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Full text of "Polybiblion : Revue bibliographique universelle"

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POLYBIBLION 


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REVUE 


BIBLIOGRAPHIQUE    UNIVERSELLE 


SAIMT-QUENTIN.   —   IMPftlMBRlB  JULES  MOUREAU 


POLYBIBLION 
REVUE 

BIBLIOGRAPHIQUE  UNIVERSELLE 

PARTIE  LITTÉRAIRE 


DEUXIÈME  aÉRlB.  —  XOHE  OEUXIËHK 

(quatosziëhe  de  la  collection.) 


PARIS 
AUX    BUREAUX    DU    POLYBIBLION 

35,  BDI  »  osmitLB,  35 

1875 


Û 


cVvr^/.  /fije^io 


Z-'X'  ^7  POLYBIBLION 

REVUE  BIBLIOGRAPHIQUE   UNIVERSELLE 


ROMANS,  CONTES  ET  NOUVELLES 

La  TenteUion  de  saint  Antoine^  par  Gustave  Flaubert.  Paris,  Charpentier,  1874.  In-8 
de  296p.  Prix:  7  fr.  50.  —  Àvrélia  ou  Ui  Juifs  ds  la  ports  Capins,  par  A.  QuiNTON. 
Noavelle  idition.  Paris^,  Letbielleux,  1875.  Iq-8  de  508  p.  Prix:  3    fr.  50.  —  Les 
Gladiatsurs^  roman  antiqne,  traduit  de  l'anglais  de  G.  J.  V^hytb-Melville.  par  Gh. 
Bbbnard-Derosnb.  Paris,  Hachette,  1875.  2  vol.  in-8  de  320  et  290  p.  Prix  :  2  Tr.  50 
les  deux  volumes.  —  L'Aventurs  d'uns  dms  en  peins^  par  Gilbert- Augustin  Thierry. 
Paris,  Didier.  1875.  In-8  de  538  p.  Prix  :  7  fr.  50.  —  Les  GentiUhammss  ds  laCuillsr, 
nar  Gbarlbs  Buet.  Paris,  bibliothèque  de  Saint-Michel,  1875.  In-18  j.,  de  384  p. 
Prix:  3    fr.  50.  ^  La  Conspiration  de  Saleèds^  par  Ernest  Billaudel.    Paris,  A. 
Ghio,  1875.  In-8  de  284  p.  Prix  :  3  fr.  —  I«  Pity  ds  Montehal,  par  Alfred  Assolant. 
Paris.  Dentn,  1875.  In- 18  j.,  de   368  p.   Prix:  3  fr.  —  L'As  ds  cœur,   par  P.  du 
BoiSGOBBY.  Paris,  Dentu,  1875.  2  vol.  m-18  j.,  de  342  et  331  p.  Prix:   6  fr.  -^ Ls9 
Mémoirss  ds  mon  oncls,  par  Ghables  d'Hébicault.    Paris,   Didier,    1875.   In-12   de 
350  p.  Prix  :    3  fr.  £0.    —  Lss   Mémoirss    d*uns    yétroleuss^   par   A.  TAbah.    Paris, 
Donmol,  1874.  In-18  de  250  p.  Prix  :  2  fr.  50.  —  la  Conquéts  ds  Plassans,  par  Emile 
Zola.  Paris,  Charpentier,  1874.  In-12  de  402  p.  Prix  :  3  fr.  50.  —  La  FauU  ds  l'abbé 
Mourst,  par  le  même.  Paris,  Charpentier,  1875.  In-12  de  428  p.  Prix:    3  fr.  50.  — 
JfiM  Aovf/,  par  VxCTOB   Cbbbbuliez.    Paris,    Hachette,    1875.  ln-18î..   de  360  p. 
Prix  :  3  fr.  50.  —  Droit  au  bul,  par  Amêdêb  Acbard.   Paris,  Michel   Lévy,  1875. 
In-18  j.,  de  372  p.  Prix  :  3   fr.  ^0.  —  la  Vis   ds  /eu,   par  AnaXs   SiGALAS.  Paris, 
Dentn,   1875.   In-18  j.,    de   336  p.    Prix:  3    fr.   -^  Ls   Mariags  ds  Thècls,  parM-« 
Matbildb  Bourdon.  Paris.  Lecoffre.  1875.  Iji-18  de  320  p.  Prix  :  3   fr.  50.  —  Une 
Femme  eaprieisuss,  par  M**  Bmiub  Garlbn,  traduit  du  suédois  par  Mlle  du  Puget. 
Paris,  Gamier,  1875.  2  vol.  in-12  de  424  et  428  p.  Prix  :  7  fr.   —  VHonnsur  ds  la 
famille,  par  M"*  Kbafft-Bugaille.  Paris,   Didier,  1875.    2    vol.    in-12    de   366  et 
390  p.  Prix:  6  fr.   —  ATonq^    Yallisr,  par  M»*  Gagne  (Elise  Moreau).  Paris,  Didier, 
1875.  In- 12  de  356  p.  Prix  :  3  f r.  —  Uns  Idylle  psndant  Is  siéffs,  par  François  Goppêb. 
Paris,   Lemerre.    1875.    In- 18  de    164  p.   Prix:  3  fr.  —    Rsnés,  par  M"*  Etienne 
Mabcel.  Paris,  Lecoffre,  1875.  In-18  de  292    p.    Prix  :  2  fr.   »  la  famills  Monval, 
par  Lucien  Dobville.  Paris,  Bray  &.  Retaux,  1875.  In-18  de  260  p.  Prix  :  2  fr.  — 
BlcMche^Nsigs,  par  M"**  Glaire  de  Chandbneux.  Paris,  Didier,  1875.  In-12  de  364  p. 
Prix:  3  fr.  —La  Main  ds  vslours,  par  Mlle  Gabrielle  d'Estbampes.  Paris,  Périsse, 
1875.  In-18  de  320  p.  Prix  :  3  fr.  —  Miss  Mortimsr,  traduit  de  1  anglais  par  E.  de 
Valubau.  Paris,  Hachette,  1875.  In-18  de  262  p.  Prix  :  1  fr.  25.   —  Maris,  histoire 
d*nne  jeune  fille,  traduit  du  danois,  par  LêouzonLe  Duc.  Paris,  K.   Nillson,  1875. 
In- 12  de  360p.  Prix:    3  fr.  —  Un  Mariags  français,  par   M"«    Jeneins.  traduit  de 
l'anglais  par  E.    W.    Paris.  Sandoz  &   Fischbaeher,  1875.  In-18  de  298  p.  Prix: 
3  fr.  50.  —  Ma    mers  et  moi,  par    Tauteur    de   John    Halifax,  trad.   de   ]*anglai8. 
Paris.  Sandoz  &  Fischbacher,  1875.  In-18  de  320  p.  Prix:  3  fr.  50.  —  HamoM,  par 
Ferdinand  Fabre.  Deuxième  édition.  Paris.  Dentu,  1875.  In-18  j.,  de  482  p.  Prix: 
3  fr.  50.   —  La    Ft<la- Komplre.  par  Paul  FÉ Val.   Paris,  Dentu,  1875.  In-18  j.,   de 
372  p.  Prix:  3   fr.   —  La  Fontaine  aux  perles,  par  LE  même.    Paris,   Dentn,  1875. 
In-18  j.,  de  374  p.  Prix:  3  fr.   —  JLa    Trssss  blonds,   par  Fortuné  du  BoiBGODBT. 
Paris,  Dentu,  1875.  In-18  j.,  de  446  p.  Prix  :  3  fr.  —  Un  Fruit  ds  lamsr  MorU,  par 
M.  E.   Bbaddon,  trad.  de  l'anglais  par  Gh.  Bebnabd  Dbbosns.    Paris,  Hachette, 
1875.  2  vol.  in-18  de  282  et  289  p.  Prix:  2  fr.  50  les 2  vol.  —  Ls  Jsuns  Brown,  par 
Gbenvillb  Mubbay,  trad.  deranglais,  par*J.  Butlbb.  Paris,  Hachette,  1873.  2  vol. 
in-18  j.,  de  238  et  252  p.  Prix  :  2  fr.  50  les  2  vol.  ~  Faleyrae,  par   Jules  Stsbg. 
Paris.  Sandoz  &  Fischbacher,    1875.  In-18  de    273  p.  Prix:    3    fr.    —  Uns  Fsmms 
gênants,  par  Gustave  Droz.  Paris,  Hetzel,  1875.   In- 18  de  260  p.   Prix:    3  fr.  —  Ls 
Ckancsllor,  par  JuLBS  Yebne.  Paris,  Hetzel,   1875.    In- 16  de  314   p.  Prix:  3  fr.    — 
Histoirssde  pstite  vUU,  par  Gbarles   Deuun.    Paris,    Dentu,    1875.  In-18  de  320  p. 
Prix  :  3  fr.  50.  —  Le  Bal  du  diabU,  par  Charles  Narrev.  Paris,  Michel  Lévy,  1874. 
In-t8  j..  de  210  p.  Prix  :  3  fr.  50.  —  Lss  Contss  eomtadins,  par  HidRY  de  la  Made- 
leine. Paris,  Charpentier,  1d74.    In- 12  de  296  p.    Prix:   3  fr.  50.  —  Ie«   Amss  sn 


ptine,  par  Xavier  Marmibr-  Noavelle  édition.  Paris,  Hachette,  1875.  In-18  j.,  de 
386p.  Prix:  3  fr.  50.  —  Aventure»  extraordinaire»  d'un  homme  et  de  trois  femme», 
par  le  prince  J.  Lubouirski.  Paris,  Dentu,  1874.  In-18  j.,  de  286  p.  Prix:  3  fr.  • 
Le  Médaiflonf  par  Emile  Daclik .  Paris,  librairie  de  la  Société  des  gens  de  lettres. 
In-32  de  180  p.  Prix:  0,75  c.  —  Une  Muse,  par  Alfred  Bonsbrgbnt.  Paris,  £. 
Lachaud,  1875.  In-32  de  212  p.    Prix  :  3  fr.  —  Cinq  nouvelle» ,  par  le  même.   Paris, 

E.  Lachaud,  1875.    In-32  de   192  p.  Prix:  3  fr.  —   La  Chambre  aux   histoire»,    par 

F.  FertiàDlt.  Paris,  Didier,  1875.  In-12  de  383  p.  Prix  :  3  fr.  —  L'Antre  des 
tnyitér»,  par  Henry  Ballacey.  Paris,  Ch.  Blériot,  1874.  In-18  de  376  p.  Prix:  3  fr, 
—  Marie  Chas»aing,  par  Adolphe  Badin.  Paris,  Hetzel,  1874.  In-18  de  336  p.  Prix  : 
3  fr.  —  Les  Chasseurs  excentriques ,  par  G.  d^Amezbuil.  Paris,  Dentu,  1875.  In-18  j., 
de  300  p.  Prix  :  3  fr.  —  Souvenirs  d'une  Co»aque^  par  Robbrt  Franz,  Paris,  Lacroix, 
1874.  Iq-18  de  280  p.  Prix  :  3  fr.  50.  —  Souvenir» d'un piani»te.  Paris,  Lachand,  1874. 
In-18  de  253  p.  Prix  ;  3  fr.  50. 

Qu^est-ce  que  la  Tentation  de  saint  Antoine  ?  Un  roman  ?  Le  scénario 
d'une  revue-féérie  ?  Une  satire  ?  Une  parodie  ?  Un  mystère  ?  Une  mys- 
tification? Ce  n'est  ni  spécialement  ceci ,  ni  spécialement  cela  ;  mais 
c'est  un  peu  tout  cela.  M.  Flaubert,  irrespectueux  comme  tout  libre- 
penseur,  joue  aux  marionnettes  avec  les  dieux  de  la  Grèce,  de  Rome, 
de  la  Chaldée ,  de  l'Egypte,  de  la  Perse,  de  Ninive,  de  Babylone  et 
de  l'Inde.  Toutes  les  mythologies,  sauf  pourtant  la  mythologie  Scandi- 
nave, défilent ,  ombres  chinoises  de  rhallucination,  devant  le  saint 
ermite  de  la  Thébaïde.  Antoine  est  assis,  le  soir,  sur  le  seuil  de  sa 
cabane.  Il  se  sent  las,  fatigué,  plein  d'ennui,  agité  de  regrets  et  de 
rêves  confus,  qui  bientôt  prennent  une  forme  sensible  et  se  multiplient 
autour  de  lui  en  myriades  de  visions  plus  ou  moins  saugrenues,  pen- 
dant la  nuit  entière.  C'est  d'abord  la  tentation  de  l'orgueil.  Antoine  se 
croit  à  Alexandrie,  revêtu  des  hautes  fonctions  de  patriarche.  Puis, 
viennent  les  tentations  de  la  chair,  et  c'est  la  reine  de  Saba  qui,  dans 
un  costume  exceptionnellement  étrange  et  dans  un  langage  plus 
étrange  encore,  essaye  de  séduire  le  pauvre  ermite.  Ensuite,  —  tenta- 
tions de  l'esprit, — commence  toute  une  série  d'apparitions  symboliques  : 
les  religions,  les  philosophies,  les  syncrétismes,  les  forces  de  lanature, 
la  science,  la  matière.  Nous  voyons  surgir  les  Gelludes,  les  Stryges, 
les  Empuses,  Erichtonius  aux  jambes  molles  ,  Triopas  aux  trois  orbi- 
tes, les  innombrables  Œsars  de  l'Étrurie.Le  décor  change,  la  baguette 
du  magicien  nous  amène  les  sept  péchés  capitaux,  les  sectaires  de  tous 
les  pays,  les  hérésiarques  de  tous  les  cultes,  les  commentateurs, 
les  contradicteurs,  les  sophistes  de  toute  langue,  Manès,  Basilide, 
Yalentin,  Simon  le  Magicien,  Marcion,  Arius,  Montanus,  Priscilla, 
AppoUonius  de  Thyane.  J'en  passe  et  des  pires.  Il  n'y  a  pas  dans  Y  Iliade 
de  pareils  dénombrements.  Aux  philosophies,  succèdent  les  animaux 
fantastiques,  le  Sphinx,  la  Chimère,  la  Licorne,  les  Blemmyes,  les 
Pygmées,  les  Sciapodes,  le  Sadhuzag  (?),  le  basilic  et  la  belette  Pas- 
tinacca  dont  l'odeur  tue  les  arbres.  On  dirait  la  fameuse  nuit  du  Wal- 
purgis  décrite  par  Goethe  dans  Faust.  Le  cauchemar  se  termine  par 
des  professions  de  foi  matérialistes,   naturalistes,    panthéistiques. 


—  7  — 

Obsédé  par  SOI  visions»  saint  Antoine  s'éorie  stupidement:  •  Je  voudrais 
être  la  matière  I  »  Alors  le  jour  parait.  Tout  au  milieu  du  ciel  et  dans 
le  disque  du  soleil,  rayonne  la  faoe  de  Jésus-Christ.  Antoine  fait  le 
signe  de  la  croix  et  se  remet  en  prières.  Qu'est-ce  à  dire  ?  M.  Gus- 
tave Flaubert  aurait-il  voulu,  fermant  son  livre,  exprimer  le  triomphe 
de  la  foi  dans  l'âme  de  saint  Antoine  ?  Tel  n'est  pas  notre  avis.  D'une 
lecture  attentive  de  Touvrage,  il  résulte  pour  nous  ceci  :  que  Fauteur 
de  la  Jen^o/ion  a  voulu  plutôt  peindre  Yidiotisme  de  la  croyance  retom- 
bant sur  elle-même  malgré  les  données  scientifiques.  Si  M.  Flaubert 
avait  tenu  à  donner  à  son  œuvre  une  teinte  chrétienne,  il  n'avait  qu'à 
armer  son  ermite  du  signe  de  la  croix  à  chaque  tentation.  Au  con- 
traire !  nous  avons  à  faire  ici  à  un  lâche  cénobite  qui  gémit,  qui  se 
lamente^  qui  s'abandonne.  On  commence  par  le  plaindre,  on  finit  par  le 
trouver  grotesque.  £n  résumé,  l'idée  générale  qui  se  dégage  du 
livre  de  M.  Flaubert,  c'est  que  toutes  les  religions  sont  indifiérentes, 
qu'elles  laissent  matière  au  doute  et  que  le  christianisme  n'est  qu'une 
étape  de  l'évolution  de  l'humanité.  La  Tentation  de  iaint  Antoine  est 
une  énigme  agaçante  à  la  confection  de  laquelle  ont  concouru  les  dic- 
tionnaires de  mythologie,  la  Bibliothèque  orientale  de  d'Herbelot,  les 
Bestiaires  du  moyen  ige,  le  Spéculum  majus  de  Vincent  de  Beauvais, 
l'Histoire  des  Religions'^  le  Monde  enchanté  de  Ferdinand  Denis,  Millier, 
Greuzer,  Gœrres,  les  Righs-Vedas,  l'Apocalypse,  Dupuis,  Strauss, 
Renan,  Schopenhauer,  les  Livres  apocryphes  et...  Pigault -Lebrun. 
C'est  d'une  érudition  étonnante,  mais  toute  de  surface.  Au  surplus,  les 
anachronismes  y  abondent.  M.  Flaubert  donne  pour  maître  à  saint 
Antoine  le  bon  vieillard  Didyme,  né  soixante  ans  après  l'ermite.  Il  est 
vrai  qu'il  ne  faut  pas  se  montrer  trop  difficile,  quand  on  voit  le  Boudha 
venir  faire  tranquillement  la  causette  avec  un  ami  de  saint  Athanase. 
Ces  réserves  de  doctrines  établies,  il  ne  nous  en  coûte  pas  de  con- 
venir qu'il  y  a  dans  la  Tentation  de  saint  Antoine  des  pages  resplendis- 
santes. Nous  citerons  notamment  la  vue  d'Alexandrie  &  vol  d'oiseau, 
le  tableau  des  jeux  du  Cirque,  le  défilé  des  dieux  indiens,  le  pano- 
rama de  l'Olympe,  l'arrivée  de  la  reine  de  Saba  en  Thébaïde  et  la  des- 
cription du  bouclier  de  Djan-ben-Djian.  Eugène  Delacroix  et  Fro- 
mentin n'auraient  pas  peint  certaines  scènes  orientales  avec  une  telle 
vérité  et  une  si  puissante  intensité  de  couleurs.  Mais,  pourquoi  donc 
M.  Flaubert,  lui  si  minutieux,  a-t-il  oublié  l'inséparable  et  légendaire 

compagnon  de  saint  Antoine  ? A  moins  qu'il  ne  l'ait  incarné  dans 

le  triste  et  fatal  Hilarion,  personnification  de  la  science  !  S'il  en  était 
ainsi,  M.  Flaubert  aurait  fait  une  allégorie  profonde  et  vraie.  La 
science  sans  Dieu  ravale  l'homme  et  le  met  au  rang  des  brutes.  Telle 
n'a  pas  été^  à  coup  sûr,  son  intention.  Aussi  maintenons-nous  toutes 
nos  critiques. 


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—  Avec  Aurélia  ou  les  Juifs  de  laporte  Capène^  de  M.  Qainton,  nous 
quittons  le  roman  visionnaire  pour  aborder  le  véritable  roman  histo- 
rique. L'œuvre  de  M.  Quinton  est  antérieure  à  un  ouvrage  avec  lequel 
elle  n'est  pas  sans  analogie  ;  nous  voulons  parler  de  Fabiola,  de 
Mgr  Wiseman.  Mais  le.  but  est  le  même  :  peindre,  sous  la  forme  drama- 
tique d'un  récit,  les  temps  primitifs  du  christianisme.  M.  Quinton^  dans 
l'édition  considérablement  augmentée  qu'il  nous  donne  û* Aurélia^  nous 
parait  avoir  parfaitement  réussi  dans  un  genre  qui  n'est  pas  sans  diffi- 
cultés. Il  a  très-bien  exposé  les  défauts  et  les  vices  du  monde  qui 
croule,  les  vertus  et  les  énergies  du  monde  qui  s'édifie.  De  ces  anti- 
thèses naturelles  naissent  les  situations  les  plus  pathétiques.  Aurélia 
Flavia  Domitilla,  noble  patricienne  de  Rome,  petite  nièce  de  Yespa- 
sien,  est  convertie  au  christianisme  par  son  humble  esclave  Cécilia. 
Avec  Aurélia,  reçoivent  aussi  le  baptême  le  vespilion  Gurgès  et  Cor- 
nélia,  la  Vestale  Maxime,  celle-là  même  qui  avait  été  condamnée  à  être 
enterrée  vive  pour  avoir  violé  ses  vœux  de  chasteté,  et  que  les  chré- 
tiens sauvèrent  de  la  fureur  des  flamines.  M.  Qainton  a  tiré  un  heu- 
reux parti  de  la  légende  de  sainte  Pétronille,  fille  de  saint  Pierre  au 
dire  de  certains  hagiographes.  Il  jr  a^  dans  son  livre^  des  notions  fort 
curieuses  sur  le  droit  romain  ;  il  j  a  aussi  des  annotations  fort 
savantes,  trop  savantes  même  dans  l'espèce.  Pareillement,  nous  blâme- 
rons l'auteur  d'avoir  donné  le  beau  nom  de  Régulus  à  un  délateur, 
à  un  accusateur  public,  à  un  vil  espion  ;  Régulus,  dont  le  nom  est 
synonyme  d'héroïsme  !  A  cela  près,  Aurélia  est  un  excellent  livre. 
Il  va  sans  dire  qu'il  n'est  pas  ici  question  des  juifs.  Les  juifs  de  laporte 
Capène  sont  tout  simplement  les  chrétiens,  confondus  d'abord  par  les 
Romains  avec  les  fils  de  Moïse. 

— Au  même  ordre  d'idées  que  le  roman  de  M.  Quinton  appartiennent 
les  Gladiateurs  de  C.-J.  Whyte-Mel ville,  avec  cette  différence  pourtant 
que,  dans  Aurélia^  l'inspiration  chrétienne  domine  toutes  les  pages, 
tandis  qu«,  dans  les  Gladiateurs ^  elle  surgit  accessoirement.  C'est  une 
œuvre  qui  se  rapproche  beaucoup  de  Y  Epicurien  de  Thomas  Moore  et 
du  Dernier  jour  de  Pompeî  de  Lytton  Bulwer,  quoique  beaucoup  plus 
mouvementée  et  beaucoup  plus  dramatique,  principalement  dans  les 
scènes  de  la  prise  et  de  la  destruction  de  Jérusalem  qui  forment  le 
dénoûment  de  l'ouvrage.  Le  héros  est  un  Celte,  un  esclave  breton, 
Esca;  sa  force  est  herculéenne  et  il  la  met  au  service  de  la  justice^  ce 
qui  le  rend  très-populaire  parmi  les  dames  romaines.  Son  maître 
orgueilleux  le  fait  descendre  dans  l'arène  pour  lutter  avec  des  gladia- 
teurs de  la  Pannonie.  Inutile  de  dire  que  ces  luttes  sont  décrites  con 
amore  par  M.  Whyte-Melville.  On  n'est  pas  pour  rien  du  pays  de  la 
boxe.  Toutefois,  l'admiration  que  professe  le  romancier  pour  la  force 
physique  ne  luiôte  nullement  le  sens  de  la  spiritualité.  Les  Gladiateurs 


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8ont  précédés  d'une  i^emarquable  préface,  écrite  pour  une  édition  anté- 
rieure par  Théophile  Gautier. 

—  Des  premiers  temps  du  christianisme,  sautons  sans  transition 
jusqu'à  la  fin  du  seizième  siècle,  et  [nous  nous  trouverons  en  face  de 
VAveniure  (Fvne  âme  en  peine,  de  M.  Gilbert-Augustin  Thierry.  Plu- 
sieurs organes  de  publicité,  parmi  ceux  qui  se  piquent  de  respect 
pour  les  choses  respectables,  ont  fait  de  ce  roman  de  grands  éloges. 
Cela  prouve  que  les  critiques  auxquels  nous  faisons  allusion  ne  l'ont 
pas  lu,  ou  qu'ils  sont,  dans  le  cas  contraire,  bien  inconséquents  avec 
leurs  principes.  En  effet,  l'Aventure  dune  âme  en  peine  n'est  pas  une 
œuvre  vulgaire  ;  mais,  au  point  de  vue  de  la  vérité  historique  et  des 
tendances  générales,  c'est  un  mauvais  livre.  M.  Gilbert-Augustin 
Thierry  a  tenté  de  faire  le  portrait  du  passé,  et  il  n'en  a  donné  que 
la  caricature.  Pas  un  de  ses  personnages  n'est  sympathique.  Tous 
sont  dominés  par  la  haine  ou  par  l'ambition,  par  la  vengeance  ou  la 
dépravation.  Actéon  le  Mauldict  de  Martincourt  descend  d'un  tem- 
plier qui  a  jadis,  au  moyen  âge,  séduit  une  religieuse.  Il  porte  sur  son 
épaule  gauche  la  griffe  de  Belzebuth,  ce  que  les  sorciers  appellent  la 
Martinette.  D'abord  abbé  galant  à  la  cour  de  France^  Actéon  devient 
ensuite  grand-vicaire  du  diocèse  de  Langres.  Là,  il  se  conduit  en 
véritable  inquisiteur  et  tyrannise  le  a  bas  clergé,  »  tout  en  se  livrant 
secrètement  aux  horribles  pratiques  de  la  magie  noire.  Son  rêve  est 
de  devenir  évêque  ;  mais  le  roi  lui  tient  rigueur  pour  certaines  fre- 
daines. Actéon,  désespéré,  entre  dans  l'ordre  des  jésuites.  Une  tarde 
pas  à  être  nommé  provincial  de  Dijon.  Là,  il  attire  à  lui  le  fils  d'un 
de  ses  fermiers,  Pierre  Maréchal,  de  la  même  famille  que  la  religieuse 
débauchée  par  le  templier.  Il  l'endoctrine,  le  fanatise  et  le  pousse 
secrètement  au  régicide.  Le  Parlement  de  Dijon  instruit  l'affaire; 
Pierre  Maréchal,  convaincu  de  tentative  d'assassinat  sur  la  personne 
d'Henri  III,  est  condamné  à  mort  ;  Actéon,  grâce  à  des  artifices  dia- 
boliques, sort  indemne  de  ce  mauvais  pas,  mais  il  est  tué,  la  nuit, 
d'un  coup  de  poignard,  dans  une  rue  de  Dijon,  par  Jacques  le  Lyon, 
un  ancien  curé  que  le  Mauldict  avait  fait  bâtonner,  alors  qu'il  était 
grand-vicaire  de  Langres.  Tel  est,  en  deux  mots,  le  roman  de  M.  Gil- 
bert-Augustin Thierry.  Dans  sa  préface,  l'auteur  déclare  vouloir  prou- 
ver que  le  passé  ne  valait  pas  le  présent.  Circonscrite  dans  les  limites 
du  vrai,  la  thèse  était  soutenable.  Seulement,  il  ne  fallait  pas  tomber 
dans  l'exception  ;  il  ne  fallait  pas  conclure  du  particulier  au  général  ; 
il  ne  fallait  pas  s'autoriser  de  crimes  exceptionnels  commis  par  quel- 
ques prêtres  et  quelques  magistrats  pour  s'écrier  triomphalement  : 
((  Tels  étaient  les  prêtres  et  les  magistrats  vers  la  fin  du  seizième 
siècle  I  »  Procéder  ainsi,  c'est  à  la  fois  mentir  sciemment  au  bon  sens 
et  à  l'histoire.  C'est  pourtant  ce  que  fait  M.  Gilbert-Augustin  Thierry, 
ne  voyant,  dans  les  magistrats  de  cette  époque,  que  des  juges  sans 


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conscience  ou  des  robins  ridicules,  et  dans  les  prêtres  et  les  jésuites 
qtie  ce  que  l'on  appelle  aujourd'hui,  dans  un  sens  méprisant,  le  jésui- 
tisme. Qu'on  ne  m'objecte  pas  que  l'auteur  s'est  seulement  borné  à 
peindre  et  àraconter,  et  qu'il  n'a  pas  jugé.  C'est  une  erreur  profonde, 
et  j'en  donne  comme  preuves  les  quolibets  qu'il  lance  à  chaque  instant 
contre  les  a  gros  bénéfices,»  les  «riches  prébendes,  d  la  «céleste 
rosée,»  la  «  casuistique  jésuitique,  »  la  «délation  ecclésiastique,  »  la 
«  compression  des  consciences,  »  etc.,  etc.  C'est  du  Michelet  mis  en 
roman.  Et  nous  le  regrettons,  car  il  y  a  une  grande  puissance  de  con- 
ception et  une  véritable  originalité  de  style  dans  l'Aventure  cTutie  âme 
en  peine:  Mais,  en  faisant  d'une  œuvre  d'imagination  un  pamphlet 
haineux  et  passionné  contre  le  clergé  et  la  magistrature,  M.  Gilbert- 
Augustin  Thierry,  fils  d'Amédée  Thierry  et  neveu  d'Augustin,  a  failli 
historiquement  au  beau  nom  qu'il  porte. 

—  M.  Charles  Buet,  lui,  n'a  ni  la  généalogie,  ni  peut-être  le  talent 
de  M.  Gilbert- Augustin  Thierry  ;  mais  il  a  quelque  chose  de  mieux,  à 
notre  avis  :  il  a  le  respect  de  la  vérité.  M.  Buet  a  pris  pour  devise 
de  ses  Gentilshommes  de  la  Cuiller  ces  trois  mots  :  In  fide  veriias  I  et  il 
y  est  resté  constamment  fidèle.  Les  anciennes  chroniques  donnent  le 
nom  de  Gentilshommes  de  la  Cuiller  à  une  association  de  seigneurs 
catholiques  de  la  Savoie,  armés  pour  combattre  la  rébellion  des  Gene- 
vois contre  leur  prince-évéque  et  les  doctrines  des  hérésiarques  dont 
Genève  était  le  foyer.  Née  au  milieu  d'un  festin,  l'association  prit 
une  cuiller  pour  symbole.  Ce  sont  les  aventures  de  ces  gentilshommes 
qui  font  le  sujet  du  roman  de  M.  Charles  Buet.  Les  deux  principes 
en  lutte  s'incarnent  dans  les  Falichet,  protestants,  et  dans  les  Mau- 
drants,  catholiques.  Les  Falichet  sont  peints  sous  de  noires  couleurs , 
un  peu  trop  noires  même.  L'auteur  s'en  excuse  en  disant  que  les 
protestants  du  seizième  siècle  étaient  les  révolutionnaires  d'alors.  Les 
Falichet  sont  naturellement  l'antithèse.  Il  faut  donc  écarter  ici  le 
côté  personnel  qui  serait  blâmable.  Nous  sommes  uniquement  en  pré- 
sence de  deux  drapeaux.  Il  y  a  dans  les  Gentilshommes  de  la  Cuiller  des 
types  vigoureusement  brossés,  tels  que  ceux  de  Pontverre,  de  Beau- 
fort,  de  Bonnivard.  Le  récit  pécherait,  à  ce  propos,  par  trop  d'austé- 
rité, si  les  chastes  amours  de  Claude  de  Champier  et  de  Claire  Mau- 
drant  ne  venaient  jeter  leur  note  émue  et  tendre  sur  ces  scènes  de 
combats  et  de  trahisons,  de  défaites  et  de  triomphes,  do  crimes  et  d'hé- 
roïsme. M.  Buet  a  fait  aussi  revivre  avec  un  rare  bonheur  la  sympa- 
thique figure  de  Symphorien  de  Champier,  historien  et  médecin  célèbre 
(le  mire  lyonnais,  comme  on  disait  do  son  temps),  auteur  de  la  Chro- 
nique de  •Sât;o{e.—- Une  bibliographie  des  ouvrages  consultés  termine  le 
volume.  Excellente  innovation. 

—  Par  exemple,  nous  voudrions  bien  savoir  à  quelle  source  sérieuse 


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M.  Ernest  Billaudel  a  puisé  cette  étrange  assertion  que  Don  Juan 
d'Autriche  a  été  empoisonné  par  Catherine  de  Médicis.  Catherine  a 
bien  assez  de  péchés  réels  sur  la  conscience  sans  lui  en  attribuer  d'ima- 
ginaires. Au  dire  de  M.  Billaudel,  le  duc  d'Alençon,  frère  de  Henri  III, 
serait  également  mort  des  suites  d'un  poison  lent,  tandis  ^qu'il  est 
aujourd'hui  prouvé  que  ce  prince  est  mort  phthisique.  De  grâce,  mes- 
sieurs les  romanciers,  si  vous  avez  besoin  de  l'histoire,  ne  la  traitez 
pas  au  moins  comme  une  gourgandine  I  C'est  ainsi  malheureuse- 
ment qu'agit  à  son  égard  Fauteur  de  la  Cotispiration  de  Salcède.  Sal- 
cède  est  un  gentilhomme  espagnol,  dont  Henri  III  (toujours  au  dire 
de  M.  Billaudel)  aurait  fait  tuer  le  père.  Pour  venger  cet  af  ront, 
Salcède  s'unit  aux  Guises  et  tente  d'assassiner  le  roi  dans  l'église 
Saint- Se  vérin.  Il  est  pris  et  pendu  en  place  de  Grève.  La  conspiration, 
dont  les  Guises  sont  l'âme  et  Salcède  le  bras,  seramiûe  avec  la  révolte 
des  Pajs-Bas  contre  l'Espagne.  Ce  qui  permet  à  M.  Billaudel  démettre 
sur  son  échiquier  romanesque,  ceux-ci  dans  un  rôle  odieux,  ceux-là 
sous  un  jour  briUant  et  sympathique,  les  Valois,  les  Guise,  le  duc  de 
Parme,  Guillaume  d'Orange,  Henrj  de  Navarre,  et  plusieurs  des 
grandes  têtes  de  la  féodalité  de  la  fin  du  seizième  siècle,  que  Riche- 
lieu, vingt  ans  plus  tard,  devait  abattre. 

— Une  les  abattit  pourtant  pas  toutes,  le  terrible  justicier!  car,  encore 
sous  Louis  XIV,  on  en  voit  reparaître  quelques-unes,  sinon  à  Versailles, 
du  moins  dans  les  provinces.  Qu'est-ce,  en  efiet^  que  ce  Timoléon  de 
Montchal  dont  M.  Alfred  Assolant  nous  raconte  les  étranges  aventures, 
sinon  un  baron  féodal  dans  toute  la  force  du  terme  ?  Enfermé  dans  ses 
forteresses  que  défendent  les  eaux  du  lac  Pavin  et  les  basaltes  de  l'Au- 
vergne, le  marquis  de  Montchal  se  débarrasse  de  sa  femme,  enlève  celle 
d'un  drapier  de  Clermont,  qu'il  a  fait  occire  par  ses  routiers  et  les 
sacripants  qui  sont  à  sa  solde,  se  moque  du  Parlement,  retient  pri- 
sonnier chez  lui  le  procureur  général  Talon,  brave  le  Roi,  vilipende  la 
justice,  soutient  des  sièges  en  règle  avec  la  maréchaussée,  et,  finale- 
ment, tombe  frappé  d'une  balle  au  moment  où  il  allait  se  battre  en 
duel  avec  le  chevalier  Armand  de  Vassivière.  Le  meurtrier  était  Gail- 
lard, le  drapier  de  Clermont,  qui  n'avait  pas  péri  sous  les  coups  des 
estafiers  de  Montchal  et  qui  se  vengeait.  M.  Alfred  Assolant  a  amoncelé 
sur  la  tête  de  son  terrible  marquis  les  crimes,  assassinats,  vols,  rapts, 
enlèvements,  concussions  et  usurpations  de  l'autorité  rojale  dont 
s'étaient  rendus  coupables  quelques  gentilshommes  du  centre  de 
la  France,  ce  qui  nécesssita  la  réunion  à  Clermont  des  Grands 
Jours  d'Auvergne.  Mais  nous  croyons  que  l'auteur  àuPui/de  Montchal 
a  dépassé  le  but.  Son  marquis,  descendant  de  l'Arverne  Verciqgé- 
torix  et  du  patrice  Mummol,  est  invraisemblable.  M.  Assolant^ 
malgré  tout  son  talent,  montre  trop  le  bout  de  l'oreille  de  certains 


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préjugés  modernes  et  donne,  dans  tous  les  cas,  une  fausse  idée  de  la 
justice  parlementaire. 

— De  Louis  XIV  à  la  Régence  la  distance  n'est  pas  longue.  Franchis- 
sons-la. UAs  de  ccBur  de  M.  du  Boisgobej  nous  sert  de  béquille.  Lft 
conception  de  VAs  de  cœur^  œuvre  à  prétentions  historiques,  est  loin 
d'être  irréprochable.  Le  comte  de  fforn,  un  personnage  qui  semblait 
devoir  dominer  l'action,  s'efface  dès  les  premières  scènes  pour  faire 
place  au  colonel  La  Jonquière.  Cet  aventurier  a  repris  la  suite  de  la 
conspiration  de  Cellamare  et  veut  enlever  le  Régent.  Entouré  de 
séides  sans  scrupule,  mais  d'une  audace  à  toute  épreuve,  La  Jonquière 
déploie  une  habilité  étonnante  dans  ses  combinaisons.  Le  principal 
rendez-vous  des  conspirateurs  est  dans  cette  fameuse  rue  Quincam- 
poix  où  la  compagnie  du  Mississipi  distribuait  ses  précieux  coupons. 
Aux  épisodes  de  la  conspiration,  se  mêle  une  histoire  d'amour  entre 
le  chevalier  de  Terne  et  Violette,  la  fille  adultérine  du  comte  de 
Horn.  A  côté  de  cette  Violette  qui  a  dans  les  veines  du  sang  corrompu 
de  son  père,  Fauteur  a  placé  une  figure  héroïque  et  sublime,  Oudule, 
la  fille  de  Texempt  Lafaille,  qui  sauve  le  chevalier  de  Terne,  qui  se 
sacrifie  et  qui  meurt  de  son  dévouement,  sans  trahir  le  secret  de  son 
âme.  C'est  une  admirable  création.  L'As  de  cœur  n'est  autre  que  le 
financier  Law.  Il  traverse,  impassible,  tous  ces  drames.  Il  y  a  dans  le 
livre  de  M.  du  Boisgobej  quelques  détails  un  peu  risques  (nous  sommes 
sous  la  Régence).  Toutefois  les  pages  trop  lestes  se  sauvent  par  la 
gaité  qui  les  anime.  Nous  n'approuvons  ni  l'un  ni  l'autre  ;  mais  mieux 
vaut  encore  le  livre  qui  fait  rire,  que  celui  qui  fait  réfléchir  et  travailler 
les  imaginations  innocentes. 

— L'idéal,  dans  le  roman,  est  d'amuser, d'intéresser  et  d'instruire,  sans 
provoquer  la  moindre  pensée  boiteuse.  M.  Charles  d'Héricault  remplit 
ces  diverses  conditions  dans  les  Mémoires  de  mon  oncle,  Un  Paysan  de 
l'ancien  régime  et  Un  Bachelier  de  Sorbonne,  L'oncle  qui  raconte  ses 
mémoires  est  Claude  François  de  Ricault  de  Lignières,  curé  de 
Zotinghcm,  au  diocèse  de  Boulogne.  Ces  mémoires  nous  font  assister  à 
la  vie  digne,  simple,  bienfaisante  d'un  curé  de  province  avant  la  Révo- 
lution. Le  brave  curé  de  Zotinghem  ne  lisait  pas  les  gazettes  :  il 
n'en  était  pas  plus  malheureux  pour  cela,  et  il  n'en  resta  pas  moins 
fidèle  quand  vint  93.  Dans  l/n  Paysan  de  V ancien  régime,  M.  d'Héricault 
nous  initie,  avec  un  style  des  plus  pittoresques,  aux  mœurs  de  l'homme 
des  champs  avant  ce  qu'on  a  appelé  son  émancipation.  Dans  le  Backe^ 
lier  de  Sorbonne,  il  ressuscite  l'originale  figure  de  l'abbé  d'Escaut,  le 
dernier  des  abbés  lettrés  du  dix-huitième  siècle.  Il  y  a  dans  cette 
étude  des  détails  charmants,  celui-ci,  entre  autres  :  «  Quand  l'abbé 
d'Escaut  soutint  sa  Sorbonique,  il  répondit  :  Pindare,  à  ceux  qui  lui 
parlaient  tolérance  ecclésiastique^   et  il  fut  reçu  tout  de  même,  d 


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M.  d'Héricault  a  dédié  son  intéressant  volume  à  ce  Jean  de  Falaise 
(le  marquis  Philippe  de  Chenevières)  dont  les  Contes  vivants  et  francs 
ont  si  bien  fait  connaître  la  Normandie. 

—  Avec  les  Mémoires  d'une  pétroleuse^  il  ne  faut  pas  parler  de  la  vie 
provinciale,  calme  et  sereine.  C'est  la  vie  parisienne,  agitée,  fiévreuse, 
infernale.  La  pétroleuse  a  nom  Jeanne  Lorin.  Sa  mère  morte,  Jeanne 
a  été  livrée  par  son  père*,  ouvrier  brutal  et  ivrogne,  à  une  misérable 
créature  qui  l'a  fait  mendier  sur  les  trottoirs.  On  devine  ce  qui  peut 
sortir  d'une  telle  éducation.  Jeanne  descend  un  à  un  tous  les  échelons 
du  vice  et  devient  une  fille  perdue.  La  Commune  arrive.  Elle  s'enrôle 
dans  les  bataillons  fédérés,  fait  le  coup  de  feu  contre  l'armée  de  Ver- 
sailles, tue  sa  propre  sœur  Claire  (jadis  recueillie  par  des  religieuses, 
et  maintenant  religieuse  elle-même),  répand  le  pétrole  sur  les  monu- 
ments, est  prise  dans  l'abominable  opération  et  se  voit  condamnée  à 
une  réclusion  perpétuelle.  Claire  en  mourant  a  pardonné  à  Jeanne.  Ce 
pardon  fait  réfiéchir  la  pétroleuse  ;  elle  se  convertit,  écrit  ses 
mémoires,  et  je  vous  assure  qu'elle  ne  met  pas  de  gants  pour  dire  leur 
fait  aux  fusilleurs  d'otages  et  aux  brûleurs  de  bibliothèques.  —  Livre 
à  répandre  surtout  parmi  le  peuple. 

— ^  Nous  en  avons  fini  avec  les  romans  historiques.  Passons  aux 
romans  psychologiques,  aux  romans  d'observation,  autrement  dit  aux 
romans  de  mœurs,  lesquels  manquent  très-souvent  de  moralité.  Voici, 
d'abord,  dans  cette  catégorie,  la  Conquête  de  Plassans  et  la  Faute  de 
fabbé  Mourety  de  M.  Emile  Zola.  La  note  dominante  de  ces  deux 
ouvrages  est  la  haine  du  prêtre  et  du  catholicisme.  Dans  la  Conquête  de 
Plassans,  nous  rencontrons  un  certain  abbé  Faujas,  qui,  sous  des 
dehors  austères  et  humbles^  nourrit  un  orgueil  et  une  ambition  effrénés. 
L'auteur  l'envoie  méchamment  à  Plassans  pour  faire,  contre  la  pers- 
pective d'un  évéché,  la  conquête  de  cette  ville  au  profit...  devinez  de 
qui?  de  l'Empire.  Ce  serait  grotesque,  si  ce  n'était  odieux.  Faujas^ 
dans  ces  conditions,  sauvegarde  les  apparences^  mais  il  marche  à  son 
butper  fas  et  nefas.  Il  tue  en  lui  le  remords,  comme  Macbeth  avait 
tué  le  sonmieil.  Il  se  sert  de  tout  et  brise  tout  ce  qui  lui  fait  obstacle, 
notamment  Marthe  Mouret,  que  M.  Zola,  obéissant  à  son  fanatisme 
matérialiste  et  antireligieux,  nous  présente  comme  une  sorte  de 
M"*  Bovary  mystique  qui  arrive  à  la  dévotion  par  l'hystérisme. 
Les  autres  personnages  essentiels  du  roman  ne  valent  guère  mieux. 
François  Mouret  est  une  espèca  d'abruti  qui  crie  bêtement  contre  les 
prêtres — quand  ils  ne  l'entendent  pas,  -—et  qui  devient  fou.  Tronche  et 
sa  femme,  Olympe,  les  parents  de  l'abbé  Faujas,  sont  tout  uniment 
des  êtres  ignobles.  Quant  à  la  mère  du  curé,  une  paysanne,  ce  n'est 
pas  une  femme,  c'est  une  femelle  adorant  aveuglément,  farouchement, 
bestialement  son  fils!  La  thèse  de  M.  Zola  est  que  tout  le  monde  obéit 


—  14  — 

fatalement  à  des  accidents  physiques,  a  des   prédispositions  héré- 
ditaires. Le  positivisme  envahit  le  roman,  et  on  voit  ce  qu'il  produit. 
Il  n'y  a  de  louable  que  la  peinture  des  petites  passions,  des  mesquines 
rivalités,  des  étranges  amours-propres  et  des  stupides  prétentions  de 
la  bourgeoisie  de  Plassans.   Les  modèles  ont  posé  et  M.  Zola  n'a  eu 
qu'à  peindre.  Tout  le  reste  est  atroce.  —  Mais  la  Conquête  de  Plassans 
est  presque  du  Berquin,  comparativement  à  la  Faute  de  fabbé  Mouret. 
«  Un  tel  livre,  a  dit  Barbey  d'Aurevilly,  ne  pouvait  naître  qu'à  notre 
époque  de  réalisme   canaille.»   Cet  abbé  Mourei  (le  fils  des  Mouret, 
mis  en  scène  dans  la  Conquête  de  Plassans),  inutile  d'indiquer  sa  faute  ! 
c'est  la  chute  par  la  femme.  Qu'importe  que  vous  fassiez  de  votre  abbé 
un  Jocelyn  succombant  en  quelque  sorte  sans  en  avoir  conscience?  Qu'im- 
porte qu'après  la  chute,  l'âme  du  prêtre  se  réveille  et  demeure  désor- 
mais inébranlable  ?  Il  n'en  a  pas  moins  succombé  dans  des  circons- 
tances qui  sont  injurieuses  et  déshonorantes  pour  le  catholicisme.  A 
toute  cette  histoire  d'amour  coupable,  dont  l'objet  est  une  sorte  de  sau- 
vagesse  libre -penseuse  du  nom  d'Albino.   M.  Zola  mêle  sacrilégement 
la  paraphrase  des  prières  liturgiques.  On  dirait    un  faune  des  temps 
antiques  qui  ricanerait  lascivement  dans  une  église  La  luxure  éhontée 
et  le  mysticisme  énervant  se  donnent  ici  la  main.  M.  Zola  affecte  de  se 
servir  des  expressions  les  plus  crues,  les  plus  sales,  et  il  les  place  à 
dessein,  soit  dans  la  bouche  d'un  frère  des  écoles  chrétiennes  qu'il  offk*e 
comme  un  parangon  de  continence,  soit  sur  les  lèvres  d'une  jeune  fille 
innocente  et  bête,  la  sœur  du  curé  des  Artauds,  vivant  quotidienne- 
ment avec  les  lapins,  les  porcs,  les  dindons  et  les  poules.  Il  a  plein 
la  plume  de  la  vie  animale,  des  vaches  qui  vêlent,  des  truies  qui  por- 
tent. Il  exalte  et  ne  connaît  que  le  naturalisme  bestial.  On  sent  partout 
la  haine  de  l'idéal  et  la  bassesse  des  inspirations.  L'auteur,  dit-on,  a 
beaucoup  de  talent.  Nous  ne  le  nions  pas  ;  mais  c'est  un  talent  fort  mal 
employé.  Il  ne  faut  point  d'ailleurs,  à  ce  propos,  se  monter  la  tête. 
M.  Zola  est  un  descriptif  à  outrance,  et,  si  belles  que  soient  certaines 
de  ses  descriptions,  elles  finissent  par  fatiguer.  Tenez  I  le  récit  si  yanté 
de  l'asphyxie  d'Albine  par  les  fleurs  n'est  pas  nouveau.  Une  mort  ana- 
logue se  trouve  racontée,  dans  le  Notaire  de  Chantillt/,  de  Léon  C^ozlan, 
et  cela  d'une  façon  bien  autrement  belle,  bien  autrement  poétique. 
—  Qui  veut  trop  prouver  ne  prouve  rien.  C'est  un  peu  le  <5as  do 
M.  Victor  Gherbuliez  dans  Miss  RoveL    Un  bourru,  Raymond  Ferray, 
a  été  trompé  par  une  Dulcinée  quelconque.  Instantanément,  il  devient 
misanthrope,  ou  plutôt  misogyne,  et  prend  toutes  les  femmes  en  grippe, 
jurant  de  n'en  plus  aimer  de  sa  vie.  Or,  il  arrive,  après  mille  évolu* 
tions  stratégiques,  que  cet  ours  mal  léché,  que  ce  loup  garon  se  laisse 
bel  et  bien  mener  à  l'autel  de  Thyménée  par  une  terrible  ingénue  de 
dix-sept  ans,  fille  d'une  Anglaise  cosmopolite,  enfant  g&té«»   mal 


—  lo  

élevée,  ou  plutôt  pas  élevée  du  tout,  précoce,  curieuse^  fantasque, 
ignorante,  garçonnière,  maligne  à  faire  damner  tout  un  couvent^  en 
un  mot  indécrottable.  C'est  un  peu  la  lutte  des  deux  contraires,  décrite 
par  tant  d'auteurs  contemporains,  notamment  par  les  Goncourt  dans 
Renée  Mauperin,  et  par  Armand  de  Pontmartin  dans  V Education 
mutuelie.  La  morale  à  en  tirer  est  qu'il  ne  faut  jamais  dire  :  «  Fontaine, 
je  ne  boirai  pas  de  ton  eau  !  »  Mais  que  parlé-je  de  morale  ?  Il  j  a  des 
pages  exquises  comme  style  dans  Miss  Rovel  ;  quant  à  la  morale,  je 
ne  sais  où  la  trouver.  Elle  n'est  pas,  à  coup  sûr,  dans  la  cabessa  de 
ladj  Rovel,  sorte  de  folle,  mauvaise  épouse,  mauvaise  mère,  qui 
laisse  im  peu  de  son  honneur  &  tous  les  buissons  de  la  route,  et  qui 
finit  par  aller,  en  compagnie  d'un  missionnaire  Weslejren,  convertir 
le  roi  des  Mandingues. 

—  La  morale  est  totalement  absente  aussi  d'un  des  derniers 
romans  de  feu  Amédée  Achard  :  Droit  au  but.  Une  jeune  fille. 
Mina  van  der  Flit,  par  égoïsme,  par  calcul,  fait  un  mariage 
d'argent.  Puis  sciemment,  froidement^  systématiquement,  se  met  à 
tromper  son  mari,  lequel  ne  tarde  pas  à  lui  rendre  la  pareille.  Ce 
n*est  pas  tout.  La  femme  à  la  mode  fait  tuer  le  comte  d'Arcagnon 
dans  un  duel,  se  donne  ensuite  à.  un  financier  et  finit  par  revenir  avec 
son  mari  qu'elle  méprise.  Pouah  !  Madame  Mina  a  un  calus  à  la  place 
du  cœur.  Une  fibre  vibre  cependant  ;  c'est  la  fibre  de  l'amitié  pour 
sa  filleule  Juliette  Maurand.  En  tout  le  reste.  Madame  Mina  est  une 
de  ces  filles  de  marbre,  si  vigoureusement  dépeintes  par  Alexandre 
Dumas  fils  et  Théodore  Barrière. 

—  C'est  encore  une  fille  de  marbre  que  Tullie  Durancej, 
Théroïne  de  la  Vie  de  feu  de  M"^*  Anaïs  Ségalas.  Le  compagnon 
de  débauches  de  Tullie  Durancej  est  un  certain  Raymond  Mail- 
lefort ,  parfaitement  conséquent  avec  ses  principes  de  morale 
indépendante.  Le  jour  où  vient  la  ruine ,  ces  deux  misérables 
se  brûlent  la  cervelle  au  milieu  d'une  orgie.  C'est  le  feu  d'artifice 
final.  Inutile  d'insister  sur  les  détails  de  la  Vie  de  feu,  Adolphe  Belot 
fait  école.  N'importe,  sous  la  plume  d'une  femme,  de  pareils  tableaux 
(quelle  que  soit  l'excellence  des  intentions)  paraîtront  toigours  incon- 
venants. Nous  préférons  l'Anaïs  Ségalas  poëte,  l'auteur  des  Oiseaux 
de  passage  et  des  Enfantines. 

—  Ce  n'est  pas  M**  Mathilde  Bourdon  qui  s'attarderait  dans  des 
marécages  semblables  à  ceux  de  la  Vie  de  feu.  Avec  M""*  Raoul  de 
Navery,  M»*  Etienne  Marcel  et  M"*  Fleuriot,  l'auteur  du  Mariage 
de  Thecle  a  complètement  transformé  le  roman  catholique.  Il  était 
ennuyeux,  elle  a  su  le  rendre  intéressant;  il  était  insignifiant  et 
puéril,  elle  a  su  en  faire  une  œuvre  vivante  et  sincère.  Je  consi- 
dère  le  Mariage  de  Théck  comme  une  des  meilleures  productions  de 


,       -  16- 

M"**  Mathilde  Bourdon.  Thècle  d'Herzej  a,  toute  jeune,  perdu  sa 
mère.  Son  père  est  un  homme  des  plus  dignes,  des  plus  honorables  ; 
mais  c'est  un  savant,  tout  absorbé  par  rarchéologie  préhistorique 
et  régyptianisme.  Il  ne  s'occupe  pas  de  Téducation  de  sa  fille, 
et  il  a  tort.  Thècle  lit  des  ouvrages  que  lui  prête  sa  tante,  Adèle  de 
Senonges,  et  qui  lui  tournent  l'imagination.  Tant  et  si  bien  qu'elle 
s'amourache  d'un  pauvre  garçon,  Alexis  Lamblin,  peintre  de  son  état, 
et  qu'elle  réponse  malgré  la  volonté  de  son  père.  Les  mariages  con- 
clus dans  ces  conditions  ne  sont  pas  bénis  de  Dieu.  Lamblin  travaille  ' 
d'arrache-pied.  Mais  il  n'est  nullement  secondé  par  sa  femme ,  capri' 
cieuse,  fantasque  et  paresseuse.  Elle  n'a  même  pas  le  courage  de 
soigner  ses  enfants.  Elle  les  néglige  pour  lire  Octave  Feuillet.  Le 
choléra  arrive;  il  emporte  Lamblin  et  sa  femme.  Les  enfants  sont 
recueillis  par  le  marquis  d'Herzey,  grâce  à  la  cousine  du  peintre, 
Camille  Lamblin,  une  dévouée  sublime.  Le  Mariage  de  Thècle  pour- 
rait s'intituler  :  «  de  la  funeste  influence  des  mauvaises  lectures  sur 
le  bonheur  de  la  vie.  »  Ce  roman,  pu  Télégance  du  style  le  dispute  à 
la  finesse  des  observations,  est  suivi  de  deux  nouvelles  :  Saphira,  his- 
toire d'une  jeune  femme  juive  convertie .  par  son  mari,  et  Calixte^ 
histoire  de  la  fille  d'un  conventionnel,  ange  d'un  démon  que  ses 
prières  ramènent  &  Dieu  —  ce  que  n'a  pas  le  bonheur  d'obtenir,  dans 
le  Prêtre  marié^  la  Calixte  de  Jean  Gourgue  Sombreval. 

—  Il  7  a,  entre  Thècle  d'Herzej  et  Edith  de  Sternfeldt,  certaines 
analogies.  Toutes  les  deux  sont  des  enfants  gâtées,  coquettes  et  fan- 
tasques. Edith,  comme  Thècle,  refuse  tous  les  soupirants.  Mais  elle 
est  moins  constante.  Thècle  fixe  son  choix  sur  le  peintre  Lamblin  et 
n'en  démord  plus.  Edith,  elle,  voltige  d'un  paysan  de  bonne  mine  à  un 
Swédenborgien,  pour  s'arrêter  au  régisseur  des  biens  de  sa  mère. 
Une  fois  devenue  la  femme  d'Ernest  Helmer,  Edith  faillit  le  trahir  ; 
mais  enfin  les  bons  instincts  l'emportent.  Contrairement  à  Thècle^ 
la  maternité  fait  de  la  femme  capricieuse  une  fenune  accomplie*  Il  j 
a,  dans  ce  roman,  œuvre  d'une  Suédoise,  M"*  Emilie  Carlen,  de  bons 
types  d'originaux,  entre  autres  l'Oncle  Jean,  célibataire,  philosophe 
conmie  Bias,  et  la  bonté  même.  On  avait  souvent  réhabilité  les  vieilles 
filles,  mais  jamais  les  vieux  garçons.  L'auteur  d"  Une  Femme  capri- 
cieuse a  eu  ce  courage,  et  elle  a  réussi.  Nous  aurions  voulu  cependant 
que  sa  traductrice,  M^^*  du  Puget,  qui  a  déjà  vulgarisé  en  France  les 
œuvres  de  Tegner  et  de  Frederika  Bremer,  eût  mis  un  peu  de  jour 
dans  les  broussailles  qui  surchargent  le  roman  de  M"*  Emilie  Carlen. 
On  étouffe  parfois  en  le  lisant. 

—  L'Honneur  de  la  famille  de  M"*®  Krafft^Bucaille  a  droit  à  nos  éloges. 
C'est  un  des  meilleurs  romans  de  la  collection  Didier.  Le  bien  et  le 
mal  sont  personnifiés  :  le  bien  dans  la  famille  Darréme  ;  le  mal  dans 


—  17  — 

a  famille  Youvert.  D'abord,  le  mal  triomphe  dans  la  personne  de 
M""  Vouvert^  d-deyant  Carmen  de  Ygonza,  marquise  de  las  Vegas. 
Les  tortures  et  les  souffrances  imposées  par  cette  mégère  aux  enfants 
d'Henry  Darrème,  dont  elle  est  légalement  la  tutrice,  sont  inimagina- 
bles. MaiSy  le  châtiment  du  crime  Tient  à  son  heure.  Séparée  de  son 
mari,  la  vieille  Espagnole  est  assassinée  à  Nice  par  son  partenaire  à 
la  roulette,  un  Yalaque,  comte  de  contrebande.  Emmanuel  Darréme, 
maintenant  le  chef  de  la  famille,  fait  ensevelir  Tennemie  de  son  père^ 
la  persécutrice  de  sa  sœur.  Emmanuel  est  bien  le  digne  ûls  d'Henry 
Darréme,  et  l'on  comprend  toute  la  sympathie  que  lui  porte  son  riche 
protecteur  William  Laurence.  Les  horribles  machinations  des  Youvert 
ont  jeté  le  fils  Darréme  dans  une  aventure  qui  n'a  pour  lui  rien 
d'agréable.  Heureusement  que  tout  se  termine  à  son  avantage,  grâce  à 
une  royale  et  toute-puissante  protection,  que  M"*  Krafft-Bucaille  fait 
intervenir  avec  une  rare  délicatesse.  Il  s'agit  de  la  reine  Marie- 
Amélie. 

—  Si  la  famille  Darréme  est  une  famille  modèle,  nous  pouvons  en 
dire  autant  de  la  famille  Boisguibert,  dans  Nancy  Vallier,  de  M"**  Gagne 
(Elise   Moreau) .  ^  Il  n*y  a  que  les  femmes  pour  bien  saisir  toutes 
les  nuances  du  dévouement,  de  l'abnégation  et  de  l'héroïsme.  Or, 
Nancy  Vallier  est,  sons  ce  rapport,  l'éloquent  et  heureux  pendant  des 
Mémoires  dtune  $œur  de  charité.  Ce  livre  est  dédié  à  M""*  la  marquise 
de  BlooqueviUe,  Tauteur  des  Soirées  de  la  Villa  des  Jasmins.  Dédicace 
très-rationnelle,  car,  dans  Nancy  Vallier  comme  dans  les  Soirées,  les 
aspirations  impies  et  matérialistes  de  notre  époque  sont  énergiquement 
combattues.  M"*  Gagne  a  placé  Taction  de  son  roman  sous  la  Com- 
mune, et  les  honnêtes  gens  qu'elle  oppose  aux  communards  ne  font  que 
mieux  ressortir  les  sinistres  exploits  des  misérables  qui    surgissent 
alors  du  milieu  de  l'écume  sociale.  Puissent  les  Pierre  Vallier,  les 
Nancy  Yallier  et  les  Boisguibert  trouver  beaucoup  d'imitateurs  !  Notre 
France  serait  sauvée.  —  Par  malheur,  les  Gabriel  Fontaine  et  les 
Eugénie  Clément  pullulent  ai:gourd'hui.  Gabriel   Fontaine  et  Eugénie 
Clément  sont  les  deux  héros  d'Une  Idylle  pendant  le  siège ^  roman  beau* 
coup  trop  vanté    de  François  Coppée.  Eugénie  Clément,  sorte  de 
caillette  fort  peu  intéressante,  est  la  femme  romanesque  et  malheu- 
reuse d'un  entrepreneur  de  charpente.  Gabriel  Fontaine  est  employé 
au  ministère  de  l'instruction  publique.    Tous  deux,  au    milieu  des 
bombes,  poursuivent  une  odyssée  galante  qui,  pour  être  contrariée, 
n'en  est  pas  moins  coupable .  Nous  ne  pouvons  guère  louer  de  ce  livre 
que  le  cadre.  Le  cadre»  c'est  le  siège  de  Paris,  avec  ses  horreurs  et 
ses  grandeurs,  que  domine  presque,  du  haut  de  «a  faconde  méridio- 
nale, Marins  Cazabon,  hurleur  de  Marseillaise^  attaché  à  une  vague 
ambulance  et  demandant  sans  cesse  (pour les  autres)  la  levée  en  masse, 
Juillet  187B.  T..  XIV,  2. 


—  18  - 

le  torpillage  des  égouts,  la  sortie  torrentielle.  Ce  livre  est,  croyons- 
nous,  la  première  excursion  que  fait  dans  la  prose  et  le  roman  l'auteur 
du  Passant^  du  Reliquaire,  de  la  Grève  de$  Forgerons^  et  ce  coup  d'essai 
est  loin  d'être  un  coup  de  maître.  —  Ce  n'est  pas  un  coup  do  mattre 
non  plus  que  la  Famille  Monvaly  de  M.  Lucien  Dorville.  Nous  y  cher- 
chons en  vain  les  éléments  nécessaires  au  succès  d'un  roman  :  l'in- 
térêt dramatiquci  la  puissance  d'observation,  l'originalité  du  style. 
Nous  n'avons  à  signaler  que  l'élévation  des  idées  et  la  générosité  de 
sentiments  dont  fait  preuve  le  principal  personnage,  Edouard  Mon- 
val.  De  ses  actes  de  chaque  jour  ressort  cette  conclusion  morale  que 
le  vrai  bonheur  réside  dans  l'accomplissement  du  devoir. -^  TeUe  est 
aussi  la  conclusion  qu'on  peut  tirer  de  la  lecture  du  dernier  roman  de 
M"*  Etienne  Marcel,  Renée.  La  vie  de  Renée  de  Plouernel  est  une 
vie  d'abnégation  et  de  sacrifices.  Elle  souffre  d'abord  horriblement  ; 
maiS|  en  rendant  heureux  tout  ce  qu'elle  aime,  elle  arrive  elle-même 
à  être  complètement  heureuse,  tandis  que  le  bonhomme  Mercier  (un 
faux  bonhomme)  qui  n'a  vécu  que  d'égoïsme,  voit,  sur  la  fin  de  ses  jours, 
toutes  ses  gredineries  dévoilées,  et  expire  châtié  dans  la  personne  de 
son  fils.  Il  y  a  dans  Renée  un  type  de  vieille  fille,  la  tante  Sylvie,  qui 
est  une  véritable  création,  toute  à  l'honneur  de  M"*  Etienne  Marcel. 
Quant  à  Renée  de  Plouernel,  je  la  trouve  presque  trop  accomplie, 
trop  parfaite,  —  dans  la  sens  de  cette  aimable  et  impeccable  enfant 
trouvée  dont  M"*  Claire  de  Chandeneux  nous  raconte  la  touchante 
histoire  et  qu'elle  a  si  poétiquement  et  si  pittoresquement  surnommée 
Blanche-Neige»  La  petite  Blanche-Neige  est  une  sœur  des  anges  et 
elle  console  la  vieillesse  de  ceux  qui  l'ont  recueillie.  Les  époux  Hum- 
frey,  ses  protecteurs,  sont  au  centuple  récompensés  de  leur  bonne 
action. 

—  Nous  voici  maintenant  devant  la. sempiternelle  gouvernante, 
l'inévitable  institutrice.  C'est  bien  usé  pourtant,  bien  rebattu.  Nous 
eussions  donc  préféré  que  M*^*  Gabrielle  d'Ethampes  s'exerç&t  sur  une 
matière  plus  originale  et  plus  neuve.  Non  que  la  Main  de  Velours 
manque  d'intérêt,  au  contraire.  Mais  elle  a  le  tort  de  trop  rappeler  la 
Beatrix  de  M^^*  Maréchal.  C'est  en  quelque  sorte  sa  doublure.  Comme 
Béatrix,  la  cousine  Jeanne  est  une  fille  noble  et  pauvre  ;  comme  Bea- 
trix, la  cousine  Jeanne  a  toutes  les  vertus;  comme  Bé  atrix,la  cousine 
Jeanne  devient  la  providence,  la  o  main  de  velours  »  de  la  famille  qui 
lui  donne  l'hospitalité  ;  comme  Béatrix  enfin,  la  cousine  Jeanne  épouse 
le  fils  de  la  maison.  Destinée  commune,  du  reste,  à  presque  toutes  les 
gouvernantes,  à  presque  toutes  les  institutrices  1  En  Angleterre,  tous 
les  romans  de  ce  genre  terminent  par  là.  Et  tenez  I  une  œuvre  nou- 
velle qui  n'est  pas  sans  mérite  et  dont  la  maison  Hachette  vient  de 
mettre  en  vente  la  traduction,  Min  Martimer,  corrobore  à  point  notre 


—  i»  — 

assertion.  Fille  d'un  pauvre  médecin  irlandais.  Miss  Mortimery  qui 
est  du  reste  une  femme  maîtresse  dans  son  humble  condition  de  gou- 
vernante, finit  par  épouser  le  riche  et  beau  Lionnel  de  Gressy.— *  Au 
même  genre  de  productions  nous  devons  rattacher  l/ari>,  histoire  d'une 
jeune  fille.  C'est  encore  la  légende  d'une  jeune  institutrice  innocente 
et  persécutée,  l'une  de  ces  p&les  fleurs  qui  croissent,  paratt-il,  jusque 
parmi  les  glaces  du  Nord.  Il  y  a  de  la  grâce  et  du  naturel  dans  Marie. 
Les  caractères  des  personnages  sont  bien  dessinés  (notamment  le 
docteur  Stub,  le  professeur  Lange,  l'indéfinissable  mamzelle  Staal  et 
l'importante  M**  TroUe).  Néanmoins,  comme  tous  les  romans  qui 
voient  le  jour  en  Suède,  celui-ci  est  empreint  d'une  certaine  froi- 
deur, et  le  traducteur,  M.  Léouzon  le  Duc,  aurait  bien  dû  j  insuffler,  de 
tempe  à  autre,  un  peu  de  furia  francese.  Marie  est  la  seconde  publica- 
tion de  la  bibliothèque  Nilsson  de  Paris,  dont  Téditeur  est  Thomo- 
nyme  et  le  parent  de  la  chanteuse  célèbre  qui  a  fait  du  rôle  d'Ophélie, 
dans  VBamlet  d'Ambroise  Thomas,  une  des  plus  belles  créations  de 
l'art  lyrique  moderne.  Cette  bibliothèque  a  pour  but  de  populariser 
ches  nous  la  littérature  Scandinave. 

—  Parmi  les  romans  de  moeurs,  nous  devons  encore  une  mention  à 
deux  productions  anglaises  :  Un  Mariage  français,  par  M"^  Jenkins, 
et  Ma  Mère  et  moi^  par  l'auteur  de  John  Halifax  gentleman.  Autant  le 
second  de  ces  romans,  par  sa  moralité  et  son  excellent  esprit,  est  digne 
de  tous  nos  éloges  ;  autant  le  premier,  par  son  esprit  systématique  et  ses 
dangereuses  tendances,  mérite  notre  réprobation.  Dans  Ma  Mère  et  moi^ 
nous  voyons  une  veuve  de  grande  famille,  délaissée,  abandonnée, 
méprisée,  avec  sa  fille  Elma,  par  les  parents  de  son  mari;  et  l'unique 
cause  de  cet  abandon,   c'est  qu'elle   n'appartient  pas  comme  eux  & 
Faristocratie,  qu'elle  est  une  pauvre  petite  bourgeoise.  Mais  cette 
pauvre  petite  bourgeoise  ressemble  à  la  femme  forte  dont  parlent  les 
Proverbes.  Elle  élève  sa  fille  dans  ses  sentiments,  et,  quelles  que 
soient  leurs  épreuves,  ni  Elma  ni  sa  mère  ne  murmurent  contre  la  Pro- 
vidence. La  Providence  leur  tient  compte  de  leur  douce  résignation. 
Elma  l'abandonnée  finit  par  être  reconnue  par  son  grand-père  et  hérite 
du  nom  et  de  la  fortune  des  Piccardy,  nobles  lords  d'Irlande.  —  Dans 
Un  Mariage  français ,  au  lieu  d'une  femme  forte,  mère  dévouée^  res- 
pectable et  respectée,  nous  sommes  en  présence  d'une  évaporée,  pas- 
sionnée et  fantasque.    M"*    veuve  de  Beaupré    s'éprend  d'amour 
pour  Raymond  Savary,  fils  d'un  pasteur  protestant  de  Castelnaudary. 
Madame  de  Beaupré  est  catholique.  Le  pasteur  refuse  son  consente- 
ment  au  mariage  de  Raymond.  Madame  de  Beaupré  sacrifie  sa  religion 
à  son  amour.  Elle  se  fait  protestante.  Tout  le  roman  est  là.  C'est  la 
lutte  de  la  passion  contre  la  croyance.  La  thèse  était  soutenable, 
mais  à  la  condition  de  rester  impartial,  et  c'est  ce  que  n'a  pas  su  faire 


—  20  — 

M"'  Jenkins,  Tauteur  du  roman  en  question.  Les  protestants  ont 
toutes  les  qualités.  Les  catholiques  qui  se  meuvent  dans  l'action  sont 
tous  des  idiots,  des  grotesques  et  des  fanatiques,  sauf  M"*  de 
Beaupré.  Mais  le  catholicisme  de  M"**  de  Beaupré  est  un  catho* 
licisme  de  fantaisie.  Evidemment^  les  tendances  de  ce  livre  sont  blâ- 
mables,  et  nous  le  regrettons^  car  Un  Mariage  fronçai»  dénote  une 
plume  alerte,  et  les  mœurs  de  notre  bourgeoisie  provinciale  y  sont 
dépeintes  avec  un  humour  britannique  qui  ne  manque  pas  de  charme. 

—  Nous  éprouvons  le  même  embarras  devant  le  Barnabe  de  Ferdi- 
nand Fabre.  En  son  genre,  ce  roman  est  presque  un  chef-d'œuvre,  et 
nous  ne  saurions  pourtant  en  recommander  indistinctement  la  lecture. 
Par  certains  côtés,  ce  livre  est  une  arme  à  Tusage  des  voltairiens 
contre  les  hommes  et  les  choses  du  catholicisme.  M.  Ferdinand  Fabre, 
a  mis  en  scène,  les  ermites  cévenols  qui,  sous  le  nom  de  Frères  libres 
de  Saint-François^  gardaient  autrefois  les  chapelles  et  les  pèlerinages 
perchés  sur  le  sommet  des  montagnes.  Or,  sous  la  plume  de  M.  Fabre 
ces  ermites-là  sont  de  fieffés  coquins,  depuis  le  frère  Yenceslas, 
sacripant  et  libertin,  jusqu*au  frère  Pigassou,  crapuleux  et  paresseux. 
Mais  Barnabe  Lavérune  les  résume  tous  :  il  est  gourmand,  ivrogne, 
pillard,  voleur,  une  franche  canaille,  un  homme  de  sac  et  de  corde, 
qui  finit  par  l'assassinat  et  par  le  suicide.  Je  ne  prétends  pas  affirmer 
que  Tauteur  nourrisse  une  intention  volontairement  hostile  contre  les 
croyances  de  son  enfance.  Il  a  bien  soin  de  dire  que  les  Frères  libres 
de  Saint- François  n'avaient  rien  de  commun  avec  le  clergé  régulier. 
Il  en  produit  même  un,  le  curé  de  Saint-Michel  des  Aires,  qui  est  un 
brave  et  saint  homme.  Mais  il  présente  les  faits  de  façon  que  les  rabe- 
laisienneries,  les  franches  lippées,  les  hypocrites  dévotions,  les  gros- 
sières convoitises,  les  tours  pendables  enfin  de  son  Barnabe  retombent 
sur  la  religion.  Tout  cela  serait  bel  et*bon,  si  Barnabe  n'était  pas 
ermite,  s'il  ne  portait  pas  le  froc,  sUI  ne  s'entourait  pas  de  croix  et  de 
soapulaires,  s'il  ne  mêlait  pas  la  superstition  à  la  foi,  s'il  ne  recourait 
pas  à  des  moyens  aussi  odieux  que  sacrilèges  pour  s'emparer  des  jam- 
bons de  la  «  béate  »  Gothon  Molinier.  Mais  Termite  de  Saint-Michel 
des  Aires  a  pour  principe  que  la  fin  justifie  les  moyens,  et  ses  actes 
rejaillissent  sur  un  culte  dont  ce  misérable  abuse.  Enlisant  le  récit  des 
goinfreries  de  Barnabe  et  des  odieux  frocards,  ses  confrères,  on  pense 
involontairement  à  l'ignoble  tableau  du  déboulonneur  de  la  colonne  : 
Le  Iteitntr  de  la  Conférence,  C'est  dommage,  en  vérité  1  car  jamais  la 
nature  cévenole  n'avait  été  décrite  avec  autant  de  sincérité  et  de  puis- 
sance. On  voit  que  M.  Ferdinand  Fabre  est  un  enfant  du  pays  qu'il 
ressuscite,  sous  sa  plume  imagée  et  pittoresque.  Le  portrait  de  Tine 
Baptiste,  du  fifreur  Braguibus,  de  la  vieille  Combale,  une  Harpagon- 
femelle,  les  amours  naïfs  de  Liette  et  de  Simonet,  la  procession,  la 


—  21  - 

kermesse  de  Bédarieux,  la  dînette  d'oiseaux  à  la  source  de  Notre* 
Dame  de  GalTimoot,  sont  des  tableaux  merveilleusement  réussis.  Mais 
tout  cela  n*empéche  pas  que  Barnabe  Lavérune  ne  soit  le  plus  scan- 
daleux et  le  plus  méprisable  des  ermites  qui  aient  jamais  pérégriné  des 
monts  d*Orb  à  la  Montagne  Noire. 

—  Dans  les  romans,  tous  les  genres  sont  bons,  hors'  le  genre 
ennuyeux.  Il  ne  faut  donc  pas  trop  en  vouloir  aux  romanciers  de  leurs 
déroutantes  et  capricieuses  conceptions.  Aussi^  pardonnons-nous  à 
Paul  Féval  de  s'être  lancé  à  fond  de  train  cette  fois  dans  le  fantasti- 
que. La  Villa-Vampire l  Ce  titre  seul  en  dit  long,  et  Ton  pressent,  du 
premier  coup^  quelque  chose  d'étrange  et  de  bizarre  comme  le  Smarar 
de  Charles  Nodier.  En  eifet,  il  y  a  ici  quelque  chose  d'analogue.  Seu- 
lement, c'est  moins  sérieux.  La  Villa-Vampire  est  un  pastiche  très- 
réussi  des  romans  d'Anne  Radcliffe.  Paul  Féval  a  eu  l'idée  originale 
de  faire  intervenir  la  célèbre  authoress  elle-même^  dans  une  histoire 
encore  plus  terrible,  plus  horrible,  plus  épouvantable  et  plus  incom- 
préhensible que  les  Mystères  dUdolphe  et  le  Confessionnal  des  pénitents 
noirs.  La  description  de  Séléne,  la  cité  communarde  de  tous  les  Brou- 
colaques  du  monde,  est  une  vraie  débauche  d'imagination.  Il  y  a  aussi, 
dans  le  roman,  un  certain  Goetzi  dont  Hoffinann,  s'il  vivait,  serait 
jaloux.  Ce  Goetzi  se  dédouble,  se  métamorphose,  boit  le  sang  des 
jeunes  filles  et  a  une  certaine  manière  de  faire  pousser  les  che- 
veux sur  les  têtes  chauves  qui  donne  la  chair  de  poule.  Toutes  les 
histoires  recueillies  par  le  savant  dom  Calmet,  dans  son  Traité  sur  les 
vampires,  ne  sont  rien,  comparées  aux  diaboliques  manœuvres  de 
Goetzi  le  Broucolaque.  La  censure  a  un  instant  interdit  le  roman  de 
M.  Paul  Féval.  S'il  nous  fallait  dire  pourquoi,  nous  serions  bien 
embarrassé.  La  Villa-Vampire  a  été  interdite,  et  la  Faute  de  Fabhé  Mouret 
a  re{u  carte  blanche.  Il  faut  avouer  que  dame  Anastasie,  pour  parler 
comme  les  petits  journaux,  ne  brille  pas  toigours  par  la  logique.  La 
Villa-  Vampire  n'est  pas  écrite  pour  les  jeunes  pensionnaires.  Mais  elle 
est  loin  d'être  un  mauvais  roman. — Nous  préférons  toutefois,  du  même 
auteur,  la  Fontaine  aux  perles.  L'action  est  simple,  attendrissante  et 
dramatique  tout  à  la  fois.  M.  Paul  Féval  s'est  plu  à  peindre  une 
ancienne  famille  bretonne  qui  vient  d'abandonner  l'antique  tradition  de 
ses  foyers  et  qui  vit  de  ses  brigandages,  comme  certains  routiers  du 
treizième  siècle,  pillant  et  volant  les  châteaux  voisins,  détroussant  sur 
les  grandes  routes,  non  sans  remords,  non  sans  garder  au  fond  du  cœur 
un  sentiment  d'honneur  amoindri.  Cette  famille  se  venge  elle-même. 
Le  chef,  le  vieux  Carrohat  trouve  en  l'un  de  ses  fils,  cet  honneur  qu'il 
a  perdu,  et  il  va  lui-même  au-devant  de  la  fatale  expiation  que  ce 
fils  lui  prépare.  Ceci  se  passe,  dans  les  commencements  du  dix-sep- 
tième siècle,  au  doux  pays  de  Rennes,  au  milieu  des  vastes  forêts 


—  M  — 

bretonnes.  Le  tout  est  ensoleillé  par  une  apparition  ravissante,  par 
Bleuette,  la  gaie  chanteuse,  une  sœur  de  Fleur-des-Genéts^  du  loup 
blanc,  insouciante  et  naïve  comme  elle, 

— Il  j  a  aussi  du  fantastique,  mais  d'une  espèce  toute  particulière,  dans 
la  Tresse  blnnde  de  M.  du  Boisgobej.  Tète  coupée^  4'une  ressemblance 
parfaite  aVec'une  tète  vivante  ;  œil  fascinateur,  brillant  la  nuit  à  tra- 
vers la  tapisserie  d'une  chambre  ;  fantômes  empoisonneurs;  rêves  de 
sang  ;  cauchemars  de  mort.. .  rien  n'est  oublié.  Et  c'est  si  ingénieusement 
présenté  qu'on  s'y  intéresse.  En  résumé,  un  crime  odieux  a  été  commis. 
Qui  en  est  l'auteur?  Edmond  de  Sartillj  a  intérêt  à  le  savoir.  Il 
cherche^  et  il  soupçonne  un  espion  russe  qui  a  des  vues  sur  la  fortune  de 
Roger  de  Mensignao  dont  lui,  Edmond,  doit  épouser  la. sœur.  Voilà 
Sartilly  limier  de  police.  Il  associe  à  ses  recherches  un  agent  de  la 
sûreté,  Jottrat,  lequel  a  à  se  venger  de  Noreffi,  l'espion  russe.  Sar* 
tillj  est  souvent  attaqué  :  on  tente  de  l'assassiner  ;  on  le  fait  tomber 
dans  divers  guet-apens.  Mais  enân^  il  triomphe  de  tous  les  obstacles. 
Grâce  à  lui,  la  fortune  des  Mensignac  est  sauvée,  et  l'on  parvient  à 
découvrir  le  véritable  auteur  du  meurtre  de  la  femme  a  à  la  tresse 
blonde.  »  Ce  roman,  très-dramatique,  se  rapproche  par  l'emploi  de 
certains  procédés  des  romans  judiciaires  d'Emile  Gaboriau  et  de 
V Affaire  de  la  rue  Morgue  d'Edgard  Poë.  Jottrat,  l'agent  de  la  police 
de  sûreté,  est  de  la  même  famille  littéraire' que  le  Javert  des  Mûi' 
râbles. 

—  Nous  avons  encore  à  parler  du  roman  social,  du  roman  politique 
et  du  roman  scientifique.  Par  roman  social  nous  entendons  les 
romans  où,  sous  le  voile  de  la  fiction,  sont  abordées  certaines  qaeê^ 
tiens  sociales.  De  ce  nombre  est  :  Un  Fftàt  de  la  mer  Mcrte^  de 
Miss  E.  Braddon,  et  Le  Jeune  Brown,  de  Grenville^Murraj.  Oes  deux 
romans  nous  viennent  d'Angleterre  et  battent  en  brèche  l'aristocratie 
anglaise.  Dans  Un  Fruit  de  la  mer  Morte  (Miss  Braddon  comme  notre 
Paul  Féval  affectionne  les  titres  bizarres),  il  ne  s'agit  nullement  du 
lac  Asphaltite.  La  mer  morte  ici,  c'est  la  vie  manquée,  la  vie  passée 
dans  l'égoïsme,  l'incroyance  et  le  libertinage.  Tel  est  le  cas  de  lord 
Jemingham.  Dans  sa  jeunesse,  ce  byronien^  ce  sceptique,  ce  blasé, 
s'est  cru  permis  de  séduire  la  pauvre  fille  d'un  libraire  écossais.  Un 
fils  est  né  de  ce  mariage.  Et  autant  ce  fils  a  de  vénération  pour  sa 
mère,  autant  il  hait  son  père,  un  père  qui  ne  lui  a  pas  donné  son 
nom.  On  voit  d'ici  les  déductions  sociales  qui  peuvent  nattre  de 
l'antithèse  de  ces  deux  situations.  Eustache  Thornburn,  c'est  le  nom  de 
l'enfant,  vit  longtemps  à  cdté  de  lord  Jemingham.  Ils  sont  là^  le  père 
et  le  fils  sans  se  connaître^  antipathiques  l'un  à  Tautre,  Au  dénoû<> 
ment,  toutefois^  la  reconnaissance  a  lieu  et  le  fils  pardonne.  Même 
thèse  dans  le  Jeune  Broum,  En  apparence^  ce  brave  garçon  est  le  fils 


—  M  — 

de  Thomas  Brown  Tanbergiflie  et  de  Madge  Wydwhil.  En  rëaliié,  son 
père  n'est  antre  qne  lord  Conrihope,  descendant  des  Plantagenet.  Miss 
Braddon,  elle,  a  effleuré  le  eôté  social  de  son  sujet.  Grenville-Murray 
y  est,  an  contraire,  entré  en  plein.  Le  Jeune  Brown  a  paru  d*abord  dans 
le  Comhill  Magaxtm,  et,  dès  son  apparition,  la  grande  aristocratie 
anglaise  a  jeté  les  hants  cris.  Non^  certes,  sans  raison.  Car  les  lords 
et  les  barons  d'Angleterre  y  sont  présentés  sous  des  couleurs  peu 
favorables.  L'impression  générale  qui  résulte  de  cette  lecture,  c'est 
que  la  haute  aristocratie  anglaise  recèle  des  vices  et  des  abus  mons- 
trueux qui,  sans  une  prompte  réforme,  pourraient  amener  un  jour  un 
cataclysme.  M.  Grenville-Murray  a-t-il  chargé  le  tableau  ?  Il  ne  nous 
appartient  point  de  le  dire,  manquant  de  données  exactes  pour  une 
affirmation.  Ce  qui  milite  en  sa  faveur,  c'est  qu'il  n'est  pas  révolu* 
tionnaire.  Il  se  contente  de  dénoncer  certaines  injustices  et  conclut 
en  ces  termes  :  o  Le  temps  accomplit  des  merveilles  et  la  Providence 
fait  toujours  bien  ce  qu'elle  fait.  >  Comme  intérêt  dramatique.  Le 
Jeune Brownn^esi  fan  comparable. à  Un  Fruit  de  la  mer  Morte,  Miss 
Braddon,  sous  ce  rapport,  ne  laisse  rien  à  désirer.  Elle  serait  parfaite, 
si,  dans  les  détails,  elle  ne  donnait  pas,  par  ci  par  là,  quelques  coups 
de  canif  à  l'austérité  anglicane.  Il  faut  aussi  blâmer  sa  manie  d*émailler 
ses  récits  d'allusions  historiques,  ce  qui  souvent  engendre  une  sottise. 
Ainsi,  elle  appelle  Cléopàtre  la  Marie  Stuart  du  Nil.  Comparaison 
peu  flatteuse  et  tout  à  fait  injuste  pour  la  reine  d'Ecosse  I  Nous  ne 
prétendons  pas  que  Marie  Stuart  ait  été  une  sainte  ;  mais  elle  ne  fut 
pas  non  plus  une  Cléopàtre.  Ai^ourd'hui,  elle  est  absolument  lavée 
des  calomnies  odieuses  lancées  contre  elle  par  les  écrivains  à  la'solde 
d'Elisabeth.  Les  récents  travaux  de  MM.  J.  Gauthier,  de  Chante- 
lanse,  Eosack  et  Wiesener  nous  montrent  une  Marie  Stuart  complè- 
tement différente  de  la  Marie  Stuart  légendaire. 

—  La  Politique  est  une  vilaine  Muse.  Ceux  qui  cherchent  en  elle 
leurs  inspirations  ne  peuvent  faire  que  des  œuvres  ratatinées, 
ennuyeuses  et  moroses.  L'auteur  de  Faleyrac  témoigne  de  notre  dire  à 
ehaoune  de  ses  pages.  Qu'est-ce  que  Faleyrac  ?  C'est  le  nom  d'une  com- 
Hume  rurale  du  Liboumais  ou  des  Charentes,  nous  ne  savons  plus  trop* 
Tous  les  habitants  de  cette  commune  sont  républicains,  et  ils  débla- 
tèrent enconséqcf^nce,  traitant  M.  le  comte  de  Chambord  d'à  eunuque  », 
Napoléon  III  de  «bandit  »,  détestant  «  la  prêtraille  »,  demandant  le 
rétablissement  de  la  garde  nationale,  se  moquant  des  royalistes  «  aux 
doigts  crochus  »,  riant  de  la  Salette  et  de  la  dévotion  à  Notre- 
Dsme-de>Lourde8  ;  bref ,  passant  leur  temps  à  hurler  contre 
Tultramontanisme,  Tobscurantisme ,  la  réaction  cléricale,  l'ancien 
régime,  Tinquisition,  les  diableries,  les  brogliastes,  les  septennalistes, 
que  sais-je  encore  ?  Tout  cela  n'eût  pas  mérité  l'honneur  d'une  men  - 


—  24  — 

tion.  Mais  le  malheur  veut  que  Tauteur  de  Faleyrae  soit  un  pasteur 
protestant.  Dés  lors,  son  livre  acquiert  une  notoriété  relative,  et  il 
est  de  notre  devoir  de  le  flétrir.  Il  fait  en  tous  cas  peu  d'honneur  à 
la  religion  réformée.  M  «le  pasteur  Jules  S  teeg  (cartel  est  son  nom)  nous  a 
plutôt  l'air  d*un  commis-voyageur  en  radicalisme  que  d'un  missionnaire 
évangélique.  Uécritcomme  un  démagogue,  et,  dans  ses  œuvres,  surexcite 
les  plus  mauvaises  passions.  Son  Faleyrae  est  dédié  à  Edgard  Quinet. 

—  Franchement,  malgré  ses  airs  volages,  nous  préférons,  et  de 
beaucoup,  la  Femme  gênante^  de  Gustave  Droz.  Cela  n'apprend  pas 
grand*chose,  mais  cela  distrait  un  moment,  et  ne  laisse  au  moins  dans 
Tesprit  aucun  sentiment  de  haine,  aucune  impression  révolutionnaire, 
aucun  faux  jugement.  On  s'intéresse  une  minute  aux  mésaventures  du 
pauvre  Corentin  Kerroch,  pharmacien  à  Kerlawen,  veuf  inconsolable 
d'un  petit  bout  de  femme  qui  Ta  fait  enrager  et  en  faveur  de  laquelle 
il  n'en  retourne  pas  moins  la  légende  d'Artémise  pleurant  Mausole. 
Puis,  c'est  fini.  On  n'y  pense  plus.  Je  me  trompe  :  si  on  oublie  Corentin 
Kerroch,  on  n'oublie  pas  le  charme  que  Ton  a  éprouvé  en  voyant  avec 
quelle  délicatesse,  quelle  exquise  finesse,  quelle  simplicité  artistique, 
M.  Gustave  Droz  a  su  cette  fois,  selon  le  mot  de  Voltaire,  peser  des 
riens  dans  des  toiles  d'araignée. 

—  Entre  la  Femme  gênante  et  Le  Chaneellor^  pas  la  moindre  analogie. 
Ce  n'est  pas  une  raison  pour  renvoyer  le  Chancelier  aux  calendes  grec- 
ques. Le  Ckancellorest  tout  simplement  un  roman  scientifique,  tout  ce 
qu'il  y  a  de  plus  scientifique.  Ne  croyez  pas  qu'il  soit  pour  cela  rebutant 
comme  un  problème  d'algèbre.  Au  contraire,  Le  ChanceUor^  gr&ce  à  la 
baguette  magique  de  M.  Jules  Verne,  l'auteur  d' Un  Drame  dam  les  airs^ 
à' Un  Hivernage  dans  les  glaces^  du  Tour  du  Mande,  etc.,  est  on  ne  peut  plus 
attrayant.  Vous  avez  deviné  que  Le  Chancellor  est  le  nom  d'un  beau 
trois-mâts  anglais  qui  fait  le  tnget  de  Charlestown  à  Liverpool.  Sur  le 
vaisseau,  se  trouve  le  passager  Kasallon,  homme  minutieux,  qui  tient 
journal  de  tout  ce  qui  arrive  :  incendie  à  bord,  naufrage  sur  un  éoueil 
isolé,  engloutissement  en  pleine  mer,  navigation  sur  un  radeau,  sauve- 
tage miraculeux  des  naufragés,  parmi  lesquels  une  Anglaise  idéalement 
émaciée.  Vous  le  voyez,  pour  M.  Verne,  le  roman  n'est  qu'un  canevas 
dont  il  se  sert  pour  vulgariser  une  découverte  ou  une  notion  scienti- 
fique. Il  est  le  créateur  du  genre.  * 

-—Nous  en  avons  fini  avec  les  romans  de  longue  haleine.  Passons  aux 
Contes  et  aux  Nouvelles.  Il  en  est  dans  le  nombre  qui  ont  un  incon- 
testable mérite.  Par  exemple,  les  Histoires  de  petite  ville,  de  M.  Charies 
Deulin  nous  paraissent  à  peu  près  parfaites.  Nul  n'excelle,  comme 
M.  Deulin,  a  saisir  sur  le  vif  les  mœurs,  les  traditions  et  les  supersti- 
tions de  la  Flandre  française.  La  petite  ville  dont  M.  Deulin  nous 
raconte  les  Histoires  est  Condé-sur-l'EIscaut,  un  pays  de  Cocaïne  aux 


—  25  — 

types  adorables.  Fraioheur  de  sentiments,  saine  gatté,  humour ^  doaoe 
ironie,  style  âpre  et  savonrenz, — nn  style  qui  sent  le  crû,  tout  ëmaillé 
de  pittoresques  expressions  flamandes  :  telles  senties  qualités  qui  dis- 
tinguent les  Bùtairei  de  petite  vUk.  Le  réel  et  Tidéal  8*y  mêlent 
agréablement.  Le  réel,  c'est  Angélina  Mauginel  qui  coiffe  sainte 
Catherine  pour  avoir  trop  fait  la  dégoûtée  ;  c'est  Alidor  Gabanal^ 
.qui  se  voyant  imprimé  pour  un  feu  de  cheminée  dans  le  Journal 
éTBaxebrouek,  se  trouve  si  grand  qu*en  passant  sous  la  voûte  céleste 
il  baisserait  volontiers  la  tête  pour  ne  pas  cogner  du  front  les 
étoiles  ;  c'est  le  percepteur  dans  l'embarras,  sorte  de  rapin  socialiste  à 
qui  la  révolution  de  1848  a  donné  une  perception  en  province  et  qui  ne 
sait  pas  dire  à  un  contribuable  méticuleux  quel  est  le  quart  de  539  fr. 
75  centimes  (vous  voyez  d*ici  la  scène).  L*idéal,  avec  une  dose  de  fan- 
tastique, c'est  le  Quéniokf  où  sont  gentiment  évoqués  et  la  reine 
Bathilde  et  le  grand  saint  Eloi  et  son  fils  Oculi  qui  lui  servait  la  messe  ; 
c*est  la  Tonne  (For,  qu*eût  signée  Nodier  ;  c'est  le  Paradis  de  Pipette, 
dans  lequel  un  homme,  renouvelant  le  péché  d'Eve,  perd  sa  part  de 
bonheur  étemel  pour  n*avoîrpas  su  résister  au  désir  de  fumer  une  pipe. 
Une  dissertation  sur  le  mot  attribué  à  Cambronne  par  Victor  Hugo 
termine  le  volume.  D'après  M.  Deulin,  Cambronne  aurait  fort  blondit  : 
Cl  La  garde  meurt  et  ne  se  rend  pas.  »  L'auteur  des  Hi$ioire$  de  petite 
vUle  invoque  à  ce  propos  le  témoignage  d'un  témoin  oculaire,  qu*il  a 
connu,  Antoine  Deleau^  ex-grenadier  au  régiment  de  la  vieille  garde. 

—  Dans  les  Bistoiree  de  petite  ville^  M.  Deulin  a  usé  du  fantasti- 
que, mais  modérément.  Dans  le  Bai  du  Diable j  M.  Charles  Narrey  en 
a  abusé.  Le  volume,  illustré  de  charmantes  vignettes  par  Bertall  et 
Yan  d'Argent^  se  compose  du  Bal  du  Diable  qui  donne  son  nom  au 
livre,  du  Petit  Chaperon  roee^  doBCheveusc  du  Diable^  de  Misire  et  pau- 
vreté. Il  y  a  de  grandes  anologies  entre  ce  dernier  récit  et  la  légende 
du  forgeron,  des  Contes  de  la  Russie ,  recueillis  par  Ralston.  Les 
Cheveux  du  Didble  sont  une  imitation  du  Faust  populaire.  Le  Petit  Cha* 
peron  rose  est  un  conte  bleu  dans  lequel  M.  Narrey  démontre  que  les 
jeunes  filles  et  les  hommes  sont  changés  depuis  l'honnête  M.  Perrault. 
Cette  fois,  c'est  le  Chaperon  qui  croque  le  Loup.  Dans  le  Baldu  Diable^ 
au  milieu  de  la  plaine  de  Carnac,  M.  Narrey,  évoque  les  Korrigans, 
les  Courils,  les  Poulpiquets,  et  tire  un  excellent  parti  des  superstitions 
bretonnes.  — Ainsi,  a  fait  de  son  côté  pour  les  superstitions  suédoiseS| 
M.  Xaxier  Marmier,  dans  les  Ames  en  peine,  La  plupart  des  petits 
drames  dont  se  compose  le  charmant  recueil  de  M.  Marmier  ont  leur 
action  en  Suède  :  Les  Emigrés^  un  Amour  apurés  la  mort^  Un  Mariage 
suédois.  Les  Émigrés  constituent  un  récit  des  plus  simples,  mais  Tima- 
gination  de  Fauteur  a  su  l'entourer  de  perles  éblouissantes.  Quoi  de 
plus  ravissant  que  le  portrait  d'Ëbha  de  Vermondans,  une  sylphide  du 


-  26  — 

nord,  mjcitiqae  comme  la  Séraphta  de  Balzac  et  femme  jaaqa'aa  bout 
des  ongles  ?  Un  Amour  après  ta  mort  nous  met  en  présence  de  deux 
familles  ennemies,  la  famille  des  Jarls  de  Hundtorp  et  la  famille  de  Jarls 
de  Qnam^  —  les  Gapulets  et  les  Montégats  de  la  Norwége.  C'est  un 
Hundtorp  qui  triomphe.  Le  Jarl  de  Quam  est  lâchement  assassiné,  et 
sa  femme  s'enterre  avec  lui  toute  Tivante.  Dans  les  Nouvelles  de  ce 
volume  qui  ont  la  France  pour  théâtre,  nous  signalerons  le  Trébuche^. 
fantaisie  des  mieux  réussies.  Au  surplus,  les  Amn  en  peine  sont  un  des 
meilleurs  ouvrages  de  M.  Xavier  Marmier  (1). 

—  Que  ne  pouvons-nous  louer  avec  la  même  assurance  les  Contée 
comtadim  d'Henry  de  la  Madelône?  Ces  Contes  sont  au  nombre  de 
trois  :  Germain  Barbe^Bleue  ^  les  Fondé  perdue^  Jean^es- Baumes.  Jean* 
deS'Baumes  est  une  merveille  de  sentiment,  d'originalité  et  de  couleur 
locale.  Nos  reproches  ne  s'adressent  pas  à  ce  brave  braconnier,  cons- 
crit réfractaire,  féru  d'amour  pour  la  beUeFélise,  contrebandier  à  ses 
heures,  fournissant  aux  curés  du  Comtat  du  bon  tabac  d'Espagne  et  réci- 
tant lamesse  chaque  dimanche  sur  lamontagne  quand  sonnaitlacloche des 
Grégories,  C  est  un  type  inoubliable,  dans  le  genre  de  cet  Esperit  de  la 
Lune,  de  ce  marquis  des  SaffiraSy^'immortalisé  par  un  autre  Ija  Made- 
lène,  qui  lui,  du  moins,  n'a  jamais  pactisé  avec  la  libre-pensée 
moderne!  Nos  reproches  portent  sur  certains  détails  trop  lestes  de  Gêr* 
main^Bleue^  histoire  d'un  Lovelace  rural,  d'un  Don  Juan  de  village,  fat 
et  faraud,  trop  caressé  par  l'auteur.  Ils  portent  également  sur  les 
Fonds  perdus^  récit  passionné  dans  lequel  la  noblesse  comtadoise  de 
l'époque  de  la  Restauration  est,  comme  dans  les  Ganaches  de  Victo- 
rien Sardou,  portraioturée  sous  les  couleurs  les  plus  ridicules  et  les 
plus  fausses.  Ces  réserves  faites,  il  7  a  lieu  de  reconnaître  que  le  stjle 
des  Contes  eomtadins  est  vraiment  agréable.  On  y  sent  quelque  chose 
de  fougueux,  d'ardent,  de  pénétrant  qui  rappelle  le  sauvage  arôme  de 
la  férigoute  du  mont  Yentoux.  Pour  montrer  où  en  étaient,  dans  le 
département  de  Yauoluse,  les  passions  politiques  sous  Louis*Philippe, 
M.  Henrj  de  la  Madelône  raconte  l'anecdote  suivante  :  «  Pendant  plus 
de  deux  ans,  après  la  Révolution  de  juillet,  les  petits  bourgeois 
d'une  petite  ville  du  Comtat  n'ont  eu  des  journaux  de  Paris  que  les 
bandes.  Chaque  matin,  à  l'heure  du  courrier,  une  espèce  d'hercule, 
fondeur  de  bois  de  son  état,  entrait  dans  le  café  de  la  localité,  et 
d'une  voix  terrible  :— ^Otin^'és  fou ;t»as?  criait-il. Le  garçon, tremblant, 
lui  remettait  aussitôt  le  numéro  du  Nationat  que  personne  n'avait 
osé  déployer.  L*hercule  mettait  le  journal  en  pièces,  le  foulait  aux 
pieds,  avalait  un  petit  verre,  en  regardant  tous  les  assistants  dans 
le  blanc  des  jeux,  et  sortait  lentement.  Sur  ses  pas  arrivait  une 
manière  de  géant,  tète  nue,  bras  nus»  la  poitrine  &  l'air  :  —  Ounfès 

1.  La  préMDte  livraiion  contient  pittt  loin  (p.  36)  une  étade  plat  étendue  sur  le 
livre  de  l'éminent  académicien.  (NoU  de  la  dirtction.) 


—  27  — 

la  guÈO  ?  oriait-il  k  son  tour.  Et  les  débris  de  la  Gazette ,  salis^  pié- 
tines, étaient  chaque  jonr  balayés  côte  à  côte  arec  ceux  du 
National.  »  Aujoard*hai,  la  ville  où  se  passait  cette  scène  caractéristique 
occupe  une  place  importante  dans  la  géographie  des  Pajs-Rouges. 

•-^  Si  le  prince  J.  Lubomirski  n'avait  à  son  avoir  littéraire  que  les 
Aventuref  d'un  homme  et  de  troi»  femmes,  nous  pourrions  sans  remords  ne 
pas  nous  occuper  de  lui.  Mais  ce  gentilhomme  russe,  plus  Français  que 
bien  des  habitants  de  Sisteron  ou  de  Yacqueyras,  aussi  Parisien  que 
Méry  ou  Nestor  Roqueplan,  est  Fauteur  de  Fonetiannatret  et  Boyârdi 
—  un  livre  qui  fait  honneur  et  à  celui  qui  l'a  écrit  et  à  notre  langue. 
Disons  donc  un  mot  des  Aventurée  dtun  homme  et  de  trois  femmee^  ou 
plutôt  du  recueil  de  Nouvelles  qui  porte  ce  titre  bizarre.  Aucune  de 
ces  nouvelles,  sauf  pourtant  la  Dame  de  trèfle  et  Conrad  Banish^  deux 
contes  à  la  manière  d'Hoffinanny  ne  sort  de  la  vulgarité.  Toutes  se 
passent  en  Russie,  et  toutes  donnent  une  bien  piètre  idée  des  mœurs 
des  popes,  des  nobles,  de  la  bourgeoisie  et  du  peuple.  Parfois^  souffle 
dans  ces  pages^  dont  quelques-unes  sont  risquées,  une  sombre  et 
désolante  misanthropie.  Il  parait  que  c*est,  dans  le  nord^  une  maladie 
aristocratique.  En  France,  nous  avons  encore  moins  bien  que  cela.  Nous 
avons  la  maladie  démocratique  ^  l'absence  de  sens  moral.  M.  Alfred 
Bonsergent,  l'auteur  d'Une  Mute  et  de  Cinq  nouvellet  en  est,  à  notre 
avis,  tout  particulièrement  atteint.  Il  y  a  une  idée  dans  sa  Gabrielle 
de  Gemj,  qui  se  fait  la  Béatrice  ou  plutôt  la  Galathée  d'un  peintre 
de  talent.  Mais  l'idée  •—  esthétiquement  belle  -«  est  souillée  par  les 
•situations  indécentes  dont  M.  Bonsergent  l'entoure.  Rien  à  dire  d^lfn 
accident  de  chatse,  de  Daphnie  et  Chloi^  de  La  Coupe  du  roi  de  Thulé, 
sinon  que  ces  récits  échevelés,  bjroniens,  mussettiques,  ne  laissent  que 
trop  deviner  de  quels  principes  ils  s'inspirent,  et  ces  principes  n'ont 
rien  de  commun  avec  le  spiritualisme. 

^-  Mentionnons  simplement  pour  mémoire  le  Jlf^tY&mdeM.  Emile 
Daclin,  contenant  deux  nouvelles  assez  bien  troussées:  l'une  du  genre 
sentimental,  etTautre  du  genre  terrible  «—  cette  dernière  frisant 
l'invraisemblance.  M.  F.  Fertiault,  dans  sa  Chambre  aux  Histoires  a  su 
éviter  complètement  cet  écueil.  Rien  de  plus  gracieux  et  de  plus  varié 
que  son  Décaméron,  qui  ne  ressemble  en  rien  (sous  le  rapport  moral)  à 
oelui  de  Boccace.  La  Chambre  aux  Histoires  fait  partie  du  château  des 
Estanges  en  Bourgogne.  La  châtelaine,  une  aimable  femme,  est 
malade.  Pour  l'égayer  et  la  distraire,  ses  voisins,  ses  parents,  ses  amis, 
se  réunissent  auprès  d'elle,  et  là  chacun  raconte  la  sienne.  Ils  sont 
neuf,  donc  neuf  histoires.  Guérie^  la  châtelaine  s'exécute  à  son  tour» 
et  le  Décaméron  est  au  complet.  Légendes  du  bon  vieux  temps,  tradi» 
tiens  bourguignonnes,  drames  des  temps  modernes,  concourent  ici  à 
faire  admirer  le  Beau,  à  faire  connaître  le  Vrai,  à  faire  aimer  le  Bien. 


—  28     • 

Tous  les  romanciers  et  les  conteurs  dont  nous  venons  d'analyser  les 
œuvres  ne  sauraient  se  rendre  la  même  justice. 

—  Il  nous  reste  à  rendre  compte  de  cinq  ouvrages  qui  tiennent  du 
roman  par  certains  côtés  et  qui  ne  sont  pas  précisément  des  romans. 
En  voici  les  titres  :  L'Antre  des  Mystères^  Marie  Chauaing^  Leê  Choi^ 
Meurs  excentriques^  Souvenirs  d*une  Cosague,  Souvenirs  dun  Pianiste.  — 
V Antre  des  Mystères^  par  M.  Henry  Baliacey,  n'est  autre  que  Tantre 
de  la  franc-maçonnerie.  L'auteur,  sous  une  forme  romanesque,  y 
dévoile  lesdoctrineSy  les  tendances  et  le  but  de  lasecte.  GoUin  de  Plancy, 
dans  Jacquemin  le  frane»mafon^  et  le  père  Bresoiani,  dans  le  Juif  de 
Vérone^  ont  fait  quelque  chose  de  semblable.  M.  Henry  Baliacey  nous 
annonce  une  suite  à  V Antre  des  Mystères.  En  attendant  que  cette  suite 
voie  le  jour,  nous  lui  conseillons  de  lire  les  œuvres  du  romancier 
catholique  italien.  Cela  Tinspirera.  Car,  il  faut  bien  le  dire,  V Antre  des 
Mystères  est,  comme  Tenfer,  pavé  de  bonnes  intentions;  mais  il 
manque  d'intérêt.  Il  y  a  mieux  à  tirer  d'un  pareil  thème.  —  Marie 
Chassaing  est  le  développement  mouvementé  d*un  simple  fait  divers. 
Lors  de  l'insurrection  indigène  de  1871 ,  la  femme  de  -Chassaing,  le 
tueur  de  lions,  fut  emmenée  en  captivité  par  une  des  plus  farouches 
tribus  de  l'Aurès.  Les  tortures  endurées  par  cette  pauvre  femme  et  sa 
miraculeuse  délivrance  ont  fourni  à  la  riche  imagination  de  M.  Badin 
la  matière  d'un  récit  qui  a  le  double  mérite  d'être  vrai  et  attrayant. — 
Ce  sont  pareillement  les  qualités  qui  distinguent  les  Chasseurs  exeen* 
triques^  de  M.  d'Âmezeuil.  Excentrique,  en  effet,  le  chevalier  de 
Moreville,  diable  de  bossu  aussi  habile  à  démonter  son  homme  dans  une 
conversation  qu'à  forcer  un  sanglier  aux  abois  I  Excentrique  ce  lord 
Edwards,  organisant  une  Saint- Hubert  à  bord  de  son  vaisseau  contre 
les  marsouins  I  Mais  le  plus  excentrique  de  tous,  c'est  le  curé  Tayaut. 
De  son  vrai  nom,  il  s'appelait  Hercule  de  Bois-Sablé,  et  sa  soutane  ne 
nuisit  nullement  à  ses  exploits  cynégétiques.  Conmie  tous  les  chasseurs, 
l'abbé  de  Bois-Sablé  aimait  à  jurer  un  brin.  Mais,  par  respect  pour  sa 
robe,  ne  pouvant  se  livrer  à  son  péché  mignon,  il  n'avait  rien  trouvé 
de  mieux  (et  de  là  son  sobriquet)  que  de  sacrer  en  se  servant  du  mot  : 
«  Tayaut!»  Et  il  s'en  donnait!...  Dame!  cela  valait  bien  la  Pasque- 
Dieu  de  Louis  XI,  le  Diable  m'emporte  de  Louis  XII,  le  Jamibleu  et  le 
Ventre^Saint'Gris  d'Henri  IV.  —  Je  me  résume  en  vous  assurant,  par 
expérience,  que  les  Chasseurs  de  M.  d'Amezeuil  n'amènent  pas  le 
sommeil. 

—  Que  dirons-nous  des  Souvenirs  d'une  Cosaque,  sinon  que  ce  livre 
scandaleux  est  une  des  hontes  de  la  littérature  moderne  ?  Une  femme 
sans  vergogne  et  sans  respect  pour  elle-même,  y  divulgue  les  secrets 
de  sa  vie  désordonnée  et  y  profane  cyniquement  des  sentiments  qui 
sont  du  domaine  de  la  conscience.  On  se  rappelle  le  dégoût  qu'inspira, 


-  29  — 

sons  l'Empire,  la  publication  à* Elle  et  Z,ui  (Georges  Sand  et  Alfred  de 
Musset).  Il  7  a  deux  ans,  un  bas-bleu,  qui  répond  au  nom  d'Hortense 
Allart,  ternissait  à  plaisir,  dans  les  Enchaniements  de  Prudence  y]3L  gloire 
de  Chateaubriand.  Aujourd'hui,  c*est  la  Cosaque  Olga  de  Janina,  qui 
traîne  dans  la  boue  un  grand  artiste,  que  raustérité  de  son  habit  ecclé- 
siastique aurait  dû  garantir,  quelque  coupable  qu*il  puisse  être,  contre 
une  semblable  flétrissure.  Mais,  madame  Olga  de  Janina,  réfractaire, 
irrégulière,  nourrie  de  mauvaises  lectures  et  libre-penseuse,  semble 
an  contraire  se  fdre  un  malin  plaisir  de  raconter,  souvent  avec  une 
crudité  révoltante,  les  défaillances  qu*elle  a  elle-même  provoquées 
avec  un  machiavélisme  diabolique.  Aux  Souvenirs  de  la  Cosaque  ont 
répondu  les  Souvenirs  d'un  Pianiste.  On  pourrait  croire  que  ce  livre  est 
la  contre-partie  du  premier  et  qu'il  a  été  inspiré  par  le  trop  célèbre 
virtuose.  Il  n'en  est  rien.  Sous  couleur  de  le  défendre  contre  les  atta- 
ques de  la  Cosaque,  Fauteur  anonyme  de  la  seconde  élucubration  rend 
encore  notre  artiste  plus  ridicule.  C'est  de  la  spéculation  cynique,  tout 
simplement.  On  a  voulu  battre  monnaie  sur  le  scandale.  Il  y  a  des 
gens  qui  ne  se  doutent  même  pas  de  ce  que  c'est  que  la  propreté  mo- 
rale. FiRMIN  BoissiN. 


THÉOLOGIE 

Ckimpendium  theolo^lae  do§pniatlcœ,  auctore  Teissonnier,  presb. 
in  seminam  Nemaus,  professore,  Paris  et  Lyon,  H.  Pelagaud  fils  et  Roblot, 
«873.  4  gi'os  vol.  in-12.  —  Prix  :  15  fr. 

Ce  n'est  pas  chose  commune  qu'un  bon  livre  élémentaire.  Surtout 
j;)our  la  théologie  dogmatique,  les  abrégés  ou  les  compendia  sont  plus 
difficiles  et  plus  rares  qu'on  ne  pense.  Il  faut  tant  de  qualités  réunies  : 
la  clarté,  la  sobriété,  la  méthode,  et,  en  même  temps,  un  grand  fonds 
de  doctrine,  un  jugement  sain  et  droit,  une  science  sûre  et  autorisée  I 
Dieu  n'a  pas  départi  tous  ces  dons  à  la  fois  à  tout  le  monde. 

N'est-ce  pas  un  motif  de  plus  pour  accueillir  avec  faveur  les  ouvrages 
de  ce  genre  en  qui  se  trouvent  toutes  ces  conditions,  de  les  apprécier 
à  leur  juste  valeur  et  de  les  faire  connaître?  Nous  n*hésitons  pas  à 
ranger  dans  cette  catégorie  le  Compendium  theologiœ  dogmalicœ  de 
M.  l'abbé  Teissonnier.Le  savant  professeur  du  grand  séminaire  de  Nîmes 
a  condensé  dans  ces  quatre  volumes  tout  son  enseignement  sur  le  dogme 
catholique  :  la  doctrine  de  l'Église  précisée  et  fixée  par  les  conciles  , 
notamment  parle  Syllabus  et  le  concile  du  Vatican,  par  les  textes  de 
rÉcriture  sainte ,  le  témoignage  des  Pères  et  des  Docteurs,  toutes  ces 
citations  faites  avec  choix  et  à  propos,  sans  vain  étalage,  destinées  à 
enrichir,  sans  les  surcharger,  l'intelligence  et  la  mémoire  des  jeunes 
lévites.  Ce  livre  est  le  résultat  de  longues  et  sérieuses  études  ainsi 
que  d'une  expérience  de  trente  années  de  professorat. 


—  30  — 

On  n'attend  sans  doute  pas  de  nons  qae  noue  dottnioas  même  une 
simple  analyse  de  ce  remarquable  ouvrage  ;  —  Fespaoe  qui  nous  est 
accorde  ne  nous  suffirait  pas. 

Ce  qu'il  nous  est  nécessaire  de  dire,  c'est  que^  tout  élémentaire  quHl 
soit,  le  nouyeau  ComperuUum  se  trouve  au  niveau  de  la  science  con* 
temporaine ,  en  harmonie  parfaite  avec  les  besoins  de  notre  époque. 
M.  le  chanoine  Teissonnier  a  étudié  à  fond  tous  les  sjnitémos  plus  ou 
moins  autorisés  ou  ingénieux  par  lesquels  l'impiété  moderne  prétendait 
battre  en  brèche  les  données  de  la  révélatioui  surtout  les  récits  de  la 
Oenèse  et  de  Ffixode  ;  il  n'ignore  aucune  des  plus  récentes  déoon* 
vertes  de  la  géologie  et  de  la  paléontologie^  et  il  lui  est  facile  ainsi 
d'initier  les  jeunes  théologiens  à  tous  les  secrets  de  son  habile  et 
savante  tactique  contre  les  objections  du  préjugé  ou  du  parti  pris. 

Le  docte  professeur  ne  réussit  pas  moins  heureusement  dans  sa  lutte 
contre  cette  nouvelle  forme  du  gallicanisme  qui,  sous  le  nom  de  libé* 
ralisme,  menace  de  nos  jours  la  société  chrétienne  ;  il  est  sans  pitié 
pour  ce  catholicisme  «  sincère  mais  indépendant  »  qui  est  l'une  des 
plus  grandes  machines  de  guerre  de  l'impiété  contre  l'Église.  Armé 
des  récentes  décisions  de  Rome ,  M.  Teissonnier  poursuit  à  outrance 
le  libéralisme  catholique,  le  combat  avec  toute  la  puissance  d'un  esprit 
convaincu,  et  réduit  à  néant  les  difficultés  nombreuses  et  prétendues 
formidables  que  les  chefs  de  la  secte  ont  accumulées  comme  à  plaisir 
autour  du  dogme  et  de  la  vérité  catholiques. 

Que  ne  pouvons-nous  montrer  aussi  avec  quelle  dialectique  il 
dénonce  ce  protestantisme  soi-disant  orthodoxe,  qui  n'est  autre  chose 
que  la  résurrection  du  pélagianisme,  avec  quelle  sagacité  il  sait  décou- 
vrir, sous  le  stjrle  pur  et  enchanteur  de  M.  Guizot,  les  traces  très-cer- 
taines de  cette  vieille  hérésie  ! 

Ajoutons  qu'à  ces  mérites  déjà  bien  supérieurs,  le  Compendium 
joint  celui  d'avoir  réalisé  d'utiles  et  précieuses  innovations.  Nous  vou- 
lons parler  du  tableau  synoptique  destiné  à  résamer,  en  quelques 
pages,  toute  l'histoire  du  dogme  catholique,  à  montrer  son  déve- 
loppement par  l'énumération  des  Pontifes  romains,  des  Conciles,  des 
Pères  et  desDocteurs  qui  forment  ce  qu'il  appelle,  après  saint  Augustin, 
la  cité  céleste,  à  mettre  sous  les  jeux,  d'autre  part,  toutes  les 
attaques  dont  il  a  été  l'objet  et  qui  étaient  dirigées,  suivant  les  siècles, 
par  l'hérésie,  la  fausse  science  et  la  fausse  philosophie,  ce  qui  cons- 
titue, à  vrai  dire ,  la  cité  terrestre.  Signalons  aussi  le  traité  spécial 
consacré  à  la  Yierge-Mère,  dans  lequel  M.  Teissonnier  réunit  toutes 
les  thèses  qui  établissent,  dans  leur  pleine  vérité  et  dans  tout  leur 
éclat,  les  privilèges  et  les  gloire  sdont  la  Mère  de  Dieu  a  été  couronnée 
par  son  divin  Fils. 

Nous  n'exagérons  rien  en  jugeant  que  cet  ouvrage  de  théologie  élé-* 


—  31  — 

mentaire  est  un  des  meilleurs  qui  aient  paru  depuis  longtemps.  D'autres, 
plus  autorisés  que  nous,  n'ont  pas  hésité  à  en  rendre  ce  témoignage. 
La  critique  s'est  déjà  donné  un  libre  cours  sur  le  livre  de  M.  Teisson- 
nier,  mais  celle-là  même  qui  a  été  la  plus  sévère  n'a  pu  signaler  que 
cer^nes  imperfections  de  détail,  tout  à  fait  secondaires.  Elle  a  été 
unanime  pour  recommander  le  Compendium  aux  élèves  et  aux  profes- 
seurs de  nos  grands  séminaires,  formant  les  vœux  les  plus  sincères  de 
le  voir  bientôt  «  se  répandre  dans  le  clergé  et  contribuer,  pour  sa 
part,  à  entretenir  et  à  augmenter  Tamour  des  solides  et  saines  doc- 
trines. »  Mais  ces  hommages,  si  flatteurs  soient-ils^  de  quel  poids,  de 
quelle  autorité  auraient-ils  été,  s'ils  n'eussent  été,  pouf  ainsi  dire  con- 
sacrés par  le  seul  témoignage  qui  fasse  autorité  et  qui  domine  toutes 
les  critiques  :  nous  voulons  dire  par  la  parole  même  du  Souverain 
Pontife?  Voici  en  quels  termes  Pie  IX  vient  d'écrire  à  M.  Tabbé  Tels- 
sonnier  :  a  II  a  été  doux  et  agréable  à  Notre  cœur,  cher  fils,  de  rece- 
voir votre  Compendium  theologiœ  dogmaticœ*. ...  iions  vous  en  féli- 
citons. Sans  doute,  les  soins  multipliés  de  notre  charge  pontificale  nous 
ont  à  peine  permis  de  parcourir  rapidement  votre  ouvrage.  Toutefois^ 
pendant  que  Notre  main  déroulait,  comme  au  hasard,  les  pages  du 
premier  volume,  nous  y  avons  trouvé  de  Tordre^  de  la  êcience^  de  la 
clarté^  de  la  solidité,  ordinem,  scieniiam^  perspieuilatem  et  soliditalem,»,  n 
Qu'ajouter  après  de  semblables  éloges  tracés  par  la  plume  même 
de  l'auguste  Pontife?  La  lettre  de  Pie  IX  est  pour  M.  Teissonnier  la 
digne  récompense  d'une  vie  toute  de  travail  et  de  dévouement  àrÉglise; 
elle  est,  pour  son  livre,  tout  à  la  fois  la  plus  précieuse  reoommandation 
et  la  meilleure  garantie  du  succès.  J.  F.  M. 


JURISPRUDENCE 

Eie  Droit  en  matière  de  sépulture,  précédé  d'une  étude  sur  le  maté- 
rialieme  contemporain  et  les  funérailles  dans  l'antiquité  et  chez  les  peuples 
modernes,  par  Léon  Roux,  docteur  en  droit,  avocat  à  la  Cour  d'appel  de 
Lyon.  Paris,  Lecofire^  1875.  In-8  de  408  p. 

Les  scandales  auxquels  ont  donné  lieu  les  enterrements  civils,  dans 
ces  dernières  années,  sont  la  raison  de  ce  livre.  A  qui  appartient-il  de 
décider  si  un  enterrement  sera  civil  ou  religieux  ?  On  a  vu  trop  sou- 
vent les  membres  d'une  même  famille  donner  le  spectacle  odieux 
d*une  querelle  autour  des  restes  à  peine  refroidis  de  leurs  proches, — 
des  amis,  ou  plutôt,  des  coreligionnaires  politiques,  venir  réclamer  à 
la  porte  d*un  hôpital,  pénétrer  jusqu* au  sein  des  familles,  et,  alléguant 
un  prétendu  engagement  du  défunt,  chasser  la  religion  de  ses  funé- 
railles pour  organiser  une  manifestation  de  libres-penseurs.  Des  auto- 
rités locales  se  sont  émues  de  tels  abus  et  ont  tenté  de  les  faire 


—  32  — 

disparaître  :  on  a  contesté  jusque  devant  l'Assemblée  nationale  la 
légalité  de  leurs  arrêtés.  Il  fallait  mettre  fin  à  ces  conflits  en  faisant 
ressortir  le  droit  de  chacun.  C'est  la  tâche  qu*a  entreprise  M.  Léon 
Roux. 

Mais  le  jurisconsulte  s'est  trouvé  doublé  d'un  fervent  chré^en; 
ajoutez  à  cela  une  tournure  d'esprit  essentiellement  philosophique  et 
littéraire,  et  vous  comprendrez  quil  ne  se  soit  pas  renfermé  dans  l'étude 
des  textes  et  de  la  jurisprudence.  Après  avoir  mis  en  regard  des 
croyances  catholiques,  pleines  de  consolations  et  d'espérances,  le 
néant  des  doctrines  matérialistes,  l'auteur  se  place  au  point  de  vue 
historique,  et  nous  montre  la  religion  associée  aux  funérailles  dans 
tous  les  temps  et  chez  tous  les  peuples.  Enfin,  il  aborde  la  question 
de  droit.  —  t  Suivre  :  1*  la  volonté  du  défunt;  2*  à  son  défaut,  celle 
de  la  famille;  3*  à  défaut  de  l'une  et  de  l'autre,  le  droit  commun; 
4*  exclure  absolument  les  étrangers.  —  Voilà  le  droit  en  matière  de 
sépulture  religieuse.  »  Pour  l'appliquer,  il  n'est  besoin  d'aucune  loi 
nouvelle;  l'autorité  judiciaire  et  l'autorité  administrative  sont  suffi- 
samment armées  pour  le  faire  respecter  et  empêcher  les  enterrements 
civils  de  dégénérer  en  provocations  et  en  désordres  ;  qu'elles  mettent 
hardiment  en  action  les  moyens  que  la  loi  leur  fournit^  et  les  scandales 
cesseront  1 

Telles  sont  les  grandes  lignes  de  cet  ouvrage,  hautement  pensé, 
plein  de  cœur  et  d'éloquence  ;  l'auteur  ne  dédaigne  pas  de  s'émouvoir 
et  d'émouvoir  son  lecteur;  et,  en  cela,  il  a  suivi  la  meilleure  des  voies  : 
quand  le  cœur  est  touché ,  l'esprit  est  bien  prêt  de  se  rendre. 

______  J.  L. 

SCIENCES  ET  ARTS 

Théodlcée.  JÉ^tuks  wit  Dieu^  la  création  9t  la  ProiAdence,  par  Amédée 
DE  Mabgerie,  professeur  de  philosophie  à  la  faculté  des  lettres  de  Nancy. 
Ouvrage  couronné  par  l'Académie  française.  Troisième  édition,  revue  et 
augmentée.  Paris ,  Didier ,  4874. 2  vol.  gr.  in- 18  de  viu-408  et  432  p.  — 
Prix  :  7  fr. 

Nous  ne  croyons  pas  avoir  à  faire  connûtre  cet  ouvrage,  l'une  des 
productions  les  plus  solides  et  les  plus  brillantes  de  la  philosophie  spi- 
ritualiste  et  ohrétienne  de  notre  siècle.  Nous  la  supposons  connue  et 
appréciée  de  tous  les  esprits  éclairés.  Et  pourtant  elle  n'a  pas  eu,  de 
bien  s'en  faut,  tout  le  succès  dont  elle  est  digne.  Elle  a  été  moins  lue 
que  tel  livre  de  M.  Jules  Simon,  par  exemple,  auquel  nous  n'hésitons 
pas  à  la  déclarer  égale  pour  le  mérite  de  la  forme,  supérieure  pour 
l'intérêt  de  l'exposition  et  encore  plus  pour  la  valeur  scientifique. 
Nous  ne  parlons  pas  de  la  sûreté  des  doctrines  et  de  la  chaleur  des 
convictions  religieuses.  La  Thiodicée  de  M.  de  Margerie  devrait  être 
au  premier  rang  des  livres  contemporains  dans  toute  bibliothèque 


-  33  — 

sérieuse  et  sous  la  main  ou  à  la  portée  de  tous  les  jeunes  gens  appli- 
qués aux  études  philosophiques.  Si  ce  succès  n^est  pas  encore  obtenu, 
nous  avertissons  nos  lecteurs  que  c'est  leur  devoir  d'y  travailler. 

Il  suffit  de  rappeler  la  belle  et  large  ordonnance  de  ce  traité.  Intro- 
duction :  la  philosophie  négative  et  ses  trois  variétés,  criticisme,  posi- 
tivisme, panthéisme,  dans  leur  influence  surl'espritgénéral  de  notre  siè- 
cle; insuffisancedetoute  philosophie  séparée  de  la  religion.  —  Première 
partie  :  Dieu  et  ses  attributs.  Méthode  de  la  théodicée,  à  la  fois  expéri- 
mentale et  rationnelle,  avec  l'appui  de  la  logique  morale.  Le  scepticisme 
de  Rant  est  écarté  par  un  admirable  dialogue  entre  Socrate  et  l'auteur. 
^-  Les  preuves  de  l'existence  de  Dieu  sont  développées  dans  l'ordre 
suivant  :  la  foi  du  genre  humain,  la  nature,  Tidée  de  Tinfini,  le  devoir 
(et  à  ce  propos  réfutation  de  la  morale  indépendante)^  les  vérités  néces- 
saires. Qu'il  nous  soit  permis  de  regretter  dans  c.es  leçons,  dont  tout 
nous  agrée,  une  lacune  :  la  preuve  métaphysique  la  plus  élémentaire, 
et  qui  lie  le  mieux  ridéal  au  réel,  la  preuve  tirée  de  Texistence  contin- 
gente et  du  principe  de  causalité^  n'a  pas  son  exposition  précise  et 
séparée.  Nous  devons  encore  noter,  dans  le  chapitre  sur  l'idée  de 
l'infini  une  page  nouvelle  au  sujet  des  néoscolastiques(p.  224)  qui  croient 
Texpliquer  par  l'expérience  de  l'abstraction;  mais  le  malentendu  (car 
M.  de  Margerie  n'attribue  cette  théorie  qu'à  un  malentendu  à  la  p.  viii 
de  la  préface)  ne  sera  probablement  pas  éclairci  par  un  court  alinéa^ 
que,  pour  notre  part,  nous  acceptons  pleinement.  —  Les  attributs 
divins  sont  étudiés,  d'après  leur  division  consacrée,  en  métaphysiques  et 
moraux  :  la  pensée  et  l'amour.  Nous  recommandons,  dans  le  dévelop- 
pement des  premiers,  l'essai  (vrai  essaie  dont  les  conclusions  n'ont  pas 
encore  toute  la  netteté  que  l'auteur  pourrait  y  mettre)  d'une  théorie 
du  temps  et  de  l'espace. 

La  deuxième  partie  est  plus  spécialement  critique.  Elle  commence 
pourtant  par  une  démonstration  de  la  création  proprement  dite  ;  après 
quoi  le  dualisme  et  le  panthéisme  sont  repoussés  directement.  Les  formes 
de  cette  dernière  erreur  sont  examinées  l'une  après  l'autre,  depuis 
les  stoïciens  jusqu'à  Hegel  ;  l'hégélianisme  est  poursuivi  avec  une 
attention  très-particulière  en  France  dans  Y.  Cousin  et  MM.  Renan  et 
Yacherot.  Le  positivisme  est  aussi  l'objet  d'un  chapitre  spécial.  La 
question  théorique  de  la  Providence  en  occupe  deux  et  amène  un  exa- 
men des  théories  naturalistes  et  surtout  de  la  théorie  de  Darwin.  Le 
philosophe  chrétien  s'affirme  plus  que  jamais  dans  le  chapitre  xiii  sur 
le  miracle  et  la  prière^  et  dans  deux  leçons,  données  en  appendice,  sur 
la  philosophie  des  Pères  de  l'Eglise . 

Tout  ce  travail  avait  paru  il  a  dix  ans,  et  les  idées,  comme  les  faits, 
ont  marché  depuis.  On  rendra  cette  justice  à  l'émiment  professeur  de 
Nancy  qu'il  se  tient  an  courant  de  l'histoire  contemporaine,  et  toute- 
JuiLLKT  i875.  T.  XIV.  3. 


—  34  — 

fois  il  n'a  eu  qu'à  reproduire,  avec  quelques  légères  améliorations  de 
détail,  son  livre  de  1865^  en  le  déclarant  (p.  u)  aussi  ac/ti^/jaujourd'hui 
qu'alors.  Nous  croyons  bien  qu'il  ne  se  flatte  pas  sur  ce  point«  La  réfu- 
tation est  parfaitement  appropriée  aux  plus  nouvelles  formes  de  la 
science  anti- chrétienne;  elle  est  seulement  devenue  plus  nécessaire 
que  jamais.  En  août  1870,  a  quinze  jours  avant  Sedan,  »  Tauteur  vit 
s'étaler,  à  la  vitrine  d'un  libraire  de  Paris^  un  journal  intitulé  l'ATHBBr 
il  frémit,  et  put  prévoir  quelque  chose  des  malheurs  et  des  hontes  qui 
ont  suivi.  Dumoins,  il  est  de  ceux  qui  ont  apporté  à  la  cause  delà  civi- 
lisation chrétienne,  si  fortement  compromise,  un  secours  efficace  par  ce 
livre  si  sûr  de  doctrine,  si  fort  de  raisonnement,  si  séduisant  de  stjle. 
Que  maintenant  tous  les  amis  du  bien  s'appliquent  à  le  méditer  et  à 
le  répandre.  Léonce  Couture. 

Lie»  Militaire»  blessé»  et  Invalide» ,  leur  situation  en  Ftance  et  à 
Ntranger,  par  le  comte  de  Riencourt.  Paris.  Dumaine,  i875,  2  vol.  in-8 
de  421  et  475  p.  —  Prix  :  14  fr. 

Persuadé  que  nous  avons  beaucoup  à  faire  pour  atteindre  la  perfec- 
tion sous  tous  les  rapports  de  l'organisation  des  services  sanitaires, 
M.  le  comte  de  Riencourt  s'est  livré  à  une  enquête  minutieuse  sur  la 
situation  des  militaires  blessés  et  invalides,  et  il  a  consigné  ces  résul- 
tats dans  les  deux  volumes  que  nous  annonçons. 

Situation  actuelle  des  invalides  en  France  ;  —  Situation  des  inva- 
lides à  l'étranger  ;  —  Améliorations  proposées  ;  —  tels  sont  les  titres 
sous  lesquels  on  peut  classer  Ténorme  quantité  d'informations  recueil- 
lies par  l'auteur.  La  situation  actuelle  des  invalides  en  France  n'est 
rien  moins  que  brillante.  L'indiférence  du  pays  à  leur  égard  n^a  paâ 
uniquement  pour  cause  Tinstinct  égoïste  de  la  population  ;  elle  tient 
aussi  au  caractère  national,  léger,  dépourvu  d'esprit  de  suite,  oubliant 
le  lendemain  du  danger  ce  qu'il  exaltait  la  veille  ,  en  définitive  ,  plus 
belliqueux  que  militaire.  La  situation  des  invalides  à  l'étranger,  rap- 
prochée de  ce  qui  existe  chez  nous,  offre  à  l'esprit  un  pénible  contraste, 
tout  à  notre  désavantage.  Combien  de  personnes  pourtant,  imbues  de 
cet  esprit  de  race  qui  nous  fait  toujours  nous  considérer  comme  très-* 
supérieurs  aux  autres  nations,  ignorent  que  nos  militaires  blessés 
et  invalides  se  trouvent,  en  réalité,  dans  une  condition  très-infé-* 
Heure  par  rapport  aux  Allemands,  aux  Anglais,'  aux  Autrichiens. 
Nous  avons  cependant  précédé  les  autres  nations  dans  cette  voie  de 
l'assistance  aux  militaires  estropiés  ;  et  depuis  Philippe-Auguste  qui 
songea  &  les  réunir  tous  dans  une  seule  ou  dans  plusieurs  abbayes, 
jusqu'à  Louis  XIV  qui  fonda  l'Hôtel  royal  (ordonnance  du  24  fé- 
vrier 1670),  la  plupart  de  nos  rois  ont  tenu  à  honneur  de  donner  aux 
vieux  soldats  blessés  ou  infirmes  des  marques  de  leur  protection. 
M.  de  Riencourt  plaide  la  cause  de  THôtel  ;  il  réclame  le  maintien  de 


—  35  — 

rinstitution  da  grand  Roi,  et  son  développement  par  rapport  à  ce 
qu'elle  est  aujourd'hui.  Les  améliorations  demandées  par  Fauteur  ne 
portent  pas  seulement  sur  cet  objet.  Il  en  propose  d'autres  qui  déno- 
tent une  étude  sérieuse  de  la  question  :  mais,  à  ce  sujet,  qu'il  nous 
permette  une  observation  :  le  traitement  de  la  Légion  d'honneur 
(ou  de  la  médaille  militaire)  est  déjà  accordé  non-seulement  a  à  tous 
les  militaires  invalides,  ou  leurs  assimilés  qui  ont  été  décorés  à  la 
suite  de  blessures,  etc.,  n  mais  encore  aux  non  invalides,  décorés 
même  pour  ancienneté  de  services. 

«  Dans  les  temps  où  nous  vivons,  ^  dit  M.  de  Riencourt^  —  tout 
Français  a,  selon  moi,  le  devoir  de  travailler  à  la  reconstitution  du 
pays.  •  Telle  est  la.pensée  qui  a  inspiré  ce  consciencieux  et  patrie-* 
tique  ouvrage,  bien  digne  d'attirer  Tattention  des  amis  de  Tarmée, 
disons  plus^  des  amis  du  pays.  E.  Dsscoubâs. 

BELLES-LETTRES 

Vray^slnous*  Conférence»  eliol»les«  précédées  d'une  notice  bio- 
gi'aphique,  par  A.  Laurent.  Tours,  Alfred  Marne.  In-8  de  lxxx»380  p.  — 
Prix  :  2  fr.  50. 

Nous  devons  féliciter  l'auteur  d'avoir  placé  en  tête  de  son  ouvrage 
(p.  I  à  Lxxx),  sous  le  titre  modeste  de  Notice  sur  Frayssinous,  une 
longue  et  sérieuse  étude  sur  la  vie  du  grand  prédicateur.  M.  Laurent 
ne  se  contente  pas  de  raconter,  au  courant  de  sa  plume,  la  vie  de 
Frajssinous  ;  il  écrit  d'après  Frajssinous  lui-même,  en  citant  de  nom- 
breux extraits  de  ses  notes  intimes,  de  ses  lettres,  et  aussi  en  évo- 
quant le  témoignage  des  journaux,  des  écrivains  et  des  hauts  person- 
nages contemporains  de  l'évéque  d'Hermopolis.  C'est  ainsi  qu'il  nous 
dépeint,  sous  des  couleurs  bien  plus  vives,  les  vertus  intimes  de  Frajs- 
sinous. Il  analyse  les  conférences  de  Saint-Sulpice  et  les  autres  dis- 
cours de  Frajssinous,  et  en  cite  des  extraits  :  là  encore,  nous  avons 
les  jugements  des  contemporains  :  Louis  XVIII ,  l'abbé  Bojer ,  le 
baron  Pasquier,  la  Gazette  de  France^  etc.  Et  c'est  également  avec  des 
faits  et  de  semblables  témoignages  que  Frajssinous  nous  est  présenté 
comme  grand-maître  de  rUoiversité.  Nous  pensons  donc  que  l'auteur 
a  atteint  son  but,  quand  il  dit  en  terminant  cette  notice  :  <  Nous  avons 
tâché  de  rendre  la  phjsionomie  de  Frajssinous  dans  toute  sa  perfec- 
tion ;  le  jeune  lecteur  doit  aimer  ce  beau  caractère  :  il  apprendra  à 
l'admirer  dans  les  pages  suivantes  écrites  pour  la  jeunesse.  » 

C'est  donc  pour  la  jeunesse  que  Tauteur  a  fait  ce  choix  de  dix  con- 
férences. Sans  doute,  il  j  a  toujours  à  perdre  à  donne^  des  Extraits 
d'une  œuvre  qui,  comme  les  conférences  de  Frajssinous^  forme  un 
tout  complet,  un  enseignement  suivi.  Cependant^  quand  le  choix  est 
bon,  ce  désavantage  peut  être  compensé  en  partie.  Nous  sommes 


—  30  — 

heureux  de  trouver  ici  les  conférences  sur  V Existence  de  Dieu  prouvée 
par  les  beautés  de  la  nature  ;  —  lei  Principes  religieux  considérés  comme 
le  fondement  delà  morale  et  de  la  société;  —  r  Incrédulité  des  jeunes  gens; 
—  Les  livra  irréligieux;  etc.  Que  Tauteur  nous  permette  cependant  de 
dire  ici  qu'il  a  laissé  de  côté  des  conférences  qui  offraient  un  caractère 
d'actualité  tout  particulier,  celles  qui  ont  pour  titres  :  Examen  des 
principaux  arguments  de  l'athéisme; -^  La  religion  vengée  du  reproche 
de  fanatisme;  —  Sur  l'union  et  F  appui  réciproque  de  la  religion  et  de  la 
société^  etc.  N^ aurait-il  pu  aussi  faire  entrer  dans  son  cadre  les  trois 
conférences  sur  la  Révolution  française^  et  la  conférence  sur  la  Mission, 
la  dernière  que  Frajssinous  ait  prononcée  à  Saint- Sulpice  et  qui  est 
peut-être  son  chef-d'œuTre  ?  Quoi  qu'il  en  soit,  M.  Laurent  nous  donne 
là  un  ouvrage  qui  ne  peut  être  que  très-utile  à  la  jeunesse,  en  lui 
offrant  Frayssinous  à  imiter  et  à  aimer  dans  sa  vie  privée,  aussi  bien 
qu'à  étudier  au  double  point  de  vue  de  la  littérature  et  de  l'enseigne- 
ment. Ernbst  Babslok. 

Ma^b  Amem  eo  peine.  Contes  d'un  toyngeuTy  par  X.  Marmieb,  de  FAca* 
demie  française.  —  Nouvelle  édition.  Paris,  Hachette,  1875.  In-18  j. 
de  386  p.  —  Prix  :  3  fr.  50. 

Ce  n'est  pas  là  un  rocueil  formé  au  hasard,  et  le  titre  commun  fait 
assez  bien  concevoir  l'empreinte  de  tristesse  un  peu  vague  qui  le 
caractérise.  Il  y  a,  dans  ce  livre,  quelque  chose  de  doux  et  de  pénétrant 
qui  va  au  fond  de  l'âme,  et  ce  qui  ajoute  encore  à  cette  teinte  de 
mélancolie,  c'est  la  couleur  des  lieux  où  le  voyageur  a  puisé  ses 
contes  ;  ce  sont  ces  grands  paysages  du  Nord  et  ce  ciel  pâle  et  bru- 
meux qui  forment,  pour  ainsi  dire,  le  fond  de  tout  ces  tableaux. 
Chacun  d'eux,  cependant,  a  ses  personnages,  son  théâtre,  et  plaît  à 
sa  manière  ;  mais  ne  les  détachant  pas  l'un  de  l'autre,  il  y  a  dans  les 
premiers  récits  je  ne  sais  quoi  de  mal  défini,  dont  on  se  plaindrait 
peut-être^  si  l'on  ne  jugeait  d'après  l'ensemble. 

Le  premier  de  tous  a  pour  titre  les  Émigrés  en  Suède.  Ce  n'est 
guère  qu'une  peinture  séduisante  de  la  famille,  un  peu  gâtée  par  une 
ombre  d'égoïsme.  Un  vieux  gentilhomme  a  déposé  toutes  ses  tradi- 
tions et  toutes  ses  croyances,  pour  vivre  dans  l'oubli  et  dans  la  paix. 
Il  a  deux  filles  qui  font  sa  joie  :  l'une  d'elles  épouse  un  honnête  pas- 
teur de  village,  tandis  que  l'autre^  esprit  triste  et  rêveur,  éprouve  le 
plus  tendre  attachement  pour  un  jeune  homme,  qui  la  paye  en  retour 
d'une  amitié  bien  froide.  C'est  un  cousin  venu  de  France  en  1880,  et 
qui,  bientôt  après,  repart,  et  meurt  bravement  pour  son  roi  :  voilà 
sans  doute  le  héros  de  l'histoire,  et  Ton  se  demande  pourtant  à  qui  l'on 
a  donné  le  plus  beau  rôle,  du  gentilhomme  fidèle  ou  de  l'habitant 
bourgeois  du  presbytère,  tout  entier  à  sa  famille  et  à  de  beaux  rêves 
de  charité.  —  A  cette  sorte  d'idéal,  succède  un  récit  bien  diffé- 


—  37  — 

rent,  véritable  tragédie  dont  la  fia  païenne  nous  afflige.  Ce  ter- 
rible Drame  sur  mer  est  l'histoire  d*ane  jeane  femme  que  son  mari  a 
confiée  imprudemment  au  capitaine  d'un  navire,  et  qui  ne  trouve 
de  refuge  contre  cet  homme  sans  foi,  que  chez  un  jeune  officier 
qu'elle  a  aimé  et  qu'elle  aime  encore.  Elle  succombe,  et  le  lendemain, 
sur  un  mot  insultant,  elle  se  punit  par  un  crime,  et  vient  donner  aux 
témoins  de  sa  faiblesse  le  spectacle  de  sa  mort  volontaire. 

Le  dessein  et  la  moralité  de  Touvrage  sont  plus  visibles  dans 
le  reste  du  livre.  Ils  se  trahissent  peu  à  peu  par  les  émotions  ten- 
dres et  honnêtes  qui  naissent  sans  efforts  à  chaque  page.  Par  un 
chemin  varié,  l'auteur  nous  conduit  à  son  but,  et  Ton  arrive  au 
dernier  de  ces  récits,  à  celui  qui  forme  la  conclusion  véritable  et  qui 
a^appelle  une  Conversion.  Là,  dans  une  série  de  lettres  adressées  à 
im  ami^  un  homme  du  monde,  retiré  dans  la  solitude  par  dégoût  de 
tout  le  reste^  raconte  au  jour  le  jour  et  cour  ainsi  dire  par  étapes, 
comment  «  un  acte  de  charité  Ta  ramené  au  travail,  le  travail 
à  la  raison,  la  raison  à  l'amour  et  Tamour  à  Dieu.  »  Ce  n'est  pas  là  la 
conversion  de  saint  Paul  ni  de  saint  Augustin ,  mais  c'est  celle 
de  beaucoup  d'honnôtes  gens  de  notre  époque.  Les  grandes  âmes,  ni 
même  les  âmes  fortes,  ne  sont  pas  celles  qu'on  a  peintes  en  ce  livre. 
Ces  petits  poèmes  n'ont  rien  d*héroïque,  et  c*est  à  la  fois  leur  mérite 
et  leur  danger.  Car,  s*il  faut  tout  dire,  pour  bien  des  lecteurs^ 
ce  livre  aimable  n^est  point  sans  danger.  Il  j  a  des  imaginations 
8i  faibles,  qu*on  ne  peut  leur  montrer  de  trop  près  d'autres  âmes 
malades.  Mais  d'autres  sont  bien  capables  de  secouer  ce  qu'il  j  a  d'un 
peu  féminin  dans  cette  mélancolie,  et  de  n'en  retenir  que  ce  fond  de 
pitié  chrétienne  qui  rend  meilleur,  et  qui  se  mêle  à  une  sympathie 
presque  involontaire  pour  celui  qui  a  su  nous  attendrir.  En  lisant  ces 
histoires  touchantes,  il  n'est  personne  qui  ne  songe  aux  vers  admi- 
rables de  Virgile...  et  mentem  mortalia  tangunt:  non-seulement  on 
7  retrouve  cette  émotion  vraie  et  ces  larmes  du  cœur;  mais  il 
B*y  ajoute  un  plaisir  aujourd'hui  bien  rare ,  celui  de  rencontrer 
un  écrivain  qui  estime  assez  ses  lecteurs  pour  leur  parler 
eonstamment  un  langage  pur,  harmonieux  et  délicat.  G.  P. 


Histoire  de  la  Ilttératore  française  depuis  «on  origine 
loMin'A  la  Renalssanee,  par  Charles  GrocL,  professeur  de  rfaéto- 
nqne  au  lycée  Fontanes,  lauréat  de  l'Académie  française  et  de  TAcadémie 
des  inscriptions  et  belles-lettres.  Paris,  Alphonse  Lemerre,  1875.  Petit 
in-i2  de  ii-472  p.  (Lirres  d'enseignement  :  édition  à  l'usage  des 
classes).  —  Prix  :  2  fr.  50. 

La  littérature  française  du  mojen  âge  n'occupe  à  peu  près  aucune 
place  dans  l'enseignement  de  nos  Ijcées,  et  j'ajouterai  de  nos  facultés. 
n  est  vrai  qu'on  l'enseigne  à  Rostock,  sur  les  bords  de  la  mer  baltique. 


—  38  - 

et  à  Marbourg»  dans  la  Heiiise  éleotorale.  Les  innombrables  prodactions 
du  génie  français,  durant  cette  grande  période,  ont  pourtant  été  Tobjet, 
même  en  France,  d'études  assez  riches  en  résultats,  pour  qu^un  exposé 
clair  et  suffisamment  exact,  orné  de  citations  choisies,  ne  «oit  pas 
impossible  à  faire  dans  les  classes  de  rhétorique  et  de  philosophie. 
M.  Oidel  a  voulu,  sans  doute,  y  inciter  ses  collègues  et  leur  faciliter 
la  tâche,  en  publiant  le  livre  dont  nous  donnons  le  compte  rendu.  Il  le 
destine,  comme  nous  rapprend  sa  préface,  à  la  jeunesse  et  aux  gens 
du  monde,  qui  ne  sont  guères,  en  effet,  mieux  instruits  de  nos  origines 
littéraires  que  les  écoliers  et  leurs  professeurs.  Son  intention  ne 
mérite  que  des  éloges,  mais  il  n'en  est  pas  de  même  de  Texécution, 
Suivant  une  vieille  habitude  à  laquelle  l'Université  ferait  bien  de  renon- 
cer, M.  Gidel  ne  s'est  aucunement  soucié  de  s'assimiler  d'abord,  par 
une  étude  sérieuse,  la  matière  nouvelle  qu'il  se  chargeait  de  professer 
par  écrit.  Ce  n'est  pas  un  bon  précis  qu'il  nous  donne,  mais  une  très- 
médiocre  compilation.  Ses  ciseaux  ont  plus  travaillé  que  sa  plume  et 
surtout  que  son  intelligence  et  que  sa  mémoire.  Il  n'a  même  pas  cher- 
ché à  se  faire  une  idée  nette  de  la  valeur  propre  et  de  la  valeur  com- 
parée des  travaux  qu'il  a  consultés,  des  livres  qu'il  a  découpés  au 
hasard  de  ses  ciseaux,  u  Nous  avons  puisé,  dit-il,  dans  les  vingt-six 
volumes  de  V Histoire  littéraire  de  la  France;  nous  n'avons  négligé  aucun 
des  livres  modernes  où  nous  pouvions  nous  instruire.  Yillemain  et 
M.  D.  Nisard  nous  ont  souvent  servi  de  guides.  Nous  avons  largement 
emprunté  à  MM,  J.-V,  Leclerc,  Littré,  P,  Paris,  Guessard,  Léon  Gau- 
tier, Brachet,  Pellissier,  etc.  »  Il  a  même  trouvé  moyen  d'emprunter 
quelque  chose  à  V Antéchrist  de  M.  Renan,  Il  ne  se  met  pas  en  peine 
d'accorder  entre  eux  ses  auteurs,  dont  il  rapporte  pêle-mêle  les  opi- 
nions les  plus  diverses.  Les  textes  qu'il  cite,  surtout  les  textes  envers, 
sont  écorchés  maintes  fois  d'une  jolie  façon.  Il  y  en  a,  par  parenthèsCi 
qui  sont  fort  déplacés  dans  un  livre  à  l'usage  des  classes.  La  doctrine 
de  M.  Gidel  n'est  pas  plus  sûre  que  sa  science.  Tout  cela  est  fâcheux, 
d'autant  plus  qu'il  a  un  remarquable  talent  d'exposition,  beaucoup  de 
goût  et  de  tact  littéipaires,  et  qu'il  pouvait  faire  un  bon  livre  en  tra- 
vaillant. Marius  Sbpet. 


Gataloipo  del  codiol  pefrarcbeschl  itelle  Blfillotecbo  Bnr« 
berloa,  <*hlf|liina«  Corslnlaoa.  Valllcelllano  e  Vaticana, 

compilato  da  E.  Narducct,  bibl.  délia  Alessadrina.  Turin,  Rome,  Florelice, 
Ermanno  Loeschcr,  1874,  In-8  de  vn-101  p, 
I  Xrlomfl  dl   F»  Petraroot  corratU  nel  tasto  e  rlordlnatl* 

per  cura  di  Crtstoforo  Pasqualtgo.  Venise,  1874,  In-8  de  128  p.  Tiré  à 
300  exemplaires.  —  PrIx  :  5  fr. 

Le  centenaire  de  Pétrarque,  comme  Ton  devait  s'y  attendre,  a  pro- 
voqué de  nombreuses  publications  inspirées  par  le  poète.  Tels  sonti 


-  39  — 

entra  aotret,  lea  deax  livres  dont  noaa  venona  d'écrire  lea  titrea.  Le 
premier  est  un  catalogue  de  tous  lea  manaacrita/ïe^rorcAeirAt  oonaervéa 
dana  lea  bibliothèqaea  publiqaea  de  Rome  qui  n'appartiennent  paa  à 
l'État.  C'eatla  trèa-utile  continuation,  ou  plutôt  c'est  le  complément 
d'une  publication  entreprîae  par  le  gouvernement  italien,  et  qui  a  eu 
pour  aujet  la  deacription  de  toua  lea  manuscrita  de  même  nature  faisant 
partie  de  aea  propres  bibliothéquea.  M.  Narducci  s'est  consciencieuse* 
ment  acquitté  de  la  t&che  qu'il  s*est  donnée,  et  a  complété  ses  recher- 
ches par  la  nomenclature  des  éditions  de  Pétrarque  existant  dans  les 
grandes  collections  publiques  de  Rome.  Ces  éditions,  un  admirateur 
passionné  de  Tamant  de  Laure,  Marsand,  les  avait  presque  toutes  réu- 
nies, ainsi  que  d'autres  œuvres  relatives  au  poète.  Le  roi  Charles  X  fit 
l'acquisition  de  cette  précieuse  bibliothèque,  qui  se  composait  de 
862  Yolumes,  et  la  plaça  au  Louvre.  Elle  a  été  détruite  dans  Tincendie 
allumé  par  les  communards.  Le  catalogue  dressé  avec  tant  de  soin  par 
M.  Narducci  ne  noua  rend  certes  pas  ces  livres,  dont  beaucoup  étaient 
bien  rares,  mais,  dune  certaine  manière,  supplée  un  peu  à  leur  dispari- 
tion. 

—  M.  Cristoforo  Pasqualigo,  connu  par  une  traduction  de  Shakes- 
peare, a  voulu  fêter  le  centenaire  de  Pétrarque  en  nous  donnant  un 
meilleur  texte  de  l'une  des  ôsuvres  du  poëte  qui  a  été  le  plus  défigurée  : 
let  Triomphes,  L'édition  de  Pétrarque  la  plus  estimée  jusqu'ici,  et  que 
Brunet  déclare  la  meilleure,  est  celle  qui  fut  publiée,  en  1819,  par 
A.  Marsand,  dont  nous  parlions  tout  à  l'heure.  Suivant  M.  Pasqualigo, 
c'est  là  une  réputation  usurpée,  et  l'on  doit  s'étonner  de  l'aveugle  ser- 
vilité avec  laquelle  ce  texte  a  été  si  souvent  reproduit.  Une  autre 
édition  de  Pétrarque,  assez  mal  traitée  dana  le  Manuel  du  Libraire^ 
fut  imprimée  à  Vérone,  en  1799,  parles  soins  de  l'abbé  Jacopo  Morelli. 
Elle  offre  des  détails  fort  intéressants  donnés,  au  seizième  siècle,  par 
Lodovico  Beccodelli,  sur  les  leçons  originales.  Beccodelll  vit  une  partie 
de  ces  autographes,  en  15%,  entre  les  mains  du  cardinal  Bembo.  Les 
autres  lui  furent  montrés  par  Baldassare  de  Pescia  qui,  ajoute-t-il, 
«  lea  avait  eua  2je  ne  sais  d'où  pour  lea  envoyer  à  Françoia,  roi  de 
France,  comme  il  le  fit*  »  Où  aont  cea  textea  aujourd'hui  ?  On  l'ignore. 
Dea  oeuvrea  italiennea  de  Pétrarque,  on  ne  connaît  plua,  de  sa  main, 
qu'un  fragment,  conservé  à  la  bibliothèque  du  Vatican,  contenant 
environ  quatre-vingt-dix  sonnets  et  seulement  une  partie  du  chapitre  m 
des  Triamfi.  C'est  cette  dernière  œuvre  dont,  nous  l'avons  dit,  M.  Pas- 
qualigo a  entrepria  de  donner  une  leçon  meilleure.  Quand  il  commença 
ce  travail,  en  1867,  son  dessein  était  seulement  de  corriger  un  texte 
défectueux;  puis,  peu  à  peu,  il  pensa  que,  confrontant  ainsi  tous  les 
manuscrita  qui  aont  à  Venise,  il  pourrait  atteindre  un  autre  but, 
reconstruire,  autant  que  possible,  l'original  perdu.  «  J'ai  choisi,  dit-il. 


-  40  - 

parmi  les  variantes  les  plus  importantes^  pour  le  dessein  que  je  ma 
proposais,  qui  était  de  retrouver  la  vraie  leçon,  de  refaire  l'auto- 
graphe de  Pétrarque. Parmi  ces  variantes,  quelques-unes  ne  concourent 
pas  au  but  que  je  me  proposais  ;  mais  j'ai  cru  qu* elles  pouvaient  avoir 
leur  utilité  pour  ceux  qui,  dans  d'autres  villes  d'Italie,  voudront  les 
comparer  aux  manuscrits  qui  s'y  trouveraient.  D'abord,  j'avais  eu 
ridée  de  publier  toutes  ces  variantes,  pensant  qu'il  serait  utile  de  con- 
naître même  celles  qui  semblent,  et  qui  sont,  en  effet,  si  souvent  des 
erreurs  de  copiste,  parce  que  ces  erreurs  peuvent  servir  à  en  expliquer 
d'autres  analogues,  et,  en  outre,  amener  &  la  connaissance  plus  exacte 
de  la  famille  des  manuscrits  et  à  mieux  distinguer  les  passages  où  le 
poëte  avait  le  plus  insisté  sur  un  travail  de  correction.  Depuis,  je  me 
décidai  à  remettre  à  d'autres  temps  cette  publication  entière.  » 

Tout  en  reconnaissant  que  le  texte  nouveau  semble  trés-amélioré, 
tout  en  applaudissant  à  des  travaux  de  ce  genre,  nous  nous  permet- 
trons d'exprimer  une  crainte  :  qu'on  prenne  garde  de  ne  pas  se  laisser 
entraîner  trop  loin  et  trop  à  l'allemande  par  ces  recherches  et  ces 
confrontations  de  variantes.  La  critique  grammaticale  pourrait  fort 
bien  finir  par  tuer  la  critique  littéraire.  Occupé  à  regarder  à  la  loupe 
de  tout  petits  détails,  on  finira  par  oublier,  dans  la  contemplatioa 
et  l'examen  de  modifications  souvent  insignifiantes,  ce  qui  a  fait  le 
mérite  des  grands  écrivains,  et  par  ne  plus  voir  que  des  mots  où  ceux- 
ci  ont  mis  des  pensées.  Th.  db  Putmaiorb. 

Aide  Manuce  et  l*liellénl«me  êk  Venise»  par  Ambhoise  Fjrmin  Didot, 
de  rAcadémie  des  inscriptions  et  belles-lettres.  Paris,  Didot,  4875,  in-8 
de  LxviiT-646  p.  — Prix  :  8  fr. 

M.  Didot  n'hésite  pas  à  dire  (p.  3)  que  la  meilleure  part,  dans  les 
merveilles  de  la  renaissance ,  revient  peut-être  à  l'influence  des 
chefs-d'œuvre  de  la  Grèce  et  à  leur  propagateur  enthousiaste,  Aide 
Manuce.  Ne  nous  étonnons  donc  pas  s*il  a  consacré  tout  un  gros 
volume  à  la  biographie  d'un  homme  dont  le  rôle  a  été  si  considérable 
et  si  brillant.  On  s'était  déjà  beaucoup  occupé  d'Aide  Manuce,  et 
M.  Didot  a  soin  de  rappeler  (p.  57  et  58)  tous  les  travaux  anté« 
rieurs  au  sien  publiés  soit  en  France,  soit  on  Italie.  Je  doute  que  désor- 
mais on  ait  à  revenir  sur  un  sujet  que  le  vaillant  académicien  a  traité 
avec  tant  d'amour  et  tant  de  savoir.  Autour  du  récit  de  la  vie  et  de 
l'appréciation  des  publications  du  grand  imprimeur,  M.  Didot  a  réuni 
des  renseignements  du  plus  haut  intérêt  sur  l'hellénisme  dans  TOcci- 
dent,  principalement  en  Italie,  sur  Isabelle  d'Esté,  marquise  de 
Mantoue,  sur  la  correspondance  inédite  des  réfugiés  grecs  en  Italie, 
sur  Zacharias  Galliergi  et  les  calligraphes  crétois ,  sur  les  premières 
impressions  grecques,  etc.  M.  Didot,  on  peut  le  dire,  nous  faitcon- 


—  41  — 

naître  noa-Beulement  Aide  Manuce,  mais  encore  toute  l'histoire  litté- 
raire de  répoque  où  a  véca  cet  illustre  père  de  rimprimerie  italienne. 
Parmi  les  nombreux  documents  groupés  à  l'appendice  (p.  433-622),  on 
remarque  les  statuts  de  TAcadémie  aldine,  le  testament  d'Âlde ,  un 
poème  grec  de  Marc  Musurus,  des  lettres  inédites  écrites  en  grec  par 
le  mâme,  etc.  Le  volume  est  orné  de  trois  portraits  qui  représentent 
AldeManuce  d'après  une  estampe  du  temps,  Isabelle  d'Esté  d'après  la 
gravure  de  Worsterman,  Marc  Musurus  d'après  la  gravure  de  Tobias 
Stimmer.  Indiquons  encore  la  reproduction  du  tombeau  du  prince  de 
Garpi  (Alberto  Pio)  et  un  fac-similé  de  l'écriture  de  Marc  Musurus.  Une 
abondante  table  analytique  rend  aussi  faciles  que  possible  toutes  les 
recherches  dans  ce  livre  où  sont  contenues  tant  de  choses,  et  qui  est 
presque  un  recueil  encyclopédique.  Terminons  en  citant  ces  paroles  de 
l'auteur,  qui  résument  si  bien  son  ouvrage  (p.  431):  «  Pour  moi,  si  des 
documents  nouveaux,sila  connaissance  plus  complète  que  j'ai  pu  donner 
sur  la  vie  privée  et  publique  d'Aide,  en  traduisant  les  nombreuses  pré« 
faces  qu'il  adressait  aux  hommes  les  plus  distingués  de  son  temps,  ont 
ajouté  encore  à  sa  gloire  et  répandu  une  plus  vive  lumière  sur  son 
mérite,  je  me  féliciterai  d'avoir  pu  exhausser  d'un  degré  la  base  de  la 
statue  que  l'Italie  ne  saurait  différer  d'élever  à  Aide  Manuce.» 

T.  DE  L. 


Eie  P.  Liejeune,  «a  vie,  «ou  oeuvre,  «o*  «ermon*,  par  Tabbé 
G.  Renocx,  docteur  es  lettres  et  professeur  d^histoire  à  la  faculté  de  théo-. 
logie  d'Aix.  Paris,  Bray  et  ^Retaux,  4875.  In-8  de  xi-357  p.  —  Prix  : 
5&. 

Le  P.  Lejeune,  le  célèbre  missionnaire  de  l'Oratoire,  méritait  bien 

d'être  le  si^et  d'une  étude  sérieuse  et  approfondie.  Né  en  1592,  à 

Ddle,  comme  le  prouve  son  nouvel  historien  par  les  registres  de  l'état 

civil  de  cette  ville,  Jean  Lejeune  commença,  dès  l'âge  de  quinze  ans,  à 

faire  le  catéchisme  aux  villageois  qu'il  allait  chercher  à  la  campagne. 

Devenu,  en  1618^  membre  de  la  Congrégation  fondée  par  le  cardinal 

de  Bérulle,  après  de  sérieuses  études  de  théologie  et  d'Ecriture  sainte, 

il  commença,  vers  1619,  sa  carrière  de  prédicateur  qui  ne  devait  finir 

qu*en  1072.  Il  prêchait  le  carême  à  Rouen,  vers  1639,  lorsqu'il  fut 

victime  d'un  accident  subit  qui  semblait  devoir  lui  interdir  à  jamais 

l'exercice  de  la  chaire.  Pendant  un  de  ses  sermons,  une  sorte  de 

nuage  passa  brusquement  sur  ses  jeux.  Il  fit  une  légère  pause,  passa 

la  main  sur  ses  yeux  et  reprit  comme  si  de  rien  n'était.  Mais  quand  il 

eut  fini  de  parler,  il  étendit  les  mains  pour  chercher  les  degrés  qu'il 

ne  voyait  plus  ;  il  demanda  qu'on  vint  l'aider  à  descendre  :  il  était 

devenu  complètement  aveugle.  Il  n'en  continua  pas  moins  de  prêcher 

pendant  plus  de  quarante  ans  encore.  En  1671,  il  tomba  malade  en 

prêchant  une  mission  près  de  Limoges,  qui  était  sa  résidence  habi- 


—  «  — 

taelle  depuU  1661.  Sa  maladie  dura  dix-neuf  mois.  Il  faisait  rassem- 
bler  dans  sa  chambre  les  petits  enfants  et,  de  son  lit,  il  leur  ensei- 
gnait le  oatéchisme.  Il  mourut  le  19  août  1672,  à  l'âge  de  80  ans. 
Il  n'a  pas  laissé  moins  de  trois  cent  soixante-deux  sermons.  Il  les  publia 
lui-mâme  à  Toulouse,  à  partir  de  1662.  Les  éditions  complètes  de  ses 
sermbns(Toulou8e,  1688;  Paris,  1671-1677),  ont  dixgrosYolumesin-S. 
M.  l'abbé  Renoux  a  placé  à  la  fin  de  son  travail  une  note  bibliogra- 
phique très-intéressante  et  très  -bien  faitesur  les  œuvres  du  P.  Lejenne. 
Le  goût  n'était  pas  encore  très-épuré  en  France  à  Tépoque  où  prê- 
chait le  missionnaire  de  l'Oratoire  :  c'est  ce  qui  explique  quelques* 
uns  des  défauts  de  ces  sermons.  Mais  malgré  quelques  biiarreries  de 
langage,  des  citations  grecques  et  profanes  qui  étaient  encore  alors 
en  usage  et  des  tournures  ou  des  expressions  vieillies,  ses  œuvres 
sont  une  mine  des  plus  précieuses.  Aucun  autre  cours  d'instruction 
religieuse  ne  peut  être  comparé  au  sien  pour  la  sagesse  de  la  méthode 
et  pour  la  richesse  des  pensées,  pour  l'ampleur  de  la  doctrine  et  l'ha- 
bileté avec  laquelle  le  prédicateur  se  met  à  la  portée  de  tous.  Il  est 
bien  au-dessous,  sans  doute,  de  Bossuet  et  de  Bourdaloue,  mais  sa 
prédication  est  un  modèle  plus  accessible  au  grand  nombre  que  celle 
de  ces  grands  orateurs.  On  a  souvent  dit,  non  peut-être  sans  raison, 
que  les  génies  de  la  chaire  française  au  dix-septième  siècle  avaient 
nui  grandement  au  clergé  qui  s'était  cru  obligé  de  s'efforcer  de  les 
imiter.  On  n'aurait  pu  lui  adresser  ce  reproche,  s'il  s'était  appliqué  à 
marcher  sur  les  traces  du  P.  Lejeune.  Massillon  conseillait  l'étude  du 
P.  Lejeune  à  ses  prêtres  du  diocèse  de  Clermont  ;  lui-même  l'étudiait 
et  s'en  trouvait  bien,  a  Ce  sermonnaire,  disait-il,  est  un  excellent 
répertoire  pour  un  prédicateur  et  j'en  ai  profité.  »  M.  l'abbé  B.enoux 
donne,  en  effet,  des  preuves  des  emprunts  faits  par  l'illustre  évêque 
de  Clermont  au  prédicateur  qui  l'avait  précédé  à  l'Oratoire  et  de 
l'habile  parti  qu'il  a  su  en  tirer.  M.  Renoux  démontre  aussi  très-bien 
l'excellence  des  sermons  du  P.  Lejeune.  Il  a  étudié  son  siyet  sous 
tous  les  aspects  et  avec  un  véritable  amour.  Il  intéresse  également 
quand  il  nous  montre  Thomme,  le  religieux^  le  prédicateur  et  son 
œuvre,  soit  qu'il  considère  son  héros  isolément,  soit  qu'il  le  replace 
dans  le  milieu  où  il  a  vécu.  Son  livre  sera  également  utile  aux  litté- 
rateurs et  aux  prédicateurs.  Les  premiers  pourront  bien  lui  reprocher 
quelques  négligences  de  style  et  même  quelques  inoorreotions  (par 
exemple,  p.  84|  115,  325);  les  seconds  s'étonneront  qu'il  fasse  un  si 
grand  éloge  de  la  manière  dont  le  P.  Lejeune  savait  se  servir  de 
l'Écriture  sainte  et  des  Pères,  sans  en  citer  un  seul  exemple,  mais  les 
uns  et  les  autres  lui  pardonneront  volontiers  ces  lacunes  ou  ces 
défauts,  ravis  qu'ils  seront  par  les  qualités  solides  de  cette  étude 
consciencieuse  du  missionnaire  de  l'Oratoire.  G*  K. 


-  43  - 

HISTOIRE 

E.«Annom  et    le  Gambodge,  vùyages  et   notices  historiques,  par  le 

R.  P.  C.  E.  BouiLLBVAUX,  missionnaire.  Paris,  Palmé,  1874.  în-8  de 544  p. 

avec  carte.  —  Prix  :  6  fir. 

Depuis  la  conquête  de  la  Basse-Cochinchine,  accomplie  par  la 
France  en  1866,  et  Textension  de  notre  protectorat  sur  le  reste  de 
TEmpire  d'Annam,  nous  avons  vu  se  multiplier  les  publications  rela- 
tives à  ce  pays.  Cela  ne  veut  pas  dire,  sans  doute,  qu'il  soit  encore 
bien  connu  parmi  nous.  Il  nous  reste, sur  ce  point, beaucoup  à  apprendre 
et  Ton  doit  saluer  avec  reconnaissance,  Tapparition  de  tout 
ouvrage  nouveau,  nous  renseignant  sur  l'état  tant  passé  que  présent 
de  notre  colonie  orientale.  Tel  nousparaît  être  notamm^pt  le  cas  pour 
le  travail  du  R.  P.  Bouillevaux.  Il  possède,  à  un  haut  degré,  toutes 
les  qualités  désirables  pour  un  livre  de  ce  genre.  L'auteur  a  longtemps 
habité  l'Àiinam,  une  première  fois  en  qualité  de  missionnaire,  au 
temps  des  persécutions,  la  seconde  en  qualité  de  curé  du  village  de 
Choquan,  dans  la  Cochinchine  française.  Son  caractère  de  prêtre,  les 
devoirs  de  son  ministère  le  mirent  à  mêipe  de  pénétrer  dans  l'intérieur 
des  familles  Indigènes,  de  s'initier  à  leurs  mœurs,  croyances,  usages 
bien  mieux  que  ne  l'aurait  pu  faire  n'importe  quel  voyageur  ou  quel 
fonctionnaire*  Le  tableau  qu'il  nous  trace,  tant  au  physique  qu'au 
moral  n'a  réellement  rien  de  très-flatteur.  Il  nous  les  dépeint  fourbes, 
rapaces,  dissimulés,  vaniteux,  serviles,  dissolus,  livrés  à  leur  fantaisie 
et  caprices  et  peu  capables  d'un  travail  suivi.  Toutefois,  il  leur  rend 
justice  sur  d'autres  point,  les  jugeant,  en  ce  qui  concerne  l'intelligence 
et  l'énergie,  supérieurs  &  leurs  voisins,  les  Siamois,  ainsi  qu'à  la  plu- 
part des  autres  races  de  Tlndo-Chine.  Ajoutons  que  l'Annam  paraît  être, 
avec  le  Japon,  de  tous  les  pays  de  l'Eitrôme-Orient,  celui  ou  la  religion 
catholique  se  trouve,  à  la  fois,  le  plus  favorablement  accueillie  des 
populations  et  le  plus  cruellement  persécutée  -par  le  gouvernement. 
C'est  ce  qui  ressort  bien  clairement  de  l'histoire  des  missions  dans  ce 
pays,  telle  que  nous  la  donne  notre  savant  auteur,  histoire  qui  s'étend 
depuis  le  deuxième  quart  du  dix-septième  siècle  jusqu'à  nos  jours. 
Les  progrès  de  la  foi  chrétienne  eussent  été,  vraisemblablement,  bien 
plus  rapides  encore,  sans  les  déplorables  querelles  qui  éclatèrent  entre 
plusieurs  dignitaires  ecclésiastiques  et  missionnaires  de  divers  ordres. 

La  plus  grande  partie  de  l'ouvrage  du  R.  P.  BouiUevaux  et  celle 
aussi,  peut«étre,  qui  captivera  Tattention  du  public,  est  consacrée  à 
l'histoire  de  l'Annam  et  des  régions  avoisinantes,  à  partir  des  temps 
les  plus  reculés.  L'éclat  jeté  jadis  par  le  royaume  de  Cambodge  ou  des 
Khmen,  les  raines  magnifiques  qui  attestent  ai:gourd'hui  encore 
Taneienne  puissance  de  ses  souverains  nous  engagent  à  consacrer  au 
moins  quelques  lignes  à  l'étude  de  ses  annales.  Fondé  vers  le  premier 


-  44  - 

siècle  de  notre  ère,  etpeat-étre  même  un  pea  ayaot,  par  des  Bond* 
dhistes  venus  de  rindo8tan«  cet  État  précéda  toutes  les  autres  régions 
de  la  péninsule  tranagangétique  dans  les  voies  de  la  civilisation. 
L* autorité  de  ses  souverains  était  reconnue  au  loin,  et  les  princes 
siamois  eux-mômes  lui  étaient  unis  par  les  liens  d'une  sorte  de 
vasselage.  Mais  toute  cette  prospérité  devait  avoir  un  terme  rapide. 
L'histoire  du  Cambodge  ne  commence  guère  à  se  débrouiller  un  peu 
qu'à  partir  du  treizième  siècle.  Il  nous  apparaît  alors  dans  un  état 
assez  florissant,  bien  que  déchu  de  sa  splendeur  première.  Les  perpé« 
tuels  envahissements  des  Siamois  d'une  part,  des  Annamites  de  l'autre, 
ne  tardent  point  à  hâter  sa  décadence. 

Le  roi  Préa-Ang-Chung  qui  vivait  vers  l'an  1550,  et  son  fils  Préa- 
Borom-Réachea  rendirent  quelque  lustre  aux  armes  cambodgiennes. 
A  l'aide  d'aventuriers  de  toute  nation,  parmi  lesquels  se  trouvaient  un 
certain  nombre  d'Européens,  ils  défirent  à  plusieurs  reprises  les  troupes 
siamoises  et  laociennes  ;  mais^  à  partir  de  cette  époque,  l'Empire 
Khmer  entra  dans  une  seconde  période  de  décadence,  dont  il  ne  s'est 
jamais  relevé.  C'est  vers  ce  temps-là  que  la  ville  métropole  d'Angcor- 
la-Orande  fut  abandonnée  sans  retour.  Actuellement  le  Cambodge 
ne  constitue  plus  qu'un  petit  État  sans  importance.  Placé  sous  la 
suzeraineté  de  la  France,  il  a  pour  roi  S.  M.  Préa-Nérodom  dont  nous 
avons  pu  contempler,  sinon  admirer  la  statue  en  bronze^  au  Champs- 
Élysées. 

Moins  brillants  furent  les  débuts  de  la  nation  des  Ctao-cAt,  prédéces- 
seurs des  Annamites  actuels,  auxquels  la  supériorité,  au  moins  rela- 
tive de  leur  organisation  civile  et  militaire,  permit  de  jouer  un  rôle  si 
important  dans  l'histoire  moderne  de  ces  régions.  Jusque  vers  le  troi- 
sième siècle  avant  notre  ère,  ils  ne  formaient  que  des  groupes  de 
petites  tribus,  aussi  sauvages  que  le  sont  aujourd'hui  encore  les 
GédanySflesBanhars  et  autres  peuplades  de  l'intérieur.  Alors  la  civili- 
sation du  Céleste-Empire  commence  à  se  répandre  sur  tout  le  littoral 
du  golfe  de  Tonking  et  les  Chinois  s'établissent  en  maîtres  dans  ce 
pays.  Leur  domination,  après  avoir  duré  plus  de  douze  siècles,  est 
enfin,  vers  Tan  907  de  notre  ère,  remplacée  par  celle  de  plusieurs 
dynasties  indigènes.  De  1414  à  1428,  l'Annam  retombe  sous  le  joug 
chinois,  mais  parvient  à  s'en  affranchir  d'une  façon  définitive.  Ce  pays 
psraît  avoir  atteint  un  haut  degré  de  prospérité  sous  le  règne  de  Lé- 
Thang-tong,  de  la  dynastie  des  Lé,  vers  le  milieu  du  dix-huitième 
siècle.  L'Annam  tombe  alors  dans  l'anarchie  et  voit  la  famille  des 
Mac  disputer  le  pouvoir  à  la  race  des  anciens  monarques.  Le  Tonking 
et  la  Cochinchine,  reconnaissant  des  souverains  différents,  mènent 
une  existence  politique  séparée  pendant  près  d'un  siècle.  Enfin^  Gia- 
longy  prince  célèbre  et  ami  des  Français,  réunit  de  nouveau  tout  TAn- 


—  4o  — 

nam  sous  son  sceptre.  On  connaît  assez  les  méfaits  do  son  successeur, 
Mièn-M ing  et  la  guerre  cruelle  qu'il  déclara  au  christianisme.  Enfin^ 
ce  sont  les  persécutions  de  Tempereur  actuel  Tu-duc  qui  déterminè- 
rent rintervention  hispano-française,  et  nous  valurent  l'acquisition 
d'une  nouyelle  et  florissante  colonie. 

Si  Ton  8*en  rapporte  au  témoignage  de  notre  auteur,  qui  paraît  un 
hon  juge  en  cette  matière ,  nous  serions  loin  d'avoir  tiré  de  cette 
acquisition,  le  meilleur  parti  possible.  Sans  doute,  des  travaux  d'une 
utilité  incontestable  ont  été  entrepris  et  menés  à  bonne  fin,  mais  la 
dépense  se  trouve *t-elle  toujours  en  rapport  avec  le  résultat  obtenu? 
Plus  d'une  fois  même  notre  administration  est  tombée  dans  certains 
abus  qu'aurait  su  éviter  le  gouvernement  des  monarques  indigènes. 
Ce  dernier  prohibait  l'usage  de  l'opium,  nous  Pavons  affermé,  et  si 
Ton  y  trouve  la  source  de  gros  bénéfices,  ce  n'est  qu'au  détriment  de 
la  santé  et  de  la  bourse  des  habitants.  Le  respect  du  lien  conjugal  se 
trouvait  garanti  par  certaines  lois^  certains  règlements  que  nos  tribu- 
naux d'outre-mer  ont  laissé  tomber  en  désuétude.  Enfin,  sans  prétendre 
porter  la  moindre  atteinte  au  principe  de  la  liberté  de  conscience, 
ne  serait-il  pas  d'une  bonne  et  habile  politique  de  se  préoccuper,  un 
peu  plus  qu'on  ne  l'a  fait  jusqu'à  présent,  de  la  conversion  des  Anna- 
mites? N'oublions  pas  que  tout  indigène  qui  embrasse  la  foi  catholique 
devient  par  là  même  ami  de  la  France,  et  l'exemple  de  récentes  insur- 
rections prouve  assez  ce  que  nous  avons  à  craindre  des  populations 
restées  païennes.  Qu'il  nous  soit  permis,  en  terminant,  de  recomman- 
der l'ouvrage  du  P.  Bouillevaux  à  tous  ceux  qu'intéressent  la  grandeur 
de  notre  pajs,  la  gloire  de  la  religion  et  l'étude  des  races  de  l'Asie 
orientale.  H.  de  Charencby. 


•ou venir*  du  pays  de  sainte  Xbérése»  par  F.-X.  Plasse,  cha- 
noine honoraire,  professeur  d'histoire,  membre  titulaire  de  TAcadémie 
des  sciences,  lettres  et  arts  de  Clennont-Ferrand.  Paris,  Victor  Palmé, 
iS78.  In-8  de  vii-320  p.  —  Prix  :  5  fr. 

Tout  le  monde  connaît  le  Pèlerinage  au  pays  du  Cid  d'Ozanam. 
M.  l'abbé  Plasse  a,  lui  aussi,  été  attiré  au-delà  des  Pyrénées  par  une 
mémoire  illustre.  Deux  fois  il  est  allé  au  pays  de  sainte  Thérèse  pour 
7  voir  les  lieux  où  elle  a  vécu,  pour  7  recueillir  les  traces  de  son  pas- 
sage sur  cette  terre.  Le  livre  qu'a  produit  une  si  fervente  admiration 
n'est  donc  pas  une  monographie  :  il  contient  des  détails  biographiques 
sur  la  sainte  ;  mais  Us  sont  mêlés  à  des  descriptions  de  sites,  de  villes, 
à  des  impressions  de  voyage  qui  donnent  à  ce  volume  un  caractère 
particulier.  En  lisant  Fouvrage  de  M.  Plasse,  on  sent  qu'il  a  été  écrit 
avec  une  sorte  d'enthousiasme.  Ce  respect,  ce  pieux  amour  de  l'auteur 
pour  celle  qui  a  été  le  but  de  son  pèlerinage,-  se  communique  souvent 
au  lecteur.  Celui-ci,  si  les  questions  littéraires  l'intéressent,  pourra. 


—  46  — 

toutefois,  regretter  que  M.  Fiasse  ne  se  soit  pas  un  peu  plus  occupé 
des  productions  si  remarquables  qui  ont  valu  à  Thérèse  de  Jésus  un 
rang  élevé  dans  l'histoire  des  lettres  espagnoles.  Les  imitations  de 
poésies  de  la  sainte,  essayées  par  l'auteur,  manquent  d'essor  lyrique 
et  mieux  eût  valu  les  traduire  en  prose  que  de  vouloir  faire  rimer  créée 
et  graoée,  trouver  et  chercher.  Quant  à  la  correspondance  de  Thérèse  de 
Jésus,  correspondance  si  considérable,  s^adressant  à  tant  de  person'- 
nages  divers,  des  évéques,  des  hommes  d'État,  des  savants,  des  poëtes, 
des  femmes,  renfermant  des  conseils  pour  tant  de  situations  di£fé* 
rentes;  quant  à  toutes  ces  lettres  qui  forment  quatre  volumes^  ont- 
elles  été  lues  assez  attentivement  par  l'auteur?  Disons-le  encore, 
M.  Fiasse  s^est-il  toujours  assez  soigneusement  transporté  à  l'époque 
qu'il  cherchait  à  faire  connaître.  Il  y  a,  dans  son  livre,  par  ci  par  là, 
des  manières  de  dire  qui  produisent  des  tons  faux.  On  est  surpris,  par 
exemple,  de  voir  des  inquisiteurs  appelés  des  mesêieurs  :  u  des  mes- 
sieurs avaient  frappé  à  la  porte  voisine  en  prononçant  les  parolei 
sacramentelles  :  Ouvrez  au  Saint* Ofdoe.  »  Ailleurs,  il  est  parlé  de 
madame  Guiomar. 

Il  y  a  quelques  années,  on  nous  a  tant  entretenus  de  couleur  locale 
qu'il  a  pu  nous  rester  sur  ce  point  des  susceptibilités  exagérées,  mais  il 
eût  été  facile  à  l'auteur  de  les  ménager,  car  il  ne  manie  pas  la  plume 
sans  tact  et  sans  habileté.  Il  n*a  pas  cru  pourtant  que  c'était  assez  de 
cette  plume  pour  peindre  le  pays  de  Thérèse  de  Jésus,  il  a  pris  les 
photographies  des  cités,  des  paysages,  des  monuments  auxquels  se 
rattache  le  souvenir  de  la  sainte,  elies  sont  reproduites  dans  de  nom- 
breuses gravures  qui  font  de  ce  livre  une  édition  de  luxe  et  le  rendent 
très-propre  &  être  donné  en  prix.  Il  nous  semble  qu'on  peut,  sans  scru- 
pule, indiquer  cette  destination  quand  on  a  lu  l'approbation  si  complète 
dont  M.  le  vicaire  général  de  Clermont-Ferrand  a  honoré  le  pieux 
voyage  de  M.  l'abbé  Fiasse.  Th.  dr  Fuymaiqrb. 

dbronlque  die  Robert  de  Tori^ny*  abbé  du  Mont-Salot- 
MIcbel»  suivie  de  divers  opuscules  historiques  de  cet  auteur  et  de  plusieurs 
religieux  de  la  même  abbaye ,  le  tout  publié  d'après  les  manuscrits  ori- 
ginaux, par  LtopOLD  Dklislb.  Rouen,  1872-73,  2  voL  gr.  ia-8  de  lxxi-371 
et  xix-4i8  p.  —  Prix  :  24  fr. 

Né  à  Torigny-sur-Vire,  Robert  prit  l'habit  de  saint  Benoit  au 
monastère  du  Bec  en  1128,  devint  abbé  du  Mont-Saint-Michel  en  1164« 
et  mourut  en  1186,  le  23  ou  le  24  juin.  Une  édition  collective  de 
ses  nombreux  opuscules  historiques^  entreprise  il  y  a  plus  de  vingt 
ans  par  M.  Léopold  Delisle,«forme  les  deux  volumes  ci-dessus,  publiée 
sous  les  auspices  de  la  Société  de  l'histoire  de  Normandie. 
En  voici  le  contenu,  qui  montre  tout  ce  que  la  sagacité  du  savant 
éditdur  a  su  dérober  aux  injures  du  temps.  Chronique  de  Roberl  de 


—  47  - 

Torigny  :  première  partie  ou  supplément  aux  ehroniques  d'fiusèbe, 
de  saint  Jérôme,  de  Prosper  et  de  Sigebert,  an  98-1180  (I,  l-Ol), 
prologue  de  la  chronique  proprement  dite  (01-7)  ;  lettre  de  Henri  de 
Huntingdon  sur  les  rois  bretons  (97*11 1)  ;  extrait  du  même  auteur  sur 
la  géographie  et  les  saints  de  TADgleterre  (111-9)  ;  seconde  partie  ou 
Chronique  de  Robert,  an  1100-1186  (110-329;  11,  Mdô)  ;  additions  à 
cette  chronique,  tirées  des  manuscrits  de  Fécamp  (146-50) ,  de 
Lire  (150-6)  «  de  Savigny  (156-63) ,  de  Yalasse  (164-5)  et  du 
Bec  (165-80),  avec  aTertissement  sur  les  diverses  compositions 
(137-46)  ;  Traite  de  Robert  de  Torignj  mr  k$  ordres  monastiques  et 
ks  abbayes  normandes  (184-206)^  aveo  avertissement  (181-4)  ;  Annales 
du  Moni'Saint'Michel^  de  la  naissance  de  saint  Jean  à  l'an  1201 
(214-âO),  de  l'an  506  à  1154  (230*5)  et  de  Tan  876  à  1087  (235^)^ 
avec  avertissement  sur  ces  trois  morceaux  (207-14)  ;  Lettres,  chartes 
et  pièces  diverses  de  Tadministratioa  de  Robert,  au  nombre  de  73, 
comprises  entre  1155  et  1187  (237-343).  Une  table  générale  des  noms 
de  lieux  et  de  personnes  termine  le  deuxième  volume  (345-415)  ; 
une  préface  sur  la  vie  et  les  ouvrages  de  Robert  de  Torigny  est  en 
tète  du  même  (j^xix);  une  autre,  qui  renferme  la  description  raisonnes 
des  dix-huit  manuscrits  et  des  onse  éditions  de  la  Chronique  de 
Robert,  forme  le  commencement  du  1"  vol.  (j-ixxj). 

Le  nom  seul  de  l'auteur  dit  assez  que  cette  édition  restera  un  type 
du  genre,  pour  la  recherche  patiente  des  matériaux,  la  classification 
intelligente  des  manuscrits,  rétablissement  correct  du  texte,  la  resti- 
tution exacte  de  la  chronologie,  l'ampleur  mesurée  des  notes  et  la 
disposition  régulière  de  la  table*  U.   C. 


•alut  a*oul*  et  son  temp»,  par  H*  Wallon,  membre  de  llnstitut, 
professeur  à  la  Faculté  des  lettres  de  Paris.  Paris,  Hachette,  1875.  2  vol. 
in-8  de  xmvi-492  et  5ë6  p.  —  Prix  :  lo  fr. 

Louis  IX  fut  un  saint  sur  le  trône.  «  Quelle  influence  le  caractère 
du  saint  a-Ml  eue  sur  la  conduite  du  roi  ?  Quelle  action  le  gouvernement 
d'un  tel  roi  a-t-il  exercée  sur  les  destinées  de  la  France  ?  b  M.  Wallon 
s'est  posé  et  a  résolu  ces  deux  questions  dans  son  nouvel  ouvrage  : 
Saint  Louis  et  son  temps.  Kauteur  n'a  pas  prétendu  apporter  à  This- 
toire  des  documents  nouveaux  ;  mais  il  a  voulu  résumer  tous  les 
travaux  faits  jusqu'ici.  En*  deux  volumes,  le  lecteur  trouve  les  événe- 
ments racontés  dans  un  stjle  toujours  précis  et  tshàtié.  Yeut-on  des 
renseignements  plus  détaillés?  des  notes  consciencieuses  renvoient 
aux  BouroeSf  et  dispensent  de  recherches  inutiles.  Ainsi,  et  les  hommes 
du  monde  et  les  savants  rencontrent  ce  qu'ils  désirent. 

L'introduction  montre  que  M.  Wallon  est  de  la  nouvelle  école,  qui 


-  48  — 

place  an  premier  rang,  dans  les  étades  historiques,  Tanalyse  critique 
des  documents  originaux.  Joinville,  Guillaume  de  Chartres,  Guillaume 
de  Nangis  sont  les  premiers  historiens  par  l'importance.  Â  côté  d'eux, 
se  place  Lenain  de  Tillemont,  dont  le  livre  est,  de  Tavis  de  tous,  un 
chef-d'œuvre  de  patience  et  d'érudition.  Parmi  les  modernes,  M.  Félix 
Faure  est  consulté  de  préférence. 

Le  premier  volume  contient  plus  spécialement  l'histoire  du  roi. 
Louis  IX,  guidé  par  la  reine  Blanche,  triomphe  des  barons^  pacifie 
l'Université,  et  règle  les  affaires  ecclésiastiques.  Dès  les  années  de  sa 
jeunesse,  il  fait  présager  ce  qu'il  sera  plus  tard.  A  la  pureté  et  à  la 
simplicité  du  cœur,  il  joint  la  bonté;  à  la  douceur,  l'humilité.  En  même 
temps,  il  déploie  une  incomparable  vigueur  contre  l'étranger  et  contre 
les  seigneurs  rebelles.  Choisi  comme  médiateur  entre  le  Sacerdoce 
et  TEmpire,  il  garde  la  neutralité.  Bientôt  il  prend  la  croix.  D'abord 
victorieux,  ensuite  prisonnier,  il  inspire  aux  musulmans  la  vénération 
la  plus  grande. 

Le  second  volume  est  le  tableau  de  la  France  sous  le  régne  du  saint 
roi.  Rapports  de  la  royauté  avec  le  clergé  et  la  noblesse,  situation  des 
villes  et  des  campagnes,  finances  et  administration  générale,  organi- 
sation  judiciaire  et  militaire  du  royaume,  tout  est  étudié  d'après  les 
meilleurs  travaux  faits  sur  chaque  point.  A  l'histoire  politique,  est 
jointe  l'histoire  littéraire.  L'Université  et  son  enseignement;  les  trou- 
badours et  leurs  chansons  ;  les  artistes  et  leurs  œuvres  nous  font  voir 
combien  grande  était  la  France  au  temps  de  saint  Louis.  Cependant, 
le  règne  s'achève.  Arbitre  en  France  et  en  Angleterre,  saint  Louis 
pacifie,  autant  qu'il  peut,  les  partis.  Bientôt  il  reprend  la  croix  et  va 
achever,  devant  Tunis,  sa  vie  si  noblement  remplie. 

Voilà,  en  quelques  traits,  l'esquisse  !;du  tableau.  Deux  critiques 
sérieuses  peuvent  seulesétre  faites  à  l'auteur.  M.  Lacroix  les  a  indiquées 
déjà  dans  YJnsiructian  publique.  Pour  être  un  saint,  Louis  IX,  comme  roi, 
n'en  est  pas  moins  faillible  ;  et  peut-être  a*t-il  exagéré  la  prudence 
en  gardant  entre  Rome  et  l'Allemagne  une  trop  stricte  neutralité. 
M.  Wallon  admire  saint  Louis,  même  en  ce  point  ;  c'est  aller,  ce 
semble,  trop  loin.  Peut-être  aussi  l'auteur,  dans  le  rejet  de  la  Pragma- 
tique, se  montre-t-il  trop  circonspect.  Ses  conclusions  sont  excellentes  ; 
mais  il  a  repoussé  quelques  arguments  qui  ne  sont  pas  sans  valeur. 
Ces  critiques,  on  le  voit,  n'atteignent  pas  le  fond  de  l'ouvrage. 

Louis  IX  a  mérité  «  que  son  nom  demeurât  comme  un  idéal  au* 
dessus  duquel  on  ne  voit  plus  rien,  o  M.  Wallonie  montre  pièces  en 
main.  Dans  ce  livre,  le  mérite  du  style,  et  de  la  composition  se  joint  à 
la  sûreté  de  la  science.  Il  demeurera  comme  un  des  plus  importants 
travaux  historiques  élevés  à  la  gloire  du  plus  grands  de  nos  rois. 

E.  Bbublibk. 


—  49  — 

Voltaire   et   Rousseau»    par   M.   Gustave   Desnoiresterres.   Paris, 
Didier,  1874.  In-8  de  516  p.  —  Prix  :  7  fr.  oO. 

Voltaire  et  Rousseauj  tel  est  le  titre  du  sixième  yolume  de  M.  Des- 
noiresterres sur  Voltaire  et  la  société  au  dix-huitième  siècle.  Titre 
trompeur  et  qui  pourrait  faire  croire  que  l'auteur  compare  ensemble 
les  deux  chefs  de  philosophie^  et  parle  de  leurs  rapports  mutuels. 
Dans  deux  chapitres,  il  est  vrai^  il  est  question  de  Rousseau,  de  la 
Nouvelle  Bélohe  et  de  Y  Emile;  mais^  dans  le  reste  du  livre,  le 
philosophe  genevois  n'apparaît  plus.  Analyser  ce  volume  est  chose 
difficile.  L'auteur  suit  Tordre  chronologique  et  les  événements  se 
succèdent  sans  se  ressembler.  L'histoire  des  relations  du  seigneur 
de  Fernej  avec  M^^'  Corneille  et  de  ses  protestations  feintes  de 
catholicisme  j  tient  une  grande  place.  Mais  le  point  capital  est  un 
récit  détaillé  des  procès  de  Voltaire  avec  le  président  de  Brosses, 
à  propos  de  noix  ou  de  quatorze  moules  de  bois,  pour  son  interven- 
tion en  faveur  de  Galas,  de  Sirven,  et  du  chevalier  de  la  Barre. 
C'est  à  proprement  parler,  Thistoire  judiciaire  de  Voltaire. 

On  retrouve,  dans  ce  livre,  les  qualités  éminentes  qu'on  remarquait 
dans  les  volumes  précédents.  Narrateur  de  premier  ordre,  M.  Des- 
noiresterres présente  les  faits  avec  une  netteté  qui  saisit  et  qui 
charme.  Peu  d'appréciations;  le  lecteur  doit  prononcer  lui-même  le 
jugement,  après  avoir  entendu  la  cause. 

Ce  n'est  pas  à  dire  que  M.  Desnoiresterres  ne  donne  parfois  ses 
propres  conclusions.  Alors,  on  voit  clairement  ce  que  le  récit  a  fait 
pressentir,  que  l'auteur  est  sympathique  à  son  héros.  «  Malgré  ses 
impiétés^  nous  dit-il,  ses  violences,  ses  défaillances  et  ses  inégalités 
de  caractère,  toute  part  faite^  chez  Voltaire,  le  bien  couvre  le  mal.  » 
Et  ailleurs  :  «  le  vrai  chrétien  doit  convenir  qu'en  faisant  prévaloir  la 
tolérance,  le  poëte,  qu'il  le  voulût  ou  non,  servait  la  religion  du  Dieu 
de  paix  et  de  miséricorde.  » 

Au  risque  de  passer  pour  malveillant^  puisque  telle  est  l'expression 
par  laquelle  M.  Desnoiresterres  flétrit  les  adversaires  du  philosophe, 
nous  ne  pouvons  croire  que  le  défenseur  de  Calas  ne  fut  pas  heureux 
de  l'occasion  que  lui  offrait  la  fortune.  Quelle  joie  de  pouvoir  écraser 
Vinfâme  à  propos  de  l'arrêt  inique  de  quelques  magistrats  toulousains  I 
Comment  expliquer  autrement  que  Voltaire  regrettât,  dans  le  procès 
Sirven,  qu'il  n'y  ait  malheureusement  pas  eu  quelqu'un  de  roué,  ce  qui 
gênait  son  éloquence.  C'est  appuyé  sur  des  citations  de  M.  Desnoi- 
resterres que  nous  combattons  ses  conclusions.  Grand  mérite,  à 
notre  avis,  pour  l'auteur,  car  il  y  a  là  une  preuve  de  sa  parfaite 
sincérité.  II  ne  dissimule  rien  des  défauts  de  celui  qu'il  admire. 
Il  cite  ces  lettres,  si  peu  à  l'honneur  de  Voltaire,  où,  préchant  pour 
JciLLKT  1875.  T.  XIV,  4. 


—  50  — 

ses  amis  l'affiranchissement  de  Tesprit,  celui-ci  veut  cependant  «nvoy^r 
toujours  ses  laquais  à  la  messe  ou  au  prêche . 

Nous  regrettons  toutefois  que,  dans  le  récit  du  procès  des  Galas^ 
M.  Desnoiresterres  ait  pris  pour  source  à  peu  près  unique,  le  livre 
d'Athanase  Coquerel.  Peut-être  a-t-il  raison  de  repousser  le  témoi- 
gnage de  Tabbé  Sirvan,  petit-neveu  du  oapitf)uI  qui  condamna  les 
innocents,  mais  il  avouera  bien  que  M.  Coquerel,  protestant  libéral, 
prêche  quelque  peu  pour  son  couvent.  L'étude  gagnerait  si  on  y  trou- 
vait les  documents  eux-mêmes. 

Il  y  a,  du  reste,  beaucoup  à  apprendre  dans  cet  ouvrage,  sur  les 
procédés  des  philosophes,  sur  leurs  moyens  de  propagande,  sur  leurs 
relations  avec  les  princes  étrangers  et  la  cour  de  France.  Ils  sont 
étudiés  dans  leur  vie  intimé  et  dans  leur  vie  publique.  Tout  est 
impartialement  raconté,  et,  grâce  à  cette  impartialité,  la  conclusion 
de  la  lecture,  est,  en  modifiant  les  expressions  de  M.  Desnoiresterres, 
que  bien  rares  sont  chez  Voltaire  les  moments  de  candeur  char^ 
manie  ,  nombreux  au  contraire  les  autres,  envahis  par  la  passion, 
M  Von  se  montre  plus  emporté,  plus  persécuteur  que  l'ennemi  qu'on 
traque  au  nom  de  la  vérité  et  de  la   tolérance. 

E.  Bburlibr. 


E#e  Ré^ne  de  Marle-Xliérése  daos  les  PAye»Bae  autri- 
chien», par  G.  J.  Ch.  Piot,  archiviste-adjoint  aux  Archives  générales 
du  royaume.  Louvain,  Veuve  Fonteyn  ;  Paris  A.  Ghio,  1874.In-8  de  349  p. 
—  Prix:  4  fr. 

Le  nom  de  Marie-Thérèse  est  resté  populaire  en  Belgique;  sa  mort 
y  fut  regardée  comme  un  malheur  public,  et,  dit  un  éminent  histo- 
rien belge,  «  il  semblait  qu*à  cette  douleur  il  se  mêlait  quelque  chose  de 
sinistre.  »  Ces  regrets  étaient-ils  mérités  et  cette  popularité  était-elle 
légitime?  C'est  la  question  que  se  pose  un  savant  archiviste,  dans  une 
intéressante  étude  sur  Marie-Thérèse  et  son  règne  dans  les  Pays-Bas. 
M.  Piot  passe  successivement  en  revue,  dans  une  série  de  trente-sept 
chapitres,  les  diverses  parties  de  Tadministration  :  les  finances,  les 
domaines,  Tétat  militaire,  les  affaires  ecclésiastiques,  la  presse,  Tins- 
truction  publique,  les  beaux-arts^  les  lettres,  les  sciences,  la  médecine, 
les  établissements  de  bienfaisance,  la  justice,  etc.,  la  politique  intérieure 
et  la  politique  extérieure.  Il  a  puisé  aux  meilleures  sources,  dans  les 
pièces  les  plus  authentiques,  aux  Archives  nationales  de  Belgique,  et, 
avec  un  scrupule  qui  double  l'intérêt  de  son  livre  pour  Térudit,  il  a 
soin,  chaque  fois,  d'indiquer  en  note  les  documents  qu'il  a  consultés. 

M.  Piot  constate  que  Marie-Thérèse  a  fait  beaucoup  pour  le  bien* 
être  matériel  en  Belgique,  qu'elle  a  ranimé  le  commerce  et  l'industrie 
et  opéré  d'utiles  et  humaines  réformes  dans  la  procédure  criminelle. 
Mais  elle  a  échoué  dans  le  développement  do   l'instruction,  et  elle  a 


—  ol  — 

laissé  s'introduire,  dans  les  arts,  le  goût  tourmenté  de  Tépoque  de 
Louis  XV,  qui  a  altéré  les  saines  traditions  de  Tart  belge. Elle  a  même, 
soit  volontairement  soit  involontairement,  favorisé  cette  introduction 
des  idées  françaises  qui^  quelques  années  plus  tard,  a  singulièrement 
aidé  l'invasion  révolutionnaire.  M.  Piot  Taocuse  presque  d'a?oir 
sacrifié  la  Belgique  à  la  France,  pour  laquelle  il  semble  conserver, 
même  après  nos  désastres,  une  défiance  bien  peu  fondée.  Il  nous 
parait  difdcile  d'admettre,  par  exemple,  que  l'alliance  de  TAutriche 
et  de  la  France  pendant  la  guerre  de  Sept  ans,  n'ait  pas  assuré  aux 
Pays-Bas  une  sécurité,  nouvelle  pour  eux,  et  dont  ils  ont  grandement 
profité. 

Ce  que  Tauteur  reproche  avec  non  moins  de  sévérité  et,  pensons- 
Dous^  plus  de  justice  à  Marie-Thérèse,  c'est  d'avoir  voulu  imposer 
à  la  Belgique  une  centralisation  qui  répugnait  à  toutes  les  traditions 
du  pays.  La  Belgique  a  tenu,  de  tout  temps,  et  tient  encore  avec 
raison  à  ses  antiques  libertés.  L'impératrice-reine,  en  lui  envoyant  des 
administrateurs  étrangers,  qui  ont  cherché  &  la  plier  au  formalisme 
bureaucratique  de  Vienne,  et  surtout  des  philosophes,  comme  Nenj, 
qui  froissaient  les  sentiments  profondément  religieux  du  peuple,  a 
semé  des  germes  de  mécontentement  qui  ont  éclaté  sous  Joseph  II.  Le 
meiUeur  choix  qu'eUe  ait  fait  a  été  celui  de  son  beau-frère,  Charles  de 
Lorraine,  prinee  d'une  capacité  ordinaire,  mais  d'une  bonté  pleine  de 
charmes.  C'est  lui  vraiment  qui,  en  s'attirant  l' affection  de  toutes  lea 
classes,  a  fait  supporter  et  aimer  la  domination  autrichienne  aux  Pays- 
Bas,  et  a  valu  à  Marie-Thérèse  ce  renom  de  popularité  dont  elle  jouit 
enoore.  Maximb  db  la  Rochbtbrie. 


0crltU  mflnorl  di  Pibtbo  ëllebo.  Bologne,  imprimerie  Fava  etGaragnani, 
'  i873.  In-8  de  321  p.  —  Prix  :  6  fr. 

Ce  volume  contient  des  dissertations  souvent  intéressantes  sur  des 
sujets  fort  divers  et  dont  plusieurs,  touchant  à  l'histoire,  à  la  politique, 
à  la  législation,  ont  de  l'importance.  Il  serait  impossible  dans  le  petit 
espace  dont  nous  pouvons  disposer  de  donner  une  idée  de  ces  différents 
travaux.  Tels  d'entre  eux,  ceux,  par  exemple,  qui  sont  relatifs  à  la 
peine  de  mort  dont  M.  EUero  demande  l'abolition,  exigeraient  des 
pages  d'analyse  et  de  discussion.  Ce  n'est  pas  en  quelques  lignes,  non 
plus,  qu'il  serait  possible  de  résumer  l'étude  sur  la  fédération  ita- 
lienne. La  partie  du  livre  de  M.  Ëllero  sur  laquelle  nous  aurions  aimé 
à  entrer  surtout  dans  quelques  détails  est  celle  qu'il  a  intitulée  Des 
tupentitions  populaires  dam  le  Frioul;  mais,  nous  l'avouons,  nous  nous 
serions  bien  plutôt  placé  au  point  de  vue  de  Fernan  Caballero  parlant 
avec  sympathie  des  croyances  de  l'Andalousie  qu'à  celui  de  M.  EUero, 
poursuivant,  au  nom  du  progrès  et  de  la  raison,  des  superstitions  pro- 


—  i)2  — 

tégées  par  la  poésie  et  rimagination.  Ce  qui  nous  aurait  semblé  parti- 
culièrement curieux,  c'aurait  été  de  montrer  quelle  ressemblance 
extraordinaire  les  croyances  du  Frioul  sur  les  divinations,  les  pré- 
sages, les  pronostics,  les  sorcières,  les  maléfices,  les  âmes  errantes, 
offrent  avec  celles  de  bien  d'autres  pays.  L'examen  des  poésies  et  des 
contes  populaires  a  révélé  entre  tous  les  peuples  des  liens  qui  n'avaient 
pas  été  aperçus  et  dont  la  connaissance  a  un  très-réel  intérêt  histo. 
rique.  Il  y  a  maintenant  à  compléter  ces  études  par  la  comparaison 
des  superstitions  populaires,  et  celui  qui  entreprendra  cette  tâche  ne 
négligera  pas  de  consulter  le  travail  de  M.  Ëllero.  Il  y  a  lieu  cepen- 
dant de  le  lire  avec  quelque  précaution,  car  Tauteur  semble  vouloir 
trouver  dans  le  magnétisme  et  les  maladies  mentales  le  secret  de  phé- 
nomènes que  les  catholiques  expliquent  autrement.  S'il  se  prétend 
fidèle  à  la  foi  de  ses  pères,  s'il  ne  considère  pas  l'usage  de  certaines 
médailles  comme  superstitieux,  sur  d'autres  points  M.  Ellero  a  pu  ne 
point  paraître  orthodoxe  à  un  censeur  auquel  il  adresse  une  réplique 
très-vive,  provoquée  d'ailleurs  —  autant  que  quelques  citations 
peuvent  en  faire  juger  —  par  une  attaque  qui,  elle-même,  était  peu 
modérée.  Th.  de  Puymaiorb. 


Armoriai  des  cardinaux  archevêques  et  évéques  contemporains  de  France^ 
par  H.  Tâusin.  Paris,  Palmé  et  Champion,  i875.  In-i8  carré  de  126  p. 
et  100  planches.  —  Prix  :  10  fr. 

Ce  petit  volume^  imprimé  avec  soin  chez  J.Moureau  à  Saint-Quen- 
tin, n'est  pas  un  simple  armoriai  ;  c'est  aussi  une  collection  de  notices 
sur  chacun  des  membres  de  l'épiscopat  français,  accompagnée  d'une 
préface  bien  faite  sur  les  insignes  qui  doivent  accompagner  les 
armoiries  des  dignitaires  ecclésiastiques.  J'avoue  que  ce  volume  m'âns- 
pire  un  regret,  c'est  qu'il  n  y  ait  pas  encore  un  armoriai  spécial  du 
clergé,  tenu  à  jour,  sinon  cHaque  année,  au  moins  par  périodes  déter- 
minées. On  pourrait  le  compléter  en  y  ajoutant  les  blasons  des  abbés 
mitres. 

Les  armoiries  des  prélats  ont  une  valeur  toute  particulière  ;  mises  en 
bas  de  leurs  actes,  ou  sur  les  monuments  construits  par  leurs  ordres, 
elles  sont  les  marques  de  leur  individualité,  puisque  leurs  signatures, 
excepté  en  ce  qui  concerne  les  cardinaux,  taisent  les  noms  de  famille. 
Pour  tous  les  prélats  qui  n'ont  pas  de  blason  héréditaire,  les  armoi- 
ries prises  au  moment  de  leur  nomination,  et  choisies  par  eux,  sont 
des  devises  personnelles  qui  méritent  d'être  conservées. 

Un  détail  qui  étonne,  en  parcourant  les  planches  de  l'ouvrage  que 
nous  signalons  en  ce  moment  à  nos  lecteurs,  c'est  l'abus  des  couronnes 
qui,  généralement,  timbrent  les  écus  épiscopaux  ;  et  aussi  l'oubli  des 
règles  qui  fixent  le  nombre  des  houpes  de  chapeaux  dans  la  hiérar- 


-53  - 

chie.  La  plupart  des  archevêques  et  des  évéques  français  timbrent 
leors  écus  de  la  couronne  ducale.  On  comprendrait  cela  pour  les 
sièges  auxquels  étaient  jadis  attachés  les  titres  de  ducs  ;  pour  tous  les 
autres  la  mitre  et  la  crosse  sembleraient  devoir  suffire.  En  présence  de 
ces  insignes  dont  rien  ne  vient  justifier  la  présence  lorsqu'il  n'y  a  pas 
quelque  tradition  historique  à  conserver,  on  se  rappelle  involontaire- 
ment les  vers  de  Marbode,  évéque  de  Rennes  au  onzième  siècle  qui, 
dans  une  satire  spirituelle^  critiquait  avec  malice  la  tendance  que  l'on 
avait  déj  à  à  s'orner  d'insignes  auxquels  on  n'avait  aucun  droit. — Je  crois 
qu'aujourd'hui  il  faut  s'en  prendre  surtout  à  Tinexpérience  des  graveurs 
héraldiques  qui  pensent  que  ce  qui  abonde  ne  peut  faire  mauvais 
effet.  C'est  une  preuve  que,  dans  les  séminaires,  il  ne  serait  pas  inutile 
de  donner  quelques  saines  notions  d'héraldique  ecclésiastique  &  ceux 
dans  les  rangs  desquels  on  choisit  plus  tard  des  évêques. 

Anatole   db  Barthélémy. 


Précl*  de  riitstolre  de  la  blbllotHéque  du  roi,  aujourd'hui 
Bibliothèque  nationale,  par  Alfred  Franklln.  2«  édition,  corrigée  et 
très-augmentée.  Paris,  Léon  Willem,  i87o.  Pet.  in-8  de  vii-344  p.  — 
Prix  :  8  fr. 

L'auteur  remonte  à  Pépin  le  Bref,  a  le  premier  roi  de  France 
qui  ait  songé  à  réunir  quelques  volumes,  d  II  suit,  dans  la  longue 
série  de  nos  rois,  les  développements  de  cette  bibliothèque  du  roi  appe- 
lée à  devenir  un  monument  unique  dans  le  monde  entier.  Le  roi  Jean 
aimait  les  livres  et  avait  avec  lui,  à  la  bataille  de  Poitiers,  une  Bible 
qui  est  aujourd'hui  au  British  Muséum.  Charles  Y  installa  sa  bibliothèque 
au  Louvre,  dans  les  trois  étages  délateur  de  la  Fauconnerie,  et  nous 
en  avons  l'inventaire,  dressé  en  1373  par  Gilles  Malet  (ms.  fr.  2700), 
qui  comprend  973  volumes  :  on  trouvera  un  extrait  de  cet  inventaire 
aux  pages  21-33.  D'autres  inventaires  furent  faits  en  1411,  1413  et 
1423.  En  1429,  le  régent  Bedford  ât  passer  en  Angleterre  les 
ouvrages  rassemblés  au  Louvre.  Charles  VU  et  ses  successeurs 
réunirent  un  grand  nombre  de  livres.  Sous  Louis  XII,  la  Bibliothèque 
du  roi  était  à  Blois.  François  V  établit  uu  dépôt  nouveau  à  Fontaine- 
bleau, et  on  7transporta,enl544,  les  livres  de  Blois.  Ce  n'est  que  sous 
Charles  IX  que  la  Bibliothèque  du  roi  fut  réintégrée  à  Paris,  où  elle 
courut  de  grands  dangers  pendant  les  troubles  de  la  an  du  siècle. 
Nomade  jusque  sous  Louis  XIV,  elle  fut  installée,  en  1666,  par  les 
soins  de  Colbert,  dans  un  vaste  local  situé  rue  Vivienne,  non  loin  de 
son  propre  hôtel,  et  en  face  du  local  actuel  de  la  bibliothèque^  où  les 
immenses  collections  réunies  pendant  le  règne  de  Louis  XIV  ne 
furent  placées  qu'en  1721  dans  l'hôtel  de  Ne  vers,  qu'elles  ne  devaient 
plus  quitter.  Dés  1691,  on  avait  commencé  à  ouvrir  les  portes  de  la 
Bibliothèque  du  roi;  elle  ne  devint  publique  qu'en  1730. 


-  54  -         , 

Nous  ne  suivrons  pas  plus  loin  M.  A.  Franklin  dans  son  intéressant 
exposé,  qui  forme  plutôt  un  recueil  de  matériaux  et  d'informations, 
qu'un  travail  mûrement  élaboré  et  définitif.  Le  sujet  niériterait  de 
tout  autres  développements.  —  Dans  un  appendice,  Tauteur  donne 
l'inventaire  des  livres  de  Louis  le  Hutin,  de  Jeanne  d'Évreux,  de 
Philippe  le  Hardi,  etc.,  et  une  notice  sur  la  bibliothèque  du  roi  tirée 
des  manuscrits  de  la  bibliothèque  sainte  Geneniève. 

L'ouvrage  de  M.  Franklin,  qui  est  pourtant  une  seconde  édition, 
appelle  quelques  critiques  :  ainsi  on  y  lit  (p.  47)  qu'un  nouvel  inven- 
taire fut  rédigé  «  à  l'avènement  de  Charles  VII,  en  1423.  »  Il  faudrait 
dire,  à  Tavénement  de  Henri  VI,  qui  eut  lieu  en  1422,  car  Paris  était 
encore  au  pouvoir  du  fils  de  Henri  V.  —  Plus  loin,  après  avoir 
raconté  l'enlèvement  des  livres  par  Bedford  ^  Tauteur  ajoute  : 
«  Charles  VII  ne  songea  point  à  réparer  cette  perte,  »  ce  qui  est 
une  erreur,  car  Charles  VII  fut  un  grand  amateur  de  livres  ;  seule- 
ment là  Bibliothèque  du  roi  ne  pouvait  être  au  Louvre  quand  le 
souverain  ne  résidait  pas  à  Paris.  On  pourrait  multiplier  ces  obser* 
vations.  Enfin  il  est  regrettable  que  l'exécution  typographique  du 
livre,  qui  contient  de  nombreuses  gravures  reproduisant  les  reliures, 
marques,  estampilles,  etc.,   ne  soit  pas  plus  satisfaisante, 

a,  DB  6, 


Archives  de  E<yoii,  par  M.  Léopold  Nikpce,  conseiller  .à  la  Cour 
d'appel.  Lyon,  Henry  Georg,l87o.  In-8  de  xvi-727  p.  —  Prix:  20  fr. 

A  côté  des  riches  bibliothèques  publiques  et  privées  dont  M.  Niepce 
fait  actuellement  Thistoire  dans  la  Revue  du  Lyonnais,  Lyon  possé- 
dait des  collections  a  non  moins  importantes,  tout  aussi  riches  et 
que  la  Révolution,  si  souvent  aveugle  et  stupide,  a  mutilées,  »  je  veux 
parler  des  archives  monastiques  et  municipales,  conservées  avec  tant 
de  soin  par  les  corporations  religieuses,  les  établissements  de  cha- 
rité, le  corps  consulaire  et  les  pouvoirs  judiciaires,  puis  dévalisées 
par  la  Révolution,  qui  n'a  pas  craint  d'anéantir,  «  pour  la  satisfaction 
de  ses  haines  et  de  ses  fureurs  aveugles,»  des  milliers  de  documents. 
L'histoire  de  ces  archives,  que  publie  aigourdMiui  M.  Léopold  Niepce, 
est  pleine  d'enseignements  et  de  détails  douloureux.  Avec  lui,  nous 
assistons  à  l'organisation  du  pouvoir  municipal  à  Lyon  ;  nous  voyons 
naître  le  consulat  et  nous  l'accompagnons  dans  ses  pérégrinations 
diverses  à  travers  la  cité.  Les  archives  suivent  les  vicissitudes  du  corps 
auquel  elles  appartiennent.  De  la  chapelle  Saint-Jacques,  elles  passent 
dans  un  hôtel  de  la  rue  Longue,  puis  dans  les  demeures  des  consuls  et 
dans  la  maison  Bellièvre  ;  de  Iti  rue  des  Générales,  elles  sont  enfin 
transportées  sur  la  place  des  Terreaux.  A  difiërentes  époques^  elles 
subissent  des  mutilations  regreitables,  partageant  ainsi  le    sort  des 


—  »»  — 

arohi ves  dépariemen taUs^des  arohi ves  hospitalières  et  des  arohiyes  judi- 
oiaires.Tantôt  il  faut  arracher  aux  flammes  des  titres  péniblement  réanis 
et  les  jeter  dans  la  rae  où  des  voleurs  en  détournent  bon  nombre  ; 
tantôt  la  Révolution,  en  voulant  fonder  un  dépôt  unique,  amène  la 
confusion  et  la  perte  de  pièces  précieuses.  D'autres  fois,  des  émeutiers 
fontf  comme  en  1870,  main  basse,  au  greffe  du  palais  de  justice,  sur 
leurs  propres  dossiers  et  leurs  casiers  judiciaires. 

Les  archives  municipales  et  les  archives  départementales  sont  encore 
riches  en  documents  historiques  :  il  suffit  de  parcourir  le  livre  de 
M.Niepcepour  s'en  convaincre.  Ces  dépôts  sont  confiés  aigourd'hui  à 
MM.Guigue  et  Gauthier,  qui  ont  été  précédés,  dans  cette  charge,  entre 
autres  par  André  Perrichon,écu7er,chevalier  des  ordres  du  roi;  Tabbé 
Jean  Benoist,  docteur  en  droit  et  en  théologie;  le  bibliothécaire  Marc- 
Antoine  Chappe,  l'avocat  Jean-Armand  Durand,  le  juriconsulte  Ber- 
tholon,  l'érudit  Morel  de  Yoleine,  l'ancien  chef  d'institution  Grand- 
perret  et  M.  Fortuné  Rolle,  si  brutalement  révoqué  en  1870  et  placé 
depuis  à  la  tête  des  archives  de  Thospice  de  la  Charité,  dont  il  va 
enfin  publier  Tinventaire  précédé  d'une  introduction  due  à  la  plume 
de  M.  le  comte  de  Soultrait. 

Les  archives  municipales,  comme  les  archives  départementales,  sont 
placées  dans  les  combles  de  l'hôtel  de  ville,  et  M.  Niepce  se  demande 
avec  inquiétude  si  on  les  laissera  longtemps  dans  un  lieu  traversé  par 
tant  de  cheminées  et  où  les  eaux  pluviales  s'infiltrent  de  tous  côtés. 
Déjà  il  a  appelé  l'attention  de  Fautorité  supérieure  sur  cette  situation, 
et  nous  espérons  bien  que  sa  voix  autorisée  sera  enfin  entendue. 

Les  papiers  déposés  au  palais  de  justice  et  provenant  des  anciens 
tribunaux  du  Lyonnais,  du  Forez  et  du  Beaujolais  étaient  dans  un 
état  désastreux,  lorsqu'en  1865,  M.  l'avocat  Brouchoud  obtint  du  pro- 
cureur général  l'autorisation  de  pénétrer  dans  l'antre  infect  où  pour- 
rissaient tant  de  documents  et  de  se  dévouer  généreusement  à  leur 
classement  :  dès  lors,  ces  archives  étaient  sauvées,  et,  sur  des  rayons 
spéciaux,  prenaient  peu  à  peu  place  les  registres  des  insinuations,  les 
papiers  du  Roy^  les  sentences  de  la  Sénéchaussée  et  du  présidial,  de 
1500  à  1790,  etc.,  etc. 

Que  dirai-je  maintenant  des  archives  hospitalières  et  des  archives 
ecclésiastiques?  Il  faudrait  plusieurs  pages  pour  en  raconter  l'his- 
toire, en  dépeindre  les  vicissitudes  et  en  exposer  la  situation.  Je  ne 
puis  mieux  faire  que  de  renvoyer  à  l'ouvrage  de  M.  Léopold  Niepce  qui, 
dans  un  chapitre  final,  nous  entretient  encore  des  minutes  des  notaires, 
et  exprime  le  vœu  que  tous  les  actes  antérieurs  à  1691  soient  déposés 
aux  archives  départementales. 

En  publiant  l'histoire  des  archives  de  Lyon,  M.  Niepce  a  fait  une 
œuvre  sérieuse  et  utile.  Peut-être  a-t-il  été  un  peu  sévère  à  l'égard 


—  56  — 

de  certains  hommes,  mais  pouvait-il  être  clément  pour  les  fauteurs 
de  désordre,  en  présence  de  tant  de  ruines  accumulées  par  eux  sur  le 
sol  de  notre  malheureux  pays  i  A.  Albribr. 

Catalo|$ue  méthodique  de  lf&  blbllotbèque  de  la  ville  de 
IVaatee,  par  Emile  Péhant,  conservateur  de  cette  bihliothëque.  Sixième 
Tolume.  (Histoire  [suite  et  fin]  ;  —  Foiygraphie  ;  —  Nouvelles  acquisitiom.) 
Nantes,  irap.  V.  Forest  et  E.  Grimaud,  i874.  In-8  de  xii-876  p. 

Ce  catalogue  ne  doit  pas  être  confondu  avec  de  nombreux  inyen- 
taires  du  même  genre  qui  ont  successivement  été  livrés  à  l'impression 
dans  diverses  villes  et  qui  n'offrent  guère  que  des  titres  de  livres  parfois 
peu  complets  et  classés  d*une  façon  assez  confuse.  M.  Péhant  8*est 
imposé  le  rude  labeur  de  relever  tous  les  titres  avec  une  scrupuleuse 
exactitude,  en  indiquant  le  nombre  des  pages  de  chaque  volume,  en 
ajoutant  les  prénoms  et  surnoms  des  auteurs,  en  dévoilant,  toutes  les 
fois  que  la  chose  a  été  possible,  les  anonymes  et  les  pseudonymes. 
A  l'occasion  d'une  foule  d'articles,  il  rappelle  d'autres  ouvrages  se 
rapportant  au  même  objet,  ou  il  cite  des  travaux  insérés  soit  dans  les 
Mémoires  de  sociétés  savantes,  soit  dans  des  publications  périodiques. 
Il  offre  aussi  aux  travailleurs  sérieux  d'innombrables  indications  que 
ceux-ci  sauront  apprécier.  Le  volume  que  nous  avons  sous  les  jeux 
va  du  n""  52,000  au  n""  66,426.  Sur  ces  14,426  articles,  13,111  sont 
entrés  à  la  bibliothèque  de  Nantes  depuis  1848.  Cet  établissement  qui, 
à  cette  époque,  renfermait  à  peine  36  à  38,000  volumes,  3,000  à 
4^000  pièces  et  une  centaine  de  manuscrits,  compte  aujourd'hui  près 
de  100,000  volumes  et  50,000  pièces.  Le  nombre  des  manuscrits 
dépasse  800,  sans  y  comprendre  les  pièces  au-dessous  de  20  pages  ; 
n'oublions  pas  4,000  lettres  autographes  et  une  précieuse  collection 
de  chartes  bretonnes.  Des  accroissements  aussi  considérables  sont 
l'œuvre  de  M.  Péhant  qui,  sachant  tirer  un  excellent  parti  des  res- 
sources restreintes,  n'a  rien  épargné  pour  enrichir  le  dépôt  qui  est 
l'objet  de  toutes  ses  sollicitudes. 

Les  livres  de  travail  sont  fort  nombreux  dans  le  catalogue  que  nous 
signalons  ;  les  ouvrages  rares  ne  font  pas  défaut  ;  nous  en  mention- 
nerons quelques-uns  à  peu  près  au  hasard  :  Extraict  ou  recueil  des  isles 

nouvellement  trouvées  en  la  grande  met*  océane faict  premièrement  en 

latin  par  Pierre  Martyr  et  translaté  en  language  françoys^  Paris,  Simon 
de  Colinet  (1532,  pet.  in-4),  volume  fort  recherché,  aujourd'hui,  ainsi 
que  tous  ceux  qui  concernent  la  première  époque  de  Thistoire  du 
Nouveau- M  onde  ;  le  Prestre  Jehan  (Paris,  Lepetit  Laurent,  s.  d. 
pet.  in-8),  opuscule  relatif  à  une  des  plus  curieuses  légendes  du 
moyen  âge  ;  Coustumes  et  esfablissemens  de  Bretaigne  (Paris,  Guillaume 
Le  Févre,  1480,  pet.  in-8),  première  édition,  d'une  rareté  extrême. 


—  5'/  — 

Si  qaelqae  bibliographe  zélé  entreprend  un  jour  de  compléter  les 
recherches  spéciales  de  Peignot  sur  les  livres  tirés  sur  papier  de  cou- 
leur et  sur  les  ouvrages  imprimés  à  petit  nombre,  il  rencontrera 
d'utiles  indications  dans  le  catalogue  qui  nous  occupe  ;  nous  avons 
distingaé  divers  écrits  imprimés  à  douze  ou  à  vingt-cinq  exemplaires 
seulement;  mais  Tespace  nous  manque  pour  les  signaler. 

En  terminant  cet  inventaire,  «  résultat  de  vingt-cinq  années  de 
labeur  sans  trêve,  ni  merci,  »  M.  Péhant  est  loin  de  regarder  son 
œuvre  comme  achevée;  Usait  très-bien  a  qu^un  catalogue  ne  peut  pas 
plus  se  passer  de  tables  qu'une  bibliothèque  de  catalogue  ;  »  il  prépare 
une  table  par  noms  d'auteurs  ;  une  table  alphabétique  des  titres  (en 
les  abrégeant  autant  que  possible),  une  table  alphabétique  des  prin- 
cipales matières.  Une  Notice  descriptive  des  manuscrits  et  des  livres 
rares  ou  précieux  à  divers  points  de  vue  que  possède  la  bibliothèque  de 
Nantes  Tiendra  ensuite.  On  ne  saurait  donner  trop  d*éloge  à  un  zèle 
aussi  infatigable^  et  il  serait  bien  à  désirer  que  toutes  les  bibliothèques 
publiques  de  la  France  fussent  confiées  à  des  conservateurs  tels  que 
celui  de  la  ville  de  Nantes  a  le  bonheur  de  posséder.  Les  avantages 
qui  en  résulteraient  pour  la  science  des  livres  seraient  du  plus  grand 
prix.  B. 

BULLETIN 

Pensée*  eliolslei*  de  saint  François  de  Baleii,  extraites  de  lin-» 
trùductùm  à  la  vie  dénote,  par  J.  Deloincourt.  Paris,  Bray  et  Retaux,  i87o. 
In-32de  435p.  —  Prix:  1  fr. 

M.  Deloincourt  vient  de  réunir  dans  un  petit  volume,d*une  forme  élégante 
et  d'une  exécution  très-soignée,  un  choix  de  pensées  extraites  de  V Introduc- 
tion d  la  vie  dévote.  Nous  ne  connaissons  rien  de  plus  reconfortant^par  les  temps 
de  luttes  ardentes  et  de  polémiques  passionnées  que  nous  traversons,  que  la 
lecture  de  ces  pages  tout  imprégnées  d'une  douceur  presque  divine,  et  d'un 
indomptable  esprit  de  charité.  Il  est  bon  de  se  retemper  souvent  à  une  source 
si  pure  et  d'écouter  la  voix  de  ce  grand  saint  qui,toute  sa  vie,  a  fait  entendre 
des  paroles  de  paix  aux  hommes  de  bonne  volonté.  Les  pensées  choisies  de 
saint  François  de  Sales  devraient  être  le  vade  mecum  de  toutes  les  âmes  qui 
aspirent  an  calme  et  cherchent  l'apaisement.  G.  M. 

Soirées  de  l'Ouvrier.   Lectures  à  une  société  de  secours  mutuels,   par 
HippoLYTE  YioLEAu;  ouvragc  couronné  par  l'Académie  française;  Septième 
édition.  Paris,  Bray  et  Retaux,  1875.  In-18de  264  p.  —  Prix:  1  fr. 
La  réapparition  de  cet  ouvrage,  épuisé  depuis  longtemps,  est  une  bonne 
fortune  pour  tous  ceux  qui  ont  à  cœur  de  répandre  les  bonnes  doctrines. 
Aux  personnes  qui  se  plaignent  de  n'avoir  à  opposer  À  la  propagande  effré- 
née du   mal   que  des  publications  insignifiantes   nous  dirons  :  Lisez  les 
Soirées  de  Vouvrier  et  vous  vous  convaincrez  que  peu  de  livres  méritent  autant 
que  celui-là  d'être  propagés  dans  les  classes  laborieuses,  abusées  parles  théo- 
nes  révolutionnaires  qu'on  leur  présente  sous  toutes  les  formes. 


—  SS- 
II est  impossible,  en  effet,  d'exposer  sous  un  joar  pins  vrai,  et  dans  un 
style  mieux  approprié  au  sujet,  des  idées  plus  nobles,  des  exemples  plus 
salutaires.  Ecrites  au  lendemain  de  la  Hévolution  de  iB48,  ces  pages  élo- 
quentes sont  encore,hêIas!  d'une  saisissante  actualité;  car  nous  nous  trouvons 
en  face  des  mêmes  problèmes  et  en  présence  des  mômes  dangers.  Plus  que 
Jamais,  nous  devons  lutter  contre  le  mal  qui  nous  envahit  et  fait  entendre 
la  voix  de  la  vérité  à  ceux  qui  nous  entourent.  Hippolyte  Violeau  n'est  plus 
avec  nous  pour  nous  aider  dans  cette  tâche,  dont  nul  mieux  que  lui  ne  com- 
prenait la  grandeur;  mais  son  œuvre  vivra,  et  bien  des  âmes  y  puiseront 
une  consolation  et  une  espérance.  G.  M. 

Conrftrencea  sur  le»  oonnalasancea  les  plu*  utiles  ans. 
Iiabitantsde  la  campagne,  par  M.  Ta.  Hombkrg,  conseiller  honoraire 
à  la  cour  de  Rouen.  Paris,  Ch.  Douniol,  187S.In-i2  de  237  p.  —  Prix  :  2  fr. 
Notre  pays,  livré  depuis  plus  d'un  siècle  aux  faiseurs  de  théories  et  aux 
entrepreneurs  de  révolutions,  porte  la  peine  de  cette  erreur  funeste  dont 
la  masse  de  la  nation  n'est  pourtant  pas  responsable.Sans  entrer  ici  dans  des 
considérations  politiques  qui  mèneraient  trop  loin,  il  est  permis  de  constater 
que  nulle  part  peut-être  l'ignorance  des  choses  pratiques,  de  la  loi,  par 
exemple, n'est  poussée  aussi  loin,  et  que  nulle  part  aussi  la  liberté  du  men- 
songe n'a  plus  de  crédit. Aussi  doit-on  applaudir  à  tonales  efforts  tentés  pour 
éclairer  et  pour  instruire.  C'est  la  meilleure  arme  de  défense  ou  de  combat 
contre  l'invasion  des  mauvaises  doctrines.  M.  Homberg,  ancien  magistrat,  a 
bien  compris  ce  besoin  du  temps.  Dans  une  série  de  conférences, dont  laVorme 
simple  et  claire  n'exclut  pas  l'élévation  du  fonds,  il  passe  en  revue  les  questions 
les  plus  diverses,  les  sujets  les  plus  utiles.  Points  de  droit  à  éclaircir,  préjugés 
à  cx)mbattre,  conseils  à  donner,  métliodes  à.  propager,  science  usuelle  h 
vulgariser,  tel  a  été  le  but  poursuivi  et  atteint  par  un  homme  qui,  en  faisant 
le  meilleur  emploi  de  son  repos,  donne  un  bon  exemple  à  ceux  qui  ne  savent 
tirer  aucun  parti  de  leurs  loisirs.  G.  de  R. 


Morale  pratique,  enseignée  par  l'exemple  à  la  jeunesse  française,  par 
G.  DE  Gerando,  premier  président  honoraire  de  la  Cour  d'appel  de  Nancy. 
Tours,  Marne,    i875.  In-8  de  240  p.  avec  une  gravure.  —  Prix  :  i  fr.  30. 

L'éminent  magistrat  se  montre  digne  du  nom  qu'il  poi'te  en  publiant  la 
Morale  pratique;  «  est  une  nouvelle;  morale  en  action  »  sur  un  plan  excellent, 
sous  une  forme  attrayante  et  saisissante,  et,  inspirée  par  le  patriotisme  et  le 
plus  vif  attachement  à  la  religion  catholique,  M.  de  Gerando  fait  un  vrai  cours 
de  morale,  commençant  par  l'existence  de  Dieu,  l'âme  et  son  immortalité, 
le  devoir  et  la  conscience,  et  le  poursuivant  dans  Tétude  des  diverses  vertus 
que  nous  devons  pratiquer,  comme  chrétiens,  comme  membres  d'une  famille 
et  comme  citoyens.  Toute  exposition  de  doctrine,  courte,  simple  et  nette 
est  accompagnée  d'exemples  bien  choisis  et  destinés  à  faire  d'autant  plus 
d'impression,  qu'un  grand  nombre  sont  empruntés  aux  temps  présents.  Ce 
sera  un  bon  livre  à  donner  en  prix.  V.  M. 


I^e  Mjm  P^ontalne  en  action.  Ouvrage  destiné  k  l'instruction  de  la 
jeunesse,  par  M.  Hyoin-Fubct.  Paris,  E.  Delhatte,  i875.  ln-12  de  360  p.  — 
Prix  :  3  fr.  50. 

Pour  faire  comprendre  et  retenir  le  sens  moral  des  fables,  M.  Hygin-Furcy 
prend  les  maximes  que  La  Fontaine  a  placées  à  la  fin  de  presque  toutes  ses 
fables,  et  fait  suivre  chacune  d'elle  d'un  exemple   qu'il   a  choisi   dans  les 


-  B9-. 

futM  bifftoriqaes  de  tous  lêt  pajr»,  ou  dans  la  biographie  des  honmes  illus- 
tres, n  se  trompe  assurément  eu  traitant  la  morale  de  La  Fontaine  d*admi- 
raJile,  mais  on  serait  tenté  de  partager  son  jugement,  si  on  ne  la  connais* 
•ait  que  par  les  dételoppements  qu'il  en  donne.  Ainsi  le  récit  de  la  mort 
héroïque  de  l'enseigne  Bisson,  qui  fait  sauter  son  navire  plutôt  que  de  se 
rendre,  sert  a  développer  ces  vers  du  fabuliste  : 

Qu'on  me  rends  impotent. 

Col-de-jfttte,  goutteux,  manchot,  pourvu  qu'en  somme 

Je  Yive.  c'est  assez,  je  suis  plus  que  content. 

Ce  livre  peut  être  mis  sans  aucun  danger  entre  les  mains  des  enfants,  et 

nous  pouvons  dire  que  Fauteur  a  atteint  son  but,  lorsqu'il  se  proposait  de 

développer,  dans  les  cœurs,  les  sentiments  de  religion,  d'honneur  et  de 
dévouement  qui  animaient  nos  ancêtres.                   Claudius  Fobestieb. 


Ceiufterle»  Anr  toaa  les  tons.  Hiitoirêtrunêreprétentaiion  untgue  dons 
les  fastes  du  théâtre  moderne^  par  Autont  R^al.  Paris,  Casimir  Pont,  i875. 
In-12de  288  p.  •—  Prix  :  3  fr. 

La  représentation  dont  il  s*agit  est  celle  qui  fut  donnée  en  4869,  sur  le 
théâtre  romain  d'Orange,  par  les  soins  de  M.  Antony  Real,  de  Lourmarin, 
auteur  de  ces  Causeries,  lesquelles  roulent  principalement  sur  la  campagne, 
les  saisons,  le  bonheur  des  champs,  les  enchantements  de  Paris,etc.,  et  sont 
mêlées  ça  et  là  de  vers  alexandrins.  C'est  le  vrai  genre  humoristique  :  on  y 
passe  d'une  idée  à  l'autre,  comme  si  on  volait  de  fleur  en  Ûeur.  Au  reste, 
rien  de  moins  malfaisant  :  c'est  nn  bavardage  sans  nul  venin.  Le  plus  gros 
péché  de  l'auteur  est  de  jeter  un  certain  ridicule  sur  sa  pauvre  province, 
à  force  de  la  vanter  :  il  n'est  pas  permis  à  tout  le  monde  de  parler  de 
son  pays  ni  de  sa  personne,  et  c'est  une  fantaisie  qui  demande  du  tact,  de  la 
finesse,  et  beaucoup  d'originalité.  Il  faudrait  aussi,  quand  on  eatae  avec 
des  inconnus,  oh&tier  son* langage  et  ne  pas  dire  par  exemple  ;  je  monte  Jei 
escaliers  et  je  tloche  à  la  porte,  expressions  qui  sont,  même  dans  le  midi,  des 
locutions  de  portière.  Avec  toutes  ces  précautions,  on  pourrait  être  encore  bien 
loin  de  l'art  difficile  de  causer  sur  tùus  les  tons,  et,  bien  que  Montaigne,  La 
Fontaine  et  quelques  autres  y  aient  réussi,  ce  n'est  pas,  à  en  juger  par  cet 
-•ssai,  )e  genre  qui  convenait  au  poète  de  Lourmarin.  G.  P. 


•éeurlté  et  liberté  de  le  Vrmuoe,  au  projet  d'une  réorganisation 
générale,  par  M.  G.  de  Kérigant,  conseiller  général,  etc.  Paris,  Douniol, 
1875.  In-8  de  64  p.  —  Prix  :  1  fr. 

La  brochure  de  M.  de  Kérigant  pose,  si  même  elle  n'a  pas  la  prétention 
de  les  résoudre,  tons  les  problèmes  que  suscite  l'organisation  administra* 
Uve  et  politique  d'un  grand  pays  comme  la  France.  Qu'on  en  juge  par  le 
résumé  suivant  :  Les  communes  seraient  l'objet  d'une  nouvelle  délimitation, 
et  devraient  présenter  au  tnintmum  une  population  de  deux  mille  Âmes.  •— 
Le  canton  deviendrait  une  circonscription  administrative,  et  devrait  avoir  au 
moins  nne population  de  48 à  20,000 âmes;  —  L'arrondissement  serait  sup- 
primé; -*  Le  nombre  des  départisments  serait  augmenté;  ehacnn  eompren« 
drait  une  population  de  300  à  950,000  âmes  ;  -*%  il  y  aurait  des  provinces 
formées  en  général  de  quatre  à  cinq  départements  ;  — •  De  nouvelles  règles 
présideraient  au  recrutement  de  l'armée  et  de  la  magistratnre,aux  nomina« 
tione,  à  l'avancement;  —  Le  système  électoral  serait  profondément  modifié, 
etc.,etc.,etc.L'auteur,on  le  voit,  n'est  pas  ennemi  des  innovations.  Nous  avouons 


—  co- 
que son  ardeur  à  corriger  Tœavre  violente  de  la  Révolution'par  d'antres  réfor- 
mes ni  moins  violentes,  ni  moins  contraires  aux  traditions  historiques,  ne 
laisse  pas  de  nous  inspirer  une  certaine  frayeur.  —  Au  moins  voudrions- 
nous,  si  l'on  fait  tant  que  de  tout  bouleverser,  avoir  devant  nous  des  plans 
mieux  définis,  plus  précis,  nous  osons  même  ajouter,  plus  étudiés.  Cepen- 
dant les  intentions  de  M.  de  Kérigant  nous  paraissent  louables  en  elles- 
mêmes,  et  nous  nous  associons  à  un  grand  nombre  des  critiques  qu'il 
formule  contre  les  abus  de  la  centralisation  révolutionnaire, 

A.  dbClaye. 


Mon  Voyage  au  paya  des  chliiiërea«  par  Antonin  Rondelet.  Paris, 
Didier,  1875.  In-18  j.  de  355  p.  —  Prix  :  3  fr.  50. 

C'est  la  réalité  que  M.  Rondelet  poursuit  au  pays  des  chimères;  il  nous 
montre,  dans  un  piquant  et  fantaisiste  récit,  à  quel  réalisme  effrayant 
devraient  nous  mener  logiquement  quelques-uns  des  prétendus  principes  qui 
passent  pour  être  le  plus  beau  fleuron  de  notre  patrimoine  intellectuel.  Les 
conséquences  chimériques  auxquelles  on  arriverait  frapperont,  par  leur 
absurdité,  certains  esprits  rebelles  au  raisonnement.  Ainsi,  nous  voilà  à 
Égalidté,  où  tout  se  fait  en  vue  de  conserver  l'égalité.  Les  costumes  sont  les 
mêmes  pour  tout  le  monde;  un  fonctionnaire  en  fait  la  distribution  à 
époques  fixes;  mais,  malgré  tout,  on  n'a  pas  pu  empêcher  que  la  manière 
de  porter  le  vêtement  ne  rompit  la  sainte  égalité  :  on  cherche  le  remède. 
La  liberté  du  travail  est  bannie,  parce  qu'elle  conduirait  à  la  plus  flagrante 
inégalité  au  détriment  des  paresseux  ;  ^oute  supériorité  étant  une  atteinte  à 
l'égalité,  les  enfants  précoces  et  intelligents  sont  confiés  aux  mains  les  plus 
aptes  à  éteindre  leurs  facultés.  A  Vaganopolis,  le  système  électoral  a  atteint 
la  perfection  :  pour  n'avoir  que  des  suffrages  désintéressés,  on  ne  fait  voter 
que  les  citoyens  qui  n'ont  pas  d'intérêt  :  les  pauvres  les  gens  sans  aveu. 
Pour  avoir  des  élus  sans  parti  pris,  on  les  choisit  parmi  les  ignorants;  les 
députés  dorment  aux  séances  pour  ne  pas  se  laisser  influencer  par  les  dis- 
cours ;  la  msgorité  exclut  la  minorité  pour  n'avoir  pas  d'opposition.  A  Orga- 
nisation-Ville, le  travail  des  bureaux  est  singulièrement  simplifié  à  l'avan- 
tage du  public  :  vous  remettez  vos  pièces  à  une  machine  qui,  au  bout  d'un 
instant,  vous  les  rend  paraphées,  visées,  etc.  Les  esprits  légers  trouveront  à 
se  distraire  et  même  à  s'amuser  dans  le  badinage  de  ce  volume  ;  les  esprits 
sérieux  y  trouveront  matière  à  de  graves  réflexions  et  à  de  fréquents  retours 
sur  noti^  état  social.  V.  M. 


Loin  aoclalea  expliquées  par  le  bon  aena»  par  C.  Boutry.  Paris, 
Chaix,  1875.  In-18  de  43  p.  —  Prix  :  0  fr.  25. 

Cette  brochure  est  un  peut  traité  d'économie  sociale,  où  sont  abordées 
toutes  les  questions  essentielles  :  la  responsabilité,  le  travail,  la  propriété, 
le  capital,  la  loi  de  l'offi^  et  de  la  demande,  l'échange,  la  monnaie,  les 
impôts,  le  socialisme,  etc.,  etc.  C'est  plutôt  un  aide  mémoire  pour  les  per- 
sonnes qui  ont  des  notions  sur  tous  ces  sujets,  qu'un  livre  populaire  destiné 
à  combattre  Terreur  et  l'ignorance.  La  préface,  du  reste,  n'est  pas  &  l'adresse 
des  classes  populaires,  et  nous  ne  voyons  pas  ce  qu'avait  à  faire,  dans  ce 
petit  traité,  la  prodigalité  de  Louis  XIV  et  le  reproche  à  la  royauté  d'avoir 
trop  souvent  joué  le  rôle  de  Providence.  B.  L. 


—  61   — 

i  de  JLtyon*  Compte  rendu  de  la  septième  assemblée  générale 
des  directeurs  d'OEuvres  (24-28  août  1874),  par  M.  Camille  Réiiont.  Paris, 
Bureau  central  deTUnion,  rue  de  Verneuil,  32.  In-8  de  v-497  p.  — Prix  : 
4  fr. 

^••«■■iblée  clea  CNSuvrea  catholiques  du  diocèse  de  Sols- 
•ODf»,  tenue  A  JVol.re-Danie  de  Lflevse*  le*  lO  et  II  mars 

A  97 tf  •  Compte  rendu  publié  par  le  Bureau  diocésain.  —  Saint-Quentin, 
imp.  J.  Moureau,  1875.  In-8  de  4o2  p.  —  Prix  :  1  fr. 

Nous  nous  reprocherions  de  ne  pas  signaler  à  nos  lecteurs  ces  deux 
ToIomeSy  qui  sont  une  éloquente  attestation  du  mouvement  intellectuel  et 
moral  qui  se  produit  en  France.  Le  congrès  de  Lyon,  qui  a  réuni  sept  cents 
personnes,  hommes  d'œuvres,  hommes  d'action,  a  laissé  des  traces  profondes 
par  rimpulsion  qu'il  a  donnée  aux  œuvres  ouvrières  et  par  les  relations  fra- 
ternelles qu'il  a  établies  entre  tous  ses  membres.  Ce  qui  en  fait  le  caractère 
original,  c'est  qu'on  s'y  est  abstenu  de  discussions  théoriques  pour  se  livrer 
à  Tétude  J'œuvres  spéciales  :  aussi  le  compte  rendu  offre-t-il  une  série  de 
monographies  des  œuvres  les  plus  importantes  et  les  mieux  entendues 
dans  tous  les  genres,  une  série  de  types  intéressants  à  étudier  et  plus  encore 
à  réaliser  :  œuvres  dans  les  villes,  dans  les  campagnes,  dans  les  usines  ; 
pour  les  apprentis,  pour  les  ouvriers;  œuvres  de  prières,  œuvres  d'instruc- 
tion et  de  propagande  intellectuelle... 

—  La  réunion  tenue  à  Liesse  a  eu  un  théâtre  moins  étendu  et  un  personnel 
moins  nombreux;  le  compte  rendu  offre  naturellement  un  intérêt  moins 
général.  Quelques-uns  des  .rapports  et  quelques-unes  des  discussions  sont 
cependant  bien  dignes  de  fixer  l'attention.  Nous  citerons,  notamment,  les 
rapports  de  M.  l'abbé  Dehon  sur  l'état  des  œuvres  et  des  associations 
d'hommes  dans  le  diocèse  de  Soissons  ;  —  Sur  le  rôle  de  la  musique  dans 
les  œuvres  ;  —  Sur  les  anciennes  confréries  et  les  associations  d'archers  ;  — 
Sur  la  presse,  les  bibliothèques  et  la  propagande  des  bonnes  lectures,  dont 
un  des  plus  actifs  instruments  est  une  œuvre  fondée  par  Mgr  de  Garsi- 
gnies,  disposant  de  29,000  volumes,  dont  26,000  en  circulation,  répartis 
entre  318  dépôts.  H.  de  St.-M. 

Hiatoire  de  l'Aosleterre  depuis  la  mort  de  la  reine  Anne 
Jua<iu'A  nos  Jours,  par  H.  Reynâld,  professeur  à  la  Faculté  des 
lettres  d'Aix.  Paris,  Germer  Baillière,  1875.  In-12  de  360  p.  —  Prix  : 
2  fr.  50. 

Ce  livre  est  l'histoire  du  parlementarisme  anglais,  depuis  l'avènement  de 
la  maison  de  Hanovre.  E  laisse  complètement  de  coté  tout  ce  qui  ne  touche 
pas  à  la  politique.  Le  principal  défaut  du  livre  de  M.  Reynald  est  dans 
l'esprit  de  partialité  révolutionnaire  qui  s'y  fait  voir  en  maint  endroit.  Il  a, 
d'autre  part,  le  tort  de  presser  trop  de  détails  dans  un  cadre  trôs-restreint; 
aussi  les  expositions  manquent-elles  quelquefois  de  clarté.  Le  style  laisse 
aussi  parfois  un  peu  à  désirer.  Enfln,  la  typographie  est  mal  soignée,  et  les 
fautes  qui  s'y  sont  glissées  sont  d'autant  plus  regrettables  qu'elles  portent 
souvent  sur  des  noms  propres  et  des  dates.  F.  R. 

Ea  Mort  et  la  Bibliographie  catlioll<iue.  Réfutation  de  la  critique 
du  livre  par  le  joumc^,  par  Joseph  de  Chaignolles.  Paris,  Didier,   1875. 
In-12  de  112  p.  —  Prix  :  1  fr.  50. 
Je  ne  sais  si  les  études  de  M.  de  Chaignolles  sur  la  Mort  ont  plus  de  valeur 

que  la  Bibliographie  catholique  ne  leur  en  attribue.  Mais  l'interminable  justi- 


—  62  — 

fieaiion  qae  l'aateur  publie  aujourd'hui  ferait  croire  que  le  critique  de  cette 
revue  û*a  point  en  tort  de  se  montrer  séyère.  Vague,  déclamatoire,  portant 
presque  toujours  à  faux,  et  longue  à  ennuyer  le  pins  patient  des  critiques  : 
telle  est  la  brochure  que  nous  offre  aujourd'hui  M.  de  Chaignolles  pour  sa 
défense.  Le  style  même  ne  mérite  pins  les  faveurs  que  la  Bibliographie 
catholique  accordait  si  complaisamment  au  style  du  livre.  Où  l'auteur  va-t-il 
chercher  des  expressions  comme  celles-ci  :  exquiBiviié,  mondanise^  biblio- 
philie,  germe  de  vastitudey  etc.  L'auteur  veut  qn'en  le  critiquant  on  soit 
clair  :  qu'il  donne  donc  l'exemple.  Pour  nons,  nous  souhaitons  quo  son 
livre  vaille  mieux  que  la  défense  qu'il  en  publie  aujourd'hui  ;  sans  cela  il  ne 
mériterait  même  pas  les  maigres  éloges  qu'il  a  reçus.  E.  P. 


Question  dynastique  en  ESspnfçne*  par  M.  Afabisi  t  GunAEHO) 
traduit  de  l'espagnol.  Paris,  Grand,  1875.  In-8  de  104  p.   —  Prix:  i  tr. 

Une  polémique  passionnée  a  pris  soin  dès  longtemps  d'obscurcir  la  ques- 
tion de  la  légitimité  en  Espagne  ;  beaucoup  d'esprits  se  laissent  aveugler  par 
ces  nuages  accumulés  à  dessein*  Car  le  problème  n'est  pas  exclusivement 
scientifique  ;  il  présente,  au  point  de  vue  politique ,  un  intérêt  saisissant 
d'actualité.  Que  les  hommes  de  bonne  foi,  dont  la  conviction  n'est  pas 
formée  encore  ,  ouvrent  le  traité  de  M.  Aparisi  y  Guijarro.  La  com- 
pétence de  l'auteur,  qui  s'est  placé  par  de  nombreux  travaux  au  pre- 
mier rang  des  publicistes  espagnols,  est  à  l'abri  de  toute  contestation  ; 
son  impartialité  est  à  l'ahri  de  tout  soupçon.  Ce  n'est  pas  un  carliste  qui  met 
son  érudition  au  service  d'une  thèse  préconçue  ;  c'est  un  érndit  qui,  lente- 
ment et  par  l'effet  de  recherches  consciencieuses,  se  rallie  au  drapeau  carliste 
et  cherche  à  y  rallier  son  lecteur.  Chacune  de  ses  assertions  repose  sur  des 
documents  officiels  ;  les  faits  sont  relatés  et  commentés  avec  la  plus  scrupu- 
leuse fidélité.  A.  DE  Clatb. 


Ei*AJ>clenne  Jonction  de  Pitngleterre  h  la  France,  ou  le  détroit 
de  CaUds,  ia  formation  par  la  rupture  de  Visthmey  sa  topographie  et  sa  cons^ 
titution  géologique  (ouvrage  qui  a  remporté  le  prix  au  concours  de  l'Aca- 
démie d'Amiens  en  l'année  4771),  par  Nicolas  Desmarets,  membre  de 
de  l'Académie  des  sciences  (1725-4815),  avec  deux  cartes  topographiqnes  et 
un  profil  ou  coupe  des  différents  fonds  du  r^nal  de  la  Hanche.  Paris,  Isidore 
Liseux,  4875.  In-42  de  425  p.  —  Prix  :  3  fr. 

U  est  vraiment  très-intéressant,  au  moment  où  la  France  et  l'Angleterre 
vont  essayer  de  se  mettre  en  communication  directe  par  chemin  de  fer,  de 
lire  un  livre  écrit  il  y  a  plus  d'un  siècle,  qui  se  rapporte  si  intimement  à  ia 
question.  C'est  une  discussion  historique  et  physique  où  l'on  trouve  une 
foule  de  faits  qui  intéressent  la  topographie  du  détroit  :  elle  est  divisée  en 
deux  parties.  Dans  la  première,  Desmarets  discute  les  preuves  historiques  et 
physiques  de  l'existence  de  l'isthme;  il  se  sert,  pour  l'hisloire,  à  la  fois  du 
témoignage  des  auteurs  anciens  :  César,  Tacite,  Pline,  Dion-Cassius,  etc.,  et 
des  travaux  des  modernes  :  Camden,  Westgan,  Twine,  etc.  Pour  les  preuves 
physiques,  l'auteur  s'attache  à  examiner  la  topographie  des  eûtes  et  du  fond 
du  détroit,  la  nature  et  les  dispositions  des  couches  du  terrain,  etc.  Après 
avoir  établi  l'existence  de  l'isthme,  l'auteur  en  étudie,  dans  la  seconde  partie, 
la  rupture  :  comment  elle  s'est  effectuée  ;  les  causes  qui  l'ont  favorisée,  telles 
que  le  mouvement  des  marées,  la  disposition  des  côtes.  Il  essaye  aussi  de 
déterminer  quelle  devait  être  la  nature  et  l'épaisseur  des  terres  qui  for- 
maient l'isthme,  et  en  combien  d'années  elles  ont  dû  être  enlevées. 

Nous  constatons  que  l'auteur  ne  s'est  point  laissé  entraîner  par  l'amour  dn 


—  63  — 


merveille DX  ;  son  oavrage  est  de  pure  érudition,  et  il  contribuera  certaine- 
ment à  jeter  du  jour  sur  la  question  qui  préoccupe  aijyoord'hui  si  vivement 
deux  grandes  nations.  Erkest  Babeu)n. 


Crétlneau-JToly  et  ses  livres»  par  le  P.  Emile  Régnault,  de  la  Com- 
pagnie de  Jésus.  Paris,  Lecoffre,  1875.  In-8  de  72  p. 

Le  P.  Régnault  a  été  bien  inspiré  de  faire  tirer  à  part  la  notice  qull  a 
consacrée,  dans  les  Etudes  religieuses,  à  M.  Crétineau-Joly.  Elle  nous  fera 
prendre  patience  en  attendant  la  biographie  préparée  par  l'abbé  Maynard,  et 
qui  sera  accompagnée  de  quelques  œuvres  inédites.  L'homme  et  l'écrivain 
sont  appréciés  avec  beaucoup  de  liberté;  l'éloge  et  la  critique  ont  leur  part. 
A  côté  du  fervent  chrétien,  vaillant  défenseur  de  l'Eglise  et  de  la  Compagnie 
de  Jésus,nous  voyons  le  polémiste  qui  ne  sait  point  ioigour»  retenir  sa  plume, 
modérer  «son  langage  et  se  tenir  dans  les  bornes  de  la  charité  et  du 
respect.  Aidé  de  documents  inédits,  le  P.  Régnault  révèle  bien  des  faits  curieux 
de  la  vie  littéraire  et  politique  de  Crétineau-Joly,  notanunent  l'origine  de» 
relations  qui  lui  ont  procuré  les  Mémoires  de  Consalvi.  Cette  étude  est  ter- 
minée par  une  notice  bibliographique  dans  laquelle  nous  ne  relevons  qu'un 
ouvrage  que  le  Mybiblûm  n'ait  pas  cité  dans  sa  nécrologie:  La  cour  et  U  gou- 
temement  de  Prusse  en  face  de  la  Coalition  (1853).  V.  M. 

