el-
Hack trouva tant d^agrëment dans la société de cet homme qu'il
lui voua une amilîé inaltérable. Dès lors, Abou^Medyen exerça
une grande influence ik la cour et parvint à une considération qui
s'étendit sur ses enfants, ses parents et ses serviteurs. Il avait
trois fils, Mobammed-eNHaddj , Abou-'l-Cacem et Abd-AlUU » le
sujet de cette notice. Us passèrent leur jeunesse à Casr*K6tama,
oà ils se virent toujours entourés des plus grands égards.
Après la mort du sultan Yacoub-Ibn-Abd-el-Hack, son fils
YouQof attacha ces jeunes gens à son service particulier et, jus-
qu'à la mort de leur père, événement qui eut lieu en 691
(4297^8), il ne cessa de les protéger et do leur donner de l'avau->
oement. Abd-Allah, celui qu'il favorisait le plus, atteignit à una
position magnifique, étant devenu le viiir et le confident du sul-
tan. Aux séances royales, il occupait la place d'honneur et, de
tous Itfs courtisans, il fut le seul qui eut le privilège de parapher
et valider les lettres et mandats émanés de son maître, il fut aui^at
la personne chargée d'examiner les comptes des percepteurs, de
punir les malversations des fonctionnaires publics et de viser
tous les ordres d'arrestation et de mise en liberté. Amiintimedu
souverain et dépositaire de ses pensées les plus secrètes, Abd«
Allah» Ibn-Abi-Med yen vit sa porte toujours assiégée par une
foule de nobles : les chefs mérinides, les princes de la famille
royale et les fils même du sultan, s*étant tous empressés aie trai*
ter en grandi seigneur et à briguer sa faveur. A son frère^ Mo-
hammed, il procura la. perception de l'impôt chez les Masmouda
de Maroc, et, à son autre frère, Abou-'l-€acem, il assura une vie
tranquille à Fez.
Arrivé au faite des grandeurs, Abd-Allah s'abandonna au re-
pos et aux plaisirs, ne s'occupent que de la table et de la toi-
lette , ne pensant qu'aux sommes d'argent que les fonctionnaires
publics lui faisaient passer à titre de cadeaux, et laissante sa
porte une foule de solliciteurs venus de toutes les parties de Tem-
pire. L^assassinat du sultan Abou-Yacoub--Youçof ne changea
rien è cet état de choses, bien que l'on prétendit que Séada [l'es-
clave dibn»]et*Mil)ani, avait commis ce crime h Pinstigatton
48t «iSTOttt ras BmftABS.
d^tt^Abi-Vedyeii. 8oos le ràgoe en 'sultan Abon-Tbabet, b (9-
vear donl il jouissait devint plus grande encore et Son influaaoe
surpassa celle de tons les autres conrlîsans. Abou-^'r-BeblAf frère
et saoeesseur d'Abott^Thabet,saivit, 0 Pégard de eet bosome, In
conduite de ses prédécesseurs.
. Go fut Ibn-Abi-lfedyen qui, en sa qualité d'oflBcier chargé dir
la promulgation dos décrets impériaux, atait ordonné le aop-
plice des Bent-Heeasa, contre lesquels, dit-on, il s'était eSbrcé
à indisposeirlesuÏÏan. Nous avons déjà mentioooé que Ton épar-
gna les jours de Rhalifa^t-es-Saghtr. Abou-'r-Rebià étant monté
sur le trône, employa Rhalifa au pelats, dans les services les plus
humbles ; ensuite, il l'admit au nombre de ses domestiques et
finit par l'attacher k sa personne. Ce Juif ne pensa plus alor»
qu'à perdre Abd-Allah-Ibn-Abi-Medyen. Il chercha d'abordé
faire craindre au sultan les mauvais desseins d'on lif>mme quir
t'était entouré d'une foule de gens capables de tout: il lui repré^
Senta et avec vérité, que le public en causait beaueoop ; puis, il
Idi fit entendre qu'lbn^Abi-Hedyen le soupçonnait d'une intrigue
avec sa fille et que son cceur en était ulcéré au point de vouloir
bouleverser l'empire. Le sultan s'était déjà aperçu des intellU
geaces que son ministre entretenait avec les principaux cbefe
mérinîdeset, so rappelant qu'il avait été un des agents les (dos
adîfs de l'autre branche de la famille royale, celle d*Aboa«-Voifr*
fof-Yacoub, il s'empressa de prendre des mesures contre la triH
bison dont il se croyait menacé.
Dans la matinée du jour oii Iba-Abi-^Medyen devait marie? sa
fille^ le sukan envoya chez lui le caM [commandant] de la milice
chrétienne pour l'inviter à se rendre au palais. Le malbeureviC
ministre partit sur le champ, sans tenir compte des avertisse-
ments qu'il avait re^us au sujet du danger qui te menaçait, el^
au moment où il traversait le ciroetiére d'Abott^Yahya**Ibn^l-
Arébi, il reçut dans le dos iln coup de javelot lanoé par le co^^ et
tomba prosterné dans la poussière. Le meurtrier lu? trancha la
télé à Pinslant même et alla la jeter aut pieds du sultan. Le vixir
Soleimàn-Ibn^Irstguen entra au même moment et, frappé de la
triste fin de son collègue, il laissa éclater une douleur profonde ;
dévoîlanl eoaaite aa sultan h perfidie du juif, il produisit ua
jcrit qttlbo*Abi-Hedyen l'avait de ch^rgS lui préseolcr et qui ren»
fermait la déclaration la plus soleooelle de sou innoceace. Be««
venu de son égarement, le sullaD s'aperçut quo Khaltfa avait
abusé de sa crédulité et, au milien des expressions du plus tif
repentir, il donna l'ordre do faire mourir le trallre sur le champ^
ainsi que tous, les juifs de la même famille que Ton avait fait en-
trer au service dtTpalats. Celte exécution servit de leçon aux an-*
trea intriguants de la mdme espèce.
IIS BABITANTS PB CBUTA S'ilfSCBGBNT CONTBB LES ARDALOOSIBRf
BT BEGOniUiSSBRT DB NOUYBAU L'AUTQRITt PU SULTAN.
OthinaiHiba*Abi-'l-OlA se réfugia dans Geuta après la défaite
de ses partisans, et, de ta, il passa en Espagne avee les princes
mérinidesqui avaient voulu suivre sa fortune, La sultan Aboi^
'r ftebiA se rendit alors & Fez où^ peu de temps après, il apprit
que les habitants de Ceuta fiupportaient avec impatience l'ooou^
patÂM grenadineot les actesd'oppressioo que les adiu'mstraleura
andalousieus exerçaient contre eux. Ayant eu la ecm&rmatipu dfi
cette nouvelle par les messages que ses partisans lui envoyaient
secrètement de la ville, il plaça son citent, TacheCli^Ibn-YaCoub*
eUOut^i* frère du vizir, à la tète d*unA armée nombreuse, com*
posée de troupes mérînidea et de milices, et lui donna Vordre
d'aller faire le siège de Ceuta. Aussitôt que cet officier fut venu
dresaer son camp sous les murs de la ville, les habitants, pleioa
de joie, poussèrentle cri de ralliement mérinide et obassèreut de
chez eux les troupes d'Ibn-el-Abroer et les fonctionnaires and^*
lousienS; tant civils que militaires. Le 10 Safer 709 (juil. 1309),
l'armée mérinide occupa la ville de Ceuta et Tachefin alla s'instaHer
dans la citadelle. La nouvelle de cette conquête fut portée au sul-
tan par un courrier extraordinaire * et causa partout une vive sa-
* Il faut lire (j.>|^ dans la t«xta arabe.
t84 BISTOIIV DIS nilBfetIf.
iisfaction. Pirrini les prisonniers faits par le général TachetTn se
tronvèrent Abon-Zékérïa-Yahya«Ibn-Meltla, commandanl de la
citadelle, Aboa-U-HaceD*Ibn*Ganiacha, chef de la marine, et
Omar-Ibn-RahhoV'lbn*Abd-Allah-Ibn-Abd-e)-Hack, prince de
la famille royale mérinide, et commandant de la garnison. Ce fut
du sultan de TAndaloasie qa'Ibn-Rahhoa tint sa nomination,
et il remplaçait son cousin, Othman*Ibn-Abi-'l-Oli qui était
rentré en Espagne pour faire la guerre sainte. Les cheikhs et les
membres do conseil municipal deCenta portèrent alors au sultan
les hommages de leurs concitoyens.
Le souverain andalousien fut très-contrarié de la perte de cette
ville et craignit que le sultan du Maghreb ne fût tenté de lui dé-
clarer la guerre. Vers la même époque, le roi chrétien leva le
siège d'Algéciras par suite d'un traité de paix , mais il ne s'en
éloigna qu'après avoir fait ans habitant» un mal affreux. Quel-
que temps auparavant, il avait assiégé et pris Djebel-el-Feth
(Gibraltar)^. Après cette conqoéte, on de ses généraux, nommé
Alfonch-Hozraa [A Iphonse Pérez de Guzman)* se mil h parcourir le
pays avec on corps de troupes, mais il fot attaqoé et mis en fuite
par Abou-Tahya-lbn-Abd-Allah-Ibn*Abi-'l*OIA , commandant
de la milice de Malaga.
La chote de Djebel-el«Feth donna de sérieuses fnqniétudes aux
musulmans, et Abou-*l-DjoYooch*Ibn-el*Abmer, sultan de l'An-
dalousie, se hAta d'envoyer des agents à la coor du sultan méri-
nide afin de négocier avec lui un traité d'alliance. Pour l'engager
à entreprendre la guerre contre les chrétiens, il se déclara prêt
h lui remettre les villes d'Algéciras et de Ronda avec les forts
qui en dépendent. Le sultan y donna son consentement et obtint
eu mariage la sœur du prince auquel il allait porter secours. En
* Le siège de Tarifa et la prise de Gibraltar par les armées do roi Don
Ferdinand lY eurent lieu en 1309.
* Dans le texte arabe il faut sans doute répéter un mot et lire
DTRASTll attlinDB . — abou-'r-ribu. 1 85
conséquence de ce fraité, il fit passer en Espagne une forte som-
me d'argent, plnsieurs chevaux de main et un corps de cavalerie
qu'il plaça sous les ordres d'0thman*Ibn-Eiça«e1-Irntani. L*at*
liance des deux monarques se maintint jusqu'à la mort du sul*
tan africain.
ABIKVL-BACK-raR-OTHBA!« BST PHOCLAlt SULTAN PAS LKS TiZIttS
n LtS CUIKHS HBRnCIBSS. — AB0D*'H-1BBIA IBURT APRftS AVOIR
VAIRCU LBS RBBELLBS.
Tant que dura la paix entre le Maghreb et l'Andalousie, le
BuUan de ce dernier pays entretint une correspondance suivie
avec la cour mérinide par l'envoi de lettres et d'ambassadeurs.
Un de ces agents diplomatiques fut tellement adonné à la débau-*
che qu'il se livrait publiquement aux excès les plus scandaleux,
passant son temps h boire du vin à la vue de tout le monde. Dans
le mois de Djomada premier 4709 (oct.*4 309), le sultan rem-»
plaça Abou-GhÀleb*eUMaghtli, cadi de Fez, par Abou-'l-Hacen-
es-Saghtr, mufti qui jouissait d'une certaine réputation dans la
ville. Le nouveau magistrat se posa d'abord en réformateur de
mœurs, mais, emporté par son zèle, il se laissa aller aux inspi*
rations de celte dévotion fanatique dont les pratiques nous sont
venues de l'étranger*. Aussi, en voulant faire une bonne œuvre,
il dépassait toujours les bornes admises et reconnues par les doc-
* On voit pnr ce passage que, même avant l'époqae où Ibn-Khaldoun
écrivait, on avait établi des confréries religieuses dans l'A Trique sep-
tenlrionale. Ces Institutions, nées en Orient, avaient d'abord pour bases
les pratiques d'une dévotion exallée au plus haut degré, mais elles ont
fiai par conduire leurs initiés au panthéisme, en les faisant traverser
les divers grades du sufisme. Eu Afrique, elles n'ont pas encore eu ce
résultat, mais le règlement d'une de ces associations, la confrérie de
Mohammed«beo-Abd-er-Rahman, fondée dans la dernière moitié du
dix-buHième siècle, décèle, en chaque ligne, les rêveries du sufisme.
On sait que cette doctrine a miné l'islamisme et qu'elle compte au
nombre de ses partisans les hommes les plus instruit», les plus éclai-
rés de la Turquie et de la Perse.
486 BX8T0IBS DIS UliftRSS.
teurs de toutes les grandes villes de l'îslamtSine..ÀyaDidooc cité
cet envoyé an tribunal el reçu des assesseor& la déclaration que
l'haleine de ^inculpé sentait le vin, il le fit châtier selon les prea»
criptions de la loi divine. L'ambassadeur, irrité par la douleur
et emporté par l'indignation , alla se présenter an vizir Rahhou-
Ibn-Yacoub-el-Outaoi et, Payant rencontré qui revenait en grand
cortège de ciiez le sultan, il se découvrit pour lai faire voiries
marques du fouet imprimées sur son dos, et il loi déobra que le
sultan de TÂndalousie, indignement offensé dans la personne de
son représentant, ne manquerait pas d*en tirer vengeance. Le
vizir, profondément affligé de ce fàckevi événenent, se mit en
colère et ordonna à ses gardes et à ses domestiques d'aller sai«-
sir le cadiy et de le Iratner par les pieds devant lui. Le cadi se
réfugia dans la grande mosquée et appela les bonn musulmans à
son secours. La canaille se jeta sur les gens du vizir, et une rîse
s'ensuivit qui faillit devenir très-grave. Ponr la calmer, le suU
ta» ae fit amener les gardes qui avalent essayé d'exécuter les
ordres du vizir et leur trancha la tête à tous, pour donner un
avertissement à leur mettre. Le vizir dissimula son ressentiment
el tint ttoe conférence secrète avec EUHacen4bn*Âli-lbn-Abr«'t«
Talac, grand obeikb des Beni-Âsker, tribu nomade, et Gonzala,
eai'd de la milice chrétienne^. Le premier de ces hommes était
tellement respecté que son avis l'emportait toojours dans le con-
seil d'état, et le second avait Tarmée et sa propre troupe sous la
main. S'adressanl à ces deux amis qui, en effet, lui étaient plus
déTooés qu'à leur sultan, il leur proposa d'enlever la souverai-
neté h Abou-'r-Rebiâ et de proclamer sultan Abd-el-Hack-lbn-
Othmao, pctil-fils de Mohamraed-Ibn-Abd-el-Hack , chef de tou-
tes les branches collatérales de la famille royale et le plus brave
cavalier d'entre les princes du sang. Ils y donnèrent leurconsen»
■ Il I I ■ iU
* Les Alnoravides, les Almc^ades et les Mérinides ovaient à leur sert
vice un corps de troupes composé* en graode partie, de rélogiés espa*
gools. Sous la dernière de ces dynasties^ lo chef de ia milice chrélitone
était deveuu uo personoage trés-importaol.
toB&0iii et prAlèreoi, à hoîa^clos, le seraieDt do EdéliU à Vimit
Abd-el-Hack.
Le tO de Djomada [premier] (octobre), left co&jorég sofimni
de la Ville-Neuve [de Fez] et» s'étaoi renduâ ^ Br-Bemeka, iUy
proclainèreDt la déposition do sultan régn/iot; puis, déployant l*é«
teudard delà royauté^ en la présence des grands officiers de l'en*
pire, iU jurèrent fidélité k l'émîr Âbd«el*Hack. Alors, Ha travet-
sàrent le S^on et campèrent tout près du territoire des Béni*
Isker, en face de Nebdonra, forteresse appartenant è El-Sace»^
U>n*Ali, un des cbefs de b conspiration. Au lendeaain, ils
prirent la route de Tèza.
Pendant que le sultan organisaitune armée dans le camp qu'il
avait établi sur le bord du Sebou, les insurgés eurent le temps
d'occuper le ribat de Tèza et d'envoyer un agent à la cour de
Tiemcen pour négocier une alliance avec Mouça, fils d'Othman-
Ibn-Yaghmoracen, et pour le décider à leur fournir des hommes
et de l'argent. Us avaient espéré que le sultan abd-el-ouadite
accueillerait très-volontiers une proposition de cette nature, puis-
que son intérêt devait le porter à mettre la désunion dans une
nation qui s^était toujours montrée l'ennemi do la sienne. Leur
espoir fut trompé ; Mouça voulut d'abord s'assurer de la tour-
nure que cette révolte devait prendre, et il se déclara lié parle
traité de paix qu'il avait conclu avec les Hérinides^ lors de son
avènement au Irène.
Le sultan Abou-'r-Rebià fit enfin partir Youçof-Ibn-Eîça-eU
Djocbemi et Omar-Ibn-Mouça-el-Foudoudi avec le gros de l'ar-
mée, et il tes suivit de près à la tête de l'arrière-garde. Les insur-
gés s'éloignèrent de Tèza et allèrent Implorer le secours du sultan
de Tiemcen. Ce prince reconnut alors qu'il avait agi Irès-sage-
ment en tardant de les soutenir et s'v refusa de nouveau sous le
prétexte qu'ils venaient d'abandonner Tèza, la seule ville dont il
se serait engagée leur assurer la possession. Gomme il n'y avait
plus rien à espérer de ce côté là, Abd-el-Hack-Ibn-Othman partit
pour TEspagne et emmena avec lui Bahhou-lbn-Tacoub, lequel
fut ensuite assassiné dans ce pays parles filsd'Ibn-Abi-'^Olà.
Quant à BI-Hacen-Ibn-^Ali, il rentra dans sa tribu et, i'éftant fait
f88 ItSTOUI DB8 BBRBftlBS.
donner des lettres degrAce, il alla reprendre son ancienne |>taeeà
la cour du sultan.
Arrivé h Têts, Abon-'r-Rebià'/ ëtooflâ les dernières étincelles
de cette révolte par la punition de ceux qui y avaient pris part,
tant des chefs que des serviteurs ; les uns furent mis à mort, les
antres emmenés captifs. Il y était encore quand il sentit l'atteinte
de la maladie qui devait Pemporter. H monrut vers la fin du mois
de Djomada second 710 (novembre f 310}, après une indisposition
quelques jours seulement. On Tentcrra à Tèza, dans la courde la
grande mosquée, et on le remplaça sur le trône par Âbou-
Satd.
ÀTÊNBMBNT DU SULTAR aBOJ -SJLtD[-OTaXÀll\ FfLS DB TAGOUB ,
FILS I)'aBO-BL-HACk].
Lejour même de la mort du sultan Abou-'r-Rvbià, son oncle,
Olhman, fils du sultan Abou-Yacoub et surnommé Ibn-Cadtb
(fils delà tige flexible) du nom de sa mère, rechercha le pouvoir
suprême et n^épargna ni démarches ni intrigues pour y parvenir.
A l'entrée de la nuit, les vizirs et les cheikhs se réunirent au pa-
lais et, comme ils s'étaient laissés gagner par l'argent et les pro-
messes qu'Ariba, sœur d'[Abou-Said]Olhman, fils dusultanAbou-
Youçof leur avait prodigués, ils choisirent pour sultan ce prince
illustre qui était alors chef delà branche principale et des bran-
ches collatérales de la famille royale. Pendant qu'ils délibéraiept
encore, son concurrent, Olhman, fils d'Abou-Yacoub sa présenta
pour acheter leurs suffrages, mais ils lui ordonnèrent de se
retirer. Avant de lever la séance, ils firent venir Abou-Safd
[Olhman, fils d'Abou-Yonçof^ Yacoub] et, l'ayant salué sultan,
ils rédigèrent des lettres par lesquelles il fut ordonné h tous les
> Liseï Et'SolUm à la place é'El^Hûctn dans le texte arnbe.
DT!«AST1B MtKlMlOB. ÂBOV-SaId. 489
gouverneurs de provinces et aux autres fonclionnaires de ooti-
voqner leurs adiniaistrës et de recevoir d*eux, au nom du nouveau
sultan, lesermentde fidélité»
L*émir Abou*1-Hacen, fils aîué d'Abou-Satd, partit aussitôt
pour Fez, par l'ordre de son père, et, y étant arrivé au commen -
cément du mois deRedjeb (fin de novembre), il entra au palais et
prit possession des trésors qui y étaient déposés.
Le lendemain delà nomination du nouveau sultan, une foule
immense se trouva rassemblée sous les murs de Tèza, et là, on
fit prêter le serment de fidélité aux Mérinides, aux Zenata, aux
tribus, aux Arabes, aux divers corjis de l'armée, aux clients
île la famille royale, à ses protégés et serviteurs, aux docteurs
de la loi, aux gens qui vivaient dans la dévotion , aux chefs des
corps et métiers, aux notables et aux hommes du peuple. Se trou-
vant ainsi revêtu de Tautorité suprême, le sultan distribua do
nombreuses gratifications et se mit 6 examiner Tétat de l'admi-
nistration publique. Par son ordre, on supprima les droits de
marché et d'autres impôts oppressifs, on vida les prisons * et on
cesM d'exiger l'impôt des maisons, taxe qui pesait beaucoup sur
les habitants de Fez.
Le20 Redjeb (44 décembre], Abou-Satd partit pour la capitale
où il recolles députations qui venaient de toutes les parties du
Maghreb pour le féliciter de son avènement au trône. Dans le
mois de Dou-^l-Càda (mars-avril 4344), il se rendit à Bibat-eU
Feth avec l'intention d'inspecter le pays, d'améliorer le sort de
ses sujets, de lever des troupes pour la guerre sainte et de faire
construire des navires pour combattre les chrétiens. Après la
fêtedasacrifice(4«'mai),ilrevintàFeset, enl'an744 (4344-2)
îl nomma son frère, Pémir Abou-Baca-YaYch, au gouvernement
de ses forteresses espagnoles, Algéciras, Ronda et les châteaux
qui en dépendent.
En l'an 743(4343-4), il partit pour les provinces marocaines
* Bq y^retensot, toatafois, les brigands, lesasssssins et les gens con-
damnés par arrêt de justice. ^ {CaHûM»)
490 BMTOlRt DIS BlRBtmS.
afin de les faire reatrer dans l'ordre et d« chè^iei* Adi-Ibn-^BetH
nea-el-Beskouri qui s'était mis en révdte. Ayant emporté d'as-
saut le château 'où les insurgés s'étaient enfermés, il chargea dé
£ers leur chef Ad i, l'emmena à Fez et l'enferma dans la prison
d'état. Ensuite, il forma le projet d*iin« expédition contre Tlem-r
cen.
PaiVlUlB BXI'ftDttlOK W SrLTAR ABOV'Sltd COXtBB T|.B«Cn.
'Quaod Abd <el^flack-4bD'-0ihmafiy l'émir qiû s'élail ré^noUi
conlns le sultan Abou-^V-Rebiâ, se lui empara de Xèza avec Is
secours d'lU-fla(cen-Ib»-Ali*lfaD^Abi-'t«Ta)ac, chef desBeoi-Asker,
il envoya de fi^uents messageseu sultan Abou-^Hasomoii^Moiiiça,
fioiiiver^dîa des Beni-Abd-el^Ouad. Gettecirconstance donna faeau*-
coup id'Dmbrage a«x Eérinides , «t l'asile qu'Aboa*«Baaiflioti ae-
fiorda eaauite assx insurgés souloYe, ohez ce peuple, une vivo in*
dignaliûA.
Le sultan Abou-Satd, étant monté sur le trbne, trouva l'es^
prJA public Aràe-ezûtté coatpe le gouvernement abd^eK Madîte ;
aussi, quand il ealpncHiéaes provimees aaarocaines eteovoyéiia
p[>«venieor*général dans ses posseusions^pdgnoWs, il entreprit
^ae eoLpëdition . contre Tleaicen.Amvé mit lehotà de la MoIeuSa,
en l'an 7U(431i*ft},îI plaça ses Ab Abou^'Uflacen et Abou.Ali,
à la ^Me des dent {ories colonne» qui focmaieat les ailes de soa
artnée et leur fit prendre les devants, petidant qu'il les suivait
avec le reste deses^roopes* Étant entré «ur le lenritoire abd»ei«-
'ooadîte sans.av<itr abandoané^eet ordre «de mandie, il y népaadk
ia dévastatioa et dirigea tta assaut terrible jeoolre la ville ÂfOu^
djda. Trouvant dans cette place une vigoureuse résistance, il
^passa ontreotfint le ebemin de Tlenicea. Parvenu à d'hippo-
drome [meldb) qui avoisine cette capitale, il y dressa son camp
et força le sultan Abou-Hammou-Mouça de s'abriter derrière ses
rçniparis^td^yjesler enfermé pendant que les Mérijoidjes.^'pc-
cupaieal à soumettre les forteresses, lo^plaine» et les populaiioa^
DYlfASTII ittimBI. — ABOU-SaIo. 101
«grieoke de f empire. Après en avoir raYagé les provinces et dé-
iruit les moissons, il châtia les Beni-Iznacen et se rendît mattre
de leurs montagnes et de lears places fortes. Quand il fut revenu
kOttdjda, son frère Taïch-Ibn-Yacoub, dont il soupçonnait les
mafivaises intentions, s^enfuit dt&camp et chercha un asfle dans
Tlemeen, auprès d'Abou-Bammou-Mouça. Le sultan ramena son
amée en bon ordre h Tèza et, s^y étant arrêté, il envoya à Fes
MO fils Abott-Ali. Dans le chapitre suivant nous parlerons de la
réveUe de cet émir.
î/tmiM ÂMOv-àU sa atroLis cohtrs sox Ftei.
Le sultan Abou*Said avait deux fils dent Tatné, '[Âbou<-l4la«
^B^]Ali, «aqvit d*uno ebytaiM, et dont le cadet, [Abov-AU-]
ÛQMr, «at pour mère une esolare cbrétiemie. Celui-ci avait too*
}ours itéle favori de son père et, bien qu'il ne f6t quhin jeune
homme imberbe à l'époque oii Abou-Satd devint sultan du Va-
{ttreb, a n*en fut pas moins désigné comme héritier d:tt trdae. Le
sultan lui accorda alors les titres d'honneur réservés aux person*
Miges revêtus de hauts commandements; il lui] forma une mai*
«on, attacha h son service ào$ gens de compagnie, des courtisans
et des secrétaires , lui accorda la permission de signer avee
le parap/he impérial et loi donna ponr vizir no serviteur dé-
iroué de la famille royale, homme d une grande influence nommé
1brali}m4bn-Éïça*el-lrntani.
Son frère aîné, Abou**l-Hacen-Ali, portait à ses parents l'affec-
tîontaplns vive et, pour ne pas contrarier son père, il accepta
un emploi gui le mit au nombre des serviteurs d*Abaa<Ali. Pen-
dant ou temps considérable, celui-ci jouit de sa haute 'fortune :
il était en correspondance avec les princes des pays voisins , il
recevait de leur part des lettres et des cadeaux ; il nommait à des
oxnfzuiodein^ntsnulitaires, iUatreienait des trouipe» ^ sa solde,
il augmentait, diminuait, supprimait, à son gré, tes ir;iilcmeoli
192 aisToiBe k/is mBfeaift.
des fonctionnaires , en un mot, il s'était approprié presque toute
l'autorité impériale.
En Tan 74 i [i 31 i-5) le sultan rentra de son eipédition contre
Tleoicen et, de Tèza où il s'était arrêté, il envoya ses deux fils à
Fex. L'emir Abou-Âli se fut i peine établi dans cette ville qu'il
forma le projet d'usurper le trône et, bien qu'il n'écoutât pas
l'avis de ses confidents qui lui recommandaient de s'ass urer, par
une ruse, de la personne du souverain, il ne se lança pas moins
dans la rébellion. Il prononça même la déposition de son père, en se
faisant proclamer sultan. Personne n'osa lui refuser obéissance,
précisément à cause de la haute autorité que son père lui avait
confiée. Il rassembla ensuite une armée aux environs de la Ville-
Neuve avec l'intention de marcher contre le sultan.
Âbou-Satd sortit de Tèxa avec ses troupes, en apprenant la
révolte de son fils, mais, tels furent son embarras et son hésita-
tion, qu'il ne sut pas s'il fallait reculer ou se porter en avant.
L'émir Âbou-Âli soupçonna alors son vizir [El-lrntani] d'entre*
tenir une correspondance avec le sultan et, se croyant trahi, il
donna à son ministre, Omar-Ibn-Yakhlof-el-Foudoudi , l'ordre
de l'arrêter. Le vizir se douta du danger et, pour l'éviter, il
s'enfuit auprès do sultan qui l'accueillit avec une grande bien-
veillance et marcha ensuite contre son fils. Les deux armées se
rencontrèrent à Macarmeda, entre Fez et Tèza, et celle du sultan
fut mise en déroute. Les fuyards prirent le chemin de Tèza et
Abou-Satd y rentra avec eux, très-affaibli par suite d'une bles-
sure h la main^ Il eut toutefois le plaisir d'y voir arriver son filS|
l'emir Abou-'l-Bacen«Âli, qui, toujours obéissant i la voix
de la piété filiale, avait abandonné son frère aussitôt après
la bataille. La conduite louable de ce prince procura au sultan
une vive satisfaction et lui parut comme un présage de bonheur
et de victoire.
Pendant que l'émir Abou-Ali s'occupait à faire le siège de Tèza
* Peut-être devons-nous lire JOOo ^ au earp#, à la place de
-a4>o i^àlamnin.
DTTdSTIB MfiRlHIDB. — ABOU-Sito. 1 93
las grauds de l'empire travaillaient h im arrangement entre les
deux partis, et il fat enfin convenu que \b sultan abdiquerait lé
pouvoir en faveur de son fils cadet, en se réservant, toutefois, le
gouvernement de Tèza et des cantons voisins. Ce traité fut rati-
fié en la présence des chefs arabes, des émirs zenatiens et des
députatioDS envoyées par les grandes villes.
Devenu ainsi mattre de l'empire, Abou-Âlis^en retourna à Fez
-o^ il reçut les hommages de toutes les villes du Maghreb, et, bien-
tôt après, tl tomba dangereusement malade. La perspective du
bouleversement que sa mort devait occasionner et des dangers
auxquels on serait alors exposé h Fez, épouvanta tous les cœurs,
et l'on se mit h glisser hors de la ville, les ans après les autres,
et à se rendre auprès du sultan Abou-Satd qui se tenait toujours
h Tèza. Cette défection générale fut couronnée par celle du vizir
AboU'-Bekr-Ibn-en-Nouan, du secrétaire-d'état, Mendil-Ibn-Mo-
hammed-^l-^inani et de tous les autres ministres d'Abou-Ali.
D'après le conseil des transfuges, le sultan se décida à prendre sa
^ revanche et partit de Tèza avec son armée. Ayant alors ramené
' sous ses drapeaux toutes les troupes mérinidcs, ainsi que les mi-
lices, il commença le siège de la Ville-Neuve [de Fez] , fît construire
au camp une maison pour lui servir de résidence et déclara l'émir
Abou - 1 • Hacen héritier du trône et lieutenant-général de l'em-
pire^ en remplacement d'Abou-Ali.
De tous les partisans de celui-ci, il ne resta plus auprès délai
cpt'uo corps de troupes chrétiennes qu'il avait prises à sa solde
et dont le commandant, son oncle maternel, gouvernait la Ville-
Neuve pendant son indisposition. Quand il eut recouvré la santé,
il vit que sa cause était perdue et fit demander è son père de lui
pardonner. Il offrit, en même temps, de rendre tout ce qu'il avait
usurpé pourvu cpi'oa lui permit de s'approprier la ville et les dé-
pendances de Sidjilraessa et de garder tout l'argent qu'il avait
pris dans le trésor du palais. Le sultan y donna son consentement
et signa le traité. Ceci se passa en l'an 715(1315-6). Abou*Alî
évacua la Ville-Neuve et alla camper avec ses officiers et sa suite
à Ez-Zitoun, endroit situé près de Fez. Le sultan accomplit toutes
les conditions du traité, occupa la Ville-Neuve et, s'étant installé
T. IV. 13
49i mSTOIRI DBS berbMks.
dans le palais, il vaqua' aux soins de l'empire. A son Gla, Âbou-
'l«Hacen, il assigna pour résidence Tun des palais impériaux
nommé Ed-Dar-El-Beida {la maison blanche) et, voulant lui cod«
fier presque toute l'autorité, il Tdutorisaà prendre des vizirs el
des secrétaires, h revêtir ses lettres du paraphe et à jouir de tous
les autres privilèges dont son frère avait fait un.si mauvais usage.
Toutes les villes du Maghreb envoyèrent alors des députalions
au sultan avec leurs hommages.
L'émir Abou-*Ali, étantarrivéà Sidjilmessa, s'y établit comme
roi : il organisa une administration, enrôla des fantassins et des
vavaliers, leur assigna une solde fixe et prit à son service les
Arabes nomades delà tribu desMakil. Il s'empara alors des pla-
ces fortes du Désert, réduisit les bourgades de Touat, do Tigou-
rartn et deTementtt, envahit le Sous et soumit toutes les plaines
de cette province, après avoir châtié et soumis les Doui-Hassan,
les Cbcbanat, les Zegna et d'autres Arabes nomades. Dans une
attaque de nuit il réussite prendre Taroudant, résidence d'Abd-
er-Rahman-lbn-el-Hacen-lbn-Yedder, seigneur des villes dii
Sous, et, ayant envoyé ce chef à la mort, il livra la place au piU
lage. Avecla chute d'Abd-er-Bahman, s'éleva un nouvel em|irre
mérinide dans les pays du Sud.
En Tan 720 (1 320), Abou-Ali déclara la guerre à son père, fit la
conquête du Deré et visa à la possession de Maroc. Le sultan en-
voya contre lui Pémir Abou-'l-Hacen et se mit lui-même en marche
))ient6t après. Arrivé h Maroc, il mit celte ville en bon état de
défense et y installa comme gouverneur Kendouz*lbn-Othman,
client de sa famille. Il partit alors avec Abou-4-Hacen et ramena
ses troupes à la capitale. En Tan 722 (4322), l'émir Abou-Ali
sortit de Sidjilmessa et marcha sur Maroc avec tant de prompti-
tude qu'il ne laissa pas à Kendouz le temps de se reconnattre. La
ville fut emportée, toute la province fut conquise et la tète de
Kendouz fut placée sur le bout d'une lance.
Le sultan se vit alors obligé d'organiser une nouvelle armée qu'il
solda d'avance et plaça sous les ordres d'Abou-'l-Hacen. Pendant
la marche de cette colonne, il la suivit lui-même avec l'arrière-
DT19A8TII VÊilfflDI. — ABOU-SaId. 4 95
gardo. Arrivés à Toulou, sur le bord de POmm-Rebià S la père
et le fiU se tlDrenl bien sur leurs gardes parce qu'on les avait pré*
venus qu'Âbou-Ali devait venir les attaquer pendant la nuit. En
«iïet, Tarmée de ce prince tomba sur leur camp, mais elle y trou*
va une telle réception qu'elle se retira dans le plus grand désor-
dre et finit parprendre la fuite. Au pointdujour, le sultan se mil
ha\ poursuite d'Abou*Âli, le contraignît à tenter le passage du
Deren {V Atlas), Dans cette retraite désastreuse, les troupes de
Stdjilmessa s'égarèrent au milieu des ravins et des précipices
où elles subirent encore les disgrâces les plus cruelles. L'én^jr
Âbou-Ali s^y vit réduit à la nécessité de faire route à pied. Cp
fat avec une peine eitréme que les fuyards parvinrent à franchir
ce passage difficile ei à gagner Sidjilmessa.
Le sultan rétablit l'ordre dans les provinces marocaines, ins*-
talla Un gouverneur avec une garnison dans la ville de Maroc,
et désigna Mouça, fils d*Ali-Ibn-Mohammed le hintatien, comme
percepteur de Tiropôt dans ces contrées et dans les régions occu-
pées par les Hasmouda. Ce chef remplit avec une grande habileté
tes fonctions qu'on venait de lut confier et il les exerça pendant
plusieurs années.
Après avoir remporté cette victoire, le sultan mena une expé-
dition contre Sidjilmessa, mats telle fut chez lui l'influence extra-
ordinaire de l'amour parternel, dont on raconte encore bien des
anecdotes singulières, qucrémirAbou-Ali n'eut qu'à demander
pardon pour obtenir la cessation des hostilités. Le sultan s'en
retourna donc è la capitale et Abou-All resta dans le pays dq Sud
jusqu'à ce qu'il fut vaincu par Abou-'l-Hacen, devenu souverain
de l'empire parla mort de leur père.
niSGHACC ET nORT DB VEUDtL-BL-KlIfAm.
Sous le gouvernement almohade, Hohammed-Ibn^Hohammed-*
tmm^m
I Le texte arabe dit sur le lioku^.
196 HlSTOIBB DBS BBBB^RBS.
eUKinani, père de Mendfl, tint un haut rang parmi les geos de
plame. Lors de la chute de la dynastie fondée par Abd-cl-Mou-
men, quand les Almohades évacuèrent Maroc, Hohammed-eK
Rinani les abandonna pour aller se fixer à Héquinez^ sous la pro-
tection des Mérinides. S'étant alors attaché à Yacoub-Ibn-Âbd-
el*Hack, il fut admis par ce prince an nombre des savants ma-
ghrébins qui formaient sa société intime, et il eut plusieurs fois
l'occasion de remplir au nom de son maître des missions impor-
tantes auprès des rois voisins. Nous avons déjà parlé de son
ambassade à la cour d'EI-Mostancer. en Van 665 * . Youçof , fils
cftsuocesseur delYacoub-Ibn-Abd-el-Hack, se plaisait d^abordà
augmenter l'influence d'fil-Kinani, mais, s'étant ensuite fâché
contre lui, il confisqua ses biens, Tan 687 (4288), et le bannit de
la cour. EUEinani vécut en disgrâce pendant le reste de ses
jours.
Son fils Mendtl continua toutefois au service du sultan Abou-
Yacoub-Youçof. Il s^élait chargé de contrôler les comptes de Pad-
ministration [militaire] et, bien que sa probité eût pour garants
ses bons antécédents et la parole unanime de ses amis et de ses
ennemis, 'jl se croyait toujours exposé à l'inimitié d'Abd-Allah-
Ibo-Abi-Medyen, intendant du palais et confident du prince. La
haute position de cet homme lui inspira un profond dépit el,
au sentiment de jalousie dont son cœur était enflammé, se mâla
la crainte continuelle d'une disgrâce qui lui coûterait la fortune et
la vie. Quand le sultan eut soumis les villes et les plaines du ter-
ritoire maghraouien, pays traversé par le Chélif, Hendil fut chargé
d'administrer les revenus de cette région, de tenir les contrôles
de l'armée et de faire' l'inspection des troupes. Il s'établit alors h
Hiliana avec Ali-Ibn-Mohammed-eUKheiri , £l-Hacen-lbn-Ali-
lbn-Abi*'l-Talac et les autres émirs [qui servaient le gouvernement
mérinide. A l'époque oii Abou-Thabet, successeur du sultan
Abou*Yacoub, rendtlepays des Maghraoua aux princes abd*
Page 53 de ce Yoluma*
DTNASTIB MtlimDB. ABOU-IAto. (97
el-ouadiies, Mendtl quitta Miliana et prit le chemin da Maghreb
afin de joindre le nouveau sultan. En passant par Tlemcen, il se
concilia la bienveillance d'Abou-Ztan et d'Abou-Hammout en leur
fournissant tous les renteignements qui pourraient leur faciliter
l'administration de la province qu'il venait de quitter.
Déjà, pendant le siège de Tlemcen par [Abou-Tacoub]-Tou-
çofy MendtUel-Kinani était devenu le compagnon d'Abou-Safd«
Othman, frère de ce sultan, et, par suite de son amitié intima
avec cet émir, qni occupait alors une position peu élevée, il mé«
rita la haute bienveillance que ce même prince lui témoigna plus
tard. Abou-Satd étant monté sur le trAne du Maghreb, l'admit au
nombre de ses intimes, le choisit pour écrivain du paraphe im-
périal, pour dépositaire de ses pensées les plus secrètes, pour
contrôleur général de la comptabilité et pour son homme d'af-
faires. Il lui accorda aussi la place d'hooneur à la cour.
Hendtl montra alors beaucoup de considération pour l'émir
Abou- Ali-Omar et passa au service de ce prince, à l'époque où le
sultan abdiqua le trône ; puis, ayant vu les affaires de son nou-
veau maître prendre une mauvaise tournure, il l'abandonna*^
L'émir Abou-'UBacen ne lui pardonna jamais ses complaisances
pour Abou-Ali, et, bien des fois, son cœur fut profondément
blessé en voyant ses droits sacrifiés par ce ministre et en goûtant
l'humiliation de travailler au service d'un frère qu'il détestait.
Pendant quelque temps, il dissimula son ressentiment ; mais,
quand il retrouva l'occasion d'entretenir son père en secret,
après le départ d'Abou-Ali pour Sidjilmessa, il fit tous ses efforts
pour perdre El-Kinani. Comme le sultan prêta une oreille atten-
tive à ces accusations, il obtint facilement l'autorisation de faire
mourir son ennemi. Il est vrai que le ministre imprévoyant
avait souvebt offensé ce monarque par sa présomption, par son
ton de familiarité et par ses traits d'arrogance. En Tan 718
(4317-8) Abou-'l-Hacen emprisonna El-Kinani dont il confis-
qua les biens et, pendant plusieurs jours, il employa la torture
pour l'obliger à rendre ses comptes : puis, dans la dernière sé-
ance, il le fit étrangler. Quelques personnes disent qu'il le laissa
mourir de faim.
(98 HISTOIRB BBS BlfiB^IBS.
IBlf-KL-ÀZÉPI SE MET EN RÊYOLTE ET SOUflElfT UN SIÉ6B DAN9
CBUTA. «— APRÈS SA MORT CETTE TILLE RENTRE SOCS L'AUTORITt
DU SULTAN.
La famille El-Azéfi , déportée à Grenade en l'an 705 * par le
raïs Abou-Satd, a^établit dans cette ville avec Pautorisation
d'El-Makfalouâ y troisième soaverain que la famille des Bcni-
'l-Ahmer fournit à l'Andalousie. En 709 (1309), lors de P occu-
pation deCeuta parle sultan Abou-'r-Bebiâ, les Azéfi obtinrent
la permission de rentrer en Maghreb, et de se fixer è Fez.
Tahya, fils d'Abou-Taleb, et son frère Abd-er-Rahman, étaient
alors les chefs de cette famille. Ils aimaient beaucoup l'élude et
suivaient assidûment les cours des savants qui enseignaient dans
la capitale mérinide. Le prince Abou-Ôaid, qui assistait alors ré-
gulièrement aux leçons données par le mufti Abou-'l-Hacen-es-
Saghtr dans la grande mosquée du quartier des Cairouanides,
fit la connaissance de Yahya-Ibn-Abi-Taleb ; aussi, quand i'
monta sur le tr6ne, il lui témoigna son bon souvenir en le nom-
mant gouverneur de Coûta et en autorisant toute la famille des
Azéfi à s'établir dans la ville où elle avait dominé autrefois. Ils
s'y rendirent en 7f0 (1310-1) et en prirerU le commandement
au nom du sultan Abou-Said.
L'émir Abou-Ali ayant ensuite enlevé Tautorité à son père,
rappela h Fez, Yahya, fils d'Abou-Taleb et le remplaça par Abou-
Zékérïa-Habboun-lbn-Abi-'l-OlàHel-Corachi. Yahya revint alors
avec son père, Abou-Taleb, et son oncle Abou-Hatem, et se fixa
auprès du sultan. Abou-Taleb mourut h Fez.
Quand Abou-Satd assiégea la Ville-Neuve, la plupart des offi-
eiers au service de son fils étaient passés de son côté, ainsique nous
•^ Voy. ci-derant, page 160.
OTNASTIK MftftlKIBS . — ABOU-SAID. i 09
l'avons dit, eiYahya les avaitsuivisavecson frère. Pour le récom-
pense,! le sultan lut donna de nouveau legouvernenienlde Geata
en le chargeait d'y maintenir Tautorité des Mérinides et, afin de
s'assurer que son protégé resterait dans le devoir, il en reiini le
fils, Mohammed, comme otage. Yahya prit alors le commande-
ment de ia ville et fit prêter aux habitants le serment de fidélité
envers Âbou*Sa}d*. Son oncle Abou-Haiem; qui l'avait accompa-
gné à Geuta y mourut quelque temps après leur arrivée.
En l'an 716 (t 3 16-7), Yahya rélablit dans Geuta le gouveme-
Rkent des cheikhs, au mépris de ses engagements envers le sal—
tan, et appela de l'Andalousie Abd-el-HacUbn-Olhman, «fin de
lui confier l'autorité miflitaire. Eo faisant ce choix, il avait poar
but de mettre la désunion entre les Hériaides et d'opposer au
snltan, s'il venait l'attaquer, un guerrier capable de le tenir en
échec. Le vizir Ibrahtm-Ibn-Eïça arriva bientôt après, à la tête
d'une armée mérinide, afin d'assiéger la vHIe, et^ comme Yahya
offrit de rentrer dans l'obéissance pourvu qu'on lui rendit son
fils, il adressa au sultan la prière d'envoyer ce jeune homme au
camp. Yahya^ ayant su par ses espions que son fils y était arrivé
etque la tente viziriale dans laquelle on le retenait se trouvait
près delà mer, résolut de faire une tentative pour le délivrer.
Profilant d'une nuit obscure, il dirigea une attaque contre le
camp, et le général Abd-el-Hack s'élança avec ses gens vers la
tente du vizir et enleva le prisonnier. Au premier cri d'darme,
les assiégeants avaient couru aux armes, sans se douter de
ce qui venait de se passer; ce fut le vizir Ini-ménie qui
s'aperçut que le jeune El-Azéfi lui était échappé. Les cheikhs
furent tellement couvaincus que cette évasion eut lieu aveclacon*
nivence de leur chef, qu'ils le mirent aux arrêts et l'envoyèrent
au sultan. Ce monarque les remercia du zèle et du dévouement
dont ils venaient de lui donner la preuve et, quelque temps
après , il relâcha le vizir dont il avait reconnu l'innocence.
* Le texte arabe porte de plus : et cet état de clioses se maintint quel'
qnes années. L'auteur ou son copiste aurait dû écrire : quelques mois.
SOO BISTOIBS k>lS BBBB&mt*
Ayant appris, en Pan 719 (1319), que Yahya-lbir-el-Aiéfr
avait exprimé le désir de rentrer en grâce, il partit pour Tanger,
et, s'étant assuré que ce chef n^avait pas d'arrière-pensée ^
il accueillit sa soumission et le confirma dans le gouver-
nement de Geula. En retour de cette faveur, Yahya-lbn-el-
Azéfi promit de remettre régulièrement au sultan les somme»
provenant des impôts et de lui envoyer un riche cadeau tous les-
ans. Les choses continuèrent en cet état jusque la mort d'El-
Axéfi, événement qui eut lieu en Pan 720 (1320).
Son fils, Hohammed-Ibn-Yahya, lui succéda et exerça^ le com^
mandement sous la direction de son cousin, Mohammed, fils d'Ali,
fils d'Abou-'l-Gacem-el-Fakth, doyen de la famille. Celui-ci avak
été nommé chef de la flotte et administrateur de la marine h
l'époque où Yahya-er-Rendahi, fils deHadjboun, fut renvoyé en
Espagne ^
En Tan 728 (1327-8), le sultan profita de l'esprit d'insubor-
dination qui animait la populace de Ceuta pour essayer d'y réta^
blir son autorité.
Quand il y arriva avec son armée, les habitants montrèrent un
grand empressement ii rentrerdans l'obéissance, voyant que Ho-
bammed-lbn-Yahya était encore trop jeune pour diriger la défen-
se de laville. Le petit-fils d'Âbou-'I-Cacem forma, il est Trai, le
dessein d'agir pour lui-même et de saisir le pouvoir avec l'aide
de la canaille; mais^ aussitôt qu'il eut rassemblé ses partisans,
les* notables l'empêchèrent d'accomplir son projet et décidèrent
le peuple à offrir sa soumission. Tous les membres de la famille
Azéfi furent alors livrés an sultan.
Après avoir occupé la citadelle, Abou-Satd restaura lès forti-
fications de la ville et rétablit l'ordre dans les cantons voisin s.
Toutes les branches de l'administration passèrent entre les
mains des Hérinides ; le sultan ayant confié les diverses parties h
quelques-uns de ses gran ds officiers et de ses courtisans. Son
chambellan, Amer-Ibn-Feth-Allah-es-Sedrati reçut le oomman^
« Ci-devant^ page 64.
DTRjtf TU MtRlNIDI. ▲BOU'fAb. 2Ai
dément de la garnison, et Âboa-l-Cacem-lbn-AbUMedyen Lk
nommé payeur de la marine et inspecleor des-chantiers decons •
traction. Aax cheikh», membres da grand conseil de la yille,
le sultan accorda des pensions et des gratifications. En partant
parla capitale, il donna Tordre de bfttir une Tille sur la partie la
pins élevée de la péninsule de] Geuta. La construclion de cette
place que Ton nomma Afrag*, fut commencée en Tan 720
(1328-9).
ABD-BL-MOniMBlf BST RanÉ SICRtTAlU-D'tTAT BT tCRITAl»
DU PARiPIB nPtlUU
LesAbd-el-Moheimen, une des premières familles deCeula»
étaient originaires de Hadramaut [province de TArabie méridio-
nale]. Ils jouissaient dans cette ville d^une haute considération et
s'adonnaient tous k la culture des lettres. Mohammed, père de
TAbd*el-Moheimen qui forme le sujet de cette notice, fut cadi de
Geuta pendant Tadmiuistralion d'Abou- Taleb-el-Azéfi et d'Abou-
Hatem-el-Axéfi ; il avait même épousé une demoiselle de cette
famille.
Son fils, Abd-el-Moheimen, passa ses premières années en-
touré de la considération générale et ne s^occupant que de ses étu-
des. Il devint très-savaot dans la philologie arabe, science quM
apprit du docte professeur El-Ghafeki. En Tan 705 (1306-6),
quand le raïs Abou-Satd renversa Taulorité des Azéfi et les dé-
porta tous à Grenade, le cadi Mohammed et son fils y furent en-
voyés avec eux. Abd-el-Moheimen se mit alors h étudier sous
les cheikhs de la capitale andalousienne et il parvint ainsi à ga-
gner de nouvelles connaissances dans la langue arabe et dans les
traditions du Prophète. S'étant ensuite fait employer comme écri-
* Àfrag en berbère signifie la cour intérieure d'une maison.
%(ii niSTOIRC DBS BERBÈRES.
vain dans la maison du sullan Mohammed-el-MakhlDoé, il passa
avec les principaux membres de la famille Azéfi au service de
Mohammed-IbD-Abd-»el-Haktm-or*Rondi, vtzir qui dominait le
souverain et gouvernait Tempire. Après la chute de ce ministre,
Abd-el-Moheimen revint h Geuta et travailla pendant quelque
^ temps dans les bureaux de Yahya-Ibn-Mostema, commandant de
la marine.
En Pan 709 (1309-10), quand les Mérinides obtinrent posses-
sion de Ceuta, Abd-el-Moheimen renonça aux écritures et, à Tins-
tar de ses aïeux, il se consacra à Tétude du droit et des huma-
tés. L'émir Abou-Ali, le même qui enleva le pouvoir à son père
après avoir été nommé héritier du trône, s'occupait aussi d'étu-
des scientifiques et recherchait avec empressement la société des
hommes instruits. Depuis le temps des AlmohaJes, l'art de bien
rédiger [la correspondance politique] n'existait plus en Maghreb*,
fait qui tenait aux mœurs encore incultes de la nation mé-
rinide. La teinture des lettres que Témir Abou-Ali avait acquise
lui permit d'entrevoir cet état de choses et de reconnaître que
ses gens de bureau n'avaient alors qu'un seul talent, celui de
l'écriture. Remarquant aussi que tout le monde désignait Abd-el-
Moheimen comme rédacteur de premier ordre, il désira l'atta-
cher h son service.
Abd-ol-Hoheimen paraissait très -souvent à la cour viérinide
où il accompagnait les députétlions que le peuple de Geuta avait
rhabilude d'envoyer au sultan. Dans ces occasions, l'émir Abou-
Ali ne manquait jamais de le traiter avec des^égards extraordi-
naires et de lui assigner, aux audiences publiques, uncdes places
d'honneur. A la fin, il le pria d'entrer h son service comme se*
/ crélaire et, malgré les refus qu'il essaya d'abord, il parvint à
l'accomplissement de sa volonté. En l'an 71 2 (1312-3), il Gtpar-
* Les dépêches du sultan AbouYouçof étaient cependant très-bien
rédigées. Voyez, par exemple, les deux pièces publiées par M. de Sacy
dans le tome ix des ^lémoircs (h VAcaîJmfe des Inscriptions et Belles-
Lettres.
DTRA8TI1 XÈIINIDI. — ABOU-fAID. 203
veoir à l'officier mérinide qui commandait à CeiUa, l'ordre de
lui envoyer Abd-el-Hoheimen, lequel fat aussitôt investi des
fonctions de secrétaire et chargé d'écrire le paraphe impérial. "^
[En Tan 744], lors de la révolte d'Âboa«-Âli contre son père,
Abd-el-Hoheimen alla joindre l'émir Âboti-1-Hacen [qui s'était
retiré auprès du sultan] ; mais Âbdu- Ali, s'étant ensuite décidé
à faire la paix et à rendre la Ville-Neuve à son père, posa, comme
me des conditions du traité, que le transfuge rentrerait à son
service. Le sultan y donna son consentement, mais Abou «'l-^Ha-
cen en ftittràs-méoontent et jura de faire mourir le secrétaire s'il
osait le quitter, t^oor se tirer du danger* Abd-el-Moheimen
s'adressa au sultan qui, touché par ses supplications , le prit
sous sa protection «t l'enleva ainsi aux deux émirs. Par son or«
dre, Abd*el-Hoheimen s'établit dans le camp [pour en diriger
l'administration] et, quelque temps après, il parvint à gagner la
faveur et à devenir le gendre de HendlM-Kinani, grand-of&cier
de l'empire et l'un des personnages les plus considérés de la
eour.
Après la chute de MendH, le sultan choisit pour écrire le para*
phe Abou-'l-Cacem-Ibn-Abi-Medyen, homme tellement dépourvu
d'instruction qu'il dut avoir recours à Abd-el-Moheimen tontes
les fois qu'il s^agissait de Nre, de corriger ou de rédiger une dé<-
pèche. Le sultan en sut bon gré ë cet habile écrivain et, bientôt,
il l'employa exclnsivement comme son secrétaire ; puis, en l'an
718(1318*9), il lui confia l'apposition du paraphe. Les grands
talents déployés par Abd*el*Hoheimen lui assurèrent la faveur
deson maître et lui Grent une grande réputation dans le public.
Tant que vécut Abou-Sald et pendant le règne d'Abou-'lHaoen,
aucun changement n'eut lieu dans sa position. Il mourut è Tunis
de la grande peste qui eut lieu en Pan 749 (4348-9).
LES MUSULMANS DE L'aNDALOCSIB INVOQUENT LB SECOURS DU SULTAN
MÉRINIDE. PEDRO MEURT SOUS LBS^MUSS DE «RBNADI.
A(lfonch-lbn-Heranda (Alphonse X, fils de Ferdinand) mourut
soi HISTOIRE DES BERBIîRES.
en Tan 682 (1 283)(. Son fiis, Chandja {Don Sanehé IV) 8*empara
de Tarifa [en 1292] et ne cessa ensuite de s'acharner sar l'An*
dalousie. Pendant ce temps, le sultan mërinide [ Âbou-Yacoub-]
Youçof- [Ibn-Yaçoub] assiégeait le fils de Yaghmoracen et se
vit ainsi dans l'impossibilité de secourir les masulmana espa-
gnols. Après lui, ses petits-fils eurent trop d'occupations et
d'embarras pour donner assistance k leurs cprréligionnaires de
la péninsule. Sanche mourut en Tan 693* et eut pour successeur
son fils Ferdinand. Pendant une année entière, celui-ci assiégea
Algéciras, port où les Mérinides allaient aborder quand ils en-
treprenaient la guerre sainte, et, comme sa flotte bloquait Gi-
braltar, il fit prier Heranda-Ibn-Adfonch (Z>on Jayme^ successeur
d^ Alphonse i/7) souverain de Barcelone, de donner de l'occupatiozi
aux musulmans de l'Andalousie.
Par suite de cette invitation, [Don Jayme] entreprit, en l'an
709 (1309), le fameux siège d'Alméria, et dressa contre la
ville plusieurs machines de guerre dont l'une, construiteen bois,
avait la forme d'une tour et dépassait de trois toises la hauteur
des remparts. La garnison réussit à incendier cette tour, et l'en-
nemi se mit à creuser une voie souterraine assez large pour ad-
mettre de front une vingtaine de cavaliers. Les assiégés eurent
connaissance de cette entreprise et, pour la déjouer, ils travaillè-
rent à un chemin de contre-approche de sorte que, leur tâche
accomplie, ils eurent un combat sous terre avec les chrétiens.
Othman-Ibn-Abi-'l-Olâ, chef des princes mérinides réfugiés en
Andalousie, reçutde[Abou-'l-DjoYouch]- Ibn-el-Ahmer le comman-
dement d'une armée et marcha au secours d'Alméria'. Sur sa route
il rencontra et tailla en pièces un corps de troupes chrétiennes,
que leur roi avait envoyées contre la ville de Marchèna. Arrivé
dans le voisinage du camp où se tenait le roi [d'Aragon], il ne cessa
I Alphonse mourut en Tan 1281.
* Don Sauche mourut en t%95 (694 de l'hégire).
' Lisez Al'Merïa dansle texte arabe.
DTKASTIE HiRIHlDI. — ABOV-SaId. 205
d'attaquer et de harasser les chrétiens jusqu'à ce qu'il les con-
traigntt à demander la paix et à lever le siège.
Dans Vintervalle, le roi [de Castille] s'était emparé de Gibral-
tar et avait fait investir Chemana * et Estepona. El-Âbbas, fils
de Rahhou-lbn-Âbd- Allah, et Othman-lbn-Abi-'l-Olftse portè-
rent au secours de ces deux villes. Olhman commença par atta-
quer le camp des chrétiens h Estepona et y tua environ trois mille
cavaliers a vecteur chef, Âdfonch-Birès(il/p/ion5e-Pere:3(/a GuZ'-
mon). Ensuite il alla dégager EI*Abbas qui était entré dans Gau-
cin et soutenait un siège contre les chrétiens. A son approche,
Tennemi décampa.
Le rot chrétien était encore sous les murs d'Algéciras quand il
apprit la défaite de ses troupes par Othman et, sur le champ, il
envoya toutes ses bandes contre les musulmans. Olhman attaqua
cette armée, en tua les principaux officiers et mil le roi dans la
nécessité de marcher en personne contre lui. A peine les chrétiens
eurent-ils quitté leurs positions que les gens d\4lgéciras envahi-
rent leur camp et enlevèrent les tentes et les bagages. De cette
manière, ils prirent leur revanche et ramenèrent beaucoup de
prisonniers. Le roi Ferdinand, filsdeSanche, survécut è cette
déroute et mourut en Tan 712 (1312). Comme son fils et succes-
seur Don Alphonse [XI] était encore très-jeune, on le plaça sous
la tutelle de son oncle Don Pedra-lbn-Chaudja [Don Pedro ^ fils de
Sanche) et de [Don] Juan, grand chef des armées chrétiennes.
Pendant que le sultan Abou-Saîd luttait contre son fils, les
chrétiens profitèrent de son embarras pour envahir l'Andalousie
et, en Tan 718 (1 31 8-9), ils mirent le siège devant Grenade. Les
musulmans de ce pays appelèrent le souverain maghrébin à leur
secours, mais il refusa de les aider sons le prétexte qu^Othman-
Ibn-Abi-'l-Olâ occupait une position très-clevéo à la cour de
Grenade^ qu'il exerçait le commandement sur tous les guerriei'S
mérinides au service de ce royaume et que, dès-lors, il pourrait
* Variante : Semaza,
206 HISTOIRE DES DERBfcftBS,
compromettre la siVeté et troubler la paix do l'empire mérîmile,
H demanda, en conséquence, qo''Olhmau lui fût livré, en promet-
tant de le relâchera la Gn de la campagne. Cette réponse fit sentir
aux Grenadins l'inutilité de leur démarche, car Ibn-Âbi-'l-Olà était
un homme trop brave et trop aimé de ses troupes pour être facile-
ment mis en arrestation. Ils renoncèrent donc à Tespoir d'être
secourus par le sultan.
L'armée chrétienne venait d'investir la ville de Grenade et
s'attendait a la voir bientôt succomber quand Dieu déploya sa
puissance et délivra les assiégés. Othman-lbn-Abi-'l*Olà s'élança
avec environ deux cents hommes vers la position qu'occupaient
les chrétiens et, secondé par la faveur divine, Jes combattit avec
une audace extrême et remporta sur eux une victoire sans pa*
rcille* Don Pedro et Don Juan y trouvèrent la mort, leurs trou-
pes tournèreDlle dos et une grande partie des fuyards perdit la
vie en se précipitant dans les canaux d'arrosage entretenus par le
Chenil. Tous leurs bagages tombèrent au pouvoir des musulmans;
Dieu ayant voulu le triomphe de sa religion et la disgr&ce de
l'infidélité. La tête de Pedro fut plantée sur les murs de Grenade
et elle y est encore.
ALLUNCB HATRIMONIALB OB LA FAMILLB MÉRIKIDB ATBC CBLLB
DBS HAF8IDES. EXPEDITION CONTRE TLEMCEN.
En l'an 706 (4306-7), Abou-Thabet leva le siège de Tlemcen,
évacua le territoire abd-el-ouadite et rendit aux petits-fils de
Yaghmoracen tonl ce que les Mérinides leur avaient enlevé h là
pointe de ré|)ée. Une année plus tard, Abou-Hammou devint seul
matlre delà nation abd-el-ouadite et, dirigeant aussitôt son at-
tention vers les provinces situées à l'est de Tlemcen, il subjugua
les Maghraoua , soumit le pays des Toudjin, renversa l'au-
torité de leurs chefs et abolit la royauté qu'exerçait la famille
d'Abd-el-Caouï-Ibn Atïa. Les princes de celte maison maghra-
ouienneet les fils deHendtl-lbn-Abd-er-Rahman partirent avec
DTlfASTIR MÊRIMDB. — ABOU-SAID. Wl
les chefs qui leur restaient TiJèlos ot se mirent sous la protection
lies Hafsides. Plus tard, notre seigneur le soUan Àbou-Yahya
[-Abou-Bekr] et son chambellan, Yacoub-lbn-Ghamr, les prirent
tous à la solde de Tempire et se formèrent ainsi un corps de mit-
1 ce redoutable, qu'ils empk)}èreiît avec un grand succès contre
les révoltés qui menaçaient leur empire.
A la suite de ces conquêtes, Abou-Hammou enleva la ville
d'Alger à Ibn-Allan, conduisit ce chef à Tlomcen et remplit tou-
tes les conditions [énoncées dans le trai lé de capitulation]. L'éva-
cuation de b Mettdja par les Beni*Mansoura^ chefs* de la tribu
sanhadjienne des Melîkich, lui permit alors d'étendre sa domina-
tion jusqu'à l'extrême limite du Maghreb central et de mettre son
royaume en contact avec celui des Hafsides, auprès desquels les
r^fugiéss'étaient retirés et dont ils avaient obtenu un bienveillant
accueil. Ensuite, en l'an 712 (1312-3), il se rendit maître de Te-
dellis. Pour justifier cette agression contre les états d'Abou-
Yahya, il chercha des prétextes dans la correspondance qui eut
lieu entre lui et ce prince à l'époque où Ibn-Khalouf s'était em-
paré du commandement de Bougie. Abou- Yahya l'avait alors in-
vité à mettre le siège devant cette ville. L'armée qu'Abou-Ham«
mou plaça sous les ordres do son cousin, Uasoud-lbn-Abi-Amer-
Ibrahtm, entreprit de réduire Bougie ainsi que Constantine, mais
ce fut surtout contre Bougie qu'elle dirigea ses efforts. Pendant
ces hostilités, Mohammed-Ibn-Youçof, petit-CIs de Yaghmoracen,
leva Pélendard de la révolte et enleva la Ouancherîch à Abou-
Hammou avec l'appui desBeni-Toudjîn.
Rien ne se changea dans cet état de choses jusqu'à l'an 718
(4319)quand la mort du sultan Abou-Hamraou ouvrit a l'émir
Abon-Tacheftn-Abd-er-Rahman le chemin du trône. Le nouveau
sultan trouva bientôt l'occasion d'attaquer avec avantage son
cousin Mohammed-Ibn-Youçof , et partit à la tête de l'armée
abd-el-ouadite pour le cerner dans !e Ojaancherîch, sa retraite
ordinaire. Étant alors parvenu h gagner Omar-Ibn-Othman
• Dans le texte arabo, lisrz 'J;^!
SOS «ISTOIRI DtS BIHBtRtl.
chef lies BeuiTighertn , il se Gt livrer le rebelle, Tan 7)9
(1319), et lai âta h vie. Ensuite, il alla se préseater
devant la ville de Bougie, mais, découragé par les prépara-
tifs que le chambellan Ibn-Ghatnr avait faits pour lui résister, il
décampa le même jour. Rentré dans Tlemcen, il en vo} a plusieurs
corps d'armée dans le territoire de Bougie, et il construisit, en
amont delà rivière 'du même nom, deux forteresses très-rap-
prochées Tune de l'autroi et destinées à servir de points de sta-
tion pour ses troupes. Un de ces châteaux portait lo nom deHisn-
Bekr. Quelque temps après, il fit bâtir une ville à Tiklat,
endroit situé à une journée de Bougie. Ce nouvel établissement
reçut le nom de Temzezdekt, aRn de rappeler le souvenir de la
forteresse que ses aïeux avaient possédée dans la montagne vis-
à-vis d^Oudjda, forteresse dans laquelle Yaghmoracen s'était
défendu contre Es-Satd [le sultan almohade]. Quand la construc-
tion de cette ville fut terminée, il la remplit de munitions et de
troupes afin d'en faire une de ses places frontières, et il y établit
oomme gouverneur Houça-lbn^Ali-el-ÂzéG, chef qui avait occupé
une haute position à la cour pendant les dernières années du feu
sultan.
Cédant ensuite aux instances des émirs kaoubiens, qui étaient
alors mal disposés pour notre seigneur, le sultan Abou-Yahya*
Abott-Bekr, il leur fournit un corps de troupes zenatiennes et
proclama sultan de Tunis le prince hafside, Abou-Abd;Allaho
Mohammed, fils d'Abou-Ali-el-Lihyani. Bientôt après, il déclara
que le souverain légitime des Hafsides était Témir Abou-Abd-
Allah-Hohammed, fils d'Abou-Bekr-ibn-Amran ; puis, il annonça
qu'Abou-lshac, fils d'Abou-Bekr<-es-Cbehtd, était le véritable
chef deTempire hafside. On a vu daub l'histoire des Abd-el-Ouad
et dans celle des Hafsides qu'il mit chacun do ces princes en
avant plus d'une fois.
Cette guerre n'offrait qu'une alternative de succès et de revers
jusqu'à l'an 729 (1328-9), quand l'armée zenatienne se rencon-
> Les manuscrits portent Abm-Yahya,
BTNÂSTIB HfiBINIDE. — ABOU-^AID. ^09
ira avecl^armée hafside à Er-R!as. Dans cette jourDée mémora*
Me, le sultan Âbou*Yahya-Abou-Bekr eut à combattre lesZenata
4M>us les ordres de Yahya-lbn«Mouça, clienl'do la famille de Yagh*
moraccn, ellesKaoub, soutenus par leurs allies nomades et com-
mandés par Témir Hamza-lbn-Omar. Les coalisés avaient
4'intentioa de placer sar le tr^ne de Tunis l'émir Mohammed-lbn-
Abi'Âmran-Ibn-Abi-Hars, et ils s'étaient fait appuyer par Abd-
el-Hack'lbn-Olhraan, prince mérinide qui, après s'être retiré
chez les Dafsides, était passé aux Zenata abd- el-ouadites avec ses
iils et tous ses dépendants. L'arméedu sultan fut mise en déroute;
ses tentes, ses trésors, son harem et ses fils, Ahmed et Omar, tom-
bèrent au pouvoir des vainqueurs. Ces deux princes furent en-
vojés à Tlcmcen. Dans ce conflit, Abon-Yahya-Abou-Bekr fut
atteint de plusieurs, blessures et conserva à peine assez de force
pour atteindre la ville de Bàne et s'y embarquer pour Bougie, où
il resta jusqu'à sa guérison. Les Zenata s'emparèrent de Tunis,
ei leur chef, Yahya-lbn-Mouça, y installa Ibn-Abi-Amran avec
le titre de sultan, s'étant réservé pour lui-même l'entière direc-
tion des affaires*
Abou-Yahya-Abou-Bekr forma lo projet de se rendre auprès
d'Abou-Satd, sultan du Maghreb, afin d'obtenir l'appui des Mé-
f inides contre les Beni-Abd-el-Ouad; mais, sur les représenta-
tions du chambellaa, Moharamed-lbn-Séld-en-Nas. il renonça -à
une démarche qui pouvait cempromettre sa dignité, et se con-
tenta d'y envoyer son fils, l'émir Abou-^ékérYa , seigneur de
Bougie.
Abou-Zékérïa s'embarqua pour le Maghreb avec Abou-Mo-
hammed-Àbd-Allah-lbn-Tafragutn, qui était chargé par le sultan
•d'applanir les voies de cette négociation et de conférer * avec
le gouvernement du Maghreb. Débarqués à Ghassaça, ils se ren-
dirent à Fez et remirent à Abcu-^Saîd la lettre dans laquelle leur
souverain lui demandait secours. Le sultan mérinide fat pro-
fondément touché de cet appel, ainsi que son fils, l'émir AboQ-4-*
* Lisez oua'l-mokaouérat dans le texte arabe.
T IV. 14
240 niSTOIRB DES BERBÊREIS.
Hacen, et, s'étant adressé au prince Abou-Zékérïa, il lui dit, en
la présence de loute la cour : a Mon fils, par votre visite et votre
j> présence ma famille se trouve hautement honorée, et je déclare
» devant Dieu, que, pour vous soutenir, je suis prôt à épuiser
» mes trésors, mon sang et celui de mon peuple. Je marcherai
9 contre Tiemcen, et, secondé par votre père, j'en ferai le
» siège.» Les membres de Tambassade se retirèrent alors, la joie
dans Pâme.
Un traité fut bientôt conclu, et un des articles auxquels les en-
voyés hafsides donnèrent leur assentiment portait que le sultan
Abou-Yahja-Abou-Bekr conduirait une armée en Maghreb
afin de prendre part au siège de Tiemcen. Le sultan Abou-
Satd, de son côté, se mil en marche, l'an 730 (i 329-30),
pour la même deslincTlion et, arrivé au- Molouïa , if dressa
son camp h Sabra, où il reçut la nouvelle positive que le
sultan Abou-Yahya venait de reprendre la ville de Tunis et
d^en expulser les Zcnata, avec le sultan qu'ils y avaient établi.
Il fit aussitôt appeler son hôte, l'émir Abou-Zékérïa-Yahya, et,
l'ayant comblé de dons, ainsi que le vizir Ibn-Tafraguin, it
leur recommanda do se hâter de rejoindre leur souverain. Ils
prirent la route de Ghassaça, emportant avec eux de nombreu-
ses marques de la bouté d'Abou-Saîd, et ils s'embarquèrent dans
les navires qui les avaient amenés en Maghreb.
Avec ces envoyés partirent deux agents du sultan mérinide,
les nommés Ibrahtm-Ibn-Abt-Hatem-el-Azéfi et Abou-Abd- Allah -
Ibn-Abd-cr-Rezzac, cadi de Fez , chargés par leur matlre do
négocier une alliance matrimoniale entre sa famille et celle des
Hafsides. Après leur départ, le sultan Abou-Said revint à Fez.
Par suite de cette mission, un mariage fut conclu entre l'émir
Abou-'l-Hacen et une fille du sultan Âbou-Yahya-Abou-Bekr,
sœur germaine de l'émir Abou-Zékérïa. En Van 731 (i330-l),
très-peu de temps avant la mort du sultan Abou-Said , la
princesse arriva au port de Ghussaça avec une flotte, et y dé-
barqua, accompagnée d'une députation de grands cheikhs aimo-*
hades, sous la présidence d'Abou-'l-Cacem-Ibn-Ottou. Le gou-
vernement mérinide accueillit la fiancée avec les plus grand»
DT'NASTIE UfiRimOB.— ABOU-^L-HAtfeN. 211
Vionneurs ci lui témoigna les égords les plus empressés. Oh
im fournit des bétes de somme pour porter ses bagages, des
montures dont les brides avaient des mors en or et en argent
et dont les selles étaient en 'étoiïe de soie, brodée en or. Pouf
sa réception et pour son mariage, on fit des préparatifs d'une
magnificence inouie chez les Hérinides et dont on parla ayec ad-
miration pendant longtemps. Des femmes âgées furent désignées
pour remplir auprès de la princesse les fonctions attribuées aux
intendants d'une maison impériale . Elle n^était pas encore
-arrivée à Fez quand le sultan Âbou-Sald cessa de vivre.
MORT bu SULtîllf An6D-SÀ!D'BT AVKN£MENT DB SOI! TILS
ABOU- L-HACBIf.
y arrivée de la fille du sultan Âbou-Yahya-Abou-Bekr excita
"à la cour de Fez Tallégresse la plus vive, tant èi cause des belles
qualités de la jeune fiancée que du profond respect que les Méri^
tiides portaient h son père et à sa famille. Le sultan Abon-Satd
partit pour Tèza afin de surveiller, en personne, le progrès du
cortège et de témoigner à la princesse hafside les sentiments de
joie et de haute considération dont il était animé; mais à peine
fut-il entré dans celte ville qu'il tomba dangereusement malade
et mit son fils, Abou-'l-Hacen, dans la nécessité de le ramener à
ia capitale. Plusieurs domestiques du' palais chargèrent sur leurs
épaules la litière qui renfermait le sultan et la portèrent jusqu'à
la rivière Sebou. Delà on entreprit de faire entrer le malade au
palais pendant la nuit , mais il mourut avant d'y arriver ; que
Dieu lui fasse miséricorde I On déposa le corps du souverain dans
la chambre ou il avait l'habitude de se tenir, et on confia aux per-
sonnages les plus saints de la ville le soin de l'ensevelir. Ceci se
passa dans le mois de Dou-'I-Hiddja 731 (sept-oct. 1331) ,
Dieu seul est éternel I
Aussitôt après la mort d'Abou-Satd, les principaux cheikhs <te
342 HISTOIRI DES BERBÈRES.
la nation mérinide et los grands dignitaires de rélal se réunirent
autour de l'émir Abou-1-Hacen, son successeur désigné, et lut
prêtèrent le serment de fidéliié. Le nouveau sultan fit donner
Tordre aux troupes de quitter le Sebou et de venir h Ez-Zitoun,
près de Fez; ensuite il assista aux obsèques de son père; puis,
«'étant entouré d'un cortège nombreux, il se rendit au camp.
Tous les corps de l^elal et toutes les classes de la population vin«
rent lui offrir foi et hommage, pendant qu'il tenait une séance so-
.lennelle dans la tente impériale, et ils prêtèrent le sermenr de
^délité entre les mains du mizouar, Obbou^-Ibn-Cacem, prévôt
de la police, et grand chambellan depuis le règne de Youçof-ll^n-
Yacoub. Alors on présenta au sultan sa fiancée et le mariage fut
célébré au camp, la mémo nuit.
Abou-U-Hacen s'était décidé h châtier les ennemis de son beau-
père, mais il voulut d'abord connaître les dispositions de l'émir
Abott^Ali à son égard. Se rappelant que le feu sultan portait
une vive affection à ce prince et qu'il l'avait fortement recom-
mandé à sa bienveillance, il résolut d'aller le voir et, comme les
fatigues étaient pour lui des plaisirs, il s'empressa de partir pour
£idjilmessa.
LE SULTAN ABOI)^ 'L-OÀCBIV PART TOUR SIDJlLVeSSA, CO^XLl;T
4YEC SON FnktM ABOU*ALI UN TRAITÉ DE PAIX ET MARCHE
SUR TLBHCEN.
Le sultan Abou- l-Haccn étant monté sur le trône, désira con-
naître les dispositions de son frère Abou- Ali, avant d'entrepren*
dre une expédition contre Tlemcen, et il se proposa de le traiter
avec bienveillance, par égard aux fréquentes recommandations
de son père, qui avait toujours porté une tendre affection au
prince de Sidjilmessa. S'étant dirigé vers cette ville en quittant
le camp d'Ez-Ztloun, il rencontra en rouie une députation que
son frère avait envoyée an devant de lui. Cette ambassade lui
déclara qu'Abou-Ali, reconnaissant ses droits à la souveraineté,
DYNASTIE HÊRIMDB. ABOU^'t-BÂCfcK. &< $'
ièfélicitatt de la haute position ii laquelle Dieu l'avait élevé ; qu'il*
tftcherait toujours de mériter sa bienveillance et, se conteutant de
cotte portion de l'héritage paternel dont il jouissait déjà, qu'il ne*
chercherait jamais à lui disputer le pouvoir : tout ce qu'il deman-
dait était sa confirmation dans le gouvernement de Sidjilmessa.
Le sultan y donna son consentement et, conformément aux injonc-
tions de son père* , il nomma l'émir Abou- Ali souverain de cette ville
et des provinces du Sud qui en dépendent. Les principaux chefs
des tribus zenaticnncs et arabes ainsi que les grands officiers de
la tribu mérinide assistèrent à cette déclaration.
Pour répondre alors aux demandes de secours que les Hafsi-
des lui avait adressées, il se porta rapidement vers Tlemcen,
mais, passant outre, sans s^y arrêter, il marcha vers l'Est afin
d'opérer sa jonction avec l'armée du sultan Abou-Yahya-Abou-
Bekr. Nous avons déjà mentionné que lors de la mission d'Abou-
Zékérïa en Maghreb, Ton était convenu que le sultan hafside ai-
derait les Mérinides à faire le siège de Tiemcen. Dans le mois dé
Chàban 732 (mai 1332), Abou^'UHacen prit position à Teçala et,
en attendant l'arrivée de son allié, il donna à ses navires l'ordre
de quitter les ports du Maghreb et de ravager les côtes de l'em-
pire abd-el-ouadite. Il fit aussi embarquer à Oran un corps de
troupes commandé par son client, Mohammcd-el-Botouï, et l'en-
voya au secours du souverain hafside. Ce renfort débarqua au
port de Bougie et, s'étant rangé sous les drapeaux d'Abou-Yah^
ya-Abou-Bekr, il marcha avec lui contre Tikial [Temzezdekt] ,
quartier-général de l'armée abd-el-ouadite chargée de bloquer
la forteresse hafside. Eïça-Ibu-Mezrouâ , commandant des
assiégeants, emmena aussitôt toutes les troupes qui se trouvaient
dans Tikiat et se replia sur la frontière du Maghreb central. No-
tre seigneur, le sultan Abou-Yahya-Abou Bekr, s'avança a la téter
des Almohades, des Arabes, des Berbères et de tous les peuples
qu'il avait rassemblés^ et prit possession de la place qu'on venait
1 Dans le texte arabe Vh du mot âhd est déplacé.
3ii mSTOlRB MS nE0ftaB8.
d'évacuer. Le sultan Abou-Hammou avait donné l'ordre, ei»
constniisant ce fort, que les gouverneurs de ses provinces orien-
tales, depuis El-Bat*ba jusqu'à la frontière, seraient tenus d'y
envoyer régulièrement la dtmo de toutes les récoltes de leurs
pays respectifs, et son fils, le sultan Abou-Tachcfln, avait maiur
tenu cet usage. Aussi, les vainqueurs y trouvèrent-ils des appro-
visionnements en quantité énorme. Tout fut livré au pillage e^
leiort ruiné de fond en comble.
Pendant ce temps, Abou-'l-Hacen attendait chaque jour Tarri*
véedu sultan et de l'armée hafsides. Il était encore au même lieu
de rendez^vous quand on vint lui annoncer que son frère, l'émir
Abon-Ali, s'était mis en révolte. Cette nouvelle le décida à ren-
trer chez lui, et le sultan Abou-Yahya-Abou-Bekr, ayant été
averti de son départ, reprit le chemin de sa capitale et emmena
El-Botouï avec lui. Alors, il combla do dons les troupes mérinides.
et leur chef, les embarqua dans les vaisseaux qui les avaient
amenés et les renvoya à leur souverain.
A la suite de cet échec, le sultan Abou-Tachefin n'essaya plus
d'envahir le territoire hafside.
lÉVOLTB I)'^B0f7<*ALI. -^ LB SULTAN ABOU-'l -BÀCEN lUBCDB CORTRB
LUI B7 L8 FAIT PRISONNIBR.
Quand Abou-'I-Hacen se fut avancé jusqu'à Teçala afin d'opé-
rer sa jonction avec l'armée d'Abou-Tahya-Abou-Bekr et do
marcher ensuite sur Tlemcen, dont ils s'étaient proposés de faire
le siège, Abou-Tachefîn, sultan de cette ville, réussit, par l'en--
tremise de ses agents, à engager l'émir Abou-Ali dans une al-
liance contre le sultan mérinide. Par ce traité, chacune des par-
ties contractantes s'imposa l'obligation d'entraver les opérations
d*Abou-4-Hacen, toutes les fois que ce monarque entreprendrait
des hostilités contre l'autre partie. L'émir Abou-Ali se mit alors
en révolte contre son frère, sortit de Sidjilmessa pour envahir le
Deçà et installa dans cette province un de ses officiers comme
DYNaSTIB VtRiniDB.— abou-*l**baceii. 245>
gouverneur, après avoir lue celui qui y commaDdâit au nom
d^Abou-1-Hacen. Du Derâ, il envoya un corps do troupes dans la
province de Maroc.
Le sultan étaît h Tcçala quand cette nouvelle lui arriva, et,
outré de colère, il résolut de se venger et reprit aussil&t le che-
min de sa capitale. Parvenu à Taourîrt[-8ur-Za], une dea places
frontières de son royaume, il y laissa une garnison sons les or-
dres de son fils^ Tachofin, auprès duquel il plaça en qualité de
dijecteur, le vizir Mendîl-lbn-Hammama-Ibn-Tlrbîghîn. S'étant
alors dirigé vers Sidjilmessa, il y arriva à la suite d'une marche
irè6-rapideoi,rayant investi, il employa une foule d'ouvriers k
construire des machines de guerre et à bâtir une ville sous les
murs de la place. Pendant une année entière, il continua le siège
sans donner aux révoltés le moindre répit.
Abou-Tachefîn, Tabd-el-ouadite, se jeta alors sur la frontière
mérinide avec ses troui)es et y répandit le ravage et la dévastation
afin d'obliger le sultan à lever le siège et à venir dégager le Ma-
ghreb. Arrivé près de Taourirt, il se laissa battre par le
fils d'Abou- l-Hacen, qui en était sorti, avec ses vizirs et ses
troupes pour lui livrer bataille. S'élant ensuite réfugié dans
[Tlemcen],son asile ordinaire, il s'empressa d'envoyer un corps
de troupes au secours d'Abou- Ali. Ce détachement réussit h s'in-
troduire dans Sidjilmessa en s'y glissant far petites bandes et
par individus isolés.
Pendant ce temps, le sultan continua le siège de la ville, jus-
qu'à ce qu'il l'emportât de vivo forceet lui fit éprouver tous les
maux de la guerre. L'omir Abou-Ali, fait prisonnier h la porte de
son palais, fut amené devant le vainqueur et mis aux. arrêts. Après
avoir établi uu nouveau gouverneur dans Sidjilmessa , Abou*'l-
Hacen repartit pour Fez, où il arriva l'an 733 (1332-3). Il fit
alors enfermer son frère dans une des chambres du palais et,
quelques mois plus tard, il donna l'ordre de l'étrangler.
Ce qu'il pouvait y avoir de blâmable dans la conquête de Si-
djilmessa fut bientôt racheté par celle de Gibraltar, ville que
les musulmans, commandés par son (ils, Abou-Malek, onlevorent
aux chrétiens.
V
3\iy MîSTOitM DES nofcKvr.
SlÉCiB KT PRISE DE GtBEALTAl FAH LES MUSULMAIIS 800S IE9
ORDRES DE L'^MIR AROC-MALEK.
Abou-1'Oueltd[-Isma}l], fils du raïs Aboa-Satd, enleva le ro''
yanme de T Andalousie à son cousin, Abou-'I-Djoïouch, etmournt
en laissant pour successeur un fils en bas âge nommé Moham-
med. Celui-ci régna sous la tutetle du virir Mohammed- Ibn-ef-
Mahrouc, membre d'une des premières familles 'de l' Andalousie
et employé, depuis des longues années, au service de Tétat. Le
sultan Mohammed, étant entré dans TadoTescence, souffrit avec
impatience la domination de son vizir et, à Tinstigaiion de ses
esclaves chrétiens, il le fit assassiner, en ran729 (4328*9). de-
venu de cette manière mattre de ses volontés, if les consacra au
rétablissement de l'autorité royahe. \
En l'an 709 (4309), Ile roi chrétien avait pris GibraTtar et
rendu cette ville une voisine très-incommode pour les autres
forteresses du Détroit. Les musulmans en furent consternés, sa-
chant que le souverain mérinide était alors trop occupé par l'a
révolte de son fils pour venir à leur secours. D'ailleurs, te gou-
vernement du Maghreb [ne possédait plus aucun point d'opéra-
tion dans la péninsule ; il] avait rendu la ville et les forts d'Al-
^éciras à Ibu-el-Ahmer en Tan 712(4312-3). Frappés enfin de
la grande supériorité que la puissance du roi chrétien avait ac-
quise, les Andalousiens remirent cette ville aux Mérinides, Pan
729. Le sultan Abou-Said y installa un de ses oncles maternels,
le nommé Sollan-Ibn-Mohelhel ^ chef de la tribu arabe de
Kholt.
Après la mort de ce prince, les chrétiens s'emparèrent de la
plupart des forts qui dépendent d'Algéciras et interceptèrent
ainsi toute communication avec le Maghreb. Peu de temps aupa*
ravant* le sultan de l'Andalousie avait fait mourir son visir
1* Le texte arabe porte : vers sette époque.
DTNA5TIB BÉRIIIIDI.— - ABOU-'L'HACER. 217
Ibn -el-Makhroac. BemarqaaDt ensuite, avec une inquiétude ex*
tréme le progrès du roi chrétien, il. passa en Afrique, Tan 732
(1331-2), et se rendii auprès du sultan Abou-'l-Hacen, qui était
alors è^Fes, capitale de l'empire. Accueilli avec de grands hon*
neurs par ce monarque, qui avait envoyé au-devant de lui an
cortège magnifique, il se logea dans le Hesarat^ jardin qui tou-
chait au palais, et il s'y vit traiter avec la plus haute distinc--
tion. Dans l'entretien qu'il eut alors avec son hôte, il lui fit part
de l'effroi que le progrès des chrétiens inspirait aux musulmans
espagnols el de la douleur qu'il éprouvait lui-même en voyant
Gibraltar tenir maintenant en respect toutes les places fortes qui
couvraient cette partie du pays.
Dans sa réponse, le sultan Abou-*'l-Hacen lui dit d'avoir bon
espoir et, comme il avait pour la guerre sainte une passion ex*
tréme, h l'instar de son aïeul, Abou-Youçof-Yacoub, il s'occupa
sur le champ à préparer une expédition contrôles chrétiens. Son
fils, l'émir Abou-Malek, partit bientôt h la tête de cinq mille Mé-
rinides, afin d'entreprendre le siège de Gibraltar, et il emmena
avec lui le sultan de Grenade. Débarqué à Algéciras , il y
attendit les divers corps de renforts que son père lui faisait
passer l'un après l'autre , et , pendant ce temps, les agents
de Mohammed [IV] - Ibn^-el-Ahmer s'occupèrent à parcourir
l'Andalousie afin d'y lever des troupes. Quand tout ce monde
fut rassemblé, l'émir et le sultan allèrent camper sous les murs
de Gibraltar, et ils pressèrent la place Hvec tant de vigueur,
qu'ils s'en rendirent maîtres l'an 733 (4333). Dieu avait permis à
l'armée musulmane d'emporter la ville d'assaut et de saisir,
comme une proie, les biens et les personnes de tous les chrétiens
qui s'y étaient enfermés.
Le surlendemain, le roi chrétien arriva, et avec lui des na-
p£* Le Mesarat, jardin situé au-dehors de Bab-es-Gheri&, une des portes
du quartier des Cairoaanides, à Fez, était renommé pour sa fertilité. Il
^n est fait mention dans le Carfa^, pages Si, Ï3 du texte arabe de l'édi-
'lon imprimée.
218 HISTOIRE DBS BBaàfttBS.
lions entières d'infidèles ; mais la place venait d'être approvi*
sionnée par la cavalerie musulmane. Dans celle opération;
l'exemple fut donné par Abou-Haleket par le sultan, qui avaient
chacun pris en croupe, à Algéciras, un sac de vivres. L'émir mé-
rinide s'en retourna à celte dernière ville après avoir confié la
défense de Gibraltar à Yabya«-Ibn*Talha-lbn-Mohalli, l'un des
vizirs de son père.
Le quatrième jour après la rentrée d'Àbou-Malek h Algéciras/
le roi chrétien en commença le siège. Âbou-Halek sortit alors à
la tête de ses troupes et occupa une position vis«>à-vis de l'ennemi.
Le souverain de l'Andalousie, qui était parti avec ses bandes pour
ravagerle territoire chrétien, revint sur ses pas, ^l'invitation de
son allié, et se plaça en face de l'armée chrétienne. De cette ma-
nière, ils obligèrent l'ennemi à se retrancher et Tempéchèrent
d'attaquer [Gibraltar], ville récemment conquise et mal pourvue
de troupes et d'armes.
Le sultan de l'Andalousie se dévoua alors pour le salut des
musulmans et courut, en devançant tout le monde, vers la tente
do roi chrétien. Celui-ci vint à pied au-devant de lui et l'accueillit
la tète découverte, en signe de respect; puis, ayant écouté sa de-
mande, il consentit & lever le siège de la forteresse. Effectivement,
quand il reçut en cadeau tous les trésors que le sultan avait au-
près de lui, il ploya bagage et partit^ L'émir Abou-Malek se mit
alors à restaurer les forlifications de la place, à y transporter
des approvisionnements et ë y faire entrer des troupes.
Le sultan Abou-'l-Hacen eut ainsi le bonheur d'achever une
* Pour ménager la susceptibilité de ses lecteurs^ Iba^Khaldouo tourne
cette dernière phrase de manière à leur laisser croire que le sultan
avait reçu de i'argeci't durci cbrélieo. Voici la (raductioo littérale du
passage : « et il lui accorda sa demande au sujet du lever de siège, et il
» lui fit don des (résors qu'il avait auprès de lui, et il s'en alla sur le-
» champ. 9 La vérité est que le sullan de Grenade se reconnut lo vassal
du roi de Castille, lui rcmil deux places fortes, avec cinquante mille
pièces d'or, et promit de lui payer un tribut annuel.
DYlf ASTIB MfiRIMlDB. — ABOU-'L-UACBN» 2{ 9
eonquéte qui couronna son règne d'une gloire iin[)éi'issable, el
il put enfin reprendre son oncien projet et faire le siège do
Tlemcen.
PEISB DE TLBMCBlf PAR ABOU-'l-DACBH ; HORT d'aBOU-TACBEFÎH
BT CaCTB I>B L'BMPIRB ABD'RL-OUADITB.
Le sultan Abou*'l-Hacen» ayant vaincu son frère et fait dispa-
raître les suites de la révolte que ce prince avait allumée, pour-
vut à la sûreté de ses frontières et remporta, par la grâce de
Dieu et parla bravoure de ses troupes» un grand avantage sur
Us chrétiens: la ville de Gibraltar tomba en son pouvoir après
être restée plus d'une vingtaine d'années entre les mains des in-
fidèles. Dégagé maintenant de toutes ses préoccupations, il
tourna ses pensées vers un ennemi de longue date, [Abou-Tache-
ftn], et forma la résolution de marcher sur Tlemcen.
Vers cette époque, il reçut unie ambassade qui lui apporta, do
la part d'Abou-Yahya-Abou-Bekr, une lettre de félicitation au
sujet de la conquête de Gibraltar et la prière de vouloir bien em-
pdcher Abou-Tacheftn d'insulter les frontières du royaume haf-
side. Par suite de cette commimication, il envoya des agents à
b cour de Tlemcen, afin d'obtenir par de vives remontrances
l'évacuation entière du territoire hafside, la remise de Tedellis
au sultan Abou-Yahya-Abou-Bekr et la réduction do l'empire
abd-el-^ouadite à ses anciennes limites*. [D'après son idée, la ré-
ussite de cette demande] devait montrer combien les autres rois
redoutaient sa puissance et apprendre k ses propres sujets lo
respect qui lui était dû. Abou-Tachefîn repoussa ces proposî-*
tiens avec fierté et y répondit dans des termes nullement mesu-
' On lit, de plus, dans le texte arabe : toa laou dma-idh (et si âant
cette année). L'auteur a probablement voulu dire qoe toutes ces opéra-
tions devaient s'elTectucr avant Texpiration de l'année.
220 HisToim DB3 bshbêrbs.
rës. Quelques-uns des esclaves qui étaieut de service pcndaot la
réception, se permirent d'interpeller la députation delà manière
la plus inconvenante et d'insulter môme la dignité de celui qui
l'avait envoyée.
Abou-'l-Hacen éprouva une violente indignation en appre-
nant les détails de cette scène et résolut de marcher contre tes
Abd-el-Ouadites sans perdre un instant. Ayant fait dresser ses
tentes hors de la Ville-Neuve de Fez, il ordonna à ses vizirs
d^aller lever des troupes, même jusqu'au fond des provinces ma-
rocaine,8puis, s'étant dépéché d'équiper son armée, de la passer
en revue et d'organiser sa cavalerie, il se mit en marche vers le
milieu de l'an 735 (fév.-mars 4 335), emmenant avec lui nne mul-
titude de guerriers, tirés de toutes les tribus du Maghreb. En
passant par Oudjda, il y laissa un corps de troupes pour en faire
le siège et, s'étant ensuite présenté devant Nedroma, vers la fin
de Pan 735 (juillet-août 1 335), il l'emporta d'assaut le même jour.
Toute la garnison- fut passée au fil de l'épée. De le, il marcha, en
ordre de bataille, jusqu'à Tlemcen dont il commença aussitôt
rinvestissement. En l'an 736, les troupes qu'il avait laissées
sous les murs d'Oudjda s'emparèrent de la place et, d'après ses
ordres, elles en détruisirent les fortifications.
Pendant que, de tous côtés, on lui expédiait des renforts, il se
tenait en observation devant Tlemcen, ainsi que le lion guette sa
proie. Après avoir obtenu la soumission des Maghraoua et des
Toudjtn, il lança [la plus grande partie de] ses troupes sur les
contrées voisines. Oran succomba à ses armes ainsi que Honein;
Hillana, Ténès et Alger subirent ensuite le même sort. Toutes
ces conquêtes eurent lieu en l'an 736.
Yahya-Ibn-Houça, qui gouvernait alors la partie orientale du
royaume abd-el-ouadite, sur la limite du territoire haCside, et
qui dirigeait te siège de Bougie depuis la défaite de Mouça-ibn«
Ali, passa alors du côté d'Abou-'l-Hacen. Accueilli avec beaucoup
de distinction parle sultan, il obtint une position honorable à la
cour, le rang de vizir et son admission dans la société intime du
souverain.
La tâche de soumettre la région orientale du royaume de Tlem-
DTNASTIK MfilllNIDR. — ABOli-L- UaCEIC. 221
cen (ui couGée h Yahya-lbo-Soleiman , chef des Beni-Âsker,
cheikh des Béni- Mcrio, membre du conseiUd'état et gendre du
soltan. Cet offîcier partit avec ses troupes, drapeaux déployés,
et soumit tes tribus qui habitaient les plaines de cette contrée ; il
s'empara de toutes les villes jusqu'à Médéa, inclusivement, et,
quand il eut établi dans toutes ces localités Taulorité des Méri-
nidcs, il y leva des troupes et les envoya au camp d'Abou-1-
Hacen. Ces renforts furent si considérables qu'ils surpassèrent en
nombre le reste de l'armée
LbOuanchertch ctlo pays des Hachem toudjtnides reçurentalors
leurs gouverneurs des Mérinides : Sdd-lbn-Selama*Ibn-Alî fut
nommé au commandement des Beni-Idiel ten et chargé de veiller à la
conduite du gouverneur de Taoughzout. Sâd avait abandonné le
service d'Âbou-Tacheftn antérieurement au départ d'Âbou-'U
Hacen pour cette expédition : jaloux de la haute faveur dont son
frère et rival, Mohammed-lbn-Selama, jouissait h la cour de
Tlemceo, il s'était décidé à passer en Maghreb.
Le sultan mérinide établit aussi des gouverneurs dans le pays
du Chelif et dans toutes les autres provinces du Maghreb centrai.
Il fonda [rebâtît], auprès de Tiemcen, la Yille-Neuve pour lui ser«-
vir de résidence, ainsi qu'à ses troupes, et il lui donna le nom
d^El'Mansoura^. Autour de la capitale abd*el-ouadite, vouée
maintenast à la destruction, il lira une ceinture de murailles et
un fossé. Derrière le fossé il posa ses catapultes et autres machi-
nes de guerre, et, sur le bord antérieur, il construisit plusieurs
tours dont chacune avait en face une des tours de la ville. Du
haut de ces édifices les archers mérinides lancèrent des traits
sur les archers abd-el-ouadites et les obligèrent à s'occuperuni-
quementdeleur propre sûreté, pendant que les assiégeants bfl*
tissaient d'autres tours plus rapprochées de la ville et assez éle-
vées poqr en dominer les remparts. De cette manière , ils
poussèrent en avant leurs ouvrages jusqu'à ce que leurs demie*
res tours couronnèrent la contrescarpe de la place. Les combat-
^Ct-devaDl^ pige 113.
^2i msToiRG \jes berbères.
(ants se trouvèrcut eiiPin tcllcrncnt rapprochés qu'ils purent se
battre tlu haut de leurs tours à coups d'épée. Ou fil alors avan-
cer les catapultes et on les lira sur la ville avec un effet prodi-
gieux.
De jour en jour la guerre devenait encore plus acharnée, et
Tiemcen se trouvait de plus en plus reserré. Chaque matin, le
suUan faisait le tour de la ville pour voir si ses soldats étaient à
leurs postes, et, quelquefois, dans ces promenades, il s'éloignait
de son escorte. Les Âbd-el-Ouadites s'en étant aperçus, crurent
que, dans une de ces occasions, il leur serait facile de surprendre
leur ennemi>. Quand ils eurent arrangé leur plan, ils postèrent un
corps de troupes derrière la parlie de la muraille qui fait face à
la montagne [des Beni-Ourntd] et, au moment où le sultan faisait
sa tournée habituelle, ils ouvrirent les portes et lancèrent sur
lui leurs guerriers les plus braves. Le sultan s'enfuit vers le pen-
chant de la montagne et il s'engagea dans un terrain tellement
entrecoupé qu'il était sur le point de mettre pied à terre, lui et
son compagnon, Arif-lbn-Yahya, émir des Soueid. L'alarme fut
donnée dans le camp, les deux fils du sultan, Âbou-Abd-er*Rah-
man et Âbou-Malek, montèrent h cheval ; de tous les côtés, le$
cavaliers mérinides se précipitèrent sur leurs pas, forcèrent les
Abd-el-<Ouadites à reculer, tout en les empêchant de gagner
leurs points de ralliement, et ils réussirent à les culbuter dans
les fossés de la ville. Le nombre de gens qui y furent étouffés et
écrasés dépassa celui des morts qui étaient restés sur le champ
de bataille. Dans celte journée fatale, les Abd-el-Ouadites per^^
dirent Omar-lbn-Othman, chef desHachemtoudjinides, Moham*
med-Ibn*Selama,chef des Beni-Idieten, et presque tous leurs
meilleurs guerriers. Les suites de cette catastrophe furent extrê-
mement fâcheuses pour les assiégés, et, depuis ce moment, la su-
périorité des Mérinides ne fit qu'accroître. Les Abd«el-Ouadi^
les continuèrent néanmoins à sedéfendre, quoique bien convaincus
que rien ne pourrait les sauver, et ce ne fui que deux ans après,
Pour fahtélehou lisez fahtébelmi dans le Icxte arabe.
DYNASTIE MÊniNIDE. — abou-'l^hacbn. ~ 223
qoo le sultan parvÎDl à s'emparer de lear ville. Tlemcen fui pris
d'assaut le 27Bainadan 737 {{•' mai 1337).
Âbou-Tachefln, entouré de ses familiers, s'arrdta devant la
porte de son palais, et combattit avec la plus grande bravoure ;
il y vit tomber ses fils Olbman et Masoud, son viiir Mouça-Ibn-
Ali , eison ami, Abd-eUHack4bn-0lhman, prince mérinide qui
avait quitté la cour des Hafsides pour venir le joindre. Nous avons
déjà fait mention de ce dernier et, plus loin, nous raconterons
son histoire en détail. Il périt avec son fils cl son neveu. Abou-
Tachofin, affaibli par de nombreuses blessures, fut pris par quel-
ques cavaliers qui remportèrent avec l'intention de le présenter au
sultan; mais l'émir Abou-Abd-er-Rahman qui, dans toute la mê-
lée, s'était montré au premier rang, rencontra ce cortège et,
comme la rue en était encombrée, il fît trancher la tête au prison-
nier. Le sultan fut très-mécontent de cet acte, car il espérait
avoir le plaisir d'insulter son ancien ennemi et de l'accabler de
reprociies.
Pour éviter le tumulte ducombat, les habitants se précipitèrent
en foule vers la porte du kiosque (Bah-Kochouc) et une multi-
tude d'entre eux y mourut écrasés. La ville fut livrée au pil-
lage, et beaucoup de familles eurent à souffrir les plus graves at-
teintes dans leurs biens et dans leurs harems. Les muftis de la
ville, Abou-Zéid et Abou-Mouça, surnommés les Fils de l'Imam,
furent invités à se présenter devant le sultan qui, s*étant installé
dans la grande mosquée avec sa suite, désirait honorer en leurs
personnes le savoir et les hommes instruits. Ils firent d'abord
quelques difficultés, mais, ayant fini par obéir, ils comparurent
dcvantle vainqueur et, dans une allocution solennelle, ils lui dé-
peignirent les maux de toute espèce qui venaient d'accabler les-
habitants de U ville. Touché de leurs remontrances, il sortit à
chevdl et fit cesser le désordre, en ordonnant à ses soldats et à
ses partisans d'épargner le peuple et Je mettre un terme aux
actes do violence. La conquête achevée, il rentra au camp de la
yille-Neuve [d'EUMansoura].
Abou-Hohammed-Abd-Allah-lbn-Tafraguto, qui avait été en-
voyé h la cour mérinide par le sultan halside afîn de renouveler
9âi HISTOIRE DKS BfiRBblIBS.
]e traité d'alliance entre les deux nations, assista à la conquête
de TIemcen et, sur la recommandation d'Abou-1-Hacen, il se
hâta de partir afin d'annoncer cette nouvelle k son souverain. Il
voyagea avec tant de rapidité qu^il devança les courriers et des-
cendit à Tunisie dix-septième jour après la prise de la capi-
tule abd-el-ouadite. Le sultan Abou-Yahya-Abou-Bekr apprit
âvec d'autant plus de joie la chute de son ancien ennemi, Abou<-
Tachefin, qu'il attribua cet événement à ses propres démar-
ches.
Le sultan Abou-'l-Hacen se croyant assez vengé par la mort
du souverain de TIemcen, donna une amnistie aux autres abd-
el-Ouadites, et les fit tons inscrire sur les rôles de son armée
avec une solde convenable. Ces nouvelles troupes le suivirent
sous les drapeaux qu^ils avaient toujours portés, et conservèrent
leur ancienne orsanisation. Tous les descendants de Ouactn , sa-
voir, les Bcni-Mertn, les Beni-Abd-el-Ouad et les Toudjtn, se
virent ainsi réunis ; Ton peut même dire que le sultan avait com-
biné en une seule nation tous les peuples d'origine zcnatienne.
H distribua ces guerriers dans les villes du Maghreb, en assi-
gnant à chaque corps la garde d'une de ses forteresses. Il en
établit des garnisons dans le fond du Sous, dans le pays des
Gbomara et dans ses possessions espagnoles.
Par la conquête de Tiemceo, Abou-'l-Hacen donna une grande
étendue à son empire ; d*abord, roi des Beni-Mertn, il devint roi
desZenata, et, après avoir été souverain du Maghreb-el-Acsa,
il se trouva mattre des deux bords du Détroit.
L'ftBIE ABOU-ÀSO-BR-EÀHlf AN TOMBÉ BN DISGBACB A BStIdJA, EST
. MIS A MOET PAE L'OEDEB DE SON PÈEB, LE SOLTAIV.
Nos lecteurs savent que le sultan Abou-Satd avait engagé les
Hafsides à prendre part au siège de TIemcen et que son succes-
seur, Abou-'l-Hacen, s'était avancé jusqu'à Teçala pour y alien**
dre l'arrivée du sultan Abou-Yahya-Abou-Bekr. Lors de sa se-
C0ode expédttioD contre cette ville, Abou-'l-Hacen ne demanda
pas lear coopération. Pendant le blocus de Tiemcen, Abou-Mo-
hammed-lbn-Tafragatn, le ministre hafside, arrivait au camp,
de temps en temps, afin de présenter ses hommages au sultan
et voir comment finirait (a carrière d'Abou-Tacheftn, leur en^
Demi commun. Après la prise delà ville, il* avertit secrètement
Àboa*'UHacen qne le sultan de Tunis se proposait de venir le
trouver et lai présenter ses félicitations. La perspective d'une
entrevue qui devait rehausser sa gloire et satisfaire son amour-
propre, décida le sultan mérinide à se rendre au-devant de son
îHustre visiteur.
fin Tan ?3S (4 337-8), il quitta Tiemcen et alla camper dans
la plaine de Mettdja, pour y attendre Tarrivéedu suUan hafside.
Ce monarque avait cependant renoncé h son projet, sur les ins^
tances de Mohammed-lbn-eUHaktra, son premier ministre et gé<-
néralen chef, qui lui en avait fait sentir les graves inconvé*
nients : « Deux sultans ne se sont jamais rencontrés, lui dit-il,
» sans que l'un ou Vautre n'ait éprouvé, le jour même, un
» revers de fortune.»
Abou-'l-Haceo était resté plusieurs mois au lieu de rendez-
vous qu'Ibn-Tafragutn lui avait assigné quand il tomba malade-
et se tint enfermé dans sa tente. On fît alors courir dans le camp'
le bruit de sa mort el, aussitôt, ses fils, Abou*Abd-er-Rahman
et Abou-Halek, se virent entourés par un tas d'intrigants, véri-
tables artisans du désordre*.
Depuis le règne de leur grand-père, Abou-Satd, chacun de ces
deux émirs avaient travaillé de son côté pour se faire déclarer
héritier de l'empire. Abou-'l-Hacen, en montant sur la trône,
leur avait accordé le titre et les priviléges^de l'émtra/, privilèges
' Le tetxe arabe porte sefirohoma [l'ambassadeur des dsux)^ c'est-
à-dire TambaRsadeur envoyé par le sultan de Tunis à celui de Tempire
marocain.
* Le traducteur a rapporté ici uoc phrase qui, dans le texte arabe,
•e trouve quelques lignes plus loin.
T. IT. * <8
226 niSTOUB dbs bbiibèeis.
qtti GODSÎsUiBQt en lo droU d'avoir des vizirs et des seerélairo»-
d'état, d'apposer aux ordonnances le paraphe impérial, d'enr6*
1er des troupes, d'avoir une bande de cavaliers à sa solde et on
corps d'armée à ses ordres. Ne se bornant pas h les placer dans
une position d'où ils pourraient facilement atteindre à l'autorité
suprême, le suUan leur permit de le remplacer aux séances ron
yales pour y rendre justice et ponr promulguer des ordonnances;
aussi, se trouvèrent-ils possédor, chacun d'eux, Taulorité d'ua
lieutenant-général du royaume*
Égarés par les gens malintentionnés dont nous avons parlé,
chacun de ces émirs tâcha de se faire des amis dans l'armée et y
envoya plusieurs chevaux chargés d'argent. Déjà, deux partis
s^étaient formés dans le camp, quand l'émir Abou-Abd-er*Bab-
man céda aux instances de ses vizirs et do ses courtisans, |quî lut
avaient conseillé de saisir le pouvoir avant que le véritable état
de son père fût connu dans le public. Les officiers du sultan dé-
couvrirent ce projet, en firent part à leur maître el le décidèrent
à se mootrer aux troupes, afin de prouver qu'il n'était pas mort
ei de prévenir ainsi un mouvement qui pourrait aboutir au dé-
membrement de Pempire. Étant passé dans le pavillon où il avait
l'habitude de donner audience» il y vit arriver tous ses guerriers
qui, ayant su que leur souverain tenait une séance de réception,
étaient accourus pour lui baiser la main* U fit aussitôt mettre aux
arrêts les militaires dont il soupçonnait la fidélité, et, après avoir
dégradé les deux émirs, il leur retira les troupes qu'ils avaient
dans leurs camps respectifs. Quand il eut ainsiétouffié le feu delà
sédition ei déjoué les projets des intriguants, il rentra dans a«
tej[^e.
Frappés d'effroi et de honte, les deux princes restèreiktdans
la consternation et l'isolement; tous leurs partisans s'étant em-
pressés de les abandonner. Abou-Abd-er-Rahman suriout en fut
profondément affecté : ne pouvant vaincre ses appréhensions,
il s'évada du camp, pendant la nuit, et, le lendemain, il arriva
chez les Aulad-Zoghli, émirs des Arabes zoghbiens qui habitaieoi
la» plaine du Hamza. Arrêté sur-le-champ par l'émir Houça-Iba-
Abi-'l-Fadl, il fut ramené à son père qui Penvoya dans la prison
VTlfASTIl lltElXlIDI. — ABOU-*L-HACBlf. 327
^'Oodjda. En l'an 742 (1331-2)^ ee malbeureax trompa la sur-
veillance des servitears que le saltan avait préposés à sa garde
eltoale geôlier [en essayant de s'échapper]. A celle nouvelle
le sultan Git partir son chambellan, AllaUlbn-Mohaoïmed, avec
l'ordre de lui 6ter la vie. Zian-lbn*Onar-eI-Outaci , vizir de cet
émir tafortuaé, alla se mettre sous la protection des Bafai-
des.
Leleudeoiain de la fuite d'Abou-Abd-er*Rabmaa, le suhaa
pardonna à Témir Abou-Malek, Tenvoya en Espagne pour y pren*
dre le coramandemeot des possessions raérinide^ et revint loî-
nérne è Tlemceo^
UÉVOLTir D'iSR-olDOlJa, IHTOSTSVII t^OI SB DOlfllA POVK l'zurt
▲BOU-ABD-EI^-RAHHAK.
LorsdeVarrestation d^Abou-Abd-er-Rahman, ses domesliqaes
et ses serviteurs prirent la fuite en se dispersant de divers côtés^
et le nommé Ibn-HIdour, boucher employé dans la cuisine de
«et émir, auquel il ressemblait beaucoup, s^échappa à tous lesre«
gards, et passa chec les Béni- Amer. Cette tribu zoghbienne était
alors eu pleine révolte parce que le sultan et sou père avaient
accordé leur amitié à Artf-lbn-Yahya, émir des Soueid , tribu
toujours en hostilité avec les Beni-Amer.
La faveur dont jouissait ArtC avait commencé à l'époque où il
abandonna Abou-Tachefin pour se joindre aux Mérinides. Les
Beai-Amer montrèrent alors leur esprit d'insubordination et se
jetèrent dans lo Désert sous la conduite de leur chef, Sogheir-lbn-
Amer et de ses frères. Ouenzemmar-tbn«Artf , eommand«bt de tous
les peuples nomades de l'empire, reçut du sultan Tordre de mar*
«her contre eux, et, s'élant mis à la tète des troupes qu^il avait
rassemblées, il les poursuivit avec tant d'acharnement qu'il réusr-
sit plusieurs fois à leur infliger un châtiment sévère.
Le boucher dont nous venons de parler étant arrivé chez les
228 niSTOlRB BKS BERBfiKBS.
Beni-AmcrS se donna pour l'émir Abou-Âbd-cr-Rahman, et, fe*
ayant trompés par sa ressemblance avec ce prince, il les décida
h lui prêter le serment de fidélité et à pénétrer avec loi dans le
territoire de Médéa. Modjahed, client da sutlan et commandant
de cette place forte, sortit pour leur livrer bataille , mais
ses troupes furent mises en déroute et il dut prendre la fuite
avec elles. Ouenzemmar réunit alors un corps d'armée pour
combattre les insurgés, et, ceux-ci, en ayant été avertis, sor-
tirent de la province de Médéa et se dispersèrent en déclarant
k leur protégé qu'ils ne pouvaient plus le soutenir.
L'imposteur se réfugia alors au milieu des Beni-lraten*, peu-
plade zouaouienne, et obtint l'appui de Chiroci, femme qui exer-
çait le commandement de cette tribu. D'après les instructions de
leur maîtresse, les Béni- Abd-es-Samed, famille des Irateo, re-
connurent' l'autorité du prétendant. Bien tôt le bruit se répandit
que l'émir Abou-Abd-er-Rahman avait reparu. Les uns y ajou*
tèrent foi, les autres le traitaient de mensonge ; les Iraten eux-
mêmes finirent par découvrir que leur protégé les avait gros*
sièrement trompés.
Repoussé par cette iribu, Ibn-Htdour alla trouver les Doua-
ottida, émirs des Biah, et s'étant arrêté cher leur chef, Yacoub-
Ibn-Ali, il lui fit accroire qu'il était le fils du sultan et le décida h
lui accorder sa protection. Le sultan bafside.Abou- Yabya-Abou-
Bekr, auquel le sultan Abou-'I-Hacen avait envoyé Ides rensei-
gnements au sujet de cet aventurier, s'adressa à Zfan-Ibn-Omar,
ancien vizir d'Abou-Abd-er-Rahman e^ alors réfugié h la cour
de Tunis, et lui ordonna d'aller voir Yacoub-lbn-Ali et de lui
* Le texte arabe porte de plus : qui s'étaient révoltés contre son père,
le sultan Abou-'l-Hacen. Comme ce fait a déjà éié indiqué, le traduc*
teur a cru joutite de le menlionner Ici . Plusieurs répétitions semblables^
qui se présentent dans le texte de l'ouvrage, ne paraissent pas dans
la traduction .
sVov. tomei, pageiS*/.
s Dans le texte arabe, il faut lire au passif le verbe hml.
dévoilar l'imposture. Qaand Yacoub apprit toate la perversité
de son h6te, il le conduisit à Ceuta, avec ses affidés, et les livra
au sultan mérinide. Par l'ordre de ce menai que on coupa au pri-
sonnier une main et un pied des côtés opposés, et on lui accorda,
ensuite une pension pour son entretien. Dès-lors, Ibn-Hidour
continua à habiter le Maghreb et il y mourut en l'an 768
(1366-7).
l'bhii âbou'Malsk mbuht un combattant lis cbhbtibrs*
Après s'être débarrassé de son ennemi [le souverain de Tlem«
oen], Abou«'l-Hacen termina prompleraent les a&ires qui sur*
▼lurent après la victoire, et, pour satisfaire ii une passion domi-
nante chez lui, il résolut d'entreprendre une guerre sainte. De-
puis le règne de TooçoMbn-Tacoub, les Mërinides eurent tant
à faire chez eux qu'ils donnèrent aux chrétiens l'occasion d'obte*
nir la supériorité sur les musulmans de TAndalousie. Ainsi, le roi
[de Castille] leur enleva plusieurs forteresses, et s'empara de6i«
brallar[en709| — 1309); puis, il assiégea le sultan Abou-'l-OuélId
dans la capitale de l'empire grenadin, l'obligea à payer lacapita*
tion et se disposa à soumettre tous les vrais croyants qui habi-
taient l'Espagne.
Le sultan Abou-'l-Hacen, ayant en6n vaincu ses ennemis et
agrandi son royaume, prit la résolution de faire la guerre aux
infidèles et, en l'an 74(r(t 339-40), il en avertit son fils, Abou-
Malek, qui commandait alors les forteresses mërinides de l'Espa-
gne, et lui envoya l'ordre d'envahir le territoire do Tennomi. il
lui expédia,enmâme temps, de la capitale, un corps de renforts
et plusieurs vizirs. Abou-Malek, pénétra, h la tdto d'une armée
nombreuse, dans les étals du roi chrétien et y répandit la dévas-
tation; ensuite il revint avec les prisonniers et le buifu jusqu'il
la frontière et y dressa son camp. Les officiers sous ses ordres
apprirent que les chrétiens avaient réuni leurs forces et s'a-
vançaient rapidement; aussi, lui conseillàrent-ils d'évacuer lo
t30 HISTOIM DBS BBHBllKS.
territoire derenoen», de rentrer dans celui des musulTnans eir
traversant la rivière qui les séparait, et d'abriter ses troupes dans
les villes appartenant au s vrais croyants. Trop fier pour reculer
«i trop jeune pour avoir rexpéricnce nécessaire dans la conduite
d^ne guerre, ce prince, aussi enlétéque brave, résolut de bi-'
vaquer dans la position où il se trouvait. Il en résulta que les Mé-
rinides, surpris dans leur camp par l'arnoée chrétienne, s^éveti-»
lèreut en sursaut et, avant de pouvoir quitter leurs tentes et nran-
ter à cheval, ils forent presque tous taillés en pièces. L'émir
Abou-Malek lui-même tomba mortellement blessé an moment où
il allait se mettre en selle. Les chrétiens s'emparèrent de toutes
les richesses que le camp renfermait et s'en retournèrent d^ns
leur pays.
Le sult&n apprit avec douleur la mort de son (ils, mais il trou-
va une consolation dans la pensée que ce jeune homme avait suc-
combé en combattant pour la foi et qu'il obtiendrait de Dieu une
ample récompense. Alors, sans perdre de temps, il lit passer une
autre armée en Espagne etéqnipa une flotte pour combattre le»
infidèles.
LA FLOTTE UCSULMARE RBMf>ORTB UNE YICTOIRV SUR C;ELLB DC8
CHRÉTIENS. MORT DE l'aUULBUD.
Quand le sultan apprit la mort de son fils, il envoya ses viiirB
dans les villes maritimes afin de présider h l'équipement de ses
vaisseaux de guerre. H ouvrit en môme temps le bureau de solde
etd'enrfriements ; puis, ayant passé ses troupes enrevne, il pour-
vut h tous leurs besoins, appela aux armes les diverses popula-
tions du Maghreb et partit pour Geuta avec l'intention de sur-
veiller en personne les préparatifs de cette nouvelle expédition.
Les chrétiens, do leur côté, se disposèrent à faire une. vigou-
reuse résistance, et )eur roi envoya une flotte dans le Détroit afin
d*en empêcher le passage.
Pendant que le souverain mérinide pressait l'armement des
DYNA8TIB ■ftHlHIDI. — ABOD-^t-HACSK. 834
navires qui se trouvaient dans ses ports, les Hafsides lui expé-
dièrent, sur sa demande, la (lotte de l'IfrtkYa, composée de seixe
bâtiments et commandée par Zeid-Ibn-Perhoun, chef de la ma-
rine de Bougie. Cette escadre, dont les navires avaient été four-
nis par les ports de l'Ifrlkïa, tels que Tripoli, Cabes, Djerba,
Tunis, Bône et Bougie, vint mouiller à Ceuta. La flotte des deux
Maghrebs, au nombre d'uno centaine de navires, s^y rassembla
aussi.
Lo sultan ayant comploté l'équipement de son armée navale,
en donna le commandement b Mohammed>Ibn-Ali*el-Âzefi, le
même qui gouvernait h Ceula, lors de la prise de celte ville, et
lui ordonna d'attaquer les chrétiens dans le Détroit. Les musul-
mans endossèrent leurs cottes démailles, saisirent leurs armes et
se portèrent à la rencontre de Tennemi. Dès deux cAtés, Ton s'ar-
rêta pendant quelques minutes ; pois Pon s'avança pour accro-
cher les navires de l'adversaire et commencer le combat. Dana
moins de temps qu'il n'en aurait fallu pour dire deux mots*, la
victoire se déclara pour les vrais croyants qui, s'étaot élancés à
l'abordage, massacrèrent les équipages à coups de pique, à coups
d'épée et jetèrent les cadavres à la mer. Almilend*, caïd des cbré-
tiens, fut tué dans celte bataille. On prit à la remorque les navi-
res enlevés à l'ennemi et on les conduisit à Ceula, où une foule
de monde s'était rassemblée pour voir ce beau spectacle. On porta
ensuite en triomphée travers tous les quartiers de la ville un
grand nombre de tètes que Ton avait coupées aux chrétiens, et on
enchaîna les prisonniers dans l'arsenal.
A la suite de cette victoire, le sultan tint une grande séance
afin de recevoir les compliments de son peuple et d'entendre les
poètes célébrer h Tenvi cette glorieuse journée.
1 II m I m n ».
' A la lettre : il n'y avait qne comme non et non, Voy. sur le sens
de celle expression le commcotaire de Hartri, deM« deSacy, page J^^
* Don Alfonse Géofroi do Téooiio, Amirantêde Caslille.
2^3 mSTOiRE DES BIRVftBIf .
PBFAITE DES MUSULMANS SOUS L£g MURS hK TAllFJ».
Après avoir défait la flotte chrélienoe et ouvert le Détroit, kr
sultan se mit à faire transporter en Espagne les guerriers cpi'U
avait pris à sa solde, pendant que la flotte musulmane se rangeai!
sur une seule ligne , d'un continent è Tautre. Quand tonte l'ar-
mée eut traversé le Détroit, Abou-U-Hàcen la suivît avec ses fa-
miliers et ses domestiques, et, vers la Hn de l'an 740 (juin (340),
il débarqua dans le voisinage de Tarifa. Ayant fait camper se»
troupes dans les environs de la place, il commença tes opéra-
tions du sîége et [bientôt après] il reçut le secours d'une puis*
santé armée commandée par le sultan de l'Andalousie, Abou-'f-
Haddjadj, fils du sultan Abou-'l-Ouélîd. Ces renforts, composés
de troupes zenatienncs, des garnisons tirées des places frontières
et de gens de la campagne, prirent position en face de l'armée
mérinide et complétèrent ainsi l'investissement de Tarifa.
Pendant que les assiégeants employaient contre la ville toutes
les ressources de l'art militaire et qu'ils dressaient tears machi-
nes pour l'attaque, une nouvelle flotte, équipée par te roi chré-
tien, entra dans le Détroit et empêcha Uarrivée des convois qui
devaient alimenter Tàrméo musulmane. On persista néanmoins
h presser le siège, malgré la disette de vivres et de fourrages,
malgré l'aflaiblissement des bétes de somme et la misère qui ré-
gnait dans le camp.