Pen»ée«,  maxime*,  sentettee»  et  bontadea,  par  M.  Louis  oc 
CoiiBETrEs-LABOUREUE.  Toulouse,  typ.  de  Bonnai  et  Gibrac,  1875.  In-8  de 
179  p. 

et  L'esprit  est  comme  le  bonheur,  il  fuit  ceux  qui  le  cherchent.  »  M.  de 
Gombettes  n'a  pas  formulé  cette  sentence  pour  que  nous  lui  disions  qu'il  n'a 
pas  dû  chercher  l'esprit,  puisqu'on  en  trouve  du  meilleur,  du  plus  fin,  du 
plus  délicat,  et  nous  pouvons  dire  du  plus  noble,  dans  ses  Pensées^  maximes^ 
sentences  etbouiades,  petits  bijoux  artistement  montés  dans  un  élégant  volume. 
Il  aborde  un  peu  tons  les  siyets  :  religion;  philosophie;  politique;  passions; 
rameur  ;  préjugés,  illusions,  ridicules  ;  vertu»,  qualités  ;  l'homme  ;  la  femme  ; 
morale  et  pensées  diverse»,  a  J'ai  employé,  dit-il,  la  forme  brève  et  concise 
des  sentences  des  grands  maîtres  ;  c'est  tout  ce  que  j'aurai  de  conmiun 
avec  eux.  »  Le  public  jugera.  Nous  ne  pouvons  donner  que  quelques  échan- 
tillons. —  «  C'est  toijgours  au  nom  de  la  morale  que  les  réformateurs  atta- 
quent la  religion,  et  toujours  aussi  cette  même  morale,  par  eux  outragée, 
qui  leur  fait  abandonner  la  religion.  »  —  «  La  meilleure  preuve  que  Dieu 
existe,  c'est  qu'il  eet  perpétuellement  attaqué.  —  «  Dans  toutes  les  révolutions 
on  voit  toujours  les  mêmes  hommes,  les  même»  choses,  les  mêmes  mots, 
déguisés  différemment.  >»  —  h  Pleurer  avec  ceux  qu'on  aime  est  une  consola- 
tion qu'on  donne  et  qu'on  éprouve.  »  —  a  Le  bonheur  est  l'ignorame  du 
mieux.  >»  —  •<  Obéir  dignement  est  plusdifQcile  que  commander.  »  —  Ily  a, 
dans  le  nombre,  plus  d'une  u  boutade  »,  M.  de  Combettes  en  convient,  et 
même  quelques  paradoxes.  Mais  nous  laissons  à  nos  lectrices  le  plaisir  d'être 
sévères  envers  lui  et  de  lui  appliquer  la  peine  du  talion.  R,  S. 

Ia  Question  du  drapeau.  Appel  au  bon  seM  et  à  la  jusUcef  luM  des 
manifestes  de  M.  le  c<mte  de  Chamhord  et  d'une  étude  de  M.  Armand  de 
Ponimartin,  sur  le  drapeau.  Reims,  Imp.  coopérative;  Pans,  Fechoz,  187S. 
ln-8  de  56  p.  —  Prix  :  40  c. 
Cette  brochure  n'a  pas  la  prétention  d'apporter  des  documents  inédits,  ni 

même  do  présenter  des  aperçus  nouveaux  sur  cette  question  qui  a  déjà  une 


—  64  — 

bibliographie  considérable.  C'est  une  énergique  défense  du  drapeau  blanc, 
un  exposé  net  et  franc  des  arguments  en  sa  faveur,  et  des  éyénements  qui 
ont  eu,  dans  ces  derniers  temps,  de  l'influence  sur  la  question.  On  y  a  joint 
quelques-uns  des  plus  récents  et 'des  plus  importants  manifestes  du  comte 
de  Chambord.  V.  M. 


VARIÉTÉS 

LE  MOYEN  AGE  ET  LA  RENAISSANCE 
A  PROPOS  d'une  publication  RECENTE  DE  M.  ORUYER 

D'après  la  terminologie,  généralement  usitée,  le  mot  Renaissance  sert  à 
désigner  une  époque  qui  se  caractérise,  premièrement,  par  la  renonciation 
à  l'idéal  chrétien  du  mojen  âge,  ainsi  qu'aux  formes  spéciales  qui  expri- 
maient alors  cet  idéal  ;  secondement,  par  le  culte  de  l'antiquité  classique,  et, 
dans  les  arts  plastiques,  par  l'emploi  du  nu,  de  parti  pris,  à  tout  propos  et 
hors  de  propos,  jusqu'à  l'indécence  et  la  profanation.  On  attribuera  partout 
à  la  Renaisnance,  par  exemple,  les  peintures  de  Michel-Ange,  dans  la  cha- 
pelle Sixtine,  le  château  de  Chambord,  le  Roland  furieux^  etc.,  etc.  Personne 
n'entendrait  sans  surprise,  et  même  sans  protestation,  qualiGer  d'œuvres  de 
la  renaissance  :  la  Sainte-Chapelle  de  saint  Louis,  le  couronnement  de  la 
Vierge  de  Fra-Ângelico,  les  sculptures  de  Notre-Dame  de  Paris,  la  Chanson  de 
Roland  ou  le  poème  du  Cid.  Chacun  dira,  sans  hésiter,  que  ces  œuvres  appar- 
tiennent au  moyen  âge,  et,  en  le  disant,  on  entendra  implicitement  une 
idée  opposée  à  celle  que  suscite  le  mot  Renaissance.  Il  y  a  des  partisans 
exclusifs  du  moyen  âge,  comme  il  y  en  a  de  la  renaissance.  Les  uns  et  les 
autres  savent  parfaitement  que  leur  prédilection  s'attache  &  des  objets  diffé- 
rents, et,  dans  une  certaine  mesure,  opposites.  —  Pour  descendre  au  lan- 
gage le  plus  pratique,  l'architecte,  l'artisan  même,  comprendra  qu'il  s'agit 
de  choses  paifaitement  distinctes,  lorsqu'on  lui  demandera  un  édiâce  ou  un 
meuble,  soit  dans  le  style  du  moyen  âge,  soit  dans  celui  de  la  renaissance. 
La  confusion  est  impossible.   Tel  est,  incontestablement,  l'état  des  choses, 
Paul  Delaroche  n'a  pas  commis  une  bévue  et  il  a  été,  au  contraire,  parfai- 
tement avisé  lorsque,  voulant  caractériser  les  grandes  époques  de  l'art  dans 
une  peinture  célèbre,  il  a  séparé  le  moyen  âge  de  la  renaissance  et  les  a 
personnifiés  par  deux  personnages  absolument  différents  :  d'une  part  la  belle 
et  chaste  blonde,  et,  de  l'autre,  une  fille  plus  libre  et  sufûsamment  désha- 
billée pour  être  reconnue  au  même  instant. 

M.  Gruyer,  dans  une  publication  toute  récente  ^  supprime  purement  et 
simplement  le  moyen  âge.  Entendons  nous  :  il  le  supprime  en  tant  que 
l'époque  d'un  épanouissement  de  tous  les  arts.  Dans  son  langage,  la  renais- 
sance n'est  plus,  comme  pour  tout  le  monde,  un  certain  mode  d'art  dont  la 
pleine  floraison  est  au  seizième  siècle.  Pour  M.  Gruyer,  c'est  le  fait  même, 
ou,  si  l'on  veut,  c'est  toute  l'époque  de  floraison  de  l'art  à  partir  de  la  déca- 
dence du  style  romano-bysantin.  Il  réserve  le  mot  moyen  âge  pour  les  œuvres 
ou  les  époques  de  barbarie,  de  décadence  ou  de  confusion  ;  il  n'est  pas 
éloigné  d'attribuer  toute  culture  esthétique  au  retour  vers  le  culte  de  l'anti- 

1 .  Ltt  œurrt*  d'art  d$  la  renaiuance  Ualienne  au  (empU  de  Saint'Jean  {BaptisUr9  ée 
Flortncê),  par  F.  A.  Gruyer.  Paris,  R^noaard,  1875.  Ia-8  do  xii-229  p.,  avec  3  plan- 
ches  gravées. 


—  63  — 

qaité  classique.  Ecoutons  :  «  Après  mille  ans  d'oubli,  le  quatorzième  siècle, 
réentend  cette  voix  universelle  de  Fart  qui  parle  de  l'infini  au  cœur  de  l'homme 
sur  le  sommet  de  Tacropole  comme  au  centre  de  la  cité  florentine  ;  après  le 
long  engourdissement  du  moyen  âge,  les  trécentistes  renaissent  à  la  vie  de  la 
nature  et  à  la  mystérieuse  poésie  de  la  beauté  humaine.  L'âme  des  artistes 
retrouve  alors  k  travers  les  caractères  accidentels  et  passagers,  ce  quelque 
chose  d'impersonnel  et  d'impérissable  qui  est  comme  l'empreinte  de  Dieu 
sur  l'homme  et  toutes  les  œuvres  que  les  artistes  touchent  de  leurs  mains 
portentla  trace  de  la  plus  sinoére  ànoUon,  » 

Voyons  un  peu  :  il  y  a  eu  de  tout  cela  avant  le  quatorzième  siècle.  Les 
églises  gothiques  du  treizième  siècle  parlent  de  Vinfini  au  cœur  de  l'homme 
tout  aussi  éloqnemment  que  le  Parthénon  (dont  je  ne  veux  pas  dire  de  mal). 
Nos  chansons  de  geste,  antérieures  à  l'an  4300,  et  celles-là  seulement,  peut- 
être,  portent  la  trace  de  la  plus  sincère  éfnotion  :  il  y  a  des  passages  de  la 
Chanson  de  Roland  que  je  n'ai  jamais  lus  sans  faire  pleurer  les  auditeurs. 
Le  trouvère  de  Garin,  et  celui  d'Alesawips  étaient-ils  des  engourdis  ?  Et  la 
musique  du  moyen  âge  ?  Demandez  quelle  émotion  elle  produisait  encore 
ces  jours  derniers,  sous  les  voûtes  de  Saint-Eustache.  Et  le  mystère  des  Pno- 
phètes  du  Christ  ?  et  la  Bésurrection  de  Lazare?  Tout  cet  ensemble,  d'une  gran- 
deur que  rien  n'a  surpassée,  est  du  pur  moyen  âge,  c'est-à-dire  antérieure 
au  quatorzième  siècle  qui  en  a  vu  commencer  la  décadence  assez  rapide. 

M.  Gruyer  est  un  esprit  trop  ouvert  et  trop  éclairé  pour  ne  pas  le  com- 
prendre aussi  bien  et  peut-être  mieux  que  moi.  Aussi,  dans  le  dburs  de  son 
livre,  fait-il  une  grosse  infidélité  à  son  quatorzième  siècle  de  l'avant-propos. 
A  la  page  210,  il  mentionne  la  renaissance  française  du  treizième  siècle.  Evi- 
demment, le  mot  est  employé  ici  dans  le  sens  étymologique  de  renaitrey  mais 
ce  n'en  est  pas  la  signification  devenue  usuelle  et,  pour  ainsi  dire,  technique. 

Est-il  à  propos  d'admettre  cette  identification  esthétique  du  moyen  âge  et  de 
la  renaissance?  En  Italie,  depuis  Giotto,  il  y  a  à  constater,  jusqu'au  dix-septième 
siècle,  une  marche  continue  (je  ne  dirai  pas  toujours  progrés)  sous  l'influence 
de  plus  en  plus  active  de  l'antiquité  classique  ;  mais  il  faut  éviter  de  subor- 
donner le  fonds  à  la  forme.  Assurément,  d'Orcagna  à  Fra-Angélico  et  à  Michel- 
Ange,  vous  pouvez  suivre  le  développement  de  certaines  compositions  et 
môme  de  certains  personnages  (comme  le  Christ  des  jugements  derniers).  Il 
en  faut  dire  autant,  sinon  plus,  de  l'architecture  et  de  la  sculpture  ;  mais 
prenons -y  garde  :  Giotto,  Orcagna,  le  Pisan,  Fra-Angelico  et  tant  d'autres 
sont,  par  eux-mêmes,  quelque  chose  de  complet  et  de  définitif,  indépendam- 
ment de  ce  qui  en  est  sorti,  quelquefois  par  un  développement  normal,  par 
un  progrès,  mais  souvent  par  déviation  et  sur  le  chemin  de  la  décadence.  Ils 
ne  sont  pas  seulement  une  préparation,  mais  un  tout,  un  résultat,  un  ter- 
minus.  Je  me  refuse  absolument  à  les  considérer  comme  des  étapes  sur  le 
grand  chemin  de  l'art. 

S'il  y  a  un  prétexte  matériel  à  comprendre  sous  une  seule  dénomination 
la  marche  de  l'art  en  I^a/te  depuis  Giotto  jusqu'au  classicisme  du  dix-huitième 
siècle,  il  n'y  a  absolument  rien  qui  justifie  cette  confusion  en  France.  Là,  au 
treizième  siècle,  l'art  était  arrivé  à  un  épanouissement  complet  sans  avoir 
subi  l'influence  de  l'antiquité,  et  sans  s'être  mis  en  révolte  contre  la  nature, 
ni  contre  la  tradition.  Rencontrant  saint  Jean-Baptiste  dans  le  désert  du 
Jourdain,  il  ne  s'est  pas  cru  autorisé  à  l'atfubler  d'une  toge  romaine  (i). 

1.  Gomme  dans  le  dossaU  du  baptutère  àt  Florenre  :  «  Le  cilice  en  poiU  de  chameau 
scruDaleosement  respecté  dans  les  bas-reliefs  précédents,  disparaît  sous  ]e  manteau 
<^ni  arape  toute  la  figure  avec  une  nobless'!  et  une  élégance  vraiment  dignes  de  l'an- 
tique. »  Gruyer.  Rtnamancê  italienne ^  p.  91. 

Juillet  1875.  T.,  XIV,  5. 


-  66  - 

Après  le  treizième  siècle,  il  a  commencé  sa  décadence  sous  lui-même  et  par 
lui-môme  jusqu'au  moment  où,  subissant  Tinfluencede  Tantiquité,  il  a  renié 
son  idéal  ancien  pour  entrer  dans  une  voie  toute  nouvelle.  Il  a  chaniré 
d'idéal.  ^ 

De  tout  ce  qui  précède,  il  me  parait  résulter  l'opportunité  de  conserver 
des  noms  différents  pour  désigner  des  choses  si  profondément  différentes. 
Nous  ne  confondrons  pas  l'idéal  chrétien  avec  le  débordement  de  l'imitation 
classique.  Nous  ne  confondrons  pas  Fra-Angelico  avec  Michel-Àjnge,  ni  le 
trouvère  de  Roland  avec  TArioste,  ni  Arnolfo  diLapi  avec  Palladio,  ni  André 
de  Pise,  avec  Jean  Goujon.  —  A  l'idéal  conçu  et  réalisé  par  les  premiers, 
nous  conserverons  l'appellation  générique  de  moyen  âge.  —  Nous  réserverons 
un  autre  nom  pour  l'art  qui  a  secoué  le  joug  chrétien,  pour  concevoir  et 
réaliser  un  autre  idéal.  Cet  idéal  nouveau  n'était  pas,  à  proprement  parler, 
celui  de  l'antiquité,  si  essentiellement  religieuse  dans  les  grandes  époques, 
mais  il  a  emprunté  les  formes  extérieures  de  la  Grèce  et  de  Home . 

Le  parti  pris  de  supprimer  le  moyen  âge,  n'est  pas  une  chose  nouvelle. 
Dans  une  salle  du  Louvre,  illustrée  par  le  peintre  Gros,  on  a  symbolisé  les 
grandes  époques  de  l'art  par  les  noms  de  Périclès,  d'Auguste,  de  François  I*% 
de  Léon  X,  enfin  de  Louis  XIV.  Entre  Auguste  et  François  P',  rien  !  C'est 
l'école  de  Boileau  appliquée  aux  arts.  Les  peintures  de  Gros  n'étaient  pas 
encore  séchées  que  la  France  avait  découvert  le  moyen  âge.  La  France  s'était 
aperçue  qu'elle  avait  un  passé  antérieur  à  Villon  et  à  Mansard.  Aussi,  dans 
l'hémicycle  de  l'Ecole  des  beaux-arts;  Paul  Delaroche  a-t-il  figuré  séparé- 
ment l'art  du  treizième  siècle,  de  la  manière  qui  était  rappelée  tout  à  l'heure. 
C'est  entre  ces  deux  systèmes,  celui  de  la  salle  du  Louvre  et  celui  de  l'hé- 
micycle, qu'il  faut  se  prononcer.  Le  système  adopté  par  Delaroche  est,  selon 
nous,  le  seul  qui  ne  commette  pas,  conmie  l'a  fait  Gros,  une  omission  aigour- 
d'hui  ii\justifiable,  et  qui  évite  la  confusion  résultant  de  la  classification  suivie 
par  M.  Gruyer. 

S'il  a  paru  nécessaire  de  présenter  les  observations  qui  précèdent,  c'est  que 
M.  Gruyer  a  conquis  dans  le  monde  des  arts  une  juste  autorité  par  ses  ouvrages 
sur  les  Fresques  de  Raphaël  au  Vatican,  qui  sont  certainement  ce  que  nous 
avons  de  plus  complet  sur  l'œuvre  capitale  du  grand  maître.  Dans  ces  deux 
volumes,  comme  dans  ceux  qui  ont  suivi  et  qui  se  rapportent  aussi  au 
peintre  d'Urbin,  M.  Gruyer  laisse  à.  une  bonne  distance,  par  derrière  tous  ses 
devanciers,  Passavant  et  les  autres. 

La  nouvelle  publication  de  l'auteur  des  Fresques  de  Rapfuièl  est  presque  un 
travail  de  découverte,  car  il  y  expose,  il  y  rapproche  et  il  y  juge  des  produc- 
tions de  première  importance  qui  ne  sont  pas  môme  mentionnées  dans  des 
livres  très-sérieux  sur  l'art ,  en  Italie,  u  En  poursuivant,  dit-il,  des  travaux 
qui,  durant  quinze  années,  nous  ont  ramené  presque  constanmient  en  Italie, 
il  nous  est  arrivé  maintes  fois  de  passer  à  côté  des  œuvres  les  plus  intéres- 
santes des  plus  belles  époques  sans  en  soupçonner  môme  l'existence,  parce 
qu'elles  étaient  voilées  ou  renfermées,  reléguées  souvent  dans  des  chapelles 
particulières  ou  des  sacristies,  conservées  dans  des  dépendances  tout  à  fait 
séparées  de  l'édifice.  A  chaque  voyage,  nous  croyions  avoir  tout  vu  dans  un 
monument  et  presque  toujours  il  nous  restait  à  voir  encore.  Les  choses  mômes 
que  nous  pensions  le  mieux  savoir,  nous  ne  les  connaissions  que  d'une  manière 
sommaire,  incomplète  et  souvent  erronée.  Une  histoire  approfondie  de  ces 
choses  nous  parait  donc  utile  au  plus  haut  point,  et  c'est  de  cette  histoire  que 
nous  tentons  aujourd'hui  le  premier  essai.  » 

La  première  des  monographies  entreprises  ainsi  avec  tant  d'à-proposparun 
homme  de  beaucoup  de  goût  et  d'érudition,  est  consacré  à  l'un  des  monu- 


—  67  — 

ments  les  plos  intéressants  de  Florence,  TÉglise  de  Saint-Jean  ou  Baptistère  : 
Je  l'ai  lue  avec  grand  intérêt  ;  j'y  ai  appris  beaucoup  sur  des  sigets  que  je 
croyais  aussi  connaître  et  sur  lesquels  je  me  suis  aperçu  que  j'avais  seu- 
lement des  données  assez  confuses.  Toute  personne  curieuse  des  choses  de 
Tart  rendra  au  travail  de  M.  Gruyer  le  même  témoignage  et  ne  fermera  pas 
le  livre  sans  se  promettre  d'y  recourir  en  temps  opportun. 

Adolphe  d'Avril. 


CHRONIQUE 

Nécrologie.  —  M.  Charles-François-Marie,  comte  de  Rémusat,  né  à  Paris, 
le  14  mars  i797,  est  mort,  dans  la  même  ville,  le  4  juin  1875.  Fils  d'un  préfet 
du  premier  Empire,  d'un  chambellan  de  Napoléon,  M.  de  Rémusat  se  rangea, 
dès  son  entrée  dans  la  vie  politique  et  littéraire,  sous  la  Restauration,  parmi 
les  disciples  de  l'école  dite  libérale,  qui  faisait  opposition  au  gouvernement 
de  la  royauté  française,  Il  collabora  au  Lycée  français^  aux  Tablettes  univer- 
selleSj  à  la  Revue  encyclopédique,  au  Globe,  au  Courrier  français.  Le  triomphe 
de  son  parti  en  1830,  le  fit  entrer,  d'abord  comme  député,  puis,  comme  sous- 
secrétaire  d*État,  dans  la  conduite  des  affaires,  et  changea  d'abord  ce  partisan 
du  mouvement  en  partisan  de  la  résistance.  Mais,  en  1837,  il  se  rallia,  sous  la 
direction  de  M.  Thiers,  à  l'opposition  dite  constitutionnelle,  et  fut  ministre  de 
l'Intérieur  dans  le  cabinet  formé  par  cet  homme  d'État,  le  1*'  mars  1840,  et 
dont  il  partagea  la  chute  le  29  octobre,  de  la  même  année.  De  1840  à  1848,  il 
battit  en  brèche,  sous  la  conduite  de  M.  Thiers,  la  monarchie  de  juillet,  et  se 
livra  en  même  temps  à  des  travaux  philosophiques  et  littéraires  qui  le  cx)n- 
duisirent  à  l'Académie  des  sciences  morales  (1842)  et  à  l'Académie  française,  où 
il  remplaça  Royer-CoUard  (1846).  De  1848  à  1852,  représentant  aux  Assem- 
blées constituante  et  législative,  il  fut  de  nouveau  du  parti  de  la  résistance. 
U  se  tint,  sous  le  second  Empire,  à  l'écart  de  la  politique,  où  il  rentra,  comme 
ministre  des  a£faires  étrangères,  sous  la  récente  présidence  de  M.  Thiers,  et 
prit  une  part  honorable  aux  négociations  pour  la  délivrance  du  territoire.  Le 
24 mai  1873,  il  tomba  pour  la  dernière  fois,  avec  son  chef  et  son  vieil  ami,  du 
pouvoir  dans  l'opposition.  Il  y  termina,  ou  peu  s'en  faut,  sa  carrière  comme 
il  l'y  avait  commencée.  M.  de  Rémusat,  qui  avait  vécu  en  libre-penseur, 
s'est  honoré  par  une  mort  chrétienne.  Ses  talents  d'orateur  et  d'écrivain 
étaient  remarquables.  On  peut  dire  de  lui,  chose  rare,  qu'il  savait  écrire 
en  français.  Quant  à  sa  renommée  de  philosophe,  son  scepticisme  élé- 
gant doit  être  considéré  moins  comme  une  force,  que  comme  une  faiblesse 
d'esprit.  Il  l'a,  grâce  à  Dieu  !  répudié  à  temps.  Les  principaux  ouvrages  de 
M.  de  Rémusat  sont  :  De  la  procédure  par  jurés  en  matière  criminelle  (1820};  — 
Du  Paupérisme  et  de  la  Charité  légale  (1840);  —  Essais  de  philosophie  {iM2)  ;  — 
Abelard  (1845);  —  De  laPhilosophie  allemande {iSi^);  —  Passé  et  présent  (1847); 
—  Saint  Anselme  de  Contorbéry  (18o4);  —  Critiques  littéraires  (1856);  ^U Angle- 
terre au  dix-huitième  siècle  (1856);  —  Bacon^  sa  vie,  son  temps,  sa  philosophie 
et  son  influence  jusqu'à  nos  jours  (1857)  ;  —  Politique  libérale,  ou  fragment 
pour  servir  à  la  défense  de  la  Révolution  française  (1860);  —  Channing,  sa  vie 
et  ses  CBUvres  (1861);  —  Philosophie  religieuse  ou  de  la  théologie  naturelle  en 
Franceeten  Angleterre  (1864);  —  lia  donné,  dans  la.Revue  des  Deux-Mondes,  un 
grandnombre  d'articles  d'histoire,  de  politique,  de  philosophie,  de  littérature 
et  de  voyages,  dont  la  plupart  ont  paru  en  volumes. 

—  M.  François-Pierre-Hippolyte-Ernest  Breton,  membre  de  la  société  des 


—  68  - 

Antiquaires  de  France,  ancien  président  de  la  société  des  Études  historiques, 
dont  il  faisait  partie  depuis  1828,  né  à  Paris  le  2i  octobre  1812,  est  mort  au 
même  lieu  le  30  mai  1875.  Élève  de  Régnier,  Watelet  et  Champin,  il  savait 
manier  le  crayon  ainsi  que  la  plume,  et,  en  même  temps  qu'il  exposait  an 
salon,  il  publiait  des  ouvrages  où  il  montrait  la  science  de  Tarchéologue 
et  qui  lui  ont  valu  des  lauriers  académiques.  En  1838,  il  fit  paraître  en 
collaboration  avec  M.  Achille  de  JoulTroy  son  Introduction  d  l'histoire  de 
France  ou  Description  physique  et  monumentale  de  la  Gaule,  jusqu'à  VéiabliS" 
sèment  de  la  monarchie  (in-folio  avec  pL),  ouvrage  qui  fut  couronné  par 
rinstitut  en  1839.  Après  avoir  travaillé  aux  Monuments  anciens  et  modeimes 
de  M.  Gailhabaud,  il  publia  Les  Monuments  de  tous  les  peuples,  (2  vol.  in-8, 
avec  gravures  sur  bois  dessinées  par  lui)  ;  ce  livre,  traduit  en  allemand, 
en  espagnol,  en  italien  et  en  russe,  eut  un  grand  succès  et  détermina 
Fauteur  à  donner,  en  1855,  Pompéia  décrite  et  dessinée,  in-8  (3«  édit.  1869, 
in-8  avec  de  nombreux  dessins],  et  en  1862,  Athènes,  décrite  et  dessinée 
(2«  édit.  1868).  Collaborateur  dès  1834  du  Musée  des  Familles  et  du  Magasin 
pittoresque,  il  a  en  outre  écrit,  pour  la  Nouvelle  Biographie  générale,  de 
nombreux  articles  sur  des  peintres,  sculpteurs  et  architectes  français  ou 
italiens.  L'Investigateur  a  publié  plusieurs  de  ses  travaux.  On  trouve  aussi 
son  nom  au  bas  des  dessins  qui  ornent  le  Manuel  d'archéologie  nationale, 
ÏBistoire  de  Paris  de  Dulaure,  les  Environs  de  Paris,  du  même,  le  Moyen 
âge  et  la  Renaissance.  Il  faisait  encore,  le  2  mai,  à  la  séance  de  la  Société 
des  études  historiques,  une  lecture  intitulée  Grenade. 

—  Le  29  mars  1875,  est  mort  k  Breslau  le  Dr  David-Auguste  Rosenthal. 
Il  était  né  de  parents  juifs,  en  1812,  à  Neisse.  Après  avoir  fait  ses  études 
médicales,  il  s'établit  à  Breslau  pour  y  exercer  sa  profession.  Il  se  convertit 
au  catholicisme  avec  toute  sa  famille  en  1851.  Depuis  cette  époque,  il  se  voua 
avec  une  infatigable  ardeur  à  la  défense  de  la  foi.  Il  dirigeait  avec  talent 
un  journal  populaire.  En  1862,  il  publia  une  nouvelle  édition  des  œuvres 
poétiques  d' Angélus  Sibsius.  Mais  Touvrage  qui  l'a  rendu  le  plus  célèbre, 
c*est  un  Tableau  des  Conversions  au  dix-neuvième  siècle  (Convertitenbilder  ans 
dem  XIX  Jahrhundert),  dont  il  vient  de  paraître  une  seconde  édition.  Ce 
Tableau  renferme  une  notice  sur  tous  les  principaux  convertis  d'Allemagne, 
d'Angleterre,  d'Amérique,  etc.  Il  fait  suite  à  la  grande  collection  publiée 
par  le  savant  évoque  de  Strasbourg,  Mgr  Rœss,  laquelle  contient  l'histoire 
des  principales  conversions,  depuis  la  réforme  jusqu'au  commencement  de 
notre  siècle. 

—  M.  Charles-Auguste  Mallet,  né  à  Lille  le  12  janvier  1807,  est  mort  dans  le 
courant  du  mois  d'avril.  Entré  à  l'école  normale  en  1826,  il  a  professé  l'his- 
toire au  lycée  de  Douai,  et  ensuite  la  philosophie  dans  plusieurs  lycées  en 
province  et  &  Paris,  jusqu'en  1848  où  il  fut  nommé  inspecteur  de  l'Aca- 
démie de  Paris,  pour  être  envoyé  comme  recteur  à  Rouen  en  1850.  11  a 
écrit:  sur  Vhistoire  de  Rollin  et  de  Veritate  (1834),  Thèses  pour  le  doctorat; 

—  Manuel  de  philosophie  (1835)  reparu  en  1853  sous  le  titre  de  Manuel  de 
logique.— Etudes  philosophiques  (2  vol.  in-8,  1838),  couronné  par  l'Académie  ; 

—  Histoire  de  la  philosophie  ancienne  (1842)  ;  —  Histoire  des  écoles  de  Mégyre 
et  des  écoles  d'Elis  et  d'Erétrie  (1845)  ;  —  Eléments  de  Morale  (1864).  —  Il  a 
traduit  de  l'anglais  les  Eléments  de  science  morale  de  Jean  Beattié  (1840).  Il  a 
collaboré  au  Dictionnaire  des  sciences  philosophiques  de  M.  Frank  à  la  Nouvelle 
biographie  générale,  etc. 

—  M.  Jules-François-Élisabeth  Bonnet,  doyen  de  Tordre  des  avocats  de  la 
cour  d'appel  de  Paris,  depuis  la  mort  de  M.  Gaudry,  s'est  éteint  le  12  mal 
à  rage  de  80  ans.  Il  était  inscrit  au  barreau  depuis  1816:  il  avait  été  depuis 


-  69  — 

2o  ans,  forcé  par  sa  santé  de  renoncer  à  l'exercice  de  sa  profession;  tonte 
son  activité  était  portée  sur  l'éducation  de  sa  nombreuse  famille  et  les  bonnes 
œuvres.  11  avait  sa  place  dans  le  conseil  des  œuvres  les  plus  importantes. 
Longtemps,  il  fut  président  de  l'œuvre  de  FAvocat  des  pauvres.  Nous  con- 
naissons de  lui  deux  ouvrages.  la  poésie  devant  la  Bible.  Etude  critique  des 
poésies  inspirées  par  rEcriture  sainte  (in-8,  4858)  ;  —  Mes  souvenirs  du  barreau 
d^titsl804(in-8,  4864). 

—  M.  Achille-Félicité  de  Godlhot  de  Saint-Gbrmain,  né  à  Paris  le  27  mars 
1809,  vient  de  mourir  à  Saint-Germain-le-Vicomte  (Manche).  Après  avoir  servi 
dans  Tarmée,  il  entra  dans  l'administration  et  fut  plus  tard  député  et  séna- 
teur. On  lui  doit  des  brochures  sur  la  présidence,  le  recrutement^  la  propriété, 
et  un  rapport  sur  la  prostittition,  lu  au  Sénat  (22  juin  i865),  qui  a  été  publié 
avec  le  discours  de  M.  Dupin,  sur  le  luxe  des  femmes. 

— ^"M.  Pierre-François-Henri  Labrouste,  architecte,  membre  de  l'Institut, est 
mort  à  Paris  le  25  juin.  Il  y  était  né  en  1804,  et  travailla  avec  ses  deux 
frères  dans  les  ateliers  de  Lebas  et  de  Vaudojer.  Il  obtint  le  grand  prix  de 
Rome  en  1824;  en  1829,  il  surveilla,  sous  la  direction  de  M.  Duban,  les  travaux 
du  palais  des  Beaux-Arts.  C'est  lui  qui  organisa,  en  1840,  la  fête  du  retour 
des  cendres  de  Napoléon  ;  en  1849,  la  cérémonie  en  l'honneur  des  victimes 
des  Journées  de  juin.  On  lui  doit  la  nouvelle  bibliothèque  Sainte-Geneviève 
et  la  nouvelle  salle  de  la  Bibliothèque  nationale.  Il  entra  à  l'Institut  le  23 
novembre  1867,  en  remplacement  de  M.  Hittorf.  Il  y  a  peu  de  jours  encore, 
il  était  nommé  président  du  Congrès  des  architectes. 

—  M.  le  baron  Jean  de  Sartiges  d'Angles,  est  mort  à  Clermont-Ferrand, 
le  19  juin.  Jl  était  né  au  Vigean,  dans  le  département  du  Cantal,  le  1*'  novem- 
bre 4789.  C'était  un  homme  charitable,  modeste,  bienveillant,  dévoué  à 
l'Eglise  et  à  la  royauté  et  rempli  d'érudition  en  tout  ce  qui  concerne  l'his- 
toire de  la  noblesse  de  France,  l'art  héraldique  et  l'histoire  de  l'Auvergne. 
Pendant  longtemps,  il  fit  des  recherches  dans  les  bibliothèqaes  publiques 
de  Paris  et,  parvint  à  écrire,  en  4  volumes  grand  in-  4,  un  vaste  et  cons- 
ciencieux Nobiliaire  d'Auvergne  qu'il  a  publié  en  7  volumes  in-8  (Clermont- 
Ferrand,  imprimerie  Perot,  1846-1853),  en  collaboration  avec  un  archéologue, 
M.  J.-B.  Bouillet  ;  mais,  par  une  extrême  modestie,  il  a  refusé  de  laisser 
figurer  son  nom  en  tête  de  l'ouvrage.  Le  Dictionnaire  historique  du  Cantal,  de 
M.  de  Ribier  du  Chàtelet  (Aurillac,  4852-4857,  5  volumes  in-8),  lui  doit  des 
articles  précieux  ;  l'Académie  de  Glermont,  dont  il  était  l'un  des  membres 
les  plus  distingués,  des  notices  et  communications  très-intéressantes,  insé- 
rées dans  ses  Mémoires.  M.  le  baron  de  Sartiges,  qui  appartenait  à  l'une  des 
plus  anciennes  familles  de  la  Haute-Auvergne,  a,  déplus,  livré  à  l'impression 
un  volume  in-4,  qui  brille  par  une  excellente  méthode,  et  qui  est  intitulé  : 
Archives  de  la  maison  de  Sartiges  (tiré  à  50  exemplaires  seulement).  Il  aaïAsi 
donné  une  Notice  historique  sur  le  ban  et  Varriére-ban  de  la  province  d* Auver- 
gne (in-8,  4865,  ClermonirFerrand).  On  peut  dire  qu'il  était  le  d'Hozier  de 
TAuvergne.  Par  testament^  il  laisse  à  la  bibliothèque  de  la  ville  de  Clermont- 
Ferrand,  tous  ses  livres  concernant  l'art  héraldique  et  la  noblesse,  qui  vont 
faire  un  fonds  très-riche  au  dépôt  public  de  la  cité  qui  l'a  vu  mourir.  Il  était 
commandeur  de  l'Ordre  de  Saint-Grégoire-le-Grand.  A.  T. 

—  M.  Fabbé  Alphonse  L.  Constant  est  mort  à  Paris,  le  4*' juin ,  à  l'âge  de 
65  ans,  après  s'être  réconcilié  avec  l'Église  qu'il  avait  afiQigée  par  sa  déser- 
tion et  ses  scandales.  Élevé  à  Saint-Sulpice,  M.  Constant  était  arrivé  à 
l'ordre  de  diacre  quand  il  quitta  le  séminaire  que  ses  opinions  excentriques 
offensaient.  H  se  lia  alors  avec  cette  étrange  sectaire  qu'on  appelait  Mapah, 
mais  dont  le  vrai  nom  était  Gannace,  et  publia,  sous  son  inspiration,  la  Bible 


—  70  — 

de  la  Liberté^  livre  révolotionnaire  pour  lequel  il  fat  poursuivi  et  oondamné; 
il  épousa  ensuite  une  jeune  fille  de  seize  ans,  connue  depuis  sons  le  nom  de 
Gaude  Yignon,  et,  après  l'annulation  judiciaire  de  son  mariage,  se  jeta 
dans  rétude  des  sciences  occultes  sur  lesquelles  il  donna,  sous  le  pseudonyme 
d*Éliphas-Lévi,  de  nombreux  écrits  :  Dogme  et  rituel  de  la  Haute^Magie  (2  vol. 
in-8,  1854-i856)  ;  —  HisUdre  de  la  Magie  lin-S,  1859);  —  Ladefdes  grands 
mystères  y  suivant  Henoch^  Abraham^  Hermès  Trismegiste  et  Sakmtm  (in-8, 1860); 
^  Le  Sorcier  de  Meudon  (1861)  ;  —  Philosophie  occulte,  i^  et  2*  série,  (2  vol. 
in*8, 1862-1865);  —  Le  Catalogue  de  la  librairie  française  lui  attribue  le  BiC' 
tûmnatre  de  littérature  chrétienne  (gr.  in-8, 1859),  paru  dans  la  Nouvelle  Ency- 
clopédie tbéologique  de  Tabbé  Migne. 

—  M.  Ad.  Roussel  est  mort  à  Bruxelles  le  6  janvier  1875.  D  était  né  en 
1809.  Il  était  ancien  bâtonnier  de  Tordre  des  avocats,  ancien  membre  de  la 
Chambre  des  représentants  et  professeur  de  droit  à  FUniversité  libre  de 
Bruxelles.  On  a  de  lui  :  Observations  sur  le  titre  UI  de  la  loi  relative  à  Vinstruc- 
tion  publique  et  sur  le  rapport  de  la  section  centrale,  paru  en  collaboration  avec 
M.  de  Haut  sous  le  pseudonyme  de  Philar-Durozoir  (Bruxelles,  1835)  ;  —  Médi- 
tations sur  Vexistence  et  les  conditions  d'un  enseignement  Sitpérieur  donné  en  Bel  • 
gigue  ausQ  frais  de  l'État,  écrit  anonyme  qui  lui  est  attribué  (Bruxelles,  1835); 
—  Encyclopédie  du  droit  (Bruxelles,  1843,  in-8)  ;  —  Pensées  et  réminiscences  par 
Auguste  Rondeaux  (1849);  —  des  articles  dans  la  Belgique  judicaire, —  des  rap- 
ports à  la  Chambre,  des  brochures  sur  l'organisation  de  l'enseignement. 

—  M.  Marie- Joseph-Frédéric  Yillot,  secrétaire  général  du  musée  du  Louvre, 
est  mort  à  Paris,  le  27  mai,  à  soixante-dix  ans.  Il  était  entré  dans  l'adminis- 
tration des  musées  au  mois  de  mars  1848  ;  ses  voyages  en  Italie  et  ses  études 
l'avaient  préparé  aux  fonctions  qui  lui  étaient  confiées.  Il  fut  nommé  secrétaire 
général  en  1861,  et  après  le  4  septembre  1870,  il  fut  chargé  de  l'intérim  de  la 
direction  générale.  Il  a  marqué  son  passage  au  musée  par  la  rédaction  des 
Catalogues,  dont  le  premier,  celui  de  l'École  italienne,  parut  au  mois  d'août 
1848.  Ceux  des  autres  écoles  suivirent  de  près:  la  collection  était  complète 
en  1852.  Ce  fut  un  véritable  événement  dans  le  monde  artistique  et  un  modèle 
dont  ont  profité  les  musées  étrangers.  Il  fut  chargé  en  i  860  de  surveiller  le 
rentoilage  et  la  restauration  des  tableaux  de  Rubens,  connus  sous  le  nom  de 
Galerie  de  Médicis,  opération,  qui,  on  s'en  souvient,  a  vivement  préoccupé  le 
public.  Il  s'est  acquis  de  nouveaux  titres  à  la  reconnaissance  des  amis  de  l'art 
par  le  soin  qu'il  prit  du  précieux  dépôt  confié  à  sa  garde  pendant  le  siège  de 
Paris  et  la  Commune. 

—  M.  Justin-Jules  GniPON,  docteur  en  médecine,  né  à  Briey  en  i826,  est 
mort  âgé  de  50  ans,  à  Laon  (Aisne),  le  20  mai  1875.  Il  était  membre  corres- 
pondant de  l'Académie  de  médecine,  médecin  en  chef  des  épidémies,  prési- 
dent de  l'Association  des  médecins  des  arrondissements  de  Laon,  Yervins  et 
Château-Thierry  ;  vice-président  du  Conseil  départemental  d'hygiène  publi- 
que et  de  salubrité  de  l'Aisne,  ancien  vice-président  du  comité  catholique  de 
Laon.  Il  a  fait  paraître  plusieurs  brochures  remarquables.  Citons  seulement 
son  Traité  de  la  dyspepsie  (in-8,  1864)  et  un  autre  livre  intitulé  :  la  Maladie 
charbonneuse  de  l'homme. 

—  Madame  Cornu,  Hortense  Lacroix,  mariée  en  1834  au  peintre  Sébastien 
Melchior  Cornu,  est  morte  le  16  mai  à  Longpont,  près  Montléry  où  elle  vivait 
retirée.  Elle  était  née  à  Paris,  le  8  avril  1809  ;  sa  mère  était  attachée  au 
service  de  la  reine  Hortense,  qui  fut  sa  marraine  et  elle  passa  toute  son 
enfance  avec  celui  qui  devait  être  Napoléon  III,  sur  l'esprit  duquel  elle  cou* 
serva  un  certain  ascendant.  Elle  a  contribué  à  lui  faire  accepter  les  idées 
de  M.  Duruy.  On  a  prétendu  à  tort  qu'elle  était  morte  «  civilement.  »  Ses  titres 


—  71  — 


littéraires,  aoqais  tons  le  psendonjme  de  Sébastien  Albin,  lui  méritent  une 
place  dans  notre  chronique.  Elle  a  donné  :  Ballades  6<  ehanU  populaim  de 
rAUemagne,  traduction  nouvelle  (in-8,  4841);  —  Qœthe  et  Bettina,  correipoR- 
danee  inédite  de  Gœthe  et  de  Madame  Bettina  d'Arnim,  traduction  de 
TaUemand  (2  toI.  in-8,  1843);  —  Essais  sur  l'Histoire  des  Arts  en  Italie. 
extr.  du  tome  XVin  de  rEncyclopédie  moderne  (in-8,  1848).  Elle  a  écrit 
dans  la  hevwi  du  Nord  :  (/.-P.  Hebel,  1836  ;  —  les  artistes  allemands  à  Borne, 
1836  ;  --  Théodore  Kœmer  et  ses  poésies  lyriques,  1837  ;  —  De  to  littérature 
hongroise,  1837);  —  dans  le  Dictionnaire  de  la  Conversation^  la  Revue  indé- 
pendante. 

—  M.  Augnsttn-Henri  Lbsieub,  mort  le  8  mars  1875  à  Wissous  (Seine-et-Oise), 
était  né  à  Paris,  le  6  mars  1800.  II  fit  ses  études  au  lycée  impérial  (depuis 
Louis-le-Grand),  où  son  père  était  employé  à  la  bibliothèque.  En  1819,  il 
entra  à  l'école  normale  et  débuta  dans 'renseignement  comme  régent  de 
rhétorique  au  collège  de  Sedan.  Il  revient  à  Paris  comme  employé,  puis 
comme  sous-bibliothécaire  à  la  bibliothèque  de  l'Université.  En  1837,  il  entra 
dans  l'administration  centrale  où  il  arriva  jusqu'au  poste  de  chef  de  division. 
Il  avait  pris  sa  retraite  en  1859.  Il  a  collaboré  à  l'édition  de  Saluste  publiée 
par  Hachette,  dans  sa  collection  de  classiques>nciens  (1828).  Il  a  publié  : 
Notices  historiques  et  littéraires  sur  les  auteurs  et  les  ouvrages  grecs,  latins  et  fran- 
Ç'tis,  indiqués  pour  Vexamen  de  baccalauréat  es  lettres...  (1848)  ;  ^  QueMions  lit- 
téraires pour  l'examen  du  baccalauréat  es  lettres  (nouvelle  édition  1850);  — 
Becits  et  biographies  de  Vhistoire  de  France,  avec  M.  Bélèze  (1865);  —  Petit 
actionnaire  usuel  de  la  langue  française  (Uame  iBQl);  — Petite  Histoire  sainte  ;  — 
Petite  hi4toire  ancienne;  —  Petite  histoire  romaine;  —  Petite  histoire  moderne-, 

—  Les  rois  de  France  et  la  chronologie  des  principaux  événements  de  leur  régne, 
on  lui  doit  aussi  une  édition  des  Prooinciaks. 

—  M.  l'abbé  Louis  Dcoois,  chanoine  honoraire  du  diocèse  de  D^on, 
membre  de  l'Académie  des  sciences,  arts  et  belles-lettres  de  cette 
ville,  né  à  Bassoncourt  (Haute-Marne),  le  10  février  1810,  est  mort  le 
21  mai  1875,  à  Messigny,  (Côte-d'Or).  Après  de  fortes  études  littéraires, 
faites  à  Langres ,  il  vint  à  Dijon  s'appliquer  à  la  théologie  ;  ordonné  prêtre, 
il  ne  tarda  pas  à  monter  dans  la  chaire  de  philosophie  au  Grand  Séminaire, 
où  il  venait  d'être  appelé  par  une  décision  de  Mgr  Rey  (20  septembre  1832). 
C'est  alors  qu'il  se  lia  avec  le  président  Riambourg  qui  lui  inspira  le  goût 
des  études  historiques  et  après  la  mort  duquel  il  fut  nommé  desservant 
de  Volnay  (octobre  1837);  plus  tard,  il  devint  desservant  de  Messigny 
(18i9)  et  chanoine  honoraire  du  diocèse  (1867).  On  lui  doit  :  Notice 
sur  la  paroisse,  Véglise,  le  village  et  Vassociation  des  vignerons  de  Volnay 
(1840,  in-8)  ;  —  Histoire  de  V abbaye  de  Morimond,  quatrième  fille  de  Citeaux, 
au  diocèse  de  Langres  (1  vol.  in-8,  Dgon  1852,  avec  un  plan  gravé,  livre  tra- 
duit en  allemand  et  en  espagnol  et  dont  une  nouvelle  édition  était  sous 
presse)  ;  —  Histoire  de  Fabbé  de  Bancé  et  de  sa  réforme,  d'après  ses  écrits  et 
des  documents  inédits  (Paris ,  1867;  2  vol.  in-8.  2'  édit.  revue  et  corrigée 
d'après  les   observations   de   Mgr  Dupanloup,  Paris,    1870,  2  vol.  in-8). 

—  M.  l'abbé  Hamon,  curé  de  Saint-Sulpice,  dans  son  ouvrage  sur  Notre- 
Oame  de  France,  a  inséré  une  notice  sur  Notre-Dame  de  Citeaux,  notice  faite 
par  M.  l'abbé  Dubois,  qui  laisse  en  outre  un  grand  travail  inédit  sur  Les 
Sacerdoces,  auquel  il  travaillait  depuis  bien  des  années.  A.  A. 

—  M.  Gustave  Marotead,  né  à  Lille  le  22  juillet  1849,  est  mort  à  la 
Nouvelle-Calédonie  le  18  mars  dernier,  jour  anniversaire  de  la  Commune, 
h  laquelle  il  doit  sa  célébrité.  Il  débuta  en  littérature  par  des  vers 
religieux  et  des  poésies  mystiques  publiés  sous  ce  titre  :  Les  Flocons  ;  il  se 


—  72  — 

lia  ensuite  avec  Georges  Garalier,  devenu  Fipe-^n-BoiSf  collabora  à  la  Rue 
de  Jules  Vallès  et  fonda  le  Faubourien  et  le  Siisérable  qui  vécurent  peu. 
Condamné  pour  injures  à  huit  mois  d'emprisonnement,  il  réussit  à  s'échapper 
de  prison,  se  réfugia  en  Belgique  et  revint,  en  septembre  1870,  à  Paris,  où 
il  collabora  à  la  Patrie  en  danger  de  Blanqui,  et  fit  paraître  le  Vrai  Père 
Duchénet  le  Bonnet  Rouge,  la  Montagne  et  le  Salut  Public,  feuilles  révolu- 
tionnaires des  plus  haineuses.  Arrêté  le  9  juillet  1871  et  traduit  devant  le 
troisième  conseil  de  guerre,  il  fut  condamné  à  mort  le  2  octobre  suivant, 
mais  vit  sa  peine  commuée  en  celle  des  travaux  forcés  à  perpétuité,  le 
20  janvier  1872.  A.  A. 

—  M.  Alfred  Todrocde,  né  au  Havre  le  9  novembre  <839,  mort  à  Paris 
le  6  juin  1875,  était  fils  d'un  libraire  ;  il  se  passionna  de  bonne  heure  pour 
la  littérature  et  publia,  à  22  ans,  un  petit  recueil  de  mélanges  intitulé  : 
Par-ci  Par-là  (Le  Havre,  186Ï,  in- 18).  Il  se  tourna  ensuite  vers  le  théâtre 
et  fit  jouer  dans  sa  ville  natale  La  Paix  à  tout  prix ,  comédie  en  3  actes 
et  en  vers;  ilfes  beaux  Mbits,  en  un  acte  (1865),  et  les  Duperies  de  V esprit 
(1866).  Enhardi  par  le  succès,  il  partit  pour  Paris,  se  fit  recevoir  au  Cercle 
des  Blaireaiuc  et  donna  au  théâtre  Déjazet  La  Vie  privée  ou  les  remords  de 
M.  Guilloutet  (1868),  et  au  théâtre  de  Cluny,  L*.  Droit  des  femmes  (1869). 
Au  mois  d'octobre  de  la  môme  année,  il  fît  jouer  à  l'Odéon  Le  Bâtard, 
grand  drame  en  quatre  actes,  qui  obtint  un  grand  succès  malgré  des 
incorrections  de  style  et  des  situations  un  peu  hasardeuses.  Les  pièces  qu'il 
fit  jouer  ensuite.  Une  Mère  [iSl\),  La  Charmeuse,  Un  Lâche  (\S1^),  Jonc  (1873), 
L'Oubliée  (1874),  ne  réalisèrent  point  toutes  les  promesses  que  le  succès  du 
Bâtard  avait  fait  concevoir.  Sa  dernière  œuvre  a  paru  chez  Lemerre,  sous  le 
titre  de  VÉchafaud  (1874).  A.  A. 

—  Mathieu-Casimir  Wolonczenski,  évoque  de  Samogitie,  décédé  à  Kovno, 
le  29  mai,  fut  l'un  des  prélats  les  plus  distingués  de  l'épiscopat  catholique 
de  la  Russie.  Né  en  1799  dans  une  famille  de  pauvres  cultivateurs,  il  em- 
brassa de  bonne  heure  la  carrière  ecclésiastique  ;  docteur  en  théologie,  il 
professait  la  théologie  pastorale  et  l'archéologie  biblique  à  l'Académie  ecclé- 
siastique de  Saint-Pétersbourg,  et,  en  1849,  préconisé  évéque  de  Samogitie,ilse 
rendit  dans  son  diocèse  qu'il  ne  quitta  plus,  entouré  de  la  vénération  de  ses 
diocésains  auxquels  il  consacrait  tous  ses  instants.  Il  s'adonnait  pour  eux, 
même  aux  travaux  littéraires,  et  publia  en  langue  lithuanienne,  plusieurs  bro- 
chures sur  les  questions  religieuses,  une  traduction  de  Vlmitation  de  i^.-S. 
Jésus-Christ,  et  nue  Histoire  du  diocèse  de  Samogitie. 

—  Le  2  juin  est  mort  âCracovie,  Joseph  Kr eh er,  professeur  de  philosophie 
à  rUniversité  des  Jagellons^  membre  de  l'Académie  des  Sciences  de  Cracovie. 
Né  en  1806  à  Cracovie,  il  j  fit  ses  études,  et  obtint  le  grade  de  Docteur  en 
droit  en  1827  ;  il  passa  les  trois  années  suivantes  &  Berlin,  Heidelberg  et  Paris, 
où  il  suivait  les  cours  de  philosophie.  A  la  nouvelle  de  l'insurrection  polonaise 
de  1 830,  il  se  rendit  à  Varsovie,  et  fit  toute  la  campagne  de  1831,  comme 
soldat,  et  depuis  comme  officier  d'artillerie.  Revenu  &  Cracovie,  il  s'occupa 
de  pédagogie  et  s'adonna  exclusivement  à  la  science.  Eki  1849,  il  obtint  la 
chaire  de  philosopliio  à  l'Université  de  Cracovie,  et  l'occupa  jusqu'au  dernier 
moment.  Disciple  de  Hegel,  il  était  en  même  temps  catholique  fervent,  et 
tâchait  de  concilier  le  système  du  philosophe  allemand  avec  l'enseignement 
de  l'Eglise.  Il  professait,  en  outre,  un  cours  du  Beau  à  l'école  des  Beaux-Arts 
de  Cracovie.  —Ses  œuvres  principales  sont:  Cours  systématique  de  philosophie 
(2  vol.  à  Cracx)vie  et  Vilna,  1849  et  iSo2);  —  Lettres  de  Cracovie  {^  vol.  nouvel- 
lement réédités  à  Raumburg)  ;  —  Voyage  en  Italie  (6  vol.,  Vilna  1859-64);  — 
La  Grèce  de  Vantiquitéf  ses  artSj  surtout  la  sc^ilpture  (1868);  -- Les  théories  phi-- 


—  73  — 

lùÊophkqÊnnBT  kintUvreet  Ve$êenudôVd$ne,jugéêsparlaphiloê(^^  moderne 
(1869);  —  Il  mettait  la  dernière  main  à  son  manuscrit.  Sur  les  erreurs  de 
^irréligion,  quand  la  mort  vint  le  frapper. 

—  Le  9  juin  est  mort,  dans  le  grand-duché  de  Posen,  un  des  plus  éminents 
écrivains  modernes  polonais.  Charles  Libelt,  né  en  1807,  &  Posen,  de  parents 
pauvres,  OFphelin  en  bas  âge,  fut  vraiment  le  fils  de  ses  œuvres.  Il  s*adonna 
de  bonne  heure  k  l'étude  de  la  philosophie,  qui  fut  toujours  sa  science  de 
prédilection  ;  mais  Tamonr  de  la  patrie  lui  fit  souvent  abandonner  ses  chères 
études  pour  la  politique  et  les  questions  du  jour.  Fort  jeune  encore,  il  prit 
part  à  rinsurrection  polonaise  de  1830,  où  il  gagna  dans  l'artiUerie  ses  ôpau* 
lettes  et  la. croix  du  mérite  militaire  (wrtuii  militari).  A  son  retour  en  Prusse, 
il  paja  cette  excursion  patriotique  de  neuf  mois  de  prison.  Il  prit  part  ensuite 
à  la  rédaction  des  Bévues  les  plus  en  vogue  dans  le  pays  ;  et  ses  travaux  sur 
!e  courage  (ttn'gue,  l'omour  de  la  ^patrie,  et  le  tiers-^tat  eurent  un  énorme 
retentissement  dans  le  pays,  et  lui  valurent  une  large  popularité.  Arrêté  de 
nouveau,  à  la  suite  des  événements  de  1846,'  il  passa  encore  deux  années 
en  prison,  où  il  composa  son  ouvrage  sur  Jeanne^* Arc.  L'emprisonnement 
ne  fit  qu'augmenter  sa  popularité.  Il  prit  une  part  active  dans  tous  les  évé- 
nements de  sa  province  ;  délégué  au  Congrès  slave  de  Prague  et  à  la  diète 
de  Francfort,  élu  député  du  grand-duché  de  Posen  à  la  Chambre  de  Berlin, 
il  j  présida  le  cercle  des  députés  polonais,  et  ne  donna  sa  démission  qu'au 
moment  où,  atteint  de  cécité,  il  fut  obligé  d'abandonner  les  travaux  parle- 
mentaires. Il  passa  une  partie  de  sa  vie  dans  la  terre  de  Czeszewo,  dont 
il  dirigeait  l'exploitation,  aimant  à  répéter  que  pour  les  Polonais  il  fallait 
ly  enter  au  décalogue  un  conmiandement  encore  :  «  La  terre  natale  tu  ne  ven- 
dras. N  Quoique  élève  de  Hegel  et  en  général  de  la  philosophie  alle- 
mande, Libelt  ne  cessa  jamais  d'être  chrétien  ;  il  mourut,  muni  de  tous  les 
sacrements  de  l'Eglise,  rendant  grâce  à  Dieu  dans  son  testament  d'être  né 
et  d'appartenir  à  l'Eglise  catholique  romaine.  Il  fut  président  de  la  Société 
des  amis  des  lettres  de  Fosen.  L'édition  complète  de  ses  œuvres,  qui  est  en  train 
de  publication  à  Posen,  chez  Zupanski,  formera  6  volumes.  Outre  les  travaux 
ci-dessus  mentionnés,  elles  contiendront  une  Esthétique  ou  philosophie  du  6eau, 
et  deux  volumes  intitulés:  Philosophie  et  critique. 

—  Madame  Pauline  Wilkonska  née  Laucy,  auteur  de  quatre-vingts  volumes 
de  romans  et  nouvelles,  dont  quelques-unes  furent  traduites  ea  allemand  et  en 
suédois,  travaillant  en  outre  dans  plusieurs  revues  et  journaux  polonais ,  est 
décédéo  à  Posen,  le  0  juin.  Elle  passa  une  partie  de  sa  vie  à  Varsovie,  où  son 
mari,  feu  M.  Auguste  Wilkonski,  fut  très-apprécié  comme  écrivain  et  homme 
de  cœur. 

—  M.  César  Peadier,  capitaine  de  vaisseau  en  retraite,  et  ancien  général 
conmiandant  pendant  la  guerre  les  départements  de  l'Ain  et  de  Saône-et- 
Loire,  où  il  a  eu  des  démêlés  fameux  avec  M.  Frédéric  Morin,  est  mort 
le  14  juin,  h  Lorient,  à  T&ge  de  63  ans.  Après  quarante-cinq  ans  de  service, 
dont  vingtrhuit  à  la  mer,  il  s'était  consacré  au  culte  plus  paisible  des  lettres. 
La  Rewie  du  Monde  catholique  a  donné  de  lui,  en  1874,  Le  diner  d'aspirant  ; 
le  Journal  du  Morbihan  et  la  France  nouvelle,  les  Causeries  familières  d^un  vieux 
Matelot.  Il  a  publié  ailleurs,  La  folle  Sixfouz,  La  Mauresque.  La  France  illus- 
trée, continue  la  publication  de  son  Voyage  de  trois  ans  dans  la  Guyanne.  Les 
Bévues  spéciales  à  la  marine  et  &  l'art  militaire  ont  reproduit  plusieurs  de 
ses  Mémoires  sur  des  questions  importantes  ;  il  a  notamment  écrit  un  tra- 
vail sur  la  colonisation  de  TAlgérie,  qui  reçut  l'approbation  d'un  maître,  le 
maréchal  Bugeaud.M.Pradier  laisse  un  grand  nombre  de  travaux  inédits^dont 
plusieurs  verront  certainement  le  jour  :  nous  pouvons  citer  Le  forçat  libéré. 


—  74  — 

-*  M.  Louis-Charles  marquis  de  Bcllbval,  né  à  ÀbbeTilley  le  10  mars  1814, 
débuta  dans  la  carrière  littéraire,  comme  critique  à  VOpMon  pubtiqttê^  de 
M.  Nettement.  Il  fonda  ensuite  la  Renwi  eontêmporaîne ;  contraint,  par  sa 
santé,  d'abandonner  la  direction  de  cette  revue,  il  publia  de  1856  à  1867,  dans 
VUnion^  des  Lettres  d'wi  bibliophile.  Ces  études  ne  suffisant  pas  à  son  acti* 
vite,  il  entreprit  de  recueillir  toutes  les  chartes,  depuis  les  temps  les  plus 
reculés  jusqu'au  seizième  siècle,  se  rapportant  à  V Histoire  du  Ponthieu  ou 
Boese-Ficardiey  travail  qui  est  resté  inédit*  En  même  temps,  il  donnait  À  la 
Bibliothèque  nationale  une  table  qu'il  avait  dressée  de  la  volumineuse  col- 
lection des  chartes  et  diplômes  de  Moreau.  Retiré  à  son  ohàtenu  de  Bois* 
Robin,  il  venait  de  promettre  sa  collaboration  littéraire  au  Soir,  lorsque  la 
mort  est  venu  le  frapper  le  31  mai  1875. 

—  M.  Edouard  Collokb,  ancien  trésorier  de  la  Société  de  géologie,  com- 
pagnon et  correspondant  d'Agassiz  et  de  H.  de  Verneuil.  Il  a  écrit,  avec  ce  der- 
nier :  Coup  d'cRil  sur  la  constitution  géologique  de  plusieurs  provinces  d'Espagne^ 
suivi  d'une  description  de  quelques  ossements  fossiles  du  terrain  mélicène, 
par  P.  Genres  (in-4,  1857).  On  lui  doit  la  première  carte  géologique  de  l'Es* 
pagne.  Il  avait  publié  en  1847  :  Preuves  de  l'existence  d'anciens  glaciers  dans 
les  vallées  des  Vosges,  Du  terrain  erratique  de  cette  contrée  (in-8), 

—  M.  BouROOGNB,  qui  fut  successivement  secrétaire  du  maréchal  Pélissier, 
du  duc  d'Aumale  et  du  prince  Napoléon,  collaborateur  de  l'Indépendance 
belge,  auteur  du  Mémoire  pour  nuir  à  V histoire  de  mon  temps  et  du  Sexefaiblet 
est  mort  &  Béthune,  où  il  occupait  un  emploi  dans  les  chemins  de  fer. 

—  M.  le  docteur  Jean-Nicolas  Démarquât,  chirurgien  distingué,  est  mort 
le  21  juin,  à  Longueval,  où  il  avait  vu  le  jour  en  4815.  On  lui  doit 
plusieurs  ouvrages  spéciaux,  parmi  lesquels  nous  signalerons  :  Des  modi^^ 
cations  de  la  température  animale,  sous  l'influence  des  médicaments,  en  collabo- 
ration avec  MM.  A.  A.  Dumenil  et  Lecointe  (1853)  ;  —  Recherches  sur  Vhyp- 
notisme  (i860)  ;  —  Mémoire  sur  la  pénétration  des  liquides  dans  les  voies  res/pi- 
ratotres  (1862);  — De  la  glycérine,  de  ses  applications  à  la  chirurgie  et  à  la 
médecine  (1863);  — Essai  de  pneumathologie  médicale,  recherches  physiologiques , 
cliniques  et  thérapeutique  sur  le  gaz  (1865). 

—  M.  Gérard-Paul  Deshates,  professeur  administrateur  au  Muséum  d'his< 
toire  naturelle,  est  mort  à  Boran  (Oise),  le  9  juin .  Il  était  né  à  Nancj, 
le  15  mai  1795.  Il  était  venu  à.  Paris  en  1819,  après  avoir  fait  ses  études  à 
Strasbourg.  Ses  travaux  ont  eu  surtout  pour  objet  les  coquilles  fossilles  ;  ils 
lui  ont  valu  une  chaire  au  Muséum,  où  il  remplaça,  en  1869,  M.  de  Lacase 
Duthieux,  et  son  entrée  dans  plusieurs  commissions  scientifiques,  notamment 
dans  celle  d'Algérie.  Il  était  membre  de  la  Société  géologique.  Voici  les 
titres  de  quelques-uns  des  ses  ouvrages  :  Description  des  coquillages  fossiles 
des  environs  de  Paris  (1824-1837, 3  vol.  in-4)  ;  —  Traité  élémentaire  de  condiy- 
liologie  (1834-1858,  2  vol.  in-8)  ;  —  Histoire  naturelle  des  mollusques,  livr.  I  h 
XXV,  inachevé  (1845,  2  vol.  in-4)  ;  —  Description  des  animaux  sans  vertèbres 
découverts  dans  le  bassin  de  Paris  (1857-1865,  5  vol.  in-4)  ;  —  Conchyliologie  de 
Vile  de  la  Réunion-Bourbon  (1863,  1  vol  in-8).  —  Ha  revu,  avec  M.  Blilne- 
Edwards,  l'Histoire  des  animaux  sans  vertèbres,  de  Lamarck  (i830-18V6, 11  vol. 
in-8).  Il  a  continué  ÏHistoire  naturelle  générale  et  particulière  des  mollusques 
terrestres  et  pluoiatiles,  de  Ferrussac,  et  donné  les  Mollusques  dans  le  Régne 
animal  de  Cuvier. 

—  M.  Jules-Pierre  CalloN)  inspecteur  général  des  mines  et  professeur  à 
l'Ecole  des  mines,  est  mort  le  8  juin  à  Paris.  Il  était  né  à  Houlme  (Seine. 
Inférieure),  en  1815.  Il  a  écrit:  Eléments  de  mécanique  à  l'usage  des  condidats 
à  l'Ecole  polytechnique  (in-8,  1851)  \  ^  Sur  les  progrés  récents  de  Vexploitation 


—  7B  — 

dltf  minê$  (f  86ft).  D  ayait  commencé  la  publication  de  son  counà  rEoole  des 
mines  :  Cound^explcitaticn  des  mine$, 

—  M.  Antoine-Louis  Barte,  statuaire,  né  le  24  septembre  1795,  élèye  de 
Bosio  et  de  Gros,  est  mort  le  25  juin,  à  Paris.  Auteur  du  Tigre  dévcrarU  un 
crocodile^  des  Lùms  de  la  terrasse  du  bord  de  Veau,  à  Paris,  du  Combat  d'ours^ 
etc,  U  a  été  conservateur  de  la  galerie  des  plâtres  au  Louvre,  et  chargé  du 
cours  d'histoire  naturelle,  à  Versailles. 

—  On  annonce  également  la  mort  de  :  M.  Le  Bèsgue,  correspondant  de 
Tacadémie  des  sciences  dans  la  section  de  géométrie  depuis  1845,  mort  à 
Bordeaux  le  12  juin,  laissant  des  travaux  considérables  sur  la  théorie  des 
nombres  ;  —  de  Si  Abdallah  bbn  Mohammed,  mort  le  i  i  mai,  &  Alger,  âgé  de 
32  ans,  chimiste  musulman  distingué  ;  —  de  M.  Joaquim  Henriques 
Fradesso  da  Silveiba,  directeur  de  Tobservatoire  météorologique  de  llnfan 
Don  Luis,  à  Lisbonne  ;  —  de  M.  Tabbé  de  Verdalle,  aumûniei  de  la 
maison  de  la  Légion  d'honneur  à  Écouen,  auteur  de  la  Vie  de  Madame  de 
Lezeau  (4869),  mort  le  22  juin  à  Écouen  ;  —  de  M.  Georges  Le  Guesnier, 
âgé  de  26  ans,  ancien  rédacteur  du  Moniteur  du  Calvados,  de  Ports- 
Journal  et  du  Petit  Monit^r  ;  —  de  M.  Foulon,  inspecteur  de  renseigne- 
ment du  chant  dans  les  écoles  de  Paris  ;  —  de  M.  Elisée  La  Rigaudière, 
de  Bordeaux,  auteur  d'une  Histoire  des  persécutions  religieuses  en  Espagne, 
collaborateur  de  la  Revue  de  Paris,de  la  Revue  ftançaiseydu  Phare  de  la  Loire,  du 
Siècle,  etc.  ;  —  de  M.  Camille  Drague,  secrétaire  de  la  rédaction  du  Journal 
de  Paris,  mort  à  42  ans  ;  —  de  M.  de  Marosy,  un  des  membres  les  plus  dis- 
tingués du  parti  catholique  en  Hongrie,  directeur  du  journal  catholique  le 
Droit,  qui  parait  à  Presbourg;  —de  M.  Henri  Oudin,  éditeur,  mort  à  Poitiers, 
le  1"  juillet. 

Institut.  —  Académie  française.  —  L'Académie  française,  vient  de  renou- 
veler son  bureau,  qui  se  trouve  ainsi  composé  pour  le  trimestre  courant  : 
M.  Camille  Doucet,  directeur  ;  M.  Caro,  chancelier. 

Faculté  des  letfres.  —  M.  Lallier,  'ancien  élève  de  l'École  normale,  agrégé 
des  lettres,  a  soutenu  le  9  juin,  en  Sorbonne,  ses  thèses  pour  le  doctorat  es 
lettres  Les  sujets  étaient  :  De  Critiœ  tyranni  vita  ac  scriptis,  —  De  la  condi- 
tion de  la  femme  dans  la  famille  athénienne  au  cinquième  et  au  quatrième  siècles. 

—  M.  Mamet,  agrégé  d'histoire ,  ancien  membre  de  l'École  française 
d'Athènes,  professeur  au  lycée  de  Lille,  a  soutenu  le  28  juin,  en  Sorbonne, 
ses  thèses  pour  le  doctorat  es  lettres.  Les  sujets  étaient  :  De  insula  Thera.  — 
Le  président  de  Brosses,  sa  vie  et  ses  ouvrages. 

Faculté  de  médecine.  —  M™*  Brès  vient  de  soutenir,  devant  la  faculté  de 
médecine  de  Paris,  sa  thèse  pour  le  doctorat.  Elle  avait  pris  pour  sujet  :  De 
la  mamelle  et  de  Vallaitement. 

Lectures  faites  a  l'Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres.  —  Dans  la 
séance  du  4  juin,  M.  Edmond  le  Blant  a  lu  une  note  sur  le  martyre  de  sainte 
Félicité,  en  réponse  au  mémoire  lu  récenunent  par  M.  Aube.  M  de  Longpé- 
rier  a  donné  lecture  d'un  mémoire  de  M.  Chabas,  sur  les  poids,  mesures  et 
monnaies  des  anciens  Egyptiens,  lecture  qu'il  a  continuée  dans  la  séance 
du  ii.  M.  Clermoni^anneau  a  cx)mmuniqué  un  travail  relatif  &  l'emplace- 
ment d'Hlppos. — Dans  la  séance  du  11,  M.  Bou tarie  a  continué  la  lecture  de 
son  mémoire  sur  l'origine  du  régime  féodal  et  le  rôle  de  l'immunité.  —  Dans 
la  séance  du  18,  M.  de  Longpérier  a  lu  un  mémoire  de  M.  Robiou  sur  divers 
points  d'histoire  et  de  chronologie  relatifs  aux  empires  des  Assyriens  et  des 
Mèdes.  —  Dans  la  séance  du  25,  M.  de  Longpérier  a  lu  une  note  de  M.  le 
commandant  Robert  Mowart  sur  le  Mercure  Averne.  M.  de  Saulçy  a  commu- 


—  To- 
nique le  résaltai  de  Recherches  qa'il  a  faites  sur  la  famille  de  Ronsard. 
M.  Ernest  Desjardins  a  continue  la  lecture  de  son  mémoire  sur  les  inscrip- 
tions du  poste  des  Vigiles. 

Lectures  faites  a  l'Académie  des  sciences  mobales  et  politiques.  —  Dans 
les  séances  des  5,  il  et  19  juin,  M.  Naudet  a  donné  lecture  d'an  mémoire 
sur  les  changements  opérés  dans  TEmpire  romain  depuis  Tan  235  jusqu'à 
Tan  285  de  Tère  chrétienne.  Dans  les  séances  du  5  et  du  i2,  M.  deBoislisle  a 
achevé  la  lecture  de  son  mémoire  sur  la  proscription  du  projet  de  la  Dime 
royale  et  la  mort  de  Yauban.  —  Dans  la  séance  du  26  juin,  M.  Jules  Zeller 
a  commencé  la  lecture  d'un  chapitre  inédit  de  son  Histoire  d'Allemagne  : 
Henri  IV  ;  Hildebrand,  archidiacre  (1066-i073).  M.  Louis  Reyhaud  a  com- 
mencé la  lecture  d'un  mémoire  sur  les  industries  du  fer  et  de  la  houille  dans 
le  midi  de  la  France. 

Société  de  Davidsfonds.  —  Il  s'est  fondé  récemment  &  Louvain,  sous  la 
présidence  d'honneur  de  M.  SchoUaert,  membre  de  la  Chambre  des  repré- 
sentants, et  la  présidence  de  M.  Âlberdingh-Thym,  professeur  à  l'uniTer- 
site,  une  nouvelle  société  littéraire  néerlandaise,  sous  le  nom  de  Davidsfonds^ 
en  mémoii*e  du  savant  professeur,  le  chanoine  David.  Le  but  de'cette  société 
est  d'abord  d'encourager  l'étude  et  l'usage  de  la  langue  néerlandaise,  par 
la  propagation  des  livres  utiles,  écrits  dans  cette  langue  et  ensuite  de  réunir 
les  efforts  d'un  grand  nombre  dans  le  but  de  populariser  l'instruction  parmi 
les  populations  de  race  flamande,  et  ne  rien  épargner  pour  développer  et 
fortifler  l'esprit  national. 

Quelques  distractions  du  dictionnaire  encyclopédique  de  la  théologie 
CATHOLIQUE.  —  Loiu  de  nous  la  pensée  de  dénigrer  cette  belle  œuvre.  Le 
Dictionnaire  des  docteurs  Wctzer  et  Welte,  publié  en  allemand  en  1854,  a  été 
accueilli  par  de  hautes  approbations,  parfaitement  justiAées.  La  traduction 
française  en  est  arrivée,  en  1870,  à  sa  troisième  édition.  C'est  un  beau  succès 
pour  un  ouvrage  qui  compte  vingt-six  volumes. 

Nous  nous  étions  d'abord  proposé  d'écrire  aux  éditeurs,  MM.  Gaume  frères  : 
nous  leur  aurions  envoyé  une  petite  liste  d'errata  pour  la  quatrième  édition. 
Toute  réflexion  faite,  nous  demandons  la  publicité  du  Polybiblion  ;  de  cette 
façon  nos  modestes  notes  pourront  être  utiles  à  ceux  qui  possèdent  l'une 
des  trois  premières  éditions  françaises  de  l'encyclopédie  théologique. 

Nous  avons  été  fort  étonné  de  lire  l'aiiicle  Durantis.  Nous  ne  connaissons 
que  Guillaume  Durand  et  Duranti.  Chacun  de  ces  deux  personnages,  parfai- 
tement connus  de  Moréri,  de  Feller,  et  autres  biographes,  aurait  d'autant 
plus  droit  à  un  article  spécial,  que  Durand,  Duranti  et  Innocent  m 
(opuscule  sur  le  saint  Sacrifice  de  la  Messe),  sont  les  seuls  auteurs  dont  l'achat 
soit  recommandé  au  maître  des  cérémonies  par  le  Cérémonial  des  écéques 
(livre  I*',  chap.  v). 

Guillaume  Durand,  le  célèbre  auteur  du  Rationale  divinorum  oflieiorum  et 
Jean  Etienne  Duranti,  premier  président  du  parlement  de  Toulouse,  massa- 
cré en  1589  par  une  populace  affolée,  l'auteur  du  livre  remarquable  de 
Ritibus  EcclesicBf  méritaient  chacun  une  belle  notice. 

Le  traducteur  français  a  eu,  dans  ce  môme  article,  une  étonnante  distrac- 
tion. Nous  apprenons  que  Durand  était  évéque  de....  Mimate.  C'est  Mende 
qu'il  aurait  fallu  écrire.  Cette  faute  a  d'autant  plus  le  droit  de  surprendre 
qu'à  l'article  dtocdse,  Mimatcns  se  traduit  par  Mende,  et  réciproquement. 

Au  tome  Vil,  p.  256  qous  lisons  :  «  Le  vrai  Père  de  l'Eglise  est  Eusèbe.  » 
On  a  voulu  dire  :  «  Le  vrai  père  de  l'histoire  ecclésiastique  est  Eusèbe.  » 
Et  cette  assertion  est  exacte  de  tout  point. 


—  77  — 

Article  Fékelo.v.  On  y  parle  des  conférences  de  Gertrcidenboubg  ;  c'est 
Gehtrcidenberg  qn*il  faut  lire,  dans  )e  Brabant  septentrional,  au  royaume 
actuel  des  Pays-Bas. 

On  aurait  du  ne  pas  réimprimer,  en  i870,  que  VAlgérie  avait,  en  4859,  un 
èvéque.  Il  semble  que  le  traducteur  français,  à  défaut  de  Tauteur  allemand, 
aurait  dû  rappeler  l'élévation  du  sié^  d'Alger  à  la  dignité  métropolitaine  et 
l'érection  des  nouveaux  sièges  épiscopaux  d'Oran  et  de  Constantine. 

Dans  rénumération  des  martyrs  de  Gorcum,  il  y  a  des  inexactitudes.  An 
lien  de  Asiha  en  Brabant,  lisez  Asscbe,  village  situé  à  13  kilomètres  de 
Bruxelles.  Au  lieu  de  Brftl,  lisez  la  Brielle. 

A  Tarticlo  Hollande,  et  ça  et  là  dans  la  traduction  française,  se  rencontre 
le  nom  propre  de  Herzogenbusch,  Ce  mot  est  allemand  ;  on  dit  en  français 
Bois-le-Duc.  Ce  nom  se  trouve  cependant  imprimé  au  verso  du  faux  titre, 
parmi  les  correspondants  libraires  que  la  maison  Gaume  compte  à  l'étranger* 
Un  autre  évôché  de  Hollande  est  celui  de  Rttremondey  et  non  Rcermande, 
du  moins  en  français. 

Lessos  était  né  à  Brecht,  et  non  Brechten.  C'est  une  fort  grande'  com- 
mane,  chef-lieu  de  canton  dans  la  province  d'Anvers,  au  lieu  de  n'être, 
comme  on  le  dit,  qu'un  petit  village  du  Brabant. 

Nous  signalerons  quelques  inexactitudes  à  l'article  Révolte  des  Pays-Bas. 
Saint-Trujen,  mauvaise  copie  du  flamand,  se  dit  en  français  Saint-Trond. 
Trudo,  c'est-à-dire  que  saint  Trond  est  le  patron  de  la  cité  et  lui  a  donné  son 
nom.  La  constitution  jurée  par  l'Archiduc  Mathias  en  1578  n'est  pas  con- 
une  sous  le  nom  de  Ponct(xtion.  Il  nous  semble  encore  qu'indiquer,  pour 
toutes  sources  de  cette  grande  perturbation,  le  récit  de  Léo  et  les  docu- 
ments publiés  par  les  Feuilles  politiques  et  historiques  de  Munich,  c'est  trop 
peu.  Le  traducteur  français  aurait  pu  ajouter  tout  au  moins  à  celte  énu- 
mération  le  nom  de  M.  Holzwarth  qui,  aidé  par  les  documents  les  plus 
récents,  a  publié,  en  1865,  une  intéressante  histoire  des  troubles  des  Pays- 
Bas  sous  Philippe  H,  en  trois  volumes  in-8.  II  y  a  même  un  M.  Holzwarth, 
auteur  de  plusieurs  articles  du  dictionnaire  théologique.  II  n'est  pas  impos- 
sible qu*il  s'agisse  de  la  même  personne. 

A  l'article  Philippe  II»  on  parle  de  la  grande  part  prise  par  le  pape  Paul  V 
à  la  bataille  navale  de  Lépante.  Il  faut  lire  PiV  F. 

A  l'article  Procès  de  sorcellerie,  il  est  question  du  célèbre  ouvrage  du 
jésuite  Frédéric  Spee  :  Cautio  cfiminaHhus.  Voici  le  titre  exact  :  CcnUio  cri- 
minalis  seu  de  processibus  contra  Sagas  Liber  ad  magistratus  Germaniœ  hoc 
tempare  necessarius,  1631. 

A  l'article  Th(mas  a  Kempis,  il  est  question  du  jcsujtc  Somuaths.  C*est  un 
l  qu'il  faut  :  Sommalius,  qui  a  divisé  Vîmitatxon  de  Jésus-Christ  en  versets. 

Cet  article  nous  remet  en  mémoire  une  étonnante  distraction  de  M.  l'abbé 
Delaunay,  Auteurs  présumés  de  l'Imitatiort,  p.  24:  «  Kcmpis,  dit-il,  est  un 
petit  village  près  d'Utrecht,  dans  le  diocèse  de  Cologne,  p 

Kempis  est  un  ablatif  pluriel  latin  ;  on  devrait  dire  Kcmpen.  Puis  Kein- 
pen  n'est  pas  un  petit  village,  c'est  une  charmante  petite  ville,  qui  a  le 
bonheur  de  posséder  une  belle  église  du  quinzième  siècle,  digne  de  l'at- 
tention des  archéologues.  Et  cette  église  renferme  des  objets  d'art  religieux 
fort  intéressants  à  visiter.  Nous  ne  voyons  pas  la  nécessité  d'introduire  ici 
le  nom  de  la  ville  hollandaise  d'Utrecht. 

Minorités  est  un  germanisme  :  on  dit  en  français  Frères-Mineurs.  Nous 
disons  habituellement  S.  WHiibrord  et  non  Wiltebrod.  Wibald,  le  célèbre 
ami  de  l'empereur  Frédéric  Barberousse,  était  abbé  de  Stavelot,  en  Bel- 
gique, et  non  de  Stabhn,  On  dit  en  latin  :  Abbas  Stabuîensis. 


—  78  — 

s. 

Noas  relèverons  quelques  inexactitudes  dans  le  supplément,  igonté  à 
Tencyclopédie  théologique  par  M.  Ghantrel. 

Noos  regrettons  qu'au  mot  Alexandre  YI,  M.  Ghantrel  n*ait  pas  mentionné 
la  belle  fftsMn  de  la  Papauté  pendant  le  quintiéme  siècle,  de  M.  Fabbé 
Christophe. 

A  l'article  de  Rak,  recteur  de  l'université  de  Louvain,  nous  lisons  : 
Liewe,  pour  Lierre,  lieu  natal  du  futur  recteur  ;  Laliendaelf  pour  Lelien- 
dae],  c'est-à-dire  la  Vallée  des  lys,  monastère  de  chanoinesses  norbertines  ; 
Annales  pour  servir  à  Vhistoire  ecclésiastique  de  la  Belgique,  lisez  Analbctbs..» 
recueil  trimestriel  ;  Martyrs  de  GrécCy  lisez  Martyrs  de  GoacuM. 

Ad.  Dklvigne. 

DioDORE  DE  Sicile  et  le  passage  de  la  mer  Rooge  par  les  Hébrkux.  —  «  Les 
Ichtjophages  qui  demeurent  aux  environs  rapportent  un  fait  qu'ils  tiamient 
par  tradition  de  leurs  ancêtres.  Us  disent  que  la  mer  se  retira  un  jour  si 
loin  qu'elle  laissa  à  sec  toute  cette  partie  de  son  fond  qui  parait  verte. 
Mais  à  peine  ce  fond  fut-il  découvert,  que,  revenant  tout  à  coup,  elle  se 
remit  dans  son  lit  ordinaire.  » 

Diodore  de  Sicile,  livre  III,  n^  20,  traduction  de  l'abbé  Terrasson,  de  l'A- 
cadémie française.  i758. 

Cette  citation  se  trouve  mal  faite  à  peu  près  chez  tous  les  auteurs. 
Rohrbacher,  Histoire  universelle  de  f  Eglise,  dit  no  40  ;  dès  Vignoles,  Chrono- 
logie de  Vhistoire  sainte,  dit  n*  44  ;  les  auteurs  anglais  de  VBistoire  univer- 
selle, n*  3. 

M.  l'abbé  Glaire,  Livres  saints  vengés,,  tome  II,  65  donne  la  traduction  sui- 
vante, extraite  de  Diodore  de  Sicile,  liv.  RI  cap.  m.  «  Les  peuples  ichtyo- 
phages  qui  habitaient  le  rivage  occidental  de  la  mer  Rouge,  tenaient  par 
tradition  qu'autrefois  cette  mer  s'était  ouverte  par  un  reflux  violent  ;  que 
tout  son  fond  avait  paru  à  sec  et  couvert  de  verdure,  les  eaux  s'étant  par- 
tagées en  deux  parties  ;  mais  qu'ensuite  il  était  survenu  un  flux  impétueux 
qui  réunit  les  eaux.  » 

M.  Gainet,  la  Bible  sans  la  Bible,  s'en  rapporte  à  Dom  Cahnet  citant  Diodore 
de  Sicile  (liv.  RI,  c.  m). 

En  fait,  il  y  a  là  une  citation  apocryphe. 

Diodore  parle,  il  est  vrai,  au  livre  RI  de  sa  Bibliothèque  des  Ichtyophages 
d'Ethiopie,  mangeurs  de  poissons  ;  mais  rien  ne  permet  de  voir  aux  cha- 
pitres xv-xx  une  réminiscence  très-altérée  du  passage  de  la  mer  Rouge  par 
les  Hébreux  sous  la  conduite  de  Moïse.  Personne,  que  nous  sachions,  n'a 
jamais  songé  à  révoquer  en  doute  la  bonne  foi  et  la  loyauté  scientiflque  de 
M.  Dindorf  dans  l'édition  du  texte  grec,  publié  par  la  maison  Didot  en 
1842;  M.  Miot,  dans  sa  traduction  française  de  1834,  M.  Hoefer,  dans  sa  ver- 
sion nouvelle  de  1865,  n'ont  pas  non  plus  trouvé  le  sens  inventé,  craignons- 
nous,  par  Terrasson. 

Nous  nous  permettrons  en  conséquence  de  prier  tous  les  catholiques  qui 
s'occupent  de  la  défense  de  nos  dogmes  de  ne  plus  faire,  s'ils  rencontrent  cet 
épisode  de  l'histoire  hébraïque,  une  citation  fausse.  Ad.  Dblvigne. 

Encore  l'homme-singe.  —  Nous  lisons  dans  la  93«  livraison  du  BuUetin 
historique  de  la  Société  des  antiquaires  de  la  Morinie  (p.  327),  la  protestation 
suivante  qu'il  nous  semble  d'autant  plus  utile  de  reproduire,  que  nous 
savons  que  son  exemple  sera  suivi  par  plusieurs  compagnies  savantes  de 
province  : 

«A  propos  de  la  brochure  intitulée  :  Classification  de  diverses  périodes  de 
Cage  de  pierre^  envoyée  en  hommage  par  M.  de  MortiUet,  et  dont  les  con- 
dusions  sont  que  Vhomme  primiHf  n'est  qu'un  singe  perfeUionnéf  qui  n'a  dû 


—  79  — 

qu'oM  mUUu  tjpéeUd  où  U  s'est  Iroiioé,  le  dèwkppemmU  de  son  inielligenes  et 
raequisUion  de  la  faculté  de  la  parole^  tandis  que  ses  eongénêres ,  le  gariile  et 
autres,  placés  dans  <f  attires  cireonstances,  sont  restés  à  l'état  de  truies^  la 
Société  des  Antiquaires  de  la  Morinie  croit  devoir  vivement  protester  contre 
les  opinions  de  l'auteur,  tout  en  reconnaissant  la  science  profonde  dont  il  a 
fait  prenve.  » 

La   gravure  française  au  dix-ucitième  siècle.  •—  H.  Emmanuel  Bocher  > 
amateur  passionné  de  Tart  français  an  dix-huitième  siècle,  a  entrepris  une 
œuvre   des   plus  considérables  ;  il  veut  donner  le  Catalogue  raisonné  des 
estampes,  eaux-fortes,  pièces  en  couleurs,  au  bistre  tt  au  lavis  de  1700  &  1800. 
Il  expose,  dans  sa  préface  {La  gravure  française  du  dix-huitiémê  siècle,  Nicolas 
Lavreince,  par  Emmanuel  Bocher,  Paris,  librairie  des  bibliophiles  et  Rapillye, 
1875,  in-4  de  67  p..  tiré  à  500  exemplaires),  le  plan  qu'il  a  adopté  :  «  Réunir 
pour  en  former    un  ensemble,  toutes  les   œuvres  gravées  par  les  ai'tistes 
qui,  de  17O0  à  1800,  ont  occupé  la  France,  soit  de  leurs  pinceaux,  soit  de 
leur  crayon,  y  ajouter  celles  de  leurs  compositions  qui ,  reproduites  par 
d'autres  artistes  qu'eux-mêmes,  n'en  sont  pas  moins  l'expression  de  leur 
pensée ,    de   leur  talent  individuel ,  mettre  sous  la  rubrique  de   chaque 
artiste  les  pièces  gravées  par  lui,  d'après  lui,  rompre  la  sécheresse  d'un 
livre  pareil  par  des  citations  et  extraits  tirés  des  traités,  des  mémoires, 
des    journaux    de  l'époque ,    essayer  de   renouveler  pour    les    amateurs 
d'estampes  ce  que  M.  J.-Gh.  Brunet  a  si  l^^ien  fait  pour  les  bibliophiles.  » 
M.  Bocher  a  débuté  par  un  artiste  suédois  dont  le  vrai  nom,  Laufrenzen, 
a  été  francisé   en  celui  de  Lavreince,  et  qui  n'a  presque  produit  qu'en 
France.   Né  à  Stockholm  en  1737,  il  mourut  dans  la  môme  ville  le  6  dé- 
cembre 1807.  M.  H.   Vienne  lui  a  consacré  une   notice   dans   la  Gazette 
des   Beaux-Arts  mars    1869.   p.    288 ,    et  c'est    la    première  fois  qu'un 
travail    de   quelque ,   étendue   ait  abordé  ce  point  de  l'histoire  de  l'art. 
Le  IHetionnaire  bibliographique  de  Suéde  (nouvelle  série,  tom.   VIII),   par 
M.  Eichbom,  de  la  bibliothèque  royale  de  Stockholm,  peut  aussi  être 
consulté.  M.  Bocher  se  contente  de  renvoyer  à  ces  deux  publications  qui  ne 
sont  pas  d'un  accès  très-facile  (la  seconde  surtout)  ;  quelques  informations 
succinctes  qui  leur  auraient  été  discrètement  empruntées ,  n'auraient  point 
été  superflues,  ce  nous  semble. 

Après  Lavreince,  viendront  Baudouin,  Chardin,  Greuze,  formant  chacun 
un  fascicule  séparé  ;  ensuite ,  M.  Bocher  se  propose  d'aborder  la  publi- 
cation du  vaste  catalogue  qu'il  prépare.  A  la  suite  de  la  description  minu- 
tieuse de  l'œuvre  de  l'artiste  qui  l'occupe,  M.  Bocher  a  placé  une  u  liste 
chronologique  des  gouaches ,  miniatures ,  pastels  et  dessins  de  Lavreince 
qui  ont  passé  dans  les  ventes  depuis  1778  jusqu'en  1800,  »  Un  assez 
grand  nombre  de  gouaches  ou  de  dessins,  chaque  année,  se  montrent 
aux  enchères  avec  le  nom  de  Lavreince,  mais  la  plupart  de  ces  productions 
sont  apocryphes  ou  restaurées  d'une  telle  façon,  qu'il  ne  reste  rien  ou 
presque  rien  du  maître  qui  les  avait  primitivement  conçues.  Nul  doute  qu'il 
n'y  ait  parfois  de  justes  reproches  à  faire  aux  sujets  que  Lavreince  a  trop 
souvent  abordés,  et  qu'explique  la  facilité  des  mœurs  pendant  la  période 
qui  précéda  la  Révolution  ;  mais,  au  point  de  vue  du  costume,  de  l'ameu- 
blement, c'est  un  guide  avec  lequel  on  ne  s'égare  pas.  Un  très-joli  portrait 
de  l'artiste,  gravé  d'après  une  photographie  reçue  de  Stockholm,  décore  ce 
volume  exécuté  avec  tout  le  soin  et  l'élégance  qui  caractérisent  les  productions 
de  l'habile  et  dévoué  typographe  dont  les  presses  alimentent  la  «  Librairie 
des  bibliophiles.  » 


—  80  — 

Collection  de  pierres  gravées.  —  Une  des  plas  belles  collections  de  pierres 
gravées,  existant  en  Europe,  est  celle  que  le  duc  George  de  Malborough  (troi- 
sième du  nom)  forma  de  i780  à  1791  ;  elle  a  été  l'objet  d'une  somptueuse 
publication,  imprimée  à  50  exemplaires  seulement,  et  destinée  à  faire  des 
présents.  (Gemmarum  antiquarum  dêlectus,  quœ  in  dactyliotheds  duds  Malbu- 
riensis  cmservantur,  Londini,  2  vol.  in-foL,  100  planches  et  2  frontispices, 
gravés  par  Bartolozzi.) 

Des  motifs,  qui  nous  sont  inconnus,  ont  amené  la  mise  aux  enchères  publi- 
ques de  ce  riche  cabinet.  Un  catalogue,  comprenant  739  articles,  a  été  pu- 
blié ;  le  28  juin,  la  vente  publique  a  eu  lieu.  On  avait  annoncé  que  la  collec- 
tion serait  offerte  en  bloc  avant  d'être  détaillée  ;  la  mise  à  prix  était  de 
35,000  livres  sterling.  Un  seul  acheteur  s'est  présenté  :  M.  Agnew,  de  Man- 
chester ;  il  en  a  offert  35,000  guinées  (926,(00  fr.),  et  il  a  été  déclaré  adjudi- 
cataire, au  noilieu  des  applaudissements  enthousiastes  de  toutes  les  personnes 
présentes. 

Il  existe  en  Angleterre  une  autre  collection  de  pierres  gravées  réunie  au 
commencement  du  dix-huitième  siècle  par  deux  ducs  de  Devonshire  (le  troi- 
sième et  le  quatrième)  ;  une  publication  entreprise  à  cet  égard  est  restée 
inachevée.  (Voir  le  Manuel  du  Libraire^  tome  II,  col.  662.)  Ce  cabinet  reste, 
d'ailleurs,  intact]  chez  son  propriétaire  actuel,  un  des  plus  opulents  pra- 
ticiens de  l'Angleterre  ;  possédant  dans  ses  châteaux  d'admirables  collec- 
tions de  livres  rares  et  d'objets  d'art  du  plus  grand  prix,  notamment  une 
réunion  de  dessins  de  Claude  Lorrain,  reproduite  en  fac-similé  (London,  1770, 
2  vol.  in-fol.,  tome  m,  1801). 

Vente  d'autographes. —  A  une  vente  d'autographes  qui  vient  d'avoir  lieu  à 
Londres,  et  dont  les  détails  sont  donnés  par  VEvening  Standard,  les  manus- 
crits ci-après  ont  été  adjugés  aux  prix  suivants  :  Un  lettre  écrite  et  signée  de 
la  main  de  la  célèbre  Lucrecia  Borgia,  adjugée  pour  11  livres  sterling  ;  lettre 
autographe  d'Olivier  Cromwell  requérant  des  munitions  d'ordonnance, 
10  liv.  lo  sh.  ;  une  lettre  d'Edouard  IV  au  duc  de  Bretagne,  10  liv.  5  sh.;  une 
intéressante  lettre  de  la  reine  Elisabeth  à  Henri  IV,  roi  de  France  et  de 
Navarre,  51  liv.  st.  ;  une  lettre  de  François  H,  époux  de  Marie  Stuart,  adres- 
sée au  roi  d'Espagne,  8  liv.  8  sh.  ;  une  lettre  de  Galilée  &  son  élève  Castelli, 
51  liv.  15  sh.  ;  une  lettre  de  Marie  Stuai*t  à  M.  de  La  Motte,  48  liv.  st.  ;  deux 
lettres  de  Napoléon  I*',  ensemble  34  liv.  st.  ;  une  lettre  de  l'amiral  lord 
Nelson,  probablement  la  dernière  adressée  par  lui  à  ladj  Hamilton,  21  liv.; 
une  lettre  de  Nicolas  Poussin.  10  liv.  st.  ;  une  lettre  de  Pierre-Paul  Rubens, 
12  livr.  st.  ;  une  élégie  do  Gray,  composée  par  lui  dans  un  cimetière  de  vil- 
lage et  entièrement  écrite  de  sa  main,  avec  les  ratures  de  changement, 
230  liv.  st.  ;  le  manuscrit  original  du  Christmas  Cavol,  de  Dickens,  55  liv.  st. 

On  sait  que  le  chef-d'œuvre  d'un  des  meilleurs  poètes  anglais,  Thomas 
Gray,  c'est  VEléyie  écrite  dans  un  cimetière  de  campagne  {Elegy  written  in  a 
Ccuntty  Chwrckyard),  Le  manuscrit  original  fut  récemment  montré  à  Londres 
dans  une  vente  d'autographes.  11  présente  des  différences  sensibles  avec  le 
texte  imprimé,  notamment  le  nom  de  César  et  de  Cicéron,  au  lieu  de  ceux 
de  Cromwell  et  de  Milton.  Cette  pièce  importante  a  été  l'objet  d'une  lutte  ar- 
dente ;  un  amateur  des  plus  fervents,  sir  Alexander  Frazer  en  est  demeuré 
possesseur,  mais  il  l'a  payée  230  livres  sterling. 

JocHs  de  la  inpancia.  —  Nous  avons  parlé  dernièrement,  ici  même, 
d'un  curieux  Recueil  de  contes  en  langue  catalane,  que  M.  Maspons  y  Labros 
a  publié  sous  le  titre  do  Rondallayre,  Nous  avons,  sous  les  yeux,  un  ouvrage 
du  même  auteur,  fait  également  pour  intéresser  tons  les  lecteurs  qui  s'occu- 


—  81  — 

m 

pent  de  littérature  populaire.  Il  a  pour  sujet  les  jeux  des  enfants  qui  tant  de 
fois  sont  accompagnés  de  vers  naïfs,  et  est  intitulé  :  Jochs  de  la  infancia,  per 
Francisco  Maspons  y  Labros  advocat,  socio  honorari  de  la  Academia  de  Bonas 
Letras  de  Barcelona,  (Barcelona,  Fr.  Marti  y  ContOy  1874-,  i  vol.  in-12 
de  112  pages.)  M.  Mespons  j  suit  ces  jeux  depuis  Tâge  le  plus  tendre 
jusqu'au  moment  où  ceux  qui  s'y  livrent  arrivent  à  Tadolescence.  Beaucoup 
de  ces  divertissements  et  de  ces  refrains  enfantins  se  retrouvent  en  France. 
Nous  avons  rencontré  là,  entre  autres  choses  de  connaissance,  notre  vieille 
danse  de  laBoii/on^ére,  avec  ce  couplet  assez  semblable  au  nôtre  : 

La  bolangera  'n  te  dinés 

Qae  no  li  costan  gaire 

Qae  *l8  ha  gnayatofilant 

Desde  Ripoll  à  Rldaura 

Aan  par  devant  corn  per  darrera 

Fesia  ballar  la  bolangera. 

Les  jeux  des  enfants  ont  déjà  été  Tobjet  de  recherches  curieuses  de  la  part 
de  M.  Pitre,  dans  sa  collection  de  chants  siciliens  ;  de  M.  Ferrero,  dans  la 
Rivista  europea;  de  M.  Pia  y  Soler,  dans  la  Revue  des  langues  romanes;  de 
M.  Boisa,  dans  les  Cmti  comarchi.  Le  volume  de  M.  Mespons  y  Libres  apporte 
de  très-nombreux  éléments  à  ce  genre  d'études  qui  touchent  de  bien  près  à 
celles  dont  les  chants  et  les  contes  populaires  fournissent  l'important  sujet. 

Th.  p. 

Prix  des  estampes  rares.  — Nous  avons,  à  diverses  reprises ,  indiqué  la 
valeur  extraordinaire,  excessive  sans  doute,  que  les  bibliomanes  attachent  à 
certains  livres  d'une  grande  rareté;  les  produits  de  l'art  du  graveur,  lorsqu'ils 
remontent  à  une  hante  antiquité,  lorsqu'ils  sont  l'œuvre  des  burins  célè- 
bres, lorsqu'ils  sont  fort  difficiles  à  rencontrer,  excitent  des  convoitises  tout 
aussi  vives  ;  il  faut,  pour  en  devenir  possesseur,  les  payer  au  poids   de  l'or. 

C'est  ce  qu'a  attesté  récemment  la  vente  des  estampes  réunies  par 
M.  Galichon. 

Le  catalogue,  rédigé  par  M.  Clément,  contient  678  numéros.  Pas  un  mot 
d'avant-propos  ;  pas  une  ligne  de  préface  ;  ce  silence  de  bon  goût  contraste 
avec  ces  réclames  hyperboliques  qui  précèdent  parfois  l'inventaire  de  ce  qui 
va  être  livré  aux  endières.  La  simple  énonciation  de  ce  que  contenaient  les 
portefeuilles  de  M.  Galiclion  dispensait  de  tout  cx)mmentaire  ;  il  n'y  avait  là 
que  des  objets  d'élite. 

Commençons  par  les  dessins.  Ds  étaient  au  nombre  de  178  ;  trente-deux 
ont  atteint  ou  dépassé  le  prix  de  1,000  francs.  Voici  les  adjudications  les 
plus  remarquables  : 

Léonard  de  Vinci,  Etude  pour  le  tableau  de  la  Sainte-Anne  du  Louvre 
13,000  francs.  —  Première  pensée  pour  l'Adoration  des  Mages  de  Florence 
12,900  francs.  —  Courrier  monté  sur  un  cheval  qui  galoppe  ;  cavalier  faisant 
dresser  son  cheval,  etc.  Dessin  exécuté  à  la  plume,  de  la  main  gauche,  avec 
un  léger  lavis,  5,500  francs. 

Raphaël.  La  fuite  de  Loth  avec  ses  filles.  Dessin  à  la  sépia  pour  les 
fresques  du  Vatican .  Il  a  fait  partie  de  collections  célèbres,  notamment  de 
celles  de  la  reine  de  Suède,  Christine,  et  du  roi  des  Pays-Bas,  Guillaume. 
Il  est  décrit  dans  la  Vie  de  Raphaël  par  Passavant,  tom  II .  p.  534:  10,000 
francs. 

Rembrandt.  Corneille  Nicolas  Ansloo,  célèbre  anabaptiste.  Superbe  dessin 
à  la  plume,  lavé  de  bistre  ;  gravé  dans  la  Gazette  des  Beaux-Arts,  tom.  XX, 
p.  234.  7,300  francs.  Jeune  fille  regardant  de  face  ;  dessein  à  la  plume  et  à  la 
sépia  ;  gravé  en  couleur  dans  la  collection  Ploos  Van  Ametel,  3,700  francs. 

Juillet  1875.  T.  XIV,  6. 


\ 


—  82  -- 

Quant  aux  gravures,  nous  en  avons  compté  69  indiquées  par  quatre 
chiffires  sur  la  liste  des  prix  d'adjudication.  A  cet  égard,  la  palme  reyient  à 
un  jeu  de  cinquante  cartes  de  Tarots,  gravées  par  un  mattre  anonyme  italien 
du  quinzième  siècle,  17,000  francs.  (Voir  la  note,  n«  331.) 

Mentionnons  quelques  prix  dignes  d'attention  et  amenés  par  ia  chalenr 
des  enchères  : 

Barbary  (Jacopo  de).  Saint  Sébastien .  Pièce  rarissime, inconnue  à  Bartscb, 
4,105  francs. 

Brescia  (G.  A.  de).  La  Vierge  avec  des  Saints.  Pièce  également  inconnue  à 
Bartsch,  7,700  francs. 

Campctgnola  (Dominique).  Douze  enfants  dansants,  Bartsch  n'a  pas  décrit 
cette  pièce,  3,700  francs. 

Lucas  de  Leyde.  Marie-Madeleine  se  livrant  aux  plaisirs  du  monde,  8,500 
francs. 

Aattnonc^i  (Marc  Antoine).  Notre-Dame  à  l'escalier,  d'après  Raphaël,  4 J05 
francs.  Le  jugement  de  Paris,  d'après  le  même,  6,7^5  francs.  Le  serpent 
parlant  à  un  jeune  honune,  4,000  francs.  Les  Ghnnteurs,  7,005  francs. 

Rembrandt,  Jésus-Christ  guérissant  les  malades,  dite  la  pièce  de  cent 
florins,  0,600  francs. 

Jésus-Christ  présenté  au  peuple,  4,700  francs. 

Sertos  (Gesare  du).  Décollation  de  saint  Jean-Baptiste.  Pièce  rarissime 
restée  inconnue  à  Bartsch  et  à  son  continuateur  Passavant;  elle  est  décrite 
dans  l'étude  de  M.  Gallichon  sur  l'œuvre  de  Gesare  du  Serto  (voir  la  Omette 
des  Beauji'Arts,  tom.  XVIU,  p.  550)  ;  700  francs.  (Notons  en  passant  que  l'ar- 
tiste, avec  rinsouciance  fréquente  à  son  époque,  a  représenté  le  supplice  du 
saint  précurseur  comme  ayant  lieu  au  bord  de  la  mer.) 

N'oublions  pas  nn  volume  qui  atteindrait  tout  au  plus  quelques  francs  s'il 
ne  contenait  pas  dix  eaux-fortes  de  Claude  Gellée,  dit  le  Lorrain.  Grâce  à 
cette  circonstance  toute  particulière,  il  a  donné  lieu  à  une  lutte  des  plus 
acharnées,  et  il  a  atteint  un  prix  fort  élevé  sans  doute,  4,250  francs  ;  il  a 
pour  titre  :  Lescripfiion  de  las  flestas  que  el  8r.  Marques  de  Castehrodrigo^ 
Embajador  de  Bspaha,  célébra  en  esta  Carte  à  la  nueva  del  élection  de  Ferdé- 
natido  m  de  Austria.  Hecha  por  MiguelJiermudez  de  Castro.  Roma,  par  Fran- 
cisco Cabullo,  MDCXXXVn.  Au  deuxième  feuillet  commence  la  description  de 
la  fête  en  vers  espagnols  ;  elle  remplit  huit  feuillets,  les  eaux-fortes  de 
Claude  représentent  des  feux  d'artifice.  (Consulter  à  leur  égard  le  Peéntre-Gra- 
veurde  Robert  Dumesnil,  tom.  I*'*.  p.  31,  ainsi  qu'un  article  publié  par 
M.  Galtiehon  dans  la  Gazette  des  Beaux-Arts^  tom.  XI,  p.  225.  Nous  ne  croyons 
pas  que  le  Manuel  du  libraire  ait  fait  mention  de  ce  très-précieux  volume.) 
Terminons  en  signalant  deux  nielles,  œuvre  florentine  remontant  aux 
origines  de  la  gravure,  adjugées  à  650  et  4,100  francs  ;  cette  dernière 
représentant  l'adoration  des  mages,  est  due  à  Maro  Finiguerra,  le  célèbre 
orfèvre  toscan,  mort  en  1475,  et  qui  frit  sinon  l'inventeur  de  la  gravure 
sur  métal,  du  moins  son  importateur  en  Italie.  Consulter  à  cet  égard 
Timportant  travail  de  M.  Duchesne  aîné  :  Essai  sur  les  nielles,  gravures  des 
orfèvres  florentins  du  quinzième  siècle  (Paris,  Merlin,  1826.  gr.  iii-8)  et  les 
divers  ouvrages  signalés  par  M.  A.  de  Lacaze  dans  l'article  qu'il  a  consacré 
&  Finiguera,  Nouvelle  Biographie  générale,  tom.  XXII,  col.  714. 

La  vente  Benzom.  —  Un  riche  Américain,  l'un  des  chefs  d'une  importante 
maison  de  commerce  établie  à  Londres,  M.  Benzon,  possédait  une  collection 
peu  nombreuse,  mais  choisie  avec  goût,  de  livres  en  langue  française;  la  plu- 
part d'entre  eux  lui  avaient  été  cédés,  on  le  sait,  par  un  très-fervent  ama- 


—  83  — 

teur  bordelais,  M.  Henri  Borde.  —  M.  Benzon  étant  mort,  ses  livres  ont 
été  apportés  à  Paris  :  une  vente  publique  a  eu  lieu  le  24  avril  par  les  soins  de 
M.  Bachelin-Deflorenne.  —  Le  catalogue  comprend  tout  juste  400  articles  ; 
le  produit  de  la  vente  s*est  élevé  à  376,000  fr.,  prés  de  1,000  fr.  en  moyenne 
pour  chaque  article. 

Nous  indiquons  les  prix  les  plus  dignes  d'attention,  en  mentionnant  à 
quel  chiffre  ces  précieux  volumes  avaient  été  adjugés  dans  des  ventes  pré- 
cédentes, car  on  voit  presque  infailliblement  ces  beaux  ouvrages  se  repré- 
senter à  quelques  années  d'intervalle.  Les  collectionneurs  meurent  ou  se 
dégoûtent  de  ce  qu'ils  ont  payé  fort  cher. 

Le  prix  le  plus  élevé  de  la  vente  Benzon  a  été  celui  de  43,000  fr.  payé 
pour  un  exemplaire  des  Contes  de  La  Fontotne,  édition  dite  des  Fermiers 
généraux  (4762,  2  vol.  in-8).  Ce  même  exemplaire  n*avait  pas  dépassé 
266  fin.  en  1811,  à  la  vente  Firmin  Didot,  et  625  fr.  en  1839,  à  celle  de  La 
Bédoyère  ;  mais  à  cellg  du  célèbre  bibliographe  J.  Gh.  Brunet,  Fauteur  du 
Manuel  du  Libraire^  il  atteignit  le  prix  fort  respectable  de  7,200  fr.  Nous 
Tavons  tenu  en  nos  mains,  et  nous  pouvons  affirmer  qu'il  n'a  rien  d'ex- 
traordinaire si  ce  n'est  une  élégante  reliure  de  Derome,  à  compartiments 
de  mosaïque  de  maroquin  rouge,  vert  citron,  représentant  des  fruits  et  des 
fleurs.  C'est  une  œuvre  d'art  remarquable  en  son  genre,  mais  toutefois  ne 
justifiant  pas,  ce  semble,  la  valeur  exorbitante  qu'on  lui  attribue.  Le  bruit 
court  que  c'est  un  des  chefs  de  la  plus  puissante  maison  de  banque  de 
l'Europe   qui  s'est  passé  cette  fantaisie. 

Nous  préférerions  à  ces  deux  volumes  une  édition  des  Œuvres  de  Molién 
(Paris,  1734,  6  vol.  in-4),  riche  reliure  en  maroquin,  exemplaire  illustré  par 
M.  H.  Borde,  dessins  originaux,  suites  de  gravures,  autographes  (voir  U 
détail  au  n*  273  du  catalogue),  adjugé  à  10,000  fr.  Des  éditions  de  l'im- 
mortel auteur  comique,  publiées  au  dix-septième  siècle,  ont  obtenu  des  prix 
élevés;  celle  do  Paris,  Cl.  Barbin  1666,  2  vol.  in-12,  2,355  fr.;  celle  de 
Paris,  D.  Thiéry,  1674-75,  7  vol.  in-12,  1,535  fr.;  celle  d'Amsterdam,  Jac- 
ques le  Jeune  (Daniel  Ëlzevier),  4675,  6  vol.  pet.  in-42,  2,700  fr.,  exemplaire 
payé  2,500  fir.,  à  la  vente  Potier.  —  Les  éditions  originales  et  séparées  des 
pièces  de  Molière  étant  devenues  d'une  extrême  rareté  ,  les  bibliophiles  les 
payent  au  poids  de  l'or  ;  M.  Benzon  avait  réuni  neuf  de  ces  livrets  introu- 
vables ;  Monsieur  de  Pourceauçmae,  4670,  4,500  fr.;  la  Critiqué  de  ¥  Ecole  des 
Femmes,  4663,  4,480  fr.;  Amphytrim,  4668,  4,080  &.;  le  Misanthirc/pe,  4667, 
995  francs. 

Les  éditions  primitives  du  grand  Corneille  sont  tout  aussi  convoitées  que 
celles  de  Molière  ;  on  peut  en  juger  par  les  prix  suivants.  Edition  de  Rouen, 
4664-67,  2  vol.  pet.  in-42,  4,000  fir.;  VlUmire  théâtre  de  M.  Comei/to,  Leyden, 
4664,  pet.  in-42,  6,600  fr.  (ce  volume  imprimé  par  les  Eizevier  ne  con- 
tient que  dnq  pièces  ;  on  n'en  connaît,  dit-on,  que  quatre  exemplaires, 
celui-ci  a  été  payé  4,000  fr.  par  M.  Borde,  à  la  vente  Potier).  Théâtre  de 
Pierre  et  Thomas  Comeiile,  Amsterdam,  4664-4678,  40  vol.*  4,750  f^.  Diverses 
éditions  séparées  des  tragédies  de  Pierre  Corneille  se  sont  payées  de  200  à 
400  h,\  toutefois  la  Mort  de  Pompée,  4644,  est  arrivée  à  600  fr.  et  le  Mmt' 
teur,  avec  sa  Suite,  4644-45,  ne  s'est  arrêté  qu'à  505  fr. 
^  Racine  suit  de  près  Corneille  et  Molière  sur  la  cote  de  la  bourse  des  livres; 
la  première  édition  collective  renfermant,  en  deux  petits  volumes,  les  neuf 
pièces  publiées  jusqu'en  4676,  4,000  fr.;  l'édition  d'Amsterdam,  4678,  2  vol. 
pet.  in-42,  avec  Esther  et  Athalie.  2,350  fr. 

Signalons  maintenant  :  Heures  sur  peau  de  vélin,  imprimées  par  Antoine 
Vérard  (vers  4487)  ;  6.000  fr.,  exemplaire  payé  8.000  à  la  vente  Peikias.  Ua 


—  8i  — 

« 

autre  exemplaire  de  la  même  éditioD,  mais  sur  papier  4,100  fr.;  celui-ci  est 
entré,  dit-on,  dans  la  bibliothèque  du  savant  et  respectable  M.  Ambroise 
Firmin  Didot,  heureux  propriétaire  d'une  des  plus  belles  collections  qui 
existent  à  Paris.  On  ne  connaît  de  ces  Heures  que  deux  autres  exemplaires, 
Tun  à  la  Bibliothèque  nationale,  l'autre  k  la  Mazarine. —  Essais  de  Montaigne 
(Paris,  1588,  in-4),  la  dernière  édition  publiée  du  vivant  de  l'auteur,  et  la 
première  qui  contienne  le  troisième  livre,  3,020  fr.  (payé  2,750  fr.,  vente 
Potier).  Essais,  Bruxelles,  Foppens,  1650,  3  vol.  pet.  in-12,  5,000  fr.;  ce  prix 
excessif  vient  de  ce  que  sur  les  plats  et  le  dos  de  chaque  volume  sont  les 
insignes  de  Longepierre  (auteur  fort  oublié  d'une  tragédie  de  Médée),  c'est- 
à-dire  la  Toison  d'or.  Les  bibliophiles  attachent  à  cet  insigne  une  valeur 
qu'il  est  permis  d'envisager  comme  singulièrement  exagérée.  M.  Benzon  avait 
réuni  huit  anciennes  éditions  de  Montaigne  ;  la  première  de  toutes,  Boor- 
deaus,  S.  Millanges,  1580,  pet.  in-8,  devenu  fort  rare,  1,420  fr.  et  la  seconde, 
1582,  presque  aussi  introuvable,  1,425  fr.  Description  de  Vlsle  d'Utopie^  pai* 
Thomas  Morus,  1550,  pet.  in-8,  4,900  fr.  Exemplaire  aux  armes  de  Louis  Xni 
et  d'Anne  d'Autriche,  (circonstance  qui  explique  ce  prix  absolument  excep- 
tionnel) ;  on  en  suit  la  trace  depuis  longtemps,  et  son  prix  va  toujours  en 
s'élevant  avec  rapidité  ;  11  fr.  vente  La  Vallière  en  1784  ;  39  fr.  en  1814  ; 
230  £r.  De  Bure,  1,500  fr.  J.  Brunet  ;  offert  en  1871  à  2,000  fr.  sur  un 
catalogue  de  la  librairie  Fontaine  Tourach. 

Le  Fastissier  fraaçois,  Amsterdam,  Louis  et  Daniel  Elzevier,  1655,  petit 
iQ-12,  3,225  fr.  ;  exemplaire  payé  par  M.  Borde,  2,910  fr.  à  la  vente  Potier.  Il 
n'y  a  guères  d'exemple  plus  frappant  des  emportements  auxquels  peut  con- 
duire le  goût  des  livres  rares,  car  celui-ci  n'a  rien  qui  le  recommande,  si  ce 
n*est  qu'il  est  des  plus  difficiles  à  rencontrer  parmi  bien  des  bouquins  qu'on 
ne  payerait  pas  2  fr.  si  le  nom  glorieux  des  Elzevier  ne  se  montrait  pas  sur 
leur  frontispice;  Œuvres  d'Bomére  traduiies  par  Mme  Dacier,  1711-1716. 
6  vol.  in-12,  3,000  fr.  (400  fr.  Nodier,  en  1844,  1,010  fr.  Pichon);  une  belle 
reliure  de  l'époque  a  fait  la  fortune  de  ces  volumes  ;  —  Le  Eoman  de  la  Uose 
(Lyon,  vers  1485),  4,600  fr.  (2,950  fr.  vente  Double);  —  Le  Chasteau  de 
labour  (par  P.  Gringore).  Paris,  4532,  in-16,  3,005  fr.;  —  (Euvres  de  Clément 
Marot.  5  parties  en  1  vol.  in-16.  Paris,  1540,  1,060  fr.;  —  Œuvres  de  Hugues 
Salel.  Paris,  1539,  1,305  fr.  ;  —  Odes  d'OUvier  de  Magny.  P^ris,  1559,  in-8, 
1,700  fr.  ;  —  Œwores  de  R^msard.  Paris,  1567,  5  vol.  in-4,  2,505  fr.  (1,000  fr. 
vente  Turquety,  en  4868)  ;  — GEuwcs  deJ.A.  de  Baif,  1572-73,  4  vol.  in-8, 
1,450  fr.;  —  (Euvres  de  Jodelle,  1574,  in-4,  2,005  fr.  (payé  1,600  fr.  venle 
Potier,  en  1870);  —  Fables  de  la  Fontaine.  1668,  in-4,  édition  originale  no 
contenant  que  six  livres,  2,050  fr.;  —  Les  mêmes  Fables.  1755,  4  vol.  in-foL, 
fig.  d'Oudiy,  6,100  fr.;  ^  Fables  de  Durât.  1773,  in-8,  jolies  figures  de 
Marinier,  belle  reliure  ancienne;  aussi  ce  volume  est-il  arrivé  à  1,600  fr. 
Les  vers  du  fade  Dorai  se  donnent  toujours  par  dessus  le  marché  ;  —  Chan- 
sons mises  en  musique^  par  M.  de  la  Borde,  1773,  4  vol.  in-8  ;  de  charmantes 
estampes  dues  à  l'habile  crayon  de  Moreau  ont  porté  fort  haut  la  valeur  do 
ce  recueil  qu'on  obtenait  pour  50  ou  60  fr.  il  y  a  une  trentaine  d'années.  La 
poésie  de  La  Borde  n'entre  pour  rien  du  tout  dans  le  prix  payé  ;  —  Sainct 
GraaL  (Un  des  plus  rares  des  romans  de  chevalerie).  Paris,  1523,  in-foL, 
3,900  fr.  (2,000  fr.  vente  Yemeniz);  —  Perceval  le  Galloys.  Paris,  1530,  in-lol., 
5,800  fr.  (ex.  payé  665  fi*.  vente  du  prince  d'Essling,  en  1839  et  2,000  fr. 
Yéméniz);  —  (Euvres  de  Eabelais.  Amsterdam,  1741,  3  vol.  in-4,  5,500  fr. 
(1,525  fr.  vente  Radziwil)  ;  —  La  Princesse  de  Cléves  (par  Mme  de  La  Fayette). 
Paris,  1678,  4  tomes  en  2  vol.  in-12.  Edition  originale  ;  l,650fr.  ;  —  Histoire 
de  MBOwn  Lescaut*  1753,  %  vol.  in-12,  1,335  fr.;  —  Histoires,  ou  contes  du 


—  85  — 

temps  passé  (par  Perrault).  Paris,  1697,  petit  in- 12,  4,000  fr.  ;  —  De  la  beauté 
anec  la  Paulegraphie,  par  Gubriel  de  Minut.  Lyon,  1587,  in-8,  livre  singulier 
et  fort  rare,  1,510  fr.  ;  —  Mémoires  de  Commines.  Leyde,  Elzevier.  1645,  petit 
in-12,  1230fr. 

Nous  pourrions  signaler  bien  d'autres  articles,  mais  il  faut  savoir  arrêter 
ici  cette  liste  trop  longue  peut-être.  Un  mot  toutefois  au  sujet  d'un  ezem« 
plaire  de  l'Imitation  (traduction  de  l'abbé  de  Cboisy,  i682^  in-12)  précieux, 
malgré  une  humble  reliure  en  veau  ;  il  porte  les  insignes  de  la  maison  de 
Saint-Cyr,  avec  envoi  autographe  de  Madame  de  Maintenon  et  la  figure  qui  la 
représente  dans  la  chapelle  de  Versailles  avec  ces  mots  au  bas  :  Audi,  filia, 
figure  promptement  supprimée,  parce  que  le  texte  du  psalmiste,  une  fois 
complété,  offrait  UTie  allusion  dont  s'emparait  la  malignité.  Il  serait  superflu 
d'ajouter  que  tous  les  volumes  dont  il  s'agit,  étaient  somptueusement  reliés, 
et  que  les  prix  signalés  n'ont  aucun  rappprt  avec  ceux  qu'on  accorderait  à 
des  exemplaires  d'une  condition  ordinaire.  G.  B. 

L*iMPB0HpTU  DE  l'hotel  De  Gondé.  —  Nous  avous  sous  les  yeux  un  livret 
tiré  à  104  exemplaires  (dont  4  sur  papier  de  Ghine)  faisant  partie  de  la  col- 
lection moliéresque  dont  nous  avons  déjà  eu  l'occasion  de  parler,  consacrée 
à  la  reproduction  d'ouvrages  relatifs  à  Molière^  et  devenus  introuvables.  Il 
est  intitulé  :  LImpromptu  de  Vhostel  de  Condé,  comédie  en  un  acte  et  en  vers 
par  M.  Montfieury,  réimprimée  sur  l'édition  originale  (1664),  et  précédée 
d'une  notice  bibliographique  de  M.  Paul  Lacroix  (San  Remo,  1875,  in-18  de 
41  pages). 

Dans  l'Impromptu  de  VersaiUeSf  réellement  improvisé  en  quelques  jours  et 
joué  avec  un  succès  complet,  en  octobre  1663,  Molière,  encouragé  par  le  roi 
lui-même,  s'était  donné  le  plaisir  de  se  moquer  de  ses  ennemis,  des  comé- 
diens de  l'hôtel  de  Bourgogne  et  des  auteurs  de  ce  théâtre.  On  voulut  répli- 
quer, et  le  fils  d'un  des  comédiens  de  cet  hôtel,  le  jeune  Montfleury,  se 
chargea  de  cette  œuvre  de  vengeance.  Il  écrivit,  dans  ce  but,  une  petite 
comédie  qu'il  intitula  VImpromptu  de  Vhostel  de  Condé,  on  ne  sait  pourquoi, 
car  le  prince  de  Gondé  et  son  fils  cherchaient  les  occasions  d'applaudir  la  pièce 
de  Molière.  VImpromptu  de  Versailles,  quoi  qu'il  en  soit,  fut  accueilli  à  la  ville 
aussi  bien  qu'à  la  cour;  joué,  pour  la  première  fois,  le  4  novembrel663, 
sur  le  théâtre  du  Palais-Royal,  il  obtint  dix-neuf  représentations  successives 
et  de  plus,  la  troupe  de  Monsieur  fut  appelée  en  visite  chez  plusieurs  grands 
personnages  pour  jouer  VImpromptu  devant  une  société  d'élite. 

La  comédie  de  Montfleury  parait  avoir  piqué  la  curiosité  publique  ;  le  pri- 
vilège est  du  15  janvier  1664,  l'impression  était  terminée  dès  le  19;  con- 
trairement à  l'usage  de  l'époque,  aucune  dédicace;  personne  ne  voulut 
accepter  le  dangereux  honneur  d'être  le  protecteur  de  Montfleury. 

La  scène  se  passe  au  palais,  et,  dès  le  début,  Molière  est  nommé  en  toutes 
lettres,  il  n'est  question  que  de  lui,  et  il  est  l'objet  d'attaques  continuelles. 
C'est  un  héros  de  farce,  acharné  sur  les  gens  ;  il  fait  rire  quand  il  joue  la 
tragédie  : 

Il  vient  le  nez  au  vent, 
Les  pieds  en  purenibèse,  et  Tespanle  en  avant; 
Sa  perruque,  qui  soit  le  costé  qu^il  avance, 
Plus  pleine  de  laurier  qu^un  jambon  de  Mayence, 
Ses  mains  sur  les  costez,  d*un  air  peu  négligé, 
Sa  tête  sur  le  dos  comme  un  mulet  chargé. 
Ses  yeux  fort  égarés,  puis  débitant  ses  rooles, 
D*an  hocquet  éternel  sépare  ses  paroles. 

Montfleury  avance  encore  un  fait  qui  ne  se  trouve  nulle  part  ailleurs,  c'est 


—  86  — 

que  Molière  essayait,  dans  des  repas,  les  bons  mots  et  les  jeux  de  scène  qu*il 
appropriait  ensuite  à  ses  comédies. 

Il  8  joué  cela  vingt  fois  aa  bout  des  tables... 

De  cela  chez  les  grands  il  payait  son  escot. 

Ces  détails  suffisent  pour  démontrer  combien  Vlmpromptu  de  Vhàtel  de 
Condé  est  indispensable  dans  toute  collection  moliéresque.  B. 

La  production  littéraire  en  Allemagne  en*  1874.  —  Le  Journal  officiel 
donne,  d'après  le  Boersenblattj  les  renseignements  suivants  :  La  production 
littéraire  a  atteint,  Tan  dernier  en  Allemagne,  le  chiffre  le  plus  élevé  qui  ait 
été  obtenu  depuis  vingt-cinq  ans.  Il  a  été  enregistré  un  total  de  plus  de 
12,000  livres,  cartes  géographiques,  etc.,  donnés  comme  publications  nou- 
velles ou  réimpressions.  Le  chiffre  est  exactement  de  i  2,070;  il  surpasse 
plus  ou  moins  les  chiffres  des  six  années  précédentes. 

Voici  quelle  a  été,  depuis  1868,  la  marche  de  la  production  littéraire  en 
Allemagne.  A  cette  date,  elle  atteignit  et  dépassa,  pour  la  première  fois,  le 
chiffre  de  10,000.  On  compte,  cette  année-là,  10,563  ouvrages  nouveaux. 
L'année  suivante  en  vit  naître  11,305.  Pendant  les  années  de  la  guerre  1870- 
1871,  il  7  eut,  naturellement,  diminution  dans  le  chiffre  de  la  production, 
qui  fut  de  i0,i08  et  de  10,669.  Mais  en  1872,  on  reprit  avec  11,127  articles  ; 
en  1873,  on  en  comptait  11,351,  et,  en  1874,  il  y  en  a  eu,  comme  nous  avons 
dit,  12,070. 

Cette  augmentation  de  755  sur  Tannée  précédente  intéresse  presque  toutes 
les  branches  de  la  production  littéraire  ;  il  n*y  en  a  que  6  sur  24  où  l'on 
constate  une  diminution.  Cette  diminution  atteint  la  théologie  (1094  articles 
contre  1,239  en  1873)  ;  les  belles-lettres  (912  contre  948)  ;  les  écrits  destinés 
à  la  jeunesse  (344  contre  387)  ;  l'architecture,  machines,  chemins  de  fer, 
mines,  etc.  (301  contre  33f)  ;  la  philosophie  (152  contre  157);  économie 
forestière  et  chasse  (89  contre  90). 

La  branche  qui  occupe  aujourd'hui  le  premier  rang  dans  la  production 
littéraire  de  l'Allemagne  est  la  pédagogie,  et  il  en  est  ainsi  depuis  plusieurs 
années.  En  revanche,  des  matières  qui,  depuis  très-longtemps,  se  trouvaient 
en  tête  de  la  liste  sont  maintenant  reléguées  &  plusieurs  rangs  en  arrière. 

On  peut  supposer  que  la  production  littéraire  a  suivi  de  même  dans  les 
autres  pays  une  marche  ascendante.  Cette  supposition  acquiert  beaucoup  de 
vraisemblance  si  l'on  se  reporte,  par  exemple,  aux  chiffres  publiés  sur  le 
mouvement  des  entrées  à  la  Bibliothèque  nationale  de  Paris,  collection  qui 
absorbe  la  plus  grande  quantité  de  livres.  Dans  le  dernier  rapport  sur  cet 
établissement,  publié  au  commencement  de  l'année  dernière,  et  qui  cons- 
tate l'existence,  à  la  bibliothèque  de  la  rue  de  Richelieu,  d'un  total  de 
2,077,571  volumes  (on  n'a  pas  calculé,  que  nous  sachions,  pour  combien  les 
brochures  entrent  dans  ce  chiffre),il  est  dit  que  les  entrées  annuelles,  soit  parle 
dép6t  légal,  soit  parles  acquisitions  et  les  dons,  sont  actuellement  de  40,000. 

Or,  elles  n'étaient,  d'après  un  précédent  rapport  dont  nous  n'avons  pas  la 
date  exacte,  mais  qui  ne  remonte  pas  à  plus  de  quinze  ans,  elles  n'étaient 
que  de  12,000.  Elles  ont  donc  plus  que  triplé  dans  un  espace  de  quinze  ou 
vingt  ans.  En  supposant  qu'elles  augmentent  sinon  dans  la  même  propor- 
tion, au  moins  dans  une  proportion  normale,  on  peut  croire  qu'elles  dou- 
bleront dans  un  même  espace  de  temps  et  qu'elles  atteindront  un  chiffre 
de  80>  peut-être  même  de  100,000,  ce  qui,  au  bout  de  dix  ans,  augmentera 
la  collection  de  un  million  de  nouveaux  articles,*  et,  au  bout  de  vingt  ans,  — 
qui  est  la  période  choisie  comme  mesure,  —  de  2  millions.  Nous  trouvons 
ailleurs  le  relevé  complet  par  ordre  chronologique  de  la  production  litté- 
raire depuis  1851. 


—  87  — 

1851  —    8,326  —  <  852  —    8,857  —  18S3  —  8,750  —  4854  —    8,705  — 

1855  —    8,794  —  1856  —    8,510  —  1857  -  8,699  —  1858  —    8,672  — 

1859  —    8,666  —  1860  —    9,496  —  1861  —  9,566  —  1862  —    9,779  — 

1863  —    9,889  —  1864  —    9,564  -  1865  —  9,661  —  1866  —    8,699  — 

1067  —    9,855  —  1868  —  10,563  —  1869  —  11,305  —  1870  —  10,108  — 
1871  —  10,669  —  1872  —  11,127. 

Les  journaux  en  Belgique  et  en  Russie.  ^  Une  preuve  de  la  grande  impor- 
tance qa*a  oonserrée  jusqu'à  ce  jour  la  langue  suédoise  en  Finlande,  c'est  le 
nombre  des  journaux  suédois  qui  paraissent  dans  le  grand-duché  :  en  1872, 
sur  37  feuilles,  il  y  en  avait  21  en  langue  suédoise,  contre  16  en  langue  fin- 
landaise; en  1874,  sur  40  feuilles,  22  étaient  suédoises,  18  finlandaises.  De 
ees  40  journaux,  20  paraissent  dans  la  capitale,  Helsingfors,  20  dans  le  reste 
du  pays. 

Nous  avons  déjà  donné  (Xm  p.  375)  la  statistique  des  journaux  belges  au  31 
décembre  1874,  d*aprés  leur  mode  de  publicité.  Au  point  de  vue  de  la  langue, 
il  y  en  a  un  en  espagnol ,  deux  en  anglais,  cent  trente  en  tlamand,  deux 
cents  quinze  en  français.  Le  Hainaut,  Namur  et  le  Luxembourg  n*ont  que 
des  journaux  français  ;  le  Brabant  à  86  journaux  écrits  en  français,  la 
Flandre  orientale  45  écrits  en  flamand. 

Catalogue  j)es  livres  anciens  et  modernes  de  la  librairie  Auguste  Fontaine. 
(Paris,  1875,  in-8  de  588  p.) — Un  catalogue  de  livres  exposés  en  vente  est  rare- 
ment digne  de  l'attention  des  bibliographes,  mais  celui  que  nous  signalons 
ici  ofire  un  intérêt  exceptionnel.  II  se  recommande  par  la  valeur  des  ouvrages - 
en  tout  genre  qu'il  met  à  la  disposition  des  blbîiomanes  et  par  les  notes 
nombreuses  qui  accompagnent  une  foule  d'articles,  notes  qui  présentent  bien 
des  informations  nouvelles  au  sujet  de  la  science  des  livres.  Quant  aux  prix 
demandés, nous  devons  convenir  qu'ils  paraîtront  sans  doute  fort  élevés  ;  mais 
il  faut  bien  qu'ils  soient  en  rapport  avec  le  prix  courant  des  curiosités  de  ce 
genre,  sinon  ils  n'auraient  aucun  motif  d'être  livrés  à  la  publicité.  Gomme 
simple  échantillon,  et  sans  avoir  besoin  d'ajouter  qu'il  s'agit  d'exemplaires 
reliés  par  les  premiers  artistes  de  Paris,nons  indiquerons  :  Daphnis  et  Chhé^  1 787, 
in-4,  exemplaire  sur  peau  vélin,  avec  29  dessins  originaux  et  29  miniatures, 
8,000  îr,;VAdole»cence  clémentine,  autrement  les  Œuvres  de  Clément  Marot,  Paris, 
1534, in-8,  5,500  francs;  le  Pastissier  françoi$,  Amsterdam, Ehevier,  1655,  petit 
in-12  (Volume  bien  insignifiant,  mais  un  des  plus  rares  qu'ait  imprimés  les 
Elzevier),  4,500 francs;  les  Œuvres  de  François  Villon,  Paris,  1532,  petit  in-8, 
4,000  francs  ;  La  Bruyère,  Caractères,  les  dix  éditions  publiées  de  1688  à  1699, 
4,000 francs;  les  Œuvres  complètes  de  Mesdames  Desroches,  1578-1586,4  vol. 
in-4,  3,000  francs  ;  les  Poésies  de  la  Fresnaye  Vauquelin,  Caen,  1605,   3,000 
francs.  —  N'allons  pas  plus  loin,  mais,  n'oublions  pas  toutefois,  que  M.  Fon- 
taine noas  parle  d'un  exemplaire  de  l'édition  rarissime  des  Œuvres  de  Louise 
Labé,  1555,  in-8,   exemplaire  qui   est  porté,  au   catalogue  des  livres    de 
M.  Ernest  Quentin  Bauchart,  au   prix  de  quinze  mille  francs.   Malheureuse- 
ment il  n'est  plus  à  vendre.  Acquis  par  M*  Fontaine  avec  les  autres  livres 
précieux  de  M.  Bauchart  —  (sa  collection  ne  comprenait  que  152  numéros; 
elle  a  été  vendue  140,119  francs.  M.  Fontaine,  annonce  avoir  acquis,  pour  la 
somme  de  100,000  francs,  environ  60  articles,  parmi  lesquels  nous  citerons  : 
Bossuet,  Histoire  des  Variations,  aux  armes  de  M«»  de  Maintenon,  4,000  francs 
et  le  Virgile,  petit  in-12,    collection  elzevérienne,    avec  une  riche   reliure 
ancienne,  2,400  francs),  —  il  fait  aigourd'hui  partie  d'une  de  nos  plus  riches 
bibliothèques,  d'où  il  ne  sortira  que  pour  soutenir  le  feu  des  enchères.  Ces 
paroles  ne  permettent-elles  pas  de  coiyecturef  que  ce  très-précieux  volume 


—  88  — 

est  entré  dans  la  collection  d'un  célèbre  banquier,  bibliophile  des  plus 
fervents,  et  qui  est  un  des  clients  les  plus  zélés  que  compte  M.  Fontaine  ? 

Restif  de  la  Bretonne,  deyenu,  depuis  quelques  années, l'obj et  d*un  engoue- 
ment fort  exagéré,  occupe  une  place  très-considérable  sur  les  rayons  des 
riches  magasins  que  nous  parcourons  ;  il  ne  revendique  pas  moins  de 
87  articles  différents.  Une  collection  des  œuvres  de  cet  infatigable  écrivassier 
présente  212  parties  ou  tomes  en  154  volumes  de  divers  formats  reliés  en 
maroquin  ;  elle  sera  cédée  pour  la  sonmie  de  20,000  finmcs  ;  une  autre  collec- 
tion moins  complète  (183  tomes  en  458  volumes),  ne  coûtera  que  5,000  fr. 

Molière,  tout  comme  Restif,  omstitue  une  spécialité  chezU.  Fontaine;  il 
occupe,  sur  le  catalogue  que  nous  Usons  avec, une  émotion  que  tous  les 
bibliophiles  partageront,  il  occupe  les  n*  1122  &  1283;  les  éditions  origi* 
nales  et  isolées  de  ses  immortelles  comédies  sont  envisag[ées  aujourd'hui 
comme  devant  se  payer  au  poids  de  Tor  ;  du  moins,  M.  Fontaine  évalue  le 
Tartuffe,  1669,  2,500  francs;  Amphytrùm,  1667,  1,800  francs;  Psyché^  1671, 
les  Pbur6ertes  de  Scaptn,  1671,  et  les  Femmes  Savantes,  1673,  2,500  francs 
chaque  ;  l'édition  des  (Euvres,  1674,  7  vol.  in-12,  6,000  francs.  Il  y  a  trente 
ou  quarante  ans,  ces  éditions,  aujourd'hui  si  recherchées,  n'attiraient  que 
fort  peu  l'attention  des  bibliophiles;  on  pouvait  les  obtenir  à  prix  fort 
modéré,  lorsqu'on  les  rencontrait,  ce  qui  d'ailleurs  était  rare. 

Nous  avons  dit  que  le  catalogue  dont  il  est  question,  se  recommandait  par 
un  grand  nombre  de  notes,  riches  en  renseignements  bibliographiques  qui 
ne  se  trouvent  pas  ailleurs.  Il  est  impossible  d'entrer  ici  dans  quelques 
détails  ;  nous  mentionnerons  seulement,  sans  faire  aucun  choix,  le  n»  942  : 
Fables  choisies  de  La  Fontaine,  Paris,  Barbier,  1669,  in-12,  une  des  éditions 
primitives,  non  cotée  dans  le  Manuel  du  libraire,  et  qui  manquait  dans  l'im- 
portante collection  spéciale  formée  par  M.  Walckeaner  Les  numéros  1091, 
1092, 109G,  1097,  1103of&'ent  des  indications  fort  utiles  pour  la  bibliogra- 
phie de  Pierre  Corneille;  mais  sachons  nous  arrêter.  Les  bibliophiles  et 
les  bibliographes  sauront  bien  reconnaître  eux-mêmes  tout  ce  que  présente 
d'intéressant  et  d'instructif  l'inventaire  des  richesses  et  des  raretés  réunies 
chez  M.  Fontaine. 

Une  revue  grecque  ▲  Paris.  —  11  se  publie  k  Paris,  depuis  le  1*'  janvier, 
une  revue  mensuelle  écrite  en  grec  moderne,  EOv(x^  yp^^h  6ictOtù>pT)9iç,  Revue 
Nationale  pittoresque,  sous  la  direction  de  M.  de  Meymar. 

Catalogues  de  livres  par  ordre  alpharétique.  —  Un  des  principaux 
libraires  parisiens  a  publié,  à  peu  d'inteiTalle,  deux  catalogues  de  livres  mis 
en  vente  et  rangés  par  ordre  alphabétique.  Cette  innovation  a  paru  malheu- 
reuse. Les  catalogues  dressés  depuis  longtemps  par  les  libraires  auxquels  on 
s'adresse  spécialement  pour  les  ventes  publiques  (Aubry,  Techener,  Potier, 
Labitte,  etc.)  sont  toujours  disposés  dans  un  ordre  méthodique  ;  tout  ce  qui 
concerne  la  poésie  française,  par  exemple,  forme  un  groupe  à  part  ;  ce  qui 
regarde  l'histoire  de  France  compose  un  autre  groupe  ;  la  jurisprudence  ne 
se  mêle  en  rien  k  l'histoire  naturelle  ;  les  Beaux- Arts  sont  bien  nettement 
séparés  de  l'histoire  littéraire.  De  la  sorte,  chaque  amateur  trouve  d'un  coup- 
d'œil  ce  qu'il  veut  savoir,  et  se  rend  compte  de  ce  qui  lui  est  offert  dans  la 
spécialité  qui  est  son  partage.  Mais  avec  Tordre  alphabétique,  il  faut  lire 
le  catalogue  tout  entier  (ce  qui  exige  du  loisir  et  du  dévouement)  ;  il  faut 
noter,  parmi  maints  articles  dont  on  ne  se  soucie  point,  ceux  auxquels  on 
s'intéresse  ;  peu  de  gens  prendront  cette  peine,  et  les  intérêts  do  la  vente 
en  souffriront.  L'ordre  alphabétique  n'a  qu'un  mérite,  celui  de  rendre  plus 
facile  le  travail  du  rédacteur  d'un  catalogue.  Ce  n'est  pas  une  considération 


—  89  — 

sérieuse,  et  nous  espérons  bien  que  l'ancienne  classification,  fidèlement  sui- 
vie le  siècle  dernier,  par  Gabriel  Martin  et  par  les  Le  Bure,  sera  maintenue 
avec  fermeté.  Gardons-nous  bien  de  prendre  pour  modèles  les  catalogogra- 
phes  anglais  qui  adoptent  Tordre  alphabétique,  mais  en  le  subordonnant  au 
format,  de  sorte  que  les  in-8,  les  in-4,  les  in-f»,  s'enchevêtrant  dans  des 
vacations  successives,  établissent  une  véritable  confusion  qui  rend  les 
recherches  à  peu  près  impossibles  et  qui  inspire  aux  bibliophiles  français 
l'éloignement  le  plus  prononcé. 

—  A  propos  de  deux  monuments  funéraires  de  Tépoque  des  dolmens,  fouil- 
lés aux  environs  de  Mantes,  à  Dennemont  et  aux  Mauduiis,  M.  de  Maulde 
arrive  à  établir,  dans  les  Nouveaux  documents  archéoloqiques  (Paris,  Dumou- 
lin, i874.  In-8  de  150  p.  avec  de  npmbreuses  gravures  intercalées  dans  le 
texte),  que  les  premiers  Gaulois  étaient  originaires  de  la  Chaldée,  que  leurs 
mesures  dérivaient  de  la  coudée  ;  il  étudie  aussi  le  symbolisme,  mais  de  ma- 
nière à  laisser  voir  qu'il  laisse  Je  champ  libre  à  son  imagination,  et  termine 
par  dire,  lui  aussi,  son  mot  sur  le  drapeau.  Je  ne  puis  deviner  si  le  nom  de 
1.  de  Maulde  PI.  cache  un  vieil  érudit,  un  jeune  commençant,  un  auteur 
ou  une  auteur;  mais  ce  que  je  puis  affirmer,  c'est  que  la  personne  qui  a 
rédigé  cette  brochure  a  beaucoup  lu,  beaucoup  observé,  sans  peut-être  se 
préoccuper  de  mettre  de  Tordre  et  de  la  critique  dans  ses  idées. 

—  Sous  ce  titre  un  acrostiche  historique  du  treizième  siècle  découvert  et  publié 
pour  la  première  fois,  par  Achille  Jubinal,  ex-professeur  de  faculté,  ancien 
député  (Paris,  imp.  Alcan-Lévy,  1875),  l'auteur  révèle  une  petite  par- 
ticularité qui  intéresse  notre  histoire  littéraire  du  moyen  âge  ;  Adenez, 
surnonmié  le  roi  (ou  Adam  le  roi),  poète  fécond,  auteur  d'Ogier  le  Danois, 
de  Berte  aus  grans  pies,  écrivit  aussi  le  roman  de  Cleomades,  Il  dit  que  deux 
dames,  dont  il  ne  veut  parler*  qu'ouvertement,  lui  racontèrent  cette  dernière 
histoire,  et  lui  commandèrent  de  la  mettre  en  vers.  Quelles  étaient  ces 
dames?  On  n'avait  aucune  certitude  à  cet  égard.  M.  Jubinal,  en  lisant  avec 
attention  le  poème  de  Cleomades,  a  rencontré  un  passage  de  vingt-quatre  vers, 
dont  la  première  lettre  de  chacun  d'entre  eux  donne  un  des  éléments 
d'acrostiche  parfaitement  clair  :  La  Eeisne  de  France  Marie,  Madame 
Blanche.  Il  s'agit  évidemment  de  la  reine  Marie  de  Brabant.  Quant  à  Madame 
Blanche,  le  nom  n'est  pas  assez  nettement  indiqué  pour  qu'on  puisse  décider 
entre  Blanche,  sœur  de  Robert  II,  et  Blanche,  fille  de  saint  Louis,  mariée  à 
l'infant  d'Espagne. 

—  Nous  signalons  tout  particulièrement  à  nos  lecteurs  Touvrage  que 
M.  Buchot  de  Kersers  consacre  à  la  statistique  monumentale  du  Cher,  par 
cantons,  et  dont  h  première  livraison  vient  de  paraître  (StaHstique  monu- 
mentale du  département  du  Cher,  canton  des  Aix-d'Angillon,  Paris,  V«  A. 
More],  1875,  in-4  de  84  p.  et  23  pi.).  Le  fascicule  concerne  les  communes  des 
Aix,  d'Aubingiies,  de  Brécy,  de  Moroguet,  de  Parasdy,  de  Riaus,  de  Saint- 
Céob,  d»  Saiut-Germain-dn -Puits,  de  Saint-Michel  de  Volanges,  de  Sainte- 
Solange  et  de  Soulangis.  C'est  un  inventaire  complet  et  fait  avec  goût  et 
éinidition  de  toutes  les  richesses  archéologique»  du  canton  des  Aix-d'Angil- 
lon. Les  planches  sont  très-bonnes,  et,  comme  le  texte,  font  honneur  à  M.  B. 
de  Kersers  qui  manie  également  bien  le  crayon  et  la  plume.  Lorsque  plu- 
sieurs cantons  auront  paru,  le  Polybiblion  consacrera  un  article  spécial  à 
cet  ouvrage  important  dont  l'auteur  trouvera  sans  doute  des  imitateurs  dans 
d'autres  départements. 

—  Le  dernier  numéro  de  la  Biblioiheca  sacra  contient  un  article  du  Rev. 
Sclah  Merril,  sur  les  Monuments  assyriens  et  babyloniens  d^Amérique. 

—  Sous  ce  titre  :  Souvenirs  de  la  vieille  France,  Les  Sociétés  de  tir  avant 


—  90- 

1780  (Amiens,  1875.  In«8  de  1S2  p.  et  9  pi.)  M.  Aug.  Janvier,  auquel  on  doit 
de  curieuses  études  sur  l'histoire  militaire  de  la  Picardie,  yient  de  retracer 
le  tableau  de  rexisteace  des  Compagnies  d'archers  et  d'arquebusiers  qui  ont 
joué  un  rôle  si  important  dans  nos  villes  du  nord  de  la  France  au  moyen 
ftge  et  même  jusqu'à  la  Révolution.  L'auteur  dépeint  les  réjouissances  et  les 
cérémonies  auxquelles  donnait  lieu  la  célébration  des  prix  provinciaux  et 
termine  par  des  détails  curieux  sur  la  suppression  de  ces  Compagnies 
en  i790.  A  de  M. 

—  Nous  reproduisons  volontiers  la  note  suivante,  qui  nous  est  communi- 
quée :  (c  M.  N.  Rauls,  attaché  au  secrétariat  de  TAcadémie  royale  des  sciences, 
place  du  Musée,  i,  k  Bruxelles,  se  proposant  de  faire  publier  un  ouvrage 
portant  pour  titre  :  Didionnaire  universel  des  académies,  sociétés  savantes, 
observatoires,  universités,  PMsées,  archives,  bibliothèques,  jardins  botaniques  et 
ioologiques,  revues  et  journaux  périodiques,  etc.,  ou  catalogue  méthodique  de 
tous  les  établissements  et  de  toutes  les  publications  qui  concourent  au  progrés 
des  sciences,  des  lettres  et  des  arts,  a  Thonneur  de  recourir  à  Tobligeance  de 
MM.  les  présidents,  directeurs,  administrateurs,  secrétaires,  bibliothécaires, 
rédacteurs,  afin  d*obtenir,  dans  la  mesure  du  possible  et  en  ce  qui  concerne 
les  établissements  qu*ils  dirigent,  des  réponses  aux  demandes  de  renseigne- 
ments énoncées  ci-aprés  :  —  1<>  Le  titre  de  rétablissement  ou  de  la  Revue  ? 

—  2*»  Date  de  la  fondation,  création,  etc.  ?  —  3°  Son  but  ?  —  4*^  Composition 
du  bureau  (les  titres  seuls}  7  —  5<>  Siège  ou  local  avec  Tadresse  exacte  ? 

—  6®  Concours,  prix,  etc.  ?  —  7*  L'établissement  possède-il  :  bibliothèque, 
archives,  musées,  cabinet  de  médailles  ou  d'antiquités,  observatoires, 
laboratoires  ?  —  8*  Publications  :  Le  nombre  et  le  genre  (bulletin,  revues, 
annales  ou  mémoires).  Le  nombre  de  volumes  publiés  depuis  la  fondation. 
Le  moyen  le  plus  facile  de  se  procurer  ces  publications,  soit  par  achat,  soit 
par  échange.  Le  prix  par  volume  ou  par  abonnement  ?  —  9®  Tous  autres 
renseignements  utiles  et  qui  ne  sont  pas  compris  dans  les  demandes  précé- 
dentes. 

N.'B.  —  Prière  à  MM.  les  secrétaires  et  rédacteurs  de  vouloir  donner  de  la 
publicité  à  cette  note,  afin  d'avancer  l'impression  du  travail,  auquel  elle  se  rap- 
porte. — Pour  les  revues  et  journauXyl'envoi  d'un  numéro  servira  de  réponse. 

—  On  vient  de  publier  à  Rome  une  brochure  intitulée  :  CommenMrazicne  di 
Maria  Armando  (sic  pour  Amando)  Pasquale  d'Avezac  fetta  cUla  Societa 
geografica  italiana  dal  socio  Enrico  Narducci  nella  Tomata  del  29  marzo  i875 
(brochure  de  17  pages,  in-8).  Un  digne  honunage  y  est  rendu  à  celui 
que  M.  Narducci  appelle  le  Nestor  des  sciences  géographiques,  et  les 
éminentes  qualités  de  l'homme  n'y  sont  pas  moins  louées  que  les  éminentes 
qualités  de  l'érudit.  Je  crois  devoir  appeler  l'attention  des  bibliographes 
sur  les  huit  dernières  pages  de  cette  brochure,  qui  renferment  le  catalogue 
complet  des  travaux  de  M.  d'Avezac  rangés  sous  97  n'*  et  compris  entre  les 
années  i823  {Essais  historiques  sur  le  Bigorre,  2  vol.  in-8)  et  i874  (Aperçus 
historiques  sur  fa  rose  des  vents,  brochure  in-8).  T.  de  L. 

—  The  Academy  nous  apprend  que  M  W.  Wartkiss  Lloyd  vient  de  terminer 
l'histoire  détaillée  des  arts  et  de  la  politique  de  la  Grèce  durant  la  période 
qui  s'écoula  entre  les  guerres  persiques  et  la  guerre  du  Péloponèse,  c'est-à- 
dire  entre  les  histoires  d'Hérodote  et  de  Thucydide.  Cet  ouvrage  va  paraître 
à  Londres  sous  le  titre  général  de  Stéc^  de  Péridés,  en  2  volumes. 

—  Le  même  Recueil  annonce  que  le  4*  fascicule  des  fascicules  de  manus« 
crits  publiés  par  la  PalœographiMl  Society,  vient  d'être  distribué  aux  sous- 
cripteurs. Il  se  compose  de  12  planches,  parmi  lesquelles  on  remarque  les 
spécimens  d'un   psautier  grec,  écrit  sur  papyrus  au  quatrième  ou  cin- 


—  9i  — 

qnième  aiôde»  da  BriH$h  Muséum  ;  de  THomère  de  la  bibliothèque  Ambroi- 
sienne  de  Milan,  orné  de  miniatures,  probablement  du  cinquième  siècle  ; 
des  lettres  et  sermons  de  saint  Augustin,  de  notre  bibliothèque  Nationale, 
manuscrit  sur  papyrus  et  sur  vélin  du  sixième  ou  septième  siècle  ;  d'un 
curieux  manuscrit  en  caractères  visigoths,  de  Tan  il09,  renfermant  un 
commentaire  sur  TApocalypse,  et  appartenant  au  Briiish  Muséum. 

—  La  maison  Dûnimler  de  Berlin  va  faire  paraître  un  ouvrage  du  docteur 
Cari  Abel  sur  la  grammaire  et  la  lexicologie  des  Égyptiens.  L'auteur  s'est 
surtout  attaché  à  la  période  copte  de  la  langue  égyptienne.  D'après  ce  qu'on 
connaît  du  livre,  il  serait  appelé  &  faire  une  révolution  dans  cette  étude.  Le 
Dr  Abel,  par  exemple,  prouve  l'emploi  de  voyelles  pour  changer  la  signifi- 
cation des  mots,  quand,  jusqu'ici,  les  voyelles  ont  été  regardées  comme  entiè- 
rement inutiles  dans  cette  langue. 

—  Nous  lisons  dans  The  Athenœum^  que  la  bibliothèque  de  William  Stuart, 
dont  la  vente  a  été  faite  à  Londres,  dans  le  coujrant  de  juin,  renfermait  entre 
plusieurs  raretés  bibliographiques,  un  exemplaire  de  la  1'*  édition  des 
QQuvres  de  saint  Thomas  d'Aquin,  en  21  vol.  in-folio,  imprimé  sur  vélin,  k 
Ffome,  en  1570.  Il  fut  offert  au  Pape  Pie  II,  qui  en  lit  présent  au  roi 
d'Espagne  Philippe  II.  Ce  prince  le  plaça  dans  la  bibliothèque  de  l'Escurial, 
d'où  il  fut  enlevé  par  les  Français  et  transporté  en  Angleterre.  Il  a  été 
vendu  190  livres  sterling  (4,750  fr.). 

—  n  est  question  à  Londres  de  se  procurer,  au  moyen  d'une  souscription, 
la  somme  nécessaire  (on  parle  de  3,000  livres  sterling)  pour  acquérir  et  pla- 
cer dans  un  des  dépôts  nationaux  la  collection  des  dessins  et  œuvres  origi- 
nales du  célèbre  caricaturiste  et  illustrateur  Gruikshank,  artiste  à  peine 
connu  en  France. 

—  Un  Anglais,  M.  C.  Stewart,  vient  de  publier,  à  Londres,  un  volume  inti- 
tulé :  Correspondance  internationale  au  moytsn  des  nombres.  C'est  une  tenta- 
tive à  sgouter  à  tant  d'autres  ayant  pour  but  de  résoudre  le  problème  d'une 
langue  universelle.  L'auteur  fait  observer  que  du  moment  que  les  chifires 
sont  uniformes  chez  les  diverses  nations,  il  ne  s'agit  que  d'exprimer  par  des 
nombres  convenus,  les  mots  les  plus  usuels  dans  les  divers  idiomes,  pour 
arriver  à  s'entendre  facilement.  L'idée  est  bonne,  mais  sa  réalisation  n'est 
pas  exempte  de  difficultés  ;  observons  d'ailleurs  qu'il  a  déjà  été  fait,  en  ce 
genre,  quelque  chose  de  fort  utile  au  moyen  du  Code  maritime  international 
des  signaux.  Grâce  à  l'emploi  de  pavillons  sur  lesquels  sont  inscrites  diverses 
lettres,  on  forme  des  mots  qui  correspondent  à  tel  ou  tel  chiffre  dans  un 
vocabulaire  spécial  ;  de  cette  façon,  les  na\ires,  soit  lorsqu'ils  en  rencontrent 
un  autre  en  pleine  mer,  soit  lorsqu'ils  veulent  se  mettre  en  rapport  avec  les 
sémaphores  du  littoral,  échangent  très-facilement  ce  qu'ils  ont  à  se  dire. 
Grâce  à  ce  procédé,  un  capitaine  russe  correspond  avec  un  français,  un 
norwégien  avec  un  portugais.  Il  y  a  certainement,  en  partant  de  cette 
donnée,  quelque  chose  à  faire  pour  les  conununications  sur  terre,  mais  de 
fortes  études  sont  encore  nécessaires  avant  que  le  problème  n'ait  reçu  sa 
solution,  avant  qu'un  résultat  pratique  n'ait  été  obtenu. 

—  M .  Dorange  vient  de  publier,  aux  frais  de  la  municipalité  de  la  ville, 
le  Catalogue  descriptif  et  raisonné  des  manuscrits  de  la  Bibliothèque  de  Tours, 
une  d^  plus  riches  en  manuscrits  que  possède  la  France. 

—  M.  l'abbé  Maynard,  chanoine  de  Poitiers,  l'éminent  auteur  des 
travaux  sur  Saint  Vincent  de  Paul  (4  vol.)  et  sur  Voltaire  (2  vol.),  prépare 
la  publication  d'un  ouvrage  intitulé:  J.  CréHneau-Joly,  sa  vie  religieuse, 
politique  et  littéraire  d*aprés  ses  mémoires,  sa  correspondance  et  autres  docu- 
ments inédits,  qui  paraîtra  chez  Didot. 


—  92  — 

Publications  nouvelles.  —  Jésus-Christ,  conférences,  par  l'abbé  Ch.  dtt 
Place  (in-8,  Durand).  —  Droits  de  Dieu  et  les  idées  modernes,  par  Tabbé  Fran- 
çois Chesnely  vicaire  général  de  Quimper  (gr.  in-8,  Oadin).  —  La  Question 
protestante,  par  G.  Romain  (in-8,  Palmé).  —  Lettres  spirituelles,  par  le  R.  P. 
Lejenne,  revnes  par  E.  B.  Fressencourt  (in-12,  Palmé).  —  Discours  de  Notre 
Saint-Pére  le  Pape  Pie  IX,  recueillis  et  publiés  pour  la  première  fois,  par  le 
R.  P.  D.  Pasquale  de  Franciscis  dei  Pii  Operarii.  T.  !•'  (in-8,  A.  Le  Clere). 

—  Les  Plaidoyers  civils  de  Démosthène,  par  R.  Dareste  (2  vol.  in- 12,  Pion).  — 
Des  Cours  d'eau  navigables  et  flottables,  par  Alf.  Plocque  (2  vol.  in-8,  Durand). 

—  Qiuxstiones  philosophicœ,  auctore  Sylvestro  Mauro,  S.  J.  Presbytero  (T.  !•». 
In-8,  Le  Mans,  Leguicbeux-Gallienne).  —  De  l'éthique  de  Spinosa,  par  Léon 
de  Montbeillard  (in-8,  Picbon).  —  Les  Conflits  de  la  science  et  de  la  religion, 
par  Draper  (in-8.  Germer  Baillière).  —  Le  Matérialisme  contemporain,  par  P. 
Janet  (in- 18,  Germer  Baillière).  —  La  Loi  absolue  du  devoir  et  la  destinée 
humaine,  par  J.  Rambosson  (in-8,  Didot).  —  Le  Crime  et  la  folie,  par  Maud- 
sley  (in-8.  Germer  Baillière).  —  L'Habitude  et  l'instinct,  par  Alb.  Lemoine 
(in-42,  Germer  Baillière).  —  Les  Fermentations,  par  Schùtzenberger  (in-8, 
Germer  Baillière).  —  Le  Métré  international  définitif,  par  W.  de  Fonvielle 
(in-18,  G.  Masson).  —  Notice  sur  un  autel  antique  dédié  à  Jupiter,  par  Tabbé 
J.  J.  L.  Barges  (in-8,  Leroux).  —  Corot,  souvenirs  intimes^  par  H.  Dumesnil 
(in-8,  Rapilly).  —  Le  Département  des  estampes,  à  la  B^liothéque  nationale, 
par  le  vicomte  H.  Delaborde  (in-12.  Pion).  — Le  Musée  du  Conservatoire  natio- 
nal de  musique,  par  G.  Ghouquet  (in-8,  Didot).  —  La  Chanson  de  Roland,  texte 
critique,  traduction  et  commentaire,  par  Léon  Gautier  (in-8,  avec  4  eaux- 
fortes,  Mame).  —  Le  Dit  des  rues  de  Paris  (1300)  de  Guillot,  par  Edg.  Mareuse 
(in-18,  Lib.  générale).  —  Etudes  sur  le  Péloponése,  par  E.  Beulé  (in-12,  Didot). 

—  Histoire  de  l'Eglise  catholique  en  France,  par  Mgr  Jager  (T.  XX.  In-8,  A.  Le 
Clere).  —  Histoire  des  persécutions  de  l'Eglise  jusqu'à  la  fin  des  Antonins,  par 
B.  Aube  (in-8,  Didier).  —  Histoire  de  saint  Bernard  et  de  son  siècle,  par  le  R. 
P.  Th.  Ratisbonne  (2  vol.  in-i2,  Palmé).  —  Etudes  sur  les  temps  primitifs  et 
l'ordre  de  Saint-Dominique,  par  le  R.  P.  A.  Danzas  (T.  m.  In-8,  Poitiers, 
Oudin).  —  Rivalité  de  François  P'  et  de  Charles-Quint,  par  M.  Mignet  (2  vol. 
in-8,  Didier).  —  La  Mort  de  Louis  XVI,  par  A.  Du  Chatellier  (in-8,  A.  Picard). 

—  Le  Parlement,  la  Cour  et  la  Ville  pendant  le  procès  de  Robert-François 
Damiens,  publié  par  G.  d'HejUi  (in-i8,  Lib.  générale).  —  Correspondance 
inédite  de  Stanislas-Auguste  Poniatowski  et  de  Mme  Geoffrin  (4764-1777),  pré- 
cédée d'une  Etude  sur  Stanislas-Auguste  et  Mme  Geoffrin  et  accompagnée  de 
nombreuses  notes ,  par  Charles  de  Mouy  (in-8 ,  Pion).  —  StoffUt  et  la 
Vendée  (in-18.  Pion).  —  La  Chouannerie  du  Maine,  par  Tabbé  Pau- 
louin  (3  vol.  in-18,  Le  Mans,  Monnoyer).  —  Histoire  de  la  Ville  et  de  tout 
le  diocèse  de  Paris  (T.  IV.  !'•  livraison,  in-8,  Durand).  —  La  guerre  au  jour  le 
jour  (1870-1871),  par  le  baron  A.  Du  Casse  (in-8,  Dumaine).  —  Histoire  du 
traité  de  Francfort  et  de  la  libération  du  territoire  français,  par  J.  Valfrey 
(2  vol.  in-8,  Amyot).  —  Vie  du  R.  P.  Captier,  par  le  R.  P.  Reynier  .(in-12. 
Albanel).  —  Ma  Mère,  souvenir  de  sa  vie  et  de  sa  sainte  mort,  par  Mgr  de  Ségur 
(in-18,  Tolra).  —  Nouvelles  lettres  de  Mme  Swetchine,  publiées  par  M.  le  mar- 
quis de  la  Grange,  membre  de  l'Institut  (in-8,  Amyot).  —  Histoire  de  la  Res- 
tauration, par  Louis  de  Vielcastel  (T.  XVII.  Gr.  in-8,  Michel  Lévy).  —  Histoire 
de  la  guerre  civile  en  Amérique,  par  le  comte  de  Paris  (T.  IIl  et  IV.  2  vol. 
in-8,  Michel  Lévy).  —  Atlas  pour  servir  à  l'histoire  de  la  guerre  civile  en  Amé- 
rique (in-8,  Michel  Lévy).  —  L'Ancien  Orient,  études  historiques,  religieuses 
et  philosophiques  sur  l'Egypte,  la  Chine,  l'Inde,  la  Perse,  la  Chaldée  et  la 
Palestine,  depuis  les  temps  les  plus  reculés,  par  Léon  Carre  (T.  m  et  IV. 


—  93  — 

2  vol.  in-8,  Michel  Lévy).  —  C*'A.  Sainte-Beucef  sa  vie,  ses  CBUvreSj  par  le 
vic5omte  d*Haussonville  (gr.  in-8,  Michel  Lévy).  —  Un  mot  sur  le  suffrage  uni- 
versel^ par  H.  Nadal  (in-8,  C.  Dillet).  —  La  tentative  anti<atholique  en  Angle- 
terre,  on  Topuscule  du  T.-A.  M.  Gladstone,  membre  du  Parlement  (in-8, 
Montpellier,  J.  Calas).  —  Mille  Trente,  par  Mathieu  Witche  (in-12,  Dillet).  -1 
Mademoiselle  de  Fetitvallon,  par  Mathieu  Witche  (in-12,  Dillet).  —Petite  sœur, 
par  Et.  Marcel  (in-12,  Dillet).  —  les  Baux  en  Provence,  par  M.  C.  (in-12, 
Avignon).  —  Le  Phylloxéra,  moyens  proposés  pour  le  détruire.  P.  Naudin. 
Dijon,  1875,  in-18.  —  La  Bourgogne  pendant  la  guerre  et  l'occupation 
allemande  de  1870-1871,  d'après  la  Gazette  officielle  de  Carlsruhe,  traduction 
du  docteur  Louis  Marchant.  Dijon,  1875,  in-8  de  290  p.  —  Le  Jugement  der- 
nier, monographie  du  rétable  de  Thôpital  de  Beaune,  par  l'abbé  Boudrot. 
Beaune,  1875,  in-4,  orné  de  deux  eaux-fortes. 


QUESTIONS  ET  RÉPONSES. 


QUESTIONS. 

Voler  les  tours  de  IVotre- 
I>aiae.  —  Dans  l'orageuse  discus- 
sion sur  l'élection  des  Gôtes-du-Nord 
(séance  du  29  juin],  M.  le  baron  de 
Janzé  a  cité  le  mot  fameux  :  ft  Si  l'on 
m'accusait  d'avoir  volé  les  tours  de 
Notre-Dame,  je  commencerais  par  me 
sauver.  »  De  qui  est  ce  mot?  On  l'a 
donné  à  Beaumarchais,  mais  Beau- 
marchais n'a  fait  fjue  se  l'approprier, 
car  le  mot  est  bien  plus  ancien,  et 
qnelc{ues-uns  ont  assuré  qu'il  avait 
été  dit  par  un  magistrat  du  seizième 
siècle.         Un  Curieux  de  province. 

Une  cltAllon  de  Mailer.  — 

Le  H.  P.  Verdière,  de  la  Compagnie 
de  Jésus,  dans  un  article  des  Etudes 
religieuses  (juin  1875,  p.  816)  sur  le 
Saint  Louis,  de  M.  Wallon,  a  fait  la 
citation  suivante  :  «  Ce  sont  les  armes 
qui  fondèrent  l'empire  en  France, 
mais  c'est  la  vertu  qui  affermit  la 
rovauté  en  France.»  —  Où  l'historien 
allemand  a-t-il  dit  cela  ?  X. 

Ghabanne»  et  Charlea  VII. 

~  Est-il  vrai,  comme  on  le  raconte 
dans  la  Biographie  universelle,  que 
Charles  Vil  ayant,  un  jour,  salué  An- 
toine de  Chabannes,  comte  de  Dam- 
martin,  du  titre  de  Capitaine  des 
icorcheurs,  ce  dernier  lui  répondit  : 
c<  Je  n'ai  jamais  écorché  que  vos  en- 
nemis, et  il  me  semble  que  leur  peau 
vous  a  fait  plus  de  profit  qu'à  moi  ?  » 
Est-il  vrai,  comme  on  l'assure  encore 


dans  le  même  ouvrage,  qu'irrité  du 
propos  du  roi,  Chabannes  s^en  vengea 
en  engageant  le  dauphin  à  se  joindre 
aux  mécontents  dans  la  guerre  de  la 
Praguerie  ?  Tout  cela  me  semble  bien 
contestable,  et  je  crains  fort  que  les 
auteurs  de  l'article  (MM.  de  Villenave 
et  B.  G.  T.  —  quelles  sont  ces  initia- 
les ?  )  n'aient  consulté,  sur  ce  point, 
plutôt  des  recueils  à  historiettes  que 
des  livres  d'histoire.  T.  de  L. 

Ijo  Saonnola*  —  J'ai,  entre  les 
mains,  un  almanach  intitulé  :  L'Ami 
du  foyer,  almanach  du  Perche  et  du 
Saonnoiê,  par  Perchon  (Mortagne  et 
Chai*tres,  1874).  Je  cherche  vaine- 
ment, et  je  ne  suis  pas  le  seul,  quel 
est  le  pavs  (pii  répond  au  Saonnois  ? 
Qui  voudrait  m'éclairer  ?       R.  S. 


raretés'  blbllogppa* 
pbiquea.  —  Je  désirerais  avoir 
des  renseignements  sur  deux  raretés 
bibliographiques  que  j'ai  vainement 
cherchées  dans  les  principales  biblio- 
thèques de  Pari^,  et  que  Brunet 
signale  ainsi  :  Vie  de  Mgr  S.  Méen, 
broch.  de  4  feuilles,  sans  nom,  ni 
lieu,  ni  date.  —  ViedesaiintManoux, 
évesque  breton,  par  Sébastien.  Mar- 
seille, Moulin,  1806.  In-12.     D.  P. 

RÉPONSES. 

I^e  pofite  Gilbert  (Xm,  479).— 
n  existe  plusieurs  versions  sur  sa  fin. 
L'une  d'elles  représente  le  poète  dans 


—  94  — 


la  situation  la  plus  misérable  et 
mourant  à  Thôpital  après  avoir  avalé 
une  petite  clé.  D'après  un  livre  pu- 
blié à  Metz,  en  1848  :  Poètes  et  rvtnan- 
eiers  de  la  Lorraine,  par  le  comte  de 
Puymaigre,  Gilbert  aurait  joui,  au 
contraire,  d'une  certaine  aisance  ;  il 
aimait  beaucx)uç  l'exercice  du  cheval, 
fit  une  chute  qui  nécessita  l'opération 
du  trépan,  et,  pour  la  pratiquer  on 
le  ramena,  non  chez  lui,  mais  à  l'hô- 
tel-dieu  où  il  mourut.  M.  de  Lescure, 
dans  un  récent  travail  (Journal  officiel 
du  27  juin  1875,  p.  4680),  a  réuni  ces 
détails  à  ceux  qui  sont  le  plus  géné- 
ralement donnés  sur  la  fin  du  poète  ; 
à  la  suite  de  cette  dangereuse  opé- 
ration, saisi  d'un  accès  de  fièvre,  il 
avala  la  petite  clé  dont  on  a  tant 

garlé,  elle  resta  dans  l'œsophage,  et 
ilbert  ne  tarda  pas  à  succomber. 
D'après  ces  diverses  versions,  qui  peu- 
vent très-bien  se  fondre  en  une  seule, 
le  poète  est  donc,  en  effet,  mort  à 
l'hôpital,  mais  il  n'j  avait  été  conduit 
qu'accidentellement.  Il  y  a,  d'après 
cela,  quelque  chose  &  modifier  aans 
la  légende  de  Gilbert,  et  il  parait 

S  d'il  en  est  de  même  pour  celle  de 
alfilàtre,  que  Gilbert  lui-même  a 
contribué  à  créer  en  écrivant  ce  vers 
bien  connu  : 

La  faim  mit  aa  tombeau  Malfilàtre  ignoré! 

H.  B. 

l^es     HIstorioifraplie»    de 
Prance  en  titre  <l*oiBee  (Xm, 

556 j.  —  M.  J.  Desnoyers  n'a  pas  ]pn- 
blié,  et  malheureusement,  je  le  crains 
bien,  ne  publiera  jamais  le  travail 

gu'il  nous  avait  promis.  Il  existe,  à  la 
ibiiothèque  nationale,  dans  le  fonds 
français,  un  manuscrit  où  sont  réunis 
divers  documents  et  renseignements 
relatifs  aux  historiographes  de  France. 
Ce  manuscrit,  inscrit  sous  le  n^  14,027, 
est  intitulé  :  Becherchei  sur  les  auteurs 
qui  09it  écrit  de  F  histoire  de  France  par 
commission  des  princes  sous  le  régne  de 
qui  Us  vivaient,  T.  de  L. 

CSIémeMice  I»«iui*e  a»t-elle 
vécu?  mil,  556.)  —  Je  ne  le  crois 

f)as,  et  m  est  avis,  au  contraire,  que 
'on  est  arrivé,  d'une  manière  cer- 
taine &  prouver  que  ce  ne  fut  jamais 
qu'un  brillant  fantôme.  Qu'il  me  soit 
permis  ici  de  renvoyer  la  question- 
neur à  une  note  de»  Vies  aes  poètes 


gascons,  par  Guillaume  Golletet  (1866, 
in*8),  où  j'ai  essayé  de  réunir  (p.  43- 
96),  les  principaux  arg^uments  des 
érudits  qui  ont  nié  l'existence  de  la 
patronne  des  Jeux  floraux.  T.  de  L. 
On  peut  lire  à  ce  sujet,  un  in- 
téressant article  dans  la  Beoue  de 
Gascogne,  1865,  page.  481.  D'après 
des  Toulousains  très-érudits,  la  fa- 
meuse Clémence  n'a  pas  existé.  Le 
tombeau  qu'on  honorait  dans  l'é- 
glise de  la  Daurade  n'était  pas  le  sien. 
Son  prétendu  testament  dont  les  li- 
bérales dispositions  ont  été  gravées 
sur  une  plaque  de  bronze,  n'est  re- 
vêtu d'aucune  authenticité.  C'est  seu- 
lement en  1513  que,  pour  la  première 
fois,  il  a  été  parlé  de  cette  fondatrice 
des  Jeux  floraux  que  D.  Vaissete  fait 
vivre  dans  les  premières  années  du 

Quatorzième  siècle.  Les  Jeux  floraux 
atent  de  1323,  et  ont  eu  pour  or- 
ganisateurs  sept  habitants  de  Tou- 
louse. Cet  article,  auquel  je  renvoie 
les  lecteurs  du  PolyHUion,  est  d'an 
écrivain    qu'ils    connaissent    bien, 
M.  Tamizey  de  Laroque.  On  peut  en- 
core consulter  sur  cette  question  : 
Mémoire  sur  Vkistoire  du  hanguedoc^ 
par  G.  Catel,  Toulouse,  1633.  L'Ori- 
gine  des  Jeuxfionxux,  par  P.  de  Caxe- 
neuve,  1629.  Les  Annales  deTouUmsSp 
par  Lafaille;  un  Mémoére  de  M.  Nou- 
fet  :  De  dame  Clémence  Isaure  substituée 
à  Notre-Dame  la  Vierge  Marie,  ootnme 
patronne  des  Jeux  littéraires  de  Tou- 
louse; un  travail  de  Cambouliu  sur 
la  renaissance  de  la  poésie  proven- 
çale; l'examen  de  ce  travail,   par 
H.  P.  Mever  :  Bibl.  de  l'Ecole  dus  chartes, 
tome  XXV,  page  51  ;  le  Cabinet  histo- 
rique, 1857,  tome  Ul,  page  285.  On 
lit  dans  ce   recueil   une    lettre  de 
M.  de  Ponsan  à  D.  Vaissette.  M.  de  Pon- 
san  se  prononce  pour  l'existence  de 
Clémence  Isaure  qui,  suivant  lui,  eut 
surtout  pour  adversaires  les  Capi- 
touls  :  «  Animés  contre  k  mémoire 
tt  de  Clémence  Isaure,  parce  que, 
<c  depuis  l'érection  des  Jeux  en  aca- 
«  demie  des  belles-lettres,  ils  n'ont 
«  plus  la  direction  de  la  feste  ou 
«  xestin  public,  à  quoy  on  employoit 
«  alors  la  presque  totalité  des  1,400 
a  francs  lé^és  par  la  fondatrice,  ce 
«  qui  faisoit  une  mangeaille  peipé- 
«  tuelle  pendant  deux  ou  trois  jours, 
«  dans  lliostel  de  ville,  et  fournissoit 
«  une  ooeasion  dt  griveler.  »   Ta.  P. 


—  95  — 


Un  pseudonyme  «le  mada- 

5Coi-nu(XIII,5561.  -M»«  Cornu, 
née  Lacroix,  n'était  pas,  comme  l'ont 
affirmé  quelques  biographes,  la  sœur 
de  lait  de  Napoléon  m.  Elle  ayait  un 
an  de  moins  ^e  lui,  et  était  la  fil- 
leule de  la  reine  Hortense.  La  nour- 
rice de  TEmpereur  était  M"**  Bure. 
C'est  sous  le  pseudonyme  de  Sébas- 
tien Albin  (et  non  pas  sous  celui  de 
Sébastien  de  Saint- Albin),  que  M** 
Cornu  a  publié  les  chants  populaires 
de  rAIlemag[ne  et  les  différents  ou- 
vrages que  cite  le  journal  «  le  Soleil .  » 
Sébastien  était  le  prénom  de  son 
mari,  Albin  venait  de  Tun  de  ses 
prénoms  ;  car  elle  s'appelait  Hortense 
Albine.  M.  T. 

La  réponse  se  trouve  dans  la  notice 
nécrolonque  consacrée  à  Urne  Cornu 
(p.  67).  Outre  cette  livraison  on  peut 
consulter  le  Cataîoçfve  raiionné  de  la 
librairie  française  et  le  Dic^ùmnaire 
des  supercheries  littéraires  dévoilées. 

R.  S. 

Dans  le  Journal  des  Débats  du 
18  juin  1875,  M.  Ernest  Renan  a 
publié,  sur  Mme  Cornu,  un  article 
nécrologique.  Il  j  parle  des  u  pages 
Qu'elle  a  publiées  dans  le  18*  volume 
de  VEncyclopédie  moderne  de  M.  Didot, 
sous  le  pseudonyme  de  Sébastien 
Albin.  »  J.  G. 

RoAtopchlne  et  l*Incendie 
de  Moscou  (XOI.  478,  557.  558). 
—  Rostopchine  a  été  l'auteur  de  l'in- 
cendie de  Moscou;  il  n'y  a,  contre  ce 
fait  avéré,  au'une  seule  objection 
sérieuse  ;  il  l'a  nié  dans  une  bro- 
chure publiée  à  Paris  en  1823.  Le 
comte  A.  de  Ségur,  dans  la  Vie  de 
Rostopchine,  examine  cette  objection 
et  la  résout  d'une  manière  satisfai- 
sante. Voici,  du  reste,  la  liste  des 
principaux  ouvrages  relatifs  à  l'in- 
ccadie  de  Moscou  : 

i.  Prœlamaiion  aux  kabiiants  de 
Moscou,  faite  par  Viatendant  de  la  ville 
et  de  la  prottnce  de  Moseo»*,  Lesseps. 
Moscou»  !•'  octobre  1812,  français  et 
rosse  (Moscou,  1812).  In-fol.  (Russica, 
p.  1406).  —  2.  Ein  Bewohner  Moskwa's 
an  seine  Landsleute,  im  October  1812 
(von  G,  Merkel).  (Un  habitant  de  Mos- 
cou à  ses  compatriotes,  en  octo- 
bre 4812.)  Saint-Pétersbourg,  Dre- 
chtler,  1812.  In-a  de  13  p.  Autres 


éditions.  Riga  :  1812  ;  Mittau,  1813  ; 
Jean  d'Acre,  1813.  (Russica,  M.  857- 
860  ;  Gadaruel,  54).  —  3.  Entretien  d'un 
vieux  habitant  des  environs  de  Moscou, 
avec  un  soldat  français  prisonnier, 
Saint-Pétersbourg,  Pluchart,  1812. 
In-8  de  14  p.  —  4.  Ueber  die  Verbren" 
nung  der  Stadt  Moskau.  Ein  Privât- 
Schreiben  aus  der  russischen  Stadt 
Wladimir,  fSur  l'incendie  de  Moscou 
lettres  écrites  de  Wladimir.  Leipzig, 

1813.  In-8  (Russica,  U.  19).  —  S.Hw- 
torical  sketch  ofMoscow,  London,  1813. 
In-4  (Russica,  S.  1456).  —  6.  (Sdlko- 
wsKi,  J.  A.  M.)  :  An  historical  account 
and  description  ofthe  city  of  Moscow. 
London,  1813.  In-8  (Russica,  S.  3069). 
—  7.  Monument  de  la  présence  des 
Français  en  Russie,  ou  Recueil  d'événe" 
ments  relatifs  à  P(ierre^  J.  (danof), 
habitant  de  Moscou  ;  traduit  du  russe 
par  V.  C.  Saint-Pétersbourg,  Plu- 
chart, 1813.  In-8  de  55  p.  (Russica, 
J.  174  ;  Gadar.,  51).  —  8.  Erreur  de 
Napoléon  en  réjponse  à  ttn  article  du 
Moniteur,  Saint-Pétersbourg,  Plu- 
diart.  In-8  de  34-2  p.  (Russica,  deest, 
Garad.,  55).  —  9.  Rapport  ijpfrétendu) 
du  ministre  de  la  guerre,  (H.  J.  G.  Clar- 
ke),  duc  de  Feltre,  à  S.  M.  Impériale 
et  Royale.  Saint-Pétersbourg,  1813. 
In-8  (Russica,  R.  116;  Gadar.,  57]. 
— 10.  De  Brand  van  Moscou,  s.  1.  n.  a. 
In-1 6  (Russica,  B.  1 845).  —  M .  (Horn). 
Versuch  einer  Darstellung  der  Verbre/h 
nung  und  Plûnderung  Mosku)a*s  durch 
die  PranzosenimSept,  1812.Fonetfiet?i 
Augenzeugen,  (Essai  d'une  description 
de  l'incendie  et  du  pillage  de  Mos- 
cou par  les  Français,  en  septembre 
1812,  par  un  témoin  oculaire).  Saint- 
Pétersbourg,  1813.  In-8.  Traduction 
polonaise.  Wilno,  1814.  In-8.  —  12. 
AUG.  v.  KoTZEBUE.  Moscow's  Verbrau- 
ding,  Amsterdam,  1814.  In-8  (Rus- 
sica, K.  1094).—  {'i,  Portrait  d' Attila 
par  Mme  la  baronne  de  Sta^l-Holstein. 
Paris,  1814'.  In-8.  Non  reproduit  dans 
ses  oeuvres.  Voy.  Journal  des  Débats, 
1814;  Spectateur  français  U  (1815) 
248-256;  Annales  titiéravres  de  Dus- 
sault  y.  (1824)  225-231  ;  BiàHophUe 
belge  ffl  (1868)  26u266.  —  14 
(Georges  Le  Coi^tte  de  La  veau).  Mas- 
cou  avant  et  après  Vincendie,  Paris, 

1814.  2*  édition.  Paris,  18î8.  Traduc- 
tion italienne.  Milano,  1818  (Russica, 
L.  440-442.)  (Gadar.,  39).  —  15. 
Voyage  d'une  dame  française  en  Russie 


—  96  — 


en  18i-2,  témoin  oculaire  de  V incendie 
de  Moscou,  Paris,  1814.  Ia-8  (Russica, 
V.  607;  Gadar.,  45).—  16.  M»«  Fusil. 
L Incendie  de  Moscou ,  la  petite  orphe- 
line de  Vilna,  pcLssage  de  la  Bérésina 
et  retraite  de  Napoléon  jusqu*à  Vilna, 
Londres,  1817.  In-8.  2*  édition.  Lon- 
dres, 1817.  In-8.  2*  édition,  Paris, 
1817.  In-8.  3«  édition.  Paris,  1818. 
In-8.  Souvenir  d'une  actrice^  par 
M™«  Louise  Fusil.  Paris,  Dumont, 
1841.  2  vol.  in-8  de  iv-iv-306  et  iv- 
348  p.  (Russica,  F.  869-872;  Gadar., 
46,  47).  —  17.  (L*abbé  Surugue). 
Lettres  sur  la  prise  de  Moscou  en  1812. 
Paris,  Didot,  1821.  Pet.  in-8  de  44  p. 
À  25  exempL  en  papier  vélin  et 
5  exemplaires  en  papier  ordinaire. 
Lettres  sur  Tincendie  de  Moscou, 
écrites  de  cette  ville  au  R.  P.  Bouret, 
de  la  Compagnie  de  Jésus,  par  l'abbé 
Sumigues  {sic),  2*  édit.  Paris,  Plan- 
ober,  1823.  In  8  de  43  p.  L'abbé 
Frappaz  dans  la  Vie  de  Vaobé  Nicolle 
fParis,  Lecoffre,  1857),  a  publié  une 
lettre  de  Tabbé  Surugue,  sur  l'in- 
cendie de  Moscou.  Le  P.  Gagarin  a 
reproduit  la  môme  lettre  dans  la 
Conversion  d'une  dame  russe  à  la 
foi  catholique.  (Paris,  Douniol,  1863). 
—  18.  GoLTON.  The  coîiflagration  of 
Moscou) f  4*  édit.  London,  1822,  in-8. 
(Russica.  G.  903.)  —  19.  Histoire  de 
la  destruction  de  Moscou  en  1812,  par 
A.  F.  de  B....ch,  traduit  de  l'alle- 
mand par  Breton.  Paris,  1822.  In-8. 
(Russica.  H.  897.  Gadar.  48.)  — 
20.  RosTOPCHiNE.  L'i  vérilé  sur  l'incen- 
die de  Moscou.  Paris,  1823.  In-8. 
1  Russica.  R.  1401.  Gadar^  42.)  Cfr. 
)outourline  :  Hist,  milit.  de  la  cam- 
pagne de  Russie- 1,  369.  Rtvue  encyclop, , 
XVIII  (1823),  161-163,  XXVIII  (1823), 
101-162.  —  21.  Mis  DB  Chambrât. 
Réponse  de  l'auteur  de  l'expédition  de 
Russie  d  la  brochure  de  M.  le  comte  de 
Rostoptchine,  Paris,  1823.  In -8  deiv- 
18  p.  (Russica.  C.  473.  Gadar.  43.) 
Cîv.  Reijue  encycl^.  XX  (1823),  394- 
395.  ->  23.  De  Doxinicis.  Relations 
historiques^  politiques  et  familières  en 
forme  de  lettres  sur  divers  usages^  arts^ 
des  Aujses.  Vol.  1, 2.  Saint-Pétersbourg, 
1824-1825.  In-8,  édit.  itaUenne. 
Vienne,  1836.  (Lettres  XIV  et  XV.) 
(Russica.    D.    764.   Gadar.  52.)  — 


24.  Denis  Davydof.  Examen  de  trois 
articles  insérés  dans  les  Mémoires  dé 
Napoléon  (en  russe).  Moscou,  1825. 
In-8,  65  p.  (Gadar^53.)  Cfr.  Bulletin 
des  sciences  militaires ,  V  (1828),  49-50. 

—  25.  Nempde.  Opinion  sur  Vincendie  de 
Moscou.  Paris,  1826,  in-8.  (Russica. 
N.  312.  Gadar.  49.)  —  26.  Entrée  des 
Français  à  Moscou.  1812.  (Paris,  1831.) 
160.  (Russica.  E.  346.)  —  27.  Do- 
MERGUE  (Armand).  La  Russie  pendant 
les  guerres  de  l'Empire.  2  vol.  Paris, 
1835,  in-8.  (Russica.  D.  761.  Gadar. 
50.)  Traduction  hollandaise.  Âmster* 
dam.  1836.  2  vol.  in-8.  —28.  (Polto- 
RATZKi,  Serge.).  Rostoptchine.  1765- 
1826.  (Hombourg),  1854.  In-8. 
(Russica.  P.  975).  —  29.  Aaret  1812 
eller  Moshous  Brand  og  den  Franske 
storarmees  UndergangiRussland  4812. 
Efter  det  Franske  ved  A.  G.  v.  Bûlow. 
Kjobenhavn,  1855.  In-8.  (Russica. 
A.  13).  —  30.  ScHNXTZLER  (Jean  Henri). 
La  Russie  en  1812.  Rostoptchine  et  Kou- 
iouzofl.  Paris,  1863.  In-8,  2«  édit. 
Paris,  1863.  In-8.  (Russica.  717.  Ga- 
dar. 44.)  Cfr.  Revue  des  deux  Mondes, 
15  septembre   1863.    —  31.   Ségur 

1A.  de).  Vie  du  comte  Rostoptchine. 
*aris,  1871.  —  32.  Gadaruel.  Rela- 
tion du  séjour  des  Français  à  Moscou 
et  de  l'incendie  de  cette  ville  en  1812, 
par  un  habitant  de  Moscou  (le  cheva- 
lier François  d'ITsarn).  Bruxelles,  Oli- 
vier, 1871.  XV,  191.  In-12.  —  Le 
biblioohile  qui  se  cache  sous  le  nom 
de  Gaaaruel,  a  donné,  dans  ce  vo- 
lume (p.  137  et  suiv.),  une  liste  des 
ouvraffes  à  consulter.  Nous  l'avons 
reproduite,  en  la  complétant,  à  l'aide 
du  catalogue  des  ilusstca,  de  la  biblio- 
thèque publique  de  Saint-Péters- 
bourg, et  en  modifiant  l'ordre.  Le 
volume  de  M.  Gadaruel  est  indispen- 
sable à  tous  ceux  aui  veulent  s'occuper 
de  l'incendie  de  Moscou  en  1812. 

J.  G. 

Périssent  les  colonies  plu- 
tAt  qu'un  principe  X  (Xm,  366.) 

—  Je  ne  crois  pas  que  cette  phrase 
ait  été  prononcée  en  1848  ;  elle  n'eût 
été  d'ailleurs  qu'une  réminiscence. 
C'est  en  1789  qu'elle  fut  lancée 
devant  la  Constituante,  et  elle  a  tou- 
jours été,  ce  me  semble,  attribuée  à 
Barnave . 

Le  Gérant,  L.  Sandret. 


SAOrr-QUBNTIM.  —  mPRUrBRIB  JULBS  MODRBAU. 


POLYBIBLION 

REVUE  BIBLIOGRAPHIQUE  UNIVERSELLE 


TRAVAUX  RÉCENTS  D'HAGIOLOGIE 

La  Vie  de$  Saints,  par  Hbwby  db  Riangbt,  édition  abrégée  par  À.  db  Riàncet.  Paris, 
Bachelin,  1874.1a-12  de  534  p.  Prix  :  30  fr.  —  Les  Saintes  du  Paradis,  modèles  de  toutes 
les  vertus,  iiAT  M°>«  de  Sougê,  édition  complétée.  Paris,  Charles  Douniol,  1875. 2  voI.in-12 
de  VE-436  et  ^67  p.  Prix  :  6  fr.  —  Vies  des  Saints  de  l'atelier.  Tonre,  Marne,  1873.  3 
vol.  in-12  de  142,  141  et  143  p.,  avec  3  grav.  Prix  :  1  fr.  50.  —  Les  Saintes  Lé- 
gendes de  l'Enfance, imitées  de  l'sMemand,  par  H.  DB  Bargbul.  Paris,  Lethielleux.  2  vol. 
in-12  de  240  et  230  p.  Prix  :  8  fr.  —  Vie  de  saint  Joseph  (V Etoile  du  xix*  siècle),  parle  R.  P. 
BouVY,  rédemptoriste.  Paris,  Lethielleux,  1874.  in-18  de  x-187p.  Prix  :  2fr. —  Vie  desaint 
Joseph,  d'après  Anne-Catherine  EMMBnicii.  avec  des  considérations ,  pratiques  et  prières,  par 
M.  C.  F.  FouBT,  cnrè-dojen  de  Routot,  chan.honor.  d'Evreux.  Paris,  Donniol,  1872. 
In- 12  de  xvi-464  p.  Prix  :  3  fr.  —  Saint  Antoine  le  Grand,  p^r  Charles  Hello.  Parii, 
Dillet,  1874  in-12  de  280  p.  Prix  :  2  fr.  —  Vie  de  saint  Germain  d'Auxerre,  par  le 
prêtre  Constancb^  traduction  du  P.  Gouilloud.  Paris,  Douniol,  1874.  In- 12  de  xn- 
200  p.  Prix  :  2  fr.—  Histoire  de  saint  Bernard  et  de  son  siècle,  par  le  R.  P.  TMéODORB 
Ratisdonnb.  Huitième  édition.  Paris,  Victor  Palmé,  1875.  2  vol.  în-12  de  xv-384  et 
415  p.  Prix:  6  fr.  —  SùBiéme  Centenaiie,  15  juiUet  1874.  Le  cardinal  saint  Bonaven- 
twre,  évique  d'Albano,  patron  de  la  ville  de  Lyon,,  Sa  vie,  sa  mort  et  son  culte  à  Xyot». 
Lyon,  Josserand^  1874.  In-12  de  xxx-208  p.  Prix  :  2  fr.  ^  La  Vie  admirable  de  notre 
glorieux  père  S.  Pierre  Célestin,  Bar-le-Duc,  imprimerie  des  Célestins,  1874.  In-8  de 
xiv-624  p.  Prix  :  6  fr.  —  La  Vierge  des  campagnes,  ou  Vie  de  la  B.  Oringa,  dite  (7Ar^(tenn«  de 
Saintê^roim,  par  M.  l'abbé  Hbnry,  directeur  général  au  Petit  Sémin'kire  de  Langres. 
Tours,  Â.  Marne,  1870.  ln-12  de  144  p.  Prix:  1  fr.  25.  —  Vie  de  sainte  Catherine 
de  Ricci,  par  le  P.  Batonnb.  Paris,  Poussielgue,  1874.  2  vol.  in-12  de  xxiv-378  et 
388  p.  Prix  :  6  fr.  — Déposition  de  sainte  Chantai  pour  la  canonisation  de  saint  Fran- 
çois de  Sales.  Tours,  Marne,  1874.  In- 12  de  288  p.  Prix  :  1  fr.  10.  —Vie  de  la  Bienheu- 
reuse Marguerite  Marie,  par  l*abbé  Daras.  Paris,  Gaume,  1875.  In-18  de  viit-231  p. 
Prix:  l  fr.  —  La  Vie  admirable  du  Bienheureux  mendiant  et  pèlerin  Benoît  Joseph  Labre, 
par  LÉON  ÂUBtNEAU.  3*  édition.  Paris,  Victor  Palmé,  1875.  Iu-12  de  x-552  p.  avec 
une  gravure.  Prix  :  3  fr.  50.  —  Histoire  du  culte  de  sainte  Philomène,  thaumaturge  du 
XIX*  siècle,  inspircUrice  des  pèlerinages  nationaux,  suivie  d'un  recueil  de  pratiques  de 
dévotion  en  son  honneur,  par  M.  Lonis  Pbtit.  Paris.  Josse;  Langres,  Dangien,  1875. 
In- 12  de  XLVm-382  p.  Prix:  2  fr.  —  Vie  de  la  mère  Thérèse,  fondatrice  de  la  MiséH^ 
corde  de  Laval,  par  labbé  Le  Segrbtain  du  Pati3.  Laval,  1673.  2  vol.  in-12  de  iv- 
380  et  623  p.  avec  un  portrait.  Prix  :  7  fr.  —  Vie  de  la  révérende  mère  Marie .  Mode- 
lêine  Oipoulon,  en  religion  sœur  Victoire,  ursuline,  fondatrice  de  la  congrégation  des 
Soeurs  hospitalières-institutrices  de  Saint-Roch,  par  l'abbé  G.  Penaod.  Paris,  Pous- 
sielgne.  1874.  In-12  de  288  p.  Prix  :  2  fr.  25.  —  Vie  de  la  révérende  mère  saint  Jérôme, 
religieuse  de  la  congrégation  de  Notre-Dame,  chanainesse  régulière  de  SaintAugusHn. 
au  monastère  dit  des  Oiseaus.  Paris,  Jules  Vie;  Ciermont-Ferrand,  Bellet,  1875.  In-8 
dexi-392  p.  et  une  photogr.  Prix  :  6  fr. 

La  vie  des  saints  devrait  former  le  fond  de  nos  bibliothèques,  comme 
les  portraits  des  aïeux  sontrornement  de  nos  appartements.  Au  chrétien 
elle  montre  Tidéal  vers  lequel  il  doit  tendre  et  lui  indique  le  chemin 
à  suivre  pour  l'atteindre  ;  au  moraliste  et  au  philosophe,  elle  offre  la 
matière  de  profondes  méditations;  au  savant  et  à  Thistorien,  elle  fournit 
des  documents  du  plus  haut  intérêt.  C'est  une  des  branches  les  plus 
importantes  de  notre  littérature.  Nous  allons  signaler  quelques- 
unes  des  plas  récentes  publications  de  ce  genre,  en  regrettant  toute- 
fois que  la  moisson  ne  soit  pas  plus  abondante  et  plus  belle. 

AOUT  1875.  T.  XIV,  7. 


-"  98  — 

Si  nous  plaçons  sous  le  titre  d'Uagiohgie  la  biographie  de  per- 
sonnes piçyses  et  des  vies  édifiant^si,  ppys  fi'anteqdans  aucunement 
préjuger  les  décisions  de  rEglise;  nous  avons  seulement  voulu  grouper 
des  travaux  qui  se  ressemblent  et  par  leur  sujet  et  par  l'esprit  qui  les 
anime. 

—  M.  Henry  de  Riancej  avait  publié,  peu  de  temps  avant  sa  niort, 
un  vrai  chef-d'œuvre  de  pi^té  et  d'art,  avec  le  concours  de  M.  Keller- 
hoven.  Son  ûls  a  entrepris  de  mettre  ce  trésor  à  la  portée  de  tous. 
Offrir  aux  familles  un  livre  où  d'admirables  exemples  sont  encadrés 
dans  les  magnificences  de  Tart,  et  qui  demeure  comme  le  trésor  du 
fojer  domestique;  présenter  à  la  fois,  avecles  hautes  et  sagea  médita- 
tions qu'inspirent  la  vie  et  la  mort  des  saints,  les  peintures  par  les- 
quelles l'habileté  contemporaine  continue  les  splendeurs  de  la  minia- 
ture et  de  Tenluminure  des  âges  de  foi,  tel  est  le  but  qui  a  été  ici  visé 
et  atteint. 

— Les  Saintes  du  Paradis^soni  une  nouvelle  édition  d*un  ouvrage  dont 
le  Polybiblion  a  déjà  parlé  (t.  X,  p.  144),  complétée  par  M"^'  de  Bougé, 
par  une  table  alphabétique  des  noms.  C'est  Texécution  d'une  louable 
pensée,  celle  de  réunir  les  vies  des  saintes  de  manière  à  fournir, 
spécialement  aux  femmes,  une  lecture  à  la  fois  intéressante  et  édifiante. 
Les  saints,  sans  doute,  offrent  des  modèles  à  tous  ;  mais  nous  trouvons 
là  un  moyen  de  donner  un  attrait  de  plus  à  des  récits  qui  devraient 
être  la  nourriture  habituelle  de  nos  âmes^  et  c'est  assez  pour  queTau- 
teur  mérite  d'être  loué.  Les  notices  sont  rangées  par  jour  et  par  mois, 
suivant  Tordre  des  fêtes  ;  il  y  en  a  quelquefois  plusieurs  pour  le  même 
jour;  elles  ne  dépassent  guère  sept  pages  ;  quelques-unes  n'ont  même 
que  quelques  lignes.  L'histoire  est  mêlée  aux  réflexions  pieuses.  En 
appendice  se  trouvent  des  notices  sur  M°**  Barat,  M""'*  Elisabeth  et 
Marie-Louise  de  France,  M^**  de  Louvencourt,  la  sœur  Marthe  et  la 
sœur  Rosalie. 

Le  but  pratique  cherché  par  l'auteur,  eût  été  plus  sûrement  atteint  si 
elle  se  fût  bornée  aux  saintes  sur  lesquelles  on  peut  donner  quelques 
détails  ;  quel  fruit  peut-on  retirer  d'une  notice  qui  n'est  qu'une  véri- 
table indication  de  calendrier?  11  y  a  des  choix  que  nous  n'approuvons 
pas  (t.  I,  p.  13).  Sans  nous  arrêter  à  quelques  négligences  de  style,nous 
signalerons  une  erreur  à  propos  de  la  bienheureuse  Marguerite-Marie, 
qui  n'est  pas  née  à  Lauthecourt,  paroisse  de  Véronde,  et  nous  trouvons 
un  peu  téméraire  de  devancer  le  jugement  de  l'Église  sur  M"*  Barat, 

—  Présenter  aux  ouvriers,  dans  de  courtes  notices,  la  vie  de  saints 
patrons  des  anciennes  corporations,  la  retracer  en  se  conformant  aux 
règles  de  la  critique  historique,  telle  est  la  pensée  qu'ont  réalisée  les 
auteurs  des  Vies  des  saints  de  r atelier.  Nous  trouvons,  dans  ce  recueil, 
qui  comprend  onze  biographies,  les  vies  de  saint  Eloi,  patron  des  for- 


—  99  — 

gérons;  de  saint  Joseph,  patron  des  charpentiers;  de  saint  Crépin, 
patron  des  cordonniers;  de  saint  Fiacre,  patron  des  jardiniers;  de 
saint  Glond,  saint  Théodote,  saint  Galmier,  saint  Théobald,  saint  Mé- 
dard,  saint  Marcel,  saint  Aquilas.  Parmi  les  noms  des  auteurs,  citons 
Ozanami  MM.  Michel  Cornudet,  Léon  Lefébure,  Roger  de  Beauf- 
fort.  Ces  vies,  publiées  d'abord  en  brochures  séparées,  viennent  d'être 
réunies  en  volumes^  et  font  désirer  la  continuation  de  la  collection. 

—  Une  bonne  pensée  a  également  inspiré  les  Saintes  légendes  de 
renfonce.  Peut-être  les  anecdotes  pourraient-elles  j  jouer  un  plus 
grand  rôle  et  les  exclamations  un  rôle  moindre  ;  mais  il  n'y  a  pas  de 
travail  qui  mérite  davantage  d'être  encouragé  que  celui  de  M.  de  Ba- 
rieuL  Un  ancien  philosophe  a  dit  que  prétendre  fonder  une  cité  sans 
religion,  c'est  vouloir  bâtir  un  édiûce  en  l'air.  C'est  pourtant  ce  qu'es- 
sayent obstinément  tous  ces  habiles  qui,  depuis  un  siècle,  font  de  l'en- 
fance et  de  la  jeunesse  le  sujet  de  leurs  expériences.  Prétendre  les 
former  aux  lettres  et  aux  arts  sans  s'occuper  de  les  former  à  la  piété, 
aux  devoirs  et  aux  vertus,  ou  bien,  ce  qui  revientau  même,  ne  donner 
àTaccomplissement  des  -^levoirs  d'autre  mobile  que  l'intérêt,  à  la  pu- 
reté des  mœurs  d'autre  appui  que  l'amour-propre,  à  la  pratique  des 
vertus  d'autre  aliment  que  l'orgueil,  n'est-ce  pas  bâtir  en  l'air,  et  ne 
préparer  pour  l'avenir  que  des  catastrophas  et  des  ruines? 

•—  La  vie  de  Saint-Joseph  par  le  P.  Bouvj,  est  remarquable  par  deux 
qualités  :  la  piété  profonde  que  l'ouvrage  respire,  les  citations  des  Pères 
et  des  théologiens  qui  le  remplissent,  et  donnent  aux  réflexions  et  aux 
vues  de  l'auteur  une  particulière  autorité.  La  manière  rappellerait 
celle  de  Ludolphe  le  Chartreux^  dans  la  Vie  de  Jésus^Christ.  C'est 
surtout  à  l'esprit  et  au  fruit  à  tirer  des  faits  que  s'attache  le  P.Bouvj. 
«  Je  crois  pouvoir  assurer,  nous  dit-il,  qu'on  ne  trouvera,  dans  cet 
ouvrage,  aucune  opinion  hasardée  ni  empruntée,  comme  il  arrive  trop 
souvent,  à  des  écrivains  sans  autorité  ou  à  des  livres  apocryphes.  Je 
passe  sous  silence  les  opinions  de  cette  nature,  chaque  fois  que  je 
ne  suis  par  forcé  d'établir  la  vérité  qui  les  combat.  Deux  sentiments 
opposés  se  présentent-ils  avec  le  même  degré  de  vraisemblance,  je 
consulte  la  notoriété  dont  ils  jouissent,  et  j'embrasse  de  préférence  la 
croyance  la  plus  répandue  parmi  le  peuple  ûdèle  (p.  viii).  »  De 
telles  règles  sont  la  sagesse  même,  avec  le  but  spécial  qu'envisageait 
l'auteur  :  édifier  et  instruire  tout  à  la  fois.  Ce  but,  il  l'atteindra  cer- 
tainement ;  son  livre  fera  du  bien,  et  il  se  recommande  aux  personnes 
pieuses  douées  d'une  certaine  somme  d'instruction.  —  On  trouvera  à 
la  fin,  une  série  de  trente-et-une  prières  distribuées  pour  un  mois  de 
visites  à  saint  Joseph. 

—  L'Évangile  et  l'histoire  ecclésiastique  nous  fournissent  sur 
saint  Joseph  de  rares  et  incomplets  renseignements.  La  tradition 


—  400  — 

elle-même  se  tait  sur  la  plapart  des  circonstances  de  sa  vie,  da  moins 
en  ce  qu'elles  pourraient  avoir  de  certain.  Un  ouvrage  du  genre  de 
celui-ci,  étendu,  abondant  en  détails,  précisant  les  moindres  faits, 
devait  nécessairement  s' appuyer  sur  des  révélations  :  et  ici,le  trésor 
est  assez  riche  dans  les  écrits  de  plusieurs  saints.  M.  Tabbé  Fouet, 
dans  sa  Vie  de  saint  Joieph^  s'attache  à  celles  d* Anne-Catherine  Emme- 
rich,  dont  le  nom  est  devenu  célèbre  parmi  nous,  grâce  aux  travaux 
de  M.  de  Cazalès,  comme  déjà  depuis  longtemps  il  Tétait  en  Alle- 
magne. La  vie  d'Anne -Catherine  a  été  celle  d'une  grande  et  merveil- 
leuse servante  de  Dieu.  Approuvées  par  plusieurs  docteurs,  par  des 
évoques  même,  ses  visions  n'ont  pas  reçu  cependant  la  consécration 
d'une  sentence  de  TÉglise.  On  peut  donc  leur  accorder  un  assentiment 
plus  ou  moins  restreint;  mais,  fait  observer  à  bon  droit  M.  l'abbé  Fouet 
(p.  xii),  ce  qu'on  ne  saurait  admettre,  c'est  que,  sans  connaître  un 
mot  de  l'histoire  de  Catherine  Emmerich,  sans  avoir  lu  tant  soit  peu 
sérieusement  le  moindre  chapitre  de  ses  communications  avec  le  ciel, 
on  vienne  de  prime-abord,  sans  autre  étude  ni  examen,  jeter  sur  elles 
le  dédain,  et  les  traiter  de  rêveries  indignes  de  la  moindre  considéra- 
tion. Un  tel  procédé  doit  être  laissé  à  ce  qu'on  appelle  la  libre - 
pensée;  il  ne  convient  point  aux  esprits  de  bon  lieu.  Le  siget  est  tout 
au  moins  fort  grave,  et  mérite  d'autres  égards. 

Quoi  qu'il  en  puisse  être^  d'ailleurs,  de  cette  question  touchant 
aux  plus  hauts  problèmes  de  la  vie  contemplative  et  de  la  théologie 
positive  ou  mystique,  reste  l'ouvrage  composé  sur  ces  données,  et 
nous  devons  déclarer  qu'il  nous  parait  l'un  des  plus  estimables,  et  dans 
tous  les  cas,  le  plus  complet,  de  ceux  qui  ont  paru  jusqu'à  présent  sur 
ce  sujet.  L'auteur  le  distribue  en  trente-et-un  chapitres,  afin  qu'à 
l'occasion  il  devienne,  dans  les  confréries  et  les  paroisses,  le  livre  des 
lectures  pour  le  mois  de  SaintJoseph.  Chacun  de  ces  chapitres,  après 
la  narration  qui  en  fait  le  fond,  se  termine  par  une  considération  suf- 
fisamment développée,  empruntée  souvent  à  nos  meilleurs  écrivains 
catholiques  ;  par  une  pratique  destinée  à  l'exercice  personnel  des 
vertus  que  l'on  vient  de  méditer,  et  par  une  prière  rédigée  dans  le 
même  esprit.  On  a  réuni,  à  la  fin  du  volume,  bon  nombre  d'autres 
prières^  belles,  variées,  bien  choisies,  que  les  fidèles  aimeront  àtrouver 
là.  L'auteur,  à  la  page  405,  inclinerait  à  croire  que  les  événements 
avant-coureurs  de  la  fin  du  monde  sont  à  nos  portes.  Nous  signalons 
cette  pensée,  sans  la  défendre  ni  la  combattre.  Matière  grave,éminem- 
ment  obscure,  qu'on  eût  bien  fait,  peut-être,  de  ne  point  aborder. 

—  Dans  le  volume  que  ^.  Charles  Hello  a  consacré  aux  visions  de 
saint  Antoine,  l'efiet  des  scènes  émouvantes  auxquelles  on  nous 
initie  est  un  peu  compromis  par  une  inclination  à  confondre  avec  elles 
les  vicissitudes  de  notre  époque.  On  sait  que  le  démon  paraissait  à 


—  101  — 

rillastre  ermite  sous  mille  formes  grotesques  ;  pour  son  nouvel 
historien,  le  tentateur  n'a  plus  qu'un  masque,  celui  du  catholique 
libéral. 

—  L'ancienne  église  des  Gaules  a  attaché  le  nom  de  saint  Germain 
à  presque  autant  d'édifices  religieux  que  celui  de  saint  Martin;  au 
seizième  siècle,  le  seul  diocèse  de  Sens  ne  comptait  pas  moins  de 
quarante  églises  dédiées  à  saint  .Germain,  et  cependant  rien  n'est 
moins  connu  aujourd'hui  que  les  mérites  de  ce  thaumaturge,  dont  la 
mémoire  plane  sur  le  berceau  de  la  monarchie  française.  C'est  donc 
une  vraie  lacune  que  vient  de  combler  le  P.  Gouilloud,  en  nous  offrant 
une  traduction  d'une  vie  de  ce  grand  saint  par  le  prêtre  Constance^ 
qui  a  vécu,  comme  lui,  au  cinquième  siècle.  C'est  un  de  ces  documents 
classiques  qu'il  est  utile  de  faire  revivre,  pour  faire  revivre  en  même 
temps  l'esprit  de  foi  et  la  simplicité  qui  présidaient  jadis  aux  travaux 
de  ce  genre.     « 

—  V Histoire  de  saint  Bernard  et  de  son  siècle  est  trop  connue  et 
son  succès  trop  incontestable,  pour  que  nous  ne  devions  nous  borner 
à  annoncer  cette  nouvelle  et  huitième  édition.  C'est  un  remarquable 
morceau  d'histoire  qui  comprend  tout  le  douzième  siècle,  car  saint 
Bernard  a  eu  une  trop  grande  part  dans  toutes  les  afi'aires  de  son 
époque,  pour  qu'on  puisse  faire  son  histoire  sans  faire  celle  de  son 
siècle.  Dans  une  belle  introduction,  le  R.  P.  Ratisbonne  étudie  le  rôle 
de  l'Église^  ses  tendances  à  l'unification  et  fait  connaître  les  temps 
qui  ont  précédé  notre  saint  ;  puis  il  étudié  saint  Bernard  sous  toutes 
ses  faces  :  vie  domestique,  vie  monastique,  vie  politique,  vie  scienti- 
fique, vie  apostolique.  Il  se  montre  non-seulement  religieux  et 
historien,  mais  encore  philosophe  ;  et  ce  n'est  pas  trop  de  qualités 
pour  faire  l'histoire  d'un  tel  saint.  On  ne  s'étonnera  pas  que  le 
R.  P.  Ratisbonne  s'arrête  avec  complaisance  à  tout  ce  qui  touche 
aux  Juifs.  Nous  tenons  à  signaler  une  longue  et  intéressante  digres- 
sion sur  sainte  Hildegarde  et  ses  prophéties.  Dans  des  chapitres  com- 
plémentaires, il  donne  des  jugements  sur  saint  Bernard,  sa  doctrine 
et  ses  œuvres,  et,  en  appendice,  quelques  fragments  de  ses  œuvres 
ascétiques.  Il  aurait  été  désirable  qu'il  tint  au  courant  des  faits  ses 
nouvelles  éditions  ;  nous  regrettons  de  lui  voir  annoncer  (t. II,  p.  347) 
une  traduction  complète  des  œuvres  du  Saint  par  M.  Ravelet,  qui 
n'a  donné  que  les  lettres. 

—  Le  sixième  centenaire  de  la  mort  de  saint  Bonaventure  (15  juil- 
let 1874)  a  donné  lieu  à  une  publication  qui  n'est  que  la  réimpression 
textuelle  de  Y  Histoire  abrégée  de  la  vte,  des  vertus  et  du  culte  de  saint 
Bonaventure.,.,  patron  de  la  ville  de  Lyon^  publiée  dans  cette  ville  en 
1747.  Cette  vie,  qui  s'appuie  peut-être  trop  sur  Baillet  et  autres 
écrivains  de  seconde  main,  a  du  moins  le  mérite,  trop  rare  aujour- 


—  102  — 

d'hui,  d'être  écrite  en  un  grand  et  beau  style.  La  lecture  en  est  agré- 
able^ et  ne  peut  que  profiter  à  la  gloire  du  docteur  séraphlque.  L'é- 
diteur anonyme  lyonnais,  n'a  mis  de  lui  qu'une  intéressante  notice 
historique  sur  l'église  de  Saint-Donaventure  de  Lyon  et  les  nom- 
breuses confréries  dont  elle  était  le  centre,  et  une  autre  notice  sur  la 
découverte  d'un  tableau  représentant  un  miracle  opéré  par  saint 
Bonaventure.  Il  en  prend  occasion  pour  parler  du  P.  de  Fanna,  et  de 
la  belle  édition  qu'il  prépare  des  œuvres  du  grand  docteur. 

—  L'ordre  des  Célestins,  qui  comptait,  avant  1793,  dix-neuf  mai- 
sons en  France,  vient  de  renaître  en  Bretagne.  Son  restaurateur  a 
publié,  à  ce  propos,  la  vie  de  son  saint  fondateur,  célèbre  par  son 
abdication.  Il  y  a  joint  diverses  notes  historiques  et  biographiques  sur 
es  anciens  monastères  des  Célestins,  et  sur  les  religieux  qui  les  ont 
lillustré  par  leur  sainteté  et  leur  science.  Ces  curieuses  monographies 
sont  accompagnées  des  constitutions  de  l'Ordre.  C'est^in  ouvrage  de 
bibliothèque  et  d'édification,  très-complet  dans  son  genre. 

—  La  bienheureuse  Ortnga,  de  qui  M.  l'abbé  Henry  nous  a  retracé 
la  vie,  est  assez  peu  connue  chez  nous,  et  mérite  de  l'être  davantage. 
L'auteur  remarque,  avec  juste  raison^  qu'on  a  trop  négligé  les  classes 
populaires  et  travailleuses  dans  la  composition  d'ouvrages  ayant  pour 
but,  d'offrir  des  modèles  de  vertu  aux  chrétiens.  Oringa,  née  en  Tos- 
cane, au  douzième  siècle,  dans  la  condition  la  plus  humble  et  la 
plus  pauvre,  est  un  admirable  exeiùple  pour  toutes  les  jeunes  filles  en 
général,  et  plus  encore  pour  les  ouvrières,  les  filles  de  ferme,  les 
servantes  :  car  elle  fût  elle-même  tout  cela,  bien  qu'elle  ait  terminé 
ses  jours  dans  la  vie  religieuse.  Son  histoire  est  d'ailleurs  pleine 
d'événements  et  de  circonstances  singulières  qui  en  rendent  la  lec- 
ture attachante.  Les  miracles  y  sont  fréquents  et  de  premier  ordre, 
Dieu  se  plaisant  à  relever  devant  le  monde  celle  qui  le  servait  si 
héroïquement.  L'auteur  ne  manque  pas  de  s'étendre,  au  besoin,  sur 
les  monuments,  les  lieux,  les  personnes,  les  analogies  historiques  que 
le  sujet  amène  sous  sa  plume,  sans  omettre  non  plus  les  exhortations 
et  les  conseils.  Quelques  hommes  de  goût  pourront-ils  reprocher 
à  M.  l'abbé  Henry  de  s'être  tenu,  d'un  bout  à  l'autre  de  l'opuscule, 
sur  un  ton  de  lyrisme  qui  nuit  à  la  belle  simplicité  qui  doit  être  la 
loi  des  auteurs  de  vies  de  saints. 

—  Ceux  qui  conservent  encore  des  préjugés  contre  la  vie  des 
cloîtres,  — >  vie  d'ailleurs  toute  de  grâce  et  par  conséquent  d'excep- 
tion, —  les  perdront  en  lisant  les  charmants  volumes  dont  le 
P .  Bay  onn e  vient  d'enrichir  la  Bibliothèque  dominicaine ,  déj  à  étincelante 
de  b^oux.  Venue  au  commiBncement  du  douzième  siècle,  sainte  Cathe- 
rine de  Ricci  fut  l'expression  magnifique  de  cette  rénovation  reli- 
gieuse qui  rendit  à  l'Église  la  beauté  de  sa  jeunesse,  et  dont  le 


—  103  — 

célèbre  Jérôme  Savanarole  fut,  en  Toscane,  Tardent  promoteur. 
Ses  biographies  étaient  si  nombreuses  et  si  variées,  que  le  P.  San- 
drini  affirmait,  au  siècle  dernier,  qu'il  n'y  avait  pas  un  autre  saint 
qui  eût  obtenu,  pour  les  vertus  et  les  actions  de  sa  vie,  une  publicité 
si  considérable.  C'est  pourtant  pour  nous  une  nouvelle  connaissance 
à  faire,  et  le  P.  Bajonne  nous  la  rend  aussi  aisée  qu'agréable. 

—  L'&me  tout  entière  de  saint  François  de  Sales  se  retrouve  dans 
les  Dépositions  de  sainte  Chantai.  C'est  un  document  angélique,  quia, 
par  surcroit,  un  grand  charme  littéraire^  comme  tout  ce  qui  est  Salé* 
sien.  Ce  charme  n'a  pas  été  scientifiquement  constaté,  mais  il  est  très- 
réel.  Prenez,  par  exemple,  le  chapitre  xxxix  de  la  troisième  partie 
de  V Introduction  ;  c'est  tout  simplement  une  merveille,  un  tour  de  force 
académique  :  jamais  plume  n'a  élucidé  pareille  matière  d'une 
façon  plus  délicate.  Sans  doute,  il  y  a  des  écrivains  plus  incisifs,  plus 
philosophes  que  l'évêque  de  Genève  ;  il  n'y  en  a  pas  qui  aient  plus  de 
naturel^  qui  soient  plus  accessibles  à  toutes  les  situations.  On  repré- 
sente la  vertu  sous  des  couleurs  si  sombres,  on  lui  inflige  un  visage 
si  plein  d'horreur  et  de  sévérité,  qu'elle  fait  reculer  les  plus  hardis. 
Saint  François  de  Sales  ne  laisse  plus  aucun  prétexte  &  cette 
vaine  terreur.  Que  de  fantômes  le  doigt  des  saints  fait  tomber  en 
poussière  ! 

—  La  petite  \ie  de  la  bienheureuse  Marguerite- M arie^  que  nous  avons 
sous  les  yeux,  est  spécialement  destinée  aux  pèlerins.  Elle  a  pour  but 
de  leur  faire  connaître  celle  qui  est  l'occasion  de  ce  grand  mouve- 
ment d'attraction  vers  Paray,  et  la  salutaire  dévotion  au  Sacré-Cœur. 
Elle  est  d'une  lecture  facile.  M.  l'abbé  Daras  a  largement  puisé  dans 
les  grandes  vies,  notamment  dans  celle  du  P.  Daniel,  et  dans  les 
écrits  de  la  bienheureuse.  Elle  est  suffisante  pour  le  plus  grand 
nombre  des  lecteurs  ;  rien  d'essentiel  n'y  manque. 

—  La  vie  admirable  du  B,  Labre,  n'est  point  une  nouveauté  pour 
nos  lecteurs.  Ils  la  connaissent  au  moins  par  ce  qui  m'a  été  dit  ici 
(t.  X,  p.  143),  et  plus  d'un,  certainement,  aura  contribué  au  rapide 
écoulement  des  deux  premières  éditions.  C'est  un  remarquable  succès, 
auquel  n^est  point  étranger  le  talent  de  l'auteur,  la  vénération  et 
Tamour  avec  lesquels  il  traite  et  étudie  son  sujet.  Mais  nous  ne 
l'offenserons  pas  en  disant,  qu'il  est  dû  beaucoup  aussi  au  sujet  lui- 
même.  Est-il  rien  qui  puisse  mieux  convenir  à  notre  siècle  que  l'his- 
toire de  ce  glorieux  mendiant  et  pèlerin,  nous  ouvrant  la  voie  sur 
laquelle  les  foules  se  pressent  maintenant,  et  venant  honorer  et  glori- 
fier la  pauvreté,  lorsque  la  soif  des  richesses  est  si  ardente,  lorsque 
l'aumône  est  considérée  comme  une  humiliation,  comme  une  chose 
dégradante  ?  M.  Aubineau  prend  le  bienheureux  Labre  au  sein  de  sa 
chrétienne  famille,  où  il    puise  la  semence  de  toutes  les  vertus  qui 


—  104  — 

deyaient  faire  Je  lui  un  saint.  Il  le  suit  pas  à  pas  dans  toutes  ses 
pieuses  préparations,  en  Italie^  en  Suisse^  en  Espagne,  en  France,  à 
Paraj-le^Monial,  où  il  nous  précède,  précurseur  du  curé  d'Ars  à  Dar* 
dillj.  Il  ne  recule  devant  aucun  de  ces  détails  qui  peuvent  choquer 
notre  délicatesse  mondaine  et  efféminée,  mais  qui  montrent  un  saint 
poussant  jusqu*à  ces  dernières  limites  le  mépris  de  toutes  les  choses  du 
monde.  M.  Aubineau  a  puisé  aux  meilleures  sources,  c'est-*à-dire  dans 
les  documents  de  la  cause  de  la  canonisation  qui  lui  ont  été  conûés. 
Cette  nouvelle  édition  ne  diffère  des  autres  que  par  quelques  rensei- 
gnements complémentaires  sur  le  pèlerinage  du  bienheureux  à 
Mariasten,  en  Suisse,  et  à  Paray-le-Monial,  et  par  le  récit  du  pèle-- 
rinage  qui  a  eu  lieu  le  7  juillet  1873,  à  Amettes,  au  lieu  de  sa  nais- 
sance. 

—  L'ouvrage  consacré  à  sainte  Philomène  est  plutôt  un  livre  de  piété 
qu'une  vie  de  saint.  Nous  pouvons  cependant  lui  donner  place  dans 
notre  cadre,  à  cause  de  tous  les  détails  historiques  qu'il  fournit  sur  le 
culte  de  la  Sainte  et  les  lieux  où  il  est  le  plus  florissant.  M.  Petit 
raconte  la  découverte  du  corps,  sa  translation  à  Mugnano,  Tintroduc- 
tion  de  son  culte  en  France  par  M"*  Jaricot,  la  pieuse  fondatrice  de 
TcBuvre  de  la  propagation  de  la  foi,  la  dévotion  du  curé  d'Ars.  Son 
culte  &  Saint-Gervais  de  Paris  fournit  Toccasion  de  quelques  détails 
intéressants  sur  le  siège  de  Paris  et  la  Commune,  et  sur  l'origine  des 
pèlerinages  nationaux.  Avec  tous  ces  faits  édifiants,  les  lecteurs 
pieux  trouveront  des  exercices  pour  une  neuvaine,  le  petit  office  de  la 
Sainte,  des  prières,  des  cantiques,  des  pratiques  en  son  honneur  et 
des  méditations  sur  ses  vertus.  Ajoutons  que  cet  ouvrage  est  approuvé 
par  M^  l'évêque  de  Langres. 

—  La  vie  de  la  mère  Thérèse  de  la  Mùé'icorde  de  Laval  prouve  que 
le  bras  de  Dieu  n'est  pas  raccourci  depuis  la  bataille  de  Lépante,  que 
Tabnégation  peut,dans  tous  les  lieux  et  dans  tous  les  âgQS,  produire  des 
fruits  merveilleux.  Dès  son  enfance,  Thérèse  de  la  Miséricorde,  digne 
de  porter  ce  nom,  ne  songeait  qu'à  soulager  les  peines  physiques  et 
morales  de  ses  concitoyens  ;  la  charité  lui  a  fait  transporter  des  mon- 
tagnes^ et  cette  pauvre  fille  du  peuple,  ne  possédant  absolument  rien, 
a  légué  à  sa  province  une  institution  considérable.  C'est  Tinverse  de 
ce  que  l'on  voit  tous  les  jours  dans  le  monde  des  affaires  et  de 
l'égoïsme. 

—  Nous  sommes  reportés,  par  la  Vie  de  la  Révérende  Mère  Marie 
Madeleine  Gipoulon^  à  une  des  époques  les  plus  intéressantes  de  l'his- 
toire de  l'Église.  M"'  Gipoulon,  née  le  2  novembre  1765,  à  Felletin 
(Creuse),  morte  le  4  août  1821,  fit  ses  vœux  chez  les  Ursulines  de 
Limoges  à  une  date  fatale,  1789,  et,  peu  de  temps  après,  un  incendie 
devança  Vœuvre  de  destruction  et  de  dispersion  que  devait  accomplir 


—  105  — 

la  Révolution.  La  tourmente  passée,  elle  réunit  les  membres  épars 
de  plusieurs  communautés  religieuses^  et,  fille  de  cette  Église  dont  on 
ne  craint  pas  d'annoncer  sans  cesse  Tagonie  et  qu*on  accuse  de  se 
désintéresser  du  soin  des  malheareux  et  de  la  culture  des  intelligences, 
elle  fonda,  ayec  le  concours  de  M^  du  Bourg,  éyêque  de  Limoges, 
une  congrégation  à  la  fois  hospitalière  et  institutrice,  chargée  en  même 
temps  de  l'hôpital  et  des  écoles.  Cette  notice  nous  révèle  un  fait  peu 
connu,  crojons-nous  :  c^est  l'idée  de  Bonaparte  de  remettre  en  une 
seule  main  la  direction  des  diverses  communautés  naissantes,  au  début 
du  siècle,  et  la  convocation,  à.  Paris,  en  1807,  d'une  assemblée  générale 
des  religieuses  de  l'Empire.  Aux  faits  historiques  se  joignent  beaucoup 
de  renseignements  sur  la  vie  intime  de  la  communauté,  sur  la  règle, 
sur  le  caractère  des  diôérents  membres  de  la  congrégation,  ou,  si  l'on 
aime  mieux,  sur  les  imperfections  dont  profitait  la  vertu  de  leur  com- 
pagne. M.  l'abbé  Penaud  établit  avec  beaucoup  de  fermeté  les  devoirs 
des  enlants  et  des  parents  dans  les  questions  de  vocation.  On  aurait 
préféré  plus  de  précision  dans  le  stjle,  et  peut  être  prendra-t-on  pour 
des  longueurs  ce  qui  peut  avoir  un  grand  intérêt  dans  la  région  encore 
pleine  des  souvenirs  la  révérende  Mère  et  de  ses  compagnes. 

—  C'est  à  un  tout  autre  ordre  d'idées  qu'appartient  la  Vie  de  la 
Révérende  Mère  Saint-Jérôme  Sans  être  exclusive  d'aucune  classe  de 
lecteurs,  elle  s'adresse  tout  spécialement  aux  anciennes  élèves  de  la 
révérende  Mère  et  aux  anciennes  pensionnaires  du  couvent  des 
Oiseaux.  Le  côté  historique  fait  presque  complètement  défaut;  ainsi, 
ce  n'est  que  dans  le  titre  que  nous  trouvons  la  date  de  la  naissance  et 
de  la  mort  de  M""*  Saint-Jérome  (1810-1868),  qui  s'était  appelée  dans 
le  monde  Pauline  Ethmann.  Mais,  en  revanche,  on  y  trouve,  peintes  au 
vif,  la  vie  du  couvent  des  Oiseaux,  les  religieuses,  les  pensionnaires,  les 
classes^  les  récréations,  les  académies,  les  fêtes,  et  tous  ces  petits 
riens  qui  éveillent  mille  souvenirs  chers  aux  cœurs  d'anciennes  élèves 
parce  qu'ils  se  rattachent  à  un  moment  heureux  de  la  vie.  L'anonyme 
auteur  a  réuni  tout  ce  qu'elle  a  pu  sur  Tenfance,  la  vocation,  le  novi- 
ciat et  la  vie  religieuse  de  la  Mère  Saint- Jérôme  ;  elle  j  a  joint  beau- 
coup de  notices  sur  ses  anciennes  compagnes,  sur  des  personnages 
mêlés  à  sa  vie,  comme  le  P.  Ronsin,  son  directeur,  et  a  fait  de  nom- 
breux emprunts  à  sa  correspondance  avec  ses  anciennes  élèves.  Nous 
avons  remarqué  une  note  intéressante  à  propos  du  bombardement  de 
Paris  et  de  la  Commune.  Il  est  superflu  de  dire  que  tout  porte  à 
l'édification  dans  ce  volume;  mais,  ce  qui  nous  a  paru  caractériser  la 
Mère  Saint-Jérôme,  c'est,  d'un  côté,  la  grande  part  qu'elle  a  prise  à  la 
propagation  de  la  dévotion  au  Sacré-Cœur  —  on  puisera  à  ce  sujet, 
dans  sa  Fie,  des  renseignements  intéressants  —  et,  d'un  autre  côté, 
les  nombreux  ouvrages  sortis  de  sa  plume.  On  lui  doit  un  des  premiers 


T 


^^   •  ~.  Ih-8,  arec 


les  théolo. 
^  dix-sep- 

^  traité* 
"'i  oeorre 


m*     -J--rj».- 


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•^.3  -  ^-  ^  .t:  uî  lii  emprunté  telle 
.*--:  ::■  .  ^  ^^-^— -a*. \::v;es  quatorze 

. ..    ;    j:  rua  .  1  Y:rî:u»  et  iox 


—  107  — 

C'est  donc  ane  henreuse  pensée  que  d'avoir  publié  de  nouveau  Tœuvre 
principale  de  Lessins.  Le  format  de  cette  édition  est  commode,  Tim- 
pre8«ion  nette  et  assez  correcte.  11  est  vrai  que  çà  etlà  quelques  fautes 
ont  ëobappé,  particulièrement  dans  les  titres  inscrits  aux  marges,  et 
dans  les  textes  grecs  ;  mais  le  lecteur  les  corrigera  sans  peine.  Les 
passades  cités  sont  imprimés  en  caractères  différents  etfrappent  d'abord 
les  jenx  ;  nous  eussions  désiré  que  Ton  s'écartât  quelque  peu  de  Tédi* 
iion  primitive^  en  indiquant  non-seulement  les  chapitrés,  mais  encore 
les  Tersets  de  TEcriture,  ce  qui  eût  abrégé  les  recherches. 

Eue.  PousssT. 


Diflhlo^rae»  de  saint  Grégoire  le  Grand»  traduits  par  E.  Cartier. 
Paris,  Poussielgue,  1875.  In-12  de  lvi-419  p.  —  Prix:  2  fr.  50. 

Les  Dialogues  écrits  par  le  pape  saint  Grégoire  le  Grand  sont  un  récit 
de  faits  édifiants^  pieux^  miraculeux,  concernant  les    saints,  papes, 
éTéques,  religieux  et  religieuses.  Le  second  livre  comprend  à  lui  seul 
la  Tie  et  les  miracles  de  saint  Benoît  (p.  69  à  155).  Des  points  impor- 
tants de  doctrine  j  sont  traités,  et  l'interlocuteur  de  saint  Grégoire 
amène,  par  ses  questions  et  ses  réflexions,  l'explication  et  le  dévelop- 
pement du  récit.  Il  y  a  des  chapitres  dont  Tintitulé  est  celui-ci  :  c  Les 
hommes  charnels  croient  difficilement  les  choses  spirituelles  et  éter- 
nelles, parce  qu'ils  ne  connaissent  pas  par  expérience  ce  qu'ils  en 
entendent  dire.  >  Ces  paroles  font  comprendre  pourquoi  M.  Cartier  a 
Toula  que  notre  siècle  entendît  les  mêmes  enseignements  que  saint 
Grégoire  adressait  aux  hommes  de  son  temps.  N'en  avons-nous  pas 
besoin,  et  a  n'y  a-t-il  aucun  rapport  entre  le  siècle  de  saint  Grégoire 
et  le  notre  ?  Nous  vivons  aussi  sur  des  ruines,  et  nous  ressemblons  à 
ces  Romains  dégénérés  qui,  dans  les  hontes  de  leurs  défaites,  conser- 
Taient  l'orgueil  des  anciens  jours,  en  oubliant,  dans  la  joie  des  festins 
et  la  pompe  des  spectacles,  les  menaces  du  lendemain...  Nous  sommes 
envahis  par  une  barbarie  civilisée  et  savante,  plus  difficile  à  vaincre 
et  plus  puissante  à  détruire  que  celle  des  Lombards.  Mais  nous  détour- 
nons les  jeux  du  danger,  pour  nous  complaire  dans  les  jouissances  de 
la  richesse  et  les  merveilles  de  rindustrie.»  —  On  ne  peut  mieux  dire^ 
et  opposer  aux  assertions  de  cette  barbarie  qui  nie  Dieu  et  son  action 
dans  le  monde  le  récit  de  Taction  évidente  de  Dieu  et  des  miracles  faits 
par  Dieu,'c'est  bien  appliquer  le  remède  là  où  il  en  est  besoin.  L'œuvre 
de  saint  Grégoire  le  Grand  revient  donc  à  nous  avec  un  Véritable 
à-propos.  La  traduction  que  donne  M.  Cartier,  parfaitement  écrite, 
correcte,  élégante,  a  triomphé  heureusement,  nous  l'avons  constaté, 
des  difficultés  réelles  d'un  texte  qui,  souvent,  contient,  selon  Tobsorva- 
tion  de  M.   Cartier,  plus  d'idées  que  de  mots.   C'est  un  nouveau 
service  rendu  par  le  pieux  et  savant  historien  du  P.  Besson,  de  sainte 


Mois  du  Sacf'ê'Cœur^  qui  est  arrivé  aujourd'hui  à  sa  vingt-septième 
ëditlott;  pltiàiéurs  ouvrages  relatifls  à  cette  dévotion  et  à  Ici  sainte 
Vierge,  et  un  asse2  grand  nombre  de  notices  sur  des  religieuses  de  son 
ot&té.  Elle  améme  fait  des  Vers.  Elle  possédait,  ce  qui  eët  rare  chez  une 
fétnme,  tn  grand  nombre  de  langues.  PfBttRB  Bouro. 


THEOLOGIE 


De  Perfectionlbu»  morlbusque  dlvlnla,  par  Lessius.  Nouvelle 
édition,  d'après  celle  d'Anvers  de  1620.  Paris,  Lethielleux,  1875.  In-8,  avec 
manchettes,  de  xx-589  p.  —  Prix  :  7  fr. 

Le  jésuite  Léonard  Lessius  tient  un  rang  illustre  parmi  les  théolo- 
giens qui,  à  la  fin  du  seizième  siècle  et  au  commencement  du  dix-sep- 
tiëme,  exposèrent  et  défendirent  la  doctrine  catholique.  Le  traité  de 
Perfectionibus  moribusque  dioinis  est  estiùié  à  juste  titre  le  chef-d'œuvre 
de  Lessius  ;  il  est  divisé  en  quatorze  livres,  d'une  étendue  et  d'une 
importance  fort  éingales. 

Dans  les  quatre. premiers,  l'auteur  parle  des  attributs  essentiels  de 
Dieu  considéré  en  lui-même  ;  les  quatre  livres  suivants  traitent  des 
perfections  divines  qui  supposent  la  possibilité  des  créatures.  Les  six 
derniers  livres  forment  la  partie  principale  de  l'ouvrage  et  de  beau- 
coup la  plus  longue.  L*auteur  considère  Dieu  dans  ses  relations  avec 
les  êtres  déjà  créés  et  surtout  avec  l'homme.  Il  expose  toute  l'écono- 
mie de  l'incarnation  et  de  la  rédemption  (Tract.  XII,  de  Misericordia); 
il  montre  l'action  de  la  justice  divine  et  en  ce  monde  et  en  l'autre  : 
les  châtiments  qui  frappent  les  individus  et  les  peuples  ;  il  résout  les 
principales  objections  que  la  raison  soulève  contre  le  dogme  de  l'enfer 
(Tract.  XIII,  de  Justitia  et  ira  Dei), 

La  manière  dont  Lessius  développe  ces  graves  vérités  lui  assigne 
une  place  à  part  entre  les  théologiens.  S'il  discute  avec  la  précision 
d'un  docteur,  s'il  puise  de  préférence  ses  inspirations  dans  les  œuvres 
les  plus  abstraites  de  saint  Denis,  il  évite  cependant  l'aridité  des  écri- 
vains scolastiques.  Son  livre  est  un  manuel  où  les  prédicateurs  trou- 
veront de  riches  matériaux  pour  des  discours  à  la  fois  solides  et  inté- 
ressants. II  nous  a  même  semblé  que  Bourdaloue  avait  emprunté  telle 
division  de  ses  sermons  au  théologien  de  Louvain.Chacun  des  quatorze 
livres  est  terminé  par  un  chapitre  que  l'auteur  appelle  recolleciio  pre* 
catoria^  et  dans  lequel,  —  résumant  la  doctrine  des  chapitres  précé- 
dents^ —  il  élève  son  âme  à  Dieu,  et  emprunte  à  l'Écriture  et  aux 
saints  leurs  plus  belles  paroles  pour  célébrer  la  grandeur  et  la  bonté 
du  Créateur.  Le  latin  est  élégant  et  facile:  on  y  rencontre  peu  de  ces 
expressions  scolastiques  que  nous  comprenons  difficilement,  habitués 
que  nous  sommes  au  langage  de  la  philosophie  moderne. 


—  107  — 

C'est  donc  une  heureuse  pensée  que  d'avoir  publié  de  nouveau  Tœuvre 
principale  de  Lessiua.  Le  format  de  cette  édition  est  commode,  Tim- 
pression  nette  et  assez  correcte.  11  est  vrai  que  çà  etlà  quelques  fautes 
ont  échappé,  particulièrement  dans  les  titres  inscrits  aux  marges,  et 
dans  les  textes  grecs  ;  mais  le  lecteur  les  corrigera  sans  peine.  Les 
passages  cités  sont  imprimés  en  caractères  différents  etfrappentd* abord 
les  yeux;  nous  eussions  désiré  que  l'on  s*écartàt  quelque  peu  de  Tédi* 
tion  primitive^  en  indiquant  non-seulement  les  chapitres,  mais  encore 
les  versets  de  TEcriture,  ce  qui  eût  abrégé  les  recherches. 

Eue.  PoussBT. 


Dialogue»  de  «alnt  Grégoire  le  Orand»  traduits  par  E.  Cartier. 
Paris,  Poussielgue,  1875.  In-i2  de  lvi-419  p.  —  Prix:  2  fr.  50. 

Les  Dialogues  écrits  par  le  pape  saint  Grégoire  le  Grand  sont  un  récit 
de  faits  édifiants^  pieux^  miraculeux,  concernant  les  saints,  papes, 
évêques,  religieux  et  religieuses.  Le  second  livre  comprend  &  lui  seul 
la  vie  et  les  miracles  de  saint  Benoît  (p.  69  à  155].  Des  points  impor- 
tants de  doctrine  y  sont  traités,  et  l'interlocuteur  de  saint  Grégoire 
amène,  par  ses  questions  et  ses  réflexions,  l'explication  et  le  dévelop- 
pement du  récit.  Il  j  a  des  chapitres  dont  Tintitulé  est  celui-ci  :  <  Les 
hommes  charnels  croient  difficilement  les  choses  spirituelles  et  éter- 
nelles, parce  qu'ils  ne  connaissent  pas  par  expérience  ce  qu'ils  en 
entendent  dire.  >  Ces  paroles  font  comprendre  pourquoi  M.  Cartier  a 
voulu  que  notre  siècle  entendît  les  mêmes  enseignements  que  saint 
Grégoire  adressait  aux  hommes  de  son  temps.  N'en  avons-nous  pas 
besoin,  et  o  n'y  a-t-il  aucun  rapport  entre  le  siècle  de  saint  Grégoire 
et  le  notre  ?  Nous  vivons  aussi  sur  des  ruines,  et  nous  ressemblons  à 
ces  Romains  dégénérés  qui,  dans  les  hontes  de  leurs  défaites,  conser- 
vaient Torgueil  des  anciens  jours,  en  oubliant,  dans  la  joie  des  festins 
et  la  pompe  des  spectacles,  les  menaces  du  lendemain...  Nous  sommes 
envahis  par  une  barbarie  civilisée  et  savante,  plus  difficile  à  vaincre 
et  plus  puissante  à  détruire  que  celle  des  Lombards.  Mais  nous  détour- 
nons les  jeux  du  danger,  pour  nous  complaire  dans  les  jouissances  de 
la  richesse  et  les  merveilles  de  l'industrie.  »  —  On  ne  peut  mieux  dire^ 
et  opposer  aux  assertions  de  cette  barbarie  qui  nie  Dieu  et  son  action 
dans  le  monde  le  récit  de  Taction  évidente  de  Dieu  et  des  miracles  faits 
par  Dieu,'c'est  bien  appliquer  le  remède  là  où  il  en  est  besoin.  L'œuvre 
de  saint  Grégoire  le  Grand  revient  donc  à  nous  avec  un  véritable 
à-propos.  La  traduction  que  donne  M.  Cartier,  parfaitement  écrite, 
correcte^  élégante,  a  triomphé  heureusement,  nous  l'avons  constaté, 
des  difficultés  réelles  d'un  texte  qui,  souvent,  contient,  selon  l'observa- 
tion de  M.  Cartier,  plus  d'idées  que  de  mots.  C'est  un  nouveau 
service  rendu  par  le  pieux  et  savant  historien  du  P.  Besson,  de  sainte 


—  108  — 

Catherine  de  Sienne,  du  B.  Suso.  Le  positiviste  peut  mépriser  ces 
récits  comme  des  légendes  ;  mais  le  chrétien  s^édiAe  en  les  lisant,  car 
ils  élèvent  son  &me  vers  Dieu  et  lui  apprennent  à  l'aimer. 

H.  OB  L'Épinois. 


Lia  Qnestloii  protestante  Jugée  par  le  bon»  aena»  la  Bible 
et  le»  falta.  Lettres  à  tm  protestant  sur  VÊglise  catholique  et  le  schisme, 
Béfutation  des  erreurs  de  MM.  Néander,  Guizot,  NavUky  Vinet^  de  Pressensé^ 
Réville,  Coguerel,  etc.,  sur  la  notion  de  V Église,  par*  Georges  Romain. 
Deuxième  édition,  suivie  de  :  Une  Excommunication  protestante;  les  Cata- 
combes de  Rome  ;  un  Sermon  à  la  table  d'hôte;  Lettre  sur  la  Bible.  Paris, 
Palmé,  1875.  In-8  de  477  p.  —  Prix  :  6  fr. 

La  persécution  dont  les  catholiques  sont  l'objet  en  Allemagne  et  en 
Suisse  donne  un  intérêt  d'actucdité  à  cet  excellent  ouvrage,  dont  Fau- 
teur avait  publié  une  première  édition  il  j  a  quatorze  ans,  et  qu'il 
reproduit  aujourd'hui  sous  un  titre  trop  long^  mais  avec  d'importantes 
additions  dont  l'opportunité  s'impose  au  lecteur. 

Toutes  les  attaques  contre  l'Eglise,  sous  quelque  forme  qu'elles 
se  produisent,  proviennent  de  l'ignorance  ou  de  la  haine  contre 
son  caractère  et  ses  véritables  conditions  d'existence.  Ainsi  que 
ledit  fort  justement  M.Romain,  l'Église  est  le  véritable  sujet  du 
débat  entre  les  protestants  et  les  catholiques  :  ce  que  les  pre- 
miers défendent  aujourd'hui,  ce  ne  sont  plus  leurs  croyances,  c'est 
leur  schisme,  ce  sont  leurs  sectes.  Pourquoi  cela?  C'est  surtout  parce 
que  les  protestants  d'aujourd'hui  méconnaissent  l'Église  :  de  l'igno- 
rance à  la  calomnie  et  à  la  haine,  la  distance  est  courte.  A  ceux  qui 
ignorent  l'Église^  il  importe  de  la  montrer  ce  qu'elle  doit  être,  ce 
qu'elle  est  en  réalité.  Les  lettres  à  un  protestant  le  font  par  une  série 
de  raisonnements  irréfutables;  après  avoir  résolu  la  première  question 
de  son  sujet  :  Y  a-t-il,  sur  la  terre,  un  intermédiaire  vivant  et  visible 
entre  Dieu  et  nous?  et  avoir  montré,  en  second  lieu,  quel  est  cet  inter- 
médiaire, et  à  quel  signe  on  le  reconnaîtra,  l'auteur  fait  jaillir  de  sa 
thèse  de  lumineuses  déductions.  Si,  en  effet,  le  bon  sens  et  la  Bible 
attribuent,  d'une  part,  à  l'Église,  une  autorité  permanente  et  trans- 
missible;  si,  d'autre  part,  l'Évangile  indique  jusqu'à  la  loi  organique 
de  l'institution  divine,  jusqu'au  mécanisme  de  son  gouvernement;  si  la 
succession  légitime  et  la  consécration  sont  les  conditions  essentielles 
du  ministère  en  qui  se  concentre  ce  gouvernement,  si,  enfin,  le  minis- 
tère est  la  personnification  de  l'Église,  comme  TÉglise  est  la  person- 
nification du  christianisme,  il  s'ensuit  que  l'Eglise  est  nécessairement 
l'intermédiaire  divin  ici-bas;  car  les  différents  caractères  ci-dessus 
énumérés  ne  n'appliquent  qu'à  elle.  Par  conséquent,  toute  église  qui 
ne  repose  pas  sur  ces  bases,  est  fausse  et  hors  du  plan  divin. 


—  109  — 

Parvenu  au  terme  de  cette  démonstration,  l'apologiste  n*a  pas  de 
peine  à  montrer  l'illégitimité  du  ministère  dans  le  protestantisme;  puis, 
passant  en  revue  les  prétendues  erreurs  opposées  à  TÉglise,  ainsi  que 
les  abus  réels  dont  elle  a  été  accusée,  et  les  mettant  en  présence  des 
erreurs  et  des  abus  trop  réels  issus  du  protestantisme  et  inhérents  à 
son  histoire,  il  a  le  droit  de  conclure  que  le  protestantisme  a  augmenté 
les  abus  comme  les  erreurs  dont  il  s'était  fait  le  redresseur.  La  con- 
clusion dernière  ressort  de  tous  ces  précédents  :  hors  de  TÉglise,  pas 
de  salut.  Le  catholicisme  est  autorisé  à  exclure  du  salut  tous  schisma- 
tiques  volontaires,  o^mme  les  protestants  excluent  du  salut  les  juifs, 
les  mahométans,  les  infidèles.  Selon  le  désir  exprimé  dans  une  lettre 
de  Mgr  Mermillod,  mieux  placé  que  personne  pour  savoir  ce  qui 
convient  dans  la  polémique  contre  les  protestants,  cette  étude  sérieuse 
et  attrayante  devrait  être  entre  les  mains  des  laïques  et  du  clergé  ; 
elle  peut  dispenser  de  prendre  connaissance  de  nombreux  ouvrages 
dont  elle  tient  lieu  :  tout  en  remarquant  quelques  longueurs  dans 
quelques-unes  de  ces  lettres,  et,  comme  nous  Ta  vous  dit,  dans  le  titre 
du  livre^  on  peut  s'assurer  que  la  lecture  en  est  agréable,  et  on  le  quitte 
éclairci  sur  la  prétendue  valeur  rationnelle  du  protestantisme,  et  sur- 
tout sur  son  importance  sociale,  faussement  exploitée  de  nos  jours, 
dans  le  but  de  concilier  Torgueil  de  Thomme  avec  le  sentiment  intime 
religieux.  A.  de  Richecour. 


SCIENCES  ET  ARTS 

lia  lx>l  absolue  da  deirolr  et  la  destinée  liuiiialiie,  par  J.  Ram- 

BOssoN.  Paris,  Didot,  1875.  In-8,  de  xii-318  p.  —  Prix  :  6  fr. 

Dans  son  nouvel  ouvrage,  M.  Rambosson  a  essayé  de  découvrir  la 
loi  absolue  du  devoir.  «Pourquoi, nous  dit-il,  dans  sa  préface,  tant 
d'écoles  en  morale,  et  pourquoi  ces  écoles  professent-elles  des  doctrines 
si  diverses  sur  la  destinée  humaine?  Il  est  évident  que  c'est  parce  que 
les  principes  qu'elles  professent  n'ont  pas  été  démontrés  scientifique- 
ment. »  Et  pourquoi  cette  lacune?  Parce  qu'on  a  usé  jusqu'ici  d'une 
mauvaise  méthode;  on  a  négligé  le  seul  procédé  qui  pouvait  conduire 
à  la  vérité  :  l'étude  simultanée  des  sciences  physiques  et  des  sciences 
morales. 

On  le  devine  aisément.  M.  Rambosson  cherche  dans  l'étude  com- 
parée de  ces  deux  sciences  la  loi  absolue  du  devoir,  c  Les  êtres  nous 
présentent  deux  points  de  vue  bien  tranchés  :  le  premier,  leur  gran- 
deur ou  quantité,  le  second,  leur  valeur  ou  excellence.»  La  Mathéma- 
tique traite  des  grandeurs  et  de  leurs  rapports,  la  Morale  doit  traiter 
des  valeurs  et  de  leurs  rapports.  Cette  dernière  science  a  pour  point 
de  départ  un  axiome:  chaque  chose,  chaque  être  doit  être  aimé  selon  sa 


-  410  — 

juste  valewr  ou  excellence.  Voilà  la  loi  absolae  du  devoir.  Qaatre  lois 
secondaires  en  découlent:  la  loi  de  dévouement,  la  loi  de  charité,  la 
loi  de  justice,  la  loi  d'intérêt.  M.  Rambosson  croit  avoir  trouvé^  dans 
cet  ensemble  de  déductions,  un  faisceau  désormais  indissoluble.  Pour 
compléter  sa  démonstration,  il  résume  et  combat  successivement  les 
systèmes  de  Platon  et  d'Âristote,  d*£picure  et  de  Zenon,  de  Molina  et 
de  Kant^  d'Hegel  et  de  Cousin. 

Telle  est  la  première  partie.  Dans  la  seconde,  Tauteur  résout  une 
question  non  moins  importante.  L'homme  est-il  naturellement  bon? 
natt-il  vicieux?  Prenant  parti  entre  les  deux  systèmes  opposés,  M.  Ram- 
bosson reconnaît,  dans  l'homme,  des  prédispositions  en  partie  bonnes  et 
en  partie  mauvaises.  L'individu  hérite  des  dispositions  physiques  et 
morales  de  ses  parents  pour  le  bien  comme  pour  le  mal.  Mais  il  peut 
réagir  contre  elles,  parce  qu*il  est  libre,  c'est-à-dire,  suivant  la  défini- 
tion de  M.  Rambosson,  parce  qu'il  a  pouvoir  de  $e  conformer  à  la  loi 
absolue  du  devoir ,  malgré  les  tendances  et  les  sollieitalions  contraires. 

Parle  bon  usage  de  sa  liberté,  l'homme  pratique  la  loi  du  bien,  mais 
c'est  au  prix  de  nombreux  sacrifices.  A  ces  sacrifices,  il  faut  une  récom- 
pense; il  faut  que  la  vertu  et  le  vice  ne  soient  pas  sur  le  pied  d'égalité. 
Sans  cela,  Dieu  manquerait  à  la  loi  absolue  de  la  morale;  il  n'aimerait 
pas  chaque  être  selon  sa  juste  valeur.  De  là,  lanéeesstté  d'une  sanction 
qui  atteigne  l'âme  après  cette  vie. 

A  ces  études,  M.  Rambosson  a  joint  la  solution  de  plusieurs  ques- 
tions secondaires  :  l'influenae  de  réduca;tion  et  celle  du  régime 
physique  sur  l'état  moral  de  l'homme.  Dans  cet  ouvrage,  excellent 
résumé  de  la  science  du  devoir,  les  idées  sont  justes  et  le  style  excel- 
lent. Parfois  les  formules  diffèrent  des  expressions  ordinaires,  mais 
alors  elles  sont  justifiées  par  de  sérieux  arguments.  Ce  livre  fait  penser 
beaucoup,  et  éclaire  d'une  vive  lumière  quelques  points,  d'ordinaire 
bien  obscurs,  en  particulier  la  question  du  libre  arbitre  en  Dieu.  Nul 
n'était  plus  capable  que  l'auteur  de  triûter,  à  la  fois,  et  la  science  de  la 
nature  et  la  science  de  l'âme  humaine.  Nous  croyons  cependant  que 
l'auteur  se  trompe,  s'il  a  la  confiance  que,  désormais,  toute  discussion 
cessera  sur  le  sujet  qu'il  étudie.  Sa  formule  même  peut  être  le  point 
de  départ  d'Épicure  et  celui  de  Zenon.  Epicure  dira  seulement  que  le 
plaisir  a  plus  de  valeur  que  le  sacrifice,  et  Zenon,  d'une  appréciation 
contraire,  tirera  une  solution  opposée.  La  raison  de  ces  différences  est 
que  la  morale  est  une  science  pratique,  et  que  les  définitions  les  meil- 
leures ne  supprimeront  pas  les  passions  humaines.  La  vérité  est  dans 
le  mot  de  Leibniz  :  «  Si  la  géométrie  s'opposait  à  nos  passions  autant 
que  la  morale,  nous  ne  la  contesterions  guères  moins,  malgré  toutes  les 
démonstrations dEuclydo  etd'Archimède.  »  E.  Beurlibh. 


—  iH  — 

Dictionnaire  de  In  santé,  ou  Hépertolre  d'bysléne  pra- 
tique À  l'usage  des  fan&tllea  et  des  écoles»  par  le  docteur 
J.  B.  FoNssAGRivES,  professcur  d'hygiène  et  de  clinique  des  enfants  et  des 
TÎeillardâ  à  la  faculté  de  médecine  de  Montpellier.  Paris.  Ch.  Delagrare, 
4875.  Gr.  in-8  à  2  eol.,  publié  en  liTraisons  mensuelles  de  5  fouilles  (BO  p.) 
au  ptrij^  de  1  fr,  50  (deux  livraisons  çax%  paru). 