• Le roi [de Ce stille] se mit alors à la tête des peuples chrétiens
et, quand il eut opéré sa jonction avec l'armée d'El-Bortugal*, sei-
gneur d'Ichbona* et de l'Andalousie occidentale, il marcha contre
les vrais croyants qui avaient déjà passé six mois sous les murs
delà place. S'étant rapproché de leur camp, il profita d'une nnit
I Don Alfonse IV, roi de Portugal.
* Jchbona, le nom arabe de Lisbonne.
BTITASTII HftBUflM.— AM>V**L- BACUI. t33
obscure pour faire passer dans Tarifa un délachemeni de son ar-
mée. Les troupes masolcnanesqu'onavait chargées de veiller aux
mouvements deTenoemine s'aperçurent de rien qu'au point du
jour, et, s'étant alors précipitées sur Tarrière-garde de la colon*
ne chrétienne avant qu'elle f6t entrée dans la ville, elles en tuè-
rent une partie. Craignant ensuite la colère du sultan, elles lui
cachèrent la vérité et l'assurèrent que rien n'avait pénétré dans
la forteresse, excepté la petite troupe qu'elle venait d'attaquer.
Au lendemain, l'armée du roi chrétien s'avança, et le sultan dis-
posa la sienne en ordre de bataille. Aussitôt que le combat fut
bien engagé, la colonne qui s'était introduite dans Tarifa et qui
s'y tenait cachée, fit une sortie contre le camp, en se dirigeant
vers les tentes du sultan. Elle tailla en pièces les soldats qui s'y
tenaient de garde et qui avaient tâché de la repousser k coups
de flèche : toutes les femmes qui essayèrent de résister forent
tuées; celles du sultan furent massacrées et dépouillées. Tel fut
le triste sort d'Âïcha , cousine du sultan et fille d'Abou«Yahya*
Ibn-Yacoub, ainsi que de Fatema, fille d'Abou-Yabya-Abou-
Bekr, souverain de l'ifrtkïa*. Les troupes musulmanes, s'étaat
aperçues de ce qui se passait derrière elles, et voyant que leur
camp était déjà en feu , perdirent leur ordre de bataille et pri-
rent la fuite. Déjè, un fils du sultan* s'était jeté au milieu
de l'armée ennemie, à la tête de ses gens, et y avait été
fait prisonnier. Le sultan lui-même tourna le dos et alla rejoin-
dre le corps de l'armée musulmane. Dans cette malheureuse jour-
née beaucoup de nos guerriers trouvèrent la mort.
Le roi chrétien étant entré dans le camp, s'arrêta auprès de la
tentedu sultan et exprima le plus vif mécontentement de ce qu'on
I « Fatime, fille do roi de Tunis, et première femme d*All>oacen
» (il6eu-'/-Jïi(icea), fut tuée dan« une tente sans être connue. On fit
9 prisonnière une de ses sœurs et trois autres femmes d*Alboaoen.»—
{Ferreras.)
*ll se nommait Abamar {Abou-Amer) , selon Ferreras.
S3i HISTOIHl DBS miBllBB.
y avftii massacré les femmes et les eofanls. Ay Bat main ieMOi at-
teint le bat de son expédition, il s'en retourna dans son pays, ei
le souverain de Grenade parvint k rentrer dans sa capitale. Le
sallan niérinidese réfugia dans Algéclras, d*oii il se rendit k Gi-
braltar et, la même nuit, il s'y embarqua pourCeuta.
En soumettant les vrais croyants h cette double épreuve, Dieu
leur réserva une ample indemnité dans l'autre monde et leur
laissa Tespoir de triompher à leur tour.
LB BOr CHRËTnSN BKtkTE BL-CALA AU SULTAN DB GBBIIADB BT
BÉDUrr ALGtCniAS.
Le roi chrétien étant rentré dans son pays, après la bataille de
Tarifa, attaqua de nouveau les musulmans de l'Andalousie, dans
Tespoir de les vaincre sans diflicuUé. Ayant rassemblé les trou-
pes de la chrétienté, il mit le siège devant Galâ-Beni-Satd * for-
teresse delà province de Grenade, à une journée de marche de la
capitale. Par l'emploi de ses machines de guerre et d\ine foule
d^ouvriers, il réduisit celle place & la dernière extrémité et mit
la garnison dans la nécessité de se rendre à discrétion, pour ne
pas mourir de soif. En Tan 742 (1341-2), la Cala succomba ;
Dieuayant voulu convertir en amertume tout le bonheur des mu-
sulmans. Cette conquête achevée, le vainqueur repartit pour son
pays.
Quant au sultan Abou-'l-Hacen, il alla débarquer à Geata afin
de préparer une nouvelle expédilîon et de prendre ainsi sa re-
vanche. Pendant que ses agents parcouraient les villes du Ma-
ghreb pour y lever des troupes, ses eaids visitaient les ports de
mer et pressaient l'armement d'une nouvelle flotte. Dans peu de
1 Al;ala la Real, ëUuéeà une journée de œarche au N. 0. de Gre-
nade.
temps OD équipa «n nombre considérable de navires, et le sufUati
revint^ à Ceula i^oiir les inspecter et pour faire traosporter son
armée eo Espagne. Le vizir Asker-Ibo-Tahadrlt fut nommé général
9n chef, et son parent» le vizir Mohammed -Ibn-et*Abbds-Ibn-Ta-
hadrtl^futdéclaré gouverneur d'Algéciras. Quand cette armée eut
passé le Détroit, le sultan lui envoya un renfort commandé par
Mouça^IbQ^IbrahJm^-eMrntani, officier qui rempliamt k la coor
les fonctions de vizir.
I^e roi chrétien eut oonnaissanco de ces préparatifs et envoya
sa flotte dans le Détroit pour combattre celle des musulmans.
Dans cette rencMiire, Dieu mit encore les vrais croyants è une
sévère épreuve : sn grand nombre d'eotreenx trouva le martyre
et leschrétiens demeurèrent mattres de la mer. Alors, le roi quitta
Séville, k la télé d'mie armée immense et marcha snr Algéciras
dans l'ospoir de lui faire subir le sort de Tarifa et de Tincorpo*
rer dans ses états. Secondé par une foule d'ingénieurs et d*ou«
vriers, il mit le siège devant ce port de passage, ce point d'abor*
dage pour les navires musulmans; il le tint bloqué pendant si
longtemps que son armée Gnit par se construire des maisons en
}kns»
Abou-*l-Haddjadj, sultan de Grenade, se porta avec l^armée an*
dalousienne en avant de Gibraltar, afin de couvrir cette place im-
portante. Abou-'l-Hacen se tint dans Ceuta d'où il fait^ail passer
en Espagne de Targent, des grains et des cavaliers, à U faveur
de la nuit, toutes les fois qu'il pouvait tromper la vigilance de la
flotte ennemie. Ses efforts furent inutiles : la ville, serrée de
près et en proie à Ic^ famine, devait succomber. Abou-4-Baddjadj
fît alors une tentative pour obtenir la paix : il fit partir uo agent
muni d'un sauf-conduit du roi et chargé d'aller trouver le sultan
et l'entretenir à ce sujet ; mais son navire fut perfidement attaqué
par plusieurs vaisseaux chrétiens que le roi avait envoyés*
Probablement de Fez.
* Ce navire ou galère aurait été enlevé par Tamiral de la flotte chré-
tienne si le roi Don Alphonse n'eût donné des ordres formellement con«
S36 ■IftTOIM DU BIMÈUf.
pour hnteroepté^. CeDefaiqa'apràsavoirsoalenu UDrudecom»
bai et éprouvé des angoisses mortelles qae les masnlmans par-
vioreot k regagner le rivage.
Les troapes mérînides enfermées dans Àlgéciras furent enfin^
rédaitesk une telle extrémité qu*elles offrirent d*évacoerla plaee
moyennant une honorable capitalation. Le roi accepta les condi-
tions, les remplit fidèlement et renvoya la garnison en Maghreb.
Algéciras succomba en Tan 743 (1 342-3). *
Le sultan accueillit ces guerriers avec une bonté qui leur fit
oublier les maux qu'ils avaient soufferts, et leur distribua tant de
robes d'honneur, de montures et de gratifications que tout le
monde en fut émerveiHé ; mais il fit emprisonner le vixir Asker*
Ibn-Tahadrlt pour le punir de n'avoir pas repoussé l'ennemi;
ce qui lui aurait été tràs«- possible avec les troupes qu'il avait à
sa disposition.
Rentré dans sa capitale, Abou*'l-Hacen demeura profondé-
ment convaincu que la cause de Dieu finirait par triompher et
que le Tout-Puissant remplirait sa promesse, en accordant aux
musulmans un retour de fortune^ et à la religion un proébaio
triomphe ; cor Dieu complétera la manifeetaiian de sa lumtàre,
malgré les tnfidiles * .
U8 PILS D'aBOU-'L-OLà SI BBlTOBiCT àDPBAS DO SULTAN BT
OBTBNHBirr LBUB GBACB PaB SCITB DB L^INTBBCBSSIOlf DO SOU-
YBBAllf UAFSIDB.
Othman-*lbn-Abi-'l-01A, prince mérinide descendu d'Abd-el-
trafres. Malgré la défense du roi, ajoute Ferreras, un oevea de l'Ami-
raote, appelé Valeotin, sacrifiant à sa cupidité l'honneur du prince,
attaqua avec furie la galère, mais celle-ei se défendit vigoureusement
et parvint A joindre la flotte musulmane. Valootio s'enfuit pour éviter
le Juste chÀlimentaaqntlil devait s'attendre de la part du roi.
^Corariy sourate 6t, verset 8. Dana le texte arabe d'Ibn-Rhaldoun
il faut lire el-kQ/iroun.
DTKASTIt XtRlRlM.— ABOC-VhACIK. {37
Baok, ëiaiichef des Volontaires de la foi, corps teoato-berbere
qoî servait dansl'Aodaioasie. Il s*y était acqais ooe haute renom-
mée en défendant les frontières contre les chrétiens, en faisant
des Gonrsea dans le territoire de Pennemi et en partageant avec
le sultan de Grenade la gloire et les dangers de la guerre sainte.
On trouvera le détail de ses exploits dans la notice que nous avons
rintention de lui consacrer.
Quand les Andalousiens appelèrent Abou-Satd à leur secours
ce monarque répondit par un refus, en prétextant qu'Oth-
man*lbn-Abi-'l-Olft tenait chez eux une position trop élevée ; il
offrit cependant de^leur venir en aide pourvu qu*on loi livrât ce
chef jusqu'à la fin de la campagne. Cette condition ne fut pasae*
oeptée.
Après la mort^d'Othman, ses fils reconnurent pour chef leur
frère atné, Abon-Thabet*Amer, et continuèrent à faire la guerre
aux chrétiens* Soutenus par de nombreux enfants et par une
foule de clients, ils formèrent un parti compact qui domina la
sultan et ne lui laissa que l'ombre du pouvoir. Ce fut Ik un de*
motifs qui portèrent le souverain de Grenade à faire sa visite au
sultan Abou-'l-Hacen. Les fils d'[Othman-]lbn-Abi-'l-Olftjugè«
rent que cette démarche ne leur présageait rien de bon ; aussi,
quand ils reçurent de leur sultan l'ordre d'assister au siège de
Gibraltar, ils s'y rendirent k contre-c(Bur.
Après la reprise de cette ville par les musulmans, le sultan da
Grenade réussit, par ses sollicitations, h obtenir la retraite du roi
chrétien et se disposa à partir pour la capitale. Les Beni-Abi-'l^
Ole, prirent alors la résolution de l'assassiner en route et, s'étant
adressés secrètement aux esclaves chrétiens qu*il avait à son ser-
vice, ils les firent entrer dans le complot. Ces gens 4è y consentirent
avec d'autant plus d'empressement qu'ils nourrissaient depuis
longtemps une haine profonde contre leur mettre, dont la hatt«>
teur et la sévérité leur étaient devenues insupportables. Le sultan*
averti du danger, avait fait ordonner h un navire de s'approcher
de la c6te pour le prendre k bord, [qUMud il serait en route],
mais, au moment où il descendait vers le rivage, les conjurés
se hftièreot d'exécuter leur projet avant qu'il ne fAt trop tard.
£38 ■WTOIRB DES BBUkRBft.
Ils attdgnireiU.ce'malheQreax prince en deçà de la CorteUdase
d'Esiepoôa et lui reprochèrent dmèreiuent sa cooduite envers
eux ; à ses excuses, ils répondirent par des insultes ; puis ,
voulant se donner un prétexte pour le frapper , ils laèrea^
devant lui son client , Acem, aduninistratevr du bureau dé
solde. Ayant ainsi fait éclater ISndignation du aultao , ils
y répondirent en le criblant de coups de lance. Rentrés aussi-
tôt au camp, ils dirent aux esclaves, leurs complices, défaire
venir Abou-'UHadJjadj-Youçof-lbD-Abi-'l-Oaéltdy frère de leur
victime, et^ d'an commun accord, ils lui prétèrenl le serment de
fidélité. Le nouveau sultan ordonna à son caïd, Ibn-Aizoua, de
partir sur le champ et de prendre possession de la capitale.
Etabli sur le. trône, Abou-'!-Haddjadj se laissa gouverocar par
aoQ chambellaii Ridouan, mais il conserva toujours aa fond du
eo^r une haine profonde contre les Beni*Abi-1-0lâ, assassins de
son frère. Aussi^ qiiand le sultan Abon-'l'^Hacen, voulant entrer
prendre une guerre sainte, envoya dans ses possessions espagno-»
les un corps de troupes sous les ordres de son fils Abou-Malek, '^
les ministres andalousiens accueillirent avec empressement l'in-
vitation secrète que ce monarque leur adressa au sujet de ces
princes, invitation que son père, le suUan Aboo-Sald, leur avait
délh faite. Tous les membres de cette famille turbulente furent
arrêtés par l'ordre d'Abou-4-Haddjadj et déportés h Tunis où le
sultan Abou-Yabya-Abou-Bekr les fit emprisonner sur la deman-
de du sultan Aboo-'UHacen. Quelque temps après, Meimoun-Ibn^
Bekroun, clief des huissiers de la cour mérinide , vint, par Tor-
dre de son souverain, afin de les conduire tous h FaJs« Abou-Yah-
ya se crut engagé par l'honneur à ne pas les livrer et repoussa la
demande d'ÂboU-'l-Hacen; mais, ensuite, il consentit à les lais-
ser emmener, sur les représentations de son vixif, Abou*Hoham*
med-Ibra^Tafragnin, qui lui fit entendre que les intentions du
souverain mérinide n'étaient paa aussi mauvaises qu'on pourmt
le croire, et qu'il mettrait ce poissant monarque sous une obli^-^
tion en les lui envoyant, lient toutefois la précwilion d'écrire à
Aboo^'I^Hacen une lettre dans laquelle il nteiroédait peureux de^
1» manière I^ pk» pressante ; déraordie conseillée aussi par le
t
II
DTNàSTU VâmUlOB. — ABOD-'^r-HACIN. t39
tirir, dans la conviction qn'uae telle priàro, de la part de son
mattre, ne serait pas repoussée. En Tan 742 (1341-3), les pros«
crils furent conduits par Ibn-Bekroun en la présence d'Âbou^*!-
Hacen^ qui était revenu de son expédition contre les chrétiens»
et, grâce à la lettre de leur protecteur, ils y trouvèrent l'accueil
le plus amical et le plus honorable. Des logements au camp^
de beaux chevaur richement harnachés, de belles tentes, «des faa«
bits magnifiques, de l'urgent, telles furent les marques de bicn<<
veillanco que lo sultan leur accorda, sans compter l^honneur
d'être admis à son service avec la solde d« première classe.
Plus^ tard, quand Abou-'l*Hacen se rendit h Geuta afin de se-
courir la ville d' Algéciras, il prêta roreille à certains délateurs
qui accusaient les Beoi-Abi-'l-Olâ de vouloir s'emparer du trAne
avec Taide d'une foule de gens malintentionnés, et, sur cette ae*
ousaiion, il les fit enfermer dans la prison de Méquinei. A l'ar^
nemeotde son fils, Abou^Einan, ils recouvrèrent la liberté, ainei
que nous le raconterons plus loin.
AlOU^LoBACUt BSVOrr BN OBIEIIT DBS CADEAlX MAGfllPfQCJBS. — IL
FAIT FOBTBB A lA HCCQOB , A MÊDINB BT A iftRCSALBM DBS
BXBM>tAlRB8 DU COTan BCBITS DE SA HAIM.
Toujours fidèle aux usages de ses aïeux, le sultan Aliou-1-»
Haccn profitait de toutes les occasions pour cultiver Tamilié des
rois de l'Orient et, animé par la piété la plus sincère, il témoi-*
gnait constamment une profonde vénération pour les lieux saints.
Aussi, quand il eut efTectué la conquête de Tiemoen, réduit- \ù
Maghreb central et soumis à son autorité une multitude des peu-
ples, il se laissa emporter sur les ailes d'un noble orgueil et, dans
une lettre qu'il fit porter è El-Mélek-en-Nacer-Mobammed-lbn-
Galaoun, roi de l'Egypte et de la Syrie, il lui annonça le triom-
phe de ses armes et l'opplanissement des obstacles qui avaient
empêché les pèlerins du Maghreb de se rendre àla Mecque. Pares-
Ibn-Meîmoun-lbn-Ouedrar, qui porta cette dépêche en Egypte,
240 «STOIItl ht% iBRBtaKS.
revint avec une nSpoose destinée à consolider la bonne intetli-'
géncequi avait toojonrs régné entre les deoz coars.
Le sultan forma alors le projet d'écrire de sa propre main un
bel exemplaire du livre saint et d'en faire cadeau au temple de la
MecquOf afin de mériter, par cette offrande, la faveur divine. Sa
tâche accomplie, il fil appeler des relieurs pour dorer et orner le
volume, des lecteurs coraniques pour en corriger et ponctuer le
texte. La couverture de celivre était formée de morceaux d'ébè-
se, d'ivoire et de bois de sandal, travaillés avec un art admira-
ble ] elle était garnie de lames d'or, de perles et de rubis. Les
étais étaient en cuir solidement travaillés et garnis de filets d'or.
On enferma le tout dans des enveloppes de soie et de satin, re-
couvertes de plusieurs autres en toile de lin. Le sultan retira
alors de son trésor une forte somme d'argent destiné à l'achat de
plusieurs terres en Orient, dont le revenu devait être consacré
h la rétribution d'un certain nomiuw de lecteurs qui se servi*
raient de ce livre.
Il chargea alors son favori, Artf-lbn^Yahya, émir des Zoghba
et grand oflicier de l'empire, d'une mission à la cour d'El*Mé-
lekren-Nacer et le fil accompagner par AtYa-lbn-MohelheMbD»
Yahya, chef de sea parents maternels, par le secrétaire Abou-
*l-Padl-lbn-Mohammed-lbn-Abi-Medyenet par Obbou-Ibn-Ca-
cem-el*Miiouar, chef des huissiers de la cour.\Le présent qu'ils
devaient offrir au monarque égyptien était tellement magnifique,
que longtemps après, on en parlait avec admiration. J'ai lu la
liste des objets dont il se composait, liste écrite de la main du
secrétaire Abou-'l-FadI, mais j'en ai oublié le contenu, bien que
jereusappris par cœur. Un des intendants du palais m'a cepen-
dant dit qu'il y avait :
Cinq cents chevaux de race dont les selles étaient
brodées en or et en argent et dont les brides
[avaient des mors, les uns] en or pur, les autres
plaqués ou dorés ;
Cinq cents ballots d'objets fabriqués en Maghreb,
tels que meubles, armes, beaux tissus de laine,
habits, robes, borne us, turbans, izanh raies,
•THÀSTIB MtanriDV.— AB0U->*L-H1CBH. 241
isars* unis» étoffes de soie à couleurs et brochées
en or, étoffes de soie unies, étoffes de soie bro-
dées ;
Plusieurs boucliers tirés des régions du Désert et
enduits de ce famenx vernis qui les rend si so-
lides; on les appelle lamtiens, du nom de Pani-
mal* dont la peau sert à leur fabrication ; plu-
sieurs de ces objets d^ameublement que l'on fa-
brique en Maghreb et qui sont trè&-recherchés
en Orient; déplus, une mesure de perles et de
rubis.
Une des veuves d'Abou«Sa!d ayant demandé h se mettre
en roule avec la caravane afin de visiter la Mecque, le sultan lui
en donna Taulorisation, et la confia aux soins de son ambassa-
deur. Quand elle allait partir, il la combla d'honneurs cl, dans
sa lettre, il pria te sultan égyptien de lui accorder sa haute
protection.
L'ambassade quitta Tlemcen et porta la lettre et les cadeaux h
leur destination. Elle entra au Caire au milieu d'une foule im-
mense et, longtemps après, on parla encore de la magnificence
qu'elle déploya. ËI-Malek-en-Nacer fut très-sensible à un tel té-
moignage d'égards provenant du sultan de Maghreb; il accueillit
les envoyés avec des honneurs extraordinaires, et quand ils par-
tirent pour accomplir le pèlerinage et déposer le livre sacré dans
le temple, les bontés de ce monarque ne cessèrent de les suivre.
Alors il fit apprêter un riche cadeau pour le sultan merinide ; on
y voyait des tentes d'une dimension et d'un travail qui devait
exciter en Maghreb l'admiration générale, ainsi que des étoffes
d'Alexandrie brochées en or et tissées d'une manière merveiU
leuse. Ayant confié ces objets à l'ambassade maghrébine, il la
renvoya en Afrique après l'avoir comblée de dons et d'hon^
* Vizar ou haïe, tissu de soie et laine, a la forme et l'aspect d'un
grand rdeau blanc-
* Voy. tome ni page îiâ.
T. IV. 46
iil ftl9T0lM ton f MlBklIM.
nefùn^ Cette ofirAiide fat d*oae telle beauté que, jusqu'à nos
jontÈ, ou n'a pas cessé d'en parler. Le suHau Abou--l-Hacea
transcrivit* alors un second exemplaire du Coran, tout-à-fait
iemblable au premier, et fit choix d^un des grands officiers de
sou foyaume pour le porter à Médine.
La meillettre intelligence se maintint entre les deux cours jus-
qu'à la mort d'El-Melek'^n-Nacer, sultan de l'Egypte. Cet évé-
nementeutlieu en 741 (1340-4). Abou^'l-Fidà-Ismaïl, son fils
et successeur*, reçut du souverain mérinide un riche cadeau ac-
compagné d'une lettre de condoléance. Ce témoignage d'égards
lui fut apporté par Abou-'l-Fadl-Abd-Âllah-lbn-Abi-Medyen, se-
crétaire du sultan et directeur de l'administration des impôts
C'était merveille de voir combien le sultan aimait à déployer le
faste et l'éclat de sa dignité. Il se plaisait à venir en aide aux
pèlerins pauvres en faisant leurs frais de route ; il envoyait aux
grands officiers de l'empire turc [mamlouk] des cadeaux achetés
de ses propres deniers, sans rien vouloir accepter d'eux en re-
tour. S'élant rendu maître de l'Ifrtkïa, il commença la transcrip-
tion d'un troisième exemplaire du Coran qu'il destinait à la
mosquée de Jérusalem, mais il mourut avant d'avoir terminé
son travail.
LB SULTAN BNYOlT ON CADEAU AU BOl BS HBLLU
Animé par un juste orgueil, le sultan Abou-'l-Hacen aspirait à
rivaliser avec les souverains les plus puissants, et il avait adopté
d'eux l'ufage d'offrir des présents aux monarques, ses égaux, et
d'envoyer des ambassades aux rois des pays lointams. A cette
^ Il faut probablement corriger le texte arabe et lire eêteneekh.
* Selon £1-Macrtzî, ce prince se nommait EKMélek-el-Mansour^
Self-^-dln-Abou -Bekr.
DTHASTIt MlltlIBB. '^ AMO-'i-HACIN. 249
époque, le roi de lielU était le ptds graBd des sonYeraiDs nègres,
ei «m fojsume, [pias] rapproché da Maghreb [que les antres
contrées du Soadau] était séparé de la fronlière méridionale des
états ift^iûidee par un désen large de eent joarnées de marche.
Quand Abou^'l-Hacen eut enlevé tlemcen aux enfants de
Yaghmoracen eleenqiiisleMagtireb central, la renommée porta
daoalooslespayslanooveiledeta mort d'Abon-Taoheftn et du
trtomplie de» Mérinides. Alors Mença^Mooça, sultan dont nous
aT«M parlé dans notre chapitre sur les souverains de MelliS ré«
solut d'envoyer au vainqueur une lettre de félicitation. Un inter-»
prête appartenant h la nation des Mactn*, peuple sanhadjien
établi dans le voisinage du pays des Noirs, fut chargé de porter
cet écritau sultan, et il partit accompagné de deux guideSi su-
jets du souverain de Melli.
Abou-'l-Hacen leur 6t un excellent accueil et; pendant leur
séjoitr auprès de lui, ainsi qu'au moment de leur départ^ il les
oottbU dii ses bontés. Voulani alors étaler de nouveau le faste
de sa puissMce, il fit prendre dans ton garde^nieubletme quantité
d'objets rares et précieux de fabrique roagiirebiuey et les expé»
dia au roi Mença-Soleiman, qui venait de perdre son père, Men-
ça-Mooça, et qui était monté sur le trône de Melli dépôts le dé*
part de lenrs envoyés* Ae nombre des personnes chargées d'ae«-
oompagoereette mission se (roavèrent Abou-Taleb*Mohammed*
lbn--Abi-MedlyaD, secrétaire du conseil-d*état, et Anbef, l'eU'-
niN|ae, •ffraochî do sultan. D'après les ordres d'Abou-'l^Hacen,
AU«lbn<^ha«i0a,ëflBirdela tribu makilienne de Djar-AUab, Ara-
bes do Désert, eotreprii d'escorter les voyageurs josqo'à MeHi et
da les ramener en Maghreb*
Après avoir aopporté les fatigues d'one longue marche h ifh^
ver» le Déseft, la caraTanefit son entrée k MeHi et y trouva
l Tome n, page 112 et suivantes;
* Voy. tome m^ page 288, note.
24i BlSTOmB DBS BIBBIUS.
''accueil le plos empressé. Les envoyés, étant repartis poar le
Maghreb , emmeoèreot avec eux une députation composée
de grands du royaume de Melli et chargée d'oifrir an sultan
Abou-'UHacen les hommages respectueux de leur maitre et
l'assurance que ce prince lui serait toujours un serviteurdévoué,
prêt à exécuter tout ce qn'il voudrait lui ordonner.
Abou-i-Hacen ayant trouvé encore cette occasion de satisfaire
son orgueil et d'humilier un autre souverain devant sa puissance
s'acquitta du devoir de la reconnaissance, en remerciant Dieu
de ses bontés.
LR SULTAK ÉPOCSB UlfB FILLB DU SOUTBBAIlf DB Tt7inS.
Nous avons mentionné comment la fille du sultan Abou-Yahya-
Ahou-Bdkrfut tuée, avec plusieurs autres dames de la famille
royale, dans le camp que son mari, le sultan Abou-'l-Hacen, avait
fait dresser sous les murs de Tarifa. Ce prince garda toujours un
tendre souvenir* de la femme qu'il avait perdue, et il se rappela
sans cesse les bonnes qualités et la haute naissance qui la distin*
guateni, lamanière dont elle gouvernait sa maison, lagrAce qu'elle
laissait percer môme dans ses moindres actions, les agréments de
sa société; les charmes d'une compagne auprès de laquelle il
avait goûté toutes les douceurs de la vie. Remplacer ce vide par
une sœur de celle qu'il avait perdue fut alors son plus grand dé*
sir, et une demande è cet effet ne tarda pas d'être adressée an
sultan de Tunis. Pour conduire cette négociation délicate, le gou-*
vernement mérinide fit choix d'Artf-lhn-Yahya, émir des Zoghba
et ami intime du sultan, et lui donna pour collègues Abou-'l-Padl<
Ibn-Abd-Allah-lbn-Abi-Medyen, directeur des contributions et
ministre de la guerre, Abou-Abd-Allah-Hohammed-Ibn-Solei-
\ Lisez hanUuui dans le texte arabe.
DTNA8TII KtllKIDI. — ▲■OIH'l.-HÂCni. Si5
man-es-Sitti, jurisooDSultadelacoar, etl'eaaaqaeAnber, affran-
chi do sultan.
Ces envoyés arrivèrent à leur destination l'an 746^ et y trou-
vèrent la réception la plus honorable. Le sultan Abou-Yabya-
Abott-Bekr, ayant été informé secrètement de l'objet de leur mis-
sion par le grand chambellan, Abou-Mohammed-Abd-Allah-Ibn-
Tafragufn, y montra d'abord une grande répugnance, en décla^
rant qu'il ne voulait pas exposer une autre de ses filles è la né-
cessité d'être toujours en voyage de pays en pays et qu'il regar-
dait un mariage de cette nature comme une chose épouvantable. Le
chambellan tâcha de réfuter ces objections et de faire valoir les
droits d'Abon-'l-Hacen i une telle faveur delà part d'un monar->
que auquel il s'était déjà attaché par les liens d'amitié et de famille.
Quand il eut réussi à faire accueillir son avis et à obtenir du sul-
tan l'autorisation de dresser l'acte de mariage, il se mit è prépa*
rer un équipage magnifique et un riche trousseau pour la fian-
cée. Les ambassadeurs durent attendre un temps considérable
avant que ces apprêts fussent terminés, et ce ne fut que dans le
mois deRebift 747 (juillet-août 4346), qu'ils se trouvèrent en
mesure de quitter Tunis.
D'après les ordres du sultan hafside, son filsBl-Fadl, seigneur
de B6ne et frère-germain de la princesse, se chargea de la con^
dttire auprès d'Abou-'l-Haoen, envers lequel il fallait agir avec
de grands égards. Une députation de cheikhs almohades, présidée
par Abd-el-Ouahed-lbn-Akmaztr, partit de la cour de Tunis ^
pour accompagner le cortège.
Les voyageurs étaient déjà en route quand ils apprirent la mort
du sultan Âbou-Yahya*Abou-Bekr. A l'arrivée de la caravano
* Le texte arabe porte en plus ces mots yaum methna, fesi-k-
dire au jour de redoublement^ ce qui doit signifier le 30 de Don-el-
Hiddja, mois qui, dans les années embolimiques (et l'an 716 en est
df? nombre), compte un jour de plus que dans les autres années.
Cette date repona au M avril 1346,
* Dans le texte arabe il faut probablement lire aite babihù
%él6 WBTOIW DBS iftHilft
Abon-^-Haceo leur offrit ses compUoieols de coi^doléwoe ei |^
combla d'honnears. Au prince El-Fadl, il fit leB prooiasAes les
plus flatteuses, en rassurant qu'il l'aiderait à obtenir I'bérii#ge
paternel, et il le retint auprès de lui, dans le palais, jusqu^à c^
qu'il l'emmenfti sous ses drapeaux a la oonquéte de Tlfrikïa.
LB SULTAK S*BIIPâlft PB L'iFIltftU.
Depais longtemps, le sultan Aboa-I^Haceii avait des vues %m
1 IfrtkVa, et, sans les égards qu'il devait à son beacHpère, le sut-
tan Abou«Yahya-»Abou-Bekf, il aurait déjë tenté la conquête 4e
ce pays. Il attendit, en eonséquenoe, la mort de ce souverain
avant de mettre son projet ii exécution. Qiiand les ambassadeurs
qui devaient demander pour lui la main d'une seeoiide princesse
hafsidese trouvèrent ii Tunis, le bruit eoumt dans Tiemcen qu'ils
avaient essuyé un refus. AnssitAl qu'il apprit cette nouvelle, il
quitta la llaosoura et oeurnt h Fcb afin d'ouvrir le bureau d'en-
nMementset de réorganiser son armée. Ces préparatifs achevée,
il confia le gouvernement du Maghreb-el-Acsa k son petîl-fils,
Mansour*Ibn*Abi*Malek, plaça la cavalerie do la police sons les
ordres' d'EUHacen*ibn-6eleimau-lbn*Irctgoen, auquel il donna
aussi le commandement de tons les peiipirs qui vivaient snoe la
tente , et repartit ensuite pour Tiemcen, avec l'intention d'en-»
vahir rifrfkïa. Ayant alors appris d*iiiie manière certaine ^(ne
aa demande avait été agi'éée et que la princesse venait de se met-
ire en route, il laissa refroidir sa colère et rentra dans son calme
habituel.
Danslemoisde Redjeb, 747 (oct.-nov^ 1346), Omar, fils du
sultan Abou-Yabya-Âbou Bekr, s'empara du trône de l'Ifrikïa,
après la mort de son père, et. dans te mois de Bamadan (déc«
' Lisez faawed dans le texte arabe.
1346 -^jan. 4347), Abou-^MohaiBmed-ibQ^Tafragatn s'enfuît de
Tttoîs [et passa en Maghreb], Ces évéoemeots raoioièrent les
pensées ambitieuses d'Abott-4-Hacen qui, après avoir entendu les
oonseils et les encouragements d'ibn -Ta fraguln, o'bésita plus de
' marcher contre Tlfrtkïa. Bientôt après l'arrivée de rexf>cham*
lan, on apprit qu'Omar le hafsiJe venait de tuer son frère Âhn
med| lequel avait essayé de faire valoir ses droits à la succession
et qui avait appuyé ses prétentions sur un acte officiel dressé par
son père. Celte pièce portait en marge les mots vu^t approuvé,
que le suUan Abou*'l-Hacen y avait ajoutés de sa propre majq,
h l'époque où Abou-'l-Cacem-lbn Ottou était venu k f^ en mis-
sion, et sur la demande de ce chambellan.
Abou-'l*Hacen témoigna une vive indignation contre Omar
d'avoir enfreint les dispositions de son père, versé le sang de
son frère et agi en parent dénaturé envers le reste dosa famille ;
il afiecta surtout une colère extrême en voyant méoonnattre in
formule d'approbation qu'il avait écrife lui-même et qui devait
servir h régler Tordre de la succession au trône. Il s*éiait donc
bien décidé à marcher sur Tunis quand Khdled-Ibn*Hamza-Ibj)«>
Omar * vint le prier de se mettre en campagne le plus tôt p9f(^ir
ble. Sur le champ, il ouvrit le bureau d'enrôlements et gratiScn'*'
tions, convoqua tous ses peuples è une expédition contre l'Urt^*
kïa et se mit à organiser une armée.
Abou-Abd-Allah, seigneur de Bougie, était déjà arrivé en Ma-
ghreb, à la suite de la mort de son ^rand-père, Abou-Yahya*
Abou-Bekr; ayant conçu l'espoir de gagner les bonnes grAcea
d'Abou-'l-Hacen en faisant valoir la mission que son père, l'émir
Abou-Zékérïa , avait remplie auprès de ce monarque. Il désiraii
aussi se faire confirmer dans le gouvernement de Bougie ; mais,
s'étant bientôt aperçu que le sultan, au lieu de le favoriser, vou-
lait marcher en personne contre l'ifrtkïa, il demanda son congé et
repartit pour Bougie.
* Chef des Kaonb.
S4S HI8T01RI DBS BBBBftftIS.
Après avoir célébré la fête du Sacrifice^ Pan 747 (25 mar&
4347), lesultaD Abou-'l-Hacen cooGa l'administratioD politique
et financioredu Maghreb central à son fils, Abou-Einan et, s'élant
mis h la tète de son armée, il partit pour PifrîkYa, emmenant avec
lai Rbaled-Ibn-Hamza, émir des nomades. Arrivé à Oran, il reçut
les envoyés de Gastîlïa et des villes du Djcrîd. Cette députation
avait pour président Abmed-lbn-Mekki , émir de Djerba et liou^
tenani-gouverneurde Cabes, ville dont son frère, Abd-el-Mélek,
était seigneur. Parmi ses compagnons de voyage , se trouva
Yahya-Ibn-Mohammed-lbn-Yemloul, qui avait repris la ville do
Touzer, quand l'émir Abou-'l-Abbas- Ahmed Tévacua pour aller
se faire toer à Tunis ; on y remarqua aussi Ahmed-lbn-Omar-
Ibn-Abed et Ali-lbn-el-Khalef, qui avaient profité de la même
occasion pour rentrer, le premier, dans Cafsa et le second, dans
Nefta*. Avec ces chefs vinrent les notables de leurs villes respec-
tives. Tous prêtèrent au sultan Abou-1-Hacen le serment de fidé-
lité et lui présentèrent les hommages et la soumission de Moham-
med4bn-Thabet, émir de Tripoli, qui n^avait pas pu les accom*
pagner. Le souverain mérinide fit à ces chefs un honorable ac-
cueil et, les ayant confirmés dans leurs commandements, il leur
donna Tantorisation de repartir pour leurs états, mais il retint
Ahmed-Ibn-Mekki; dont il désirait la compagnie dans cette expé-
dition.
Bep renant ensuite sa marche , il se porta rapidement jusqu'à
Beui-Hacen, dans la province de] Bougie, et là, il reçut la visite
deltfansour-Ibn-Mozni, émir de/^Biskera et du Zab,qui vint [lui
présenter ses hommages] , à la tête d'une députation composée
des notables de Pendroit où il faisait sa résidence. Yacoub-Ibn-
Ali-Ibn- Ahmed, chef des Douaouida et commandant des peuples
nomades qui occupaient les campagnes de Bougie et de Constan-
tine, se présenta aussi [et reconnut l'autorité mérinide]. Le sultan
1 Dans le texte arabe jl faut insérer'entre les mots raïs Nefia, ces
moia*ci : Cafêùi^UQ Àli^Km-Khalef rw.
DTIfÂSTIB MtllHIDB. ABOH-'l-HAGIH. 849
eur fit à touH an accueil |$loin de bienveillance et les admit dans
sa fuite.
Son caïd, Hammou-Ibn''Yahya*el-AcheriY client du feu sultan
[Âbou-Saîd], alla camper devant Bougie» ville où commandait
Abou-Âbd-Allah. Les habitants, craignant la colère d'Abou-4-
Hacen et désirant mériter sa faveur, refusèrent d'obéir à leur
émir et finirent par le laisser dans un isolement complet. Leurs
cheikhs, leurs cadis, leurs muftis et leurs conseillers munici-
paux se rendirent tous à une grande audience donnée par le sul-
tan: audience à laquelle Fareb, affranchi dlbn-Séïd-en-Nas, les
avait devancés pour annoncer la soumission d'Abou-Abd-Allah
dont il était leohambelUn. Le sultan renvoya Pareh, en le char-
geant d'avertir cet émir qu'il aurait a se rendre au-devant du
cortège impériaL Quand les étendards de Parmée mérinide pa-
rurent sur le haut des collines qui commandent la ville, Abou-
Abd-Allah accourut auprès du sultan et demanda pardon d'avoir
tardé à lui offrir ses hommages. Abou-'I-Hacen l'accueillit com-
me un filsbien-aimé, agréa ses excuses et lui donna en fief le ter-
ritoire des Koumïa, dans le pays des Honein, avec le droit è une
forte pension, payable à Tiemcen. ]l le fit aussitôt partir pour
cette ville en le recommandant à la bienveillance d'Ahou^-Einan,
gouverneur du Maghreb central. Ayant alors fait son entrée dans
Bougie, il y mit fin à une foule d'abus et réduisit les impôts d'un
quart ; il en restaura les fortifications, y installa une garnison
mérinide sous les ordres de Mohammed4bn-eth-Thouar, un de
ses vizirs, et, laissant auprès de cet officier le secrétaire des fi^
nances, Bérékat-Ibn-Hassoun-lbn-el-Bouac, il partit pour Gons*
tantine au plus vite. L'émir de cette ville, Abou-Zéid, petit-fils
du sultan Abou-Yahya-Abon-Bekr, sortit au-devant do lui avec
Abou-'l-Abbas- Ahmed, Abou-Yahya-Zékérïa et ses autres frères.
Tous firent leur souinission au sultan mérinide, se démirent de
leurs commandements en sa faveur et lui jurèrent fidélité. Pour
les récompenser de celte démarche, il accorda à l'émir Abou-
Ztid) le gouvernement de Nedroma, ville de la province de
Tiemcen , en lui ordonnant de partager avec ses frèr^e les
imp'Isde cette localité. Étant alors entré dans Conslaiilîiie ,
250 OISTOiaU m» MMtAi9.
il y élaUit, enqualité de gouverneur, Mobamoied-Ibn^ei-Abbas,
et plaça auprès de lui une garoison composée de Beui-Asker [mé*
rioides] et oommandée par El-Abbas-lbu^Omar, chef de cette
tribu. Il confirma alors les Douaouida dans la possession dos fiefs
dont ils avaient ia jouissance.
Il était encore à Constantine quand Oinar-Ibn-Hainza, sei^
gneur des Kaoub et oommandant de la population nomade [de
l'empire hafaîde] vint le prier de bâter son départ, en lui repré^
sentant que le sultan Abou^Hafs^mar avait quitté Tunis et s'é~
tait dirigé vers Cabes avec ses partisans, las Aulad-Mohelhel,
rivapx des Kaoub. Il loi recommanda aussi d'envoyer un ôorps
d'armée sur la ligne de marche quo oe prioce devait suivre, afin
de l'empêcher de se réfugier daus Tripoli. Le sultan approuva
cat avis et ordonna an caïd SammQu-lbo*Yahya-el-Aeheri d'ae-»
oompagner ûnMiMbn*Samsa et de prendre avec lui un détache.,
ment des troupes mérinides et de la milice.
Pendant que cette colonne marchait ^ la poursuite de l'usur-^
pateur, le sultan se tant à Constantine et passa son armée en re-»
vue sur le plateau d'Sl-Adjaf ^ Youçof-ibn-MoKot prit alors la
route du Zab, après avoir reçu un beau cheval et une robe d'hon-*
neur; le seigneur EUFadI, fils dn aultan Abou*Yahya-Abou->
Bekr, obtint vers la lodme époque, sa eonfirmatioii daos le goo-
vemementde Bôoeet partit pour cette viUe, cemblé de dons et
revêtu d'une robe magnilique. Après le départ do ces chefs la
sultan reprit sa aiarohe. '
IpAOolooMde HMQmott*lbn-Yah}a, sooUmoepar les nomades
qui obéissaient apx Aulad-Abi^'ULeil, réussit à atteindre l'émir
Abon^Bafs^Omar à Mobarka, aur le leiritoire de Cabes. Dans le
Gontbat qui s'ensuivit, Omar fut précipité de son cheval et fait
priaonuiar, ainsi qaeraffranehi d^origine européenne, Dafer-^aS'-
SiMn«qnitiii servait de ministre. Bammou les fit égorger,
* Variante : EUAdjab, C'est probablement le plateau de Koudia-t-
Ati. Il est ce^ndant bon de Mre observer qu'entre le Koudia et la
vilto 4» fi$««|PQtJif il 7 avait fm dw^le 4é4^. i iM'A^'4di^.
DTNAST19 XtEUflPI* — AJM>D-'l.-HÂCB!f. VU
la même fiuit, et eovoya leurs létes «a soltaH, Im àéhria
de l'armée vaincue s^étant réfugiés dans Cabeft, Abd-el-Mélek-
Ibn-Hekki, gouverneur de eelte vtlle , fit arrêter Abou-*1-
Gaoem-Ibu-Oitou, cheikh des Ahnobades qui s'était attaché k h
fortune d'Abou-Hafa-Oaiar, ainsi que 6akhr*lbu*Mouça, cheikh
des Beni-Heskin, et plusieurs autres grands personnagas. Tous
ces malheureux furent enchaînés deux ë deux et envoyés au sul-
tan. Ce monarque pla<^ aussitôt son ijendre^ yahya«lbn-SoIai*
mauj chef des Beni-Askeri è la tête de Parméeet lui donna l'or*
dre de marcher sur Tunis en se faisant accompagner par Abmedk
Ibo-Mekki. Cette ville tomba au poQvoir des Mérinides. Ibo^
Hekki repartit pour le siège de son gouvernement après avoir
obtenu du sultan sa confirmation dans ce poste et reçu pour
lui-même et pour sa suite une quantité de robes d'honneur et de
montures.
Le sultan était arrivé 2i Bédja quand un courrier lui apporta
la tête de l'émir Abou-Bafs-Omar comme témoignage de la vic-
toire que les Mérinides venaient de remporter. Il se remit alors
en marche, et arriva sous les murs de Tunis, le mercredi, 8 Djo-
mada second 748 (45 septembre 4347), Les notables de la ville^
les cheikhs du grand conseil et les oiuftis sortirent h sa rencontre
pour lui présenter les hommages de leurs concitoyens Jet ils se ra-
tirèrent pleins de confianoe dans les bonnes intentions du vain-
queur.
Le samedi suivant , ' les troupes du sultan formèrent une
double baie, longue de trois ou quatre milles, depuis Sîdjoumi
oà était le camp, jusqu'à l'entrée de la ville. Les Mérinides,. tous
à cheval, se rangèrent, par classes; sous leurs drapeaux respec-
tifs, et le sultan sortit de sa tente, monté sur un beau coursier e^
nivi d'un cortège magnifique. A sa droite marchait son ami,
Ârîf-IbnTahya, émir des Zoghba, suivi d'Abou^Mohammed-lbn-
Tafragutn ; à sa gauche se tenait l'émir Abou-Abd-Allah-Moham
med, frère du sultan Abou-Tahya-Ahou-Bekr, suivi de son ne-
veu, l'émir Âbou-Abd- Allah, fils de Khaled. Ces deux princes
étaient restés en détention ëConstantine, avec leursenfants, de-
puis la révolte de l'émir Abou- Fafea « Bemis eu liberté par le
S52 HISTOIRE DBS BBBBÈEBS.
sultan Âboa-'UHacen *, ils l'accompagnèreDt à Tunis, et ornè-
rent alors le cortège de ce souverain en le suivant au milieu
d'une foule de princes et de chefs mérinides. Le sultan avança
au son des tambours, pendant qu'une centaine de drapeaux flot-
taient autour de lui. Au furet à mesure qu'il passait, les troupes
se formèrent en file et marchèrent à sa suite, de sorte que la terre
tremblait sous les pas de cette armée immense. Jamais, autant
que je le sache, une pareille journée ne s*élait vue. Entré au pa-
lais, il posa sur les épaules d'Âbou-Mohammed-Ibn-Tafraguîa
la robe qu'il venait de porter et lui fit cadeau de son cheval, avec
la selle et la bride. Toute l'assemblée partagea d'un repas qui lui
fut servi sous les yeux du sultan et, aussitôt après, elle se
sépara.
S'étant alors fait accompagner par Ibn-Tafragutn, le souverain
mérinide visita toutes les chambres du palais, demeures des kha-
lifes hafsides. Il passa ensuite dans le Ras-et-Tabiâ, parc atte-
nant au palais, et, après avoir admiré les jardins et les bassins
de cet établissement royal, il se rendit directement au camp. En-
suite il envoya dans la citadelle de Tunis une garnison mérinide
commandée par Yahya-lbn-Soleiman et, s'étant fait amener les
chefs qu'on avait arrêtés à Cabes après la défaite d'Âbou-Hafs-
Omar et qui portaient encore leurs chaînes, il les envoya tous en
prison, après avoir fait couper la main droite et le pied gauche a
Abou-'l-Cacem-lbn-Ottou ainsi qu'à Sakhr-lbn-Houça : punition
qu'il leur infligea en vertu d'une sentence émanée des muftis
auxquels il avait dénoncé leurs forfaits.
Au lendemain, il partit pour Gairouan dont il visita les anciens
monuments, les restes des édifices construits par les Fatemides
et par les Zirides, les tombeaux où reposent les saints et les doc-
teursde la loi. De là, il se rendit à El-Mehdïa et, s'étant arrêté
sur le bord de la mer, ilréfléchit sur le sort de ceux gui PavaimC
précédé ; hommes encore plus grands el plus puissants sur la
! Dans le texte arabe il faut remplacer El^Àbbas par El^Hacen,
DTKAST1B attllIIfiB. -— ▲BOUr'l.oHÀCIN. 253
terre ^ Aa commencement da mois de Ramadan (^décembre), il
revint à Tunis en suivant la route qui passe auprès du château
d*E]-Ëdjem et du ribat d'EI-Monesttr. Ayant alors établi des
garnisons dans toutes les places fortes de l'ifrikïa, il concéda aux
Mérinides les villes et les campagnes de cet empire, mais il laissa
aux Arabes la jouissance des fiefs que le gouvernement hafside
leur avait accordés. Il envoya des commandants dans toutes les
localités du pays qu'il venait de soumettre, et il s'installa lui-
môme dans le palais des rois hafsides.
Ce fut ainsi qu^leiTectua celte grande conquête, qu^il reçut la
plénitude de la faveur divine en subjuguant des royaumes et
qu'il étendit sa domination sur les élats africains, depuis Mes-
rata jusqu'au Sous-el-Acsa et de là jusqu'«^ Honda, en Espagne.
L'empire est à Dieu ; il la donne à celui de tes serviteurs guHl
veut; mais la fin [heureuse] est pour ceux qui craignent [leur
Créateur] «.
A Tunis, les poètes lui récitèrent des vers de félicitation; mais
Abou- 1-Cacem-er-Rahooï, jeune littérateur de grande espérance,
les surpassa tous dans un poëme qu'il lui adressa et que nous re«
produisons ici :
L'Orient a répondu, à ton appela ainsi que l'Occident ; la
Mecque est accourue au-devant de toif ainsi que Yathreb
[Médinfi].
L'Egypte t'a invoqué, de même que l'Irac et sa voisine ^
la Syrie; hûle-toi [à leur secours] ! les maux de la religion
se guérissent par ta présence.
Les chaires [de nos mosquées] t'ont saluée ou peu s'en est
fallu ; ces chaires d'où les prédicateurs de la vérité prononcent
le khotba en ton nom.
Nos frères, quHls soient loin ou près [de tot]^ se sont tous
empressés d'obéir à Dieu en te rendant obéissance.
* Corah, sourate 40, verset Sli.
* Ceci n'est pas un verset du Cùran^ mais un composé de plu-
sieurs fragments de versets.
Née âmê9 oipinimt mee ardeur^ avec amour ^ à U posséder ^
iait qtâê tes iifénements te rapfirochaieni ou ^éloignaient de
nous.
Dans la VUle-Blanehe * , Von se tenait à tes ordres au mo-
ment où tuparaissais à t horizon d^Bn-ffaeerîa *,
Au moment où tes députations envoyées par les pays de dai~
tiers * troui>aieni auprès de toi un bienveillant accueil.
Ce n^étmt pas par fierté que Bougie tardait [à se sou-
mettre ], mais parce que Von se plaît ^ chez elle, à braver les
dangers.
Btte faisait Voryueilleuse, mais, à Vapproche de ces trou-^
pes qui regardent les {armées les plus] brillantes comme une
preie facile^
Ses habitants, remplis d^effroi, s'empressèrent défaire leur
smêmiseion ; les factieux et leurs chefs s*hum%lièrent devant
toi.
T^nis a rempli sa promesse; sans cela, on y aurait vu un
speetaele afreHa> ; aussi, repose-t^elle maintenant heureuse
dans ton bercail.
Ses habitants n'étaient que des milans présomptueux ; mais,
seus Vinfluence de ta gloire^ ils sont devenus des faucons et des
aigles.
NaguèreSy tu étais le protecteur de leur chef; aujourd'hui,
tu e$ Vasite, le refuge ée tout fmpeuple.
Ils voieat que ta fortune a remplacé ce prince par foi, eê
que la v%e, une vie de btmheur, s*est offerte [ è lewrs souhaits] •
Um filt parvenu h l'âge viril et toutefois soumis, a travaiUé
peur te faire honneur ; H est vrai qu'il t^a eu pour père*.
I La Ville-Btenehe, e'est-à-d^ T^sms. DIoddre rrrftil app(4éa
Tunes leucos,
^ En^Nacsrïa, c'est-à-dire Bougie. Yoy. tome ii, page 51 de cette
tradactioD.
s C'est-à-dire le DjeHd et le Zab.
4 Ced est ofi comptiinent à l'adresse de l'émir Abeu- I-FAdt , fils
dasQltan.
DTNÀST» VtimDf .«^ IBÔV-'t-IIACllf . fSS
Ce [bùnhMr] n'« tenu qu*à ta justice quê Von compare Mec
raison à celle des saints khalifes [de f ancien temps].
Tu as lutté avec constance pour t empire et pour le ciel]
vois maintenant devant toi Pautel et le trône K
D'antres rois peuvent aimer le vin qui circule à la ronde^
— té plaisir que tu recherches c'est de lire le Coran et de
l'écrire.
Que d^ autres hommes passent leurs matinées à boire, — tu
consacres, par habitude, ces heures à la prière.
Que d'autres se plaisent à vider la coupe du soiry «— chaque
nuit tu abreuves tan âme du souvenir de Dieu.
Que d'autres princes soient âpres [de caractère] et qu'ils
vivent enfermés dans leurs palais, — tu n'es pas un esprit mo*
rose, tu ne repousses pas les visites de tes sujets.
Chez toi, tous les sentiments respirent ta noblesse et, favo-'
risés par la fortune , ils répandent des émanations suaves et
douces.
Cest ainsi que tu as élevé un édifice [ de gloire ] parmi les
chefs d\me grande famille dont [les prouesses] augmentent la
reuommée de [leurs odieux] Cahtan et Yaroh *;
Des chefs qui surent abattre les tyrans orgueitieux et qui^
dans la lice [de là gloire] , laissèrent Cdb et Aghleb derrière
euos comme des esclaces *.
Des héros dont les rois briguaient ta protection, qui faisaient
l'honneur de l'espèce humaine, f admiration de Vunivers ;
Dominateurs du monde, ils avaient dressé leurs trônes sur
les épaules des puissants lions*.
^«N«Mn*Ai»«
^ Lfitéralement : devant toi est le mihrah et auprèe de lui le cortège
(mpéfiat.
* La race des Arabes TemeDites descendant de Cahtan^ père de
Yarob.
' Cdb, aïeul d^UDe illostre tribu arabe ; AghUh, aieul des Aghle-
bides.
*0\i: des sept pUmites,
256 HISTOIftX DIS BBtBftUS.
»
Leur ville de Fez excita l'envie de Baghdadei [pour étreprès
d^eux] le Tigre aurait voulu être le Sebou.
Ils étaient les étoiles qui ornaient le ciel de la gloire; les uns
stationnaient dans Vest^ les autres dans Vouest.
Quel brillant cortège de chefs descendus de Yarob ! Vhomme
du pays étranger devenait arabe pour chanter leurs louan-
ges.
Abd^el-Hack se leva pour faire valoir ses droits^ et rien de
ce qu'il rechercha ne put lui échapper.
Il engendra Yaeoub^ y prince qui suivit le chemin de son père,
chemin bien battu dans lequel il ne pouvait pas s^ égarer.
Yacoub laissa Othman, épée tranchante qui fraya les voies
de Vislamisme.
Combien d'expéditions a-t-il faites pour la cause de Dieu !
expéditions qui mirent en ruine tout ce que l'infidélité avait
construit.
Toutes les fois que Dieu a voulu compléter ses grâces en-^
vers les musulmans, il les a versées sur nous tous, saints ou
pécheurs.
Dieu l'a produit pour être le flambeau de la religion or-
thodoxe et pour dissiper les ténèbres qui voilaient Véclat de la
vérité.
Dans ton progrès tu as marché selon le cœur de Dieu, et
suivi un sentier qui Va mené vers sa faveur.
Tu as soutenu de la bonne manière la cause de Dieu en la
défendant avec une lance habituée aux combats.
Tuas rendu le peuple de Dieu ton peuple et ton appui; par
tes efforts tu lui a procuré un rang et une position [parmi les
nations].
Un coup a frappé les pervers et dérangé leurs projets; un
homme s* est posé auprès d'eux y pour les réprimander et pour
les punir.
Ul y a ici un jeu de mots sur Abd-el-Hack et hack {droit).
* Oua Acaba Yacouha ; encore un jeu de mots.
stuastu stEfniDB. — abou^'l^hacen. 257
ru t%s lutté comme il le fallait pour la cause du Miséricor-
ilieux ; aussi ^ lesprêtres des infidèles redoutent ta puissance.
Tu as délivré tout un peuple des griffes des Arabes nomades ;
faisant ainsi la meilleure des guerres saintes, celle qui est la
plus nécessaire.
Le monde s^est avancé vers toi, comme une fiancée soumise
à ta volonté, parle cours merveilleux du destin.
Il n^y a point de ville dont les habitants ne souhaitent tapré-
sence; point de pays qui ne s^épanouisse à la mention de ton nom. ,
La terre n'est qu'unvaste logement dont tues le maitre, et il
n'y arrive que des amis bienvenus.
Tu possèdes lamoitié du pays par le droit de conquête, l'au^
tre moitié par héritage ; conquête et héritage I beaux titres de
possesion.
Tu l'as conquise au moyen de trois armées dont l'une avait
pour montures des planches et l'Océan, l'autre était portée sur
de nobles coursiers,
La troisième était ta bonté, ta justice et ta piété. — ' Celle-
ià, j'en atteste Dieu I fut la plus puissante, la plus victorieuse*
Chaque cheval [de tes armées] fait l'ornement de son cava-
lier ; chaque cavalier fait V ornement de son cheval.
Chaque lance est mince et flexible', chaque épée polie et tran-
chante.
On y voit des écrivains que leur épriture ^ fait vivre et qui
ne savent cependant ni lire, ni écrire;
Ils se jettent sur les plus braves cavaliers de l'ennemi ainsi
que le lion se précipite sur un troupeau de cerfs;
Des écrivains dont les lancesne se refusent jamais des coaps
fîquanis, et qm, habitués au haut style, connaissent à fond les
Journées des Arabes *.
' L'antevr joue ici sur la double signification du mot khatt {îance$^
— écriture. )
* Les Journées des Arabes, leurs guerres et combats avant l^isla-
misme, font le sujet de plusieurs ouvrages très-admirés. Les récils
4n Kitah-el-Àghani, traduits par M. Fresuel, et les notice que M.
T. iv. 47
iSS8 HISTOiEl l>lt BERikBIt.
Par la magie de cette parole : Frappe I ils produisent des
effets merveilleux^ et les épées descendent sur tes têtes des
guerriers.
Avec les orateurs^ ils savent parler unlangage beau et fleuri;
parmi les' guerriers^ ils montrent leur supériorité et leurexpé^.
rience.
Là aussi sevoit l'homme qui porte la robe du savoir et de la
piété, et sur lequel flottent les amples basques de la davi-
(tienne ^
Ilpossèdeune teinture de science; [oui, mais] elle se répand
comme un torrent ; sonintelligence jette des lumières qu^aucun
nuage ne saurait obscurcir.
Admirons aussi cette armée qui réunit les étendards de tous
les peuples ; grâce à elle^ notAS pouvons sans danger parcourir
le monde.
Quelle noble troupe ! voilà la bande qui rétablit le bon droit
et qui brxse tous les obstacles.
A tdp sire^ appartient la prééminence sur les peuples domi^
ciliés^ et sur les nomades^ nHmporte où ils se rendent ei d'où ils
viennent.
Roi juste j pieux, favorisé de Dteu, toi dont les hauts faits
sont exaltés partout et inscrits [sur les pages de l'histoire];
Tu as suivi envers nous une voie de générosité qui atteint
également les présents et les absents.
Pieux toi-même, tu honores les hommes pieux ; pour toi, le
dévot est un parent très-^approché.
Savant [dans la loi] , tu as exalté le savoir et tu recherches
avec empressement ceux qui le cultivent.
Gaussin de Perceyala insérées dans son £««ai sur Vhistoire des Arabes
peuvent donner une idée du contenu de ces anciens recueils- — On
voit que le poète joue sur la double signification des mots J&urneés
des Arabes qui s'emploient pour désigner leurs combats et Vhistoirê
de leurs combats.
^ Selon les musulmans, personne n'a jamais su travailler le fer
aussi bien que le roi David, fils de Salomon. Il fabriquait surtout
des cottes de mailles à larges basques qui avaient la réputation
d'être impénétrables.
DYNASTIE HfilkmiDK.— ABOO«'1-HACB1I. 299
Faire reloge de tes vertus est un devoir pow tout homme qui
^ait parler; mais qui pourrait compter les sables de la mer.
Combien est admirable l'abondance des dons, des cadeaux et
des bienfaits que tu répands l certes , les matns qui versent de
pareils torrents peuvent se comparer à l'Océan.
Puissent-elles ressembler toujours à ces nuages quï donnent
aux créatures de Dieu les eaux et les pâturages !
Puisse l'éloge de ta gloire s'élever toujours I puissent les
détracteurs de ton mérite rester accablés, brisés sous le poids
du mépris universel I
Puisse-tu atteindre sûrement au comble de tes vœux ! au-
cune grâce ne saurait être rebelle [à tes vœux] ni difficile [à
obtenir].
COMBAT ENTRB LES ARABE9 BT LB SULTAN. DÉSASTKB U
CAIBOUAN.
LesKaoub, famille de la triba des Soleim, commandaient à
toute la population nomade dePlfrtkïa ; fiers et'puissants, ils ne
voulaient jamais subir Pautorité de Tempire [hafside], et, dans
le temps où cette dynastie n'existait pas, ils s'étaient toujours
distingués par leur amour de Tindépendance. Lors de la promul-
gation de rislamisme, quand les Arabes descendus de Moder con-
quirent tant de royaumes, les Soleim se tinrent à l'écart , au mi-
lieu de leurs plaines, dans le fond de leurs déserts, et ne payè-
rent la dtme légale que par simple condescendance. Cette con-
duite hautaine les rendit suspects aux khalifes, et l'historien Et-
Taberi* nous assure qu'El-Mansour [deuxième khalife abbacide]
avait enjoint formellement a son fils [et successeur] El-Mehdi de
ne jamais admettre aucun individu de cette tribu au service de
l'empire.
Quand la dynastie abbacide s'acheminait vers sa ruine et
' Abou-Djâfer-Mohammed-Ibn-Djerir-et'TaberJy l'an des plus an-
ciens et des plus célèbres d'entre les historiens arabes, nous a laissé
une histoire très-volumineuse et très-curieuse des trois premiers
«iècles de l'islamisme. Il mourut en l'an 310(923 de J.-G.)
260 IlSTOIRS DBI BBlBÈRIt.
qu'une Croupe d'esclaves tirés de l'étranger, s'était arrogé tonte
Pautorité du kbalifat, les Beni-Soleim, devenus, très- puissants
dans lesdésertsdu Nedjd*, se mirent à dévaliser les caravanes de
la Mecque et de Medine, en faisant éprouver aux pèlerins lesmaux
les plus déplorables. Quand les Fatemides eurent démembré l'em-
pire des Abbacides et fondé la ville du Caire, les Soleim profitè-
rent de ce changement pour gratifier leur esprit de domination
ot leur amour du désordre : ils harassèrent également les fron-
tières des deux khalifats et rendirent les routes impraticables
par leurs brigandages. \
Plus tard, le gouvernement fatemide leur permit d'envahir l'A-
frique heptentrionale et de partir pour Barca a la suite des Arabes
hilaliens*. Jls ne cessèrent de parcourir et ravager ce pays jus-
qu'à l'époque où Ibn-Ghanîa [Palmoravide] fit la guerre aux Al^
mobades et leur enleva Tripoli et Cabes, villes qui servaient à
couvrir la frontière orientale de leurs états. Caracocb, le ghozz,
client des ATouhides qui gouvernaient l'Egypte et la Syrie, em-
brassa le parti d'Ibn-Ghanta, et plusieurs fractions de la tribu
des Soleim se rangèrent du même côté, avec une foule d'autres
nomades. Rassemblés sons les drapeaux de ces deux chefs , ils
insultèrent les villes et les campagnes de lifrîkïa, s'y montrant
partout comme les avant-coureurs du désordre'.
Après la mort d'Ibn-Ghanta et de Caracoch, quand les Hafsi-
4les eurent établi leur indépendance en Ifrikïa, les Doua-
ouida [tribu rtahide] résistèrent à l'autorité d'Abou-Zékérïa-
Yahya. Cet émir résolut de leur opposer une autre tribu nomade
et; s'étaot procuré Pappui des Soleim, en les retirant de la provinco
de Tripoli, où ils avaient leurs lieux de parcours, il les établit à
Cairouan et leur accorda des ictâ * en Hrîkïa. Introduits au ser-
* Le Nedjd est un vaste plateau qui occupe une grande partie de
l'Arabie centrale.
* Voy. le premier volame de cette traduction.
» Voy. l'histoire de Caracocb et dlbn-Ghania, dans le second vo-
lume de cette traduction.
* Voy. tome'i, p. 117, note 2.
tTNÀSTIS HÉRIIflDE. — IBOC-'L^HACBll. t64
Vice de Pempire hafsîde, les Soleifn*lai firent bicDiôt seollr leur
grande puissance et leur humeur intraitable.
Lors des luttes qui eurent lieu entre les princes bafsides, les
Kaoub obtinrent le commandement de toute la population no-
made et, toujours prêts h soutenir les divers membres de la fa-
mille royale qui désiraient s'emparer du trône, ils portèrent de
rudes coups è l'empire, malgré les châtiments qu'ils eurent èi su-
bir par suite de leur insubordination. Hamza-ibn-Omar, frère de
l'émir [Houlahem et leur principal chef,] soutintconlre notre sei*
gneur, l'émir Abou-Yahy a* Abou-Bekr, une guerre dans laquelle
les succès alternaient avec les revers et^ tant qu'elle dura, il sut
profiter très-habilement des tentatives faites par les Abd-eUOua-
dites pour étendre leur domination' sur les provinces occidenta-
les de l'Ifrrkïa. Il les décida h y envoyer des troupes chaque fois
qu'il soutenait lui-même l'un ou l'autre des princes hafsides qui
aspiraient À l'empire; maisensuite, quand le sultan Abou*>Yahya*
Abou-Bekr eut étouffé l'esprit d'insubordination dont les attein-
tes avaient tant nui à son autorité, et que le sultan abd-el-oua-
dite, l'ennemi implacable du gouvernement hafside^ eut succombé
sous l'épée d'Abou-'l-Hacen, parent et ami du souverain de Tu-
nis, il changea de tactique et fit sa soumission au prince qu'il
avait si longtemps combattu. Usant alors de la haute influencis
qu'il exerçait chez lesSoleim, il porta celle tribu, malgré elle,
à payer Timpôt [sadacat) au gouvernement. Il mourut, dans
un guet-à-pens auquel, dit-on, l'administration hafside n'était
pas étrangère.
Ses fils et successeiKs montrèrent tant d'imprévoyanee qu'ils
s'attirèrent, plusieurs fois, un châtiment sévère de la part du
souverain dont ils avaient encouru la colère. Ayant toujours en-
tendu vanter la puissance de leurs aïeux, ils ne pensèrent pas
à traiter avec le gouvernement, et, s'étént laissés emporter par
l'ambition, ils livrèrent bataille à un généra hafside, Tan 742
(1341-2), mirent ses troupes en déroute et allèrent assiéger le
sultan dans la capitale de l'empire. Indignés contre l'émir Abou-
Hafs-Omarqui les avait abreuvés d'humiliations après la mo/tde
son père, ils embrassèrent le parti d'Abou-'l-Abbas, héritier lé -
362 nSTOIRI Ml BtBBÊMN.
gitime du tr6ne, et le conduisirent h Tunis. Sept jours plus tard,
Âbou-Hafs força Tentrée de la ville, tua son frère Âbou-'l-Abbas^
«t, s'étant emparé d^\bon-'l-Haul, fils de Hamzà, il le tua de
sangfroid, à la porte de la citadelle. La nouvelle de ce forfait
remplit les fils doHamza d'une telle indignation qu'ils invitèrent
Abou-'l-Hacen à venir, sans tarder davantage, et à prendre pos-
session de rifrîkïa.
Après avoir effectué cette conquête, le sultan mérinide traita
ses nouveaux sujets avec une hauteur à laquelle le gouvernement
hafside ne les avait pas habitués,, et, dans sa conduite envers les
nomades, il adopta un système bien différent de celui que l'an-
cienne dynastie avait employé. Ayant reconnu que les Arabes
s'étaient prévalus de leur puissance pour se faire concéder, d'a-
bord plusieurs territoires très-étendus, et ensuite, un grand
nombre de villes, il leur ôta celles-ci et leur accorda, comme in-
demnité, des pensions sur l'état et une augmentation de djébaia^»
Bientôt après, il opéra une réduction dans les revenus qu'il ve-
nait de leur assigner, et, touché des plaintes que les cultivateurs,
toujours victimes de la tyrannie des Arabes, lui avaient adres-
sées au sujet du khafâra [protection), tribut qu'ils payaient aux
nomades, il défendit à ceux-ci de l'exiger et aux cultivateurs da
le payer.
Les Arabes commencèrent alors h se méfier du sultan et, se
voyant enfin accablés par la sévérité de son administration, ils
attendirent une occasion favorable afin de se venger. Cette por-
tion de leurs nomades qui vivaient de rapines et de brigandages^
eut àpeipe entendu parler de leurs intentions qu'elle glissa à tra-
vers la ligne de camps et de garnisons que les Herinides avaient
4 A toutes lesépoques, les gouvernements musulmans se sont vus
dans l'Impuissance de faire rentrer les impôts des provinces un
peu éloignées de la capitale. Pour effectuer cette opération finan-
cière ils ont toujours eu recours aux guerriers nomades, qui rete-
naient ordinairement la moitié de la somme perçue. — Par le mot
djebala Ibn-Kbaldoun parait désigner cette espèce de gratification*
DTIIÀSTII attlNIDI. — aiou-'l-hacbti. 203
établis sur les frontières de Tlfrlkïa et, s'ëtaDt avancée dansPin-
tériear du pays, elle se mit à piller les habilants et à enlever
leurs troupeaux. De toutes parts on n'entendit que des plaintes
contre les Arabes, et bientôt la bonne intelligence qui avait régné
entre ce peuple et le gouvernement mérinide fut profondément
ébranlée. Le sultan avait quitté EUMehdïa et venait de rentrer
à Tunis quand une députation de chefs arabes se présenta de-
vant lui. E!le se composait de Rbaled-Ibn-Hamza, le même qui
l'avait poussé à envahir rifrtkïa, d* Ahmed, frère de Rhaled, de
Khaltfa-Ibn-Abd-Aliah-lbn-Mesktn, chef des Âuled-el^-Cos, et
de Khaltfa-Ibn-Abi-Zeid, cousin du précèdent.. Tous ces cheikhs
reçurent d^abord un honorable accueil, mais, pendait qaUl jouis-
sait deThospitalité du sultan, une circonstance fâcheuse amena uu
grand changement dans leur position.
Parmi les gensqui formaient la suite du sultan se trouvait un
émir bafside nommé Abd-el-Ouahed, fils du feu sultan Abon-
Tahya-Zékérïa-lbn-el-Libyani. Retraçons ici l'histoire de ce
prince. Ayant perdu son père en Egypte, comme nous l'avons
dit précédemment, il rentra dans la province de Tripoli*, se
fit proclamer sultan et rallia autour de lui les Arabes nomades de
la tribu des Debbab. S'étant alors ménagé l'appui d'Abd-el~
Mélek'lbn-Mekki, seifl;neur de Cabes, il partit aveo lui et s'em-
para de Tunis pendant l'absence du sultan [Abou-Yahya-Abou-
Bekr] qui était alors occupé à détruire la forteresse de Temzex-
dekt. Ayant appris, quelques jours après, que le sultan appro-
chait, il quitta la ville en toute hâte et alla se réfugier dans Tlem-
cen. Quand Abou-'l-Uacen marcha contre la capitale abd-el-
ouadite, le réfugié abandonna ses protecteurs et trouva auprès
du souverain mérinide un accueil plein de bienveillance. Depuis
lors il était resté avec Abou-'l-Hacen et Tavait accompagné à la
conquête de Tunis.
1 L'auteur ajoute ici en Van 732, ne s'étaiit pas rappelé qu'il avait
déjà donné l'an 72^ comme ladate de cet événement. Yoy. tome, n,'
page A76.
26& HISTOIRE DBS BBRBftBES.
Bientôt après l'arrivée de ladéputalion arabe, réarir Abd-el-
Ouabed informa le sultan qu'un émissaire de ces chefs était venu
en secret l'engager à partir avec eux et à se laisser proclamer
souverain de l'Ifrikïa; ii déclara aussi qu'il avait repoussé cette
proposition comme il le devait. Le chambellan Allal-lbn-Hoham-
med-lbn-Amsmoud fit aussitôt venir les inculpés au palais et,
après leur avoir adressé de vifs reproches, il les envoya en pri*
son. Le sultan ouvrit alors le bureau de la solde et des gratifi-
cations [en vue d'une nouvelle expédition] ; puis, après avoir
célébré la fête delà Rupture du jeûne (748 — coramencemenl de
janvier 4348), il fit dresser ses tentes à Sidjoum, en dehors de
Tunis, et rappela les garnisons qu'il avait établies dans les
places frontières, ainsi que tousles autres corps détachés.
Les Aulad-Abi-'l-Leil et les Aulad-el-Cos apprirent avec effroi
que le sultan venait d'emprisonner leur députation et qu'il se dis-
posait à marcher contre eux. N'écoutant plus alors que leur dé-
sespoir, ils s'obligèrent par serment à combattre jasqu'è la mori
et ils chargèrent Abou-'l-Leil-Ibn-Hamza de se rendre auprès de
leurs ennemis héréditaires, les Aulad-Hohelhel, et d'implorer
leur secours. Après la mort du sultan Abou-Hafs*Omar, ses
partisans, les Mohelhel, avaient quitté rifrikïa et s'étant jetés*
dans le Désert pouréviter la vengeance du souverain nierinide.
Abou-'l-Leil alla,en conséquence, se mettre à la merci des Mofaelhel
et les implora d'une manière si pressante à former avec sa tribu
une alliance contre le sultan, qu'ils consentirent à sa prière et
se mirent en marche avec lui. Toutes les familles qui formaient
la grande tribu des Kaoub et toutes les branches de la tribu des
Hakhn se réunirent alors à Touzer, dans leDjerîd. Des deux
côtés, l'on renonça à ses anciennes haines, l'on se pardonna mu-
tuellement le sang versé dans leurs querelles ; pois, s'étant tous
donné la main, ils firent serment de mourir plutôt que de reou^
1er. Alors, ils cherchèrent un prince de sang, afin de le mettre
en a vaut comme sultan, et, snr les indications de quelques arti-
sans du désordre , ils découvrirent à Touzer un descendant
d'Abou-Debbous, de ce khalife de la famille d'Abd-el-Moumea
ffiû fut tué par les Mérinides à la prise de Marog.
DYNASTIE lÉBlNIDB. — ABOU-'l-HACIR. 266
Otbman, grand-père de ce personnage, était fils d^Idris et petit-
fils d'^bou-Debboas. Après la mortd^Idrts, il passa en Espagne
et fit connaissance avec Morghem«lbn-Saber, chef des Bebbab,
qui était alors prisonnier à Barcelonne. Le comte de cette ville
relâcha Morghem, négocia une alliance entre luietOthman, leur
fournit un navire moyennant la promesse d'une somme d'argent,
et les fit débarquer sur la côte de Tripoli^ Othraan passa avec
son compagnon dans la région occupée par les Debbab et, par-
venu aux montagnes habitées par les Berbères, il annonça ouver-
tement ses prétentions au trône. Soutenu par tous les Arabes
debbabiens, il essaya, mais en vain, de réduire la ville de Tri-
poli, et, s'étant ensuite procuré l'appui d'Ahmed-Ibn-Abi-'l-
Leil, cheikh des Kaonb, il marcha avec lui contre Tunis. Cette
tentative n'eut aucun succès, le parti hafside étant encore très*
puissant en IfrYkïa tandis que celui delà dynastie d\\bd-el-Hou-
men avait cessé d'eïister depuis de longues années. Othman
mourut dans Mie deDjerba. Son*fils, Abd-es-Selam, y mourut
ensuite et laissa trois enfants dont le plus jeune, nommé Ahmed,
se fit artisan. Après avoir été ballotés par la fortune et jetés de
pays en pays, ces frères revinrent h Tunis, pensant que ^histoire
de leur aïeul y serait tout-à-fait oubliée. Le sultan Abou-Tahya-
Abou-Bekr, ayant appris qui ils étaient, les fit emprisonner pen-
dant quelque temps et, en Tan 744 (1343-4), il les bannit à
Alexandrie. Ahmed rentra en Ifrîkïa et, s'étant fixé dans Touzer,
il exerça le métier de tailleur pour avoir de quoi vivre. Les
Kaoub s'étant mis d'accord avec leurs alliés et confédérés, les
Attlad-eUCos et toutes les branches des Allac, appelèrent Ahmed
au milieu d'eux et le reconnurent pour sultan. Après lui avoir
fourni une espèce d'équipage royal, composé de quelques tentes,
de beaux habits, de chevaux de main et d'autres marques de
commandement, ils l'entourèrent du cérémonial usité à la cour,
campèrent auprès de lui et partirentensuile pour aller cambaltre
Abou-'l-Hacen *.
1 Yoy. tome u, p. 403.
*yoy. tome m, p 33.
S66 aitTOIRI Dit BIRBftUS.
En l'an 748, ce monarque quitta son camp près de Tunis,
après avoir célébré la fêle du Sacrifice (milieu de mars 4348),
et marcha coptre les insurgés. Quand il eut débouché du Th^nïa,
col que Ton traverse pour se rendre de la plaine de;Tunis dans
celle de Cairouan, l'ennemi s^aperçut de son approche et com-
mença sa retraite. Pendant ce mouvement rétrograde, les Arabes
se défendirent avec une grande bravoure, mais, parvenu aux
environs de Cairouan, ils perdirent tout espoir de salut et s'ar-
rêtèrent avec la résolution de mourir les armes à la main. En ce
moment, les troupes abd-el-ouadites, maghrouienes ettoudjîni-
des qui, après avoir été vaincues par lesBeni-Merin, s'étaient
vues obligées à marcher avec eux, firent inviter secrètement les
Arabes h livrer bataille au sultan le lendemain , en déclarant
qu'aussitôt le combat engagé, elles iraient se ranger de leurcdté,
drapeaux déployés. Le 8 Moharrem 749* (4 0 avril i 348), au point
du jour, les Arabes s'avancèrent à l'attaque, et le sultan étant
moQté à choval, s'entoura de toute la pompe de la royauté et
marcha à leur rencontre. Aussitôt, le désordre se mit dans son
armée, dont une grande partie alla se joindre aux insurgés, et il
dut se réfugier dans Cairouan avec le petit nombre de ses trou-
pes qui s'était échappé, par une fuite précipitée, à la cavalerie
arabe. Son camp, son trésor et plusieurs dames de son hdrem
tombèrent au pouvoir des vainqueurs, qui dressèrent aussitôt
leurs tentes en cercle autour de la ville pendant que les bandes
de pillards qui les avaient accompagnés allèrent si^^ eter comme
des loups sur les contrées voisines. Toutes les parties de l'em-
pire se trouvèrent ainsi envahies par des nuées de brigands.
Quand la nouvelle de ce désastre (utconnue à Tunis, les gens du
sultan et son harem se réfugièrent dans la citadelle.
Ibn-Tafragutn, qui avait accompagné Abou-1«Hacen dans
cette expédition malheureuse, sortit de la ville de Cairouan et
se rendit au milieu des Arabes. Désigné sur le champ pour rem-
plir les fonctions de chambellan auprès de leur sultan Ahmed -
* L'auteur ou son copiste a mis ici en Van 729.
DTHaSTII HttlRIDB. — AB0U-*I,-H1CCR. S67
Ibo-Âbi-Debbous, il reçut Tordre de partir pour Tunis et de
mettre le siège devant la citadelle. A son arrivée, il rallia les
partisans des Hafsides, les bandes de la milice et la lie de la po-
pulace; il dressa plusieurs catapultes et commença Pattaque de la
forteresse qu'il avait fait cerner de tous côtes. Bientôt après, son
sultan, Ahmed, vint le rejoindre. Tous leseRbrtsdes assiégeants
échouèrent devant la vigoureuse résistance de la garnison.
[Sous les mors de Cairouan], la discorde éclata bientôt parmi
les Kaoub, et une partie de leurs tribus étant allée se ranger
sous les drapeaux d'Abou-M-Hacen, mit ainsi un terme aublocus
de la ville. Les Aulad-Abi-M-Leil, voyant que [leurs anciens ri«
vaux] les Aulad-Mohelhel entretenaient une correspondance ac-
tive avec ce sultan, s*en étaient inquiétés au point d'autoriser
leur chef, Abou-']-Leil;Ibn-Hamza, d'aller le visiter et de s'ar-
ranger de manière à faire lever le siège. Comme l'exécution de
cette promesse se faisait attendre, le sultan conclut ave lesMohel-
hel un traité par lequel ils s'obligèrent k l'escorter jusqu'à Souça,
port de mer où sa flotte avait l'ordre de l'attendre. Étant sorti
de Cairouan h la faveur des ténèbres, il marcha en ordre de ba-
taille avec ses nouveaux alliés et parvint à sa destination.
Ibn-Tafragutn , averti de cet événement, s'embarqua de
nuit, pour Alexandrie, et abandonna le siégequ'it avait entrepris.
]bn*Abi-Debbous resta consterné de la fuite de son ministre '
tous ses partisans se dispersèrent et la citadelle se trouva dé-
gagée.
Vers la On du mois de Rebiâ second <, Abou-'l-Hacen entra au
port de Tunis et commença sur le champ à faire réparer les mu-
railles de la ville et à les entourer d'un fossé; sage prévoyance
qui mit la place en état de mieux résister à l'avenir.
Ce fut ainsi que, par la volonté de Dieu, le sultan mérinide se
releva de sa chute et conjura les suites du desastre qui faillit le
perdre à Cairouan. LesAulad-Abi-'l-Leil et leur sultan Ahmed-
' Le texte porte de Djomada, Voy. t. m, p. 36.
t68 HISTOIRE DBS BtlBÈRBS.
Ibn-Âbi-Debboas se montrèrent bientôt sous les murs de Tunis
et en commencèrent le siège, mais les Mohelhel restèrent fidèles
àÂbou-4-HaceuetjusliGèrentla confianceqn'il leur avait accor-
dée. Quelque temps après, les fils do Hamza-Ibn-Abi-'l-Leil
changèrent d'avis et résolurent de faire leur soumission. Danslo
mois de Chftban(oct.-nov.43i8), leur chef, Omar, alla voir le sul-
tan et, pour lui prouver son obéissance et celle de sa tribu, il lui
livra Afamed-Ibn-Âbi-Debbous. Lesultan enferma le prétendant,
accueillit leur repentir et maria son fils, A|3ou-'l-Fadl, h la fille
d'Omar-lbn-Hamza. Dans la suite, cette tribu se montra tantôt
dévouée, tantôt hostile au gouvernement mérinide.
CONSTIRTIHB BT bougie R^PODIENT la domination MfiRINIDB
ET RENTRENT 80D8 l'aUTORITÉ DBS HAFSIDBS. '
Enl'an747 (13i6-'i), El-Padl^ fils de notre seigneur Abou-
Yahya-Abou-Bekr, conduisit à Tlemcen sa sœur-germaine,
fiancée du sultan Abou-'UHacen. Il était encore en route quand
il apprit la mort de son père. A son arrivée, le souverain méri-
nide lui fit l'accueil le plus empressé et le combla d'égards et de
faveurs. Voulant le consoler de la perte qu'il venait de faire, il
lui fit entendre^ d'une manière vague, que le gouvernement du
Maghreb l'aiderait à monter sur le trône de ses aïeux ; aussi,
quand il entreprit son expédition contre l'ifrtkïa, le prince hafsi -
de s'attendait à être bientôt mis en possession de ce ro-
yhume. Cette espérance ne s'accomplit pas : après avoir vu le
sultan s'emparer de Bougie et de Constantine et l'avoir suivi jus-
qu'à Tunis, EUFadl dut se contenter du gouvernement de Bône,
ville où il avait déjà commandé du vivant de son père. D'après
l'ordre d'Abou^'UHacen, il s'y rendit sur le champ, mais il gar-
1 Voy. tome m, page 36. — Ici le texte arabe porta vers la fin dû
Djwnadù,
BT1VA8TIB SÈUIHDB. *-<- ABOO-^L-HACEK. 269
(la dans son cœur une profonde rancune et le désir de se venger.
La défaite du sultan aux environs deCairouanlui inspira la pen-
sée de s'emparer du royaume paternel par la force des armes, el
bientôt il trouva une occasion qui favorisa ce projet.
Les habitants de Bougie et de Constantine supportaient avec
impatience la domination des Mérinides, peuple dont la conduite
dure et hautaine contrastait d'une manière fâcheuse avec l'admi-
nistration douce et indulgente à laquelle le gouvernement hafside
les avait habitués. La nouvelle de la déroute de Cairouan leur
donna le courage de secouer le joug qui les accablait. Eo ce mo-
ment', la ville de Constantine était [remplie d'étrangers : une ca-
ravane partie du Maghreb venait d'y arriver avec plusieurs dé-
putations et quelques troupes du même pays qu'un des jeunes
fils du sullan conduisait à Tunis par l'ordre de son père.Les gou-
verneurs des provinces maghrébines qui devaient rendre compte
au sultan de leur administration et lui remettre es impôts qu'ils
avaient perçus, y étaient déjà depuis le commencement de l'année.
On y voyait aussi plusieurs chefs chrétiens chargés par leur roi , le
fils d'Alphonse, de remettre au sultan Abou-'l-Hacen un autre de
ses fils, l'émir Tacheftn. Ce prince, qui avait l'esprit dérangé,
était resté prisonnier chez les chrétiens depuis la fatale journée
de Tarifa; mais., maintenant que la paix s'était établie
entre les deux souverains, que leur amitié avait été cimentée par
de riches cadeaux et que Tlfrlkïa était tombée au pouvoir des Mé-
rinides, il avait obtenu l'autorisation d'aller rejoindre son père.
Les chefs qui l'accompagnaient devait complimenter Abou-'l«
Hacen au nom de leur mailre et le féliciter du triomphe de ses ar-*
mes. Il y avait encore une députation des gens de Melli, princes
des peuples nègres de l'Occident. Elle venait de la part de leur
roi, Mença-Soleiman, afin de complimenter le sultan sur la con-
quête de rifrlkïa. Enfin, YouçoMbn-Hozni, émir et administra-
teur du Zab, s'étant mis en route avec l'intention de porter au
sultan le revenu de cette province, apprit l'arrivée de ces envo-
yés à Constantine et jugea convenable de s'y rendre aussi afin de
les accompagner jusqu'à la cour. Tout ce monde se trouvait réuni
dans la ville et entouraient de leurs respects les deuxfils du sultan.
S70 HISTOIRE DBS BIRBftRBS.
•
Les fortes sommes provenant des impôts et les autres riches-
ses dont ces députations étaient chargées avaient déjà excité la
cupidité * de la populace quand on apprit la défaite du sultan
auprès de Cairouan. A cette nouvelle, les gens du peuple se tin-
rent prêts à piller les trésors de la caravane, pour se venger, di-
saient-ils, de la tyrannie des Mérinides. Pendant ce temps ,
leurs cheikhs, avertis qu'El-Fadl venait de lever le masque et de
se déclarer indépendant, expédiaient un messager h Bône pour
inviter ce prince à venir sans retard aQn de prendre lecomman-
dementde leur ville. Les Mérioideset leurs amis ayant su qu'El-
Fadl approchait à grandes journées, s'enfermèrent dans la cita-
delle avec les fils du sultan, et Ibn-Mozni courut se mettre en sû-
reté au camp, où il avait laissé un corps de troupes sous les or-
dres de Yacoub-Ibn-Âli, émir des Douaouida. Les habitants de
Gonstantine affectèrent de prendre la défense des Mérinides afin
de leur inspirer une fausse sécurité et donner à £l-Fadl le temp»
d'arriver ; puis, à la première vue de ses drapeaux, ils entourè-
rent la citadelle , forcèrent la garnison à capituler et l'envoyè-
rent [avec les ambassadeurs] au camp de Yacoub-lbn-Ali, après
les avoir complètement dépouillés, au mépris du traité qu'ils ve-
venaient de conclure.
D'après les conseils d'Ibn-Mozni, tous ces voyageurs l'accom-
pagnèrent à Biskera d'où ils pouvaient se rendre plus facilement
auprès du sultan. Us se mirent en route, escortés par Yacoub-
Ibn-Ali, dont l'autorité s'étendait alors sur tout le pays ouvert.
Quand ils furent arrivés à Biskera, Ibn-Mozni les traita delà
manière la plus hospitalière et pourvut abondamment à leurs
besoins, en se réglant d'après le rang de chacun et l'importance
* A la lettre : leurs lèvres suintaient le lait ; tournure analogue à
l'expression française: cela leur faisait venir Veau à la bouche. En
anglais, on dit de la môme manière : that maJe iheir teeth water
{cela leur faisait suinter Veau des dents).
DTVASTfB MtBIKIDI. — IBOU-VbACBH. VU
plus OU moins grande que chaque ambassade devait avoir aux
yeux du Bultan. Dans le mois de Redjeb[sept,-oct. 4348] ils ar-
rivèrent à la cour, sousla conduite de Yacoub-Ibn-Âli.
Bougie s'empressa de suivre l'exemple donné par Constantine :
la populace mit au pillage les logements occupés par les gens du
suUani par ses troupes et par ses officiers d'administration ; puis,
ayant dépouillé tous ces malheureux, elle les chassa hors de la
ville et les laissa partir pour le Maghreb. L'émir £l-Fadl< reçut
par un courrier extraordinaire la nouvelle de cet événement et
l'invitation de se rendre à Bougie sur le champ. Il confia aussilAt
le commandement de Constantine et de Bône à deux officiers de
haut rang et d'une fidélitééprouvée auxquels il avait accordé son
amitié. Arrivé à Bougie dans le mois de Rebift (juin ou juillet
4348), il y releva le trône de ses ancêtres, mais il ne le conserva
pas longtemps. Nous parlerons ailleurs de ce qui se passa plus
tard entre lui et le sultan.
LBS PILS DU SOLTAN USUBPENT l'aUTORITÊ 8UPBÈ1IB DANS LB
■AGBRSB CBIfTBAL BT DANS LB MAGHBBB-EL-ACSA* ABOU-
BINAN BESTB HaItSE DE CBS DBUX PATS.
L'émir Abou-Einan, fils d'Abou-'l-Bacen et gouverneur du
Maghreb central, ayant vu arriver dans sa ville de TIemcen plu-
sieurs débvis de l'armée de son père qui étaient revenus de l'If-
rfkïa, les uns par bandes, les autres isolément, et tous dans le
plus grand dénuement, ajouta foi aux bruits qui couraient dans
le public et, sous l'impression que le sultan avait perdu la vie à
Cairouan, il résolut de s'emparer do tout le royaume à l'exclu-
sion de ses frères. Comme il avait mérité l'estime et l'affection
de son père par la régularité de sa conduite, par sa piété et par
^ Deux fois dans le texte arabe de ce chapitre on a imprimé Abau
l-Padl, à la place d'E^-FadL
272 HISTOIRE DES BBEBBSES,
sa profonde connaissance da Coran, il pouvait avec jastîce aspi-
rer an trône.
Nous avons déjà parlé d'Othman-lbn-Yahya-Ibn-Djerrar,
cheikh des Aulad-Tîdoukcen-Ibn-Tâ-ÂlIahS tribu abd-el-oua-
dite, et mentionné qu'il jouissait d'une certaine considération à
la cour. Cet homme, ayant obtenu du sultan Abou-'l*Hacen ia per-
mission de rentrer en Maghreb, quitta le camp, à £l-Mehdïa et,
arrivé à Tlemcen, il alla se loger dans le Zaouïa^ d'El-Obbad. Aus-
tère de mœurs, compassé dans toutes ses actions, profondément
versé dans l'histoire des temps anciens' et singulièrement taci-
turne, il donna lieu de croire [par son savoir et sa tenue,] quUl
prévoyait l'avenir.
Abou-Einan, qui avait un extrême désir de savoir ce qu'était
devenu son père, crut obtenir de cet homme quelques renseigne-
ments à ce sujet, et, Payant envoyé chercher, il lui fit un accueil
plein d'affabilité. Ibn-Djerrar n'était pas bien disposé pour le
sultan : aussi, ne manqua-t-il pas de donner carrière à son ima-
gination et d'adresser M'émir plusieurs paroles qui lui laissaient
entendre la chute de son père dans un abîme ; ensuite, il lui offrit
des félicitations sur son prochain avènement au trône. Voyant
qu'Abou-Einan prétait ii ses discours une oreille attentive, il se
conduisit avec tant d'adresse qu'il s'empara bientôt de son es-
prit. Quand la nouvelle du désastre de Cairouan parvint à Tlem-
cen, il fut tellement convaincu de la mort du sultan qu'il con-
seilla à l'émir de saisir l'autorité suprême avant qu'elle ne tom-
bât entre les mains de ses frères. Il rapporta en môme temps les
bruits qui couraient dans la ville au sujet de la mort d'Abou-'l-
^ Voy. tome ni, page 420.
• Voy. tome i, page 83.
3 Djohétna-ta-Khabr-^n (historien aussi véridique qu'un membre de Im
tribu des Djohiïna), Un proverbe arabe dit ; anda DjehéïncL-4''il^kha'^
bro-'l-yakin ( chea les Djohéina on trouve les^ bons renseignemMits .) -^
(Spécimen hist. arab. de Pocoke, édition d*Oxford, 4806, p. il.
DYMASTIB HKRMIDE. -*- ABOC-'l-RACEM. 273
HaeeB. Ahouc-Binan s'y laissa enfin décider qaand il sat qa<) le
gouverneur des proTinces lAaghrebines et commandant de Fer,
NmirMansour, fils d'Abou-Mélek el petit-fils du sultan, avait
profité du départ des troupes et des chefs mérinidcs pour s'em*-
parer|dn pouvoir, et qu'il venait d'ouvrir le bureau des gratifiça^
lions et d'enrAler des cavaliers et des fantassins, sons le prétexte
peu croyable d'aller an secours de son grand-père.
EUBacen-lbn-Soieiman-lbn-Irztguen;. gouverneur de ta cita^
délie de Fez ei chef de la cavalerie qui faisait la police'de la cam-
pagne, s'apef eut du projet de Mansour eft sollicita Tautorisation
d^aller joindre le sultan. Cette faveur lui fut accordée sansdifli*
eoUé, tantle jeune prineo désirait Véloignement d'un homme
aussi puissant. En partant, H reçut de Mansour l'ordre d'emme-*'
ner avec lui les administrateurs des tribus masmoudiennes et
des provinces marocaines, vu que ces officiers avaient à remettro
au snifan les impôts qu'ils venaient de recueillir.
Quand cette compagnie de voyageurs arriva dans Tlemcen,
Aboti-Einan, maintenant bien décidé à prendre en marn l'auto-
rité suprême, saisit l'argent qui lui était venu sr b-propos et,
s'étant emparé des trésors que son pèrre avait laissés dtfMf Itf
Mansoura, il se fit proclamer sultan. Ceci eut lieu dans le mois
do Hebifl [premier] 749 (juin 4348). Étant alors monté aur i^
trAne, dans la grande salle du palais, il reçut des hauts fonction*
nanres de l'empire le serment de fidélité. On lut ensuite auxassrs^
tants l'engagement qtie ces chefs venaient de prendre, et quand
tiMles les classes inférieures eurent suivi leur exemple, on leva
faséanco.
Le nouveau sultan, ayant posé les bases do son autorité, sfor^^
lit à cheval, au milieu des insignes do la royauté et marcha, h la
(été i^an cortège magnifique, jusqu^au Kiosque do rhippodrèniv
[CohbB^t^t'Metdb). A ce spectacle inattendu», le peuple fut safsi
de eoneternation et se dispersa de. tous les côtés. Bacen^lbn-So'^
leiman-Ibn-Irzîguen fut nommé vizir , Fares-lbn-Meimoun-lbn*
Ouedrar lui fut adjoint comme lieutenant, mais Othman-lbn-
Dîavrar obtint la préséance aur ces deux: mmtstfes. Le secrétaire
Aboo-Abd-AlIah-lbn-llohammed, pe(it-fils du cadi Abd-*Altalf^
T. nr. 18
274 HtSTOIRB DES BBRBEEBS.
IbD-AbUOmar, devant Pami et le conGJt^nt du souverain. Nous'
»
donnerons plus tard une notice de ce personnage.
Abou-Einan ouvrit alors le bureau des izratifications, enrôla
tous les soldats de son père qui s'étaient réfugies dans Tletncen
et leur fournil les chevaux, les habits et les gratifications d'u-*
sage. Pendant qu'il organisait ainsi une armée aGn d'envahir le
Maghreb, il apprit* que Ouenzemmar^bn-Arif-Ibn-Yahya, émir
des Zogbba, ami intime du sultan Abou-'l-Hacen et commandant
de tous les nomades de l'empire, avait rassemblé ses Arabes
ainsi que les Zénata du Maghreb central et qu'il marchait sur
Tiemcenavec I intention de soutenir la causé do son mattre et
d'étouITer, par les armes, la révolte qui venait d'y éclater. A.
cette nouvelle, AbourEinan donna au vizir El-Hacen-Ibn-Solei-
man le commandement de l'armée et l'envoya à la rencontre de
Ouenzemmar; Il mit aussi à sa disposition toutes les fractions des
Béni' Amer qu'il avait sous la main, sachant que cette tribu était
toujours la rivale et l'ennemie des Soueid, la grande tribu zogh-
bienne. Le vizir alla prendre position h Teçala et, après avoir
repoussé Ouenzemmar, qui était venu l'attaquer, il poursuivit si
Tivement les troupes de son adversaire qu'il leur enleva tentes,
bagages et troupeaux. S'étant chargé des dépouilles de l'ennemi,
il revint auprès d'Abou-Einan, qui nomma aussitôt Othman-Ibn-
Djerrar gouverneur de Tlemcen, l'installa dans le Vieux-Châ«
teau [El'Casr'-el^Cadim) ';et partit pour le Maghreb. Ibn-Djer-
rar resta au pouvoir jusqu'à l'arrivée d'Othman-Ibn-Abd-er-
Bahman, le prince abd-el-ouadi te [qui monta ensuite sur le trône
de Tlemcen]. Nous avons raconté la chute d'ibn- Djerrar dans
notre histoire de cette dynastie.
Quand Abou-Einan fut parvenu à la rivière d'Ez-Zitoun, on
Taverlitque son viz'r, EUHaceti-Jbn-Soleiman, avait l'intention
de le faire assassiner à Tèza, dans l'espoir de mériter ainsi la
bienveillance d'Abou-'l-Hacen ; on lui dit aussi que C9 ministre,
I La répétition signalée dans la note (1) du texte de notre auteur-
est unede ces tournures qui conviennent augémedela langue arabe..
DT^NASTIB MiKRlinDB. ^^ AB0U*-'L<DACEN. 275
ay^nt remarqué le dévouement dont Mansour, gouverneur du
Maghreb, faisait parade envers Âbou-'UHacen, s^était concerté
avec lui dans le but de relever l'autorité de ce monarque. Cette
dénonciation lui parut si étrange qa il hésita d*y ajouter foi, mais
quand on lui présenta une lettre écrite par le vizir et renfermant
)a preuve du complot, il ordonna l'arrestation de ce ministre et
le fil étrangler le même soir. Ayant alors repris sa marche vers
ie Maghreb, il rencontra auprès du Bou-1-Âdjraf, rivière des
environs de Tèza, Tarmée de Mansouret la chargea si vigoureu-
sement qu'il la mit en pleine déroute. Il continua la poursuite
des fuyards et, dans le mois de Rebiâ second (juillet 4348), il
prit position contre la Ville-Neuve, forteresse où Mansour 8*était
enfermé après avoir échappé du champ de bataille et gagné la
ville de Fez. Ayant rallié pendant sa marche les diverses classes
de la population qui étaient accourues au«de^ant de lui pour faire
le«r soumission , il investit la Ville - Neuve et employa une
fouie d'ouvriers h la construction de machines de siège.
En arrivant sous les murs de cette forteresse, il avait envoyé
au gouverneur de Méquinoz Tordre de relâcher les fils d^Abou^'l-
Oià que Ton détonait dans la citadelle de cette ville ; aussi, ces
princes arrivèrent au camp bienfAt après, et y restèrent pendant
toute la durée du siège. La population de la place, voyant que
ses approvisionnements allaient s'épuiser et que les troupes
d'Abou-Einan continuaient Tattaque avec autant d'opiniâtreté
qu'auparavant, ne sut plus quel parti prendre ; la désunion se
glissa parmi eux et leurs chefs les plus influents passèrent
aux assiégeants. Alors, Idris, iilsd'Othman-Ibn-Abi-'l-Olâ, s'en-
fui t du camp, à la tête de ses gens et oiïrit ses services aux habi-
tants de la Ville-Neuve. En agissant ainsi, il ne fit que suivre
l'ordre d'Abou-Einan qui lui avait dit en secret d'entrer dans la
place et d'y excitor une sédition afin d'en accélérer la chute.
Idrts remplit ses instructions et, dans la confusion produite par
sa révolte, la Ville-Neuve fut prise d'assaut. Mansour se rendit
à discrétion ; il fut conduit dans une prison et mis à mort par*
l'ordre du vainqueur.
Aussitôt qu'Abou-Einan se fut rendu mattre de la capitale,
^79 biSTOlRB BÇ6 P£l|BÈ|lfiS.
((uit#«tfis prpvinces dq Maghreb raçoDuqreDi son «uiprité ai le»
Q^Pdbr^iis^^ villes de pçmpire rivalisèrent d'emprass9meiit à liM
«^pédi^rleMrs hommages et leur^ félicitations. Pendant quQlqiU)
leinps, Çeula demeura fidèle au suUap Âbou-'i-Hacen» maiç, à
)a fin, Ifl^ babilants ^'insurgèrent contre leur gouverofsur, Abdr
4tlah-lbn-AU-Jbp-Said, qfftçii^r du çorpç de3 yiairs, et, l'envo^
Jurent prisonnier à Témir Abou«Einan dout ils proolapoièrQiit $^us*
^i^^t \^ souveraineté. Le principal inenei^f de ce inouveçient fi^\
leur çhet Abpu*'l-Âbba^*Âbn3ed*IbQ-Moh^(Qn3ed-|bn*Ra(d de la
f^^^ille 4* Abou-^'s-Cherlf, branche de la grande famille des cbé-
fjfsquj descendent d'EUHacen [petit-fils de Mahamni^et] L^
4boi|^>-Ch^rtf a^yaient hal:^ité la Sicile avqnt de s'établir d^f\f
Çfuta.
Ahpu^Pipaq, se trouvant s^jn^i ipîiftre di^ ifçy^ua^e d^ Haghreib,
r«^UU Mtour de lui tous les Mérinides, à Texception de çeuxquj>
ne voulant pas abandonner leur sultan, étaient feaiéa a Tuftia.^
Cette révolution mit Abou^'l-Bftcen dan$i Timpos^ibililé dechA^
lier h réiyoUe des Kaoub ; aussi, ^e tint-il dans Tunia, pensant
que 1^ fojrtuue lui deviendrait f^CQre {avor4)tla« PeAdani ^
temps, les provinces^de TAfriq^^lui échappèrent sucoessi veinent
et dba nouvelles révoltes ne ceasÀrent d'y éclater jusqu'à ce que,
ay^Pl perdu Tespoirde caoserverce pays» il partit pour 1^ Ma-
BÉVOLT^S ftANS US PKOVmCKS. — RaTABLIS-MHEIfT DBS B^NH
ABD-^IL-OCAD DANS TLEBCHK, DBS KACBBAODA DANS L^ PAYS
DO CBBLIF BT DIS TOUpJÎN DAIVS MÊD&A.
Aprèg la défaite du sultan à Gairouan et la dissolution dies
Kai^ qui tes^ient ei»skear^bte les. tcou(¥^ des diveFa«& natiojaa <et*
f^tie^nea., qhacm de Ç4j& çpfp^ tU^t gqi^il $ar |^ ï^^swes q^'il
4w«Vl Pfiejjdirfi ppiiç assurai: ^w {v^opiici ^(^lutet celui de ses. ci-
liés. S'étant maintenant joints aux Kaoub, ap^r^ ?tVok ^^>
p^t l^j^ d4JJBçUoi> ^ rev^r^ qui ^ceahl^ 1# sflttjq, tW m àé^è-
DYNASTIE XfiRINIOS. — AHOU-'L-HACEN. Î7T
rent kmarehér sar Taàis arec Ibn-Tafraguîn el de se rendre eo
saite dans leurs pays respectifs.
Abou-'l-Haceù aVail emmeiiéèb IfrikYa plusieurs de leurs chef»
de tribu et, dafis le bomhre se irouvèrent quatre frères : [Aboù-*
8atd']0tbmaD, [Abou-Thabel-] Ëi-ZâYm, Youçof el Ibrahim ^
princes dont le père^ Abd-or*Rahman, était fils de Yahyabt pcf*
tit-fils de Yaghmoraoen-IbD^Zian, sultan des Beni-Abd-el-Ouad.
Tombés au pouvoir d'Abou-'l-Haceiïtf lors delà prise de Tlem-^
cen, et envoyés à Algéciras pour combattre, les chrétiensf ils
avaient obtenu de lui, après la chute de cette ville, la permission
de rentrer dans leur tribu, et s^étaiei>l ensuite rendus à Gai
rouan sous le drapeau du même souverain.
On remarqua aussi parmi cds chefs Ali, fils de oe Bached^bn*»
Mohammed-lbn-Tbabet-Ibn-Mendil dont no^js avons déjà racontii
l'histoire *• Devenu orphelin de bonne heure, Ali^Ibn-Hached
fut élevé à la cour de Fez ; il y passa sa jeunesse entouré des
f oins les plus lendresi et, en grandissant sous lès yeux du sul*
tan, il s'habitua aux Mérinides comme s'il n'avait jamais connu
d'autre famille que la leur.
Les Beni-Abd-el-Ouad, s'étant assemblés à Tunis, élurent pour
chef Othraan, filsd'Abd-er-Rafaman, parce qu'il était l'alné des
quatre frères dont nous venons de mentionner les noms. Ce fut
dans la banlieue de cette capitale, aopràs du côté Oriental à%
Vieux-Uosalla el dans une position d'où Ton découvrait la plaine
de Sfdjoum que cette réunion eut lieu et qu'Olhman fut inauguré,
séance tenante. Pour accomplir cette cérémonie^ on posd par
terre un bouclier lamtien* sur lequel on le fit asseoir ; puis, on
l'entoura de tous côtés et Von se courba pon r lui baiser la mdin.
Les Maghraoua prêtèrent ensuite le eferiïient de fidélité à l'émîr
Ali-Iba-Rached^ en se pressant autour de lui. Alorsy les deui
peuples se pardonnèrent le sangqui avait été répandu dans leurs
anciennes querelles et, s'étanl engagés h se traiter 6n aàiitf et k
> Yoy. p4 145 de ce vol, et tome ni^ p. 319.
« Voy. t. in^ p. W3.
278 HISTOIRE DES BERDERKS.
se soutenir dans Teotrcprise qu'ils allaient tenter^ ils prirent en <»
semble la route du Maghreb.
Arrivés, sous la conduite d^Ali-Ibn-Rached, dans leur pays, la
plaine du Chelif, les Maghraoua soumirent les villes de celte ré-^
gion et s'emparèrent de Ténès d'où ils expulsèrent les troupes
du sultan et tous ses partisans. Us firont mourir Serhan, cadi, de
Hazouna qui, après avoir soutenu dans cette vîHe la cause d'A-
boir-'l-Hacen, s^y était rendu indépendant.
Othman-Ibn-Abd- er-Bahman et ses Beni*Abd-eI-Ouad conti-
nuèrent leur marche jusqu'à TIemcen, naguère siège de leur em-
pire, et y trouvèrent Ibn-Djerrar établi comme souverain. Aus-
sitôt après le départ d*Al)Ou-Einan, cet homme avait pris le titré
de sultan et encouru la haine des habitants qui le virent avec in-
dignation s'établir sur un trône auquel sa naissance ne lui don-
nait aucun droit. H s'était toutefois maintenu au pouvoir pen-
dant quelques jours et il espérait que sa tribu viendrait à son
recours quand il se vit tout-à-coup assailli par l'armée abd-él-
ouaditede l'émir Othman* La populace s'insurgea à l'instant
même, brisa les portes de la ville, se précipita au-devant de ses
compatriotes et conduisit le descendant de leurs anciens rois au
palais de ses aïeux. Cette révolution eut lieu dans le mots de Djo«
mada 749 (août-sept. 4348). Les habitants accoururent par ban-
des au pied du trône et prêtèrent le serment de fidélité àMeur nou-
veau souverain. Dans l'intervalle, Ibn-Djerrar avait disparu,
mais on le découvrit enGn caché dans une des cabinets de la
résidence royale. Traîné dans un cachot, il y mourut, noyé par
les eaux qu'on y fit couler exprès.
Le sultan Abou-Satd-Olhman partagea l'autorité suprême
m vec son frère, Abou-Thabet^ez-Zaïm, et, l'ayant choisi pour
lieutenamt, il lui confia le commandement de l'armée, de la cam-
pagne et de la population nomade. H choisit pour vizir son pa-
ient Yahya-IbnDawoud-Fbn-Megguen, de la famille de Moham^-
med-Ibn-Tîdoukcen-Ibn-Tâ-AlIah.
Les Abd-el-Ouad, ayant ainsi rétabli leur empire, envoyèrent
une députation de cheikhs auprès de l'éaiir Abou-Einan, sultan
des Beai-Merin, et, par l'entremise de ces agents, ils conclurent
DYNASTIE HERIMDE. — ABOU-'L-HlCfiN. 279
Un traité de paix par lequel ils s'obligèrent h repousser le sultan
Abou-'l-Hacen, s*il tentait h passer dans le Maghreb. Ils marchè-
rent ensuite contre Ori.n, forteresse qui avait fait partie de leurs
états et, après un siège de quelques mois, ils forcèrent le gouver-
neur àcapituler. Cet officier, qui était un desclients ^du sultan,
ae nommait Obbou-lhn-Djana, et le corps de troupes qu4I com-
mandait avait été installé dans la place par Abou*'l-Hacen.
Les habitants d'Alger mirent leur ville en état de défense et
restèrent fidèles au sultan Abou-M-Hacen qui, étant rentré à Tu«
ois après le désastre de Cairouan, leur avait envoyé comme goiH
verneur Mohammed- Lbn-Yahya-el-Acheri, ancien serviteur de
son père.
Vers la même époque, Adi-Ihn-Youçof, petit-fils deZfan-Ibn-
Hohammed-Ibn-Abd-el-CaouY, parut à Timproviste dans Médéa
ei rétablit le royaume de ses ancêtres en s'y faisant proclamer
sultan» La population de Ouanchertch, boulevard de lempire ton?-
djinide, repoussa ses prétentions parce qu'elle avait déjà pour
chef un membre de la famille d'Omar-lbn-Othman, ancien chef
de la tribu des Beni-Tlgherin ; mais les Aalad-Azîz autre tribu
toudjinide, établie dans la campagne de Médéa, embrassèrent le
parti d'Adi et se rallièrent autour de son drapeau. Ce chef passa
le reste de sa vie à combattre les fils d'Omar-Ibn- Olhman, les*
quels se maintinrent dans le commandement des Beni-Toudjtn et
gardèrent leur fidélité envers le sultan Abou*'l-Hacen.
Pendant ces changements, Abou-'l-Hacen était resté à Tunis,.
1 Clients : le mot arabe est £^Uji0, de la racine ^â^ {faire). Ce
terme est employé par notre auteur pour désigner les officiers sor-
tis du corps des pages et les autres protégés du sultan, ceux^ en
un mot, dont il avait fait la fortune. Les pages étaient ordinaire-
ment des orphelins ; élevés, dès leur première jeunesse, sous les
yeux du sultan, ils oublièrent promptement leur origine et n'eurent
plus d'autre tribu, d'autre famille que celle de leur patron et pro-
tecteur. Presque toutes les dynasties musulmanes entretenaient un
corps de pages ; celle des Turcs, à Constanlinople^ avait ses /toA-
^ghlanlar [jeunes gens de l'intétieur du palais).
y
^80 HISTPIRS DUS BfiBBÈRBS.
maift enfin l'houro du départ arriva et il vint débarqmr ^
Alger,
\ LES PRINCBS lABSIDES QUI ATAIHPIT COmUMDÉ JL lOUOIB K7
A COlfUTARTIRB RSRTBBlfT BN POSfXBSION DI CB8 FO>RTJttia8B8.
A répoqae où Abou-Einau usurpa le trône de sod pèm, en se
fifiisantprocIamersaUanJtTlemcen, il avait accordé son amitiéft
Pémlr Abou-Abd-Allah-Mohammed, fils de l'émir Aboa-Zékérra-
Yabya et ex-seigneur de Bougie. Renvoyé de cette ville par h
sultan Abou-*l-Hacen, ce prince hafside avait été condaii à
Tfemcen oit il fit la connaissance d^Aboa-£inan. Cohii-ct, étant
devenu souverain, n^oublia pas son ami : il le nomma goerer-'
neur de Bougie, hii fournit des armes et deTargenl en quantité
suffisante, et PenVbya prendre possession de la ville. En quittant
son bienfaiteur, Abou-Abd-Alfah prit rengagement de s^opposer
à la marcbe d*Abou-1-Haceu dans le cas où ce monarque quitte-
rait Tunis pour se rendre en Maghreb.
Parti d'Oran avec la flotte qu'Abou-Einan avait mis à sa dis-
position, il débarqua au port de Tedellis et fit son entrée dans tar
ville. Les Sanbadja qui habitaient la campagne de Bougie abatr^
donnèrent aussitôt l'émir Abou-'l-Abbas-el-Padl et accoururent
sous les drapeaux de son neveu, Abou-Abd-Allah, duquel ils se
rappelaient les bienfaits et dont ils avaient vu régner le père.
L'émir Abou-Binan avait emmené de Tlemcen en Maghreb
l'émir Abou-Zeid-Abdi-er-Rahman , fils d^ Témir Abou-Abd-
Allah et ex-gouTerneur de Gonstantiae. [Arrivera Pet], il adnailoe
prince et ses frères dans son intimité et, quand il eut enlevé la
Ville-Neuve h son neveu Mansour, il les envoya tous dans leur
pays, afin de créer encore un nouvel embarras à son père. Dana
la nombre de ces princes se trouva notre seigneur lesultao régnant^
Aboa-*l«-Abbas, celui dont Dieu s'est servi pour restaurer Vpm^
pirebafside.
Leureffranchi,Nebtl, autrefois chambellan de feur père, les
DTKASTIB ■ÈUIHDB. <^-« ÀtOD-^L-HACBN. S84
devança auprès da prince Âbou-Abd-Allab qui faisait le siège do
Bougie et, delà, il partit pour Conslantine, ville dont Âbou-'l-
Abbas-el-Fadl avait obtenu possession. A son approche, les ha-
bitants senlirenl renattre dans leurs ocBOrs l'amour qu'il» por-
taient k Imirs anciens émrs; ils se rappelèrent la doucear de
leur administration et se décidèreot à déposer le gouverneur
qu'Abou-'l-Fadl leur avait donné. Aussi, quand Nebîl parut
sous les murs de leur ville, ils le prirent pour chef, reconnu-
rent son maître pour leur souverain et renvoyèrent tous les
officfers d^Rl-Fadl. Nebîl ayant obtenu possession dfe Cotl^-*'
tantineet des régions qui en dépendent, y rétablit la dotninaCmtt
dé l'émir Abou-Zeid et de ses frères. Arrivés au stége âet leu^
gouvernement, ces princes y trouvèrent leur autorité reconnue
et virent leurs drapeaux flotter sur toutes les parties de la pro^
vince. Il descendirent donc au palais ausst naturellement que
descendent les iiùns dans teors tanièred ou les autres sûtrs l'bo^
rizon.
Aboa-ÂËcl- Allah élant parvenu h rassembler ses amis et ded
partisans» tint so» oncle [E^Fadl] MoqM dans Bougie pendant^
plnsienvs jours ; ensuite, il décampa et, quelque temps après, il
reeomnoençâ le siège. Alors, dans nnedes nuits du Ramadan 749
(noiF.-déc. 4348), les amis qu'il avait dans la place ef le^ gens âtt
people auxquels il avait fait passer de l'argent lui ouvrirent les
portes du faubourg. Au bruit de^ tambours et de l'irruption des
trompes les habitants s^éveillèrenl épouvantes et l'émir Abou-'I-**
Abbas-*el-Fadl s'élantenfui, à pied et sans chaussure, alla^ ^é'
cacher dans on des ravins de la Gouraïa, montagne qui domine
la citadelle. Au lendemain, dans la journée, il fut tiré de sa re-^^
traite, amené devant son neveu, qui le reçut très-^grâcieusement
et l'embarqua pour BÔne, siège de son commandement.
Redevenu mattre de Bougie, Abou-*Abd-Allah monta éUf* le'
trène de ses aïeux et écrivit, ainsi que lès princes de Gonstan^
line; i Abou^Einan pour lai annoncer leur heureux succès. Ils
lui renouvelèrent, eu même temps, l'assurance de' leur sincère
dévouement et se déclarèrent en mesure d^empiécher wrt j}èr6
de pafsser en Maghreb .
SS2 BISTOIBI DBS BBRBËaiS.
KN-MACBR, FILS DD SULTAK ABOU-'L-HACEN, SORT DB TUNIS BT
FAIT, AYBC ARiP-UR-TAHTA, UNB EXPÉDITION DANS Ll MAGHBBB
CENTRAL.
Qaand le sultan Abou-U~Hacen vit arriver à Tunis, sous Tes-
cortede Yacoub-ibn-Âli, émir des Douaouida, ses deux fils, ses
percepteurs et les ambassadeurs qu^on lui avait envoyés, il ve-
nait d'apprendre que les provinces du Maghreb s'étaient déta-
chées de son empire et que plusieurs princes, dont quelques-uns
appartenaient à sa propre famille, en avaient pris possession*
Voulant porter un prompt remède h ce fâcheux état de choses,
il ordonna a son (ils En-Nacer de partir pour le Maghreb central
afin d'y étouRcr le feu de la révolte et de reconquérir Tempire
qui lui échappait. Ses alliés, Yacoub-lbn-Âli et AriMbn-Yahya,
émir des Zoghba, prirent les devants avec leurs troupes pour
éclairer le chemin. Arrivé à Biskera, £n-Nacer y 6t camper son
armée; puis, s'étant remis en marche, il traversa le pays des
Btah et entra dans celui des Zoghba. Ayant alors rassemblé sous
ses drapeaux les Arabes seaailiés; ainsi que les Toudjîn du Ouan-
cherîchet quelques autres tribus zenatiennes, il se porta jus-
qu'à la rivière Oureg, où il rencontra Abou-Thabet-ez-Zaïm qui
avait quitté Tiemcen à la tête des Beni-Abd*el-Ouad et de leurs
alliés, afin d'arrêter son progrès. Dans le combat qui s'ensuivit,
En-Nacer subit une défaite et dut s'enfuir et rentrer à Biskera.
Arif-Ibn-Yahya se réfugia au milieu de sa tribu, les Soueid, tra-
versa ensuite le Désert et, arrivé dans le Maghreb- el-Acsa, il
trouva un accueil bienveillant auprès de l'émir Abou-Einan. De
Biskera, En-Nacer marcha avec les Aulad-Mohelhel au secours
de Tunis, ville dont les Aulad-Abi-1-Leilet leur sultan [Abou-'U
Abbas-]el-Fadl essayaient de s'emparer. Avertis de son approcher
les assiégeants quittèrent leurs positions pour lui livrer bataille
etle chassèrent devant eux jusqu'à Biskera. Il resta dans celte
7{
DTNASTtt HâmmDB. — abou-'l-hacbk. ses
ville pendant quelque temps ei, quand son père se fut rendu de
Tunis è Alger, il s^empressa d'aller le rejoindre.
ABOU-^L-BACEN PlRT POUR LB BAGHRBB. — BL-PADL
S^BMPABE DE TljNiS.
Abou-1>Âbbas-eUFadl, ayant été gracié par son neveu après
la prisi3 de Bougie, repartit pour Bône, siège de son gouverne-
ment et, comme les (ils de Haraza-lbn-Omar lui envoyèrent alors
plusieurs cheikhs des AuIad-Abi-'ULeil aGn de le pousser à s^em-
parer de l'Ifrikïa, il consentit à tenter cette conquête et, vers le
commencement du mois de Choual 749 (décembre 1348), il se
rendit dans les cantonnements de ces Arabes. Leur cavalerie se
mit aussitôt à parcourir les campagnes de l'Iirikïa pour y lever
des contributions et ensuite elle alla camper devant Tunis. Cette
armée tint la ville étroitement bloquée pendant plusieurs jours;
mais, se voyant menacée par les Mohelhel, alliés du sultan Abou-
'1-Hacen, qui approchaient sous la conduite de son fils, En-Nacer,
le même qui avait évacué précipitamment le Maghreb central^
elle quitta ses positions, força ses adversaires à prendre la fuite*
et recommença le siège pour Tabandonner encore.
Alors, Khaled-Ibn-Hamza passa avecsa tribu ducAté des Mo*
helhel et les rendit ainsi bien plus puissants qu'auparavant* Son
frère, Omar-lbn-Hamza, partit pour TOrient afin d'accomplir le
pèlerinage, et Âbou-1-Leil, le troisième frère, se jeta dans le
Désert avecEl-Fadl. Ce prince ne sortit de sa retraite qu'à Pépo-
que où les peuplades du Djertd reconnurent son autorité. Yoici
quelques détails relativement à cet événement.
Quand le sultan Abou-'l-Hacen fut rentré à Tunis après avoir
effectué son évasion deCairouan, il reçut la visite d'Ahmed- Ihn-
] Il faut sans doute lire cherrtdouhomy au i^urlel.
294 BIBTOIKB DBfl BllBfeRB».
I
Mekki qui ^tait veau le féliciter et qui dédirait Peo&retedir eu sur-
jet de la frontière et des révoltes que la volonté du destin
avait permis d'éclater dans les provinces. D'après les conseils de
cet émir, il essaya d'y rétablir l'ordre en donnante chaque loca-
lité un chef dont la famille appartenait à l'endroit , croyant s'at-
tacher ainsi les habitants et les conserver dans l'obéissance. Par
suite de ce projet, le gouvernement de Gabes, de Djerba, d'Ël-*
Hammaetdes contrées qui en dépendent fut accordé à Abd-el-
Ouahed, fils du sultan Abou-Yahya-el-Lihyani. Ce prince
pâftit ^oufâa destination avec Ahmed-lbn Mekki, mais, quel-
ques jours après son arrivée à Djerba, il mourut de la peste qui
fil tahtde ravages en Afrique cette année-là. Abou-Cacem-tbn-
Ottou, grand^cheikh des Almohades [hafsides] reçut par la même
d<icdsionr, le commandement de Tou^er, de Nefta et de toutes leâ
autres villeâdu Djerfd; s'étaht attiré les bonneâ grâces du sultan
après la trahison et la fuite de son rival, Ibn-Tafragutn. Aussi-
tôt arrivé dans Tôtia^ér*, il pai'vinC à inspirer aul habitants du
Ùjôftd les meilTeurâ sentiments envers les Méi'inicJes.
LéprtnceAbou-'l-Abbas-el-Fadl, qui avait assiégéTunisdeux
fois et repoussé les Aulad Mohelhel, entra dans le Djertd Pan
780 (< 349-80), dans l'espoir d'y établir son autorité. Ô'étârit
atoi^s adressée Ibn-Ûttou, il lui rappela leur ancienne amitié é^
lés nombreul droits que la famille ie^ Safsides avait à sa recon'''
naissance. Profondément aiïeclé paf les souvenirs que ces paro-
les réveillèrent dans son cœur, Ibn-Oltoû jeta les yeux sur ses
membres cruellement mutilés par l'ordre d'Abou-'(-Hacen, et,
laissant éclater la hainequ'il avait étouffée jusqu'alors, il répu-
dia l'autorité des^Mérinides et ordonna à tous ses administrés dé
reconnaître pour leur souverain le seigneur £I-P&dl, fils du sul-
tan Âbou-Yahya-Abou-Bekr. Les habitants de Tôuzér^ de Gafsa,
de Nefta et d'El-Hamma s'empressèrent de répondre è cet^e in-
vitation et prêtèrent tous le serment de fidélité au prince hafside.
Ibn-Mekki lui-même suivit leur exemple et entraîna l'adhésion
des habitants de Gabes et de Djerba.
Le sultan ayant appris qu'El-Padl marchait sur Tunis après
s'être rendu roatirecié toutes les villes de l'IfilkYa, dn cowçUV de
DTlfASTIB «Élini»!. — abov-'l-hàciii. SS6
sérieaset iDquiétudes, et, oédaqt aux ooBseils de ses familiera
qui Gomptatent ^ur une vie heureuse dans le Maghreb fiussilAt
que leur matlre aurait recouvré aon royaume, il commeuça %es
préparatifs de départ. Âyaut approvisionné* plusieurs navires de
tout ce qui pourrait coqtribuer au bien-élre des voyageurs, il
B^embarqua l'an 760, au cœur del*hiver,aprèsavoir accompli le
jeAne du Ramadan (au milieu de décembre 1349). laissant
k Tunis, en qualité de gouverneur, son fils Abou-4-Fadl. Il cro*
yait que l'alliance matrimoniale de ce prince avec la famille de
Bamza-Ibn-Abi-'l-Leil et le commandement qu'il venait de lui
donner suffiraient pour empêcher la populace de se révolter
et d'insulter aux Mérinidesqui allaient s'embarquer. Cinq jours
apbès son départ, il entra dans le port de Bougie pour renouveler
sa provision d'eau, mais le seigneur de cette ville défendit à
tous les habitants du littoral de lui en fournir. Les gens du sultan
descendirent ë terre, les armes k la main, et remplirent lueurs
tonneaux après avoir chassé les hommes qui gardaient la fon-
taine. Son navire remit alors à la voile et essuya, la même nuit,
une tempête affreuse ; balloté par les vagues, il échoua sur le ri-
vage après avoir eu ses embarcations brisées et mises hor^ de
service. La majeure partie de ^équipage fut noyée ainsi que plu-
sieurs des familiers du sultan. Ce prince lui-même fut jeté sur
Ptiequi se trouve en face du pays des Zouaoua *, et il y passa ta
nuit avec quelques serviteurs que la mer avait épargnés et qui
se trouvaient dans un état de nudité complète. Le lendemain, uq
canot, échappé au naufrage, s'approcha à la rame et les hommes
qui le montaient prirent le sultan à bor j. Ils y arrivèrent bien à
propos, car déjà les Berbères accouraient de leurs modtagnes en
poussant de hauts cris, et s^avançaient pour enlever le pri.nç6
quand ce bateau vint le délivrer et le transporter à Alger. Ayant
débarqué dans cette ville et pris quelque repos, Aboù-'Upacen
' I ^ I II I ^y^T-^^ I * 'I "m I I |i| H |UHHI1WTllf'HI»>llll»WttW»ir'li ■■li»l»|l ■b|1.»wh»W
' > Dans le texte arabe il faut l4re (^^^
* Cette fie porte sur nos cartçsje ^u)V^ do VUm Pis^,
SS6 HISTOIAB DSS BBftMRBS,
disiriboa des véteBueDls aux équipages des navires qui avaient
été dispersés par Torage ainsi qu'aux amis qui venaient le
rajoindre. Son fils En^^Naeer partit alors de Biskera. et vint le
retrouver.
Quand El-Fadl eut connaissance du départ du sultan, il sorttl
du Djerid, s'empara de Tunis et força Abou-4-Fadl, fils de ce
monarque, à s'enfermer dans la citadelle avec ses partisans. Se*
condé par les habitants, il investit cette forteresse, le 40 de
Dou-1-Hiddja (24 février 4350], et obligea la garnison à capitu-
ler. Âbou-'l-Fadl serenditàla tente d'Âbou-'l-Leil-Ibn-Bamza
et obtint de ce chef une escorte pour Alger.
Adi-Ibn-Youçoff membre de la famille d'Âbd-el*Caouï qui
avait usurpé le commandement à Médéa, accourut auprès du sul-
tan et offrit de lui remettre cette ville en déclarant qu'il s'en
était emparé pour le gouverner au nom de ce monarque. Cette
démarche lui mérita son pardon et même sa confirmation dans le
commandement. Les Soueid, les Hareth, les Hosein et tous leurs
dépendants vinrent alors du Maghreb pour soutenir le sultan,
après s'être rénnis autour de Ouenzemmar*Ibn-Arif, chef qui lui
était toujours resté fidèle. Il reçut aussi la visite d'Ali -Ibn-Ra->
ched, émirmaghraouien, qui voulait le poussera combattre les
Beni-Abdel-Ouad, et qui se disait prêt à le seconder moyennant
l'assurance d'être confirmé dans son commandement aussitôt que
la campagne serait terminée. Le sultan refusa d'admettre aucune
condition, pour ne pas prendre* un engagement qu'il serait tenté
à rompre plus tard, etl'émir Ali passa aux Abd-el-Ouadites.
Le seigneur de Tlemcen, Abou-Saîd-Othman, obtint alors de
Pémir Abou-Einân l'appui d'un corps mérinide commandé par
Tahya-Ibn-Rahhou-Ibn-Tacheftu-Ibn-Môti, de la tribu des Tir-
bîghtn. Son frère, Abou-Thabet-ez-Zaïm marcha contre lesultan
à la tête de ces Mérinides et des contingents fournis par lesBeni-
Toudjîn. Abou*'l-Hacen avaitquitté Alger pour établir son camp
àllettdja quand Ouenzemmar lui amena leS; troupes qu'il avait e-
^ A la place de UIo il faut lire i^lé^.
DYNASTIE HfiaiNira. — abod-'l-hàcen. ^S81
\ées dans les caotOKoements des Arabes. Il partit aussitôt pour
Ghelif et rencontra l'ennemi à ChediouYa. Les Maghraoaa l'at-
taquèrent avec une grande impétuosité et, dans la mêlée, lui tuè-
rent son fils, En-Nacer, qui avait soutenu leur charge sans bron-
oher* Les troupes du sultan, découragées par la mort de ce jeune
prince, abandonnèrent à l'ennemi leur camp et les tentes de leur
souverain. Ouenzemmar-Ibn-Ârtf et ses gens emmenèrent le
malheureux. Abou~'l-Hacen du champ de bataille et le conduisi-^
rentau Djebel-Bached en traversant le Ouanchertch. Les vain«
queurs renoncèrent è la poursuite et allèrent s'emparer d'Alger,
d^où ils expulsèrent tous les partisans de leur adversaire. Ce
fut ainsi que le sultan Abou - '1 - Hacen perdit le Maghreb
central.
Ll SVLTAN OCCUPE SIDJILVE6SA ET l'ÉVACUB ENSUITE A L'aPPEOCHE
DE SON PIL8 ABOU-EINAM.
Le sultan, après avoir assisté à la défaite de ses troupes et
perdu son fils, En-Nacer, abandonna le champ de bataille et
passa dans le Désert avec son ami Ouenzemmar. Conduit par ce
chefdans les cantonnements desSoueid, au milieu du Ouanche-
rtch, il prit la résolution de rentrer en Maghreb, demeure de sa
tribu, pays où elle avait conquis la puissance et fondé son em*
pire. Arrivé auDjebel-Rached, il entreprit une longue marche
à travers lo Désert, et se dirigea vers Sidjilmessa sous l'escorte
des nomades et de leur chef Ouenzemmar. Aussitôt que les ha«
biianlsde celle ville furent avertis de son approche, ils accouru-
rent au-devant de lui avec le plus grand empressement ; tous t^
précipitèrent à sa rencontre, jusqu'aux jeunes filles : preuve
évidente de l'amour qu'ils lui portaient et de leur désir de l'avoir
pour souverain. L'officier qui y commandait [au nom d'Abou-
Einan] eficctua son évasion et parvint à un lieu de sûreté.
Quand Abou-Einan eut appris la marche de son père sur Sid-
S88 HISfOIIIB DES BBRBIKBS.
jtlmosSft, il équipa shs Mërinldes et sos aulres tnMipes; le«r dis-
Iribiia IcB^gretificaiions d'usage et se mit «b campagae. Les Mé^
rinides éiaieni tràs^mal disposés pour leur ancien sultan : ils
craigoaient sa y^geanoe en se rappelant combien de fois ils Vbt*
valent abandonné daos les combats et trahi au moment du dan*«
ger ; ils laîeo voulaient aussi de les avoir emmenés dans des ex^
p^ditioos lointaines et do les avoir engages dans les entreprises
les plus périlleuses. Aussi $e mirent-ils tous d'necord poor le
repoasaef et pour soutenir franchement la cause de son fils et
rival.
Abou««4«-Haoen était à peine installé dans Qidjilmessa quand
•o TÎDt lui annoncer que son fils approchait k garndes jovrnées,
suivi d^une arméeimmense. Pendant qu*il réfléchissait sur sa po-
sition et qu'il désespérait de pouvoir résister, son favori, Ouen-
zemmar, disparut avec les Soueid* Expliquons le motif de celte
défection : Arif-lbn->Yahya, père de Ooenxemmar^ s'étant rallié
au parti d'Aboo-Einan, avait trouvée la cour de cet émir la
même position honorable et les mêmes égards dont il avait joui
sous le règne précédent ; mais quand son nouveau souverian eut
appris que Ouenzemmar s'était dévoué à la canse d*Abou-'l-Ha*
een et qu'il allait eavahir le Maghreb* à la tête des Arabes, il se
vit traiter avec froideur et ensuite il entendit de la bouche du
prîooe ces paroles menaçantes : « J^en jure par Dieu que, si
3 ton fils ne quitte pas le sultan, je m'en prendrai îi toi et à ton
Tt fih Ânter. Écris-lui ce que je viens de to dire. » Faisons ici
observer qu'Anter se trouvait dans la suite d'Abou-Einan. Ouen-
jeemmar, ayant prrs connaissance de cette lettre, se décida pour
son père ; étant, du reste, convaincu que, s*îl entrait dans le
Maghreb avec le snltan, il ne pourrait hti être dtine grande uti-
Kté. Il \e quitta donc à l'improviste, passa dans te Zab et, sMtant
alors séparé de sa tribu, il jeta le bâton de voyage, se fixa dans
Biskera d'où il ne sortit que pour aller jomdre Abon-Einan ;
mafs de ceci nous parlerons ailleurs.
» Dans te texte arabe Vélifûn mot EUHaghreb a disparu et doit y
êtreréUMi.
BYNASTIl aftRlNIDC. — ABOU-^L-HACIH. 280
AboQ-EiDaDiayanltrouvë la ville de Sidjilmessa abandonnée
par 8on pàre, la mit en état de défensd et y installa comme gou-
verneur Yahya-Ibn*Omar-lbn-Abd«el-Moumen, chef dés Beni-
Oangacen. Sur la nouvelle que le sultan avait pris la route de
Maroc^ îl voulut se porter de ce côté, mais, ne pouvant pas
décider les Mérinides à le suivre, il se vit obligé de rentrer
À Fez.
Ll SULTAN OCCUPB LA VILLB DB MAKOC , L'ÉTACUB â L'APPIOCBB
DB SON FILS BT asORT DAMS LA aORTAGHB »BS WlTrATA.
En Tan 751 (1349-50) le sultan Aboa-'l-Hacen sortit de Sidjil-
messa pour échapper à son fils, Abou-Einan, qui marchait contre
lui è la tête des Mérioides, et, s'étant dirigé vers Maroc, il s'en-
gagea dans les précipices de la montagne habitée par lesHas-
mouda, franchitce passage difficile et arriva en vue de cette ca-
pitale. Aussitôt, de tous les côtés et de toutes les collines * sa
précipita une foule de monde, tous empressés de lui oSTrir
l'assurance de leur dévouement. Le gouverneur de Maroc s'en-
fuit auprès d'Abou-Einan, mais Tadministrateur de rirapôi,
Abou-1-Medjd-Mohammed-lbn-Abi«Medyen ; passa an service
du sultan et lui livra tout Targent qui se trouvait dans la
caisse des contributions. Abou-'l-Hacen lui en témoigna sa haute
satisfaction en le nommant son secrétaire écrivain du paraphe.
S*étant alors mis à enrôler des cavaliers et des fantassins,
il Ht prélever des impôts et distribuer des gratifications
h tons ses partisans. Les tribus arabes qui formaient la grande
famille des Djochem lui offrirent leurs services , ainsi que-
toutes les tribus masmoudieones. Enooqragé par le rétablisse-
ment de son autorité k Maroc, il conçut l'espoir de reconquérir
la souveraineté et d'enlever l'empire à celui qui l'avait usurpé.
* Coran, sourate 21, verset 96.
T. lY. 49
.S90 HISTOIRB DES BBRBfeMES
Aboii-Einan, étasl revesude Sidjiifflessa, dressa son camp en
dehors de Pex et dépensa beaucoup d^argeoi pour réorganiser
son armée. Il avait déjà soupçonné Hamza*lbn-Choaïb\ petit-fils
deMohammed-lbo-Abi-Medyen et directeur des finances, d'avoir
travaillé les Mérinides à Sidjilmessa, quand il s^agissait de mar-
cher de cette ville jusqu'à Maroc, et de les avoir poussés par &es
intrigues au refus d'oliéissauce qui fit manquer cette expédition;
aussi, quand il sut qu*Abou-'l-Medjd, oncle de ce ministre, avait
livré au sultan Abou-'l-Hacen l'argent des impôts marocains, il
prêta facilement Porcille aux insinuations pçrfides que Tesprit
delà jalousie avait dictés à son secrétaire et favori, Abou-Abd*
Allah-Mohammed-lbo-^Mohammed-lbn^Aht-Amr* lîmporté par
la colère, il mit Choaïb à la torture et le laissa mourir, après lui
avoir fait couper la langue. Ayant enfin rassemblé ses Mérinidest
il marcha sur Maroc.
Le sultan se porta h la rencontre de son fils et le trouva posté
sur Tautre bord de TOmm-BebiA. Pendant quelque temps, les
deux armées restèrent en observation, chacune d'elles attendant
l'autre au passage du fleuve. Enfin, le sultan traversa cette
barrière et mit ses troupes en ordre de bataille. Ce fut à
Tamedgharst, vers la fin du mois de Safer 754 (mai 4350) ,
que le combat s'engagea entre le père et le fils. Les Mérinides
enfoncèrent l'armée du sultan et la mirent en pleine dé-
route ; leurs plus braves guerriers pénétrèrent même jusqu'à
l'endroit où se tenait Abôu-*l-Dacen, mais ils s'éloignèrent aus-
sitôt, frappés de honte et de respect à la vue de leur ancien met-
tre. Quand ce monarque infortuné voulut enfin prendre la fuite,
ri tomba à terre avec son cheval et se vit entouré par une nuée
de cavaliers. Dans ce moment critique, Abou-Dinar-Soteiman,
< Dans le texte arabe, il faut lire c^^ax.*^. Notre auteur dit, plus
loin, que Hamza était le neveu d^Abou-*I-Medjd ; il se tronf\pe,
sans doute, car la comparaison des noms paternels de ces deux
personnages fait voir que Hamza était le petit-fils d'Abou-l-
M edjd .
CTVASTIB MÉRIMDB. ABGC-'L-IIACBN. 294
Sis (l'Âli - Ibn ' Ahmed , émir des Douaouida , se jela avec
le lieutenant de son frère Yacofib, entre le sultan et l'ennemi. Il
étaft allé joindre Abou*'l-Hacen à Alger et ne Tarait plus quitté
depuis. Ce brave guerrier remit le sultan à cheval et se tint
en arrière de lui pour le protéger et couvrir sa retraite.
Allal-lbn-Mobammed, chambellan d'Abou-'l-Hacen, tomba en^
tre les o^ains des Mérinides et fut conduit en prison par Tordrti
d'Abou-Einao, mais il rentra en grâce quand cet émir eut appris
la mort de son père.
Ahd-el-AztZ'lbn-Mohamroed-lbn-Ali, chef des Hintata, em-
mena le sultan dans le montagne habitée par cette tribu et Tins-
talla chez lui. Les hommes les plus influents parmi les Hintata et
leurs alliés masmoudiens se rallièrent autour de Tiliustre fugi-
tif et prirent l'engagement de le défendre jusqu'èi la mort. Abou-
Einan continua la poursuite jusqu'à Maroc et, s'élant établi dans
cette ville, il tint la montagne des Hintata investie si longtemps
qu'il força le sultan h demander grâce. Le chambellan, Moham-
med-lbn-Abi-AmJr, se rendit alors auprès d'Abou-'l-Qacen
qu'il avait envoyé chercher, et lui présenta les excuses de l'émir
son maître, en le suppliant de vouloir bien lui pardonner. Le
sultan y consentit et Gt aussitôt dresser un écritpar lequel il dé-
légua l'tfutorité à son fils Abou-Einan. Il pria ce prince, en
même temps do lui envoyer de l'argent et des habits. Pendant
qu'Ibn-Abi-Amr se transportait h la résidence royale afin do
prendre tous les objets dont le sultan pourrait avoir besoin , ce
monarque tomba gravement malade et fut soigné par ses amis ^
et ses serviteurs. S^étant alors fait tirer du sang, il se lava le
bras avec de Teau afin de se mettre en l'état de pureté [requise
pour faire la prière] ; mais, aussitôt après, une enflure s'y dé-
clara et amena la mort au bout de deux ou trois jours. Abou-
ti-Hacen cessa de vivreIe23deRebiâ second 752 (21 juin 4 351). ^
Ses gens firent transmettre celle nouvelle à TémirAbou-Einan,
qui était campé, dans la plaine de Maroc, et ils se mirent alors
en route pour lui |>orter le corps de leur niahre qu^ils avaient
plauésur un brancard. Abou-Einan sortit au-devant d'eux, les
pieds Qus, la tète découverte, et baisa respectueusement lecer^
392 nisToiRi DIS bkrbèris.
-cueil CD se lamentant et en versant des larmes : a Nous appar-
» tenons k Dieu, s'écria-t*il plusieurs fois, et c^est à Dieu que
» nous dey ODS retourner I b 11 traita les amis et les officiers du
fou sultan avec une bonté extrême et permit à chacun d'eux de
se choisir un emploi au service de Tempire. Il enterra son père
h Maroc, mais, en partant pour Fez, il emporta le corps avec lui
afin de le déposer dans le cimetière royal, à Chala. Abou-Dinar
trouva auprès de lui l'accueil le plus bienveillant et le plus ho-
norable ; comblé de dons, revêtu d'une robe d'honneur et monté
sur un beau cheval dont le nouveau sultan lut avait fait cadeau,
il partit de Fez pour rentrer dans sa tribu et la décider à joindre
les Mérinides sous les murs deTlemcen, ville dont Abou-Einan
avait résolu de faire le siège aussitôt qu'il eut perdu son père.
Pour récompenser l'émir hintatien, Âbd-el-Azîz, de la géné-
reuse hospitalité qu'il avait accordée au sultan Abou-'l-Hacen
et du dévouement qu'il avait montré en bravant la mort pour le
défendre, Abou-Einan le confirma dans Je gouvernement des
Hintata, le combla d'égards et lui assigna une place d'honneur
à sa cour.
AB0D*BIKA!f aAlCBB SUR TLBHCBM, COMBAT LBS BBITI-ABD-BL-OUAD
A ANGAD BT TUB LBCR SL'LTAN ABOU-SaId.
Après avoir levé le blocus de la montagne des Hintata, le
sultan Abou-Einan emporta le corps de iBon père à Chala pour
le déposer dans le cimetière de la famille royale et, ce dovoir
siccompli, il se hâta de rentrer à Fez. N'ayant maintenant aucun
rival pour lui disputer le trône, il commença les préparatifs
d'une expédition contre Tiemcen, afin d'enlever aux Beni-Abd-
el<>Ouad l'empire qu'ils venaient de relever dans le Maghreb
central. Au commencement de l'an 733 (fév.-mars 4352), il fit
annoncer qu'une distribution d'argent serait faite à tous les hom-
mes qui voudraient s'enrôler ; alors il forma un camp au dehors
de la yille*Neuve, organisa ses nouvelles levées , les passa en
DTNA8TIB MÉRINIDB. ABOO^BlNAIf. i93
revue et se mit en marche. A celte noavelle, Âbou-Satd, sultan
de Tiemcen, et son frère, Abou-Thabet, rassemblèrent les
Beni-Abd-el-Ouad et tons leurs partisans, tant arabes queze-
natiens. Arrivé au Molooïa, Abou-Einan s^arrâta pendant quel-
ques jours afin d'inspecter les troupes arabes et les contingents
qui étaient venus pour combattre sous ses drapeaux. S'étant
alors avancé en bon ordre, il alla pren«^lre position dans la
plaine d'Angad et bientôt, il vit paraître l'ennemi. Quand les
deux armées se trouvèrent en présence, sa cavalerie légère prit
la fuite et rentra en Maghreb. Dans ce nH>meQt de confusion, il
80 mit à la tête des troupes disciplinées, s'élança aa galop yers
les Abd-el-Ouadites et, s'étant dégagé de la cohue des fu-
yards, il plongea au milieu des rangs de l'ennemi, en affrontant
la mort, les mit en pleine déroute et s'empara de leor camp*
Ses Mérinides continuèrent la poursuite jusqu'à la nuit et ra*-
menèrent beaucoup de prisonniers et de butin, après avoir tué
une foule de monde. Le sultan Abou-SaYd étant tombé entre
leurs mains, fut conduit devant Abou-Einan et mis aux fers
par son ordre. Le lendemain, on ravagea les cantonnements des
Arabes makiliens pour les punir d'avoir pillé le camp mérinide
pendant le tumulte du combat*
Dans le mois de Rebiâ (second : mai-juin 4352)^ Abou-Einan-
occupa Tlemcen et y rétablit son autorité. S'étant alors fait ame-
ner le sultan Abou-Satd, il l'accabla de reproches pour lui faire
sentir les suites funestes do sa mauvaise foi ; puis, ayant convo-
qué'plusieurs muftis et légistes, il soumit k leur jugement la
conduite du prisonnier. S'autorisent ensuite <jb leur avis qui
devait entraîner la peiné de mort^, il ordonna que la loi de Dieu
fût exécutée, etAbou'-Said mourut égorgé dans sa prison, après
une captivité de huit jours. Abou-Thabet-ez-Zaïm s'était déjà
enfui dans la partie orientale [du Maghre)) central] et là , il
termina sa carrière, ainsi que nous allons le raconter.
' Dans le texte arabe il faut peut-être remplacer le mot *^s?Lh^
par *jl>^.
294 BISTOIKE BE8 BERBfctBS.
DÉFilTB D^ABOU-THABBT PAB LBS MBRIHIDIS SUR LB BORD DV
CHSLIF. «^ IL TO»BB AU POOTOIR DBS HAFSIDES DB BOUGIE.
Lors de la défaite des Beni-Abd-el-Ouad et la prise de leur
saltao Aboa-Saîd, h Âogad, son frère Âbou-Thabet, qui s'ëtail
échappé avec les débris da Tarmée, passa auprès de Tlemceo,
pour y prendre les dames de leur famille, et coolinua sa fuite vers
le Maghreb oriental, en emportant tous les objets de valeur qu'ils
avaient laissés dans cette capitale. Arrivé au Chélif , dans le
pays des Maghraoua,il y dressa son camp, rallia autour de son
drapeau un ramas de Zenatiens et résolut d'y attendre de pied<
ferme et de risquer encore une bataille. Le vizir Fares-Ibn-Mei-
inoun-Ibn-Ouedrar partit alors de Tiemcen, par Tordre d'Abou-
Einan qui le suivit de près, et conduisit les troupes mérmides et
la milice à la rencontre de Tennemi. Des deux côtés Ton engagea
te combat avec un acharnement extrême ; Ton se précipita dans
les eaux du Chelif pour se battre de plus près ; mais les Mérini*
des chargèrent enfin avec tant de vigueur qu^ils traversèrent le
fleuve et mirent leurs adversaires en pleine déroute. Le camp
des Abd-el-Ouadites, leurs richesses, leurs troupeaux et leurs
femmes tombèrent au pouvoir des vainqueurs et la majeure
partie des fuyards fut taillée en pièces. Une lettre, écrite par le
vizir, donna ausultan Abou-Einan la nouvelle de cette victoire.
Abou-Thabet et les compagnons de sa fuite passèrent de nuit
auprès d*Algeret, s'étant avancés dansie pays qui forme Pex-
tréme limite du Maghreb oriental, ils se laissèrent dépouiller par
Zouaoua et durent continuer leur route à pied, sans habits et
sans chaussures, après avoir tout perdu, montures et bagages.
Le vizir arriva bientôt devant Alger dont il obligea les babr*
tants h reconnattre Tautorité du souverain mérinide.
Abou-Einan, s^étanl avancé jusqu'à Médéa, ordonna à son
confident, Ouenzemmar, et à son ami, Yacoub-Ibn-Ali, de por-
ter à l'émir de Bougie, Abou-Âbd-Allah-Mohammed, petit- Uki
DYNASTIE lH^RiniBB.— ABOlI«EmAN. 293
de l'émir Abou-Yahya-Zékérïa, l'ordre de faire arrélerAbou-
Thabot et les gens qui raccompagaaient. L'émir s'y conforma
et, par rélablissameot d'une surveillance très-active surtouies
les rouies et de sentinelles sur toutes les collines, il parvint*
à découvrir les fugitifs. Abou-Thabet fut amené prison-
nier à Bougie, ainsi que son neveu Aboa-Ztan et son vizir
Yabya-Ibn-Dawoud. Le prince de Bougie chargea de fers
ces malheureux et les* envoya au sultan qui se tenait à^
Médéa.llles suivit lui-même de près et, arrivé dans le voisi-
nage du camp mérinide, il aperçut Abou-Ëinan qui était monté
achevai pour venir au-devani de lui. A l'approche du cortège,
il mit pied à terre; le sultan en fit autant, combla son visiteur
de politesses et, après avoir fait emprisonner Abou-Thabet, il
donna audience h une députation que les Douaouida venaient de
lai envoyer. Cette ambassade obtint l'accueil le plus bienveillant
et les personnes dont elle se composa reçurent des robes d'hon-
neur, des montures et de l'argent au moment de repartir pour
leur tribu. Une autre députation, venue du Zah, trouva le sul-
tan à Médéa et lui présenta un acte d'hommage et de fidélité si-*
gnépar Ibn-Mozni, seigneur de cette contrée. Une réception^
honorable et de riches cadeaux furent aussi le partage de ces
.envoyés.
Lorsqu'Abou-Einan eut achevé la réduction du Maghreb cen-
tral, et installé des administrateurs dans les provinces soumises^
il conçut le ferme espoir de reconquérir l'Ifrikïa. '
IBOU-ÉIKAN OBTIENT POSSESSION DE BOUGIE ET CONDUIT EN
tfAGBRBB l'émir DE CETTE VILLE.
Arrivé à Médéa dans le mois de Châban 753 (sept.-oct. 4352),
Abou-Abd-Allah-Mohammed , Gis de l'émir Abou-Zékérïa, et
seigneur, de Bougie, trouva auprès d'Abou-Einan Tacsneil le
plus empressé. Il lui exposa ensuite, dans un entretien secret, la
grande difiiculté qu'il éprouva h gouverner un état dont les ha^
296 BISTOIRI DIS BIlBBftlS.
bitants, toujours portés au désordref refusaient d'acquitter le»
impAts, dont les courtisans avaient accaparé toute l'autorité el
dont l'armée était en proie à l'insubordination. Un aveu de
cette nature répondit parfaitement aux souhaits du sultan ; aussi
s'empressa- t-ii d'offrir à son h6te telle partie du Maghreb qu'il
désignerait, en échange d'une province qui opposait tant d'obs-
tacles à une bonne administration. Cette proposition fut trop
agréable au prince hafside pour âtre repoussée et, se conformant
aux conseils du chambellan Mohammed-lbn-Abi*Amr , lequel
agissait d'après les inspirations de son souverain, Abou-Einan,
il souscrivit à l'arrangement proposé, sans consulter les grands
officiers du rovaume dont il allait faire l'abandon. Tous ses
courtisans en furent indignés, et Ali, Jàh du caïd Mohammed--
lbn-el-Hak!m, s'enfuit du camp avec plusieurs autres et passa
eu Ifrikïa. Alors, sur l'invitation du sultan, l'émir écrivit de sa
propre main au gouverneur de Bougie, lui ordonnant de remet-
tre la ville aux fonctionnaires mérinides.
Devenu mettre de Bougie, Abou-Einîin en con6a le gouverne*
ment à Omar-lbn-Ali-el«Ouattaci, de la famille des Aulad*el-
Oueztr, la même dont nous avons déjà raconté l'insurrection k
Tazouta^ Ayant achevé la conquête du Maghreb central, il
repartit pour Tlemcen afin d'assister aux cérémonies reli-
gieuses qui accompagnent la rupture du jeftne du Bamadan.
H y fit son entrée au milieu d'une foule immense, suivi de
deux chameaux qui marchaient à pas saccadés entre la double
haie des troupes et dont l'un portait Abon«-Thabet et l'autre
le vixtr Ibn-Dawoud* Ce spectacle offrit aux assistants un nouvel
exemple des vicissitudes de la fortune. Le lendemain, on con-
duisit ces prisonniers au lieu du supplice et on leur èta la vie à
coups de lance. Abou-Einan assigna un logement magnifique à
l'ex-émir de Bougie et fit tapisser la salle d'audience pour mieux
fêter son arrivée.
iYq7« p. 13& de ce volume.
IDYNASTIE HfiBlM0S. ABOU-SIlfAIV. S97
LE CB4VBELUN IBN-ABl-A^R COKDUIT UNI ABJiÉB CONTRE
BOUGIE DONT LES HABITANTS s'fiTAlENT MIS Blf HÉTOLTB.
Les Sanhadja des environs de Bougie descendent des Teikata,
famille dont une •branche régna dans cette ville et dans la Cala
des Beni-Hammad. Lors de l'établissement de rempirealmobade,
ils fixèrent leur séjour dans la vallée de Bougie, sur le territoire
des Beni-Ouriagudy où ils se trouvèrent environnés de peuplades
berbères-ketamiennes. Les airaohades leur concédèrent cette
contrée, moyennant le service militaire, et le sultan [hafside de
Bougie] finit par ne pl»M avoir d'autres troupes, en conséquence
de la diniinution prog*^<»9sive qu'éprouva l'armée almohade. Les
Sanhadja profitèrent de cette circonstance ^pour imposer leurs
volontés au gouvernement. L'émir Abou-Abd*-Allah eut k se plain-
dre d'eux depuis le moment où il prit le commandement de
Bougie et, pour se venger, il fit mourir Mohammed-lbn-Temim,
un de leurs principaux cheikhs. Depuis le règne d'Âbou-Zekérïa,
le chambellan Fareh, client d'Ibn-Seid-en-Nas, avait eu ce peuple
sous ses ordres et il était parvenu à gouverner le royaume en
ne laissant que l'ombre de la puissance souveraine à l'émir
Abou-Abd -Allah, fils et successeur de ce prince.
Quand Abou-Abd-Allah consentit ë abdiquer en faveur
d'Abou-Einan, [son compagnon et ministre] Fareh en fut vive-
ment contrarié, mais il eut l'adresse de cacher son ressentiment,
et, lors du départ d'Omar-Ibn-Ali-el-Ouattaci pour Bougie, il s'y
rendit aussi afin de prendre et de transporter en Maghreb le ha-
rem de son mattre, ainsi que les effets et le mobilier du palais.
Arrivé dans la ville, il prêta l'oreille aux confidences des San*
hadja, qui se plaignaient de l'administration tyrannique sous la-
quelle on les avait fait passer et, leur ayant donné raison, il leur
recommanda de chasser les fonctionnaires mérinides et de pro-
clamer la souveraineté du prince hafside, Abou-Zeid, seigneur
de Constantine. lis y consentirent volontiers et prirent la résolu-
298 BISTOIBB DBS BERBfiBES.
tioD d'assassioer EUOaatlaci pendant qu'il donnerait audience
dans la citadelle. Mansoar-Ibn-eUHaddj, un de leurs cheikhs, se
chargea de lui porter le coup mortel, et, s'étant rendu au parais
de bon malin, selon Tusage des officiers revêtus de hauts corn*
mandements, il s^approcha du nouveau gouverneur, en se pen-
chant comme pour lui baiser le pan de la robe, et dans le même
moment, il lui plongea un poignard dans le corps. Malgré la gra«
vite de la blessure I El-Ouattaci conserva assez de forces pour
s'enfuir dans sa chambre, mais les conspirateurs y pénétrèrent et
lui ôtèrent la vie. Ceci se passa dans le commencement du mois
de Dou-*UHiddja 753 (janvier 4353). Au même instant, la po-^
pulace se mit en insurrection et Faieh, étant monté à chçval, fit
proclamer à haute voix la sonveraineté d'Abou-Zeid. Ce prince
reçut par un courrier extraordinaire la nouvelle de la révolution
survenue h Bougie et l'invitation de s'y rendre le plus tôt possible,
mais, au lieu de partir, il se contenta d'y envoyer un de sos af-
franchis européens çn qualité de lieutenant.
Abou-Einan soupçonna Pémir Abou-Abd- Allah d'avoir com-
ploté cette révolte avec le chambellan Fareh , et le mit aux ar-
rêts ; il emprisonna aussi plusieurs notables de la ville de Bougie
qui étaient arrivés à la cour depuis quelque temps pour y remplir
une mission dont leurs concitoyens les avaient chargés. [Cet acte
de vigueur produisit son effet : ] les cheikhs de Bougie se repen-
tirent d'avoir permis la dernièro révolution ; leurs hommes d'ac-
tion et de conseil se liguèrent contre Fareh et les Sanhadja ; le
caïd Uibl, client d'Abou-Abd-Allah-tbn-Séid-en-Nas, entra dans
le complot, ainsi qu'Ali-Ibn-Mohammed-el-Mit, ancien chambel-
lan de Témir Abou-Zékérïa-Yahya, et Mohammed, fils ducham- ^
bellan Abou-Abd-Allah - Mohammed - Ibn-Seïd-en - Nas. L'on
convint d'assassiner le chambellan aussitôt que le lieutenant
du seigneur de Constanline serait arrivé. Ce jour-là ils éclatè-
rent en plaintes contre Fareh et le firent appeler à une conférence
dans la grande mosquée. Averti de leurs intentions hostiles, ce
malheureux alla se réfugier chez le mufti, Ahmed-Ihn-Idrts ;
mais son patron, Ibn-Séid>ro-Nas, enfonça lui-même la portede
la maison et le tua d'un coup de potc;iuird. Lr;s conspirateur:^
DTRASTll anSRIRlLI. ABOU-KINAIf. 299
coupèrent ensuite la tête de leur victime pour Tenvoyer à Abou*
Eioan. et jetèrent le corps [hors du beivéïler,] sur la terrasse de
la maison. Mansour-lbn-el-Haddj se hâta de quitter la ville avec
ses troupes sanbadjiennes.
Il y avait alors en rade un bâtiment dans lequel se trouvait ua
serviteur d'Âbou-Einan, nommé Ahmed-lbn-Satd-el-Carmouni
(natif de Carmona, en Espagne), lequel était venu de Tunis pour
affaires. Les habitants le firent descendre et s'empressèrent au*
tour de lui en criant a Vive notre maître, le sultan mérinide ! »
D'après les conseils de cet homme, ils expédièrent un courrier k
Tahyalen-Ihu-Omar-lbu- Abd-eUMoumen-el-Oungaçni , cheikfa
mérinide qui commandait h Tedellis. Tahyaten ne tarda pas d'ar-
river avec une poignée de troupes* Ils envoyèrent aussi un mes*
sager au sultan Abon-Einan pour lui annoncer ce qu'ils avaient
fait, et ils attendaient le résultat de leur démarche.
Quand cette nouvelle parvint au sultan, son chambellan^ Mo-
hammed-lbn-Abi-Amr , reçut aussitôt l'ordre de partir pour
Bougie avec un corps d'armée et, s'étant campé en dehors de
Tlemccn, il y réunit cinq mille cavaliers choisis par sou souve-
rain, tous parfaitement équipés.et soldés d'avance. Après avoir
assisté à la fête du Sacrifice (en janvier 4353), il se mit en mar-
che pour sa destination et, parvenu à Beni-Hacen, il apprit que
les Sanhadja s'étaient rassemblés pour lui livrer bataille. N'ayant
éprouvé aucune opposition delà part de ces nomades qui, n'o-*
sant pas engager le combat , avaient reculé jusqu'à Gonstantine
d'où ils se rendirent à Tunis, Ibn-Abi-Amr occupa leur camp,
situé au Rhamts de Tikiat, et la, il reçut la visite des vizirs bafsi*
des et de la corporation des cheikhs. Après avoir fait arrêter le
caïd Hilal et l'avoir envoyé au sultan, il entra dans la ville de
Bougie à la tète d'un brillant cortège et alla s'installer dans la
citadelle. Ceci eut lieu en Moharrem 754 (février 4 353). Ayant
rétabli l'ordre dans la place, il donna des robes d'honneur à tous
les cheikhs et choisit Ali*lbn-el-Mit et Mohammed-lbn-Se'fd-en-
Nas pour lui servir do ministre:». Ensuite, il fit arrêter et embar-
quer pour le Maghreb deux cents individus de la populace, tous
chefs de bandes et tous soupçonnés d'avoir pris part à l'insurrec*
300 BISTOiBB DES BERBÈliZS.
tion contre les Mérinides. Par cette mesure il assura la tranquiU
lifé de la ville. Pour garantir l'obi^issance des tribus-douaouida
qui venaient de lui envoyer des députations, il exigea la remise
de plusieurs otages. A tous ces envoyés il prodigua de riches pré-
sents ainsi qu'au gouverneur du Zab, Youçof-Ibn-Mozni, qui se
vit ainsi indemnisé de toutes les dépenses quil avait faites [pour
le service du gouvernement noérinide] ^
Après avoir passé deus mois à Bougie, Ibn-Abi-Amr repartit
pour Tiemcen, emmenant avec lui les chefs arabes et les dépula-
tions qui étaient venus le trouver. Ayant reçu de lui une robe
d'honneur, des montures, de Targeot et des teutes, je me mis en
route avec cette compagnie de voyageurs. Vers le commencement
de Djomada second (commencement de juillet 4 353), quand nous»
fûmes arrivés à Tlemcen, le sultan tint une grande séance afin de
recevoir les députations et d^examiner les chevaux et autres dons
qu^on avait à lui offrir. Cette cérémonie se Gt en présence d'une
foule immense. Tons ces envoyés furent amplement rétribués
par Abou>Einan, surtout Youçof-lbn-Mozni et Yacoub-Ibn-Ali,
auxquels il prodigua les égards, les dons et les honneurs. Après
avoir pris leur avis sur l'état de Plfrikïa et £ur le meilleur mo-
yen de réduire la ville de Constantine, il les renvoya dans leur»
pays respectifs, le premier jour de Ghàban 764 (commencement
de sept. 4353). Le chambellan Ibn-Abi-Amrdut (es accompagner
k son grand regret ; nous en dirons les motifs dans le chapitre
[suivant] où nous retracerons l'histoire de sa vie. Je me mis en
route avec lui, heureux d'avoir reçu du sultan une forte gratifi-
cation, plusieurs robes dlionneur, de beaux chevaux et la pro-
messe d'être rétabli dans la possession des fiefs dont ma famille
et moi nous avions eu la jouissance dans [Tunis] notre ville
natale.
ï Voy. p. 270 de ce volume.
DYNASTIE MÉRINIDI. — ABOU-CINAN.
304
BIOGRAPHIE DU GUAMBELLAN IBN-ABI-AMR. — KOSUfi GOUTBRNei'R
DB'BODGIB, IL BNTRBPRBITD LE SIÊiSB DE CORSTARTIZIE
PAR L^ORDRB DU Bl'LTAN.
Les ancêtres du chambellan Ibn-Abi -Âmr habitaient El-Mehdïa
et faisaient partie de la milice fournie au gouvernement de Plfrî-
kYApar les Arabes temtm ides de ce pays. Son grand-père, Aii,
légiste d^un grand savoir, alla se (ixer à Tunis, sur l'invitation
d*El-Mostaneer, et, se voyant chargé de remplir les fonctions dd
cadi dans cette capitale et dSnscrirc le paraphe impérial sur les
dépêches du cabinet et sur les ordonnances de toute nature, il
80 conduisit avec une probité exe nplairo et, jusiiu^à sa
mon, il conserva sa haute position et Pestime générale. Son fils
Abd-Allah le remplaça copnme paraphiste des ordonnances et des
dépêches; nommé à cette charge sous le règne d'Abou-Bafs-
Omar, (Us de l'émir Abou-Zékérïa, il en remplit les devoirs
avec une fidélité parfaite.
Ahmed-lbn-Ali, frère do celui-ci, était un. homme très-réglé
qui se distinp;uait autant par sa gravité que par son application û
Pélude. il eut un fils nommé lUohammed[-lbn-Abi-Amr] qui
cultiva les sciences coraniques et la jurisprudence sous les doc «
teurs lés plus habiles de Tunis. Lors du bouleversement de
l'empire hafside , Hohammed-lbn-Abi-Amr quitta la capitale
pour chercher ailleurs les moyens de vivre ; jeté par les vicissi-
tudes de la fortune dans la ville de Collo, il s'v fit tellement re->
marquer par son amour de l'étude et par sa belle écriture qu'il
fut nommé régisseur du port à l'époquooù ibn^Ghamr dirigeait
l'administration de Bougie. Voulant se faire donner comme ad-
joint le chérîf HaceD-ibn-Hohammed-es-Sibti [natif de C^ta)^
qui avait partagé ses fatigues et ses malheurs, il réussite pro-
curer la nomination de ce fidèle ami. Dès>lors, ils servirent Ibn-
Ghamr avec un zèle dont celui-ci eut toujours à seJouer.
Quand Mottimssed-lbn-Youçof se mit en révolte contre Abou-
308 , niSTOIRB DES BCaBftRE3.
Bammou* et paralysa de cette manière les forces de Tempire abd-
el-ouadite, le chérK Âbd-el-Ouehhab, gouverneur de TedelUs,
abandonna la cause du sultan de Tlemcen et passa aux Hafsides.
Ibn-Ghamr envoya alors Mohammed -Ibn-Abî-Ainr à Tedeliis
comme régisseur de la douane et le fit accompagner par le chérîf
Bacen en qualité de cadi.
Abou-Bammou ayant rétabli la puissance de son empire et
repris la ville de Tedeliis, ordonna à son premier mufti, Ibn-
el*lmam, d^aller recevoir la soumission des habitants et d'exiger
l'envoi de leurs notables a la cour. Ibn-Abi-Amr et son ami, le
chérîf, firent partie de cetle députatioo et fixèrent leur séjour
dans Tlemcen, oh ils occupèrent alternativement la place décadi,
tant sous le gouvernement abd-el->ouadité que sous la domina-
tion mérinide. Plusieurs cheikhs de cette ville se liguèrent con-
tre Ibn-Abi-Amr pendant qu^Abou-'l-Hacen occupait le trône, et
le dénoncèrent comme un magistrat prévaricateur. Pour leur
donner quelque satisfaction, ce monarque destitua le cadi,
mais, étant parfaitement convaincu de son innocence, il le prit à
son service et lui confia Péducation de son fils Fares. Dans cette
nouvelle position, Ibn-Abi-Amr se surpassa en zèle et en
habileté.
Son fils Mohammed, le chambellan dont nous allons raconter
rhistoire, fut élevé avec Ahou-Eiiian, fils du sultan, et en de-
vint Tami intime. Abou-Einan, étant monté sur le trône, fit
avancer de grade en grade le compagnon de son enfance et le
porta aux plus hauts emplois. Le paraphe impérial, le comman-
dement en chef de l'armée, les fonctions de chamlrellan, PoflSce
d'ambassadeur, la direction des bureaux de la guerre, la compta-
bilité, l'intendance du palais, les titres d'honneur les plus élevés,
le gouvernemenlde la maison royale, rien ne manqua au favori du
sultan. Tous les regards se portèrent vers lui; les hommes les plus
éminents, les princes dusAng, les chefs de tribus, leschérifs, les
docteurs de la loi, s'empressèrent à briguer sa protection, et les
• Voy. tome ni, page 3%.
DTHASTIB MÉRIRIDI. — AROU> EINAK. 303
^dmiaiMraleurd des provinces lui envoyèrent l'argent des contri*
buables, afin de gagner sa faveur. Pendant un temps considérable,
il jouit du plus haut crédit et d*une fortune qui excita la jalousie'
des vizirs et des grands de l'empire. Aussi, quand il partit pour
Bougie à la léle de Tarmée, ses ennemis profilèrent de sonéloi-
gnement pour gagner l'oreille du souverain et lui faire entendre
des insinuations perfides ë Tégard de son protégé» Revenu de
cette expédition, ibn-Abi-Amr crut user de Tascendant qu'il
avait toujours exercé sur Tespritde son maître et lui reprocha
d^avoir écouté de pareilles calomnies. Voyant qu^Abou-Einan ac-
cueillait ses remontrances avec froideur, au point même de s'en
formaliser, il se posa en victime et sollicita la faveur d'aller pren-
dre le gouvernement de Bougie. En faisant cette demande, il ne
s'attendait nullement à être pris au mot, s'étant imagin^ que le
sultan l'aimait trop pour le laisser s'éloigner ; mais, à son grand
désappointement, il reçut la permission de s'y rendre. Ce fut en
vain qu'il voulut s'en dédire : Abou-Einan lui ordonna de i>ar*-
tiret le chargea en même temps d'une expédition contre Cens-
tantine. Il lui accorda toutefois autant de troupes et d'argent
qu'il pourrait désirer.
Ce fut en Châban 754 (sept. t353),qu Ibn-Abi-Amrse mit
en marche pour Bougie; il y arriva vers la fin du même mois et y
passa l'hiver. Les Hafsidoscherchèrent alors à semer la division
parmi lesMérinideset, dans ce but, ils reconnurent pour souverain
du Maghreb le prince Abou Omar Tachefîn, fils du sultan Abou '1-
Haccn qui était tombé au pouvoir de l'émir bafside El-Fadl etqui,
depuis lors, avait été retenuen captivité, ils lui fournirent des ten-
tes et un équipage royal, laissant à Meimoun-lbn-Ali le soin de le
soutenir. Meimoun entreprit cette tâche uniquement pour contra-
rier son frère, Abou-Dinar-Yacoub-Ibn* Ali. Celui-ci, avant su leur
dessein, partit sur le champ pour le Zab où les tribus sous les
ordre.H de Meimoun étaient cantonnées, et, les ayant mis en dé-
route, il les repoussa dans le pays d'où elles étaient sorties et les
contraignit à s'enfermer dans la ville [de Constantine].
Quand l'hiver fut terminé, Ibn-AbipAmr dressa son camp en
dehors de la ville [de Bougie], après avoir cf^él)ré la fête du Sa-
30 i BISTOIRB DES DEKBfeBCS.
crificc. Il passa ensuite ses troupes en revue, leur distribua les
gralifications d'usage et les emmena an siège de Consfantine. Le^
Douaouida, suivis de leurs familles, leurs tentes et leurs trou-
peaux, vinrent se joindre à lui. Le seigneur de Constantine ,
Abou-Zeid, fit ses~ préparatifs de résistance et rallia autour do
lui toules les tribus de la province de Bône, ainsi que les frac-
tious de la tribu des Douaouida qui s'étaient attachées à son
parti et qui avaient pour chef Meimoun, (ils d'Âli-lbn-Ahmed.
Le chambellan Nebîl, auquel il conGa le commandement de cette
armée, se. porta au-devant dlbn-Âbi-Amr et lui livra bataille,
enDjomada755 (mai-juin-juillet 4354). Le général mérmidc
remporta la victoire, s'empara des bagages et des troupeaux de
ses adversaires, et tint Constantine étroitement bloqué jusqu'à
ce qu'on lui eût livré le prince Tachefîn, frère d*Abou-Einan, le
même qu'on avait mis en avant comme prétendant au trône mé-
rinide. Il envoya ce prisonnier à son souverain.
Le rds d'AboU'Zeid se rendit alors h la cour merintde par l'or-
dre de son père et s'en retourna enchanté de sa réception et du
succès de sa mission. Rentré à Bougie, Ibn-Abi«Amr n'en sortit
plus, et il y mourut vers le commencement de l'an 7&6 (janv.-
fév. 1355), emportant les regrets des habitants dont il avait ga-
gné l'amour par une administration juste et paternelle. Le sultan
envoya ses propres chevaux et mulets pour ramener en Maghreb
la famille et les enfants de son ancien ami. Le corps du défunt
fut porté h TIemcen et déposé dans le cimetière où l'on avait en-
terré son père. Abou-Zîan, fils du sultan Abou-Einan, arriva
avec un détachement de troupes mérinidcs pour rendre au cham-
bellan les derniers devoirs.
Le vizir Abd-Al!ah-Ibn-Ali-!hn-Sfcîd, fut nommé gouverneur
de Bougie et partit pour sa destination, au mois de Rebiâ 756
(marsravriUmai 4385). Aussitôt arrivé, il adopta le système de
conduite qui avait mérité h son prédécesseur l'estime universelle.
Nous aurons h parler do lui et de son expédition contre Constan -
tine, ville dont il sVnapara à la suite d'un siège
DTNASVIt HÊBIRIM. ABOU-BlHAIf. 39S
MOU--'L«-PABLf riLS BU «ULTAN A«OU-^L*fIACBH ; A1LVM« CKfi - ^ r Y "^
mftVOLTB BAKÂ LA liO?ITA<3NB BKS dBKCiouY* IL MEURT
YiCTIMB O^VSE TBAIÎSOK 0U»D1« ^AR LE GOÙTfeRIlSOfI DU DBRA.
Après la mort^ii sultan Abou-'l*HacefB, ses fi]s,Aboti-'t-Padl>
MoliAinnsed el Aboa^Salem^brahtm, se rendirent auprès de leur
frère Abeu-^iiiaii, c|4H commença par leur accorder de hauts com^
mandemeiits ; puis, craignant de leur laisser acquérir trop d'in-
fluence, îl les déporta en Espagne.Ils s'établirent dans ce pays, sous
la protectâon du sultan [de Grenade], Abou-1«Haddjadj, fils du
sultan Aboà-'l*OuéU<l ei petit-Pils du roiis Abou-Sald. Abou-
Eioan se repentit bient<6t d'avoir pris tet(e mesure et, lorsqu'il
eut consolidé son autorité par la conquête de TIemcen et du Ma-
ghreb centrai, il (il prier Aboa-'UHaddjadj de les loi renvoyer.
La réJlexion lui avait démontré qu'il garantirait mieux la tran-
quillité de son empire en retenant ses frères adprès de lui qu'en
les laissant dans un pays où ils pourraient devenir les instruments
des intrigants et des factieux. Abon^'l-Haddjadj, soupçonnant
de mauvaises iaientiens & leur égard , refusa de les livrer, en
déclarant qu'il no trahirait jamats de vrais croyants auxquels il
aurait aoGordé sa protection. Piqué au vif par cette réponse,
Abou-Ëiuan ordonna è son ehambeitan, Motiamtted-Ibn-Abi-
Kmt, d'écrire au monarque andaiousten une lettre do reproche
et do reoMnitrance. Ce document fut admirablement bien rédigé,
comme j'ai pu m'en assurer, ce ministre me l*ayant fait voir pen«
dantqueje me trouvais è Bougie. Abou-'UBaddjadj en ayant
pris coisnaiesanco , recommanda secrètement à Abou-'i-Fadl,
l'a?né des deux princes, de se réfugier auprès du roi [Don Pédre]
qui, depuis l'an 751 (4350), époque de la mort de son père AU
phonse sous les murs de Gibraltar, avait montré une sincère
amitié au souverain de Grenade. Abou*'l*Fadl suivit ce conseil
et, s'étant ensuite fait prêter un navire par le roi chrétien, il alla
débarquer sur la côte du Sous. De la, il se rendit auprès d'Abd-
I. IV. 20
306 HISTOIRE DCS BEBBCtCS.
#
Allah-es-Sekcîouïy et, s'ëtaotfait proclamer soUan, il somma les
peuples du Maghreb de reconnaître son autorité.
Abou^Einan apprit cette nouvelle en 754, peu de tem)>s avant
)e retour de son chambellan lbn-Abi«Amr, qui venait d^occoper
la ville de Bougie, et envoya aussitôt une armée en Maglireb sous
la conduite deFares-Ibn-Meimoun-Ibn-Ouedrar. Ce vizir quitta
Tiemcen dans le mois de Hebiâ 754 (avril-mai 1353). et, par-
'venu au pied du mont Sekcbua, il en occupa tons les aborda et
construisit la ville d*EUColiera pour lui servir de camp ei de
quartier général. Es-Sekciouï, se voyant bloqué danssH monta-
gne, abandonna la cause de son protégé et oiïrit au vizir un sem-
blant d'obéissance. Abou-'l-FadI se mitalors a parcourir les mon*
tagnes des Masmouda, et le vizir porta ses drapeaux et ses armes
viclorieuses dans toutes les parties du Sous. Pour assurer la
soumission de cette province après y avoir rétabli Tordre , Pares
installa des troupes sur les frontières et plaça dos garnisons dans
plusieurs forteresses et villes telles qu4fri-en-Four!ao* et Taroa-
dan t.
Abou-'UFadI étant passé des montagnes occupées par lesllas-
mouda dans le territoire des Zanaga, se jet^ entre les br<»s d'Ibn*
Uamtdi, chef de cette portion delà tribu qui habitait [le flanc de
l'Atlas], vis<4i-vi8 du Derà. Abd-Allah-lbn*Moslem*ez-Zerdali,
gouyerneur de cette province, se bâta de bloquer le pays où le
prince s'était réfugié. Cheikh de l'empire abd-el*ouadite, Ez-
Zerdali avait gagné la faveur du sultan Abou-'l*Hacen, l'an 737,
«'(près la prise de Tiemcen, et, depuis cette époque, il était resté
an service de l'empire mérinide. Ayant serré Ibn*Hamtdi de
près, il l'effraya en déclarant que les armées et les vizirs du
i^ltan allaient bientôt arriver ; puis, il lui promit telle somme
d'argent qu'il voudrait à la condition de laisser prendre le réfu-
gié. Celte proposition fui asEréée, et Ibn-Moslem se mit h Natter
les espérances du prince par l'offre de son appui, et le trompa an
• Ifri ou fouran^ ou Ifri enfotnian paratt signifier caverne desra'
p«tir<, en langue berbère. «
DT.NASnB HERIKIDE. -^ ABOV-EIKAN. 907
point de le décider ^ monter h cheval et à venir le trouver.
L'ayant fait aussîtôt arrêter, il Tenvoya au sultan et paya à El*
Hamtdi la somme convenue. Ceci se passa en Tau 735 (1354).
Abou-Einan expédia des lettres jusqu'aux extrémités de son ém-
igré pour annoncer cette nouvelle et, quelque temps après,» il fit '
étrangler son frère dans la prison où on le tenait enfermé.
VOar B'eiÇA*lBX-EL-HACEN QCI s'était BÈVOLTfi A GIIUKALTAB.
Eiça, filsd'EUHaoen-lbn-»Âli-lbn*Âbi^'t-Taiac/appartenait ^u
corps des cheikhs mérinides et était un des membres les plus îo^
fluents du grand conseil de la nation. Nous avons déjà parlé <le
son père en retraçant les événements qui marquèrent le règne
d'Abou-r-Rebiâ*. Quand le sultan Abou-'l«»HacaQ eut achevéla
construction de la ville de Djebel «el-Feth [Gibraltar)^ Eiça reçut
Tordre de s'y installer en qualité de gouverneur des possessions'
mérinides en Espagne, d^nspecteur des forteresses, de payeur*
général des garnisons, et il conserva ces fonctions assez longtemps
pour devoir s'en assurer Texercice pendant le reste de ses
jenrs. Toutes les fois qu'un grave événement survenait * dans
^l'état , Abou^'l-Hacen le faisait venir pour avoir son * avis
et , au moment ile marcher contre rifrikïa , il le consolta
sur celte entreprise. Ëiça lui recommanda d'y renoncer et lui r&*
présenta que les tribus mérinides n'étaient pas assez nombreuses
|x>ur garder un tel pajs, vu qu'il faudrait y établir des garni-
sons depuis la frontière orientale jusqu'à celle de l'Occident et
encore sur toute la ligne du littoral. Cette contrée, disai^il,
exige beaucoup de troupes pour la garder et, de plus, une armée
assez forte pour contenir le» Arabes, peuple qui y domine main^
tenant et qui, depuis bien longtemps est demeuré insoumis. Le
saltan avait un toi désir de posséder lifrikï^i qu'il ferma l'oreille
' Pûge i«G de co volume.'
308 BISTOIM DM BIBBftRIS.
k CQ9 «âges coBseils el en renvoya Tauteur au gouvernement des
forteresses espagnoles.
Après le désastre de Cairouan, Eïça traversa le Détroit aCn
àe comprimer les révoltes que le fils du sultan avaient suscitées à
Fes et àTlomcen. Débarqué è Gbassaça, il se rendit à Tèza, looa*
litésituéedansle territoire de sa tribu, IcsBeni-Asker, et, eoayant
rassemblé les guerriers, il partit avec l'intention de surprendre le
campd'Abou-Einan, pendant que ee prince tenait son ueveu étroi-
tement bloqué' dans la Ville-Neuve [de Fez], après Tavoir battu en
rase campagne. Sa!d-lbn-Mouça-el-Adjtci, auquel Abou-Einan
confia le commandement des troupes destinées à agir contre
Eiça, alla prendra position sur le bord du Uou-Halou, rivière
qui sert à délimiter la région occupée par les Beni-Asker. Les
deux armées étaient en présence depuis plusieurs jours quand
elles apprirent que la Yille-^Neove avait succombé. Peu de temps
après, Eiça reçut une communication d'Abou Einan qui l'engf*
geaitk reconnattrc son autorité et, trouvant qu'Abou-'l-Hacen
- mettait une lenteinr extrême à lui envoyer des renforts, il fit f^a
soumission moyennant certains avantages que le nouveau sultan
s'empressa de lui accorder. A la suito de cet arrangement, il se
rendit k Fex, et Abou-Einan, enchanté d'avoir gagné un homme
aussi inQuent^ le logea dans le palais et lut donna la présidence
do conseil privé.
Après la mort do sultan Abou*1-Hacen, le chambellan, Ibn^
Abi^Amr, s'empara de l'esprit d'Abou-Einan et, devenu son
confident et son ami intime, il écarta de la présenco royale tons
les autres coortisans. Eiça, qui en fut du nombre, ressentit un
vif mécontentement, mais il cacha sondépit et se fit donner l'an-
torisalion d'aller à la Mecque. Revenn du pèlerinage, l'an 756
(4355), il passa par Bougie et, cédant aux sollicitations d'ibn*
Abi->Amr, qu'il rencontra dans cette ville, il s'engagea ^ lui cooci*
lier de nouveau la faveur du sultan. Arrivé h la cour et trouvant
QO'Aboo-*'Einan gouvernait sans prendre conseil de personne, et
sans témoigner la moindre confiance ni aux courtisans ni aux fa-
miliers du palais, il demanda la permission de rentrer en Espa-
gne, siège de son commandement, afin, de maintenir la guerre
V.
DYNASTIE miniDI. ABOO-IlNAlf. 300
sainte sur cette partie de la frontière mérinide. S*4lant alors
rendu è Geata, il traversa le Détroit et prit terre à isibraltar,
Le bureau de la solde établi dans celte forteresse avait alors
pour chef un nommé Yabya-el-Fercadji, personnage rempli d'or-
gueil, qui trailait les autres officiers du gouyernement aveo une
hauteur excessive et qui, par son arrogance, avait excédé Abou^
Yahya, fils [et lieutenant] d'Eisa. Quelque temps après l'arrivée
de celui-ci, Masoud-lbn-Kendoux, un des serviteurs du sultan,
apporta à Gibraltar, de la part de son mattre, Targeot qui devait
servir a solder les garnisons mérinides. EUFercadJi voulut obli-
ger Eiça h passer chez lui pour toucher son traitement, humilia-
tion qu'il avait déjà fait subir à Aboo-Yahya pendant l'absence
de son père. Indigné de tant d'insolence, Eiça le fit mettre ati
cachot, renvoya Ibn*Kendouz à Geuta la même nuit, et répudia
l'autorité du sultan.
A la réception de cette nouvelle^ Abou*Einan ressentit une
inquiétude extrême et, croyant qu'Eiça s'était précipité dans la
révolte à l'instigation d'Ibn-el-Âhmer et du roi chrétien, il fil
donner l'ordre à Ahmed-lbn-el-Khattb, commandant de lama-^
fine à Tanger, de prendre la mer avec quelques vaisseaux et
d'aller mouiller dans la rade de Gibraltar afin de surveiller les
démarches de l'ennemi. Quand cette flotte parut devant la îùvie^
resse, les officiers delà garnison et les chefs des volontaires ve^
nus du pays des Ghomara pour prendre part à la guerre sainte
se concertèrent ensemble et, au lieu de soutenir leur chef, ils ré-
solurentde le livrer au sultan. Soleiman-lbn-Dawoud-lbn-Arab-
el-Askeri, gouverneur de Ronda, avait déjà eu un entretien se-*
cret avec Eiça, dont il était le conseiller et l'ami intime et dont
les démarches lui avaient procuré son commandement. Voyant
que son protecteur persistait à répudier l'autorité d'Abou-Einan
et à vouloir se tenir en révolte ouverte, il l'abandonna à son
sort et écrivit au sultan pour l'assurer de son obéissance. Eiça
reconnut alors que sa tentative prenait une mauvaise tournure
et se repentit d'avoir agi en dépit des plus simples règles de la
prudence^ Aussi, quand Ibn-el-Khattb arriva avec sa flotte, il
alla implorer ses bons offices au nom de Dieu et de leur ancienne
340 mSTOIRB DBS BERBÈRES.
amitié, et b pria d'envoyer au sultan Tassurancc de son dévoue-
ment et de le disculper d'avoir pris pari au forfait dont les gens
delà forterasse, disaîl-il, s'étaient rendu coupables. Les Gho-
marai ayant appris l'accusation qu'Eiça faisait ainsi peser sur
ens, furent saisis d'effroi et, pour se jqsliGer, ils firent irruption
dans le château où il s'était enfermé, le garrotèrent lui et son fils,
et les envoyèrent à bord du navire d'Ibn-el-Khattb. Cet officier
alla débarquer les prisonniers à Ceula et accourut à la capitale
pour y annoncer la bonne nouvelle. Le sultan lui présenta une
robe d'honneur et^ par son ordre, tons les courtisans en firent de
même. Omar, fils du vizir Âbd-Allah-Ibn-Âli, partit alors avec
Omar-lbn-el-Adjouz et le commandant de la milice chrétienne
afin d'amener Eiça et son fils devant le sultan et, le 8 du mois de
Dou-'l*Hiddja 756 (décemb. 4355), ils revinrent il la capitale.
Abou-Einan tint alors une séance solennelle pour juger les incuU
pés et, les ayant fait comparaître, il n'entendit que des excuses
et des protestations de regret. Cette défense ne fut pas accueillie
et on les ramena en prison^ où ils restèrent enchaînés jusqu'à ce
qu'on eut célébré la fêle du Sacrifice [40Dou-'l-Hiddja]. Quand
le dernier jour de l'année fut arrivé, on les traîna nu champ du
supplice. Eiça mourut criblé de coups de lance ; son fils subit
l'amputation d'une main etd'un pied, et, comme il refusa de se
laisser panser, il resta baigné dans son sang et mourut le lende-
main. Le triste sort de ces malheureux servit de leçon h ceux
qui auraient été tentés d'imiter leur exemple. Le sultan donna le
commandement de Gibraltar et des autres forteresses espagnoles
à Soleiman-Ibn-Dawoud.
LB SDLTAN S'BVPABI hE CONSTANTINE ET DB TUNIS,
Après la mort du chambellan Ibn-Abi-Amr, le suUan donna
le gouvernement de Bougie et des provinces situées au-delà de
cette forteresse au vizir Abd-Allah-lbn-Ali-lbn-Satd. Cet officier
partit pour sa destination après avoir reçu la permission d'em-
DTITASTtB VÊBIKIDB. AiiOU-BINÀN. 3(f
ployer pour la solde des troupes tout rargent- provenant de»
impôts.
Les montagnes de la province de Constantine, étant habitée»
pai'de» Sedouikich, appartenaient déjë au sultan; puisque [set
alliés] les Douaouida y avaient étendu leur domination; aussi,
nomma-t^il Mouça^Ibn-'Ibrahîm^lbn-Eiça au commandement da
ces peuplades et lut prescrivit-il d'aller à Taoortrt, sur Teitréme
limite de la. province de Bougie, et de s'y établir avec ses pa-
renia, ses fils et ses clients.
Ibn-Âbi-Amr avait déjà mis le siège devant Gonstantine après
s'être installé à Bougie; mais, ayant conclu un traité de paix avec
Témir Abou-Zeid, seigneur de- la ville dont il voulait s'emparer,
il s'en était éloigné, après avoir posté Uouça-lbn^lbrahlm à
Mila.
Le vicir Abd^Allah-Ibn-Ali ayant pris le commandement do*
[de Bougie avec le tilre de gouverneur de] l'ifrtkïa , se mit en
marche, Tan 157 (1356), conformément à l'ordre du sultan, et
occupa les abords de Constantine. Les habitants allaient faire
leur soumission en voyant les catapultes des assiégeants mena*
cer leur ville. qui était déjà étroitement bloquée, quand, tout-à-
coup, les Mérioides levèrent le siège par suite d'un faux bruit qui*
s'était répandu dans le camp au sujet de la mort d'Abou-Einan«.
L'émirAbou*Zeid se rendit alors à Bàne, après avoir confié le
gouvernement de Gon^tantiue à son frère, Abou-'UAbbas, main-
tenant Émit des croyants, que Dieu tout-puissant le soutienne 1
Ge prinee y était venu de l'ifrfkïa; où il avait essayé de con-
quérir letfône de ses ancêtres avec l'aide des Arabes, et tenté,
à plusieurs reprises, d'enlever Tunis au chambellan Jbn-Tafra-
gutn. Ces hostilités commencèrent en Tan 753 (1352), ainsi*
q^e nous l'avons déjà mentionné. Ge fut Kbalcd-lbn-Hamza,
le compagnon d'Abou-'l-Abbas, qui obtint pour lui le comman-
dement de Gonstanline et qui emmena l'émir Abou-Zeid; afin de
recommencer le s!ége de Bougie. Abou-'UAbbas fut à peine ins-
tallé dans la ville qu'il se déclara indépendant et, cédant aux ins-
pirations de son esprit intrépide, il prôla une oreille attentive *
aux suggestions de quelques chefs appartenant aux Aulad-You-
34 9 msroiu nsf M»f9t«9.
9of, fiimitlo qui ooiDOM^dait la tribu des Sedoatkiofa el qm étoH
mai disposée poar les Mérinides. D'après leurs conseils, U mareha
sarMila et surprit le earap de Moaça-lbn-lbrahtm dans une atta-
que de oint. Les fila de Mouça y perdirent la TÎe, les lAèrimàe^
alModoonèreol leurs tentes et leurs bagages, s^enfuirent jusque
Taoïirirtel passèrent de là a Bougie. Abott-^Binan, auprès duquel
Mmiçase rendit è la suite de cette défaite, attribua auxient^ura
du vîair AbdiAllah^lbtt-Ali lemdlieur qui venait d'arriver, vu
qu 'un prompt envoi de secours aurait pu le prévenir, et, d'apràa
son ordre, Ghealb»lbn*Meimoun partit pour Bougie el loi amena
le visir prisonnier. Yabya-ibn-Meiaioun4bn^Auumoud, client el
pifotégé de la famiUe royale, fut nommé gouverneur de oelte
ville.
Sur ces entrefaites, Abou-Zeid avait écrit à Ibn-Tafragutn, mt-
uÂstra de son oncle [Abou«Ishac-]lbraktm, îx>ur obtenir l'autori^
aation de se fixer à Tunis moyennant la cession de B6ne au sul-
tan. Cette proposition fut agréée ; l'émir s'établit dans la capitale
avec le titre d'héritier du trâne, et la ville do BAno reçut un oom«
mandant tunisien.
Ce fut pendant les journées du Teehric ^ds l'an 757 (déeemb.
4356), que le sultan Abou-*Eiuau apprit la défaite de M6uça«4bn*
Ibrahim. Use décida aussitAi k envahir l'IfrtkTa et, ayant fait
dresser un camp à U porte de la Vilie«^euve, il envoya des offi«
eiers à Maroc pour rassembler les contingents des provinces qui
dépendent de cette villa. Il ordonna en même temps aum Mérini-
detf de se préparer pour une longue expédilion et, depuis le jour
QÙ il reçut cette mauvaise nouvelle jusqu'au mois de BabiA (mars«»
avril 4 357), il se tint eonetammeot assis, en public» afin d'enrft"
1er des troupes, de les solder et de les passer en revue. Le vÏBir
EaresT^lbn-^Heimoun partit enfin deFei avec le premier corps et
'{^s trois jours qui suivent la fête du Sacrifice (40deDou-'l-
Hfddja) ont et ^ nommés techrie, parce que les p '!< rins expoient au
mlM {cherrêc) la cbair des victimes pour la dessécher, on
parcQ qu'ils inunolent les victimes en pleia soleil.
DTRASnB XtlItlIlDi. -««> AtfOlMIRAR. 9(3
l'armée, et le saltao le suivit à la tète da second, ils marchèrent
eo oui ordre jusqu'à Bougie et, après une halte de quelques joors
pendant lesquels ils s^occupèrent à rétablir l'équipement des
troupes, le vizir poussa jusqu'à Constantine et y mit le siège.
I^ 3i}Uafi ne (arda ps à le rejoindre et, aussitM qu'il s'y montra
avec sa paissante armée qui marchait drapeaux déployés et dont
le pcûds ébranlait la terre, les habitants, saisis d'effroi, abandon-
nèrmt leur suUmi et se précipitèrent au-devant du souverain
mérinide aGn de lui offrir leur soumission. Abou-'l-Abbas s'en-
ferma dsîns la oitadelle avec ses oflieiers et serviteors, pendant
que son frère, El«-Fadl, se rendit auprès d'Abou-^Sinan datis l*e8*
poir d'obtenir une capitulation. Cette grâce leur fut accordée,
mais, en évacuant la citadelle, ils eurent à passer dtfns le eamp
du suites». Quelques jours plus tard, Abou-^'l-Abb^ fut envoyé ^
bord d'un navire qui le transporta à Ceuta. Il resta prisonnier
dans cette forteresse jusqu'à ce que la fortune lai devint encore
favorable, ainsi que nous le racont«roas plus tard.
Mansoiir-lbn^el*Hgddj-KbalQuf*e)*Tdbani, cheikh mérinideel
membre du conseil-d'état, reçut d'Abou-Einanle commandement
de Oottstantine et, dans le mois de Cbâban (juillel^soûl i3&7), il
^s'ins^ialla dans la citadelle. Le sultan était encore campée» de-«
bora de la ville quand on lui apporta deux lettres d'hommage;
l'une de la part d^ Ydhya-lbn*Yemtoul, seigneur de Tooier, et
l'autra d^ la p^rt d'Ali-lbo'-eK&halef, seigneur de Nefta. Ibn-
Mekkî vint en per90Qne pour lui renouveler ^assurance de sa fi-»
délité, et leç Aalad^ob^lbel, chefs des Kaoub et rivaux des Benî->
Abi^'l-Leil, arrivèrent aussi pour l'engager dans une tentative
contre Tauiç- U accueillit cette propoeiMoo avec empresseipent
et leur fournit tin corps d'armée sous le& ordres de Yafaya-^lhn-^
Rahhou-lbn-Tacbefin. Il donna, en mâoae temps, le comniande*'
ment do la flotte au raïs Mohammed-lbn-Youçof-el-Abkem, en lui
ordonnant de faire voile pour Tunis, afin d'appuyer le&iroupes
de terre»
Averti de leur approche, lechambellao Abou*Mohammed"»lbfH
TafragdiQ, plaça soD sultan, Abou-Ishao-lbrahtm^ fils da sultan
Abou-Yahya«Aboti*B«kr, à la tète d!une armée et Teavoya avec
314 BiSfOiai D£8 MaS&BBS.
les AoIad-Abw'I-Leil, à la rencontre de l'ennemi. ,La flolte du
sultan étant arrivée dans le port de Tunis, attaqua la ville pen-
dant le reste de la journée et, par cette démonstration, elle dé(nda
Ibn-Tafragutn h partir la même nuit aGn de s'enfermer dans EU
Mehdïa. Au mois de Ramadan 7ô8 (août-sept, 4357) , les alliés
* d'Abou-Einan prirent possession de Tunis et y proclamèrent la
souveraineté de ce monarque, pendant que Yahya-lbn*Rabhoii
alla s'installer dans la citadelle etse charger du haut commande-
ment.
Abou-Einan , ayant alors tourné son attention vers l'état du
pays qu*il avait conquis, défendit aux Arabes riahides d'exiger
le tribut appelé khafara et, par cette prohibition, il leur inspira
tant de méfiance qu'ils étaient tous disposés à la révolte aussitôt
qu'il leur eut fait demander des otages. Leur émir, Yacoub*Ibn«
Ali, s'aperçut de ses mauvaises intentions à leur égard et, pour
les soustraire^ aux coups perfides qui allaient les atteindre, il les
emmena tous dans la province du Zab. Le sultan se mit à leur
poursuite en faisant ^éclairer sa marche par Youçof-lbn«>Mozni,
gouverneur de cette contrée, et se rendit à Tolga en passant par
Biskera. D'après les conseils do son guide, il arrêta Abd-er-
Bahraan-lbn-Ahmed, grand cheikh de Totga et détruisit les cbè-
teaux de Yacoub*lbn-Ali. Comme les Arabes s'enfuyaient tou-
jours en se dirigeant vers le Désert, il revint sur ses pas et reçut
d'ibn-Mozni le montant des impôts que ce chef avait recueillis
dans sa province. Tous les soldats de la colonne jouirent de
l'hospitalité de ce chef, qui leur distribua du blé, de la viande,
des assaisonnements et du fourrage pour les dédommager de
. ce qu'ils avaient consommé pendant celte course de trois jours,
à travers les sables. Le sultan le récompensa largement de ce
tribut de générosité et lui donna, ainsi qu à son (ils à ses gens^
une forte gratification.
Il rentra ensuite à Gonslanline avec l'intention de continuer sa
marche jusqu'à Tunis, mais il avait une armée dont les ressour^
ces s'étaient épuisées par la longueur de cette campagne et par
les dangers qu'elle avait eu k surmonter lors de son entrée en
Ifrtkïa. Les chefs de corps se concertèrent alors et prirent la ré^
*.
DYNASTIE HfiBIKlDE. — ABOU-Bllf AN. 315
solution dd l'abandonner; le vizir Fares-Ibn-Meimoun, se laissa
entraîner dans le complot, et, tbut-à-coup, les cheikhs et com-
mandants de tribus donnèrent congé à leurs subordonnés et les
renvoyèrent en Maghreb. Le sultan» auprès duquel ces chefs
étaient restés, fut averti qu'ils en voulaient mârae à ses jours et
qu'ils avaient l'intention de le remplacer par Idrls, fils d'Oth-
man*Ibn-Abi-'I-Olâ ; mais il avait si peu de troupes à sa dispo-
sition, qu'il fut contraint de cacher son ressentiment. Il savait
cependant parfaitement bien qu'ils étaient tons d'accord pour le
trahir. Ce fut à deux journées vers l'est de Conslanlioequ'il se vit
obligé de reprendre la route du Maghreb. Ayant pressé sa mer-
che, il entra à Fez vers le commencement de Dou-'l-Hiddja 758
(nov, 4357), et, sur le champ, il fit emprisonner le vizir Pares-
Ibn-Meimonn dont il soupçonnait la complicité avec les chefs
mérinides. Quand les trois jours da Techric furent passés [com-
mencement de décembre] , il donna l'ordre de faire mourir le
trattre h coups de lance, et, s'élant saisi des principaux chefs
des Beni*Merin, il condamna les uns à la mort et les autres k
Temprisonnement,
La nouvelle de sa retraite vers lo Maghreb se répandit avec
une grande rapidité, et le chambejlan Ibn-Tafraguîn s'empressa
de quitter £l-Mehdïa pour rentrer à Tunis. Aussitôt qu'il parut
dans les environs de la capitale, ses partisans coururent aux ar-
mes et forcèrent la garnison mérinide à s'embarquer pour le Ma-^
ghreb. Bientôt après le retour de ces troupes, on vit arriver à
Fez la colonne que Yabya-lba-Rahhou, soutenu parles Aulad-
Mohelhel, avait conduite dans le Djerid pour y percevoir l'impôt.
Le sultan rallia ainsi une partie de ses forces et résolut de faire
une nouvelle campagne l'année suivanle.
SOLBIHAlf-IBN-DAWOCD EST IfOnnfi TIZIR ET FAIT CHB BXPtDmO!!
EN IFRÎKÏA.
Abou-Einan étant rentré en Maghreb sans avoir pu complè*
346 HISTOIRI DIS BIBBERVt.
ter la conquête de rifrtkïa, ressenlit queiqo^iDqQiëtti(ie ea ré-
fléchissant h Télat dans lequel il avait laissé ce, pays. Craignant
surtout les attaques que Yacoub-Ibn-Ali et les Douaouida insoo*
rois pourraient diriger contre la province de Constantine, il rap-
pela Soleiman*lbn-Dawoud, gouverneur de ses possessions espa-
gnoles, et, Tayant nommé viiir de Pempire, il le plaça à la tête
de Tannée qui allait partir pour TlfrikTa. Cette colonne se mît
en marche dans le mois de Rebià 759 ( février-mars-avril
4358),
Yacoub-lbn-Ali avait maintenant jeté le masque et levé l'éten-
dard de la révolte ; aussi, le gouvernement merinide le remplaça
par son frèreet rival, Meimoun«lbn«-Alt, qui devint ainsi eom*
mandant des Beni-BIohammed, tribu douaouida, et de tous les
nomades de la province [de Constantine]. Il parvint même h
rallier la majeure partie des tribus qui avaient suivi son frère
Yacoub. Plusieurs fractions des Aulad-Seba-Ibn-Yahva vinrent,
sous la conduite de leur chef, Othman-Ibn-Youçof>lbn-Soleiman,
pour se joindre à lui et reconnaître de nouveau l'autorité du
sultan. Toute« ces peuplades arrivèrent alors avec leurs tentes
et leurs troupeaux, et se postèrent dans la voisinage du lieu où
le vizir avait établi son camp.
Pendant que le sultan se rendait à Tiemcen afin de mieux sur-
veiller les opérations de son ministre, celui-ci était entré sur le
territoire de Constantine. Youçof-Ibn-Mozni , gouverneur du
Zab, connaissant parfaitement les affaires des Douaouida et leurs
habitudes, reçut Tordre de quitter Biskera etde se rendre auprès
d'Ibn-Dawoudafin deledirigerparses conseils. Étant allé trouver
cet officier, il Taccompagna dans une expédition contrôles peuples
de T Auras et Taida non-seulement à faire i entrer tous les impôts
de cette localité, mais aussi à chasser les Douaouida insoumis et
à faire cesser leurs brigandages. Soleiman-Ibn-Ddwoud ramena
h Tiemcen Tarmée du sultan, après Tavoir conduite à cette par-
tie de Tifrikïa qui forme Texlréme limite du territoire occupé par
les Riah. Il revint avec les députations des tribus arabes qiii
s'étaient distinguées dans cette campagne par leurs bons servi-
ces, Le sultan donna h ces envoyés ûes robes d'honneur, des
OTRaSTII MttiKlDI. — ES-BAÎD. 317
chevaux ot (Ic3 brevels de pension dont la solde devait être
prisé sur le revenu du Zab. Ahmed, (ils de Youçof-lbn<Mozni, se
présenta ensuite de Li part de son père et fil cadeau au snllan *
de plusieurs beaux chevaux et d'un certain nombre d'esclaves et
del>oucliers.Abou-Einan accueillit ce chef avec une grande dis-
tinction et l'emmena à Fez afin de le traiter plus diijnement et de
lut.roonlrer toute la splendeur de la cour mérinide. Ils y arri-
vèrent vers le milieu du mois de Dou«'l-Câda 759(fin d*oc<-
tobre 1 358).
■ORT D'ABOU-fiJNilf. -*LB TIZIR EL-BACEN-IBN-OSIÂH S'fiUPARB
DU POUVOIR BT FAIT DÊCLARBR ES-8AID SULTAN DU MAGBHEB.
Entré à Fez la veillede la grande Fête (milieu de nov. 4358),
Abou-Einan assista le lendemain, jour du Sacriflce, à là prière
publique et, aussitôt après, il ressentit une indispo<;ition qui
Tempècha di3 donner audience, ain.si qu'il en avait eu rhabilude
dansées journées solennelles. Rentré au palais, il se trouva tel-
lement malade qu'il dut se mettre au lit et se faire soigner par
ses femmes. Ayant déjà désigné sou fils, Abou-Zfnn, comme héri-
tier du trône, il avait donné à ce prince, en qualité de vizir oi
do tuteur, un vieux serviteur delà fnmille rovale, nommé Mou-
f;a-lbn-Eiça-el-Acouli. Ce personnage, dont k père ailssi avait
rempli les fonctions de vizir, voulut établir Paulorilé de son pu-
pille le p^us tôt possible et, dans ce but, il proposa aux chefs
mérinides de se rallier sur le champ autour du jeune émir et do
faire*mourir le vizir Él-Hacen-lbn-Omar. On ennemr personnel
de celui*ci, Omar-Ibn-Meimoun, fut l'auteur de ce conseil. El-
Hacen, soupçonnant leur dessein, communiqua ses appréhen-
sions au grand conseil, et, comme les membres de co corps
étaient tous mal disposés pour le prince héréditaire à cause de
son humeur farcuche et de son mauvais naturel, ils prirent la^
résolution de confier à. un autre I*antorilé suprême. Ayant alors
appris qu'Abou-Einan, bien que dangereusement malade, avait
3)8 HISTOIRE DBS BERBtiIBS.
rinleotion de les chàlier tous avant de mourir, ils so décidèrent
à lui donner la mort el à proclamer sullan sou Fils* Es-Satd , enfant
de cinq ans. Ce plan arrêté, ils se rendirent au palais le matin, de
bonne heure, et luèrenlle vizir Mouça*Ibn-Eiça, ainsi qu'Omar-
Ibn-Meimoun ; ensuite^ ils placèrent Es-Saîd sur le trône et lui
prêtèrent le serment de (idélilé. Masoud-lbn-Rahhou-lba-Maçaï^
vizir du jeune prince, se Gt alors donner Tordre d^arréker Abou-
Zîan aPm de Téloigner du palais. L'ayant trouvé dans l'apparte-
ment des femmes, il l'engagea par des paroles rassurantes à sor-
tir de celle retraite, le ccinduisit devant son frère auquel il l'o-
bligea de jurer fidélité. Aussitôt après, il Tentraina dans un ca-
binet et lui ôta la vie. Ce lut le mercredi, 24 de Dou-'l-Hiddja
(fin de novembre 4358), qu'ElHacen-Ibn-Omar s'empara de
1 autorité.
Pendant ces événements, Abou-Eirinn se mourait; le jeudi sui-
vant on s'attendait à son enterrement, [car on avait répandu le
bruitde sa mort]. Le vendredi arriva et, comme aucun préparatif
funèbre ne se faisait encore, des soupçons de trahison se répandi-
rent dans ic public. Alors , dit-on, le vizir entra dans la
chambre du moribond et lui serra le cou jusqu'à ce que la n^ort
s'ensuivit. L'enterrement eut lieu le lendemain, samedi
El-Hacen-lbn-Omar séquestra Es-Saîd dans le palais, après
Tavoir fait proclamer souverain et s'être attribué toute l'autorité.
Abd-er-Rdhman« autre lilsd'Abou-Einan, effectua son évasion
le jour où son frère fut inau^^uré, et chercha un asyle dans la
montagne de Lokaï. Il était plus âgé que le nouveau sultan, mais
on avait préféré celui-ci parce que son visir, Masoud-lbn-Maçai,
était cousin [d'El-Hacenrlbn-Omarj.Surla promesse que ses jours
seraient respectés, Abd*cr-Rahman sortit de sa retraite et se
laissa conduire devant son frère. EUlIaccn-lbn-Omar Tenferma
' Le texte arabe porte U-akhiki {à son frère). On peut admettre
cette ieçoa en supposant que le pronom possessif se rapporte à
Abon-ZIan ; mais l'auteur aurait mieux fait d'écrire V-ibnihi
[à son fils).
DYNASTIE MÉRITIIDB. ES-SAÎD. 319
ilans la citadelle de Fez et envoya chercher les autres fils d'Abou-
Kinan lesquels, Lien que Irès-jeunes, occupaient tous de hauts
commandements dans les forteresses de Tempire. On lai amena
Ël-Motacem deSidjilmessa, mais Amer-Ibn-Mohammcd, le hin-
tatien, qui avait été choisi par le feu sultan pour être le tuteur et
gardien du prince Ël-Motamed, gouverneur de Maroc, refusa de
livrer son protégé, et Temmena dans la montagne des Hintata.
Le vizir équipa aussitôt une armée pour lui faire la guerre. EI-
Motamed ne sortit de cet asile que pour se rendre auprès de son
oacle, Abou-Salem, à Tépoque où ce priuco obtint la souveraineté
du Maghreb.
LE yiZlR SOLBIIIAIV-IDN-DA^'OI'D HARCBB SUR VAKOC , APllf Dl
COUBATTBB All^B-lBN-XOUAMMED.
Amer- Ibn-Mohammed'Ibn-Ali était cheikh des Hintata, Tune
dos grandes tribus masmoudiennes. Son père, Mohammed-lbn-
Ali, avait été chargé, par le sultan Abou-Youçof-Yacoub, de pré-
lever l'impôt chez ces peuples, et son oncle, Mouça*lbn*Alif avait
remplîtes mêmes fonctions pour le sultan Abou-Satd. Amer^ le
sujet de cette notice, fut élevé à la cour mérinide ; il accompagna
Abou-'l -Hacen en Ifr ikïn et reçut de ce prince lo commandement
(lu corps de cavalerie qui faisait la police à Tunis. Abou-4-Iiacen
s'étant embarqué pour lo Maghreb, mit toutes les dames de sa
famille dans un autre navire, eu ordoni^anlà Amerde les accom-
pagner. Elles traversèrent la mer, débarquèrent h Almeris, en
Andalousie, et là, elles apprirent le naufrage du sultan et de ses
troupes. Amer les Ol rester dans cette ville, et, fidèle observateur
des engagements qui le liaient envers son maître, il refusa de les
livrer aux émissaires d'Al>ou-Einan. Après la mort d'Abou-'l-
Hacen, qui finit ses jours sur la montagne des ûinlata, il apprit
qu'Abou-Einan lui savait bon gré de son dévouement envers un
monarque que iMfrtkïa avait repoussé et que les hommes avaient
abandonné. Ayant alors conduit auprès du nouveau sultan le
320 nisTomi ust MUftiss*
harem li' Abou-'l-Hacen, il fui accueilli k la cour de la manière la
plus honorable*
Se trouvant à Tl^mcen Tan 754 (13o3}, il fui nommé par
Abou-Einan percepteur de Timpôl chez les tribua masinoudi^n-
nes et, a'étant rendu au milieu de ces peuples, il remplit sa
tâche avec un zèle et une habileté des plus rares. Le sultan lui-
même On fut frappé au point de s'écrier : « Je voudrais
> trouver un homme qui pût administrer les provinces
» orientales de mon empire avec autant de talent qu'Amer admt*
» nistre mes provinces occidentales. Débarrassé alors de tout
» souci mondain, je me livrerais à la vie dévote. » La haute fa«-
veur qu'Amer s'était acquise lui attira la jalousie des vizirs et,
k l'époque où El-Hacen-Ibn-Omar devint vizir unique du sultan,
il eut à supporter non-seulement la haine, mais aussi les calom-
nies de ses ennemis.
Peu de temps avant de mourir, Abou-Einan accorda à ses en-
fants de hauts commandements dans les provinces ; a son
lils , Mohammed-el«Hotamed , il donna lo gouvernemenl de
Maroc, et plaça Amer-lbn-Mohammed auprès de lui en qualitéde
conseiller et protecteur. EI-Hacen-lbn-Omar, s^étnnl emparé
(lu pouvoir après la mort du sultan, proclama la souveraineté
d'Es-Satd et rappela h Fez tous les enfants <l'Abou-Einan qui
exerçaient des commandements. Amer recul alors l'invitation
«ranfi^ner son pupille à la capitale, mais, au lieu d'obéir, il quitta
Maroc avec le jeune prince et l'emmena dans la montagne dos
Hintata. A cette nouvelle , El-Haccn s'empressa d'envoyer a
Maroc un corps d'armée commandé par son collègue, Soleiman*
Ibn-Dawoud. Dans le mois de Moharrcm 760 (décembre t3S8),
Ibn^Dawoud se mit en marche, et, quand il eut occupé la ville
de Maroc, il pénétra dans la montagne des Hinlala et bloqua la
position où Amer s'était fortifié. A la f:uito d'un long siège, il allait
emporter les derniers retanchemenls des insurgés, mais, au mo-
ment d'atteindre le but de «es efforts, il apprit que la discorde
avaitéclalé parmi les Mériuides et que Mansour-Ibn-Soleiman,
prince do la famille royale, s'était mis en révolte et faisait le
siéi;;ede la Ville*Ncuve. Quand cette nouvelle fut connue dani le
DTHASTIB MfiRllfIDB. — ^ ES-SAID. 321
•I
camp, toutes les troupes quittèrent leurs positions pour aller
joindre le prétendant, et le vizir iînit par suivre leur exemple*
Amer &e vit ainsi délivré d'un grand péril el, quelque temps
après, il quitta sa montagne par Tordre d'Abou-Salom , qui 8'é-
tait rendu maître du Maghreb en CbAban 760 (juillet) et qui dési-
rait avoir son neveu auprès de lui.
ABOO-HIXHOU- HOUÇA SB HOIÏTRE OAKS LA PEOYHÎCE DE TLEHCBII
BT BNLÈVB CBTTB VILLE AUX ■BRIIfIDES.
Nous avons dit * qu'Abd-er-Rahman, fils de Yahya et petit- '
fils de Yaghmoracen, avait quatre fils. Youçof , qui en était Tatné,
se distingua par son caractère grave et, peu ambitieux des biens
de ce monde, il ne s'occupa que de bonnes œuvres. Quand son
frère, Abou-Satd-Olhman, prit possession de Tiemcen, il reçut
de lui le gouvernement de Ténès. Son fils Abou-Hammou-Mouça
marcha sur ses traces : amateur du repos et de la tranquillité, \l
évita la société des gens pervers. En Tan 753 (4352), quand
Abou-Einan enleva aux Abd-eî-Ouadites le royaume de Tiemcen,
. leur sultan, Abou-Thabet s'enfuit vers la frontière orientale du
Maghreb [avec plusieurs de ses parents et amis]. Ces voyageurs
forent attaqués par les Zonaoua qui leur enlevèrent tout, jusqu'à
leurs montures, et les mirent dans la nécessité de continuer leur
route à' pied. Abou-Thabet, accompagné de son neveu, Abou-
Zlan -Mohammed, fils d'Abou-SaM, de son autre neveu, Abou*
Mouça, fils de Youçof, et de son vizir, Yahya-Ibn-Dawoud, s'é-*
earta du sentier suivi par la reste de ses gens et fut fait prison-
nier avec ses compagnons. Mouça parvint à s'échapper et, arrivé
k Tunis bii il se mit sous la protection du chambellan Ibn-Tafra*
guîn, il trouva h la cour des Hafsides l'accueil le plus bienveil-
lant. Un fort traitement lui fut assigné ainsi qu'aux autres réfu--
Voy. tome lu, p. 4^2.
T. IT. 34
322 BISTOIM DBt BBKBERCS.
giés abd^cUouaditas qni voulaient se mellredo sefvice do goa«
vernemonl tunisien. AboQ<*>ËiQan demanda en vain leur eilradi-.
tfoD ; le ebambellan déclara baniemcDl qu'il les prot^eraii
centre tous ledrs ennemis.
Quand Tarmée mërinide s'empara de Tunis [en 758 '^t 357] ^
le sollan harside, Abou-Ishac-lbrahtm, fils de notre seigneur
Abou-Yahya-Abon-Bekr, s^éloigna da la ville et emmena dans sa
suite le prince Abou-Hammou-Mouça. Après le départ d'Abou-
Einan pour le Maghreb, Abou^lsbac alla mettre le atége devant
Constantine, et, dans cette entreprise, il se fit soutenir par son
neveu, Abou-Zeid, seigneur de Bône, par les Douaouida, sous
les ordres de Yacoub-Ibn-Ali, et par les réfugiés zenaliens com-
mandés par Abou-Hammou-Mouça.
. Api'ès la prise de Tiemcen par Abou-Eioan, les Beni-Anier^
lbn-Z6ghba se révoltèrent contre son autorité, passèrent eti Ifrî-
kfaateo leur chef, Soglieir- lbn*Amer, et se fixèrent avec leur;, fa^
milles, leurs tentes et leurs troupeau^^, dans le voisinage et sous la
protection de Yacoub-lbn-Ati. Quand l'armée du sultan Abou-
làhao leva le siège de Constantine, Sogheir forma le projet de ra«
mene> eon peuple dans le désert du Maghreb central, leur ancien
séjour, et, voulant avoir sous la main un prince du sang, afia di»
le proclamer sultan et d'envahir avec lui la province de Tleincen,
il ÎDvita Pémir Abou-Hammou h raccompagner. Les Bafsides
consentirent volontiers au départ de leur protégé et lui Tirent ca-
deau de plusieurs tentes et d'un équi|>age royal, le lot^t auss.i
l>eau qu'ils purent lui fournir dans la position où ils se trouvaient,
puisqu'ils étaient eus-mâmes en expédition et loin de leuiQ*api^
taie. SduIq, fils de Yacoub-Ihn-Ali, accompagna les Bi^ni-Ainer
quavd ils se mirent en marche ; Zian» fils d'Olhman-Ibn-Sebdt et
chef douaouidieo, se joignit à eux, el Daghar-Ibn-Eiçn prit \| la
même route, emmenant avec lui les Beni-Said, tribu rîahida.
se dirigèrent vers le Maghreb à grandes journées, dans l'intentioi
d'y porter b ravage. \
Les Soueid, rivaux des Boni- Amer, el amis des Mérinides ,
avaient rassemblé leurs forces pour repousser les envahisseurs ;
ils se rencontrèrent avec eux au midi île Tiemcen el, ne pouvant
\
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DYNASTIE UtRlNlDB. — ES -SAID. 32S
leur résisier, iU prirent la fuite, après avoir perda OtbnoiaQ, fils
<le leur obef Ooenzeramar. Ce fatsur ces entrefaites cpi'eni lien
la mort d'Aboii-Einan. Avant de quitter la vie, il avait doané à
ses enfants des commandements dans les provinces et Bommé
son Q's, Uohammed*el-Mehdi, au gouvernement deTlemoen.
Les Arabes, ayant appris que le stiltan n'était pins , péné-
trèrent dans la province de Tlemcen et s'en rendirent m*eitres.
El-Hacen-lbn«Omar plaça alors Satd-lbn-Houça-el-Adjtci,
client de la famille rovale, à la tète d^une armée et lui ordonna
de pousser jusqu'à Tiemcen et de prendre le commandement
de la garnison que l'on y avait laissé. Abmed-Ibn*Mozui , qui
vonlut rentrer dans le Zab et qui avait reçu d'Ibn^Omar on
riobe cadeau, un beau cheval et une /obe d'honneur, profita d«
départ d« la colonne pour l'accompagner jusqu'à Tlemcen. Satd^
lbn«-Moiiça fit son entrée dans cette ville au mois de Safer 769
{jôiov. 13&9), et s'y vit bientôt investi parMes Beni-Amer qui,
sous les ordres de leur sultan, Abou-Hammou-Mooça, s'étaient
rendus maîtres de tout le pays ouvert. Le 8 du mois dû
Rebiâ ( février ) , ces Arabes emportèrent la ville d'assaut ,
après *pln.«ieurs jours de combats, et massacrèrent la gar-
nison mérioide. Sogheir-*Ibn-Âmer , dans la tente duquel Satd-*
Ibn-Mouça s^éiait réfugié avec le fils du sultan Abou^Einân
et les gens de sa suite, leur accorda sa protection et les fitescor-*
ter jusqu'à Fez par un détachement de sa tribu.
Abou-Hammou, ayant recouvré le royaume de ses ancêtres,
s'appropria un présent roagniGque que le sultan [Abou-Einan]
destinait à Don Pedro [1Y], fils du comte et seigneur de Barce*
lone. On y remorqua surtout un beau cheval, de couleur gris-
«foncé dont la selle et la bride étaient richement brodées en or. U
garda le cheval pour son propre usage et disposa des autres
objets pour les besoins de son service.
LB VlZlft HASOUD-IBN-VAÇAÏ S'bMPARB DS TLBVCBVr , TKAHIT SON GOU-r
VSaNElHENT RT PR0CtA31K I.A SOUYERAINCTfi DE SIANSOUR FBN-SOLCIMAK.
Le vizir El-naccn-lbn-Omar couvoqna le corps^ de cheikhs
324 HISTOIHB DES beubïres.
mërinides aussitôt qu^il reçut la nouvelle de la prise de TlerocoD
parAboii Hammoa, et leur annonça son intention* de marcher coq*
tre le sultan abd-el-ouadile. Il eulPidëe de s'yrendreen personne,
nuais ils repondirent par des objections, tout en approuvant l'envoi
d'une armée et en promettant de prendre part à Texpédition.
Cédant à leurs remontrances, il se borna à faire ouvrir le bu-
reau de solde, à distribuer beaucoup d'argent et à rassembler,
sous les mura de la Ville-Neuve, une armée parfaitement équi-
pée. Le commandt^ment de ce corps fut donné à Masoud-Ibn-
Rahbou-Ibn-^ Maçaï auquel on remit, en même temps, des sommes
considérables et les insignes d'autorité. Masoud partit à la (aie
de ses troupes, drapeaux déployés, et emmena dans sa suite Man-
80ur-Iba*Soleiman, petit-fils d'Abou-Malek et arriére petiufils
do sultan Yacoub-Ihn-Abd-cl-Hack.
Le peuple avait espéré que la royauté passerait h ce prince
après la mort d'Abou-Kinan ; tout le monde regardait son avène-
ment comme une chose cerlainc et l'on se le disait, non-seule*
ment entre amis, mais en public. Mansour en fut très-inquiet et,
craignant les suites fâcheuses qui pourraient en résulter pour
lui-même, il alla s'en plaindre [à Masoud]. Ce vizir le blâma verte-
ment d'avoir souffert qu'une pareille idée lui passât par Tesprit
el, mettant en oubli toutes les convenances, il lui adressa une ré-
primande sévère. Le prince suhit cette semonce avec une grande
soumission et promit de ne plus s'occuper de pensées aussi dan-
gereuses. J'assistai à cette scène et je demeurai convaincu que
Mansour, avec une telle faiblesse do caractère, devait infailli-
blement encourir les disgrâces les plus humiliantes.
Au mois de Rebiâ second (mars 4359), le vizir fit son entrée
dans Tiemcen ; Abou^Hammou ayant évacué la ville avec ses
nlliés arabes, les Zoghba [Beni-Amer] et les Unkil, pour se jeter
dans le Désert. Ces guerriers, voyant ensuite que le Maghreb
était resté dégarni par suite du départ des iroupes mérinides
pour Tiemcen, allèrent s'ioslaller dans l'Angad avec leurs tentes
et leurs troupeaux. Pour les chasser de cette position Masoud ex-
pédia contre eux un détachement dans lequel il avait fait entrer
plusieurs émirs vi cheikhs mérinides. Son cousin, Auier-lbn.
DTHISTIB aiERINIOB.-^ ABOO-SALBH . 32&
Obbou-lbn-Maçaï; auquel il donna le commandement de cette
colonne, rencontra les Arabes dans la plaine d'Oudjda et essuya
une charge si vigoureuse que ses troupes s'enfuirent en abandon-
nant leurs tentes et leurs bagages. Les cheikhs mérinides perdi^-
rent leurs chevaux dans la bagarre et arrivèrent à Oudjda, dé-
pouillés de tout, jusqu'à leurs 'habits.
Quand la nouvelle de cette défaite fut connue à Tiemcen, le9
Mérinides qui s'y trouvaient en garnison étaient déjà mal dispo*
ses pour le vizir El-Hacen-lbn-Omar et» fort mécontents de
voir ce ministre tenir leur sultan en tutelle , ils n'»tten-'
daient qu'une occasion favorable a6n de pouvoir renver-
ser son autorité usurpée. Aussi, en apprenant la défaite d'Ibor
Maçaï, ils laissèrent éclater une joie extravagante et, dans uik
oonseil tenu en dehors de la ville, leurs meneurs se décidèrent à
prendre pour sultan Yaïch-Ibo-Ali, petit-fils d'Abou-Ziau et ar-
rière petit-fils du sultan Abou-YacoUb. Le vizir Masoud-lbu-Sah*
boa fut très-contrarié de cette démonstration^ et, comme il nour-
rissait, depuis quelques temps, le projet de placer Mansour-^lbn-*
Soleimaa sur le trône, il s'empressa de le faire venir et le con-
traignit à prendre le titre de sultan^ Lui ayant alors prêté le
serment de fidélité, il décida le grand raïs Ibn-Ahmer * et BU
Gomeodador >, caïd de la milice chrétienne , à suivre son exem*-
ple. Le peuple arriva en foule pour offrir ses hommages aa
nouveav souverain, et les chefs mérinides^ avertis de ce qui se
passait, accoururent de tous côtés pour en faire autant. Yatèb-
Ibn-Ali partit sur le champ et se rendit en Espagne.
Hansour se mit alors en marche pour le Maghreb avec les Mé*
rinides qui s'étaient ralliés à son parti, et, trouvant que les ban-
des arabes voulaient lui barrer le passage, il tomba sur elles el^
s'empara de leurs tentes et de leurs troupeaux. A la suite d'une
marche très-rapîde, il arriva sur le bord du Sebou, vers le miliea
* Ce personnage appartenait à la famille royale de Grenade*
* Le Commandeur, Ce mot est espagnol.*
326 nSTOlBB 0B9 BIMBtBBS.
de Djomada second 760 (commeocemen t de mai 4 359) , et y ékabrti
soneamp.
A ia réception de cette nouvelie, El-Hacea*lbii--OmBr fit dresser
ses tentes au dehors de Fez et y conduisit son sultan en grande
cérémonie. La iiiéa»e nuit, il découvrit que ses troupes commeo*
çaient à l'abandonner et que les personnages les plus considérable»
de r^oipire avaient passé du côte de Mansour-lbn-Soleiman.
Amsitôt, îl fit^alhiflier des torches et des grands feux atitoitr du
eaflip et, rassemblant lès clienis de la famillo royale et les troa-
pesde la milice, il fit monter te jeune prince à cheval, le rameftar
au paiais et mit la Yîile-Neu ve en état de défense. Le leodemain^
Hansour rangea son armée en ordre de bataille ot se dirigea vers
h Kodia*t-dl«AraY6, où il prit position le 22 damôme mois, et com*
meoça les hostilités en coupant toute communication avec la
piacb. Pendant que de nombreux oovriers, rassemblés de ton»
côtés, lui construisaient des titaohinesde siège, une foule dedépu-^
taiffoiis vinrent lui présenter les hommages des villes du Ua^reb,
et les Iroopes mérinides qu*on avaient envoyées k Maroc pour
s'eoparer d'ABner-lfao-^Mohammed arrivèreoi au camp avecleuf
chef Soleiinafi-Ibn-Dawoud. Pour récompenser cet officier, Man*
sour le noBima visîr et, ayant l'ait mettre en liberté Abd-Allah-^
lbn*AK, ancien vizir du sultan Abou-£inan, il le rétablit dansie
rang qu'il avait déjà occupé.
Notre seigneur, Abou-'l-Abbas , prince de Gonstantioe, reçut
alors TautoTtsatton de quitter la prison de Ceutdi et, après avoir
subi Pépreuve de la captivité, il en sortit aussi pur que l*or qu^
a passé par les creusets. Toutes les prisons de l'empire se yidè-
f ont en même temps par l'ordre de Mansour, et les gens du
peuple que le sultan Abou-Einan avait fait arrêter à Bougie et à
Gonstantine lors de l'occupation de ces villes par les Mérinides,
purent enfio rentrer chez eux.
Pendant que Mansour-lbn-Soleiman dirigeait des attaques in-
cessantes contre la Ville-Neuve, une partie do ses Mérinides
passa du côté d*£l-Hacen-lbn-Omar et d'autres rentrèrent dan»
leurs foyers pour y attendre les événement^. Maâsour garda ses
positions jusqu'au comniencemcut de Ghàban (comm, de juillet)
DTNASTIK HAIINIDB.-— ABOU-SALB». 337
ifiiaiul Aboa-Salom arriva eo Maghrob et monta s«r le Irène
doses aYeux.
ABOO-SâLBH MBBABQVB bars LB PAVB GHOHARA BT 9B BEftO 1|Alf>B«
BC BOTAUne. -** MAMSOOB-lBIl-SOLfllMAN BST MIS A «ORT.
Vémhp Afaoo-Balem-^Ibralittai avait demeuré en Esp^ne depuis
la mort de aon père S et il y était resté quand (son frère] Abou*-
'UFadl aita so perdreen essayant de soulever le Sous contre Aboti'-
£tnan. 4jomme il s'était adonné aux pratiques ide la dévotion cA
Hq}\1 menait une vie retirée, le sultan de Maghreb ne pensa goère
k l'inquiéter.
Enl'an7S5(t3&4), Abou-'UHaddjadj, souverain de l'Anda-
louaie fut poignardé dans le maaaila * pendant qu'il eéUbrait If
fête qui termine le }«Ane de Hamadan (21 octobre). L'ai^ssia
était un malbeureux idiot, né d'une des négresses du pelais et
t regardé généraleenent oorame (ils de Mohammed^ frère du souve<-
ratn régnant. L'affranchi Aidouan^, ihinistrode Toniptre, séques-"
Ira le nouveau sultan, Mohammed, fils d'AboUi-'UHaddjadJ, et
prit «ar iuir^méme l'administration de Tétat* i
Abou-^fitASQ, avons-nous dit, était rempli d'ambition : il espér
raitméme s*emparer du royaume dn Grenade. Étantmalade, l'an
7/kJM|5F} il fit inviter le gouvernement andalousieo à lui envoyer Je
juif^lbraMm-Ibn^-Zerzer, médecin du palais. Cet homme montra
unegrande répugnance à faire le voyage, et le ministre espagooïi
•ayant agréé ses excuses, les adressa au sultan magbrehin. Abou^
Ëima en fut trèa-»niéoontent, et, rentré à Fez, après la prise éç
«
I » ' ■ 1 . I ' ' <■■■! I ■ » ■ Éii ■ w I, |ii m mi M |i II I I
9
* Voy. page 305 de ce volume.
* Voj. tome I, page 372.
^Dans le texte arabe ou a imprimé par erreur Ramadan à îa place
de fitdcKion.
328 niSTOlM DBS ibivèms.
Constantine et la conquête de ilfrtkïa, i\ arrêta un vizir et plit"
ftieurs cheikbs que la coar de Grenade avait envoyés pour le
complimenter. Il donna pour prétexte de cet acte de violence que
leur sultan et leur premier ministre auraient dû venir en per-
sonne pour le féliciter du triomphe de ses armes. Ayant troublé
de cette façon la bonne intelligence qui avait subsisté entre les
deux empires, il résolut de passer en Espagnç et de marcher sur
Grenade.
Depuis Pan 754 (4950-4), quand Alpbonse[X] mourut au siège
de Gibraltar, son fils Pedre avait gagné la confiance des Andar
loosiens ; et RidouaUf depuis son avènement au pouvoir, avait
toujours cultivé l'amitié des chrétiens dans Tintérél du peuple
musulman. Abou-Eii^n condamna hautement cette alliance, mais
ilae vil dans l'impossibilité d'en tirer vengeance ; étant bien con^
vaincu que s'il entreprenait une ezpéditiou en Espagne, le roi
[de Gastille] enverrait sa flotte au secours des Andalousiens e^
rempécherait de traverser ie Détroit. Ayant ensuite appris que
Pédre et le roî d'Aragon se faisaient une guerre acharnée, il for-
ma Une alliance avec celui-ci et obtint la promesse que U flotte
de Barcelone passerait dans le Détroit et ferait sa jonctîoi^avec la
flotte africaine. Il apprêta alors un présent magnifique, composé de
riches étoffes et de meubles fabriqués en Maghreb, d'un harnais
brodèenoretd'on beau cheval: témoignage d'amitié qu'il voulait
envoyer à son nouvel allié. Ge cadeau n'arriva pas à sadestina»
tion,a}an(été saisi à Tiemcen.
Après la mort d'Abou-Biuan, son frère Abou*Salem conçut
l'espoir de mouter sur le trône du Maghreb avec l'appui du gou-
vernement andaloosien que la politique de ce sultan avait indis-
posé au dernier point. Invité à se rendre en Afrique par les amis
qu'il y avait conservés et encouragé par les représentations de
ceux qui allèrent le trouver à Grenade, il demanda h Bidouan-
l'autorisation de passer le Détroit. Sur le refus de ce ministre, il
partit en colère pour la cour de Gastille et, s'étant jeté aux pieds
du roi chrétien, il l'implord de le faire transporter en Maghreb •
Aux conditions posées par ce monarque comme prix d'une telle
faveur, il donna un prompt consentement, et, s'étant embarqué
DTVlSTIfi MHINIDB. — ÂBOU* 8ALVM. 3t9
dâDB le navire mis à sa disposition, il alla descendre sur la c6te
de la province de Maroc. Ayant alors reconnu qu'il ne devait
pas compter sur l'appui d'Amer^lbo-Mobammed, vu que ce chef
était alors étroitement bloqué par les troupes de Soleiman-lbo**
Dawoud, il se remit en mer avec Pintenliop de rentrer an port
d'où il était parti ; mais, en passant devant Tanger, il prit uae
réaotution désespérée, et se Gt débarquer au pied du mont Safiha ,
dans le pays desGhomara. A peine s*y fut-il montré, que toute
la population accourut pour le soutenir et elle jura de le défendre
jusqu'à la mort.
S'étant alors emparé de Ceuta et de Tanger, il rencontra dans
cette dernière ville l'ex-seigneur de Constantine, Abou-'l-Abbas,
qui s'y était rendu en sortant de la prison de Ceuta. Nous avons
déjà parlé des événements qui procurèrent la liberté à ce prince
hafside. Accueilli par Abou-Salem comme un ami , Abou-'l-
Abbas ne cessa de jouir de sa haute bienveillance, jusqu'à ec^ que
le destin le retirât de l'eiil pour le mettre en possession du ro-
yaume paternel. Le prince mérinide trouva aussi à Tanger Bl-
Hacen-Ibn-Youçof de la iribu des Ourtadjen, Abou-'l-Hacen-
Ali-lbn-es-Saoud, secrétaire du bureau de la guerre et Abou-'I-
Cacem-et-Tilimçani le cbérif. Ces trois personnages avaient en*
couru la disgrâce de Mansour-Ibn-Soleiman qui, les ayant soup-
çonnés d'entretenir des intelligences avec El-Hacen-lbn-Omar,
alors assiégé dans la Ville-Neuve, venait de les renvoyer du
caropavec l'ordre de passer en Espagne. Us entrèrent tous au
service d'Abou-Salom,£l-HaGen-lbn*Yooçof comme visir; Ibn-
es-Saoud comme écrivain du paraphe et le chérîf Et-Tilimçanî
comme intime du palais et compagnon de promenade.
Bientôt après la soumission de Centa et de Tanger, les forte-
resses que les Mérinides possédaient en Espagne reconnurent
l'autorité d'Abou-Salem, et Tahyalen-Ibn-Omar , gouverneur de
Gibraltar, lui amena les troupes qui formaient la garnison de
cette ville.
Le bruit de ces événements se répandit rapidement et l'armée
du nouveau sultan augmenta tous les jours. Mansour-lbn-Solei-
man tenait encore la Ville-Neuve assiégée quand il cnt connais*
3S0 BIBfOIIK DBS BBIBfttBf.
sanœ dti danger et, pour l'avertir, il plaça ses frères, Ei9a>^t
Taihe, k la lôte d'un corps de troupes et les envoya contre les in-
surgés. Cesohefs oocupàroniCasr-iLetama, Uvràrent one batMlle
à Aboci*<Salem et le repoussèrent dans la montagne {des G)h)-
iiH»ra]. Alors, ie vizir EUHacen^Ihn-Oœar, qui se tenait toujours
derrière ses remparts, s^empressa de Caire porUer h C0 priniçe
l'assurance ée son dévouement et la promesse de lui remeAti»» la
Ville-Neuve , siège de l'empire ; et Masond-lbp-&abhou^Ua»-
IfaçfJûT, craignant d'avoir encouru la haine ds Mansour et d'A}î«
filsde Mansour, suivit les conseils de quelques partisans d'Abov-
Salemei s'enfuit. pour aUer le joindre. Uansour se vit bientôt
abandonné de la plupart de son moode et, décourage tQi|t-^>^f^t
par la retraite des cbeb Mérinides qui Ta vaieot soutenu , il
courut se réfugier dans Badis, ville située sor le littoral du Ma-
ghreb. Les troupes cpi'il avait laissées au camp se mirent ai^s
en ordre de œarobe, par escadrons, et passèrent sous les drâ*
peaux d'Abou^Salem, en Tinvitant à se porter sur la capitale.
Aiusitâi qu'Abou-Salem parut sous les mars de la Ville-Neuve,
El^Haoen-Ibn^Omar déposa son fantôme de sultan et le lut en-
voya ; sortant ensuite au-devani du prince triomphaleur, il lui
prêta le serment de fidélité et l'introduisit dans la forteresse.
Cet événement eut lieu le vendredi, 4 5 CbAban 760 (milieu de
juillet 4369.)
Devenu ainsi souverain du Maghreb, Abou-Salem vit accourir
au pied du trône une foule de députations, chargées de lui pré-
senter les hommages de ses états. Pour éloigner EUHacen-Ibn-
Oouir dont il redoutait ta présence, il loi fournit un corps de
troupes et ie fit partir pour Maroc en qualité de gouverneur. Ma-
soud-Ibn-Bafabou-Ibn-Maeaï et El-Hacen-lbn^Youpof«6l-Ourta-
djeut reçurent le titre de vizir, et le savant légiste, Abott*-Abd*>
Allab-Mohammed-Ibn«»Afamed-lba^Mer20uc, prédicateur da la
cour sous le règne du père d' Abou-Salem, fut admis au nombre
des familiers du palais. L'auteur de cet ouvrage devint à la fois
seerélaire particulier du sultan et secrétaire des commandements:
ayant remarqué que les aSTairesde Mansour-Ibn^Soleiman tom-
baieiit en désarroi et convaincu que l'autorité suprême passerait
DYNASTIE MtEimOB. ABOD-SALIM. 334
entre les mains d'Abou-Salem, j'avais abandonné le camp de
Kodia-t«el-Àraïs pour aller troaver ce prince. Il m^accaeillit
avec une bienveillance extrême, me traita comme t\ j'étais son
propre fiis^ et me nomma son secrétaire intime.
Pendant que i'antoritédu sultan se consolidait en Maghreb, les
partisans qu'il avait à Badis arrêtèrent Mansour-lbn-Soleiman
ainsi qu'Ali, fils de Hansour, et les an^enèrent enchaînés à la capi-
tale. Abou Salem les fit comparaître devant lui pour leur adresser
des TefNTDohes aiensaîte illes envoya aa supplice. Ils mourlH^ent
Tersla fia de Chàbaa (juiOet), criblés de eoups delaoee. D'après
SftA ordre, on oondubii en Espag^, pour rester aoiis bonne
garde dans la forteresse de Bonde, ses frères, ses <x>n8Îiis, toub
les autres princes du sang, ainsi qua les membres les plus in-
fluents des br^nehtfs collatérales de la famiUe royale. Son neveu,
Mohammed, filsd'Abot^Abd^er-^Rahfnaii, parvioiàs'éobapper et,
après avioir passé quelque tempsà Grenade, il se rendit ë la cour
du roi cht^éiien où il continua h séjourner jusqu'à oe qu'il montât
sur le trône du Maghreb. Nous ranonieroosson histoire plus tard.
Abou«âalem était depuis quelque temps eo possession du pouvoir
quand on fit eadiarqner les détenus de Ronda, soas le préleiSie
de les envoyer en Oxient et, lorsque le navire se («i éloigné de la
côte, on les jeta tous à la mer, conformément à l'ordre que ce
monarque avait donné. S'étaat ainsi débarrassé de tous ses ri-^
vaux, il resta seul maître de l'empire. La volonté de Dieu do«
nûoe les^vénements I
An priece hafaîde, Abou-'l-Abbas , le sultan prodigna les
égards et tes honneurs : il fit disposer pour sa réception la maison
d'Amef-Um-rFeth-Allah, ancien vizir d'Aboo-'l-Haoen ; il lai as-
signa aux audiences publiques une place immédiatement à eôté
de la sienne^ et loi promit de le faire monter sur Te trône de
•Tunis. Aussi, quand il se fat emparé de Tlemoen^ il enroya son
piiotégé ep Ifcîli^.
1 Notre auteur avait alors vingt-huit ans.
332 HISTOIRE DBS BBlBtelS.
BiDOUAlf , MINISTRE DU ROI DE GRENADE , EST ASSASSINÉ. —
SON SOUVERAIN , IBN-EL-AHXER, EST DÉTRÔNÉ ET SB PRESENTE
U COUR DU SULTAN ABOU-SALEM.
Ed l'an 755 (1354), Mohammed, fils da sullan Aboa-'l-Had-
djadj, occupa le trône de l'Andalousie devenu vacant par la mort
de son père,eiRîdouan, affranchi d'Abou-1-Haddjedj, s'attribua
la haute direction des affaires. Ismail, fils cadet du feu sultan,
avait été désigné comme héritier du royaume, par suite de la
tendre affection que ce monarque lui portait ainsi qu'è sa mère ;
mais, maintenant que l'on eut fait passer la souveraineté à un
autre, il se vit relégué dans le fond d'un palais. Il avait épousé
aa cousine, sœur-germaine de Mohammed, filsd'ismati, fila du
raXs Abou-Satd ; aussi, fit*il inviter secrètement son beau-frère
il travailler pour le placer sur le trône. Mohamsied y consentit
et, profitant de l'absence du sultan qui était allé à une de ses
maisons de campagne, il rassembla la lie de la populace, dans la
nuit du 27* Ramadan (42 août 4359) , escalada les mura de
l'Alhamra , enfonça la porte de la maison habitée par le cham-
bellan Ridouaa et tua ce ministre sous les yeux de ses femmes et
de ses filles. Ayant alors fait monter IsmatI à cheval, il le con-
duisitau palais impérial et le proclama sultan. Pendant que les
remparts de TAlbamra retentissaient du bruit des tambours, le
sultan s'enfuit de sa maiaon de plaisance et se réfugia dans
Guadix. ,
Au point du jour, [les grands de l'empire et les autres classes
de la population se présentèrent devant IsmatI et lui prêtèrent le
serment de fidélité. Le raïs Mohammed s'arrogea alors toute l'au«*
i Le 28, selon Ibo-eUKhatlb, ms ar. de la Bib. irop. numéro 758.
tTNASTlS HfiKIHIDV. — ABOll-SALBH. 333
torité et, quelques mois plus tard, il tua son cousin, le nouveau
suUau, et se plaça lui-niéine sur le trône.
Le sultan Abou-Salem ressentit un mécontentement eitréme
en apprenant t*a$sassinat de Ridouan et la déposition *d'Aboa-
Abd-AIIah[-]Mohammed-lbn-el-Ahmer], prince auprès duquel il
avait trouvé une généreuse hospitalité, et il ordonna à son fami-
lier, lechértf Abou-'l-Gacem, départir sur le champ et de lai
amener le monarque déchu. Cet envoyé passa en Espagne, obtint
dea ministres du gouvernement grenadin la permission de con-
duire en Maghreb le réfugié de Gnadix et, leur ayant adressé
une sommation formelle au nom de son mettre, il procura la mise
en liberté d'Abou*Abd-Allah-!bn-el-Kbattb^ , vizir et secré^
leire d*état qu'ils avaient emprisonné, lors de cette révolution,
parce qu'il était le lieutenant du chambellan Ridouan et Tun des
plus fermes soutiens du souverain qu'ils avaient trahi. Il alla
ensuite à Guadix pour y prendre l'ex-sultan et se rendit avec
lui en Afrique, où ils débarquèrent dans le mois de Dou-'l-Cftda
de la même année (octobre 4 359)^.
Quand le monarque andalousien arriva dans le voisinage de
FeZy Abou-Salem monta à cheval pour aller à sa rencontre ; en-
suite, il le conduisit dans la salle d'audience, que l'on avait dé-
corée pourcette occasion et qui se trouvait remplie d'une foule
de cheikhs et de grands officiers de l'empire. Le vizir Ibn-eU
) Ibn-el-Khatib s'était distingué comme diilomate, comme
poète et comme historien. H était un des amis de notre auteur, qui
rapporte, plus loin, les circonstances qui amenèrent la mort de cet
homme vraiment remarquable. £1-Maccari, l'auteur d'une histoire
d'Espagne dont le texte arabe s'imprime maintenant, consacre
toute la seconde partie de son grand ouvrage à la biographie d'Ibn-
el-RhatIb. Les mannscrits de cet ouvrage ne sont pas rares *, il s'en
trouve à Paris, à Londres, àConstantlne et à Alger.