Les  lecteurs  du  Polybiàlion  connaissent  déjà  la  plupart  des  ouvrages 
du  docteur  Fonsrtagrires,  dont  nous  avons  successivement  rendu 
compte,  au  fur  et  à  mesure  de  leur  publication.  Celui-ci  en  est,  en 
quelque  sorte,  le  couronnement,  et,  désormais,  à  côté  de  tous  les  dic- 
tionnaires usuels,  il  faudra  placer  celui  de  la  santé.  Il  y  avait  là  une 
importante  lacune  à  combler,  et  jamais  Topportunité  de  cette  publica- 
tion n'avait  été  plus  pressante.  On  s'occupe  de  tout,  excepté  de  sa 
santé  :  il  semble  que  cet  intérêt,  qui  dépasse  cependant  en  importance 
tous  les  autres  intérêts  matériels  et  qui  les  met  en  valeur,  si  Ton  peut 
s'exprimer  ainsi,  ne  mérite  pas  qu'on  j  songe.  Il  rogne,  à  ce  sc^et,  une 
sorte  de  fatalisme  inconscient  qui  pèse  lourdement  sur  la  vie  humaine. 
Les  peuples,  dit-on,  n'ont  que  le  gouvernement  qu'ils  méritent  :  avec 
bien  plus  de  raison  l'on  peut  affirmer  que  les  familles  n'ont  que  la 
santé  qu'elles  méritent,  c'est-à-dire  qu'elles  conquièrent  de  haute  lutte  : 
il  faut  violenter  la  santé  pour  arriver  à  sa  possession,  de  même  que 
l'Évangile  nous  apprend  qu'il  faut  violenter  le  royaume  du  ciel  ;  en 
sorte  que  la  conquête  des  deux  biens  suprêmes,  dans  Tordre  matériel 
et  dans  l'ordre  spirituel^  ne  peut  s'obtenir  que  par  la  vigilance,  la 
volonté,  l'opiniâtreté  dans  la  recherche. 

En  général,  on  ne  se  rend  pas  un  compte  suffisant  de  la  nécessité  de 
cette  lutte  de  tous  les  instants.  Tout  le  monde  veut  se  bien  porter, 
mais  personne  ne  fait  ce  qu'il  faut  pour  atteindre  ce  but;  personne  ne 
songe  à  s'instruire  des  voies  et  moyens  à  suivre  pour  y  arriver.  Qu'on 
examine  la  bibliothèque  d'un  homme  à  l'esprit  cultivé,  c'est-à-dire 
choisi  parmi  ceux  qui  passent  pour  prendre  souoi  de  tout  ce  qui  peut 
intéresser  notre  humaine  nature,  et  l'on  aura  la  mesure  de  cet  incom- 
préhensible abandon  d'un  pareil  intérêt.  Les  lettres;  les  sciences, 
l'histoire,  la  géographie,  l'économie  politique,  la  biographie,  etc.  y 
ont  leurs  dictionnaires,  encyclopédies  abrégées  qui  porteût  rapidement 
l'esprit  au  renseignement  qu'il  recherche  :  mais  où  trouvera-t-on  le 
dictionnaire  qui  conseillera  sur  les  questions  d'hygiène  pratique,  sur 
celles  relatives  à  l'éducation  physique  des  enfants,  sur  les  soins  à 
donner  aux  malades  pour  seconder  l'action  du  médecin  sans  jamais 
songer  à  le  remplacer,  recueil  pratique,  exclusif  de  toute  ingérence 
dangereuse  dans  les  choses  de  Ja  médecine  et  renfermant  ses  conseils 
dans  les  limites  étroites  où  ils  ne  peuvent  donner  qu'une  lumière 
utile?... 

Telestl'espnt  du  nouvel  ouvrage  de  l'éminent  professeur  d'hygiène, 


—  112  — 

qui  a  déjà  tant  fait  pour  la  vulgarisation  des  saines  doctrines  et  que  la 
faveur  totgours  croissante  du  public  soutient  depuis  longues  années 
dans  rentier  accomplissement  do  sa  tâche.  L'idée  générale  du  livre 
se  dégage  nettement  dans  l'une  de  ses  épigraphes  :  a  II  y  a  une 
hygiène  domestique  et  des  soins  domestiques,  il  n'j  a  pas  de  médecine 
domestique.  »  Cette  parole  paraîtra  dure  à  ceux  qui  croient  possible 
la  médecine  populaire,  et  qui  s'imaginent  que  la  médecine  vraie  ferme 
au  public  les  portes  du  temple  dans  un  intérêt  de  corporation  et  pour 
rehausser  son  prestige.  Elle  est  cependant  rigoureusement  exacte. 
Khjgiène  est  faite  pour  prévenir  les  maladies^  mais  une  fois  la  maladie 
arrivée  au  chevet  domestique,  le  médecin  devient  nécessaire.  Si  le 
premier  venu  fait  de  la  médecine,  où  s'arrêtera  la  limite  à  laquelle 
cette  médecine  perdra  son  caractère  seco arable  pour  devenir  aven- 
tureuse ?  Comment  cette  science  si  pleine  d'obstacles,  si  enveloppée 
d'obscurité  pour  ceux-là  même  qui  donnent  toute  leur  vie  à  son  étude, 
pourrait-elle  être  réellement  accessible  à  ceux  qui  ne  lui  donnent  que 
leurs  prétentions?  Déûons-nous  de  ce  qui  nous  paraît  facile  :  c'est  un 
pur  mirage  de  l'ignorance. 

Le  Dictionnaire  du  docteur  Fonssagrives  combat  donc  toutes  les 
tentatives  innombrables  qui  ont  été  faites  pour  apprendre  aux  gens  à 
se  soigner  et  à  soigner  les  autres,  tentatives  dont  la  plupart  ont  trop 
souvent  un  tout  autre  mobile  que  l'intérêt  public,  et  dont  les  mieux 
intentionnées  n'aboutissent,  en  général,  qu'à  propager  des  idées  fausses 
et  des  pratiques  périlleuses.  Son  but  est  de  faire  toucher  du  doigt  les 
innombrables  causes  de  maladies  au  milieu  desquelles  se  meut  notre 
santé  ;  de  pousser  à  faire  de  l'hygiène,  pour  empêcher  d'être  malade  ; 
de  faire  au  charlatanisme  une  guerre  sans  merci  ;  de  combattre  les 
préjugés  et  l'ignorance,  et  d'arrêter  le  courant  qui  nous  entraîne  à 
faire  de  la  médecine  quand  nous  sommes  malades. 

L'auteur  a  sa  philosophie,  que  nous  avons  déjà  entrevue  dans  ses 
précédents  ouvrages.  Il  croit  à  la  mission  morale  de  la  médecine  :  il 
estime  qu'elle  -  éluderait  son  devoir  si  elle  n'élevait  l'homme  en  le 
secourant,  et  qu'elle  le  trahirait  d'une  façon  coupable  si  elle  l'abaissait. 
Ce  livre  est  donc  \mQ  œuvre  de  spiritualisme chrétien^eino\i&  en  {élioiiona 
l'auteur  bien  sincèrement.  Inutile  d'ajouter  que  c'est  un  vrai  livre  de 
famille,  et  que  la  critique  la  plus  sévère  n'y  relève  aucun  article,  aucun 
mot  qui  puisse  faire  payer,  par  le  froissement  d'un  sentiment  délicat^ 
la  lumière  qu'il  apporte. 

Quant  à  la  manière  du  livre,  nos  lecteurs  la  connaissent  d'avance. 
Selon  Thabitude  du  docteur  Fonssagrives,  elle  est  facile,  claire,  sans 
prétention,  persuasive  par  son  tour  familier,  procédant  avec  les  allures 
pénétrantes  de  la  causerie.  Dans  les  premières  livraisons,  les  articles 
abstinence,  allaitement^  annonces  médicales,  bains^  boissons^  clioix  d'un 


appartement,  etc.  nous  ont  Bortont  frappé  par  ce  caractère  spécial  à 
Tautear  de  se  placer  toiigonrs  dans  la  réalité  des  besoins  véritables 
des  familles^  et  de  leur  parler  à  la  fois  le  langage  de  la  sensibilité  et  du 
bon  sens. 

Nous  souhaitons  à  ce  livre  le  même  succès  qu'à  ses  devanciers,  car 
il  respire,  d*un  bout  à  Tautre  et  jusque  dans  ses  plus  petits  articles, 
selon  Texpression  même  de  la  Gazette  hebdomadaire  de  médecine ^  l'amour 
de  la  vérité  et  du  bien  public.  Rbné  Kbrvilbr. 


DeiDse  macabre,  peinte  en  1^5UI»  an  cimeU^re  de* 
Innocenta,  /h^-sûnite  de  Tédîtion  de  1484,  précédé  de  recherches,  par 
Tabbé  Valbntiiy  Dufour,  parisien.  Paris,  Léon  Willem,  1875.  In-4  de  52  p., 
avec  flg.  grav.  —  Prix  :  8  francs. 

M.  Tabbé  Yalentin  Dufour  a  eu  la  bonne  pensée  de  reproduire,  en  la 
réduisant,  l'édition  de  la  Dame  macabre^  datant  de  14^  (sept.  1485). 
Malheureusement,  il  a  cru  devoir  raccompagner,  sous  le  nom  de 
Recherches,  de  cinquante  pages  in-quarto  de  considérations,  dans  les- 
quelles il  expose  tout  ce  qu*il  sait,  et  surtout  ce  qu*il  ne  sait  pas,  de 
l'histoire  du  mojen  &ge.  L'auteur^  mécontent  des  travaux,  assez  con- 
sidérables cependant,  qui  existent  sur  la  matière,  nous  explique,  dans 
sa  préface,  qu'il  a  voulu  étudier  le  sujet  d'après  une  nouveUe  méthode, 
en  se  reportant  aux  sources  ;  et  il  se  flatte  d* avoir  rencontré  des  «  ré- 
sultats inattendus.  »  En  effet,  il  enseigne  que  le  moine  Théophile 
vivait  au  huitième  siècle  (p.  15),  que  Gerson  (p.  41)  est  l'auteur 
de  Y  Imitation  de  Jésus- Christ  (ce  qui  est  inadmissible  depuis  le  beau 
travail  de  M.  Arthur  Loth);  —  que  Louis  d'Orléans,  second  fils  de 
Charles  Y,  était  comte  «  dbs  Vertus  en  Champagne  (p.  28);  »  que  le 
même  prince  {ibid)  fut  tué  de  q  guet  a  pensA,  »  etc.,  etc...  Tout  cela 
ne  touche  guère  à  la  danse  macabre,  et  je  me  garderais  bien  de  re- 
procher à  l'auteur  son  défaut  de  préparation  en  histoire  politique,  en 
histoire  de  l'art,  en  histoire  littéraire  et  en  philologie,  s'il  n'était 
lui-même  (p.  14  et  15)  justement  sévère  pour  les  billevesées  des  écri- 
vains incompétents. 

Il  est  fort  difQcile  de  suivre  la  pensée  de  l'auteur  à  travers  un  laby- 
rinthe de  digressions  et  de  la  saisir,  noyée  qu'elle  est  dans  un  verbiage 
intarissable.  On  arrive  cependant  à  découvrir  qu'il  veut  établir  un 
rapprochement  entre  une  peinture  de  la  chapelle  d'Orléans  aux  Céles- 
tins  de  Paris  et  les  peintures  du  charnier  des  Innocents  ;  qu'il  prétend 
que  la  danse  macabre,  gravée  et  éditée  en  1484,  est  la  copie  de  ces  pein- 
tures du  cimetière  parisien  ;  enfin,  que  les  vers  qui  accompagnent  la 
danse  ont  été  composés  par  Oeraon.  M.  l'abbé  Dufour  ne  démontre 
pas  le  moins  du  monde  que  la  peinture  de  Louis  d'Orléans,  aux  Céles- 
tins,  soit  du  quinzième  siècle  comme  il  le  dit.  Il  y  a  une  inscription 

Août  1875.  T.  XIV,  7. 


formelle  qui  date  cette  peinture  du  règne  de  LouiA  XII.  Cette  insorip- 
tion  existe  aussi  bien  dans  le  dessin  de  la  collection  Gaignières  d*Ox- 
ford  que  dans  le  dessin  de  M.  Lenoir.  M.  Dufour  n'a  pas  même  pris 
la  peine  de  vérifier  ce  fait.  Avant  de  s'inscrire  en  faux  contre  Topi- 
nion  ordinairement  reçue,  n'aurait*ilpas  dû  se  mettre  en  état  de  prou- 
ver son  assertion?  Quand  M.  Dufour  afftnne  à  tort  et  à  travers  que 
Louis  d^Orléans  porte  le  costume  de  Célestin  (p.  36),  il  se  trompe.  Le 
duc  est  revêtu  d*nn  o  manteau  vermeil  doublé  de  vair,  »  et  ce  costume 
est  celui  des  chevaliers  de  Tordre  de  TÉtoile.  Voir  les  statuts  de  cet 
ordre. 

a  Enl485|»  dit  l'auteur,  «  c^est-à-dire,  soixante  ans  après  que  cette 
peinture  (fa  danse  macabre)  ait  été  exécutée,  Guyot  Marchant  envoya 
dessiner  les  fresques  que  reproduisirent  ses  dessinateurs  sur  bois,  tandis 
qne  ses  typographes  reproduisaient  les  strophes  qui  les  expliquaient.  » 
Il  est  impossible  d^admettre  cela.  En  effet,  si  Ton  peut  accepter,  comme 
le  laissait  entendre  M.  Bonnardot  {Revue  univenelle  des  Arts^  t.  III| 
p.  11  et  suiv.),queles  peintures  du  charnier  ont  inspiré  Féditeur  pari- 
sien, on  ne  peut  soutenir  que  les  dessins  gravés  soient  des  copies  des 
peintures  exécutées,  suivant  M.  Dufour,  au  commencement  du  quin- 
zième siècle.  Style,  dessin,  costumes,^  allégorie,  tout  date  de  la  seconde 
moitié  de  ce  siècle.  Si  le  charmer,  comme  le  prétend  M.  Dufour,  était 
peint  en  1425,  il  est  parfaitement  certain  que  nous  ne  possédons 
pas,  dans  l'édition  de  Gujot-Marchant,  la  reproduction  exacte  de  la 
danse  primitive.  Ce  résultat  erroné  des  recherches  de  M.  Dufour  ne 
lui  est  pas  personnel  et  ne  saurait  être  rangé  au  nombre  des  «  résultats 
inattendus.  »  Les  derniers  éditeurs  de  la  Panse  macabre  s'étaient  déjà 
trompés  avant  lui. 

Le  manuscrit  latin  14,904  de  la  Bibliothèque  nationale,  provenantde 
saint  Victor,  contient  quelques  œuvres  de  Gerson  et  de  Nicolas  de  Cla- 
manges,  ainsi  que  le  texte  de  la  Danse  macabre  édité  en  1485.  M.  Du- 
four en  conclut  que  ce  texte  est  Tœuvre  de  Gerson  ;  et,  sans  autre 
preuve,  il  inscrit  le  nom  de  Gerson  sur  le  titre  de  sa  réimpression.  Voici 
ce  titre  :  Là,  Dansb  macabrb,  com poséb  par  Maist&b  Jbhan  Qbrson, 
1425.  C'est  trop  de  sans  gêne.  On  procédait  avec  plus  de  critique  en 
plein  quinzième  siècle.  L.  Courajod. 


BELLES-LETTRES 

Et'Odyssée  d*Honiëre  i  texte  grec,  revu  et  corrigé  d'après  les  dior- 
thoses  alexandrines,  accompagné  d'un  commentaire  critique  et  explicatif, 
précédé  d'une  introduction  et  suivi  de  la  Batraehomyomaehie,  des  Hymms 
homériqurn,  etc.,  par  Alkzis  Pibrhon.  Paris,  Hachette,  1B75.  2  vol.  in-8  de 
LXXV-654  et  656  p.  —  Prix  :  i6  fr. 

Ces  deux  volumes  achèvent  l'édition  d*Homère,  entreprise,  depuis 


—  116  — 

de  longues  années  déjà^  par  M,  Pierron.  Noas  avons,  en  son  temps, 
annonoé  (t.  III,  p.  211,  et  t.  IV,  p.  213)  les  deux  volumes  de  V Iliade^ 
et  nous  avons,  à  cette  occasion,  exposé  la  méthode  suivie  par 
Téditeur  qui  s^attache,  autant  que  possible,  à  la  vieille  et  célèbre 
recencion  d'Aristarque.  Son  Iliade  a  été  couronnée  par  l'association 
pour  l'encouragement  des  études  grecques.  Dans  Tlntroduction 
kV  Odyssée,  M.  Pierron  ne  revient  pas  sur  les  règles  de  la  méthode  qu'il 
8*est  in^^osée  et  qu'il  a  exposée  dans  Tintroduction  à  V Iliade;  et  il  se 
borne  strictement  à  Tétude  dn  texte  de  l'Odyssée  et  de  ses  conunen-* 
tateurs  depuis  l'antiquité  jusqu'à  nos  jours.  Il  a  tiré  un  profit  tout 
particulier  des  nouvelles  sch^Ues  publiées  par  G.  Dindorf.  Dans 
le  cours  de  son  travail,  il  lui  est  arrivé  une  aventure  analogue  à 
ceUe  de  l'homme  que  la  fortune  est  venue  trouver  dans  son  lit. 
Sans  bouger  de  Paris,  il  a  découvert,  dans  un  couvent  du  mont  Athos, 
un  manuscrit  nouveau  des  scholies  les  plus  importantes  de  ïOdyaée, 
qu'un  manuscrit  de  Venise  ne  fournit  qu'imcomplétemeot.  C'est 
en  examinant  quelques  pages  de  copies  faites  à  Vatopédi,  au  mont 
Athos,  et  trouvées  dans  les  papiers  de  feu  Blondel,  que  notre  auteur 
y  reconnut  les  gloses  correspondant  à  celles  du  Marcianus  mutilé 
de  Venise  et  paraissant  dans  toute  leur  intégrité.  Cette  découverte  fut 
appréciée  à  sa  juste  valeur  dans  le  monde  de  Térudition,  et  mission 
fut  donnée  à  M.  l'abbé  Duchesne,  un  des  membres  les  plus  distingués 
de  notre  nouvelle  école  de  Rome^  d'aller  relever  ce  supplément 
inespéré  de  gloses  homériques  sur  le  manuscrit  de  Vatopédi. 
M.  Pierron  s'est  donc  entouré  de  toutes  les  ressources  de  la  philo* 
logie  contemporaine  pour  établir  le  texte  de  son  poëte,  et  il  l'a 
accompagné  d'un  commentaire  <c  critique  et  explicatif,  »  c'est-à-dire 
consacré  uniquement  à  la  discussion  et  à  l'explication  des  passages 
difficiles  du  texte.  11  a  sagement  banni  de  ses  notes  les  commentaires 
et  les  rapprochements  purement  littéraires,  qui  eussent  réclamé 
trop  d'espace  et  dont  la  place  n'est  pas  dans  une  édition  critique. 
Pour  ne  rien  laisser  perdre  de  ce  qui  porte,  à  tort  plntdt  qu'à  raison, 
le  nom  d'Homère,  la  BatraehomyamacMe  et  les  Hymnes  homériques 
ont  été  jointes  au  second  volume  de  Y  Odyssée,  Le  vieil  Homère  est  un 
des  auteurs  les  plus  étudiés  de  nos  classes  ;  aussi  l'édition  savante  qui 
vient  de  lui  être  consacrée  rendra-t-elle  grand  service  à  notre  ensei- 
gnement. H.  G. 


€jontem  popalalre»  de  la  Orande-Bretaspne,  par  Lots  Bbuetrb. 
Paris,  Hachette,  i875.  Gr.  in-8  de  zlviu-382  pages. 

'  n  y  a  un  an  environ,  M.  Bruejre  publia  une  traduction  des  contes 
russes  recueillis  par  Ralston,  mais  il  ne  reproduisit  pas  les  commen- 
taires dont  l'érudit  anglais  les  a  entourés,  et  ne  vit  dans  ce  recueil 


—  416  — 

qu*un  livre  propre  à  amuser  les  enfants.  On  témoigna  au  traducteur 
des  regrets  de  cette  suppression;  il  continua  ses  études  dans  la  voie  de 
la  littérature  populaire,  et  arriva  facilement  à  comprendre  quel  intérêt 
peuvent  avoir  ces  récits  d'une  apparence  si  frivole;  aussi  le  volume 
dont  nous  avons  à  parler  est-il  écrit  sous  une  inspiration  toute  diffé- 
rente, et  prend-il  un  caractère  sérieux  dont  était  privé  l'ouvrage  qui 
Fa  précédé.  Il  semble  même  que,  cette  fois,  M.  Bruejre  soit  allé  un 
peu  loin  dans  le  système  des  origines  mythiques.  Sans  doute, 
dans  de  nombreuses  circonstances,  on  ne  peut  les  nier^  mais  il  ne  faut 
pas  prétendre  retrouver  partout  des  allégories  ayant  pour  but  dépeindre 
le  retour  des  saisons  ou  la  succession  du  jour  et  de  la  nuit.  Ce  qui 
semble  incontestable  maintenant,  ce  que  prouve  Textréme  diffusion  de 
récits  analogues,  c^est  qu'un  certain  nombre  de  contes  remontent  à 
des  époques  bien  lointaines,  au  temps  où  les  nations,  qui,  depuis,  les  ont 
répétés  sur  tant  de' points  différents  du  globe,  n'avaient  pas  encore 
abandonné  l'Asie,  a  Cette  conclusion^  dit  M.  Brueyre,  qui  eût  pu  pa- 
raître hardie  au  siècle  dernier,  avant  que  la  philologie  comparée  eût 
démontré  la  parenté  originelle  des  peuples  indo-européens,  n^est  plus 
maintenant  qu'un  corollaire  naturel  de  cette  découverte.  Elle  la  com- 
plète d'autre  part  en  nous  révélant,  dans  une  certaine  mesure,  le  côté 
poétique  et  religieux  de  l'antique  nation  aryenne.  »  Les  plus  anciens 
contes  anglais  remonteraient  donc  directement  à  cette  source,  ensuite 
seraient  venues  les  traditions  Scandinaves,  ayant  une  même  origine, 
puis  les  fictions  normandes,  Scandinaves  elles-mêmes  à  leur  point  de 
départ.  A  ce  fond  déjà  considérable,  se  joignirent  les  récits  inspirés  par 
certains  événements,  certains  personnages  d'époques  plus  récentes. 
Quant  aux  contes  indiens  et  persans,  quipénétrèrent  en  Europe  à  la  suite 
des  Sarrazins  ou  qui  furent  apportés  par  les  croisés,  M.  Brueyre  leur 
reconnsdt  une  grande  influence  sur  la  littérature  proprement  dite,  et, 
suivant  nous,  leur  attribue  une  action  trop  faible  sur  les  inspirations 
franchement  populaires. 

Nous  regrettons  de  ne  pouvoir  nous  arrêter  plus  longtemps  à  l'in- 
troduction de  M.  Brueyre;  elle  offre  des  aperçus  curieux;  on  y  lit  no- 
tamment des  recherches  intéressantes  sur  les  traces  que  les  croyances 
populaires  ont  laissées  dans  les  œuvres  de  divers  poètes  anglais  : 
Chaucer,  Sponsor,  Shakespeare.  Nous  y  voyons^  aussi,  que  les  héros 
rendus  un  instant  si  célèbres  par  les  pastiches  de  Macpherson,  appar- 
tiennent réellement  à  de  fort  antiques  légendes.  Les  poèmes  attribués 
à  Ossian  ont  eu,  en  réalité,  pour  thème  des  chants  dont  des  fragments 
existent  encore  en  Ecosse  à  l'état  de  traditions.  Ce  sont  ces  traditions 
relatives  aux  personnages  d'Ossian  qui,  avec  les  contes  d'origine 
aryenne,  forment  la  première  partie  du  recueil  de  M.  Brueyre.  La 
seconde  renferme  les  contes  de  Pairies;  la  troisième,  les  récits  rap« 


—  in  — 

pelant  des  événements  historiques  locaux^  les  légendes  religieuses, 
les  contes  de  nourrices»  les  fables.  M.Braeyre  a  fait  suivre,  pour  ainsi 
dire,  chaque  conte  de  Tindication  de  ses  similaires  fournis  par  diverses 
nations.  Il  a  surtout  demandé  ces  rapprochements  aux  peuples  du  Nord  ; 
ceux  du  Midi  auraient  pu  lui  en  offrir  aussi,  et  en  non  moins  grand 
nombre.  Ainsi^  le  conte  IV  de  M.Brueyre,  conte  dans  lequel  les  aven- 
tures de  Peau'iTAne  se  mêlent  à  celles  de  Cendrillon,  on  le  lit  dans  le 
recueil  catalan  de  M.  Maspons  j  Labres,  h  Jtondallayre  (2*  série, 
p.72),  dans  lesNovelk  popolari  iiciliane^  Pilusedda  (t.  I,  p.  281),  dans  les 
IVovelline  popolari  de  Comparetti:  Zuccacia  (t.  I,  p.  244);  enfin  le  début 
de  ce  récit  forme  le  commencement  du  romande  la  Mannekine^  deTépi- 
8ode  d'Éléonore  d'Aquitaine  dans  le  Victorial,  de  la  légende  de  Santa 
l/liva^  de  la  Bntoria  ddrey  deHungria^  de  la  Figlia  delredi  Daeia^  etc. 
Feman  Caballero  a  recueilli  en  Espagne  le  conte  Y,  VAne^  la  table^  et 
le  bâton.  Ce  même  conte,  Pitre  l'a  appris  en  Sicile  (t.  I,  p.  226)  ;  Com- 
paretti Ta  entendu  en  Toscane  etdans  les  marches  d*Ancône  (t.  I,  p.  31 
et  4ô).Le  conte  XIY  :  lei  Filles  du  Roi  de  Lochlin,  présente  une  grande 
ressemblance  avec  VOreiUe  du  diable  de  F.  Caballero.  Dans  le  recueil 
de  ce  dernier,  se  retrouve  encore,  sous  le  titre  les  Ames  bienheureuses^ 
le  conte  anglais  la  Paresseuse  et  ses  Tantes.  L'histoire  intitulée  De  trois 
péchés  le  moindre  se  lit  dans  le  Libro  de  los  enxemplos  (Ex.  LXXXY);  dans 
le  Libro  de  Apollonio;  elle  est  devenue  le  scget  d'un  fabliau  De  termite 
qui  s^enivra  {De  la  poésie  française  dans  les  douzième  et  treizième  siècles^ 
par  Roquefort,  p.  334),  et,  avant  defoumir  à  Pironun  petit  conte  gri- 
vois, a  semblé  au  bon  chevalier  de  La  Tour  Landry  très-propre  à  être 
débitée  à  ses  filles  comme  une  leçon  morale  (ch.  lxxxix).  Un  conte 
qui  pourrait  venir  delà  France,  c'est  celui  qui  est  intitulé  :  Baillie  Lun' 
nain.  Est-ce  qu'en  le  lisant,  M.  Bruejre  ne  s'est  pas  vaguement  sou- 
venu de  notre  joli  roman  de  Jean  de  Paris?   On  pourrait  indiquer 
d'autres  parallèles  qui  ont  échappé  à  Tattention  de  l'auteur,  qui  lui  ont 
échappé  même,  mais  bien  rarement,  dans  les  littératures  du  Nord. 
Ainsi,  le  conte  Musique  du  ciel  rappelle  une  sorte  de  complainte  popu- 
laire de  l'Allemagne  :  la  Fiancée  hongroise.  Des  rapprochements  de  ce 
genre  ont  du  reste  perdu  de  leur  importance.  Dernièrement,  en  parlant 
du  recueil  de  M.  Pitre,  un  maître,  Don  Manuel  Milà  y  Fontanals,  di- 
sait très-bien:  c  II  est  maintenant  avéré  que  beaucoup  de  ces  contes  for- 
ment comme  un  patrimoine  commun  aux  nations  de  race  aryenne.  Si 
les  coïncidences  pouvaient  surpendre  les  premiers  qui  se  livrèrent  à  des 
recherches  de  cette  nature,  à  présent  elles  constituent  un  fait  univer- 
sellement reconnu,  et,  de  même  que  cela  arrive  pour  les  poésies  popu- 
laires, quoique  à  un  degré  moindre,  les  analogies,  les  identités  se  pré- 
sentent d'elles-mêmes  à  celui  qui  feuillette  diverses  collections.  » 
Ce  n'est  pas  dire  cependant  qu'un  travail  comparatif  soit  dépourvu 


—  118  — 

d'intérêt;  bien  des  leoteurs  n'ont  ni  réradttion,  ni  la  mémoire,  ni  les 
livres  qui  faoiliterfdent  des  confîrontations  de  oette  espèce,  et  ne  sont 
pas  f&chés  de  trouver  la  besogne  faite.  Mais  enfin,  il  ne  faut  pas  qa*an 
remords  causé  par  quelques  omissions  trouble  M.  Brueyre  dans  la 
pensée,  fort  justifiée,  qu'il  a  composé  un  ouvrage  curieux,  dont  les  élé- 
ments n'étaient  pas  faciles  à  réunir,  et  qui  est  d'une  lecture  à  la  fois 
instructive  et  agréable.  Th.  db  Puymaiorb. 


Histoire  die  la  llttératare  contemporaloe  en  Italie,  «ona  le 
réifime  naltalre  (1859-1874),  par  Amédée  Roux.  Paris,  Charpentier, 
1875.  In.l2  de  428  p.  —  Prix  :  3  fr.  50. 

Nous  avons  rendu  compte  de  Y  Histoire  de  la  littérature  contemporaine 
en  Angleterre^  dont  l'auteur  est  M.  Odysse  Barot,  un  positiviste.  L'au- 
teur de  Y  Histoire  de  la  littérature  contemporaine  en  Italie  ^  dont  nous  avons 
à  parler  aujourd'hui,  est  un  libéral.  C'est  au  point  de  vue  libéral  et 
unitaire  que  M.  Amédée  Roux  étudie  la  littérature  italienne  contem- 
poraine. Rendons  d'abord  à  l'auteur  cette  justice,  c'est  que,  comme 
M.  Odysse  Barot,  M.  Amédée  Roux  a  su  renfermer,  dans  un  petit 
espace,  le  plus  de  choses  possible.  Son  ouvrage  n'a  qu'un  volume,  et 
pourtant  aucun  des  lettrés  en  tout  genre,  dont  l'Italie  s'honore^  n'est 
oublié.  M.  Roux  commence,  dans  une  introduction  remarquable,  par 
jeter  un  coup  d'œil  d'ensemble  sur  les  grands  prosateurs  et  les  grands 
poëtes  de  l'Italie  depuis  1800  jusqu'en  1859.  Après  quoi,  il  entre  réso- 
lument en  matière.  Son  /fûtotVe  est  divisée  en  dix-huit  chapitres,  dans 
lesquels  sont  successivement  passées  en  revue  les  gloires  de  l'Italie  con- 
temporaine dans  la  poésie,  le  théâtre,  l'histoire,  la  littérature  politique, 
la  philosophie,  l'éthique,  l'esthétique,  la  philologie,  la  critique,  la  fan- 
taisie et  le  roman.  H  y  a  beaucoup  de  noms  d'écrivains  peu  connus  de  ce 
câté-ci  des  Alpes  et  qui,  d'après  l'analyse  que  donne  M.  Roux  de  leurs 
œuvres,  méritent  autre  chose  que  rindifférence  et  l'oubli.  Tels  sont  les 
Tigri,  les  Zanella,  les  Pardi,  dans  la  poésie  ;  les  Giacometti,  les  Bolo- 
gnese,  les  Zamboni,  les  Baraltani^  lesMarenco,  les  Gherardi,  les  Forelli, 
dans  le  drame  et  la  comédie  ;  lesRicotti,  les  Guidici,  les  Bonghi,  dans 
l'histoire  ;  les  Donati«  les  Nievo,  les  Selvatico,  dans  le  roman. 

Les  tendresses  que  M.  Amédée  Roux  professe  pour  le  régime  nou- 
veau apparaissent,  ici  et  là,  dans  un  grand  nombre  de  ses  jugements. 
Il  se  laisse  aller  souvent,  peut-être  à  son  insu,  à  décerner  des  brevets 
d'hommes  supérieurs  à  plusieurs  littérateurs  italiens  qui  partagent  ses 
préventions  contre  «  l'ultramontanisme.  »  Il  aime  à  citer  et  à  van- 
ter les  écrivains  qui  combattent  «  le  Syllabus,  u  Néanmoins,  si 
M.  Amédée  Roux  est  éclectique  et  libéral,  il  est  loin  d'être  socialiste, 
matérialiste  et  athée.  C'est,  au  contraire,  un  spiritualiste  convaincu, 
un  déiste  très-sincère.    Il  ne  craint  pas  de  signaler  et  d'anathé- 


—  149  — 

matiser  les  tendances  pernieienaee  des  poésies  socialistes  de  Garducoi, 
et  les  sorties  déclamatoires  d^AJcide  Oliari  et  de  Gaetano  Negri  en 
favenr  de  Tathéisme.  Il  appelle  les  déma^fognes  des  c  eharlatans  igno* 
blés,  fi  n  cite  avec  éloges  des  œuvres  conçues  dansnn  excellent  esprit^ 
telles  que  les  Poésies  de  Tabbé  Zanella,  les  Légendes  dn  marquis  de 
Yillarena,  les  Essais  philologiqtsn  da  Père  Oailiani,  enfin  les  saTante 
travaux  critiques  du  docteur  Ginseppe  Pitre ,  éditeur  des  Chanis  popn* 
laires  de  la  Sicile,  et  aigourd'hui,  croyons-nous^  collaborateur  é'uat 
revue  française  qui  est  la  sœur  du  PolybibUon  :  nous  voulons  parier  de 
rimportante  Revue  des  questions  historiques, 

M.  Amédée  Roux  a  complété  sa  compacte  étude  (dont  tous  les  juge- 
ments ne  doivent  pas  être  acceptés  sans  contrôle)  par  une  liste  exacte 
des  nombreux  journaux  qui  se  publient  présentement  en  Italie. 

FiKMiN  BoiBsm. 


^îouvelles  Xjettrea  de  madame  Bm^etclilne,  publiées  par  le  mar- 
quis D«  LA  Grange,  membre  de  l'Institut.  Paris,  Amyot,  4875.  In-8  de 
8i7  p.  —  Prix  :  7  fr.  50. 

Il  ne  faut  point  trop  chercher,  dans  ces  lettres,  la  variété  des  sigets 
ni  même  la  nouveauté  du  stjle  ;  mais  plutôt  la  bonté  d*ime  et  Tesprit 
élevé  de  celle  qui  les  a  écrites.  On  Vy  retrouve  partout  amie  dévouée, 
conseillère  prudente,  sage  consolatrice,  toi^ours  d'accord  avee  elle- 
même,  et  c^est  pour  la  montrer  ainsi  que  M.  le  miirquis  de  la  Grange 
a  publié  ce  recueil.  On  devine  le  plaisir  qu*il  a  dû,  prendre  à  ajouter 
quelque  chose  à  une  mémoire  si  chère,  et  même  à  livrer  une  part  des 
joies  et  des  douleurs  intimes  qui  lui  ont  valu  les  témoignages  d'une 
telle  amitié.  Après  lui,  le  plaisir  sera  pour  ses  amis,  pour  ceux  qui  ont 
oonnn  ou  seulement  entrevu  M"*  Swetchlne,  pour  tous  ceux  qui  sln^ 
téressent  au  caractère  de  cette  femme  remarquable,  pour  tous  les 
esprits  délicats  :  mais  le  gros  du  pubUc  n'j  trouvera  pas  grand*chose. 
Ce  serait  un  tort,  si  Ton  avait  compté  sur  lui  pour  le  succès  de  cet 
ouvrage,  mais  cela  n^est  point  à  supposer  ;  et  quand  même  la  curio- 
sité n'j  trouverait  pas  d*aliment,  il  y  aura  toujours  là  quelque  chose 
qu'on  ne  rencontre  guères  dans  ce  grand  nombre  de  recueils  inédits  : 
c'est  un  parfum  de  vertu  et  de  bon  sens  qu'il  fait  toi^jours  bon  res- 
pirer, même  dans  un  livre.  G.  Phiuppok. 


Une  Belle  Ame,  on  lea  Atromatee  de«Ieaii  de  Rocheviellle. 

Pages  de  la  vingt-cinquième  annéSy  écrites  par  un  jeune  hommes  mort  à  vingt- 
cinq  anSf  et  mises  en  ordre  par  Henry  (Iilbiat.  Notre-Dame  de  Lérins, 
imprimerie  Marie-Bernard,  i874.  In-i2de  y-250  pages.  —  Prix:  3  tr. 
Jean  deRochevieilleestunjeune  gentilhomme  du  Quercj,  épris  d'art, 
de  littérature  et  de  poésie .  A  vingt-quatre  ans,  possédé  du  désir  de 
faire  quelque  chose,  il  quitte  son  vieux  ch&teau,  sa  mère,  sa  sœur,  et 


—  i20  — 

et  va  à  Paris  ppur  faire  son  droit.  Mais  là,  malgré  les  labeurs  d'un 
travail  acharné,  sa  pensée  s'envole  sans  cesse  vers  les  lieux  qu*il  a 
laissés,  vers  ceux  qu'il  aime,  et,  ne  pouvant  aller  les  retrouver  lu  i- 
méme,  il  leur  envoie  ses  lettres  et  son  journal;  pour  sa  sœur^  il  joint 
quelquefois  un  bouquet  de  pensées.  Il  écrit  un  jour:  c  Un  penseur 
chrétien  a  dit  :  Il  y  a  trois  choses  dans  ce  monde  :  «  Dieu,  le  soleil  et 
les  amis.  »  Ce  penseur  s'est  trompé,  il  aurait  dû  dire  :  ci  II  7  a  quatre 
choses  :  Dieu,  la  mère,  le  soleil  et  les  amis.  » 

Sa  mère  et  sa  sœur,  voilà  sur  la  terre  les  deux  grandes  affections  de 
JeandeRochevieille,etces  deux  affections,  il  les  cultive  àParis  comme 
à  Rochevieille.  Mais,  bientôt,  un  devoir  austère  et  une  grande  tristesse 
le  rappellent  au  pays  :  sa  mère  meurt  après  une  courte  maladie.  Quel- 
que diligence  qu'il  fasse,  il  arrive  trop  tard,  et  il  ne  retrouve  plus 
que  sa  sœur  au  foyer  de  la  famille.  Jean  de  Rochevieille  s'abîme  d'abord 
dansune  insondable  douleur;  puis  ilse  reprend  à  vivre,  parmi  ces  beaux 
paysages  et  ces  «  perspectives  ravissantes,  »  près  du  ruisseau  du 
Repentir  et  de  la  fontaine  de  Yieillecaze.  Il  caresse  la  pensée  de 
vivre  là,  avec  sa  sœur  Emma,  comme  deux  pieux  cénobites,  faisant  le 
bien  autour  d*eux,  aimant  et  aimés.  Puis,  à  cette  affection  de  sa  sœur, 
vient  se  joindre  bientôt  une  affection  plus  tendre,  celle  d'une  amie  de 
sa  sœur,  M"*  Laure  de  Pechpeyron.  Et  son  imagination  comme  son 
cœur  travaillent  et  font  de  beaux  rêves.  Rêves,  hélas  !  éclos  au  prin- 
temps et  qui  ne  verront  point  l'hiver.  La  santé  de  Jean  de  Rochevieille 
décline  chaque  jour;  le  travail  a  usé  ses  forces,  et  le  chagrin  les  a 
épuisées;  les  tristes  symptômes  d'un  mal  qui  ne  pardonne  guère  se  font 
bientôt  sentir.  Les  médecins  veulent  l'envoyer  à  Cauterets  ;  il  s'y 
refuse,  et  il  l'écrit  presque  gaiement  dans  son  journal.  Mais  cette  gaieté 
fait  mal  ;  car  on  voit  trop  le  dénoùment.  Bientôt,  en  effet,  on  lit  des 
lignes  comme  celles*ci  :  «  Rien  ne  guérit  en  moi.  b  —  «  Pourquoi  M.  le 
curé  vient-il  me  voir  si  souvent  ?»  —  «  Je  respire  très-difficilement,  s 
Puis  :  (f  J'ai  voulu  me  regarder  dans  un  miroir  et  je  me  suis  trouvé 
bien  pftle.  »  Puis,  plus  rien.  Le  31  décembre,  Jean  de  Rochevieille 
s'éteint  doucement,  et  son  dernier  cri  est  :  «  Vive  le  Ciel  I  •  Sa  sœur 
entre  au  Carmel  ;  la  terre  de  famiUe  est  vendue  ;  le  vieux  château  est 
démoli,  et,  de  Jean  de  Rochevieille,  il  ne  reste  plus  que  son  journal, 
confié  par  l'affection  de  sa  sœur  à  celle  d'un  ami,  et  qui  voit  le  jour 
aujourd'hui. 

On  a  beaucoup  abusé  dans  ces  derniers  temps,  il  faut  en  convenir, 
de  la  littérature  intime,  et  il  nous  semble  que  cet  abus  n*est  pas  sans 
danger.  Le  journal  n'est  pas  toujours  la  marque  de  cette  connais- 
sance de  soi-même  que  recommandait  la  sagesse  antique;  il  est  trop 
souvent  le  signe  d'une  préoccupation  exclusive  de  soi-même  ou  d'un 
état  maladif  de  l'âme.  A  force  de  s'écouter  vivre,  ou  oublie  facilement 


—  421  — 

les  devoirs  austèrea  de  la  vie,  et  la  contemplation  d'un  idéal  inacces- 
sible empêche  parfois  de  voir  la  réalité  sérieuse  et  pratique.  Il  n'en 
fat  point  ainsi  pour  Jean  de  Rochevieille;  Tamour  de  la  poésie  ne  lui 
fit  point  négliger  le  soin  de  ses  champs  et  de  ses  métayers,  et  le  souci 
de  sa  propre  pensée  ne  le  rendit  point  insensible  au  bien  des  autres. 
Nous  n'en  voulons  pour  preuve  que  ce  passage  de  son  journal,  par 
lequel  nous  ne  croyons  pouvoir  mieux  terminer  cette  courte  étude. 

«  Quand  j'étais  petity  je  m*en  souviens  encore,  mon  père  me  pre- 
nait souvent  sur  ses  genoux  et  me  disait  :  «  Que  veux-tu  être,  petit?  » 
Et  je  lui  répondais  suivant  l'inspiration  du  moment  :  je  voulais  être 
tour  à  tour,  avocat,  marin,  magistrat,  soldat  ou  prêtre,  —  jamais 
médecin.  Or,  voilà  que  j'ai  grandi  ;  je  ne  suis  plus  petit,  et  que  suis-je  f 
Rien.  Je  ne  suis  ni  avocat,  ni  marin,  ni  magistrat,  ni  soldat,  ni  prêtre, 
encore  moins  médecin;  je  ne  suis  rien,  si  ce  n'est  bachelier.  Dieu 
Ta  voulu  ainsi,  respectons  sa  volonté.  Mais,  si  mon  père  m'apparais* 
sait,  et  qu'il  vînt  me  poser  la  question  d'autrefois  :  a  Que  veux-tu 
être?  »  Je  répondrais  hardiment  :  a  Je  veux  être  un  remueur 
d'idées^  »  mais  un  remueur  d'idées  pour  faire  du  bien  à  mes  û^res, 
un  remueur  d'idées  pour  laisser  derrière  moi  une  trace  lumineuse  et 
bienfaisante.  »  M.  pbi  la  Rochbterib. 


€>pere  M  Vlneenxo  Mortlllaro  llarclieae  de  Vlllarena.  — 

Vol.  XIIL  —  fbMt  sd  ocMimt.  Palerme,  impr.  de  Pietro  Pensante,  1875. 
In-4  de  262  p.  —Prix  :  8  £r. 

Il  y  a  peu  de  temps  qu'il  a  été  parlé,  dans  ce  recueil^  des  œuvres 
de  M.  Mortillaro,  marquis  de  Yillarena.  Elles  se  sont  augmentées 
d'un  volume  faisant  suite  aux  Memarie  nvuedmenti  e  rimembranze. 
L'auteur  continue  à  s'y  occuper  beaucoup  moins  de  sa  personne  que 
des  événements  contemporains.  La  France  tient  une  large  place  dans 
ce  nouveau  tome,  au  premier  chapitre  duquel  elle  fournit  même  son 
titre.  Viennent  après  cela  des  pages  sur  la  longévité  de  Pie  IX, 
Napoléon  III,  M.  de  Bismarck,  le  maréchal  de  Mac-Mahon,  les  Bour- 
bons, la  Fusion  et  d'autres  personnages,  d'autres  sujets  qui  ont  récem- 
ment excité  ou  qui  excitent  encore  l'attention  générale.  Nous  l'avons 
dit  dernièrement,  M.  le  marquis  de  Yillarena  exprime  sans  ména- 
gements sa  pensée  sur  les  hommes  et  sur  les  choses.  Nous  imiterons 
cette  franchise  en  né  lui  cachant  pas  que  quelques-unes  de  ces  appré- 
ciations nous  paraissent  très-fausses.  Il  faut  vivre  à  400  lieues  de  la 
France  pour  parler  de  M.  Bazaine  et  de  M.  le  maréchal  de  Mac-Mahon 
comme  Ta  fait  M.  Mortillaro.  Il  est  aussi  favorable  à  l'un  qu'injuste 
envers  l'autre.  Ce  qu'il  a  écrit  sur  M.  Thiers  vaut  beaucoup  mieux. 
Habituellement,  du  reste.  Fauteur  se  montre  juge  équitable,  et  cette 


—  iî2  — 

saita  de  ses  Mémoires  pourra  intéresser  ceux  de  nos  leoteum  qai  s'oo- 
enpent  d'histoire  contemporaine,  non  pas  que  M«  Mortillaro  réyèle  des 
faits  noaveanXf  mais  parce  qa*il  est  cnrieax  de  savoir  quelle  est,  sur 
notre  situation^  la  pensée  d*an  politique  étranger.  M.  le  marquis  de 
ViUarena,  tout  en  faisant  un  triste  tableau  du  temps  présent,  tout  en 
craignant  de  le  voir  devenir  plus  sombre  encore,  ne  désespère  pas  de 
Tavenir.  Il  exprime  cette  confiance  dans  sa  préface  ;  il  Texprime 
encore  dans  sa  conclusion,  et,  lui  qui  abuse  des  citations,  en  emprunte 
cette  fois  une  très-belle  à  Dante.  Il  croit  que  TÉglise  se  relèvera  vieto* 
rieuse  après  tant  d* épreuves  : 

Gome  la  fronda  ehe  fl«tte  la  eima 
Nel  transito  del  reato,  e  poi  si  l«Ta 
Per  la  propria  virtù  cha  U  toblima. 

Tn.  P. 


Iftlbliotéca  délia  Gloventù  Itallana,  Torino,  Ttp.  delVOriUoHo  di 
S.  Franceseodi  Saies.  1  vol.  in-18  par  mois.  —  Prix  de  la  souscription  pour  la 
France  :  8  £r.  par  an. 

Nous  pensons  faire  une  chose  utile  en  consacrant,  de  temps  en 
temps,  quelques  articles  aux  ouvrages  destinés  à  l'instruction  de  la 
jeunesse,  ouvrages  qui  sont  trop  souvent  de  simples  spéculations  de 
librairie,  et  qu*on  ne  peut  mettre  sans  un  sévère  examen  entre  les 
mains  des  lecteurs  auxquels  ils  sont  dédiés.  Nous  parlerons  aujour- 
d'hui de  la  Biblioteea  délia  GùwentU  Ualiana.  Elle  mérite  d*étre  mieux 
connue  en  France.  Nous  ne  sommes  plus,  il  est  vrai,  au  temps  où  tout 
homme  bien  élevé  y  était  aussi  familier  avec  la  langue  du  Tasse  qu'avec 
celle  de  Cervantes,  où  M"**  de  Sévigné  se  plaisait  à  citer  des  vers  de 
rArioste,  où  Voiture  eût  écrit  aussi  facilement  un  sonnet  en  italien 
qu'en  castillan.  La  langue  anglaise,  la  langue  allemande  ont  fait  du 
tort  à  des  idiomes  dont  Taccès  nous  était  plus  facile  ;  mais  cependant, 
ces  idiomes,  nous  les  négligeons  moins  qu'il  y  a  quelques  années,  et 
l'étude  de  Titalien  surtout  est  assez  répandue  pour  que  bien  des  pères 
de  famille  puissent  nous  savoir  gré  de  leur  signaler  une  collection 
faite  avec  beaucoup  de  goût,  beaucoup  de  soin  et  avec  des  précautions 
permettant  à  leurs  enfants  de  connaître  tant  de  poètes,  tant  de  pro- 
sateurs illustres.  Par  Tindication  des  livres  précédemment  publiés, 
nous  vojons  que  les  éditeurs  de  la  Biblioteea  délia  Gioventù  ont  déjà 
donné  presque  tous  les  classiques  italiens  :  Dante  :  la  Divina  commedia; 
le  Tasse  :  La  Gerusalemme;  Pétrarque  :  Bime  seelie  ;  T Arioste  :  Bellezze 
delfOrlando;  Tassoni  :  La  Secchia  rapt^a;  Machiavel  :  Prose  seelie;  Boc- 
cace;  Sachetti,  Bandello  :  Novellepurgaie;  Celliai:  la  FiVa;Firenruola: 
Prose  seelie;  Métastase:  Drammi^  etc.  Les  volumes  de  cette  biblio- 
thèque  que  nous  avons  sous  les  jeux,  sont  eux-mêmes  parfaitement 
choisis,  intéressants  comme  fonds  et  d'un  excellent  style  ;  nous  y  remar- 


—  423  — 

qnons  Y(h$ervatore  de  Gozzi,  ce  spirituel  joarnal  écrit  à  rimitation  du 
Spectateur  anglais,  les  lettres  choisies  d'Annibal  Caro,  de  Galilée,  de 
Francesco  Redi,  an  choix  de  morceaux  dramatiques  et  de  poèmes  de 
Montii  le  Visioni  d'Alfonso  Varano,  ce  poète  que  nous  ne  connaissons 
pas  assez  et  qui,  dans  raffadissementoù  était  tombée,  au  siècle  dernier, 
la  littérature  de  sa  patrie,  eut  le  mérite  de  remonter  tout  à  coup  vers 
Dante  si  négligé,  et  de  demander  à  la  Divine  comédie^  la  sève  et  la 
force.  Les  voyages  sont  représentés  dans  ces  volumes  par  ceux  de 
Marco  Polo,  par  le  pèlerinage  en  terre  sainte  de  Simone  Sigoli,  deux 
livres  fort  anciens,  Fun  du  treizième  siècle,  Fautre  du  quatorzième, 
deux  teêti  âxlingua.  La  langue  italienne  a  été  formée  de  si  bonne  heure 
que  les  éditeurs  ont  pu  admettre  ainsi  dans  leur  collection  des  ouvrages 
d'une  date  très*reculée  ;  tels  sont  encore  le  petit  livre  intitulé 
Fiùre  di  virtU,  et  le  Trattatç  del  govemo  délia  famiglia.  Deux  des  der- 
nières publications  de  la  Biblioteea  délia  Gioventù  sont  particulière- 
ment intéressantes.  Nous  voulons  parler  de  la  Vie  de  Dante  de  Gesare 
Balbo  et  d*une  ancienne  traduction  de  V Imitation  de  Jéius-ChriBt  dont» 
dans  cette  édition,  on  attribue  Toriginal  à  Giovanni  Gersen,  abbé  des 
Bénédictins  du  couvent  de  Saint-Ëtienne  de  Verceil.  Cette  opinion^  au- 
jourd'hui très-accréditée  en  Italie,  n^'est  du  reste  pas  une  chose  nou- 
velle. Elle  a,  nous  le  croyons,  été  émise  pour  la  première  fois,  en  1738, 
par  Tabbé  Yalart.  Un  boUandiste  célèbre,  Tabbé  Ghesquiôres,  et  plus 
tard,  Tabbé  Desbillons  ont  réfuté  les  arguments  de  Tabbé  Valart,  et 
nous  ne  croyons  pas  que  depuis  on  en  ait  produit  de  nouveaux  en 
faveur  de  sa  thèse*  Nous  n^en  n'avons,  du  moins,  trouvé  aucun  dans 
une  préface  assez  longue,  trop  longue  même,  et  écrite  à  côté  du  sujet, 
qui  précède  l'édition  de  la  Biblioteea  délia  Gioventù.  Dans  cette  intro- 
duction, on  se  contente  de  parler  de  Giovanni  Gersen  comme  sUl  était 
Fauteur  incontesté  de  Fadmirable  livre.  C'est  là  ce  qu'il  aurait  fallu 
prouver;  il  aurait  même  fallu  prouver  Texistence  de  Gersen,  considérée 
comme  très-problématique  par  beaucoup  de  critiques.  Aureste,  quel  que 
soit  Fauteur  de  V Imitation^  on  a  parfaitement  fait  d'admettre  dans  la 
Biblioteea  un  livre  incomparable,  dont  la  version  a  mérité  d'être  re- 
gardée comme  te$to  di  lingua. 

Il  y  a  déjà  sept  ans  que  la,  Biblioteea  délia  Gioventù  existe,  et  chaque 
année  elle  publie  douze  volumes  ;  nous  sommes  donc  bien  loin  d'avoir 
pu  mentionner  tous  les  livres  qu'elle  a  mis  au  jour.  Nous  croyons 
cependant  que  nous  avons  pu  faire  partager  aux  lecteurs  du  Polybiblion 
notre  opinion  sur  cette  louable  entreprise.  Cette  opinion  est  si  favorable 
que  nous  voudrions  voir,  en  France,  éditer  une  collection  analogue, 
à  la  portée  des  plus  petites  fortunes  [50  c.  le  volume)  offrant  un  choix 
assez  bien  fait  pour  que  la  bibliothèque  de  la  jeunesse  puisse  encore 
être  lue  avec  plaisir  dans  l'âge  mûr  ;  éclaircie  par  des  notes  historiques 


—  «H  — 

ou  littéraires,  et  enûn  revêtae  d'une  approbation  ecclésiaatique  faite 
ponr  inspirer  toute  confiance  aux  parents.  On  pourra  nous  citer  des 
poblicationSi  dont  plusieurs  sont  très-estimables,  qui  semblent  rentrer 
un  peu  dans  ce  plan,  mais  elles  s*en  éloignent  par  divers  côtés  :  prix 
trop  élevés,  manque  d'unité,  publication  d'ouvrages  récents  et  dont  la 
valeur  n'est  pas  encore  établie.  C'est  à  nos  classiques  seulement  qu'il 
faudrait  demander  les  éléments  d'une  collection  de  ce  genre,  et  ces 
éléments,  il  7  aurait  lieu  d'aller  les  chercher  plus  loin  qu'on  ne  le  fait 
d'ordinaire.  Le  directeur  de  là  Bibltoteca  délia  Gioventu  n'hésite  pas  à 
remonter  au  treizième  siècle;  à  l'aide  de  glossaires,  de  notes  ou  de 
traductions,nécessaires,àcause  des  variations  que  notre  langue  à  subies, 
nous  pourrions  en  faire  autant.  Et  que  de  bonnes  et  belles  choses  peu 
connues  du  grand  public^  parce  qu'elles  sont  perdues  au  milieu  d'autres 
insignifiantes  ou  dangereuses,  seraient  alors  répandues  et  appré- 
ciées partout  ;  quel  charmant  volume^ fournirait  Montaigne  I  —  Une 
collection  ainsi  comprise  serait  non-seulement  une  bibliothèque  de  la 
jeunesse  :  elle  serait  aussi  une  excellente  bibliothèque  populaire  et  la 
plus  éloquente  réponse  à  ceux  qui  accusent  les  catholiques  de  favoriser 
rignorance.  Th.  de  Pdtmaiorb. 

HISTOIRE 

OéosrapUe  militaire  de  l*JBmplre  d*ilLllemac^ne,  traduite  de 
Tallemand  avec  Tautorisation  de  Fauteur,  par  E.  X.  Henri  Ruhibrik, 
licencié  en  droit,  capitaine  aux  mobiles  de  la  Charente.  Paiîs,  Sandoz  et 
Fischbacher,  1875.  In-12  de  384  pages.  —  Prix  :  3  fr.  50. 

On  a  ici  entre  les  mains  un  critérium  topique  pour  juger  si  la  supé- 
riorité géographique  de  nos  voisins  d'outre-Rhin  n'est  pas  un  peu  sur- 
faite.  Nous  convenons  très-volontiers  que  cet  ouvrage  n*est  pas  sans 
mérite.  Il  est  écrit  simplement,  avec  méthode etdarté.  Use  divise  na- 
turellement en  deux  parties,  États  du  Nord,  États  du  Sud.  La  première 
comprenant  en  vingt-deux  paragraphes,  la  deuxième  en  cinq,  la  des- 
cription des  différentes  principautés  qui  les  composent.  L'Alsace-Lor- 
raine forme  un  chapitre  spécial,  rejeté  à  la  fin  du  volume,  qui  se  termine 
par  une  table  alphabétique  assez  complète.  L'auteur  n'a  pas  cru  devoir 
adopter,  en  général^  la  description  par  bassin,  suivie  par  Th.  Lavallée 
d9Jï9  n9k  Géographie  physique  et  mUiiaire,  et  qui  est  pourtant  lajeule 
répondant  à  l'idée  exacte  de  la  géographie.  Il  a  considéré  chaque  état 
successivement  et  donné  d'abord  une  description  sommaire  des  limites 
et  de  l'aspect  des  pays,  puis  un  court  historique  des  familles  princières 
qui  l'ont  successivement  possédé  ou  gouverné,  ou  qui  en  portent  le  titre. 
Entrant  alors  dans  la  géographie  proprement  dite^  l'auteur  décrit 
l'orographie,  les  principaux  cours  d'eau,  puis  il  passe  aux  produits  et 


—  12ë  - 

ressources  da  pays,  notant  avec  soin  les  centres  de  production  cheva- 
line et  les  dépôts  de  remonte,  et  termine  par  Texposé  des  divisions 
administratives,  où  chaque  localité  est  citée  avec  plus  ou  moins  de 
détail,  selon  son  importance.  Ce  plan  est  rationnel,  mais  il  force  à  des 
redites  que  [le  système  de  Tétude  par  bassin  éviterait  avec  avantage^ 
selon  nous.  Il  n^est  parlé  que  des  routes  qui,  passant  sur  les  plateaux, 
peuvent  servir  de  lignes  d'opérations  aux  armées,  —  les  chemins  de  fer 
sont  également  en  peu  laissés  danaTombre  ;  —  de  grands  détails  sont 
donnés  sur  rétat  militaire  des  différents  Etats  ;  le  traducteur  les  a 
complétés  (p.  30  et  suivantes),  pour  la  confédération  du  Nord  seulement, 
par  un  tableau  synoptique  présentant  la  situation  en  1872  ;  c'est  donc 
aigourd'hui  un  renseignement  purement  historique.  Nous  félicitons 
Tauteur  anonyme  allemand  d'avoir  su  se  dispenser  des  rotomontades 
prussiennes  ordinaires,  qui  n'ajoutent  rien  à  la  valeur  d'un  travail 
sérieux  et  surtout  technique  comme  celui-ci,  et  de  ne  s'être  pas  donné 
le  ridicule  de  soutenir  des  assertions  dans  le  genre  de  celles  éditées 
par  je  ne  sais  plus  quel  manuel  géographique  allemand,  qui  prétend  que 
M.  de  Lesseps,  quand  il  entreprit  le  percement  deTisthme  de  Suez, 
était  consul  de  Prusse  (!)  à  Alexandrie. ••  En  somme,  cet  ouvrage  n'est 
pas  mal  fait,  et  ne  manquera  pas  d'utilité  pour  les  Français  qui  vou- 
dront le  consulter,  bien  qu'après  les  travaux  desLavallée,  Levasaeur  et 
autres,  il  ne  nous  paraisse  pas  combler  une  lacune. 

F.   DB  ROQUBFBUIL. 


Histoire  de»  persécution»  de  FB^^Use»  Jusqu'il  la  fln  des 
A^ntonlns,  par  B.  àubâ,  professeur  de  philosophie  au  lycée  Fontanes. 
Paris,  Didier,  1875.  In-8  de  470  p.  —  Prix  :  7  francs. 

Les  savants  d'autrefois  comptaient,  dans  les  cent  quatre-vingts  pre- 
mières années  de  l'Église,  quatre  persécutions,auxquelles  les  empereurs 
Néron,  Domitien,  Trigan  et  Marc-Aurèle  ont  laissé  leur  nom  ;  M.^  Aube 
a  découvert  et  prétend  démontrer  que  ce  n'est  là  qu'une  vieille  erreur. 

L'auteur  divise  son  livre  en  huit  chapitres.  Dans  le  premier,  il  re- 
trace l'histoire  de  ce  qu'il  appelle  les  disêentiments  intérieurs  de  t Église 
primitive;  dans  les  autres,  il  soumet  à  l'exaimen  de  la  critique  toutes  les 
persécutions,  depuis  celle  des  Juifs  contre  Jésus  et  les  premiers  disci* 
pies,  jusqu'à  l'avènement  de  Commode.  Deux  appendices  terminent 
l'ouvrage  :  ce  sont  des  dissertations  sur  la  légalité  du  christianisme 
dans  l'Empire  romain  pendant  le  premier  siècle, — et  sur  l'authenticité 
des  actes  du  martyre  de  sainte  Félicité  et  de  ses  fils. 

On  retrouve,  dans  ces  pages,  les  assertions  que  l'incrédulité  répète 
depuis  cent  ans,  an  nom  de  la  science.  Pierre  et  Paul  ont  les  pensées 
et  les  tendances  les  plus  contraires.  Avec  Pierre,  attaché  aux  pratiques 
de  la  Loi  mosaïque,  nous  trouvons  Jacques,  qni  semble  être  chef  suprême 


—  426  — 

de  l'Église  naissante,  et  Jean  qui  reste  fidèle  au  parti  judaïque,  et 
écrit  contre  Paul  et  contre  les  persécuteurs  VApocalypsCy  n  Bymne  de 
la  vengeance  (p.  358).  »  Paul,  ennemi  irréconciliable  des  observances 
d'Israël,  a  pour  lui  tous  les  païens  convertifl. 

Des  deux  côtés,  on  échangeait  de  dures  paroles.  «  On  se  traitait  de 
blasphémateur  et  de  faussaire,  de  visionnaire  et  de  snppôt  de 
Satan  (p.  34).  »  Les  choses  allèrent  si  loin  que  nous  ne  pouvons 
supposer  qu'il  y  ait  eu,  entre  les  deux  plus  célèbres  apôtres,  «  une  ré* 
conciliation,  même  in  exiremi»  (p.  125).  » 

La  négation  du  dogme  chrétien  n'est  point,  cependant,  la  partie 
principale  du  livre.  M.  Aube  veut  surtout  raconter  les  premières 
persécutions,  —  c'est-à-Sire  en  contester  l'existence.  Il  résume  ainsi 
sa  pensée  :  «  Pendant  ces  deux  siècles,  on  peut  dire,  en  général,  que 
les  chrétiens  ont  joui,  en  fait,  d*une  tolérance  à  peu  près  complète 
de  la  part  du  pouvoir  politique  (p.  3d2).  s  II  suit,  en  effet,  dans  le 
détail,  chacun  des  règnes  :  et,  de  ce  grand  nombre  de  martyrs  qu'ad<- 
met  la  tradition  chrétienne,  bien  peu  échappent  à  sa  haute  critique. 

Ce  n'est  pas  asses,  toutefois,  d'atténuer  la  persécution;  notre  auteur 
réussit  presque  à.  la  légitimer.  Pilate  n'a  point  dû  hésiter,  lorsqu'on  lui 
demandait  la  mort  de  Jésus,  que  condamnait  a  l'autorité  loosle  et  com- 
pétente, agissant  légalement  (p.  40).  s  Saint  Etienne,  «  jugé  selon 
(t  les  formes...,  périt  apparemment  comme  blasphémateur  de  la  Loi 
(p.  44).  s  Néron  voulut  «  purger  Rome  d'un  trop-plein  d'étrangers 
sans  aveu  et  sans  nationalité,  écumer,  si  je  puis  dire,  la  lie  de  la 
cité  (p.  104).  »  Les  chrétiens  étaient  alors  «  un  gibier  de  police 
tout  préparé  (p.  107).  •  Les  autres  empereurs,  les  Antonins  sur- 
tout, se  proposent  de  sauver  l'état,  en  poursuivant  ces  hommes  qui 
i  professent  le  mépris  de  la  patrie,  amollissent  les  âmes  par  un 
nupticisme  énervant,  les  détachent  des  mâles  devoirs  et  des  rudes 
obligations  de  la  vie  civile  et  militaire,  et,  par  leurs  attaques  et  leurs 
enseignements,  creusent,  sans  bruit,  la  mine  où  la  fortune  de  Rome 
s'engloutira  (p.  400).  » 

Voilà  le  livre  que  M.  Aube  vient  de  donner  an  public*  Ce  n'est 
point  une  œuvre  de  savant  :  l'auteur  se  platt  surtout  à  citer  M.  Renan  ; 
il  invoque  peu  les  docteurs  allemands,  et  discute  volontiers  avec  les 
archéologues  d'Italie. 

Le  style  manque  de  couleur  et  de  mouvement,  et  ressemble  trop  au 
style  d'un  mémoire.  Nous  avons  même  relevé  des  négligences  plus 
graves  ;  nous  avons  lu  fétlat  dune  haine,  éclai  cTharreur^  pour  une  haine, 
une  horreur  qui  éclate.  Nous  avons  noté  le  mot  iwrehauffé^  les  expres- 
sions :  colloque  impoeeible^  fanatieme  à  fleur  de  peau^  —  votif  criez  aprh 
euXf  —  les  chrétien»  de  chez  eux^  comme  on  dit  les  gens  de  chez  nous. 

Mais  ne  reprochons  pas  sévèrement  à  l'écrivain  ces  fautes  de  lan- 


—  127  — 


gage  :  c'est  une  qualité,  poar  une  œuvre  de  ce  genre^  de  n'avoir  point 
la  séduction  du  style  qui,  trop  souvent  en  France,  assure  le  succès  aux 
plus  méchants  livres,  Euq.  Poussbt. 


Histoire  de    l'ËflplIae   catliollciiie  en  nrence,  par  Mgr  Jager. 
Tome  XX.  Paris,  Adrien  Le  Clere,  1875.  In-8  de  588  p.  —Prix:  6  fr. 

En  ouvrant  ce  vingtième  et  dernier  volume  de  Y  Histoire  de  PÉglùe  catho' 
ligue  enFrance^  publiée  sous  le  nom  du  regrettable  Mgr  Jager,  je  crai- 
gnaisden'j  trouver  qu*un  abrégé  de  l'ouvrage  écrit  par  le  même  auteur, 
en  1852,  sous  le  titre  S  Histoire  de  t  Eglise  de  France  pendant  la  révo- 
lution,S  vol.  in-8.  Dans  les  volumes  de  1852,  je  n'avais  guère  rencontré 
qu'une  analyse  du  Moniteur,  et  j'avais  été  complètement  trompé  en  ne 
découvrant  presque  aucun  renseignement  sur  les  événements  accompli^ 
après  le  26  février  1785,  c'estrà-dire  après  l'abolition  da  culte  officiel. 
Heureusement,  mes  craintes  étaient  mal  fondées  ;  dans  l'ouvrage  publié 
en  1875,  on  cite  assez  souvent  plusieurs  histoires  particulières  qui 
fournissent  abondamment  des  renseignements  d'une  grande  valeur* 

La  principale  difficulté  que  devait  rencontrer  l'auteur  était  de  faire 
entrer,  dans  un  cadre  aussi  étroit,  tant  de  faiis  d'une  importance 
majeure  :  on  peut  dire  qu'il  l'a  vaincue  avec  succès.  Ses  récits,  néces- 
sairement fort  abrégés,  sont  empreints  de  la  teinte  sombre  qui  convient 
aux  tristes  tableaux  qui  se  pressent  sous  sa  plume.  Il  n'a  garde 
néanmoins  d'oublier  les  traits  héroïques  que  la  foi  et  la  charité  pré- 
sentent de  toutes  parts  durant  ces  jours  où  les  vertus  chrétiennes 
brillèrent  du  plus  vif  éclat  près  des  vices  les  plus  honteux  et  des 
crimes  les  plus  noirs.  A  côté  de  la  Convention  proscrivant  en  masse 
tous  les  membres  du  clergé  fidèles  à  leurs  serments,  on  admire  la 
charité  de  Pie  YI,  du  cardinal  Qioannetti,  à  Bologne,  du  cardinal 
Mattei,  à  Ferrare,  du  cardinal  Lorenzana  et  de  Févéque  d'Orense,  de 
Que vedo,  en  Espagne.  L'Allemagne,  la  Suisse,  TAngleterre  surtout 
rivalisent  de  générosité  envers  les  proscrits.  La  mort  de  Louis  XVI, 
de  Marie-Antoinette,  de  M""*  Elisabeth  et  d'une  foule  d'autres  victimes 
si  grandes  dans  leur  simplicité,  soulagent  l'esprit  des  horreurs  com- 
mises par  les  montagnards  et  des  l&chetés  non  moins  repoussantes  des 
girondins. 

On  aime  à  voir  l'auteur  s'appliquer  à  faire  ressortir  le  caractère 
avant  tout  religieux  du  soulèvement  des  populations  de  l'Ouest.  Il 
allègue  avec  raison  les  manifestes  de  la  Vendée,  à  son  début;  il  aurait 
peut-être  pu  citer  aussi  le  manifeste  des  paysans  manceaux,  présenté 
au  district  d'Ëvron,  inspiré  par  les  mêmes  principes  et  publié  plusieurs 
mais  avant  le  soulèvement  de  la  Vendée.  (V.  l'Église  du  Mans  durant 
la  Bimtution,  t.  I,  p.  380.) 

Il  n'est  point  d'âme  si  froide  qui  puisse  demeurer  indifférente  en 


—  liB  — 


«^*«.ii«  des  combâte  Utrés  p*r  l'»mé«  catholique,  des  affreuses  «da- 
Lur.rsa  mine,  ei  de.  atrocité,  commis,  par  l'armée  répubUcame. 
S  «Wes'  P?lttt  «on  plus  qui  ne  «>lt  profondément  émue  a  la  Tue  de 
!L  .rirT»  martj»  qui  arroaèrent  de  leur  nng  le.  échafaud.  de  la 
Z^;^^  rSHmouT^it  ert  le  .peetale  de  ««i  con««««»  de  U 
ÎÏ^Undl^wnU*  long.  tourmenUda».  lUed'Aix,  p>«.  ^oà^^^ 
tRÎîltîuî.  uu Sk  du  bS à BUj*.  et  d.» mitte  «*«.  endjorti.  car 
K  t^^la  ÛbU  ee  eo^^it  «biteas-t  de  geMea.  d.»  l-q«ll« 

ax^  ï«  *o«t  aam  w*le>  ««»««»<*«««  *»^  »~  ■•»"  " 
«o«^«  Gérant  l*«w  «•¥«*««  «f^  -..yi,  ^ 

^  B««aV  éTê<p«  de  Troy«a,  ^S79,  ^  de  »n«l,  :^«»^ 

«odific  d'après  1«  wn»igii«entB  «iwnnspBrM.  de  la  QmtmoB, 

dans  «M»  livre:  les  ftrti«*^i»*w*»'  . 

Lwjog^wnts  qu'il  porte  «UT  Grégoire,  «r  Bovin,  «•  THieiw, 

,Bf»e*t»rle  cardinal  Oapra»,  bow  «fmW«n  de-veir  Témir  ta»  1« 

«dftages.  Il  en  «era  de  ««me.  nous  le  croyons,  po«r  las^fréaiiMM 

sur  l9pT«ner  coMol  et  le  concordat.  De  U  pm  do  Sw^wam  Pw** 

èî  de  CoBMlvi.  le  concordat  fat  un  acte  dicfté  par  les  fans  ta  ph» 

pores  de  religion  ;  de  la  part  du  prewer  conwl,  ce  fat  m  acte  d'b^ 

politique,  entaché  de  «auwise  foi  par  l'immixtiomnihreptiee  d«««MW 

©^«liqnes.  Bn  «onme,  ce  ftat  une  neane  avantageve  à  r^i«,  « 

qui  eat  une  portée  beaucoup  plus  grande  que  »c  l'awii  ^éva  cal» 

oui  le  pwnnier  laprovoqna.  1>«  ï*«»  ^"^ 


_^ r\ 

ramainrjtisq^eau  traite  de  Frmicpwt.  par  1  abbt   A.  ï^«**""*^^''^  *" 
ISTS.  hx-^  de  K«<^»  T*»?^.  —  ^rix  :  ji  fr. 

d»8  wn  IWifqrretfeg /wPBweNW  gfTWiBm^ 


-  129  — 

la  mcmarchiepaqufa  noêjowrty  noos  araieni  précédemment  raconté  les 
grandes  luttes  nationales  contre  les  Germains,  Tentons,  Saxons  et 
antres  enyahisseurs  d*oatre-Rhin.  M.  Tabbé  Derameconrt  embrasse 
anjonrdlini  nn  cadre  pins  large,  plus  complet  et  qni  comprend  Fhistoire 
de  France  tont  entière.  Nons  Fen  félicitons.  An  milieu  des  désastres 
contemporains,  il  est  bon  d*étndier  comment  la  Franca  de  nos  pères 
8*e8t  inunortalisée  dans  les  guerres  soutenues  pour  son  indépendance  | 
comment  elle  a  supporté,  dans  la  fortune  adverse,  des  démembrements 
comme  celui  de  Bretignj,  plus  douloureux  peut-être  encore  que  ceux 
dont  nous  sommes  témoins,  et  comment  elle  s^est  relcYéepar  la  foi  en 
Dieu,  la  fidélité  à  la  rojauté^le  travail  et  le  sacrifice.  L^histoire  consi- 
dérée de  bauty  a  n*est  pas  seulement,  dit  Cicéron,  la  dépositaire  des 
éyénements  et  le  témoin  de  la  vérité,  elle  est  encore  Tâme  des  sou- 
venirs et  la  grande  conseillère  de  la  vie  humaine.  »  A  ce  titre,  Ton* 
Tragede  M.  Derameconrt  est  bon  à  lire  et  à  méditer,  quand  même  il  ne 
joindrait  pas,  comme  le  talent  de  l'auteur  Ta  pu  réaliser,  le  mérite  lit- 
téraire  àTintéret  des  faits.  M.  Derameconrt,  selon  son  programme,  fait 
Fhistoriquede  la  défense  nationale  depuis  César  etyercingétorix(chap.i, 
p.  5  à  45)  jusqu'au  traité  qui  nous  a  arraché  l'Alsace  et  une  partie  de 
la  Lorraine.  En  six  chapitres,  il  passe  en  revue  les  Invasions  barbares, 
la  guerre  de  Cent  ans,  période  parfaitement  bien  traitée  selon  nous 
(p.  85  à  215);  la  grande  lutte  entre  les  maisons  de  France  et  d*  Autri- 
che (chap.  iv);  les  guerres  de  TEmpire  et  de  la  Révolution,  et  enfin 
l'Invasion  allemande  de  1870.  Cette  dernière  partie  est  traitée  avec 
beaucoup  plus  de  détails  que  les  autres,  et  nous  le  regrettons  presque  : 
—  les  ouvrages  spéciaux  tant  militaires  que  politiques  abondent  sur 
cette  période,  et  le  détail  des  marches  et  contre-marches  de  tel  ou  tel 
corps  belligérant  est  encore  su£9samment  présent  à  tous  les  esprits  ; 
il  demande,  d'ailleurs,  à  être  exposé  par  une  plume  technique.  Il  nous 
semble  que  si  Fauteur  avait  un  peu  raccourci  ce  chapitre,  s'en 
tenant  anx  grands  enseignements  moraux  d'une  lutte  si  tristement 
menée  matériellement  de  notre  côté,  mais  si  féconde  en  si^gets  de 
réflexions  sur  les  vraies  conditions  de  la  vie  et  de  la  grandeur  d'une 
nation,  il  aurait  pu  s'étendre  davantage  sur  les  chapitres  précédents, 
trop  rapides  en  quelques-unes  de  leurs  parties.  Malgré  ce  desideratum^ 
nous  n'éprouvons  aucune  hésitation  à  louer  Y  Histoire  de  la  Défense  na^ 
lianak  et  à  la  recommander  à  tous  les  esprits  réfléchis  et  patriotiques. 
Nous  ne  doutons  pas  que  sa  lecture  ne  soit  pour  beaucoup  pleine  de 
charme  et  d'intérêt,  et  que  Fauteur  ne  recueille  dans  les  suffrages  de 
ses  lecteurs  la  juste  récompense  de  ses  travaux. 

F.  DB  ROQUBFBUXL. 


Août  i87ii.  T.  XIV,  8. 


—  128  — 

présence  des  combats  livrés  par  Tarmée  catholique,  des  affreuses  cala- 
mités de  sa  ruine,  et  des  atrocités  commises  par  Tarmée  républicaine. 
Il  n'en  est  point  non  plus  qui  ne  soit  profondément  émue  à  la  vue  de 
ces  nombreux  martyrs  qui  arrosèrent  de  leur  sang  les  échafauds  de  la 
Terreur.  Non  moins  émouvant  est  le  spectale  de  ces  confesseurs  de  la 
foi  qui  endurèrent  de  longs  tourments  dans  111e  d*Aix,  près  Rochefort, 
à  Bordeaux,  au  fort  du  Hâ,  à  Blaje,  et  dans  mille  autres  endroits,  car 
la  terre  de  la  liberté  se  couvrit  subitement  de  geôles,  dans  lesquelles 
les  plus  afflreux  scélérats  firent  endurer  tous  les  tourments  à  ceux  qui 
avaient  le  cœur  assez  noble,  la  conscience  assez  droite  pour  ne  pas  se 
courber  devant  leurs  caprices  impies. 

Sans  doute,  il  serait  possible  de  signaler  beaucoup  d*oublis  ou 
d'omissions  dans  les  noms  des  victimes  qui  offrirent  leur  vie  pour 
Dieu  et  la  patrie;  nous  regrettons,  en  particulier,  que  Ton  ait  passé  sous 
silence  la  mort  des  quatorze  prêtres  exécutés  à  Laval  le  21  janvier 
1794,  d'autant  plus  que  la  cause  de  leur  martyre  est  absolument 
exempte  de  toute  couleur  politique.  Nous  dirons  aussi  que  plusieurs 
noms  propres  n*ont  pas  été  reproduits  avec  assez  d'exactitude,  comme 
de  Bessal,  évéque  de  Troyes,  p.  279,  pour  de  Barrai;  Pierre  Denain, 
p.  297,  pour  Denais;  Belmar,  évéque  de  Cambray,  p.  427,  pour  Bel- 
mas.  Ce  sont  de  simples  fautes  d'impressions,  mais  qui  ont  une  certaine 
importance.  Il  nous  semble  que  Fauteur  ne  s'est  pas  exprimé  d'une 
manière  sufiftsamment  complète  sur  Torigine  de  la  petite  Église,  p.  248, 
et  nous  croyons  que  son  jugement  sur  le  général  Hoche  doit  être 
modifié  d'après  les  renseignements  fournis  par  M.  de  la  Ooumerie, 
dans  son  livre  :  les  Ruines  de  Quiberon. 

Lesjugements  qu'il  porte  sur  Grégoire,  sur  Bemier,  sur  Theiner, 
même  sur  le  cardinal  Caprara,  nous  semblent  devoir  réunir  tous  les 
suffrages.  Il  en  sera  de  même,  nous  le  croyons,  pour  les  appréciations 
sur  le  premier  consul  et  le  concordat.  De  la  paii  du  Souverain  Pontife 
et  de  Gonsalvi,  le  concordat  fut  un  acte  dicté  par  les  vues  les  plus 
pures  de  religion  ;  de  la  part  du  premier  consul,  ce  fut  un  acte  d'habile 
politique,  entaché  de  mauvaise  foi  par  l'immixtionsubreptice  desarticles 
organiques .  En  somme,  ce  fut  une  mesure  avantageuse  à  l'Église,  et 
qui  eut  une  portée  beaucoup  plus  grande  que  ne  l'avait  prévu  celui 
qui  le  premier  la  provoqua.  Dom  Paul  Piolin . 


Histoire  de  %m  Oéfeose  nationale  en  France»  depuis  Vlnvaiion 
romaine  jusqu'au  traité  de  Francfort,  par  l'abbé  A.  Derambcourt,  prêtre  de 
la  Société  de  Saint-Bertin,  ancien  professeur  d'histoire.  Paris,  Olmer, 
1875.  In-8  de  580  pages.  —  Prix  :  5  fr. 

M.  Heinrich,  dans  ses  Invasions  germaniques  en  France^  et  M.  F.Combes, 
dans  son  Histoire  des  Invanons  germaniques  en  France ^  depuis  Vùrigine  de 


-  129  — 

la  numarchiejttsqu'a  nosjours^  nous  avaient  précédemment  raconté  les 
grandes  luttes  nationales  contre  les  Germains,  Teutons,  Saxons  et 
autres  envahisseurs  d'outre-Rhin.  M.  Tahbé  Deramecourt  embrasse 
aujourd*hui  un  cadre  plus  large,  plus  complet  et  qui  comprend  Thistoire 
de  France  tout  entière.  Nous  Ten  félicitons.  Au  milieu  des  désastres 
contemporains^  il  est  bon  d'étudier  comïnent  la  Franca  de  nos  pères 
s*est  immortalisée  dans  les  guerres  soutenues  pour  son  indépendance , 
comment  elle  a  supporté,  dans  la  fortune  adverse,  des  démembrements 
comme  celui  de  Bretigny,  plus  douloureux  peut-être  encore  que  ceux 
dont  nous  sommes  témoins,  et  comment  elle  s'est  relevée  par  la  foi  en 
Dieu,  la  fidélité  à  la  royauté^ le  travail  et  le  sacrifice. L'histoire  consi- 
dérée de  haut,  «  n'est  pas  seulement^  dit  Cicéron,  la  dépositaire  des 
événements  et  le  témoin  de  la  vérité,  elle  est  encore  Tàme  des  sou- 
venirs et  la  grande  conseillère  tie  la  vie  humaine.  »  A  ce  titre,  l'ou- 
vrage de  M.  Deramecourt  est  bon  à  lire  et  à  méditer,  quand  même  il  ne 
joindrait  pas,  comme  le  talent  de  l'auteur  l'a  pu  réaliser,  le  mérite  lit- 
téraire à  l'intérêt  des  faits.  M.  Deramecourt,  selon  son  programme,  fait 
l'historique  de  la  défense  nationale  depuis  César  et  Yercingétorix  (chap.i, 
p.  5  à  45)  jusqu'au  traité  qui  nous  a  arraché  l'Alsace  et  une  partie  de 
la  Lorraine.  En  six  chapitres,  il  passe  en  revue  les  Invasions  barbares, 
la  guerre  de  Cent  ans,  période  parfaitement  bien  traitée  selon  nous 
(p.  85  à  215)  ;  la  grande  lutte  entre  les  maisons  de  France  et  d'Autri- 
che (chap.  iv);  les  guerres  de  l'Empire  et  de  la  Révolution,  et  enfin 
l'Invasion  allemande  de  1870.  Cette  dernière  partie  est  traitée  avec 
beaucoup  plus  de  détails  que  les  autres,  et  nous  le  regrettons  presque  : 
—  les  ouvrages  spéciaux  tant  militaires  que  politiques  abondent  sur 
cette  période,  et  le  détail  des  marches  et  contre-marches  de  tel  ou  tel 
corps  belligérant  est  encore  8u£9samment  présent  à  tous  les  esprits  ; 
il  demande,  d'ailleurs,  à  être  exposé  par  une  plume  technique.  Il  nous 
semble  que  si  Tauteur  avait  un  peu  raccourci  ce  chapitre,  s'en 
tenant  aux  grands  enseignements  moraux  d'une  lutte  si  tristement 
menée  matériellement  de  notre  côté,  mais  si  féconde  en  si^gets  de 
réflexions  sur  les  vraies  conditions  de  la  vie  et  de  la  grandeur  d'une 
nation,  il  aurait  pu  s'étendre  davantage  sur  les  chapitres  précédents, 
trop  rapides  en  quelques-unes  de  leurs  parties.  Malgré  ce  desideratum^ 
nous  n'éprouvons  aucune  hésitation  à  louer  Y  Histoire  de  la  Défense  na* 
tionaleei  à  la  recommander  à  tous  les  esprits  réfléchis  et  patriotiques. 
Nous  ne  doutons  pas  que  sa  lecture  ne  soit  pour  beaucoup  pleine  de 
charme  et  d'intérêt,  et  que  Tauteurne  recueille  dans  les  suffrages  de 
ses  lecteurs  la  juste  récompense  de  ses  travaux. 

F.   DB  ROQUBFBUIL. 


AOUT  187o.  T.  XIV,  8. 


—  130  — 

tilvallté  de  François  !•'  et  de  Gharles-Quint»  par  M.  Mignet, 
de  TÂcadèmie  Êrançaise,  secrétaire  perpétuel  de  rAcadémie  des  sciences 
morales  et  politiques.  Paris,  Didier,  1873.  2  vol.  in^  de  562  et  503  p.  -^ 
Prix:  15  fr. 

On  attendait  depuis  longtemps  un  ouvrage  magistral  de  M.  Mignet 
sur  ce  seizième  siècle  qu'il  connaît  si  bien,  qu'il  a  étudié  avec 
tant  de  soin  et  d'amour.  Cet  ouvrage,  dont  une  partie  déjà  avait  paru 
dans  la  Reme  des  Deux-Mondes,  vient  enfin  d'être  publié.  Il  embrasse 
les  trente  premières  années  du  siècle,  et  est  limité  plus  particulièrement 
par  deux  grandes  dates  de  notre  histoire  :  la  bataille  de  Mariguan  et 
la  paix  de  Cambrai.  C'est  la  période  historique  de  la  branche  des 
Valois,  c'est  l'apogée  de  la  puissance  espagnole  et  le  commencement 
de  cette  lutte  séculaire  de  la  maison  de  France  avec  la  maison  d'Au- 
triche. La  lutte,  ici,  se  personnifle  dans  deux  hommes  différents  par  le 
caractère,  mais  grands  tous  deux,  et  très-dignes  de  passionner  un  his- 
torien comme  M.  Mignet.  Ce  livre,  en  effet,  est  le  plus  vivant  et,  à 
tout  prendre^  le  plus  remarquable  qui  soit  sorti  de  la  plume  du  savant 
auteur.  Il  est  le  plus  travaillé^  le  plus  impartial,  et  il  laisse  loin 
derrière  lui  YSistoùre  de  la  Révolution  française  ou  YHiêtoire  de  Marie 
Siuùfi. 

Faai-il,  en  quelques  lignes,  rappeler  le  sujet  de  ces  deux  volumes  ) 
Ils  s'ouvrent  par  une  introduction  destinée  à  bien  établir  la  situation 
de  la  France  vis-à-vis  de  l'Italie  sous  Charles  YIII  et  Louis  XIL 
Puis,  après  le  glorieux  avènement  de  François  P'  et  ses  premières 
victoires,  arrive  la  grande  affaire  de  l'élection  à  l'Empire,  en  1519, 
terminée  par  le  triomphe  de  Charles-Quint,  par  la  sanglante  défaite 
de  Pavie,  la  captivité  du  roi  et  le  traité  de  Madrid.  La  seconde  partie 
de  cette  rivalité  implacable  ne  noua  mène  qu'à  la  moitié  du  règne  de 
François  I*'  (1520)  ;  et  M.  Mignet  aurait  encore  une  longue  période  à 
parcourir,  s'il  voulait  donner  à  ce  récit  sa  conclusion  véritable,  en 
retraçant  l'histoire  jusqu'à  la  trêve  de  Vaucelles  ou  même  au  traité  de 
Câteau-Cambrésis  (1559).  Il  irait  ainsi  se  rattacher  aux  dernières 
lignes  d'un  plan  qu'il  a  tracé  lui-même,  il  j  a  quelques  années,  en 
écrivant  son  livre  sur  l'abdication  et  la  mort  de  Charles-Quint. 

L'auteur  a  accumulé  sobrement  et  sans  affectation,  dans  son  nouvel 
ouvrage,  tous  les  documents  propres  à  en  faire  une  œuvre  définitive. 
Il  ne  s'est  pas  bonié>  en  effet,  aux  sources  vulgaires  ;  mais  on  s'aper- 
çoit qne  les  grands  dépôts  de  manuscrits,  les  publications  de  pièces 
d'archives,  en  France  comme  à  l'étranger^  n'ont  rien  pour  lui  d'in- 
connu. Les  documents  diplomatiques  et  autres,  qu'il  cite  en  note, 
seraient  ses  garants,  s'il  en  avait  besoin ,  mais  ses  récits  dramatiques 
ne  sont  interrompus  par  rien  d'inutile,  et  il  nous  donne  vraiment  le 
modèle  de  la  grande  histoire.  Les  intrigues  mêmes  qui  accompagnèrent 


—  13!  — 

réleetion  du  pape  Clément  VIT,  —  lequel  «  était  le  plus  opiniâtre  des 
candidats  et  était  entré  dans  le  conclave  avec  la  résolution  de  n*en 
sortir  que  pape,  »  —  sont  racontées  d'une  manière  fort  convenable. 
De  telle  sorte  que  les  plus  difficiles  n'ont  guère  de  réserves  à  faire 
sur  un  livre  assurément  fort  digne  du  grand  succès  qu'il  obtient. 

GuBTAVB  Baousnault  db  Puchbsbb. 


I>ébrlfli  de  Qulberon,  Souvenirs  des  désastres  de  1795,  suivis  de  la 
liste  des  victimes,  rectifiée,  d'après  les  documents  de  la  collection  Hersart 
du  Bnron,  et  tous  autres  titres  contemporains  et  authentiques,  par  Eugénb 
DE  LA  GouRNBRiB.  NantCB,  LibaTOs.  1875.  In-8  de  201  p.  —  Prix  :  2  îr. 

L'histoire  de  Quiberon  est  faite  depuis  longtemps,  dit  l'auteur  de  cet 
intéressant  ouvrage,  composé  d'une  série  d'articles  les  plus  émouvants 
qu'ait  publiés,  depuis  longue  date,  une  vaillante  et  laborieuse  revue 
de  province,  la  Bévue  de  Bretagne  et  de  Vendée.  Oui,  Thistoire  de  Qui- 
beron est  faite,  si  l'on  parle  de  l'histoire  générale  de  ce  désastreux 
épisode  de  nos  guerres  civiles,  mais  non  pas  si  l'on  parle  de  son  his- 
toire particulière,  au  sujet  de  laquelle  une  foule  d'erreurs  accréditées 
demandent  rectification  ;  non  pas,  si  Ton  veut  entrer  dans  le  détail 
d'héroïsmes  peu  connus,  de  dévouements  ignorés,  de  souffrances  qui 
n'ont  pas  eu  d'écho  ;  non  pas  si  l'on  accepte  pour  exactes  la  liste  offl- 
oielle  des  victimes,  gravée  sur  le  monument  de  la  chartreuse  d'Auraj, 
ou  toutes  celles  fort  nombreuses  qui  ont  été  publiées.  M.  de  la  Oour- 
nerie,  avec  la  patience  à  toute  épreuve  et  la  conscience  remarquable 
qu'il  apporte  dans  tous  ses  travaux,  a  entrepris  de  rétablir  la  véritable 
physionomie  de  ces  journées  de  deuil  et  de  souffrances  sans  nom,  de 
retrouver  la  trace  de  toutes  les  victimes,  de  compter,  autant  que  poflh 
sible,  les  familles  éteintes  à  la  suite  des  épouvantables  massacres  de 
Vannes,  d'Auraj  et  de  Quiberon,  de  rechercher  ce  que  sont  devenues 
celles  de  ces  ouvriers,  de  ces  laboureurs,  de  ces  pauvres  prêtres^  qui 
parleurs  humbles  noms  réunis  forment  la  majorité  sur  laliste  définitive 
dont  le  total»  après  suppression  des  doubles  emplois^  addition  d'oublis 
et  rectification  d'erreurs  nombreuses,  atteint  le  chiffre  de  neuf  cent 
quarante-deux.  Examen  minutieux  des  documents  officiels  et  des 
minutes  du  greffe  conservées  aux  archives  de  Vannes,  de  l'enquête 
dressée  par  M.  Hersart  du  Buron,  ou  des  souvenirs  manuscrits  de  M.  de 
Nojelle,  l'un  des  échappés  du  massacre,  notes  demandées  aux  familles, 
voyages  sur  les  lieux,  M.  de  la  Gournerie  n'a  épargné  aucune  peine 
pour  arriver  à  l'exactitude  rigoureuse  que  réclame  l'impartiale  histoire. 
Nous  lui  devons  une  sincère  reconnaissance  d'avoir  mené  à  bon  terme 
un  travail  aussi  épineux,  car,  si  l'esprit  se  détourne  avec  horreur  de 
tant  de  scènes  de  carnage,  combien  n'est-il  pas  touché  de  tant  d'admi- 
rables traits  d'héroïsme  et  de  dévouement  :  les  captifs  prisonniers  sur 


—  132  - 

parole  qui  ne  veulent  tenter  aucun  projet  d'évasion  sur  la  route  de 
leur  calvaire  entre  Auray  et  Vannes,  lorsque  la  nuit  les  favorise  et  que 
les  troupes  républicaines,  émues  de  compassion,  leur  offrent,  pour 
ainsi  dire,  leur  aide  et  leur  silence  ;  les  ofûciers  des  commissions,  qui 
se  refusent  à  jouer  le  rôle  de  bourreaux  ;  ces  saintes  femmes  de  Vannes 
et  d'Aurây  qui  vont  visiter  les  condamnés  et  leur  apporter,  au  péril 
de  leur  vie,  les  secours  du  corps  et  de  l'àme,  favorisant  l'évasion  des 
uns,  conduisant  aux  autres  des  prêtres  insermentés. . .  «  Les  républicains, 
dit  M.  de  la  Gournerie,  célèbrent  avec  raison  leur  Haudaudine.  Les 
royalistes  seraient  plus  embarrassés,  parce  que  les  Haudaudines,  chez 
eux,  furent  sans  nombre,  et  on  les  tua  tous,  tandis  que  THaudaudine 
républicain^  le  Regulus  nantais  ne  fat  pas  tué. 

Ce  livre  est  donc,  à  la  fois,  une  œuvre  historique  sérieuse  et  une 
œuvre  morale  bien  faite  pour  relever  nos  esprits  et  nos  cœurs.  De 
pareils  souvenirs,  après  les  scènes  analogues  que  nous  avons  vu  se 
renouveler  en  1871,  sont  fort  opportuns  à  rappeler  et  &  préciser.  11  y 
a  là  un  enseignement  qu'avec  notre  légèreté  habituelle,  nous  sommes 
beaucoup  trop  portés,  sinon  à  dédaigner,  du  moins  à  laisser  dans 
l'ombre.  Rbnb  Kbrvilbr. 


I^a  Chouannerie  du  Maine  et  pays  adfjacentji,  —  1793,^1799,  — 
1815,  — 1832,  — avec  la  biographie  de  plus  de  120  officiers,  y  compris  les 
généraux  d*Andigné,  de  Frotté,  Cadoudal,  parTabbé  Paulouin.  Le  Mans, 
Ed.  Monnojer,  1875. 3  yoL  in-12  de  xxvii-296, 314  et  295  p.  —Prix  :  7  fr.  50. 

Qu* est-ce  que  la  chouannerie,  où  a-t-elle  pris  son  origine  ?  A-t-elle 
pour  père,  comme  le  prétend  Duchemin-Descepeaux,  répété  par  tous 
les  autres  historiens,  un  «  contrebandier  gracié  par  son  roi,  qui,  pour 
son  coup  dressai,  surprend  et  tue  dix-huit  hommes  sans  défense  et  en 
blesse  un  plus  grand  nombre  ?  n  Â-t-elle  pour  berceau  la  Mayenne  ou 
la  Bretagne  ?  Telles  sont  les  questions  qu'examine  M.  l'abbé  Paulouin, 
et  qu*il  résout,  pièces  en  main,  d'après  les  documents  authentiques  et 
les  traditions  locales.  La  chouannerie  est  mancelle  ;  elle  est  née  dans 
la  Sarthe,  au  bord  des  bois  de  la  Petite-Charme,  dans  les  cantons 
d'Epineu-le-Ghevreuil,  Loué,  Conlie,  Rouez-en-Champagne  ;  les  pre- 
miers Chouans  sont,  non  pas  des  contrebandiers,  mais  des  culti- 
vateurs irrités  de  la  persécution  religieuse  à  laquelle  ils  sont  en 
butte;  ils  empruntent  leur  nom  à  un  oiseau  de  nuit  dont  le  cri  leur 
sert  de  ralliement,  et  ils  prennent  les  armes  pour  Dieu  et  le  Roi.  Dés 
le  11  mars  1793,  ils  menacent  le  Mans;  c'est  leur  début  dans  la  carrière 
militaire.  Leurs  chefs  sont,  pour  la  plupart,  de  simples  paysans  qui, 
pour  ne  pas  compromettre  leurs  familles,  s'affublent  d'un  nom  de 
geurre  :  Tranquille,  Moustache^  Saint-Paul,  Ftit  va  de  bon  cœur,  Tan- 
crède.  Jambe  t argent,  Brise  bleue ^  etc .  Le  chiffre  des   bandes  attein 


—  133  — 

parfois  jusqu'à  neuf  cents  hommes  ;  malheureusement  ces  bandes  ont 
peu  de  cohésion  entre  elles  ;  chaque  chef  opère  de  son  côté,  et  lorsque 
les  princes  veulent  envoyer  un  officier  supérieur  prendre  le  comman- 
mandement  de  tous  ces  corps  épars,  ce  chef  n'est  pas  to!:uours  obéi. 
Aussi  y  a-t-il  peu  de  faits  d'armes  importants;  ce  sont,  la  plupart  du 
temps,  des  exploits  isolés,  brillants,  intrépides,  mais  dont  le  résultat 
n'exerce  pas  d'influence  sérieuse.  Acharnés,  d'ailleurs,  d'une  fidélité  à 
toute  épreuve  comme  leur  courage,  les  chouans  ne  posent  un  instant 
les  armes,  en  1796,  que  pour  les  reprendre  en  1799.  Sous  l'Empire,  la 
pacification  est  plus  complète  ;  mais,  lorsque  la  fortune  de  Napoléon 
fléchit,  dès  1813,  les  chouans  du  Maine  rentrent  en  lice  ;  en  1814  et 
1815,  le  soulèvement  est  général,  et,  en  1832,  la  branche  aînée  vaincue 
trouve  là  encore  de  zélés  et  dévoués  partisans. 

Telle  est  l'histoire  que  M.  l'abbé  Paulouin  raconte,  d'après  les  récits 
qu'il  en  a  entendu  faire  lui-même  souvent  dans  sa  propre  famille  : 
histoire  d'épisodes  plutôt  qu'histoire  d'ensemble,  mais  qui  révèle  bien 
des  faits  inconnus  et  des  physionomies  oubliées. 

Une  série  de  notices  biographiques  sur  les  principaux  officiers  de  la 
chouannerie  du  Maine  complète  cette  œuvre,  qui  sj  termine  par  une 
liste  des  sobriquets  les  plus  connus  de  ces  modestes  et  vaillants  défen- 
seurs de  la  monarchie.  Maximb  db  la  Rochbtbrie, 


Histoire  du  second  Empire»  par  M.  Taxile  Delord,  membre  de 
rAssemblée  nationale.  Tome  YI.  Paris,  Germer-Baillière,  1875.  In-8  de 
640  p.  —  Prix  :  7  fr. 

M.  Taxile  Delord  termine  aujourd'hui^  par  un  sixième  et  dernier 
volume,  son  Histoire  du  second  Empire.  (Pour  les  précédents,  voir  le 
Polybiblion,  t.  X^  p.  105  ;  t.  XI,  p.  26,  et  t.  XII,  p.  166.)  Les  faits 
qui  7  sont  retracés  et  qui  s'étendent  depuis  le  plébiscite  jusqu'à  la 
journée  du  4  septembre,  apparaissent  comme  le  dénoûment  du  long 
drame  où  Napoléon  III,  comme  conduit  par  la  main  de  la  fatalité  an- 
tique, a  passé  par  toutes  les  épreuves  de  la  prospérité  et  de  l'infortune, 
de  l'élévation  et  de  la  chute.  On  l'avait  cru  habile,  quand  il  n'était 
qu'heureux  ;  profond,  quand  il  n'était  qu'irrésolu  ;  capable  de  grandes 
pensées^  quand  il  n'était  que  rêveur  ;  maître  des  événements,  quand  il 
ne  faisait  que  les  suivre.  La  manière  dont  il  est  tombé  a  donné  la 
vraie  mesure  de  sa  grandeur  ;  et  l'histoire  a  désormais  percé  à  jour  le 
nuage  qui  l'avait  si  longtemps  entouré. 

Nous  ne  referons  pas^  avec  M.  Taxile  Delord,  le  récit  de  cette 
néfaste  année  1870  qui,  après  avoir  donné  quelques  instants  d'illusion 
aux  amis  d'une  sage  liberté,  a  livré  bientôt  le  pays  aux  aventures 
d'une  diplomatie  sans  prévision  et  sans  prudence,  et  d'une  administra- 
tion militaire  aussi  ignorante  que  présomptueuse.  Ce  sont  des  faits 


-  i34  — 

trop  de  fois  reproduits  par  tous  les  acteurs  et  témoins,  et  par  ceux  qui 
en  sont  les  détracteurs  et  par  ceux  qui  s'en  sont  montrés  plus  ou 
moins  les  apologistes. 

M.  Taxile  Delord  les  retrace  avec  précision  et  clarté,  mais  sans  révé- 
lation nouvelle.  Il  accorde^  sans  doute,  un  trop  grand  et  trop  beau  rôle 
aux  amis  qu'il  patrone,  aux  idées  qu'il  préconise.  Quel  est  l'historien 
contemporain  qui  peut  s'abstraire  assez  de  ses  opinions  personnelles 
pour  garder  une  impartialité  absolue?  Mais,  en  somme,  il  se  montre 
instruit,  modéré,  équitable.  La  plupart  de  ses  jugements  ne  sauraient 
se  réfuter.  La  conclusion,  qui  termine  le  sixième  volume  et  tout  l'ou- 
vrage, quoique  sévère,  est  le  tableau  vivant,  le  résumé  intéressant  et 
fidèle  de  ces  dix-neuf  années,  pendant  lesquelles  Napoléon  III  a  été, 
pour  le  bien  ou  pour  le  mal,  le  maître  souverain  des  destinées  de  la 
France. 

Celui  qui  aura  lu,  avec  cet  esprit  de  critique  intelligent  et  attentif, 
les  six  volumes  de  M.  Taxile  Delord,  pourra  se  rendre  le  témoignage 
qu^il  a  été  mis  à  même  de  connaître  exactement  une  des  époques  les 
plus  curieuses  et  finalement  les  plus  tristes  de  l'histoire  de  la  France. 

Gustave  Baoubnault  db  Puchbssb. 


Versailles  pendant  l'occupation.  Reeueil  de  documents  pour  servir 
à  r histoire  de  Vinvasion  allemande,  publié  par  E.  Delebot.  Paris,  Pion,  1873. 
Gr.-in  S  de  322  p.  ^  Prix  :bîr. 

a  II  est  absolument  nécessaire  que  les  contemporains  de  la  dernière 
guerre  témoignent  de  ce  qu'ils  ont  vu  et  soufiert  ;  il  y  a  là,  pour  nos 
enfants,  une  leçon  terrible  qu*il  nous  est  interdit  de  ne  pas  leur  léguer.  • 
Ces  lignes  de  Tavertissement  placé  en  tête  de  ce  volume  résument  le 
livre  de  M.  Delerot,  peinture  fidèle,  bien  qu*émue,  de  tout  ce  que  la 
ville  de  Versailles  a  a  vu  et  souffert  »  pendant  Tocoupation  prussienne, 
du  19  septembre  1870  au  12  mars  1871.  On  sait  quels  sont  les  actes 
ordinaires  de  l'invasion  allemande  :  réquisitions,  exactions,  vexations, 
cruautés,  le  tout  assaisonné  de  cette  grossièreté  brutale  dont  nos 
ennemis  ont  le  secret.  Les  excès  de  tout  genre  commis  dans  les  pays 
occupés  sontà  peu  près  partout  les  mêmes;  mais,  à  Versailles,  un  intérêt 
tout  particulier  t'attache  à  leur  étude.  C'est  qu*ici  tout  se  passait  sous 
les  jeux  du  roi  et  du  grand  quartier  général,  souvent  sous  la  haute 
inspiration  du  chancelier  fédéral.  Aussi,  le  zèle  des  employés  de  toute 
sorte,  inspecteurs  de  police,  conseillers  intimes,  assesseurs,  offlcien 
de  gendarmerie  et  autres,  docteurs  es  réquisitions,  se  réchauffe-t-il  à 
ce  puissant  foyer.  Les  accusations  les  plus  arbitraires,  les  défiances  les 
plus  ridicules  poursuivent  de  tranquilles  habitants  qui  sont  aussitôt 
incarcérés  et  transportés  en  Allemagne. 

M.  Lesourd,  secrétaire  d'ambassade,  coupable  d'avoir  remis  au 


—  I3K  — 

chancelier  la  déclaration  de  guerre  de  juillet  1870,  à  Berlin,  est  enleyé 
et  conduit  à  Mayence.  Deux  jeunes  substituts,  M.  de  Rajnal,  accusé 
de  ne  pas  vouloir  révéler  unnom  effacé  sur  un  carnet  intime  ;  M.  Harel, 
auquel  on  reproche  de  ne  pas  trahir  le  secret  de  son  ami,  sont  trans* 
portés  à  Minden.  Le  maire  de  Versailles,  qui  s'honore  par  sa  coura- 
geuse résistance  à  des  réquisitions  excessives,  et  plusieurs  conseillers 
municipaux,  sont  jetés  en  prison. 

Mais  les  policiers  allemands  ont  beau  se  couvrir  de  gloire,  ils  sont 
de  beaucoup  dépassés  par  le  a  préfet  de  Seine-et-Oise  o  prussien. 
M,  de  Brauchitsch  mériterait  d'être  étudié  comme  un  curieux  produit 
de  la  culture  germanique.  De  ses  ingénieuses  combinaisons  flnan* 
cières,  nous  ne  citerons  qu*une  seule.  La  ville,  déjà  fortement  pressurée, 
est  frappée  par  M.  le  préfet  d'une  amende  eiorbitante;  on  ne  peut 
trouver  les  fonds;  que  faire?...  Heureusement^  derrière  M.  le  préfet, 
montrant  une  oreille  Israélite,  se  tient  quelque  fils  de  Lévi,  accouru 
d'Allemagne  à  la  curée,c*estM.  Betzold,  M.  Baron,  ou  quelque  autre... 
L'honorable  négociant  veut  bien  offrir  à  la  ville,  et  aux  meilleures 
conditions,  les  fonds  nécessaires.  Pour  références,  il  apporte  une  pra- 
tique déjà  ancienne  de  ce  genre  d'opération;  il  a  déjà  rendu  les  mêmes 
services  à  Nancj  et  à  d'autres  villes  envahies,  et  par  conséquent  sai- 
gnées à  blanc  (ce  sont  choses  connexes). 

Cette  tendance  à  faire  de  la  guerre,  Ixors  de  son  territoire,  un  vaste 
ensemble  d'opérations  Ûnancières,  à  comptabilité  expéditive,  appar- 
tient en  propre,  et  de  longtemps,  à  la  race  germanique.  On  a  pu  la 
voir,  depuis  la  guerre,  mendier,  à  la  conférence  de  Bruxelles,  une 
consécration  officielle. 

Avons -nous  besoin  de  dire,  après  ce  qui  précède,  que  le  livre  de 
M.  Delerot  respire  la  haine  de  l'étranger  f  C'est  donc  une  œuvre 
utile,  car  la  haine  de  l'étranger  est  la  seule  meilleure  sauvegarde 
d'une  nation,  dans  la  guerre et  dans  la  paix. 

J.   OOUBTHAL. 

Eie«  drapeaiiiz  francal*.  étude  hisimquef  par  le  comte  L.  dk  BouiLLft. 
Deuxième  édition,  considérablement  augmentée,  et  accompagnée  de  i23 
dessins.  Paris,  Librairie  militaire  de  J.  Dumaine,  1875.  In-8  de  iii-352  p. 
et  XIX  planches.  —  Prix  :  8  fr. 

La  première  édition  des  recherches  de  M.  de  Bouille  sur  Thistoire 
des  drapeaux  français  (1872,  in-lô  de  80p.  et  xii  planches)  ne  fournis- 
sait, pour  la  période  antérieure  à  1789,  à  peu  près  aucune  lumière.  Il 
n'en  est  pas  de  même  de  la  seconde,  qui  est,  à  vrai  dire,  moins  une 
nouvelle  édition  qu'un  nouvel  ouvrage,  comme  la  simple  comparaison 
du  nombre  des  pages  le  montre  au  premier  coup  d'œil.  La  matière  j 
est  distribuée  en  douze  paragraphes  ou  chapitres,  dont  les  titres  sui- 
vent: I.  Cape  de  saint  Martin.  II.  Bannières  des  paroisses  et  descom- 


—  136  — 

mânes.  III.  Oriflamme.  lY.  Bannière  de  France  ou  bannière  royale. 
y.  Couleurs  personnelles  des  rois,  princes  ou  seigneurs.  YI.  Le  drà< 
peau  lorrain.  YII.  Marques  de  commandement.  YIII.  Troupes  à 
cheval.  IX.  Enseignes  d'infanterie.  X.  Pavillons  de  marine.  XI.  Cou- 
leurs distinctives,  uniformes,  cocardes.  XII.  Milices  des  villes,  garde 
nationale.  Le  livre  contient,  en  outre,  une  liste  intitulée  :  Sources  et 
bibliographie,  une  table  alphabétique  et  une  table  des  planches. 

La  méthode  et  la  critique,  tout  à  fait  absentes  de  la  première  édi- 
tion, commencent  à  se  montrer  dans  celle-ci,  où  elles  sont  encore  fort 
imparfaites.  Comme  la  division  ci-dessus  reproduite  suffirait  à  l'indi- 
quer, la  composition  est  très-défectueuse.  Mais  enfin,  il  y  a  un  cadre 
et  des  compartiments  tracés,  où  les  faits  se  répartissent,  et,  quoique 
ce  cadre  ne  soit  pas  bon^  il  est  bien  préférable  au  pêle-mêle  du  premier 
essai.  Chaque  chapitre  se  compose  non  pas  d'un  texte  raisonné^  mais 
de  notes  mises  bout  à  bout  dans  Tordre  chronologique.  Toutes  ne  sont 
pas  également  sûres  et  elles  doivent  être  contrôlées.  Ilja  d'évidentes 
erreurs.  La  discussion  des  faits  et  leur  interprétation,  quelquefois 
justes,  sont  trop  souvent  inexactes.  Mais  il  y  a  beaucoup  de  faits  réunis 
et  de  sources  indiquées,  parmi  lesquels  des  renseignements  et  des 
textes  non  produits  encore,  dont  plusieurs  sont  d'un  très-grand  prix, 
et  dont  il  faut  savoir  d'autant  plus  de  gré  à  M.  de  Bouille  qu'il  en  sort, 
souvent,  do  la  façon  la  plus  décisive,  la  confirmation  de  thèses  directe- 
ment  contraires  à  celles  qu'il  appuie  de  préférence.  Je  citerai,  en  par- 
ticulier, les  documents  qu'a  découverts  l'auteur  aux  archives  du  miius- 
tère  de  la  marine  et  qu*il  a  eu  le  courage,  la  loyauté  vraiment 
scientifique,  de  placer  textuellement  sous  les  yeux  de  se^  lecteurs.  Ce 
courage  est  ici  d'autant  plus  louable,  que  le  parti  pris  se  fait  davan- 
tage sentir,  soit  dans  les  remarques  de  Tauteur,  soit  dans  ses  réticences 
en  maint  endroit  de  son  livre.  Je  citerai  encore  la  description  de^ 
enseignes  perdues  à  la  bataille  de  Saint-Quentin  (août  1557),  d'après 
les  archives  d'état  de  la  maison  de  Savoie.  Ce  document  éclaire  d'une 
assez  vive  lueur  l'une  des  périodes  les  plus  obscures  de  l'histoire  de 
nos  étendards  militaires,  et  de  celle  du  drapeau  national  de  France. 
Je  ferai  enfin  une  mention  spéciale  du  dernier  chapitre^  comme  renfer- 
mant un  grand  nombre  de  renseignements  précieux  sur  la  milice  pari- 
sienne, son  organisation,  son  équipement,  ses  enseignes  aux  diverses 
époques  de  notre  histoire. 

Jugé  dans  son  ensemble,  le  livre  de  M.  de  Bouille  doit  être  consi^ 
déré  comme  un  recueil  abondant  de  matériaux  utiles,  et  l'auteur 
mérite  d'être  loué  pour  la  somme  de  travail  qu'il  y  a,  cette  fois, 
dépensée.  Mais^  je  le  répète,  cet  ouvrage  doit  être  lu  avec  beau- 
coup de  précaution,  et  il  n'en  faut  user  qu'avec  une  critique  sévère. 
L'idée  dont  s'est  inspiré  l'auteur  dans  sa  première  édition  et  où  il  a  le 


—  437  — 

tort  de  persister  dans  la  seconde,  puisque  son  liyre  même  y  donne 
loyalement  d'éclatants  démentis^  cette  idée^  que  partagent  un  certain 
nombre  de  personnes  même  éclairées,  c'est  qa*il  n'y  avait  point  de 
drapeau  national  avant  1789  ;  c'est,  en  d*autrés  termes,  la  négation  de 
Tantique  et  auguste  valeur  du  drapeau  blanc  de  la  France.  Sur  ce 
point,  et  plus  généralement  sur  l'histoire  des  transformations  logiques 
de  l'enseigne  nationale  et  souveraine,  distinguée  des  étendards  parti- 
culiers et  subordonnés,  je  me  permets  de  renvoyer  nos  lecteurs  au 
mémoire  publié  dans  la  livraison  d'avril  1875  de  la  Revue  des  questions 
historiques.  Le  livre  de  M.  de  Bouille  y  a  été  mis  à  profit. 

Marius  Sbpbt. 


IVote*  prises  aux  archives  de  l*éUftt  civil  de  Paris,  avenue 
Victoria,  4,  brûlées  le  524  mal  ISTl,  par  le  comte  de  Chas- 
TBLLUX  (Extrait  de  la  Aetme  historique  et  nobiliaire,  4872-1874).  Paris,  Du- 
moulin, 1875.  In-8  de  634  p. 

La  destruction  des  registres  de  Tétat  civil  déposés  soit  aux  archives 
de  la  ville  de  Paris,  soit  au  greffe  du  tribunal  de  première  instance  de 
la  Seine,  est  un  fait  à  jamais  regrettable  et  une  cause  profonde  de 
perturbation  pour  les  familles.  L'anéantissement  de  ces  actes  précieux 
fait  disparaître,  en  même  temps, des  piécesd'une  inappréciable  valeur  et 
des  documents  d'un  haut  intérêt  pour  le  topographe,  rhistorien,  le  bio- 
graphe^ le  généalogiste  et  l'amateur  d'autographes  :  j*en  atteste  ce 
curieux  Dictionnaire  publié  par  Téminent  historiographe  du  ministère 
delà  marine,  M.  Auguste  Jal,  aujourd'hui  décédé.  Admis,  lui  aussi,  à 
compulser  les  registres  réunis  dans  l'important  dépôt  de  Tavenue 
Victoria,  alors  qu'il  écrivait  l'histoire  généalogique  de  sa  famille^ 
M.  de  Chastellux,  Tun  des  plus  laborieux  collaborateurs  de  la  Retme 
historique  et  nobiliaire,  a  eu  l'heureuse  idée  de  relever  avec  soin  la 
plupart  des  noms  marquants  disséminés  dans  les  livres  des  paroisses 
Saint-André  des  Arts,  Saint-Eustache,  Saint-Gervais^  Saint-Jacques 
du  Haut-Pas,  Saint-Jean  en  Grève,  Sainte-Marie-Madeleine  de  la 
Ville-l'Ëvêque,  Saint-Nicolas  des  Champs,  Saint-Paul,  Saint-Roch  et 
Saint-Sulpice.  C'est  le  résumé  de  ces  recherches  qu'il  fait  paraître 
aujourd'hui. 

Esprit  méthodique  et  scrupuleux,  travailleur  infatigable,  M.  de 
Chastellux  a  coordonné,  dans  cet  ouvrage,  le  fruit  de  longues  années 
d'investigations  ;  autant  qu'il  a  pu,  il  a  suivi  l'ordre  alphabétique^  ce 
qui  est  bien  la  meilleure  manière  de  procéder.  Désormais,nul  ne  pourra 
établir  la  filiation  de  bien  des  familles  de  France  sans  recourir  aux 
Notes  prises  aux  archives  de  Ntat  civil  de  Paris.  Que  d'erreurs  corn- 
mises  par  les  biographes,  pourront  maintenant  être  rectifiées  !  Sera- 
t-il  permis  aujourd'hui  aux  généalogistes  de  faire  naître  à  Fresne, 
en  1746,  Henry-Cardin-Jean-Baptiste  d'Aguesseau,  alors  qu'il  est 


—  438  — 

constant  que  le  petit-flls  da  chancelier  est  yenu  au  monde  à  Paris,  le 
23  août  1752?  Comment  reporter  au  10  décembre  1753,  la  naissance 
du  comte  Louis-Philippe  de  Ségur,  quand  on  sait  que  le  futur  grand- 
maître  des  cérémonies  a  été  baptisé  à  SaintSulpicele  10  septembrell^. 
Le  livre  de  M.  de  Chaste llux  redresse  donc  bien  des  faits  erronés  et 
rectifie  bien  des  dates  d*une  fausseté  évidente.  Si,  dans  cet  ouvrage,  les 
documents  abondent  sur  les  temps  antérieurs  à  1789,  ils  font  un  peu 
trop  défaut  pourTépoque  contemporaine,etnous  devons  regretter  qu'on 
se  soit  montré,  à  Tégard  de  M.  de  Chastellux,  aussi  sobre  de  communi- 
cationis.  Pourquoi  être  si  jaloux  d'actes  dont  on  a  la  garde?  Les  pièces 
relatives  au  dix-neuvième  siècle  n'appartiennent  donc  pas  à  l'histoire  ? 
Quoi  qu'il  en  soit,  nous  émettrons,  en  terminant,  un  vœu  inspiré  par 
la  lecture  du  livre  même  de  M.  de  Chastellux  :  celui  de  voir  une  œuvre 
semblable  consacrée  aux  registres  d'état  civil  de  plus  d'une  ville,  et, 
s'il  était  possible,  de  chaque  commune  de  France.         A.  Albribr. 


IVotIce  sur  un  autel  antique  dédié  A  Jupiter,  découvert  à  SainU 
Zacharie  {Var),  et  sur  quelques  autres  monuments  romains,  par  Tabbô  Babgês, 
professeur  d'hébreu  à  la  Sorbonne.  Paris,  Leroux,  1875.  In-8  de  48  p. 
et  3  planches.  Prix  :  3  fr.  50. 

M.  Tabbé  Barges  a  fait  connaître,  dans  cette  notice,  un  autel 
romain  dédié  à  Jupiter,  et  placé  aigourd'hui  dans  la  prison  de  Saint^ 
Zacharie  (Yar).  Ce  petit  monument  porte,  sur  sa  face  antérieure^  une 
inscription  des  plus  simples;  Jovi  0{ptimo)  M{aximo);  à  l'époque 
chrétienne  on  l'a  utilisé,  comme  tant  d'autres,  pour  les  besoins  du 
nouveau  culte  :  on  Ta  retourné,  et,  sur  sa  face  postérieure,  on  a  tracé 
l'image  d'une  croix  entre  deux  brebis.  Ce  texte  n'apprend  rien  de 
nouveau,  mais  le  savant  auteur  a  profité  de  sa  publication  pour 
remettre  en  lumière  plusieurs  inscriptions  trouvées  dans  le  même  pays 
ou  aux  environs.  A  propos  de  Tinscription  du  château  de  Rougiers 
(p.  21),  il  dit  que  le  nom  inconnu  de  Merucius  semble  indiquer  un 
homme  indigène,  et  non  un  colon  d'origine  latine.  Il  ne  faut  pas  lire 
Merucius,  msàshien  A!{arcus)  Erueius;  c'est  un  gentilicium  connu.  Pour 
n'en  citer  que  deux  exemples,  je  signalerai  à  l'auteur  une  inscription 
des  environs  de  Tarragone  élevée  à  Sextus  Erueius  Athenodorus  {Cor- 
pus, II,  n^  4,360)  et  un  autre  texte  que  j'ai  copié  moi-môme  cette  année 
en  Tunisie,  à  El-Kef  (Sicea  Veneria);  c*est  Tépitaphe  de{Quintus)  Eru^ 
dus  Maximus.  —  L'inscription  de  Lucius  Attius  (p.  35)  n'est  pas 
interprétée  d'une  façon  exacte.  L'abréviation  vol.  désigne  la  tribu 
VoUinia,  dans  laquelle  cet  Attius  était  inscrit;  ce  n'est  pas,  comme  l'a 
cru  l'auteur,  le  nom  de  famille  Yolusus.  On  doit  lire  L^ucio)  Attio, 
Q{uinti)  f(ifio)y  Vol{tinia  tribu),  Rufino^,..  etc.,  et  j  voir  un  seul  et  même 
personnage.  C'est  un  usage  constanti  dans  l'épigraphie  romaine,  de 


—  139  — 

placer  rabréyiation  danom  des  tribus  après  Tindication  de  la  filiation 
et  ayant  le  eognomen.  Je  ferai  une  remarque  analogue  pour  l'inscrip- 
tion de  Clarenzac  (p.  48),  dans  laquelle  le  eognomen  Patemus  se  rap- 
porte au  fils  et  non  pas  au  père.  —  Dans  la  note  20,  on  trouvera  une 
liste  de  monuments  découyerts  dans  le  Midi  de  la  Gaule,  et  apparte- 
nant à  la  famille  Attia.  M.  Tabbé  Barges  n'en  signale  qu'un  seul  trouvé 
à  Ljon;  le  recueil  de  M.  de  Boissieu  en  contient  sept  provenant  de 
cette  ville.  C'est  à  propos  d'une  grande  inscription  de  Saint-Zacharie 
que  l'auteur  a  été  amené  à  parler  de  cette  famille  Attia.  Bouche  avait 
édité  ce  texte  deux  fois,  mais  d'une  façon  différente.  La  première  fois 
(p.  198),  il  le  donnait  comme  découvert  à  Arles,  d'après  une  copie  de 
Gabriel  Simeonis;  la  seconde  fois  (p. 212),  d'après  une  meilleure  copie, 
il  l'indiquait  comme  ajant  été  vu  à  Saini-Zacharie  :  M.  l'abbé  Barges  a 
levé  les  doutes  sur  la  provenance.  Nous  remercions  l'épigraphiste  qui 
s'est  occupé  avec  tant  de  succès  des  inscriptioi^  phéniciennes  de  nous 
avoir  conduits  de  nouveau  sur  le  terrain  romain,  où  il  a  déjà  tant  glané 
depuis  Tlemcen  jusqu'au  Plan-d'Aulps.     Ant.  Hbaon  db  Yillbfossb. 

l^e  Xrésor  de  Clalpvaux.  da  donaEtème  an  dlsL>liutUÀme 
•léole»  par  M.  l'abbé  Charles  Laloke.  Troyes  et  Paris,  E.  Thorin,  1875. 
In-8  de  xxiv-281  pages.  —  Prix:  7  fr. 

Il  est  inutile  d'insister  auprès  des  érudits  sur  l'importance  qu'eut 
au  mojen  âge  un  trésor  comme  celui  de  Glairvaux.  M.  l'abbé  Lalore 
a  entrepris  de  le  reconstituer  à  l'aide  d'anciens  inventaires  et  de 
documents  de  toutes  sortes.  Il  renfermait  huit  pièces  de  travail  grec 
provenant  du  pillage  de  Gonstantinople  par  les  croisés,  huit  reliquaires 
occidentaux  du  douzième  siècle,  neuf  du  treizième,  neuf  du  quator- 
zième, quatre  du  quinzième,  trois  du  seizième  et  six  du  dix-septième. 
0  Pendant  sept  siècles  environ,  dit  M.  Lalore,  ce  trésor  ne  subit 
presque  aucune  perte;  il  demeure  intact  même  pendant  les  époques 
de  bouleversements  et  de  troubles  qui  désolèrent  nos  contrées  du 
quinzième  au  milieu  du  dix- septième  siècle,  comme  le  prouve  l'inven- 
taire de  1405  comparé  aux  inventaires  du  dix-huitième  siècle.  Au  mois 
de  décembre  1789,  la  Révolution  ût  main  basse  sur  tant  de  richesses 
et  la  spoliation  totale  du  trésor  de  Glairvaux  fut  consommée  le 
!•'  février  1705.  Les  reliquaires  furent  brisés  et  envojés  à  la  monnaie 
de  Paris.  »  L.  G. 


Eie  Paroaaae  médical  rrançala*  ou  Dktionnaire  des  médecins  poétss 
de  la  France f  anciens  ou  modernes,  morts  ou  vivants ^  didactiques ,  élégiaques, 
satiriques,  chansonnierh,  auteurs  dramatiques,  vaudevillistes,  comédiens,  fan- 
taisistes, burlesques  y  rimailleurs,  etc.,  etc.,  par  le  Dr  A.  Ghereau,  lauréat  de 
TAcadémie  de  médecine,  etc.  Paris,  Ad.  Delahaye,  1874^  Gr.  in-18  de 
xxrr-552  p.  —  Prix  :  7  fr. 

L'auteur  a  réuni^  dans  ce  volume,  la  liste  fort  longue,  disposée  par 


—  140  — 

ordre  alphabétique^  «  de  médecins  qui  avaient  cherché  dans  le  culte  * 
de  la  poésie  une  diversion  précieuse  à  des  travaux  plus  austères. 
Tous  les  temps,  tous  les  pays^  ont  fourni  leurs  pléiades  de  ces 
esprits  distingués,  que  le  visage  sévère  d'Hipppcrate  n'a  pu  arra- 
cher aux  agaceries  et  aux  coquetteries  provoquantes  des  Muses,  » 
selon  l'expression  de  M.  Chereau.  Nous  ne  surprendrons  personne 
en  disant  que  les  œuvres  inspirées  par  ces  agaceries  et  ces 
coquetteries  ne  sont  pas  toutes  d'une  moralité  irréprochable. 

Chaque  notice  biographique  et  littéraire  est  plus  ou  moins  déve- 
loppée (son  extension  varie  depuis  une  demi-page  jusqu'à  trois  pages), 
selon  la  valeur  de  l'écrivain  qui  nous  est  présenté,  et  selon  retendue 
des  citations  que  M.  Chereau  a  cru  devoir  lui  emprunter.  Nous 
savons  gré  au  biographe  d*avoir  exécuté  cette  laborieuse  entreprise, 
car,  jusqu'à  présent,  ce  sujet  n'avait  guère  été  traité  à  fond, 
surtout  sous  cette  forme.  Du  reste,  avant  d'entrer  en  matière, 
M.  le  docteur  Chereau,  —  qui,  à  son  tour,  va  faire  partie  de  la  série 
des  médecins-littérateurs,  —  raconte  dans  V IntroducHm  comment 
il  a  été  amené  à  publier  ce  travail;  il  expose  la  bibliographie 
assez  détaillée  de  la  question,  et  énonce  une  suite  d*auteurs,  tant 
français  qu'étrangers,  qui  ont  écrit  des  dissertations  spéciales  sur  les 
médecins  poètes. 

Cependant,  nous  devons  signaler  à  Tauteur  une  lacune  :  son 
dictionnaire  serait  bien  plus  complet,  s'il  contenait  une  table  des 
matières  renvoyant  à  la  liste  des  noms  des  poëtes.  Nous  ne  doutons 
pas  qu'un  tel  vœu  formulé  ici  sera  réalisé  dans  la  deuxième  édition 
que  M.  Chereau  devra,  sans  doute,  donner  bientôt  de  son  livre,  appelé 
à  un  succès  très-légitime  M"  Schwab. 


Hommes  de  l*exll«  par  Charles  Hugo.  Paris,  Alphonse  Lemerre, 
1875.  In-12  de  349  p.  —  Prix  :  3  fr.  50. 

Il  y  a,  dans  ce  livre^  deux  parties  bien  distinctes  :  la  partie  litté- 
raire et  la  partie  politique.  La  partie  littéraire  est  intéressante  et 
contient  de  belles  pages.  La  partie  politique  n*est  qu*un  pamphlet^ 
inspiré  par  la  haine.  On  lit  avec  plaisir  les  aventures  de  Camille  Berru, 
réfugié  à  Bruxelles  après  le  Deux-Décembre,  et  obligé,  pour  vivre, 
de  faire  un  peu  tous  les  métiers,  copiant  des  manuscrits,  fondant  un  cours 
de  style  usuel,  enseignant  à  nager  dans  un  établissement  de  bains,  et 
finalement  s'échouant  comme  coupeur  de  faits  divers  à  f  Indépendance 
belge.  Les  deux  derniers  duels  de  Cournet,  les  portraits  de  Noël 
Parfait,  d'Alexandre  Dumas  père,  d'Emile  de  Girardin  sont  des  mor- 
ceaux enlevés  de  verve  et  bien  frappés.  La  politique  entre  ici  pour 
peu  de  chose.  Il  n*en  est  pas  de  même  des  portraits  de  Louis  Blanc, 
de  Barbés,  de  Schœlcher  et  de  RibeyroUes.  Les  trois  premiers  nous 


—  141  - 

sont  offertB  comme  des  héros  antiques^  comme  des  modèles  d*hoii- 
neur  et  de  patriotisme,  comme  d'impeccables^  admirables  et  infail- 
libles Aristides.  Leurs  idées  ultra-révolutionnaires  nous  sont  données 
comme  la  Bible  du  monde  nouveau.  Quant  à  Ribejrolles,  un  cons- 
pirateur incorrigible,  M.  Charles  Hugo  nous  le  réprésente,  avec  une 
complaisance  peu  dissimulée,  comme  une  nature  hors  ligne,  comme  le 
Cambronne  farouche  du  Waterloo  républicain,  comme  le  conciliateur 
de  la  proscription.  Or,  ce  conciliateur  «  adorait  »  Danton,  a  respectait  » 
Robespierre,  •  tutoyait»  MaratlII  II  est  vrai  — circonstance  atté- 
nuante (?)  —  qu'il  trouvait  moyen,  au  dire  de  M.  Charles  Hugo,  de 
tourner  a  fraternellement  »  le  dos  à  Hébert.  —  L'auteur  des  Hommes 
de  fexiWeat  amusé  aussi  à  crayonner  le  général  de  Lamoricière.  L'es- 
quisse est  assez  vivante^  sympathique  même.  Mais  elle  a  des  tons 
abominablement  faux.  M.  Charles  Hugo  ne  craint  pas  d'émettre,  à 
propos  du  vaillant  défenseur  de  la  Papauté,  cette  énormité  ridicule  : 
0  Au  fond,  Lamoricière  ne  croyait  à  rien.  »  Quand  on  ne  croit  à  rien, 
on  ne  va  pas  bravement  et  généreusement  risquer  de  se  faire 
tuer  pour  les  croyances  des  autres.  C'est  élémentaire. 

Nous  ne  parlerons  pas,  et  pour  cause,  de  la  partie  politique  des 
Hommes  de  l'exil.  Disons  seulement  que  l'auteur  a  le  triste  courage  de 
chercher  des  excuses  à  l'insultante  Lettre  de  Félix  Pyat  à  la  reine 
d Angleterre  (22  septembre  1855),  lettre  qui  obligea  le  gouvernement 
anglais  à  expulser  les  proscrits  français  de  Tile  de  Jersey.  —  Une  ou 
deux  fois,  M.  Charles  Hugo  a  occasion  de  s'occuper  de  religion  dans 
son  livre.  La  religion  de  M.  Charles  Hugo  n'est  pas  gênante.  Il  sup- 
prime le  culte^  il  supprime  le  prêtre  :  c'est  un  vague  déisme.  L'au- 
teur des  Hommes  de  Fexil  tient  cette  religion  de  son  père.  M.  Victor 
Hugo,  jadis  si  chrétien,  excelle  aujourd'hui  à  écrire  d'étonnantes 
tirades  sur  Dieu  et  la  vie  universelle.  Mais  il  ne  va  pas  au-delà. 
Témoins  les  pages  antithétiques  et  apocalyptiques,  intitulées  :  Mes  Fili^ 
qui  servent  d'introduction  aux  Hommes  de  Fexil. 

FiRMiN  Boissm. 


&lbllogprafla  idlollitâna,  owero  gran  dizùmario  bibliografko,  per  G.  M.  Miar. 
Palerme,  typographie  de  G.-B.  Gandiano,  i873.  In-4<»  à  2  colonnes, 
1 1  livraisons.  —  Prix  de  la  livraison  :  i  £r. 

Nous  avons  reçu,  il  y  a  déjà  un  certain  temps,  le  commencement  de 
cette  importante  publication.  Pour  en  parler,  nous  attendions  qu'elle 
fût  terminée;  mais  de  nouveaux  fascicules  ne  nous  parvenant  plus,  nous 
voulons  du  moins  dire  un  mot  de  ceux  que  nous  avons  sous  les  yeux 
et  exprimer  l'espoir  qu'ils  seront  complétés.  Le  titre  d'un  livre  promet 
trop  souvent  plus  de  choses  qu'il  n'en  peut  tenir.  Ici  c'est  le  contraire 
qui  a  lieu.  M.  Mira  ne  s'est  pas  borné  à  composer,  ce  qui  aurait  déjà  été 


—  142  — 

une  œuvre  fort  considérable,  une  nomenclature  des  livres  imprimés  ou 
inédits  d*auteurs  siciliens  ou  traitant  de  sujets  intéressant  la  Sicile. 
Sa  bibliothèque  est  tout  à  la  fois  une  ample  biographie  :  elle  donne 
non-seulement  des  renseignements  précis  sur  les  ouvrages,  mais  des 
notices  sur  leurs  auteurs.  La  dernière  livraison  que  nous  avons  reçue 
est  la  onzième,  et  finit  par  l'article  Giovanni  di  Qiovanni.     Th.  P. 


BULLETIN 

Cour»  de  Religion.  £«  Régne  de  Jésu9-<)hriêi  par  Us  Papes,  par  le 
R.  P.  DE  BoTLESVB,  S.  J.  Paris,  Uaton,  1875.  5  tableaux  in- 12.  1*'  tableau  : 

,  Saint  Pierre  et  les  Papes  martyrs,  44  p.  —  2*  tableau  :  les  Papes  et  les  Césars 
chrétiens,  64  p.  -  3*  tableau  :  les  Papes,  les  Grecs,  les  Francs,  70  p.  — 
4*  tableau  :  les  Papes,  les  Italiens,  les  Allemands,  80  p.  —  5*  tableau  : 
les  Princes  se  séparent  des  Papes,  68  p. 

Pour  tous  ceux  qui  ont  eu  déjà  entre  les  mains  quelques-uns  des  nom- 
breux et  excellents  opuscules  publiés  par  le  R.  P.  de  Boylesve,  il  «ufQra 
d'indiquer  cette  nouvelle  série,  type  achevé  du  résumé  historique  net, 
précis,  doctrinal,  lumineux.  La  manière  de  l'éminent  religieux  est  connue, 
sa  science  aussi.  Personne  ne  nous  démentira,  quand  nous  dirons  qu'il  brille 
au  premier  rang  parmi  les  champions  et  les  vulgarisateurs  de  la  vérité 
catholique,  philosophique  et  historique.  Donc,  à  ceux  qui  n'ont  pas  encore 
fait  connaissance  avec  lui,  nous  recommandons,  sans  hésiter  et  chaleureuse- 
ment, ce  cours  de  religion  si  remarquable,  qui,  par  son  format,  semble  ne 
s'adresser  qu'aux  enfants,  mais  qui  contient  toute  la  moelle  de  la  doctrine, 
la  grande  doctrine  du  catholicisme  sur  les  questions  politiques  et  sociales, 
et  suffit,  dès  lors,  à  satisfaire  les  intelligences  les  plus  élevées  et  à  les  illu- 
miner encore.  Est-il  besoin,  d'ailleurs,  d'analyser  ces  tableaux  historiques  ? 
Leurs  titres  disent  assez  ce  qu'ils  promettent  au  lecteur  :  c'est  l'histoire  de 
la  Royauté  de  Dieu  exercée  sur  le  monde  par  son  Église  et  ses  pontifes,  et 
des  luttes  constantes  et  acharnées  qu'elle  a  soutenues,  depuis  la  Pentecôte, 
d'abord  contre  le  paganisme  et  les  persécutions,  puis  contre  les  héré- 
siarques, contre  les  iconoclastes,  contre  les  empereurs  teutons  et  les  rois 
gallicans,  etc..  Assurément,  pour  un  observateur  superficiel,  la  partie 
semble  perdue,  car  c<  les  princes  finissent  par  se  séparer  des  papes  ;  »  mais 
à  quel  prix?  Et  voilà  le  signe  de  la  victoire  de  Jésus-Christ!  Toute  scission 
avec  Rome  est  un  germe  de  catastrophe  dans  l'ordre  intellectuel,  moral, 
politique,  social,  matériel  même.  C'est  ce  que  montre  parfaitement  le  Cours 
de  Religion  du  R.  P.  de  Boylesve,  bien  que  son  dernier  tableau  nous  paraisse 
comporter  des  développements  plus  r;msidérables  que  ceux  qu'il  lui  a 
donnés.  Mais,  que  d'erreurs  dissipées,  que  de  mensonges  dévoilés,  que  de 
calomnies  vengées I...  Ce  sont  là  des  ouvrages  de  propagande  dont  tout 
honnête  homme,  ami  de  la  vérité  historique  autant  que  de  la  vérité  reli- 
gieuse, doit  avoir  à  cœur  de  procurer  la  diffusion  la  plus  rapide,  la  plus 
complète  possible;  et  nous  voulons  croire  qu'en  effet,  ces  tableaux  dé 
l'éminent  religieux  seront  vite  épuisés  et  remplacés  par  de  nouvelles  études 
aussi  «xoellentes.  F.  de  Roqdefsuil. 


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OBuvre  des  campagnes,  ou  quelques  mof/enê  de  ranimer  la  foi  et  la  ^ 
ehrétierme  da$i$  le$  paroiêseè  moins  religieuses,  particulièrement  à  la  ùam- 
pagnSy  par  le  P.  Vandil,  missionnaire  du  Sacré-Cœor.  3*  édition.  Pans, 
Douniol,  1875.  In-12  de  vui-432  p.  —  Prix  :  2  fr.  50. 

Le  fait  seul  d'être  arrivé  à  une  3*  édition,  pour  un  ouvrage  de  ce  genre, 
témoigne  déjà  en  sa  faveur.  L.  P.  Vandel,  en  homme  expérimenté,  y  donne 
d'excellents  conseils  sur  les  moyens  de  ranimer  la  foi  dans  les  populations 
rurales.  Il  s'adresse  spécialement  aux  curés  :  il  leur  servira  de  guide  sur  les 
œuvres  et  associations  à  établir,  les  moyens  de  les  fonder,  les  pieuses  indus- 
tries auxquelles  ils  peuvent  avoir  recours  et  qui  sont  les  plus  efficaces.  Mais 
les  classes  dirigeantes  y  ont  aussi  leur  part  :  elles  sont  les  auxiliaires  natu- 
rels du  prêtre  ;  elles  ont  à  exercer  un  apostolat  laïque  sur  lequel  le  P.  Van- 
del  les  éclaire.  R. 

Eté  Pasteur  de  la  Salnte-Enfanoe,  ou  Recueil  de  traits  édifiants^ 
récits  de  fêtes,  loteries ,  correspondances,  etc.,  extraits  des  Annales  de  la 
Sainte-Enfance,  par  le  R.  P.  Latour,  de  la  Compagnie  de  Jésus.  Pre- 
mier recueil.  Le  Mans,  Leguicheux-Gallienne,  1875.  In-12  de  302  p  — 
Prix  :  75  c. 

Ce  recueil  est  destiné  aux  associés  de  la  Sainte-Enfance,  c'est-à-dire  surtout 
aux  enfants.  Le  P.  Latour  a  extrait  des  Annales  de  l'œuvre  les  traits  les  plus 
propres  à  impressionner  les  jeunes  imaginations  et  à  leur  faire  goûter  cette 
oeuvre  admirable.  Il  a  eu  la  bonne  pensée  de  les  ranger  dans  un  classement 
méthodique,  par  ordre  de  matière  :  Détails  sur  les  enfants  chinois  et  sur  les 
hospices  chinois;  —  Zèle  déployé  par  les  associés  ;  —  Bienfaits  de  l'œuvre; 
—  Développements  de  Tœuvre,  etc.  Ce  livre  intéressera  les  enfants  et  leur 
fera  du  bien.  S. 


Li'HiNtoIre  de  la  grotte  de  Lourde»  racontée  À  la  Jeunesse» 

par  M.  l'abbé  A.  Aubebt,  curé  dans  le  diocèse  d'Angers.  Paris,  Blériot  ; 
Angers,  Briand  et  Hervé,  1874,  In-18  de  xi-170  p.  —  Prix  :  i  fr.  60. 

Le  titre  de  cet  ouvrage  dit  assez  quelles  sont  les  visées  de  l'auteur.  U 
saura  intéresser  les  enfants  à  ce  grand  fait  de  l'apparition  miraculeuse  de 
Lourdes,  qui  ne  pourra  qu'accroître  leur  dévotion  envers  la  sainte  Vierge. 
Mais  nous  croyons  qu'il  eût  mieux  valu  laisser  les  événements  donner  eux- 
mêmes  d'utiles  leçons,  plutôt  que  de  les  déduire  en  s'adressant  directement 
aux  enfants.  Quelques  prières  terminent  ce  petit  volume.  S. 


Biades  politiques,  historiques  et  relifl^leases,  suivies  de 
variétés  scientifiques,  dédiées  à  la  France  catholique,  par  Jcles  de  Cacheleu, 
ancien  collaborateur  de  feuilles  parisiennes  et  départementales.  Amiens, 
H.  Yvert,  i875.  In- 12  de  354  p.  —  Prix:  2  fr. 

«  On  a  mis  de  tout  dans  ce  livre-lk  :  »  nous  ne  nous  en  plaignons  pas  ;  car 
les  différents  morceaux  qui  le  composent,  et  dont  quelques-uns  sont  peut-être 
étonnés  d'être  ainsi  rapprochés,  renferment  de  fort  bons  conseils,  expriment 
de  saines  et  généreuses  pensées,  et  tendent,  évidemment,  à  l'amélioration 
intellectuelle  et  morale  du  lecteur,  soit  en  lui  rappelant  les  principes  poli- 
tiques et  religieux  qui  ont  fait  la  France  grande  et  honorée,  soit  en  lui 
montrant  le  désarroi  pratique  où  nous  a  jetés  le  mépris  de  ces  mêmes  prin- 
cipes. M.  de  Cacheleu  est  patriote  et  royaliste...  et  il  s'en  fait  honneur  en 
boa  style.  U  est,  en  même  temps,  etil  ne  semble  guère  s'en  cacher  davantage, 
grand  chasseur  devant  l'Étemel  1...  ie  note  pour  preuve  ses  études  sur  la 


—  142  — 

une  œuvre  fort  considérable,  une  nomenelatare  des  lirres  imprimés  ou 
inédits  d*aateurs  siciliens  ou  traitant  de  sujets  intéressant  la  Sicile. 
Sa  bibliothèque  est  tout  à  la  fois  une  ample  biographie  :  elle  donne 
non -seulement  des  renseignements  précis  sur  les  ouvrages,  mais  des 
notices  sur  leurs  auteurs.  La  dernière  livraison  que  nous  avons  reçue 
est  la  onzième,  et  finit  par  l'article  Giovanni  di  Giovanni.     Th.  P. 


BULLETIN 

Cour»  de  Reltiplon.  Le  Régne  de  Jésus^hrUi  par  1$$  Papes,  par  le 
R.  P.  DE  BoTLEsvB,  S.  J.  Parla,  Haton,  1875.  5  tableaux  in-12.  !•'  tableau  : 

g  Saint  Pierre  et  les  Papes  martyrs ,  44  p.  —  2*  tableau  :  les  Papes  et  les  Césars 
chrétiens,  64  p.  -  3*  tableau  :  les  Papes,  les  Grecs,  les  Francs,  70  p.  — 
4*  tableau  :  les  Papes,  les  Italiens,  les  Allemands,  80  p.  —  5«  tableau  : 
les  Princes  se  séparent  des  Papes,  68  p. 

Pour  tous  ceux  qui  ont  eu  déjà  entre  les  mains  quelques-uns  des  nom- 
breux et  excellents  opuscules  publiés  par  le  R.  P.  de  Boylesve,  il  «uffira 
d*indiquer  cette  nouvelle  série,  type  acbevô  du  résumé  historique  net, 
précis,  doctrinal,  lumineux.  La  manière  de  l'éminent  religieux  est  connue, 
sa  science  aussi.  Personne  ne  nous  démentira,  quand  nous  dirons  qu*il  brille 
au  premier  rang  parmi  les  champions  et  les  vulgarisateurs  de  la  vérité 
catholique,  philosophique  et  historique.  Donc,  à  ceux  qui  n'ont  pas  encore 
fait  connaissance  avec  lui,  nous  recommandons,  sans  hésiter  et  chaleureuse- 
ment, ce  cours  de  religion  si  remarquable,  qui,  par  son  format,  semble  ne 
s'adresser  qu'aux  enfants,  mais  qui  contient  toute  la  moelle  de  la  doctrine, 
la  grande  doctrine  du  catholicisme  sur  les  questions  politiques  et  sociales, 
et  sufOt,  dès  lors,  à  satisfaire  les  intelligences  les  plus  élevées  et  à  les  illu- 
miner encore.  Est-il  besoin,  d'ailleurs,  d'analyser  ces  tableaux  historiques  ? 
Leurs  titres  disent  assez  ce  qu'ils  promettent  au  lecteur  :  c'est  l'histoire  de 
la  Royauté  de  Dieu  exercée  sur  le  monde  par  son  Église  et  ses  pontifes,  et 
des  luttes  constantes  et  acharnées  qu'elle  a  soutenues,  depuis  la  Pentecôte, 
d'abord  contre  le  paganisme  et  les  persécutions,  puis  contre  les  héré- 
siarques, contre  les  iconoclastes,  contre  les  empereurs  teutons  et  les  rois 
gallicans,  etc...  Assurément,  pour  un  observateur  superficiel,  la  partie 
semble  perdue,  car  «  les  princes  finissent  par  se  séparer  des  papes  ;  »  mais 
à  quel  prix?  Et  voilà  le  signe  de  la  victoire  de  Jésus-€hrist!  Toute  scission 
avec  Rome  est  un  germe  de  catastrophe  dans  l'ordre  intellectuel,  moral, 
politique,  social,  matériel  même.  C'est  ce  que  montre  parfaitement  le  Cours 
de  Religion  du  R.  P.  de  Boylesve,  bien  que  son  dernier  tableau  nous  paraisse 
comporter  des  développements  plus  cmsidérables  que  ceux  qu'il  lui  a 
donnés.  Mais,  que  d'erreurs  dissipées,  que  de  mensonges  dévoilés,  que  de 
calomnies  vengées  I...  Ce  sont  là  des  ouvrages  de  propagande  dont  tout 
honnête  homme,  ami  de  la  vérité  historique  autant  que  de  la  vérité  reli- 
gieuse, doit  avoir  à  cœur  de  procurer  la  diffusion  la  plus  rapide,  la  plus 
complète  possible;  et  nous  voulons  croire  qu'en  effet,  ces  tableaux  de 
réminent  religieux  seront  vite  épuisés  et  remplacés  par  de  nouvelles  études 
aussi  «xoeUentes.  F.  de  Roquefxuil. 


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OBavre  de»  campagnes»  ou  quelques  moyens  de  ranimer  la  foi  et  latte 
chrétienne  dans  les  paroisses  moins  religieuses,  particuHérement  à  la  oam- 
pagney  par  le  P.  Yandkl,  missionnaire  da  Sacré-Cœur.  3*  édition.  Paris, 
Douniol,  <873.  In-12  de  viii-432  p.  —  Prix  :  2  fr.  50. 

Le  fait  seul  d*étre  arrivé  à  une  3*  édition,  pour  un  ouvrage  de  ce  genre, 
témoigne  déjà  en  sa  faveur.  L.  P.  Vandel,  en  homme  expérimenté,  y  donne 
d'excellents  conseils  sur  les  moyens  de  ranimer  la  foi  dans  les  populations 
rurales.  Il  s'adresse  spécialement  aux  curés  :  il  leur  servira  de  guide  sur  les 
oeuvres  et  associations  à  établir,  les  moyens  de  les  fonder,  les  pieuses  indus- 
tries auxquelles  ils  peuvent  avoir  recours  et  qui  sont  les  plus  efficaces.  Mais 
les  classes  dirigeantes  y  ont  aussi  leur  part  :  elles  sont  les  auxiliaires  natu- 
rels du  prêtre  ;  elles  ont  à  exercer  un  apostolat  laïque  sur  lequel  le  P.  Van- 
del  les  éclaire.  R. 

Lie  Pasteur  de  la  Aalnte-Enfanoe,  ou  Recueil  de  traits  édifiants^ 
récits  de  fêtes,  loteries,  correspondances,  etc,  extraits  des  Annales  de  la 
Sainte-Enfance,  par  le  R.  P.  Latour,  de  la  Compagnie  de  Jésus.  Pre- 
mier recueil.  Le  Mans,  Leguicheux-Gallienne,  4875.  In-12  de  302  p  — 
Prix  :  75  c. 

Ce  recueil  est  destiné  aux  associés  de  la  Sainte-Enfance,  c'est-à-dire  surtout 
aux  enfants.  Le  P.  Latour  a  extrait  des  Annales  de  Tœuvre  les  traits  les  plus 
propres  à  impressionner  les  jeunes  imaginations  et  à  leur  faire  goûter  cette 
OBuvre  admirable.  Il  a  eu  la  bonne  pensée  de  les  ranger  dans  un  classement 
méthodique,  par  ordre  de  matière  :  Détails  sur  les  enfants  chinois  et  sur  les 
hospices  chinois;  —  Zèle  déployé  par  les  associés;  —  Bienfaits  de  Tœuvre; 
—  Développements  de  Tœuvre,  etc.  Ce  livre  intéressera  les  enfants  et  leur 
fera  du  bien.  S. 


Kj'HIiitoIre  de  la  carotte  de  K^ourdes  racontée  à  la  Jeuoetiae* 

par  M.  Tabbé  A.  Acbert,  curé  dans  le  diocèse  d'Angers.  Paris,  Blériot  ; 
Angers,  Briand  et  Hervé,  1874.  In- 18  de  xi-170  p.  —  Prix  :  1  fr.  50. 

Le  titre  de  cet  ouvrage  dit  assez  quelles  sont  les  visées  de  Tauteur.  Il 
saura  intéresser  les  enfants  à  ce  grand  fait  de  Tapparition  miraculeuse  de 
Lourdes,  qui  ne  pourra  qu'accroître  leur  dévotion  envers  la  sainte  Vierge. 
Mais  nous  croyons  qu'il  eût  mieux  valu  laisser  les  événements  donner  eux- 
mêmes  d'utiles  leçons,  plutôt  que  de  les  déduire  en  s'adressant  directement 
aux  enfants.  Quelques  prières  terminent  ce  petit  volume.  S. 


£tndeii  politique»,  lilstorlquea  et  reli^pleasea,  suivies  de 
variétés  scientifiques,  dédiées  à  la  France  catholique,  par  Jules  de  Cacheleo, 
ancien  collaborateur  de  feuilles  parisiennes  et  départementales.  Amiens, 
H.  Yvert,  1875.  In-42  de  354  p.  —  Prix:  2  fr. 

«  On  a  mis  de  tout  dans  ce  h'vre-là  :  »  nous  ne  nous  en  plaignons  pas  ;  car 
les  différents  morceaux  qui  le  composent,  et  dont  quelques-uns  sont  peut-être 
étonnés  d'être  ainsi  rapprochés,  renferment  de  fort  bons  conseils,  expriment 
de  saines  et  généreuses  pensées,  et  tendent,  évidemment,  à  l'amélioration 
intellectuelle  et  morale  du  lecteur,  soit  en  lui  rappelant  les  principes  poli- 
tiques et  religieux  qui  ont  fait  la  France  grande  et  honorée,  soit  en  lui 
montrant  le  désarroi  pratique  où  nous  a  jetés  le  mépris  de  ces  mêmes  prin- 
cipes. M.  de  Cacheleu  est  patriote  et  royaliste...  et  il  s'en  fait  honneur  en 
boa  style.  U  est,  en  même  temps,  et  il  ne  semble  guère  s'en  cacher  davantage, 
grand  ch«Meur  devant  l'Étemel  1...  ie  note  pour  prenve  ses  études  sur  la 


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vie  des  champs,  sur  la  culture  française,  sur  le  cheval,  le  chien,  le  perdreau, 
les  abeilles,  la  destruction  du  gibier,  etc..  études  fort  succinctes,  mais  où 
paraissent  résumés  les  fruits  d'une  longue  expérience.  F.  R. 


Origine»  et  développement  du  positivisme  contemporain» 

Critique  de  celte  doctrine,  essai  de  conciliation,  par  J.-B.  Tissândier,  profes- 
seur de  philosophie  à  la  faculté  des  lettres  de  Douai.  Paris,  Eug.  Belin, 
1874.  In-8  dexL-160  p.  —Prix:  4  fr. 

Nous  avons  accueilli  avec  faveur  (Polybliblion,  mars  1 870,  t.  V,  p.  1 29)  les  Eiudes 
de  théodicée  de  M.  J.-B.  Tissândier.  Le  livre  qu'il  vient  de  publier  sur  les 
origines  du  positivisme  est  loin  de  marquer  chez  lui  un  progrès  dans  la  doc- 
trine ou  dans  l'art  d'écrire.  C'est  d'abord  une  ébauche,  plutôt  qu'un  travail 
fini.  Rien  de  plus  indéterminé  que  le  contenu  de  Vlntroduetîonf  dont  les 
allures  vagues  et  indécises  ne  peuvent  surtout  s'expliquer  que  par  un  parti 
pris  de  conciliation  entre  les  systèmes  opposés,  sans  base  vraiment  scienti- 
fique. Nous  courons  ainsi  à  travers  l'histoire,  sans  autre  fruit  qu'une  réhabi- 
litation des  sophistes  (p.  xiii),  une  analyse  assez  obscure  du  Théétète,  et  des 
considérations  sur  le  rapport  de  la  métaphysique  avec  la  science,  l'ordre 
social  et  la  religion. 

Ce  n'est  pas  que  les  intentions  du  professeur  de  Douai  ne  soient  droites, 
et  qu'il  n'y  ait  dans  son  travail  des  parties  louables,  sauf  l'absence  de  préci- 
sion et  de  décision.  L'ensemble  même  se  réduit,  dans  les  deux  parties  (du 
Positivisme  théorique,  du  positivisme  pratique),  à  une  double  thèse  très-légi- 
time,  quoique  nullement  neuve.  On  sait  bien  que,  pour  réagir  contre  le 
septicisme  de  Hume,  Reid  s'attacha  au  caractère  relatif  de  laconn  aissance 
humaine,  et  devint  ainsi  le  précurseur  très-involontaire  des  positivistes 
anglais  ;  Hamilton,  avec  son  horreur  de  toute  métaphysique,  marque  la  tran- 
sition de  Reid  à  Stuart-Mill.  En  étudiant  à  son  tour  les  idées  de  cause  et 
d'absolu,  M.  J.-B.  Tissândier,  poursuit  la  revendication  des  droits  de  la  raison 
contre  l'empirisme  ;  mais  il  se  préoccupe  surtout  de  montrer  qu'il  n'y  a  pas, 
entre  l'expérience  et  les  idées,  cette  solution  de  continuité  que  le  positi- 
visme suppose  et  que  le  spiritualisme  a  quelquefois  eu  l'air  d'accepter.  Mal- 
heureusement ce  point,  le  seul  qui  eût  pu  rajeunir  le  travail  de  M.  Tissândier, 
n'est  pas  touché  d'une  main  sûre,  et  le  lecteur  se  trouve  à  chaque  instant 
en  face  de  phrases  indécises  comme  celle-ci:  «  Je  crois  qu'il  y  a  des  exagé- 
rations et  des  erreurs  dans  la  théorie  de  M.  Cousin  ;  mais  je  crois  en  même 
temps  qu'on  l'a  trop  oubliée  aujourd'hui,  que  l'on  fait  à  ce  sujet  les  plus 
fâcheuses  confusions,  etc.  » 

Dans  la  deuxième  partie,  ce  sont  les  droits  de  la  morale  et  de  la  liberté 
dans  l'ordre  social  qui  sont  défendus  conti*e  le  positivisme.  En  déplorant 
encore  ici  le  vague  des  énoncés  et  des  preuves,  nous  reconnaissons  volon- 
tiers l'honnêteté  qui  distingue  les  idées  pratiques  de  l'auteur.  Au  point  de 
vue  du  langage,  on  ne  peut  que  s'étonner  de  trouver  sous  la  plume  d'un 
professeur  de  faculté  des  négligences,  des  obscurités  et  même  quelques 
incorrections  :  «danger  iminent  (p.  133).  »  L.  Couture. 


Apologie  de  la  théodicée  du  dernier  concile  général  du 
Vatican,  par  l'abbé  Freynbt.  Paris,  Pion,  1875.  In-12  de  280  p.  — 
Prix  :  2  fr.  50. 

Le  concile  du  Vatican  ne  figurerait  guère  qu'au  frontispice  de  ce  volume 
si  l'auteur  n'eût  placé,  à  la  fln,  en  appendice,  une  traduction  française  de  la 
constitution  Dei  juius.  Le  petit  livre  de  M.  l'abbé  Freynet  est  parement  et 


—  14a  — 

simplement  un  manuel  de  théodicée  chrétienne,  au  point  de  vue  philoso- 
phique, et  il  aurait  pu  paraître  à  peu  près  tel  qu'il  est  avant  le  concile.  Ce 
n'est  pas  que  la  doctrine  sur  Dieu,  renfermée  dans  les  quatre  chapitres  pro- 
mulgués au  Vatican  le  28  avril  i870,  ne  put  servir  de  hase  à  une  exposition 
rationnelle  spécialement  appropriée  aux  besoins  du  temps  actuel.  Ce  travail 
intéressant  et  utile  a  même  été  partiellement  exécuté  par  un  éminent  théo- 
logien dans  les  Etudes  des  PP.  Jésuites.  Nous  ne  trouvons  ici  rien  de  semblable, 
et  nous  n'en  ferions  pas  un  reproche  à  M.  Freynet,  si  le  titre  de  son  livre  ne 
donnait  au  lecteur  le  droit  de  s'y  atttendre.  Nous  rendons  cette  justice  à  son 
manuel  de  théodicée  qu'il  est  conçu  et  rédigé  avec  méthode.  Trois  chapitres 
(p.  5-115)  sont  consacrés  aux  premiers  principes  métaphysiques  et  à  la  certi- 
tude; deux  autres  (p.  li 5-491)  renferment  les  preuves  consacrées  de  l'exis- 
tence de  Dieu  et  de  la  création  ;  les  deux  derniers  traitent  de  la  Providence 
divine  et  de  la  liberté  de  l'acte  créateur  :  le  tout  divisé  en  proportions  net- 
tement exprimées,  avec  démonstrations  en  forme  de  réponse  aux  objections. 
L'esprit  général  est  celui  du  spiritualisme  chrétien  fortement  empreint  de 
cartésianisme,  et  tout  à  fait  ôii*anger,  dans  la  méthode  et  l'ordre  des  ques- 
tions et  la  terminologie,  au  néopéripatétisme  en  faveur  aujourd'hui  dans 
beaucoup  d'écoles  catholiques.  Clairement  et  sagement  écrit,  quoique  sans 
originalité  notable  et  sans  appropriation  bien  précise  aux  erreurs  contem- 
poraines, ce  livre  peut  être  de  quelque  utilité  aux  jeunes  gens  qui  étudient 
la  philosophie.  Léonce  Couturr. 

Apostolat  des  médecins,  par  N.  S.  B.  — Beauvais,  imp.  Père,  1875, 
In-18  de  ix-89  p.  —  Prix  :  0  fr.  50. 

M.  Boivin  poursuit  avec  persévérance  son  œuvre  courageuse.  Déjà,  après 
nos  désastres,  il  avait  écrit,  sous  l'inspiration  la  plus  française  et  la  plus  reli- 
gieuse, un  Appel  en  faveur  des  missions  catholiques.  C'est  aux  médecins  qu'il 
s'adresse  aujourd'hui,  toujours  sous  l'inspiration  des  mêmes  sentiments,  pour 
leur  montrer  la  grandeur  de  leur  mission,  le  bien  qu'ils  peuvent  opérer  sur 
les  âmes.  Par  l'influence  légitime  que  leur  donne  l'exercice  de  leur  profession, 
ils  sont  les  plus  précieux  auxiliaires  des  prêtres  et  des  missionnaires. 
M.  Boivin  rappelle  l'alliance  étroite  qui  existait,  même  chez  les  païens, 
entre  les  médecins  et  la  religion,  alliance  que  n'ont  pas  répudiée  les  plus 
illustres  praticiens,  et  qui  a  toujours  été  favorable  aux  développements  de  la 
science.  Des  tendances  contraires  se  manifestent  de  nos  jours,  et  détournent 
les  médecins  de  la  voie  qu'ils  prendraient  avec  le  plus  de  profit  pour  tous. 
Telles  sont  les  excellentes  pensées  que  l'auteur  développe,  sans  y  mettre  assez 
de  précision  et  d'ordre.  Son  appel  arrive  à  point,  au  moment  où  la  liberté 
de  l'enseignement  supérieur  va  permettre  de  lutter  contre  le  courant  maté- 
rialiste, et  nous  rendre  les  médecins  chrétiens,  aussi  utiles  aux  âmes  qu'aux 
corps.  V.  M. 

Itestez'au  irtUage,  par  Eginhard.  Paris,  Curol,  1874.  In-8  de  221  p.  — 
Prix  :  2£r. 

Ce  titre  nous  avait  fait  prendre  le  livre  pour  une  étude  d'économie  sociale 
sur  la  dépopulation  des  campagnes  :  ce  n'est  qu'une  nouvelle  assez  mal  in- 
titulée, car  l'opposition  qu'on  y  trouve  entre  la  vie  des  champs  et  la  vie  de 
Paris  n'est  point  concluante  en  faveur  do  la  campagne,  le  héros  du  roman 
n'ayant  quitté  son  pays  que  par  nécessité.  Deux  enfants  orphelins,  le  frère 
et  la  sœur,  vivent  au  village  avec  leur  grand'mère,  sans  fortune,  mais  hon- 
nêtes, et  relativement  heureux  dans  un  intérieur  où  règne  la  plus  grande 
Août  1875.  T.  XIV,  9. 


—  i46  — 

union  et  où  tout  est  conforme  ft  la  loi  de  Dieu.  Le  frère,  devenu  grand, 
vient  à  Paris  pour  se  créer  une  position.  Il  y  trouve  des  difficultés  de 
tout  genre,  bien  des  privations,  finalement,  la  misère  et  la  maladie,  sans 
cependant  qu*on  puisse  rien  lui  reprocher  de  sérieux.  La  grand*mère  meurt  ; 
la  sœur  va  rejoindre  son  frère  et  le  soigner.  Elle  trouve  à  son  chevet  un  ami, 
jouissant  d*une  grande  fortune  et  d'une  belle  position.  De  fréquentes  ren- 
contres, où  tout  se  passe  très-convenablement,  font  naître  des  sentiments 
faciles  à  deviner.  Le  frère  meurt,  et  la  pauvre  jeune  fille  devient  châtelaine 
d'un  beau  manoir  en  Bretagne.  Les  charmes  du  style,  la  pureté  des  inten- 
tions ne  sauraient  faire  passer  sur  les  inconvénients  d'une  pareille  donnée. 

V.M. 


AJmanaoli  du  Sonnet.  —  Sonnets  inédits,  publiés  avec  la  collaboration 
de  deux  cents  poètes  français  et  des  principaux  Félibres.  2*  année,  1875. 
Aix  en  Provence,  V«  Remondet- Aubin.  In-18  dé  207  p.  et  une  pour  Terrata. 

Ce  petit  volume,  élégamment  imprimé,  offre  une  collection  intéressante 
de  vers  écrits  par  un  grand  nombre  de  poêtes,^resque  tous  jeunes  et  animés 
d'un  vif  dévouement  pour  le  culte  des  muses.  Apprécier  le  mérite  de  ces 
diverses  productions,  ce  serait  sortir  des  limites  que  nous  devons  nous  pres- 
crire. Disons  seulement  que  les  pages  184  &  196  renferment  des  sonnets  en 
dialecte  provençal  (on  trouve  même  un  sonnet  en  langue  bretonne),  suivis 
de  la  traduction  de  huit  sonnet ti  de  Pétrarque.  L'Académie  du  Sonnet , 
s'appuyant  sur  le  concours  de  nombreux  sonnetistes,  se  propose  de  publier 
deux  .traductions  de  la  collection  des  sonnets  du  célèbre  chantre  de  Laure, 
Tune  en  français,  l'autre  en  provençal.  —  Ce  qui  paraîtra  peut-être  le  plus 
digne  d'intérêt  dans  VAlmanach  en  question,  c'est  l'introduction  (52  p.);  elle 
ofiîre,  au  point  de  vue  de  l'histoire  littéraire,  des  informations  curieuses  ; 
elle  traite  successivement  des  origines  du  sonnet,  du  sonnet  dans  la  poésie 
provençale,  du  célèbre  sonnet  de  Des  Barreaux  ;  elle  reproduit  un  sonnet  de 
Ronsard,  qu'on  peut  qualifier  d'inédit,  car  il  ne  se  voit  que  dans  la  première 
et  introuvable  édition  des  Amours  de  ce  poète  (Paris,  1552),  et  il  n'a  été 
reproduit  dans  aucune  des  dix-huit  éditions  des  œuvres  do  Ronsard.  VAca» 
déinie  du  Sonnet,  à  Yaucluse,  et  le  Sonnet  en  1874  sont  également  l'objet  de 
quelques  pages  bien  dignes  d'être  lues.  Des  détails  circonstanciés  apprennent 
une  circonstance  dont  on  se  doute  fort  peu  dans  les  régions  du  nord  de  la 
France,  l'activité  incessante  et  méritoire  des  muses  provençales  et  langue- 
dociennes. Du  reste,  le  zèle  des  amis  du  sonnet  ne  se  ralentit  point;  ils 
annoncent  en  préparation  V Anthologie  du  sonnet  français  (1529-1875)  et  l'An- 
thologie  du  sonnet  provençal  (treizième-dix-neuvième  siècles).  B. 


nistolre  de  l'Influence  de  la  lan^ne  IVancalse  en  Alle- 
magne» par  Jules  de  Beylié,  avocat  à  la  Cour  d'appel  de  Grenoble.  Gre- 
noble, 1874.  In-8  de  44  p.  —  Prix  :  2  fr. 

L'auteur  de  cet  intéressant  opuscule  a  obéi  à  une  heureuse  inspiration  en 
recherchant,  dans  la  langue  de  nos  voisins  d'outre-Rhin,  l'empreinte  de  la 
nètre.  Cette  empreinte  est  profonde,  et,  à  coup  sûr,  beaucoup  de  Français 
ignorent  jusqu'à  quel  point  nos  vainqueurs  d'hier  subissent  aigourd'hui  le 
joug  de  notre  domination  littéraire.  Il  faut  suivre  M.  de  Beylié  dans  ses  déve- 
loppements historiques  sur  un  sujet  qui  n'a  rien  d'aride,  et  qu'il  relève 
encore  par  des  aperçus  ingénieux  et  de  curieux  détails.  Conmient,  en  effet, 
ne  pas  lire  avec  plaisir  qu'au  mois  de  novembre  1873,  M.  de  Biamarek, 
ayant  fait  remettre  à  la  chancellerie  de  Saint-Pétersbourg  une  note  rédigée 


—  147  — 

en  alltmand,  il  lui  fat  répondu  en  russe,  pour  lui  rappeler  que  le  français 
est  la  seule  langue  diplomatique!  Si,  par  son  érudition,  le  jeune  avocat 
auquel  nous  devons  cette  œuvre  originale  nous  prouve  sa  connaissance 
approfondie  de  Tidiome  allemand,  par  le  choix  du  fond  autant  que  par  la 
correction  de  la  forme,  il  se  révèle  bon  Français.  B.  B. 


AoUloque»  sceptique»»  par  La  Mothe-le-Vâyer,  réimprimés  sur 
rédition  unique  de  1670.  Paris,  Isidore  Liseux.  1875.  In-18  de  60  p.  — 
Prix  :  2  fr.  50. 

Mja  Conférence  entre  Liutlier  et  le  Diable.  Traduction  nouvelle, 
par  Isidore  Liseux.  Même  libraire.  In-18  de  96  p.  — Prix  :  4  fr. 

£n  réimprimant  ces  deux  opuscules  on  leur  a  peut-être  ôté  leur  plus 
grand  mérite,  celui  de  la  rareté.  Mais  ils  ont  été  publiés,  il  faut  le  recon- 
naître, avec  un  soin  et  dans  des  conditions  typographiques  qui  doivent  leur 
valoir  un  bon  accueil  des  bibliophiles.  La  MoÔie-le-Vajer  était,  on  le  sait,  un 
philosophe  pyrrhonien.  Cependant  il  prétendait  que  son  scepticisme  ne 
s'adressait  qu'aux  sciences  humaines.  Il  a  du  moins  fait,  à  Tégard  de  la  reli- 
gion, une  réserve  qui,  si  elle  n'était  pas  sincère,  ne  serait  qu'tuae  précaution 
hypocrite  dont  il  y  aurait  peu  à  le  louer.  Cette  réserve  ne  parait  pas,  d'ail- 
leurs, avoir  été  prise  en  grande  considération  par  l'éditeur,  qui  semble  sur- 
tout enchanté  d'établir  un  contraste  entre  un  philosophe  athée  de  nos  jours 
et  La  Mothe-le«Vayer  ayant,  à  l'Académie,  Bossuet  pour  collègue  —  il  aurait 
fallu  dire  confrère  —  et  devenant  précepteur  de  Louis  XTV  —  ce  qui  est  une 
eireur.  La  Mothe-le-Vayer  fût  le  précepteur  du  duc  d'Orléans. 

La  Conférence  entre  Lutker  et  le  Diable  offre  plus  d'intérêt  que  les  Soliloques. 
Un  savant  et  pieux  ecclésiastique,  l'abbé  de  Cordemoy,  par  les  commentaires 
qu'il  joignit  à  cet  opuscule,  en  fit  un  ouvrage  de  controverse.  Devenu  fort 
rare,  il  fut  inséré  dans  le  Recueil  de  dissertations  sur  les  apparitions  et  les 
esprits f  livre  d'un  autre  abbé,  celui-là  très-savant  aussi,  mais  nous  le  crai- 
gnons, d'une  piété  assez  douteuse.  Ce  nouvel  éditeur  était  ce  LenglctDu- 
fresnoy  qui  commenta  un  peu  trop  en  franc  gaulois  —  mots  par  lesquels  il 
aimait  à  se  peindre  —  le  Roman  de  la  Rose  et  de  nombreuses  productions 
du  même  genre,  et  qae  son  amour  pour  la  liberté  conduisit  une  douzaine 
de  fois  à  la  Bastille.  M.  Isidore  Liseux  a  donné  une  traduction  nouvelle  de 
rœuvre  étrange  de  Luther,  mais  a  conservé  les  remarques  des  deux  précé- 
dents éditeurs*  Th.  P. 


Portrait»  d*hl»tolre  morale    et  politique   du  temiM»   par 

Ch.  dk  Mazàdi.  Paris,  E.  Pion»  1875.  Gr.  in-18  de  370  p.  Prix  :  3  fr. 

Nous  n'avons  point  ici  à  entrer  dans  le  détail  des  portraits  que  M.  Ch.  da 
Mazade  a  tracés,  non  sans  talent,  pour  faire  revivre  quelques*-uns  des  épi- 
sodes, des  caractères  et  des  physionomies  du  siècle.  Dans  ces  fragments  de 
l'histoire  morale  d'un  temps  qui  a  tout  connu,  les  espérances  et  les  décep- 
tions, M.  de  Mazade  poursuit  une  démonstration  qui  n'est  point  faite,  hélas  I 
aux  yeux  de  tout  le  monde.  L'auteur  est  dans  le  vrai  quand  il  trouve  que 
les  abus,  les  fantaisies,  les  sophismes,  les  excès  qui  essayent  de  fleurir  encore, 
conmie  si  rien  ne  s'était  pas^,  ne  sont  plus  de  saison  ;  qu'ils  ne  répondent 
plus  à  un  certain  instinct  public,  désormais  fatigué  de  mécomptes  et  afiamé 
de  réparations.  C'est  le  rôle  des  lettres,  aujourd'hui,  de  réchauflfer  et  de  guider 
cet  instinct,  d'être  les  réparatrices  morales,  les  consolatrices  d'une  nation 
éprouvée»  et  de  l'aider  à  se  relever  par  toutes  les  supériorités  de  l'esprit. 


—  148  — 

« 

Pour  aider  à  ce  réconfort  des  esprits  qui  s'abandonnent,  à  l'heure  présente, 
à  un  pessimisme  aussi  déplacé  que  stérile,  M.  de  Mazade  a  consacré  à  la 
jeunesse  de  la  Restauration  sa  première  étude,  qui  porte  sur  Victor  Jacque- 
mont  ;  il  a  raconté  les  épreuves  du  régime  rx)nstitutionnel  en  étudiant  l'œuvre 
et  la  personne  de  M.  Guiiot;  le  libéralisme  catholique  a  été  visé  dans  If.  de 
Montalembert  ;  nous  avons  les  confessions  d'un  dominicain  avec  lePéreLacoT' 
daire;  sous  le  titre  de  :  les  Méditations  d'un  prêtre  libéral,  il  nous  donne 
une  assez  forte  étude  sur  le  Père  Gratry;  les  rêveries  bibliques  de  M.  Mickelet 
suivent;  un  humoriste  protestant,  sous  lequel  le  sectaire  perce  souvent, 
Madame  de  Grosponn,  fait  aussi  l'objet  de  curieuses  remarques  ;  avec  Madame 
Stoetchitie,  à  laquelle  l'auteur  ne  reproche  que  d'avoir  mis  son  idéal  dans  la 
Restauration,  nous  voyons  quel  peut  être  le  rôle  des  femmes  dans  la  société 
et  la  littérature;  le  réalisme  dans  la  critique  nous  vaut  une  fine  étude  sur 
M.  Taine  ;  et  enfin,  des  pages  touchantes  sur  la  jeunesse  d'un  rêveur  inconnu, 
Alfi*ed  Tonnelle,  ferment  le  volume.  Il  y  a  du  goût,  de  l'esprit  et  un  certain 
sens  critique  dans  ces  études,  intéressantes,  au  demeurant  ;  elles  sont  écrites 
dans  l'allure  et  la  forme  académiques  usitées  à  la  Revue  des  Deux-Mondes  : 
il  ne  leur  manque  qu'un  souftle  de  foi,  pour  qu'on  en  garde  meilleur 
souvenir.  Gh.  Lebrun. 

EiO»  Spectacles  forain»  et  la  Comédie-Française,  d'après  des 
documents  inédits,  par  Jules  Bonnassies,  ancien  attaché  à  la  Direction  des 
Beaux- Arts  (Bureau  des  Théâtres),  avec  une  eau-forte  par  Edmond  Hédouin 
Paris,  E.  Dentu,  1875.  In-12  de  300  p.  —  Prix  :  3  fr. 

Le  volume  publié  par  M.  Bonnassies  est  composé  de  trois  mémoires.   Le 

premier,  qui  prête  son  titre  au  volume  entier,  est  destiné  à  raconter,  d'après 

les  documents  originaux,  imprimés  ou  manuscrits,  et  notamment  d'après 

les  archives  de  la  Comédie-Française  et  les  registres  du  secrétariat  de   la 

Maison  du  roi  aux  Archives  nationales,  la  longue  lutte  soutenue  par  la 

Comédie-Française  pour  la  défense  de  ses  privilèges,  de  son  monopole,  contre 

les  empiétements  obstinés  et  à  la  fin  triomphants  des  théâtres  établis  aux 

foires  de  Paris,  puis  sur  les  boulevards,  et  d'où  sont  issues  la  plupart  de  nos 

scènes  secondaires.  Dans  un  second  mémoire,  M.  Bonnassies  étudie  l'histoire 

du  droit  des  pauvres  avant  et  après  1789,  et,  dans  un  troisième,  l'histoire  des 

rapports  des  auteurs  dramatiques  avec  la  Comédie-Française  au  dix-neuvième 

siècle.  M.  Bonnassies  sait  recueillir  et  classer  les  faits,  et  il  a  l'excellente 

habitude  de  recourir  aux  documents  originaux,  de  puiser  aux  sources.  Mais 

il  a  le  tort  de  mêler  à  l'exposé  des  résultats  obtenus  par  ses  recherches  ses 

mes  et  ses  préjugés  de  républicain  libre-penseur.  U  aurait  dû  se  garder 

de  digressions  inutiles,  se  dispenser,  par  exemple,  de  nous  donner  son  avis 

sur  le  gouvernement  de  Louis  XIV  et  sur  l'origine  des  corporations,  sur 

l'organisation  du  travail  au  moyen  âge.  Qu'il  laisse  en  paix  le  moyen  âge  I 

Il  n'y  entend  rien  et  ce  n'est  pas  son  affaire.  M.  S. 


Mémoires  d*nné  Torôt*  Fontainebleau*  par  Jules  Levâllois. 
Paris,  Sandoz  et  Fischbachcr,  1875.  Gr.  in-18  de  264  p.  —  Prix  : 
3  fr.  50. 

« 

Ce  petit  livre  contient  la  matière  d'un  bon  Quide  k  Fontainebleau,  sous 
une  forme  un  peu  prétentieuse  et  qui  n'ajoute  pas  grand'chose  à  son  mérite. 
L'auteur  s'applaudit  avec  raison  d'avoir  effacé  sa  propre  personnalité,  mais 
on  ne  s'intéresse  guères  davantage  à  celles  de  Sylvius  et  Sylvia,  comme  il  les 
nomme,  l'un  médecin  de  village,  et  l'autre  sa  cliente,  qui,  tout  le  temps,  se 


—  149  - 

font  nosciceroni  et  finissent  pars*épouser.  Ce  n'est  pourtant  pas  un  mauvais 
ouvrage  et,  chose  plus  louable,  Tauteur  s*y  montre  respectueux  de  tout  ce 
que  les  honnêtes  gens  respectent.  Si  quelque  mot  malsonnant  s'y  rencontre, 
c'est  dans  des  morceaux  qu'il  cite,  sans  paraître  les  prendre  sur  lui.  —  Le 
volume  se  termine  par  une  petite  nouvelle  qui  serait  fort  jolie,  si  le  style 
ne  manquait  un  peu  de  grâce  et  de  vivacité.  X. 


lies  Senaatlona  d'un  «luré*  vingt  figures  contemporaines,  par  Hippolyte 
Babou.  Paris,  Lemerre,  1873.  Petit  in-i8,  de  324  p.  —  Prix:  5  fr. 

Ce  titre  n'est  point  très-clair  pour  un  ouvrage  de  critique:  l'auteur  a  voulu 
dire  qu'il  ne  jugeait  point  sur  les  lois,  mais  d'après  le  simple  bon  sens, 
comme  font  les  jurés.  Ceux  qu'il  examine  sont  presque  tous  des  romanciers 
ou  des  journalistes  littéraires,  et  lui-même  est  du  métier:  cela  se  recouTialt 
au  ton  particulier  du  style,  à  l'estime  qu'il  professe  pour  l'esprit  et  les  bons 
mots,  à  son  mépris  sans  bornes  pour  les  académiciens  et  les  pédants.  Il  est 
vrai  qu'il  y  en  a  de  bien  lourds  ;  mais  il  nous  faut  ajouter  que  les  meilleurs 
chapitres  de  M.  Babou  sont  ceux  qui  sentent  un  peu  le  professeur,  et  que 
telle  bonne  analyse,  qu'on  pourrait  citer,  vaut  cent  fois  mieux  que  les 
plaisanteries  dont  il  a  composé  certains  chapitres.  Il  a  beau  s'escrimer  contre 
M.  Nisard  et  Mgr  Dupanloup,  il  n*est  point  taillé  pour  les  coups  de  pointe  : 
la  fermeté,  l'originalité,  voilà  justement  ce  qui  lui  manque,  car,  il  a  de 
l'esprit  et  même  il  sait  écrire  ;  mais,  si  ce  n'est  pas  comme  tout  le  monde,  c'est 
un  peu  comme  tous  ses  confrères.  —  Nous  n'avons  encore  rien  dit  de  ses 
doctrines,  elles  ont  une  teinte  d'impiété,  qui  est  aussi  l'impiété  de  tout  le 
monde.  Au  surplus,  on  s'y  arrêtera  peu;  le  principal  attrait  de  ce  livre, 
qpii  n'est  pas  sans  valeur,  c'est  cette  abondance  de  renseignements  sur  quel- 
ques écrivains  dont  on  parle  beaucx>up,  et  que  tout  le  monde  n'a  pas  le  loisir 
de  lire.  6.  Philippon. 


EiO  Moire  international  déflnltif*  par  Wilfrio  de  Fonviclle.  Paris, 
G.  Masson,  1875.  Gr.  in-18dexvi-i41  p. 

Dans  cet  écrit  correct  et  substantiel,  M.  W.  de  Fonvieille,  après  avoir 
montré  que  le  chaos  des  anciennes  mesures  nécessitait  la  création  d'un 
système  de  poids  et  mesures  général  et  basé  sur  les  unités  immuables, 
étudie  succesivement,  dans  douze  chapitres,  ce  que  furent  les  unités  de 
mesure  chez  les  peuples  civilisés  de  la  plus  haute  antiquité,  ce  que  devinrent 
les  mesures  diez  les  Grecs  et  les  Romains,  et,  enfin,  quel  fut  le  point  de  départ 
des  mesures  modernes  jusqu'aux  réformes  introduites  en  faveur  du  système 
métrique.  L'auteur  passe  ensuite  à  l'histoire  du  système  métrique  depuis  le 
moment  où  les  premiers  éléments  en  furent  si  péniblement  élaborés  par 
Delambre  et  Méchain,  jusqu'à  l'heure  présente,  où  toutes  les  nations  de  l'Europe 
sont  en  train  d'adopter,  sinon  le  système  français,  du  moins  des  systèmes  en 
dérivant  directement.  —  Nous  n'aurions  que  des  éloges  à  donner  à  cet  ouvrage 
si  l'auteur  n'avait  eu  le  tort  d'y  faire  parade,  d'une  manière  fort  intempes- 
tive, de  ses  idées  révolutionnaires.  E.  de  B. 


Histoire  résumée    de  la  Géographie  en  Autriche  depuis 

l>2IO»par  M.  A.  Beckee.  Paris,  Lahure,  1875.  In-8  de  21  p.— Prix  :50c. 

Excellent  résumé.  L'auteur,  après  avoir  constaté  l'état  d'infériorité,  pour 
ne  pas  dire  de  nullité,  de  la  science  géographique  en  Autriche  avant  Marie- 


-  loO  — 

Thérèse,  divise  en  deux  périodes  le  temps  écoulé  depuis  le  mouTement 
imprimé  à  ces  études  par  cette  princesse  jusqu*à  nos  jours.  La  première 
période  se  poursuit  jusqu'en  1814.  Elle  se  caractérise  par  un  zèle  tout 
nouveau  pour  la  recherche,  Tétude  et  le  collectionnement  des  matériaux* 
M.  Becker  cite  et  analyse  les  principaux  ouvrages  auxquels  ont  donné  lieu 
ces  travaux  préparatoires,  principes  féconds  des  résultats  obtenus  dans  la 
deuxième  période.  De  1815  à  1848,  la  situation  change  complètement  : 
c<  Jusque  là,  c'était  le  gouvernement  qui  prenait  l'initiative  et  encourageait 
les  esprits  ;  maintenant  nous  le  voyons  indifférent,  pour  ne  pas  dire  hostile, 
aux  progrès  de  la  science.  »  Les  efforts  seront  donc  individuels,  et  ce  sera 
le  grand  honneur  de  ceux  qui  auront  mis  à  profit  les  travaux  précédents, 
pour  produire,  pendant  cette  période,  de  nouveaux  ouvrages  et  entreprendre 
de  lointaines,  de  considérables  explorations.  Depuis  1848,  le  mouvement  s'ac- 
célère, et  la  fondation  d'un  grand  nombre  de  sociétés  savantes,  spécialement 
consacrées  à  Tétude  de  la  géographie,  de  la  statistique,  de  l'agriculture  ou 
de  l'histoire  naturelle,  doit  être  le  gage  d'un  avenir  scientifique  tout  à  fait 
remarquable  par  les  résultats  qu'on  a  droit  d'en  attendre.  La  brochure  de 
M.  BedLer  est  fort  intéressante  à  consulter;  la  partie  bibliographique 
parait  traitée  avec  soin.  F.  R. 

Biatolre  de  rAllemasoe,  depuis  la  bataille  de  Sado^v^a»  par 

Eug.  Véron.  Paris,  Germer  Baillière,  1874.  In-12  de  ix-31 1  p.  —Prix  :  3fr.  50. 

Cet  ouvrage,  moitié  historique,  moitié  polilique,  est  la  suite  d'un  livre  pu- 
blié par  le  même  auteur  en  1867,  sous  le  titre  à' Histoire  de  la  Prusse  depuis 
la  mort  de  Frédéric  IL  C'est  un  résumé  succinct  et  assez  nourri  de  faits,  dont 
l'analyse  est  difficile.  Sadowa  et  ses  terribles  suites  est  un  sujet  trop  connu 
pour  qu'il  soit  nécessaire  d'en  rappeler  les  points  principaux.  L'cnchaine- 
ment  naturel  des  événements  se  déroule  de  telle  sorte,  dans  le  récit  de 
M.  Eug.  Véron;  que  la  responsabilité  principale  de  tous  ces  malheurs  retombe 
sur  Napoléon  m  et  le  gouvernement  impérial.  —  La  vérité  et  la  justice  le 
veulent  ainsi,  et  nous  ne  saurions  y  contredire.  Mais  l'ardeur  démocratique 
de  Taùteur  l'emporte  un  peu  loin  quelquefois  dans  ses  sentiments  de  haine 
et  de  mépris.  Dire  «  qu'il  serait  fort  injuste  de  se  figurer  le  Reischstag 
allemand  (de  1867)  à  l'image  de  ces  assemblées  serviles  et  Iftches  de  députés 
officiels  dont  la  France  a  supporté  l'ignominie  pendant  plus  de  vingt  ans  ;  n 
appeler  cette  «  honte  pire  que  l'invasion  ;  »  c'est  une  exagération  de  termes 
qui  n'est  point  digne  de  l'histoire. 

Le  même  esprit  de  parti  pousse  l'auteur  à  plaider  incidenunent  l'abolition 
de  la  peine  de  mort;  à  rendre  les  catholiques  et  «les  révolutionnaires  du 
Vatican  »  responsables  de  la  guerre  odieuse  et  si  peu  justifiée  que  M.  de 
Bismarck  leur  a  déclarée  ;  à  reprocher  à  l'Assemblée  nationale  actuelle  d'avoir 
a  sacrifié  1,500,000  Français  pour  se  délivrer  du  souci  de  continuer  la  guerre.» 
Comme  si  une  histoire  de  la  guerre  de  1870*71  pouvait  raisonnablement  con- 
venir que  la  France  était  capable  de  continuer  la  lutte  et  pouvait  refuser  à 
la  Prusse  ses  exigences,  quelque  dures  qu'elles  soient! 

Ces  réserves,  qui  ne  semlileront  pas  trop  sévères,  empêcheront  qu'un  vo- 
lume de  ce  genre  ait  sa  place  marquée  dans  toutes  les  bibliothèques.  Un 
résumé  d'événements  si  utiles  à  avoir  constamment  sous  les  yeux  n'aurait 
rien  perdu  en  intérêt,  s'il  avait  été  plus  impartial  et  plus  modéré.  Nous 
regrettons  que  ce  défaut,  qui  semble  bien  difficile  &  corriger,  tant  il  parait 
inhérent  à  l'esprit  môme  de  l'auteur,  fasse  tort  à  des  qualités  d'exposition 
et  à  des  recherches  fort  méritoires,  qu'il  nous  eût  été  très-facile  de  mettre 
en  relief.  J.  B.  d«  P. 


—  15i  — 

E**ariiiée    et  la    mlattlon   de  le    Frenoe  en   Afrique  9   par 

Mgr  J'Archevêqae  d'Alger.  Paris,  Belin,  1875.  In-8  da  64  p. 

Il  est  rare  d*entendre  un  plas  noble,  plus  magnifiqna  et  plus  patriotique 
langage  que  celui  que  vient  de  tenir  Mgr  Lavigerie,  dans  son  discours  pro- 
noncé pour  rinauguration  du  serrice  religieux  dans  l'armée  d'Afrique.  C'est 
un  éloquent  récit  de  la  conquête  d'Alger,  le  dernier  legs  de  la  monarohia 
française,  et  de  la  conquête  de  l'Algérie.  Toutes  nos  gloires  militaires  passent 
sous  nos  yeux  dans  le  tabteau  admirablement  dessiné  par  l'éminent  orateur  ; 
puis  viennent,  dans  sa  bouche,  quia  pleine  autorité  en  cette  matière,  les  plus 
hautes  considérations  sur  le  réle  civilisateur  et  chrétien  que  la  France  doit 
exercer  dans  ces  contrées.  La  Providence,  disait  Lamoricière,  qui  nous  destine 
à  civiliser  l'Afrique,  nous  a  donné  la  victoire.  R. 

Petite  Carte  de  France  murale»  muette  ou  écrite^  à  Vvsage  des  écoles 
et  des  familles,  dressée  par  Ehrard,  d'après  la  carte  oro-hydrographique  pu- 
bliée sous  les  auspices  au  ministère  de  l'instruction  publique,  parla  Commis- 
sion de  la  topographie  des  Gaules.  Réduction  de  la  grande  Carte  murale 
du  môme  auteur.  Paiis,  Hachette,  1875.  —  Prix  de  la  carte  en  feuille,  6  fr.; 
avec  gorge,  rouleau  et  vernissage,  3  fr.  en  plus. 

Cette  carte,  dressée  à  l'échelle  de  ^  J^^^q  et  tirée  en  couleurs,  comprend, 
outre  la  France,  une  grande  partie  de  l'Europe  centrale.  Elle  donne  une 
idée  frappante  de  la  configuration  du  sol  et  de  ses  accidents,  et  convient 
aux  écoles  dans  lesquelles  la  grande  carte  murale  n'a  pu  être  placée  à  cause 
de  ses  dimensions.  Sa  largeur  et  de  i*  10;  sa  hauteur  de  90  centimètres.  Les 
mers  sont  en  bleu  clair;  les  fleuves  et  les  cours  d'eau,  en  bleu  plus  foncé; 
les  chemins  de  fer,  en  rouge;  les  montagnes,  en  bistre,  avec  teintes  plus  ou 
moins  sombres,  suivant  leur  altitude  ;  les  glaciers  en  blancs  ;  les  vallées,  en 
vert  clair  ou  en  chamois,  suivant  leur  nature  ;  la  lettre  noir.  —  Nous  recom- 
mandons cette  carte  comme  pouvant  être  placée  très-utilement  dans  nos 
écoles  primaires.  L.  C. 

VARIÉTÉS 

I 

NOTES    INÉDITES    SUR    DU    CANGE 

SUIVIES  DE  TKOIS  DE  SES  BILLETS  INEDITS. 

Peu  de  savants  ont  eu  autant  de  biographes  que  Charles  du  Fresne,  seigneur 
du  Cange.  Combien  la  liste  serait  longue  des  notices  qui  lui  ont  été  consa- 
crées depuis  celle  de  Baluze  (Epistola  Steph.  Baluzii  Tutelensis  ctd  virum  cla* 
rissimum  Eusebivm  Renaudotum  de  vita  et  morte  Caroli  Dafresnii  Du  Cangii  ; 
Paris,  1688,  in-i2]  *,  jusqu'à  celle  de  Léon  Feugère  {Essai  sur  la  via  et  les 
ouvrages  de  Du  Cange;  Paris,  1852,  in-8)  *.  Naturellement   je   n'ai  pas  la 

1.  Réimprimée  au  devant  du  Chronicon  pascaie  (Paris,  1689,  in-fol.),  ei  au  Gloitarium 
ad  êcripiorts  mêdùie  et  infimfp  Uainitalû  (édition  Didot,  1840,  in-4). 

2.  H.  Léon  Feugère  a  cité  presque  tons  let  travaax  de  ses  devanciers.  Parmi 
ceux  de  ces  travaax  qae  je  ne  vois  pas  figurer  dans  son  éuumération,  je  signalerai 
une  bonne  étude  d'an  bibliothécaire  de  l'Arsenal ,  M.  Denain,  étude  que  j'ai  eu  le 
plaisir  de  lire,  il  y  a  déjà  bien  des  années,  dans  la  Bibliographie  catholique,  et  aussi 
un  excellent  article  de  M.  H.  Géraud,  snr  le  Glonaire  de  la  boue  latinité  (Bi6(to- 
thiqiii  d§  l'Eeolê  du  eharUt,  t.  II,  1840),  article  qu'il  faut  rapprocher  de  ceux  de 
M.  Pardessus  sur  le  même  chef* d'oeuvre  {Journal  det  iovantê  de  18 47;, 


—  152  — 

prétention  de  revenir  sur  un  sujet  tant  de  fois  si  bien  traité  :  j'ai  voulu 
seulement  mettre  sous  les  yeux  du  lecteur  des  renseignements  fournis  par 
un  des  Ûls  de  Du  Gange  ^  quelques  jours  après  la  mort  de  son  père.  Mo 
suis-je  trompé  en  pensant  que  Ton  trouverait  un  intérêt  particulier  dans  ces 
notes,  qui  ne  présentent,  il  est  vrai,  rien  de  complet  et  rien  de  nouveau, 
mais  qui  ont  quelque  chose  de  ce  parfum  de  simplicité  et  d'honnêteté 
qu'exhalent  les  journaux  de  famille  autrefois  rédigés  sur  les  marges  des 
vieilles  Bibles?  A  ces  notes,  j'ai  cru  devoir  joindre  trois  billets  de  l'éditeur 
des  Mémoires  de  ViUehardoin  et  de  Joinville,  billets  qui  fournissent  de  tou- 
chantes preuves  de  la  reconnaissance  de  celui  qui  aima  toi^gours  tant  à 
obliger,  et  qui  ne  fut  pas  moins  grand  par  le  cœur  que  par  l'érudition. 

Philippe  Tahizey  de  Larboque. 

A  BALUZ£^ 

«  Je  n'ay  pa  voas  envoyer  plaatost,  Monsieur,  le  reste  des  particalaritez  que  vous 
m'avez  demandé  toacbant  M.  du  Gange,  mon  père,  n'ayant  reçeu  reaponse  d^Âmiens 
qu'hier  au  soir. 

tt  Louis  du  Fresne,  conseiller  du  Roy,  prévost  royal  de  Beauquesne^  à  Amiens,  père 
du  sieur  du  Gange,  est  né  à  Amiens  le  24  décembre  1568,  et  est  décédé  le  neuf 
janvier  1638. 

«  Heleine  de  Rely,  mère  du  sieur  du  Gange,  a  esponsé  le  dict  Louis  du  Fresne,  le 
2  juillet  1606,  aagée  de  vingt-cinq  ans  et  demy,  et  a  esté  la  seconde  femme  du  dict 
Louis  du  Fresne.  Elle  estoit  fille  de  Louis  de  Bely,  sieur  de  Framicour.  Ladicte  dame 
Heleine  de  Rely  est  décédée  en  couche  à  Amiens,  le  six  mars  1613,  à  huit  heures  du 
soir,  le  dixième  jour  de  son  accouchement. 

«  Charles  du  Fresne,  sieur  du  Gange,  est  né  à  Amiens,  le  16  décembre  1610,  sur  les 
sept  heures  du  matin,  a  esté  baptisé  le  mesme  jour  à  Saint-Firmin  à  la  Pierre,  aa 
parroisse,  et  tenu  sur  les  fons  par  Charles  Oorguette,  sieur  du  Bus,  et  dame  Margae- 
ritte  Louvet,  venfve  du  deffunt  Anthoine  de  Rely^  vivant  esonyer  ûenr  de  Framicour. 

a  Louis  du  Fresne,  père  du  sieur  du  Gange,  a  eu  trois  enfans  du  premier  lit,  Adrien, 
Jean  et  Louis.  Adrien,  prévost  royal  de  Beauqnesne,  qui  a  esté  très-habil  homme  et  a 
laissé  deux  enfans  dans  le  monde,  Louis  du  Fresne,  sieur  de  Fredeval,  prévost  royal 
de  Beauquesne,  à  Amiens,  qui  a  esté  deux  fois  premier  eschevin  de  la  dicte  ville, 
homme  de  scavoir  et  d'une  très-grande  probité,  et  François  du  Fresne,  homme  de 
lettres,  conseiller  du  Roy,  trésorier  de  France,  à  Amiens. 

a  Jean  du  Fresne,  second  fils  du  premier  lit,  a  esté  advocat  au  parlement,  et  a  esté 
homme  de  lettres.  G^est  lui  qui  a  commenté  la  coutume  d'Amiens,  et  qui  a  fait  l«s 
deux  premiers  tomes  du  Journal  des  Audiences,  et  n*a  pas  laissé  d'en  fans. 

«  Louis  du  Fresne,  huitiesmefils  du  premier  lit,  a  esté  médecin,  et  un  des  plus  babil 
dans  sa  profession. 

a  Faites  moi  la  grâce  de  vouloir  faire  mention  de  ce  que  j'ay  mis  cy  dessus,  et  vous 
prie  d'ajouter  que  la  famille  des  du  Fresne  est  alliée  à  tout  ce  qu'il  y  a  de  familles 
plus  considérables  dans  la  ville,  et  que  depuis  plus  de  trois  cents  ans,  elle  a  toujours 
possédé  les  charges  de  judicature.  Ce  sera  un  surcroit  d'obligation  que  je  vous  auray, 
dont  je  conserveray  toute  ma  vie  une  reconnoissance  entière  estant,  Monsieur,  plus  que 
personne  vostre  très-humble  et  très-obéissant  serviteur. 

«  Du  Gange.  » 

«  Le  sieur  du  Gange,  est  tombé  malade  pour  la  première  fois,  le  10  juin  1688,  d'une 
rétention  d*urine,  et  n'a  duré  que  dix  jours  malade. 
9  Sa  seconde  maladie  est  du  16  septembre. 
«  Il  a  reçeu   le  viatique  et  Textréme-onction,  et  donna  la  bénédiction  à  tonte  sa 

1.  Philippe  du  Fresne,  sieur  du  Gange,  mort  le  22  juin  1692.  Boivin  l'appelle 
optimi  patrit  filius  diynistimut  dKù%  la  préface  du  Gregorat  SieepKort  (Paris,  1702,  in-i). 

2.  Bibliothèque  nationale,  collectioQ  dite  des  Armoires  de  Baluze,  vol.  GCCLIV,  p.  255. 


—  453  — 

famille,  et  les  embrassa  tous  en  lenr  disant  à  tons  quelque  chose  de  touchant  et 
d'une  extrême  tendresse,  et  leur  recommandant  à  tous  l'union  après  sa  mort. 

c  II  est  .mort  avec  des  sentiments  de  piété,  tout  extraordinaires,  avec  une  fermeté 
d'esprit  et  une  oonnoissance  parfaite  de  Testât  où  il  estoit  de  ne  pouvoir  relever  de 
cette  maladie  sans  en  estre  effrayé,  et  regardant  la  mort  en  véritable  chrestien  et 
disant  qu'il  falloit  finir  tost  on  tard,  et  dit  les  derniers  adieux  à  tous  ses  amys  et  à  sa 
famille  avec  une  fermeté  inconcevable. 

«  Je  n'ay  encore  pu  avoir  le  mémoire  du  médecin  sur  sa  maladie.  Tj  ay  envoyé  ce 
matin,  j*y  envoyeray  encore  aprez  midy.  » 

«  Je  trouve,  Monsieur,  qne  dans  les  manuscripts  que  mon  père  a  laissé  on  petit  nombre, 
qu'il  n'y  a  d'achevé  qne  :  VHiêtoirt  de  Veiiat  de  la  vilU  d'Amiênt  et  de  ee»  comtee,  avec  un 
recueil  de  plusieun  titrée  concernant  l'Metoire  de  cette  ville,  quiWont  pae  encore  étépublide. 
Celui-là  est  relié  en  veau  '. 

«  11  y  a  quelques  ouvrages  commencés  qui  regardent  une  histoire  de  France,  mais 
je  suis  persuadé  que  c^est  fort  peu  do  chose. 

«  II  préparait  l'édition  de  Nicéphore  Gregoras,  avec  une  addition  de  six  livres  tirés 
de  la  Bibliothèque  du  Roy,  avec  une  histoire  grecque  barbare  tirée  de  la  mesme  biblio- 
thèque, des  François  qui  ont  possédé  la  Ho/ée  sur  les  derniers  siècles,  le  tout  avec 
des  observations,  pour  estre  imprimée  à  Tlmprimerie  RoyalleS,  mais  tous  ces  manus* 
cripts  ne  sont  pas  au  logis  et  je  ne  vois  pas  que  les  observations  soient  bien  avancées, 
ne  voyant  que  quelques  papiers  sur  la  table  où  il  y  a  quelques  notes  grecques,  telle- 
ment que  je  suis  persuadé  qu'on  ne  tirera  pas  grande  lumière  de  ce  qu'il  a  laissé. 
Son  cabinet  est  dans  le  mesme  estât  qu'il  l'a  laissé  avant  sa  mort  et  personne  n'a 
touché  sur  sa  table.  Si  on  imprime  le  Gregoras,  je  me  ferai  un  très-grand  plaisir 
d*aider  en  tout  ce  que  je  pourray  celuy  qui  y  travaillera  de  ce  qui  luy  pourra  servir 
des  manuscripts  de  mon  père  >. 

«  Voilà,  Monsieur,  ce  que  je  vous  puis  dire  et  l'éclaircissement  que  je  vous  puis 
donner  touchant  ses  ouvrages  commencés.  Quand  nos  partages  seront  faits  et  que  Je 
seray  maistre  de  sa  bibliothèque,  me  Tayant  laissée  à  titre  honnereux,  comme  il  me 
l'a  dit  lu> -mesme  trois  jours  devant  mourir,  je  mettray  à  part  tous  les  escripts  qui 
seront  de  luy«  pour  pouvoir  s'en  servir  si  on  peut  dans  le  besoin,  ne  souhaitant  rien 
plus  que  d'éterniser  sa  mémoire  et  de  vous  faire  connoistre  que  je  suis  entièrement| 

«  Monsieur, 

a  Vostre  très-humble  et  très*obéissant  serviteur. 

«  Du  Gange. 
«  Ce  mardy  au  soir,  2  novembre  1688. 

«  Je  partiray  demain  pour  Fontainebleau  et  ne  reviendray  que  dimanche  ou 
Inndy.  s 

A  PIERRE  DU  PUT  \ 

A  Amiens,  le  16  may  1651. 
■  Monsieur, 

a  Je  vous  envoyé  les  mémoires  dont  il  vous  a  pieu  me  faire  part  et  les  accompagne 
d'actions  de  grâces  qui  seront  tous  jours  au  dessous  des  obligations  que  vous  avez 
acquis  sur  moy  par  un  si  sensible  plaisir.  La  bienveillance  que  tous  tesmoignez  en 
tons  rencontres  à  ceux  qui  ayment  les  lettres  et  le  désir  que  vous  avez  de  les  servir 
dans  leurs  desseins,  sont  autant  d'effects  de  vostre  bonté,  que  vous  faictes  paroîstre 
aujourdhuy  en  une  personne  qui  n'a  ces  qualités  que  par  inclination  et  qui  n'a  mérité 
par  le  moindre  de  ses  services  la  grâce  dont  vous  l'honorez.  Je  ne  sçay  quel  senti- 

1.  Cet  ouvrage  a  été  publié  en  L<UO  (l  voL  in-S  de  L^ldS  pages). 

2.  Le  Oregoraa  Nicéphore  que  Du  Cange  avait  laissé  inachevé  parut  par  Us  soins  de 
Boivin  dans  l'Histoire  hieantine  (collection  du  Louvre),  en  1708,  comme  je  l'ai  déjà 
rappelé. 

3.  Voir,  pour  plus  de  détails,  le  Mémoire  Hiatorique  eur  les  tnanuserits  de  Af.  Du  Cange, 
par  Jean  Charles  do  Fresne  d'Aubigny  (Paris,  1752,  in'4).  —  M.  Rey  a  publié  récemment, 
dans  la  collection  des  Documents  inédits  sur  Vhistoire  de  France,  un  des  plus  importants 
manuscrits  do  Du  Cange,  son  ouyra^û  sxu  les  Principautés  d'outre-mer,  ou  familles  d'Orient, 

4.  Bibliothèque  nationale,  collection  Du  Puy,  vol.  DCCCIII,  p.  416. 


—  454  — 

ment  tous  portes  da  denein  que  je  me  eait  donné  U  liberté  de  Tout  faire  eomma** 
niqaer.  Je  l'avoit  d'abord  reslraint  à  la  première  partie,  jugeant  bien  que  la  denxieeme 
ne  pouToit  eetre  achevée  qne  par  la  recherche  de  divertee  pièces  tirées  da  thrésor  des 
chartes  dn  Roy  dont  il  vous  plaist  me  faire  espérer  la  communication,  comme  lee 
epistres  des  Papes  non  encor  imprimées  dont  aucunes  se  voyent  dans  les  ÀnnaUê  de 
Biovins,  HaynalduB  et  Wadtogne  et  autres  semblables  pièces.  Je  soubmetz  cette  entre- 
prisA  à  vostre  jugement,  comme  de  celluy  qni  est  aujourdhuy  l'arbitre  et  l'oracle  de 
la  littérature. 

«  Monsieur, 

a  Vostre  très-humble  et  très-obéissant  serviteur  » 

«  Du  Fbbsnb  Du  Gange.  » 
A  BALUZE  *. 

«  IfOWSlBUR, 

«  J'ay  reçeu  des  marque^  de  vostre  générosité  par  la  communication  qu*il  vous  a 
plu  de  me  faire  des  vers  grecs  du  reliquaire  de  Perpignan,  dont  je  vous  suis  infini- 
ment redevable.  Je  crois  quMls  viendront  même  assev  à  temps,  et  les  ay  envolez  à  l'ins- 
tant même  à  M.  Gramoisy  pour  les  insérer  à  Tendroit  de  mon  traité  >  où  ils  doivent 
être  places  avec  la  reconnaissance  que  l'on  doit  aux  personnes  de  vostre  mérite.  Je 
suis  ravi,  Monsieur,  que  ce  m'ait  esté  une  occasion,  non  de  vous  faire  connaître  mon 
nom,  mais  de  vous  offrir  mes  très-humbles  respects,  vous  protestant  qne  je  n'auray 
jamais  plus  de  joye  que  lorsque  je  serai  assez  heureux  de  voutf  pouvoir  donner  des 
marques  de  ma  gratitude  pour  un  bienfait  de  cette  nature.  Je  vous  conjure  d'en  être 
persuadé  et  de  me  croire,  Monsieur, 

«  Vostre  très-humble  et  très-obéissant  serviteur, 

«  Du  Cangb.  « 
«  A  Amiens,  ce  t7  mars  1665.  » 

A  BALUZE  •. 

a  Monsieur, 

9  Je  prends  la  liberté  de  vous  présenter  ce  petit  traité  de  nostre  chef  de  saint  Jean« 

Baptiste  \  et,  comme  c*est    une  matière  difficile,  imp0ditufn  oput  et  facundia  minime 

eapam,  comme  parle  Pomponius  Mêla  de  sa   Géographie,  je  me  persuade  que  vous 

aurez  assez  de  bonté  pour  en  excuser  les  défauts.  Il  me  suffit  que  je  vous    y  rende 

les  beanx  vers  grecs  que  vous  m^avez  confiés  avec  tant  de  générosité,  et  qu'en  vous 

les  remettant  entre  les  mains,  ce  me  soit  une  nouvelle  occasion  de  vous  marquer  ma 

gratitude  et  la  passion  que  je  conserveray  toute  ma  vie  de  vous  faire  paraître  que  je 

suis  avec  respect,  Monsieur, 

t  Vostre  très-humble  et  très -obéissant  serviteur, 

«  Du  Cangb.  » 
c  A  Amiens,  ce  30  aoust  1665.  d 


IL 

Bibliographie  raisonnbe  de  L*Â.CADÉinE  française. 

Pellisson  et  d'Olivet  ont  donné,  à  la  suite  de  leur  Histoire  de  l'Académie 
fhjmçaise,  des  listes  bibliographiques  des  ouvrages  de  tous  les  académiciens 
dont  ils  avaient  esquissé  la  physionomie  :  mais  ces  listes  sèches  et  arides, 
outre  qu'elles  sont  très-incomplètes,  ne  comprennent  qu'une  période  relative- 
ment très-courte  de  la  série  académique.  Nous  avons  pensé  qu'il  serait 

1.  Bibliothèque  nationale,  collection  des  Armoires  de  Balute,  vol.  CCCLXI,  p,  119. 

2.  Traité  hiitori^ue  du  chef  dé  eaint  Jean-Baptiête  (Paris,  1665,  in-4}. 

3.  Ibidem,  p.  100 

4.  L'envol  fiait  à  Baluse,  en  août  1665.  du  Ttikité  du  chef  de  eaint  Jean-Baptietê  oblige 
à  corriger  dans  Niceron,  dans  la  Biographie  universelle  (article  de  Roquefort),  etc.,  Ta 
date  de  1666  donnée  à  cette  publication. 


-  155  - 

intérensant  de  refondre  et  de  compléter  leur  traTail,  en  y  ajoutant  la  biblio- 
graphie des  travaux  biographiques  ou  critiques  dont  les  académiciens,  soit 
en  groupe,  soit  isolément,  ont  été  l'objet  depuis  la  fondation  de  Tillnstre 
compagnie  jusqu'à  nos  jours;  mais,  pour  aujourd'hui,  nous  nous  bornerons 
à  la  bibliographie  de  ce  qui  concerne  l'Académie  en  général,  son  histoire, 
les  critiques  et  les  satires  qu'elle  a  subies,  les  études  sur  les  groupes  particu-- 
liers  d'académiciens,  leurs  œuvres  collectives,  etc. 

Il  est  inutile  de  rappeler  que  l'Académie  a  été  fondée,  en  1634,  par  le 
cardinal  de  Richelieu,  son  premier  protecteur,  auquel  succéda  le  chancelier 
Séguier,  en  i643;  que  le  roi  la  prit  directement  sous  sa  protection  en  1672; 
qu'elle  fut  supprimée  parla  Convention,  le  8  août  1793;  qu'elle  reparut 
sous  le  titre  de  2*  classe  (de  grammaire)  de  l'Institut  en  4803,  avec  son 
nombre  fatidique  de  quarante  membres  ;  et  qu'elle  reprit  définitivement,  en 
1815,  son  nom  d'Académie  française.  Ceci  posé,  entrons  en  matière. 

I.   BTSTOIUENS  DB  l'âCADÉMIB  OU  DB  GaOUPBS  ACADÉMIQUES. 

i.  Relation  contenant  Vhistoire  de  V Académie  française.  Paris,  chez  Pierre  le 
Petit,  imprimeur  ordinaire  du  roy  et  de  l'Académie,  rue  Saint-Jacques,  à 
la  Croix  d'Or,  1653,  in-8.  —  Anonyme,  mais  le  privilège  est  au  nom  de 
Vellisîon  (Paul  Pellisson-Fontanier).  Ce  petit  livre,  qui  passe  à  bon  droit 
pour  un  des  chefs-d'œuvre  de  notre  littérature,  est  trop  connu  pour  qu'il 
soit  nécessaire  d'insister  ici  sur  son  intérêt.  Il  a  eu  un  grand  nombre 
d'éditions  pendant  le  dix-septième  et  le  dix-huitième  siècles.  Citons  en 
particulier  : 

a  —  ReMvm  contenant  l'histoire  de  V Académie  française,  par  M.  P.  Jouxte  la 
copie.  —  Bruxelles,  Fowens,  1671,  in -12.  Charmante  petite  édition  qui  fait 
partie  de  la  Collection  des  elzeviers. 

h  —  Id,  S.  L.  Jouxte  la'copie  imprimée  à  Paris,  chez  Auguste  Gourlie, 
1674,  in-42. 

c  —  Helatim,  etc.  —  Augmentée  de  plusieurs  pièces,  entr'autres  de  l'ordre  de 
l'Académie  française,  pour  l'établissement  de  deux  prix.  Paris,  Pierre  le 
Petit,  4672,  in-42.  On  la  rencontre  aussi  avec  la  signature  Th.  Jolly  (achevé 
d'imprimer  le  30  janvier  1672)  ou  Louis  Billaine,  4672,  in-42.  —  Presque 
toutes  les  éditions,  depuis  4672,  portent  le  nom  de  Pellisson,  et  s'intitulent  : 
Histoire  de  r Académie  française.  Citons  : 

d  —  Histoire  de  V Académie  française,  avec  un  abrégé  des  vies  du  cardinal  de 
Richelieu,  Vaugelas,  Corneille,  Ahloncourt,  Mézerai,  Voiture,  Pairu,  La  Fàn- 
taine,  Boileau,  Racine  et  autres  illustres  aoadémieiens  qui  la  ixmposent.  Dernière 
édition  corrigée  et  augmentée  de  divers  ouvrages  du  même  auteur,  etc. 
La  Haye,  4688,  pet.  in-42.  —  On  trouve  à  la  suite  une  liste  des  <c  noms  et 
qualités  des  académiciens  qui  ont  été  reçus  depuis  la  fin  de  1652  Jusqu'au 
mois  de  janvier  4672.  »  —  Cette  édition,  qui  parait  être  une  contrefaçon 
donnée  par  quelque  émigré  protestant,  contient  beaucoup  d'erreurs.  C'est 
là  que  M.  de  Labouisse-Rochefort  a  appris  que  Pellisson  était  de  Castres.  Il 
est  aujourd'hui  bien  constaté  que  Pellisson  est  né  k  Béziers. 

e  —  Histoire  de  V  Académie  française,  par  M.  Pellisson,  avec  les  sentiments  de 
cette  compagnie  sur  la  tragi-comédie  du  Cid.  —  A  Paris,  chez  J.-B.  Coignard, 
imprimeur  du  roy  et  de  l'Académie,  rue  Saint-Jacques,  à  la  Bibk'dOr,  1700 
et  1704,  petit  in-42,  en  deux  parties,  à  pagination  séparée,  en  un  seul 
volume,  avec  une  liste  des  académiciens  en  4700  et  en  4701.  —  Ibid*,  1708, 
et  Amsterdam,  4747. 


—  156  — 

(Voir  des  comptes  rendus  du  livre  de  Pellisson  :  Journal  des  Savons^ 
novembre  1700;  —  Baillet,  Jugemms  des  SavanSy  U,  49;  —  République  des 
Lettres,  de  Bernard,  janvier  1717,  etc.) 

2. — Histoire  de  l'Académie  française,  depuis  son  établissement  jusqu'à  1652,  par 
M.  Pellisson,  avec  des  remarques  et  des  additions.  Paris,  J.-B.  Coignard  fils, 

1729,  2  vol.  in-4,  et  1730,  2  vol.  in-12. 

C'est  l'histoire  de  Pellisson,  annotée  et  continuée  jusqu'en  1700  par  l'abbé 
d^Olivet  (Pierre-Joseph  Thoulier  d'Olivet),  qui  a  signé  la  dédicace  à  l'Acadé- 
mie. Le  premier  volume  ne  contient  que  l'histoire  de  Pellisson,  avec  des 
remarques  et  des  additions  importantes.  Le  second  volume  commence  à 
Tannée  1652,  où  Pellisson  s'était  arrêté,  et  porte  un  titre  spécial  :  Histoire 
de  V Académie  française  depuis  1652  jusqu'à  1700,  par  Fabbé  d'Olivet.  —  Les 
notes  de  Quérard  {France  littéraire)  nous  apprennent  que  d'Olivet  avait  con- 
tinué son  travail  jusqu'en  1715,  mais  que,  pour  n'être  pas  obligé  de  louer 
des  académiciens  peu  louables,  il  jeta  son  manuscrit  au  feu.  —  Il  y  a  une 
autre  édition  de  1743,  en  deux  volumes  in-12,  qui  est  plus  complète  que  les 
précédentes  :  elle  contient  de  nombreuses  additions  et  corrections.  —  On 
connaît  aussi  une  édition  de  1730,  à  Amsterdam,  chez  Bernard,  in-12. 

(Voir  des  comptes  rendus  du  livre  de  l'abbé  d'Olivet  :  Journal  de  Leipsic, 

1730,  p.  358;  —  Journal  de  Verdun,  mars  1730,  etc.) 

3.  —  Histoire  de  V Académie  française  par  Pellisson  et  d'Olivet,  avec  une  intrO' 
duction,  des  éclaircissements  et  notes,  par  M.  Cli.  L.  H.  Livet.  Paris.  Didier, 
1858,  2  vol.  in-8.  —  L'introduction  et  les  notes  de  M.  Livet  sont  très-intéres- 
santes, mais  ce  qui  rend  ces  volumes  précieux,  ce  sont  leurs  nombreux 
appendices,  parmi  lesquels,  outre  différentes  pièces  déjà  imprimées  sur 
l'Académie,  comme  les  Harangues  de  Pellisson.  la  comédie  des  Acadé- 
mistes  de  Sadnt-Evremont,  la  requête  des  dictionnaires  de  Ménage,  une 
épitre  de  Boisrobert,  des  extraits  des  Mémoires  de  Perrault,  etc.,  etc.,  on 
remarque  deux  longues  séries  de  lettres  inédites  de  Chapelain  et  une  cor- 
respondance aussi  inédite  de  l'abbé  d'Olivet  avec  le  président  Bouhier,  ren- 
fermant une  foule  d'incidents  curieux  de  l'histoire  intime  de  l'Académie. 
On  peut  lire  un  excellent  compte  rendu  de  cette  publication,  par  M.  Sainte- 
Beuve,  dans  ses  Catiseries  du  Lundi*  Paris,  Garnier,  1861,  tome  XIV  (p.  195- 
218)  :  ce  compte  rendu  apprend  lui-même  bien  des  choses  nouvelles.  — 
Consulter  aussi  le  chapitre  u,  intitulé  «  l'Académie  française  et  ses  histo- 
riens »  des  lettres  satiriques  et  critiques  de  H.  Babou.  Paris,  Poulet-Malassis, 
1860, 1  vol.  in-12  (p.  17-31). 

4.  —  Dgclos.  Histoire  de  l'Académie  française, —  Fragment  inséré  au  t.  VIII 
des  Œuvres  complètes  de  Duclos.  Paris,  Janet  et  Cotelle,  1820-1821,  9  vol. 
in-8.  —  C'est  une  continuation  fort  médiocre  de  l'histoire  de  l'abbé  d'Olivet, 
que  l'intraitable  secrétaire  perpétuel  se  proposait  de  compléter  par  les 
éloges  des  académiciens  morts  depuis  1700  :  mais  il  n'a  laissé  que  l'Éloge  de 
Fontenelle,  éloge  bizarre  qui  ne  fait  pas  trop  regretter  les  autres.  —  On  peut 
lire,  dans  les  Mémoires  secrets  de  la  Eépublique  des  lettrés  (par  Bachaumont) 
pour  1771,  un  piquant  compte  rendu  de  la  lecture  que  Duclos  fit  de  son 
manuscrit  en  séance  publique. 

5.  —  Histoire  des  membres  de  l Académie  frùneaise  morts  depuis  1700  jus- 
qu'en 1771,  pour  servir  de  suite  aux  lùoges  imprimés  et  lus  dans  les  séances 
publiques  de  cette  oompagnie,  par  M.  d'Alembert,  secrétaire  perpétuel  de 
l'Académie  française  et  membre  des  académies  des  sciences  de  France,  d'An- 
gleterre, de  Prusse,  de  Russioi  de  Suède,  de  Portugal,  de  Bologne,  de  Turin» 
de  Napies,  de  Cassel,  de  Boston  et  de  Norwége.  A  Paris,  chez  Moutard» 
imp.-libraire   de  la  reine,  de  Madame,.,  et  de  l'Académie  des  sciences,  rue 


—  lot  — 

des  Mathurins,  hôtel  de  Ciuni,  1787,  6  vol.  in-12.  Ouvrage  posthume,  puhlié 
par  Condorcet.  Le  premier  volume  avait  paru  isolément,  du  vivant  de 
d'Alembert,  en  1779,  avec  le  titre  de  :  Éloges  de  plusieurs  savants,  lus  dans  les 
séances  de  VAcadémie.  Il  n'y  a  que  le  titre  de  changé.  Ce  sont  des  éloges 
isolés,  sans  lien  entre  eux,  précédés  d*une  simple  introduction  et  accompa- 
gnés de  notes  justificatives  très-intéressantes,  de  discours  sur  les  prix 
décernés  et  de  divers  documents  académiques.  —  L*ordre  chronologique  n'est 
pas  suivi  ;  mais  on  Ta  rétabli  dans  les  diverses  éditions  des  œuvres  cx)mplètes 
de  d'Alembert,cn  particulier.  Paris,  Bastien,  an  XIV,  18  vol.  in-8,  ctBossange, 
1821,  5  vol.  in-8. 

6.  —  ViLLEMALN.  IniroducHm  à  une  hisMre  de  VAcadémie  depuis  d'Alembert. 
Articles  publié  dans  la  Revue  des  deux  Mondes,  livraison  du  15  septembre 

1832. 

7.  —  Saime-Beuve.  VAcadémie  française,  histo/ire  de  Vacadémie,  depuis  1803, 
des  nouvelles  fondations,  etc.,  composée  pour  le  Paris-Guide,  Paris,  Albert  La- 
croix, 1867, 2  vol.  in-8,  —  et  réimprimée  dans  les  Nouveaux  Lundis,  tome  XII, 
Paris,  Michel  Lévy,  1871  (p.  402438). 

.  8.  —  Historre  de  r Académie  française  depuis  sa  fondation  jusqu'en  1830,  par 
M.  Paul  Mesnard.  Paris,  Charpentier,  1837,  1  vol.  in-8.  —  Ce  livre  fort  inté- 
ressant, qui  contient  une  liste  de  tous  les  académiciens,  par  ordre  chronolo- 
gique de  réceptions,  et  une  liste  par  fauteuils,  s'attache  surtout  à  Thistoire 
des  relations  de  TAcadômie  avec  ses  protecteurs  et  avec  le  pouvoir  central. 
—  On  peut  en  lire  un  excellent  compte  rendu  au  tome  m  des  Œuvres  eom" 
piétés  de  H.  Rigault,  Paris,  Hachette,  1839,  4  vol.  in-8. 

9.  — Mâynard.  VAcadémie  et  les  Académiciens.  Série  d'études  biographiques 
et  littéraires  sur  les  membres  de  l'Académie  française  classés  par  fauteuils, 
publiés  par  M.  l'abbé  Ulysse  Maynard,  dans  la  Bibliographie  catholique,  depuis 
1855  jusqu'en  1870.  Paris,  auxbureauxde  la  Revue,  rue  de  Sèvres,  31, 
in-8.  —  Ces  études  n'ont  pas  été  réunies  en  volume.  —  L'ordre  numérique 
des  fauteuils  n'est  pas  suivi  :  c'est  ainsi  qu'on  trouve  le  37*  étudié  en  1858, 
le  21»  en  1868,  le  31«  en  1869,  le  19»  en  1870.  —  Ndhs  ne  leur  ferons  qu'un 
reproche,  celui  d'être  un  peu  inégales  en  importance  :  plusieurs  académi- 
ciens sont  trop  sacrifiés  à  leurs  voisins  :  mais,  en  revanche,  on  reconnaît  par- 
tout l'étude  consciencieuse  et  de  première  main  qui  rectifie  bien  des  erreurs 
accréditées. 

10.  —  Philabeste  Chasles  et  Victor  Fournel.  —  Histoire  anecdotiquedes  qua- 
rante fauteuils  de  VAcadémie  française,  —  Série  d'études  légères,  avec  des  por- 
traits gravés  sur  bois,  publiées  dans  le  Musée  des  familles,  en  1854, 1855  et  1856, 
par  M.  Philareste  Chasles,  et  depuis  1857,  par  M.  Victor  Fournel.  C'est  un 
recueil  d'anas  plus  ou  moins  contrôlés,  assez  ingénieusement  reliés  dans  des 
cadres  fantaisistes,  sur  les  académiciens,  groupés  par  fauteuils  au  nom  du 
dernier  occupant  :  «  Ne  supposez  pas,  disait  cependant  M.  Philareste  Chasles, 
que  le  caprice  ou  la  fiction  entrent  pour  rien  dans  les  curieux  portraits  qui 
vont  suivre  :  tous  les  faits  bizarres  et  romanesques  relatifs  à  l'aventureux 
Campistron,  à  l'ambassadeur  roturier  Destouches,  au  révolutionnaire  Cham- 
fort,  à  l'amuseur  de  Richelieu,  Boisrobert,  je  les  recueille  fidèlement  dans  les 
annales  et  les  chroniques  de  leur  époque.  Le  théâtre  du  hasard  et  de  la  vie 
est  disposé  avec  plus  d'art  et  de  fantaisie  que  les  plus  habiles  ou  les  plus 
audacieuses  créations...  »  —  Ces  études  sont  très-inégales.  Prenons,  par 
exemple,  le  fauteuil  do  M.  de  Ségur,  publié  en  1836  (t.  XXin  du  Musée  des 
familles),  il  y  a  20  colonnes  sur  Boisrobert,  2  sur  Segrais,  2  sur  Campistron, 
2  sur  Destouches,  2  sur  de  Boissy,  1/4  sur  La  Cumc  de  Sainte-Palaye,  10  sur 
Chamfort,  1/2  sur  le  duc  de  Levis,  2  sur  le  comte  de  Ségur.  —  M.   Victor 


—  158  — 

Foarnel  a  publié,  en  1857,  le  fauteuil  de  I^funartine  ;  en  1858,  ceux  de 
Scribe  et  de  Barante;  en  1859,  celui  de  Saint-Maro  Girardin;  en  1861, 
celui  de  Victor  Hugo,  etc. 

11.  —  Consulter  les  articles  :  Acadéiiib  de  V Encyclopédie  méthodique  (par 
d'Alembert  ou  Duclos?) ;  —  du  DicHonnaire  philosophique  de  Voltaire;  ^  du 
IHetiofmaire  de  la  conversation;  —  de  VEncydopidie  du  dix-neuoiéme  siècle 
(Giraud);  etc.,  etc. 

12.  —  Tc^leau  historique  et  chr^mologique  de  VAcadéfnie  française  et  de  V Aca- 
démie des  Inscriptûms  et  belUs-lettres^  suivant  la  méthode  de  A.  Lesage,  par 
A.  D.  de  Nancy.  Paris,  Jules  Renouard,  1826,  grande  feuille  in-plano  col. 
(n*  10  de  V Atlas  historique  et  chronolofjique  des  littérateurs)» 

13.  —  Premier  tableau  de  V Académie  française  et  Uste  de  tous  les  acadérnsdens 
jusqv^à  présent  (août  1772),  au  nombre  de  246,  selon  Tordre  de  Tannée  de 
la  mort  de  ceux  qui  sont  décédés  ;  où  Ton  voit  leurs  successeurs  et  la  date 
de  la  réception  de  tous.  —  Inséré  dans  la  Bibliothèque  historique  de  la  France 
du  P.  Le  Long  (édit.  Fontette,  t.  IV,  p.  52-62). 

14.  —  H.  Babou.  L'Académie  française  et  ses  kietariens,  —  C'est  le  second 
chapitre  des  «  lettres  satiriques  et  critiques  avec  un  défi  au  lecteur,  par 
Hippolyte  Babou.  Paris,  Poulet-Malassis,  1860,  1  vol.  in-12. 

15.  -*  Chapters  of  the  biographical  history  of  the  firench  Academy^  by  Edv. 
Edwards.  London,  Trûbner,  1861,  in-8  (cité  par  Brunet,  Manuel  du  lUtraire), 

16.  -*  Histoire  des  quarante  fauieuils  de  V Académie  française^  depuis  la  fon- 
dation jusqu'à  nos  jours  (1635-1855),  par  M.  Tyrtée  Tastet.  Paris,  Adolphe 
Delahays,  1866,  4  vol.  in-8.  —  Cet  ouvrage  comprend,  à  la  suite  d'une 
introduction  générale  (de  156  p.),  résumant  Thistoire  de  TAcadémie,  une 
série  de  portraits  littéraire»  de  tous  les  académiciens  depuis  Torigine, 
groupés  par  fauteuils,  sous  la  rubrique  de  l'académicien  le  plus  éminent 
qui  ait  occupé  ce  fauteuil.  On  n'y  rencontre  paa  de  notices  bibliographiques. 
Compilation  assez  laborieuse,  mais  qui  ne  recourt  pas  assez  aux  sources 
premières  et  n'apprend  rien  de  bien  nouveau.  Le  catalogue  de  la  Biblio- 
thèque nationale  dit  q«e,  d'après  un  renseignement  fourni  par  M.  Livet» 
les  trois  derniers  volumes  ont  été  rédigés  par  M.  Léon  Renard,  bibliothé- 
caire de  la  Marine. 

17.  —  looftOtfrapMe  de  IJnstiM  royal  de  France,  ou  collection  des  portraits  des 
membres  composant  les  quatre  académies  depuis  1814  jusqu'en  1825,  dessinés 
d'après  nature  par  Jules  Boilly,  Paris,  chez  l'auteur  et  chez  Pieh  Benard 
(imp  lith.  de  Villars),  s.  d.,  gr.  in-4,  4  tomes  en  1  vol.  — L'Académie 
française  comprend  40  portraits  :  celles  des  inscriptions  40,  celle  des 
sciences  69,  celle  des  beaux-arts,  45. 

18.  '  Qakrie  des  académicienSf  portraits  littéraires  et  artistiques,  par  G.  Vatr 
tier.  Paris,. Amyoty  1863,  1864,  1866.  3  vol.  pet.  in-18.  —  Cette  galerie  non 
terminée,  ce  qu'on  doit  fort  regretter,  d'après  ce  qui  a  paru,  devait  corn* 
prendre  tout  l'Institut  contemporain.  Mais  TAcadémie  française  est  en 
très-grande  majorité,  comme  on  le  voit  par  ce  résumé  de  la  table  :  Tomep'  : 
Portraits  de  Vigny,  Legouvé,  Feuillet,  Cousin,  Beulé,  Dumont.  —  Tome  II  : 
Sainte-Beuve,  Mérimée,  Ponsard,  Saint-Marc  Girardin,  Michelet,  Ingres. 
—  Tome  ni  :  de  Sacy,  de  Montalembert,  Sandeau  ,Viennet,  Renan. 

19.—  LetU^  au  public  sur  la  mort  de  MM.  Cribillon,  Grts&et,  etc,  par  Tauleur 
des  Anecdotes  de  Vemperewr  (ùucoudray)  PdriS|  Durand,  1777,  in-8. 

20.  —  Fonienelle,  Colardeau  et  Dorât,  ou  éloges  de  ces  trois  écrivains  célébi^es. 
Ouvrage  renfermant  plusieurs  anec  lotes  non  connues^  précédé  d'uneieltre  que 
Bailly  a  écrite  à  Tauteur  au  siget  de  Téloge  de  Fontenelle  et  suivi  d'une  vie 
de  Rivarol  par  C*  Palingeaux.  Pans,  Cérioux»  an  Xl-1803|  in-8. 


—  159  — 

21.  -—  Vaunoib.  Biographie  des  ac<idémicien$  radiés^  suivie  de  celle  des  aca- 
démiciens élus  par  lordonnance  du  4  mars  1816,  contresignée  Vaublanc. 
Paris,  chez  les  marchands  de  nouveautés,  1822,  in-8,  96  p.  (impr.  Gatschy). 

22.  —  Les  fauteuils  illustres  en  quarante  étuiies  littéraires  faisant  suite  aux 
quatre  siècles  littéraires^  par  M"'*  d*AUenheym  (Gabrielle  Soumet).  Paris, 
E.  Ducrocq,  1860,  in-18. 

23.  —  Le  chancelier  Pierre  SéguieTy  second  protecteur  de  l'Académie  française. 

—  Etudes  sur  sa  vie  privée^  politique  et  littéraire  et  sur  le  groupe  académique  de 
ses  famiUiers  et  commensaux,  par  René  Kerviler,  ancien  élève  de  l'Ecole  poly- 
technique. Paris,  Didier,  1874,  in-8  de  692  p.  avec  blasons  inédits  et  fac- 
similé  d'autographes.  (Il  a  été  tiré  cinq  exemplaires  sur  papier  vergé  en  deux 
volumes  à  pagination  distincte,  qui  n'ont  pas  été  mis  dan^  le  commerce.)  — 
Ce  groupe  académique  comprend  des  études  biographiques  et  littéraires  sur 
onze  académiciens,  accompagnées  de  pièces  justificatives  et  d'un  grand 
nombre  de  lettres  et  de  documents  iuédits.  L'auteur  doit  les  faire  suivre 
prochainement  d'études  sur  un  second  groupe  choisi  parmi  les  quarante  fon- 
dateurs de  l'Académie  sou^  le  titre  de  :  La  cour  académique  du  Palais-Car^ 
dinaL  —  Il  ne  nous  appartient  pas  d'apprécier  ici  cet  ouvrage  dont  le 
Polybiblion  a  déjà  parlé  dans  sa  livraison  de  février  1875. 

24.  —  Kervilbr.  Les  Académiciens  bibliophiles^  série  d'études  sur  sept  aca- 
démiciens :  Uabert  de  Montmor^  les  abbés  Bignon,  Colbert,  Louvois,  etc., 
publiées  en  1872  et  en  1873  dans  le  Bibliophile  français.  Paris,  Bachelin- 
Deûorenne,  gr.  in-8,  sur  papier  des  Vosges.  Cette  revue  a  interrompu  ^a 
publication  à  la  fia  de  1873. 

25.  ~  La  Bourgogne  à  l'Académie  française  de  1665  à  1727,  par  Ch.  Muteau. 

—  Dijon,  Picard  et  Manière,  1862,  in-8. 

26.  —  Contrés  sdenti/ique  de  France.  Trente-huitième  cession  tenue  à  Saint* 
Bri<^uc  du  !•'  au  10  juillet  1872.  —  La  Bretagne  à  l'Académie  française  aux  dix- 
septième  et  dix-huitième  siècles^  par  M.  Pocard  Kerviler,  ingénieur  des  ponts 
et  chaussées. —  Fragments  de  la  lecture  faite  à  la  mairie  le  4  juillet  1872. 
Saint-Brieuc,  Guyon  Francisque,  1874,  in-8,  32  p.  C'est  un  tirage  à  part,  à 
25  exemplaires,  de  l'étude  insérée  dans  les  Mémoires  du  congrès.  —  Ibid., 
1874,  2  vol.  iu-8.  —  Ce  canevas  général  a  été  considérablement  augmenté  et 
développé  par  Tauteur,  qui,  depuis  1872,  publie,  dans  la  Bévue  de  Bretagne  et 
de  Vendée,  des  études  complètes  sur  la  Vie  et  les  ouvrages  des  académiciens 
bretons,  sous  la  rubrique  générale  :  La  Bretagne  à  t' Académie  française.  Paul 
et  Daniel  Hay  du  Chastekt  ont  été  étudiés  par  lui  en  1873  ;  les  trois  dues  de 
Coislin  en  1874;  Chapelain  est  en  cours  de  publication  en  1875.  11  est  fait  de 
ces  études  un  tirage  à  part  &  douze  exemplaires. 

27.  —  MoNSELBT  (Charles).  Les  quarante  académiciens  français.  —  Série  d'étu- 
des publiées  en  1874  dans  le  Moniteur  universel  sur  les  quarante  membres  de 
l'Académie  alors  vivants.  Ces  études  paraissaient  à  peu  près  tous  les  samedis  ; 
mais  la  série  n'a  pas  été  achevée.  Ont  paru  seulement:  en  janvier,  MM.  FeuiU 
let  et  Thiers;  —  en  février  :  MM.  J.  Janin,  de  Laprade,  V.  Hugo;  —  en  mars, 
MM.  E.  Augier,  C.  Doucet^  S.  de  Sacy  ;  —  en  avril,  M.  Autran  ;  —  en  mai, 
MM.  J.  Sandeau,  C.  Housset;  —  en  juin,  M.  Cuvillier-Fleury  ;  —  en  juillet, 
Mgr  Dupanloup  ;  —  en  ao&t,  M.  Guizot;  —  en  octobre,  M.  le  duc  de  Noailles. 

—  En  tout,  quinze  études^  qui  n'ont  pas  été  continuées. 

(A  suivre.)  Rkmé  Kerviler. 


—  160  - 

CHRONIQUE 

NÉCROLOGIE.  — *  S.  Em.  Jacques-Marie-Adrien  Mathieu,  archevêque  de 
Besançon  et  cardinal,  a  vu  venir,  avec  courage  et  résignation,  la  mort  qui  Ta 
enlevé  le  9  juillet.  Quoiqu*il  manifestât  des  dispositions  pour  Tétat  ecclé- 
siastique, il  fit  son  droit  et  s'occupa  d'affaires.  Puis  il  entra  au  séminaire  de 
Saint-Sulpice.  Ordonné  prôtre  en  1823,  il  a  montré  de  bonne  heure  les 
qualités  qui  lui  valurent  Thonneur  d'atteindre  au  sommet  de  la  hiérarchie 
ecclésiastique.  On  le  vit,  dans  le  diocèse  d'Evreux,  professeur,  puis  supérieur 
du  séminaire,  chanoine  et  vicaire  général  ;  puis  à  Paris,  sous  Mgr  de  Quelen, 
promoteur  de  l'officialité,  chanoine,  vicaire  général,  puis  curé  de  la  Made- 
leine. En  1832,  il  fut  préconisé  évêque  de  Langrcs,  et  transféré  sur  le  siège 
archiépiscopal  de  Besançon  en  1831.  Il  fut  promu  au  cardinalat  en  1850.  Le 
cardinal  Mathieu  a  dépensé  la  plus  grande  partie  de  son  activité  dans  l'ad- 
ministration de  son  diocèse.  Ce  n'est  point  le  lieu  d'apprécier  sa  longue  et 
féconde  carrière,  mais  nous  tenons  à  citer  les  tentatives  qu'il  fit  pour  rame* 
ner  à  Dieu  le  fameux  abbé  Grégoire,  la  création  à  Besançon  du  collège 
Saint-François-Xavier,  sa  participation  aux  délibérations  du  Sénat,  marquée 
par  des  discours  remarquables,  et  le  recours  comme  d'abus  formé  contre 
lui,  en  1865,  pour  avoir  lu  en  chaire  l'encyclique  du  8  décembre  1864.  Ses 
œuvres  principales  sont  :  la  traduction  d'une  Dissertation  polémique  sur  Tltn- 
maculée-Conception,  par  le  cardinal  Louis  Lambruschini  (1843,  in-8)  ;  — 
Heures  des  Corigrégations  et  Conférences  du  diocèse  de  Besançon  (in-8,  1849)  ;  — 
Un  Mot  sur  la  brochure  Pape  et  Empereur,  de  M.  Cayla  (in-8,  1860)  ;  —  La 
Cause  italienne  et  le  P.  Passaglia  (in-8,  1861)  ;  —Le  Pouvoir  temporel  des  papes 
justifié  par  l'histoire  ;  étude  sur  l'origine,  l'exercice  et  l'influence  de  la  sou- 
veraineté pontificale  (in-8, 1863).  Parmi  ses  nombreux  mandements,  où  tous 
les  sujets  sont  traités,  nous  citerons  ceux  sur  la  Parole  de  Dieu  (1844)  ;  — Sur 
les  Avantages  du  Carême  (1848)  ;  —  Sur  la  Sanctification  des  dimanches  et  fêtes 
(1853)  ;  —  Sur  l'Assistance  aux  offices  et  les  profits  qu'on  en  retire  (1859)  ;  — 
Sur  la  Diminution  de  V esprit  du  christianisme  (1862)  ;  —  Sur  V Éducation  des 
enfants  (1864);  —  Sur  Les  tec/ures  (1867). 

—  M.  Adolphe  Dechamps,  ministre  d'État  belge,  vient  de  mourir  à  Bruxelles^ 
le  19  juillet.  Il  était  né  à  Melle  (Flandre-Orientale),  le  17  juin  1807. 
Cette  perte  sera  vivement  ressentie,  non-seulement  par  la  Belgique  et  par  le 
roi  Léopold,  dont  M.  Dechamps  était  un  des  plus  fidèles  conseillers,  mais 
encore  parles  catholiques  de  tous  les  pays,  pour  la  cause  desquels  cet  éminent 
homme  d'État  combattit  toute  sa  vie.  Cotçme  écrivain,  orateur  et  chef  da 
parti  catholique  en  Belgique,  sa  réputation  était  européenne.  Il  prit,  par  la 
plume  et  la  parole,  une  part  fort  active  à  tous  les  débats  qui  ont  agité,  dans 
le  cours  de  ce  siècle,  la  presse  et  la  tribune.  Son  nom  fut  mêlé  à  toutes  les 
grandes  luttes  religieuses  de  la  Belgique  ;  sa  parole  a  retenti  à  la  Chambre 
des  représentants  belges  chaque  fois  que  le  parti  catholique,  dont  il  était  le 
leader,  eût  à  revendiquer  ou  fût  attaqué;  sa  plume,  qui  était  celle  d'un  écri- 
vain habile  et  d'un  économiste  distingué,  aida  puissamment,  à  la  Remie  de 
Bruxelles  comme  ailleurs,  au  triomphe  des  idées  que  défendaient  les  catho- 
liques. Ces  idées,  d'ailleurs,  celles  des  vieilles  Flandres,  il  les  avait  paisëes, 
ainsi  que  son  illustre  frère,  Victor  Dechamps,  aujourd'hui  cardinal  et  primat 
de  Belgique,  dans  l'enseignement  paternel,  à  Seneffe,  où  tous  deux  s'étaient 
préparés  à  combattre  le  bon  combat.  Après  avoir  fait  ses  premières  cam- 
pagnes dans  VÉmancipation  et  le  Journal  des  Flandres,  le  succès  le  récompensa 
si  bien,  qu'il  fut  envoyé,  en  1834,  par  le  district  d'Ath,  à  la  Chambre  des 


—  161  — 

représentants.  Ses  talents,  mis  en  lumière  par  les  discussions  sur  Toganisa- 
tion   conmiunale,  sur  Tinstruction  publique   supérieure,  sur  les  intérêts 
industriels  et  commerciaux  de  la  Belgique,  lui  donnèrent  promptement  une 
influence  considérable.  En  4839,  son  attitude   patriotique  dans  les  débats 
oratoires  que  souleva  le  traité  des  mngt'qtULtre  articUs^  lui  valut  des  ovations 
populaires.  —  En  1841,  il  fut  nommé  gouverneur  du   Luxembourg  belge, 
puis  s'acquitta  avec  succès  d'une  mission  commerciale  auprès  du  gouverne- 
ment français,  n  arriva  au  ministère  en  1843,  et  eut  le  portefeuille  dos  tra- 
vaux publics  dans  le  cabinet  mixte  dirigé  par  M.  Nothomb  ;  ce  fut  à  lui  que 
le  réseau  des  chenûns  de  fer  belges  dut  son  achèvement.  —  Après  les  élec- 
tions de  1845,  malgré  le  remplacement  de  M.  Nothomb  par  M.  Yande  Weyer, 
M.  Dechamps  demeura  au  ministère,  où  il  fut  chargé  des  affaires  étrangères, 
n  conserva  ce  portefeuille  dans  le  cabinet  catholique  de  M.  de  Theux,  et  lit 
entrer  son  gouvernement  dans  ses  vues  libre-échangistes.  Des  traités   de 
commerce  avec  la  France,  la  Hollande  et  les  États-Unis  d'Amérique  tirèrent 
la  Belgique  de  l'isolement  où  l'avait  jusqu'alors  maintenue  le  système  pro- 
tectionniste. —  La  chute  de  M.  de  Theux  entraîna  celle  de  M.  Dechamps,  en 
1847,   le  parti  libéral  ayant  fini  par  l'emporter  sur  le  parti  catholique.  Pen- 
dant les  années  suivantes,  il  lutta  contre  ses  adversaires,  comme  député  de 
Charleroi.  —  Chargé  en  1864,  après  la  démission  du  ministère  Frère-Rogier» 
de  former  un  cabinet,  il  n'y  put  réussir;  peu  après,  porté  aux  élections  à 
Charleroi,  il  échoua.  Il  fut  longtemps  éloigné  de  la  politique  militante,  et  ne 
rentra  aux  affaires,  comme  ministre  d'État,  qu'alors  que  le  parti  catho- 
lique eût  triomphé  du  parti  de  la  révolution.  La  mort  est  venue  surprendre 
l'illustre  homme  d'État,  au  lendemain  de  l'incident  diplomatique  où  l'exis- 
tence même  de  la  Belgique  fut  un  instant  mise  en  cause,  au  moment  où  il 
rêvait  de  refaire  à  son  pays  un  glorieux  avenir,  à  l'heure  où,  plus  soucieux 
du  bien  public  que  ses  prédécesseurs  libéraux,  il  forçait  ses  adversaires   à 
admirer  et  à  respecter  et  sa  ligne  de  conduite  et  son  talent.  M.  Dechamps  a 
publié  :  La  Convention  de  Qastein;  —  La  France  et  V  Allemagne;  —  Situation  de 
la  Belgique  (in-8,  1865,  Dentu);  —  L'Empire  et  V  Angleterre  (in-8, 1860)  ;  — 
Jule$-César\    —  U  Empire  jugé  par  V  Empereur  (in-8,  1865);    —  Le  second 
Empire;  —  IHalogues  politique  (in-12,  1859);  —  Les  partis  en  Belgique  et  le 
nouveau  règne  {in-S,  1866).  —  M.  Dechamps  a  aussi  beaucoup  écrit  dans  la 
Bévue  de  Bruxelles,  qu'il  avait  fondée. 

—  M.  l'abbé  Mathieu  Orsini,  né  en  1802,  ancien  chapelain  de  Saint-Louis 
des  Invalides,  est  mort  à  Paris,  au  mois  de  juillet.  Outre  sa  collaboration  à 
un  certain  nombre  de  revues  et  journaux,  comme  le  Conservateur  de  la  Foi, 
le  Moniteur  de  la  Beligion,  la  Bévue  de  l'Education  natUmaUf  il  a  écrit  :  La 
Vierge;  histoire  de  la  Mère  de  Dieu,  complétée  par  des  traditions  d'Orient» 
les  écrits  des  saints  Pères  et  l'histoire  privée  des  Hébreux  (2  vol.  in-8  ; 
\^  édition;  «837  2%  1861);  —  Traduction  des  lettresde  saint  Jérôme  (1839)  ;  — 
Les  Fleurs  du  ciel,  ou  Imitation  des  Saints  (1839)  ;  —Le  Conseiller  du  peuple 
(in-8,  1842);  —  Histoire  de  saint  Vincent  de  Faut  (in-18,  1842)  ;  —  La  Bible 
des  familles,  extraits  textuels  des  livres  saints  (in-12,  1843)  ;  —  Les  Quatre 
Évangiles  complets,  précédés  d'une  préface  et  d'une  table-concordance  ;  suivis 
d'un  extrait  des  Actes  des  apôtres,  etc.  (in-16,  1843);  —  Considérations  sur 
Napoléon  (1853)  ;  —  Le  Faradis  terrestre  (in-12,  1857,  Vermot)  ;  —  Béponse  à 
la  brochure  intitulée  :  le  Fape  et  le  Congrès  (in-8,  1860)  ;  —  La  Bible  des  écoles, 
ou  cours  abrégé  d'histoire  sainte,  précédé  ^d'une  analyse  sur  chacun  des 
livres  de  l'Ancien  et  du  Nouveau  Testament,  suivi  de  la  vie  de  N.-S.  Jésus- 
Christ  et  de  l'histoire  des  Juifs  jusqu'à  leur  entière  dispersion  ;  —  Examen  du 
Hvre  de  M.  Benan  (in-8,  1863)  ;  2*  édition  sous  le  titre  de  Bé^taHon  du  livre 
Août  1875.  T.  XIV,  10. 


—  !6«  - 

de  M.  Renan  (in^,  4863)  ;  —  ¥rote$tatiùn  tontrû  la  «uppress^^i  dé  V hôtel  des 

Invalides  (Paris,  4870,  iii-8  de  32  p.). 

•^  M^  Piêire^oseph  d«  Pusox,  éiréque  de  Sion  iSuisse),  est  mort  le  16 
Juillet  dans  sa  tille  épiseopale.  Il  était  né  à  Venthrôme,  le  28  avril  1798. 
Docteur  en  théologie  et  en  droit  canon,  profdssear  de  théologie  et  d'écriture 
sainte,  chanoine  titulaire,  il  tat  préconisé  é?éque  de  Sion  en  1844.^  Mgr  de 
Preui  laisse,  parmi  ses  œuvres,  un  certain  nomhre  de  lettres  pastorales  re- 
marquables. Nous  n'en  citerons  que  quelques-unes  :  Contre  to  lecture  des 
mauvais  Itoreseldee  maxn)(Xls  jeiurnaiai  (1845)  ;  •-  CtmJtre  VirréUgion  et  le  Hber- 
tlnage,  (1848)  \  —  Le  Sensualisme^  le  respeel  humain  et  Vind^endamoe^  causes 
de  Ironsgressiofis  de  Vabstinmcey  (1851) ;  —  Qu'est-ce  ^ue  (e  Pape?  (1862)  ;  -- 
On'esi-ee  qaé  le  DimoHCitoP  (<864),  et  beaucoup  d'autres  sur  la  fbi,  sur  le 
lubilé,  etc. 

—  H.  Jean^Charles  MoABàU,  chanoine  de  l'église  métropolitaine  de  Paris, 
est  mort  à  Paris  le  9  mai.  U  était  né  à  Hessas  près  Beaugency,  le  4  août  1788. 
n  promettait  par  ses  goûts  et  ses  études,  en  partie  fkites  sous  la  direction  de 
Tertuenx  ecclésiastiques,  et  au  petit  séminaire  d'Orléans,  lorsque  les  circons*- 
tances  l'entraînèrent  dans  l'armée  en  1896*  n  servit  dans  l'intendanoe,  en 
Italie,  et  arriva  au  grade  de  capitaine,  n  se  distingua  plus  tard  par  son  courage 
à  la  bataille  de  Waterloo.  Enfin,  en  1821,  il  entra  au  séminaire,  à  l'âge  de 
trente-trois  ans,  et  fût  ordonné  prêtre  en  1824.  U  exerça  le  saint  ministère 
en  qualité  de  vicaire  à  Saint-Denis  du  Saint-Sacrement,  à  Notre-Dame  des 
Victoires,  puis  à  Notre-Dame.  En  1843,  il  fut  promu  à  la  cure  de  Saint- 
Hèdard,  où  il  fat  puissamment  secondé  par  la  sœur  Rosalie,  et  obtint  un 
canonicat  en  1862.  Il  a  publié,  en  1639,  sous  le  titre  de  Mes  Vacances  en  /(olie 
(in-12),  la  relation  d'un  voyage  qu'il  fit  dans  ce  pays,  et  la  Ltfurgie 
ûa  ÏHmttMM  (1852,  in^l2).  n  laisse  un  travail  inédit  sur  Notre-Dame  de 
Paris.  Il  était,  depuis  longtemps,  membre  de  la  Société  des  études  histùriqueÈ. 

•^  Mgr  Jacques  JsANCAftn.évêque  de  Gé2ame  ài  porh^us  et  chanoine  de  Saint- 
Denis,  vient  de  mourir,  le  6  juillet,  à  Cannes.  U  était  né  en  1799.  n  avait  été 
Tauziliaire  de  NN.  SS.  de  Mazenod  et  Guibert  dans  l'exercice  de  leur  minis- 
tère apostolique.  Préconisé^  en  1858,  évêque  de  Gézame,  in  partibus,  et  après 
la  mort  de  Mgr  de  Mazenod,  en  1861,  chanoine  de  Saint-Denis,  il  est  auteur 
d'une  Vie  de  setM  Martin  et  d'une  IfMx  sur  Louis-Marie  Camper,  novice 
de  la  compagnie  des  Oblats  de  Marie.  On  lui  doit  aussi  deux  oraisons  fu- 
nèbres de  NN.  SS.  Ghàrles^rtuné  et  Charles  Joseph-Eugène  de  Mazenod 
(1840,  1861). 

-^  M.Étienne>Edmond,  comte  Lavono,  né  à  Paris  le  18  février  1821,  est  mort 
dans  cette  ville,  le  23  juillet  1875;  il  était  commandeur  de  l'ordre  de  Saint- 
6régoire-le-Gfand,  président  de  l'œuvre  du  Denier  de  Saint-Pierre,  président 
honoraire  et  fondateur  de  la  Société  de  Saint-Jean  pour  l'encouragement  de 
l'art  chrétien,  membre  de  la  Société  bibliographique  ;  on  le  trouvait  dans 
toutes  les  œuvres,  auxquelleê  il  donnait  le  concours  de  son  activité  et  le 
généreux  appui  de  sa  fortune.  Les  œuvres  pontificales  étaient  celles  qui 
avaient  le  plus  d^attrait  pour  lui.  0*nnfa  pro  Pétri  sede,  telle  était  sa  devise, 
fidèle  expression  de  son  dévouement  au  Saint-Siège.  Ecrivain  lui-même,  il 
comprenait,  mieux  qu'on  ne  le  fait  généralement,  ce  que  nous  appellerions 
Volontiers  les  œuvres  de  charité  intellectuelle.  Il  a  écrit  :  Dante,  Pétrarque, 
Michel-Ange,  Tass»,  sonnets  choisis,  traduits  et  précédés  d'une  étude  sur 
chaque  poète,  en  collaboration  avec  M.  Etienne  Lafond  (in-8,  1848);  — 
De  la  »)enaissance  eathotiqwe  enAnglaerre  (in-18,  1849)  ;  —  Rame,  Lettrée  d'un 
pèlerin  (2  vol.  in-8  ou  in-18)  1856;  2*  édit.  1864);  —  La  Voie  doulourettse 
des  Popes  (in-18,  1860);  —  Larette  et  Ca^lfidarie  (in-18,  1862);  -^  m  Mé- 


-  163  — 

dedn  sous  la  Tefreur,  suivi  d'antres  tiouTelles  (1864,  in-i8)  ;  —  EisMre  «les 
cAoines  de  saint  Pierre,  et  dé  la  Confrérie  de  ce  nom  à  Rtme  (in-32, 1866)  ;  •— 
LalVi6toietoC^dAome,  méditations  et  souvenirs  (in-i8,  1869);  — Aome 
CBctcménigue,  lettres  à  un  ami  pendant  le  ooneile  (in-8,  1870);  —  Le 
Pèlerinage  d'Âuchy  histoire  de  saint  François  par  les  monuments  (in-18)  ; 
—  La  Saleîte^  Lourdes  et  Pontmairiy  voyage  d'un  croyant  (2«  édit.,  in-18);  — 
Dorothée,  vierge  et  martyre,  tragédie,  suivie  du  Mag^ieien,  drame  de  Galdéron/ 
traduit  de  l'espagnol  (in-8, 1873)  ;  —  Le  Poème  de  Home  (in-8,  1874).  —  Le 
comte  Lafond  a,  en  outre,  écrit  dans  le  Correspondant,  la  Bévue  du  Monde 
ccUhoUque,  le  Contemporain,  le  Messager  de  la  Semaine.  —  D  avait  été  un  des 
rédacteurs  du  journal  fAmi  de  la  Beligion.  —  Il  laisse  plusieurs  manuscrits, 
parmi  lesquels  on  trouvera  probablement  les  éléments  à  peu  près  complets 
de  plusieurs  ouvrages.  Il  était  sur  le  point  de  faire  paraître  un  ouvrage  asset 
considérable,  et  auquel  il  travaillait  depuis  longtemps  :  les  Saints  de  Rome. 

— M.  le  vicomte  Edouard-Ferdinand  de  BEAUMOifr-yASsr,  né  au  château  de  la 
Mothe-Souzay  (Indre-et-Loire),  en  1816,  est  mort  subitement,  k  Paris,  le 
^  juillet.  Ancien  préfet  de  l'Aisne  (1851  k  4853),  ancien  maître  des  requêtes 
de  première  classe  au  Ck)nseil  d'Etat  (1855),  ses  premiers  essais  littéraires 
furent  des  romans  :  Une  Marquise  d'autrefois  (1838,  in-8)  ;  —  Don  Luis  (1839, 
in-8),  etc.  Se  tournant  ensuite  vers  rhistoire,  il  écrivit  des  ouvrages  assez 
estimés,  au  premier  rang  desquels  on  peut  citer:  Les  Suédois  depuis 
Charles  lU  jusqu'à  Oseur  /•'  (1841,  2  vol.  in-8).  il  attaqua  vivement  la  révo- 
lution de  juillet  dans  différentes  brodiures,  telles  qae  la  Politique  des  honnUes 
gms  (1851)  et  la  Préface  du  2  décembre  (1853).  Nous  avons  encore  k  citer  de 
ce  pnbUcûste:  Swedenborg,  ou Stoeholm  en  1856  (1842,  in-8);  —  Eistoire  des 
États  européens  depuis  le  congrès  de  Vienne  (1843-1853, 1. 1*'  k  VI,  in-8), 
publication  ÛMchevée;  —  Un  Dernier  B^  de  jeunesse  (1852),  roman  qui  ne 
ftit  pas  son  dernier,  malheureusement;  —  Histoire  de  mon  temps  (1855-1858, 
4  vol.  in-8),  où  le  règne  de  Louis-Pbilippe  et  la  République  sont  vivement 
pris  k  partie  ;  •—  Les  Sàkns  de  Paris  et  la  sodéié  parisienne  sous  Loute-PW- 
l^iptl*'  (1856,  in-18);  —  Une  éistrigue  4ms  le  gmnd  monde  (1867,  in-i8), 
roman  de  mœurs  oontemporaûies;  —  les  Saêons  de  Paris  et  la  société  parir 
efefifie  «me  IVcqMiéonliï  (1858,  in-IB);  —Bietoireinltime  du  second  Empire;  — 
Mémoires  seerets  du  âtao-neuiméme  siècle  f  —  et  enfin,  son  dernier  ouvrage, 
qui  devait  paraître  le  Jour  même  de  sa  mort,  et  dont  il  n'a  pu  voir  la 
publication  :  Les  papiers  ourieux  d^un  honme  de  cour. 

^ —  M.  Athanase-Josué  GooncREL  fils,  né  à  Amsterdam  en  1820,  est  mort  k 
Fismes,  le  25  juillet.  Gomme  son  père,  il  était  pasteur  protestant.  Devenu 
rédacteur  en  chef  du  Lien,  puis  de  la  Nouvelle  remie  de  théologie,  il  acquit,  par 
ses  doctrines  et  ses  écrits,  plus  encore  que  par  un  certain  talent  de  parole, 
une  autorité  personnelle  parmi  les  protestants.  En  4864,  il  se  déclara  par- 
tisan des  idées  de  M.  Renan,  à  propos  de  sa  Fîe  de  Jésus.  H  était  alors  sup- 
pléant du  pasteur  Martin  Paschoud;  il  fut  suspendu,  cette  même  année,  da 
ses  fonctions  de  ministre  par  le  consistoire  de  Paris,  par  suite  de  ses  prédi* 
cations  d'un  libéralisme  de  mauvais  aloi,  qui  soulevaient  des  orages  parmi 
les  protestants  orthodoxes.  H  a  publié  :  Topographie  de  Jérusalem  (in-8,  avec 
plan,  1843)  ;  —  Des  Beaux-Arts  en  Italie  au  point  de  me  religieux  (1857);  — 
Le  Bon  Samaritain,  sermon  ;  —  Le  Catholicisme  et  le  Protestantisme  considérés 
dans  leurorigine  et  leur  développement  (1864,  in^);  —le  Culte  tel  que  Dieu  le 
demande;  ^  Les  Deux  Méthodes.  Expansion  et  compression  (1865);  —  L'E- 
goisme  devant  la  Croix  (1864);  —  Homélies,  deux  séries  (1858);  —  Jean  Calas 
et  sa  famille,  étude  historiée  d'après  les  documents  originaux,  etc.  (1858^ 
in-12,  avec  2  grav.  et  fao-simile)  ;  —  La  Saint-Barthélémy  (1860)  ;  »  Précie  de 


^  164  — 

l*EglUe  réformée  de  PariSy  à^Aprés  des  dùcumenis  en  grande  partie  inédits 
(1862,  in-8);  —  Un  certain  nombre  de  sermons,  sous  des  titres  particnliers 
(1860-64)  :  La  Science  et  la  Religwn  ;  —  La  Solidarité  chrétiennB;  —  La  Tradifion 
protestante;  —  La  Charité  sans  peur;  —  Des  premières  transformaiûms  histori" 
quesdu  christianieme; — Pourquoi  la  France  n'est-^lle  pas  protestante?  libres 
études;  —  La  Conscience  et  la  Foi;  —  Élan  vers  Dieu;  —  Le  ministère  de 
f  Esprit  ;  —  Les  Minorités  chrétiennes^  etc.  —  Il  a  aussi  publié  des  lettres 
inédites  de  Voltaire  sur  la  tolérance. 

—  M.  Albert  Blanqubt,  né  à  Paris  en  i826,  est  mort  au  Vésinet  (Seine-et« 
Oise),  le  10  juin.  Il  a  débuté  dans  la  carrière  littéraire  par  des  romans  qui 
ont  eu  de  la  vogue  dans  les  journaux  populaires.  Il  a  été  attaché  au  cabinet 
de  Napoléon  m,  et,  depuis  la  guerre,  il  donnait,  sous  le  nom  de  Ghrysale» 
des  causeries  dans  le  journal  la  Liberté.  Citons  de  lui  :  La  Giralda  de  Séi>iUe 
(1852);  —  Amovr  et  caprice,  comédie  (1854);  —  Les  Amours  de  dArtagnan 
(1 859)  ;•- Les  Bains  de  mer  des  cit^  normandes,  guide  (1859);  —  Le  Roi  d'Italie 
(1860);  —  Le  Parc  aux  cerfs  (1860)  ;  ->  Mademoiselle  Trois-Étoiles  (1862).  -- 
La  belle  léronniére  (1862);—  Les  chevaliers  de  TAs  de  |>C9ue  (1863)  ;— les 
Enfantsdu  curé  (1864)  ;  —  La  Mer  durai;  ^  Les  Amaitones  de  la  France;  — 
La  Terre  dPor,  etc. 

—  En  annonçant,  dans  un  de  oos  précédents  numéros  (avril  1875,  p.  362), 
la  mort  de  M.  Tabbé  Th«  Grasilier,  nous  avons  donné  un  résumé  incomplet 
des  travaux  de  ce  modeste  savant  ;  nous  croyons  juste  de  compléter  cette 
première  notice.  —  L'abbé  Grasilier  eut  pour  maître  Tabbé,  Gholet,  dont 
il  fut  le  collaborateur.  Ds  recueillirent  ensemble,  dans  tous  les  dépôts  publics 
de  la  France  et  de  l'étranger,  les  œuvres  de  Jean  de  la  Rochelle,  Tun  des 
représentants  les  plus  remarquables  de  TÉcole  franciscaine  au  treizième 
siècle  ;  Tabbé  Grasilier  en  transcrivit  lui-même  plus  de  500  pages  de  grand 
format,  et  c'est  dans  cet  énorme  manuscrit  que  M.  Laguet  a  pu,  tout 
récemment,  puiser  la  matière  {d'une  remarquable  thèse  de  doctorat.  C'est 
M.  Grasilier  qui  suryeilla  l'édition  du  Cartulaire  de  Baigne,  préparé  par 
Tabbé  Cholet;  il  publia  seul  ceux  de  Notre-Dame  de  Saintes,  de  Saint- 
Étienne  de  Vaux  et  de  Notre-Dame  en  Arvert  ;  il  a  donné  de  nombreux  articles 
dans  le  Bulletin  religieux  du  diocèse,  et  un  mémoire  dans  la  Bévue  archéoUh 
gique  sur  un  tombeau  gallo-romain  découvert  &  Saintes.  M.  Grailler,  qui  était 
un  collaborateur  actif  de  la  Conmiission  de  la  topographie  des  Gaules,  pour 
le  département  de  la  Charente-Inférieure,  a  laissé,  en  manuscrits,  plusieurs 
travaux  importants,  qui  sont  assez  avancés  pour  laisser  espérer  qu'ils  seront 
publiés.  Nous  citerons  le  Cartulaire  de  l'abbaye  de  Saint-Jean  d'Angély,  les 
Vies  des  saints  du  diocèse  de  Saintes,  le  Catalogue  des  èvéques  de  Saintes,  les 
Archiprétrés  de  ce  diocèse,  la  copie  du  manuscrit  du  chanoine  Tabourin,  dont 
l'original  a  été  brûlé  en  1871,  ainsi  que  leGartuUnre  de  Notre-Dame  de  Saintes. 

Institut.  —  Académie  des  sciences.  —  L'Académie  a  tenu  sa  séance  publique 
annuelle  le  21  juin,  sous  la  présidence  de  M.  E.  Frémy.  M.  le  président  a 
fait  le  bilan  rapide  de  l'année  qui  vient  de  s'écouler.  Il  a  proclamé  ensuite 
les  prix  du  concours  de  1874.  M.  Bertrand  a  prononcé  Tôloge  historique  de 
M.  Élie  de  Reaumont,  son  prédécesseur. 

Voici  la  liste  des  principaux  prix  accordés  et  le  nom  des  lauréats. 

Grand  prix  des  sciences  mathématiques.  «  Théorie  mécanique  du  vol  des 
oiseaux.  »  —  Six  mémoires  ont  été  présentés  au  concours.  Aucun  d'eux  n'a 
présenté  un  ensemble  assez  complet  au  point  de  vue  mathématique  et  assez 
sûr  quant  aux  bases  expérimentales  pour  qu'on  pût  lui  décerner  le  prix. 
Une  récompense  de  2,000  firancs  a  été  accordée  à  M.  Penaud  pour  le  mémoire 


—  I«5  - 

n*  2.  Un  enoouragement  de  1,000  francs  a  été  accordé  à  MM.  Hureau  de  Vîl- 
leneure  et  Crocfr-Spinelli  pour  le  mémoire  n<^  4. 

Grand  prix  des  scienees  pkytiques.  n  Etude  de  la  fécondation  dans  la  classe 
des  champignons.  »  —  Aucun  mémoire  n'a  été  jugé  digne  du  prix.  Sa  valeur 
a  seule  été  partagée^  à  titre  d'encouragement,  entre  MM.  Maxime  Cornu  et 
Ernest  Rose. 

Mécanique.  Prix  Poncelet.  —  Décerné  à  M.  Bresse,  ingénieur  en  chef  des 
ponts  et  chaussées  pour  son  ouvrage  :  Cours  de  Mécanique  appliquée  professé  à 
l'Écoie  des  ponts  et  chaussées. 

Prix  Montyon.  -^  Décerné  à  M.  le  lieutenant-colonel  du  génie  Peaucellier, 
Ce  savant  officier  a  résolu  complètement  un  problème  de  mécanique  géomé- 
trique considéré  avant  lui  comme  insoluble. 

Prix  Phaney  :  Décerné  à  M.  Joseph  Farcot,  pour  son  intéressant  appareil, 
ie  servo-^nateur  en  moteur  asservi. 

M.  Audenet  a  obtenu  une  mention  pour  son  beau  travail  sur  «les  Conden- 
seurs à  surfiice.  » 

Asfrofiontte.  Prix  Lalande.  —  Ce  prix  a  été  surtout  institué  pour  récom- 
penser l'observation  astronomique  la  plus  intéressante  de  l'année.  L'Aca- 
démie ne  saurait  mieux  f<iire  pour  remplir  les  vues  de  l'illustre  fondateur 
que  de  décerner  ce  prix  à  MM.  Mouchez,  Bouquet  de  la  Grye,  Fieuriais,  André, 
Héraud  et  Tisserand,  chefs  des  expéditions  françaises  qui^  &  la  lin  de  l'an- 
née 1874,  sont  allés  observer  le  passage  de  Vénus  sur  le  soleil.  La  valeur  du 
prix  est  sextuplée. 

Statistique.  Prix  Montyon  :  Décerné  à  M.  de  Kertanguy,  pour  son  excellent 
travail  sur  cla  Mortalité  parmi  les  assurés  de  la  Compagnie  générale.  » 
Mentions  honorables  :  à  M.  de  Saint-Genis,  pour  ses  «Etudes  statistiques  sur  la 
Savoie,  de  1860  à  1870.  Manuscrit  inédit.  A  M.  Loua,  pour  son  Atlas  statis- 
tique de  la  population  de  Paris  de  1801  à  1872. 

Chimie.  Prix  Jecker.  —  Partagé  entre  MM.  Reboul  et  Bouchardat.  M.  Reboul 
pour  son  travail  sur  les  éthers  du  Glycide.  M.  Bouchardat  fils,  pour  les  éthers 
de  la  Mannite  et  de  la  Dulcite. 

Botanique.  Prix  Desmazières.  —  M.  de  Seynes,  pour  ses  belles  recherches 
sur  les  Fistulines,  espèce  de  champignon  dont  la  plus  répandue  se  trouve 
dans  la  Caroline,  en  Europe  et  jusque  dans  l'Himalaja. 

Prix  de  la  Fons-Mélicocq  :  La  valeur  de  ce  prix  est  partagée,  à  titre  d'en- 
couragement, entre  M.  Calley,  pharmacien  au  Chesne,  pour  son  •  Essai  de 
catalogue  raisonné  et  descriptif  des  plantes  vasculaires  du  département  des 
Ardennes,»  et  MM.  Eloy  de  Vicq  et  Blondin  de  Brutelette,  pour  leur  t Cata- 
logue raisonné  des  plantes  vasculairei  de  la  Somme.  » 

Anatomie  et  Zoologie.  Prix  Thore.  —  Décerné  à  M.  Auguste  Forel,  professeur 
à  l'académie  de  Lausanne,  pour  son  ouvrage  considérable  ayant  pour  titre  : 
Les  Fourmis  de  la  Suisse. 

lfë(2ecînee^eAtfurgte.  —  Prix  Bréaot,  do  100,000  francs,  légué  comme  on 
sait,  pour  être  donné  à  celui  qui  découvrira  la  cause  du  choléra  épidémique 
ou  un  moyen  spécifique  de  guérison  de  cette  maladie.  La  commission  n^a 
pas  décerné  encore  ce  prix.  Elle  a  accordé  une  récompense  ce  3^500  francs 
à  M.  Ch.  Pellarin  qui,  dès  1849,  a  démontré  le  caractère  contagieux  du  cho- 
léra, et  a  accumulé  les  preuves  depuis,  par  ses  travaux  sur  les  causes  de 
propagation  de  la  maladie;  et  une  de  1,500  francs  à  M.  Armieux,  l'un  de 
nos  médecins  militaires  les  plus  distingués^  auteur  de  deux  mémoires  impri- 
més :  le  Choléra  à  Toulouse,  la  Répartition  du  choléra  en  France. 

Prix  Montyon.  —  Obtenu  à  la  fois  par  MM.  Dieulafoy,  pour  son  ouvrage  : 
t  Sur  l'aspiration  des  liquides  morbides  dans  le  traitement  des  maladies 


chirurgicales;  »  Malassez,  répéUtaur  aa  Collège  de  France^  qui  s'est  attaché 
depuis  quelque  temps  à  étudier  les  roodificatioDs  de  la  composition  du  sang 
chez  l'homme  malade  ;  et  Mehn,  qui  a  fait  coanaltre  dans  sept  mémoires 
les  succès  qu'il  a  (4>tenus  dans  l'art  de  guérir,  en  recherchant  la  composi« 
tion,  par  rapport  au  sang,  des  liquides  épanchés  dans  les  cavités  naturelles 
ou  accidentelles.  —  Mentions.  M.  Bérenger-Feraud,  médecin  en  chef  de  la 
marine  aux  colonies,  pciur  ses  ouvrages  sur  la  fièvre  jaune  au  Sénégal  et  sur 
la  fièvre  bilieuse  mélanurique  des  pays  chauds.  —  M*  Letiévent,  chirurgien 
en  chef  de  THÔtel-Dieu  de  Lyon,  pour  son  ouvrage  sur  les  sections  nerveuses. 
—  M.  Peter,  pour  son  livre  :  Leçons  de  dimque  médicale,  —  Citations.  — 
M.  le  docteur  Béni-Barde:  Traité  tJiéorique  et  pratique  d'hydrothérapie,  M.  J. 
Bonrrel  :  Traité  complet  de  la  rage  chez  le  chien  et  le  eJuxt,  M  Herp:ott|  de 
Nancy:  Mémoires  sur  les  gouttières  en  linge  plâtré.  M.  Dechauz,  de  Montlu- 
çon:  De  THystérie,  etc...  H.  Lunier:  Influence  des  grandes  conunotions  poli- 
tiques et  sociales  sur  le  développement  des  maladies  meotales.  M.  Moncoq  : 
Sur  la  transmission  du  sang.  M.  Toussaint  Martin  :  Sur  les  Hydropisies. 
M.  Salle  :  Sur  les  altérations  du  sang  dans  les  affections  typhoïdes  du 
cheval. 

Phytiologie  expérimentale.  —  Décerné  à  MM.  Arloing  et  Tripier,  pour  leurs 
travaux  «  Conditions  de  la  persistance  de  la  sensibilité  dans  le  bout  périphé- 
rique des  nerCs  sectionnés.  »  Décerné  égalemeat  à  M.  Sabatier  pour  ses  étu- 
des^ sur  «Le  coaur  et  la  circulation  centrale  dans  la  série  des  vertébrés.  » 

Prix  généraux.  Prix  Trémont.  —  M.  Achille  Gazin. 

Prix  Gegner.  —  M.  Gaugain,  pour  l'aider  à  poursuivre  ses  travaux  sur 
l'électricité  et  le  magnétisme. 

Prix  fondé  par  M"*  la  marquise  de  Laplace.  —  M.  Badoureau,  sorti  le 
premier  en  1874  de  l'École  polytechnique  et  entré  à  l'École  des  mines. 

—  Dans  sa  séance  du  19  juillet,  TAcadémie  a  élu  M.  le  capitaine  de 
vaisseau  Mouchez,  dans  la  section  d'astronomie,  à  la  place  de  M.  Mathieu, 
décédé,  par  33  voix  contre  26  données  à  M.  Wolf  et  1  à  M.  Tisserand. 

Faculté  des  lettres.  —  M.  Lavisse,  ancien  élève  de  l*École  normale,  pro- 
fesseur an  Lycée  Henri  IV,a  soutenu,  en  Sorbonne,  le  12  juillet,  ses  thèses  pour 
le  doctorat  es  lettres.  Les  sujets  étaient  :  De  Hermanno  Salenzi  ;  —  De  ia 
Marche  de  Brandebourg  sous  la  dyruutie  aseanienne. 

CoNcouBs.  —  La  classe  des  lettres  et  des  sciences  morales  et  politiques  de 
TAcadémie  royale  des  sciences,  des  lettres  et  des  beaux-arts  de  Belgique, 
vient  de  publier  le  programme  des  concours  pour  1877. 

Première  question  :  «  Expliquer  le  phénomène  historique  de  la  conserva- 
tion de  notre  caractère  national  à  travers  toutes  les  dominations  étrangères.  » 

Df^uxiéme  question  :  «  Les  encyclopédistes  français  essayèrent,  dans  la 
seconde  moitié  du  dix-huitième  siècle,  de  faire  de  la  principauté  de  Liège  le 
foyer  principal  de  leur  propagande.  —  Faire  connaître  les  moyens  qu'ils 
employèrent  et  les  résultats  de  leurs  tentatives,  au  point  de  vue  de  Tin- 
ûnence  qu'ils  exercèrent  sur  la  presse  périodique  et  sur  le  mouvement 
littéraire  en  général.  » 

Troisième  question  :  «  Écrire  l'histoire  de  Jacqueline  de  Bavière,  comtesse 
de  Hainaut,  de  Hollande  et  de  Zélande,  et  dame  de  Frise.  »  Dans  leur  travail, 
les  concurrents  doivent  s'attacher,  d'une  manière  toute  particulière,  aux 
événements  principaux  de  la  vie  et  du  règne  de  cette  princesse  ;  ils  utilise- 
ront, sans  les  suivre  servilement,  les  travaux  qui  ont  été  publiés,  pour  cette 
époque,  tant  &  Tétranger  qu'en  Belgique. 

Quatrième  question  •  «  Faire  l'histoire  des  finances  publiques  de  la  Bel- 


—  167  — 

gique,  d«pqis  1830»  en  appréciant»  dans  leur»  principes  et  dans  leurs  résul- 
tats, les  diyarsee  parties  de  la  législation  et  les  principales  mesures 
administratives  qui  s'y  rapportent.  -*  Le  travail  s'étendra  d'une  manière 
sommaire  aux  finances  des  provinces  et  des  communes,  ai 

Cinqi/Mm  que$iiim  •  «  Indiquer  les  analogies  et  les  différences  que  pré- 
senta la  poésie  flamande  avec  la  poésie  des  autres  langues  d'origine 
germanique,  ce  qu'elle  leur  doit  et  l'influence  qu'elle  a  eue  sur  elles.  » 

Le  prix  de  chacune  de  ces  questions  sera  une  médaUle  d'or  do  le  valeur 
de  «te  09»^  frima, 

GoNORte.  —  Ccnqrés  archéoUiQiquê  de  Chàhns.  Parmi  les  qnestiona  qui 
seront  traitées  an  congrès,  nous  remarquons  tes  suivantes  :  <«  Quels  sont  les 
prindpaux  points  du  département  de  la  Marne  où  il  a  été  reconnu  des  stations 
ou  des  ateliers  des  dififérentes  époques  de  la  pierre  9  »  —  «  Quelles  sont  les 
découvertes,  Adtes  dans  le  département  de  la  Marne,  de  oimetières  ou  d'objets 
des  époques  du  brome  et  du  fer?  »  ^^  «  Signaler  les  découvertes  de  gise* 
ments  arohéologiques  des  époquee  gauloise,  gallo-romaine  et  mérovingienne 
faites  depuis  le  Congrès  tenu  à  Reims  en  1964.  »  ««>  «  Quelles  sont  les  déeoU" 
vertes  de  monnaies  anciennes,  à  quelque  époque  qu'elles  appartiennent, 
faites  dans  le  département  de  la  Marne  depuis  4864  ?»  —  u  Dresser  un 
inventaire  critique  des  sceaux  originaux  conservés  dans  les  dépôts  d'archives 
de  la  Marne  et  en  donner  autant  que  possible  les  dessins.  »  —  «  A^ton 
découvert  de  nouveaux  éléments  matériels  on  historiques  qui  puissent  servir 
à  déterminer  le  lieu  où  se  donna  la  bataille  de  454,  dans  laquelle  Attila  fut 
vaincu  t  »  —  m  Déterminer,  dans  le  département  de  la  Marne,  la  limite  de  la 
quatrième  Lyonnaise  et  de  la  seconde  Belgique,  »  ««  k  Etudier  les  organisa- 
tions communales  des  Villes  neuoêi  fondées  en  Champagne,  au  douiièma 
siècle,  par  des  seigneurs  laïques  ou  ecclésiastiques.  »  —  «  Etudier  les  diffé- 
rents patois  du  département,  spécialement  sous  le  rapport  étymologique,  w 

—  <c  Quels  sont  les  monuments  religieux  les  plus  remarquables  du  onxième 
au  seizième  siècle,  existant  dans  le  département  de  la  Marne  ?  Signaler 
leurs  principaux  caractères.  A*t<on  découvert  dans  ces  monuments  des  pain* 
tnres  murales,  mosaïques,  carrelages  et  sculptures  d'un  certain  intérêt  ?  >» 

—  «  Architecture  militaire  de  la  région,  depuis  le  douzième  siècle  jusqu'au 
quinzième  ;  quelle  était  la  forme  des  donjons  aux  époques  romane  et 
ogivale  ?»  —  «  Quels  ont  été  les  établissements  des  ordres  du  Temple  et  de 
Maltcr  dans  le  département  de  la  Marne.  »  --  «  Décrire  et  analyser  sommaire» 
ment  les  cartulaires  des  établissements  religieux  et  hospitaliers  du  départe- 
ment, conservés  dans  les  dépôts  publics  et  dans  les  collections  particulières.  » 
— «  Les  communes  de  la  Marne  sont-elles  riches  en  titres  anciens  ?  >  -—  «  Ins.- 
crlptions  lapidaires  appartenant  4  l'époque  gallo-romaine.  •  —  Une  médaille 
d'argent  sera  décernée,  s'il  y  a  lieu,  à  l'auteur  du  recueil  complet  des  ins- 
criptions gallo-romaines  de  la  troisième  division  archéologique,  comprenant 
les  départements  de  la  Marne  et  de  Seine-et-Marne.  -^  «  Inscriptions  lapi- 
daires depuis  l'époque  mérovingienne  jusqu'à  la  révolution  de  4789.  » 

Les  archives  privées  d'un  habitant  de  Pompai.  —  On  a  découvert,  il  y  a 
quelques  jours,  à  Pompéi,  les  archives  très-intéressantes  et  très-curieuses 
d'un  simple  particulier,  enfouies  dans  le  cataclysme  de  cette  ville.  Ce  sont 
des  tablettes  de  cire,  en  très-grand  nombre,  qui  sont  malheureusement  dans 
un  état  bien  peu  solide,  mais  qui  permet  cependant  de  déchiffrer  les  men- 
tions qu'elles  portent. 

On  connaît,  par  le  plan  qui  se  trouve  dans  tous  les  guides,  dit  le  corres^ 
pondant  qui  transmet  au  Time$  les  détails  de  cette  découverte,  la  position 


—  IW  — 

de  la  Casa  del  Torello,  ou  Maison  du  Taureau,  ainsi  nommée  à  cause  de  la 
petite  statue  de  bronze  qu'on  a  découverte.  Cette  maison  est  située  à  Tangle 
nord  du  quadrmum  d'où  se  dirigent  au  nord-est  la  Strada  di  Nola,  au  sud- 
ouest  la  Strada  délia  Fortuna  et  au  sud-est  la  Strada  Stabiana;  la  rue  du  nord- 
ouest,  qui  conduit  à  la  Porta  del  VesuTio,  n'a  pas  encore  reçu  de  nom.  Un 
peu  au-delà  de  ce  lieu^  les  ouvriers  font  des  fouilles  dans  une  habitation 
particulière  dont  les  murs  sont  couverts  de  peintures  bien  conservées. 

En  déblayant  une  des  chambres  supérieures  situées  au-dessus  de  l'omM*- 
tornim,  ils  découvrirent  une  boite  de  bois  légèrement  enfoncée  au-dessous  du 
pavement  de  la  chambre  qui,  avec  le  temps  avait  fini  par  fléchir.  C'est  par 
le  plus  heureux  des  hasards  que  cette  boite  n'a  pas  été  mise  en  pièces  et 
réduite  en  poudre  avec  tout  son  contenu,  avant  qu'on  pût  vérifier  la  nature 
de  la  découverte,  car  cette  boite  est  si  complètement  carbonisée  qu'elle  se 
brisait  au  toucher.  Elle  mesure  environ  80  centimètres  de  largeur  sur  un 
peu  plus  de  longueur.  Un  fragment  s'en  détacha  avec  les  décombres  qui  l'en- 
touraient, et  on  vit  qu'elle  contenait  un  grand  nombre  de  tablettes  sur  les 
extrémités  desquelles  on  distinguait  des  traces  d'écriture. 

Le  surveillant,  reconnaissant  l'importance  de  cette  trouvaille,  arrêta  sur- 
le-champ  les  fouilles,  prit  les  mesures  nécessaires  pour  protéger  la  boite  et 
la  maintenir  dans  l'état  où  elle  se  trouvait,  et  télégraphia  à  Rome,  au 
ministre  de  l'instruction  publique,  qui  donna  immédiatement  l'ordre  à 
M.  Fiorelli  de  se  rendre  à  Naples  par  le  plus  prochain  train.  A  huit  heures 
et  demie,  le  lendemain  matin,  M.  Fiorelli  était  à  Pcmipéi.  Dès  le  premier 
examen,  il  reconnut  non-seulement  qu'on  ne  pouvait  espérer  de  conserver 
la  boite,  mais  qu'il  fallait  prendre  des  moyens  énergiques  et  inmiédiats 
pour  en  sauver  le  contenu  s'il  était  possible. 

Ce  contenu  consistait,  autant  qu'on  en  pouvait  juger,  en  300  tablettes 
minces  et  de  difiérente  grandeur  de  bois  de  sapin  ;  quelques-unes  mesu- 
raient 118  millimètres  sur  83,  d'autres  132  sur  120  ;  un  petit  nombre  avait 
le  double  de  cette  dimension  ;  tontes  les  tablettes  étaient  liées  ensemble 
trois  par  trois  et  disposées  par  couches.  Sur  le  rebord  de  beaucoup  d'entre 
elles,  et  probablement  sur  toutes,  conune  un  nouvel  examen  le  fera  décou- 
vrir, se  trouve  le  mot  Prescrtpfû)  suivi  d'un  nom  quelquefois  au  génitif  et 
quelquefois  au  datif.  On  souleva  très-délicatement  un  des  paquets  de  la 
couche  supérieure  et  on  l'ouvrit  avec  soin.A  la  grande  joie  de  tous  ceux  qui 
assistaient  à  l'opération,  l'écriture  se  lisait  distinctement;  le  stylet,  en  péné- 
trant la  légère  couche  de  cire  qui  a  entièrement  disparu,  avait  gravé  la 
forme  des  caractères  sur  le  bois  tendre  qui  se  trouvait  au-dessous.  On  lut  les 
mots  suivants  : 

Q.  Volasio  Satornino  P.  Cor 
aelio  Cos.  vin  K.  Jal. 
M.  Alleias  Garpai  scripsi  me 
aooepisse  ab  L.  Caeeilio 
Jneundo  H.  8.  Mcccxicvi 
ab  anctione  ma  snpsti 
pulatu  ejtts  (7) 
Actam  Pomp. 

Ce  qui  peut  se  traduire  ainsi  : 

«  Le  8  des  calendes  de  juillet,  Q.  Volnsins  et  P.  Cornélius  consuls,  moi 
AUéius  Carpus,  déclare  avoir  reçu  de  L.  Cœdlius  Jucundus  1386  sesterces, 
avec  l'accroissement  suivant  la  stipulation.  Fait  à  Pompéi.  » 

Cette  partie  du  contenu  ayant  ainsi  été  copiée  à  la  hâte,  les  tablettes 


—  169  — 

{tarent  refenoées,  ear  le  danger  de  destruction  de  la  totalité  était  si  inuni* 
nent,  qu'il  était  urgent  de  prendre  immédiatement  des  mesures  pour  le  con- 
jurer et  pour  transporter  sans  délai  tous  ces  documents  dans  un  lieu  plus  sûr. 
Quoique  ces  tablettes  ne  fussent  pas  dans  la  condition  absolument  irrémé- 
diable de  la  boita  qui  les  avait  protégés  pendant  4800  ans  contre  les  débris 
environnants  et  contre  la  moisissure  qui  l'avait  traversée,  elles  indiquaient 
par  des  signes  certains  qu'il  faudrait  bien  peu  de  chose  pour  les  mettre  en 
pièces,  sinon  pour  les  réduire  en  poussière. 

Non-seulement  les  tablettes  supérieures  commençaient  à  se  déjeter  et  à  se 
fendre  parl'eSét  de  la  chaleur  qui  était  excessive  (le  thermomètre  marquait 
36  degrés),  mais  dans  la  masse  elle-même,  on  entendait  un  son  aigu  comme 
celui  du  charbon  à  demi  allumé  sur  lequel  on  soufQe,  et  ce  son  augmentait 
graduellement. 

Pour  éviter  les  effets  de  la  chaleur,  on  mouilla  des  linges,  dont  on  entoura 
les  reste  de  la  boite  et  son  contenu.  Mais  alors  vint  la  question  :  Gomment 
les  emporter?  Essayer  de  soulever  le  tout  hardiment,  était  évidemment  im- 
praticable ;  car  le  moindre  choc,  la  moindre  pression  sur  un  point  quelcon- 
que menaçait  de  tout  briser.  Dans  cette  difficulté,  comme  il  était  clair  qu'il 
fallait  sacrifier  la  boite  pour  en  tirer  le  contenu,  infiniment  plus  pré- 
cieux qu'elle,  M.  Fiorelli  pensa  qu'il  fallait  enlever  les  tablettes,  couche  par 
couche,  en  faisant  passer  sous  chacune  d'elles  une  plaque  d'étain  égale  en 
superficie  à  la  tablette. 

On  procéda  ainsi,  et  chaque  couche  fut  déposée  avec  un  plein  succès  entre 
des  linges  humides  sur  la  couche  précédente.  Le  soleil  se  couchait  après 
une  brûlante  journée  quand  on  enleva  la  dernière  couche  ;  on  attacha  des 
cordes  au  plateau  sur  lequel  les  tablettes  avaient  été  posées,  et  douze 
hommes  les  portèrent  sans  secousse,  de  Pompéi  jusqu'à  Naples,  à  douze 
milles  de  là,  et  les  déposèrent  dans  les  salles  voisines  de  la  collection  des 
papyrus  du  musée. 

C'est  dans  cette  pièce,  tenue  aussi  sombre  que  possible,  que  l'on  procède 
maintenant  à  l'examen  des  tablettes.  On  les  place  avec  soin  l'une  après 
l'autre  sur  des  cartons,  avec  lesquels  on  évite  les  dangers  de  dilatation  ou 
de  retrait  que  les  changements  de  température  feraient  subir  à  du  verre 
ou  à  du  bois.  On  fait  des  fac-similé  très-exacts  de  chaque  tablette,  et 
aussitôt  qu'ils  sont  terminés,  ils  sont  examinés  par  les  personnes  les  plus 
compétentes  et  comparés  à  l'original,  afin  d'assurer  la  plus  scrupuleuse 
exactitude. 

Gomme  nous  l'avons  dit,  ces  tablettes  sont  attachées  trois  par  trois,  comme 
des  triptyques.  Sur  le  côté  de  chacune  d'elles  il  y  a  deux  trous,  par  lesquels 
passaient  des  cordes  dont  on  voit  beaucoup  de  restes  et  qui  les  rattachaient 
l'une  à  l'autre.  On  remarque  qu'entre  elles  un  tissus  était  placé  pour  pro- 
téger la  cire.  La  surface  intérieure  de  chaque  tablette  avait  un  léger  filet 
pour  former  une  sorte  de  cadre  où  cette  cire  était  contenue.  On  se  fait  les 
plus  grandes  espérances  sur  la  masse  d'informations  que  peuvent  fournir  ces 
documents  relativement  à  la  vie  privée,  aux  usages,  aux  habitudes  des  habi- 
tants d'une  ville  italienne  à  cette  époque. 

Aucune  découverte  aussi  importante  n'a  été  faite  depuis  que,  en  1752,  on  a 
trouvé  à  Herculanum  les  célèbres  papyrus.  Mais,  tandis  que  ceux-ci,  après 
d'énormes  dépenses,  une  patience  et  un  talent  merveilleux  pour  les  déchif- 
frer, il  a  bien  fallu  le  reconnaître,  ne  contenaient  rien  que  des  fragments 
de  traités  philosophiques,  ces  tablettes,  immédiatement  lisibles,  offrent 
toutes  les  chances  d'augmenter  beaucoup  notre  savoir  sur  la  vie  de  chaque 
jour  au  commencement  de  l'ère  chrétienne. 


—  170  — 

En  déblayant  le  péristyle  delà  maison  où  la  découTorte  a  eu  Iten,  on  a 
trouvé  les  piliers  de  marbre  de  deux  hermès  et  une  tète  de  bronze  intacte» 
suivant  toute  apparence  un  portrait,  peuVêtre  du  propriétaire  même  de  la 
maison.  On  n*a  pas  trouvé,  jusqu*à  présent,  de  traces  de  nom,  mais  en  tête 
des  piliers  sont  inscrits  ces  mots  :  «  L.  Nostri.  Félix  L,  w     (Jbumai  o/]Mil.) 

SociÉerka  savantes.  —  L'Association  pour  l'encoura^ment  des  études 
grecques  en  France  vient  de  publier  l'annuaire  pour  4874.  On  y  remarque 
des  Lexiques  grées  inédits,  publiés  par  M.  Miller  ;  une  étude  sur  les  Géoponl- 
crues,  par  M.  le  président  de  Rajnal  ;  deux  lettres  inédites  de  l'empereur 
Michel  Ducas  ;  enfin  divers  articles  de  BOI.  Gidel,  G.  d'Eichtbal,  Dareste, 
B.  Ruelle,  etc.  Ace  volume  de  mémoires  philologiques  littéraires,  l'Associa- 
tion ijoute,  sous  le  titre  de  Momimenis  grecs,  une  livraison  in-4,  contenant 
des  mémoires  d'archéologie  et  des  planches  gravées  dans  le  but  de  propager 
le  goût  des  connaissances  archéologiques.  Les  deux  planches  de  la  livraison 
de  4874  contiennent  une  série  de  figurines  de  Tanagre,  servant  d'illustration 
au  mémoire  de  M.  Heuzey  sur  les  femmes  wiiées  et  une  peinture»  tirée  d'un 
vase,  représentant  l'enlèvement  d'Orythée  par  Borée  ;  le  mémoire  qui  explique 
œ  suget  est  de  M.  Georges  Perrot. 

—  La  Société  de  Saint- Jean  pour  l'encouragement  de  l'art  chrétien,  a 
publié,  depuis  le  commencement  de  l'année,  deux  numéros  de  son  BulMfn. 
Outre  les  procès-verbaux  et  les  actes  de  la  société,  ce  bulletin  contient  une 
série  de  Bapports  et  études  parmi  lesquels  nous  remarquons  :  VJcùnogrcipkte 
russe,  par  le  Père  Martinov;  — -  Les  fêtes  de  UUe.  VŒuore  deBotH,  par 
S.  Petit.  —  Le  Bôle  décoratif  de  la  peinture  en  mùsaique,  par  E.  Didron;  — 
VAccmHquedans  les  églises,  par  l'abbé  Besson  ;  —  Une  Bibliographie  des  arts 
très-étendue.  —  {Nota  :  Le  Bulletin  et  les  autres  publications  de  la  Société  de 
SaintnJean  sont  déposés  à  la  Librairie  de  la  Société  bibliographique.) 

—  La  Société  archéologique  et  historique  de  l'Orléanais,  dans  sa  séance 
du  23  avril  4875,  statuant  sur  le  classement  des  mémoires,  a  décerné  un 
premier  prix  ex  œquo  :  à  M*^*  de  F.  de  Yillaret,  ancienne  élève  de  Saint- 
Denis,  pour  son  mémoire  intitulé  :  L'Enseignement  des  belles-lettres  et  des 
sciences  dans  VOrléanais,  depuis  les  premiers  siédes  du  christianisme  jusqu'à  la 
fondation  de  Vuniversité;  el  à  M.  Dupré,  bibliothécaire  de  la  ville  de  Blois, 
correspondant  du  ministère  de  l'instruction  publique,  pour  son  mémoire 
intitulé  :  Étude  sur  les  institutions  municipales  de  Blois  ;  un  second  prix  ex 
cequo  :  à  M.  Guissard-Gaucheron,  professeur  à  Orléans,  pour  son  mémoire 
intitulé  :  L'École  de  Fleury -sur-Loire  et  son  influence  àlafndu  dixième  siècle; 
et  à  M.  A.  de  Salies,  d'Angers,  pour  son  mémoire  intitulé  :  Monographie  de 
Trôo  (Loir-et-Cher).  Une  mention  trés-honorahle  a  été  accordée  à  M.  Lucien 
Merlet,  archiviste  d'Eure-et-Loir,  pour  son  travail  intitulé  :  Catalogue  des 
auteurs  nés  dans  le  département  d^ Eure-et-Loir,  ou  y  ayant  résidé  et  y  ayant 
écrit.  Deux  mentions  honorables  ont  été  accordées  :  à  M.  Félix  Guillon, 
d'Orléans,  pour  son  travail  intitulé  :  Armoriai  historique  du  siège  â^ùrléanf 
en  4429;  et  à  M.  l'abbé  Maître,  curé  de  Goinces,  pour  son  travail  intitulé  : 
La  Maison  de  Bhis,  ses  origines,  ses  princ^les  alUances  et  quelques-uns  de  ses 
fiefs. 

Lectubes  faites  a  l'Acad£nie  des  insciuptions  et  bkllb^lettres.  —  Dans 
la  séance  du  2  juillet,  M.  Waddington  a  communiqué  à  l'académie  un  des- 
sin de  la  fresque  découverte  dans  les  catatombes  de  Sainte-Pétronille. 
M.  Emile  Bumouf  communique  également  des  dessins  représentant  des 
antiquités  et  concernant  les  fouilles  qu'il  a  exécutées  au  bastion  de  l'Odyssée. 
Cette  communication   provoque  une   discussion   à  laquelle  prenent  part 


—  171  — 

HM •  de  LoDgpérier,  Desnoyers,  Ernest  Deqardins,  Georges  Perroti  Maury  et 
Waddington.  -«  Dans  la  séanee  du  9,  M.  G.  Perrot  a  communiqué  un 
traTail  sur  une  inscription  grecque  trouvée  dans  les  ruines  de  Gyzique. 
M.  Léon  Renier  a  communiqué  une  inscription  grecque  trouvée  k  Soulou- 
Serai.  M.  Bergaigne  a  achevé  la  lecture  de  son  mémoire  sur  le  r61e 
mystique  des  nombres  dans  la  mythologie  védique.  —Dans  les  séances  du  9 
et  du  30y  il  a  été  donné  lecture  d'un  mémoire  de  H.  Bobiou,  sur  divers  points 
d'histoire  et  de  chronologie  relatifs  aux  empires  des  Assyriens  et  des  filèdes. 
—  Dans  la  séance  du  i6,  M.  de  Longpérier  a  fait  une  communication  sur 
un  vase  athénien  trouvé  à  Gyrénalque»  et  M.  Heuzey  sur  une  découverte 
&ite  par  lui  des  ruines  de  la  ville  d'Oricum  en  Epire.  —  Dans  les  séances 
du  16,  du  23  et  du  30,  M.  Ernest  Desijardins  a  lu  un  mémoire  de  H.  Charles 
Tissot,  consul  de  France  au  Maroc,  sur  la  géographie  comparée  de  Tancienne 
Mauritanie-Tingitane.  —  Dans  la  séance  du  23,  M,  de  Longpérier  a  achevé 
la  lecture  du  mémoire  de  SL  Ghabas  sur  les  poids  et  mesures  des  anciens 
Égyptiens,  et  M.  le  Dr  Gustave  Lagneau  a  commencé  la  lecture  d'un 
mémoire  sur  Tethnographie  des  Ligures,  et  Ta  continuée  dans  la  séance  du  30. 

LiCTUaiS  FATTES  A  Ii*AgADÉMIB  DBS  SCIKNCB8  MOBALIiB   ET  POUTIQUES.   —  DaUS 

la  séance  du  3  juillet,  M.  Louis  Reybaud  a  continué  la  lecture  de  son 
mémoire  sur  les  industries  du  fer  et  de  la  houille  dans  le  midi  de  la 
France.  M.  Zeller  a  continué  la  lecture  de  son  mémoire  sur  Tempereur 
Henri  IV  et  Hildebrand.  -^  Dans  la  séance  du  10,  M.  Nourrisson  a  lu  un 
mémoire  sur  les  Ëvolntionnistes  et  l'Évolution.  Dans  la  séance  du  i7, 
VL  Zeller  a  lu  un  nouveau  âagment  de  son  HisMre  cFAUemagnif  relatif  h 
la  querelle  des  investitures,  et  M.  le  docteur  Gustave  Lagnaau  a  lu  un 
mémoire  sur  l'iniluence  de  l'illégitimité  sur  la  mortalité.  —  Dans  la  séance 
du  24,  M.  le  secrétaire  perpétuel  a  commencé  la  lecture  d'un  mémoire  de 

M.  le  colonel  de  la  Barre-Duparcq  ayant  pour  titre  :  Henri  17  et  nos  fron- 
tières. —  Dans  la  séance  du  3 i,  St.  Drapeyron  a  commencé  la  lecture  d'un 
mémoire  intitulé  :  Essai  sur  le  caractère  de  la  lutte  de  V Aquitaine  et  de  VAus- 
trasie  sùus  les  Mérocingiens  et  les  Carolingiens, 

Impression  du  Gi;K)8SAiaB  de  Sainte-Palatb.  —  La  Cume  de  Sainte-Pdaye, 
né  à  Auxerre  en  1697,  mort  en  1781,  membre  de  l'Académie  des  inscriptions, 
en  1724,  et  de  l'Académie  française,  en  1758,  avait  consacré  la  plus  grande 
partie  de  sa  vie  à  réunir  et  à  classer  les  matériaux  d'un  glossaire  de  l'an- 
cienne  langue  fîrançaise,  depuis  son  origine  jusqu'au  siècle  de  Louis  XTV, 
sur  le  modèle  du  glossaire  de  Du  Gange.  Il  publia,  en  1756,  une  brochure 
in-4  de  32  pages,  où  il  exposait  le  plan  de  son  dictionnaire  et  en  donnait 
quelques  artides  comme  spécimen.  Gette  brochure  est  intitulée  :  Projet  d'un 
Glossaire  françois.  Un  laborieux  érudit,  Georges-Jean  Mouchet,  se  chargea  de 
mettre  l'ouvrage  au  jour.  Il  devait  comprendre  10  ou  12  volumes  in-folio. 
Mais  l'impression,  interrompue  par  la  Révolution  en  1792,  n'a  pas  été  con- 
duite au-delà  du  mot  assewretéy  colonne  1470,  ou  page  73^  du  tome  P'. 
Quelques  exemplaires  de  ce  fragment  ont  subsisté.  D'ailleurs  les  manuscrits 
de  Sainte-Palaye  n'ont  pas  été  perdus.  Il  en  existe  deux  du  glossaire,  l'un 
en  31  volumes  in-folio,  à  deux  colonnes  ;  l'autre,  plus  ample,  en  61  volumes 
in-4.  L'un  et  l'autre  appartiennent  au  département  des  manuscrits  de  la 
Bibliothèque  nationale,  où  les  travailleurs  ne  cessent  d'en  faire  leur  profit. 
Mais  le  texte  définitif,  comme  l'a  dit  la  BoTmmtki,  ne  devait  être  rédigé  qu'au 
fur  et  à  mesure  de  l'impression.  La  librairie  H.  Champion,  15,  quai  Mala- 
quais,  a  entrepris  la  publication  du  glossaire  de  Sainte-Palaye.  Cette 
publication  est  dirigée  par  M.  L.  Favre,  auteur  du  Glossaire  du  Foitou^  de 
la  Saintange  et  de  VAunis.  Le  Dictionnaire  historique  de  Vancien  langage 


—  i72  — 

framçois  formera  10  volumes  in*4,  chacun  d'environ  500  pages.  II  sera 
publié  en  100  fascicules  de  48  pages  in-4  à  deux  colonnes,  sur  papier  à 
bras.  Le  prix  du  fascicule  est  de  3  francs  pour  les  souscripteurs;  vingtrcinq 
exemplaires  numérotés  sont  tirés  sur  papier  de  Hollande,  au  prix  de 
5  francs;  deux  exemplaires  sur  papier  carré  peau  vélin,  au  prix  de  10  francs; 
1  exemplaire  seulement  sur  papier  de  Chine.  Les  prix  seront  augmentés 
après  la  clôture  de  la  souscription,  qui  aura  lieu  quand  dnq  cents  per- 
sonnes seront  inscrites.  La  liste  des  souscripteurs  sera  publiée  à  la  fin  du 
dernier  volume,  et  ils  recevront  gratuitement  un  fascicule  supplémentaire 
où  seront  indiqués  les  manuscrits  et  les  éditions  auxquels  La  Cume  de  Sainte- 
Palaye  a  emprunté  ses  citations.  —  Nous  avons  sous  les  yeux  les  neuf  pre- 
miers fascicules  publiés  par  la  librairie  Champion.  Quand  l'édition  sera 
plus  avancée,  nous  en  rendrons  compte  à  nos  lecteurs,  et  nous  appré- 
cierons l'importance  et  l'utilité  du  Gfossatre,  ainsi  que  les  notes  explicatives 
et  rectificatives  des  éditeurs.  Mab  nous  devons  prévenir  nos  lecteurs,  dès 
ai:gourd'hui,  que  les  progrès  des  études  philologiques,  de  la  lecture  et  de  la 
critique  des  textes  depuis  le  siècle  dernier,  ne  laissent  &  l'ouvrage  de  Sainte- 
Palaje  que  la  valeur  —  à  coup  sur  considérable  —  d'un  immense  recueil 
de  renseignements  et  de  matériaux  de  toute  espèce.  En  tant  que  diction- 
naire de  l'ancien  français,  l'œuvre  est  certainement  à  refaire.  — C'est  ce  qu'a 
entrepris  M.  Frédéric  Godefroy  dans  l'œuvre  nouvelle  qu'il  annonce,  sous  ce 
titre:  Bioftonnotre (ie  VandeMM  lan(fU€  ftimçaUe^dunewHéme 
composé  d'après  le  dépouillement  de  tous  les  plus  importants  documents 
manuscrits  ou  imprimés  qui  se  trouvent  dans  les  grandes  bibliothèques  de 
la  France  et  de  l'Europe,  et  dans  les  principales  archives  départementales, 
municipales,  hospitalières  ou  privées. 

Cours  historique  de  langue  française.  —  M.  Charles  Marty-Laveaux, 
membre  du  Comité  des  travaux  historiques  et  des  Sociétés  savantes  au 
Ministère  de  l'instruction  publique,  a  entrepris,  chez  l'éditeur  Alphonse 
Lemerre,  la  publication  d'un  Coun  historique  de  langue  française  en  une  série 
de  volumes  du  format  petit  in-12.  Ont  paru  les  ouvrages  ou  traités  suivants  : 
De  renseignement  de  notre  langue  (papier  teinté.  Prix  :  1  fr.);  —  Grammaire 
élémentaire  (papier  teinté,  2  francs,  édition  classique,  0  fr.  75  c);  — Gramtnaire 
historique  (papier  teinté,  3  francs,  édition  classique,  1  fr.  50).  —  Nous  avons 
lu  ce  dernier  ouvrage  et  nous  croyons  pouvoir  le  recommander  comme  livre 
d'éducation.  Les  découvertes  de  la  philologie  moderne  y  sont  appropriées 
dans  une  sage  mesure  à  l'enseignement  de  la  grammaire  française,  qui 
attend  depuis  longtemps  une  réforme  indispensable.  M.  Marty-Laveaux, 
sans  rompre  trop  brusquement  avec  des  habitudes  que  l'on  ne  changera 
utilement  que  par  des  améliorations  graduées,  a  su  introduire,  d'une  façon 
claire,  simple  et  presque  toi:^^^^  exacte,  l'explication  historique  des  règles 
granmiaticales  et  de  leurs  exceptions  au  lieu  des  explications  arbitraires  et 
parfois  fantastiques  que  nous  avons  reçues  dans  notre  enfance,  et  qui  pré- 
valent encore  dans  l'enseignement  de  notre  langue.  On  peut  noter  pourtant 
conmie  une  innovation  assez  hardie  dans  un  livre  à  l'usage  des  classes,  la 
réduction  à  huit  des  fameuses  dix  por^s  du  discours. 

L'article  est  placé  au  nombre  des  adjectifs,  sous  le  nom  d'adjectif  déter- 
minatif,  et  le  participe  est  rattaché  au  verbe  dont  il  n'est,  dit  l'auteur,  qu'un 
simple  mode.  Ces  deux  innovations  et  surtout  la  seconde  ont  été,  ce  semble, 
dictées  à  l'auteur  par  des  considérations  logiques  de  granmiaire  générale 
plutôt  que  par  des  raisons  tirées  de  l'histoire.  Elles  heurtent  assez  rudement 
nos  vieilles  habitudes,  ménagées  au  contraire  avec  une  prudence  dont  nous  ne 


—  173  — 

nous  plaignons  pas,  mais  que  plusieurs  jugeront  sans  doute  excessive,  pour 
ce  qui  est  des  quatre  conjugaisons  entre  lesqueUes  on  a  coutume  de  distri- 
buer les  Terbes  français,  et  dont  Tordre,  tout  au  moins,  parait  à  remanier, 
si  Ton  se  reporte  aux  coiyugaisons  latines  d'où  les  nôtres  sont  issues.  Quoi 
qu'il  en  soit,  la  petite  Grammaire  hùioriqtie  de  M.  Marty-Laveaux  nous  semble, 
en  somme,  excellente  et  surtout  pratique.  -—  Son  cours  de  langue  fran- 
çaise doit  comprendre  encore  les  traités  suivants  :  Prononciation,  —  Ortho^ 
graphe.  —  Poncttiolton.  —  Origine  et  formation  de  la  langue  française.  —  La 
langue  française  au  seizième  siècle^  —  au  dix-septiémef  —  au  dix-^tiémef  — 
au  dùMieuviéme  siècles.  —  Principes  d'étymologie.  —  Noms  de  lieux  et  noms  de 
personnes.  —  Dialectes  et  patois.  —  Langage  populaire  et  proverbial.  —  Lan- 
gage  des  Précieuses.  —  Langage  de  la  Bévolution.  M.  S. 

Dbs  mesures  en  dsagb  au  moten  AGE.  —  Quaud  on  étudie  dans  ses  sources 
rbistoire  du  moyen  âge,  on  est  souvent  arrêté  par  des  difficultés  qui,  sans 
être  insurmontfld)les,  exigent,  pour  être  vaincues,  de  longues  digressions 
dans  le  travail  et  des  pertes  de  temps  considérables.  Bien  souvent,  par 
exemple,  on  comprend  et  on  peut  traduire  très-intelligemment  un  texte  au 
point  de  vue  de  la  lettre,  sans  en  saisir  nullement  Tesprit  et  la  portée.  Les 
termes  de  longueur,  de  distance,  de  poids,  de  mesure,  de  valeurs  employés 
autrefois  ne  se  réfèrent  nullement  aux  nôtres,  et  différaient  tous  entre  eux 
non-seulement  de  province  à  province,  mais  de  village  à  village.  Ces  termes, 
faute  d'étalon  et  de  tables  de  comparaison,  perdent  donc  souvent,  pour  le 
lecteur,  toute  signification.  On  comprend  maintenant  l'intérêt  qu'offrent  des 
tables  comparatives.  M.  Nat.  de  Wailly  a  fait  ce  travail  pour  établir  la  valeur 
de  l'argent  aux  différentes  époques  du  moyen  âge.  Les  poids  et  mesures  ne 
sont  pas  moins  utiles  à  connaître  et,  sans  cette  connaissance,  toute  étude 
sur  l'économie  politique  et  agricole  de  l'ancienne  France  serait  impossible. 
M.  Delisle  a  traité  la  question  d'une  manière  définitive  pour  la  Normandie 
{Etude  sur  la  condition  de  la  classe  agricole  en  Normandie)\  MM.  E.  de  l'Epinois 
etMerlet  pour  la  Beauce  (Cariulaire  de  Noire-Dame  de  Chartres).  Sur  la  Cham- 
pagne et  la  Brie,  M.  Bourquelot  a  réuni  de  nombreux  documents  {Foires  de 
Champagne^  2*  partie).  M.  Boutaric  a  publié  un  tableau  des  poids  et  mesures 
usités  en  France  au  quatorzième  siècle  (Bewie  des  Sociétés  saoanteSf  1^'  semestre 
1860,  p.  317).  Ce  travail  avait  déjà  vu  le  jour  dans  le  Glossaire  de  Du  Cange. 
C'est  le  tableau  officiel  des  principales  mesures  du  nord  de  la  France  rame- 
nées à  la  mesure  de  Paris.  M.  de  Yillefosse  vient  de  compléter  et  de  rectifier, 
sur  certains  points,  le  travail  de  M.  Bourquelot  {Des  mesures  en  usage  en  Brie, 
aux  treizième  et  quatorzième  siécleSj  par  Ant.  Héron  de  Yillefosse.  Paris,  à  la 
Société  française  de  Numismatique,  in-4  de  23  p.).  Tous  les  amis  de  notre 
histoire  lui  sauront  gré  de  ces  patientes  et  si  utiles  recherches.      L.  C. 

Les  clubs  philologiques  en  Italie.  —  C'est  d'un  journal  américain,  le 
Chicago  Tribune^  que  nous  tenons  d'intéressants  renseignements  sur  les 
sociétés  ou  clubs  philologiques  établis  en  lialie  pour  favoriser  l'étude  des 
langues  modernes  et  en  répandre  le  goût.  C'est  de  Turin  que  serait  partie 
cette  idée  qui  a  été  ensuite  adoptée  à  Milan,  à  Florence,  à  Gênes,  à  Livourne, 
â  Rome,  à  Ancône,  à  Alexandrie,  à  Pise.  La  première  société  avait  pris  pour 
base  de  ses  études  le  français,  l'anglais  et  l'allemand,  sans  exclure  l'espa- 
gnol, le  hongrois,  le  grec  et  l'arabe.  Quelques-unes  de  ces  sociétés  ne  sont 
guères  que  des  écoles,  qui  vont  quelquefois  jusqu'aux  cours  de  philologie 
comparée  et  de  sténographie.  Depuis  1870,  des  cours  ont  été  créés,  pour  les 
fenunes.  Mais  ce  qui  fait  le  côté  original  de  cette  création,  c'est  qu'il  ne 
s*agit  pas  seulement  ici  de  cours  où  l'on  apprend  les  langues  étrangères, 


—  174  — 

mais  de  sociétés  où  l'on  se  rétinit,  comme  dans  les  clubs  ordinaires,  potir  la 
conversation  et  pour  l'agrément  des  relations  sodales.  Aussi  les  salles  du 
clnb  sont-elles  exclusiTement  réservées  aux  femmes,  pendant  quatre  heures 
de  Faprès-midi.  Des  bibliothèques  sont  un  accessoire  nécessaire  de  ces 
sociétés  :  on  j  trouve  les  revues,  les  magazines,  les  journaux  des  différents 
pays.  Au  Ctrcolo  de  Florence,  par  exemple,  on  ne  reçoit  pas  moins  de 
soixante  dix  revues  et  magazines,  sans  compter  trente-trois  journaux  étran- 
gers et  italiens.  On  admet  ord&nairement  les  étrangers  de  passage,  qui 
peuvent  jouir  des  bénéfices  du  club  pendant  un  mois. 

Les  Français  a  l'étranger.  —  Les  revues  italiennes  ont  une  très-bonne 
coutume.  Sous  le  titre  Italiani  altesterOf  elles  Indiquent  les  articles  publiés  & 
l'étranger  sur  les  œuvres  de  leurs  compatriotes.  Nous  voulons  essayer  de 
suivre  cet  exempJe^  mais  toutefois  en  indiquant  seulement  les  livres  d'une 
certaine  valeur  dont  nos  voisins  ont  pu  s'occuper.  — Dn  des  écrivains  les  plus 
èminents  de  l'Italie,  M.  Comparetti,  l'auteur  du  magnifique  ouvrage  Vvrgilio 
ml  medio  evo,  a,  dans  le  numéro  de  juillet  de  la  Jfuova  antologia  de  Florence, 
consacré  un  article  de  douze  pages  à  la  Ccur  littéraire  de  don  Juan  II,  de 
notre  collaborateur  le  comte  de  Puymaîgre.  Le  môme  ouvrage  avait  déjà  été, 
à  l'étranger,  le  sujet  d'un  article  de  don  Manuel  Bfilà  y  Fontanals  dans  le 
Diario  deBareelomf  d'une  analyse  de  M.  Liebrecht  dans  les  QœtHngische 
gelehrte  Araeigen,  à'xxn  compte  rendu  dans  la  Atvistaeiiropea,  et  d'une  apprécia- 
tion de  M.  Pitre,  dans  lesNuoveEfPemeridi  sieiliane.  Les  livres  français  impor- 
tants dont  il  est  parlé  dans  la  dernière  livraison  de  la  Attrista  ewropea  sur.t  - 
Etudes  slaves,  par  L.  Léger.  ^—  Aide  Manuel  et  f^eUëntsme,  par  Ambroise  Fir- 
min  Didot.  —  Correspondance  de  LomorttfM,  tome  VI.  —  Le  lendemain  de  la 
Mort,  par  L.  Figuier.  Outre  ces  notices  bibliographiques,  M.  Houx  s'occupe, 
dans  un  article  spécial,  de  VHistoire  des  insHtiUions  politiquss  de  Vancienne 
France,  de  M.  Fustel  de  Coulanges,  de  Saint-Louis  et  de  son  temps  de  M.  Wal- 
lon, de  l'Histoire  de  Pramx  de  Guizot,  de  la  Vie  de  M.  Duckatel  par  Yitet,  de 
VHistoire  du  Gowoemement  de  la  Défense  nationale  de  M.  J.  Favre.  —  La  Bivisia 
historioa  latina  contient  une  note  sur  r Avènement  des  Bourbons  au  trône  d^Es- 
pagne,  par  M.  Gh.  Hippeau.  —  Le  Ùiario  de  Barcelona,  un  article  de  M.  Milà  y 
Fontanals,  sur  le  travail  de  M.  Morel  Fatio:  Le  Livre  d^ Alexandre. —  Il  est  parlé 
des  Souvenirs  du  pays  de  sainte  Thérèse  de  M.  l'abbé  Plasse,  des  Conférences 
de  Notre-Dame  àvL  Père  Matignon,  dans  le  T^^  Month  and  eatholic  review;  de 
tBistoire  du  ùostume  en  France  de  M.  Quicherat,  de  VHietoire  de  France  dé 
Guizot,  dans  The  Atlantic  MontMy;  des  Ortgnes  de  la  famille  par  M.  Giraud- 
Teulon,  dans  la  Bibliothèque  untoerstile  de  Genève. 

Unb  biographib  de  Hanin.  —  Le  directeur  de  VArchivio  veneto.  M»  R.  Fulin, 
a  fait  tirer  à  part  un  travail  fort  intéressant,  publié  par  lui  dans  cette  excel- 
lente revue,  sous  ce  titre  :  Venezia  e  Daniele  Manin  (1  vol.  iurS  de  227  p.).  Ce 
travail  se  compose  de  deux  parties;  à  l'étude,  dans  laquelle  Manin  occupe 
une  si  grande  et  si  glorieuse  place,  succèdent  de  nombreux  documents  des- 
tinés à  éclairdr  les  faits.  Écrit  avec  beaucoup  d'impartialité  et  dans  un  beau 
style,  ce  remarquable  épisode  est  une  page  fort  émouvante  de  l'histoire  cou. 
temporaine,  et  tous  ceux  qui  songent  à  la  situation  que  l'Allemagne  a  faite 
à  deux  de  nos  anciennes  provinces  éprouveront  une  vive  sympathie  pour  le 
patriote  vénitien.  M.  Fulin  a  tracé,  de  cet  homme  illustre,  un  portrait  dont 
nous  voulons  mettre  quelques  lignes  sous  les  yeux  de  nos  lecteurs. 

«  Venise  et  Manin  sont  jugés  ensemble,  parce  que,  dans  cette  période  de 
temps,  Daniel  Manin  fint  le  cœur  et  l'Âme  de  Venise.  Qui  n'a  pas  vu  la  place 
couverte  d*un  peuple  tumultueux  se  calmant  à  l'aspect  seul  de  Manin,  prenant 


—  175  — 

dans  sa  parole  le  courage  de  sacrifices  sublimes;  qui  n'a  pas  vu  la  foale,  à  an 
signe  de  lui»  se  séparer  pour  courir  à  la  défense  de  la  patrie  redeyenue  libre  ; 
qui  n*apas  assisté  à  un  tel  spectade  ne  peut  s'imaginer  quelle  fiiscination  cet 
honome  exerçait,  et  jusqu'à  quel  point  le  peuple  de  Venise  avait  mis  en  lui  son 
orgueil  et  sa  confiance.  J'ai  entendu  dire  plus  d'une  fois  que  Manin  fut  un  tri- 
bun. Gela  ne  me  parait  pas  vrai.  Le  tribun  suscite  les  passions,  il  ne  les  gouverne 
pas,  il  ne  les  réforme  pas«  Manin  n'excita  jamais»  ne  flatta  jamais,  ne  toléra 
jamais  les  passions  aveugles  qui,  tant  de  fois,  surgissent  dans  ks  grandes 
commotions  populaires,  et  qui,  trop  souvent»  les  souillent,  n  ne  supprima  ni 
la  liberté  de  la  presse,  ni  la  liberté  de  la  parole  ;  mais,  par  de  promptes  et 
énergiques  mesures,  il  empécba  Tune  et  l'autre  de  devenir  des  instruments 
de  trouble  et  de  discorde.  De  ces  mesures,  il  fut  àprement  blâmé,  mais  non 
par  le  peuple,  qui  savait  bien  avoir  en  lui  le  plus  vrai  de  ses  amis.  «  Véni- 
«  tiens,  je  sais  que  vous  m'aimez,  avait  dit  Manin,  le  22  mars,  et  au  nom  de 
«  cet  amour,  je  vous  demande  de  vous  conduire  comme  des  bomjnes  dignes 
«  d'être  libres.  »  Ces  paroles  sont  un  programme.  Tous  les  plus  nobles  senti- 
ments et  le  premier  et  le  plus  efficace  de  tous,  le  sentiment  religpieux,  furent 
invoqués  pour  soutenir  cet  amour  de  la  patrie  qui  exigeait  des  citoyens  tant 
de  grands  et  journaliers  sacrifices.  Si  cas  sentiments  n'avaient  pas  soutenu 
la  masse  du  peuple,  Venise  n'aurait  pas  donné  le  mémorable  spectade  d'une 
résistance  sans  exemple  et  sans  tache.  » 

En  note,  M.  Fulin  rapporte  un  fait  qui  prouve  la  foi  de  Manin.  U  chargea 
Castellani  de  se  rendre  à  Gaéte  :  a  Vous  présenterez  au  Souverain  PonUife, 
lui  dit-il,  les  respectueux  hèmiiiages  de  notre  dté  qui,  au  milieu  de  ces 
temps  difficiles^  a  conservé  et  conserve  immaculée  la  religion  de  ses  péroa, 
et  avec  de  fréquentes  prières  publiquesi  se  raifermit  dans  son  héroïque 
résistance  et  accomplit  de  magnanimes  sacrifices.  Implorez  du  Saint  Père  une 
bénédiction  pour  Venise,  et  reconmiandez  lui  notre  existence  politique.  >» 

Th.  p. 

Fh-£S  UTTÉaAiBJSd  DE  MoNTPiLLUXB.  —  Nous  aurious  voulu  parler  plus  t6t 
d^une  solennité  littéraire  qui  a  eu  lieu  au  mois  de  mars,  à  Montpellier,  et 
sur  laquelle  nous  lisons  un  intéressant  artide  du  si  respectable  et  savant 
Milà  7  Pontanals,  dans  le  Dtarû)  de  Barcelone^  du  5  juin.  M.  BIilà«  qui  aassbté 
à  cette  fête,  commence  par  rappeler  quels  liens  ont  jadis  rattaché  Montpel- 
lier À  l'Espagne.  G'est  à  MontpeÛier  que  naquit  un  diea  plus  grands  rois  de 
l'Aragon,  et  le  dialecte  qu'on  parle  dans  cette  ville  semble  un  û'ère  de  celui 
qui  est  usité  en  Catalogne.  Le  réveil  poétique  du  midi  de  la  France  a 
rappelé  les  souvenirs  d'une  amitié  oubliée,  et  a  provoqué  en  même  temps  de 
sérieux  travaux.  Montpellier  est  devenu  le  centre  d'une  société  ayant  pour 
objet  l'étude  des  langues  romanes  et  le  lieu  de  publication  d'une  impor- 
tante A6Vtt«.  Parmi  les  fondateurs  de  cette  assodation,  qui  furent  au  nombre 
de  cinq  seulement,  nous  trouvons  un  des  membres  de  la  Société  bibliogra- 
phique, M.  le  baron  de  Tourtoulon,  dont  la  belle  BisMrè  de  Jacquet  P^  n'a 
pas  besoin,  dit  M.  Milà,  d'être  vantée  aux  lecteurs  du  THario,  M.  Mîlà  termine 
ainsi  son  article  :  «  Tous  ceux  qui  ont  eu  le  plaisir  et  l'honneur  d'assister  à 
cette  solennité  littéraire  en  conserveront  un  charmant  souvenir,  grâce  au 
plus  cordial  accueil,  aux  soins  les  plus  empressés,  à  des  conversations  aussi 
affectueuses  qu'instructives,  animées  par  un  enthousiasme  littéraire  commun, 
et  embellies  par  des  chants  anciens  et  nouveaux.  On  a  prononcé  là  d'excel- 
lents discours  et  porté  des  santés  inspirées,  à  la  fois,  par  l'amour  des  études 
philologiques  et  des  bonnes  traditions,  et  par  un  esprit  provindal  très-vif« 
mais  ne  tombant  pas  dans  les  exagérations.  De  deux  points  opposés,  tous 
deux  hors  de  France,  sans  que  cela  eût  été  concerté,  sans  que  cela  lût  prévu, 


on  reçut  deux  télégrammes  qui  acclamaient  la  fraternité  des  nations  latines  : 
démonstration  très-significative,  non  d*une  idolâtrie  ethnographique,  cause 
de  tant  de  maux,  mais  d'union  contre  une  nouvelle  et  tyrannique  prépon- 
dérance. » 

Un  portrait  de  Jeanne  d'Arc.  —  Il  s*est,  depuis  quelque  temps,  produit  & 
Paris  un  grand  émoi  dans  le  monde  qui  s'occupe  d'histoire  et  d'ardiéologie, 
et  cette  émotion  est  parfaitement  justifiée,  comme  on  va  le  voir.  Il  y  a  une 
trentaine  d'années,  M.  Auvray,  expert  et  marchand  de  tableaux  bien  connu, 
dont  le  magasin  est  sous  le  péristyle  du  Palais-Royal,  acheta  à  Orléans, 
d'une  personne  qui  vit  encore,  un  petit  tableau  fort  sale,  fort  noir,  qu'il 
paya  un  très-bas  prix  et  oublia  dans  son  grenier,  au  milieu  de  débris  de 
toutes  sortes.  U  y  a  quelques  mois,  un  ami  de  M.  Auvray  était  en  quête  de 
vieilles  peintures  pour  compléter  un  ameublement  ancien,  M.  Auvray  se 
rappela  tout  à  coup  le  tableau  acheté  jadis,  et  le  retrouva —  il  est  sur  bois  — 
en  deux  morceaux.  U  se  mit  à  le  nettoyer,  et  vit  apparaître  successivement, 
d'abord  dans  la  partie  supérieure  de  la  peinture,  et  ensuite  au  bas,  le  nom 
de  Jeanne  d'Arc.  Bientôt  ce  fut  la  bonne  Lorraine  elle-même  qui  se  dégagea 
de  la  croûte  noirâtre.  Elle  est  debout,  à  la  gauche  d'une  vierge  qui  occupe  le 
milieu  du  tableau,  et  qui,  à  sa  droite,  a  saint  Michel.  Jeanne  d'Arc  est  vêtue 
d'un  hoqueton  rouge,  sur  la  ceinture  dorée  duquel  on  peut  lire  encore  son 
nom.  Sa  main  gauche  s'appuie  sur  un  bouclier  portant  les  armoiries  que  lui 
donna  Charles  VII  ;  sa  main  droite  tient  la  bannière  bien  connue.  Elle  porte 
un  heaume,  derrière  lequel  paridt  s'aiTondir  une  auréole,  mais  ce  pourrait 
bien  être  un  lambrequin  ou  volet.  La  figure  de  la  Pucelle  est  restée  assez 
obscure  ;  cependant  on  distingue  parfaitement  bien  un  nez  droit  et  bien  formé 
et  une  bouche  indiquant  la  fermeté;  l'œil  gauche  semble  loucher.  Ce  tableau 
si  curieux  a  été  examiné  par  les  honounes  les  plus  compétents;  il  ne  reste 
aucun  doute,  ni  sur  l'époque  de  cette  peinture,  ni  sur  le  personnage  qu'elle 
représente,  et  l'intérêt  que  cause  ce  tableau  est  d'autant  plus  grand  qu'avant 
cette  trouvaille  on  ne  possédait  aucun  portrait  de  la  Pucelle  offrant  des 
caractères  d'authenticité.  Un  des  érudits,  consultés  à  propos  de  cette  décou- 
verte, pense  que  cette  œuvre  pourrait  être  celle  d'un  peintre  écossais, 
Power,  qui  peignit  l'étendard  de  la  Pucelle,  laquelle  l'avait  pris  en  amitié 
et  fit  marier  ses  filles.  Cette  peinture  semble  être  un  ex-voto  destiné  à  rap- 
peler la  délivrance  d'Orléans.  Peut-être  y  aurait-il  sur  sa  date  une  induction  à 
tirer  des  armoiries  qu'on  y  voit;  elles  furent  accordées  à  Jeanne  le 
2  juin  1429.  Le  tableau  ne  peut  donc  être  antérieur  à  cette  époque. 

L'Émaillerie  chez  les  Gaulois.  —  On  sait  depuis  longtemps  que,  deux 
siècles  après  la  conquête  romaine,  des  émaux  Champlevés  étaient  fabriqués 
par  les  populations  qui  habitaient  le  sol  de  la  Gaule.  Le  hasard  des  trou- 
vailles rapproché  du  texte  d'un  auteur  du  troisième  siècle  de  notre  ère  avaient 
fait  jusqu'à  présent  considérer  les  ateliers  de  cette  fabrication  comme  exclu- 
sivement fixés  sur  les  bords  de  l'Océan.  Les  fouilles  pratiquées  avec  tant 
d'intelligence  et  de  persévérance  par  M.  Bulliot  sur  le  mont  Beuvray,  près 
d'Autun,  c'est-à-dire  sur  l'emplacement  de  l'ancienne  Bibracte,  ont  amené 
une  découverte  véritablement  importante  pour  l'histoire  de  l'industrie  gau- 
loise. Désormais,  la  fameuse  phrase  de  Philostratc  ne  doit  pas  s'appliquer 
seulement  aux  bords  de  l'Océan,  mais  à  la  Gaule  entière,  et  l'existence  de 
l'émaillerie  doit  y  être  reculée  de  plus  de  deux  cents  ans.  Au  cœur  du 
département  de  Saône-et-Loire,  M.  Bulliot  a  mis  au  jour  plusieurs  ateliers 
d'émailleurs  encore  garnis  de  tous  leurs  ustensiles.  Émaux,  objets  émaillés, 
instruments  exhumés,  tout  cela  à  une  date  certaine.   Un  jeune  chimiste, 


—  177  — 

• 

M.  de  Fontenay,  a  analysé  et  expéiimenté  rémail  découTert,  et  il  explique, 
après  les  avoir  reproduits,  les  procédés  de  fabrication.  Les  auteurs  de  la 
brochure  qui  a  paru  sous  ce  titre  :  VArt  de  VEimaUlme  chez  les  Êduens  avant 
Tëre  cArëMeime,  par  J.-G.  BuUiot  et  Henry  de  Fontenay  (Parb,  Champion, 
1875,  in-8  de  44  p.  et  9  planches),  concluent  ainsi  :  «  L'émaillerie  était  pra- 
tiquée dans  la  Gaule  antérieurement  À  Tère  chrétienne,  et  les  Romains,  lors 
de  la  conquête,  trouTèrent  cette  industrie  florissante  dans  le  pays  des 
Edoens.  »  L.  C. 

L'Histoire  de  César  de  Napoléon  Ui  et  M.  Plon.  —  Le  18  décembre  1864, 
intervenait  entre  M.  Anselme  Petetin,  agissant  au  nom  privé  de  Tempereur, 
et  sous  le  régime  du  droit  commun,  et  M.  Pion,  éditeur,  un  traité  aux  ter- 
mes duquel  M.  Pion  se  réservait,  sous  certaines  conditions,  le  droit  d'éditer 
et  de  mettre  en  vente  VHisMre  de  Jules-César,  par  Napoléon  UI.  L'article  il 
de  ce  traité  est  ainsi  conçu  :  (c  Si,  à  un  moment  quelconque,  l'auteur  jugeait 
devoir  ou  arrêter  la  vente  ou  reprendre  son  droit  direct  de  publication,  il  le 
pourrait  toigours,  en  remboursant  à  M.  Pion  le  montant  de  ses  dépenses  sur 
les  exemplaires  restant  entre  ses  mains,  sur  le  pied,  savoir:  de  5  francs  par 
volume,  pour  l'édition  A  ;  9  francs  par  volume,  pour  l'édition  B;  2  francs  par 
volume,  pour  l'édition  C.  Il  est  entendu  que  sur  les  exemplaires  rendus 
par  M.  Pion,  en  vertu  de  cet  article,  il  ne  devrait  point  de  droit  d'auteur.  » 

Or,  la  publication  de  YEisUnre  de  César  a  été  interrompue  par  les  événe- 
ments que  l'on  sait.  La  veuve  Pion  et  les  héritiers  de  la  succession.  Pion  ont 
soutenu,  par  l'organe  de  M*  AUou,  qu'il  y  avait  lieu  d'appliquer  l'article  il» 
du  traité  qu'on  vient  de  lire.  M*  Busson-Billault,  avocat  des  héritiers  de  l'em- 
pereur, s'expliqnant  sur  les  causes  de  l'interruption  de  la  publication,  a  répli- 
qué que  l'empereur  avait  fait  totgours  preuve  du  désir  et  de  la  volonté  de 
terminer  son  œuvre,  et  que,  seuls,  des  événements,  qui  ont  le  caractère  de  la 
force  majeure,  l'ont  mis  dans  l'impossibilité  de  continuer  ses  travaux,  ce  Ainsi» 
Messieurs,  a-t-il  dit  en  terminant,  il  n'y  a  eu,  en  droit,  mise  en  demeure  ni 
directe,  ni  indirecte  ;  il  y  a  eu,  au  plus  haut  degré,  force  miyeure^  par  la 
saisie  et  la  destruction  des  papiers  de  l'empereur,  qui  ont  mis  obstacle  à  ce 
que  l'œuvre  puisse  être  achevée.  Enfin,  sa  mort  si  douloureuse  est  venue 
rendre  l'achèvement  de  cette  œuvre  absolument  impossible.  A  tous  les  points 
de  vue,  donc,  la  demande  de  H.  Pion  doit  être  repoussée.  » 

Après  avoir  consacré  à  cette  affaire  les  audiences  des  21»  28  juillet  et 
4  août,  la  première  chambre  du  tribunal  civil  de  la  Seine,  présidée  par 
M.  Aubépin,  a,  sur  les  conclusions  conformes  ie  M.  le  substitut  Laval,  rendu 
un  jugement  par  lequel  il  déclare  la  veuve  et  les  héritiers  Pion  non  receva- 
blés  dans  la  demande  par  eux  formée  contre  les  membres  de  la  commission 
de  liquidation  de  la  liste  civile  et  du  domaine  privé  de  l'empereur  Napoléon  m, 
et  les  en  déboute. •  Ch.  L. 

Collections  de  timbres-poste.  —  Le  goût  de  collectionner  des  timbres^ 
poste  n'est  pas  prêt  de' s'éteindre.  Tke  Nation  de  New  York  nous  apprend 
qu'un  habitant  de  Saint-Louis  (Etats-Unis)  vient  de  faire  paraître,  soas  le 
titre  de  Pkaatelieal  Library^  un  catalogue  de  toutes  les  publications  parues 
sur  les  timbres-poste  (Siamp).  L'auteur  est,  depuis  une  quinzaine  d'annéeSi 
un  ardent  collectionneur,  et  il  possède  la  plupart  des  ouvrages  qui 
figurent  dans  son  catalogue.  Dans  cette  liste,  c'est  l'Amérique  qui  tient 
la  corde,  avec  211  ouvrages  sur  les  timbres-poste  ;  l'Angleterre  vient 
inunédiatement  après,  180  publications;  l'Allemagne  ensuite,  102;  puis  la 
France,  la  Hollande,  l'Italie,  l'Espagne,  le  Danemark.  L'ouvrage  contient 

Août  1875.  T.  XIV,  12. 


—  178  — 

•nsaitt  un  aperça  des  prix,  où  figure  même  le  maiebé  nissa.  La  partie  qui 
B*est  pas  la  moins  intéressante,  igoute-t-on,  est  celle  qui  énumèro  les  artieles 
pnbliés  sur  les  collectionneurs  de  timbres,  sur  Thistoire  des  timbres  eux- 
mêmes,  sur  la  réforme  postale,  le  post-ofRce,  ete.  Puis  vient  une  liste  des 
périodiques  et  des  guides  consacrés  aux  postes;  des  jeux  à  Taide  de  timbrer- 
poste;  des  morceaux  de  musique  inspirés  par  cette  invention,  et  des  photo* 
graphies  auxquelles  elle  a  donné  lieu.  Le  chapitre  des  altérations,  des  falsi- 
fications est  curieux;  il  porte  ce  titre  :  «  Description  de  près  de  sept  cents 
falsifications  (fwgmes)  de  timbres. 

hZ  Là  VULOAaiSATION  MS  OORNAISSàlfCBS   «AOGBAPBIQDBS.    —  SoUS   GO    titre  : 

Dm  meUliun  moyens  de  vulgoaùer  lût  oonnaia$anoes  géographiques  (Lyon,  Secré* 
tariat  de  la  Société  de  géographie.  Gr.  in-8  de  i2  p.),  M.  de  Longuemar  vient 
de  rédiger  un  intéressant  Mémoiref  pour  répondre  à  une  question  proposée 
en  ces  termes  par  le  Comité  d^action  de  la  Société  géographique  de  Lyon  : 
indiquâr  les  mêiUewrs  moyens  de  vulgariser  les  cotmaissanoes  géographiques. 
L'auteur,  connu  du  monde  savant  par  de  nombreux  Mémoires  archéologique») 
dont  quelques-uns  ont  été  Tobjet  de  distinctions  honorifiques  très-fiatteuses, 
était  d'ailleurs  préparé  de  longue  main  à  traiter  la  question.  La  grande 
carte  géologique  de  la  Vienne,  qu'il  a  exposée,  en  1867,  et  que  nous  pouvons 
admirer  de  nouveau  à  l'exposition  du  congrès  géographique  international, 
prouve  qu'aucun  détail  de  cette  science  difficile  et  importante  ne  lui  est 
étranger. 

Notons   brièvement  les   principales  réformes   réclamées  par  l'auteur, 
pour  la  vulgarisation  si  désirable  des  connaissances  géographiques.  On  est 
en  même  temps  frappé  de  la  AÛnplicité  ingénieuse  des  méthodes  proposées 
et  du  défaut  d'initiative  qui  a  jusqu'ici  fait  prédominer  dans  l'enseignement 
géographique   une  routine  déplorable  dont  on  commence  seulement  à 
a'affiranchir.  Il  eût  suffit,^  ponr  que  le  mouvement  de  progrès  fut  plua  t6t 
entrepris,  de  s'en  tenir  à  la  rigueur  des  définitions  :  la  géographie,  en  effet, 
est  la  description  naturelle  physique  de  la  terre,  et  les  délimitations  admi- 
nistratives n'y  ont  que  faire,  elles  ont  leur  valeur,  leur  nécessité  ;  elles  ne 
sont  pas  de  liÉt  géographie.  Partant  de  ce  principe^  M.  de  Longuemar  propose. 
pour  chaque  contrée,  un  système  de  quatre  cartes  dressées  à  la  même  échelle. 
Sur  la  première,  établie  sur  papier  fort  et  exclusivement  physique,  il  sup- 
prime toutes  les  indications  qui  ne  sont  pas  absolument  indispensables 
pour  préciser  les  limites  des  États  et  l'emplacement  des  principaux  centres 
de  populations,  réservant  poir  la  seconde  (ou  même  pour  les  colonnes  d'un 
dictionnaire  géographique  défaille)  toutes  les  indications  supplémentaires 
de  divisions  politiques,  administratives,  judiciaires,  religieuses  et  militaires. 
€ette  seconde  carte  serait  dressée  sur  tissa  ou  papier  transparent  de  manière 
à  s'adapter  exactement  sur  la  première  qu'elle  compléterait  ainsi  fort  avan- 
tageusement. Il  en  ferait  de  même  d'une  troisième  carte  consacrée  aux 
centres  commerciaux  et  industriels,  aux  cultures,  en  un  mot,  à  toutes  les 
ressources  et  produits  naturels  du  pays,  et  d'une  quatrième  uniquement  his- 
torique et  archéologique,  donnant  toutes  les  localités  illustrées  par  quelque 
événement,  quelque  souvenir,  ou  quelque  monument  digne  d'être  signalé. 
Toutes  ces  indications  cartographiques  seraient  développées,  soit  par  rensei- 
gnement du  professeur,  soit  par  un  texte  explicatif.  Quant  à  la  question 
topographique  si  importante  pour  la  lecture  des  cartes,  l'auteur  propose  de 
remplacer  par  un  modelé  les  hachures  destinées  ft  la  représentation  des 
altitudes  ou  des  dépressions  de  terrain  et  qui  ont  toi:gonrs  l'inconvénient  de 
ne  pouvoir  être  établies  à  la  même  édielle  que  la  carte  elle-même.  Bnfln 


—  179  — 

M.  de  Longaemor  tarmiii»  son  iniéreasant  Mémoire  par  quelques  réflexions 
très-justes  sur  les  programmes  de  géographie  et  le  genre  de  questions  à 
poser  au  candidat  pour  s'assurer  qu'il  ne  récite  pas  une  nomenclature 
géographique  comme  un  perroquet  plus  ou  moins  doué  de  mémoire,  mais 
qu*il  comprend  réellement  la  configuration  du  sol  qu'il  habite,  -*  Nous  ne 
pouvons  que  souhaiter  de  voir  mis  en  pratique  les  conseils  de  ce  remar* 
quable  outrage.  F.  R. 

Un  RxctKn.  os  bbocbubes  D'iDucAnoK  ropuLAiBB.  -^  Nous  avons  déjà  appelé 
l'attention  (t.  XI,  p.  304),  sur  V Education  populaire^  recueil  de  brochures^  éditées 
maintenant  par  la  librairie  Sandoz  et  Fisehbacher,  et  qui  se  distinguent  par 
leur  haine  envers  le  catholidtme.  Une  série  a  été  publiée  sous  le  titre  ron- 
flant d'Histoire  natknàle;  nous  en  avons  déjà  indiqué  le  caractère.  La  troisième 
série,  que  nous  avons  sous  les  jeux,  n'accuse  'point  d'amélioration,  et  nous 
devons  constater,  à  regret,  que  le  lowfnoA  offM$l  lui  donne  périodiquement 
le  concours  de  sa  publicité.  Nous  apprenons  (n*  9,  p.  S),  que  le  roi  Jean  pas* 
sait  ((  la  plus  grande  partie  de  ses  jotirnées  (dans  la  captivité)  à  croquer  du 
sucre:  »  c'est  un  fait  à  signaler  aux  érudits.  N*  10,  p.  16,  l'auteur  se  tire 
habilement  de  Jeanne  Barc  (sic)  ;  «  Elle  ne  sait  point  Ure^  mais  elle  est  en* 
thotisiaste.  s  Le  Morceau  sur  les  jésuites  (n*  12,  p.  10)  est  parfait.  Qu'on  en 
juge  :  «  Le  jésuite  ne  doit  avoir  qu'une  vertu  :  robéissance;  être  constam" 
ment  à  la  disposition  de  son  chef;  toujours  et  en  tout  temps  prêt  à  partir, 
sans  condition,  sans  salaire;  faire  tout  ce  qui  lui  sera  commandé,  même  le 
crime.  Ce  n'est  plus  un  homme^  mais  un  cadavre;  toujours  prêt  à  frapper 
ou  agir  comme  un  bâton  dans  la  main  du  vieillard.  Le  vieillard,  c'est  le  su- 
périeur. Il  a  renoncé  à  toute  affection;  son  souverain,  c'est  le  Pape;  il  n'a 
pas  de  patrie,  son  ordre  lui  eu  tient  lieu;  sa  famille  n'existe  plus,  ses  biens 
ne  sont  plus  à  Itii,  mais  à  son  ordre,  qui  est  aussi  pour  lui  sa  seule  ^oire  et 
son  seul  honneur,  s  —  Voilà  comme  oh  instruit  le  peuple,  et  comme  on  le  dis- 
pose à  faire  des  otages  quand  le  moment  sera  venu,  sauf  à  se  tenir  soi-même 
discrètement  derrière  le  rideau. 

L'ÉnncATioN,  JotraNiL  riDAoooiQov.  — «  Nous  recommandons  vivement  à  ceux 
de  nos  lecteurs  qui  s'intéressent  à  l'enseignement  primaire,  le  journal  péda* 
gogique  VtduooMon  (Paris,  Poussielgue,  6  firanos  par  an).  Cette  feuille  hebdo- 
madaire, créée  depuis  deux  ans  par  la  Société  d'éducation  et  d'enseigne- 
ment, a  déjà  su  marquer  sa  place.Toutes  les  questions  présentant  quelque  in- 
térêt pour  les  instituteurs  et  les  maîtres  de  l'enfance  y  sont  exposées  et 
discutées.  Nul  n'ignore  que  la  llbre*pensée,soos  couleur  de  lalscisme,  essaye 
chaque  jour  de  pénétrer  dans  les  régions  jusqu'ici  inviolées  de  l'enseignement 
primaire.  C'est  aux  catholiques  de  combattre  cette  tendance.  Les  ennemis  de 
la  religion  savent  nous  donner  l'exemple  d'une  disciplihe  efficace  et  d'une 
activité  que  rien  n'arrête.  Pourquoi  les  catholiques  seraient-ils  plus  tièdest 
Le  péril  est  assez  grand  pour  que  nous  réunissions  tous  nos  efforts,  en  sou- 
tenant ceux  qui,  comme  les  fondateurs  et  rédacteurs  de  VtàucaÈiùn^  sont  plus 
directement  sur  la  brèche. 

La  LANOtm  trnivnsELLB.  —  Il  y  a  longtemps  que  des  chercheurs  s'efforcent 
d'arriver  à  la  création  d'une  langne  de  convention  universellement  usuelle, 
et  au  moyen  de  laquelle  les  hommes  de  tous  les  pays  pourraient  apprendre 
à  échanger  leurs  idées  tout  comme  dans  leurs  idiomes  usuels;  malheureuse- 
ment, cette  langue,  qui  rendrait  de  si  grands  servioes,  n'existe  pas,  et  toutes 
les  tentatives  faites  pour  la  découvrir  sont  restées  sans  résultat.  L.eibniz  n'a 
touché  à  ees  questions  que  pour  y  laisser  une  traoe  de  son  universalité  ;  elles 
ont  été  traitées  d'une  fa^n  remarquable  dans  un  ouvrage  d'un  Écossaisi 


George  Dalgarno,  dont  le  livre,  écrit  en  latin,  futimprimé  à  Londres  en  1661 , 
9wnptibu8  authùris  (nul  libraire  n'ayant  voulu  se  charger  de  Téditer)  sous 
le  titre  de  :  Ars  signorumj  vulgo  character  unwenaHs  et  lingua  phiioêophioa.  Ce 
volume,  auquel  Nodier  a  consacré  une  notice  intéressante  (Mélanges  es^raiU 
étune  petite  bibliothèque,  i828,  p.  268-284),  était  devenu  fort  rare;  mais  il  a 
été  réimprimé,  ainsi  que  d'autres  ouvrages  du  même  auteur,  dans  une  édi- 
tion des  œuvres  de  Dalgarno,  publiée  à  Edimbourg  aux  frais  du  MaUland 
Chd>.  UEdnUmrghBeinew  a  rendu  compte  de  cette  publication  (juillet  1835, 
p.  405417.) 

Indiquons  quelques-uns  des  ouvrages  qui  concernent  un  problème  dont 
Descartes  et  Pascal  se  sont  également  préoccupés  :  Projet  d'une  langue  tmt- 
venelle^  par  Vabbé  B.  Sotos  Ochanào,  traduit  de  l'espagnol  par  Fabbé  Touzet, 
Paris,  1855;  —  PkUoeapky  of  discourse;  An  universal  alphabet,  languageand 
grammar,  by  G.  Edwards.  London,  1856,  in-4,  gros  volume  du  prix  de 
42  sheilings;  —  La  Tribune  des  linguistes,  journal  dirigé  par  G.  Henricy.  Des 
articles  sur  la  langue  universelle,  1858  et  1859;  —  Nodier,  Notions  de  Un- 
guistiquê,  1834,  p.  31  ;  —  Jones.  Bieroglyfc,  or  a  grammatical  Introduction  to 
an  uniœrsal  hieroglyfic  language.  London,  1768;  —  Gibclb  of  Gomer,  an  Essay 
towards  an  introduction  to  the  english  as  an  vniversal  language,  1771;  — 
Le  Top.  The  OlineAeaf,  or  imtverso/  AB  C  D.  London,  1603.  (Voir,  sur  cet 
ouvrage,  Belob,  Memoirs  ofUtterature  (t.  n,  p.  257.) 

n  existe  aussi,  touchant  les  projets  de  langue  universelle,  des  écrits  de 
MM.  Letellier,  Gosselin  et  de  divers  autres,  mais  il  ne  saurait  être  question 
d'arriver  ici  à  une  énumération  bibliographique  complète. 

En  Angleterre,  on  cherche  en  ce  moment  à  entamer  le  problème,  au 
moyen  des  chi&es  qui  sont  les  mêmes  chez  les  diverses  nations  civilisées;  la 
solution  de  ce  c6té  ne  serait  pas  difficile  ;  elle  repose  sur  le  principe  qui  a 
présidé  à  l'établissement  du  Code  intematùmal  de  Signaux  maritimes  qui  fonc- 
tionne avec  un  plein  succès.  La  difficulté  consiste  à  faire  pénétrer  ces  théo- 
ries dans  le  domaine  de  la  pratique. 

Le  sint  ut  sunt  âut  non  sint.  —  M.  Taberlet,  dans  la  séance  de  l'Assem- 
blée nationale  du  9  juillet  dernier,  a  dit,  au  sujet  des  jésuites  :  «  A  une  cer- 
taine époque,  &  qui  leur  demandait,  que  dis-je,  les  suppliait  de  changer 
leur  règlement,  de  modérer  leur  action,  afin  d'avoir  un  motif  pour  user  de 
clémence  envers  eux,  ils  firent  entendre  ces  paroles  mémorables  :  Sint  ut 
suni  aut  non  sint!  Qu'ils  soient  ce  qu'ils  sont  ou  qu'ils  ne  soient  pas!  »  A  ce 
passage  de  son  discours,  l'orateur  a  été  interrompu,  d'après  le  Journal  offi- 
ciel, par  M.  le  baron  Ghaurand,  s'écriant  :  Alkm  donc!  —  Get  allons  donc 
prouve  que  M.  le  baron  Ghaurand  connaît  mieux  l'histoire  que  M.  Taberlet. 
Si  ce  dernier  avait  lu  quelque  livre  sérieux  sur  les  relations  de  la  compagnie 
de  Jésus  avec  la  papauté  au  dix-huitième  siècle,  si  notamment  il  avait  jeté 
les  yeux  sur  le  livre  de  M.  Grétineau-Joly,  il  aurait  su  que  les  paroles  mémo^ 
râbles  attribuées  à  Ricci  n'ont  jamais  été  dites.  Mais  peut-être  M.  Taberlet 
s'est-il  contenté  du  témoignage  de  M.  Henri  Martin!  T.  de  L. 

Etats  db  sbbvicbs  de  la  maison  royale  db  Bourbon.  —  M.  Edouard  de  Bar- 
thélémy vient  de  publier  sous  ce  titre  (Paris,  1875,  gr.  in-8  de  24  p.),  une 
brochure  qui  n'est  ni  une  œuvre  de  parti,  ni  même  un  travail  généalo- 
gique, mais  un  simple  mémento  de  ce  qu'ont  été  pour  la  France,  du 
seizième  au  dix-neuvième  siècle,  les  princes  de  la  royale  famille,  dont  douze 
membres  sont  tombés  tués  ou  blessés  sur  les  champs  de  bataille,  vingt  ont 
conmiandé  en  chef  des  années,  et  dix-sept  ont  servi  avec  éclat  conmie  géné- 
raux ou  amiraux.  La  notice  commence  au  premier  duc  de  Vendôme,  Gharles 


—  I8i  — 

de  Bourbon  (1489-4537),  père  d*Àntoine,  qui,  par  son  mariage  avec  Jeanne 
d'Albret,  fut  roi  de  Navarre,  et  de  Louis,  auteur  de  la  branche  de  Ck>ndé. 
Elle  s'arrête  aux  générations  maintenant  subsistantes,  laissant  de.  côté  les 
branches  transplantées  en  Espagne,  à  Parme  ou  dans  les  Deux-Siciles.  Nous 
croyons  devoir  signaler  à  l'attention  de  nos  lecteurs  cet  intéressant  et  subs- 
tantiel exposé,  rédigé  par  un  écrivain  dont  la  compétence  en  ces  matières 
est  depuis  longtemps  connue.  H.  L. 

Les  saiNCES  PAiBisToniQUES  a  l'Instîtitt.  —  Nous  trouvons,  dans  le  compte 
rendu  de  la  séance  du  2  juillet  de  l'Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres, 
une  protestation  de  MM.  de  Longpérier  et  Desnoyers,  contre  l'abus  du  mot 
préhiatorigue.  «  Il  serait  à  propos  de  s'en  défaire,  ont-ils  dit,  attendu  qu'au 
point  de  vue  chronologique,  il  n'a  aucune  valeur  et  ne  saurait  qu'intro- 
duire de  la  confusion  dans  le  langage.  »  Les  honorables  académiciens  ont 
raison,  seront-ils  écoutés?  C'est  une  autre  question.  Il  est  certain  qu'il  n'est 
pas  possible  d'employer  un  mot  moins  scientifique  et  dont  le  sens  soit  plus 
diffidle  à  définir.  C'est  ce  qui  en  fait  le  mérite. 

La  Société  AHCHfoLOGiQUB  du  Périgord.  —  Le  Périgord,  qui  a  vu  naître 
Montaigne,  La  Boétie,  Fénelon  et  tant  d'autres  sommités  littéraires  et 
scientifiques,  semblait,  depuis  un  certain  nombre  d'années,  avoir  aban- 
donné toute  culture  intellectuelle.  Mais  l'heure  du  réveil  a  sonné.  Vers  le 
milieu  de  4874,  une  société  s'est  constituée,  sous  le  titre  de  Société  historique 
et  ardiéologique  du  Périgord^  «  pour  développer,  dans  le  département  de 
la  Dordogne,  le  goût,  l'amour  de  l'étude  du  passé,  »  et  tout  d'abord  le 
chifire  de  ses  membres  a  atteint  le  total  de  deux  cents,  qui  s'accroît  nota- 
blement tous  les  jours.  Et  la  plupart  de  ses  membres,  sous  l'impulsion  do 
M.  le  docteur  Galy,  président,  des  vice-présidents  et  des  secrétaires,  mon* 
trent  un  zèle  de  bon  augure  pour  l'avenir  de  la  société.  Aussi,  au  bout  de 
huit  mois  d'existence,  a-t-elle  pu  mettre  au  jour  un  volume  de  400  pages, 
précieux,  non-seulement  pour  les  amateurs  d'histoire  locale,  mais  encore 
pour  ceux  que  les  arts  et  les  antiquités  de  la  France  ne  laissent  pas  indif- 
férents. YoilÀ  pourquoi  j'ai  pensé  qu'il  était  utile  de  le  faire  connaître  aux 
lecteurs  du  PolybibHùn, 

Commençant  par  où  l'on  finit  ordinairement,  je  dirai  tout  d'abord  que  ce 
livre,  sorti  des  presses  de  la  maison  Dupont,  ne  laisse  rien  à  désirer  pour 
le  choix  des  caractères,  la  bonne  disposition  typographique  et  la  correction. 
Les  matières  sont  variées.  Outre  les  procès-verbaux  des  séances  de  la  société, 
qui  résument  des  communications  U*ès-intéressantes,  et  un  questionnaire 
archéologique,  approprié  à  la  contrée,  nous  trouvons  seize  mémoires  plus  ou 
moins  importants,  sans  parler  de  documents  inédits  publiés  sans  commen- 
taires, ou  de  notes  archéologiques,  dont  la  brièveté  n'exclut  pas  la  valeur. 

Je  signalerai,  en  première  ligne,  le  travail  sur  «  l'Organisation  des  deux 
diocèses  du  Périgord,  »  par  M,  le  chanoine  René  Bernaret,  publication  de 
pouillés  du  quatorzième  et  du  seizième  siècle,  qu'on  doit  toutefois  regretter 
de  ne  pas  trouver  accompagnée  de  notes  amples  du  savant  ecclésiastique, 
qui  connaît  de  visu  toutes  les  paroisses  du  diocèse  et  leurs  archives. 

On  peut  considérer  comme  une  sorte  de  complément  à  ce  précis  fonda- 
mental de  l'histoire  religieuse  de  la  contrée,  la  c  Liste  des  abbés,  qui  ont 
gouverné  les  anciennes  abbayes  de  la  province  du  Périgord  »  extraite  par 
M.  Ph.  de  Bosredon  des  manuscrits  de  Lépine,  conservés  à  la  Bibliothèque 
nationale,  à  Paris. 

L'Étude  sur  Mgr  Le  Boux,  évêque  de  Périgueux,  par  M.  Riboulet,  vicaire 
de  la  cathédrale,  est  une  monographie,  pleine  de  recherches  et  fort  attrayante. 


êuf  ntk  inrédieatoiir  célèbre  dn  dix-septîèmé  tiètlt»  de  la  oo&grégttkm  d» 
moratoire.  D'antres  que  les  habitants  du  Périgord  pourront  y  trooTer  de 
riniérét. 

On  doit  signaler  encore,  dans  la  partie  parement  historique,  les  notes 
fort  cnrienses  de  M.  Gh.  Durand,  snr  l'histoire  de  Bergerae.  Ce  sont  des 
extraits  de  comptes,  en  dialecte  périgonrdin,  relatifs  anx  dépenses  faites, 
en  4393^94,  pour  la  réparation  des  fortifications  de  eette  Yille,  qui  devint 
pins  tard  un  des  boulevards  de  la  Réforme. 

Une  simple  énumération  suffit  ponr  les  documents  inédits  publiés  textuel- 
lement :  Donation  faite,  en  1213,  à  Tabbaye  de  la  Faye,  par  Pierre  de  Saint- 
Astier,  évêque  de  Périgueux  (M.  Galy).  --  Une  charte  délivrée  à  Tabbaye 
de  Saint-ÀjBtier  par  Pierre  m  de  Saint-Astier  ÇSf.  le  vicomte  de  Lestrade  de 
Conty).  —Une  sentence  ecclésiastique  au  treizième  siècle  (H.  l'abbé  Ganier). 
^  Entrée  de  Mgr  Philibert  de  Brandon,  évéqne  de  Périgueux,  le  28  mars  1649 
(M.  le  chanoine  René  Bemaret).  —  Lettre  inédite  de  Mgr  Du  Lau,  arche- 
vêque d'Arles  (M.  Di^garric-Descombes],  —  Lettre  de  Mgr  Christophe  de 
Beaumont,  archevêque  de  Paris  (M.  F.  Villepelet).  —  Statistique  historique 
de  Monpont  à  la  fin  du  seizième  siècle  (M.  l'abbé  Delpeyrat).  —  Tenne  des 
États  généraux  à  Pérignenx,  en  4649  (M.  le  chanoine  René  Bemaret). 

Les  philologues  et  les  littérateurs  trouveront,  dans  ce  même  reeneil,  denx 
morceaux  instructifs  :  4*  Fragments  d'un  mystère  provençal  déooaverts  à 
Périgueux,  par  M.  Camille  Ghabaneau  ;  2'  Quelques  mots  sur  l'origine  et  la 
naissance  de  Cyrano  de  Bergerac,  article  court  et  très-attrayant  de  M.  Dujarrii>' 
Descombes,  que  nous  connaissions  déjà  par  ses  intéressantes  études  histo- 
riques sur  Mgr  Daniel  de  Francheville,  évêque  de  Périgueux,  publiées  il  y  a 
un  an,  et  qui  sont  un  digne  pendant  dn  mémoire  de  M.  l'abbé  Ribonlet, 
dont  nous  venons  de  faire  mention. 

L'archéologie  marche  de  pair  avec  l'histoire,  et  des  monuments  de  tous 
les  âges  sont  mentionnés  dès  ce  premier  volume  : 

Le  duseau  de  Saint-Léon  sur  l'isie,  par  M.  le  comte  de  Mellet,  nous  montre 
l'époque  préhistorique,  ainsi  que  le  dolmen  de  Saint-Aqnilin  de  M.  Galy, 
Les  curieux  d'une  antiquité  moins  primitive  ont  pour  leur  part  trois 
mémoires  dus  à  M.  le  docteur  Galy.  —  L'art  du  placage  et  de  rétamage 
ehez  les  Gaulois.  — Bracelet  protecteur  de  la  santé.  -^  Enceinte  murale 
gallo-romaine  de  la  dté,  à  Périgueux. 

Le  moyen  âge  revendique  quatre  bonnes  monographies  : 

Notice  snr  l'église  de  la  chapelle  Saint-Robert  (M.  J.  Mandin). 

Notice  historique  et  descriptive  du  prieuré  de  Merlande  (M.  Ch.  Durand). 

Notes  sur  l'église  de  Carsac,  près  Sarlat  (M.  A.  de  Rouméjoux). 

Notes  sur  deux  vases  funéraires  trouTés  à  Riou-Martin  et  à  Verteillae 
(M.  J.  Mandin). 

Dix  lithographies  fort  bien  faites,  accompagnent  et  complètent  oenx  des 
mémoires  qui  le  comportent  :  vue  du  dolmen  de  Saint-Aqïiilin  et  types,  de 
grandeur  naturelle,  des  silex  et  poteries  qui  y  ont  été  trouvés  ;  deux  firag* 
ments  des  murs  de  l'enceinte  gallo-romaine  de  la  eité  de  Périgueux  ;  les 
vases  funéraires  de  Riou-Martin  et  Verteillae;  plan  et  élévation  de  la 
chapelle  Saint-Robert  ;  vue  pittoresque,  plan,  coupe  et  détails  de  l'é^se 
de  Merlande  *  sceaux  de  la  ville  de  Périgueux  ;  portrait  de  Guillaume  Le 
Bottx,  d'après  Landry. 

Enfin,  sous  le  titre  de  Varia,  chacun  des  ftiseioules  se  termine  par  des 
nouvelles  archéologiques,  découvertes  de  monnaies,  inscriptions  de  cloohes 
et  notules  d'un  véritable  intérêt. 


—  189  -- 

Là  Sodété  historique  et  aidiéologlqae  du  Périgord  a  trop  bien  eommenoé 
pour  s'arrêter  en  chemin,  et  si,  sans  préparation  de  longae  date,  les  mein* 
bres  ont  pu  lui  apporter  des  matériaux  si  yariés  et  si  substantiels,  on  peut 
augurer,  sans  témérité,  que  les  volumes  subséquents  ne  seront  pas  infé- 
rieurs et  qu*on  pourra  les  classer  k  o6té  des  Mêmùirm  réputés  de  la  Société 
des  antiquaires  de  TOnest,  ou  des  Antiquaires  de  Normandie,  et  de  Tineom- 
parable  Bulletin  monumental  du  regretté  M.  de  Gaumont     Ga.  Yasbiui. 

La  Revdv  des  dsuz-mondss  et  la  Statue  db  Mbmnon.  —  H.  Gaston  Boissier, 
a  publié,  dans  la  Berne  des  Beux-Mondes  (jtiillet  1874),  un  article  intitulé 
V Empire  romain  en  OrienU  Les  sons  que  rendait  parfois,  au  moment  du  levéf 
de  Taurore,  la  colossale  effigie  du  roi  Amunopb,  placée  aux  abords  de  la  cité 
de  Thébes,  sont  un  fait  attesté  par  un  grand  nombre  de  témoignages  irré- 
cusables; les  anciens  Grecs  et  les  Romains  7  ont  vu  quelque  chose  de  surna- 
turel, la  science  moderne  y  a  reconnu  un  effet  physique  provenant  d'une 
raréfaction  momentanée  de  Tair,  effet  qui  disparut  lorsque  l'empereur 
Septime-Sévère  eut  fait,  vers  la  fin  du  second  siècle,  restaurer  la  statue  qu'un 
tremblement  de  terre  avait  en  partie  renversée.  <c  On  sait  que  cette  découverte 
est  due  à  notre  illustre  Letronne  ;  »  ainsi  s'exprime  M.  Boissier,  mais  il  se 
trompe.  Letronne  publia,  en  1833,  un  mémoire  où  il  versa  les  trésors  de 
son  érudition,  aussi  judicieuse  qu'étendue  :  La  Statue  vocale  de  Memno/n 
considérée  dam  ses  rapports  avec  VEgypte  et  la  Grèce;  mais  il  ne  revendica 
point  pour  lui  le  mérite  d'une  explication  qui  avait  déjà  été  signalée. 
Le  premier  qui  Tait  indiquée  est  ce  semble,  Dussaulx,  dans  les  notes  qiii 
accompagnent  sa  traduction  de  Juvénal  ;  le  poète  avait  dit,  dans  sa  quin- 
zième satire  : 

Dimidio  magîc8s  résonant  ubi  Memaone  cbordœ  ; 

et  son  interprète  français  a  judicieusement  expliqué  ce  vers. 

La  Omaieriy  Beview^  qui  vient,  dans  sa  livraison  d'avril  1875,  de  consacrer 
4  la  statue  de  Memnon,  un  article  intéressant,  observe  que  dans  cette  même 
revue,  en  février  1831  (deux  ans  avant  que  l'écrit  de  Letronne  ne  vit  le  jour), 
un  savant  illustre,  David  Brewster,  fit  paraître  un  article  relatif  à 
Herschel  et  non  signé  selon  l'habitude  de  tous  les  grands  périodiques  anglais; 
l'explication  des  sons  émis  par  le  oolosse  égyptien  était  exposée;  Humboldt 
l'avait  d'ailleurs  déjà  indiquée  en  parlant  de  bruits  semblables,  qu'il  avait 
entendus  sortant  des  rochers  qui  bordent  les  rives  de  l'Orénoque.  Il  serait 
facile  de  multiplier  les  témoignages  de  ce  genre,  mais  il  ne  saurait 
s'agir  ici  d'épuiser  une  question  qui  est  complètement  résolue. 

Les  journalistes  et  L'EX?osiTioif  de  géographie.  «^  Les  journalistes  qui 
ont  parlé  de  l'exposition  de  géographie  ont  commis,  par  endroits,  une  mé- 
prise assez  curieuse.  Elle  consiste  à  rendre  un  compte  doctoral  d'ouvrages 
qui  NE  figurent  PAS  à  l'exposition.  Ainsi  un  rédacteur  du  Journal  des  BébaU 
(n*  du  26  juillet  p.  5,  col,  3)  nous  dit  :  «  Gitons  les  recherches  de  M.  D. 
Europœus  sur  un  peuple  de  race  hongroise,  qui  aurait  habité  la  RusHe 
moyenne  et  septentrionale,  etc.  »  M.  G.  de  Mortillet,  rendant  compte  de  l'ex- 
position dans  la  Bévue  scientifique  du  31  juillet,  p.  109,  a  remarqué  le  même 
ouvrage  :  wll  faut  citer  aussi  de  M.  D«  Europaus  des  recherches  sur  Un 
peuple  de  race  hongroise  qui  a  habité  la  Russie  moyenne  et  septentrio- 
nale etc...,  enfin  une  carte  de  la  Volhynie  et  de  la  Gallicie, depuis  les  temps  les 
plus  reculés  jusqu'à  l'an  1453.  «  Ni  la  carte  de  Volhynie  et  de  Gallicie,  ni  Toil- 
▼fage  d'Ean>pœus  ne  figurent  à  l'exposition  11!  Us  devaient  y  figurer,  et  c'est 
pour  Cela  qu'ils  ont  été  inscrits  par  avance  au  catalogue,  mais  ils  ont  été 
égarés  efi  route.  Le  rédacteur  des  Débets  et  M.  de  Mortillet  en  ont  parié  sur 


—  484  — 

la  foi  du  catalogue,  sans  prendre  la  peine  de  les  voir  par  eux-mêmes:  de  \k 
leur  méprise. 

Et  voilà  justement  oomme  on  écrit  Thittoire  I 

—  Parmi  les  travaux  envoyés  à  llnstitut  par  le  directeur  de  TEcole  archéo- 
logique de  Rome,  nous  devons  signaler  un  projet  de  catalogue  du  fonds  de 
la  reine  Christine  ;  l'inventaire  des  documents  concernant  l'Histoire  de  France^ 
conservés,  en  Italie,  par  MM.  Duchesne,  Cledat  et  Zeller. 

—  D'une  statistique  faite  il  y  a  deux  mois,  il  résulte  que  l'Ordre  des 
Frères  des  écoles  chrétiennes  compte  10,644  frères,  1,141  étahlbsements^ 
396,085  élèves.  En  France,  il  compte  8,769  frères,  1,009  établissements  et 
326,000  élèves,  k  Paris,  le  nombre  des  élèves  est  de  51,650;  à  Lyon,  31,900; 
àMarseiUe,  46,500. 

—  Notre  collaborateur  M.  A.  Héron  de  Yillefosse  avait  été  chargé  d'une 
mission  d'exploration  archéologique  en  Algérie  et  en  Tunisie^  pour  recher- 
cher les  inscriptions  latines  qui  auraient  échappé  aux  explorateurs  précé- 
dents. D  est  revenu  avec  une  abondante  moisson  ;  un  des  documents  les  plus 
curieux  dont  il  ait  rapporté  un  calque  exact  est  le  tarif  des  douanes  de  Zraia 
qu'il  a  retrouvé  dans  le  pretortumde  Lambèse.  M.  Léon  Rénier  a  communiqué 
à  l'Académie,  dans  la  séance  du  2  juillet,  le  résultat  de  la  mission  de  M.  de 
Yillefosse. 

—  Un  grand  travail,  qui  aura  peut-être  abouti  au  moment  où  cette 
livraison  paraîtra,  s'est  produit,  depuis  quelques  années,  en  faveur  de  la 
liberté  de  l'enseignement  supérieur.  Les  régions  du  nord  de  la  France  sont 
peut-être  celles  où  il  s'est  accompli  avec  le  plus  de  zèle,  d'intelligence  et  de 
dévouement.  Il  s'est  manifesté  par  la  création  de  cours  libres,  préparation 
naturelle  à  une  université  catholique,  par  d'importantes  souscriptions,  et  par 
la  création  d'un  comité  d'études,  chargé  de  suivre  et  de  diriger  ce  mouve- 
ment pour  le  faire  aboutir  à  des  résultats  pratiques.  Ce  comité  a  pour  or- 
gane le  BuUetin  de  la  Ccmmissicn  formée  peur  la  aréaiwn  d^une  untoenUé  oo- 
tholique  dans  le  nord  de  la  France.  Quatre  numéros  ont  déjà  parus.  Nous  y 
trouvons,  avec  les  procès-verbaux  très-intéressants  des  séances  de  la  commb- 
sion,  d'excellents  travaux  sur  les  questions  qui  touchent  à  l'enseignement 
supérieur  et  des  documents  qui  font  connaître  l'organisation  adoptée  dans 
les  pays  étrangers. 

—  En  attendant  une  histoire  des  Baux,  en  Provence,  à  laquelle  travaille 
un  élève  de  l'École  des  chartes,  M.  Common  publie  des  notes  historiques, 
archéologiques  et  descriptives,  mêlées  d'impressions  poétiques  empruntées 
à  Miréio  (Les  Baux  en  Prwence.  DescripHons  et  souvenirs,  par  M.  C***.  Avi- 
gnon, F.  Séguin,  487.5,  in-18  de  39  p.),  qui  appelleront  l'attention  sur  cette 
antique  seigneurie  possédée  par  une  des  plus  illustres  et  puissantes  maisons 
de  Provence,  éteinte  au  quinzième  siècle.  Elle  passa  ensuite  dans  le  domaine 
comtal,  et,  au  dix-septième  siècle,  fut  érigée  en  marquisat  en  faveur  des 
Grimaldi-Monaco. 

—  M.  Léopold  Pannier,  de  la  Bibliothèque  nationale,  vient  de  publier  en 
même  temps  deux  opuscules  qui  méritent,  à  divers  titres,  d'être  reconmian- 
dés  à  nos  lecteurs.  L'un  intitulé:  Le  Pâté  et  la  tarte,  farce  du  quinLiéme  siècle 
mise  en  langage  moderne,  (Saint-Prix^  1875,  in-18  de  56  p.),  et  l'autre  :  Etat 
des  inventaireS'Semmaires  et  des  autres  travaux  relaHf s  aux  diverses  archives  de 
la  France  au  i*^  janvier  1875  (Paris,  H.  Champion,  1875,  in-8  de  80  p.).  Le 
Fàté  et  la  tarte  (tiré  à  120  exemplaires)  est  dédié  au  fils  de  l'auteur,  enfant 
de  six  ans,  et  c'est  le  premier  volume  d'une  collection  qui,  sous  le  titre 
général  de  BiWaUiéquede  Jacques,  renfermera  un  choix  de  contes  et  fabliaux 


—  485  — 

du  bon  Tienx  temps  accommodés  à  l'usage  des  petits  lecteurs.  La  pièce,  tra- 
duite aDgo^^*^^  P^  M.  Pannier  avait  été  classée  par  M.  Magnin  parmi 
«les  phis  remarquables  imitations  de  Patheltin.»  M.  Pannier  ne  pouvait 
trouver  une  plus  agréable  bluette  à  mettre  en  tète  de  la  série  des  volumes 
dont  se  composera  sa  bibliothèque  enfantine,  et  tous  les  pères  de  famille 
devront  le  remercier  de  si  bien  rajeunir  notre  vieille  littérature  au  profit  de 
leurs  chers  bébés.  —  VÉtat  des  inventavres-sûatmaires^  etc.,  au  i*'  janvier  1875 
(extrait  de  la  Bibliothèque  de  TÉeole  des  chartes)  est  un  travail  aussi  bien  fait 
qu'il  est  important.  M.  Pannier  a  pris  beaucoup  de  peine  pour  nous  en  épar- 
gner beaucoup,  et  sa  bibliographie,  qui  ne  comprend  pas  seulement  Ténumé- 
ration  des  publications  de  nos  archivistes,  mais  encore  Tônumération  de 
toutes  les  publications  qui  se  rattachent  aux  archives  nationales,  départe- 
mentales, communales,  hospitalières,  etc.,  ainsi  qu'aux  archives  des  grandes 
familles,  ne  saurait  être  trop  louée.  T.  db  L. 

^  On  annonce  Tapparition  de  la  Colieetion  des  inscriptions  grecques  antiques 
du  British  Muséum,  publiée  par  H.  Gh.  Newton,  conservateur  du  Musée  des 
antiques,  avec  le  concours  de  H.  Hicks.  Cette  première  partie  contient  les 
inscriptions  de  TÂttique,  au  nombre  de  436,  en  grande  partie  insérées  déjà 
dans  le  Corpus  de  Bœcidi.  Elles  ont  subi  des  corrections  nombreuses  et 
parfois  très-importantes.  Certaines  ont  été  complétées  à  l'aide  de  fragments 
retrouvés  à  Athènes  depuis  la  publication  du  Carjpas. 

—  Le  premier  volume  des  Ftslorîei»  grecs  des  Croisades  vient  de  paraître 
par  les  soins  de  H.  Miller.  Il  contient  les  Prolégomènes  de  M.  Hase,  où  Ton 
explique  les  causes  qui  ont  amené  les  Croisades  et  où  Ton  étudie  l'état  de 
l'empire  d'Orient  à  cette  époque;  des  fragments  de  l'historien  grec  Midiel 
Attaliate;  des  opuscules  de  Michel  Psellos;  dbs  textes  historiques  d'Anne 
Commène  et  de  Nicétas  Choniate,  accompagnés  d'une  traduction  latine.  Le 
second  volume,  actuellement  sons  presse,  contiendra  les  notes. 

—  M.  Hocher,  correspondant  du  comité  des  travaux  historiques,  vient  de 
faire  pari^tre  k>  preimer  volume  d'une  édition  qu'il  publie  du  Boman  du 
Saxnt^QraaL  Le  texte  ancien  est  accompagné  d'une  traduction  et  de  notes 
formant  un  véritable  commentaire.  L'ouvrage  est  précédé  d'une  introduction 
où  M.  Hucher  traite  les  questions  encore  débattues  de  la  date  de  composition 
et  de  l'origine  du  livre  du  Saint-Graal;  il  croit  être  parvenu  à  établir  comme 
très-probable  l'opinion  qui  attribue  à  la  littérature  française  du  dou- 
zième siècle,  et  à  un  auteur  du  Gàtinais,  le  roman  qui  fait  partie,  comme 
on  sait,  du  cycle  de  la  Table-Ronde  avec  MerUn^  Artus  et  Lmcelot  du  Iaxc. 
—  Nous  devons  au  même  auteur[une  autre  publication  :  Le  Jubé  du  cardinal  de 
Luxembourg,  à  l'entrée  du  chœur  de  la  catiiédrale  du  Mans,  détruit  en  i562; 
reproduction  en  fa&^imile  d'après  un  dessin  d'architecte  de  la  fin  du  quin- 
zième siècle,  comprenant  huit  planches  lithographiées  et  quatre  planches 
de  texte,  documents  inédits. 

—  VEneyclopcsdiia  de  Chambers  jouit,  dans  la  Grande-Bretagne,  d'une  répu- 
tation attestée  par  une  vogue  soutenue;  mais  le  sort  des  ouvrages  de  ce 
genre  est  de  vieillir  promptement  et  de  perdre  ainsi  beaucoup  de  leur  uti- 
lité ;  il  faut  les  refaire  de  temps  en  temps;  aussi  a-t-on  entrepris,  pour  l'ou- 
vrage que  nous  signalons,  une  édition  nouvelle,  complètement  revue  et  mise 
au  niveau  des  connaissances  actuelles;  elle  forme  dix  volumes  in-8,  compre- 
nant 27,000  articles  différents,  3,400  figures  sur  bois  et  30  cartes  coloriées. 

—  Un  célèbre  éditeur  écossais,  dont  la  réputation  date  de  loin, 
M.  Blackwood,  d'Edimbourg,  publie  une  collection  de  traductions  d'auteurs 
anciens  destinée  aux  lecteurs  anglais  {Andent  Cktssics  far  engiish  readers); 


e]l«  est  Méentée  vna  aoiii  et  avec  goftt;  les  IMrm  de  Pline  le  Jeune  ont 
para  réoemment;  la  Wmimin»ief  Beviêw  (tomel*'  de  1875,  p.  312-329)  lenr  a 
ooBiaeré  un  artide  digne  de  l'attention  des  personnes  qii  ont  nn  goût  bien 
légttinie  ponr  Tétnde  de  la  littérature  romaine, 

«-  La  Qaleriê  naticnalê  de  Londres  est  un  des  musées  les  plus  riohes  de  l'Eu- 
rope, grâce  à  Tampleur  des  allocations  mises  à  la  disposition  de  ses  oonser* 
Tateurs.  Elle  a  déjà  été  l'objet  d'une  publication  qui  a  reproduit  un  certain 
nombre  des  plus  beaux  tableaux  qu'elle  renferme;  une  édition  nouvelle  de 
cette  SêleaUon^  gravée  par  d'babiles  artistes»  a  vu  le  jour.  Le  texte  n'apprend 
rien  de  nouveau,  mais  diverses  gravures  ont  du  mérite.  On  a  signalé  le 
portrait  d'un  marchand  juif,  d'après  Rembrandt,  gravé  par  John  Bumet,  et 
la  reproduction  d'une  des  meiHeures  compositions  de  David  Wilkie;  elle  sert 
de  frântispiee  au  volume  que  nous  signalons. 

—  Les  ouvrages  du  pontife  des  spirites  français,  d'Allan  Kardec  (pseudo« 
ttjme  d'H.  L.  Denison-Rival,  ancien  chef  d'institution),  trouvent,  paralt>il, 
des  admirateurs  en  Angleterre.  Une  dame,  Mistress  Anna  Blackwell,  a  traduit 
le  LHfr€  dm  espriiê  et  le  livre  de$  méditims.  On  a  sojin  d'annoncer  que  le  pre- 
mier de  ces  ouvrages  a  déjà  été  imprimé  en  France  4  plus  de  1 20,000  exem* 
phiires,  et  le  second  à  80,000  au  moins. 

-«•  Les  dialectes  que  parlent  les  Bohémiens  ont  attiré  &  diverses  reprises 
l'attention  des  philologues;  signalons  un  recueil,  publié  à  Londres,  de  (àiants 
de  ce  genre  :  Ènglish  gip$y  Swiqi,  In  Benuiuviyi  le  texte  est  accompagné 
d'une  traduction  anglaise  en  vers. 

--  Des  Chinois  ont*ils,  dix  siècles  avant  Colomb,  découvert  l'Amérique? 
Il  est  permis  d'en  douter;  mais  les  personnes  que  cette  question  intéresse 
feront  bien  de  lire  l'écht  de  M.  Charles  C.  Leland  :  i^so-vt,  et  the  JHMnftfi 
ùf  AmÊfioa  by  CMness  Buddhùi  PHestt. 

—  Un  éditeur  anglais,  placé  à  la  tête  d'une  importante  librairie  d'éduea* 
tlon,  M.  Thomas  Murby,  a  entrepris  la  publication  d'une  série  d'ouvrages 
seientiflques  et  de  manuels  destinés  aux  écoles;  ils  comprennent  la  Chimk 
inùrganlquey  par  M.  R.  Meldela;  la  MinérahoUf  par  M.  F.  Rutlej;  Proj&aUm 
eu  la  ffoÊiquê  de  ia  géométrie  des  eolideê,  par  M.  J.  Payne;  Qéométnephy 
êique,  par  M.  Skertchly.  D'autres  manuels  concernent  la  botanique,  laminé-» 
ralogie,  la  physiologie  animale.  Les  étudiants  trouveront  une  grande  utilité 
dans  ces  résumés,  qui  mériteraient  d'être  traduits  en  français. 

—  Un  Allemand,  le  docteur  Geiger,  est  mort  réoenmient,  laissant  une  eol« 
lection  importante  de  livres  hébreux.  Une  somme  de  6,000  marcs,  provenant 
de  souscriptions  volontaires,  a  fourni  le  moyen  d'acquérir  cette  bibliothèque, 
qui  a  été  placée  dans  le  local  de  l'université  Israélite  de  Berlin.  C'est  la 
troisième  collection  de  ce  genre  que  cet  établissement  obtient  par  le  même 
procédé. 

—  Un  nouveau  journal  hebdomadaire,  vient  de  paraître  à  Londres,  sous 
le  titre  de  Conoordia;  il  s'occupe  spécialement  de  musique  et  de  théâtre. 

-~  Mgr  Vaughan,  achevéque  de  la  Nouvelle-Galles  du  sud,  vient  de  réussir, 
après  de  longs,  coûteux  et  pénibles  efforts,  à  relever  le  collège  catholique 
de  cette  colonie,  dont  il  a  fait  une  université  rivale  de  celle  de  Sidney.  Il  a 
Établi  des  chaires  de  théologie,  de  philosophie,  d'histoire,  d'écriture  sainte, 
de  langues  classiques,  de  mathématiques  et  de  sciences  naturelles,  qui  ont 
été  pourvues  de  professeurs  capables.  Les  onze  évéques  de  l'Australie 
ont  joint  leurs  efforts  à  ceux  de  leur  métropolitain  pour  remettre  sur  pied 
eat  établissement,  fréquenté  aiijourd'hui  par  la  jeunesse  des  diverses  par- 
ties de  la  oc^onie.  L'archevêque  en  est  le  recteur,  et  a  choisi  pour  vioe- 


reetour  éam  AnMlme  Gillett,  moine  béoédictiii  dn  pneuré  de 
d'Hereford. 

—  La  Caimdm  Soeiêtyf  dont  l'objet  eat  la  pnblieation  des  doeoments  origi- 
naux de  rhistoire  d'Angleterre,  vient  de  faire  imprimer  nne  CAromgfue 
SA^Utem  dynmi  lu  réfinee  des  Tudors  d9  1485  à  i559,  par  Charlea  Wrio« 
tbeslejs  héraut  de  Windsor,  d'après  un  manuscrit  appartenant  à  lord  Per^. 
Cette  chronique  est  d'une  grande  importance,  pour  édairoir  une  foule 
de  questions  restées  obscures  dans  rUstoire  de  eette  période  si  agitée. 

—  Une  mer?eille  de  calligraphie  du  n^yenàge  rient,  nous  dit  thé  Aeademi^^ 
d'âtre  envoyée  à  Paris  par  un  libraire  anglais,  qui  Ta  achetée  36,000  firanos. 
C'est  un  psautier  provenant  du  monastère  de  Saint-Hubert,  dans  les 
Ardennes,  et  connu  sous  le  nom  de  Psautier  de  Louis  le  Pieux,  qudique 
M.  Paulin  Paris,  qui  l'a  examiné,  incline  à  penser  qu'il  ne  remonte  pas 
plue  haut  que  Lothaire  son  fils.  Il  est  écrit  en  ondales^  La  reliure  présente, 
d'un  cûtéy  un  ivoire  admirablement  ciselé,  de  l'autre^  une  plaque  de  cuivre 
repoussé  représentant  le  souverain  auquel  le  manuscrit  a  appartenu.  Ce 
psautier  avait  été  décrit  par  Mabillon  au  dix-<septième  sièole  ;  mais,  depuis 
la  an  du  dix-huitième  siècle,  on  Je  croyait  perdu. 

—  The  Aeademy  annonce  qu'une  bibliothèque  publique,  contenant 
30,000  volumes,  a  été  formée  k  Yedo  par  la  seetion  d'éducation  du  gouver- 
nement japonais,  à  1* usage  des  naturels  et  des  étrangers.  Elle  est  ouverte 
toute  l'année  de  neuf  heures  du  matin  à  dnq  heures  du  soir. 

-<**  MM.  Mommsen  et  Studemund  ont  publié  récemment  à  Leipiig,  sous 
le  titre  de  Analeeta  Ltvtona,  un  ouvrage  de  peu  d'étendue,  mais  intéree- 
Bunt  surtout  pour  ceux  qui  veulent  se  rendre  compte  de  la  forme  sous 
laquelle  le  texte  de  l'illustre  historien  de  Rome  nous  a  été  conservé.  H 
renferme  cinq  planches  photo-lithographiques,  offirant  un  spécimen  des 
quatre  plus  anciens  manuscrits  de  Tite-Live.  La  l**  est  prise  dans  le  palimp- 
seste de  Vérone;  la  2*,  dans  le  manuscrit  de  Du  Puy  (Bibliothèque 
nationale  de  Paris,  f.*lat.,  57^)  ;  la  3*  et  la  4*,  dans  le  manuscrit  de  Vienne; 
la  5*  dans  un  fragment  du  livre  Xd  de  la  bibliothèque  du  Vatican.  Les 
éditeurs  y  ont  Joint  de  savantes  dissertations  sur  les  nombreux  manuscrits 
de  l'historien  latin. 

—  Un  correspondant  du  Tûmes  &  Rome  annonce  la  découverte,  faite  è 
Milan,  de  manuscrits  irlandais  de  l'époque  de  Saint-Golomban,  renfermant 
un  glossaire  de  la  langue  irlandaise.  Ces  manuscrits  avaient  fait  partie  de  la 
bibliothèque  du  monastère  de  Bobhio,  et  avaient  été,  depuis,  donnés  par  saint 
Chartes  Borromée  à  la  bibliothèque  Ambrosienne  de  Milan.  Le  chevalier  Nigra 
prépare,  dit-on,  un  travail  sur  ces  manuscrits,  qu'il  se  propose  de  publier. 

—  Une  collection  des  actes  consistoriaux  du  SaintrSiége,  relatifs  aux 
afibires  ecclésiastiques  de  la  Grande-Bretagne  et  de  l'Irlande,  durant  le 
quinzième  et  le  seiiième  siècle,  a  été  formée  par  le  docteur  Masièr»*Brady, 
dans  les  bibliothèques  et  les  archives  de  Rome. 

—  On  annonce  la  publication  de  la  MhHaihéque  de  Shahetpeare^  ou  coUee- 
tion  des  pièces,  romans,  nouvelles,  poèmes  et  histoires  employés  par 
Shakespeare  dans  la  composition  de  ses  œuvres,  par  M.  W.  C.  Haalitt. 

—  Une  découverte  importante  est  signalée  par  the  Aeademy,  dans  la 
bibliothèque  du  monastère  de  Grottoferrata  près  dé  Frascati,  si  riche  en 
manuscrits  grecs.  Le  Père  Joseph  Cosia,  chargé,  depuis  plusieurs  années  par 
le  cardinal  Angelo  Mal  d'étudier  les  manuscrits  de  TËcriture  sainte  qui 
s'y  trouvent,  a  découvert  plusieurs  palimpsestes,  dont  l'un  offiv  le  texte 
de  Strabon  écrit  sur  trois  colonnes  en  lettres  onciales,  et  présente  tous  les 


—  188  — 

caractères  d'an  manuscrit  du  sixième  siècle.  Il  était  recouvert  par  une  copie 
de  TAncien  Testament  du  onzième  siècle. 

—  On  annonce  la  publication  d*un  ouvrage  prédenx  pour  Tétude  de 
rhistoire  de  l'église  d'Irlande,  c'est  le  8pieUegium  Oiscrienie,  eu  Collection  de 
doùmneats  erigmauas^  ceneerrunU  Véglise  irUxndam^  depuis  la  refermé  jusqu'à 
Van  1800,  recueillis  et  annotés  par  le  docteur  Patrick-Francis  Moran.  Ces 
documents  sont  extraits,  pour  la  première  série  qui  s'étend  de  i  537  &  1673,  la 
seule  publiée  jusqu'ici,  des  papiers  d'État  de  l'Irlande,  des  collèges  irlandais  de 
Rome  et  de  Salamanque,  des  manuscrits  de  l'évêque  Thomas  de  Burgo,  des 
archives  de  la  Compagnie  de  Jésus,  de  la  collection  Rinuccini  de  Florence, 
des  archives  du  Vatican. 

— -  Le  second  volume  de  l'ouvrage  anglais  de  M.  Beames  :  Grammaire  eom' 
parie  des  idiomes  ariens  modernes  de  Vlnde^  vient  de  paraître.  Il  renferme  de 
remarquables  dissertations  sur  les  noms  et  les  pronoms  des  diverses  contrées 
de  rinde. 

—  Le  général  John  Eaton,  président  de  la  Commission  nationale  d'éduca- 
tion de  l'Amérique  du  Nord,  va  faire  paraître,  lisons-nous  dans  the  Athenmwrn, 
un  travail  sur  la  BiXMoIhéque  des  BMs-JJnis.  Aux  détails  statistiques  et  aux 
notices  historiques  concernant  les  bibliothèques  publiques,  son  livre  joindra 
des  articles  d'une  utilité  pratique  relatifs  à  la  formation  et  au  catalogue  des 
collections  littéraires. 

—  La  maison  Sotheran  et  C*,  de  Londres,  publie  VAri  de  la  cérmnîque  au 
Japon,  par  MM.  Âudslej  et  Bowes,  de  Liverpool.  La  première  partie  de  cet 
ouvrage,  magnifiquement  illustré,  vient  de  paraître. 

—  Sous  le  titre  de  Fragments  et  spécimens  du  /oltn  amien,  M.  J.  Wordsworths 
a  recueilli,  dans  un  fort  volume,  enrichi  de  dissertations  et  de  notes,  des 
extraits  d'anciennes  inscriptions  latines,  des  lois  romaines  parmi  les  plus  impor- 
tantes, des  fragments  qui  nous  ont  été  conservés  des  poètes  et  des  prosa- 
teurs antérieurs  au  premier  siècle  avant  Jésus-Christ.  Ce  livre  est  destiné  à 
l'usage  classique  des  universités  d'Oxford  et  de  Cambridge. 

—  Le  savant  et  obligeant  président  de  la  salle  de  lecture  du  BrUuk  Muséum, 
M.  Bullen,  vient  d'être  nommé  à  l'emploi  de  conservateur  des  imprimés  du 
même  étâJ)lissement,  en  remplacement  de  M.  Rye,  démissionnaire. 

—  La  Société  des  anciens  textes  anglais  vient  de  faire  paraître  le  Cursar 
Uvmdi,  poème  northumbrien  du  quatorzième  siècle,  en  quatre  dialectes 
différents,  dont  les  variantes  de  diction  et  d'orthographe  oflOrent  le  plus 
grand  intérêt  pour  l'étude  de  la  formation  de  l'idiome  anglais  moderne. 

—  M.  Firkovitz  vient  de  recueillir  en  Crimée  plus  de  900  manuscrits 
hébreux  et  arabes  de  la  plus  haute  antiquité.  Il  en  a  proposé  l'acquisition 
au  gouvernement  russe. 

—  Un  exemplaire  du  TrasU  de  médecins  de  Galien,  de  l'édition  princeps 
des  Aide  de  1525,  appartenant  &  l'hôpital  général  de  ShefiBelds,  oflôre,  nous 
aprend  ihe  Athenaum,  des  notes  marginales  assez  nombreuses  qui  paraissent 
être  de  la  main  de  François  Rabelais.  Le  docteur  Law,  un  des  médecins  de 
cet  hôpital,  en  a  fait  faire  des  photographies. 

—  Nous  pouvons  annoncer  à  nos  lecteurs  la  publication  prochaine,  à  la  librai- 
rie Didot,  du  troisième  et  dernier  volume  des  (kmtemparains  de  ÊÊoHére,  par 
M.Victor  Fouroel.  Le  premier  avait  paru  en  4863;  le  deuxième  en  i866javant  la 
création  du  PotyhibUan.  Ce  dernier  volume  comprendra  le  théâtre  du  Marais 
et  le  théâtre  de  Molière,  c'est-à-dire  un  choix  de  pièces  rares  et  non  restées 
au  répertoire  jouées  sur  ces  deux  théâtres,  et  choisies  surtout,  comme  dans 
les  autres  volumes,  parmi  les  ouvrages  qui  ont  un  intérêt  plus  ou  moins 


—  189  — 

'historique  au  point  de  vue  des  mœurs,  des  usages  des  modes,  et  ceux  qui 
ont  trait  directement  ou  indirectement  à  Molière.  On  y  trouvera^  en  parti- 
culier, le  Parasite  de  Tristan  rHermite,  ie  Campagnard,  de  Gillet  de  la  Tesson- 
nerie»  la  Désolation  des  fUouSf  et  les  Amours  de  Calotin  (relative  à  Molière)  de 
Chevalier,  Champagne  le  coiffeur,  de  Boucher,  la  Joueuse  dupée,  de  Chappuzeau, 
lelVotnMOtt  Festin  de  Pierre,  de  Rosimont,  qui  offre  des  points  de  comparaison 
curieux  avec  le  don  Juan  de  Molière,  etc.,  etc  ;  le  tout  avec  des  notes^  des 
notices  biographiques  et  bibliographiques  sur  chaque  pièce  et  chaque 
auteur,  enfin  Thistoire  de  chaque  théâtre. 

—  Sous  ce  titre  :  A  propos  de  la  reconstruction  de  régisse  SaiiU-Pierre  (Bor- 
deaux, Féret,  br.  de  21  p.}»  M.  Ch.  Ghauliac^  examinant  la  question  du  trans- 
fert de  la  paroisse  Saint-Pierre  dans  le  local  de  Tancienne  église  Saint- 
Remy,  au  lieu  de  la  reconstruction  sur  l'emplacement  actuel,  appuie  son 
projet  sur  des  considérations  économiques  et  historiques  très-intéressantes; 
il  donne  des  renseignements  peu  connus  dans  le  public  sur  l'histoire  de  ces 
deux  églises^  Saint-Rémy  et  Saint-Pierre,  fort  anciennes  Tune  et  l'autre  ;  car 
la  première  date  du  cinquième  siècle.  Quoique  partiellement  reconstruito 
à  des  époques  postérieures^  la  seconde  remonte  au  treizième  siècle.  Cette 
brochure  sera  lue  avec  un  v^  intérêt  par  tous  ceux  qui  s'intéressent  à  l'histoire 
du  Bordelais. 

—  Une  soirée  littéraire  a  eu  Ueu  récemment  à  Saintes,  au  profit  des  inondés 
du  Midi.  Elle  a  été  composée  de  diverses  lectures  faites  par  des  membres 
de  la  Société  des  archives  historiques  de  la  Saintonge.  M.  Letelié  a  lu  une  bio- 
graphie de  Charles-Esprit  Le  Terme,  d'Angers,  sous-préfet  de  Marennes, 
décédé  en  1847,  qui  a  rendu  d'éminents  services  à  la  population  de  l'arron- 
dissement en  desséchant  les  marais  qui  l'infectaient  ;  M.  Hypolyte  de  Tilly 
a  raconté  les  souvenirs  de  Charlemagne  en  Sainlonge.  M.  Geay-fic^,  acyointj 
a  dit,  en  vers  patois,  les  impressions  d'un  paysan  saintongeois  au  concours  ré- 
gional de  Saintes,  et  M.  Louis  Audiat  a  improvisé  une  poésie  de  circonstance  : 
Somles  et  Toulouse. 

—  On  vient  de  réimprimer  LeIHt  des  rues  de  Paris  (1300),  par  Guillot  (de 
Paris),  avec  préface,  notes  et  glossaire.  L'éditeur  est  M.  Edgard  Mareuse  ;  il  a 
joint  au  texte  un  plan  de  Paris  sous  Philippe-le-Bel  (Paris,  librairie  géné- 
rale). Cette  publication  a  été  tirée  à  360  exemplaires  :  350,  papier  de  Hollande  ; 
2,  peau  de  vélin  ;  6,  papier  de  Chine  ;  2,  parchemin. 

—  On  annonce  la  réimpression,  chez  MM.  Féret  et  fils,  libraires  à  Bor- 
deaux, des  Œuvres  de  Pabbé  Bouretn:  Variétés  bordelaises^  ou  essai  historique 
et  critique  sur  la  topographie  ancienne  et  moderne  du  diocèse  de  Bordeaux. 
Cette  nouvelle  édition  contiendra  de  nombreux  renseignements  complémen- 
taires et  formera  trois  volumes  grand  in-8,  à  7  fr.  50  le  volume,  et  par  sous- 
cription, à  6  fr.  — •  Il  sera  tiré  150  exemplaires  de  luxe  sur  papier  de 
Hollande,  dont  le  prix  est  fixé  à  15  ft.  le  volume.  Chaque  volume  de  ce 
tirage  spécial  sera  numéroté  et  portera  le  nom  du  souscripteur. 

—  L'admirable  ouvrage  de  M.  l'abbé  Gay  :  De  la  vie  et  des  vertus  chrétiennes 
considérées  dans  rétat  religieux,  dont  nous  avons  parlé,  et  qui  a  obtenu  un  si 
grand  et  si  légitime  succès,  vient  de  parvenir  à  sa  troisième  édition.  Cette 
édition  forme  3  volumes  in-12  du  prix  de  iO  Dr.  50  (libr.  Oudin). 

^  M.  le  comte  Anatole  de  Bremond  d'Ars  vient  de  remettre  en  lumière 
l'oeuvre  d'un  de  ses  compatriotes  dont  le  nom  était  bien  oublié.  C'est 
l'Alphabet  militaire  de  Jean  Monigeon,  sieur  du  Haut-Puy  de  Fleac,  Angoumoisin, 
avec  les  ordonnances  du  Boy  sur  le  règlement  de  Vvnfanterie,  réimpressùmâiOiprés 
Us  édiUiom  de  1615  et  1620.(Angouléme,  imprimerie  charantoise  de  A.  Nadaud, 


—  190  — 

1875,  in>-8  de  88  p.,  tiré  à  cent  exemplaires,  sur  papier  mécanique,  3  fr; 
et  sur  grand  papier  de  Hollande,  8  fr.)  C'est  un  tirage  à  part  d*un  travail  paru 
dans  le  Bidletin  de  ta  SoeUté  archéologique  et  artistique  de  la  Charente,  1874. 
M.  de  Bremond  d*Ars  y  a  joint  des  notes  intéressantes  et  une  notice  sur 
l'auteur  et  sa  famille. 

—  L'éditeur  Marietti,  de  Tarin,  fient  de  mettre  en  vente  le  deuxième 
volume  de  sa  réédition  de  Surius.  Ce  volume  est  consacré  au  mois  de  février. 

Publications  nouvelles.  —  LePseudO'-Synode  connudans  rhiêUdrêsous  Jenom 
de  Brigandage  d^Ephèee^  étudié  d'après  ses  actes  retrouvés  en  syriaque,  par 
Tabbé  Martin  (in-8,  Maisonneuve).  —  BisUrire  de  VÉglùe  eaiholique,  par 
L.  Jannay  (in-12,  Gaume).  ^  Im  Origines  du  texte  masoréthique  de  VAneien 
Testament^  par  A.  Kuenen,  trad.  d'A.  Carrière  (in-8,  Leroux).  —  Mémoires 
d^arehéologie^  d^éj^ofàie  et  d^histoire^  par  G.  Perrot  (in-8,  Didier).  -^  Pie  11 
#1  les  études  cUusiques^  par  Mgr  Gaume  (in-8,  Gaume).  ^  Uistoriœ  seu  viUs 
sanctorwnf  del  Surius,  vol.  n.  Februarius  (in-8,  Torino,  P.  Marietti).  — 
Bistwe  cki  second  Empire^  par  T.  Delord.  T.  VI  (in-8,  Germer  Baillière).  — 
La  Questùm  d'Orient^  précédé»  du  conflit  gréoo^lgare  (in-8.  Douniol).  -^  Le 
prceés  d^Axtém^  recueil  complet  des  documents  politiques  et  autres  pièces 
produites  à  Taudience  publique,  traduit  de  Tallemand,  annoté  et  mis  en 
ordre  par  F.  Figurey  et  D.  Corbier,  avec  une  introduction  de  M.  Yalfrey 
(in-8,  Pion).  —  X'JSapoflfne,  spiendetirs  et  misères,  voyage  artistique  et  pitto- 
resque, par  P.-L.  Imbert  (in-18  illustré.  Pion).  —  JBssoi  sur  le  suffrage 
universel  direct  avec  scrutin  de  /isie,  par  le  comte  de  Galembert  (gr.  in-i8, 
Dentu).  —  La  Défense  de  Parte,  1870-1871,  par  le  général  Ducrot.  T.  I*', 
(in-8  cavalier,  Dentu).  —  Histoire  de  Gustave-Ado/pAe,  roi  de  Suède,  par 
M.  de  Parieu,  de  Tlnstitut  (in-12,  Didier).  —  La  Grande  Pyramide  pharaoniqus 
ds  nom,  par  Piazzi  Smyth,  trad.  de  l'abbé  Moigno  (in-18,  Lib.  des  Mondes). 

—  La  Conservation  de  lénergie,  par  Balfour  Stewart  (iu-8.  Germer  Baillière). 

—  Le  Soleil,  par  le  P.  Seccbi  (in-8  et  atlas,  Gauthier-Villars).  —  Le  Son,  par 
A.  GuiUemin  (in-18,  Hachette).  —  Les  Ouvriers  de  la  ferme  :  le  vachar  et  le 
bouoier,  par  E.  Menault  (in-32,  Hachette).  -^  De  la  graoure  de  portrait  en 
France,  par  G.  Duplessis  (in-8,  Rapilly).  —  Contes  populaires  de  la  Grande- 
Bretagne,  par  L.  Brueyre  (in-8.  Hachette).  —  Histoire  abrégée  des  principales 
littératures  de  l'Europe,  par  L.  L.  Baron  (in-i2,  Thorin).  ^  Victorius,  ou  Borne 
ouasprenders  temps  du  christiat^isme,  par  le  R.  P.  Fr.  Gay  (in-12,  Haton).  — 
Géographie  militaire  de  l  Empire  d'Allemagne,  par  E.  X.  H.  Ruhière  (in-18, 
Sandoz  et  Fischbacher).  —  Les  Droits  de  Dieu  et  les  idées  modernes,  par  Tabbé 
Fr.  Ghesnel  (in-8,  Oudin).  —  La  Faillite  dans  le  droit  international  pHvé,  par 
G.  Carie,  trad  de  £.  Dubois  (in-8,  A.  Marescq).  —  Bestauration  de  la  science 
polUique,  par  Ch.  L.  de  Haller.  T.  IV,  V,  VI  (in-8,  Vaton).  —  La  Foi  et  la 
sdenos,  parTabbé  Moigno  (in-18,  Lib.  des  Mondes).  —  La  Banque  du  diahk 
et  autres  histoires,  par  Eug.  de  Margerie  (in- 18,  Téqui).  —  Le  Marquis  de 
Montùolm,  par  le  R.  P.  F.  Martin  (in-18,  Téqui).  —  Carmela,  par  la  princesse 
Olga  Cantacuzène  (2  vol.  in-18  j.,  E.  Paul).  —  AmeUne  du  Bourg,  par  A. 
Fjuklin  (in-18,  Sandoz  et  Fischbacher).  -^  Un  Chapitre  d'art  poétique,  la  rime, 
par  Ch.  Le  Vavasseur  (in-8,  Lemerre.)  —  Sonnets  et  Poésies,  par  E.  Péhant 
(in-18,  Lemerre.)  -— Poéstei  de  François  Coppée,  1869-1874,  (in-18,  Lemerre.)  — 
La  Femme  politique,  étude  contemporaine,  par  J.  de  la  Brenne  (in-18,  Douniol). 

—  La  Noldesse  ptiitique,  étude  contemporaine,  par  J.  de  La  Brenne  (in-18, 
Douniol).  —  PrîMiie  ei  emprisonnement,  par  C.  Breton  (in-8,  Durand).  —  Des 
Conditions  de  gouvernement  en  France^  par  A.  Dubost  (in-8,  Germer  Baillière). 

ViSBNOT. 


—  191  — 

QUESTIONS  ET  RÉPONSES. 


QUESTIONS. 

GMendrler  éqvlnoslal»  — 

On  lit  dans  le  Manuel  de  BUdêcçraphiiB 
iméMne/Zé,  par  Dénia»  Pinson  et  de 
Martonne  (Paris,  encyclopédie  Roret, 
1897, 1  Tol.  in*8  de  706  p.),  page  44, 
an  mot  Calbhdubr,  colonne  3%  §  11, 
l'indication  de  l'ouvrage  suivant: 

il.  Coneoréancê  da  calmdrier  gré- 
gcfiin  avec  le  calendrier  éqwnaxiaif 
fOTF  J.  F.  AZIord,  1805,  in-8. 

Cet  oUTrage  n'existe  pas4  la  Biblio- 
thèque nationale.  PeuVon  indiquer, 
dans  quelle  bibliothèque  de  Paris, 
cet  ouvrage  se  titmTerait  et  pourrait 
être  communiqué?  -—  Quelque  li- 
braire de  Paris  le  possède? 

Ce  calendrier  équinoxial  n'est-il 
pas  tout  simplement  l'ancien  calen- 
drier républicain,  baptisé  d'un  autre 
nom?  F.  R. 

Porcon  de  la  Barbtneil». — 
£adste-t-il  quelque  relation,  men- 
tionnant les  hauts  faits  de  Porcon 
de  la  Barbinais,  conmiandant  d'un 
petit  navire  de  guerre  dans  la  Médi- 
terranée? —  Ce  marin  avait  pour 
mission  de  protéger  le  commerce  de 
SaintrMalo.  sa  viDe  natale,  contre  les 
pirates  d'Aiffer.  Plus  tard,.fait  prison- 
nier, puis  cnargé  de  transmettre  à 
Louis  aIV,  les  orgueilleuses  proposi- 
tions de  paix  du  bey  d'Alger,  il  eût 
la  tête  tranchée,  le  grand  roi  n'a^t 

Sas  voulu  accepter  les  propositions 
u  bey.  A.  DB  Ba. 

Madame  la  reine  d*aoii- 
srie.  —  Je  lis  dans  le  Journal  de 
Paris,  du  30  juillet  1789  : 

«  Les  dames  de  la  halle  ayant  ac- 
cepté la  députation  qui  leur  a  été 
fute  par  le  district  de  Saint-Joeeph 
pour  coopérer  au  maintien  de  l'ordre, 
M.  Bélanger,  président,  et  M.  André, 
commanoant  de  la  milice  bourgeoise, 
ont  été  éhargés  de  porter  Tadresse 
suivante  à  Mmame  la  reine  d* Hongrie^ 
première  dame  dee  Halles.,.  » 

On  voit  enoore  plus  loin  Madame  la 
reine  d'Hengrie  conduisant  une  dépn* 
tation  de  ces  dames  ;  Madame  la  reins 
d^ffangrie  recevant  une  somme  de 
800  livres  pour  la  distribuer  aux  pau- 
vres. Qu'est-ce  que  cette  reine  d*Hon' 
grie?  A-ton  quelque  connaissance 
de  l'existence  de  ce  titre  et  de  cette 
dignité  parmi  les  dames  de  la  Halle? 
Existe-il  quelque  autre  passage  où 


Ton  trouve  l'emploi  de  la  même  dé- 
nomination, et  quelle  peut  en  être 
l'origine?  V.  F. 

Liea  OBavrea  de  Pierre  de 
Vermat.  —  Les  ouvrages  de  ce 
mathématicien  illustre  sont  devenus 
fort  rares  ;  le  projet  d'en  publier  une 
réimpression,  aux  frais  de  l'Etat,  avait 
été  arrêté,  il  ^  a  une  trentaine  d'an- 
nées, par  le  ministre  de  l'Instruction 
publique  ;  il  avait  même  été  demandé, 
à  cet  égard,  un  crédit  spécial  à  la 
Chambre  des  députés;  il  y  eut«  à  la 
session  de  1844,  un  rapport  de 
M.  Arago,  à  cet  égard.  M.  Libri  avait 
été  chargé  de  diriger  cette  publioa^ 
tion,  qui  fut  d'abord  retardée,  ensuite 
oubliée. 

A-t-il,par  suite  de  diverses  circons- 
tances, été  donné  suite,  k  ce  siûet, 
depuis  1848?  Et  si  personne  ne  aen 
occupe,  ne  serait-il  pas  à  propos  de 
reprendre  une  idée  qui  toucnait  à  une 
des  gloires  scientifiques  de  la  France  ? 

On  peut  consulter,  entre  autres 
écrits  relatifs  à  Fermât,  un  très-bon 
article  de  M.  Maurice  dans  la  Biogra- 
phie universelle  ;  le  Précis  des  Œuvres 
de  Fermatf  par  M.  Brassine  (inséré 
dans  les  Mémoires  de  VAoadénie  de 
Toulouse^  1853,  p.  l-ltf4;  il  y  a  des 
exemplaires  tirés  à  part).  Les  ar- 
ticles de  M.  Libri,  dans  le  Journal  des 
SaoantSf  septembre  1839,  mai  1841, 
novembre  1845,  et  Revue  des  Deux 
Mondes,  15  mai  1845;  la  Biographie  de 
Tamel'Garonne,  1860,  t.  JL  p.  468- 
506;  un  article  signé  F.  E.  (Ferdi- 
nand Hofer),  dan<}  la  Nouvelle  Bfogra- 
phie  générale.,  t.  XVII,  col.  438-451. 

E.  V. 

Eiea  Gollegla  da  0aa-Em« 
pire.  —  Nous  voudrions  avoir  la 
bibliographie  des  ouvrages  où  sont 
examinées  les  conditions  des  curfio- 
rations  au  Collegia  du  Bas-Empire 
romain.  P.  de  M. 

Eiea  Mémolree  du  comte 
de  XUly.  —  Les  Mémoires  du 
comte  Alexandre  de  Tilly,  ancien  page 
de  Marie-Antoinette,  ont-ib  été  l'ob- 
jet d'études  critiques?  Quel  degré  de 
créanc3  méritent-ils  ?  H. 

RÉPOiNSES. 

OeiuL  raret6a  bibliogra- 
phique» (X1V.93).  --  La  Vie  de 
saint  Menouxy  evesque  breton,  par 
Sébastien  Marcaille,  Moulins^  1606, 


—  i92  — 


doit  se  trouver  à  la  Bibliothèque  de 
Moulins,  formée  de  la  Bibliothèque 
des  Béaédictios  de  Souvigny,  où  Ifar- 
caille  était  sous-prieur.  A. 

Kfe  Saonnol».  —  M.  R.   S.  ne 

pouvait  mieux  tomber  :  Perchon  est  le 
pseudonyme  d*un  membre  de  la 
Société  Bibliographique,  abonné  au 
Polyb^lionj  et  voici  sa  réponse  : 

Le  Saonnois  a  existé  conmie  le 
Thymerois,  le  Dunois  et  tant  d'autres 
pays  tributaires  des  grandes  pro- 
vinces. Sa  capitale  était  Saône,  autre- 
fois vil^e  et  aujourd'hui  simple  com- 
mune du  canton  de  Mamers.  On 
trouve  Neufchateî  en  SaormoiSy  Scdnt- 
CaUz  en  Saonnois,  Mcncé  en  Saonnois. 
etc.,  dans  le  territoire  qui  s'étend 
entre  Bonnétable  et  Alençon,  ce  qui 
permet  de  déterminer  assez  exacte- 
ment la  situation  de  notre  Saonnois. 
Les  géographes  et  auteurs  qui  ont 

Sarlé  de  lui  ne  sont  toutefois  pas 
'accord  sur  l'orthographe  de  son 
nom,  les  uns  ont  écrit  Saonnois, 
d'autres  Sonnois  et  quelques-uns 
Sosnois.  Le  cadre  de  cette  partie  du 
Polybiblion  ne  me  permet  pas  d'en 
dire  plus,  mais  comme  lAnd  du 
foyer  se  trouve  indirectement  mis  en 
cause,  je  dois  dire  que  s'il  a  pris 
pour  sous-titre  :  Almanach  du  Perche 
et  du  Saonnois.  c'est  qu'à  son  début 
il  paraissait  oans  les  seuls  arrondis- 
sements de  Mortagne,  Nogent-le-Ro- 
trou  et  Mamers.  R.  G. 

—  Le  Saonnois  est  une  partie 
de  l'ancienne  province  du  Maine, 
située  au  N.  E.  du  département 
de  la  Sarthe  et  comprenant,  en 
totalité  ou,  au  moins,  en  très- 
grande  partie,  les  cantons  de  Ma- 
mers, La  Fresnaye,  Saint^Pateme, 
Fresnay,  Beaumont-sur-Sarthe,  Bal- 
lon et  Marolles-les-Brault.  Il  conQ- 
nait  au  Nord,  à  l'Alençonnais,  dont 
il  était  séparé  par  la  rivière  de  la 
Sarthe,  et  à  l'Est,  au  Perche.  On  le 
trouve  désigné  dans  les  anciens  do- 
cuments sous  les  noms  de  Pagus 
Sagonensis^  Sanonia  patria^  Terra  Sa- 
gonensiSf  SavonemiSf  Suenensis. 

Avant  la  Révolution,  le  Saonnois 
formait  une  des  sept  grandes  divi- 
sions du  diocèse  du  Mans,  le  grand 


archidiaconé  {me^or  arekidiaconaius), 
qui  comprenait  cinq  doyennés,  Bal- 
lon, Beaumont,  Fresnoy,  Saonnois  et 
Linières. 

Les  ouvrages  &  consulter  sur  la 
configuration,  l'importance  et  l'his- 
toire de  cette  partie  du  Maine  sont  : 
Le  Livre  Biane  du  ehapUre  de  l'anse 
du  ManSf  in-4.  Le  Mans,  Monnoyer, 
1869  ;  Géographie  ancienne  du  diocèse 
du  Mans,  par  Th.  Gauvin,  in-4,  Paris, 
Derache,  1845  ;  Dictionnaire  siatisti- 
que  de  la  SortAe,  par  Pesche,  in-8. 
Le  Mans,  Belon,  1841,  t.  V  ;  DicHon- 
navre  topograiûMque ,  hîsioriquef  gé- 
néalogique et  oif>lhgr€^phique  de lawo- 
vince  et  diocèse  du  Maine,  par  M.  le 
Paige,  chanoine  de  la  cathédrale, 
2  vol.  in-8.  Le  Mans,  Toutain,  1777, 
etc.  X. 

Périssent     les     Colonies 

(Xin-556). — Je  trouve  un  pareil  senti- 
ment de  l'abbé  Bergier  cité  d'après  son 
Dictionnaire  théologique,  par  M.  Victor 
Schœlcher  dans  1  introduction  de 
son  ouvrage  Les  Colonies  françaises 
(Paris,  1842):  Inutile  de  dire  que 
l'ancien  abolitionniste  l'adopte  :  «  Il 
n'est  pas  possible,  dit-on^  de  culti- 
ver les  lies  autrement  que  par  des 
esclaves.  Dans  ce  cas  il  vaudrait 
mieux  renoncer  aux  colonies  qu'à 
l'humanité^.  »  P.  G. 

—  Le  Pdyhiblion  demande  qui  a 
prononcé  ces  paroles  :  «  Périssent  les 
colonies  plutôt  qu'un  principe.»  Quel- 
ques journaux  ont  cru  un  peu  légè- 
rement qu'elles  dataient  de  1848.  Ils 
auraient  dû  se  souvenir  combien  de 
fois  elles  avaient  été  répétées  pendant 
la  Restauration.  Ge  mot  remonte  à 
1791,  et  il  n'a  point  été  prononcé 
ainsi.  Robespierre,  &  la  Gonstituante, 
voulait  faire  rayer  le  mot  esclave  que 
les  colons  prétendaient  maintenir. 
Irrité,  il  lança  ces  paroles  un  peu 
diffuses  dans  leur  violence  :  «  Péris- 
sent les  colonies,  s'il  doit  vous  en 
coûter  votre  bonheur,  votre  gloire  et 
votre  liberté.  Si  les  colons  veulent, 
par  les  menaces,  vous  forcer  à  décré- 
ter ce  qui  convient  le  plus  à  leurs 
intérêts.  »  Naturellement  la  phrase  a 
été  modifiée  plus  tard,  comme  tant 
d'autres.  A.  V. 

Le  Gérant^  L.  Samdrbt. 


SlIIfT-QUENTIK.  —    IXP.  J0LB8  UOmiBAU. 


POLYBIBLION 

REVUE  BIBLIOGRAPHIQUE   UNIVERSELLE 


INSTRUCTION  CHRÉTIENNE  ET  ASCÉTISME 

L'Art  d^ini9igner  la  religion,  ouvrage  posthame  de  M.  l'abbé  Martinet.  Paris,  Palmé, 
1874.  Ir.-t2  de  xvi-250  p.  Prix  :  2  fr.  —  Cours  abrégé  de  religion,  ou  vérité  et 
beauté  de  la  religion  chrétienne,  Manuel  approprié  aux  établissements  d'instruction, 

Ear  le  R.  P.  J.-X.  Schouppb.  de  la  Compagnie  de  Jésus.  Bruxelles,  Glosson  ;  Paris, 
onniol,  1874.  In-12  de  292  p.  Prix  :  2  fr.  —  Conférences  aux  jeunes  filles,  ou  Consi" 
dérations  sur  certains  défaut»  plus  particuliers  à  ùur  âge  et  à  leur  condition,  par 
M.  Pabbé  F.  MécHiN,  chanoine  honoraire,  curé  de  Saint-Urbain  de  Troyes.  Bar-le- 
Duc,  les  Célestins;  Paris,  V.  Palmé,  1874.  In-18  j.  de  viii-307  p.  Prix  :  2  fr.  — 
Petit  Catédiisme  protestant  et  catholique  raisonné,  ou  les  Croyances  protestantes  et  cathù^ 
Uques  devant  la  Bible  et  la  raison,  par  M.  Tabbé  Jules  Louche.  Avignon,  Aubanel, 
1873.  In-18  de  Xix-6i7  p.  Prix  :  4  fr.  —  Mois  de  Marie  des  paroisses  et  des  familUê 
chrétiennes,  par  M.  l'abbé  Ant.  Ricard,  docteur  en  théologie,  chanoine  honoraire 
de  Marseille  et  de  Carcassonne.  Paris,  V.  Palmé,  1874.  In-12de  330  p.  Prix  :  t  fr.  50. 

—  Mois  de  Marie  de  l'âme  religieuse,  ou  simples  élévations  *ur  les  litanies  de  la  Très- 
Sainte  Vierge  pour  tous  les  jours  du  mois  de  mai,  par  Tabbé  F.  Demore,  chanoine 
honoraire  de  Marseille.  Paris.  Bruy& Retaux,  1875.  In-12  de  316  p.  Prix:  l|fr.  50, 

—  La  Première-Communion,  Causeries   familières   d^uru  mère   avec  ses    enfants,   par 
M-*  G.  R.  Paris,  V.  Palmé,  1874.  In-18  j.  de  280  p.  Prix  :  2  fr.  —  Année  liturgique 
du   prédicatew\    ou   Cours  d>  instructions  familières  sur  la  liturgie  des  dimanches  et  des 
fêtes    de  l'année,  par  M.   l'abbé   J.  Grand.  Paris,  Martin  &  Audier,  1874.  In-8  de 
11-346  p.  Prix  :  5  fr.  —  Saint  Joseph  :  Etude  historique  sur  son  culte;  premier  office  en  son 
honneur,  nnblié  aveo  variantes,  notes  et  traduction,  sur  des   documenls  du  zv*  et 
et  XVI*  siècles;  recueil   de  prières  tirées  des  anciennes  liturgies  :  par  M.    l'abbé 
LucOT,  chanoine   honoraire    de    Gh&lons.   Paris,    Pion,  1875.  In-18  de  viu-376  p. 
Prix:  3fr.  —  L'Evangile  proposée  ceuw  qui  souffrent,  parTauteur  des  A^is  spiriluele, 
Paris,  Donniol,  1875.  In-18  de  vi-676  p.  Prix   :  3   fr.  25.  ~   Le  liègne  de  Jésus^ 
Christ  et  la  question  sociale,  à    l'occasion  des  malheurs  de  la  France  :  Conférences,  par 
M.  Tabbé  JOLY,  curé  de  Saint-Pierre  à  Tonneins.  2*  édition.  Paris,  Bray  &  Retaux; 
Agen,  Michel  &  Médan,  1875.  In-12  de  295  p.  Prix  :  2  fr.  50.  —  Mietttes  évangéli^ 
ques.  Sujets  de  méditations  pour  tous  les  jours  de  Vannée,  p&T  le  R.  P.  ThéODOHB  Ratis- 
BONNB,    supérieur  des  prêtres  missionnaires   et  des  religieuses  de  Notre-Dame  de 
Sion.  Paris  et  Lille,  Lefort,  1873.  In-18j.de  X-484  p.  Prix  :  3  fr.  50.  —  VArméeetla 
mission  de  la  France  en  Afrique  :   Discours  prononcé  dans  la  cathédrale  d'Alger,  le 
25  avril  1875,  pour  l'inauguration  du  service  religieux  dans  Tarmée  d'Afrique,  par 
Mgr  V Archevêque  d'Alger.    Alger,  Jourdan,  1875.    Gr.  in-8  de  64  p.  Prix  :  1  fr. 
—    Union  des  chrétiens  dans  le  ccsur  de  Jésus  pour  ramener  les  âmes  a  Dieu.  Paris, 
Douniul,  1875.  In-18de  vi-276  p.  Prix  :  2  fr.  —  La  Manne  du  prêtre,  ou  Recueil  de 
prières,  tCexamens,  de  méditations  et  pieuses  pratiques,  très-efficaces  pour  la  sanctification 
du  prêtre,  par  le  R.  P.  J.  Mach,  de  la  Compagnie  de  Jésus.  Traduction  de  M.  Tabbé 
A.  Gaveau.  Paris,  Lethielleux,  1875.  In-18  de  in-488  p.  Prix  :  2  fr.  —  Exercice  du 
Chemin  de  la  Croix,  par  le  R.   P.   Mach,    illustré  de    15   belles    gravures.   Paris, 
Lethielleux,  1875.  ln-32  de  41  p.  Prix  :   50  c.  —  Les  Vertus  de  Marie  Mère  de  Dieu, 
par  le  R.  P.  Arias,  de  la  Compagnie  de  Jésus;  traduit  de  l'espagnol  par  M.  Tabbé 
A.  Gaveau.  Paris,  Pion,  1874.  In- 18  de  xn-242  p.  Prix  :  2  fr.  30.  —  Retraite  epiritueUe 
du  P.  Claude  de  la  Golombière,  avec  une  introduction  historique  et  divers  docu- 
ments sur  Torigine  de  la  dévotion  au  sacré  cœur  de  Jésus.  Paris,  Haton,  1874.  In-32 
de  XLVllI-192  p.  Prix:  75  c.   ~   Maximee  et  avis  spirituels  sur  Vadmirabte    docteur 
mystique  Jean  de  la  Croix,   pour  conduire  les  âmes  dans  les  voies   de  Dieu  jusqu'à 
r  union  du  parfait  amour  :  traduits  pour  la  première  fois  sur  Tédition  espagnole  de 
1702,  par  un  Père  de  la   Compagnie   de  Jésus.    Paris,   Douniol,    1875.    I0-I8    de 
ViU-190  p.  Prix  :  1  fr.  —  Xo  Vierge  Marie  et  la  Femme,  par  M"»*  Marib-Elisabeth 
Gav&.   Paris,  Dillet,  1875.  In-32   de  xtv-223  p.  Prix  :  50  c.  —  VisiUs  à  Jésus-Hostie, 
par  Tauteur   des  Avis  spirituels.   Paris,   Douniol,  1875.    2  vol.  in-32  de  239-255  p. 
Prix  :  2  fr.  50.  —  VOraiion  mentale,  d'après  sainte  Thérèse,  saint  Liguori,  saint  François 
de  Saks,  Rodrigue»,  et  autres  maîtres  spirituels,  par  le  R.  P.  Pbtitalot,  mariste. 

Septembre  1875.  T.  XIV,  13. 


—  i9i    — 

Avignon,  Seguin;  Paris,  Bray  &  Retanx,  1874.  In-32  de  173  p.  Prix  :  75  c.  — 
Pailleiles  d'or;  Cueillette  de  petits  conseils  pour  la  sancti/ica  ion  et  le  bonheur  de  la  vie. 
Publication  périodique  1'*  et  2«  séries  (de  1868  à  1873).  27*  et  7*  éditions.  Avignon, 
Aubanel.  In- 18  de  138-131  p.  Prix  :  3  fr  par  abonnement  d'un  an;  50  c.  le  volume 
de  livraisons  réunies.  —  Les  Œuvres  eucharistiques,  par  J.  Blaxcqox,  directeur  de 
ÏEcho  de  Fourvière.  3*  édition.  Lyon^  Gérard,   1874.  In-18  de  xii-95  p.  Prix  :  80  c. 

Ce  n'est  pas  chose  facile  et  commune  que  d'enseigner  bien  la  reli- 
gioD,  d'exposer  la  doctrine,  de  dire  les  commandements^  et  d*en  tirer, 
pour  tous  les  états  do  la  vie,  les  applications  pratiques.  Il  y  faut  de  la 
clarté,  de  la  méthode,  du  trait,  une  connaissance  sûre  de  renseigne- 
ment de  rÉglise.  M.  Tabbé  Martinet,  auteur  d'une  Théologie  morale 
estimée  et  de  plusieurs  ouvrages  qui  eurent,  dans  leur  temps,  quelque 
retentissement,  à  cause  de  la  solidité  du  fond  et  de  la  singulière  origi- 
nalité de  la  forme  {Solution  des  grands  problèmes  et  Platon-Polichinelle» 
entre  autres),  avait  promis  d'écrire  quelque  jour,  sous  les  lumières  de 
.  son  expérience,  l'Art  d'enseigner  la  religion^  et  il  j  avait  mis  une  main 
active,  lorsqu'il  fut  surpris  par  la  mort.  Le  manuscrit  restait,  et 
M.  Tabbé  Colomb,  chanoine  et  supérieur  du  grand -séminaire  de 
Moûtiers,  nous  le  donne  aujourd'hui.  C'est  un  travail,  en  effet,  qu'il 
ne  convenait  point  de  laisser  périr.  Ce  livre  est  spécialement  destiné 
aux  prêtres,  et  néanmoins  il  n'est  pas  une  persoune  du  monde  qui  ne 
le  lût  avec  intérêt  et  avantage.  La  pensée  mère  de  M.  l'abbé  Martinet 
est  qu'on  doit  suivre,  en  matière  d'enseignement,  la  voie  que  Dieu 
lui-même  indique  dans  la  sainte  Écriture,  c'est-à-dire  pas  d'abs- 
trait, beaucoup  de  faits  ;  l'histoire  de  l'action  divine  plus  que  la  dis- 
sertation. La  vérité  est  un  fait,  la  révélation  un  fait;  la  création,  la 
chute  de  l'homme,  la  réparation,  sont  des /atï^;  la  mission  de  Jésus- 
Christ  est  le  plus  grand  des  faits.  Tel  est  le  besoin,  telle  la  nature  de 
l'esprit  humain,  qu'il  s'attache  toigours  aux  faits,  s'éloigne  de  Va-priori, 
et  veut,  pour  ainsi  dire,  une  incarnation  de  la  pensée.  C'est  pourquoi, 
après  avoir  exposé  la  fin  de  l'enseignement  religieux,  qui  est  de  sus- 
citer, de  nourrir  et  de  développer  dans  les  âmes  la  vie  chrétienne  par 
la  parole  même  du  Maître  par  excellence,  Jésus-Christ,  M.  Martinet 
montre  que,  pour  être  puissante,  la  parole  apostolique  doit  s'approprier 
aux  dispositions  des  auditeurs,  et  que  le  meilleur  moyen  de  se  confor- 
mer à  ces  dispositions  ordinaires  et  actuelles  des  esprits,  dès  qu'il  s'agit 
des  choses  de  Dieu,  c'est  do  s'appliquer  à  rattacher  à  la  vie  et  à  l'his- 
toire de  Notre- Seigneur  tout  ce  que  l'on  veut  rappeler  des  vérités 
étemelles  et  révélées.  «  Œuvres  de  Dieu  envers  les  hommes,  écrit-il, 
œuvre  des  hommes  envers  ou  contre  Dieu,  cette  histoire  se  résume  et 
se  déploie  avec  un  merveilleux  éclat  dans  la  vie  et  la  mort  de  Jésus- 
Christ  (p.  vin).  »  Du  reste,  cette  méthode  ne  fut-elle  pas  celle  des 
Pères  apostoliques  comme  des  Apôtres,  de  qui  ils  l'avaient  reçue  ? 
Elle  n'a  rien  de  nouveau,  assurément,  mais  elle  a  été  trop  oubliée,  et 
il  importe  de  la  reprendre,  en  face  de  besoins  semblables  k  ceux 


—  195  — 

des  premiers  siècles  chrétiens.  Le  moyen  âge  l'avait  comprise  :  il 
faisait  tout  dériver  de  la  réalité  palpable  de  Thistoire  biblique,  illus- 
trée par  lui  et  symbolisée  de  mille  manières  dans  Tarcbitecture  et  les 
beaux-arts,  tous  y  voyant  Tunique  fondement  des  annales  du  monde 
et  de  sa  destinée  future.  Cette  histoire,  elle  était  alors  et  sera  tou- 
jours, observe  à  bon  droit  M.  Tabbé  Colomb,  le  plus  efficace  des  rai- 
sonnements pour  le  grand  nombre  des  intelligences,  parce   que  c'est 
celui  qui  exige  le  moins  d'efforts  et  laisse  moins  de  place  à  Tesprit 
d'opposition  et  de  négation.  —  Dans  les  classes  influentes  comme  dans 
la  multitude,  aigourd'hui,   les  dispositions  d*àme,   comparées  à  ce 
qu'elles  étaient  il  y  a  seulement  un  siècle,  peuvent  paraître  désespé- 
rantes. Alors,  la  religion  était  encore  Tâme  des  institutions  sociales  ; 
même  sous  une  apparence  de  scepticisme  on  trouvait,  sinon  des  con- 
victions bien  assises,  du  moins  des  principes,  à  l'aide  desquels  on  pou- 
vait les  affermir.  On  sait  ce  qu'est  Tesprit  de  notre  âge  matériel  et 
mécanique,  et  combien  sont  restreints  les  moyens  de  l'atteindre  et  de 
le  gagner.  Les  populations  ouvrières  sont  entraînées  loin  de  Dieu  par 
une  force  de  corruption  qui  fait  frémir,  et  qui  dérive,  en  partie^  d'une 
législation  où  Dieu  ne  compte  plus.  Malgré  cela,  grâces  au  Ciel,  il 
reste  dans  les  âmes  un  besoin  de  religion  que  le  catholicisme  seul 
peut  satisfaire,  et  aussi,  dans  ce  qu'on  appelle  les  idées  modernes,  une 
furie  de  destruction  que  lui  seul  peut  arrêter.  De  là,  sans  doute,  la 
haine  profonde,  fanatique,  effrontée,  que  lui  portent  tous  les  destruc- 
teurs. Donc,  Tabbé  Martinet  repousse  de  lachaire  laméthodescolastique, 
pour  s'en  tenir  à  celle  de  l'Évangile  et  des  Pères.  Ses  observations  et 
ses  conseils  dans  ce  genre  sont  fort  précieux.  Il  réfute  sommairement 
les  redites  plus  que  ridicules  de  l'athéisme  et  du  panthéisme^  ainsi  que 
le  principe  sur  lequel  repose  tout  l-édifice   de  la  politique  contempo- 
raine, à  savoir  Tindifférentisme  religieux  voilé  sous  le  mot  spécieux 
de  tolérance.  Il  montre  la  beauté  de  l'apostolat  catholique,  en  regard 
des  fausses  doctrines  et  notamment  de  l'idolâtrie  avec  ses  trois  carac- 
tères de  niaiserie,  de  cruauté  et  de  luxure,  et  de  la  morale  des  gens 
opposés  au  règne  de  l'Évangile.  On  remarquera  de  bien  belles  pages 
sur  l'humilité,  et,  par  contre,  sur  ce  levain  de  folie  qui  fermente  dans 
tous  les  cœurs,  Vorgueil,  dont  il  fait  connaître  la  nature,  les  degrés, 
les  œuvres,  le  rôle  dans  le  temps,  le  rôle  dans  l'éternité  même.  — 
Ouvrage  recommandable,  éloquent  et  fort. 

—  Tout  en  ayant  le  même  but,  le  R.  P.  Schouppe,  avantageusement 
connu  par  des  publications  antérieures,  adopte  une  marche  un  peu 
différente  dans  son  Cours  abrégé  de  religion^  parce  qu'il  envisage  surtout 
renseignement  catéchistique  des  paroisses  et  des  maisons  d'éducation. 
Il  y  a^  observe-t-il,  dans  Tinstruction  religieuse,  deux  périodes  ou 
degrés,  qu'on  pourrait  appeler  le  degré  de  la  mémoire  et  le  degré  de 


—  196  — 

Y  intelligence.  Le  premier  correspond  à  renseignement  élémentaire  et 
regarde  les  jeunes  enfants,  avec  qui  les  dissertations  et  les  preuves 
avancent  peu  le  résultat  poursuivi;  le  second  est  Toeuvre  de  l'ensei- 
gnement moyen,  et  plus  encore  de  renseignement  supérieur.  Dans  les 
écoles  primaires^  on  doit  s'attacher  au  texte  du  catéchisme  diocésain, 
qui  sera  imperturbablement   su   et  compris  quant  à  la  lettre.  Ce 
bon  grain  germera  plus  tard;  il  est  d'ailleurs  fondamental  pour  la 
culture  religieuse.  A  la  jeunesse  plus  instruite^  élevée  dans  des  éta- 
blissements d'instruction  secondaire  ou  scientifique,  il  est  nécessaire 
de  présenter  la  démonstration,  une  explication  approfondie,  une  vue 
philosophique,  des  arguments  en  un  mot,  çt  ces  preuves  devant  les- 
quelles s'incline  toute  raison  droite  et  en  fonction  correcte.  Ces  esprits 
ont  besoin  qu'on  leur  donne  la  véritable  intelligence  des  dogmes,  qu'on 
les  mette  à  même  d'en  contempler  l'harmonie  admirable.  A  cette  con- 
dition se  dissipent  une  foule  d'objections  ou  de  préjugés  qui  n'ont 
d'autre  fondement  que  l'ignorance  ou  bien  une  fausse  idée.  Et  puis, 
ajoute  l'auteur,  les  vérités  de  la  foi  sont  si  belles  de  leur  nature  qu'il 
n'est  pas  possible  de  les  voir  dans  leur  vrai  jour  sans  que  l'esprit  en 
soit  ravi.  Cette  démonstration  de  la  foi,   cette  explication  de  ses 
dogmes,  cette  revendication  des  titres  chrétiens,  toujours  à  la  portée 
des  intelligences  neuves  encore,  tel  est  l'objet  de  l'ouvrage  du  R.  P. 
Schouppe.  ^  Il  se  divise  en  deux  parties  :  V Apologétique,  renfermant 
les  principes  rationnels,  les  preuves  de  la  foi  chrétienne,  ainsi  que  la 
réfutation  des  principales  erreurs  modernes  ;  la  Dogmatique^  ou  exposi- 
tion méthodique  des  dogmes  de  la  foi,  depuis  l'existence  et  les  attributs 
de  Dieu,  la  création,  etc.,  jusqu'au  jugement  universel^  dernier  terme 
de  l'œuvre  divine  dans  le  monde.  —  Voilà  le  plan.  L^exécution  nous 
en  a  paru  réussie.  Outre  que  la  division  est  excellente,  qu'on  y  fait 
rentrer  sans  peine  absolument  toute  la  doctrine  catholique,  l'auteur  a 
le  don  d'une  exquise  clarté;  il  évite  toute  prolixité,  se  bornant  à  l'in- 
dication nette  des  idées,  et  laissant  au  maître  des  développements 
faciles.  Par-dessus  tout,  sa  marche  est  d'une  logique  et  d'un  enchaîne- 
ment qui  frappent  dès  les  trente  premières  pages,  les  propositions 
se  déduisant  l'une  de  l'autre,  s'appelant  mutuellement,  se  fortifiant  et 
8*éclairant.  Dans  l'apologétique  notamment^  il  ne  laisse  passer  aucune 
des  objections,  historiques,  scientifiques  ou  autres,  sans  y  répondre 
par  quelques  lignes  irréfutables  :  intolérance.  Inquisition,  Saint-Bar- 
thélémy, Galilée,  les  mauvais  papes,  la  civilisation,  le  progrès,  la 
liberté,  toute  la  kyrielle,  tous  les  oripeaux,  toute  la  phraséologie. 
Le  Syllabus  aussi,  le  Syllabus  occasion  de  tant  de  clameurs  insensées, 
a  son  petit  article,  fort  recommandable,  où  les  distinctions  entre  libé- 
ralisme et  libéralisme  s'offrent  aussi  nettes  que  possible.  —  La  Dog^ 
taatique  part  aussi  des  hauteurs  pour  descendre  à  l'homme,  et  expli- 


—  107  — 

quer  d'une  part  ce  que  Dieu  a  fait  pour  lui  sous  les  deux  Testaments, 
et  de  Fautre  comment  Thomme  se  doit  comporter  en  face  et  sous 
Faction  de  ces  mystères.  Naturellement,  ce  qui  regarde  propre- 
ment les  commandements  et  la  morale  n*entre  point  dans  cette  étude  ; 
nous  supposons  et  noud  désirons  qu'un  autre  volume,  aussi  heureuse- 
ment'conçu,  leur  soit  ménagé.  —  Ajoutons,  comme  détail  non  dépourvu 
de  valeur,  que  des  titres  courants  en  marge,  ou  manchettes^ 
couvrent  les  marges  à  chaque  alinéa,  le  résumant  en  trois  mots  et 
facilitant  à  Tattention  rintelligence  très-claire  de  la  marche.  Combien 
il  serait  à  souhaiter  que  cette  vieille  pratique,  abandonnée  pour  des 
raisons  d'économie  typographique,  fût  reprise  partout  dans  les  ouvrages 
du  genre  de  celui-ci  ! 

—  Avec  M.  Tabbé  Méchin,  dans  ses  Conférences  aux  jeunes  filles^ 
nous  avons  de  tout  autres  matières  et  une  forme  nécessairement  diffé- 
rente. C'est  aux  jeunes  personnes  quMl  s'adresse,  ce  sont  leurs  défauts 
qu'il  combat,  c'est  leur  cœur  qu'il  veut  atteindre,  au  nom  de  la  religion, 
et  c'est,  par  conséquent,  au  côté  moral  qu'il  s'attache.  L'ouvrage  est 
bien  écrit  comme  langue,  intéressant  comme  forme,  abondant  en  pen- 
sées judicieuses  et  fines.  M.  l'abbé  Méchin  sait  par  cœur  son  petit 
monde,  et  son  petit  monde  devait  avoir  grand  bonheur  à  l'écouter,  si 
nous  en  jugeons  par  le  charme  de  la  simple  lecture.  Il  nous  dépein- 
dra donc,  dans  une  série  de  portraits  dont  chacun  occupe  une  confé- 
rence, la  jeune  fille  envieuse,  la  jeune  fille  bavarde  ou  médisante,  ou 
menteuse,  ou  dissimulée,  ou  trop  prompte  à  juger;  la  jeune  fille 
paresseuse,  celle  qui  est  molle,  celle  qui  est  légère,  ou  bien  celle  qui 
est  inconstante,  irritable,  orgueilleuse,  coquette,  et  encore  la  liseuse 
de  romans,  à  qui  sont  attribués  deux  chapitres.  Le  portrait  de  ces 
divers  caractères  esquissé,  l'auteur  demande  où  serait  bien  la  source 
du  vice  en  question,  et  il  tarde  peu  à  la  découvrir;  puis  les  maux  où  il 
entraîne  fatalement,  et  enfin  le  remède  qu'on  lui  doit  opposer.  Tout 
cela  est  dit  clairement,  dignement,  solidement,  d'une  manière  persua- 
sive. Quelques  traits  d'histoire  eussent  ajouté  au  mérite  d'un  pareil 
travail. 

—  M.  l'abbé  Louche,  du  diocèse  de  Viviers,  n'écrit  pas  avec  moins 
de  talent,  et  nous  pouvons  recommander  son  Petit  catéchisme  protestant 
et  catholique  comme  un  modèle  tout  à  la  fois  et  un  trésor  de  polémique 
religieuse.  Un  grand  mouvement  s'opère  actuellement,  nous  dit-il,  au 
sein  du  protestantisme.  Le  principe  fondamental  des  diversrs  coi^es- 
sions  réformées,  destructeur  de  l'unité,  et,  partant,  de  tout  accord 
aussi  bien  dans  le  dogme  que  dans  la  morale,  a  poursuivi  à  travers  les 
siècles  son  œuvre  de  destruction  et  de  ruines.  Pour  qui  veut  aller  au 
fond  des  choses,  il  est  avéré  qu'un  protestant  ne  saurait  plus  exposer 
nettement  ni  ce  qu'il  est  obligé  de  croire  ni  ce  qu'il  est  tenu  de  faire 


—  198  — 

pour  appartenir  à  son  culte.  On  a  beau  vouloir  se  cramponner  à  la 
Bible  comme  à  la  dernière  planche  de  salut,  dans  ce  naufrage  des 
croyances  religieuses  :  le  livre  sacré,  interprété  par  la  raison  indivi- 
duelle, contient  pour  chacun  juste  ce  que  chacun  veut  ou  s'imagine  j 
découvrir,  et  personne,  à  s'en  tenir  au  principe  constitutif  du  prote»- 
tantisme,  n'a  droit  de  reprocher  à  un  autre  de  ne  pas  entendre  le  teite 
comme  il  Tentend  lui-môme.  Deux  mots  résument  renseignement  théo- 
logique protestant  :  liberté  absolue  pour  chacun  de  croire  et  de  faire 
ce  que  bon  lui  semblera,  sans  avoir  à  relever  d*aucune  autorité,  sous 
peine  de  cesser  par  le  fait  même  d*étre  protestant.  Or^  de  toute  évi- 
dence, ce  n'est  pas  là  une  religion,  ni  quanta  l'esprit  ni  quant  à  la  con- 
duite. La  religion  n'étant  autre  chose  que  T ensemble  des  devoirs  de 
Thomme  envers  Dieu,  sous  ce  double  rapport,  il  est  absurde  d'admettre 
que  ce  soit  à  l'homme  môme  de  se  tracer  ces  devoirs;  il  ne  peut  que 
les  accepter  du  Créateur.  Ce  point  compris,  les  plus  obscures  diffi- 
cultés disparaîtraient.  Notre  écrivain  fait  donc  appel  à  la  réflexion  et 
à  la  bonne  foi,  en  débattant  ces  trois  questions  :  —  Les  ministres 
réformés  répètent  tous  les  jours  qu'ils  sont  en  possession  du  pur  ensei- 
gnement de  Jésus-Christ  et  des  Apètres  :  et  cela  est  complètement 
faux;  —  qu^ils  ont  entre  les  mains  la  vraie  parole  de  Dieu  et  l'en- 
tendent mieux  que  l'Église  romaine  :  et  c'est  complètement  faux;  — 
que  l'Église  catholique  a  dénaturé  l'enseignement  des  Apôtres  en  7 
mêlant  une  foule  de  pratiques  superstitieuses  et  idolàtriques  :  et  c'est 
complètement  faux.  —  Nous  disons  qu'une  telle  lecture  sera  aussi  d'une 
notable  utilité  pour  les  catholiques,  qu'elle  instruira  et  confirmera  dans 
leur  foi.  —  Suivant  les  lois  de  son  titre,  M.  l'abbé  L(^uche  procède  par 
demandes  et  par  réponses,  dans  une  suite  de  vingt*deux  leçons,  où  il 
traite  tour  à  tour  l'histoire  du  protestantisme,  les  noms  divers  qu'on 
lui  a  donnés,  l'absence  de  fondement  dans  ses  doctrines,  les  erreurs 
particulières  dont  il  a  fait  son  lot,  et  qui  sont  ici  réfutées  solidement. 
Une  bonne  table  analytique  permet  de  trouver  tout  de  suite  la  ques- 
tion désirée.  L'auteur  a  eu,  de  plus,  la  très-pratique  idée  de  terminer 
par  une  liste  d'ouvrages  à  consulter  sur  ces  matières.  Peut-être  eût- 
il  été  &  propos  de  préciser  un  jugement  sur  la  valeur  et  le  mérite 
propre  de  chacun  d'eux.  Deux  ou  trois  de  ces  titres  sont  d'ailleurs 
inexacts  :  ainsi,  M.  Audin  a  écrit  Y  Histoire  de  la  vie,  des  ouwragei  et  det 
doctrines  de  Luther^  puis  l'Histoire  de  Calvin  :  nous  ne  sachions  pas 
qu'il  existe  de  lui  un  livre  intitulé  :  Vie  de  Luther  et  de  Calvin.  Dans 
l'Esquisse  de  Rome  chrétienne^  de  Gerbet,  indiquée  aussi,  quelle  partie 
consulter?  on  ne  le  dit  pas. 

—  M.  l'abbé  Antoine  Ricard,  dans  son  Moisde  Marie,  a  principalement 
en  vue  les  paroisses  et  les  familles  chrétiennes.  Ses  trente-deux  instruc- 
tions  (y  compris  celle  de  la  veille  de  l'ouverture)  sont  bien  divisées, 


d'une  longueur  oonvenable,  et  se  terminent  par  un  trait  historique.  Pre- 
nant la  Tie  de  la  Sainte  Vierge  dés  sa  conception  immaculée,  l'auteur  la 
conduitjusqu'à  l'Assomption  et  au  couronnement  dans  le  ciel,  tirant 
toujours  de  chaque  circonstance  l'application  au  fidèle,  et  y  rattachant 
la  méditation  sur  une  des  vertus  de  la  vie  chrétienne.  Le  sujet  a  l'in- 
convénient de  faire  retomber  très-souvent  dans  les  faits  évangéliques 
propres  à  Notre-Seigneur,  qui  ont  pu  être  déjà  touchés  pendant  le 
carême,  et  qui,  en  tout  cas,  le  sont  régulièrement  le  dimanche* 
M.  Tabbé  Ricard,  cependant,  cotoio  assez  bien  cet  écueil  ;  mais  en 
général,  à  notre  avis,  il  ne  serre  pas  d'assez  prés  la  doctrine  ;  il  eût 
fallu  établir  mieux  et  plus  à  fond  les  principes.  Où  il  excelle,  c'est  dans 
le  côté  pieux  et  l'exhortation  de  cœur.  Citons  au  hasard  ce  passage 
(p.  173)  :  —  «  Pourquoi  me  cherchiez-vous?  (dit  Jésus  k  Marie  qui  le  re- 
trouvait au  temple).  0  parole  déchirante  pour  le  cœur  de  Marie  I 
Voilà  donc  la  seule  consolation  qui  la  dédommage  de  ses  alarmes  et 
de  ses  souffrances  I  Pourquoi  me  cherchiez-vous?  0  Jésus,  pouvez- vous 
le  demander  ?  Elle  vous  cherche  parce  qu'elle  ne  peut  pas  vivre  sans 
vous;  elle  vous  cherche  parce  qu'elle  souffre  depuis  trois  jours 
d'inexprimables  douleurs;  elle  vous  cherche,  parce  qu'elle  est  votre 
mère.  Pourquoi  me  cherckiez-vous?  Fallait-il  donc  qu'elle  s'en  allât 
tranquille  après  vous  avoir  perdu?  Ohl  c'est  un  sacrifice  que  vous 
n'obtiendrez  pas  de  son  amour...  » 

—  Le  Mois  de  Marie  de  M.  Fabbé  Demore  est  une  œuvre  posthume. 
L'auteur  l'avait  écrite  pour  répondre  aux  instances  des  religieuses 
clarisses  de  Marseille,  dont  il  était  l'aumônier.  C'est  à  lui  que  l'on  doit 
aussi  une  Vie  fort  estimée  de  sainte  Claire  d^ Assise.  Le  livre  n'étant 
pas  absolument  achevé,  l'éditeur  littéraire  a  pu  lui  ménager  les  addi- 
tions indispensables,  au  moyen  des  notes  laissées  par  le  vénérable 
défunt,  de  sorte  que  l'ouvrage  est  complet  dans  sa  forme  actuelle. 
Mgr  rÉvéque  de  Marseille. lui  décerne,  en  l'approuvant,  un  bel  éloge  : 
«  Parmi  tant  d'ouvrages  écrits  depuis  un  demi-siècle  pour  honorer  le 
mois  consacré  à  la  Sainte  Vierge,  celui-ci  nous  a  paru  se  distinguer, 
indépendamment  de  son  but  spécial,  par  sa  ;  doctrine,  qui  est  em- 
pruntée aux  commentaires  des  saints  docteurs,  par  les  excellentes  et 
ingénieuses  applications  morales  que  l'auteur  en  déduit,  non  moins 
que  par  la  douce  et  pénétrante  onction  de  sa  forme  littéraire.  »  Le  sujet 
choisi  par  M.  l'abbé  Demore  est  la  suite  des  invocations  des  litanies  de 
Lorette.  D'immenses  ouvrages  ont  été  composés  sur  cette  riche  matière ^ 
entre  autres  celui  du  P.  Mieckowitz  (dix-septième  siècle),  en  deux 
volumes  in-folio  :  il  s'agissait  d'être  infiniment  plus  court,  et  de  tirer, 
néanmoins,  de  ces  douces  et  poétiques  invocations  tout  le  suc  utile  à  la 
piété.  C'est  à  quoi  on  a  ici  réussi  à  souhait.  Chaque  jour  donc  du  mois, 
on  prend  une  des  invocations,  on  la  médite  dans  son  sens  littéral,  dans 


—  200  — 

sa  signification  mystique,  dans  ses  rapports  ou  ses  allusions  à  la  vie 
réelle  de  Marie,  et  l'on  passe  de  là  aux  retours  personnels,  suivis  d'une 
prière,  d*une  oraison  jaculatoire  et  d*un  bouquet  spirituel.  —  A  peine 
est-il  besoin  de  le  dire,  bien  que  composé  en  vue  des  humbles  et  aus« 
tères  religieuses  de  Tordre  séraphique  et  des  personnes  appelées  à  vivre 
en  communauté,  l'ouvrage  de  M.  Tabbé  Demore  répond  également  aux 
aspirations  des  âmes  intérieures  placées  au  milieu  du  monde  :  ce  qu'on 
peut  dire,  au  reste,  de  tout  livre  spirituel  bien  fait. 

—  C'est  une  mère  qui,  dans  la  Première'Communion^  par  madame 
G.  R.,  s'entretient  avec  ses  enfants,  pour  les  préparer  à  cette  action 
si  grave.  Elle  le  fait,  sinon  avec  un  grand  mérite  de  style,  du  moins 
avec  une  onction  et  une  piété  qui  touche.  L'auteur  croit  que  la  plupart 
des  autres  livres  de  ce  genre  surexcitent  l'imagination  et  la  sensibilité 
a  sans  rien  apprendre  de  la  vertu  la  plus  simple.  »  Jugement  sévère, 
assurément  immérité,  car  les  très-bons  livres  sur  la  première-com- 
munion sont  nombreux.  «  On  y  fait  trop  souvent  de  la  religion,  conti- 
nue madame  G.  R.,  une  sorte  de  poésie  vague;  on  y  affadit  les  imes 
sans  les  rendre  capables  d'un  efifbrt  sérieux.  C'est  pourquoi  nous  avons 
écrit  ces  simples  entretiens,  qui,  nous  l'espérons,  seront  compris  de  tous 
les  enfants,  et  pourront  les  aider  à  préparer  chrétiennement  leur  cœur 
pour  la  venue  de  leur  Dieu.  »  Bref,  l'auteur  espère  avoir  fait  mieux 
que  ses  devanciers,  et  cela  dans  un  bon  sentiment.  Nous  n'oserions 
assurer  qu  elle  a  atteint  ce  but  spécial,  mais  elle  a  certainement  fait 
un  très-bon  travail,  qui  sera  un  secours  pour  les  mères  de  famille  sou- 
cieuses de  la  préparation  de  leurs  enfants,  autant  que  pour  les  enfants 
eux-mêmes.  Le  frère  et  la  sœur,  Edouard  et  Thérèse,  sont  interrogés, 
avant  ou  après  le  catéchisme  paroissial,  par  leur  mère,  non  point  sur 
la  lettre  de  la  doctrine,  mais  sur  les  vertus  qui  doivent  orner  leur 
cœur  à  l'approche  du  grand  jour.  Eux-mêmes  interrogent  aussi  quand 
ils  veulent  une  explication.  On  parcourt  de  la  sorte  les  diverses  prières 
habituelles  au  chrétien  pendant  le  jour,  la  méditation,  le  travail,  les 
récréations,  les  repas,  la  lecture  pieuse  ;  puis  le  travail  intérieur,  la 
lutte  contre  le  défaut  dominant,  les  secours  ménagés  dans  la  confes- 
sion, la  visite  au  Saint-Sacrement,  la  dévotion  envers  la  Sainte 
Vierge,  etc.  La  retraite  a  ses  chapitres  à  part,  où  Ton  a  tort  de 
donner,  comme  réglementaire.  Tordre  des  sujets,  le  prédicateur  les 
choisissant  selon  son  auditoire  ou  selon  ses  goûts,  et,  de  fait,  ces  sujets 
variant  chaque  fois  dans  leur  distribution.  Un  règlement  de  vie  court 
et  d'une  rédaction  claire,  couronne  les  entretiens.  Au  résumé,  ouvrage 
digne  d'éloges,  et  qui  sera  bien  accueilli. 

—  Ij  Année  liturgique  du  Prédicateur  fait  partie  de  la  vaste  publi- 
cation entreprise,  depuis  longues  années,  par  M.  Tabbé  G.  Martin, 
sous  le  titre  général  de  Bibliothèque  des  Prédicateurs,  qu'il  ne  faut  pas 


—  201  — 

confondre  avec  celle  da  P.  Houdry,  plue  ancienne,  dernièrement  réé- 
ditée en  dix-huit  volumes  grand  in-8®,  rédigée  sur  un  plan  différent^  et 
qui  fournit  d*abondantes  ressources  sans  donner  les  discours  tout  faits  : 
méthode  que,  pour  notre  part,  nous  estimons  de  beaucoup  la  meilleure. 
Kœuvre  de  M.  C.  Martin  compte  déjà  vingt-huit  tomes^  dont  plusieurs 
ont  eu  un  grand  et  mérité  succès.  Celui-ci  aborde  des  matières  dont, 
malheureusement,  on  parle  trop  rarement  en  chaire.  N'importe-iril 
pas  que  le  peuple  soit  initié  aux  prières  et  aux  cérémonies  de  la  litur- 
gie, qu'il  en  comprenne  le  sens,  la  distribution,  la  marche  et  Tesprit? 
Au  moyen  de  ce  nouveau  volume,  tout  pasteur  sera  à  même  de  com- 
bler facilement  cette  lacune  de  renseignement  ordinaire.  Les  discours 
n'y  ont  qu'une  étendue  de  prône;  ils  sont  bien  divisés;  l'œil  en  saisit 
tout  de  suite  l'ensemble,  grâce  à  la  disposition  typographique  :  avantage 
précieux.  Que  si,  sur  un  point  particulier  que  Fauteur  ne  développe 
pas,  il  prévoit  qu*un  orateur  désirera  insister,  il  indique  aussitôt  les 
ouvrages  qu'il  peat  consulter  ou  les  volumes  de  la  collection  qui  trai- 
tent cette  matière.  Excellente  idée,  assurément.  Toutefois,  on  n*y 
trouvera  point  Texplication  de  la  Messe  dans  sa  partie  invariable,  le 
JTyrie,  le  Gloria  in  excebis,  le  Credo^  le  Sanctus  et  le  Canon;  ce  sera 
l'objet  d'un  volume  à  part.  On  s'arrête  aux  prières  liturgiques  qui 
changent  chaque  dimanche,  telles  que  Tintroït,  la  collecte,  l'épître, 
le  graduel,  l'évangile,  Toifertoire,  etc.  Les  vêpres  ne  sont  point 
oubliées  ;  antiennes,  capitules  et  hymnes  ont  leur  place  dans  ces  com- 
mentaires pieux.  Avec  quel  intérêt  les  fidèles  suivront  des  instructions 
de  ce  genre,  il  est  superflu  de  le  dire.  La  piété  y  peut  gagner  beau- 
coup, et  Tattention  y  gagne  tout.  Du  reste^  ce  ne  sont  pas  les  di- 
manches seulement  auxquels  s'attache  l'auteur,  il  s'occupe  aussi,  de  la 
même  manière,  des  principales  fêtes  de  Tannée.  —  Voici  l'ordre 
qu'il  suit  régulièrement.  Deux  points,  dont  le  premier  concerne  la 
messe  du  jour,  le  second  les  vêpres.  Au  premier^  d'abord,  l'esprit  du 
dimanche  .ou  de  la  fête,  en  quelques  lignes;  ensuite  l'explication  suc- 
cessive de  rintroït,  de  la  collecte,  de  l'offertoire,  de  la  commu- 
nion, etc.,  mais  surtout  de  Tépître  et  de  l'évangile,  qui  ne  sauraient  être 
jamais  oubliés  dans  l'instruction  pastorale.  Au  second,  le  capitule, 
l'hymne  et  les  antiennes.  Pourquoi  n'avoir  rien  dit  des  prières  de  la 
bénédiction,  ou  salut  du  soir?  Parfois  aussi  d'utiles  éclaircissements 
ont  été  omis.  Au  jour  de  Pâques,  par  exemple  (p.  110),  nous  lisons  : 
(c  Pendant  l'aspersion  de  l'eau  bénite,  aujourd'hui  et  durant  le  temps 
pascal,  on  chante  l'antienne  Vidi  aquam  à  la  place  de  V Asperges,  »  Et 
c'est  tout.  Ne  convenait-il  pas  d'expliquer  la  raison  de  ce  changement  et 
la  nouvelle  antienne  elle-même?  —  Un  inconvénient  se  présentait  :  les 
dimanches  où  l'on  faitl'office  dujoursont  rares  dans  la  liturgie  romaine, 
maintenant  adoptée  partout  ;  le  plus  souvent  ce  sont  des  saints  ou  des 


—  202  — 

fêtes  spéciales  qu*on  y  célèbre  :  dès  lors,  une  explication,  du  haut  de 
la  chaire,  de  ce  qui  ne  se  dit  pas  à  Tautel  devenait  pour  le  moins  un 
hors-d'œuvre.  Notre]auteur  j  a  paré,  soit  par  les  articles  consacrés  aux 
fêtes  spéciales^  ainsi  que  nous  l'avons  remarqué  plus  haut,  soit  par 
d'autres  instructions  sar  les  offices  du  commun  des  apôtres,  martjrs», 
pontifes,  justes,  vierges,  saintes  femmes.  Nous  serait^il  permis  d'ex- 
primer ici  le  désir  que  la  désignation  de  confesseur,  mal  comprise  du 
peuple,  qui  toujours  y  voit  un  prêtre,  fût  remplacée,  dans  nos  livres 
français,  comme  autrefois,  par  celle  de  juste,  qui  est  plus  claire? 

—  Lelivre  de  M.  Tabbé  Lucot,  sur  Saint  Joseph  est  surtout  une  œuvre 
d'érudition^  tenant  par  différents  côtés  à  la  liturgie.  La  piété  n'en 
est  point  exclue  cependant;  loin  de  là;  il  peut  servir  de  livre  de  dévo- 
tion à  cause  des  riches  prières  qu*il  renferme.  L'auteur  étudie  Fhis- 
toire  du  culte  du  saint  patriarche  qu'un  récent  décret  pontifical  a 
proclamé  patron  de  l'Église  universelle.  Encore  que  TÉvangile  parle 
peu  de  Joseph,  les  plus  glorieuses  prérogatives  découlent  pour  lui  de 
ses  titres  de  père  adoptif  de  Jésus  et  d'époux  de  Marie.  «  Sentier 
étroit  d'abord,  peu  connu,  peu  frayé,  cette  dévotion  est  devenue, 
selon  la  parole  de  nos  saints  livres,  ce  grand  chemin,  tout  resplen- 
dissant de  sainteté,  où  germent  les  plus  merveilleuses  vertus. 
Tant  d'àmes  y  ont  passé  qu'il  est  devenu  deux  fois  glorieux  ;  tant 
de  cœurs  attristés  y  ont  retrouvé  la  paix  et  la  sérénité,  qu'en  cette 
vallée  de  larmes  on  y  court  avec  bonheur  (p.  0).  »  Que  saint  Joseph 
ait  été  honoré  dès  les  premiers  siècles  de  l'Église,  les  peintures  des 
catacombes  romaines  le  démontrent.  Détail  curieux  à  noter  :  elles  ne 
le  représentent  point,  comme  on  le  fait  aujourd'hui,  sous  les  traits 
d'un  vieillard,  mais  comme  un  jeune  homme.  Ce  culte  reçut  des 
ordres  religieux,  appelés  à  imiter  Joseph  dans  sa  vie  de  recueillement 
et  d'humilité,  un  développement  sensible.  Les  franciscains  en 
adoptent  solennellement  la  fête  en  1399  ;  elle  était  inscrite  en  divers 
martyrologes  depuis  la  fin  du  neuvième  siècle.  On  sait  l'extraordi- 
naire dévotion  du  vénérable  chancelier  Gerson  pour  saint  Joseph,  «  et 
tout  ce  qu'il  fit  pour  la  propager  dans  l'Église,  entre  autres,  son  poème 
de  Josephina,  en  douze  chants.  Sainte  Thérèse  ne  devait  pas  moins 
faire,  au  siècle  suivant.  Le  premier  ofiSce  composé  en  l'honneur  du 
saint  patriarche  parait  dater  de  1481  environ  :  c'est  l'époque  où  la  fête 
est  instituée  à  Rome;  en  1621,  Grégoire  XV  la  déclare  obligatoire, 
avec  interdiction  des  œuvres  serviles  et  fermeture  des  tribunaux. 
Quant  à  l'office  actuel,  il  est  du  pape  Clément  XI  et  de  l'année  1714.  n 
Ces  détails  historiques  occupent  la  première  partie  de  l'ouvrage 
(vraie  perle  de  typographie,  disons-le  en  passant).  La  seconde  pré- 
sente le  texte  du  premier  office  connu  en  l'honneur  de  saint  Joseph, 
et  qui  est  vraisemblablement  l'œuvre  des  religieux  carmes,  toi^ours 


—  203  — 

les  premiers  dans  ce  culte.  Presque  tout  y  est  en  vers  rimés^  introït, 
graduel,  antiennes  des  vêpres,  etc.  De  la  piété,  de  la  naïveté  tant 
qu*on  voudra;  mais,  en  vérité,  quelle  indigence  littéraire,  àTexcep- 
tion  des  leçons  de  matines  et  des  oraisons  I  Est-ce  que,  pour  parler  à 
DieU;  ou  des  choses  saintes,  il  ne  convient  pas  d*emprunter  àlalangue, 
au  verbe  humain,  toute  sa  noblesse,  au  génie  de  l'homme  ses  plus 
belles  élévations?  M.  Tabbé  Lucot  a  recueilli  dans  son  livre  plusieurs 
autres  offices,  la  messe  composée  par  Gerson,  une  hymne  de 
la  liturgie  grecque,  des  proses  d'Allemagne  des  quinzième  et  dix- 
huitième  siècles,  une  préface  du  rite  ambroisien,  des  hymnes,  des 
litanies,  des  antiennes.  Il  j  a  là  un  travail  d'érudit  et  de  chercheur 
qui  mérite  tout  éloge.  Ce  qui  regarde  la  piété  proprement  dite  se 
compose  de  prières  anciennes  pleines  d'onction  et  de  charme  :  prose 
de  Chartres  en  1529  ;  antienne  rimée  du  quinzième  siècle  ;  liturgies 
de  Paris,  Strasbourg,  Reims,  1504  et  1545;  de  Sens,  1593;  oraison 
de  Fontevrault,  1595;  litanies  de  Châlons,  1638,  prose  de  l'^bbaje 
de  Sainte-Geneviève,  1665;  Heures  royales,  1667;  de  la  princesse  de 
Conti,  1657;  etc. 

—  Bien  peu  d'ouvrages  de  spiritualité,  en  notre  temps,  ont  trouvé 
un  accueil  comparable  à  celui  qui  continue  d'être  fait  aux  divers 
volumes  sortis  de  la  plume  de  l'auteur  inconnu  des  Avis  spiritueb. 
Les  âmes  mettent  leurs  délices  dans  cette  exposition  approfondie,  et 
en  même  temps  touchante  et  pleine  de  sève,  des  principes  de  l'union 
à  Dieu  par  la  séparation  des  objets  sensibles  et  par  le  combat  contre  les 
déchéances  de  la  nature.  L'Évangile  proposé  à  ceux  qui  souffrent  est 
digne  en  tout  de  ses  aînés.  Ces  pages,  nous  dit  Tauteur  en  com- 
mençant, ont  été  primitivement  écrites  pour  une  personne  que  la 
main  de  Dieu  avait  touchée  d*une  des  plus  grandes  épreuves  de  cette 
vie  :  elle  y  a  trouvé  un  secours  dans  les  instants  de  faiblesse  où 
rame  la  plus  courageuse  se  sent  quelquefois  plongée.  Nous  espérons 
que  d'autres  pourront  également  s'en  servir  avec  profit  spirituel  : 
car  l'âme  souffrante  ou  affligée  a  besoin  d'un  aliment  spécial.  La 
prière  et  la  méditation  mettent  cet  aliment  toujours  à  notre  portée. 
—  Or,  l'Évangile  s'adresse  aux  âmes  de  bonne  volonté,  et  princi- 
palement aux  pauvres,  aux  petits,  aux  affligés;  il  est  par  excellence 
le  livre  de  ceux  qui  souffrent;  et,  quand  on  Ta  lu  à  travers  les  larmes, 
médité  sous  la  pression  de  la  croix,  il  s'en  échappe  une  magnifique  et 
fortifiante  lumière.  On  y  puise,  avec  la  résignation,  un  courage  qui 
rend  capable  des  plus  généreux  sacrifices.  C'est  pourquoi,  prenant  le 
récit  sacré,  l'auteur  le  divise  en  autant  de  semaines  et  de  jours  qu'il 
y  en  a  dans  l'année;  il  suit  pas  à  pas  Notre-Seigneur  depuis  sa  nais- 
sance jusqu'à  son  immolation,  se  conformant  autant  que  possible  à 
Tordre  de  l'année  liturgiquei  et  de  chacun  de  ces  mystères,  de  ces 


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faits,  de  ces  paroles,  de  ces  pai^aboles,  il  fait  sortir  Tinstraction 
capable  de  consoler  et  de  raviver  un  cœar  endolori.  Point  de  lon- 
gueurs, point  de  phrases  :  le  sujet  indiqué  en  peu  de  mots,  puis  la 
doctrine  de  consolation  tirée  clairement,  et  enfin  une  élévation  à  Dieu 
comme  corollaire  et  conséquence  pratiquée.  On  ne  saurait  dire  tout  ce 
qu'il  7  a  de  pensées  élevées,  d'aperçus  heureux,  d'effluves  de  piété» 
dans  un  volume  assez  considérable  rédigé  tout  entier  sur  ce  pro- 
gramme. Les  fêtes  n'ont  pas  été  omises.  Les  Actes  des  Apôtres  sont 
commentés  comme  le  reste  de  l'Évangile.  Une  simple  citation,  afin  de 
faire  mieux  saisir  le  genre  du  livre  :  —  «  Le  parfum  n'est  odoriférant 
qu'autant  qu'il  brûle  :  ainsi  je  ne  serai  la  bonne  odeur  de  Jésus-Christ 
qu'autant  que  son  amour  débordera  de  mon  cœur.  Cet  amour  donne 
aux  vertus  la  subtilité  de  l'encens.  J'aspire  avec  délices  l'Eucharistie, 
qui  me  parfume  de  la  douceur,  de  la  patience,  de  Thumilité  de  Jésus, 
dans  Tanéantissement  perpétuel  où  il  se  réduit  pour  la  gloire  de  son 
Père  et  pour  mon  amour.  Mais,  après  avoir  recueilli  ces  parfums,  je 
dois  à  mon  tour  les  répandre.  Le  premier  est  celui  de  la  piété  :  il  n'y 
a  rien  de  plus  extensible  que  la  vraie  dévotion.  Le  second  est  le 
parfum  de  la  patience  :  il  n'y  en  a  pas  de  plus  fort  et  de  plus  doux  ; 
pour  moi  il  peut  être  continuel,  car  j'ai  toujours  occasion  de  l'exhaler. 
Le  troisième  est  celui  du  détachement  :  la  souffrance  m'avertit  d'être 
toujours  prêt  à  quitter  ce  monde.  Je  demanderai  à  Notre-Seigneur 
de  cheminer,  entre  le  tabernacle  et  la  croix,  vers  l'autel  sacré  où 
s'immolent  avec  lui  les  saintes  victimes  de  son  amour  et  de  sa  croix, 
mais  dans  l'extase  de  la  vision  divine  (p.  353).  »  Tout  l'ouvrage  est  à 
cette  hauteur. 

—  A  Tonneins^  M.  Tabbé  Joly,  curé  de  la  paroisse  de  Saint-Pierre, 
prononçait  naguère  une  suite  de  discours  dont  il  vient  de  faire  impri- 
mer la  seconde  édition,  sous  ce  titre  :  Le  Règne  de  Jésus-Christ  et  la 
question  sociale,  à  V occasion  des  malheurs  de  la  France,  Touché  de  ces 
effroyables  doctrines  répandues  dans  les  centres  ouvriers  par  une  presse 
odieuse  et  d'indignes  émissaires,  il  a  jugé  de  son  devoir  d'aborder  ces 
matières  du  haut  de  la  chaire,  de  montrer  le  néant  des  séduisantes 
promesses  et  l'infamie  de  tant  de  calomnies  colportées  contre 
l'Église  catholique.  C'était  côtoyer  de  très-prés  la  politique,  s'expo- 
ser à,  des  interprétations  hostiles  :  ces  considérations  ne  l'ont  point 
fait  changer  de  dessein,  et  il  a  eu  raison.  Outre  la  prudence  qu'il  sait 
mettre  dans  ses  paroles,  la  politique,  à  ces  hauteurs,  n'est  que  de  la 
morale,  et  Ton  sait  quelle  espèce  de  gens  en  prétend  éloigner  le 
ministre  de  la  religion.  Nous  voudrions  que  cette  pensée  eût  été  plus 
fermement  accentuée  dans  sa  neuvième  conférence,  et  que,  comme 
précaution  oratoire,  il  n'eût  pas  rangé  tous  les  partis  sur  la  même 
ligne  (p.  116)  :  car  enfin,  il  y  a  ici-bas  des  hommes  qui  défendent  la 


—  203  — 

vérité  sociale  et  Téternelle  justice,  et  ily  en  a  qui  leur  font  la  guerre  : 
on  appelle  ces  deux  écoles  différentes  des  partis  :  comment  tenir  entre 
eux  la  balance  égale  ?  Nos  ennemis  nous  appellent  bien  le  parti  catho- 
liquel  A  ce  point  do  vue,  Tindifférence  pour  les  partis  est  une  abdica- 
tion et  comme  une  apostasie.  L'essentiel  est  d'être  du  bon  côté.  Mais 
nous  ne  relevons  qu'en  passant  cette  erreur,  sur  laquelle  l'orateur 
n'insiste  guère,  et  que  dément  tout  son  livre.  —  Dieu  châtie  les 
peuples  quand  ils  l'ont  mérité  ;  de  ces  châtiments  il  faut  tirer  profit  ; 
c'est-à-dire  régénération,  et  non  point  occasion  de  blasphème  :  telle 
est  la  pensée  dominante  de  ces  dix-neuf  instructions.  Après  des  con- 
sidérations préliminaires  sur  l'opposition  que  rencontre  ordinairement 
la  vérité  parmi  les  hommes,  M.  l'abbé  Joly  s'applique  à  démontrer 
que  nos  cruels  et  immenses  revers  sont  une  punition,  et  que  Dieu  a 
bien  pu  se  servir  de  la  Prusse  hérétique  pour  cette  œuvre  rigoureuse, 
sans,  pour  cela  donner  gain  de  cause  à  l'égarement  protestant. 
Les  peuples,  ainsi  que  l'a  remarqué  saint  Augustin,  n'ont  point  d'éter- 
nité comme  les  individus  :  c'est  ici-bas  qu'ils  sont  collectivement 
châtiés  ou  récompensés.  Or,  quelles  sont  les  infidélités  dont  la  France 
s'est  rendue  coupable  ?  La  liste  en  est,  hélas  I  facile  à  dresser  :  foi 
amoindrie,  diminution  de  la  vertu  dans  toutes  les  classes,  profanation 
effrontée  du  dimanche  et  des  fêtes;  à  quoi  il  eût  fallu  ajouter  Thor^ 
reur  du  blasphème,  universellement  répandu  depuis  la  Révolution. 
Ces  causes  attiraient  autrefois  la  colère  de  Dieu  sur  les  Juifs. 
Mais  il  est  un  péché  qui  est  plus  spécialement  le  péché  des  peuples, 
un  péché  où  notre  pays  a  roulé^  et  dans  lequel  on  peut  voir  la  raison 
plus  particulière,  plus  immédiate^  de  nos  calamités  publiques  :  le  péché 
social,  par  lequel  les  droits  de  Dieu  sur  le  gouvernement  de  ce  monde 
ont  été  repoussés  et  niés.  L'État,  chez  nous,  ne  reconnaît  plus  Jésus- 
Christ,  ne  tient  pas  compte  de  Dieu,  légifère  en-dehors  de  Dieu,  et, 
non  content  de  cette  extrémité,  semble  travailler  à  soustraire  à  Dieu 
la  famille  comme  famille,  et  les  individus  qui  la  composent.  Le  main- 
tien d'un  tel  état  de  choses,  c'est  la  mort  à  bref  délai,  c'est,  en  tout 
cas,  la  cause  incessante  et  pressante  du  châtiment.  —  Est-il  temps  de 
revenir  et  reste-t-il  quelque  espérance  ?  Oui.  Ici  (p.  101,  8'  instruc- 
tion), l'orateur  part  de  ce  texte  de  la  Sagesse  :  Sanabiles  fecit  {Deus) 
nationes  orbis  terrarum;  qu'il  traduit  :  «  Dieu  a  fait  les  nations  guéris- 
sables. »  Ce  n'est  point  le  sens  exact  de  ce  verset,  trop-  souvent 
invoqué  dans  le  même  but,  et  qui  signifie  autre  chose,  comme  on  peut 
s'en  assurer  auprès  des  traducteurs  et  des  commentateurs  de  quelque 
poids.  La  thèse  n'en  souffre  point,  d'ailleurs,  et  M.  l'abbé  Jolj  afiSrme 
légitimement  que  le  salut  est  à  notre  disposition,  et  que  l'unique  con- 
dition en  est  le  retour  au  règne  de  Jésus-Christ.  Nous  apprenons  donc 
en  quoi  consiste  ce  règne,  et  comment  nous  incombe  le  devoir  de  con- 


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faits,  de  ces  paroles,  de  ces  pafaboles,  il  fait  sortir  l'instruction 
capable  de  consoler  et  de  raviver  un  cœur  endolori.  Point  de  lon- 
gueurs, point  de  phrases  :  le  sujet  indiqué  en  peu  de  mots,  puis  la 
doctrine  de  consolation  tirée  clairement,  et  enfin  une  élévation  à  Dieu 
comme  corollaire  et  conséquence  pratique.  On  ne  saurait  dire  tout  ce 
qu'il  7  a  de  pensées  élevées,  d'aperçus  heureux,  d*ef9uves  de  piété» 
dans  un  volume  assez  considérable  rédigé  tout  entier  sur  ce  pro- 
gramme. Les  fêtes  n'ont  pas  été  omises.  Les  Actes  des  Apôtres  sont 
commentés  comme  le  reste  de  l'Evangile.  Une  simple  citation,  afin  de 
faire  mieux  saisir  le  genre  du  livre  :  —  «  Le  parfum  n'est  odoriférant 
qu'autant  qu'il  brûle  :  ainsi  je  ne  serai  la  bonne  odeur  de  Jésus-Christ 
qu'autant  que  son  amour  débordera  de  mon  cœur.  Cet  amour  donne 
aux  vertus  la  subtilité  de  l'encens.  J'aspire  avec  délices  l'Eucharistie, 
qui  me  parfume  de  la  douceur,  de  la  patience,  de  l'humilité  de  Jésus, 
dans  l'anéantissement  perpétuel  où  il  se  réduit  pour  la  gloire  de  son 
Père  et  pour  mon  amour.  Mais,  après  avoir  recueilli  ces  parfums,  je 
dois  à  mon  tour  les  répandre.  Le  premier  est  celui  de  la  piété  :  il  n'y 
a  rien  de  plus  extensible  que  la  vraie  dévotion.  Le  second  est  le 
parfum  de  la  patience  :  il  n'y  en  a  pas  de  plus  fort  et  de  plus  doux; 
pour  moi  il  peut  être  continuel,  car  j'ai  toujours  occasion  de  l'exhaler. 
Le  troisième  est  celui  du  détachement  :  la  souffrance  m'avertit  d'être 
toujours  prêt  à  quitter  ce  monde.  Je  demanderai  à  Notre-Seigneur 
de  cheminer,  entre  le  tabernacle  et  la  croix,  vers  l'autel  sacré  où 
s'immolent  avec  lui  les  saintes  victimes  de  son  amour  et  de  sa  croix, 
mais  dans  Textase  de  la  vision  divine  (p.  353).  »  Tout  l'ouvrage  est  à 
cette  hauteur. 

-—  A  Tonneins^  M.  l'abbé  Joly,  curé  de  la  paroisse  de  Saint-Pierre, 
prononçait  naguère  une  suite  de  discours  dont  il  vient  de  faire  impri- 
mer la  seconde  édition,  sous  ce  titre  :  Le  Règne  de  Jésus-Christ  et  la 
question  sociale,  à  V occasion  des  malheurs  de  la  France,  Touché  de  ces 
effroyables  doctrines  répandues  dans  les  centres  ouvriers  par  une  presse 
odieuse  et  d'indignes  émissaires,  il  a  jugé  de  son  devoir  d'aborder  ces 
matières  du  haut  de  la  chaire,  de  montrer  le  néant  des  séduisantes 
promesses  et  l'infamie  de  tant  de  calomnies  colportées  contre 
l'Eglise  catholique.  C'était  côtoyer  de  très-près  la  politique,  s'expo- 
ser à  des  interprétations  hostiles  :  ces  considérations  ne  l'ont  point 
fait  changer  de  dessein,  et  il  a  eu  raison.  Outre  la  prudence  qu'il  sait 
mettre  dans  ses  paroles,  la  politique,  à  ces  hauteurs,  n'est  que  de  la 
morale,  et  Ton  sait  quelle  espèce  de  gens  en  prétend  éloigner  le 
ministre  de  la  religion.  Nous  voudrions  que  cette  pensée  eût  été  plus 
fermement  accentuée  dans  sa  neuvième  conférence,  et  que^  comme 
précaution  oratoire,  il  n'eût  pas  rangé  tous  les  partis  sur  la  même 
ligne  (p.  116)  :  car  enfin,  il  y  a  ici-bas  des  hommes  qui  défendent  la 


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vérité  sociale  et  l'éternelle  justice,  et  il  y  en  a  qui  leur  font  la  guerre  : 
on  appelle  ces  deux  écoles  différentes  des  paî'ti's  :  comment  tenir  entre 
eux  la  balance  égale  ?  Nos  ennemis  nous  appellent  bien  le  parti  catko- 
lique!  A  ce  point  do  vue,  l'indifférence  pour  les  partis  est  une  abdica- 
tion et  comme  une  apostasie,  ^essentiel  est  d'être  du  bon  côté.  Mais 
nous  ne  relevons  qu*en  passant  cette  erreur,  sur  laquelle  l'orateur 
n'insiste  guère,  et  que  dément  tout  son  livre.  —  Dieu  châtie  les 
peuples  quand  ils  l'ont  mérité  ;  de  ces  châtiments  il  faut  tirer  profit  ; 
c'est-à-dire  régénération,  et  non  point  occasion  de  blasphème  :  telle 
est  la  pensée  dominante  de  ces  dix-neuf  instructions.  Après  des  con- 
sidérations pçéliminaires  sur  l'opposition  que  rencontre  ordinairement 
la  vérité  parmi  les  hommes,  M.  Tabbé  Jolj  s'applique  à  démontrer 
que  nos  cruels  et  immenses  revers  sont  une  punition,  et  que  Dieu  a 
bien  pu  se  servir  de  la  Prusse  hérétique  pour  cette  œuvre  rigoureuse, 
sans,  pour  cela  donner  gain  de  cause  à  l'égarement  protestant. 
Les  peuples,  ainsi  que  l'a  remarqué  saint  Augustin,  n'ont  point  d'éter- 
nité comme  les  individus  :  c'est  ici-bas  qu'ils  sont  collectivement 
châtiés  ou  récompensés.  Or,  quelles  sont  les  infidélités  dont  la  France 
s'est  rendue  coupable  ?  La  liste  en  est,  hélas  I  facile  à  dresser  :  foi 
amoindrie,  diminution  de  la  vertu  dans  toutes  les  classes,  profanation 
effrontée  du  dimanche  et  des  fêtes;  à  quoi  il  eût  fallu  ajouter  Thor- 
reur  du  blasphème,  universellement  répandu  depuis  la  Révolution. 
Ces  causes  attiraient  autrefois  la  colère  de  Dieu  sur  les  Juifs. 
Mais  il  est  un  péché  qui  est  plus  spécialement  le  péché  des  peuples, 
un  péché  où  notre  pays  a  roulé^  et  dans  lequel  on  peut  voir  la  raison 
plus  particulière,  plus  immédiate^  de  nos  calamités  publiques  :  le  péché 
social,  par  lequel  les  droits  de  Dieu  sur  le  gouvernement  de  ce  monde 
ont  été  repoussés  et  niés.  L'État,  chez  nous,  ne  reconnaît  plus  Jésus- 
Christ,  ne  tient  pas  compte  de  Dieu,  légifère  en-dehors  de  Dieu,  et, 
non  content  de  cette  extrémité,  semble  travailler  à  soustraire  à  Dieu 
la  famille  comme  famille,  et  les  individus  qui  la  composent.  Le  main- 
tien d'un  tel  état  de  choses,  c'est  la  mort  à  bref  délai,  c'est,  en  tout 
cas,  la  cause  incessante  et  pressante  du  châtiment.  —  Est-il  temps  de 
revenir  et  reste-t-il  quelque  espérance?  Oui.  Ici  (p.  101,  8*  instruc- 
tion), l'orateur  part  de  ce  texte  de  la  Sagesse  :  Sanabiles  fecit  {Deus) 
nationes  orbis  terrarum;  qu'il  traduit  :  «  Dieu  a  fait  les  nations  guéris- 
sables. ))  Ce  n'est  point  le  sens  exact  de  ce  verset,  trop*  souvent 
invoqué  dans  le  même  but,  et  qui  signifie  autre  chose,  comme  on  peut 
s'en  assurer  auprès  des  traducteurs  et  des  commentateurs  de  quelque 
poids.  La  thèse  n'en  souffre  point,  d'ailleurs,  et  M.  l'abbé  Joljr  affirme 
légitimement  que  le  salut  est  à  notre  disposition,  et  que  l'unique  con- 
dition en  est  le  retour  au  règne  de  Jésus-Christ.  Nous  apprenons  donc 
en  quoi  consiste  ce  règne^  et  comment  nous  incombe  le  devoir  de  con- 


—  204  — 

faits,  de  ces  paroles,  de  ces  paraboles,  il  fait  sortir  l'instruction 
capable  de  consoler  et  de  raviver  un  cœur  endolori.  Point  de  lon- 
gueurs, point  de  phrases  :  le  sujet  indiqué  en  peu  de  mots,  puis  la 
doctrine  de  consolation  tirée  clairement,  et  enfin  une  élévation  à  Dieu 
comme  corollaire  et  conséquence  pratiqi^e.  On  ne  saurait  dire  tout  ce 
qu'il  7  a  de  pensées  élevées,  d'aperçus  heureux,  d'effluves  de  piété» 
dans  un  volume  assez  considérable  rédigé  tout  entier  sur  ce  pro- 
gramme. Les  fêtes  n'ont  pas  été  omises.  Les  Actes  des  Apôtres  sont 
commentés  comme  le  reste  de  l'Évangile.  Une  simple  citation,  afin  de 
faire  mieux  saisir  le  genre  du  livre  :  —  «  Le  parfum  n'est  odoriférant 
qu'autant  qu'il  brûle  :  ainsi  je  ne  serai  la  bonne  odeur  de  Jésus-Christ 
qu'autant  que  son  amour  débordera  de  mon  cœur.  Cet  amour  donne 
aux  vertus  la  subtilité  de  l'encens.  J'aspire  avec  délices  l'Eucharistie, 
qui  me  parfume  de  la  douceur,  de  la  patience,  de  l'humilité  de  Jésus, 
dans  l'anéantissement  perpétuel  où  il  se  réduit  pour  la  gloire  do  son 
Père  et  pour  mon  amour.  Mais,  après  avoir  recueilli  ces  parfums,  je 
dois  à  mon  tour  les  répandre.  Le  premier  est  celui  de  la  piété  :  il  n'y 
a  rien  de  plus  extensible  que  la  vraie  dévotion.  Le  second  est  le 
parfum  de  la  patience  :  il  n'y  en  a  pas  de  plus  fort  et  de  plus  doux  ; 
pour  moi  il  peut  être  continuel,  car  j'ai  toujours  occasion  de  l'exhaler. 
Le  troisième  est  celui  du  détachement  :  la  souffrance  m'avertit  d'être 
toujours  prêt  à  quitter  ce  monde.  Je  demanderai  à  Notre-Seigneur 
de  cheminer,  entre  le  tabernacle  et  la  croix,  vers  l'autel  sacré  où 
s'immolent  avec  lui  les  saintes  victimes  de  son  amour  et  de  sa  croix, 
mais  dans  l'extase  de  la  vision  divine  (p.  353).  »  Tout  l'ouvrage  est  à 
cette  hauteur. 

—  À  Tonneins^  M.  l'abbé  Joly,  curé  de  la  paroisse  de  Saint-Pierre, 
prononçait  naguère  une  suite  de  discours  dont  il  vient  de  faire  impri- 
mer la  seconde  édition,  sous  ce  titre  :  Le  Règne  de  Jésus-Christ  et  la 
question  sociale,  à  l'occasion  des  malheurs  de  la  France.  Touché  de  ces 
effroyables  doctrines  répandues  dans  les  centres  ouvriers  par  une  presse 
odieuse  et  d'indignes  émissaires,  il  a  jugé  de  son  devoir  d'aborder  ces 
matières  du  haut  de  la  chaire,  de  montrer  le  néant  des  séduisantes 
promesses  et  l'infamie  de  tant  de  calomnies  colportées  contre 
l'Eglise  catholique.  C'était  côtoyer  de  très-près  la  politique,  s'expo- 
ser &  des  interprétations  hostiles  :  ces  considérations  ne  l'ont  point 
fait  changer  de  dessein,  et  il  a  eu  raison.  Outre  la  prudence  qu'il  sait 
mettre  dans  ses  paroles,  la  politique,  à  ces  hauteurs,  n'est  que  de  la 
morale,  et  Ton  sait  quelle  espèce  de  gens  en  prétend  éloigner  le 
ministre  de  la  religion.  Nous  voudrions  que  cette  pensée  eût  été  plus 
fermement  accentuée  dans  sa  neuvième  conférence,  et  que,  comme 
précaution  oratoire,  il  n'eût  pas  rangé  tous  les  partis  sur  la  même 
ligne  (p.  116)  :  car  enfin,  il  y  a  ici-bas  des  hommes  qui  défendent  la 


—  20S  — 

vérité  sociale  et  Téternelle  justice,  et  il  y  en  a  qui  leur  font  la  guerre  : 
on  appelle  ces  deux  écoles  différentes  des  partis  :  comment  tenir  entre 
eux  la  balance  égale?  Nos  ennemis  nous  appellent  bien  le  parti  catho- 
liquel  A  ce  point  do  vue,  l'indifférence  pour  les  partis  est  une  abdica- 
tion et  comme  une  apostasie.  L'essentiel  est  d'être  du  bon  côté.  Mais 
nous  ne  relevons  qu'en  passant  cette  erreur,  sur  laquelle  l'orateur 
n'insiste  guère,  et  que  dément  tout  son  livre.  —  Dieu  châtie  les 
peuples  quand  ils  l'ont  mérité  ;  de  ces  châtiments  il  faut  tirer  profit  ; 
c'est-à-dire  régénération,  et  non  point  occasion  de  blasphème  :  telle 
est  la  pensée  dominante  de  ces  dix-neuf  instructions.  Après  des  con- 
sidérations préliminaires  sur  l'opposition  que  rencontre  ordinairement 
la  vérité  parmi  les  hommes,  M.  l'abbé  Jolj  s'applique  à  démontrer 
que  nos  cruels  et  immenses  revers  sont  une  punition,  et  que  Dieu  a 
bien  pu  se  servir  de  la  Prusse  hérétique  pour  cette  œuvre  rigoureuse, 
sans,  pour  cela  donner  gain  de  cause  à  l'égarement  protestant. 
Les  peuples,  ainsi  que  l'a  remarqué  saint  Augustin,  n'ont  point  d'éter- 
nité comme  les  individus  :  c'est  ici-bas  qu'ils  sont  collectivement 
châtiés  ou  récompensés.  Or,  quelles  sont  les  infidélités  dont  la  France 
s'est  rendue  coupable  ?  La  liste  en  est,  hélas  I  facile  à  dresser  :  foi 
amoindrie,  diminution  de  la  vertu  dans  toutes  les  classes,  profanation 
effrontée  du  dimanche  et  des  fêtes;  à  quoi  il  eût  fallu  ajouter  l'hor- 
reur du  blasphème,  universellement  répandu  depuis  la  Révolution. 
Ces  causes  attiraient  autrefois  la  colère  de  Dieu  sur  les  Juifs. 
Mais  il  est  un  péché  qui  est  plus  spécialement  le  péché  des  peuples, 
un  péché  où  notre  pays  a  roulé,  et  dans  lequel  on  peut  voir  la  raison 
plus  particulière,  plus  immédiate,  de  nos  calamités  publiques  :  le  péché 
social,  par  lequel  les  droits  de  Dieu  sur  le  gouvernement  de  ce  monde 
ont  été  repoussés  et  niés.  L'État,  chez  nous,  ne  reconnaît  plus  Jésus- 
Christ,  ne  tient  pas  compte  de  Dieu,  légifère  en-dehors  de  Dieu,  et, 
non  content  de  cette  extrémité,  semble  travailler  à  soustraire  à  Dieu 
la  famille  comme  famille,  et  les  individus  qui  la  composent.  Le  main- 
tien d'un  tel  état  de  choses^  c'est  la  mort  à  bref  délai,  c'est,  en  tout 
cas,  la  cause  incessante  et  pressante  du  châtiment.  —  Est-il  temps  de 
revenir  et  reste-t-il  quelque  espérance?  Oui.  Ici  (p.  101,  8'  instruc- 
tion), l'orateur  part  de  ce  texte  de  la  Sagesse  :  Sanabiles  fecit  {Deus) 
nationes  orbis  terrarum;  qu'il  traduit  :  «  Dieu  a  fait  les  nations  guéris- 
sables. ))  Ce  n'est  point  le  sens  exact  de  ce  verset,  trop-  souvent 
invoqué  dans  le  même  but,  et  qui  signifie  autre  chose,  comme  on  peut 
s'en  assurer  auprès  des  traducteurs  et  des  commentateurs  de  quelque 
poids.  La  thèse  n'en  souffre  point,  d'ailleurs,  et  M.  l'abbé  Joly  afiirme 
légitimement  que  le  salut  est  à  notre  disposition,  et  que  l'unique  con- 
dition en  est  le  retour  au  règne  de  Jésus-Christ.  Nous  apprenons  donc 
en  quoi  consiste  ce  règne^  et  comment  nous  incombe  le  devoir  de  con- 


—  200  — 

courir  à  un  tel  rétablissement.  En  premier,  il  faut  agir  sans  nous 
laisser  dérouter  par  l'égoïsme  ambiant  ou  par  le  respect  humain  ; 
il  nous  faut  agir,  tous,  parfaitement  convaincus  de  la  lutte  inévitable, 
séculaire,  indestructible,  entre  le  bien  et  le  mal;  il  faut  agir  en  nous 
groupant,  Tassociation  décuplant  les  forces;  il  faut  agir,  mais 
avec  un  plan  aux  lignes  définies,  c'est-à-dire  :  Jésus- Christ  est  roi  de 
la  société,  mais  aussi  de  la  famille,  de  Tindividu,  et  ces  trois  règnes 
sont  liés  entre  eux  par  d'intimes  relations,  sont  inséparables,  n*en 
font  qu'un  dans  la  réalité.  Dès  lors,  au  lieu  de  s'adresser  directement 
à  rÉtat,  besogne  inabordable  présentement,  nous  travaillerons  à  faire 
régner  Jésus-Christ  sur  Tindividu  et  sur  la  famille,  et  ^  nos  mœurs 
ainsi  régénérées  la  réforme  passera  d*elle-même  dans  nos  institutions. 
Il  faut  que  Thomme,  le  père,  le  mari,  revienne  au  christianisme,  non 
à  un  christianisme  conventionnel,  de  pure  théorie^  mais  au  chris- 
tianisme de  pratique,  descendant  de  Fesprit  dans  les  mœurs; 
Thomme,  le  mari,  le  père,  doit  reprendre  sa  place  en  tête  du  mouve- 
ment religieux  de  l'humanité .  —  Suivent  des  conseils,  des  indications, 
pour  préparer,  puis  pour  amener  ce  résultat.  Nous  signalerons  les 
deux  dernières  conférences,  où  sont  rappelées  et  flétries  les  armes 
dont  se  sert  la  presse  impie,  avec  d'utiles  avis  sur  la  manière  de  se 
préserver  de  ses  poisons. 

—  La  dissipation  de  Tesprit  figure  en  bonne  place  parmi  les  carac- 
tères qui  distinguent  notre  temps.  Chose  remarquable,  cependant  : 
nous  ne  connaissons  pas  d'époque  où  l'on  ait  publié  autant  de  cours  de 
méditations,  et  où  ces  livres  aient  été  mieux  accueillis.  Celui  de 
M.  Tabbé  Th.  Ratisbonne,  Miettes  évangéliques,  a  droit  à  être  signalé 
parmi  les  bons.  L'auteur  ne  se  préoccupe  pas  du  nombre  de  ses  devan- 
ciers. L'Église,  observe-t-il,  est  comme  un  jardin  où  se  diversifient, 
avec  une  inépuisable  fécondité,  les  plantes  nourrissantes  ou  curatives 
qui  se  renouvellent  avec  les  saisons  pour  répondre  à  des  besoins  nou- 
veaux. Son  intention,  à  lui,  est  principalement  d'exercer  l'esprit  de 
prière;  et,  à  cet  effet,  il  renferme  dans  le  moins  de  mots  possible  des 
vérités  substantielles,  capables  de  fortifier  les-àmes,  de  les  éclairer, 
de  les  maintenir  en  harmonie  avec  l'Église.  Il  no  s'agit  point  d'une 
distribution  graduelle  des  sujets,  sur  un  plan  d'enseignement  ou  même 
d'exhortation  doctrinale.  On  prend  l'Évangile  du  jour,  en  suivant 
l'ordre  des  dimanches  de  l'année,  et,  du  texte  on  tire,  pour  la  nour- 
riture de  l'âme,  quelques  miettes*  Hâtons-nous  de  dire  que  ces  miettes, 
au  nombre  de  deux  par  méditation,  sont  fort  substantielles  et  valent 
l'aliment  le  plus  riche.  La  prière,  l'habitude  de  l'union  à  Dieu,  qu*en- 
visage  avant  tout  le  P.  Ratisbonne,  se  réduit  à  aimer  Dieu,  suivant 
le  premier  des  préceptes  :  et  c'est  pourquoi  l'ouvrage  ramène  con- 
stamment à  ces  pensées  d'amour  divin,  a  L'avancement,  le  progrès 


—  ^7  - 

spirituel  ne  dëpond  ni  de  la  multiplication  ni  de  la  longueur  des 
prières,  il  dépend  des  communications  intimes  et  incessantes  arec 
Jésus-Christ»  le  saint  des  saints.  Ce  n'est  pas  par  les  œuvres  exté- 
rieures, c'est  par  les  affections,  les  aspirations  et  les  élévations  de 
notre  âme  que  nous  allons  à  Dieu.  Non  pedibus  sed  affectibus,  dit 
saint  Augustin  (p.  iv).  »  —  Un  supplément  a  été  ajouté  pour  les 
principales  fêtes.  Le  manuel  est  donc  aussi  complet  qu'on  le  peut 
souhaiter.  Rédigé  d'abord  pour  les  religieuses  de  Notre-Dame  de 
Sion,  il  ne  fera  pas  un  moindre  bien  dans  les  autres  communautés 
et  parmi  les  âmes  fidèles  qui,  vivant  dans  le  monde,  j  cherchent  les 
voies  de  la  sanctification  et  du  salut. 

—  On  doit  compter  au  nombre  des  mesures  qui  honorent  l'Assem- 
blée Nationale  actuelle  d'avoir  eufin  accordé  à  nos  soldats  ces  secours 
religieux  qui  ne  leur  font  défaut  dans  aucune  armée  de  peuple  civiliéé, 
et  qui  étaient,  par  exemple^  si  sagement  et  si  puissamment  organisés 
chez  nos  ennemis  de  1870.  L'armée  d'Afrique  a  bénéficié ,  comme  les 
autres  (elle  en  a  plus  besoin  encore),  de  la  loi  nouvelle.  Le  25  avril 
dernier,  ses  chefs  étaient  réunis  dans  la  cathédrale  d'Alger,  et 
Mgr  l'Archevêque  prononçait  devant  eux  un  discours  qui  a  été  impri- 
mé, et  qui  peut  passer  pour  une  œuvre  merveilleuse  d'éloquence  et  de 
vérité.  Si  nous  en  parlons  ici^  c'est  que  là,  dans  ce  discours  et  dans 
cette  brochure,  est  reproduite  à  grands  traits  toute  l'histoire  de 
l'Afrique  chrétienne.  Le  prélat  n'a  rien  écrit  encore  qui  égale  la 
beauté  de  ces  pages,  et  il  n'est  guère  possible  que  la  parole  humaine 
s'élève  plus  haut.  L'orateur  insiste  sur  le  côté  providentiel  de  notre 
conquête  africaine,  et  sur  la  mission  de  la  France  dans  ces  contrées 
si  longtemps  abandonnées  à  la  barbarie .  a  Lorsqu'une  nation  s'arme 
pour  servir  les  grandes  causes  de  l'humanité  et  de  la  justice,  lors- 
qu'elle porte  avec  elle  la  lumière  et  le  nom  de  Jésus-Christ  jusque 
dans  les  régions  barbares,  lorsque,  dans  le  sentiment  élevé  du  devoir 
elle  s'impose  le  sacrifice  de  ses  trésors  de  son  sang  pour  arracher 
un  peuple  à  la  mort,  lorsqu'elle  souffle  sur  ces  ossements  arides  et 
que  peu  à.  peu  elle  leur  rend  la  vie,  il  faut  proclamer,  dans  une  si 
généreuse  entreprise,  une  action  supérieure  à  celle  de  lliomme,  et 
confesser^  avec  le  Prophète,  que  c'est  Dieu  même  qui  inspire  ces 
courages  désintéressés  et  appelle  du  tombeau  ces  autres  Lazares 
(p.  7).  »  Nous  voudrions  reproduire  l'énergique  et  brillant  tableau 
des  ravages  exercés  par  les  pirates  algériens  sur  les  côtes  de  la  Médi- 
terranée,  celui  de  l'expédition  commandée  par  Bourmont,  ceux  de  la 
bataille  de  Stouëli  et  de  la  prise  d'Alger,  a  Vous  étiez  là,  attendant  do 
donner  vos  premiers  coups,  obscurs  encore^  mais  portant  déjà  vos 
victoires  dans  la  mâle  fierté  de  vos  regards,  capitaines  futurs  des 
grandes  guerres  de  ce  siècle  :  Lamoricière,  Changarnier^  Duvivier, 


—  -208  '— 

Damrémont,  qui  deviez  attacher  vos  noms  à  nos  batailles  africaines  ; 
Pélissier,  vainqueur  de  Séb'astopol  ;  Mac-Mahon,  soldat  intrépide 
de  Malakoff  et  de  Magenta  ;  Baraguey-d'Hilliers,  Vaillant,  Forej, 
Magnan,  Chabaud-Latour;  et  vous^  brave  Dumesnil,  qui  deviez 
écrire  cette  noble  histoire  ;  et  vous,  digne  fils  des  croisés,  Quatre- 
barbes,  qui  deviez  demander  à  la  France,  dans  ses  assises  solen- 
nelles, de  terminer  par  la  croix  cette  conquête  commencée  par 
Tépée^  et  subir  à  Ancône  une  défaite  plus  noble  que  les  plus  nobles 
victoires  (p.  17).  »  On  ne  s* arrache  pas  à  ces  pages,  et  nous  trans- 
cririons toute  la  brochure.  Ce  passnge  encore  cependant,  où  revient 
le  dessein  de  Dieu  :  «  En  nous  donnant  le  triomphe,  il  semble  que  Dieu 
s'en  montre  jaloux.  Le  drapeau  de  la  monarchie,  qui  a  guidé  nos  sol- 
dats, tombe  au  lendemain  du  jour  où  il  était  arboré  sur  les  murs  de  la 
Kasbah  ;  le  vieux  roi  qui  a  préparé  la  conquête  prend  le  chemin  de 
l'exil  ;  Bourmont  quitte  Alger  en  fugitif,  n'emportant  avec  lui^  sur 
une  barque  étrangère,  que  le  cœur  do  son  fils...  Et,  tandis  que  les 
noms  des  princes,  des  capitaines  qui  ont  pris  part  à  nos  guerres  afri- 
caines sont  restés  attachés  à  nos  villes,  à  nos  villages,  tandis  que 
nous  leur  avons  élevé  des  colonnes  et  des  statues,  aucun  hameau  ne 
garde  les  noms  de  ces  premiers  vainqueurs.  Rien  d*humain  n'a  sur- 
vécu à  leur  victoire,  et  le  seul  monument  qui  soit  resté  d'elle  est  la 
croix  (à  Staouëli)  qu'ils  ont  replantée  sur  ces  rivages  comme  un  signe 
de  pardon  et  de  vie.  Qu'on  cherche  à  cet  oubli  des  raisons  humaines, 
j'en  pourrais  trouver  moi-même,  et  je  sais  que  la  Providence  n'a  pas 
toujours  besoin  de  miracles  pour  se  fairç  entendre  de  nous;  mais  je  no 
vois  pas  moins  que  le  seul  signe  qui  soit  resté  de  la  conquête  est  un 
signe  divin,  et  que  Dieu  n'a  voulu,  durant  un  demi-siècle,  laisser  ins- 
crire à  côté  du  sien  le  nom  d'aucun  autre  vainqueur.  C'est  moi, 
semble-t-il  nous  dire,  c'est  moi  qui,  par  les  mains  de  ces  vaillants 
hommes,  ai  ouvert  ce  sépulcre  où  un  monde  était  enseveli  (p.  24).  » 
On  ne  saurait  rien  lire  de  plus  véritablement  beau  que  ce  qui  suit, 
sur  l'aveuglement  de  la  France,  qui  n'a  pas  su  reconnaître  la  divine 
hauteur  de  sa  mission,  reprendre  l'œuvre  des  Cjprien^  des  Optât,  des 
Augustin,  des  Fulgence.  Ne  devions-nous  pas,  dès  le  premier  jour, 
jeter  à  ces  montagnes  et  à  ces  vallées  le  cri  de  la  délivrance  et  lui 
dire  :  a  Afrique  chrétienne,  sors  du  tombeau  1  réunis  tes  débris  épars 
sur  tes  monts  et  dans  tes  déserts.  Reprends  ta  place  au  soleil  des 
nations,  tes  sœurs  dans  la  civilisation  et  dans  la  foi  ;  que  tes  enfants, 
apprenant  de  nouveau  ton  histoire,  sachent  que  nous  ne  sommes  venus 
à  eux  que  pour  leur  rendre  la  lumière,  la  grandeur,  l'honneur  du 
passé  !  D 

^  L'état  présent  de  la  société,  désespéré,  ou  à  peu  près,  aux  yeux 
de  la  sagesse  humaine,  se  résume  en  ces  quelques  mots  :  a  Jésus-Christ 


—  209  — 

absent  des  âmes,  de  la  famille  et  da  monde.  »  C'est  ce  que  rappelle^ 
dans  sa  préface,  Fauteur  de  Y  Union  des  chrétiens  dans  le  ccsurde  Jésus ^ 
ouvrage  plein  de  foi  et  de  tendre  piété,  et  dont  la  doctrine  est  aussi 
très-profonde.  La  condition  du  salut  pour  la  société  est  donc  le  Sauveur 
restauré,  reconnu,  adoré,  obéi,  aimé,  au  foyer  de  la  famille  et  dans 
les  institutions  publiques  ;  au  résumé,  le  sens  de  Jésus  rétabli  dans  tout 
ce  qui  intéresse  notre  vie.  Mais  par  quels  moyens  et  comment  opérer 
cette  conversion  de  toute  une  multitude  livrée  à  l'esprit  d'erreur, 
à  Tambition,  à  la  poursuite  exclusive  de  la  richesse  et  des  plaisirs  ? 
C'est  que  tous  s'unissent  dans  le  Cœur  de  Jésus  pour  y  travailler;  non 
pas  seulement  le  prêtre,  le  catéchiste,  l'apôtre,  dont  c'est  la  vocation 
et  le  devoir,  mais  tous  les  chrétiens  sans  exception,  les  plus  humbles 
comme  les  plus  forts.  Il  faut  une  croisade  universelle,  où  chacun 
gagne  autour  de  lui  des  âmes  et  s'occupe  à  convertir;  il  faut  prendre 
l'habitude  de  s'unir  et  de  s'entendre  pour  la  gloire  de  Dieu,  au  prix  de 
quelques  efforts  et  de  quelques  sacrifices,  comme  on  le  fait  pour 
assurer  l'honneur  et  les  intérêts  de  la  famille  naturelle.  —  Après  cette 
indication  du  but,  l'auteur  établit^  comme  base  de  Taction,  la  dévotion 
au  Sacré-Cœur,  dont  il  redit  les  titres  divers  à  notre  amour^  à  notre 
gratitude,  à  notre  confiance.  Puis  il  revient  à  exhorter  plus  vivement, 
sur  des  considérations  multiples,  les  fidèles  à  s'unir  ainsi  pour  un 
immense  et  courageux  apostolat  ;  et  enfin  il  leur  indique  les  disposi- 
tions intérieures  auxquelles  ils  doivent  s'attacher,  les  pratiques  de  piété 
qui  les  peuvent  maintenir,  les  vertus  qui  leur  sont  nécessaires.  Une 
note  de  la  page  135  nous  a  particulièrement  frappé,  sur  Vempreinte  de 
Dieu  dans  les  différents  ordres  de  sa  création:  il  y  a  là  de  merveil- 
leux aperçus.  Le  livre  se  termine  par  une  indication  de  l'organisation 
qui  pourrait  être  adoptée,  et  qui  parait  tout  à  fait  sage.  Un  tel  ou- 
vrage ne  doit  point  passer  sans  attirer  l'attention  des  chrétiens  zélés, 
et  les  pasteurs  y  rencontreront  pour  eux-mêmes  bien  des  instructions 
de  valeur  sur  l'art  d'atteindre  les  âmes. 