'Selon Ibn-el Khatib, le sultan débarqua en Afrique le lende-
main du jonr du Sacnfif^e, c'est-à-dire le 11 Dou-'l'HIddja, un mois
plus tard que la date indiquée ici par Ibn-Khaldoun.
334 BWTÛIEI DBt BlUftUi.
Rbatib s'avança alors au-devant du suil«D maghrébin et iaî i^ita
un poème dans lequel il le pria de soutenir le souverain de l'An-
dalousie et de le replacer sur le trône. Nous donnerons ici Une
copie de jcette pièoe dont le style touchant et pathétique émvt
touteTassemblée jusqu'aux larmes* :
Demandez f met deux {ami$\ , ei {ma b%eii^QMnée[ garde le
souvenir de liokhabbera; [demandez^ si ce vallon ut encore
vert t et $i les fleurs y répandent encore leur parfum.
[Demander] si le printemps a versé ses pluies sur le coteau
[où se voyait] une demeure dont les traces, maintenant dispa^
rueSf n'existent que dans [notre] imagination et [dans nos]sou^
venirs.
[Ce fut là] mon pays! dans ces lieux, je partageais [ot^^cffin
bien-aimée la coupe] enivrante de l'amour, alors que [le am.
lier de] 4a vie effarait un gazon doux et verdoyant.
[O fut] sous ce ciel et dans ce nid que mes ailes commencè-
rent à croitre; et me voici maintenant privé d'ailes et de
nidl
Il m'a repoussé [ce pays], sans pourtant me haïr ni medé-
daigner, et sans que l'aversion eût brisé les doux liens de
notre affection ;
Mais^ parce que les joies de ce monde sont passagères et que
ses plaisirs ont pour habit%ule de visiter [l'homme] et de «'en«
fuir.
Qui me rapprochera de ma [bien-aiméé] ! séparé d*elle » le
temps me parait bien long et chaque jour me semble un mois.
Il fallait noits voir, les seins embrasés par la douleur ;
Pendant que la main du départ répandait les perles de [nos]
larmes ; hélas l la séparation a des peints que le cœur [de /'o-
muni] ne saurait endurer.
Le 5otr, nous pleurâmes auprès des eaux douces [du ruisseau]^
t £1-Maccari rapporte qv'lbo-el-Khaltb improvisa son poème, ne
l'ayant pas composé d^avance.
DTNASTIB ■£ftmiDB. — A»OU*8ALBM. 33&
de sorte , qu^aprèê nohre départ , elles étaient devenues
amères.
Je disais à nos montures accablées par une longue tnarche de
nuit, à ces chameaux que le conducteur eoit apprivoiser pa^
son chant et effarouclier par ses cris :
« Courage I après chaque peine arrivent deux plaisirs ; r^-
» jouisse^^ous \ Dieu remplit sa promesse, nos peines vont
» disparaître I »
Dieu a envers nous des desseins cachés; et le bonheur se ren-
contre même dans un état de malheur.
Oïit, la fortune nous trompe, mais la prudencene nous trom-
pera pas I Qvs les hommes nous trahissent, la patience nous
sera fidèle.
Si l^adversité, en m^éprouvantj eût reconnu en moi un homme
d'adresse et d'expérience, auquel sont indifférentes les douceurs
et les amertumes [de la vie] ,
Elle a dû trouver que mon cœur s'était endurci aux peines de
l^absence * et que ma résolution était ferme et tranchante à
rineiar du glaive indien»
[ Seigneur I ] puisque tu as visité ma maison d'El-Beidâ,
tant que je vivras f mon cceur et mon aspect ne perdront rien
de leur fraicbevr;^
Nous avons deviné que la guérison de nos cceurs [dffligési]
se ferait par Ibrahim-[Abou^Salem], et, en voyant sa figure,
nous avons reconnu la justesse de nos pressentiments*
[Oui, ils seront guéris] par le meilleur de la famille de
Yacoub-[Ibn^Abd-*el-J{ack], par celui qui a montré, dans les
ténèbres de l'adversité, un courage auquel la gloîre n'a jamais
fait défaut»
Les caravanes ont répandu partout sa belle renommée, et,
enle voyant, [les hommes] ont avoué que le bruit public s'ac^
cordait avec les faits.
Il» ■■ lit I tmé^m,^^
Lut, elle a mordu sur un bois endurci conirerabsencc.
A
336 HISTOIRE DBS BBMBRIS.
Si la merpauoait contenir [les flots dé sa] générosité^ elle
verrait ses eaux devenir douces ^t^ [remplie jusqu'au bord]
elle ne subirait plus les vicissitudes du flux et du reflux.
Sa bravoure fait tressaillir d'effroi le destin Im-méme; ri*
vêtu de ses habtts c'est la mort même qui se promène ' •
Tout lui obéit jnsgu'aux retraites inabordables sur les ci-
mes des montagnes; et les astres brillants encouragent [les
mortels] à espérer ses bienfaits.
Maître des rois I nous sommes venus de loin pour te voir et
pour obtenir justice de ton esclave ^ la fortune ^ qiH nous a trai^
tés en tyran.
Nous avons arrêté ses emportements à l*aide de ton nom,
bien qu'elle nous eût consternés par son orgueil et par sa
dureté. '
Dans la gloire qui Ventoure notas avons trouvé un refuge
contre la mort ; nous avons cherché l'ombrage de ta majesté et
nos craintes se sont dissipées.
Arrivés au bord de la mer auo: vagues menaçantes, nous
avons pansé à V Océan [de ta générosité] et cette mer nous a
semblé peu de chose.
[Nous avons pensé] à ton vaste khalifat ; et^ si quelqu'un
ose méconnaître ta dignité, la foi de cet homme est fausse et
son savoir n'est qu'ignorance.
Tes nobles qualités donnent aux louanges une direction sUkre
et bonne, pendant que la poésie s'égare en louant tes infé-
rieurs •.
Les cœurs de tous les croyants ont sincèrement désiré tapré*
sence ; leurs paroles et leurs pensées se trouvaient agréables à
Dieu.
' D*apres une note marginale, la leçon el^fetka serait préférable.
Les manuscrits portent el-atka avec un aïn, et el-betka. Dans tous
les cas, le sens du vers est le môme.
* Dans le texte arabe, une correction mal faite a produit i\ne dou-
ble erreur : il faut lire J^^ et ô^^l
DTKASTIB MtBIXIHB. — ABOU- SALEM. 3.3?
On tendit vars Dieu des maim suppliantes et JMeu ripendit :
€ Votre prière est exaucée. »
Il les combla de ses grâces en te plaçant sur le trône; prince
de noble race, ton avènement était de bon augure.
Les remparts de cette forteresse laissèrent éclater leur joie;
eux qui ne souriaient plus à cause de leurs afflietiont.
En rétùblissant lapaix tu as rendu la sécurité au pays et au
peuple ; maintenant Vépée ne se dégaine plus, la terreur n'arrive
plus à Vimproviste.
Déjà, notre seigneur, ton père^ avait déclaré gw tu étais le
meilleur de ses fils.
Tu avais le droit d'exercer le khalifat immédiatement après
lui ; mais chaque événement est réglé par le destin.
Tu avais laissé dans une triste solitude le halo de la de^
meure des kliahfes ; et^ pendant ton absence^ la lune [ du
khalifat] ne reluisait pas au [centre de ce halo.]
Dieu Va ensuite rétabli dans tes droits afin que le bonheur
fût répandu sur tous et que le voile [de la protection divine]
fût baissé [autour de la nation].
Conduits par lui l'empire et ses habitants se livrèrent à toi ;
la sécurité leur manquait et ils durent s'y résigner.
En te faisant subir l'épreuve [de l'adversité]^ il augmente ta
puissance, ta gloire et taj-écompense ; pour juger de l'or, il
faut le faire passer par le creuset.
Cest toi qu'on invoque quand un malheur survient; c'est toi
dont on espère le secoure quand la pluie [longtemps attendue]
trompe [les vœux du cultivateur].
Que la fortune^ par sa volonté arbitraire, commette uMela-
justice, c'est à toi [d'y porter remède;] de créer ^ de défaire,
d'interdire et de commander.
Voici le fils de Nasr * ; il vient, Paîle brisée, pour dememder
de ta grandeur les moyens de laguérison.
' l»a famille des Beni-'I-Ahmer, rois de Grenade, eut pour anoA'
tre un chef d^origine arabe, nommé Nasr.
T. IV. 28
338 HISTOIftB DES BBtBÈBES.
leif dans un pays étranger^ il espère une faveur que iu es
digne de lui accorder ; si tu désires la gloire, la voici à ta
portée*
Émir des Musulmans^ renouvelle avec lui ta ferme alliance^
que rien n^aurait pu briser excepté la trahison.
Ces t dans un prince comme toi que tout réfugié doit placer
S4m espoir ; quiconqtie invoque la famille de Mérin ramène à
lui la puissance et la victoire.
Imam de la vérité I venge le bon droit outragé I pendant tes
[généreux] efforts, tu recueilleras la gloire et une digne ré-
compense.
Défenseur de la vérité ! soutiens le bon droit, cai , [à toti
défaut] ou nepourra compter sur personne * .
Si Von dit : a [// /atif ] de l'argent ; » ton trésor est ample ;
si Von dit : a [// faut] des troupes ; » ton armée est tm-
mense.
Par toi le trangfesseur se voit arrêté dans sa carrière ; par
tes efforts la morale prend nns nouvelle naissance et l'isla-
misme relève ce que ^infidélité avait ruiné*
Quand notre prince te quittera, accorde -luiune faveur ines-
timable en le renvoyant dans sa patrie.
Hâte la guérison de ses malheurs et guéris ainsi les cœurs af-
fligés de tout un peuple, retenu loin de lui par Vusurpation et
la tyrannie.
Ils s^attendent à tevoir prendt e un engagement que ta main
droite s^empressera de sceller et dont le succès est assuré.
Le but est facile à atteindre ; aucune obligation ne pèsera
sur toi exceptét[la dépense d^]une somme sans importance quand
<m considère ta gloire qui doit en résulter.
> A la lettre : on ne pourra compter m^ur Zeid ni tur Omar. Ceci est
une allusion à une formate employée par tous les grammairiens ara-
bes et ainsi conçoedara6a Zetiion Omora {Verberavit Zeidus Omarum.)
' Le traducteur regarde le mot ^t comme l'adverbe négatif.
Voy. le Grammaire arabe de M. de Sacy, tome i, p. 549.
DYNASTIE HÊRINIDB. — ABOU-SALEM. 334
La vit de t'homme n'est qu^un éclat d^ emprunt, un don qu'il
faut rendre; mais une belle renommée c'est l'immorta^
lité.
Et celui qui échange un bien transitoire contre un bien éter^
nelf a obtenu un vrai succès et un bénéfice énorme* . ,
Prince illustre^ avant que ton hôte puisse accomplir ses dé--
sirs, il lui faut de vigoureux coursiers, aux pieds blancs ^ aux
fronts étoiles ;
Et des provisions de voyage, et des chameaux, bais de poil,
qui montrent clairement les indices [d^une nobterace], qui aient
le corps [brillant comme] de l'or et les jambes [reluisantes
comme] des perles •
Et des [chevaux] gns^qu'onarendus sveltes et légers pour
le jour de combat, et dont les étoiles envient l'éclata
Et des hommes-lions, de la tribu deUerîn, [des hommes] no-
blés, à turbans blancs, aux lances jaunes ,
Qui, revêtus d'amples cottes de mailles, résistent, en cara^
colant, aux troupes couvertes de fer *.
Voilà les gens qu'il faut appeler pour repousser une attaque;
aucun conflit ne leur parait redoutable , aucune montagne ne
leur est difficile à gravir^.
Si on leur demande ils donnent; si on leur résiste, ils
^ Le poète allait terminer ici son improvisation quand un de
assistants loi fit observer qa^îl devait faire l'éloge des parents du
sultan et des Mérinides en général. Sans se déconcerter, il récita
les vera qui suivent.
^ A la lettre vertes. Le mot khadra était employé par les anciens
Arabes pour désigner toute espèce de couleur foncée, même fa
couleur de la cotte de mailles. Le petit corps de cavalerie que
Mahomet avait sous srrs ordres , lors de la conquête de la
Mecque s'appelait, pour cette raison, le peloton vert {el-keiiba-
t-el-khadra) . '
s Le traducteur juge inutile de faire rémarquer les jeux de mots
qui se présentent dans le texte de cette pièce.
340 BlSTOltB DBS BEUtRBS.
écraténl ; yils/otU un$ promesse ^ ils la remplissent ; sHls
prennent un^migagementf ils y restent fidèles.
S'ils entendent des paroles impudiques, ils s^nfutent; mais ^
au jour du combat^ la seule pensée de fuite est pour eux un
piehé.
Si on les loue, ils trépignent de joie et s'agitent comme des
hommes ivres dont les jambes sont affectées par le vin.
On les voit sourire au milieu d'une forêt de lances, ainsi
que les fleurs sourient à travers les tiges du bocage.
Seigneur^! mon esprit, ainsi que mon génie^ s^était en^
gourdi; esprit et génie ne m'étaient plus d'aucun secours]
Et^ sans la compassion que tu m'avais accordée et qui m'a
sauvé la vie, rien ne serait resté de moi, ni corps ^ ni souvenir»
J'étais pfrdu, et de quelle perte ! qtjmnd tu me rappelas à
Inexistence; le tombeau renfermait déjà mes membres quand tu
m^as ressuscité t.
Tu commenças par a^ faveur éclatante dont je tC étais nul^
lement digne, et la grandeur de ta bonté fit épanouir mon
cœur.
Tu m'as comblé de bienfaits sans nombre, et mes éloges,
ainsi que ma reconnaissance^ ne suffiront jamais pour y
répondre^
Tu as pns l'engagement de couronner ces actes de généro^
siti par un effort qui nous rendra te pouvoir, la gloire et
t*honneur.
Puisse Celui auquel tu dois ta haute position te récompenser
de cette miséricorde qui brise les chaînes du captif et relève
Vopprimé.
Quandnous essayons de louer dignement tes nobles qumW4e^
nous demeurons interdits; ce serait compter les sables du
Désert o« les gouttes de pluie.
« Dans le texte arabe, il faat insérer an ^/î^ avant le mot Maulwi.
^ Le sultan mérinide Pavait Tait sortir de prison.
DTKASTIB atnilUDB. ASOO-SALBM. 34t
Hais nous faisons ce que nous pouvons, éi celui ^î nfipwT'-
fne aucun effort mérite de Pindulgenoe.
Après la récitation de ce poème on leva la séanee el^ IbD-
el-Ahmer se rendit \ son logement. On avait tapissé et
meiiblé plusieurs palais pour lui et pour sa suite et mis à sa
disposition un nombre d'excellents chevaux dont lei brides et
les selles étaient brodées en or. Le sultan lui envoya aussi une
quantité de riches habits et lui assigna un traitement convenable,
ainsi qu'aux affranchis européens et aux intimes qui Pavaient ac«
compagne. On observa à l'égard de cet illustre visiteur tout le
cérémonial delà royauté : cortège, gardes, titres, rien n'y man-
qua, excepté lés emblèmes ostensibles du commandement; oihTS-
rfon approuvé par le sultan andalousien è cause des égards qu'il
devait fc son bâte, le souverain du Maghreb. Après avoir passé
quelque temp;* auprès de son protecteur, il rentra en Espagne et ,
'en Pan 763 (4363), il recouvra son royaume.
El-HACBN-IBN-OHAR 88 RÉVOLTE k TKDlA. -* IL TOtiSS AtT
FOI7T01R DU SULTAN BT SUBIT LA PBlKB DB MORT.
Le vizir El-Hacen-Ibn-Omar, étant allé prendre te cômmaln-
dément de Maroc, établit son autorité dans cette ville, mais il
apprit avec inquiétude que sa haute fortune avait excité la ja-
lousie dés vizirs attachés au conseil dMtat et qu'ils travaillaient
i le perdre dans Pesprit du sultan. Craignant d'être frappé à
Pimproviste par 1^ colère de son maitre, il sortit de Maroc, l'an
764, au mois de 8afer (janvier 1360), courut à Tedia et arbora
Pétendard de la révolte. Les Beni-Djaber , tribu djochemide,
embrassèrent sa cause el; prirent l'engagement de le soutenir.
El-Hacen-Ibn-Youçof , vizir auquel le sultan remit le comman-
deraient de Pdrmée, marcba contre les rebelles, occupa Tedla et
força leur chef à se jeter dans la montagne voisine et à se mei^
tre sous la protection de Hocein-Ibn-Ali-el-Ourdfghi, grand
cheikh dp cette localité. Ayant cerné la montagne, il corrotnpit
342 BI8T0IBB DUS BSBBBBBS.
aTeo de Vof, one partie des ZaoAga qui en formaient la popala*
tioD, et se fit livrer lefugilif dont ib avaient attaqué et dispersé
les partisans. U ramena son prisonnier à la capitale, où il trouva
beaucoup de monde assemblé pour le voir arriver. Le sultan en-
voya toute» sa cavalerie au-devant du vainqueur et se rendit lui-
même à la Toor-d'Or (Bprdj-^ed'Deheb)^ kiosque situé en dehors
de la ville et dans laquelle il avait l'habitude de s'asseoir afin de
faire l'inspection de ses troupes.
El-Bacen-Ibn-Omar traversa la foule des spectateurs, porté
sur un chameau, et, en passant devant le kiosque, il pencha la
ièie comme pour baiser la terre. Le sultan, étant alors monté à
cheval, prit le chemin du palais, et toute cette multitude se dis-
persa, après avoir assistée un spectacle qui offrait un triste exem-
ple des vicissitudes de la fortune. Rentré au palais, le sultan se
plaça sur le trône et, s'étant entouré de ses officiers, il fit intro-
duire le prisonnier, et lui reprocha les crimes dont il s'était
rendu coupable. Le malheureux vizir essaya de se justifier et
finit par tout nier. Je me trouvai au milieu des courtisans et des «
grands qui assistaient k cette scène, et j'avoue qu41 y avait de
quoi faire couler des larmes de commisération. Alors, par Tor-
dre du souverain, on tratna Ibn-Omar, la face contre terre, hors
de l'assemblée ; ensuite, on lui arracha la barbe et, après l'avoir
cruellement fustigé, on le jeta dans une prison. Quelques jours
plus tard, il fut mené hors de la ville et tué à coups de lance.
Son cadavre fut mis en croix et resta exposé sur le rempart,
près de la porte d'El-Mahrouc, pour servir d'exemple.
LXS IflKSBBS [ BB-SODDAN ] BUVOIBRT AU SOLTaH UH PBtSBHT
D'AUTIRT plus SINGULIBB qu'il s't TBOOTA mis GiBABfB.
Dbns notre histoire du sultan Abou-'l-Haoen, nous avons parlé
du présent qu'il envoya au souverain des Noirs , Mença-Solei-
inan, fils de Mença-H ouça [et roi de Melli]. Le prince nègre vou-
lut lui en rendre l'équivalent et réunit divers produits de son
dtnàstib asaiaioB. — abou-salem. 343-
pays, tous extrêmement rares et curieux. Abou-'l^H^ceo mourut
daQsI'iQtervalle, etroffrande qui lui était destinée n'alla pas plus
loin que Oualaten^ ville située sur l'extrême fronlière du pays
des Noirs. La mort de Mença-Solèiman , qui eut lieu vers la
même époque, empêcha la caravane de continuer sa route. Une
guerre civile éclata alors dans le royaume de Melli : plusieurs
princes tentèrent de s'emparer du trône et se tuèrent les uns le»
autres. Le désordre ne prit fin qu'à l'avènement de Monça-Djata^.
En examinant Tétat du royaume , ce prince découvrit que le
présent expédié au sultan du Maghreb était encoi'e à Oualaten,
et donna aussitôt l'ordre de le faire parvenir à sa destination.
Il y ajouta une girafTe, quadrupède d'une forme bixarre, d'une .
taille colossale et réunissant en lui seul les caractères distinc tifs
de plusieurs animaux de différentes espèces.
Ce présent arriva à Fez dans le mois de Safer 762 (déc.<-j.an v.
4360-4). Le jour de son entrée à la ville fut une véritable fête :
pendant que le sultan allait s'asseoir dans le Kiosque-d'Or, d'où
il avait l'habitude de passer ses troupes en revue, les crieun
publics invitèrent tout le monde à se rendre dans la plaine, en
dehors de la ville. L'on s'y précipita en foule de tous les côtés
et , bientôt , ce vaste local fut tellement encombré que plu-
sieurs individus durent monter sur les épaules de leurs voi-
sins» Le désir de voir la'giraffe et d'en admirer la forme étrange
avait attiré toute cette multitude. Les poètes profitèrent d'une
si belle occasion pour réciter au sullan des éloges et des compli*
ments dans lesquels ils eurent soin de décrire ce singulier
spectacle. Les envoyés nègres se présentèrent devant AJbou-Sa«
lem pour lui exposer l'objet de leur mission et, tout en lui don-
nant l'assurance la plus formelle de l'amitié que leur souverain
lui portait, ils le prièrent d'excuser le retard qu'on avait mis
dans l'envoi du présent , retard causé par la guerre civile
qui avait désolé l'empire. Ils décrivirent aussi en termes
1 Dans la notice des souverains nègres, tome u, p. Iti. notre aïk*
teur donne à ce prince le nom de Mari-Djata.
344 BISTOIiB DBS MBBftïfeS.
pompettx la grandeur de I^ur siiliàn et la hante paissance de
leur nation. Peodant que l'interprète expliquait lenr discours,
ils faisaient résonner les cordes de leurs arcs en signe d'appro-
balioni selon Tusage de leur pays. Pour saluer le sullan, ils se
jetèrent de la poussière sur la tète, ainsi qoecela se pratique en-
vers les sottTerains de leur pays barbare. La réception finie,
Aboo-Salem se remit il cbe?al et l'assemblée se dispersa. La nou-
velle de cette ambassade se répandit promptement partout. Les
envoyés furent hébergés aux frais du saltan, et, comme ce
prince mourut avant leur départ, ce fut le régent de l'empire
qui leur fit les cadeaux d'usage et les congédia. Ils prirent la
route de Maroc et passèrent ensuite chez les Doui-Hassan, arabes
makiliens dont le territoire s'étend depuis ^e Sons jusqu'à la
frontière du pays des Noirs. En quittant les Doui-Hassan ils se
rendirent auprès de leur sultan.
U SOLTAll S'B«PAHB DE TLiaCBlf BT T LAISSE COaUB SOCTEHAllV
*
ABOO-ztAll, tBTlT'FILS D'ABOU-TACHEFtE. -^ lES PRIVCES
BAESIDBS SONT BEIITOTÉS DANS LBOB PATS.
En 760 (1 359), année dans laquelle le sultan Âboo -Salem de-
vint souverain du Maghreb, le Derft avait pour gouverneurAbd-
Allah-tbn-Moslem-ez^Zerdali , ami des Abd-el-Ouadites et partisan
dévoué de leur famille royale. Entré au service d'Abou-'l-Hacen
après la chute de Tlemcen, cet officier fut nommé ensuite gouver-
neurdu Derft par Aboo-Einan.La trahison qui livra au sultan
Abou-Einan son frère Abou-'l-PadI , lequel s'était mis en révolte
dans la montagne d'Ibn-Hamtdi, fut ourdie et conduile par Ibn-
Moslem. Lors de l'avènement d'Abou-Salem, qui portaitèson frère
Abou-'l-Fadl une viveaffeclion, surtout depuis leor dépoctatipn
en Espagne, Ibn-Moslem craignit la vengeance du nouveau sul-
tan et, s'étant assuré le concours des Arabes makilîens, il se
transporta, avec sa famille et ses (résors, à travers le Désert
jusqu'à Tlemcen* Il y arriva vers la fin de Pan 760 et trouva un
DTNaST» MÊRITCIDI. — JkBOU- SALEM. 346
accueil très-honorable anprès d'Abou-<Haminou. A l'instant
même, il fut élevé an vizirnt par ce sultan, qui était bien aise
.d'avoir l'appui d'un homme aussi puissent, et, dès*Iors, il dé-
ploya un grand zèle pour le service du prince qui lui avait confié
l*admrnistration * de l'empire.
Les Arabes makiliens, voyant la haute position qu'Ibn-Moslem
avait atteint, et craignantd'étre puni» par Abou-Salem, à cause
de leurs fréquentes révoltes contre le gouvernement mérinidc,
quittèrent tous leur territoire, sur l'invitation de ce ministre, et
allèrent se rallier aux Abd-el-Ouadites de Tiemcen. Abou-Salem
exigea d'Ab'ou-Hammou l'extradition d'Ibn-MosIem et , voyant
sa demande repoussée, il se rappela que les Makii étaient ses
sujets, habitants de son empire, et insista sur leur renvoi. Ne
pouvant obtenir aucune satisfaction du sultan abd-el-ouadite,
il prit la résolution de lui faire la guerre et alla camper en dehors
delPez, après avoir fait ouvrir le bureau des enrôlements et an-
noncer une expédition contre Tiemcen. Pendant qu'il équipait
[les divers corps qu'il avait sous la main] , plusieurs de ses vizirs
se rendirent dans les provinces marocaines, afin d'y lever des
troupes. Au mois de Djomada761 (avril 4360), il se mit en mar-
che avec tous les contingents de ses états.
Abou-Hammou, prévoyant le danger, avait rassemblé les for*
ces de son empire et les partisans que la dynastie abd-el-ouadite
avait conservés parmi les Arabes et les Zenata. Ses alliés arabes
étaient lesBeni-Amer et toutes les tribus makiliennes, h l'excep-
tion des Àmarna, dont le chef, Ez-Zobeïr-)bn-Talha, avait em-
' brassé le parti du souverain mérinide. Suivi de toutes ces trou*
pes, Âbou-Hammou évacua Tiemcen , où Abou-Salem fit son
entrée, le 3 Bedjeb (21 mai 4360), et traversa le Désert pour se
rendre dans le territoire du Maghreb. Arrivé à Guerctf , ville ap-
partenant h Ouenzemmar*lbn-Ar!f , il la ruina de fond en comble
pour se venger de ce chef dont la famille s'était dévouée aux Méri-
I II faut supprimer dans le mot el-hal du texte arabe Vélif qui
précède le lam final.
346 BISTOIRB DES BBRBBtBS:
nides. Ensaite il alla dévaster le territoire d*Ootati et Toeavre de
destruction accomplie, il rentra dansTAngad.
A la nouvelle des ravages qui se commettaient sur la frontière
du Maghreb, Abou-Salem s'empressa de quitter Tiemcen afin d'y
mettre un terme, et il y laissa en qualité de gouvemear l'émir
Abou-Z}an<-Mobammed, filsd'Othman et petit-fils du sultan Aboa-
Tachefin. Ce prince avait été élevé i la cour de FeB où, depuis
son enfance, il vécut entouré des soins les plus tendres. On le
désignait ordinairement par le sobriquet d'El-Gobbi *. Le sultan
Vayant alors installé dans le palais de Tiemcen, nommé El-
Casr-el-Cadtm ( le Vieux-Château ) , mit* à ses ordres les
troupes Ben^tiennes tirées de la partie orientale du Maghreb
central et lui donna pour vizirs son cousin maternel, Omar-Ibn-
Mohammed-lbn-Ibrahim-Ibn-Megguen et Satd-Ibn-Mouça-Ibo-
Ali, fils d'un ancien vizir mérinide. Il plaça dix charges d'or et
d^argent* à la disposition de son protégé auquel il remit aussi les
insignes de la souveraineté.
Ce fut il cette époque qu'il rendit la ville de Gonstantine au
prince hafside, Abou-'l-Abbas, pour le récompenser d'avoir
partagé ses fatigues et ses dangers. Il donna, en même temps,
au prince hafside, Abou-Abd- Allah, la permission d'aller repren-
dre possession de Bougie, ville qui était alors au pouvoir d'Abou-
Isbac-Ibrahim, sultan de Tunis et oncle de ces deux princes.
Après les avoir revêtus de robes d'honneur et fourni à chacun
d'eux plusieurs montures et deux charges d'argent, il adressa à
Mansour-Ibn-el-Haddj-Khalouf, officier mérinide qui ôomman-
daità Gonstantine, une lettre par laquelle il lui ordonna de re«
mettre cette forteresse à l'émir Ahon-'l-Abbas. En congédiant
ces princes, il reprit le chemin du Maghreb. Arrivé à la fron-
tière de ce pays, il en expulsa l'ennemi et, dans le mois de Chfl*
ban (juin-juillet 4360), il rentra à Fez.
' Voy. t. ni,^p. 443. Ici les manuscrits portent El-Feta,
t, *'Dans le texte arabe, le « du mot |0^|;<3Jt doit être supprimé.
DYNASTIE M&RllIIDB. — ABOU-SALE». 347
BîeDtAi après son retour, il vît arriver Vém'iv Abou-Zîaa qui,
ayant quitté Tlemceu précipitamment à l'approche d'Abou-
Hammou, s'était jeté dans le Oaancherich où ses troupes furent
ensuite battues et dispersées par les.Abd'cl-Ouadites. Abou-
Hammou recouvra son royaume el obtint do sultan Abou-Salem
des conditions de paix très- favorables.
■ORT DI7 SULTAN ABOU-SAJLBM. OMAa-lBN-*ABD*ALLAa PBOCLAMB
ET DBPOSB SCCCESSIVBMBNT PLUSIBOBS 8CLTAITS.
Nous allons raconter Phistoire du prédicateur Abou-Abd-
Allah [-Mohammed] -Ibn-Merzouc qui était parvenu à exercer sur
l'esprit du sultan uneinfluencesans bornes. Ses ancêtres avaient
habité le rt6a^ * du cheikh Abou-Medyen [Bou-Mcdîn], et Tun
de ses aïeux, gardien du tombeau et de la mosquée de ce saint
personnage, transmit cette dignité ë ses descendants. Mohammed
graud-'père* du sujet de cette notice, mourut en odeur de sainteté
et fut enterré dan^ le Yieux-Châleau [El-Casv^el-Cadîm] par
l'ordre de Yaghmoracen, qui vonlut avoir près de lui le tombeau
d'un tel homme, aGn que cela lui portât bonheur. Ahmed, (ils
du précédent, se rendit en Orient et, jusqu'à sa mort, il habita
tantôt la Mecque et tantôt Medine. Son fils, Abou-Abd-Allah-
Mohammed [le prédicateur], passa, ses premières années en Hidjaz
et en Egypte ; puis, quand il eut fait quelques études et appris la
jurisprudence sous les professeurs de l'époque, il vint se fixer
en Maghreb. Le sultan Abou-M-Hacen, ayant bâti la mosquée
d'EUObbad , choisit Abou-Abd-Allah-[Ibn-Merzouc] pour y
remplir les fonctions de prédicateur, tant il se plaisait à enten-
dre les discours {khotba) que ce docteur prononçait du haut de la
^ Le tombeau, la mosquée et le zaouia (v. 1. 1, p. 85) de Boa^
Medfnest située à £l-Obbad, dans le voisinage de Tlemcen.
* Le trisaHeul^ selon le texte arabe.
348 HISTOIBE DIS BBRBÈftBS.
chaire. En effet, ses sertnoiid renfermaient des allusions très-
flatteuses pour le sultan el de belles prières pour sa prospérité.
Ibn-Merzoac gagna de celte manière, l^amitié du prince el se vit
accorder la place d'honneur aux audiences publiques. Toutes les
fois qu*Abou-'l-Hacen assistait à la prière dans n'importe quelle
mosquée du Maghreb, ce fut toujours Ibn-Merzouc qui prononça
\ek/iotba. Il lui arriva même d'être envoyé aux cours étrangères
comme représentant du sultan. Après la déroute deCairouan, if
se sauva en Maghreb et s'installa dans le ribat d'El-Obbad,
séjour de ses ancêtres. Pour éviter des longueurs, nous passerons
sous silence les aventures qui lui arrivèrent pendant son
voyage.
Quand Abou-'l-Hacen se fit débarquer à Alger après avoir
échappé au naufrage, Abou-Saîd, souverain de Tlemcen, dé-
cida Ibn-Merzouc à se rendre auprès de ce monarque afin de
négocier un traité de paix. Abou-Thabet [frère d'Abou-Satd] et
tous les chefs abd-el-ouadi les condamnèrent cette démarche et
envoyèrent Sogheir-Ibn-Ameràla poursuite de l'ambassadeur.
Bamené prisonnier et mis au cachot, Ibn-Merzouc en fut relire
pour être déporté en Espagne. Il entra alors au service d'Abou-
i-Haddjadj, sultan de Grenade, et devint prédicateur de la cour,
honneur qu'il devait à là réputation, assez mal fondée, d'être
l'homme le plus capable de prêcher en la présence d'un souve-
rain. Pendant son séjour à Grenade, il cultiva l'amitié d^Abou-
Salem qui y vivait alors en proscrit; et, chaque fois que ce prince
avait une demande h faire, il l'appuyait vivement auprès d^Abou-
'1-Haddjadj. Quand Abou-Salem débarqua chez les Ghomara,
Ibn«-Merzouc trayailla avec beaucoup de succès à lui gagner des
amis parmi les chefs mérinides et les vizirs de l'empire ; aussi,
ce prince, étant parvenu au trône, récompensa avec empresse-
ment les services que le prédicateur lui avait toujours rendus et
rattachement qu'il lui avait montré, ainsi qu'à son père Abou-
'1-Hacen.
Devenu l'ami du suUan, son conseiller intime, le compagnon
de ses loisirs et le mattre de son esprit, Ibn-Merzouc attira sur
lui tous les regards cl vit courber devant lui toutes les têtes*
DTNASTIB MtRlNlDB. — ABOU-SALBH. 349
Les vîxirs et les hommes les plus illustres par leur naissance loi
faisaient la cour ; les généraux et les émirs assiégeaient sa porte
depuis le malin jusqu'au soir. Bien qu'il tint en main les rênes
de Télat, il évitait, autant que possible, de faire acte d'autorité
par crainte des conséquences fâcheuses que cela pourrait avoir
pour lui-même. Quand des plaignants venaient lui exposer leurs
griefs, il les renvoyait toujours aux fonctionnaires du palais
[chargés d'expédier les afiairei de celle nature]. Malgré tonte
sa prudence, il encourut la haine des gi^nds officiers de la cour
en se permettant de censurer leur conduite et, non-seulement il
s'attira leur inimitié, mais il Ws indisposa contre le sultan qui
le protégeait. Les personnages revêtus de hauts commandements
voyaient avec indignation l'influence extraordinaire que cet
homme était parvenu à exercer ; les vizirs contemplaient avec
jalousie la prééminence qu'il tenait de la faveur du sultan;
tous , ils n'attendaient qu'une occasion afin de renverser le
trdne et, pendant ce temps, l'esprit de mécontentement se pro-
pageait parmi les autres classes de la population.
Dans le mois de Djomada760 (avril-mai43D9],entlieuIamort
du vizir Âbd-Allah-ibn-Âli, dont l'immense fortune avait excité
la cupidité d'Âbou-Salem aussitôt que ce prince fut monté sur le
trône. Omar-lbn-Abd-Âllah, fils du défunt, se voyant exposée
perdre ce riche héritage, en offrit la moitié à Ibn-Merzouo pour
avoir sa protection. Le marché fut conclu au moment même où
Ton avait décidé le sultan à priver Omar de sa place et de ses
biens. Ibn-Merzouc conjura le danger, obtint pour son protégé
un emploi plus élevé qu'auparavant et décida le sultan à en
épouser la sœur. Toules les fois que ce monarque quittait la
capitale pour faire une course dans les provinces, Omar-lbn-
Abd-Allah fut chargé du commandement de la Tille-Neuve. Pour
neutraliser l'animosité de Masoud-lbn-Maçaï, vizir de l'empire,
et pour gagner son amilié, Omar en épousa la fille.
Dans le mois de Ghâban 762 (juin-juillet 1361), Omar-Ibn-
Abd-Allah fut envoyé en mission à la cour de Tiemcen. Ses en-
nemis répandirent alors le bruit qu'il tramait un complot avec
le souverain de cette ville, et iJs le compromirent au point que
. *
350 DISTOIRE DES BBr^ÈHES.
le sultan fat presque décide à lui ôter la vie. Défendu avec cha«
leur par Ibn-Merzouc, il échappa an sort qu^on lui destinait ;
mais, depuis lors, il conserva au fond du cœur un vif ressenti-
mept contre son maître et prit la résolution de le détrôner
aussitôt que l'occasion se présenterait. Au commencement du
mois de Dou-'l-Câda* ( commencement de septembre) bien-
tôt après son retour de Tiemcen , il reprit le commande*
ment du siège de l'empire, le sultan étant allé s'établir dans
la citadelle de Fez, où il avait fait construire, à côté du pa-
lais, une salle magnifique parfaitement bien disposée pour ad-
mettre la brise du matin et du soir. Voyant alors tous les cœurs
fortement indisposés contre le gouvernement à cause de la faveur
excessive dont jouissait Ibn-Merzouc, Omar forma le projet de
«'emparer du pouvoir et décida Garcia*lbn-AntouD y caYd de la
milice chrétienne, aie seconder dans cette tentative. La veille
du mardi, 17 du mois de Dou-'l-Câda76S (19 septembre 4 361),
les conjurés se transportèrent au logement que Tacheftn, fils
d'Abou-'l-Hacen , occupait dans la Ville-Neuve , revêtirent ce
pauvre idiot* de l'habillement impérial, le firent monter achevai
et leconduisirent, entouré des insignes de la royauté,! jusqu'à la
salle d'audience. L'ayant placé sur le trône, ils forcèrent Ibn-ez-
Zerca, chef du corps d'archers et commandant de la garnison,
à prêter le serment de fidélité au nouveau souverain. Aussitôt
après, ils proclamèrent, au son de tambours , la déchéance
d'Abou-Salem et, s'étant rendus au trésor, ils se mirent è distri-
buer de l'argent aux troupes sans prendre la peine de compterce
qu'ils donnaient. Les soldats de la milice qui occups^ient la Ville-
Neuve, s'attroupèrent autour d^eux et, après avoir pris de force
la solde qui leur revenait , i)s allèrent piller les magasins
d'effets et d'approvisionnements militaires , situés en dehors de
la ville , et y mirent ensuite le feu pour empêcher ce vol d'être
découvert.
• Voy. page de 869 ce volume.
DTMASTIB HfiRINIDE. — ABGU^-SALBH. 354
Le suUan, qui se tenait dans la citadelle selon son habitude,
monta à cheval le lendemain malin, convoqua ses officiers, ras-
sembla les troupes tirées des tribus, et, s*étant dirigé vers la
Ville-Neuve, il en fit le tour sans pouvoir y pénétrer. La résis-
tance de cette place importante l'ayant mis dans la nécessité d'en
faire le siège, il alla camper sur le Kodia^t-el-Araïs et ordonna
au peuple de prendre les armes et de venir se rallier autour de
son drapeau. Vers le midi^ à l'heure de la sieste, il mit pied à
terre devant sa tente, mais aussitôt, il vit ses partisans quitter
le camp par bandes et entrer dans la Ville-Neuve, sans qu'il
pût les retenir. Abandonné ensuite par ses familiers et par ses
intimes , qui passèrent tous aux insurgés, il s'entoura d'une
petite troupe de cavaliers et s'enfuit k cheval. Le vizir Masoud-
Ibn-Rahhou-ibn-Maçaï, partit avec lui , ainsi que le vizir Solei-
man-Ibn-Dawoud et le caïd Soleiman-Ibn-Ounsar , c6mmandant
du corps d'affranchis et chef de la milice qui gardait la porte
du palais. Ibn-Merzouc, qui avait obtenu la permission de rentrer
chez lui , profita de cette occasion pour s'en aller. Quand
la nuit fut venue, l'escorte du sultan se dispersa, à la faveur de
l'obscurité, et les deux vizirs reprirent la route de la Ville-
Neuve. Aussitôt arrivés, ils furent arrêtés et emprisonnés sépa^
rément, par l'ordre d'Omar-Ibn-Abd-AlIah et de son complice,
Garcia-lbn-Antoun. Ali-Ibn-Mehdi-Ibn-Irztguen fut envoyée la
poursuite du sultan et le trouva endormi dans une cdban.e de
berger, près de la rivière Ouergha, où il s'était réfugié après
avoir jeté ses habits royaux pour mieux échapper aux regards.
L'ayant placé sur un mulet, il le ramena vers la ville et dépécha
un courrierà Omar-Ibn^Abd-Allah pour lui en annoncer la nou-
velle. Ce ministre donna aussitôt l'ordre h Choaïb-Ibn-Meimouû
et à Feth-Allah-Ibn-Amer-Ibn-Feth-Allah d'aller h la rencontre
du prisonpier et de lui couper la téte% Ils le trouvèrent auprès
de Khandac-el-Casab {fessé aux roseaux)^ derrière le Kodia-t-
el-Araïs, et le firent décapiter par un soldat de la milice chré-
tienne. Sa tête fut mise dans un panier et déposée aux pieds du
vizir et des cheikhs mérinides.
Omar-lbn*Abd«Allah prit alors le gouvernement de l'empire
352 OISTOIEB DES BEHBBHSS.
et, pour tromper le peuple, il leur offrit un semblant de sultan
dans la personne du faible Tachefin.
KORT D^IBM-ANTOUN, CAÎD DB Là TBOCPB CHBÉTIENKE.
BtVOLTB DB TIBTA-IBN-BAHBOU ET DBS CHEFS MÊRIHIDBS.
Omar-lbn-Abd-Allah ayant fait prisonniers les deux vizirs,
mit Soleimao-Ibn-Dawoud aux arrêts dans la maison de Garcia-
Ibn-Ântoun, caïd de la milice chrétienne, et garda chez lui Hd-
soud-lbn-Maçaï auquel il voulut épargner toute espèce de mau-
vais traitement. H avait de boos molifs pour en agir ainsi : Ibn-
Maçaf était son beau-père et avait assez d'enfants, de frères et
de parents pour former une bande doul le secours pourrait être
très-utile.
Soleiman-lbn-Ounsar, qui avait aussi abandonné le sultan,
entra, la même nuit, dans la Yille-Neuve et se rendit chez son
ami. Garcia-Ibn-Ântoun, qui avait l'habitude de lui faire boire
du vin. Daus un entretien avec son hôte, il raconta ses griefs et
convint avec lui de tuer le vizir Omar-lbn-Abd- Allah et de le
remplacer par SoIeiman-lbn-Dawoud, homme avancé en Age et
habitué au commandement. Omar fut averti de leurs intentions
et, se voyant tout-è-fait dépourvu de l'appui que peut donner
une nombreuse famille, il alla trouver Ibrahim-el-Batrouhi, com-
mandant de la troupe andalousienne qui formait le cortège îm*
périal, et lui exposa sa position. Ayant reçu de cet officier Tas»
surance qu'il combattrait jusqu'à la mort pour le défendre, il
porta les mêmes plaintes à Yahya-lbn-Bahhou, l'un des princi*-
paux cheikhs mérinides et membre très-influent du grand
conseil. Ce chef lui donna raison et prit l'engagement de
faire mourir Ibn-Anloun et les autres conjorés. Celui-ci, de
. son côté, dressa avec Ibn-Ounsar le plan qu'ils devaient saivre
et, s'étant rendu avec lui au palais, de très^bonne heure, il y fit
entrer un peloton de la milice chrétienne, afin d'avoir main-
forte en cas de besoin. Les chefs mérinides se présentèrent è l'au-
DTHàSTII KÉRINIDI. — TlCHSFtff. 353
dienee royale, selon l'usage, et goûtèrent du repas qu'on leur fit
servir. Alors, Omar-Ibn-Abd-AUah invita Ibn-Antoun à venir
parler avec Yahya-lbn-Aahhou , après avoir eu la précaution
d^ntrodaire dans la salle El-Batrouhi et la garde andalousienne.
Ibn-Rahhou ouvrit la conférence et invita le caïd Garcia-Ibn*An-
toun à transférer Soleiman-lbn-'Dawoud dans la prison de
l'état. Le chef chrétien s'y refusa en ajoutant, d'un ton sarcas-
tique, qu'il serait disposé à le faire quand on aujrait soumis Ibn-
Maçaï è un traitement semblable. Omar-Ibn-Abd-Allah donna
sur le champ l'ordre d'arrêter le caïd audacieux, mais celui-ci
lui rit au nez et lira son poignard pour se défendre. Les mérini-
des se jetèrent aussitôt sur lui et le tuèrent, ainsi que tons les
soldats chrétiens qui se trouvaient dans le palais. Cette exécution
ne put s'accomplir qu'à la suite d'un conQit acharné. Le reste de
la troupe chrétienne se réfugia dans le Melah, camp où on l'avait
installée et qui était dans le voisinage de la Ville-Neuve. La po-
pulace se mit alors àcrierqu'lbn-Antou'n avait tenté d'assassiner
le vizir, et elle massacra tous les soldats chrétiens qu'elle ren-
contra dans les rues. Ensuite elle se porta vers le Melah afitf d'en
exterminer le reste, mais les Mérinides étant montés à. cheval,
vinrent prendre la défense de leur milice et lui éviter la dis-
grâce d'être vaincue par la canaille. Dans cette affaire les chré-
tient perdirent presque tous leurs effets et leur argent, mais ils se
vengèrent en égorgeant une foule de pillards et de mauvais su-
jets qui s'étaient enivrés dans le Melah.
Omar s'empara de la maison du caïd et envoya Ibn-Oudrar en
prison où il le fît mourir la même nuit. Il mit Soleiman-ibn-
Dawoud aut arrêts dans une maison particulière et, secondé par
Yahya-Ibn-Rahhou, qu'il avait pris pour conseiller, il étendit sa
domination non-seulement sur les vizirs, mais sur Tempire, et
s'attira les hommages empressés des chefs mérinides. Ibn-Rah-
hon voulut absolument faire mourir tous les familiers du sultan
Abou-Salem , contre lesquels il nourrissait une haine profonde ;
mais Omar s'y refusa dans l'espoir de pouvoir utiliser Ibn-Maçaï.
Sa partialité pour cet homme devint tellement évidente que .l'a-
mour-propre d'ibn Rahhou et do tous les chefs mérinides en fut
T. IV. 23
354 HI8T0IRI M8 nnnÊMiB.
blessé. S'apercevaDt qu'ils ourdissaiaii quelque trame contra
lui, Omar acheta rallianœ et Pappui d'Amer-Ibn-MohanHued
[chef des HiotataJ en partageant avec lai le royaume de Maghreb.
Il lui fit passer, en même temps, le prince Abou^i^-Padl, ils^
d'Âbou-Salem ; se ménageant ainsi un moyen de salut dans lé cas
où les Ménnidesenlreprendraient lesiégedela Yilt^Neuve, ainsi
qu^ils en avaient formé le projet.
Les cheikhs mérinides, s'aperçurent bientôt qn'Abou-i-Padl
n^était plus dans la citadelle où, jusqu'alors, on l'avait retena
sous bonne garde, et ils firent h Omar de vifs reproches ; mais
celui-ci rompit ouvertement avec eux, sans vouloir leur donner
la moindre satisfaction. S^étant alors eofermédans la Yille-Neuve,
il les empêcha d'y pénétrer et, par ce Irait de hardiesse, il les
exaspéra à un tel degré qu'ils allèrent trouver leur chef, lbn«
Rahhou, et revinrent pour camper en face de la porte d'EI-Po-
touh. Ils amenèrent avec eux Abd-eUUaltm, fils du sultan Ahou-
Ali. Nous raconterons plus loin ce qu'ils firent de ce prince.
Omar-Ibn-Abd*Allah rendit alors la liberté à Hasoud-Ibn«^
Maçaï et le laissa partir pour Maroc, après lui avoir imposé Vobli*
gation de venir combattre les Mérinides s'ils mettaient le siège
devant la Ville-Neuve.
ABD-BL-HALtv, FILS DU SULTAN ABOU-ALI, ARRIVE DE TtEttCIN.
SIEGE OB LA VILLE- MEUVE.
Le sultan Abou-'l-Hacen, après avoir fait mourir son frère,
Abou- Ali, ainsi qu'il en avait le droit, se chargea, par devoir,
d'élever les enfants et d entretenir la famille de ce prince malheu-
reux. Il combla ces jeunes gens de bienfaits, les traitant, sons tous
les rapports comme ses propres fils, et il en maria Ali-Abou-
Ifelloucen avec sa fille bien-aimée Tahadrît. Lors du désas-
tre de Cairouan, celui-ci abandonna son beau-pèro, passé aux
Arabes et revinl à leur têle pour l'attaquer dans cette ville et
BTlflSTIV ■tMlfIDI« -— TACBBFilf . 3ft&
dans Tunis. Ayant ensaite'qnilté l'Ifrtkjfa, il trouva une honora-
ble réception à la cour d'Aboa-Satd-Othman, souverain de Tleoi
€eo ; mais, au moment où il allait se rendre en Espagne, il fui
livré par son hôte aux agents d^ Aboa-Einan. Ce monarque l^en-
leraia dans une de ses pvisons et, l'ayant ensuite fait amener
devant lui, il l^aocabla de reproches à cause de sa trahison en-
vers* ie sallan Abou-'UHacen; deux jours plus tard , il l'-en*
voya à la mort. Ceci eut lieu en l'an 751 (1350*4).
Aussitôt qo'Abou-'l-Hacen eut rendu le dernier soupir, ses
fils allèrent trouver le sultan Aboo-Einan^ qui, devenu oiattre du
sort de ces princes, les déporta en Espagne , ainsi que les Gis de
Témir Abou-Ali. Ceux-<;i se nommèrent Abd-el-Haltm , Abd-cl-
Moumen,El-HansouretEn-Nacer. Leur neveu Satd, filsd*Abou-
Ztan, y fut envoyé avec eux* Ibn-el-Ahmer, sultan de P Andalou-
sie^ les prit sous sa protection et, quand ie monarque africain lui
fit demander, plus tard, leur extradition ainsi que celle de son
frère [Abou-'l-PadI], il refusa de les lui livrer» De là surgir
entre les deux cours la mésintelligence dont nous avons
parlé.
Quand le sultan Abou Salem fitconduireàBonda tous lesmem*
hres de sa famiUe dont il craignait l'influence, Tun deces princes,
Abd-er*Rahman, fils d'Abou-lfelloucen^ effectua son évasion et
alla trouver ses oncles à Grenade. Abou-Salem redoutait toujours
la considération dont ils jouissaient ; il se méfiait également
de tous ses autres parents, et, sur une simple accusation dirigée
contre son pupille, Mohammed , fils de sa sœur Tahadrît et d'A-
bou-ifellpucen, il tua ce jeune homme qui s'était réfugié on Ire
les bras de sa mère. »
A l'époque où Abou-Âbd- Allah, fils d'Abou-1-Haddjadj et sul-
tan de de l'Andalousie, se réfugia en Maghre1> après avoir perdu
le trône, Abou-Salem, qui s'était empressé de Taccueilir, crut
^ienir entre ses mains le sort do ses parents qui se trouvaient à
Grenade. Dans une dépêche adressée au raïs Mohammed-lbn-
Ismail, qui venait d'usurper le pouvoir et de faire mourir les
enfants d'Abou-'l-Haddjadj . il demanda rcmprisonoement des
princes mérinides, en promettant d'empêcher les tentatives que
356 HITOIRB DBS BBUtRBS.
le monarque déchu * pourrait diriger contre l'Andalousie. Le
raïs consentit à cette proposition et enferma les pnnces.
Le roi [de Castille] s'étant alors brouillé avec le raïs, envahit
l'Andalousie, enleva aux musulmans un grand nombre de forte-
resses et invita Abou-Salem à lui envoyer Ibn - el - Ahmer ;
puis, sur le refus du monarque africain, qui voulait rester
fidèle à son engagement, il tourna ses armes contre les places for-
tes que le gouvernement mérinide possédait en Espagne. Abou*
Salem dut céder pour ne pas risquer ses états : il fournit à son
\i6ie un équipage royal, le combla de dons et le fit conduire à
Geuta, où le navire qui l'avait amené venait d'être disposé pour
le recevoir. Allai -Ibn- Mohammed fut chargé d'embarquer
rillustre voyageur et de l'accompagner à la cour du roi chrétien.
Le raïs était dans son sultanat de Grenade quand il apprit
cette nouvelle et, se rappelant qu'Ahou-Hammou , sultan de
Tiemcen, lui avait souvent fait demander les fils d'Abou-1-
Ali, afin de les avoir sous la main quand il voudrait susciter des
difiicultés au sultan Abou-Salem, il s'empi^essa de mettre en li-
berté et d'envoyer en Afrique Témir Abd-eUHaltm, l'émir Abd-
el Moumen, frère de celui-ci, et leur neveu Abd-er-Rahraan ,
fils d*AboU'lfelloucen. Ces princes débarquèrent à Honein peu de
temps avant la mort d'Abou-Salero. Le souverain de Tiemcen
les reçut avec une bienveillance extrême et reconnut Abd-el-
Halîm pour sultan du Maghreb en lui donnant pour vizir
Mohammed-cs-SobéYè, fils de Mouça-Ibn-lbrahtm, qui avait
abandonné le parti d'Omar-lbn-Abd-AUah. Arrivé dans la capi-
tale abd-el-ouadite en même temf^s que les trois princes mérini*
des, Ibn-Sobéïà leur apprit la mort d'Abou-Salem. présenta ses
hommages à l'émir Abd-el-Halîm et l'engagea fortement k par- .
tir avec lui pour le Maghreb. Plusieurs envoyés vinrent alors de la
part des Mérinîdes et invitèrent ce prince à se rendre au milieu
d'eux. !l y consentit avec empressement et, après avoir reçu ,
' Dans le texte arabe, il faut lire el-makkloué à la place dW
kkaloité.
DYNASTIE MARINIDB. -— rACHtPtN. 357
d'Âboa*-Haiiimou un équipage royal, iUemiten route. Les voya-
geurs étaient encore en marche quand ils rencontrèrent Mobam-
med-Ibn-Zegdan, Tun des Beni-Âli, chefs des Oungacen. Cette
tribu avait continué à habiter Debdou, sur la frontière du Ma-
ghreb, depuis inoccupation de ce pays par les Beni-Merîn. Ibn-
Zegdan prêta le serment de fidélité au nouveau sultan et décida
son peuple à en faire autant. Alors, Abd-eUHalîm se porta en
avant à grandes journées.
Nousavons déjà dit que Yabya-Ibn-Bahhou et les cheikhs méri*
Dides, se voyant repousséd- par Omar -Ibn-Abd-Allah, avaient
dressé leur camp en face de la porte de Fotouh. De là ils expé-
'dièrent à Tlemcen une députation chargée de leur amener Âbd-
el«-HaUm. Ces envoyés le rencontrèrent à Tèza et revinrent avec
lui. Les Beni-Merin s'avancèrent tous jusqu'au Sebou pour le re-
cevoir et, le samedi,? Moharrem 763 (8 nov. 1861), ils campè-
rent sur le Kodia-t -el-Araïs et commencèrent le siège de la Ville^ *
Neuve. Pendant sept jours, ils attaquèrent les remparts depuis
le matin jusqu'au soir, et une foule de dépulations entrèrent au
camp pour offrir au sultan Abd-eUHalim les hommages des diver-
ses villes du Maghreb. De nombreux renforts y arrivèrent aussi
de toutes parts. Le samedi suivant, Omar-ibn-Abj -Allah opéra
une sortie à la tète des milices musulmanes et chrétiennes qui for-
maient l'avant-garde de l'armée du sultan Abou-Omar[-Tache-
ftn]. Ce corps d'archers et de hallebardiers marcha en avant,
pendant que l'arrière-garde, sous les ordres immédiats du
sultan , resta en ordre de bataille. Après avoir lancé quel-
ques volées de flèches, les troupes de Tachefin simulèrent une
retraite vers la ville, afin d'attirer leurs adversaires à la portée
des archers qui garnissaient les remparts. Les Mérinides
s'étant avancés à la poursuite, 'virent leur centre accablé d'une
grêle de flèches et, ne pouvant soutenir une charge vigoureuse
qu'Omar dirigea ensuite contre eux, ils prirent la fuite dans
le plus grand désordre. Les Mérinides se dispersèrent alors
pour regagner leurs foyers : Yahya-lbn-Bahhou s'enfuit à
Maroc avec Mobarek^Ibn-ibrahîm, cheikh des Rholt, pendant
qu'Abd-cl-Halîm et ses frères rentraient à Tèza. Le sang-
338 HISTOIBB DBS BBBBÈUS.
froid et la bravoure déployés par ces prinoes rempErénfi
d'admiration toutes les personnes qui assistèrent k cette ba-
taille.
Omar-lbn-Aibd-Âllah évita de le poursuivre et attendit l'arri-
vée de Mohammed, fils d'Âbou-ÂbdFer-Bahman.
■OHinHBD, FILS DB L^BHIB ABOD-ABD-BB-tABIIAll, AMIVB A
Lk VILL8*irBUTB. — OMAa U FicTT PSeCLAIBa 6ULSAH KT U
TIBirr BK TUTBLU.
Les Beni-Hertn, s'étant ligués contre Omar-Ibo-Abd-Allab
aussitôt qu'il rompit avec eux, le blâmèrent hautement d*avoir
inauguré comme sultan Abou-Omar[-TacheflD], prince auquel
manquait une des conditions que la loi et Pusage exigent dans
un khalife, savoir^ la faculté de la raison. Omar lui-même
s'aperfut qu'il j avait commis une faute, et se mit à chercher un
autre membre de la famille auquel il pourrait transférer la dignité
du kbalifat. Son choix se fixa sur [Abou-Ztan-JMohammed, fils de-
l'émir Abou-Abd-er-Bahman et petit-fils du sultan Abou-'l-Ha-
cen. Ce prince avait effectué son évasion de Bonda, bientdt après
l'avènement d'Abou-Salem et avait trouvé un excellent accueil à
la cour du roi [de Castille]. Omar lui envoya d'abord l'eunuque
affranchi Y Atic, pour l'engager k venir le trouver sans délai; ensuite
il donna une semblable coosoiission k Othman-IbiHeUTasmln;
puis à Er-Baïs-el-Abkem [U cheffimei^]^ membre delà famille
des Ahmer [souverains de l'Andalousie]. Il s'adressa aussi à
Vex-sultan, Ibn-eUAhmer, qui avait trouvé, depuis peu de
temps, un asile dans les états du roi chrétien, et le fit prier d'ob-
tenir de ce monarque le prompt renvoi du prince m érinide.
lbn-el*Ahmer , qui n'était plus alors en bons termes avec
le roi, et qui cherchait une occasion pour le quitter, répon-
^ Voy. ci^devant, page 326.
dthastib unnioB. -—ABou-rtAif-iioHAMKED. 359
dit au vitir qu'il se chargerait de oelte affaire, mais à la condition
de recevoir pour luî-mâme la ville de Honda. Omar lui expédia
sur lechaiDp un acte portant la cession de cette place forte et
aigné par les chefs mérinides et les cherîfs qui formaient son con-
seil. A la réception de cQtte pièce, Ibn-el-Abiner alla trouver le rci
et le pria de renvoyer Mohammed, fils d'Abou-Abd«er-Rahman en
Afrique où.sa présence était réclamée par tous les Mérinides. Le
roi y consentit et, dans le mois de Moharrem 763 (novemb.1361)
il permit à ce prince de quitter Séville , après lui avoir imposé
certaiDBS conditions dont Pacte fut aussi lAt dressé et signé.
Omar ayant appris par un courrier que Mohammed venait
d'arriver à Ceuta, où Satd*Ibn-Othman, parent de ce vizir, était
allé pour l'attendre, déposa le sultan Abou-Omar[-Tachefîn], le
renvoya dans l'appartement des femmes d'où il avait été tiré et fit
porter à Abou-Ztan-Mohaoïmed les insignes de la souveraineté i
les tentes impériales et l'acte d'hommage et fidélité. Un déta-
chement de troupes qu'il envoya au-devant du nouveau sul*
tan, le rencontra è Tanger et le conduisit promptement à la ca-
pitale. Yers le milieu du mois de Safer [décembre], ce prince
étant venu dresser son camp à Kodia- t-el-AraYs, le vizir alla le
même jour lui présenter ses hommages et fit placer 9a tente au-,
près de celle de son maître. Quatre jours plus tard, il le conduisit
au palais et l'établit sur le trône, mais il se garda bien de lui lais-
ser la moindre autorité. Bientôt après, il eut à soutenir une lutte
contre les fils d' Abou-AIi * .
LES FRftRBS DU SULTAN ABI>-BL-IUi4h BSSUTBMT UNE DIPAITB
A MEQUINBZ et SB RENDBNT AYBC ]LU1 A StDJaMBSSA.
Abd-el-Haltm apprit h Tèza que Mohammed, fils d'Abou-
* Lisez Abi^Àli dans le texte arabe.
360 HISTOIftB DB8 BBBBiUS.
Abd-er-BahinaD, a irait qaittëCeata pour se rendre à Fez, et ré-
solut de lui barrer le chemin. Son frère, Âbd-el-Moumen et bot»
neveu, Abd-er-Rabman, auxquels il confia l'exécution de oe pro-
jet, se rendirent à Mequinez (Miknaçajf mais ils n*osèrent pas
risquer un combat. Quand Mohammed fut entré dans la Yille^
Neuve, ils commencèrent à ravager les contrées voisines et mi-
rent le viiir Omar dans la nécessité de marcher contre eux. Il
sortit avec tout Pappareil de la guerre et alla bivaquer sur le
Ouadi-'a-Nedja, d'oii il partit, le lendemain, pour Mequinez.
Arrivé, par une marche très<rapide, dans le territoire de cette
ville, il livra bataille aux troupes d'Abd-el-Moumen et d'Abd-
er-Rahman qui s'étaient avancées à sa rencontre et, après une
courte résistance; il les força à se replier sur Tèza, auprès du
sultan Abd-el-Haltm. S'étant alors campé dans la banlieue de
Mequinez, il me chargea de porter au sultan Mohammed la nou-
velle de cette victoire. Tout le monde en ressentit une joie extré-^
me et le sultan se félicita hautement d'un événement qui leraffer-
missaitt sur le trône.
Quand Abd-eUMoumen eut rejoint son frère, Abd-el«Halim, à
Tèza, les troupes de celui-ci passèrent au sultan de Fez. Abd-el^'
Hallm partît aussitôt pour Sidjilmessa, emmenant avec lui ses
frères, son vizir Es-Sobéïft et les Arabes makiliens qui lui étaient
restés fidèles. Gomme les habitants de celte ville l'avaient
reconnu pour leur sou verain^, il n'eut pas de diflb;ulté à s'y éta-^
blir et à prendre les allures de la royauté.
ASER-lBK-MOBAHnBD BT MASOUD-IBN-MAÇAÏ ARRIYBHT DE MAROC*
CBLUI-Ct BST NOHHfi TIZIR BT AlIBR OBTlBIfT LB GOIfTEB-
IfEHBNT DES PROYl^fCBS KAROGAIKBS.
Le sultan Abou-Sôlem, étant monté sur le trône du Maghreb^
avait confié le gouvernement de Maroc et la perception des im-
pôts chez les Jifasmouda à Mohammed-IbnrAbi-'l-Olâ-Ibn-Abi-^
Talha, membre d'une famille d'administrateurs. Bien que cet offi.-^
DYNASTIE HftEnaDB. — AJlOU-ziAlf-IIOlIAVaKD. 364
oier rempltt aveo une grande habileté les fonctions de sa place,
il montra tant de haine envers les gens au service d'Amer-
Ibn-Mohammed que celui-ci en fut indigné. Il avait même dé-
noncé au snltan, plusieurs fois, la conduite de ce chef , mais ses
plaintes étaient demeurées sans réponse. A peine Amer eot*il
appris la mort d'^bou-Salem et l'avènement de son ami, Omar-
Ibn-Abd-Allah, à la régence, qu'il alla saisir Ibn«Abi-'l-01ft dans
sa maison, le tratna en prison et le (it mourir dans des tour-
ments. Devenu ainsi tout-puisaant à Maroc, il se fit envoyer par
Omar le prince Abou-'l-Fadl, fiU du sultan Abou-Salem, afin de
le mettre en avant [comme drapeau] dans le cas oit il serait
obligé de marcher au secours de Fez, ville dont les Mérintdes
devaient probablement entreprendre le siège. Quelque temps
après, le marne vizir lui envoya Masoud[*Ibn-Rahhou]-Ibn-
Haçaï.
Quand les Mérinides commencèrent le siège de la Yille-Neave,
Amer rassembla les milices et les contingents des tribus, se mit
il leur tête avec Abou-'l-Fadi et, s'étant dirigé sur Anfa, il alla
camper auprès de lOmm-Bebià. Après la défaite des Mérinides
sous les murs delà Yille-Neuve, il vit arriver [en fugitif] Yahya-
Ibn-Bahhou, et bien qu'il lui portât une sincère amitié, il le reçut
avec froideur afin de ménager la susceptibilité d Omar-Ibn-Abd-
Allah et de Masoud-Ibn-Haçaï qui se trouvait alors avec lui. Il
évita pour cette raison de présenter le réfugié à l'assemblée
des chefs et se borna à le faire passer dans la montagne [des Hin-
tata]. Ibn-Rahhou partit, le cœur ulcéré de ce manque d'égards,
et alla trouver le sultan Abd-el-Halîm à Sidjilmessa. Quel-
que temps après, il perdit la vie dans un combat que ce iponar-
que livra aux Arabes.
La défaite d'Abd-eUMoumen et l'évacuation de Tèza par Abd-
el-Haltm, qui était parti pour Sidjilmessa, rendit Omar-Ibn-
Abd-Allah maître de l'empire. Débarrassé de ses adversaires, il
reprit les démarches qu'il avait déjà faites dans le but de s'as-
surer l'appui de Masoud-Ibn*Rahhou[-Ibn-Maçaï], à la famille
duquel il venait de s'allier par un mariage et dont les nombreux
frères et parents pouvaient lui être d'un bon secours. Par ces
moHfs il le fit nommer vizir, à la grande satisfaction des Méri-
308 aisioiu DBS bimiub.
iHdes, dont il s'était empressé de coDcilier la bienveillance et d'oa-
bUer l'bosiiUté.
Amer-Ibn-Mohamined taisait ses préparatils pour aller déli-
Yrer le. sultan qnand Hasoad vint le trouver, ils se rendirent en-
sentie à la ooor , où ce prince les aeoœillit avec ude bonté ex»
tnèm; Masoodfut installé dans la place de visir, sur la reconir
nnndaiîon d'Omar-Ibn-Abd-AIlah , lequel espérait gagner de
cette manière , un OfBfti aussi dévoué que puissant Omar forma ,
an méiae temps , une aHîance avec Amer-lbn-Mohamed , et hn
céda le gouvernement de tonte la partie dn Maghreb située au-deik
de l*Omm«Rebift« Pour répondre aux souhaits de ce chef , il
assigna le commandement de Maroc au prince Abou-'l-FadL
Amer ooniracta alors une alliance ave la famille royale en épou-
sant la veuve du sultan Abou-'l-Hacen, fille dn sultan Abou-
Tahya-Abou-Bekr. Ce furent ses amis qui décidèrent Tentou-
rage de la princesse à faciliter cette union par leur approbation.
Dans le mois de Djomada 763 [mars-avril 4362), Amer rentra k
Maroc avec une suite nombreuse, de^grandes richesses et un train
magnifique.
Omar commença alors les préparatifs d'une expédition contre
Sîdjilmessa, d'où il voulait expulser Abd-el-Halîm et son
frère.
IXrtmnOlV n'oaAB-IBN-ABD-AIXAH COimB SWJILIIBSSA.
Quand Abd-el*Haltm et ses frères furent arrivés à Sidjilmessa,
les Arabes makilîens vinrent en masse, avec leurs troupeaux,
pour exiger la- concession des impôts fournis par les contrées
[qui dépendent de cette ville]. Après s^élre distribué Texploita-
lion de ces territoires, ils donnèrent des étages comme garants
de leur obéissance, et se rallièrent autour du souverain dont ils
avaient extorqué jusqu^à la jouissance des revenus provenant
tous des domaines royaux. Alors, sur les instances de Yahya-Ibn-
Rahhou et des autres cheikhs mcrinides qui se trouvaient dans
DTlf A8TII MÉUlflOf . --" AB01I*etiJI*M0HAUfB9 . 3A3
la ville, Abd-^-Halfm prit k résolutton de faire une expédition
en Maghreb.
Pour étouffer ri neendîe qni menaçait d'éelatefi ie vixir Omar-
ibn*Abd-Allali se décida à marcher snr Sidjitmeftsa, et, voniant
rassembler une armée, il fit ennonoer nne distribution d'argent
aux hommes de bonne volonté. Après avoir passé une revue et
eompiété l'équipement des guerriers qu'il était parvenu à réooir
et auxquels il paya d'avanee la solde et Im gratification, il qottta
les environs de Fez dans le mois de Ghiiban 763 (mai-jnin 4362)
et se mit en marche pour sa destination. Aveclui partit son
principal soutien, Masoud-Ibn-Haçaï.
Le sultan Abd-el-Haltm s'étant porté à la rèoeontre de son
adversaire, les deux armées se trouvèrent en présence k Taftzour
tet, localité située auprès du col de la montagne par lequel on
passe pour se rendre du tell maghrébin dans le Désert. On était
sur le point d^engager le combat quand les chefs arabes offrirent
leormédicçtifinet firent des démarches afin d'effectuer un arran-*
geraent. Après qnelques jours de pourpariers, il fut convenu ,
grâce aux efforts de Ifasoud , qu'Abd^l*HaUm garderait
Sidjihnessa, son héritage paternel, et que les deux partis s'en
retourneraient dans leurs états respectifs. Au mois de ramadan
(juin-juillet) , Omar et le visir Masoud rentrèrent à la TiUe-*Neuva .
et reçurent de leur souverain l'accueil le plus bienveillant et le
plus honorable.
Le vîzir Uohammed-Ibn-SobéTa abandonna la cause 4'Abd-el-
Baltm et alla trouver le sultan Mohammed et le vizir Omar. Ce-
tni«ci le reçut avec empressement et le nomma son lieutenant
dans le vizirat. Dès-lors, les deux sultans se tinrent chacun
chez soi,^ s'occupèrent à consolider leur autorité.
ABD-KL-HOCSBIV EST PAOCLAVe SULTIK PAR LES ABABBS. -—
ABD-Bi-HALtu PART POUR L'ORIERT.
Après avoir conclu ce traité de paix avec le vizir Omar, le
— — a
364 mSTOlRB DBS BBIBÈIBS.
sultan Abd-d-Haltm rentra dans Sidjîlmessa et y fixa son séjouri.
A cette époque, les Arabes Doui-Mansour , branche de la tribu
des Makii, formaient deux grandes familles, les Ablaf et les Aulad-
Hocein. Or^ depuis l'entrée de ce peuple en Maghreb, les Ahiaf
avaient leur résidence à Sidjilmessa, ville qui, à elle seule, leur
valait autant que toutes les contrées parcourues par leur tribut
Nous avons déjà fait observer que les Aulad^Hocein étaient bien
disposés pour le vizir Omar ; circonstance qui mérita aux Ahlaf
la préférence d'Abd-el-Haltm. La jalousie des Aulad-Hocein en
fut éveillée ; l'inimitié qui avait régné entre les deux peuplades
éclata de nouveaux et les porta à se faire la guerre. Abd-el-Mou»
men fut envoyé par son frère, Abd-el-Haltm, pour les amènera
un racommodemeni, mais, à peine eut-il paru chez les Aulad*
bocein, qu'ils le proclamèrent sultan, malgré toutes ses remon-
trances.
Au mois de Safer 764 (nov.-déc. 4362},ils marchèrent sur Si-
djilmessa, et Abd-el-Baltm sortit à la tête de ses partisans, les
Ahlaf, pour leur livrer bataille. Les deux troupes s'arrêtèrent quel*
que temps, entravèrent leurs chameaux, puis elles engagèrent un
combat qui se termina par la déroute des Ahlaf. Yahya-lbn-Rah-
hou, grand cheikh des Mérinides, perdit la vie dans cette rencon-
tre. Les Hocein prirent possession de Sidjilmessa et contraigni-
rent Abd-el-Halîm h se démettre du pouvoir en faveur de son
frère.
Tombé du trêne, Abd-el-Halim partit pour l'Orient afin
d'accomplir le pèlerinage de la Mecque et, en disant adieu à son
frère, il reçut de lui tout ce dont il pourrait avoir besoin pen-
dant ce long voyage. Ayant traversé le Désert jusqu'à Melli, il.se
joignit à une caravane de pèlerins qui se rendaient de cette ville
au Caire. Arrivé dans la capitale de l'Egypte, il se fit) connaître
à l'émir Ilbogha-el*Khasseki, qui tenait alors en tutelle le sou-
verain de ce pays, et il trouva auprès de lui uue réception digne
^ Le traducteur n'ose pas assurer qu'il ait bien compris le texte
arabe de ce passage.
DTNASTR HÉRIMIDE. ABOD-ziAN-HOHAMMBD« 36B
de son rang et de sa naissance. Quatid il eut rempli le devoir du
pèlerinage, il reprit le chemin du Maghreb, mais il mourut au-
près l^Âlexaudrie, Tan 768 (4366-7) et laissa Abd-^l-Moumen
en possession de Sidjilmessa.
IBN-MAÇAY s'BIPARI de SIDJILHBSSA. — ABD-KL*HOU«BN SB
BÉFD61B DANS MAROC.
Quand la désunion se fut mise entre les fils du sultan Abou-
Ali et qu'Abd-el-Moumen eut déposé son frère, le vizir Omar
conçut encore l'espoir de les vaincre, et bientôt il «e vit favori-
sé par les Ahiaf, partisans de Tex-sultan et ennemis jurés des
Aulad-Ahlaf. Dans le mois de Rebiâ 764 (janv.-fév. 4362-3), il
plaça son principal soutien , Masoud-lbn-Maçaï, à la tête d'un
corps de troupes et l'envoya contre Sidjilmessa. Les Ablaf vin-
rent se joindre à ce chef, suivis de leurs tentes et de leurs trou-
peaux. L'armée combinée marcha rapidement sur Sidjilmessa et
opéra sa jonction avec un parti considérable des Hocein qui avait
abandonné le sultan Abd-el-Moumen. Amer-lbn-Mohammed en-
voya alors un messager h ce prince qui était encore dans la
ville et, Tayaut attiré à Maroc, il le mit aux arrâls et le relégua
dans la maison qu'il avait sur le mont Hintata. Le vizir Masoùd
occupa Sidjilmessa, après avoir renversé Tantorité des enfants
d'Abou-Ali et détruisit le principe de désunion qui avait affligé
Pempire. Rentré en Maghreb deux mois après son départ de ce
pays , il ne cessa d'habiter la ville de Fez jusqu'à l'époque où il
rompit avec le vizir Omar-Ibn-Abd-Aliah et ralluma la guerre
civile.
AHBR-IBN-MOHAMIIBD SB HBT EN RÉVOLTE. — SON EXEMPLE
EST SUIVI PAR MASDUD-IBN-MAÇAÏ.
Amer^Ibn Mohammed, était devenu gouverneur de la ville de
366 HUTOtBl MS BKKBlm.
Maroc et des prorinces qai eo dépendent, aind que delà partie
occidenlale des montages masmoadieDoea , fit ehoix d'Ahott-
'l«Fadl, fila da aoltan Abou-Salem , pour y représenter la
royauté; puis, lui ayant dooné desviiirs et des secrétaires, il
forma de ces localités un état, pour ainsi dire, indépendant. Ceux
d'entre les grands officiers mérinides qui abandonnaient le gou-
verneinent[établi à Fez] étaient toujours assurés de trouver
auprès de lui asile et protection. Les nombreux réfugiés dont il
se vit bientôt entouré lui conseillèrent de remplacer Abou--'l-
Fadlpar^Abd-el-Moumen, prince beaucoup plus digne de consi-
dération par son origine, par les hauts comn)(^ndementsquUl avait
exercés et par l'intérêt que lui portèrent les Mérinides. En con-
séquence de leurs représentations, il appela ce prince auprès de
lui et, pour ne pas éveiller les soupçons d'Omar-Ibn-Abd-Allab, il
fitentendrek celui-ci qu'il voulait lui rendre un bon service
et tendre un piège au prince mérinide. Malgré cette déclaration,
Omar en ressentit une vive inquiétude.
Parmi les grands personnages qui se réfugièrent à Maroc,
un des derniers qui arrivèrent fut Es-Sobéïa-lbn«Mouça-Ibn-
Ibrahtm, ex-vizir d'Abd-el-Haltm. A cette nouvelle. Omar
cessa de dissimuler ses intentions et résolut d'équiper une
armée afin d'attaquer son rival. Pendant qu'il se laissait
entraîner à la méfiance envers tous les fonctionnaires sous
ses ordres , une lettre lui tomba entre les mains , adressée
par Masoud-Ibn-Maçaï au régent des pcovinces marocaines
et renfermant des offres de service et d'un dévouement sans
bornes. Omar fit aussitôt emprisonner le porteur du billet.
Masoud en fut très-mécontent et, prêtant l'oreille aux conseils
et aux promesses des chefs mérinides qui formaient son
entourage, il résolut d'arracher le pouvoir au vizir. Pour
mieux déguiser ses intentions, il fit dresser ses tentes à ëz-
Zîtoun, près de Fez, eu prétextant le désir de jouir de l'air du
printemps et de l'aspect de la campagne. Ceci eut lieu dans le
moisdeRedjeb 763 (avril-mai 4363). Ses amis vinrent alors
camper à côté de lui et, quand ils y furent tous rassemblés, il prit
résolument son parti et se déclara contre le gouvernement.
1>T!IAST1B MtUlflDB.*-^ ABOU^stlN-llODAMlfBD. 369
S'étant alors mis en marche, il effecioasa jonction afvec plnaieors
de ses partisans mérinides qui étaient venus camper à Onadi-'n*
Nedja, ainsi que cela avait été convenu, et, les ayantconduita à
Hequinez, il écrivit au prince Âbd^r-^Rahman, fils d'Ali^Aboa*
Ifelloucen, en le priant de venir ^et recevoir des insiH^ le
serment de fidélité.
Abd-er^Rahoian se trouvait alors aux environs de Tedla ou il
était allé pour susciter une insurrection, après avoir quittéson
frère, Abd*el-Moumen, au moment oh ils s'éloignèrent de Sîdjil-
messa. Amer, gouverneur de Maroc venait d'envoyer un corps
de troupes contre lui et l'avait forcé à se réfugierau milieu des
Beni-Oungaoen. A*'la réception delà nouvelle que lui envoyè-
rent Ibn-Maçaï et sea partisans, Abd-er-Rahman alla les trouver
et s'en fit proclamer sultan.
Omar ayant alors donné à son sullan , Mohammei*lbn-Abd-
er*Aahnian, rautorisation de se mettre en campagne, lui forma
un camp à Kodia*t-el-Araïs et, quand il eut soldé et équipé une
année, il le fit marcher jusqu'à Ouadi^'n-Nedja. Attaqué auprès
de cette rivière, et pendant la nuit, par les troupes d'Ibn*Maçaï,
il tint ferme jusqu'au jour et força enfin ses adversaires à pren-
dre la fuite. Les insurgés se dispersèrent de tous côtés pendant
que le vainqueur les poursuivait avec acharnement, et ib appri-
rent, à leurs dépens, que la population de l'empire était dévouée,
plus qu'ils ne l'avaient pensé, au sultan et à son vizir. Ibn-Ma-
çaT chercha un refuge dans Tedla, pendant que l'émir Abd-er-
Rahman se rendait chez les Beni-Oungacen. Omar ramena son
sultan à la capitale et regagna la confiance des chefs mérinides en
leur accordant une amnistie.
Abon-Bekr-Ibn-Hammama fit alors proclamer, dans les terri-
toires soumis h son commandement la souveraineté d'Abd-er-
Rahman, fils d'Abou-Ifelloucen. Mouça-Ibn-Séïd-en-Nas, gendre
d'Ibn-Bammaroa et membre de la famille des Beni-Ali qui habite
la montagne de Debdou, dans le pays des Oiingacen, prôta aussi
le serment dé fidélité à ce prince. La tribu [d'Ibn-Hammama] ne
partageant aucunement les sentiments de son chef, passa du
côté d'Omar, le vizir de Fez, et le décida h s'emparer du pays
388 BiSTOiu M9 mitui.
dUbn-Hammaina et à emporter d'assaut Iklouan, château o&te
chef faisait sa résidence. Ibu-Hammama s^enfuit avec son gen-
dre, après avoir averti leur sultan , Abd*er-Rahman, qu'il ne
devait plus compter sur leur appui, et il ne tarda pas à faire sa
soumission au souverain de Fec.
Abandonné par ses principaux soutiens, Abd-er»Rahman s'en-
fuît à Tlemcen et trouva une honorable réception auprès du sul-
tan* Abou-Hammou. Son vizir, Masoud-Ibn-Maçaï, se réfugia
dans le Debdou et obtint un asile auprès de Mohammed-Ibn-
Zegdan, émir et seigneur de cette forte position ; puis, ayant
formé le projet de réparer ce dernier échec, il s'entendit avec
son hôte et fit inviter Témir Abd-er-Bahman à quitter Tlem-
cen et è rester avec lui en attendant^ l'occasion de péné-
trer d^ns le Maghreb. Comme Abou-Hammou désapprouva ce
projet, Abd-er-Rahman s*évada de chez lui et alla rejoindre
Ibn«Haçaï et ses autres partisans. Ceux-ci le reconnurent de nou*
veau pour leur souverain et firent avec lui une incursion dans le
territoire de Tèza. Ils entreprirent même de combattre le vizir
Omar-Ibn-Abd-Allah, qui venait d'arriver dans celle ville avec
.un corps d'armée, mais ils essuyèrent encore une défaite et du-
rent s'enfuir à la débandade jusqu'au Debdou.
Ouenzemmar-Ibn-Arlf, l'ami dévoué de la dynastie mérinide,
entreprit alors de faire cesser ces tentatives d'insurrection et,
d'après ses conseils, Abd-or-Rahman se rendit à Ghassaçaet
s'embarqua pour l'Espagne, avec Ibn-Maçaî, au commencement
de l'an 76i7 ( sept.-oct. 4365 ). Le vizir Omar repartit pour
Fez, avec l'intention d'organiser une expédition contre Maroc.
EXPÉDITION nu VIZIR ET DR SON SULTAN CONTRE UAROC.
Omar , s'élant ainsi débarrassé de Masoud-Ibn-Maçaï et
^ Dans le texte arabe il faut probablement lire ^Ji:>j VJojJ ,'ex
pression qui parait être l'équivalent do A-îL-w^^j-^ui^AJ.
DYlfASTUS «ÉRllflDB. — ABD-BL-Aztz. 369
d'Abd-er-Rahman, tourna ses regards vers Maroc, ou Âmer-lbn-
Mohammed avait établi son indépendance, et prit la résolution de
Aener une armée contre ce chef. Ayant fait annoncer son projet,
it dépensa beaucoup d^argeht pour la solde et l'équipement d'un
corps de troupes^ et, dans le mois de Redjeb 767 (mars-avril
4366), quand tous ses préparatifs furent terminés , il se mit en
route pour Maroc. A cette nouvelle, Amer emmena son sultan,
Aboa-4-Fadl, dans la montagne [des flintala] et s'y retrancha
avec lui. Il tira en même temps Abd-el*Moumen de la maison
où on le retenait et, l'ayant entouré des insignes de la souverai-
neté, il le plaça sur un trône vis-à-vis de celui où siégeait Abou-
'1-PadI. Il parvint ainsi à persuader au jeune prince que le
peuple [de Fez] l'avait reconnu pour souverain et que son
autorité était solidement établie, tandisque le but réel de cette
manœuvre était de gagner l'adhésion des Mérinides qu'il savait
être très-bien disposés pour Abd-cUMoumen. Cette démonstra-
tion inspira tant d'elTroi à Omar qu'il changea de ton et envoya
une lettre très-grâcieuse à celui qu'iLétait venu combattre. Has-
soun, fils d'Ali-es-Sobaïhi, fit alors des démarches afin de réta-
blir la paix entre les deux adversaires, et décida Omar à répar-
tir pour Fez, après lui avoir faitagréer toutes les conditions pro-
posées par Amer. Celui-ci séquestra encore le prince Abd-el-
Moumen et rétablit l'ordre de choses qui avait existé aupara-
vant.
HORT su SULTAN MOHAMMBD, FILS 1>'a1I0U*ABD-BK-1ABMAN, 6T
AYftNBHBNT B'ABD-BL-AzIz, FILS Dif SULTAN A30U-'l-HACBN.
Ce fut une chose vraiment extraordinaire que la manière dont
le vizir Omar dominait son sultan : il le tenait éloigné des affai-
res comme un enfant sans intelligence; il se faisait instruire de
toutes ses démarches par les espions dont il Tavail entouré, et
parmi lesquels se trouvaient des personnes appartenant à la fa*
mille et même au harem de ce malheureux prince. Bien des fois,
T. IV. ' 24
370 niSlOIRB DES BIRBIBES.
le sultan géDiissait de sa triste position ; i| s'en plaignait mémo
à ses compagnons de table et de lit \ puis enfin il forma le pro-
jet de faire assassiner le vizir. Un des esclaves attachés è soa
service devait 6ter la vie à cet insolent ministre, mais le secret
fut découvert par ui^ femme du harem et communiqué par
elle au vizir qui Pavait subornée. Pour conjurer le danger
qui le menaçait, Omar prit un parti extrême : il avait déjà
porté son audace au point d'entrer cl)oz le sultan à toute bearop
soit que ce prince se trouvât dans le harem , soit qu^il s'amusât
avec ses intimes *; donc, cette fois-ci, il pénétra avec ses gardes
dans la salle où le sultan était à boire, fit mettre à la porte tous
les convives et ordonna à ses gens d'étrangler leur souverain.
€e forfait accompli, on jeta le corps dans un des puits du Jardin
des (ia^elles. Le vizir fil alors venir les grands officiers de Tem-
|)ire et leur montra le puits, en déclarant que son maître y était
4ombé dans un moment d'ivresse. Ceci sa passa au commence-
ment de Tan 768 (scpt-oct.4366]. Aussitôt après, il se fit amener
l'émir Abd-el-Aztz, fils du sultan Abou- 'l-Hacen, qu'il retenait jus-
qu'alors sous bonne garde, à Fez, dans unecharabre de la citadelle.
Grâce à l'excellente éducation qu'il avait reçue, Abd-el-Aztz s'était
montré digne de régner ; aussi» le sultan Mohammed avait cher-
ché, par jalousie, è le faire mourir. Arrivé au palais, il monta
sur le trAne ; les portes de la salle s'ouvrirent , et les Méri-
nides de toutes les classes s'y précipitèrent afin de lui baiser la
main et de lui prêter le serment de "fidélité.
Après l'inauguration, le vizir s'empressa d'organiser une nou-
velle expédition contre Maroc, et, ayant^ouvert les bureaux d'en-
rôlement, il se mit à distribuer de l'argent aux volontaires k en
former ainsi une armée. Quand il eut passé ces troupes et revue,
il quitta Fez avec son sultan, au mois de Châban (avril-mai
4367) , et'se porta vers Maroc h grandes journées. Amer<-
' A la place de iu^j , un des manuscrits porte ai^. C'est par
conjecture seulement que le traducteur a essayé de rendre ce mot
et celui qui le précède.
Ibn - Mohammed venait de $e retirer dans la montagne des
Hintata oii il tenait auprès de lui les émirs Abou-'l-Padl ,
fils du sultan Abou- Salem, et Abd-'eNlIoumen, fils du
«ultanAbou-Ali. Ayant relèclié celui-ci, il le fit encore asaeoif
sur on trAue, vis^-vis de son cousin, et Tentoura des làsîgnes de
la royauté ; en on mot, il joua avec lui la même comédie qu'au*
paravent. On parvint alors k négocier une paix entre Amer et
Omar% lequel ramena son sultan à Fes dans le mois de Ghoual
(juin 4367).
XB SOLTAM ABD-BL-AZiz FAIT aOUBlB 0UAR-»N*ABP*ALIAH BT
TBBIfD L« BAUT COHMANDBUSBT.
Omar fit dès lors peser sa domination sur le sultan Abd«el-
Aztz : il le relégua dans le palais , l'empêcha de {aire le ipoiqdre
4icte d'autorité et défendit au peuple de lui soumettre leurs récla*
mations. Abd-tsl-Azîz avait toutefois dans sa mère unegardjenne
affectionnée et dévouée. Après avoir usurpé tout le pouvoir^ le
vizir désira s'allier à la famille royale en épousant une fille du
sultan Abou «Einan , et l'on assure qu'une des conditions du ma-
riage portait que le frère de cette princesse serait placé sur le
trône. Le sultan fut averti de cette intrigue et il apprit , en
même temps , que le vizir était bien décidé h Ui Ater la vie«
Ce fut précisément à ce moment qu'Omar l'invita à quitter le
vpalais et à prendre uu logement dans la citadelle. Frappé de <cetie
'Coincidence ^ il résolut de tout risquer plutôtq ue d'y consentir :
s'étant décidé pour des mesures violentes, il cacha plusieurs
hommes dans les cabinets aliénant à sa chambre et fit inviter le
vizir à venir tenir conseil avec lui , comme d'ordinaire. Aussitôt
-que le ministre s'y présenta , les eunuques de service fermèrent
•la porte à clef et le sultan se mit à l^accablcr de reproches. Dans
'■ " "^^
* Il faut corriger le texte arabe et sublituer^ à j^U
372 HKfOIIB DBS BBBBÈRBS.
le même inAtanl, les assassins s^éiancèrent des cabinets et bâchè-
rent leur victime à eoaps de sabre. Il eut beau appeler à son se-
cours les familiers qu^il avait stationnés à la portée de sa voix :
quand ils eurent enfoncé la porte , ils le trouvèrent étendu sur lo
earpe«u«t couvert de sang. A ce spectacle , ils prirent la fuite et
sortirent du palais. Le sultan passa alors dans la safle d'audience
et , s'étant assis sur le tràne , il fit venir les officiers attachés
à sa personne et choisit pour vizir Omar-lbn-Masoud-Ibn-Mendtl-
Ibn-Hammama, lemérinide, Choaïb-lbn-Meimonn>lbn Ouédrar,
le hachemide , et Yahya-lbn-Meimoan-Âmsmoud , client de la
famille royale. De cette manière , vers le milieu du mois de
Dou-1-CAda , 768 (juillet 1367) Pautoritédu sultan fut définiti-
vement établie.
Le (ils du vizir Omar , son frère , son oncle , ses autres pa-
rents et ses domestiques furent jetés en prison et exécutés quel-
ques nm'tspTustard. Ainsi fut anéantie la puissance de cette famil-
le. Pour rassurer les esprits , le sultan fit proclamer amnistie,
permit aux fugitifs de rentrer dans la ville et les traita avec une
grande indulgence. t)uelques jours après, il ordonna rarreslali<fn
de Sdieiman-Ibn-Dawond et de Mohammed-es-SobéYa qu'on lui
aveit dénoncés comme amis d'Omar. Ces deux officiers restèrent
en détention josqu'bta mort du sultan. Avec eux il emprisonna
AlIal-lbn-Mohammed et le chértf Abou-M-Cacem , dont il s'était
méfié parce qu'ils avaient fréquenté le vizir , mais il les relâcha
plus tard sur la prière dMhn-el-Khattb ; vizir d'Ibn-el-Ahmer^
YoulanI ensuite s'attribuer rentier exercice de la puissance souve-
raine, il défendit k ses officiers et à ses courtisans de se mêler en
aucune façon des affaires du gouvernement , à moins d'avoir obte*
nu de lui une autorisation spéciale. Quelques mois après rétablis-
sement de son autorité , eut lieu la mort du vizir Ghoaïb-Ibn-
Meimoun et ensuite celle do Yahya-Ibn-^Meimoun. Nous revien-
drons sur cette afiaire.
^ Dans le texte arabe H faut probablement lire eua acsahoma {et H
les bannit) ^ à la place de oua acsaho [et il le bannit).
DYNASTIE MfiRIMlDB. — ABD-BL»AZ)z. 373
li'ÉVIR ABOU-'l-FADL S^BMPABB du pouvoir a MAROC. LB
SULTAN MARCBR CONTRE LUI ET LE FAIT METTRE A MORT>
Aussitôt qu'Âbou-'l-Fadl , Gis da âultan Aboa^-Saiem, e'ui'
apprit que le sultan Abd-el-Aztz s'était défait du vizir doQt H*
subissait la tutelle , il prêta Toreille aux conseils de ses intimes
et résolut de traiter sou propre vizir , Amer-lbn-Mohammed ,
delà même manière et pour la même raison. Amer devina les
intentions du prince et, sons prétexte d'une indisposition , îl
resta chez lui jusqu'i ce qu'il, obtint l'aniorisation de se rendre •
au château qu'il avait sur la montagne où , disait-il , ses femmes
et ses parents pourraient le soigner. S'4tant mis en route aveo
tous ses gens, il ne laissa plus à Abou*'UFadl l'espoir de l'attein*<
d^e. Quelques nuits après son départ, le prince s^'enivra et,
d'après les conseils de ses serviteurs , il fit appeler, la oommanr
dant de la milice chrétienne et lui ordonna de se transporter à la.
prison de la citadelle de Maroc et d'ôter la vie au- prince Abd^-
Moumen. L'officier obéit et lui apporta la tâtede sa- victime.
Amer fut saisi d'épouvante en apprenant cette nouvelle ; il
remercia Dieu de l'avoir sauvé da danger et, sur le champ, il
(It porter au sultan Abd-el-Aztz une déclaration de fidélité et
d'obéissance, il l'engagea , en même temps, d'attaquer Abou-
'l-Fadl et de s'emparer de Maroc ; lui promettant une coopéra-
tion active dans celte entreprise. Le sultan commença aussitôt
les préparatifs d'une expédition et, en ran769 (1367-8), quand
il eut levé et soldé une armée, il partit de Fez.
Abou -'1-Fadl, étant devenu maître absolu de Maroc en se dé-
barrassant d'Abd-ef-Moumen, prit pour vizir le nommé Talha
et coniia le paraphe impérial à Mohammed- el-Kinani, fils de Mo-
hammed-lbn-Mendil. Pour conseiller il choisit Mobarek-lbn-
Ibrahtm-lbn-AtYa, de la tribu des Kholt. Quelque temps après,
il ôta la vie à Talha contre lequel il s'était laissé indisposer par
les insinuations d'El-Kinani. Parti ensuite de Maroc avecl'in-
374 BlfltOlBI NSI BBMBSUfl.
lealioD d'assiéger le lieu où Amer s'était enfermé, il apprit que
loi-méme, allait être attaqué par le sultan Abd-el-Azti. A
cette nouvelle^ il décampa et se rendh dans la province de
Tedia, afin de prendre position snr la montagnedes BeBi7Djaber.
Ce lieu de refuge ne le garantit pas contre les armes du sultan
qui, s'étant détourné de sa marche sur Maroc, vint le bloquer
et le réduire enfin à la nécessité de risquer une bataille. Au mo-
riient oè le combat allait s'engager, une partie des Beni^Djaber,
dont le sultan avait acheté la trahison, abandonna Aboii-'l-Fadl
et amena par cette défection la déroute du reste de l'armée.
Parmi les nombreux prisonniers qui tombèrent entre les mains
du sultan so trouva Mobarek-Ibn-Ibrahtm, lequel resta en cap-
ti^rilé jusqu'à l'époque eù Amer fut mis à mort. Par l'ordre
dtt sultan, il subit alors le même sort que le chef hitatiea.
BI-Kinanî échappa h toutes les recherches et parvint à se ré-
faigier auprès d'Amer. Quant h l'émir Abou-'i-FadI, il chercha
un asile au milieu des Zanaga qui se tenaient en arrière de Tedla,
mais il fut trahi pureeux-mémes dont il avait espéré la protec-
tion : séduits par l'appftt d'une forte somme d'argent que les
Beni^Djaber leur offrirent au nom du sultan, ils livrèrent leur
k6te au visir Yahja-Ibn-Meimoun. Conduit par ce ministre au-
près du sultan, le prisonnier en eut à subir les reproches les
plus amers ; alors on le relégua, dans une tente située & côté
de celle qu'ocôupait le souverain et, quand la nuit fut venue , ou
l'étrangla. Ceci eut lieu en Ramadan 769 (avril-mai 1368).
Amer, auquel te sultan fit parvenir ces nouvelles dans t'es*
poir de l'amener ila soumission, repoussa tout espèce d'accom-
modement et dressa l'étendard de la révolte.
CBOTB Bt MOBT DU VIZIB TABTA'lBl«*MBIBIOlIR-UHf*ABSHOUD»
Yabya-Ibo-Meimoun, grand officier de Pempire, avait été
élevé h la cour du sultan Abou-'l-Hacen. Ainsi que son père,
Heimoun, il se vit toujours en bntte à la haine de son oncle Allai.
OYNASTIB MIKINIDE. ABO*IL-AZiz. 375
Quaml Abou-Einan usurpa le trône de son pèro, Yahyà eAtra
aa service de Pempire, et, tant que régna ce prince, il jduiî dé
toute sa confiance. Devenu gouverneur de Bougie, il garda ce
commandement jusqu'à son arrestation par les partisans dâ
gouvernement hafside , quand cette viUe fût enlevée aux
Mérinides. Amené à Tunis, il y resta prisonnier ; puis ayant
elbtenti son renvoi en Maghreb pendant la régence d^Omar*
ibn-Abd-Allah, il gagna la faveur de ce îniiûstre et reçut de lui
un haut emploi. Nommé vizir par le sultan Abd-eUAztz, il
montra beaucoup do fermeté et d^énergie dans cette charge,
inais ses ennemis le trouvèrent inexorable dans ses haines ei
dans ses vengeances. Son oncle Allai ayant éié remis en liberté
par Tordre du sultan, réussit à capter la bienveîlianco du prince
et h se faire donner un emploi qui le rapprochait de lui. Profitant
alors de sa posirion, il essaya d'indisposer le monarque contre
Yahya qui, disait-it, s'était emparé dé toute l'autorité et avait
formé le projet de placer sur le trône un a utre membre de la fa-
mille royale. Il ajouta que ce ministre avait fait entrer dans le
complot tous les officœrs de la milice chrétienne. A cette époque,
une indisposition forçait Yahya de gaHer la maison. Le sultan
remarqua son absence et fut informé que les chefs de la milice
chrétienDe et une foule d'autres personnages se pressaient à la
porte du vizir pour lui rendre visite. Yoy«nnldans cette circons-
tance la confirmation de ses craintes, il donna à quelques servi-
teurs du palais l'ordre de traîner Yahya en prison, et, le lende-
main, il le (it conduire h la place d'exécution et tuer à coups de
lance. Tous les membres de la famille royale et tous les officiers
pela milice que l'on soupçonnait d'avoir trempé dans la conspi-
ration furent exécutés en môme temps, par l'ordre du souve-
rain*
LB SULTAN ASSIÈGE AMBR-IBN'IIOHAIIMED DANS LA MONTAGNE
DES BINTATA ET LB PAIT PRlSONNIfift,
Après s'être débarrassé d'Abou-'l-Fadl , le sultan confia lo
376 HI8T0IIIB DBS BIlBftftBS*
>
gouveroemeni de Maroc à un client de la famille royale nommé
Âli-Ibn-Mohammed Ibn-AUdjana, en lai recommandant de tenir
Amer étroitement bloqué et de le contraindre ainsi à faire acte de
soumission. Rentré ensuite à Fez', il forma le projet de marcher
contre Tlemcen, mais, au moment où il réunissait une armée pour
cet objet , il apprit qo'lbn-Addjana s^était dirigé conire Amer
et, qu'après l'avoir tenu bloqué pendant plusieurs jours , îl
venait d'être attaqué et fait prisonnier par son adversaire , ainsi
qu'une grande partie de ses troupes. Outré de colère à celte nou-
velle inattendue, il prit la résolution de se mettre à la tête desHéri-i
nides,|de réunir tous les peuples du Maghreb, et de iparcher contre
le chef insoumis. Pendant que ses gens parcouraient les provin-
ces pour y lever des troupes , il se tenait campé en dehors de la
ville et faisait des largesses aux soldats. Ayant enfin passé en
revue l'armée qu'il venait de rassembler, il choisit pour yizic
Abou-Bekr-Ibn-Ghazi-Ibn-Yahya-lbn-el-Kas , personnage dans
lecJQel il croyait reconnaître les indices d'une grande habileté et
d'un véritable talent pour le commandement.
En l'an 770 (1 368-9), il leva son camp et, arrivé à Maroc, il
alla cerner la montagne où Amer s'était fortifié. Ce chef avait^
alors proclamé sultan le nommé Tachefin, prince de la famille
royale et descendant d'Abd-el-Hack par Abou-Thabet-Yacoub-
Ibn-Abd-Allah. U venait aussi de recevoir un appui très-réel
par l'arrivée d'Ali-Ibn-Omar-Ibn-OuîghIan, cheikh des Beni-
Ourladjin, chef mérinide et membre influent du graod conseil.
Il rallia aussi à sa cause un grand nombre de soldats qui avaient
abandonné les drapeaux du sultan, les uns à cause de sa sévé-
rité, les autres par dégoût du service et d'autres encore dans
l'espoir de gagner davantage auprès d'Amer, leur parent. Dieu
retint, toutefois, la main du chef hintalien et l'empêcha de ré-
pandre sur ses partisans une seule goutte des tréso^rs dont il
l'avait rendu mattre.
Comme le blocus se prolongea, le sultan fit construire des lo-
gements pour ses troupes qui, du reste, ne cessaient d'attaquer
journellement les positions occupées par l'ennemi. De cette ma-
nière, on parvint graduellement à. s'emparer des forts par les-
9YNA8TIB MfiRmiDB. ABD -BL-Aziz. 377
quels Amer avait cherché h se couvrir, et l'on atteignit le sommet
du mont Tamskrout. Peadant qu'Abou-Bekr-lbD-Ghazi se signa-
lait par son habileté, Amer avait poussé Vavarice au point de
dégoûter ses propres partisans. Bientôt la mésintelligence survint
entre lui et Ali-lbn-Omar, lequel finit par solliciter secrètement
sa grâce et passa aux assiégeants aussitôt qu'il eût obtenu du
sultan l'assurance que ses jours seraient respectés. Fares-Ibn-
Abd-el-Aztz, ayant eu à se plaindre de la sévérité de son oncle
Amer, et, indigné de se voir placer sons les ordres d'Abou-
Bekr, fils d'Amer, envoya prévenir le sultan qu'il allait recon-
naître son autorité. Aussitôt qu'il reçut de ce monarque des
lettres de grâce, il suscita nne révolte contre Amer et décida
les tribus de la montagne à faire leur soumission. L'armée im-
périale profita de cette occasion pour se porter en avant et elle
atteignit enfin la cime de la montagne où les Insurgés s'étaient
retranchés. Amer, se voyant prêt de succomber, conseilla à son
fils de passer du côté du sultan et^de faire un semblant de sou-
mission. Le transfuge obtint son pardon et se vit enrôlé dans
la suite du souverain.
Amer abandonna alors ses partisans et tâcha de s'échapper
vers le Sous, mais, obligé de s'engager dans les neiges qui , pendant
plusieurs jours, s'étaient amoncelées sur la montagne, il perdit
une partie de son harem, avec toutes ses montures, et ne conserva
plus aucun espoir de se sauver. Forcé de revenir sur ses pas, il
alla se cacher dans une caverne que lui indiquèrent les mêmes
guides auxquels il avait donné de l'argent pour se faire con-
duire a travers la montagne, jusqu'au désert de Sous. Pendant
. qu'il y attendait la cessation des neiges, il fut découvert par
quelques Berbères et conduit devant le sultan. Aux reproches
dont ce prince Taccabla il répondit avec humilité, en offrant sa
soumission et en demandant pardon du crime dont il s'avouait
coupable. Tratnéensuite vers une tente qu'on avait dressée pour
sa réception, derrière le pavillon du sultan, il y resta 'sous
bonne garde. Le même jour, on fit prisonnier Mohammed-lbn-
el-Kinani.
Les châteaux eties maisons d'Amer furent livrcsau pillage; ses
378 HISTOIRB DBS BBBBBftBS.
armes, ses dëpâts de grains et de vivres, ses meubles, une masse
de richesses dont personne de cet endroit n^avait eu l'idée, tom-
bèrent entre les mains du vainqueur. La réduction de la montagne
et des châteaux qui la couronnaient fut effectuée pendant le mois
de Ramadan 774 (avril 4 370). Le siège en avait duré une année
entière.
Devenu maître de ces régions, le sultan donna le commande-
ment des Hintata h Fares-Ibn-Âbd-el-Âztz-Ibn-Mohammed-
Ibn-Ali, et partit pour Fez ; oii il arriva vers la &n de Rama-
dan. Une foule immense sortit à sa rencontre et vit le triste
spectacle d'Amer et de son sultan Tachefin couverts de baillons,
portés chacun sur i)n chameau et livrés ainsi au mépris public.
Ce fut là une grave leçon pour tous ceux qui en étaient les té-
moins. Après la fête de la rupture du jeûne, le sultan se Gt ame-
ner Amer et, lui ayant reproché ses méfaits, il produisit une lettre
écrite par le prisonnier au sultan Abou-Hammou et renfermant
une demande de secours contre le souverain mérinide. L'authen-
ticité de celte pièce ayant été établie par la déclaration de lé-
moins, le sultan donna l'ordre d'en mettre l'auteur à la tor-
ture. On le frappa à coups de fouet jusqu'à ce que sa chair s'en
allât en lambeaux ; on lui fustigea les bras et les jambes au point
de les faire gonfler; enfîn, ce malheureux périt entre les mains
de ses bourreaux. Alors on introduisit El-Kinani auquel on Ci
subir le même sort ; Tachefin fut traîné à la place d'exécution et
tuéàcoups de lance; Mobarek-ibn-Ibrahim subit un long em-
prisonnement, puis on l'envoya rejoindre ceux qui avaient déjà
succombé. C'est ainsi qu'à chaque chose il y a un terme.
Débarrassé maintenant de tous ses adversaires, le sultan
Abd-el-Azîz put en(in s'occuper de l'expédition contre Tiemcen.
BBPBISB d'aLGÊCIRAS.
Nous avons mentionné que le roi chrétien Alphonse [XI, roi
de Léon et de Castille] s'était emparé d'Algéciras, l'an 743
(4344) et, qu'après avoir atteint à une grande puissance, il
DTNASTIiaÉRlNIDB. ABD-EL-Aztz. 37Ô
mourut de la peste, l^an 754 (1350), sons les mars du Gibral-
tar, forteresse dont il avait entrepris le siège. Dieu débarrassa
ainsi les mtisulmaos d'un ennemi acharné. Son fils Pedro [Pierre-
/e-(7nie/] lui succéda dans le commandement des Galiciens [el
des Castillans]. Le nouveau roi montra une ieWe animosité
contre ses frères que le comte [Henri de Transtamare] , fils de
son père par une concubine nommée Éléonore Gusman, s'enluil
chez le comte de Barcelone [roi d'Aragon]. Accueilli par ce mo-
marque avec les plus grands égards, il rallia autour de lui plu*
sieurs grands de cet empire et plusieurs de leurs comtes, surtout
le Marquis , fils de sa tante ^ Pierre, roi de Gaslille^ fit de-
mander au comté de Barcelone l'extradition du fugitif et^ sur
le refus de ce prince, trop généreux pour trahir les droits do
l'hospitalité, il lui déclara là guerre. Pendant la longue suite
d'hostilités qui en résulta, Pierre enleva plusieurs forteresses à
son adversaire et en parcourut les états h la tête de son armée.
A plusieurs reprises, il mille siège devant Valence, capitale de
l'Andalousie orientale : ses troupes s'acharnaient contre cette
place forte et sa flotte couvrait la mer dont elle est baignée, il
accabla par sa cruauté la natioti chrétienne [espagnole] et, par
sa tyrannie, il devint si odieux à ses sujets qu'ils s'insurgèrent
contre lui et marchèrent sur Gordoue, après avoir fait venir le
comte [de Transtamare] pour les commander. La révolte de Sé-
ville fit sentir à Pierre que tous les chrétiens favorisaient son
frère. Forcé de quitter ses états, iL passa en France, royaume
situé au nord de la Galice, et, en l'an 767 (1 366) il se présenta
devant EUFens Ghales [le prince des Galles], souverain de ce
pays et seigneur de l^Angleterre K Sur sa prière, le prince ras-
sembla des troupes pour le soutenir et, l'ayant aidé h reconqué-
rir son royaume, il rentra en France.
* Don Ferdinand, infant d'Aragon et marquis de Tortose, flis de
Don Alphonse IV, roi d'Aragon, et d'Ëléonore, infante de Castille,
et sœur de Don Alphonse XI, roi de Castille et de Léon.
^ Le Prince noir, qui tenait sa cour à Bordeaux. L'exactitude de
tous ces renseignements est incontestable et fait bcauc.up d'hon-
neur à rhîstorien musulman.
380 HI8T0IRB r>M BBEBtRBS.
Qaelqae temps après, les chrétiens reprirent les armes contre
Pierre et aidèrent le comte h loi enlever ses états et à le repous-
ser vers la frontière musulmane. Ibn-el-Ahmer, dont Pierre im-
plora l'appui, s'empressa de mettre h profil une si belle occa-
sion de faire la guerre sainte, et porta le ravage dans le pays des
chrétiens. Après avoir détruit plusieurs de leurs forteresses et
de leurs villes, telles qu'Obéda, Jaën et d'autres métropoles, îl^
ramena ses troupes h Grenade. La guerre continua entre Pierre
et son frère jusqu'à ce que celui-ci parvint à vaincre son adver-.
saire et à lui ôler la vie.
Pendant cette période de troubles, les chrétiens avaient né-
gligé l'entretien des forteresses qui couvraient leur pays du côté
de la frontière musulmane; aussi les vrais croyants conçurent-ils
l'espoir de recouvrer la ville d'Âlgéciras qui, naguère, faisait par-
tie de leur empire. Le souverain du Maghreb ne pouvait pas enlre-
prendre, en personne , une pareille conquête, ayant été obligé
d'employer tous ses moyens afin de comprimer l'^insurrectioa
d'Aboi\;-'I-Padl et d'Amer- Ibn-Mohammed ; mais il (il prier Ibn-
el-Ahraer de mener une armée contre Algéciras, en lui promettant
de pourvoir à la solde de ce corps et de lui fournir une flotte. Il
ajouta qu'il désirait se réserver tous les mérites spirituels d'une
entreprise aussi sainte. Cette condition ayant été acceptée,
il fit passer à Ibn-el-Ahmer plusieurs charges d'argent et
donna l'ordre d'équiper la flotte de Ceuta. Ces navires mirent
bientôt à la voile et allèrent bloquer le port d'Algéciras. Ibn-
ehAhmer solda ses troupes, organisa son armée et, s'étant
procuré des machines de siège, il investit la forteresse. A peme
quelques jours se furent-ils écoulés que la garnison chrétienne
perdit tout espoir d'être secourue ; reconnaissant que sa perte
était inévitable, elle demanda une capitulation et l'obtint k des
conditions si avantageuses qu'elle s'empressa d'évacuer la ville.
Les vainqueurs y remplacèrent aussitôt les doctrines de l'infidé-
lité et de l'idolâtrie par les emblèmes et les rites de l'islamisme,
et Dieu enregistra la récompense de cette bonne action en faveur
de ceux qui y avait travaillé d'un cœur sincère.
La ville d'Algéciras rentra au pouvoir des vrais croyants l'an
DYNASTIE MtRlNIDI.— ABD-BL-AZÎZ. 384
770(4368). Iba-el-Âhmer y insUlla un de ses officiers comme
gouverneur ; puis, craignant de la voir retomber au pouvoir des
chrétiens, il la fit détruire, entre les années 780 et 790, Au
matin, on la trouva renversée, comme- si elle n^ avait pas été ha^
buée la veille*.
PRISE DE TLBMCBN PAR LE SULTAIV. — FUITE DU SULTAN
ABOU-HAUnOU.
Les Arabes de la tribu d*El*Makil habitaient le désert du Ma*
ghreb, depuis le Sous jusqu^au Dera etàTafilell; puis, delà
jusqu'au Molouïa et au Za. LesBeni-Maosour, peuplade formant
une de leurs subdivisions, et composée do deux branches, les
Aulad-Hocein et les Âhiaf, habitaient le territoire mérinide
et subissaient, en peuple vaincu, la domination de cet empire.
Lors des troubles qui eurent lieu en Maghreb après le rétablis-
sement des Abd-el'Ouadites h Tlemcen par leur sultan Abou-
Hammou, les Makiliens commencèrent à ravager ce pays et à le
désoler par leurs brigandages. Quand l'empire mérinide se re-
leva de sa chute, les Beni-Mansour passèrent aux Beni-Abd-el-
Ooad, obtinrent la concession d'un territoire dans les états de
cette famille et y fixèrent leur séjour. Ceci eut lieu à l'époque
où Abd'Allah-lbn-Moslem, gouverneur du Derâ, abandonna je
service du gouvernement mérinide pour remplir les fonctions
de vîzir auprès d'Abou-Hammou. En l'an 766 (4364-5), celui-ci
envahit le Maghreb, dévasta le territoire de Debdou et s'attira
la haine de Mohammed-Ibn-Zegdan, seigneur de cette partie de
la frontière *.
1 Coran, sourate 10, verset 25.
^ La suite de ce passage n'est pas intelligible ; le texte arabe
varie dans tous les manuscrits , sans présentiT, en aucun, un f ens
raisonnable.
38S VISTOItB DBS BKBBÈUS.
Après la mort d'Âbd-Allah-lbn-Moslemy plusieurs messages
passèrent entré le sultan Abou-Hammou et le sultan Abd-el«
Aztz, qui venait de prendre en mains Texercice du pouyoir. Dans
oette correspondance la courmërinide cherchait à décider le goa-
vernement de Tiemcen à ne plus accueillir les Makil, parce
qu'elle craignaitPaugmentation de forces que Pappui de cette tribu
donnait aux Abd-el-ouadites. Abou-Hammou ne voulut pas y con-
sentir,sachant combien la coopération de ces réfugiés lui serait né-
cessaire pour téniren échecles Zogbba et les autres tribus. Le ton
de ces communications devint tellement aigre que le sultan Abd-
el-Aztz perdit patience et, en l'an 770 (4368-9), il conçut la peu*
sée de faire une expédition contre Tiemcen. Mohammed-ibn-
Zegdan le poussa fortement à entreprendre la conquête de cette
ville, mais la révolte d'Amer-Ibn-Mohammed entrava l'exécution
de ce projet.
Rentré à Fez après avoir conduit une expédition à Maroc et
renversé le pouvoir d'Amer, le sultan reçut la visite d'Abou-
Bekr-ibo-Arîf, chef de la famille des Beni-Malek et émir des
Soueid. Cet arabe y arriva avec tous ses nomades aGn d^obtenir
l'assistance du gouvernement mérinide contre Abou-Hammou,
« qui, disait-il, se platlà nuire aux Beni-Malekà cause du dévoue*
» ment bien connu qu'ils ont toujours montré envers le souve-
» rain du Maghreb ; il relient même en captivité mon frère'Amcr
» et plusieurs autres de nos chefs. »
Avec lbn-Ar(f se présenta une députation chargée par les ha-
bitants d'Alger de présenter au sultan un acte par lequel ils re*^
connaissaient son autorité et de le prier de marcher contre Abou-
Hammou afin de les délivrer de la gueule du lion. Ouenzem-*
mar-lbn-Arlf et Mohammed-lbn-Zegdan, dont les conseils furent
recherchés par le sulUn en [celte occasion, s« Grent forts de
rendre, à eux seuls, ce service aux habitants d'Alger.. Le sultan
prit toutefois la résolution de marcher en personne sur Tiem-
cen, et envoya des agents dans les provinces marocaines pour
y lever des troupes. Le 40 du mois de Dou-'l-Hidd]a de l'an
774 ( 7 juillet 4370 )^, ces divers corps se trouvèrent réunis
a la capitale et reçurent, avec leur solde, tous les objets dont ils
DYHASTIB MÉRIIflDB. — ABD-BL-Az!z. 383
avaient besoin. Après avoir accompli le sacrifice d'obligatioD on
ce jour solennel et passé Tarmée eq revue, le sultan la conduisit
/ à Tèza, sur la roule de Tiemcen.
À la nouvelle de son approche, Âbou-Hammou rassembla sous
les murs de sa capitsle tous les Zenata des conjrées orientale^
qui reconnaissaient son autorité, ainsi que les Beni-Amer, ara*
bes de la grande tribu des Zoghba. Après y avoir dressé son
camp, il fit la revue de ses troupes et, comptant sur la fidélité
des Arabes makiliens, il sa décida à marcher au-devant des Mé-
rinides. Bnce moment, il apprit que les Âhlaf et les Obeid-
Allah avaient été gagnés par Ouenzemmar, l'ami des Mérinides,
«t s'étaient laissés conduire vers le désert [d*Angad] par le$
émissaires de ce chef et qu'ils allaient joindre lebultan. Effrayé
par cette défection, il leva son camp et se dirigea vers EUBarha
avec le reste de ses troupes et avec ses partisans fidèles, les Béni-
Amer. Arrivé dans cette ville, il se détourna vers Mindas d'où i|
déboucha dans le pays des Dialem et alla s'arrêter chez les Au-
lad-Seba-Ibn-Yahya , après avoir traversé le territoire des
Bîah.
Abd-el-Aztz envoya en avant son vizir, Abou-Bekr-Ibn-Ghazi,
afin d'occuper Tiemcen et, ayant enfin quitté Tèza, il fit lui-
même son entrée à Tiemcen le 40 de Moharrem 772 (7 août
4370). Une foule immense assista h ce spectacle. Alors il confia
À son vizir Ibn-Ghazi le commandement des Mérinides, des mi-
lices, des Arabes makiliens, des Arabes soueidiens , et lui or-
donna de marcher h la poursuite des Abd-el-ouadites. Il lui
adjoignit Ouenzemmar comme conseiller et directeur muni de
pleins pouvoirs. Ce fut vers la fin de Moharrem que l'armée
mérinide partit de Tiemcen.
A cette époque, j'étais en mission* à la courd'Abou-Hammou.
Le voyant sur le point dlabandonner Tiemcen, je pris congé de
lui et me dirigeai vers Honein d'où je me proposai de passer en
^ Notre auteur était alors bien réellement au service d'Abou-
Ilammou ; voy. t. i, p. xlyi.
384 HlSTOIllB DES BiRBERSd.
m
Espagne. Il arriva cependant que de misérables intrigants me
calomnièrent auprès du sultan Âbd-el-Âziz, en ni^accusant de
vouloir emporter dans ce pays une forte somme d^argent. Une
troupe de soldats envoyée par ce prince vint m'arréter et me
conduire auprès de lui. Je le trouvai au Ouadi-'z-Zttoun d'où il
allait se rendre à Tiemcen. M'ayant fait amener devant lui, il
m'interrogea lui-même et reconnut, à mes réponses, que ces dé-
lateurs l'avaient trompé. lime revêtit alors d'une robe d'hon-
neur, me fit cadeau d'une monture, et, après avoir envoyé son
vizir h la poursuite d'Abou-Hammou, il me chargea de passer
diez les Rtah et de faire mes eiïortfi pour les amener à la sou-
mission, en les détachant du part/ d'Abd-el-ouadite. Je parvins
à joindre le vizir h El-Bat'ha et, l'ayant accompagné jusqu'à
rOureg, rivière qui traverse le territoire des Attaf, je pris
congé do lui et me rendis à ma destination. M'étant abouché avec
les Rtah, je les décidai à retirer leur appui à Abou-Hammou et à
reconnaître l'autorité du sultan mérinide. Vers la même époque,
Abou-Ztan sortit du pays des Hocein, de la localité où il avait
l'habitude d'allumer la révolte ^ et passa chez les Aulad-Mo^
hammed-lbn-Ati-IbnSebâ, grande famille des Douaouida. Quanta
Abou-Hammou^ il quitta Biskera et se rendit à Ed-Doucen où il
resta quelque temps. Le vizir et Ouenzemmar se mirentalors en
marche, sous la conduite d'une bande des Douaouida que je leur
avais envoyée, et s'avancèrent jusqu'à Ed-Doucen, ville près de
laquelle Abou-Hammou était campé avec ses troupes zenatiens
et ceHes de ses alliés , les Beni-Amer. Lq vizir arriva à la
tête d'une foule d'Arabes makiliens, d'Arabes zoghbiens et de
Rtahides. A l'instant même, il força le sultan abd-el-ouadite
d'abandonner son camp et ses trésors. Tout fut livré au pillage
ainsi que les bagages et les troupeaux des Arabes qui l'avaient
accompagné. Abou-Hammou prit la fuite à travers mille périls
et atteignit le pays des Mozab, où il parvint à rallier ses fils et ses
gens qui s'étaient dispersés de tous càlës dans le Désert. Le vizir
'Il fautprohablement lire A^y».
DTlfASTIB BfÉRlNIDS. — AUD-^L^Aztz. 3S5
Testa quelques jours à Ed-Soucen et y reçut un riche cadeau que
lui envoya Ibn-Mozai. Ayant alors repris la route du Maghreb,
il dévasta, en passant, les bourgades que les Beni-Âmer possé-^
daient dans le Désert et en chassa les habitants jusqu'à dans ces
solitudes éloignées bix l'on meurt de soif. Il rentra k Tiemcen au
mois de Rebift second (oct.-nov. 1374). Ce fut moi qui présentai
au sultan les Bouaouida et leur chef, Abou-I)}nar-lbn*Âit«ibn-
Ahmed. Le prince se souvint des bons services que son père
[Abou- 1-Hacen] avait reçus de cet émir et PaccueiNit avec une
bonté extrême ; il lui. donna un beau cheval et fit présent d'une
. robe d'honneur à lui et tous ses compagnons. Les Douaouida re-
partirent alors pour leur pays. Abd-el-Azlz installa des gouver-
neurs dans les villes qu'il avait conquises et confia à ses propres
officiers Tadministralion des contrées qu'il venait de soumettre-
D'après ses ordres, ie vizir Omar, fils de Hasoud-Ibn-Mendtl-
Ibn-Hammama, prit le commandement de plusieurs escadrons
et alla bloquer la localité où Hamza-Ibn-Ali-lbn-lftached, membre
delà famille de Thabet-lbn*Mendil, s'était retranché.