—  C'est  à  eux  seuls  que  s'adresse  un  nouveau  manuel  du  R.  P.  Mach, 
la  Manne  du  Prêtre^  véritable  vade-mecum  pour  la  prière,  l'oraison, 
l'examen  de  conscience,  les  rubriques,  etc.  Ce  qui  concerne  la  Messe 
y  est  largement  développé,  et  comme  exhortation,  et  comme  exposi- 
tion et  comme  paraphrase,  et  comme  moyens  de  célébrer  dignement. 
Il  y  a,  en  outre,  des  méditations  pour  un  mois  entier,  des  avis  éten- 
dus et  multipliés  sur  l'avancement  dans  la  vertu  et  un  très-riche 
recueil  de  pièces  pour  les  diverses  circonstances  de  la  vie  pastorale 
et  delà  vie  intérieure.  Notons  encore  des  visites  au  Saint- Sacrement, 
des  formules  nouvelles  pour  Texercice  du  chemin  de  la  croix,  et  des 
extraits  du  rituel  pour  les  bénédictions  qu'un  prêtre  est  appelé  à 
donner  d'un  instant  à  l'autre.  Il  règne  beaucoup  d'ordre  dans  le  clas- 
Sbptxmbre  1875.  T.  XIV,  14. 


sèment  des  matières.  —  Du  reste,  le  Chemin  de  la  croix  a  été  tiré  à 
part,  en  une  piqûre  très-soignée,  papier  de  Chine,  quinze  belles  gra* 
vures.  Varier  les  formules,  afin  de  remédier  à  la  froide  routine,  est 
chose  excellente. 

—  A  M.  Tabbé  A.  Gaveau,  traducteur  du  P.  Mach,  nous  deyons 
aussi  d'avoir  fait  passer  de  l'espagnol  en  français  un  précieux  traité  du 
P.  Arias  sur  les  Vertus  de  Marie  Mère  de  Dieu,  traité  appartenant  à  la 
grande  école  ascétique  qui  a  enrichi  l'Église  de  tant  de  livres  précieux, 
où  Texactitude  rigoureuse  de  la  doctrine  et  la  précision  du  langage 
sont  comme  embaumées  dans  le  parAim  de  la  plus  suave  piété.  Le 
P.  Arias  a  vécu  de  1533  à  1605.  Il  était  de  Séville,  et  saint  François 
de  Sales  met  les  opuscules  du  fervent  et  savant  religieux  au  nombre 
des  a  beaux  livres  de  dévotion  n  qu'il  conseille  à  sa  Philothée,  à  côté 
de  ceux  de  saint  Bonaventure,  de  Louis  de  Blois,  de  Grenade.  Arias  est 
solide  théologien,  et  n*avance  rien  qu'il  n*appuie  sur  TÉcriture  ou 
l'enseignement  de  l'Église.  Ici,  il  commence  par  décrire  la  vertu  dont 
il  parle,  avec  ses  degrés  différents  ;  puis,  extrayant  de  TÉvangile  les 
passages  qui  montrent  de  quelle  manière  la  Sainte  Vierge  l'a  pratiquée, 
il  les  enchâsse  dans  quelque  belle  sentence  des  Pères  ;  enfin,  il  indique 
au  lecteur  comment  il  peut  et  doit  reproduire  en  lui  cette  vertu  :  c'est 
la  conclusion  pratique.  On  parcourt  ainsi,  avec  des  subdivisions,  les 
vertus  d'humilité^  de  foi^  d'espérance,  de  charité,  de  piété,  de  bonté 
envers  les  hommes,  d'obéissance,  de  pureté,  d^amour  de  la  retraite, 
de  modestie,  de  pauvreté  volontaire,  de  patience  dans  les  afflictions. 
—  Dans  un  appendice  de  quelques  pages,  M.  Tabbé  Gaveau  a  réuni 
plusieurs  pièces  intéressantes  :  un  passage  de  saint  Bonaventure  sur 
la  circoncision  de  Notre-Seigneur,  un  cantique  de  saint  Liguori  sur  l'en- 
fance de  Jésus  bercé  par  Marie,  une  prose  latine  du  moyen  âge  sur 
la  purification  de  la  sainte  Vierge  par  Adam  de  Saint-Victor. 

—  Les  ouvrages  de  saint  Jean  de  la  Croix,  le  glorieux  coopérateur 
de  sainte  Thérèse,  sont  fort  goûtés  de  toutes  les  âmes  spirituelles  qui 
ontpu  les  connaître.  C*était,  lui  aussi,  un  maître  éminent,  de  qui  la 
vie  prêchait  encore  plus  que  les  paroles,  et  qui  avait  reçu  du  ciel  le 
don  d'entrer  dans  les  cœurs  et  de  les  émouvoir  profondément.Se8ifaxi- 
mes  et  Avis  spirituels  embrassent  à  peu  près  tout  ce  qui  regarde  l'œuvre 
de  la  sanctification.  C'est  comme  une  série  de  Bentenoes,courte8,  daireSi 
saisissantes,  appuyées  sur  des  textes  d'Écriture-Sainte.  Le  saint 
s'adresse  directement  au  lecteur  dans  le  plus  grand  nombre  des  oas« 
Les  sujets  qu'il  présente  sont  surtout  les  vertus:  le  soin  d'imiter  Jésus- 
Christ,  les  vertus  théologales,  la  crainte  de  Dieu,  l'amour  du  pro- 
chain, J'oraison,  la  vertu  de  religion,  la  patience,  la  modestie,  la  pau* 
vreté  volontaire,  l'humilité,  le  silence,  eto.  Citons  la  première  venue 
de  oes  maximes,  oomme  exemple  du  genre  et  du  mérite  du  livre  :  «^ 


—  211  — 

a  Dieu  ordonna,  dans  rancieone  loi,  quo  Taixtel  où  se  devaient  offirir 
les  sacrifices  fût  creux  et  vide  àTintérieur  :  pournous faire  comprendre, 
par  ce  symbole,  combien  il  yeut  que  notre  âme  soit  vide  de  toutes 
les  cboses  créées,  aûn  qu'il  devienne  un  autel  digne  de  la  présence  de 
sa  divine  Majesté  (p.  171).  » 

—  Le  P.  de  la  Colombière,  dont  la  cause  de  béatification  est, 
orojons-nous,  introduite  à  Rome,  fut  un  parfait  modèle  de  la 
vie  sacerdotale  et  religieuse.  Cette  vie  a  été  récemment  publiée 
et  Ton  sait  que,  choisi  miraculeusement  pour  coopérer  avec  la 
bienheureuse  Marguerite-Marie  à  rétablissement  de  la  dévotion  au 
sacré  Cœur  de  Jésus,  il  j  consacra  la  meilleure  partie  de  son  action 
apostolique.  C'est  lui  qui  le  premier  l'établit  en  Angleterre,  dès  le 
début  des  révélations  de  Paraj-le-Monial.  La  Retraite  spirituelle  qu'on 
vient  de  publier,  avec  une  introduction  sur  sa  vie  et  sur  la  dévotion 
elle-même,  forme  un  livre  de  haute  piété  qui  sera  lu  avec  empresse- 
ment. Le  F,  de  la  Colombière  ne  l'adresse  à  personne,  ne  Ta  point 
composée  pour  les  autres;  ce  sont  les  réfiexions,  les  sentiments,  les  réso* 
lutions  que  lui  inspire  une  solitude  de  trente  jours,  telle  que  la  prati- 
quent les  Pères  de  la  Compagnie  de  Jésus.  C'est  là  que  l'on  peut  voir 
tout  à  la  fois  le  degré  de  vertu  où  était  parvenue  cette  âme  d'élite, 
les  hauteurs  où  peut  atteindre  toute  âme  docile  aux  mouvements  de 
la  grâce  intérieure  et  amoureuse  de  la  perfection.  Tous  les  mjstères, 
toute  l'histoire  de  Notre-Seigneurj  sont  médités,  appliqués  à  la  vie 
du  chrétien,  en  même  temps  que  les  considérations  ordinaires  de  la 
fin  de  l'homme.  On  7  remarquera  la  justesse  des  retours  sur  soi-même, 
la  discussion  douce  mais  efficace  des  moindres  mouvements  de  la 
nature,  l'attention  pieuse  à  ne  perdre  rien  de  ceux  qui  viennent  du  ciel. 
L'on  apprendra  à  connaître  le  vrai  chemin  du  bientôt  on  se  sentira 
entraîné  à  le  parcourir  avec  une  sainte  fermeté. 

—  D'un  tout  autre  genre  est  le  petit  livre  de  M*"*  Cave,  la ,  Vierge 
Marie  et  la  Femme,  Ce  n'est  point,  dans  la  réalité,  un  cours  de  médi- 
tationSi  et  cependant  on  j  médite,  et  il  fuit  du  bien.  Nous  eussions 
voulu  que  la  langue  j  eût  été  moins  oubliée  en  vingt  endroits,  et  que 
certaines  expressions  en  fussent  absentes.  Telle  la  première  phrase 
de  rintroduction  :  a  La  Vierge  n'est  pas  ce  qu'un  monde  vulgaire 
pense  :  une  simple  fille,  pure  par  ignorance,  marchant  les  jeux 
baissés,  et  se  trouvant  mal  le  jour  de  la  mort  de  son  fils.  »  En 
vérité,  nous  ne  sachions  pas  que  jamais  la  divine  figure  de  Marie  ait 
été  réduite  à  ces  indignes  proportions  par  qui  que  ce  soit  du  monde 
le  plus  vulgaire^  à  moins  qu'au  fond  de  quelque  cabaret  un  inepte  pan- 
dour  ait  une  fois  blasphémé  sous  cette  forme.  Une  comparaison  de  la 
pages  10  pourrait  être  mal  interprétée  sur  le  dogme  de  la  présence  de 
Jésus-Christ  dans  TËucharistie.  La  voici  :  a  Comment  vojea-vous, 


—  212  — 

homme  plein  de  raison,  qu'un  chiffon  de  papier  déchiré  et  sale  a 
exactement  la  valeur  de  mille  francs  d'argent  ?  Parce  que  vous  avez 
confiance  que  la  Banque  vous  l'échangera  pour  du  bel  et  bon  or. 
Eh  bien,  noas,  nous  avons  confiance  en  Dieu  :  nous  croyons  qu'au 
ciel  rhostie  nous  est  échangée  contre  Jésus-Christ  le  fils  de  Dieu, 
qui  se  donne  tout  entier.  »  Observons  encore  (p.  185)  une  erreur  de 
détail  :  ce  n'est  point  à  la  troisième  heure  du  jour,  mais  à  la  neuvième^ 
que  fut  crucifié  le  Seigneur.  —  La  marche  de  Tauteur  est  de  partager 
la  vie  de  la  Sainte  Vierge  en  sept  époques^  envisagées  comme  ses 
joies  et  ses  gloires,  et  d'en  rapprocher  chacune  des  périodes  de  la  vie 
de  la  femme,  principalement  dans  sa  qualité  de  mère  de  famille.  Elle 
sait  heureusement  peindre,  et  ses  tableaux  se  relèvent  par  les  effu- 
sions d'un  noble  cœur,  pénétré  des  enseignements  chrétiens.  Le  mot 
n*est  pas  toujours  celui  qu'il  fallait,  mais  les  sentiments  sont  à  leur 
place  et  vrais.  Du  trait  ici  et  là.  «  La  femme  meurt  pour  se  repro- 
duire, puisque  par  le  mariage  elle  n'a  plus  de  nom,  elle  ne  possède 
rien  et  n'a  plus  de  volonté.  Elle  doit  donc  revivre  entièrement  dans 
ses  enfantSf  et  retrouver  en  eux  son  nom,  sa  fortune  et  sa  volonté, 
(p.  76).  »  Une  seconde  partie  conduit  aux  neuf  stations  des  douleurs 
de  Marie^  suivies  des  neuf  stations  des  douleurs  de  la  fenmie  ici-bas. 
Beaucoup  d'observation,  de  sensibilité,  de  finesse  dans  l'analyse. 
((  Ce  qui  doit  nous  consoler,  nous  encourager  dans  notre  mission 
maternelle,  conclut  M'"^  Cave,  c'est  de  voir  notre  persistance  à  suivre 
Jésus-Christ  depuis  dix-huit  siècles.  Dans  la  maison  de  Dieu,  le  sanc- 
tuaire de  son  Fils,  vous  trouverez  toujours  une  femme^  n'importe  à 
quelle  heure  de  la  journée...  Toutes  ces  âmes,  tous  ces  cœurs,  sentent 
que  là  seulement  repose  l'espérance  par  la  foi  et  l'amour  (p.  213).  » 
—  En  ouvrant  les  deux  gracieux  et  pieux  volumes  des  Visites  à 
JémS'Hostiey  par  l'auteur  des  Avis  spirituels^  de  qui  nous  parlions  plus 
haut,  arrêtons-nous  d'abord  devant  le  bon  goût,  le  luxe  charmant  de 
l'exécution  typographique.  Elle  fait  le  plus  grand  honneur  et  à  l'au- 
teur, qui  vraisemblablement  l'a  indiquée  et  dirigée,  et  à  l'imprimerie 
Ooupy  qui  l'a  si  bien  compris.  C'est  vraiment  un  bijou,  et  le  fond 
méritait  un  si  beau  soin.  Toutes  les  qualités  de  l'écrivain  anonyme  se 
retrouvent  dans  cette  nouvelle  production  :  fervent  amour  de 
Dieu,  aspirations  admirables,  connaissance  des  voies  divines,  ten- 
dresses suaves,  inépuisable  abondance  d'idées  et  de  sentiments.  Char 
cun  des  deux  volumes  complète  l'autre,  encore  qu'ils  puissent  se  sépar 
rer;  car  ce  sont  deux  séries  distinctes.  L'une  et  l'autre  commencent 
par  des  prières  nouvelles  pour  la  sainte  Messe  :  personne  n'ignore  ce 
que  la  piété  gagne  à  cette  variété  d'expressions  qui  ranime  l'attention 
et  soutient  l'âme  dans  le  travail  sublime  de  la  prière.  D'une  part, 
trente-trois  Visites  au  Saint- Sacrement,  trente-trois  encore  au  tome 


—  213  — 

second  ;  sans  compter  de  nombreuses  prières,  liturgiques  ou  autres, 
couronnant  chaque  volume.  Et  quelles  élévations  d'âme,  quelle  intel- 
ligence du  mystère  divin ,  quelle  impatience  d'y  conformer  toutes  les 
puissances  intérieures  de  l'homme!  L'ouvrage  si  connu  de  saint  Liguori, 
le  dirons-nous?  est  pour  nous  inférieur  à  celui-ci  sous  plus  d'un  aspect* 
La  visite  débute  par  une  considération  ascétique,  sur  le  plan  des 
mystères  évangéliques,  et  de  là  part  dans  une  adoration  palpitante  de 
reconnaissance,  d'admiration,  de  désir  du  sacriâce  et  de  généreux 
propos  d'avenir,  résumés  dans  une  demande  intime,  A  peine  s'il  est 
besoin  de  recommander  un  tel  manuel  ;  il  fera  la  joie,  la  consolation 
et  le  bonheur  des  âmes  vouées  à  la  pratique  de  la  piété,  qui  aiment  à 
trouver  la  richesse  de  la  pensée  unie  aux  trésors  du  cœur,  c'est-à-dire 
l'homme  tout  entier  prosterné  devant  le  Créateur  et  lui  faisant  hom- 
mage de  la  dignité  de  sa  nature  immortelle. 

— >  En  réunissant,  dans  son  opuscule  VOraison  mentale^  les  leçons,  avis 
et  conseils  de  saint  Liguori,  de  sainte  Thérèse,  de  saint  François  de 
Sales,  de  Suarez,  etc.,  le  R.  P.  Petitalot  n'a  pas  eu  pour  objet  de  les 
reproduire  textuellement  les  uns  après  les  autres,  mais  de  composer 
avec  ces  précieux  éléments  un  ouvrage  qui  fût  bien  le  sien.  L'oraison 
étant,  comme  le  dit  sainte  Thérèse,  un  intime  commerce  d'amour  où 
l'âme  s'entretient  seule  à  seul  avec  Dieu,  et  ne  se  lasse  pas  d'expri- 
mer son  amour  à  celui  dont  elle  sait  qu'elle  est  aimée,  il  n'y  a  point 
d'exercice  spirituel  plus  important  dans  la  vie  chrétienne.  Il  semble- 
rait, observe  l'auteur  (p.  15),  que  Dieu,  ne  pouvant  s'adorer  lui-même, 
s'humilier  devant  lui-même,  se  prier  en  un  mot,  ait  voulu  se  faire 
homme  afin  de  compléter  son  éternelle  oraison.  Non-seulement  Jésus- 
Christ  voit  Dieu,  aime  Dieu,  agit  et  opère  pour  la  gloire  de  Dieu, 
mais  il  adore,  il  s'abaisse  et  s'humilie  devant  la  majesté  du  Père, 
disant  :  a  0  Seigneur,  je  suis  votre  serviteur,  oui  votre  serviteur, 
et  le  fils  de  votre  servante.  »  Or,  après  avoir  expliqué  ce  qu'est 
l'oraison,  en  avoir  établi  la  grande  utilité,  et  pour  certains  cas  la 
nécessité,  avoir  prémuni  son  lecteur  contre  ces  infirmités  inévitables 
qu'on  appelle  les  distractions  et  les  sécheresses,  l'auteur  entre  pleine- 
ment dans  son  sujet,  trace  les  règles  de  la  préparation  éloignée  et  de 
la  préparation  prochaine,  et  expose  la  méthode  de  l'oraison  elle- 
même  ;  car,  en  toute  chose,  il  faut  de  la  méthode  et  des  règles,  et 
l'audience  que  Dieu  daigne  nous  accorder  en  exige  comme  le  reste.  Ici 
elle  se  réduit  à  ces  termes  :  saluer  convenablement  le  Maître  sou- 
verain en  se  présentant  devant  lui,  traiter  sérieusement  avec  lui 
l'affaire  qui  nous  amène,  ne  se  retirer  qu'après  avoir  gagné  ses  bonnes 
grâces  et  en  le  laissant  favorablement  disposé.  —  Le  P.  Petitalot  a 
rassemblé  en  notes  des  extraits  d'auteurs  et  de  Pères  qu'on  aimera  à 
rencontrer  là,   surtout  un  passage  tout  à  fait  remarquable  de  saint 


—  214  — 

Angnstin  sur  le  psaume  oxlvui*.  C'est  en  latin,  sans  traduction  :  quel- 
ques-uns peut-être  s'en  plaindront. 

—  Et  yoioi  maintenant  les  Pailkties  (for.  Quel  mérite  aurions-nous 
à  louer  un  opuscule  vingt-sept  fois  réimprimé  en  six  ans?  Que  suaye, 
fleuri,  gracieux  et  fécond  est  l'esprit  de  l'écrivain  anonyme  à  qui  nous 
le  devons  I  quelle  variété  dans  ces  petits  conseils,  quel  heureux  choix 
d'exemples,  quelle  fraîcheur  dMdées  et  d'expression  I  9  Dans  le  midi 
de  la  France,  nous  dit-il,  aux  jours  d*été,  de  petits  enfants  et  de 
pauvres  infirmes,  incapables  de  tout  labeur  pénible,  s'occupent,  pour 
apporter  un  peu  de  pain  au  foyer,  à  recueillir  au  fond  de  quelques 
rivières  à  demi  desséchées  des  paillettes  d'or  qui  brillent  au  soleil  et 
que  Teau  entraine  dans  sa  course.  Ce  que  font  ces  pauvres  et  ces 
petits  pour  les  paillettes  d'or  que  Dieu  a  semées  dans  ces  rivières 
ignorées,  nous  voulons  le  faire  pour  ces  enseignements  que  Dieu 
sème  presque  partout,  qui  brillent,  qui  éclairent,  qui  échauffent  un 
instant,  et  disparaissent,  laissant  à  Tâme  le  regret  de  n'avoir  pas 
pensé  à  les  recueillir.  »  Un  mot  lu  dans  un  livre  oublié,  un  trait 
entendu  dans  la  conversation,  une  illumination  soudaine  de  la  pensée, 
le  regard  limpide  d'un  enfant  innocent,  en  faut-il  davantage,  ordi- 
nairement, pour  causer  au  cœur  les  plus  vives  impressions,  et  les 
^lus  salutaires  ?  Les  Paillettes  sont  ce  mot,  ce  trait,  ce  sourire,  cet 
innocent  regard,  cette  pensée  tout  à  coup  dégagée.  C'est  la  piété  qui 
en  fait  les  frais,  mais  tout  y  est  aussi  de  ce  qui  forme  la  bonne  édu* 
cation,  la  vie  honorable  dans  le  monde,  le  contentement>u  milieu  des 
siens.  Morale  douce,  exhortations  amicales,  élans  de  chrétienne 
poésie,  sentences  pénétrantes  sur  tous  les  sujets  de  la  vie  supérieure 
et  de  la  vie  pratique  :  où  chercherait-on  mieux  ?  Les  Paillettes 
devraient  être  dans  toutes  les  familles. 

—  Les  Œuvres  eucharistiques  de  M.  Blanchon,  promptement  arri- 
vées à  la  troisième  édition,  offrent  un  tableau  animé  des  institution 
catholiques  ayant  pour  objet  d'honorer  le  Saint- Sacrement,  et  par  lui 
d'exercer  la  vraie  charité.  «  Par  la  pratique  des  œuvres  de  charité,  le 
chrétien  peut  accomplir  les  préceptes  et  les  conseils  de  l'Evangile  ; 
par  la  pratique  des  œuvres  eucharistiques,  il  devient  apôtre  (p.  ix).  » 
Ces  œuvres  sont:  la  Confrérie  du  Saint-Sacrement,  l'Œuvre  des 
Lampes,  celle  des  Tabernacles,  l'Association  du  saint  Viatique,  l'Ado- 
ration nocturne,  TAdoration  perpétuelle.  M.  Blanchon  en  explique  la 
pensée,  constate  le  bien  qu'elles  font,  exhorte  à  s'y  engager,  et  dans 
des  termes  nobles  et  pressants.  Viennent,  après  cela,  le  même  zèle  et 
les  mêmes  soucis  religieux  se  portant  sur  trois  époques  capitales  de 
la  vie  :  la  première-communion,  le  mariage  et  la  mort  :  là  encore,  au 
nom  de  l'Eucharistie,  sont  des  œuvres  touchantes.  Ne  faut-il  pas  y 
faire  entrer  aussi  les  fêtes,  que  le  concours  des  fidèles  peut  embellir? 


—  2IB  - 

Noos  ëtadierons,  enfin^  les  trois  ohefs-d'œavre  eucharistiques  :  le 
chrétien  dans  le  inonde,  la  vie  monastique  et  ses  fécondes  créations 
et  ses  sublimes  exemples,  le  prêtre  gardien  de  la  vérité,  prédicateur 
de  la  charité,  illuminateur  et  médecin  des  âmes.  —  On  voit  ce  que 
peut  contenir  un  tel  livre  :  nous  disons  qu'il  est  écrit  avec  le  cœur, 
par  une  plume  habile^  et  que  la  faveur  qui  Ta  accueilli  est  pure 
justice.  V.  PosTBL, 


JURISPRUDENCE 

Orgaalsatlon  Jadlolalre  et  administrative  de  la  Pranoe  et 
de  la  Belgique»  1814  i^  18T€I,  par  Émilb  Flourens,  maître  des 
requêtes  au  Conseil  d'État.  Ouvrage  couronné  par  Tlnstitut.  Paris,  Garnier 
frères,  1875.  In-8de395  p.  —Prix  :  5  fr. 

L'Académie  des  sciences  morales  et  politiques  a  eu  une  heureuse 
pensée  en  proposant  Tétude  de  Torganisation  judiciaire  et  administra* 
tive  en  France  et  en  Belgique.  Ce  concours  nous  a  valu  un  excellent 
livre  sur  une  belle  question  de  législation  comparée. 

Au  commcement  de  ce  siècle,  la  France  avait  donné  ses  lois  à  la 
Belgique;  parties  du  même  point,  les  deux  nations  sont  aujourd'hui 
dans  des  situations  assez  différentes.  La  Belgique,  sagement  libérale, 
montre  beaucoup  d'attachement  à  ses  institutions,  la  France,  hélas! 
n'est  pas  sortie  des  agitations  révolutionnaires.  Comment  une  même 
législation  a«t*elle  produit  des  résultats  si  divers?  Il  faut  en  chercher 
l'explication  dans  des  différences  de  détails  et  d'application.  C'est 
cette  recherche  qui  fait  l'objet  du  livre  de  M.  Flourens. 

Une  première  partie,  consacrée  à  l'organisation  judiciaire,  en  con- 
tient l'historique  rapide,  mais  complet.  L'auteur  ne  se  contente  pas 
d'indiquer  avec  exactitude  les  changements  successifs  4Bipportés  aux 
institutions,  il  examine  l'esprit  qui  a  dicté  ces  changements,  l'effet 
qu'ils  ont  produit.  Après  avoir  montré  les  modifications  diverses  subies 
par  l'organisation  judiciaire  des  deux  peuples  depuis  1814  jusqu'à  nos 
jours,  il  en  fait  la  comparaison,  signalant  les  différences  peu  nom- 
breuses qui  les  séparent,  critiquant  certaines  dispositions,  proposant 
certaines  réformes. 

L'organisation  administrative  occupe  plus  longtemps  M.  Flourens 
(qui  s'j  trouve  dans  son  domaine),  et  d'ailleurs  cette  partie  de  la  légis- 
lation touche  plus  intimement  à  la  constitution  du  pays;  les  pro- 
blèmes d'administration  se  discutent  aujourd'hui  en  France,  leur 
solution  aura  une  grande  influence  sur  nos  destinées  politiques. 

L^auteur  examine  d'abord  l'organisation  communale  dans  son  déve- 


—  216  — 

loppement  historique^  puis  dans  les  détails  dd  son  fonctionnement.  Le 
département  et  la  province  sont  ensuite  étudiés  avec  laméme  méthode; 
enfin,  une  troisième  partie  traite  de  ladministration  centrale  :  ministres 
Conseil  d'Etat,  Cour  des  comptes.  Il  y  a  dans^  cette  étude,  des  cha- 
pitres fort  intéressants  et  par  le  sujet  même,  et  par  la  façon  dont  il 
est  traité.  Les  questions  qui  divisent  nos  pubUcistes  et  nos  hommes 
d*État  sont  exposées  avec  clarté;  à  côté,  sont  proposées  des  solutions 
toujours  soigneusement  motivées.  La  comparaison  entre  la  commission 
départementale  de  nos  conseils  généraux  et  la  députation  permanente 
du  conseil  provincial  belge  (qui  a  servi  de  modèle  au  législateur  de 
1871),  est  pleine  d'intérêt  et  d'actualité. 

La  nécessité  d'exposer  ainsi  parallèlement  deux  législations  aurait 
pu  être  une  cause  d'obscurité.  Ici  elle  a  été  évitée.  L'ouvrage  est 
clair,  divisé  méthodiquement  en  titres  et  chapitres,  enfin  fort  bien 
écrit,  dans  un  stjle  simple,  toujours  facile  à  lire  et  à  comprendre. 
Une  conclusion  résume  brièvement  tout  l'ouvrage  et  en  précise  Tesprit 
général.  Cet  esprit  nous  semble  sage  et  modéré  ;  nous  l'aimerions 
mieux  un  peu  plus  favorable  encore  à  ces  grandes  idées  de  décentrali- 
sation dont  nous  attendons  les  meilleurs  résultats  pour  l'avenir  de 
notre  pajs.  On  peut  d'ailleurs  ne  point  partager  toutes  les  opinions  de 
l'auteur,  mais  on  ne  saurait  lire  son  livre  sans  intérêt  et  sans  profit. 

A.  C. 


Ites  CkmaéquenceB  Juridiques  de  la  déconfiture,  par  Ernest 
Pannier,  docteur  en  droit,  avocat  à  la  Cour  d'appel  de  Paris..  Paris, 
Marescq  aîné,  1875.  In-8de  340p.  —  Prix:  5  fr. 

Voici  une  thèse,  pour  le  doctorat  en  droit,  qui  se  distingue  de  beau- 
coup d'autres  par  un  mérite,  rare  chez  nos  jeunes  jurisconsultes,  le 
souci  de  recourir  à  des  sources  riches  et  cependant  presque  inexplorées 
les  chartes,  où  la  législation,  en  vigueur  dans  notre  ancien  droit  cou- 
tumier  apparaît  mieux  que  dans  des  compilations  ou  des  travaux  de 
seconde  main,  trop  souvent  consultés  quoique  insuffisants.  Aussi  estrce 
avec  un  véritable  plaisir  que  nous  avons  lu,  au  bas  des  pages  de  ce 
remai*quable  travail,  des  notes  presque  aussi  nombreuses  que  celles 
qui  font  Taccompagnement  ordinaire  des  thèses  de  l'École  des  chartes. 
Nous  n'entrerons  point  dans  le  détail  de  ces  graves  et  célèbres  ques- 
tions des  nexi  et  des  addicli  en  droit  romain,  que  l'auteur  nous  paraît 
avoir  clairement  et  savamment  exposées.  La  bomrum  vendùio  ne  nous 
arrêtera  pas  davantage,  et  le  droit  gaulois,  que  des  auteurs  modernes 
ont  tenté  de  reconstituer,  ne  nous  semble  pas,  quant  à  présent  du 
moins,  offrir  assez  d'éléments  aux  dissertations  des  savants.  Le  droit 
coutumier  est,  à  notre  avis,  la  partie  la  meilleure  et  la  plus  approfondie 


—  217  — 

du  travail  de  M.  Pannier.  Des  notes  plas  nombreuses,  des  citations  de 
chartes^  des  extraits  intéressants  de  coutumes  locales,  des  recherches 
philologiques  même,  soulignent  un  texte  toigours  clair  et  concis.  Le 
Grand  eoutumier,  que  le  quatorzième  siècle  nous  a  légué  ;  la  Somme 
rurale,  de  Jean  Bouteiller;  la  coutume  de  Lille^  rédigée  vers  1297, 
croyons-nous,  par  Roisin,  clerc  de  la  ville  ;  la  coutume  du  Hainaut, 
celle  de  Malines  ont  été,  pour  l'auteur,  des  documents  précieux  à  con- 
sulter. Leur  lecture  l'a  conduit  à  se  demander  pourquoi  certaines 
coutumes  du  Nord  de  la  France  et  des  Pays-Bas  ont  conservé  une 
empreinte  du  droit  romain  bien  plus  accentuée  qu'elle  ne  l'est  dans 
d'autres  coutumes  moins  septentrionales.  Un  titre  de  la  coutume  de 
Malines,  par  exemple,  a  une  rubrique  copiée  du  Digeste  :  De  bonis 
avthoritatejudicispossidendis.,.  La  critique  n'a  pu  encore,  que  nous 
sachions,  donner  le  mot  de  cette  énigme.  Nous  ne  ferons  qu'un  repro- 
che à  Tauteur  d'une  étude  remarquable  à  tous  égards,  celui  d'avoir 
défiguré  les  textes  originaux,  écrits  en  langue  romane,  qu'il  a  cités. 

Ch.  Lebrun. 


SCIENCES  ET  ARTS 

E«sEieçon«  de  l'Histoire.  I^e  Chplstlanlsme  et  la  llbre-pen- 
•ée»  ou  le  dlaL-nenviéme  «técle*  Ouvrage  posthume  de  M.  Edouard 
Haus,  procureur  du  roi  à  Gand,  membre  correspondant  de  l'Académie  de 
législation  de  Toulouse,  membre  de  la  Société  des  arts  et  des  sciences 
d'Utrecht,- chevalier  de  Tordre  du  Christ  de  Portugal.  Bruxelles,  Goemaere; 
Paris,  Bray  et  Retaux,  i875.  Gr.  in-8  de  vi-502  p.  —  Prix:  7  fr. 

Frappé  des  ravages  produits  dans  les  intelligences  et  dans  les  âmes 
au  dix-neuvième  siècle  par  la  libre-penaée,  M.  Haus  avait  consacré 
les  dernières  années  de  sa  vie  à  la  combattre  d  ans  l'ouvrage  solide  et 
plein  de  faits  qu'on  vient  de  publier  après  sa  mort.  Toute  son  argu- 
mentation se  résume  en  quelques  points  incontestables.  La  libre-pen- 
sée proclame  l'indépendance  complète  de  la  raison;  le  christianisme, 
au  contraire,  tout  en  reconnaissant  la  valeur  de  la  raison  humaine, 
prêche  la  soumission  à  la  révélation  qui  est  au-dessus  de  la  raison.  Les 
limites  de  l'intelligence  sont  un  fait  patent,  incontestable.  Elle  ne 
peut  s'élever  assez  haut  pour  pénétrer  la  cause  de  ce  qui  existe  en 
Dieu.  De  plus,  la  libre-pensée  a  toujours  produit  des  résultats  funestes, 
elle  a  constamment  varié  en  tournant  dans  le  même  cercle.  Au  con- 
traire, le  christianisme  a  été  une  source  de  l)ienfaits  pour  l'humanité, 
et  il  est  resté  fondamentalement  invariable.  L'auteur  développe  ses 
arguments  en  les  appliquant  tour  à  toar,  en  trois  livres  distincts,  à  la 
philosophie,  au  droit  et  aux  beaux-arts.  Il  étudie  successivement  la 


*-Si8  — 

philosophie  de  la  libre^pentëe  et  la  philoiophie  da  chrietlâaiime,  le 
droit  d'après  la  libre-pensée  et  le  droit  d'après  le  ohristiaiiisme,  les 
beanx-arts  inspirés  par  la  libre-pensée  et  les  beanz-arts  inspirés  par 
le  ohristianisme.  Ce  dernier  livre,  véritable  histoire  littéraire»  est 
parUcnlièrement  attachant,  mais  les  trois  livres  sont  également  solides 
et  convaincants.  Oomme  M.  Hans  fait  toncher  an  doigt  le  mal  de  notre 
époque,  quand  il  dit:  c<  En  matière  d'art,  oomme  en  philosophie  et  en 
politique,  la  libre-pensée  aboutit  au  matérialisme,  à  l'oubli,  à  la  néga- 
tion de  la  divinité  1  (p.  492)  »  Le  remède  au  mal  est  donc  dans  le  retour 
sérieux  aux  pratiques  de  la  religion.  C'est  là  seulement  qu'est  la  vraie 
liberté,  comme  l'explique  très-bien  l'auteur.  ««  La  phrase  de  M.  Haus 
est  parfois  un  peu  traînante  :  c'est  le  seul  reproche  que  nous  lui  adres- 
serons. O,  E. 


XteaCaoratlon  de  1a  set enoe  polltl<iae,  ùu  théorie  de  VÊiat  iodal 
naturel  opposé  à  la  fiction  éPunÉtat  civil  factice,  par  Chables-Louis  de  Hallbb. 
Ouvrage  traduit  de  Tallemand,  par  l'auteur,  sur  la  seconde  édition.  Paris, 
Vaton,  i875.  3  volumes  in-8,  formant  ensemble  92i  pages.  —  Prix  :  9  fr. 

Cet  ouvrage  se  présente  en  trois  volumes,  dont  le  premier  (t.  lY) 
est  intitulé  :  Des  Empires  militaires,  dont  le  second  (t.  Y)  est  intitulé  : 
Des  Seigneurs  spiHtueb  indépendants  ov  des  États  pontificauXy  dont  le 
troisième  (t.  YI,  deuxième  partie)  a  pour  titre  :  Des  Républiques  ou  des 
communautés  indépendantes.  Si,  en  ouvrant  ces  volumes,  nous  cherchons 
comment  nous  avons  soas  les  jeux  l'apparence  d'une  suite  pans  son 
commencement,  puisque  les  trois  premiers  volumes  ne  sont  pas  entre 
nos  mains,  en  voici  l'explication.  L'ouvrage  allemand  en  six  volumes, 
intitulé  :  Restauration  de  la  science  politique,  a  été  publié  en  Allemagne 
après  la  chute  du  premier  empire.  La  traduction  des  trois  premiers 
volumes  parus  avant  la  révolution  de  Juillet  fut  interrompue  d'a« 
bord  par  cette  révolution,  puis  par  la  mort  de  l'auteur  qui  été  son 
propre  traducteur,  laquelle  survint  en  1854.  Quant  aux  trois  derniers 
volumes,  leur  apparition  est  de  date  très-récente,  et  ils  sont  du  fils 
de  l'auteur,  M.  Charles  de  Haller. 

Cette  œuvre,  comme  on  le  voit,  entreprise  après  un  long  intervalle 
de  temps,  n'a  pas  eu  seulement  pour  but  de  traduire  l'ouvrage  primitif, 
mais  de  le  réduire  en  présentant  dans  un  cadre  plus  restreint  l'en- 
semble des  idées  dont  la  prolixité  germanique  pouvait  ofBrir  un  obs- 
tacle à  des  lecteurs  français,  habitués  à  un  stjle  vif  et  concis  :  c'est 
ainsi  que  le  traducteur  s'est  trouvé  amené  à  faire  paraître  la  série 
de  ces  trois  volumes,  qui  sont  comme  le  résumé  de  la  pensée  pater- 
nelle, et  que,  cependant,  par  une  déférence  flliale,  il  n'a  voulu  offrir  au 
public  que  comme  une  suite  des  trois  premiers  précédemment  com- 
posés et  traduits  par  son  père.  Tout  en  regrettant  cette  anomalie 


—  219  — 

bibliographique,  qui  a  pour  effet  de  oous  présenter  comme  incomplet 
un  ouvrage  qni  forme  réellement  un  tout  dans  ses  trois  derniers 
tomeSf  nous  nous  empressons  de  signaler  aux  lecteurs  l'importance  de 
cette  publication.  Les  questions  sociales  et  politiques  y  sont  étudiées 
et  traitées  avec  la  plume  d*un  maître  et  une  vigueur  de  pensées  à 
laquelle  on  reconnaît  facilement  un  philosophe  chrétien.  Kanteur, 
remontant  à  l'origine  des  institutions  politiques,  conduit  le  lecteur  à 
irayera  le  dédale  de  l'histoire,  trop  souvent  altérée  au  profit  des  pas- 
siens  intéressées  ;  il  montre  Tabime  inévitable  où  tombent  les  peuples 
qui  s'écartent  des  lois  que  la  nature  des  choses  leur  impose  ;  et  il  va 
sans  dire  que  la  nature  des  choses  se  confond  pour  lui  avec  l'ordre 
providentiel.  Les  déviations  survenues  dans  les  événements  des 
trente  dernières  années  ne  servent  qu'à  mettre  plus  en  relief  la  vérité 
de  ces  lois  fondamentales  qui  président  à  toutes  les  institutions 
sociales  et  politiques  ;  cette  démonstration  est  surtout  saisissante 
dans  le  tome  cinquième,  où  le  lien  providentiel  établi  entre  les  deux 
puissances,  la  puissance  spirituelle  et  la  puissance  temporelle,  apparaît 
sous  son  double  aspect,  à  Rome  d*abord,  par  leur  pénétration  réci- 
proque, puis  dans  les  autres  pays,  par  les  relations  naturelles  qui 
doivent  exister  entre  TÉglise  et  les  États  séculiers.  Le  tome  quatrième 
avait  traité  des  institutions  monarchiques,  que  l'auteur  identifie  peut* 
être  un  peu  trop  avec  les  empires  militaires.  Le  tome  sixième,  spécial  à 
la  forme  républicaine,  jette,  sur  ce  genre  de  gouvernement,  des  aspects 
que  Ton  pourrait  appeler  nouveaux,  et  seront  propres  à  nous  éclairer 
tout  particulièrement,  nous  autres  Français,  en  nous  montrant  les  dif- 
férences qui  séparent  une  république  viable  et  pratique  des  théories 
soi-disant  républicaines  et  purement  révolutionnaires,  qui,  sous  nos 
yeux,  éclosent  de  tant  de  cerveaux  malades,  outre  qu'elles  sont  oppo- 
sées à  ce  que  Tauteur  nomme  si  justement  les  conditions  naturelles 
qui  président  à  l'existence  et  à  la  durée  des  nations. 

Mous  engageons  vivement  les  politiques  qui  se  disent  catholiques, 
mais  qui  résument  toute  leur  politique  dans  la  lecture  de  certain 
journal^  à  méditer  les  théories  républicaines  de  M.  de  Haller  ;  ils 
seront  surpris  de  leur  ignorance,  et  se  demanderont  s'ils  ne  prennent 
pas  trop  souvent  des  fantômes  pour  des  réalités  ;  peut-être,  alors, 
s'ils  sont  sincères,  en  arriveront-ils  à  conclure  avec  nous  que,  dans 
notre  vieux  pays,  la  meilleure,  la  seule  forme  de  République,  c'est 
encore  la  monarchie,  A.  db  Richscoue. 


l^ft  C3onditlon»  de  converaen&ent  en  France*  par  ÀNiomN  Ou- 
BosT.  Paris,  Germer  Baillière,  1875.  In-8  de  750  p.  ^  Prix  :  7  fr.  50. 

L'auteur,  qui  est  et  qui  se  dit  le  disciple  d'Auguste  Comte,  avait 
d'abord  destiné,  nous  apprend  sa  préface,  les  matériaux  de  ce  travail 


—  220  - 

pour  les  publier  dans  la  Revue  de  philosophie  positive^  place  désignée 
pour  un  pareil  travail  ;  puis  il  s^est  ravisé,  et  publie  ce  volume,  en  le 
plaçant  sous  l'égide  de  cette  maxime  de  son  maître  :  «  Il  n'y  a 
qu'un  absolu  en  ce  monde,  c'est  que  tout  est  relatif.  » 

Ce  patronage  du  père  de  la  philosophie  positiviste,  invoqué  en  tête 
du  livre,  nous  instruit  suffisamment  sur  le  but  qui  est  poursuivi  et 
d'ailleurs  franchement  avoué  dans  ces  pages,  à  savoir  de  substituer  la 
démonstration  scientifique  à  ce  queTauteur  appelle  la  révélation  théo- 
logique, sur  tous  les  problèmes  que  soulève  la  science  sociale  et  poli- 
tique. 

L'histoire,  dans  cette  donnée  étrange,  n*est  autre  chose  queTétude 
de  la  loi  du  changement  :  toute  la  philosophie  de  Thistoire  ne  sert 
qu'à  nous  montrer  le  sens  des  inévitables  mutations.  Selon  cette  école, 
nous  en  avons'à  tout  jamais  fini  avec  le  passé,  qui  n'est  que  la  transi- 
tion antérieure  des  sociétés  de  l'état  polythéiste  et  militaire  à  l'état 
catholique  et  féodal,  pour  faire  place  enfin  à  l'état  présent,  ce  bienheu- 
reux état  scientifique  et  industriel  qu'il  s'agit  de  préciser,  de  systé- 
matiser et  de  développer.  Ace  prix,  selon  l'auteur,  nous  en  aurons  fini 
avec  la  révolution,  alors  que  nous  aurons  bien  compris  les  lois  qui 
nous  font  connaître  d'où  nous  venons  et  où  nous  allons,  et,  par  suite, 
&  quel  point  du  développement  général  la  révolution  sera  terminée  I 

Nous  sommes,  selon  M.  Dubost,  à  cette  phase  de  transformation  où 
la  science  tend  définitivement  à  prendre  la  place  de  la  théologie.  La 
théologie,  c'est  la  vérité  selon  l'imagination  ;  la  science,  c'est  la  vérité 
selon  la  raison.  C'est  en  présence  de  cette  évolution  irrésistible  que  les 
gouvernements  ont  à  prendre  une  attitude  pour  laquelle  l'auteur  pré- 
tend leur  donner  de  sages  conseils.  Il  leur  suffirait,  pour  réaliser  les 
espérances  du  philosophe,  de  ne  pas  s'obstiner  à  soutenir  des  vérités 
qui  échappent  à  l'expérience,  et  de  prendre  résolument  parti  pour  tout 
ce  qui  doit  favoriser  le  développement  humain;  or,  pour  cela,  il  suffit 
de  mettre  en  quarantaine  toute  doctrine,  toute  règle  pratique  jusqu'ici 
reconnue  comme  universelle  et  absolue,  pour  lui  substituer  des  règles 
politiques  purement  relatives  et  contingentes  selon  l'état  de  la  société 
et  les  circonstances. 

Dans  cette  théorie,  on  peut  facilement  voir  ce  que  deviennent 
la  religion,  la  morale,  le  droit  naturel,  le  droit  des  gens,  et  tons  les 
principes  d'ordre  et  de  justice  étemels  sur  lesquels,  jusqu'à  ce  jour, 
a  reposé  la  société.  Il  suffit  de  présenter  à  nos  lecteurs  l'exposé 
de  ces  idées,  par  lesquelles  l'auteur  lui-même  s'attend  «  à  choquer 
bien  des  gens,  o  pour  mettre  en  lumière  le  mensonge  radical  et  total 
de  ce  livre.  —  Nous  n'avons  pas  besoin  d'ajouter  que  les  solutions  prati- 
ques sont  en  rapport  avec  de  semblables  prémices  ;  tout  étant  relatif  et 
contingent  dans  les  principes  de  la  société,  il  n'y  a  de  gouvernement 


—  221  — 

fort  et  stable  que  celui  qui  émane  d'un  accord  explicite  ou  implicite 
des  diverses  volontés  individuelles  :  cet  accord  lui-même  ne  peut  être 
que  relatif  et  provisoire,  parce  qu*ildbit  naturellement  varier  au  fur  et 
à  mesure  que  les  progrès  scientifiques  et  pratiques  modifient  les 
crojances  et  les  opinions  ;  voilà  pourquoi  la  république  est  la  seule 
forme  qui  puisse  se  prêter  aux  modifications  inhérentes  à  la  mobilité 
sociale!  II  II  y  a  donc  urgence  à  remettre  les  pleins  pouvoirs  à  la  nation 
elle-même,  qui  en  usera  suivant  ses  tendances  et  ses  intérêts.  Pour 
préparer  cet  avenir,  il  faut  mettre  en  pleine  application  Tœuvre  d* Au- 
guste Gomte^  et,  basant  Téducation  universelle  sur  ce  principe  que 
chacun,  «  en  quelque  rang  que  sa  naissance  Tait  jeté,  »  doit  être  placé 
dans  une  situation  en  rapport  avec  sa  valeur  intellectuelle,  morale  et 
pratique;  dès  lors  la  meilleure  application  consistera  à  remettre  cons- 
tamment la  direction  gouvernementale  entre  les  mains  des  esprits  à  la 
fois  plus  pénétrés  des  désirs  et  des  besoins  sociaux,  et  les  plus  capa- 
bles de  combiner  les  procédés  propres  à  y  satisfaire  dans  la  limite  des 
possibilités.  Alors  (et  c'est  ici  que  l'auteur  s'occupe  pour  la  première 
fois  de  la  vertu),  Thomme  sera  vertueux  sans  aucun  motif  bas  et  servile  : 
car  la  vraie  morale  consiste  à  vouer  au  bien  commun  toutes  les  forces 
réelles  de  la  société.  Quel  étrange  mystère  que  celui  qui  nous  fait 
voir  un  esprit  pourtant  sagace^  s'ingéniant  à  donner  à  toute  la  science 
sociale  pour  unique  fondement  le  relatif,  le  caprice  individuel,  la  bana- 
lité grotesque  et  odieuse  du  nombre,  tout  ce  qui  constitue  Tobstacle  et 
le  danger  à  toute  fondation,  à  tout  principe ,  à  toute  règle  sur  lesquelles, 
depuis  Torigine  des  choses,  repose  l'économie  général  du  salut  indivi- 
duel et  social  I 

Cet  ouvrage  est  une  démonstration  saisissante  de  la  maladif  de  ce 
temps  :  de  même  qu'à  Sparte  le  spectacle  d'un  ilote  ivre  était  recom- 
mandé comme  un  moyen  de  pratiquer  la  sobriété^  de  même  il  suffit  de 
lire  ce  livre  pour  croire  à  la  nécessité  des  principes  placés  au-dessus 
du  délire  individuel.  A.  db  Richbcour. 


Intempérance  et  MIsètre,  par  Jean  Lefort,  avocat  à  la  Cour  d*appe], 
membre  de  la  Société  d'Économie  politique,  lauréat  de  Flnstitut.  Paris, 
Gnillaumin,  1875.  In-8do  xiv-3o3  p.  —  Prix  :  6  fr.  Ouvrage  récompensé 
par  TAcadémie  des  sciences  morales  et  politiques. 

La  division  de  cet  ouvrage  est  simple.  Dans  trois  parties  successives, 
Tauteur  étudie  Tintempérance  elle-même;  puis  il  montre  comment, 
fatalement,  l'intempérance  produit  et  accroît  la  misère;  enfin  il  recher- 
che par  quels  moyens  on  peut. essayer  de  combattre  Tintempérance  et 
d'enrayer  ses  progrès.  Dès  le  début,  M.  Lefort  définit  l'ivrognerie 
qui,  BOUS  les  facilités  obtenues  par  l'industrie,  souvent  peu  scrupuleuse, 
dégénère  aisément  dans  ce  mal  profond  que  Ton  a  décoré  du  nouveau 


—  2M  — 

nom  d'alcoolisme.  L'histoire  de  rintempërance  montre  comment,  peu 
à  peu,  dans  la  suite  des  siècles  et  par  suite  même  des  progrès  de  la 
science,  notre  époque  en  est  arrivée  à  ce  point.  U  ne  faudrait  pas 
croire  que  partout  il  en  a  été  de  même  et  aussi  rapidement  ;  Tintem- 
pérance  a  sa  géographie*  Un  chapitre  spécial  est  consacré  à  cette 
étude,  dont  les  développements  présentent  un  triste  mais  réel  intérêt. 
Les  statistiques  Ont  une  grande  éloquence.  De  même  que  l'intempé- 
rance est  plus  répandue  dans  telle  ou  telle  région,  de  même  elle 
est  favorisée  davantage  par  telle  ou  telle  cause.  C'est  par  Texamen  de 
celles  qui  ont  la  plus  large  part  dans  le  développement  du  mal  qui  se 
termine  la  première  partie  du  volume. 

'  Ce  que  les  habitudes  d'ivrognerie  enlèvent  au  bien-être  des  travail- 
leurs est  incalculable.  Elles  absorbent  d'abord  ce  que  d^honnétes  gens 
pourraient  épargner;  peu  à  peu^  réduisant  les  forces  de  Touvrier, 
elles  diminuent  son  gain,  en  même  temps  qu'elles  prennent  plus  d'em- 
pire et  deviennent  plus  irrésistibles.  C'est  la  misère  à  bref  délai, 
pour  eux,  pour  leur  famille;  et,  comme  cette  misère  toute  volontaire 
pèse  sur  la  société,  o*est  une  calamité  et  un  danger  publics.  A  ce 
point  de  vue,  les  deux  chapitres  de  la  seconde  partie  sont  pleins  de 
révélations;  ils  énumèrent  d'abord  les  pertes  produites  par  Tivro- 
gnerie,  et  indiquent  ensuite  quels  dommages  elle  occasionne.  Perte  de 
force,  d'énergie,  au  physique  comme  au  moral  ;  ruine  de  la  santé,  et 
trop  souvent  mort  du  malheureux  alcoolisé.  L'auteur  nous  permettra  de 
regretter  qu'il  n'ait  pas  insisté  plus  longuement  sur  le  rôle  antisocial  de 
l'intempérance  ;  il  s'appesantit  à  bon  droit  sur  le  tort  que  l'ouvrier  se 
fait  à  lui-même  par  ces  habitudes;  il  aborde  également,  quoique  plus 
brièvement,  le  mal  qui  rejaillit  sur  les  siens,  sur  ses  enfants  surtout  ; 
mais  pourquoi  ne  pas  exposer,  avec  autant  de  développements,  ne 
pas  faire  toucher  le  mal  que  l'intempérant^  ou  plutôt  les  intempérants 
causent  &  la  société?  L'abrutissement  auquel  chacun  se  condamne  ne 
sera-t^il  pas  fatalement  suivi  d'un  affaiblissement  dans  les  facultés 
morales  de  la  société  qui  compte  tant  de  ces  ivrognes?  La  santé 
publique  n'en  sera-t-elle  pas  affectée  ?  Sans  doute,  l'auteur  touche  ces 
poLuts,  mais  il  le  fait  trop  légèrement. 

A  ces  maux  quels  remèdes  opposer?  C'est  l'objet  de  la  troisième 
partie.  Au  nombre  des  remèdes  propres  à  combattre  l'ivrogne  rie,  les 
uns  Sont  personnels,  physiques  ou  moraux,  tels  que  l'alimentation,  la 
volonté,  la  religion,  l'éducation  surtout,  dit  l'auteur,  qui  lui  attribue 
«ne  influence  plus  graode  peut-être  que,  seule,  elle  ne  peut  en  avoir  en 
réalité.  Pais,  viennent  les  remèdes  qui  ont  leur  base  dans  l'association. 
Ils  cbnsistent  dans  ces  règles  qu'imposent  certains  patrons  à  leurs 
ouvriers,  certaines  sociétés  à  leurs  adhérents.  Enfin  il  j  a  ce  qu'on  peut 
appeler  les  remèdes  publics^  et  découlant  des  lois.  Les  unes  punissent 


—  223  — 

riYrognerie  et  ses  oonséquenoeft^  d^autres  frappent  certaines  boissons 
d'impôts  qui^  élevant  le  prix,  rendent  Tasage  moins  facile,  Kauteor 
n*est  nullement  partisan  de  la  loi  réprimant  l'ivresse.  Il  ne  croit  pas 
que  l'intempérance  puisse  être  un  délit,  parce  que,  dit-il,  il  n'j  a  dans 
le  fait  de  s'enivrer  aucune  atteinte  ^  ni  aux  biensi  ni  aux  droits^  ni  à  la 
personne  d*autrui.  £n  droit,  on  pourrait  contester  ce  principe,  et  puis- 
qu'à  diverses  époques  il  j  a  eu  des  faits  personnels  que  la  loi  punissait, 
la  loi  peut  en  punir  ai:gourd*hui  ;  répugnerait-il  à  considérer  comme 
un  délit,  la  tentative  de  suicide  et  certains  faits  punis  par  la  nouvelle 
loi  comme  par  notre  ancien  droit?  Et  cependant,  il  n'en  résultait 
aucun  tort  pour  les  biens,  les  droits  ni  la  personne  d'autrui?  Il  semble 
de  plus  que  Fauteur  n'a  aucune  foi  dans  l'efficacité  de  lois  répres- 
ûves.  Sur  ces  points,  sans  aller  jusqu'à  penser,  comme  plusieurs,  que 
tout  sera  sauvé  si  ces  lois  existent,  nous  croyons  à  leur  influence. 

Deux  chapitres  terminent  Touvrage  :  l'un  est  consacré  à  combattre 
le  chômage  du  lundi;  Tauteur  y  résume,  en  quelque  sorte,  Texcellent 
ouvrage  qu'il  a  écrit  spécialement  sur  ce  point  ;  le  dernier  parle  des 
sociétés  de  tempérance.  Leur  nombre  est  considérable,  en  Amérique 
et  en  Angleterre  surtout,  puis  en  Nowége  et  dans  quelques  autres  pays 
d'Europe.  De  création  récente  chez  nous,  ont-elles  beaucoup  d'avenir? 
M.  Lefort  n'ose  l'espérer,  et  il  développe  en  terminant  ses  raisons 
d'en  douter.  O.  db  Senmbvillb. 


Prluclpea  de  la  •ctence  de«  financer»  par  R.  Gaudillot,  docteur 
en  droit,  conseiller  à  la  Cour  d'appel  d*Alger,  ancien  professeur  à  l'uni- 
versité de  Bruxelles.  Paris,  Guillaumin,  1874.  3  vol.  in-B  de  592-563-587  p. 
—  Prix  2  18  fr. 

Le  titre  de  cet  ouvrage  n'est  pas  moins  général,  pas  moins  étendu 
que  le  bntde  l'écrivain.  Par  le  mot  finances^  il  entend  «  toutes  les  valeurs 
perçues  et  employées  par  le  gouvernement,  qu'elles  figurent  au 
budget  ou  n'y  soient  pas  comprises,  qu'elles  consistent  en  monnaie  ou 
en  prestations  diverses,  qu'elles  proviennent  d'impôts  ou  d'autres 
sources.  »  Cette  acception  appellera  naturellement  des  développe- 
ments importants  sur  les  divers  sujets  suivants  :  les  bases  des  impôts 
(t.  P')i  les  emprunts  publics  (t.  II),  les  droits  de  l'État  (t.  III},  ses 
monopoles,  que  l'auteur  décore  de  ce  titre  plus  modeste  :  «  les  indos- 
tries exercées  par  l'État  (t.  lY],  s  la  comptabilité  publique  (t.  Y).  Ce 
dernier  titre  ayant  un  objet  plus  spédal,  comprend,  à  lui  seul,  la 
mi^e^o  partie  du  troisième  volume. 

Disons  d'abord  que  l'auteur  ne  peut  se  défendre  d'appartenir  aux 
éeoleq  modernes,  et  d'avoir,  pour  les  idées  nouvelles,  une  vive  propen« 
sion.  U  les  considère  et  les  admet  par  un  côté  élevé  et  généreux]  maiS| 


—  224  — 

pour  avoir  ce  mérite,  sont-elles  plus  justes  et  offrent-elles  moins  de 
dangers?  Dans  sa  pensée,  TÉtat  paraît  être  la  plus  haute  personnifica- 
tion de  la  justice.  Sans  doute,  à  bien  des  pages,  le  mot  de  liberté 
revient^  mais  les  droits  de  VÉtat  reviennent  plus  souvent  encore,  et 
c^est  à  les  bien  établir  que  Fauteur  apporte  une  partie  de  ses  efforts. 
En  maints  endroits  on  voit  affirmer  ce  principe  que,  nécessairement, 
«  un  instinct  civilisateur  pousse  les  nations  jeunes,  vigoureuses,  auda- 
cieuses, soit  contre  les  races  autochtones  ou  les  races  vieillies,  pour 
les  confiner,  pour  les  remplacer,  soit  contre  des  nations  plus  mûres, 
plus  avancées,  plus  perfectionnées,  plus  douées  d'avenir,  pour  s'initier 
à  leur  pratique,  s'inculquer  leur  savoir,  se  pénétrer  de  leur  génie,  n 
Ainsi  les  peuples  sont  soumis  à  une  loi  de  progrès,  fatale  si  on  ne  la 
suit  :  et  le  progrès  doit  être  indéfini.  Car  «  toutici-bas  se  modifie  pour 
grandir,  o  •»  Le  premier  défaut  de  cette  théorie  absolue ^  c'est  d'affir- 
mer que  rien,  dans  le  passé,  n'est  bien  ni  bon,  auprès  de  ce  qui,  consé- 
quence du  progrès,  existe  aujourd'hui.  Cette  marche  de  l'humanité  est 
d'ailleurs  dans  les  «voies  delaProvidence,»  —  car  l'auteur  a  des  instincts 
religieux.  Souvent  il  parle  de  «  Dieu,  »  des  a  destinées  providentielles 
des  nations,  b  de  a  la  Providence  vigilante,  »  de  «  ses  volontés  au-devant 
desquelles  nous  devons  aller,  sans  contrainte  comme  sans  illusions.  » 

Mais  si  Tauteur  est  religieux  et  tient  à  le  témoigner,  il  ne  paraît 
pas  d'ordinaire  favorable  à  TÉglise  catholique^  ni  à  sa  hiérarchie. 
Tout  son  désir  de  rester  impartial  échoue  devant  les  nombreux  pré- 
jugés qu'il  partage.  Il  en  est  de  même  à  Toccasion  de  son  exposé  de 
Torganisation  publique  au  moyen  âge.  C'est  une  époque  complètement 
fermée  pour  lui.  Il  semble^  à  lire  les  pages  qu'il  a  consacrées  à  cette 
étude,  qu'il  n'y  avait  alors  ni  justice,  ni  équité;  que  la  force  primait 
tout,  et  naturellement  que  tout,  dans  l'organisation  des  impôts  ouplutôt 
des  institutions  financières,  était  arbitraire,  sans  règle  et  sans  raison. 
A  ces  redevances,  à  ces  corvées  o  dans  lesquelles  se  résolvaient,  pour 
l'ancien  conquérant,  les  bénéfices  de  la  conquête,  »  il  faut  igouter  ces 
droits  de  mille  sortes...  créés  pour  satisfaire  un  insolent  orgueil,  ou 
des  fantaisies  honteuses  et  méchantes^  ou  une  vanité  méticuleuse  et 
stupide.  »  Et  alors  il  est  naturel  de  rappeler  (bien  qu'en  note  seule- 
ment) les  grenouilles  de  l'abbaye  de  Luxeuil,  le  droit  de  jambage 
aggravé  d'exigences  odieuses,  etc.,  etc. 

Franchement,  toutes  ces  choses  devraient-elles  trouver  place  dans 
un  ouvrage  sérieux?  Loin  de  nous  de  prétendre  que  tout  fût  alors 
rréprochable,  qu'il  n'y  eût  aucun  abus.  Mais  il  ne  faut  pas  nier  ce  qui 
existait  de  bon,  et,  au  point  de  vue  qui  l'occupe,  M.  Qaudillot  réfor- 
merait bien  des  idées  et  des  jugements,  s'il  prenait  la  peine  de  lire  les 
doctes  travaux  des  Quérard,  des  Delisle  et  des  Wailly  sur  liobjet 
même  de  ses  études.  Q.  de  Sbnnbvillb. 


—  225  — 

Oen  Force»  physlco- chimique»  et  de  leur  Intervention 
dan»  la  production  de»  pliônonoiône»  naturel»*  par  M.  Bec- 
querel. Paris,  tjp.  Firmin-Didot,  1875.  In-8  de  648  p.,  avec  un  atlas  de 
onze  planches.  —  Prix  :  15  fr. 

Le  mouvement  produit  la  chaleur,  rèlectricité  et  le  magnétisme  ; 
la  chaleur  se  transforme  en  lumière  ;  rélectrtcité^  selon  ses  différentes 
formes,  favorise  ou  contrarie  Taffinité  chimique.  Toutes  ces  forces  ne 
sont  que  des  modalités  d'un  même  fluide,  Téther,  qui  pénètre  entre  les 
molécules  de  tous  les  corps.  Telles  sont,  en  substance^  les  vérités  natu- 
relles, acceptées  aujourd'hui  de  la  généralité  de  nos  savants,  à  la 
démonstration  desquelles  M.  Becquerel  a  consacré  la  pins  grande 
partie  de  sa  vie,  car  son  premier  mémoire  est  de  1823.  Le  livre  qu'il 
publie  est  le  bilan  de  ses  découvertes  et  le  résumé  de  mémoires  spé- 
ciaux insérés  aux  Comptes  rendus  de  l'Académie  des  sciences,  ou  d'ou- 
vrages étendus  publiés  par  lui  seul  ou  en  collaboration  avec  son  fils, 
M.  le  professeur  Edm.  Becquerel.  L'origine  de  toutes  ces  recherches 
est  Tétude  de  Télectricité  dégagée  dans  les  dissolutions  de  deux  natures 
qui  réagissent  chimiquement  l'une  sur  l'autre,  par  Tintermédiaire 
d'une  cloison  perméable,  c'est-à-dire  percée  d'innombrables  espaces 
étroits,  dits  capillaires.  Plusieurs  physiciens,  Œrsted,  de  la  Rive, 
Ritchie,  Pouillet,  Schœnbein,  etc.,  ont  contribué  à  perfectionner  cette 
étude.  Mais  c'est  à  M.  Becquerel  que  revient  l'honneur  d'avoir  subs- 
titué à  la  théorie  du  contact,  par  laquelle  Volta  expliquait  les  phéno* 
mènes  de  sa  pile,  la  théorie  des  actions  électro-chimiques.  Il  a,  de  plus, 
été  le  premier  à  aborder  l'examen  des  phénomènes  électro-capillaires 
(produits  par  les  courants  électriques  qui  circulent  dans  les  espaces 
électro-capillaires),  phénomènes  qui  ont  donné  la  clef  de  bien  des 
effets  rapportés  auparavant  à  une  force  spéciale,  aveugle,  la  «force 
cataljtique,  »  que  Ton  invoquait  pour  expliquer  l'inexplicable,  sans 
pouvoir  la  définir  elle-même.  M.  Becquerel  emploie  la  plus  grande 
partie  de  son  ouvrage  à  démontrer  les  propriétés  des  courants  élec- 
tro-capillaires dans  les  trois  règnes  de  la  nature  :  chez  les  minéraux, 
où  produisent  les  filons  de  substances  pures,  cristallisées  à  l'intérieur 
des  fêlures  des  grandes  roches  ;  chez  les  végétaux  où  ils  entraînent  la 
circulation  de  la  sève  et  les  dépôts  &  la  surface  des  cellules  ;  enfln,chez 
les  animaux,  dont  ils  régissent  la  respiration,  la  nutrition,  et,  par  suite, 
la  température,  dans  les  espaces  capillaires  où  ne  se  fait  plus  sentir 
l'action  foulante  du  cœur.  La  force  est  ainsi  mise  au  service  de  la  vie. 

L'étude  de  l'électricité  terrestre  a  conduit  l'auteur  à  élever  ses 
inductions  vers  l'origine  de  l'électricité  atmosphérique,  et  celle  dos 
actions  physico-chimiques  exercées  à  la  surface  ou  dans  Tintérieur  de 
notre  globe,  l'amène  à  rechercher  s'il  ne  s'en  produirait  pas  de  sem- 
blables sur  le  soleil,  dont  l'origine  est  la  même  que  celle  de  la  terroi 
Septembbe  1875.  T.  XIV,  15. 


—  226  — 

et  dont  le  refroidissement  a  dû  être  beaucoup  plus  lent,  puisque  son 
volume  est  1,326,480  fois  plus  considérable  que  celui  de  notre  planète. 
Uanaljse  spectrale^  en  comparant  la  lumière  que  nous  produisons 
avec  celle  qui  émane  du  soleil  ou  des  astres,  a  révélé  à  la  science  que 
ceux-ci  recèlent  les  mêmes  éléments  matériels  que  notre  globe.  Ces 
présomptions  et  ces  faits  ont  permis  à  Fauteur  d'aborder  l'étude  de  la 
constitution  actuelle  du  soleil,  et  de  comprendre  par  quelles  phases  a 
passé  la  terre  en  se  reportant  aux  bouleversements,  sortes  d'érup- 
tions volcaniques,  dont  la  surface  de  cet  astre  offre  aux  astronomes  le 
spectacle  continuel.  Ces  phases  et  ces  bouleversements,  si  la  science  ar- 
rive à  en  prouver  définitivement  l'identité,  seront  les  meilleures  preu- 
ves, disons-le  en  passant,  de  la  nature  périssable  de  notre  monde. 

Après  ces  recherches^  dont  nous  écrivons  seulement  la  table,  M.  Bec- 
querel a  cru  devoir  exposer  les  principaux  phénomènes  de  l'atmos- 
phère ;  phénomènes  lumineux,  électriques  et  aqueux,  ce  qui  Ta  conduit 
à  parler  des  climats,  de  leur  constance,  de  leur  variabilité  et  de  l'in- 
fluence qu'exercent  sur  eux  les  forêts.  Ici  se  placent  des  recherches 
spéciales  à  l'auteur,  entreprises  avec  les  registres  des  compagnies 
d^'assurance  et  avec  ceux  de  Tadministration  des  forêts,  dans  lesquelles 
il  est  parvenu  à  dresser,  pour  le  département  du  Loiret  qu'il  habite 
et  pour  les  départements  voisins,  la  statistique  des  orages,  et  surtout 
des  orages  à  grêles.  Cela  Ta  mis  à  même  de  prouver  Tinfluence  bien- 
faisante qu'exercent,  contre  ces  météores,  les  surfaces  boisées,  en 
absorbant  Télectricité  atmosphérique,  cause  principale  de  la  forma- 
tion des  grêlons. 

Nous  n'avons  fait  que  mentionner  les  principaux  sujets  traités  par 
Tillustre  auteur  de  ce  livre,  mais  signaler  une  telle  œuvre  suffirait 
pour  en  montrer  à  tous  l'importance  scientifique,  bien  que  celle-ci 
s'efface  encore  devant  sa  portée  philosophique.  M.  Becquerel  ne 
confond  point  les  forces  physico-chimiques  avec  les  forces  vitales, 
à  l'exemple  de  tant  de  natursdistes  modernes.  La  vie  dispose,  selon  lui, 
des  agents  naturels  qui,  dans  les  corps  vivants,  n'agissent  qu'en  subor- 
donnant leurs  propriétés  à  l'existence  de  ce  nescio  quid  divinum  qui  est 
la  vie^  à  moins  qu'ils  ne  soient  assez  forts  pour  la  détruire.  Il  sont  dis- 
tincts d'elle  et  incapables  de  la  produire.  Aussi,  l'auteur  déclare-t-il 
ne  pas  comprendre  comment  elle  a  pu  se  manifester  à  la  surface  du 
globe  refroidi  :  là  est,  dit-il,  le  secret  du  Créateur.    Euo.  Fournibr. 


CSarbonIsaUon  des  bol»  en  vase*  clos  et  utilisation  de» 
produit»  dériva»,  par  M.  Camille  Vincent.  Paris,  Gauthier-Villars, 
1873.  In-8  de  156  p.  —  Prix  :  5  fr. 

L'auteur,  qui  est  répétiteur  de  chimie  industrielle  à  l'École  centrale, 
et  qui  s'est  occupé  pendant  près  de  douze  ans  des  procédés  et  appareils 


—  227  — 

qui  servent  à  l'extraction  des  produits  si  nombreux  de  la  distillation 
du  boiS|  avait  une  compétence  spéciale  pour  grouper  les  renseigne- 
ments qui  concernent  ces  procédés  et  ces  appareils,  et  en  discuter  la 
valeur  relative.  Il  a  pensé  judicieusement  qu'il  serait  utile  de  joindre 
k  cet  ensemble  Texposition  des  propriétés  que  possèdent  certains 
dérivés  de  l'acide  acétique  et  de  l'alcool  méthjlique,  auxquels  Tusage 
industriel  peut,  d'un  moment  k  l'autre,  donner  une  importance  qu'ils 
n'ont  point  encore.  Il  a  été  conduit  ainsi  à  réunir  tous  les  documents 
qu'il  pouvait  avoir  sur  le  traitement  et  l'emploi  des  produits,  buts  obte- 
nus par  la  carbonisation  du  bois  en  vase  clos,  notamment  sur  la  fabri- 
cation du  gaz  au  bois,  qui  a  de  Tavenir  dans  les  localités  forestières  où 
l'on  peut  se  procurer  à  bon  marché  la  chaux  jiécessaire  à  l'épuration 
du  gaz  obtenu.  Le  livre  de  M.  Vincent  sera  utile  pour  les  gens  du 
métier  ;  l'auteur  pourra  se  rendre  plus  utile  encore  à  la  science  en 
étendant  ses  travaux  à  des  bois  de  nature  diverse,  et  en  faisant  con- 
naître quels  sont  ceux  dont  la  carbonisation  donnerait  le  meilleur 
rendement  à  l'industriel,  selon  le  but  qu'il  se  proposerait.  Il  j  a  là  un 
champ  encore  inexploré  que  nous  nous  permettrons  de  recommander 
à  ses  recherches.  E.  F. 


Priacipe»  de  géologie  transformiste.  Application  dé  laihéùhe 
de  révolution  à  la  géologie^  par  Gustave  Dollfus.  Paris,  F.  Savy,  187^. 
In-18  de  vn-178  p.  —  Prix  ;  2  fr.  50. 

M.  Gustave  Dollfus  a  voulu  démontrer^  dans  ce  volume,  «  que  la 
doctrine  transformiste  donne  la  seule  explication  plausible  des  faits 
naturels,  n  Mais  il  n'a  donné  aucune  explication  nette  et  plausible  de 
la  doctrine  transformiste.  Il  a  prouvé  seulement  la  variété  de  ses 
connaissances  géologiques  et  la  confiance  trop  facile  avec  laquelle  il 
accueille  des  idées  vagues,  des  formules  ambiguës,  des  assertions 
gratuites  et  discordantes,  accréditées,  non  par  des  preuves  solides, 
mais  par  le  nombre  et  l'activité  passionnée  de  leurs  propagateurs, 
a  Le  transformisme,  dit-il,  n'atteint  pas  plus  la  foi  que  les  doctrines 
de  Galilée  et  de  Laplace  ne  l'avaient  fait  (p.  38).  »  Sans  doute,  le 
transformisme  est  susceptible  de  restrictions  et  d'explications  qui  lui 
enlèvent  tout  caractère  hétérodoxe.  Mais  les  propagateurs  les  plus 
vantés  de  cette  hypothèse  variable  lui  impriment  un  caractère  abso** 
lument  matérialiste  et  athée.  Je  suis  heureux  de  constater  que 
M.  G.  Dollfus  ne  professe  ni  le  matérialisme,  ni  l'athéisme.  Mais  il 
inclicine  ouvertement  à  croire  qu'à  l'époque  miocène,  l'homme  était 
un  animal  anthropomorphe  à  peine  supérieur  au  gorille  (p.  113-114), 
et  qu'il  a  eu  besoin  d'un  temps  incalculable  pour  devenir  peu  à  peu  ce 
qu'il  est  aigourd'hui,  par  la  grâce  de  Vévolution.  Cette  foi  conjectu- 
rale n'est  pas  la  nôtre. 


—  228   - 

M.  Dollfus  oppose  le  caractère  libéral  {sio)  des  hypothèses  transfor- 
mistes à  celui  des  théories  systématiques  et  autoritaires  professées  par 
Cuvier,  A.  d'Orbigny,  Agassiz  et  M.  Barrande.  Mais  les  nouveaux  théo- 
riciens sont-ils  moins  systématiques  que  leurs  devanciers?  Ne  tendent- 
ils  pas  à  devenir  ^\\x^  autoritaires  que  les  plus  dogmatistes?  «  Ni  pertur- 
bations générales,  disent-ils  ;  ni  extinctions  subites ,  ni  naissancer 
inopinées  (p.  8).  n  II  est  facile  de  proclamer  dogmatiquement  ces 
aphorismes;  mais  il  reste  à  les  prouver  I 

Suivant  M.  G.  Dollfus,  Constant  Prévost  a  eu  la  gloire  de  fonder, 
en  1827,  •  la  théorie  des  causes  actuelles  en  opposition  à  la  théorie  des 
causes  anciennes  ou  surnaturelles  {i^.  A),  n  Mais  Topposition  des  causes 
actuelles  et  des  causes  anciennes  est  chimérique  ;  Tidentité  des  causes 
anciennes  et  des  causes  surnaturelles  ne  Test  pas  moins.  Dieu,  qui  est  la 
cause  iumaturelle  par  excellence,  est  encore  et  sera  toujours,  quoi 
qu'on  fasse,  la  plus  actuelle  de  toutes  les  causes, 

Aux  yeux  de  M.  Dollfus,  Constant  Prévôt  est  un  naturaliste  libéral^ 
en  opposition  aux  naturalistes  doctrinaires  et  autoritaires  dont  M.  Bar- 
rande est  aujourd'hui  le  type  le  plus  éminent(p.  12  et  15).  Que  signifie 
cette  antithèse?  Constant  Prévost n*a  jamais  eu  d'autorité,  et  toujours 
il  a  contredit  les  maîtres  qui  en  avaient  une  très-^ande.  Cela  suffit- il 
pour  être  un  naturaliste  libéral?  —  M.  Barrande  est  un  observateur 
très-positif  et  très-patient,  dont  la  doctrine  est  aussi  ferme  que 
mesurée.  Il  maintient  vigoureusement  Tautorilé  des  faits  qu'il  a 
constatés,  et  refuse  de  sacrifier  leurs  enseignements  aux  hypothèses 
conjecturales  qui  les  contredisent.  Un  naturaliste  libéral  doit-il  renon- 
cer à  cette  liberté  scientifique? 

M.  Dollfus  appelle  MM.  Broca  et  Rohln  des  hommes  de  progrès/ A 
coup  sûr,  M.  Barrande  a  contribué  beaucoup  plus  qu'eux  km  progrès  de 
la  géologie  et  de  la  paléonthologie.  H.  db  Valhoger, 

de  l'Oratoire. 


Eieçons     élémentaires     d*liygléne  faite»    au    collège    de 

Falaise,  par  H.  le  Dr  Desceux,  rédigées  et  publiées  par  L.-A.   Dcche- 

MiN,  principal.    Paris,    Ch.  Fourraut  et  fils,  1875.  In-i2  de  175  p.   — 
Prix:  1  fr.  25. 

La  connaissance  de  Thygiène,  c'est-à-dire  des  moyens  de  conserver 

la  santé,  repose  sur  l'ensemble  des  connaissances  médicales  qu'elle 

suppose  chez  celui  qui  veut  rétudier.  Aussi,  est<ce  une  tâche  difficile 

d'enseigner  cette  science  à  des  intelligences  qui  n'y  sont  pas  préparées, 

bien  que  cette  tache  soit  maintenant  prescrite  dans  les  lycées,  les 

collèges  et  les  écoles  normales  primaires,  et  que  les  kcons  élémentaeres 

d'hygiène,  dont  TAcadémio  de  médecine  a   rédigé  le  programme, 

soient  maintenant  obligatoires  pour  les  élèves  de  philosophie  et  de 

mathématiques  spéciales,  d'après^  un  arrêté  ministériel  du  6  mai  1S72* 


—  229  — 

C'est  M.  le  D'  Deacieux,  ancien  professeur  d*hjrgiène  à  rinsiitut 
agronomique  de  Grignon^  qui  avait  provoqué  ces  mesures  dans  un 
mémoire  adressé  à  l'Académie  de  médecine^  mémoire  où  il  démontrait 
la  possibilité  de  [mettre  Thygiène  à  portée  des  élèves  de  toutes  les 
écoles.  Il  lui  appartenait  de  participer  au  mouvement  qu'il  avait  fait 
naître.  Depuis  Tarrêté  ministériel  de  mai  1872,  un  grand  nombre  d*au- 
teurs  se  sont  occupés  de  rédiger  des  leçons  d'hjgiène  suivant  le  pro- 
gramme dressé  par  l'Académie;  mais  aucun  d'eux  n'a  autant  que 
M.  Descieux  soigné  la  partie  morale  de  rhjgiène,  dans  laquelle  il  a 
même  outrepassé  les  limites  du  programme.  Admirablement  préparé 
par  un  enseignement  antérieur,  par  de  nombreuses  publications  où  il 
avait  mis  l'hygiène  à  la  portée  des  enfants  de  nos  écoles  et  des  habi- 
tants de  nos  campagnes,  et  même  par  un  Manuel  tt hygiène  plus  étendu 
destiné  aux  lycées,  collèges  et  séminaires,  M.  Descieux  a  bravement 
abordé  cette  immense  difâculté  d'enseigner  l'inconnu  sans  procéder 
par  le  connu.  Il  a  bien  dû,  en  quelques  endroits,  faire  un  abrégé 
(très-abrégé)  d'anatomie  et  de  physiologie  humaines  qui  n'est  point 
dans  le  cadre  de  Thygiène,  et,  comme  il  s'adressait  à  des  lycéens  arri- 
vés à  la  fin  de  leurs  études,  il  pouvait  heureusement  s'appuyer  sur 
leurs  notions  élémentaires  de  chimie.  Il  en  a  profité  pour  rédiger  un 
traité  clair  et  substantiel^  presque  toigours  exacte  court,  et  qu'un 
autre  professeur  abrégerait,  malheureusement  peut-être,  en  enlevant 
la  couleur  propre  au  maître  de  Falaise,  ces  historiettes  que  suggé- 
raient à  M.  Descieux  les  souvenirs  déjà  anciens  de  sa  longue  pratique 
médicale,  et  qui  perdraient  beaucoup  à  n'être  plus  contées  par  lui. 
Nous  souiiaiterions,  en  tout  cas,  à  son  imitateur  de  bien  saisir  avec 
quel  art  il  a  rattaché  la  morale  à  l'hygiène,  en  insistant  sur  le  malaise 
de  notre  ftme  que  causent  les  passions  mauvaises,  et  sur  le  bien-être 
que  ressent  tout  notre  organisme  quand  nos  facultés  sont  bien  dirigées. 
Le  lien  est  léger  peut-être,  mais  bien  ingénieusement  attaché,  et  l'on 
s'inspirera  avec  utilité  de  cette  paraphrase  chrétienne  du  mens  sona 
d'Horace.  M.  Descieux  ne  s'abuse  pas  sur  les  résultats  que  peut  obte- 
nir l'hygiéniste  ;  il  n'espère  pas  anéantir  les  maux  de  l'humanité.  Nous 
savons,  dit-il,  qu'il  entre  dans  les  desseins  du  Créateur  que  nous  souf- 
frions sur  cette  terre.  Mais  il  est  plus  que  permis,  il  est  ordonné  de 
lutter  contre  le  mal.  A  l'œuvre  donc  ;  faisons  de  la  propagande 
morale?  —  Ce  peu  de  mots  suffira  à  nos  lecteurs  pour  qu'ils  fassent  de 
la  propagande  en  faveur  du  livre.  Euo.  Fournibr. 


Corot.  Souvenirs  intimes,  par  Henri  Dumesnil,  avec  un  portrait  dessiné  par 
Aimé  Millet,  gravé  par  Alph-Leroy.- Paris,  Rapilly,  1875,  In-8  de  138  p. 
—  Prix  :  3  fr. 

Le  portrait,  placé  en  tête  de  cette  monographie,  rend  bien  la  physio- 


-.  230  — 

nomie  du  grand  artiste  que  nous  avons  perdu  ;  il  exprime  Tintelli- 
gence,  la  simplicité,  la  bonté  et  le  naturel.  A  regarder  ce  médaillon, 
on  comprend  que  telle  a  dû  être  la  figure  de  Thomme  qui  a  su  rendre 
la  nature  d*une  façon  si  saisissante,  et  donner  à  ses  créations  un 
charme  pour  moi  irrésistible.  Corot  a  su  se  dégager  des  entraves  de  ce 
classicisme  qui,  suivant  une  expression  heureuse  de  M.  Henri  de  Bor- 
nier,  «  est  la  mort  de  tous  les  arts,  n  II  n*7  a  pas  beaucoup  d'artistes, 
8*il  j  en  a,  qui  aient  été  doués  d'une  originalité  aussi  caractérisée  dans 
la  manière  de  sentir  et  de  rendre.  L'un  de  ses  plus  précieux  mérites 
est  d*être  resté  constamment  fidèle  à  lui-même.  Indulgere  geniof  II  a 
été  lui-même,  mais  sans  tapage,  et,  pour  ainsi  dire^  sans  provocation. 
Le  génie  particulier,  et  très-particulier^  de  Corot,  c'était  une  faculté 
hors  ligne  pour  donner  à  ses  paysages  la  vie,  la  lumière,  l'espace  et 
surtout  le  charme.  Ce  charme,  tant  par  le  procédé  que  parle  résultat 
obtenu,  avait  incontestablement  quelque  chose  de  profondément  hon- 
nête. La  contemplation  d'un  paysage  de  Corot  apporte  à  l'âme  du 
calme  et  de  l'équilibre.  Toute  âme  réellement  artiste  lui  a  dû  des 
moments  délicieux. 

L'œuvre  de  Corot  restera.  Il  était  donc  à  propos  de  ne  pas  oublier 
l'homme.  M.  Dumesnil,  qui  a  été  son  ami,  a  recueilli  minutieusement 
tous  les  souvenirs  qui  se  rattachent  à  la  vie  paisible  et  bien  ordonnée 
du  cher  artiste.  La  biographie  est  en  harmonie  avec  l'œuvre.  C'est 
trop  détaillé,  comme  toutes  les  monographies  qui  se  font  de  nos  jours  ; 
mais  M.  Dumesnil  aura  Texcuse  àe  ramitié,  et  il  trouvera  autant  de 
complices  que  de  lecteurs  dans  la  profonde  sympathie  de  tous  ceux 
qui,  comme  nous,  ont  été  sous  le  charme  pénétrant  de  Corot. 

Adolphb  d'Avril. 


BELLES-LETTRES 

Eli  I^ouman»  de  Berto  an»  in^^ns  plé»  i»ar  i%.dené«  Il  Roi»* 

Poème  publié  diaprés  le  manuscrit  de  la  bibliothèque  de  l'Arsenalf  avec  notes 
et  variantes,  par  M.  Aug.  Scheler,  associé  de  TAcadémie  royale  de  Bel- 
gique, bibliothécaire  du  roi  et  du  comte  de  Flandres.  Bruxelles,  Comptoir 
universel,  M.  Closson  etC*;  G.  Muquardt,  H.  Merzbach,  successeur,  libraires 
de  la  Cour,  1874.  In-8  de  xi-190  p.  —  Prix  :  3  fr. 

Bueve»'  de  Gommareiil»,  par  Adenéa  II  Itola»  chanson  de  gestCf 
publiée  pour  la  première  fois  et  annotée  par  M.  Aco.  Scheleb,  etc. 
Bruxelles,  Closson  et  C%  1874.  In-8  de  vii-i86  p.  —  Prix  :  3  fr. 

La  publication  de  ces  deux  poëmes  complète  la  mise  au  jour  de  Tobu- 
vre  du  trouvère  Adenés,  entreprise  par  l'Académie  rojale  de  Belgique. 
Elle  vient  se  joindre  à  celle  du  roman  de  Cléomadès,  par  M.  Van 
Hasselt  (2  vol.  in-8,  prix  :  10  fr.)  et  à  celle  des  Enfances  Ogier  (1  vol. 


—  231  -^ 

in-8,  prix  :  3  fr.),  par  M.  Soheler,  l'éditeur  de  Berie  am  gram  pies  et 
de  Bueves  de  Commarchis^  qui  sont  Tobjet  du  présent  article.  Le  roman 
de  Berthe  avait  déjà  été  publié  en  1832  par  M.  Paulin  Paris,  qui 
commença  par  ce  poëme  la  collection  connue  sous  lé  nom  de  Bornons 
des  douze  Pairs.  Cette  édition  fut  réimprimée  en  1836.  Elle  est  aigour* 
dliui  presque  introuvable.  On  connaît  six  manuscrits  de  Berie  aux 
granspiéSj  un  à  la  bibliothèque  de  F  Arsenal  (Belles-lettres  françaises , 
175,  fin  du  treizième  siècle),  quatre  à  la  Bibliothèque  nationsde  (fonds 
français, 778, quatorzième  siècle;  1447,  fin  du  treizième  siècle  ;  12467, 
id.  ;  et  24404,  commencement  du  quatorzième  siècle),  et  un  à  la  biblio- 
thèque de  Rouen  (Belles-lettres,  42).  M.  Francisque  Michel  en  a 
signalé  un  septième,  qui  est  décrit  dans  le  catalogue  de  feu  Richard 
Heber  (partie  XI,  page  10,  n*  3;  F.  Michel,  Chanson  des  Saxons^ 
préface,  page  lxi).  En  faisant  abstraction  de  ce  dernier  manuscrit  et 
même  de  celui  de  Rouen,  les  cinq  manuscrits  de  Paris  offrent  ample- 
ment la  matière  d'une  édition  critique^  c'est-à-dire  remontant,  autant 
que  possible,  à  Toriginal  par  la  classification  généalogique  de  ces 
manuscrits,  et  tirant  vers  par  vers  la  leçon  la  plus  ancienne  du  rappro- 
chement des  leçons  qu'ils  offirent,  contrôlées  et  rectifiées  par  le  tact 
historique  et  philologique  de  l'éditeur.  C'est  là  une  tâche  très-longue 
et  très-laborieuse,  devant  laquelle^  nous  ne  ferons  pas  un  crime  à 
M.  Soheler  d'avoir  reculé,  dans  Tétat  présent  des  choses.  Mieux  vaut 
assurément  une  bonne  édition  semi-critique^  comme  celle  qu'il  nous 
donne,  que  pas  d'édition  du  tout.  Il  a  choisi,  de  préférence,  pour  son 
édition,  le  manuscrit  de  l'Arsenal,  dont  une  copie,  faite  par  Mou- 
chet  au  siècle  dernier^  existe  à  la  Bibliothèque  nationale.  Cette  copie 
(c'est  M.  Scheler  qui  le  déclare  dans  sa  préface)  a  été  transcrite  et 
vérifiée  sur  l'original  par  un  archiviste-paléographe  dont  la  modestie 
dissimule  trop  l'esprit  exact  et  judicieux,  M.  Michel  Deprez,  qui  a 
aussi  relevé  les  variantes  de  deux  autres  manuscrits.  M.  Scheler  a 
recueilli  lui-même^  un  peu  rapidement,  mais  suffisamment  pour  le  but 
qu'il  se  proposait,  dit-il,  celles  des  manuscrits  12467  et  24404,  et  il  a 
dressé  une  liste  de  notes  et  rectifications^  que  sa  science  philologique  rend 
fort  intéressante  et  fort  utile  pour  l'étude  de  notre  ancienne  langue. 
Les  corrections  qu'il  a  introduites  dans  le  texte  du  manuscrit  par  lui 
choisi,  et  les  matériaux  rassemblés,  dans  ses  variantes  et  dans  ses  notes^ 
pour  le  futur  auteur  d'une  édition  critique^  donnent  à  son  travail  une 
réelle  valeur.  Il  en  est  sorti  une  bonne  version  soit  de  lecture,  soit 
d'étude. 

Bueves  de  Commarchis  ne  nous  ayant  été  conservé  que  dans  un  seul 
manuscrit  (celui  de  l'Arsenal,  mentionné  plus  haut),  la  tâche  de  l'éditeur 
était  ici  fort  simplifiée.  M.  Scheler  a  joint  à  son  texte  l^*  Un  sommaire 
de  la  chanson  ;  2®  Des  notes  et  rectifications  ;  3"^  Une  liste  des  person*^ 


—  232  — 

nages  qui  figurent  dans  le  poSme  ou  y  sont  simplement  cites  ;  4^  Un 
vocabulaire  comprenant  les  mots  les  plus  intéressants  relevés  dans 
les  notes  des  trois  ouvrages  d'Adenés  publiés  par  le  même  éditeur,  ou 
dans  le  texte  de  Cléomadès  que  M.  YanHasselt  avait  publié  sans  com- 
mentaire.  Le  texte  de  Bueves  de  Commarchii  pourrait,  ce  semble,  être 
amélioré,  quoiqu'il  n'y  ait  point  d'autre  manuscrit  que  celui  de 
TArsenal,  par  une  comparaison  minutieuse  avec  le  poëme  dont  Tœuvre 
d'Adenés  n'est  qu'un  remaniement,  c'est-à-dire  avec  le  Siège  de  Bar- 
bastret  chanson  qui  fait  partie  du  grand  cycle  formé  autour  de  Guil- 
laume au  court  nez.  Mais,  comme  le  Siège  de  Barbastre  est  encore 
inédit^  il  serait  plus  juste,  peut-être,  de  dire  que  Bueves  de  CommoT" 
ehis  devra  être  mis  en  usage  pour  une  édition  critique  de  cette  plus 
ancienne  chanson.  Nous  renvoyons,  pour  l'analyse  et  l'appréciation  de 
l'œuvre  d'Adenés  en  général,  et  en  particulier,  pour  les  deux  poëmes 
dont  il  s'agit  dans  ce  compte  rendu,  à  la  notice  développée  publiée  par 
M.  Paulin  Paris  dans  le  tome  XX  de  V Histoire  littéraire  de  la  France^ 
et  aux  deux  ouvrages  qui  sont  aujourd'hui  le  fondement  nécessaire  de 
toute  étude  sur  l'épopée  nationale  :  YBistoire  poétique  de  Charkmagne^ 
de  M.  Gaston  Paris,  et  les  Épopées  françaises^  de  M.  Léon  Gautier. 
Voyez  notamment,  dans  ce  dernier  ouvrage,  l'analyse  de  Berte  aux 
grans  pies  et  la  savante  i\otice  historiq^ie  et  bibliographique  qui  raccom- 
pagne (tome  II,  chapitre  ii,  p.  7-27).  Il  est  à  propos  de  remercier, 
en  terminant,  l'Académie  royale  de  Belgique  de  ses  publications  déjà 
si  nombreuses,  et  si  utiles  pour  l'histoire  politique  et  littéraire  de  la 
France.  Il  est  à  propos  de  remercier,  en  particulier,  M.  Scheler,  qui  a 
donné  ses  soins  à  beaucoup  d'entre  elles.  Marius  Sepbt. 


Manuel  de  la  Revilla.  Dudaa  y  triatezaa,  poesiad,  con  un  prologo 
de  D.  Ramon  de  Cahpoamor,  de  la  Academia  espanola.  Madrid,  Médina  y 
Navarro,  1875.  In-18  de  xxxn-196  p.  —  Prix  :  12  réaux. 

Ce  volume  prouve  que  l'Espagne,  au  milieu  de  toutes  les  commo- 
tions qui  l'agitent,  comme  au  temps  de  toutes  ses  perturbations  pas- 
sées, est  restée  une  terre  de  poésie  et  d'imagination.  Seulement,  au- 
trefois, à  ses  plus  belles  époques  littéraires,  je  ne  crois  pas  qu'elle  eût 
produit  un  livre  portant  ce  titre  :  Doutes  et  tristesses.  Il  y  a  dans  ces  mots 
une  trace  de  l'invasion  d'idées  étrangères  qui  ne  sont  pas  dans  la 
nature*  dans  le  caractère  de  ce  noble  pays.  M.  de  la  Revilla  n'est,  du 
reste,  pas  encore  arrivé  au  scepticisme  absolu.  Quelques-uns  de  ses 
vers  :  Bios  et  Buseando  à  Dios^  par  exemple,  peuvent  même  donner  à 
espérer  qu'il  s'arrêtera  en  chemin.  Son  esprit  y  gagnerait  du  calme, 
son  talent  peut-étre  plus  d'ampleur.  Tel  qu'il  est  maintenant,  M.  de 
la  Revilla  est  un  poëte  un  peu  sec.  Ce  n'est  pas  lui  qui  cherchera  à 
exprimer  tout  ce  qu'un  sentiment  peut  produire,  qui  retournera  une 


—  233  — 

pensëd  dans  tous  les  sens,  qui  s'efforcera  de  rendre»  à  force  d*ëcla- 
tantes  images,  nne  sensation,  pour  ainsi  dire,  palpable  et  visible.  On 
dirait  que,  quand  il  fait  des  vers,  M.  de  la  Revilla  est  pressé  d*en  finir* 
Il  est  rare  que  sa  verve  lui  fournisse  des  idées  pour  deux  pages.  Man- 
zoni,  Yictor  Hugo,  Lamartine  ont  vu^  au  nom  de  Napoléon,  Tinspirar 
tion  remplir  leurs  strophes.  Napoléon  ne  donne  à  M.  de  la  Revilla  que 
quatorze  vers.  M.  de  la  Revilla  aurait  pu  enfermer  le  grand  empereur 
dans  un  sonnet.  Dante  ne  rend  pas  notre  poète  beaucoup  plus  fécond; 
cinquante  vers  lui  suffisent  pour  dire,  —  et  ce  n*était  pas  très-nou- 
veau, —  tout  ce  qu'il  avait  dans  l'imagination  sur  Tillustre  Florentin. 
M.  de  la  Revilla  fait  des  vers  comme  un  mathématicien.  Cette  préoi- 
sion,  ce  laconisme,  on  doit  le  reconnaître,  donnent  un  certain  charme 
à  plusieurs  pièces  du  recueil  qui^  par  leur  nature,  ne  se  prêtaient  pas 
à  de  grands  développements.  D'ailleurs,  on  a  eu  affaire  à  tant  de 
poëtes  diffus,  qu'on  n'est  pas  fâché  d'en  rencontrer  un  d'un  tout  autre 
caractère.  Ajoutons  encore  que  ce  poëte  aime  les  sentiments  honnêtes, 
—  ce  qui  nous  fait  beaucoup  douter  de  son  doute  :  —  qu'on  lise  la 
pièce  :  Le$  Fruits  du  jardin  (Tautrui.  En  politique,  M.  de  la  Revilla 
semble  aussi  un  homme  impartial  et  de  bonne  foi  ;  il  n'hésite  pas  à 
dire  son  fait  à  Marcus  Brutus,  et  ne  se  gêne  pas  pour  proclamer  ce 
qu'il  pense  de  la  façon  dont  certains  hommes  entendent  la  liberté. 

Le  nouveau  poëte  est  présenté  au  public  par  M.  Ramon  de  Campoa- 
mor,  de  l'Académie  espagnole  ;  ce  dernier,  dans  une  préface  spiri- 
tuelle^ montre  les  qualités  d'un  critique  distingué. 

Th.   ns  PUYHAIORB. 


Mjtk  Ijansue    et  la  llttératore  hlndouatanlea   de    IdllO  ik 

isaQ.  Discours  Scuoerture  du  cours  d*hindousimi,  par  M.  Garun  dk 
Tasst,  membre  de  Flnstitut.  ^  édition,  Paris,  Maisonneuve,  i875.  In-8  de 
488  p.  —  Prix  :  6  fr. 

C'est  une  idée  excellente  qu'a  eue  le  savant  orientaliste  d'ouvrir, 
chaque  année,  le  cours  d'hindoustani  dont  il  est  chargé  au  Collège  de 
France,  par  an  discours  où  il  nous  fait  connaître  l'état  actuel  de  cet 
idiome  et  de  sa  littérature.  Grâce  à  cette  précautiiSn,  Thistoire  et  les 
développements  du  principal  des  dialectes  de  l'Inde  cesseront  d'être 
ignorés  du  public  français.  L'on  peut  les  suivre  pas  à  pas,  et,  pour 
ainsi  dire,  jour  par  jour.  Il  devient  facile  de  se  rendre  compte  du  pro- 
grès de  l'infiltration  des  idées  européennes  chez  les  Indous,  de  l'état 
des  missions  chrétiennes  dans  leur  pays,  et  d'assister,  pour  ainsi  dire, 
aux  débuts  de  ce  mouvement  intellectuel  et  moral  dont  le  résultat  sera, 
dans  un  temps  donné,  la  transformation  totale  de  la  société  indienne. 

Naturellement,  le  docte  professeur  débute  par  nou;  donner  un 
tableau  succinct  des  origines  de  la  langue  par  lui  enseignée.  On  sait 


—  234  — 

qne  rancien  sanscrit,  celai  des  Védas,  par  une  première  transforma-» 
tion,  donna  naissance  à  la  langue  des  Paranas  et  des  Sohàstras,  laquelle 
diffère  assez  sensiblement  de  celle  des  hymnes.  Enfin,  cet  idiome  loi, 
môme  finit  par  disparaître,  an  moins  de  la  bouche  du  peuple,  et  divers 
dialectes,  fils  de  la  yieille  langue  sacrée,  se  partagent  le  territoire  de 
rinde  septentrionale.  Lorsque,  vers  les  neuvième  et  dixième  siècles  de 
notre  ère,  les  Musulmans  pénètrent  dans  ces  régions iTusage  de  l'Ath- 
dotwi  ou  Atne/ottt  était  devenu  prédominant.  G^étaitun  idiome  qui,  formé 
d*éléments  presque  tous  sanscrits,  mais  relativement  assez  pauvre  de 
formes,  se  trouvait,  vis-à-vis  de  l'idiome  védique,  à  peu  près  dans  le 
même  rapport  que  l'italien  vis-à-vis  du  latin,  ou  même  Farabe  vulgaire 
vis-à-vis  de  l'arabe  littéral.  Les  conquérants  venus  de  la  Perse  conti- 
nuèrent même  sur  le  sol  indou  à  parler  la  langue  de  leur  pays  d'ori- 
gine. Ainsi  ont  fait  les  Espagnols  qui^  établis  en  Amérique,  portèrent 
presque  partout  avec  eux  Tusage  du  castillan.  Toutefois,  si  le  persan 
restait  Fidiome  des  vainqueurs,  il  n'avait  aucune  chance  de  se  faire 
accepter  par  la  race  conquise. 

L'hindouvi,  déchu  de  son  rang  de  langue  officielle,  se  fractionna  en 
un  grand  nombre  de  dialectes,  ou  plutôt  de  patois  vivants  encore 
aujourd'hui.  Tels  sont  le  penjabi,  le  gnzerati,  le  langage  du  Bengale, 
enfin,  le  plus  cultivé  de  tous,  le  bridj-bakha  ou  hindi.  En  môme  temps, 
le  besoin  des  relations  entre  mahométans  et  Indous  amenait  la  forma- 
tion d'une  sorte  de  lingua  fronça^  comprise  presque  partout  dans  la 
péninsule  indostanique,  et  à  laquelle  certains  auteurs  donnent  ce  nom 
assez  impropre  d'hindoustani. 

Pour  notre  auteur,  tous  ces  dialectes  néo-indous  constituent  autant 
de  formes  d'un  seul  et  même  idiome,  auquel  il  convient  de  réserver  le 
nom  d*hindoastani.  G^est  dans  le  dialecte  hindi  qu'écrivent  la  plupart 
des  auteurs  encore  païens;  Quant  aux  littérateurs  musulmans,  ils  pos- 
sèdent, si  Ton  peut  se  servir  de  cette  expression,  deux  dialectes  à  leur 
service,  le  dakchani  ou  décanais,  né  dans  le  midi  de  l'Inde,  et  Vurdu, 
originaire  de  la  vallée  du  Gange,  le  plus  répandu  des  langages  de 
rinde  moderne.  Tous  deux,  au  reste,  ont  subi  un  fort  mélange  d* arabe 
et  de  persan.  Geci  nous  explique  la  lutte  existant  aujourd'hui  entre  les 
sectateurs  de  la  religion  indoue,  qui  voudraient  faire  adopter  le  dia- 
lecte hindi  comme  langue  officielle,  et  les  mahométans,  qui  n'entendent 
point  sacrifier  les  droits  de  Turdu.  Ajoutons  que  M.  G.  de  Tassy  donne 
raison  aux  derniers.  Leur  dialecte,  fait-il  observer,  a  pour  lui  l'avan- 
tage de  la  possession  d*état.  Il  est  littérairement  plus  cultivé  que 
l'hindi,  et,  d'ailleurs,  si  Ton  prétendait  en  bannir  tous  les  mots  persans 
et  arabes,  on  aurait  bien  de  la  peine  à  les  remplacer  d*une  façon  satis- 
faisante par  des  composés  d*origine  indigène.  Nous  ne  parlerons  pas, 
bien  entendu,  de  ces  fantaisistes  qui  veulenti  les  uns,  en  revenir  à 


—  23»  — 

Tusage  du  sanskrit^  mort  depuis  tantôt  trente  siècles,  les  autres,  faire 
de  l'anglais  Tidiome  courant  de  toute  la  péninsule. 

Mais  en  yoici  assez  sur  la  langue.  Disons  maintenant  un  mot  de  sa 
littérature.  Pendant  bien  longtemps,  les  musulmans  continuèrent  à 
faire  usage  du  persan,  et  l'hindoustani,  relégué  au  rang  de  patois,  ne 
commença  que  vers  le  quinzième  siècle  de  notre  ère  à  être  employé 
dans  les  œuvres  de  poésie.  Le  dialecte  du  Décoas,  dont  le  développe- 
ment avait  précédé  celui  de  Furdu,  se  trouva  rapidement  supplanté  par 
ce  dernier.  Au  reste,  Toriginalité  fait  généralement  défaut  à  la  litté- 
rature hindoustanie.  Comparable,  sous  ce  rapport,  à  celle  du  turk, 
ellen'oifre  point  le  même  intérêt  que  les  littératures  persane,  sanskrite 
ou  arabe.  Généralement,  les  poëtes  de  llnde  moderne,  s'ils  sont 
païens,  imitent  les  vieax  auteurs  indigènes^  et,  quant  aux  Musulmans, 
c^est  dans  la  langue  de  Tlran  qu'ils  vont  chercher  leurs  modèles.  Bon 
nombre  d'indigènes,  sans  doute,  savent  l'anglais  et  le  parlent  avec 
facilité.  Différents  ouvrages  de  cette  langue  ont  même  été  traduits  en 
hindoustani.  Toutefois,  la  manière  de  voir  et  de  sentir  des  Orientaux 
diffère  trop  de  la  nôtre,  pour  que  la  littérature  de  la  Grande-Bretagne 
ait  exercé  une  grande  influence  sur  le  développement  de  celle  des 
Indiens.  En  revanche,  ils  goûtent  assez  4es  traductions  d'ouvrages  de 
sciences,  car,  à  cet  égard,  ils  ne  peuvent  s'empêcher  de  rendre  justice 
à  la  supériorité  de  l'EuropCi  Ajoutons  qu'une  presse  indigène  s'est 
formée  depuis  longtemps  déjà,  laquelle  a  joui,  jusqu*au  moment  de  la 
grande  insurrection,  d'une  liberté  presque  illimitée.  Enflo,  chaque 
année  voit  éclore  quantité  d^écrits  de  controverse  religieuse,  rédigés 
dans  les  dialectes  du  pays,  et  spécialement  en  urdu.  Missionnaires 
catholiques  et  protestants  s'y  accordent  à  réfuter  les  erreurs  de  l'ido- 
lâtrie, aussi  bien  que  de  Fislamisme.  Les  païens  ne  répondent  guères 
à  ces  attaques,  se  bornant  à  suivre  les  pratiques  bonnes  ou  mauvaises 
transmises  par  les  aïeux.  Au  contraire,  les  Musulmans  ne  manifestent 
pas  la  même  indifférence  pour  la  polémique,  et,  de  temps  à  autre,  ils 
font  paraître  des  ouvrages  consacrés  à  la  défense  de  leur  foi.  On  ne 
saurait  nier  Timportance  capitale  de  la  question  religieuse,  dans  l'Inde 
comme  ailleurs.  C'est  seulement  par  leur  conversion  au  christianisme 
que  les  habitants  de  la  péninsule  gaogétique,  abandonnant  leurs  pré- 
jugés séculaires,  deviendront  réellement  nos  frères  en  civilisation.  On 
a  reproché,  et  parfois  avec  raison,  au  gouvernement  anglais  un  peu 
trop  de  tolérance  pour  certains  usages  du  polythéisme,  entachés  de 
cruauté,  d'extravagance  ou  d'immoralité.  Toutefois,  on  doit  lui  rendre 
cette  justice  qu'il  est  parvenu  à  extirper  presque  complètement  les 
sutttes  ou  sacrifices  des  veuves,  ainsi  que  les  assassinats  quasi-reli- 
gieux des  thugs  ou  étrangleors.  Quoi  qu'il  en  soit,  l'œuvre  de  la  pré- 
dication évangélique,  bien  qu'elle  marche  lentement,  ne  laisse  pas  que 


—  236  — 

d'être  en  progrès.  Le  nombre  des  catholiques  indigènes  peut  être  éva- 
lué à  plus  d'un  million,  tandis  que  celui  des  réformés  ne  dépasse  pas  la 
moitié  de  ce  chiffre.  Du  reste,  un  résultat,  etnon  le  moins  curieux,  de 
l'influence  exercée  par  les  missionnaires,  c'est  le  mouvement  intel- 
lectuel qui  se  manifeste  au  sein  même  du  paganisme.  Les  sectateurs  de 
la  religion  indienne  montrent  une  tendance  de  plus  en  plus  marquée 
vers  la  croyance  en  un  seul  Dieu.  Certains  pandits  prêchent  le  mono- 
théisme, comme  un  retour  à  la  foi  primitive  de  Tlnde^  bien  qu'il  n'en 
soit  nullement  question  dans  leurs  livres  sacrés  par  excellence,  les 
védas.  C'est  ainsi  que  nous  vimes,  vers  les  premier  et  deuxième  siècles 
de  notre  ère,  certaines  sectes,celle  des  gnostiques,  par  exemple,  tenter 
une  sorte  de  compromis  entre  la  religion  du  Christ  et  Tidolàtrie.  Il  en 
sera  pour  Tlnde  comme  il  en  a  été  pour  le  monde  gréco-romain  ; 
et  cet  essai  de  transaction  ne  peut  être  considéré  que  comme  le  signe 
avant  coureur  de  la  victoire  du  christianisme. 

Ce  compte  rendu  permettra  de  juger  de  l'intérêt  présenté  par  le 
livre  de  M.  Garcin  de  Tassy.  Parmi  les  publications  orientales  récentes, 
il  en  est  peu  qui  nous  semblent  autant  de  nature  à  être  goûtées  et 
appréciées  du  public.  H.  db  Charbngby. 


HISTOIRE 

L.*B«pagne«  Aplendeups  et  misères»  Voyage  oxiUHqw  et  pitio- 
resgiM,  par  P.  L.  Imbeert.  Illustrations  d'Alexandre  Prévost.  Paris,  Pion, 
i875.  Id-12  de  384  p.  —  Prix  :  4  te. 

A  ce  titre,  on  pourrait  croire  que  le  volume  de  M.  Imbert  contient 
ce  qu'on  n'y  trouve  pas.  L'auteur  n'a  pas  voulu,  comme  M.  de  la  Borde 
et  comme  M.  Oermon  de  Lavigne,  écrire  un  itinéraire  ;  il  n'a  pas 
cherché,  comme  Dumas,  dans  ses  Impressions  de  voyage  de  Paris  à 
CadiXy  à  divertir  ses  lecteurs  par  les  procédés  habituels  aux  roman- 
ciers; comme  MM.  Teste  et  Fr.  Maguard,  comme  M.  Cherbuliez 
ensuite,  il  n'a  pas  tenté  d'examiner  l'Espagne  à  un  point  de  vue  poli- 
tique. Il  s'est  rappelé  un  peu  plus,  peut-être.  Th.  Gautier  et  les  écla- 
tants tableaux  de  Tra  lo$  Montes;  il  s'est  rappelé  un  peu  plus  encore 
la  manière  de  M.  Taine  dans  son  Excursion  aux  Pyrénées,  M.  Imbert 
n'étudie  l'Espagne  ni  en  historien,  ni  en  littérateur,  ni  même  en 
artiste  ;  les  événements  du  passé,  les  poëtes  Toccupent  peu,  les  arts  ne 
le  frappent  pas  très-vivement,  et  ses  descriptions  de  musées  et  de 
tableaux  n'apprendront  rien  à  personne.  M.  Imbert  a  tâché  de  repro- 
duire surtout  ce  qu'il  avait  sons  les  jeux,  cela  fûi-il  d'un  intérêt 
médiocre,  cela  ne  servtt-il  qu'à  montrer  l'habileté  de  l'écrivain.  Là, 
il  a  souvent  réussi,  et  son  volume,  comme  esquisse  de  paysages  et  de 


—  237  — 

lûœurs,  a  de  la  vérité  et  du  charme.  On  le  lit  avec  plaisir,  comme  Ton 
placerait  dans  un  stéréoscope  une  série  de  photographies^  seulement, 
rœil  se  fatigue  de  cet  exercice,  et  l'esprit  se  fatiguerait  d'une  lecture 
trop  suivie  du  livre  de  M.  Imbert;  mais  quitté  et  repris,  je  le  répète, 
il  distrait,  il  plaît,  il  donne  quelque  chose  des  émotions  de  voyage,  et 
cela  n'est  pas  un  petit  mérite.  Que  toutes  les  anecdotes  que  raconte 
M.  Imbert  soient  espagnoles,  nous  en  doutons  ;  on  trouve  à  la  page  58, 
sous  le  titre  :  VFuêque  et  le  Barbier,  une  petite  histoire  qui  traîne  dans 
les  anas  de  tous  les  pays.  Souvent  M.  Imbert,  dans  son  désir  de  trop 
peindre,  emploie  des  comparaisons  plus  que  bizarres;  ainsi,  en  parlant 
d'une  vieille  église  :  o  Les  ouvertures^  dit-il,  en  sont  éraillées  comme 
les  yeux  d'une  vieille  fille,  les  murs  atteints  d'une  colique  de  pierres, 
se  tiennent  debout  par  je  ne  sais  quel  prodige.  »  Ailleurs,  il  trouve 
qu'en  s'avançant  dans  le  lit  desséché  d'une  rivière,  tt  on  croirait,  dans 
de  certains  endroits,  marcher  sur  un  immense  morceau  de  lard  durci.  » 
Le  volume  de  M.  Imbert  est  illustré  de  seize  dessins  de  M.  Al.  Prévost, 
son  compagnon  de  voyàjge.  Ils  ont  du  mouvement,  ils  semblent  bien 
pris  sur  le  fait,  mais  ils  n'ont  pas,  sans  doute,  été  reproduits  aussi 
heureusement  que  le  peintre  l'eût  désiré.  Th.  P. 


Histoire  ancienne  de»  peuples  de  POrlent,  par  G.  Maspero, 
professeur  de  langue  et  d'archéologie  égyptiennes  an  Collège  de  France. 
Ouvrage  contenant  neuf  cartes  et  quelques  spécimens  des  écritures  hiéro- 
glyphiques et  cunéiformes.  Paris,  Hachette,  1875.  In-12  de  608  p.  — 
Prix  :  o  fr. 

Anolent  BUstory  from  the  nfonuments.  Published  under  the 
Direction  of  the  Committeeof  gênerai  literature  and  Education,  appointed 
bythe  Society  for  promoting  Christian  Knowledge:  i.  Egypt  from  the 
eifrUest  Tîmes,  to  B.  C  300,  by  S.  Bibch,  L.  L.  D.  ;  —  2.  Assyriat  from  the 
earîiest  Times  to  tke  Fall  of  Ninevehf  by  Georges  SiUTB^of  the  Département 
of  oriental  Antiquities,  Bristish  Muséum;  —  3.  Fersia  from  the  earîiest 
Period  to  the  arab  Conquesty  by  W.  S.  W.  Vaux,  M.  A.,  F.  R.  S.  Londres, 
Society  for  promoting  Christian  Knowledge.  3  vol.  in-18  de  xxii-192,  192 
et  192  p.  —  Prix  :  2  fr.  60  le  vol. 

Le  successeur  de  M.  de  Rougé  dans  la  chaire  d^archéologie  égyp- 
tienne au  Collège  de  France,  M.  Maspero,  vient  de  publier  une  His* 
toire  ancienne  des  peuples  de  f  Orient ,  remarquable  à  bien  des  titres.  Par 
malheur,  il  est  loin  d'avoir  l'esprit  chrétien  qui  animait  son  maltre,et^ 
tout  en  reconnaissant  le  mérite  exceptionnel  de  son  travail,  nous 
sommes  obligés  de  faire  les  plus  graves  réserves  au  nomde  la  critique 
religieuse.  ^ 

Son  histoire  est  divisée  en  cinq  livres,  comprenant  chacun  une  des 
grandes  phases  de  la  vie  des  peuples  orientaux.  Le  premier  étudie 
rÉgypte  jusqu'à  Tinvasion  des  pasteurs;  le  second,  l'Asie  avant  et 
pendant  le  temps  de  la  domination  égyptienne  ;  le  troisième,  Tempire 


—  238  — 

assyrien  et  le  monde  oriental  jusqu^à  Tavénement  des  Sargonides  ;  le 
quatrième,  les  Sargonides  et  le  monde  oriental  jusqu'à  ravénement 
de  Kjros  (Cyrus);  le  cinquième,  Tempire  perse.  Le  dernier  chapitre 
est  consacré  à  récriture  :  aux  procédés  employés  dans  la  formation  des 
écritures  antiques»  en  particulier  de  récriture  cunéiforme  et  hiéro- 
glyphique, hiératique  et  démotique  ;  à  Torigine  de  Falphabet  phénicien 
et  de  ses  dérivés  ariens.  Neuf  cartes,  malgré  des  lacunes  quelque- 
fois considérables,  permettent  de  suivre,  sur  les  lieux,  la  marche 
générale  des  événements  racontés.  Tous  les  faits  sont  étudiés  avec 
beaucoup  de  soin  ;  les  sources  originales  sont  souvent  citées  dans  une 
traduction  française.  La  compétence  de  rautenr,en  tout  ce  qui  touche 
à  rÉgypte,  est  incontestable.  Pour  ce  qui  concerne  TAssyrie,  il  a  ana* 
lysé  soigneusement  tous  les  travaux  de  MM.  Oppert,  Lenormant, 
Schrader,  Menant,  G.  Rawlinson.  Il  a  suivi  M.  Schrader  sur  cer- 
tains points  où  il  aurait  mieux  fait  de  l'abandonner.  Le  plus  grand 
mérite  de  son  travail  consiste  cependant  à  présenter,  dans  un  seul 
tableau,  Thistoire  de  tous  les  peuples  d'Orient.  Les  historiens  qui  Tout 
précédé,  M.  Georges  Rawlinson,  M.  François  Lenormant  ont  raconté 
séparément  l'histoire  des  nations  diverses  de  l'antique  Orient. 
M.  Maspero  nous  les  présente  jouant  leur  rôle  dans  ce  grand  drame 
de  la  civilisation  antique  ;  il  ne  les  fait  pas  paraître  isolément,  mais 
elles  se  montrent  à  nous  à  la  fois,  lorsqu'elles  se  sont  rencontrées  en 
effet  sur  le  théâtre  des  événements.  Le  récit  est  ainsi  plus  vivant,  et 
surtout  l'ensemble  des  faits  et  leur  enchaînement  apparaissent  d'une 
manière  plus  claire  et  plus  saisissante. 

Nous  avons  maintenant  à  adresser  k  M.  Maspero  quelques  légères 
critiques  et  un  reproche  grave.  Il  se  moque,  p.  838,  «  des  raffifés  de 
Thèbes  et  de  Memphis  qui  trouvaient  autant  de  plaisir  à  sémitiier  que 
nos  contemporains  à  semer  le  français  de  mots  anglais  mal  prononcés.» 
Pourquoi  alors  tourmenter  certains  noms  propres  comme  il  l'a  fait? 
Pourquoi  surtout  les  écrire  dans  notre  langue  avec  l'orthographe 
anglaise?  Pourquoi  appeler  le  prophète  Isaïe  Éiate  (p*d77)  et  ailleurs 
Jésaiah  (p.  896),  lorsque  aucune  de  ces  formes  ne  représente  exacte- 
ment la  forme  originsde  hébraïque?  Pourquoi  aussi  défigurer  le  nom  si 
connu  de  Cyrus  en  Kyros,  qui  est  la  forme  grecque  mais  non  la  forme 
perse  du  nom  du  grand  roi  ?  Un  pareil  système  ne  peut  que  produire  la 
confusion  et  être  une  source  d'embarras  pour  les  lecteurs.  Que  l'on 
donne  aux  noms  propres  leur  orthographe  originale,  soit,mais  que  Ton 
s'y  tienne. 

Un  reproche  beaucoup  plus  grave  que  l'on  doit  faire  à  V Histoire 
ancienne  des  peuples  de  COrient,  reproche  que  nous  avons  déjà  indiqué, 
c'est  qu'elle  est  tout  imprégnée  de  rationalisme.  La  Bible  est  traitée 
comme  la  traitent  les  incrédules  d'en- deçà  et  d'au-delà  du  Rhin.  Pour 


—  230  — 

M.  Maapero,  le  surnaturel  n* existe  pas,  ety  dans  certains  passages,  il 
parle  de  Dieu  sur  un  tel  ton  que  Ton  se  demande  s'il  croit  à  son  exis- 
tence (p.  317,  319,  etc.).  C'est  assez  prévenir  les  parents  chrétiens 
que  ce  livre,  qni  fait  partie  de  la  collection  Duruj,  n'est  pas  à  mettre 
entre  les  mains  des  jeunes  gens. 

—  Les  trois  volumes  d'Histoire  ancienne  i après  les  monuments,  publiés 
par  la  Société  pour  le  développement  de  t  instruction  chrétienne^  racontent 
les  mêmes  événements  que  le  volume  de  M.  Maspero,  à  l'exception  des 
événements  bibliques;  mais  chacun  d'eux  est  consacré  exclusivement 
à  un  seul  peuple.  La  rédaction  en  a  été  confiée  à  des  hommes  spéciaux, 
d'un  mérite  et  d'une  science  reconnus.  M.  Birch  et  M.  G.  Smith  sont 
célèbres,  même  en  France,  le  premier  comme  égjptologue,  le  second 
comme  assyriologue.  V Egypte  de  M.  S.  Birch,  s'ouvre  par  une  intro- 
duction où  sont  traitées  toutes  les  questions  générales  d'origine,  de 
religion,  d'administration,  de  mœurs.  Les  faits  sont  racontés  en  quatre 
chapitres,  dont  le  premier  comprend  l'ancien  empire  ou  les  six  pre- 
mières dynasties;  le  second,  le  moyen  empire  ou  de  la  septième  à  la 
dix-huitième  dynastie  ;  le  troisième,  le  nouvel  empire,  depuis  la  dix- 
hoitième  jusqu'à  la  vingtième  dynastie;  le  quatrième,  depuis  la  ving- 
tième dynastie  jusqu'à  la  conquête  de  l'Egypte  par  Alexandre  le 
Grand.  L'histoire  ùl  Assyrie  est  moins  bien  divisée.  Elle  est  partagée 
en  seize  chapitres,  consacrés,  pour  la  plupart,  à  l'histoire  particulière 
d'un  roi  assyrien.  Cette  division  ne  permet  pas  de  voir,  du  premier 
coup  d'œil,  les  grandes  lignes  de  l'histoire  assyrienne.  On  peut  faire 
un  reproche  à  peu  près  semblable  à  l'htstoire  de  la  Perse^  au  moins 
pour  les  premiers  chapitres.  Lesqoatre  premiers  s'occupent  des  Aché- 
ménides,  le  cinquième,  des  Arsacides  et  le  sixième,  des  Sassanides. 
Le  chapitre  troisième  n'est  que  l'analyse  du  livre  de  Daniel. 

l^' Egypte i  l'Assyrie^  la  Perse  sont  trois  résumés  remarquables  qu'on 
ne  saurait  trop  recommander.  Les  auteurs  ont  su  condenser,  dans 
quelques  pages,  tout  ce  que  les  récentes  découvertes  archéologiques 
nous  ont  révélé  de  plus  utile  et  de  plus  intéressant  sur  ces  pays. 
Personne  n'était  mieux  préparé  qu'eux  à  cette  œuvre  de  vulgarisation. 
Rien  de  ce  qui  concerne  la  terre  des  Pharaons  n'est  étranger  à 
M.  S.  Birch.  M.  Smith  vit,  au  British  Muséum,  au  milieu  de  l'ancienne 
bibliothèque  de  Ninive  ;  il  a  fait  deux  voyages  en  Mésopotamie,  il  a 
publié  V Histoire  à'Assurbanipaly  les  Découvertes  assyriennes  et  un  grand 
nombre  d'articles  sur  l'histoire  de  l'Assyrie,  dans  les  revues  et  les 
journaux  anglais  et  dans  la  Zeitschrift  de  Lepsîus.  Il  n'a  donc  eu 
qu'à  abréger  ses  propres  travaux  et  à  faire  connaître,  en  partie,  ses 
propres  découvertes  pour  écrire  son  Assyrie.  L'épigraphie  n'a  pas  jeté 
autant  de  lumière  sur  l'histoire  de  la  Perse  que  sur  celle  du  bassin  de 
de  l'Euphrate  et  du  Tigre  et  sur  celle  de  la  vallée  du  Nil.  Les  inscrip- 


—  240  — 

lions  perses  sont  cependant  encore  nombreuses  et  fort  importantes, 
et  M.  Vaax  les  a  bien  mises  à  profit. 

Ces  trois  publications  sont  ornées  d'illustrations  sur  bois,  repré- 
sentant des  œuvres  d*art  et  des  monuments  originaux  ou  des  inscrip- 
tions. Elles  parlent  aux  jeux  des  lecteurs,  et  lui  en  disent  bien  plus  que 
des  pages  entières  de  descriptions.  Il  est  seulement  à  regretter  que 
chaque  volume  ne  soit  pas  accompagné  d*une  carte  du  pays. 

G.  K. 


Dictionnaire  pratique   de  Tantlqulté,    par   Patrice  Ghâovièbe. 
Paris,  Casimir  Pont,  1875.  In-12  de  493  p.  —  Prix  :  2  fr. 

Je  commencerai  par  adresser  un  reproche  à  l'auteur  de  cet  ouvrage, 
c*est  d'avoir  voulu  faire  un  dictionnaire  d'antiquités  sans  la  moindre 
figure  ;  mettre  quelques  représentations  sous  les  jeux  de  ses  lecteurs 
était  le  seul  moyen  de  justifier  son  titre  de  dictionnaire  pratique.  La 
connaissance  des  monuments,  leur  interprétation,  Tétude  de  Tarchéo- 
logie  figurée  sont  ai:gourd*hui  si  indispensables  aux  amateurs  de  Tanti- 
quité  qu*il  est  permis  d'affirmer  qu'on  ne  peut  approfondir  la  vie,  les 
mœurs,  les  usages  et  les  coutumes  des  anciens  sans  avoir  sans  cesse 
sous  les  yeux  les  représentations  qu'ils  nous  ont  laissées.  Il  est  néces- 
saire de  connaître  les  textes  des  auteurs  :  mais  combien  de  passages 
seraient  restés  pour  nous  obscurs,  si  nous  n'avions  pas  eu  des  monu- 
ments pour  leur  servir  de  commentaires  ;  et,  réciproquement,  combien 
de  monuments  en  tous  genres  n'auraient  pour  nous  qu'une  significa- 
tion très-vague^  si  un  petit  texte,  un  court  passage,  un  mot  quelque- 
fois n'étaient  venus  nous  aider  à  leur  donner  un  sens  précis  et  clair,  à 
en  déterminer  l'usage.  Si  on  veut  expliquer  ce  que  c'est  qu'ui^  cratère, 
on  le  fait  bien  mieux  comprendre  en  en  plaçant  l'image  devant  le  lec- 
teur qu'en  lui  citant  les  plus  beaux  vers  d'Homère  et  de  Virgile  ! 
M.  P.  Ghauvière  en  est  encore  à  l'ouvrage  de  Montchablon,  qui  lui  a 
servi  de  base  pour  rédiger  ses  articles;  et  cependant,  il  doit  reconnaître 
que^  depuis  cent  quinze  ans,  l'archéologie  a  fait  quelques  progrés. 
Sans  parler  des  livres  spéciaux  de  Krause,  du  résumé  d'Hermann  pour 
la  Grèce,  de  celui  de  Becker  etMarquart  pour  Rome,  de  la  RealEncy- 
chpédie,  etc.,  il  eût  trouvé,  dans  le  manuel  si  connu  d'Antony  Rich, 
un  meilleur  modèle  à  suivre  et  souvent  à  corriger  sur  beaucoup  de 
points.  Un  grand  nombre  de  mots  manquent  dans  son  dictionnaire, 
même  parmi  ceux  dont  l'usage  est  le  plus  fréquent  et  que  les  gens  du 
monde  rencontrent  dans  leurs  lectures  de  chaque  jour.  On  y  cherche- 
rait en  vain  les  termes,  acropole,  pétasCy  rouelle,  stratég€,portorium,  etc. 
Les  notions  de  l'auteur  sur  l'administration  romaine  laissent  aussi  à 
désirer  :  au  mot  legatus,  par  exemple,  on  voudrait  trouver  l'explica- 


—  241  — 

tion  du  terme  legalus  Auguêtipro  prœlore;  au  mot  légion,  on  serait  fort 
aise  de  rencontrer  la  liste  exacte  des  légions  avec  les  surnoms  qu'elles 
portaient  et  l'indication  de  leurs  ^iKir^iers  habituels.  Ces  renseignements 
font  absolument  défaut.  Les  articles  consacrés  aux  proconsuls  et  aux 
procurateurs  ne  contiennent  rien  de  précis  sur  ces  fonctionnaires,  dont 
il  est  si  important  de  définir  nettement  le  rôle  et  les  attributions.  Dion 
Gassius  nous  a  pourtant  laissé  des  détails  très-clairs  sur  le  système 
d'administration  des  provinces  impériales  inauguré  par  la  célèbre 
constitution  d'Auguste  de  Tan  727,  et  les  renseignements  qu*il  nous  a 
transmis  sont  confirmés  chaque  jour  par  Tétude  des  monuments  épi- 
graphiques.  Puisque  je  parle  de  Tépigraphie,  la  partie  la  plus  neuve  de 
ce  petit  manuel  serait  peut-être  les  listes  d'abréviations  que  l'auteur 
donne  à  propos  de  chacune  des  lettres  de  Talphabet^  s'il  n'avait  pas 
confondu  les  abréviations  fournies  par  les  médailles  avec  celles  qu'on 
rencontre  dans  les  textes  lapidaires  romains.  Les  premières  ne  sont 
soumises  à  aucunes  règles  fixes;  les  secondes^  au  contraire,  sont  les 
mêmes  pour  la  même  époque  à  Rome  et  dans  les  autres  provinces  de 
l'empire.  Et  parmi  ces  dernières  les  unes  sont  immuables,  notammentles 
abréviations  des  prénoms  ou  des  noms  de  dignités  ;  les  autres  sont 
purement  accidentelles,  et  il  est  dangereux  de  les  citer  dans  un  dic- 
tionnaire. En  somme  l'antiquité,  pour  devenir  familière  aux  gens  du 
monde,  et  je  crois  que  ce  petit  manuel  s'adresse  à  eux  spécialement, 
aurait  besoin  d'un  apôtre,  je  ne  dirai  pas  plus  convaincu  que  M.  Chau- 
vitee^  mais  mieux  préparé  à  la  tâche  difficile  qu'il  a  entreprise. 

Antoine  Héron  db  Villbfossb. 


Eie  Pseudo-Synode  connu  dans  l*lit»tolre  ftons  le  nom  de 
Bri^andagpe  d'Ephèse,  étudié  d'après  ses  actes  retrouvas  en  syriaque, 
par  H.  Tabbé  Martin,  chapelain  de  Sainte-Geneviève.  Paris,  Maisonneuve, 
1875.  ln-8  de  xxi-214  p.  —  Prix  :  4  fr. 

Le  conciliabule  que  le  pape  saint  Léon  et  Thistoire,  après  lui,  ont 
flétri  du  nom  mérité  de  Brigandage  d*Éphèse,  a  été  jusqu'à  ces  der- 
niers temps,  malgré  sa  grande  importance,  emveloppéd'obscurité.Tout 
n'est  pas  encore  parfaitement  clair  aujourd'hui,  mais  beaucoup  de 
nuages  ont  été  dissipés,  grâce  à  la  publication  des  actes  syriaques  du 
Pseudo-Synode  d'Ephèse,  trouvés  au  couvent  de  Nitrie  et  conservés 
aujourd'hui  au  British  Muséum.  M.  G.  Hoffmann  en  a  donné  une  tra- 
duction allemande,  et  M.  Martin  une  traduction  française, pendant  que 
M.  G.  Parry  travaille,  à  Londres,  à  la  publication  du  texte  en  même 
temps  qu'à  une  traduction  anglaise.  Les  actes  du  Brigandage  d'Ephèse 
n^étaient  que  très-imparfaitement  connus  par  le  concile  de  CalcédoinCf 
Ils  ne  le  sont  pas  encore  complètement  par  la  version  syriaque,  car  le 
manuscrit  a  malheureusement  souffert  des  ravages  du  temps,  et,  de 
Septembre  1875.  T.  XIV,  16. 


—  244  — 

site  parfois  un  sarcroit  d'attention  de  la  part  da  lectear,  en  s* étendant 
sar  des  sigets  qui,  par  leur  nature  même,  ne  sont  pas  toujours  aisément 
accessibles.  Th.  de  Puymaiorb. 


Étude»  sur  les  temps  primitifs  de  l'ordre  de  Saint-Domi- 
nique, par  le  R.  P.  Amtonin  Danzas.  Tome  QI.  Poitiers,  Oudin,  1875. 
In-8  de  xvi-520  p.  —  Prix  :  6  fr. 

Le  P.  Danzas  vient  de  publier  le  troisième  volume  de  l'intéressant 
ouvrage  dont  nous  avons  naguère  signalé  à  nos  lecteurs  (t.  XII, 
p.  275)  la  première  partie.  Au  lieu  de  suivre,  dans  son  exposé,  la 
méthode  chronologique,  qui  semble  plus  naturelle  et  qui  est  plus 
accessible  à  tous  les  esprits,  Fauteur  a  cru  devoir  adopter  la  méthode 
syntéthique.  Après  avoir  successivement  traité  de  la  vie  religieuse  et 
monastique,  de  la  vie  doctrinale  et  de  la  vie  apostolique,  le  savant 
historien  aborde,  dans  le  volume  qui  nous  occupe,  la  question  du  gou- 
vernement de  Tordre.  Si  Ton  trouve,  à  la  base,  des  institutions 
libérales^  il  faut  avouer  qu'elles  ne  sont  pas  sans  contre -poids  au 
sommet,  et  Ton  reconnaît  bien  la  vérité  de  la  définition  qu* Albert  le 
Grand  donna  du  pouvoir  souverain:  Est  totasimulin  unostanspotesCas.., 
stans  et  non  nutans  :  une  puissance  stable  réunissant  dans  les  mains 
d'un  seul  tous  les  attributs  souverains...  stable  et  ne  vacillant  pas. 
Cependant,  à  côté  du  pouvoir  exécutif,  se  trouve  une  autorité  qui 
délibère  :  c'est  le  chapitre,  dont  la  constitution  est  appliquée  d'une 
façon  aussi  exacte  qu'intéressante. 

A  la  suite  de  l'exposé  d'ensemble  du  système  de  gouvernement 
adopté  par  les  saints  fondateurs,  le  P.  Danzas  entre  dans  les  détails 
spéciaux  à  la  discipline  monastique  et  religieuse,  à  la  discipline 
scolaire  et  à  la  vie  apostolique.il  aborde  ensuite  Tétude  des  privilèges 
de  l'ordre,  dont  le  principal  était  l'exemption.  Les  luttes  engagées  pour 
la  défense  des  immunités  furent  aussi  longues  que  difficiles:  elles 
éclatèrent  dans  toute  leur  effervescence  vers  le  milieu  du  treizième 
siècle;  mais  elles  se  prolongèrent  bien  au*  delà,  et  il  est  intéressant 
d'en  suivre  les  détails  et  les  alternatives. 

Le  volume  se  termine  par  deux  chapitres  intitulés  :  l'ordre  de  Saint- 
Dominique  et  l'Empire;  l'ordre  de  Saint-Dominique  et  la  France,  que 
suit  une  longue  et  intéressante  étude  sur  les  doctrines  de  l'ordre  relati- 
vement aux  rapports  entre  les  deux  puissances.  Il  serait  difficile  de 
suivre  l'auteur  dans  les  développements  qu'il  donne  sur  ce  point,  et 
plus  difficile  encore  de  se  prononcer  sur  la  valeur  de  l'hypothèse  qui 
forme,  en  quelque  sorte,  la  conclusion  du  volume. a  L'absolutisme,  dit  le 
P.  Danzas,  a  pris  la  place  de  la  royauté  de  Jésus-Christ,  en  attendant 
qu'il  cède  le  sceptre  à  la  Révolution.  Serait-ce  cet  avenir,  alors  si 
lointain,  aujourd'hui  si  présent,  qu'avait  entrevu  Hugues  de  Saint- 


—  243  — 

but  de  vulgarisation,  M.  Pidal  y  Mon  ne  s^est  pas  cru  permis,  comme 
cela  arrive  trop  sonvent  en  pareille  occorence,  de  coordonner  des 
redites.  En  s'aidant,  ainsi  que  c'était  son  droit,  .du  labeur  de  ses  nom- 
breux devanciers,  il  a  tenu  à  examiner  par  lui-même  le  sujet  si  impor- 
tant qu'il  voulait  mettre  à  la  portée  de  tous  les  lecteurs,  et  a  réussi,  dans 
un  nombre  de  pages  relativement  restreint,  à  bien  raconter  la  vie  et 
à  exposer  suffisamment  la  doctrine  du  puissant  théologien.  M.  Pidal  j 
Mon  a  divisé  son  livre  en  dix  parties  :  —  Vie  de  saint  Thomas  ;  — 
histoire  de  ses  reliques;  —  ses  œuvres;  —  sa  doctrine  ;  —  ses  dis- 
ciples; —  son  siècle;  —  Tordre  fondé  par  lui;  —  sa  mission;  —  les 
éloges  qui  furent  faits  de  lui,  les  honneurs  qui  lui  furent  rendus  ;  —  sa 
bibliographie,  son  iconographie.  —  Tout  est,  pour  ainsi  dire,  intéres- 
sant dans  ce  livre  ;  mais  les  deux  chapitres  qui  nous  ont  le  plus  frappé 
sont  celui  qui  renferme  Tanaljse  des  œuvres  de  saint  Thomas  et  celui 
qui  contient  des  considérations  sur  sa  mission,  mission  qui  se  continue 
encore  aujourd'hui.  Le  premier  de  ces  chapitres  cause  une  réelle  admi- 
ration par  la  lumière  que  saint  Thomas  a  projetée  sur  tant  de  questions 
ardues  et  obscures.  Il  j  a  là,  en-dehors  même  des  problèmes  théo- 
logiques ou  philosophiques,  des  déûnitions  d'une  netteté  surprenante, 
et  l'on  est  émerveillé  de  la  justesse  avec  laquelle  le  docteur  angélique 
se  prononce  sur  les  diverses  formes  de  gouvernement.  Les  inconvé- 
nients de  la  monarchie  absolue  se  corrompant  si  facilement  en  tyran- 
nie, les  dangers  de  la  République  si  portée  à  dégénérer  en  anarchie, 
les  avantages  d'une  combinaison  mixte,  de  ce  que  nous  appellerions 
aigourd*hui  une  royauté  constitutionnelle,  ont  été  remarquablement 
exposés  par  saint  Thomas  :  a  Toutes  les  grandes  questions  théolo- 
giques,  philosophiques,  politiques,  sociales,  économiques  de  notre 
temps  ont  été,  dit  l'écrivain  espagnol,  traitées  d'une  manière  émi- 
nente  par  saint  Thomas.  Le  panthéisme  idéaliste,  le  matérialisme  posi- 
tiviste, le  socialisme,  l'individualisme,  la  morale  indépendante,  les 
fondements  de  la  légitimité  des  pouvoirs,  leur  division,  leur  distinc- 
tion, les  principes  économistes,  les  règles  du  travail,  le  droit  de  pro- 
priété, enfin  tout  ce  qui  constitue  l'essence  de  la  polémique  contem- 
poraine, trouve  là  une  réponse  ou  une  solution,  une  indication  ou  une 
direction,  des  limites  ou  des  développements.  » 

Nous  sommes  obligé  d'abréger  le  passage  enthousiaste  d'où  nous 
extrayons  ces  lignes,  passage  écrit,  comme  beaucoup  d'autres  de  ce 
volume,  d'un  style  trop  déclamatoire.  Pour  les  méridionaux,  U  est  dif- 
ficile de  ne  pas  chercher  la  phrase  brillantée,  ou  plutôt  de  ne  pas  la 
trouver  sans  même  la  chercher.  Leur  imagination  ardente,  leur  idiome 
sonore  et  hyperbolique  les  poussent  hors  de  la  simplicité  et  de  la  pré- 
cision. M.  Pidal  y  Mon  n'a  pas  toujours  assez  résisté  à  des  entraîne- 
ments de  cette  espèce  ;  son  langage,  trop  solennel,  trop  imagé,  néces- 


-  246  — 

NouR  anrionfl  aimé  pourtant  à  voir  figurer,  parmi  les  docoments  con- 
ceroant  le  18  fructidor,  V Histoire  du  chevalier  de  La  Rue.  Le  aecond 
volume  se  termine  parun  appendice  de  pièces  relatives,  pour  la  plupart, 
au  31  mai  et  au  2  juin.  Nous  avouons  ne  pas  bien  comprendre  les  raisons 
qui  ont  empêché  M.  de  Lescure  de  classer  ces  journées  parmi  les  jour- 
nées révolutionnaires  ;  et  le  soin  même  qu'il  a  pris  de  donner  des 
fragments  de  Dulaure  et  de  Lanjuinais,  qui  racontent  la  proscription 
des  Girondins,  nous  semble  prouver  qu'il  n'a  exclu  qu'à  regret  ce  grand 
drame  révolutionnaire  de  son  programme.  Nous  regrettons  encore 
qu'il  ait  été  si  sobre  de  détails  pour  la  journée  du  13  vendémiaire,  et 
muet  sur  celles  du  12  germinal  et  du  1*'  prairial. 

La  nouvelle  série  s'augmentera  bientôt,  nous  l'espérons,  des  mé- 
moires annoncés  sur  les  Assemblées  politiques  de  la  Révolution,  sur  les 
Comités  révolutionnaires^  sur  les  Procès  célèbreSy  sur  la  F!end^,sur  VÉmi- 
gration.  Nous  souhaitons  vivement  que  les  volumes  promis^  tout  en 
nous  apportant  des  documents  inédits,  puisent  largement  aussi  dans 
les  documents  déjà  connus,  et  les  reproduisent,  autant  que  possible, 
intégralement.  Les  éditions  de  1823  et  de  1825  sont  devenues  presque 
introuvables.  La  grande  collection  Baudouin  des  Mémoires  sur  la 
Révolution,  est  très-chère  et  ne  se  rencontre  plus  que  très-difficile- 
ment. Pourquoi  ne  la  réimprimerait-on  pas,  en  l'augmentant  des  prin- 
cipaux documents  livrés  depuis  au  public  ?  Il  appartiendrait  à  un 
érudit,  comme  M.  de  Lescure,  et  à  un  éditeur,  comme  M.  Didot^  de 
tenter  cette  entreprise,  et  nous  sommes  convaincus  qu'entre  leurs 
mains,  elle  réussirait.  Maxime  de  la  Rochbtbrib. 


IVapoléon  !«'  et  le  rot  JjauMm,  d*aprés  les  documents  conservés  aux  Ar^ 
chives  nationcdes,  par  Félix  Rocquâin.  Paris,  Didot,  1875.  Grand  in-8  de 
cxxviii-338  p.  —  Prix  :  9  fr. 

On  connaissait,  depuis  longtemps  les  querelles  de  Napoléon  P'  et 
et  de  son  frère,  le  roi  de  Hollande  ;  on  n'en  connaissait  point  les  do- 
cuments authentiques.  En  1820,  Louis  avait  publié  quelques  pièces 
que  Napoléon  s'était  empressé,  sans  les  avoir  lues  probablement,  de 
traiter  de  «  libelle.  »  En  1868,  un  écrivain  hollandais,  M.  Théodore 
Jorrîssen,  avait  imprimé,  dans  une  brochure  sur  Napoléon  P'  et  le  roi 
de  Hollande,  sept  lettres  conservées  dans  les  archives  de  Hollande. 
Mais  la  plus  grande  partie  de  ces  documents  appartenaient  aux  archives 
de  France,  et  ceux-là  étaient  restés  secrets.  En  publiant  la  fameuse 
correspondance  de  Napoléon,  le  gouvernement  impérial  avait  sup- 
primé ou  tronqué  plusieurs  des  lettres  de  Napoléon  à  Louis,  et  s'était 
bien  gardé  de  donner  les  lettres  de  Louis  à  Napoléon.  C'est  cette 
lacune  qu'est  venu  combler  M.  Rocquâin,  dans  un  beau  volume  imprimé 


—  247  — 

ohez  Didot.  Gomme  pour  son  intéressant  ouvrage  sur  tÉtai  de  la 
France  au  18  brumairey  M.  Rocqnain  a  fait  précéder  les  pièces 
'  officielles  d'une  étude  approfondie  sur  ces  pièces.  Il  j  établit,  de  la 
façon  la  plus  nette  et  la  plus  impartiale,  l'antagonisme  des  deux 
frères,  antagonisme  qui  se  révèle,  en  quelque  sorte^  dès  le  premier 
jour.*  Louis  prend  son  rèle  de  souverain  au  sérieux;  devenant  roi  de 
Hollande^  il  adopte  son  peuple  et  les  intérêts  de  son  peuple  ;  il  se  fait 
Hollandais  en  quelque  sorte.  Ce  n'est  point  ainsi  que  Ta  entendu 
Napoléon.  En  donnant  un  trône  à  son  frère,  il  n'a  nullement  voulu 
rétablir  indépendant  :  il  prétend  faire  de  lui  moins  un  souverain  qu'un 
serviteur  fidèle,  moins  un  roi  de  Hollande  qu'un  préfet  français,  exé- 
cuteur scrupuleux  des  volontés  du  puissant  empereur  d'Occident.  Peu 
importe  que  le  blocus  continental  ruine  le  commerce  de  la  Hollande; 
peu  importe  que  ce  petit  pays  ait  ses  finances  épuisées  et  sa  popula- 
tion misérable.  La  Hollande  doit  fermer  ses  ports  aux  marchandises 
anglaises,  et  entretenir,  moins  pour  sa  défense  que  pour  celle  de  l'em* 
pire,  une  armée  qui  la  ruine.  En  vain,  Louis  proteste,  supplie,  implore  ; 
il  n'obtient  rien  que  des  reproches  et  de  nouvelles  rigueurs.  Napoléon 
en  vient  même  à  interdire  en  France  l'entrée  des  denrées  hollandaises, 
achevant  ainsi  de  porter  le  dernier  coup  au  commerce  de  ce  malheu- 
reux pajs,  jadis  si  florissant.  On  est  véritablement  tenté  de  croire,  et 
M.  Rocquain  d'ailleurs  le  soupçonne,  que  Napoléon  veut  pousser  à 
bout  son  frère  ;  pour  trouver  dans  son  abdication  un  prétexte  d'an- 
nexer purement  et  simplement  la  Hollande.  C'est  ce  qui  arriva  en 
effet,  après  des  négociations  et  des  discussions  où  le  caractère  de  Louis 
rêvât  une  réelle  grandeur,  et  où  celui  de  Napoléon  apparaît  plus  tj- 
rannique  et  plus  faux  que  jamais.  Louis,  en  renonçant  à  la  couronne, 
quitte  furtivement  la  Hollande  pour  n'être  point  arrêté  par  la  police 
impériale,  et  Napoléon  déclare  la  Hollande  réunie  à  l'empire  français. 
En  contemplant  de  si  près  lesmjstères  de  la  politique  impériale,  on 
voit  tout  de  suite  où  devaient  fatalement  aboutir  ces  violences  et  ce 
despotisme.  M.  Félix  Rocquain  a  rendu  un  nouveau  service  à  ceux 
qui  ne  veulent  dans  l'histoire  que  la  vérité.  Son  livre  sur  VÉtat  de  la 
France  ou  18  brumaire  avait  singulièrement  entamé  la  légende 
républicaine  ;  son  volume  sur  Napoléon  et  le  roi  Louis  ne  contribuera 
pas  peu  à  détruire  le  prestige  de  l'Empire.      M.  db  la  Roohbtbrie. 


l^aOuerre  au  Jour  le  Jour»  19TO-19Tl«  suivie  de  considérations 
sur  les  causes  de  nos  désasfreSj  par  le  baron  A.  du  Casse.  Paris,  J.  Dumaine, 
1875.  In-8  de  437  p.  —  Prix  :  6  francs. 

Cet  ouvrage,  qui  a  paru  d'abord  dans  le  Spectateur  militaire^  échappe 
un  peu  à  l'analyse,  en  raison  de  sa  forme  môme.  C'est  un  tableau  et  jour 
par  jour  d  de  tous  les  faits  qui,  sur  divers  théâtres,  se  sont  passés 


—  218  — 

dorant  la  dernière  guerre .  On  se  perd  un  peu  dans  cette  longue  suite 
de  reoherohes  trop  décousues,  qui,  étant  le  simple  résumé  de  tons  les 
travaux  publiés  en  France  et  en  Allemagne,  ne  peuvent  évidemment 
rien  apprendre  de  très-nouveau.  Les  quatre-vingts  dernières  pages  sont 
plus  personnelles  et  attirent  mieux  l'attention.  Ce  sont  des  considéra- 
tions sur  les  causes  de  nos  désastres,  dont  beaucoup  sont  aussi  justes 
que  sévères.  La  part  de  la  nation  et  celle  dç  ceux  qui  la  dirigeaient  est 
faite  par  M.  du  Casse  avec  une  rigueur  toute  militaire.  Selon  lui, 
Napoléon  III  ne  devait  pas  se  mêler  de  commander  en  chef,  quand  il 
avait  été  prouvé^  lors  de  la  campagne  d'Italie,  qu'il  a  ne  savait  pas 
faire  la  guerre.  »  Et,  quant  à  nous,  «  Tordre,  la  méthode^  Tintelli- 
gence,  l'étude  sérieuse  et  prolongée,  la  discipline  inflexible  et  acceptée 
de  tous,  $ur  la  rive  droite  du  Rhin;  le  désordre,  la  présomption,  le 
défaut  d'étude,  la  vantardise  et  la  tendance  à  Tindiscipline,  sur  lame 
gauche  du  fleuve,  t  nous  donnaient  une  infériorité  dont  nous  devions 
forcément  être  victimes.  G.  B.  db  P. 


Histoire  du  traité  de  Prancrort  et  de  la  libération  du 
territoire  fk^nçals»  par  J.  Valpbby.  Deuxième  partie.  Paris,  Âmyot, 
4875.  In-8  de  271  p.  —  Prix  :  6  fr. 

M.  Yalfrej  vient  de  terminer  Tintéressante  série  d'études  historiques 
qu'il  a  consacrées  aux  négociations  diplomatiques  et  aux  traités  de 
paix  nécessités  par  la  dernière  guerre  entre  la  France  et  la  Prusse.  Le 
volume  qu'il  publie  est  le  cinquième  (voir  pour  les  précédents,  t.  YII, 
p.  151,  et  t.  XII,  p.  34)  ;  et  les  matières  traitées  s'étendent  entre  le 
12  octobre  1871  et  le  5  septembre  1873.  Trois  milliards  sont  encore  à 
payer;  il  s'agit  de  les  trouver,  et  l'appel  au  crédit  public  ayant  dépassé 
toutes  les  espérances,  de  profiter  de  ce  succès  pour  hâter  la  libération 
définitive  du  territoire.  C'est  la  fin  de  l'œuvre  de  M.  Thiers,  c'est  en 
même  temps  la  fin  de  son  pouvoir.  M.  Yalfrej  trouvera  donc  ainsi 
l'occasion  de  faire  plus  d'une  fois  excursion  dans  la  politique  propre- 
ment dite,  ou  plutôt,  ramenant  tout  à  son  siget,  il  nous  exposera  l'opi- 
nion des  divers  cabinets  européens  sur  les  événements  qui  se  sont 
accomplis  en  France  durant  cette  période.  C'est  la  partie  la  plus  nou- 
velle et  la  plus  piquante  de  son  ouvrage,  car,  pour  le  détail  des  négo- 
ciations avec  la  Prusse,  il  ne  donne  guère  que  les  documents  et  les 
informations  qui  se  trouvent  dans  toutes  les  mains  et  que  les  journaux 
du  temps  ont  déjà  reproduits. 

Ainsi  on  n'a  pas  compris,  paraît-il,  à  l'étranger^  où  l'on  est  peu  au 
fait  de  nos  passions  et  de  nos  rancunes  de  parti,  comment^  après  les 
services  rendus  par  M.  Thiers^  après  le  succès  de  l'emprunt  de  1872, 
la  droite  conservatrice,  au  lieu  «  de  l'entourer,  de  le  retenir,  »  choisit 
ce  moment  pour  «  entrer  en  lutte  »  avec  le  chef  de  l'État  qu'elle  avait 


—  249  — 

choisi,  •  s'engageant  dans  un  conflit  où  l'opinion  ne  suivrait  pas  les 
députés  et  prendrait,  au  contraire,  fait  et  cause  contre  la  représenta- 
tion nationale  et  pour  le  pouvoir  exécutif,  qui  s'afârmait  par  des  actes 
et  des  résultats,  a  De  là,  Tunion  de  plus  en  plus  intime  de  M.  Thiers 
avec  la  gauche  et  la  révolution  parlementaire  du  24  mai  1873.  A  cette 
occasion  encore,  M.  Yalfrey  ne  dissimule  pas  Témotion  ressentie  par 
les  gouvernements  étrangers,  la  Russie  en  particulier,  et  Thahilité  avec 
laquelle  Tltalie  exploita,  dans  son  intérêt,  d'accord  avec  celui  de  la 
Prusse,  la  situation  nouvelle.  Si  hienque  M.  le  duc  de  Broglie,  le  prin- 
cipal auteur  de  la  chute  de  M.  Thiers,  était  ohligé,  dans  une  circulaire 
aux  puissances,  d'annoncer  qu*il  suivrait  la  même  politique  étrangère 
que  le  gouvernement  précédent.  Nous  ne  comprenons  pas  seulement 
que  M.  Yalfrej  puisse  reprocher  à  M.  Thiers  de  n*avoir  pas  gardé  le 
pouvoir  au  24  mai,  comme  la  constitution  Rivet  l'y  autorisait;  car, 
en  présence  d'une  majorité  ouvertement  hostile,  il  aurait  forcément 
perdu  tout  crédit,  toute  autorité  et  tout  prestige. 

Les  autres  critiques  qu^il  adresse  à  l'ancien  président  sont  plus 
justifiées.  Ainsi,  ses  idées  économiques  et  son  fatal  impôt  des  matières 
premières  mécontentaient  inutilement  l'Angleterre.  Puis,  son  dessein 
arrêté  d'empêcher  la  constitution  d'un  gouvernement  définitif  rendit 
impossible  pour  la  France  les  négociations  d'alliances  à  longue  durée 
capables  de  neutraliser  l'entente  que  les  trois  empereurs  du  Nord  con- 
clurent à  Berlin  en  1872.  Mais  n'est-ce  pas  beaucoup  dire  que  de 
prétendre  que  M.  Thiers  s'est  cru  l'homme  nécessaire  de  la  France  ;  — 
qu'il  a  voulu  arrêter  sur  sa  tête  les  destinées  du  pays  ;  —  qu'au  lende- 
main de  la  paix  de  Francfort,  il  a  réalisé  l'idéal  de  gouvernement  que 
nous  souhaitait  la  Prusse  victorieuse?...  »  Il  faut  être  plus  juste,  même 
contre  des  adversaires  politiques,  surtout,  lorsqu'ils  sont  tombés.  Et, 
si  nous  avons  relevé  ce  que  ces  appréciations  avaient  d'exagéré,  c'est 
qu'il  nous  a  semblé  que  les  opinions  de  M.  Yalfrey  s'étaient  singu- 
lièrement accentuées  à  mesure  qu'il  avançait  dans  la  confection  de  son 
ouvrage,  et  qu'il  a  plus  d'une  fois  abandonné  cette  modération  vrai- 
ment digne  de  la  grande  histoire  que  nous  avons  été  heureux  de  consta- 
ter dans  ses  premiers  volumes.    Gustavb  Baqubnault  de  Puchbssb. 

La  Question    d*Orleiit,  précédée  du  Conflit  gréco-bulgare^  Alençon, 
Ch.  Thomas;  Paris,  Douniol,  4875.  In-42  de  xxix-i99  p.  —  Prix  :  2  fr. 

Il  j  a  beaucoup  de  choses  dans  ce  livre  ;  je  dirai  même  qu'on  y  a 
mis  trop  de  choses  pour  qu'il  en  ressorte  des  idées  bien  nettes.  Voici 
d'abord  un  mémoire,  déjà  connu  ,  sur  la  question  arménienne.  Vien- 
nent ensuite  :  La  question  bulgare;  —  Origine  du  schisme  d'Orient  et 
causes  de  sa  durée  ;  — Moyens  de  convertir  les  musulmans  ;  —  Avenir 
de  la  Cjrénaïque  ;  —  Avenir  de  la  mission  des  chrétiens  du  Liban  et 
de  la  Sjrrie  \  —  Moyens  d'avancer  le  retour  de  la  Russie  à  l'unité 


—  250  - 

catholique,  etc.  Je  sais  que  tout  cela  se  tient;  mais  ce  n'est  pas  assez 
lié  dans  la  compilation  qui  nous  occupe.  Est-ce  à  dire  qu'on  ne  doive 
pas  s'jr  intéresser  ou  qu'on  n'y  puisse  apprendre  beaucoup?  Non:  il  j  a 
du  bon  et  du  vrai  dans  les  idées  sur  lesquelles  on  s'appuie,  et  qui 
émanent  principalement  du  R.  P.  Gagarin,  de  Fabbé  Bourgade,  de 
M.  de  Bertou,de  M.  François  Lenormant^  etc.  L'auteur  en  tire  un 
utile  parti.  Ainsi,  il  a  raison  de  plaider  la  cause  des  Grecs,  contre  les 
ignorances  ou  les  préjugés  de  TOccident.  En  rappelant  que  beaucoup 
de  Grecs  sont  venus  combattre  dans  nos  rangs  en  1870,  il  fait  acte  de 
justice  ;  mais  il  aurait  dû  mentionner  que  le  même  mouvement  s'est 
manifesté  aussi  en  Valachie,  tandis  que  les  Turcs  faisaient  étalage 
de  leurs  sympathies  prussiennes. 

Arrivant  à  parler  de  l'attitude  des  puissances  chrétiennes,  et, 
en  particulier^  de  la  France,  notre  auteur  insiste  avec  beaucoup 
d'a-propos  sur  la  nécessité  de  rompre  avec  une  politique  qui 
ferait  de  nous  les  suppôts  de  l'islamisme  et  les  soutiens  de  la 
révolution;  mais,  sur  le  terrain  des  solutions  pratiques,  il  aurait 
fallu  apporter  une  connaissance  plus  exacte  de  l'état  des  choses. 
Ainsi,  pour  le  conflit  bulgare,  les  intéressés  arrivaient  à  un  arran- 
gement, si  la  Porte  n'avait  pas  exigé  que  l'exarque  bulgare  ré- 
sidât à  Gonstantinople  à  côté  du  patriarche  grec  ;  mais  il  restait 
encore  à  s'entendre  sur  le  partage  de  certains  diocèses  où  Grecs 
et  Bulgares  sont  mêlés,  en  d'autres  termes,  sur  la  question  de  savoir 
si  la  Thrace  et  une  partie  de  la  Macédoine  seront  attribuées  au 
monde  hellénique  ou  au  monde  slave.  [L'auteur  de  l'ouvrage  ne  paraît 
pas  se  douter  non  plus  de  l'invasion  du  laïcisme  dans  toutes  les  com- 
munautés de  l'Orient.  Je  ne  sais  pas  s'il  voit  bien  clairement  que 
les  questions  nationales  tendent  à  prendre  le  pas  partout  sur  les 
intérêts  religieux,  ce  qui  est  une  des  conséquences  du  laïcisme. 
Dois-je  ajouter  que  je  n'ai  pas  confiance  dans  les  institutions  parle- 
mentaires proprement  dites  pour  la  régénération  de  l'Orient  ) 

Enfin,  en  ce  qui  concerne  les  Turcs,  il  y  a  une  certaine  candeur  à 
croire  que,  par  de  bons  raisonnements,  on  amènera  les  hommes  im- 
portants à  prendre  en  main  la  cause  d'une  réforme  plus  sensée  et 
plus  appropriée  que  celles  qui  ont  précédé.  La  Turquie  est  entrée  à 
pleines  voiles  sur  la  mer  orageuse  de  Farà  da  st.  Qui  peut  prévoir 
par  quelle  porte  elle  en  sortira?  Adolphe  d'Avril. 

L.e»Orands  Hommesde  la  France.  Marins:  Du  Quesne;  TowrvUle; 

par  Edouard  Gœpp,  chef  de  bureau  au  ministère  de  l'Instruction  publique 

et  Hbnrt  de  Mannoury    d'Ectot,   ancien  capitaine  au  long  cours.  Paris, 

P.  Ducrocq,  1875.  InH2  de  388  p.  —  Prix  :  4  fr. 

Trois  hommes  ont  fait  la  marine  française  :  Richelieu,  Golbert  et 
Du  Quesne.  Le  dernier  fut  non-seulement  un  homme  de  mer,  mais 
encore  un  organisateur  habile.  Cette  double  aptitude  explique  le  rAle 


—  281  — 

important  joué  par  Du  Quesne  dans  le  développement  de  notre  puis- 
sance navale  au  dix-septième  siècle.  —  MM.  Gœpp  et  d'Ectot,  dans 
le  livre  que  nous  annonçons,  suivent  Tordre  chronologique  pour 
Texposé  des  hauts  faits  de  Ou  Quesne  et  de  Tourville.  Les  événements 
sont  notés  par  années,  par  mois  et  par  jours,  ce  qui  a  permis  aux 
auteurs  d'ém ailler  leurs  récits  de  quelques  extraits  des  mémoires  ou 
correspondances  du  temps.  Dangeau,  Golbert  et  Seignelaj,  Saint- 
Simon  et  d'autres  leur  fournissent  tour  à  tour  des  citations.  Les  docu- 
ments historiques  proprement  dits  sont  toigours  puisés  aux  sources  les 
plus  sûres.  Le  présent  volume  n'est,  au  surplus,  que  la  troisième 
partie  d'un  travail  d'ensemble  publié  par  M.  Gœpp,  les  Grands  Hommes 
de  la  France.  —  Deux  séries  de  ce  travail  ont  déjà  paru  (voir  t.  XIII, 
p.  156).  Elles  sont  chacune  à  leur  deuxième  édition.  —  La  publi- 
cation relative  aux  marins  a  été  entreprise  par  M.  Gœpp,  avec  la  col- 
laboration d'un  ancien  capitaine  au  long  cours,  M.  H.  de  Mannoury 
d'Ectot,  dont  le  nom  est  célèbre  dans  les  fastes  maritimes  du  dix- 
septième  siècle.  Les  connaissances  pratiques  de  M.  d'Ectot  et  son 
expérience  des  choses  de  la  mer  ont  dû  être  d'un  précieux  secours 
pour  la  rédaction  de  la  partie  technique  de  l'œuvre.  On  lira  avec  inté- 
rêt la  description  des  batailles  navales.  Tout  ce  qui  touche  à  la  com- 
position et  aux  manœuvres  des  flottes  est  traité  avec  une  sûreté  de 
vues  qui  dénote  l'homme  du  métier. 

L'histoire  de  Du  Quesne  et  de  Tourville  est  l'histoire  des  guerres 
maritimes  de  Louis  XIV  :  MM.  Gœpp  et  de  Mannoury  d'Ectot  ne  sont 
pas  restés  au-dessous  d'un  pareil  sujet.  Leur  livre  est  écrit  dans  un 
style  simple,  clair  et  méthodique.  Il  se  recommande  également  par 
l'exactitude  rigoureuse  des  faits,  par  Tabondance  et  la  richesse  des 
détails.  Nous  regrettons  toutefois  que  les  auteurs  aient  cru  devoir  se 
borner  à  une  peinture  souvent  minutieuse  des  événements,  sans  les  en 
visager  au  point  de  vue,  d'ailleurs  si  sérieux,  de  leurs  causes  et  de 
leurs  résultats.  Un  examen  critique  n'eût  certes  pas  été  déplacé  dans 
la  biographie  de  deux  hommes  qui  ont  exercé  une  influence  prépondé- 
rante sur  les  destinées  de  la  marine  française  au  dix-septième  siècle. 
Cette  réserve  ne  nous  empêche  pas  de  savoir  gré  aux  auteurs  des  efforts 
consciencieux  qu'ils  ont  faits  pour  vulgariser  l'histoire  de  nos  hommes 
célèbres.  Les  ouvrages  de  M.  Gœpp  ont  été  adoptés  par  la  commission 
des  bibliothèques  scolaires,  par  la  réunion  des  officiers,  pour  les  biblo- 
thèques  de  l'armée,  et  honorés  de  la  grande  médaille  d'honneur  de  la 
Société  d'encouragement  au  bien.  —  Le  livre  qui  rend  hommage  aux 
vertus  et  aux  talents  de  Du  Quesne  et  de  Tourville  mérite  d'être 
répandu.  Tous  ceux  qui  ont  quelque  souci  de  la  grandeur  de  la  France 
y  trouveront  des  enseignements  salutaires  et  de  patriotiques^exemples. 

Etibnnb  Héron  de  Villkfosse. 


.*2S2  - 


BULLETIN 

Instructions  et  «conseils  adressés  anic  familles  chrétiennes. 

Le  Mariage;  —  les  Enfanis;  —  la  Famille^  par  Mgr  Meignan,  évéque  de  Chà* 
Ions.  Paris,  Douniol;  Ghàlons,  T.  Martin,  1875.  In-i6  de  218  p.  —  Prix  : 
2  fr.  50. 

Mgr  révoque  de  Chàlons  a  voulu,  dans  ces  pages  courtes  mais  substan- 
tielles, offrir  aux  époux  chrétiens  des  enseignements  simples  et  pratiques, 
des  conseils  dictés  par  le  véritable  esprit  de  TEglise,  trop  souvent  oublié  ou 
méconnu;  il  leur  recommande  de  les  lire  et  de  les  méditer  avec  «  la  ferme 
volonté  de  confesser  la  vérité  et  de  la  suivre,  malgré  les  préjugés  d'aujour- 
d'hui. »  L'ouvrage  est  divisé  en  trois  parties.  Dans  la  première,  Féminent 
auteur  examine  les  conditions  constitutionnelles  du  mariage,  son  caractère 
sacramental,  les  devoirs  mutuels  qu'il  impose  ;  dans  la  seconde,  il  parle  des 
fins  du  mariage,  de  la  stérilité  coupable  et  volontaire  et  des  maux  qui  en 
découlent,  de  la  peur  des  familles  nombreuses,  du  baptême,  des  nourrices, 
de  la  mère,  première  institutrice,  du  collège  et  de  la  pension,  de  la  première- 
communion,  des  devoirs  des  parents  à  l'égard  de  leurs  enfants  pension- 
naires, du  jeune  étudiant  ft  Paris,  de  la  jeune  fille  sortie  de  pension;  dans 
la  troisième,  il  passe  en  revue  ce  qui  est  la  base  du  bonheur  des  familles, 
à  savoir  :  la  religion,  le  travail  et  les  vocations,  la  discipline  et  l'ordre  ; 
l'union  entre  tous  les  membres  de  la  famille.  —  Ce  rapide  aperçu  suffit  & 
montrer  l'importance  et  la  variété  des  sujets  abordés.  Le  livre  que  nous 
annonçons  résume,  sous  une  forme  brève  et  saisissante,  des  instructions  et 
conseils  donnés  dans  de  gros  livres  qu'on  lit  peu;  il  a  sa  place  marquée  dans 
la  bibliothèque  de  choix  des  parents  chrétiens.  G.  de  B. 


Lies  Dangers  du  mariage  et  les  dangers  de  la  flsmllle»  par 

M.  DE  MoNTRouL  Paris,  Larcher,  i875.  In-42  de  402  p.  —  Prix  :  2  fr.  50. 

Le  titre  ne  répond  pas  à  ce  qu'on  serait  tenté  d'en  attendre.  On  se  demande 
si  on  a  sous  les  yeux  l'œuvre  d'un  célibataire  endurci,  ou  d'un  mari  désabusé, 
prêchant  croisade  contre  le  mariage  et  la  famille.  La  lecture  semble  donner 
raison  à  la  dernière  de  ces  hypothèses.  Mais,  hàtons-nous  de  le  dire,  l'attaque 
est  sans  portée  :  l'auteur,  septuagénaire,  a  pris  soin,  dans  sa  préface, 
d'avouer  son  inexpérience  en  matière  de  publications.  N'ayant  encore  rien 
livré  à  la  publicité,  il  a  cru  néanmoins  qu'il  ne  serait  point  sans  utilité  pour 
ses  semblables  de  lire  le  résultat  de  ses  observations,  mûries  par  une  longue 
expérience.  Il  réclame  de  ses  lecteurs  «  une  indulgence  plénière  »  pour  son 
style,  auquel  il  attache  beaucoup  moins  de  prix  qu'au  fond  même  des  idées 
qu'il  a  mises  dans  son  ouvrage,  en  vue  d'apporter  c  sa  petite  pierre  à  la 
rectification  de  l'ordre  moral  et  social.  »  Le  sensualisme,  l'égolsme  et  sur- 
tout l'orgueil,  trois  sources  d'où  dérivent  et  découlent,  selon  l'auteur,  tous 
les  maux  de  l'humanité  ;  la  feoune,  parce  qu'elle  est  la  base,  le  soutien  et  le 
support  de  la  société  domestique,  —  tels  sont  les  sujets  d'études  qu'il  a 
choisis.  Beaucoup  de  digressions,  quelques  redites,  et  même,  à  ce  que  nous 
croyons,  des  personnalités,  donnent  à  ce  travail  un  caractère  étrange  que 
nous  n'oserions,  par  crainte  d'être  indiscret,  attribuer  à  des  souffrances  per- 
sonnelles à  l'auteur.  Ainsi,  cependant,  s'expliqueraient  des  attaques  fort  vives 
contre  l'immixtion  des  frères  et  sœurs  dans  la  vie  coigugale  d'un  d'entre  eux, 
et,  ce  qui  étonne  moins,  contre  l'intervention  des  belles-mères  dans  l'intérieur 


—  2o3  — 


ment  choisies  et  appropriées  au  sujet  traité,  apprennent  tout  ce  qu'il 
importe  de  connaître  sur  les  conditions  de  paix  et  de  bonheur  du  foyer 
domestique.  Gh.  Lebruiï. 


Rénovation  soclalo  basée   aur  lea  lofa  de  la  nature.  — 

FhUosophie'reîiQion.  Discussions  entre  Mlle  Nina  Golovine,  à  Tâge  de  treize 
ans,  et  Démétrics  Gocbareff,  auteur  du  Testament  c(mtemûorain.  2'  édition. 
Paris,  A.  Ghio,  1875.  In-12  de  229  p.  —  Prix  :  3  fr. 

Ami  lecteur,  si  tous  êtes  de  ces  curieux  qui  recueillent  les  monuments  de 
la  folie  ou  de  la  bêtise  humaine,  ceci  est  votre  fait.  Il  faut  tenir,  palper, 
lire  et  relire  de  tels  livres,  pour  croire  &  la  possibilité  de  certains  cas  de 
pathologie  intellectuelle.  Les  pages  les  plus  raisonnables  du  volume  sont 
celles  d'une  enfant  de  treize  ans,  qui  plaide  la  cause  de  la  foi  chrétienne  ; 
mais  le  philosophe  qui  lui  répond  et  prétend  la  réfuter  prend  presque  toute 
la  place,  pour  démolir  les  Évangiles  avec  un  merveilleux  aplomb,  sans 
ombre  de  critique  sérieuse  ou  seulement  de  sens  commun.  Il  mêle  à  cela 
des  morceaux  de  prose  sans  idée  et  sans  style  sur  toute  sorte  de  sujets,  et 
parfois  des  vers.  —  Le  Testament  contemporain,  placé  à  la  suite  de  cette 
correspondance,  la  dépasse  encore  de  beaucoup.  On  y  trouve,  sur  IDieu, 
rhomme  et  le  monde,  une  philosophie  d'estaminet  des  plus  indépendantes. 
Les  conséquences  pratiques  sont  à  l'avenant  :  «  supprimer  les  mariages 
indissolubles  et  obligatoires  à  vie  ;  admettre  l'union  des  deux  sexes  par 
contrats  à  termes  limités,  cela  dépend  de  la  volonté  des  contractants,  etc.  » 
A  la  fin  du  volume,  se  trouve  une  lettre  de  l'auteur  à  Pie  DC,  où  les  idées  du 
Testatnent  c(mtemporain  sont  présentées  au  Souverain  Pontife,  conmie  l'esprit 
vierge  de  Jésus-Ghrist  qui  parle  à  la  société  moderne.  »  ^gri  somma!  Mais, 
au  fond^  c'est  à  peu  près  la  philosophie  courante  d'une  bonne  portion  de  la 
société  moderne,  dans  presque  toute  l'Europe  !  LioNCE  Gouture. 


I>lea  et  Patrie.  —  Vathéisme  réfixté  par  le  bon  sens  et  par  le  patriotisme, 
par  Ernest  Garon,  chef  d'institution  à  Paris.  Paris,  F.  Wattelier  et  G* 
1875.  In-32  de  70  p.  —  Prix  :  50  cent. 

L'auteur  de  Nos  libres-penseurs,  Nos  vrais  sauveurs,  la  Famille,  VEcole,  et 
de  plusieurs  autres  excellentes  brochures  de  propagande  n'a  pas  encore 
publié  d'œuvre  aussi  réussie  que  celle  où  il  a  entrepris  de  prouver  qu'il  n'y 
a  point  de  patrie  sans  Dieu.  Gett«  démonstration,  qui  n'est  pas  aussi  facile  à 
faire  qu'on  serait  tenté  de  le  croire,  pour  un  public  prévenu  et  borné  du 
moins,  nous  a  paru  complète.  L'excellent  petit  livre  de  M.  Garon  est  arrivé 
à  ce  résultat  en  montrant  comment  un  peuple  devient  grand,  et  ce  qu'il 
devient  en  se  faisant  athée.  Le  tableau  que  l'auteur  a  fait  de  ces  deux  périodes 
dans  la  vie  d'un  peuple  est  vif,  excite  l'attention  et  la  retient.  Nous  pensons 
que  la  lecture  de  cet  opuscule  pourra  profiter  à  beaucoup.       Gh.  L. 


Obaervatlon»  pratiques  sur  Vapplication  de  différents  articles  du 
Code  pénal  en  matiéi^e  correctionnelle  et  sur  les  modijUalions  à  apporter 
au  régime  des  amendes,  par  G.  Gbarles  Gasati,  juge  au  tribunal  civil  de 
Lille,  docteur  en  droit,  archiviste-paléographe.  Pans,  Gosse,  Marchai,  Bil- 
lard et  G«,  1875.  Br.  gi-.  in  8. 

Dans  ces  observations,  qui  ont  surtout  un  but  pratique  et  portent  sur  l'ap- 


T 


—  «2  -. 


BULLETIN 


Instructions  et  conseils  adressés  aaiL  femlUes  chrétiennes. 

Le  Mariage;  —  les  Enfants;  —  la  Famille,  par  Mgr  Meionan,  évéque  de  Ch&- 
Ions.  Paris,  Douniol;  Ghâlons,  T.  Martin,  1875.  In-16  de  218  p.  —  Prix  : 
2  fr.  50. 

Mgr  rôYéque  de  Châlons  a  voulu,  dans  ces  pages  courtes  mais  substan- 
tielles, ofirir  aux  époux  chrétiens  des  enseignements  simples  et  pratiques, 
des  conseils  dictés  par  le  véritable  esprit  de  TEglise,  trop  souvent  oublié  ou 
méconnu  ;  il  leur  recommande  de  les  lire  et  de  les  méditer  avec  u  la  ferme 
volonté  de  confesser  la  vérité  et  de  la  suivre,  malgré  les  préjugés  d'aujour- 
d'hui. »  L'ouvrage  est  divisé  en  trois  parties.  Dans  la  première,  Téminent 
auteur  examine  les  conditions  constitutionnelles  du  mariage,  son  caractère 
sacramental,  les  devoirs  mutuels  qu'il  impose;  dans  la  seconde,  il  parle  des 
fins  du  mariage,  de  la  stérilité  coupable  et  volontaire  et  des  maux  qui  en 
découlent,  de  la  peur  des  familles  nombreuses,  du  baptême,  des  nourrices, 
de  la  mère,  première  institutrice,  du  collège  et  de  la  pension,  de  la  première- 
communion,  des  devoirs  des  parents  à  l'égard  de  leurs  enfants  pension- 
naires, du  jeune  étudiant  à  Paris,  de  la  jeune  fille  sortie  de  pension;  dans 
la  troisième,  il  passe  en  revue  ce  qui  est  la  base  du  bonheur  des  familles, 
à  savoir  :  la  religion,  le  travail  et  les  vocations,  la  discipline  et  l'ordre  ; 
l'union  entre  tous  les  membres  de  la  famille.  —  Ce  rapide  aperçu  suffit  à 
montrer  l'importance  et  la  variété  des  sujets  abordés.  Le  livre  que  nous 
annonçons  résume,  sous  une  forme  brève  et  saisissante,  des  instructions  et 
conseils  donnés  dans  de  gros  livres  qu'on  lit  peu;  il  a  sa  place  marquée  dans 
la  bibliothèque  de  choix  des  parents  chrétiens.  G.  de  B. 


Lies  Dangers  du  mariage  et  les  dangers  de  la  ftsmlUe»  par 

M.  DE  MoNTRouL  Paris,  Larcher,  1875.  In-i2  de  402  p.  —  Prix  :  2  fr.  50. 

Le  titre  ne  répond  pas  à  ce  qu'on  serait  tenté  d'en  attendre.  On  se  demande 
si  on  a  sous  les  yeux  l'œuvre  d'un  célibataire  endurci,  ou  d'un  mari  désabusé, 
prêchant  croisade  contre  le  mariage  et  la  famille.  La  lecture  semble  donner 
raison  à  la  dernière  de  ces  hypothèses.  Mais,  hâtons-nous  de  le  dire,  l'attaque 
est  sans  portée  :  l'auteur,  septuagénaire,  a  pris  soin,  dans  sa  préface, 
d'avouer  son  inexpérience  en  matière  de  publications.  N'ayant  encore  rien 
livré  à  la  publicité,  il  a  cru  néanmoins  qu'il  ne  serait  point  sans  utilité  pour 
ses  semblables  de  lire  le  résultat  de  ses  observations,  mûries  par  une  longue 
expérience.  Il  réclame  de  ses  lecteurs  «  une  indulgence  plénière  »  pour  son 
style,  auquel  il  attache  beaucoup  moins  de  prix  qu'au  fond  même  des  idées 
qu'il  a  mises  dans  son  ouvrage,  en  vue  d'apporter  c  sa  petite  pierre  &  la 
rectification  de  l'ordre  moral  et  social.  »  Le  sensualisme,  l'égolsme  et  sur- 
tout l'orgueil,  trois  sources  d'où  dérivent  et  découlent,  selon  l'auteur,  tous 
les  maux  de  l'humanité  ;  la  femme,  parce  qu'elle  est  la  base,  le  soutien  et  le 
support  de  la  société  domestique,  —  tels  sont  les  sujets  d'études  qu'il  a 
choisis.  Beaucoup  de  digressions,  quelques  redites,  et  même,  à  ce  que  nous 
croyons,  des  personnalités,  donnent  à  ce  travail  un  caractère  étrange  que 
nous  n'oserions,  par  crainte  d'être  indiscret,  attribuer  à  des  souffrances  per- 
sonnelles à  l'auteur.  Ainsi,  cependant,  s'expliqueraient  des  attaques  fort  vives 
contre  l'immixtion  des  frères  et  sœurs  dans  la  vie  conjugale  d'un  d'entre  eux, 
et,  ce  qui  étonne  moins,  contre  l'intervention  des  belles-mères  dans  l'intérieur 


—  2o3  — 

(les  ménages.  En  somme,  ce  Jivre  intéressera  surtout  par  les  conseils  pour 
la  conduite  de  la  vie  tirés  de  TÉcriture  et  les  vérités  et  préceptes  tirés  de 
saint  Paul,  qu'il  renferme  en  grand  nombre.  Ces  maximes,  judicieuse- 
ment choisies  et  appropriées  au  sujet  traité,  apprennent  tout  ce  qu'il 
importe  de  connaître  sur  les  conditions  de  paix  et  de  bonheur  du  foyer 
domestique.  Ch,  Lbbbun. 


Rénovation  socialo  basée   aur  lea  lots  de  la  nature.  — 

Thilosophie-religion.  Discussions  entre  Mlle  Nina  Golovine,  à  Tàge  de  treize 
ans,  et  DéuÉTRins  Gocbareff,  auteur  du  Testament  contemporain.  2'  édition. 
Paris,  A.  Ghio,  1875.  In-12  de  229  p.  —  Prix  :  3  fi?. 

Ami  lecteur,  si  vous  êtes  de  ces  curieux  qui  recueillent  les  monuments  de 
la  folie  ou  de  la  bêtise  humaine,  ceci  est  votre  fait.  Il  faut  tenir,  palper, 
lire  et  relire  de  tels  livres,  pour  croire  à  la  possibilité  de  certains  cas  de 
pathologie  intellectuelle.  Les  pages  les  plus  raisonnables  du  volume  sont 
celles  d*une  enfant  de  treize  ans,  qui  plaide  la  cause  de  la  foi  chrétienne; 
mais  le  philosophe  qui  lui  répond  et  prétend  la  réfuter  prend  presque  toute 
la  place,  pour  démolir  les  Évangiles  avec  un  merveilleux  aplomb,  sans 
ombre  de  critique  sérieuse  ou  seulement  de  sens  commun.  Il  mêle  à  cela 
des  morceaux  de  prose  sans  idée  et  sans  style  sur  toute  sorte  de  sijgets,  et 
parfois  des  vers.  —  Le  Testament  contemporain,  placé  à  la  suite  de  cette 
correspondance,  la  dépasse  encore  de  beaucoup.  On  y  trouve,  sur  IDieu, 
l'honmie  et  le  monde,  une  philosophie  d'estaminet  des  plus  indépendantes. 
Les  conséquences  pratiques  sont  à  Tavenant  :  «  supprimer  les  mariages 
indissolubles  et  obligatoires  à  vie  ;  admettre  Tunion  des  deux  sexes  par 
contrats  à  termes  limités,  cela  dépend  de  la  volonté  des  contractants,  etc.  » 
A  la  fin  du  volume,  se  trouve  une  lettre  de  l'auteur  à  Pie  IX,  où  les  idées  du 
Testament  contemporain  sont  présentées  an  Souverain  Pontife,  conrnie  Tesprit 
vierge  de  Jésus-Christ  qui  parle  à  la  société  moderne.  »  JEgri  sommai  Mais, 
au  fond^  c'est  à  peu  près  la  philosophie  courante  d'une  bonne  portion  de  la 
société  moderne,  dans  presque  toute  l'Europe  !  Léonce  Couture. 


Dieu  et  Patrie.  —  V athéisme  réfaié  par  le  bon  sens  et  par  le  patriotisme, 
par  Ernest  Gabon,  chef  d'institution  à  Paris.  Paris,  F.  Wattelier  et  G* 
1875.  In-32  de  70  p.  —  Prix  :  50  cent. 

L'auteur  de  Nos  libres-penseurs,  Nos  vrais  sauveurs,  la  Famille,  VEcole,  et 
de  plusieurs  autres  excellentes  brochures  de  propagande  n'a  pas  encore 
publié  d'œuvre  aussi  réussie  que  celle  où  il  a  entrepris  de  prouver  qu'il  n'y 
a  point  de  patrie  sans  Dieu.  Cette  démonstration,  qui  n'est  pas  aussi  facile  à 
faire  qu'on  serait  tenté  de  le  croire,  pour  un  public  prévenu  et  borné  du 
moins,  nous  a  paru  complète.  L'excellent  petit  livre  de  M.  Caron  est  arrivé 
à  ce  résultat  en  montrant  comment  un  peuple  devient  grand,  et  ce  qu'il 
devient  en  se  faisant  athée.  Le  tableau  que  l'auteur  a  fait  de  ces  deux  périodes 
dans  la  vie  d'un  peuple  est  vif,  excite  l'attention  et  la  retient.  Nous  pensons 
que  la  lecture  de  cet  opuscule  pourra  profiter  à  beaucoup.       Ch.  L. 


Obaervotlons  pratiques  sur  ^application  de  différents  articles  du 
Code  pénal  en  maiiéi*e  correctionnelle  et  sur  les  modijicalions  à  apjporter 
au  régime  des  amendes,  par  G.  Charles  Gasati,  ju^e  au  tribunal  civil  do 
Lille,  docteur  en  droit,  archiviste-paléographe.  Pans,  Cosse,  Marchai,  Bil- 
lard et  C;  1875.  Br.  gr.  in  8. 

Dans  ces  observations,  qui  ont  surtout  un  but  pratique  et  portent  sur  l'ap- 


—  254  — 

piication  de  différents  articles  du  Code  pénal,  notamment  des  articles  463, 
423,  433,  408, 406,  153,  i62,  de  la  loi  du  26  juillet  1873  ;  1  et  2  de  la  loi  da 
22  avril  1871,  et  2  de  la  loi  du  23  janvier  1873,  l'auteur  a  évité  de  se  lancer 
dans  les  théories  générales  sur  le  droit  de  punir.  Il  a  compris  que  ces  théo- 
ries sont  un  danger  et  souvent  un  écueil  pour  le  jurisconsulte,  et  il  s'est 
borné  à  poser  en  principe  que  la  théorie  la  plus  généralement  admise  donne 
pour  fondement  au  droit  de  répression  la  justice  absolue  et  l'utilité  sociale, 
proportionnant  la  peine  à  la  fois  à  la  violation  de  la  loi  naturelle  et  au  dom- 
mage éprouvé  par  la  société.  On  peut  constater  avec  M.  Gasati  que  les  ques- 
tions de  principe  du  droit  criminel  sont  un  peu  négligées  depuis  le  Code 
pénal,  et  s'étonner  avec  lui,  par  exemple,  au  point  de  vue  des  mœurs,  de  ne 
voir  la  sodomie  et  la  bestialité  punies  qu'à  la  condition  d'être  consommées 
dans  un  lieu  public,  comme  outrage  à  la  pudeur  (art.  330).  La  première  obser- 
vation de  l'auteur  porte  sur  le  texte  même  de  l'un  des  plus  importants  arti- 
cles du  Code  pénal,  qui  est  aussi  l'un  des  plus  fréquemment  appliqués,  l'ar- 
ticle 463.  Les  autres  portent  sur  le  taux  des  amendes,  et  spécialement  sur 
l'art.  423,  complété  par  les  art.  1  et  2  de  la  loi  du  27  mars  1851 .  Enfm,  des 
réflexions  sur  l'application  de  la  loi  du  22  avril  1871,  qui  se  trouve  modifier 
un  certain  nombre  d'articles  du  Code  pénal  et  soumet  au  jury  un  grand  nom- 
bre de  délits  attribués  jusque-là  à  la  juridiction  des  tribunaux  correctionnels, 
terminent  les  importantes  observations  qu'un  magistrat  de  savoir  et  d'expé- 
rience a  présentées  à  l'attention  des  jurisconsultes.  Nous  pensons  qu'on  ne 
pourra  les  lire  sans  être  frappé  de  la  netteté  des  critiques  formulées  par 
l'auteur,  et  sans  être  convaincu  qu'il  y  a,  pour  nos  législateurs,  nécessité 
d*agir  dans  le  sens  des  réformes  demandées  par  lui^  d'une  façon  si  com- 
pétente. Cu.  Lebeun. 


Oe  la  Pemoniiallté  civile  du  diocèse»  par  Ch.  de  Franqukvillb, 
maître  des  requêtes  au  Conseil  d'Etat  Paris,  Lecoffre,  1875.  Gr.  in-8  de 
52  p.  —  Prix  :  1  fr.  50. 

M.  Ch.  de  Franqueville  vient  de  faire  paraître,  sous  les  auspices  do  la 
Société  d'éducation  et  d'enseignement,  un  écrit  trés-substantiel  et  très- 
concluant  sur  une  question  qui  a  été  fort  dénaturée  dans  la  presse  et  à  la 
tribune,  et  qui  pourtant,  quand  on  y  regarde  de  près,  se  résout  de  la 
manière  la  plus  simple  et  la  plus  péremptoire.  Le  savant  auteur  établit, 
preuves  en  main,  que  la  personnalité  civile  du  diocèse  était,  avant  1840,  uni- 
versellement admise,  en  fait  comme  en  droit;  que  le  Conseil  d*État,  en 
repoussant  la  doctrine  de  la  personnalité  civile  du  diocèse,  a,  comme  Ta 
remarqué  M.  Jules  Simon  lui-même,  obéi  à  des  considérations  législatives, 
et  a  plutôt  songé  «  à  refaire  la  loi  qu'à  rappliquer  ;  )>  qu'entre  les  partisans 
des  doctrines  contraires,  il  n'y  a  guère  qu'une  querelle  de  mots,  et  qu'il 
faut  arriver  à  reconnaître  la  personnalité  civile  du  diocèse,  parce  que  là  est 
la  vérité,  là  est  la  justice.  Il  a  joint  à  son  écrit  plusieurs  documents  qui  en 
sont  le  très-opportun  complément.  L.  C. 


Dlscourf»  prononcé»  par  M^r  l*évÔc|ue  <l*OrléanB  à  l'il.miem- 
blée  nationoile,  pour  appuyer  le  projet  de  loi  présenté  par  M.  le  comte 
Jaubert  sur  la  liberté  de  renseignement  supérieur,  Paris,  Douniol,  1874-75. 
2  br.  gr.  in-8  de  48  et  72  p.  —  Prix  :  1  fr.  chaque. 

Voilà  des  documents  qui  ne  sont  pas  seulement  un  admirable  titre  d'hon- 
ueur  pour  l'illustre  prélat  qui  a  si  éloquemment  et  si  courageusement 
revendiqué  une  des  premières  libertés  de  l'Église  catholique,  que  la  Révolu- 


lion  Ini  avait  enlevé,  mais  une  mine  de  renseignements  précieux,  d'armes 
savamment  rassemblées,  pour  lutter  contre  Terreur.  Les  discours  prononcés 
par  l'évêque  d'Orléans  dans  les  mémorables  séances  des  4  et  5  décembre  i874, 
conrnie  ceux  qui  ont  retenti  à  la  tribune  aux  mois  de  mars,  de  mai  et  de 
juin,  doivent  rester  dans  toutes  les  mémoires  et  seront  d'un  puissant  secours 
à  ceux  qui  ont  maintenant,  en  profitant  de  la  faculté  si  vaillamment  con- 
quise, à  soutenir  le  bon  conibat.  G.  de  B. 


Recheroiie»  sur  restlniAttoii  de  la  rlehe«»e  nationale  et 
privée  en  Prance  et  en  ilin^leterre^  par  le  duc  d'Aybn.  Paris. 
Guillaumin,  i  875.  Gr.  in-8  de  47  p.  (Extrait  du  Jowmal  des  Économiste,) 

Nos  lecteurs  ont  conservé  le  souvenir  de  la  remarquable  étude  de  M.  le 
ducd'Âjen  sur  le  Revenu^  le  Salaire  et  le  Capital,  qui,  publiée  en  1872  dans 
la  série  des  Questions  du  jour  de  la  Société  bibliographique,  obtint  alors  un  si 
légitime  succès.  Ses  conclusions,  que  la  science  économique  n'a  pas  hésité  à 
accepter,  tendaient  à  établir  qu'une  étroite  solidarité  relie  entre  eux  ces 
divers  facteurs  de  la  richesse  ;  que  le  capital  disponible,  ainsi  que  le  revenu 
des  consommateurs  non  producteurs,  passent  tout  entiers  en  salaires,  que, 
dès  lors,  la  part  des  travailleurs  ne  peut  s'accroître  que  corrélativement  aux 
produits  réels  et  définitifs  eux-mêmes.  L'auteur  s'est  aujourd'hui  pro- 
posé de  compléter  sa  précédente  étude  par  un  inventaire  raisonné  des  dif- 
férents éléments  qui  constituent  la  richesse  nationale.  De  cet  inventaire, 
dont  le  récent  ouvrage  de  M.  Baxter  lui  a  permis  de  faire  une  intéressante 
comparaison  avec  la  situation  économique  de  l'Angleterre,  il  a  pris  grand 
soin  d'exclure  la  fortune  de  seconde  main,  la  valeur  des  produits  inter- 
médiaires, lesquelles  ne  sauraient  y  figurer  sous  peine  de  faire  double 
emploi.  Nous  l'en  félicitons  ;  car  c'est  là  une  distinction  capitale,  trop  sou- 
vent négligée,  et,  faute  d'avoir  su  en  tenir  suffisamment  compte,  bon  nom- 
bre de  statisticiens  sont  tombés  dans  d'étranges  méprises. 

Le  travail  de  M.  le  duc  d'Ayen  n'est  pas  de  ceux  qui  comportent  une 
analyse.  Il  veut  être  lu  en  son  entier.  Nous  nous  contenterons  de  signaler 
ici  certaines  équivalences  fort  curieuses  qu'il  semble  avoir  reconnues  entre 
les  économies  annuelles  de  la  France,  les  revenus  des  particuliers,  le  bénéfioe 
des  classes  laborieuses,  et  les  charges  totales  du  budget.  Nous  appellerons 
en  même  temps  les  méditations  de  nos  réformateurs  modernes  sur  les  con- 
clusions suivantes,  qui  se  dégagent  d'un  examen  consciencieux  des  faits  et 
des  chiffres.  En  Angleterre  comme  en  France,  les  grosses  fortunes  sont  bien 
moins  nombreuses,  bien  moins  considérables  qu'an  ne  serait  porté  à  le 
croire  ;  57,300  familles  seulement  dans  la  première  et  31,390  dans  la  seconde 
jouissent,  en-dehors  du  commerce  et  du  travail,  d'un  revenu  de  25,000  fr.  et 
au-dessus.  L'accumulation  relative  des  fortunes  en  Angleterre  n'est  pas  une 
cause  de  misère  pour  les  masses,  puisque  le  nombre  officiel  des  assistés  est 
identiquement  le  même  dans  les  deux  pays  (1  sur  22).  D  n'y  a  pas  d'un  côté 
de  la  Manche  plus  que  de  l'autre  de  classes  spoliatrices,  car  celles  qu'on 
désigne  ainsi,  loin  de  faire  tort  à  l'ouvrier,  lui  sont  nécessaires  ou  utiles, 
en  lui  assurant  par  leurs  fortunes  un  bénéfice  annuel  et  certain.  Aussi 
«  peulon  affirmer  sans  réticences,  en  restant  sur  le  terrain  des  intérêts 
positifs,  qu'il  y  a  plus  à  gagner  pour  chacun  dans  l'ordre  social  actuel  que 
dans  tout  autre  connu  jusqu'ici.  »  H.  de  Luçay. 


—  256  — 

Esfcal  sur  le  ftuffk*a||^e  universel  direct  avec  scimtln   de 

liste,  par  le  comte  deGalehbert,  précédé  d*une  lettre  de  M.  F.  Le  Play. 

Paris,  Dentu,  1875.  Gr.  in-i8  de  xxiv-180  p.  —  Prix:  2  fr. 

Le  livre  de  M.  de  Galembert  se  compose  de  deux  parties  distinctes.  Dans 
la  première,  toute  théorique,  Fauteur  étudie  le  suffrage  an  point  de  vue 
des  principes  et  du  droit,  et  après  avoir  discuté  les  différentes  formes  qull 
comporte,  se  prononce  pour  son  universalité  avec  exclusion  du  vote  direct, 
du  moins  en  ce  qui  concerne  les  élections  politiques.  La  commune  rurale  de 
cinq  cents  électeurs,  au  maximum,  constituerait  le  type  de  Funité  élec- 
torale et  nommerait  un  délégué  à  l'assemblée  électorale  du  canton  ;  celle-ci 
déléguerait  à  son  tour  au  chef-lieu  de  département,  où  les  députés)  seraient 
choisis  au  scrutin  de  liste,  scrutin  qui,  ainsi  pratiqué  à  plusieurs  degrés, 
semblerait  donner  moins  de  prise  que  le  scrutin  d'arrondissement  aux 
rivalités  des  intérêts  locaux. 

La  seconde  partie  du  volume  est  consacrée  à  Thistoire  de  l'élection  du 
2  juillet  1871  dans  le  département  d'Indre-et-Loire,  à  l'exposé  des  moyens 
légaux,  patents  et  honnêtes  par  lesquels  les  conservateurs  de  ce  dépai*- 
tement  cherchèrent  alors  à  compléter  et  rendre  praticable  une  législation 
défectueuse.  Le  succès  a  trahi  les  efforts  des  comités  électoraux,  dont  M.  de 
Galembert  fut  un  des  membres  les  plus  actifs.  Il  a  voulu  néanmoins  fixer  le 
souvenir  de  cette  patriotique  tentative,  et,  en  agissant  ainsi,  il  a  bien  mérité 
non-seulement  de  ses  concitoyens  d'Indre-et-Loire,  mais  encore  de  tous 
ceux  qui  appartiennent  en  France  au  grand  parti  de  l'ordre,  et  qui  trou- 
veront dans  son  récit,  appuyé  de  pièces  justificatives,  d'utiles  enseigne- 
ments pour  de  trop  prochaines  éventualités.  H.  de  Luçay. 


Révolution,  par  M.  G.  de  Bbrnabdi.  Paris,  Albanel,  1875.  In-B  de 
v-177  p.  —  Prix  :  2  fr. 

Que  d'idées  soulève  et  que  de  points  de  vue  implique  ce  mot  de  Béw>ltttiKm! 
M.  de  Bernardi  a  su  se  rendre  compte  des  difficultés  et  de  l'étendue  du  s^jet  : 
son  livre  réalise  les  promesses  du  titre.  Il  commence  par  définir  a  cette  doc- 
trine nouvelle  qui  aspire  à  régénérer  l'espèce  humaine...  On  trouve  où  elle 
commence,  mais  on  ne  sait  pas  où  elle  finit...  Elle  va  du  rationalisme  à 
l'athéisme,  de  la  libre-pensée  à  la  négation  de  la  pensée,  de  la  souverameté 
du  peuple  au  droit  d'insurrection  en  permanence,  du  socialisme  au  commu- 
nisme, du  sensualisme  à  la  théorie  de  l'honune-singe.  »  Puis,  faisant  en 
quelque  sorte  la  genèse  de  la  Révolution,  il  indique  son  affinité  avec  le  prin- 
cipe du  libre  examen  en  religion.  Il  la  suit  dans  ses  manifestations  multi- 
ples :  il  nous  la  montre  bourgeoise,  radicale,  socialiste,  t'jtgours  impie  dans 
son  point  de  départ,  tovgours  funeste  dans  ses  résultats,  soit  qu'elle  abou- 
tisse pratiquement  à  l'anarchie  ou  au  despotisme.  Enfin,  l'auteur  apprend 
aux  conservateurs  quels  sont  leurs  devoirs;  il  prouve  que  «  les  dangers  de  la 
Révolution  tiennent  moins  aux  doctrines  et  aux  entreprises  des  radicaux, 
qu'à  l'attachement  des  conservateurs  aux  idées  et  aux  institutions  qui  con- 
duisent logiquement  au  radicalisme.  »  —  Ce  livre  est  l'œuvre  d'un  penseur 
et  d'un  écrivain  ;  c'est  en  même  temps  un  acte  de  courage  et  un  acte  de  foi 
catholique.  A.  db  Claye. 

Eie  I^rocé»  d'Aralm,  traduit  de  l'allemand  par  E.  Pigurky  et  D.  Gor- 
BiER.  Introduction  de  M.  J.  Valfrey.  Paris,  Pion,  1875.  Pet.  in-8  de  xxx- 
226  p.  —  Prix  :  4  fr. 

Il  était  bon  de  conserver  la  mémoire  des  divers  incidents  de  cet 
étrange  procès  d'Ârnim  ;  il  était  bon  de  réunir  les  documents  diplomatiques 


~  257  — 

si  curieux  qui  n'ont  dû  qu'à  cette  querelle  fortuite  du  chancelier  allemand 
avec  un  de  ses  subordonnés  leur  divulgation  très-prématurée.  Nous  ne 
sommes  plus  les  seuls  à  étonner  l'Europe  par  nos  indiscrétions  offîcielles  ; 
et  nous  pouvons  proAter  de  révélations  dont  on  a  si  souvent  abusé  contre  nous. 
Un  intelligent  éditeur  a  ajouté  dernièrement  ce  petit  volume  à  sa  collec- 
tion déjà  nombreuse  d'ouvrages  relatifs  aux  affaires  contemporaines;  et  un 
écrivain  très-versé  dans  ces  matières,  M  Valfrey,  a  tiré,  en  quelques  bonnes 
pages,  la  moralité  de  cet  épisode,  qui,  il  faut  bien  le  dire,  n'est  pas  tout 
entier  à  l'honneur  de  l'ambassadeur  léger,  susceptible  et  arrogant  qui 
représentait  la  Prusse  victorieuse  à  Paris,  et  aurait  voulu  que  toute  l'aris- 
tocratie française  vint  à  lui  à  bras  ouverts.  Les  dépêches  confidentielles  de 
de  M.  de  Bismarck  nous  avertissent  assez  cyniquement  de  la  manière  d  ont 
l'Allemagne  prétend  traiter  la  France  ;  et,  à  tous  les  titres,  les  enseigne- 
ments contenus  dans  cette  publication  étaient  aussi  utiles  qu'intéressants  à 
recueillir.  G.  B.  de  P. 


E<ettreii  d*un  rural,  par  le  vicomte  de  Sarctjs,  ancien  capitaine  de  di^a- 
gons.  —  Dijon,  Darantière,  1875.  In-12  de  22Ï  p.  —  Prix  :  2  fr.  50. 

Dans  doux  premières  séries  do  Lettres  d*un  rural,  parues  en  1872  et  en  1873, 
M.  le  vicomte  de  Sarcus  avait  donné  ses  impressions,  curieuses  et  intéres- 
santes à  plus  d'un  titre,  sur  les  événements  de  ces  années.  Une  nouvelle  série 
de  lettres,  que  lui  ont  dictées  les  événements  de  1874,  nous  donne  des 
observations  qui  ne  sont  ni  moins  vraies  ni  moins  judicieuses  que  les  pré- 
cédentes. Des  tableaux  comparatifs  de  ce  que  sont  les  budgets  en  temps  de 
monarchie  et  en  temps  de  république,  et  le  programme  de  la  royauté 
traditionnelle  :  «  Tout  pour  la  France  et  par  la  France,  »  mis  en  regard  de  la 
devise  de  la  démagogie  internationale  :  «  Périsse  la  France  plutôt  que  la 
République!»  —  sont  opportunément  mis  sous  les  yeux  et  en  disent  plus 
long  que  bien  des  discours.  Parmi  les  trente-huit  lettres  qui  composent  ce 
volume,  écrit  avec  le  sens  droit  et  la  franchise  militaire  qui  caractérisent 
l'auteur,  deux  surtout  nous  ont  frappé.  Dans  la  vingt-deuxième,  cherchant  à 
se  rendre  compte  des  raisons  qui  font  perdre  du  terrain,  tous  les  jours,  aux 
conservateurs,  ce  qui,  pour  beaucoup,  parait  difficile  à  expliquer,  l'auteur 
démontre  que  ce  fâcheux  résultat  est  dû  surtout  à  l'indifférence  qu'on  ren- 
contre trop  souvent  dans  les  classes  aisées  à  l'endroit  des  journaux  qui 
luttent  énergiquement  pour  défendre  les  bonnes  doctrines  menacées,  et  des 
revues  savantes  et  consciencieuses  qui  mettent  la  science  au  service  de  la 
vérité.  A  ces  journaux  qui  combattent  le  bon  combat,  on  préfère  des  jour- 
naux sceptiques,  gouailleurs,  u  boulevardiers  »  et  vivant  de  scandale  ;  on 
s'abonne  à  des  revues  matérialistes  et  athées  qui,  «  avec  un  grand  étalage  de 
théories  nuageuses  et  d'éi*udition  sophistiquée,  démolissent,  une  à  une,  les 
traditions  et  les  croyances.  »  L'auteur  nous  parait  avoir  mis  à  nu  une  des  plaies 
du  parti  conservateur,  l'indifférence.  Le  moins  qu'on  doive  aux  journaux  et 
revues  catholiques,  c'est  de  s'y  abonner  ou  d'aider  à  leur  diffusion,  alors  qu'on 
se  pique  d'être  conservateur  et  qu'on  s'honore  d'être  chrétien.  Dans  la  trente- 
septième  des  Lettres  d'un  rural,  M.  le  vicomte  de  Sarcus,  fait  appel,  avant 
la  reprise  de  la  session,  aux  députés  monarchistes  et  les  presse  d'agir  ;  sinon, 
dit-il  :  andiamo  al  fondo.  Il  a  vu  juste,  et  ses  prévisions  ont  été  en  pai-tie 
réalisées.  Cm.  Lebrun. 


Sewembee  1875.  T.  XIV,  17. 


—  258  — 

19yi*18T£l.  AvL  Jour  le  Jour,  par  M.  le  marquis  de  Biencoort. 

Paris,  Dentu  ;  Tours,  Georget-Joubert,  1875.  In-8  de  ix-323  p.  —  Prix  :  5  fr. 

M.  le  marquis  de  Biencourt  a  réuni,  dans  ce  Tolume,  une  série  d*artic]es 
écrits  au  jour  le  jour^  comme  le  dit  le  titre,  et  qui  sont  comme  une  revue 
rétrospective  des  événements  de  ces  dernières  années,  comme  le  thermo- 
mètre des  variations  de  la  température  politique  au  milieu  des  péripéties 
que  nous  avons  traversées.  L'auteur  a  toujours  été  inspiré  par  une  même 
pensée  :  la  fidélité  à  nos  traditions  nationales  :  «  Je  suis  royaliste  et  je 
le  proclame,  écrit-il  dans  son  avant-propos.  L'Empire  et  la  République  sont 
cause  de  nos  malheurs.  La  monarchie  légitime  et  nationale  peut  seule 
sauver  et  relever  la  France.  »  Le  volume  s'ouvre  par  un  article  de  février 
1871,  intitulé  :  Uarbiirage  du  monde;  il  se  ferme  par  Taperçu  d'une  nou- 
velle loi  sur  la  presse,  en  date  du  iO  mai  1875.  Les  années  1871  et  1872  n'ont 
fourni  que  onze  articles;  les  soixante  autres  appartiennent  aux  deux  années 
et  demi  qui  ont  suivi.  En  rendant  hommage  au  patriotisme  et  à  la  loyauté 
de  l'auteur,  on  lui  reconnaîtra  en  même  temps  un  sens  politique,  une  net- 
teté, un  esprit  pratique  qui  donnent  aux  pages  sorties  de  sa  plume  un  véri- 
table intérêt  et  une  valeur  réelle.  G.  de  B. 


Table^tu  résumé  de»  principaux  scrutins  de  l*A.sseniblée 
nationale,  pendant  les  années  1871,  1872,  1873  et  1874.  Dépouillement 
fait  d'après  le  Journal  ofUdel,  par  L.-J.  N.  Paiis,  Le  Chevallier.  1875.  Gr. 
in-8  de  40  p.  ^  Prix  :  1  fr. 

Cette  brochure  contient  :  le  texte  officiel  des  propositions  soumises  au 
scrutin  ;  les  noms  des  députés  par  ordre  alphabétique  ;  les  suffrages  simples 
et  multiples  qu'ils  ont  obtenus  lors  de  leur  élection  ;  la  nuance  politique 
basée  sur  les  votes  et  les  goupes  parlementaires;  enfin  l'indication  des  votes 
de  chaque  député  dans>48  scrutins.  —  On  comprend  l'utilité  pratique  d'un 
tel  travail  ;  mais  la  première  condition  en  pareil  cas  doit  être,  outre  une 
exactitude  rigoureuse,  un  choix  intelligent  des  scrutins.  Or,  par  exemple, 
au  lieu  de  donner  le  scrutin  d'abrogation  des  lois  d'exil  du  8  juin  1871,  on 
donne  un  premier  scrutin  du  même  jour  sur  une  proposition  tendant  à  ce 
que  les  membres  des  familles  ayant  régné  sur  la  France  ne  puissent  rentrer 
qu'après  le  vote  et  la  promulgation  de  la  Constitution.  Ajoutons  que  la  clas- 
sification des  députés  n'est  pas  toujours  faite  d'une  manière  irréprochable. 

B. 


I^a  Mission  de  Clmrles  VII.  Extrait  de  la  CMltà  cattolica.  Traduit 
par  M.  Abel  Gaveau,  prêtre.  Paris,  Pion,  1875.  In-8  de  30  p.  —  Prix  :  1  fr. 

Charles  YII  est  suscité  de  Dieu  pour  s'opposer  à  la  Révolution  qui  nie  les 
droits  de  Dieu  de  la  Patrie  et  du  Roi  ;  il  est  en  butte  à  ses  colères,  il  dédaigne 
ses  outrages;  il  marche  d'un  pas  fertne  vers  le  terme  assigné  à  ses  efforts  ;  il 
a  commencé  avec  trente  hommes  :  cent  mille  soldats  sont  sous  ses  drapeaux  ; 
rien  ne  l'abat^  rien  ne  l'arrête  ;  son  gouvernement  s'organise  ;  il  a,  par  sa 
noble  attitude,  remis  en  grand  honneur  la  cause  du  bon  droit  et  de  la 
monarchie;  il  a,  par  l'évidence  des  faits,  arraché  à  ses  plus  furieux  ennemis 
des  paroles  d'admiration  pour  lui  et  pour  son  armée.  —  C'est  là  ce  que  cons- 
tate, dans  une  première  partie,  l'auteur  de  cet  opuscule.  Dans  une  seconde, 
il  se  demande  quelles  sont  lesjdées,  la  politique  du  prince,  et  il  termine 
par  un  cri  d'enthousiasme  et  d'espoir.  G.  de  B. 


—  259  — 

Question  esiMifl^nole.  Don  Carlos  rot  lésttlme.  I.  La  pragmati- 
que de  iliZ,  par  M.  Henri  Lemoine.  —  U,  La  pragmatique  de  1789  e//e 
tettameiU  de  Ferdinand  yjf,  par  M.  Victor  Gay.  Paris,  Féchoz,  1875.  In-18 
de  2i  p.  —  Prix  :  30  cent, 

Les  jeunes  auteurs  auxquels  nous  devons  cette  petite  brochure  ont 
essayé  de  serrer  d'aussi  près  que  possible  la  question  dynastique  en  Espagne 
en  y  consacrant  un  petit  nombre  de  pages.  Ils  n'ont  fait,  d'ailleurs,  que 
résumer  les  démonstrations  d'écrivains  autorisés,  dans  des  écrits  étendus,  et 
s'ils  ne  réussissent  pas  à  convaincre  tout  le  monde,  ils  ont  au  moins  le 
mérite  d'avoir  apporté  à  leur  tâche  deux  choses  qu'on  ne  trouve  pas  tou- 
jours réunies  en  pareil  cas  :  la  clarté  et  la  brièveté.  G.  de  B. 


l4*Berzé||ovlne,  par  E.  de  Sainte-Marie,  premier  drogman  du  consulat 
général  de  France  à  Tunis.  Paris,  Gh.  Delagrave,  1875.  In-8  de  31  p.  — 
Prix:  1  fr. 

M.  E.  de  Sainte-Marie  a  passé  trois  ans  en  Herzégovine  :  il  y  a  réuni  les 
matériaux  d'un  grand  ouvrage  qui  est  sur  le  point  de  paraître  et  dont  il  a 
détaché  la  présente  notice,  entièrement  consacrée  à  la  géographie  du  pays. 
Pour  la  partie  physique,  il  a  pu  faire  de  visu  un  grand  nombre  de  rectifi- 
cations aux  travaux  antérieurs  ;  quant  à  la  partie  administrative  ses  docu- 
ments sont  puisés  aux  meilleures  sources,  dans  les  rapports  ofûciels  de  la 
Sublime-Porte  et  dans  l'almanach  annuel,  imprimé  en  langue  turque,  à 
Serayévo.  L'auteur  a  su  rendre  attrayant  cet  opuscule,  en  y  joignant 
des  renseignements  sur  les  œuvres  littéraires  du  pays,  les  mœurs  et  les 
usages  des  habitants  et  les  antiquités  recueillies  dans  la  contrée.  Les  trou- 
bles qui  viennent  d'éclater  en  Herzégovine  ont  attiré  l'attention  de  l'Europe 
sur  cette  petite  région  ;  aussi,  tout  ce  qui  peut  contribuer  à  la  faire  con- 
naître davantage  est-il  accueilli  par  le  public  avec  une  faveur  marquée. 

A.  H.  DE  Y. 


«losepli  Stur^e,    membre  de  la  Société  des  Amis.  Traduit  et  abrégé  de 
l'anglais.  Paris,  Bonhoure,  1875.  In-8  de  vi-222  p.  —  Prix  :  2  fr. 

Joseph  Sturge,  né  en  1793  à  Elberton  (Angleterre),  et  mort  à  Birmin- 
gham en  1858,  a  joué  un  rôle  parfois  important  dans  plusieurs  des  événe- 
ments de  ce  siècle.  H  prit,  de  1823  à  1838,  une  part  très-active  au  mouve- 
ment qui  aboutit  à  l'acte  d'émancipation  ded  Noirs.  Il  fut  un  des  promoteurs 
de  l'agitation  électorale  dans  le  Royaume-Uni  ;  il  se  signala  par  ses  travaux 
dans  la  Société  de  la  Paix.  Médiateur  aussi  officieux  que  malheureux,  il 
intervint  dans  les  questions  de  Grimée  et  du  Schleswig-Holstein.  Sa  vie  pou- 
vait donner  lieu  à  une  curieuse  étude.  Malheureusement  pour  lui  et  aussi 
pour  nous,  Sturge  était  quaker,  et  sa  biographie  a  été  écrite  par  un 
quaker,  préoccupé  surtout  de  faire  œuvre  de  propagande  religieuse.  Gela 
est  fâcheux,  tant  pour  l'agrément  que  pour  l'instruction  du  lecteur. 

A.  DE  Glate. 


Marie  Guynrd  et  les  Ursullnes  an  Genada,  par  Jean  d'Estibnnb. 

2«  édition.  Paris,  Haton,  1875.  In-32  de  34  p.  —  Prix  :  15  cent. 

Extraite  du  Contemporain^  cette  brochure  de  propagande  est  intéressante 
par  le  style  et  les  faits  qu'elle  relate.  La  vie  de  Marie  Guyard,  en  religion, 
sœur  Marie  de  l'Incarnation,  fondatrice  des  umulines  au  Ganada,  y  est  retracée 
avec  un  charme  où  la  foi  a  sa  large  part.  La  conclusion  de  cette  brochure 
est  que,  depuis  deux  siècles,  la  population  canadienne  n'a  jamais  cessé  de 


—  260  — 

considérer  la  mère  Marie  Guyard  de  rincarnation  comme  méritant  des  autels. 
Rome  a  commencé  à  donner  raison  à  cette  vox  populi.  En  1867,  la  question 
du  procès  de  béatification  de  la  fondatrice  des  ursulines  canadiennes  est 
venue  devant  une  commission  nommée  par  les  soins  de  Mgr  Baillargeon. 
Pie  IX  a  accueilli  avec  une  faveur  marquée  la  supplique  que  lui  a 
adressée  le  concile  de  la  province  de  Québec  avec  les  procès-verbaux  de  la 
conmiission,  puisque,  sans  vouloir  que  ces  pièces  attendent  dix  ans  à  la 
chancellerie  romaine  avant  que  les  sceaux  en  soient  rompus,  Sa  Sainteté  les 
a  fait  aussitôt  rompre,  puis  remettre  à  la  Congrégation  des  Rites.  Il  y  a 
donc  lieu  d'espérer  avec  Tauteur  que  la  France  ancienne,  en  même  temps 
que  la  Nouvelle-France,  compteront  bientôt  au  ciel  une  protectrice  de  plus. 

Ch.  L. 


.  Sam«oii  et  mem  élève»,  par  E.  Legouvé,  de  l'Académie  française. 
Paris,  Hetzel,  1875.  In-8  de  40  p.  —  Prix  :  2  francs. 

Sous  ce  titre,  on  a  eu  la  bonne  idée  de  publier  une  remarquable  conférence, 
faite,  aux  matinées  littéraires  de  cet  hiver,  par  le  meilleur  lecteur  de  l'Aca- 
démie française.  D'une  lecture  fort  attrayante,  très-mouvementée  d'allure, 
comme  tout  ce  qui  sort  de  la  plume  de  M.  Legouvé,  cette  étude  sur 
Samson  et  ses  élèves  est  pleine  de  conseils  pratiques  pour  ceux  dont  la 
profession  réclame  l'art  de  la  lecture.  Tout  ce  qui  concerne  l'art  de  lire  à 
hante  voix,  l'art  de  parler  en  public  avec  une  diction  correcte,  une  pronon- 
ciation claire»  une  articulation  nette  est  l'ol^jet  de  précieuses  remarques  que 
l'auteur,  élève  du  célèbre  sociétaire  de  la  Comédie -Française,  a  puisées,  on 
le  voit,  à  bonne  école.  Le  spirituel  académicien,  qui  a  pourtant,  au  suprême 
degré,  le  don  de  la  lecture  à  haute  voix,  s'est  efforcé  d'établir  qu'il  y  a  là  un 
art  plus  qu'un  don,  parce  que,  soutient-il,  le  naturel  s'enseigne  et  qu'il  faut 
prendre  des  leçons  pour  être  soi-même.  A  ceux  qui  se  destinent  aux  profes- 
sions oratoires,  à  la  chaire,  au  barreau,  à  l'enseignement,  M.  Legouvé  rap- 
pelle une  des  maximes  de  son  maître  en  l'art  de  bien  dire  :  »  On  n'est  maître 
du  public  que  quand  on  est  maître  de  soi;  on  n'est  maître  de  soi  que 
quand  on  est  maitre  de  sa  voix,  et  on  n'est  maître  de  sa  voix  que  quand  on 
apprend  à  s'en  servir.  »  D'intéressantes  anecdotes  sur  Lekain,  Mlle  Mars, 
Mlle  Rachel  surtout,  contribuent  à  l'attrait  de  cette  étude  sur  M.  Samson  et 
ses  élèves.  Ceux-ci  ont  illustré  et  enchanté  la  scène  française  depuis  trente 
ans,  et  tous,  ainsi  que  le  démontre  l'auteur,  portent  la  forte  empreinte  de 
l'école  d'un  homme  d'un  vrai  talent  comme  acteur  et  comme  auteur,  et 
d'un  génie  réel  comme  professeur.  Ch.  L. 

Oramaii  lirlcos  d'Antonio  Arnâo.  Madrid,  Médina  y  Navano,  4875.  In-i2 
de  xiv-245  p.  —  Prix  :  10  réaux. 

Quinaut  et  Métastase  sont,  je  crois,  les  seuls  auteurs  de  livrets  d'opéra  qui 
aient  obtenu  une  réputation  littéraire.  Tout  en  reconnaissant  que  le  compo- 
siteur qiii,  sans  le  parolier^  ne  pourrait  rien  faire,  accapare  tout  l'honneur  du 
succès,  —  quand  succès  il  y  a,  —  M.  Antonio  Arnao  a  voulu  composer  divers 
drames  lyriques  dans  l'espoir  de  favoriser  la  création  d'un  opéra  national  en 
Espagne.  A  l'exception  de  la  fllle  de  Jephté,  tous  les  sujets  qu'il  a  traités 
appartiennent  à  l'histoire  de  sa  patrie.  Son  volume  renferme  deux  pièces  en 
trois  actes  :  Pelage  et  Bodngtie,  et  cinq  pièces  en  un  acte.  Ces  dernières  nous 
semblent  toutes  manquer  de  l'intérêt  nécessaire  à  des  œuvres  de  cette  nature. 
L'une  d'elles  a  cependant  été  représentée,  et,  à  ce  qu'il  parait,  a  réussi,  c'est 
celle  qui  est  intitulée  les  Vaisseaux  de  Cartes,  En  France,  nous  n'avons,  je 


—  261  — 

crois,  qu'un  seul  grand  opéra  en  un  acte  :  Le  Rossignol;  aussi  peut-il  nous 
sembler  singulier  que,  pour  une  production  de  cette  espèce,  on  puisse  se 
contenter  d'un  cadre  si  étroit.  Th.  P, 


Fabuliste  olirétlen,  par  J.-M.  Villepeanche.  Paris,  Delagraye;  Lyon, 
Briday,  1875.  In-18  de  xviii-196  p.  —  Prix  :  1  fr. 

Il  y  a  longtemps  que  M.  Jf.-M.  Villefranche  écrit  des  fables;  c'est  par  là  qu'il 
a  débuté.  Aujourd'hui,  il  fait  un  choix  de  ces  fables;  il  en  compose  un  grand 
nombre  d'autres,  et,  du  tout,  il  tire  le  Fabuliste  chrétien.  La  fable  a  toujours 
une  moralité,  même  quand  elle  n'est  pas  morale.  Mais  cette  moralité  a  sou- 
vent le  tort  de  s'inspirer  de  la  morale  indépendante.  La  Fontaine,  par 
exemple,  montre-t-il  jamais  qu'il  a  été  baptisé?  C'est  un  sage,  un  sublime 
artiste,  un  philosophe  de  la  Grèce  ou  de  Rome,  un  artiste  païen,  même  un 
précurseur  du  dix-huitième  siècle  en  certains  .  endroits.  Ajoutez  à  cela  que 
le  bonhomme  est  au-dessus  de  la  portée  de  tout  jeunes  enfants;  il  faut  avoir 
déjà  une  culture  intellectuelle  développée  pour  apprécier  les  plus  impor- 
tants de  ses  chefs-d'œuvre.  M.  Villefranche,  suivant  les  traces  du  maître,  a 
voulu  pourtant  que  ses  fables  fussent  un  peu  différentes  :  il  les  a  envoyées  à 
l'église  ;  elles  sont  chrétiennes  et  catholiques.  Disons  bien  vite  que  l'inspiration 
religieuse  n'a  point  nui  à  l'inspiration  poétique.  On  n'a  qu'à  parcourir 
le  recueil  de  ses  cent  trente  petits  poèmes  pour  le  constater.  Que  de  pages 
charmantes  nous  aurions  à  citer  dans  ce  volume  I  charmantes  par  le  cœur, 
par  l'inspiration,  par  la  poésie,  par  le  sentiment  chrétien.  M.  Villefranche 
est  un  penseur  chrétien  et  un  père.  La  bonté  d'âme  n'exclut  pas  chez  lui, 
pourtant,  la  malice.  «  Il  y  a  de  l'esprit  dans  ces  productions,  lui  a  dit 
Mgr  Mermillod,  et  de  bon  esprit;  elles  sont  faciles,  malicieuses,  charmantes, 
enfin  elles  laissent  dans  l'ûme  de  salutaires  et  fortifiantes  pensées.  »  On 
pourrait  seulement  reprocher  à  l'auteur  quelques  expressions  un  peu  tech- 
niques, peut-être,  quand  elles  s'appliquent  aux  révolutionnaires  de  notre 
temps,  et  que  je  voudrais  voir  plus  châtiées  sans  perdre  de  leur  force. 

L.  A. 


K^a  Dauphlne  Marle-«Vo»èplio  de  Saxe,  mère  de  IjOuI»  IK. VI, 

par  le  P.  Emile  Régxault,  de  la  G*  de  Jésus.  Paris,  Lecoffre,  1875.  Gr.  in-18 
de  viii-316  p.  —  Prix  :  2  fr. 

Le  R.  P.  Régnault  a  donné  successivement,  dam  les  Étiules  religieuses f  etc., 
une  série  d'articles  sur  Madame  Louise  de  France  et  sur  la  Dauphine,  mère 
de  Louis  XVI.  La  première  étude  n'a  jusqu'ici  été  l'objet  que  d'un  simple 
tirage  à  part,  et  nous  espérons  que  le  pieux  et  savant  auteur  en  donnera 
bientôt  une  édition  augmentée  ;  quant  à  celle  sur  la  Dauphine,  la  voici 
mise  à  la  portée  de  tous,  avec  tous  lés  documents  nouveaux  que  le  P.  Ré- 
gnault a  patiemment  recueillis  et,  en  particulier,  les  lettres  que  lui  ont 
fournies  les  archives  de  la  maison  de  Luynes.  Le  récit  est  attachant,  bien 
conduit;  il  met  parfaitement  en  lumière  la  touchante  figure  de  Marie- 
Josèphe  de  Saxe.  Nous  y  aurions  souhaité  parfois  un  peu  plus  de  sobriété,  et 
nous  espérons  que  certaines  pégligences  de  style,  qu'on  pourrait  relever  à 
d'assez  nombreuses  pages  du  livre  (v.  p.  2,  15,  26,  63,  102,  103,  160,  174, 
181,  etc.),  disparaîtront  de  la  prochaine  édition.  Nous  engageons  aussi  l'au- 
teur à  faire  toutes  les  citations  de  lettres  avec  l'orthographe  moderne. —  Une 
dernière  observation  :  nous  ne  nous  porterions  point  garant  de  l'authenticité 
du  triple  autographe  cité  à  la  p.  290.  G.  de  B. 


-l 


—  262  — 

Ma  Mère.  Souvenirs  de  sa  vie  et  de  $a  sainte  mortf  par  Mgr  de  Séocb.  Pari», 

Tolra,  1875.  In-12de  i80  p.  —  Prix  :  1  fr.  50. 

Mgr  de  Ségur  avait  écrit  ces  pages  «  pour  Tintimitô  de  la  famille  ;  » 
cédant  à  de  nombreuses  instances,  il  les  donne  aujourd'hui  au  public,  après 
en  avoir  retranché  «  certains  détails  par  trop  intimes.  »  C'est  moins  une 
biographie  complète  de  cette  grande  dame  russe  unie  à  un  Français  —  et 
qui,  née  schismatique  grecque  à  Saint-Pétersbourg  le  19  juillet  4799,  devait 
mourir  à  Paris,  le  9  février  1874,  sous  la  robe  de  saint  François,  après  avoir 
vécu  soixante  ans  en  catholique  fervente,  —  qu'une  silhouette  tracée  avec 
la  tendresse  et  l'émotion  d'une  plume  filiale,  et  quelle  plume  1  silhouette 
à  c6té  de  laquelle  apparaissent  divers  membres  de  la  famille,  et,  au  premier 
rang,  le  pieux  et  admirable  prélat  qui  fut  le  premier-né  de  cette  race  bénie 
de  Dieu.  Le  récit  des  derniers  moments  occupe  une  bonne  partie  du  livret 
et  l'on  regrette  de  n'avoir  pas  plus  de  détails  sur  une  vie  si  bien  remplie, 
et  que  la  renommée  méritée  de  l'écrivain  avait,  depuis  longtemps^  fait 
sortir  du  cercle  restreint  de  la  famille.  G.  de  B, 


Quatre  conférence»  faites  en  Belgique  au  mois  d^ayml  4874,  par 
M.  Jules  Favre,  de  l'Académie  française.  Paris,  Pion,  1874.  Gr.  in-18  de 
xxxviii-244  p.  —  Prix  ;  3  fr. 

Nous  sommes  en  retard  avec  ces  Conférences,  qu'il  nous  sufQra  de  signaler 
brièvement,  le  nom  de  l'auteur  disant  assez  dans  quel  esprit  elles  ont  été 
faites.  La  première  est  consacrée  aux  Devoirs  internationaux  et  l'on  y  expose 
les  lois  morales  qui  déterminent  les  rapports  des  nations  entre  elles  :  «  L'hu- 
manité appartient  au  droit,  non  à  la  force,  et  il  lui  suffit  de  se  ressaisir 
elle-même  pour  se  mettre  à  l'abri  des  entreprises  de  la  violence  ;  »  la 
seconde  est  un  Éloge  de  Washington,  entrepris  dans  le  but  de  «  corroborer  et 
de  défendre  les  grands  sentiments  qui  ont  fait  la  gloire  et  le  bonheur  de  son 
existence  ;  »  en  troisième  lieu,  M.  Jules  Favre  examine  la  condition  des 
femmes  dans  les  sociétés  démocratiques  :  prétexte  à  bien  des  déclamations  et  à 
plus  d'une  erreur  (qu'est-ce  que  ce  texte  de  la  Bible  (p.  140)  Marem  et  femi- 
nam  fecit  eos  ?)  ;  enfin  Jeanne  d'Arc,  (ou  plutôt  Darc)  a  tenté  la  verve  du 
conférencier,  qui  a  voulu  présenter  à  ses  auditeurs  d'Anvers  «  le  modèle 
incomparable  du  patriotisme,  du  sacrifice,  de  la  liberté  de  conscience  » 
—  Le  volume  est  précédé  d'un  avant-propos  sur  la  Belgique  et  sur  les 
avantages  du  programme  de  liberté  en  tout  et  pour  tous.  L.  G. 


E«*/krrlqne  éqnatorlale,  Gabonais,  Pahouln»,  Gallois,  par  le 

marquis  DE  CoMPiÊGNE.  Paris,  Pion  1875.  Gr.  in-18  de  vi-360  p.— Prix  :  4fr. 

Voilà  certes  un  titre  capable  d'éveiller  l'intérêt  du  lecteur.  Rien  de  plus 
actuel,  en  fait  de  géographie,  que  l'étude  de  l'Afrique  équatoriale.  Rien  de 
plus  intéressant  que  de  suivre  les  traces  d'un  voyageur,  surtout  lorsqu'il  est 
Français,  au  milieu  de  ces  contrées  sauvages  et  inconnues.  Aussi  l'ouvrage 
du  marquis  de  Compiègne  sera-t^il  apprécié  par  tous  ceux  qui  se  lanceront  à  sa 
suite  dans  les  déserts  de  l'Afrique.  Ils  y  trouveront  une  description  détaillée 
des  mœurs  des  différents  pays,  de  nombreuses  remarques  sur  l'histoire  natu- 
relle, une  description  des  lieux  éclaircie  pas  une  carte  spéciale.  Plusieurs  gra- 
vures complètent  les  détails  donnés  sur  les  indigènes,  les  lieux  ou  les  animaux. 
Le  marquis  de  Compiègne  a  eu  soin  de  relever  les  quelques  erreurs  commises 
par  ses  devanciers, surtout  en  fait  d'histoire  naturelle.  Son  livre  est  une  œuvre 
de  mérite,  indispensable  à  quiconque  veut  avoir  une  idée  nette  du  présent 
et  de  l'avenir  de  nos  comptoirs  du  Sénégal  et  du  Gabon.  E.  de  B. 


—  263  — 


VARIÉTÉS 

I 

LE  CONGRés  INTERNATIONAL  DE  GEOGRAPHIE  DE  PARIS. 

Le  Congrès  international  de  géographie  vient  de  tenir  sa  deuxiftmo 
session  à  Paris,  du  1*'  au  ii  août.  On  comprendra,  sans  peine,  la  difficulté 
qu'il  7  a  à  rendre  un  compte,  môme  sommaire,  des  travaux  de  cette  réunion, 
en  considérant  que,  pendant  ces  dix  jours,  il  a  été  tenu  huit  séances  géné- 
rales, et  plus  de  soixante  séances  de  groupes,  et  que  le  programme  com- 
prenait plus  de  cent  questions,  chiffre  qui  s*est  trouvé  presque  douhlé 
par  les  communications  faites  aux  divers  groupes,  pendant  la  durée  du 
congrès.  ' 

Plus  de  i  ,500  membres  s'étaient  fait  inscrire,  et,  sur  ce  nombre,  la  moitié 
an  moins  a  assisté  au  congrès  et  pris  part  à  ses  travaux.  Tout  ce  que  l'Europe 
comprend  de  voyageurs,  de  géographes  et  d'érudits,  semblait  s'être  donné 
rendez-vous  à  Paris,  et,  auprès  de  l'amiral  de  la  Roncière  Le  Nourry,  pré- 
sident du  congrès,  de  MM.  de  Lesseps,  Daubrée,  Laussedat,  de  Langle, 
Mouchez,  de  Quatrefages,  Delesse,  Em.  Desjardins,  Deloche,  Vivien  de  Saint- 
Martin,  Levasseur,  Rey,  Gortambert,  Duveyrier,  Grandidier,  de  Gompiègne, 
Maunoir,  Ney,  on  trouvait  MM.  de  Semenow,  de  Kanikow,  Bogdanowitch  et 
Malnow,  de  Richtofen,  Nachtigal,  Gérard  Rholfs,  Schweinfurth,  Schlagenweith 
et  Kiepert  ;  sir  Rawlinson  et  le  colonel  Montgomerie,  de  Hochstetter,  Harm  ; 
Vambery,  Humfalvy  et  de  Déchy,  le  comro.  Gorrenti,  le  général  Mena- 
brea  et  l'amiral  Acton;  le  colonel  Goello  et  Arnllaga;  de  Beaumont,  de 
Saussare  et  W.  Huber,  de  Borchgrave,  d'Hane  Steenhuyse,  le  général  TJagre 
et  Ruelens,  Erslev  et  Waldmar  Schmidt;  Forell,  Rubenson,  Sagre  et  Fabri- 
cius,  le  colonel  Versteeg  et  Veth,  Vasconcellos-Abreu  et  Rodriguez,  Mahmoud- 
Bey,  Uricochea  et  tant  d'autres  que  le  défaut  de  place  nous  empêche  de 
nommer. 

Le  gouvernement,  désireux  de  donner  au  Gongrès  une  preuve  de  son  estime 
et  de  son  intérêt  pour  les  études  géographiques,  avait  mis  à  la  disposition 
de  M.  le  commissaire  général  baron  Reille,  le  pavillon  de  Flore  et  la  partie 
des  Tuileries,  qui  s'étend  sur  le  quai  jusqu'à  la  nouvelle  salle  des  Etats. 
Quarante  et  nne  salles  avaient  pu  être  ainsi  disposées  par  les  soins  de  M.  le 
capitaine  de  Torcy  et  de  M.  Napoléon  Ney,  commissaires  de  l'exposition,  et 
ont  reçu  les  collections  envoyées  de  toutes  parts  et  dont  M.Foumierarédigé 
un  catalogue  qui  restera  comme  une  mine  d'utiles  renseignements  à  con- 
sulter. Diverses  annexes,  élevées  sur  la  terrasse  du  bord  de  l'eau,  contenaient, 
en  outre,  des  collections  supplémentaires  de  la  Russie  et  de  l'Autriche  et  une 
exposition  de  géographie  commerciale. 

Malgré  l'intérêt  qu'offrirait  l'examen  détaillé  des  objets  envoyés  à  l'exposi- 
tion, nous  nous  trouvons  dans  l'impossibilité  de  conduire  nos  lecteurs  dans 
les  différentes  salles,  et  il  faudrait  une  série  spéciale  d'articles  (série  qui 
paraîtra,  nous  l'espérons,  dans  cette  Revue),  pour  leur  faire  examiner  les  belles 
cartes  des  dépôts  de  la  guerre  et  de  la  marine,  les  minutes  de  l'état-major 
russe  en  Asie,  groupées  à  c6té  '  des  bijoux  du  khan  de  Khiva,  les  remar- 
^quables  cartes  allemandes,  la  célèbre  carte  de  Suisse  du  général  Dufour, 
mort  au  jour  même  de  l'ouverture  de  l'exposition,  les  nombreuses  cartes  en 
relief  dont  l'emploi  commence  à  se  généraliser  dans  l'enseignement.  Quel- 
ques bibliothèques  étrangères  ont  envoyé  leurs  plus  beaux  manuscrits; 


—  2Ô4  — 

Bruxelles  et  Lejden  nous  montrent  les  atlas  de  Mercator  et  d'Ortélius,  les 
globes  de  Blaeu  ;  la  Société  de  géographie  de  Londres  s'est  dessaisie,  pour 
quelques  jours,  des  dessins  originaux  de  Livingstone,  de  Burton,  de  Speke 
et  de  Grant.  Le  Danemark  a  presque  seul  compris  le  côté  ethnographique 
de  cette  exposition,  et,  à  côté  [de  remarquables  cartes  marines  et  d'instru- 
ments de  précision,  il  nous  donne  un  aperçu  complet  du  Groenland,  types, 
costumes,  modèles  d'habitations  et  de  canots,  outils  analogues,  pour  la  plu- 
part, à  ceux  de  nos  collections  préhistoriques,  vues,  paysages  et  une  suite 
complète  des  historiens  du  Groenland,  dans  leurs  éditions  originales. 

Dans  l'Autriche,  nous  mentionnerons  le  magnifique  portulan  dessiné  par 
Philippe  11  et  qui  fait  partie  des  splendides  collections  de  M.  Spitzer. 
L'Espagne  a  envoyé  de  beaux  travaux  géodésiques,  et  l'exposition  portugaise 
se  fait  remarquer  par  de  nouveaux  systèmes  de  reproduction  héliographique 
dus  au  professeur  Rodrigues.  Une  exposition  collective  des  divers  services 
reliés  au  ministère  de  l'instruction  publique  comprend  des  cartes  et  plans 
empruntés  aux  archives  nationales  i,  de  nombreux  dessins  rapportés  de 
leurs  missions  scientifiques  par  MM.  de  Saulcy,  de  Vogué,  Grandidier, 
Joyaux,  Rey,  Mauss  et  de  Cessac,  les  diverses  cartes  de  la  Gaule  dressées  par 
la  Commission  et  des  spécimens  nombreux  des  monuments  du  musée  de 
Saint-Germain,  portant  des  noms  géographiques,  etc.  L'École  des  langues 
orientales  a  fourni  un  ample  contingent  de  cartes  turques,  japonaises  et 
chinoises,  et  les  diverses  missions  envoyées  pour  l'observatian  du  passage 
de  Vénus  ont  réuni,  à  côté  des  résultats  obtenus,  les  instruments  qui  ont 
permis  à  MM.  Mouchez,  Janssen,  Vélain,  etc.  d'observer  ce  curieux  phénomène 
astronomique. 

Puisque  nous  ne  pouvons  nous  arrêter  plus  longtemps^  entrons  dans  la 
salle  des  États,  destinée  aux  séances  générales,  et  sur  le  mur  de  laquelle  se 
dresse  la  carte  de  l'État-Major,  montée  pour  la  première  fois,  croyons-nous, 
et  qui  n'occupe  pas  moins  de  seize  mètres  de  hauteur  sur  treize  de 
largeur. 

Dès  le  lendemain  de  la  séance  solennelle  dans  laquelle  le  bureau  du  pre- 
mier congrès  géographique,  tenu  à  Anvers  en  1871,  avait  remis  à  celui  de 
Paris  ses  pouvoirs,  les  menibres  se  partagèrent  en  sept  groupes  suivant  leurs 
tendances  et  leurs  aptitudes  spéciales.  » 

Dans  le  premier  groupe  (mathématiques),  les  principales  questions  traitées 
ont  été  celles  de  la  substitution  de  la  division  centésimale  à  la  division 
sexagésimale  du  quart  de  circonférence  ;  de  l'unité  d'angle  ;  du  choix  d'un 
zéro  pour  le  nivellement  général  ;  des  attractions  locales  ;  de  la  définition 
exacte  de  la  forme  de  la  terre,  etc. 

Le  second  groupe  s'est  occupé  de  la  géographie  maritime  et  de  l'hydro- 
graphie. Les  discussions  ont  porté  sur  la  révision  des  aires  du  vent  du  com- 
pas, sur  les  ras  de  marées  et  leurs  causes,  sur  la  cote  à  adopter  pour 
indiquer  l'iniluence  des  marées  dans  les  rivières,  sur  la  coincidence  des 
ouragans  avec  les  phases  de  la  lune,  etc. 

Le  troisième  groupe  :  géographie  physique,  météorologie,  géologie  et 
anthropologie  générale,  n'a  pas  tardé  à  se  scinder  en  deux,  et  les  anthropolo- 
gistes  ont  formée  sous  la  présidence  de  M.  de  Quatrefages,  une  section  qui 
a  donné  de  fort  utiles  résultats.  Elle  a  entendu  notamment  des  communica- 
tions de  MM.  Waldmar  Mainow,  sur  les  races  actuelles  de  l'Empire   russe, 

1.  Le  règlement  de  la  Bibliothèque  nationale  ne  lui  permettant  pat  de  lais&er  sortir 
les  objets  Tes  plus  précieux,  MM.  Delislc  et  Cortambert  ont  placé  dans  la  galerie 
Mazarine  tous  les  monuments  géographiques,  et  nous  espérons  que,  de  provisoire,  cette 
exposition  deviendra  définitive. 


—  265  — 

de  M.  Pinard,  sur  les  Esq[uimaux;  de  M.  W.  Schmidt,  sur  les  Groenlandais;  de 
M.  de  Quatrefages,  sur  les  Peaux-Rouges  ;  de  M.  Yeth,  sur  les  populations 
des  Indes  néerlandaises,  et  du  comte  Miniscalchi,  sur  les  Akkas.  La  première 
section  du  troisième  groupe  s'est  occupée  des  inondations  et  des  systèmes  de 
barrages  usités  dans  les  divers  pays,  des  reliefs  du  sol  et  de  la  formation 
des  vallées.  MM.  Perschtein  et  Marié -Davy  ont  fait  connaître  le  résultat  de 
leurs  observations  sur  l'action  chimique  des  rayons  solaires  sur  les  rochers; 
MM.  Doretle  vice-amiral  de  Chabannes  ont  traité  divers  points  de  la  forma- 
tion des  glaces;  M.  l'amiral  de  Langle  a  signalé  les  progrès  de  la  navigation 
dus  à  l'étude  du  régime  des  vents  et  rappelé  les  beajix  travaux  du  commodore 
Maury  et  de  M.  Brau.  MM.  Alph.  Milne-Edwards  et  de  Saporta  ont  fourni 
leur  contingent  aux  études  d'histoire  naturelle,  en  traitant,  le  premier  de 
la  géographie  zoologique,  et  le  second  de  la  flore  fossile  du  Spitzberg  et  du 
Groenland. 

L'étude  des  questions  de  géographie  historique  appartenait  au  quatrième 
gi*oupe,  et,  parmi  les  nombreux  travaux  qui  lui  ont  été  soumis, nous  signale- 
rons les  communications  de  M.  W.  Schmidt,  sur  la  géographie  de  l'Egypte 
sous  Toutmès  m  et  Ramsès  le*;Grand,  et  sur  la  division  des  pays  soumis  à  leur 
empire  en  Asie  et  en  Afrique  ;  de  M.  de  Mortillet,  sur  la  division  des  popula- 
tions de  l'Europe  à  l'époque  préhistorique  ;  de  M.  A.  Bertrand,  sur  les  inva- 
sions des  Gaulois  et  sur  la  marche  qu'ils  ont  suivie  en  quittant  les  bords  du 
Danube  pour  venir  en  Italie  ;  de  M.  Ern.  Desjardins,  sur  la  division  de 
ritâlie  en  onze  régions  donnée  par  Pline,  division  cadastrale  qui  correspon- 
dait à  la  Vigesima  hereditatum^  sur  la  douane  quadragésimale  des  Gaules  et 
sur  les  rapports  des  circonscriptions  du  culte  de  Rome  et  d'Auguste  avec 
celles  des  diocèses  ;  de  MM.Hardouin  et  Deloche,  sur  la  centaine  et  la  viguerie, 
de  MM.  Picot,  D'  Obédénare  et  Henri  Martin,  sur  les  Daces  et  l'origine  des 
Yalaques  ;  de  M.  Henri  de  Longpérier,  sur  le  choix  d'un  premier  méridien  au 
point  de  vue  des  études  de  géographie  historique  ;  de  M.  de  Marsy,  sur  ta 
géographie  de  l'Orient-Latin  ;  de  M.  Gravier,  sur  les  voyages  à  la  côte  occi- 
dentale de  l'Afrique,  antérieurs  à  ceux  des  Portugais  ;  de  M.  Gaudet,  sur  les 
Blaeu  ;  de  M.  Genart,sur  l'imprimerie  plantinienne  et  la  correspondance  des 
géographes,  qui  s'y  trouve  conservée  ;  de  M.  Desnoyers,  sur  la  Mappemonde 
de  Salomon  de  Caus,  etc. 

Au  cinquième  groupe,  revenait  l'examen  des  questions  économiques,  com- 
merciales et  statistiques.  On  y  a  traité  successivement  les  problèmes  qui,  en 
ce  moment,  captivent  plus  particulièrement  l'attention  des  économistes,  et, 
en  première  ligne,  celui  du  percement  de  l'isthme  de  Panama. 

M.  de  Lesseps,  qui  présidait  la  séance, a  rappelé  les  moyens  qu'il  avait  mis 
eii  œuvre  dans  le  percement  du  canal  de  Suez,  et  a  vivement  recommandé 
l'étude  des  projets  dans  lesquels  on  peut  se  passer  d'écluses  et  de  barrages. 
Les  différents  plans  de  MM.  Bionne,  de  Gogorza,  de  Puydt,  Blanchet  et 
Thomé  de  Gamond  ont  été  successivement  exposés  par  leurs  auteurs,  ainsi 
que  celui  du  colonel  Siegfried,  dont  M.  Levasse ur  s'est  fait  l'interprète.  Le 
colonel  Bogdanowitch  a  présenté  ensuite  le  résultat  de  ses  études  sur  le 
chemin  de  fer  européen-asiatique,  dont  la  partie  russe  semble  être  déûni- 
tivement  adoptée  jusqu'à  Fioumen.M.  le  capitaine  Roudaire  a  donné,  sur  la 
mission  qu'il  a  remplie  dans  les  chotts  algénens,des  renseignements  les  plus 
étendus.  Malgré  les  assertions  de  M.  Fingénieur  Fuchs  et  l'avis  émis,  dit-on, 
par  la  Commission  italienne,  il  ne  doute  pas  de  la  possibilité  de  la  création 
d'une  mer  intérieure  dans  le  Sahara.  M.  Napoléon  iNey  a  fait,  d'après  les 
historiens  arabes,  un  curieux  récit  des  relations  commerciales  en  Afrique 
au  moyen  &ge. 


Une  commission  spéciale,  formée  dans  le  sein  du  cinquième  groupe,  s^est 
chargée  de  l'examen  des  question  d*émigration  et  de  colonisation,  et  a  en- 
tendu d'importantes  communications  de  MM.  Carlos  Galyo,  d'Hane  Steen- 
huyse,  de  Borchgraye,  Bouche,  Levasseur,  Delamarre,  etc. 

M.  Havard,  enfin,  a  également  traité  dans  ce  groupe  la  question  de 
Talliance  des  intérêts  commerciaux  et  scientifiques,  au  point  de  yue  du  dé- 
yeloppement  géographique  et  commercial,  et  le  groupe  a  émis  le  vœu  de 
voir  se  former,  dans  les  villes  maritimes,  des  sociétés  de  géographie  com- 
merciale ou  des  chambres  syndicales  reliées  aux  sociétés  géographiques. 

Les  questions  soulevées  au  sixième  groupe  sur  renseignement  et  la  diffu- 
sion de  la  géographie  sont  trop  nombreuses  pour  que  nous  puissions  en 
parler  avec  quelques  détails.  Il  nous  faudrait  d'ailleurs  entrer  dans  la  dis- 
cussion de  questions  techniques,  et  nous  nous  bornerons  à  rappeler  le  vœu 
porté  à  la  tribune  par  M.  Maze  et  approuvé  à  l'unanimité  par  le  Congrès, 
pour  la  séparation  de  l'enseignement  géographique  et  de  l'enseignement 
historique,  pour  la  création  de  chaires  spéciales  et  de  professeurs  spéciaux, 
et,  par  suite,  pour  l'établissement  d'une  agrégation  de  géographie. 

Le  septième  groupe,consacré  aux  explorations  et  aux  voyages  scientifiques, 
commerciaux  et  pittoresques,réunissait  le  plus  grand  nombre  des  membres 
du  congrès,  avides  d'entendre  les  récits  de  hardis  explorateurs  de  contrées 
presque  encore  complètement  inconnues. 

Les  premières  séances  ont  été  consacrées  à  l'étude  des  mesures  à  prendre 
dans  les  voyages,  à  l'examen  de  divers  appareils,  tels  que  le  podomètre  et  le 
télémètre  et  d'un  procédé  d'occultation  des  étoiles,  de  M.  Grandidier. 
L'établissement  d'un  bureau  central  de  renseignements  pour  les  voyageurs 
a  été  aussi  mis  en  avant  par  M.  Babinet. 

MM.  Nachtigal,  Schweinfurth  et  Gérard  Rholfs  ont  ensuite  exposé  les  ré- 
sultats de  leurs  grands  voyages  dans  l'Ouest  et  dans  le  centre  de  l'Afrique  ; 
M.  Soleillet,  après  avoir  résumé  son  expédition  dans  le  Sahara,  a  donné  des 
détails  sur  le  possibilité  de  relations  à  établir  entre  le  Sénégal  et  le  Maroc, 
par  Tombouctou.  M.  RafiQray  a  annoncé  son  intention  de  visiter  le  pays  des 
Massai,  et  M.  de  Brazza  a  développé  le  plan  du  grand  voyage  d'exploration 
qu'il  va  entreprendre  sur  l'Ogoué,  au  Gabon,  de  concert  avec  M.  Marche. 
M.  Guido-Cora  a  présenté  l'itinéraire  de  son  ouvrage  en  Albanie,  M.  le 
D'  Meyer,  de  Dresde,  a  communiqué  la  carte  de  son  exploration  de  la 
Nouvelle-Guinée,  et  M.  le  commandant  Camperio  a  rappelé  le  souvenir  des 
dernières  expéditions  de  Miani. 

Le  groupe  a  aussi  entendu  l'exposé  fait  par  M.  de  Severtsow  du  projet  de 
réunion  de  la  mer  Caspienne  et  de  la  mer  d'Aral,  ainsi  que  diverses  com- 
munications sur  les  explorations  des  Russes  dans  l'Asie  centrale  ;  et  M.  Malte- 
Brun,  en  exprimant  le  regret  de  ne  pas  voir  au  Congrès  MM.  Payer  et 
Weyprecht,  a  retracé  l'historique  des  expéditions  polaires. 

Pour  terminer  le  tableau  des  travaux  du  Congrès,  il  nous  reste  à  rappeler 
les  communications  faites  aux  séances  générales  et  les  conférences.  Nous 
citerons  d'abord  l'étude  de  M.  Lalanne,  sur  la  loi  mathématique  des  centres 
de  population;  les  remarques  de  M.  Van  Bénéden,8ur  les  diiférentes  espèces 
de  baleines  et  leurs  stations  ;  TexplicHtion  des  aurores  boréales  proposée 
par  M.  Lemstrôm  et  présentée  par  le  professeur  Rubenson  ;  le  récit  de  la 
mission  scientifique  remplie  au  Cap- Vert  par  M.  de  Cessac.  Signalons,  ea 
outre,  les  conférences  de  M.  Delaporte,  sur  le  Cambodge  et  l'art  khmer  ;  de 
M.  Nachtigal,  sur  le  Wadal,  de  M.  Barande,  sur  les  routes  de  l'Asie  centrale, 
de  M.  L.  Leduc,  sur  la  femme  chez  les  Scandinaves,  etc. 

Le  mercredi   11,  une  séance  générale  à  laquelle  assistaient  le  Maréchal- 


—  267  — 

Président  et  le  grand-duc  Constantin  de  Russie,  a  clos  les  travaux  du  Con- 
grès par  la  distribution  des  récompenses  aux  exposants.  Des  discours  ont  été 
prononcés  à  cette  occasion  par  M.  Wallon,  ministre  de  Tinstruction  publique, 
M.  Maunoir,  rapporteur  général  du  jury,  l'amiral  de  la  Rondère  et  le  com- 
mandeur Négri. 

Presque  tous  les  soirs,  des  fêtes  ont  été  données  en  Tbonneur  des  mem- 
bres du  Congrès,  à  la  présidence,  chez  le  ministre  de  Finstruction  publique, 
à  la  préfecture  de  la  Seine,  à  l'Observatoire,  chez  M.  de  Lesseps,  etc. 

De  plus,  deux  excursions  ont  eu  lieu  :  l'une  à  Saint-Germain,pour  la  visite 
du  Musée  des  antiquités  nationales  et  les  expériences  des  machines  de 
guerre  romaines  reconstituées  par  le  colonel  de  Reffye,  et  mises  en  mouve- 
ment avec  grand  succès,  par  M .  Abel  Maître  ;  l'autre  &  Compiègne,  où  le 
Musée  Khmer,formé  par  M.  Delaporte,  des  objets  rapportés  de  son  explora- 
tion du  Cambodge,  oflfrait  un  vif  attrait  de  curiosité  à  la  plupart  des  mem- 
bres du  Congrès. 

Avant  de  se  séparer,  le  Congrès  a  remis  entre  les  mains  du  bureau,  le 
soin  de  convoquer  une  nouvelle  session,  qui  se  tiendra  probablement  dans 
quatre  ans  à  Saint-Pétersbourg  ou  à  Florence,  et  assurera  ainsi  d'une  manière 
déûnitive  la  périodicité  des  réunions  dont  les  heureux  résultats  sont  ai^gour- 
d'hui  surabondamment  établis.  A.  de  Mabst. 


II, 

l'orient  latin  a  l'exposition  de  géographie. 

Malgré  l'article  qui  précède,  nos  lecteurs  nous  permettront  une  seconde 
étude  sur  l'exposition  des  sciences  géographiques,  renfermée  dans  un  cadre 
tout  spécial. 

Pendant  l'une  de  nos  excursions  aux  Tuileries,  nous  avons  entendu  une 
personne  indiquer  à  son  voisin  une  image  du  fond  de  la  mer.  Poussé  par  la 
curiosité,  nous  avons  voulu  voir  à  notre  tour  cette  représentation  figurée,  et 
nous  avons  reconnu  que  l'objet  ainsi  désigné  était...  le  plan  en  relief  de  la 
presqu'île  du  Sinal.  Dès  lors,  nous  nous  sommes  promis  de  nous  arrêter 
spécialement  dans  cette  section  de  l'Orient,  qui  touche  de  près  au  berceau 
de  l'humanité  et  qui  est  en  même  temps  le  berceau  de  la  religion.  Il  nous 
semble  assister  ainsi  d'une  manière  beaucoup  plus  intime  et  suriout  plus 
*  rapprochée,  aux  tâtonnements  des  premiers  pas  de  l'homme;  nous  le  voyons 
hésiter  à  sortir  du  premier  cercle  de  sa  demeure;  il  n'ose  encore  traverser 
les  fleuves  et  encore  moins  se  confier  à  la  mer.  Combien  l'on  comprend 
l'exclamation  du  poète  : 

Illi  robur  et  »•  triplex 
Gircum  pectas  erat...l 

Mais  que  de  changements  accomplis  depuis  ea  moment,  que  de  progrès, 
que  d'innovations,  que  d'améliorations,  pour  faciliter  les  voyages  et  les 
rendre  même  agréables.  Que  d'instruments  successivement  perfectionnés  et 
combien  d'heureuses  applications  sont  venues  guider  nos  pionniers  dans 
les  routes  à  suivre.  Nous  voudrions  examiner  une  à  une  toutes  les  solu- 
tions diverses  de  la  science,  nous  en  rendre  compte  dans  leurs  détails  tech- 
niques ;  mais  le  sujet  est  beaucoup  trop  vaste,  et  force  nous  est  de  nous 
maintenir  dans  certaines  limites.  Notre  but,  désormais  restreint,  est  d'en- 
registrer ici  une  série  de  notes  pouvant  servir  aux  histoires  futures  des  croi* 
sades. 