Ce jeune homme avait été élevé à la cour des Mérinides, où il
passa ses premières années , entouré d'égards et comblé de
bontés. Ayant enfin pris en dégoût la position qu'il occupait chez
eux, il s^enfuitdans le pays des Maghraoua, séjour de ses aïeux
et, s'étant réfugié dans la montagne des Beni-Bou-Satd, il se
mit sous la protection de celte tribu et obtint la promesse qu'elle
ledéfendraitjusqu'àlamort. Le vizir Omar-1bn*Masoud< chargé
par le sultan d^étouffer cette insurrection, attaqua les Beni-Bou-
Sa}d ei les contraignit à se réfugier sur la cime de leur monta-
gne. Il établit alors son quartier-général à El-Khamts, sur le
Ohélif, et les tint étroitement|bloqués. Plusieurs renforts lui étant
arrivés de l'armée de Tlemcen, il les organisa en corps détachés
et leur assigna des postes où ils devaient rester afin de mieux
contenir l'ennemi. Pendant ce temps , le sultan s'empara des
provinces et des villes du pays ; il y établit de nouveaux gonver-
^ Voy. tome m, page 325.
T. IV. 23
r
386 BlgTOIBI DIS BBSinUSS.
aears et fiait par soumettre tout le Maghreb central ,' abû que
l'avaient fait les sultans ses prédécesseurs.
U «AOHtBB CSNTRIL S'AGITS.— ABOD-ziAR «SVIBRT A TtlBRI,
BT L88 ABABB8, SOCS LA COHOUITB D'aBOUwHABWOD, «ARCBBUT
SOI TLBMCBll. — LB SULTAN L8S DfiVAlT BT BAFFUMIT SON
ACTOBITÉ DARS CB PATS.
Après le catastrophe d'Ed-Doucen, le sultan Âbou-Bammou
se jeta dans les profondeurs du Désert avec les Beni-Amer et ses
autres partisans; s'éloignaut ainsi des bourgades que ses alliés
[les Beni-Amer] possédaient au sud du mont Rached* Le vixir
Ibn-GbaBÎ et Ouenzemmar-lbn-Arîf revinrent alors sur leurs
pas, suivis des Zoghba et des MakiU
Aussitôt que le sultan Abd-el-Azh se fut établi dans TIemcen,
les Arabes sollicitèrent l'autorisation d^occuper les territoires
dont ils avaient naguère arraché la concession à la faiblesse
d'Abou«-Hammou. Fier de sa puissance et jaloux de sa dignité,
Abd-eUAztz repoussa cette demande et se fit ainsi beaucoup
d'ennemis. Dès ce moment, les Arabes souhaitèrent le succès
d'Abou-Hammou comme le seul moyen qui pourrait les faire at-
teindre au but de leurs désirs, La victoire sans pareille que le
souverain de Fez venait de remporter sur celui de TIemcen leur
fit perdre cette espérance, maisRahhon, fils de Mansour-Ibn-Ya*
coub et commandant des Rharadjmakiliens, de la branche d'Obeid-
Allah, prit la résolution de s'insui^er contre le gouvernement
mérinide. Aussi, quand les Arabes se furent retirés dans leurs
quartiers d'hiver, il alla joindre ses troupes aux bandes des
Benî-Amer qui étaient restées avec Abou-Hammou, et mit en-
core ce prince en état d'insulter les territoires oii le vainqueur
avait établi sa domination. Conduits par ce chef, les Arabes en-
vahirent les états du sultan et, dans le mois de Redjeb 772
(janv.-fév. 4371), ils bloquèrent la ville d'Oudjda. A l'appro-
che d'une armée envoyée de TIemcen, ils prirent la fuite et, dans
DTIfASTlB HfiftlNlDE. ABD-BL-AZÎZ. 387
leur monvemerii de retraite, ils dévastèrent le territoire d'EU
Bat'ba. Le vizir [Ibn-Gbazi], qui s'était mis à leur poursuite, les
rejeta dans le Désert.
Sur oes eolrefaites, les partisans de Hamza-IbB*Ali-4biH
Rached étaient devenus [audacieux comoie] des aigles, après
s'être montrés [faibles t)omme] des milans : pendant que le vizir
{Omar*Ibn-Masoud] les tenaient bloqués, ils descendirent au Ghé^
iif, surprirent son camp a la faveur de la nuit, mirent ses trou-
pes en'dèrouteei le forcèrent à s^enfuir jusqu'à £l-Bat'ha«
Les Hosein, qui s'attendaient toujours à être châtiés par le
sultan à cause de leur insubordination envers tous les gouverne-
rnents et de leur promptitude h soutenir tousles rebelles qui pas-
saient chez eux, apprirent cette nouvelle [avec plaisir] et envo^
yèrent chercher Âbou-ZIan. Cet émir, pour lequel ils s'étaient
tléjà soulevés, demeurait alors au milieu des Donaouida, chez la
famille des Âulad-Yahya-lbn-Ali-Ibn-SebA. L'ayant mis à leur
tête , ils firent une irruption dans la province de Hédéa et blo-
quèrent la garnison que le sultan avait établie dans cette ville.
Aussitôt , le feu de l'insurrection s'alluma dans tout le Maghreb
central. Cet état de choses se prolongea jusqu'à Tan 773
(1374-2) /quand le sultan réussit à détacher^ Babhou-Ibn^Man-
sour du parti d'Abou-Hammou, en lui donnant une forte somme
<l'argent et toutes les plaines dont il désirait obtenir la jouissance.
A l'égard des autres Arabes, Abd-el-Aztz se conduisit delà même
manière, au risque d'accroître leur avidité et leurs exigences. Il
forma alors le projet de les appuyer par un corps d*armée et de
les employer à rétablir la tranquillité partout, en expulsant du
pays les chefs des insurgés. Gomme la conduite de son vizir
[Omar*Ibn*Masoud] envers [Hamza-Ibn-Ali] le maghraouien
lui paraissait SQspecte, il le fit arrêter par un de ses o£Sciers,
qui le chargea de fers et le conduisit à la prison de Fez.
' Lisez, dans le texte arabe, JllU.1. Le traducteur ne s'arrêtera
plus a signaler les fautes d'impression déjà indiquées dans Verrata
ajouté au texte arabe.
388 HISTOIRE DES BBEBÈRfiS.
L'armée que Ib sultan venait d'organiser partit de Tiemcciiy
au mois de Bedjeb 773 (janv.-fév. 4372), sons la conduite
d'Abou-Bekr-Ibo-Ghazi, qui avait l'ordre de châtier les auteurs
des dernières révoltes. Elle atlaqna avec un grand acharnement
les partisans de Hamza-Ibn-Ali, lequel s'était retranché dans la
montagne des Beni-Bou-Saîd, sa retraite ordinaire, et Ht éprou-
ver à ces insurgés des pertes considérables. Aussi, finirent*ils
par craindre les suites de leur rébellion et, après avoir chargé
leurs cheikhs de porter leur soumission au vizir, ils avertirent
Hamza de ne plus compter sur eux. Ibn-Ghazi accorda aux in-
surgés les conditions les plus favorables.
Hamza.se rendit alors chez les Hoseiu pour y trouver Abou-
Ztan ; m<iis, bientôt après, il s'en retourna dans la plaine du
€helif et tâcha de surprendrcMa garnison de Timzought dans une
attaque de nuit. Ces troupes tinrent ferme, mirent en déroute
!es assaillants et firent prisonnier Hamza-Jbn-Ali. La vizir, au-;
quel on le conduisit, s'empressa d'en avertirle sultan et, d'après
les ordres de ce prince, il fit décapiter le rebelle et tous ses par-
tisans. Leurs tâtes furent envoyées au sultan et leurs cadavres
furent mis en croix sur les murs de Miltana.
A la suite de celte victoire, le vizir marcha contre les Hosein
et les cerna dans leur montagne, à Titeri. Soutenu par toutes les
tribus zoghbienneS; [h l'exception des Béni- Amer], il tint Ten-
nemi étroitement bloqué pendant un temps considérable et l'at-
taqua vigoureusement. Je me trouvai alors dans le Zab, et là, je
reçus du sultan l'ordre de faire prendre les armes aux Rîah et de
mener tous ces guerriers au camp du vizir. D'après mes instruc-
tions, je rassemblai les diverses fractions de cette tribu cl j'allai
bloquer la montagne, du côté du Désert, en occupant une posi-
tion qui touchait au territoire des Bîah. Les Hosein éprouvè-
rent enfin tant de misère que, dans le mois de Moharrem 774
(juillet 4372), ils perdirent courage et s'enfuirent de tous côtés,
I Dans le texte arabe, les manuscrits portent avlaj^ ; il faut, sans
doutC; lirec;AJu^.
DYNASTIE IffiRlNlDE. — AKD-EL-AZIZ, 389
en abandonnant leur montagne. Âbou^Ztan réussit à se jeter dans
Oiiargia. Le vizir] s^enopara de la forteresse, qu'ils venaient
d'évacuer, et la livra au pillage. Il contraignit même les Hosein
h fournir des otages et à payer sur le champ une forte contribu-
tion.
Dans cet intervalle, Abou*Hammon profita de Tabsence des
troupes mérinides et fît une irruption dans le territoire de Tlem-
cen. Jl eut cependant la maladresse d^ndisposer son allié, Kha-
led4bn*Amer, émir des Beni-Âmer, en lui préférant pour com-
mander celte tribu zoghbienne, Abd-Âllah-Ibn-Asker, qui n'a-
vait été que le lieutenant de ce chef. Indigné d'un tel passe-
droit, Khaled ouvrit des intelligences avec Abd-el*Aztz et, sur
la réception d'une somme d'argent, il quitta le parti d'Abou-
Hammou et se rallia aax Mérinides. J)ans le mois de Dou-'i-Gâda
773 (mai-juin 4373), le sultan envoya contre Abou-Hammou
un corps d'armée composé de Bent-Amer et d'Aulad-Yahmor,
tribu makilienne. Le commandement de cette colonne fut donné
à Mohammed-lbn-Othman, parent du vizir Ibn-Ghazi. Abou*
Hammou osa risquer une bataille, et vit la défaite de ses parti-
sans, la prise de son camp et la ruine de ses alliés, les Arabes
nomades, qui perdirent tout, tentes et bagages. Ses trésors, son
fils et son harem tombèrent entre les mains des vainqueurs. Le
sultan, h qui on envoya ces prisonniers, les fit conduire à Fez et
les logea dans ses palais. Atïa-Ibn-Afouça, seigneur de Cbelif et
client d'Abon-Hsftnmou, fut pris aussi, mais il obtint sa grftce et
entra au service du gouvernement mérinide. Abd-Allah-Ibn-
Sogheir [chef des Beni-Amer], h Ia]merci duquel Abou-Hammou
vint alors se mettre, fut touché de compassion {et lui fournit des
guides pour le conduire à Ttgourarîn, dans le pays du Sud. Le
monarque abd-el-ouadite resta pendant quelque temps dans
cette ville. Le revers qui avait ruiné] ses espérances lui arriva
quelques jours avant la conquête de Tlteri.
Le sultan mérinide, ayant ainsi consolidé sa puissance, se vit
mattre du Maghreb central. Après avoir chassé de ce pays les
meneurs de tant de révoltes, il fitVespecterson autorité aux Ara-
bes, dont les uns se soumirent de bon gré cl les autres par
390 BISTOIHE' DBS BERBÈfiBS.
crainte. Le vieir AlKHi-Bekr-lbii-<rhazi étant de retour Je la
frontière orientale [du Maghreb centrai] lui présenta une foule
de chefs arabes qu'il avait amenés avec lui, Abd-et-Âztx accueil-
lit ces visiteurs avec beaucoup de prévenance et leur fit de ri-
ches cadeaux; il monta même à cheval pour aller au-devant du
vizir. Tous ces chefs lui fournirent des 6tages et prirent renga-
gement de lever une armée afin d'expulser Abou-Hammou de
Ttgourartn. Ik partirent, comblés des bontés que le sultan leur
avait prodiguées et, rentrés dans leurs quartiers d'hiver, ils or-
ganisèrent une expédition contre cette ville.
«
U VIZia IBH-EL-KBATÎa QOITTB LA COUa n'OH-CL-ASMIt,
SnCITBDK ni L'ARDALOUSIS, BT SB BftFUGIB A TLBMCBlf, AUTlfeS
DU SULTAN ABD-BL-AZh^
Mohammed-lbn-el-Rhattb était natif de Locha (£oa?a), ville
située à une journée de Grenade, dans la plaine qui s*étend
autour de la capitale et qui porte le nom d*El-Merdj (la prairie).
Loxa s'élève sur le bord du Ghendjtl ou GhentI [Xenil), rivière
qui traverse cette plaine, en se dirigeant du sud vers le
nord. Au nombre des vizirs de cet empire on comptait plusieurs
aïeux d'Ibn-el-Khattb, Son père, Abd-AUah, se transporta à
Grenade pour entrer an service du souverain, prince de la fa-
mille des Ahmer, et il devint surintendant des magasins de vi-
vres. Lui-même, il passa ses premières années dans cette capi-
tale et fit ses études sous les professeurs les plus distingués.
Devenu le disciple favori du célèbre médecin, Yahya-Ibn-Hodeil,
il cultiva les sciences philosophiques et acquit de grandes con-
naissances en médecine* Entraîné par le goût des belles-lettres,
îl suivit les leçons des hommes les plus habiles et puisa copieu-
* El-Haccari a reproduit ce chapitre dans sa vie d'Ibn-el-Khatlb
(i:H;«9l-e<f-d^n).
DYMA8T1B MfiKimOB. -*-> AB»»BL-AZiz. 39f
setneni dé (ont ce qu'il y avait de meilleur dans la poésie et dans
la prose des auteurs arabes. Toùt-à-coup il se montra grand
poète, épistolc^faphe de pfèiïiier rang, et, dans ces deux parties,
il demeura sans rival. Los vers qu'il composa en Thonnettr
du souverain régbant, Âbou-'l-Haddjadj, prince de la famille
des Ahmer, se répandirent dans tout le royaume et jus-
qu'aux pays les plus éloignés. Pour le récompenser, le sultan le
prit à son service et le (il ehtrer au nombre des écrivains qui
travaillaient dans le bureau du palais sous la direction dlbn-el-
Djeïab.
Abou-^'1-Hacen-IbB^eUDjeîab fut regardé comme le coryphée
de tous les poètes, prosateurs et philologues de l'Espagne et d^
l'Afrique. A l'instar de ses aîeuk, il remplit les fonctions de àe-
crétaire*auprès des sultans de (ïrenade ; étant entré au service de
l'état lors déjà déposition de Mohammed [III] et de l'assassinat
du touti-puissant vîztr, Mohammed-Ibn-el-Haklm. Devenu alors
chef du secrétariat impérial, il conserva cette place jusqu'en l'an
74& (4348-9), oh il fut emporté par l'épidémie qui régnait à
cette époque.
Le sultan AboQ^'UHaddjftdj choisit alors Hohammed-Ibn«^l-^
Khattb pour remplir la place vacante et lui accorda en mém^
temps les titres et tes privilèges du-vizirat. Dansl'exeroice de ses
hautes fonctions; Ibn-^1-Kbaltt> déploya une grande habilité et,
dans les lettres émanées de son bureau et adressées aux prince»
voisins, souverains de l'Afrique , il déploya un talent vraiment
admirable. Le sultan lui témoifçna une bienveillance sans exem**
pie et l'autorisa secrètement à désigner les candidats aux emplois
administratifs et à faire avec ces personnes les conditions les
plus avantageuses pour lui-même. De celte manière, Ibn-el-
Khatib ramassa une fortune considérable. Envoyé par son sou-
verain h la cour d'Abou-Einan, afin d'offrir des compliments
de condoléance^ à ce prince qui venait de perdre son père, le-
f La correction conjecturale indiquée dans Verrata de l'éditio>i>
du texte arabe, est confirmée par El-Maccari.
399r BISrOlRE DES BBBBfcRB&é
sultan Aboa-'UHaceo , il remplit parfaitemeot sa missiao*
En Tan 755 (1354), Abou-'l-Haddljadj mourut assassioé* IL
était allé à la mosqué le |Our de la rupture du jeûne, pour assis-
ter à la prière, et, au moment où il faisait ses prosternements ,
un homme de la basse classe se précipita sur lui et le tua d'un
eoup de poignard. Les chrétiens qui formaient la garde du sul-
tan abattirent ce misérable avec leurs sabres et le taillèrent
en mille morceaux. L'on proclama aussitôt la souveraineté de
Mohammed [V] , fils d'Abou-1-Haddjadj.
L'affranchi Ridouan qui, h cotte époque, était tout-puissant, en
sa double qualité de général en chef et de tuteur des jeunes
princes delà famille royale, parvint à dominer Tesprit du sul^
tan et à gouverner Tempire. Il prit Ibn-el-Khattb pour lieute-
nant etTadmit au partage réel du pouvoir ; mais, tout en lui
laissant la dignité du vizirat, il lui enleva le secrétariat, place à
laquelle il désigna une autre personne. Dès*lors, Tempire entra
dans un état do prospérité et jpuit d'une bonne administration..
Quelque temps après, Ibn-eIrKhattb reçut l'ordre de se ren-
dre auprès d'Abou-Einan et de solliciter Tappui de ce monarque
contre le roi chrétien. Ce fut encore là une répétition des mêmes
demandes que les rois de Grenade avaient l'habitude d'adresser
aux. aïeux du princo mérinide. Quand il se présenta à l'audience
royale, il prit le pas sur les vizirs et légistes dont se composait
la députation et, s'adressant directement à Abou-Einan, il de-
manda la permission de reciter une pièce de vers avant d'entrer
en conférence. Le sultan y consentit et l'ambassadeur commença
ainsi, en se tenant debout :
Vicaire de Dieu ! puisse le Destin augmenter ta gloire, tant
que ta lune brillera dans l'jobscuriîé.
Puisse la main de la Providence éloigner de toi ces dangers
que la force des hommes ne saurait repousser.
Dans nos afflictions^ ton aspect est pour nous la lune qui
dissipe les ténèbres^ et, aux époques de disette, ta main rem*
place la pluie [et verse l^abondance] .
Privé de ton secours, le peuple de VEspagnen^ aurait conservé
ni kabitation ni territoire.
STNASTli HtRINIDV. — f ABD-^BL-AZtz. 393
Entjtnmot, ce pays n^a qu^un besoin : la protection de ta
majesté.
Ceux qui ont des obligations envers toi n'ont jamais été in-
grats; ils n'ont pas nié tes bienfaits.
Maintenant qu'ils craignent pour leur existence, ils m'ont
envoyé vers toi et ils attendent.
Le sultan trouva ces vers si beaux qu'il dit au poète : a Tu
V oe t'en retourneras pas chez eux sans que tous leurs souhaits
2> ne soient accomplis. Je le donne la permission de t'asseoir. i»
Ensuite, il combla de dons les membres de cette ambassade -et,
avant de les congédier, il accorda toutes leurs demandes. Un de
mes anciens profe.sseurs, le cadi et cherif Abou-*l-Cacem, qui
avait fait partie de cette députation, m'a dit, en parlant de cette
audience : Ce fut la première fois que l'on vit un ambassadeur
» atteindre le but de sa mission avant d'avoir salué le sultan au-
t quel il fut envoyé. »
Bidouan et Ibn-el-Rhatîb avaient gouverné l'Andalousie pen-
dant cinq ans qnand le raïs [Âbou-Abd-Allah-] Mohammed,
cousin paternel du sultan ei, comme lui, petit-fils du raïs Abou-
Satd[-Feredj] conçut le projet de renverser lenr pouvoir et, pro-
fitant de l'absence du souverain, qui venait de se rendre à sa
. maison de campagne, il escalada les murs de la résidence impé-
riale nommée i4/-£ramra {la rouge, l'Alhambra), surprit Ri-
douan h la faveur delà nuit et lui ôta la vie. Aussitôt après, il
plaça sur le trône Ismafl, fils du sultan Abou-'l-Uaddjadj; ayant
préféré ce prince parce qu'il en avait épousé la sœur-germaine.
Jusqu'alors, on avait tenu Ismail enfermé dansl'Alhamra; le raCs
le fit sortir du lieu où on le retenait et, l'ayant proclamé sultan,
il entreprit de gouverner Tempiie au* nom du nouveau sou-
Terain.
Le sultan Mohammed, qui se trouvait alors dans sa campagne,
entendit le bruit des tambours et, soupçonnant quelque trahison,
il monta à cheval, courut à Guadix et s'en assura la possession '.
Voy. page 332 de ce volume.
394 HISTOIRE DIS UUfeSCS.
Bosttite Jl s'empressa de faire avertir le sullan [ménoide],
Abon-Salem, de ce qui était arrivé. Ce prince venait de monter
sur lo trftoe de ses aïeux quand il reçut cette nouvelle. Pendant
le règne de son frère, Abou-Eiuan^ il avait demeuré en Espagne
auprès de la famille royale de Grenade.
Le raïSy devenu ainsi régent de l'empire, jeta le vizir Ibn-el-
Kbattb dans le fond d'une prison et le tint étroitement gardé.
Le khatib Ibn-Herzoue qui, pendant son séjour en Espagne,
s'étaitattdché parles liens de lamitié à ibn-el-Kbattb, exerçait
alors une grande influence sur Tesprit du sultan Abou-Salem.
Voulant sauver son ami, il représenta k ce monarque qu'ea fai-
sant venir de Guadix le snllan déchu, le gouvernement maghré-
bin aurait le moyen de tenir en échec celui de l'Andalousie et
d'ôter aux membres de la famille royale mérinide qui s'étaient
réfugtéSi en ce pays, tout espoir d'envahir le Maghreb. Abou-
Salem approuva ce conseil et, après avoir obtenu du gouverne*
mont andalousienla promesse qu'aucun obstacle ne serait apporté
au départ de Tex-soltani il fit choix d'un de ses familiers, le
chérif Abou-'l-Cacem de Tiemcen, et lui donna l'ordre d'aller à
Guadix et de' lui amener le prince qui s'y était réfugié. Cet en*
voyé emporta aussi une lettre dans laquelle on sollicitait la mise
en liberté d'Ibn-el-Khattb. L'ex-ministre obtint la permission
de quitter la prison et, s'étant joint à la suite du chertf , &t toute
avec lui jusqu'à Fez..
Abou-Salem apprit avec un plaisir extrême l'arrivée d'Ibn-ei-
Âhmer [Mohammpd Y] ; il sortit avec un cortège magnifique afin de
le recevoir plus dignement, et le fit monter sur un trAne que l'on
avait dressé vis-à'vis du sien. Ibn-eUKhattb récita alors le poëme
que nous avons déjà reproduit, poëme dans lequel il implorait
le monarque africain de ^eu^ porter secours. Ce fut |vraiment là
un jour de fête. Le sultan promit de soutenir son hôte et, en at-
tendant le moment d'agir, il le combla d'honnenrs et l'installa
dans un palais magnifique. En môme temps, il pourvut abondam-
ment aux besoins de toutes les personnes qui formaient la suite
du monarque espagnol.
L'ex-vizir, Ibn-eURhatib, mena pendant queluue temps une
DTMASTIB «SnmiDB. ABD-SL-AZiz, 305
vie tràa-agréab)e» en jouissaQl de la pension et des coiicessio^s
que le suhan mérinide lui avaii accordées; puis^ il deoaanda Tau-
torisation de parcourir les provinces marocaines et de visiter les
monuments que les anciens rois y avaient laissés. Il partit^ ^fn«
portant avec lui des lettres par lesquelles on invita les administra-
teurs des provinces à lui faire des cadeaux. Grâce àPempresse^
ment de ces fonctionnaires, il ramassa une fortune considérable.
En revenant, il passa par Salé et, étant entré dans le cimetière
des rois [mérinides], à Chala, il s^arrèta auprès du tombeau
qui renfermait le corps d*Abou-*UHacen, et récita une élégie
dans laquelle il déplora la mort de ce sultan et invoqua sa proieo^
tien, afin de pouvoir rentrer en possession de sa campagne près
de Cordoue. Cette pièce commence ainsi :
Bien que sa demeure soii éloignée e^ que son habitation soit
à une grande distance de nous, le souvenir de ses hauts faits
ramène son image devant nos yeux^
Partageons nos heures entre la jalousie- et la douleur; [en*
vions] cette terre qui renferme ses cendres ; \regardons\ ce
qui reste de lui [et versons des larmes].
Le sultan Ahou-Salem ayant eu connaissance de cette pièce,
intercéda auprès du gouvernement andalousien en faveur de
Tauteur et lui Gt rendre ses terres. Tant que le sultan déchu
resta en Afrique, Ibn-el-Khattb se tint àTécart et ne quitta pas
la ville de Salé. £n l'an 763 (4362), Mohammed-Ibn-el-Ahmer
rentra en possession du trône et envoya chercher sa famille,
qu'il avait laissée à Fez. Omar-lbn-Abd-Allah qui, à cette épo-
que, était régent de l'empire mérinide, fit venir Ibn-el-Khaltb
de Salé et le chargea de conduire en Espagnoles femmes et les
enfants du souverain andalousien. Ce prince accueillit son an-
cien ministre avec un vif plaisir et le rétablit dans la posi-
tion qu'il avait occupée sous l'administration de Ridouan. *
[Le prince mérinide,] 0thman-Ibtf«Yahya-1bn-0mar^ com-
mandant des volontaires de la foi [au service des souverains de
Grenade], se trouvait alors à la cour du roi chrétien, où il s^é-
tait rendu avec son père , Tahya , afin d'échapper aux mauvais
dessins que le raïs^ usurpateur du trône de Grenade, avait for-
396 HISTOIBB DBS BBBBBRES.
mes contre eux. De là Yahya s'était rendu en Afrique, mais soir
fils avait continué à rester chez Tennemi. Quand le sultan Mo-
hammed [V] se réfugia chez les chrétiens [en quittant le Maghreb,]
il reprit Olhman^à son service ; puis, ayant perdu Pespoir de re-
couvrer son royaume avec Taide du roi de Castille, il quitta la
cour de ce prince et se dirigea, avec Othman, vers la frontière
de r Andalousie. S*étant alors adressé à Omar-lbn-Abd- Allah, il
le pria de lui céder une des places fortes que les Mérinides pos-
sédaient encore en Espagne, voulant s'y installer, en attendant
l'occasion de reconquérir le royaume de Grenade. Pour obtenir
cette faveur il eut recours h mon appui; et, comme une ferme
amitié, fondée sur des obligations mutuelles, régnait entre mot
et Omar, je décidai ce ministre à lui remettre la forteresse de
Ronda. J'avais indiqué cette ville, parce qu'elle avait toujours
appartenu aux aïeux du sultan Mohammed, comme un héritage
de famille. Ce prince s'y établit avec Othman,qui tenait alors
la première place[dans 'son intimité. Ce fut de là qu'ils sortirent
pour s'emparer de Malaga : aussi, peut-on dire que Ronda fut le
marchepied au moyen duquel le sultan remonta sur le trône.
Après la prise de Mataga, il se rendit maître de Grenade, capi-
tale de l'empire.
Dès-lors, Othman-Ibn-Yahya tint la première place à la cour
et, jouissant au plus haut degré de la confiance de son maître, il
le gouverna à sa fantaisie. Aussi, quand Ibn*eUKhattb eut ra-
mené à Grenade la famille du sultan, et repris sa place dans l'ad-
ministration de l'empire, avec le privilège de voir ses conseils
toujours agréés par le souverain, il conçut une jalousie profonde
contre Othman et s'indigna de la confiance que le sultan témoi-
gnait à ce chef. Craignant la présence de tous ces princes méri-
nides comme dangereuse pour l'état, il fit partager ses appré-
hensionsà son maître*, qui prilaussitôtdes mesures deprécaution»
Dans le mois de Ramadan 764 (juin-juillet 4363), Othman,
' Dans l'ouvrage d'El-Maccari, on Ht o^^t »'j'.? «^ '*" A* ^'^^
le danger.
DYNASTIB MËRINIDB. ARD-EL-Aziz. 397
^soo père et ses frères furent mis^ en prison et, quelque temps
après, on les expulsa du pays.
S'étantainsi débarrassé de ses rivaux, Ibn-eUKhatib demeura
seul maître de l'esprit du sullan et se fit confier le gouvernement
de l'empire. Il eut môme l'adresse de semer la mésintelli-
geuce entre le souverain et tous ceux qui Tentouraient, tant les
amis du prince que ses compagnons de table^. Resté seul arbitre
de l'administration, il s'attira tous les regards ; sa faveur devint
l'objet de toutes les espérances ; les grands et les petits se pres-
saient à sa porte, pendant que les familiers du j^rince dévoraient
leur jalousie et leur dépit, ils eurent beau employer contre lui
tous les genres de calomnie et d'intrigue, le sullan resta sourcl à
leurs insinuations. Ibn-el-Khattb fut enfin averli des trames
qu'on ourdissait contre lui, et, cédant à ses appréhensions, il se
disposa à quitter la cour.
Le sultan Abd-eUAzîz lui était redevable d'un grand service :
de l'arrestation de son oncle, Âbd-er-Rahman-Ibn^Âbi-lfellop-
cen, prince auquel on avait donné le commandement des volon-
taires de la foi qui étaient aii service du gouvernement grenadin.
Abd-er-Bahman avait parcouru le Maghreb dans l'espoir de
s'emparer du trône ; de tous côtés il avait allumé le feu delà ré-
volte, quand le vizir Omar-Ibn-Abd-Aliah, régent de l'empire,
l'attaqua vigoureusement et le contraignit h passer en Espagne
etd'yemmenersonvizirMasoud-Ibn-Maçaï. En Tan 767(1 365-6j.
ils arrivèrent chez le sullan, le même qui avait été déposé,
et trouvèrent une honorable réception è la cour de Grenade.
Ali-lbn-Bedr-éd*Dln , commandant des volontaires de la foi,
étant mort sur ces entrefaites , on fit choix d'Abd-er-Rah«
man pour le remplacer. Le sultan Abd-el-Aztz s'étant enfin rendu
maîtie de son propre royaume en ôlant la vie au vizir Omar-
' Dans lejexte d'El-Macccari, on lit ix^ à la place de aJUj. En
adoptant cette leçon, qui est probablement la bonne, il faut tra-
duire ainsi : il plaça fcs fils au nombre desjamis 'eC des intimes du
prince.
398 KISTOIRB D£jt BBftltllSlES.
lbii«Abd-Altah, futlrès^incpiiei de oetle nomination ois'allcmlit
à voir son autorité ébranlée par les trames dn saltan de Grenade.
Ayant alors eu connaissance de certaines proclamations qu' Abd-
er^Rahman avait (ait répandre parmi les Mérinides, il céda èses
appréhensions et envoya au ministre espagnol un agent secret
chargé d*6btenir Temprisonnement du prince etdu vizir. Ibn«
eWKhatib auquel on promit en retour de ce service «ne pe-
sition très-éievée h la cour de Pes, se fit donner par l'envoyé on
écrit h cet effet, et alors il décida son souverain k mettre les ré«
fugiés en prison. La pièce dont nous parlons fui rédigée par
Abou-Yahya-Ibn-Abi*Medyen, secrétaire [ du sultan méri«
nide].
Pendant le cocrs de tous ces événements, Ibn-eURhattb foi en
proie aux pluft graves inquiétudes; effrayé par les renseigne*^
ments qui lut étaient parvenus au sujet des calomnies et des in«
irigues des courtisans, il crut s'apercevoir que le sultan com-
mençait à y ajouter foi, qu'on Tavait même indisposé contre lui;
aussi, pril-il la résolution de quitter l'Andalousie et de passer
en Afrique. S'élant fait donner la commission d'inspecter les
forteresses qui couvraient la frontière occidentale de l'empire,
il partit h la tôle d'un détachement de cavalerie qu'il avait à son
service^ et se rendit à sadestination^ avec son fils Ali, lequel était
tout-a*fait dévoué an sultan. Arrivé auprès de Gibraltar, port
de passage entre l'Espagne et l'Afrique, il envoya son passeport
an gouverneur de la place. Ces ofBcier, qui avait déjà reçu des
instrudiona du sultan Abd-el-Aziz, sortit au-devant de l'illus-
tre visiteur et le fit partir pour Geuta dans un navire que l'on
apprêta sur le champ. Arrivé dans cette forteresse africaine,
lbn-el*Khatîb reçut de tous les fonctionnaires les honneurs
d'usage et se vit comblé d'égards. Ayant alors pris la route de
TIemcen, il y trouva le sultan mérinide. Ceci eut lieu en l'an
773 (1371 -2). Toute la cour se mit en mouvement a la nouvelle
de son approche ; le sultan fit monter à cheval ses principaux
■ La bonne leçon est t^xAxi,
DTKASTIE MÊRINIBE. — ABb-BL-Azlz. 399
officiers et les envoya au-devant do lui ; il l'accueillit ensuite
avec une. bienveillance parfaite ; il pourvut à sa sûreté et il son
bien-être; le traitant avec les mêmes faveurs et les mêmes hon-
neurs que l'on accorde aux membres de la famille royale. A peine
les premières salutations passées, le sultan fit partir pour t^E»^
pagne son secrétaire, Abou-Yahya -Ibn-Abi*Medyen, afin d'obte^
nir du sultan andalousien la permission d'emmener en Afrique les
femmes et les enfants d'Ibn-el-Khattb. Cet envoyé revint avec
toute la famille, que l'on avait rassuré complètement et comblée
d'honneurs.
Dès-lors, les courtisans du sultan de Grenade ne purent plus
contenir leur jalousie, et ils s'empressèrent de le mettre sur les
traces des moindres peccadilles dont le fugitif s'était rendu cou-
pable. Le monarque laissa enfin percer les sentiments qu'il avait
cachés depuis longtemps , et se mit à récapituler Mes traits de
présomption et les défauts qu'il avait remarqués dans son vizir.
Quelques ennemis d'lbn-el-Khat!b saisirent cette occasion pour
lui attribuer certains discours qui sentaient le matérialisme, et
Abou-'l-Hacen-lbn-Abi-'l-Hacen, cadi de Grenade, auquel on
soumit ces écrits, les trouva si pernicieux que, par un acte for-
mel, il eo déclara l'auteur un infidèle. Ce fut alors que le sultan
se tourna tout-à-fait contre son ancien ministre ; il chargea le
même cadi de se rendre auprès du sultan Abd-el- Azîz et d'exiger
le châtiment du réfugié, coiiformémantà cette déclaration juri*
dique et aux prescriptions de la loi divine. Le sultan du Maghreb
était trop généreux pour trahir les droits de l'hospitalité
et, en réponse au cadi, il se borna à dire : a Puisque vous con-
» naissiez ses crimes, pourquoi ne l'avez-vous pas puni pendant
» qu'il était chez vous ? Quant h moi, je d<^clare que, tant qu'il
» sera sous ma protection, personne ne devra le tracasser è pro-
» pos de cet affaire. » Il combla ensuite de { ensions et de con*
cessions non-seulement lbn-el-Khat!b et ses enfants, mais aussi
tous les Andalousiens qui l'avaient accompagné en Afrique.
* Il faut probablement lire ^Uâj^l^
400 ^ HISTOIRE DBS BKBRÈftBS.
En Tan 774 [4372), lors de la mort d'Abd-el-Azti;, les Méri-
nides quittèrent Tlemcen poar rentrer en Maghreb, et Ibn^l-
Khattb s'y rendit aussi, dans la suite du vizir, Abou-Bekr-lbn-
Ghazi, devenu maintenant régent de l'empire. Arrivé à Fez, il
acheta plusieurs terres, bâtit des maisons superbes et planta de
beaux jardins. Les pensions qu'il tenait du feu sultan lui atti-
rèrent enfin la haine du régeut, ainsi que nous le raconterons
plus tard.
MORT OC SULTAK AÉD-BL-Aztz BT AVÊNBMBNT DE SON FILS ES-
SaId. JBB-GHAZI S'bHPARE DE TOUTE L'aUTORITB. LES
aiÊRlNIDBS RENTBElfT BN MAGHREB.
Dans sa première jeunesse, Abd-el-Aztz avait tellement
souffert d'atrophie, accompagnée d'une fièvre intermittente, que
le sultan Abou-Satem s'abstint de l'en\oyerà Ronda avec les
autres princes delà famille royale. Parvenu à l'âge de puberté,
il recouvra la santé ; mais, pendant son séjour h Tlemcen, il eut
une rechute et devint excessivement maigre. Après avoir conso-
lidé sa puissance par l'heureux succès de cette campagne, il
éprouva plusieurs accès de son ancienne maladie ; mais, pour ne
pas alarmer ses troupes, il supporta ses douleurs avec patience
et les cacha à la connaissance du public. Pendant ce temps, son
armée était campée en dehors de la ville et s'apprêtait à partir
pour le Maghreb. Eudn, la veille du 2'i de Rehtâ second, 774
(23 oct. 4372), il fil ses derniers adieux à sa famille et cessa de
vivre. Le vizir [Ibn-Ghazi] ayant été prévenu de ce grave évé-
nement par les eunuques du palais, prit sur son épaule Moham-
med-es-Saîd, fils du sultan décédé et, après avoir annoncé au^
troupes la perte douloureuse qu'elles venaient de faire, il leur
présenta cet enfant comme leur souverain. Tout le monde fondit
en larmes et se pressa autour du jeune prince afin de lui baiser
la main et de lui donner l'assurance d'un dévouement parfait.
On le conduisit ensuite au camp. Le vizir fit alors placerle corps
d'Abd-cl-Azîz sur une bière et le transporta à la tente impé-
DTKASTIB HÉRINIOB. — BS-SAÎD II. 401
riala. Peudani toute la nuit l*armée resta sous sous les ar-
mes et, au leudemain, elle reçut l'ordre de partir. Les Méri-
nides sortirent [de la ville] par baudes et , s^étant rassem-
Mes dans le camp, ils prirent, au surlendemain, la route du Ma-,
ghreb. Après s*étre arrêtée à Tèza , Tarmée continua sa marche
jusqu'à Fez.
Quand le nouveau sultan fut arrivé dans la capitale, il tint une
séance publique au palais afin de recevoir du peuple le serment
de fidélité et d'accueillir les dépulations des grandes villes qui
venaient, selon l'usage, lui présenter les hommages de leurs
concitoyens. Comme il était trop jeune pour s'occuper d'affaires,
le vizir Abou-Bekr-Ibn-Ghazi le relégua dans le palais et prit
en main l'administration de l'empire. Il envoya de nouveaux
commandants dans les provinces, présida aux séances du grand
conseil* et s'occupa a gouverner le Maghreb do sa propre autorité.
ABOD-UAMaiOlJ HEPBEND POSSESSION DB TLEMCEN ET DU
HAGHREB CENTRAL.
Ouand les Mérinides se furent arrêtés à Tèza, après avoir
quitté Tiemcen, leurs cheikhs tinrent conseil et désignèrent
comme gouverneur de la capitalequ'ils venaient de quitter l'émir
Ibrahtm, fils du sultan abd-eUouadite, Abou-Tachefîn. Ce prince
avait été élevé à la cour de Fez depuis la mort de son père, et,
comme il s'était dévoué aux Mérinides, il obtint Cacilement sa
nomination h ce' haut commandement. Rahhou-Ibn-Mansour,
émir des Obeid-Allah , tribu makilienne. partit avec lui pour
l'emmener à sa destination et s'y fit escorter par toutes les trou-^
pes maghraoniennes qui se trouvaient alors en Maghreb. Ces
guerriers avaient reçu l'autorisation de rentrer dans le territoire
du Chelif, autrefois siège de leur empire, et ils se mirent en
1 Dans le texte arabe, il faut probablement lire J^aaâJI.
T. IV. 26
402 HISTOIRE DES BBRBfiRSS.
marchesous la conduite d*Ali etde Rahmouo, tous les deux fils de
HarouD-Ibn-MendlI-lbn-Abd-er-Rahman, aux ordres desquels les
Mérinides les avaient placés.
Sur ces entrefaites, un ancien client d'Abou-Hammou, nom-
mé Àtïa-Ibn-Mouça, qui était entré au service d'Abd-el-Aztz et
en était même devenu Tami intime, sortit du palais en appre-
nant la mort du souverain mérinide, et alla se cacher dans la
ville [de Tlemcen]. Aussitôt que Tarméc mérinide eut levé son
camp et quitté les environs de Tlemcen, Atïa se montra au peu-
ple et les invita à rétablir la souveraineté d^Abou-Hammou .
Ayant rallié autour do lui tous les partisans que ce sultan avait
conservés parmi les habitants de la ville, il rassembla encore
une foule de gens du peuplé et força les hommes de la haute
classe à prêter le serment de fi<lélit^ envers leur ancien maître.
Aussi, quand Ibrahim, filsd'Abou-Tachefin, s-y présenta avec
Rahhou-Ibn-Mansour et les Obcid-Allah.il trouva une (elle résis-
tance qu'il dut s'en éloigner et rentrer en Maghreb.
Abou-Hammou se tenait encore dans son lieu de retraite, à Tt-
gourarîn, quand il apprit la nouvelle de ces événements par un
courrier que ses partisans, les Aulad-Yaghmor, branche des
Obeid-Allah,lui avaient expédié. Son Gis, Aboq-Tachefîn, qui se
tenait alors au milieu des nomades de la iribu des Beni-Amer,
en fut également averti et courut en toute hâte à Tlemcen. Il y
fît son entrée à Ih tête de la bande des Abd-el-ou«tdites qui lui
était restée fidèle, et rassembla bientôt les autres fractions de
cette tribu que s^étaient enfuies dans les contrées voisines. Le
sultan Abou-Hammou y arriva bientôt apfvS, et, dans le mois
deDjomada774 (nov.-déc. 1372) il rentra dans sa capitale,
qu^il avait perdu Tespoir de recouvrer. Après avoir donné ses
premiers soins au rétablissement de son autorité, il fit arrêter et
exécuter plusieurs courtisans qi l'avaient desservi pendant son
absence et dont il avait appris la trahison. Lorsqu'il eut relevé
l'empire abd-el-ouadile, il marcha contre les Maghraoua, alliés
des Mérinides, et, à la suite des alternatives d'une longue guerre,
il soumit leur territoire, le pays du Chelif . Rahmoun, fils de Ha-
roun, perdit la vie dans une de ces batailles. Ce fut ainsi que
DTNASTIB MËRINIDE. — BS-SaId II. 403
i
t^atttoritédes Hérinides fut anéantie dans les campagnes et dans
les villes du Maghreb central.
Le vizir Abou-Bekr-Ibn-Ghazi forma alors le projet d*ane
expédition cont^e Âbou-Hammoo, mais il en fut détourné par
l'embarras que lui créa la révolte deVémir Abd-er-Rahman dans
le pays des Botouïa .
ABD-BR-RAHMAN, FILS d'aBOU-IFBLLOUCBN , DÉBARQUB EN MAGBRBB
BT RALLIE A SA CAUSE LA TRIBO DBS BOTOCÎA.
Dans le mois de Djomada 763 (mars-avrii 1362), Mohammed
[Y] Ibn-el-Ahmer, Tex-sultan de l'Andalousie, quitta Ronda
poar reprendre possession du royaume de Grenade. Lq' laïs
usurpateur s'enfuit chez le roi chrétien, [Pierre^e-Crael] , et fui
mis à mort par ce prince, qui voulut donner, de cette manière,
un témoignage de sa haute considération pour [Mohammed V],
qui s'était déjà mis sous sa protection après avoir perdu son
royaume.
Quand [Mohammed Y] fut rétabli sur le trône, Ibn-el-Khattb,
qui avait rempli auprès de lui et de son père, les fonctions de se-
crétaire d'état, reparut h la cour et y trouva l'accueil le plus
bienveillant. Admis dans Tintimité du souverain, il fui aussitôt
nommé au vizirat, et, se voyant en possession de toute la con-*
fiance de son mattre, il le dirigea à son gré et gouverna l'em-
pire.
Malgré sa haute fortune, il tournait toujours ses regards vers
le Maghreb , dans la prévision de quelque désastre qui pourrait
détruire sa puissance et le mettre dans la nécessité d'aller s'éta-
blir dans ce pays. Aussi, ne cessait-il jamais d'entretenir les
bonnes grâces des souverains mérinides et de montrer un grand
empressement à leur rendre des services. L'on sait que les fils
du sultan Abou-'l-Hacen nourrissaient une jalousie extrême
contre leurs cousins, les fils du sultan Abou^Ali, tant ils crai-
gnaient de les voir arriver au pouvoir. Or , Ibn-el-Rhàtib avait
4Q4 OlSTOiU DES BBMfeBCS.
mooiré heaucoup de bienveillaooe k Téinir Abd-^fir^-RahmoD
[fils d'Âbou-Ifelloucen et petit fils d'Abou-Âli], qui était passé
en Espagne ; il Pavait pris pour ami, et, voulant lui faire une po*
sition, il a ^ait décidé le sultan è le nommer commandant des Yo«
lontaires de la foi, corps zenalien dont le dernier chef apparte^
naitàla famille d'Abou-1-Hacen. Dans cet emploi, Abd«er-ftab-
man donna de nombreuses preuves d'une haute capacité. Abd-el-
Aztz, s'ctant rendu maître du pouvoir, fut convaincu qu'Ibn-el-
Khattb ferait tout pour mériter sa bienveillance, et lui fit deman-
der secrèteioent Temprisonnemont d'Abd-er-Rahman et du
vizir Masoud-Ibn-Maçaï. Le ministre espagnol s'y prit avec tant
d'adresse qu'il détermina son sultan h donner lui-même Pordre de
leur arrestation. Ce ne fut qu'après la mort d'Abd-^el-Azii qu'on
leur rendit la liberté.
Ibn-el-Kbatfby ayant enfin reconnu que rinQoence dont il
jouissait auprès du sultan commençait h baisser, quitta la cour
en Tan m (4370-1) et chercha un asile dans le Maghreb, paya
dont le avUan, Abd-eUAztz, lui devait de grandes obligationa*
Ce monarque accueillit le réfugié avec bonté et le reçut cooune
un ami, ou plutôt comme un parent. Il obtint même d'IbnHil-Ah«
mer [Mohammed Y] que la famille de son protégé lui fût envoyée.
8'étant ainsi établi auprès du sultan mérinide, Ibn-eM^hattb
voulut rendre à son ancien maHre haine pour haine, et, dans cette
pensée, il encouragea Abd^el-Aztz h tenter la conquête de Vkn^
dalousie. Il obtint enfin la promesse que cette entreprise aurait
lieu aussitôt que la cour et l'armée quitteraient Tiemcen pourren-
trer en Maghreb. Ibn-el^Ahmer eut connaissance du danger qui
le menaçait , et , pour le conjurer , il envoya au sultan mérinide
un cadeau d'un valeur inouia. On y voyait un ohoiz de plus riches
étoffes et de plus beaux meubles que les fabriques espagnoles
étaient capables de produire; on y remarquait aussi plusieurs mu*
leta de l'espèce vigoureuse que l'on élève dans ce pays et une
bande de jeunes esclaves chrétiens des deux sexes. L'ambassa-*
deuriohargé de présenter cette offrande au sultan lui demanda,
en même temps, l'extradition d'ibn-el-Kbattb ; mais sa récla*
mation fut repousséo avec hauteur.
OTNaSTIB MfitlMIDB. ES-^SaId II. 405
Après la mort d'Abd-el-^Âzic, sod vizir, Ibn-Ghazi, qui était
devenu lout puissant et auquel lbn*el-Rhaltb s^était attaché,
opposa ûD refus formel h une seconde demande de la même na^
ture et répondit de la manière la plus insultante aux instances
de l'ambassadeur. Quand cet agent fut de retour, Ibn-el-
Abmer s'attendit h être attaqué par les Hérinides, et, dans cette
prévision» il mit en liberté l'émir Âbd-6r-Bahman-Ibn<^Abi4fel*
loucet), l'embarqua pour le Maghreb et alla lui-même mettre
le siège devant Gibraltar.
Dans .le mois de Dou-l--Câda 774 (avril-mai 4373) , Abd-er^
Rahman débarqua sur la côte du pays des Botoula ot^ accompa-
gné de soti vizir, Masoud«Ibn*Maçâï, il se présenta aut tribcts,
de cette localité, s'en fit reconnaître pour sultan et reçut d'elles
l'engagement de combattre potlr lui jusqu'à la mort. A la récep-^
tion de celte nouvelle, le vizir Ibn-Ghazi ordonnée Son cousin,
Mohammed-ibn-Othman, d'aller prondre le commandement de
Ceuta, forteresse contre laquelle il craignait qu'lbn*eUAhraer ne
dirigeât ses attaques. Lui-même , il quitta Fez à la iête d'une
argaée et porta avec lui des machines de guerre, afin d'assiéger
la ville des Botouïa où Abd-er-Rahman s'était' fortifié. Après
avoir attaqué cette place pendant plusieurs jours, il se retira sur
Tèza d'où il repartit pour Fez. Abd*er-Bahman prit alors pos-*
session de Tèza. Arrivé à Fez, le vzir réunit le conseil d'état
et lui soumit le projet d'une expédition contre Tèza, afin d'eo
chasser l'ennemi. Ce fut alors qu'on vint lui annobcer qu'Abôu-
'l-Abbas , fils du sultan Abou-Salem ^ s'était fait proclan(ler
sultan.
ABOU-'L-ABBÂS-AniKED , FILS d'aBOU-SALKHI, EST PBOCLAnÉ SULTAN
ET S'BUPARE du trône.
Mohammed*- fbn'Othman alla s'établir dans Geuta avec la
mission de mettre cette forteresse à l'abri des surprises et de
repousser les tentativesqu'lbn-el-Abmcr pourrait diriger contre
406 HISTOIRE DBS BBRBBRXS.
elle. Depuis quelque temps, ce monarque tenait Gibraltar étroîie-
ment bloqué, et il l'avait réduit jusqu'à la dernière eitrémité
quand, à la suite d'une correspondance épistolaire dans laquelle
il faisait des reproches à Ibn-Othman, qui s'excusait de son mieux,
il obtint de cet officier l'aveu qu*ibn*6haxi s'était conduit de la
manière la plus inconvenante dans .ses rapports avec la cour de
Grenade. Profilant alors de ses avantages, il lui fit proposer de
reconnattre pour souverain un fils du feu sultan Abou-Salem^
qui se trouvait alors détenue Tanger avec plusieurs autres pria*
ces du sang royal : a Établissez-le comme sultan, lui disait-il,
» dans cette communication, donnez ainsi aux musulmans un
B chef qui ait le pouvoir de les gouverner, un chef qui soit
A capable de parcourir leur pays * à la tête d'une armée afin de
» le protéger. Il ne faut pas les laisser sans guide et sans gar-
» dieu, ni les tenir soumis 'à un enfant dont la souveraineté ne
» saurait être valide devant la loi, à cause de son extrême jeu-
» nesse. Prenez le fils d'Abou-Salem pour votre sultan et réta-
» blissez4e dans les droits qu'il tient de son père. Je vous sou-
» tiendrai dans cette entreprise, h la condition,, qu'une fois l'af-
» faire engagée, la garnison mérinide évacuera Gibraltar et me
B laissera occuper cette forteresse. Vous m'enverrez les autres
1^ princes du sang qu'on retient prisonniers h Tanger ; je les
jt garderai chez moi. Vous m'enverrez aussi Ibn-el-Khattb,
B quand vous serez mattre de sa personne. »
Ahmed-er-Boaïni, l'agent chargé de cette négociation, réussit
à obtenir le consentement de Hohammed-lbn-Othman aux de-
mandes d'Ibn-el-Ahmer. Il était receveur des contributions à
Ceula ; sa mère avait épousé Abou-'I-Hacen la nuit même où ce
monarque revint en Afrique après avoir perdu ses femmes au
siège de Tarifa ; mais elle fut renvoyée k sa famille aussitôt que
> En marge d'un des manuscrits on trouve la leçon a (| Xjb.Ls>»
qui doit être préférée à celle du texte.
s La leçon ua^^^ se trouve dans un de nos manuscrits.
DYNASTIE MÉRiNlDB. — BS-SAÎD H. 407
les autres femmes du sultan lui furent arrivées de Fez. Élevé
dans l^idée que cette alliance Tavalt rendu pupille du sultan, Er-
Roaïni porta la vanité jusqu'au point de croire qu'il faisait par-
tie des princes du sang, nés d'Abou-^-Hacen, et, se voyant alors*
employé comme intermédiaire entre Ibn-Othman et le souverain
deGrenade, il espéra obtenir un haut commandement dans le
Maghreb.
 la suite de cette négociation, Mohammed-'Ibn-Othman monta
achevai, se rendit à Tanger et, étant allé à la prison où Ton rete-
nait les princes du sang, il en fit sortir Âbou-'ï-Âbbas* Ahmed,
fils du sultan Abou-Salem, le proclama sultan et décida le peuple
è jurer fidélité au nouveau souverain, il envoya ensuite aux ha-*:
bitants de Geuta l'ordre d'expédier au même prince un acte
d'hommage et d^obéissaoce. La garnison de Gibraltar à laquelle
il adressa une invitation semblable, donna aussi son adhésion à
la cause d'Abou-'I-Abbas. Alors, le même officier fit prévenir les
habitants de cette forteresse que son souverain avait consenti à
les laisser rentrer sous l'autorité d'Ibn-el-Ahmer. Ce prince, qui
s'était retiré à Malaga aprèsavoir levéle blocus de Gibraltar, vint
alors et prit possession de la place. De celte façon, les Mérinides
perdirent la seule partie do l'Bspagne qui leur était restée. Ibn-el-
Ahmer fit alors un beau présent au sultan Abou-'l-Abbaset lui
envoya de plus une somme d'argent pour subvenir aux frais de
la guerre. H lut fournit aussi un détachement des volontaires de
la foi.
Nous devons faire observer que Mohammed -Ibn-Othman,
avant de quitter Fez et de prendre congé de son cousin, le vizir,
lui avait conseillé de laisser au peuple mérinide le choix d'un
imam ( souverain ) autour duquel toute la nation pouvait se
rallier. Us avaient même délibéré sur ce sujet ; mais ils s'étaient
séparés sans pouvoir en venir à une décision. Après avoir livré
Gibraltar, Ibn-Otbman essaya de justifier sa conduite en pré-
tendant, dans une dépêche, adressée au vizir, qu'il s'était con-;
formé à la décision prise alors et qu'il avait agi d'après les
instructions de ce ministre. Nous devons avouer que le résvUat
de leurs délibérations à cette époque est resté toujours ui^mis-
tère. Quoi qu'il en soit, le vizir tâcha de se disculper aux yeux du
408 HISTOIRE DBS BIBBfiRM.
public en (iëmeotanl la déclBration d'Ibo-Olbinan ; il (enta même
d'obtenir de celui-ci l'abandon de l'entreprise dans laquelle it
s'était engagé et la réintégraiion d'Abou-'l-Âbbas dans la prison
où Ton retenait les autres prince du sang, Ibn-Othman repoussa
cette proposition en déclarant que la nomination du nouveau
souverain avait obtenu l'approbation de fout le monde ot que
citait une affaire déjà arrangée et terminée.
Pendant que le vizir lbn*6hazi cherchait h sortir de son em-
barras, il apprit qu'on venait d'envoyer eu Espagne tous les
princes que l'on détenait à Tanger et qu'ils se trouvaient déjà au
pouvoir dibn-el-Ahm'er. Cédant au chagrin qui l'accablait, it
rompit tout«à-fait avec Ibn-Otbman, rejeta le sultan que celui-ci
avait fait nommer et marcha sur Tèza. Son intention était d'en
finir* d'abordavecTémir Abd-er-Rahman et de tourner ensuite
sesarmes contre les insurgés de Ceuta. Ayant mis le siège* devant
Tèza, il y tenait Abd*er-Babman étroitement bloqué, quand Mo*
bammed«-Ibn-Othman profita de son éloignemont pour tenter t*
conquête du Maghreb. Il avait déjà obtenu d'Ibn^el- Ahmer l'a|v-
pui d'une armée andalousienne, marchant sous le drapeau de ce
sultan et commandée par Youçof-Ibn-Soltïiman-Ibn-Othman'^'
lbn-Abi-1-Olâ, officier supérieur du corps des volontaires de h
foi. Il avait reçu de plus un détachement d'archers andalousiens,
fort d'environ sept cents hommes. Ibn-el-Ahmer envoya en
mémo temps un messager à Pémir Abd-er-Rahman pour le déci-
der à former une alliance avec le sultan Abou ^'1-Abbas et à
prendre part avec lui au siège de Fez. Par suite de cet arrange-^
ment, Abou-'l-Abbas devait monter sur le trône do ses aïeux
pendant qu'Abd-er-Rahnian irait prendra possession de la pro-
vince [do Sidjilmessa] où son grand-père avait régné.
Mohammed-Ibn-Othman partit alors pour Fez avec son Isultan
dans l'espoir de pouvoir y pénétrer avant le retour du vizir.
^ Il faut rejeter la leçon proposée dans la note d;i texte arabe.
^ Dans le teste arabe il faut sans doute Vte J>^
DYNASTIE VEltlNlDB. BS-SAÎD 11. 409
Son armée était déjà parvenue à Casr-Âbd-el-Kertm quand ibn-
Ghazi eut connaissance du projet, leva le siège de Tèza et revint
oamper à Rodia-t-el-Araïs^ auprès de la capitale. Averti ensuite
que le sultan Abou-^l-Abbas était arrivé à Zerhoun, il marcha
contre lui et tâcha de le chasser du haut de la colline où il s'était
posté.Gettetentativen'eut point de succès; les troupes du vizir
reculèrent en désordre ; son arrière-garde fut mise en déroute et
son camp tomba au pouvoir de Tennemi. Obligé do prendre
la fuite, il alla se jeter dans la Yille-Neuve et appela à son se -^
cours les Aulad-Hocein. D'après ses instructions, celte tribu
arabe devait camper à Ez-Zltoun, près de Fez , et attendre jus-
qu'à ce quMl pût sortir de la ville, avec ses troupes, et aller
les joindre; mais l'émir Abd-er-Eahman, ayant quitté Tèza, à la
tête de ses Arabes, les Ahiaf, rejeta les Hocein dans le Désert et
vint se poster en vue de l'armée arabe-zenatienne qui soutenait le
sultan Abou«'l-Abbas. Les partisans des deux princes Grent alors
venir l'ami et conseiller de leur famille, Ouenzemmar-Ibn-Arif,
qui habitait toujours le Casr-Morada, château qu'il s'était faitbâlir
sur le Molouïa. Quand ils l'eurent mis au courant de leurs arran^-
gements secrets, il leur recommanda de rester unis et d'agir aveo
ensemble; puis, dans une autre réunion, tenue à Ouadi-'n-NedJ9,
il leur fit jurer de combiner leurs efforts contre l'ennemi com-
mun et d'assiéger la Yille-Neuve , place dout la chute devait
nécessairement les rendre maîtres de la personne du vizir.
Dans le mois de Dou-'UCâda 775 (avril mai \ 374), ils allèrent
prendre position sur le Kodia-t-el-Araïs, et le vizir sortit pour
leur livrer bataille. Le combat s'engagea vivement et dura pen-
dant quelque temps ; mais enfin l'armée combinée, soutenue par
sa réserve, marcha^en avant, culbuta Tennemi et força le vizir
à rentrer dans la ville: ce fut même à grand'peine qu'il réussit
à s'échapper. Le sultan Abou-'l-Abbas établit alors son camp sur
le Kodia ; l'émir Abd-er-Hahman prit position visa vis de lui, et
ils travaillèrent ensemble h entourer la Ville-Neuve d'une circon-
vallation . Par des alertes souvent renouvelées , par des assauts et
d'autres démonstrations hostiles, ils tinrent les assiégés dans des
alarmes continuelles. Ayant alors reou d'Ibn-el-Ahmer un
«
410 BiSTOIRB DBS BmfeRBS.
renfort de troupes andalousiennes, ils serrèrent la place de très*
près et firent dévaster les fermes qu'lbn-el-Khatib possédait aux
environs de Fez.
Au commencement de l'an 776 (juin 4374), Mohammed-ibn*
Otfaman fit inviter secrètement son cousin, le vizir Âbou-Bekr-ibo-
Ghazi, h rendre la ville et à reconnaître le nouveau sultan; il lui fit
aussi observer qu'il ne pourrait soutenir le siège plus longtemps,
qu'il devait avoir perdu l'espoir d^étre secouru et que l'argent
lui manquait. Ces observations décidèrent le vicir à se rendre.
L'émir Âbd-er-Rahman demanda alors aux Mérinides la re-
mise des provinces marocaines en échange de Sidjilmessa. Ils y
consentirent à contre-cœur, ne pouvant faire autrement; mais ils
conservèrent Fespoir d'annuler cet arrangement par quelque
tour d'adresse.
Le vizir Ibn-Ghazi sortit de la ville, se présenta devant Abou-
i-Abbas, et, l'ayant reconnu pour son souverain, il demanda le
pardon qu'on lui avait promis et la permission de quitter le vizi-
rat. Le sultan agréa celte prière et, le septième jour du mois
de Moharrem (20 juin 1 374), il fit son entrée dans la Ville-
Neuve. Ce même jour, l'émir Abd-er-Bahman partit avec Ali-
Ibn-Omar-Ibn Outghian, cheikh mérinide, et le vizir Ibn-Maçaî,
afin de prendre possession de Maroc. Quelque temps après, ce
même vizir s'enfuit à Fez, selon l'engagement qu'il avait pris avec
le sultan Abou-'l-Abbas et , s'élanl fait transporter en Espagne,
il fixa son séjour dans les états d'Ibn-el-Ahmer.
Devenu matlre du Maghreb, le sultan Abou-'l-Abbas prit pour
vizir Hohammed-lbn-Othmdn-lbn-el-Kas et lui laissa tous les
soins de l'administration. Ce ministre acquit bientôt une grande
influence sur l'esprit de son matlre. La présidence du conseil fut
donnée à Soleiman-lbn-Dawoud qui, après avoir été mis en
liberté par l'ordre d'Ibn-Ghazi et en être devenu le confident et
l'homme d'exécution, avait passé aux assiégeants dans le moment
où ses services auraient été très- utiles à son patron. Il s'attacha
au sultan Abou-'l-Abbas qui, ayant alors pris des mains de Mo-
hammed-lbn-Olhman les rênes du pouvoir, lui accorda la prési-
dence du conseil et du corps des cheikhs mérinides.
DTRASTIB MlfiRiniDB. — ABOU-*L-ABBA8. 44 I
La meilleure inlelligence s^établit alors entre le gouvernemenl
mérinide et celui de l'Andalousie ; Ibn-el-Ahmer, ayant mainte-
nant sous la maiatous les princes du sang mérinide, devint l'ar-
bitre suprême des affaires du Maghreb.
Quand l'émir Abd-er-Rahman fut arrivé à Maroc , les Méri*
nides cherchèrent à éluder les conditions du traité qu'on avait
fait avec lui, relativement à cette ville et aux provinces qui en
dépendent; ils soutenaient que ce prince était lié par le traité
fait antérieurement et qu'il pouvait s'en aller et prendre
possession du royaume de son aïeul. Ils ajoutèrent que leur con«
sentement ë laisser échanger ce royaume contre les états maro-
cains leur avait été arraché par la force des circonstances. Ils
voulurent même entreprendre une campagne contre lui ; mais ils
y renoncèrent et, en l'an 776 (4374-5), ils signèrent avec ce
prince un traité de paix par lequel la ville d'Azemmor devait
marquer le point de séparation entre le royaume de^Fez et celui
de Maroc. Baâsoun-Ibn-Ali-es-Sobeihi reçut alors le comman-
dement de cette place frontière et le conserva jusqu'à sa mort.
MORT D'lBlf-BL-KBATfB.
Vers le commencement de l'an 776 (juin 4 374), le sultan Abou-
'1-Abbas devint maître de la Ville-Neuve, siège de l'empire, et
se laissa gouverner par son vizir, Mohammed-Ibn-Othman, le-
quel avait pour lieutenant Soleiman-Ibn-Dawoud , cheikh des
Beni-Asker, arabes nomades. Proclamé sultan à Tanger, il avait
pris envers Ibn-el-Ahmer l'engagement de .lui livrer Ibn-el-Kha-
tlb^ ministre transfuge qui avait poussé Abd-el-Azîz à tenter la
conquête de l'Andalousie.
Après avoir quitté Tanger, le sultan] Abou-'l-Abbas eut une
rencontre avec les troupes d'Abou-Bekr-Jbn-Ghazi sous les murs
de la Ville-Neuve qu'il avait forcées h s'abriter derrière l^jurs
remparts et à soutenir un siège. Ibn-el-Khatib comprit alors
l'étendue du péril qui le menaçait et s'enferma dans la ville avec
412 HISTOIRE DBS BIIBBUS.
le vîiir. Le sultan ayant obtenu possession de la place , laissa
Ibn-el'Khatfb tranquille pendant quelques jours ; puis, il le fit
arrêter d'après ïe^ conseils de Soleiman-lbU'Dawoud. Ce minis-
tre portait au prisonnier une haine mortelle : quand Ibn-el-
Ahmer s'était réfugié en Afrique, il avait obtenu de ce prince la
promesse formelle qu'aussitôt rétabli sur le trône, il le nomme-
rait commandant des volontaires delà foi; étant arrivé plus
tard à la cour de Grenade pour y remplir une mission dont
Omar-Ibn-Abd-Allah l^avait chargé, il demanda Taccomplisse-
ment de cet engagement. Ibn-el-Rhatîb en détourna le sultan; lui
ayant représenté que cette place ne pouvait être remplie que par
un descendant d'Abd-el-Hack, vu que, de toutes les familles ze-
natiennes, celle de ce princp était la plus illustre. Soleiman rentra
en Afrique le cœur aigri par ce désappointement et brûlant d'in-
dignation contre Ibn-el-Khattb. Nommé ensuite gouverneur de
Gibraltar^ il eut à tenir une correspondance avec ce ministre et,
dans ses lettres, il ne craignit pas de lui exprimer le fond de sa
pensée. Ibn-el-Kbatib, de son côté, y répondit de la façon la
moins obligeante.
Ibn-el-Ahmer ayant appris l'arrestation de son ancien minis-
tre, chargea Abou-Abd-Allah-Ibn-Zemrok, successeur de celui-
ci, d'aller voir le sultan Abou-'l-Abbas et d'exiger la punition
du transfuge. Sur la demande de cet envoyé, le sultan mérinide
fit comparaître Ibn-el-Khatib devant une commission composée
de grands ofliciers de l'empire et de plusieurs conseillers de
i'élat. Accusé d'avoir inséré dans quelques-uns de ses écritscer-
laines propositions mal sonnantes, le prisonnier eut à subir,
d'abord une réprimande, et ensuite la question, peine qui lui
fut appliquée séance-tenanle ; puis, il fut ramené en prison. La
cour délibéra alors sur le point de savoir si lesdites propositions,
déjà condamnées par un jugement, devaient entraîner la peine
capitale. Quelques jurisconsultes de l'assemblée opinèrent pour
la mort, et fournirent ainsi à Soleiman- Ibn*Dawoud l'occasion
de se venger. Par ses ordres secrets , quelques misérables qn 'îl
avait àsonservice, ramassèrent, de nuit, une bande de la populace i
emmenèrent avec eux les envoyés espagnols, forcèrent les
DTNASTIB MÉRIHIDB. — ABOU-^'l-ABBAS. 443
portes delà prison et étranglèrent ibn-el-Rbattb. Le lendemain ,
on l'enterra dans le cimetière de la porte de Mahrouc, et le aur*
lendemain, on découvrit que le corps avait été arraché du tom-
beau afin d'être brûlé sur un bûcher : il était couché sur le bord
de la fosse , les cheveux en avaient été consumés et la peau de
la figure était noircie par l'action du feu. On l'enterra de non- '
veau, et ainsi finirent les épreuves d'Ibn-el-Khattb. Le public en
fut indigné et n'hésita pas à attribuer cette scandaleuse profana-
tion à Soleiman, à ses domestiques et aux employée de son admi-
nistration*
' Pendant les jours de son emprisonnement, le malheureux Ibo-
el-Khatib (que Dieu liii pardonne ses péchés I ) s'attendait à la
mort ; il eut toutefois la force de rassembler ses pensées et de com-
poser plusieurs élégies sur le triste sort qu'on lui réservait. Dans
une de ces pièces il s'exprimait ainsi :
Bien que noz^ soyons près du séjour [terrestre] , nous en
sommes maintenant éloignés I arrivés au heu de rendez-^oUs
[le tombeau], nous gardons le silence [pour toujours].
Nos soupirs se sont arrêtés tout-à'COiXp, ainsi ques^arréie
la récitation de la prière quand on a prononcé le Konout^
Puissants naguères, nous ne sommes plus qu'ossements ; au^
trefois nous damnions des festins , maintenant noua sommes le
festin [des vers].
Nous étions les soleils de la gloire; mais à présent ces so^
leils ont disparu, et tout l'horizon nous déplore^.
Combien de fois la lance n^a-^t-elle pas abattu le porteur
d^épéel combien de fois le malheur n'a-t^il pas terrassé^^
l'homme heureux!
I Le Konout, c'est la formule inna leka canitoun (nous vout sQmmes
dévoués); on U prononce à la fin de la prière qui se fait au levQr de
l'aurore.
* Dans le texte arabe, il faut probablera^nt lire «::;v<>-Ui, leçon
qui se trouve ^ans un des manuscrits et dans l'histoire d'Ibn-ei^
Kbatlb.
9 Dans te mot ^«X^, il faut supprimer le point du d
41 i HI6T0IEB DBS BBRBfcRBS.
Combien de fois a-t-on enseveli dans un haillon l'homme
dont les habits remplissaient plusieurs malles I
Dis à nos ennemis : Ibn^el-Khatib est parti ! il n'est plus !
et qui ne mourra donc pas ?
Dis à ceux qui s'en réjouissent : Réjouissez-vous si vous
êtes immortels* '
soleimah-ibr-dawoud sb bbhd en aiidalousib et t ebstb
jusqu'à sa mort.
SoIeimaD-Ibn-Dawoud avait senti les atteintes de l'adversité
et subi les vicissitudes de la fortune; aussi, avait-il toujours la
pensée de s'enfuir en Espagne a6n de vivre auprès des membres
de sa tribu qui faisaient partie des volontaires de la foi. En Tan
764 (4 359-60), quand le sultan Ibn-el«Ahmer arriva à Fez, après
avoir été détrôné, et qu'il sollicita la protection du sultan Âbou-
Salem, Soleiman profita de cette occasion pour obtenir du mo-
narque déchu la promesse d'être attaché à sa personne et d'être
nommé plus tard au commandement des volontaires. Ibn-el-
Abmer étant remonté sur le trône de l'Andalousie, Soleiman
parut à Grenade, l'an 766, chargé ostensiblement d'une mission
par le vizir Omar-Ibn-Abd-Allah ; mais le véritable but de son
▼oyage était de réclamer l'exécution de la promesse dont nous
venons de parler. Ibn-el^Rhattb s'y opposa et fit comprendre au
sultan que le commandement du corps des volontaires devait
toujours appartenir à un prince du sang, descendu d'Abd-el-
Hack, vu que les membres de cette famille formaient un parti
très*puissanten Andalousie. Soleiman, voyant son espoir frustré,
revint auprès de celui qui l'avait envoyé en Espagne ; mais il
garda toujours une profonde rancune contre Ibn-el-Rha(tb.
Sous le règne d'Abd-el-Aztz, il tomba en disgrâce et resta en
prison jusqu'à la mort de ce souverain. Il dut sa liberté au ré-
gent de l'empire, Abou-Bekr-lbn-Ghazi, qui espérait se mainte-
nir au pouvoir avec l'appui d'un personnage aussi influent. Lors
DTIfASTlB MÉRINIDB. — * ABOU-'L-ÀDBAS. 445
cIq siège de la Yille-Neuvo, Soleiman abandonna son patron,
passa dans le camp du sultan Abou*'l-Âbbas, et, par cette défec-
tion, eotratna la reddition de la place.
Au commencement de Tan 776 (juin-juillet 1374). Abou-'l-
Abhas occupa la Ville Neuve et, s'étant établi sur le trône, il
éleva Soleiman au rang de conseiller d'état et le chargea d'aider
le vizir Mohammed-Ibn-Othman, h soutenir le fardeau de Tad-
ministration. Bien que, dans cette position, Soleiman Ht toujours
prévaloir ses avis dans le conseil, il n'en chercha pas moins Poe-
casion de se rendre en Espagne. Pour effectuer son projet, il se
mil à cultiver la faveur du sultan Ibn-eI*Ahmer, et, sachant com*
bien ce prince détestait Ibn-el-Khatib, il poussa le vizir, Moham-
med-Ibn-Othman, à ordonner la mort de ce ministre.
Après avoir travaillé avec zèle pour les intérêts d'Ibn-el*Ah->
mer, il obtint, en l'an 778 (1376-7), une mission pour la cour
de Grenade. Dans ce voyage, il (il route avec Ouenzemmar*Ibn-
Arîf. Le sultan leur accorda les honneurs dus h leur rang et les
traita avec la plus haute distinction. A peine les deux envoyés
eurent-ils entamé l^aiTaire dont ils étaient chargés, queOuenzem«
mar se fit donner un ordre écrit de la main du sultan, ordre par
lequel tous les capitaines de la flotte devaient faciliter le passage
du porteur en Afrique. Il sortit alors, sons le prétexte d'aller k
la chasse^ et, s'étant rendu h Malaga, il présenta celte pièce au
commandant de la flotte. Conduit à Centa par cet oflScier, il s'en
alla chez lui. Quant à Soleiman, il prit le parti de rester avec Ibn-
el-Ahmer, dont il devint bientôt l'ami et le conseiller. Pendant
le reste de sa vie, il conserva la confiance de ce prince. Sa mort
eut lieu en l'an 781 (1379-80).
LB TlZia IBN-GHAZl BST DÉPOBTÉ ▲ MAÏOBQCB. — RENTBlft BIf
VAGBBBB, IL SB UBT BN RfiVOLTB ET TROUVB LA MORT.
AboU'Bokr-Ibn-Ghazi, se voyant étroitement bloqué dans la
Ville-Neuve, reconnut, après avoir épuisé ses trésors et même
446 HISTOIRE DBS BBRBftRBS.
ceux de son sultan, qu'il ne pouvait échapper h ses eDQemis.
Dans cette position critique, il accueillit les conseils que Moham-
med-Ibn-Olhman lui faisait parvenir du camp des assiégeants et
consentit à rendre la place moyennant la vie sauve. S^étant alors
présenté devant le sultan Âbou-U-Abbas, il obtint une sauve-
garde signée de la main de ce prince. Rentré ensuite à Fea, il alla
s'installer chez lui. Le sultan [Mohammed-es-Said] qu'il avait
placé sur le trône et qu'il venait de livrer au vizir Mohammed*
Ibn-Othman, fut mis en détention, sous bonne garde, et, quel-
que temps après, on l'envoya joindre les autres princes du sang
qn'lbn-el-Ahmer retenait à Grrena de. Le sultan Abou-'l-Abbas,
devenu maître du trône et de la capitale, fit aussitôt acte d'auto-
rité en expédiant ses ordres dans toutes les parties de l'empire.
Bien qu'Ibn-Ghazi évitât de se montrer en public, toutes les
espérances étaient fixées sur lui, et les courtisans eux-mdmes se
pressaient à sa porte. Ces démonstrations éveillèrent les appré-
hensions des ministres , au point qu'ils travaillèrent l'esprit de
leur maître contre l'ex-viiir et, vers la fin de l'an 776 (1374-»5),
ils obtinrent de lui l'ordre de conduire à Gbassaça cet homme
dangereux et de l'embarquer de là pour Haïorque.
Ibn-Ghazi passa quelques mois dans cet île ; puis il parvint
à fléchir le vizir, Mohammed-lbn«Othman, auquel il adressa plu-
sieurs lettres, et se fit donner l'autorisation de rentrer en Ha-
ghreb et de se fixer Ghassaça. Au commencement de l'an 777, il
débarqua à ce port dont on lui avait» donné le commandement et,
cédant aux inspirations de son génie ambitieux^ il ne cacha plus
la jalousie qu'il portait à son cousin le ministre de Pempire.
S'étant adresséau sultan Ibn-el-Abmer, il chercha à se le con-
cilier par de riches présents et, pour détourner les soupçons
d'lbn-Othman,il exprima à ce vizir le désir d'être rappelé h
Fez. Bien que Ouenzemmar-Ibn^Arif eût donné une espèce d'ap-
pui à cette demande, Ibn-Othman y refusa son consentement et
parvint même à indisposer le sultan contre celui qui l'avait faite.
Ayant alors obtenu la révocation des concessions qu'lbn-Gliari
devait à la bonté du prince, il rassembla les contingents arabe^
en l'an 779 (4377-8) et marcha contre lui.
DTNASTIK MÊEINIDB. — ABOU-'L-ABBAS* 447
Ibo-Ghazi, de soo c6té, s'empressa de lever des troupes par-
mi les tribus arabes ; il distribua tout soo argent aux Ahlaf,
fraction de latribu des Maktl, et, les ayant réunis autour de son
<lrapeau, il sortit de Ghassaça. Après leur avoir soufflé Tesprit
de la révolte, il leur fit reconnaître pour souverain un homme
qu'il avait choisi parmi les Arabes nouvellement venus dans
le pays et qui prétendait être le fiU du sultan Abou - 4 -
Hacen.
A cette nouvelle, le sultan Abou-'l-Abbas partit à la télé d'une
armée et prit position a Tèza. L'aspect des troupes mérinidos et
des corps de milice suffit pour faire prendre la fuite aux Arabes,
et Ibn-Ghazi ne put échapper qu'à grand'peine aux gens qni
^'étaient mis à sa poursuite. Ouenzemmar-Ibn-Arîf le décida
enfin à sortir du sentier delà révolte et à s'humilier devant la
puissance de l'empire ; il Je conduisit auprès du sultan qui en-
voya le prisonnier à Fer, sous escorte.
< L'avant-garde de l'armée mérinide poussa jusqu'au Molouïa
et inspira une telle frayeur au souverain de Tlemceu qu'il dé-
pêcha plusieurs de ses parents et de ses courtisans au camp du
sultan. Celte députation employa tantde flatteries, lantd'adresse,
^our calmer le prince mérinide, qu'elle obtint de lui un Iraité de
paix signé de sa main.
Abou-'l-Abbas envoya alors des agents du fisc dans toutes ses
provinces et recueillit ainsi des impôts à souhait. Rentré dans
sa capitale, il donna l'ordre défaire mourir Ibn-Ghazi. Ce mal-
heureux fut poignardé dans la prison où on le retenait et four-
•iiit, par sa triste fin, un nouvel exemple des vicissitudes de ta
fortune.
Après avoir établi son autorité dans toutes les parties de l'em-
pire, le sultan Abou-'l-Abbas conclut un traité de paix et d'ami-
lié avec l'émir Abd-er-Rahman, souverain de Maroc. Depuis
lors, ces princes, ainsi qu'Ibn-el-Ahmer, sullan de l'Andalousie,
ont continué à s'envoyer régulièrement des présents, les uns aux
autres ; la tranquillité n'a pas cessé de régner dans le Maghreb
et , jusqu'au moment où nous avons, fait la révision de cet
ouvrage, c'est-à-dire, vers la fin de Tan 781 (mars-a^ril
T. 4V, 27
448 BISTOIBB DES tBEB&BBS.
a
4360) \ tout le monde y vit dans le bonhear, avec Tassarance
d'uD avenir heureux.
LÀ GUCBBB ËCLATB ENTBB ABD-BB - BABÏAN , SOCYBBAIlf DB
BABOC, ET AIOC-VaBBAS, SLLTAN DR FEZ. ABD-EB-BAOHAN
s'ebpabb d'azemvob dokt il TUB LB GOOTEBREUB, BASSOUN-
IBN-ALI.
Âli-ibn-Omar, cheikh des Beni-Outghian, fraction de la tribu
des Ourladjen, avait embrassé le parti de Pémir Abd-er-Rah-
man h Pépoquc oii ce prince arriva d'Espagne et s^cmpara de
Tèza. Il assista avec lui au siège de la Yitle-Neuvo et Taccompa-
, {^na ensuite à Maroc. Devenu alors le conseiller' intime de son
mattrc et le premier officier de l'empire, il chercha h se venger
d'un anr^ien ennemi, Khalod-Ibn-lbrahtm-el-Melzari «, cheikh
des Haha, tribus masnioudicnncs établies entre Maroc et la pro-
vince de Sous.
Quand le vizir Ibn-Ghazi s'empara du pouvoir, après la mort
du sultan Abd-el-Azîz, Ali-lbn-Omar lui refusa obéissance et se
relira dans le Sous. Pendant qu'il traversait le territoire de Kha-
led-lbn-lbrahîm, il fut attaqué par ce chef et perdit plusieurs
bétcs do somme, ainsi qu'une grande partie de ses bagages. Il
eut (oulefcis le bonheur daltoindre le lieu d'asile qu'il s'était mé-
nagé dans colle province cl, dcs-lors, il nourrit une haine pro-
fonde contre Khalcd. Quand Abd er-Rahman quitta l'Espagne et
pénétra aux environs de Tèza , Alilbn-Omar résolut d'embras-
ser le parti de cet émir : il appela auprès de lui les cheikhs des
* Quelques années plus tard notre auteur ajouta plusieurs chapi-
tres à son ouvrage. Ces additions portent la date de 796 (1393-4)
Klies se trouvent dans notre édition du texte arabe et de la traduc-
tion.
^ L'orthographe de ce nom est incertaine.
k.
DYNASTIE MtRIKIDE.; — ABOU-^L-ABBAS. ^
tribus makilienncs, se rendit avec eux au milieu de ces nomades
et, pendant le temps quMI y resta , il travailla dans les inté-
rêts du prince dont il s'était déclaré le partisan. Ensuite^ il alla
joindre son nouveau maître , qui assistait alors le sultan Abou-
'i^Abbas è faire le siège de la Yille^Neuve. Vers le commence-
ment de Tan 776 (juin 4374), cette place tomba au pouvoir du
sultan, et, par suite des arrangements que les deux princes
avaient faits, Témir Abd-er-Rahman partit pour Maroc. Ali-lba-
Omar Taccompagna et, à leur arrivée dans cette capitale, il de-
manda l'autorisation d'ôter la vie h Khaled -Ibn-Ibrahim, Sur le
refus de Témir, il éprouva un vif mécontentement, mais, sa-
chant dissimuler, il ne laissa rien paraître de ses véritables sen-
timents. Quelques jours plus tard, il se rendit dans la montagne
des Oqrtka pour y arranger quelques affaires administratives et,
profitant de celte pccasion, il donna à son petit-fils, Amer-ibn-
Hobammed, Tordre d'assassiner Khaled. Peu de temps après,
Amer rencontra ce chef aux environs do Maroc et, l'ayant tué, i(
s'enfuit h Ourtka, auprès de son grand-père. L'émir Abd-er-Rah-
man employa les voies de la douceur pour ramener les deux fu-
gitifs et, après avoir.envoyé plusieurs messages très- rassurants,
il monta lui-même à cheval et alla les chercher. Ali-Ibn-Omar,
auquel il rendit son amitié, quitta la montagne avec lui et revint
h Maroc. Pendant quelques jours, il resta auprès du souverain;
puis, cédant à ses appréhensions, il sortit de la ville et se réfugia
dans Azeromor.
Hassoun-Ibn-Ali-es-Sobeihi, commandant de cette forteresse,
céda aux instances d'Ibn-Omar et fit avec lui une irruption dans le
territoire des Sanhadja, région qui compte au nombre des pro-
vinces marocaines. L'émir Abd-er-Rahman donna à son cousin,
Abd-el-Rerim, l'un des grands officiers de l'empire, l'ordre de
repousser les envahisseurs. Ce fonctionnaire appartenait à la fa-
mille royale, son pèt^ Ëïça étant fils de Soleiman, fils de Hanspur,
fils d'Abou -Mélek - Abd - el - Ouahed, fils de Yacoub , ftls
d'Abd-el-Hack. Accompagné de Mansour , affranchi de l'émir
Abd-er-Rahman, il marcha contre Ali-Ibn-Omar et le rejeta dans
Azemmor, après avoir disperse les banJes el saisi les tentes et
4S0 HISTOIRE DBS BERBÊKSS.
les bagages de ce perlurbaieur. Ali-lbn-Omar parlit alors pour
la cour de Fez avec Hassoun-es-Sobeibi.
Pendant ces derniers événements, un traité de paix s'était né-
gocié entre les sultans de Maroc et de Fez; ce qui obligea Âli-Ibn-
Omar h rester dans celte dernière ville et permit à Hassoun de re-
partir pour Azemraor. Un peu plus tard, ce traité fut rompu.
L*émir Abd-er-Rahman avait alors à son service deux frères
appartenante la famille de Mohammed -Ibn-Yacoub-Ibn -Hassan •
es-Sobeihi, lesquels se nommaient, Taîné, Ali et, le cadet, Ahmed.
Ces deux hommes se complaisaient dans les actes de violence et
de brigandage. Aliassaj^sinason cousin, Ali-Ibn-Yacoub-lbn Ali-
Ibn-Hassan. Mouça, frère de oo dernier, obtint du sultan Tauto-
risalion de se venger et tua le meurtrier. ^Ahmed fut outré de
colère en apprenant la mort de son frère cl résolut d'ôter la vie à
Mouça. Instruit du dan;^er qui le menaçait, celui-ti courut se ré-
fugier auprès de Yacoub-lbn Mouça-Ibn-Séïd-en-Nas , grand
chef des Beni-Ouangacon et hoau-frère de l'émir Abd-er-Rahman;
puis, au bout dequelques jours, il s'enfuilh Azemmor. La guerre
ayant éclaté de nouveau, rémir Abd-er-Rahman marcha sur
cette ville, l'emporta d'assautol la livra au pillage, après en avoir
tué le gouverneur, tlassoun-Ifen-Ali, qui avait essayé en vain de
lui résister.
A la nouvelle de cet événement, le sultan Abou-1-Abbas quitta
Fezetconduisit son armée jusqu'à Salé. Delà, il se mit à la pour-
suite d' Abd-er-Rahman qui avait rebroussé chemin pour attein-
dre Maroc, et, s'étant porté dans la plaine d^Aguelmtm, aux en-
virons de cette ville, il y resta environ trois mois et livra plu-
sieurs combats aux troupes de son adversaire. On entra nioiçs en
pourparlers et la paix se rétablit. D'après le traité qui fut dressé
à cette occasion, les deux empires [de Fez et de Maroc] devaient
conserver les mômes limites qu'auparavant.
Le souverain de Fez étant rentré dans «es états, chargea Et-
Hacen-lbn-Yahya-Ibn-Hassoun d'aller prendre le commande-
ment d'Azeninior. Eî-Hacen appartenait à la tribu sanhadjienne
qui occupait les environs de cette forteresse. Depuis l'établisse-
în,'nl de l'ernpire des Mériiiiiles, ?a famille avait toujours été à
CYNASTIB MÉRINIDB. AROU-'L*ABBÀS. 421
leur service. Son père, Yahya, fut employé par le sultan Abou-'l-
Hacen comme percepteur d'impôts àÂzemmor et ailleurs ; il mou-
rut à Tunis, dans Texercice de ses fonctions, è l'époque où Abou-
'1-Hacen occupait cette capitale. Ses enfants, dont il laissa plu-
sieurs, obtinrent tous des emplois semblables au sien. Son fils,
£l-Hacen, celui dont nous venons de parler, embrassa le service,
militaire et remplit plusieurs commandements analogues au mé-
tier qu'il avait adopté. Quand Abou-'l-Abbas fut proclamé à
Tanger, EUHacen, qui était alors gouverneur d'El-Casr-el-Kebîr,
s^empressa de reconnaître l'autorité du nouveau sultan ; il mar-
cha même sous ses ordres et assista h la prise de la capitale.
Chargé ensuite d'autres commandements militaires, il finit par
obtenir celui d'Azemmor.
Parlons à présent delà famille des S)beih. Hassan, l'aïeul de
cette maison, appartenait à la tribu des Sobeih, fraction des
Soaeid. Quand Abd-Allah-Ibn<-Kendouz, chef des Beni-Gommi,
tribu abd-el-ouadite, quitta Tunis et se rendit h Tendjedâ * «
auprès de Yacoub-Ibn-Abd-el-Hack, il avait pour gardien de ses
chameaux le Hassan dont nous venons de mentionner le nom.
Ayant obtenu du gouvernement riiérinide la concession d'un ter-
ritoire dans une des provinces marocaines, à la charge de soi-
gner les chameaux que le sultan faisait entretenir par les peupla-
des pasteurs du Maghreb, il rassembla en un seul troupeau tous
ces animaux qui, jusqu'alors, se trouvaient éparpillés dans diver-
ses tribus, et les contia a la garde de ses propres chameliers.
Hassan, qui était à la léie do ce corps de serviteurs, eut dès lors
l'occasion de causer avec le sultan au sujet de ces bêles de somme
etde le tenir au courant de leur état. Cela lui procura l'avantage
d'être connu du souverain et d'arriver à la fortune. Il, devint
trésor iche et mourut dans une extrême vieillesse. Ses enfants
furent élevés à la cour, au milieu des grandeurs, et passèrent
ensuite par diverses charges, tout en conservant la garde de^
•Localité dos environs do la ville de Maroc. — Voy. sur Ic:
Beni-Gommi, t. m, p. 49'2.
493 HISTOIRE DES BERBEEES>
troupeaux da sultan. Jusqu'à nos jours, les membi^s de cette fch-
mille se sont partagés le mdme emploi , comme un héritage,
et ont rempli plusieurs autres fonctions au service du gou^
vemement mérinide. Hassan eut (rois fils ' , Ali , Tacoub
et Talfaa , aïeux des branches de la famille Sobeih. Leurs
descendants exefceftit encore la surintendance des tribus pas-
teurs, h Tinstar de leurs ancêtres , et conservent toujours le
droit de garder les chameaux dont le sultan se sert pour le
transport de ses bagages. Ils sont maintenant très-nombreux et
jouissent d'une grande considération à cause de la haute posHioft
qu'ils occupentdans Tempire.
El GtJBtSB tCLATB POUB LA SBCOHDB FOIS BHTBB LES SOCtERAIllS
DE FEZ BT DE BABOC. -^- SIÈGE DB MABOC BT BftTABLlSSEMBlIT
' DE LA PAIX.
Le sultan Âbou-*I-Abbas repartit pour Fez après avoir conclu
un nouveau traité de paix avec Abd-er-Rahman, mais, comme
cet émir demanda ensuite la cession des provinces sanhadjiennes
et dokkaliennes, il se trouva obligé d'envoyer au-devant de lut
EI-Bacen-lbn-Yahya, gouverneur d*Azemmor et des lieux voi-
sins. Cet officier devait s'opposer aux tentatives que Véunv pour-
rait diriger contre ces deux contrées . mais, étant mal disposé
pour le gouvernement de Fez, il eut à peine rencontré son adver-
saire qu'il prit rengagement de le seconder et de lui livrer les
territoires qu'il aurait dû proléger. Abd-er-Bahman ayant aug-
menté sa puissance de cette manière, résolut d'entamer des hos-
tilités contre le sultan de Fez et, pour avoir un prétexte de faire
la guerre, il exigea que l'Omm-Rebiâ formât désormais la ligne
de séparatiojfi entre les deux empires. Comme cette demande fut
repoussée avec indignation, il quitta M«rocà la tête d'une armée
^ Lisez oJjjJl dans le texte arabe.
DTNASTIB HÉftlMIDB. — ADOU-'L-ABBAS. 423
elS6 fit remettre la villo d'Azemmor par El-Uaceo-lbn-Yahya*
Alors, d'après ses ordres, rafTranchi Mansour alla prendre pos-
session d'Ânfa et imposer une forte contribution sur le gouver-
neur, lecadi et bs principaux habitants de la ville. A celle nou-
velle, le sultan Abou-'l-Âbbas sortit de Fez et conduisit son
armée à Salé. Mansour se hâta d évacuer Anfa et d^opérer sa
jonction avec Abd-er-Rahman, qui ne tarda pas aussi à quitter
Azemmor afin de se replier sur Maroc. Le sultan de Fez continua
sa poursuite et, arrivé au Cantera-t->el-Ouadi [pont^^ela rivière),
endroit situé près de Maroc, à la distance d'une portée de flèoboi
il s'y arrêta pendant cinq mois et tint la ville assiégée.
Le sultan Ibn-el-Ahmer eut connaissance de ces événements
el chargea son conseiller intime, le vizir Abou^'l-Cacem-'lbn-el^
Hakim-er-Rondi, d'aller mettre un terme aux hostilités. Les
deux rivaux donnèrent alors leur adhésion h uu traité de paix
dont un des articles portait que le sultan de Fez emmènerai^
comme otages les princes Hafod et EUHacen, tous deux fils do
Témir Abd-er-Rahman.
Quand Abou-4-Abbas fut rentré h Salé , un grand nombre de
Mérinides et d'autres personnages marquants vinrent le joindre,
après avoir abandonné le service de son adversaire; Parmi ces
transfuges on remarqua Ahmcdlbn-Mohammed-ibn-Yacoub-es-
Sobeihi, lequel, ayant rencontré en roule Dja-el-Khaber, affran-
chi de l'émir Abd-er-Rahman, l'avait contraint à l'accompagner.
On y vit aussi Yacoub-Ibn-Séïd-en-Nas, chef des Oungacen,
Abou-Rekr-Ibn-Rahhou, petit-fils d'£l-Hacen-Ibn-Ali-Ibn-Abi-
Talac, Mohammed-Ibn-Masoud-el-Idrici et Zlan, fils d'AIi^lbn-
Oiuar-el-Outaci. Le sultan, qui était encore à Salé, accueillit tous
ces chefs avec de grands égards et s'en retourna alors à Fez.
ALI -fBN-ZfiKÉRÏA , CHEF DES UESEOURA , SE MET EN RBTQ^TB
CONTRE l'émir ABD - ER-RAOlIAIf ET ASSASSINE L'aFFRANCHI
I9ANSOUR. — [siège de UAROC et mort d' ABD-ER-RAHMAN.]
Le sultan rentra dans sa capitale, après avoir pu reconrattre,
m
KU RISTOIBB DES BERBÈRES.
a«x défections qui veQaient d'avoir lieu, que le royaume de Ma-*
roc devait bientôt succomber, et, l'émir Abd-er-Rahman, se vo-
yant abandonné par ses principaux soutiens, cessa de compter
sur la fidélité * de ses troupes et se retraucha dans la ville. Il en-
toura la citadelle d'une muraille et de plusieurs fossés, trahis-
sant ainsi l'affaiblissement de sa puissance. Âli-Ibn*ZékérYa,
grand cheikh des Beskoura, lequel avait embrassé la cause
de l'émir lorsque ce prince eut' pris possession de Maroc, cher-
cha alors à so raccommoder avec le sultan de Fez, let parvint 2t
faire agréer sa soumission. L'affranchi Mansour, auquel Àbd*er-
Rahman donna l'ordre d^aller voir ce chef et de le ramener
par la douceur, tomba dans une embuscade dressée par celui-
même auprès duquel il so rendait, et perdit la vie. Sa tête fut
envoyée au sultan de Fez , qui se mit aussitôt en campagne et
marcha sur Maroc. L'émir Abd-er-Rahman s'enferma dans la ci-
tadelle, qu'il avait isolée de la ville par des muraille^ et un fossé.
Le sultan, ayant occupé Maroc, posta des troupes autour delà
citadelle, dressa des machines de siège et fit élever un mqr entre
cette forteresse et la ville. Tous les jours, pendatlt l'espace de
sept mois, il dirigea des attaques contre la place. Ahmed-lbn-
Mohammed-es-Sobeihi, ofiicier auquel il avait confié la garde
d*une position qui commandait la citadelle, forma alors le projet
d'assassiner le sultan, mais il fut dénoncé et mis en prison.
Abou-'l-Abbas ayant enfin reçu des renforts tirés de toutes les
provinces, et le secours d'un corps de troupes envoyé par Ibn*
el-Ahmer, pressa le siège avec tant de vigueur, que les partisans
de l'émir en furent altérés, et, voyant leurs vivres s'épuiser, ils
reculèrent devant la perspective d^une mort certaine et aban-
donnèrent la citadelle. Parmi eux se trouva le vizir Nahhou-lbn«
el-Elm, descendant de ce Mohammed-Ibn-Omar qui avait gou-
verné les Hcskoiira et les Masmouda sous les règnes d'Abou-'U
Hacen et d'Abou-Einan. Le sultan, étant convaincuquecechef ne
serait pas venu le trouver sans y être poussé par la crainte d'un
* U faut prol)ablemeDt lire J^yt>^! à la plaee de à^.y^S^
DTNASnB MÉRINIDB. -«- ABOtJ*'L-ABBAS. i25
danger îimniDeDi, le fil arrêter [et emprisonner. Enfin, tout le
monde s'empressa d'abandonner Témir, et I*on descendit du haut
de la muraille pour se rendre auprès da sultan.
Pendant la nuit, Témir exhorta ses fils, Abou-Amer et Selîm ,
de mourir les armes à la main^; et, au point du jour, il» se trou-
vèrent seuls dans la forteresse. Le sultan s'avança alors à cheval,
en grand pompe, et donna aux tronpes de l'avant»garde Tordre
de monter à l'assaut» L'émir et ses fils se précipitèrent au-devant
de l'ennemi qui avait déjà pénétré dans l'Asarak * , placo ouverte
entourée de palais, et ils combattirent bravement jusqu'à ce
qu'ils trouvassent la mort. Ils succombèrent sous les coups d'Ali-
Ibn-Idrts et de ZtaD-Ibn*Omar-el-Outaci, homme qui, pendant
longtemps, avait vécu de leur bonté et qui s'était montré bien fier
de les avoir pour mattres. Son nom est devenu le synonyme do
l'ingratitude, mais Dieu ne lésera qui que ce soit, pas môme
pour le poids d^un atome K La prise de la citadelle eut lieu le
dernier jour du mois de Djomada second 784 (11 sept. 1382). Le
sultan ayant vaincu ses ennemis, chassé ses riviyix et réduit tout
le Maghreb sous son autorité, reprit la route de Fc2.
UN FILS DO SULTAN ABOl)-ALI ENVAHIT LB HAGHBBB A LA TfiTB
DBS ABABBS. ABOD -TACHBPtN, FILS D'aBOU-BAHMOU, EN FAIT
DB HÊIIB. — ABOU-HAMMOU SUIT LEUR BX8HPLE.
Les Aulad-Hocein, arabes makiliens, avaient méconnu l'auto-
rité du sultan quelque temps avant son expédition contre Maroc^
et leur cheikh, YouçoMbn-Ali-lbn-Ghanem, s'était plu à témoi-
gner, par des actes d'hostilité, la haine qu'il portait à Mohammed-
Ibn-Othman , régent de l'empire. Chassé des environs de SidjiU
«
' Dans le dialecte des Berbères masmoudiens, ce mot signifie large^
et vaste, Voy. t. n, p; 339.»
^Coran^ sourate I, verset
i2fr
HISTOIRB DBS BERBÈRES.
messa par les troupes que ce vizir avait envoyé contre lui ^
Touçouf se jeta dans le Désert, après avoir vu dévaster ses pro •
priétés.
Il y était encore quand Témir Âbd-er-^Rahman, se voyant blo--
qaédans^la ville de Maroc, chargea son cousin, Abou-4*AchaYr-
Ibn-Mansour, d'aller le trouver et le décider à envahir le Ha**
ghreb; espérant que cette démonstration forcerait le sultan k
lever le siège. Cet envoyé se rendit auprès de Youçof et le con-
duisit à^Tiemcen, afin d'obtenir la coopération d'Abou**Hammou,
entre lequel et l'émir Abd-er-Rahman un traité avait déjà été
conclu àcet eCet. Le souverain abd-el-ouadite mit à leur dispo-
sition un corps do troupes commandé par son fils, Abou-Tacho-
ftn, et il les suivit bientôt après, avec le reste de l'armée. En
traversant les tribus arabes, Abou-Tachefin et Abou-'l-Achaïr
les emmenèrent avec eux et, s'étant précipités sur les environs
deMiknaça\ ils y répandirentla dévastation.
Au moment de partir pour Maroc, le sultan Abou-'l-Abbas
avait établi dans Fez, en qualité de lieutenant, AU-lbn»Mehdi-
el-Askeri, et misa ses ordres un des corps de la milice. Cet oQi-
cieri ayant été informé de Pirruption des Arabes, sollicita les bons
offices de Ouenzemmar-Ibn-Arîf, cheikh des Soueid, lequel de-
meurait alors dans le voisinage du Molouïa avec sa tribu. Patron
et ami de la dynastie mérinid'e, Ouenzemmar employa toute son
influence auprès des Arabes makiliens et parvint à détacher de
leur coalition les Amarna et les Monebbat, autrement dits les
Ahlaf. Ces tribus allèrent joindre l'armée d'Ali-lbn-Mehdi et l'ai-
dèrent à chasser l'ennemi du territoire de Miknaça et à lui ôter
l'espoir de pénétrer plus avant dans le pays. S'étant alors
arrêtés, ils donnèrent au sultan Abou-Hammou le temps
de se diriger contre Tèza pour y mettre le siège. Il passa sept
jours sous les murs de cette place, et il venait de renverser
^ Nous avons déjà fait remarquer quUl s'agit ici de la Miknaça dn
Tèza, située à 16 ou 17 licucs Est de Fez. La Miknaça de Zerhoun,
nommé Mequinez par les Européens, est à 10 lieues Ouest de Fez.
DTHaSTIB MÉBmiDB. — ABOU-*L<^ÀBBAS . 427
le palais da sultan et la tnosqaée impériale appelée Casr^Tazrout,
quand il apprit, à ne pas en douter, que Maroc avait succombé et
que l'émir Abd-er-Hahman venaitd'étre tué. Aoetle nouvelle, il se
hâta de quitter le pays ; Abou-I-Achaïr et -Abou-Tachefîn le sui^
Tirent avec les Aulad-Hocein, vivement poursuivis par les Ahlaf.
En se retirant, il traversa le territoire des Botouïa* afin de rentrer
h Tlemcen et, en passant, il y détruisit le Gasr-Morada, cbâteaa
appartenant à Ouenzemmar. Lesultan Aboo-'UAbbas revint à Fez
après avoir achevé la conquête de Maroc*
LA tILLB DE TIBaCET9 EST PBI8E ET DËVASTfiB PAB IB SULTAN
MÊRIiNIDB.
Lesultan, ayant appris l'irruption des Arabes et la conduite
d'Abou-Haramott, n'en persista pas moins à presser le siège de
Maroc, mais il conserva un vif ressentiment contre le souverain
abd-eUouadite qui avait rompu ta paix sans aucun motif légi-
time. Rentré à Fez, il prit quelques jours de repos et, s'étant dé-
cidé à marcher sur Tlemcen, Use mit à la télé de l'armée, selon
Tusagè de ses aïeux, et la mena jusqu'à Taoùrirt. Abou-Hammou
éprouva un embarras extrême à la réception de cette nouvelle : il
prit d^abord la résolution de soutenir un siège et, d'après ses or-
dres, les habitants delà ville s'apprêtèrent à faire une vigoureuse
résistance; mais, peu de temps après, il quitta sa capitale pen-
dant la nuit, emmenant avec lui ses fils, ses femmes et ses prin-
cipaux serviteurs, afin de camper sur le bord du Sefcîfi Au len-
demain, les habitants accoururent auprès de lui, suivis de leurs
femmes et de leurs enfants, et l'implorèrent de ne pas les laisser
2t la merci des troupes maghrébines. Sans se laisser émouvoir par
leurs prières, il persista dans son projet de se rendre à £l-Bat'ha.
^ A la place de iS!^, il faut probablement lire ^>^ et traduire
ainsi : il travema le Molouia.
428 BISTOIRB DBS BBRBÈ&BS.
De là il passa dans le pays des Maghraona et, s'étant arrêté chez
les Beoi«-bou-Saîd, tribu qui demeure près du Ghelif, il déposa
sa famille et les plus jeunes de ses enfants dans le château de
Tadjhammoumt. Le sultan Abou»'l-Âbbas prit possession de
Tlemcen et, après y être resté quelques jours, il iit abattre les
murailles de la ville et ruiner les palais du souverain. En don-
nant Tordre de détruire ces monuments, il avait cédé aux ins-
lances de Ouenzemmar, qui voulut se venger de la ruine de Taz-
routet de son château de Morada. Il se mit alors à la poursuite
d'Abou-Hammou, et il venait de faire halte à une journée seu-
lement de Tlemcen quand il apprit que son cousin Mouça, fils
d'Abou-Einan, avait traversé le Détroit et s^était rendu matlre
de Fez, Pendant qi^il se hâtait à rentrer en en Maghreb, Abou-
Hammou revint à Tlemcen.
MOUÇA , FILS D'aBOU-EINàN , QUITTE l'ANOALOUSIB , DÉBARQUE
BN HAGREB ET S'eUPABB DE LA CAPITALE. IL FAIT PRISON*
NIER SON COUSIN ADOU-Y-ABBAS ET L^ENYOIB EN ESPAGNE.
Nous avons déjà fait observer que Mohammed-lbn-cI-Ahmer,
le [même] sultan [qui, après avoir été] déposé, [monta une se-
conde foia sur le trône de Grenade], exerçait une grande in-
fluence sur les conseils d'Abou-'l-Abbas, sultan du Maghreb.
Plusieurs circonstance» avaient contribué à lui procurer cet avan>
tage : ce fut lui qui porta Mohammed-Ibn-Othman à proclamer
la souveraineté d'Abou-1-Abbos, alors prisonnier à Tanger; par
l'envoi de troupes et d^argent, il avait mis ce prince en état de
réduire la Ville-Neuve et de se rendre maître de l'empire, et
enfin, il gardait auprès de lui plusieurs princes mérinides qu'il
pouvait, au besoin, lâcher sur le Maghreb; moyen efficace de tenir
en respect le gouvernementdecepays. Ces princes avaient été dé-
tenus à Tanger avec Abou-'l«Âbbas et ils étaient tous petits-fils
du sultan Abou-'l-Hacen. H y avait les fils d'Abou-Einan, ceux
d'Abou-Salcm, ceux d'El-Fadl,ccux d'Abou-Amer, ceuxd'Abou-
DYNASTIE MÊRINIDB. — ABOXI-'L-ABBAS. 429
Abd-er-Rahman et d'autres encore. Pendant leur captivité, ils s'ë-
iaient promis mutuellement que celui d'entre eux auquel Dieu
accorderait Tempire, mettrait les autres en liberté et les ferait
passer en Espagne. Abou-'l-Abbas, étant parvenu au trône, rem«-
plitcet engagement en les envoyant au sultan Ibn-el-Ahmer. Ce
monarque les logea dans TAlhamra, palais du gouvernement an-
dalousien ; il les combla de dons, leur fournit des chevaux et leur
assigna de fortes pensions. Aussi, y menèrent«ils une vie heu-
reuse, à l'ombre de la protection impériale. Mohammed-Ibn-Oth-
man, grand vizir de l'empire [d'Abou-'l-Abbas], comprit parfai-
tement que cet état de choses l'obligerait h montrer une extrême
déférence aux volontés d'Ibn-el-Ahmer ; il seconda en tous points
les vues de ce monarque et le laissa diriger à son gré le gouver^
nement du Maghreb. Les grands officiers mérinides et les chefs
arabes avaient tous les yeux fixés sur le souverain d'outre-mer,
et le Maghreb semblait être devenu une province de l'empire de
Grenade. L'influence d'Ibn-el-Ahmer était arrivée à un tel point,
qu'au moment de l'expédition contre Tiemcen, les chefs mérini-
des lui envoyèrent des adresses en le priant de veiller sur les
destinées de leur pays.
Lors de cette expédition, Mohammed-Ibn-Othman avait laissé
à Fez, comme lieutenant, le nommé Mohammed-Ibn-Hacen, an-
cien partisan des Almohades [Hafsides]de Bougie, qu'il avait pris
pour seciétaire et comblé de bienfaits.
Après la prise de Tiemcen, lesMérinidos écrivirent à Ibn-el-
Ahmer pour lui annoncer le triomphe de leurs armes, et ils con-
fièrent leur lettre à une démon de perversité qu'on avait accueilli
h la cour. Cet homme se nommait Abd-el-Ouahed; son père, Mo-
hammed, était fils du Mizouar Obbou-Ibn-Cacem. Égaré par l'am-
bition, Abd-el-Ouahed aspiraitaux grandeurs, sans y avoir aucun
droit, et, pour y arriver, il guettait toutes les occasions afin de
compromettre la prospérité de l'empire.
Bien qu'Ibn-el-Ahmer dominât sur le gouvernement mérinide,
il eut de temps en temps, divers motifs de mécontentement :
tantôt, on n'avait pas eu é<^ard à son intercession [en faveur de
CCI tains pcrsonnaeos qui avaient (Micouru la disgrâce du^souve-
430 niSTOIUE DBS BBRBkRIS.
raÎD maghrébin] , tanlôt, on agissait en opposition directe è sa
volonté, parce qu^on ne pouvait pas faire autrement. Il était, par
conséquent, assez mal disposé pour Abou-'l-Abbas, quand Abd«
el-Oualied vint lui annoncer la prise de Tlemcen. Cet intrigant
profita de sa mission pour raconter que les grands de Tempire
étaient mécontents, et qu'ils remplaceraient volontiers leur
sultan par un autre, s^ils trouvaient le moyen de le faire. U
ajouta encore plusieurs renseignements, les uns avex vraisem-
blables, les autres indignes de foi. Faisant ensuite obser-
ver que le Maghreb était dégarni de troupes, il déclara sa-
voir, avec certitude, que' la capitale n^avail point d'autre gar-
dien qu'un homme de bureau, un citadin, nullement capable d'y
organiser une résistance sérieuse. Le monarque espagnol saisit
aussitôt l'occasion qu'il attendait et (it passer en Maghreb l'un
des petitS'fiis [d'Abou-l-Hacen] qu'il retenait à Grenade ; sa-
voir, le prince Mouça, fils du sultan Abou-£inan. Pour vizir, il
lui donna Hasoud-Ibn-Bahhou-Ibn-Maçaï, personnage qui avait
rempli les fonctions de ministre d'état en Maghreb et dont la
famille, les Béni Foudoud, s'était attachée aux Mérinides.
A l'époque où Abou-Bekr-Ibn-Ghazi dirigeait les affaires du
Maghreb, Masoud avait été désigné pour remplir les fonctions de
vizir auprès de l'émir Abd-er-Rahman, qui allait y débarquer.
Il resta au service de ce prince jusqu'à l'occupation delà Ville-
Neuve par Abou - 'UAbbas et Taccompagna ensi)ite à Maroc.
Arrivé dans cetle capitale, il obtint de son maître la permission
de rentrer en Espagne. S'étant alors rendu a Fez, il eut plusieurs
entrevues avec les autorités mérinides et parvint a s'y faire de
nombreux am'n^ ; ensuite, il fit ses visites d'adieu et partit avec
Pespoir que la faveur d'Ibn-el-Ahmcr ne lui manquerait pas. En
jeffeA, ce monarque l'accueillit avec bonté, lui accorda une pen-
sion cl Tadmil au nombre de ses familiers.
Mnsoud-lbn-Maçaï ne cessa d'y mener une vie heureuse jus-
qu'au moment où le sultan l'envoya en Afrique avec le prince
Mouça. La flotte andalousicnnc les transporta, eux et un corps
do troupes, a Coûta, ville forte dont on avait gagné les notables
cl les membres du conseil municipal, La proclamation de Mouça
DTNASTIB MÉRimOB. -— MOUÇA. 43i
n'y éprouva aucune difficulté ; on t'admit dans la ville et on lui
amena comme prisonnier Rahhou-lbn-ez -Zaïm-el*Hekdoudi ,
gonverneur da la place. Ceci se passa au commencement du mois
deSafer786 (fin de mars 4384). Le nouveau sultan y fit aussi-
tôt reconnaître Tautorité d'Ibn-el-Abmer , livra la ville aux
agents de ce prinoe et partit pour Fez. A* la suite d'une
marche très-rapide^ il arriva dans cette capitale et, se voyant
soutenu par la populace, il bloqua la Ville-Neuve, siège du gou-
vernement. Mohammed-Ibn-Hacen, qui y commandait comme
lieutenant du vizir Ibn-Othraan, éprouva une telle frayeur qu'il se
hftta de rendre la place. Le sultan Mouça ne lui en sut cependant
aucun gré , car , è peine s'y fut-il installé, qu'il jeta cetliomme.
en prison. La Ville-Neuve fut prise le 20 de Rebiâ premier (786
44 mai 4384). On accourut alors de tous les côtés pour offrir
ses hommages au nouveau souverain.
Abou*'l-Abbas était encore dans la province de Tlemcen quand
il apprit le débarquement de Mouça à Cenla. Il donna aussitôt
l'ordre à Ali-Ibn-Mansour, drogman de la milice chrétienne, de
prendre un détachement de ce corps et d'aller tenir garnison dans
la Ville-Neuve. Quand cette troupe fut parvenue h Tèza, elle n'alla
pas plus loin, car on vint lui annoncer la prise de la forteresse
où elle devait se rendre. Le sultan Abou-'l-Abbas était parti en
toute hâte pour se rendre à Fez, et, arrivé à Taourîrt, il fut
averti que sa capitale se trouvait au pouvoir de Mouça. Il poussa
toutefois en avant, jusqu'au Molouïa et, après avoir balancé
quelque temps entre les deux partis qui lui restaient à prendre :
soit d'aller à Sidjilmessa avec ses alliés arabes, soit de continuer
sa marche vers le Maghreb, il Hnit par s'en tenir à sa dernière
résolution. Arrivée Tèza, il y passa quatre jours et de là, il se
rendit à £r*Rokn. Pendant sa marche , les grands chefs qui
l'accompagnaient tinrent conseil ensemble et , s'étant accordés
sur la nécessité d'embrasser la cause de son cousin, le sultan
Mouça, qui éCait alors en possession de la capitale, ils s'en allè-
rent par bandes du côté de Fez, le malin môme où leur mattre
devait quitter Er-Rokn. Se voyant ainsi délaissé , Abou-'l-
Abbas ropiTrtitpour Tôzo, nprcs avoir vu brûler son camp, piller
13S HISTOIRB DUS BBEBBftB^.
ses teoies et ses trésors. La nuit suivante, il entra dans Tèia^
forteresse qui avait alors pour gouverneur Taffrânchi Dja-el«
Khaber, client du feu sultan Âbou-'l-Hacen. Quant à Mohammed-*
Ibn-Othman, il se retira auprès de Ouenzemmar-Ibn-Arlf et des
émirs makiliens.
De Tèza le sultan Abou*1-Âbbas écrivit à Houça pour lui rap*
peler l^engagement d^autrefois, et cet émir, qui avait promis à
Ibn-el-Abmer de lui envoyer son rival aussitôt qu'il Tauraît eo
son pouvoir, répondit à la lettre en priant Abou-'l*Abbas de
venir le trouver. Le sultan se mit en route, accompagné de Zé-
kérTa-Ibn-Yahva-lbn-SoIeiman, de Mohammed-lbn-Soleiman-
Ibn-Dawoud-lbn-Arab et de plusieurs autres chefs des Beni-As-
ker, tribu qui habitait cette localité. El-Abbas-Ibn-Omar-el-
OusnaH se mit aussi de la bande. Quand ils furent arrivés au
zaouta de Ghadir-el-Hams, près de Fez, Abou-1-Abbas se ren«
dit prisonnier et fut chargé de fers. On l'envoya en Espagne sous
la garde d'Omar-Ibn-Rabhoo, frère du vizir Masoud-lbn-Hah-
hou-lbn-Maçaï. Il eut toutefois la permission d'emmener son fils
Abou-FareS) mais on retint ses autres ^enfants à Fez. Embarqué
à Ceuta, il fut dirigé sur Grenade pour être livré au sultan Ibn-
ol'Ahmer^ qui se tenait alors dans PAlhamra. Ce monarque fit
débarrasser le prisonnier de ses liens et, l'ayant placé sous la
surveillance de quelques officiers, il lui assigna une forte pen-.
tion: Nous raconterons plus loin comment Abou-^l-Abbas recou-
vra la liberté et ce qui lui arriva.
DISGRACE BT IQORT DV T1ZIR BOHAliaiED-lBN-OTaflJklf.
Mohammcd>Ibn-Othman appartenait à la famille desBeni-'l-
Kas, et à la tribu d'Ourladjen. Quand les Béni -Abd-el-Hack [les
Mérinides] eurent établi leur domination dans le Uaghreb, la mai-
son d'El -Kas leur fournit quoiqucs vizirs , mais elle se vil enfin
DTNASTIB HtiBlNIOB. "-* MOCÇA. 433
centratnie de passer en Espagne , en conséquence de la riTalité
qui s était déclarée entre elle et les deux autres familles viziriea-^
nés , les Hachem et les Foudoud. Dans ce pays encore , la fa*
xnîlle des Beni-'l-Kas eut, avec les Beni-ldris et les Beni-Abd-
Allab, des contestations qui occasionnèrent la mort de plu-
sienrsde ses membres.
Ghazi-lbn*el-Kas passa sa jeunesse à la cour des Mérinides,
pendant les règnes d'Abou-Said et d'Abou^l-Hacen. L'étude et
le travail ayant développé les beaux talents dont la nature l'avait
^oué, il fut nommé par Aboa^'l-Hacen successeur du vizir
Yahya-lbn-Talha-Ibn-Mohalli , qui venait de mourir. Pendant
plusieurs années Gbazi exerça les hautes fonctions dont on l'avait
revêtu et, en Tan 744 [1340-4), iUssista, avec son mattre, à la
•catastrophe de Tarifa et y perdit la vie en combattant les infi-
dèles.
Abou*Bekr-Ibn-Ghaziy fils du précédent, fut élevé par les
soins et sous les yeux du gouvernement mériaide. La concubine
dont il naquit, entra, après la mort de son père, au service de
son cousin, le vizir Mohammed-lbn-Othman[-lbn-el-Kas], per-
sonnage doni nous aurons bientôt à parler. La jeunesse d'Ibn*
Ghazi se passa dans^ Ih maison d*lbn-Othman, dont il était, du
reste, le supérieur par le rang qu'avaient tenu son père et son
aïeul. Parvenu à l'âge de la raison, il déploya tant de belles qua-<
lités qu'il s'attira les regards de plusieurs princes et obtint des
«emplois qui l'habituèrent à l'exercice du pouvoir ; ensuite il de-
vint vizir d'Abd-el-Aziz, ainsi que nous l'avons dit ailleurs. Dans
cette haute position, il se fit seconder {)ar son cousin, Ibn-Oth-
man, et montra comme administrateur une habileté de premier
ordre. Après la mort d'Abd-el-Azîz, il plaça sur le trône le prince
E3-Saîd, fils du monarque décédé. Cet enfant était encore si
jeune qu'il n'avait pas perdu ses premières dents. Nous avons
raconté ce qui s'ensuivit : la ruine de sa puissance, le siège qu'il
eut à soutenir dans la Ville-Neuvo et le triomphe d'Abou-'l-
Abbas. Ce sultan choisit Mohammed-Ibn-Othman pour vizir, Im
laissa tous les soins de l'administration et s'abandonna aux plai-
sirs.
T. IV. 28
I
434 HtSTOIRB DBS BBBBÈRBS.
Mohammed-Ibn-OthiDan gouverna i'ëiat, tant bien que mal^
jusqu'à Tépoque où le prince Mouça s'empara de là capitale.
Abandonné alors par lesMérinides, ainsi que son sultan, il revint
à Tèza avec ce monarque, qu'il quitta ensuite afin d'aller cher-
cher la protection de Oueazemmar-lbn-Artf. Ce chef, qui se te-
nait alors dans le voisinage de Tèza, Taccueillit avec dureté et
lui tourna le dos. Se rappelant alors Tamitié qu'Ahmed-lbn-
Obbou, chef des Arabes-Monebbat, lui avait souvent témoignée^
Ibn-Othman courut le trouver. Ibn-Obbou qui se trouvait avec
ses nomades dans le pays situé au sud de Tèza, trompa le réfugié
en lui offrant sa protection et en faisant prévenir le nouveau sul-
tan de son arrivée dans la tribu. Un détachement de troupes,
accompagné du Mizouar , Abd-el-Ouahed-Ibn-Obbou-lbn-Mo*
hammed-Ibn-Gacem, de Zerouc-lbn-Toucrttet et de Taffranchi
£l*Hacen-Ibn-Aouafou, fut envoyé à la recherche de l'ex-vizir
et, Tayant reçu des Monebbat, qui s'étaient empressas de le
livrer, il le ramena h la capitale. Aussitôt que ce malheureux y
fut arrivé, on le promena avec ignominie à travers les rues de
Fez ; ensuite, on le retint en prison pendant quelques jours,
puis, on le mil à la torture afin de lui arracher ses tréscrs. Après
avoir subi la confiscation de tous ses biens, Mohammed-Ibn-
Othmoo fut égorgé dans le lieu où ses ennemis Pavaient
enfermé.
EXPÉDITION D'iBN-aïAÇAÏ CONTRE BL*nACBlf-lDN- Sn-If ACER QUI S^ÊTAIT
MIS EN RÊTOLTB DANS LE PATS DBS GBOVABA.
Le sultan Mouçj, étant parvenu au trône du Uaghreb, eut à
subir la domination de son vizir, Afasoud-Ibn-Maçaï. Ce fut alurs
qu'eurent lieu la déportation du sultan Abou-'UAbbd3 en Espa-
gne, lexéculion du vizir Mohanimed-lbn-Olhman, et la disper-
sion des parents cl des amis de ce minisire, qui furent obligés
de se cacher dans les profondeurs [pour ainsi dire] de la terre.
El-Abbas-Ibn-Micdad, neveu d'IbnOlhman, sVnfuit à Tunis où
mriVASTIB BRINIDE. HODÇÀ. 435
il trouva EUHacen, fils d'En-Nacer et potit-fils du suitau Abou-
Ati, qui ëtaii arri véde l'Audalousie avec l*espoir de s'emparer du
royaume [de Sidjilmessa, qui avait appartenu à sooaieul]^
D'après Pavis d^bo-Hicdad, ce prince prit la résolution do
passer en Maghreb et d'entreprendre la conquête de ce pays.
Ayant quitté Tunis avec son conseiller, il affronta les fatigues et
les dangers d'un voyage à travers le Désert et atteignit en&n
la montagne des Ghomara. Accueilli avec empressement par les
habitants d'Es-Safiha, il les rallia à sa cause, s'en fit proclamer
sultan du Maghreb et donna le titre de vizir à Ibn-Mfcdad.
Cette nouvelle étant parvenue à Fez , obligea Masoud-Ibn*
Maçaï d^envoyer contrôles insurgés son frère, Mehdi-Ibn-MaçaX*
Pendant plusieurs jours, cet officier bloqua la montagne d'Es-
Saflha sans pouvoir la soumettre. Alors, le vizir lui-même quitta
la capitale à la tête d'une armée afin de hâter la réduction de cette
localité ; mais, avant d'y arriver, il apprit la mort, du sultan
qu'il avait laissé à Fez et se vit obligé de rebrousser chemin.
DU SULTAN HODÇA BT AVÈNEMENT A'sL -MONTA CEA, FILS
DU SULTAN ABOU-'L-ABBAS.
Devenu sultan du Maghreb, Houça supporta avec impatience
la domination d'Ibn-Maçaï et fit même entendre à quelques-uns )de
ses intimes qu'ils lui rendraient un grand service en le débarras-
santd'un vizir qui le tenait ainsi en tutelle. C'était ordinairemeot
avec son secrétaire et confident, Mohammed-lbn* Mohammed-
Ibn-Abi-Amr,fil3 du secrétaire de son père, qu'il s'entretenait
à ce sujet. Il avait aussi plusieurs compagnons de table qu'il met-
tait au courant de presque toutes ses affaires; parmi eux se trou«
vait El-Abbas-lbn-Omar-lbn-Othman-eUOusnafi, dont la mère
avait épouse le vizir et qui, lui-même, avait été élevé par ce mi-
nistre. El-Âbbas rapporta à son beau-père tout ce qui se disait de
lui dans la société intime du sultan et finit par lui inspirer une
frayeur extrême,
436 HISTOIRE DES BBKBÈRBS.
Le vizir ne chercha plus alors qu'un prétexte de s'éloigner do
Fez et il profita de la révolte d'El-Hacen-lbn-en-Nacer dans le
pays des Ghomara pour se mettre encaoapagne et quitter la ca-
pitale. Au moment de partir il y laissa, en qualité de lieutenant,
son frère, YaYch-lbn-Rahhou-Ibn-MaçaY. Parvenu h * El-Casr-el-
Kebir, il apprit la mort de Mouça, événement qui eut lieu dans le
jnois de Djomada second (786 juillet-août 4384). Ce monarque
fut emporté par une maladie de vingt-quatre heures; aussi, le pu-
blic ne manqua-t'il pas d'attribuer sa mort à un empoisonnement.
Yaïch, que Ton accusait de ce forfait, s'empressa de placer sur le
tr6ne le prince El-Montecer, fils du sultan Abou-*l-Abbas et ne-
veu du sultan décédé. Le vizir Ibn-Maçaï quitta précipitamment
El-Casret, rentrée Fez, il ordonna la mort d'Es-Sobéîa-Mo-
hammed-lbn-Mouça-Ibn-ibrahim, membre du corps des vizirs,
qu^il avait fait mettre en prison, sous le règne de Mouça. Nous
avons déjà parlé d'Es-Sobéïà et de sa famille. Pendant quelque
temps encore, lbn*Maçaï continua à gouverner Tempire.
LB PRINCE EL-OUATHFX-MOnAVflED, FILS D'aBOU-'L-FàDL ET PETrr-PILS
\ ' ^ dUbOU-VHaCEN, ARBIVB d'BSPAGKE et SB FAIT PROCLAMER
StLTAN A FEZ.
Le vizir Ibn-Maçaï, aussitôt qu'il s'était aperçu des mavaises
intentions du sultan Mouça à son égard, avait envoyé en Espa-
gne son fils Yahya et le Mizouar-Abd-el-Ouahed afin d'engager
Ibn-el-Ahmerà renvoyer en Maghreb le prince Abou-'l-Abba)&,
qu'il s'était proposé de rétablir sur le trône. Le monarque es-
pagnol consentit à leur deooande, tira Tes-sultan du lieu où on
le retenait prisonnier et le conduisit a Gibraltar afin de le faire
passer en Afrique. La mort du sultan Mouça, événement qui ar-
' Dans le toxt ^ arabe, il faut insérer le mot Ha avant cl-casr.
DYNASTIE HfiRINIDB. EL-HONTBGER. 437
riva sur ces entrefaites^ amena le vizir à changer d'avis et k faire
prier Ibn-el-Ahmer, par une voie secrète, de ramener Abou-'l-
Abbas à Grenade et de lui envoyer El-Ooathec-Hohammed, fils
d'Aboa<*1-Fadl et petit-fils dii sultan Abou-'l«-Hacen. De tous Us
princes mérinides quibneUAhmer gardait auprès de lui, celui-
là lui paraissait le plus facile b*cooduire et à tenir en tutelle.
En conséquence de cette prière, Abou*'l*Abbas fut ramené à
l'Alkamra et le prince EUOuathec fut envoyé à Gibraltar.
Trois grands officiers de l-empire abandonnèrent, vers cette
époque, le parti du vizir Masoud-Ibn-Maçaï, et se rendirent à
Geuta, afin de passer en Espagne : ils se nommaient Yaïch-Ibn-
Ali-lbn-Fares-el-Yabani , Siyour-lbn-Tahyaten-Ibn-Omar-el -
Oungaçni et Mohammed-es-Sobeïhi. S'étant présentés à la cour
de Grenade en se donnant pour émissaires du vizir , ils se firent
remettre le prince El-Ouathec et remmenèrent en Maghreb avec
eux. Arrivés à Zerhoun, montagne qui domine Mequinez, ils
montèrent auprès des tribus qui habitaient celle localité, et s^y
étant fortifiés, ils levèrent l'étendard de la révolte. Ayant ras-
semblé autour d^eux une foule d'individos, tous aussi mal dis-
posés pour Ibn-Vaçaï qu'eux-mêmes, ils prirent l'engagement
de combiner leurs efforts et d'agir avec ensemble contre leur en-
nemi. Parmi les nouveaux venus se trouvèrent Talha-Ibn-ez-
Zobeir-el-Ourtadjeni , * Mohammed-et-Toimeci , membre de la
famille d'Abou-t-Talac, et Fareh-Ibn-'Mehdi, affranchi d'origine
chrétienne qui avait passé du service des BenirZtan, souverains
de Tiemcen, dans celui du sultan [Monça].
Es-Sobeïhi eut à peine mené El-^Ouathec en Maghreb qu'i
traita ses compagnons avec beaucoup de hauteur et prit envers
eux le ton d'un mahre, parce qu'il était militaire et qu'il appar-
tenait à l'un des corps de milice que l'empire avait à son service.
Les fonctionnaires civils qui' l'accompagnèrent en furent si indi-
gnés, qu'ils allèrent tous déclarer à El-Oualhec leur ferme résolu-
tion de ne plus avoir le moindre rapport avec un homme aussi
Ici le texte arabe ajoute le nom de Styour-lbn-Tayaten,
438 mSTOlAB MS BSEBftBBS»
insolent. Encouragés par le prince, qui leur laissa voir la part
qu'il prenait h leurs sentiments^ ils se jetèrent sur Es-Sobelht^
qui se trouvait alors à la porte de la tente impériale, et lui 6fà-
rentla vie. Taïch^I-Yabani, l'un des grands chefs mérinîdes,
fui le principal acteur de cette affaire. Le sort d*Es-Sobeîbi peut
servir de leçon à bien du monde ; il succomba sans être pleurjé ni
sur la terre ni dans le ciel.
Il nous faut, maintenant dire quelques mots de Zerrouc-Ibn-
Toucrttet et de Moharnooed-ibn-Touçof-Ibn-Âllal. Zerrouc ,
affranchi de la famille Ali*Ibn-Ztan, cheikhs des Onngacen, était
ua des grands oiEciers de Pempire mérinide et avait exercé ua
haut commandement dans la milice. Ayant ab^^ndonné le service
du sultan Houça, il se rendit , avec Mohammed- Ibn-Youçoi,
au milieu des Aulad-Hoccin, arabes makiliens qui étaient en
pleine révolte , et trouva un bon accueil auprès de leur
chef , Youçof* - Ibn- Ali- Ibn-Ghanem ^ avec lequel il s'était
déjà lié par les relations de bon voisinage. Youçof «-Ibn-
Allal, père de Mohammed, était un des protégés d'Aboii-l-
Hacen ; ce monarque ayant eu soin de son éducation. Zerrouc et
Mohammed avaient une telle aversion pour le vizir lbn-Maça¥,
qu*ils rentrèrent en Maghreb pour se joindre au. parti d'EU
Ouathec, aussitôt que ce prince fut débarqué. Celle démarche
leur valut une réception très-honorable et leur nomination aux
charges qu'ils avaient déjà remplies.
Le vizir vint alors se poster vis-à-vis des insurgés qui occu-
paient la montagne deHaghtIa et, pendant quelques jours, il leur
livra une série de comlxats ,, tout en employant des moyens se-
crets pour gagner leurs chefs. Une armée qu'il envoya du c6t<^
de Mequinez, mit le siège devant cette ville et contraignit le gou*
verneur , Abd-el-Hack-lbn-el-Hacen-Ibn-Youçof-el-Ourtadjem,
à se rendre. Alors une correspondance s'établit entre El^Ouathee
^ Dans letcxte arabe il faut lire y^*»iy. à la place de i^^y^
DTMASTIB MBSIHIDE. — BL-OUàTBBC. 439
et ses partisans d'une part, et le vizir de Tautre. 11 s'agissait de
faire reconnaître l'autorité d'EI-Ouathec et de renvoyer en Espa-
gne ce fantôme de sultan, El-]^ontecer, qui pourrait alors rester
auprès de son père, Abou-'l-Abbas. Cetle négociation ayant eu un
résultat parfaitement satisfaisant, El-Ouathec et ses partisans
allèrent joindre le vizir et campèrent auprès de lui. Yaïct>Ibn-
Âli [à qui cet arrangement ne convenait pas] les quitta tous et
s'en alla.
Après avoir conduit £l-Ouathec au siège du gouvernement»
Ibn-Maçaï lui prêta le serment de fidélité, aussitôt qu'il eut
obtenu pour lui-même et pour ses amis, tous les avantages qu'ils
pouvaient souhaiter .^L'inauguration du nouveau sultan eut lieu
dans le mois de Choual788 (oct.-nov. 4386). El-Montecer fut
renvoyé en Espagne où il trouva son père Abou-'l-Abbas. Alors
le vizir fit arrêter plusieurs des chefs qui avaient soutenu El-
Ouathec; il ôta la vie au Mizouar- Abd-el-Ouahed ; il emprisonna
Fareh-lbn-Mehdi et fit mettre à la torture Dja-el-Khaber et d'au-
tres encore. Ensuite il ordonna l'arrestation de tous les fa*-
miliers du sultan Houça qui avaient tramé sa perte, et en fit mou-
rir quelques-uns. Il emprisonna aussi .une partie de là milice
andalousienne qu'Ibn-el-Ahmer avait envoyée en Maghreb pour
soutenir EUOuathec ; les officiers d'origine chrétienne qui com-
mandaient ce corps furent mis aussi en arrestation. Mohammed-
Ibn-Abi-Âmr, secrétaire du sultan Mouça^ fut arrêté à son retour
d'une mission auprès d'Ibn-el-Ahmer, et ne recouvra la liberté
qu'en sacrifiant toutes ses richesses.
A la suite de ces actes de rigueur , Masoud-Ibn-HaçaTenvoya
Idrîs-Ibn-Mouça-el-Yûbani auprès d'E)-Hacen-lbn-en-Nacer, le
même qui avait soulevé les Ghomara du mont Sattha et qui était
resté au milieu d'eux. Cet agent usa de tant d'adresse qu'il par-
vint h circonvenir le prince trop crédule et à l'emmener à Fez,
en lui faisant accroire qu^il allait le pla.cor sur le trône. Le >izir
retint ce jeune homme prisonnier pendant quelques jours et lo
renvoya en Andalousie.
A40 HISTOIKB Dft BItmift.
»5-liAÇ«kï SE BtOUlLLB AYBG LB SULTAN IBIf-BL-*ABIIIR. —
aboc^Vabbas Débarque a cbuta afin db RitONQuftRiR
LE TBÔHB.
Le vizir Ibn-Maçaï étant parvenu à fortifier son autorité par
rioanguratioii d^El-Oualhec et à mettre fin aux (roubles qui
avaient affligé Tempire, dirigea son attention vers les provinces
que les Mérinides avaient perdues et chercha le moyen de let
recouvrer. Il s'occupa d'abord de Cegta, forteresse que le sultan
Mouça, lors de son arrivée d'Espagne, avait livrée au sultan ibn-
el-Ahmer. Dans l'espoir d'obtenir la remise de cette place en pre-
nant les voies de la douceur, il envoya un agent à la oour de
Grenade. Ibn-el-Ahmer ne put maîtriser s» colère quand cet am-
bassadeur le pria de rendre la forteresse au gouvernement du
Maghreb, et il déclara de la manière la plus formelle qu'il n'y
consentirait jamais. Ce fut ainsi que la mésintelligence se mi^
entre les deux cours^
Ibn-Maçaï expédia aassildt un corps de troupes contre Geuta et
le fit accompagner par El-Abbas-Ibn-Omar-Ibo-OthmaB-el-
Ousnafi , par Tahya-Ibn-Allal*Ibn<-Amsmoud et par le rms Mo-
hammed, ù\b de Mobammed-el-Abkem. Le rou appartenait à
'a famille royale de Grenade , étant descendu du sultan [Me-
hammed-]es«Cheikh, ancêtre de cette dynastie et fondateur de
l'empire andalousien. Le vizir écrivit en même temps au roi de
la famille alphonsienne qui gouvernait Séville et la Galice, le
priant da lui envoyer Mohammed-eUAbkem et Mohammed Ibn-
Ismail, cousins d'Ibn-el-Ahmçr, afin de les lancer sur les états-
de ce monarque. ^
L'armée du vizir emporta Ceutade vive fçrce et, è la suite d'ua
long combatdans les rues de la ville, elle força la garnison anda-
lousienne à se réfugier dans la citadelle. Ibn-eUAhmer , qui se
tenait alors dans Malaga, remarqua les feux d'alarme que les
assiégés avaient allumés et, sur le champ, il embarqua un corps
DYNASTIE HfiRINlDB. — BL-(H2ATBBC. 444
de troupes et l'envoya à kur secours. Ayant ensuite fait venir
de l'Albamra le sultan Abou-4-Abba8, il lui fournit un navire
pour le transporter en Afrique. Arrivé à la citadelle de Ceuta,
}e premier du mois de Safer 7«9 (22 février 4387), Abouti-
Abbas monta, le lendemain, sur le rempart et somma les Méri-
nides de reconnaître son autorité. Le désordre se mit aussitôt
dans Tarmée du vizir ; tojit le monde se dispersa et laissa tom-^
ber le camp au pouvoir des assiégés. Les fuyards retinrent par
bandes et se mirent aux ordres de leur ancien sultan, mais les
Arabes et leurs chefs se retirèrent à Tanger. Abou-'l-Abbas prit
alors possession de la ville de Ceuta et, bien qu'Ibn-el-Ahmer
Peut fait inviter k la lui rendre, il n'en persista pas moins à la
garder '.
LE SULTATT AB00-'L«ABBAS MARCHE SUR FEZ. — L'ABUAB DU
VIZIR BST MISB EN DÉROUTE.
Quand Abou-U-Abbas eut établi son autorité dans Ceuta , il
prit la résolution de marcher sur Fez aGn de reconquérir son ro-
yaume. Ibn-el-Ahmer Tencouragea dans cette tentative, en lui
promettant de le bien appuyer. Il était d'autant plus intéressé au
succès de son protégé qu'il avait découvert un complot ourdi
contre lui-même par les intrigues d'Ibn-Maçaï. Ce vizir avait
gagné quelques individus que le sultan andalousien admettait
dans son intimité et les avait engagés à tuer leur souverain et à
placer le rai'5 El-^Abkem sur le trâne de Grenade. L^on dit que
ces traîtres étaient Youçof-Ibn-Masoud, de Valence, et Moham-
med, fils du vizir Abou-'l-Cacem-Ibn-el-Haktm, de Bouda. Le
sultan eut connaissance de la conspiration pendant qu'il se tenait
^ Le texte arabe ajoute ici un passafl;e qui signifie, et il l'avais
chargé des affaires des hôtes qui arrivaient. On ne comprend pas pour*
quoi Tauteur a inséré ces mois ici.
442 BISTOIBB DBS BBBBfcBBft.
à Gibraltar pour veiller aa progrès du sultan Abou-'UAbba».
Les conjurés et leurs parents furent tous mis è mort. Selon ua
autre rapport, ce complot n^était qu'une fable imaginée par Kba-
«ledy affranchi et ministre du sultan qui, se voyant gêné par
l'influence de ces hommes, avait imaginé ce moyen pour s'en àé*
barrasser. Quoi qu'il en fut, le sultan laissa éclater une viveindi-
gnation contre Ibn -Ha çaï et pressa ie départ d'Abou-'l-Abbas
en l'exhortant d'aller reprendre son royaume.
Le sultan mérinidc se hâta de suivre ce conseil et, après avoir
établi dans Coûta comme son lieutenant Rahhou-lbn-ez-Zaïm-eU
Mokdoudi, ancien gouverneur de cette place forte, il alla mettre
le siège devant Tanger , ville où Saleh-Ibn-Hammou-eUYabani
commandait au nom d'El-Oualhec et dont la garnison avait pour
chef le raïs El-Abkcm. Après avoir assiégé la place pendant
quelques jours sans pouvoir la réduire , il y laissa un corps de
troupes en observation et marcha sur Aztla. Cette ville reconnut
aussitôt son autorité et lui ouvrit ses portes.
Ibn-Maçaï • se mit alors à la tétede l'armée et marcha sur At tla ,
après avoir installé son frère Yaïch dans la capitale avec les
pouvoirs de lieutenant-général. Quand son avant-garde parut en
vue d'AztIa, le sultan Abou-'l-Abbas s'éloigna précipitamment
afin de se réfugier sur le montSaflba. Il y fu^bientôt bloqué par
les troupes du vizir et par le corps d'archers andalousiens que
ce ministre avait fait venir de Tanger. Pendant l'espace de deux
mois il eut à soutenir un siège très-rigoureux ; mais alors, il
éprouva un changement do fortune, amené par une nouvelle
complication d'événements.
Depuis longtemps, Youço[-lbn*Ali-lbn-Ghanem, cheikh des
Âulad-Hocein, arabes makiliens, avait méconnu l'autorité du
vizir et s'était prononcé en faveur d'Abou-'l-Abbas. Il avait
mémo écrit au sultan Ibn-el-Ahmer pour obtenir le renvoi de son
ancien souverain en Afrique. Ayant maintenant appris qu'Abou-
'l->Abbas marchait sur Fez après avoir occupé Ceuta, il rassembla
» Le texte arabe porte Ibn-Fares
DYNASTIE HERINIDB. — IL-OOATHEC. 443
ses Arabes, pénéira avec eux dans le Maghreb et prit posilioo
entre Fez et Miknaça ^ Delà il lança ses cavaliers dans les plaw
Des voisines, afin d*y répandre la dévastation et de forcer les cul-
tivateurs è se réfugier dans les places fortes.
D'un autre côté, Ouenzemmar-lbn-Arlf, ami sincère delà dy-
nastie roérinide, avait continué à correspondre avec le sultan
Abou-'l-Abbas, auquel il était toujours resté fidèle, et il ne cessa
d'écrire ë Ibn-el-Ahmer en faveur de ce prince* Tout-à-coup, il
yit arriver chez lui, aux environs de Tèza, Abou-Fares, fiU
d'Ahou-'l-Abbas, et Siyour-lbn-Tayaten-lbn-Omar. Ces envo-
yés loi dépeignirent si vivement la dangereuse position da leur
sultan, toujours bloqué dans le Saflhaque, sur le champ, il fit
proclamer la souveraineté de son ancien maitre et se rendît à
Tèza avec Abou-Fares. Soleiman-lbn-Bouhîat-el-Foudoudi, pa-
rent du vizir Ibn-Maçaï et gouverneur de cette ville, fit aussitôt
sa soumission au jeune prince et lui livra la place. Pour lui don-
ner, un témoignage de 3a haute satisfaction , Abou-Fares le prit
pour vizir et partit ensuite pour Sofrouï avec Ouenzemmar, afin
de se joindre aux Arabes makiliens et d'entreprendre avec eux
le siège de Fez.
Yers la même époque, un corps de troupes , sous les ordre»
d'Él-Abbas-lbn-el-Micdad, fils de la sœur du feu vizir, Moham-
med-Ibn-Olhman, se présenta devant Ouergha au nom du sultan
Abou-'lAbbas, et trancha la tète au gouverneur Mohammed-Ibn-
ed-Demâa.
A l'aspect des révoltes qui éclatèrent ainsi de toute part,
Yaïch-lbn-Maçaï expédia uu courrier au camp de Saffha, pour
en avertir son frère, le vizir. Les troupes, ayant suce qui venait
d'arriver , abandonnèrent leurs positions et prirent en toute
hâte la route de Fez. Le sultan se mit à leur poursuite et,
après avoir reçu la soumission de Dja-el«Khaber, gouverneur
de Mequinez et affranchi de l'émir Abd * er - Rahman, il opéra sa
La ville de M(?qiiincz.
444 HtBIOll^B DBS BBRBBRBS.
jonction avec les nomades que Yoaçof-lbn-* Ali- Ibn* Ghaneo^
s'ëtaît empressé de lai amener, el^marcba sur Fez.
' Aboa^ares venait de quitter Tèia pour se rendre è Sofrouï,
où il espérait trouver son père, le sultan ^ quand il rencontra k
fieni-BeblouI un corps d'armée commandé par Ibn-Maçaï. Ce
vizirn'hésita pas d'engager un combat dont le succès lui parais-
sait assuré ; mais, à peine eut-il fait ses dispositions pour l'atta-
que, qu'il se vit abandonner par ses troupes qui passèrent toutes
du câté de son adversaire. Il prit aussitôt la fuite et rentra dans
la Ville-Neuve où il espérait trouver un asile. Le sultan Abou-
'1-Abbas fut bientôt averti de cet événement et quitta Mequinei
a6n de marcher sur la capitale. Parvenu au Ouadi*'n-Nedja, il
opéra sa jonction avec son fils, Abou-Fares, qui était venu à sa
rencontre et, le lendemain, il parut avec son armée sous les
murs de la Yille-Neuve. Le vizir qui s'y était déjà enfermé
avec ses partissms et ses créatures, retenait alors auprès de lui
Taghmoracen*lbn-Mohammed et plusieurs otages qu'il s'était
fait donner par les cbefs mérinides avant de marcher contre
Aztla.
LBS PARTISANS DU SULTAN ABOU-'^L-ABBAS BfiTABLISSBNT SON
AUTORITÉ A MAROC.
Le vizir ibn-Maçaï avait confié le gouvernement de Maroc et
des provinces masmoudiennes à son (rère Omar. Tout ce pays
était parfaitement soumis quand la nouvelle s'y répandit de la
prise de Ceuta par Abou-'l-Abbas. Les partisans que ce monar-
que conservait encore dans ces contrées s'apprêtèrent aussitôt 2k
y rétablir son autorité, et Ali-lbn-Zékérïa, chef des Heskoura,
la fit reconnattre h tous les gens de sa montagne. Le vizir était
encore occupé à bloquer le sultan dans la montagne deSafihaet
avait môme fait demander des renforts au gouverneur de Maroc,
quand l'insurrection éclata. Makhlouf-Ibn - Soleimao, gouver-
neur de la région qui sépare le Sous des provinces marocaines,
DYNASTIE VRIIf IDB . BL^OUATHEC. 44S
s^empressa de lui amener quelques troupes, mais les autres gou-
verneurs so tinrent dans l'inactlou et finirent par abandonner
leurs postes.
AboU'Thabet, petit-fils d'Ali-lbu-Omar, se rendit alors à la
montagne des Beskoura, avec Youçof-lbn-Yacoub-es-Sobeïhi,
afin d'obtenir l'appui d'Ali-Ibn-Zékérïa. Ils allèrent ensuite atta-
quer Omar-lbn-Rahhou-lbn-Maçaï dans Maroc et, à la suite d'un
combat assez court, ils s'emparèrent de la ville. Abou-Tbabet
s^installa dan^ la citadelle, y fit emprisonner Omar et envoya au
sultan une dépécbe renfermant cette bonne nouvelle. Abou-'l-
Abbas , à qui cette communication arriva au moment où il quit-
tait Mequinez pour marcher sur Fez, transmit à Abou-Thabet
Tordre de lui amener les troupes marocaines; ayant jugé que
leur concours lui serait nécessaire pour faire le siège de la Ville-
Neuve. Abou-Thabet établit un de ses cousins dans la citadelle
de Maroc en qualité de lieutenant et partit pour Fez avec Tarmée
qu'il avait rassemblée. Il trouva le sultan sous les roqrs de
la Ville-Neuve et- resta avec lui jusqu'à la chute de cette place
forte.
BL-HONTECSB, FILS DU SULTAN AB017»'L-ABBAS, BST NOMIIÉ
GOCTBBNBUR DB MABOC.
Rentré en Maghreb avec l'espoir d'y rétablir son autorité, le
sultan Abou -'1- Abbas embarqua son fils, Mohammed-el-Monle*
cer, pour Salé et lui adjoignit en qualité de vizir Abd-el-Hack-
Ibn-el-Hacen-Ibn-Youçof. Le jeune prince, étant arrivé à sa des-
tination, eut l'adresse d'attirer chez lui Zerrouc-lbn-Toucrîret
qui, ayant appris que le sultan assiégeait la Ville-Neuve, avait
quitté le Dokkala pour rentrer [en Maghreb]. Zerroucfut chargé
de fera, conduit auprès du sultan et mis h tnort dans la prison
0(1 ce monarque l'avait fait enfermer. Quelque temps après, El-
^Monlecer reçut de son père l'ordre d'aller prendre le gouverne-
ment de Maroc et, s'élant rendu à cette ville, il somma le com-
416 BIST01BB DBS BBRBBH18.
loandant do la ciladelle de lui livrer la place. Cet officier, «qui
agissait comme lieutenant d'Âbou-Thabet, répondit que le prince
pourrait y entrer, mais sans être accompagné par aucun indi-
vidu de sa suite. Ali-Ibn-Abd-el-Âziz, cheikh des Hintata et con-
fident du lieutenant, fit alors avertir, par une voie secrète, le
vizir Abd-el-Back, que l^on avait le projet delui 6ter la vie avant
de remettre la citadelle au prince. Le vizir partit, sur le champ,
avec son maître, et, s*étant jeté dans la montagne des Ueskoara,
il expédia au sultan une dépêche dans laquelle il raconta ce qui
venait de se passer. Abou-'UAbbas en fut vivement contrarié et,
ne voulant pius se fier à Abou-Thabet, il lui enjoignit d'écrire
au gouverneur de Maroc, Tordre de mettre EUMontecer en pos-
session de la citadelle. Ayant ensuite prononcé la destitution du
vizir Abd-eUHack et son rappel à Fez, il fit choix de Saîd-Ibn-
Abdonn pour le remplacer. Satd partit sur le champ, muni de la
lettre d' Abou-Thabet et, Tayant remise, jl se fit livrer la cita-
delle et y établit le fils du sultan. Amer, le lieutenant d'Abou-
Thabet, et tous ses partisans furent arrêtés par les gens d'Ël-
Montecer et mis à la torture jusq^'à ce qu'ils eussent livré toutes
leurs richesses.
PRISE DB LA YILLB-NBUVB ET MORT J)'lBIf-aiÇAÎ
Aussitôt que le sultan eut pris position sous les murs de la
Yille-Neuve , les membres do sa tribu, [les Beni-Meriu] et ses
dépendants accoururent auprès do lui. F^o vizir Masoud-lbn-
Maçaï fut tellement indigné de la défection des Mérinides,que,
sans l'intervention jde Yaghmoracen-Ibn-Mohammed, il aurait
àié la vie à tous les enfants que ces chefs lui avaient remis
comme gages de leur fidélité. Réduit jusqu'à la dernière extré-
mité, après avoir soutenu un slëgo de trois mois, il demanda
une capitulation ai/ sultan qui lui envoya* Ouenzemmar-lbn-
Arlf et Hohammed-Ibn-Youçof^lbu-Allal, chargés de négocier la
reddition delà place. Comrae conditions du traite, Ibn-Maç^ï
DTRASTIB MSINIDE.— IBOC-^L'-ABBAS. 44?
obtint ^assurance qu'aucun mal no serait fait ni à lui, ni à ses
partisans ; quUl conserverait le titre de vizir et qu'il aurait la
permiston d'emmener en Espagne son sultan El^Ouatbec. Les
deux commissaires d'Abou-'l-Abbas promirent, sur la foi du
serment, que ces conditions seraient respectées.
Le cinq Ramadan 789 (21 sept. 4387) le sultan rentra en pos-
session de la Ville-Nieuve, trois ans et quatre mois après son dë-
trônement. A l'instant même, El-Ouatheo fut arrêté et emmené
à la prisoi? de Tanger où il fut mis à mort. Deux jours après
l'occupation do la ville, le sultan proGta du raffermissement de
son autorité pour faire arrêter et mettre à la torture Masoud-Ibn-
Maçaï ainsi que les frères et les partisans do ce vizir. Ces malheu-
reux succombèrent tous dans les supplices. Maâoud fut traité
avec une cruauté inouie : comme il avait donné l'ordre de sac^
cager les habitations des Hérinides qui l'avaient abandonné, il
reçut vingt coups de fouet sur l'emplacement de chaque maison
qu'il avait fait abattre; de sorte que ce traitement dépassa toutes
les borner* Ensuite, le sultan ordonna de lui couper les mains et
les pieds, mais le malheureux vizir rendit le dernier soupir au
moment où le second de ses qualres membres lui fut abattu.
MODAXUBD-IBN-' ALLAI EST IfOMSlfi VIZIB.
Youçof-lbn-Allal, père de l'hommo d'état dont nous allons
^esquisser l'histoire, sortit dy corps de jeunes gens que les sultans
mérinides faisaient éleyer à leur cour. Il passa ses premières
années dans le palais d'Ahou-'l-HaceD; et tant que h fortune
favorisa son protecteur, il monta graduellement aux plus hautes
dignités de Tétat. Gouverneur du Derâ, il amassa do grandes
richesses, et, comme son caractère le portait vers la magnifi-
cence, il mena un train do vio digne d'un souverain. Le sultan
Abou-Binan lui confia l'intendance de sa cuisine, do sa table et
de la maison des hôtes. Maintenu dans cet einploi par Abou-
Salcm, frère d'Abou-Einau, Youçof-lbn-Allal y resta quelque
448 nKTOIRB DB9 BIRBfelUKS.
temps; il passa ensuite au gouvernement de Sidjtlmessa, oà il
éprouva tant de difficultés dans radministratioa des tribus
arabes que le sultan se vit obligé de )e destituer. H mourut à
Fez, laissant plusieurs enfants qui furent tous élevés à Pombre
delà bonté impériale.
Quand Abou-1-Âbbas monta sur le trône, Mohammed, fils de
Youçof-Ibo-Allal, laissa paratlre de si belles dispositions qu'il
obtint du sultan l'intendance de la table royale et de la maison
des hôtes, emploi que son père avait déjà rempli : dans la suite,
îl devint le confident et compagnon du souverain. La déposition
d'Abou-4-Abbas ayant rendu le vizir Ibn-MaçaY tout puissant,
Mohammed-lbn-Allal se trouva dans un graud embarras : depuis
longtemps, il avait eu en Yaïch, frère du vizir, un ennemi qu^il
détestait, et maintenant, il se vit obligé de plier devant leur auto-
rité. Aussi, quand le feu de la'révolte éclata en Maghreb et que les
Arabes makiliens recommencèrent leurs courses dans le terri-
toire de Tempire, il s'empressa do fuir le danger auquel il se
voyait exposé , se rendit au milieu de ces nomades avec Zer<»
rouc-lbn-Toucritet , et y resta sous la protection de Youçof-
Ibn-Ali-lbn-Gbanem, cheikk des Aulad -Hoccin. Quand Ël-
Ouathec arriva d'Espagne et se porta avec ses partisans jusqu*à
la montagne de Zerboun avecTintention de combattre Ibn-Maçaï,
les deux réfugiés accoururent auprès de ce prince et reconnurent
son autorité ; se justifiant ainsi de l'hostilité qu'ils avaient mon-
Crée au gouvernement cl h laquelle ils avaient été poussés par 1^
haine d'Ibn-Maçaï. A peine y furent ils arrivés que ce ministre
se reconcilia avec £l-Ouathec et le conduisit à Fez. Zerronc et
Ibn-AUal ne purent se dispenser de suivre le prince et retom-
bèrent ainsi au pouvoir de leur ennemi. Le vizir oublia toutefois
ses griefs contre eux et les rétablit dans leurs anciens emplois.
Quand Mohammed Ibn -Allai apprit qu'Abou-'l-Abbas avait
débarqué à Ceuta, il en ressentit une vive émotion et, se rap-
pelant la bienveillance qucce prince lui avait toujours témoignée
ainsi que la haine que les frères Maçaï lui avaient montrée, il
prit hardiment ^on parti et se rendit h Ceuta. Le sultan le vit
arriver avec plaisir, le reçut très-hoiiorablcment cl lui confia la
DYNASTIE XfiRtNJDC. ABOU-^-ABBAt. %h9
drrcotîon dos affaires politiques. Quelques jours après Vinvesr
tissement de la Ville-Neuve, Iba-Allal se vit revâlu du vivirM.
Dans celte charge împorlànte, il déploya uee grande habileté.
Après la prise de la Ville-NeQV4), l'ordre se rétablit dausTeiii-
pire et Mohammed-lbn-AJlal continua à remplir ses hautes fonc-
iioas de la mamère la plassatlsfaisaole. Nous aiAroas à repacler
«de ce ministre:
HOBAUaieil, FILS DU SULTAN AHD-EL-nALtif, S'BMPARB BB
siiuilhessa.
Dans notre histoire du suUan Abd-el'^Halim, sarnommé Hallt
•et fils du sultan Abou-Alt ^ nous avons mentionné que lesMérini-
des le proclamèrent souverain et marchèrent avec lui, l'an 763
(1361 j, contre la Ville-Neuve, forteresse dans laquelle Omar-Ibn-
Abd-Allah s^élait enfermé avec son sultan, Abou«Oi9ar-[TacheftD]y
filsd'Abou-'l-Hacen. A la suite d'une sortieopéréepar la garnison,
les Mérinides se dispersèrent de tous côtés et , pendant que le
sultan Abd-el-Halîm courut se réfugier dans Tèza, son frère,
Abd-eUMoumen, et son neveu, Abd-er-Rahroan-Ibn-Abi-Ifel-
loucen, se dirigèrent vers Miknaça (Wèj^utnez).
Comme les Mérinides refusaient de reconnaître Abou-Omar
pour leur sullan, vu que son état d'imbécililé le rendait incapable
de régner, le vizir Omar*lbn-Abd -Allah prit le parti de le, rem-
placer par Mohammed, fils d'Abou-Abd^r-iRahman etpetit^ls
d'Abou-'l-Hacen. Ayant fait venir ce prince de Séville, il le pro-
clama sullan et sortit aussitôt après, à la taie deTarmée, afia
d'empêcher Abd-el-Moumen et Abd-er-Bahman d'occuper Me-
* Voy. p«ige 354 de ce volume.
490 OISTOIRB DES BEIBBSIS.
qninez. Pans la rencontre qui eut lieu^ les troupes de ces princes»
furent mises en déroute ; aussi se virent-ils obligés de rentrer a
Tèza, auprès d'Abd-el~HaUm. De là, ils se transportèrent tous
les trois à Sidjilraessa et y fixèrent leur séjour ; Abd-el*Haltn
conservant toujours le titre et l'autorité de sultan.
Quelque temps après, une querelle éclata entre les Aulad*
Hocein et les Ahiaf, tribus arabes makiliennes, et Abd*el-Mou-
men passa au milieu d'eux dans Tespoir d'effectuer un raccomo-
dement; mais, aussitôt qu'il s'y présenta, les Hocein le proclamè-
rent sultan malgré ses remontrances. Abd-el-Halîm marcha
contre les insurgés h la tête des Ahlaf et leur livra une
bataille qui amena la défaite de ses troupes et la mort de ses
principaux partisans. Dans cette journée, Yabya-lbn-Rahhou-
Ibn-Tacheftn-Ibn-Môti, cheikh des Tirbîghtn et grand officier de
l'empire mérinide, perdit la vie. Abd-el-Moumen fit alors son
entrée dans la ville de Sidjilmessa, prit en main l'autorité souve-
raine et donna à son frère» Abd-el-Haltm , l'autorisation de se
rendre en Orient afin de faire le pèlerinage de la Mecque. Ce
prince partit pour le Caire, en prenant la route que l08 pèlerins
de Tekrour ^ ont l'habitude de suivre à travers le Désert. Arrivé
dans la capitale da l'Egypte, il trouva un honorable accueil au-
près d'ilbogha-el-Khasseki , officier qui gouvernait alors au nom
du sultan El-Achref-Chàban-Ibn-Hocein, petil-fîls d'En-Nacer-
Mohammed et l'arrière petit-fils de Galaoun. Outre les dons et
les rations qu'il obtint pour lui-même et pour les gens de sa
suite, l'émir égyptien lui fournit, à titre de provision de voyage,
une grande quantité de vivres, de vaisselle et de bétes de som-
me, tant chevaux que chameaux. Après avoir accompli le pèle-
rinage, il revint au Caire où il reçut encore un grand approvi-
sionnement pour son voyage enMaghreb, etmourulàTeroudja]*,
' Tekrofir, le pays des Nègres.
• Voy. l'index géographique, en tête du prenf>ier volume»
DYNASTIE HfiRlKIDE. — AHOU-^L-ABBAS. 45)
tm l'an 767 (1365-6). Les persoDDes attachées à son service ra-
menèrent en Maghreb ses femmes et ses enfants. Son fils, Mo-
hammed, dont nous avons maintenant à parler^ était alors un
enfanta la mamelle.
Mohammed , fils du sultan Abd-el-HaUm , passa sa jeunesse
loin de sa famille, h cause de la jalousie qui animait les fils
du suhan Afaou -'l-Hacen contre leurs cousins, les fils
d'Abou-Àli. Il vivait tantôt chez un souverain , tantôt chez un
autre ; mais, le plus souvent, il habitait Ttemcen, sous la pro-
tection d*Abou-Hammou, l'abd-el-ouadite. Ce monarque eut de
lui un soin tout particulier; car il espérait Renvoyer plus tard
en Maghreb [comme prétendant au trône de ce pays,] ce qui
devait empêcher les Mérinides d-aitaquer le royaume de Tlem-
cen.
En l'an 789 (1387), lors de l'insurrection des Arabes maki-
liens contre le vizir Masoud-Ibn-Maçaï, le sultan Abou-Hammou
s'empressa de faire passer son protégé au milieu de ces tribus,
afin de leur donner un prétexte d'envahir le Maghreb et d'effec-
tuer, s'ils le pouvaient, le démembrement de cet empire. Mo-
hammed s'arrêta chez les Ahiaf, peuplade dont le territoire était
irès-rapproché de Sidjilmessa et dont les liaisons avec les ha-
bitants de cette ville étaient des plus suivies. Ali-lbn-lbrahtm-
Ibn-Obbou^Ibn-Maçaï commandait alors h Sidjilmessa au nom de
son parent, le vizir. Celui-ci, se voyant étroitement bloqué dans la
Ville-Neuve par le sultan Abou-'l-Abbas, envoya des émissaires
auprès des Ahiaf et recommanda à son cousin Ali d'engager les
gens de cette tribu à proclamer le prince Mohammed et à l'éta-
blir comme sultan dans Sidjilmessa. Il espérait qu'à la suite
de cet arrangement, Mohammed envahirait le Maghreb et force-
rait le sultan Abou-'l-Abbas à lever le siège de la Yille-Neuvc,
dont la garnison était aux abois. On suivit ce conseil, et Ali-Ibn-
Ibrahîm, qui avait admis le prince Mohammed dans Sidjilmessa,
entreprit de lui servir de vizir.
Après la prise de la Ville-Neuve et la mortd'Ibn-Maçaï, de ses
frères et de ses parents, une mésintelligence éclata entre le vizir
Aii-Ibn-lbrahim et le sultan Mohammed. Il en résulta que celui-
452 BISTOIRC DES BEBBfeBKS.
ci abdDdooDa Sidjilmessa et reoira à Tlemceo. où la protection
d'Abou-Hammou ne devait pas loi manquer. Dès lors, Ali-Ibn-
Ibrahtm fut en proie à des inquiétudes toujours croissables, et il
finit par se rendre au piilieu des Arabes plutôt que de rester dans
une ville qu'il n'osait plus gouverner. Ayant obtenu une es-
corte d'une de ces tribus, il prit la route do TIemoen où il espé-
rait obtenir un asile, auprès d'Abou-Hammou. Après la mort de
ce sultan, il partit pour Tunis, où il se trouva, Tan 706 (1 393-i),
l6rs de la mort du sultan bafside, Abou-'l-Abbas.
iQuand Abou-Hammou perdit la vie, Mohammed, fils d'Abd-
el<*Halfm, se rendit aussi à Tunis ; puis, après la mortd'Abou-'l'-
Abbas [le hafside]| il partit pour l'Orient afin d'y voyager, d'y
faire la guerre et de se tenir éloigné de sa pairie.
■ORT D'iBIf-ABl-AMB BT DB lABACAT-IBN-HASSOUN.
LesuUan Abou-'UAbbas, étant remonté sur le Irône, tourna
son attention vers la conduite passée des officiers de l'empire,
afin d'en reconnaître ceux dont il devait se méGer. Parmi les
l^ns de sa cour il remarqua particulièrement Mobammed-lbn-
Abi-Jimr, un de ses familiers d'autrefois, auquel il avait départi
sa faveur et accordé le premier rang parmi le courtisans. Nous
avons déjà parlé de cet bomme d'état.
• LesultanMouça, étant devenu mailre de l'empire, ressentit
pour Ibn-Abi-Amr les mêmes sentiments de bienveillance
que son père, Abou-Einan, avait montrés envers le père de ce
même individu. Il le choisit pour confident et, voulant l'élever
au-dessuB de tous Mes autres officiers du royaume, tl le nomma
secrétaire, chargé, comme son père avant lui, d'apposer le pa-
raphe impérial aux écrits émanant du souverain. Dans toutes
^ Lisez joUw à la place de^U^
CTNAST12 VtBlIlIDS. ABOU-'L-ABBAS. 45S
ie3 affaires importantes, Mouça avait recoars ë l'avis dece minis-
tre, et il s^en laissait influencer au point de rendre tous les grands
fonctionnaires jaloux de son favori. Quand le vizir Masoud-
Ibn-MaçaY apprit que le sultan Mouça en voulait à sa vie, il dé-
couvrit on même temps qu'Ibn-Abi-Amr était la personne qui le
desservait auprès du prince. Ce même Ibn-Âbi-Âmr, devenu le
favori du sultan Mouça, se rappela les moindres offenses qu'il
avait reçues des intimes de [Tex-sultan] Ahmed [-Âbou-'l-
Abbas] et, pour se venger, il poussa son maitre à leur donner la
mort. Offensé de quelques observations que le cadi, Abou-Ishac-
el-Iznaceni, s'était permis de faire dans une partie de plaisir où
le sultan se trouvait avec ses intimes, il essaja de perdre ce ma-
gistrat dans l'esprit du sultan et réussit à le faire fustiger de la
manière la plus indigne. Envoyé en Anda|QUsie pour y remplir
une mission, il eut souvenj; l'occasion de passer aupfès de la mai^
son oii Abou-'UAbbas était détenu ; quelquefois même il Ip rea-
contraity mais il se gardait biep de)e saluer ou de lui (^moigner
le respect qu'on doit à un prince. Ce fut là un trait qu'Abou'U
Abbhs n'gublia p^s ; aussi, quand il en eut fini ayec ibn-MaçaY.
il ordonna l'arrestation du courtisan ipgra^ et, quelques j,our8
après, il le fit mourir à'coups de fouet. La famille du supplicié, à
laquelle on envoya le corps, s'occupait à le jiransportç^ au cim^-
iière quand 09 vint, par Tordre du sultan, le tirçr de la bière,
le traîner par les pieds, au moyen d'une corde, à travers tous les
quartiers de la ville et le pter enfin sur on tas de décombres.
Quelque temps après, on emprisonna Haracat-lbp-Hassonn f
homme qui, dans la carrière de la trahison, savftit prendre
toutes les allures. Quand Abou-'l-Abbas vint débarquer 9 Ceuta.
les Arabes niakilieos^ qui s'étaient insurgés contre le gouveriiçr
menideFeZ; allèrent trouver Baracat è Tedia ,çt le forcèrent .^
reconnaîtra rautorité d^ ce monaque et à -les ^QÇOJJ^p^^^^r ^-
près de lui. Le sultan avait été instruit du mauvais yçalp.ir de
cet oQicier, mais il dissimula son mécontentemeot jusqu'il œ
' qu'il .eût rafEern;ii sa piûssançe p,ar I9 prise de la Vill^-fi^ç^ye .;
%alors, il ordonna Tarrcstation du traître et le fit ijQO^rif daiiji
les tortures. ^.,
4^54^ IHSXOIRB DBS SCHBtEEff.
BtVOLTB D^ALI-1B?I-ZÉ:kÉRÏA DA?(S L4 MONTAGNE DBS HBSKOUftA.
SA UORT.
Ali-Ibn-Zékérïa, cheikh des Heskoura, auquel Âbou^'l*Abba&
envoya ^invitation de venir k son secours au moment d'entre-
prendre le siège de la Ville-Neuve, ressentit trop vivement les
obligations qu^il devait au prince pour s^y refuser : il rassemblâ-
tes gens de sa tribu, ainsi que les troupes masmoudiennes, et
alla prendre part au siège. Le sultan lui témoigna sa reconnais-
sance en Ini accordant le commandement de toutes les tribus
masmoudiennes, charge que le gouvernement avait Phabilude de
oonGer au grand cheikh des Heskoura. Quelque temps après, un
chef masmoudien, nommé Mohammed -lbn-Youçof-el-Metzan\
vint à la cour et, comme sa sœur avait épousé le vizir Moham-
med-lbn-Ibrah}m-lbn«Allal, il se fit donner par le sultan Tem-
.ploidonl on avait revêtu Ibn-Zékérïa. Celui-ci en fut si indigné
qu'ayant trouvé un prince de la famille royale, il le proclama sul-
tan et leva l'étendard de la révolte. Abou*'l-Abbas envoya une
armée contre lui sous la conduite de Mohammed -Ibo-Youçof et de
Saleh-Ibn-Hammou-eUYabani. Il transmit, eu même temps, à
Omar-lhn-Abd-'cl-Moumen, gouverneur du Derà, l'ordre de se
mettre à la tête des troupes de cette province afin d'attaquer
le rebelle du côté du midi. Ali-Ibn-Zékérïa, se voyant bloqué
dans sa montagne, après avoir essuyé plusieurs défaites, passa
dans la montagne voisine , et demanda la protection d'fbrahtm-
Ihn-Amran-es-Sanagui (/r sanhadjien). Ce chef ,. craignant Tes
conséquences d'une révolte qui l'exposerait h être vaincu, écouta
les représentations deMohammed-Ibn-Touçofet, séduit par Tar^*
gent de ce ministre, il lui livra son hôte. On conduisit le prison-
nier à Fez où il fit son entrée enla présence d'une foule immense.
Après la mort du sultan Abou«-'l-Abbas, les personnes chargées
de gouverner le Maghreb eurent une telle crainte de l'influence
qu'Ali-lbn-Zékérïa exerçait encore qu'elles le firent mourir dans
la prison où on le tenait enfermé.
BTNASTIB HâRllflDE. — AB0U-'L-ABBA9. 455
âBOU-TACBBFÎR SB BÉTOLTB CONTRE SON PËRB , ABOO-HAMIOU,
ET DBVANDB l'APPUI d'aBOU-'L-ABBAS. — 1IAR€HB DE l'ARXtK
HÊRINIOB BT SORT D^ABOU-HAMMOU.
Vers la 6n de Tan 788 (janvier 4387), le prince Âbou-Ta«
cheftn emprisonna son père, Àbou-Hammou, h Oran, et marcha
contre ses frères, El-^Montecer, Âbou-Zian et Omaïr, qui avaient
joui de toute la faveur paternelle à son détriment. Pendant plu-
sieurs jours, il les tint bloqués dans la montagne de Ttterl^ ou
ils s'étaient mis sous la protection des Hosein ; puis, réfléchis-
sant aux dangers dont il serait menacé tant que son père resterait
en vie, il ordonna h son fils, Abou-Zian, de se rendre à Oran et
défaire mourir le prisonnier. Abou-Ztan partit à la tétad^une
bande de familiers qu'Abou-Tachefin tenait auprès de lui et au
nombre desquels se trouvèrent Mouça, (ils du vizir Aibran^lbn-
Monça, et Abd-Allah-Ibn-Djaber^el-Khoraçani. Arrivé k Tlem*
cen, il Ata la vie à plusieurs fils d'Abou-Hammon et, de là, il se
rendit à Oran avec sa troupe afin d^en faire autant à leur père.
Celui-ci, les ayant entendus [à sa porte], monta sur la terrasse
du château où on le retenait, appela les habitants de la ville à son
secours et descendit au milieu d'eux à l'aide de la corde de son
turban, dont il attacha un desbouts autour de son corps^ Touto la
population de la ville vint alors à son aide et. le plaça de nquveau
sur le trône. Ibn-Khazrout, prédicateur de la grande mosquée, fut
le principal meneur de ce mouvement. AboU'Zfan, ayant man-
qué son coup, s'enfuit à Tlemcen et, se voyant poursuivi par son
ateul, il quitta C€|tte ville et courut rejoindre son pèi*e. Abou-
Hammou reprit possession de Tlemcen et, bien qu'il n'y trouvât
' Voy. tome ni. p. -183. t
i^ msrOKB DBS BIEBtftES.
quis des maisons en ruines et des forlificalioiis démantelées, if y
organisa de nouveau une cour et une administration. A la nou-
velle de cet événement , .Âboa«Tacbefk) quitta précipitamment
les environs de Titeri, serendit en toute hâte à Tlemcen et força
son père k se réfugier dans le minaret de la grande mos-
quée. L'ayant décidé à se rendre, il lui permit de partir pour PO-
rient afin d^accomplir le pèlerinage, et le (it embarquer, sous
bonne garde, dans un navire qui allait partir pour Alexandrie
avec quelques négociants chrétiens. Quand ce vaisseau fut par-
venu à la hauteur de Bougie, Aboa-Hammou gagna les chrétiens,
obtînt sa liberté et, s^étant faU accorder par le gouverneur do
Bougie un permis de débarquer, il se rendit a Alger ei prit k son
service les Arabes de cette province Ne pouvant â'abord ré-
duire TlemceBi il entra dans le Désert et revînt du côté de i'Oc-
eident pour attaquer la ville, il mit alors en déroute l'armée de
son fila et, dans le mois de Bedjeb 790 (juillet-aoftt, 1388),
rentra en possession de sa capitale. Abou-Tachefîn se réfugia aa
milieu des Soueid, qui se trouvaient alors dans )eUrs quartiers
d'hiVer. Nous avons tracé ici une simple esquisse de ces événe-^
aientâ, les ayant déjà racontés en détail^ .
Abou-Tâcbefîn, accompagné de Mohammed-Ibn-Arjf, cheikb
des Soueid, se rendit auprès du sultan Abou '1-Abbas dans Tes-
poirde ramener la fortuiie avec l'appui de ce monarque. Le sul-
tan lui fit de belles promesses, sans se presser de les remplir, e^
le vizir Mohammed- Ibn-Allal imita l'exemple de son maître, bierr
qu'il eftt juré au prince abd-el-ouaditede lui tenir parole.
Sur ces entrefaites , Abou-Hammou s'était adressé au sultan'
Ibn-el-Ahmer, dont il connaissait la haute influence auprès du
gouvernement mérinidè, et le pria d'employer son inierventioc^
afin d'empdcber Abou-'l-Abbas d'appuyer Abou-Tacbefin. Le
sultan espagnol laissé de côté toute autre affaire pour no s'oocu-
pét que de celle-ci, à cause defe grande importance qu'il y atla-
l^oy.tomenr, page 484 etsuiv.
DYNASTIE MtRlNlDB. — ABOU-^^L-ABfeAS. 457
chait, ot il invita le sultan mérinide k lui onvoyer le réfugié.
Abou-'l-Abbas répondii que cela ne dépeDdait plus de lui, puis-*
que son fils, Aboa*Fares, venait de prendre Abou-Tacheftn sou»
S9 protection. Le vizir traîna en longueur cette négociation, jus-
qu'à ce qu'il eût mari ses plans et décidé le sultan mérinide a
remplir ses engagements envers Abou-Tacbefîo. Alors il se mit à
la léte d'une armée el partit pour Tèza, avec l'émir Aboo-Fares,
afin d'appuyer les mouvements de leur protégé. Le sultan Abott-
HâmmoU évacua aussitôt Tlemcen , rassembla ses alités , les
Obeid-Allah et alla se retrancher dans la montagne des Ghaïran,^
derrière le Beni-Ournîd, autre montagne qui domine Tlemcen*
Le vizir et Abou-Tacbeffn en furent informés par leurs espions
el partirent de Tèza afin de surprendre Abou-Hammou et ses
Arabes. Conduits par Soleiman-Ibn-Nadji, chef des Ahlaf, ib
prirent le chemin qui traverse le Désert et tombèrent à l'impro-
visle sur lesKharndj qui étaient cdm{)és aEl-Ghaïran avec Abou^
Hammdu. Ces Arabes prirent la fuite après une courte résistance;
Abou-Hammou voulut les suivre, mais son cheval s'abattit et it
fut lui-même atteint parles gens d'Abou-Tachefin et tué à coups
de laiïce. On porta sa tête au vizir età l'émir Abou-Tachefiu, qui
l'envoyèrent au sultan. Omaïr, fils d'Abou-Hammou , fut fait
prisonnier ot, sans l'opposition des Mérinides, il aurait été tué
sur le champ par Abou-Tacheffn ; cependant, ils le livrèrent à
son frère quelques jours plus tard, et celui-ci le fit égorger.
Vers la fin de l'an 791 (nov -déc. 4389), quand Abou-Tache*
ftn entra dans Tlemcen, le vizir resta campé avec ses Mérinides
en dehors de la ville pour y attendre Texéculiondes engagements
que ce princeavait pris, et, quand il eut reçu de lui la sommed^ar-*
gent stipulée dans le traité, il repartit pour le Maghreb. Abou-
Tachefîn s'établit dans Tlemcen en qualité de vassal du sultan
Abou-'l-Abbas et, par son ordre, on fit la prière au nom de ce
souverain dans toutes les mosquées de l'empire abd-cl-ouadite-
Depuis lors, il envoya chaque année à ce monarque une somm^
considérable à litre de tribut , aibsi que cela avait été convenu.
A l'cpoquc ou Tlemcen retomba au pouvoir d'Abou-Hammou^
émir Abou-Zîan, fils de ce prince , obtint de lui le gouvernement
468 HISTOIRB DES BBBBBRBS.
d'Alger. Quand il apprit ia mort de son père, il passa chez les
Hoseio pour leur demander les moyens de se venger. Une dépa-
iation des Beni-Amer,tribuzoghbienne, étant alors venue lui pro-
poser la conquête de Tiemcen , il partit avec elle, obtint l'appui
de leur chef, Bl-Masoud-Ibn-Soghaïr, et marcha contre cette
ville. Au mois de Redjeb 79S (juin-juill. 4390), ils y mirent le
siège, maiSy àl'expiration de quelques jours, les Arabes se lais-
sèrent corrompre par Pargent d'Abou- Tachefin ei décampèrent.
Abou-Tacheftn dirigea alors une attaque contre Abou-Ztan et le
força à prendre la fuite. Ceci se passa dans le mois de Ghàban
(juillet-août) de la même année.
Abou-Ztan se jeta dans le Désert, rallia à sa cause les Arabes
makiliens et, dans le mois de Choual (sept.-oct. 4390), il repa-
rut sous les murs de Tiemcen dont il recommença le siège.
Averti ensuite qu'une armée mérinide s'avançait pour dégager
Abou-Tacheftn, lequel avait envoyé son fils en Maghreb afin
d'obtenir des secours, et, sachant que ces troupes étaient déjà
arrivées h Taourtrl, il quitta ses positions et rentra dans le Dé-
sert. Quelque temps après, il prit la résolution d'aller solliciter
l'appui des Mérinides. Abou-'l-Abbas , souverain du Maghreb,
l'accueillit très-honorablement, mais, tout en lui promettant de
l'aider y il le retint auprès de lui jusqu'à la mort d'Abou-Ta-
chefîn.
MORT d'aBOU-TàCHBfIn. — LB SOUTBRAHI nu MAGHflBB PBBND
POSSESSION DB TLBVCBN^
* L'auteur reproduit textuellement un chapitre qu'il a déjà donné
et donton trouvera la traduction dans le tome m, p. 489, 490.
LES MÊRIKIDKS VOLONTAIRES DE LA FOI. 459
HOKT D^AB0U-'L-ABBA8, SULTAN DU MAGHREB. — ABOU-zIaN,
FILS d'ABOU-HAMHOU , DETIENT HaItRE DE TLEICEN ET DU
■AGHRB3 CENTRALE
HISTOIRE DBS PRINCES DE LA FAUILLE d'aBD-EL-HACK QUI
COVMANDËRENT LES VOLONTAIRES DE LA FOI EN ANDALOUSIE.
CBS CHEFS PARTAGÈRENT LE POUVOIR AVEC LE SOUVERAIN DE
GRENADE ET EURENT A EUX SEULS LA CONDUITE DBS EXPÉDITIONS
CONTRE LES CHRÉTIENS*.
Après la chute de la dynaslie fondée par Abd-el-Houmen el
l'élablisseuQent de la famille El-Ahmer sur le trône de Grenade,
TAndalousie tomba dans la décadence et n'eut presque plus de
troupes pour la défendre. Elle aurait bientôt succombé sans l'in-
tervention delà providence divine, qui inspira aux tribus zena-
* Ici, dans le texte arabe, notre auteur reproduit textuellement
le dernier chapitre de Thistoire de la dynastie abd-eI*ouadite.
Comme nous en avons déjà donné la traduction dans notre troi-
sième volume, pages 490, 491 , nous y renvoyons le lecteur.
' L'auteur raconte dans ce chapitre, et d'une manière très-vague,
une série de faits dont il donne les détails dans les chapitres sui'
vantSr
460 HISTOiafi DBS BEKBÈRE9.
tiennes la passion de la goerro sainte, à ces tribus qui se sont
transmis, l'une à Tautre, le sceptre de la domination et qui ont
reçu en partage les royaumes du Maghreb. Dans cette noble
cause, les Beni-Merin, habitants du Maghreb-el-Acsa, se sont par-
ticulièrement distingués ; les occasions ne leur ont jamais man-
qué, vu la proximité des côtes du Maghreb et de l'Espagne,
aiusi que le grand nombre de ports où l'on peut s'embarquer afin
de traverser le Détroit. Depuis les temps les plus anciens, ce
canal avait servi de voie de communication entre les deux
continents.
Les Mérinides venaient de conquérir le royaume du Maghreb
quand les musulmans espagnols, affaiblis parleurs malheurs et
par les empiétements du roi chrétien, se virent obligés de reçu-
1er vers le bord de la mer. Le vainqueur s'était emparé d'El-
Frontièra [le territoire de Xérès de la Profitera) et même d'une
partie des contrées situées en deçà de cetCe limite, pendant que
les enfants du Comte, seigneurs de Barcelone et de Catalogne,
avaient conquisTEspagne orientale. Le triste sort deCordoue et
de ses sœurs, Séville et Valence, avait été annoncé dans toutes
les parties du monde. A la fin, les musulmans cédèrent à l'indi-
ë
gnation et ne demandèrent qu'un seul bonheur, celui de consa-
crer leurs jours et leurs richesses à la guerre sainte* En Afrique,
le premier à débuter dans cette carrière fut l'émir hafside, Abou*
ZékérYa, souverain le plus puissant de l'époque , seul prince sur
lequel on pouvait compter pour ramener les triomphes de l'isla-
misme. Quand les habitants de- l'Espagne eurent reconnu la sou-
veraineté de ce monarque et envoyé à Tunis une députation de
cheikhs, chargé de lui offrir foi ^t hommage, il employa, pour
les secourir, une grande partie de sa cavalerie et de ses trésors.
Yacoub, fils d'Abd-el-Hack, avait longtemps nourri l'espoir
d'assister à la guerre sainte ; il avait même supplié son frère,
Abou-Yahya, de le laisser passer en Espagne , mais celui-ci lui
fut trop attaché pour le permettre do s'expatrier. D'après ses
ordres, Âbou-Ali-Ibn-Khalas, gouverneur de Ceuta, mit tant
d'obstacles à l'embarquement de Yacoub qu'il l'obligea h ne
{)lus y penser. Devenu souverain du Maghreb par la mort
LES MfiRlMDBS VOLONTAIRES VE LA FOI. 461
de son frère, Abou-Yahya , le sultan Yaçoub-Ibn-Abd-el-
Hack fut obligé de veiller à ses propres intérêts et de renon-
cer aux mérites de la guerre sainte : Tinfluence de ses neveux,
fils d4drts-Ibn-Abd-el-Uack, et la jalousie qui les animait contre
ses propres enfants lui donnèrent de trop justes motiis d'appré-
hension. Aussi, quand Amer, fils dldrîs, lui demanda la per-
mission d'aller faire ia guerre sainte en Espagne, il la lui accorda
avec un grand empressement. Il plaça même sous les ordres de
ce prince un corps de volontaires zenatiens composé de plus de
trois mille hommes, et le laissa traverser le Détroit avec son
cousin Rahhou, fils d*Abd-Allab, GIsd'Abd-el-Hack.
Débarqués en Espagne, Tan 661 (4262-3)*, ces guerriers dé-
ployèrent une grande bravoure contre les infidèles et se couvri-
rent de gloire ; mais, ensuite, Amer rentra en Magbreb. Plusieurs
membres collatéraux de ia famille royale [qui] s'étaient mis en
révolte [contre leur sultan, durent ensuite passer en Espagne],
et inspirèrent aux pr;nces zenatiens l'envie de les imiter. Dans
le Maghreb centrai , Abd-el-Mélek , fils de Yaghmoracen-
Ibu-Zian, Aïd, fils de Mendtl-lbn-Abd-er-Rahman, Zîan , fils
de Mohammhd-lbn-Abd-el-Caouï, etquelqbes autres fils de rois,
prirent ensemble rengagement de traverser le Détroit et de se
dévouer à la guerre sainte. Us s'y rendirent elTectivement, Tan
676 (4277*8), et emmenèrent avec eux tous les hommes de leurs
tribus respectives dont ils pouvaient disposer. De cette manière,
TEspagne se remplit de princes et de grands chefs zenatiens.
Parmi les premiers on remarquait les fils d'Eïça-lbn-Yahya-
Ibn-Ousnaf-Ibn-Obbou-Ibn-Abi-Bekr'lbn-Hainmama et Solei-
man-lbn-Ibrabtm , guerriers qui se firent une haute renommée
en combattant les chrétiens.
Mouça-lbn-Rahhou, soutenu par les Beni-Abd-Âllah-Ibn-Abd-
el-Hack, avait supporté un siège contre le sultan dans le château
d'Aloudanet, après avoir capitulé, il se rendit h Tlemcen.^Parmi
' Voy. p. 48 Ce ce vulumc.
462 HISTOIBE DIS BERBERES.
les nombreuses branches de la famille mérinido, les fils d'Abd-
Allah-Ibn-Abd-el-Hack et d'Idrts- Ibn^Abd-eî Hack faisaient
bande à pari ; et cela par la raison qu'Ahd-Allah et Idrtsnaqui-»
rent de la môme mère, Sot-en-Niça. Mohammed, fils dldrîs, se
révolta a l'exemple de son cousin, Yacoub Ibn-Abd- Allah, et ,s*é-
tant enfermé dans Casr-Ketama, l'an 663 (1264-5)^ il'y soutint
un siège contre le sultan^ qui lui accorda, toutefois, une capitu-
lation honorable. Quant à Yacoub, il persista dans l'insoumis-
sion et continua ë courir de lieu en lieu jusqu^à ce qu'il fût tué,
Tan 668 ;( 1269-70 ) , aux environs de Salé , par Talha-lbn-
Uohalli, allié du sullan. Ce fut à l 'époque où le sultan dési-
gna son fils, Abou-Malek, comme hérificr du trône que ces
membres de la famille royale prirent le parti de s'in-
surger. Hohammed-lbn-Idrts occupa le château d'Aloudan ,
et Mouça-lbn-Bahhou-Ibn-Abd-Allah, soutenu par ses cousins,
les fils d'Abou-ETad-]bn-Abd-el*Hack, se retrancha dans les
montagnes des Ghomara. En Tan 670 (1271-2), le sultan les
contraignit à capituler et les déporta en Espagne. Ce fut alors,
pendant qu'ils soutenaient si bien la guerre contre les infidèles,
que les princes zenatiens de Tlemcen aspirèrent Vpartagcr leur
gloire.
En Tan 670, [Mouça-lbn-Rahhou] quitta cette ville et se ren-
dit en Espagne où le sultan-lbn-el-Ahmer lui donna le comman-
dement des volontaires de la foi ; ayant reconnu en lui un homme
digne d'en être le chef, tant par sa naissance que par sa bravoure.
Après y avoir fait un court séjour, [Mouça] rentra en Maghreb.
Son frère, Abd-el-Hack le remplaça avec l'autorisation du sultan
espagnol, mais, quelque temps après, il quitta le service, dans
un moment de mauvaise humeur, et se rendit à Tlemcen. Ibra-
hfm-Ibn-Eïça-Ibn-Yahya-lhn-Ousnaf fut alors nommé comman-
dant des volontaires de la foi.
' Ou bien, en l'an 600 ; voy. p. 4s do ce volume.
LBS MÉBllVIDIS TOLORTAIBBS hE LA FOI. 462
BI5T0IHE DE MOUÇÀ-IBN-RAHBOU, PREMIER CHEF DBS VOLONTAIRES
DE LA FOI. — ^ IL FUT REMPLACÉ PAR SON FRÈRE <, ABD-BL«BACE
LEQUEL EUT POUR SUCCESSEUR SON FILS DAMMOU.
Après la morl du sultan [de Grenade, Mohammed I-]Ibn-eI-
Ahmer, surnommé le Cheikh, son (ils el successeur [Mohammed
11] !bn-eUAhmer, surnommé le Fakih {légiste) envoya une dépur
talion en Maghreb afin d*inviter le gouvernement ihérînide à
porter secours aux musulmans de l'Espagne. Le sultan Yacoub-
Ibn-Abd-el-Hack s^empressa d'accueillir cette prière et, en Pan
673 (4 275) 'il passa le Détroit pour la première fois. Dans une
bataille sanglante, il écrasa les troupes chrétiennes , tua leur
chef, Don Nuno [de Lara] et porta ses armes victorieuses dans
toute ^Andalousie. Ibn-el-Ahmer regretta alors la démarche
quMI venait de faire ; il commençait à craindre que les suites lui
en fussent funestes et que le sultan mérinide le traitât de la
même manière que Youoof-Ibn-Tacheffn et les Almoravides
avaient traité Ibn-Abbad. A côté de lui, une dynastie rivale fon-
dée par ses parents, les Beni-Chekîlola, régnait sur Guadiz, Ha-
laga el Gomarès, pendant que dcu\ chefs andalousiens, Abou-
Atdrîl ' el Ibn*ed-Delil{i faisaient des incursions dans le ter-
ritoire musulman. Aidés par les chrétiens, ces révoltés mirent le
siège devant Grenade dont ils avaient ravagé les environs, mais,
voyant que Yacoub-lbn-Abd-eUHack avait consolidé sa puis-
sance en Espagne, ils firent alliance avec lui.
' Dans le texte arabe, remplacez ibnih par akhih.
* En Tan 674 Voy. ci-devant, p. 77.
^ Voy. p. 89 de ce vol. L'orthographe de co nom est inrerlainp.
464 DISTOIRB DES BERURIS.
Ibn-el-Ahmer vilavcc elTroi celte coalition et, pour se garan-
tir contre les tentatives du sultan, il résolut de lui opposer Pua
ou l'autre des princes mérinides que Ton gardait à la cour de
Grenade. A cette époque, il y avait les fils de Rihhou-Ibn-
Abd-Allah , les fils dUdris-lbn-Abd-AlIah et les Gis dldrîs-
]bn-Abd-el-Hack , descendus tousde la même aïeule, Sot-
en-Niça [Tune des femines d'Abd *el-Hack]. Avec eux se
trouvèrent les Gis d' Abou - Eïad - Ibn - Abd - el - Hack , qui ,
épouvantés par la froideur que le sultan leur avait témoi-
gnée , s'étaient réfugiés en Espague. Ils quittèrent le Ma-
ghreb sous le prétexte d'assister h la guerre contre les inGdèles«
mais en réalité, ils n'avaient d'autre désir qued'éviter le voisinage
d'un homme aussi puissant. Chaque fois que le sultan Abou-
Youçof-Yacoub soupçonnailla Gdélitéd'un prinbedesa famille, il
l'envoyait en Andalousie : aussi s'en trouva-t-il auprès d'Ibo-el-
Ahmer toute une bande: on y voyait les Gis d'Abd-el-Hack,
ceux d'Ousnaf, de Nezoul et de Tacbefln-lbu-Môli, chef des
Tirbightn , fraction des Béni -Mohammed. On y remarquait
aussi les fils de Mohalli , oncles maternels du sultan Abou-
Youçof.
C'étaitordinairementà l'un ou à l'autre deccs prii^ces qu'Ibn*
el-Ahmer confiait le commandement des Zenata, volontaires de
la foi, surtout quand il s'agissait d'envahir le territoire chrétien.
Il commença, l'an 673 (1274-5), par y nommer Mouça-lbn-
Rahhou; ensuite, quand celui-ci rentra en Maghreb, il en cboi-
sitle frère, Abd-el-Hack, pour le remplacer. Abd-el-Hack rentra
aussi en Maghreb et eut pour successeur Ibrahim-Ibn-Eïça.
Quelque temps après, Mouça-lbn-Rahhou passa encore en Espa-
gne avec son frère et obtint, pour la seconde fois, le commande-
ment des volontaires de la foi. A cette occasion, Ibn-el-Ahmer
lui délégua des pouvoirs extraordinaires, dans la pensée que l'on
serait obligé de repousser par les armes le sultan mérinide,
Abou-Youçof. Dans la suite, cet emploi fut rempli alternative-
ment par eux et par leurs cousins ; mais, avant que cet arrange-
ment fiH définitivement adopté, le sultan faisait remplir Id place
vacante par un autre chef. Ce fui ainsi qu'à l'occasion dune ex-
IIS MBRITllDES yOLp!(T41RES DE LA FOI. i65
pédilioD en pays ennemi , il nomma Ali, fils d'Âbou-Eïad^lbn-
Al)d-el-Hacky chef du corps des volontaires et, une autre fois,
en l*an679 (4280-4), il en confia le commandement à Tachefin^-
Ibn-Môti. Cet officier marcha au-devant du roi chrétien et,
l'ayant rencontré au pied du château de Moclin^ il remporta sur
lui la victoire.
Plus tard, Ibn-el-Ahmer eut à combattra le sultan Abou-You-
çof et, dans une de ses expéditions, il plaça toutes les troupes
zenatiennes sous les ordres de Yala-Mbn-Abi-Eïad. Une bataille
s'ensuivit dans laquelle les Mérinides furent mis en déroute, et
Mendil, filsde leur sultan, tomba au pouvoir des vainqueurs.
Après la mort d'Abou-Youçof^Yacoub, son fils et successeur,
Abou-Yacoub Youçof, fit la paix avec le sultan andalousien et
procura ainsi la liberté de son frère.
Le commandement des volontaires revint ensuite à Houça«lbn-
Rahhou ^ qui le conserva jusqu'à sa mort. Abd-el-Hack, frère et
successeur de Mouça, remporta plusieurs victoires sur les enne-
mis de l'islamisme et garda cet emploi tant qu'il vécut^. Mort en
l'an 699 (4299-4300), il fut remplacé par son fils Hammou. Ce
haut emploi passa plus tard de la famille de Mouça-Ibn-Rahhou
dans celle de son parent, Abou-'l-Olà ; puis, dans une autre fa-
mille. Hammou lui-même se vit placer sous les ordres de son
successeur, Othman-lbn-Abi^'1-Olâ.
Quant à lbrahim-lbn*Eïça-el-Ousnafi, il rentra en Maghreb et
alla trouver le sultan Abou-Yacoub-Youçof ; mais, quelque temps
après, il fut mis à mort par l'ordre de ce prince, qui faisait alors
le siège de Tlemcen. A cette époque, Ibrahîm était devenu vieux
* Il faut lire (jjAiill.— Voy. Ferreras, t. iv, p. 317.
* Dans le texte arabe lisez (^^.
' C'est à tort qu'on a imprimé dans le texte diVdhey^j (j^ o^* H
faut supprimer l'un des ^o.
* Dans l'édition imprimée du texte arabe, p. 515, ligne 10, il y a
une phrase répétée qu'il faut supprimer.
T. IV. 30
466 HISTOIHB DBS BERBÈHES.
et aveugle. Yaia-Ibn-Abi-Eïad mourut en 687 (4288) ; Môtt
Ibn-Tacbeflo eu 689 et Talha-Ibn-Hohalli en 686.
HISTOIBB D'ABD-BL-HA€K-IBN-OTHHlff , COHMAMDAKT DES
V0L09ITAIBES DB LA FOI.
Abd-eUHack, l'un des princes les plus illustres de la famille
mérinide, était petit-fils de Mohammed, fils et second successeur
deVémir Abd-el-Hack [fondateur de la dynastie]. Son père,
Olhman , fils de Mohammed , mourut en Espagne , Pan 679
(1280-4), pendant qu'il faisait une expédition contre les chré*
tiens. Abd-el-Hack fut élevé sous les yeux du sultan Touçof.
S'étant ensuite concerté avec \p vizir Rahbou-Ibn*Yacoub-el--
Outaci, il sp mit en révolte contre le sultan Abou-V-Rebià * et
dut s'enfuir à Tlemcen, d'où il se rendit en Espagne. Abou-
'1-Djoîouch , fils du sultan Mohammed-el-Fakih , gouvernait
aloi s l'Andalousie, etHammou, filsd'Abd-el-Hack-Ibn-Rahhou,
commandait les volontaires zenatiens. Emprisonné par le gou-
vernement^ andalousien sur la demande du sultan mérinide,
Abou-Satd' , l'émir Abd-el-Back effectua son évasion et passa
chez les chrétiens.
Abou-'l-Ouélid, fils durais Abou-Satd, s'étant mis en ré-
volte, à Malaga, prit le titre de sultan et alla mettre le
siège devant Grenade. Plusieurs combats se livrèrent sous
les murs de la ville et , dans une do ces rencontres, Ham-
mou, fils d'Abd-el*Back-Ibn-Rahhou [et commandant des
volontaires de la foi ] , tomba entre les mains des assié-
* Voy, p. 186 de ce volume..
* C'e$t à tort que le texte arabe povle A bou-^-Abbat»:
LES UeaiNlDBS VOLONTAIBBS 1» LA FOU 4S7
géants et fut conduit devant Aboa-'l-Oaélîd. £l-Abb«s*Ibn«>
Rahhoa, qui se trouvait alors auprès d'Âbou-'KOuëltd , ne
voulut pas souiTrii- que Hainmou, Gis de sou frère, restât
prisonnier et le (it remettre en liberté. Hammou revint an*
près du sultan, [Abou-'l-Djoiouch], mais le fait de son ren^
voi par Tennemi éveilla les soupçons de ce prince, quî
rappela Abd-el-Back-lbn-Olhman du pays des chrétiens et luî
donna le commandement des volontaires. Bientôt après, Abou-
'1-Ouéltd obtint possession do Grenade et signa un traité par le-
quel Abou-i-Djoïouch eut l'autorisation d'aller prendre le gou-
vernement de Guadix. Abd-eUHack-Ibn-Otbman s'y rendit avec
Abou- UDjoYouoh, mais, à la suite d'une altercation qui survmt
entre eux, il passa de nouveau à la cour du roi chrétien. Plus lard,
il débarqua au port de Ceula et déploya la plus grande bravoure ^
au service de Yahya-lbn-Abi-Taleb-el-Azefi, qui avait à sou-
tenir un siège contrôle sultan [mérinide],Abou-Satd. Quand
la paix fut rétablie entre les deux partis et que le sultan se fut
retiré, Abd-el-Hack-Ibn-Olhman prit la route de l'Ifrîkïa. Ar-
rivé à Bougie l'an 719 (<3<9), il y trouva le gouverneur, Abou-
Abd-er-Rahman-Ibn-Ghamr , chambellan * du sultan hafside ,
Abcu-Yahya[-lbn-el-Lihyani]. Cet officier le reçut avec de grands
égards, lui fournit des vivres en abondance et, pour surcroît
d'honneur, il lui permit de camper à £r-Bécha, près de la
ville. Il lui donna aussi cent cinquante chevaux, pour lui et
pour ses gens, ad moment de les laisser partir pour Tunis.
Arrivé dans cette capitale, Abd-eUHack fut accueilli par le sul-
tan avec les témoignages les plus empressés de bienveilhince
et d'amitié, faveur qu'il devait en grande partie à la troupe de
guerriers qui avait suivi sa fortune et dont les services pou-
vaient être d'une grande utilité au gouvernement mérinide.
En l'an 727(4326-7), le sultan hafside rappela de Bougiû Mo-
hammed Ibn-Séïd-en-Nas pour lui confier les fondions de cham-
bellan. Devenu très-puissant, ce ministre se rendit presqu'ina-
t
Lisez u^j>.Ur- j^ dans le texte arabe.
468 BISTOIEE DES BBBBÈAES.
bordable et, oo oertaio jour, il refusa sa' porte à l'émir Àbd-eN
Hack-lbu-Othman. Indigoé de cette insulte , le prince mérinide
persuada au prince Abou-Fares de quitter la capitale et de se
mettre en réiolte contre son frère, le sultan. Dans l'histoire des
HafsideSi nous avons raconté les conséquences de cette équipée* :
Abou-Fares y perdit la vie, et Abd-el-Hack se rendit à Tlemcen.
Deux années plus tard, il rentra en IfrikYa avec Tarmée abd-el*
ouadite que le sultan Abou-Tachefin envoya contre le souverain
de Tunis.
Vers la fin de la même année, quand les Abd-eUouadites t eu-
rent repris la route de Tlemcen, notre seigneur, le sultan Abou-
Yahya«Abou«Bekr, rentra dans Tunis. lbn«Abi-Amran, le prince
hafside qui s'était établi daos cette capitale en qualité de sultan,
alla se réfugier au milieu des Arabes nomades. Ibn-Rezztn, ne-
veu d'Abd-el-Hack-Ibn-Othman fut fait prisonnier et tué à
coups de lance, ainsi qu'une petite troupe de ses partisans.
Abd*d-Hack lui-même rentra à Tlemcen où il passa le reste de
sa vie, honoré de la faveur du sultan Abon-Tacheftn, et comblé
de ses bienfaits. Il mourut avec lui le jour de la prise de Tlem-
cen parles troupes du sultan mérinide, Abou-'l-Hacen. Cet évé-
nement eut lieu en l'an 737 (4337). Avec eux succombèrent, à
la porte du palais, Othman et Masoud, (ils d'Abou-Tacbeftn ,
M ouça-lbn*Ali , son chambellan, et Abou-Thabet, neveu d'Abd-
el-Hack. Leurs corps , privés de télés, restèrent exposés devant
le palais.
aiBTOlBB D'OTHVAN-IBN-ABI*'l-OLA , COMMANDANT DES
VOLOMTAIBBS DB LA FOI. .
Idrts et Abd* Allah , tous les deux fils d'Abd-el-Hack et de
» Voy. t. n, p. 470
* Lisez Abd-el-Ouad à la place d' Abd-el 'na4:k ^ dd^ns le texte
arabe.
LES MËRIKIOBS VOLOKTA»£S DB LA FOI. 469
Sot-en-Niça , laissèrent plusieurs enfants, qui formèrent ensem-
ble loute une bande et qui jouirent d'une haute considération
parmi les autres Mérinides. Idrîs , aïeul de la famille des Béni-
Idrls , mourut avec son père , Abd-el-Hack , dans la journée de
Tafertast* . Son frère, Abd- Allah, éfait mort quelque temps aupa-
ravant, laissant trois fils, Yacoub ,Rahhou et Idrîs, qui devin-
rent les souclies d'autant de familles.
En Pan 649 (4 Soi -2) , Yacoub , fils d'Abd-Allah , reçut d'Abou-
Yahya , fils d'Abd-el-Hack , le gouvernement de Salé , ville dont
les Mérinides venaient de faire la conquête; puis, en l'an 658
(4 260) , il répudia Tautorité de son oncle Yacoub -Ibn-Abd-êl-
Hack et garda la place pour lui-même. Elle tomba ensuite au pou-
voir des chrétiens, ainsi que nous Tavons raconté ailleurs *, et
fut reprise par le sultan Yacoub. Le rebelle se réfugia dans Alou-
dan , château du pays des Ghomara.
Amer et Mohammed, fils d'Idrîs, imitèrent la conduite de
leur cousin, Yacoub -Ibn-Abd- Allah, et s'emparèrent d*El-Casr-
el-Kebîr. Us avaient réuni sous leurs drapeaux tous les descen-
dants deSot-en-Niça, quand le sultan marcha contre eux , les
rejeta dans les montagnes des Ghomara et les y tint bloqués
jusqu'à ce qu'ils fissent leur soumission. Le vainqueur leur
pardonna à tous et, en Tan 660 (1261-2), il mit Amer à la tdte
d'une expédition qui partait pour l'Espagne. Rahhoa,fil8 d'Abd-
Allah et cousin d'Amer, traversa le Détroit avec lui. Mohammed,
fils d'Amer, rentra [en Maghreb] et s'enfuit, l'an 680 (1281-2), à
Tiemcen, d'où il repartit pour TEspagne. En l'an 669 (1970-4),
ces princes, soutenus par [leurs parents] les fils d'Abou-Eïad-
Ibn-Abd-el-Hack, se révoltèrent contre le sultan, Yacoub-Ibn-
Abd-el-Hack, et soutinrent un siège dans Aloudan. Contraints à
se rendre, ils eurent de ce monarque la permission d'aller à
Tiemcen. Les descendants de Sot-en-Niça et les fils d'Abou-
Eïad partirent alors tous et allèrent s'élablir en Espagne.
I Page 30 de ce volume.
* Page 46 de ce volume.
ilO HISrOlEE DES BERBliRE9.
Plas loin, noas aurons h raconter le relonrd'Âmer ot de Mohano*
med en Maghreb el ce qui leur arriva dans ce pays.
Tacoub, fils d- Abd-Allab, mourut Van 668, sans être revenu
de son égaremeni et àe ses idées de révolte : il fut tué k Gha-
boula, près de Ribat-el-Falh, par Talha-Ibn-Moballi. Ses GI&
continuèrent à habiter le Maghreb et l'un, Aboa-Thabet, gou-
verna le Sous pendant le règne du sultan Youçof-lbn-Yaoonb.
En Tan 699 (1299-1300), il châtia les Zegna et, depuis lors,
il resta en Maghreb, lui et ses enfants.
Aboti-4-Olft et Rahhou, cousins du précédent et fils d*Abd-
Allab-Ibn-Abd^el-Hack, furent les souches des deur nouvelle»
branches de la famille. Rahhou passa en Espagne avec ses cou-
sins, Amer et Mohammed, fils dldrîs. En Tan 669 (1 270-4], soj>
fils, Mouça I se rendit [en Espagne] avec les filsd\\bou-£ïad et
les descendants de Sot-%n-Niça. Plus lard, il revint à la place
qu'il avait occupée dans l'empire mérinide ; puis, en Tan 675
(4276-7) il s'enfuit à Tiemcen avec son fils. Ensuite il alla se
fixer en Espagne. Les fils d'Abou-'l-Olà s'y transportèrent
en l'an 685 (4286), avec leurs parents, les fils d'Abou-Yabyd-
Ibn-^Abd-el-Hack , et les fils d'Othmao -Ibn^-Nezoul. S'étant tous
établis en ce pays, ils reconnurent pour chef leur frère aîné
Abd-Allah. Celui-ci fut un des chefs auquel le sultan anda-
lousien donna le commandement des Zenata, guerriers da la foi,
avant que cet emploi fût définitivement constitué [comme apa-
nage des princes mérinides]. Il resta en place jusqu'à l'an 693
(429i), quand il trouva le martyre en combattant les chrétiens.
Othman-lbn-Abi-'l-Olâ , frère d'Abd- Allah, reçut d'îbn-el-
Ahmer [Mohammed III] «prince que l'on détrôna, le commande-
ment d'un détachement des volontaires chargés de garder Ma-
)aga et la région qui s'étend a l'occident do cette ville [la Ghar^
bïa de Malaga). Il se vit placer, en même temps, sous les ordres
du ra;iê Abou-Satd-Feredj ; fils d'IsmdtMbn«Youçof-lbn-Nacer
et cousin du sultan. En l'an 705 (4305-6), le raïs surprit la
ville de Coûta et fit ainsi éclater une guerre entre le Maghreb el
l'Andalousie. La cour de Grenade reconnut Othman pour souve-
mn du Maghreb et le fit passer chez les Ghomara. S'étaol
LES IBRIRIDBS YOLOIITAIRBS DB LA FOI. 471
fait proclamer sultan par cette peuplade, il alla s'emparer
d'ÂstIa, d*EUAraYcb, puis d'El-Casr-eUKebtr. Nous avons déjà
raconté l'histoire de cette affaire* et mentionné qu'Olbman fut
vaincu, en 708 (1308-9) par le sultan Abon-V-Hebiâ. Il rentra
alors en Espagne.
Abou-^l*OuélM , fils du rats A: ou-Saïd , ayant formé le pro-
jet d'enlever le trône à Abou-'l-Djoïoucb , sultan de Grenade,
s'adressa secrètement à Othmao*ba-AbI-'I'OI&, qui commandait
encore les volontaires postés à Malaga et, s'étant assuré le con*
cours de ce chef, il marcha sur Grenade, l'an 7H (1314-R).
Après avoir accompli son dessein et obtenu possession de la pa.
pitale , il remplaça l'émir Abd-el-Hack-Ibn-Othtnan , chef des
volontaires cenatiens, par Othman*Ibn-Abi-'l-Olâ. Abd-eUHack
suivit Abou-'l-Djoïouch à Guadix ,etHammou-Ibn-Abd'el*Hack-
Ibn-Rahhou , qui avait aussi commandé les volontaires , s'y ren-
dit avec eux.
Othman conserva pendant très-longtemps la haute position
dans laquelle Abou-'l-Ouélîd l'avait placé et il s'y fit un si belle
renommée que le sultan du Maghreb en ressentit une jalousie
extrême. Aussi, en l'an 718 (1318-9) , quand les musulmans
de l'Andalousie invoquèrent son appui contre les chrétiens, il ré-
pondit qu'il irait très* volontiers à leur secours si, jusqu'à son
retour en Maghreb , on tenait emprisonné l'émir Othman.
Cette condition fut déclarée inexécutable. Quand le roi chré-
tien mit^e siège devant Grenade, Othman et ses fils montrèrent
une bravoure qui assura aux musulmans une victoire bien
au-dessus de leurs espérances. Ils continuèrent h soutenir
heureusement la cause du gouvernement andalousien et des
musulmans jusqu'à l'an 725 ( 1324-5), quand Abou-'l-Ouéltd
fut assassiné par quelques chefs, membres de sa propre
famille. Othman, que l'on soupçonna d'avoir pris part à cette
trahison, plaça aussitôt sur le trône Mohammed , fils du feu
> Page 161 de ce volume.
472 DtSTOlBB DBS EBRBBRES.
•
sultan, qui n'avait pas encore atteint Tàge de puberté. Mobam-
nied-Ibu-eUMahrouc, client et vizir d'Ibn^el-Ahroer, s'appliqua
à gagner l'esprit du nouveau sultan et laissa les rênes de Tem-
pire entre les mains d'Otbman.
Ayant maintenant le pouvoir d'agir à son gré,Othman domina
les ministres , leur enleva une grande partie de leur autorité et
consacra presque tous les revenus de l'état à la solde et l'entre*
tien des volontaires. Ibn-Mahrouc soupçonna enQn ce chef de
vouloir usurper le trône et tftcba, par tous les moyens, de l'en
empêcher. Ses efforts augmentèrent l'opiniâtreté de son collègue
et ajoutèrent à la mauvaise intelligence qui régnait entre eux.
Othman, ne pouvant plus contenir son mécontentement , alla
camper dans la plaine de' Grenade, rallia les volontaires zena-
tiens autour de son drapeau et força le vizir et tous les autres
ministres à s'enfermer dans l'Âlhamra. Pendant que le naïb^
faisait, chaque jour des nouvelles démarches aQn d'effectuer un
raccommodement, le vizir forma le projet de susciter à son ad-
versaire un ^ival capable de lui disputer le pouvoir et de Ten-
traver dans ses tentatives contre l'état. Othman avait auprès de
lut son gendre Yahya, fils [d'Omar et petit^fils] de Babbou-Ibn*
Abd-Âllah-Ibn-Âbd-el*Hack. Le vizir attira ce personnage au
palais et le nomma commandant des volontaires. Othman se vit
bientôt abandonné par ses troupes et ne trouva plus au camp
que ses fils, ses parents et les gens de sa maison. Danscetle
position, il consentit à faire ta paix et à se rendre en Maghreb.
Ayant alors envoyé quelques-uns de ses intimes auprès du sul-
tan Abou-Said, pour l'avertir de son intention, il quitta la plaine
de Grenade, Tan 72S (4327-8), à la tête de mille cavaliers, dit-
on, dont les uns étaient ses parents, les autres ses clients et ses
domestiques. Il prit la route d'Almeria, où il avait l'intention de
s'embarquer; mais, arrivé aux environs d'Andous * , il reçut
I Peut-être le lieutenant (naib) du vizir.
' Variante : Adres, Gela ne peut pas être Andujar, qui était loin
de la route suivie par Othman.
LES MfiRlNIDES VOLONTAIRES DE LA FOI. 473
la vistto des chefs qui y cominaoclaient et avec lesquels il en-
tretenait des iutelli^euces, puis, au moment où ils lui adressaient
les compliments d'usage, il profila de leur imprévoyance pour
monter à cheval et s emparer de la ville. Quand il y eut installé
son harem et déposé ses trésors, il fit venir de Salobrena un
fils du rais Abou-Satd , nommé Mohammed et, l'ayant reconnu
pour sultan, il se mit à faire des courses dans le territoire de
Grenade. Yahya-Ibn[-Omar*Ibn-]Bahhou rassembla tout ce
qu'il pouvait de cavaliers zenatiens et sortit pour arrêter oes
incursions, qui se renouvelaient depuis le matin jusqu'au soir.
La guerre aurait pu durer pendant des années * si le sultan de
Grenade, Mohammed [IV]-Ibn-el-Ahmer , n'eût pasôtéla vie à
son vizir, ibn* eUMahrouc et rappelé Olhman-Ibn-Âbi- 1-OlÂ* Par
le traité qui fut dressé à cette occasion, le prince Mohammed,
[fils du raïs Âbou-Saîd et] oucle du sultan, devait être déporté
en Maghreb, et Othman devait rentrer à Grenade pour repren-
dre le commandement des volontaires de la foi. Ceci se passa en
l'an 729 (1338-9). Othman recouvra de cette manière sa haute
position dans l'empire et mourut quelque temps après.
HISTOIRE D'aBOU-THABET , FILS I>'OTHMAII-IBH*ABI-'L*OLA ET
COMMANDANT DBS VOLONTAIRES DE LA FOI.
Après la mortd'Othman-lbn-Abi-'l-Olà, cheikh des volontai-
res de la foi et coryphée des princes zenatiens , son fils , Abou*
Thabet-Amer', le remplaça comme chef de la famille et obtint
du sultan Abou-Abd-Allah[-Mohammed IV] , Q^ls d'Abou-'l-Ouélîd,
^ A la place de (^^aâim , ji faut probablement lire (j^aajUi et tra-
duire : tf La guerre avait duré deux ans quand le sultan de Grenade
6ta la vie etc. »
474 UISTOIRB DES B£RBERBS.
le commandement des volontaires. Son esprit vif, sa fermeié,
sa bravoure et le nombre de ses dépendants lai méritèrent une*
considération estraorditiaire ; aussi, les troupes sous ses ordres
déployèrent-elles une audace qui les rendit redoutables mémo
au gouvernement andalousien, dont elles avaient plus d'une fois
constaté la faiblesse*.
Le sultan Mohammed [IV] était trop fier pour subir la domi*
nation de qui que ce fut ; il voulut être le seul maître et direo-*
teur, iant dans les petites affaires que dans les grandes, aussi, ne
manqua*t-il jamais de traiter avec mépris les conseils que les
chefs de ce corps voulaient lui imposer, et se plut-il à froisser
leur amour-propre toutes les fois que Poccasion s'en présenta:
En Tan 732(1334-2), il se rendit auprès du sultan Âbou-'l-
Hacen afin d'obtenir son appui contre le roi chrétien et de le dé-
cider k faire passer en Espagne, le plus tôt possible, un corps de
troupes sous les ordres de son (ils, Abou-Halek ; un tel secours
lui paraissant nécessaire pour assurer le succès du siège qu'il
allait mettre devant Gibraltar.
Les officiers du corps des volontaires s'imaginèrent que cette
démarche était le commencement d'une trame dont ils devaient
être les victimes ; aussi prirent-ils la résolution d'assassiner
leur souverain. Ils firent même entrer dans le complot plusieurs
clients de ce prince lesquels, depuis quelque temps , attendaient
une occasion pour renverser le gouvernement.
Gibraltar fut pris, ainsi que nous|ravons raconté ailleurs * et
peu de temps après^ le roi chrétien vint y mettre le siège. Le
sultan 'de Grenade se rendit alors à la tente' de ce monarque et, à
force de sollicitations, il le décida à décamper. En l'an 733
(1333), aussitôt que l'ennemi se fut éloigné, les divers corps
de l'armée musulmane s'en allèrent, chacun de son côté, et le
I A la lettre : dont Us avaient mordu le boi$. On mord un morceau
da bois pour reconnaître s'il est dur ou mou.
• Page 217 de ce volume.
' Pour xiju lisez aa^ (sa tente). Voy. Ferreras, t. v, p, 67.
L€S HÊainiDES VOLONTAIRBS DE LA FOI. 475
sultan lai-méme partit pour Grenade. Ayant alors appris que les
chefs des volontaires s'étaient mis en embuscade sur son pas-
sage, il envoya chercher un navire de la flotte aGn de s*y embar-
quer pour Halaga. Les conspirateurs, avertis à temps de son in-
tention, coururent au-devant de lui et, Payant rencontré sur le
chemin qui longe la côte d'Estepona , ils se mirent à lui repro-
cher la conduite de son favori, Âccm, affranchi d'origine chré-
tienne. Pendant qu'il cherchait à disculper son serviteur, les
traîtres se jetèrent sur celui-ci et le tuèrent à coups de lance.
Provoqué par cet outrage, il en exprima toute son indignation, et
aussitôt un autre coup de lance le précipita de son cheval et l'éten-
dit mort à côté d'Acem. Les assassins Grent alors venir le prince
[Abou-4-Haddjadj-]Youçof, frère de leur victime, lui prêtèrent
]e serment de fidélité et le conduisirent à Grenade ; mais le crime
qu'ils avaient commis les exposa, dès-lors, h la méfiance du
nouveau souverain. ^
Le sultan Abou-4-Hacen\ après avoir achevé la conquête de
Tlemccn, prit la résolution do faire la guerre aux chrétiens et
fit proposer au sultan Youçof de combiner leurs efforts afin de
chasser les infidèles de l'Andalousie. Youçof y donna son entière
approbation et fit aussitôt emprisonner Abou-Thabet , ainsi
qu'fdrîs, Mansour et Sultan, frères de ce chef. Soleiman, un au-
tre de ces frères , effectua son évasion , alla trouver le roi chré-
tien et, plus tard, dans la journée de Tarifa , il se distingua par
son acharnement à combattre les musulmans.
Abou-Thabet et ses frères restèrent en prison plusieurs jours;
déportés ensuite en Urîkïa par l'ordre du sultan, ils débarquè-
rent à Tunis et altèrent se présenter devant noire seigneur,
Abou-Yahya. Ce prince venait de recevoir d'Abou-'l-Hacen
l'invitation de prendre toutes les mesures nécessaires pour em-
pêcher ces hommes dangereux de passer en Maghreb tant que le
souverain de ce pays serait occupé à combattre les chrétiens en
Espagne; aussi, les fit-il enchaîner sur le champ et livrer à la
garde . d'Abou-Mohammed-Ibn-Tafragutn, qui avait l'ordre de
les conduire à la cour du souverain maghrébin. Il adressa en
même temps une lettre à Abou^^'l-Haccn dans laquelle il le pria
476 QISTOIBB DES BBRBÊRBS.
de traiter les prisonniers avec indulgence* • Ce monarque y ré-
^ pondit en leur faisant un honorable accueil, mais, en Pan 743
(1342-3), pendant qu^il se tenait à Ceuta afin de mieux surveil-
ler le siège d'Algéciras, il fit enfermer ces princes dans la prison
de Mequinez, en conséquence de certains rapports peu favorables
qui lui étaient parvenus à leur sujet. Dans la suite , son fils,
Abou-Einan, qui avait usurpé le trdne et mis en déroute les
troupes de son neveu Hansour, fils d'Abou-Malek, entreprit
le siège de la Yille-Neuve et se fit amener les prisonniers. Leur
rendre la liberté, les combler de dons et de faveurs, ri^ ne lui
coûta pour se les attacher ; il prit même Abou-Thabet pour con-
seiller et ami.
Idris communiqua alors'k son frère Abou-Thabet un projet
qui devait entraîner la chute de la Ville-Neuve et, pour l'exé-
cuter, il passa aux assiégés. Parvenu à gagner leur confiance ,
il suscita une révolte dans la place et mit la garnison dans la né-
cessité de se rendre ë discrétion. Le sultan Abou- 1-Einan, ayant
ainsi obtenu possession de la capitale, donna le gouvernement
de Ceuta et du Rif à Témir Abou-Thabet, afin que ce chef pût
mieux surveiller l'Espagne, pays où il avait naguère exercé un
haut commandement ; il plaça même à sa disposition les trésors
et les troupes de Tempire mérinide. Abou-Thabet prît congé de
son protecteur et se disposait h partir quand il fut atteint de la
peste qui désolait l'Afrique en l'an 749 (1348-9). Il mourut dans
le camp où^ il s'était tenu pendant le siège de la Ville-Neuve et
d'oti il voyait, en face de lui, le camp du sultan.
Ses frères allèrent habiter le Maghreb -el-,Acsa. sous la
protection d'Abou-Einan, mais Idrîs s'évada plus tard, passa en
Espagne et obtint le commandement des volontaires de
la foi. Dans un des chapitres suivants nous raconterons son
histoire.
' Voy. page 238 de ce volume.
* Page 275 de ce volume.
LES XfiRIlflDBS VOLONTAIRES DB LÀ FOI. 477
HISTOIRE DE YAHTA-IBN-OMAR-IBN-RAHHOU, CHEF QUI COMMAKOA
DEUX FOIS LB CORPS DES YOLOlfTAlBES BN ANDALOUSIE.
RahhoQ[, l'aïeul de Yahya-Ibn-Omar,] était le fils aine d'Abd-
Allah-lbo-Abd-el-Hack. Il eut plusieurs enfants qui laissèrent
chacun une nombreuse postérité. Ils se nommaient Mouça, Abd-
eUHack, Ël-Abbas , Omar , Mohammed , Ali et Youçof. Ces
princes quittèrent Tlemcen et passèrent en Andalousie avec les
autres descendants de Sot*en-Niça ; mais Omar y resta , devint
père de famille et ne les rejoignit que bien plus tard. Mouça rem*
plaça Ibrabîm^Ibn-Eïça-el-Ousnafi dans le commandement des
volontaires de la foi, puis, en Pan 705 ( 1305-6) , il se rendit à
Geuta avec le raa Abou-Saïd et Othman-Ibn-Abi-1-Olâ. Dans
cette forteresse il eut sous ses ordres le détachement du corps'
des volontaires qui en formait la garnison. Rentré en Espagne,
il n'y resta que peu de temps avant de repasser en Maghreb, où il
trouva un honorable accueil auprès du sultan Abou-Saîd. Plus
tard il se rendit encore en Espagne.
Othman-Ibn-Abi-'l-Olâ, ayant obtenu le commandement des
volontaires, céda aux sentiments de jalousie qui animent les
hommes puissants l'un contre l'autre, et déporta en Ifrikïa tous
les membres de la famille Rabhou. Notre seigneur, le sultan
Abou-Yahya[-Abou-Bekr] , leur (it un bon accueil, les attacha
au service de l'empire et les employa avec avantage dans ses
expéditions militaires. Omar, fils de Rahhou, mourut dans le
Djertd et son tombeau se voit encore à Bechri, dans le pays des
Nefzaoua. Son fils. Yahya, laissa ses frères sous les drapeaux du
sultan Abou-Yahya-Abou-Bekr et embrassa le parti d'ibn-Abi-
Amran. Ensuite il passa dans le pays dos Zouaoua, resta quel-
que temps au milieu des Beni-Iraten et se rendit enfin en An-
dalousie où il reprit, parmi les volontaires de sa tribu, le haut
rangqui lui appartenait. Othman-Ibn-Abi-'l-Olà épousa alors la
fille de ce chef, auquel il venait d'accorder toute sa confiance.
478 nisTOiHB des derbèrbs.
En l'au 727 (1 32C-7} Othmao se brouilla avec Ibn -el-Mahroucy
vizir dusuhao (le Grenade et, étant allé camper dans la plaine de
cette capitale, il rallia autour de lui tous les volontaires de la
foi. Ibn-el-Mahrouc parvint alors à détacher Yahya, filsd'Omar-
Ibn-Rahhou, du parti d'Othman et, l'ayant attiré à Grenade , il
le fît nommer par le sultan commandant des volontaires. Ces
guerriers se rendirent, par bandes, auprès de leur nouveau chef,
et quittèrent Olhman, qui partit alors pour Âlmeria et se con-
duisit de la manière que nous avons racontée ailleurs '. Y'ahya-
Ibn-Omar garda le commandement jusqu'à la chute d'Ibn-eUMah*
roue. Le sultan, ayant ôté ta vie h ce vfzir, rappela Olhman , le
plaça de nouveau a la tête des volontaires et ordonna à Yahya-
Ibn-Omar daller prendre le commandement d'un détachement
du même corps qui tenait garnison à Guadix. Au bout de quel-
que temps, Yahya revint [à Grenade] et reprit la place qu*il
avait occupée d'abord, parmi les guerriers de sa tribu. Othman*
Ibn-Abi-'UOlâ rendit alors son amitié à Rahbou, et Abou-Tha-
het, nis d'Othman et d'une fille* do Mouça-lbnRahhou, obtint
beaucoup d'influence par l'appui de ses oncles maternels.
Après la mort d'Othman, son fils Abou-Thabet prit une part
active à l'assassinat du sultan [Mohammed iV] et fut arrêté et
déporté en Ifrlkïa avec ses complices, par l'ordre d'Abou-'i-
Haddjadj, frère de leur victime.
La puissance de cette famille s'étant ainsi écroulée, le sultan
plaça Yahya-Ibn-Omar h la tête des volontaires et eut souvent
l'occasion d'apprécier les grands services de ce chef. En l'an
7S5 (4354), Abou-'UHaddjadj fut assassiné dans hMosalla^, au
moment où il se baissait pour accomplir le dernier des proster-
Déments qui font partie de la prière. Il mourut d'un coup de poî-
* Voy. ci-devant, pag« 472.
* Posr x«J^ lisez ^.«1
» Voy. t. J p S'^î.
LES UÉRlKlb£S VOLONTAIRES DB LA FOI. 479
gnard que lui porta uq des nègres atlachës h son écurie et dont
Tesprit s'était dérangé. Cet homme que Ton prétend avoir été
poussé au crime par d'autres personnes , fut sabré * sur place.
Ridouan, affranchi d'origine chrétienne, qui avait servi le père
et Ponde du sultan eo qualité de chambellan, Qt aussitôt inau*
gurer le prince Mohammed, fils d'Âbou-'l-Haddjadj. Ayant
alors relégué le nouveau sultan dans le palais, il s'assura Texer-
cice du pouvoir en le partageant avec Yahya-lbn-Omar dont
Tappui lui était devenu indispensable. Il jouit de sa haute puis-
sance jusqu'à l'époque où le raïs Mohammed, fils d'ismaîl, fils do
Mohammed, fils du raïs Abou-Satd, s'empara de l'Alhamra et
proclama souverain IsmatI, fils d'Abou-'UHaddjadj et frère du
sultan régnant. Pour exécuter ce coup de main, les conjurés
avaient profité de l'absence du sultan Mohammed qui se trouvait
alors à la campagne, dans sa maison de plaisance. Ayant surpris
l'Alhamra, ils tuèrent le tout puissant vizir, Hidouan, et placè-
rent Ismail sur le trône. On convoqua ensuite toutes les classes
de la population afin de leur faire prêter le serment de fidélité
au nouveau sultan. Yahya-lbn-Omars'y présenta le lendemain,
an moment où l'on croyait qu'il ne viendrait pas et qu'on allait
l'avoir ponr ennemi. Il prit alors l'engagement de servir le sul-
tan IsmatI en sujet fidèle et rentra ensuite chez lui.
Quelques jours après, les meneurs de cett? révolution donné*
rcut le commandement des volontaires à Idrîs-lbn-Othman»]bn-
Abi-'l-Olâ, qui venait d'arriver de la province do Barcelone ,
région qui fait partie du territoire de l'ennemi. Yahya<-Ibn-
Omar, ayant été averti qu'on voulait l'arrêter, rassembla tous
ses gens, monta à cheval et partit avec eux pour la Galice
(Castille)^ pays appartenant aux chrétiens. Idrîs se mit a leur
poursuite, les atteignit et leur livra une bataille qui dura toute
une matinée et qui se termina par la déroute de ses troupes.
Arrivé chez les chrétiens, Yahya leur confia son fils, Abou-
Saîd-Othman, et partit pour le Maghreb afin de rejoindre l'ex-
* Pour \jju^ il faut lire \^.
480 BISTOin& DES BERBËRES.
sultan, Mohammed, fils d'Abou-i-Haddjadj. Ce fut eu Tan 764
(1359-60) <}u*il se présenta à la cour d*Âbou-Salem et entra du
service de ce prince, duquel il devint bientôt le conseiller intime.
Son fils, Abou-Said, persuada alors au roi de Castille d'envoyer
chercher le monarque détrôné^ afin de te mettre à la tête d*une
armée et de le faire passer en Andalousie, dont le gouvernement
venait de rompre la paix qu'il avait conclue avec les chrétiens.
En l'an 762 (t361)>, Abou-Salem donna à Yahjaibn-Omar l'au-
torisation d'accompagner en Espagne l'ex- roi de Grenade.
Abou-Satd vint au-devant des voyageurs et aida son père,
Yahya, à rétablir eq Andalousie l'autorité de leur sultan. Pen-
dant cette campagne, Yahya et son fils déployèrent une bra-
voure extraordinaire.
Redevenu maître de Grenade , en lan 763, Uohammed, fils
d'Abou*'l-Haddjadj, rendit à l'émir Yahya-lbn-Omarle com-
mandement des volontaires, et lui accorda des pouvoirs plus
étendus qu'auparavant ; il en prit [Othman, le fils d'Abou-Said],
pour conseiller et ami* Ces hautes faveurs excitèrent à uti
tel degré la jalousie du vizir, Ibn-eUKhattb, qu'il essaya de
perdre le père et le fils dans l'esprit du sultan. En l'an 764
(4362-3),. ce monarque les fit enfermer dans la prison d'état,
mais, deux ans après, il permit à Yahya de se rendre à Almeria
et de s'y embarquer pour Alexandrie. Le proscrit revint en Ma-
ghreb, où il fut accueilli avec le plus grand empressement par le
régent, Mohammed-Ibn-Abd-Allah, et il y passa le reste de sa
vie, entouré d*honneurs. 11 mourut en 782 (1380-1).
Abou-Satd-Othoian, ayant enfin reçu du sultan de Grenade
la permission de se rendre en Ifrikïa, débarqua à Bougie, l'an
767 (1365-6) et alla se mettre au service d'Abou«-'l<Abbas, petit-
fils du sultan hafside, Abou-Yahva-Abou-Bekr. Il assista à la
prise de Tunis et , dans celte campagne, il déploya une telle
bravoure que le sultan lui accorda une pension et plusieurs fiefs;
^ Le texte arabe porte 763. Cette date est faùfsc, car le sultan
merinide Abou-Salem mourut vers la fin de l'année précédente.
LES VÊRIHIBIM yOLONTlIRBB DB LÀ TOI. 48f
il le prit même pour conseiller et ami intime. Aujourd'hui encore,
oe chef se montre au premier rang à la cour et au champ
de bataille. Ses frères sont restés en Andalousie où, grâce à leurs
noDabrem domestii|ues et clients, ils jouissent d'une haute consi-*
dératîon. Le suUan de ce paya est lont-à-fait revenu de la mé-
fiance qu^il leur avait montra et les traite maintenant en
amis.
HISTOIRE D'iimtf^, FILS D'OT^IlfAN-iBN-ABl-'L^OLA ET
COUHANDÂNT DBS YOLGNTAIRBS DB LA FOI.
Abou-Thabet, fils d'Othman-lbn-Abi-1-Olà , mourut en Pau
780 (< 349-50)*, et ses frères restèrent au service d'Abou-
Ëinan, sultan du Maghreb. Us continuèrent à jouir des fitsfs et
des pensions que ce monarque leur avait accordés, mais, de tous
ces princes, Idrts fut le seul qui exerça sur la foule cette influence
qui distingue les hommes habitués au commandement. En 758
(1557), Ab&ij-Einan entreprit une expédition contre Conslan-
tine et pénétra dans Pifrtkïa; mais les chefs de son armée, effra-
yés parla perspective d'une longue série de combats, ourdirent
un complot pour détourner leur maître de ses projets de con-
quête et donnèrent à leurs subordonnés la permission de partir
pour le Maghreb. Le sultan, voyant son camp presque dégarni,
et averti, dit^on, que, dans un conseil tenu par ses oQiciers, il
avait été question de le déposer et de placer Idris-Ibn-Oroar sur
le trône, prit le parti de rebrousser chemin et de renlrcx dans
son pays. Idris fut averti parle public do ce qui venait de se
passer et jugea prudent de s'évader du camp, pendant la nuit,
et de chercher un refuge à ^^nis. Accueilli dans cette capitale
^aveclaplus haute distinction, il obtint d'Abou-Mohammed-Ibn-
Tafraguîn, chambellan et régent de l'empire , qu'un navire fût
1 Ou en 749. Voy. ci-devant, p. 470.
T. IV. 31 .
482 HISTOIRE DBS BiRBimiS.
apprêté pour le trsinsporier en Espagne. S'y étanl embarqué
avec toute sa suite, il alla trouver le fils du Confite, seigneur /Je
Barcelone. Pendant quelque temps, il resta auprès de ce prince,
puis, en l'an 760(1359), après la mort du chambellan, Ridooan,
premier ministre du gouvernement andaiousien , il se rendit à
Grenade, ville où il avait passé sa jeunesse et où il trouva une
honorable réception.
Ismatl, filsd'Abou-'l-Haddjadj, et son cousin, le ratf Moham-
med, fils d'Ismatl-Ibn Hohammed-lbn-«r-l}at>Abi-Satd, appri-
rent avec un plaisir extrême l'arrivée d*un homme capable
d'exercer le commandement des volontaires et d'y remplacer
Yahya-Ibn-Omar, chef dont ils soupçonnaient la fidélité et qui
leur paraissait disposé à favoriser le sultan déchu. En Pan 16i
(1 359<*60), Yahya se réfugia sur le territoire chrétien et Idris fut
misà'la tête des volontaires. Dans cette position élevée, il fit
preuve d'une grande habileté et obtint, à la cour, le m^me
rang que son père et son frère avaient déjà occupé.
Le rau Moliammod tua ensuite son cousin, le sultan Ismaîl, et
s'empara dutrdoe, mais, deux années plus tard, il fut cha&séde
Grenade par l'ex-sullanAbon-Abd-Allah-Mohammed. Ce prince
avait quilté le pays des chrétiens , fort mécontent des procédés
de leur roi à son égard, et était allé s'établir dans Ronda , ville
qu'Omar-lbn-Abd-Allah, régent duMagbreb, venait de lui faire
remettre. Ce fut de là qu'il marcha contre l'usurpateur, qui se
retira en Castille, avec ses partisans, et cbercha la protection
du roi chrétien. Ce prince les fit mourir tous pour les punir de
la mort de Ridouan et du sultan Ismaîl. Idits et la troupe de
volontaires qui avaient accompagné le rai* dans sa fuite fu-
rent enfermés dans la prison de Séville.
En l'an 766 (1364-5), un musulman attaché au service du
roi chrétien entreprit de faciliter l'évasion d'idrîs et tint un
cheval toujours prêt vis-à-vis de la prison. Idrîs brisa ses fers,
perça le mur de sa cellule, mit le pied à l'étrieret, bien qu'il fût
poursuivi de près, atteignit le territoire musulman. Accueilli
de la manière la plus gracieuse par le sultan Mohammed, fils
d'Abou-'l-Haddjadj, il obtint'l'aulorisalionde se rendre àCeuta.
LES HtimiDES TOLOlfTAlRBS DB LA FOI. iB3
Ire vizir Omar-Ibn-Âbd-Allah , régent du Maghreb, craignit à
un tel point l'influence de ce chef qu*it le fit aussitôt arrêter par
le gouverneur de Ceuta et conduire à la prisen de M«quinez.
Transféré ensuite dans le Ghour (cachot) de Fez, par 1 -ordre du
sultan Abd-el-Aztt, Idrîs y mourut étranglé l'an 779 (4368-9).
«ISTOIHB d'aU-IBN-:BBI>R-ED'>DÎR , COHHANDAIIT DES T0L9IITAIIIBS
>DB LA VOI.
^ous avons dit que Mouça, fils de Rahhou, passa en Espagne,
avec les autres descendants de Sot^en-Niça. Parmi eux se trouvè-
rent Mobammed-lbn-Idrts-lbn-Abd-el-Hack et son frère Amer.
€eci eut lieu en Pan 669 (1270-4). Mouça rentra en Maghreb, se
réfugia dans Tiemcen et passa encore en Espagne. Nommé au
commandement des volontaires de la foi, il conserva cei emploi
jusqu'à sa mort. En l'au 679 (4 280-4 ), U maria sa fille au sultan
mérinide, Youçot-Ibo-Yacoub, et la fit escorter eu grande pompe
à la cour de ce souverain, lient plusieurs fils dont les deux atnés
se nommaient Mohammed et on les distinguait par les surnoms de
Djemal-ed^Din (beauté de la religion) ei de Bedr-ed-Dîn {pleine
lune dfi la religion). Ils reçurent ces titres d'un^ chérif de la
Mecque qui était venu en Occident et qui les désigna ainsi, selon
l'usage des orientaux. Les princes de la famille royale des Merîn
avaient toujours un profond respect pour les descendants du
Prophète et, dans toutes les occasions, ils reeherchaient les priè-
res et les bénédictions de ces saints personnages. Les deux en-
fants de Mouça venaient seulement de naître quand leur père le
pria de les bénir et de leur 'frotter les gencives avec des dates
mâchées, selon la coutume du Prophète. Le chérif y donna son
«consentement et, en rendant les enfants, il dit au père : a Reçois
» la beauté de la religion , reçois la pleine lune de la religion. »
Mouça accepta ces surnoms ; étant parfaitement convaincu
484 HiSTOlBB BBS BBRBBHBS.
qu*ilfi porteraient bonheur à ses fils. Depuis lors, ec'sdeusciv-
faats fureul gf^nérnlement conous, Tua, par rappellation de
DjemaUed-Dîn, ci l'autre par celle de Bedr-ed-Din. Quaod ils
eureot atteint l'âge viril, leur père les associa avec lui au com-
iwandautdos volontaires.
Après la mort de Mouça-lbn-Rahhou, le corps des volontaires
passa sous les ordres de son frère Abd-el-Hack} dont le (ils
obtint ensuite ce haut comoiandemenl. En l'an 703 '(4303-i),
Djemal-ed-Din passa chez le roi chrétien et, s'élani embarqué à
Gartliagène, il alla trouver le sultan Youçof-Ibn-Yacoub qui fai-
sait alors le siège de Tiemcen. Le jour même de la mort de
YouçoI.soti nisi Ahou-Salem, prince fdible et incapable, essaya
de monter sur le trône, mais , ayant vu qu'Abou-Thabel, petit-
fils du feu sultan, s'était emparé du pouvoir, il prit la fuite,
dans la soirée, et emmena a vcA; lui son parent, Djemal-ed>Dfn,
et ses oncles, El-Abbas, Eiça et Ali, fils de Rahhou-lhn-Abd-
Allah. Pendant qu'ils se dirigeaient vers Medîouna, ils furent ar-
rêtés par les gens envoyés h leur poursuite cl ramonés au camp.
Le sultan Abou-Thabet fit aussitôt mourir son oncle, Abou-Sa-
lem elDjernaUed^Din, mais il fil grAre aux autres prisonniers.
El'-Abbas passa en Espagne et se distingua dans la guerre contre
les chrétiens. Quant à Bedr-ed-Dîn, il resta toujours en Anda-
lousie, au milieu de ses gens, et conserva, jusqu'à sa mort, Ic'S
honneurs et le grade militaire auxquels sa naissance lui donnait
droit.
Son fils et successeur, Ali, ^e fil remarquer par sa fierté et
ambition. A diverses reprises, il reçut du gouvernement gre-
nadin le commandement des troupes zenaticnnes qui tenaient
garnison sur les fronlTères de Pempire, loin de la capitale. Ce
fut ainsi, quVi Pinslar d^nutres membres de sa famille, il com-
manda dans les villes de Malaga, d'Almcria et de Guadix.
Le chef <lu corps des volontaires était toujours un homme
d'épée et remplissait des fonctions purement militaires. Profi-
tant de la faiblesse du sultan, If^quel avait très-souvent besoin de
ces guerriers, soil pour combattre le roi chrétien, soil pour
résister aux tentatives du souverain de Maghreb contre l'An-
Les MÊRINIDBS VOLOKTAtRBS M LA FOI. 488
dalousie, il parlageaiiiav^c iai les rorenus àe Tempirc afin de
solder et d'enlrelenir les troupes sous ses ordres. Le sol*
tan, constamment expo^ aux coups de deux «nnemis,
avait besoin d'être soutenu par cet officier et dut se résigner
à toutes ses exigences. Les troubles qui éclatèrent, vers le
milieu de ce siècle, entre les chrétiens de PEspagne, neutralisé^
rent la puissance du roi de Gastille et le mirent dans l'impossi*
bilité de faire aucune démonstration hostile contre VAndaloasie;
d'un autre côté, les Mérinides, depuis la mort du sultan Abou-
1-Haccn, semblaient avoir oublié jusqu'au souvenir des victoi-
res qu'ils avaient remportées sur leurs voisins et rivaux. Aussî,^
en l'an 764 (1362-3) le souverain de l'Andalousie crut avoir
trouvé le moment opportun pour supprimer la place de comman-
dant des volontaires et, d'après les conseils du vizir, Ibn-el-Kha-
tib, qui voulait se débarrasser d'un compétiteur redoutable, il
emprisonna Yahya*-Ibn-Omar et les fils cle ce chef. Il plaça en-
suite les volontaires sous les ordres de l'émir Youcof, son fils 'et
successeur désigné, et enleva aux princes mérinides les comman-
dements qu'ils exerçaient dans ce corps. Ayant ensuite reconnu
qu^en se privant do l'appui d'une famille dont tous les membres
étaient animés d'un même esprit et ne formaient, pour ainsi dire,
qu'un seul corps, il avait perdu son meilleur moyen de défense^
il re-çint sur sa première idée , et il déclara son favori , Ali- Ibo-
Bedr-ed-Dîn , chef des volontaires de la foi.
A l'époque où Ridouan fut assassiné , Ali commandait le déta-
chement de ce corps qui tenait garnison à Guadix et , celte mémo
nuit, il accueillit chez lui et soutint fidèlement le sultan son maitre^
qui s'était échappé aux révoltés. En l'an 761 (1359-60) , quand
ce monarque passa en Maghreb, il l'accompagna <i la cour d'Abou-
Salem et, plus tard, il rentra avec lui en Espagne. Par ces témoi-
gnages de dévouement il plaça le sultan sous des obligations qui ne
s'oublièrent jamais : devenu l'ami du souverain, le compagnon do
ses heures de loisir, Ali, fils de Bedr-ed-Dîn« s'attira lès regards du
maître quand il s'agit de trouver un homme digne du commander
le corps des volontaires. Ses anciens services et l'attachement
inébranlable qu'il avait montré au sultan dans les jours de l'ad-
A8& H18T011I DIS BBaBlEBS.
varsité , lat méritèrent bien one position que ses aïeux avaieni
déjà rentplie. Dans i'exercice de ces hautes fonctions, auxquelles
il fut nommé en Pan 767 (4 965-6) , il déploya une grande ha-
bileté, et mourut en office, Tannée suivante.
ttlSTOIRf B^ABD-BR-lAHUAN , COMMAIIDAIIT DES VOLORTAIBBS
BT FILS H'aLI-ABOU-ICBLLOUCBN, FILS DU SULTAN ABOU-ALI.
Les fils du sultan Abour-Ali avaient fixé leur séjour en Espa-
gne, mais, ensuite, ils rentrèrent en Maghreb avec Tespoir d'en
devenir les maîtres. Nous avons déjë raconté les suites de celte
tentative. Âbd-er-Rahman, petit-fils du même sultan, s'embar-
qua au port de Ghassaça, Tan 766(4364-5), avec son compa-
gnon d'exil, le vizir Hasoud4bn-Rahhou-Ibn-Maçaï , et quitta
le Mashreb à la suite d'une convention faite avec le vizir Omar-
Ibn-ÂDd-Allah, régent de l'empire. Débarqué à Almuôecar, où
le sultan andalousien se trouvait campé avec son armée, il en
fut accueilli de la manière la plus gracieuse et reçut tous les hon-
neurs dignes dosa haute naissance. Les dons les plus amples,
l'autorisation d'entrer dans le corps des volontaires, rien ne
ne fut négligé pour être agréable à son vizir, aux gens de sa
suite et à lui-môme.
En l'an 768 (4366-6), brs de la mort d'Ali, fils de Bedr-ed-
Dtn, il obtint du sultan le commandement en ohef des volontaires.
Ce choix fut motivé par la bravoure que le prince mérinide avait
déployée en toute occasion, et par la proche parenté qui existait
entre lui et te souverain duMas^hreb. Cette dernière condition
paraissait ahors essentietle quand il s^agissait de nommer à ce
haut emploi ; les descendants d'Abd-Allah-Ibn-Abd-el-Hackne
pouvaient plus y prétendre, le trône du Maghreb ayant appar-
tenu si longtemps à la branche collatérale de In famille et le sou^
verain de ce pays ne leur étant qu'un parent fort éloigné. Le
sultan fit choix d'Abd-er-Rahman pour ces raisons, le combla
LC8 VÊRIRIDBS VOLOMTAIHSS DK LA FOI. 487
d'hoDoeurs et lui assigna une place dans le conseil des vizirs, pri-
vilège que l'on accordait, du reste, à chacpie commandant des
volontaires.