—  268  — 

Le  bilan,  du  reste,  est  trop  étendu  :  Ton  peut  en  juger  en  additionnant 
simplement  les  six  ou  sept  salles  au-rez-de-chaussée  du  pavillon  de  Flore, 
autant  à  chacun  des  quatre  étages,  sans  compter  les  deux  annexes,  A:  celle 
de  la  Bibliothèque  nationale  ;  B  :  celle  de  la  terrasse  du  bord  de  Teau,  où 
plusieurs  pavillons  sont  consacrés  aux  expositions  de  nos  voisins.  Évidem- 
ment, nous  aurions  grand  tort  de  nous  plaindre  d*un  si  bel  ensemble,  dont 
Teifet  est  merveilleux.  Mais  il  manque  d'harmonie.  Nous  nous  sentons 
dépaysé  et  comme  étranger  au  sein  même  de  nos  études  de  prédilection 
et  toutes  spéciales,  que  nous  souhaitons  voir  réunies  en  un  groupe  compact. 
Nous  n'essayerons  même  pas  de  suivre  une  classiflcation  quelconque  dans  cette 
masse  considérable  de  matériaux  qui,  certes,  concourent  tous  à  un  même 
but,  à  l'extension  de  la  science,  à  une  connaissance  meilleure  et  plus 
complète  de  tous  les  points  du  globe,  mais  dont  le  nombre  effraye.  En  vain, 
les  organisateurs  ont-ils  voulu,  en  principe,  adopter  la  division  par  groupes  : 
elle  n'existe  qu'en  théorie,  sur  les  premières  pages  du  catalogue,  tandis 
qu'en  réalité,  on  a  classé  le  tout  et  distribué  les  salles  au  proraUi  des  expo- 
sants, qui  sont  rangés  par  nationalités,  non  par  pays,  ni  par  climats,  ni  par 
divisions  territoriales.  Ainsi,  nous  prions  les  pères  de  famille  et  lecteurs  de 
ces  lignes  de  ne  pas  dire  à  leurs  enfants  que,  dans  cette  exposition  de  géo- 
graphie, les  notions  les  plus  exactes  et  les  plus  précises  sur  la  Palestine  se 
trouvent...  en  Angleterre. 

Abstraction  faite  de  cette  bizarrerie  de  disposition,  il  faut  bien  recon- 
naître que  nos  voisins  d'Outre-Manche  ont  accompli  les  progrès  les  plus 
sérieux  dans  l'exploration  de  la  Terre-Sainte.  Ils  peuvent  être  fiers  des 
résultats  obtenus  et  les  montrer  au  grand  jour.  Nous  n'avons  pas  à  examiner 
si,  au  fond,  il  se  cache  quelque  arrière -pensée  de  prosélytisme  l)rotestant  à 
l'ombre  de  ces  recherches  et  de  ces  découvertes,  aussi  intéressantes  pour 
l'explication  philologique  des  termes  de  la  Bible,  qu'importantes  pour  l'his- 
toire du  théâtre  des  écritures  saintes. 

Nous  ne  voyons  et  nous  n'admirons  que  ce  qui  est  sous  nos  yeux,  bien 
palpable,  et  nous  sommes  tenu  de  reconnaître  que  les  découvertes  faites 
sont  bien  dignes  des  conquêtes  de  la  science  moderne,  appliquée  aux  fouilles, 
aux  investigations  géologiques,  aux  procédés  de  topographie,  aux  trian- 
gulations des  moindres  accidents  de  terrain,  aux  tracés  des  cartes  et  aux 
levés  de  plans,  ainsi  qu'on  le  verra  dans  l'énumération  qui  va  suivre. 

Les  Anglais  occupent,  —  heureusement  au  rez-de-chaussée,  — les  salles  IV 
et  V.  A  côté  de  descriptions  splendides  concernant  leurs  colonies  dans  l'Inde, 
au  milieu  de  tableaux  éclatant  de  couleurs  et  figurant  les  indigènes  de  l'ex- 
trême Orient,  leui*3  costumes  et  leurs  mœurs  ;  au  centre  même,  on  remarque 
de  prime-abord  les  divers  monuments  figuratifs  concernant  le  pays  d'Israël  ; 
on  voit  briller  le  zèle  et  la  conviction  profonde  avec  lesquels  des  adorateurs 
du  livre  sacré  cherchent  à  en  expliquer  les  moindres  détails  et  y  consacrent 
soit  leur  fortune,  soit  leur  talent,  soit  leur  existence. 

Le  bureau  trigonométrique  et  topographique  de  l'Inde  a  présenté,  pour  la 
section  de  la  présidence  de  Bombay,  des  vestiges  de  l'Assyrie,  de  la  Méso- 
potamie et  de  Babylone,  sous  les  numéros  51-54,  compris  dans  le  quatrième 
groupe,  qui  est  consacré  à  la  géographie  historique,  à  l'ethnographie,  à  la 
philologie,  parce  que,  en  effet,  ils  peuvent  servir  à  constater  les  premières 
migrations  du  genre  humain. 

Si  ces  objets  sont  d'un  intérêt  secondaire  pour  nous,  en  revanche,  on  remar- 
quera l'exposition  faite  par  la  Société  qui  a  pris  le  titre  de  Palestine  Eoppkh 
roHon  Fund^  dans  le  7'  groupe,  comprenant  les  explorations  scientifiques  et 
les  missions  : 


—  269  — 

N**  85.  Exploration  accomplie  par  MM.  le  major  du  génie  Wilson  et  le  capi- 
taine Anderson,  Carte  dressée  à  réchclle  de  1/63360.  Manuscrit  et  orignal  de 
l'esquisse  de  campagne.  Spécimen. 

86.  Exploration  de  M.  le  capitaine  du  génie  Warren.  Même  échelle. 

87.  Carte-Table  indiquant  le  progrès  du  levé  de  plan  (y  compris  les  divi- 
sions du  pays  entre  les  expéditions  anglaise  et  américaine). 

88.  Triangulation  ;  diagramme  d'une  partie  du  manuscrit  de  cette  opéra- 
tion. Spécimen  du  levé  de  contour,  manuscrit  par  M.  le  commandant  Conder, 
du  génie  royal. 

89.  Spécimens  des  croquis,  minutes  de'campagne,  du  même. 

90.  Spécimens  des  plans  minutes,  par  M.  le  major  Wilson. 

91.  Spécimens  des  plans  originaux  de  construction,  du  commandant 
Conder. 

92.  Spécimens  des  plans  originaux  de  constructions,  par  M.  Charles  Cler- 
monMianneau. 

93.  Photographies  de  la  Palestine  (y  compris  les  clichés  sur  verre). 

94.  Publications  relatives  &  la  Palestine,  faites  par  la  société  de  l'explo- 
ration. 

On  y  remarque,  outre  les  comptes  rendus  mensuels  ou  trimestriels  des  tra- 
vaux de  cette  société,  le  résumé  de  ses  recherches  intitulé  :  Our  Work  in 
Palestine  (1875,  in-12),  ainsi  qu'une  œuvre  analogue  de  Morrisson  (1871). 

C'est  ici  que  nous  aurions  voulu  placer,  —  à  titre  de  pendant  et  comme 
point  de  comparaison,  —  la  collection  française  du  Bulletin  de  l'œuvre  des 
pèlerinages  en  Terre-Sainie,  œuvre  qui  fonctionne  depuis  plus  de  douze  ans 
(depuis  1862  environ)  et  que  l'on  peut  considérer  comme  une  suite  très- 
convenable  aux  Lettres  édifiantes  sur  l'Orient.  On  n'y  trouve  pas  seulement 
les  récits  pleins  de  foi  et  d'onction  des  missionnaires  venus  de  la  France, 
mais  une  foule  de  renseignements  précieux  sur  l'histoire  et  la  géographie 
de  la  Syrie,  de  véritables  mémoires  scientifiques,  émanant  de  la  plume 
vénérable  des  abbés  Barges,  Rignon,  Laurent  de  Saint-Aignan,  etc.  Et 
cependant,  ce  n'est  pas  le  seul  élément  apporté  par  les  nôtres  pour  la  con- 
naissance de  cette  terre  mémorable. 

Nous  aimerions  à  attribuer  au  compte  de  notre  pays,  —  quoiqu'ils  soient 
rangés  dans  la  section  anglaise,  —  les  travaux  de  M.  Ch.  Clermont-Ganneau, 
ancien  attaché  au  consulat  de  France  à  Jérusalem,  et  maintenant  à  Constan- 
tinople,  travaux  dont  l'inventaire-catalogue  ne  parle  pas.  Il  se  contente  de 
mentionner,  au  numéro  92,  des  spécimens  de  plans.  En  voici  donc  l'énu- 
mération  : 

Au-dessous  du  numéro  85,  un  cadre  étendu  renferme  une  inscription 
hébraïque,  et  une  autre  grecque,  gravée  sur  un  roc,  marquant  la  limite  de 
l'antique  Guezer,  ville  lévitique  de  la  tribu  d'Ephraim  (Josué,  xxi,  21),  telle 
qu'elle  a  été  trouvée  par  M.  Ganneau,  en  explorant  la  Palestine. 

A  coté,  et  toujours  pour  le  compte  du  Palestine  Exploration  Fund^  le  même 
archéologue  a  réuni  dans  un  cadre  :  {^  le  plan  de  Jéricho  ;  2^  Hadjar-el- 
Asbah;  3*  Tombeau  de  Siméon  (un  massif  carré)  ;  4»  le  Kébékiyeh  (ogive, 
surmontée  d'une  coupole)  ;  —  5<^  le  tombeau  de  la  vallée  de  Hinom  ;  6°  et 
7*  vues  près  de  Jéricho  (l'une  coloriée)  ;  8<*  Neby  Moussa  (croquis  de  village 
vus  en  regardant  le  Nord-Est). 

Puis,  un  dessin  ligure  le  chandelier  à  sept  branches,  avec  dédicace  hébraïque 
et  grecque  «  A  Ananias,  fils  de  Jacob,  »  trouvée  par  M*  Ganneau  sur  l'une 
des  colonnes  hautes  de  la  nef  d'une  mosquée,  à  Gaza.  —  On  y  voit  encore 
maints  autres  objets  d'antiquité  de  la  même  provenance. 

Les  voici  en  trois  groupes  différents.  Le  premier  est  relatif  à  la  dite  mosquée 


—  270  — 

de  Gaza  et  offre  la  façade,  avec  tour  sexagonale,  percée  sur  chaqae  coté  d'ane 
série  de  baies;  puis  une  coupe  longitudinale,  à  Téchelle  de  0  mètre  01, 
coloriée  et  agrémentée  des  constructions  ayoisinantes.  Le  deuxième  comprend: 
i<>réglise  des  croisés  à  Yabné  (coupes  architecturales  diverses);  2'  idem  (vues 
de  face)  ;  3^  tombeau  et  habitation  à  Siioan  (Jérusalem),  avec  inscription 
phénicienne  ;  A^  église  des  croisés  à  Beit-Nouba  (bénitier  et  autres  détails) 
5*  tombeau  à  Emmaûs  (vue  à  vol  d'oiseau)  ;  6*  id.  intérieur  et  inscription 
grecque.  Le  troisième  comprend  :  1»  Poteries  et  verreries  trouvées  à  Beitr 
Djala;  2^  tête  impériale  trouvée  à  Jérusalem;  3<*  inscriptions  diverses. 
4.  Ossuaire  juif  et  inscription;  5*  inscription,  grand  ossuaire  juif  ;  objets 
funéraires  et  autres . 
Mais  poursuivons  la  succession  des  numéros: 

95.  Levé  du  plan  de  Jérusalem,  par  le  génie  ;  auquel  on  a  joint  : 
i^  Notes  pour  accompagner  le  levé  du  plan  (1  volume). 

2*  Photographies  de  Jérusalem.  Carton  contenant  des  plans. 
Plan  de  Jérusalem.  Échelle  verticale  et  horizontale  au  500  1/2. 
Dans  le  plan  en  relief,  les  altitudes  et  les  variations  de  terrain  sont  toutes 
indiquées. 

96.  Levé  du  plan  du  Sinsd,  par  le  génie  (également  en  relief). 
Partie  L  Compte  rendu  descriptif  et  illustrations. 

Partie  n.  Cartes.  —  En  traçant  l'itinéraire  d'Israël  à  la  sortie  d'Égjpte,  les 
auteurs  ont  pris  soin  d'y  noter  les  moindres  localités  de  l'Éxode,  avec  indi- 
cation du  chapitre  et  du  verset. 

Partie  m.  Photographies  (volumes  I,  II,  III). 

97.  Plan  du  Jebel-Musa  à  échelle  verticale  et  horizontale,  au  1/150,60. 

98.  Plan  du  Jebel-Musa,  au  1/21,120. 

99.  Plan  du  Jebel-Serbal^  k  l'échelle  de  1/10,560. 

100.  Idem,  au  1/21,120. 

101.  Vues  stéréoscopiques  de  Jérusalem  et  du  Sinal. 

102.  Vues  transparentes  de  Jérusalem  et  du  Sinal. 
Entrons  en  France,  salles  38  et  39  (môme  groupe). 

Voyons  les  objets  exposés  par  M.  E.  Guii-Rey,  numéros  1438-1444,  relatifs 
au  nord  de  la  Syrie  ou  à  la  Palestine  des  croisés,  savoir  : 
N«  1438.  Carte  du  nord  de  la  Syrie,  à  l'échelle  de  1/500,000. 

1439.  Fragment  d'un  des  itinéraires  de  M.  Rey,  ayant  servi  à  la  coastruo- 
tion  de  cette  carte. 

1440.  Plan  de  Meimbedy  (Hiérapoiis). 

1441.  Plans  et  photographies  des  ruines  de  Hosn  Suleiman  (Bœtocéoé). 

1442.  Plans  et  vues  de  l'enceinte  sacrée  de  Naous. 

1443.  Châteaux  du  Krak,  de  Margat  et  de  Tortose. 

1444.  Les  monuments  militaires  des  croisades  (volume  de  la  collection  de» 
documents  inédits  de  l'histoire  de  France). 

Le  savant  archéologue  aurait  pu  y  joindre  son  Voyage  éUais  le  Haouran 
aux  bords  de  la  mer  morte  et  au  pays  des  Druzes  et  desMaronistes,  exécuté 
pendant  les  années  1857  et  1858,  région  inexplorée  où  nul  français  n'avait 
encore  pénétré,  sans  compter  son  Étude  historique  et  topographiquê  sur  la 
tribu  de  Juda  (gr.  in-4).  C'est  probablement  par  un  sentiment  de  réserve, 
assurément  excessive,  que  M.  Rey  s'est  abstenu,  ou  préoccupé  de  son  rùle 
de  délégué  du  Ministre  de  l'Instruction  publique  auprès  de  l'Exposition.  Il 
avait  à  remplir  au  nom  du  Gouvernement  français,  une  tâche  délicate,  dont 
il  s'est  acquitté  avec  autant  de  tact  que  de  bon  goût  ;  et,  grÀce  à  lui,  notre 
pays  a  été  représenté  dignement  et  noblement,  tout  en  faisant  À  ses  hôtes 
les  honneurs  du  salon. 


—  271  — 

Par  ses  soins,  le  môme  emplacement  contient  des  œuvres  analogaes,  et 
l'on  y  remarquera  particulièrement  les  numéros  suivants  : 

1445.  Itinéraire  de  la  mer  Morte,  par  M.  de  Saulcj. 

1446.  Anunonitide,  carte,  plans  et  vues,  du  même. 

1447.  Deux  plans  de  Jérusalem,  par  le  conmiandant  Gélis. 

1448.  Itinéraires  divers,  par  le  même. 

1449.  Garizim  et  environs  de  Naplouse.  Plans. 

1450.  Environs  de  Jérusalem.  Plans  et  dessins. 

1451.  Aqueduc  de  Béthléhem.  Plan. 

1452.  Jérusalem,  Hébron,  Hérodium  et  Ramlet-el-Khalil.  Plans,  coupes, 
Tues. 

Le  catalogue  sgoute  en  nota,  que  M«  de  Saulcy  s'était  adjoint,  dans  sa 
mission,  le  commandant  Gélis,  pour  la  topographie,  et  M.  Mauss,  conmie 
architecte. 

1456.  Tombeau  des  Machabées.  Plans  et  vues,  par  M.  V.  Guérin. 

Nous  passons  maintenant  aux  œuvres  de  M.  le  comte  de  Vogué  : 

N'  1457.  Kalat  Semaln.  —  Église  et  couvent  de  saint  Siméon  Stylite,  cons- 
truits au  cinquième  siècle  entre  Âlep  et  Antioche  (Syrie  centrale). 

a.  Plan  restauré  à  TécheUe  de  0"'0025  par  mètre. 

b.  Vue  générale  des  ruines  en  1862. 

c.  Intérieur  de  Téglise  ;  vue  de  la  cour  centrale  (restauration). 

d.  Vue  intérieure  de  TAbside  (restauration). 

1458.  Lapais,  Ancienne  abbaye  royale  construite  au  quatorzième  siècle, 
sauf  Téglise  qui  date  du  treizième  (lie  de  Chypre). 

a.  Plan  des  ruines  en  1865,  k  l'échelle  de  0'*005  par  mètre;  b  façade  nord, 
è  l'échelle  de  O'^OOl  par  mètre,  état  des  ruines  en  1865;  c  façade  ouest,  id.; 
d  coupe  suivant  la  ligne  A.  B.;  e  coupe  suivant  la  ligne  C.  D. 

1458  bis.  Jérusalem,  mosquée  d'Omar,  coupe  transversale,  prise  en  1862. 

Ajoutons  encore  les  deux  suivants  : 

1459.  M.  de  Mas-Latrie  :  carte  de  Tile  de  Chypre,  k  l'échelle  de  1/250,000. 
1498.  M.  Mauss:  Cloître  du  douzième  siècle,  à  Béthléhem. 

a  Plan  et  vue  de  Koubeibek  (Emmaûs).  b  Eglise  Sainte-Anne  à  Jérusalem 
et  ses  dépendances.  4  plans 

Finalement,  disons  aussi  que  nous  pouvions  nous  attendre  à  voir  adopter 
dans  le  même  cycle  littéraire  l'ouvrage  intitulé  :  Géogra/phie  du  Taknud,  par 
M.  Ad.  Neubaner  (1868,  gr-8),  qui  a  pour  origine,  sinon  une  mission  scien- 
tifîquoy  du  moins  un  oncours  académique.  Cet  orientaliste  avait  aussi 
publié  le  texte  hébreu  des  Lettres  du  voyage  d'Obadia  de  Bertinoro  en 
Egypte  et  en  Palestine  au  quinzième  siècle  (traduction  française  par  le 
signataire  de  ces  lignes,  1865.  in-8). 

Telle  est  la  nomenclature  (que  nous  aurions  voulu  à  la  fois  plus  courte  e 
moins  aride)  des  documents  relatifs  à  notre  sujet.  Il  n'est  pas  besoin  de 
remonter  bien  haut  ni  d'établir  des  comparaisons  nombreuses  pour  prouver 
la  supériorité  notable  de  ces  topographes  sur  leurs  devanciers.  Un  seul 
exemple  suffira  pour  nous  en  convaincre. 

La  magnifique  carte  de  Ritter  n'a  pas  assez  circonstancié  le  moyen  Age  ; 
par  conséquent,  elle  ne  saurait  servir  à  expliquer  les  relations  des  narrateurs 
qui  ont  employé  les  dénominations  en  usage  parmi  les  croisés.  Cette 
remarque  a  déjà  été  exprimée  par  feu  Joachim  Lelewel  dans  sa  lettre  sur 
la  carte  géographique  de  la  Terre-Sainte  d'El.  Carmoly  (Bruxelles,  1847), 
accompagnant  les  extraits  de  narrations  des  pèlerins  juifs  de  différentes 
époques  qui,  pour  la  plupart,  étaient  sur  les  lieux,  savoir  :  Bei^amin,  de 
Tudèle,  en  1163  ;  Petahia,  de  Ratisbonne,  en  1173  ;  Samuel  bar  Simson  de 


—  272 

France,  en  1210;  Jacob  de  Paris,  en  1258;  Isaac  Helo,  deLaresa,  en  1334; 
Eliahde  Ferrare,  en  4438,  outre  deux  auteurs  de  listes  abondantes  de  tom- 
beaux, du  seizième  siècle. 

Or,  aujourd'hui,  —  il  est  à  peine  besoin  de  le  constater  à  nouveau,  —  le 
point  de  mire  de  tant  de  recherches  est  atteint,  ou  peu  s'en  faut.  Ce  ne  sera 
pas  un  des  moindres  services  rendus  par  le  Congrès,  d'avoir  opéré  la  réunion, 
sinon  réelle,  au  moins  possible,  des  matériaux  les  plus  indispensables  à  la 
géographie  des  croisades,  de  l'avoir  élucidée,  de  l'avoir  présentée  au  grand 
public  sous  un  jour  favorable  ;  d'avoir  enfin  facilité  l'accès  de  tous  ces  trésors 
aux  explorateurs  futurs  et  aux  pèlerins,  ainsi  qu'aux  missionnaires  de 
l'Orient.  C'est  un  avantage  qu'à  côté  de  bien  d'autres,  nous  sommes 
heureux  de  consigner,  car  il  est  assez  important  pour  être  signalé  à  la 
gratitude  du  monde  savant  M**  Schwab. 


CHRONIQUE 

Nécrologie.  —  Hans-Christian  Andersen,  célèbre  poète  et  romancier 
danois,  est  mort  le  2  aoiU  à  Copenhague;  il  était  né  le  2  avril  1805  à 
Odensée,  dans  l'ile  de  Fionie.  Fils  d'un  cordonnier,  il  fut  mis  en  apprentis- 
sage chez  un  tailleur,  dès  l'àgo  de  onze  ans.  A  cette  époque,  il  faisait  déjà 
des  vers.  Comme  il  ne  montrait  aucune  disposition  pour  les  travaux  manuels, 
sa  mère  le  laissa  partir  pour  Copenhague.  S'étant  présenté  au  Théâtre- 
Royal,  il  fut  éconduit,  parce  qu'il  était  .trop  maigre.  Mais  sa  voix,  fort  belle, 
lui  valut  la  protection  de  plusieurs  musiciens,  qui  l'aidèrent  à  vivre.  Une 
maladie  subite  lui  ayant  enlevé  la  voix,  il  eût  recours  à  la  poésie,  et  publia 
plusieurs  pièces  de  vers,  parmi  lesquelles  VEnfant  mourant,  qui  eut  un 
grand  succès.  Les  poètes  en  renom,  OEhlenschlœger  et  Jugeman,  sollicitèrent 
pour  lui  une  bourse  dans  une  école  de  Copenhague.  Il  commença  ses  études 
à  23  ans,  en  1828.  Deux  années  après,  il  fit  paraître  une  satire  littéraire 
intitulée  :  Voyage  à  pied  à  Amak,  qui  eut  trois  éditions.  Il  publia  ensuite, 
Fantaisies  et  Esquisses,  qui  révéla  en  lui  l'un  des  plus  grands  poètes  du 
Nord.  Il  voyagea  successivement  en  Allemagne,  en  France,  en  Suisse,  en 
Italie,  ce  qui  amena  la  publication  des  Esquisses  de  voyage.  L'Italie  lui 
inspira  un  de  ses  meilleurs  romans  :  V Improvisateur,  traduit  en  français  par 
M"*  C.  Lebrun  (1837,  2  vol.  in-8).  Il  alla  ensuite  dans  l'Orient,  le  pays  de 
ses  rêves,  qu'il  a  décrit  dans  son  Bazar  du  poète  (1842).  Il  vint  à  Paris  en  1843  ; 
l'année  suivante,  il  reçut  des  ovations  en  Allemagne.  Il  commença  son  auto- 
biographie, le  Récit  de  ma  vie,  en  Italie.  En  1847,  il  visita  l'Angleterre  et 
la  Suède.  Dans  les  intervalles  de  ses  pérégrinations  à  travers  l'Europe,  il 
écrivit  :  O-T,  c'est-à-dire  la  maison  de  réclusion  d'Odensée  (1835);  — Rien 
qu'un  violoniste  (1837,  2*  édit.  1853);  —  Un  drame  qui  réussit  :  le  Mulâtre; 

—  Un  autre  moins  heureux  :  Raphaèlla  (1840).  Cette  même  année,  parût 
encore  son  Album  satis  dessins.  D  donna  ensuite  ses  Contes  (3  volumes).  Un 
choix  des  plus  jolis  a  paru  sous  le  titre  de  Contes  choisis  (1855,in-16)  ;  puis  sui- 
virent :  Livre  d'images  sans  images  (1 859,  in-i  8)  ;—  Nouveaux  contes  (i  861 ,  in-1 8); 

—  Pantaisies  danoises  (1861,  in-18).  On  a  encore  de  M.  Andersen  un  drame 
symbolique  :  Ahasvérus,  et  un  roman  emprunté  aux  mœurs  nationales,  les 
Deux  baronnes,  qui  a  paru  dant  l'édition  générale  de  ses  Œuvres  (Leipzig, 
1847-1848,  35  vol.) 

—  M.  Etienne,  recteur  de  l'Académie  de  Besançon,  est  mort  le  6  août. 
Professeur  suppléant  de   litterature  françabe  à   la   Sorbonne*  de   1870 


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à  1873;  recteur  à  Chambéry  et  à  Besançon  depuis  lors,  il  avait,  du- 
rant de  longues  années,  analysé  et  apprécié,  dans  la  Revue  des  Deux- 
Mondes,  les  productions  anglaises  contemporaines.  Dans  son  Histoire  de  la 
lUtéraivre  italienne,  parue  récemment,  il  a  résumé,  d*une  façon  concise  et 
magistrale,  vingt  ans  d*études  assidues,  et  il  s'est  montré  critique  fin  et 
élevé  et  historien  d'une  érudition  consommée  chaque  fois  qu'il  s'est  occupé 
des  littératures  modernes. 

—  M.  Fernand-Louis-Amoult  le  Proux,  archiviste-paléographe,  associé- 
correspondant  de  la  Société  des  antiquaires  de  France,  né  à  Saint-Quentin 
(Aisne),  le  13  octobre  1844,  mort  dans  la  même  ville  le  23  juillet  1875,  a  publié 
un  certain  nombre  de  travaux  sur  l'histoire  de  Picardie, et  notamment:  Chartes 
françaises  du  Vermandois,  antérieures  à  1250  (Bibliothèque  de  l'Ecole  des 
Chartes,  1874)  ;  —  Lettres  du  cardinal  Mazarm  à  la  Ville  de  Saint-Quentin, 
1873  (extrait  du  Vermandois)  ;  —  Saint-Quentin,  notes  d'histoire  locale,  neu- 
vième et  dixième  siècles  (Mémoires  de  la  Société  académique  de  Saint- 
Quentin)',  —  Fondation  d'une  chapelle  de  Notre-Dame  en  1468  à  Compiégne 
par  le  roi  Louis  XI  {Bulletin  de  la  Société  historique  de  Compiégne,  t.  l*%  1872)  ; 
—  En  ilolkmde.  Notes  extraùes  d'un  carnet  de  voyage  (avec  A.  de  Marsy), 
Arras,  1867.  En  outre,  une  série  d'articles  bibliographiques  dans  le  Journal 
de  Saint-Quentin,  M.  le  Proux  laisse  divers  travaux  manuscrits,  en  tôte 
desquels  ligure  une  Histoire  des  comtes  de  Yermandois,  présentée  comme 
thèse  à  l'Ecole  des  chartes  en  1869  ;  une  Histoire  de  Vahhaye  de  Fervacques,  et 
une  édition  de  Guibert  de  Nogent,  préparée  pour  la  Société  de  l'histoire  de 
France.  —  A.  de  M. 

—  M.  l'abbé  Parâhelle,  si  connu  par  son  talent  pour  la  découverte  des 
eaux  souterraines,  est  mort  le  20  août  a  Saint-Géré,  petite  ville  du  dépar- 
tement du  Lot;  il  était  né  en  1790^  à  Félizins,  canton  de  Figeac.  Savant 
et  saint  prêtre,  il  a  laissé  un  testament  qui  sera  le  monument  de  sa  charité 
et  de  son  dévouement  aux  bonnes  œuvres.  Il  a  publié,  en  1856,  chez  Dal- 
mont  :  L*Art  de  découvrir  les  sources  (in-8),  dont  une 'seconde  édition, 
augmentée,  a  été  donnée  en  1859. 

—  M.  Gharles-Théodore-Edwin  Tross,  libraire-éditeur,  à  Paris,  né  &  Hamm 
(Prusse),  en  1822,  est  mort  le  30  août.  Savant  aussi  modeste  que  anti- 
quaire distingué,  il  parlait  et  écrivait  la  plupart  des  langues  de  l'Europe. 
Ses  vastes  connaissances  faisaient  qu'il  était  souvent  consulté  par  lesérudits 
les  plus  éminents.  Ses  catalogues  ont  de  la  valeur.  Il  a  publié  :  Cent  cinq 
rondeaulx  d'amour,  d'après  un  manuscrit  du  commencement  du  seizième 
siècle  (in-12,  1863,  avec  2  vignettes). 

On  annonce  encore  la  mort  de  M.  Rohault  de  Fleury,  architecte,  admi- 
nistrateur de  l'École  Saint-Nicolas;  —  de  M.  Gormon,  rédacteur  en  chef 
du  Hainaut  français,  mort  à  Avesnes  (Nord)  ;  —  de  M.  le  baron  Lombard  de 
BuppiÊRES,  ancien  magistrat,  ancien  député  ;  —  de  M.  André  Leroy,  pépi- 
niériste distingué  d'Angers,  et  auteur  d'un  Dictionnaire  de  Pomologie  ;  —  de 
M.  Gonnop-Thirlwall,  ancien  évêque  anglican  de  Saint-David,  auteur  d'ou- 
vrages estimés  ;  —  de  M"^^  la  duchesse  de  Storne,  qui  avait  été  l'amie  de 
Chateaubriand,  de  Lamartine  et  d'Alfred  de  Musset,  et  qui  laisse  des  notes  fort 
curieuses  sur  ces  grands  honmies  ;  ses  Mémoires  seront  publiés  par  les  soins 
de  ses  héritiers  ;  —  de  M.  Auguste  Pcjol,  rédacteur  en  chef  du  Journal  de 
Toulouse,  mort  dans  cette  ville  le  8  août  ;  —  de  M.  le  baron  de  Léonhardi, 
professeur  de  philosophie  à  l'université  de  Prague  et  historien  célèbre,  mort 
le  21  ao&t  d'une  attaque  d'apoplexie  ;  —  ^e  Mgr  Guillaume  Sillani-Aretini, 
né  àSigillo,  diocèse  de  Nocera  (Italie),  le  11  août  1786,  mort  le  12  août; 
chanoine  de  Nocera,  entré  dans  la  congrégation  ^es  missionnaires  du 
Septembre  1875.  T.  XIV,  18. 


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PrécieuX'Sang,  et  préconisé  évoque  des  sièges  unis  de  Terracine,  Piperno  et 
Sezze,  le  6  avril  1835,  donna  sa  démission  en  1853,  et  se  retira  chez  les 
missionnaires  du  Précieux-Sang,  où  il  est  mort  ;  r-  de  M.  Lochon,  avocat, 
collaborateur  de  V Union  savoisienne,  mort  à  Annecy  le  22  août;  — de 
M.  GoTTSCHALK,  inspecteur  d'académie,  mort  à  Amiens,  le  même  jour  ;  -^  de 
M.  le  baron  de  Maistre,  le  cousin  de  Joseph  et  de  Xavier  de  Maistre,  et  l'in- 
time ami  de  Lamartine,  mort  en. son  château  de  Coques  (Nièvre),  le  20  aoi^; 
—  de  M.  Jean  Goethals,  ancien  membre  du  Congrès  national  et  de  la  Cham- 
bre des  représentants,  ancien  commissaire  d'arrondissement  à  Courtrai, 
ancien  membre  de  la  députation  permanente  du  Conseil  provincial  de  la 
Flandre  occidentale,  mort  le  15  août,  à  Bruxelles,  àTâge  de  81  ans. 

Institut.  —  Académie  française.  L'Académie  française  a  tenu  le  jeudi 
49  août,  sa  séance  hebdomadaire  ordinaire.  La  commission  chargée  de 
prononcer  sur  les  livres  envoyés  au  concours  du  prix  Guizot  se  composait 
de  BfM.  Dufaure,  d'Haussonville,  Marmier,  de  Loménie,  auxquels  étaient 
adjoints  de  droit  les  membres  du  bureau,  savoir  MM.  Camille  Doucet,  Caro 
et  Patin.  Le  prix  triennal  de  3,000  francs,  fondé  par  M.  Guizot,  et  qui  n'est 
pas  destiné,  conune  on  l'a  dit,  au  meilleur  ouvrage  en  vers  ou  en  prose  paru 
depuis  dix  ans,  mais  à  tout  ouvrage  spécialement  consacré,  soit  à  mettre  en 
.  lumière  une  des  grandes  époques  de  l'histoire  de  France^  soit  à  raconter  la  vie  et  à 
apprécier  les  asuvres  d'un  grand  écrivain  français,  a  été  décerné,  pour  la  première 
fois,  à  notre  collaborateur  M.  Gautier,  pour  son  livre  sur  la  Chanson  de  Bokmd, 
Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres.  —  Dans  sa  séance  du  6  août, 
l'Académie  des  inscriptions  a  reçu  conmaunication  du  rapport  de  M.  Adrien 
de  Longpérier,  au  nom  de  la  commission  des  antiquités  de  la  France.  La 
première  médaille  a  été  décernée  à  l'ouvrage  :  les  Vicomtes  de  Limoges^ 
par  M.  Robert  de  Lasteyrie  ;  la  seconde,  à  VEtude  sur  l'architecture  de  VAge- 
nais,  par  M.  Tholin  ;  la  troisième,  aux  deux  ouvrages  :  Histoire  et  cmtulaire 
de  FlineSf  par  M.  l'abbé  Hautcœur.  Les  six  mentions  honorables  ont  été 
accordées  :  la  première,  à  VHistoire  des  institutions  de  VAuvergne,par  M.  Rivière; 
la  seconde,  au  Trésor  de  Clairveaiuû,  et  &  onze  autres  mémoires  présentés  par 
M.  l'abbé  Lalore  ;  la  troisième,  aux  Inscriptions  céramiques  a*Autun,  par  M.  Ha- 
rold  de  Fontenay  ;  la  quatrième,  à  divers  ouvrages  intitulés  :  Rcceuils  de 
chartes^  Visite  pastorcUes  à  Grenoble,  Choix  de  monuments  diplomatiques  inédits, 
par  notre  collaborateur  M.  l'abbé  U.  Chevalier  ;  la  cinquième  k  l'ouvrage  : 
Réunion  de  Lyon  à  la  France,  par  M.  Pierre  Bonassieux  ;  la  sixième  aux  Chro- 
niques  de  saint  Martial  de  Limoges,  par  M.  Duplès-Agier. 

^-Dans  sa  séance  du  20  août,  l'Académie,  statuant  sur  un  rapport  de  M.Adrien 
de  Longpérier,  au  nom  de  la  commission  du  prix  Louis  Fould,  a  décidé 
de  donner  un  accessit,  représenté  par  trois  années  de  revenu  du  capital  de 
20,000  francs,  à  l'ouvrage  de  M.  James  Fergusson,  intitulé  Histoire  de  l'arcki' 
tecture  de  tous  les  peuples  depuis  les  temps  les  plus  reculés  jusqu'à  nos  jours; 
elle  a  pris  d'ailleurs  en  considération  les  cinq  publications  du  même  auteur 
dont  les  titres  suivent:  1»  Les  Monuments  de  pierres  brutes  dans  toutes  les 
contrées  ;  2<»  les  Palais  de  Ninive  et  de  Persépolis;  3<*  Explioatùms  des  temples 
taillés  dctns  le  roc,  dans  Vînde  ;  k^  Illustrations  de  l'ancienne  architecture  de 
VHindoustan  ;  5<>  le  Culte  de  V Arbre  et  du  Serpent  ou  Explication  de  la  mythO' 
logie  de  Flnde  d'après  les  sculptures  des  monuments  bouddhistes  de  Santchi  et 
d*Amraivati. 

—  Dans  sa  séance  du 27,  l'Académie,  sur  les  conclusions  de  M.  Adrien  de 
Longpérier,  rapporteur  de  la  conmiission  du  prix  de  numismatique,  fondé 
par  Allier  de  Hauteroche,  a  décerné  ce  prix  &  M.  Barclay  Vincent  Head, 
conservateur  ady  oint  du  cfl^inet  des  médailles  du  Musée  britannique,  pour  son 


—  275  — 

ouvrage  intitulé  :  Série  chronologique  des  monnaies  de  Syracuse,  1874  ;  in-8, 
accompagné  de  quatorze  planches  exécutées  par  le  procédé  autotype  (hélio- 
graphique). 

Académie  des  sciences  morales  et  politiques.  —  Dans  sa  séance  du  28  août, 
r Académie  des  sciences  morales  et  politiques,  a  fixé  les  sujets  des  prix 
suivants  :  —  i*  Prix  Victor  Cousin  pour  1876  (3,000  îr,).  Le  sujet  à 
traiter  sera  :  De  la  philosophie  stoïcienne,  —  2«  Prix  de  M.  le  .baron  Félix 
de  Beaujour  pour  1877  (5,000  fr)  :  De  V Indigence  aux  différentes  époques  de 
la  civilisation.  —  3»  Prix  de  M.  le  baron  de  Morogues  pour  1877  (2,000  fr.). 
L'auteur  devra  traiter  la  question  du  Paupérisme  en  France  et  indiquer 
les  moyens  d'y  remédier.  —  4«  Prix  Stassart  pour  1878  (3,000  fr.)  : 
(c  Chercher  les  raisons  de  la  diversité  qui  peut  exister  dans  les  opinions  et 
les  sentiments  moraux  des  différentes  parties  de  la  société,  »  —  5^^  Prix  de 
2,500  francs  :  Les  modifications  introduites  dans  les  lois  relatives  aux  titres 
négociables,  —  6«  Prix  Odilon  Barrot  pour  1877  (7,500  fr.);  ce  prix  sera 
décerné  à  l'auteur  du  meilleur  ouvrage  sur  le  jury  et  sur  la  procédure  civile 
et  criminelle. 

CoMCOUBs  ET  PRIX.  —  La  section  des  lettres  de  l'Institut  national  genevois 
a  offert  un  prix  de  500  francs  à  la  meilleure  traduction  française  de  quatre 
ballades  allemandes  de  Schiller,  Goethe,  Uhland  et  Bûrger. 

—  Dans  sa  séance  publique  du  20  juin  1875,  la  Société  académique  ^de 
Saint-Quentin  a,  entre  autres  prix,  décerné ,  dans  le  concours  de  littérature, 
le  !<'  prix  à  une  Étude  sur  Jean  Bodin,  par  M.  Éd.  de  Barthélémy,  membre  du 
comité  des  travaux  historiques;  et  dans  le  concours  d'Histoire  locale,  la  seule 
récompense,  —  une  mention  honorable  avec  médaille  d'argent  grand  module, 

—  a  été  donnée  au  môme  pour  son  Histoire  de  saint  Marcou  et  du  Prieuré  de 
Corbeny, 

—  La  Société  académique  de  Saint-Quentin  a  mis  au  concours,  pour 
l'année  1876,  les  sujets  suivants  :  Poésie;  le  sujet  est  laissé  au  choix  des 
concurrents.  —  Littérature  :  i^  «  Étude  sur  la  poésie  contemporaine;  » 

—  2**  »  Des  moyens  de  développer  le  goût  de  l'étude  dans  toutes  les  condi- 
tions. »  —  Histoire  locale:  1®  u  Faire  l'histoire  d'une  localité  quelconque  du 
département  de  l'Aisne  ou  de  l'un  des  départements  limitrophes;»  — 
2°  <(  Histoire  de  l'Abbaye  de  Fervaques,  &  Saint-Quentin  ;  —  3°  «  Étude  sur 
l'Abbaye  de  Nogent-sous-Coucy  et  les  travaux  de  ses  principaux  religieux;  » 

—  4®  «  Étude  historique  sur  les  comtes  de  Soissons  ;  »  ^-  5®  «  Recherches 
sur  l'homme  préhistorique  dans  l'arrondissement  de  Saint-Quentin.  » 

Congrès.  —  Le  Congrès  de  l'union  des  associations  catholiques  ouvrières 
a  tenu  sa  cinquième  session  à  Reims,  du  23  au  28  août,  sous  la  présidence 
de  son  excellence  Mgr  Langénieux,  archevêque  de  Reims,  au  milieu  d'une 
très-nombreuse  afÛuence.  Le  congrès  était  partagé  en  sept  commissions  : 
1.  Union  des  bureaux  diocésains  ;  2.  Propagation  de  l'union  ;  3.  Œuvres  et 
cercles  d'ouvriers  ;  4.  Œuvres  de  jeunesse  ;  5.  Œuvres  d'enseignement  et  de 
bonnes  lectures  ;  6.  Corporation  chrétienne  :  Œuvres  de  l'union  et  de  la 
famille  ouvrière  ;  7.  Aumènerie  militaire.  —  Un  rapport  sur  les  biblio- 
thèques populaires  et  la  propagande  des  bons  journaux,  brochures  et  tracts, 
a  été  présenté  par  le  R.  P.  de  Boylesve,  et  une  monographie  de  la  Société 
bibliographique  a  été  lue  par  M.  de  Beaucourt. 

—  Association  française  pour  l'avancement  des  sciences  —  L'Association 
fr'ançaise  a  tenu,  à  Nantes,  son  quatrième  Congrès  annuel,  du  19  au  26  août 
dernier,  sous  la  présidence  de  M.  d'Eichtal.  On  remarquait,  au  bureau  de  la 
séance  solennelle  d'ouverture,  sur  la  scène  du  Grand-Théâtre  de  la  place 


—  27»  — 

Graslin,  cinq  membres  de  l'Académie  des  sciences,  IIM.  Dumas,  Claude 
Bernard,  Balard,  Wurtz  et  de  la  Goumerie,  un  membre  de  l'Académie 
des  sciences  morales  et  politiques,  M.  Levasseur;  une  foule  de  profes- 
seurs, d'ingénieurs,  d'industriels,  de  savants  de  toute  classe  ;  et,  parmi 
les  étrangers  :  Mahmoud-Bey,  de  l'Institut  égyptien,  le  conmiandeur  Negri, 
M.  Cari  Vogt,  le  général  Ricci,  les  docteurs  Brandza,  Grinwis,  Schmidt  et 
Phené,  l'amiral  OManney,  etc..  11  nous  serait  impossible  de  donner  ici  une 
simple  nomenclature  des  travaux  remarquables  qui  ont  été  produits  dans  les 
quinze  sections  :  des  sciences  mathématiques,  —  génie  civil,  —  physique  et 
météorologie,-^-  chimie,  —  géologie  et  minéralogie,  —  botanique, —  zoologie, 

—  anthropologie,  —  sciences  médicales,  —  agronomie,  —  géographie,  —  éco- 
nomie politique  et  statistique.  Des  conférences  publiques  avaient  lieu,  en- 
dehors  des  sections,  en  séances  générales.  Qu'il  nous  suflise  de  signaler,  en 
particulier,  les  conférences  de  M.  Bureau  sur  les  progrès  des  sciences  naturelles 
à  Nantes  ;  de  M.  Lorieux  sur  les  ressources  minéralogiques  et  salicoles  de  la 
Loire-Inférieure,  et  de  M.  Gavarret  sur  le  son*.  Cette  dernière  a  été  très-remar- 
quée  :  mais  le  savant  professeur  a  gâté  tout  son  succès,  en  terminant  par 
une  péroraison  malencontreuse  &  l'adresse  de  la  récente  loi  sur  l'enseigne- 
ment supérieur.  Si  réellement  l'Université  ne  craignait  pas  la  concurrence, 
elle  ne  le  crierait  pas  si  haut.  —  Citons  aussi,  parmi  les  travaux  des  sections, 
les  mémoires  de  M.  Collignon,  sur  la  résolution  des  équations  numériques  ; 

—  de  M.  Fouret,  sur  une  nouvelle  méthode  de  calcul  de  la  résistance  des 
poutres  droites  à  plusieurs  travées  ;  —  de  M.  Bergeron,  sur  le  tunnel  du  Pas- 
de-Calais;  —  de  MM.  Roussin  et  l'abbé  Durand,  sur  les  expéditions  au  Pôle 
nord  ;  —  de  M.  Broca,  sur  un  crâne  préhistorique  recueilli  par  M.  René  Ker- 
viler  dans  les  fouilles  du  nouveau  bassin  de  Saint-Nazaire  ;  —  de  M.  Foulon, 
sur  l'histoire  des  chambres  de  commerce  ;  —  de  M.  Guieysse,  sur  la  propaga- 
tion de  la  marée  dans  les  rivières  ;^de  M.  Claude  Bernard,  sur  la  température 
du  sang  et  sur  les  effets  du  curare  ;  —  de  M.  Goullin,  sur  l'amélioration  de  la 
Loire  ;  —  de  M.  Mannheim,  sur  les  propriétés  de  la  surface  de   l'onde  ; 

—  de  M.  Cornu,  sur  la  mesure  de  la  vitesse  de  la  lumière  entre  l'Obser- 
vatoire et  Montsouris;  —  de  M.  Viaud  Grand  Marais,  sur  le  venin  des 
serpents;  —  de  M.  Ë.  Lemoine,  sur  la  substitution  des  alcalis  dans  les 
règnes  végétal  et  animal;  —  de  M.  Godard,  sur  les  méthodes  de  l'école 
Monge;  —  de  M.  Bourdelles,  sur  l'extraction  de  roches  sous- marines;  —  de 
M.  le  docteur  Laénnec,  sur  la  structure  et  le  développement  des  tissus  osseux; 

—  de  M.  Joly,  sur  l'application  de  la  drague  du  système  Bazin  sur  la 
Loire,  etc.,  etc...  M.  le  docteur  OUier,  de  Lyon,  a  lu  un  très-remarquable 
compte  rendu  de  la  session  du  Congrès  de  Lille  en  1874. 

De  nombreuses  excursions  ont  eu  lieu  dans  les  environs  de  Nantes,  dont 
presque  toutes  les  grandes  usines,  rafQneries,  confiseries,  fonderies,  etc.,  ont 
été  successivement  visitées.  Les  anthropologistes  se  sont  rendus  à  l'Ile  de 
Batz  et  au  Croisic  ;  les  agriculteurs,  à  la  ferme-école  de  Grand-Jonan  ;  les 
géologues,  à  Ancenis;  les  métallurgistes,  à  Couêron,  Basse-Indre  et  Indret,  où 
M.  De  Robert  a  fait  les  honneurs  du  bel  établissement  de  la  marine  ;  les  ingé- 
nieurs, à  Saint-Nazaire,où  M.  Daymar  a  conduit  le  Congrès  dans  les  ateliers 
de  la  Compagnie  transatlantique,  et  où  M.  Kerviler,  ingénieur  des  travaux 
d'achèvement  du  nouveau  bassin,  a  exposé  l'économie  générale  de  ce  grand 
port  et  ses  essais  de  fondation  dans  la  vase  sur  puits  coulés  à  25  mètres 
au-dessous  du  sol  naturel.  Enfin,  après  la  clôture  de  la  session,  un  grand 
nombre  d'excursionnistes  sont  partis  pour  Vannes,  ont  visité  le  Morbihan, 
les  monuments  de  Carnac  et  de  Locmariaker;puis  un  navire  de  l'État  leur  a 
fait  visiter  la  baie  de  Quiberon  et  Belle-Dé.  Les  derniers  membres  du  Congrès 


—  277  — 

se  sont  séparés  à  Lorient.  Nous  devons  ajouter  qu'une  magnifique  exposition 
d'objets  préhistoriques,  gaulois  et  gallo-romains  avait  été  réunie  au  Théâtre 
de  la  Renaissance  par  les  soins  de  MM.  Mario nn eau  et  Parenteau.  On  y 
admirait  les  collections  de  MM.  de  Limur,  Parenteau,  Fabbé  Baudry,  Seidler, 
Fillon,  de  Girardot,  etc.,  etc.  —  R,  K. 

Les  FRàRBS  des  Écoles  chrétiennes  au  Congrès  de  géographie.  —  Le  Con- 
grès international  de  géographie,  dans  sa  dernière  séance,  a  décerné  à 
rinstitut  des  Frères  des  Écoles  chrétiennes,  pour  ses  travaux  de  géographie 
scolaire,  la  rare  médaille  de  i'*  dasse,  la  plus  haute  récompense  qu'il  pût 
accorder.  Et,  chose  digne  de  remarque,  la  nombreuse  assemblée  du  Congrès 
a  accueilli  cette  nomination  par  des  applaudissements  et  par  des  marques, 
non  équivoques  de  sympathie,  ce  dont  elle  n'était  cependant  pas  prodigue. 
L'institut  se  maintient  donc,  pour  l'enseignement  de  la  géographie,  au 
niveau  des  progrès  accomplis  dans  ces  derniers  temps.  La  récompense  qui 
lui  est  accordée  est  égale  à  celle  qu'ont  obtenue  les  auteurs  le  plus  en  renom 
et  les  premiers  éditeurs  de  Paris.  Et  c'était  justice.  On  pourrait  rapporter 
ici  des  témoignages  de  la  plus  haute  valeur,  et  notamment  celui  d'un  per- 
sonnage étranger  de  distinction  qui,  dans  un  langage  plus  expressif  que 
correct,  disait  :  u  La  collection  des  objets  exposés  par  les  Frères  est  encore 
ce  qu'il  y  a  de  plus  mieux  pour  les  écoles,  n  {Le  Monde») 

Lectures  faites  a  l'Acadéhie  des  inscriptions  et  belles-lettres.  —  Dans  la 
séance  du  6  août,  l'Académie  a  entendu  une  communication  de  M.  le  Dr  Gus- 
tave Lagneau  sur  Véthnographie  des  Ligures»  Dans  la  même  séance  et  dans  celle 
du  20,  on  a  continué  la  lecture  du  mémoire  de  M.  Ch.Tissot,  sur  la  géographie 
comparée  de  la  Mauritanie  tingiiane,  —  Dans  la  séance  du  i3,  M.  Egger,  au 
nom  de  M.  Thomas-Henri  Martin,  a  lu  une  note  sur  l'étymologie  du  mot  latin 
Dtclator,  sur  l'origine  et  le  sens  primitif  de  ce  mot.  —  Dans  les  séances  des  ' 
43  et  20,  M.  Alfred  Maury  a  lu  un  mémoire  intitulé  :  Nouvelles  observations  sur 
la  langue  étrusque,  —  Dans  la  séance  du  27,  M.  Léon  Renier  a  communiqué 
un  travail  suggéré  par  une  inscription  latine,  recueillie  à  £1  Arrouch,  à  mi* 
chemin  entre  Gonstantine  et  Philippeville. 

Lectures  pattes  a  l'Académie  des  sciences  morales  et  politiques.  —  Dans  la 
séance  du  7  août,  M.  le  baron  de  Gzœrnig,  correspondant  à  yienne'(Autriche) 
de  la  section  d'économie  politique,  a  lu  une  note  intitulée  :  Les  changemetits 
du  système  fluvial  survenus  dans  le  comté  de  Goricd  depuis  le  temps  des  Romains  : 
risonzo,  le  fleuve  le  plus  récent  de  V Europe.  —  Dans  les  séances  du  7  et  du  44, 
M.  L.  Drapeyron  a  lu  la  seconde  et  la  troisième  partie  de  son  mémoire  sur 
le  Caractère  de  la  lutte  de  V Aquitaine  et  de  VAustrasie  sous  les  Mérovingiens  et 
les  Carlovingiens»  Les  points  abordés  dans  ce  mémoire  sont  les  suivants  : 
Médiation  de  Grégoire  de  Tours  ;  les  Aquitains  et  les  Basques  ligués  contre  les 
Austrasiens  ;  Sens  de  la  lutte  de  Waiffre  et  de  Pépin  le  Bref;  Guerres  et  légende 
de  Waiffre;  Padfication  de  Louis  le  Débonnaire,  —  Dans  la  séance  du  14, 
M.  Giraud  a  repris  la  lecture  du  mémoire  de  M.  le  colonel  de  La  Barre- 
Duparcq  intitulé  :  Henri  IV 'et  nos  frontières,  —  Dans  la  séance  du  24, 
M.  Jules  Alaux,  professeur  de  philosophie  à  l'académie  de  Neuchâtel 
(Suisse),  a  lu  la  première  partie  d'un  mémoire  ayant  pour  titre  :  La  méta- 
physique, étude  sur  la  philosophie  première,  —  Dans  la  séance  du  28,  M.  Bau- 
drillart  a  commencé  la  lecture   d'un  mémoire  sur  le  Luxe  et  les  moralistes 

Un  coffret  du  douzième  siècle  découvert  a  la  bibliothèque  de  Vannes.  — 
Ayant  obtenu  la  permission  de  classer  les  archives  capitulaires  de  la  cathé- 
drale de  Vannes,  il  y  a  quelques  années,  M.  l'abbé  Chauffier,  ancien  élève 
de  l'École  des  chartes,  qui  consacre  tous  ses  loisirs  à  l'étude  de  nos  anciens 


—  278  — 

monuments,  aperçut,  après  avoir  enlevé  la  plupart  des  liasses,  un  cofflret 
en  bois,  couvert;  de  peintures  et  rempli  d'ossements  qui  gisait  méprisé  der- 
rière de  gros  antiphonaires  parisiens.  Son  attention  fut  aussitôt  éveillée  par 
la  bizarrerie  fort  archaïque  des  peintures,  qu'une  patine  épaisse  permettait 
à  peine  de  reconnaître.  La  serrure  étant  faussée,  il  était  difficile  aussi  d« 
constater  Tauthenticité  des  reliques  ;  mais  les  costumes  des  personnages 
représentés  sur  toutes  les  faces  du  coffret  conduisirent  Fauteur  &  penser  qu'il 
appartenait  à  la  seconde  moitié  du  douzième  siècle.  Quelques  fragments  de 
parchemin,  attachés  aux  ossements  qu*il  renfermait,  portaient  le  nom  de 
saints  en  écriture  de  la  même  époque. 

De  patientes  et  laborieuses  recherches  ont  enfin  permis  à  M.  l'abbé  Ghauffier 
d'établir  que  les  reliques  du  cofiret  sont  dues  à  l'évoque  Guéthenoc,  qui 
gouvernait  le  diocèse  de  Vannes  de  1177  à  1227,  et  que  les  scènes  de  dieva- 
lerie  représentées  tout  autour  du  coffret,  scènes  que,  au  premier  abord,  on 
pourrait  croire  détachées  des  romans  de  la  Table  Ronde,  en  particulier  de  la 
belle  et  délectable  histoire  du  noble  chevalier  Gauvain,  sont  antérieures  au  cjcle 
d'Arthur,  dont  la  critique  la  plus  exacte  fixe  la  composition  de  1170  à  1250. 
Tout  concorde  donc  pour  fixer  la  date  du  coffret  à  la  moitié  du  douzième 
siècle,  et  c'est  merveille  de  voir  comment  l'abbé  Ghauffier,  analysant  tous 
les  détails  du  costume,  des  armures  et  des  attitudes  des  personnages,  pour 
les  comparer  avec  ceux  qui  sont  représentés  sur  les  monuments  déjà  connus 
ou  avec  les  descriptions  des  auteurs  contemporains,  écarte  successivement 
toutes  les  hypothèses  douteuses  pour  arriver  à  une  conclusion  qui  s'impose 
impérieusement  à  l'esprit.  Rarement  nous  avons  vu  déployer  une  érudition 
plus  séduisante  et  de  meilleur  aloi  ;  aussi  devons-nous  féliciter  hautement 
la  Revue  de  Vart  chrétien,  l'Association  bretonne,  et  la  Société  polymathique 
du  Morbihan  de  n'avoir  pas  hésité  à  insérer  l'étude  de  M.  l'abbé  Ghauffier  dans 
leurs  publications.  Le  tirage  à  part,  très-soigné,  mérite  une  place  d'honneur 
dans  toutes  les  bibliothèques  qui  se  piquent  d'honorer  le  moyen  âge.  (EsMi 
iur  un  coffret  du  douzième  siècle  appartenant  à  la  bibliothèque  de  Vannes.  Extrait 
de  la  RevuedeVart  chrétien.  Arras,  Planque,  1875,  in-8  de  38  p.  et  2  pi.)  ^R.  K. 

La  Nouvelle-Guinée  et  le  capitaine  Lawson.  —  La  Nouvelle-Guinée  est 
une  des  régions  les  moins  connues  du  monde.  Un  marin  anglais,  le  capitaine 
Lawson,  vient  de  lui  consacrer,  sous  le  titre  de  Wanderings  in  New  Quinea^ 
un  volume  intéressant.  Au  mois  de  mai  1872,-  accompagné  d'un  lascar  et  de 
deux  indigènes  de  l'Australie,  il  pénétra  courageusement  dans  l'intérieur  de 
cette  région;  après  six  journées  de  marche,  il  atteignit  une  chaîne  de  mon* 
tagnes  qui  arrivait  à  une  hauteur  de  19,500  pieds  anglais;  au  delà,  sont  des 
plaines  où  les  buffles,  les  lièvres,  les  daims  abondent.  Les  habitants  sont  de 
fort  petite  taille,  leur  peau  d'un  brun  très-foncé  ;  ils  élèvent  de  la  volaille, 
des  cochons,  des  chèvres;  leur  mets  favori  c'est  la  chair  grillée  du  singe.  Le 
capitaine  découvrit  un  lac  d'une  vaste  étendue,  autour  duquel  résident  une 
multitude  d'oiseaux  et  des  légions  de  grenouilles;  il  lui  donna  le  nom 
d'Alexandra,  en  l'honneur  de  la  princesse  de  Galles,  et  il  gratifia  du  nom  de 
Vulcain  une  montagne  volcanique  en  éruption  qui  s'élève  jusqu'à  16,700  pieds 
au-dessus  du  niveau  de  la  mer.  Une  autre  montagne,  le  mont  Hercule,  pré- 
sente, selon  notre  voyageur,  la  plus  grande  hauteur  qui  existe  sur  notre 
planète;  l'assertion  est  contestable.  Les  récits  des  exploits  du  voyageur 
contre  les  sauvages,  sa  résistance  à  des  fatigues  extrêmes  et  à  des  dangers 
nombreux  ne  semblent  pas  exempts  de  quelque  exagération,  et,  tout  en 
ajoutant  des  détails  utiles  au  peu  qu'on  savait  déjà  au  sijget  de  la  Nouvelle- 
Guinée,  ces  Wanderings  n'empêchent  pas  de  désirer  la  publication  d'un  livre 
qui  fournira  des  notions  bien  précises  relativement  à  cette  (erra  inoognita. 


—  «79  — 

BmioTBÂQUES  8C0LAIBSS.  —  NoQs  empruiitona  à  la  StaUstiqtie  de  la  France 
de  M.  Blockj  les  renseignements  suivants  sur  le  mouTement  des  biblio- 
thèques scolaires  de  i865  à  1871.  Le  nombre  des  bibliothèques  était,  en 
1865,  de  4,833,  avec  180,854  vol.;  —  en  1866,  de  7,789,  avec  258,724  vol.; 
—  en  1867,  de  11,417,  avec  721,853  vol.;  —  en  1868,  de  12,395,  avec 
988,728  vol. ;— en  1869,  de  14,395,  avec  1,239,165  vol.;  —  en  1870-1871, 
de  13,638,  avec  1,158,742  volumes. 

Une  académie  en  Chine.  —  Mgr  Pemy,  ancien  provicaire  apostolique  de  la 
Chine,  dont  les  savants  travaux  ont,  plus  d'une  fois,  été  signalés  &  nos  lec- 
teurs, vient  de  concevoir  le  projet  d'établir,  en  Chine  même,  une  académie 
destinée  à  mieux  faire  connaître  ce  vaste  pays  qu'il  ne  Ta  été  jusqu'à  ce 
jour  (Projet  d'une  Académie  européermej  Paris,  Jules  Boyer,  in-8  de  12 p.).  Le  siège 
de  cette  société  savante  serait  &  Han-Kéou,  ville  sise  sur  le  fleuve  Bleu,  au  sein 
môme  du  Céleste-Empire.  Elle  se  composerait  d'une  vingtaine  de  membres,  les 
uns  missionnaires  ou  savants  européens,  les  autres  lettrés  du  pays,  et  publie 
rait,  chaque  mois,  au  moins,  un  fascicule  d'annales.  Les  sujets  les  plus  variés  y 
seraient  successivement  traités,  et  chaque  volume  constituerait  ainsi  un  véri* 
table  essai  d'encyclopédie  chinoise.  Questions  commerciales,  ethnographie, 
histoire,  littérature,  sciences  naturelles,  tout  s'y  trouverait  successivement 
passé  en  revue.  La  création  d'un  musée  et  d'une  bibliothèque  au  local  de  la 
société  est  chose  jugée,  et  avec  raison,  indispensable.  Quant  aux  ressources 
financières,  on  espère  les  trouver  soit  dans  les  dons  des  personnes  s'intéres- 
saut  aux  progrès  des  sciences,  soit  dans  les  abonnements,  soit  dans  la  vente 
des  dites  annales.  L'abonnement,  qui  ne  pourra  être  de  moins  d'une  annéOi 
sera  fixé  au  prix  de  60  francs. 

Par  le  résumé  que  nous  venons  de  donner,  l'on  voit  clairement  le  but 
auquel  vise  Mgr  Perny.  Ce  n'est  pas  tant,  à  proprement  parler,  de  révéler 
l'Europe  aux  Chinois,  que  de  nous  initier,  nous  autres  barbares  Occidentaux, 
à  la  connaissance  des  choses  et  hommes  de  l'Empire  du  milieu.  On  ne  saurait 
nier  qu'il  n'y  ait  beaucoup  À  faire  dans  cette  voie.  Pour  nous  en  tenir  &  la 
question  industrielle,  combien  de  procédés  connus  depuis  longtemps  des 
Chinois,  et  que  nous  aurions  tout  intérêt  &  leur  emprunter?  En  fait  d'accli- 
matation, nous  aurions  également  plus  d'une  leçon  à  recevoir  du  peuple  à  tête 
noire.  Déjà,  au  reste,  l'on  a  tenté  l'introduction  de  certaines  plantes,  telles 
que  le  sorgho,  qui  n'a  qu'un  défaut,  c'est  de  ne  point  valoir  le  mais,  dont 
on  peut  le  considérer  comme  un  succédané  ;  et  une  espèce  de  bambou, 
propre  aux  régions  tempérées  du  Céleste-Empire,  et  qui  réussit  fort  bien  dans 
le  midi  de  la  France.  Pourquoi,  n'imiterions-nous  pas,  à  cet  égard,  les  Anglais, 
gens  pratiques,  s'il  en  fût,  et  qui  aujourd'hui,  sont  parvenus  à  récolter  le 
thé  sur  les  versants  de  l'Himalaya?  Diverses  régions  de  l'Algérie  et  peut-être 
même  du  midi  de  l'Europe  semblent  parfaitement  convenir  à  la  culture  de 
cet  arbrisseau.  Ce  serait,  à  coup  sûr,  une  grande  économie  pour  le  monde 
entier  que  de  n'être  plus,  sur  ce  point,  tributaire  de  l'Empire  chinois. 

Quoi  qu'il  en  soit,  on  ne  saurait  contester  les  services  que  rendra  évidemment 
l'Académie  européo-chinoise,  lorsqu'une  fois  elle  sera  parvenue  à  se  cons- 
tituer d'une  façon  sérieuse.  Ajoutons  que,  grâce  à  son  activité,  à  son  énergie, 
à  sa  prodigieuse  érudition,  nul  ne  semble  plus  capable  que  Mgr  Perny  de 
mener  une  aussi  laborieuse  entreprise  abonne  fin.  —  H.  de  Ch. 

Notre  Géographie  provinciale.  —  Le  Polybiblion  a  donné  (p.  192)  d'inté- 
ressants renseignements  sur  le  Saonnois.  En  ce  qui  regarde  la  division  de  la 
France  en  pays,  n'y  a-t-il  pas  d'ouvrages  ou  de  cartes  où  l'on  puisse  se  ren- 
seigner avec  quelque  précision  ?  Nous  pensons  ici  à  la  division  de  l'ancienne 


—  280  — 

France^  non  en  gouyemements  mais  en  pays.  Ces  pays,  lors  même  qu'ils  ont 
cessé  de  bonne  heure  de  correspondre  à  des  divisions  administratives,  judi- 
ciaires ou  ecclésiastiques,  n'en  vivent  pas  moins  dans  les  souvenirs  de  la  tra* 
dition.  Nos  paysans  savent  cette  géographie  par  cœur,  en  ce  qui  concerne 
leur  village  et  les  villages  voisins  :  ils  savent  où  tel  pays  finit,  où  tel  autre 
commence,  et,  si  on  leur  demande  d'où  ils  sont,  ils  ne  répondront  pas  par 
le  nom  de  leur  département  (du  moins  si  ce  sont  de  vrais  et  vieux  paysans), 
mais  par  le  nom  de  leur  pays  :  «  Je  suis  du  Gâtinais,  de  la  Beauce,  etc.  » 
S'il  n'existe  pas  un  travail  d'ensemble  pour  notre  pays,  il  serait  intéressant 
de  le  faire  par  l'apport  de  savants  des  différentes  provinces.  Le  travail  de 
M.  Longnon  sur  l'Ile  de  France,  dans  le  premier  volume  des  Mémoires  de 
la  Société  de  l'histoire  de  Parts,  quoique  fait  à  un  point  de  vue  différent, 
montre  l'intérêt  d'un  semblable  travail.  —  H.  G. 

Le  Groupr  en  marbre  de  l'église  Notre-Dame  a  Bruges.  —  Au  moment  où 
l'Italie  s'apprête  à  célébrer  pompeusement  le  centenaire  de  Michel- Ange,  la 
petite  brochure  que  M.  F.  Reiset  vient  de  publier,  sous  le  titre  transcrit  plus 
haut  (Paris,  Gh.  de  Mourgues,  in-12  de  8  p.),  est  toute  d'actualité.  Un  passage 
de  Gondivi,  mal  compris  par  Yasari  et  rectifié  par  notre  auteur,  lui  a 
permis  de  restituer  &  Michel-Ange  la  Vierge  de  Bruges,  que  M.  James  Wheale 
avait  cru  pouvoir  attribuer  au  sculpteur  florentin  Torrigiani.  Non-seulement 
il  y  reconnaît  une  œuvre  du  maître  lui-même,  mais  il  parvient  à  préciser 
l'époque  à  laquelle  ce  chef-d'œuvre  a  dû  être  exécuté.  Ge  fut  évidemment 
avant  le  mois  de  décembre  de  l'année  1506;  c'est-à-dire  au  moment  où  son 
génie  était  dans  toute  sa  force,  et  où  il  a  produit  les  plus  parfaits  de  ses 
ouvrages.  —  A.  H.  de  V.  ' 

ABOLmoN  DE  LA  MORT.  —  De  la  peine  de  mort,  direz-vous?  Pas  du  tout,  ou 
plutôt,  mille  fois  mieux,  abolition  de  toute  mort,  naturelle  ou  violente!  Et 
ce  beau  projet  n'est  pas  un  rêve  poétique;  c'est  l'objet  d'un  manifeste  phi- 
losophique des  plus  sérieux,  des  plus  raisonnes,  fondé  sur  de  magnifiques 
axiomes,  comme  ceux-ci  :  a  l'être,  l'intelligence,  l'activité  sont  les  trois  élé- 
ments constitutifs  de  la  durée  ou  de  la  vie;  »  l'intelligence  finie,  qui  contient 
en  elle  le  rapport  du  multiple  fini  au  multiple  absolu,  a  le  droit  de  déve- 
velopper  à  l'infini  sa  propre  durée,  etc.  »  Là-dessus,  on  arrive,  par  des  pro- 
cédés de  raisonnement  dont  beaucoup  de  philosophes  célèbres  n'ont  pas  le 
droit  de  se  moquer,  à  démontrer  que  l'homme  sera  physiquement  inmiortel, 
quand  il  voudra.  Du  reste,  nous  y  tendons,  mais  avec  lenteur.  11  est  évident 
que  la  foi  manque  et  que  trop  peu  d'hommes  sont  arrivés  à  ce  degré  de  per- 
fection requis,  où  la  différence  entre  le  bien  et  le  mal  est  absorbée  dans  une 
vraie  conception  synthétique  de  l'univers.  Quand  ce  progrès  sera  accompli, 
comment  la  vie  pourra-t-elle  être  à  Tabri  des  accidents,  comme  la  chute 
d'une  tuile,  l'asphyxie?  etc.  Gomment  la  terre  suffira-t-elle  à  recevoir  et  à 
nourrir  tant  d'habitants?  A  ces  questions,  et  à  bien  d'autres,  M.  Fr.  Attardi 
répond  sans  sourciller,  et  rien  ne  l'embarrasse.  Lisez  sa  brochure  :  Filosofia 
deW  immortalità  (Palermo,  tipogr.  Bondi,  1875,  95  p.  in-12).  Il  se  plaint  que 
les  savants  à  qui,  jusqu'à  ce  jour,  il  a  fait  part  de  son  système  »  ont  gardé 
un  dédaigneux  silence.  Nous,  qui  ne  sommes  pas  savants,  mais  assez  curieux 
de  philosophie,  nous  lui  déclarons  que  sa  théorie  est  un  pur  délire,  mais 
qu'elle  vaut  bien  un  grand  nombre  d'autres  théories  que  nous  sommes 
obligés  de  traiter  avec  plus  d'égards.  —  Léoivce  Gouture. 

Le  Glossaire  de  Le  Glerc  de  Douy.  —  On  sait  que  le  célèbre  Glossaire  de  M 
langue  française  de  La  Gurne  de  Sainte-Palayo  va  bientôt  être  réimprimé,  pour 
la  plus  grande  utilité  des  travailleurs  qui  veulent  étudier  les  origines  de  notre 
vieux  langage.  Les  mérites  de  ce  glossaire  sont  connus;  mais  ce  qu'on  igno- 


-  281  — 

rait  jusqu'à  ce  jour,  c'est  que  La  Gurne  de  Sainte-Palaye  trouva,  dans  un 
modeste  savant  de  province,  une  collaboration  à  demi-volontaire  qui  lui  fut 
des  plus  utiles.  Un  certain  Leclerc  de  Douy,  procureur  du  roi  au  baillage 
d'Orléans  et  gardien  des  archives  du  duché,  avait  presque  achevé,  pour  son 
propre  compte,  un  semblable  glossaire,  en  deux  volumes  in-4,  que  M.  de 
Silhouette,  intendant  du  duc  d'Orléans,  le  força  de  communiquer  à  La  Gurne, 
en  i757.  Un  membre  distingué  de  la  Société  archéologique  et  historique  de 
l'Orléanais,  M.  Gaston  Vignat,  vient  de  découvrir  toutes  les  pièces  de  cette 
affaire,  et  il  en  a  fait  l'objet  d'un  curieux  travail  qui  sera  prochainement 
publié. 

Les  antiquités  et  chroniques  de  la  ville  de  Dieppe.  —  Tel  est  le  titre  d'un 
ouvrage  important,  resté  inédit  jusqu'ici,  et  dû  à  la  plume  de  David  Asseline, 
prêtre  habitué  à  Saint-Jacques  de  Dieppe,  né  en  1619  et  mort  en  1703.  Get 
ouvrage  a  été  publié,  sous  les  auspices  du  Conseil  municipal  de  Dieppe,  par 
souscription,  et  forme  deux  beaux  volumes  grand  in-8,  du  prix  de  20  francs 
et  25  francs  sur  papier  vergé  (Dieppe,  Marais  et  V'  Leblanc).  Il  a  eu  pour 
éditeurs  MM.  Michel  Hardy,  Guérillon  et  l'abbé  Sauvage^  et  inaugure  fort 
heureusement  une  Biblioth^ue  dieppoise,  où  M.  l'abbé  Sauvage  a  publié 
aussi  :  Entrée  de  LouU  HV  dans  la  ville  de  Dieppe,  et  qui  doit  s'enrichir  d'un 
autre  ouvrage,  les  Mémoires  chronologiques  pour  l'histoire  de  Dieppe,  par 
Michel  Glande  Guibert,  prêtre  habitué  en  l'église  de  Saint-Remy  en  1761, 
qui  formeront  deux  volumes  in-8. 

La  vraie  Groix  de  Bacgé.  —  Le  récit  de  l'invention  de  la  sainte  Groix,  la 
description  du  fragment  considérable  conservé  à  Baugé  et  les  preuves  de  son 
authenticité  viennent  d'être  l'objet  d'une  intéressante  Notice  historique,  par 
M.  l'abbé  J.-B.  Barrau,  supérieur  de  l'Institution  de  Saint-Joseph,  à  Angers 
(Angers,  Briand  et  Hervé,  1874,  in-8  de  142  p.)  Jean  d'Alluye,  qui,  en  1241, 
avait  reçu  ce  fragment  de  Thomas,  évêque  d'Hiérapétra  et  d'Arcadie,  l'offrit 
à  l'abbaye  de  la  Boissière.  Sauf  pendant  les  plus  terribles  phases  de  la  guerre 
de  Gent-Ans,  la  relique  y  resta^  et  jusqu'à  la  Révolution  :  transférée  d'abord  à 
l'église  paroissiale  de  Baugé,  elle  fut  acquise,  moyennant  400  livres,  par 
Mlle  de  la  Girouardière,  fondatrice  de  l'Hospice  des  Incurables  de  cette  ville. 
G'est  dans  cet  hospice  que  la  précieuse  relique  est  demeurée  depuis  le 
17  octobre  1790.  La  notice  de  M.  l'abbé  Barrau  est  d'une  lecture  agréable 
et  intéressante  ;  elle  a,  de  plus,  le  mérite  d'avoir  attiré  l'attention  sur  une  de 
nos  plus  belles  reliques,  généralement  peu  connue,  môme  dans  le  diocèse 
qui  a  l'honneur  de  la  posséder.  —  G.  R. 

Les  Ordres  du  jour  de  Santerre.  —  Nous  avons  sous  les  yeux  le  premier 
fascicule  d'une  publication  qui  porte  ce  titre  :  Documents  historiques,  Ordres 
du  jour  inédits  de  Santerre,  oommcmdant  des  gardes  nationales  parisiennes  en  1792 
et  1793,  coUationnés  sur  les  textes  originaux,  mis  en  ordre  et  annotés  par 
Edouard  Dutcmple,  ancien  attaché  à  l'Assemblée  nationale;  édition  ornée 
de  gravures  d'après  les  estampes  du  temps  et  d'un  plan  de  Paris,  sous  la 
Gonvention,  par  Frédéric  Ghevallier  (Paris,  Desenne,  1875,  in-8  de  26  p.) 
Gomment  les  ordres  du  jour  de  Santerre  ontrils  été  retrouvés?  Quel  est  le 
«  heureux  hasard  »  qui  a  mis  M.  É.  Du  temple  en  possession  de  ces  documents? 
G'est  ce  que  l'auteur  ne  nous  apprend  pas  encore,  mais  ce  qu'il  nous  appren- 
dra, nous  l'espérons,  dans  les  livraisons  subséquentes.  L'histoire,  plus  que 
jamais,  aujourd'hui,  tient  à  connaître  l'origine  des  pièces  qu'on  lui  livre. 
Gette  première  livraison,  d'ailleurs,  n'est,  en  quelque  sorte,  qu'un  spécimen. 
Elle  retrace,  au  moyen  des  ordres  du  jour  du  Irop  célèbre  commandant  de 
la  garde  nationale  parisienne,  la  physionomie  de  la  capitale,  le  jour  néfaste 
du  21  janvier  1793.  Elle  donne  surtout  des  renseignements  txès-détaillés  sur 


—  282  — 

la  position  des  forces  considérables  déployées  ce  jonr-là,  du  Teii4>le  à  la 
place  de  la  Révolution,  et  un  plan,  très-bien  fait,  annexé  à  la  liyraison» 
aide  à  Tintelligence  du  texte.  Les  autres  fascicules  doivent  paraître  succes- 
sivement, et  former  un  volume  de  44  francs,  ou  10  francs  pour  les  cinq 
cents  premiers  souscripteurs.  Nous  en  reparlerons  quand  la  publication  sera 
plus  avancée. 

HoNORÀiBES  PAYÉS  A  DIVERS  AUTEURS.  —  H  j  aurait  là  un  s^jet  curieux  de 
recherches  ;  on  a  signalé,  parmi  les  ouvrages  de  Peignot,  restés  inédits,  un 
travail  sur  ce  sujet  ;  peut-être  envisagera-t-on  avec  quelque  intérêt  des  indi- 
cations recueillies  dans  le  cours  de  lectures  dirigées  vers  un  autre  but.  En 
1845,  la  Bévue  de  Paris  annonçait  qu*Eugène  Sue  venait  de  vendre  à  un 
libraire  la  publication  du  Juif  errant^  pendant  dix  ans,  au  prix  de 
110,000  francs.  C'était  payer  cher  cette  production  monstrueuse,  que  Tesprit 
de  parti  avait  seul  le  courage  de  louer  ;  d'ailleurs,  d'après  le  traité,  il  ne 
revenait  que  80,000  francs  à  l'auteur,  attendu  qu'il  avait  à  payer  30, 000  francs 
de  dédit  à  ses  anciens  éditeurs,  MM.  Béthune  et  Gosselin,  qui  avaient  acheté 
tous  les  ouvrages  futurs  de  M.  Sue,  avec  la  clause  qu'il  compterait  3,000  francs 
de  dédommagement  pour  chaque  volume  inédit  qu*il  céderait  à  un  autre 
libraire. 

En  1846,  divers  journaux  avancèrent  que  Lamartine  avait  vendu  la  pro- 
priété de  ses  œuvres  à  une  société  à  la  tête  de  laquelle  était  l'éditeur  Béthune. 
Les  conditions  étaient  satisfaisantes:  1°  350,000  francs  payables  en  divers 
termes;  2*  une  rente  viagère  de  8,000  francs  avec  réversibilité  de  moitié  sur 
une  autre  tête,  au  capital  de  120,000  francs;  3<»  une  part  dans  le  produit  de  la 
vente  des  GirondifiSf  part  évaluée  à  200,000  francs.  C'était  un  total  de 
700,000  francs.  On  ajoute  que  Lamartine,  se  flattant  de  trouver  mieux, 
demanda  et  obtint  la  résiliation  de  ce  contrat,  mais  tout  ceci  parait  singu- 
lièrement exagéré.  Quoi  qu'il  en  soit,  personne  n'ignore  quels  étaient  les 
embarras  pécuniaires  de  Lamartine,  pendant  les  tristes  et  dernières  années 
d'une  carrière  qui  avait  été  si  brillante. 

Bfilton  céda,  dit-on,  pour  un  prix  des  plus  modiques,  la  propriété  du 
Paradis  perdu  ;  il  circule  à  cet  égard  diverses  versions  qui  réclament  Texa- 
men  d'une  critique  judicieuse.  Circonstance  singulière!  Tédition  originale 
du  Paradise  lost,  publiée  en  1667,  in-4,  reparut  avec  sept  frontispices  suc- 
cessifs et  différents  ;  sur  ces  huit  frontispices  deux  sont  datés  de  1667,  quatre 
de  1668,  deux  de  1669.  Lowndes,  dans  son  Bibliographer's  Manual,  p.  1557, 
décrit  minutieusement  les  différences  qu'ils  présentent.  La  seconde  édition 
vit  le  jour  en  1674,  puis  la  troisième  en  1678,  et  la  quatrième  en  1688.  Ces 
dates  attestent  que  ce  poème  célèbre  n'obtint  que  lentement  le  succès  qui 
devait  être  son  partage.  —  B.  G. 

La  Shakespeare  Society. — On  formerait  une  bibliothèque  fort  considérable 
avec  les  ouvrages  publiés  en  Angleterre  au  sujet  de  Shakespeare,  et  dont  le 
nombre  tend  à  s'accroître  sans  relâche.  Il  vient  de  se  former  une  nouvelle  Sha- 
kespeare Society  f  destinée  à  continuer  les  travaux  de  l'ancienne,  qui  avait  été 
créée  il  y  a  quarante  ans  environ,  et  qui  avait  rendu  de  très-importants  ser- 
vices à  l'histoire  littéraire.  —  M.  Furnival,  qui  est  le  principal  promoteur  de 
l'entreprise  nouvelle,  vient  d'ajouter  une  introduction  remarquable  à  une 
réimpression  des  Commentaires  de  Shakespeare,  écrits  par  un  professeur  de  Hei- 
delberg,  le  docteur  Gervinus;  cette  introduction  a  été  signalée  parles  jour- 
naux anglais  comme  une  œuvre  d'un  grand  intérêt  ;  l'auteur  s'est  attaché, 
entre  autres  objets,  à  déterminer  l'ordre  chronologique  de  la  composition 
des  diverses  pièces,  lesquelles,  dans  bien  des  éditions,  sont  placées  conmie 
au  hasard  et  sans  aucune  méthode.  Quant  à  la  biographie  de  l'inmiortel 


—  «83  — 

dramatiirge,  il  reste  peu  de  découvertes  à  faire  ;  toutefois  M.  Furnival  croit 
pouvoir  établir  que  la  maladie  à  laquelle  succomba  Shakespeare  était  due 
à  rétat  d'insalubrité  de  quelques  maisons  entourant  sa  demeure,  et  qu'elle 
ne  fut  point,  comme  on  Ta  prétendu,  le  résultat  d'un  excès  de  boisson 
commis  en  compagnie  de  Ben  Johnson. 

M.  Edouard  Dowden,  professeur  d'histoire  d'Angleterre  à  l'université  de 
Dublin  et  vice-présidentde  la  nouvelle  «  Shakespeare  Society,  »  s'est  efforcé  de 
montrer  son  zèle  en  publiant  un  volume  intitulé  :  Shakespeare,  A  critieal 
Study  of  hii  Mind  and  Art,  On  a  rendu  justice  au  mérite  de  ce  travail,  qui 
envisage  surtout  le  poète  au  point  de  vue  de  la  critique  esthétique. 

La  English  Dialect  Socibtt.  — Un  bibliophile  instruit  et  qui  s'est  fait  con- 
naître par  divers  ouvrages  estimables,  M.  Burgaud  des  Maretz,  avait  fait  des 
démarches  afin  d'arriver  à  la  création  d'une  société  qui  consacrerait  ses 
efforts  à  l'étude  des  dialectes  provinciaux  de  la  France  ;  la  mort  l'a  frappé 
sans  qu'il  eût  pu  réaliser  sa  pensée*.  En  Angleterre,  les  choses  sont  plus  avan- 
cées  ;  il  existe  une  Engli$h  Dialect  Society,  qui  a  entrepris  la  publication 
d'une  série  de  glossaires  provinciaux  ;  elle  a  débuté  par  publier  celui  des 
expressions  particulières  au  Swaledale,  localité  du  Yorkshire,  et,  circons- 
tance remarquable,  ce  travail  est  dû  à  un  ancien  officier  presque  nonagé- 
naire, le  capitaine  Harland,  qui  donne  un  exemple  bien  rare  d'énergique 
dévouement  à  la  science.  Ce  langage  d'une  population  de  mineurs  et  de 
cultivateurs  offre  un  véritable  intérêt  philologique,  et  il  n'y  a  pas  de  temps  à 
perdre  pour^en  conserveries  traces;  car,  en  Angleterre  tout  comme  en  France, 
les  patois  tendent  à  disparaître. 

La  Society  dont  nous  parlons  publie  également  des  réimpressions  d'an- 
ciens glossaires  devenus  rares  ;  elle  les  accompagne  d'additions  et  de  notes 
qui  en  augmentent  la  valeur  ;  c'est  ce  qu'elle  a  fait  pour  le  North  of  England 
Qlossary  d'Hutton,  auquel  M.  Lunbj  a  joint  d'intéressantes  observations. 
Bien  des  mots  en  usage  il  j  a  quelques  siècles  se  trouvent  conservés  au  fond 
des  campagnes.  —  Il  serait  fort  désirable  que  quelques  personnes  de  bonne 
volonté  vinssent  fonder  chez  nous  la  Société  des  dialectes  françaiê.  Ch.  Nodier 
a  jadis,  et  bien  mieux  que  nous  ne  saurions  le  dire,  indiqué  tout  ce 
qu'avaient  d'utile  des  recherches  de  ce  genre. 

—  La  Société  des  archéologues  cambriens  a  tenu  sa  trentième  assemblée 
annuelle  à  Carmarthen,  dans  le  courant  d'août.  Ses  excursions  ont  offert  le 
plus  vif  intérêt.  Elle  a  visité  successivement  les  anciens  ch&teaux,  églises 
et  monastères  des  environs,  les  monuments  celtiques,  les  inscriptions  anti- 
ques que  le  district  de  Carmarthen  offre  en  abondance. 

—  The  Acadeniiy  nous  apprend  que  le  Dr  Roehl,  de  Berlin,  auteur  des 
Queetioneê  homeHeœ,  s'occupe  actuellement,  à  Oxford,  de  collationner  sur  les 
marbres  d'Arundel  les  inscriptions  dont  le  texte,  publié  par  Chandler,  a  été 
reproduit  par  Bdckh  dans  le  Corpus  inecriptionum  grœcarum.  Il  parait  que, 
malgré  les  soins  apportés  par  le  premier  éditeur  de  ces  précieux  monuments, 
un  examen  plus  attentif  a  fait  découvrir  un  certain  nombre  d'erreurs  dans 
le  texte  donné  par  Chandler. 

—  Un  pareil  travail  de  collation  se  fait  dans  la  collection  de  manuscrits  de 
l'Angleterre,  par  le  Dr  Zangemeister,  de  l'université  de  Heidelberg,  sur  le 
texte  imprimé  d'Orose.  Cette  collation  doit  servir  à  une  édition  de  cet 
auteur,  destinée  à  faire  partie  de  la  collection  des  Pères  latins,  publiée  à 
Vienne. 

—  Le  Dr  L.  A.  March,  professeur  de  philologie  comparée  au  collège 
Lafajette  (Etats-Unis),  a  publié  un  choix  d'hymnes  de  l'Eglise  latine  à  l'usage 


—  284  — 

des  classes.  Dans  ce  collège,  les  élèves  peuvent  choisir,  à  leur  gré,  les  auteurs 
païens  ou  les  auteurs  chrétiens,  comme  objet  de  leurs  études.  Ainsi,  pour 
rétude  du  grec,  Xénophon  peut  être  remplacé  par  Eusèbe,  etc. 

—  M.  Georges  Dennis,  auteur  estimé  des  Cités  et  cimetières  d*Ètrurief  va 
publier  en  Angleterre  un  travail  sur  Syracuse  et  ses  antiquités. 

—  Le  fait  important  que  nous  avons  signalé,  dans  notre  précédente  livrai- 
son, de  la  découverte  d'un  texte  palimpseste  de  Strabon,  dans  le  monastère 
de  Grotto-Ferrata,  demandait  quelques  explications  que  nous  trouvons  dans 
The  Academy.  Les  fragments  retrouvés  de  Fauteur  grec  consistent  en  nom- 
breux extraits  des  dix-sept  livres  de  sa  Géographie  ;  ils  ne  sont  pas  réunis 
en  un  seul  volume,  mais  dispersés  sur  un  grand  nombre  de  feuilles  de  par- 
chemin. On  assure  que,  parmi  ces  fragments,  il  se  trouve  des  portions  impor- 
tantes du  livre  VII'  perdu,  et  du  Ym*,  et  que  ces  passages  sont  assez  corrects 
pour  aider  à  la  reconstruction  du  texte.  Il  paraîtrait  que  le  P.  Gozza  doit  sa 
découverte  au  soin  mintftieux  qu'il  a  mi^  à  examiner  d'énormes  tas  de  par- 
chemins gisants  depuis  des  siècles  dans  les  caves  du  monastère,  et  que  les 
précédents  explorateurs,  y  compris  le  cardinal  Mai,  n'avaient  pas  eu  le  cou- 
rage de  manier,  &  cause  de  la  poussière  et  des  décombres  sous  lesquels  ils 
étaient  ensevelis. 

—  Nous  avons  sous  les  yeux  un  catalogue  de  livres  en  vente  à  la  librairie 
Bachelin-Deflorenne  (gr.  in-8  de  288  p.,  4492  numéros).  Nous  le  mention- 
nons, parce  que  nous  y  avons  remarqué  quelques  détails  dont  les  bibliographes 
peuvent  faire  leur  profit.  Diverses  éditions  de  livres  anciens  sont  signalées 
comme  ne  se  rencontrant  pas  dans  le  Manuel  du  Libraire,  habituellement 
si  complet;  nous  les  recommandons  à  M.  Pierre  Deschamps,  qui  prépare,  pour 
la  maison  Didot,  un  supplément  au  vaste  travail  de  J.  Gh.  Brunet  ;  men- 
tionnons en  ce  genre  le  Grand  Blason  des  fauîcés  amours  (par  Guillaume 
Alexis),  sans  lieu  ni  date  (probablement  Lyon,  vers  1497),  16  if.  pet.  in-4 
(offert  à  800  francs,  n^  515).  —  Un  livret  de  quelques  feuillets  dont  on  ne 
connaît  positivement  jusqu'ici  qu'un  seul  exemplaire,  VlmportunUé  et  malheur 
de  noi  anSf  parB.  Bailly,  conseiller  à  Troyes,  Troyes^s.  d,  (1576),  est  porté  à 
600  francs,  n*  613.  Certains  volumes  sont  estimés  à  des  prix  qui  pourraient 
paraître  excessifs  aux  personnes  étrangères  à  la  passion  de  la  bibliomanie  : 
l'édition  des  Essais  de  Montaigne,  Paris,  1595,  in-fol.  2,500  francs  (inutile 
de  dire  qu'il  ne  s'agit  en  tout  ceci  que  d'exemplaires  somptueusement  revêtus 
de  maroquin  par  les  plus  habiles  relieurs)  ;  —  CEuvres  de  Racine^  1676, 2  vol. 
in-12  (première  édition  collective  des  neuf  pièces  publiées  jusqu'alors), 
2,500  francs.  Le  catalogue  en  question  est  rangé  par  ordre  alphabétique; 
nous  avons  déjà  signalé  les  inconvénients  de  ce  système  :  l'homme  d'étude 
est  forcé  de  tout  lire  s'il  veut  découvrir  quelque  ouvrage  se  rapportant  spé- 
cialement aux  objets  qui  l'occupent.  A  la  fin,  deux  manuscrits  précieux,  l'un 
du  quatorzième  siècle  :  Justiniani  InstitutioiMS,  l'autre  du  quinzième,  Heures 
d'Anne  de  Bourgogne  ;  tous  deux  renfermant  de  nombreuses  miniatures  ;  ils 
sont  cotés  4,000  et  8,000  francs. 

—  Un  des  principaux  éditeurs  de  Londres,  M.  John  Murray,  a  mis  au  jour 
une  édition  nouvelle  et  fort  augmentée  de  la  traduction  de  Marco  Polo,  par  le 
colonel  du  génie  (armée  du  Bengale)  Henry  Yule  ;  elle  forme  2  volumes  in-8, 
avec  19  cartes,  des  plans  et  130  vignettes  insérées  dans  le  texte.  Divers  jour, 
naux,  notamment  VEdinburgh  Bemew  (habituellement  sobre  de  louanges) 
font  l'éloge  de  ce  travail.  Les  récits  du  vieux  et  intrépide  voyageur  vénitien, 
si  précieux  pour  la  connaissance' de  l'Asie  centrale,  avaient  déjà  été  (en  1818) 
l'objet  des  travaux  d'un  savant  orientaliste  anglais  (William  Marsden);  il  a 
provoqué,  en  France,  deux  publications  importantes,  dues,  l'une  à  la  Société 


—  285  — 

de  géographie  (Paris,  1824,  in-4),  Tautre  à  M.  G.  Pauthier  (Paris,  Didot, 
1865,  in-8);  mais  la  nouyelle  édition  de  Tœuvre  du  colonel  Yule  ajoute  beau- 
coup à  tout  ce  que  ses  devanciers  avaient  recueilli. 

—  The  Academy  publie  une  lettre  où  est  signalée  Texistence  d*un  manus- 
crit en  français-normand  de  Tépoque  du  roi  Jean-Sans-Terre  (fin  du  douzième 
siècle).  C'est  une  traduction  du  traité  de  législation,  écrit  en  latin,  attribué 
à  Glanville,  grand  justicier  du  roi  Henri  II.  Ce  curieux  manuscrit,  unique 
probablement,  fait  partie  de  la  bibliothèque  du  duc  de  Northumberland  à 
Almwick-Castle. 

—  Mgr  Tévêque  catholique  de  Galway,  déjà  connu  pour  son  remarquable 
travail  sur  les  épltres  de  saint  Paul,  dont  la  troisième  édition  vient  d*ôtre 
publiée,  va  faire  paraître,  avant  la  fin  de  Tannée,  un  commentaire  sur  les 
saints  Evangiles,  approprié  aux  erreurs  modernes. 

—  Les  Réxaples,  d*Origène,  publiés  au  dix-septième  siècle,  par  Mont- 
faucon,  viennent  d*ètre  édités  à  Oxford  par  le  savant  docteur  Frederick 
Field,  avec  des  additions  et  des  corrections  importantes. 

—  Le  Dr  P.  "W.  Joyce  vient  de  faire  paraître,  à  Dublin,  la  seconde 
partie  d*un  travail  précieux  pour  Tétude  des  anciens  idiomes  de  TEurope  : 
Origine  et  histoire  des  noms  de  lieux  en  Irlande, 

-— >  The  Âtfienceum  signale  la  décroissance  notable  des  étudiants  en  théo- 
logie dans  les  universités  d'Allemagne  depuis  1862.  Â  cette  date,  on  comp- 
tait, dans  les  anciennes  provinces  prussiennes,  1,180  étudiants  en  cette 
science;  en  1875,  ccPnombre  est  descendu  à  580.  La  même  diminution  s'eit 
fait  sentir  dans  les  autres  États  d'Allemagne.  Ce  fait  peut  être  attribué  à 
une  double  cause  :  l'exiguité  du  salaire  des  pasteurs  comparé  aux  res- 
sources que  fournissent  les  autres  professions  ;  en  second  lieu,  le  déclin 
généralement  remarqué  du  mérite  des  professeurs  dans  les  universités.  Les 
Gésénius,  les  l^nder,  les  Lûcke,  les  Tischendorf,  et  bien  d'autres  savants 
éminents,  n'ont  pas  été  remplacés.  Il  y  a  surtout  une  disette  déplorable  de 
professeurs  de  littérature  biblique.  L'université  de  Halle,  la  première  pour 
les  études  théologiques,  est  réduite  à  moins  de  moitié  du  nombre  des  étu- 
diants qui  suivaient  naguère  les  leçons  de  Gésénius.  L'illustre  hébralsant, 
qui  parlait  quelquefois  devant  500  auditeurs,  a  eu  pour  successeur  Schlott- 
mann,  qui  est  bien  loin  d'atteindre  même  la  moitié  de  ce  nombre. 

—  Pendant  les  fêtes  du  centenaire  de  Michel-Ange,  qui  vont  commencer 
dans  quelques  jours,  paraîtra  une  édition  des  lettres  du  grand  artiste,  au 
nombre  de  sept  à  huit  cents,  et  une  bibliographie  du  même  par  le  comte 
Passerini. 

—  V Architecture  eclésiastiqne  en  Irlande  à  la  fin  du  douzième  siècle,  tel  est 
le  titre  d'un  travail  remarquable  publié  à  Dublin,  avec  illustrations,  par 
M.  R.  Brash. 

—  On  vient  de  publier  à  Londres  la  seconde  édition  des  Élétnents  de 
paléographie  de  l'Inde  du  Sud,  par  M.  Burnell.  La  première  avait  paru, 
imprimée  &  très-petit  nombre,  à  Mangalore. 

—  M.  W.  Chappel  vient  d'achever  une  Histoire  de  la  musique  (art  et 
science).  Le  tome  I*%  seul  publié  jusqu'ici,  comprend  les  temps  anciens 
jusqu'à  la  chute  de  l'Empire  romain. 

—  La  librairie  Trûbner,  de  Londres  annonce  la  publication  prochaine  de 
quelques  ouvrages  dignes  de  fixer  l'attention  des  amis  des  lettres  ;  nous 
remarquons  une  traduction  d'une  partie  des  Poésies  d'Eu  fis,  par  Herman 
BickeJl,  d'après  le  texte  original  (il  est  inutile  de  rappeler  que  c'est  à  peine 
si  cet  écrivain  est  connu  en  France  autrement  que  de  nom)  ;  signalons  aussi 
une  traduction,  par  le  docteur  James  Legge,  des  Clasiiques  chinois;  Mencius 


—  286  - 

a  déjà  ya  le  jour,  et  le  Ske  King,  traduit  en  vers  anglais,  est  aa  moment  de 
paraître.  De  son  côté,  va  surgir  le  5«  et  dernier  volume  du  Ramayana  de 
Yalmiki,  traduit  en  vers  anglais  par  M.  Griflithe,  poème  sanscrit  où  s^étale, 
dans  toute  son  exubérance,  le  génie  de  Tlnde  antique.  —  Ces  publications, 
fort  utile?  pour  faire  connaître  aux  Européens  les  productions  de  l'Orient, 
seront  accompagnées  de  deux  ouvrages  qui  offriront  aux  students  de  pré- 
cieuses ressources  :  le  Dictionnaire  paU-anglais  de  M.  Ghilders;  le  Dictionnaire 
penan-anglais  et  anglms-persan  de  M.  Palmer.  —  On  ne  peut  que  donner 
des  éloges  à  la  courageuse  activité  de  MM.  Trûbner,  et  il  faut  espérer  que 
leurs  efforts,  tout  &  fait  en-debors  du  domaine  de  la  littérature  facile  qui 
est  une  des  plaies  de  notre  époque,  obtiendront  le  succès  qu'ils  méritent. 

—  La  première  paitie  du  tome  troisième  de  la  nouvelle  édition  du 
Dictionnaire  des  anonymes^  de  Barbier,  ne  tardera  pas  à  paraître  à  la  librairie 
Paul  Daffls.  On  sait  que  cette  édition,  dirigée  par  MM.  René  et  Paul  Billiard, 
de  la  Bibliotbèque  nationale,  renferme  un  grand  nombre  d'ouvrages  qui  ne 
se  trouvaient  pas  dans  la  seconde  édition,  publiée  de  1822  à  1824.  Sans 
parler  d'une  foule  d'auteurs  anonymes  qui  se  sont  fait  imprimer  depuis 
cette  époque,  il  reste,  sans  doute,  dans  cette  vaste  publication,  bien  des 
lacunes  inévitables  ;  on  y  relèvera  bien  quelques  erreurs,  mais  elle  n'en 
constitue  pas  moins  un  grand  service  rendu  à  la  science  des  livres. 

—  Le  Polybiblion  a  annoncé  (p.  187),  d'après  le  Times,  la  découverte  de 
manuscrits  irlandais  à  Milan.  Le  fait  ainsi  présenté  n'^st  pas  complètement 
exact.  Le  manuscrit  de  Milan,  si  riche  en  gloses  irlandaises,  est  depuis 
longtemps  connu  des  celtistes.  Zeuss  en  a  donné  des  extraits  dans  sa 
GrammaHoa  celtica;  M.  Nigra  en  a  publié  d'importants  fragments  dans  la 
Bévue  celtique  de  M.  Gaidoz,  et  M.  Ascoli  en  prépare  une  édition  complète 
qui  forme  tout  un  volume  de  son  Archivio  glottologico  italiano, 

—  M.  Joseph  .Denais  vienlT  de  publier,  sous  ce  titre  :  Monographie  de 
Notre-Dame  de  Beaufort^en-Vallée,  église  et  paroisse  (Paris,  Dumoulin  ;  Angers, 
Lachèse,  in-12  de  563  p.),  un  livre  plein  de  faits  puisés  aux  meilleures 
sources,  exposés  avec  clarté  et  précision,  et  tians  un  ordre  excellent.  Le 
cadre  est  restreint,  sans  doute,  et  ne  comporte  pas  de  grands  développements 
historiques  :  mais  le  lecteur  a  sous  les  yeux  un  tableau  exact  et  complet  de 
l'histoire  religieuse  de  Beaufort.  C'est  une  excellente  monographie,  dont 
le  plan  a  été  bien  conçu  et  bien  exécuté,  et  qui  dénote  chez  son  auteur  les 
meilleures  qualités  de  l'historien. 

—  Notre  collaborateur,  M.  Claudio  Jannet,  vient  de  mettre  sous  presse  un 
travail  considérable,  qui  paraîtra  prochainement  sous  ce  titre  :  V Amérique 
contemporaine  :  moeurs  et  institutions,  d'après  les  faits  actuels  et  les  documents 
les  plus  récents.  M.  Claudio  Jannet,  déjà  connu  par  de  savants  travaux,  est 
un  disciple  de  M.  Le  Play. 

—  Un  autre  disciple  de  M.  Le  Play,  notre  habile  et  expérimenté  collabo- 
rateur M.  Charles  de  Ribbe,  l'auteur  de  l'ouvrage  Les  Familles  et  la  société 
en  France  avant  la  Révolution,  qui  a  obtenu  un  si  grand  et  si  légitime  succès, 
prépare  la  publication  d'un  nouveau  volume,  intitulé  :  La  Vie  domestique. 

—  Enfin,  nous  sommes  heureux  d'annoncer  l'apparition  d'un  nouveau 
livre  de  l'illustre  auteur  de  la  Réforme  sociale;  il  a  pour  titre  :  La  Constitu» 
tion  de  V Angleterre,  et  forme  deux  volumes. 

—  Nous  insérons  avec  plaisir  la  conmiunication  suivante,  en  la  signalant  à 
l'attention  de  nos  lecteurs.  —  cf  Les  personnes  qui  posséderaient  ou  connaî- 
traient quelque  autographe  ou  quelque  lettre  inédite  de  saint  Vincent  de 
Paul,  sont  priés  de  vouloir  faire  connaître  la  date  de  la  lettre  et  le  nom  du 
destinataire  au  Secrétariat  des  Lazaristes,  rue  de  Sèvres,  05»  à  Paris.  » 


—  287  — 

^-  Le  Comité  catholique  de  Paris  a  récemment  publié  le  compte  rendu 
du  Congrès  qui  s*est  tenu  à  Paris  au  printemps  dernier.  Qa  ;  tmorora  d'in- 
téressants  rapports  sur  les  principales  œuvres  catholiques  qui  font  honneur 
à  notre  époque,  et  les  renseignements  les  plus  sûrs  et  les  plus  précis  sur  le 
OMNrrement  religieux  et  charitable  qui  se  produit  tant  à  Paris  que  sur  les 
divers  points  de  la  France. 

—  Le  ministre  des  beaux-arts  dltalie  yient  d*acheter  la  célèbre  biblio- 
thèque musicale  rassemblée  par  le  compositeur  Alessandro  Orsini.  Cette 
importante  collection  de  livres  et  de  partitions  sera  désormais  accessible  au 
public.  Le  dépôt  en  a  été  confié  à  l'Académie  de  Sainte-Cécile,  de  Rome, 
Congregazione  pontificia  ed  academia  di  Sonia  Cecilia,  la  plus  ancienne  insti- 
tution mvLsicale  de  TEurope,  fondée  en  1583  par  Palestrina. 

Publications  nouvelles.  —  Réfutationde  la  ChristoloQie  de  M.  Albert  Réville, 
par  Tabbé  J.  Troncy  (in-8,  Berche  et  Tralin).  —  Histoire  de  sairU  Pierre, 
prince  des  apôtres  et  premier  pape,  par  Tabbô  Janvier  (in-8.  Tours,  Marne).  — 
Le  vénérable  Guillaume,  abbé  de  Saint-Benigne  de  JOi/on,  par  Tabbé  G.  Che- 
vallier (in-8.  Palmé).  —  Eincmar  de  Reims,  parTabbé  Vivien  (in-8,  L.  Larose). 

—  Hagiographie  du  diocèse  d'Amiens,  par  Tabbé  J.  Corblet.  Tome  V  (in-8, 
Dumoulin  ;  Amiens,  Prévost- Allô).  —  Histoire  de  France  à  Vusage  des  écoles 
primaires,  par  G.  Hubault  (2  vol.  in-18,  Ch.  Delagrave).  ^Recherches  sur  les 
ÉttUs  de  Bretagne,  par  A.  du  Bouêtiez  de  Kerorguen  (2  vol.  in-8,  Dumoulin). 

—  Stofflet  et  la  Vendée,  par  Edm.  Stofflet  (gr.  in-18.  Pion).  —  La  Chanson  de 
Roland,  par  L.  Gautier  (in-8,  Tours,  Mame).  —  Alexis  Clére,  marin,  jésuite  et 
otage  de  la  Commune,  par  le  R.  P.  Ch.  Daniel  (gr.  in-18,  Albanel).  »  Journal 
de  mon  troisième  voyage  d'exploration  dans  l'Empire  chinois,  par  Tabbé 
A.  David  (2  vol.  in-18,  Hachette).  —  Au  cœur  de  V Afrique,  1868-1871,  par  le 
Dr  Schweinfurth  (2  vol.  in-8,  Hadiette).  ~  Histoires  de  chasse^  par  B.  H.  Revoil 
(gr.  in-18,  Didier).  —  Ce  que  disent  les  champs,  par  M"»'  la  baronne 
de  Mackau,  nouv.  édit.  (in-12,  Ton»,  Mame).  — -  Un  Gouvernement  dédaigné, 
par  M.  le  comte  de  MacCarthy  (in-18,  Paris,  imp.  des  apprentis  catholiques). 

—  1871-1878.  Au  jour  le  jour,  par  le  marquis  de  Biencourt  (in-8,  Dentu).  — 
Jane  et  Germaine,  par  la  comtesse  de  Mirabeau  (gr.  in-18,  Didier).  -^  La  Loi 
qui  tue,  par  C.  Delaville  (in-18,  Amyot).  —  Un  Drame  sous  Philippe  II,  par  le 
prince  Lubomirski  (in-18,  Didier).  —Le  Livre  d'une  mère,  par  Pauline  L*** 
(in-8,  Michel  Lévy).  —  Les  Deux  Frères,  par  George  Sand  (gr.  in-18,  Michel 
Lévy).  —  Portraits  de  grandes  dames,  par  le  baron  Imbert  de  Saint-Amand 
(gr.  in-18,  Pion).  Visenot. 


QUESTIONS  ET  RÉPONSES. 


QUESTIONS. 


Suger»  son  lieu  de  nals- 
itaDce*—  La  question  est  depuis 
longtemps  controversée  ;  et  plusieurs 
villes,  entre  autres  Saint-Denis,  près 
Paris,  Toury  en  Beauce,  Saint-Omer 
se  disputent  l'honneur  d'avoir  donné 
naissance  au  grand  ministre  de  Louis 
le  Gros.  Récemment,  la  Société  des 


antiquaires  de  la  Morinie  a  pris 
rinitiative  d'une  souscription  natio* 
nale  pour  élever  une  statue  à  Suj^er 
sur  une  des  places  publiques  de  Saint* 
Omer.  Elle  ne  semble  appuyer  son 
entreprise  d'aucun  document  nou- 
veau, d'aucun  ensemble  de  preuves, 
d'aucun  titre  local.  L'affaire  ainsi 
engagée  équivaudra-t-elle  à  la  re- 
connaissance d'un  droit  historique  ? 
Ou  mieux,   quelqu'un  serait-il  en 


—  288 


mesure  de  résoudre  définitivement 
un  problème  aussi  intéressant  que 
difficile?  G.  B.  de  P. 

Gaasien.  —  Quels  sont  les  pu- 
blications récentes  ou  anciennes  qui, 
en  France  où  à  l'étranger,  pourraient 
aider  à  un  travail  historique  et  cri- 
tique sur  Cassien  ?  X. 

fHalal-ilLndré   des  A.rt».   — 

M.  A.  Albrier  (t.  XIV,  p.  437],  écrit 
Saint-André  des  Arts;  est-ce  la  véri- 
table orthographe?  Ne  faut-il  pas 
Saint- André  des  Arcs  ?  Z.  X. 

Apre»  mot  le  délace.  —  On 

cite,  en  général,  ce  mot  comme  étant 
de  Louis  XV,  tandis  qu'il  faut, 
croyons-nous,  en  faire  honneur  à 
]){me  de  Pompadour.  Quelles  sont  les 
autorités  qui  ont  été  alléguées  à  ce 
siyet?  X. 

Pari»  vaut  bleo  une  ufteaae. 

—  Voilà  un  mot  bien  souvent  cité,  et 
fort  à  la  légère.  Je  demande  qu'on 
indique  la  source  où  il  a  été  puisé, 
et  qu'on  éclaire  le  public  sur  la 
question  de  savoir  si  c  est  à  Sully,  et 
non  à  Henri  IV,  qu'il  doit  être 
attribué.  P. 

Bannière»  des  corpora- 
tions  d'art»   et  métier».   — 

Quels  sont  les  ouvrages  où  l'on  pour- 
rait trouver  des  dessins  reproduisant 
les  bannières,  blasons  ou  sceaux  des 
corporations  d'arts  et  métiers  du 
nord   de   la  France   (Flandre). 

P.  L.  D. 


RÉPONSES. 


Œuvre»  poatiiunies  d*A.u- 
«uiftUn  Xlilerry  (XIII,  287,  383, 
479).  —  Je  retrouve  un  fragment  de 
lettre  qui  donne  quelques  renseigne- 
ments curieux  sur  les  dispositions 
d'Augustin  Thierry  et  de  son  entou- 
rage ;  elle  porte  la  date  de  juin  4856, 
et  est  adressée  à  un  ancien  conseiller 
d'Etat,  ai^ourd'hui  décédé,  par  une 
femme  de  mérite,  bien  placée  pour 
être  au  courant,   et  qui   est  morte 


également.  —  Je  copie  textuelle- 
ment : 

«  Cette  àme  droite  aspirait  à  la 
publication  de  son  Histoire  revue  et 
corrigée  de  la  Conquête  d'Angleterre. 
«  J'ai  suivi  les  chroniques  galhques,  » 
nous  disait-il,  «  infectées  de  protes- 
«  tantisme;  je  n'ai  pas  assez  consulté 
«  les  autres  ni  remonté  aux  sources. 
«  Que  faire,  hélas  1  Le  faux  libéra- 
le lisme  avait  tout  séduit;  la  foule  et 
<(  les  applaudissements  le  suivaient. 
«  Gomment  résister  à  l'entraînement 
«  général?  Nous  étions  fous.  Enfin, 
«  ajouta-t-il,  je  vais  remettre  le  pre- 
«  mier  volume  à  l'imprimeur.  '  Les 
«  corrections  fondamentales  sont 
«  faites,  et  je  pourrai  les  revoir  pen- 
te dant  l'impression  du  premier.  » 
....Il  s'y  est  pris  trop  tard,  et  a  remis 
le  soin  de  ses  publications  à  son 
frère.  —  «  C'est  ce  travail  qui  «  l'a 
tué,  »  disait  son  malheureux  frère, 
u  Revoir  un  tel  ouvrage,  si  beau,  si 
complet,  le  changer,  n'est-ce  pas 
avouer  qu'il  manque  quelque  chose 
à  sa  gloire  ?  »  Mignet  applaudissait. 
Pour  moi,  je  suis  convaincue  que  les 
manuscrits  de  Thierry  ne  verront  pas 
le  jour.  Les  philosophes  incrédules 
frémissaient  au  discours  du  curé  de 
Saint-Sulpice.  —  Déjà  la  note  de  Re- 
nan dans  les  DébatSj  sur  la  mort  de 
Thierry,  implique  ce  que  je  prévois. 
Et  cependant  Renan  était,  avec  Char- 
rier et  d'autres,  présent  à  une  lec- 
ture que  fit  Thierry,  l'autre  hiver, 
d'une  partie  renouvelée  de  son  pre- 
mier tome.  Thierry  avait  appelé  Re- 
nan à  titre  d'impie,  et  comme  pour 
être  avocat  du  diable.  Il  le  conviait 
aux  critiques  dont  il  jugeait  la  nou- 
velle édition  susceptible.  La  volonté 
de  Dieu  soit  faite  !  »  B. 

Parçon   de    la    Barbtnal* 

(XIV,  191).  —  Il  existe  une  ballade 
inédite,  mais  en  langue  allemande, 
racontant  les  hauts  faits  de  Parçon 
de  la  Barbinais  ;  l'auteur  est  un  Fran- 
çais naturalisé,  M.  Reichel,  demeu- 
rant au  Grand-Montrouge.  —  Nota 
qu'on  a  imprimé  Foreon  pour  Parçon. 

Un  Abonné. 


Le  Gérant j  L.  Sandrbt. 


SAINT-QUENTIN.  —    IMP.  JULES  UOUaBAD. 


POLYBIBLION 

REVUE  BIBLIOGRAPHIQUE   UNIVERSELLE 


PHILOSOPHIE   SCOLASTIQUE 

Manuel  d$  ta  philoiophiê  ehrétienne^  comparée  avec  les  doctrinee  anciennee  et  modernes,  par 
6.  Saksevbrino,  tradait  par  M.  Tabbé  Gordiol,  ancien  professeur  de  philosophie,  sur 
les  dernières  éditions,  latine  et  italienne,  données  par  N.  Signoribllo,  élève  de  Tau- 
tear,  seule  traduction  française  autorisée  et  augmentée  d'une  table  analytique. 
Paris,  Lethielleux,  1875.  2  vol.  pet.  in- 8  de  m-352  et  498  p.  Prix  :  8  f r.  —  Examen 
pkHosophieo-'tkeûlogicwn  de  ontologismo,  autore  âlbbrto  Lbpidt,  ord.  prsdicatorum. 
Lonvain,  veuve  Fonteyn;  Paris,  A.  Ghio,  1874.  In-8  de  vi-434  p.  Prix  :  5  fr.  — 
Théodicée^  thèses  de  métaphysique  chrétienne,  par  A.  H.  H.  Dupont,  chanoine  honoraire  de 
Liège,  professeur  à  l'université  catholique.  Louvain,  veuve  Fonteyn;  Paris,  A.  Ghio^ 
1874.  In-8  de  vi-334p.  Prix  :  4  fr.  50.  —  Ontologie,  thèses  de  métaphysique  générale, 
par  LB  MÈMR.  Louvain,  veuve  Fonteyn;  Paris,  A.  Ghio,  1875.  Gr.  in-8  de  488  p. 
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tualismo  juxta  mentem  Syllabi  vaticanique  eoncilii  adversus  errores  philosophicos,  prœci- 
pue  rcUionalismum,  positinsmum  et  novam  criticenf  auct.  P.-M.  Brin,  presb.,  philoso- 
phie in  maj.  semin.  Gonstantiensi  prof.  Paris,  Bray  &  Retaux,  1874.  Tomus  I' 
ïogica,  In-8  de  423  p.  Prix  :  4  fr.  —  Délia  eonoscensa  inteUectuale ,  trattato  del 
P.  Mattbo  LiBBajiTORB,  D.  G.  D.  G.  2a  edizione,  corretta  ed  accresciuta.  Roms 
Aless.  Befani,  1873.  2  vol.  in-8  de  441  et  492  p.  Prix  :  12  fr.  —  Dell'  uomo,  trattato 
di  Mattbo  Libbratorb.  D.  G.  D.  G.  Vol.  1**  del  composto  umano.  2«  ediz.  orr.  et 
acer.  Roma,  Befani,  1874.  In-8  de  530  p.  Prix  :  7  fr.  (On  ne  peut  acquérir  c« 
volume  et  les  deux  précédents,  qn^en  souscrivant  à  toute  la  publication,  qui  com- 
prendra encore  un  volume  :  DeW  anima,)  —  Quœetiones  philosophicœ,  auctore  Stlves- 
TRO  Mauro,  s.  J.  presb.f  olim,  in  coll.  Rom.  phil.  et  S.  theol.  prof.,  editio  novis» 
aima,  cum  epistola  a  R.  P.  Matth.  Libbratorb  prefata  {sic).  Tom.  1%  continens 
Summuleu  et  quœstiones  proœmiales  logicœ.  Genomani,  Leguicheux-Gallienne,  1875. 
In-8  de  vi-644  p.  Prix  :  5  fr.  (Deux  autres  volumes  parâtront  dans  l'année.  Prix 
des  3  vol.  :  15  fr.)  —  Thésaurus  philosophorum,  seu  distinctiones  et  axiomata  philoso^ 
phica^  a  Gborg.  Rbbb  S.  J.  proposita,  a  J.  M.  Gornoldi  ejusd.  S.  recognita  et 
28  Bcholiis  aucta.  Ed.  nova.  Paris,  Lethielleux,  1875.  In-18  de  viii-377  p.  Prix  :  2  fr.  50. 

Nous  avons  plus  d'une  fois  constaté  la  faveur  accordée,  dans  beau- 
coup d'établissements  d'instruction  chrétienne,  à  la  philosophie  scolas- 
tique  reconstituée  par  les  efforts  de  plusieurs  écrivains  distingués,  et 
surtout  des  rédacteurs  de  la  Civiltà  cattolica.  L'un  des  introducteurs 
de  cette  réforme  en  France  fut  précisément  le  P.  Bourard,  de 
glorieuse  mémoire,  qui  tenait  ici  la  plume  avant  nous.  Les  livres  de 
cette  école  ne  sauraient  être  examinés  avec  le  même  critérium  que 
les  autres  :  on  sait  d'avance  leur  manière  de  résoudre  et  d'exposer  les 
principales  questions  de  logique  et  de  métaphysique.  Nous  cherche- 
rons pourtant  à  relever  dans  chacun  ce  qu'il  peut  offrir  d'original^  soit 
pour  la  méthode,  soit  surtout  pour  la  polémique.  Quant  à  la  question 
pratique  que  le  système  néoscolastique  soulève  de  lui-même,  ce  n'est 
pas  ici  le  lieu  de  la  résoudre.  On  nous  permettra  pourtant,  au  point 
de  vue  de  l'enseignement  aptuel,  deux  ou  trois  remarques.  —  Il  ne  faut 
pas  exagérer  l'unité  qui  résulterait  nécessairement  de  l'adoption  de  la 
scolastique  :  il  est  peu  de  thèses  purement  philosophiques,  qui  n'eussent 
OciOBHE  1875.  T.  XIV,  19. 


—  290  ■* 

plusieurs  solutions  dans  l'école;  et  runanimité,  quand  elle  existait, 
était  parfois  plus  apparente  que  réelle,  et  semblait  d'ordinaire  se 
fonder  plutôt  sur  Y  autorité  d'Aristote  que  sur  la  raison.  Il  est  vrai  que 
les  nouveaux  scolastiques  en  appellent  à  saint  Thomas;  mais  les 
autres  écoles,  surtout  celle  de  Scot,  n'ont-elles  pas  aussi  droit 
de  cité  dans  l'Église?  —  Il  est  évident  que  renseignement  philoso- 
phique doit  prendre  les  questions  comme  elles  sont  posées  dans  Tétat 
actuel  des  esprits,  et  se  préoccuper  de  la  physionomie  contemporaine 
de  Terreur.  Or,  certaines  expériences  permettent  de  dire  que  plusieurs 
manuels  scolastiques,  d'ailleurs  estimables,  laissent  à  désirer  à  oe  double 
point  de  vue,  et  que  des  élèves,  assez  ferrés  sur  leur  logique  et  leur 
métaphysique  thomistes,  se  trouvent  trop  étrangers  au  langage  philo- 
sophique courant  et  trop  désarmés  en  face  des  systèmes  les  plus 
connus. — Il  ne  faut  pas  non  plus  se  figurer  qu'en  reproduisant  superfi- 
ciellement la  savante  synthèse  des  philosophes  scolastiques»  on  peut 
encore  aujourd'hui  la  faire  revivre.  Toute  une  partie  de  leur  science 
est  bien  morte,  et  aucun  homme  de  sens  ne  doit  essayer  de  ressusciter 
Tastronomie  ou  la  physique  d'Albert  le  Grand  et  de  saint  Thomas. 
On  a  bien  soin  de  dire  qu'on  n'y  vise  pas,  et  que,  par  exemple,  en 
réhabilitant  la  théorie  de  la  matière  et  de  la  forme,  on  ne  fait  que  de 
la  métaphysique.  Soit!  mais  alors,  cette  théorie  a  changé  de  sens  et 
de  portée  :  elle  donne  une  explication  plus  ou  moins  profonde  du 
mystère  de  la  substance  étendue,  et  rien  de  plus,  tandis  que,  pour  les 
scolastiques,  elle  contenait  en  germe  toute  une  cosmologie,  de  laquelle 
il  faut  bien  faire  son  deuil.  —  En  somme,  on  doit  se  féliciter  du  mou- 
vement qui  reporte  les  esprits  vers  saint  Thomas;  on  doit  se  remettre 
énergiquement  à  la  philosophie  chrétienne  et  traditionnelle.  Mais  il 
faut  aussi,  parce  qu'on  la  présente  à  des  hommes  du  dix-neuvième 
siède,  la  rapprocher  du  langage  de  nos  jours,  Tenrichir  de  tous  les 
progrès  qui  se  sont  produits,  surtout  dans  la  psychologie  expérimen- 
tale et  dans  la  logique,  lui  donner  la  vie  et  l'intérêt  des  questions 
actuelles,  en  se  préoccupant  de  comprendre  et  de  ruiner  les  erreurs 
les  plus  funestes  du  temps  présent. 

—  Feu  M.  Gaetano  Sanseverino,  chanoine  de  Naples,  a  fait  la  plus 
vaste  tentative  de  renouvellement  philosophique  dans  le  sens  soolas* 
tique  qui  se  soit  produite  depuis  Descartes.  Son  grand  ouvrage,  mal- 
heureusement inachevé,  Philosophia  christiana  cum  antiqua  et  nova 
comparata  (Naples,  1862, 5  vol.),  est  surtout  remarquable  par  Texa* 
men  approfondi  auquel  il  soumet  les  diverses  théories  modernes  en  les 
rapprochant  du  péripatétisme  chrétien.  Beaucoup  de  ces  discussions 
laissent  place  à  des  dissentiments  raisonnables;  mais  il  y  en  a  aussi 
qui  sont  tout*  à-fait  décisives.  Ce  vaste  travail  ne  s'adressait  qu'aux 
savants  ou  à  ceux  qui  veulent  le  devenir  ;  l'auteur  Ta  abrégé  sms  le 


—  291  — 

titre  à^Fkmmta  pkihsophiœ  christianœ,  mais  les  quatre  YolDmes  de  ces 
éléments  conTiennent  tout  au  plus  aux  établissements  de  hautes  études. 
L'enseignement  élémentaire  réclamait  un  simple  manuel  ;  et  il  a  été 
trôs-habilement  exéeuté  par  un  élève  deTauteur,  qui  déjà  l'avait  aidé 
dans  la  composition  de  son  principal  ouvrage.  En  voici  la  distribution 
générale  :  Logique  (1''  partie,  de  la  notion,  du  jugement,  du  raisonne- 
ment; 2^  partie,  du  syllogisme  sophistique,  dialectique^  démonstratif; 
8*  partie,  méthodologie)  ;  Dynamilogiey  ou  facultés  de  Tàme  (f.  végé- 
tative, sensttive,  intelleotive,  facultés  appétitives,  y  compris  le  libre 
arbitre,   faculté  locomotrice),  idéologie  (origine  des  idées,  langage, 
question  des  universaux) ,  critériologie  (divers  critériums,  scepticisme)  ; 
ontologie  (propriétés  communes  des  êtres  et  catégories);  cosmologie 
(principes  des  corps,  vie  végétale,  âme  des  bétes,  ordre,  origine  et 
perfection  du  monde);  anthropologie  (union  de  l'âme  et  du  corps,  siège, 
essence,  origine,  immortalité  de  Tâme  humaine)  ;  théologie  naturelle 
(existence,  nature  et  attributs  de  Dieu,  panthéisme).  On  voit  que  la 
morale  n'est  pas  comprise  dans  ce  manuel,  mais  que  Tensemble  de  la 
logique  et  de  la  métaphysique  s'y  déroule  dans  le  plus  bel  ordre.  La 
rédaction  est  généralement  digne  du  plan,  et  il  est  difficile  d'être  plus 
net  et  plus  précis.  L'adaptation  des  théories  scolastiques  aux  besoins 
actuels  est  une  des  préoccupations  évidentes  de  l'auteur;  à  ce  point  de 
vue,  l'idéologie  est  peut-être  la  partie  la  plus  remarquable  de  son 
manuel.  Mais  il  y  a  aussi  des  lacunes  et  des  points  bien  contestables, 
en-dehors  de  tout  parti  pris  d'école.  La  théorie  de  l'induction,  aujour- 
d'hui si  importante,  est  éliminée  plutôt  que  traitée  dans  quelques 
pages  très-insuffisantes  (L  56,  303);  la  question  du  critérium  n'est 
pas  menée  à  fond,  et  la  critériologie  manque  d'unité;  il  est  bien 
difficile  de  ne  pas  voir  une  contradiction  dans  la  théorie  qui,  attri- 
buant le  jugement  à  l'intellect  (I,  182),  prétend  que  l'acte  libre  de  la 
volonté  est  déterminé  par  un  jugement  (1, 219).  Nous  pourrions  multi- 
plier  les  remarques  de  détail;  mais  il  faudrait  en  venir  à  faire  dominer 
l'éloge,  et  à  reconnaître  qu'il  n'existe  peut-être  pas  de  meilleur  manuel 
de  philosophie  scolastique  pour  notre  temps.  Nous  ajouterions,  il  est 
vrai,  que  ce  meilleur  des  manuels  scolastiques  ne  nous  paraît  complète- 
ment répondre,  ni  au  tempérament  intellectuel  des  jeunes  générations, 
ni  même  (malgré  d'excellentes  parties)  aux  besoins  réels  du  moment. 
-^  Quant  à  la  traduction,  elle  laisse  trop  à  désirer,  même  avec  le 
secours  de  l'important  errata  annexé  au  second  volume. 

— <•  Une  philosophie  spéciale  a  régné,  jusqu'à  ces  derniers  temps,  à 
l'université  catholique  de  Louvain.  C'était  une  sorte  de  fusion  de 
l'ontologiune  et  du  traditionalisme,  qui,  préparée  par  Arnold  Tits, 
avait  trouvé,  dans  les  divers  traités  du  vénérable  M.  Ubaghs,  sa  forme 
définitive*  Il  était  difficile  que  Téoole  de  liouvain  ne  fût  pas  atteinte 


—  292  — 

par  les  censures  plus  ou  moins  formelles  qui  ont  frappé  ces  deux 
systèmes.  Il  j  a  plus  :  les  livres  mâmes  de  M.  Ubagbs  ont  été  Tobjet 
de  mesures   improbatives   directes.  L'esprit  profondément  romain 
qui  anime  renseignement  de  Louvain,  et  les  lumières  qui  ont  jailli  de 
polémiques,  souvent  trop  ardentes,  mais  toi\j ours  instructives,  devaient 
corriger  les  tendances  systématiques  de  la  pbilosophie  professée  à 
l'université.  Il  était  d'ailleurs  inévitable  que  le  mouvèlnent  néoscolas- 
tique,  si  répandu  dans  les  diverses  écoles  catholiques,  se  prononçât 
aussi  à  Louvain.  Il  s'est  affirmé,  en  effet,  nous  le  verrons  tout  à  l'heure, 
dans  l'enseignement  universitaire.  Il  règne  d'ailleurs,  dans  des  établis* 
sements  annexés  à  Yalma  matery  comme  le  collège  de  l'Immaculée- 
Conception,  qui  a  pour  préfet  des  études  le  P.  Lepidi,  auteur  d'une 
réfutation  très-méthodique  de  l'ontologisme.  Cet  «examen  philoso- 
phico-théologique  »  est  écrit  dans  le  latin  de  l'école,   sans  souci  de 
l'élégance,  mais  avec  une  parfaite  clarté,  et  dans  la  méthode  scolas- 
tique,  «definiendo,  dividendo,  per  rationem  et  auctoritatem  arguendo, 
adversariorum  argumenta  refutando  (p.  17),  n  toutefois  sans  aucune 
sécheresse.  Le  P.  Lepidi  entend  l'ontologisme  dans  le  sens  rigoureux 
des  idées  immédiates  et  de  Isl  vision  en  Dieu;  il  le  résume  surtout  d'après 
Malebranche,  Gioberti,  Ubaghs  et  MM.  Branchereau  et  Fabre  d'En- 
vieu.  Il  le  réfute  ensuite  en  prouvant  :  1^  que  la  lumière  intérieure  par 
laquelle  nous  connaissons  la  vérité  n'est  pas  la  lumière  divine  elle- 
même  (ch.  III,  IV,  v)  ;  2®  que  l'homme  ne  voit  pas  Dieu  intuitivement 
en  cette  vie,  in  statu  viœ  (vi,  vu,  viii)  ;  3*  que  l'objet  propre  de  nos  con- 
naissances rationnelles  autres  que  Dieu  n'est  pas  Dieu  même  (fx,  x). 
La  seconde  partie  du  livre  est  surtout  consacrée  à  examiner  les 
autorités  dont  les  ontologistes  ont  prétendu  s'appuyer  :  l'Écriture 
sainte,  saint  Augustin,  saint  Anselme,  saint  Bonaventure,  saint  Tho- 
mas, les  anciens  philosophes,   tels  que  Platon  et  Plotin.  L'auteur 
montre  enfin,  dans  l'ontologisme,  la  confusion  de  l'ordre  naturel  et  de 
l'ordre  surnaturel  (ch.  xxi),  des  dangers  très-prochains  de  panthéisme, 
d'illuminisme,  etc.,  et  une  opposition  formelle  aux  enseignements  de 
l'Église  romaine.  Nous  ne  ferons  aucune  remarque  particulière  sur  ce 
livre,  dont  presque  tous  les  détails  avaient  déjà  été  traités  par  d'au- 
tres auteurs,  mais  jamais  peut-être  sous  une  forme  si  méthodique  et  si 
précise.  Il  est  difficile  de  soutenir,  contre  des  preuves  si  claires  et  des 
autorités  si  formelles,  le  système  de  l'intuition  directe,  constante  et 
naturelle;  mais  tous  n'avoueront  pas  que,  dans  sa  partie  positive,  1^ 
P.  Lepidi  soit  aussi  inattaquable  que  dans  sa  partie  négative,  et  que 
son  chapitre  viii%  par   exemple,  atteigne  le  fond  du  procédé  par 
lequel  l'homme  s'élève  de  la  créature  à  Dieu.  On  pourra,  ai\jourd1iui 
surtout  que  le  P.  Fidèle  de  Fanna  a  révélé  un  précieux  traité  de  saint 
Bonaventure  sur  la  grave  question  de  la  connaissance  rationnelle,  lui 


—  293  — 

objecter  que  les  scolastiques  eux*inâmes  faisaieat  à  Télément  ontolo* 
giqne  une  autre  part  que  leurs  disciples  actuels. 

—  C'est  dans  le  même  esprit  que  sont  écrits  les  deux  traités  de 
Thiodicée  et  d'Ontologie  générale^  de  M.  H.  Dupont,  professeur  de  phi- 
losophie et  de  théologie  dogmatique  à  l'université  de  Louvain.  Nous 
regrettons  un  peu  que  la  théodicée  surtout,  quoique  conçue  d'après 
un  plan  méthodique,  se  présente  sous  forme  de  thèses  détachées,  sans 
les  préambules  qui,  dans  les  maîtres  de  l'école  et  surtout  dans  saint 
Thomas,  font  sentir  Tunité  de  ToBUvre  et  les  rapports  des  membres 
entre  eux.  Une  autre  remarque  plus  essentielle,  c'est  que  beaucoup  de 
thèses  sont  un  peu  trop  étriquées  :  défaut  inévitable,  sans  doute,  dans  un 
traité  de  théologie  naturelle  où  Ton  veut  englober^  comme  des  préli- 
minaires indispensables,  les  réfutations  de  Tinnéisme,  de  l'ontolo- 
gisme,  du  traditionalisme,  etc.,  matière  assez  grave  et  assez  étendue 
pour  exiger  un  livre  spécial.  Enfin,  nous  avons  peur  que  M.  Dupont  ne 
diminue  quelquefois  le  trésor  de  la  philosophie  chrétienne,  dans  l'in- 
tention, au  fond  très-louable,  de  la  purger  de  tout  argument  «  qui  ne 
résiste  pas,  comme  il  dit,  à  un  examen  sérieux.  »  Ainsi,  la  magnifique 
démonstration  de  l'existence  de  Dieu  par  les  idées  nécessaires  paraît 
éliminée  purement  et  simplement  (p.  5)  de  sa  théodicée.  Mais  quoi  ! 
n'est-elle  pas  développée  avec  une  autorité  et  un  éclat  incomparables 
par  saint  Augustin  lui-même?  Il  faut  la  dégager  de  tout  lien  avec  la 
vision  de  Dieu,  sans  doute  1  Mais  elle  subsistera  ensuite  dans  sa  forme 
légitime,  qu'on  aimerait  à  trouver  dans  le  volume,  d'ailleurs,  si  précis 
et  si  plein,  de  M.  Dupont.  Après  les  Questions  préliminaires^  relatives 
surtout  aux  idées  et  aux  preuves  à  rejeter  (j  compris  celle  de  saint 
Anselme,  et  celle  de  Descartes),  l'auteur  donne  les  trois  preuves  les 
plus  connues,  étudie  l'essence  divine  {aséité\  ce  qui  lui  donne  lieu  de 
réfuter  le  panthéisme  et  le  positivisme,  traite  ensuite  successivement 
des  attributs  négatifs  et  positifs  de  la  divinité,  de  ses  opérations 
(création,  conservation,  concours),  de  la  Providence,  qui  l'amène  à 
repousser  le  darwinisme  et  à  défendre  la  prière,  enfin  du  miracle  et 
des  preuves  du  christianisme.  On  peut  remarquer  que,  fervent  disciple 
de  saint  Thomas,  il  l'abandonne  cependant  sur  la  question  de  la  possi- 
bilité d'un  monde  étemel  (p.  152);  et,  de  plus,  qu'il  se  rattache,  par 
les  théories  de  la  science  moyenne,  du  concours  simultané,  etc.,  à 
l'école  des  jésuites,  et  non  à  celle  des  thomistes  proprement  dits.  — < 
Le  style  ne  manque  pas  de  vigueur,  dans  sa  simplicité  nue  ;  il  est 
fâcheux  que  lanationalité  de  l'auteur  s'y  trahisse  par  quelques  incor- 
rections (V.  l'énoncé  de  la  thèse  Lxiii,p.  67). 

— ~  Le  traité  i^ Ontologie  mérite  les  mêmes  éloges  ;  il  a  même,  à  notre 
avis,  une  valeur  supérieure  par  l'arrangement  général,  la  profondeur 
et  le  complet  des  discussions.  Après  une  courte  introduction  sur  la 


—  294  — 

yraie  notion  de  la  métaphysique  et  de  rontologle,rauteaF  traite,  dans 
quatre  parties  successiveSi  de  Tétre  et  de  ses  propriétés^  des  catégories 
(réduites  à  quatre,  substance,  qualité,  quantité,  relation),  des  causes, 
de  la  perfection.  Fidèle  aux  traditions  du  péripatétisme  catholique, 
M.  Dupont  lui  fait  toujours  parler  un  langage  accessible  au  commun  des 
lecteurs  lettrés*  Il  annexe,  de  plus,  à  ses  doctrines  et  à  ses  démonstra- 
tions trop  oubliées,  Texamen  de  celles  que  les  philosophes  modernes  j 
ont  substituées.  On  trouve,  dans  la  première  partie,  une  réfutation  de 
la  théorie  de  Rosmini  sur  l'idée  d'être,  de  la  thèse  de  Locke  sur  les 
essences,  du  système  des  idées  innées;  dans  la  troisième,  la  discussion 
des  théories  modernes  sur  Tidée  de  cause,  et  des  systèmes  relatifs  à  la 
nature  des  corps;  dans  la  dernière,  une  longue  réfutation  de  Sans-Fiel 
et  d'autres  ontologistes  qui  prétendent  prouver  que  Tidée  d'infini  est 
immédiate.  Sans  chercher  les  points  où  il  serait  permis  de  trouver  trop 
absolu  le  péripatétisme  de  Tauteur,  et  trop  rigide  sa  critique  de  telle 
ou  telle  théorie,  nous  aimons  à  citer,  en  les  adoptant,  ces  paroles  de 
Tapprobation  de  Mgr  Tévêque  de  Liège  :  «Le  grand  mérite  deTauteur 
et  la  raison  de  la  solidité  de  son  enseignement  viennent  de  ce  que, 
connaissant  parfaitement  les  erreurs  modernes  et  possédant  à  fond  la 
doctrine  des  scolastiques  et  des  grands  maîtres  de  la  science,  il  sait, 
en  signalant  les  erreurs,  leur  opposer  cette  doctrine,  et  prouver  ainsi 
que  Terreur,  quelque  nouvelles,  quelque  multiples  que  soient  ses 
formes,  trouve  sa  réfutation  dans  les  principes  depuis  longtemps  soli- 
dement établis  et  qu'il  met  en  lumière.  » 

—  Nous  saluons  volontiers,  dans  V Intellectualisme  de  M.  Tabbé  Brin, 
un  exemple  d'attachement  sérieux  à  la  philosophie  traditionnelle  joint 
à  une  part  notable  d'innovation.  Sa  philosophie  doit  avoir  trois 
volumes  ;  le  premier^  qui  est  depuis  assez  longtemps  entre  nos  mains, 
en  renferme  la  partie  la  plus  importante  sans  doute^  puisque  c'est  dans 
la  logique  que  l'auteur  expose  et  ramène  à  ses  principes  essentiels  le 
système  qu'il  a  décoré,  peut-être  mal  à  propos,  du  nom  d'intellectua- 
lisme. Au  fond,  en  effet,  ce  système  n'est  pas  nouveau,  heureusement 
pour  lui.  Il  consiste  surtout  en  ces  trois  propositions  :  l'intelligence  est 
capable  d'atteindre  la  vérité  ;  la  vérité  est  objective;  l'évidence  (à  la  fois 
subjective  et  objective)  est  le  critérium  de  la  vérité.  Chacune  de  ces 
propositions  forme,  avec  des  thèses  accessoires  en  petit  nombre,  une 
des  trois  parties  de  cette  logique.  La  préférence  que  Tauteur  accorde 
constamment  aux  définitions  et  aux  divisions  de  l'école  nous  a  porté  à 
le  classer  parmi  les  scolastiques.  Il  faut  convenir  cependant  qu'il  s'en 
distingue,  surtout  par  la  part  très-étendue,  et  même  principale,  qu'il 
fait  théoriquement  et  pratiquement  à  l'induction.  Nous  croyons,  du 
reste,  qu'il  a  raison  d'insister  sur  ce  procédé  intellectuel,  et  que  les 
règles  qu'il  établit  à  ce  sujet  sont  dignes  d'attention  ;  mais  il  nous 


—  295  — 

semble  que  ce  qu^il  nomme  induction  embrasse  plasieurs  espèces  de 
généralisations  qu'il  faudrait  distinguer.  Nous  ne  pouvoirs  ici  que  ren- 
voyer sur  ce  point  Tauteur  et  ses  lecteurs  à  ce  que  nous  connaissons 
de  plus  précis  et  de  plus  exact  touchant  les  méthodes  scientifiques, 
l'essai  de  M.  Th.  H.  Martin  sur  la  Science  et  ks  sciences  (en  tête  du 
Tolume  le$  Sciences  et  la  philosophie,  1869).  —  Il  faut  louer,  dans 
M.  Brin,  outre  un  esprit  synthétique  remarquable,  une  connaissance 
trôs-étendue  de  la  littérature  philosophique  contemporaine  et  un  souci 
constant  d'en  réfuter  les  erreura.  Malheureusement,  ses  démonstra- 
tions, dites  inductives,  sont  parfois  peu  rigoureuses;  il  abuse  des  réfé- 
rences et  des  répétitions,  et  on  pourrait  abréger  de  beaucoup  son  livre 
sans  tailler  dans  le  vif.  Enfin,  le  style  a  ce  caractère  peu  correct  que 
nous  pardonnons  en  France,  à  tort  peut-être,  aux  manuels  scolaires  de 
philosophie  et  de  théologie  ;  mais  des  barbarismes  sont  de  trop,  et  ce 
n'est  pas  être  cicéronien  exalté  que  de  proscrire  Taffreux  a(^ectif  co- 
gnoscitivus,  qui  revient  à  chaque  pas  ;  c'est  bien  assez  de  cognitivus. 
—  L'homme  qui  a  le  plus  contribué  peut-être  à  la  renaissance  de  la 
philosophie  scolastique,  dans  ces  dernières  années,  est  le  P.  Mathieu 
Liberatore,  l'un  des  principaux  et  des  plus  anciens  rédacteurs  de  la 
Civilià  cattolica.  Auteur  d'un  cours  de  philosophie  en  latin  (3  voU 
in-8, 5*  édit.  1872)  et  d'un  Compendium  de  ce  cours  en  un  seul  volume, 
il  a  fourni  k  l'enseignement  un  texte  commode,  où  le  péripatétisme  de 
l'école  est  très-fidèlement  exprimé,  dans  une  forme  accessible  aux 
jeunes  étudiants;  il  s'est  surtout  occupé  de  repousser  les  théories  qui 
lui  font  encore  échec,  surtout  dans  la  péninsule  :  je  veux  dire  les 
systèmes  de  Gioberti  et  de  Rosmini.  Le  P.  Liberatore  représente 
depuis  longtemps  et  soutient  presque  seul  la  polémique  de  l'ortho- 
doxie scolastique  contre  ces  brillantes  synthèses,  qui  ont  gardé  encore, 
malgré  tout,  un  grand  empire  sur  les  esprits  au-delà  des  monts.  Les 
deux  ouvrages  que  nous  annonçons  ici  ont  encore  plus  d'importance 
que  les  Institutiones,  quoiqu'ils  s'adressent  à  un  public  moins  nombreux. 
On  peut  les  regarder  comme  l'expression  la  plus  complète  des  doctrines 
philosophiques  pour  lesquelles  la  Civiltà  cattolica  lutte  avec  tant  d'ar- 
deur et  d'habileté  depuis  plus  de  vingt  ans.  Au  reste,  à  peu  près  tous 
les  chapitres  de  ces  deux  ouvrages  ont  paru  dans  ce  recueil  si  juste- 
ment estimé.  Us  y  ont  même  été  publiés  dans  un  ordre  assez  métho- 
dique, fort  étranger  aux  habitudes  de  la  presse  périodique  en  France. 
Toutefois,  ils  ont  été  remaniés  très-soigneusement  pour  constituer  un 
livre,  une  œuvre  pleine  d'unité,  de  proportion  et  d'harmonie.  A  l'égard 
de  la  forme,  les  adversaires  mêmes  du  P.  Liberatore  ne  peuvent 
s'empêcher  de  rendre  hommage  à  son  rare  mérite.  On  peut  trouver 
chez  d'autres  philosophes  italiens  soit  plus  de  fraîcheur  et  de  grâce, 
soit  plus  de  nerf  et  de  force,  soit  plus  d'éloquence  et  d'éclat;  mais  il 


—  296  — 

n'a  pas  de  rival  pour  raisance,  la  correction,  et  la  clarté  da  langage, 
Tampleur  facile  et  naturelle  des  développements,  la  sagesse  et  la 
fécondité  des  plans. 

Il  suffit^  après  cela,  de  rappeler  ici  le  contenu  de  ces  ouvrages  déjà 
connus  en  France  par  d'assez  bonnes  traductions.  Le  traité  de  la 
Connaissance  intellectuelle  comprend  deux  parties,  dont  la  première  est 
purement  critique  et  la  seconde  positive.  La  première  expose,  discute 
et  rejette  quatre  systèmes  modernes,  qui  ont  disputé  le  terrain  à  la 
philosophie  traditionnelle  dans  renseignement  catholique  :  le  sens 
commun  de  Lamennais^  l'intuition  divine  de  Gioberti,  les  diverses 
formes  du  traditionalisme,  enfin  Têtre  idéal  de  Rosmini.  Les  quatre 
chapitres  qui  épuisent  cette  laborieuse  discussion  sont  loin  d'être 
égaux  en  longueur^  et  Tontologisme  est  le  système  qui  a  pris  le  plus 
de  place.  Au  reste,  l'examen  des  théories  est  largement  conçu  et 
Tauteur  se  préoccupe  à  juste  titre  des  origines  et  des  affinités  des 
systèmes.  Ainsi,  à  l'occasion  de  Lamennais,  il  discute  assez  à  fond  la 
méthode  cartésienne  ;  à  propos  de  Gioberti,  il  remonte  à  Gerdil  et  à 
Malebranche.  —  Ce  n'est  pas  cependant  par  l'érudition  que  brille  spé- 
cialement le  P.  Liberatore  :  il  fournit  peu-aux  curieux  d'histoire  et  de 
bibliographie  spéciales;  mais  il  serre  de  près  les  doctrines  qu'il  discute 
et,  quelle  que  soit  la  rigueur  de  sa  critique,  il  a  la  polémique  modérée, 
au  moins  &  l'égard  des  contemporains  catholiques  qu'il  doit  combattre  ; 
il  y  a  même  tel  de  ses  adversaires  (le  P.  Romano^  ontologiste  sicilien) 
qui  est  traité  avec  une  sympathie  voisine  de  l'admiration.  —  La  partie 
doctrinale  expose  et  défend  la  théorie  de  saint  Thomas.  L'originalité 
du  P.  Liberatore,  dans  cette  exposition,  est  surtout  dans  l'interprétation 
qu'il  donne  à  l^cte  intellectuel,  par  lequel  la  connaissance  sensible 
perd  son  caractère  individuel  et  concret  pour  faire  place  à  l'universel  : 
d'après  lui,  l'intellect,  par  sa  vertu  propre,  saisit  la  quiddité  de  l'objet 
perçu  par  les  sens,  ce  qui  constitue  Vuniversel  direct^  qui  devient,  par 
l'abstraction,  Y  universel  réflexe  ou  proprement  dit.  On  comprend,  par 
là,  quelle  est  la  doctrine  générale  des  chapitres  sur  le  réalisme  de  saint 
Thomas  et  sur  Vorigine  des  idées.  Un  autre  chapitre  important  est 
consacré  à  l'averroïsme  ;  la  partie  positive  en  est  empruntée  surtout  à 
M.  Renan.  Le  dernier  roule  sur  Yexemplarisme  divin  :  le  P.  Liberatore 
t&che  de  prouver  qu'en  empruntant  quelque  chose  aux  idées  de  Platon^ 
saint  Thomas  n'est  pas  infidèle  au  péripatétisme  ;  il  est  vrai  que  l'excel- 
lent jésuite  paraît  avoir  étudié  Aristote  beaucoup  moins  dans  son  texte 
et  ses  interprètes  primitifs  que  dans  les  commentateurs  chrétiens  qui 
ont  si  profondément  modifié  beaucoup  de  points  de  l'aristotélisme. 

—  Le  traité  de  U Homme  doit  comprendre  également  deux  parties  ; 
du  Composé  humain  et  de  l'Ame  humaine.  Le  premier  paraît  ici  en 
deuxième  édition,  le  second  n'a  pas  encore  paru  en  volume,  et,  à  ce 


-  297  — 

titre,  noas  lui  consacrerons  plas  de  place,  dès  que  nous  aurons  pu  Texa- 
miner.  Le  .traité  du  Composé  humain  a  été  traduit  par  un  jésuite  fran- 
çais (Ljon,  Bridaj,  in-8)  sur  la  première  édition.  La  nouvelle  est 
améliorée,  sans  aucun  changement  essentiel.  Nous  avons  remarqué, 
dans  la  préface  (p.  9  et  10),  deux  notes  sur  les  progrès  qu'a  faits,  depuis 
1862,  Tanthropologie  scolastique  :  l'auteur  se  félicite  de  la  voir  adoptée 
par  Técole  de  médecine  de  l'université  de  Bologne  et  soutenue,  en 
France,  par  la  Revue  médicale  du  docteur  Gajol.  Le  plan  du  livre  est 
resté  le  même  :  après  avoir  prouvé  Tunité  du  composé  humain  (en 
rejetant  la  plupart  des  définitions  de  la  personnalité  données  par  les 
spiritualistes  modernes),  le  P.  Liberatore  traite  d'abord  de  la  vie  en 
général  (ch.  ii),puis  de  la  vie  végétative  (m)  et  de  la  vie  animale  (xv)  ; 
on  remarquera  une  discussion  étendue  sur  le  principe  vital  des  plantes, 
distinct  des  forces  physiques  et  chimiques  de  la  matière.  En  revanche, 
ce  qui  concerne  Tabsence  d'intelligence  chez  les  bêtes  est  peut-être 
un  peu  insuffisant,  en  face  des  théories  contemporaines.  Mais  le  fort 
de  la  controverse  est  au  chapitre  sixième^  sur  Tunité  du  principe  de 
vie  dans  Thonmie  et  son  identité  avec  Tâme  raisonnable;  au  septième, 
sur  l'union  de  Tâme  et  du  corps  ;  au  huitième,  sur  la  théorie  de  la 
composition  substantielle  du  corps.  Une  longue  polémique  avec  le 
P.  Tongiorgi,  qui  soutenait  Vaiomisme  chimique  contre  son  confrère, 
défenseur  du  système  scolastique  pur  et  simple  de  la  matière  et  de  la 
forme  ou  des  formes  substantielles^  a  été  réduite  de  beaucoup  dans  cette 
seconde  édition,  qui  n'y  a  rien  perdu  d'essentiel.  Nous  signalerons^  au 
contraire,  une  addition  dans  le  dernier  chapitre  :  c'est  une  discussion 
contre  le  docteur  Frédault,  qui,  dans  ^n  Traité  d^ anthropologie  physio- 
logique et  philosophique  (Paris,  1863),  d'ailleurs  comblé  d'éloges  par  le 
P.  Liberatore,  s'est  écarté  de  la  théorie  thomiste  des  formes  substan- 
tielles en  admettant  (ce  que  peu  de  philosophes  lui  reprocheront  I)  que 
les  éléments  simples  restent  en  acte  dans  les  corps  vivants. 

—  Un  jésuite  français^  qui  réédite  au  Mans  les  Quœstiones  philoso- 
phicœ  de  Silv.  Mauro,  publiées  à  Rome  en  1670,  a  placé,  en  tête  de 
cette  reproduction  pure  et  simple,  une  petite  vie  très-édifiante  du 
savant  auteur,  et  une  lettre  du  P.  Liberatore,  qui  range  Mauro  parmi 
les  principes  scholœ  magistros^  et  présente  son  ouvrage  comme  un 
cours  de  philosophie  très-complet,  très-judicieux,  très-propre  à 
rendre  encore  de  grands  services  à  l'enseignement.  Les  Quœstiones 
philosophicœ  étaient  fort  rares,  au  moins  en  France,  et  nous  avouons 
que,  malgré  un  goût  déjà  assez  ancien  pour  les  scolastiques  des  der- 
niers siècles,  nous  ne  le  connaissions  pas  du  tout  avant  d'avoir  reçu 
le  premier  volume  de  l'édition  du  Mans.  Mauro  nous  a  paru  exceller 
par  la  clarté  du  langage,  la  disposition  naturelle  des  questions,  le 
choix  judicieux  des  exemples.  Son  livre  n'est,  d'ailleurs,  autre  chose 


^208  — 

qa'nne  exposition  dé  la  lo^qae  aristotëliolenne,  avec  letqaalqnei 
questions  de  détail  que  le  moyen  âge  7  a  ajoutées.  Le  titre  dji  volume 
peut  tromper  les  lecteurs  sur  son  contenu  :  outre  les  Summula 
(manuel  de  logique  élémentaire),  il  renferme,  non-*seulement  les 
Questions  préliminaires  de  la  logique,  mais  Fesplication  des  Catégories, 
du  mp\  Sp[jiT]vc(a{,  des  Analytiques,  c'est-à-dire  de  presque  tout  VOrganon 
d^Aristote.  L'édition  est  bien  exécutée,  d'une  lecture  facile  et  d'une 
correction  suffisante.  Ce  livre  mérite  donc  assurément  un  excellent 
accueil  de  ceux  qui  cherchent  une  exposition  claire,  précise,  vrai- 
ment classique  de  l'aristotélisme  chrétien.  Nous  y  reviendrons  à 
propos  des  volumes  suivants,  qui  nous  permettront  de  juger  si  Maure 
possède  quelque  originalité  personnelle  dans  ]es  questions  de  méta- 
physique, comme  ses  confrères  Suarez  et  Arriaga. 

«»  Tous  ceux  qui  fréquentent  les  scolastiques  feront  bien  d*avoir 
sous  la  main  le  Thésaurus  philosophorum,  publié  en  1629,  à  Ingolstadt, 
par  le  P.  G.  Reeb,  et  dont  un  autre  jésuite,  le  P.  J.-M.  Cornoldi, 
a  donné,  àBrixen,  en  1871,  une  édition  soigneusement  revue,  dimi« 
nuée  de  certains  détails  devenus  oiseux,  mais  augmentée  de  nom- 
breuses scolies,  parfois  assez  développées,  sur  les  points  de  doctrine 
les  plus  essentiels  ou  les  plus  ignorés.  C'est  cette  édition  que  l'éditeur 
Lethielleux  vient  de  reproduire  dans  un  petit  volume  élégant  et  com- 
mode, qui  ira  de  lui-même  à  son  adresse.  Nous  nous  contenterons  de 
dire  que  le  travail  du  P.  Reeb  comprend  deux  parties  :  les  Distinctions 
et  les  Axiomes.  On  sait  que,  dans  Targumentation  soholastique,  il 
n'est  rien  de  plus  important  que  ces  deux  choses  :  une  distinction  vous 
sauve  d'un  mauvais  pas,  un  axiome  ferme  la  bouche  à  votre  adver- 
saire. Mais  il  faut  savoir  le  fondement,  la  portée,  le  vrai  sens  des  uns 
et  des  autres.  Or,  le  Thésaurus  présente  Texplication  nette  et  précise 
de  plus  de  cent  cinquante  distinctions  usuelles  {materialiter,  forma^ 
liter;  —  eminenter,  formaliter;  —  sensu  diviso,  composito,  etc.),  et  de 
presque  autant  d'axiomes  {causa  prior  est  effectu  ;  causa  causœ  est  causa 
causati;  entia  non  sunt  multiplicanda,  etc.).  On  comprend  assez  que  ces 
explications,  outre  leur  utilité  pratique  dans  les  écoles,  sont  très- 
bonnes  à  consulter  pour  l'intelligence  des  mattres  de  la  philosophie 
scolastique.  Il  faut  en  dire  autant  des  scolies  du  P.  Comoldi,  qui 
s'est  surtout  préoccupé  de  faire  connaître,  d'après  les  meilleures 
autorités  de  l'École,  les  points  qui  présentent  le  plus  d'intérêt  pour 
les  polémiques  contemporaines  :  ontologisme,  vitalisme,  etc. 

LÉONCB  COUTTJ&B. 


—  *99  — 


POÉSIE 

Lacryma  nrwnt  poétUi^  par  Lucibn  Pat&.  2*  édition.  Paris,  Jouaust,  1875.  In-i2  d« 
98  p.  Prix  :  2  fr.  —  Lu  MélodUê  intimti,  poAiu,  par  LuciKK  Patâ.  Paris,  Joaaast, 
1874.  In- 12  de  94  p.  Prix  :  2  fr.  —  Révettt  devoirs,  par  Thêodobe  Froment.  Paris, 
Alphonse  Lemerre,  1873.  In-12  de  193  p.  Prix  :  3  fr.  —  Un  Chapitre  d'art  poéliqu9f 
la  Rimé,  par  GnsTAVB  Lb  Vavassbcr.  Paria,  Alphonse  Lemerre,  1875.  In-8  de  3t  p. 
Prix  :  2  rr.  —  Les  Champs  et  la  tner,  par  JuLBS  Breton.  2'  édition  Paris,  Alphonse 
Lemerre,  1875.  In-12  de  178  p.  Prix  :  3  fr.  —  Pleurs  et  chantSy  poésies,  par 
ARB0U89B  Bastide.  Paris,  Sandoz  &  Fischbacher,  1875.  In-18  de  232  p.  Prix  : 
3  fr.  50.  —  L'Illusion,  par  H.  Gazalis.  Paris,  Alphonse  Lemerre,  1875.  In-12  de 
200  p.  Prix  :  3  fr.  —  JL«  Cahier  rouge,  poésies,  par  FRANÇOIS  Goppâb.  Paris, 
Alphonse  Lemerre,  1874.  In-12  de  143  p.  Prix  :  3  fr.  -^  Idéal  et  nature,  par  QuT 
DB  BbadfOrt.  Paris,  Jouaust,  1875.  In-12  de  167  ç.  Prix  :  3  fr.  50.  —  Du  Cœur 
aux  Uereê,  poésies  par  Fbrdinand  Gartairadb.  Paris,  Jouaust,  1874.  In-12  de  xix- 
251  p.  Prix  :  3  fr.  —  Les  Fleurs  sous  l^herbe,  poésies,  par  Ferdinand  Gartairadb. 
Paris,  Joaaust,  1874.  ln-12  de  245  p.  Prix  :  3  fr.  ~  Le  Jour  et  la  Nuit,  poésies, 
par  Ferdinand  Gartairadb.  Paris,  Jouanst,  1874.  In-12  de  249  p.  Prix  :  3  fr.  — 
Les  Illusions,  par  Emile  Favin.  Paris,  Jonaust,  1875.  In-12  de  165  p.  Prix  :  3  fr. 
—  Mes  Veillées  au  Paraelet.  poésies,  par  le  baron  Gh.  Walckbnabr.  Troyes,  A.  Socard, 
1874.  2  vol.  in-12  de  361  et  286  p.  Prix  :  6  fr.  ~  Exaltations  poésies,  par  Ernest 
PÊRIGAUD.  Paris,  Joaaust,  1875.  Ib-12  de  72  p.  Prix  :  1  fr.  50.  —  Les  Feux  follets, 
poésies,  par  Gh.  Pjtou.  Longny  (Orne),  chez  Tantear.  In-12  de  XXiv-235  p.  Prix  : 
3  fr.  50.  —  Xa  France  au  Tribunal  de  Dieu,  par  M.    Tabbé  Démange.  Paris,  Palmé, 

1874.  In-8  de  40  p.  Prix  :  1  fr.  50.  —  Les  Militanies,  poésies,  par  M-«  A.  M.  BlaN- 
checotte.  Paris,  Alphonse  Lemerre,  1875.  In- 12  de  237  p.  Prix  :  3  fr.  —  Sans  peur 
et  sans  reproche^  poésies,  par  M**  Fanny  Dênoix  DES  Vebgnes.   Paris  Emile  Blellier, 

1875.  Id-12  de  288  p.  Prix  :  3  fr.  —  Saint  François-Xavier,  poime  en  douze  chanU, 
ar  l'abbé  FàLix  Halatestb.  Paris,    Bray  &  ReUux,    1875.  In-12  de  434  p.  Prix  : 

fr.  50.  —  Sonnets  et  poésies,  par  Emile  Péhant.  Paris,  Alphonse  Lemerre,  1875. 
In-12  de  xxxli-279  p.  Prix  :  3  fr.  50.  —  Yelléda,  tragédie  en  cinq  acUs,  par  LOUiS  de 
Gombbttbs  Labourblle.  Gaillac,  P.  Dugonrc,  1874.  In-8  de  80  p.  Prix  :  1  fr.  50.  — 
Les  Fantannagories,  par  LoniS  Salles.  Paris,  Alphonse  Lemerre,  1875.  In-12  de 
163  p.  Prix  :  3  fr.  —  In  extremis,  adieux  om  dix-neuvième  siècle,  par  an  sonriyant 
da  dix-huitième  (Atranasb  Renard),  Paris,  E.  Deutu,  1875.  In-12  de  36  p. 
Prix  :  1  fr.  —  Panthéia,  étude  antique,  par  FÉLIX  Hbnnbgut.  Paris,  Joaaust,  1874. 
In-12  de  149  p.  Prix  •  3  fr.  —  Premières  Rimee,  par  Frédéric  BataILLB.  Paris,  San- 
doz &  Fischbacher,  1875.  In- 18  de  344  p.  Prix  :  3  fr.  50.  —  Chants  du  soldat,  par 
Paol  Déroulède  (ouvrage  couronné  par  l^Académie  ft-aoçaise).  21*  édition.  Paris, 
Michel  Lévy.  1875.  In-18  de  127  p.  Prix  :  1  fr.  ^-  Nouveaux  chants  du  soldat,  par 
Paul  Déroulède.  19*  édition.  Pans,   Michel  Lévy,  1875.  In-18  de  96  p.  Prix  :  1  fr. 

C'est  chose  rare,  dans  tous  les  temps,  qu'on  poëte  épris  d'idéal  et  de 
suayes  pensées,  en  même  temps  que  très-oublieux  de  l'heure  et  de  la 
rue.  En  ce  siècle  où  les  muses  n'ont  plus  d'ailes,  le  poëte  marche  d'un 
pas  distraie,  coudoyé  par  les  gens  de  guerre  ou  de  finance  ;  Tactuel  le 
saisit,  et  la  fibre  sonore  qu'il  porte  au  cœar  entre  en  vibration  pour 
une  cause  périssable,  pour  un  incident  ou  un  nom  sans  grandeur.  Là 
est  recueil.  A  l'homme  inspiré  de  choisir  sa  voie.  Des  acclamations 
nombreuses,  mais  courtes,  accompagnent  le  barde  contemporain.  Elles 
l'ont  accueilli  à  son  départ,  elles  le  suivent  parfois  jusqu'à  l'arrivée. 
L'arrivée,  c'est  la  tombe.  Plus  lentes  à  se  lever  autour  d'une  renom- 
mée sont  les  approbations  discrètes,  réfléchies  de  ces  esprits  distin- 
gués qui  marchent  de  pair  avec  le  poëte  ou  l'artiste  dont  les  pensées 
planent  au-dessus  des  événements  de  la  vie.  Mais  quelle  n'est  pas  la 
durée  d'un  libre  jugement  porté  sur  l'œuvre,  souvent  à  l'insu  de 


ï 


-  800  — 

rhomme  !  De  pareilles  réparations  ont  leur  source  dans  les  sujets 
impersonnels  traités  avec  une  évidente  personnalité.  Le  cœur  humain 
ressemble  à  TOcéan.  Il  en  a  la  profondeur  insondable  et,  par  consé- 
quent, toigours  inexplorée  ;  mais  ses  tortures  visibles,  ses  défaillances, 
ses  cris  de  foi,  tout  ce  qui  constitue,  si  j'ose  dire,  son  expression,  n'a 
pas  varié  depuis  six  mille  ans.  Oser  peindre  le  cœur  humain,  c'est  se 
mesurer  avec  Tinûni  dans  une  langue  vulgaire  que  seul  le  vrai  talent  a 
le  don  de  rajeunir  et  de  relever. 

Une  édition  nouvelle  de  Lacrymœ  rerum,  un  second  recueil,  les 
Mélodies  intimes  ramènent  sous  notre  plume  le  nom  de  M.  Lucien 
Pâté.  Ce  poëte  appartient-il  à  la  Pléiade,  comme  M.  Coppée?  Non.  Se 
rapproche-t-il  par  l'allure  de  M.  Deroulôde?  Pas  davantage.  La  nature, 
ses  bois,  ses  lacs,  un  coucher  de  soleil,  un  oiseau  mort,  une  feuille  qui 
tombe,  voilà  ce  qui  Témeut  et  le  captive.  Or,  comme  son  inspiration 
n'a  rien  de  voulu,  comme  elle  est  sincère,  un  parfum  de  jeunesse  et 
de  vérité  circule  dans  ses  vers. 

Qui  me  voit  me  croit  seul,  et  je  sais  avec  vous, 

dira*t-il  à  la  confidente  aérienne  de  ses  rêves.  Une  autre  fois,  médi- 
tant sur  la  Mort  des  oiseaux,  nous  l'entendrons  dire  : 

Pliez- vous  pour  tonjoan^  déployez-voas  vos  ailes? 

Od  donc  les  fermez-vous?  Pour  quel  lieu  B*OQvreat-eUes? 

Il  faut  lire  dans  ces  deux  volumes  le  Retour  aux  champs,  le  Vieux 
pêcheur,  et  de  nombreuses  pages  sans  titre,  dans  lesquelles  l'auteur 
paraît  avoir  noté  les  plus  douces  pensées  de  son  esprit,  les  plus  nobles 
aspirations  de  son  âme.  Deux  fois,  dans  Corneille  et  Napoléon,  et  dans 
Rouget  de  Liste,  M.  Pâté  s'est  essayé  dans  un  genre  où  l'histoire,  élé- 
gamment traduite  par  sa  plume  exercée,  lui  gagnerait  promptement 
une  réputation  sérieuse  s'il  consentait  à  publier  quelques  poëmes  ayant 
ce  caractère.  Mais  notre  poëte  n'est  pas  historien  par  penchant,  tandis 
qu'il  se  sent  paysagiste;  il  retourne  donc  plus  volontiers  à  ses  médita- 
tions philosophiques  sur  la  nature.  Spiritualiste  réservé  dans  ses 
tableaux,  éminemment  distingué  dans  le  choix  de  ses  expressions, 
M.  Pâté  n'a  rien  d'efféminé  ni  de  langoureux  dans  ses  vers.  Il  s'en 
échappe,  au  contraire,  en  maint  endroit,  un  parfum  délicat  et  sain,  qui 
nous  permet  d'espérer  que  les  croyances  chrétiennes  se  feront  jour 
dans  des  pages  nouvelles  &u  même  auteur.  Lacrymœ  rerum  et  les 
Mélodies  intimes  portent  l'indice  de  nobles  tendances,  et  l'Académie 
française  remarquera  ce  jeune  poëte,  essentiellement  classique  par  la 
forme,  lorsqu'elle  voudra  couronner  quelque  volume  de  poésie  récem- 
ment écrit. 

—  Rêves  et  Devoirs/  s'écrie  M.  Théodore  Proment.  C'est  sa  devise, 
et  elle  sied  au  jeune  maître  d'école  qui  se  délasse  de  l'étude  par  la 
poésie.  Son  volume  porte  une  leçon  soas  chaque  vers.  On  se  sent  en 


—  301  — 

face  de  quelqu'un  qui  a  charge  d'âmes  et  qui  tient  à  s'acquitter  digne- 
ment de  sa  haute  mission.  Un  cachet  d'honnâteté,  beaucoup  de  jeu- 
nesse, une  connaissance  profonde  de  Tenfant,  tels  sont  les  caractères 
du  talent  de  M.  Froment.  La  Langue  des  anciens.  Premières  épreuves. 
Vieux  livres,  A  un  élève  en  vacancesy  etc.  sont  des  pages  achevées  aux- 
quelles il  convient  d'tgouter  la  verte  réplique  à  Victor  Hugo,  le  ridi- 
cule agresseur  du  mattre  d'études  dans  ses  Contemplations.  M.  Fro- 
ment venge  avec  esprit  une  cause  qui  est  la  sienne. 

—  Boileau  n'est  pas  mort.  Des  continuateurs  de  son  œuvre  se  sont 
nommés  dans  nos  rangs,  mais  personne  n'a  plus  de  droits  à  l'héritage 
du  législateur  en  poésie  que  M.  Gustave  LeVavasseur,  à  qui  nous  devons 
Un  chapitre  fart  poétique^  la  Rime,  Ce  n'est  qu'une  brochure,  mais 
elle  vaut  plusieurs  livres.  Dire  l'histoire  de  la  rime,  depuis  Clément 
Marot  jusqu'à  Soulary,  n'était  pas  chose  facile.  Enchâsser,  dans  des 
alexandrins  alertes,  les  noms  oubliés  de  Mellin  de  Saint-Gelais,  Bro- 
deau,  Michel  d'Amboise,  Scève,  Peletier,  Lancelot,  Forcadel,  Héroët, 
JodeUe,  Ronsard,  Baïf,  Rémi  Belleau,  Ponthus  de  Thjard,  Magnj 
et  cent  autres,  demandait  autant  d'habileté  que  d'érudition.  M.  Le 
Yavasseur  n'a  pas  faibli  au  cours  de  son  long  Chapitre,  qui  tient  tout 
ensemble  de  l'histoire  et  de  l'art  poétique.  Le  poëte  s'est  pénétré  du 
génie  parfois  inculte  et  barbare  de  tous  les  ancêtres  de  notre  langue 
rimée  ;  il  a  cherché  la  raison  de  leur  supériorité  relative  ou  de  leur 
abaissement  dans  le  respect  qulls  ont  eu  de  cette  puissance  ombra- 
geuse, la  rime.  Et  c'est  dans  des  vers  d'une  étonnante  souplesse  qu'il 
résume  ses  observations  unes,  justes  et  neuves.  Sans  doute,  en  plus 
d'un  lieu,  le  versificateur  domine  le  poëte,  mais  celui-ci  n'abdique  pas, 
et  bientôt  il  réparait  à  la  place  d'honneur.  Il  n'est  personne  qui  n'ap- 
plaudisse à  l'éloquente  prédiction  de  l'auteur  lorsqu'il  dit  : 

Demandez  à  Bornier,  à  Pnidhomme,  à  Goppée 

Si  la  Rime  n'est  pas  sauve  comme  Tépée. 

Autran  chante  et  sourit,  Laprade  chante  et  mord... 

M.  Le  Yavasseur  énumère  alors,  en  quelques  vers,  les  poëtes  de  notre 
âge.  Il  ne  pouvait,  sans  doute,  sgouter  son  nom  à  ceux  dont  les  strophes 
font  autorité  de  notre  temps,  mais  plus  libre  que  lui,  nous  saluons  son 
talent  heureux. 

—  Ce  qui  manque  absolument  à  M.  Jules  Breton,  dans  les  Champs 
et  la  mery  c'est  la  justesse  de  l'expression.  Les  images  de  ce  poëte 
sont  le  plus  souvent  bizarres  ou  triviales.  Ce  qui  le  frappe,  dans  les 
Partions  de  Bretagne,  ce  n'est  pas  la  foi  naïve  des  pèlerins,  mais  bien 
leurs  pieuses  pratiques  qu'il  dénature  et  présente  sous  des  couleurs 
grotesques  dans  ses  vers.  M.  de  Lafajette  a  mieux  compris  la  poésie 
des  champs,  et  M.  Autran  cdUe  de  la  mer.  M.  Jules  Breton  voudra 
s'y  reprendre,  et,  dans  une  prochaine  édition,  cet  écrivain  ne  parlera 


—  302  — 

p\n%,  noaa  respéront,  du  «  g^rand  sphinx,  la  nature,  »  ou  dn  «  ehrome 
de  l'ajonc,  »  pas  plus  que  de  «  la  faucille  du  ciel  qui  fond  sa  corne.  « 

—  Phurê  et  chants  de  M.  Arbousse  Bastide  est  un  livre  sérieux, 
mais  firoid.  La  note  chrétienne  y  vibre  souvent,  mais  on  sent  que  Tau* 
teur  appartient  à  la  religion  réformée.  Un  penchant  à  la  discussion 
religieuse  se  trahit  &  Tinsu  de  Fauteur  dans  les  pages  les  plus  élevées. 
Patrie,  Amitié,  Famille,  Religion,  sont  les  divisions  principales  du 
volume  de  M.  Arbousse. 

—  L'IUurionj  par  M.  Cazalis,  est  un  recueil  enfiévré,  à  travers  lequel 
souMe  un  vent  de  révolte  et  de  mécontentement  qui  ne  permet  pas  à 
son  cerveau  d'écouter  les  sereines  conâdenoes  de  la  muse.  Moins  de 
philosophie  byronnienne  ferait  de  M.  Cazalis  un  poëte  élégant, 
capable  de  parler,  en  vers  bien  frappés,  d'art,  de  lumière  et  d'har- 
monie. 

—  Singulière  faculté  que  celle  de  M.  Coppée  1  Est-ce  un  phUo- 
sophe  ?  Est-ce  un  poëte  f  C'est  plutôt  un  analyseur.  Il  scrute,  découvre 
et  raconte.  Ses  récits  ont  pour  eux  l'originalité  du  détail.  Le  mot 
imagé,  imprévu  se  présente  naturellement  sous  sa  plume,  mais  le  soc 
de  sa  charrue  glisse  sur  le  sillon  sans  l'entamer.    Ses  analyses  s'ap- 
pliquent aux  objets  plutôt  qu'aux  sentiments.  Il  voit  et  il  chante.  De 
plus  profonds  veulent  que  Thymne  jaillisse  de  la  pensée.  M,  Coppée 
trouve  assez  heureusement  une  situation  poétique .  Il  y  place  ses  per- 
sonnages, puis,  sans  plus  d'efiort,  il  nous  invite  à  les  venir  voir. 
Pendant  une  heure  vous  ragardez  passer  ces  figures  contemporaines 
—  car  M.  Coppée  appartient  à  notre  âge  et  ne  sait  rien  du  passé,  — > 
mais  vous  ne  tardez  pas  à  trouver  que  ces  paysans,  ces  soldats,  ces 
pécheurs  ou  ces  forgerons  n'ont  point  d'âme.  Ils  suivent  leur  chemin, 
prompts  à  saisir  le  côté'  visible  des  choses,  mais  ne  se  retrempant 
jamais  aux  grandes  sources  de  la  réflexion.  Le  Cahier  rouge,  le  dernier 
ouvrage  de  M.  Coppée,  nous  le  montre  fidèle  à  ses  qualités  descrip- 
tives, mais  sans  progression  sur  ses  œuvres  anciennes.  Aux  Amputés 
de  la  guerre  y  la  Chaumière  incendiée,  le  Canon,  Au  lion  de  Bel  fort  sont 
des  épisodes  militaires  où  se  retrouvent  Télan  tout  français,  la  tristesse 
virile  que  Pils  —  mort  hier  —  savait  répandre  sur  ses  toiles.  Par 
malheur,  au  verso  de  ces  pages  émues,  se  rencontrent  des  idylles  de 
barrière  souvent  grotesques,  totgours  insignifiantes.  Au  milieu  de  ces 
choses  fades,  surgit  un  titre  charmant.  Douleur  bercée,  par  exemple, 
qui  sert  de  prétexte  à  vingt  vers  sans  prétention  où  se  laisse  voir 
Tongle  du  podte.  Cependant,  M.  Coppée  possède  un  tempérament 
maladif,  c'est  un  Werther  attardé  dont  les  gémissements  ne  nous 
touchent  point,  aussi  conseillerons -nous  à  ce  jeune  maître  de  se  dé- 
faire au  plus  tôt  d'une  manie  surannée.  Nous  voulons  parler  des  plaintes 
qu'il  élève  oontre  la  destinée.  A-t  -il  le  droit  vraiment  d'en  vouloir  à 


—  303  — 

son  siècle,  celui  qae  le  succès  a  bercé  dès  la  première  heure  f  Non.  Et 
comme  à  certains  jou^s,  M.  Coppée  se  révèle  poëte  national,  nous 
souhaitons  que  la  patrie  lui  inspire  de  nouvelles  œuvres.  Évidemment 
l'auteur  se  lassera  de  nous  peindre  «  des  bras  sans  mains  »  des  <t  dra- 
peaux troués»  des  atours  démantelées  ;  »  il  fouillera  plus  avant  dans 
nos  douleurs  françaises,  et  son  nom  —  presque  oublié  déjà  —  rede- 
viendra populaire  comme  au  temps  du  Passant  et  de  la  Grève  des 
forgerons. 

—  Idéal  et  nature  est  le  titre  d'un  poëme  en  quatre  chants,  par 
M.  Guy  de  Beaufort.  L'action  se  passe  en  Bretagne  ;  les  vers  nous 
ont  rappelé  Brizeux,  en  plus  d*un  endroit  du  livre,  mais  nous  eussions 
voulu  que  le  récit  fût  moins  étendu.  Le  drame  languit,  et  certain  per- 
sonnage important,  du  nom  de  Winoo,  dépare  Tœuvre  de  M.  de  Beau- 
fort. 

—  Quelle  étrange  présomption  fut  celle  des  amis  de  M.  Ferdinand 
Gartairade,  qui  viennent  de  publier  les  poésies  complètes  de  cet  écri- 
vain, en  trois  volumes  I  Chacun  de  ces  volumes  porte  un  titre  distinct  : 
Du  eœur  aux  lèvres,  les  Fleurs  sous  t herbe,  le  Jour  et  la  Nuit.  Pourquoi 
la  monotonie  de  toutes  ces  pièces,  que  nous  avons  lues  avec  plus  de 
résignation  que  de  plaisir,  nous  oblige-t-elle  k  regretter  qu*on  les  ait 
éditées  ? 

—  Les  Illusions  de  M.  Emile  Favin  relèvent  d'un  ordre  de  pensées 
qui  nous  défend  d'en  rien  dire.  L^étrange  y  coudoie  Tobscène. 

-«  Le  baron  Walckenaër  s'éprend  de  poésie  à  soixante -deux  ans, 
et,  dix  ans  plus  tard,  il  publie  deux  Volumes  très-compactes  :  Mes  veillées 
au  Paraclet.  Nous  n'oserions  dire  qu'une  certaine  sénilité  ne  soit  pas 
saislssable  dans  quelques  pièces;  l'auteur  se  montre  également  peu 
difficile  dans  l'usage  qu'il  fait  d'expressions  populaires,  qui  sentent  trop 
le  terroir  breton,  mais  la  foi,  l'honneur,  le  caractère,  la  responsabilité 
de  la  vie,  les  grandes  et  chastes  amours  de  la  famille  sont  la  préoccu- 
pation de  l'auteur. M.  Walckenaër,  porte  une  âme  que  la  douleur  a  plus 
d'une  fois  blessée  sans  l'abattre.  Les  poésies  fugitives  de  ce  poëte 
sont  remplies  des  plus  nobles  pensées,  et  les  sept  chants  de  la  légende 
champenoise  Robert  le  Grand  Hurleur  laissent  apprécier  le  talent  per- 
sonnel et  ingénieux  du  barde  philosophe. 

-*M.  Périgaud  a  publié  un  volume  de  sonnets,  sous  le  titre  :  Exalta^ 
fions.  Les  tendances  élevées  du  poëte  ne  contredisent  pas  le  titre  de 
son  livre,  mais  il  manque  à  la  plupart  de  ses  pièces  ce  trait  final  qui 
fixe  la  pensée  dans  l'esprit  du  lecteur. 

«—  M.  Charles  Pitou,  membre  de  l'Académie  des  poëtes  de  Paris, 
nous  offre  ses  pages  de  jeunesse,  en  un  volume  qu'il  appelle  :  Les  Feux 
follets.  L'auteur  ne  manque  pas  d'élégance  dans  Je  style,  et  ses 
tableaux  sont  toigours  convMMblet.  Plus  4e  oonoision  dans  le  vers  et 


—  304  — 

d'originalité  dans  l'idée  feront  de  M.  Pitou  un  poète  descriptif  dont  les 
œuvres  seront  lues. 

—  Signalons  une  cantate  parue  en  brochure,  la  France  au  Tribunal 
de  Dieu,  par  l'abbé  Démange,  de  Nancy.  Les  récitatifs  sont  conçus  avec 
ampleur;  les  strophes,  essentiellement  viriles  et  chrétiennes,  ne  man- 
quent pas  de  lyrisme. 

—  Oh  1  qui  donc  a  pu  dire  en  blaiphémant  un  joar 
Qne  le  rêve  idéal  n^était  point  de  ce  monde?... 

s'écrie  M"^"  Blanchecotte,  dans  ses  Militantes,  dont  le  caractère 
chrétien  doit  être  loué.  Il  est  fâcheux  que  l'auteur  n'ait  pas  varié 
davantage  la  note  de  chacune  de  ses  pièces;  mais  cette  répétition  d'une 
même  idée,  cet  hymne  sans  cesse  renouvelé  en  Thonneur  de  l'amour 
espéré  ou  de  Tamour  perdu,  permet  justement  d'admirer  le  talent 
flexible  de  M""*  Blanchecotte,  en  même  temps  que  Texquise  convenance 
de  son  pinceau. 

—  Plus  philosophique  et  plus  virile  est  la  muse  de  M"*  Panny 
Dénoix  des  Vergues,  dont  le  dernier  recueil  s'intitule  :  Sans  peur  et  sans 
reproche.  Ses  strophes  à  Cavour,  à  Proudhon,  à  Napoléon  III,  à 
M.  Thiers  étincellent  de  vers  énergiques,  coulés  d'un  seul  jet.  Mais 
que  vaut  ce  mérite  en  face  de  l'athéisme  de  Tauteur  ou  de  ses 
haines?  Le  style  de  M"*  Dénoîx  rappelle  par  certains  côtés  la 
grande  manière  de  M"*'  de  Staël,  mais  le  vol  de  sa  pensée  tournoie 
dans  le  cercle  où  s'est  renfermé  Eugène  SUe.  Les  stances  les  plus 
achevées  de  son  livre  sont  adressées  à  l'auteur  du  Juif-Errant, 
vivement  applaudi  par  le  poëte.  Ce  n'est  pas  à  son  éloge.  M"*"  Dénoix 
dédiait,  il  y  a  quelques  trente  ans,  ses  premiers  essais  poétiques 
à  David  d'Angers,  qui  venait  de  modeler  les  traits  de  Delphine  Gay, 
Desbordes-Yalmore  et  Tastu.  Nous  serions  tenté  de  regretter  que 
le  grand  artiste  n'ait  pas  répondu  aux  avances  de  M"*'  Dénoix.  Son 
médaillon  offrirait  sûrement  quelque  intérêt  au  physionomiste.  Il 
doit  y  avoir  de  l'homme  dans  ses  traits. 

—  M.  l'abbé  Malateste  a  publié  cette  année  un  poëme  en  douze 
chants  :  Saint  François-Xavier,  ou  la  conquête  de  VInde  et  du  Japon. 
C'était,  sans  doute,  une  noble  tentative,  mais  nous  pensons  que  les 
meilleurs  épisodes  de  son  livre  eussent  paru  isolément  avec  avantage 
pour  l'auteur.  Ce  qui  nuit  à  son  œuvre,  ce  sont  les  transitions.  Décrire 
n'est  pas  sans  péril  pour  le  poëte,  et  c'est  trop  peu  pour  lui  d'atteindre 
sous  ce  rapport  à  la  concision  qui  sied  au  prosateur.  Mais  M.  Mala- 
teste rachète  par  plus  d'une  qualité  réelle  ces  inévitables  défauts. 
Indépendamment  du  sujet  qu'il  traite,  et  dont  la  grandeur  ne  peut 
échapper  à  personne,  il  a  su  faire  aimer  l'apostolat, 

Et  montrer  snr  l'erreur  la  jnste  primauté, 
De  la  muse  chrétienne  et  de  la  vérité. 


-  305  — 

—  M.  Emile  Péhant  doit  à  d'illustres  amitiés  le  patronage  de  son 
livre  Sonnets  et  Poésies»  M.  Victor  de  Laprade  s^est  chargé  de  pré- 
senter an  public  ce  recueil,  dont  chaque  pièce,  est  une  lettre  adressée 
à  Vigny,  Deschamps^  Victor  Hugo,  Villemain,  etc.  Nous  ne  pouvons 
que  louer  les  pensées  de  l'auteur,  pensées  revêtues,  le  plus  souvent, 
d'un  style  élégant,  bien  rhythmé,  harmonieux.  Ce  qui  distingue  le 
talent  de  M.  Péhant,  c'est  moins  la  force  que  la  grâce,  mais  il  ajoute, 
par  le  trait,  au  mérite  de  certains  sonnets  dont  le  début  manque  de  fer- 
meté. Tel  est  le  dernier  tercet  à  la  mémoire  de  Boïoldieu  : 

Non,  la  mort,  dans  sa  main,  ii*a  pas  brisé  la  lyre. 
Oh  1  non  ;  le  cœur  gonflé  d*nn  pins  parfait  délire. 
Il  fait  les  hymnes  saints  qne  le  ciel  chante  à  Dieu. 

—  Nous  nous  contenterons  de  signaler  la  tragédie  de  Velléda,  par 
M.  Louis  de  Gombettes  Labourelle,  dont  le  talent  dramatique  n'est  pas 
sans  parenté  avec  celui  de  Viennet.  —  Si  M.  Louis  Salles,  dans  son 
volume  les  Fantasmagories,  visait  moins  &  l'effet,  il  serait  plus  goûté. 
Ses  pièces  énigmatiques  Matago  et  Mackar  sont  loin  de  valoir  sa 
délicate  élégie  intitulée  Petite-Fleur.  —  Il  convient  de  savoir  gré  à 
M.  Athanase  Renard,  de  la  pensée  généreuse  qui  lui  a  dicté  ses  vers 
In  extremis,  adieux  au  dix-neuvième  siècle,  par  un  survivant  du  dix^ 
huitième.  —  Inspirée  par  les  poëmes  de  Théocrite  et  d'Ëmpédocle, 
l'étude  antique  intitulée  Panthéia,  par  M.  Félix  Henneguy,  est  une 
œuvre  de  mérite  où  le  génie  grec  a  laissé  son  empreinte.  —  Les  Pre^ 
mitres  Rimes  de  M.  Frédéric  Bataille  portent  Tindice  d'un  talent  qui 
cherche  sa  voie. 

—  Tout  autre  est  M.  Déroulède.  Il  n'a  qu'une  muse,  la  France.  Ses 
Chants  du  soldat  et  ses  Nouveaux  chants  du  soldat  sont  l'œuvre  d'un 
patriote  militant,  d'un  Français  plus  épris  du  devoir  que  du  droik,  et 
nous  savons  trop  que  les  hommes  de  ce  tempérament  manquent  à 
notre  pays.  M.  Déroulède  est  parfois  négligé;  le  style  à  ses  yeux  n'a 
pas  la  valeur  de  l'idée,  c'est  bien  ainsi  que  raisonnent  les  vrais 
talents;  mais,  en  se  montrant  plus  difficile  sur  le  choix  de  l'expression 
ou  l'eurythmie  du  vers,  le  poëte  dont  nous  parlons  ajouterait  à  l'au- 
torité de  son  nom.  Pour  ne  citer  qu'un  exemple,  le  Sergent  est  un 
poëme  achevé  des  Nouveaux  chants,  si  Ton  ne  regarde  qu'à  la  pensée, 
mais  un  grand  nombre  de  vers  sans  facture  déparent  cette  composi- 
tion. M.  Déroulède  afiecte  volontiers  d'imiter  le  sans-géne  despoëtcs  de 
la  Pléiade.  À  quoi  bon  s'appliquer  à  une  telle  besogne  ?  M.  Déroulède 
ignore-t-il  qu'en  se  tenant  au  ton  familier,  les  jeunes  bardes  du  passage 
Choiseul  donnent  tout  ce  qu'ils  possèdent  ?  L'avenir  ne  saurait  être 
promis  à  leurs  œuvres.  Ébauches  ou  esquisses,  leurs  compositions 
n'ont  rien  de  fini,  le  modelé  manque  de  profondeur,  et  le  coloris  de 
netteté.  Le  sujet  lui-même  est  trop  souvent  une  énigme*  M.  Déroulède 

OCTOBBRK  1875.  T.  XIV,  20. 


—  306  — 

est  supérieur  à  ces  ëcrivalas  qui  se  passionnent  à  froid  devant  une 
mèche  de  cheveux,  le  hanc  d'un  square^  les  passagers  des  bateaux- 
mouches.  L'auteur  des  Chants  du  soldat  n*est  pourtant  pas  un  amant 
des  hautes  pensées  prises  à  Tétat  impersonnel.  Il  faut  à  sa  muse  un 
nom,  un  type  qui  soit  comme  l'image  connue  de  l'idée  qu'il  va  chanter. 
Toutefois,  si  le  poëte  reste  notre  contemporain  par  les  personnages 
qu'il  met  en  scène,  son  talent  n*a  point  d'âge,  ses  généreux  enseigne- 
ments sont  de  toutes  les  époques  et  conviennent  à  tous  les  peuples. 
Car  c'est  un  des  côtés  de  cet  esprit  militant  et  viril  de  savoir  écrire 
pour  le  peuple.  Arrière  la  cheminée  de  porphyre,  ou  la  console  en  bois 
d'ébène  ;  arrière  le  boudoir  et  le  lit  de  repos,  ce  n'est  pas  là  qu'il  faut 
placer  les  Chants  du  soldat.  Katelier,  la  caserne,  la  rue  conviennent 
bien  mieux  à  ces  livres  vraiment  populaires,  que  les  mains  rugueuses 
de  Touvrier  peuvent  ouvrir.  L'accent  du  poëte  n'a  pas  besoin  d'être 
commenté.  On  en  saisit  la  nuance  et  la  valeur,  pour  peu  qu'on  soit 
Français.  Pas  une  page  qui  ne  renferme  une  leçon,  pas  un  vers  qui  ne 
soit  un  appel.  Et,  dans  un  temps  où  les  hommes  font  métier  des  plus 
saintes  passions,  la  sincérité  patriotique  de  M.  Déroulède  ne  sera 
pas  mise  en  doute  par  personne.  Le  chauvinisme  est  aussi  loin  de  ses 
hémistiches  que  de  sa  pensée.  Juste  envers  la  France,  il  a,  comme 
l'auteur  des  MessénienneSj  un  chant  pour  toutes  ses  gloires.  C'est  lui 
qui  s'écriera,  au  début  de  sa  pièce  sur  Bazeille,  où  il  raconte  la  mort 
héroïque  d'un  curé  de  village: 

Le  blâme  qui  voadra^  moi  je  Taime  ce  prêtre  ! 

Dans  ses  vers  sur  Corneille^  le  poëte  adresse  à  son  pays  ce  mélanco- 
lique et  nécessaire  avertissement: 

Pauvre  France  1  qae  Diea  te  protège. . .  et  te  change  ! 
Ton  espoir  était  fou,  que  ton  deuil  soit  sensé, 
Tu  parles  déjà  haut  de  Tavenir  qui  venge, 
L'avenir  qui  répare  est-il  donc  commencé? 

Si  nous  parcourons  le  volume  des  Nouveaux  chants^  la  pièce  dédiée 
à  Jeanne  d^Arc,  celle  A  Ma  Mère,  Judex  Vtndex  et  Épilogue  sont  des 
pages  d'un  lyrisme  pénétrant.  Quel  est  celui  d'entre  nous  qui  a  pris 
pour  diagnostic  de  l'éducation  de  la  famille  la  valeur  du  soldat.  Quel 
est  le  poëte  qui,  s'adressant  aux  femmes  de  France,  a  mieux  dit  que  ce 
jeune  poëte: 

0  Mère,  ta  tendresse  a  mal  formé  cette  &me, 
S'il  ne  sait  pas  mourir,  tu  n'as  pas  su  créer  J 

Honneur  donc  à  la  muse  chrétienne  et  française  de  M.  Déroulède. 
Si  son  esprit  ne  s'est  pas  encore  orienté  vers  l'idéal^  qui  seul  donne 
aux  œuvres  de  la  plume  d'être  immortelles,  M.  Déroulède  est  peut- 
être,  de  tous  lespoëtes  d'aujourd'hui,  le  plus  fidèle  au  culte  de  l'idée. 

Hbnrt  Jodin. 


—  307  — 

PUBLICATIONS  RELATIVES  A  LA  LITTÉRATURE 

ANGLAISE  DU  MOYEN  AGE 

THE    EARLY   ENGLISH    TEXT    SOCIETY 

Troisième  article  (voir  tome  X,  p.  198  et    tome  XI,  p.  165). 


XXXVII.  The  myroure  of  oure  Ladye^  ccntaining  a  dêvoiional  treatise  on  divine  tervice,  elc, 

■Edited  from  the  original  black-letter  text  of  1 530,  with  introduction  and  notes,  by 

John  Hbnry  BLOrrr,  1873.  In-8  deLX-379  p.  — XXXVIII.  À  Treatiee  on  the  Aetrolabe ; 

mddreued  io  hit  ean  lovoye,  6y  Oeofprey  Chaucer,   Â.  D.  1391.  Edited  from  the  earliest 

text  bv  tbe  Rev.  Waltbr  â.  Skba.t,  1872.   In-8  de  x.XiX-117  p.  et  7  planches.  — 

XXXIa.   The  complaynt  of  Scotlande,  vylh  ane  exortation   to  the  thre  estait*  to  be  vigi- 

Itmtê  in  the  deffense  of  theirpubUc  veiL  A.  0.  1549.  With  an  appendiz  of  contemporary 

Engliah  tracts  :  a.    The  juet  déclaration  of  Henry  VIII  (1542);  —  ^.  The  eaortacion 

ofjamee  Harrytone,  Seottiaheman  (1547);  —  c.  The  epietle  of  the  Lord  protector  Someraet 

(1548);  —  d,  The  epitome  of  Nicolae  Bodrugan,  aliae  AdMne  (1548).  Reedited  from  the 

originals  with  introduction  and  glossary,  by  Ja.mbs   A..    H.    MnaRA.T,  In-8,  Part<  I, 

1872.  de  CZXin-112  p.  Part.  II.  1873.   In>8  de   113   p.  —  XL.  Cumor  mundi  {The 

Cureor  o  the  Word)  :  a  Northun^rian  Poem  of  the  Fourteenth  Century,  Bdited  by  the 

Rev.  Richard  MORis,    LL.  D.  livraisons   I  et  II.  London.  Trûbner,  1875.  In-8  de 

xxvi*207  pages. 

XXXYII.  The  myroure  ofoure  Ladye.  Le  traité  publié  sous  ce  titre 
est  un  ouvrage  d'édification  composé  expressément  pour  les  sœurs  du 
monastère  de  Sion,  maison  religieuse  élevée  à  Isleworth,  près  de 
Londres,  sur  les  bords  de  la  Tamise.  Les  sœurs  de  Sion  existaient, 
dès  Tannée  1415,  à  titre  de  communauté  ;  elles  disparurent  lors  de  la 
dissolution  des  monastères,  pendant  le  règne  d'Henry  YIII  ;  sous  le 
gouvernement  de  Marie  Tudor,  un  court  intervalle  de  répit  leur  fut 
accordé^  puis  elles  se  retirèrent  à  Lisbonne,  où  un  couvent  de  dames 
anglaises  existe  encore  de  nos  jours.  Le  Miroir  de  ^otre-Dame  est  une 
explication  du  service  divin,  suivi  d'une  traduction  commentée  des 
heures  de  la  sainte  Vierge,  et  de  Toffice  tel  qu*il  se  disait  à  Sion.  Il 
n'existe  pas  de  ce  traité  un  seul  manuscrit  complet  ;  un  codex  du 
quinzième  siècle  en  donne  environ  la  moitié,  et  on  est  réduit,  pour  le 
reste,  à  consulter  quelques  exemplaires  imprimés^  tous  plus  ou  moins 
défectueux,  d'une  édition  publiée  par  Richard  Fawkes,  en  1530.  Il  est 
impossible  de  déterminer,  d'une  manière  certaine,  Tauteur  du  livre 
dont  je  m'occupe  en  ce  moment;  M.  Blunt  est  porté  à  l'assigner  au 
docteur  Thomas  Gascoign,  membre  du  collège  de  Merton,  à  Oxford, 
vice-chancelier  de  l'université  de  cette  ville,  en  1434  et  en  1439,  puis 
élevé  à  la  dignité  de  chancelier,  de  1442  à  1445.  Il  composa  un  dic- 
tionnaire de  théologie  qui  existe,  en  deux  in-folio  manuscrits,  à  la 
bibliothèque  du  collège  de  Lincoln.  Dans  cet  ouvrage,  il  cite  une  tra- 
duction de  la  vie  de  sainte  Brigitte,  faite  par  lui  pour  l'usage  des 
sœurs  de  Sion.  Il  s'est  occupé,  à  plusieurs  reprises,  de  la  princesse 
Scandinave,  dont  les  révélations  ou  prophéties  merveilleuses  sont  si 
connues  des  hagiographes  ;  et  cette  prédilection  peut  être  attribuée  à 


—  308  — 

un  voyage  que  Gascoign  fit  en  Suède,  comme  chapelain  de  sir  Henry 
Fitzlurst)  fondateur  de  Tordre  des  Brigittines  anglaises.  Après  la  des- 
cription des  différents  exemplaires  du  Miroir  de  Notre-Dame,  M.  Bruce 
entre  dans  des  détails  nombreux  et  fort  curieux  sur  le  monastère  de 
Sion,  sa  règle,  son  organisation  et  son  caractère  ;  il  donne  plusieurs 
extraits  des  manuels  de  dévotion  employés  dans  le  couvent,  et  il  n'ou- 
blie pas  la  liste  de  toutes  les  abbesses.  Le  texte  du  Miroir  vient  en- 
stiite,  accompagné  de  notes  et  d*un  glossaire. 

XXXYIII.  A  Treatise  on  the  Astrolabe.  —  M.  Skeat  commence  par 
une  énumération  des  manuscrits  qui  existent  de  ce  traité  ;  il  en  cite 
plus  de  vingt,  et  il  est  probable  qu*on  en  trouverait  d'autres  enfouis 
dans  la  poussière  des  bibliothèques.  L'ouvrage  lui-même  n'est  pas 
complet,  il  s'en  faut  de  beaucoup,  et  quelques  parties  du  texte,  tel 
qu'il  nous  été  transmis^  ne  sauraient  être  attribuées  à  Ghaucer.  Reste 
à  examiner  les  sources  d'où  le  grand  écrivain  anglais  a  tiré  sa  disser- 
tation. M.  Halliwell,  dans  une  note  de  son  édition  des  voyages  de  sir 
John  Mandeville,  parle  d'un  traité  de  F  Astrolabe,  composé  en  sans- 
crit, où  il  y  a  une  traduction  latine  ;  il  serait  difficile  de  déterminer  si 
la  Compositio  et  operatio  astrolabie,  version  latine  d'un  ouvrage  de 
Tastronome  arabe  Messahala,  se  rattache  au  livre  sanscrit;  quoi  quMl 
en  soit,  Ghaucer  eut  évidemment  Messahala  sous  les  yeux  lorsqu'il 
composa  son  essai;  il  Ta  traduit  souvent  mot  à  mot;  en  divers  endroits 
il  l'a  développé,  et  afin  de  montrer  les  rapports  qui  existent  entre  le 
latin  et  l'anglais,  M.  Skeat  a  eu  soin  d'imprimer,  in  extenso,  Y  Operatio 
astrolabie^  commençant  par  ces  mots  :  Nomina  instrvmentorum  sunt  hœc. 
Je  ne  suivrai  pas  le  docte  éditeur  dans  les  explications  techniques 
qu'il  nous  donne  sur  lusage  de  l'Astrolabe;  ces  remarques,  illustrées 
par  la  reproduction  en  fac-similé  d'anciens  dessins,  sont  intéressantes, 
mais  elles  m'entraîneraient  trop  loin,  ainsi  que  les  nombreuses  cita- 
tions astronomiques  tirées  des  Canierbury  Taies;  des  notes  et  un  index 
terminent  ce  volume . 

XXXIX.  The  Complaynt  of  Scotlande.  Voici  un  des  textes  les  plus 
importants  qui  aient  été  publiés  par  la  Société  ;  il  forme  deux  livrai- 
sons, complétées  par  un  excellent  glossaire,  et  il  est  nécessaire  que 
j'en  parle  avec  quelque  détail.  L'éditeur  commence  par  une  introduc- 
tion très-bien  écrite  sur  la  situation  de  l'Ecosse  au  moment  où  la 
Complainte  vit  le  jour.  Le  pays  était  en  proie  au  désordre  et  à  l'anarchie; 
pendant  les  trois  siècles  écoulés  depuis  Robert  Bruce,  jusqu'à  l'avéne- 
ment  de  Jacques  VI  au  trône  d'Angleterre,  près  d'un  siècle  et  demi 
avait  vu  se  succéder  des  fantômes  de  souverains  à  peine  sortis  de  l'en- 
fance; pour  un  espace  de  cent  vingt  ans,  le  pouvoir  était  resté  entre  les 
mains  de  régents  qui  gouvernaient  légalement  au  nom  d'un  roi  mineur 
ou  qui,  dans  la  plupart  des  cas,  avaient  usurpé  le  pouvoir.  Au  milieu 


—  309  — 

d'un  tel  état  de   dissolution^  ce  qui  a  droit  de  nous  surprendre,  c'est 
que  les  Écossais  aient  pu  conserver  leur  indépendance  ;  ce  fait  tient  à 
deux  causes  principales.  D'abord,  l'attention  de  l'Angleterre,  ce  pays 
limitrophe,  concentrée  sur  la  France,  ne  laissait  pas  au  gouvernement 
le  loisir  de  songer  à  rÉcosse;  ensuite  les  guerres  entre  les  maisons 
rivales  d'York  et  de  Lancaster  absorbèrent  les  forces  des  successeurs 
d'Edouard  I'^  Outre  cela,  il  ne  faut  pas  oublier  qu^un  traité  d'alliance 
offensive  et  défensive  avait  été  conclu  entre  l'Ecosse  et  la  France,  et 
que  la  crainte  d'une  invasion  étrangère  était  suffisante  pour  empêcher 
les  Anglais  de  se  saisir  d'une  proie  qu^ils  convoitaient   depuis  long- 
temps, et  sur  laquelle  ils  croyaient  avoir  des  droits  légitimes.  Le  roi 
Henry  YIII  résolut  enfin  d*accomplir,  de  gré  ou  de  force,  ce  projet 
d'annexion,  et^  à  cet  effet,  il  arrangea  avec  ceux  des  barons  écossais 
qui  lui  étaient  favorables,  un  projet  de  mariage  entre  son  fils  Edouard, 
alors  âgé  de  cinq  ans,  et  la  petite  Marie  Stuart,  qui  n'avait  que  huit 
jours.  Après  de  longues  négociations,  cette  union  fut  arrêtée  de  con- 
cert avec  le  comte  d*Arran,  régent  d'Ecosse,  et  il  fallut  tout  le  génie 
du  cardinal  Beatoun  pour  entraver  les  projets  du  roi  d'Angleterre  et 
sauver  la  cause  de  l'indépendance.  C'est  alors  qu'un  écrivain  anonyme, 
partisan  décidé  de  Talliance  française,  fit,  dans  l'ouvrage  dont  j'ai  à 
parler,  un  appel  éloquent  à  ses  concitoyens,  les  exhortant  à  l'union,  et 
leur  montrant  que  le  seul  moyen  de  chasser  les  Anglais  était  de  mettre 
fin  aux  guerres  entre  clans  et  aux  disputes  qui  épuisaient  les  forces  du 
pays.  La  Complainte  est  un  véritable  pamphlet;  la  mode,  dans  ce  temps- 
là,  était  aux  brochures  politiques  ;  M.  Murray  en  a  imprimé  quatre 
comme  appendice  à  son  volume,  et  il  faut  en  dire  deux  mots. 

1.  Lorsque  Henri  YIII  déclara  la  guerre  en  1542,  il  fit  publier  une 
justification  très-ample  de  sa  conduite,  se  plaignant  des  menées  du 
gouvernement  écossais,  et  revendiquant  de  nouveau  les  droits  supposés 
de  la  couronne  d'Angleterre  sur  les  pays  situés  au  nord  de  la 
Tweed. 

2.  Après  l'expédition  d'Hartford,  un  récit  de  cette  affaire  {the  laie 
expedkUm  m  Scotland)  fut  imprimé  à  Londres  pour  prouver  que  l'obs- 
tination seule  des  Écossais  leur  avait  attiré  les  malheurs  dont  ils 
souffraient. 

3.  En  1547,  avant  la  bataille  de  Pinkie.  «  James  Harryson,  Scottis- 
teman^  »  vendu  à  l'Angleterre,  fit  paraître  un  petit  écrit  maintenant 
les  droits  de  Henri  YIII  et  excitant  ses  compatriotes  à  les  recon- 
naître. 

4.  En  1548,  Somerset  envoya  une  espèce  à*Eirenicon  ou  de  mani- 
feste pacifique,  déplorant  les  résultats  de  la  bataille  de  Pinkie,  et 
tâchant  d'accomplir,  par  un  appel  à  la  raison,  ce  que  la  force  des 
armes  avait  rendu  plus  difficile.  Il  s^abstient,  dans  ce  pamphlet,  de 


—  310  — 

faire  la  moindre  allasion  aux  prétentions  anglaises;  mais  il  était 
important,  en  même  temps,  que  ces  prétentions  ne  fassent  pas  consi- 
dérées comme  abandonnées;  aussi, 

5.  Simultanément  avec  l'écrit  de  Somerset,  on  vit  paraître  une 
diatribe,  sortie  des  presses  de  Timprimerie  du  roi,  et  composée  par 
un  nommé  Nicolas  Bodrugan  ou  Adams;  cette  pièce  adressée  à 
Edouard  YI,  sans  doute,  avec  la  permission  du  lord  protecteur, 
rappelle  au  roi  que  le  projet  d'unir  l'Ecosse  à  l'Angleterre  par 
un  mariage  est  excellent,  mais  que  les  droits  de  Sa  Majesté  sur  la 
souveraineté  de  TEcosse  n'en  existent  pas  moins. 

6.  Enfin,  Felton,  publiant  la  même  année  une  brillante  description 
de  la  campagne  qui  s'était  terminée  à  la  bataille  de  Pinkie,  sgouta,  en 
guise  de  préface  à  son  récit,  un  appel  à  ses  «  compatriotes  du  Nord,  » 
ainsi  qu'il  les  appelle,  leur  conseillant  de  se  soumettre  à  la  volonté 
du  Dieu  des  armées,  et  d'accepter  le  gouvernement  de  l'Angle- 
terre ,  pajs  dont  ils  partageaient  les  coutumes^  les  intérêts  et  la 
langue. 

Quelques-uns  de  ces  pamphlets  doivent  avoir  pénétré  jusqu'en 
Ecosse,  et  l'auteur  de  la  Complainte  les  a  probablement  connus 
tous;  c'est  pour  les  réfuter,  et,  en  même  temps,  pour  réveiller  le  cou- 
rage de  ses  compatriotes,  qu'il  prit  la  plume  à  son  tour  et  écrivit  son 
éloquent  volume.  Ainsi  parut,  au  commencement  de  Tannée  1549,  un' 
des  meilleurs  spécimens  que  nous  connaissions  du  genre  pamphlet. 
L'auteur  a  beaucoup  de  qualités  qui  nous  rappellent  le  quadribge 
invectifà'ÂleÀn  Chartier;  suivant  l'habitude  du  temps  où  il  vivait,  il  se 
sert  des  formes  de  rallégorie,  et  nous  représente  a  Dame  Scotia  »  en 
pourparlers  avec  les  trois  états  du  royaume  :  la  Noblesse,  l'Église  et  les 
Communes,  reprochant  à  chacun  ses  défauts^  les  exhortant  à  s'amen- 
der, et  recommandant  à  tous  l'union.  Nous  ne  savons  pas  quels  furent 
les  résultats  immédiats  de  la  Complainte;  aucun  des  écrivains  con- 
temporains ne  la  cite;  mais  le  but  que  l'auteur  se  proposait  fut 
accompli,  pour  un  temps  du  moins  ;  aidés  par  les  troupes  françaises, 
les  écossais  reconquirent  pied  à  pied  tout  le  terrain  qu'ils  avaient 
perdu,  et  enfin  une  paix  honorable,  conséquence  du  traité  de  Bou- 
logne, signé  au  mois  d'avril  1550,  entre  la  France  et  Edouard  VI, 
donna  un  peu  de  répit  aux  malheureux  voisins  de  l'ambitieuse  Angle- 
terre. 

La  seconde  partie  de  l'introduction  de  M.  Murray  contient  d'abord 
quelques  détails  bibliographiques,  puis  une  analyse  de  l'ouvrage. 
Quatre  exemplaires  seulement  de  la  Complainte,  sont  connus,  et 
sur  ces  quatre,  deux  font  partie  de  la  bibliothèque  du  Musée  brita- 
nique.  L'auteur  a  divisé  son  livre  en  deux  sections,  savoir  :  un  dis- 
cours sur  l'affliction  et  la  misère  où  l'Ecosse  est  plongée,  et  ensuite 


-  3H  - 

Cl  le  Songe  de  Dame  Scotia  »  avec  l'énumération  de  ses  doléances 
contre  ses  trois  enfants.  Ces  deux  parties  sont  reliées  ensemble  par 
on  (c  monologue  récréatif;  »  ce  monologue  décrit  les  circonstances 
qui  amenèrent  l'auteur  à  interrompre  son  discours  et  qui  évoquèrent 
devant  lui  le  fantôme  de  sa  patrie.  La  préface  est  une  épître  à  la 
reine  Marie  de  Guise  (ane  Epistil  to  the  Quenis  grâce),  suivie  d*un  pro- 
logue au  lecteur  {Prohg  to  the  Bader), 

Après  Tabdication  du  comte  d'Arran,  la  régence  d^Ëcosse  passait 
naturellement  entre  les  mains  de  Marie  de  Guise,  c*est  à  elle  que 
notre  anonyme  s^adresse  en  premier  lien;  il  l'appelle  «  la  Marguerite 
et  la  perle  des  princesses,  »  et  la  compare  à  toutes  les  fenunes 
illustres  mentionnées  dans  Thistoire,  la  remerciant  pour  les  services 
signalés  qu'elles  a  rendus  au  pays  en  le  délivrant  des  trois  calamités, 
de  la  peste,  de  l'invasion  étrangère  et  de  la  guerre  civile.  La  famille 
de  Guise,  ses  ancêtres  et  ses  origines  paraissent  ensuite  sur  la  scène, 
commençant  avec  Godefroj  de  Bouillon,  pour  aboutir  au  héros  de  la 
bataille  de  Saint-Quentin. 

a  Maintenant,  illustre  princesse,  »  s'écrie-t-il,  je  vous  entretiendrai 
de  votre  noble  et  illustre  père,  le  duc  de  Guise,  lieutenant  général 
du  roi  de  France,  pour  tout  le  district  de  la  Champagne  et  de  la  Brie  : 
mais  il  serait  trop  long  de  vous  raconter  en  détail  les  faits  éclatants 
qu'il  a  accomplis  de  nos  jours.  Le  souvenir  d'une  de  ses  actions 
est  encore  récent,  lorsque,  avec  beaucoup  de  courage,  il  jeta  dans 
la  ville  de  Saint-Quentin  un  secours  de  deux  mille  hommes,  con- 
trairement à  la  volonté  de  ses  ennemis;  là  il  fit  mordre  la  pous- 
sière à  un  grand  nombre  d'hommes  du  parti  opposé  sans  aucun 
dommage  pour  les  siens  ;  ce  qui  fait  que  chacun  peut  admirer  sa  dex- 
térité, son  courage  et  sa  science  de  Tart  militaire.  La  prouesse 
magnanime  du  duc  de  Guise  produisit  une  autre  action  brillante;  à 
savoir  qu'à  la  tête  de  six  mille  hommes  seulement,  il  en  mit  quarante 
mille  en  échec  au  siège  de  Péronne  ;  si  bien  que,  de  cette  grande  mul- 
titude, pas  un  seul  soldat  n'osa  avancer  ou  reculer,  à  cause  des 
assauts  et  des  escarmouches  qu'il  leur  livra  coup  sur  coup,  tuant  une 
grande  quantité  de  leurs  gens,  sans  aucune  peine  pour  les  siens. 
€Mce  à  cette  merveilleuse  bravoure,  il  parvint  à  faire  entrer,  dans 
la  ville  de  Péronne,  des  vivres,  des  arquebusiers  et  des  munitions  de 
guerre...  » 

Le  reste  de  ce  panégyrique  serait  trop  long  à  citer,  et  il  faut  que  je 
passe  au  prologue  qui  mérite  aussi  un  coup  d'œil;  il  est  écrit  d'un 
ton  d'apologie  familier  aux  lecteurs  accoutumés  aux  préfaces  de 
Chaucer,  de  Lydgate  et  de  Gawain  Douglas;  Tauteur  annonce  qu'un 
homme  habitué  à  manier  la  plume  est  redevable  de  son  talent  au 
public  tout  autant  qu'un  soldat,  un  prêtre  ou  un  laboureur,  et  il 


—  312  — 

espèro  qud  le  succès  couronnera  ses  efforts  pour  ranimer  resprit  d'har- 
monie pco'mi  ses  concitoyens. 

Le  discours  préliminaire  établit  cette  proposition,  que  la  ruine  des 
empires^  bien  loin  d'être  TouTrage  du  hasard,  doit  toigours  être  re- 
gardée comme  une  ptmition  du  ciel.  L'histoire  des  Assyriens,  des 
Perses,  des  Romains,  des  Français  et  des  Allemands,  prouve  ce  fait 
jusqu'à  révidence,  et  il  appartient  aux  Écossais  de  tirer  parti  de 
l'expérience  des  temps  passés.  M.  Murray  remarque,  avec  raison,  que 
Tauteur  de  la  Complainte  attaque  indirectement  Boccace  et  son 
traducteur  anglais  Lydgate,  ainsi  que  Gower  et  plusieurs  autres  poëtes 
qui  substituaient  l'action  de  la  fortune  à  Tinteryention  de  la  provi- 
dence dans  les  affaires  de  ce  monde. 

Le  monologue  récréatif  contenant  la  vision  de  «  Dame  Scotia  »  est 
écrit  avec  beaucoup  de  verve  et  d'entrain,  et  il  est  curieux  de  le 
comparer  au  Quadriloge  d'Alain  Ghartier.  Ici  comme  dans  le  reste  de 
l'ouvrage^  on  trouve  une  imitation  bien  évidente  de  Lyndesay,  poëte 
écossais  dont  j*ai  déjà  parlé  au  début  de  ce  travail;  les  allusions  his- 
toriques abondent,  et  on  pourrait  extraire  un  grand  nombre  de 
passages  très-intéressants  pour  Thistoire  des  mœurs  et  des  coutumes 
pendant  la  première  moitié  du  seizième  siècle*  Il  parait  que  l'auteur 
de  la  Complainte  fit  au  u  monologue  récréatif,  »  diverses  additions 
de  la  plus  grande  importance  ;  sous  prétexte  de  raconter  au  lecteur 
ce  qu'il  avait  vu  dans  le  cours  de  sa  promenade,  il  nous  fait  part  de 
ses  connaissances  en  botanique,  en  cosmogonie,  en  architecture 
navale,  etc.,  etc.;  il  nous  donne  le  titre  des  chansons  et  des  romans 
qu'il  avait  lus,  et  les  noms  des  danses  populaires  en  usage  de  son 
temps.  Aristote,  saint  Augustin,  Boèce,  Boccace,  Caton,  Gicéron, 
Salluste,  Plutarque,  Thucydide,  Yalère-Maxime  lui  étaient  familiers; 
il  connaissait  à  fond  les  contes  de  Gantorbéry,  Robert-le-Diable,  duc 
de  Normandie,  Lancelot  du  Lac,  Ymmedon  et  plus  de  quarante  autres 
compositions  du  même  genre. 

Le  style  du  pamphlétaire  anonyme  mérite  de  fixer  notre  attention 
tout  autant  que  la  substance  de  son  ouvrage;  le  fond  est  aussi 
français  que  la  forme,  et  on  pourrait,  sans  difficulté,  compiler  un  gros 
vocabulaire  d^expressions  tirées  de  notre  langue  en  feuilletant  la 
Complainte  avec  soin.  Ge  fait  n'a  pas  lieu  de  surprendre  ;  tous  les 
écrivains  du  seizième  siècle  prêteraient  à  la  même  remarque,  et  le 
dialecte  littéraire  de  ce  pays  abonde  en  mots  empruntés  directement 
du  français.  Gé  ne  sont  pas  seulement  des  termes  employés  là  où 
l'anglais  n'offre  pas  d'équivalent,  mais  notre  langue  est  toujours 
choisie  de  préférence,  et  les  mots  anglais,  lorsque  l'auteur  en  fait 
usage,  revêtent  une  terminaison  française.  Voici  quelques  exemples  à 
Tappui  : 


—  313  — 

l^  Expressions  françaises  substituées  à  des  équivalents  anglais.  —  Mal- 
talent, làohey  loue,  garnison,  roy,  volage,  YsÀg{vaguer\  succar  {sueré), 
rammel   {rameau)  fard  (farder),  cordinair  {cordonnier)^  escarmuchis 
{escarmouches)^  carions  (carognes)^  etc.,  etc. 

2*  Expressions  anglaises  avec  terminaisons  françaises.  —  Gloire, 
martyr,  prodige,  reproche,  vertu,  vilité,  au  lieu  des  correspondants 
anglais  :  Glorj^  marble,  prodigal,  reproach,  virtue,  vileness. 

L* orthographe  des  noms  propres  est  essentiellement  française  (Inde. 
Perse,  Seneque,  Italie,  Marc,  Luc,  etc.);  il  faut  aussi  attribuer  à  l'in- 
fluence française  la  pluralisation  des  ac^ectifs  qui  n'a  jamais  lieu 
en  anglais  ;  ainsi  nous  trouvons,  dans  la  Complainte,  les  expressions 
suivantes  :  «  batellis  socialiSy  batellis  intestynis^  invectives  philipiques, 
démonstrations  mathématiques,  lynis  parallelis,  ainsi  que  les  mots 
saidis  (said),  /brsatdts  (forsaid),  etc.,  etc. 

Reste  à  savoir  le  nom  de  l'auteur  du  livre  remarquable  dont  je 
viens  de  parler  si  longuement;  M.  Murray,  consacre  à  cette  question 
onze  pages  de  son  introduction,  et  malheureusement  il  lui  est  impos- 
sible de  la  décider.  Tout  ce  que  Ton  peut  dire  en  connaissance  de 
cause  se  réduit  à  ceci  :  1®  L'anonyme  était  un  partisan  décidé  de  Tal- 
liance  française;  2^  c'était  un  catholique,  attaché  aux  doctrines  de 
son  église  tout  en  comprenant  la  nécessité  de  réformes  ;  3^  il  habitait 
un  des  comtés  du  Sud,  et  probablement  le  border  limitrophe  de  l'An- 
gleterre. 

XL.  Cursor  mundi.  Ce  traité  est  un  des  derniers  volumes  publiés  par 
VEarly  Text  Society,  et  il  est  fort  curieux  au  double  point  de  vue  de 
l'histoire  et  de  la  philologie.  L*auteur  commence  par  un  prologue  où 
il  disserte  sur  le  goût  que  la  plupart  des  gens  ont  pour  les  contes  et 
les  légendes.  Si  les  hauts  faits  des  Grecs  et  des  Romains  et  les  mer- 
veilleux exploits  du  roi  Arthur  excitent  tant  d'intérêt,  à  plus  forte 
raison  les  récits  tirés  de  la  Bible  devraient  fixer  l'attention  des  lecteurs 
et  les  amuser  tout  en  les  édifiant.  Aussi  art-il  cru  bien  faire  de  com- 
poser, en  rhonneur  de  la  vierge  Marie  et  de  la  très-sainte  Trinité, 
une  espèce  de  glose  sur  les  livres  de  l'Ancien  et  du  Nouveau  Testa- 
ment; il  l'écrira  en  anglais  et  non  pas  on  français;  car  chaque  peuple, 
devrait  employer  son  propre  idiome  plutôt  que  de  recourir  à  celui  de 
ses  voisins.  Cette  particularité  est  digne  de  remarque  ;  elle  confirme 
l'opinion  que,  vers  la  fin  du  quatorzième  siècle,  Tusage  de  l'anglais  ten- 
dait à  devenir  plus  général  dans  la  Grande-Bretagne,  et  on  sait  qu'en 
1362,  l'enseignement  de  la  langue  nationale  fut  autorisé  pour  les  écoles 
publiques. 

Le  Cursor  mundi  était  une  sorte  de  répertoire  où  les  auteurs  de 
mystères  puisaient  à  pleines,  mains  ;  certains  passages  des  anciens 
drames  sacrés  en  sont  copiés  mot  pour  mot,  et  cette  suite  de  récits 


-  314  — 

émouvants  et  naïfs  devait  figurer  sur  la  table  de  travail  des  drama- 
turges de  la  fin  du  moyen  âge.  Voici  un  curieux  spécimen  des  légendes 
ajoutées  par  Tauteur,  en  guise  de  commentaire  ou  développement  du 
texte  sacré  :  Adam,  fatigué  de  la  vie^  envoie  son  fils  Seth  au  Paradis» 
demander  s'il  peut  obtenir  Vhuile  de  miséricorde  qui  lui  avait  été  pro- 
mise. Arrivé  à  la  porte  principale,  Seth  trouve  un  ange  qui  la  gardait, 
et  qui  lui  dit  d'avancer  sa  tâte  dans  Tintérieur  du  séjour  destiné  aux 
élus,  et  d'observer  soigneusement  la  vision  évoquée  devant  ses  jeux. 
Pendant  le  cours  de  ce  spectacle  le  patriarche  reçoit  l'interprétation 
véritable  de  la  phrase  huile  de  la  miséricorde.  Avant  de  quitter  le 
Paradis,  Seth  obtient  de  l'ange  trois  pépins  du  pommier  fatal  dont  le 
fruit  révélait  la  connaissance  du  bien  et  du  mal.  Ces  trois  pépins  de- 
vront être  placés  sous  la  langue  d'Adam  après  sa  mort,  et  d'eux  croî- 
tront trois  arbres  merveilleux  :  le  cèdre,  le  cyprès  et  le  sapin  qui 
représentent  symboliquement  le  Père,  le  Fils  et  le  Saint-Esprit. 

En  somme,  je  ne  puis  que  recommander  aux  archéologues  la  lecture 
du  Cursor;  il  est  édité  avec  le  plus  grand  soin,  et  les  quatre  textes 
différents  imprimés  parallèlement  facilitent  les  recherches  philolo- 
giques. GUSTAVB  Mâsson. 


THÉOLOGIE 

De  theorla  probabtlltatls  dlsaertatlo  theologtca,  concinnata 
a  R.  P.  Fr.  Maria-Ambr.  Potton,  ord.  Prœd.  Paris,  Poussielgue,  1874. 
In-8  de  234  p.  —  Prix  :  3  fr.  75 

De  la  tbéorie  du  probablllsme,  dtaaertatlon  théolo^lque, 

par  le  R.  P.  Fr.  IIarie-Ambr.  Potton,  des  Fr.-Prêcheurs.  Poitiers,  Henri 
Oudin,  i875.  Gr.  in-8  de  34  p.  —  Prix  :  1  fr. 

On  sait  que  le  terrain,  depuis  longtemps  assez  paisible,  de  la  théo- 
logie morale  est  devenu  le  théâtre  d'une  lutte  très-vive,  dont  il  est 
difficile  de  prévoir  Tissue.  On  ne  doit  pas  se  figurer  le  P.  Potton 
comme  un  médiateur  entre  le  probabilisme  proprement  dit,  du  P.  Bal- 
lerini,  et  Téqui probabilisme  des  Pères  rédemptoristes.  Dévoué, 
autant  que  les  deux  parties  belligérantes,  aux  saines  doctrines  et  aux 
inspirations  du  Saint-Siège,  le  théologien  dominicain  propose  une 
théorie  scientifique  très- différente  des  deux  autres,  sans  se  rapprocher 
davantage  du  probabiliorisme  ou  du  tutiorisme.  Il  faut  s'entendre 
pourtant  :  le  système  proposé  par  le  P.  Potton  se  résoudrait  pratique* 
ment,  pour  la  plupart  des  cas,  en  un  vrai  équiprobabilisme .  Il  n*y  a 
donc  pas  lieu  de  crier  à  la  nouveauté  pour  le  repousser  ;  la  nouveauté 
est  dans  la  formule,  non  dans  la  substance  même  delà  doctrine.  Il  est 
vrai  que  Ton  a  jugé  téméraire  de  s'éloigner,  même  en  ce  point,  des 
procédés  suivis  dans  Técole.  Mais  ces  procédés  ne  datent  pas  de  très- 


—  315  — 

loin  dans  Thistoire  de  l'enseignement  thëologiqne  ;  les  systèmes  ne 
sont  même  nettement  tranchés  que  depuis  peu  d^années,  puisque 
la  lutte  a  été  longtemps,  purement  et  simplement,  entre  le  tutiorisme 
et  le  probabilisme,  qui  sont  les  deux  solutions  contraires  de  ce  pro- 
blème: quelle  estlajègle  delà  certitude  pratique  dans  le  cas  de 
doute  théorique  ?  Il  est  Btv  que  ces  deux  systèmes  sont  dépourvus 
d'exactitude  scientifique,  puisqu*ils  ne  peuvent  être  admis,  leurs  parti- 
sans en  conviennent,  sans  de  nombreuses  exceptions.  Mais  les  systèmes 
intermédiaires  donnent  lieu,  à  divers  degrés,  à  la  même  critique  :  ils 
ne  sont  donc  pas  scientifiquement  exacts,  malgré^  leur  valeur  relative 
comme  application.  Telle  est^  du  moins,  la  pensée  du  P.  Potton,  et  il 
semble  bien  sévère  de  la  déclarer  injurieuse  à  saint  Alphonse  de 
Liguori  ou  aux  autres  maîtres  de  la  théologie  morale. 

Mais  le  point  difficile  est  de  substituer  aux  théories  essayées  jus- 
qu'à ce  jour  une  théorie  nouvelle.  Le  P.  Potton  y  a  visé.  Son  système 
peut  s'appeler  le  probabilisme  à  compensations  ;  en  voici  la  formule  : 
f(  Pour  agir  légitimement  contre  une  loi  douteuse,  il  faut  toujours 
avoir  des  raisons  proportionnées  à  la  gravité  et  à  la  probabilité  de 
cette  loi.  »  Nous  renvoyons  le  lecteur,  soit  pour  la  réfutation  du 
probabilisme  ordinaire,  soit  pour  Texposition  et  la  démonstration  de 
la  nouvelle  théorie,  à  la  brochure  française  du  P.  Potton,  qui  paraît 
renfermer  tout  Tessentiel  de  sa  doctrine.  Il  y  a  de  plus,  dans  son 
livre  latin,  des  détails  particuliers  intéressants  pour  les  théologiens  : 
on  y  verra  surtout  les  antécédents  de  cette  théorie,  qui  se  trouve 
déjà  plus  qu'en  germe  dans  une  dissertation  de  feu  M.  Laloux,  prêtre 
de  Saint-Sulpice,  et  aussi  dans  le  Compendium  philosophiœ^  d'un  autre 
sttlpicien  justement  estimé,  M.  Manier. 

Sans  rien  préjuger  sur  la  valeur  de  cette  théorie,  qui  paraît  au 
moins  mériter  une  attention  sérieuse,  on  peut  regretter  que  Texcellent 
religieux  prête  un  peu  le  flanc  à  ses  adversaires  par  la  rédaction  très- 
négligée  de  sa  dissertation  latine,  et  par  sa  tendance  trop  constante  à 
prendre  les  questions  par  leurs  petits  bouts,  au  lieu  d'en  saisir  forte- 
ment le  nœud.  Mais  il  serait  injuste  de  méconnaître,  sous  ces  allures 
trop  minutieuses,  un  jugement  sévère  et  pénétrant. 

LlSONCI  GotJTURB. 


Ei*Boiiime  selon  la  science  et  la  Toi*  Conférences,  par  le  P.  Droon , 
de  Tordre  de  Saint-Dominique.  Paris,  Didier,  1875.  In-18  j.  de  32i  p.  — 
Prix  :  3  fr. 

Ces  six  conférences,  prêchées  à  Marseille  l'an  dernier,  embrassent 
un  vaste  ensemble  de  questions  philosophiques,  scientifiques  et  reli- 
gieuses, tout  un  traité  d'anthropologie  au  double  ou  triple  point  de  vue 
de  la  raison,  de  la  science  et  de  la  doctrine  révélée.  On  pourra  trouver 


—  316  — 

que  c*e8i  trop  pour  six  discours  de  moyenne  étendue,  et  telle  est 
peut-être  Texplication,  au  moins  partielle,  du  principal  défaut  de  ce 
livre  :  trop  de  roideur  et  de  densité. 

Une  préface,  très-trayaillée,  indique  tout  d*abord  tesprit  et  la 
méthode  de  cet  enseignement  mixte,  où  la  foi  s* adresse  à  la  raison  en 
lui  parlant  son  langage.  On  ne  saurait  contester  la  justesse  générale 
de  la  thèse  du  P.  Didon  :  il  veut  qu'en  gardant  Tesprit  de  la  doctrine 
lethéologien  en  rajeunisse  la  lettre  et  y  joigne  la  méthode  scien- 
tifique. Mais  on  pourra^  sans  parler  d'une  excessive  préoccupation  et 
curiosité  de  style,  se  plaindre  qu'il  n'y  ait  pas  assez  de  précision 
dans  certaines  parties  de  ce  programme  délicat,  et  qu'on  ne  définisse 
bien  ni  les  ((  aspirations  généreuses  o  auxquelles  on  adhère  si  chau- 
dement (p.  33),  ni  les  «  formes  usées  »  dont  on  se  détache  avec  une 
ardeur  qui  pourra  paraître  trop  empressée  et  trop  juvénile.  Nous  ne 
doutons  pas,  du  reste,  que  des  explications  plus  nettes  n'eussent 
éloigné  toute  interprétation  fâcheuse  des  dernières  pages  de  la  pré- 
face, qui  en  admettent  une  excellente,  mais  qui  laissent  place  à  des 
utopies  et  à  des  rêves  de  rénovation  et  de  conciliation  toujours  dan- 
gereux. 

Ajoutons  qu'il  n'y  a  rien  de  semblable  dans  les  conférences  elles- 
mêmes.  Dès  la  première,  sur  la  vraie  définition  de  F  homme  (un  être 
essentiellement  composé  de  corps  et  d'âme,  à  l'image  et  à  la  ressem- 
blance de  rinfini),  on  reconnaît  le  disciple  de  saint  Thomas,  le  fidèle 
interprète  de  la  philosophie  chrétienne,  également  éloignée  de  la 
science  matérialiste  et  d^'un  spiritualisme  exclusif.  La  seconde.  Ori- 
gine divine  de  t homme j  démontre  la  création  intelligente  et  libre,  et 
réfute  la  théorie  de  l'évolution;  c'est  solide,  mais  bien  serré!  Les 
deux  suivantes  roulent  sur  le  problème  de  la  destinée  :  après  avoir 
repoussé,  comme  dégradantes,  ou  incertaines,  ou  incomplètes  et 
inexactes,  les  données  de  la  philosophie  négative  ou  séparée  et  d'une 
prétendue  science  positive,  l'orateur  expose  et  défend  avec  éloquence 
la  réponse  du  Credo  catholique.  Les  deux  dernières  sont  consacrés  à 
Yhomme  déchu  et  à  Vhomme  régénéré.  Sur  la  cinquième  seule,  on 
pourra  faire  quelques  réserves  relatives  au  fond.  La  manière  dont 
le  P.  Didon  expose  et  prétend  démontrer  la  tache  originelle  ne 
donne  prise  à  aucune  censure  théologique,  et  sa  théorie,  peu  sympa- 
thique à  certaines  écoles  catholiques,  trouverait  des  appuis  solides 
dans  d'autres.  Mais,  dans  une  œuvre  surtout  apologétique,  pourquoi 
embrasser  l'explication  de  la.  chute  la  plus  difficile  à  concilier  avec 
les  attributs  divins,  au  lieu  de  justifier  ce  dogme  sans  chercher  à  le 
prouver  directement  et  sans  perdre  de  vue  la  condanmation  de  la 
cinquante-sixième  proposition  de  Baïus  :  Deus  non  potuisset  ab  initia 
talem  creare  hominem  qualis  nunc  nasdtur.  Cette  proposition,  il  est 


—  317  — 

vrai,  est  le  principe  de  la  démonstration  chrétienne  de  Pascal  ;  mais 
tant  pis  pour  Pascal  et  sa  démonstration  ! 

Il  7  a  plaisir  à  saluer  un  talent  nouveau  dans  la  chaire  française. 
Le  P.  Didon  a  l'accent  moderne,  qui  fit  en  partie  le  succès  de  son 
incomparable  maître,  le  P.  Lacordaire.  Il  aime  à  frapper  fort  autant 
que  juste,  à  tenir  Tesprit  en  éveil  par  la  hardiesse  de  la  pensée  et  le 
relief  de  l'expression  ;  il  a  d'ailleurs  le  don  naturel  de  la  distinction 
et  tend  de  lui-même  vers  les  hauteurs.  Mais  on  peut  lui  trouver  les 
défauts  de  ses  qualités.  Plus  de  simplicité,  d'abandon,  de  familiarité, 
au  moins  par  places,  doublerait  l'intérêt  de  ses  discussions  et  Teffet 
de  sa  parole,  et  sauverait  son  style,  d'ailleurs  remarquable  a  plusieurs 
égards,  du  reproche  de  préciosité  et  de  roideur. 

LÉONCE  COUTURB. 


Kje»  Gonlllte  de  la  science  et  de  la  religion,  par  J.  W.  Draper, 
professeur  à  l'université  de  New  York.  Deuxième  édition.  Paris,  Germer 
Baillière,  1875.  In-8de  xii-265  p.  Fait  partie  de  la  Bibliothèque  sdentifique 
intematimale,  —  Prix,  relié  en  toile  anglaise  :  6  francs. 

Le  livre  de  M.  Draper  est  un  des  plus  violents  qu'ait  publiés  la 
librairie  Germer  Baillière,  qui  en  a  cependant  publiés  tant  d'autres 
contre  le  catholicisme.  L'auteur  a  quelques  ménagements  pour  le  pro- 
testantisme, mais  rinfaillibilité  de  l'Église  et  du  Pape  le  mettent  hors 
de  lui,  et  il  n'est  point  d'intentions  perverses  et  criminelles  qu'il  ne 
prête  à  la  religion  romaine.  Voici  quelques-unes  des  dernières  phrases 
du  volume:  «Cette  puissance  (la  religion  catholique),  sachant  bien 
qu'elle  ne  fera  pas  de  miracles  pour  le  triomphe  de  sa  cause,  a  recours 
à  des  moyens  humains  (?)  et  jette  le  trouble  dans  la  société,  par  ses  intri' 
gués,  et  les  maux,  dans  le  monde,  par  son  alliance  avec  les  despotes. 
Ses  prétentions  impliquent  uuq  rébellion  contre  la  civilisation  moderne 
et  une  intention  de  la  détruire^  si  faire  se  peut,  au  risque  de  détruire 
la  société  elle-même.  Pour  s'y  soumettre,  il  faudrait  que  les  hommes 
eussent  des  âmes  d'esclaves.  »  Mais  a  tout  ce  qui  s'appuie  sur  le  men-- 
songe  et  la  fraude  périra.  Des  institutions  qui  sont  rorganisation  de 
l'imposture  devront  enân  produire  leurs  titres  au  tribunal  de  la  raison  » 
(p.  264-265).  M.  Draper  vante  plusieurs  fois  son  impartialité  dans  sa 
préface  (p.  vu,  vin,  xii).  Il  dit  formellement,  p.  viu  :  «Je  me  suis,  en 
un  sens,  identifié  avec  (les  deux  partis  en  présence)  afin  de  me  péné- 
trer mieux  de  leurs  raisons;  mais,  en  un  sens  plus  large,  je  suis 
resté  étranger  au  débat,  aûn  de  ne  pas  compromettre  mon  impar- 
tialité. »  Il  faut  être  bien  aveugle  par  la  passion  pour  se  poser  en 
simple  rapporteur  impartial  quand,  pendant  plus  de  250  pages,  on  ne 
•ait  désigner  l'Église  que  par  des  termes  injurieux. 
On  comprend  combien  les  faits  doivent  être  dénaturés  sous  la  plume 


—  3J8  — 

d'un  tel  rapporteur.  Les  conflits  de  la  science  et  de  lareUgion  sont 
racontés  sous  forme  historique,  depuis  l'origine  du  christianisme  jus- 
qu'à nos  jours.  M.  Draper  prend  naturellement  parti  contre  les  évê- 
ques,  par  exemple,  contre  «  un  certain  Théophile  qui  occupait  le  siège 
épiscopal  d'Alexandrie  (p.  39),  »  contre  a  ce  fanatique»  qui  détruisit  la 
grande  bibliothèque  d'Alexandrie  (p.  40}  I  Toutes  ses  sympathies  sont 
pour  les  hérétiques,  pour  Arius  qui  jugeait  que  la  nature  des  choses 
voulait  que  le  Père  fût  plus  vieux  que  le  Fils  (p.  39),  pour  Nestorius, 
qui  tt  rejetait  le  bas  anthropomorphisme  populaire  (p.  51),  »  pour 
Mahomet,  u  qui  conçut  la  haine  des  pratiques  idolàtriques  de  TÉglise 
d'Orient  (p.  57),  »  etc.  Quant  à  ces  conflits  prétendus  entre  la  science 
et  la  religion,  dont  la  gravité  est  telle  qu'il  semble  que  toute  concilia- 
tion soit  devenue  impossible  entre  les  deux  antagonistes,  quels  sont- 
ils  donc?  La  question  de  la  forme  de  la  terre,  de  la  prééminence  de 
notre  planète,  de  son  immobilité,  de  son  antiquité,  des  six  jours  de  la 
création,  de  l'universalité  du  déluge,  de  la  condition  primitive  de 
rhomme.  Certes,  voilà  bien  de  quoi  proclamer  Tincompatibilité  de  la 
science  et  de  la  foi  1  La  religion  a  toujours  admis  et  admettra  toujours, 
non  pas,  il  est  vrai,  ce  qu'imaginera  tel  ou  tel  savant,  mais  ce  qui 
démontrera  réellement  la  science,  parce  qu'il  n'y  aura  jamais  contra- 
diction entre  deux  lumières  qui  procèdent  du  même  foyer,  la  révélation 
et  la  raison.  Pour  conclure  en  un  mot,  le  nouveau  volume  de  la  Biblio- 
thèque scientifique  n'est  pas  un  livre  de  science,  mais  de  passion. 

G.  K. 


JURISPRUDENCE 

Introduction  lilstorlque  A  l'étude  du  Droit,  par  M.  J.  Tissot, 
doyen  honoraire  de  la  faculté  des  Lettres  de  Dijon.  Paris,  Marescq  aîné, 
1875.  In-8  de  xv-549  p.  —  Prix  :  9  fr. 

Le  livre  de  M.  Tissot  a  été  écrit  en  vue  d'un  concours  ouvert  par 
l'Académie  des  sciences  morales  et  politiques  sur  cette  question  : 
ce  Établir  historiquement  Tuniversalité  des  principes  de  la  morale,  n 
Il  s'agissait  de  réfuter,  à  l'aide  du  raisonnemnnt  et  à  Taide  des  faits, 
le  scepticisme  en  matière  de  droit  et  de  morale.  Le  svget,  on  le  voit, 
n'était  pas  précisément  très-neuf .  Nous  ne  saurions  en  faire  un  crime 
à  l'auteur,  qui  Ta  subi  et  non  choisi.  Mais  ce  que  nous  pouvons  et 
devons  lui  reprocher,  c'est  le  soin  qu'il  a  pris  de  rééditer,  comme  & 
plaisir,  les  lieux  communs  les  plus  rebattus  de  la  philosophie  anti- 
religieuse. Dans  un  précédent  ouvrage  tendant  au  rétablissement  du 
divorce,  il  avait  émis  des  doctrines  sociales,  avec  lesquelles  nous  ré- 
pudions toute  solidarité.  Le  présent  ouvrage  n'est  guère  qu'un  long 
réquisitoire  contre  toutes  les  religions  connues.  A  entendre  M. Tissot, 


—  3i9  — 

ce  sont  les  religions  qui  ont  toujours,  par  leurs  abus^  corrompu  les 
mœurs  et  altéré  le  sens  moral  :  a  Qu'on  nous  dise  à  présent,  s'écrie- 
t-il,  si  l'athéisme  eût  jamais  produit  de  pareils  ravages,  et  si  Bajle 
n*a  pas  mille  fois  raison  quand  il  soutient  la  thèse  qui  avait  déjà 
arraché  à  Lucrèce  ce  cri  de  profonde  et  douloureuse  vérité  :  a  Tan" 
tum  religio  poiuit  suadere  mahrum  (p.  575)  I  i  —  Plus  loin^  il  s'in- 
digne a  contre  les  déclamateurs  qui  ne  voient  de  morale  et  de 
moralité  possibles  que  dans  la  religion  et  par  la  religion  ;  qui  font 
même  semblant  de  croire,  contrairement  à  Texpérience  de  tous  les 
temps^  que  la  religion  suffit  pour  moraliser  les  nations  et  les  indivi- 
dus^ que  les  lumières  j  'sont  inutiles^  dangereuses  même  (p.  576).  » 
—  Est-il  besoin  d'ajouter  que  lesr  coups  les  plus  violents  visent  le 
catholicisme  ?  La  chose  va  de  soi.  Il  est  vrai  que,  pour  être  rudes,  ces 
attaques  n'en  sont  pas  plus  redoutables.  Nous  n'en  voulons  citer  qu'un 
exemple.  A  la  suite  de  statistiques  criminelles  qui  donnent  à  certaines 
populations  protestantes^  la  supériorité  sur  certaines  populations 
catholiques,  M.  Tissot  propose  sérieusement  Texplication  suivante  : 
(i  Le  temps  consacré  à  de  vaines  cérémonies  religieuses,  outre  qu'il 
est  une  cause  d'appauvrissement  pour  tous,  même  pour  ceux  qui 
croient  l'employer  le  plus  régulièrement,  est  de  plus,  pour  les  autres^ 
une  occasion  de  jeu,  d'ivrognerie  et  de  débauche  (p.  586).  » 

Toutefois,  en  dépit  des  influences  religieuses,  M.  Tissot  ne  déses- 
père pas  du  salut  de  la  société.  Il  se  rallie  au  drapeau  du  progrès 
indéfini;  il  professe  la  théorie  de  V évolution.  Ne  s'écartantdu  système 
darwinien  qu'en  ce  qui  regarde  les  origines  de  l'humanité,  il  admet  ses 
conséquences  pour  ce  qui  concerne  l'avenir. 

Disons  maintenant,  à  la  décharge  de  l'Académie  des  sciences 
morales  qui,  après  deux  concours  jugés  insuffisants,  a  décerné  une 
médaille  à  M.  Tissot,  que  les  chapitres  où  ces  tendances  s'affichent  le 
plus  hautement,  ne  figuraient  pas  dans  le  mémoire  couronné  et  ont 
été  ajoutés  après  coup.  A.  db  Clays. 

De  la  Propriété  et  de   se*   forme»  primitive»,   par    M.  E. 

DE  Lavelete.  Paris,  Germer  Baillière,   1874.   In-8  de    xxiv-396   p.   — 
Prix  :  7  fr.  50. 

Deux  choses  doivent  être  distinguées  dans  l'ouvrage  de  M.  de  Lave- 
leye  :  nous  ne  saurions  en  approuver  les  tendances  économiques  ;  mais 
nous  devons  en  reconnaître  le  mérite  et  l'intérêt,  au  point  de  vue  des 
recherches  scientifiques. 

Selon  l'auteur,  les  juristes  se  trompent  lorsque,  sur  la  foi  des 
Institutes^  ils  font  dériver  la  propriété  de  l'occupation  de  la  res 
nuUius.  La  propriété  foncière,  avant  de  constituer  ce  droit  individuel 
et  exclusif  dont  le  domaine  quiritaire  est  l'expression  la  plus  parfaite, 
a  toujours  et  partout  revêtu,  au  sein  des  sociétés  rudimentaires^  une 


—  320  — 

forme  collective.  Au  début,  le  sol  appartient  au  clan  ou  à  la  tribu,  qui 
Texploite  en  commun.  «  Plus  tard,  la  terre  cultivée  est  divisée  en  lots 
répartis  entre  les  familles  par  la  voie  du  sort  ;  Tusage  temporaire  est 
seul  attribué  ainsi  àTindividu.  Le  fonds  continue  à  rester  la  propriété 
collective  du  clan,  à  qui  il  fait  retour  de  temps  en  temps,  afin  qu'on 
puisse  procéder  à  un  nouveau  partage  (p.  5).  »  —  Tel  était  le  système 
en  vigueur  chez  les  Hébreux  ;  c'était  celui  des  Germains  au  temps  de 
Tacite;  on  en  retrouve  les  traces  dans  les  légendes  classiques  de  Vâge 
(Cor;  il  forme  encore  aujourd'hui,  du  moins  pour  une  large  part,  le 
régime  de  la  propriété  chez  les  Arabes,  les  Afghans,  etc.;  nous  le 
voyons  fonctionner  surtout  dans  deux  institutions  que  Tauteur  décrit 
avec  détails,  le  Mir  russe  et  les  communautés  de  village  à  Java 
(p.  9-69);  enfin,  nous  saisissons,  dans  les  Allmenden  de  la  Suisse,  sa 
plus  moderne  et  Tune  de  ses  plus  curieuses  manifestations  (p.  267-314). 

Puis,  en  suivant  l'ordre  des  temps,  apparaissent  les  communautés 
de  famille.  Désormais,  la  propriété  constitue  un  droit  privé,  mais  non 
pas  encore  un  droit  individuel.  M.  de  Laveleye  consacre  à.  l'histoire 
de  ces  communautés,  notamment  dans  notre  France  du  moyen  âge, 
des  chapitres  qui  confirment  et  complètent  parfois  les  belles  recherches 
de  M.  Le  Play.  Ici  se  posent  les  questions  les  plus  ardues.  Comment 
s^est  accomplie  la  première  transformation  qui  a  remplacé  le  clan  pro- 
priétaire par  la  famille  propriétaire?  Comment  une  plus  récente  évo- 
lution est-elle  venue  enfin  consacrer  la  notion  du  droit  individuel? 
M.  de  Laveleye  entre,  sur  ces  points  divers,  en  des  développements 
que  nous  recommandons  à  toute  Tattention  du  lecteur. 

Mais  il  n*a  pas  borné  son  ambition  &  scruter  le  passé;  et  tnalheureu- 
sèment,  derrière  Térudit,  perce  Técenomiste  dont  les  tendances  nous 
paraissent  très-dangereuses.  Ce  n'est  pas  que  nous  désapprouvions  sa 
critique  de  la  Révolution  française,  lorsqu'il  écrit  :  «  Elle  a  posé 
l'homme  abstrait,  l'individu  isolé,  et  lui  a  reconnu  théoriquement  tous 
les  droits  naturels,  mais,  en  même  temps,  elle  a  anéanti  tout  ce  qui  le 
rattachait  aux  générations  précédentes  et  à  ses  concitoyens  actuels... 
La  commune^  ayant  perdu  toute  autonomie  locale,  n'est  plus  qu'un 
rouage  administratif  obéissant  au  pouvoir  central.  La  propriété  com- 
munale a  été  presque  partout  vendue  ou  réduite...  Plus  de  corpora- 
tions industrielles ,  les  sociétés  anonymes  qui  en  tiennent  lieu  ne  sont 
qu'un  moyen  d'associer  des  capitaux,  et  non  des  hommes.  La  religion, 
ce  lien  puissant  des  âmes,  a  perdu  la  plus  grande  partie  de  son  action 
fraternelle,  et  la  famille,  fortement  ébranlée,  n'est  plus  guère  que 
l'organisation  de  la  succession.  L'honmie  est  un  être  sociable,  et  l'on 
a  détruit  ou  affaibli  les  institutions  où  la  sociabilité  prenait  corps  et 
donnait  une  base  solide  à  l'État  (p .  268  et  269).  »  —  Tout  cela  est  bien 
dit,  autant  que  bien  pensé.  Mais  où  trouver  le  remède  qui  réparera  le 


—  321  — 

mal  causé  par  la  Révolution?  Sera-ce  dans  le  rétablissement  des  com- 
munautés de  famille?  Certes,  il  est  permis  d*estimer^  d*envier  même 
les  peuples  dont  les  mœurs  et  Tétat  social  ne  répugnent  pas  à  cette 
antique  institution.  Seulement,  nous  constatons  que,  si  la  propriété 
individuelle  est  partout  sortie  de-  la  communauté  primordiale,  jamais 
ne  s'est  produit  le  phénomène  inverse.  M.  de  Laveleye  l'avoue  lui- 
même  (p.  16),  et  il  ajoute  :  «  Une  semblable  opération  pourrait  à 
peine  se  concevoir  ;  »  elle  implique,  en  effet,  tout  un  ensemble  de 
coutumes  et  de  vertus  qu^il  n'appartient  pas  au  législateur  de  décréter 
par  voie  d'autorité . 

Quant  au  rétablissement  des  communautés  de  village,  cette  solution, 
malgré  les  sympathies  qu'elle  semble  rencontrer  de  la  part  de  notre 
auteur,  doit  être  encore  plus  absolument  écartée  :  elle  se  heurterait 
au£  mêmes  impossibilités  que  la  précédente,  et  elle  n'offi*irait  pas  les 
mêmes  avantages. 

Reste  une  dernière  solution,  qui  consisterait  à  attribuer  à  l'État 
seul  la  propriété  du  sol.  Ici,  nulle  impossibilité  n'existe  ;  l'entreprise 
serait,  au  contraire,  d'une  facilité  que  nous  appellerions  volontiers 
effrayante.  Il  suffirait  de  modifier  dans  son  principe  la  taxe  foncière  : 
au  lieu  d'être  un  impôt,  elle  deviendrait  une  rente;  et  le  relèvement 
dont  ses  tarifs  seraient  l'objet  permettrait,  conformément  au  pro- 
gramme des  physiocrates,  d'abolir  toutes  les  autres  contributions. 

Nous  regrettons  de  voir  M.  de  Laveleye  appuyer  de  son  autorité  ces 
doctrines  socialistes  qui,  faisant  de  l'État  Tunique  propriétaire  et  le 
seul  détenteur  de  la  richesse,  détruiraient  toute  activité  et  toute 
liberté,  aboutiraient  à  la  ruine  en  économie  et  au  césarisme  en  poli- 
tique. —  Il  est  surtout  poussé  par  le  désir  de  l'égalitô  :  a  Les  démo- 
craties, où  l'on  ne  parvient  pas  à  conserver  l'égalité  des  conditions  et 
où  deux  classes  hostiles,  les  riches  et  les  pauvres,  se  trouvent  en  pré- 
sence, arrivent  au  despotisme  en  passant  par  l'anarchie...  (p.  xxiii).  o 
S'il  est  vrai  que  la  démocratie  ne  puisse  s'accommoder  des  inégalités 
qui  résultent  du  libre  exercice  des  facultés  humaines,  tant  pis 
pour  cette  forme  sociale.  Ce  vice  radical  la  condamne  ;  et  ce  n'est  pas 
en  l'exagérant  que  l'on  y  rejnédiera;  ce  n'est  pas  en  édictant  l'égalité 
de  tous  dans  une  commune  misère  et  sous  le  joug  d'une  commune 
servitude,  que  Ton  sauvera  notre  société,  menacée  par  la  lutte  entre 
le  salaire  et  le  capital.  D'autres  moyens  doivent  être  mis  en  œuvre. 
La  question  présente,  avant  tout,  un  côté  moral  et  religieux  que 
M.  de  Laveleye  parait  trop  peu  soupçonner.  A.  de  Claye. 


Octobre  i87o.  T.  XIV,  21. 


—  322  — 

SCIENCES 

Cours  de  philosophie.  Première  partie,  PsychologiBy  par  Th.  Bernard, 
professeur  de  philosophie  au  lycée  de  Montpellier.  Paris,  Delagrave,  1874. 
In-8  de  vu-387  p.  —  Prix  :  5  fr. 

M.  Bernard  exprime^  dans  sa  préface,  sous  une  forme  modeste  mais 
suffisamment  claire,  Tespoir  de  surpasser  les  traités  élémentaires  de 
philosophie  qui  ont  précédé  le  sien  ;  il  se  flatte  d'être  à  la  fois  plus 
clair,  plus  complet  et  plus  scientifique.  Nous  devons  convenir  que  cette 
louable  ambition  a  été  servie,  au  moins,  par  un  travail  très-conscien* 
cieux.  Le  volume  ne  renferme  que  le  tiers  ou  le  quart  de  la  philosophie 
classique,  et  il  offre  près  de  quatre  cents  pages  d^une  impression  très- 
compacte,  quoique  bien  lisible  et  agréable  à  l'œil.  De  plus,  la  matière 
est  méthodiquement  divisée^  avec  des  titres  d'articles  précis  et 
voyants,  et  toute  retendue  désirable  dans  les  développements  et  les 
exemples.  S'ensuit-il  que  le  livre  soit  aussi  parfaitement  clair  qu'on  le 
croirait  au  premier  coup  d'œil,  et  que  l'auteur  a  voulu  le  faire?  A 
notre  avis,  cet  éloge  convient  à  plusieurs  pages,  et,  en  général,  aux 
plus  solides  de  fond,  par  exemple  à  ce  long  chapitre  sur  les  Passions 
(p.  76-91),  à  peu  près  irréprochable  de  doctrine  et  de  stjle.  Mais,  en 
d'autres  endroits,  les  définitions,  les  preuves,  les  explications  nous 
paraissent  un  peu  laborieuses  et  confuses,  de  sorte  qu'au  seul  regard 
de  la  clarté,  sans  parler  de  critiques  qui  ont  encore  beaucoup  d'impor- 
tance, le  livre  de  M.  Bernard  ne  nous  semble  pas  un  livre  d'ensei- 
gnement classique  pleinement  réussi. 

Peut-être  la  raison  principale  de  ce  défaut  est-elle  dans  la  situation 
doctrinale  du  savant  professeur.  M.  Bernard  n'appartient  pas  à  la 
nouvelle  école  de  la  volonté;  il  n'est  pas  davantage  un  spiritualiste  de 
la  vieille  roche  ou  un  demeurant  de  l'éclectisme  ;  mais  il  est  difficile 
de  dire  ce  qu'il  est,  parce  que  sa  doctrine,  sans  relever  d'une  école 
déterminée,  manque  de  vie  propre  et  d'unité.  Il  est  au  courant  des 
théories  et  des  controverses  contemporaines,  ce  qui  est  à  merveille, 
mais  il  semble  sollicité  par  des  tendances  contradictoires,  qui  lai 
rendent  impossibles  cette  précision  et  cette  décision  sans  lesquelles  il 
n'j  a  pas  d'enseignement  philosophique  sérieux  et  utile. 

Son  introduction  n'ofire  que  les  idées  communément  reçues  sur  les 
généralités  de  la  philosophie  ;  mais  pourquoi  ne  pas  en  affirmer  nette- 
ment le  caractère  scientifique  ?  —  Le  manque  d'originalité  et  de  pro- 
fondeur en  psychologie,  dont  l'auteur  s'excuse  (p.  26)  comme  d'une 
nécessité  de  son  programme,  nous  parait  résulter  bien  plutôt  de  sqs 
aptitudes  et  de  ses  habitudes  personnelles.  Quoi  de  plus  incomplet  que 
sa  critique  du  sens  vital  (p.  69)  ?  Quoi  de  plus  indécis  que  sa  conclusion 
sur  la  question  des  Universaux  (p.  136)?  Quoi  de  plus  évidemment  in- 


—  323  — 

sufOsant  et  de  moins  explicatif  que  sa  loi  de  Possodatûm  des  idées 
(p.  182),  même  avec  les  développements  très-étendus  qui  l'accompa- 
gnent? C'est  ici  que  Tauteur  aurait  pu  mieux  profiter  des  travaux  de 
la  psychologie  anglaise,  pour  laquelle  il  avoue  (p.  26)  une  sympathie 
qui  n'est  pas  de  trop  bon  augure,  puisqu'elle  ne  paraît  guère  porter 
sur  les  détails  utiles  de  cette  philosophie  dévoyée.  —  Du  reste,  quant 
au  fond,  ces  pages  valent  bien  celles  qui  leur  correspondent  dans  la 
plupart  des  manuels  universitaires;  et  il  y  a  de  plus  ici  l'ampleur  des 
explications,  et  beaucoup  de  cadres  assez  bien  tracés,  où  se  classent 
et  se  coordonnent  d'elles-mêmes  les  observations  psychologiques;  le 
style,  sans  avoir  toute  la  précision  désirable,  est  toigours  éloigné  de 
cette  phraséologie  littéraire  sous  laquelle  trop  de  livres  de  ce  genre 
dissimulent  leur  faiblesse  scientifique. 

Nous  reconmianderions  donc  très-volontiers  cet  essai,  au  moins 
comme  livre  de  lecture  pour  les  élèves,  sans  quelques  défauts  plus 
graves,  qui  s'accentueront  davantage  dans  d'autres  parties  de  la  philo- 
sophie, si  Tauteur  continue  ce  cours.  Sa  métaphysique  nous  parait, 
sinon  fausse,  au  moins  trop  indécise  sur  les  points  les  plus  essentiels. 
Nous  recommandons  aux  maîtres  l'examen  de  ses  chapitres  sur  la 
liberté  et  sur  la  spiritualité  de  l'âme.  Sur  le  premier  point,  il  mérite 
certains  éloges  :  il  combat  le  déterminisme  contemporain  et  celui  de 
Leibniz,  et  il  a  une  page  remarquable  contre  la  théorie  de  M.  Fouillée 
(309-310)  ;  mais  sa  réfutation  du  fatalisme  religieux  renferme,  sur  le 
concours  divin^  une  critique  très-superficielle  et  très-contestable  ;  mais 
surtout,  sa  propre  théorie  du  libre  arbitre  est  vague  et  obscure,  et, 
malgré  ses  efforts,  il  n'a  pas  su  trouver  un  milieu  nettement  défini 
entre  le  déterminisme  et  la  liberté  d'indifférence.  —  Quant  à  la  spiri- 
tualité, Tauteur  b'j  embarrasse  encore  davantage  :  ses  pages  contre  le 
matérialisme,  d'ailleurs  assez  bonnes,  sont  accessoires  ;  quand  il  veut 
directement  établir  sa  thèse,  il  ne  sait  où  prendre  pied;  il  affaiblit  lui- 
môme  comme  à  plaisir  les  arguments  qu'il  expose  ;  faute  de  bien  éclai- 
cir  les  idées  de  vie  et  de  force^  il  ne  laisse  aucune  valeur  à  Topposition 
établie  par  tous  les  spiritualistes  entre  les  attributs  du  corps  et  ceux 
de  l'âme.  Enfin,  dans  ses  pages  mêmes^  comme,  d'après  lui,  dans  le 
monde  contemporain,  «  le  matérialisme  tient  en  échec  le  spiritua- 
lisme, 0  parce  qu'il  n'a  pas  eu  soin  de  le  réduire  à  sa  nullité  fonda- 
mentale, dégagée  de  l'appareil  scientifique  qui  trompe  les  esprits  légers. 

L'attention  sérieuse  que  nous  avons  accordée  à  ce  livre  témoigne 
assez  de  notre  estime  pour  un  remarquable  effort  d'amélioration  dans 
Texposition  élémentaire  de  la  philosophie  ;  l'importance  des  saines 
doctrines  plus  ou  moins  compromises,  peut-être  contre  le  gré  de  l'au- 
teur, dans  plusieurs  de  ses  pages,  justifiera  la  sévérité  de  notre 
critique.  Lbonck  Couture. 


—  324  — 

K^e  Matérialisme  contemporain,  par  Paul  Janet  ,  membre  de 
rinstitut,  professeur  à  la  faculté  des  lettres  de  Paris.  2*  édition.  Paris, 
Germer  Baillière^  4875.  In-18  de  168  p.  (Bibliothèque  de  philosophie  œntem' 
poraine.)  —  Prix  :  2  £r,  50. 

Le  matérialisme  scientifique  du  dix-neuvième  siècle  a  trouvé  son 
expression  la  plus  précise  dans  le  livre  trop  célèbre,  publié  par 
M.  Biichner  en  1856,  sous  ce  titre:  Force  et  matière.  C'était  le  résultat 
d'un  mouvement  purement  empirique,  préparé  par  l'idéalisme  cbimé- 
rique  de  Schopenhauer  (légitime  héritier  de  Eant)  et  par  Thégélia- 
nisme  impie  de  Feuerbach  ;  et  la  formule  de  cet  empirisme  avait  été 
donnée  en  1852  par  M.  Moleschott,  dans  ses  fameuses  lettres  sur  la 
Circulation  :  a  Sans  matière  point  de  force,  sans  force  point  de  matière.» 
Cette  école  a  déjà  égalé  Tancien  matérialisme  français  par  Taudace 
de  ses  explications  psjcho-phjsiologiques  :  «  Le  cerveau,  a  dit 
M.  Yogt,  sécrète  la  pensée,  comme  le  foie  sécrète  la  bile,  et  les  reins 
sécrètent  Turine.  »  Avouons,  à  Thonneur  de  M.  Biichner,  qu'il  a  senti 
la  parfaite  inanité  de  cette  comparaison,  mais  sans  relever  d'une  ligne 
le  niveau  métaphysique  et  moral  du  nouveau  matérialisme,  dont  son 
livre  est,  au  dire  de  M.  Paul  Janet,  «  le  vrai  manuel.  » 

Il  appartenait  à  Tun  des  représentants  les  plus  en  vue  da  spiritua- 
lisme universitaire  français  de  combattre  cette  résurrection  préten- 
tieuse et  bruyante  d'un  système  que  M.  Cousin  se  flattait  d'avoir 
enterré.  Il  s'acquitta  de  ce  devoir  par  le  mémoire,  élégant  et  modéré 
de  forme,  très-incisif  au  fond,  dont  nous  avons  atgourd'hni  une  édition 
améliorée,  où  Tauteur  a  pu  tenir  compte,  sur  quelques  détails  de  fait, 
des  remarques  de  son  traducteur  allemand.  Ce  mémoire  fut  apprécié 
très-favorablement  par  les  meilleurs  juges,  et  il  attend  encore  une 
réponse.  Le  matérialisme  n'en  va  pas  moins  son  train,  avec  toutes  les 
allures  d'un  triomphe  que  rien  ne  Tempêche  de  s'attribuer,  car  il  ne 
tient  compte  d'aucune  attaque  ni  d'aucune  défense.  C'est  d'ailleurs  un 
motif  de  plus  pour  recommander,  à  tous  ceux  qui  s'occupent  d'études 
scientifiques,  la  thèse  de  M.  Janet,  dont  il  suffit  d'indiquer  ici  les 
grandes  lignes. 

Après  un  tableau  saisissant,  quoique  restreint,  de  la  philosophie  alle- 
mande depuis  Hegel,  et  une  claire  et  vive  exposition  du  système  de 
Biichner,  il  entame  la  critique  de  ce  système.  L'énoncé  mémo  de  son 
dogme  fondamental  n'a  pas  de  sens  précis.  Car,  pour  affirmer  qu'il 
n'y  a  pas  de  force  sans  matière,  encore  faut-il  dire  ce  qu'on  entend  par 
matière  ;  et  la  notion  adoptée  par  Bûchner  se  trouve  justement  la  plus 
incompatible  avec  l'idée  de  force.  On  le  met  ensuite  dans  l'impossi- 
bilité d'expliquer,  par  son  matérialisme  mécanique,  V  lemouveipent; 
2^  la  vie;  3^  la  génération  :  4^  la  pensée.  Les  hypothèses,  vieilles  ou 
modernes,  proposées  sur  ces  divers  points,  telles  que  la  force  d'attrac- 


—  325  — 

lion,  l'hétérogénief  le  djnanisme  cérébral,  etc.,  sont  discutées  avec 
ane  convenance  parfaite  et  une  remarquable  puissance  d'analyse.  Ni 
le  fond  de  la  doctrine  de  M.  Janet,  ni  les  preuves  qui  Tappuient  n'ont 
le  caractère  de  la  nouveauté.  Mais  le  talent  de  Texposition  leur  donne 
un  relief  très-frappant  et  comme  un  air  de  jeunesse,  en  face  de  sys- 
tèmes qui  n'ont  rien  corrigé  au  défaut  de  Tempirisme  de  tous  les 
temps  :  amas  d'hypothèses  gratuites  et  contradictoires. 

Le  dernier  chapitre  de  ce  petit  livre,  dans  la  première  édition,  rou- 
lait sur  le  darwinisme  ;  c'était  un  fragment  d'un  ouvrage  encore  iné- 
dit sur  les  catms  finales.  L'auteur  ne  le  reproduit  pas  cette  fois,  mais 
il  le  remplace  par  un  excellent  examen  du  livre  récent  de  M.  Louis 
Viardot,  intitulé  Libre  examen^  qui  n'est  qu'un  remaniement,  sous 
une  forme  plus  française,  des  idées  de  BUchner.  C'est  là  que  M.  Paul 
Janet  est  amené  à  toucher  les  questions  de  création,  de  vie  future,  etc. 
Nous  regrettons  qu'il  garde  sa  position  de  philosophe  rationaliste  en 
face  du  problème  religieux^  mais  il  faut  lui  rendre  cette  justice  que 
ses  armes  lui  suffisent  contre  M.  Yiardot,  et  même  contre  Sainte- 
Beuve  et  M.  Havet. 

Nous  aurons  plus  d'une  occasion  peut-être  de  déclarer  nos  dissen- 
timents avec  l'éloquent  professeur  de  philosophie  de  la  Sorbonne  ; 
ai:^ourd'hui,  ce  nous  est  une  vive  satisfaction  de  recommander,  sans 
réserve  sérieuse,  cette  œuvre  décisive  et  méritoire  de  controverse 
vraiment  scientifique  sur  l'un  des  dogmes  essentiels  de  la  foi  des  vrais 
philosophes  et  de  l'humanité.  Lêoncb  Couture. 


Bote.  Question  actuelle,  par  le  R.  P.  de  Bonniot,  de  la  Compagnie  de 
Jésus.  Tours,  Alfred  Marne,  1875.  fn-8  de  xv-368  p.  —  Prix  :  3  fr.  50. 

Ce  sous-titre,  Question  actuelle,  a  peut-être  été  dicté  à  l'auteur  par 
ses  habitudes  assez  marquées  de  finesse  spirituelle  et  satirique.  Mais 
elle  a  un  sens  très- vrai;  la  question  de  l'intelligence  des  bêtes  n'a 
jamais  été  aussi  souvent  traitée  que  de  nos  jours,  et  si  Ton  considère 
les  doctrines  matérialistes  qui  tendent  à  s'introduire  dans  la  science 
anthropologique,  on  concevra  que  beaucoup  de  savants  ou  prétendus 
tels  ont  été  intéressés  à  détruire  toute  démarcation  essentielle  entre 
la  bête  et  l'homme.  Le  P.  de  Bonniot  a  compris  combien  il  importait 
a  de  réagir  avec  vigueur  contre  la  tendance  de  certaine  science  con- 
temporaine qui  veut  faire  de  l'animal  un  homme,  afin  de  pouvoir  faire 
de  l'homme  un  animal  (p.  xi).  »  De  là,  ce  livre,  qui  a  paru  d'abord  en 
articles  détachés  dans  les  Études  religieuses  des  PP.  jésuites,  mais 
qui  reparait  en  volume  dans  un  état  de  composition  et  d'unité  bien 
supérieur,  et  que  nous  ne  craignons  pas  de  signaler  comme  une 
œuvre  des  plus  remarquables  au  double  point  de  vue  philosophique  et 


—  326  — 

littéraire.  Le  P.  de  Bonniot  est  un  écrivain  plein  de  verve;  il  unit  le 
nerf  et  la  concision  du  style  à  l'abondance  des  pensées  et  à  la  vivacité 
de  l'imagination  ;  surtout  il  a  éminemment  cette  qualité  si  françûse, 
Tesprit,  et  c'est  de  ce  côté  qu'il  doit  se  garer,  car  l'abus  tente  les 
riches.  Avec  tout  cela,  il  a  fait  un  livre  aussi  agréable  que  solide.Nous 
souhaitons  fort,  à  ce  propos,  que  le  succès  de  l'œuvre  répondant  à  son 
mérite  (le  nom  de  l'éditeur  n'y  nuira-t-il  pas  en  faisant  croire  à  un 
livre  pour  distribution  de  prix  ?),  le  R.  P.  de  Bonniot  recueille  aussi 
en  volume  les  études  si  remarquables  qu'il  a  publiées  sur  la  psycho- 
logie  de  M.  Taine,  sur  le  positivisme,  etc.,  et  qu'il  ne  cesse  pas  de 
tenir  sa  place  dans  le  mouvement  philosophique  de  notre  temps,  où 
peu  d'écrivains  marqueraient  plus  que  lui. 

Mais  abordons  le  fond  même  de  ce  livre  charmant.  La  thèse  qu'il 
défend  est  dirigée  contre  presque  toutes  les  théories  contemporaines 
sur  l'intelligence  et  Tinstinct  des  animaux.  Les  spiritualistes  mêmes 
n'établissent  pas,  au  moins  avec  précision,  une  différence  radicale  entre 
la  raison  de  l'homme  et  la  connaissance  de  la  bête.  Le  P.  de  Bonniot 
fait  une  seule*  exception  en  faveur  du  livre,  selon  lui  trop  peu  remar- 
qué, mais  auquel  nous  avons  ici  rendu  pleine  justice  (t.  IX,  p.  189), 
de  Y  Instinct  f  par  M.  Henri  Joly.  Lui-même  ne  prétend  qu'avoir  déve- 
loppé ((  les  pages  admirables  et  trop  peu  connues  où  Bossuet,  s'ins- 
pirant  de  saint  Thomas,  a  déterminé  d'une  main  si  sûre  la  différence 
de  l'homme  et  de  la  bête.  »  Mais  développer  ainsi^  c'est  faire  œuvre 
de  maître. 

Sa  première  partie  [la  Bête  et  V Homme)  est  consacrée  à  dégager  le 
vrai  fond  de  la  connaissance  humaine,  qui  est  la  raison,  à  montrer  le 
caractère  d'universalité  qui  appartient  à  toutes  les  notions  de  la  raison, 
même  la  moins  parfaite,  à  étudier  le  langage  et  la  liberté  comme  fon- 
dés sur  la  raison,  à  prouver  que  l'animal  en  est  absolument  privé  et 
incapable.  ^-  La  seconde  partie  est  une  étude  profonde,  mais  pleine 
de  détails  attachants,  sur  Tinstinct  animal  :  raciion  instinctive  est 
décrite  depuis  son  principe  jusqu'à  ses  manifestations  extérieures  les 
plus  variées  ;  l'auteur  aboutit  à  un  mécanisme  très-différent  de  celui  de 
Descartes,  mais  qui  ne  permet  assurément  pas  d'attribuer  à  l'animal 
a  quelque  vestige  de  personnalité,»  comme  M.  Janet  (£/émen^s  de 
moralcy  p.  186),  ou  la  faculté  de  délibérer  et  de  choisir,  comme  M.  Th- 
Bernard  {Psychol.,  p.  308).  Je  recommande  surtout  aux  psychologues 
le  sixième  chapitre  de  cette  deuxième  partie,  où  l'instinct  et  l'habitude 
sont  analysés  si  nettement,  à  partir  de  Vassociation  des  images  et  de  la 
loi  de  la  simultanéité.  Il  faut  regretter  seulement  que  certaines  parti- 
cularités importantes,  comme  le  passage  de  l'habitude  à  l'instinct  pro- 
prement dit  par  l'hérédité  (p.  113),  soient  trop  rapidement  indiquées. 
— •  La  troisièhie  partie  renferme  l'examen  de  quelques  théories  con- 


—  3Î7  — 

temporaines,  stiriont  celles  de  Darwin  et  d'un  positiviste  français^ 
M.  A.  Sanfion.  C'est  une  contre-épreuve  de  la  thèse  de  Tauteur^  qui 
substitue  partout  ses  explications  à  celles  de  ces  savants^  en  discutant, 
avec  une  finesse  exquise  et  une  verve  parfois  assez  malicieuse,  une 
foule  de  prétendus  raisonnements  faits  par  les  animaux.  —  La  der- 
nière partie  est  intitulée  :  Les  bêtes  dans  V histoire^  et  ce  titre  n'est  pas 
trop  bien  choisi  ;  car  il  semble  annoncer  le  cheval  d'Alexandre,  les 
oies  du  Gapitole,  etc.  Kauteur  a  voulu  dire  :  Histoire  des  opinions  émises 
sur  Vinielligenee  des  bêtes.  Il  les  classe  en  trois  groupes  :  les  bêtes 
raisonnables,  les  bêtes-machines,  les  bêtes  telles  qu'elles  sont;  et  cette 
revue,  qui  plaît  par  la  variété,  lui  permet  d'affermir  encore  la  vraie 
théorie  de  l'instinct  animal. 

Dans  l'appendice  se  trouvent  divers  morceaux  assez  curieux  sur  le 
même  sujet,  et,  en  particulier,  une  polémique  soutenue  par  Fauteur. 
Qn^il  me  soit  permis  de  remarquer  ici  qu'il  a  peut-être  eu  trop  peu  de 
condescendance  pour  les  habitudes  de  langage  et  de  classiflcation 
usitées  aujoard'hui  en  psychologie  ;  ces  habitudes  ont  du  bon,  et,  en  s'y 
conformant  un  peu  plus,  il  se  serait  mieux  fait  comprendre.  Intelli- 
gence y  est  synonyme  de  connaissance;  dès  lors,  il  faut  accorder  Tintel- 
ligence  aux  bêtes.  La  perception  des  rapports  et  la  notion  de  Tuniversei 
et  de  l'absolu  constituent  la  raison^  qui  est  le  propre  de  l'homme.  Les 
animaux  ne  raisonnent  pas;  mais  on  peut  dire,  au  sens  de  la  psycho- 
logie contemporaine,  qu'ils  connaissent  et  même  qu'ils  ju^^n^  dans  une 
forme  de  jugement  primitif  et  immédiat  où  n*entre  pas  d*idée  géné- 
rale et  que  Técole  rapporte  à  YestimativCj  faculté  commune  à  Thomme 
et  à  la  brute.  L'auteur  se  plaint  amèrement  que  l'enseignement  actuel 
mêle  les  faits  de  Tordre  sensible  et  ceux  de  l'ordre  rationnel.  Il 
nous  semble  que  ce  reproche  n'est  pas  sérieusement  mérité ,  au  moins 
par  les  maîtres  les  plus  autorisés. 

Nous  n'aurions  plus  à  lui  reprocher  que  des  détails  sans  importance. 
Il  croit  à  la  parfaite  authenticité  de  l'histoire  du  chien  de  Montargis  :  il 
faut  le  renvoyer  à  la  préface  du  vieux  poëme  français,  Macaire,  publié 
dans  la  Collection  elzëmrienne.  Il  ne  cite  Dupont  de  Nemours  que  d'aprèa 
M.  de  Feletz,  et  il  ne  doit  pas  l'avoir  abordé  directement;  il  aurait 
mieux  utilisé  les  singulières  théories  de  cet  académicien  sur  l'arithmé- 
tique, la  poésie  et  surtout  la  moralité  {sic)  des  bêtes. 

LÉONCE  Couture. 

RI  Matrlmonlo,  su  ley  natural,  «u  hlstorla,  su  Impor- 
tAncla  •oclal,  por  Joachin  Sanchez  de  Toca.  Madrid,  M.  G.  Hernandez, 
1874.  Gr.  in-8  de  600  p.  —  Prix  :  9  pesetas  (9  fr.  4o). 

Voici  une  éloquente  et  touchante  dissertation  sur  le  mariage,  qu'un 
écrivain  espagnol,  jeune,  pensons-nous,  a  écrite  avec  un  vif  amour  de 
la  vérité  et  poussé  du  louable  désir  d'aider  au  triomphe  de  la  femme 


—  328  — 

dans  la  société  moderne,  en  réclamant  pour  elle  le  respect  qui  lai 
est  dû.  C'est  bien  là  une  entreprise  castillane;  aussi  Tauteur  y  a-t-il 
mis  une  ardeur  qu'excuse  peut-être  son  âge.  Son  plaidoyer  débute 
par  des  réflexions  sur  Torigine  de  la  société,  sur  la  famille^  sa  néces- 
sité sociale  et  son  heureuse  influence  sur  Thomme.  Suivent  les  diflié- 
rentes  preuyes  qui  établissent  son  origine  divine,  puis  les  bases 
fondamentales  de  toute  société,  de  toute  famille,  lesquelles  sont, 
selon  Fauteur,  le  mariage,  le  respect,  les  droits  de  l'individu,  la  reli- 
gion et  raccord  parfait,  avec  TÉtat,  de  ces  trois  conditions.  L'exposé 
de  la  loi  psychologique  de  Tamour,  la  déflnition  du  mariage  et  l'exa- 
men de  ses  conséquences  pour  la  société  terminent  la  première  partie, 
où  il  y  a  cependant  un  chapitre  curieux,  le  septième,  sur  le  divorce. 
L*auteur  assimile  le  divorce  à  la  polygamie,  et  trace  un  tableau  des 
ravages  qu'il  fait  dans  les  pays  protestants  :  il  réfute  aussi  quelques 
erreurs  deJ^fontesquieu,  qui  a  attribué  à  Texclusive  action  du  climat 
l'origine  de  la  monogamie  et  de  la  polygamie.  Il  montre  enfin  Terreur 
de  ceux  qui  prétendent  que  l'adultère  n'est  pas  réprouvé  par  la  loi 
naturelle. 
La  seconde  partie,  intéressante  et  d'une  érudition  qui  doit  beaucoup 
'  aux  travaux  allemands  sur  la  matière,  retrace  l'histoire  du  mariage  et 
la  condition  sociale  de  la  femme  en  Orient,  dans  l'Inde,  dans  la  religion 
de  Boudha  et  en  Israël.  La  nouvelle  condition  qu'acquiert  la  femme, 
en  passant  de  l'Orient  à  l'Occident,  est  longuement  examinée.  La 
femme,  en  Grèce,  à  Rome,  dans  la  société  chrétienne,  fait  l'objet  de 
tableaux  vivement  peints.  L'auteur  n'a  pas  de  peine  à  prouver  que 
l'émancipation  et  l'anoblissement  de  la  femme  sont  uniquement  dus 
au  christianisme,  et  il  démolit  toutes  les  prétentions  de  certaines 
écoles  philosophiques  modernes  qui  veulent  l'émancipation  des 
femmes  en  s'appuyant  sur  les  maximes  de  l'Evangile  et  les  lois 
du  mariage  chrétien.  En  terminant,  l'auteur  s'excuse  d'avoir  été 
ennuyeux  et  monotone  dans  des  matières  arides,  et  incomplet  sur 
une  question  où  il  y  aurait  beaucoup  à  dire.  C'est  là  un  cas  de 
modestie  assez  rare  tra  los  montée,  mais  ce  n'est  point  cela  seulement 
qui  nous  fait  constater  la  réelle  valeur  de  son  travail  et  Futilité  qu'on 
peut  en  retirer.  Ch.  Lebrun. 


Rapport  «ucclnct  sur  la  séolo^le  des  vallées  de  l'il^Uta- 
bafftkaM^-MackenasIe  et  de  l*A.nderson»  par  le  R.  P.  E.  PEnroT, 
oblat  de  Marie,  Paris,  typographie  Hennuyer,  1875.  In-8  de  80  p.  — 
Prix  :  2  fr. 

S'il  est  des  régions  peu  connues  sous  le  rapport  géologique,  c'est,  à 
coup  sûr,  celle  de  la  Colombie  anglaise  de  l'ouest.  Les  explorateurs 
ont  eu  bien  rarement  l'occasion  de  parcourir  ces  solitudes,  et  sans  les 


—  329  — 

renseignements  fournis  par  quelques  rares  chasseurs  canadiens  et 
surtout  parles  missionnaires  catholiques^  elles  resteraient,  avgourd'hui 
encore,  presque  à  Tétat  de  Tertœ  incognitœ.  Cette  circonstance  ne  peut 
manquer  de  donner,  aux  yeux  des  savants,  un  nouveau  prix  à  la 
publication  du  R.  P.  Petitot,  l'un  de  ces  infatigables  apôtres  qui  ont 
été  porter  les  lumières  de  la  foi  chez  les  tribus  dlndiens  Dennés  et 
Dindfis.  Ajoutons,  par  parenthèse,  qu'elles  appartiennent  au  grand 
rameau  athabaskan,  dont  on  retrouve  des  représentants  dans  tout 
l'occident  de  l'Amérique  septentrionale,  depuis  le  pays  des  Eskimaux 
jusqu'aux  frontières  du  Mexique. 

Quoi  qu'il  en  soit,  son  ministère  évangélique  n'absorba  pas  tellement 
le  docte  missionnaire,  qu'il  n'ait  eu  quelques  instants,  par  ci  par  là, 
à  consacrer  à  Tétude  des  questions  scientifiques.  Ce  sont  précisément 
ces  observations  qu'il  a  condensées  dans  la  brochure  dont  nous  propo- 
sons de  rendre  compte. 

Toutes  les  chaînes  de  montagnes  qui  traversent  ce  pays,  peuvent 
être  considérées  comme  des  ramifications  des  montagnes  Rocheuses. 
Les  hauteurs  de  l'est  et  du  nord,  par  de  là  le  soixantième  degré  de  lati- 
tude, sont  surtout  composées  de  schistes  ou  de  grès,  tandis  que  le 
massif  central  se  fait  remarquer  par  sa  constitution  granitique.  L'en- 
trée du  grand  Lac  (Tkuile  (tourSj  situé  sous  la  latitude  du  cercle  arc- 
tique, mérite  d'être  signalée  par  une  particularité,  laquelle  n'offre  d'ail- 
leurs tien  de  géologique.  On  y  rencontre  le  plus  boréal  de  ces  rochers 
sculptés  de  main  d'homme,  indice  du  passage  de  races  moins  sau- 
vages que  les  Indiens  actuels.  Sur  les  rives  3e  l'Athabaskaw^près  de  sa 
jonction  avec  la  Rivière  des  eaux  claires^  nous  assistons  à  ce  spectacle 
étrange  de  terrains  svgets  à  prendre  feu  spontanément.  Cela  s'ex- 
plique par  la  présence  de  gaz  inflammables  qui,  de  temps  à  autre, 
parviennent  à  s'échapper  des  fissures  du  sol.  Nous  laissons  de  côté, 
pour  ne  pas  trop  prolonger  notre  notice,  ce  qui  concerne  la  faune  et 
la  flore  de  cette  froide  contrée,  ainsi  que  Tétude  d'ailleurs  si 
curieuse  des  phénomènes  glaciaires.  L'auteur  en  tire  d'ingénieuses 
déductions^  relativement  à  la  formation  des  terrains  plntoniens.  Enfin, 
le  mémoire  se  termine  par  un  appendice  concernant  les  traditions  et 
légendes  des  riverains  de  l'Athabaskaw.  Nous  ne  pouvons  nous  empê- 
cher d'y  t  rouver  la  preuve  d'anciennes  relations  ayant  existé  entre 
le  Nouveau-Monde  et  l'Asie.  H.  de  Charbncby. 


Traité  élémentaire  do  mlnéralogfl  e,  par  M.  F.  Pisani,  précédé 
d'une  préfiice  de  M.  Des  Cloizeaux,  de  Tlnstitut.  Paris,  Masson,  i875.  In-8 
de  410  p.,  avec  184  figures  dans  le  texte.  —  Prix  :  8  fr. 

La  minéralogie,  dont  le  génie  d'Haiiy  avait  fait  une  science  fran- 
çaise, n'a  guère  été  représentée  chez  nous  que  par  des  traités  élémen- 


—  330  - 

taires  fort  insaffisants,  malgré  la  valeur  incontestable  de  leurs  auteurs. 
La  plupart  de  ces  ouvrages  se  bornaient,  en  effets  à  énoncer  les  lois 
fondamentales  de  la  cristallographie,  puis  à  décrire  les  espèces  miné- 
rales auxquelles  un  emploi  industriel  assurait  une  importance  spéciale. 
Mais  cette  importance  est  incessamment  modifiée,  soit  par  la  décou- 
verte de  gisements  nouveaux,  soit  par  F  exploitation  de  substances 
réputées  rares  ou  inutiles.  Il  y  avait  donc  intérêt  à  présenter,  môme 
dans  un  traité  élémentaire^  non  plus  seulement  quelques  espèces  choi- 
sies plus  ou  moins  arbitrairement,  mais  un  tableau  d'ensemble  du 
règne  minéral.  D'autre  part,  les  études  plus  précises  de  la  chimie 
permettent  d'apprécier  avec  exactitude  la  composition  longtemps  indé- 
cise d*un  grand  nombre  de  minéraux  mal  connus,  et  de  mieux  clas- 
ser, dans  leurs  rapports  mutuels,  les  espèces  si  variées  que  nous  ofire 
la  nature. 

Chimiste  hiCbile,  M  Pisani  avait  déjà,  par  de  nombreuses  analyses, 
éelairci  lui-même  plusieurs  des  problèmes  les  plus  complexes  relatifs 
à  la  composition  des  minéraux.  Il  ^tait  mieux  préparé  que  tout  autre 
pour  rédiger  un  traité  élémentaire  complet  dans  Ténumération  des 
espèces,  précis  dans  les  détails  de  la  synonymie,  exact  enfin  dans  la 
description  des  propriétés  chimiques. 

Le  premier  livre  de  Touvrage  est  consacré  à  Fétude  des  caractères 
physiques.  Les  lois  de  la  cristallographie  y  tiennent  naturellement 
la  première  place;  elles  sont  exposées  avec  clarté,  ainsi  que  le 
problème  délicat  de  la  détermination  des  formes  primitives.  Puis 
vient  un  examen  rapide  des  propriétés  importantes  :  la  cassure  et 
Téclat,  la  polarisation  et  la  réfraction,  la  conductibilité  et  la  dila- 
tabilité, la  dureté  et  la  ténacité,  le  magnétisme  et  la  phosphores- 
cence, etc.  —  Le  second  livre  traite  des  propriétés  chimiques,  et  décrit 
les  procédés  de  Tanalyse  qualitative  ou  quantitative,  les  essais  au 
chalumeau,  et  l'emploi,  aujourd'hui  si  précieux,  du  spectroscope. 
—  Le  troisième  livre,  qui  forme  à  lui  seul  les  deux  tiers  de  l'ou- 
vrage, présente  la  description  des  espèces.  La  classification  adoptée 
est  celle  qui  groupe  les  minéraux,  d'après  leur  composition,  en 
familles  naturelles  caractérisées  par  l'élément  acide  :  le  quartz  et  les 
silicates,  le  carbone  et  les  carbonates,  le  soufre  avec  les  sulfures  et  les 
sulfates,  forment  ainsi  autant  de  familles  bien  délimitées.  Ces  descrip- 
tions se  recommandent  tout  particulièrement  par  l'exactitude  de  la 
synonymie  qui  s'étend  aux  termes  étrangers,  par  le  très-grand  nombre 
d'analyses  qui  accompagnent  les  définitions,  et  par  les  indications  de 
gisement  et  d'usage  qui  les  complètent.  Deux  tables,  dont  un  index 
alphabétique  de  toutes  les  appellations  usitées  en  minéralogie,  per- 
mettent de  tirer  parti  rapidement  des  renseignements  ainsi  accumulés 
en  quatre  cents  pages. 


—  331  — 

Au  flurplos,  nous  avons  cherché  à  donner  ici  un  aperçu  de  Touvrage 
et  non  à  en  faire  Téloge  :  à  cet  égard,  en  effet,  la  préface,  que  M.  Des 
Cloizeaux  a  bien  voulu  mettre  en  tête  du  livre,  est  pour  Tauteur  le 
plus  honorable  témoignage,  pour  le  lecteur  la  plus  précieuse  recom- 
mandation. A.  D. 


Aolell,  par  le  P.  Secchi,  de  la  Société  de  Jésus,  directeur  de  TObser- 
vfttoire  du  Collège-Romain,  correspondant  de  llnstitut  de  France.  2^  édit. 
revue  et  augmentée.  1"  partie.  Paris,  Gauthier- Villars.  Gr.  in-8  de 
428  p.  avec  atlas  in-4  de  6  planches.  —  Prix  :  24  fr. 

Parfois  la  science  fait,  dans  quelques-unes  de  ses  parties,  des  pro- 
grès si  rapides,  que  Touvrage  où  Ton  en  marquait  les  dernières  limites 
peut,  presque  aussitôt  après  sa  publication,  se  trouver  distancé  par 
de  toutes  récentes  découvertes.  Tel  a  été  un  moment  le  sort  du  livre 
dont  nous  annonçons  la  seconde  édition.  Quand  il  parut  pour  la  pre- 
mière fois,  la  physique  solaire  s'enrichissait  de  faits  nouveaux,  fertiles 
en  conséquences.  Le  savant  directeur  de  TObservatoire  du  Collège 
romain  s'est,  avec  une  infatigable  ardeur,  remis  immédiatement  à 
Tœuvre,  et,  comme  il  le  dit,  ce  qu'il  offre  aujourd'hui  au  public^  c'est 
moins  une  seconde  édition  qu'un  ouvrage  «  complètement  refondu  et 
presque  entièrement  nouveau,  b 

Cet  ouvrage  est  divisé  en  plusieurs  parties.  La  première,  qui  rem- 
plit tout  le  tome  premier,  et  la  seule  dont  nous  ayons  à  nous  occuper 
en  ce  moment^  traite  de  la  structure  du  soleil,  et  se  partage  en  quatre 
livres. 

Le  premier  est  consacré  à  des  notions  générales  sur  les  phénomènes 
solaires^  sur  l'aspect  de  l'astre,  sur  les  lois  fondamentales  du  mouve- 
ment des  taches  qu'on  j  observe  et  sur  les  nouvelles  méthodes  employées 
pour  faire  ces  observations,  au  moyen  des  oculaires  hélioscopiques , 
des  oculaires  polariscopiques  et  de  la  photographie,  à  laqueUe  il  im- 
porte toujours  de  joindre  le  dessin  à  la  main. 

Dans  le  deuxième  livre,  le  P.  Secchi  étudie  plus  en  détail,  et  seule* 
ment  à  l'aide  de  la  lunette,  les  phénomènes  qui  se  passent  à  la  surface 
du  soleil.  Cette  surface,  ou  photosphère,  est  couverte  de  rugosités  ou 
granulations  que  l'auteur  définit  «  une  multitude  de  points  lumineux 
disséminés  sur  une  sorte  de  réseau  plus  sombre.  •  Comme  Herschel, 
il  pense  que  ces  points  lumineux  sont  les  sommets  d'une  quantité  de 
jets  enflammés  qui  s'échappent  dans  l'atmosphère  du  soleil.  Les  taches 
sont  un  phénomène  fort  complexe.  Tantôt  elles  se  forment  lentement; 
tantôt,  le  lendemain  même  du  jour  où  elles  ont  apparu,  elles  ont  pris 
des  proportions  considérables.  L'auteur  décrit  la  manière  dont  la 
matière  lumineuse  se  dissout  dans  les  taches,  comment  celles-ci  se 
divisent  et  se  multiplient.  Il  en  examine  l'intérieur  et  discute  les  phé- 


—  332  — 

nomènes  qui  lui  font  regarder  les  taches  comme  étant  des  cavités  ;  il 
en  étudie  la  structure,  la  pénombre,  les  voiles  roses  qu'il  a  souvent 
vus  étendus  sur  ces  abîmes  et  qui  sont  analogues  aux  protubérances 
rouges  qu^on  aperçoit  autour  du  disque  de  la  lune  pendant  les  éclipses 
solaires.  A  l'extérieur  des  taches,  il  remarque  les  régions  d'un  éclat 
plus  vif  que  le  reste  de  la  photosphère  et  que  Ton  désigne  sous  le  nom 
de  facules.  De  toute  cette  étude,  il  tire  des  conclusions  importantes, 
qu'il  résume  ainsi  :  «  Le  noyau  du  soleil  est  composé  d'une  masse 
obscure,  environnée  d'une  matière  photosphérique  à  l'état  gazeux,  qui 
cherche  à  Tenvahir  et  à  le  recouvrir  (p.  120).  »  Cette  masse  noire 
est-elle  solide  ou  gazeuse?  C'est  cette  dernière  opinion  qu'il  adopte, 
en  annonçant  qu'il  la  corroborera  ulté  rieurement  par  les  expériences 
spictroscopiques. 

Il  termine  ce  deuxième  livre  par  Texamen  des  mouvements  géné- 
raux des  taches  et  de  leurs  mouvements  propres,  puis  de  leurs  varia- 
tions séculaires  et  de  leur  périodicité  «  undécennale,  qui  coïncide 
d'une  manière  aussi  inattendue  que  certaine  avec  la  période  des  varia- 
tions du  magnétisme  terrestre  (p.  193).  » 

Dans  le  livre  troisième,  le  savant  jésuite  aborde  les  preuves  directes 
de  ^existence  d'une  atmosphère  gazeuse  et  transparente  enveloppant 
la  photosphère.  Ces  preuves  sont  au  nombre  de  trois  :  1®  L'absorption 
des  radiations  lumineuses  chimiques  et  calorifiques  du  soleil,  absorp- 
tion qui  va  croissant  depuis  le  centre  du  disque  jusqu'au  bord,  où  elle 
atteint  son  maximum,  et  qui  ne  laisse  s'échapper  dans  l'espace  que 
12/100  de  la  radiation  totale  (p.  213)  ;  2^  Les  études  spectroscopiques 
dont  le  P.  Secchi  rappelle  les  origines  et  les  rapides  progrès,  et  qui 
montrent  le  pouvoir  absorbant  plus  grand  au  bord  de  Tastre  qu'au 
centre,  ce  qui  semble  dû  à  des  gaz  proprement  dits,  et  plus  grand 
aussi  dans  l'espace  occupé  par  les  taches,  ce  qui  semble  principale- 
ment dû  à  des  vapeurs  métalliques  (p.  293)  ;  3®  Enfin,  les  phénomènes 
observés  pendant  les  éclipses  totales  de  soleil  :  ce  qui  nous  amène  au 
livre  quatrième,  consacré  en  entier  à  ces  éclipses. 

L'auteur  commence  par  une  description  détaillée  et  saisissante  du 
phénomène  imposant  qu'il  a  plusieurs  fois  observé,  et  qui  cause  aux 
astronomes  de  vives  émotions  dont  ils  doivent  se  rendre  maîtres  dans 
l'intérêt  de  la  science,  mais  qu'ils  ont  souvent  bien  de  la  peine  à 
dominer.  De  l'étude  attentive  et  spéciale  des  phénomènes  qui  accom^ 
pagnent  la  disparition  et  la  réapparition  de  l'astre,  «  il  résulte  que  le 
soleil  n'est  pas  limité  par  un  contour  géométrique  nettement  défini  ; 
sur  ses  bords,  il  y  a  une  région  où  la  lumière  s'éteint  rapidement, 
mais  graduellement  (p.  321).  »  La  couronne  est  un  phénomène  très- 
complexe,  qui  a  son  siège  dans  le  soleil,  mais  au  siget  duquel  on  est 
encore,  sur. bien  des  points»  réduit  à  de  simples  conjectures.  Les  pro- 


—  333  — 

tubérances  observées  pour  la  première  fois,  en  1842,  soas  forme  de 
flammes  gigantesqueSi  de  couleur  rose  ou  fleur  de  pâcher,  s'ëlançant 
autour  de  la  lune,  fournissent  au  P.  Secchi  la  matière  d'un  chapitre 
d'un  grand  intérêt,  dont  voici  la  conclusion  :  «  Le  soleil  est  environné 
d'une  atmosphère  très-élevée,  dont  la  hauteur  est  au  moins  égale  à 
la  moitié  de  son  rayon...  Dans  cette  atmosphère  flotte  une  couche 
continue  de  matière  rose,  possédant  un  grand  pouvoir  photogénique, 
dont  la  hauteur  est  variable  et  le  contour  irrégulier.  Cette  matière  se 
soulève  quelquefois  et  forme,  tantôt  des  colonnes  verticales,  tantôt 
des  nuages  isolés  ;  ces  colonnes  et  ces  nuages  sont  entraînés  d'une 
manière  trèa-appréciable  par  des  courants  atmosphériques  (p.  391).  » 

Un  autre  chapitre  j  sur  les  observations  spectrales  faites  pendant 
les  éclipses  totales,  et  que  la  belle  découverte  de  M.  Janssen,  en  1868, 
a  mis  les  astronomes  en  état  de  continuer  en-dehors  du  temps  des 
éclipses,  termine  le  volume.  L'auteur  explique  comment  elles  ont 
permis  de  constater  la  nature  chimique  des  protubérances,  formées 
en  grande  partie  d'hjdrogène,  de  reconnaître  l'existence,  au  bord  du 
soleil,  d'une  atmosphère  composée  de  vapeurs  métalliques  à  l'état 
gazeux,  et  d'analjser  la  couronne  composée  de  substances  dont  la 
température  est  assez  élevée  pour  qu'elles  soient  lumineuses  par 
elles-mêmes,  et  qui  sont  principalement  l'hydrogène,  un  corps  parti- 
culier  nommé  hélium  et  un  autre  corps  inconnu  (p.  412). 

A  ce  volume,  imprimé  avec  luxe  et  renfermant  cent  quarante-trois 
gravures  dans  le  texte,  est  joint  un  atlas  de  six  planches,  représentant 
le  spectre  ordinaire  du  soleil  et  les  spectres  d'absorption  atmosphé- 
rique, le  spectre  de  diffiraction,  d'après  la  photographie  obtenue  par 
M.  H.  Drapier,  le  spectre  normal  du  soleil  d'après  Angstrom  et  le 
spectre  normal  (portion  ultra-violette),  par  M.  A.  Cornu. 

Rbnê  Sidry. 


BELLES-LETTRES 

Essai  de  grammaire  vôpse  ou  tchoude  du  IVord,  d*apré$ 
les  données  de  MM.  Ahîqvist  et  Lœnnrot,  par  M.  Ch.  de  Ujfalvv,  vice-pré- 
sident de  la  société  philologique.  Paris,  Ernest  Leroux,  1875.  In-8  de 
129  p.  —  Prix  :  10  fr. 

Dictionnaire  et  Grammaire  de  la  langue  des  Cria,  par  le 
R.  P.  Alb.  Lacombe,  oblat.  Montréal,  Beauchemin  et  Valois,  1871.  In-8  de 
897  p.—  Prix:  13  fr. 

Grammar  and  DIcUonary  of  thé  Lianguage  of  thé  Hidataa, 
etc.,  etc.,  by  Washington  Matthews.  New  York,  Gramoisy  Press,  1873.  In-4 
de  148  p.  —Prix:  40  fr. 

On  a  souvent  rappelé  l'histoire  de  ce  voyageur  anglais,  lequel, par- 
courant les  plaines  de  l'Asie-Mineure,  finit,  à  force  d'investigations, 


—  334  — 

par  découvrir,  cachés  sous  Therbe,  les  débris  d'une  célèbre  cité 
antique,  dont  le  souvenir  s'était  complètement  perdu  chez  les  habi- 
tants même  du  pays.  La  tâche  de  cet  ingénieux  explorateur  nous 
semble  être  un  peu  celle  de  nos  modernes  philologues.  Non^seulement 
ils  prennent  soin  d*étudier,  au  double  point  de  vue  lexicographique  et 
grammatical,  des  dialectes  jusqu'à  ce  )our  dédaignés  et  de  recueillir,  si 
Ton  ose  8*exprimer  ainsi,  le  dernier  soupir  des  langues  qui  s'éteignent  ; 
ils  en  arrivent  même  à  constater  l'existence  d'idiomes  nouveaux,  dans 
des  régions  où  nul  n'aurait  soupçonné  leur  existence.  Tel  est  précisé- 
ment le  cas  pour  la  langue  tchoude,  parlée  aujourd'hui  par  une  quin- 
zaine de  mille  âmes  seulement,  aux  frontières  sud-est  de  la  péninsule 
finlandaise.  Malgré  le  peu  d'étendue  de  son  domaine,  cet  idiome  se 
partage  en  deux  dialectes,  le  vêpse^  au  nord  et  au  midi^  le  vote  (qu'il 
ne  faut  pas  confondre  avec  le  wotiaque).  Deux  savants  ûnnologues, 
MM.  Ahlqvist  et  Lœnnrot,  avaient  pris  ce  dialecte  du  nord  pour  sujet 
de  leurs  études*  Toutefois,  ils  n'en  donnèrent  point,  à  proprement 
parler,  de  monographies  complètes,  Tan  d'eux  s'étant  spécialement 
occupé  du  verbe  et  l'autre  de  la  déclinaison.  M.  de  Ujfalvj,  déjà 
connu  par  d'intéressants  travaux  sur  la  linguistique  flnno-ougrienne , 
nous  semble  donc  avoir  eu  une  excellente  idée,  en  fondant  l'un  avec 
l'antre  les  mémoires  des  érudits  sus-nonunés,  et  plus  encore,  en 
faisant  paraître  son  travail  dans  notre  langue.  Après  une  première 
partie  toute  grammaticale,  l'auteur  donne  une  série  de  textes  fort 
judicieusement  choisis,  avec  traduction  en  regard.  Ils  consistent,  pour 
la  plupart,  en  fables,  proverbes,  formules  de  magie  recueillis  de  la 
bouche  même  des  indigènes,  et  pleins  de  cette  saveur  locale  qui  a  tant 
de  charme  pour  l'amateur.  Ces  morceaux,  d'ailleurs,  sont  suivis  de  la 
traduction  du  quatrième  chapitre  de  l'évangile  d'après  saint  Matthieu. 
Enfin,  l'ouvrage  se  termine  par  un  vocabulaire  vêpse-français,  que 
l'auteur  a,  sans  doute,  donné  aussi  complet  qu'il  lui  était  possible. 

Un  mot  maintenant  sur  les  caractères  particuliers  de  la  langue 
vêpse  ou  plutôt  tchoude.  Elle  appartient  à  cette  subdivision  de  la 
famille  ouralo-altaïque,  désignée  elle-même  du  nom  de  tchoude^  et 
dans  laquelle  se  rangent  le  suomi  ou  finlandais,  l'esthonien,  et  le 
sabme  ou  lapon.  Pour  parler  plus  exactement,  l'on  a  donné  à 
l'idiome  dont  le  vépse  constitue  le  dialecte  boréal,  ce  nom  de  tchoude, 
parce  que,  de  toutes  les  langues  du  groupe,  c'est  celle  qui  a  conservé  le 
caractère  le  plus  archaïque.  Voilà  précisément  ce  qui  la  rend  fort 
intéressante  à  étudier.  Elle  difière  assez  du  suomi  pour  n'en  être 
pas  considéré  comme  un  simple  dialecte,  et  nous  paraît  se  trouver, 
vis-à-vis  de  ce  dernier  idiome,  à  peu  prés  dans  le  même  rapport  que 
la  langue  d'oc  vis-à-vis  du  français. 

—  La  volumineuse  et  savante  publication  du  R.  P.  Lacombe  nous 


—  335  — 

reporte  bien  loin  de  la  Baltique,  dans  les  solitudes  américaines  du 
nord-ouest.  Non  content  d'avoir  prêché,  aux  Cris  des  rives  de  TAtha- 
baskaw^  les  vérités  de  TÉvangile,  il  a  cru  faire  œuvre  utile  aux 
missionnaires  à  venir  et  aux  érudits^  en  donnante  la  fois  un  vocabulaire 
français-cri,  cri-français,  et  un  résumé  de  la  grammaire  de  cette 
langue.  Inutile  de  prévenir  le  lecteur  que  ces  Cris  occidentaux  n'ont 
absolument  rien  à  faire  avec  les  Creeks  du  sud  des  États-Unis.  Ces 
derniers,  comme  tous  les  peuples  de  la  Ghactaw-Muscogulgue^  à  la- 
quelle ils  appartiennent,  ont  déjà  accompli  d'importants  progrès  dans 
la  voie  de  la  civilisation.  Au  contraire,  les  néophytes  du  R.  P.  La- 
combe  restent,  aujourd'hui  encore,  exclusivement  chasseurs  ou  pê- 
cheurs. Ceux  d'entre  ces  Indiens  qui  habitent  la  plaine,  où  ils  pour- 
suivent le  bufifalo,  se  montrent  supérieurs  en  intelligence,  courage  et 
beauté  physique  à  leurs  frères  confinés  dans  les  forêts  ou  sur  le 
bord  des  cours  d'eau.  Par  leur  langue,  les  Cris  se  rattachent  à  cette 
famille  algique^  qui  compte  au  nombre  de  ces  membres,  les  Delawares, 
Algonkins^  Mohégans,  Abénakis.  On  sait  que  ces  idiomes  algiques,  qui 
offrent  certains  points  de  contact  fort  remarquable  avec  la  langue 
basque^  eurent  pour  berceau  primitif  les  rives  du  Saint-Laurent,  et  que, 
de  là,  ils  se  répandirent  sur  une  vaste  étendue  de  territoire.  Effective- 
ment, aujourd'hui  même,  plusieurs  d'entre  eux  se  parlent  depuis 
Terre-Neuve  jusqu'aux  montagnes  Rocheuses.  L'ouvrage  du  R.P.  La- 
combe  fera  connaître  la  richesse,  les  ressources  inépuisables  de  ces 
dialectes  de  sauvages.  La  coujugaiçon  surtout  y  est  d'une  complica- 
tion vraiment  effrayante,  et^  à  cet  égard  encore,  c'est,  parmi  les 
idiomes  de  TAncien-Monde^  celui  de  la  Biscaye  dont  ils  semblent  se 
rapprocher  le  plus.  Que  le  savant  auteur  du  livre  en  question  nous 
permette  de  mêler  une  simple  observation  aux  éloges  qu'il  mérite 
d'ailleurs  à  tous  égards.  Pourquoi  n'a-t-il  pas  donné  quelques  textes 
en  langue  indienne  avec  traduction?  Ce  n'est  que  par  là  que  Ton  peut 
bien  juger  du  génie  d'un  idiome*  Il  a,  il  est  vrai,  publié  le  Pater, 
mais  ce  n'est  pas  assez.  Peut-être  craignait-il  de  grossir  outre  mesure 
un  ouvrage  déjà  volumineux.  En  tous  cas,  il  serait  fort  à  souhaiter 
que  l'exemple  du  R.  P.  Lacombe  fût  suivi  par  d'autres  missionnaires. 
Bien  des  documents,  qui,  malgré  leur  importance,  menacent  de  dis- 
paraître sans  retour,  se  trouveraient  ainsi  sauvés  de  l'oubli.  Nous  ne 
terminerons  point  sans  adresser  également  nos  remercîments  à  un 
jeune  américaniste,  que  sa  libéralité,  aussi  bien  que  les  longs  voyages 
par  lui  entrepris,  signalent  à  la  gratitude  du  monde  savant.  Nous 
voulons  parier  de  M.  A.  Pinart,  lequel  a  généreusement  aidé  à  la 
publication  de  la  grammaire  et  du  vocabulaire  cris. 

—  C'est  encore  chez  les  indigènes  de  l'Amérique  du  Nord  que  M.  le 
Dr  Matthows  a  cherche  le  sujet  de  son  dernier  travail.  Il  nous  donne 


—  336  — 

une  grammaire  de  la  langue  des  Hidatsas  ou  JUinélaris  {Gvos-Yentres du 
Missouri  des  Canadiens),  suivie  d'un  dictionnaire  assez  étendu,  hidatsa- 
anglais.  Le  tout  se  trouve  précédé  d'une  longue  et  fort  instructive 
introduction  sur  l'histoire  et  les  traditions  de  la  nation.  Les  Minétaris 
vivent  ou  plutôt  vivaient  fraternellement  unis,  avec  les  Mandanes, 
aujourd'hui  &  peu  près  éteints,  et  qui,  comme  eux,  appartiennent  à  la 
race  siousse.  Ils  ont  également  comme  aUiés  les  Arikaris,  qui 
parlent  un  idiome  tout  spécial  et  jusqu'à  présent  peu  connu.  C'est  sur 
la  rive  gauche  du  Missouri,  vers  le  quarante-septième  degré  de  lati- 
tude nord  et  le  cent-unième  de  longitude  ouest,  que  Ton  rencontre  ces 
espèces  de  jardins  où  les  Minétaris  cultivent,  de  temps  immémorial, 
le  tabac,  le  maïs,  le  haricot  indien,  le  soleil,  etc.  La  légende  sur 
l'origine  souterraine  de  leurs  aïeux,  se  retrouve  chez  ces  Peaux-Rouges, 
aussi  bien  que  chez  les  Mandanes.  Du  reste,  leurs  traditions,  quelque 
confuses  qu'elles  soient,  semblent  indiquer  une  origine  occidentale. 
Nous  ne  saurions  adresser  trop  de  compliments  à  M.  Matthews  pour 
son  intéressant  ouvrage,  mais  peut-être  pourrion9-nous  lui  demander, 
aussi  bien  qu'au  R.  P.  Lacombe,  pourquoi  il  a  négligé  de  publier  des 
textes?  Enfin,  nous  devons  faire  observer  que  l'ouvrage  en  question 
forme  le  premier  numéro  de  la  deuxième  série  de  publications 
relatives  à  la  linguistique  américaine.  H.  de  Cuarbncbt. 


t^a  GliAiiAon  de  Roland,  teaate  critique^  troÀuction  et  commentaire, 
par  Léon  Gautier,  professeur  à  l'École  des  chartes.  5*  édition. ,  Tours, 
Alfred  Mame  et  fils,  i875.  In-8  de  lii-394  p.  —  Prix  :  2  fr.  50. 

Le  Polybiblion  a  salué^  à  son  apparition,  le  monument  élevé  par 
M.  Léon  Gautier  au  plus  précieux  reste  de  notre  immense  littérature 
chevaleresque.  Nous  avons  donc,  aujourd'hui,  à  parler  seulement  de 
l'édition  de  propagande  que  la  maison  Mame  vient  de  publier,  dans  des 
conditions  de  bonne  exécution  et  de  bon  marché  qui  n'ont  jamais  été 
atteintes  et  qui  ne  seront  pas  dépassées  de  si  tôt. 

Le  beau  volume  de  M.  Léon  Gautier  contient  d*abord  un  résumé 
substantiel  et  tout  à  fait  suffisant  de  Tlntroduction  qui  se  trouve  dans 
la  grande  édition  de  luxe,  en  deux  gros  tomes.  Vient  ensuite  le  texte, 
qui  a  été  revu,  avec  la  traduction  en  regard.  Quelques  notes 
courantes  étaient  indispensables  ;  on  les  trouvera.  La  troisième  partie 
contient,  sous  le  nom  d'ÉcLAiRCissBMBNTS,  quatre  véritables  dis- 
sertations sur  la  Légende  de  Ckarkmagne  ;  —  r  Histoire  poétique  de 
Roland;  —  le  Costume  de  guerre;  —  la  Géographie  de  Roland,  Voilà  un 
ensemble  complet,  auquel  Téditeur  a  ajouté  les  illustrations  qui  se 
trouvaient  déjà  dans  Tédition  de  luxe,  et  qu'on  n'aurait  guère  espéré 
retrouver  dans  une  édition  à  bon  marché. 

Les  eaux-fortes,  quel  qu'en  puisse  être  le  mérite  intrinsèque,  ne 


—  337  - 

sont  pas,  à  mes  jeux,  la  partie  la  plus  intéressante  de  cette  illustra- 
tion :  je  ne  les  trouve  pas  dans  le  ton  de  l'œuvre.  Pour  le  Chant  de 
Roncevaux,  il  aurait  fallu  s'inspirer  des  monuments  du  moyen  âge,  qui 
nous  a  laissé  des  motifs  admirables  dans  les  sculptures  des  églises, 
dans  les  miniatures  des  manuscrits,  et  plus  particulièrement  encore 
dans  les  sceaux,  dont  les  cavaliers,  lancés  au  galop  avec  la  main  droite 
en  arrière  et  l'épée  haute,  m'ont  toujours  apparu  comme  le  plus  beau 
tjpe  figuré  de  la  chevalerie  chrétienne. 

En  revanche,  les  vignettes  sur  bois  ont  une  valeur  inestimable, 
pour  commenter  le  poëme.  Voici  d'abord  les  statues  de  Roland  et 
d'Olivier,  qui  se  trouvent  au  .portail  de  la  cathédrale  de  Vérone,  puis 
le  compartiment  du  vitrail  de  Charlemagne,  à  Chartres,  qui  représente 
Roland  essayant  de  briser  son  épée,  et  Roland  qui  sonne  du  cor.  La 
première  figure  est  un  peu  affaisée  ;  mais  la  seconde  a  une  grâce  et 
une  vérité  incomparables. 

Il  est  assez  difficile  de  comprendre  sans  un  commentaire  l'outillage 
guerrier  de  nos  héros  et  le  commentaire  appelait  lui-même  des  des- 
sins. Après  une  série  de  neuf  épées,  M.Gautier  a  intercalé  dans  le  texte, 
d'après  des  monuments  authentiques,  quatre  cavaliers  armés  de  toutes 
pièces  et  dans  diverses  attitudes,  un  chevalier  debout,  deux  oriflam- 
mes, un  casque  avec  son  nasel,  un  olifant,  un  fragment  de  la  tapisserie 
de  Bayeux,  représentant  une  panoplie  du  onzième  siècle,  portée  par 
deux  écuyers. 

Enfin,  pour  la  partie  géographique,  nous  avons  une  vue  de  la  cha- 
pelle d'Ibagneta,  et  du  passage  où  l'on  suppose  qu'a  eu  lien  le  désastre. 
On  suppose/  Je  me  suis,  en  effet,  rendu  coupable,  il  y  a  dix  ans,  d'un 
doute  sur  l'itinéraire  généralement  admis.  Gomme  le  texte  dit  que 
€harlemagne  passa  par  la  Cerdagne  et  qu'il  prit  Narbonne,  j'avais 
timidement,  et  sous  la  forme  du  conditionnel  si  cher  aux  diplomates, 
émis  l'idée  que  le  vrai  Roncevaux  pourrait  bien  se  trouver  beaucoup 
plus  à  l'Est.  J'avais  tort,  sans  doute,  puisqu'on  est  tombé  sur  moi  de 
tous  les  côtés,  avec  un  ensemble  et  une  vigueur,  que  mon  simple  point 
d'interrogation  ne  méritait  guère. 

Ce  sont  les  érudits  et  plus  particulièrement,  il  faut  le  dire,  les  pro- 
fesseurs de  l'enseignement  public,  qui  ont  remis  en  honneur  nos  pré- 
cieuses chansons  de  gestes.  Remercions-les  ici  cordialement  en  la  per- 
sonne de  M.  Léon  Gautier,  qui  s'y  est  lancé  avec  toute  la  fougue  de 
son  cœur.  Il  s'est  fait  le  paladin  de  Roland  !  Non-seulement  l'éru- 
dition lui  doit  de  très- bons  travaux,  mais  il  aura  contribué  plus  que 
personne  à  la  vulgarisation  de  cette  poésie  mâle  et  saine,  vraiment 
chrétienne  et  française,  qui  doit  être  la  première  pierre  de  l'ensei- 
gnement de  la  littérature  dans  nos  collèges,  en  attendant  que  quel- 
qu'un de  nous  ait  le  bonheur  de  la  faire  entendre  au  peuple  de  nos 
villes  et  de  nos  campagnes.  Adoophb  d'Avril. 

Octobre  1873.  T.  XIV,  22. 


—  338  — 

Poésie»  f)pançai«e»9  latlnew  et  grecque»  de  JUartlo  De»- 
pol»,  avec  une  introduction  et  des  noieSy  par  Eeihhold  Dbzbucbbis  (premier 
fascicule  du  tome  n  des  publications  de  la  Société  des  bibliophUes  de  Guyenne), 
Bordeaux,  Feret  ;  Paris,  Aubry,  1875.  In-8  de  143  p.  —  Prix  :  10  fr. 

M.  Dezeimeris,  qui  a  écrit  tant  de  charmantes  pages^  n'en  a  peut- 
être  jamais  écrit  de  plus  charmantes  que  celles  dont  il  a  fait  précéder 
(p.  1-32)  les  œuvres  presque  toutes  inédites  de  son  compatriote  Martin 
Despois.  Je  viens  un  peu  tard  dire  combien  sa  notice  est  élégante  et 
spirituelle,  combien  ses  notes  sont  à  la  fois  savantes  et  agréables  et 
combien  son  édition  est,  à  tous  égards,  une  édition  irréprochable  ; 
mais,  m'oocupant  un  des  derniers  du  recueil  publié  cet  hiver,  je 
puis,  du  moins,  constater  que  tous  les  critiques,  même  ceux  qui,  d'habi- 
tude, sont  le  plus  exigeants,  ont  très-favorablement  jugé  ce  recueil. 
Les  épigrammes,  les  sonnets,  les  chansons  du  poëte  bordelais,  ainsi 
que  ses  poésies  grecques  et  latines,  choisies  entre  beaucoup  d'autres, 
avec  une  louable  sévérité^  plaisent  aux  curieux  érudits  ;  je  ne  doute 
pas  que  le  commentaire  de  M.  Dezeimeris,  où  Ton  remarquera  surtout 
d'ingénieux  et  doctes  rapprochements,  ne  leur  plaise  encore  davantage, 
et,  pour  ma  part,  si  j'applaudis  tant  à  la  résurrection  de  l'ami  de 
Pierre  Trichet  et  de  Marc  de  Mailliet,  c'est  surtout  à  cause  de  la 
notice  et  des  notes  dont  M.  Dezeimeris  a  accompagné  les  Poésies 
françaisHS,  latines  et  grecques,  si  bien  imprimées  par  Qounouilhou. 

T.  DB  L. 


Marguerite  de  SurvUle,  m  vie,  ses  ouvres,  ses  degeendants  devant  ia  cri* 
tique  moderne,  avec  notes,  documents  justificatif  s  et  carte  de  Vesseaux,  auquin" 
ziéme  siècle,  par  Eugène  Yilleoieu,  ancien  sous-préfet  de  la  République, 
membre  de  plusieurs  sociétés  savantes.  Paris,  Douniol,  premier  fascicule, 
-1873;  deuxième  fascicule,  1875;  forment  un  volume  in-8  de  xvi-423  p.  — 
Prix  :  4  fr.  50  chaque  fascicule. 

Honneur  au  courage  malheureux!  M.  Eugène  Villedieu  persiste  à 
croire,  malgré  toutes  les  objections,  malgré  toutes  les  invraisem- 
blances, à  l'authenticité  des  poésies  de  celle  qu'il  appelle  Marguerite  de 
Surville.  Son  ouvrage,  qui  a  d'abord  paru  dans  le  Bulletin  de  la  Société 
des  sciences  naturelles  et  historiques  de  l'Ardèche,  est  écrit  avec  une  cha- 
leur, avec  un  enthousiasme  qui  font  sourire^  maintenant  qu'il  a  été 
surabondamment  prouvé  que  les  prétendues  poésies  du  quinzième 
siècle  sont  bel  et  bien  des  poésies  de  la  fin  du  siècle  dernier.  Il  est 
inutile  de  combattre  un  auteur  dont  les  naïves  illusions  ont  résisté  à 
des  démonstrations  tellement  claires,  que  l'on  ne  saurait,  en  vérité, 
rien  désirer  de  plus  décisif,  et  qui,  du  reste,  emploie  des  arguments  de 
la  force  de  celui-ci  (p.  62)  :  Marguerite  de  Surville  a  pu  composer,  à 
89  ans,  une  excellente  pièce  de  vers^  puisque  M.  Guizot,  après  de 
87  ans,  écrit  encore  des  volumes,  marqués  de  toutes  la  fermeté  de  son 


—  339  — 

talent.  M.  Yilledieu  est  sans  miséricorde  pour  VillemaiD,  poor  Sainte- 
Beuve,  pour  M.  Qaston  Paris^  pour  moi-même,  pour  tous  ceux  enfin 
qui  ont  attribué  au  chevalier  de  Surville  ou  à  Vanderbourg  les  poésies 
de  Clotilde  :  il  nous  immole  tous  sur  Tautel  qu'il  dresse  en  Thonneur 
de  la  fabuleuse  Sapho  du  Yivarais.  Comme  étude  de  critique  littéraire, 
l'ouvrage  de  M.  Yilledieu  ne  peut  avoir  la  moindre  valeur  pour  per- 
sonne ;  mais,  si  on  on  le  considère  comme  un  roman,  les  pages  amu- 
santes n'y  manquent  pas.  T.  db  L. 


HISTOIRE 


Souanétie  Uî^re»  Épisode  d'un  voyage  à  la  chakie  centrale  du  Caucase, 
par  Raphaël  Bebnoville.  Paris,  veuve  Morel,  1875.  In-4  de  175  p.,  viii  pi.  et 
1  carte.  — Prix:  30  fr. 

La  Souanétie  occupe  à  peu  près  le  centre  du  tronçon  occidental  du 
Caucase  :  c'est  un  pays  peu  connu  en  Europe,  surtout  en  France  ;  le 
livre  de  M.  R.  Berno ville  j  transportera  agréablement  pour  quelques 
heures  ceux  qui  ne  seraient  pas  tentés  d'entreprendre  le  voyage. 
L^auteur  a  eu  la  bonne  fortune  de  suivre,  en  1869,  une  expédition 
militaire  organisée  par  le  général  russe  gouverneur  de  Koutaïs,  et  le 
récit  qu'il  fait  de  son  séjour  dans  ces  contrées  éloignées  présente  un 
véritable  intérêt.  Écrit  d'une  façon  sérieuse,  dans  un  style  simple, 
fourni  de  remarques  fines  et  piquantes,  cet  ouvrage  nous  présente  un 
tableau  curieux  du  pays  des  Souanes,  des  usages  et  du  caractère  de  ses 
habitants.  Sous  la  forme  brève  d'un  journal  de  voyage,  il  renferme  des 
peintures  de  mœurs  saisissantes,  de  justes  appréciations  ethnographi- 
ques et  de  nombreux  renseignements  sur  le  climat  et  les  productions 
de  la  Souanétie.  Après  avoir  parcouru  le  haut  Ratcha  et  la  fertile 
vallée  du  Phase,  Tauteur  nous  fait  pénétrer  avec  lui  dans  le  cœur 
même  du  pays,  où  toutes  les  scènes  qui  se  déroulent  sous  ses  yeux, 
fournissent  un  intarissable  sujet  à  ses  observations.  Une  des  plus 
curieuses  se  rattache  aux  croyances  des  Souanes  de  Tlngour:  ces  peu- 
ples ont  perdu  à  ce  point  Tidée  de  leur  religion,  que  les  monuments 
mêmes  de  leur  ancien  culte  sont  devenus  pour  eux  incompréhensibles. 
Les  superstitions  les  plus  honteuses  et  toutes  les  énormités  du  paga- 
nisme sont  entretenus  chez  eux  par  un  corps  de  papas  héréditaires, 
qui  a  conservé  une  immense  infiuence,  malgré  l'arrivée  dans  le  pays 
des  prêtres  géorgiens.  Une  horrible  pratique,  l'immolation  des  enfants 
du  sexe  féminin,  n'a  pu  être  entièrement  déracinée. 

Un  savant  russe,  le  docteur  Radde,  a  recueilli  plusieurs  vieux 
chants  souanes,  dont  deux  sont  traduits  dans  le  corps  de  cet  ouvrage: 
la  Romance  de  Tamar  et  la  Romance  de  çhuôse  de  Metki,  On  y  trouvera 
aussi  le  catalogue  des  plantes  recueillies  par  ce  même   savant.  Plu- 


—  340  — 

sieurs  plans  d'églises,  d'une  disposition  à  peu  près  uniforme,  sont 
insérés  dans  le  texte  ;  nous  signalerons  particulièrement  la  description 
de  la  remarquable  église  de  Tchoucoulis,  dont  le  clocher,  comme 
dans  les  anciennes  basiliques,  occupe  une  petite  tour  séparée  de  Tédi- 
fice.  Mais  ce  qui  réjouira  surtout  le  cœur  de  rarchéologue,  ce  sont  les 
excellentes  gravures,  exécutées  d'après  des  photographies,  d'un 
certain  nombre  d'objets  d*art  appartenant  au  mobilier  ecclésiastique. 
Citons  une  remarquable  porte  en  bois  sculpté,  dans  Féglise  d'un  des 
villages  dépendant  de  la  communauté  de  Laschket  (p.  73);  au  monas- 
tère de  Saini-Quirique,un  reliquaire  en  argent,  dont  les  faces  latérales 
sont  garnies  d'émaux  cloisonnés  d'une  grande  finesse  (p.  111  et  113)  ; 
dans  une  église  bâtie  sur  les  ruines  du  monastère  de  Saint-Oeorges, 
deux  croix  portatives  en  argent  repoussé  (p.  133)  ;  plusieurs  plaques 
de  la  môme  façon^  une  peinture  sur  bois  représentant  une  vierge,  une 
grande  croix  de  chêne  dont  les  bras  sont  divisés  en  compartiments 
offrant  toutes  les  scènes  du  martyre  chrétien,  un  vase  d'argent  en 
forme  de  poisson  à  tôte  de  fenune,  deux  calices,...  etc.  Enfin, 
pour  ne  rien  oublier,  l'auteur  signale  aussi,  à  Laschkvari,  une  bible 
du  onzième  siècle,  et,  à  Saint-Quirique,  un  manuscrit  grec  fort  ancien. 
Toutes  ces  notes  purement  scientifiques  sont  présentées  avec  tant  de 
simplicité  qu'elles  ajoutent  un  charme  de  plus  aux  récits  pittoresques 
du  voyageur.  Ant.  Hbron  de  Yillbfossb. 


Histoire  de  l*ɧpll«e  catholique»  depuis  JésuB-ChrUt  jusqu'au  temps 
actuelj  à  Vusage  des  écoles  et  des  familles,  par  L.  Jaunat,  professeur  au 
petit  séminaire  de  Paris.  Paris,  Gaume  et  G*,  i875.  In- 12  de  vii-540  p. 
—  Prix  :  2  fr.  75. 

Réunir  en  540  pages  toute  l'histoire  de  TÉglise  est  assurément  une 
œuvre  difScile,  et  le  récit  doit  forcément  laisser  de  côté  beaucoup  de 
faits  importants.  L'auteur  a  divisé  son  sujet  par  siècle,  et^  après  les 
événements  généraux,  il  a  soin  de  donner,  en  quelques  mots,  la  vie 
des  saints  illustres  qui  ont  vécu  à  chaque  époque.  Ce  résumé  brillant, 
où  rien  n'est  hasardé,  suffit  sans  doute  pour  donner  une  idée  de  This- 
toire  de  TÊglise  et  en  prendre  une  vue  d'ensemble  ;  mais,  pour 
apprendre  véritablement,  il  faudrait  plus  de  faits,  plus  de  précision 
dans  les  jugements;  il  serait  nécessaire  de  combler  quelques  lacunes. 
Ainsi,  il  n'est  rien  dit  de  la  Ligue,  qui  tient  une  assez  grande  place 
dans  l'histoire  de  l'Église  du  seizième  siècle;  l'auteur  n'est  pas 
très-exact  sur  les  catacombes.  Est-il  juste  de  dire  que  Voltaire 
tt  donne  à  la  France  ce  qu'aucun  sectaire  n'avait  su  donner  aux  pays 
protestants,  la  tolérance?  n  C'est  l'indifférentisme  que  Voltaire  a 
répandu,  duquel  indifférentisme  est  résultée  la  nécessité  de  tolérer 
Terreur,  et  ce  sont  les  catholiques  seuls  qui  ont  pratique  cette  tolé- 


—  341  — 

rànoe  :  Voltaire  attaquait  à  outrance  la  religion.  M.  Jaunay  sait  cela 
mieux  que  nous  :  il  n'a  pas  eu  le  temps  de  donner  à  sa  pensée  une 
forme  irréprochable.  L*auteur,  dans  ce  livre  qu'on  lit  avec  plaisir,  a 
évidemment  moinâ  en  vue  de  bourrer  la  tête  de  faits  que  de  montrer 
le  développement  de  TÉglise  et  sa  vie  sans  cesse  entretenue  par  les 
saints  qui  dirigent  et  avivent  son  action.  H.  db  L'É. 


Goars  d'hiatoire  générale,  à  Vusage  de»  lycées,  des  établissements 
d'instruction  publique  et  des  candidats  ava  écoles  du  gouvernement  et  aux 
baeealauréaU,  rédigé  conformément  aux  programmes  officiels  par  F.  Oger, 
professeur  d'histoire  et  de  géographie  au  collège  Sainte-Barbe.  Paris, 
Gauthier-Villars,  1875,  4  vol.  in-8  de  vii-221  p.,  iv-234  p.,  xlviii^S  p., 
XLViii-519  p.  —  Prix  :  21  fr. 

Le  titre  de  Tonvrage  dit  ce  qu'il  est  :  il  y  a  des  faits  nombreux  et 
beaucoup  de  dates.  Le  cours  a  été  enseigné  avant  d'être  écrit,  c^est- 
à-dire  qu'il  y  a  de  la  netteté  dans  les  divisions,  de  la  mesure  dans  les 
développements,  développements  subordonnés  aux  demandes  des  pro- 
grammes. Ainsi,  Tanteur  consacre  deux  pages  à  Thistoire  du  peuple 
juif,  dix  pages  à  Thistoire  de  la  Orèce,  dix  pages  à  Thistoire  de  Rome. 
Cent  cinquante  pages  retracent  l'histoire  depuis  les  invasions  jusqu'au 
commencement  du  quatorzième  siècle;  deux  cent  trente  pages 
conduisent  Thistoire  jusqu'au  dix-septième  siècle  ;  de  1610  à  1789,  il  y 
a  deux  cents  pages,  et  deux  cent  trente  de  1780  à  1848.  On  voit  le 
cadre  de  l'œuvre  :  on  comprend  peu  comment  un  quatrième  volume  qui 
a  pour  sous-titre  :  Cours  de  rhétorique,  est  ajouté  au  troisième;  sauf  un 
récit  un  peu  plus  long,  s'arrêtant  à  1815,  on  a  les  mêmes  matières  et 
il  eût  été  facile  de  suffire  dans  le  même  volume  aux  exigences  de  tous 
les  cours.  En  général,  l'auteur  est  très-sobre  de  réflexions  :  il  se 
préoccupe,  avant  tout,  de  donner  des  faits,  des  dates,  de  les  grouper 
ensemble.  Les  faits  sont,  en  général,  bien  étudiés  :  mais  on  aurait  pu 
faire  une  observation  sur  la  pragmatique  sanction  rendue  par  saint 
Louis;  sur  la  phrase  :  tuez-les  tous^  Dieu  recomnaîtra  les  siens;  sur  la 
dénomination  de  Marie  la  sanglante,  sur  la  prétention  de  Grégoire  VU 
à  faire  de  Rome  la  capitale  d'une  monarchie  théocratique  univer- 
selle, etc.,  etc.,  les  travaux  récents  ont  montré  qu'il  y  a  lieu  de  revenir 
sur  ces  faits.  Nous  aurions  également  plus  d'une  réserve  à  présenter 
sur  les  jugements  portés  sar  les  faits  contemporains  et  sur  la  manière  de 
présenter  ces  faits.  On  voit  combien  il  est  difficile  d'éviter  l'écueil 
inhérent  à  ces  programmes  d'histoire  contemporaine.  Dire  que  a  la 
Restauration  venait  de  l'étranger  et  à  la  suite  de  l'invasion,  »  parler 
de  (I  la  terreur  blanche,  »  prétendre  que  l'étranger  imposait  pour  la 
seconde  fois  la  «  royauté  à  la  nation,  »  c'est  parler  sans  doute  comme 
M.  de  Vaulabelle,  dont  le  pamphlet  est  souvent  cité,  mais  c'est  aller 


—  342  — 

à  rencontre  de  tous  les  témoignages  historiqnes.  Khonorable  profes- 
seur n'a  donc  pas  à  nos  jeax  évité  tous  les  écaeils  ;  cependant,  son 
livre,  pour  toute  la  partie  antérieure  aux  époques  passionnées  par  nos 
luttes  religieuses  et  politiques,  est  instructif,  complet,  un  peu  froid 
peut-être,  mais  précis  comme  il  le  faut  dans  un  cours  destiné  aux 
jeunes  gens.  H.  bi  L'Ê. 

Histoire  de  la  franc-maçonnerie  depuis  son  origine  Jus- 
qu'aux temps  présents  (en  russe),  par  Findel.  Saint-Pétersbourg, 
1872  et  1874.  2  vol.  in-8.  —  Prix  :  20  fr. 

Bien  que  roriginal  allemand  date  de  bientôt  quinze  ans  et  soit  très- 
connu,  la  traduction  russe,  qui  vient  d*en  être  terminée,  mérite  une 
mention  plus  particulière,  comme  un  signe  du  temps  d'abord,  puis 
encore  comme  un  des  rares  ouvrages  où  il  soit  parlé  de  la  maçon- 
nerie russe.  Car  le  traducteur  anonyme  ne  se  contenta  pas  de  repro- 
duire le  texte  de  Toriginal;  il  j  ajouta  une  introduction  suivie  d'une 
esquisse  historique  de  la  franc-maçonnerie  russe.  Il  s'j  livre  à  des 
considérations  sur  l'opportunité  d'une  pareille  publication  en  présence 
du  dernier  rescrit  impérial  au  ministre  de  l'instruction  publique,  dans 
lequel  la  noblesse  est  invitée  à  coopérer  activement  à  T amélioration 
du  peuple  par  renseignement  chrétien.  Notre  anonyme  se  demande 
si  la  noblesse  est  assez  fortement  établie  en  moralité  pour  pouvoir 
accomplir  la  tâche  difficile  que  le  souverain  vient  de  lui  conâer;  et  il 
se  prononce  en  sens  négatif.  Le  moyen  qu'il  propose  de  la  réaliser^ 
surprendra  le  lecteur  catholique,  o  En  confiant  à  la  noblesse  une  si 
importante  mission,  dit-il,  le  gouvernement  pourrait  bien  lui  confier 
aussi  l'organisation  de  Védifice  morale  ainsi  qu'on  appelle  avec  raison, 
la  franc-maçonnerie  prise  dans  sa  forme  actuelle  la  plus  pure  1  »  Ainsi 
le  rétablissement  de  la  loge  maçonnique  est,  dans  son  opinion,  une  des 
planches  de  salut  pour  TEmpire  des  tsars.  C'est  que  la  loge  est,  à  ses 
yeux^  devenue  aujourd'hui  indispensable  aux  classes  intelligentes  de 
la  société.  Quelque  étrange  que  soit  le  conseil,  il  n'y  aurait  rien 
d'étonnant  si  on  le  suivait.  Le  vide  que  l'Eglise  officielle  a  produit 
dans  les  âmes  est  si  grand,  et  les  progrès  que  les  idées  modernes  font 
en  Russie  sont  si  rapides  !  Quoi  qu'il  en  soit,  l'histoire  de  la  franc-ma- 
çonnerie russe  étant  entièrement  ignorée  de  l'Occident  et  fort  peu 
connue  des  Russes  eux-mêmes,  la  nouvelle  traduction  de  l'ouvrage  de 
Findel  ne  devait  pas  être  passée  sous  silence.  J.  M. 


De  la  i*éunion  de  Lyon  &  la  France,  Étude  historique,  d'aprèsies 
documents  originaux,  par  Pierre  Bonnassieux,  ancien  élève  de  l'École  des 
chartes.  Lyon,  Aug.  Brun;  Paris,  Champion,  1875.  Gr.  in-8  de  229  p.  — 
Prix  :  5  francs. 

Il  suffflrait  presque  pour  faire  connaître  et  juger  la  politique  de 


-  343  — 

Philippe  le  Bel,  de  l'épisode  raconté  par  M.  Bonnassieux.  Évocation  de 
tous  les  précédents  historiques  qui  semblent  devoir  légitimer  une 
annexion^  principe  des  nationalités,  plébiscite  fait  après  coup  pour 
justiûer  ce  qu'il  y  a  eu  de  violent  et  d'irrégulier  dans  les  procédés, 
tels  sont  les  moyens  peu  modernes  mis  en  œuvre  pour  amener,  au 
commencement  du  quatorzième  siècle,  la  réunion  du  Lyonnais  à  la 
couronne.  Le  savant  historien  de  Philippe  le  Bel,  M.  Boutaric,  nous 
Tavait  déjà  montré,  employant  en  grand  les  mêmes  moyens  dans  sa 
lutte  avec  Boniface  VIII  et  dans  ses  rapports  avec  les  princes  étran- 
gers. A  un  point  de  vue  plus  général,  le  livre  de  M.  Bonnassieux  nous 
offre  le  récit  d'une  de  ces  annexions  dont  Tensemble  a  constitué  notre 
unité  française  ;  des  travaux  semblables  au  sien  sont  encore  à  désirer 
pour  la  plupart  de  nos  provinces,  et  on  ne  peut  trop  féliciter  ceux  qui, 
comme  lui,  contribuent  à  en  grossir  le  nombre;  c'est,  en  effet,  un 
spectacle  plein  dMntérôt,  que  celui  de  l'agrandissement  progressif  de 
notre  pays;  c'est  aussi  le  plus  bel  hommage  qui  se  puisse  rendre  à  la 
persévérance  et  à  Fhabileté  de  la  race  royale,  qui  a  ainsi  groupé  les 
éléments  épars  de  notre  nationalité  française. 

Avouons,  toutefois,  qu'on  ne  voudrait  pas  voir  se  répéter  trop  sou- 
vent les  faits  qui  se  rencontrent  ici  ;  ils  ne  font  guère  honneur,  en 
effet,  à  l'honnêteté  politique  de  Philippe  le  Bel.  Les  divisions  dont  Lyon 
était  le  théâtre  ne  le  servaient  que  trop  bien  déjà,  il  sut  les  accroître 
encore  pour  rendre  toute  résistance  impossible  et  faire  désirer  son 
intervention  ;  il  se  fit  des  alliés  dans  le  rang  même  et  parmi  les  servi- 
teurs de  ses  adversaires.  Armé  de  souvenirs  historiques  qui  remon- 
taient jusqu'aux  Mérovingiens,  sans  tenir  compte  des  vicissitudes 
(rapidement  résumées  par  M.  Bonnassieux)  qui  avaient  fait  de  Lyon 
une  ville  impériale  de  droit,  mais,  en  fait,  soumise  à  ses  seuls  arche- 
vêques et  à  son  chapitre,  Philippe  le  Bel  revendiqua  la  suzeraineté  de 
Lyon^  et  ses  habitants,  toujours  en  révolte  contre  leurs  seigneurs, 
acceptèrent,  avec  empressement,  ce  haut  patronage  ;  il  en  profita 
pour  conclure,  avec  l'archevêque  et  le  chapitre,  un  traité  menaçant 
pour  les  libertés  lyonnaises  (1307),  et  qui,  par  suite,  resta  sans  exécu- 
tion; les  confiits  qu'il  devait  apaiser  recommencèrent;  et  le  roi  favo- 
risa si  ouvertement  les  Lyonnais  contre  leur  archevêque,  que  celui-ci 
dut  recourir  aux  armes;  l'armée  royale  entra  alors  sur  le  terri- 
toire épiscopal;  cette  prise  de  possession  devait  être  définitive.  L'ar- 
chevêque dut,  en  effet,  céder  à  Philippe  le  Bel  sa  justice,  c'est-à-dire 
le  plus  important  de  ses  droits  ;  il  ne  reçut,  en  échange,  que  des  avan- 
tages insignifiants^  sans  aucun  danger  pour  Tautorité  royale  ;  celle-ci 
s'était  installée  à  Lyon,  elle  n'en  devait  plus  sortir,  et,  malgré  des 
concessions  plus  importantes  en  apparence  qu'en  réalité,  elle  ne  fit^ 
depuis  lors  (10  avril  1312),  que  s'y  affermir  de  jour  en  jour.  Tels  sont 


—  su- 
ies faits  racontés  par  M.  Bonnassieux;  extraits  de  textes  pour  la  plu- 
part inédits,  et  tocgoars  originaux,  ils  oonstituent  une  étude  très« 
neuve  et  très-intéressante.  A.  Yabsbn. 


Ajrclilve»  de  la  Bastille.  Documents  inédits  reeueitUs  et  publiés  par 
François  Ravaisson,  conservateur  adjoint  à  la  bibliothèque  de  TArsenal. 
Bégne  de  Louis  XIV  (1681  et  1665  à  1674).  Paris,  Durand  et  Pedone-Lau- 
riel,  1875.  Gr.  in-8  de  vi-503  p.  — Prix  :  9fr. 

M.  Ravaisson  nous  donne,  dans  la  première  partie  du  septième 
volume  de  son  précieux  recueil  (p.  1-187,)  la  fin  de  l'exposé  de  la  pro- 
cédure instruite  contre  les  empoisonneurs,  exposé  qui  avait  déjà 
rempli  les  deux  volumes  précédents.  Les  documents  relatifs  à  cette 
immense  procédure  s'étendent  ici  du  27  juillet  1681  (date  d*une  lettre 
de  Louvoie  à  la  Rejnie),  jusqu'au  7  juin  1720  (date  d'une  lettre  de 
M.  Legras  de  Luartà  M.  de  Breteuil,  où  est  annoncée  la  mort  k  de  la 
prisonnière  d'État,  nommée  la  Chapelain,  qui  était,  depuis  quarante 
ans,  dans  les  prisons  du  château  de  Yillegranche.  »  Revenant  ensuite 
sur  ses  pas,  M.  Ravaisson  publie  diverses  pièces  qui  touchent  à  mille 
sigets.  La  première  de  ces  pièces  est  une  lettre  de  M.  de  Besmans  à 
Golbert,  du  9  mai  1665,  sur  l'assassinat  d'un  camarade  et  ami  de 
Molière,  du  sieur  Magnon,  historiographe  du  roi,  tué  en  plein  jour,  au 
Pont-Neuf,  assassinat  dont  on  accusa  le  marquis  de  Sortosville,  amou- 
reux de  la  femme  de  la  victime.  La  dernière  est  une  lettre  de  Le 
Tellier  à  M.  de  Besmans,  du  Q  octobre  1674,  portant  ordre  de  faire 
mettre  en  liberté  M.  Foullé  de  Martangis,  alors  maître  des  requêtes 
et,  plus  tard,  ambassadeur  en  Danemark,  qui  avait  été  mis  à  la  Bas- 
tille, quelques  jours  auparavant,  pour  avoir  insulté  J.  Fr.  de  la  Baume 
Le  Blanc  de  la  Yallière,  gouverneur  du  Bourbonnais,  frère  de 
M"*  de  la  Yallière.  Parmi  les  autres  dossiers  dépouillés  par  M.  Ra- 
vaisson, signalons  le  dossier  Bussj-Rabutin,  où  l'on  voit  que  l'auteur 
des  Amours  des  Gaules  avait  d'autant  plus  mérité  la  prison,  qu'au 
crime  d'avoir  écrit  ce  scandaleux  libelle,  il  avait  joint  le  crime  de 
tuer  son  cocher  (p.  196);  le  dossier  Yerthamend,  où  l'on  voit  que  cet 
ancien  conseiller  au  Parlement  de  Paris,  ce  maître  des  requêtes,  avait 
été  mis  à  la  Bastille,  pour  avoir  publié  un  insolent  factum  contre  l'ar- 
chevêque de  Paris,  il  n'avait  obtenu  sa  liberté  qu'à  la  généreuse 
prière  du  prélat  qu'il  avait  si  gravement  offensé  (p.  280);  le  dossier 
Auberj,  où  l'on  voit  que  l'auteur  des  Histoires  de  Richelieu  et  de  Maza- 
rin  fut  incarcéré  pour  avoir  publié  avec  un  zèle  indiscret  un  livre 
intitulé  :  Des  justes  prétentions  du  roi  sur  l'Empire  (p.  285);  le  dossier 
Marsilly, —  conspiration  contre  Louis  XIV  (p.  305);  le  dossier  che- 
valier  de  Rohan  —  autre  conspiration  contre  Louis  XIV  (p.  402).  Au 
sujet  de  cotte  dernière  affaire,  j'observerai  que  M.  Ravaisson  n'a 
qonnu  ni  le  travail  de  M.  de  Laffore,  ni  celui  do  M.L«  Sandret,  et  ^ue, 


—  345  — 

s'il  avait  oonsolté  oea  excellents  travaux,  il  n'aurait  pas  en  le  regret 
d'écrire  (note  de  la  page  429),  après  avoir  cité  un  passage  d'Eugène 
SvLe{Lairéaum<mi)  sur  la  marquise  de  Yillars  :  «  Nous  lui  laissons  la 
responsabilité  de  ce  renseignement,  que  nous  n'avons  pu  contrôler.  » 

T.  DE  L. 

Eie  Parlement,  la  Cour  et  la  Ville  pendant  le  proeA»  de 
Robert-Prancola  Damlena  (ITIIT).  —  Lettrée  du  poète  Bobbé  de 
Beauveiêt  au  dessinateur  Besfriehes,  publiées  pour  la  première  fois  avecnotice, 
notes  et  documents  inédits  par  Georges d*Hetllu  Paris,  Librairie  générale, 
1875.  Pet.  in-i8  de  Lzzxn-486  p.,  tiré  à  300  exemplaires.  —  Prix  :  7  fir. 

Qui  connaît  aujourd'hui  le  poôte  Robbé  de  Beauveset,  et  qui,  après 
avoir  lu  Tintéressante  notice  de  M.  Georges  d'HejUi,  a  envie  de  con- 
naître ses  versf  Poëte  licencieux  à  faire  rougir  un  siècle  qui  ne 
rougissait  guère,  pensionné  par  l'archevêque  de  Paris  à  condition  qu'il 
n'imprimerait  pas  ses  œuvres  ordurières,  ne  les  imprimant  pas»  sans 
doute  pour  s'en  tenir  à  la  lettre  du  traité,  mais  s'empressant  de 
les  réciter  ou  de  les  lire  dans  les  réunions  auxquelles  on  le  conviait, 
zode  ou  panégyriste  de  Louis  XV  et  de  la  Dubarrj  suivant  les  intérêts 
de  sa  bourse,  libertin  de  parole  et  de  conduite,  devenu  plus  tard  jansé- 
niste et  même  convulsionnaire,  puis  redevenu  libertin  à  la  fin  de  sa 
vie,  ce  triste  personnage,  après  avoir  été  le  convive  chojé  des  petits 
soupers  du  dix-huitième  siècle,  a  fini  par  mourir  à  quatre-vingts  ans 
dans  une  obscurité  d'où  nous  espérons  bien  qu*il  ne  sortira  pas.  Ce 
qui  lui  vaut  aigourd*hui  les  honneurs  de  Timpression,  c'est  la  décou- 
verte, dans  un  château  des  environs  d'Orléans,  d'une  volumineuse 
correspondance  entre  lui  et  son  oncle,  le  dessinateur  Orléanais,  Aignan 
Desfriches.  De  ce  dossier,  l'inventeur,  M.  Georges  d'Hejlli,  a  tiré  une 
vingtaine  de  lettres,  toutes  relatives  à  Tattentat  et  au  procès  de 
Damions.  Ce  sont  les  nouvelles  du  Parlement,  de  la  Cour  et  de  la 
Ville,  racontées  par  un  habitant  de  Paris  à  un  habitant  de  la  province. 
Robbé  se  vante  à  son  correspondant  d'avoir  «  mis  à  profit  toutes  les 
conversations  pour  percer  autant  qu'il  lui  a  été  possible,  dans  les 
secrets  du  fameux  procès.  »  Il  abonde  donc  en  détails,  et  il  n'épargne 
pas  les  détails  horribles.  Il  assiste  à  Tatroce  exécution,  a  au  premier 
rang  pour  tout  voir  sans  rien  laisser  échapper  de  la  terrible  céré- 
monie, p  et  il  n'en  laisse  rien  échapper  en  effet  dans  le  récit  «  complet 
et  exact  »  quUl  envoie  à  Desfriches,  avec  une  minutie  qui  donne  une 
plus  haute  idée  de  son  impassibilité  que  de  son  cœur. 

Un  certain  nombre  de  documents  du  temps,  publiés  en  appendice, 
viennent  confirmer  ou  compléter  le  récit  de  Robbé.  Ajoutons  que 
Touvrage  est  imprimé  sur  beau  papier,  en  caractères  elzéviriens,  avec 
vignettes,  ficurons,  et  culs  de  lampe,  avec  un  soin  et  une  élégance  qui 
font  autant  d'honneur  à  rimprimeur  qu*à  l'éditeur. 

Maxime  db  la  Rocheterib. 


—  346  — 

/Lrclilves  révolutionnaire»  dn  département  de  la  Greui 
1T60-1T04,  par  LoDis  Ddv AL,  archiviste  du  département  de  la  Creuse. 
Gnéret,  1875,  chez  l'auteur.  In-8  de  in-392  p.,  tiré  à  200  exemplaires 
numérotés.  —  Prix:  10  fr. 

Les  premières  pages  de  ce  livre  ont  été  écrites  sons  le  coup  des 
désastres  de  1870,  on  s'en  aperçoit  facilement.  Combien  alors,  ou- 
bliant les  leçons  de  Thistoire  et  les  études  décisives  de  M.  Camille 
Rousset,  croyaient  encore  à  la  légende  des  volontaires  de  1792  et  du 
succès  irrésistible  des  levées  en  masse.  M.  Louis  Duval  a  partagé  les 
illusions  de  tant  d*autres  à  cette  époque  ;  pour  lui,  c'étaient  les  me- 
sures révolutionnaires  de  la  Convention  et  les  armées  improvisées 
qui  avaient  sauvé  la  France  de  Tinvasion  des  puissances  alliées. 
Archiviste  du  département  de  la  Creuse,  il  s'est  donc  mis  à  chercher, 
parmi  les  documents  qui  lui  sont  confiés,  la  trace  des  mesures  adop- 
tées dans  le  département  pour  fournir  aux  armées  républicaines  des 
hommes,  des  armes  et  des  vivres.  Puis  son  siget  Ta  entraîné  ;  de  la 
Défense  nationale^  il  est  arrivé  à  la  Terreur^  et  de  là  est  sortie  une 
histoire  ou  plutôt  une  série  de  chapitres  sur  la  Révolution  dans  la 
Creuse.  Ainsi,  s'explique  aussi  la  défaut  de  méthode  du  livre  qui  em- 
brasse une  suite  de  sigets  divers^  juxtaposés  plutôt  que  coor- 
donnés entre  eux,  et  dont  chacun  forme,  en  quelque  sorte,  un  tout 
isolé  :  les  canons  et  le  métal  des  cloches  ;  les  fabriques  de  salpêtre  ; 
les  travaux  pour  l'armement  des  citoyens  ;  l'habillement  et  l'équipe- 
ment des  troupes  ;  les  levées  en  masse  ;  puis  les  suspects  ;  les  prêtres 
constitutionnels  et  réfractaires  ;  les  comités. 

Au  fond,  la  Révolution  fut,  dans  le  département  de  la  Creuse,  ce 
qu'elle  fut  à  peu  près  partout,  avec  des  degrés  dans  l'intensité,  un 
temps  de  violences  et  de  misère,  au  milieu  d'une  grande  exaltation 
populaire,  de  nobles  aspirations,  au  début,  bientôt  étouffées  par  ce  que 
M.  Duval  appelle  lui-même  «  l'excès  et  l'intolérance.  &  S'IL  y  eut  un 
caractère  particulier  dans  ce  département,  ce  fut  surtout  une  recru- 
descence de  fanatisme  anti-religieux.  On  fut  assez  modéré  générale- 
ment pour  les  suspects  laïques  ;  il  y  eût  des  emprisonnements,  mais 
qui  ne  semblent  pas  avoir  été  aussi  rigoureux  qu'en  une  foule  d'autres 
contrées,  et  la  guillotine,  croyons-nous^  ne  fonctionna  jamais  à 
Guéret.  Mais  quant  aux  prêtres  insermentés,  ils  furent  persécutés  là, 
plus  violemment  peut-être  que  partout  ailleurs;  pour  eux,  nulle  modé- 
ration, nulle  pitié  :  la  prison  ne  suffit  pas  ;  il  faut  la  déportation  ;  les 
administrateurs  de  la  Creuse  stimulent,  sur  ce  point,  le  zèle  des  persé- 
cuteurs de  la  Convention.  Il  leur  semble  que  leur  pays  ne  sera  libre 
et  leur  département  tranquille  que  le  jour  où  le  dernier  prêtre 
catholique  aura  été  jeté  à  Cayenne.  Cette  fureur  anti-religieuse  ne 
prit  même  pas  fin  au  9  thermidor;  elle  persista  avec  la  même  haine, 
surexcitée,  sans  doute,  par  l'attachement  que,  dans  certains  cantons. 


—  347  — 

les  paTsans,  rassurés  par  la  chute  de  Robespierre,  croyaient  pouvoir 
manifester  aux  prêtres  et  au  cuite  proscrits. 

A  ces  divers  titres,  les  documents  que  nous  annonçons  aigourd'hui 
présentent  un  réel  intérêt.  M.  Duval  a  apporté,  lui  aussi,  sa  pierre  à 
ce  grand  édifice  d'une  histoire  de  la  Révolution,  qui  ne  sera  complet, 
que  lorsque  toutes  les  archives  des  provinces  auront  livré  leurs  secrets. 
Quant  à  Tesprit  qui  anime  ce  livre  et  aux  théories  politiques  et  his- 
toriques qu'il    contient,  nous  aurions  de  graves  réserves  à  faire. 
M.  Duval  professe  pour  la  République  et  les  hommes  de  93,  un  en- 
thousiasme que  nous  sommes  loin  de  partager.  Il  semble  qu'à  ses 
yeux,  comme  à  ceux  de  M.  Ernest  Hamel,  Robespierre  soit  un  génie 
méconnu  qui  vaut  mieux  que  sa  réputation,  et  qui,  sans  le  9  Thermidor, 
eût  définitivement  fondé  la  République;  nous  croyons^  nous,   que 
Robespierre  visait  surtout  à  la  dictature.  Non  pas,  sans  doute,  que 
M.  Duval  approuve  la  Terreur,  ni  même  la  Constitution  civile  du 
clergé  ;  il  les  condamne  énergiquement  :  <  la  Terreur,  parce  qu'elle  a 
tué  la  République;  la  Constitution  civile,  parce  que  l'idée  de  fonder 
une  Église  nationale  est  une  de  ces  «  demi-mesures  a    qui  portent 
l'irritation  dans  les  esprits,  et  qui  compliquent  les  questions  sans  les 
résoudre  (p.  153).  o  Mais  la  Terreur,  dit-il,  ce  ne  sont  pas  les  con^ 
ventionnels  qui  Tont  inventée  :  elle  a  existé  de  tout  temps,  et  Cons- 
tantin et  Théodose  ne  se  sont  pas  servis,  pour  établir  le  christianisme, 
de  moyens  autres  que  les  hommes  de  93  pour  le  détruire  (p.  156).  Si 
atroces  d'ailleurs  et  si  arbitraires  qu*ils  fussent,  les  décrets  de  la  Con- 
vention ont  été,  d'un  côté,  provoqués  par  Taudace  de  la  réaction,  de 
Tautre,  inspirés  par  la  raison  d'Etat  et  les  nécessités  du  salut  public^ 
Or,  «  qui  oserait  prétendre  déterminer,  sans  crainte  de  jamais  se 
tromper,  le  point  fixe  où  il  convenait  de  s'arrêler  dans  cette  série  de 
mesures  de  salut  public,  qui  la  plupart  durent  être  improvisées  sur  le 
champ  (p.  141)?  § 

On  comprendra  que  nous  ne  discutions  pas  ici  de  pareilles  théories  : 
il  nous  suffit  de  les  indiquer.  M.  de  la  Roghbterib, 


Eia Guerre  de  France  (IdTO-TI),  par  Gh.  dk  Mazadb.  Pans,  Pion, 
1875.  2  vol.  in-8  de  538  et  555  p.  —  Prix  :  16  fr. 

Hlatotre  diplomatique  de  la  c^uerre  franco«aUeniande«  par 

Albert  Sorel.  Paris,  Pion,  1875.  2  vol.  in-8  de  428  et  452.  —  Prix  :  16  fr. 

Le  nomhre  des  ouvrages  relatifs  à  la  dernière  guerre,  publiés  tant 
en  France  qu'à  l'étranger,  devient  réellement  trop  considérable 
pour  qu'on  puisse  les  analyser  tons  en  détail.  Nous  avons  rendu 
compte,  ici  même,  de  la  plupart;  et  notre  tâche  serait  à  peu  près 
achevée,  si  deux  œuvres  des  plus  remarquables,  conçues  k  des  points 
de  vue  différents  et  se  complétant  en  quelque  sorte  Tune  Tautre, 


—  348  — 

n*étaient  venues,  dans  ces  derniers  temps,  ramener  vivement  l'atten- 
tion sur  un  siyet  qu'on  aurait  cru  épuisé. 

C'est  le  côté  militaire  et  politique  qu'a  envisagé  M.  Gh.  de  Mazade, 
quand  il  a  entrepris,  dans  la  Revue  de»  Deux-Mondes^  les  dramatiques 
tableaux  qu'il  a  réunis  depuis  en  deux  gros  volumes.  C'est  uniquement  le 
rôle  de  la  diplomatie  avant,  pendant  et  après  la  guerre  franco-alle- 
mande qu'a  voulu  étudier  M.  Albert  Sorel,  avec  une  compétence  fort 
spéciale  et  une  finesse  d'appréciation  peu  commune.  Le  premier  s'est 
contenté  de  résumer  les  documents  connus  :  publications  officielles 
des  états-m^jors,  récit  des  généraux,  déposition  des  témdns,  rapporta 
faits  à  TÂssemblée  nationale.  Le  second,  sans  négliger  les  ouvrages 
de  ses  prédécesseurs^  s'est  appliqué  particulièrement  à  découvrir  le 
secret  des  chancelleries^  à  analyser  les  moindres  actes  des  diplomates, 
tant  français  qu'étrangers,  à  juger  ce  qui  a  été  fait,  à  dire  aussi  ce 
qu'on  aurait  pu  faire.  Tous  les  deux,  avec  des  procédés  et  des  mérites 
divers,  ont  écrit  avec  talent  une  œuvre  historique  définitive,  que  devra 
consulter  quiconque  voudra  entendre  quelque  chose  aux  événements 
de  ces  dernières  années.  Ajoutons  que  la  même  impartialité  a  présidé 
à  la  composition  des  deux  livres,  si  bien  que  les  jugements  qui  s'y 
rencontrent,  sans  avoir  la  prétention  d'être  infaillibles,  approchent 
autant  que  possible  de  la  vérité. 

M.  Ch.  de  Mazade  aborde  de  plein  pied  son  sujet  :  à  peine  un  cha- 
pitre est-il  consacré  aux  préliminaires  de  la  guerre,  et  tout  le  pre- 
mier volume  est  destiné  à  raconter  les  divers  incidents  de  la  lutte, 
depuis  Wissembourg  jusqu'à  Téchec  définitif  des  armées  de  province 
dans  l'Est,  en  passant  par  le  4  Septembre  et  la  capitulation  de  Metz. 
Le  second  volume  traite  particulièrement  du  siège  de  Paris,  de 
l'armistice  et  des  négociations  pour  la  paix  définitive.  Les  pièces  justi- 
ficatives, les  citations  sont  peu  abondantes  ;  tout  l'intérêt  réside  dans 
le  récit  qai  est  clair,  animé,  patriotique,  et  auquel  on  ne  pourrait 
guère  reprocher  que  l'abus  de  quelques  formes  de  langage.  C'est,  en 
un  mot,  un  ouvrage  fait  pour  les  gens  du  monde  et  les  lecteurs  qui 
ne  tiennent  pas  trop  à  approfondir. 

Le  livre  de  M.  Albert  Sorel  est  à  la  fois  plus  sérieux  et  plus  origi- 
nal :  on  sent  qu'un  homme  du  métier  y  a  mis  la  main.  Avant  tout,  il 
se  propose  de  rechercher  les  causes  premières  des  malheurs  de 
la  France  ;  et  il  n'a  pas  de  peine  à  établir,  dans  de  longs  prélimi- 
naires, que  la  politique  du  gouvernement  impérial  devait  fatalement 
engager  le  pays  dans  un  duel  inégal,  où  l'Europe  entière  profiterait  de 
nos  fautes  pour  laisser  à  la  Prusse  le  champ  libre  dans  la  diplomatie 
aussi  bien  que  dans  la  lutte  à  main  armée.  Rarement  la  responsabi- 
lité du  ministère  Ollivier  dans  la  déclaration  de  guerre  a  été  mieux 
prouvée.  L'empereur  hésitait  sans  volonté,  l'impératrice,  par  întûrêt 


—  349  — 

dynastique,  inclinait  vivement  à  ToffensiTe,  le  maréchal  Le  Bœuf 
avait  confiance  dans  les  alliances  négociées  par  le  duc  de  Gramont, 
le  duc  de  Oramont  espérait  que  l'armée  imposante,  mise  sur  pied  par 
le  maréchal,  entraînerait  l'adhésion  des  puissances  amies  ;  et,  cha- 
cun se  trompant  à  son  tour,  une  Chambre  sans  indépendance  se 
laissait  volontairement  abuser  et  votait  des  résolutions  pour  lesquelles 
elle  n'avait,  au  fond,  nul  enthousiasme. 

Les  désastres  une  fois  survenus,  la  diplomatie  pouvait-elle  les 
amoindrir?  Et  Tinexpérience  de  nos  hommes  d'État,  après  le  4  Sep- 
tembre, a-t-elle  augmenté  pour  nous  la  conséquence  de  la  défaite  ? 
M.  A.  Sorel incline  aie  penser;  mais,  quand  il  entre  dans  le  détail 
des  événements,  il  ne  prouve  point  qu'une  conduite  plus  correcte  eût 
amené  de  meilleurs  résultats.  Ainsi,  il  reproche  à  M.  Thiers  de  s*étre 
fait  duper  par  le  bon  accueil  qu'il  reçut  en  Russie,  et  d'avoir  trop 
franchement  laissé  voir  à  l'étranger  que  la  France,  au  point  de  vue 
militaire,  était  à  bout  de  ressources.  Ainsi,  il  aurait  voulu  qu'on  permit 
à  M.  de  Chaudordj  d'exploiter   vis-à-vis  de  TAngleterre,  la  crainte 
qu'elle  éprouvait  des  projets  de  la  Russie  relatifs  à  la  dénonciation 
du  traité  de  Paris.  Mais,  quelque  habilement  exploitées  que  fussent 
ces  craintes,  l'Angleterre  n'aurait  rien  fait  pour  s'en  délivrer,  puisque, 
plus  tard,  quand  l'événement  prévu  éclata,  elle  ne  put  ni  ne  voulut 
agir.  Puis,  cette  aligne  des  neutres,  »  qui  nous  fut  si  fatale,  n'était-ce 
pas  l'alliance  intime  de  la  Prusse  avec  la  Russie  qui  l'imposait  à 
l'Europe;  et  cette  union  fatalement  cimentée,  comment  penser  à  la 
rompre  en  face  de  la  Prusse  victorieuse  I  Aussi  nous  semble-t-il  que 
M.  Sorel  a  quelque  peu  exagéré  les  mérites  de  M.  de  Chaudordy  ; 
car  toutes  les  petites  habiletés,  dont  il  a  partagé  le  secret,  et  qu'il 
nous  révèle  aujourd'hui,  étaient  incapables  de  rien  modifier  aux  inten- 
tions d'un  ennemi  qui  avait  fixé  d'avance  les  exigences  dont  il  ne 
s'est  jamais  départi.  La  principale  faute  du  gouvernement  de  la 
Défense  nationale  que  l'auteur  fasse  toucher  véritablement  du  doigt, 
c'est   encore  le  refus,  habilement  secondé  par  M.  de  Bismarck, 
d'envoyer  un  plénipotentiaire  aux  conférences  de  Londres;  c'était 
une  circonstance  favorable,  qu'il  fallait  saisir  sans  hésitation,  et  qui 
ne  s'est  plus  présentée. 

Tout  ce  qui  concerne  les  longues  négociations  pour  la  paix  remplit 
la  moitié  du  second  volume,  et  est  esquissé  avec  une  précision,  une 
intelligence  du  sujet,  un  intérêt  soutenu  qu'on  ne  retrouve  dans  aucun 
autre  écrit,  pas  même  dans  les  recherches  spéciales  de  M.  Yalfrej. 
Enfin,  une  justesse  de  vue  parfaite  s'unit,  dans  le  livre  de  M.  Sorel, 
au  plus  noble  patriotisme,  si  bien  qu'en  étudiant  avec  clairvoyance 
les  événements  passés,  on  peut  rencontrer  pour  l'avenir  les  plus  sages 
et  les  plus  pratiques  conseils.  Le  joune  professeur  de  l'Ecole  libre  des 


—  380  — 

sciences  politiques^  qui  est  aussi  diplomate  à  ses  heures,  nous  parait 
donc  avoir  composé  un  ouvrage  qui  demeurera  et  qui,  sauf  de  légères 
restrictions,  ne  mérite  que  des  éloges. 

Gustave  Bagubnàult  bb  Puchbssb. 


Histoire  de  Fabba  je  d'Hauteeoinbe,  en  Savoie»  avec  pièces 
justificatives  inédites,  par  Claudius  Blanchard,  docteur  en  droit,  membre 
de  TAcadémiede  Savoie.  Ghambéry,  imprimerie  Châtelain.  1875.  In  8*  de 
741p. 

La  royale  abbaye  d^Hautecombe,  nouveau  Saint-Denis  d*une  puis* 
santé  famille  souveraine,  s'élève  près  du  lac  du  Bourget,  en  face  da 
coteau  de  saint  Innocent,  sur  Fun  des  plus  saillants  promontoires  de 
cette  côte  pittoresque.  C'est  un  des  plus  célèbres  monastères  de  la 
Savoie.  Le  baron  Jacquemoud,  conseiller  d'État^  Mgr  Yibert,  évéque 
de  Maurlenne,  et  le  comte  Gibrario,  ministre  d'État^  ont  naguère 
esquissé  à  grands  traits  la  physionomie  de  ce  couvent  renommé,  mais 
nul  n'a  su  retracer  avec  tant  de  clarté  et  de  lucidité  l'histoire  de  la 
première  nécropole  de  la  maison  de  Savoie  que  l'auteur  du  livre  que 
nous  annonçons  aujourd'hui.  Ouvrages  imprimés,  archives  publiques 
et  privées,  documents  inédits,  pièces  déjà  connues^  rien  n'a  été  négligé 
par  M.  Claudius  Blanchard,  qui  a  voulu  ainsi  faire  de  son  travail  une 
œuvre  d'une  scrupuleuse  exactitude. 

Fondé,  vers  Fan  1101,  sur  l'étroit  plateau  de  Paquinot,  par  des 
moines  de  l'abbaye  d'Aulps  en  Chablais,  le  monastère  de  la  combe  de 
Yalpert  fut^  vers  Tan  1125,  sur  les  conseils  de  saint  Bernard,  trans- 
féré à  Charaïa,  sur  les  rivesdu  lac  du  Bourget,  au  lieu-dit  Haute-Combe. 
Agrégé  peu  à  près,  en  1135  environ,  à  Tordre  de  Cîteaux,  il  eut  pour 
premier  abbé  Vivian,  auquel  succéda,  en  1139,  Amédée  d'Hauterive, 
le  r^i/a6/e  fondateur  d'Hautecombe,  pour  ainsi  dire,  celui-là  même,  qui^ 
en  1145,  fut  évéque  de  Lausanne  et  que  TÉglise  honore  d'un  culte  tout 
particulier.  Rodolphe,  qui  vint  ensuite,  put,  grâce  aux  libéralités  da 
comte  Humbert  III,  agrandir  la  maison  et  élever  cette  chapelle  Saint- 
André  qui  existe  encore  et  qui  a  su  si  bien  résister  aux  injures  du  temps. 
Sous  la  sage  administration  d'Henry  de  Marsac,  qui,  pendant  dix-sept 
ans  (1160-1477),  régit  Fabbaye  d'Hautecombe,  on  vit  s'accroître  la 
piété  des  religieux.  Le  cloître,  à  cette  époque,  reçut,  pour  la  première 
fois,  les  dépouilles  mortelles  d'un  membre  de  la  famille  de  Savoie. 

Nous  assistons  dès  ce  moment  à  la  prospérité  croissante  du  monas- 
tère; nous  voyons  Tabbaye,  comblée  des  dons  des  maisons  de  Savoie,  de 
Clermont,  de  Grésy  et  d'AUinges,  augmenter  ses  possessions  diverses, 
accroître  ses  relations  et  donner  un  dernier  asile  à  plus  d'un  puis- 
sant de  la  terre.  Jean  de  Faverges  lui  accorde  la  malàdrerie  de  Sainte- 


—  351  — 

Marie-Madeleine  ;  l'abbé  Jacques  est  chargé  par  Benoit  XII  d'intro- 
duire à  Ânlpsla  réforme  cistercienne  ;  Ajmonle  Magnifique  fait  cons- 
truire la  chapelle  des  princes,  dont  il  confie  la  décoration  à  Georges 
d*Aquila;  Edouard  le  Libéral,  Louis  II  et  AmédéeVI  sont  inhumés  avec 
une  certaine  pompe  et  Tiennent  dormir  là  leur  dernier  sommeil.  Avec 
Amédée  VU,  décédé  en  1391,  prennent  fin  les  comtes  de  Savoie.  De 
cette  époque,  date,  et  pour  la  monarchie  et  pour  sa  nécropole,  une  situa- 
tion nouvelle,  a  Neuf  chefs  de  la  dynastie,  un  grand  nombre  de  princes 
et  de  princesses  étaient  venus,  pendant  le  cours  de  deux  siècles, 
attendre,  dans  le  pieux  et  solitaire  asile  des  bords  du  lac,  le  grand 
jour  de  la  résurrection.  Désormais,  plusieurs  années  s'écouleront 
et  aucun  cortège  funèbre  n'entrera  dans  la  basilique  abbatiale. 
Pendant  le  quinzième  siècle,  quelquefois  encore  ses  murs  se  couvri- 
ront de  tentures  de  deuil  ;  l'ossuaire  d'Ajmon  s'ouvrira,  deux  souve- 
rains de  Savoie,. portant  la  couronne  ducale,  7  seront  déposés  ;  mais, 
dans  les  siècles  suivants,  la  nécropole  sera  peu  à  peu  entièrement 
désertée  ;  la  ruine  matérielle  suivra  la  ruine  morale  ;  de  nombreuses 
restaurations  la  défigureront,  jusqu'à  ce  que,  abandonnée  et  violée 
par  des  mains  sacrilèges,  eUe  soit  rachetée  par  l'héritier  des  sou- 
verains dont  elle  abritait  les  augustes  dépouilles.  Rétablie  alors 
dans  son  ancienne  splendeur  et  renouant  les  souvenirs  des 
siècles  passés,  elle  recevra  les  restes  mortels  du  dernier  suc- 
cesseur direct  d' Amédée  III,  comte  de  Maurienne,  dans  la  per- 
sonne de  Charles  Félix,  roi  de  Sardaigne,  avec  qui  s'éteint  la 
branche    aînée    de    Savoie.  » 

Gouvernée  d'abord  par  des  abbés  réguliers^  Hautecombe  passa, 
au  quinzième  siècle^  sous  la  domination  d'abbés  commendataires 
dont  M.  Blanchard  nous  raconte  longuement  les  faits  et  gestes. 
Dans  cette  intéressante  galerie,  se  détachent  surtout  les  figures 
expressives  de  Sébastien  d*Orlié  (1473),  de  Claude  d'Estavayé 
(1504-1534),  du  cardinal  de  Saint-Georges  (1549-1560),  d'Alphonse 
Delbene  (1560-1603)  et  d'Antoine  de  Savoie  (1655-1688).  Vers  le  mi- 
lieu du  dix-huitième  siècle  l'abbaye  est  unie  à  la  Sainte-Chapelle  de 
Chambéry  et  régie  alors  par  le  doyen  du  chapitre,  puis  par  dés  abbés 
réguliers  et  des  délégués  apostoliques. 

Il  nous  faudrait  de  longues  pages  pour  décrire  les  vicissitudes 
diverses  de  ce  monastère  et  en  raconterlesfortunes  variées.  Nous  pré- 
férons renvoyer  à  l'ouvrage  de  M.  Claudius  Blanchard.  Celui-ci  n'a 
pas  hésité,  du  reste,  à  reproduire,  à  l'appui  de  ses  assertions,  bien  des 
documents  d'un  haut  intérêt  :  ce  qui  donne  encore  une  valeur  nou- 
velle à  l'Histoire  de  tabbaye  et  Hautecombe.  Nous  recommandons  donc 
vivement  ce  livre  à  nos  lecteurs.  A.  Albrieb. 


—  352  — 

Itechercliea  sur  les  Éïtcitn  de  Bretagne.  La  tenue  de  i736,  par 
M.  A.  Dd  Boubtiez  dk  Keroaguen.  Paris,  Dumoulin,  1875.  2  vol.  gr.  in-8 
de  xn-484  et  464  p.  —  Prix  :  12  fr. 

L'histoire  de  Bretagne  pendant  les  trois  derniers  siècles»  c'est*à« 
dire  depuis  sa  réunion  à  la  couronne  jusqu'à  la  révolution  de  1789,  est 
particulièrement  intéressante  ;  car  cette  province,  la  seule  peut-être 
entre  toutes  celles  qui  formèrent  le  royaume  de  France,  put  se   gou- 
verner en-dehors  de  la  centralisation  ministérielle,  conserver  une  indé- 
pendance relative  et  maintenir  chez  elle  un  gouyemement  constitu- 
tionnel véritable  :  les  États  seuls  yotaient  les  impôts^  et  l'on  sait 
quelle  crise  menaça  d'éclater,  lorsqu'on  1717,  la  Cour,  ayant  voulu  faire 
passer  plusieurs  édits,  malgré  leur  résistance^  le  parlement  de  Rennes 
déclara  coupables  de  forfaiture  tous  les  receveurs  qui  percevraient 
quelque  droit  que  ce  fût  avant  que  justice  ne  fût  rendue.  C'est  que  la 
Bretagne  n'avait  jamais  été  conquise  par  les  rois  de  France;  elle 
s'était  donnée  librement,  stipulant  des  conditions  précises,  à  l'exé- 
cution desquelles  elle  dût  sa  longue  prospérité.  Cette  histoire  pro- 
vinciale de  trois  siècles  est  encore  trop  peu  connue  ;  la  monographie 
de  la  Chambre  des  comptes  de  Bretragne  a  trouvé,  il  est  vrai,  dans 
M.  Fourmont,  un  compilateur  consciencieux  ;  mais  celle  d'une  cour 
souveraine  beaucoup  plus  importante,  celle  du  Parlement  de  Rennes^ 
n'a  pas  encore  été  tentée.  Les  États  ont  été  plus  heureux,  M.  de  Carné 
a  consacré  deux  volumes  importants  à  leur  histoire  politique.  MM.  de 
la  Borderie,  Lamarre,  Caron  ont  étudié  leur  organisation  intérieure, 
et  nous-mêmes,  nous  avons  eu  Toccasion,  dansnos  Essais  sur  les  trois  ducs 
de  Coislin  et  sur  l'un  des  évéques  de  Vannes,  Mgr  Jjefebvre  de  Caumar- 
tin,  de  donner  des  détails  inédits  sur  plusieurs  sessions  intéressantes. 
Mais  aucune  publication  de  longue  haleine  n'avait  encore  été  consa- 
crée à  leur  histoire  intime,  à  cette  histoire  qui  les  montre  veillant  à 
tout,  s'occupant  des  plus  petits  détails,  étudiant,  discutant,  résolvant 
une  foule  de  questions  que  nous  voyons  soulever  dans  nos  assemblées 
politiques,    s'occupant  des  finances,  des  routes,  du  commerce,  de 
l'extinction  de  la  mendicité,  des  colonies  agricoles,  des  encourage- 
ments à  donner  à  l'industrie,  aux  lettres,  aux  sciences  et  aux  arts. 
C'est  pour  comblet  cette  lacune  que  M.  du  Bouëtiez  de  Eerorguen  a 
pris  le  parti  de  publier  m  extenso  les  procès- verbaux  de  deux  sessions 
d'États,  celles  de  1717  et  de  1736,  choisies  à  des  époques  qui  corres- 
pondent à  un  mouvement  de  reprise  d'indépendance  nationale.  Ea 
éditeur  scrupuleux,  M.  du  Bouëtiez  ne  s'est  pas  contenté  d'une  sèche 
reproduction.  Non-seulement  il  a  fait  précéder  sa  publication  d'une 
introduction  substantielle,  dans  laquelle  il  étudie  successivement  le 
rôle,  les  attributions  et  les  prérogatives  des  trois  ordres  du  clergé, 
de  la  noblesse  et  du  tiers  dans  ces  assemblées,  des  officiers  dos  États, 


—  353  — 

des  députés  à  la  Cour  et  à  la  Chambre  des  comptes;...  mais  il  a  joint 
aux  procès-verbaux  une  foule  de  lettres  inédites,  extraites  de  la 
Bibliothèque  nationale  et  des  Archives,  écrites  par  les  présidents,  le 
gouverneur^  les  intendants»  les  commissaires  ou  les  ministres;  il  repro- 
duit même  le  fac-similé  d'une  ancienne  gravure  fort  curieusS  représen- 
tant une  séance  solennelle  d'ouverture  des  États  ;  il  nous  donne  des 
notices  biographiques  très-étendues  sur  les  principaux  personnages 
des  deux  sessions  dont  il  s'occupe  en  particulier,  et  il  termine  son 
second  volume  par  des  extraits  des  catalogues  des  manuscrits  de  nos 
grandes  collections  nationales,  indiquant  les  sources  de  l'histoire  bre- 
tonne pendant  les  derniers  siècles. 

C'est  là  un  travail  consciencieux  et  méritoire,  qui  a  droit  à  tous  les 
encouragements  de  la  critique  :  il  ja,  dans  ces  deux  volumes,  une  mine 
de  documents  d'une  richesse  toute  particulière,  libéralement  ouverte 
aux  travailleurs,  et  nous  ne  donnerons  qu'un  conseil  à  M.  du  Bouëtiez, 
s'il  peut  préparer  bientôt,  comme  nous  l'espérons,  une  seconde  édition 
de  son  livre  :  qu'il  rejette  en  appendice  certains  documents  intercalés 
dans  le  texte  et  qu'il  revoie  avec  soin  les  épreuves  de  ses  notes,  où 
quelques  noms  se  reconnaissent  difficilement;  mais  ce  n'est  là  qu'une 
tache  légère.  C'est  à  l'aide  de  tels  ouvrages  qu'on  fera  quelque  jour  une 
bonne  histoire  de  France.  Rbnê  Kbrvilbr. 


Dix:  ans  de  l*litstolre  d* Allemagne.  Origines  du  noiaoel  Empire^ 
diaprés  la  correspondance  de  Frédéric-GuUlaume  IV  et  du  baron  de  Bunsen^ 
1847-1857,  par  Saint-René  Taillandier,  de  FAcadémie  française,  profes- 
seur à  la  faculté  des  lettres,  Paris,  Didier,  1875.  In-8  de  xx-438  p.  — 
Prix  :  7  fr.  50. 

Nous  n'avons  jamais  voulu  connaître  assez  rAllemagne,  et  nous 
nous  sommes  toujours  laissé  surprendre  par  des  événements  qu'avec 
un  peu  d'attention  il  était  très-facile  de  prévoir.  M.  Saint-René 
Taillandier  le  rappelle  fort  à  propos  dans  la  préface  d'un  ouvrage 
qu'il  a  publié  il  y  a  quelques  mois  et  qui  complète  toute  une  série  de 
travaux  consacrés  par  lui,  depuis  trente  ans,  à  l'histoire,  à  la  philoso- 
phie, à  la  politique  allemande.  Le  célèbre  historien  Léopold  Ranke, 
vient  de  recueillir  la  correspondance  du  roi  de  Prusse^  Frédéric- 
Quillaume  IV,  avec  le  baron  de  Bunsen,  son  ambassadeur  auprès  de 
la  reine  d'Angleterre;  d'autre  part,  la  veuve  du  diplomate  avait 
donné,  à  la  manière  anglaise,  une  ample  biographie  de  son  mari,  tirée 
de  ses  papiers  de  famille^  où  abondent  les  pièces  de  tout  genre, 
lettres,  rapports,  documents  officiels  et  correspondances  intimes.  C'est 
d'après  ces  sources  de  renseignements,  qui  se  complètent  si  bien  Tune 
par  l'autre,  que  M.  Saint-René  Taillandier  a  tracé  non -seulement  le 
portrait  de  deux  physionomies  contemporaines  aussi  originales  que 

Octobre  1875.  T.  XIV,  23. 


—  354  - 

peu  connues,  mais  encore  le  tableau^  très-nouveau  pour  nous,  de  toute 
une  période  de  Thistoire  contemporaine. 

Après  une  introduction  sur  les  origines  et  la  nature  de  l'amitié  qui 
unissait  le  souverain  et  l'ambassadeur^  ces  études  commencent  par 
l'affaire  du  Sonderbund  et  des  cantons  radicaux  de  la  Suisse  en  1847, 
affaire  qui  passionna  si  vivement  Frédéric-Guillaume  IV,  comme  prince 
de  Netifchâtel.  Puis  viennent,  d'après  l'ordre  des  chapitres,  l'histoire 
du  parlement  de  Francfort  et  de  la  constitution  d'un  empire  d'Alle- 
magne offert  à  la  Prusse  par  la  démocratie  germanique,  —  les  humi- 
liations de  la  Prusse  en  face  de  TAutriche  en  1850,  —  Tavénement  de 
Tempereur  Napoléon  III,  —  enfin  la  guerre  de  Crimée,  l'abstention  de 
la  Prusse  et  la  démission  de  Bunsen,  qui  soutenait,  dans  cette  circons- 
tance, une  politique  différente  de  celle  du  roi.  Ce  sont,  comme  l'on 
voit,  autant  de  sujets  féconds  en  révélations  intéressantes,  que 
M.  Saint-René  Taillandier  a  traités  avec  son  talent  ordinaire,  et  qui 
sont  d'une  lecture  aussi  attachante  que  profitable.        G.  B.  j>r  P. 


Iba  Mutualité  de»  Mai^e»  depuis  lea  temps  les  plus  unclens 
Jusqu'au  dl^K-liultlènie  siècle»  par  J.  Peryolf.  Saint-Pétersbourg, 
1874.  In-8  de  294  p.  —  Prix  :  8  fr. 

L'idée  de  la  solidarité  des  peuples  slaves  n'est  point  nouvelle.  Elle 
a  été  mise  en  vogue  par  les  propagateurs  du  principe  de  nationalité, 
dont  elle  n'est  qu'une  application  partielle.  Le  feu  poëte  Kollar,  dont 
on  connaît  les  tendances  slavophiles  et  le  penchant  pour  les  théories 
quelque  peu  fantaisistes  (témoin  son  Italie  paléo-slovène^  où  il  fait  des 
Étrusques  un  peuple  slave),  a  contribué  beaucoup  à  rendre  cette  idée 
populaire,  grâce  à  son  talent  d'écrivain,  et  aussi,  grâce  à  Tenthou- 
siasme  avec  lequel  les  Tchèques  accueillaient  alors  les  moindres  écrits 
favorables  à  leur  nationalité.  Mais  Tauteur  de  La  mutualité  littéraire 
des  Slaves  (Die  litterarische  Wechselseitigkeit  der  Slaven,  Pesth,  1837) 
n'a  envisagé  qu^un  côté  de  la  question,  ainsi  que  l'indique  le  titre  de  son 
opuscule  demeuré  célèbre.  Il  a  complètement  négligé  le  côté  histo* 
rique.  M.  Pervolf,  au  contraire,  s'attache  surtout,  dans  son  ouvrage,  à 
assurer  à  l'idée  de  mutualité  slave  une  base  historique,  à  retrouver 
ses  titres  de  noblesse,  à  établir  son  ancienneté,  voire  la  perpé- 
tuité des  rapports  mutuels  qui,  selon  lui,  ont  existé  parmi  les  divers 
membres  de  la  grande  famille  slave.  —  Tel  est  le  but  de  son  livre. 
L*aut6ur  prend  les  peuples  slaves  au  moment  de  leur  apparition  sur  la 
scène  historique  du  monde,  et  en  poursuit  les  destinées  jusqu'à  l'époque 
où  elles  subirent  un  changement  décisif,  par  suite  de  la  transformation 
subite  de  la  Russie  en  une  puissance  politique  du  premier  ordre,  et  de 
la  prépondérance  que  l'empire  des  tsars  commença  dès  lors  à  exercer 
sur  les  autres  peuples  slaves.  Toiciles  conclusions  de  notre  auteur; 
elles  méritent  d'être  reproduites  en  entier. 


—  355  — 

1^  KuDité  primitive  de  race  se  manifeste  non-seulement  dans  la 
langue  des  Slaves,  mais  encore  dans  lears  institutions  plus  récentes, 
dans  la  période  de  Texistence  autonome  des  divers  groupes  de  peu- 
ples; 29  Le  sentiment  de  l'unité  de  race  s'est  conservé  chez  eux  dans 
la  vie  littéraire  et  sociale,  et  cela  jusque  dans  les  derniers  temps; 
3»  Le  mouvement  hussite  n'a  pas  été  le  résultat  de  {'orthodoxie  intro- 
duite en  Bohôme  par  Cyrille  et  Méthode  ;  il  se  hasait  sur  des  principes 
résultants  des  conditions  locales  dans  lesquelles  se  trouvait  rÉgUse 
tchèque  à  la  fin  du  quatorzième  siècle  et  au  commencement  du  quin- 
zième; 4®  Le  hussitisme  a  été  non  seulement  un  mouvement  religieux, 
mais  encore  national  :  tchèque  et  slave  ;  5®  L*art  militaire  des  Tchèques 
du  quinzième  siècle  a  influé  sur  celui  de  Pologne  ;  6*  L'influence  du 
tchèque  sur  Tancienne  langue  polonaise  est  plus  sensible  dans  là  litté- 
rature théologique  que  chez  les  écrivains  profanes  ;  7^  Le  sort  des 
Slaves  de  l'Elbe  et  de  la  Baltique  a  été  toujours  considéré,  par  les 
autres  Slaves  occidentaux,  tchèques  et  polonais,  comme  un  indice 
instructif  de  leur  propre  sort;  8o  La  différence  do  religion  a  été  un 
des  principaux  obstacles  à  Tunion  spontanée  de  la  Russie  et  de  la 
Pologne,  sous  la  forme  d'un  seul  corps  politique  ;  9^  La  langue  tchèque 
a  exercé  une  incontestable  influence  sur  les  traductions  faites  dans 
la  Russie  occidentale,  au  commencement  du  seizième  siècle,  telles 
que  la  Bible  de  Skorina  et  le  Cantique  des  Cantiques  ;  10^  Le  slavon- 
ecolésiastique  a  le  plus  contribué  au  rapprochement  de  tous  les  Slaves 
orthodoxes,  et,  en  partie  aussi,  des  Slaves  catholiques  du  midi. 

Ces  propositions  résument,  en  mdme  temps  qu'elles  caractéri- 
sent le  livre  de  M.  Pervolf,  où  d'ailleurs  il  a  fait  preuve  d'une 
grande  érudition  et  d'une  connaissance  approfonrlie  des  littératures 
polonaise  et  tchèque.  La  théorie  panslaviste  vient  d'acquérir  en  lui 
un  nouvel  adepte*  Dans  cette  théorie,  le  hussitisme  joue  un  rôle  dont 
on  exagère  à  plaisir  Timportance.  Certains  auteurs  russes  vont  même 
jusqu'à  voir,  dans  le  hussitisme,  une  forme  nouvelle  de  Vorthodoxie 
byzantine,  ou,  pour  parler  avec  M.  Pervolf,  un  résultat  de  Vortho» 
doxie  introduite  par  Cyrille  et  Méthode.  Sans  admettre  cette  dernière 
opinion,  il  en  partage  cependant  l'erreur  capitale,  qui  consiste  à  faire 
des  saints  apôtres  des  Slaves,  Cyrille  et  Méthode,  des  orthodoxes  de 
nouvelle  espèce,  c'est-à-dire  des  sectateurs  de  Photius.  Quant  au  hussi- 
tisme et  en  général  à  l'élément  tchèque,  sur  lequel  M.  Pervolf  insiste 
tant,  on  ne  doit  pas  en  être  surpris  :  de  la  part  d'un  auteur  qui  est  tchèque 
d'origine,  qui  semble  être  étranger  au  catholicisme,  et  a  terminé  ses 
études  à  l'université  de  Prague,  une  pareille  insistance  parait  assez 
naturelle.  Au  reste,  la  question  principale  n'est  pas  là.  Ce  qu'il  importe 
de  savoir  avant  tout,  c'est  si  la  mutualité  des  peuples  slaves  a  réelle- 
ment existé  autrefois,  et  si  l'histoire  nous  en  a  conservé  des  témoi- 


—  356  — 

gnages  positifs  et  vraiment  dignes  de  foi.  Là-dessus^  le  doute  n'est  que 
trop  permis.  Le  livre  que  nous  examinons  ne  réussit  point  à  le  dissi- 
per; nous  n'y  trouvons  presque  aucun  document  historique  de  quelque 
importance  qui  soit  antérieur  au  quatorzième  siècle^  et  ceux  de  date 
postérieure  he  sont  ni  assez  nombreux  ni  assez  convaincants  pour  éta- 
blir la  thèse  dont  il  s'agit,  si  toutefois  on  parvient  jamais  à  l'asseoir 
sur  une  base  historique  et  vraiment  solide.  J.  M. 


A  narrative  of  the  récent  Kvents  In  Xou-KIng^,  hy  Henri 
CoRDiER,  honorary  librarian  of  the  north  China  branch  of  the  royal  asiatic 
Society.  For  sale  at  Mess.  Kelly  et  C«.  Shanghaï,  american  presbyterian 
Mission  Press,  January  1875.  Gr.  in-8  de  74  p. 

Les  efforts  de  la  France  et  de  TÂngleterre  pour  ouvrir  au  com« 
merce  européen  les  riches*  provinces  de  la  Chine  méridionale,  et  le 
double  traité  que  nous  avons  conclu  récemment  avec  le  royaume 
d'Annam  doivent  appeler  désormais  l'attention  sur  toute  publication 
se  rattachant  à  ces  importantes  régions.  C'est  à  ce  point  de  vue  que 
nous  signalerons  à  nos  lecteurs  une  brochure  qui  nous  arrive  de 
l'extrême  Orient,  et  où  les  questions  relatives  à  l'histoire  ancienne 
et  moderne  du  Tonkin  sont  traitées  avec  compétence  et  intérêt. 
L'auteur  a  divisé  son  travail  en  deux  parties.  Dans  la  première,  il  a 
résumé  les  notions  éparses  dans  des  ouvrages  difficiles  k  consulter,  sur 
le  Tonkin,  sa  langue,  son  histoire,  ses  rapports  successifs  avec  l'Em- 
pire chinois  et  avec  celui  d'Annam.  Il  y  a  là  des  détails  curieux  et 
certainement  ignorés  de  la  grande  masse  des  lecteurs.  Ils  trouveront^ 
en  particulier,  à  la  page  13,  des  citations  utiles  à  noter,  empruntées  à 
la  fois  aux  Lettres  édifiantes  et  à  la  relation  d'un  voyageur  anglais  du 
dernier  siècle,  sur  l'importance  de  la  Gochinchine  et  du  Tonkin,  au 
point  de  vue  des  intérêts  français.  Ils  étudieront  aussi  avec  fruit  les 
conclusions  de  l'auteur,  qui  représente  cette  province  septentrionale 
de  l'Annam  comme  un  pays  conquis  et  tyrannisé  par  ses  maîtres 
actuels. 

La  seconde  partie  de  la  brochure  contient  le  récit  des  événements 
qui  se  sont  succédé  au  Tonkin  entre  1873  et  1874,  pendant  l'expédition 
française  dont  chacun  a  gardé  le  souvenir.  L'auteur  s'est  trouvé  en 
rapport  avec  plusieurs  personnages  mêlés  aux  faits  qu'il  a  plutôt  l'in- 
tention de  raconter  que  de  juger.  Il  a  reçu,  en  particulier,  des  informa- 
tions de  MM.  Dupuis  et  Millot,  les  deux  négociants  qui  paraissent 
avoir  reconnu  les  premiers  la  navigabilité  du  Song  Koï,  ou  du  grand 
fleuve  du  Tonkin,  depuis  la  mer  jusqu'au  centre  du  Yun  Nan.  Sa 
chronique,  car  c'est  le  seul  titre  que  modestement  il  ambitionne, 
cherche  à  être  très-précise,  et  elle  donne  notamment  sur  la  mort 
du  brillant  et  malheureux  M.  Oamier  des  détails  pleins  d'un  triste 


—  357  - 

intérêt  et  nécessaires  à  recueillir.  De  ce  récit,  comme  de  ceux  qui  sont 
déjà  arrivés  jusqu'à  nous  sur  cette  courte  campagne,  il  ressort  avec 
éclat  que  la  valeur  et  l'initiative  françaises  s'y  sont  montrées  au  niveau 
des  plus  brillantes  époques  de  notre  passé  d'outre-mer.  Quelques 
hommes  ont  suffi,  dans  certains  cas,  pour  s* emparer  d'une  ville  forte, 
et  il  faut  remonter  aux  annales  des  guerres  de  l'Inde  pour  trouver  des 
traits  où  l'histoire  la  plus  véridique  semble  aussi  singulièrement  em- 
pruntée à  la  légende.  Quant  à  l'appréciation  définitive  à  porter  sur 
cette  entreprise,  sur  son  origine  et  sur  sa  conclusion^  nous  ne  saurions 
ici  que  réserver  notre  jugement.  Tous  les  documents  ne  sont  pas 
entre  nos  mains,  toutes  les  parties  n'ont  pas  été  entendues  ;  c'est  plus 
tard  seulement  que  l'histoire  pourra  porter  son  verdict  sur  des  événe- 
ments qu'un  traité  heureux  a  bientôt  suivis,  mais  que  de  grands 
malheurs  ont  accompagnés^  et  où  il  est  difficile  d'assigner  encore  à 
chacun  sa  part  de  responsabilité. 

Comte  Dbsbassayns  db  Richbmont. 


Rapport    sur  une  mlaslon  itrchéoloe^que   en  il^l^érle»   par 

Ant.  Héron  de  Villefossb.  Paris,  Imprimerie  nationale,   i875.   In-8  de 
*  120  p.  avec  deux  planches  etjrois  bols.  —  Prix  :  5  fr. 

Ce  rapport  est  extrait  des  Archives  des  missions  scientifiques.  Il  ren- 
ferme les  résultats  de  la  première  mission  de  M.  A.  Héron  de  Ville- 
fosse,  en  Algérie,  pendant  l'année  1873.  C'est  surtout  au  point  de  vue 
épigraphique  qu'il  est  intéressant.  Plus  de  230  textes  j  sont  donnés  ; 
les  uns  entièrement  inédits,  les  autres  déjà  connus,  mais  par  des 
copies  incomplètes  ou  inexactes.  Parmi  les  inscriptions  les  plus  im- 
portantes, nous  signalerons  le  tarifée  douanes  de  Zraïa,  monument 
unique  dans  son  genre  ;  Tauteur  ne  s'est  pas  contenté  d'en  rectifier  le 
texte,  il  l'a  rapporté  au  musée  du  Louvre  où  il  est  exposé  aujourd'hui 
avec  d'autres  monuments  provenant  de  la  même  mission.  Nous  cite- 
rons encore  la  fameuse  tribune  de  la  Schola  des  optiones  (lieutenants 
aux  centurions)  de  la  3*  légion  auguste,  casernée  à  Lambèse  ;  les 
bustes  impériaux  de  Vérécunda  ;  une  inscription  honorifique  d'El  Djein 
(Thysdrus),  etc.  En-dehors  de  Lambèse,  mine  inépuisable  d'inscrip« 
tions,  les  points  les  plus  remarquables  explorés  par  l'auteur  sont  : 
Esar-Bagaï,  Klenchela,  l'antique  Mascula,  ^Rhamissa  (TJiubursicum 
Numidarum),  une  des  localités  les  plus  riches  de  la  Numidie  au  point 
de  vue  archéologique,  mais  qui^  avant  le  voyage  de  M.  de  Yillefosse, 
avait  été  très-insuffisamment  visitée  ;  enfin  Mdaourouch  (Madaure)  où 
naquit  Apulée  et  où  saint  Augustin  fit  une  partie  de  ses  études.  M.  Héron 
de  Yillefosse  ne  s'est  pas  borné  à  étudier  l'épigraphie.  Chemin  faisant, 
il  signale  les  monuments  figurés  qu'il  rencontre  ;  c'est  ainsi  que  son 
livre  peut  servir  de  guide  dans  les  musées  d'Alger  et  de  Cherchell  : 


—  358  — 

cette  dernière  localité,  surtout,  renferme  une  collection  de  marbres  de 
premier  ordre.  A  Tebessa,  il  a  relevé  un  plan  trèe-exaet  de  la  basilique, 
le  monument  le  plus  considérable  de  l'Afrique  chrétienne^  qu*on  a  pu 
voir  récemment  à  l'Exposition  de  géographie.  Enfin,  il  a  enrichi  le 
musée  du  Louvre  d'une  nombreuse  série  de  monuments  africains,  et 
rapporté  des  documents  de  toute  sorte  sur  les  lieux  qu'il  a  parcourus 
et  les  monuments  qu'il  a  étudiés.  L.  C. 


l^ern  Papiers  de  IVoallle»  de  la  BIbllotbàqae    du  I^ouvre* 

Dépouillement  de  toutes  les  pièces  qui  composaient  cette  précieuse  collection^ 
brûlée  dans  la  nuit  du  23  au  24  mai  1871,  avec  le  texte  même  d'un  grand 
nombre  de  documents  relatifs  aux  guerres  civiles  du  seizième  siècle, 
publié  par  Louis  Paris,  éditeur  du  Cabinet  Historique.  Paris,  au  Cabinet 
EistoiHqueet  chez  Dentu,  1875.  2  vol.  gr.  ih-8  de  zxiy-324  et  viii-176  p. 
—  Prix  :  12  fr. 

Encore  une  épave  de  ce  grand  désastre  qui  nous  laisserait  inconso- 
lables si  nous  ne  songions  que  bien  d'autres  richesses  littéraires 
auraient  pu  —  auraient  dû  —  disparaître  pendant  ces  jours  néfastes 
de  la  Commune  :  le  temps  seul  a  manqué  à  Fœuvre  de  destruction)  La 
bibliothèque  du  Louvre  contenait  une  précieuse  collection^  en  trente 
volumes  in-folio,  formée  par  la  maison  de  Noailles,  et  provenant  d'un 
recueil  de  papiers  d'État,  beaucoup  plus  considérable,  qui  fut  dilapidé 
par  rÉtat,  sous  la  Révolution,  et  dont  on  se  partagea  les  richesses. 
Les  Affaires  étrangères^  les  Archives,  la  Bibliothèque  nationale  ont 
encore  leurs  lots,  et  celle-ci  possède,  en  outre,  de  nombreux  volumes 
achetés  au  maréchal  de  Noailles,  ou  donnés  par  lui,  de  1740  à  1756. 
Les  Papiers  du  Louvre  ne  contenaient  aucune  correspondance  diplo- 
matique :  c'était  une  partie  de  la  correspondance  intime  de  la  famille, 
où  l'on  trouve  les  détails  les  plus  curieux  sur  la  vie,  les  mœurs,  les 
habitudes  sociales  de  Tune  des  plus  grandes  maisons  de  France,  pen- 
dant près  de  trois  siècles. 

L'ouvrage  que  nous  avons  sous  les  yeux  se  compose  de  deux 
volumes.  Le  premier  est  divisé  en  deux  parties,  contenant  :  1®  le  Dé- 
pouillement des  quatre  volumes  de  la  première  série  des  Papiers  de 
Noailles:  c'est  une  table  complète  des  lettres,  avec  leurs  dates,  et, 
pour  le  tome  P%  la  reproduction  des  premiers  mots  de  chaque  lettre;  à 
la  suite  de  cette  table,  nous  trouvons  le  dépouillement  d'un  volume 
du  cabinet  des  titres  de  la  Bibliothèque  nationale,  sur  la  maison  de 
Noailles  ;  2^  un  choix  de  pièces  inédites  extraites  du  tome  P'  des  Papiers 
de  Noailles j  et  dont  M.  L.  Paris  avait  fait  prendre  copie,  un  peu  au 
hasard.  Ces  pièces,  auxquelles  quelques  additions  ont  été  faites  d'après 
les  manuscrits  de  la  Bibliothèque  nationale,  sont  relatives  aux  années 
1589  à  1597;  elles  sont  au  nombre  de  plus  de  150,  et  présentent, 
pour  la  plupart,  un  réel  intérêt,  —  Le  tome  second  contient   la  table 


—  359  — 

par  ordre  de  pièces,  avec  une  Ifrève  analyse  des  docaments  qui  étaient 
contenus  dans  les  vingt-six  antres  volumes  des  Papiers  de  Noaillen,  A 
la  suite,  l'on  a  ajouté  un  certain  nombre  de  lettres  inédites^  tirées  des 
divers  volumes  dont  la  table  précède.  Un  très-bon  juge  a  constaté  que 
M.  Louis  Paris  avait  eu  la  main  heureuse  dans  ses  transcriptions. 
Nous  avons  donc  de  doubles  remercîments  à  adresser  à  l'infatigable 
érudit  pour  nous  avoir  donné  Ténumération  des  richesses  aqjourd^hui 
perdues  de  la  collection  de  Noailles,  et  pour  avoir  placé  sous  nos  jeux 
le  texte  de  documents  historiques  d'un  haut  intérêt,  sauvés  par  lui 
d'une  irréparable  ruine.  0.  db  B. 


BULLETIN 

Eies  Tliéiies  et  Thypothése»  contradictions  du  libéralisme,  par  Jules 
CAMAOEit,  avocat.  Bruxelles,  Glosson,  1875.  In>i8  de  63  p.  —  Prix  :   60  c. 

Cette  brochure^  dont  quelques  détails  sont  un  peu  vulgaires  de  composi- 
tion et  de  style,  offre  du  moins  un  excellent  fond  de  doctrine  et  un  cadre 
assez  heureux.  Elle  tend  à  montrer  i^  que  la  distinction  entre  la  thèse  et 
l'hypothèse,  par  laquelle  les  catholiques  peuvent  accorder  leur  entière  sou- 
mission au  SyUabtiS  avec  leur  adhésion  aux  constitutions  modernes, 
n*est  pas  une  vaine  subtilité,  mais  une  règle  très-fondée  en  raison  ;  2®  que 
la  thèse  absolue  du  pur  libéralisme  est,  au  contraire,  irréalisable  et  renferme 
l'anarchie  ;  3^  que,  du  reste,  elle  n'a  jamais  été  loyalement  mise  en  pratique, 
et  que  le  libéralisme  au  pouvoir  est  devenu,  par  une  contradiction  mani- 
feste, oppresseur  et  persécuteur.  Il  y  a  une  page  très-judicieuse  (33-34),  sur 
les  discussions  à  ce  sujet  entre  catholiques  :  «  11  y  a  souvent  malentendu. 
Les  uns  ont  les  yeux  ardemment  fixés  sur  la  thèse.  Dès  lors,  ils  rejettent,  ils 
réprouvent  tout  ce  qui  s'en  écarte.  Us  sitbissent,  avec  une  douleur  parfois 
exagérée,  Vhypothése.  —  D'autres  envisagent  autrement  les  choses...  Ils 
appréhendent  les  maux  qui  pourraient  être.  L'hypothèse  leur  apparaît  alors 
comme  un  mal  moindre,  donc  comme  un  bien  relatif.  Us  admettent,  ils 
aiment  le  régime  de  la  liberté,  non  pour  lui-même,  mais  pour  le  bien  qui 
en  résulte  quand  on  lutte  avec  vaillance.  »  Ecrit  spécialement  pour  la  Bel- 
gique, comme  on  s'en  aperçoit  par  les  noms  propres  et  les  citations,  cet 
opuscule,  on  le  comprend,  trouve  aussi  bien  son  appUcation  en  France. 

Léonce  Couture. 


Waî  et  la  Science»  Explosion  de  la  libre-pensée  en  ao(U  et  septembre 
i874.  Discours  de  MM.  Tyndall,  du  Bois-Iieymond,  Owen,  Huxley^  Hooker  et 
sir  John  Lubbock,  annotés  par  M.  l'abbé  Moigno,  chanoine  de  Saint-Denis, 
rédacteur  en  chef  des  Mondes,  Paris,  librairie  des  Mondes  et  Gauthier- 
Villars,  1875.  In-!8  de  xxiv-216  p.  —  Prix  :  3  fr.  50.  {Actualités  scientifiques, 
première  série,  n*  45.) 

Le  savant  et  infatigable  rédacteur  des  Momies,  M.  l'abbé  Moigno,  publie,  à 
côté  de  sa  revue  hebdomadaire,  une  collection  de  petits  traités  où  il  exa- 
mine les  événements  principaux  du  monde  savant.  La  première  série  de 
cette  collection  est  arrivée  déjà  à  son  quarante  cinquième  numéro,  dont  je 
viens  de  transcrire  le  titre.  Les  discours  traduits  et  critiqués  dans  ce  petit 
volume  ne  contiennent  aucune  idée  nouvelle;  suivant  l'expression  d'une 
revue  américaine,  le  Sdentific  American  Journal,  ce  sont  des  manifestes  cal" 


-260  — 


culés  pour  «  sonner,  du  haut  d'ane  position  élevée,  le  combat  inévitable  des 
années  qui  vont  suivre.  »  L'étude  de  ce  recueil  sera  spécialement  utile  à  nos 
professeurs  de  philosophie  et  de  théologie.  H.  de  Vâlroger, 

de  l'Oratoire. 


Passai^e  de  Vénus  sur  le  soleil»  par  J.  P.  A.  Madden.  Versailles, 
Aubert,  1874.  In-8  de  23  p.  (Extrait  du  onzième  volume  des  Mémoires  de 
la  Société  des  sciences  naturelles  et  médicales  de  Seine-et-Oise.) 

L'astronome  qui,  dans  son  observatoire,  mesure  les  astres  et  suppute  leurs 
distances,  a  besoin  d'une  unité  d'évaluation  proportionnée  à  la  grandeur 
des  quantités  qu'il  s'agit  d'exprimer.  La  distance  de  la  terre  au  soleil, 
évaluée  en  rayons  terrestres,  est  l'unité  choisie,  et  on  la  mesure  au  moyen 
de  la  parallaxe  solaire^  c'est-à-dire  de  l'angle  sous  lequel  le  rayon  de  notre 
planète  serait  vu  du  centre  du  soleil.  On  comprend,  dès  lôrs,  combien  il 
importe  de  connaître  avec  exactitude  ce  très-petit  angle  :  la  vitesse  de  la 
terre  sur  son  orbite,  la  vitesse  de  la  lumière  dans  l'espace,  le  diamètre  du 
soleil,  pour  ne  citer  que  les  données  principales,  dépendent,  en  effet,  de  la 
valeur  qu'on  lui  attribue.  M.  Madden  a  su,  en  quelques  pages,  décrire  le 
phénomène  du  passage  de  Vénus  dans  ses  phases  successives  ;  montrer,  en 
termes  clairs,  comment  il  peut  servir  à  mesurer,  par  trois  méthodes  diffé- 
rentes, la  parallaxe  du  soleil  ;  enfin  rappeler,  par  leurs  traits  généraux,  les 
faits  historiques  qui  se  rattachent  aux  passages  déjà  observés  en  i639, 
1761  et  1769.  En  1874,  la  photo-héliographie  a  donné  tous  les  résultats 
qu'on  en  attendait.  Bientôt  la  discussion  des  nombreuses  observations, 
recueillies  dans  les  stations  des  régions  diverses,  sera  publiée,  et  elle  fixera 
la  valeur  si  controversée  de  la  parallaxe  solaire.  En  attendant,  la  lecture 
du  court  mémoire  de  M.  Madden  est  une  excellente  préparation  à  l'étude  de 
cette  importante  question.  A.  D. 


Principes  raisonnes  de  la  méUiode  intellectuelle  appli- 
quée et  l'éducation  maternelle»  A  l'enselsnement  scolaire 
et  èk  l'apprentissage  professionnel,  par  J.  Gdchet,  directeur  de 
l'école  et  du  pensionnat  de  Glisson.  Paris,  A.  Picard,  1875.  In-12  de  xv- 
272  p.  —  Prix  :  3  fr.  50. 

Cet  ouvrage  sert  d'introduction  à  un  cours  d'instruction  élémentaire  que 
doit  publier  M.  Guchet  pour  appliquer  sa  méthode.  Son  œuvre  est  sérieuse, 
réfléchie  ;  tout  y  est  dit  avec  beaucoup  de  clarté.  Il  expose  la  manière 
dont  se  développe  l'intelligence,  dont  elle  acquiert  les  connaissances, 
la  méthode  rationnelle  d'après  laquelle  elle  doit  opérer,  et  il  fait 
une  application  sommaire  de  sa  théorie  à  quelques  parties  de  l'enseigne- 
ment. Tout  ce  qui  concerne  l'entendement,  l'instruction,  la  mémoire,  l'ima- 
gination, initie  bien  au  travail  accompli  dans  notre  esprit  par  le  fai 
des  sensations,  de  l'attention,  de  la  comparaison,  du  raisonnement,  etc.  Mais 
on  n'y  trouve  pas  cette  exactitude  rigoureuse,  essentielle  dans  un  ouvrage 
didactique.  Ainsi,  l'auteur  prétend  (p.  9)  que  l'attention  d'un  esprit  exercé 
dispense  de  la  comparaison;  ailleurs,  il  parle  d'une  c  fausse  intelligence,  » 
n  faut  aussi  signaler  une  grave  lacune  sur  l'origine  des  idées.  • 

La  seconde  partie  est  consacrée  à  la  méthode  ;  elle  s'occupe  de  l'analyse  et  de 
la  synthèse;  de  la  copie,  de  l'institution  et  de  l'invention  ;  de  l'habitude  ;  de 
la  méthode  socratique,  de  la  méthode  expositive  de  llnduction  et  de  la 
déduction.  Les  applications  que  M.  Guchet  fait  de  ses  idées  donnent  lieu  à 
une  foule  d'excellentes  observations  dont  les  maîtres  ont  à  faire  leur  profit. 


—  361  — 

Nous  signalerons  notamment  ce  qui  regarde  renseignement  de  l'orthographe. 
Mais  était-il  bien  nécessaire  d'inventer  les  mots  d'étade  autùpiique  et  d'étude 
idéoristique?  S'il  est  bon  de  s'élever  contre  les  contes  de  fées,  ne  devraiton 
pas  être  plus  sévère  contre  les  contes  scientifiques  mis  à  la  mode  aujourd'hui? 
L'auteur  nous  parait  trop  rabaisser  la  mémoire  des  mots,  qui  est  l'indispen- 
sable auxiliaire  de  la  mémoire  des  idées.  Lui  qui  est  animé  des  sentiments  les 
plus  chrétiens,  n'aurait-il  pas  dû  insister  sur  la  nécessité  de  ne  négliger^  dans 
l'enseignement,  aucune  occasion  pour  conftrmer  les  dogmes  et  les  préceptes 
de  la  religion?  Nous  avons  peine  aussi  à  comprendre  sa  préférence  pour  les 
écoles  (c  communales.  »  R.  de  St-M. 


Pie  FX.  et  les  études  classiques.  Appel  (mx  pérns  de  familles  et  aux 
instituteurs  delà  jeûnasse,  par  Mgr  Gaume.  Paris,  Gaume.  1874.  In-12  de 
i90p.  —  Prix:  2  fr. 

Mgr  Gaume  a  incontestablement  le  mérite,  sinon  la  gloire,  d'avoir  été 
l'un  des  premiers  et  des  plus  persévérants  promoteurs  de  la  réforme  de  l'en- 
seignement dans  le  sens  de  l'introduction  de  l'étude  des  auteurs  chrétiens 
et  de  l'expurgation  des  classiques  païens.  Un  bref  de  Pie  IX,  approuvant 
pleinement  ces  deux  bases  de  réforme,  lui  permet  de  revenir  sur  la  ques- 
tion. Il  résume  et  réfute  tout  ce  qui  a  été  dit  contre  cette  réforme,  en  s'ap- 
puyant  sur  les  exigences  du  baccalauréat,  sur  les  inconvénients  et  même 
l'inutilité  de  changements  dans  les  méthodes  usitées,  sur  Tintérét  de  la  belle 
latinité,  sur  l'absence  de  bons  auteurs  chrétiens.  Il  est  fâcheux  qu'il  y  ait 
mêlé  la  question,  tout  à  fait  étrangère,  du  théâtre,  et  se  soit  appuyé  d'une 
autorité  aussi  peu  recevable  que  celle  de  M.  A.  Dumas  fils,  qui  juge  les  autres 
d'après  lui.  Mgr  Gaume  ne  dit-il  pas  trop  que  qui  n'est  pas  avec  lui,  n'est 
pas  avec  le  Pape,  quoique  celui-ci  n'ait  approuvé  que  les  deux  principes  de 
réforme,  sans  viser  les  applications  qui  en  ont  été  faites?  N'abuse-t^il  pas  de 
la  flétrissure  de  «  libéral,  »  pour  ceux  qui  ne  partagent  pas  complètement 
sa  manière  de  voir  ?  N'est-ce  pas  une  exagération  d'attribuer  à  la  renais- 
sance tous  nos  maux,  dans  lesquels  le  pédbé  originel  a  toujours  la  meil- 
leure part?  Il  accorde  trop  d'influence  au  livre,  pas  assez  aux  professeurs. 
Combien  qui  nous  feraient  trembler  s'ils  étaient  chargés  d'expliquer  des 
auteurs  chrétiens  I  Nous  regrettons  d'autant  plus  ces  défauts  dans  le  livre 
de  Mgr  Gaume  que  nous  sommes  de  cœur  et  d'action  avec  lui  pour  tout  ce 
qui  tend  &  ramener -notre  génération  au  christianisme.  R.  de  St-M. 


Vie  Intime  d'un  Tpére  des  Ecoles  clii*étlennes«  Notice  biogra- 
phique sur  le  frère  Bérain,  mort  à  Paris,  le  ii  novembre  1872,  par  Auguste 
Garion,  prêtre.  Seconde  éditioQ  abrégée.  Paris,  Poussielgue  et  Watelier, 
1875.  In-I2de  136  p.  -  Prix  :  1  fr.  25. 

C'est  moins  l'intérêt  que  l'édification  qu'il  faut  rechercher  dans  la  vie  du 
frère  Bérain.  Car  ce  ne  sont  pas  des  actions  d'éclat  qui  en  font  le  mérite, 
mais  une  rare  perfection  dans  les  détails  les  plus  communs.  Elle  se  résume 
dans  une  enfance  vertueuse  au  sein  d'une  famille  chrétienne,  dans  une  scru- 
puleuse fidélité  à  correspondre  aux  mouvements  de  la  grâce  et  à  suivre  la 
voix  de  Dieu  qui  appelait  le  jeune  Bérain  parmi  les  frères  des  Écoles  chré- 
tiennes, où  il  fut  diargé  de  fonctions  importantes,  et  enfin  une  ponctuelle 
exactitude  dans  l'accomplissement  de  la  règle.  Ce  côté  est  celui  qui  a  été  mis 
le  plus  en  relief  par  l'auteur.  Son  livre  est  conmie  un  commentaire  pratique 
des  règles  du  bienheureux  de  La  Salle.  Les  Frères  y  trouveront  an  charme 


-^  862- 

particalier;  ceux  qui  cherchent  la  perfectioni  un  modèle  et  d*ezcellent8 
conseils,  dont  quelques-uns  sont  tirés  des  notes  laissées  par  le  firère  Bôrain 
—  nous  citerons  comme  particulièrement  remarquable  ce  qu'il  dit  du  tra- 
vail ;  —  tous  y  apprendront  à  mieux  connaître  et,  par  conséquent,  à  mieux 
apprécier  l'esprit  qui  anime  l'institut  des  Frères  et  lui  fait  opérer  des  fruits 
si  précieux  et  si  abondants.  R.  db  St-M. 


Portrait»  de  grandes  dames»  par  Imbket  Dft  Saint-Amand,  Paris, 
Pion,  1875.  Gr.  in-18  de  433  p.  —  Prix  :  3  fr. 

Grandes  dames,  en  efifet,  que  celles  dont  nous  entretient  M.  de  Saint-Amand  : 
grandes  par  le  rang,  par  la  fortune,  par  l'esprit  ou  par  le  cœur  :  M"^  de  la 
Vallière,  M"^*  de  Montespan,  Tabbesse  de  Fontevrault,  la  duchesse  de  Berry, 
fille  du  Régent,  M"*  de  Lespinasse,  la  comtesse  de  Sabran,  la  princesse  de 
Lamballe,  Marie-Thérèse,  et  les  deux  plus  grandes  peut-être,  parce  qu*e]les 
furent  les  plus  malheureuses,  Marie  Stuart  et  Marie-Antoinette;  puis,  pour 
achever  la  galerie,  après  toutes  ces  femmes,  illustres  &  des  titres  si  divers, 
deux  femmes,  moins  connues  du  monde,  mais  bien  connues  des  pauvres  et 
de  Dieu  :  Elisabeth  Seton  et  la  marquise  de  Barol.  Telles  sont  les  grandes 
dames  dont  M.  Imbert  de  Saint-Amand  a  entrepris  d'esquisser  la  figure,  la 
plupart  du  temps  à  la  suite  et  à  l'occasion  d'ouvrages  qui  en  racontaient 
plus  complètement  la  vie.  Cette  tâche,  il  y  a  réussi  à  merveille;  les  tableaux 
très-courts  qu'il  a  tracés  sont  pleins  de  relief,  de  vie  et  de  couleur;  le  modèle 
y  est  peint  avec  tous  ses  traits  saillants,  avec  sa  vraie  physionomie.  Mais  ce 
que  nous  louerons  surtout  dans  ce  livre,  c'est  l'esprit  profondément  chrétien 
qui  Tanine  et  qui  préside  à  toutes  ses  pages.  L'auteur  n'y  a  point  l'indul- 
gence facile  du  monde  pour  toutes  ces  belles  pécheresses,  devant  lesquelles 
les  courtisans  de  la  faveur  ou  ceux  de  l'esprit  étaient  à  genoux,  qu'elles  s'appel- 
lent M"»  de  la  Vallière,  M"»  de  Montespan  ou  M"*  de  Lespinasse  ;  il  est  pour 
elles  sévère,  mais  juste,  et  de  toutes  ces  vies,  même  de  celle  de  la  duchesse 
de  Berry,  il  sait  tirer  une  leçon  morale.  Comme  il  faut  bien  faire  la  part  de 
la  critique,  nous  relèverons  ici  une  erreur  historique.  Dans  les  deux  cha- 
pitres consacrés  à  Marie-Antoinette  et  Marie-Thérèse  et  à  Marie-Antoinette  et 
Marie  Stuart,  M.  de  Saint-Amand  parie  de  Marie-Antoinette  conmie  si  elle 
avait  assisté  au  feu  d'artifice  du  30  mai  1770,  si  déplorablement  commencé 
par  une  catastrophe,  ou  du  moins  conmie  si  elle  avait  été  à  Paris  ce  jour-là. 
Ce  ne  fat  que  trois  ans  après  que  le  dauphin  et  la  dauphine  firent  leur  en- 
trée dans  la  capitale .  Mais  cette  légère  tache  n'enlève  rien  au  mérite  d'un 
livre  qu'on  peut  recommander  en  toute  confiance. 

M.  DE  LA  ROCHETEBIE. 


Demlèrea  lettre»  d'un  passant,  par  Arthur  de  Boissibu.  Pré- 
face par  Armand  de  Ponthartin.  Paris,  Palmé,  1875.  In-12  de  301  p.  — 
Prix  :  3  £r.  50. 

Pour  se  faire  une  idée  de  ces  Lettres,  comme  de  celles  qui  les  ont  précé- 
dées, il  faut  lire  la  préface  qui  commence  ce  dernier  recueil  :  c'est  un  éloge 
et  un  souvenir  d'ami,  mais  c'est  en  même  temps  un  excellent  morceau  de 
critique.  M.  de  Pontmartin  n'était  pas  embarrassé  pour  peindre  en  peu  de 
mots  et  le  livre  et  l'auteur.  Nous  le  sommes  bien  davantage  :  pour  ce  qui 
fait  le  fond  de  ces  lettres,  il  ne  nous  convient  guères  d'y  toucher  ;  les 
hommes  et  la  politique  de  chaque  jour,  tels  qu'ils  allaient  sous  le  règne  de 
M.  Thiers,  en  font  presque  tous  les  frais.  Pour  le  style,  c'est  un  composé  pi* 


—  368  -- 

qnant  de  grâce  et  de  finesse,  de  recherche  et  de  laisser-aller,  qn'il  est  assez 
difficile  de  définir;  le  mot  d'esprit  français,  dont  on  a  le  tort  d'ahuser,  expri- 
merait seul  ce  mélange.  Si  cet  esprit  a  des  défauts,  Arthur  de  Boissieu  les 
avait.  Ses  écrits  ont  je  ne  sais  quelle  coquetterie  qui  peut  plaire  ou  déplaire 
suivant  les  humeurs.  Assurément,  il  y  a  une  foule  de  petits  jeux  d'esprits  et 
même  de  jeux  de  mots  qu'on  reprendrait  chez  un  autre,  et  qu'on  lui  passe 
parce  qu'il  sait  tout  hien  dire  :  il  a  ce  ton  de  la  bonne  conversation  qui  fait 
toujours  plaisir  chez  un  écrivain,  mais  qui  n'est  pas  un  fruit  du  métier.  — 
En  résumé,  son  livre  offre  une  suite  de  causeries  charmantes^  qui  laissent 
voir  un  esprit  agréable,  un  vif  bon  sens,  et,  ce  qui  vaut  mieux,  un  noble 
cœur.  On  ne  parcourra  pas  sans  tristesse  ces  jolies  pages,  si  l'on  songe 
qu'elles  sont  comme  un  adieu  de  cet  aimable  passant,  qui,  hélas  I  ne  doit  plus 
revenir.  G.  Philippon. 


Ija  Oéportatlon  et  l'abandon  de»  morts*  CitneHére  de  Méry^  par 
Léon  Pages.  Paris^  Olmeret  Taranne,  1875.  In-8  de  72  p.  —Prix  :  0  fr.  50. 

Voici  un  écrit  qu'on  ne  saurait  trop  répandre  dans  Paris,  au  moment 
où  le  conseil  municipal  veut  imposer  à  la  capitale  la  déportation  et  l'aban- 
don de  ses  morts.  M.  Pages  y  a,  d'une  plume  expérimentée  et  chaleureuse, 
plaidé  la  cause  de  la  vérité,  de  la  piété  filiale,  de  la  légalité.  Son  substan- 
tiel travail  est  ainsi  divisé  :  observations  préliminaires  ;  anciens  cimetières 
et  législation  intermédiaire  ;  projet  de  M.  Haassmann  et  discussion  qu'il  sus- 
cita ;  reprise  du  projet  par  M.  Léon  Say  ;  intervention  du  cardinal  arche- 
vêque; discussion  au  sein  du  conseil  municipal,  sur  un  rapport  présenté 
par  M.  Hérold,  le  il  avril  1874;  mémoires  rédigés  par  divers  conseillers  ou 
ingénieurs  ;  résolution  définitive  ;  conclusion.  —  Il  est  temps  encore  d'ar- 
rêter le  conseil  municipal  dans  la  voie  funeste  où  il  s'est  engagé  ;  l'écrit  de 
M.  Pages  pourra  contribuer  puissamment  à  atteindre  ce  résultat.       B. 


Voltaire,  ennemi  de  Dieu,  de  la  IiVanee  et  du  peuple,  par 

un  ermite  en  vacances.  Bordeaux,  Le  Goderc,  1875.  In-18  de  24  p.  QÊuvre 
de  propagande.  —  Prix  :  15  cent.;  le  cent,  12  fr. 

Tel  est  le  titre  d'un  petit  opuscule  vivement  et  simplement  écrit.  «  Tous  les 
crimes  des  révolutions  qui  ensanglantent  la  France  depuis  bientôt  un  siècle 
sortent  de  la  plume  de  Voltaire  ;  c'est  lui  qui  les  a  préparés,  conseillés  et 
rendus  possibles,  en  les  alimentant  de  sa  rage  contre  Dieu.  »  Ainsi  s'exprime 
l'auteur  de  cet  opuscule  ;  puis,  à  l'aide  de  nombreux  fragments  des  lettres 
de  Voltaire  lui-même,  il  nous  montre  quelle  fut  la  conduite  de  celui  que 
Sainte-Beuve,  dans  ses  Ccoiseries  du  Limdi,  a  déclaré  avoir  été  un  démon,  un 
météore,  plutôt  qu'une  personne  humaine  et  morale.  Voltaire,  ennemi  de 
Dieu,  voulait  écraser  la  religion  et  ses  ministres;  ennemi  de  la  France,  il 
ne  voyait  et  ne  flattait  que  le  roi  de  Prusse  ;  ennemi  du  peuple,  il  disait 
enfin  :  c<  Il  est  à  propos  que  le  peuple  soit  guidé  et  non  qu'il  soit,  instruit  ; 
il  n'est  pas  digne  de  l'être.  )>  P.  M. 


A  Monsieur  Tout-le-Monde*  I^a  C^m^dle  du  radicalisme^ 

par  Ch.  Tresvauxdd  Fravàl.  Laval,  Mary-Beauchône,  1875.  In-16  de  80  p. 
—  Prix  :  30  cent. 

M.  Tresvaux  du  Fraval  est  l'auteur  de  plusieurs  brochures  d'actualité. 


—  364  — 

quelqa es-unes  en  vers,  qui  se  distinguent  par  des  idées  très-pratiques,  une 
grande  clarté  d'exposition,  beaucoup  de  verve  et  d'esprit.  La  raillerie  est 
une  vieille  arme  gauloise  qu'il  excelle  à  manier,  et  ses  ennemis,  a  les  radi- 
caux, »  n'ont  pas  souvent  eu  les  rieurs  de  leur  côté.  Avant  de  tenir  la 
plume,  il  avait  noblement  payé  de  sa  personne  à  Gastelfidardo  :  je  n'ai  pas 
à  insister  sur  ses  opinions.  Dans  son  nouvel  opuscule,  il  passe  en  revue  les 
diverses  phases  de  la  vie  humaine  dans  la  famille,  dans  la  société,  les 
rouages  du  gouvernement,  le  mouvement  catholique  et  les  entreprises 
maçonniques  dont  nous  sommes  les  témoins;  il  signale  et  flétrit  énergique- 
ment  le  mal  causé  partout  par  les  doctrines  révolutionnaires.  Il  invoque  le 
témoignage  de  l'Ecriture,  et  la  cite  fréquemment,  toujours  à-propos.  C'est 
un  livre  à  répandre  :  puisse-t-il  faire  du  bien  !  L'auteur,  au  moins,  aura 
fait  son  devoir.  J.-M.  R. 


A  bas  don  GarIoa«  Louvain,  typographie  de  veuve  Gh.  Fonteyn,  et  chez 
tous  les  libraires,  1875.  In-8  de  48  p.  — '  Prix  :  1  fr. 

Cette  petite  brochure,  imprimée  en  Belgique^  porte  un  titre  dont  il  ne 
faut  pas  s'effrayer  ;  elle  présente,  au  contraire,  la  défense  de  la  cause  carliste. 
L'auteur  y  passe  en  revue  les  objections  ordinaires  de  la  Révolution  conti*e 
la  légitimité  et,  en  particulier,  contre  le  carlisme  ;  il  les  réfute  avec  esprit  et 
entrain.  Ce  qui  a  trait  aux  droits  incontestables  de  Charles  Vil  est  résumé 
d'une  façon  brève  mais  très-saisissante.  L'auteur  fait  bonne  justice  de  ces 
accusations  banales  contre  les  carlistes  que  bon  nombre  de  personnes 
répètent  tous  les  jours.  Il  n'aime  pas  les  révolutionnaires,  et  nous  l'en  féli- 
citons cordialement.  A.  H.  db  V. 


Ce  4ue  illsent  les  champs,  par  M°^*  la  baronne  de  MACKAn.  Tours, 
A.  Mame,  1874.  In-12  de  138  p.  —  Prix  :  0  fr.  60. 

L'ouvrage  de  M'^^  la  baronne  de  Mackau^  Ce  que  disent  les  champs,  dont 
le  Folybibîion  a  parlé  avec  éloge  (t.  X,  p.  229)  et  qui  avait  paru  dans  des 
conditions  de  luxe  qui  en  rendaient  la  diffusion  peu  aisée,  vient  d'ôtre  im- 
primé par  la  maison  Mame,  dans  sa  Bibliothèque  de  la  Jeunesse  chrétienne.  — 
Nous  recommandons  à  nos  lecteurs  cette  édition  populaire  d'un  opuscule 
excellent  à  répandre  parmi  les  habitants  des  campagnes.  L.  C. 


VARIÉTÉS 

LA  SOCIÉTÉ  GÉOGRAPHIQUE  DE  RUSSIE  ET  SES  TRAVAUX. 

Le  congrès  géographique  de  187S  sera  marqué  dans  les  annales  de  la 
science.  Si  l'élite  seule  a  pu  prendre  part  aux  séances  du  congrès,  VExposi- 
tton,  qui  en  était  comme  le  prolongement,  a  été  visitée  par  des  milliers  d'indi- 
vidus attirés  par  la  seule  curiosité.  Tous  ceux  qui  ont  eu  l'occasion  de  jeter 
ne  fùt>ce  qu'un  coup  d'œil  rapide  sur  l'Exposition,  auront,  sans  doute,  remar- 
qué la  place  d'honneur  qu'y  occupait  la  Russie.  Qui  n'a  pas  admiré  les  ma- 
gnifiques cartes  du  Caucase  et  du  Turkestan,  qui  tapissaient  les  murs  des  deux 
premières  salles?  Elles  frappaient,  en  effet,  les  regards,  sinon  par  l'achevé 
de  l'exécution  matérielle,  au  moins  par  la  nouveauté  des  contrées  qui  y  sont 


—  365  — 

représentées,  pour  la  première  fois,  avec  autant  de  précision  et  une  si 
grande  abondance  de  détails.  Maints  visiteurs,  après  avoir  contemplé  ces 
échantillons  de  la  cartographie  russe,  et  sans  se  soucier  du  reste  se  seront 
empressés  de  décerner  à  la  Russie  un  brevet  de  distinction.  Et  cependant,  ce 
n'est  là  qu'une  faible  portion  des  richesses  scientifiques  exposées  par  l'Em- 
pire des  Tsars  ;  le  fonds  principal  en  est  ailleurs,  dans  le  modeste  pavillon 
dressé  sur  la  terrasse  du  jardin,  où  il  reste,  pour  ainsi  dire,  caché  aux  visi- 
teurs les  plus  empressés.  Cette  humble  annexe  sert  de  dépôt  aux  publications 
de  la  Société  géographique;  ce  sont  elles  qui  m'ont  le  plus  intéressé  ;  c'est 
d'elles  que  je  me  propose  d'entretenir  le  lecteur. 

Il  y  a  trente  ans,  la  Société  géographique  n'existait  qu'à  l'état  de  projet. 
A  la  première  réunion  générale,  qui  eut  lieu  en  1846,  on  comptait  huit  per- 
sonnes ^en  tout  ;  aujourd'hui,  c'est  une  des  sociétés  géographiques  les  plus 
nombreuses  qui  existent.  Elle  porte  le  titre  d'impériale  *,  ce  qui  lui  assure 
la  protection  de  l'auguste  chef  de  l'Empire  ;  des  centres  secondaires  en  sont 
établis  à  Tillis  pour  le  Caucase,  à  Orenbourg  pour  la  Russie  d'est,  à  Var- 
sovie, à  Vilno  et  à  Kiev,  pour  la  Pologne  et  la  Russie  de  l'ouest,  à  Irkoutsk 
pour  la  Sibérie,  en  attendant  qu'il  s'en  forme  un,  pour  l'Asie  centrale,  à 
Taschkend.  Ses  membres  appartiennent  à  tous  les  degrés  de  l'échelle  sociale  ; 
et  le  concours  sympathique  qu'elle  a  su  provoquer  dans  toutes  les  parties 
de  l'immense  empire,  lui  assure,  grâce  à  la  sage  direction  du  conseil  central, 
une  heureuse  fécondité  et  une  prospérité  sans  cesse  croissante. 

Rien  ne  donne  mieux  l'idée  des  résultats  déjà  obtenus  par  elle  que  les 
nombreuses  publications  qui  figurent  à  V Exposition  dont  elles  sont  un  véri- 
table ornement. 

Pour  s'orienter  dans  ce  dédale  des  variétés,  un  fil  conducteur  est  indispen- 
sable. Où  le  trouver  ?  Le  Catalogue  général  imprimé  donne  bien  le  nom  de 
chaque  article  exposé  ;  mais  une  sèche  nomenclature  ne  suffit  pas  ;  elle  a 
besoin  d'un  commentaire  détaillé,  qui  raconte  la  genèse  et  l'histoire  des 
magnifiques  résultats  de  la  Société  géographique  exposés  aux  regards  des 
visiteurs. 

Heureusement,  parmi  les  nombreuses  publications  en  langue  russe  accu- 
mulées sur  les  tables,  il  s'en  est  trouvé  une  qui  me  tira  d'embaiTas.  C'est 
un  volume  assez  élégant,  intitulé  :  Le  vingt-cinquième  anniversaire  de  la 
Société  géographique  russe,  célébré  le  13  janvier  1871  «.  Après  l'avoir  lu, 
j'étais  parfaitement  orienté,  je  n'avais  besoin  d'autre  guide.  L'ouvrage  en 
question  contient  trois  rapports  faits  pour  la  solennité  par  les  représentants 
d'autant  de  sections  de  la  Société.  Le  premier  rapport,  traitant  des  travaux 
relatifs  à  la  géographie  physique,  est  rédigé  par  M.  Semenov,  le  digne  pré- 
sident de  la  section  ;  le  second,  qui  a  pour  auteur  M.  Maîkov,  est  consacré  à 
l'ethnographie  ;  la  statistique  a  fait  le  sujet  du  troisième  rapport,  dû  à  la 
plume  autorisée  de  M.  Bouschen.  Enfin,  une  revue  détaillée  des  travaux  con- 
cernant la  géographie  historique  porte  la  signature  de  M.  Artemiev,  dont  la 
perte  récente  a  causé  de  si  vifs  regrets.  Sa  belle  étude,  occupant  plus  de  la 
moitié  du  volume  (p.  91-223),  sert  d'appendice  aux  comptes  rendus  précé- 
dents. Un  second  appendice  donne  la  liste  des  sociétaires. 

Ainsi,  la  géographie  (physique  et  mathématique),  l'ethnographie  et  la  sta- 
tistique, telles  sont  les  branches  de  science  que  la  Société  de  Saint-Pétersbourg 

1.  Saint-Pétersbourg,  1872.  In-S  de  ni-260-vm  p. 

2.  Ce  titre  fat  acccordé  à  la  Société  le  jour  de  son  Tingt-cinaaième  anniversaire, 
avec  ane  subvention  annuelle  de  5,000  roubles  arg.,  ^outre  celle  de  10,000  qu'elle 
touchait  depuis  sa  fondation,  soit  60,000  fr.  environ. 


—  3W  — 

s'est  donné  la  mission  de  cultiver.  Les  formts  principales  sous  lesquelles 
ractiyité  de  ses  membres  se  produit  habituellement,  oe  aoni  les  expéditions 
scientifiques,  la  confection  des  cartes  et  la  publication  des  ouvrages.  On  le 
voit,  le  champ  est  vaste  et  le  travail  assez  varié.  Dans  Timpossibilitè  où  je 
me  vois  de  résumer  dans  quelques  pages  les  travaux  de  trente  ans  environ 
d'une  société  savante,  nombreuse  et  prospère,  je  m'attacherai,  cette  fois, 
à  faire  connaître  la  partie  relative  à  la  géographie  proprement  dite,  en 
réservant  le  reste  pour  une  autre  fois.  —  Dans  l'exposé  qu'on  va  lire,  je 
suivrai  mon  guide  russe,  sauf  de  le  compléter  au  besoin,  et  sans  entrer  dans 
les  développements  quelconques  de  l'ohginal  ;  ils  ne  seraient  point  ici  à 
leur  place. 

Les  expéditions  scientifiques  doivent  venir  en  premier  lieu. 

Ce  n'est  pas  en  Russie  que  puissent  manquer  les  pajs  à  explorer  :  les 
dimensions  de  l'Empire  des  tsars  sont  si  grandes,  les  acquisitions  faites  en 
Asie  sont  encore  si  récentes  que  le  zèle  le  plus  ardent  y  trouvera  de  quoi 
s'alimenter  pendant  longtemps.  L'attention  de  la  Société  se  porta  d'abord 
sur  les  parties  le  moins  connues,  sur  les  régions  avoisinant  les  deux  ver- 
sants du  mont  Oural  et  la  mer  Glaciale,  sur  la  Sibérie  extrême,  l'Asie  cen- 
trale et  le  Caucase.  Les  résultats  des  expéditions  scientifiques  envoyées  dans 
chacune  de  ces  contrées  ont  été  consignés  dans  une  série  d'ouvrages  qui 
font  le  plus  grand  honneur  à  la  Société. 

On  débuta  par  Texpédition  d'Oural,  qui  a  duré  trois  années  (i847,  1848 
et  i850).  Malgré  d'énormes  difficultés  qu'offrait  le  pays,  le  but  a  été  plei- 
nement atteint.  Outre  la  découverte  de  l'extrémité  de  la  chaîne  d'Oural,  qui 
reçut  le  nom  de  Rocher  de  Constantin  (en  honneur  du  président  de  la  Société, 
le  grand-duc  Constantin),  on  constata  l'existence  d'une  chaîne  détachée, 
appelée  Pal-Hol,  et  allant  dans  la  direction  nord-ouest  jusque  dans  l'Ile  de 
Yalgatch,  qui  est  séparée  de  NovatOrZemlia  par  un  détroit.  L'Oural  septefh 
trionàl  et  la  chaîne  de  Pai-Hoi,  tel  est  le  titre  des  deux  gros  volumes  in-4 
publiés  sous  la  direction  de  M.  Hofman,  avec  la  collaboration  des  spécia- 
listes de  renom,  MM.  Rose,  le  comte  Kaiserling  et  les  académiciens  Brandi 
et  Rnprecht,  et  contenant  les  fruits  de  cette  laborieuse  expédition  >. 

La  Nouvelle-Terre  était  trop  près  de  là  pour  ne  pas  attirer  l'attention  des 
sociétaires.  Elle  eut  la  bonne  chance  de  trouver  dans  M.  Svenske,  un  savant 
et  habile  vulgarisateur.  Son  ouvrage  intitulé  Novaia-Zemlia,  ifu  point  de  vue 
de  la  géographiej  des  edences  naturelles  et  de  Vindustrie  \  et  orné  d'une 
carte  qui  avait  été  dressée  par  l'illustre  navigateur,  l'amiral  Lutke,  vice- 
président  de  la  Société,  obtint  un  succès  tel,  qu'il  fut  presque  entièrement 
reproduit  en  allemand  dans  les  éditions  classiques  de  Peterman.  Au  reste, 
tout  le  littoral  du  nord  de  la  Russie  européenne  et  asiatique  deviendra 
bientôt  l'objet  d'une  expédition  dont  on  se  promet,  avec  raison,  des  résultats 
sérieux.  En  attendant,  on  dut  s'occuper  de  l'extrême  orient  de  la  Sibérie 
sud-est,  de  la  nouvelle  province  d'Amour  et  de  la  vallée  de  l'Oussouri. 

L'expédition  sibérienne  commencée,  en  i854  et  terminée  en  1803,  pré- 
senta des  difficultés  plus  grandes  encore  que  celle  d'Oural;  malgré  cela  elle 
obtint  de  beaux  résultats,  témoins  ses  Travaux  publiés  en  1864  et  1874  et 
partagés  en  deux  parties,  dont  la  première  (section  mathématique)  a  été 
rédigée  par  M.  Schwarz  ',  la  seconde  (section  physique),  par  MM.  Sdunidt 

1.  Saint-PétersboQrff,  1853-1856, 1*'  vol.  de  LXm-307  p.  €t  le  2«  de  XV-374-7i-57  p. 
«  L*onvnffe  a  été  piibUé  ansei  en  allemand, 

2.  8aint»Pétertboarff,  1866,  1  vol.  ûip8  de  vi-i30  p. 

3.  Ibid.  1864,  in-4  ae  400  p.  avec  oattes. 


—  367  — 

et  Glen  i.  GrÂce  à  ses  longues  et  pénibles  recherehes,  la  contrée  située 
au-delà  du  lac  Balkal  se  présenta  sous  un  jour  nouveau.  La  chaîne  du  Sta- 
noYOl  fût  réduite  à  sa  juste  hauteur  de  5,000  pieds,  et  il  fut  constaté  que  ses 
ramifications  et  plateaux  s'étendent  sans  interruption  jusqu'à  la  mer 
d'Okhotsk. 

En  même  temps,  le  célèbre  naturaliste,  Auguste  Radde,  explorait  de  son 
côté  la  lisière  sud-est  de  la  Sibérie  *  et  posait  des  bases  à  la  zoologie 
exacte  de  ce  pays  lointain,  qu'aucun  savant  n'a  visité  depuis  Pallas.  La 
Sibérie  nord-est  avait  été  décrite  auparavant  par  l'académicien  Blidden- 
dorf  s,  celui  je  pense,  dont  l'heureux  voyage  a  donnée  à  son  retour  à 
Pétersbourg,  la  première  pensée  de  fonder  une  société.  La  province  du 
fleuve  Amour  et  la  vallée  de  l'Oussouri  furent  étudiées  par  MM.  Maak  et 
Regel  K  Les  mêmes  contrées  devinrent  ensuite  l'objet  de  nouvelles 
investigations  de  la  part  des  deux  infatigables  [voyageurs  MM.  Pijevalski  * 
et  Vénukov  K  Le  dernier  a  visité  aussi  l'archipel  du  Japon  dont  il  fit  une 
description  à  la  fois  intéressante  et  érudite  ?.  Toutefois,  igoutons-le,  ce 
voyage  a  été  exécuté  aux  frais  de  l'État-major  général  et  tout  à  fait  en- 
dehors  de  la  Société  géograpl\^que. 

La  grande  expédition  sibérienne  dont  nous  parlions  tout  à  l'heure  fut 
suivie  de  plusieurs  autres  de  moindre  importance,  celles  de  Yiluisk,  d'Olek* 
minsk,  Touroukhansk,  etc.,  entreprises  sous  le  patronage  de  la  section  de  la 
Sibérie.  Cette  section,  datée  de  1851,  à  son  siège  principal  et  son  centre 
d'action  dans  la  ville  d'Irkoutsk. 

Les  conquêtes  récentes  dans  l'Asie  centrale  furent  suivies  aussitôt  de 
celles  de  la  science.  Les  noms  de  Fedcbenko,  de  Severtsov,  de  Venukov 
demeureront  aussi  célèbres  que  celui  du  général  Kaufinan,  vainqueur  du 
Khiva.  La  France  savante  connaît  déjà  le  Kahnat  duKhohand  et  les  Contrées 
avoisinantes  «  du  premier  de  ces  hardis  explorateurs,  Fedchenko,  récem- 
ment ravi  à  la  science  d'une  manière  à  la  fois  si  imprévue  et  si  tragique. 
Ce  n'était  là  du  reste,  qu'un  fragment  détaché  d'un  grand  ouvrage  que  l'auteur 
n'a  pas  eu  le  temps  d'élaborer  lui-même,  laissant  cette  tâche  à  de  savants 
amis  qui  s*en  sont  chargés  avec  empressement  ».  M.  Severtsov  a  composé 
un  ouvrage  fort  remarquable  ayant  pour  titre  :  Voyage  dans  le  Turkestan  et 
exploration  du  Thian-Chan  ^^.  Fruit  de  dix  années  d'explorations,  son  livre 
donne  une  description  géographique  du  massif  des  montagnes  du  Thian-Chan, 
si  peu  connues  jusqu'alors.  Toutefois,  il  n'en  fait  connaître  que  le  versant  occi- 
dental ;  reste  à  explorer  leThian-Chan  oriental,  dont  les  trop  fameux  Doun- 
gands  rendent  aujourd'hui  l'accès  si  difficile,  et  qui  est  non  moins  ignoré 
des  Européens  que  le  reste  de  la  Haute-Asie  centrale  ou  la  Mongolie. 

Quant  à  celle-ci,  il  faut  s'en  prendre  à  la  nature  du  pays,  immense  désert 

1.  Saittt-Péterebourg.  1868,  io-4  dexxi-tl9  p.  avec  cartes. 

2.  Beiiûn  im  Suden  von  Ott^ibêHên  in  dên  Jahnn  1855-1859.  Saint- Pétenboorg, 
1862  et  1863,  2  vol.  in-4  do  v-327  et  392  p.  avec  29  planches  et  4  cartes.  La  rela^ 
tion  dn  voyage  lui-mèqie  a  été  insérée  dans  les  Mémoiret  di  la  SodéU,  1861, 
t.  IV,  p.  1.78. 

8.  1862  à  1869.  4  vol.  in-4. 

4.  1861,  2  vol.  ia-4  de  vm-203-21  et  xxiv-344  p.  avec  12  planohed  et  1  carte. 

5.  Voyagt  dam  U  pays  de  VOuuouri,  1870.  1  vol.  in-8. 

6.  Yoyagn  el  recherchés  faiUê  dam  la  région  du  fleuve  Amour  en  1854-56. 

7.  Varchipel  du  Japon  dam  eon    état  actuel.    Saint- Pétersbourg,    1871^    in-8    de 
VI-154,  97,  83  et  41  p. 

8.  Bulktén  d»  la  Soe,  géog.  de  Part«,  join  1874. 

9.  Voyage  au  Turkeetan,  1873,  2  vol.  in-4,  avec  planches  et  cartes  ;  le  2*  vol.  est  d« 
460  p. 

10.  Saint  -Pétersbonrg,  1873,  ia-8  de  460-n  p.  avec  carte. 


—  i;68  — 

d*ane  mer  de  sable.  Grâce  à  cette  circonstance,  la  Mongolie  n*est  habitée 
que  vers  la  frontière  de  la  Sibérie  et  de  la  Chine,  depuis  surtout  que  TEm- 
pire  des  tsars  et  celui  du  Milieu  sont  entrés  en  relations  commerciales  et 
diplomatiques. 

Un  Toyageur  intrépide  et  savant  tout  ensemble,  le  colonel  Pxjévalski, 
vient  de  faire,  dans  cette  partie  de  TAsie  centrale,  des  voyages  dont  les 
résultats,  malgré  les  mille  obstacles,  parmi  lesquels  la  pénurie  des  ressources 
pécuniaires  ne  fut  pas  la  moindre,  ont  dépassé  toute  attente.  Ils  fourniront 
la  matière  des  trois  volumes  dont  le  premier,  ayant  pour  titre  :  La  Mongolie 
et  le  pays  des  Tangentes  S  est  déjà  entre  les  mains  de  tous.  La  partie  sud-est 
du  Gobi,  le  bassin  du  Khouan-Khé  (ou  fleuve  Jaune)  supérieur,  la  région  du 
lac  Bleu  ou  Khou-Khou-Noor  et  le  pays  des  Douçgans,  —  telle  est  la  route  qu*a 
suivie  l'indomptable  explorateur.  Une  partie  de  ce  parcours  ayant  été  faite  par 
les  abbés  Hue  et  Galet,  missionnaires  français  dont  tout  le  monde  à  lu  le 
récit,  cela  a  donné  au  voyageur  russe  l'occasion  de  rectifler  plusieurs 
de  leurs  assertions.  Il  y  a,  à  ma  connaissance,  peu  de  voyages  écrits  avec 
autant  de  science  et  de  charme  que  celui  de  M.  Prjèvalski.  La  lecture  en 
est  si  attrayante  qu*on  ne  la  quitte  qu'après  l'avoir  achevée,  et,  en  déposant 
le  livre,  on  éprouve  un  vif  regret  que,  faute  de  ressources  pécuniaires  et 
bien  à  contre  cœur,  l'auteur  ait  dû  renoncer  an  voyage  de  Lhassa,  capitale 
du  Thibet. 

Des  considérations  d'un  ordre  supérieur  ont  déterminé,  en  1858,  Texpédi- 
tion  du  Khorasan,  qui  obtint,  parait-il,  plus  de  publicité  que  les  autres, 
grâce  à  la  langue  française  dans  laquelle  ont  été  publiés  les  principaux 
résultats  de  ses  travaux,  fort  importants  d'ailleurs  pour  la  cartographie  et 
l'ethnographie  iraniennes.  L'expédition  fut  conduite  par  M.  Nicolas  KhanykoVj 
orientaliste  et  ingénieur,  qui  en  exposa  les  résultats  dans  deux  mémoires 
imprimés  à  Paris,  dont  l'un,  sur  L'Ethnographie  de  la  Perse,  a  obtenu  de  la 
Société  géographique  de  France  la  grande  médaille  d'or  >.  Le  môme  auteur 
a  beaucoup  contribué  à  perfectionner  la  cartographie  du  Caucase  dont  le 
souvenir  rappelle  involontairement  ses  travaux  à  côté  de  ceux  de  Âbich, 
Bartholomée,  Berger,  Chodzko,  Radde,  Stebnitski,  etc.     • 

Dans  son  expédition  Caspienne  (4853-54),  l'académicien  Behr  a  étudié  l'état 
de  la  péchehe  et  a  constaté  que  l'abaissement  des  eaux  de  la  Caspienne  doit 
être  expliqué  par  quelque  cause  violente  et  non  par  une  action  lente  et  gra- 
duelle *.  On  sait  que  le  niveau  de  la  Caspienne  est  inférieur  de  plus  de  26 
mètres  à  celui  de  la  mer  Noire.  Dix  ans  après,  la  mer  d'Azov,  dont  la  diminu- 
tion des  eaux  offrait  un  phénomène  intéressant  à  étudier,  fut  également  le 
but  des  investigations  confiées  à  M.  Danilevski  ^. 

En  explorant  les  contrées  peu  connues  de  l'Asie  dn  nord,  de  l'est  et  du 
centre,  la  Société  n'ignorait  pas  que  ses  investigations  n'étaient  pas  toutes 
nécessaires  au  même  degré  qu'il  existait  déjà,  sur  quelques-unes  d'elles, 
des  travaux  tout  faits  dont  elle  n'avait  qu'à  profiter.  Parmi  les  ouvrages 
consacrés  à  la  géographie  de  l'Asie  centrale,  aucun  ne  jouit  d'une  renommée 
mieux  établie  et  plus  méritée  que  le  travail  classique  de  Ritter,  intitulé 
JSrdAunie.  Aussi,  dès  son  début,  la  Société  l'avait-elie  pris  pour  guide  et  pour 
modèle  ;  elle  avait  même  résolu  d'en  faire  une  édition  en  langue  russe,  dès 


»nt-Pétenboar|^,  avec  deux  magnifiques  cartes,  1875,  i  vol.  iD*8  de  ix»390p. 
ss  deux  mémoires    forment  un  vol.   in -4  de  plus  do  400  p.,  accompagné  do 


1.  Saint. 

2.  Ces 
cartes,  de  plans  et  de  types. 

3.  C<upi9di$  StuiUn,  1853-1834. 

4.  Oani  les  Mémoiru  de  la  Soc.  de  Pétersb.,  de  1869,  t.  II. 


—  369  — 

que  ses  ressources  le  permettraient.  Atgourd'hui,  nous  lui  devons  déjà  six 
magnifiques  Tolumes,  dont  les  trois  premiers  ont  été  traduits  et  complétés 
par  M.  SemenoY,  si  bien  préparé  à  ce  travail  et  par  sa  longue  expérience  et 
par  son  voyage  dans  le  Thian-Ghan  dont  il  avait  rapporté  un  riche  album.  Les 
deux  volumes  suivants  ont  été  publiés  par  M.  Grigoriev,  orientalise  distingué, 
et  le  dernier,  qui  vient  de  paraître  est  dû  aux  soins  intelligents  de 
M.  Kbanykov,  celui  qui  avait  jadis  conduit  la  mission  du  Khorosan.  On  ne 
pouvait  faire  ni  un  meilleur  choix  des  rédacteurs,  ni  un  meilleur  usage  du 
capital  (20,000  r.  arg.)  offert  par  la  libéralité  de  M.  Goloubkov.  Aussi  ce  serait 
une  grosse  erreur  de  penser  que  la  nouvelle  édition  n'est  qu'une  simple 
reproduction  de  l'original.  Les  doctes  éditeurs  ont  fait  mieux  que  cela;  après 
l'avoir  soumise  à  un  rigoureux  contrôle,  ils  l'ont  enrichie  de  notes,  de  com- 
mentaires, d'additions  de  toute  sorte,  en  telle  abondance,  qu'on  est  en  droit 
de  considérer  l'édition  russe  comme  un  nouveau  travail.  Qu'on  juge  par 
l'exemple  suivant  :  le  quatrième  volume,  Lt  CabiUistan  et  leKafiristan,  remplit 
dans  celle-ci  plus  de  i,000  pages,  tandis  que  le  même  pays  n'occupe  dans  le 
texte  allemand  que  cent  et  quelques  pages  en  tout.  M.  Khanykov  en  a  agi 
de  même  ;  au  traité  original,  il  a  ajouté  de  longs  appendices  extraits  des 
œuvres  de  M.  Spieg^l  et  autres  orientalistes  en  renom.  G'est  qu'on  voulait 
donner  une  édition  vraiment  critique,  mise  au  niveau  de  la  science  contem- 
poraine et  enrichie  de  toutes  les  découvertes  récentes  ^ 

Les  publications  qui  viennent  d'être  énumérées,  et  quantité  d'autres  que 
nous  passons,  parce  qu'elles  ont  été  faites  en-dehors  de  la  Société  géogra- 
phique, témoignent  assez  du  mouvement  qui  s'est  produit  dans  les  études 
géographiques  en  Russie.  Mais  il  en  résulte  aussi  qu'elles  ont  singulière^ 
ment  augmenté  le  nombre  des  données  topographiques  et  rendu  indispen- 
sable un  travail  où  tous  ces  éléments  fussent  réunis,  coordonnés  et  fissent 
un  corps.  De  là  le  besoin  iirgent  d'une  nouvelle  carte  générale  de  la  Russie 
de  l'Europe  et  d'un  dictionnaire  de  géographie.  La  première  fut,  en  effet, 
exécutée  en  1862  par  les  soins  de  la  Société,  comblant  ainsi  une  lacune  que 
les  travaux  précédents,  y  compris  ceux  de  Koeppen,  ne  parvenaient  pas  à 
remplir. 

G*est  à  elle  encore  que  revenait  de  droit  la  seconde  tâche,  la  rédaction  du 
grand  dictionnaire  de  géographie  et  de  statistique  *. 

À  l'heure  qu'il  est,  cette  œuvre  capitale  de  M.  Semenov,  entreprise  avec 
le  concours  de  MM.  Zvérinski,  Maikov,  Filipov  et  Bock,  touche  déjà  à  son 
terme.  Les  quatre  énormes  volumes  sont  depuis  longtemps  entre  les  mains  du 
public  studieux  ;  le  dernier  s'arrête  au  mot,  Siastra-Kassy.  Le  dictionnaire 
contient  plus  de  16,000  notices  nouvelles,  dont  quelques-unes  sont  d'une 
étendue  très-considérable.  Ainsi,  par  exemple,  Pétersbourg  (y  compris  le  gou- 
vernement du  même  nom)  occupe  trente-cinq  pages  d'impression  compacte  à 
deux  colonnes;  Moscou  en  remplit  vingt-six  et  Novgorod  quatorze.  A  chaque 
article,  on  trouve  une  liste  des  auteurs  à  consulter,  ce  qui  facilite  beaucoup 
les  recherches  ultérieures.  La  perfection  n'étant  guère  possible  dans  un 
travail  pareil,  M.  Semenov  se  propose  de  donner,  à  la  Un,  un  supplément  des- 

1.  Voici  les  titres  des  six  volâmes  ;  —  Tome  I**^  Introduction  générale  et  confiné  orient 
taux  de  VAtie,  1856  ;  —  Tome  II,  Thian^Schan  et  VÀltat  chinois,  1859  ;  —  Tome  III, 
L'ÀUai  rut$9  et  Ut  duUne  de  Sagan,  1860  ;  —  Tome  IV,  Le  Cabalistan  et  le  Kafirittan,  1867, 
in-S  de  xiv-1079  p.  ;  —  Tome  V,  Le  Turkeetan  cMnoie,  1869-1873  ;  —  l'Iran  (1"  par- 
tie), 1874,  in-8»  de  xv-LXV-653  p. 

2.  Slovar  roeeitkot  imperU,  4  vol.  in-8.  1863-67;  —  T.  I*'  de  vm-716p.  -,  —  T.  II, 
de  iv-898  p.  ;  —  T.  III  de  743  p.  ;  —  T.  IV  de  v-867  p.  La  première  livraisoû  da 
V  vol.  (Taa-M)  a  déjà  para, 

OcTOBBB  1878.  •  T.  XIV,  24. 


—  370  — 

tinô  à  rectifier  les  inexactitades  qu'on  aara  remarquées  dans  le  corps  de 
l'ourrage,  et  à  combler  les  lacunes,  celles  surtout  que  les  découvertes  posté* 
rieures  ont  rendues  inévitables. 

On  ne  peut  que  rendre  hommage  au  dévouement  éclairé  et  infatigable 
avec  lequel  la  Société  poursuit  sa  noble  mission  ;  aussi  la  félicitons-nous  du 
fond  du  cœur  des  beaux  et  importants  résultats  qu'elle  a  déjà  obtenus^  et 
lui  souhaitons-nous  une  longue  et  féconde  prospérité. 

J.  MllTDfOV. 


CHRONIQUE 

Néchologib.  —  M.  Denis-Lonis-Martial  Avenel,  conservateur  à  la  Biblio- 
thèque Sainte-Geneviève,  chevalier  de  la  légion  d'honneur,  ofQcier  de  Tins- 
truction  publique,  est  mort  à  Pans,  le  16  août  i875,  dans  sa  quatre-vingt- 
treizième  année.  Il  était  né  à  Orbec  (Calvados),  le  26  mai  4783,  et  non 
1789,  comme  l'indique  le  DicMoimotre  des  Contemporains.  D'abord  secrétaire 
du  roi  de  Westphalie,  il  devint  ensuite  journaliste,  et  il  donna  de  nombreux 
et  remarquables  articles,  soit  politiques,  soit  littéraires,  au  Courrier  français^ 
au  Temps,  au  Moniiewr  univeirsely  &  la  Beouê  «neycibpédtgué,  etc.  On  trouve  de 
lui  d'excellentes  notices  biographiques  dans  VEncyàlopidie  des  gens  du 
numde.  Sa  collaboration  au  Journal  des  Savants^  qui  dura  près  de  vingt 
années,  fut  des  plus  fécondes  et  des  plus  brillantes.  Esprit  &  la  fois  fin  et 
judicieux,  M.  Avenel  examina  successivement,  dans  ce  recueU,  avec  non 
moins  de  goût  que  d'érudition,  divers  ouvrages  importants  :  l'édition  de  la 
Chronique  de  Bertrand  du  Quesdin  de  Guvelier,  par  Gharrière;  le  TaMeau  des 
instiMions  et  des  mœurs  de  VÉglise  au  moyen  âge,  de  Frédéric  Hurter;  YEistoère 
des  Vêpres  siciliennes  d'Amari  ;  VHistoire  de  la  conquête  du  royaums  de  NapUs^ 
par  Charles  d'Anjou,  du  comte  de  Saint-Priest;  la  Vie  de  savU  Louis,  de  Le 
Nain  de  Tillemont;  les  Mazarinades,  de  M.  G.  Moreau;  YRUtoire  de  Madame  de 
Maintenm,  de  M.  le  duo  de  Noailles,  etc.  Gomme  M.  Avenel  joignait  à  toutes 
les  qualités  du  critique  le  don  heureux  d'un  style  aussi  ferme  que  pur, 
il  mérita  d'être  regardé  coDune  un  des  meilleurs  rédacteurs  d'un  journal 
où  écrivaient  les  Cousin,  les  Flourens,  les  Blignet,  les  Patin,  les  Vitet,  etc. 
Mais  j'ai  hâte  d'arriver  à  l'ouvrage  qui  est  et  qui  restera  l'immortel  honneur 
de  sa  vie,  à  cetto  édition  desLeftres,  instructions  diplomatiques  et  papiers  (f^tol 
du  cardinal  de  Richelieu,  à  laquelle,  depuis  1842,  il  a  consacré,  pour  ainsi  dire, 
toutes  les  forces  de  son  corps  et  de  son  âme.  On  n'admirera  jamais  assez  le 
zèle  et  le  soin  avec  lesquels  M.  Avenel  a  recueilli,  a  publié,  a  entouré  de 
toutes  les  explications  désirables,  les  papiers  du  plus  grand  ministre  qu'ait 
Jamais  possédé  la  France.  Scrupuleux  jusqu'à  l'excès,  il  voulait  tout  voir, 
tout  revoir,  tout  approfondir,  même  les  plus  petites  questions;  sa  patience 
était  infatigable,  et,  comme  elle  était  accompagnée  d'une  rare  sagacité,  on 
ne  doit  pas  être  surpris  de  trouver  si  peu  d'omissions  et  de  fautes  dans  les 
six  ou  sept  mille  pages  de  son  recueil.  A  une  époque  où  je  n'avais  pas 
encore  le  plaisir  de  connaître  M.  Avenel^  je  disais  de  lui  {Quelques  noi/ss  sur 
Jean  Otitlon,  le  maire  de  la  Roch^le,  1863,  p.  14),  que  c'était  le  modèle  dee 
éditeurs.  Je  ne  puis  que  répéter  cet  éloge,  devenu  de  plus  en  plus  légitime, 
et  je  suis  d'accord,  en  cetto  appréciation,  avec  tous  ceux  qui  ont  examiné 
depuis  ce  beau  travail.  Je  ne  dois  pas  omettre  deux  étodes  que  M.  Avenel  a 


—  371  — 

publiées  dans  la  Rgvuêâesquêstims  historiques^  et  qui  ont  fait  sensation  dans 
le  monde  sayant  :  Richelieu^  Lcuis  XII Jet  Onq-Mars  (Hyraison  du  1"*  janvier 
1868),  et  la  Jeunesse  de  Richelieu  (livraison  da  1*'  janvier  1869).  Le  vaillant 
ëmdit  avait  promis  au  même  recueil  un  travail  complet  sur  le  Caractère 
de  Louis  Xin,  travail  pour  lequel  il  avait  réuni  des  notes  abondantes,  qu'il 
n'a  pas  eu  le  temps  d'utiliser.  Avant  tout,  il  tenait  à  achever  son  Richelieu. 
Dieu  n'a  pas  permis  que  le  vénérable  vieillard  goûtât  l'ineffable  joie  de  voir 
son  dernier  volume  entièrement  imprimé  ;  mais,  du  moins,  M.  Avenel  a  eu 
la  certitude^  en  mourant,  que  son  manuscrit  serait  révisé  et  que  ses 
épreuves  seraient  corrigées  par  un  ami  qui  ne  négligerait  rien  pour  justifier 
la  confiance  dont  il  l'avait  honoré. 

Admis  dans  l'intimité  de  M.  Avenel,  l'ayant  beaucoup  vu  pendant  les 
dix  dernières  années  de  sa  vie,  pendant  sa  cruelle  maladie,  et  presque 
jusqu'à  l'heure  de  sa  mort,  je  puis  déclarer  qu'en  lui  l'homme  valait  l'érudit 
C'était  un  des  oœurs  les  plus  droits,  un  des  esprits  les  plas  fermes,  un  des 
caractères  les  plus  nobles  que  l'on  pût  rencontrer.  D  aimait  par-dessus  tout 
la  justice  et  la  vérité,  et  nul  n'a  jamais  été  plus  que  lui  l'esclave  du  devoir. 
Daiis  sa  vigoureuse  et  si  beUe  vieillesse,  il  avait  une  ardeur  de  bien  faire 
digne  de  ces  généreuses  années  où  tout  nous  est  doux  et  facile.  S'il  était  sévère 
pour  lui,  il  était  indulgent  pour  les  autres.  Aussi,  son  exquise  bonté  avait^ 
elle  groupé  autour  de  lui  les  plus  tendres  et  les  plus  fidèles  affections. 
Malade,  il  s'est  toi^gours  montré  calme  et  résigné,  souriant  en  quelque 
sorte  à  la  mort,  pour  épargner  le  plus  possible  à  une  famille  adorée  le 
contre-coup  de  ses  souffirances.  H  s'est  éteint  avec  la  sérénité  de  l'homme 
de  bien,  du  chrétien  plein  de  foi  et  d'espérance.  Humble  et  modeste  jus* 
qu'à  la  fin,  il  avait  témoigné  le  désir  que  nulle  parole  ne  fût  prononcée  sur 
sa  tombe.  Mais  son  éloge  est  gravé  dans  le  cœur  de  tons  ceux  qui  l'ont 
connu,  et,si  j'en  juge  par  mespropres  sentiments,  j'ai  le  droit  d'ajouter  qu'il. 
ne  s'en  effacera  jamais.  «—  Ph.  Tamizbt  db  Labboqui. 

—  M.  Gharles-Marie*Wladimir  Brunst  db  PassLBy  né  à  Paris,  le  10  no- 
vembre 1809,  est  mort  à  Parouzeau,  près  Provins,  le  12  septembre  1675.  U 
était  membre  de  l'Académie  des  inscriptions  depuis  le  10  décembre  1852, 
et  j  avait  remplacé  le  baron  Wailkenaer.  Helléniste  consonmié,  il  s'adonna 
à  l'étude  du  grec  moderne,  ce  qui  l'avait  mis  en  relations  avec  les  philhel- 
lènes  qui  ont  joué  un  rôle  sous  la  Restauration.  Il  parlait  et  écrivait  le  grec 
avec  une  grande  facilité.  Depuis  plus  de  quarante  ans,  sa  maison  était  le 
rendez-vous  de  tous  les  Grecs  de  distinction  qui  venaient  à  Paris.  U  était 
l'élève  affectionné  de  M.  Hase,  et,  en  4864,  lorsque  celui-ci  mourut,  M.  Brunet 
de  Presle,  présenté  par  l'Académie  des  inscriptions  et  par  l'École  des 
langues  orientales,  lui  succéda  dans  la  chaire  de  grec  moderne.  En  1842, 
il  avait  remporté  le  prix  dans  un  concours  proposé  par  l'Académie  des  ins- 
criptions sur  cette  question  :  Histoire  des  établissements  des  Grecs  en  Sicile  jûs^ 
qu'à  la  TiducHm  de  cette  Ue  en  prooinoe  romaine.  L'ouvrage  fut  imprimé 
en  1845  (Paris,  Didot,  in-8).  En  1850,  il  fit  paraître  un  EûDomen  critique  de  la 
succession  des  dynasties  égyptiennes,  travail  dans  lequel  il  avait  mis  en  œuvre 
toutes  les  sources  grecques  relatives  à  cette  question  (!'•  partie,  Paris, 
Didot,  iii-8  av.  pi.).  M.  Brunet  de  Presle  avait  été  chargé  de  continuer  le 
grand  recueil  de  papyrus  grecs  conmiencé  par  Letronne,  et  il  fit  pa- 
raître, en  1865,  en  collaboration  avec  M.  Egger  :  Les  papyrus  grecs  du 
Musée  du  Louoreetdela  Bibliothéqueimpériale  (Paris,  Impr.  imp.,  in-4  de  506  p. 
av.  atlas  in-fol.  de  52  pi.,  extrait  du  t.  XVHI,  2«  partie,  des  Notices  et  extraits 
des  manuserits). 


—  372  - 

On  ne  doit  pas  oublier  qu'il  fut  un  des  fondateurs  de  Y  Association  pour 
rencouragement  des  études  grecques.  Sa  précieuse  collection  de  livres,  bro- 
chures, journaux  en  grec  moderne,  collection  unique  pour  sa  richesse,  a 
été  léguée  à  l'École  des  langues  orientales.  —  On  lui  doit  encore  le  volume 
Grèce,  de  YUnivers  ptïtoresgue,  en  collaboration  avec  M.  Blanchet,  et  une 
Monographie  du  Sérapéum  de  Memphis,  insérée  au  t.  n,  i^*  série,  des  Mémoires 
des  savants  étrangers. 

—  M.  Connop  Thirlwall,  né  en  1798,  mort  évêque  protestant  de  Saint- 
David,  dans  le  pays  de  Galles;  il  était  l'auteur  d'une  Histoire  de  Gréce^  publiée 
dans  LaTdner*s  Cabinet  Cydopedia  de  1835  à  1841,  en  8  volumes  in-8,  et  réimr 
primés  à  Londres  de  1845  à  1852,  et  le  traducteur,  avec  M.  Hare,  de  VHistoire 
romaine  de  Niebuhr,  publiée  à  Cambridge,  en  deux  volumes,  de  1848  à  1852. 
Cette  traduction  n'était  point,  d'ailleurs  son  début  littéraire  :  il  avait  publié, 
en  1809,  à  l'âge  de  onze  ans,  un  volume  intitulé  :  nFrimitix,  or  Essays  ani 
Foems,  by  Connop  Thirlwall,  eleven  years  of  âge,  with  a  préface  by  his 
Father,  »  volume  accompagné  d'un  portrait. 

—  M.  Aimé-Jean-Baptiste-Emest  GRAssET,|président  de  chambre  honoraire 
k  la  Cour  de  Dijon,  vice-président  de  la  Commission  des  antiquités  de  la 
Côte-d'Or,  né  à  Dijon,  le  11  mai  1799,  est  mort  en  cette  ville  en  septem- 
bre 1875.  M.  Grasset  fut  successivement  avocat  en  1818,  conseiller  auditeur  à 
la  Cour  de  Dijon  en  1822,  substitut  du  procureur  général  en  1829,  conseiller 
à  la  Cour  en  1831,  chevalier  de  la  Légion  d'honneur  en  1843,  président  de 
Chambre  en  1865,  et  président  honoraire  en  1869.  On  doit  à  ce  magistrat 
chrétien  un  curieux  travail  intitulé  :  Un  épisode  de  Vhistoire  mtintetpale  de 
Dijon,  travail  annexé  dans  le  tome  YI  des  Mémoires  de  la  Commission  des 
antiquités  de  la  Côte-d'Or,  et  tiré  à  part.  —  A.  A. 

On  annonce  encore  la  mort  de  M.  Edouard  Corbière,  rédacteur  en  chef  du 
Journal  du  Havre,  de  1826  à  1841 ,  mort  à  Morlaix,  à  l'âge  de  quatre-vingt- 
deux  ans  ;  —  de  M.  Octavien  Bringnier,  président  de  la  Société  pour  l'étude 
des  langues  romaines  ;  —  de  M.  Jean-FVançois  Caron,  ancien  juge  de  paix 
de  Pornic,  auteur  d'une  Histoire  de  Pomic  (1859)  et  du  Catéchisme  des  tneré- 
dules  (1865),  mort  dans  sa  quatre-vingt-cinquième  année  ;  —  de  M.  Jean 
Engblmann,  président  de  la  chambre  des  imprimeurs  lithographes  de  Paris, 
mort  le  29  juillet,  à  l'âge  de  cinquante-neuf  ans. 

CoNGRis.  —  L'Association  bretonne  a  tenu,  à  Guingamp  (C6tes-du-Nord), 
du  30  août  au  5  septembre  dernier,  son  troisième  congrès  annuel  depuis  sa 
résurrection.  La  réunion  était  fort  nombreuse  :  on  y  remarquait  un  grand 
nombre  de  députés  des  cinq  dépai'tements  de  Bretagne,  presque  toutes  les 
notabilités  bretonnes,  et  des  délégués  des  Iles  anglaises.  Un  concours  agricole 
général  et  des  concours  spéciaux  hippique  et  linier  avaient  été  annexés  au 
congrès,  par  les  soins  de  l'Association.  Mgr  David,  évêque  de  Saint-Brieuc 
et  de  Tréguier,  et  M.  deJouvenel,  préfet  des  C6tes-du- Nord,  ont  été  élus  pré- 
sidents d'honneur  du  congrès  ;  M.  de  Tréveneuc,  député  des  C6tes-du-Nord, 
président  de  la  section  d'agriculture  ;  et  M.  de  Kerdrel,  député  du  Morbihan 
et  vice-président  de  l'Assemblée  nationale,  président  de  la  section  d'archéo- 
logie. On  a  beaucoup  remarqué,  à  la  séance  d'ouverture,  un  discours  de 
M.  Louis  de  Keijégu,  proclamant  l'Association  bretonne,  au  nom  du  bureau 
directeur,  une  œuvre  de  conciliation  générale  et  faisant  appel  à  toutes  les 
forces  vives  du  pays,dans  un  but  de  régénération  sociale.  M.  deChampagny, 
secrétaire  général,  a  présenté,  dans  le  même  but,  un  brillant  tableau  des 
grands   résultats    produits   par   les  anciennes    associations  anglaises,  et 


—  373  — 

Mgr  DaTid,  dans  l^allocntion  prononcée  à  la  messe  du  Saint-Esprit,  a  repris 
le  même  thôme.  Des  travaux  importants  ont  été  couronnés  par  la  section 
d'agriculture.  Nous  citerons,  en  particulier,  ceux  de  MM.  Tabbé  Tostidint,  sur 
la  fabrication  du  cidre,  Bourel-Roncière,  sur  la  culture  du  lin  ;  Ck)urtois,  sur 
les  engrais  artificiels,  et  Kersanté,  sur  les  vices  redhibitoires  des  chevaux. 

Dans  la  section  d'archéologie,  nous  devons  une  mention  toute  spéciale  & 
réloge  du  regretté  président,  M.  Aymar  de  Blois  prononcé  par  M.  S.  Ropartz, 
Tauteur  de  la  Vie  de  J,  M.  de  Lamennais,  et  des  Études  sur  Guingamp  ;  — 
à.  la  conférence  de  M.  de  la  Borderie  sur  Noël  Du  Fail;  —  à  la  biographie 
de  Mlle  de  Kerouartz,  fondatrice  des  Ursulines  de  Kemperlé,  par  M.  Audran  ; 
—  à  la  longue  discussion  engagée  entre  MM.  Lallemand  et  Tabbé  Maréchal, 
sur  la  destination  des  dolmens;  —  aux  mémoires  de  M.  Raportz,  sur  la 
famille  Descartes  en  Bretagne,  et  sur  le  catalogue  de  jurisprudence  bretonne 
de  feu  M.  le  comte  de  Corbière  ;  —  à  la  carte  des  monuments  mégalithiques 
de  Farrondissement  de  Guingamp,  par  M.  Gautier  du  Mottay  ;  —  aux  rap- 
ports de  M.  Kerviler,  sur  les  fouilles  de  Saint-Nazaire  et  sur  Touvrage  de 
M.  Du  Bouêtiez  de  Kerorguen  :  Recherches  sur  les  États  de  Bretagne  ;  —  aux 
légendes  bretonnes  de  MM.  Dulaurens  de  la  Barre  et  Luzel  ;  —  au  projet 
d'une  grande  publication  spéciale  à  Thagiologie  armoricaine,  formé  par 
MM.  de  la  Borderie,  Ropartz,  dom  Plaine,  et  l'abbé  Ghauffier;  —  au  Fouillé 
historique  de  Tarchidiocèse  de  Rennes,  par  M.  Tabbé  de  Gorson,  etc.,  etc. 

Avant  de  se  séparer,  TAssociation  a  complété  son  bureau  de  direction,  en 
nonmiant  M.  Ropartz,  président  de  la  section  d'archéologie  à  la  place  de  M.  de 
Blois,  décédé,  et  M.  P.  Huguet,  secrétaire  de  cette  section,  à  la  place  de  M.  Ro- 
partz. —  Suivant  la  coutume,  d'intéressantes  excursions  archéologiques  ont 
eu  lieu  aux  environs  de  Guingamp,  en  particulier  à  Notre-Dame  de  Grâces, 
et  l'aviso  de  l'État,  VArvemey  a  conduit  une  partie  du  congrès  à  Jersey  et 
Guernesey,  où  les  membres  ont  reçu  la  plus  cordiale  réception.  —  R.  K. 

—  Le  congrès  géodésique  européen  a  tenu  sa  session  annuelle  le  20  sep- 
tembre et  jours  suivants,  à  Paris,  dans  les  salons  du  ministère  des  affaires 
étrangères^  sous  la  présidence  de  M.  le  général  Banez,  délégué  de  l'Espagne, 
qui  préside  cette  année  le  comité  permanent. 

Mdsée  du  Louvre.  —  On  vient  d'exposer,  au  musée  du  Louvre,  sur  le  palier 
de  l'escalier  assyrien,  six  bustes  impériaux  découverts  à  Markouna,  près  de 
Lambèse,  en  AMque  ;  ils  ont  été  rapportés  par  notre  collaborateur,  M.  Ant. 
Héron  de  Yillefosse.  Ils  représentent  Marc-Aurèle,  Lucius  Vérus,  Lucille, 
Annius  Vérus,  Septime-Sévère  et  Plautille.  Plusieurs  inscriptions,  provenant 
de  la  même  mission,  et  quelques  monuments  trouvés  à  Carthage  sont  placés 
au  même  endroit. 

Inauguration  de  la  statue  de  Chateaubriand  a  Saint-Malo.  —  Le  di- 
manche 5  septembre  a  eu  lieu  à  Saint-Malo,  au  milieu  d'un  immense  con- 
cours des  populations  bretonnes,  et  après  une  messe  solennelle  célébrée  à 
l'antique  cathédrale,  l'inauguration  de  la  statue  élevée  à  l'auteur  du  Génie 
du  Christianisme,  sur  la  place  qui  porte  son  nom,  devant  la  maison  où  il  est 
né.  Cette  statue,  due  au  ciseau  du  sculpteur  A.  Millet,  respire  un  air  de 
grandeur  et  de  mélancolie  qui  a  vivement  impressionné  l'assistance.  Un 
grand  nombre  de  discours  ont  été  prononcés  à  cette  occasion.  M.  Houitte 
de  Lachesnaye,  maire  de  Saint-Malo,  au  nom  de  la  municipalité;  M.  Camille 
Doucet,  au  nom  de  l'Académie  française  ;  M.  le  duc  de  Noailles,  comme 
successeur  de  Chateaubriand  au  fauteuil  académique;  M.  Paul  Fé?al,au  nom 
de  la  Société  des  gens  de  lettres,  ont  successivement  rendu  hommage,  de- 
vant le  monument ,  au  grand  publiciste  et  à  l'éminent  poète.  Mais  le  mor- 


—  374  — 

ceau  qui  nous  a  pin  dayantage  a  été  le  toast  porté  le  soir  an  banqfaet 
municipal  par  un  troisième  académicien^  breton  celui-là,  M.  Garo,  qui  a 
enleyô  tous  les  suf&ages  par  un  éloquent  appel  au  génie  de  la  Bretagne;  au 
même  banquet,  on  a  encore  entendu  M.  le  comte  de  Chateaubriand,  Tun  des 
derniers  représentants  de  la  famille;  le  vénérable  M.  Sauzet,  délégué  de  FÂca- 
démie  de  Lyon,  et  d'autres  orateurs  dont  les  noms  sont  moins  retentissants. 
La  municipalité  avait  très-bien  organisé  les  fêtes,  et  Timpression  générale  a 
été  fortsatbfaisante.  Un  seul  reproche  aux  organisateurs  :  l'Association  bre- 
tonne qui  siégeait  à  Guigamp  avait  envoyé  une  députation  aux  fêtes  de 
Saint-Malo  ;  pourquoi  le  président  de  la  députation,  M.  de  la  Borderie, 
député  d'Ile-et-Vilaine,  qui  avait  préparé  un  excellent  discours  et  qui  était 
plus  qu'aucun  autre  en  droit  de  déposer  son  hommage  aux  pieds  de  son 
illustre  compatriote,  n'a-t-il  pas  été  admis  à  prononcer  sa  harangue?... 
Plusieurs  pièces  de  poésie  ont  été  publiées  à  l'occasion  de  cette  cérémonie. 
En-dehors  de  l'ode  de  M.  Maury,  récenmient  couronnée  aux  jeux  floraux, 
nous  citerons  celles  de  BIM.  Célestin  Roche,  A.  du  Glézieux  et  Hipp.  de  Lor^ 
geril.  —  R.  K. 

Lectures  faites  a  l'Académie  des  inscbiptions  et  belles-lbttbes.  — Dans  la 
séance  du  3  septembre,  M.  de  Longpérier  a  communiqué  une  note  surForigine 
du  vers  Indocti  disearU  et  ament  meminisseperUi,  qui  doit  être  attribué  au  prési- 
dent Hénault.  --  M.  Derembourg  a  communiqué  une  noté  sur  une  inscrip- 
tion néo-punique  trouvée  aux  environs  de  Cherchell.  Dans  les  séances  du 
3  et  du  10,  il  a  été  donné  communication  d'un  rapport  de  M.  Victor  Guérin 
sur  sa  mission  en  Palestine.  —  Dans  la  séance  du  10,  M.  N.  de  Wailly  a  com- 
muniqué une  note  au  sujet  d'un  article  publié  par  M.  le  comte  Riant,  dans  la 
Bévue  des  questione  historiqueSy  pour  protester  contre  les  critiques  dont  Ville- 
Hardouin  y  a  été  l'objet;  M.  Alfred  Maury  a  continué  la  lecture  de  son 
mémoire  sur  les  inscriptions  étrusques.  —  Dans  la  séance  du  47,  M.  Bouley, 
de  l'Académie  des  sciences,  a  communiqué  une  note  sur  Claude  Bonrgelot, 
fondateur  des  écoles  vétérinaires  en  France;  H.  Thurot  a  lu  un  extrait  de  son 
introduction  au  Recueil  des  historiens  ocddeiUaux  des  Croisades^  lecture  con- 
tinuée dans  la  séance  du  24;  et  M.  Desjardins  a  continué  la  lecture  du 
mémoire  de  M.  Tissot  sur  la  géographie  de  l'ancienne  Mauritanie.  —  Dans 
la  séance  du  24,  M.  Germain  a  communiqué  un  mémoire  sur  le  Registre  du 
Procureur  des  étudiants,  conservé  aux  archives  de  la  faculté  de  médecine  de 
MontpoUier. 

Lectdbes  faîtes  a  l'Acadévib  des  sciences  morales  et  FOLmQUBS.  "—  Dans  les 
séances  du  4,  du  li  et  du  48  septembre,  M.  Maurice  Block  a  lu  un  mémoire 
sur  la  décentralisation  en  Prusse.  Dans  les  mêmes  séances  et  dans  celle  du 
25,  M.  Henri  Baudrillart  a  continué  la  lecture  de  son  mémoire  sur  le  luxe  et 
les  moralistes.  —  Dans  la  séance  du  25,  a  été  lu  un  fragment  d'un  mémoire 
de  M.  Krug-Bass  sur  l'administration  de  l'Alsace  avant  la  révolution. 

Société  médicale  de  Jonzac.  —  Nous  avons  sous  les  yeux  le  Rapport  sur  les 
travaux  de  cette  société  pendant  les  années  4874-4875,  par  le  Dr  E.  Lafar- 
gue,  secrétaire  général  (Jonzac,  impr.  L.  Ollière,  4875,  24  p.  gr.  in-8).  La 
lecture  de  ce  travail  remarquable  suggère  quelques  réflexions  pratiques.  Une 
quarantaine  de  médecins,  pharmaciens  et  vétérinaires  se  réunissent  pério- 
diquement au  chef-lieu  de  l'arrondissement  où  ils  exercent,  apportant  à  ces 
séances  les  difficultés  ou  les  résultats  acquis  de  leur  pratique  et  quelquefois 
des  mémoires  écrits  sur  des  observations  particulièrement  intéressantes.  Cau- 
series et  lectures  remplissent  à  merveille  le  temps  toujours  trop  court  de  la 


^  375  — 

réunion.  De  plus,  les  mémoires  imprimés  on  mannscrits  constituent  les  archi- 
Tes  de  la  Société,  ardÛTes  du  plus  grand  prix,  quoique  le  secrétaire  général 
les  trouve  trop  pauvres,  la  plupart  des  membres  ayant  rarement  le  goût  ou 
le  temps  d'écrire.  —  Pourquoi  une  telle  institution  ne  se  généraliserait-elle 
pas?  N'est-il  pas  déplorable  que  les  médecins  de  proTince  vivent  presque 
tous  dans  l'isolement  de  leurs  confrères?  Sans  parler  de  ces  rivalités  mes« 
quines,  de  ces  inimitiés  professionnelles  qui  sont  l'un  des  plus  tristes  fléaux 
de  la  vie  médicale,  n'est41  pas  évident  que  beaucoup  de  médecins  glissent 
dans  la  routine  et  l'indifférence  à  tout  progrès,  par  l'absence  d'un  centre 
intellectuel  et  de  toute  occasion  de  communications  scientifiques?  Il  y  a  plus  ; 
les  réunions  médicales  seraient  le  moyen  le  plus  efficace  de  relever  morale- 
ment la  profession,  en  la  rattachant  aux  saines  doctrines  et  aux  bonnes  tra- 
ditions religieuses,  philosophiques  et  sociales.  Il  est  impossible  que,  dans 
ces  centres  provinciaux  où  les  médecins  répandus  dans  le  pays  se  réuni- 
raient périodiquement,  pour  causer  du  grand  art  de  guérir  le  corps,  le  plus 
grand  de  tous  les  arts  après  celui  de  sauver  les  âmes,  la  vraie  et  légitime 
influence  des  supériorités  intellectuelles  et  morales  ne  triomphât  pas  peu 
à  peu  des  erreurs  et  des  préjugés  retenus  d'un  enseignement  suspect  et  des 
habitudes  de  la  vie  d'étudiant.  —  Quoi  qu'il  en  soit,  s'il  est  permis  de  juger 
de  la  Société  médicale  de  Jonzac  par  les  pages  de  son  secrétaire  général, 
M.  Lafargue,  médecin  à  Montguyon,  on  peut  en  concevoir  l'idée  la  plus 
flatteuse.  Beaucoup  d'observations  intéressantes,  relatives  soit  à  la  médecine, 
soit  à  la  chirurgie,  y  sont  présentées  sous  une  forme  concise,  mais  avec  un 
détail  suffisant  pour  intéresser  tous  les  médecins  studieux.  De  plus,  sans 
sortir  des  limites  de  la  clinique,  où  se  restreignent  les  travaux  de  sa 
Société,  le  savant  rapporteur  laisse  voir,  dans  les  quelques  considérations 
générales  de  son  début  et  de  sa  conclusion,  une  intelligence  très-versée 
dans  la  philosophie  médicale,  et  qui  ne  sépare  pas  les  principes  de  son  art 
des  principes  religieux  sans  lesquels  ne  saurait  s'accomplir  aucun  progrès 
digne  de  ce  nom. 

L'AsTEONOMiB  GRSCQUB  ET  ROXiONB.  —  Le  savaut  doyon  de  la  faculté  des 
lettres  de  Rennes,  M.  Th,  H.  Martin,  vient  de  publier,  dans  la  quatrième 
livraison  du  Bktionnaire  des  antiquités  grecques  et  romaines,  un  ariicle  qui  n'a 
guère  qu'une  trentaine  de  pages  in-4,  et  qui,  néanmoins,  résume  tout  ce 
qu'on  sait  aujourd'hui  sur  l'histoire  de  l'astronomie  grecque,  dont  l'astronomie 
romaine  ne  fut  qu'un  écho  très-faible  et  très-infidèle.  Travailleur  infatigable. 
Fauteur  de  cet  article  prépare,  depuis  quarante  ans,  une  histoire  des  sciences 
dans  l'antiquité  ;  et  des  fragments  très-nombreux  de  cette  histoire  ont  été 
publiés,  soit  en  France,  soit  à  Rome.  Ce  fragment  nouveau  résume,  non-seule- 
ment les  publications  volumineuses  déjàffaites  par  M.  Martin,  mais  encore  des 
dissertations  inédites  qui  doivent  paraître  successivement  dans  le  recueil  des 
Mémoires  de  V Académie  des  Inscriptions,  U  est  divisé  en  quatorze  sections, 
dont  voici  les  titres  :  I.  Noms  antiques  de  Vastronomie;  II.  Enfance  de  Vastro- 
nomie  pratique;  RI.  Cosmographie  populaire  des  Qrecs  et  des  Romains;  IV.  Eyp>- 
thèses  astronomiques  ;  V.  Progrès  des  notions  préliminaires  ;  YI.  Progrés  des  ins* 
truments  et  des  procédés  d*observation  ;  YD.  Observations  empruntées;  YDI,  Astr<^ 
nomie  steUaire  et  précession  des  équinoxes;  XI.  Astronomie  solaire;  X.  Astrono- 
mie  lunaire;  XI.  Astronomie  planétaire;  XR.  Tables  axtroniomiqueSf  époques  et 
éres\  XIR.  Aepeets,  levers,  couchers  des  astres  \  XIV.  Bésumé  historique  et 
bibliographique.  —  Si  grand  que  soit  le  nombre  des  renseignements  condensés 
sous  chacun  de  ces  titres,  l'exposition  est  aussi  nette  que  possible;  la  préci- 
sion lomineuse  du  style  y  satisfait  l'esprit,  comme  la  netteté  des  caractère) 


—  37«  — 

typographiques  et  la  beauté  du  papier  satisfont  les  yeux.  Chaque  colonne 
du  texte  repose  sur  une  base  solide  de  notes  serrées,  qui  fournissent  toutes 
les  indications  nécessaires  pour  vérifier,  approfondir  ou  compléter  les 
thèses  énoncées  par  l'auteur.  Le  nombre  de  ces  notes  s'élève  à  quatre  cent 
quinze  !  On  éprouve  un  sentiment  profond  d'admiration,  quand  on  considère 
les  trésors  de  science  renfermés  en  si  peu  d'espace.  —  H.  db  Yalboger. 

Un  manuscbtt  hébreu  de  916-917.  —  Parmi  les  dernières  acquisitions  de  la 
Bibliothèque  publique  de  Saint-Pétersbourg,  on  mentionne  un  manuscrit 
hébreu  datant  de  916-917.  Ce  manuscrit  est  important  surtout  à  cause  du 
système  de  ponctuation  dite  babylonnienne  qui  y  est  observée  et  qui  est 
plus  ancienne  que  celle  dont  on  se  sert  maintenant  et  qu'on  désigne  sous 
le  nom  de  hiérosolymitaine,  inventée  au  septième  siècle.  Aussi,  vu  l'impor- 
tance du  manuscrit,  l'administration  de  la  Bibliothèque  a-t-elle  résolu  d'en 
faire  une  reproduction  photolithographiée  et  elle  a  obtenu  du  Gouvernement 
un  subside  de  plus  de  9,000  roubles  argent  (environ  35,000  francs).  Outre  la 
reproduction  du  précieux  manuscrit,  on  imprimera  le  catalogue  de  tous  les 
textes  bibliques  que  la  Bibliothèque  avait  achetés,  en  1859,  aux  Firkovitch, 
leurs  anciens  propriétaires. 

Une  brochure  sur  les  États-Unis.  —  Nous  avons  sous  les  yeux  une  bro- 
chure de  M.  Alexandre  de  Rabanesse  (Les  anciens  États  confédérés  depuis  la 
guerre  de  sécession^  etclParis,  A.  Pougin,  1875,  in-8  de  31  p.),  pleine  de  ren- 
seignements, dont  les  hommes  politiques  pourront  faire  leur  profit.  On  se 
rappelle  l'enthousiasme  excité  au  sein  d'une  partie  du  public  français  par 
la  proclamation  du  président  Lincoln.  L'abolition  de  l'esclavage  y  était 
représentée  comme  le  but  principal  de  la  guerre  soutenue  contre  le  Sud. 
Nous  nous  plaisions  alors  à  nous  figurer  les  Américains  ilu  Nord  comme  des 
modèles  de  philanthropie  ardente  et  désintéressée,  mus  par  le  désir  exclusif 
de  rendre  à  la  liberté  et  &  la  dignité  de  citoyens  trois  ou  cpiatre  millions  de 
leurs  frères,  jadis  importés  d'Afrique.  L'on  s'empressait  de  présager  un 
brillant  avenir  de  paix  et  de  prospérité  &  cette  grande  Républiqpie  d'outre- 
mer, enfin  guérie  de  la  plaie  qui,  seule,  empê(^ait  la  concorde  de  se  réta- 
blir entre  le  Sud  et  le  Nord.  L'intéressante  brochure  de  M.  de  Rabanesse 
prouve  assez  combien  il  y  a  à  rabattre  d'une  espérance  trop  légèrement 
conçue,  et  son  témoignage  acquiert  une  gravité  toute  particulière  de  ce 
fait,'qu'il  a  longtemps  séjourné  dans  le  pays  dont  il  parle,  et  qu'il  a  pu 
constater  chaque  chose  de  visu. 

Le  tableau  qu'il  nous  trace  de  la  situation  des  anciens  États  confédérés 
est  bien  triste.  La  main  du  vainqueur  s'est  appesantie  sur  eux,  et  leur  sort 
se  trouve  à  peu  près  entièrement  remis  entre  les  mains  de  ces  PolUicians 
connus  sous  le  nom  de  Carpei  Baggers.  Ils  exploitent,  à  leur  profit,  les  pré- 
jugés des  gens  de  couleur  contre  ceux  qui  furent  leurs  maîtres,  et  se 
servent  trop  souvent  des  fonctions  qui  leur  sont  confiées  pour  satisfaire  leurs 
intérêts  personnels.  On  juge  en  quel  état  se  trouvent  les  finances  de  ces 
malheureux  États.  Au  prix  des  plus  persévérants  efforts,  les  anciens  plan- 
teurs parviennent  difficilement  à  conjurer  la  ruine  dont  ils  sont  menacés. 
Quelques-uns  commencent  à  chercher,  dans  l'industrie,  des  ressources  qne 
l'agriculture  a  cessé  de  leur  fournir.  L'introduction  des  coolies  chinois 
parait  effectivement  n'avoir  point  produit  les  résultats  que  l'on  en  attendait, 
et  l'introduction  de  cultivateurs  européens  sera  nécessaire  pour  suppléer  à 
la  nonchalance  des  nègres  affranchis.  Ces  derniers,  ayant  d'ordinaire  peu 
de  besoins  à  satisfaire,  préfèrent  la  pauvreté  au  travail,  et,  pour  eux,  la 
liberté,  c'est  le  droit  de  ne  rien  faire.  Quoi  qu'il  en  soit^  on  ne  saurait 


—  3T7  J- 

nier  qne  les  'procédés  dont  use  le  Nord,  yis-à-vis  des  États  yaincns  ne 
soient  de  nature  à  susciter  de  graves  difficultés  pour  plus  tard.  L'avenir  do 
rUnion  et  celui  même  de  la  liberté  politique  en  Amérique  sont  intéressés  à 
la  prompte  suppression  de  tels  abus.  —H.  de  Gh. 

Uns  imprimbrib  ▲  Boulak.  —  Le  Mobaeher  donne,  d*aprés  une  correspon- 
dance qui  lui  est  adressée  du  Caire,  les  détails  qui  suivent  sur  l'imprimerie 
khédi?ienne  de  Boulàk  : 

L'imprimerie  de  Boulak  est  le  premier  établissement  de  ce  genre  qui  ait 
été  fondé  en  Orient.  Sa  création  remonte  à  Tannée  1245  (1829-1830)  ;  elle 
est  due  au  kbédive  El-Hadj  Mohammed  Ali.  Des  hommes  éminents  en  ont  eu 
successivement  la  direction  ;  nous  citerons  entre  autres  :  Ali  Afendi  Djoudet 
et  Abd  Er  Rahmane  Bej  Rachdi.  Un  homme  vraiment  remarquable  par  son 
savoir  et  ses  qualités  aimables,  Hossaine  Bey  Hassani,  est  aujourd'hui  placé 
à  la  tête  de  cet  établissement.  En  1287  (1870-1871),  S.  A.  le  prince  régnant, 
Ismail,  apprenant  le  zèle  et  l'intelligence  apportés  par  Hossaine  Bey  dans 
l'administration  de  l'imprimerie  de  Boulak,  le  chargea  également  de  la  ges- 
tion de  l'usine  à  papier. 

Le  papier  qui  sort  de  la  fabrique  est  fort  beau.  Le  Caire  peut  main- 
tenant se  passer  des  produits  étrangers.  Les  contrées  voisines  y  font  leurs 
commandes.  Cette  usine  est  contiguê  à  l'imprimerie  ;  elle  est  située  sur  les 
bords  du  Nil.  Le  nombre  des  employés,  dans  ces  deux  établissements,  est 
de  300.  L'imprimerie  livre  des  ouvrages  en  langues  arabe,  turque,  persane, 
française,  anglaise,  etc.  Les  Nouvelles  égyptiennes  s'y  impriment,  ainsi  que 
les  calendriers,  les  timbres-poste,  les  billets  d'embarquement^  les  arrêtés  du 
gouvernement.  Le  directeur  de  l'imprimerie  a  engagé  son  mandataire^ 
Mohammed-Afendi  Hassani,  k  suivre  les  cours  de  chimie  et  de  physique  de 
l'école  de  médecine,  pour  y  étudier  ce  qui  concerne  la  fabrication  du  papier. 
De  Paris,  on  envoie  des  livres  k  imprimer  en  langue  persane.  On  y  compose 
également  des  ouvrages  en  caractères  moghrebins.  On  s'y  occupe  en  ce 
moment  d'une  édition  de  Sidi-Khelil.  (Journal  officiel.) 

D(7  ROLE  DÉCORATIF  DE  LA  PEINTURE  EN  mosaIque.  —  M.  Ed.  Didrou  voudrait 
remettre  en  honneur  un  procédé  de  décoration  dont  les  anciens,  puis  les 
artistes  de  Byzance  et  les  Carolingiens  tirèrent  un  merveilleux  parti.  En 
France,  la  mosaïque  est  aujourd'hui,  et  depuis  longtemps,  délaissée  pour  la 
peinture,  qui  ne  présente  pas  la  même  solidité  et  produit  des  effets  tout  dif- 
férents, beaucoup  moins  heureux  au  point  de  vue  purement  décoratif. 
M.  Garnier  l'a  employée  dans  la  décoration  de  l'avant-foyer  de  l'Opéra,  mais 
M .  Didron  désirerait  la  voir  appliquer  à  nos  édifices  religieux,  à  ceux  sur- 
tout qui,  comme  l'église  du  Vœu  national,  témoignent  de  larges  emprunts  à 
l'architecture  byzantine.  La  brochure  qu'il  vient  de  publier  sous  le  titre 
transcrit  pi  as  haut,  est  très-intéressante,  accompagnée  de  planches  curieuses, 
retraçant  à  grands  traits  l'histoire  de  la  mosaïque,  exposant  ses  procédés  et 
ses  ressources.  L'idée  du  savant  archéologue  mérite  l'attention  des  anti- 
quaires et  des  artistes.  —  J.-M.  R. 

Le  Protontologismb.  —  Nous  avons  consacré,  en  avril  dernier  (PolybûAiùn^ 
t  Xin,  p.  307),  AUX  Éléments  de  phHùSophie  àB  M.  Ant.  Caneva,  prêtre  de 
Plaisance,  un  article  qu'une  revue  italienne  a  déclaré  écrit  dans  un  sens 
plus  que  catholique.  Nous  croyons  avoir  été  simplement  exact  et  impartial; 
mais  se  déclarer  nettement  contre  le  positivisme  et  l'hégélianisme,  c'est  un 
excès  intolérable  au  jugement  des  témoins  intéressés.  Quoi  qu'il  en  soit, 
on  peut  se  souvenir  que  ce  principe  :  Dieu  est  le  premier  inieUigible  et  le 


-  378  — 

premier  eaiendu  (inteso),  est  la  base  du  système  firotoiMùgiquê  de  M.  Ant. 
Ganeya.  Nous  lisons  cette  désignation  an  peu  étrange  à  la  page  24  d^one 
brodiure  du  même  autenr  (IntelUtto  e  ienso  in  orâim  aUa  natwra  ed  origine 
délie  idée,  poche  pagine  in  agginnta  al  2*  Tolnme  de'  snoi  Mlementi  di  fUo^ 
sofa.  Piacenza,  tipogr.  A.  del  Majno,  1873,  39  p.  in-12).  Cette  petite  publi- 
cation, bonne  à  consulter  pour  ceux  qui  yeulent  aToir  une  idée  juste  de  la 
doctrine  de  M.  Ganeva,  renferme  d*abord  un  résumé  de  sa  théorie  de 
l'origine  des  idées,  puis  des  réponses  aux  objections  qu'on  lui  a  opposées 
de  divers  côtés.  Ce  qui  nous  firappe  dans  cette  discussion,  où  nous  ne 
devons  pas  entrer,  c*est  que  M.  Caneva,  tout  en  ayant  pour  adversaires 
déterminés  les  nouveaux  pérîpatéticiens,  s'appuie  toujours  sur  les  docteurs 
scolastiques.  —  Léonce  Couture. 

Un  petit  anachronisme  de  M.  Meissonier.  —  M.  Meissonier,  parlant  au  nom 
de  rAcadémie  des  beaux-arts  de  l'Institut  de  France,  le  jour  de  l'inaugura- 
tion du  monument  de  Michel-Ange,  à  Florence,  s'est  exprimé  ainsi  :  «  De 
cette  belle  Italie,  cette  terre  des  arts,  tu  es  conmie  le  jardin,  heureuse 
Florence  I  Tu  n'es  pas  seulement  la  ville  des  plus  belles  fleurs  de  la  nature, 
tu  es  la  ville  des  plus  belles  fleurs  de  l'esprit  humain  I  Tu  es  la  ville  de  la 
renaissance  des  lettres,  des  sciences  et  des  arts  I  Je  ne  puis  nommer  tous  tes 
fils;  tu  as  eu  Oante,  Pétrarque,  et  avant  Galilée...  »  Quoi  donc?  Galilée,  qui 
est  de  la  seconde  moitié  du  seizième  siècle  et  de  la  première  moitié  du  dix« 
septième,  amnt  Dante^  mort  au  commencement  du  xiv*  siècle  (1321),  avant 
Pétrarque,  mort  avant  la  fin  de  ce  même  xiv«  siècle  (1374)  I  —  T.  os  L. 

Etat  des  Bibliothèques  de  Paris.  -^  Conformément  à  une  récente  circa* 
laire  de  M.  le  Ministre  de  l'instruction  publique,  les  administrations  des 
diverses  bibliothèques  de  Paris  ont  dressé  une  liste  exacte  des  volumes  de 
ces  établissements.  En  voici  les  chiffres  :  Bibliothèque  de  l'Arsenal,  200,000 
volumes,  8,000  manuscrits  ;  *->  Bibliothèque  de  la  Sorbonne,  80,000  volumes  ; 

—  Bibliothèque  de  l'École  de  médecine,  35,000;  — <  Bibliothèque  natio- 
nale, 1,700,000  volumes  imprimés,  80,000  manuscrits,  1,000,000  d'estampes; 
cartes  et  gravures  120,000  médailles;  ~  Bibliothèque  Mazarine,  200,000 
volumes,  4,000  manuscrits,  80  modèles  exécutés  en  relief  et  représentant 
des  monuments  pélasgiques  de  l'Italie,  de  la  Grèce  et  de  l'Asie-Mineure  ; 

—  Bibliothèque  Sainte-Geneviève,  160,000  volumes  imprimés,  350,000  ma- 
nuscrits; •—  Total  :  2,375,000  volumes,  442,000  manuscrits  et  1,120,000 
estampes,  médailles,  etc. 

—  Les  journaux  anglais.  -•  Le  Journal  officiel  a  publié,  d'après  oa 
ouvrage  anglais  intitulé  :  History  of  AdverOsing  from  the  earliest  Hmi$,  un 
intéressant  article  sur  l'origine  de  l'annonce,  son  apparition  en  Angleterre 
et  les  premiers  journaux  anglais  ;  nous  lui  empruntons  quelques  détails. 

Le  premier  essai  de  la  création  d'un  journal  en  Angleterre  date  de  1642,à 
l'origine  de  la  guerre  civile.  Le  public  était,  à  cette  époque,  extrêmement 
avide  de  nouvelles.  Un  libraire-gazettier  résolut  de  publier  un  journal  hebdo- 
madaire sur  le  modèle  des  gazettes  vénitiennes  qui  circulaient  alors  manus- 
crites. Après  deux  ou  trois  essais  timides,  il  poussa  la  hardiesse  jusqu'à  se 
lancer  dans  une  annonce  assez  longue  ;  mais,  comme  toutes  les  idées  nou- 
velles, sa  témérité  ne  rencontra  que  de  l'indifférence,  puis  de  l'opposition. 
Le  monde  des  lettres  ne  lui  ménagea  point  l'invective.  La  première  annonce 
anglaise  connue  parut  dans  le  MercuriUM  politicus,  janvier  1652  ;  c'était  l'an- 
nonce d'un  poème  héroïque,  vendu  par  John  Holden,  dans  le  New  Excbange, 
à  Londres,  et  imprimé  par  Th.  Newcourt. 


—  379  - 

Quelques  années  après  (1657)«  parut  un  autre  îDeékly^  ou  journal  hebdoma- 
daire, le  Public  Advertiser^  dont  le  premier  numéro  porte  la  date  des  19  et  26 
mai,  imprimé  pour  Newcombe,  dans  Thames  street.  Cette  feuille  se  compo- 
sait presque  uniquement  d'annonces;  on  y  signalait  l'arrivée  et  le  départ 
des  navires,  Tapparition  prochaine  de  tel  ou  tel  livre  sous  presse,  etc.  Ce 
genre  de  publication  alla  se  multipliant;  la  plupart  des  feuilles  de  cette 
époque  contiennent  des  annonces  relatives  aux  apprentis  enfuis  de  chez 
leurs  maîtres,  aux  petits  décrotteurs,  aux  foires  qui  ont  lieu,  aux  combats 
de  coqs,  aux  vols  avec  effraction  ou  sur  les  grands  chemins,  aux  chevaux 
volés,  aux  chiens  perdus,  au  départ  des  coches  pour  la  province,  coches 
qui  quelquefois,  chose  inouïe  1  se  hasardaient  jusqu'à  Edimbourg. 

En  i682,  un  certain  J.  Houghton,  apothicaire  et  en  même  temps  mar-> 
chand  de  thé,  café  et  chocolat,  fonda,  dans  la  ruelle  Bartholomée,  un 
journal  qui  n'eut  pas  une  longue  existence,  mais  qui  reparut  plus  solide 
en  1692.  Doué  d'une  persévérance  infatigable,  d'un  grand  esprit  d'initiative 
et  de  beaucoup  d'industrie,  ce  personnage  habitua  ses  contemporains  à  un 
système  régulier  d'annonces.  A  cette  époque,  le  système  d'annonces  par 
la  voie  des  journaux  s'était  fort  développé,  grâce  surtout  à  la  London  Gazette^ 
la  seule  feuille  qui  existe  encore  aujourd'hui,  de  toutes  celles  qui  virent  le 
jour  vers  le  milieu  du  dix-septième  siècle. 

Au  commencement  du  dix-huitième,  il  était  déjà  parfaitement  reconnu 
que  le  meilleur  mode  de  publicité,  non-seulement  pour  le  commerce,  mais 
encore  pour  les  nouvelles  politiques,  pour  la  négociation  des  mariages,  pour 
la  chasse  à  la  fortune,  etc.  était  l'annonce  dans  les  journaux.  A  la  fin  du 
dix-huitième  siècle  et  au  commencement  du  dix-neuvième,  les  choses 
étaient  à  peu  près  comme  elles  sont  aujourd'hui,  où  les  journaux  quotidiens 
et  les  autres  périodiques  tirent  leur  principale  source  de  revenu  de  leur 
clientèle  d'annonces. 

Dans  cette  industrie,  le  Times  et  le  BaUy  Tekgraph  emportent  la  part  du 
lion.  —  Ce  fut,  comme  on  sait,  en  1786,  que  parut,  sous  le  titre  de  Daily 
Universal  Register,  le  journal  qui  devait  donner  tant  d'impulsion  au  journa- 
lisme littéraire,  ainsi  qu'aux  industries  matérielles  qui  s'y  rattachent.  Il  ne 
prit  le  titre  de  Times  qu'au  i®' janvier  1788.  Les  commencements  furent 
pénibles  ;  c'est  seulement  sous  le  second  de  ses  éditeurs  de  la  dynastie  des 
Walther,  qu'il  prit  son  essor.  Walther  H,  né  en  4784,  devint,en  1803,  le  seul 
propriétaire  et  éditeur  du  Times.  Dénoncé  pour  avoir  attaqué  l'administra- 
tion de  lord  Melville,  il  perdit  les  impressions  du  bureau  des  douanes  qui 
lui  avaient  été  confiées  jusque-là  ;  puis,  quand  vinrent  les  guerres  de  l'em- 
pire, où  le  besoin  de  nouvelles  était  si  impérieux  dans  le  public,  comme  on 
lui  retenait  à  la  poste  et  dans  les  ports  les  journaux  étrangers  qui  étaient 
au  contraire  distribués  sur  le  champ  à  ses  confîrères,  il  dut,  dans  cette  lutte 
pour  l'existence,  imaginer  des  moyens  plus  rapides  d'obtenir  les  informations 
et  les  nouvelles.  Pour  arriver  à  ce  but,  il  n'épargna  ni  les  soins  ni  l'argent. 