Abd-el-Aztz, sultan du Maghreb, apprit cette nomination avec
un déplaisir extrême ; s^étant imaginé qu^elle avait pour but
d'accrottre l'influence d*Abd-er-Rahman et de le mettre en posi-
tion d^asplrer au trône du Maghreb. A cette époque, le vizir,
Ibn-el-Khattb, entretenait une correspondance secrète avec là
cour de Fez ; croyant se ménager ainsi ua asile dans te Maghreb
si on le forçait h quitter l'Espagne. D'après les instructions
d'Abd-el-Aztz, il travailla à la perte d'Abd-er-Rahman et for-
gea des lettres au nom de ce chef et du vizir Masoud-Ibn-Maçaï,
par lesquelles les officiers zenatienset plusieurs intimes du palais
furent invités à se qjévoUer contre ie souverain de Grenade. Ce
monarque fit comparaître devant lui Abd-er-Rahman et le vizir
Masoud, leur montra les lettres comme preuves du crime dont on
les accusait et donna l'ordre de les enfermer dans la prison,
d'état. Ceci se passa en l'an 770 (1368-9).
Ibn-el-Khatib gagna de cette manière la faveur du sultan roé-
rinide et, quelque temps après, il s'enfuit de Grenade et se ren-
dit il la cour de ce monarque. Le sultan andaiousien reconnut
alors la trame dont Abd-er-Rahman et Masoud faillirent devenir
les victimes. Après la mort d'Âbd-eU Aztz, il se brouilla avec
Abou-Bekr-Ibn Ghazi, régent de l'empire mérinidc, et, voyant
avec peine que ce royaume musulman était devenu la proie do
factieux et d'intrigants, il rendit la liberté aux deux prisonniers
et leur fournit les moyens de passer en Maghreb. Abd-er-R.ih-
man débarqua au porl de Ghassaea et se fit proclamer souverain
par les Botouïa. Nous avons raconté ailleurs ce qui passa alors
entre lut et Ibn-Ghazi. Il finit par se mettre en possession do
Maroc; partageant ainsi les provinces du Maghreb avec le sultan
Abou-1-Abbas-Ahmed , fils d'Abou-Salem. L'Ornm-Rebià sert
maintenant à séparer les deux empires.
Le souverain do l'Andalousie vient de supprimer la place dé-
commandant Qn chef des volontaires de la foi ; il a pris ce corps
sous SCS ordres immédiats et s'occupe perbounellement de.
488
IfISTOIRE DIS BfiBBBHES.
tous les (lélails. Aux princes mérinides qui en {aisaient partie il
a accordé uoe augmenialion d^honncurs et rien de plus. Tel est
élat où se Irouvenl les choses aujourd'hui , c^est-à-dire , en l'an
^ 783(t 384-2). Louons Dieu dans toutes les circonstances delà
vie I
Fin de l'histoire des dynasties musulmanes qui ont régné en^
Maghreb; ouvrage composé par Ouéli-^d^Dîn-Abou-Zeid-Abd-
er-Rahman-Ibn-Khaldoun , originaire du Hadramout [ en,
Arabie], puis, de Séoitle, docteur du rite malekile.
Louangt à Dieu, souverain de l' Univers !
APPENDICE
Mwm
i.
NOTES SUR LA LANGUE, LA LirrÉRATURE
ET LES ORIGINES IHI PEUPLE BERBÈRE'.
Les Arabes qi>i onlevèrent l'Afrique sepleatrionale à la^ domi-
nation byzantine étaient tous à la solde du khalifat et formaient
des oorps d'armée soumis au^L règlements de la discipline et de
Phiérarchio militaires. Tout en conservant leur organisation par
tnbusi ils se mirent en marche sans se faire suivre par leurs fa-
milles et leurs troupeaux ; renonçant ainsi au plus ancien usage
de la race sémitique. La conquête leur procura des femmes et
des terres; la vie de garnison les façonna aux habitudes d'une
civilisation plus avancée, et un long séjour dans les villes chan-
gea ces soldats en citadins.
Dès lors, la domination arabe, basée sur une occupation pure-
ment militaire, n^out plus la force de se soutenir ; affaiblie par
les conflits qui eurent lieu entre les grands chefs et par les révol-
tes continuelles des indigènes, elle succomba sous les coups de
la dynastie fattmidequi, soutenue parles Berbères ketamiens,
s*empara du trône de Cairouan.
Après le départ des Fatimides, qui allèrent établir en Egypte
ie siège de leur empire, la famille de Zîri, chef auquel ils avaient
* M. De Sacy, M Quatremère, M. De Hammer et presque tous les
autres orientalistes de l'Europe écrivent ^0r6er au masculin, et Ber-
bère au féminin. Dans cette traduction \c mot Berbère s'emploie
tant pour le masculin, que pour le féminin; circonstance qu'il no
faut pas attribuer à la volonté du traducteur.
490 niSTOIRB DBS BERBÈRES.
confié le gouvernement de l'Afrique septentrionale, fonda en ce
paya une dynastie purement berbère.
Vers le milieu du onzième siècle de notre ère, EUMoëzz-lbn-
Badts, quatrième descendant de Zîri, régna sur l'ffrikïa, c'est-à-
dire, sur les pays de Tripoli et de Tunis^ Ël-Gaïd, filsdeHamraad
et. arrière petit-fils do Ziri, gouverna; au nom des Fatemides,
les provinces de Constantine et de Maghreb central*. Dans la ré-
gion au delà du Molouïa, les tribus elles villes obéissaient à des
chefs berbères qui devaient bientôt succomber devant l'invasioD
des Almoravides.
A cette époque, toutes les plaines de l'Afrique septentrionale
étaient occupées par des Berbères nomades, ainsi que cela avait
eu lieu depuis plusieurs siècles; les villes renfermaient une po-
pulation partie berbère, partie arabe; I islamisme s'était répan-
du dans toutes les tribus et, bien qu'3 la grande majorité du peu*-
ple parlât berbère, la langue arabe', soutenue par le Coran, de-
meura celle de la religion, de l'enseignement et de la cour.
£l-Moëzz venait de renoncer aun doctrines héritiques profes-
sées par lesFatemides;il avait répudié Pautorité de cette famille
et dressé, dans Cairouan, le trône d'un empire berbère, d'un état
indépendant. Se voyant favorisé par la fortune, il espérait éten-
dre sa domination sur toutes les contrées voismes, quand il vit sa
puissance ébranlée par un ennemi dont il croyait n'avoir jamais
à redouter les attaques. ,
En l'an 277 (890-4 de J. C), la secte des Carmates, branche
de celle des Ismaïliens, fit son apparitionaux environs de Koufa,
ville sit^uée au nord de l'Arabie et dans le voisinage de l'Euphrate.
Elle enseigna la doctrine exposée dans le second volume de cet
ouvrage^el, huit années plus tard, elle se trouva assez forte pour
la propager par les armes. Une victoire remportée sur les trou-
pes du khalife abbacide, El-Moladcd, ouvrit la Syrie à ces sec-
taires; en l'an 317, ils massacrèrent à la Mecque plus de vingt
> Voy. t. u. p. 18.
- T. Il, p. 43 et suivantes.
3 Patïc 505.
APPENDICE. 49 i
mîlie pèlerins el comblèrent de cadavres le puits sacré de Zem-
zem. £n l'an 360, ils occupèrent la ville de Damas et, pendani
cette longue guerre, ils couvrirent de sang et de ruines plusieurs
provinces du khajifat. Les musulmans orthodoxes furent surtout
l'objet de leur haine et se virent traités sans miséricorde.
ParoM les tribus de l'Arabie, plusieurs de celles qui descen-
daient de Caïs-Ghaïlan* embrassèrent le parti des Carmates, plu-
tôt par l'appât du pillage et par l'amour du désordre que par
conviction religieuse. Les Béni Soleim, qui campaient habitu-
ellement aux environs de Médine, en furent les premiers à
soutenir les Garmales du Bahrein. Cette tribu, une des plus
nobles de l'Arabie, descendait de Maad, fils d'Aduan et apparte-
nait, par conséquent, à la même souche qui avait produit la tribu
de Coreich, celle dont Mahomet faisait partie.
Les Carmates se rendirent aussi incommodes à leurs voisins
et coreligionnaires, les Fatemides de l'Egypte^ qu'aux Abbacides
del'Irac etdela Syrie. Repoussés par les troupes du khalife fa-
temide,El-Aziz, ils se retirèrent du côté du Golfe persique et aban-
donnèrent leurs alliés, les Arabes nomades. A la suite de cette
défaite, les Soleim, lesHilal et les Djochem firent leur soumission
et durent se transporter dans la haute Egypte afin de s'ins-
taller dans le territoire situé entre le Nil et la Mer Rouge. Ils y de-
meurèrent près de cinquante ans ; alors le gouvernement du Caire
leur permit de passer le fleuve et les envoya porter le ravage dans
les états du prince Ztride qui avait méconnu l'autorité de
l'empire Catemide.
Ibn-Khaldoun nous fait connaître les suites fâcheuses de cette
invasion : la puissance des Zîrtdes presqu'anéanlie ; les campa-
gnes et les villes de l'Ifrîkïa et du Maghreb livrées comme une
proie aux Arabes nomades ; l'agriculture ruinée, le commerce
détruit, et tout le pays exposé, pendant plusieurs siècles, aux
raziasetaupillage.Les Almoravides, les Almohades, les Merinî-
des,les Abd-el-Ouadites, toutes les dynasties berbères s'efforcè-
.' Ce nom est souvent écrit ainsi dans les manuscrits arabes, mais
e'est Aïlan qu'il faut lire.
492 niSTomK des berbères.
rent de mcUre uo terme à ces désordres et, bien qu'ils réupsiretit a
coDlenir les Arabes pendanl quelque temps, ceux-ci ne naanquèrenl
jamais de recommencer leurs brigandages, chaque fois que l'occa-
aibn se présentsait. Cet état da choses durait encore h l'époque
où notre auteur écrivait son histoire.
Après avoir enlevé à ia dynastie Ziride et aux Sanhadja,
presque toutes les villes de l'Ifrîkïa, les Arabes nomades, dit
Ibn-Khaldoun, s'y installèrent en maîtres et accablèrent leurs
nouveaux sujets de la tyrannie de leur administration.
S'étant fait expulser des villes par les habitants indignés, ils
occupèrent tout le pays ouvert, et là, jusqu'à nos jours, ils ont
continué à molester les populations agricoles, à dévaliser les vo-
yageurs et h tourmenter leurs voisins par leur rapine et leur
brigandage.
Dans le récit des guerres qui suivirent cette grande invasion,
à peine trouva«t-on quelques indications au sujet de la population
arabe qui descendait des anciens conquérants; on pourrait même
supposer qu'elle n existait plus si Ël-Bekri. qui compoia sa des-
cription historique et géographique de l'Afrique peu d'années
après c?s événements, n'eût indiqué, comme une chosedigne de
remarque, les localités qui possédaient encore des habitants
arabes.
Los Arabes nomades s'étant emparé du pays plat, contraignis
rent les Berbères à se retirer, les uns dans les montagnes, les
autres vers les contrées occidentales du Maghreb. Dès lors seu-
lement, c'est-à-dire vers le milieu du onzième siècle de J. C.
l'Afrique septentrionale posséda des nomades arabes. « Les
» premiers conquérants musulmans, dit Ibn-Khaldoun, ne s'y
» établirent point comme habitants de tentes ; pour rester mat-
» très du pays ils durent se tenir dans les villes. Ce ne fut
» qu'au milieu cinquième siècle de l'hëgireque les Arabes no-
I) mades y parurent pour ia première fois et s'y dispersèrent par
D tribus afin d'allei camper dans toutes les parties de cette vaste
» région. » Répétons encore qu'avant cette époque les plaines
de l'Afrique septentrionale appartenaient exclusivement aux no-
mades de la race berbère.
APPRNDIOB. 4&3
«
Si, dans cetle esquisse, doiis devions nous occuper des Arabes
de l'Afrique septentrionale, nous iiurions à sigildier les modifi-
fications que leur langue a subies, tant dans la partie grammati-
cale que dans le vocabulaire; nous aurions môme à préciser Vé^
poque et les causes du grand changement opéré dans la conju-
gaison du verbe, changement qui s'est fan d'après un même prin-
cipe en Arabie, en Egypte et en Syrie. Nous pouvons seulement
énoncer un fait, trôs-^naturcl du reste, c'est que dans la langue
arabe de la Mauritanie, on reconnaît un assez gtand nombre de
mots et de formes appartenant è la langue berbère.
Selon les anciens historiens et géograpbesr arabes, iapopuIa««
lion de l'Afrique seplentionale, au premier siècle de l'hégire, se
composait do Roum, d'Afarec et de Berber, Par le mot Roum
(Romains), les conquérants musulmans désignaient les chrétiens
d'origine étrangère, c'est-à-dire, les colons de race latine et les
troupes de l'empire byzantin; aux indigènes românisés, qui tous
professaient lu christianisme, ils donnèrent le nom d^Afarec
(Africains), mot dont le singulier est Afriki] aux peuplades que
les Roum appelaient Barbari, les Barbares, ils appliquèrent
la dénomination de Berber, mol dont le pluriel, en Arabe, prend
les formes de Beraber el de Berabra. Ce fut à ta population
latine qu'ils empruntèrent le terme Berber, Les Romains avaient
reçu ce mot des Grecs, qui l'avaient probablement tiré du sans-
crit. Dans cette ancienne langue, souche du persan, du grec, du
latin et des langues germaniques, le mot Warivara signifie un
proscrit y un homme vil, un burbare. S'il faut en croire
Hérodote* , les anciens Egyptiens donnaient le nom de
Barbaroi à tons ceux qui ne parlaient pas leur langue. Quoi
qu'il en soit, les écrits de Saint-Augustin et de ses correspondants
nous montrent que le terme barbari était employé par la popu-
lation latine de l'Afrique pour désigner les peuplades indigènes
qui repoussaient l'autorité de remj)iro el les doctrines du chris-
tianisme.
* Livre ii, 1S8.
494 HISTOIBB DBS BBRBBRES.
Si l'on demande aux lexicographes et aux philologues arabes
la dérivation du mol berber, ils répondent qu'il est formé du
verbe berbera^ qui signifie parler d^une manière ininielligibUj
murmurer, pousser des cris de colère, ou bien de berbera^ mot
qui signiGc beaucoup de bruil et de mouvement. Sachant que les
Arabes étaient aussi habiles que les Grecs pour trouver, dans
leur propre langue, la dérivation des mots^étrangers, nous n'at-
tachons aucune importance à leur explication de ce nom ; nous
ferons seulement observer qu'ils ne le considéraient pas comme
appartenant à la langue berbère. En cela, du moins, ils avaient
raison ; jamais les Berbères ne se désignent par ce mot, qui est
très-rarement employé aujourd'hui, même par les Arabes. D'Her-^
belot prétend que Berber dérive de Ber Beratkom « qui dit-il,
« signifie deux choses, ou bien votre pays est fort désert, ou
« bien votre pays est un pays de blé, » Ces deux explications
sont également absurdes : l'auteur de la Bibliothèque orientale
avait eu^concaissance de la légende d'ifricos, (voyez tome I, page
468 de celle traduction, ) mais il ne s'était pas rendu compte
des mots ma akthera berberatakom, phrase que le moindre ara-
bisant de nos jours saurait très bien rendre par les mots
quel jargon est le vôtre ! Quelques écrivains disent que Berber
est un mot composé : les deux grandes familles de ceite race
descendaient, dit-on, Tune de Berr, fils de Caïs, et l'autre de
P^rr, fils de Canaan, donc, pour désigner tout le peuple, on
n'avait qu'à combiner les noms de ses aïeux en un seul mot.
Cette dérivation ne cède pas eu bizarrerie h oelie d'un savant
européen qui nous assure que Berber est composé du mot
syriac bar {fils)el du mot arabe ber (?) (désert (?))i donc, il
signifie fils du désert. C'est aller un peu loin pour chercher Ja
solution d'une question bien simple. M. de Saiul-Martin ne s'est
pas laissé fourvoyer; il avait très-bien compris que les Berber
des Arabes étaient les Barbari des Latins.
Passons au mol Cabilc, qui sert encore d désigner une partie de
la race berbère. Pour exprimer l'idée de tribu, de peuplade no-
made, les Arabes emploient \emoiCiibila^ et, au pluriel CabaiL
Pendant les quatre siècles qui snivirenl la conquête de l'Afrique
APPENDICE. 495
s0pleDlrion<)Io par les musulmans, tous- les nomades apparte-
naient à la race berbère ; aussi, dans les ouvrages historiques et
géographiques qui traitent de cette époque, le mot cabita veut
dire tribu berbère. Les Aiabes nomades, arrivés en Afrique,
étaient aussi organisés en (ribus [cabaït] ; mais, voyant employer
ce terme pour désigner une race qu'ils méprisaient, ils appli-
quèrent à leurs propres tribus le nom d'drcA, {J^j^ qui signifie
maison, pavillon, tente. Les historiens Arabes respectent trop
leur langue pour se servir du mot drch avec le sens de tribu;
ils s'en tiennent au terme consacré et disent également cabatl el-
Arab [tribus des Arabes), et cabaïlel-Berber (tribus des Berbè-
res), Dans les provinces d'Alger et d'Orau, le mol cabila sert
à désigner les Berbères, et ceux-ci l'ont accepté ; dans la provin-
ce de Gonstantine on emploie le mot arabe chaouta [bergers), ou
bien le mot Zenaiïa [Zenatiens], en parlant de ce peuple ; dans les
provinces méridionales de l'empire marocain, les Berbères s'ap*
pellent chelouh, mot dérivé du nom berbère achlouh, au
pluriel ichlah, qui signifie tente de poil de chameau. Us donnent
au dialecte qu'ils parlent le nom de chelha, mot provenant di? la
même racine que le précédent et, lorsqu'ils veulent s'exprimer
avec élégance, ils ledésignent par le nom tamazight ou tamazîrt»
Ce mot est du genre féminin ; la forme masculine amazigh, ama-
zir, signifie noble, homme libre, berbtr, Akat amazigh, mots
cités et mal traduits par Léon l'Africain, veulent dire le pa^js
berbère. Ce mot amazigh n'est pas connu en Algérie; on trouve,
il est vrai chez les Touaregsaf72tt/ar ou amajagh, et, au pluriel,
imoujaran, qui signifie hommclibre, touareg', mais ce mot est
dérivé du verbe augar ( surpasser).
Les peuplades qui forment la race berbère se rencontrent dans
presque toutes les parties dtj l'Afrique septentrionale; on les
trouve depuis la Méditerranée jusqu'au Niger et depuis l'Atlan-
tique jusqu'aux oasis égyptiens. Les unes habileat les montagnes
et cultivent les jardins qui entourent leurs villages, ou bien ils
s'adonnent h Texercicedes arts utiles; les autres demourent dans
les plaines et s'occupent de l'af^riculturo et de l'éducation des
troupeaux ; d'aulrc<s so tiennent dans les bouri^ades situées entre
V
496 HISTOIRE DBS BIRB&KES.
le Tell et le grand Désert, où ils s^ôccupent de commerce ; quel-
ques branches de la grande famille touarègue passent leur temps
à piller les caravanes, à escorter les voyageurs et a combattre
les Arabes ou les Nègres, leurs voisins. On a remarqué qu'en Al-
gérie les Berbères occupent les montagnes et/ les Arabes les plai-
nes ; en Tunisie et en Maroc le même fait a lieu^ excepté dans les
provinces méridionales de ce dernier royaume, on les Ghelouh
hahîteAt le pays plat.
Toutes ces peuplades parlent des dialectes d'une même langue,
dialectes tellement différents qu'on est d'abord tenté de les re-
garder comme des langues distinctes. Dans le quatrième siècle de
notre ère cet état de choses avait déjà frappé l'attention d'Am-
mien Marcellin, dont les paroles : dissonas culiu et sermonum
varietatenationes plurimas^ rappellent le passai^e d'un historien
andalousien qui fleurissait dans le Ireizièmo siècle : Les dia^
leetes des Berbères^ dit AIi-lbn-Saîd,/>eu(;€n< être ramenés à
quelques souches uniques (osoul ouahida), mais^ telle est la
variété de leurs ramifications (forouâ) quelles diverses ti*i^
bus] ne peuvent s'entendre entre elles qu'à l*aide d'interprètes*.
L'illustre Saint-Augustin y voyait plus clair que l'Historien ro-
main et le polygraphe arabe ; ses paroles : in Africd barbare
gentes in una Unguâ plurimas novimus^^ démontrent qu'il avait
reconnu un fait important et bien difficile à saisir. En eflet,la
langue berbère se partage en un grand nombre do dialectes ;
chaque tribu, chaque localité a le s^ien. De province en province,
de montagne en montagne, de village en village, le langage varie
à un tel point que souvent deux peuplades voisines no s'en-
tendent pas. L'habitant du Jurjnra ne com^ rend pas le berbère
des Beni-Mozab ; ceux-ci auraient de la peine h s'entretenir avec
des Chelouh, et un Masmoudien de l'Atlas marocain serait (rès-
embarasfié si un Berbère de la plaine de Haha lui adressait la pa*
rôle. Enfin, les Berbères du Tell ne comprennent rien afu langage
* xx.x, B.
ê
' Abulfcdae Historia antoislamica, p. 178.
3 De CivUate Dei, xvi, 6.
APPRMMCI. 497
des Touaregs « De prime abord, oes dtaleeieB paraissenl avoir si
peu de rapports, les Qas avec les autres, que Von est tenté de les
regarder comme des langues loul-à-fait distinctes ; mais, si Von
oompare ensemble deux de ces idiomes, même les plus discor-
dants, on y découvre la même ^construction grammaticale, le
même système de conjogaisoo et beaucoup de ressemblance dans
les vocabulaires. On y reconoatf cpielques différences dans les
pronoms, dans les acceptions des verbes, daas les adverbes, lés
prépositions et les conjonctions, ainsi que dans la prcmonciation
de certaines lettres. Chez une tribu, on trouve des mots berbè-
res remplacés par des mots arabes ; cbez un autre on remarque
plusieurs mots berbères qui ne s'emploient pas aiHeurs. Celui
qui voudrait étudier l'ensemble de la langue doit cb^cSier d'a^-
bord les caractères distincti£s de chaque dialecte, afin de les
mettre à l'écart et d'examiner ce qui reste ; alors, il apercevra
que tous ces dialectes proviennent d'une même souche et qu'il
n'y a point entré eux de différences fondamentales. Quand on
se rappelle que la plupart des tribus berbères ont remplacé par
des mots arabes un bon tiers de ceux qui formaient leur ^focabu-
laire primitif; — que tel mot berbère est inconnu dans une peu-
plade et s'emploie' chez celle de la montagne voisina ; — - que la
la forme féminine d'un nom se trouve en Gabilie, par exemple,
tandis que le masculin ne se rencontre que ohez les Cbelouh; —
que certains termes usités jadis dans le Tell n'existent plus que
dans le Sabra; que, de tribu en tribu, les lettres se permutent,
le thêta remplace le t. Je ts^ le d, eiviee versa; le ch permute
aves le dj eile z;*^ qu'il y a plusieurs autres irrégularités de
cette nature ; — quand on a bien cœpris ces faits, on peut s'en-
gager avec une certaine confiance dans le chaos des dialectes
berbères.
On a admis comme règle générale que plos deux tribus sont
voisines, plus leurs dialectes se ressemblent: mais on trouve des
peuplades établies à trè^-peii de distance l'une de l'autre et qui
ne s'entendent pas. D'autres tribus, séparées par. une vaste éien.
due de pays, parlent le même idiome. Âinsi^ la zenalta des envi-
rons de Tuggurt ne diffère pas beaucoup de la 2«na^ a marocaine.
T. IV. 32.
498 HISTOIRI DBS BBftBBRBS.
Presque tous ces dialectes ont subi de graves altérations par
l'inlroductioD de l'élémc.nl arabe. L'empressement des Berbères
à changer leur vocabulaire en accueillant les mots de la langue
sacrée n'a rien qui doive nous surprendre; mais, qu'ils aieni
porté cet engouement au point de renoncer à leur idiome pour
adopter celui d'une autre race est un fait qui pourrait nous éton-
ner si nous n'en avions pas d'exemples en Europe. Dans la région
située entre Constanline. Sélif , la mer et la frontière tunisienne,
une grande partie de la population est d'opigine ketamienne, et
cependant elle ne parle plus que l'arabe. D'un antre côté, la
langue touarègue a été profondement altérée par l'introduction
de mots nègres ; on remarque, surtout, dans le dialecte d'Agadez
beaucoup de^ermes qui semblent appartenir à la langue Haoussa.
Par des recherches plus approfçndies on parviendra, sans
doute, à constater les caractères dislinctifs de tous ces dialectes,
à faire ressortir les points de ressemblance plus ou moins nom-
breux qui existent entre eux, et h les classer alors par familles.
Jusqu'à présent on n'a pas les moyens pour tracer l'arbre glos-
sologique de la race berbère ; tout au plus si l'on est parvenu à
fixer les traits qui se reproduisent dans toutes les ramifications
de cette langue. Faute de renseignements suffisants, on n'ose pas
déclarer que cet arbre forme deux grandes branches qui corres-
pondent aux deux principales nations dont se compose la race
berbère , selon les généalogistes musulmans ; à plus forte
raison faut-il renoncer, pour quelques temps, à l'espoir d'y re-
connattre les diverses ramifications que 'les mêmes auteurs s'ac-
cordent à compter sur chaque branche. On n'est pas encorepar-
venu à remarquer une ressemblance de famille entre Içs dialectes
des Azdadja, des Masmouda, des Auréba, des Adjtça, des
Ketama et desSanhadja. tribus qui forment, dit-on, la descen-
dance des Bernés; on ne peut non plus indiquer les traits qui
caractérisent ces dialectes et qui les distinguent de ceux des
Âddaça , des Nofouça, des Darîça et des Louata, tribus que
Pon fait descendre de Madghis Ël-Abter.
Pouvons- nous maintenant essayer d'identifier la langue ber-
bère avec la langue numide?
i
I
APPETfDlGB. 499
Avant de répondre h celte question , il faut savoir , d'une
manière précise , la signification attachée à ces mots langue ntt*
mide. Depuis quelques années seulement , on les emploie pour
désigner la laogue^ des autocthones de l'Afrique septentrionale;
la langue des Gétules, des Libyens et des Numides ; celle de
Pirmils et d'Igmazen, de Tacfarinas, deBocchns et de Jugurtha;
pourvu, toutefois, qu^ celui-ci n'eût pas le punique pour langue
maternelle. On admet donc que, sous la domination carthagi-
noise et sous celle des Romains, les indigènes de ce pays, les
Barbares, quf, selon Ptolomée, formaient plus &e cent trente
peuples distincts, parlaient une môme langue. Bien que cette
supposition paraisse très-hasardée, on aurait tort de la repous->
ser : de nos jours encore, le même fait se montre jusqu'à In der-
nière évidence, et rien dans les annales de l'Afrique ne donne lieu
à croire que, pendant les derniers temps de la domination by-
zantine, l'ancienne population ttumide*ait été remplacée par des
tribus d'une autre race. La seule difficulté qui se pi^ésente à
l'ethnographe et qui, dans l'état actuel de nos connaissances,
n'admet pas d'une solution immédiate, c'est ie moyen d'établir
■une comparaison entre cette ancienne langue et celle dont les dia-
lectes se parlent encore chez les diverses peuplades berbères. Que
nous resle-t*-il de cette langue numide? Ou en sont les monu-
ments? quelques pierres portant des inscriptions que l'oo est à
peiné parvenu à lire et dont une seirte est accompagnée d'une tra*
duction punicpe ; des noms delocalité, et plusieurs noms propres
dont quelques-uns commencent par la syllabe ma^ou mis. Quant
à l'inscriplion bilingue, elle n'offre rien de concluant ; déchiffrée
par Gesenius en premier lieu, revue par M. de Saulr.y, qui rec*
tifia plusieurs erreurs commises par son devancier, elle ren-
ferme encore deux lettres sur la valeur desquelles on n'est pas
d'accord. En coroparantcett^inscription avec l'alphabet <i/bnar,
usité maintenant chez les Touareg, on est même obligé de croire
^ue plusieurs autres lettres n'ont pas les valeurs que les savants
de l'Europe leur ont assignées. Dans cette épitaphe, composée en
grande partie de noms propres, trois moti^ seulement paraissent
être des formes verbales ; malhourcusement, le premier est à
SM HISTOIBE DM BmiHES.
iBoUié eSacë, ei las deux antres appartieaaeat h des racines ra-
coDOuea jusqu'à présent en langae berbère*
Quant aux noms propres, tels que Sasiinisâm, Misagmei^
Micipsa, Masiniha^ Massiva^ Muteizêl^ Jtfaa^oAa, etc. , dont la
première syllabe est un de ces mots qui, en berÛref signifient fiU^
ou pinlôt fils d^lui, on pourrait les regarder comme appartenant
à oetle langue ; roçis alors il faut siip|)Oserqiiele mot dont la syl*
labe mas ou mis est suivie représente le nom porté par la mère
de rindividu ainsi désigné» Autremeoti on ne saurait expliquer
pourquoi le fil^de Gula se nommait MassinissB [le fils d'/ita),
pourquoi trois (ils de ce dernier roi étaient désignés par les
noms de MisageneSy Mioipsa et Masgaba; pourquoi enfin le fils
de Jugurtha portait le nom de MasirUka^
S'il nous était même parvenu des écrits en langue numidoi
nos recherches ne pourraient guère aboutir k un résultat satis*
faisant qu'à la suite d'une longue ftérie d'études. Prenons les
évangiles, traduites par Ulpfailas en langue gothique, et compa-
rons-les avec l'allemand d'aujourd'hui; on aurait d'abord beau*
coup de peine à reconnaître la parenté de ces deux idiomes.
Bapprochons cette même traduction avec celle des évangiles ea
anglo-saxon , nous y trouverons une différence tout aussi marquée,
cU, cependant, nous avons la certitude que ces trob langues pro-
viennent d'une même souche. Pour établir une comparaison
entre le berbère et le numide, nous n'avons pas même un tout
petit vocabulaire de cette dernière langue : nous n'en possédons
absolument rien. Encore, s'il existait un vocabulaire, à quoi cela
pourrait^il servir dans la recherche de la vérité ? Nous trouvons
en français et en anglais un grand nombre de mots parfaitement
identiques ; devons-nous conclure qu'en France et en Angleterre
le peuple parle la même langue ? Voici un vocabulaire touareçi;
renfermant quelques mots usuels :
3Iech^ en français Dieu, en berbère erbi.
A lis,
«
—
hommCy
—
ergaz.
Amanokal^
—
sultan,
—
aguelid.
Amnès,
—
chameau ,
—
alrom*
Echeh\,
—
arbre.
—
tasttta.
Eguclnicm^
—
fleuve.
—
«c*A
^FPBRDICI.
504
Takçt, en français, fleur, eu berbère, adjeddigue.
Arom f ) I ville ou i i ttmdint^
AgadèSj i '/^oy*, î ' temzirt,
A riaspection de cette liste on est porté h regarder le touareg
comcne toui-à-faii diflércat du berbère. Mais en voici un autre
vocabulaire :
7a/buit/, en français ^ soleil y en berbère tafoukl.
titm.
—
éloiU,
-^
itri.
Azenkotf
—
ffaaeUôj
—
tazenkot.
Imogran^
•^
grand.
—
imogran.
Imellalj
—
blanc.
—
imellel.
Izi,
—
mouche.
..^
xzt.
Tethent,
«MM
sely
—,
lisent.
Fouda,
soif,
—
fod.
Adar,
pied,
—
adar.
Afouty
main,
—
afous.
A quoi donc servent des vocabulaires incomplets ?
Les renset^iemenis el traditions fournis par les historiens el
généetogues, tant arabesque berbères, méritent toutefois d'être
pris en considération ;. les indications de Gorippus dans son
Johanmiée ne doivent pas dire négligées^; aussi, quand noas
aurons k examiner les pièces qui concernent les origines 4)erbè*
res, nous oe manquerons pas de nous y arrêter. Mais, avant
d'entamer ce sujet , il ne sera pas inutile de faire quelqaes
observations sur la grammaire de la langue dont se servent les
Berbères el de présenter au leoteur quelques morceaux de leur
littérature.
ou DIALieTB GmLHA.
Le,chelha est le seul dialecte de la langue berbère qui possède
une littérature- écrite. L'aipbabet se compose de trente-deux let-
609 HISTOIRE DES BBMÊMS.
tF6S, doat viogi-huit sont identiques avec celles qui formeni Tal-
pbabei arabe. Les quatre lettres supplémeoCaires sont :
z '*'*
j j Le même son, représenté par le même sigae, se re-
trouve en persan. Cette lettre et ta précédente se
rencontrent très-rarement.
OP zk Cette lettre est un z emphatique qui se prononce du
gosier. Dans quelques autres dialectes elle se rem-
place par le z ordinaire.
if) ou /^ o C^est le g dur des mots gala^ gandole^.
Le M ^ L représenté quelquefois par le c;» ;, a le même son
que le thêta des Grecs et \e th dur des mots anglais thin, think.
ie dh s j qui s'écrit assez souvent ^ , sans point, est le delta des
GrecSy le th doux des Anglais, comme dans les mots Mt>, the,
thêse.
On trouve la lettre aïn ^ en chelha et dans tous les idiomes
berbères du Tell; elle se présente surtout dans des mots em-
pruntés à Tarabe « mais ou la rencontre aussi dans plusieurs mots
qui n*appartienn0nt pas k cette langue. L'alphabet touareg n*a
aucun signe poui; représenter cette lettre. Le b se trouve dans. un
grand nombre de mots purement berbères. Le Ah j^ se renoonire
aussi dans quelques mpts berbères. Ainsi que dans l'arabe , le
gh^n ^ est Vr grasseyé des Parisiens et des Provençaux!
Dans la prononciation et dans récriture surtout, plusieurs
lettres du dialecte chelha se remplacent par '.d^autres. Voici la
liste de ces permutations qni , très-souvent, défigurent Tortho-
graphe même des mots empruntés à Tarabe.
t ii:^, thx^, d^,dh^ tt ^, s'emploient les uns pour les autres.
d Je, tt \,^
kh j-, gh j
**c,
k J
kht,
V
^A j,
gdur^
V
c ti.
A J,
»■ i£
"» |.t
« W
APPENDICE. 503
s'emploient les uos pour l'es autres.
DU NOIF.
Il y a trois classes de noms : les noms propres, comme Bihi,
Aghennadj^ Amentag ; les noms appellatifs , comme ergaz
(homme), aguellid {roi], taset ta {arbre), temzîrt {pays); et les
noms abstraits, comme temdoukelt {amitié), temlelt {blan-^
cheur), touatta {venue), temezriout, {la vue). Du mot ergaz
{homme), dérive le mot terougza {humanité, virilitéy Les noms
de cette dernière classe se forment de plusieurs manières, dont la
plus usitée est celle qui ajoute la syllabe toua^s au commence-
ment de la racine verbale et la lettre a ^ àla fin : exem. touakda
{crainte) , formé de akad {craindre); touafka {don), formé
d^efka {donner)\ touakchema {entrée, arrivée) , formé d^ekchem
{entrer), touarça,{descente) , formé d'ers {descendre); tewazra
\commencement) , formé dHzaour {être le premier). Les noms
abstraits sont très-nombreux ; chaque racine pouvant en four-
nir un. On a déjà reconnu plus de vingt manières de former les
noms abstraits.
DBS GENRES.
Les noms et les verbes de tous les idiomes berbères ont deux
genreSi le masculin et le féminin. Presque tous les noms mascu-
lins commencent par une des voyelles a, e, t, o, ou. Les noms
féminins commencent par la syllabe té ou ti (en zouaoua, thé,
thi), et se terminent très-souvent par un ^ (M en zouaoua). Les
50i mSTO»B MS BIIBfcBBS.
btlres qui servenl à désigner les georw semblent représentes
l'ancien article défini qni aurait perdu toute sa valeur détermi»
native. C'est ainsi que Tarticle arabe el s'incorpore aux noms
arabes berbérisés et ne conserve plus son. influence : le mot
labhar, en arabe, el-bahr {ta fner), signifie également la mer
et une mer ; loct, en arabe, el-wact, peut se rendre pac le tempi.
ou par un temp$. Quoi qu'il en soit, l'article défini n'existe pas
en berbère moderne. Le mot yan [ur{\^ au Céminin yat [une), sert
en chelha , d'article indéfini ; ixoan [uri\ et iijoat [unt)^ remplis-
sent cette fonction en dialecte xouaoaa.
Les noms masculins se mettent au féminin par la substitution^
de la s vllabe ié ou thé à la voyelle initiale et par l'addition d'un.
I à la nn du mot. Parmi les exceptions que subit cette règle on
remarque ergaz[homme)^ dont le féminin est tamettouioM Ma-
mtitoui.
Dan$ un grand nombre de substantifs féminins dont la forme
masculine ^n'existe pas, on remarque l'absence du t final.
Le nom diminutif se forme du nom masculin de la même ma*
nière que le nom féminm.
Pour naturaliser des noms arabes du genre féminin , les Ber-
bères leur ajoutent un t ou th au commencement et la même let-
tre ^ la fin ; exem. médina [ville)^ en berbère temdint ou ihem-
dint. Les noms masculins, arabes conservent ordinairement l'ar-
ticle / quand on les admet en langue berbère. ^
DKS NOMBRBS.
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En berbère, les noms et lies verbes ont deux nombres, le sin^
gulier et le pluriel. Le nom masculin singulier se met au pluriel
par la conversion de la voyelle initiale en i et par Taddition d'un
n final précédé d'une voyelle; exem. ergai^{hQmme) ^ pluriel
irgazen; aguellld [rot) , pluriel ijrue/^i<ton.
Telle est la règle générale, mais beaucoup de noms forment
leur pluriel d'après un autre système ! ainsi, si la dernière syl*-
labe est un ou oq un t long, suivi d'une consonne, cette voyeUe
peut se changer en a. En ce cas, la terminaison en n ne a'em^-
ploio pas; exeni'. dghiwl (dne), pluriel ighial ; amchich [chai) y
pluriel imchaeh ; acerdoun [tnulet) , pluriel icerdan. Si la s^U
hho pénultième renferniB uue voyelle longue, cette voyelle peut
se changer en ou et celle de la syllabe finale en a ; exera. agadir
[escarpement), pluriel igaudar ; afarez [jiiune d'œufjj pluriel
ifouraz ; aghanîm {roseau)^ pluriel ighounum.
Il y a des pluriels dont les racines diffèrent de celles des noms
singuliers qui leur correspondent : exem. tamettout [femme)j
pluriel toulaouin (à la lettre : petits cceurs).
La plupart des noms féminins se mettent au pluriel par la con-
version du t final enl'une des syllabes an^ en «m, oun. On trouve
cependant des pluriels qui conservent ce t malgré l'adjonction
(fe la syllabe de.pluralité. Quelquefois aussi la voyelle de la syl-
labe préfixe se remplace par ua autre et le t final disparaît ou
se change en a; exem. taddart [village) ^ p\uTieltauddar] ta--
mourt [pays) y pluriel timoura ; tabourt (porté) ^ pluriel tiboura.
Le nom fémini o qui commence par ta et se termine par a peut se
mettre au pluriel par la conversion du premier a en i et dvk
second en ioun; exem. talefça [vipère)^ pluriel Hlefcioun;
tamella [tourterelle) , pluriel timellioun.
Dans les divevs dialectes berbères dont nous avons pris con-
naUsance toutes ees règles s'appliquent d'unis manière presque
générale.
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DBS CAS..
Il y a êix^ cas ; le nominatif, le génitif, h datif, l*accusaiif , le
vocatif et le cas absolu. Ce dernier est celui du nom qui uo subite
L'influenee d'aucun agent.
DicLmAisoif mi nom ^hasculih m cbelha.
Singulier. Pluriel.
Nom. ourgaz(rAomme). ouïrgazen.
Gén. ouërgaz, ouërgazen,
506 HISTOIRE DBft BBtBtntBS.
Dat» îërgaz et irgaz, lërgazen et îrgazeo.
Ace. aourgaz et argaz, aourgazen et argazeo,
Voc. aïergaa. aïirgazen,
Abs. ergaz. irgazen.
DÉGLIlfAISON DU NOM MASCULIN EN ZOUÀOUA.
Singulier. Pluriel.
Nom. ourgaz, irgazen,
Gén. ou-ourgaz ef bourgaz, iôrgazen c^ guirgazen, >
Dat. ïourgaz, ïourgazen,
Ace. argaz, irgazen,
Voc. aiërgaz, aiërgazen,
Abs. ergaz. irgazen.
Les noms féminins, ne prenant pas les signes dcscas,sedécU;
nent au moyen de prépositions.
Quand un nom régit un autre au génitif, ce rapport peut s'éta-
blir de deux jpanières ; exem.
Tiguimmi ouërgar i n^ maison de nomme).
Tiguimmi n'ouergaz \ ^
mTX \ (un cheval de selle).
Ce on ou n est l'équivalent de la préposition de.
Signalons ici un autre genre d'annexion qui a lieu surtout avec
les antécédents : baba {père) , imma [mère] , enU {fils) , illi
{fille), et qui ressemble au génitif pléonastique de la langue
syriaque; exem.
Babas ouëfroukh {le père de lui, du jeune homme),
Illis ouguellîd {la fille de lui, du roi),
Immis ouërgaz {la mère de lui, de l'homme),
Emis ouamghar {le fils de lui, du vieillard) ;
c^ost-à-dire : le père du jeune homme, la filledu roi, la mère de
^PBRDICE. 507
l'homme^ h fils du'vieillard. Od retrouve la même consinictioa
enzouaoua.
DBS ADJECTIFS.
Les adjectifs dériveoi du verbe. Ils ont généralemeDt la forme
delà troisième persoDne*du singulier, ou bieu celle du participe.
Les adjectifs empruntés à Parabe s'adaptent au dialecte chelha
en recevant un d initial, pour le geni'e masculin, et un t, tant
initial que final, pour le féminin ; exem. dâdjib {merveilleux^)
féminin tâdjîbt. En chelba et en mozabi les adjectifs se mettent
au pluriel par Paddition du sufiixe In, en.
L'adjectif berbère ne fournit aucune forme dérivée qui puisse
exprimer le comparatif ou le superlatif. Pour énoncer, en chelha,
l'idée de supériorité on emploie le verbe youf [il est mieux^ il
surpasse)^ touf {elle est mieiKc) ; ou bien on se sert des mots
oggar en {plus dé) , felta {sur), fou (en arabe fouc, au-dessus
de), etc.
C'est ainsi que l'on dit :
Yat tacerdouQt touf fi's {une mule vaut mieux qu'un cheval);
Ghouad youf aghouan {ceci vaut mieux que cela) ;
Nekki d'amocran oggar en-nek (je suis plus grand que toi) ;
Yan ergaz iggouthen achedd fell^ {un homme beaucoup plus
fort que lui) ;
Aghouad yakhechen fou ghouan ( celui-ci e&t pire que
celui-là).
DES NCMÉRATIFS.
On verra par le tableau suivant qu'au moins trois des dix
premiers nombres appartiennent 5 la souche sémitique.
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513
T. IV.
33.
SI 4 OTSTOIBS BIS BBMStSS.
Le pronom affix^ de U troisième personne a deux fona»
iljétîacles^ Tuae pour Taccusatif : f, th au singulier, tenon thm
a« pUiriel; l'autre pour le génitif et le datif : s au singulier «t
4€ftatt plurid. Le pronom misa Taccusalif ou au datif suit immé-
diatenaeni TaorisCe du verbe qui le régit ; exera.
Err}gh-ek {je t'ai vu) ; I(ka-s (t7 lui a dQnnë\.
Mais^ lorsque le vorbe est précédé delà particule négative ûur^
ou d'une des particules ai, o^mi, qui .servent , Tune à former le
présent et l'auirts te futui* ^ on doit placer le pronom entre le
verbe et la syllabe préfixe ; oxem. Our-ek-exrîgh {je nt t'ai pas
vu); Ad-ek^izra {H te voit); Ai^ek-nezra {nous le verronti).
Quand la phrase est interrogalivc ou que le verbe ost vir-
tuellement au modo subjonctif. Je même fait a lieu.
Dans les poèmes écrits on dielha, le pronom aOixe se place
quâquefois avant Tour.
En chelha, les pronoms démonstratifs acf, ed^ on, «?i, etli^
peuvent se placer immédiatement après le nom auquel ils se rap-
portent; exem. iccmeg-ad {cet esclave) ; tafout-oHi [celle tu-
mtère) ; ghelmcdîut-au {dans celte ville) ; leuézîr^aa (co vizir
là).
nV VERSB*
Dans tous les diakctcs berbères, le verbe se conjugue de la
mémo manière. Une partie des inflexions dpnnées à la racine du
verbe berbère pour exprimer les personnes s'accorde avec les
inflexions analogues du verbe mis au présent, en hébreu, «n
arabe littéral et en arabe vulgaire. Nous indiquerons ici ces in-
flexions et nous représenterons la racine du verbe par un trait.
Berbère. Hébreu. Arabe littéral. Arabe vttls;aîre.
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PARADIGME DO VERBE.
S1N«ULIER.
PLUUBL.
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Sker.
FaiUe, (mase.)
Faiie9. (fém.)
Aortote.
rai fait, jV/aiV.
7tiii« ./at'r, etc.
72 a fait.
Elle a fait.
Sker-egb.
Te-sker-edh.
le-sker.
Te^kér.
Nimsavonê fait.
Vous avez fait
(masc.)
Vous avez fait
(fém.)
Ils ont fait.
Elles ont fait.
Sker-th.
Sker-emt.
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Ne-sker.
Te-sker-em.
Te-sker-^mt.
Sker-en.
Sker-^nt
Présent «u butoir.
Je fais, je ferai.
Tu fais, tu feras
il fait, il fera.
j-m-x.
Ade-sker-cgh.'
At-te-dker-«db
Ad-ie-aker.
Neus faisane etc,
V^us faites.
Us fonf.
Ao-ne-sker.
AMe-^ker-em.
Ad-sker-€ri«
3e fertti.
Fotar.
Ara-sker^gh. i iVou^ fè
rans.
i
Ara-ne-aker.
Se ferai.
Putnr Oainposé.
Ara-d-sker- i Nous ferons,
egh.
Ara-d'iie-sker.
■^^— ^"^
Par<l«t|^,
Dérivé de l'ao-
riste.
Dérivé du pré-
sent .
Dérivé du fu-
tur.
Dérivé du fu-
tur composé.
faisant.
le-sker-an.
(masc.)
Ad-i-sker-an .
(masc.)
Ar-i-sker-an.
(masc.)
Ara-d-i-sker-
an. (masc.)
Te-sker-an.
(fém.)
At-ïe-skcr-an.
(fém)
Ar*te-sker-an
(féoi.)
Ara-te-sker-afi
(fém.)
t 516 aiSTOlBB DB8 BBRBfiBBS.
FORMES DÉRIVÉES DU VEPBE PRIMITIF.
La sylL 65 ou %e, placée avant la racine du verbei le rendtransitif.
— am ou en — le .rend réciproque ou réfléchi J
— it ou tsa — le rend fréquentatif ou passif.
— im on em — le rend fréquent ou réciproque
Par le redoublement de la seconde lettre radicale on forme
aussi le verbe d'habitude ou de fréquence.
Ainsi que dans les langues sémitiques, les formes temporelles
*du verbe n^ezpriment pas toujours le temps de Inaction d^une
^manière bien précise.
Le verbe qui est régi par un autre se met au présent et doit se
traduire par le subjonctif ou par TinGnitif. Le subjonctif s'ex*
prime aussi par l'aoriste précédé de la lettre a.
Quand il faut exprimer avec la négation le présent ou le futur
du verbe primitif, on remplace ce verbe par la forme verbale
qui en dérive et qui sert à désigner l'idée de fréquence ou d'ha-
bitude.
Dans la plupart des verbes berbères la troisième personne
masculine du singulier de Paoriste se compose de deux syllabes,
dont la première commence par un t, signe de cbtte personne.
Si nous supprimons cette lettre et la voyelle faible de la seconde
syllabe, il nous reste ordinairement une racine de trois lettres ;
cxem.
jSié0>j> iskcr {il a fait) ; racine 5, A*, r, JC*» ;
JCs» inker (t7 se leva) ; racine n, fe, r, Sj ;
f^^{j yaoui [il apporta); racine a, ou, t, ^^^1;
j{j yarra {il rendit) ; racine o, r, r,^i.
La seconde radicale est quelquefois la même que la pre^
mière ; exem.
^jso iddou {il alla) ] iocin(^, c/, o?i, ^^ ;
^^y^ issen {il sut) ; racine 5, «, ?i, i^*** ;
APPENDICE. 517
On trouvo aussi des verbes qui ont la seconde radicale redou-
blée ;exein.
JLc imoggar (il fut grand) : racine m, y, r: JLt ;
jJH^ ihammel {il aima) ; racine A, m, /, Jl^.
Chacune des trois lettres radicales peut être une voyeHe ;
exem.
Jj,^ iouzel [il courut) ; racine o:f ; z, /, Jjj ;
i^^ ifoud {il eut soif)] racine f, ou, d, :»y^ ;
LJL> ilça (t7 s'habilla) ; racine l, p, a, UJ.
Dans un petit nombre de racines une voyelle de prolongation
suit la première ou la seconde radicale; exem.
fj:>y*^ içouden {il monta à cheval) ; racine p,d,n, ^à>^jm;.
ij^yéS^. ikçoudb (i7 craignit) ; racine fc, *, d4, ^jà^étS*,
Il y a quelques racines quadrilitères, exem.
Jkp^ js^ idarghal {il fut aveugle) ; racine d, r, gh^L J^:>.
Les verbes dont une des radicales est une voyelle se conju-
guent irrégulièrement : tantôt cette voyelle se change en une
autre et tantôt elle disparait. Dansâtes verbes de cette classe, les
voyelles normales qui accompagnent les signes des personnes se
remplacent quelquefois par d'autres voyelles. On commence
ë entrevoir la règle g<Snérilede ces permutations ; mais, jusqu'à
présent on n'a pas pu la formuler d'une manière précise.
L'adverbe ed {ici) peut se placer à la fin de toutes les person^
nés de l'aoriste et de l'impératif. Il ajoute au sens du verbe une
idée de localité se rapportant au lieu où se trouve la personne
qui parle ou celle dont on parle; exem. oughal-ed {il est revenu
tci), ekchem-ed(enfre3tct). Oughal sans ed, signifie il s^en est
retourné; &ecAem sans e(i signifie fntr«2 ou entrez-là.
Celte particule précède le verbe toutes les fois que Ja phrase
éprouve une des modifications qui obb'gent les pronoms adixes à
se placer devant le verbe qui les régit (voy. p. 514) ; exem. our
brjgh cd ïoughalOe ne veux pas qu'il vienne).
En chclha le verbe tV/a {exister^ cire) se conjugue ainsi ;
54S
S»TOtRB DES BEHBKBIS..
▲aJIISTS.
SÎDgatier.
Ellîgh, yétaiSf jesuiSy
telltt, tu étaUf ete, y
îUa, il était,
tolla, elleétaiit^
Nella^ nau$ itionSt
tellam, wut étiez,
illa», iU étaient^
illant, etUs étaient.
PatSBIfT»
Adigguîgh, je suis,
aitegatt, tu es,
adigg», il ett^
aitigga, elle ett^
Adinegga, nom scmmes^
addiggam, vous éteSy
addigan, tV^ eont^
adîggani^ elles aofif .
patTtatT.
]g«, il fut.
IgaD» iU furent^
wrufc.
Arittigb, je serai ,
artillit, tu seras,
arilla, Usera,
ArncIIa, nous strons^
artellcm, vous serez^
arillan, ils seront^
PAKTieiPB».
2.
3:
Illan (fnasc.sinff.)
tfMn&(fém* sing.)
itkinen , {maso, plur.)
tgan {masc. sing.)
adigai» ma^c. sing-,)
étant,
APPEMDKIB.
549
Eft dialecte zooftoua te m^me \crbe se eaDjoguo de la m^teière
suivante :
AOKISTS.
SiDgdtîcr.
Emgh,/'e7aû,
thcllidb, tu étais,
tlb, il était,
idhfClleé'aù^
Plttîiel.
Nelta, nous étions r
tbollam, vous étiezy
ellao, ils étaient r
oihai y elles étaient^
FDTCR.
Adiligb, je serais
attlidby tu seraSy
adi¥)i, il sera ^
Annili, nous serons^ .
alilim, vous serez,
adilÎD, ils seront,
adilinl, elles ser oui,
PftÈ^ERT.
Aklh*, je JittV
aklak, tues,
albaVa, il est y
Aktagb, mussoniniisSf
aklakoQn, vùUs êtes y
athnaïa, ils sont.
L^équivdlont du verl>e avoir manque dai>s plusieurs dialectes,
berbères. Pour exprimer l'idée de possession ou emploie une-
tournure anologue h celle des Arabes et on dit, on cbelha ;
Dar-Î (chez moi, c*e8l-ë-dire j'ai),
dar-ek, chez toi,
dar-es, chez lui,
dar^negb, chez nouSj
dar-koD^ chez vous,
dar-*sen, chez euœ,
dar-sent, chez elles.
520 HISTOIRE N8 RBABËBES.
En zouaoua, en mozabi, en touareg et chez les Beni-Henacer-
on substitue la préposition ghour ou rour (mot purement ber*
bèrej, au mot dar (qui est un emprunt fait à la langue arabe).
Les Zouaoua ont un verbe qui sigaitie posséder et qui se con-
jugue ainsi :
satgh, y'at;at>y ^
the sattb, tu avais,
&MO isM^ il avait etc.,
éyf^:>\ ad'sâough, j'ai,
]oyxm3\ atsftoutt, tu a^«|
Le verbe ycM sâou paraît être une altération du verbe arabe .
^^ ouapda, %^ ièçàa, qui signi^e contenir.
Il existait probablement en berbère une voix passive qui se.
distinguait de Tactive par les voyelles. En voici quelques indica-
tions, signalées par H. Newman :
Deligh, j'ai couvert, B'ih^h, j'ai été couvert,
darregh , j'ot nui, dirregh , j^ai été lésé,
youfa, j'ai trouvé, yafa, •/ a été trouvé,
itouT, il cacha, itir, il fut caché*
Dans les divers dialectes de la langue usuelle il règne une telle,
confusion que le même verbe s'emploie tantôt avec le sens
actif et tantôt avec le sens passif ; exem.
Oulaënnegh lahdîd-agh iskern {nos cœurs en fer font, c'esi-i^
dire sont changés en fer).
L'ancien passif vocalisé sera donc tombé en désuétude , ainsi,
que cela a eu lieu pour le passif du verbe arabe.
PE^ ADTERBJPS Et D'AUTRES PABTIGULES.
Les adverbes, les prépositions, les conjonctions et les inter-
jections sont très-nombreux en berbère et varient selon les
dialectes.
Les prépositions se placent avant les noms qu41s régissent,
mais, en chelha, agh [dans) se met quelquefois après le nom ;
... exem, liguirarai-uck-agh [dans ta mniion).
APPENDICE. S24
Ed chelha , en zouaoua et dans quelques autres dialeetes la
particule d sert de conjonction copulative; exem. ez-zeman
d'el-mefacil {le temps et les saisons) ; aghras d'oçomniM adas
iskarn {larouie et le froid ont eu de l^ effet sur lui). Elle s'emploie^
aussi comme copule pour réunir le sujet et l'attribut d'une pro«
position; exem. adrar agui d'amezian(ce^^e montagne estpetiis}. '
En zouaoua et en quelques autres dialectes, le verbe , précédé
de la particule négative our^ est suivie de la particule ara;
exem. our issen ara [il ne sait pas). En mozabi on dirait: our
issen iche. Ce dernier mot est arabe et^signifie chose (chéi). En
chelha, la négation s'exprime plus simplement; on dit : our issen
{Une sait pas).
On voit par cette esquisse grammaticale que la langue berbère
et les^langues sémitiques ont plusitiurs points de ressemblance :
4^ les racines des verbes sont généralement trilitères; 2^ les in-
flexions du verbe ont une grande ressemblance avec celles du
vçrbe sémitique ; 3^ les verbes dérivés se forment par l'adjonc-
tion de certaines lettres au verbe primitif; 4^ la seconde ei
la troisième personne du verbe ont deux genres ; 5<> les pro-
noms affixes n'ont pas la même forme que les pronoms isolés ;
6^ dans les verbes qui comptent une des voyelles a t, i ^, o^, au
nombre do leurs radicales , il y a permutation, et quelquefois
même suppression , de la voyelle ; 1^ les temps du verbe
manquent de précision ; 8^ les pluriels des noms forment deux
classes : les pluriels réguliers et les pluriels irréguliers ou rom-
pue; ajoutons que la tournure et la construction de la phrase
berbère sont presqu'identiques avec celles de la phrase arabe.
Le berbère se dislingue des langues sémitiques : i^ par son
vocabulaire ; i^ par l'avantage de posséder une forme de pro-
nom qui représente le datif de la troisième personne ; 4<^ par la
mobilité des pronoms affixes, lesquels se placent quelquefois
avant le verbe qui les régit
&a msToniB Des DemrÈRBS»
Dans les langues indo -germaniques , on trouve des raotoes.
muUilitèreSy des verbes dérivés qui se formeiU au moyen d&
prépositions et de noms composés de deux ou de plusiews^autres-
BonAs. Rien de cela n'existe en l)erbère. Cette langœ diOere es-
seniieUeiBônl du copte et de la langue haoussa, par la eonjugat-
*soo^ la déclinoisonct le vocabatatre.
Avant de présenior au lecteur les extraits qne nous avofi»^
tirés de livres manuscrits j6crits ou dialecte chelha, nous indique-
roDS ici les travaux qui ont été faits en Europe et on Anoérique
»ur la langue berbère. C'est à un article inséré par M. d'Avezac^
dans le tome XIV de la S* série du Journal de la Société de
Géographie, que rtous devons Tindication de plusieurs ouvrages
eités dans cette notice.
Jones. Diàsertatio do lingua sliilhense; h la fin de l'ouvrage
de Chamberlayne, iniitulé Oratio dominiûa in diversas linguat
vetsa. Ift-i^j Amsterdam, 4715. — Ce recueil renferme cent
cinquante versions de l'Oraison dominicalo en diverses langues*
il se termine par plusieurs dissertations dont celle de Zachariah
Jones mérite encore l'attention des personnes qui s'occupent de
la langue berbère.
Peyiomiel , savant^ aussi distingué comme voyageur que
comme naturaliste, nous fournit un vocabulaire do onze mots
appartenant au dialecte des Chaouïa du mont Auras, en disant^
avec une naïveté parfaite, qu'il les avait appris pour pouvoir
» les comparer à l'ancien punique, s'il reste encore quelque
» notion de ce langage.» Inutile do dire que ces mots sont ber-
bères, que nous avons maintenant quelques notions du punique
et que les deux langues ne se ressemblent pas.
SAau;, donne un vocabulaire de la langue chaouïa, composé
d'environ cent vingt mots et pbrasesT Cette liste ronfernie queU
«
qnes erreurs; ette se trouve dans le récit de ses voyages eoi^
Barbarie et au Levant.
Gldss. Vocabntaire de la langue parlée par les anciens habi-
tants des tics Canaries; dans l'ouvrage intitulé Hisîory oftbe
Camry islands; ini-4® , Londres 4764. Il n'es! pas encore
promue que les mots de ces listes appariienne»! à la langue
berbère.
Boest, Vocabulaire d^mviron cent trente mots berbères , in-
séré dans sa Description du Maroc. Cet ouvrage, écrit cd
danois et imprimé à Copenhague en 1779, fut traduitfen aile*
mand deux années plus tard. On y trouve quelques bons rensei-^
gnements, mais on doit convenir que hauteur n^avait pas une
connaissance profonde de la langue arabe, quoi qu^en disent ses^
biographes , que ses indications ne sont pas toujours sûres et
que ses cartes, portant les noms de lieux transcrits, ou plutôt
défigurés, en caraclères arabes, sont irès«mauvaises*
Chénter. Vocabulaire citelba, dans le tome Ht ée ses Recher^
e^easvr les Maures. Paris, 4787» Cette liste renferme unequa*-
raotaine de mots, dont plusieurs sont incorrectement écril!s.
Hormi quelques faits d'observation, t ouvrage de Gliénier ne mé-
rite aucune considération.
Barbe, Vocabulaire cabile^ dans les Nouvelles Annules de»
Voyages. Paris, 4830. Cet ouvrage ne se trouve pas à Alger.
Homemann. Dans le journal de son voyage depuis le Caire
jusqu'à Horzouk, on trouve un vocabulaire du dialecte employer
à Syouab (l'oasis de Jupiter Ammon). Une grande partie des
noms renfermés dans cette liste se retrouvent dans le dictionnaire
eabilô de M. Brosselard.
Marsden. Observations sur la langue de Syouah, ajoutées aa
i^oyage de Hornemann. Ces observations ont peu de'valeur.
Venture de Paradis. Extraits de son dictionnaire insérés par
M. Langlès dans la traduction française du voyage de Borne*
524 HISTOIRB DBS BBB6ÊRBS.
■
mann. De tous les travaux do M. Langlèscelai*ci est le moins fautif.
VaUr et Adelung. Notice de la langue berbère, insérée dans le
troisième volume du Milhridates. 4 vol. in-8<». Berlin, 4842,
4819. Cet ouvrage , écrit en allemand, renferme des notions gé«
nérales au sujet de loutes les langues connues et offre la prière
dominicale dans près de cinq cents langues, idiàmes et dialectes.
L'esquisse de la langue berbère n'est pas exemple d'erreurs,
mais elle se lit encore avec profit.
Jackson. Vocabulaire berbère, dans sa Description du Maroc,,
en Anglais. Chez cet auteur, l'instruction et l'esprit d^observar'
tion se remplaçaient par une grande confiance dans son propre
mérite. On ne peut guère attacher beaucoup d'importance à ses
renseignements.
Ali^Bey (pseudonyme de l'espagnol Badid y LebCich). Dans le
récit de ses voyages on trouve une liste d'environ cent trente-
niots appartenant au dialecte chelha.
Le capitaine £yon^. Son voyage au Fezzan renferme on ample
vocabulaire du dialecte berbère de Socna, oasis située entre le
Fetzan et Tripoli. Un certain nombre de ces mots se trouvent
dans le dictionnaire Brosselard, et plusieurs autres existent dans
le dialecte chelha. Cette liste est très-intéressante et mérite bien
la place qu'elle occupe dans un des meilleurs ouvrages que nous
possédons sur le Fezzan et les Touaregs. Ce volume pianque à la.
Bibliothèque d'Alger.
Scholtz, Observations sur la langue de Syouah, dans les Nou--
velles Annales des Voyages ^ t. xx.
Minutoli. Vocabulaire Syouah , inséré dans son voyage aa
temple de Jupiter Âmmoo. Cet ouvrage, écrit en allemand et pu-
blié à Berlin en 4824, ne se trouve pas à Alger.
Ukert. Remarques sur les Berbères et les Tibbos, en alle-
mand. Weimar, 1826.
Caillaud. Vocabulaire siouah, dans le Voyage à Méroé et au.
fleuve blanc, Paris, 1826..
ÂPPBNBICR. 526
Boccacio» Numeroruro séries ab 1 ad 46, sicut àCaDariig di»
cuniur. Dans les Mémoires de l* Académie de Lisbonne, t. xi,
3* partie.
Nous n'avons pas pu nous procurer ces irois ouvrages.
Muller. Vocabulaire de la langue des habitants d'Âudjela.
dans Touvragc de Pacho sur la Cyrénaique, Paris, 1827.
Shaler, Vocabulaire des langues africaines, AdiUsV Esquisse de
Vétat d* Alger, < 830. Traduit de TAnglais. L'auteur y reproduit
les vocabulaires deShaw, de Chénier, une' partie de celui de
Hornemann, celui d'Ali-Bey, et une liste d'environ deux cent
cinquante mots des dialectes chelha et mozabi, recueillis par
J. F. Schultzc. On y remarque plusieurs fautes.
Hodgson, Esquisse grammaticale de la langue berbère dans
les Transactions of the American philosophical Society . Vol. 4;
Philadelphie, 1831. En 1828 et 1829, M. W. B. Hodgson, an-
cien consul des Étals -Uuis à Alger, rédigea quatre lettres sur la
langue berbère et les adressa au président de la Société philoso^
phique américaine. Ces pièces, accompagnées d'une esquisse de
la grammaire berbère, parurent bientôt après dans les Tran-*
sactions de ce corps savant. Les lettres renferment des considé-
rations et des élymologies peut-être trop hasardées; l'esquisse,
qui remplit huit pages, donne une idée peu complète de la con-
jugaison et de la déclinaison. À la suite de cette dernière pièce,
on trouve une chanson et un conte en langue cabile. Nous y
avons remarqué plusieurs inexactitudes.
Société biblique. Treize chapitres de l'évangile de Saint-Luc,
traduits en langue berbère. Londres, 1833. Ce petit volume est
du format in-8o et renferme 64 pages. Le texte, écrit en carac-
tères arabes, est accompagné des points voyelles. Pour repré
senter le ts des Zouaoua , on a employé un sîn arabo/avec deux
points ; le ihétay nu th dur des Anglais, est indiqué par une es-
pèce de O renversé, avec un point au milieu de la boucle qui
forme la tétc de la lettre. Ces caractères rendent le texte tout-à-
fait illisible pour les indigènes et doivent, sans doute, leur nais-
y
S26 HISTOIRE DIS B^IIBÉRBS.
iMmceiila fantaisie derédîteur européen. Le ficeond stirtout a
«me forme qui répugneà l'écriture arabe ; e*est un caractère im-
possible. La (radiiclion berbère a été faite par un homme qui ne
comprenait pas bien le texte arabe des évangiles qu'on lui avait
mis entre les mains ; aussi, a-t-il fait une foule do bévues et de
contre-sens. Â la An du volume se trouve le chapitre zii écrit en
caractères purement arabes.
Vewman. Analyse de la traduction berbère de saint Luc et es-
quisse do la grammaire berbère, publiées à Bristol dans le recueil
iniiiulé Tfi3 west of England lUeranj and scieniific journal.
L'auteur de ce petit traité, ayant dirigé son attention sur la tra*
duclion berbère des douze chapitres de saint Luc dont nous
venons de faire mention, parvint, sans aucun secours, à dé-
hrouiUer le système grammatical de cette langue et h reconnaître
que le traducteur musulman avait commis plusieurs bévues.
Quand oa considère les difficultés qu'il fallait surmonter dans
l'accomplissement de celte tâche, on ne saurait asses admirer
la patience et la sagacité de M. Newman.
Grœberg de Hemsœ. Remarques sur la langue des Àmazîrghs,
<Ians le /ourr]a/o/*//i6 royal asiatic Society ^ 1836. Cet auteur
a publié des ouvrages en français, en italien, en anglais et en
suédois. Ces écrits renferment tant do suppositions hasardées,
tant de faits controuvés. qu'on ne saurait s'en servir qu'avecune
extrême précaution.
Delaporte fils. Vocabulaire berbère, dans le Nouveau jûurnal
^asiatique d'avril, 4836. Cette liste, imprimée à deux colonnes,
remplit vingt-deux pages du journal. Nous y a\*ons remarqué
un certain nombre d'erreurs- • -
Prichard. Vocabulaire chelha et berbère, dans le second vo-
lume de ses Rescarches oh the physical history of Mankind.
Celle liste, renfermant à peu près cent vingt mois , est bien loin
d'avoir toute la correction désirable.
Ajoutons h cette série d'auteurs les noms suivants ;
Anonyme (Samudn). Essai sur la langue dus Bcni-Mozab, pa-
AFPBlfBICS.
SSÎ?
Uié par morceatix, dans Irois numéros du Moniteur algérien de
1840. PiÀoe assez remarquable, qui^ h iiéfacit d^autres rensei-
gui^mefits, suQlraii à Caire recosmaitrc Téiroito pareotéqui règne
entre cet i<lion)e et les autres <lialecieâ berbères.
Venture de Paradis. Grammaire et dictionnaire de la langue
berbère; ouvrage posthume, revu, par P.^Âméilée Jaubert, pair
de France, conseiller d'État, membre de l'Institut, professeur de
turo, et publie par la Société de géographie, iB-4<^ - Paris, 4 8i4«
Ce dictionnaire est fort incomplet. Les mots dont il se compose
appartiennent^ tes uns au dialecte xouaoua, les autres au dialecte
«helha, circonstance que Tauteur a négligé d'indiquer. On y re^
marque plusieurs erreurs. La grammaire n'est qu'une esquisse
4rès-imparfaite et renferme des notions soiivent fausses. L'au*
ieur commence par déclarer que la langue -berbère ne possède*
aticuu terme abstrait; or, il est constant que^ dans les dialectes
cbelba et zouaoua réunis, il y a plus de vingt manières de coa»
vertir la racine du verbe en un nom abstrait. Selon Venture , ie
d mobile est une lettre euphonique qui se place après la première
personne du verbe. Cette particule a une signification ; elle se
pjace après toutes les personnes du verbe; quelquefois même
elle précède le verbe. L'auteur se trompe dans la conjugaisom
et dans la déclinaison. £n parlant des lettres de Talpliabet,
il p4*étend que tous les mots oà entre un h ne sont p^s origi-
nairement l>erbères ; il en dit autant du iv/i; ces deux observa-
tions ne sont pas exactes. Il dit que les Berbères n'ont aucune
conjonction poiir lier les parties du discours; ils en ont plusieurs
dont nous pouvons indiquer df'' et oula. No Os y remarquons
encore plusieurs fautes de diverses natures. On devait s'attendre
à trouver la rectificaiion d'une partie de ces erreurs dans l'aver-
tissement placé par M. Jaubert en tète du volume ; malheureu-
sement, cette pièce aurait elle-même besoin de rectifications et
4' éclaircissements. Nous ne pouvons pas comprendre ce que l'au-
teur de cet écrit ait voulu dire quand il nous assure que « l'on
B remarque dans le borbère la présence, inconnue dans les
i> idiomes asiatiques, derarliclc indéfini /6, /a, /^^.» Il ajoute
que « la déclinaison dos verbes a lieu comT^ en hébreu et en
528 HISTOIITE UR8 BEDBÈRRS.
» arabe, au moyen de particules préfixes. /) Un professeur de
turc aurait dû savoir ce que cVst que Tarticle indéfini et qu'en
«rabe, la déclinaison se. fait par des voyelles ou par des
syllabes ajoutées à la fin du mot. En somme, ce volume ne
peut se recommander que par une biogaphie de Venture, écrite
avec beaucoup de tact et de jugement par M. Jomard, membre de
rinstitut.
Newman, Grammaire de la langue berbère , en anglais, pu-
bliée dans le 6^ volume du journal allemand intitulé Zettschrift
fur kunde des Morgenlandes ; in-8o , Bonn, 4845. La société
biblique d'Angleterre s'étant procuré une traduction berbère du
texte arabe des quatre évangiles et delà Genèse, la communiqua
à M. Newman qui avaitdéjà fait un travail très remarquable sur
la langue berbère. Voy. ci-devant, page 526. Aorès avoir exa-
miné et analysé le texte de cette traduction, qui ofTrail un grand
nombre d'inexactitudes, M. Newman rédigea, en forme de gram-
maire, les résultats de ses observations. Ce traité remplit 90
pages et renferme une foule d'indications dignes d'une sérieuse
attention. *
Le môme savant publia en 4844, dans le 4" volume des Re-^
searches de Prichard, voy. ci-dev. p 526, un petit traité renfer*
maot un résumé de ses études et intitulé ; On the structure of
the Bercer language. Dans cette notice, l'auteur a condensa
une série de faits et observations philologiques dont on doit pres-
que toujours rcconnattre la justesse. On y remarque aussi la
réunion, bien rare, d*un profond savoir el d'un bon jugement.
Brosselard Dictionnaire français-berbère, ouvrage composé
par l'ordre du Ministre de la Guerre ; 1 vol. in-8<>de 656 pages ;
Paris, 4844. Ce volume, imprimé avec luxe, offre une partie
considérable des mots de la langue française expliqués en cabile
de Bougie. Le dialecte de cette localité renferme beaucoup plus
de mots arabes que celui des tribus zouaoua qui habitent la
montagne voisine , le Djurdjera : plusieurs termes berbères,
dont ce dictionnaire n'offre que les équivalents arabes , s'em-
ploient encore chez ces peuplades. Tous les philologues regret-
ATPBICDtCl. 529
imX virement que U seconde partie, rédigée par )e& soins de
M. Brosselard et renfermant tes mots de la langue berbère ex-
pliqués en français, ne soit pas encore publiée*
Hodgson. Notes ou Northern Africa^ un vol. in -8"; New-York,
4S4I. Ce petit volume n'est pas sans mérite : il renferme plu-
sieurs vocabulaires berbères et une liste de mots appartenant à
la langue touaregne. Cette dernière pièce a suffi pour démontrer
que les Touareg parient un dialecte du berbère.
Richards<m et Newman. Cahier in-folio, de 24 pages, publié,
apparemment, parle gtiuvernsme.il britannique, Poreign Office.
On y trouve le troisième chapitre de l'évangile de saint Mathieu,
en dialecte berbère de Ghadaras, accompagné d'une traduction
latine par H. Newman; idem en oabile algérien, et, de plus, un
vocabulaire en arabe ghadamsien et touareg; Le cahier se
termine paru» vocabulaire ghaderasîen, semblable au précé-
dent. Un autre cahier in-folio de 4 6 pages et portant le n^ II, ren •
ferme un vocabulaire arabe, gbademsien et touareg. Ces listes
sont lithographiéeS d'après la mauvaise écriture d'un tateb de la
force ordinaire, c'est-à-dire, d'un écolier peu instruit.
Richardson et Bar th. On trouve dans les ouvrages du premier
voyageur, intitulés Travels in the great désert of Sahara^ 2 vol.
in-8^, Londres, 1848, et Miseitm to central Africa^i vol. in-80;
1853, beaucoup de notions curieuses sur les Touaregs. Dans
le recueil intitulé Barths und Overwegs Untersuchungen et
publié en allemand par les soins du docteur Gumprecht , à
Berlin, 4852, on trouve plusieurs lettres de M. Barth ren-
fermant des notices sur les Touaregs,, et le récit de son
voyage à la ville d'Agadez , capitale du royaume d'Âhîr.
Le même ouvrage nous offre plusieurs autres communications du
même voyageur, au sujet des langues parlées par les tribus qui
habitent les régions méridionales du Sahara.
Brosse/arc?. Grammaire de la langue berbère, inédite.
DelaporlCy père. Grammaire de la langue berbère (chelha),
T. lY.
34
g3Q BISTOIM B»8 MMttW.
m»nu<=cril appartonanl à la Bibliothèque impéf laU. Cet ouvrage
riTast^utlfait achevé et aurait besoin d'être revu et cor-
rigé en [plusieurs endroils.
Delaporte, père. Spécimen de la langue berbère : «ncahier de
isTagTs in-ioUo, lithographie. Cette brochure renferme de«
diaWuos en langue chelha et une légende versifiée qu. est »ns
idit.le Jleur morceau de '^ 'j^^'^^^^^r^^^^
leur lui donne le litre de Saby ou le dévouem^ fhal. Ces ter-
es n caractères arabea, sont accompagnés d'une transcnpfon
: 'leure européennes, d'une traduction littérale et d'une se-
conde traduction dont le style nous parait trop d.ffus.
GesHn, ancien élève de l'École de Grignan, mort h Laghouat
en i« n 856, s'était beaucoup occupé des d.ver« d.alectes
"res Les 'résultats de ses rechen^hes rèmp«s»eoipl-e««
cahiers encore inédits. Nous indiquerons .c. le contenu d une
^"Ï;et::;tfordTr;^^^^^ habitée par .es.Touaregs ; notice
des tSs Loregues . de leurs mœurs et de leurs usages.
''Ki de grammaire du dialecte des Imoujaran-Kal-Aér.
„j« An navs d'Auadès. 435 pages.
^Upt. »«e e».,.eprié„ .,Ké,.W ^.Touareg.
U,',, e. .»Wi <!■«». «»<» •<• ■"»" "PP"^""' ■" ''"'•"• *
Soraou-Touareg.
60 Notice sur les Bcni-Mo«ab et sur leur pays.
Lorammairedudialecte berbère -P f .^^^^ 'f^f^^t^d^^
branche de la tribu des Beni-Menacer, q«. hab.te Tazert-Tamel
lai, village à une journée de marche de M.lîana.
7. Éléments de la grammaire moxabi.
. 8« Vocabulaire français-moiabi, 36 pag^-
9. Dictionnaire du dialecte des Aïl.Ferah. ^0 Pje^'
40. Analyse radicale des mots delà langue berbère. Cetra^a.l
AfTBKBIGB. 331
oÏÏre beaucoup à reprendre el laisse beaucoup à désirer. 85 pages.
4 1o Esquisse de la conatruetion grammaticale de la langut;
Haoussa.
Il existe probablement d'autres écrits du même auteur. Ceux
(fuenous venons d'indiquer doivent se trouver à Paris , soit au
Ministère de la Guerre, soit à l'Académie des Inscriptions et
Belies^Lettres.
De Neveu, colonel d'état-major, chef du Bureau politique des
aiFaires arabes, à Alger, a recueilli un grand nombre de notions
précieuses sur les Touaregs, leur pays , leur langue et leur
écriture.
M. Hanoteau, capitaine du génie, premier adjoint au Bu-
reau politique. Grammaire du dialecte zouaoua ; travail encore
iiiédit,auquel on assignera la première place parmi les ouvrages
qui traitent de la grammaire berbère.
Parlons maintenant des ouvrages composés par des Berbères.
Vers ran744(127 deThégire), un prétendu prophète, nommé
Saleh-lbn-Tartf, commença s^es prédications chez les Berghouata.
Il leur enseigna un nouveau genre d'islamisme et composa pour
leur usage un Coran en langue berbère. Le célèbre géographe
Abou-Obeid-el-Bekri , nous fournit quelques indications sur le
contenu de oe livre dont il cite deux ou trois passages assez re-
marquables; malheureusement il s^est borné à nous les donner
tiaduits en arabe. H nous fait toutefois connaître une partie des
modifications que Saieh avait apportées aux pratiques du rite
orthodoxe, et il a eu la bonne idée de nous conserver quelques-
unes des paroles que les Bergouata employaient dans la prière.
La formule au nom de Dieu s'exprimait par les mots A bism en
Yacos dont la première lettre est une interjection; 6f m (au
nom) est arabe; en signifie de ; Yacos ^jmSIj t ou peut-être
Bacos QMiSLt est un mot inconnu en berbère; serait-ce Bacchus,
divinité dont le culte s'était très-répandu en Afrique ? La for-
mule berbère , moggar Yacos signifie,' Yacos est grand et
répond aux mots arabes Allah Mer. Une troisième formule,
I
I
L
5321 nisTomK Ms Bmftus.
ihen Yacos, est réqiiiTdiMt A^AUùh tvakid {Dieu $st unique) ;
ihen se retrouve encore en berbère sous les formes tti;afi et yatt
qui sigoifienl un. Une dernière formule, ourd-^m Taeos^ signi-
fie il n'y a pas de semblable à Dieu ; our^ c*ef>t la particule né-
gative berbère, d est la copule qui lie l'attribut au sujet ; am
veut ^ite semblable. Les Berghouata desceudaietit probablement
des anciens J?acua<éf ; comme eux« ils habitaient le Temsna ,
région qui forme la partie centrale du royaume actuel de Maroc.
Ces sectaires étaient toujours en guerre avec les musulmans
jusqu^au cinquième siècle de Phégire, quaod ils succombèrent
aux attaques des Almoravides.
En Tan 925 (313 deThégire], un autre faux prophète, qui
so4iommait Hamtm, commença ses prédications dans le Rîf ma-
rocain, aux environs de Tetouan, et composa pour l'usage de
ses sectateurs un Coran en langue berbère. EUBekri nous donne
la traduction arabe d^un court fragment de ce livre, flamfm fut
tué en Tan 927 ou 928. tl est probable que son coran et celui
de Saieh n^existent plus.
Vers le commencement du sixième siècle de rhégire, un im-
posteur, nommé Mohdmmed«Ibn-Abd«»Allah et sfurnommé Ibn-
Toumeri (mot qui paratt être le dimifttitif berbère d'Omar), se
donna pour le Mehdi (voy. 1. 1, introd. , p. xxyn, et t. ii, p. 501
et 1 64 ) et réussit à fonder chex les tribnà sdmi'-bai'bnres de l'Atlas
marocain une secte dont les membres, intitulés al-mowahhedht,
c^est-à-dire almohades ou unitaires, parvinrent, en quelques
années, à subjuguer toute l'Afrique septentrionale et presque
toute l'Espagne musulmane. Cet homme appartenait & la tribu
desHergha, branche de la grande tribu berbère des Masmouda/
Ayant étudié en Orient la théologie dogmatique et scolastiqne, il
composa plusieurs traités religieux dont il nomma l'Un le Jlor- •
chida [la directrice) ^ l'autre le Tauhid {la profession de Vunité
de Dieu) et un troisième Aazsô ma yotlab {la chose la plus pré- J
cieuse que /'on puisse rechercher). Un volume, renfermant la
collection de ces traités et écrit cinquante-cinq ans après la mort
de l'auteur, se trouve, depuis quelques années, dans la Biblio-
ATPVIIJIICB. 533
thèque iropérialo. La leciore lie cos pièces démontre qulbn-Tou-*
mert avait ocquîs île grandes connaissaBces dan& la partie dog-
* maiique del'islamisoie. Il s'exprimait en berbère avec une rare
élégance et, lorsqu'il eut commencé à répandre ses doctrines
cbez les tribus de TAilas , il rédigea pour lear jisage une tradac-
tion du Coran eo langue berbèpe et une traduction de ses deux
principaux traités, le Morchida^t, le Tauhld.pt^us ses instruc-
tions aux q^phJtes, il disait ; ce Celui qui n'apprend pas par
9 cœur le T($uhid n'e^t pas un uniXaire [almohcuie) , mais un inG-
» dèle ; on ne doit pas prendra cet homme pour chef de la prière
» ni manger les animaux qu'il aura égorgés. » a Aussi, dit Tau-
» teur du Cartas, ce traité servit de coran aux tribus masmou-
0 diennes, peuplades aussi ignorantes en religion qu'en aOaires
» mondaines. » L'empire fondé par les Almohades fut renversé
par lesMérinides, qui travaillèrent à extirper les doctrines de
ces sectaires. Malgré tous leurs efforts, ils ne purent jamais sub-
juguer complètement les Hasmouda de l'Atlas ; aussi, nous cst-il
permis do supposer que quelquf)^* uns de ces montagnards, ayani
conservé leur indépendance jusqu'à ce jour, aient gardé encore
les doctrines et les écrits d'Ibn-Toumert. Quand les Européens-
pourront pénétrer dans les montagnes au sud -est de la ville di
Maroc, un voyageur intelligent en rapportera , peut-être, dei
traités de la religion almohade en langue berbère.
Ibn-Khaldoun nous fournit un grand nombre de renseigne*
ments tirés des ouvrages dont les auteurs étaient de race ber-
bère. Il parle très-souvent des historien:», des savants et des
généalogistes de ce peuple ; il nous donne même quelques extraits
de leurs écrits, mais il néglige de mentionner en quelle langue
ces livres furent rédigés. Nous sommes très-disposé à croire
que tous ces traités étaient en arabe fIbn*Khaldoun nous apprend
que les Berbère», inspirés par un amour-propre mal entendu, cher-
chaient tous à* se donner une origine noble, en se représentant
comme les descendants de l*une ou de l'autre des anciennes tribus
de l'Arabie. Ajoutons que pour appuyer leurs prétentions, ils fa-
briquèrent des poèmes (en mauvais arabe) et, dans le mémo but,.
53i HISTOlRr DES niBERCS.
Hs se forgèrent des généalogies. Comme ces pièces s'adressaieni
évidemment aux Arabes, qui étaient lenrs matires, d'abord par
la force des armes, ensuite par l'influence de la religion, par la -
civilisation et par Tinstruction, il est naturel de supposer quMles
élaient écrites dans la langue du peuple rainqueur. D'ailleurs
nous ne pensons pas que notre auteur ait [possédé assez de ber-
bère pour comprendre des livres composés en cette tangue : nous
voyons par son autobiographie qu'il n'était pas homflie à nous
cacher ses connaissances et qu'il i>'aurait pas manqué de dire,
en citant les écrits des auteurs berbères : «t Voilà des renseigne^
» ments que j'ai trouvés dans leurs livres et que j'ai traduits en
» arabe. »
Dans le siècle actuel, deux traductions du Coran en dialecte
chelha parurent dans le Sous marocain. Ou nous assure que le
gouvernement de ce pays fit brûler ces volumes et décapiter
leurs auteurs.
Nous allons indiquer le contenu dé tous les manuscrits berbè-
res dont nous avons eu occasion de prendre connaissance.
I.
Manuscrit de la Bibliothèque impériale de Parts ; io-folio, nu^
méro d'entrée : R. G. 4807. Il porte le titre A^Essai sur lu
langue berbère et renferme les pièces suivantes ;
4^ Un traité de grammaire berbère rédigé par tf Delaporte
père{voy. ci-devant, page 629);
2<> Un vocabulaire berbère-français (par Venture). Cett« liste
de mots a été publiée par la Société de géographie (Voy. ci-de-
vant, page 5Î7) ;
3<> Trente-quatre dialogues en berbère et en français, suivis
de deux appendices. M. Delaporte a publié un extrait de ces dia-
logues avec le poème do Saby (Voy. ci-devant, page 530).
4^ Poème de Saby, texte, transcription et traduction ;
5^» Seize lettres en langue berbère (dialecte chelha) , textev.
transcription et traduction ;.
jippsRDici. 535
6* Autre série de dialogues berbères, en brouillon ;
7o Une vingtaine de fables avec la transcription en caractères
européens ;
* 80 Transcription , en caractères européens , d'une pièce inti-
tulée TemchaHoutj c'est-à-dire divertissement , et de quelques
autres morceaux ;
9o Le TemcKahouty en caractères arabes ;
tOo Les douze premiers chapitres de Tévangilc de saint Luc,
fournis par M. W» 6. Hodgson (Voy. ci-devant, page 525),
On y trouve \e texte, la transcription et la traduction de ces
chapitres,, qui sont en dialecte zouaooa;
14® Collection of Berber songs and taies with theirliteral
translation^madeby W. B; Hodgson, in the year 4829. (Becueil
de chansons et de contes berbères , avec une traduction
littérale en langue anglaise; fait a Alger en 4829 , par
M. Hodgsoo«)
U.
Manuscrit de là Bibliothèque impériale, numéro d'*entrée : R.
C. 48(y4 ; un volume in-folio d^environ 550 pages. Ce manus-
crit , d^uue écriture moderne, renferme plusieurs contes dans le
genre de ceux des Stillô et une nuits. Le texte bQrbère, accom-
pagné d'une mauvaise traduction interlinéaire en arabe maro-
cain, est suivi d'une transcription en caractères européens et
d^uiie traduction française par M. Dlstaporte.
Ces histoires sont presque toutes d'aune invraisemblance rebu-
tante; le style en est plat, vulgaire, décousu, tel en6n qu'on ne
saurait le pardonner qu'à un paysan grossier et sans instruction.
Nous avons choisi le plus raisonnable de ces récits pour l'insérer
dans cet appetidice, mais nous devons déclarer qufil est bien
loin d'avoir la franche allure et l'agrément de ceux qui compo-
sent les Mille et une nuits. Ainsi que dans tous les manuscrits
berbères, l'orthographe de ce volume est très-fautive , souvent
même, elle est d'une absurdité incroyable.
536 H18T01IB DBS BBBBEBE8.
111.
Hamiscritdela Bibliothèqne impériale, numéro d'entrée 4802,
Un volnme in-folio de plus de 400 pages, renfermant deux traités
dont le premier, intitulé ^Jd^A- {eMaud), d^un mot arabe cpii si-
gnifie l'abrmvoirj offre une exposition des devoirs du musul-
man ; la seconde, porte aussi un titre arabe Bahr-^d^-Domoué
[ia mer de larmes)^ et a pour sujet la morale et la dévotion.
Le Haud, composé par Mohamn>ed*ou-Ali -ou-Ibrafalm-ou«
Souci-ou-Zali (Mohammed, fils d'Ali, fils d'ibrahtm, natif de la
province de Sous et membre de la tribu des Houzal,) a pour
base les doctrines de Pimam Halek, telles que nous les présente
' le Mokhtacer (abrégé de jurisprudence) de Sidi-Khalfl. L'auteur
dit :
Sidi'-KhalU adiwîn lacwal iachehertaïn^
GkalkHflb el'tnokktacer net tan attibaghi .
C.-à-d. : Sidi-Khallla rapporte des sentences authentiques, ^
Dans le livre EUMokhtecer ; c'est lui que j'ai suivi.
Pour donner une forme rby thmiqoe à son oirvrage, l'aoteur 1*9
rédigé en courtes phrases qu'il termine ordinairement par un i
paragogique. Jusqu'à présent noua ne sommes pas parvenue
scander ces vers, ou lignes, qui paraissent avoir, cependant,
une marche et une accentuation assez régulières. Cet ouvrage se
compose d'nn grand nombre de chapitres ; nous n'en indique^
rons que les premiers, ce qui suffira pour donner un idée do
reste :
i^j^^^yXi ç^UI LeBab ne-tauMéj chapitre sur I» doc-
Irine de l'unité de Dieu ;
(ki-»'y vW le Bab ne - waman , chapitre sur les
eaux qui peuvent servir à la purifi-
cation ;
^ S Mw^i** v^— ^ Le Bab ma yonghçal ffu'inceraf sur le»
C3t^^MN^ vêtements qui doivenl^étre bvéa;.
A
••1
AmvcDicB . ft37
y^àyh vW Le Bab ne*^Uivoéou , sur la purifica-^
(ioo;
J^^ vW Le Bab ne-U-ghoeel^ sur rablutioo ;
oJULj c^liJ Le Bab ne-U^oucat ne taxella, sur les
heures île la prière ;
ylJsJj çjIaJ xe Bab ne-l-adan, -sur Vappel è la
prière ;
j^UJ^I ^^;Uô vW £a Ba6 ne-setr el-aoura, sur Voblîga-
tioD de cacher. les parties honteuses ;
^■M^^^^> V W i:^ jBa6 nMo3/i(, sur U prière.
A la fin (}e Touvrage Tauleur nous apprend qull termina son
travail en Tan 1 124 dePhégire (1709-40 de J. C). Yoici ses par
rôles : a Ne^wahed (mdcherin tiguen ne-mia d-ifodhiy c'est-ik«
dire : en l'un et vingt gui suivent le cent et mille. Le mot tiguen
est probablement le participe féminin du verbe igga [ajouter).
Le Bahr ed^Domouâ^ ouvrage du même auteur, est écrit en
prose rimée, chaque ligne se terminant ordinairement par Vi pa-
ragogique. Il renferme plusieurs chapitres dont voici la liste :
*r>» iiX^j^^ V^ Le Bab ne-tawacen ne^rabbi , chapitre
de I9 connaissance de Dieu ;
J"*^^ VM^ Le Bab ne-^^hira, chapitre de Vautre
monde;
<^ {j^Jt^ V^ Le Bab ne tawacen n^en-nabi , chapitre
de la connaissance du Prophète ;
(^àJ^ if>\ji^ V^ ^ ^^^ ^ gharae ne^H^djenneti 1 cha-
pitre du chemin do paradis ;
oijUj vW ^ ^^^ ne-toubetf chapitre du repentir;
jOs^^ vUJ ^ ^oh ne^'l'Odau^ chapitre de Pennemi
de l'homme;
c;»^ c^bJ Le Bab ne^'l-mout^ chapitre de la mort;
.^1 yxi^"^ vW ^ Babne^'l akhbar el-akhira^ chapitre
des nouvelles de l'autre vie.
Ce traité remplit les 84 dernières pages du volume. Le même
copiste qui a transcrit et traduit en patois arabe le num6ro4804.
538 HISTOIRE DIS BtftBfttES.
a ioscrii entre les lignes da texte berbère, tant da Hwad que du
Bahr ed-Domoud^ une espèce de traduction en arabe, langue
qu'il connaissait d'une manière très-imparfaite. Il paraît avoir
exécuté ce travail pour H» Delaporte. Plus loin, le lecteur trou-
vera un extrait de cet ouvrage.
IV.
Manuscrit de la Bibliothèque impériale, numéro d'entrée R.
C. 4803. Un volume in-i^ écrit en l'an 1498 de Thégire, et
renfermant les mêmes ouvrages que le numéro 4802. Ce manus-
crit, dont toutes les pages attestent la plus grande indifférence
des étudiants marocains pour la propreté, semble être l'original
du manuscrit 4802. Il est vrai que l'orthographe de celui-ci est
plus satisfaisante, mais cette amélioration provient, sans doute,
du copiste qui travaillait pour M. Delaporte.
V.
Manuscrit de la Bibliothèque impériale, numéro d'entrée fi.
G. 4804. Un volume in-4*, renfermant :
I.Un traité en style cadencé de 102 pages, survies devoirs^
du musulman; composé par le CId Ibrahfm^Ibn-Abd^Àllah-es-
Sinhadji. sous la dictée de son professeur, leCid Ali-lbn-Moham-
med-lbn-Wicédan
2o Le HutÀdde Hohammed-Ibn-Ali ; voy. num. m
3o Le Bahr^ed^Domoud du même auteur.
VI.
Manuscrit de la Bibliothèque impériale, numéro d'entrée R.
G. 4805. Petit volume in 4^ de 63 pages, très-mal écrit et ren*
fermant le poème arabe composé par El-Boucîri en l'honneur du
Prophète, et intitulé le Borda. Ghaque vers de ce poème est suivi
d'une glose en langue berbère cbel ha.
APPERDICf» 539
VIL
Manuscrit de ia Bibliothèque impériale, numéro d'entrée R.
C. 4806. Copie de Touvrage précédent avec une espèce de tra«
duction interlinéa ire en patois arabe. Ce volume est de la même
main que les numéros 4801 , 4802.
VIIK
Manuscrit appartenant à M. de Gayangos. Un volume grand
in-folio, de 430 pages , renfermant le Haud et le Bahr ed^Pa-
moud de Mohammed, il Is d'Ali, BU d'Ibrahim , soucien, houza-
lien.
IX.
Il existe h Alger un assez beau manuscrit du Haud et du Bahr
ed'Domouâ. Je l'ai eu entre tes mains assez de temps pour en re-
connaître le contenu •
Ces ouvrages ont été composés vers le commencement du der-
nier siècle de notre ère. Écrits dans un jargon moitié arabe,
moitié berbère, défigurés par des fautes d'orthographe les plus
bizarres, ils nous donnent une idée très^défavorable de la litté-
rature et de l'instruction du peuple cbelha. Les manuscrits du
Hatul et du Bahr ed^Domouâ offrent les plus singulières varian-
tes d'orthographe qu'on puisse imaginer et fournissent, dans
chaque ligne, la preuve de rignorance des copistes, qui, évidem-
ment, ne savaient pas décomposer en mots isolés les phrases de
leur propre langue.
TEXTES EN LANGUE BERBÈRE.
Le manuscrit désigné par le numéro n renferme le texte chelha
du conte que nous reproduisons ici. Pour mettre le lecteur à
même d'apprécier la différence qui existe çntre les dialecte»
berbères, nous donnons le commencement de la même pièce tra-
duite en zouaoua.
540
HISTOIIB DES BSMBRBS.
ZOUAOCÀ.
nia youeo d'aguellid, ghoUrès
Était un roi, chez-lai
thalatha H-ouzera : ifkaïas
trois Yizirs : doona-loi
Rohhi sB'ifad'cl mal attas;
Dieu beauté et richesses beaucr
la - mani our iss&i ara araou-
mais il D'arait pas enfant
ïa. Ibbod ghier themourth
de-lui .11 partît pour un pays
ibâden , ikchemts , youfa
lointain, il entra-en-iui| il trouva
youen ei-tadjer itsouassen di
un marchand connu dans
thamourlenni.lïbded et-tadjer,
ville-cette . Se-leva le march<*.
ifkaïas, iouguelUd, eUyacout^
il donna-lui, an roi, rubis
ou ^t'djouher adh - idrimen
et perles etdirhems
attas. Yefràh lïs ogueK
beaucoup. Se-réjouitde-Iui le
\îd nizhQ. tfi ibgha
roi beaucoup. Quand vo.ulut
CHELHA.
nia yan oguelltd dates
Était un roi chez-Iui
krad ^l-omera ; ifkas
trois vizirs : donna-lui
Rahbi ifolki ouala - '1 - mal
Dieu beauté et richesses
iggbuthen ; oua - lakin our
beaucoup ; maïs pas
dares taroua. Iftou si-yat
cbez-ltti enfant. Il partit pour un
temzîrt yaggougan , ikcham
pays lointain ; il entra
seres, yafen yan eî^tadjêr
dans-lui,il trouva un marchand
Dellan aïlibdaren gh(i-
lui (que) Ton célébrait dan$
H-medinei ^n. ^nVeteUiadjer
ville«cetie . Se-leva le marcb^
ihdou ioguetltd gha H^yacout
il donna au roi de rubis
d'/-(/;ouAerd'e/-ma/iggouiheû.
et perles et argent beaucoup.
Ifrah seres oguellld béhér».
Se-réjouit de lui le roi beaucoup
appkhi^ics.
544
ZOIIAOUA.
oguelUd adiotg,
le roi qu'il partit (partir)
innaïas : Âsedtdi gheir
ildit-i-lui:VîeQ8aYec-inoi vers
ih-medînetiou. Inoaïas et-
la-yiUe-jnJeDoe. Dit-à-lui le
tadjer: Iskerl ai-oguellîd
marchand ; Soit fait I 6 roi
n'ed'dounit* Irouh dits
da monde. Il partit avec -lui,
îbbouï arfaouïs yak
il emmena enfans-siens et
àhe^rozkh ) cor idji ara ;
richesses-de-lui ; il ne laissa pas;
îzenz aïlas tl - Ml ,
il-vendit sapropriéié, le tout,
idhfar agoellid. Segmi
il ' suivit le roi. Quand
ebboddhen ghe|r the-mtfct^ntfX
ils-arrivèrent à la-ville
oguellid, ifkaïas oguellid
dU'foi, donna-lui le roi
akkham ilha \ yougbal d'e/-
une maison belle; il-de^int le
OûzIroguelUd.
vizir du roi.
CHBLBA.
AYlligt^ ira iftou oguellîd
Lorsque voulut partir le roi ,
innaïas : Ghoixr moun
il-dit-à-lnir Seuletn' accompagne
dîdi se«-7-mecftfieM*noti.
avec moi dans la ville-mienne.
Innaïas et-tadjer : Khiart 1
Dit-à-lui le marchand : bien I
ai-aguellid nW-(/oiinll. Imoun
6 roi du monde. Il accompagna
dïts, irhalj yaoui
avec-lui, il partit, il emmena
terouaùs dVts oualal-ma/ens
fils-siens avec-luietrich.-sienn;
our ifal yal: izenza koul
ne laissa rien ; il vendit tout
êl-melkaiens imoun
les-biens-de-lui, il accompagna
d'ougueUid. Aïllîgh elkemeii
avec le roi. Quand ils arrivèrent
se-'/-m«dln0l
dans-la-ville
n'oguelltd ,
du roi,
ifkas oguellîd yat tiguimmi
donna-lui le roi une maison
ifolktn ; iga l^ouzîr n'oguellfd.
belle ; Il devint le vizir du roi.
I
542 R1ST0IRB DBS BBBBBBES.
SUITB BH DIÀIBCTB CHBLHA*
lazia dares foghou6//t dare» zouarnia
Il fût cher aaprès-de-lai plas-que-ceax chez^^luKc -àHl.)les premiers
krad Uauxara. Aichdcou iggoulh dares el-mal^ iga
trois vizirs. Gomme abondait chez-lai les richesses, il fat
argaz tgan djéïd, Ar yauas, isker ogaelltd yat
on homme élant généreux. Sur un-jour, fil le roi une
9
nêzhet; imeAooiiaren fellas el-ouzara elli s-krad;
fête ; se-concertèrent contre-lui les vizirs qai au (nomb.) de troi s;
ran atlîâ[;7otin f oguelltd. Aïlligh
ils voulareni qu'ils l'éloignèrent (réloigner) du roi. Quand
iggauren d'ouguelltdi icaouat yan gotoen, inna : AgueUtd!
ils-furent-assis avec loroi^ parla un d'enire-eux, il dit : 6 roi l
tilta yat el-bint dar yan oguelltd ne Tork, atfolki
elle-existe une fille chez un roi . des Tores , elle-est-belle
zoun aïour; oua-lakln our stidtaoui ghair
comme la-lune ; mais ne la-pourra-amener personne-qoe
el'ouzir d^^-el-djôdld elli d}k imoun. Innaïas oguellfd :
le-vizir le nouveau qui avec-tof est-venu-avec. Pit-à-lai le roi :
Ghair, atteftout sers. Innaïas : Khxart !
(je ne veui^ rien d*)aotre qne-tu-ailles vers-elle. Il dit-à-lui : Bien I
Enker el^outir elli d-imoun d'oguellîd , isker Yâouin
Se -leva le vizir qui était-venu avec le roi, il-fit les provisions
n'-omoddou yaggougan béhéra. Ilian igharacen galcen
de voyage lointain beaucoup. Etaient les-routes en-elies
APPBRDiCB' 543
idjoui d^iccaddhâen d'izem. Iftou P-^ouzir okoun aïoar
boae ek brigands^ et lion . S'en-alla lo vizir eoYîron an*mois
d' netia gh-ogharas. Aïlligh elkain lemdini^ ikchaoci dîs,
et lui en chemin. Qaaad il vint à la ville^ il ectra en-elle,
iftou dar oguelUd , ilkamet, ifkas teirat
il -alla chez le roi, il-Tiot-à-lui, il doona-à-lui la lettre
n*ogaetMd. Ifrah seras oguelltd ; iggauz dares.
du roi. Se réjouit de oela le roi ; descendit (le vizir) chez-lui.
Aïlligh iga krad ooussan, ihdou yas lehdit ifolkin
Quand était trois jours (passes), il-donna à-lui un-présent beau
béhéra. Innaïas oguelltd : Ira oguellîd illi astîli ?
beacoup. Dit-à-lui le roi : veut-il le-roi ma-Ûllep'-qu'il-répodse?
lonaïas : Our sinegh ; koulloi^chi ilia gué iehratens.
Il-dit-à*lui : point-ne sais; toute chose est dans lettre- de-Iuî.
Innaïas oguelltd : Enker^ ^V , ekchem Jar-illi, inïas :
Dit-à lui le roi : Lève-toi, vas, entre cbez-ma-fille, dis-à-eile :
Babam ifkakam ioguelltd el-flani. Enker eZ-ou^lr,
Votre-père a-donné-vous au roi un-tel. Se leva le yizir
iftou. Aïlligh ilkem Ictcser n' el^bint, ibod guts.
s'en-alla. Quand il-arriva au-chÂteau de la-fille, il s'arrêta là.
Iftou yan icemeg, ikcham dar, el^bint, innaias : Ha
Partit un esclave, entra chez la-fiHe, lui-dit : Voici
^l-ouzîr ellî yam inna babam. Yocbkad el-bint^ iahtal
le vizir dont à-vous a-parlé père-voire. Entra la-fille , se-prépara
fellas. El'bint dts amraouat le-bnat foikintu
pour 'lui. La*fille (étaient) avec-ellc des -femmes jeunes belles
544 HI8T0IRB DM IIRBÊRES.
20uti aïour ; telçâ U-bint^ ellis n'ogaeUtd n' Tork,
eomme U lane ; »'hftbiHâ taille, Blle^e-lai du roi des Turcs»
oafagh d'0/-yac6ttl d^el^jôuhêr^ teggaouer tezzouml
(âTec) or et mbîs et perles, elle-s'assit aa -^ milieu
n*a/-6^na^ elH, tesers el-yntout, d^eZ-J/ouAcr, d'ouragh
des filles celles-là ; elle plaça des rubis, ci des perles et d'- or
gué - j^oi/damnis, tesref seres. Aïlligh fellas ikcham,
eu-devaû(-d'elle, elle-entoya verd-lui . Quand sttr-elle il eatra,
tezzert, iziert tggaouer H - g&ddamms ^
elle- regarda-le, il-regarda-la, il-s'assit deTaut-d'eile ,
teûuaïas : Ktïn aîgau H-ouzir D^oguelltd t klïu adiochekan
elle-lui-di i : toi étant (es) le Tizit du roi ? toi étant (tu es) venu
adtr -taouH 's-etares? De-uetta îzdar
pour qtte-tu-m'emmènes chez- lui? Mais-lui baissa
elIenSy our^içacual seres. Tenoaïas : Aci gh* el-mal
yeux-de-lui, non-paria yers*elle. fille-dit-à-lui : Prends des rich«*
d*0/-yacou^ d^ouragh ; ha *l - hetiat ; ten trtt ,
et des rubis et d'or ; voici des-fiUes; celles-que tu - veux ,
aouît. Our as - idjaouah ouala içaoual seres.
emmène -les. Non à-eile il répondit et non parla vers-elle.
Tegher icemeg en-babas, tennaïas it-tadjer : Effough-
Elle-appela esclave de son-père, elle-dit-à-lui, au marchand : Sors-
gutgt. Tenna icemeg : Sir, ini ibaba : argaz-ad
de-devant-moi. Elle-dit à l'esclave : va, dis au père .qu^homme-ce
iga adordour, iga azzenzzoum igltli, Enker, imoun
est sourd, est muet muet. Il-se-leva, il accompagna
A1>PBND1CB. fttô
4* icemeg. Aïligh ilkemen aguellîd, innaïas iccmeg : Ergaz—
avec l'esclave. Quand ils vinrent au roi, dit-à-Iui l'esclave : Homme
^d iga glili, iga adordour our aïssefled ; teoDaîas lalia ,:
cet est muet, est sourd point n'entend; elle-dit-à-lui la maîtresse :
Aci ouregh d* eMjouher d' el'^ûcout^ taoatt yat el^hint
Prends or et perles et rubis, emmène une fille
elli trit ' gue 1 ^ IcAaterenk ; our içaoual ; hati
' celle-qne lu veux selon la volonté-d^toi; poir.t-ne parla ; le voici,
aouîghted s' (^arek. Innaïas oguellid : Makb
je - Tai - ameoé-ici vers chez-toi, Dit-à-Jui le roi : Pourquoi
aïltigh our trit gbaïad t^lli yak tinua illi ? Innaïas
donc non tu-as-voulu de-cela que à toi elle-a-dit ma ûlle? Drt-à-lui
7-oti2îr : Nekki, aguellîd, illa darx H-yacout ouata l-
le vizir : Moi , ô roi, il y a chez-moi des rubis et des
djouher ouala ouregh otiala tiraghartu ifolknîo bëhéra ,
perles et de Tor et des femmes belles l>eaacoup ;
our ikkassi yat ; gheir aguellid nekki
non à moi manque rien ; seulement le roi à moi
ifkaï teira^eos d^el-hedïetem aouigheklidj*
' adonné-à-moi lettre-de-lui etprésent-de*lui j'ai apporté à toi
igh trît adfi tefekt kca, guis
€ela ici ; si tu-veux à-moi (que) tu-donncs quelque-chose, en cela
el'-kheir^ imma nekki our 'douchekîgli adaoutgh
. (sera) le bien, mais moi non je-suis-venu pour-que-j'emporte
ikhfins haita yat ; el-khater
pour ma tête (mol-m^me) même (la moindre) chose ; la volonté
T. IV. 35
546 HISTOIRE DBS BBRBERSS.
n»oguellîd aïzouaren koulou chi dari. Innaïaè oguelltd
du roi est précédent à toute chose chez-moi. Dit-à-!ui le roi
ne-tork : Zoiin' kîïn aïllegan e/-oazir n-oguellîd 1 Imoufà
des Turcs : Comme toi doit-étre Je vizir d'UQ-roi ! Il partit avec
dis, ekchemen yal tiguimmi guîs yat
avec-lui, ils-entrèrentune maison dans laquellfe (était) une
oAanou guîs gheir ikhfaouen elli ibbi
chambre dans lequel (rien) exceptéides-têles qu' il -avait-coupée s
n-irgazen elli xiiekhatebsin ellîs
aux-homroes qui avaient-demande -en-mariage la fille-de-lui
u-'oguellîd : Igh acen teuna U-bint : istram ^niel-bintl
du roi : Si à-eux disait la-fiile : Voulez-vous une fille ?
innanès : Nra ; igh acenlenna : Islrem
ils-direut-à-elle : Nous-voulons ; si à-eux-elle-disait : Voulez-vous
el^mdl? accnt, içaoualen seres, aiserf
de l'argent ? il prirent-!e, ils-parlùrent vers-elle, elle-envoyait
es-babas alennaïas : Ebbi iklif o-ghouan !
à père-d'elle qu'elle dise à lui (pour lui dire): Coupe la tête àcelui-làî
inghtl gh el'hin, Innaïas oguellîd : Koullou ^hoMxd nekkl
il-coupa-la à l'instant. Dit-à-lui le roi : Tous ceux-là moi
yaten inghan ; guillenad aïPagh teskeit ^hi-kedda, our
eux ai-tué ; maintenant que tu-as-fait comme-ainsi (que) pas
tegguit zoun ghouîn ; efkighak illai , aoutt. Ilhou
tu es comme ceux-là; je-donne-à-toi ma-fiUe, ç;mmène-là. Se mit
oguellîd ^ritahtal a'iserf illîs ,
le roi il Ot (à faire) des-préparatifs pour qu'il-renvoie fille-de«lui
iPP£Nfiic«. 547
esker lehaouaïdj folkÎDÎn ; inoa l'ouzir : Eoker ahtal
iUÛt des-habits magnifiques; il- dit aa vizir : Lève toi fais-prépara-
iinoddout. Ifkas oguellîd gh-icemegan ouala tîwîwîu
tifs de-route. Donna-jui le roi des esclaves et négresses
oualaH-mal iggoulhen d'e/-ma;Âa//a^ Iftou l-ouzir ; aïlligh
et argent beaucoup et des troupes. Partit le vizir ; quand
ilkem ioguellid, ifrak seres oguelliJens ; izoggaz
iUvint au-roi, se-réjouit sur-lui roi-de-Iui ^ il-tit-reposer
l-erahall \ ifkacen cl-kheir aïlligh ichadd,
la-troupe,iI-donna-à-elles des richesses jusqu'à-ce-que (cela) sura-
Ilhou oguellîd esker tt^maghra ifolkin ; aïlligh
boudait. Se mit le roi il-flt (à faire] une fête belle ; quand
■
icada temaghra, isreflemhall^ iggaour oguellîd ^h-el-medineleiks
eut-fîni la-fôle, il congédia la troupe,' resta le-roi dans ville-de-lui;
yafen el^bint^ ellis n'oguellîd , zoun aïour gho'folki;
trouva la-fille, fiUe-de-lui du-roi, comme une-lune en beauié;
tâdjebei béhéra, laazoïi dures, Aïlligh
elle-plul-à-lui beaucoup, elle-fut-chère auprès-de-lui. Quand
azuja krad et^ouzera ghaian elli isker l-ouzir
regardèrent les-trois vizirs à-ce que fit (avait fait) le vizir
elli addiouÎD el-oint, ihobbet oguellîd oggar
qui amenant (avait amené) la-ÛIle (et que) aimait-le le roi plus
en ^i-kelli izouareu, emckaouren fellas
que comme les (vizirs) précédents, ils-se-concertèrent contre-lui
ar-sigguilen madas iskarn aïnguiri (?) d'ouguellîd
pour chercher ce que ils- feraient pour-le-détacher du roi
5i8 HISTOIRE DIS BBRBÉRBS.
gh' el^khalerens. Agueilid ilian dare$ sin iferkhaa
dans Tesprit-de-lui. Le roi éuii clicz-hii deux jeuoesgensf pages)
aras teterrachen igh ira aïgao, zoud
pour-lui ils*faisaient-lc-Iit quand il voulait dormir, ils étaient comme
icemg^n ariteggaour yan dar ikhfens, yan
des serviieurs afin-que-se-tinl Tun auprès-de la-tète-de-lui, l'autre
dar idhareos, ar fellas lennachachen
auprès di*s-pieds-de-Iui, poursur-lui ils éventaient (pour Téventer)
estazifen arkJgh aïgan gbozal.
avec mouchoirs jusqu^à ce que dormant (s'endormit) pendant le jour.
Koul as ifloun el-ouzéra 's-krad aïlligh roeggarn
Chaque jour allèrent les vizirs . les trois aûn qu'ils-rencontrèrent
iferkhan elli ettilUn d'ouguellfd igh
(de rencontrer] les -pages qui étaient avcc-le-roi quand
ira aïgan. Ennancen el'ouzera : Igh ira oguelltd
il'Voulait dormir. Dirent-à-eux les-vizirs : Quand voudra le roi
aïgan tennamès : El-ouzir elli diouin ^ ilUs
dormir dites-a-lui: Ce vizir qai amenant (a-amené) la-fille
lî'oguelltii ar-ikcham '^-c^ares, ar-dîs 'içaoual
du roi entre chezelie, pour avec-elle il-parle (parler)
koul as. Efkenaccn acantar n'ouregh ; ennancen :
chaque* jour. Us donnèrent-à-eux un-quinlal d'or ; ils-répon-
Khiart I Eftoun iferkhan. Aïlliîgh ikebam oguelltd
dirent-à>eux : Bien ! Partirent les pages. Quand ful-entré le-roi
aïgan ghimA*e//t isker
pour dormant (dormir) comme il-faisait (d'habitude)
APPENDICE. 527
ckchernn dures. AguelUd ighli siggui 7-/eracAne»,
ils-cntrèrent chez. lai. Le roi monta sur le-lit«âe-Iai
aïgao; yan gutsen içaoual , iona ighouan yodaîo :
pour-dormir; Tun d'enlre-eux parla, il-dil à i'an l'aatré (à l'aut.)
Stezrtt eC-omir elli adfouia illîs 'n-oguellid ? arikcham
AS'ta-YU le vizir qui amenant (amena) la fille du roi ? il-entre
ar dareSy içaouat seres koul as I Innaïas
jusqu'à chez-elle, il-parle avec-élle chaque jour ! Dit-à-Iui
ighouan yadnîn : Ghassad keili tizrit I cahl
Vm\ autre : C'est-aujourd'hui (que) tu (P) as yu ! avant
ghassad eikcham dures; amedokelehs eïga.
aujourd'hui il est entré chez -elle; il ramant*d'ellesoit(doit'être}.
Aguelltd arisoQed, orta (?) aïgao. Enker ogueUld gha
Le roi entendit, pas-encore dormant. SeMeva le roi à
'l-l^n, igher el-ouzir. Yochkad ar-cfares ;
l'instant, appela le^ vizir. Il-entra jusqu'à-chez^lui ;
innaïas : Ghîkadd atteguti I Ingiitt ;
il (le soi) loi dit': G'est-ainsi que-tu-es l ll-le tua ;
indem fellais, imdhetlet ghtn, our-asidaoïti
il-sc^repentit sur-lui , il-enterra-le sur-place, non*qu' apportât
r
yan H'okhhar aïlligh
quelqu'un (afin que personne ne portasse) la-nouvelle qu'
immout. Yeggaour ogueliid, our-ikcham ' iar A^el-hinVr
il-fot-mort. Resta lc-roi> point-n'entra chez la-fille;
Ikçoud attaouï 7-a&Â6arcns aïlligh imn>out
il-craignit de-lui-apporter ia-nouvclle-dc-lui que fut-mort
550 nfSTOiRE Des berbères.
el'0uzit\ ùchkou idzza dàrès. Igga
Ic-vizir, parce-qn il (lo vizir) était-cher chez-elfe. Resta
oguellîd ar ïed ; yafen iferkhan arte/âian
ie-roi jusqu'à la-nuit; trouvant (il trouva) les-pages (qui) jouaient
s^ouregh ; içaoual yan gulcen, inoa : Ogaellid ingba
avec de l'or ; parla l'un d'enXj il--dit : Le-roi a-tué
'l-oueziTy gheir neskarkes fetlas , meshm l
le-vizir. mais nous-avons-menti sur-lui, le malheureux (vizir) !
mammou nra ghîad ed ouregh ? ma-ra seres
pourquoi avons-nous -voulu ce l'or (cet or) ? qu' en
nesker? Ogoellîd ibbod araçen, isofled aïlligh
férons-oous? Le-roi s'arrêta près-d'eux il-écoutait pendant qu'
açaoualen f ikcbam fellacen, innaïaceii : Madawen
ils-parlaient ; il entra sur-eux , il-dit-à-eux : Quî-à-vous
ifkan ouregh-ad ? Innanes : El-ouzeranek
a-donné or - ce (cet or)? lls-dircnt-à-lni : Les-vizirs-de-toi
s' krad cnsen ennanegh aoual ell* ak
(les) trois d'entre^-cux ont-^it-à- nous la-parole qu^ à-loi
nenna, aïlligh tenghît e/-ou2ir elli idtouîn
nous-avons-dit, quand tu-ss-tué le-vizir qui amenant (amena)
ellîs, n'oguelltd. Enker oguellid, inghiten ghîen ;
fille-de-lui, du-roi. Se-leva le-roi, il-tua-Ies sur->place;
yeggaour. ar sabah içref s - el-ouzera. Aïlligh
il-resta jusqu'au matin, ii-Rl-chercher pour-les-vizirs. Quand
douchkan^ ebbi kouJ igensen ikhfaouencen gha-'/-Afn.
i4s*ontr(>rent,il-coupa (à) chacun d'eux t<^ies-d'eux à l'instant^
APPElfDICB. 554
Ikchem dar^el-bint^ ithou ar-ïolla ; tennaïas el'-bint :
Il-entra chez*la-fille, il-se-mit à-plearer; elle-dil-à-lui la-flile :
Maki-yaghan aïllîgh ar-tellat aï-agueilid ? yak
Qa^eslrce-qui-te-nuisant (lenuit)pour-quetu-pleures6 roi? à-tof
ourak immout yan zegh-(iarek ? Innaïas : Ëoghîgh
pas-à-toi est-mort quelqu'un de cbez-toi ? 11-dit-à-elIe : J'ai- tué
7-ouezir e//î kem iddiouen. El*b%nt elli isellan
le-vizir qui vous amenant (a amenée). La-fiUe qui entendant
eîmmout el-ouzir tebbi houl^-ma telsa
(entendit) que-fut-mort le-vizir coupa tout-ce-dontelle-était-ha-
gh' inserafens ; têlhou artella , our
billée des eflfets-d'elle ; elle-se-mit elle-pleura (à-pleurer), point
tesbory our techetta ouala 'rtessa ghied
elle-eut -patience, point elle-mangea et-non elle-but de-nuit
oula zal. Tenna ïoguellîd : Loukoun our
et-non (de) jour. Elle -dit au-roi : Si-c'était ne-que
d* l'Ouzir-an , tenghît,
de vizir - ce (si ce n'était ce vizir) tu-as-tué-le (que lu as tué),
our adh' tezrat gbtn I Innaïas : Makh ? Tennaïas :
point moi tu-verrais ici I ll-dit-à-elle : Comment ? Elle-dit-à-lui :
Baba yengha irgazen oggar en mta el-ouzara 'n-
(Mon) p(ère a -tué dcs-hommcs plus de cent vizirs de
iguellidan elli ya^/66an ; koullou zerighten ; our
rois qui (me) demandaient ; tous j'ai-vu-les ; point
iddjoud nekki aïzran zoun d'aghouan abadan.
jamais (?) moi ai-je-vu comme de-cclui-là jamais
552 mSTOlRB DBS BBRBÈBI9.
Aiàotiedas 'l-akhbar ghemkelli izoaaren. llhom
EUe^répéta-à-loi la-noavelle comme dessus. Se-mit
ougaelltd yahzen fellas. TekemmeUt el kisset.
le-roî il-s^attrista (à s'atirister) sur-lui. Elle-esUfini Tbisteire.
Noas donnons ici les deux premiers chapitres du Bahr-
ed-Domouâ -
^ f^yXJUà^^ JU^, \j\
Inna icemeg idafen igan,
A dit le-serviteur faible étant (qui est),
(Xy^^y U^ kJî^^**^'
Imeikîn igao bou-donoubi,
Pauvre étant, plein-de-péchés,
^^ ylSÎ Je ^ *x^
Mohammed-ben-Ali igan osouci,
Mohammed Qls d^Ali étant de Sons,
4^ tyu4^:>l J\j^
Aouzali, adas ydfou ilahi :
Rouzalien, à-lui que -pardonne Dieu :
Bismi 'Ilahi es-ie(]ftgh aoual iwaltidi
Au nom do Dieu que^ja-commence un-discours qui. . . • . (V)
Es - sàlatou oua-selam aleika a-nMi Ahmedif
La bénédiction et-Ic-saiul sur-toi ô Prophète louable «
IPPERDICC 5â3
Nettan de kra yourou ouala 'z-zoudjat
(sur) lui ei ceux qu' il-a-engendrés ei (ses) épouses
oua 'l-ashabi,
et (ses) compagnons,
]ym^ OfUMjl (jM|^Âé> ^jmJuuuo^
D'et-ta6éïnnès gho gharas ar acef
Et leurs-successeurs dans la (bonne) voie jusqu^au jour
n*el''djeza*
de la rétribution.
Guigen aïdénegh adren ^l-mohibbînn'el'kotbi
Souvent de-nons ont-demande lesamîs des-livres
CSi^^yi^^ iS^^ tr^' Uàx:^^
N' el'fnauoiAddha irazzamen imezguoo
De bons-conseils qui attacheraient les oreilles (l'attention)
ihîou d'el-kelbi.
et rendront la vie au cœur.
Se^n-nadhm oo-tamazight enni folktn
(qui seront) en-vers en berber (langage) qui (est) beau
igan Vddjobi
qm est la merveille (du monde).
Ennan : Hefûkih oken aïllan ghoualtdi
llfi-4ireDt : le docteur seul est (capable) d'une telle (tâche):
554 niSTOIRB DBS BEBBËRES.
Teskert d'el-ahkam B^es^cherà ; adek idjazza
Tu auras agi selon les maximes de la loi ; que te récompense
ilahi !
Dieu ! . •
Âfitma I el-maouadha tebderem nekkfa
Frères ! les conseils (que) yous mentionnez, moi (je les prends^
arguîgui.
sur moi.
Oualakin er^edjiou gha ro&ii d'e^-cAet^A
Mais (mon) espérance (est) dans le Seigneur et (dans) le cheikh
aîcemdi.
(qui) est parfait (c.-à-d. Mohammed).
Er^redjenou oulinou aibelleghi
L'espoir- de-moi, de-mon-cœur (est qu'ilj me fasse atteindre
le-maksodi.
mon but .
Jl)^ (jj;*x533^^! \i!fjjmjx^ *Xi
Caddama^h ar-serek el-Baril iouellîk idderntn
Nous avançons au-devanl-toi, 6 Créateur 1 toi que Ton implore
gho zali.
de jour.
APPENCICE. 555
Oula nd our-te^Aa/e/en ; adiï terzemt Vebouab^
Et (de) nuit sans-ôtrc -négligent; à moi ouvre les portes(de ta faveur),
Tegait serr, a-Moulana ! gho walinou
Place (ton) inspiration (?) ô Seigneur ! dans ma parole
de-l-ca/6ioou;
et mon-cœur;
Enni'tezza^ gha M-ca/i iwats izgharan
Laquelle restera dans le-cœur (et) /ui-apportera les promesses
•• •
ifollodjou,
accomplies,
^j^ ^^j^j\ uM='3•^i (•ï*^^^'
AriteAdam l-ebouatil arisserid ed^donoubiy
(El) détruira l'erreur (et) lavera les péchés,
Aritkekial H-djonoud ibiis aricAereeifadi ;
(Et) chassera les troupes de Satan (et les) mettra en déroute ;
^^1 s!)*yjûjj UJ^U JUJ^^
Oua *n el-islam a^Moulana^ rerenghodek an
Et, de Fislamisme ô Seigneur ! nous olï^ons ici à toi cet
touba
(acte de) repentir.
556 HISTOIRE RBS BERBEIIBS.
f54^{ J!^>I yy^s (jx^ „jS3
Tegueit el^alamina douinweo ouala
Mets toutes les créatures (d'accord) avec toi ainsi que
^l-acoual^ aïilahi /
(leurs] par 3les^ 6 Dieu !
jjA^I Ui^U v;;>3«X4>
TeAdout ya Moulana, afétinîn es-souahi.
Tu (le- ) dirigeras ô Seigneur, afin qu'ils parlent la rériié .
Aweffec ie/id/icou da '/'cau/inou
Fais accorder (nos) actions avec (nos) paroles (cela n'est)
ourigui.
pas pour toi (difficile).
L'eau/ 6/a a/ii/, nedji a rabbi , 'x-gutci.
Parole sans actes, déliyre-moi, ô Seigneur décela.
É^^^'^T,^' (:X*^ tê^ ^^^ oOjiû:?
Tene/jfet, ya Afou/ana s'kra, negh ien/iien, our kra
Tu as prodigué, ô Seigneur, des choses à nou^ utiles , tien dans
gutci.
elles (nous a profité).
^^u*l^Xj^ Jl^^iM^Xà» ^-«MN ^t
llleu icemanegh, guici Mla kra
Ëtant (il) nous entend, en lui est la chose (la gràco)
APPENDICE. 557
ne/6ert.
(que) nous reTÔtissions .
Takhetemtt yaMoulena, fellaoagh ^sel-kheir
Imprime ion sceau, ô Seigneur, sur nous avee le bien
ouata U-mohibbînî,
et aussi (sur) les amis,
^U.il j*^ ^.^^ ^3 iJiT»^^ (j^^-*^
ift
Ouâ/a imoslemin adjmaîn otiata H-oualidaïn yauma
Et (sur) les musulmans tous et sur (mes) parents au jour
'Uhiçahi.
du jugement.
^t lyuJ^^J JA^il ^^^OJI
Bahr ed-Domouâ adguigh e/»it(a6edinott eïkéi'
(Le tilre de) La Mer des larmes j'ai placé (sur) livre-ce- mien (?)
jt^XJ^ (^^^:>;l ix«|;l;j) |;ÂXaJu
Yan £ /e^ro^an irer emetta
Quiconque (se met) dans cette lecture rendra des larmes,
izdi nit amdani,
(les) augmentera vraiment exprès.
Coubelt . ouala U--alemin koulloieUj à ouahdaho /
Accueille-le, ainsi que les savants tous, 6 toi qui ea l'unique l
Lekerm* dXàà teguit, ya rabbi ! ghel-ftAeir gui - cemegui;
Grâce cetle fais, ôSeigneur! avec le bien envers (ton) serviteur;
558 HISTOIRE DBS BBRBkRES.
Lebab en tawaçoa ne-^rabbi, agh , bedigh^
Le chapitre de la conoaissance de Dieu, par (lui) je commence ,
aouni guts !
mon secours (est) en loi !
^^\ ^^t*X5t Ui^U (j-Jl»y
Âouïsi guis, â Moulanay atidaouigh, aïilahi I
Aide-moi en cela, 6 Seigneur, afin que je i^accomplisse, à monDien!
^U U-My c;wJw cxâJ. ^j\Sij\
Aigan 6/- djennet n'ed-dounît tawaçna n-ilahi.
C'est le-paradis dans ce monde (que) la connaissance de Dieu.
3
Oua netta our aïssen zoun ; our iga dounit adi.
£t lui, il ne connaît (pas de) semblable; il n'est pas de ce monde.
j^Joî (j^Xii-l (jMéJ ùJ^\ cih'v^
Ouin itran imned, issen ikhfens afedi
Qui<;pnque veut regarder sait sa tôte (lui) que
Our guis ; aïssen oual ilidkhalkeu mamink iga.
(Dieu)n'est pasenlui; sali celai qui Ta créé comment il est.
Mekenn iga 'l-makhlouc han (?) el-mokhlikens our
Gomment la créature peut-il voir (?) son créateur, point
ligui (?)
il ne lui ressemble (**)
APPENDICE.
559
(^wytl^ y}^S] (^yJAXj ifJui p«3sjîj
Ben^Âdem iga kou n-nacsan^ iga koutou bou-'l-àibi.
L'homme est touto imperfection, il est tout plein de défauts.
El^Khalekens our guis en^nacsan ouala illa 'l-aïbù
Son-créateur point (n'est) en lui imperfection et point n'est défaut.
El-aousaf cl-koullou folkinin agh (b) îlla (a) ilahi.
Les qualités toutes belles sont (a) dans (b) Dieu,
^^*>ijU-l ^ljU«J Ua^l ^ ^OUJ Jl
Iga *l'Cadim el-bakl, ihya, içfaou' içofledi.
11 est l'éternel, l'immortel, il donne la Tie, il éclaire, il entend .
ar-içaoual, yalem kra lillan, izdhar ma ira.
11 parle; il sait , touto chose qui existe, il peut faire ce qu'il veut.
Arinegha van ira, irJt Ben^Àdem uegli
Il tue quiconque il veut, (soit) que le veut Thomme soit que
ohoui.
non.
Aviidebber el^omour^ our ichaouer yan iterc^uîn.
11 dirige les choses, ilne prend conseil depersonne autre que lui,
Ihtdddjù seres koyan, our ihtaddja es-yan
A besoin de lui chacun, il n'a pas besoin d'aucun de (ses)
360 lUSTOIBE DBS BBKDBRES.
icemgan.
serviteurs
âio^t ^^>j^ uy^y^^
Honciel , ai-ouguennoun t raondet, ai oguellidani I
Regardez-le, ô génies I regardez-le, 6 rois l
Sobhan Rohhi Hli tenyoumzen blà aoucaf a
Exalté-soit le Seigneur qui les enlève sans résistance ô
benadem.
homme.
^JoXiUJlj^.! ^^^l^bv;»JOU
Monden ton, itrao, aiour oualà tafoukt adi ;
Regardez-les, les étoiles, la lune et soleil - ce ;
Yan guiccn îghaben i^ dou akal adissellldi.
Chacun^ d'eux disparaît sous ia-terre et il revient encore (?) ;
Temnedem ikh i^ou//ou temmou^em, y^hya kon di.
Vous voyez que tous vous mourrez^ il fera vivre vous là.
ktxicerf makedd^ ira; ghi/mo/A:ens iga oguelltd.
11 gouveri.e comme il veut; dans son monde il est roi.
«
Our yechrtk ad yan, our itouala yan
Il ne s'associe personne, il n'a pour compagnon personne
, APP8MD1CB. 564
bla Delta ouahdou.
eicepté Ini-mCme seul .
^^yMS\ tiyuwl vJift^UL JjS^pl>XJ
Ilazen koul el-khalaïc atifootm, aiazzouni.
11 faut qae loates les créatarea lai obéissent (et) rbonoreot.
Les négocients musulmans qui habitent les provinces méri-
dionales de Tempire marocain se servent dti dialecte chelha dans
leurs lettres de commerce. Nous donnons ici le texte et la traduc-
tion littérale d*une de ces pièces.
Mohibhina fi 'Uahi haccan oua yakinan ; oua dhalika
A mon ami en Dieu véricablement et siac^rement: ellni c'est
ad Mohammed-ben-Folan ] selamon alaïka oua rahma-*
le ctd Mobammed^ fils d'un Tel ; le salut soit sor toi et la miséricorde
^i'Ollahi oua bereketohou. Aïmodekkolino icak seghîgh eU
de Dieu et sa bénédiction . 0 mon frère I pour toi j'ai acheté des
louz^ iggoulhen d'ilem iga outn el^mdzi , hati illa
amandes beaucoup et des peaux qai sont de chèvre ; voici elles
gou-foucinou lah matiltessen,
sont entre-mes-mains^ mais ilny-a-personne pour les-prendre;
lah xtreffakeïï ; iganîn ihahan idroucen ;
il n'y-a-pas de-cbameliers : ceux de Haha sont-rares;
imma nekki illigh ghomoddou; adeftough
quant-à mot je-suis (prêt) à (faire) un-voyagc ; afin-que-j'ailie
ar Merrakech; adsegh kouttou mada righ» Tessent
jusqu'à Maroc; j'achèterai tout ce^que je- désire. Tu sais
T. IT. 36
562 DISTOIRB DBS BBBBÈaES. •
ilkem ' omoggar ne mars ; adecdough
qu'approche la-foire de mars ; je-termioerai (mes achats)
ourrtghed; hali nekki oucjgk ogma adak
et-je-reviendraî-ici; voici moi j'ai-chargé mon-frère qn'à-toi
içarf kouUo H-homoul ad-ellanin ghtd. Darîngh
il- envoie tous les-ballots qui-soot ici. Chez-nous
tamactrt tehenna âlakheir oual agharas. £/-tfac?((/
le-pays-est tranquille et-en-bon état ainsi-que la-route. LeHaddj
Ahmed illa gho-Aghadir; nedfà yas konllo-^l^mal
Ahmed est à " Agadtr ; nous-payons à-lui tont-rargeot (impôts)
n^'-el ' makhzen; iferra fellanegh imharkin.
du gouvernement ; îl-a-reparti sur-jious les^contingents (troupes).
Serf-you & kra H-iittan igan es-sabao ; otia-e^*«e/am ; oua
Envoie-moi un peu de toile étant calicot; et salut; et
katib al-horouf . ileik amodekkoIinBk El-Hadij
'écrivain de-ces-lettres à-toi (c'est) ton ami Lë-Hadj
Ibrahtm, oua /î acheret aïyam min dhou ^-IHiddja
Ibrahim, et dans le dix des jours do dhou 'l-Hiddja
âam 4255.
de Fan 1255.
CONTE TRADUIT DX L'aRABB EN ZOUAOUA .
Thahkattli ouguelltd d'où fellah.
HISTOIRE BU ROI ET DU CULTIVATEUR.
Kisra îâdda youfa afellah da - ithezsou
Chosroès il-passait (el) trouva un-cultivateur que-plantait
APPENDICE* 563
thezdaïth; netsa d'amghar moggar. Inna Kisra :
un dattier'; lui c'étaiNuo-vleillard âgé. Dit Gboaroès :
a
Wahntmegh deg amgliar agui da-ïetlaçal ad-ïetch
Je-suis-étonné de- ce vieillard ci qu'il-pense qu'il-mangera
themrmin ^ an tbezdaïlh agui I netsa our itsilli
les fruits du dattier ici 1 il (les fruits) ne sera pas
alemma dddan aich^-hcU issegaceu I kotchini,
jusqu'à-ce-que soient passées beaucoup d'années 1 toi,
aï fellah ! ikfa â/-amrtk. Innaïas oumghar :
ô cultivateur 1 se termine ta-vie. Dlt-à-lui le- vieillard :
Aï oguellid, ezsan, nelcha ; anezsou
0 roi, il (d'autres) ont planté, nous-mangeons; nous plantons^
adetchan. Inna oguellid : Tàdjehe^ deg
(d'autres) mangeront. Dit le roi : Je m'émerveille de ces
awalin agui ; efkas alf xdinâr^u^ ïou -fellah,
paroles-ci ; donne-lui mille dinars^ au cultivateur
Ifkaïacen, Innaïas oufellab : Âï oguellid, ihâdjel
On-les-lui-donna. Lui-dit le cultivateur : 0 roi, a-été-précoce
thezdaïlh agui si tàemnwXxï, Adjtbïi, ouguellld, aowal
ce-dattier cl avec des-fruits. Plut-à-lui au roi, (cesj paroles
V *
I
agui ; inna : Ifkas alf idtnUren. Innaïas :
ci : (et)dit : Donne-lui mille dinars. Lui-dit (le cultivateur):
Âï oguellid,' koul chi ad H-adjeb, lamâni thezdaïlh
0 roi, chaque chose est une merveilUe, surtout (ce) dattier
agui ; thourou merràtaïn doug-seggas. Inna ougueliid j
ci ; il a produit deux fois dans l'année. Dit le roi :
364 HISTOIRE DBS BBBBBSB6.
Ifkas ûlf xdinùrQïk nidoia. Irouà.
Donaa-!ai mille dinars autres, et il s'en-alla .
Quelques pièces en dialecte touareg auraient pu se pincer h la
suite de ces extraits, mais elles présentent des diflScultës telle-
ment 'graves, que nous devons en suspendre la publication.
L'écriture des Touaregs pourrait donner lieu è plusieurs obser-
vations, si DOS renseignements étaient assez complets pour auto-
riser l'examen de ce sujet intéressant.
On voit par les extraits précédents que la langue des Berbères,
dans son état actuel, renferme un grand nombrede mois arabes ;
cette race africaine, ayant accepté la religion du conquérant, a
toujours tâché d'en adopter le langage. Plusieurs tribus berbères
ont fini par oublier leur idiome; et les autres, h Texception tou-
tefois des Touaregs, se sont formés des dialectes hybrides dans
lesquels l'élément arabe tend graduellement h prédominer. Par-
tout où l'islamisme s'est introduit, la langue nationale a subi
l'influence dn la langue arabe au point de s'en laisser saturer ou
de se neutraliser. Le Berbère s'est assimilé l'arabe avec une
grande facilité; il a même accueilli des mots appartenant aux
turc et aux langues européennes; de nos jours, il reçoit sans
difficulté certains termes français et espagnols.
Cependant, il ne renferme presque rien ni du phénicien, ni du
latin, ni du vandale; bien que les Carthaginois, les Romains et
les bandes do Genserich eussent dominé assez longtemps sur
l'Afrique pour pouvoir communiquer aux indigènes une partie
des mots dont se composaient leurs langues. Il est vrai que les
peuples berbères latinisés vivaient à demeure fixe ; aussi, quand
la conquête de leur pays par les musulmans les priva de l'appui
APPKNDICB. 565
des Romaios, ils se virent exposés aux envahissements des Ber-
bères nomades : une partie fut exterminée : le reste se dispersa
dans les tribus et perdit bientôt tout ce qu'il avait appris de la
civilisation européenne. Un siècle auparavant, les débris du peu-
ple vandale étaient allés se confondre avec les tribos berbères de
l'Auras; la population punique avait disparu, ainsi que son dia-
lecte sémitique, bientôt après le triomphe des Vandales; et Ton
ne peut guèr^ supposer que les Berbères insoumis et moitié sau*
vages eussent daigné apprendre et conserver quelques mots ap-
partenant aux langues des peuples qu'ils avaient toujours dé-
testés et qui venaient de succomber.
Ibn-Kbaldoun a consacré deux chapitres de son ouvrage
(tomei, page 467 etsniv., et tome m, page 480 et suiv.)
à l'exposition et à l'examen des renseignements fournis
par les écrivains musulmans qui traitent des origines berbè*
res. Les opinions qu'il discute et qu'il réfute, presque toujours
avec raison, proviennent de deux sources , l'une arabe, l'autre
berbère. On pourrait attribuer une certaine valeur aux indica-
tions fournies par les auteurs arabes., si l'on ne savait pas que,
dans l'histoire des deux premiers siècles de la domination mu-
sulmane en Afrique, les dates les plus importantes sont inexac-
tes et que le récit des faits est très-incomplet et souvent peu
croyable. Jusqu'au milieu du deuxième siècle de Thégire, les
annales de l'islamisme ofTrent une foule de contradictions et de
lacunes; pour ce qui regarde l'Afrique septentrionale, on remar-
que, surtout dans les plus anciens historiens, des fausses dates
assignées à la nomination des gouverneurs, et l'on s'est aperçu
que l'exposition des événements politiques qui eurent lieu pen-
dant celte époque ne peut soutenir un examen critique. Sans le
secours de la Byzantine et des chroniques européennes, nous ne
saurions avec certitude ni l'année de la prise de Carthage, ni
celle de la conquête de l'Espagne. Même en ce qui touche à l'his-
toire de leur propre pays, les Arabes n'ont jamais eu que des
notions très-confuses. Hors les événements qui signalèrent la
carrière de Mahomet, tout ce qu'ils nous racontent de l'ancienne
Arabie est peu satisfaisant et souvent contradictoire. Leurs gé-
/
r
566 HISTOIRB DES BERBERES.
néalogies mêmes, ces souvenirs auxquels ils tenaient avec l'esprit
le plus vif de Pamour-propre, ne sont pas toujours complètes :
celle de leur Prophète offre une énorme lacune que les musul-'
mans les plus savants n'ont jamais pu combler, malgré leurs re-
cherches. L'histoire des rois himyerites résiste à toutes les ten-
tatives que nos orientalistes ont faites pour la débrouiller; celle
des deux familles les plus célèbres de l'Arabie, des Ghassanides,
phylarquesde la Syrie, et des Lakhmides, rois de Hira, s'accorde
rarement avec les indications, bien plus dignes de foi, que nous
trouvons dans la Byzant%ne. Leurs données sur l'histoire de la
Perse pendant les temps antéislamiques fourmillent de fables et
d'inexactitudes ; leur histoire des Patriarches est d'une absurdité
révoltante : leurs notions relatives à l'empire romain et à Pem«*
pire byzantin sont presque nulles. On ne peut donc espérer des
Arabes une suite de bons renseignements sur un peuple aussi
obscur que la race berbère.
Comment pourraient-ils nous enseigner l'origine de ce*peuple,
eux qui n'avaient pas fait des recherches sur leur propre origine,
tant qu'ils ignoraient l'islamisme? Ce fut seulement dans le troi-
sième siècle de l'hégire que les Arabes commencèrent à écrire
leur histoire : avant cette époque, ils étaient trop occupés de
conquêtes, de pillage et de leurs guerres civiles pour y penser.
Aussi, quand les premiers historiens musulmans eurent entrepris
de mettre par écrit les grands événements qui, jusqu'alors,
avaient marqué la carrière de l'islamisme, ils se trouvèrent dans
l'impossibilité de tieii préciser au milieu d'une masse de tradi-
tions véreuses et de récits discordants. Ils durent se contenter de
rapporter, sans examen, tous les renseignements qu'ils avaient
recueillis, et de laisser au lecteur le soin d'y chercher la vérité.
Les ouvrages d'Et-Taberi, de Mohammed-Ibn-Ishac, d'Abou-'l-
Feredj^el-Ispahanictd'Ibn«-Abd-el-Hakemensont la preuve.
Ibn-Khaldoun cile les écrits de plusieurs savants arabes qui
,ont traité des origines berbères; mais tous ces auteurs, à l'ex*
cepiioo d'un seul, du célèbre Ibn-Coteiba, composèrent leurs ou-*
vrages postérieurement au troisième siècle de l'hégire; A reroon-^
ter de celte époque jusqu'à la chute de Carthage, on trouve plusL
APPENDICE. 567
de deux cents ans , période de combats et de révololions
pendant laquelle les souvenirs nationaux du. peuple, berbère. ont
dû s'altérer et même s'effacer sous Tinfluence de l'islamisme. Ce
fut cependant aux Berbères que ces écrivains ont dû empruatef
les renseignements -qu'ils rapporteni ; autrement, ils les atiraient
inventés. On prévoit d'avance le désaccoird qui doit régnep entre
ces indications ramassées au hasard et provenant de diverses
sources. Sqlon Ibn-Coteiba (voy. 1. 1 de cette traduction» pages
475 et 484,) et Djordjani (voy. 1. 1, p. 26) , les Berbères sont
les enfants de Djalout (Go/la^A) ; selon Ët*Taberi (t. i, p. 475) »
ce sont des Cananéens et des Amaléciles qu'un certain Ifrtcos
transporta en Afrique après la mort de Djalout ; — selon Es-Souli
(t. I, p. 476j, ils descendent des Misraïm, c'est-à-dire, des an-
ciens Égyptiens; — selon Ël-Masoudi (t. i, p. 474), ils faisaient
partie des Ghassanides du Yémen ; — Ibn-Abd-eUBerr (tome
I, page 474 ) repousse la tradition qui fait descendre les
Berbères d'un peuple yéménite ; — lbn*Hazm (tome i, page
48 ) regarde les Zenala comme les descendants de Berr ,
mais il oublie de nous informer, chose cependant assez im-
portante, si ce Berr était fils de Gaïs, et, par conséquent ,
d'origine arabe, ou bien s'iV était fils de Canaan ; — Bekri (t. i,
p. 477) fait chasser les Berbères de la Syrie par les Israélites
après la mort de Goliath; --- Malek-lbn-Morahhel (t. i, p, 476^
t. iT, p. 96, l'Anthologie grammaticale de M. deSacy, p. 443),
essaie de concilier toutes ces données ; selon lui, « les Berbères
B se composent de diverses tribus bimyerites, moderites (arabes),
» coptes, amaléciles, cananéens et coréickides qvki i'éieieui
» réunies en Syrie et qui parlaient un jargon barbare. Ifrîcos les
» nomma Berbères, » Il y avait donc des Coreiebides du temps
d'ifricos; or, Coreich, Taïeul de cette famille, naquit vers l'an
200 de notre ère; donc, les Berbères et Ifricos lui-même, colu
qui, ditron, donna son nom à l'Afrique, arrivèrent en ce pays
entre les ans 222 et 622 de notre ère I
Ibn-Khaldoun repousse toutes ces opinions et nous dit hardi-
mentque a le fait réel, fait qui dispease de toute hypothèse, est
« ceci : les Berbères sont les enfants do Canaan, fils de Chan^
568 HISTOIIK DBS BBftBfiBBS.
B GUdeNoé. x» (t. i, p. 484). Notre auteur avait du jugement,
du bon sens, bec^ucoup plos qu^I ne s'en trouve ordinairement
chez les auteurs musulmans; il réfuie très -habilement les opi-
nions de tous les écrivains que nous venons de nommer, mais il
oublie de nous dire sur quelles bases il a fondé la sienne. Il sa-
vait, cependant, très-bien que, dans les questions historiques il
faut des preuves, et que ces preuves doivent être oontrAiéesavec
beaucoup de soin ; c'est fâcheux que, dans la partie la plus inté-
ressante de son ouvrage, il ait perdu de vue ce principe salu-
taire. Ausfti, dans cette question, son assertion ne vaut pas plus
que celle de ses devanciers.
Il avait entre les mains plusieurs traités généalogiques et his-
toriques composés par des érudits de race berbère et rédigés
probablement en arabe, ainsi que nous avons eu Toccasion de le
faire remarquer. Il les cite en divers endroits de son ouvrage ;
il en donne même des extraits ; mais il ne dit pas en quelle lan*
goe ces traités furent écrits et il néglige d^eo nommerles auteurs.
Tout ce que son ouvrage nous apprend h cet égard revient à ceci
que, parmi les historiens et les généalogistes berbères les plus
distingués Ton remarquait :
4<^ Sabec-lbx^-Soleiman, membre de la tribu des Matmata ;
S« Hani-Ibn^Masdour (ou Isdour), de la tribu des Koumîa, et
probablement généalogiste de la famille royale des Almohades;
Z^ Hani-Ibn-Bekour, de la tribu des Dartça ;
i^ Ibn-Sabec, fils, peut-être, de S«bec*Ibn*Soleiman ;
5^ Kehlan-lbn*Abi-Loua, le matmatien :
6^ Aïoub, fils du célèbre aventurier, Abou-Yeztd ;
7^ Abou-Hohammed -Bou-Ighni, de la tribu des Berzal ;
8^ Ibrahîm-eUTlmzoughti, généalogiste zenatien.
Le cinquième et le sixième de ces personnages vivaient dans
le quatrième siècle de l'hégire ; le huitième enseignait dans la
première moitié du huitième siècle de l'bégtre; quant aux autres,
on ne sait à quelle époque ils écrivaient.
Les renseignements fournis par ces auteurs s'accordent aussi
peu ensemble que ceux des généalogistes arabes, et leurs indice*
lions ne servent qu'à embrouiller encore davantage les notions
iPPBNDICB. ' ft69
confuses que ceux-ci nous oui transmises. Les uns déolareni qu'il
faut regarder lesLouata comme arabes bimyerites et les Hoouara
comme les desceodanls de Sekçak, fils de Kinda, le yéménîte
(personnage inconnu ani Arabes). Les généalogistes zenatiens
assurent que leur tribu appartient à la grande famille des Arabes
yéménites; ceux de la tribu desGhomara prétendent que cette
peuplade est d'origine himyerite; d'autres généalogistes réola*
ment le même honneur pour les Zouaoua et les Mekiata. Notre
auteur n'admet pas ces opinions ; pour lui, les Berbères sont les
enfants de Canaan ; puis» il nous dit quo les Ketama et les Sanha*
dja appartiennent à la race yéménite.
Ibn-Rhaldoun n'eut jamais roccasionde lire Tacite, autrement
on pourrait le soupçonner d'aroir calqué son exposition des ori-»
gioes berbères sur celles des origines juives que le grand histo-
% rien latin nous offre dans ses Histoires^ livre y, seet. 3 : l'une
est aussi peu satisfaisante que Tautre.
On a remarqué que les antiquaires musulmans se donnent ra-
rement la peine de justifier l'exactitude de leurs assertions ; ils
se bornent à ^énoncer leurs opinions, et tont est dit« Aussi, ne
doit-on pas s'émerveiller de les voir exposer avec tant d'aplomb
leurs idées sur l'origine de la race berbère : rien de plus facile
que d'inventer des théories. Si le lecteur européen n'était pas
prévenu de cette circonstance, il serait en droit de faire plusieurs
questions : comment, par exemple, se fait-il que* les historiens,
tant arabes que berbères, aient ignoré tout ce qui s'est passé en
Afrique depuis l'immigration des Berbères jusqu'à la conquête
musulmane ? Pourquoi, dans leurs récits, nous parlent-ils de
Goliath, du roi David et du roi Ifrikos, sans faire aucune men-
tion de ce qui arriva aux Berbères dans leur nouveau pays ; sans
raconter les guerres de ce peuple avec les Carthaginois, les Ro-
mains et les Vandales? Pourquoi les historiens de la tribu des
Lonata — elle avait des historiens -^ pourquoi ont-ils ignoré
^occupation de leur territoire par une race d'outre-merf Pour-
quoi n'ont-ils pas raconté la lutte que leur peuple eut k soutenir
contre les troupes de l'empire byzantin, lutte qui ébranla toutes
les populations do la Berberie ? Pourquoi n'ont-ils pas conservé
570 . HISTOIRE DES BERBftHBS.
les noms do leurs chefs qui combatlireot st bravement pour Vm-
dépendance de l'Afrique ? Pourquoi onUils omis dans leurs
arbres généalogiques de tribus le nom des llasguas , peuple
qui s'était illustré par ses exploits et par sa résistance aux
troupes byzantines ? Pourquoi ont-ils laissé à un poète chrétien
le soin de nous transmettre les noms et les hauts faits de Garca-
san, d'Ântalaset dierna ? Il y a des moments où Ton est tenté
de dire, avec Cervantes : « De los Moros no se puede esperar
« verdad alguna, porque todos son embelecfidoreSf falsarios
» y chimeristas. »
L'envie montrée par les Berbères de rattacher leur origine k la
souche arabe était tellement forte qu'Ibn-Khaldoun lui-même n*a
pas pu s'empêcher d'en signaler la folie. Deux chapitres de son
ouvrage (t. i,p. 498etsuiv. , t. m, p. 483etsuiv.), renferment
à ce sujet des observations très-scnsées. Nous devons cependant
avouer, qu'aux yeux des musulmans, il valait mieux descendre
dismail ou de Himyer, que de Goliath; d'une souche arabe que
d'une souche de mécréants. Aussi, les écrivains berbères n'ont
pas reculé ; ils ont vu la tâche qu'ils devaient exécuter et l'ont
' abordée hardimeut. Les Berbères avaient à soutenir la dignité de
leur nation contre la morgue aristocratique des Arabes, tant en
Afrique qu'en Andalousie; ayant appris à lutter contre eux par les
armes, ils n'hésitèrent pas à s'arroger des litres de noblesse
qu'ils pourraient opposer à ceux dont leurs vainqueurs d'autre-
fois avaient été si fiers. Après avoir fondé une dynastie à Cai-
rouan et à Grenade, nous voyons des chefs berbères monter sur
le trône et régner à Maroc, a Fez , à Tlemcen et à Tunis. Riches
et puissants, ces princes aimèrent à protéger les savants, et
ceux-ci ne se montrèrent pas ingrats> Sachant combien leurs pa-
trons tenaient à se donner une origine arabe, ils firent tous leurs
efTorls pour les satisfaire^ Par malheur, il faut plus que de la
bonne volonté pour confectionner une généalogie passable ; il
faut citer des documents et, surtout, travailler de concert. Quant
à la critique, ils n'avaient pas à s'en inquiéter, elle n'existait pas
alors et n'existera jamais chez les musulmans do l'Afrique. Aussi
l'aspect seul do leurs généalogies suffit pour en démontrer la fausr
APPENDICE. 571
selé, et leurs pièces à l'appui soot de la dernière faiblesse. Dans
ces listes, la série commence par des noms berbères qui vont se
rattacher à des noms arabes, afin d'aboutir, par le moyen de per-
sonnages imaginaires, h l'aïeul de l'une ou de l'autre des grandes
tribus de l'Arabie. Les documents qu'ils citent proviennent, di-
sent-ils, de leurs ancêtres qui, à une époque reculée, auraient
parlé le langage de cette presqu'île. Effectivement, ces pièces sont
en langue arabe et même en vers ; mais on n'y trouve ni gram-
maire, ni prosodie, ni style, ni expression. Ce sont do misérablea
rapsodies d'écolier, les premiers efforts d'un homme peu ins-^
truit qui tâche de composer des vers en une langue qui lui est
étrangère. Ces documents sont tellement pitoyables qu^ils suffi-
raient pour faire perdre la meilleure cause.
Il faut toutefois coavenir que les généalogistes musulmans
avaient eu l'idée de faire quelques recherches sur l'origine des
Berbères ; mais pour se procurer des renseignements, ils s'adres-
sèrent toujours à des étrangers. Dans les premiers temps de
l'islamisme, les Juifs de l'Arabie et, surtout, Kâb«eUAhbar, re-
négat d'une impudence rare, avaient fourni aux musulmans quel-
ques idées sur l'histoire du monde pendant les siècles anteisla-
miques ; renseignements, mal cousus, mal rapiécés , où le fond
disparaissait sous les morceaux de hasard que ces misérables fri-
piers de notions historiques y avaient rapportés. Pour l'ancienne
histoire des Berbères, on a eu recours à des sodrces tout aussi
suspectes : aux indications fournies par les médecins juifs de Gai-
rouan et par les chrétiens asservis de la Syrie et de l'Espagne.
Dans la masse confuse de traditions que les écrivains musul-
mans se plaisent à rapporter quand ils ont à raconter l'origine
des Berbères, on remarque surtout celles qui renferment la men-
tion d'//rfco$, de Djalout, de Sefk et de Pars, Ces noms méri-
tent quelque attention.
IfricoSj c'est l'adjectif latin Africus ; en arabe, ces deux mots
s'écrivent de la même manière. Africa, d'où dérive Africus,
était, selon Suidas, l'un des noms de Carthage. On sait que ce
terme s'appliqua ensuite à la banlieue de la ville de Didon, puis
à la Zeugitane^ puis à la Mauritanie orientale, puis à tout le con-
\
/
572 BISTOIRB DSSBiRBBRBS.
tinent africain. De même que le mot arabe firca^ le mot phénicien
africa devait signifier un détachement ^ une fraction^ une bande
séparée : on l'avait donc bien choisi poar désigner un corps de
colons qui abandonnaient la mère-patrie. Les historiens des Ara-
bes himyerites expliquent d'une antre manière l'origine de ce
nom : dans le recueil de fables qu'ils débitent au sujet des rots
du Yémen, ils racontent qu'Ifrtcos (ou Africus), puissant souve-
rain himyerite, laissa son nom au Maghreb, contrée dont il avait
fait la conquête. Cette légende se reproduit sous diverses formes
qui se contredisent les uns les autres. Ibn-Hazm, généalogiste et
historien d'une grande autorité, en a eu connaissance, mais îtne
lui accorde aucune considération : m Les Himyerites, dit*il, ne
» se sont jamais rendus en Maghreb, excepté dans les récits men-
» songers des historiens yémenites. » On a lieu de croire que
cette opinion, si franchement énoncée, ne s'écarte pas de la vé^
rite. Nous pouvons même ajouter que les Arabes n'avaient jamais
entendu parler ni d'Ifrtcos, ni de l'Afrique avant d'avoir porté
le drapeau de l'islamisme dans la province de Tripoli.
On lit dans le Coran que les Juifs marchèrent contre les trou-
pes de Djalout (Goftath) et que ce chef fut lue par David. Les hiâ»
toriens musulmans disent que Djalout était le titre porté patous
les rois des Philistins, de même que Pirâoun (PAaraon) était
celui des rois égyptiens, Kisra (Chosroèi) celui des rois de Perse,
Ciaioer [Gesar) celui des empereurs romains, Adfonch [Alphonse)
celui des rois d'Espagne, etTobbâ, celui des souverains himye-
rites. Ajoutez à ces notions qu'en berbère, le mot aguellid signi-
fie roi. Cela a suffi pour décider Ibn-Coteiba et d'autres his-
toriens arabes à déclarer que les Berbères étaient les descendants
des Philistins.
Le même antiquaire nous apprend que Djalout était Gis de
Beryal, (ils deDjaloud, fils de Dtal, fils de Gahtan, fils de Fars^
a personnage bien connu, et Sefek (ou Sofok) est l'ancêtre de
D tous les Berbères. » Ce dernier renseignement, introduit si
abruptement, n'est connu d'aucun autre généalogiste musulman,
mais on peut voir quelque chose de semblable dans Joseph
^Antiquités; i, 45). Cet auteur nous apprend, sur l'autorité
APPENDICE 573
d* Alexandre Polyhistor, que a Didor, fils d'Hercule/engendra
» Sopbon (ou platôt Sophak, voy. Platarqae, Sert. 9), person-
» nage de qui les Sophakès^ peuple barbare^ (ireut leur nom. »
Ce Sophak nous est, d'ailleurs, connu par Âppien et Suidas;
Plolémée, dans sa description, de TAfrique, place les Sophou^
kaïoi dans la partie méridionale du pays qui forme maintenant
l'empire du Maroc. C'est donc aux Grecs, probablement à quel-
que prêtre chrétien de la Syrie, qu4bn-Coteiba (ou Tauteur qu'il
cite), a tiré une indication échappée à tous les autres généalo-
gistes musulmans, tant arabes que berbères. Le nom deFar^ ou
Pares est bien connu de ces auteurs ; ils représentent ce person*-
nage comme Taïeul des Persans et comme fils de Lud, fils de
Sem. Cela est un des échelons que les savants musulmans ont
inventés, afin de pouvoir rattacher tous les peuples qui leur
étaient connus à l'arbre généalogique par lequel l'auteur de la
Genèie représente les diverses branches de la famille de Noé.
Hiempsal, cité par Salluste, et Pline, le naturaliste parlent de
l'établissement d'un peuple persan ou pharrAsienea Afrique ; ce-
lui-ci le place dan? la partie sud du Maroc, ainsi quePloIomée, dont
les Pharousïoi se trouvent dans le voisinage des Sophoukatoi.
L'arbre généalogique des tribus berbères, dressé sur les mdi«
cations d'Ibn-Khaldoun et placé dans l'introduction du premier
volume de cette traduction, se partage en deux branches, celle
deMadghiset celle de Bernés. Madghis reçutle surnom ^'El^Abler^
c'est-b«dire sans queue^ sans postérité^ singulier titre pour le père
desNorouça,desAddaça,desLouataetdes D&rtçal Le moi abter
est arabe ; le pluriel en est botr. Ce dernier terme sert, chez les gé-
néalogistes berbères, à désigner tous les descendants de Madghis.
Un tel emploi de ces mots suffit à prouver que l'nsage de la lan-
gue arabe était très-répandu dans la Mauritanie à l'époque oiï
l'on dressa le tableau ethnographique de la nation berbère. Il
démontre aussi l'ineptie des savants berbères, de ces faiseurs
de généalogies qui n'avaient pas assez d'intelligence pour écarter
de leur travail deux termes qui devaient le rendre indigne de
confiance. Bien qu^ cette liste soit plus que suspecte, elle ne
laisse pas d'offrir une certaine utilité : nous y trouvons de bon-
574 BISTOIM DES BBRBÉR8S.
Des indications sur la parenté de plusieurs tribus entre elles et
une nomenclature qui n^est pas sans intérêt pour les recherches
historiques. Elle nous oiïre les noms de toutes les tribus berbè-
res, tant de celles qui existaient en Afrique au quatrième siècle
de l'hégire, que de celles dont les musulmans avaient conservé
le souvenir. Aussi, pouvons-nous essayer d'y retrouver les noms
de quelques-uns de ces peuples africains que les écrivains grecs
et litins nous ont fait connaître. Dans cette recherche nous ne
serons pas toujours heureux, mais nous espérons y rencontrer
assez de coincidences pour démontrer que, depuis les temps les
plus anciens, la race berbère a toujours existé dans l'Afrique sep*
tentrionale.
Le peuple désigné sous les noms de Mazikes ^ Masices ^
Maziees et Mazax , est mentionné par Lucrèce , Suétone ,
Ptolémée, Ammien BUarelIin, Gorippus et Jean Cassien. Il habi-
tait l'Afrique septentrionale, depuis la Tingitane jusqu'à la fron-
tière de râgypte. Ce nom Mazik ou Mazax est évidemment le
même mot ([M^amfizighoximazegh^ c'est-à-dire \q peuple berbèrem
Voyez ci-devant, page 495 de ce volume.
On peut assimiler les Geluli des anciens aux Guesoula d'Ibn*
Khaldoun et de ses auteurs.
Les Zaouèkes, placés par Hérodote dans le voisinage de la
petite Syrte, répondent aux Zouagha^ peuple qui, du temps
d'Ibn-Khaldoun, habitait encore cette région.
Les Bakouatai de Ptolémée, les Baquatet des inscripiions et
les Bacuetes de Vltinénaire, habitaient la partie centrale de la
Tingitane, dans la localité que les Berghouaia occupaient jus-
qu'au milieu du cinquième siècle dePhégire.
Les Makamtai de Ptolémée, les Macetiites de l'/^mératre, se
tenaient dans la localité où s'élève Mequinez (en berbère Jftc-
naça). Celte ville tire son nom d'une fraction de tribu qui, du
temps d'Ibn-Khaldoun, habitait cetendroit.
Les Autololai de Ptolémée occupaient Zerhoun, plateau sur
lequel est situé la ville de Mequinez. Les Romains y possédaient
une ville, ohef-lieu do la Tingitane. Cet établissement, nommé
Volubilis, paraît avoir été le point d'où Suetonius Paulinus se
iPPBNDlCB. 575
mit en marche lorsqu^'l entreprit soq expédition à travers PAtlas
jusqu'au bord du Guir. Les ruines de Volubilis, en berbère
Oulili, sont encore visibles. Autololat paraît représenter les
mots berbères Aït-Oulili^ c'est-à-dire la tribu des Oulili.
Les Makhoures ou Makkouri^ appelés Macares par Corippus,
habilaient la Mauritanie césarienne, dans une localité que nous
retrouvons encore, à Maccarâ ou Moggâra^ ville dont on décou-
vre les ruines à l'est de Mecîla.
Les Màkhoureboi occupaient, du temps de Plolémée, le même
territoire qu^Ibn-Rhaldoun appelle le pays des Mdghrûoua,
Les Kédamousioi , nommés aussi Koidamousioi et Ktdd^
mousioi^ habitaient la province actuelle de Constantine, dans la
région appelée par Ibn-Khaldoun le pays des Ar6^a?7»a. H esta
remarquer que le nom de Ketama prend quelquefois les for-
mes Ko lama ei Kitama^ modifications analogues à celles que
. Ton vient de remarquer dans le nom de Kedamousiot.
Le nom des Massesy H ou Massaisuloi parait être formé des
mots berbères Mas IslUen, c'est-à-dire: le (ils des fiancés. Dans
le tableau général des tribus berbères, nous trouvons les Isliten.
Cette peuplade laissa son nom à la plaine d'isly, lieu célèbre par
plusieurs grandes batailles.
Les Serangai, placés par Ptolémee dans la partie méridionale
de la Tingitane, probablement sur les bords du Oued-Noun, pa -
paissent être les Sanhadja ou Zanaga, peuple qui, plus tard,
s'avança jusqu'aux environs de Fez, puis'au Rif marocain, puis
dans la Mauritanie orientale où il fonda la dvnalie des Zîrides.
Dans les écrivains grecs et latins, on cherche vainement le
nom des Zenata ; mais il est certain que ce peuple était connu
en Afrique à une époque où les usages du paganisme romain se
maintenaient encore dans la Mauritanie césarienne. Sur un os-
suaire en marbre du musée du Cherchel, on lit l'inscription
suivante :
TI. CLAVDIUS ZENATI
CLAVDII CHRESIMl
FRATER fl(ic). S(itus). E(st).
Les Druifai do Ptolémée et les Dares de Pline, étaient prqba-
376 HISTOIKE DBS BBUÊRBS.
blement les Udriçû^ descendants doDari. Ce personnage lient
une place importante dans le tableau des généalogies berbères.
Les Ouerroes se trouvaient dans cette partie du Maroc qui est
arrosée par le Ouergha ou Ouerra,
Les Isaflenses d*Ammien Marcellin sont évidemment les Etth
Iflicen ou lis Iflicen^ c^est-à-dire la tribu des Plissa ; ils demeu-
raient à l'est d'icomm (Alger), dans la même localité que les
Plissa occupent do nos jours.
J^s'Lebatai de Procope et les Languùten de Gorippus habi*
talent la Tripolitane, aux lieux mèmeà où Ibn-Khaldoun et d'au*
très historiens arabes placent une fraction considérable de la
grande lrlj)u des Louata. Le pluriel de Louata est Louaien ou
Iloualen, mot que Gorippus et ses copistes ont altéré de plusieurs
manières.
On voit par Touvrage d'Ibn-Sbaldoun que les noms de plu>-
sieurs tribus berbères commencent par la syllabe our; il en était
de mémo dans les temps anciens : Plolémée nous a fait connaître
les Oueroueis^ et les Ourbikai.
Ammien Marcellin, qui écrivait dans le quatrième siècle de
notre ère, nous présente, dans son histoire, les nomade plusieurs
tribus de la Mauritanie. Nous y remarquons :
Les Austuriani,
Les Tyndenses ,
Les Massissenses,
Les Mazices^
Les Musones,
LesBaiurae,
Les Gantauriani ,
Les Auastomates,
Les Cafaves,
Les Davares,
Les Gaprienses,
Les Abbani,
Les Isùflenses,
Les Jesalenses,
Et la natio Jubalona.
APPETa)iCE. 677
Dans celte liste, no^us n'avons pu identifier que trois noms.
Gorippus, poète latin du sixième siècle, a conservé, dans le
Johannide^ les noms de plusieurs tribus africaines, dont nous
ilonnons ici la liste :
Les Ânacutasur, .
Les Astrices,
Les Austur,
Les Cannes,
Les Celiani,
Les Ifuraces,
Les Ilasguas,
Les Imactas,
Les Languaten^
Les Macares, •
LesMarmaridae,
Les Martamali,
Les Mùssyliy
Les Haurusii,
Les Mazax,
Les Hecales,
LesNaffur,
Les Nasamon ,
Les Silvacse,
Les Silvaizan,
Et les Silzactae.
Dans cette liste, nous avons cru recoonattre quatre noms de
tribus berbères, mais, si nous possédions un second manuscrit
du Johanntde, plus correct que celui dont on a publié le texte ,
nous pourrions espérer y trouver plusieurs autres noms sous
des (ormes qui nous seraiet mieux connues. Sans nous arrêter
aux Maurusii et aux Nasamon que noua avons vus ailleurs, nous
chercherions une variante du mot Ifurdces, lequel nous parait
être une altération d^Ifuranes. On sait, par Ibn->Khaldoun, le
grand rôle que les Beni-7/ren ou Iforen ont joué dans les pre-
miers siècles de l'islamisme.
T. IT. 37
578 HISTOIRB DBS BVtBÈRBS.
On s'étonne d'abord de trouver si peu de ces noms dans nos
généalogies berbères ; mais {il faul se rappeler que ces généalo-
gies, ayant été dressées dans le dixième siècle de J.-C, sont né-
cessairement très-incomplètes en ce qui regarde les peuplades
les plus anciennes ; elles renferment même l'indication de plu-
sieurs tribus absolument inconnues aujourd'hui, circonstance
par laquelle elles ressemblent aux listes tirées d'Âmmien et de
Gorippus. L'on sait, du reste, que les tribus arabes et berbères
de l'Afrique sont très-portées à se fractionner et à changer de
nom ; on a même appris, par expérience, qu'il faut se livrer à
des recherches presque toujours difficile^ si l'on veuidétermî*
ner d'une manière positive, l'origine de beaucoup de tribus im-
portantes qui occupent maintenant en Algérie des territoires
d'une vaste étendue.
Les auteurs latins et grecs nous ont conservé un bien petit
nombre de mots qui appartiennent, disent-ils, à la langue liby-
que", mais qui certainement ne se retrouvent pas en berbère.
Hérodote nous apprend (iv, 492) que a dans le pays des Numi-
» des [kata tous nomades) on voyait trois sortes de rats, les
i> dipodes {gerboises), les zégériès, nom libyen qui signifie eo
» grec bounoi, (c'est-à-dire collines) ; les rats de la troisième
» espèce sont des hérissons. » Samuel Bocharl, qui n'a pas
manqué de citer ce passage dans son Canaan^ a eu bien raison
de s'écrier : a In quâ in ter prêta tione hoc perabsurdum, quod
» mûris genus vult a collibus nominari. Ecquid enîm mures et
» colles habentinter se commune, nisi credatur fabnlœdemure
)ft ex partu montium? n Ce mot, zégériès, auquel Hérodote as-,
signa une signification aussi bizarre qu'inexplicable, ne se pré-
sente pas dans nos vocabulaires berbères: on y trouve le mot
iterri {mouton)^ et agherda {rat) ; coltine se dit taguemmouni.
Selon Alexandre Polyhistor, le mot samatho , signifie grande
en libyen ; en berbère, ou dit tamocrant.
Les premiers souverains grecs de la Gyrénaïque portaient tous
le titre Battus, c'est-à-dire roi, en langue libyenne. Encore on
mot qui n'existe pas en berbère.
Vers la fin du sixième siècle de J.-C. , le stratège ou gouver-
•-
APPENDICE. 579
neur de l'Afrique romaine, portait le titre dodehar, C^est Théo-
pbj'Iacte Simocaita qui nous le dit. En dialecte chelhay la racine
dokar sigoi&e frapper ; mais, avant d'admettre qu'elle ait donné
naissance au mot dekar^ il faudrait avoir des indications plus pré-
cises et plus claires qtte celles fournie» par Thistorien de Tem*
pereur Maurice.
Dans le Pœnulus de Plaute se trouve un monologue de 46 vers
dont on suppose que les dix premiers sont en langue phénicienne
et les six autres co langue libyque ou berbère. Nous osons dé-
clarer,sans ridn énoncer h l'égard des vers présumés phéniciens,
que les derniers méritent autant de considération que le dialogue
turc du Bourgeois Gentilhomme et le beau discours arabe de
Panurge.
Il ne faut pas chercher en berbère la signiPicalion du mot Atlas'y
nous savons par Strabon que celte dénomination n'était usitée
que chez les Grecs. On lit dans cet auteur : a En avançant au-
» delà de ces colonnes (les colonnes d'Hercule) et laissant TAfri-
» que à gauche, on rencontre une montagne que les Grecs appel-
» lent Atlas et les Barbares Dyrin.i» — (oros estîn hoper oi men
Hellènes Atlanta kalousîn, oi Barbaroi dé Durtn). — Les traduc-
teurs, voyant que qe dernier nom était à l'accusatif, lui ont sup-
posé une forme nominative, à la grecque, et l'ont tous rendu par
DyriSy terme qui ne se trouve dans aucun écrivain de l'anti-
quité. Nous lisons dans VHistoire naturelle de Pline (liv. y ) :
CI Ab eo amne [qûem vocant Fut) ad Dyrin« hoc enim Atlanti
. » nomenesseeorum(sT;il. indigenarum)linguâconvenit, ducenta
, » miliia. » Ici, les traducteurs ont encore écrit Dyris^ et avec
aussi peu de raison qu'auparavant. Connaissant mieux leur mé-
tier et leur sujet, ils eussent conservé la forme Dyrin, Nous
lisons dans Solin : a Hsec de Atlantide quem Mauri Adderim
» nominant. » Pourquoi le traducteur met-il Adderis ? Ou a-
-il trouvé cette' forme ? Martianus Capella écrit : a Hune {scit.
» montem Atlanlem) incolse Adirim vocant. » Le traducteur,
égaré par la même fausse analogie, met Adiris, Il parait certain
que Dyrin ou Adderin est le môme moi qn^Idraren, pluriel ré-
gulier d'adrar {montagne en langue berbère). De nos jours en-
590 niSTOIRB DES BERBERES.
core, les babilante de l'Atlas morocaio donnent le nom d'Idrarm
h tonte cette chaîne de montagnes. Un mot vraiment berbère se
trouve enfin cher les anciens 1 Ce fait reconnu, on peut conclure
que, déjà du temps d'Hérodote, on parlait berbère dans toute la
région montagneuse qui entoure les provinces méridionales de
l'empire marocain. ....
L'anonyme de Bavenne nous apprend que la NauriUnie tingi-
tane était appelée Abrlda; puis il ajoute, mais à tort, que ce fut
là où Bélisaire défit les Vandales. Un peu plus loin, il dit : « Mau-
» ritania ghadilana quœ et barbaro modo i46rkfadicitur. » En
Berbère, le mot abrid, au féminin tabrida, signifie route, et il
est digne de remarque que, sur le Molouia, frontière de la pro-
vince que^'an^^^Y^^ vient de nommer, s'élevait une ville nom-
mée Tabrida. Il est asseï singulier que le traducteur français de
la géographie d'idrtci ail écrit ce nom Tabrenda, bien qu'il eût
entre les mains l'Brfri»i. de Hartmann et la Géographia Nubien-
sis des Maronites, ouvrages dons lesquels ce mot est orthogra-
phié correctement.
Quant au mot magalia [tentes), au singuliermayoW, il appar-
tient à la langue phénicienne.
M. Movers, dans ses Phoentzier (t. ii, 2« part., p. 409), cite
plusieurs noms que les Latins semblent avoir empruntés aux
indigènes Je l'Afrique ; dans le nombre nous pouvons signaler :
cera {cire), qui se dit en berbère tekir, avec l'article détermma-
lif du genre féminin ; le pois chiche (ctcer, pmicum cicer) , se
nomme en chelha ikûer ; la lentille, en latin leas, lenlts, s'ap-
pelle en berbère tinllUt ou telentit ; le chou [crambé, hbys
caulos), s'appelle en lonaoua akrenbit, mais ce mot paraît être
emprunté à la langue grecque ; le mot hortus (jardin] se repré-
sente en chelha par ourti et en lenatia par eggur, hgguert ,
tuggurl, mots dans lesquels on reconnaît le nom latin oyer; mais
il est assez probable que ces termes, ainsi qu'ourti, sont des
emprunts faits au latin •.
Nous sommes de l'avis dt-M. Quatremère au sujet du mota/jfco».
APPENDICE. SM
En cbelfaa, le mal layoka^ forme féminioe de yoka^ «Bt^em»'
ployé pour désigner une paire de bœufs allelés à la charme* Ce
terme ressemble beaucoup et son équivalent latin ju^um; mais les
Anglais possèdent le mot yoke^ les Allemands le moiioch, le Ara--
bes le mot zowijy et il parait même que la racine primitive youga
existe en sanscrit.
En cfaelba, navire se dit tennaut, terme qui rappelle les mots
latins fKwiSy nauta.
La géographie de Ptolémée, les ouvrages de Pline, dé Mêla,
d'Ammien Marcellin, les itinéraires d'Antonin et de Peutinger,
la liste des évécbés d'Afrique, nous font connattre beaucoup de
noms de lieux qui ne peuvent s'expliquer ni par le latin, ni par
le grec. Bien qu'un petit nombre de ces mots offre une significa-
tion en langue berbère, il serait imprudent, dans l'état actuel de
nos connaissances, d'entreprendre une analyse étymologique de
tant de noms barbares.
Il en est de même à l'égard des noms propres d'hommes. Les
historiens do l'empire romain, ainsi que Procope, nous en ont
conservé un certain nombre ; mais c'est Cortppus qui nous en
fournit le plus. Dans son poème latin, le Johannide, composé
vers le milieu du sixième siècle de J.-G. et imprimé pour la pre-
mière fois en 1820, on trouve les noms d'environ cent cinquante
chefs et guerriers appartenant à la race libyenne ou numide.
L'auteur s'écrie en rapportant ces mots barbares :
Quis mihi tôt populos gentesquc et proelia vatcs
Ordinet arte nova?
Temperet insuetis nutantia carmina verbîs :
Naro fera barbaricaa latrant sua nomina linguie.
â
Dans la plupart des langues on rencontre des obstacles souvent
(cAamtfdu\ en chelha, aram ; ce savant le considère comme berbère,
tandis que M. Movers^ dans son Phoenizier (t. ii, 2* partie, p. 365) ,
n'y voit qu'une altération du mot arabe djemel. Noos conviendrions
volontiers qu'al/ana vienne d'equus^ que wig dérive de perruque,
(en anglais periwig, par aphérèse; toig)^ mais nous doutons fort
qu^aram provienne de djemel.
5S2 OISTOIRB DBS BBRBBRES.
insurmontables quand on essaie de trouver l'étymologie de nom»
propres. En chelha et en touareg, les noms des hommes n'ont
plus aucune signification. Beaucoup de chefs berbères ont porté
des noms qui ne s'expliquent plus à Paide de leur langue. Aussi ,
nous n'oserions entamer la discussion étymologique des noms
libyens avant de pouvoir indiquer d'une manière certaine la si-
^unification de Bologguîn^ de Makcen^ de Soggout^ de Tachefin,
de Tafraguin, et d'autres noms purement berbères.
L'on peut cependant se permettre de faire quelques observa-
tions à ce sujet :
4° Parmi les noms conservés par Corippus on en trouve une
trentaine qui se terminent en an^ en, ou iV», syllabes formatîves
du participe actif en berbère :
2* Il s'y présente aussi à peu près autant de noms qui se ter-
minent en es ou as, pronom possessif de la troisième personne
du singulier, en berbère;
3® Nous y trouvons aussi quelques noms qui prennent la ter-
minaison asen, pronom possessif de la troisième personne da
pluriel, en berbère. Tels sont :
Hisdreasen,
lelidasseo ,
Macurasen ,
Manonasen ,
Manzoracen.
Les lecteurs d'Ibn-Khaldouu ne manqueront pas de faire uu
rapprochement entre ces derniers noms et celui de Yaghmora^
cen, fondateur de la dynastie abd-el-ouadile. On sait que ce chef
avait mérité par sa bravoure le titre d'étalon de la tribu [fahl
el caum, comme le disaient les Arabes), aussi, en berbère, le
nommait-on Yaghmoracen (admissarius eorum). C'est ainsi
qu'en arabe africain, le mot lallahom, nom propre de femme,
signifie la maîtresse d'eux.
Les noms de ces trois catégories ont des formes parfaitement
berbères; de plus, ils se réduisent à des racines trilitères, quand
on les dépouille des syllabes accessoires , et ils rentrent ainsi
APPENDICE 583
dans la classe de mots berbères. Vouloir trouver, dès-à-préseut,
la signiKcatioQ de ces racines, ce serait entreprendre Pimpossi-
ble; nous ne connaissons encore qu'une très-faible portion du
Tocabulaire général de la langue berbère ; même, si nous en pos-
sédions tous les mots, toutes les racines, nous hésiterions d'ap-
pliquer nos connaissances à une série de mots qui, bien qu'ils
semblent faire partie de cette langue, ont peut-être cessé d'être
employés depuis plus de treize siècles. *
Je né saurais terminer ma tâche, fruit d'un travail
assidu de quatorze années, sans témoigner ici ma pro-
fonde reconnaissance au Ministère de la Guerre, dont
.l'administration intelligente a su, au niilieu des plus
graves préoccupations y encourager les travaux et les
recherches relatives à Thistoire et à la géographie
de notre belle colonie algérienne. Sans lui, cet impor-
tant ouvrage aurait encore dormi longtemps sur les
rayons poudreux de nos bibliothèques. Je me plais
donc à le remercier des encouragements qu'il a tou-
jours accordés à ce genre d'études et à lui exprimer ma
reconnaissance de toutes les marques de bienveillance
dont il m'a favorisé.
De Slane.
58i
NISTOIIC DES BBRBKRIS.
POSTSCBIPTl.
La noie sur les recherches de M. Geslin, iosérée dans la pag»
530 de ce volume, était déjà impriméei quand le Moniteur tint-
versel du 7 etx!u 8 août 4o56, donna au public un rapport sur
la même matière. Ce document, rédigé avec beaucoup de soin et
de savoir par M. Reinaud, membre de l'institut, renferme une
juste appréciation du travail de M, Geslin et un exposé clair et
détaillé des connaissances q«e l'on possède en Europe au sujet
du peuple touareg et des langues nègres, H est bien à regretter
oue M. Creslin n'ait pas vécu assez longtemps pour lire cet écrite
dans lequel le savant académicien lui donnait de justes éloges et
de sages conseils. Les cahiers renfermant les recherches de
M, Geslin ont été renvoyés à Alger.
Tout le monde a lu et admiré les beaux envisages dans les-
Jnels M. le général Daumas a dépeint les mœurs et les usages Acs
iverses populations musulmanes de l'Afrique saptent^ lonak*
Son esquisse de la Grande Cabilie est d'une vérité frappante et
sa description du Grand Désert renferme d'excellents renseigne-
ments sur les Touaregs et sur leur pays. L'exactitude de la carte
géographique qui accompagne ce volume et qui a pour base les
indications recueillies de la bouche des indigènes, est pleinement
confirmée par les observations de Richardson et au docteur
Barth.
• LISTS DES CHAFITRES. 5^5
LISTE DES CHAPITRES
DU QUATBiftHE TOLOME.
V
PAOCt.
Les Beni-Bached. . ^ 4
Les Benî-Toudjln 4
Les Beoi-Sélama 19
Les BeDl-Irnaten 22
Les BeDi-Merio. — Leur généalogie «... 35
— Abd-el-Hack 28
— Avènement d'Abou-Yahya .... 33
— Défaite de Yaghmoracen à Isly . , 39
— Abou-Yahya prend et perd la ville
de Salé . — Défaite d'El-Morleda il
— Prise de Sidjilmessa 43
-«- Mort d' Abou-Yahya et avènement
d'Abou-Youçof-Yacoub 44
— Prise de Salé par les chrétiens. . • 46
— Siège de Maroc par les Mérinides. • 49
— Bataille do Telagh 51
-^ Traité de paix entre Abou-Youçof
et le khalife de Tunis 52
— Prise de Ha roc et mort d*Aboa-
Debbons ,••«•.• 56
r— * Abou-Malek est déclaré héritier du
trône. — Béyolte des Aulad-
Idrîs ; 57
— Défaite de Yaghmoracen à Isly . . 59
— Prise de Tanger et soumission de
Ceula 63
^ — Sidjilmessa est enlevée aux [Abd-
el-Ouadites . 66
— Guerre sainte en Espagne. — Mort
deDonNuûo 74
&S6 HISTOIRE DRS BKtifeBIS.
Les Bent - Herfn. — Fondation de la Ville-Neuve de Fez 81
— Seconde expédition d*Abou -Touçof
« en Espagne • 85
— Ibn-Chekîlola cède la ville de Ma-
laga au sultan mérinide 88
-r Alliance d^lbn-el-Ahmer et de Ya-
' ghmoracen avec le roi chrétien.
— Bataille de Kharzouza. ... 92
— Révolte de Don Sancîie contre son
père. — Troisième expédition
d'Abou-Youçof en Espagne. . • 406
— Abou-Youçof fait la paix avec Ibn-
el-Ahmer. 407
^- Quatrième expédition d*Abou-You-
çof en Espagne 110
— Paix entre Don Sanche et les Méri-
nides. — Mort du sultan Abou-
Youçof 146
— Avènement du sul tan Abou-Yaconb 420
— La villede Guadix est remise à Ibn-
el-Ahmer 4 24
•— Hévolte de l'émir Abou-Amer. . • 425
-^ Siège de Tlemcen par le sultan
Abou-Yacoub 426
-* Expédition d'Abou-Yacoub contre
le roi chrétien 430
— Prise de Tarifa par le roi chrétien. 434
•— Ibn- el-Ahmer se rend à Tanger
pour visiter le sultan 433
— Ibn-el-Ouéztr-el-Ouataci s'empare
deTazouta 434
— Abou-Amer se réfugie dans la mon-
tagne des Ghomara. * 436
-— Le sultan envahit le territoire de
Tlemcen. .••••• 438
LIgTB DBS CBAPITIIES. - 587
Pmis
Les BeDÎ-Verîn — Le long siège de Tlemcen 444
-«- Conquête du pays de Haghraoua 444
— Conquête du pays des Toudjin 447
— Les souverains de Tunis et de
Bougie envoient des ambassades
au sultan mérinide ...... 448
— Les souverains de TOrient et les
émirs de l'Egypte envoient des
ambassades au sultan 453
— ' Le sultan de ^Andalousie déclare la
goerro aux Hérinides. — - 0(h-
man*lbn*Âbi-'l-OIft soulève le
pays des Ghomara 4 57
— Révolte des Beni-Gommi 462
— Trahison d'Ibn-el-MilIani 465
— Grandeur et chute des Beni-Hocasa 467
— Hort du sultan Âbou-YaiWj • . • 468
-^ Avènement d'Abou-Thabet^ ... 469
— Youçof-lbn*Abt-Eîad s'empare de
Maroc 474
. . — Le sullan meurt & Tanger. • • • • 476
— Règne du sultan Abou-'r-RebiA. • 479
— Hort d'Abd-AIlah-lbn-Âbi-Medyen 480
— ' Les habitants de Ceuta s'insurgent
contre les Andalousiens 483
•— Abd-el-Hack-]bn>Othman est pro*
clamé sultan. — Mortd'Abou-
'r-Rebiâ. .• , 485
— Avènement du sultan Abou-Satd. 488
— P/emière expédition d'Abou-Satd
contre Tlemcen • 490
— L'émir Abou-Âli, fils du çultan, se
révolte contre son père. . . • • 494
«^ Disgrâce et mort, de Hendll-el-
Kinani 495
588 niSTOI&B MS BBBBtalS.
Pacu*
Les Bcni-Merfn. — Révolte d'Ibn-el-Azefi à Geuta. . 498
-^ Abd-el-MoheimcD est nommé secré-
taire d'état 204
— Les musulmans de TAndalousie
implorent le secours du sultan
mërinide. — Mort de'Don Pedro 203
— . Alliance matrimoniale de la famille
mérioide avec celle des Hafsides.
— Expédition contre Tlemcen. 206
— Mort du sultan Abou-Saîd et avè-
nement d'Abou-'l-Hacen . • . . 214
— Abou-'l-Hacen conclut un traité de
paix avec son frère Âbou-Ali et
marche sur Tlemcen.. • , . . . 242
— Révolte et chute J'Abou-Ali. . • . 244
— Prise de Gibraltar par les musul-
mans 246
-^ Prise de Tlemcen par Abou-'l-Hacen 249
L'émir Abou-Abd-er-Rahman est
mis à mort par Tordre de son
père, le sultan. : 224
— . Révçlte d'Ibn-Htdour 227
MortdeTémir Abou-Halek . . . . 229
— La flotte musulmane remporte une
victoire sur celle des chrétiens 230
— Défaite des muîsulmans sous les
murs de Tarifa 232
— Le roi chrétien s'empare d'Algéci-
ras 234
_ Les fils d*Ibn-Abi-'l Olà font leur
soumission au sultan 236
— Abou*'l-Hacen envoie des cadeaux
au sultan de TÉgypte et fait par-
tir de riches offrandes pour la
Mecque et pour Médine. • • • • 239
LIfÇTE DES CHAPlTftE3. 58&
Pion.
Les Béni - Merîu. — Il envoie un cadeau au roi de Molli 242
Il épouse une fille du souverain de
de Tunis 244
_ Il s'empare de Hfrlkïa 246
Il allaque les Arabes et essuie une
défai te auprès de Gairouan . . . 259
1^ Gonsiantine el Bougie répudient la
domination mérinide 26S
— Les fils du sultan usurpent Vauto-
riié. — Avènement ^'Abou-
Èiuan 27<
J^ Les Beni-Abd-el-Ouad, les Maghra-
oua et les Toudjtn rétablissent
leur indépendance 276
Les princes hafsides reprennent
possession de Bougie et de Cons-
tanlioe 280
-^ £n-Nacer, fils du sultan Abou^'l-
Hacan, faiiunc expédition dans
le Maghreb central 282-
Abon-U-Hacen part pour le Ha-
greb. — El-Fadl s'empare de
Tunis. . ; : . . 283
— Le sultan occupe Sidjilmessa et Vé-
vacue ensuite. . ' 287
Le sultan occupe la ville de Maroc
et l'évacué ensuite • 289
-^ Abou-Einan marche contre les Béni*
Abd-el-Ouad et tue leur sultan 292
Défaite et capture d'Abou-Thabet 294
— Abou-Einan occupe Bougie. . . . 295
Ibn-Abi-Amor marche contre Bou-
gie dont les habitants s'étaient
jnis en révolte 297
-^ Nolicc biographique d'Ibn-Abi-Amr 301
500 BiSrOilK DES BBBBERES.
Les BcDÎ-Merin. •— Révolte d'AI)OU-'l-Fadl daos^ le
Sekcîouï 305
-^ Mon d'Eïça-lbn-el-HaceD è Gibral-
tar 307
— Aboa-Einan s'empare de Constao-
tine et de Tunis 310
— Le vizir Soleiman-ibD-Dawoud fait
une expédition en IfrîkTa ... 3t5
— Mort d'AboU'Einan et avènement
d'Es-Satd 317
— Soleimr.n-Ibn-Dàwoud marche sur
Maroc 319
— Abou - Hammou enlève Tiemcen
aux Mérinides 324
— Masoud -Ibn-Maçaï s^empare de
Tiemcen et proclame Mansour*
Ibn - Soleiman 323
— Abou-Salem se rend maître du ro-
yaume. — Mort de Maosour-
Ibn-Soleiman 327
— Mort de Ridouan, ministre du roi
de Grenade. -— Ibn-el-Ahmer se
réfugie h la cour d'Abou-Salem 332
— ^ Révolte et mort d'El-Hacen-Ibn-
Omar 3W
— > Ambassade nègre • . 342
— Abou-Salem s'empare de Tiemcen 344
— Mort d'Abou- Salem 347
— Mort d*lbn - Antoun. — Révolte
de Yahia-lbn-Rahhou, .... 352
— Abd-el Baliifi arrive de Tiemcen.
— Siège de la Ville - Neuve. 354
— Mohammed, fils de Témir Abou«
Abd-er-Rahman , est proclamé
sultan par le vizir Omar-lbn-
LISTE Dt8 CBAHTRBB. 591
Âbd-Aliah 358
Les Béni - Mertn. -^ Le salUn Âbd^el-Haltm se retire à
Sidjihnessa avec ses frères . : 359
— Masoud-lbn-MaçaY est nommé vizir
et Amer-ibn-Mohammed obtient
le gouvernement des provinces
marocaines • ' 360
-^ Omar-lbn-Abd*AIIah marche con-
tre Sidjilmessa* 362
— Abd-eUMoumen est proclamé sol-
tan de Sidjilmessa 363
— Ibn-Maçaï s'empare de Sidjilmessa 366
— Révolte d'Amer-lbn^âlohammed et
de Masoud - Ibn - Maçaï . . . . 365
— Expédition contre Maroc •*••«• 368
— Itort du sultan Mohammed et avè-
nement d'Abd-eN-Azîz ... . 369
— Mort d*Omar-lbn-Abd-Allah . . « 371
*~ Le sahan fait mettre à mort Aboa*
FadI qui s'était emparé de Maroc 373
-<- Mort du vizir Yahya-Ibn-Meimoun 374
— Le 'bultan fait prisonnier Amer-
Ibn-Mohammed 375
— Reprise d'Algéciras • . . 378
— Prise de Tiemcen par les Mérinides 381
— Révoltes dans le Maghreb central 386
— Ibn-^UKhattb , vizir de Grenade,
se réfugie à Tiemcen 390
-^ Mort du sultan Abd-el-Azfz et avè-
nement de son fils, Es-Satd. , 400
— Abou-Hammou reprend possession
de Tiemcen. . . , , 401
— Le prince mérinide Abd*er-Rah-
man débarque en Maghreb. . 403
— Le prince Abeu-1-Abbas- Ahmed
592 HlSTOiHE DES BIlBfcRBS.
s'empare du trône 405
Les Béni - Merhi. — Mort d'Ibn^l-Khattb 444
— Soleimao-IbD-Dawoud passe en Es-
pagne. • . , • • 444
— Mort da viiir Ibn-Ghazi 445
— Le sultan de Fez et celai de Maroc
se font la guerre 448
•^ Deuxième guerre entre ces princes 422
— « Ali-lbn*ZékérTa, chef des Heskoura
96 met en révolte* — Siège de
Maroc , . . . . 423
— Le Maghreb est envahi par uu fils
du sultan Abou-Ali, par Abou-
TachefÎQ et par Abou<Hammou 425
— Prise de Tlemcen par les Mérinides 427
Mou^a, fils d'Abott-Ëinan s'empare
de Fez • . 428
— . Mort du vizir Mohammed-lbn-Olh-
— man 432
-««- Expédition d'Ibn - MaçaT dans le
pays des Ghomara 432
Mort du sultan Mouça et avènement
* d'El-Montecer 495
Le prince EUOualhec se fait procla-
mer sultan à Fez 436
1 — p> Le prince Abou-'l*Abbas débarque
en Maghreb 440
— 11 marche sur Fez 444
— Son autorité est reconnue à Maroc 444
^- Le prince El-Montecer est nommé
I gouverneur de Maroc 443
— - . Prise de la Ville-Neuve et mort
' d'Ibn-Maçaï 446
— Mohammed-lbn- Allai est nommé
vizir 447
L1STBS DSS GflÀPITRBS. 593
Pages.
-Les Beni-Merio — Mohammed, fils du sultan Abd-el-
Halîm, s'empare de Sidjilmessa 449
—^ Moridlbn-Abi'Âmr et de Haracat
Ibn-HassouD 452
— Révolte et mort d'Âli-Ibn-Zékérïa 454
-^ Expédition des Mér inides contre
Tiemcenetmortd'Abou-Hammou 455
- — Mort d'Abou-Tachefîn et prise de
Tiemcen par les Mérinides . . 45S
Mort d'Abou-1-Abbas , sultan de
Maghreb. — Abou-Ztan s'empare
de Tiemcen 459
Notices des chefs mérinides qui
ont commandé les Volontaires
de la foi en Andalousie. . . . 459
— Histoire de Mouça-lbn-Rahhou ,
premier commandant des Volon-
taires de la foi. ,.,..*.. 463
— Histoire d'Abd-el-Hack - Ibn-Oth-
maU; commandant des Volontai*
res de la foi 466
— • Histoire d'Othman-lbn-Abi- l-Olâ ,
commandant des Volontaires de
la foi 468
Histoire d'Abou-Thabet, fils d'Oth-
man, commandant des Volontai-
res de la foi 473
- — Histoire de Yahya-lbn-Omar Ibn-
Rahhou , commandant des Vo-
lontaires de la foi , 477
— Histoire d'idris , fils d'Othman-
Ibn-Abi-'l-Olà, commandantdes
Volontaires de la foi 481
Histoire d'Ali-lbn-Bedr-ed-Dîn ,
commandant des Volontaires de
T. IV. 38
59*
HISTOIRE DES BERBÈRES.
la foi
483
Les Beni-Merîn. — Histoire d-Abd - cr - Rahman , fils
d'Abou-Ifelloucen et coroinan-
danl des Volontaires do la foi
Appendice, -- Notes sur la langue, la littérature et
les origines du peuple berbère
i86
489
FIN DE LA LISTE DFS CDAPITRES.
llfDBX DfiS NOMS.
5g&
INDEX DES NOMS
QUI SB TROUVENT DANS CE VOLUME.
Les Âbbadides, 92.
E-Âbbas-lbn-Atïa, 6.
— Ibn Oraar, 250,432,
435, 440.
-— Ibn-Mohaaimed, 46.
— Ibn-Rahbou, 205,
484.
Abou-'l-Abbas, le cid, 38,
— lebafside, 3t1,
313, 326,
329.
— le mécinide ,
405 et suiv,
415, 447,
418, 430,
6^ mt;.440,
441 . 444 ,
459,
El-Abbcli, 156, 167.
Abd-Allah-lbn-Abd-el-Hack ,
469,
— Ibn-Ali, 304,310,
311.
— Ibn-Asker, 389,
— Ibn-Djaber, 455.
— !bn-Moslero, 306 ,
344.
— Ibn-Saîd, 276.
— Ibn-es-Saîd, 36.
— Ibn-Sogheir, 389.
Beni-Abd - Allah , 57 , 433 ,
461.
Abou-Abd-Allah , le hafside ,
249, 2ol.280c/siifv. 295,
346,
Abd-eUAztz- Ibn- Mohammed y
291 , 292,
■— . le poète, 97.
— le mérinide, 369,
400, 487,
Abd-el-Caouï-Ibn-el-Abbas ,
6 et sviv.
Iba-Abd-el-Caouï -Mohammed ,
7, 9, 10, 41, 105,
Beni-Abd-eUCaouï, 147.
Abd-el-pack-lbn-el-Hacen , .
438, 445.
— Ibn-Mahîou, 27
et suîv,
— Ibn - Olhman ,
172, 176,
185c^5.223,
446 et suiv.
— Ibn-Mohammed ,
. 41.
— Ibn - Rahhou ,
462, 464,484
Ibn-Abd-el-Hack, 32, 33.
Beni-Abd-eUHack,459 et suiv.
Abd-el-Halîm , le mérinide ,
354, 363, 364, 450.
Abd-el-Kerîm-lbn-Eiça , 166,
^^19.
Casr- A bd-el-Kerim^ 161.
Abd-el-Melek-Ibn-Yàghmora-
ccn, 461.
Abd-el-Moumen, 26, 27,
— le mérinide, 356,
360, 363, 450.
Les Abd-ol-Moheimcn, 201 .
596
mOBX DBS NOM.
Abd-er-Rahman-ibn - Ahmed,
3U.
— Ibn-Abi-Ei-
nan, 318.
— le tnérinide,
356, 360,
'S61 etsuiv.
397 , 403
Aljou-Abd-er-Rahman, 41.
— lemërinide,
129,222
et suiv.
Ibn-Abd-er-Rezzac, 240.
Beni-Abd-es-Samed, 228.
Les Abd-el-Ouad, 277.
Abd-el-Ouahed - el - Mizouar ,
436, 439.
— Ibn- Moham-
med, 428
et suiv.
— Ibn - el-Lih-
yani 263 et
sutv. 284.
Abd-el-Ouehhab, 302.
Ibn-Abed, 248.
Ibn^Abla, 90, 111.
El-Abkem, 313, 35S, 440 et
AlIaUlbo-Mohammed, 356.
Atïa-ibn-Mouça, 402.
Acem, 475.
Acerai, 119.
Ibo-Acerdîl, 89.
Les Achar, 46.
Abou-»l-Achaïr, 426, 427.
El-Acherî, 279.
El-Achref-Châban, 450,
Abou-Acîda, 150i.
El-Acouii, 317.
Ibn-Âddjana, 376.
Adepghal, 30,
Adi-Ibn-Yoaçof; 47, 279;
Ibo-el-Adjouz, 340.
El-Adjraf, 250.
Bou-n-Adjraf, 275.
AdouMbû-IgnimeD, 6.
Ibn-Abi-'l-Afta, 35.
i4/raff, 210.
Aghfou, 55.
Les Ahiaf , 364, 365 , 38f ,
383,417.450.
Ahmed-Ibn-el-Hacen, 453.
— Ibn-Idrîs, 298.
— Ibn-SaJd 229.
ibn-eUAhmer, 92, 434, 433.
— le cheikh, 463.
— - le fakih, 75.,
78 , 457 ,
463.
— Abou-'UHad-
djadî., 232.
— el - Makhlouô ,
457.
— Mohammed -
Ibn-Youçof,
73.
Abou-Aïad-IbD-Yahya, 36.
Aïcha-bint^Yacoub, 233.
Aïd-lbn-Mendtl, 464.
Abou-Aïdrît, 463!
Aïn-es-Sefâ, 36, 430.
Ibo-Akmaztr , 450 et suiv.
245.
Algéciras, 400, 401, 434 ,
484.
Alger. 442, 220, 378, 380.
AH-lbn-Abd-el-Azîz, 446.
— IbD-Bedr>ed-Dtn, 483 et.
suiv,
— ibn-Abi-Eïad, 465.
— (bn-Ghanem, 243.
— Ibn-Haroun, 402.
— * iLn-Bassan, 16.
— Ibo-HenDOu, 190.
INBBX DBS NOMS.
597
Âli-Ibn-Ibrahtm, 35, 454.
— Ibn-Mansour, 431.
-- Ibn-Mehdi, 351, 426.
T- Ibn-Mohammed, 166.
— Jbn-en-Nacer, 15; 148.
-. Ibn-Nasr,i9, 23.
— Ibn-Omar, 68,376, 418
et sufv,
— Ibn-Othman, 43.
— Ibn-Rached, 277 et suiv^
286,
— Ibn-Bahhou, 484, 485.
— lbn*Yahya,146,U6,452.
— Ibn-ZékérYa: 423 et suiv.
444, 4o4.
— Ibn-Zîan, 48.
Abou-Ali,Iecîd, 38.
— le mérioide , 1 90 ,
191 cUwit>.,212
et suîv.
Aulad-Ali, 462,
Benî-AUac, 265.
Allai, 374, 375,
— Ibn Mohammed , 227,
264,29<,372,446erî.
Ibn-AUal , Mohammed , 454 , 456 ,
Youçof, 447,
Ibn-Allan, 142,207.
Alméria, 204.
Almilend, 230, 231.
Aloudan, 48, 57, 177, 178,
462. 469.
Alphonse X, 203.
— XI, 378.
Les Amaroa, 345, 426.
Amer-Ibn.Abd.Allah,369,371 .
— Ibn-Feth-Allah,334.
«.- Ibn-Idrîs. 48, 53, 54,
68, 469.
— Ibn-Mohammed , 319,
329,364,360,362,
365, 373 et suiv^
Çeoi-Amer, mérinidcs, 58.
Abou-Amer , mérioide, 125^
433, 436,
Bent-Abi-Amer, 301 et suiv.
Ibn -Abi- Amer,' Mohammed,
290,291, 296 ef^utw., 305.
Ibn-el-Amîn, 63, 64, 65.
Amran-Ibn-Mouça, 455«.
Beni-Amran, 3..
Ibn-Abi-Amran, 3, 209, 468.
Ibn-Amsmotid, 264,342, 440.
Anber^468.
Andous, 472.
Anfa, 476.
Anter-Ibn-Ouenzemmar, 288.
— Ibn-Nasr 23.
Ibn-Antoun, 350, 352 et suiv.
Ibn-Aouafou, 434.
Ibn-el-Arebi, 482.
Arîf-lhn-Yahya , 222, 227,
240, 244, 254, 282, 288,
El-Ark,12.
El-Arka,%l.
Asaraky 425.
Asker-Ibn -Mohammed, 26«
Beni-Asker, 33, 422.
Aladjonb, 49, 473.
Alîc, 358.
Alïa - t-el-Asaram, 44,. 45.
-- Ibn-Daflîten, 5.
-- l-el-Hîou, 5.
-r Ibn-Menad, 5.
— Ibn-Mohelbel, 240.
— Ibn Mouça, 24, 389.
Abou-4-Atïa, 424.
Ibn-Attouch, 43, 50, 67, 82.
Ibn-Auzaï, 44.
Beni-AïUas, 36.
Axarafe, 87, 442.
El-AzéG,Abou-1-Abbas, 64.
— Abou-'l-Cacem, 64.
— el-/afeA,159.
— Ïbn-Feredj,67.
— Aboii-Hatem,404 459
598
INDK.t DBS NOMS.
EUAfcfi, Ibralnm, 240.
Mohammed, 231.
— Mouça, 208.
— Abou-Taleb,70,159.
— Yahya, 467.
Beni-'PAzéfi, 160,198 ei suiv.
Azemmor^ i11, 418.
Azîz-etl-Dani, 132, 1&§.
Aulad-Aftz, <2, 16, 18, 22.
23, 279.
Azouer, 84, 98, 109.
Azouz, 119.
Ibn-Azzoun, 238.
Abou-1-Baca-Khalod. 150
- Yaïch, 189.
Heni-Badfn, 25.
Badis, 81.
El'BûVha, 142, 427.
J?cm-Bec/itr, 87.
Bechri, 477 .
Bedjer, 131.
Bedr-ed-DÎD, 397.
Behloula, 42.
Les Behloula, 31 ■
Beht, 32.
Aboo-Bekr-lbn-Araer, 377.
Ibn-Arîf, 382.
— Ibn-lbrahîm,14,14o.
Hisn-Bekr, 208.
Benyounoch^ 1 33
El'Bira, 109.
Berda, 114,
Bérékat, 249.
Ibn-Abi-'l-Bérékat, 126.
El-Binya, 81 .
Bîroebes. 61.
EUBorlugal, 232.
LesBolouïa. 31.
EUBoloaï, 213.
Ibn-el-Bouac, 249..
Bougie, 269.
Jbn-Bouhtal, 443.
Brecltk, 142.
ElGabaïli,50,83,
Et'Cttçubat, 22, 105, 142.
Abou-1-Cacem It^ chérif, 329,
333, 372,
393,394.
-- Ibrv-el Hakim,4S3.
Beni-Cadi, 6, 19.
Ibn-Cadîb, 172,188.
Cahera^ .jjOp.
Cai rouan, 266.
El'Canater, 87, 414.
Cantara-t-el'Ouadj 423.
Caracoch, 260. ,
Cdlaniana, 86.
El'Calef, 84.
Ibn-el-Cattan, 84.
Cazrountf 26.
C^M/o, 63, 160,461,178,183.
Chah, 292.
Ghana, 40.
Chandja, 406.
Les Chaouïa, 31.
Chediouïa, 10,287.
Les Chebanat, 194.
Ibn-Cliékilola, 78, 98.
Beoi-Cbékilola, 78, 80, 88,
402. 103, 104, 124, 463.
Chclouca^ 87.
Chemaoa, 206.
Gherchel, 142,
Abou-'s-Chertf, 274.
Cliimci, 228.
Choaïb, 180, 181.
— Ibu-Meimoun , 312,
351,
— Ibn-Mcndîl, 372.
Clients, 277.
El-Cobbi, 346.
El-Coléïâ, 86.
El-Comendador, 326,
Confré ries religieuses , 183.
Constcntine, 269, 310.
Coran, 133, 153.
INDEX DES NOMS.
699
Cordons, 74, 88.
Ibn-Abi-Coreich, 98.
Abou-Gorra,2.
Cos-es-Ziar, HO.
Âulad-el-CoSj 263 et suiv,
Dafer-HS'Sinan, 250.
Daghar-Ibn-Eïça, 322.
Bou-Darba, 32.
Abou-Debbous, 49,50 et suiv,
Ibn-Abi-Debbons, Ahmed, 265
et suiv,
— Olhman, 265.
Aulad-Abi-Debbous, 205,267,
268
/)fîWoû, 357, 367,384.
Ibn-ed-Delîl, 103, 125,463.
Ibn-ed-Demâa, 443.
Dera, 194.
Derrâg. 5.
Los Dîalein, 383.
Abou-Dîiiar-Ibn-Ali, 385.
— Soleiman , 290 ,
292.
-7- Yacoub. 303.
Dja-el-Rhaber,423, 432,439,
443.
Beni-Djaber, 43, à41 , 374.
Beni<Djar.AlIah,243.
Djeha/ia, 262,
Ibn-el-Djëïab,391.
Djeliana, 86.
lbn-Abd-e^Djelîl,173,475;
Djemal-ed-Dîn, 174.
lbn-Dierrar,272,273,278.
Les Djochem, 53, 60, 99, 175.
El-Djochemi,487.
Abou'l-Dioïouch, 158, 184.
Djouher, }e caïd, 2.
LesDouaouîda,260.
Ed OouceQ,384.
lbn-Doulîn,175.
BeDi-Doulîn,175.
Eïad*ol-Acerni,114, 149.
-î lbn-Saîd,151,152.
Abou-Eyad,464.
Ibn-Eïad, 58.
Ibn.Abi.Eïad,174,475,
Ëïça-Ibn-el-Haccn, 307,
— Ibn-Maçaï,64.
— [hn-Abi-Malek,409.
— lbn-Mouça,472.
— lbn-Rahhou,484.
— lbn-Sollan,49.
— Ibn-Yahva, 464.
Eïnan-lbn-Nasr, 23,
Abou-Einon, 248, 274 , 327, —
Éléonore de Gu2man, 379.
Emirat, 225.
£'5/q»cno,205.
El-Ez2,16S.
El-FadI le hafside, 245, 250,
268c^swtv.,271,280,28l,
284,
Abou«'l-Fadl-en-Nacer, le nié-
rinide,286,287.
— Ibn-Abi-M.Hacea,306.
— Ibn.Abi-Salem,354,
374,373,374.
Fareh, 249,297.
— Ibn-Mehdi, 437.
Fares-Ibn-Abd el-Azîz, 377,
378
— lbn-Abi-'l-Hacen,302.
— Ibn-Meirnoun , 239 ,
294,306,312, 345.
— Ujn-Yaghmoracen, 4 0,
64.
Abou-Fares, le hafside, 468.
— le rnérinide,443,
444, 457.
Falcma, fille du sultan hafside,
233.
Fazaz-el-Maden, 39.
EI-Fcns~Ghales(/c prince dei
Golfes), 379.
600
INDEX D£S NOUA.
ï:l.Fercadii,309.
Perdicand, fils de Don Sanche,
1S8.
Feredj-Ibn Isinaîl,132.
Feih- Allah [voy. Es-Sedrali).
— Ibn-Araer, 354 .
Les Fichtala, 31 .
El-Fichlali, 38, 45.
El-Frontïéra, 73,74,460.
Ibn-Abi-Folouh, 23.
Beni-Foudoud, 430.
El-Foudoudi,i74,n2.
— Omar, 178.
— Abd- el-Ouahed ,
176.
Fouzi, 154.
Prince des Galles, 319,
Ibn-Gamacha, 184.
Garcia-lbn-Anloun, 350.
GAa6oti/a,,46,98.
Ghadir-el-Hams, 432.
El-Ghafaïri, 154.
El-Ghafeki,201.
El-Ghairan, 457,
IbD-Ghalb.5.
Ghaleb,13.
Ghalîana, 87.
lbn-Gharar,467.
6hdnem-lbn-Mohammed,3.
Ibn-Ghanta, 260.
El-Gharbïa, 72, 78, 1 34, 1 59.
GAa^^opa, 416.
GhazUibn-el-Kas, 433.
Ibn-Ghazi, 376, 383, 386,
388,390,400, AOietsutv.,
445,417.430,433 e^^utv.
El-Ghomari, 54.
Gi6ra/^ûr,215, 216,407,474.
BenUGommi, 162.
Gonzala, 186.
Guadatète, 110.
Guadix, 124.
Guercif, 343.
I
Ibn-el-Habbak, 84.
Ibn-el-Habci, 67.
Hàbboun-Ibn-Ali, 198.
— Ibn-lbrahîm, 126.
El-Bacen-lbn-Ali, 187.
— Ibn-Amer, 173,474.
— Ibn-en-Nacer , 434,
435, e^^tttt;.
— lbn.Oinar,317,318,
320,330,341.
— Ibn-Abd-er-Bahman,
423.
— lbn-Soleiman,274.
— lbn-Yahya,420,422,
423.
— Ibn-Youcof , 329 ,
341./
Abou-'l- Haddjadj-lbn -el-Ah-
mer, 238, 305, 327, 392,
475, 478.
Ibn-Haddjadj, 68.
Abou-Hadîd,43,67.
Hafed - Ibn-Abd - cr-» Bahman ,
423.
Abou-Hafs-Ibn-Yaghmoracen ,
52.
Ibn^ei-Flaktm, 158, 460.
— Mohammed ^
225.
— Ali, 296.
Abd-el-Halîm, 35^7, 359 et
Hdlli, 449.
Hammama-Ibn-ïslilen, 30,31.
— Ibn - Mohammed ,
26.
Beni'Hammama, 33.
Ibn-Hammama , Abou-Bekr ,
27, 367.
Hammou - Ibn - Abd-el - Hack ,
466.
— Ibn-Mouça, 465.
— Ibn-Yahva, 115,
mon DES T7011S.
601
U6, 249,230.
Abou-Hammou, 21, 1 56,321,
322, 384 et suiv., 466,
457.
Ibn-HamMi, 306.
j4/-//omrû, 306,393.
Hamza-Ibn-Choaïb, 290.
— Ibn-Ali, 385 et suiv.
— Ibn-Omar, 264 .
Ibn-Hanîna, 69, 70.
Haracat-Ibn-Hassonn, 453,
Haroun-lbn-Moiiça. 62.
Ibn-Haschar, 40, 41 .
Douï-Hassan, 344.
El-Hassani, 445.
HassouD-lbn-Alu 369.
— lbn-Mohammed,452.
~ es-Sobéïhi, 44 9,420.
Abou'1-Haul, 262.
El-Hemdani, 63.
Ibn-Hicham, 78.
Ibn-Bîdour, 227 et suiv.
Ibn-Hidya, 456,
Hilal, 298.
LesHinlata, 294.
Hocein-lbn-Ali, 344.
Aulad-Hocein, 364, 384, 409,
425, 450.
LesHosein, 387, 388.
Honein, 90, 220.
Les Hoouara, 34.
iBn-Houd, 72, 73.
ffueltna, 'iO.
Ibrahîm-ibn-Amran, 454.
— Ibn-Ali, 19.
— Ibn-Eiça , 84 , 462 ,
465, 477.
— Ibn - Abi - Tachefîn ,
401.
— Ibn-Zîan, 43.
Beni'Ibrahtm, 3.
Abou-Ibrahîm, le cid, 29.
Beni'ldlelleii. 6, 7, 4 4,
T.l?.
idrîs-îbn-Abd-el-Hack, 469,
— Ibn-Mouça, 439.
— Ibn-Othman, 275, 476,
479, 484 et smv.
Aulad-ldrîs, 48, 57, 58, 433,
464.
El Idrici. Mohammed, 423.
Aboli -Ifelloucen, 354, 355.
//y an, 2.
Beni-Ifrcn, 2.
Ifriah Four ion, 306.
Boa-lgni, 26.
Iklouùn, 368.
llbogha, 364, 450.
Beni-llouraen, 2.
L'Imam, les fils de, 223.
Imelloulîn, 42.
Beni-Iraten, 228. 477. '
Ibn-Irgacen, 430, 433.
Beni-lrnaten,7,22.
Bent-irnîan, 48.
El'Irnîanl, Ibrahtm, 472.
— Moaca, 235.
IrzîgU'in, 1,37.
Ibn-irzîguen, Ali, 354 .
— el-Hacen, 273.
— Soleiman, 482.
Ishac, frère d'El-Morteda, 55*
Abou-Ishac, lehafside. 343.
Ismaîl-lbn-Abî - 1- fladdiadL
393.
— Ibn-Mohammèd, 332,
My, 9,39,40,59,61.
IzgAaren-Bafnka^ 464.
Beni-Iznacen, 491.
EMznaceni^ 453.
Beni-lznaten, 6>
Beni-Izzoul, 422.
Jaën, 74, 88, 380.
Don Jayme, 204.
Kahtour, 443.
Les Kaoub 259, 261 .
Ibn-cl-Kas, 410.
39
602
INDEX »E« NOMS.
Bcni-'lKas , 433.
El-Kebîr, 24.
Reodoiiz, 53.
— Ibn-.Abd.AHah,i62.
— Ibn-Olhraan, 194.
Ibn-Kendouz, 53, 54.
— Abd-Alllah,163,
42t.
. _ Masoiid, 309.
Beni-Kendouz, 163,165.
Beni-Kerdjoun, 3.
C-dsr-Ketama, 178.
iTAa/artf, 262, 314,
Ibn-Khaldoun , 330,331,383.
Ibn-Khalas, 63, 76. 4G0.
Khaled-lbn-Amer, 389.
— Ibn-Haroza, 247, 248,
K 263,283,311.
-- Ibn - îbrahîm , 418,
419.
Ibn.cUKhalef, Abd- Allah,
333.
Ali, 248,
313.
KhaUfa, 182,167.
Ibn-Abd-Allah, 263.
Ibn-Abi-Zeid, 263.
A7m7m'5, 269.
Khathîça, 134.
Las Kbaradj, 380.
Kharzouza, 10, 103.
Ibn-ol-Khalîb , 309, 390 tt
SMt?., 395 et suiv. , 403,
404 , 41 1 eri suiv. , 480,
487.
Ibn^Khazrout, 455.
El-Kheiri, 76. 144,143, 196.
Khidr-el-Ghozzi, 114.
Ibn-Khtrbach, 39,134,1 33.
E!-Kinani, 53,34, 373, 374,
Mendîl, 193,196.
MohaiDmed , 373 ,
377.
I Beni-Kinani, 493.
' EUKilrani, 67,68.
Ibn-eUKilrani, 43.
Aiilad-Abi-'l-Leil, 264.
Les Lemdïa, 12.
Lemtr-lbn-Mabîou, 31 .
Lemli, 122.
Locha, 390.
Locman~Ibn-el-Motozz, 5.
Ibn-Macaï, 351 . 365.368,410,
439,440,442.
- Ali, 451.
— .Masoud, 323,325,
330, 349, 360,
361, 404, 405,
430, 434, 435,
446 et suiv. ,
486, 4^7,
— Mehdi, 435,
— Omar, 445.
— Yaïch, 443.
Macarmeda, 44, 192.
Macîn, 243.
Madjrît. 107.
Beni-Madoun, 6, 19.
Madrid, 107.
MaghNa, 438.
EUMa£;l>îli, 55, 183.
Los Maghraoua, 1 44.
Maliiou-Ibn-Abf-Bekf, 27.
Ïbn-Mahîon, âO.
Mahnoun, 9, 42, 22.
Ibn-el-Mahrouc, 216, 472 ,
473, 478.
Makhlouf-lbn-Qennou, 175.
Ibn^Soleiman, 444.
LesMakil.345, 381.
Alalaga, 107.
Maltk-lbn-Morahhcl, 96.
Abmi-Malek, 57, 59, 61,62,
66, 215, 217, 222, 229
el suiv.
MorhUj 405.
INDEX DES NOMS.
603
Benî-Mamet, 6.
M^nsour, 419, 433 et suiv.
Mansour-Ibn-eUHadcij, %QS ,
299,313,346.
— Ibn-Abd-el-Mélek,
'm,4ln,123,126,
435.246,273 275,
476.
— Ibn -Solerman , 349 ,
324 et suivantes t
331.
.- Ibii-Tachefiû, 468.
Doui-Matisour,364,3S I .
Ei'Uansoura, U3, 221, 223.
Beni-Maosoura, 207.
Marbella, 402.
Alarchena, 204.
Maroc, 49, 55, 289.
Masoud-Ibn-Abi-Amer, 207.
— Ibij el-Haddj, 438.
— Ibn-Kanoun, 58,400.
— Ibn Abd - el - Mélek ,
472.
— Ibn^Rahhou, 348.
-— Ibn-Sogheir, 458.
— Ben-Bou-Zeid, 48.
Les Matghara, 62.
Mûzouna, 13, 442, 445,
446.
Mecherla, 39.
Mecîfa, 439.
J/^rfea, 4 4,45, 442, 447,148,
224.
Beni-Meden, 6.
Medîn, voyez Medyen.
Beni-Medîn, 7.
Bou-Mod}n, 347.
lbn-Abi<Medyen, 496.
Abott - Abd-
Allah,467,
468, 471,
] 86 et sui-
vantes.
Ibn -Abi-Medyen-Abou - 4-Ga-
cem. 203.
Abou-*l-Fadl,
240, 242.
244.
Abou-Taleb,
243.
Abou-Yahv»,
398, 399.
Beni-Abi-Medven, 481.
Les Medîonna, 4, 2, 31.
lbQ-A1egy;uen, 278, 346.
iMeimoun-lbn-Ali, 303, 304,
316.
Meimoun>lbnBebroun , 238,
239.
— Ibn-Oiiedrar,437.
Kl-Mekdoiidi»43l.
Ibn - Mekki , Ahmed , 248 ,.
251.
^ Abd - eî - Mélek ,
251, 263.
— Omar, 283.
El-Mdâb, 190-
Melah, 353.
EUMélek-en-Nacer-lbn-Cala«-
oiiu,4 45, 239.
3/e/i/a, 62.
Ibn-Meh1a, 484.
Mclit, 242.
Menod-Ibn-Nasr. 49.
Mença Djata, 343.
~ Mouça, 243.
— Soleunan, 243, 269,
302.
Mendtl-Ibn-Hammama, 215.
— Iba-Mobamméd> 493.
— Ibn-Nasr, 23.
— Ibn-Ourtadlim, 68.
Ibn.Abi-MendîI, 67. *
Mengouch, 6.
El-Mengoucbi, 6 et et su\v.
Les Mencoucha, 46^^
mi
IKDKl DBS KOUfi.
MeraÈ, 81.
Ibn Merdenich, 73.
Merîn, 25.
Beoi-Merin, 25 et suiv.
Ibn-Merzouc, 330, 347 etsui-
vantes n 394.
Mesarat, 217.
Beni-Mesktn, 254.
Messoufiy 27.
£l-Metzari, 418,454.
Ibo-Mezouâ, 243.
Ibn-Micdad, 434, 435, 443.
Les Miknaça, 31 ,
MUa, 312.
Miliana, 142.
El.Milîani, HS.
IbD-el-Miltani, 165, 166.
Mindas, 383.
IbD elMil, 298, 299.
El-MizouaF; voyez Obhou.
— Abd -el - Ouahed ,
436.
— Cacem, 124.
IfoaAfrf, 167.
Abou-Moaref, 111, 121,
172.
Mobarek-lbn-Ibrahtm , 357 ,
373, 374.
Mobajka, 250.
Mocatel, 3.
-« Ibn-Ouenzemmar, 3.
jtfoc/in, 103.
Modjahed, 228.
IbD'HohalIi, Mohammed, 82,
98, 124.
— Mouça, 115.
— Omar, 91, 97.
*15.
-— Sollan, 216.
— * Talha, 84, 98,
103,113,116,
123,218.
Beai-Mohalli, 97, et suiv.
Aulad-Hohelhci , 264 , 267 r
313.
Mohîb-lbn-Nasr, 22.
Mohammed - Ibn - el - Abbas ^
250.
— Ibn . Abd-Allah ,
480.
— Ibn-Abd-el-Caouï,
' 61.
— Ibii - Abd - el-Ha-
iim, 449 et sui-
vantes.
— Ibn- Abi - Abd-er-
Rahman, 331,
358 et suiv^
369.
— Ag«ellîd, 122.
— Ibn-Ali, 56.
Ibn-Amer, 469.
— Ibn- Abi -Amer •
439.
— Ibn-Amran, 67.
— Ibii^Arîf, 456.
— Ihn-Àlïa, 15.
— Bedr - ed - Din ,
483.
— Ihn - cl - Cacèm ,
440.
— Djemal-ed-Dtn ,
483.
— Ibn- Abi - 1 - Had-
djadj , 479 ,
480.
— Ibn-Hacen, 428,
431.
—, lbn.ldrîs,32, 58,
121.462,469,
483.
— Ibn-Israaîl, 440.
— eUMehdi, 323.
— ' Ibn - Mohammed ,
435.
— lbn'Mouça,436.
INDEX DES NOUS.
605
— Ibn-Omar, 440. ,
— IbD-Olhman,389,
405 et suiv,
410, 415, 428
et suiv.y 434.
— Ibn - Soleimao^
432.
~ Ibn-Temîm, 297.
— cl-Tonneci,437.
— Ibn - yaghmora -
cen, 429.
—- Ibii-Youçof, 16 ,
207,301.
— Ibn-Youçof *Ibn-
Allal, 4â8.
— Ibn-Zegdau, 357.
El-Mokhaddeb, 26, 27.
Ibn-Mokhlès, 159, 460.
Les MoDebbnt, 426.
Bl-Monestlr^ 253.
Monîf-lbn-Thabci, 1 46.
El-Montdcer, le mérinide, 435
et suiv,y 439,
445.
— Tabd-el-ouadite,
455.
Ibn-el-Morabet, 92, 96.
Morada, 427.
El-Morteda, 39, 42,48, 49, 67,
82.
Mostagha/nern, 142.
El-Mostancer, 52,150.
El-Mot-icem, 319.
El-Motamed, 319, 320.
Abou-1-Motarref, 35.
Moti-lbn-Tachefîn, 466.
■^ Ibn-EïÇ3, 317,318.
— Ibn-Abi-Fadl,226.
— Ibn-Abi-Hammou , 139.
~ Ibn.-Ibrahîm,311,312.
— lemérinide,4286/5i/iv-,
435.
— Ibn-Rahhou, 58,124,
461 et $uiv.,ilO.
— Ibn-Yahya, 3.
— Ibn-Zerara, 14.
Mouça-Ibn-Ali, 195,223,468.
Abd-elMotimeD, le mérinide,
365 etsviv*
Ibn-Mozni, Ahmed, 317,323.
— r Mansour, 248.
~ Youçof, 269 et
suiv., 300, 314, 316.
Nasr-Ibn-Ali, 23.
— Ibn-Omar, 17, 18.
— Jbn-Sollan, 19.
En - Nacer - Ibn-Abi-'l-Hacen ,
282.
Nebdoura, 122,187.
Nebîl.280.
Nedjd, 260.
Nedroma, 139, 220, 249.
Abou-Nefîs, 43.
Nehel, 17,
ll>n-Abi-Nenii, 154.
Beni-Nemi, 442.
Beni-Nemzi, 6.
Nezoul, 464.
ibn-Nezoul, 470.
Noggom, 26.
Ben-Bou-Noual, 22.
Ibn €n-Nouan, 493.
En-Nouar, 30,
Don-Nuno, 74,79,463.
El'Ohbad, 347.
Obbou-lbn-Cacem, 212, 240.
— Ibn-Djana, 279.
— Ibn Bacen, 23, 24.
Ibn Obbou, Ahnrtd 434.
— Amer, 325.
— Abd-el - Ouahed ,
434.
— Cacem, 124.
Doui-Obeid- Allah, 68.
El'Ocab, 77.
Abou.'l-Olâ,49,122,470.
606
moBX DES Noas.
lbn-Abi-4-Olà, voy. Oibman.
BeDÎ-Abi-'l-OIâ, 236 et sui^
vantes
Omaïr, 455, 457.
Ibn-Omaïra, 35.
Omar, le baf^uie, 250.
— ibo-Abd-Allah , 310,
349, 351,358,371.
— Ibn - Abd-el - Mounien ,
♦54.
— Ibn-Ali, 296. 297.
— Ibn-Hamza, 2;:0, 283.
'— Ibn Ismotl, 13.
— Ibn-Abi-Malek, 111.
— Ibn-Masoud, 372,385,
387.
— Ibn-Meirooun , 317 ,
318.
— Ibn-Mohammed, 3i6.
— Ibn-Nasr, 23.
— Ibn-Olbman, 16,17,
207.
— Ibn Otbman-el-Askeri,
122.
'- Ibn.Rahhou,177 ,432,
477.
— Ibn-Yahya, 135.
— Ibn-Abl-Yahja,45,46.
— Ibn-Abi - Yabya - Abi-
Bekr, 246,
— Ibn-Yakhluf, 192.
Beni-Omar, 65.
0mm er-Ridjlein^ 50,
0mm el' Yomm , 97 ,
Oran, 142.
Ibn Otbeinien,15i,152.
Olhman.lbn-Abd-cI-Hack,30,
31.
— Ibn-Abd-er-Rahman,
211 et swv.
— Ibn - Djerrar, 272 et
iuiv.
— Ibn-Mohammed, 403.
Othman-Ibn -Abi-1-OlA , 1 23,
161,173.1:6,177,
183,204 etsuiv.,
360,361,465,468,
et suiv., 470 et
sniv. , 477 et suiv*
— Ibn - Ouenzeinmar ,
323.
— Ibn-Sebd, 150.
— Ibn - Abi - Tacheffn ,
46S.
— Ibn - Yaghmoracen ,
126,129,140.
— Ibn-Yahva,395,396,
479,480,
-r- Ibn-Yonçof, 316.
Ibn-Oltou , Abou-'l-Caccm r
210,247,261,
252 284.
— Mohammed , H ♦ ,
124e£ suiv.f
129.
Ouacely 5.
Beni-Ouachi, 25.
Oua</i-7- i46<rf, 55.
.Ouataten, 343.
Ouamharman^iS,
Ouancherich, 221.
Ibn-Ouanoudtn, Abou-Ali,29',
— Abou -Mo-
hammed V
32.
Ouar^ /a, 389.
hl -Oi:athec, 436e; suiv., 447.
Ël-Oualtaci , voy, Omar-Ib»-
Ali.
Ouuzmorf 145.
Oucenaf, 28.
Beni-Ouctl, 6.
Owrf/'rfa, 139, 140, 190,220,
386.
Abou 'l-Ouél!d-lbn-el-Âhmcr,
216, 466,471.
INDBX DES ISOMS.
607
OueDzeramar-lbn-Amran, 3.
— Ibn-Ar!f , 21 ,
. 227 228,274,
286,287,288,
368,382,383,
409,415,416,
417.426,443,
« 446.
— lbn*Ibrah)m > 3,
4.
Ibn-0«enzemmar, 3.
Bcni-Ouenzeinmar, 4.
Ouerj'Aa, 351 .443.
Ibn-el-0«iezîr, 134,
Beni-M-Oaezfr, 134,
Ibn-Ouîghern 144.
Ibn-Onîghian, 376,410.
Les Oungacen, 29,367.
El-Oungaceni, 172.
Ibn-Oonsar,3S^2, 353,364.
Oura, 177.
Beni-Oura, 60.
Ouragh, 26.
El-Ourdîghi, 341.
Oureg, 282. 384.
Beni-OiirDÎd, 2, 457.
Beni-Ourladjen, 169.
El-Oorladjeni, 330.
El Ourtedghrabi, 67.
Ibn-Ourzîz, 26, 67
Ibn-Ousoaf, 461. 462.
El-Oasnari,432, 440, 466.
Omat, 28, 346.
Ouzînii, 22.
Don Pedro, 205,379.
Ferez de Guzmao, 184,205.
Poudre à canon, 69,
Er^Rabeta, 38.
Bached-lbn-Mohammed y 144
etsuiv., 149.
BeniBached, 1 et suiv.
Ibn-Bafê, 276.
»ahhou-lbn-Abd-Allah, 461,
464,469,470.477.
Bahhou-lbo-Mansoor , 386 ,
387, 401, 402.
— Ibn.Yacoab,486,187.
— Ibn-ez-Zaïm, 431 ,
442.
Ibn-Rahhou, El-Abbas, 473,
467.
— Abou-Bekr, 423.
— Omar, 184.
— YahYa,313,3l4,
352,c$53,357,
361,362,364,
450.
Aulad-Bahhou,171.
Rahmoun-lhu-HarouQ, 402.
Er-Rahonï 253.
Ibn-er-Rakîk, 6.
Ras et-Tabîa, 252.
Abon-*r-Rebiâ, le ncérinide ,
179 et suiv.
Ibn-Abi-Y-Rebiè, 56.
£r-Rechîd, l'almohado; 33.
Beni-Recoughen, 6.
Er-Remeka, 187.
Remfta. 154
Er-Rendahi 64,119.
Ibn-Rezîga, 179.
Ridouan, 238,327,328,332,
392,393,479.
Les Rîah, 30,31,32,176,
Er-Rias,W9.
Er-Rîk-Rtkcen,138.
Er-Roaïni, 406.
Beni-Rocasa, 167,182.
Er-Rokhami, 151
Er-Rokn, 431 ,
iîonrfa. 77, 102,134,184,359.
Er-Rondi, 423.
Rota, 87, 1 1 1 .
Ibn-Abi-'l-Saber, 179.
Saôra, 210
Sàd-lbn-Selama, 221.
608
INDEX DES KOVS.
Sacout, m,
Safihd, 329, 439.
ES'Saguia-t'Cl-Hami'a, 110.
Satd-l'bn-Abcloun, 446.
Saîd-lbn-Mouça, 308, 323.
£â-Saîd, l'almohade, 33, 36,
— lbn-Abi-Eïnan,348,
— le mérinide, 400 et
suiv.
Abou-Sâtd ^ l'abd-el-ouaJîle,
293.
—" Feredi -er-roïr ,
89, 459, <6<,
470.
— le niérinido, 488
et suiv*
— Olhmao, 480.
Beni-Safd, 322.
Cala - Béni - Sald ( Alcala la
Beal ), 234.
Beni-Bcu-Saîd, 445,446.385,
388, 428.
Casr-ëaida^ 2.
Sakhr«lbn-Mouca,254,252.
Sakhra-t-Eibaà, 406.
Scilé, 46.
Saleh-Ibu-Haramou,442, 454.
BeniSaieh, 42.
Abou-Salem, le mérinide,461 ,
470, 327,484.
Sa/o6reno 407.
Don Sanche, 405,406,408,
446,445,138,204.
Les Sanhadja de Bougie, 297.
Es-Saoud,39,40.
Ibn-es-Saoud.329.
Sénda,484.
Aulad-Seba,346.
Les Sedou}kicb,34 4.
Les Sedrata,34.
Es-Sedrati, 84,80,98.
Sefcif, 427.
Sepmîan, 26.
Séïd-en- Nas-Ibn • Abd - el -
Caouï, 43.
Ibn-Séïd-en-Nas, Mohammed,
298,299,
467.
— Moaçd,367.
— Yaconb ,
423.
Sêkciouï, 400.
Es-Sekcîouï, 306.
Selama-Ibn-Ali, 49.
Ibn-Selaraa, Mohammed, 20,
224 , 222.
~ Sâd, 20, 224 .
Beni-Selama, 7, 49 cf suiv,
i4 6ou-Sc/tf, 44, 67.
SeDgman, 26.
Abou-Serhan , 4 5.
Séville.lfk, 86, 442.
Es-Sibli,304.
Ibnes-Sibli, 468.
Beni-VSibli,467.
SUljilmessa, 43, 66, 494, 242,
287,362,449.
Sidjoum, 254,264.
Es-Siui. 245.
Siyour. 437,443.
Es Sobéïà, 360,363 ee suiv. ,
372, 436.
Ibn-es-SobéYa, 356.
Es-Sobeihî, Ahm-d, 420,423,
42i.
— Ali, 420.
— Hassan, 424.422.
— HassouD , 449 ,
420,
— Mohammed, 437,
438
— Mouça, 463,474,
423, 434.
— Yoiiçot, 445.
Sofrouïjitii.
Sogfjom, 26.
IMDSX Ipg NOMS.
609
Es-Soggoumi.30«
Sogheîr-lbD-Amcr, 227, 323,
348.
U^ Soletm, 259,260.
SoleiiiiaD-Ibo-Daw(»ud , 309,
315, 346, 319,
320, 326, 351,
352, 372, 442,
444.
~ IbiHlbrahifii, 464 .
-^ Ibn^Oibinan , 44 ,
475.
— Ibd-Sèd, %i .
Aboa*Sollan-Aztz, 90.
Soi-en-Niça, 30, 462.
Les Soueîd, 322.
^ula-Ibn-Tacoub, 322.
Àulad-Tft.AUah,462.
Taazoulel, 363.
Et-Taberi, Hiistorien, 259.
Tacergttuit,23, 24.
Taobefin-lbn - Abd-el * Hack ,
376.
— « Ibn-Abi - 'i - Haoen,
304, 350,359.
— lba-Abi.Malek,400.
— Ihn^Moti, 403, 464.
465.
Tacbefin-Abou-Omar, 303.
— ibD*Abd-el-Oaahed,
77.
— el-Oataci, 483.
Abou-Tachefln , l'abd-^l-oua-
dîte, 244, 223, 402, 426,
427, 455 et $uiv.
Tadjhammaumi, 428.
Taferga, 58,
Taferknit, 7.
ra/arjfuifU, 442,447.
Tafertast,M9.
7a/na, 4 05.
Ibn-Tafraeuîo, Abou-Moham-
med, 223, 225, 845, 247,
* T. IV.
254, 252.266, 267, 343,
345, 475.
Tafrata, 54 .
raarrtr4,450.
Tahadrtl, 354.
Ibn-Tahadrtt, Asker, 23i«.
— Mohammed , 235 .
Tayaien-lbD-Hahiou, 28.
~ Ibn^Omar, 899, 329.
Ibd-Abi-'t-Talac, 486, 490.
— Ali, 445.
— el - Haceo ,
423.
Talha, 373.
~ ibo-Mohalli 48, 466,
470.
*-^ Ibo^eZ'Zobeir, 437.
Ibn-Abi-Talha, 360.
Tallout, 442.
Tama/rir, 464.
Tamskraut^ 377.
liran^er, 63,65,66.
Taaughzoui^ 49.
raouHrl, 4 39, 344,342.
— sur Za, 245, 427,
431.
Tdoun^, 62, 444.
Tarifa, 77 , 434 et suiv. ,
232.
Tarouaant^ 464,494.
Ibo-Abi-TatOQ, 40, 41 .
Tazauta, 29. 434.
Tazrount, 487.
repaya, 243
recAHc,342.
Les TeçQul, 34 .
Tedellis, 302.
Tedta, 344 .
Telagh, 27,54.
Et-TeUli,455.
Telkûta, 297.
Tementit. 494.
Temzezdekt,d6,ii3i,ZùH.
40
640
n»itBk DIS itons
(bn-Tenateft, 26.
Tendjeda, 424 .
Teroudja^ 4B0.
Tesalit, 30.
Tèza,lk3i.
Thabet*lbu.HeadtlJ39, UO,
U4.
Abou-Thabet, le mériiiide,169
et êuiv.
— Ibn^AIi, 446.
— Ibn - GthmaD ,
473 et suiv,,
478.
•^ Ei-Zaïm, 286,
293,2&4,296.
— Ibn • Yacotib ,
47a.
£es Thâleba, 4 0.
Thenïa, ^66.
lbn-«lh-Thouar, 249^,
Tidjedoughin, 32.
Beni-Tîgberfn, 6.22.
Tigoitrarin, 494, 389, 40».
Tifcipo*, 464.
mra/, 243,299.
Ëi-TilimçaDi, 329.
Tinmelel, 27, 83.
lbii-TîrbfgbtD,245.
Titeri, 388.
7/emcen^&9, 426, 438, 444,
442, 490,2<9,292,427.
Tolède, 407, 408.
lbn*ct-TordjemaD, 417.
Tou/otr, 1 95^
To/ya, 34'4.
Jouât, 4 94.
Ibn-ToQcrHet, 434, 438. 446,
448.
Beni^Toudjîn, 4 eisuiv.^ 447,
448.
Toiikal, 17.
TouFzegU€&, 4.
rufir>, 340.
Dbeda, 409,380.
Valence j 74.
Ville- Neuve^ voyez Mansourr.
— de Fez. 84 , 84^
493,276.
Xérèt, 7fr, 87, 440.
El-Yabarri, 343, 437 et suiv.,
442, 464.
Yacoub-ibo-AsDag, 476;
— Ibn-Abd> Allah. 46 et
^nU;., 469,470.
— lbn-Abd*el-Hack, 34,
38. 44 et euiv. ,
46».
— Ibn-Ali , 248 , 270,
274,282,294,300^
344, 316.
— Ibo-Haroun, 9, 76.
— Ibn-Idri«^462.
— Ibn-Moucd.420.
Abou-Yacoub-Yoïiçof, le mé-
rioide, 60,420 ^t mt;. 4 68.
Aniad-Yaghmor, 389,403^.
Yag^moraeen-Ibn-Hammama •
69, 70.
^ IbD-ôeUoia, 20.
— Ibn-Mobammed
446.
— tt)D-Tache(tD,44
— Ihn-Zîàn,\8, 33,
39, 51 ,84,99,
104,427,428,
462.
Yahya-Ibn-Abd-Allah, 49.
— Ibiî-AllaK 440.
— Ibn-AlYa,15,1«.
— Ibn-Dawood, «95,296*-
^ lbD*Ha2eiii,400.
— Jbii-Hodeil,390.
— Ibn - Meimoan , 342 ,
\ 372, 374., et «t«V.
--. Ibti-Aii-MeiKKi, 44».
IRDIX DIS NOMS.
M\
Yabya-ibn^Mouça. 220.
— Ibn-Omar-lbn- Abd-el -
MoumoD, 289.
— Ibn- Omar - tbn - Rah"*
hou, 286,345,472,
473, 477 $t «wV.,
483.
— - Ibn-Saleh, 54.
— Ibn ^ Soleiman , 221 ,
254 , 252.
— lbD-Yaghinoraoen,69.
Aulad-Yahya, 304.
Abou - Yahya - Ibn - Abd - el-
Hack,8, 33,
67, 422,
446, 470.
— Aboa - Bekr .
' 209, 240,
2i3, 245,
249.
— - Ibn-esChehtd,
64.
— Ibn-Houça, 4.
Yaïch-lbii-Ali, 325.437, 438,
464,472, 494
— Ibn-'Ainran, 474.
YalalbD-Abi-fiïad, 445,465,
466.
Ibn-Yalou, 47.
Ibnei-Yamto, 358.
Yaoud, 22.
Yedder-lba^Locman, 5.
Ibn-Yedder, Abd-er-Rahman,
464,494.
— • Ali, 464,
Beni-Yedder, 464.
Ibn-Yemioul, Yahya,248,313,
Belad-Biini-YeEtd, 68.
Youçof-lbn-Ahd-el-Caouï, 9.
-^ Ibn-Ali, 425,438,442,
444, 448-
— Ibn-EYça, 474.
— IbnJrgacen, 44, 67.
YoaçoMbn-Ha8san,4 6.
-- Ibn-Masoud, 444.
•^- Ibn-^Omar, 48.
— El-MostaDcer,408.
— Ibn-Yacoub, le méri-
nide, 68, 4 20 et sui-
vantes.
— Ibn-Ztan, 45.
Aulad-Youçof, 344.
Ibn-Youwoddjan, 6.
^s*Zdn, 450.
Ez'Zéara,i39.
Les Zegaoua, 34 .
ZegdaD,462.
— Ibn-Adiemi, 44.
Ibn-Zegdan, 384,382.
Ibn-Zeghbooch, 453.
LesZegoa, 426, 475, 494,
470.
Zeid*lbD*FerhouD , 23i .
Abou-Zeid, le hafside, 349,*^
280 e/mw,, 297, 344,342.
Zékérïa-lbn^ Yahya, 432.
Aboo-Zékérïa, le hafside, 4 49,
209.
Zekouan, 4(9.
Ez-Zelaïdji. 437.
Ibn^Zemroc, 442.
Beiii*Zecdek, 9.
Ibo-ez-Zerca, 90,
Ez-Zerdali, 306.
ZerAoïin, 33, 409^ 437.
Zerooc, 434. 438, 445, 448.
Ibo-Zerzer, 327. -\
Ztan-IbD-Abi*Elad, 99.
— Ibo-Mohammed, 40.
— Ibn-Mohammed-lbn-Abd-
eUCaouï, 464 .
— Ibn.Omar,227,228,423,
425.
— Ibn-Othman, 322.
— Ibn-Thabet, 462.
— Ibn-Abi-Yahya, 4. -
612
HIDKX DBS HOaS.
< 62, 386,387.
— » . Ibn-Abi-EinaD,
804.347.
Ibo- Abi - Ham-
mou , 455 ,
467,
— MeDdîl;90,IOO,
402, 409,
443, 449.
Abou-Zten-MohadiBied,! 43.
Ibs-Othmaii,
346.
Ztgaeo, 437.
Ztrî-Ibn^^Haaiinad, 442, 444.
^z*Zilotin, 493, 242.
Les Zoghba, 324.
Aulad-Zoghli, 226.
Ec-ZobeiMbn-Talba, 345.
Bx-Zolaïkbi, 437.
rm Dk l'index du toh QUÀTtiÈvi.
Pàgb 17, LteiVB
— 56, —
88, -
138, ajoQt^z
Itt,
146,
167,
18i,
197,
209,
ERRATA.
A Uplaaede :
26,
3,
Ibn^mar
el-Gabaili et ses
enfants.
Usez :
Omar,
le secrétaire EI-
CabaTli et leurs
enfants.
L'alenle pater-
nelle.
à la note Er-Bik-Rikcm peut signifier Henri
Requeeen'yH y avait une noble
famille de ce nom en Catalogne .
note, L'a'ieul paternel
231,
336,
337,
363,
389,
394,
405,
472,
498,
492,
495,
498,
501,
524,
536,
5;
note,
note,
id.
note i,
(signature)
M,
*^
u{(.
83,
^'
46,
32.
19,
20
12,
. 17,
Mazouma
Id.
EI-AbeUi
Recasa
Hammout
mokaouerfU
fahtélebofA
fahiébelm
Tenotio
rnsgu*aiux
Oudrar
Yahmor
queluue
vzir
Rabhon
l'hiérarchie
trouva
égyptiens
81 ron est
géoéalogues
supprimez le moi
ILhaliia rapporte
Mazouna.
Id.
Bl-Abbeli.
Rocasa.
Bammou.
mohaoueraU
fahtehbou.
Îdfttebe(o».
Tenorio.
jtttotf'aitx.
22.
OuAsar.
Yaghmor.
quejque.
vezir.
Rabhou.
la hiérarchie,
trouve,
égyptiennes .
est-on.
généalogistes,
beaucoup.
Khalll a rap^
porté .
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