La  capitulation  de  Flessingue,  en  1809,  fut  connue  et  annoncée  par  lui, 
bien  avant,  on  dit  même  deux  jours  avant  que  le  gouvernement  n'en  eût 
connaissance.  De  là  l'origine  de  la  vogue  du  Times,  et,  par  suite,  le  développe- 
ment de  ses  colonnes  d'annonces.  Dans  l'histoire  dont  nous  parlons,  la 
recette  quotidienne  de  son  département  d'annonces  est  évaluée  à  un  millier 
de  livres  sterling  (25,000  francs)  par  jour.  Viendrait  ensuite  le  Telegraph, 
qui,  dans  un  seul  numéro  (décembre  1873),  a  eu  jusqu'à  1,441  annonces,  ce 
qui  fait  environ  500  livres  sterling  (12,500  francs).  D'après  la  même  autorité, 
que  nous  ne  garantissons  pas,  du  reste,  le  Standard  arriverait  bon  troisième  ; 


-  380  - 

le  Laily  News,  depuis  la  dernière  guerre,  aurait  beaucoup  étendu  son  cercle 
d'annonces. 

Quand  anMoming  Advertiser,  il  a  une  clientèle  particulière  ;  intermédiaire 
précieux  pour  le  commerce,  il  s'adresse  surtout  à  la  classe  des  débitants 
patentés,  les  licensedviciuaUers]  tout  ce  qui  tient  à  la  distillerie,  à  la  bras- 
serie, aux  tavernes,  est  de  son  ressort.  Le  Moming  Post  a,  sous  le  rapport  de 
Tannonce,  beaucoup  d'analogie  avec  le  précédent  :  il  s'attache  à  une  clien- 
tèle spéciale. 

Journaux  périodiques  aux  États-Unis  et  au  Canada.  —  Aux  États-Unis  et 
au  Canada,  il  se  publie  actuellement,  selon  VAlmanack  des  adresses  pour  la 
presse  périodique,  par  Rowell,  8,348  journaux  et  revues  périodiques.  Les 
journaux  publiés  en  langue  française,  aux  États-Unis,  sont  au  nombre  de  23  ; 
ceux  du  Canada,  au  nombre  de  32.  En  langue  Scandinave,  il  parait,  aux 
États-Unis,  26  journaux;  en  espagnol,  23;  en  hollandais,  8  ;  en  italien,  i.  En 
langue  allemande,  il  s'en  publie,  aux  États-Unis,  338,  et  au  Canada,  9.  Les 
feuilles  du  dimanche  (Sùnntagsblœter)  ne  sont  pas  comprises  dans  ce  nombre. 
L'État  de  Pensylvanie  ne  possède  pas  moins  de  59  journaux  allemands  ; 
vient  ensuite  l'État  de  New  York,  avec  51  ;  il  parait  chaque  jour  5  journaux 
allemands  dans  la  ville  de  New  York,  autant  à  Saint-Louis,  autant  à  Mil- 
waukie  ;  il  en  parait  4  quotidiens  à  Philadelphie  et  à  Buffalo  ;  3  à  Chicago, 
à  Détroit,  &  Cincinnati,  etc.;  2  quotidiens  à  San  Francisco,  Indianopolis, 
Baltimore,  Richmond,  etc.;  1  quotidien  à  Washington,  à  la  Nouvelle- 
Orléans,  à  Kansas  City,  etc.  Tous  les  autres  journaux  et  revues  périodiques, 
au  nombre  de  7|850,  se  publient  dans  la  langue  anglaise. 

Production  littéraire  en  Russie.—  Du  20  juillet  au  30  août,  il  a  été  publié, 
en  Russie,  277  livres  et  brochures.  Le  comité  de  la  censure  étrangère  a  exa- 
miné, dans  le  courant  de  juillet,  207  publications  allemandes,  124  françaises, 
26  anglaises,  20  polonaises,  10  italiennes  et  2  serbes.  Ont  été  prohibées  : 
7  publications  allemandes,  4  françaises,  4  polonaises  et  1  italienne.  Ont  été 
autorisées  avec  des  restrictions:  17  publications  allemandes^  11  françaises, 
3  anglaises  et  2  polonaises.  (Indicateur  de  la  presse.) 

Exposition  de  la  Presse  en  Amérique.  —  Une  annexe  du  palais  de  l'expo- 
sition  à  Philadelphie  est  destinée  à  recevoir  l'exposition  du  journalisme 
américain.  On  y  verra  l'histoire  aussi  complète  que  possible  de  la  presse  aux 
États-Unis.  La  première  gazette,  la  May  Flower,  parut  en  1673  ;  la  seconde, 
le  Boston  News  Letter,  en  1704  ;  la  troisième,  la  Boston  Gazette,  en  1720.  En 
1775,  il  y  avait  aux  colonies  27  journaux  ;  en  1776,  avant  la  révolution,  40. 
Mais  en  1850,  on  en  compte  2,526,  tirant  à  426,409,000  exemplaires  ;  en  1860, 
4,051,  tirant  à  928,000,000  ;  en  1870,  5,871,  tirant  à  1,500,000,000. 

Une  lettre  inédite  de  La  Bruyère.  —  Nous  avons  annoncé  ici  même,  il  y 
a  quelque  temps,  l'heureuse  trouvaille  de  M.  Ulysse  Robert.  Nous  annonçons 
aujourd'hui  une  nouvelle  édition  de  la  curieuse  lettre  de  l'auteur  des  Cœrae^ 
téres.  La  première  édition  était  formée  de  quatre  pages  extraites  de  la 
Bibliothèque  de  l'École  des  chartes.  «La  présente  édition,  véritable  bijou  typo- 
graphique qui  fait  honneur  aux  presses  de  Bluzet-Guinier  (à  D61e),  se  com- 
pose de  seize  pages  et  se  vend  chez  H.  Champion  (1  franc).  Les  plus  zélés 
amis  de  La  Bruyère  voudront  posséder  cette  plaquette,  non-seulement  parce 
qu'elle  a  été  imprimée  avec  un  soin  exquis  et  à  un  petit  nombre  d'exem- 
plaires, mais  encore  parce  que  le  savant  éditeur  y  a  joint  de  nouvelles  notes 
qui  sont  pleines  d'intérêt.  —  T.  de  L. 


—  381  - 

-*  On  annonce  le  catalogue,  publié  à  Arnhem,  des  œnyres  de  Jacobus 
Houbraken,  illustre  graveur  hollandais  du  dix-huitième  siècle,  dont  il  a  été 
dit  «  que  jamais  grayeur  ne  régalera,  probablement,  dans  sa  manière  d*imiter 
par  le  burin  les  chairs  et  les  couleurs.  » 

—  Le  Marchand  de  Venise^  de  Shakespeare,  a  été  récemment  traduit  en 
tamil,  par  un  indien,  élève  de  l'université  de  Madras,  qui  doit  faire  paraître, 
pour  la  fin  de  Tannée,  une  traduction  du  même  ouvrage  en  sanscrit. 

—  Le  czar  a  accordé  25,000  roubles  pour  la  fondation  de  Funiversité  sibé- 
rienne, dont  le  siège  serait  à  Tomsk.  La  première  pensée  de  cette  création 
est  due  au  général  Kasnakow,  inspecteur  de  cette  vaste  contrée,  qui  a  pu 
s'assurer  par  ses  yeux  de  l'absence  presque  totale  de  culture  intellectuelle 
en  Sibérie. 

—  Le  second  volume  de  la  traduction  anglaise  des  (Euores  dramatiqves  de 
Molière,  par  M.  Van  Laun,  vient  de  paraître  &  Edimbourg.  Il  est  orné  de  six 
gravures  de  Lalauze. 

—  Un  auteur  belge,  M.  Paul  Frédéricq,  vient  de  faire  paraître,  à  Gand,  un 
remarquable  ouvrage  d'histoire,  sous  le  titre  de  Essai  sur  le  rôle  politique  et 
social  des  ducs  de  Bourgogne  dans  les  Pays-Bas. 

— >  La  collection  des  historiens  d'Ecosse,  qui  se  publie  à  Edimbourg,  est 
arrivée  à  son  cinquième  volume,  qui  renferme  les  vies  de  saint  Ninian,  pre- 
mier évéque  d'Ecosse,  au  quatrième  siècle,  et  de  saint  Kentigem,  son  succes- 
seur. Ces  deux  vies,  si  intéressantes  pour  l'histoire  religieuse  et  politique 
du  pays,  ont  été  publiées  d'après  les  meilleurs  manuscrits  des  bibliothèques 
de  la  Grande-Bretagne . 

—  M.  Smith,  le  savant  archéologue,  auteur  d'un  ouvrage  qui  va  paraître 
sous  le  titre  de  Chaldean  account  of  Genesis,  vient  de  partir  pour  TOrient,  afln 
de  reprendre  ses  fouilles  sur  l'emplacement  de  Ninive. 

—  VAthenœum  annonce  que  de  nouvelles  découvertes  de  curieux  manuscrits 
en  langue  sanscrite  ont  été  faites  dans  l'Inde  par  les  savants  chargés  ofQcielle- 
ment  de  rechercher  et  d'examiner  les  collections  qui  existent  dans  cette 
contrée.  Des  textes,  jusqu'ici  inconnus,  des  onzième  et  douzième  siècles  de 
notre  ère,  ont  été  soigneusement  copiés.  Le  catalogue  en  sera  publié,  en 
attendant  l'impression  des  principaux  ouvrages. 

—  L'imprimerie  de  l'université  d'Oxford  vient  de  mettre  au  jour  la  plus 
petite  miniature  de  Bible  qui  ait  encore  été  exécutée.  Elle  mesure 
4  pouces  1/2  sur  2  pouces  3/4,  avec  1/2  pouce  d'épaisseur,  et  pèse,  avec  sa 
reliure  de  maroquin,  moins  de  3  onces  1/2  d'Angleterre.  Elle  est  tirée  sur 
un  papier  de  l'Inde  d'une  extrême  ténuité  et  d'une  opacité  parfaite  dans 
sa  Onesse  ;  elle  est  imprimée  en  caractères  lisibles  pour  une  vue  ordinaire. 

—  L'Union  centrale  des  beaux-arts  appliqués  à  l'industrie  vient  d'ouvrir, 
dans  une  de  ses  galeries,  place  Royale,  3,  une  exposition  intéressante, 
qui  se  compose  :  1<^  de  160  dessins  originaux  des  maîtres  lyonnais  du  siècle 
dernier,  ayant  Bony  à  leur  tête  ;  ces  dessins  représentent  des  habits  et  gilets 
de  cour  et  de  ville,  des  robes  époque  Louis  XVI  ;  2*  de  26  dessins  originaux, 
exécutés  à  la  plume  par  Adam  (oiseaux),  dix-huitième  siècle  ;  3<*  de  18  des- 
sins de  Delafosse,  Delalonde,  Ranson,  J.  J.  Lequien,  Nollet;  4^  de  447  com- 
positions originales  exécutées  depuis  nombre  d'années,  dans  l'atelier  de 
M.  Guichard,  par  lui  et  par  des  artistes  bien  connus  dans  l'industrie  du  tapis 
et  des  tentures,  des  soieries  et  des  mousselines,  des  papiers  peints,  de  Fébé- 
nisterie,  des  bronzes,  etc.;  5<>  de  5,859  échantillons  de  rubans  de  soie  de 
Saint-Étienne,  de  robes  et  gilets  de  soie  et  velours,  de  passementeries  en 
soie  paille,  crin  et  laine,  et  enfin,  6«,  de  80  échantillons  de  soieries  anciennes 
d'une  remarquable  beauté. 


—  382  — 

—  Un  très-eurienx  manuscrit  vient  d'être  apporté  à  Psm  par  un  moine 
italien,  le  P.  Matteoli.  De  ce  manuscrit,  il  résulterait  que  Gutenberg,  Tin- 
Tenteur  de  Timprimerie,  a  été  poursuivi  à  Mayence  pour  assassinat  d'an  de 
ses  oncles,  en  1422,  et  acquitté  après  une  assez  longue  détention.  Aucune 
des  biographies  de  Gutenberg  n'avait  mentionné  cette  étrange  particularité. 

—  n  vient  de  paraître  chez  l'éditeur  Féchoz  (5,  rue  des  Saints-Pères),  un 
Tableau  généalogique  de  la  maison  de  Bourbon,  depuis  Henri  IV.  On  y  em- 
brasse d'un  seul  coup  d'œil  la  filiation  des  diverses  branches  qui  ont  donné 
des  souverains  à  la  France,  à  l'Espagne, aux  Deux-Siciles  et  à  Parme.  L'auteur 
accompagne  son  œuvre  d'observations  sur  le  blason  de  France,  sur  le  coq 
gaulois  et  sur  l'orthographe  du  mot  Henry.  H  signale  les  bévues  des  révolu- 
tionnaires qui,  en  effaçant  de  nos  monuments  les  fleurs  de  Ijs,  ne  se  dou- 
taient pas  que,  les  blasons  féodaux  étant  attachés  à  la  terre  et  non  aux  per- 
sonnes, c'est  l'emblème  de  la  France  elle-même  qu'ils  s'acharnaient  à 
détruire.  —  A.  H.  dk  V. 

—  Le  R.  P.  Tondini,  connu  par  ses  savants  travaux  sur  l'église  russe  et 
la  question  religieuse  en  Russie,  vient  de  faire  paraître,  en  Angleterre,  un 
remarquable  opuscule,  dont  nous  entretiendrons  prochainement  nos  lec- 
teurs ;  il  est  intitulé  AngHcanism,  Old  Catholicism  and  the  Union  of  ike 
Christian  Episcopal  Churches  (London,  Pikering;  Paris,  Lib.  de  la  Société 
bibliographique,  in-8  de  64  p.). 

—  Nous  devons  rectifier  une  erreur  typographique  qui  s'est  produite 
dans  notre  livraison  d'août,  relativement  au  nom  de  l'auteur  de  la  bro- 
chure Les  Baux  en  Provence  :  il  faut  lire  Camman  et  non  Common. 

—  Une  autre  erreur  s'est  produite  dans  la  même  livraison  (p.  143),  le 
R.  P.  Latour  est  auteur  d'un  recueil  intitulé  non  le  Pasteur  mais  le  Parterre 
de  la  sainte  enfance. 

—  La  librairie  H.  Georg,  de  Lyon,  vient  de  faire  paraître  un  important 
ouvrage  sur  les  Archives  de  Lyon,  municipales,  départementales,  judiciaires 
hospitaiOres  et  notariales,  dû  à  la  plume  expérimentée  de  M.  Léopold  Niepce, 
président  de  la  société  littéraire,  conseiller  à  la  cour  de  Lyon.  H  a  été  tiré 
à  200  exemplaires,  et  forme  un  fort  volume  grand  in-8,  du  prix  de  20  francs. 

Publications  nouvelles.  —  Essai  thorique  de  Droit  naturel,  par  le  R.  P. 
Taparelli  d'Azeglio,  2«  édition  (2  vol.  gr.  in-8.  Tournai,  V«  H.  Casterman). 

—  Catéchisme  poUtique  à  Fusage  des  Français,  par  un  homme  d'État  (in-8, 
Blond  et  Bassal).  —  La  Création  et  Vœuvre  des  six  jours,  par  J.  J.  D.  Swolfs 
(in-12,  Bruxelles,  Closson).  —  Les  Harmonies  du  culte  de  la  trés-sainte  Vierge 
et  la  Virginité,  par  l'abbé  Aug.  Riche,  3«  édit  (in-18.  Pion).  —  Je  savais  bien  que 
cela  me  porterait  bonheur,  par  l'abbé  Aug.  Riche  (gr.  in-8,  Pion).  —  Nos  maux 
et  leurs  remèdes,  par  l'abbé  Edm.  de  Cazalès  (in-12,  Douniol).  —  Histoire  du 
régne  de  Louis  XIV,  par  M.  G.  Guillardin,  t.  V  (in-8,  Lecoffre).  —  Mémoires  du 
duc  de  Saint-Simon,  t.  XIX  (in-18.  Hachette).  —  La  Flandre  pendant  les  trois 
derniers  siècles,  par  le  baron  Kervyn  de  Lettenhove  (in-8,  Bruges,  Beyaert- 
Defoort).  —  Jïfémotres  d'Odilon  Barrot,  t.  II.  ^  La  Prusse  et  la  France  devant 
VHistoire;  Essai  sur  les  conséquences  de  la  guerre,  seconde  partie  (in-8,  Amyot), 

—  V Herzégovine,  par  R.  de  Saint-Marc  (gr.  in-8,  Baer).  —  J.  Crétineau-Joly. 
Sa  vie  politique,  religieuse  et  littéraire,  d'après  ses  mémoires^  sa  correspondance 
et  autres  documents  inédits,  par  M.  Tabbé  U.  Maynard  (in-8,  Bray  et  Retaux). 
Monseigneur  Miecislas  Halka,  comte  Ledochowski,  cardinal-archevêque  de  Gne- 
sen  et  Posen  (gr.  in-8,  Bray  et  Retaux).  —  Dictionnaire  historique  de  randen 
langage  français,  par  La  Curne  de  SaintrPalaye,  fasc.  10  et  U  (in-4,  Chapa- 
ionp).  —  Trésor  étymologique  ou  Étude  sur  les  mots  français,  par  Th.  Lepeiit 


—  383  — 

(in-12,  Lihr.  de  VÉchùd»  Ai Sùrlmne).  —  DUimnaire  analytique etétymohgique 
des  idiomes  méridiomux^  parL.  Boucarais,  fasc.  1  à  16,  (Nîmes,  Baldy-Rlffard). 

—  Guide  de  Vart  chrétien,  par  le  comte  Grimouard  de  Saint-Lam'ent,  t.  VI  et 
dernier  (Oudin  et  Didron).  —  Les  Principaux  chants  liturgiques  (in-12,  Ad.  Le 
Clere].  —  Le  Brigandage  en  Italie  depuis  les  temps  les  plus  reculés  jusqu'à  nos 
jourSf  par  Armand  Dubarry  (in-lS  j . ,  Pion).  —  Ristoùre  de  Vorigine  des  inven- 
lions,  des  découvertes  et  instiMions  humaines,  par  D.  Ramée  (in-8  raisin, 
Pion).  —  Vantadono,  par  M™  d'Arvor  (in-12,  Tolra).  —  Maître  Olivier^  par 
Ch.  Dubois  (in-12,  Le  Clere).  —  Contes  du  printemps,  par  E.  Richebourg 
(3  vol.  in-18,  Pion).  —  Contes  d'été,  par  E.  Richebom*g  (3  vol.  in-lS,  Pion).  — 
Le  Bire  dans  la  vie  et  dans  tort,  par  V.  Courdaveaux  {in-12,  Didier).  —  Dic- 
tionnaire de  la  santé,  par  le  Dr  Fonssagriyes,  4*  fasc.  (gr.  in-8,  Delagrave). 
•--Le Phylloxéra,  histoire  de  la  nouvelle  maladie  de  la  vigne,  par  C.  Ladrey  (in-18, 
Savy).  —  Notice  sur  le  Phylloxéra  vastatrix,  histoire  de  son  origine,  son  mode  de 
propagation,  moyens  curatifs  proposés,  par  Pierre  Tochon  (gr.  in-8,  Chambéry). 

—  Notice  des  tableaux,  dessùis,  estampes,  lithographies,  photographies  et  sculp^ 
tures  exposés  dans  les  salles  du  Musée  de  rhôtel  de  vilU  d'Aulun,  par  Hérold  de 
Fontenay  (in-8,  Autun).  —  Le  Jeune  Ouvrier  chrétien,  par  Mgr  de  Ségur  (in-18, 
Tolra).  —  Oh  Maariage  dans  le  monde,  par  Octave  Feuillet  (gr.  in-18>  Michel 
L6vy).  ViSENOT. 


QUESTIONS  ET  RÉPONSES. 


QUESTIONS. 

Sur  un  priétendu  mot  de 
Henri  IV.  —  On  a  prêté  au  Béar- 
nais beaucoup  de  mots  spirituels 
qu'il  n'a  jamais  eu  l'occasion  de  pro- 
noncer; mais,  en  revanche,  combien 
de  sottises  lui  sont  attribuées  dans  les 
recueils  d'anecdotes  1  Telle  est  celle- 
ci,  qui  traîne  dans  un  si  grand  nom- 
bre de  livres,  et  qui  aurait  été  à 
l'adresse  d'un  ambassadeur  d'Espa- 
gne trop  rodomont  :  «  S'il  me  pre- 
nait envie  de  monter  à  cheval,  j'irais 
avec  mon  armée  d^euner  à  Milan, 
entendre  la  messe  à  Rome  et  diner  à 
Naples.  »  Je  demande  &  tout  homme 
de  bon  sens  si  un  pareil  propos  a 

I'amais  pu  être  tenu  par  notre  Henri 
V.  C'eût  été  vouloir  aller  au-devant 
de  cette  piquante  répartie  :  «  De  ce 
train-là,  Votre  Majesté  pourrait  bien 
arriver  pour  Vêpres  en  Sicile.  »  Il  est 
bien  évident  que  la  bravade  mise  si 
ridiculement  dans  la  fine  bouche  du 
yainçieur  d'Arqués  et  d'Ivry  a  été 
imag|inée  tout  e]q)rès  pour  amener 
la   riposte  de  l'ambassadeur  espa- 


^ol.  Je  voudrais  savoir  quel  est  le 
livre  où,  adressant  à  Henri  IV  une 
double  injure,  on  lui  a,  pour  la  pre- 
mière fois,  fait  dire  ce  qu'il  n'a  ja- 
mais dit,  et  fait  entendre  ce  qu'il  n'a 
jamais  entendu.  T.  de  L. 

Une  blstolre  manuscrite 
delà  IV*  croisade.— Du  Gange 
(Hist.  du  chef  de  saint  Jean),  et  le  P. 
Ignace  (Hist,  des  comtes  de  Ponthieu) 
citent  une  Histoire  manuscrite  de  la 
IV^  Croisade  par  François  Rose,  d'A- 
miens. Pourrait-on  donner  quelque 
renseignement  sur  le  sort  de  ce  ma- 
nuscrit, ou  tout  au  moins  sur  l'épo- 
que à  laquelle  écrivait  l'auteur  ? 

R. 

de  «loumal  de  Malus.  —  Un 

physicien  des  plus  distin^és,  E.  L. 
Malus,  mort  en  1812,  avait  pris  part 
à  l'expédition  d'Egypte,  et  il  avait 
consigné  le  récit  des  faits  dont  il 
avait  été  témoin  dans  un  jfouma/  que, 
longtemps  après,  François  Arago  dé- 
couvrit dans  des  papiers  de  famille, 
et  dont  il  a  donné  quelques  extraits. 
Sait-on  ce  qu'est  devenu  ce  manus- 


—  384  — 


crit?  Il  pourrait  donner,  en  partie  dn 
moins,  lieu  à  une  publication  inté- 
ressante dans  quelque  recueil  con- 
sacré aux  sciences  historioues.  Les 
campagnes  d'Egypte  et  de  Syrie  sont 
une  des  portions  ]es  moins  connues 
des  annales  militaires  de  la  première 
république.  M.  E. 


RÉPONSES. 

Suser»  son  llea  de  nais- 
sance (XIV,  287).  —  Le  Folybibliofi 
adresse  à  ses  lecteurs  une  question 
sur  le  lieu  de  naissance  de  Sucer. 
Sans  entendre  donner  une  solution, 
j'indiquerai  à  Tauteur  de  la  question, 
comme  étant  à  consulter,  une  notice 
sur  Suffer  tranchant  la  question  en 
faveur  de  SaintrOmer,  dans  la  Biogra" 
phie  de  la  vUle  de  Saint-Omer,  par 
Piers  (Saint-Omer,  1835,  in.-8). 
M.  Henri  de  la  Plane,  dans  les  Abbés 
de  Saint'Bertin  {observations,  t.  I, 
p.  xv),  avoue  ne  rien  connaître  qui 

Êuisse  confirmer  ces  assertions.  — 
.  Menault  {Angervillej  p.  44),  le  dit 
né  à  Toury.  B.  de  T. 

Bannière»  des  corpora- 
tions d'arts  et  métiers  (XIV, 
288).—  Pour  ce  qni  concerne  la  Flan- 
dre, consulter  i)evignb:  Recherches 
historiques  sur  les  costumes  civils  et 
militaires  des  fHldes  et  corporations  de 
métiers,  Gand,  1847,  gr.  in-8  avec 
nombr.  planches.  —  Devigne  :  Mœurs 
et  vsages  des  corporations  de  métiers 
de  la  Belgique  et  au  nord  de  la  France, 
avec  pi.  (Gand,  1857).  —  Devigne  : 
Vade  mecum  du  peintre  ou  recueil  de 
costumes  du  moyen  âge  (2  vol.  in  fol). 
—  Devigne  et  de  Bustcher  :  Album  du 
cortège  historique  des  comtes  de  Flan- 
dre (Gand,  av.  pi.).  —  Devigne  et 
de  Bustcher  :  Album  des  chars  de  triomr 
phe  du  même  cortège  (Gand,  av.  pi.). 

Outre  cela,  on  peut  consulter: 
Ptckb  :  Recherches  sur  les  corporations 
(Mém.  cour,  par  l'Acad.  de  Bruxelles). 


— Wautbbs  :  Les  Oildes^  dans  les  Bul- 
letins de  VAcad.  royale  de  Belgique; 
-^  le  Messager  des  sciences  historiques, 
de  Belgique;  les  Annales  des  anti- 
quaires de  la  Morinie  et  celles  de  la 
Société  royale  des  beaux-arts  de 
Gand.  —  Hutttens:  Recherches  sur  les 
corporations  et  archives.  —  Quelques- 
uns  de  mes  fascicules  des  Souvenùrs 
archéologi^fues  de  laviUe  deGand^  et 
encore  bien  d'autres  publications 
dont,  au  besoin,  il  serait  facile  de 
fournir  la  liste. 

Emile  Varsnbergh. 

—  L'ouvrage  de  M.  Demay,  sur  les 
Sceaux  de  Flandre  fournira  d'utiles 
indications,  car  le  sceau  et  la  ban- 
nière des  corporations  représentaient 
presque  toujours  le  même  sujet.  — 
Pour  le  même  motif,  voir  V Armoriai 
manuscrit  de  d'Hozier  (Biblioth.  nat); 
la  plupart  des  corporations  durent, 
comme  les  nobles,  gens  d'église  et 
bourgeois  notables,  faire  enregistrer 
leurs  armoiries  à  la  fin  du  dix-hui- 
tième siècle.  —  Les  archives  commu- 
nales des  départements  du  Nord  et 
du  Pas-de-Calais  sont  généralement 
riches  en  documents  sur  les  corpo- 
rations. S.  M.  R. 

ealnt-André  des  A^rts  pOV 

288).  —  En  écrivant  Saint-André  des 
Arts,  Vai  suivi  purement  et  simple- 
ment l'orthoffraphe  adoptée  et  par 
M.  de  Ghastellnx  dans  le  livre  dont 
je  rendais  compte,  et  par  M.  Auguste 
Aubry,  l'intelligent  éditeur  du  Bul- 
letin du  Bouquiniste.  Est-ce  là  la  véri- 
tai)le  orthographe  ?  Je  ne  le  crois  pas, 
et  je  reconnais  volontiers  qu'il  eût  été 
plus  légal  de  dire  Saint-André  des 
Arcs.  On  sait,  du  reste,  ^e  ce  surnom 
des  Arcs  a  donné  lien  à  diverses  étjmo- 
logies  dont  la  plus  vraisemblable  est 
que  les  fabricants  d'Arcs  habitaient 
les  maisons  voisines  de  l'Eglise  Saint- 
André.  Cf.  Frédéric  Loge  :  iMettonnoûre 
topographique  et  historique  de  Vanden 
Paris.  Hacàette,  in-i8,  p.  348. 

A.  Albrier. 


Le  Gérant^  L.  Sandrbt. 


8AIM1^UB!fTDf.  —    IMP.  iOU»  HOUBIAU. 


POLYBIBLION 

REVUE  BIBLIOGRAPHIQUE   UNIVERSELLE 


DE  QUELQUES  OUVRAGES  DE  JURISPRUDENCE. 

Le  Droit  français,  par  M.  À.  Jourdan,  professeur  à  la  faculté  de  droit  d'Aix.  Paris, 
E.  Pion,  1875.  Iu-8  de  xv-580  p.  Prix  :  7  fr.  50.  —  Eléments  du  droit  français,  par 
M.  £..  Glasson,  professeur  agrégé  à  la  faculté  de  droit  de  Paris.  Paris,  1875, 
Guillaumiu.  2  vol.  in-12  de  421  et  528  p.  Prix  :  7  fr.  —  La  Définition  du  droit, 
par  M.  DE  HaullbvillEi  Paris,  Quillanmin,  1875,  1  vol.  in-l?  de  382  p.  Prix  : 
3  fr.  50.  —  De  la  séparation  de  corps,  vrt  M.  Massol,  professeur  il  la  faculté  de  droit 
de  Toulouse.  Paris,  Duraud  &  Peaone-Lauriel,  1875;  2*  édit.,  considérablement 
augmentée.  In-8  de  512  p.  Prix  :  8  fr.  —  Les  Jeux  et  paris  devant  la  loi,  par 
£.  Chevallier,  docteur  en  droit.  Paris,  André  Sagnier,  1875.  In-12  de  238  p.  — 
De  la  division  des  personnes  chez  les  Romains  ;  des  Actes  de  l'état  civil,  par  H.  Patbn. 
Paris,  PichoD,  1875.  In-8  de  184  p.  —  De  l'accusation  publique^  par  M.  £.  Fabrb, 
docteur  en  droit.  Paris,  Marescq  aîné,  1875.  In-8  de  496  p.  Prix  :  7  fr.  —  Traité 
sur  tadultère,  par  M.  V.  Sibyb,  docteur  en  droit.  Paris,  Marefcq  atné,  1875.  In-8  de 
456  p.  Prix  :  7  fr.  —  Le  Code  de  commerce  mis  en  concordance,  article  par  article, 
ave^  les  principales  législations  étrangères,  par  M.  L.  Oudlv.  Paris,  Marescq  aîné,  1875. 
In-12  de  x-363  p.  Prix:  4  fr.  —  E%sai  sur  la  vente  commerciale,  par  M.  £.  Ripert, 
docteur  en  droit.  Paris,  Marescq  aine,  1875.  In-8  de  254  p.  Prix  :  4  fr.  —  La 
Faillite  dans  le  droit  international  priré,  par  M.  Q.  Garlb,  traduit  de  Titalien  avec 
additions  par  M.  £.  Dubois,  professeur  à  la  faculté  de  droit  de  Nancy.  Paris, 
Marescq  atné,  1875.  In-8  de  xi-165  p.  Prix  :  4  fr.  —  Commentaire  iMurique  et  pra- 
tique de  la  loi  du  10  décembre  1874  sur  l'hypothèque  maritime,  par  M.  T.  Morbl, 
avocat  à  la  cour  d^appel  de  Gaen.  Paris,  Durand  &  Pedone*Lauriel,  1875.  In-8  de 
256  p.  Prix  :  5  fr. 

Les  deux  ouvrages  qui  s'imposent  d* abord  à  notre  attention  ont 
été  écrits  en  vue  d'un  concours  dont  l'Académie  des  sciences  morales 
et  politiques  précisait  ainsi  Tobjet  :  «  Exposer,  avec  la  clarté 
nécessaire  pour  être  compris  par  tous,  les  régies  fondamentales  du 
droit  français;  montrer  les  rapports  de  ce  droit  avec  les  principes  de 
la  morale  et  avec  l'utilité  générale;  insister  sur  ce  qui  intéresse  la 
famille,  la  propriété,  le  travail^  la  foi  des  contrats,  ainsi  que  sur 
Tobéissance  due  aux  lois  et  aux  pouvoirs  institués,  pour  garantir,  à  la 
société  et  à  chacun  de  ses  membres,  la  sécurité  et  la  liberté.  §  — 
L'ouvrage  de  M.  Jourdan,  auquel  l'Académie  a  décerné  le  premier 
prix,  est  divisé  en  deux  parties.  L'auteur  commence  par  traiter  du 
droit  en  général  ;  il  le  considère  en  lui-même,  puis  dans  ses  rapports 
avec  la  morale,  la  philosophie,  Téconomie  politique...  Cette  généra- 
lisation rapide,  mais  substantielle,  est  suivie  d'une  seconde  partie 
plus  considérable,  consacrée  à  Texposition  des  principes  de  notre 
législation.  Droit  cisril,  droit  administratif,  droit  commercial,  procé- 
dure^ toutes  les  branches,  en  un  mot,  delà  science  juridique  sont  tour 
à  tour  passés  en  revue.  Le  plan  et  la  méthode  méritent  des  éloges 
presque  sans  réserve;  Tinfinie  variété  des  points  de  vue  qui  se  dé- 
roulent devant  le  lecteur  ne  nuit  pas  à  Tunité  de  Tensemble.  L'har- 

NovBMBRE  1875.  T.  XIV,  25. 


--  386  — 

moDie  serait  complète,  si  l'auteur  ne  faisait  à  réconomie  politique, 
objet  de  son  enseignement  quotidien,  une  part  quelquefois  excessive. 
Le  style  est  toigours  clair  et  animé  ;  il  gagnerait  seulement  à  étro 
plus  sobre  par  intervalles.  Désireux  de  faire  avant  tout  une  œuvre  de 
vulgarisation,  l'auteur  a  évité,  autant  que  possible,  les  controverses 
irritantes;  il  expose  plutôt  qu'il  ne  discute.  Toutefois,  ce  qu'il  laisse 
percer  de  S9s  opinions  philosophiques  et  éooQomiqut^s  nous  parait  en 
général  assez  satisfaisant. 

—  Nous  passons  au  second  lauréat,  M.  Glasson.  Assurément,  celui-ci 
a  moins  bien  compris  que  son  heureux  concurrent  les  conditions  du 
programme  tracé  par  TAcadémie.  Malgré  cela,  ou  peut-être  à  cause 
de  cela,  nous  n*hét)itons  pas  à  reconnaître  à  son  ouvrage,  plus  étendu, 
une  portée  très-supérieure*  S'il  ne  convient  pas  autant  à  la  masse  du 
publie,  son  intérêt  est  plus  réel  pour  les  lecteurs  déjà  initiés  à  Fétude 
du  droit.  Nous  j  trouvons  un  moindre  talent  de  misa  en  œuvre,  mais 
des  recherches  plus  approfondies  et  une  plus  grande  variété  d'érudi- 
tion. Uéclat  est  remplacé  par  la  solidité.  Ce  n'est  pas  M.  Glasson  qui 
se  dérobe  devant  les  difficultés  ou  les  discussions  ;  il  paraît  même  les 
affectionner  à  Texcès,  témoin  sa  digression  assez  oiseuse  sur  Finstruo- 
tion  obligatoire,  gratuite  et  laïque,  à  propos  de  Tart.  203  du  Code 
(no  72).  Mais  hâtons-nous  d'ajouter  qu'en  thèse  générale,  et  à  quelques 
exceptions  près,  il  n'y  a  pas  lieu  de  regretter  cette  tendance  de  notre 
auteur.  Presque  toujours  il  lutte  pour  les  bonnes  causes;  et  c'est  un 
lutteur  dès  longtemps  préparé,  armé  d'une  science  de  bon  aloi,  animé 
d'un  véritable  esprit  chrétien.  Nous  mentionnerons  surtout  l'introduo* 
tion,  dans  laquelle  il  établit  le  fondement  de  la  morale  et  réfute  les 
écoles  naturaliste,  positiviste,  utilitaire  (n^  1-15);  ses  aperçus  sur 
rindissolubilité  du  mariage  (n*  36)  ;  sa  très-remarquable  dissertation 
sur  la  légitimité  et  la  nécessité  du  droit  de  propriété  (n^  87 -M),  etc. 

Il  est  malheureusement  difficile  qu'un  ouvrage  de  oe  genre,  touchant 
à  toutes  les  questions  et  remuant  tous  les  problèmes  de  l'ordre  le  plus 
élevé,  ne  nécessite  pas  des  critiques,  tout  au  moins  des  réserves. Nous 
nous  voyons  forcé,  en  eSei,  d'en  exprimer  un  certain  nombre.  Ce 
n'est  pas  le  lieu  d'insister  ici  sur  des  dissidences  relativement  secon- 
daires, de  défendre,  par  exemple,  les  juridictions  administratives 
contre  des  attaques  peu  réfléchies,  à  notre  sens  (n®  287).  Mais  nous 
devons  signaler  d'autres  erreurs  plus  graves,  qui  proviennent,  la  plu- 
part, d'un  culte  exagéré  pour  le  Code  civil,  d*une  sorte  de  fétichisme 
indigne  du  talent  de  M.  Glasson  et  du  rang  qu'il  occupe  déjà  dans  la 
science.  Notamment  dans  les  deux  grandes  questions  de  la  liberté 
testamentaire  (n^  37  et  124),  et  du  mariage  religieux  (n*^  41  et  49), 
nous  regrettons  de  le  voir  confondre  les  améliorations  possibles  avec 
les  exagérations  évidentes,  et  opposer  k  toute  tentative  de  refonte 


—  387  — 

des  craintes  parfois  chimériques.  Il  est  fâcheux  que  ces  taches,  dont 
nous  n'indiquons  que  les  principales,  viennent  diminuer  le  mérite  d'un 
ouvrage  si  propre,  d'ailleurs,  à  faire  connaître  Tesprit,  l'histoire  et  la 
philosophie  de  notre  législation  aux  jeunes  gens  qui,  trop  souvent, 
n'en  apprennent  que  la  lettre  dans  les  traités  réputés  classiques. 

—  Avec  M.  de  HauUeville  et  sa  Définition  du  droit,  nous  sortons 
quelque  peu  de  notre  domaine  pour  pénétrer  sur  le  terrain  de  la  phi- 
losophie. Mais  le  lien  entre  Tun  et  l'autre  de  ces  deux  ordres  d'idées 
est  étroit,  plus  étroit  que  ne  le  suppose  le  praticien  empirique  qui  ne 
voit  dans  le  droit  qu'un  art,  dans  la  loi  qu'un  caprice  imposé  par  la 
force.  On  lira  avec  autant  d'intérêt  que  de  fruit  l'introduction  (p.  1-35), 
dans  laquelle  notre  auteur  établit  la  nécessité  de  la  philosophie  pour 
le  jurisconsulte,  pour  le  législateur,  pour  le  magistrat.  Malgré  une 
certaine  fatigue  provenant  de  l'abus  des  formules  métaphysiques,  on 
étudiera  ensuite  avec  profit  ses  développements  trôs-orthodoxes  et 
très-nourris  sur  la  notion  du  bien,  sur  l'origine  de  la  société,  sur  la 
naissance  et  les  sources  du  droit,  sur  le  devoir  juridique,  etc. 

—  Nous  avons  déjà  mentionné  ici  même,  en  leur  temps  et  lieu, 
diverses  publications  tendant  au  rétablissement  du  divorce;  nous  avons 
signalé,  en  le  condamnant,  le  mouvement  d'opinion  dont  ces  écrits 
étaient  l'indice  et  la  conséquence.  La  question  prend  de  jour  en  jour 
une  importance  plus  grave;  un  programme  trop  célèbre  vient  de 
mettre  en  pleine  lumière  les  projets  et  les  espérances  du  parti  radical. 
Répétons-le  une  fois  encore,  c'est  dans  l'insuffisance  de  notre  loi  sur 
la  séparation  de  corps  que  les  agitateurs  puisent  leurs  meilleurs  armes  ; 
c'est  vers  le  perfectionnement  de  cette  loi  que  doivent  tendre  nos 
efforts.  La  séparation  de  corps,  on  le  sait,  n'avait  pas  trouvé  place 
dans  le  projet  du  Code  civil,  non  plus  que  dans  la  législation  intermé- 
diaire. Les  catholiques,  qui  ne  pouvaient  accepter  cette  alternative  du 
divorce  ou  du  maintien  pur  et  simple  de  la  vie  commune  dans  des 
conditions  peut-être  intolérables,  réclamèrent  à  bon  droit  ;  et,  en  1804, 
la  séparation  de  corps,  appelée  pour  ce  moiiîle  divorce  des  catholiques, 
finit  par  être  organisée,  mais  d'une  manière  très-imparfaite.  Les  juges 
chargés  de  la  prononcer,  d'en  apprécier  les  causes,  d'en  déterminer 
les  effets,  durent  faire  de  larges  emprunts  au  titre  du  divorce.  De  là 
des  incertitudes,  encore  aggravées  depuis  par  la  loi  du  8  mai  1816, 
consacrant  à  nouveau  l'indissolubilité  du  mariage.  Quels  sont  aujour- 
d'hui, parmi  les  textes  écrits  en  vue  du  divorce,  ceux  qu'il  convient 
de  faire  revivre,  en  quelque  sorte,  pour  les  appliquer  au  cas  de  sépa- 
ration? Ce  problème  embarrasse  la  jurisprudence  qui,  privée  d'une 
base  positive,  éprouve  de  fréquentes  variations.  Les  auteurs  de  la  loi 
de  1816  avaient  stipulé  qu'il  serait  promptement  remédié  à  cet  état  de 
choses  dont  ils  prévoyaient  les  inconvénients.  Un  projet  fut,  en  effet, 


—  388  — 

élaboré  au  cours  de  la  même  année,  discuté,  puis  adopté  par  la 
Chambre  des  pairs.  Pourquoi  fut-il  abandonné?  Il  ne  nous  est  pas 
possible  de  le  dire,  mais  il  nous  est  permis  de  le  déplorer. 

Ces  quelques  observations  montrent  combien  l'on  doit  savoir  gré  à 
M.  Massol  de  Tinitiative  qu'il  a  prise,  avec  un  courage  égalé  par  sa 
haute  compétence.  Il  commence  par  se  demander  s*il  conviendrait  de 
rétablir  le  divorce,  et  il  répond  non,  d'accord  avec  le  bon  sens, 
l'histoire  et  la  religion.  Il  aborde  ensuite  Texamen  de  la  législation 
actuelle  ;  nous  ne  connaissons  pas,  sur  cette  matière  si  délicate,  de 
commentairepluscomplet  et  plus  judicieux.  Arrivant  enfin  à  la  partie 
vraiment  neuve  de  son  œuvre,  M.  Massol  expose  la  nécessité  d'une 
loi  spéciale  qui  aurait  pour  but  de  mettre  un  terme  aux  incertitudes 
dont  nous  avons  parlé,  et  d'effacer,  en  fait,  de  notre  code  le  divorce, 
qui  a  déjà  disparu  en  droit.  Il  importe,  comme  le  dit  notre  auteur,  de 
ne  plus  rien  laisser  subsister  de  cette  offense  contre  la  morale,  et  d'en 
proscrire  même  le  titre.  La  nouvelle  loi  permettrait  aux  juges  de  dis- 
penser l'un  des  époux  de  l'habitation  sans  pourtant  prononcer  la 
séparation  proprement  dite  —  celle-ci  pourrait  être  d'avance 
limitée  dans  sa  durée  ;  —  le  refus  par  l'un  des  époux  de  procéder  à  la 

célébration  religieuse  en  serait  désormais  une  cause  légale Ces 

diverses  réformes,  auxquelles  s'en  ajoutent  bien  d'autres,  secondaires, 
nous  semblent  excellentes.  Est-ce  à  dire  que  tout  soit  parfait  dans  le 
plan  de  M.  Massol?  Non;  et,  par  exemple,  nous  sommes  surpris  de  le 
voir  maintenir  la  disposition  qui  n'autorise  la  femme  à  agir  contre  le 
mari  adultère  que  si  la  concubine  a  été  tenue  dans  la  maison  com- 
mune. Est-ce  à  dire,  d'autre  part,  que  ce  plan  soit  complet  et  règle 
tous  les  points?  Nous  n'oserions  pas  non  plus  l'affirmer.  Mais  notre 
reconnaissance  n*en  est  pas  moins  due  au  savant  professeur  pour  avoir 
aperçu  et  signalé  le  problème,  pour  avoir  tenté  de  le  résoudre  et 
pour  y  avoir  réussi  dans  une  très-large  mesure. 

—  De  l'ouvrage  précédent  à  la  thèse  de  M.  Payen,  qui,  en  droit 
français,  s'occupe  des  actes  de  l'état  civil,  la  transition  est  naturelle. 
Le  législateur  moderne  a  fait  du  mariage  un  contrat  purement 
laïque.  La  célébration  religieuse  était  tout  sous  l'ancien  régime; 
aujourd'hui  elle  n'est  rien.  Nos  codes  ne  la  mentionneraient 
même  pas,  si  l'on  n'avait  jugé  utile  d*édicter  des  pénalités  contre 
le  prêtre  coupable  d'avoir  prêté  son  ministère  avant  l'accomplis- 
sement des  formalités  civiles  {Code  pénal,  art.  199  et  200).  Évi- 
demment, de  telles  exagérations  ne  viennent  que  trop  en  aide  aux 
partisans  du  divorce.  Comment  s'est  accomplie  cette  sécularisation  du 
mariage?  C'est  ce  que  M.  Payen  expose  avec  soin;  il  suit  la  marche 
des  faits  depuis  l'ordonnance  de  Yillers-Cotteréts,  et  il  classe  avec 
intelligence  les  documents  dont  l'étude  est  ici  nécessaire. 


—  389  — 

—  C'est  également  une  question  pleine  d'actualité  que  celle  que  M.  E. 
Ghevallier  vient  de  traiter  dans  un  très-curieux  et  très-instructif  volume . 
Beaucoup  de  bruit  s'est  fait  récemment,  dans  une  certaine  presse, 
autour  des  maisons  de  jeux,  et  la  cause  de  leur  rétablissement  a 
trouvé  de  nombreux  avocats,  babiles  à  invoquer  des  considérations 
fiscales,  voire  des  arguments  moraux  1  A  un  autre  point  de  vue, 
les  paris  relatifs  aux  courses  de  chevaux  ont  dernièrement  préoccupé 
le  monde  judiciaire  et  donné  lieu  à  d'importantes  décisions.  Est-il 
besoin,  enfin,  d'insister  sur  le  rôle  trop  considérable  que  jouent,  à 
notre  époque,  les  paris  connus  sous  le  nom  de  jeux  de  Bourse?  Aucun 
de  ces  points  n'échappe  aux  recherches  de  M.  Chevallier  ;  sur  le  der- 
nier, notamment,  il  entre  en  des  explications  d'une  clarté  parfaite  et 
d'une  réelle  utilité  pour  la  masse  des  lecteurs.  Nous  applaudissons  & 
la  vigueur  de  son  plaidoyer  contre  la  loterie  et  les  maisons  de 
jeux  :  «  Quand  leur  suppression,  écrit-il,  n'aurait  pas  d'autre  avan- 
tage que  celui  d'avoir  effacé  le  jeu  de  la  liste  des  vices  publics 
et  patentés,  cela  suffirait  pour  la  maintenir.  »  Ajoutons,  en  termi- 
nant, que  l'érudition  elle-même  trouve  sa  place  dans  ce  travail,  qui 
fournit  sur  les  jeux  de  l'antiquité  des  renseignements  peu  connus. 

—  L'institution  du  ministère  public,  ses  origines  dans  le  passé,  son 
organisation  dans  le  présent  ont  fait  l'objet,  depuis. quelques  années, 
de  plusieurs  monographies.  L^uvrage  de  M.  E.  Fabre,  qui  ajoute  des 
observations  personnelles  aux  résultats  déjà  acquis  par  ses  devanciers, 
se  présente  à  nous  comme  le  plus  complet  des  traités  sur  la  matière. 
Poussant  ses  investigations  jusqu'aux  âges  primitifs,  il  nous  décrit  le 
droit  public  d'accusation  chez  les  Égyptiens,  les  Syriens,  les  Grecs,  etc. 
(p.  10-49).  Puis  nous  assistons  au  fonctionnement  des  juridictions 
criminelles  à  Rome;  nous  en  suivons  les  transformations  nombreuses; 
mais,  jusqu'à  la  fin,  nous  voyons  les  citoycQS  conserver  dans  son  inté- 
grité le  vieux  droit  public  d'accusation  (p.  50-216).  L'auteur  passe 
ensuite  à  l'organisation  judiciaire  chez  les  Germains  avant  la  conquête, 
au  droit  criminel  des  plaids,  à  la  procédure  devant  les  Scabini^  aux 
justices  patrimoniales  et  privées,  aux  justices  ecclésiastiques,  etc. 
(p.*21ô-273).  A  partir  du  treizième  siècle,  apparaît  enfin  le  ministère 
public  entre  les  mains  des  procureurs  du  roi,  dont  l'action,  bornée 
d'abord  à  la  poursuite  et  à  la  défense  des  intérêts  privés  du  souverain, 
s'agrandit  et  en  vint  même  à  changer  complètement  de  milieu,  par 
une  suite  forcée  de  l'extension  que  prenait  en  même  temps,  sur  le 
terrain  politique  et  social,  l'autorité  royale  marchant  toujours  droit 
à  son  but  (p.  287).  »  —  La  constitution  de  1791  institue  t accusateur 
public,  nommé  par  le  peuple.  Cette  conception  démagogique,  sévère- 
ment condamnée  par  l'auteur,  est  bientôt  abandonnée  ;  en  l'an  VIII  et 
en  l'an  IX,  le  législateur  pose  les  bases  du  système  consacré  depuis  par 


—  190- 

le  Gode  d'instrnotion  ciimiDelle.  —  Telles  sont  les  lignes  principales 
de  l'étude  à  laquelle  se  livre  M.  Fabre.  Le  lecteur  j  trouvera  une 
science  véritable,  exposée  dans  une  forme  claire  et  attacbante.  On 
s'associera  avec  nous  à  la  conclusion,  ainsi  formulée.  <(  Les  critiques 
adressées  aux  différents  systèmes  qui  semblent  s^'éloigner  trop  ouver- 
tement du  tjpe  idéal  de  l'accusation  populaire,  perdent  beaucoup  de 
leur  justesse  et  de  leur  autorité  auxfyeux  de  celui  que  la  connaissance 
de  la  nature  humaine  et  les  leçons  de  Thistoire  ont  instruit,  et  qui  est 
obligé  de  conclure  de  ce  double  enseignement,  qu'il  est  souvent  plus 
utile  à  Thomme  de  n'être  pas  le  maître  d'exercer  les  droits  mêmes 
dont  il  se  montre  le  plus  jaloux.  » 

—  M.  y.  Sieje  observe  avec  raison  que  les  moralistes  ou  roman- 
ciers sont  loin  d'avoir,  dans  leurs  dissertations  sur  l'adultère,  épuisé 
le  sujet  au  point  de  vue  historique  et  juridique.  Il  a  entrepris  de 
combler  cette  lacune,  dans  un  ouvrage  qui,  nourri  de  faits,  résiste  par 
là  même  à  l'analyse.  Nous  ne  pouvons  que  résumer  notre  impression, 
en  disant  que  l'auteur  n'est  pas  resté  au-dessous  de  sa  tâche.  Son 
œuvre  est  toijgours  sérieuse  quant  au  fond  ;  elle  est  parfois  remarquable 
dans  la  forme;  elle  se  recommande  enûn  par  ses  tendances  géné- 
rales. M.  Sieje  reproche  à  la  loi  de  manquer  de  logique  :  «  Si  l'adultère 
est  un  crime,  vous  devez  le  châtier  des  peines  les  plus  sévères...  Si 
ce  n'est  qu'un  simple  délit,  pourquoi  excuser  dans  le  mari  le  droit  de 
le  venger  d'une  façon  aussi  sévère  et  aussi  barbare?  Pourquoi  approuver 
ce  châtiment  excessif  par  des  acquittements  illégaux?  »  Une  première 
réforme  consisterait  donc  à  qualifier  l'adultère  de  crime;  une  seconde, 
à  supprimer  le  mode  de  répression  qui  place  la  femme  coupable  dans 
un  milieu  où  elle  achève  de  se  démoraliser.  La  peine  devrait  être  à  la 
fois  infamante  et  pécuniaire»  Ce  n'est  pas  tout  :  il  importerait  d'at- 
teindre plus  efficacement  le  complice,  et  aussi  de  frapper  avec  plus  de 
rigueur  les  infidélités  du  mari.  Aujourd'hui,  «  c'est  l'injure,  le  mauvais 
exemple,  plus  que  la  violation  de  la  loi  conjugale,  que  la  loi  punit,  et 
en  cela  elle  est  blâmable  ;  car,  en  droit  naturel,  le  mari  est  aussi 
coupable  que  la  femme.  »  —  Ces  diverses  propositions,  fortement 
motivées,  font  honneur  à  l'écrivain  qui  les  émet.  Pourquoi  sommes-poua 
forcé  de  terminer  par  une  critique?  Rapportant  la  controverse  théolo- 
gique qu'ont  suscitée  deux  textes  dissemblables  de  saint  Matthieu  et 
de  saint  Marc,  sur  la  question  de  savoir  si  la  répudiation  de  la  femme 
adultère  ouvre  au  mari  le  droit  de  contracter  un  nouveau  mariage, 
M.  Sieye  conclut  ainsi  :  «  Nous  devons  nous  incliner  devant  la  déci- 
sion de  rÉglise,  qui  est  devenue  un  article  de  nos  lois,  mais  nous 
pouvons  regretter  que  le  divorce  n'existe  pas  pour  ce  cas  excep- 
tionnel (p.  278).  »  Cette  phrase  est  malheureuse  ;  elle  est  en  con- 
tradiction avec  l'ensemble  des  doctrines  de  l'auteur  ;  aussi  le  considé- 
rons-nous comme  doublement  tenu  de  la  faire  disparaître. 


—  391  - 

—  M.  8.  Yàinbdrg  non»  transporta  bvlt  le  terrain  de  Térudition 
pnre.  Son  liyre^  ia  Faillite  d'après  le  druit  romain,  est  sorti,  par  ordre 
du  gonvômement,  des  presses  de  llmprimerie  nationale  ;  une  telle 
fkrenr  lui  était  due  à  plus  d'un  titre.  C'est  aveo  joie  que  nous  voyons 
des  savants  français  s'engager  dans  les  fortes  études  que  poursuivirent 
avec  tant  d*éolat  nos  jurisconsultes  classiques»  Godefroj,  Cnjas,  Don- 
neau,  Dumoulin,  et  dont  les  Allemands  prétendent  aujourd'hui 
s'arroger  le  monopole  exclusif.  M.  Vainberg  complète  heureusement 
les  savantes  expositions  de  MM.  Giraud  et  Tambour  sur  la  condition 
iéBnexi,  Il  a,  de  plus,  le  mérite  de  ne  pas  se  confiner  dans  une  période 
déterminée,  mais  d'embrasser  Tensemble  de  la  législation,  depuis  les 
Douze- Tables  jusqu'à  la  fin  de  l'empire.  De  son  ouvrage  nous  ne  criti- 
querons que  le  titrOé  L'antiquité,  ne  Toublions  pas,  ne  s'est  jamais 
préoccupée  de  définir  l'acte  de  commerce  ;  elle  ne  faisait  dé- 
couler de  la  profession  de  commerçant  ni  ces  obligationâ  propres, 
ni  ces  privilèges  spéciaux  qui  sont  Tinnovation  dulégislatear  moderne. 
C'est  lèi  un  point  certain,  quoi  qu'insinue  M.  Vainberg.  Comment,  dôs 
lors,  apercevoir  une  réglementation  quelconque  de  la  faillite  dans  les 
textes  qui  prévoyaient  la  situation  aujourd'hui  connue  sous  le  nom 
de  déconfiture  ?  Nous  pensons  doQC  que  l'auteur  se  laisse  entraîner 
trop  loin,  lorsqu'il  nous  parle,  dans  sa  préface,  de  l'intérêt  pratique 
des  recherches  qu'il  a  entreprises.  Ne  lui  suffit-il  pas  que  l'intérêt  soit 
très-réel  au  point  de  vue  doctrinal? 

—  A  l'inverse  de  ce  qui  précède,  nous  avons  à  rendre  compte  main- 
tenant d'un  certain  nombre  de  traités  essentiellement  pratiques.  Tel 
est  le  caractère  du  Code  de  Commerce  mis  en  concordance,  article  par 
article,  avec  les  principales  législations  étrangères,  par  M.  L.  Oudin. 
Ce  manuel  contient,  dans  un  format  restreint  et  commode,  les  notions 
dont  la  connaissance  est  commandée  par  l'état  des  relations  interna- 
tionales. 

—  L* Essai  sur  la  vente  commerciale^  de  M.  E.  Ripert,  ouvrage  cou- 
ronné par  la  faculté  d'Aix,  initie  le  lecteur  aux  usages  du  commerce, 
notamment  à  certains  usages  particuliers  de  la  place  de  Marseille. 
L'utilité  de  ce  volume  est  évidente  pour  le  négociant  ;  mais  le  juris- 
consulte ne  consultera  pas  avec  moins  de  fruit  cette  étude  sur  un  sujet 
peu  approfondi  jusqu'ici,  et  qui,  cependant,  offre  tant  de  points  de  con- 
tact aveo  le  droit  civil. 

—  Le  livre  du  professeur  italien  G.  Carie,  sur  la  Faillite  dans 
le  droit  international  privée  soulève  des  difficultés  d'un  ordre  plus 
élevé.  L'auteur  voudrait  prévenir,  entre  les  diverses  législations, 
des  conflits  non-seulement  possibles  en  théorie^  mais  très-fréqeunts 
en  pratique.  Il  conviendrait,  nous  dit-il,  d'unifier  les  règles  de 
la  faillite,  surtout  de  décider  que  le  jugement  déclaratif  sortira  ses 


—  392  -- 

effets  en  tous  pays,  sans  considérer  ni  la  nationalité  du  débiteur^  ni 
celle  des  créanciers.  Une  seule  réserve  serait  admise  pour  sauve- 
garder la  souveraineté  de  chaque  État  :  Texécution  forcée  ne  pourrait 
être  pratiquée  que  sous  le  contrôle  de  cet  État  et  avec  son  assenti- 
ment. Ainsi  comprise,  la  réforme  serait  aussi  possible  qu'elle  est 
désirable  ;  elle  a  déjà  été  partiellement  consacrée  par  plusieurs  con- 
ventions diplomatiques.  Nous  recommandons  à  toute  l'attention  du 
public  ce  traité,  que  le  traducteur  français,  M.  Dubois,  a  eu  soin  de 
mettre  au  courant  de  notre  jurisprudence. 

—  M.  Tranquille  Morel  vient  de  donner  à  la  loi  du  10  décem- 
bre 1874  sur  l'hypothèque  maritime  son  premier  commentaire.  Ce 
travail  a,  pour  les  nombreux  intéressés,  le  mérite  de  Topportunité»  et 
pour  l'ensemble  des  lecteurs  Tattrait  de  la  nouveauté.  11  retrace  l'his- 
torique de  la  question,  reproduit  les  incidents  de  la  discussion  parle- 
mentaire, apprécie  les  conséquences  probables  de  cette  innovation  sur 
notre  crédit  public,  compare  enfin  la  loi  récente  avec  les  lois  anglaise, 
américaine  et  italienne.  Cette  étude,  qui  embrasse  ainsi  toutes  les 
faces  du  sujet,  peut  se  passer  de  nos  éloges  après  le  témoignage  de 
haute  approbation  que  lui  a  décerné  la  faculté  de  Caen. 

A.  DB  Clatb. 


OUVRAGES  POUR  LA  JEUNESSE. 

Tony  Brenner.  Récit  alsacien,  par  M"*  Garoliiœ  Ernst.  Par»,  Hachette,  1875.  In-12  de 
233  p.  3  ÎT.  -^  Trùii  histoires  de  terre  et  de  mer,  par  A.  Ddbarrt.  Paris,  Didier,  1875. 
In- 12  de  378  p.  3  fr.  —  Les  Diamants  irlandais,  par  Emile  Bowles,  traduit  par 
Mil"  Guerrier  de  Haupt.  Limoges,  Barbou  frères.  In-8  de  232  p.  2  fr.  50.  — -  <7a«r- 
doulw,    par    àtmé    Gécil.     Touroai,  V*    H.    Gasterman.   1875.    In- 12  de   216  p. 

1  fr.  —  Irène^  par  Et.  Marcel.  Poitiers  et  Paris,  H.  Oadin,  1875.  In- 12  de  307  p. 

2  fr.  —  Petite  saur,  par  Et.  Marcel.  Paris,  G.  Diliet,  1875.  In-12  de  285  p. 
2  fr.  —  Mon  sillon,  par  M"«  Plbdbiot.  Paris,  Lecoflfre,  1875.  In-12  de  328  p.  2  fr. 
—  Abnégation,  par  M""  Bourdon.  Nouvelle  édition.  Paris,  Henri  Allard,  1875.  In-12 
de  310  p.  —  L  Institutrice  à  Berlin,  par  M^^«  M.  Maréchal.  Paris,  Gh.  Blériot,  1875. 
In- 12  de  283  p.  2  fr.  ~  Le  sire  de  Coucy,  par  F.  DE  Servan.  Paris,  G.  Dillet.  1875. 
In-12  de  317  p.  2  fr.  —  Berthilde  ou  les  origines  monarchiques  et  ^retiennes  de  la 
France,  par  G.  d*Arvor.  Paris,  G.  Téqui,  1875.  In-12de248  p.  3  fr.  —  Viclorius,  ou 
Rome  aux  premiers  temps  du  christianisme,  par  le  R.  P.  G  A  Y.  S.  M.  Paris,  Haton, 
1875.  In-12  de  196  p.  2fr. — Les  Châtelaines  du  Roussillon,  par  M"*  la  comtesse  DE  la 
ROGfiBRE.  Tours,  Alf.  Marne,  1874.  In-8  de  244  p.  2  (t.  bO —V Anneau  du  meurtrier,  par 
GONDRY  DU  Jardinet.  Paris,  aux  bureaux  de  lAlmanach  du  Pèlerin,  1875.  In- 12  de 
246  p.  2  fr.  —  La  Banque  du  diable,  par  EUG.  de  Margerib.  Paris,  G.  Téqui,  1875. 
In.l2  de  283  p.  3  fr. 

—  Le  Bécit  alsacien,  de  M"*  Ernst,  est  un  livre  charmant. 
La  scène  se  passe  en  Alsace.  L'aisance  est  d'abord  le  lot  du 
ménage  de  l'honnête  forgeron  ;  puis  vient  Tépreuve.  Le  père 
meurt  victime  de  son  dévouement;  Marthe,  restée  veuve,  est 
sur  le  point  de  succomber  au  désespoir.  Mais  elle  saura  domi- 
ner sa  douleur  :  son  fils,  le  petit  Tony,  le  héros  de  l'histoire, 
et  le  vieux    grand'père   attendent  tout   désormais  de  sa  vaillance 


—  393  — 

et  de  son  courage.  Quelques  mois  s'écoulent;  les  difficultés  sont 
grandes  :  Tony  est  trop  jeune  pour  diriger  la  forge  ;  il  a  fallu  en  con- 
fier la  direction  à  un  principal  ouvrier.  Celui-ci,  à  force  d'astuce,  par- 
vient à  capter  la  confiance  de  Taïeul,  si  bien  que  le  vieillard  veut 
l'avoir  pour  gendre.  Marthe  refuse  longtemps.  Enfin,  vaincue  par  les 
instances  de  tous,  croyant  assurer  le  bonheur  des  siens,  elle  se  résout 
à  épouser  Wild.  Tout  change  bientôt  dans  la  demeure  autrefois  si 
paisible.  Wild  jette  le  masque  qu'il  avait  pris  pour  arriver  à  ses  fins. 
L'effrayante  réalité  apparaît  à  la  malheureuse  femme.  Son  mari  est 
buveur  !  C'est  alors  que  se  dévoile  dans  toute  sa  beauté  le  caractère 
de  Marthe,  la  Jfonti7uejD/^6eïenne,  comme  l'appelle  le  cardinal  Donnet 
dans  une  lettre  fort  élogieuse  adressée  à  l'auteur.  Elle  ne  s'irrite  pas 
contre  l'affreuse  destinée  qui  lui  est  faite.  L'âme  de  ce  misérable 
ivrogne  lui  est  confiée  ;  elle  consacrera  sa  vie  à  essayer  de  le  retirer 
du  bourbier.  Aussi,  grâce  à  elle,  il  mourra  repentant.  Mais  que  de  jours 
d'angoisses  I  Comme  elle  souffre,  la  pauvre  mère,  en  voyant  son  fils 
malheureux  !  Tony  est  sans  cesse  en  butte  aux  mauvais  traitements  de 
son  beau-père.  Aussi  n'essaye -t-elle  pas  de  le  retenir  quand  il  veut 
être  soldat  ;  d'ailleurs  la  patrie  a  besoin  de  lui.  Là  se  placent  les  dé- 
tails de  l'invasion  du  territoire  pendant  le  premier  empire  :  tristesses 
que  nous  avons  ressenties  de  nouveau  sous  le  second.  Durant  l'absence 
de  son  fils,  Marthe  engourdit  son  chagrin  en  s'occupant  des  autres. 
Elle  s'attache  à  une  orpheline,  refait  patiemment  son  éducation.  Plus 
tard,  Marguerite,  devenue  une  charmante  jeune  fille,  payera  sa  dette 
de  reconnaissance  à  sa  bienfaitrice  en  faisant  le  bonheur  de  Tony.  Les 
sentiments  contenus  dans  l'ouvrage  de  M""*  Ernst  sont  vrais  et  déli- 
catement exprimés.  Les  descriptions  sont  bien  faites,  les  caractères 
nettement  tracés. 

—  Trois  histoires  de  terre  et  de  mer  nous  offrent  des  récits  intéres- 
sants pour  des  adolescents  dont  l'imagination  ardente  rêve  le  péril  et 
les  situations  dangereuses.  La  première  des  histoires,  intitulée  Les 
tapirs  à  dos  blanCj  est  l'odyssée  d'un  malheureux  savant  à  qui  l'amour 
de  la  science  a  fait  entreprendre,  dans  l'Inde,  un  voyage  de  décou- 
vertes. Ce  voyage,  décrit  à  la  façon  un  peu  fantastique  de  Jules  Verne, 
est  rempli  des  incidents  les  plus  dramatiques.  —  La  seconde  est  d'un 
genre  différent  ;  la  famille  Mantelet,  famille  de  braves  marins,  a  tou- 
jours été  sans  tache  jusqu'au  jour  où  Claude,  échappant  à  la  vigilance 
maternelle,  a  fait  de  mauvaises  connaissances,  et  a  été  entraîné  au  vol. 
Il  est  arrêté.  La  scène  où  la  mère,  avertie  par  la  rumeur  publique, 
accourt  chez  le  magistrat,  est  très-touchante.  La  lutte  entre  la  tendresse 
maternelle  et  l'indignation  que  la  veuve  Mantelet  éprouve  contre  le 
voleur,  est  bien  rendue.  Qrâce  à  sa  mère,  le  coupable,  déjà  repentant, 
évitera  l'ignominie  de  la  prison,  mais  à  la  condition  qu'il  s'embar- 


—  894  — 

quera  et  qu'il  effacera  sa  faute  par  le  travail.  C*e0t  elle  qui  dicte  cet 
arrôt,  puis  elle  remmène  dans  son  humble  demeure  jusqu'à  Theure  du 
départ.  Là,  seule  avec  ses  enfants,  elle  évoque,  devant  Claude  age« 
nouille  à  ses  pieds,  tous  les  souvenirs  les  plus  poignants  ;  et  elle  reçoit 
le  serment  qu'il  lui  fait  devant  le  Christ  de  ne  plus  faillir.  Il 
tiendra  parole  ;  mais  il  ne  reverra  plus  sa  mère  ;  il  meurt  en  dëfen^ 
dant  le  drapeau  français  contre  les  Anglais,  à  la  bataille  de  la  Hougue. 

La  troisième  histoire  nous  initie  aux  mœurs  bretonnes  d*il  j  a  une 
centaine  d'années,  alors  que,  dans  certaines  parties  du  littoral^  les 
habitants,  s'intitulant  les  naufrageurs,  attiraient  les  navires  par  de 
faux  signaux.  Un  homme,  voulant  se  défaire  d'un  bâtiment  de  corn* 
merce  rival  du  sien,  vient  tenter  un  pécheur  de  ces  contrées,  par 
Tappàt  d'une  riche  part  de  butin.  Floch  accepte  le  marché  comme  chose 
toute  naturelle  :  il  a  besoin  d'argent  pour  se  mettre  en  ménage,  car  il 
a  une  fiancée.  Mais  Aliette,  à  qui  il  vient  en  toute  hâte  communiquer 
les  espérances  qu'on  a  fait  luire  à  ses  jeux,  a  horreur  de  ce  moyen  de 
faire  fortune,  et  elle  jure  à  Floch  que  jamais  elle  ne  sera  sa  femme  s'il 
ne  renonce  à  son  criminel  projet.  Grâce  à  la  fermeté  de  la  jeune  fllle, 
le  pécheur  ne  commettra  pas  ce  crime.  Il  y  a,  dans  ces  récits,  beaucoup 
de  vie,  de  mouvement  et  des  notions  historiques  qui  ne  sont  pas  sans 
valeur. 

—  Un  charmant  ouvrage  est  celui  qui  a  pour  titre  :  Le$  Diamants 
irlandais.  L'auteur  a  su  faire  admirablement  ressortir  les  caractères 
forts,  enthousiastes  et  généreux  que  produit  la  catholique  Irlande. 
Una,  la  simple  maîtresse  d'école,  est  une  ravissante  création.  Qael  cou- 
rage elle  puise  dans  sa  foil  Rien  ne  l'arrête,  dès  qu'il  s'agit  de 
préserver  les  enfants  confiés  à  ses  soins;  du  contact  dangereux  des 
hérétiques  qui  veulent  s'emparer  d'eux  à  tout  prix.  Lord  Powderhouae 
et  sa  sœur  Eudora  ont  résolu  d'extirper  le  papisme^,  et  les  persécutions 
assaillent  leurs  malheureux  tenanciers.  Femmes,  vieillards  et  enfants, 
qui  refusent  de  se  soumettre,  sont  jetés  hors  de  leurs  cabanes  par 
les  agents  subalternes,  plus  durs  encore  que  leur  mûtre.  Quelle 
résignation  dans  les  paroles  de  Nora,  la  grand'mère  d'Una,  lors- 
que Randal,  le  fiancé  de  sa  petite-fille,  vient,  bouillant  d'indignation 
contre  les  vexations  sans  nombre  dont  il  est  l'objet^  lui  et  tous 
ses  compatriotps,  exhaler  sa  colère  contre  les  oppresseurs  I  L'amour 
pur  qui  unit]les  deux  fiancés  est  très-délicatement  exprimé.  Le  Père 
Murphj  est  le  type  du  bon  pasteur.  Rien  n'égale  sa  tendresse,  sa 
compassion,  sa  prudence  pour  son  pauvre  troupeau  persécuté.  Les 
figures  du  Père  Fitz  Simon  et  du  Père  Lawrence  sont  fort  belles.  Le 
tableau  où  les  deux  frères  s'excitent  mutuellement  à  poursuivre,  sans 
faiblir,  le  but  auquel  ils  ont  voué  leur  vie,  est  tracé  de  main  de 
maître.  Les  récits  de  la  mort  du  Père  Lawrence,  de  la  jalousie  du 


—  395  — 

pauvre  Randal  et  des  tristes  événements  qui  s'en  suivirenti  de  la 
soéne  des  contrebandiers  avec  Tenfant  idiot  sont  très>bien  tracés.  Un 
souffle  mélancolique  et  plein  d*une  suave  poésie  agite  le  cœur  enlisant 
cet  ouvrage,  où,  à  chaque  page,  on  trouve  des  pensées  profondes^ 
des  situations  pleines  d'intérêt,  des  paysages  gracieux.  M"*  Guerrier 
de  Haupt  s'est  fort  bien  acquittée  de  sa  difficile  tâche  de  traducteur. 

—  Cœurdoulx  est  le  nom  d'un  personnage  de  la  nouvelle  qui  porte 
ce  titre.  Celui  d'Eupkroêine  eût  été  mieux  approprié,  car,  de  fait, 
c'est  la  jeune  fille  qui  joue  le  rôle  principal.  La  scène  se  passe  à 
Tépoque  troublée  du  règne  de  Charles  IX.  La  donnée  est  très-roma- 
nesque. Euphrosine,  fille  d*un  père  protestant  par  ambition  et  d*une 
mère  fervente  catholique,  est  élevée  dans  un  couvent  où  on  lui  laisse 
ignorer  son  origine  tout  à  fait  plébéienne:  ses  parents  étaient  portiers. 
Lor8que,:plus  tard,  la  vérité  lui  est  connue,  l'orgueil  d'Euphrosine  se 
révolte,  et  elle  veut  cacher  sa  naissance  obscure  dans  le  cloître.  Mais 
le  devoir  filial  l'oblige  à  retourner  près  de  son  père.  Cœurdoulx,  qui 
habite  la  même  maison,  s'éprend  d'elle;  il  est  repoussé.  La  jeune  fille 
persiste  dans  ses  projets  de  vie  religieuse  jusqu'au  jour  où,  à  son  tour, 
elle  ne  peut  rester  insensible  à  l'admiration  qu'elle  inspire  à  un 
grand  seigneur,  et  le  roman  finit  par  un  beau  mariage.  C'est  un 
ouvrage  de  médiocre  valeur,  tant  pour  le  fond  que  pour  la  forme. 

Une  toute  petite  nouvelle,  assez  originale,  complète  le  volume. 
Nina  est  la  fille  d'un  savant,  et  elle  a  pris  la  science  en  horreur, 
en  raison  même  de  l'amour  exagéré  que  son  père  a  pour  les  plantes 
et  les  insectes»  Aussi,  la  jeune  fille  s'esVelle  juré  de  ne  jamais 
épouser  un  amateur  dliistoire  naturelle,  et  c'est  justement  le  con- 
traire qui  arrive. 

—  Irène  est  le  type  de  la  pensionnaire  modèle.  Le  couvent  où  elle 
est  élevée  est  en  Algérie,  et  se  trouve  à  côté  de  la  maison  d'un  riche 
Maure,  qui  j  vit  avec  sa  fille  unique.  La  petite  Léïla,  qui  a  quelques 
notions  du  catholicisme,  sent  croître  son  désir  de  devenir  chrétienne  en 
entendant  les  prières  et  les  chants  des  pensionnaires.  Elle  parvient  & 
se  mettre  en  rapport  avec  Irène,  et,  après  bien  des  obstacles,  Leïla, 
devenue  orpheline,  vient  rejoindre  Irène  au  couvent,  où  elle  échange 
son  nom  de  Leïla  contre  celui  de  Marie.  Irène,  son  éducation  ter- 
minée, rentre  dans  la  maison  paternelle,  ou  elle  est  appelée  à  vivre 
avec  une  belle-mère  frivole;  mais,  grâce  au  bon  caractère  de  la  jeune 
fille,  les  rapports  entre  les  deux  femmes  sont  faciles.  Le  père  dlrène 
est  vieux  ;  aussi  pense-t-il  â  donner  un  protecteur  â  sa  fille  ;  il  a  un 
neveu  en  qui  il  a  toute  confiance.  Fernand  de  Vallades  se  prête 
d'abord  aux  projets  de  son  oncle,  mais  bientôt  une  ombre  voile  les 
jeux  du  jeune  homme,  et  Irène  devine  le  secret  qu'il  voudrait  lui 
cacher.  Fernand  a  vu  Lella-Marie  ;  il  l'aime,  et  la  jeune  Mauresque  le 


—  396  — 

paye  de  retour.  Irène  n'en  peut  douter.  Aussitôt  son  cœur  géné- 
reux a  pris  un  parti  héroïque  ;  elle  renoncera  au  mariage,  elle  veillera 
sur  les  dernières  années  de  son  père,  et,  oelui-d  parti  pour  un  monde 
meilleur,  elle  retournera  dans  le  cloître  où  s'est  passée  son  heureuse 
enfance.  Nul  ne  se  doute  de  retendue  de  son  sacrifice.  Fernand  est 
ravi  de  pouvoir  suivre  son  penchant,  et  Marie,  ignorant  les  désirs  de 
M.  Bazneviel,  accepte,  sans  arrière  pensée,  le  bonheur  qui  s'offre  à 
elle.  —  Il  7  a,  dans  ce  livre,  des  sentiments  nobles  et  délicats,  beau- 
coup de  piété  vraie,  mais  il  j  a  trop  de  descriptions  et  le  style  manque 
de  naturel. 

—  Les  mêmes  défauts  se  retrouvent  dans  Petite  sceur,  du  môme 
auteur.  Ici  ce  sont  deux  sœurs  sur  lesquelles  Tintérét  se  partage.  Le 
but  de  M.  E.  Marcel,  en  écrivant  cet  ouvrage,  a  été  de  prouver  que  le 
vrai  bonheur  réside  à  l'ombre  du  foyer.  Sophie,  la  petite  sœur^  ainsi 
nommée  on  ne  sait  trop  pourquoi,  ne  rêve  qu'au  bonheur  simple  et 
caché.  Mais  à  Louise,  la  brillante  pianiste,  il  faut  la  renommée  et  la 
gloire.  Elle  épouse  Jacques  Mauhel,  un  violoniste  de  premier  ordre, 
et  tous  deux  courent  le  monde  en  quête  de  succès  et  d'ovations.  Pen- 
dant ce  temps,  Sophie  se  consacre  à  ses  parents.  Son  père  est  un  pro- 
digue, sa  mère  est  usée  par  les  soucis  et  les  chagrins.  Elle  a  une 
jeune  sœur,  un  frère  dont  l'éducation  n'est  pas  terminée  ;  l'enfant 
de  Louise  est  souvent  confié  à  ses  soins.  Sophie  est  la  providence  de 
tous.  Un  jeune  médecin,  témoin  de  son  dévouement,  s'éprend  pour 
elle  d'une  vive  afection,  mais  Sophie  ne  peut  songer  à  quitter  les 
siens  tant  qu'elle  se  sentira  nécessaire.  Plus  ^tard,  la  position  de  tous 
s'étant  améliorée,  Sophie  consent  à  être  heureuse  avec  le  docteur 
Paul  Geslin,  qui  lui  est  resté  fidèle. 

—  Mon  sillon,  de  Mlle  Fleuriot,  appartient  à  la  même  catégorie 
d'ouvrages  dont  on  peut  permettre  la  lecture  sans  danger.  —  Ce  livre 
se  divise  en  trois  parties.  La  première  est  de  beaucoup  la  meilleure. 
Mlle  Fleuriot  s'est  surpasssée  en  décrivant  l'intérieur  de  la  famille 
patriarcale  des  Desprès.  Quelle  figure  idéale  que  celle  de  M*»*  Desprèsl 
Un  de  ses  fils,  poussé  par  Tambition,  veut  quitter  sa  petite  ville  de 
Bretagne,  où  il  trouve  qu'on  végète.  Paris  l'attire.  Il  y  a  des  scènes 
charmantes,  surtout  celle  ou  la  pauvre  mère  se  glisse  la  nuit  dans 
la  chambre  où  son  cher  enfant  prodigue  dort  peut-être  pour  la  der- 
nière fois.  On  vit  avec  tous  les  personnages  de  ce  petit  drame,  on 
s'attache  à  eux.  Mélite  et  Fanny  sont  de  charmants  types  de  jeunes 
filles.  Le  caractère  de  Mélite  se  révèle  surtout  dans  les  lettres  qu'elle 
écrit  à  son  frère  René,  qui,  lui  aussi,  comme  Charles  Desprès,  est  allé 
chercher  fortune  à  Paris.  Les  lettres  échangées  forment  la  seconde 
partie  de  l'ouvrage.  La  troisième  est  bien  faible.  Il  semblerait  qu'elle 
a  été  tronquée.  Le  tableau  si  finement  esquissé  a  été  terminé  à  grands 


—  397  — 

coups  de  pinceau,  comme  si  Ton  avait  hâte  d'en  achever  rexécution. 
-—  Abnégation,  par  M""'  Bourdon,  est  encore  une  nouvelle  du  même 
genre.  Cet  ouvrage^  qui  a  eu  de  nomhreuses  éditions,  contient  une 
série  d'historiettes  dans  chacune  desquelles  ressort  Tadmirahle  vertu 
qui  sert  de  titre  au  volume.  Clémentine^  Anna,  Emilie  de  Soulanges, 
Tante  Christine^  Julie,  Ludovise^  Thérèse,  Mademoiselle  de  Turgis,  la  Sœur 
du  Curé  y  nous  offrent  des  types  du  plus  pur  dévouement.  Plusieurs  de 
ces  nouvelles  sont  empruntées  à  des  auteurs  flamapds  et  traduites 
librement  ;  mais  la  plus  grande  partie  appartient  en  propre  à  M°^*  Bour- 
don. Tante  Christine  est  la  plus  intéressante,  quoique  la  donnée  en 
soit  un  peu  banale.  Il  est  inutile  d'ajouter  que  toutes  sont  d'une  irré- 
prochable moralité. 

—  L Institutrice  à  Berlin  est  une  nouvelle  beaucoup  plus  romanesque. 
C'est  un  ouvrage  intéressant,  et  animé  surtout  d'un  souffle  patriotique. 
L'auteur,  M^^*  Maréchal,  éprouve  une  indignation  bien  naturelle  en 
parlant  des  vainqueurs  de  la  France  et  des  désastres  de  notre  pauvre 
pairie.  Gisèle,  son  héroïne,  est  allée  en  Prusse  avant  la  guerre, 
pour  j  être  institutrice  dans  la  famille  de  Qastein,  et  elle  y  est 
aussi  malheureuse  que  possible.  Le  neveu  de  M"**  de  Gastein  arrive  èi 
Berlin  pour  se  remettre  des  suites  d'une  blessure  ;  il  ne  peut  rester 
insensible  aux  charmes  de  Gisèle,  et  il  lui  offre  sa  main  et  sa  fortune. 
Malgré  le  penchant  qu'elle  éprouve  pour  lui,  la  jeune  fille  refuse:  u  Je 
suis  Française  et  catholique,»  répond-elle  à  toutes  ses  instances.  Il  y 
a  de  jolies  pages  dans  ce  récit,  mais  beaucoup  de  longueurs  ;  les  carac. 
tères  sont  forcés,  surtout  celui  de  la  comtesse  ;  de  plus,  le  sujet  est 
assez  scabreux,  non  pas  qu'il  y  ait  rien  d'immoral,  mais  à  quoi  bon 
nourrir  d'illusions  chimériques  l'imagination  des  jeunes  filles  pau- 
vres? 

—  Le  Sire  de  Coucy  nous  reporte  à  plusieurs  siècles  en  arrière,  en 
pleine  époque  de  la  féodalité.  C'est  un  ouvrage  écrit  surtout  au  point 
de  vue  historique.  L'auteur  a  voulu  démontrer  ce  qu'étaient  les  pri- 
vilèges des  communes  de  France,  et  dans  quelle  erreur  sont  tombés 
ceux  qui  ont  cru  les  imiter  en  nous  donnant  la  Commune,  telle  que 
nous  l'avons  vue  à  Paris,  en  1871.  Ce  roman  est  donc  surtout  instructif, 
et  souvent  il  y  a  des  notes  à  l'appui  des  assertions  de  l'auteur.  Ainsi, 
il  est  très-exact  que  Louis  le  Gros  aimait  à  voyager  incognitio  pour 
connaître  les  besoins  de  son  peuple,  et  réprimer  les  exactions  des 
grands  vassaux,  toujours  en  guerre  avec  la  couronne.  La  figure  du  roi, 
personnage  principal  du  drame,  est  bien  dessinée. 

—  Berthilde,  par  M"*  G.  d'Arvor,  appartient  aussi  à  la  catégorie  de 
romans  historiques.  Celui-ci  nous  fait  assister  aux  débuts  de  la  monar- 
chie française.  Tous  les  événements  sont  groupés  autour  des  deux 
grandes  figures  de  Clovis  et  de  sainte  Clotilde.  L'auteur  s'est  efforcée 


—  398  — 

de  faire  ressortir  la  salutaire  inflaence  du  cliristianisme  sur  nos 
pères  à  demi  barbares,  inflaence  qui  a  fait  la  France.  Ce  livre,  fort  bien 
écrit  d'ailleurs,  n'est  pas  ce  qu'on  appelle  un  ouvrage  amusant.  Il 
doit  plaire  plutôt  aux  intelligences  un  peu  sérieuses. 

Dans  Victorius,  le  R.  P.  Gaj  nous  initie  aux  mœurs  romaines  dans 

les  premiers  temps  du  christianisme.  Le  nom  de  l'auteur  dispense  de 
toute  appréciation  au  point  de  vue  moral  et  religieux.  Quant  au 
reste,  voici  ce  que  nous  lisons  dans  la  préface  :  «Ce  livre  est,  avant 
tout,  une  œuvre  d'imagination;  mais,  en  l'écrivant,  nous  avons  scrupu- 
leusement respecté  les  exigences  de  l'histoire ,  tant  profane  qu'ecclé- 
siastique, pour  ce  qui  regarde  l'époque  à  laquelle  se  place  le  draine  que 
nous  racontons.  »  Vietorius  est  écrit  dans  le  genre  de  Fabtola.  Le  lec- 
teur voit  défller  devant  lui  la  phalange  héroïque  des  premiers  martjrs. 
Il  les  voit  dans  les  catacombes,  où  ils  se  préparent  à  tout  souffkir 
plutôt  que  de  renoncera  leur  foi;  puis  au  Golisée  où  ils  périssent  sous 
la  dent  des  animaux  féroces,  aux  applaudissements  d'une  multitude 
dépravée  par  tous  les  vices. 

—  L'ouvrage  de  M"*  de  la  Rochère,  Les  Châtelaines  du  JRoutsilbm, 
nous  fait  assister  aux  guerres  de  religion  qui  ensenglantérent 
les  règnes  de  Charles  IX  et  de  son  frère  Henri  III.  Le  massacre 
de  la  Saint-Barthélémy  avait  exaspéré  tous  les  esprits.  Jusqu'alors, 
la  comtesse  de  Roussillon  avait  vécu  paisible  dans  ses  terres, 
avec  son  âls  et  sa  fille.  Un  remords  pèse  pourtant  sur  sa  vie  : 
elle  a  fait  disparaître  un  enfant  né  du  premier  mariage  de  son  mari. 
Lorsque  son  fils  à  elle  tombe  sous  les  coups  des  protestants,  elle  sent, 
dans  cette  mort,  la  main  puissante  de  Dieu.  Le  chagrin  la  tue,  mais 
elle  ne  veut  pas  mourir  sans  confession.  Espérie,  sa  douce  et  char, 
mante  fille,  brave  toutes  sortes  de  périls  pour  aller  chercher  un  prêtre. 
Elle  amène  un  religieux,  le  père  Alphonse,  qui  absout  la  coupable. 
La  comtesse  apprend  en  môme  temps  que  celui  qui  ouvre  à  son  repen- 
tir les  portes  du  oiel  est  Tenfant  voué  par  elle  à  la  mort  et  miraculeu- 
sement sauvé»  Restée  orpheline,  Espérie  se  consacre  au  soulagement 
des  blessés,  à  quelque  camp  qu'ils  appartiennent,  et  meurt  religieuse. 
U  y  a  beaucoup  de  mouvement  dans  ce  récit,  de  la  couleur  locale,  des 
descriptions  bien  réussies. 

—  L'Armeau  du  meurtrier,  par  M.  Gondry  du  Jardinet,  est  un  tableau 
des  mœurs  corses.  Scènes  de  meurtre,  de  vendetta,  de  guet-apens, 
rien  n'y  manque.  Les  romans  de  ce  genre  se  ressemblent  à  peu  près 
tous.  Pour  compléter  le  volume,  l'auteur  a  ajouté  cinq  petits  récits. 
L'Arrestation  sous  la  Commune  est  le  plus  important  et  le  plus  intéres- 
sant. C'est  l'auteur  lui-même  qui  est  en  seène.  —  Une  noble  vengeance 
est  une  bonne  leçon  de  charité  chrétienne  ;  ce  n'est  qu'un  simple 
trait. 


--  399  — 

—  La  Banque  du  diable  6Bt  le  titre  de  la  première  des  historiettes  que 
M.  Amëdée  de  Margerie  a  réunies  en  un  volume.  L^ auteur  est  assez 
oonnu  pour  que  Ton  sache  d'avance  que  son  livre  peut  être 
mis  de  confiance  entre  toutes  les  mains.  Ses  nouvelles  détachées  seront 
goûtées  surtout  par  les  écoliers,  les  apprentis  et  les  soldats,  qui 
peuvent  facilement  en  saisir  le  sens  pratique.  D.  db  Bodbn. 


THÉOLOGIE 

CursuA  AorlptaraD  Micree»  par  le  P.  Schouppb,  S.  J.  2*  édit. 
Bruxelles,  Glosson;  Paris,  Bray  et  Retaux,  1875.  2  vol.  in-S'de  xii-527  et 
456  p.  —  Prix  :  12  fr. 

Les  ouvrages  du  P.  Schouppe  sont  classiques  dans  les  séminaires 
d'Allemagne  et  de  Belgique.  Ils  se  font  remarquer  par  la  clarté  des 
divisions,  la  concision  des  démonstrations,  Talliance  heureuse  de  la 
méthode  scolastique  et  de  la  méthode  positive.  A  l'université  de 
Louvain  —  nous  le  savons  —  lorsque  quelque  professeur  s'est  élancé 
vers  les  sommets  de  la  haute  théologie,  laissant  loin  derrière  lui  ses 
auditeurs  moins  hardis,  ceux-ci,  à  rapproche  d'un  examen,  se  hâtent 
d'ouvrir  les  Éléments  de  théologie  du  P.  Schouppe,  et  apprennent  en  peu 
de  jours  ce  qu'ils  n'avaient  pas  saisi  dans  les  doctes  leçons  de  leur 
maître. 

Le  Cours  d^Écriture  sainte  a  les  mêmes  qualités.  C'est  un  livre  élé- 
mentaire qui  n'approfondit  pas  les  questions,  mais  les  indique,  fournit 
les  éléments  de  la  solution,  expose  celle-ci  en  peu  de  mots.  L'auteur 
a  divisé  son  ouvrage  en  deux  parties.  Il  consacre  la  première  aux  pro« 
légomènes  et  considère  les  livres  saints  eux-mêmes,  leur  autorité,  leur 
interprétation.  Dans  la  seconde  partie,  sont  d'ahord  résolues  les  difû- 
cultes  principales  que  Ton  oppose  à  la  Bihle.  Nous  avons  admiré  com- 
ment le  P.  Schouppe  avait  pu,  en  moins  de  cent  pages,  parcourir  pres- 
que tous  les  livres  sacrés  et  répondre  aux  objections  les  plus  difficiles, 
surtout  à  celles  que  l'on  élève  contre  Tautorité  de  la  Genèse,  au  nom 
de  la  géologie  et  de  la  chronologie. 

Nous  sommes  à  peine  parvenus  à  la  moitié  du  premier  volume,  et 
quelque  soit  le  mérite  de  l'auteur,  il  n'a  fait  jusqu'à  présent  que 
résumer  pour  les  étudiants  en  théologie,  ce  que  l'on  trouye  dans  les 
ouvrages  plus  étendus.  Ici  commence  une  œuvre  plus  personnelle,  et 
dont  nous  devons  féliciter  le  savant  religieux.  Il  choisit,  dans  la 
liturgie  de  TÉglise  et  dans  le  bréviaire,  les  prophéties,  les  épîtres,  les 
évangiles,  les  psaumes  les  plus  remarquables,  et  il  en  donne  une  courte 
et  substantielle  exposition.  Souvent  il  divise  comme  fait  us  orateur 
dans  un  sermon  ou  dans  une  homélie  ;  d'autres  fois,  il  suit  pas  à  pas 
récrivaln  saoré  ;  toiQOiini  il  fournit  d'heorenses  pensées  et  une  matière 


—  400  — 

féconde  au  prêtre  qui  cherche,  dans  ces  pages,  le  texte  d'une  instruc- 
tion ou  le  plan  d'un  discours. 

Le  style  a  les  mêmes  caractères  que  le  fond  :  fermeté,  concision  et 
clarté.  En  un  mot,  ce  manuel  d'Ecriture  sainte  nous  semble  être  un 
de  ceux  que  l'on  étudiera  plus  utilement  :  sa  brièveté  est  une  précieuse 
qualité  ;  car,  si  Tintelligence  est  éveillée,  une  part  nécessaire  est  laissée 
au  travail  individuel.  E.  Poussbt. 


Tlteolo^la  morall»  S.  Alphonsi  M.  de  Ligobio.  Accèdit  Dissertatio 
P.  ZacJiariœ  et  Dea^eta  Romanorum  Pontificum,  morum  materiam  respicentia. 
Ediiio  omnium  accuratior,  continens  quidquid  auctor  in  cceteris  addidit,  refor- 
mamt  vel  expîicamt.  Augustœ  Taurinoruro,  H.  Marietti.  [Paris,  Lethielleux], 
1875.  2  vol.  in-8  à  deux  colonnes  de  lxxxv-9o2  et  i064  p.  —  Prix: 
12  fr.  50. 

Nous  n'avons  pas  à  faire  ici  Téloge  de  la  Théologie  morale  de  saint 
Liguori  :  tout  le  monde  connaît  son  importance  et  son  excellence.  Les 
Souverains-Pontifes  Benoît  XIV,  Pie  VII,  Grégoire  XVI,  Pie  IX, 
ont  accordé  les  plus  grandes  louanges  à  sa  doctrine.  La  bulle  de  cano- 
nisation relève  dans  ses  écrits  a  une  force  extraordinaire,  une  grande 
science,  un  amour  exquis  de  la  religion,  »  et  elle  ajoute  que  ce  qu'il 
faut  surtout  remarquer,  c'est  qu'un  examen  diligent  a  montré  que, 
quoique  l'auteur  ait  publié  un  grand  nombre  de  livres,  ils  sont  tous 
irrépréhensibles  et  peuvent  être  lus  par  les  fidèles  en  toute  sécurité. 
Dans  le  bref  par  lequel  Pie  IX  lui  a  conféré,  en  1871,  le  titre  de 
docteur  de  l'Eglise,  le  Saint-Père  s'exprime  ainsi  :  a  Nous  voulons  et 
nous  décrétons  que  les  livres,  les  commentaires,  les  opuscules,  toutes 
les  œuvres,  en  un  mot,  de  ce  docteur,  puissent  être  cités,  allégués, 
et,  au  besoin^  employés,  comme  les  ouvrages  des  autres  docteurs  de 
l'Eglise,  non-seulement  en  particulier,  mais  aussi  en  public,  dans  les 
gymnases,  les  académies,  les  écoles,  les  collégps  ;  dans  les  leçons,  les 
discussions,  les  interprétations,  les  instructions,  les  sermons  et  dans 
toutes  les  études  ecclésiastiques.  »  On  n'a  rien  à  ajouter  sur  la 
doctrine  de  saint  Liguori,  après  de  telles  paroles.  Qu'il  nous  suffise 
donc  de  dire  quelques  mois  sur  la  nouvelle  édition  que  vient  de 
publicf  le  célèbre  éditeur  de  Turin,  M.  Hyacinthe  Marietti.  Il  avait 
déjà  publié  une  première  édition  de  la  Théologie  morale^  qui  lui  valut* 
en  1825,  un  bref  de  féli citation  du  pape  Léon  XII.  Depuis  lors,  il  n'a 
cessé  de  travailler  à  améliorer  les  éditions  successives  de  ce  savant 
ouvrage.  Quelque  étendu  qu'il  soit,  il  est  maintenant  réduit  à  deux 
volumes,  ce  qui  le  rend  accessible  à  toutes  les  bourses,  et  quoique 
l'impression  soit  compacte,  elle  est  parfaitement  nette  et  très-lisible. 

L'impression  est  très-correcte.  Quelques  notes  ont  été  sgoutées  au 
bas  des  pages.  On  trouve,  également  au  bas  des  pages,  les  renvois  aux 


—  40i  — 

passages  des  auteurs  cités.  Dans  les  anciennes  éditions,  un  grand 
nombre  dUndications  étaient  fautives  :  on  les  a,  dans  celle-ci,  toutes 
revues  et  soigneusement  vériâées.  En  tête  du  premier  volume^  se 
trouve  un  extrait  de  la  bulle  de  canonisation  de  saint  Alphonse,  le 
bref  de  Pie  IX  conférant  au  saint  le  titre  de  docteur  de  TÉglise  et 
l'importante  dissertation  du  P.  Zacharias,  sur  l'histoire  et  rexcellence 
de  la  théologie  morale.  A  la  fin  du  second  volume,  Téditeur  a  placé 
les  passages  de  la  première  édition  de  Naples  que  l'auteur  a  modifiés 
dans  la  seconde  ;  les  propositions  condamnées  par  le  Saint-Siège,  les 
décrets  des  Souverains-Pontifes  concernant  la  morale,  et  enfin  une 
abondante  table  alphabétique  des  matières,  très-bien  faite,  qui  rend 
extrêmement  facile  l'usage  de  la  Theologia  moralis,  L.  G. 

jréBUB-GbrlBt,  sa  dwinité,  son  caractère,  son  œuvre  et  son  cœur.  Conférences 
par  Fabbé  Charles  de  Place,  chanoine  archiprêtre  de  Notre-Dame  de 
Paris.  Paris,  Durand  et  Pedone-Lauriel,  1875.  In-8  de  xii-390  p.  — 
Prix  :  8  fr. 

Une  main  pieuse  a  recueilli  et  mis  .en  ordre  les  œuvres  oratoires 
laissées  par  M.  de  Place.  Ce  saint  prêtre,  né  à  Saint-Étienne,  le 
14  février  1804,  mort  à  Vichy,  le  19  juillet  1871,  a  été  considéré  par 
ceux  qui  Font  connu  comme  un  des  types  les  plus  purs  de  l'éloquence 
sacrée  au  dix-neuvième  siècle.  Ces  conférences  méritaient  Thonneur 
de  l'impression,  avec  d'autant  plus  de  droit  qu'elles  ne  perdent  pas,  à 
la  lecture,  les  qualités  qui  les  faisaient  le  plus  remarquer  lorsqu'elles 
étaient  prononcées  par  l'orateur  lui-même.  Le  présent  volume  en 
contient  treize»  Jésus-Christ  nous  est  d'abord  représenté  dominant 
toute  l'histoire  du  peuple  juif  et  toute  l'histoire  du  monde  païen,  répon- 
dant aux  besoins  de  réparation  qu'éprouvait  l'humanité,  guérissant 
ses  quatre  grandes  blessures  :  l'ignorance  de  l'esprit,  la  corruption  du 
cœur,  la  souillure  de  la  conscience  et  la  dégradation  de  la  nature,  par 
la  foi,  la  grâce,  le  pardon  et  l'alliance  divine;  il  vient^  il  s'affirme,  il 
se  prouve^  il  s'impose  :  ses  miracles  convertissent  le  monde.  Son 
caractère  est  divin  :  il  ne  s'élève  pas  au  sublime,  il  j  vit  et  il  élève 
tous  les  esprits  à  sa  suite  ;  son  cœur  est  le  modèle  de  la  force  et  le 
modèle  de  la  tendresse.  M.  de  Place  étudie  ensuite  Jésus-Christ  dans 
le  riche  et  dans  le  pauvre,  régnant  sur  toutes  les  âmes,  manifestant 
sa  puissance  et  sa  divinité  dans  ses  œuvres,  se  survivant  à  lui-même 
dans  ses  Évangiles,  dans  son  sacerdoce,  dans  la  papauté.  La  dernière 
conférence  a  pour  objet  le  Sacré-Cœur.  Tous  les  discours  contenus 
dans  ce  volume  n'ont  pas  la  même  valeur  et  la  même  importance, 
mais  ils  se  distinguent  tous  par  leur  solidité,  et  il  n'y  en  a  aucun  qui 
n'ait  un  véritable  mérite.  M.  de  Place  était  un  orateur  d'une  doctrine 
profonde,  d'une  argumentation  vigoureuse,  d'une  dialectique  pres- 
NovEMBBRB  <875.  T.  XIV,  26. 


—  4<tt  — 


santé.  Il  a  écrit  avec  pureté  et  élégance,  avec  précision  et  avec 
noblesse.  Parfois,  il  prend  son  essor  et  s'élève  à  une  grande  hauteur. 
Toutes  les  classes  de  lecteurs  le  liront  avec  intérêt  et  avec  fruit  :  les 
âmes  croyantes  y  fortifieront  leur  foi,  les  âmes  vacillantes  y  trou- 
veront Tappui  dont  elles  ont  besoin  :  chacun  y  apprendra  à  mieux 
aimer  Jésus-Christ.  O.  K. 


Réftitatlon  de  la  GhrlAtolo^le  de  M.    Albert  Itévllle,  par 

M.  l'abbé  J.  Troncy,  docteur  en  théologie  et   licencié   es  lettres.   Paris, 
Berche  et  Tralin,  1875.  In<8  de  474  p.  —  Prix:  6  fir. 

12 Histoire  du  dogme  de  la  divinité  de  Jésus-Christ^  par  M.  Réville, 
dont  M.  l'abbé  Troncy  entreprend  aujourd'hui  la  réfutation,  est  d'une 
date  déjà  assez  éloignée  (1869).  Ce  petit  volume  (188  pages]  a   déjà 
été  Tobjet  d'une  solide  réfutation,  due  à  la  plume  du  P.  Largent,  et 
parue  dans  le  Correspondant  des  10  mai  et  10  octobre  1809,  et  du 
25  avril  1872.  —  L'ouvrage  que  nous  annonçons  aujourd'hui,  aurait 
gagné  à  avoir  un  autre  titre  :  il  est,  en  effet,  une   Christologie,  pour 
parler  à  l'allemande,  ou  plus  clairement  une  exposition  du  dogme  de 
la  divinité  de  Jésus-Christ.  Ce  sujet  avait  déjà  été  traité,  quoique  plus 
en  abrégé,  dans  les  Études  critiques  sur  ks  origines  du  christianisme, 
par  M.  l'abbé  Thomas  (Paris,  1870,  in-8),  dont  nous  avons  rendu 
compte  dans  le  Polybiblion  de  juillet  1870  (t.  VI,  p.  21).  La  Réfutation 
de  la  Christologie,  n'apporte  rien  de  bien  nouveau  dans  son  premier 
livre  :  christologie  du  Nouveau  Testament  (p.  33-160)  ;  nous  pensons 
même  que  la  partie  critique  du  sujet,  c'est-à-dire  tout  ce  qui  concerne 
l'authenticité  des  livres  du  Nouveau  Testament,  n'est  pas  assez  éten- 
due. Nous  ne  trouvons,  en  effet,  que  quelques  courtes  pages  sur  l'époque 
de  la  composition  de  l'Évangile  de  saint  Jean  (p.  153-158),  et  pour- 
tant cette  question  est  une  des  plus  importantes  dans  le  sujet  traité 
par  l'auteur  de  la  Réfutation. 

Le  livre  second,  Christologie  de  la  Tradition,  est  plus  nouveau  dans 
notre  littérature  théologique.  Divisé  en  neuf  chapitres,  il  contient  une 
véritable  histoire  du  dogme  de  la  divinité  de  Notre-Seigneur,  jusqu'au 
concile  de  Nicée.  —  Seulement  la  partie  critique  n'a  pas  dû  demander 
de  longues  recherches  :  elle  est  tirée  tout  entière  du  savant  ouvrage 
de  Mgr  Freppel,  Les  Pères  apostoliques.  Avec  dom  Maran,  M.  Coquerel 
et  Benjamin  Constant,  voilà  tous  les  auteurs  cités  dans  les  notes  de 
l'ouvrage.  Je  ne  parle  pas  naturellement  des  sources,  c'est-à-dire  des 
Pères  anté-nicéens,  qui  sont  souvent  indiqués.  —  Un  chapitre  inté- 
ressant et  bien  fait  de  ce  second  livre  est  le  cinquième,  intitulé  Con- 
fession des  Martyrs  (p.  259-290)  :  l'importance  dogmatique  des  actes 
des  martyrs  y  est  parfaitement  mise  en  relief.   Un  autre  chapitre, 
aussi  utile  que  celui-là,  aurait  dû  trouver  sa  place  dans  le  chapitre  troi- 


—  403  — 

siôme  intitulé  :  Foi  et  culte  des  fidèks  des  premiers  siècks,  relativement  à 
Jésus-Christ  {^.  211-216).  Il  est  singulier  qu'on  ne  tienne  pas  plus  de 
compte  des  récentes  découvertes  faites  aux  Catacombes,  et  qui 
éclairent  d'un  jour  si  vif  l'histoire  des  premiers  siècles  de  TÉglise  et 
les  croyances  des  premiers  chrétiens.  Le  jésuite  Gêner  avait  introduit, 
dans  sa  Théologie  (1767-1777),  des  chapitres  où  le  dogme  s'appuyait 
sur  les  anciens  monuments.  Son  exemple  n'a  guère  eu  d'imitateurs. 
Pourtant,  avec  les  renseignements  nouveaux  de  la  Rome  souterraine, 
des  Inscriptions  chrétiennes  de  Rome,  pour  ne  citer  que  ces  deux 
ouvrages,  que  de  lacunes  on  peut  combler  dans  les  écrits  des  Pères  et 
des  apologistes  des  trois  premiers  siècles  I  11  faut  espérer  que 
M.  Troncy  réparera  cet  oubli  dans  une  nouvelle  édition  de  son  livre. 
Toute  la  seconde  partie  de  son  travail  est  très-intéressante,  et  elle  a, 
d'ailleurs,  le  mérite  de  réunir,  pour  la  première  fois,  tout  ce  que  con- 
tient la  tradition  antérieure  au  concile  de  Nicée,  sur  le  dogme  de  la 
divinité  de  Jésus-Christ.  C.  Trochon. 


Esposizlone    popolare   dalla    dotCrIna    crlatlana,    per  don 

F.  RosA,  Prévôt  de   Bruine.  Turin,  Marietti;  Paris,   Lethielleux,    1875. 
3  vol.  in-8  de  821,  942  et  1117  p.  —  Prix  :  12  fr. 

Avez-vous  jamais  assisté,  dans  quelque  église  d'Italie,  aux  instruc- 
tions que  l'on  appelle  la  dottrina,  et  que  nous  nommons  le  catéchisme  ? 
Je  ne  connais  rien  de  plus  vivant,  rien  qui  sente  moins  le  ton  apprêté 
et  convenu  d'un  grand  sermon.  Les  questions  se  pressent,  les  exemples 
se  succèdent,  les  comparaisons  tiennent  en  éveil  l'auditeur.  La  vérité 
la  plus  abstraite  prend  un  corps  et  devient  saisissable.  La  langue 
italienne,  qui  sait  être  familière  sans  être  vulgaire,  se  plie  à  toute  s 
les  pensées,  accepte  tous  les  mots  et  n'a  point  leet  difficiles  exigences 
de  la  langue  française. 

Don  F.  Rosa,dans  les  trois  volumes  que  nous  avons  sous  les  yeux,  fait 
la  dottrina  selon  la  méthode  d'Italie.  Son  ouvrage  est  une  explication 
à  la  fois  très-simple  et  très-sérieuse  du  catéchisme  de  Turin.  L'auteur 
suit  Tordre  même  du  livre  qu'il  commente  :  et  cet  ordre  est  à  peu 
près  celui  des  catéchismes  en  usage  en  France.  Il  use  largement  des 
meilleurs  travaux  qui  ont  été  composés  sur  le  même  sujet  :  Guiilois, 
Gaume,  Martinet  sont  cités  à  chaque  page.  Il  n'y  a  point  d'instruc- 
tion qui  n'ait  un  exemple,  un  trait,  une  histoire  ;  et  il  faut  voir  com- 
ment l'auditeur  est  pris  à  partie,  est  mis  sans  cesse  en  demeure  de  se 
prononcer.  Sans  doute,  plusieurs  de  ces  récits  et  de  ces  apostrophes 
perdraient  de  leur  charme,  si  on  les  dépouillait  de  cette  belle  langue 
italienne,  qui  ne  peut  rien  dire  sans  grâce  et  sans  vie.  Toutefois, 
n'eùt-on  fait  qu'apprendre  la  véritable  manière  de  parler  aux  igno- 


—  404  — 

rants,  c'est-à-dire  au  grand  nombre,  on  aurait  recueilli  un  précieux 
avantage. 

Nous  avons  déjà  dit  que  le  fond  de  Touvrage  est  très-solide.  Don 
F.  Rosa  expose  les  vérités  religieuses,  particulièrement  les  questions' 
morales,  dans  leurs  détails  ;  nos  lecteurs  français  seront  étonnés  de 
rencontrer  dans  un  catéchisme  développé  ce  que  Ton  réserve  ordinai- 
rement aux  traités  de  théologie.  C^est  qu'en  Italie,  même  après  tant 
de  ruines,  le  christianisme  tient  une  bien  plus  grande  place  qu'en 
France  dans  les  pensées  de  tous  :  on  s'intéresse  encore  à  ce  que  chez 
nous  on  néglige.  Le  lecteur  peu  accoutumé  à  la  langue  italienne  com- 
prendra cependant  sans  peine  YEspozisione  de  don  S.  Rosa  :  le  stjle 
est  sans  prétention,  la  langue  classique.  Cependant  il  est  facile  de 
remarquer,  dès  la  première  page,  que  ce  livre  a  été  écrit  à  Turin  :  on 
ne  trouve  jamais  au  pied  des  Alpes  la  lingua  fiorentina^  qui  ne  se  fait 
entendre  que  sur  les  bords  de  l'Arno  ou  du  Tibre. 

E.    POUSSET. 


SCIENCES 

I*etrl  Antonil  Corte.  In  R.  Taurlnensl  atlieii*  antehac  pro- 
fesBorls,  Elementa  pbllosopbiee,  m  usum  seminariofvm.  Taurini, 
Marietti,  1874  [Paris, Lethielleux],  3  vol.  in-12.  Vol.  I,  Logica^  291  p.;  vol.  Il, 
Metaphysica,  167  p.;  vol.  UI,  Ethica,  247  p.  —  Prix  :  7  fr.  50. 

Principil  elementarl  «11  filosofla»  del  prof.  Testa,  teol.  coll.  Vittore. 
Torino,  Marietti  [Paris,  Lethielleux].  2  vol.  in-i2.  Filosofia  speeulaiiva 
(1874),  435  p.;  Filosofia  nmale  (1875),  379  p.  —  Prix  :  4  fr.  50. 

Nous  ne  devions  pas  séparer  ces  deux  professeurs  ni  leurs  cours  de 
philosophie,  rédigés,  l'un  en  latin,  à  Tusage  des  séminaires,  l'autre  en 
italien,  pour  les  collèges.  Malgré  les  différences  qui  résultent  de  leur 
destination  respective  et  quelques  autres,  ils  ont  un  air  de  famille,  qui 
est  expliqué  par  cette  note  de  M.  Testa  {Filos,  speeul,^  p.  14)  :  «  Nous 
aimons  à  déclarer  que  nous  devons  à  M.  Corte  la  plus  grande  partie  de 
ce  que  renferment  nos  principes  élémentaires  de  philosophie  spécula- 
tive. On  ne  s'en  étonnera  pas  si  Ton  songe  que  les  éléments  dictés  par 
lui  furent,  pendant  une  longue  suite  d'années,  le  texte  de  notre  ensei- 
gnement, de  sorte  que  non-seulement  ses  doctrines,  mais  ses  expres- 
sions même  nous  devinrent  familières.  » 

Il  n'j  a  pas  lieu,  d'être  surpris  de  Tinfluence  qu'a  exercée,  même 
avant  d'être  imprimé,  le  cours  de  philosophie  de  M.  Corte.  Il  est,  au- 
jourd'hui encore,  fort  instructif  et  fort  attachant,  quoique  plus  appro- 
prié à  la  situation  philosophique  de  1850  ou  environ,  qu'à  celle  du 
moment  présent.  Nous  n'avons  garde  de  l'analyser  ici.  Il  suffit  d'ob- 
server qu'il  est  conforme  à  la  division  ordinaire  {Logique^  Métaphy- 
sique  et  Morale),  avec  cette  particularité  que  la  logique  et  la  morale 


3ont  précédëes  chacune  des  questions  de  psychologie  expérimentale 
qui  lui  servent  de  base,  et  que  la  métaphysique  se  divise  en  Psycholo^ 
gie  rationnelle  et  Théologie  naturelle,  sans  aucun  traité  d'ontologie  géné- 
rale. Tous  les  problèmes  philosophiques  sont  discutés  et  résolus  en 
bons  termes,  dans  une  forme  également  éloignée  de  la  sécheresse 
scolastique  et  du  développement  oratoire  ;  le  latin,  sans  prétendre  à 
la  pureté  classique,  n'a  rien  de  barbare.  Ce  qui  nous  a  frappé  surtout, 
ce  sont  les  notes  fréquentes  et  assez  étendues  qui  garnissent  le  bas  des 
pages,  et  qui  offrent  une  quantité  de  citations  intéressantes  emprun- 
tées aux  sources  les  plus  diverses  et  aussi  souvent  à  nos  auteurs  fran- 
çais (cités  dans  notre  langue)  qu'aux  classiques  anciens  et  italiens. 

Plusieurs  pages  donneraient  lieu  à  diverses  critiques  secondaires, 
que  nous  aimons  mieux  supprimer.  Il  suffit  de  dire  que  Tesprit  chré- 
tien anime  toutes  les  parties  de  Touvrage,  mais  qu'il  ne  peut  cepen- 
dant être  accepté  de  tous  les  maîtres  chrétiens,  parce  qu'il  a  une 
couleur  d'école  fort  marquée.  Le  vénérable  auteur  est  rosminien  pur. 
Ses  doctrines  sur  la  génération,  sur  l'union  de  l'âme  et  du  corps,  sur 
le  critérium  de  la  vérité,  sur  la  probabilité  morale,  etc.  sont  exacte- 
ment celles  de  son  maître.  Son  idéologie  surtout  (t.  I*%  p.  90-140)  est 
un  bon  résumé  de  la  théorie  de  Rosmini  sur  la  formation  de  la  con- 
naissance. En  voici  les  points  principaux  :  1.  Meœ  omnes  ad  ideam 
ends  reducunlur;  2.  Ope  ideœ  entis  ideas  omnes  humanus  spiritus  format  ; 
3.  Idea  entis  est  innata. 

La  partie  la  plus  complète  et  la  plus  indépendante  de  toute  idée 
d'école,  dansce  cours,  est  certainement  la  morale,  qui  forme  un  ensemble 
très- complet  et  très-scientifique.  Je  n'y  reprendrai  que  la  définition 
du  suicide,  qui  semble  exclure  plusieurs  cas  de  mort  volontaire  (t.  III, 
p.  133),  ce  qui  n'est  sans  doute  qu'un  défaut  de  rédaction.  Il  faut  donc 
recommander  ce  volume  comme  un  excellent  manuel  de  philosophie 
morale,  et  le  cours  tout  entier  comme  un  livre  fort  estimable  et  fort 
utile,  ne  fût-ce  qu'à  titre  d'exposition  abrégée  du  système  d'un  des 
plus  grands  philosophes  catholiques  du  dix- neuvième  siècle,  f  Antoine 
Rosmini. 

^  M.  Testa,  on  l'a  vu,  n'a  pas  d'autres  doctrines.  Cependant,  sa 
Filosofia  speculativa  semble  étrangère  à  toute  idée  systématique,  et 
peut  convenir  à  l'enseignement  chrétien  de  la  philosophie  élémentaire, 
indépendamment  de  tout  parti  pris  d'école.  La  plupart  des  maîtres, 
pourtant,  regretteront,  sans  doute,  que  le  cours  commence  par  la  méta- 
physique et  par  la  partie  la  plus  élevée  de  la  métaphysique,  IsithéosO' 
phiey  mot  cher  aux  rosminiens,  quoique  M.  Corte  ne  l'ait  pas  adopté. 
Cette  partie,  placée  avant  toute  théorie  de  la  raison,  perd  assurément 
beaucoup  de  sa  valeur  scientifique.  La  psychologie  de  M.  Testa  nous 
paraît  supérieure  ;  elle  est,  du  reste,  conforme  au  cadre  adopté  par  les 


—  406  — 

disciples  de  Rosmini,  mais  Tidëologie  de  ce  dernier  en  est  absente. 
La  logique  laisse  peu  à  désirer.  La  morale  nous  paraît  au-dessus  de 
tout  éloge.  Nous  la  connaissions  et  nous  l'estimions  depuis  longtemps  : 
car  elle  avait  paru  séparément  sous  le  titre  de  Principii  elemeniari  di 
filosofia  morale  (4^  édition^  1865).  Elle  est  assez  conforme  au  plan  et 
aux  idées  générales  de  celle  de  M.  Corte.  Mais  il  y  a  ici  plus  de  déve- 
loppements et  une  appropriation  encore  plus  exacte  aux  besoins  du 
temps.  Lb,  Civilid  cattolka  de  juin  1863,  en  avouant  qu*elle  avait  abordé 
ce  livre  avec  de  grandes  préventions,  j  loua  franchement  la  clarté  du 
stjle,  la  profondeur  de  la  doctrine  et  Tesprit  vraiment  catholique. 
Aujourd'hui  qu'il  reparaît  encore  amélioré  par  l'auteur,  nous  sommes 
heureux  de  lui  donner,  en  connaissance  de  cause,  les  mômes  éloges, 
et  de  le  recommander  très-vivement  aux  maîtres  et  aux  élèves  de  phi- 
losophie qui  entendent  Titalien.  Léonce  Gotjturb. 


Physiologie  de  la  volonté,  par  A.  Herzen,  traduit  de  Tîtalien  par 
le  iD'  Ch.  Letourneau.  Paris,  Germer  Baillère,  i874.  In-18  de  xxiv-192p. 
{Bibliothèque  de  philosophie  cojitemporaine.)  —  Prix  :  2  fr.  50. 

Dans  quelques  mots  a  au  lecteur  »  Técrivain  russe-italien  s'ex- 
prime avec  modestie  sur  la  valeur  et  l'originalité  de  son  livre.  On  n'a 
voulu  le  prendre  au  mot  ni  en  Italie,  où  son  travail  a  fait  beaucoup  de 
bruit,  ni,  sans  doute,  en  France»  où  Ton  a  jugé  utile  d'en  publier  une 
traduction.  Le  fait  est  que  les  idées  exposées  par  M.  Herzen  ne  sont 
pas  encore  communes  et  même,  espérons-le,  ne  le  seront  jamais.  Il 
nie  résolument  et  absolument  la  liberté  ;  et  c'est  tout  simple  pour  lui, 
pur  matérialiste,  qui  nie  aussi,  non-seulement  l'âme,  mais  toute  vie 
distincte  des  lois  physiques,  et  pour  qui  l'organisme  vivant  est  tout 
simplement  un  foyer  de  transformations  matérielles  et  dynamiques,  j  Qom^ 
pris  ce  qu'on  appelle  faits  psychologiques. 

Du  reste,  chez  M.  Herzen,  comme  chez  la  plupart  des  penseurs  de 
la  même  école,  ce  qui  effraye  le  plus^ce  n'est  ni  la  hardiesse  des  asser- 
tions, ni  l'allure  scientifique  de  la  discussion,  c'est  la  parfaite  igno- 
rance de  la  psychologie  laplus  vulgaire,  que  dis-je?  la  parfaite  oblité- 
ration du  sens  intime  et  du  sens  commun.  Ainsi  vous  croiriez  que  la 
négation  de  la  liberté  ne  peut  se  produire  sans  quelques  précautions  à 
l'endroit  de  la  morale  publique,  évidenament  ébranlée  par  une  telle 
doctrine.  Eh  bien,  c'est  tout  autre  chose.  M.  Herzen,  dans  son  Intro^ 
duction^  déclare  et  démontre  à  sa  manière  que  «  la  destruction  de 
l'hypothèse  du  libre  arbitre  ouvrira,  pour  Tavenir,  une  ère  de  progrès,  » 
parce  que  toutes  nos  plaies  sociales  viennent  de  cette  malencontreuse 
et  absurde  hypothèse  ! 

Voici  du  reste,  cette  hypothèse  éliminée,  comment  M.  Herzen 
explique  ce  que  nous  appelons  les  déterminations  libres  de  la  volonté. 


—  407  — 

• 

Pour  lui  (p.  128),  elles  sont  «  le  produit  infaillible,  nécessaire  et 
exclusif  des  trois  facteurs  suivants  :  1®  V organisation  individuelle^ 
c'est-à'dire  la  constitution  physique  et  morale  innée,  les  dispositions^ 
les  tendances,  les  passions,  les  talents^  le  caractère,  etc.;  2®rétatdu 
système  nerveux  au  moment  où  il  reçoit  l'impression  qui  le  met  en 
activité  ;  et  cela  comprend  Tétat  moral  (I)  des  centres  nerveux  produit 
par  réducation  dans  le  sens  le  plus  vaste  de  ce  mot  ;  3^  Vensemble  des 
impressions  perçues  au  moment  d'agir,  soit  que  leur  origine  soit  direc- 
tement externe,  soit  qu'elles  se  réveillent  par  action  réflexe  ou  par 
association  dans  la  trame  intérieure  des  centres  nerveux.  » 

Mais  quelle  est  la  démonstration  de  ces  belles  choses?  La  liberté  se 
constate  psychologiquement  ;  c'est  sur  le  terrain  de  la  psychologie 
que  nous  attendons  ses  adversaires.  M.  Herzen  ne  le  connaît  pas; 
tout  au  plus  vous  prouvera-t-il  que  vous  n'ôtes  pas  libre,  en  vous 
mettant  au  déii  de  vous  jeter  par  la  fenêtre  d'un  troisième  étage.  0 
profonde  intelligence  du  rôle  et  de  la  portée  de  la  liberté  I  La  démons- 
tration de  l'écrivain  florentin  est  physiologique.  Pour  lui,  impression, 
sensation,  détermination  active,  se  suivent  par  une  connexion  méca- 
nique. Le  fort  de  ce  système  est  la  théorie  de  V action  réflexe^  qui  est, 
dans  rintérieur  de  Torganisme,  une  suite  nécessaire  de  l'impression 
extérieure.  Dès  lors,  plus  de  liberté,  que  dis-je?  plus  de  volonté,  plus 
d'instinct:  un  pur  mécanisme.  Malheureusement  pour  M.  Herzen,  tout 
cela  ne  tient  pas  contre  Tévidence  absolue  de  la  conscience,  et  même 
contre  une  étude  un  peu  plus  attentive  de  la  vie  organique,  que  la 
théorie  matérialiste  de  Taction  réflexe  n'explique  pas  le  moins  du 
monde,  comme  le  démontrait  naguère,  dans  le  Correspondant,  M.  le 
D'  Chauffard.  Mais,  que  penser  de  la  moyenne  philosophique  d'une 
époque  où  des  livres  pareils  usurpent,  et  accaparent  presque  exclu- 
sivement, une  réputation  sérieuse  de  profondeur  et  de  solidité 
scientifique  ?  Léoncb  Couturb. 


da  Contttltatlon  de  l*A.ii§pleterre,  considérée  dans  ses  rapports  avec 
la  loi  de  Dieu,  par  M.  F.  Le  Plat,  avec  la  collaboration  de  M.  A.  Delaiab, 
Tours,  Marne  ;  Paris,  Dentu  1875.  2  vol.  in-i8  j.  de  Lxm-340  et  437  p. 
—  Prix  :  4  fr. 

Depuis  un  siècle  environ,  nous  avons  les  yeux  tournés  vers  l'Angle- 
terre; c'est  là  qu'à  diverses  époques,  nous  sommes  allés  demander  des 
modèlesde  constitutions,  un  idéal  de  gouvernement.  Mais,  préoccupés 
de  nos  institutions  politiques  ébranlées  par  des  révolutions  successives, 
nous  n'avons  vu,chez  nos  Yoi8ins,.que  les  résultats  extérieurs  ;  la  cause 
cachée  de  la  force  et  de  la  prospérité  de  l'Angleterre  nous  a  presque 
toujours  échappé.  Le  temps  nous  a  appris  que  ces  institutions  étran- 
gères ne  pouvaient   vivre  sur  notre  sol  ;  voici  maintenant  que  nous 


—  408  — 

allons  apprendre  la  cause  qui  leur  a  permis  de  traverser  tant  de  siècles 
dans  la  vieille  Angleterre.  Pour  donner  un  pareil  enseignement,  un 
homme  ordinaire  ne  pouvait  suffîre,  un  homme  public  eût  été  suspect  ; 
compromis  dans  nos  essais  politiques,  il  aurait  paru  prévenu,  et  se 
serait  montré  ou  trop  hostile  ou  trop  favorable  ;  il  n'aurait  pu  demeu- 
rer calme  au  milieu  de  Tardeur  des  partis. 

Il  fallait,  pour  traiter  un  pareil  sujet,  un  esprit  assez  élevé  pour 
remonter  aux  causes  morales  et  saisir  leurs  rapports,  assez  large  pour 
en  déduire  toutes  les  conséquences  pratiques,  assez  profond  pour  en 
pénétrer  toutes  les  parties,  assez  éclairé  pour  leur  communiquer  cette 
lumière  qu'apporte  la  connaissance  des  diverses  constitutions  sociales. 
L'éminent  auteur  des  Ouvriers  européens  et  de  La  Réforme  sociale, 
M.  F.  Le  Play,  réunissait  pour  une  pareille  œuvre  tout  ce  que  l'étude 
et  l'observation  ajoutent  à  la  connaissance  des  hommes  et  des  sociétés 
les  plus  diverses. 

La  méthode  de  M.  Le  Play  est  trop  connue  pour  qu'il  soit  néces- 
saire de  l'exposer.  Ayant  pour  base  l'observation  calme  des  faits,  elle 
enlève  au  hasard  tout  ce  qu'il  est  possible  de  lui  ôter,  elle  échappe 
aux  préjugés  et  aux  idées  préconçues,  et  demeure  essentiellement  pra- 
tique au  milieu  des  théories  sans  nombre  enfantées  de  notre  temps.  La 
constitution  de  l'Angleterre  nous  apparaît  donc,  au  milieu  de  nos 
désastres  et  de  nos  incertitudes,  comme  un  des  exemples  les  plus  salu- 
taires que  Ton  puisse  offi*ir,  non  pas  à  Timitation,  mais  à  la  méditation 
des  esprits  sérieux.  On  verra  par  là  combien  il  est  plus  utile  pour 
un  peuple  d'améliorer  lentement  sa  constitution  sociale  que  de  la 
transformer  subitement.  C'est  dans  ce  respect  de  son  passé  que  TAn- 
gleterre  a  puisé  sa  force,  c'est  pour  avoir  brisé  avec  le  nôtre  que  nous 
sommes  contraints  d'errer  à  l'aventure  au  milieu  des  essais  les  plus 
divers,  sans  pouvoir  nous  attacher  à  aucune  institution.  Tels  sont  les 
enseignements  que  Ton  retirera  de  l'œuvre  vraiment  magistrale  que 
nous  annonçons. 

Mais  il  est  un  point  de  vue  qui  mérite  d'être  particulièrement  signalé, 
car  il  nous  apparaît  comme  un  symptôme  au  milieu  de  nos  temps 
troublés.  Jusqu'ici,  Ton  n'avait  étudié  les  sociétés  que  dans  leurs 
rapports  avec  la  politique  et  la  philosophie  ;  il  appartenait  à  M.  le  Play 
de  relever  le  point  de  vue  d'où  l'observateur  doit  considérer  les  rap- 
ports sociaux,  en  choisissant,  comme  type  et  comme  idéal  pour  un 
peuple,  la  coutume  fondée  sur  la  pratique  de  la  loi  de  Dieu.  C'est  à  la 
lumière  de  la  loi  morale  que  M.  le  Play  a  étudié  l'Angleterre;  c'est 
sur  cette  pierre  de  touche  qu'il  a. jugé  sa  constitution  dont  aucune 
partie  ne  lui  a  échappé.  Ce  sont  d'abord  les  lieux  eux-mêmes,  dont 
l'influence  est  si  grande  sur  les  populations,  que  l'auteur  nous  présente 
dès  le  début  de  l'ouvrage. 


—  409  — 

Puis,  c'est  le  peuple  aaglais  dont  il  nous  dépeint  le  caractère,  dont 
il  nous  fait  parcourir  Thistoire  dans  une  briôveté  lumineuse.  Nous  pé- 
nétrons ensuite  dans  la  famille,  cette  véritable  unité  sociale,  la  cause 
la  plus  puissante  de  la  grandeur  ou  delà  décadence  d'un  peuple.  Nous 
étudions  successivement  Fassociation  et  la  hiérarchie  dans  la  vie< 
privée,  et  les  rapports  des  Anglais  avec  les  étrangers. 

Dans  le  tome  second,  nous  observons  le  gouvernement  local,  le  gou- 
vernement provincial,  TÉtat,  sous  ses  divers  aspects.  Enfin,  la  conclu- 
sion et  Tépilogue  résument  en  une  admirable  synthèse  l'ouvrage  tout 
entier,  qui  est  lui-même  le  résultat  d'une  vie  entière  consacrée  à  l'étude 
calme  et  sereine  des  plus  hautes  questions  sociales. 

Telle  est^  dans  toute  l'imperfection  d'un  compte  rendu  sommaire, 
cette  œuvre  remarquable,  destinée  à  un  long  et  glorieux  retentisse- 
ment. Puisse-t-elle  nous  apporter  la  fin  de  nos  souffi>ances^  puisse- 
t-elle  provoquer^  parmi  nos  gouvernants  et  dans  toutes  les  classes  de 
la  société,  un  retour  vers  les  saines  traditions  des  peuples  prospères, 
trop  longtemps  abandonnées  en  France,  mais  conservées  en  Angle- 
terre au  milieu  de  tous  les  bouleversem  ents  du  continent  ! 

E.  Dbmolins. 

Lia  Xliéorle  des  atomes  dans  la  conceplloii  générale  du 
monde,  par  M.  A.  Wurtz,  membre  de  l'Institut.  Discours  d'inauguration 
de  la  troisième  session  de  l'Association  française  pour  ravancement  des 
sciences,  suivi  des  éloges  de  Laurent,  de  Gerhardt  et  de  Soubeiran.  Paris, 
G.  Masson,  4874.  In-18  j.  de  147  p.  —  Prix  :  2  fr. 

Dans  ce  remarquable  discours,  le  savant  doyen  de  la  faculté  de 
médecine  a  montré  comment  la  notion  des  atomes,  indiquée  par  les 
anciens,  a  été  précisée  par  la  science  moderne  et  surtout  parla  chimie. 
Tout  j  a  concouru,  depuis  les  mémorables  découvertes  de  Lavoisier, 
Berzélius  et  Dalton  sur  la  combustion,  l'affinité  et  la  loi  des  propor- 
tions définies,  jusqu'aux  belles  études  de  M.  Dumas  sur  les  substitu- 
tions et  les  types  moléculaires.  De  là,  est  sortie  la  théorie  de  l'atomi- 
cité, conception  féconde,  puisqu'elle  permet  non-seulement  d'expliquer, 
mais  de  prévoir  les  propriétés  des  corps  composés,  et,  en  quelque 
sorte,  de  les  créer.  Abordant  ensuite  les  considérations  de  l'ordre  le 
plus  élevé,  l'éloquent  orateur  expose  l'appui  que  la  notion  des  atomes 
apporte  aux  doctrines  de  la  physique  moderne.  Pour  celle-ci,  en  effet, 
tout  n'est  que  mouvement  des  atomes  et  vibrations  qui  s'échangent 
entre  la  matière  pondérable  et  Téther,  «  ce  messager  rayonnant  de  la 
chaleur  et  de  la  lumière.  »  Elle  sait  découvrir  ces  merveilleux  mouve- 
ments des  infiniment  petits  dans  les  phénomènes  les  plus  divers  de 
Taffinité,  de  la  fusion^  de  l'électricité...  Elle  sait  même  obliger  les 
ondes  lumineuses  à  lui  révéler  la  constitution  des  astres  perdus  aux 
confins  du  ciel  visible.  En  retrouvant,  dans  tous  ces  mondes  errants,  les 


-  410  — 

mêmes  corps  simples  que  sur  notre  terre,  quelques  esprits  ayentu- 
reux  se  sont  laissé  séduire  par  Thypothèse  que  les  atomes  des  diffé- 
rentes substances  représentent  les  degrés  successifs  de  concentration 
d'un  seul  élément^  l'éther. 

Telle  est  Tadmirable  ordonnance  de  la  nature,  où  tout  se  ramène  à 
des  mouyements  harmonieux  et  rhythmés.  Mais,  comme  le  dit  excel- 
lemment Torateur  en  terminant,  a  c'est  en  yain  que  la  science  aura 
réyélé  à  l'esprit  humain  la  structure  du  monde  et  l'ordre  de  tous  les 
phénomènes  :  il  yeut  remonter  plus  haut,  et,  dans  la  conyiction 
instinetiye  que  les  choses  n'ont  pas  en  elles-mêmes  leur  raison  d'être, 
leur  support  et  leur  origine,  il  est  conduit  à  les  subordonner  à  une 
cause  première,  unique^  uniyerselle,  Dieu.  » 

Dans  les  Éloges  qui  terminent  le  yolume,  M.  Wurtz  retrace  la  car- 
rière et  rappelle  les  titres  scientiâques  de  trois  hommes  éminents  : 
Laurent,  qui  contribua  plus  que  personne  à  déyelopper,  par  ses  propres 
découyertes,  la  doctrine  féconde  des  substitutions  et  des  édifices  mo- 
léculaires émise  par  M.  Dumas;  Gerhardt,que  firent  connaître  d'abord 
ses  recherches  sur  les  équiyalents  de  Foxjgène  et  du  carbone,  puis 
ses  études  sur  les  composés  groupés  en  séries  homologues  ;  Soubeiran^ 
dont  les  débuts  dans  la  yie  furent  entrayés  par  des  malheurs  immérités 
que  Tadmirable  déyouement  de  sa  mère  et  son  courage  personnel  lui 
firent  surmonter,  et  dont  le  nom  reste  lié  à  d'importants  trayaux  de 
pharmacie  ainsi  qu'à  l'inyention  du  chloroforme.  A.  D. 


da  Conservation  de  Pénergple,  par  B.  Stewart.  Traduit  de  Tanglais, 
par  P.  de  Saint-Robert.  Paris,  Germer  Baillière,  4875.  In-8  de  209  p.  — 
{Biblioihèqm  scientifique  internationale»)  —  Prix  :  6  fr. 

Ce  titre  est  obscur;  au  reste,  la  clarté  manque  souyent  dans  cet 
ouyrage.  Énergie  est  employé  comme  synonyme  de  force  :  par 
exemple,  un  corps  placé  à  une  certaine  hauteur,  un  pendule  qui 
oscille  possèdent  de  Fénergie,  car  ils  sont  capables  de  produire  un 
certain  mouyement,  un  certain  trayail.  L'effet  produit  est  rigoureuse* 
ment  égal  à  la  force  déployée.  L'auteur  démontre,  et  c'est  ici  le 
meilleur  chapitre  de  son  ouyrage,  que  Ténergie  mécanique  est  suscep- 
tible de  se  transformer  en  chaleur.  Rien  ne  se  perd,  car  la  chaleur 
est  une  yariété  de  mouyement.  H.  Dayy  le  prouya  en  faisant  fondre 
deux  morceaux  de  glace  qu'il  frottait  l'un  contre  Fautre.  —  Suiyent 
les  expériences  de  Joule,  sur  la  détermination  de  Téquiyalent  méca- 
nique de  la  chaleur.  L'énergie  se  trouye  partout  dans  la  nature  :  gra- 
vitation, forces  élastiques,  affinité  chimique,  forces  moléculaires  et 
atomiques,  électricité.  Ces  énergies  sont  variables,  mais  leur  somme 
est  constante  ;  c'est  ce  que  l'auteur  appelle  principe  de  la  conservalion 
de  rénergie. 


—  4H  — 

Il  y  a,  aTons^nons  dit,  transformation  da  mouvement  en  chaleur; 
l'auteur  applique  cette  donnée  à  Tunivers  et  au  soleil  en  particulier  ; 
il  laisse  à  entendre  que  la  matière  et  le  mourement  sont  étemels.  Les 
êtres  animés  sont  compris  dans  ce  mouvement  universel.  Ici  l'auteur, 
malgré  ses  obscurités,  nous  parait  plus  que  suspect  de  matérialisme 
(p.  168).  —  Le  traducteur  a  fait  suivre  ce  travail  d'un  mémoire  sur  la  na- 
ture de  la  force.  Il  termine  ainsi  :  «  On  est  amené  de  plus  en  plus  h  ne 
voir  dans  la  nature  que  matière  et  mouvement,  tous  deux  indestruc- 
tibles (p.  208).  n  Ce.  Lefbbvrb. 

Ije  Ci*ime  et  la  Folle»  par  M.  H .  Mâudsley.   Paris,  Germer  Baililère, 
1874.  In-8  de  300  p.  (Bibliothéqm  scierUifique  internationale,)  —  Prix:  6  fr. 

L'auteur  de  cet  ouvrage  est  franchement  matérialiste.  Qu'est-ce  que 
rhomme?  Un  animal  et  rien  de  plus.  Cette  intelligence  dont  il  est  si 
fier  est  <  un  terme  général  exprimant  la  somme  totale  des  fonctions 
du  cerveaa,.que  nous  appelons  intelligence,  sentiment  et  volonté 
(p.  14).»  L'homme  n'a  point  la  libre  détermination  de  ses  actes  :  a  car 
il  y  sl,  pour  l'homme,  une  destinée  que  ses  ancêtres  lui  ont  faite,  et 
nul,  fût- il  capable  de  le  tenter,  ne  peut  résister  à  la  tyrannie  de  son 
organisation  (p.  20).  »  —  «  Le  scélérat  n'est  pas  scélérat  par  un  choix 
délibéré  des  avantages  ou  des  jouissances  de  la  scélératesse  ;  mais 
par  une  inclination  de  sa  nature  faisant  que  le  mal  lui  est  un  bien  et 
le  bien  un  mal  (p.  23).  » 

Poursuivons  :  a  Le  scélérat  juge  ainsi,  parce  que,  quoique  ayant  reçu 
les  mêmes  enseignements  que  tout  le  monde,  il  ne  se  les  est  pas  assi- 
milés. »  —  Car,  pour  l'auteur,  le  sens  moral  n'est  autre  chose  qu'une 
faculté  acquise  (p.  59).  Les  hommes  l'ont  inventé  autrefois  dans  l'in- 
térêt de  la  société  (p.  59).  C'est  un  effet  concomitant  de  l'évolution  de 
l'humanité  (p.  60).  —  Une  personne  qui  n'a  point  acquis  cette  faculté 
est  naturellement  très-apte  à  devenir  criminelle  (p.  57).  Cela  va  de 
soi. 

Venons  aux  rapports  du  crime  et  de  la  folie.  —  a  L'absence  de  sens 
moral  est  une  des  conséquences  possibles  de  l'insanité,  chez  les  ascen- 
dants et  dans  la  famille  (p.  56).  »  —  «Parfois  le  crime  est  très-claire- 
ment le  résultat  d'une  véritable  névrose  (p.  30).  »  L'auteur  développe 
sa  pensée  :  «  Tout  inacceptable  qu'il  puisse  paraître  de  supposer  qu'un 
crime  est  une  preuve  de  folie,  alors  que  pas  un  symptôme  antérieur  n'a 
fait  prévoir  le  mal,  il  est  cependant  possible  que  le  crime  marque  la 
période  où  la  tendance  à  l'insanité  est  devenue  l'insanité  elle-même, 
l'heure  où  l'organe  trop  faible  a  cédé  à.  la  poussée  qu'il  supportait 
(p.  66).  » 

Qu'est-ce  donc  que  le  crime?  L'auteur  aflarme  «  que  Tidée  du  crime 
implique  deux  éléments  :  1*  la  connaissance  que  l'acte  qui  le  constitue 


-  412  - 

est  contraire  à  la  loi  (?)  ;  2^  la  volonté  de  faire  ou  de  ne  pas  faire  cet 
acte  (p.  105).  »  Pourrait-il  j  avoir  des  criminels,  dans  le  système  déve- 
loppé par  Tauteur?  Non,  certes.  Aussi,  ne  sommes-nous  pas  étonnés 
de  lire  en  un  autre  endroit  :  a  A  aller  au  fond  des  choses,  peut-être  trou- 
verait-on qu'en  définitive,  ladifiérence  est  petite,  entre  mettre  le  cri- 
minel en  prison  ou  le  séquestrer  dans  un  asile  (p.  24).  »  Il  conclut 
également  à  Tabolition  de  la  peine  de  mort  (p.  26). 

Toutefois,  l'auteur  admet  que  l'homme  peut  et  doit  travailler  à  se 
préserver  de  la  folie.  Et,  parmi  les  moyens  qu*il  indique,  se  trouve 
au  premier  rang  l'étude  des  sciences  naturelles  (p.  255-292).  Nous 
n'ajoutons  rien.  L.  Lefbbvrb. 


Histoire  de»  mathématique*,  depuis  leurs  origines  jusqu'au  com- 
mencement du  dix-neuvième  siècle,  par  Ferdinand  Hoefer.  Paris.  Hachette, 
1874;  in-d8  j.  de  602  p.  —Prix  :  4  fr. 

Les  conquêtes  inattendues  que  les  sciences  ont  réalisées  depuis  un 
siècle^  et  les  grandes  inventions  qui  en  ont  été  le  magnifique  cortège 
ont  porté  Forgueil  humain  aux  plus  dangereuses  illusions.  On  s'est 
complu  trop  souvent  à  dire  que  l'homme,  affranchi  par  la  science, 
reléguait  désormais  les  religions  vieillies  au  rang  des  jouets  hrisés, 
secouait  le  joug  des  traditions  routinières  et  pouvait  enfin  s'élancer^ 
riche  de  forces,  avide  de  conquêtes,  dans  la  voie  féconde  de  la  liberté 
et  du  progrès.  A  coup  sûr,  la  vraie  science  n'a  jamais  partagé  ce 
délire  orgueilleux  des  faux  savants.  Peut-être,  cependant^  l'auteur  de 
YHistoire  des  mathématiques  a-t-il  cédé  à  quelque  entraînement  dont  le 
lecteur,  au  surplus,  a  peine  à  se  défendre  :  lorsqu'on  assiste  à  cette 
lente  évolution  du  raisonnement,  s'essajant  d'abord  dans  la  numéra- 
tion dactylographique  des  peuplades  primitives  et  s'élevant,  peu  à  peu, 
jusqu'à  peser  les  astres  et  mesurer  les  profondeurs  du  ciel,  comment 
ne  pas  s'émouvoir  au  spectacle  de  «  ce  drame  de  Tesprit  humain  »  et  ne 
pas  s'éprendre  de  quelque  passion  pour  le  héros  ? 

Après  avoir  exposé  d'ingénieuses  considérations  sur  l'origine  des 
mathématiques^  l'auteur  aborde  son  sujet  et  rassemble  des  renseigne- 
ments aussi  curieux  qu'instructifs  sur  les  systèmes  de  numération,  l'in- 
vention des  chiffres  et  les  premières  connaissances  d'arithmétique  ou 
de  géométrie  chez  les  peuples  de  l'antique  Orient  et  chez  les  Égyp- 
tiens. Ce  n'est  que  chez  les  Grecs,  toutefois,  que  de  florissantes  écoles 
cultivèrent  avec  succès,  quoique  en  y  mêlant  des  conceptions  philo- 
sophiques, ces  connaissances  demeurées  infertiles  ailleurs.  C'est 
d'abord  en  lonie,  Thaïes,  Anaxagore  et  les  premières  études  sur  la 
quadrature  du  cercle  ;  ensuite  dans  la  Grande-Grèce,  Pythagore,  unis- 
sant ses  doctrines  mystiques  aux  recherches  sur  les  diverses  propor- 
tions et  le  carré  de  l'hypoténuse;  enfin, Platon  et  ses  disciples,  conti- 


—  4i3  — 

nuant  les  tendances  pythagoriciennes,  perfectionnant  les  méthodes  de 
démonstration  et  découvrant  les  sections  coniques.  Après  la  mort 
d'Alexandre,  le  îoyev  de  la  philosophie  et  de  la  science  se  déplaça  et 
suivit,  en  Egypte,  le  plus  heureux  de  ses  lieutenants.  Alexandrie  vit 
successivement  deux  écoles  célèbres.  La  première  fut  illustrée  par 
Euclide,  le  vrai  fondateur  de  la  géométrie  ;  par  Apollonius,  Tauteur 
d\i  Traité  des  sections  coniques  ;  msiis  surtout  par  Archimède,  le  plus 
grand  mathématicien  de  Tantiquité.  Il  créa,  pour  la  quadrature  des 
aires,  la  méthode  des  limites  ou  méthode  d'exhaustion,  dans  laquelle 
on  peut  voir  avec  raison  le  point  de  départ  de  Tanaljse  infinitésimale. 
Aux  premiers  siècles  de  l'ère  chrétienne,  la  seconde  école  d'Alexan- 
drie compta  encore  plus  d*un  géomètre  éminent  :  Ménélaus  et  Pto- 
lémée,  auxquels  on  rapporte  Torigine  de  la  trigonométrie  ;  Pappus, 
l'auteur  d'un  recueil  précieux  pour  l'histoire  des  méthodes  anciennes  ; 
endn,  Diophante,  que  l'on  peut,  à  bon  droit,  regarder  comme  l'inven- 
teur de  l'algèbre. 

Après  la  décomposition  du  vieux  monde  païen  et  avant  la  renais- 
sance, l'école  d'Athènes  au  sixième  siècle,  l'école  byzantine  au 
septième,  et  les  mathématiciens  latins  après  Charlemagne^  ne 
firent  guère  que  commenter  les  œuvres  de  leurs  prédécesseurs.  Encore 
faut-il  reconnaître  que  les  ouvrages  d'Enclide,  d'Apollonius,  etc. 
furent  transmis  au  moyen  âge  surtout  par  les  traductions  des  Arabes. 
Ceux-ci,  en  développant  les  méthodes,  contribuèrent  beaucoup  à 
fonder  la  trigonométrie  dans  laquelle  ils  substituèrent  la  considéra- 
tion des  sinus  à  celle  des  cordes  ;  à  transformer  l'algèbre  qu'ils  ten- 
tèrent d'appliquer  à  la  géométrie;  et  surtout  à  créer  ralgortthme^  ou 
arithmétique  de  position  par  laquelle  le  zéro  et  les  autres  signes 
numéraux  reçoivent  une  valeur  déterminée  suivant  leur  rang  de  droite 
à  gauche. 

Après  Léonard  de  Pise,  Albert  Durer  et  Léonard  de  Vinci  arrivent 
jusqu'au  seuil  du  seizième  siècle.  On  ne  peut  même  esquisser  à  grands 
traits  la  succession  rapide  des  progrès  scientifiques  que  viennent 
encourager  à  la  fois  et  le  culte  de  l'antiquité,  et  la  découverte  du 
Nouveau-Monde,  et  l'invention  de  l'imprimerie.  Après  Copernic,, 
qui  se  voua  à  l'astronomie^  c'est  Tartaglla  et  Cardan  qui  s'occupèrent 
surtout  des  équations  du  troisième  degré  ;  Oronce  Fine,  qui  crut  avoir 
trouvé  la  quadrature  du  cercle  ;  Yiète,  qui  s'illustra  dans  toutes  les 
branches  des  mathématiques,  et  posa  les  premiers  jalons  pour  l'applica- 
tion  de  l'algèbre  à  la  géométrie  ;  Harriot,  qui  décomposa  les  équations 
en  facteurs  simples  ;  Kepler,  enfin,  l'un  des  plus  grands  géomètres  et  le 
propagateur  des  logarithmes,  inventés  par  Napier  et  Briggs.  Avec  le 
dix-septième  siècle,  commence  l'époque  mémorable  où  la  raison,  que 
guide  une  foi  robuste,  grandit  et  s^élève.  L'idée  de  l'infini  pénètre 


—  414  — 

dans  les  mathématiques,  et  se  traduit,  dans  les  méthodes  nouvelles, 
par  les  mots  de  maxima^  tninima,  tangentes^  différentielles^  infiniment 
petits,..  Il  faut  se  borner  ici  à  citer  des  noms  :  Galilée  et  Cavalieri, 
qui  introduisent  la  conception  des  indivisibles  ;  Descartes  et  Fermât, 
qui  appliquent  Talgfèbre  à  la  géométrie,  et  se  querellent  pour  la  mé- 
thode de  maximis  et  minimis;  Pascal,  qui  donne  de  si  féconds  théo- 
rèmes sur  las  coniques  ;  Desargues  et  Roberval  ;  Walliâ,  qui  applique 
l'analyse  cartésienne  aux  indivisibles  de  Cavalieri  ;  enûn  Newton  et 
Leibniz,  qui,  formulant  les  idées  vaguement  émises  depuis  un  siècle, 
créent  la  méthode  des  fluxions  et  le  calcul  différentiel. 

Au  dix-huitième  siècle,  les  progrès  se  poursuivent,  quoique  le  scepti- 
cisme, qui  se  développe  surtout  par  l'imitation  des  Anglais,  vienne,  peu 
à  peu,  rompre  Taccori  fécond  de  la  foi  et  de  la  science.  Aux  BernouUli, 
qui  élucident  les  probabilités  et  s*attachent  à  Tétude  de  la  chaînette 
ou  d'autres  courbes  célèbres,  succèdent  RoUe,  l'inventeur  de  la 
méthode  d'approximation  dite  calcul  des  cascades;  les  Riocati,  qui  per- 
fectionnent les  procédés  d'intégration  des  équations  différentielles  ; 
Tajlor  et  Nicole,  qui  traitent  surtout  du  calcul  des  différences  finies, 
tandis  que  Moivre  s'attache  à  l'anal  jse  et  aux  jeux  de  hasard  ;  Maolau* 
rin,  qui  formule  les  propriétés  générales  des  courbes  et  s'inspire  des 
méthodes  d'Archimède  dans  son  étude  du  sphéroïde  terrestre;  Euler, 
illustre  entre  tous,  qui  reprend  et  développe,  en  même  temps  que 
d'Alembert,  les  diverses  parties  du  calcul  intégral  ;  Glairaut,  acadé- 
micien à  dix-huit  ans,  célèbre  par  ses  recherches  sur  les  courbes  à 
double  courbure  et  sur  la  figure  de  la  terre  ;  Bezout,  auteur  d  une 
remarquable  théorie  des  équations  ;  Condoroet,  qui  précise  les  condi* 
tiens  d'intégrabilité  des  équations  différentielles  et  le  calcul  des  pro- 
babilités; Lagrange,  dont  les  immenses  travaux,  depuis  le  Calcul  des 
variations  jusqu'à  la  Mécanique  analytique  et  la  Théorie  des  fonctions, 
ne  peuvent  être  énumérés  ici;  Laplace,  qui,  s'il  n'a  pu  créer  une 
science  nouvelle,  était,  au  jugement  de  Fourier,  né  pour  tout  perfec- 
tioimer  et  dont  l'œuvre  capitale  en  mathématiques  est  la  tiiéorie  ana- 
lytique des  probabilités;  enfin,  Monge  et  Garnot  qui,  après  Mauper- 
.tuis,  généralisent  les  méthodes  ébauchées  par  Pascal  et  Desargues, 
l'un  parla  Géométrie  descriptive,  l'autre  par  la  Géométrie  de  position. 

Tel  est  l'enchaînement  historique  de  ces  patientes  conquêtes  qui  ont 
mis  à  la  disposition  de  la  science  de  merveilleux  instruments  de 
démonstration  et  d'investigation.  Peut-être  doit-on  regretter  que  l'au- 
teur, s'arrétant  devant  les  contemporains,  n'ait  pas  cru  pouvoir  faire 
un  pas  encore  et  analyser  au  moins,  avec  son  érudition  savante,  les 
méthodes  de  Cauchy  et  le  calcul  des  imaginaires,  procédés  si  féconds 
et  trop  peu  connus. 

Malgré  cette  laoune  volontaire  et  malgré  la  critique  que  nous  avons 


—  415  — 

indiquée  au  débuts  VBtstoire  des  mathématiques  se  recommande  à  tous 
ceux  qu'intéresse  la  science.  Etudier  la  marche  de  nos  devanciers  dans 
la  route  qu'ils  nous  ont  ouverte,  est  à  la  fois,  en  effet,  un  juste  hommage 
rendu  à  leur  mémoire  et  le  plus  sûr  moyen  de  développer  les  aptitudes 
qui  permettront  de  poursuivre  leurs  travaux.  Aussi,  ne  saurait-on  trop 
désirer  que  nos  programmes  fassent  une  plus  large  part  à  Thistoire 
philosophique  des  sciences.  C'est  là  cet  enseignement  comparé  que  le 
Père  Gratry,  conseille  dans  Pun  des  plus  éloquents  chapitres  àesSources, 
etsurtout  pour  les  connaissances  mathématiques;  car,  suivant  une  pensée 
qu*il  emprunte  à  Bordaz-Desmoulins  :  «sans  les  mathématiques,  on  ne 
0  pénètre  pas  au  fond  de  la  philosophie  ;  sans  la  philosophie,  on  ne 
0  pénètre  point  au  fond  des  mathématiques  ;  sans  les  deux,  on  ne 
«  pénètre  au  fond  de  rien.»  A.  D. 


Goure  de  navl^patlon  Intérieure.  Fleuves  et  riviéreSf  par  H.  de 
Lagrené,  ingénieur  des  ponts  et  chaussées,  chevalier  de  la  Légion  d'hon- 
neur et  de  rOrdre  de  Léopold  de  Belgique.  Paris,  Dunod,  1869-1871- 
1873.  3  vol.  in-4  de  164,  222,  440  p.,  accompagnés  chacun  d'an  atlas  de 
même  format  de  9,  12  et  43  pi.  —  Prix  :  75  fr. 

Traité  de  la  eonatructlon  dea  ponta  et  viaducs»  en  ftierre,  en 
charpente  et  en  métal  pour  routes,  canaux  et  chemins  de  fer,  avec  un  appen- 
dice pour  la  construction  des  souterrains,  par  Al.  R.  Morandière,  inspec- 
teur général  des  ponts  et  chaussées,  professeur  du  cours  de  ponts  à  l'École 
des  ponts  et  chaussées.  Paris,  Dunod,  2  fascicules  in-4  (1874-1875),  for- 
mant un  Tolume  de  440  p.  airec  un  atlas  in-fol.  de  115  pi.  —  Prix  :  80  fr. 

Le  Polybiblion  tient  à  ne  point  laisser  de  côté  les  ouvrages  concer- 
nant les  travaux  publics,  aussi  bien  en  France  qu'à  Tétranger,  et  nous 
ne  pouvons  mieux  inaugurer  Texamen  des  livres  de  cette  spécialité  que 
par  ces  deux  magnifiques  publications  :  elles  font  le  plus  grand  hon- 
neur au  corps  national  des  ponts  et  chaussées  auquel  nous  apparte- 
nons, et  il  n'y  a  pas  besoin  d'être  ingénieur  pour  y  trouver  les  plug 
larges  éléments  d'instruction  :  tout  en  s'adressant  spécialement  aux 
hommes  techniques,  ces  beaux  livres,  avec  leurs  splendides  atlas, 
doivent  entrer  dans  la  bibliothèque  de  tout  homme  qui  se  pique  d'aimer 
les  arts,  les  sciences  et  l'industrie. 

Le  Cours  de  navigation  intérieure  de  M.  de  Lagrené,  n'a  pas  été  fait 
pour  être  professé.  Le  savant  ingénieur,  longtemps  attaché  au  service 
ordinaire  de  la  navigation  de  la  Seine,  aujourd'hui  ingénieur  en  chef 
de  la  Haute-Marne,  en  avait  à  loisir  recueilli  tous  les  documents  pour 
son  instruction  personnelle,  et  il  a  cru,  avec  raison,  qu'il  devait  faire 
profiter  le  public  de  ses  patientes  recherches  et  des  résultats  acquis 
par  sa  propre  expérience.  Quoiqu'il  dise  modestement  dans  sa  préface 
que  les  nombreuses  occupations  de  son  service  ne  lui  ont  pas  permis 
d^exposer  et  de  discuter  dans  un  ordre  suffisamment  logique  les  faits 


—  4i6  — 

observés^  d'approfondir  les  points  restés  douteux,  de  faire  ressortir  de 
Tensemble  les  préceptes  applicables  dans  chaque  espèce,  et  que  la 
plupart  des  sujets  traités  réclament  encore  de  nouvelles  recherches  de 
la  part  des  ingénieurs  et  des  savants  de  tous  les  pays,  nous  avons  ici 
un  excellent  exposé  de  tout  ce  qui  peut  intéresser  le  service  d'entre- 
tien, d'amélioration  et  de  construction  de  la  navigation  dans  les  rivières 
et  les  canaux.  Aucun  traité  complet  n'existait  encore  en  France  sur  la 
matière,  et  nous  nous  rappelons  avoir  été  fort  embarrassé,  en  1866,  pour 
trouver  des  documents  suffisants  de  comparaison  au  sujet  d*une  mission 
qui  nous  avait  été  confiée  pour  étudier  l'aménagement  des  canaux  en 
Angleterre.  Si  quelques  points  spéciaux  sont  encore  à  trancher  d'une 
manière  définitive^  par  exemple,  celui  du  profil  intérieur  à  donner  aux 
murs  de  soutènement  des  quais,  nous  avons  du  moins  l'état  fort  exact 
des  discussions  et  des  expériences  acquises,  et,  désormais,  pour  toute 
question  intéressant  les  canaux  où  les  rivières,  on  sera  sûr  de  trouver, 
dans  Touvrage  de  M.  de  Lagrené,  une  réponse  très-satisfaisante. 

Après  avoir  fait  ressortir  combien  les  améliorations  produites 
dans  le  service  de  la  navigation  intérieure  peuvent  rendre  des  ser- 
vices signalés  au  commerce  et  à  Tindustrice,  M.  de  Lagrené  étudie 
d^une  manière  générale,  en  forme  d'introduction,  le  régime  des  cours 
d'eau,  les  causes  qui  infiuent  sur  la  hauteur  de  leur  niveau,  le  rapport 
entre  le  volume  de  la  pluie  tombée  et  le  débit  des  rivières,  l'influence 
de  la  culture  et  des  forêts  sur  le  niveau  des  crues  ;  il  donne  des  détails 
fort  intéressants  et  très-complets  sur  tous  les  modes  de  jaugeage 
usités  jusqu'ici;  son  érudition,  en  pareille  matière,  est  prodigieuse^  et  les 
recherches  qu'il  lui  a  fallu  faire  pour  retrouver,  dans  une  foule  de  pu- 
blications disparates,  les  résultats  d*expériences  exécutées  depuis  les 
temps  anciens  sur  les  fleuves  et  rivières  de  tous  les  pays,  méritent  la 
plus  sérieuse  attention  :  c'est  là  certainement  un  des  chapitres  de  son 
premier  volume  qui  seront  le  plus  consultés  et  avec  le  plus  de  fruit. 

Après  des  considérations  historiques  sur  les  transformatiouB  suc- 
cessives de  la  navigation  en  rivière  depuis  les  temps  les  plus  reculés 
jusqu'à  nos  jours,  M.  de  Lagrené  aborde  Tétude  des  travaux  à  exé- 
cuter sur  un  cours  d'eau  où  le  chenal  navigable  existe  déjà,  comme  la 
défense  des  rives,  enrochements,  perrés,  clayonnages,  murs  de  quai, 
l'aménagement  des  ports,  des  gares  et  des  docks.  L'exposé  de  tous  les 
systèmes  de  fondations  est  ici  fort  bien  développé,  mais  nous  eussions 
désiré  une  solution  plus  catégorique  de  la  préférence  à  donner  au 
système  anglais  ou  français  pour  la  coupe  des  murs  de  qoai.  Nous 
sommes  peut-être  plus  intéressé  qu'un  autre  à  réclamer  cette  solution 
au  moment  où  nous  nous  engageons  franchement  dans  le  système  fran- 
çais pour  les  trois  kilomètres  de  murs  de  quai  que  nous  commençons 
au  nouveau  bassin  à  flot  de  Penhouët,  à  Saint-Nazaire  :  mais  quoique 


—  4!7  — 

M.  de  Lagrené  dise  modestement  qu'il  n'aborde  pas  cette  recherche, 
parce  qu'il  n'en  a  pas  trouvé  dcisolution  complète,  nous  sommes  per- 
suadé que  sa  longue  expérience  aurait  pu  l'amener  à  la  trancher  dans 
un  sens  ou  dans  l'autre.  C'est  là  un  point  capital  dans  Tart  de  l'ingé- 
nieur, et  tous  les  constructeurs  devront  une  vive  reconnaissance  à 
celui  qui  leur  apportera  la  clef  définitive  de  ce  problème. 

Dans  les  chapitres  suivants,  M.  de  Lagrené  expose  l'état  de  ses 
recherches  et  de  ses  idées  personnelles  au  sujet  de  deux  autres  ques- 
tions pleines  d'actualité  et  qui  sont  encore  plus  capitales  que  la  pré- 
cédente :  celle  de  la  navigation  aux  embouchures  des  fleuves  et  celle 
des  inondations.  La  question  des  crues  et  des  digues  de  défense  contre 
les  inondations  est  bien  étudiée  par  M.  de  Lagrené,  qui  remarque  très- 
justement  que  c'est  par  un  très-faux  raisonnement  qu'on  a  contesté 
l'utilité  de  l'endiguement. 

Après  avoir  examiné  les  différentes  manières  de  se  servir  d'un  cours 
d'eau  au  point  de  vue  de  la  navigation,  soit  en  ce  qui  concerne  l'arri- 
mage de  la  marchandise  (flottage  à  bûches  perdues  ou  en  trains),  soit 
en  ce  qui  concerne  le  mode  d'aménagement  de  l'eau  (navigation  par 
édusées,  réservoirs  employés  pour  relever  le  niveau  de  l'étiage...), 
soit  enfln  en  ce  qui  concerne  le  moteur,  traction,  touage  et  propulsion 
des  bateaux...),  le  savant  ingénieur  passe   en  revue    les   travaux 
d'amélioration  qui  laissent  libre   le   cours  de  l'eau,  c'est-à-dire  les 
travaux  de  fixation  d'un  chenal,  les  rétrécissements,  redressements, 
approfondissements^  mines  sous  l'eau  et  hors  de  l'eau,  draguages,  cu- 
rages, faucardements,etc.On  trouve,  dans  ce  IP  volume,  des  mémoires 
fort  instructifs  sur  l'état  actuel  du  lac  de  Genève,  sur  l'utilisation  des 
lacs  des  Pjrénées,  sur  les  réservoirs  du  Furens  et  de  Saint-Ferréol, 
sur  l'hélice  et  les  roues  à  aubes,  sur  tous  les  modes  de  voilure^  sur  les 
procédés  les  plus  perfectionnés  d'explosion  des  mines,  sur  les  dra- 
guages de  la  Clyde  et  de  l'isthme  de  Suez,  en  un  mot  sur  une  foule  de 
sigets  éminemment  intéressants  et  pratiques.  Jamais  pareilles  matières 
n'avaient  été  étudiées  d'une  façon  aussi  complète  et  aussi  approfondie: 
nous  avons  là  une  encyclopédie  complète  de  tout  ce  qui  concerne  la 
navigation  intérieure  ;  et  si  nous  ajoutons  à  cette  nomenclature  celle 
des  chapitres  du  troisième  volume,  qui  traite  de  la  canalisation  du  lit 
des  rivières  au  moyen  d'écluses  et  de  tous  les  systèmes  de  barrages 
connus,  barrages  à  déversoirs  fixes,  à  fermettes,  à  hausses,  à  tambours, 
à  portes,  à  pontons,  à  presses  hydrauliques,  etc....,  on  reconnaîtra  que 
M.  de  Lagrené  n'a  rien  oublié  de  ce  que  l'esprit  le  plus  méticuleux 
peut  rechercher  sur  les  rivières  et  les  canaux.  Le  savant  ingénieur 
demande  en  terminant  que  l'on  songe  enfin  à  utiliser  l'énorme  quantité 
de  force  motrice,  ai^jourd'hui  perdue,  qui  est  accumulée  dans  nos  biefs, 
pour  l'employer  sur  place  ou  la  transmettre  à  distance  à  Taide  d'aocù** 
Novembre  1875.  T.  XIV,  27. 


—  418  — 

molateurs.  Cela  serait  d'autant  plus  urgent,  à  une  époque  où  Ton  se 
préoccupe  déjà  de  Tinsufâsance  future  des  mines  de  charbon  pour 
l'alimentation  des  machines  à  vapeur,  que  la  création  d^usines  consi- 
dérables éloignées  des  grands  centres  pourrait  avoir  sur  les  popu- 
lations ouvrières  l'effet  moral  le  plus  sérieux  et  le  plus  favorable  à  la 
reconstitution  de  notre  état  social^  argourd'hui  si  ébranlé. 

—  Nous  n*avon8  pas  besoin  de  présenter  longuement  aux  lecteurs 
les  titres  scientifiques  de  Tauteur  du  Traiié  de  la  construction  des  ponts 
et  viaducs  :  directeur  des  travaux  à  la  Compagnie  d'Orléans,  inspecteur 
général  des  ponts  et  chaussées  et  professeur  du  cours  de  ponts  à 
l'école  de  la  rue  des  Saints-Pères,  M.  Morandière  est  assez  connu  par 
les  magnifiques  ouvrages  qu'il  a  exécutés  sur  les  réseaux  du  centre  et 
de  la  Bretagne  pour  qu*il  soit  nécessaire  d^insister  sur  Fautorité  toute 
particulière  qui  s'attache  à  son  enseignement  :  sa  mort  a  été  un  vé- 
ritable deuil  pour  tout  le  ôorps  des  ingénieurs,  et  nous  devons  un 
hommage  public  à  Texpérienoe  consommée  ainsi  qu'au  caractère 
sympathique  et  bienveillant  de  notre  vénéré  maître.  Son  cours  est 
édité  avec  un  luxe  extraordinaire  de  planches,  de  croquis,  de  tableaux, 
de  statistiques,  de  bibliographie  technique,  de  documents  de  toute 
espèce,  puisés,  dit  l'éminent  ingénieur,  «  à  des  sources  bien  sûres  et 
que  je  crois  utiles,  parce  que  j'aurais  certainement  été  heureux  de  les 
avoir  sous  la  main  lorsque  j'ai  commencé  ma  carrière  d'ingénieur.  »  Il 
est  certain  qu'il  est  impossible  de  rencontrer  nulle  part  plus  de  ren- 
seignements pratiques  et  immédiats  que  dans  ce  traité  magistral. 
Âjant  pris  part  à  la  construction  d'un  grand  nombre  de  ponts  et  de 
viaducs  (une  soixantaine  au  moins,  qui  ont  occasionné  une  dépense  de 
plus  de  40  millions),  ayant  assisté  à  la  rédaction  des  projets,  suivi 
l'exécution  des  travaux  et  le  règlement  complet  de  tous  les  comptes, 
M.  Morandière  a  pu  apprécier  d'une  manière  très-exacte  l'importance 
des  dépenses  principales  et  celle  des  dépenses  accessoires  dont,  en 
général,  on  ne  tient  pas  suffisamment  compte,  et  les  tableaux  compa- 
ratifs de  toutes  ces  dépenses,  dressés  pour  une  collection  nombreuse 
d'ouvrages,  donnent  un  intérêt  direct  tout  particulier  à  chacun  des 
chapitres  du  livre.  Aucune  méthode  d'enseignement  n'est  comparable 
à  celle-là^  qui  fait  reconnaître,  à  chaque  pas,  qu'une  bonne  administra- 
tion est,  en  somme,  le  principe  des  véritables  économies. 

Après  des  notes  historiques,fort  érudites,sur  l'origine  des  ponts  dans 
les  temps  anciens,  sur  leur  destruction  par  les  barbares  après  la  chute 
de  l'Empire  romain,  sur  l'institution  des  frères  pontifes  et  l'organisa- 
tion du  corps  des  ponts  et  chaussées,  M.  Morandière  consacre  un 
chapitre  à  des  considérations  générales  communes  à  tous  les  ponts  :  le 
choix  de  l'emplacement,  le  débouché,  le  calcul  des  remous,  la  gran- 
deur des  arches,  la  forme  des  piles,  les  abords,  etc;  puis,  étudiant  spé- 


—  419  — 

oialement  les  fondations,  il  s'étend  longaemeat  sur  tous  les  systèmes, 
si  perfectionnés  de  nos  jours  :  fondations  par  encoffrements,  sur  pilotis, 
à  Fair  comprimé,  par  caissons,  par  puits  coulés  ou  sur  des  pieux  à  vis, 
tous  ces  systèmes  sont  étudiés  dans  leurs  plus  petits  détails  ;  de  nom- 
breux exemples  pratiques  sont  rapportés  à  chaque  cas,  et  nous  signa- 
lerons tout  particulièrement  à  l'attention  la  description  des  fonda- 
tions des  ponts  de  Saint-Louis  et  de  New  York,  en  Amérique,  et  celle 
des  ponts  et  viaducs  de  la  ligne  de  Nantes  à  Lorient,dans  la  traversée 
des  marais  de  Redon.  Toutes  les  péripéties  de  la  lutte  contre  les  plus 
terribles  dif&oultés  naturelles  y  sont  exposées  avec  une  simplicité  et 
une  précision  remarquables.  C'est  là  le  type  àe  renseignement  calme 
et  sûr  de  lui-môme. 

Abordant  le  chapitre  des  ponts  en  pierre^  M.  Morandière  se  livre 
ensuite  à  des  développements  étendus  sur  la  résistance  des  pierres  et 
des  maçonneries  à  Técrasement^  le  tracé  des  courbes  d'intrados,  le 
tassement  et  la  stabilité  des  voûtes,  Tépaisseur  des  voûtes  à  la  clef, 
celle  des  piles  et  des  culées,  le  tracé  des  courbes  de  pression,  les  dis- 
positions des  parties  intérieures  des  ponts^  le  mode,  l'écoulement  des 
eaux,  les  appareils  de  maçonneries,  etc.,  etc.  Dans  tout  cela,  beaucoup 
de  science^  mais  surtout  beaucoup  de  pratique,  et  nous  devons  signaler 
ce  conseil,  au  siget  du  tracé  des  courbes  de  pression  pour  l'étude  de 
la  stabilité  des  voûtes,  qu'au  lieu  de  chercher  Isk  courbe  réelle  au  moyen 
des  constructions  nombreuses  de  MM.  Méry  ou  Durand-Claye,  il  sera 
plus  simple  de  tracer  inamédiatement  la  courbe  de  pression  qui  résulte 
de  Vexpérience^  de  bien  étudier  sa  situation  par  rapport  à  l'intrados  et 
à  l'extrados,  et  de  déterminer  les  actions  qui  en  seront  la  conséquence 
sur  les  divers  points  et  sur  la  culée.  C'est  par  de  nombreuses  études 
de  cette  nature,  ditl'éminent  professeur,  qu'un  ingénieur  peut  devenir 
rapidement  un  bon  praticien  et  un  bon  constructear.  Nous  sommes 
parfaitement  de  son  avis  :  c'est  particulièrement  sur  les  faits  d'expé- 
rience qu'il  convient  de  s'appuyer  dans  la  rédaction  des  projets  ou  dans 
l'exécution  des  travaux. 

La  seconde  moitié  du  volume  est  tout  entière  consacrée  à  l'étude 
et  à  la  description  des  dispositions  générales  d'un  grand  nombre  de 
ponts  et  viaducs  remarquables,  choisis  dans  tous  les  pays,  depuis 
les  temps  les  plus  reculés  jusqu'à  nos  jours.  C'est  là  une  revue 
singulièrement  instructive  et  intéressante,  riche  en  documents  les  plus 
variés,  et  au  milieu  de  laquelle  nous  appellerons  l'attention  sur  l'his- 
toire complète  des  ponts  de  Paris  et  des  viaducs  de  Bretagne.  Ou 
nous  promet  prochainement  le  volume  qui  traitera  des  ponts  en  char- 
pente et  en  métal,  et  de  la  construction  des  souterrains  :  nous  l'atten. 
dons  avec  une  vive  impatience,  car  nos  souvenirs  de  l'Ecole  des  ponts 
et  chaussées  sont  pour  nous  un  sûr  garant  que  cette  seconde  partie  de 


—  «0  — 

rœuvre  de  M.  Morandière  sera  à  la  hauteur  de  celle  que  nous  venons 
de  décrire.  Renb  Rbrvilbr. 


BELLES-LETTRES 

QKuvres  complète»  dr»  Rutebenf,  trouvère  du  treiiième  siécUy  recueil- 
lies et  mises  au  jour  pour  la  première  fois,  par  Achille  Jdbinal,  ex-profes- 
seur de  faculté,  ancien  député.  Nouvelle  édition,  revae  et  corrigée.  Paris, 
Paul  DafQs,  1874-75.  T.  !•%  de  lxiii-250  p.  T.  H,  de  392  p.  T.  ÏH,  de 
436  p.  —  Prix  de  chaque  volume  :  5  fr. 

M.  Jubinal  a  beaucoup  trayaillé,  beaucoup  écrit|  comme  il  ne 
manque  pas  de  nous  le  rappeler  lui-même,  en  donnant,  à  la  fin  de 
chacun  des  trois  volumes  dont  il  vient  d'enrichir  sa  Bibliothèque  elze^ 
uirienne,  l'ample  liste  de  ses  ouvrages,  y  compris  ceux  qui  sont  épuisés 
Parmi  toutes  ses  publications,  celle  qui  lui  a  valu  et  lui  vaudra  long- 
temps le  plus  de  renommée,  c'est  la  publication  des  Œuvres  complètes 
de  Rutebeuf.  Sans  doute,  Tédition  de  1838  (2  vol.  in-8),  pas  plus  que  la 
présente  édition,  quoique  cette  dernière  ait  été  revue  avec  soin  sur  les 
manuscrits  originaux^  n'est  à  l'abri  de  tout  reproche,  mais  si  Ton  tient 
compte  de  toutes  les  difficultés,  et  surtout  de  la  grande  difficulté  qu'il 
y  a  toujours  à  parcourir  une  carrière  où  nul  n'est  encore  entré,  on  doit 
bien  des  éloges  à  M.  Jubinal.  Rutebeuf,  qui  est  incontestablement  un 
de  ceux  de  nos  vieux  poëtes  qui  méritent  le  plus  d'être  connus,  était 
un  de  ceux  que  Ton  connaissait  le  moins.  Soit  à  cause  de  la  verve  et 
du  talent  qui  brillent  dans  les  chants  joyeux  du  trouvère  champenois, 
soit  à  cause  de  l'influence  si  considérable  qu'eurent  ces  chants  sur  la 
langue  d'oil,  qui  atteignit,  au  treizième  siècle,  ce  son  point  culminant  de 
perfection,  »  comme  s'exprime  M.  Jubinal  (t.  P',p.  v),  «  il  importait 
de  mettre  au  jour,  préférablement  à  celles  de  tout  autre,  les  œuvres, 
restées  depuis  six  cents  ans  manuscrites,»  de  l'auteur  de  la  Complainte 
cTOutre-Mer.  En  regrettant  que  la  nouvelle  édition  ne  renferme  pas, 
comme  la  première,  toutes  les  variantes  des  manuscrits  consultés,  je 
signalerai  les  grandes  améliorations  apportées,  en  revanche,  dans  la 
Notice  sur  Rutebeuf ^  dans  la  plupart  des  notes  mises  au  bas  des  pages  et 
surtout  dans  les  notes  et  éclaircissements,  qui  remplissent  presque  tout  le 
troisième  volume  (p.  1-322).  M.  Jubinal  ne  s'est  pas  contenté  de  nous 
donner  toutes  les  poésies  de  Rutebeuf  :  il  nous  a  donné  aussi,  indé- 
pendamment de  divers  extraits  et  de  diverses  analyses  de  poésies  du 
temps  répandus  dans  les  notes  des  deux  premiers  volumes,  un  certain 
nombre  de  pièces  {Additions,  t.  III,  p.  321-354),  qui  ont  un  rapport 
plus  ou  moins  direct  avec  le  texte  du  célèbre  trouvère.  De  même,  il 
he  s'est  pas  contenté  de  reunir  tous  les  renseignements  qu'il  a  pu 


—  421  — 

trouver  sur  Kutebeuf  ;  il  a  aussi  consacré  de  petites  notices  à  Adam 
de  la  Halle^  surnommé  le  Bossu  d'ArraSf  quoique,  suivant  sa  propre 
déclaration,  il  ne  le  fût  mie,  à  Adenez  ou  Adam  le  Roi,  à  Guillaume  de 
Saint- Amour,  à  Thibaut,  roi  de  Navarre,  dit  le  Chansonnier,  etc.  On 
lira  encore  avec  intérêt  ce  que  dit  M.  Jubinal (po^^im)  de  la  médecine 
au  moyen  âge;  des  villes  de  Troye3,  de  Provins,  et  de  Bar-sur-Seine  ; 
de  Marie  de  Brabant;  des  divers  personnages  nommés  Jean  de  Paris; 
du  chevalier  Geoffroy  de  Sergines,  etc.  N^omettons  pas  enfin  les 
observations  qu'adresse  M.  Jubinal  à  certains  érudits,  tels  que  le  pré- 
sident Fauchet (appelé  Faucher,  t.  P',  p.  5,  note  1),  Legrand  d'Aussj, 
Eloi  Johanneau,  M.  Paulin  Paris,  qu^il  proclame  son  «  savant  ami,  » 
et  qui  me  parait  avoir,  sur  b'ien  des  points,  raison  contre  lui.  Il  serait 
trop  long  de  discuter  ici  toutes  les  assertions  douteuses  de  Téditeur  des 
Œuvres  de  Rutebeuf;  mais,  du  moins,  j'exprimerai  Tétonnement  que 
j'ai  éprouvé  en  voyant  M.  Jubinal,  homme  des  Pyrénées,  ne  pas  recon- 
naître dans  le  «  vieil  auteur,  H.  Spondanùs,  »  par  lui  cité  (t.  I*',  p.  53), 
un  voisin,  Henri  de  Sponde  (né  à  Mauléon),  évéque  de  Pamiers,  et 
abréviateur  des  Annales  de  Baronius.  T.  i>b  L. 


HISTOIRE 


IVonvelle  ftéograplile  universelle.  La  terre  et  les  hommes,  par  Elisée 
Reclus.  Paris,  Hachette,  {875.  Gr.  in-8,  24  liyraisons  parues  à  Q  fr.  50  la 
lîTraison. 

Le  Polybiblion  a  parlé  (t.  XIII,  p.  504)  du  plan  général  de  cette 
importante  publication  et  des  quatre  premiers  fascicules.  ATheure 
où  nous  écrivons,  vingt-quatre  livraisons  ont  paru,  et  nous  ne  pouvons 
que  souhaiter  à  Tauteur  et  à  l'éditeur,  comme  au  public  lui-même,  la 
continuation  d'une  périodicité  aussi  régulière  jusqu'à  la  fin  de  Tentre- 
prise.  Vingt-quatre  livraisons,  sur  cinq  cents  annoncées,  sont  peu  de 
chose  encore,  il  est  vrai  ;  mais  la  maison  Hachette  est  de  celle  qui  ins- 
pirent toute  confiance. 

Voici  le  sommaire^  des  chapitres  déjà  parus  :  on  sait  que  le  premier 
volume  comprend  l'Europe  méditerranéenne,  moins  la  France  et  l'Afri- 
que. Chapitre  premier,  Considérations  générales  (p.  1  à  9),  une  gravure. 

—  Chapitre  ii,  l'Europe  (p.  9  à  33)  :  Limites,  divisions  naturelles,  zone 
maritime,  climat,  races  et  peuples,  une  gravure,  cinq  cartes  dont  une 
coloriée.  —  Chapitre  m,  la  Méditerranée  (p.  33  à  53),  forme,  faune, 
pêche,  salines,  commerce  et  navigation,  une  gravure,  quatre  cartes. 

—  Chapitre  iv,  la  Grèce  (p.  53  à  129)  :  Vue  d'ensemble,  Grèce  continen- 
tales et  Morée,  tles  de  la  mer  Egée  et  Ioniennes,  considérations 
sur  le  présent  et  l'avenir  et  le  gouvernement  de  la  Grèce,  treize  cartes, 
six  gravures,  —  Chapitre  v,  Turquie  d'Europe  (p,  129  à  245)  :  Vue 


—  442  — 

d'ensemble,  Crète  et  Archipel,  littoral,  Thraoe,  Macédoine,  Thea- 
salie,  Albanie,  Épire,  Slavie,  Bulgarie,  Goayernement  et  administra* 
tion,  présent  et  avenir,  quatorze  cartes,  neuf  gravures,  une  carte 
ethnographique  coloriée.  — Chapitre  vi,  la  Roumanie  (p.  245  à  270)  : 
quatre  cartes,  deux  gravures.  —  Chapitre  vii,  la  Serbie  et  le  Monté- 
négro (p.  2T7  à  208)  :  trois  cartes,  une  gravure.  —  Chapitre  viii,  Italie, 
partie  non  terminée  encore  avec  la  vingt-quatrième  livraison. 

On  voit  Timportance  de  cette  publication,  tout  à  la  fois  scientifique 
et  illustrée  :  on  pourrait  ajouter  littéraire,  tant  l'auteur  excelle  dans 
les  descriptions.  C'est  là,  en  effet,  un  ouvrage  non  de  détails  mais  de 
vues  générales.  M.  Reclus  fait  parfaitement  saisirles  grandes  lignes  et 
la  configuration  naturelle  des  différentes  régions  qu'il  étudie,  mais  il 
ne  faut  pas  lui  demander  de  notions  soi-disant  géographiques,  telles 
qu'on  les  conçoit  dans  les  classes  et  qu'on  les  ofiï*e  aux  candidats  pour 
les  examens.  Il  suppose  connus  les  principes,  les  définitions  mêmes 
des  termes  techniques  qu'il  emploie,  les  divisions  politiques  ou  admi- 
nistratives, et  s'attache  à  vous  montrer  l'aspect  physique  du  pays.  C'est 
ainsi  que,  dans  le  chapitre  sur  l'Italie,  dont  nous  reparlerons  prochaine- 
ment, il  a  plusieurs  pages  très-remarquables  et  instructives  sur  le 
système  hydrographique  du  bassin  du  Pô.  D'un  autre  côté,  l'étude  des 
races  et  des  populations  attire  aussi  son  attention. 

Quant  aux  théories  politiques  et  sociales  de  l'auteur,  bien  qu'il  soit 
sobre  jusqu'ici  dans  l'exposé  des  systèmes  contre  lesquels  sa  notoriété 
en  ce  genre  ne  devrait  que  nous  mettre  en  garde,  on  peut  regretter 
quelques  vagues  insinuations  pour  le  moins  contestables  :  ainsi  il  pa- 
rtit admettre  qu'il  faille  «  chercher  la  trace  des  ancêtres  sur  le  sol 
même  qui  porte  les  descendants  »  ce  qui  contredit  manifestement  la 
thèse  certaine,  et  d'ailleurs,  beaucoup  plus  scientifique,  de  l'unité  d'o- 
rigine, dans  le  groupe  adamique,  de  toutes  les  races  humaines.  Ailleurs 
quelques  réflexions  sur  l'équilibre  européen,  sur  la  civilisation,  qu'il 
considère  seulement  au  point  de  vue  matériel,  constituent  des  digres- 
sions auxquelles  il  eût  été  préférable,  croyons-nous,  qu'on  neselaissAt 
pas  entraîner,  surtout  dans  un  travail  géographique. 

Malgré  ces  desiderata,  nous  n'hésitons  pas  à  recommander  un  ouvrage 
où  l'on  trouve  d'ailleurs,  le  plus  souvent,  un  correctif  aux  rares  asser- 
tions qu'une  critique  chatouilleuse  pourrait  relever  çà  et  là. 

F.  DB  ROOUBFBUIL. 


Xhe  IVIc^ne  and  Apoatles*  Greeds.  Their  îiterary  Hisiory  ;  iogethet 
mih  an  accxmnt  of  IhB  Grotot'^  ani  Heceptim  of  the  Sermon  cm  the  FoitA,  eom- 
monly  called  a  the  Creed  of  saint  Athanasius,  »  By  C.  A.  Swainson,  D.  D. 
Canùti  of  ChichesieTy  Nomsian  Professor  of  IHvinity  at  Cambridge^  and 
examining  Chaiplain   to  the  BUhop   of  Chichester;  fcrmerly  Fellow  and 


—  423  — 

Tulor  of  Chrùfi  Collège^  Cambridge.  London,  John  Mnrraj,  4875.  In-8  de 
xv-542  p. 

Xbe  il.tlianaslan  Greed,  an  EximtityixHm  ofreeeni  Theorieê  retpeeting 
its  Date  and  Origin,  wiih  a  Posieript,  referring  to  Prof  essor  Swatnscn'saccount 
of  Us  Grcwih  and  Réception,  wMch  is  contained  in  his  work  eniitled  «  the  Nicene 
and  Âpostles'  Creeds^  tfieir  Hteray  History.  »  By  G.  D.  W.  Ohuanney,  M.  A. 
curateof  Whiichurch^  Somerset,  London,  Riyingtons,  i875.  In-12  de  xtx-378 
p.  —  Prix  :  10  fr.  75. 

Notre  époque  a  le  mérite  d'avoir  sonlevé  un  grand  nombre  de 
questions  historiques  qui,  jusqu'à  présent,  avaient  peu  ou  point  attiré 
l'attention.  Parmi  ces  questions,  Tune  des  plus  intéressantes,  sans 
contredit,  est  Thistoire  des  symboles  de  notre  foi.  Le  mouvement 
religieux  qui  s'est  manifesté  en  Angleterre,  et  qui  a  porté  tant  d'esprits 
éminents  à  tourner  leurs  regards  vers  les  premiers  siècles  chrétiens,  a 
déterminé  plusieurs  savants  à  rechercher  l'origine  des  Credo,  En  1870, 
M.  Swainson  publia  son  livre  intitulé  :  The  Atkanasian  Creed,  and  its 
Usage  in  the  English  Church,  Il  y  soutient  que  le  symbole  dit  de  saint 
Athanase,  dans  sa  forme  actuelle,  ne  fut  complété  qu'après  la  mort 
d'Hincmar,  archevêque  de  Reims,  laquelle  eut  lieu  en  822.  Son  opinion 
fut  vivement  combattue,  on  le  devine  aisément.  Dans  une  lettre 
adressée  au  Guardian,  le  20  mars  1872,  il  déclare  que  sa  conviction 
bien  réfléchie  est  que  ce  symbole  n'existait  pas,  tel  qu'il  est  aujourd'hui, 
avant  le  milieu  du  neuvième  siècle,  et  en  particulier  les  articles  7-20. 
Il  a  donné  plus  de  précision  encore  à  ses  assertions  dans  son  Plea  for 
Delay^  publié  en  1873,  où  il  avance  que  le  symbole  de  saint  Athanase 
a  été  composé,  comme  nous  le  connaissons,  de  750  à  870,  et  que  c'est 
en  870  qu'il  reçut  sa  forme  définitive.  Dans  l'intervalle,  vers  la  fln  de 
1871^  M.  E.  3.  Ffoulkes  avait  afûrmé  avec  assurance  que  le  même 
symbole  avait  été  compilé^  en  l'an  800,  par  Paulin,  archevêque 
d'Aquilée,  et  qu'il  avait  été  répandu  dans  la  chrétienté  comme  l'œuvre 
authentique  de  saint  Athanase,  par  l'empereur  Gharlemagne,  aidé 
dans  cette  fraude,  par  Paulin  et  son  ami  Alcuin.  Le  D'  Swainson,  dans 
le  volume  qu'il  a  publié  cette  année,  a  élargi  son  cadre  :  il  s'occupe  du 
8ymbole|des  apôtres  et  de  celui  de  Nicée  en  môme  temps  que  de  celui  de 
saint  Athanase.  Sur  ce  dernier,  il  modifie  légèrement  ses  assertions 
de  1873  :  sa  conclusion  est  que  le  Qmcumgue  fut  achevé  dans  la  pro- 
vince de  Reims,  entre  les  années  860  et  870  (p.  448).  Quant  au  symbole 
de  Nicée,  il  pense  que  ce  Credo  était  destiné  à  servir  de  règle  de  foi, 
mais  non  de  symbole  qui  dût  être  récité  par  les  nouveaux  baptisés 
(p.  68).  Le  symbole  des  apôtres  est,  pour  M.  Swainson,  le  Credo 
romain.  On  peut,  dit-il,  -en  faire  aisément  l'histoire,  à  partir  du  jour 
où  Easèbe  en  présenta  un  exemplaire  au  concile  de  l'an  318,  jusqu'à 
la  version  aujourd'hui  reçue  et  qui  fat  adoptée  par  Récarède  en  589. 
Selon  lui,  l'auteur  à  qui  nous  le  devons  tel  que  nous  l'avons  mainte- 


—  424  — 

nant  est  Marcel,  évêque  d*Aucyre,  en  Galatie,  qui  assista  an  concile  de 
Nicée;  il  arrangea  les  doctrines  flottantes  de  l'Occident,  les  articles 
principaux  de  leurs  règles  de  foi^  k  la  manière  du  symbole  de  Nicée, 
et  peut-être  la  mention  distincte  des  relations  du  Fils  avec  le  Père  et 
le  Saint-Esprit  avait-elle  pour  but  de  repousser  la  charge  de  sabel* 
lianisme  qui  avait  été  soulevée  contre  lui  (p.  155-157). 

M.  Swainson  a  fait  une  œuvre  de  grande  érudition  et  de  beaucoup 
de  science.  Il  s'est  livré  à  des  recherches  très-approfondies,  et 
désormais  il  sera  impossible  de  se  passer  de  son  travail  pour  Tétude 
des  symboles.  Nous  regrettons  d'autant  plus  que  tant  de  labeur 
Fait  amené  &  des  conclusions  fausses.  Il  fait  trop  bon  marché  de  la 
tradition  (p.  15),  ce  qui  l'amène  &  tomber  dans  des  contradictions 
(p.  27,  31,  32-33,  45,  etc.),  et  ce  qui  le  conduit  à  émettre  des  opinions 
insoutenables.  On  ne  tardera  pas,  sans  doute,  à  réfuter,  en  Angleterre, 
les  conclusions  de  l'auteur  du  Nicene  and  Apostks*  Creeds,  comme  on  a 
déjà  réfuté  les  conclusions  de  ses  publications  précédentes  et  celles  de 
M.  Ffoulkessur  le  Quicumque.  Les  professeurs  Heurtley,  Stubbs,  Jones, 
Brewer  et  M.  Ommanney  se  sont  distingués  dans  cette  controverse. 

—  Ce  dernier  vient  de  publier  une  réfutation  remarquable  et  complète 
des  erreurs  de  MM.  Ffoulkes  et  Swainspn,  sur  l'origiDe  du  symbole  de 
saint  Athanase.  Il  établit  solidement  qu'il  est  impossible  de  prouver 
que  le  Quicumque  a  reçu  des  additions  au  huitième  et  au  neu- 
vième siècles,. et  il  déduit  de  cette  impossibilité  son  antiquité.  L'étude 
de  ce  document  porte  à  croire  qu'il  avait  été  composé  avant  le  concile 
d'Éphèse,  tenu  en  431.  On  ne  peut  l'attribuer^  il  est  vrai,  à  saint  Atha- 
nase^ comme  tous  les  savants  en  conviennent;  on  n'a  pas  non  plus  de 
raisons  suffisantes  de  l'attribuer  à  saint  Hilaire  d'Arles,  comme  Ta 
fait  Waterland,  mais  quelque  incertaine  que  soit  son  origine,  quelque 
inconnu  que  soit  son  auteur,  sa  valeur  n'en  reste  pas  moins  hors  d'at- 
teinte, car  elle  dépend,  non  de  celui  qui  l'a  composé,  mais  de 
l'acceptation  que  l'Église  en  a  faite. 

The  Athanasian  Creed  est  mieux  écrit  que  The  Nicene  and  Apostles* 
Creeds.  L'érudition  du  D'  Swainson  est  parfois  fatigante  :  sa  marche 
est  un  peu  lourde  et  embarrassée  ;  il  est  surchargé  de  citations,  de 
parenthèses,  de  digressions.  M.  Ommanney  se  meut  librement  au 
milieu  des  autorités  qu*il  cite  avec  discrétion  et  à-propos  ;  il  est  d'une 
lecture  facile  et  agréable.  G.  K. 


Olscoum  de  noire  tr^a-aalnt  P^re  le  Pape  Plo  I^»  adreir 
8és  dans  le  palais  du  Vatican  aux  fidèles  de  Rome  et  du  mande  catholique 
depuis  le  commencemnit  de  sa  captivité^  recueillis  et  publiés  pour  la  pre. 
mière  fois  par  le  R.  P.  P.  de  Franciscis,  dci  pii  operarii.  Seule  traduction 
française  authentique  faite  et  revue  à  Rome^  dédiée  à  S.  F),  le  cardinal 


—  425  — 

Monaco  La  Yalletla.  Paris,  LeClere,  4875.  2  vol.  ia-8  de  528  et  ix-544  p. 
Le  3*  vol.  est  sous  presse.  —  Prix  :  6  francs  le  vol. 

Le  PolybibliDn  (t.  XI,  p.  156)  a  rendu  compte  des  Actes  et  paroletde 
Pie  IXj  captif  au  Fa/tcan,  publiés  chez  Palmé  par  M.  Roussel,  rédacteur 
de  l'Univers;  nous  ayons  alors,  signalé  les  réclamations  que  ce  travail 
avait  provoquées  de  la  part  du  R.  P.  de  Franciscis,  qui  faisait  à  Rome 
une  publication  analogue.  Le  R.  P.  de  Franciscis  prétendait  donner 
seul  le  texte  complet  et  authentique  des  discours  pontificaux,  tandis  que, 
selon  lui,  M.  Roussel  n'en  donnait  que  des  analyses,  non  autorisées 
par  le  Souverain-Pontife.  —  Le  journal  Z^Jfom/e  (n^*  des  6,  7  et  14 
février  1874)   répondait  que  les  discours  publiés  par  M.  Roussel 
étaient  reproduits  diaprés  les  sténographies  communiquées  à  YOs-> 
servatore  romonOf  et  accusait  le  P.  de  Franciscis  d'avoir  arrangé 
les  discours  de  la  publication  romaine.  —  11  semble  qu'aujourd*hui 
le  public  puisse  se  prononcer  entre  les  deux  éditeurs.  En  ce  qui  con- 
cerne le  texte  même  des  discours,  M.  Roussel,  vérification  faite, 
reproduit  le  plus  souvent  celui  qui  se  trouvait  dans  les  colonnes  de 
VUnivers.  Sans  doute,  l'Univers  a  donné  ordinairement  le  texte  de 
YOsservatore  romano,  mais  souvent  aussi  il  s'est  contenté  des  som- 
maires ou  anal;^ses  à  lui  transmis  par  son  correspondant  romain. 
Quant  à  la  quantité,  l'édition  du  R.  P.    de  Franciscis   est  infini- 
ment plus  considérable.  Elle  comprend,  en  effet,  trois  volumes,  tandis 
que  celle  de  M.  Roussel  n*en  a  qu'un.  D'un  autre  côté,  M.  Roussel 
publie  certains  documents,  tels  qu'encycliques,  brefs,  etc.,  qui  ne  se  trou- 
vent pas  dans  l'ouvrage  du  R.  P.  de  Franciscis,  lequel,  sauf  quatre- 
vingt  dix-neuf  morceaux  importants,  mais  en  petit  nombre  (13  pour 
les  deux  premiers  volumes),  rejetés  en  appendices,  ne  donne,  con- 
formément au  titre  qu'il  a  choisi,  que  les  discours  prononcés  par  le 
Pape  au  Vatican,  en  réponse  aux  différentes  adresses  des  députations 
catholiques. 

Voici  des  ohifQres  qui  établiront  la  part  des  deux  auteurs  dans  leurs 
travaux  de  compilation,  qui  se  complètent  ainsi  nécessairement 
l'un  par  l'autre,  et  seront  tous  deux,  pour  l'historien  futurdu  règne  de 
Pie  IX,  une  des  sources  les  plus  riches  et  les  plus  indispensables  à 
consulter  :  pour  l'année  1870,  M.  Roussel  donne  huit  discours,  le 
P.  de  Franciscis  deux  seulement  :  mais,  pour  1871,  M.  Roussel  n'en 
donne  que  soixante-quatre,  tandis  qu'il  y  en  a  cent  trente-sept  dans 
le  P.  de  Franciscis  :  pour  1872,  le  premier  en  publie  soixante-seize, 
le  second  cent  un  :  pour  1873,  M.  Roussel  en  reproduit  trente-neuf 
jusqu'au  24  juillet,  et  le  P.  d^Franciscia  cinquante  jusqu'au  18  sep- 
tembre, et  le  3*  volume  devra  compléter  incessamment  la  collection. 
Les  deux  auteurs  font  connaître  dans  une  sorte  ^argument  à  quelle 
occasion  tel  ou  tel  discours  a  été  prononcé  :  mais,  encore  sous  ce  rap- 


—  «6  — 

port,  l'éditeur  romain  nous  parait  beaucoup  plus  complet,  sortoat 
dans  le  second  volume,  où  il  imprime  le  plus  souyent,  ayeo  les  noms 
des  membres  des  députations,  les  adresses  mêmes  qu'ils  ont  déposées 
aux  pieds  du  Souverain-Pontife.  En  somme,  et  comme  conclusion 
pratique  à  ces  réflexions,  nous  croyons  indispensable  de  se  munir  des 
deux  ouvrages  ;  car,  ainsi  que  nous  l'avons  dit  tout  à  Theure,  quelques 
documents  qui  font  défaut  dans  Tun  se  retrouvent  dans  l'autre.  La 
question  d'authenticité,  bien  qu*à  notre  avis,  et  vu  surtout  les  approba- 
tions romaines^  il  y  ait  de  très-fortes  présomptions  en  faveur  du 
R.  P.  de  Franciscis^  ne  nous  paraît  pas  6ien  résolue  ;  voici,  par 
exemple,  à  ce  siget,  un  détail  que  nous  livrons  à  qui  de  droit  :  la 
réponse  du  Pape  au  duc  de  Norfolk  (4  avril  1871,  selon  M.  Roussel,  et 
5  avril,  selon  l'édition  Le  Clere)  a  été  prononcée  en  français;  or,  les 
deux  textes,  identiques  poiir  le  fond,  ne  se  ressemblent  pas  du  tout 
pour  la  forme  :  lequel  est  le  vrai  f  F.  db  Roquefeuil. 


Sainte  Jleanne-Françolse  Ii*reinyot  de  Chantai*  sa  vie  et 
•ea  oeuvrea.  —  Tome  II.  (Œuvres  diverses).  Paris,  E.  Pion,  4875.  Gr. 
in-8  ^e  xxiv-592  p.  et  un  portrait.  —  Prix  ;  8  fr. 

Nous  avons  (t.  XII,  p.  339)  rendu  compte  du  premier  volume  con- 
sacré, par  les  religieuses  de  la  Visitation  d'Annecy,  à  la  vie  et  aux 
œuvres  de  Tillastre  fondatrice  de  leur  ordre  et  de  leur  monastère, 
sainte  Françoise  de  Cbantal.  Ce  premier  volume  contenait  les  mémoires 
sur  la  vie  et  les  vertus  de  la  sainte,  rédigés  par  la  mère  de  Cbaugy, 
Tune  de  ses  compagnes.  Les  éditeurs  nous  présentent  ai]gourd'hui  un 
volume  tout  entier,  composé  des  œuvres  diverses  de  sainte  Chantai,  et 
orné  d'un  magnifique  portrait  gravé  sur  acier,  d'après  Toriginal  con- 
servé au  monastère  de  la  Visitation  de  Turin.  Ces  CEuwres  diverses  ne 
sont  point  des  traités  ou  des  ouvrages  qui  aient  jamais  été  destinés  à 
la  publicité,  car  la  fondatrice  de  cet  ordre  célèbre  n'a  pas  écrit  une 
seule  page  en  vue  de  l'impression  :  mais  si  elle  n'a  jamais  songé  à  faire 
œuvre  d'écrivain,  elle  a  consacré  toute  sa  vie  religieuse  à  son  œuvre 
de  fondatrice,  au  gouvernement  de  son  ordre  et  à  la  conduite  spiri- 
tuelle des  religieuses  soumises  à  son  autorité,  exerçant  surtout  son 
action,  aussi  bien  pour  l'administration  générale  que  pour  la  direction 
particulière,  par  des  exhortations,  des  conseils  ou  des  entretiens, 
tantôt  pendant  les  récréations,  tantôt  dans  les  réunions  prescrites  par 
la  règle,  tantôt  dana  les  assemblées  du  chapitre,  où  elle  avait  l'habi- 
tude de  traiter  un  si\jet  spécial  de  direction  de  conscience.  Toutes  ses 
paroles  étaient  avidemment  recueillies  par  les  sœurs,  qui,  sous  la  pre- 
mière impression  du  charme,  écrivaient  pieusement  ce  qu'elles  venaient 
d'entendre  et  fixaient  sur  le  papier  ce  qui  les  avait  frappées  le  plus 


—  427  — 

fortement,  oomplëtant  cet  enseignement  les  unes  par  les  antres,  en 
sorte  qu'on  a  pu  reconstituer,  à  peu  près  intégralement,  les  entretiens 
et  les  allocutions  de  sainte  Chantai,  et  qu*on  peut  affirmer  que  tous 
les  opuscules  composant  le  présent  volume  lui  appartiennent  très-légi- 
timement. Si  l'on  se  rappelle  qu'elle  fut  initiée  à  la  perfection  reli-* 
gieuse  par  saint  François  de  Sales,  et  que,  pendant  dix-neuf  ans,  elle 
reçut  les  leçons  de  ce  maître  si  habile  dans  la  science  des  saints,  qui 
composa  spécialement  pour  elle  son  Traité  de  Vamour  deDieu^  on  com- 
prendra facilement  quelle  autorité  s'attache  aux  enseignements  de 
cette  âme  d'élite^  toute  imprégnée  de  Tesprit  du  grand  évéque.  C'est 
en  réalité  saint  François  de  Sales  qui  parle  par  la  bouche  de  la  sainte, 
qui  écrit  par  sa  plume,  qui  gouverne  par  son  moyen. 

Son  empreinte  est,  du  reste,  fortement  accusée  dès  le  début  du 
volume  dans  le  Petit  liûret  ou  recueil  d'avis  que  la  sainte  avait  reçus  en 
divers  temps  de  saint  François,  verbalement  ou  par  écrit,  et  dans  les 
Questions  adressées  par  elle  à  son  séraphique  directeur,  avec  les 
réponses  directes  de  celui-ci  :  sublime  dialogue  engagé  au  moment  de 
la  vocation  définitive  de  la  fondatrice  de  la  Visitation  :  préceptes 
approfondis  du  plus  pur  renoncement  à  soi-même  et  de  la  perfection 
chrétienne.  Pais  viennent  les  Papiers  intimes^  renfermant  une  série  de 
résolutions,  d'élans  vers  Bleu,  d'actes  mystiques,  écrits  par  sainte 
Chantai,  à  l'issue  de  l'une  de  ses  retraites  vers  l'année  1616,  et  qu'elle 
réservait  exclusivement  à  son  usage,  les  portant  toujours  sur  eUe. 
Ellevoulutâtre  enterrée  avec  ce  témoignage  de  son  ardent  amour 
pour  Dieu,  et  ces  pages  admirables  complètent  en  quelque  sorte  la 
physionomie  intime  de  cette  ftme  angélîque. 

Les  ExhortationSy  les  Entretiens  et  les  Instructions  aux  novices  rem- 
plissent, après  ce  préambule,  la  majeure  partie  du  volume.  Nous  ne 
pouvons  mieux  les  comparer  qu'aux  chapitres  de  Y  Imitation^  et  cet 
éloge  n'est  en  aucune  sorte  exagéré.  L'enseignement  de  ces  instructions 
simples  et  si  élevées  se  résume  dans  la  pratique  du  détachement 
absolu  des  choses  terrestres  :  il  ne  faut,  dit  quelque  part  la  sainte  à 
ses  sœurs,  rien  désirer,  ni  rien  refuser,  q  et,  je  vous  dis  derechef, 
mes  chères  filles,  aimons  la  pauvreté  et  simplicité  de  vie.  n  11  y  a  là 
des  exhortations  irrésistibles  sur  la  vigilance  et  la  guerre  à  faire  aux 
ennemis  de  l'âme^  —  sur  les  maux  que  causent  à  l'âme  les  finesses  de 
l'amour-propre  et  de  la  prudence  humaine,  —  sur  l'obligation  de 
ruiner  la  nature  pour  faire  régner  la  grâce,  —  sur  la  pureté  de  cœur 
et  l'importance  de  «  s'afiisotionner  à  l'oraison.  »  Mais  qu'on  n'y 
cherche  point  les  fleurs  dont  l'évéque  de  Genève  émaille  si  volontiers 
ses  écrits:  le  style  est  grave  et  dépouillé  d'ornements  ;  les  grâces  de 
l'imagination  font  place  aux  maximes  sévères  de  l'Évangile,  présentées 
sans  circonlocutions  ni  périphrases.  Aussi,  bien  que  destinés  au  cloître, 


068  opusoales,  où  il  n'est  question  que  de  Tamour  du  prochain,  de  la 
patience,  du  travail,  de  l'obéissance,  de  Tempire  sur  le  corps  et  ses 
mauvais  instincts,  seront-ils  de  la  plus  grande  édification  pour  tous 
ceux  qui,  dans  le  monde,  aspirent  à  mener  une  vie  chrétienne.  On  nous 
promet,  dans  un  troisième  volume,  les  Méditations  de  la  sainte,  et  sa 
Déposition  pour  la  béatification  et  la  canonisation  de  saint  François  de 
Sales  :  ce  volume  sera  le  très-bienvenu.  René  Ebrvilbr. 


Hlncmar  de  Itelnia.  Étude  sur  le  neuméme  siéde^^ar  M.  Tabbô  Vioied. 
Paris,  Larose,  i875.  In-8  de  z-356  p,  —  Prix  :  6  fir. 

En  étudiant  la  vie  et  les  œuvres  d*Hincmar  de  Reims,  M.  Vidieu 
8*est  proposé  de  dépeindre  le  neuvième  siècle;  et  certes  le  cadre  ne 
pouvait  être  mieux  choisi.  Hincmar  est,  en  effet,  mêlé  à  tous  les  grands 
événements  de  son  temps.  Conseiller  des  rois,  il  reste  inviolablement 
fidèle  aux  descendants  de  Charlemagne.  Quelquefois,  son  attache» 
ment  aux  princes  lui  fait  oublier  la  soumission  qui  est  due  au  Souve- 
rain-Pontife :  mais,  d'autres  fois,  il  sait  défendre  la  morale  et  la  reli* 
gion  avec  une  liberté  digne  des  plus  saints  évéques.  Il  faut  lire  tout 
le  récit  des  démêlés  d'Hincmar  avec  les  Papes.  L'archevêque  se  con* 
sidérait  quelque  peu,  en  son  église  de  Reims,  comme  un  vassal  dévoué 
du  Pontife,  prêt  à  reconnaître  les  droits  de  son  suzerain,  mais  à  con- 
dition que  celui-ci  n'userait  point  de  son  autorité,  pour  réformer  les 
jugements  et  redresser  les  actes  de  sou  puissant  feudataire. 

Hincmar  a  joué  un  plus  beau  rôle  et  exercé  une  infiuence  plus  heu- 
reuse pour  la  réforme  du  clergé  et  le  rétablissement  de  la  discipline 
ecclésiastique  en  France.  Durant  un  épiscopat  de  trente-sept  ans,  il 
assista  à  trente-neuf  conciles,  et,  le  plus  souvent,  ce  fut  lui  qui  présida 
et  dirigea  ces  assemblées.  Il  y  fit  condamner  les  erreurs  de  Gott- 
schalk;  et  les  quatre  canons  d'Hincmar  sont  restés  la  formule  de  ren- 
seignement théologique  sur  le  dogme  de  la  prédestination.  Enfin,  aa 
milieu  de  tant*  de  travaux,  cet  homme  extraordinaire  composait  des 
traités,  écrivait  des  lettres,  faisait  même  des  vers,  copiait  des  livres 
anciens  :  ce  qui  nous  reste  de  ses  ouvrages  ne  forme  pas  moins  de  deux 
volumes  in-folio. 

Cependant  la  figure  d'Hincmar  est  restée  enveloppée  d'un  nuage  ; 
on  a  pu  dire  de  lui  presque  autant  de  mal  que  de  bien  ;  on  l'a  fait  tour 
à  tour  modèle  des  évêqaes  et  chef  de  parti.  Faut-il  en  chercher  seule- 
ment la  raison  dans  le  caractère  d'Hincmar,  car  il  eut  à  la  fois  les 
plus  belles  qualités  et  de  très-grands  défauts  ?  Cette  explication  nous 
parait  insuffisante.  Si  l'illustre  archevêque  n*est  point  parvenu  à  la 
gloire  sans  mélange  qu'il  pouvait  atteindre,  c^est  parce  qu'il  ne  fut  pas 
un  saint.  Homme  politique,  savant  théologien,  administrateur  habile, 
il  eut  l'austérité  de  vie  qui  convenait  à  un  évêque  ;  mais  il  manqua  dos 


-  429  — 

vertus  ëminentes  qui  mettent  Téquilibre  dans  une  âme  mal  réglée,  qui 
tempèrent  les  yiolences  de  la  volonté  et  font  éviter  les  excès  en  toute 
chose.  Aussi  nous  avons  remarqué  que^  dans  l'étude  de  M.  Vidieu, 
cet  aspect  si  important  de  la  vie  d'Hincmar  avait  été  laissé  au  second 
plan.  L'auteur  parle  très-peu,  et  seulement  en  termes  généraux,  des 
vertus  chrétiennes  de  son  héros. 

Peut-être  le  portrait  manque-t-il  de  relief:  ce  livre  est  trop  une 
thèse  de  théologie,  on  aimerait  y  voir  agir  et  parler  les  hommes  du 
neuvième  siècle.  Le  style,  même  en  ne  tenant  pas  compte  des  nom* 
breuses  fautes  d'impression,  est  souvent  incorrect.  Ces  réserves  faites, 
hfttons-nous  de  rendre  hommage  à  Tœuvre  de  M.  Yidieu.  Il  a  fallu  de 
longues  et  pénibles  lectures  pour  réunir  les  documents  nécessaires  à 
cette  étude  ;  et  Ton  ne  peut  qu'applaudir  au  courage  de  ceux  qui, 
parmi  les  travaux  d'une  vie  occupée,  trouvent  encore  le  loisir  d'inter- 
roger les  manuscrits  et  les  lourds  auteurs  du  neuvième  siècle. 

E.  POUSSBT. 


MéiiioIreii*JournauxL  de  Pierre  de  inOstolle.  Édition  pour  la 
première  fois  complète  et  entièrement  conforme  aux  manuscrits  origi- 
naux, publiée  avec  de  nouveaux  documents  inédits  et  un  commentaire 
historique,  biographique  et  bibliographique,  par  MM.  G.  Brunet,  A.  Chah- 
POLLION,  E.  Halphen,  Paul  Lacroix,  Charles  Read,  Tamizey  de  Larroque 
et  Ed.  TricoteI|.  Tome  V^.  Journal  de  Heriti  II/,  1574-1580.  Paris, 
Librairie  des  bibliophiles  (Jouaust,  imp.},  1875.  In-8  de  viii-398  p.  — 
Prix:  15  fr. 

Qui  ne  connaît  les  Mémoires  de  l'Estoile  ?  C*est  le  bréviaire  de  tous 
ceux  qui  veulent  étudier  les  mœurs  et  les  caractères  du  seizième 
siècle,  pénétrer  les  mystères  de  la  cour  des  derniers  Valois.  On  y 
trouve,  à  chaque  page,  des  portraits  bien  vivants,  des  anecdotes 
piquantes,  des  mots  d'une  bonhomie  malicieuse  qui  font  juger  toute 
une  époque.  Quel  historien  ne  les  a  pas  consultés?  Et  pourtant,  bien 
qu'ils  aient  été  souvent  réimprimés,  particulièrement  au  dix-huitième 
siècle,  sous  les  auspices  d*érudits  qui,  comme  les  Godefroj  ou  Tabbé 
Lenglet  du  Fresnoj,  n'étaient  point  exempts  de  mérite,  on  peut  dire 
que  nous  en  attendions  encore  une  édition  vraiment  définitive.  Celle 
que  MM.  ChampoUion  ont  donnée  en  1837  ne  saurait  passer  pour 
telle  ;  car  la  découverte  de  nouveaux  manuscrits  du  précieux  journal 
en  a  rendu  la  révision  tout  à  fait  nécessaire. 

C'est  la  tâche  délicate  et  laborieuse  que  vient  d'entreprendre  une 
réunion  de  savants  paléographes  et  d'écrivains  distingués  dont  tous 
déjà  ont  fait  leurs  preuves.  Quelques-uns  connaissent  Tépoque  de  la 
Réforme  et  des  guerres  religieuses  presque  aussi  bien  que  le  grand 
audiencier  de  la  chancellerie  de  France  sous  Henri  III  et  Henri  IV  ; 
l'un  d'eux,  M.  Halphen,  a  déjà  publié  des  fragments  inédits  de  TEstoile, 


—  430  — 

d'autres,  comme  M.  Tamizey  de  Larroque,  ont  Tari  d'enrichir  un  texte 
de  notes  originales  et  de  renseignements  peu  connus  qui  en  doublent 
le  prix.  On  peut  donc  être  assuré  que  rœuvre  sera  menée  à  bonne 
fin  :  elle  est  considérable,  du  reste,  puisque  la  présente  édition,  avec 
les  documents,  les  tables,  les  répertoires  de  toutes  sortes  dont  elle 
doit  être  accompagnée,  ne  comprendra  pas  moins  de  douze  ou  quinze 
Tolumes.  L'exécution  matérielle  répond  à  Timportance  du  travail  : 
la  Librairie  des  bibliophiles  et  son  habile  directeur  M.  Jouaust  n*ont 
rien  négligé  pour  faire  de  cette  réimpression  un  modèle  de  perfection 
typographique,  un  véritable  objet  de  luxe.  C'est  à  peine  si,  sous  œ 
beau  vêtement,  Tauteur  lui-même  reconnaîtrait  le  modeste  travail 
qu'il  avait  composé  au  courant  de  la  plume  et  sans  se  soucier  de  la 
postérité* 

Le  premier  volume  commence  au  mois  de  mai  1574,  à  la  mort  de 
Charles  IX^  et  va  jusqu'à  la  fin  de  décembre  1580.  Les  principaux 
événements  de  ces  six  années  du  règne  de  Henri  III  j  sont  mentionnés 
à  leur  date,  et  l'auteur  a  bien  soin  de  les  accompagner  de  tous  les 
commentaires,  de  tous  les  bons  mots  contemporains,  de  toutes  les 
pièces  de  vers  latins  et  français  dont  elles  ont  été  roccasion.  Les  faits 
les  moins  importants  ne  sont  pas  les  moins  longuement  traités  :  c'est 
ainsi  que  la  mort  de  Quélus  et  de  Maugiron,  ces  célèbres  «  mignons  » 
du  roi,  occupe  plus  de  trente  pages.  Nous  n'étonnerons  personne  en 
disant  que  Ton  rencontre  dans  ce  livre  plus  d'un  passage  si  peu  châtié 
qu'il  semble  à  peu  près  illisible;  aussi  bien  l'ouvrage  n'est  pas 
de  ceux  qu'on  mette  d'ordinaire  entre  toutes  les  mains,  —  ce  qui  ne 
serait  vraiment  pas  possible. 

Quant  aux  annotations  «biographiques,  historiques  et  bibliogra- 
phiques, )>  nous  ne  saurions  en  parler  ai^ourd'hui,  car  on  a  craint  que 
le^texte  en  soit  «  embarrassé  et  surchargé,  n  et  on  les  a  re jetées  dans 
des  volumes  distincts.  Cette  méthode  a  son  bon  et  son  mauvais  câté. 
Tout  dépend  d'ailleurs  de  la  façon  dont  elle  est  appliquée  ;  et  il  nou9 
faut  attendre  la  suite  de  l'édition  pour  la  juger.  Nous  ne  pouvons 
aiJÙourd'hui  qu'applaudir  au  bon  goût  et  au  soin  parfait  qui  ont  présidé 
à  la  confection  de  ce  chef-d'œuvre  typographique,  en  souhaitant  qu*il 
soit  bientôt  suivi  d'une  série  nombreuse  de  volumes  également 
achevés,  que  tous  les  amateurs  voudront  mettre  à  une  place  choisie 
de  leur  bibliothèque.  Gustave  Baoubnault  db  Puchsssb. 


Urspruns  und  Begrian  «1er  RevoluUoiiAkrlese  (Origine  d^ 
gverr€8 de  la Eévolution).  Von  L&opolo  von  Rankb.  Leipzig,  Dunker  und  Hum- 
blot,  1875.  In-8  de  x-379  p.  —  Prix  :  8  marks  80  pfennigs. 

C'est  par  les  armes,  non  moins  que  par  les  idées,  que  la  Révolution 


—  431  — 

française  a  étenda  son  action  en  Europe.  Le  nouveau  livre  de  Léopold 
de  Ranke  est  une  étude  sur  les  premières  campagnes  de  cette  époque^ 
et  particulièrement  sur  la  part  qu*y  ont*prise  la  Prusse  et  l'Autriche. 
A  la  vue  des  premiers  événements  révolutionnaires,  les  cours  de  Berlin 
et  de  Vienne,  déjà  rapprochées  par  quelques  intérêts  de  second  ordre, 
conclurent  une  alliance  contre  la  nation  française  tout  autant  que 
contre  la  Révolution.  Le  récit  de  M.  de  Ranke  comprend  la  déclara- 
tion de  guerre  faite  par  la  France  à  TAutriche,  l'invasion  du  territoire 
français,  les  opérations  en  Champagne,  et  s'arrâte  à  la  prise  de 
Majence,  par  Custine,  le  21  octobre  1792  :  c'est  alors  que  d'offensive 
qu'elle  était,  du  côté  des  alliés,  la  guerre  devint  défensive»  «  On  avait 
dit  à  Paris  que  le  décret  de  déclaration  de  guerre  coûterait  la  vie 
à  quelques  milliers  d'hommes,  mais  qu'il  apporterait  la  liberté  sur  la 
terre.  Au  sentiment  d'hostilité  contre  les  puissances  étrangères,  se 
joignit  un  vaste  esprit  de  propagande.  On  savait  que  déclarer  la  guerre 
à  l'Autriche,  c'était  allumer  une  guerre  universelle  ;  mais,  loin  d'ef- 
frayer, cette  perspective  fut  saluée  avec  joie.  La  proposition,  faite  au 
nom  du  roi,  fut  acceptée  à  la  presque  unanimité  des  suffrages;  sept 
voix  seulement  s'j  opposèrent.  »  Nos  premiers  succès  ne  pouvaient 
qu'augmenter  cet  enthousiasme,  o  Les  Français  conçurent  l'espoir 
d'arriver,  par  leurs  principes  et  l'élan  de  leurs  armes,  à  dominer 
l'Europe. Tout,  dès  lors,  dépendait  de  la  résistance  que  les  anciens  États 
pourraient  ou  non  leur  opposer.  Ainsi  commençait  la  grande  lutte  des 
puissances,  qui  devait  remplir  l'Europe.  Peut-être  est-il  pernds  de  dire 
qu'elle  a  été  décidée  en  1870,  du  moins,  au  point  de  vue  des  relations 
étrangères.  »  Si,  par  cette  dernière  phrase,  M.  de  Ranke  entend  que, 
désormais,  la  France  ne  combattra  plus  au  nom  des  principes  de  89, 
et  que  c'est  dans  la  défense  d'une  autre  cause  qu'elle  cherchera  la 
victoire,  nous  ne  pouvons  qu'applaudir  à  son  désintéressement 
national. 

«  Le  trait  caractéristique  de  la  Révolution,  dit-il,  c'est  le  rapport 
étroit  qui  existe  entre  les  événements  du  dehors  et  ceux  de  l'intérieur.  » 
Aussi,  à  propos  des  guerres  de  la  Révolution,  ne  pouvait-il  se  dispen- 
ser de  parler  de  la  Révolution  elle-même  :  un  chapitre  entier  de  son 
livre  est  consacré  aux  origines  et  au  début  de  ce  grand  phénomène 
historique.  Le  mécanisme  et  le  jeu  des  événements  7  sont  dépeints 
avec  cette  fidélité  objective,  dont  les  historiens  allemands  font  tant 
de  cas,  et  qui  a  du  moins  le  mérite  de  l'exactitude.  Gomme  cette  partie 
du  livre  de  M.  de  Ranke  est  celle  qui  intéresse  le  plus  le  lecteur 
français,  qu'il  nous  soit  permis  d'en  donner  un  aperçu  rapide. 

«  On  a  considéré  les  premières  années  du  règne  de  Louis  XVI,  dit 
l'éminent  historien,  comme  une  des  époques  les  plus  heureuses  que  la 
France  ait  jamais  Ixaversées:  son  conmierce  éclipsait  même  l'Angle- 


—  434  — 

8ourc68  officielles  et  aux  instruments  diplomatiques,  lui  offi*aient  des 
facilités  qu'aucun  autre  écrivain  n'aurait  possédées.  Le  titre  de  son 
livre,   La  carte  iEwrope  ctoprès  les  traitét,  indique  plutôt  la  con- 
clusion de  l'ouvrage  que  sa  nature.  Il  eût  été  plus  juste  de  Finti- 
tuler.  ■  Modifications  successives  que  les  traités  ont  fait  subir  depuis 
1814  à  la  carte  d'Europe.  »  Il  ne  s'agît  pas  ici  d'une  œuvre  d'imagi- 
nation,  ni  même  d*un  travail  historique  dont  la  lecture  de  longue 
haleine  soit  attrayante  ou  même  amusante.  Non,  tel  n'a  point  été 
Tobjet  que  s'est  proposé  M.  Hertslet.  Ce  qu'il  a  voulu  offi?ir  au  publie, 
c'est  un  véritable  répertoire  diplomatique  où  Ton  trouve  tous  les 
traités  de  paix  et  de  délimitation  qui  ont  eu  lieu  depuis  1814  ;  les 
déclarations  de  guerre  ;  les  décrets  d'annexion  de  territoires  ;  les  pro- 
testations qu'elles  ont  soulevées;  les  traités  pour  le  maintien  de 
l'équilibre  européen,  pour  la  garantie  de  l'indépendance  et  de  la  neu- 
tralité de  certains  États  ;  enfin  des  comptes  rendus  analytiques  des 
séances  des  conférences  européennes.  A  ces  nombreux  documents, 
Tauteur  a  ajouté  des  notes  claires  et  lumineuses  et  plus  de  vingt 
cartes  coloriées.  Ce  rapide  exposé  suffit  pour  faire  comprendre  l'im- 
portance de  l'ouvrage  de  M.  Hertslet.  Maintenant  qu'il  a  paru,  il  en 
est  de  lui  comme  du  café  :  on  se  demande  comment  on  a  jamais  pa 
s'en  passer.  On  s'étonne  qu'il  n'ait  pas  été  publié  plus  tôt.  Toutefois, 
cet  étonnement  cesse  quand  on  apprend  que  ce  livre  a  coûté  à  son  auteur 
plus  de  vingt  ans  de  travail  consciencieux.  C'était  un  labeur  ingrat, 
avouons-le.  L'écrivain  ne  pouvait  espérer  de  faire  briller  les  facettes 
de  son  esprit  :   il  lui  était  interdit  de  montrer  les  richesses  de  son 
imagination,  de  faire  pleurer  ou  même  de  faire  rire.  Mais  les  seules 
qualités  dont  il  lui  fût  permis  de  faire  preuve,  il  les  a  déployées  dans 
leur  plénitude;  il  a  poussé  Texactitude  jusqu'au  scrupule,  la  patience 
jusqu'au  génie.  Et  ce  n'est  pas  là  un  mince  mérite,  quand  on  songe  que 
le  nombre  des  traités  ne  s'élève  pas  à  moins  de  430.  Mais  ce  qui 
mérite  une  mention  spéciale,  c'est  le  soin  intelligent  que  M.  Hertdet 
a  pris  pour  guider  l'étranger  à  travers  son  ouvrage.  Les  traités,  les 
protocoles,  les  instruments  diplomatiques  de  tout  genre  forment  un 
véritable  labyrinthe,  dans  lequel  le  lecteur  pourrait  facilement  s'é* 
garer  ;  mais  l'auteur  compatissant  lui  vient  en  aide  et  remplit  auprès 
de  lui  le  rôle  d'Ariane,  en  lui  mettant  sous  la  main,  en  goise  de 
peloton  de  fil,  une  table  alphabétique  et  raisonnée,  grâce  à  laquelle 
il  trouve  son  chemin  sans  difficulté.  Supposons  qu'on  ait  besoin  de 
savoir  quand  et  dans  quelles  circonstances  la  Prusse  a  renoncé  à  la 
souveraineté  de  Neufchàtel  (il  est  rare  de  voir  la  Prusse  renoneer 
à  quelque   chose)  ;    on  cherche  Nbufghatbl  à  la  table  ;  on  prend, 
dans  la  colonne  voisine,  parmi  les  différents  faits  relatifs  4  cette  pria* 
cipauté,  les  mots  «  renonciation  de  la  Prusse,  v  — *  en  regard  desquels 


—  433  - 

chie  avait  surtout  grandi  par  la  constitution  des  trois  ordres  ;  cette 
constitution,  ne  répondant  plus  à  la  France  d'alors,  ne  se  manifestait 
plus  de  même.  Aucun  ordre  n'était  ce  qu'il  avait  été.  Chacun  d'eux  se 
représentait  moins  d'après  les  règles  traditionnelles  que  d'après  sa 
situation  actuelle.  Dans  la  noblesse,  les  élections  n'avaient  pas  été 
bornées  à.  l'ancienne  noblesse  féodale.  Dans  le  clergé,  l'admission  des 
curés  entraîna  une  transformation  décisive.  Mais  c'est  dans  le  tiers- 
état  qu'était  survenu  le  changement  le  plus  considérable  :  égal  en 
nombre  aux  deux  autres,  il  ne  s'était  pas  seulement  recruté  dans  les 
villes,  mais  encore  et  surtout  dans  les  campagnes.  L'assemblée  repré- 
sentait moins  l'ancienne  France  que  la  nouvelle;  la  délibération 
séparée  des  trois  ordres  ne  pouvait  plus  subsister  :  car  cette  sépara- 
tion, qui  exprimait  leurs  anciens  rapports  ne  répondait  plus  aux 
nouveaux,  t 

En  effet,  la  première  prétention  et  la  première  victoire  du  tiers- 
état  fut  la  délibération  en  commun.  Le  pouvoir,  en  résistant  d'abord, 
ne  fit  qu'aigrir  les  esprits  ;  en  cédant,  il  montra  sa  faiblesse.  Quand 
la  démocratie  parisienne  s'empara  de  la  Bastille,  cette  révolte  de  la 
rue  contre  l'ordre  public  n'était  qu'une  suite  de  la  révolte  des  repré- 
sentants de  la  bourgeoisie  contre  la  constitution  séculaire  de  la  France. 
La  révolution  fut  moins  le  résultat  d'une  suite  de  fautes  de  la  part  du 
pouvoir,  que  l'irrémédiable  expression  de  l'état  d'une  société  hallucinée 
par  de  fausses  doctrines:  des  réformes  étaient  inévitables;  les  ten- 
dances du  dix-huitième  siècle  en  firent  une  catastrophe.  Ces  vérités 
ne  sont  pas  familières  au  public  :  le  livre  de  M.  de  Ranke,  sans  les 
exprimer  positivement^  les  fait  assez  comprendre.  Souhaitons  qu'il  soit 
bientôt  traduit,  afin  d'être  apprécié  en  France  comme  il  mérite  de  l'être. 

J.  A.  DE  Bbrnon. 

The  Map  of  Europe  by  treaty,  shomng  tke  varions  Political  and 
Territorial  Changes  whieh  hâve  iaken  place  since  ihe  General  Peace  of  18i4. 
With  numerous  Maps  and  Notes.  By  EdWard  Hertslet,  G.  B.  London,  But- 
terworths,  1875.  3  volumes  in-8  de  2399  p.  --  Prix  :  li8  £r. 

M.  Edouard  Hertslet  n'est  pas  le  premier  venu.  Chef  de  la  division 
des  archives  au  ministère  des  affaires  étrangères  de  Sa  Majesté 
britannique,  il  a  déjà  donné  plusieurs  ouvrages:  les  Documents 
officiels  {State  papers\  les  Traités  de  Commerce  {Commercial  Trêaties) 
qui  ont  attiré  l'attention  du  monde  diplomatique.  La  croix  de  che- 
valier de  l'ordre  du  Bain  a  été  la  récompense  des  travaux  lit- 
téraires de  M.  Hertslet,  non  moins  que  de  ses  services  officiels.  Il 
avait  donc  au  plus  haut  degré  l'autorité  nécessaire  pour  entreprendre 
l'importante  publication  qu'il  vient  de  terminer  heureusement,  en 
même  temps  que  ses  fonctions,  en  lui  donnant  un  libre  accès  aux 
Novembre  1875.  T.  XV,  28. 


—  436  — 

I>ella  vita  privata  del  Genoveal,    per   L.   T.   Belgeano.    Genova, 
tipogr.  d.  Sordomuti,  1875.  In-8  de  viii-538  p. 

Le  travail  considérable  que  publie  aujourd'hui  le  savant  éditeur  des 
Contrats  de  nolis  de  saint  Louis  est  le  développement  d'un  mémoire 
préliminaire,  lu  en  18ÔÔ  à  la  Société  d'histoire  de  la  Ligurie.  Mieux 
placé  que  personne  pour  aborder  la  tâche,  en  apparence  restreinte, 
mais,  en  réalité,  très-difficile,  qu'il  avait  entreprise,  M.  Belgrano  a 
su,  en  mettant  sans  cesse  à  contribution  les  archives  si  riches  dont  il 
est  l'un  des  dépositaires,  donner  à  ses  recherches  une  valeur  toute 
spéciale.  Il  est  parvenu  à  reconstituer,  jusque  dans  ses  moindres  détails, 
Texistence  des  Génois  du  moyen  âge,  et  à  ressusciter  tout  l'opulent 
passé  d'une  des  plus  somptueuses  cités  de  l'Italie.  Je  n'hésiterai  donc 
pas  à  dire  que  l'histoire  de  la  civilisation  ne  compte,  de  nos  jours,  que 
bien  peu  d^études  aussi  importantes  que  celle-ci. 

Le  plan  du  livre  de  M.  Belgrano  est  très-simple  :  il  étudie  succes- 
sivement V habitation  et  son  mobilier  y  l'alimentation,  le  vêtement  et  les 
coutumes. 

La  première  partie  est  la  plus  instructive  de  toutes,  par  les  détails 
inédits  qu'elle  donne  sur  l'histoire  des  diverses  industries  qui  alimen- 
taient le  luxe  véritablement  princier  des  maisons  génoises  ;  plusieurs 
chapitres,  consacrés  à  la  confection  et  à  l'ornementation  des  manus- 
crits, sont  pleins  de  particularités  curieuses.  La  partie  consacrée  aux 
vêtements  donne  une  haute  idée  de  la  recherche  jusqu'à  laquelle  était 
poussée,  à  Gênes,  l'art  de  fabriquer  et  d'orner  les  étoffes. 

La  quatrième  partie  nous  initie  aux  mœurs  des  diverses  classes  de 
la  Société  génoise  :  ici  l'auteur  a  peut-être  fait  preuve  de  plus  de 
franchise  que  d'amour-propre  local,  ce  qui,  d'ailleurs,  ne  fait  qu's^outer 
à  l'autorité  de  l'écrivain  et  à  l'intérêt  des  faits  qu'il  expose. 

L'ouvrage  entier  se  termine  par  une  série  de  tables  comparatives 
des  valeurs  successives  des  monnaies  génoises,  estimées  en  francs  et 
centimes  ;  ces  tables  sont  dues  à  la  collaboration  du  savant  chevalier 
Desimoni,  le  collègue  de  M.  Belgrano  aux  archives  de  Saint-Georges. 

Gênes  est  trop  notre  voisine,  et  son  histoire  est  mêlée  de  trop  près 
à  la  nôtre,  pour  que  l'on  ne  s'attende  point,  même  avant  de  l'ouvrir,  à 
trouver  dans  le  livre  de  M.  Belgrano  des  renseignements  utiles  aux 
érudits  français  ;  mais  la  réalité  dépasse  encore  cette  attente,  car 
c'est  par  centaines  que  la  Vie  privée  des  Génois  contient  des  détails  de 
nature  à  être  mis  à  profit  chez  nous. 

Je  dois  dire  aussi  quelques  mots  sur  Texécution  matérielle  du  livre  : 
en  général,  les  meilleurs  travaux  des  Italiens  nous  parviennent  sous 
une  forme  indigne  du  pays  qui  a  vu  fieurir  les  grandes  imprimeries 
vénitiennes  et  florentines  du  seizième  siècle.  M.  Belgrano  a  voula 
revenir  à  des  traditions  qui  semblaient  oubliées  de  l'autre  côté  des 


—  437  — 

Alpes;  il  faut  saluer  cette  première  tentative,  comme  le  commence* 
ment  de  la  renaissance  du  goût  typographique  en  Italie. 

Je  ne  ferai,  en  terminant,  qu'une  seule  observation  au  savant  auteur: 
je  lui  demanderai  d'ajouter  à  la  prochaine  édition  de  son  travail  un 
index  copieux.  Il  touche  à  tant  de  points,  signale  tant  de  faits  nou- 
veaux, que  ce  complément  est  indispensable  pour  donner  au  livre 
toute  rutiUté  qu'il  comporte.  R. 


DlcUonnalre  d*archéologle  Égyptienne,  par  Paul  Pierret, 
conservateur  adjoint  du  Musée  égyptien.  Paris,  Imprimerie  nationale; 
Rollin  et  Feuardent,  1875.  In-12  de  572  p.  —  Prix  :  6  fr. 

Tous  les  pays  civilisés  comptent  aujourd'hui,  parmi  Télite  de  leurs 
savants,  des  hommes  qui  consacrent  leur  vie  à  Tétude  de  l'archéolo- 
gie égyptienne,  mais  cette  étude  est  restée  le  privilège  de  quelques-' 
uns,  et^  malgré  les  résultats  surprenants  que  nous  devons  au  déchifOre- 
ment  des  hiéroglyphes,  l'histoire  de  l'art,  l'histoire  de  la  civilisation  en 
Egypte  sont  encore  peu  connues  du  vulgaire.  M.  Paul  Pierrot  soulève 
le  voile  qui  cachait  cette  terre  mystérieuse;  il  nous  en  livre  tous  les 
secrets,  explique  les  croyances  religieuses,  interprète  les  scènes 
sculptées  sur  les  vieux  pylônes,  expose  les  renseignements  les  plus 
certains  fournis  par  les  textes,  sur  l'agriculture  et  l'industrie  ;  enûn, 
avec  une  compétence  que  personne  ne  saurait  lui  contester,  il  enre- 
gistre, sous  la  forme  si  instructive  et  si  commode  du  dictionnaire,  les 
résultats  acquis  à  la  science  depuis  la  découverte  de  notre  illustre 
Ghampollion.  Personne  n'était  préparé  mieux  que  lui  à  un  travail  de 
cette  nature  :  élève  et  successeur  de  M.  le  vicomte  de  Rougé,  la  pu- 
blication des  catalogues  du  Louvre  lui  avait  mis  sous  les  yeux  toutes 
les  richesses  de  nos  musées,  et  en  écrivant,  il  y  a  deux  ans,  sa  Descrip^ 
tûm  de  la  salle  historique  (voir  Polybiblion,  septembre  1873,  t.  X, 
p.  186),  il  l'avait  fait  suivre  d'un  glossaire  qui  était  comme  l'embryon 
du  dictionnaire  qu'il  livre  aujourd'hui  à  la  publicité.  Dans  son  nouvel 
ouvrage,  les  matières  sont  classées  par  ordre  alphabétique  :  l'auteur  y 
passe  en  revue  tout  ce  qui  touche  à  la  mythologie,  à  la  géographie^  à 
l'histoire,  à  l'ethnographie,  aux  arts' proprement  dits.  Les  dieux  et  les 
déesses,  les  rois  et  les  reines,  les  fonctionnaires,  les  prêtres  ou  les 
artistes,  dont  le  nom  est  venu  jusqu'à  nous,  ont  chacun  un  article 
spécial;  les  questions  de  grammaire  sont  clairement  exposées  avec 
renvois  aux  mémoires  plus  détaillés.  Quelquefois  même,  les  notes  sont 
extraites  des  auteurs  les  plus  autorisés.  Au  mot  syntaxe,  par  exemple, 
il  énumère  les  principales  règles  de  la  grammaire  égyptienne  en  les 
empruntant  à  YHieroylyphiç  Grammar  de  M.  Birch;  l'article  sculpture^ 
où  se  trouvent  indiqués,  d'une  façon  si  précise  et  si  claire,  les  carac- 
tères généraux  propres  aux  cinq  époques  de  l'art  égyptien,  est  extrait 


—  438  — 

de  la  Notice  des  monumente  du  Louvre  par  le  vicomte  de  Roagé  ;  il  en 
est  de  même  de  l'article  zodiaques;  sous  la  rubrique  copte^  les  renaei- 
gnemeuts  sur  la  composition  et  le  mécanisme  de  cette  langue  ont  été 
présentés  par  M.  E.  Révillout,  qui  a  fait  de  cette  littérature. une  étude 
toute  spéciale. 

La  bibliographie»  si  utile  aux  travailleure,  occupe  une  large  place  : 
au  mot  religion^  l'auteur  donne  la  liste  des  ouvrages  à  consulter  pour 
approfondir  les  croyances  et  les  doctrines  des  anciens  Égyptiens  ;  au 
mot  papyrus j  Ténumération  des  principaux  papyrus  publiés  et  étudiés  ; 
au  mot  monuments^  la  liste  des  ouvrages  consacrés  à  la  reproduction 
des  monuments;  tous  les  articles  renferment,  en  outre,  Tindioation 
très-exacte  des  sources  où  Tauteur  a  puisé  ce  qu'il  avance.  On  est 
ûer  d*y  lire,  à  chaque  page,  des  noms  fraoçais,  et,  en  première  ligne, 
celui  d'an  homme  dont  la  science  pleure  encore  la  perte,  le  vicomte 
Em.  de  Rougé.  —  Les  fouilles  exécutées  en  Egypte,  depuis  quelques 
années,  par  notre  compatriote  M.  Mariette,  ont  été  trop  fructueuses 
au  point  de  vue  archéologique  pour  que  Fauteur  les  ait  passées  sous 
silence.  Aussi  a  t  il  eu  soin  de  s'étendre  sur  la  découverte  des 
Sérapéum,  et  la  trouvaille  du  cercueil  de  la  reine  Aah-Hotep,  qui 
nous  ont  livré  de  si  admirables  spécimens  de  l'orfèvrerie  égyptienne 
au  commencement  de  la  dix-huitième  dynastie,  et  sous  la  dix-neuvième. 
Les  bijoux  qui  accompagnaient  la  momie  d'Aah-Hotep  sont  aujourd'hui 
à  Boulaq,  ceux  du  Sérapéum  sont  au  Louvre. 

Malheureusement,  cette  première  édition  ne  renferme  pas  encore  de 
gravures;  mais,  sortie  des  presses  de  l'Imprimerie  nationale,  elle  con- 
tient des  signes  figuratifs  et  symboliques  et  tous  les  cartouches  royaux. 
L'auteur  a  même  soin  de  donner  la  transcription  des  noms  de  lieux, 
quand  il  le  peut,  en  copte  et  en  arabe.  Les  articles  géographiques 
sont,  du  reste,  rédigés  avec  une  certaine  prédilection  ;  ils  renferment 
le  nom  de  la  ville  ou  du  nôme,  les  traditions  qui  s'y  rattachent,  des 
éclaircissements  sur  le  rôle  politique  de  la  cité  ou  sur  les  personnages 
qui  l'ont  illustrée,  enfin  la  liste  des  monuments  qui  attestent  encore 
son  ancienne  splendeur  ou  font  connaître  quelques  particularités  de 
son  histoire.  Ant.  Héeon  db  Yillbfossb. 


IVotloe  sur  un  manuscrit  méroirlnglen  contenant  dea  fk*ag^ 
menta  d'KusypIua  (appartenant  à  M.  Jules  Desnoyers),  parLéopold 
Deuslb.  Paris,  A.  Picard,  avril  1875.  In-fol.  de  10  p.  et  6  pi.  —  Prix  :  15  tr, 

M.  L.  Delisle  rappelle  (p.  5)  que  la  science  paléographique  s'est 

constituée  en  France  et  qu'elle  y  a  été  cultivée  sans  interruption 

depuis  le  dix-septième  siècle  jusqu'à  nos  jours.  «  Nous  avons  donc, 

dit-il,  à  soutenir  une  ancienne  réputation  et  à  ne  pas  laisser  dépérir 

chez  nous  les  études  qui  se  rattachent  par  tant  de  points  à  l'histoire 


—  430  — 

et  à  la  philologie,  n  Pour  réminent  érndit,  l'un  des  meilleurs  moyens 
de  développer  et  de  faciliter  Tétude  de  la  paléographie,  consisterait 
à  publier  d'excellents  fac-similé  photographiques,  d'après  lesquels 
l'œil  se  familiariserait  avec  les  écritures  de  chaque  pays  et  chaque 
époque,  à  choisir  des  types  authentiques  auxquels  pourraient  être 
ramenés  les  exemples  qu'on  rencontre  le  plus  souvent,  à  joindre  aux 
faC'Simik  une  copie  en  caractères  courants  qui  servirait  aux  exercices 
de  déchiffrement,  et  des  commentaires  dans  lesquels  on  indiquerait  la 
nature  du  texte,  la  date  et  le  lieu  de  la  transcription  et  les  parti- 
cularités dont  il  faut  tenir  compte  pour  bien  connaître  les  usages 
suivis  par  les  scribes  depuis  l'antiquité  jusqu'à  l'invention  de  l'impri- 
merie. »  Voulant  donner  un  exemple  de  ce  qui  pourrait  être  tenté 
dans  ce  genre,  M.  Dell  si  e  a  pris  un  volume  dont  il  n*a  été  question 
dans  aucun  traité  de  paléographie,  et  qui  fournit  des  types  fort 
variés  de  l'écriture  que  les  copistes  de  Tépoque  mérovingienne  em- 
ployaient à  la  transcription  des  livres.  Ce  volume,  dont  six  pages  ont 
été  admirablement  reproduites  en  photogravure  par  les  soins  de 
M.  Dujardin  (avec  copie  en  regard  et  qui  appartient  à  M.  Jules  Des- 
noyers, dont  le  cabinet,  même  encore  après  les  dévastations  subies 
en  1870,  lors  de  Toccupation  de  Montmorency  par  les  Allemands, 
renferme  beaucoup  de  documents  historiques  et  littéraires  du  moyen 
âge  et  des  temps  modernes),  est  un  manuscrit  de  la  première  moitié 
du  huitième  siècle,  et  il  renferme  des  extraits  de  saint  Augustin 
recueillis  par  Eugypius  vers  le  milieu  du  sixième  siècle,  lesquels 
ensuite  ont  été  imprimés  dans  le  tomeLXII  de  lo,  Patrologie  de  Migne. 
Remercions  M.  Delisle  du  nouveau  service  que,  par  cette  remar- 
quable publication,  il  vient  de  rendre  aux  études  paléographiques.  A 
lui  plus  qu'à  personne,  il  appartenait  de  montrer  ce  que  nous  avons 
à  faire  pour  ne  pas  nous  laisser  dépasser  par  les  diplomatistes  étran- 
gers. Puisque  nous  n'avons  pas  su  garder  toutes  nos  anciennes  gloires, 
gardons  au  moins  celle  que  représentent  les  noms  des  Mabillon,  des 
Montfaucon,  des  Natahs  de  Wailly  et  des  Delisle  !  T.  de  L. 


Nouveaux  mélanges  d'archéologie»  d*liletolre  et  de  litté- 
rature nur  le  moyen  Age»  par  les  auteurs  de  la  monographie  des 
vitraux  de  Bourges  (Ce.  Cahier  et  feu  Arthur  Martin,  de  la  C*  de 
Jésus\  Collection  publiée  par  le  P.  Ch.  Cahier. —  Tome  U,  Ivoires,  Minià- 
iures,  J^mouop  ;  Tome  III,  Décora/ions  d'église,  Paris,  Firmin-Didot,  1874- 
1875.  2  vol.  gr.  in-4  de  350  et  294  p.  —  Prix  :  40  fr. 

Les  dessins  et  les  planches  gravées  par  feu  le  P.  Martin  forment 
une  immense  collection  à  laquelle  le  P.  Cahier  ne  cesse  de  recourir 
sans  que,  heureusement,  on  puisse  prévoir  que  cette  riche  mine  soit 
épuisée  de  sitôt.  Voici  deux  magnifiques  volumes,  tels  que  Ton  est 


—  440  — 

accoutumé  à  en  voir  sortir  de  la  maison  Didot^  qui  portent  à  trois 
tomes  la  série  des  Nouveaux  mélangefâ^ archéologie.  J'ai  parlé  du  pre* 
rnier,  édité  en  1873.  Le  volume  de  1874  traite  principalement  des 
ivoires,  des  miniatures  et  des  émaux  ;  le  volume  de  1875  se  compose 
de  nombreuses  gravures,  groupées  de  manière  à  former  un  recueil 
indispensable  à  consulter  pour  la  décoration  des  églises. 

Je  n'ai  pas  à  revenir  sur  Térudition  du  P.  Cahier  ;  elle  est  aussi 
inépuisable  que  la  suite  des  croquis  et  dessins  recueillis  de  tous  côtés 
par  son  regretté  confrère  et  collaborateur  ;  à  chaque  page-,  on  peut 
facilement  constater  la  profonde  connaissance  des  textes  sacrés  et 
des  écrits  des  saints  Pères,  que  possède  le  docte  jésuite.  Que  n'est-il 
un  peu  plus  archéologue  et  paléographe  ! 

L'héritage  artistique  du  P.  Martin  n'est  pas,  il  faut  Tavouer, 
toujours  facile  à  inventorier.  Confiant  dans  sa  mémoire,  ne  prévoyant 
pas  sa  fin  prématurée,  il  négligea  trop  souvent  de  rappeler,  sur  ses 
croquis,  la  matière  des  objets  qu'il  avait  sous  les  jeux,leslieuxmémes 
où  il  les  avait  étudiés.  11  en  résulte  que  le  P.  Cahier  est  forcé 
d'avouer  l'impossibilité  dans  laquelle  il  se  trouve  de  donner  certains 
détails  qui  ont  bien  leur  prix  pour  les  lecteurs.  Le  P.  Cahier,  d'ail- 
leurs^ ne  semble  pas  trop  préoccupé  de  donner  son  avis  sur  l'âge  des 
monuments,  et  il  lui  a  paru  inutile  de  faire  des  démarches  pour  pré- 
ciser certains  faits.  —  Je  regrettais  plus  haut  qu'il  ne  fût  pas  paléo- 
graphe ;  pourquoi  n'a-t-il  pas  cru  devoir,  à  cet  égard,  consulter  quel- 
ques spécialistes?  Il  en  eût  certainement  trouvé  dans  la  Compagnie  de 
Jésus.  De  cette  manière,  il  ne  se  fût  pas  étonné  (t.  III,  p.  15)  de  l'ins- 
cription tracée  ou  brodée  sur  une  mitre  de  Tolède,  représentant 
Notre-Seigneur  crucifié,  entre  la  sainte  Vierge  et  le  disciple  bien 
aimé  ;  là  où  le  P.  Cahier  lit  :  ecce  mater  Domini^  je  lis  :  ecce  crucem 
Domini.  Il  n'aurait  pas,  non  plus,cherché,dans  les  débris  de  la  légende 
peinte  sur  la  fresque  de  Saint-Pierre-lès-Églises  (t.  II,  p.  113),  les 
mots  balneatum  et  tunica,  qui  ne  s'y  trouvent  certainement  pas. 

Telle  qu*est  l'œuvre  du  P.  Cahier,  il  semble  que  l'on  se  trouve  dans 
un  magnifique  musée,  classé  sans  ordre  méthodique  ;  on  j  voit  des 
représentations  d'objets  expliqués  d'une  manière  complète,  mais  dont 
il  faudra  retrouver  les  originaux  ;  on  regrette  de  ne  pas  toujours 
apprendre  d'où  ils  viennent,  par  quelles  mains  ils  ont  passé.  Si  le 
P.  Cahier  est  l'interprète  le  plus  sûr  et' le  plus  complet  que  l'on  puisse 
souhaiter,  on  se  demande  pourquoi  il  ne  fait  pas,  plus  en  détail,  l'his- 
toire des  monuments,  qu'il  explique  si  bien.  Ainsi,  le  tome  II  commence 
par  les  plats  en  ivoire  sculptés  d'un  manuscrit  provenant  de  la  Grande- 
Chartreuse,  vendu  en  1846  en  Angleterre,  exécuté  en  Palestine  pour  la 
princesse  Mélissende,  Le  P.  Cahier  décrit  avec  un  soin  méticuleux  les 
principaux  épisodes  de  la  vie  de  David  qui  sont  gravés  sur  l'un  des 


—  441  — 

plats^  la  représentation  symbolique  des  œuvres  de  miséricorde  qui 
figurent  sur  Tautre  plat;  mais  le  lecteur  aimerait  savoir,  en  outre, 
comment  ce  manuscrit  était  venu  de  Palestine  à  la  Grande-Chartreuse, 
quelle  était  cette  princesse  Mélissende.  Ces  détails  intéresseraient 
autant  que  la  discussion  sur  le  nom  d'Hérodius  gravé  en  boustrophédon 
au-dessus  d'un  oiseau;  quelques  personnes,  dans  ce  mot,  veulent 
voir  le  nom  de  l'artiste  qui  a  exécuté  ce  magnifique  ouvrage.  Le 
P.  Cahier  ne  paraît  pas  éloigné  de  rapprocher  Herodius  et  Fulica^ 
sjnonjmes,  d'après  quelques  bestiaires^  et  de  chercher,  dans  le  nom 
du  faucon,  une  allusion  à  celui  de  Foulque  Y  d'Anjou. 

Parmi  les  autres  ivoires  décrits  dans  le  tome  II,  je  citerai  une  boite 
cylindrique  sur  laquelle  est  représentée  une  châsse  ;  une  tour  ;  la 
crosse  de  Siegburg  ;  des  olifants,  dès  plaques  diverses;  des  peignes 
liturgiques.  Les  deux  premiers  objets  sont  certainement  antiques,  et 
la  tour,  qui  paraît  provenir  de  Brioude,  pourrait,  suivant  le  P.  Cahier, 
avoir  été  un  présent  d*Avitus  à  la  basilique  de  Saint-Julien,  —  Les 
miniatures  sont  empruntées  à  Tévangeliaire  de  Charles  le  Chauve, 
dont  la  couverture  en  orfèvrerie  a  été  gravée  dans  le  tom  P' 
des  Nouveaux  mélanges;  à  d'autres  manuscrits  des  bibliothèques  de 
Munich  et  de  Poitiers;  aux  lettres  historiées  du  Sacramentaire  de 
Drogon.  Dans  l'émaillerie,  nous  trouvons  la  châsse  de  saint  Calmine, 
qui  fit  partie  de  la  collection  Soltykof;  celle  de  saint  Yiance;  celle 
de  l'église  d'Huj,  qui  porte  le  nom  de  Saint  Marc  ;  des  reliquaires  de 
Maestricht. 

Ensuite,  vient  le  superhuméral  d'Eichstaedt,  qui  donne  au  P.  Cahier 
Toccasion  de  traiter  la  question  du  pallium,  et  d'expliquer  un  vête- 
ment ecclésiastique  toujours  porté  par  saint  Lambert  ;  la  sainte  face 
deLaon;  les  colombes  et  réserves  eucharistiques  ;  les  chrismes;  les 
bas-reliefs  du  portail  de  la  Vierge,  à  la  cathédrale  de  Paris,  déjà 
étudiés  jadis  par  feu  Duchalais;  le  savant  jésuite,  en  passant,  rend 
hommage  au  tact  archéologique  de  mon  regretté  confrère  et  ami.  — 
Le  volume  se  termine  par  une  série  considérable  de  dessins,  recueillis 
en  Espagne,  et  par  des  modèles  de  ferronnerie  composés  par  le  P.  Mar- 
tin. Disons  que  les  modèles  du  P.  Martin  sont  excellents  à  suivre; 
il  avait  â  la  fois  le  sentiment  de  l'art  et  celui  de  l'archéologie  du  moyen 
âge.  Si  l'on  tient  à  l'exactitude,  mieux  vaut  se  fier  à  ses  compositions 
qu'à  ses  gravures  d'originaux  anciens  qui,  bien  souvent,  ne  sont  que 
de  belles  infidèles. 

Le  troisième  volume  des  Mélanges,  publié  cette  année,  est. un  véri- 
table album,  qui  donne  de  très-bons  éléments  pour  T  ornementation  des 
églises  au  point  de  vue  architectural,  comme  au  point  de  vue  du 
mobilier.  Chacun  peut  trouver  là  des  motifs  pour  les  mitres,  les  cha- 
subles, les  sarcophages,  la  sculpture  décorative,  les  fonds  baptismaux, 


\ 


—  442  - 

les  ohandeliora,  les  lutrins,  l^s  calices,  les  ciboires,  les  croix,  les  en* 
censoirs,  etc.  A  proposées  vitraux  d'Auzerre,le  P.  Cahier  donne  une 
véritable   monographie  des   légendes  de  saint  Nicolas,    de  sainte 
Madeleine  et  de  sainte  Catherine,  accompagnée  de  copieuses  citations 
empruntées  à  des  récits  rimes.  A.  db  B. 


BULLETIN 

I^es  Question»  de  vie  ou  de  oiort,  par  le  R.  P.  Al.  Lefebvbb,  de 
la  Compagnie  de  Jésus,  i  To1.in-12.  Paris,  ^lard,  1875.  In-i2  de  400  p.  — 
Prix  :  3  fr. 

Quel  chrétien  ignore  l'éloquence .  tout  apostolique  du  P.  Lefebvre,  sa 
vie  active  partagée  entre  la  prière,  la  chaire  et  le  confessionnal,  et  ses 
livres,  qui  sont  une  autre  manière  de  prédication,  sur  les  Consolations  reU^ 
gieuses  et  sur  la  Folie  en  matière  de  religion?  Son  livre  d*a^jourd*hui  n'a  pas 
d'autre  visée  ;  ce  n'est  pas  œuvre  de  philosophe  et  de  publiciste,  c'est  effu- 
sion de  zèle  religieux.  Au  reste,  l'auteur  obéit,  en  le  publiant,  non -seule- 
ment aux  inspirations  de  sa  charité,  mais  au  vœu  d'une  &me  sainte.  «  C'est 
vous,  dit-il,  dans  sa  dédicace  au  P.  de  Ponlevoy,  6  mon  bon  Père,  père  de 
mon  âme,  c'est  vous  qui  m'avez  conseillé  d'écrire  ce  petit  livre,  et  qui,  la 
veille  même  de  votre  mort,  m'avez  pressé  de  le  publier.  » 

On  devine  quelles  sont  les  graves  questions  traitées  ici  :  Dieu,  l'homme, 
la  destinée,  la  vie,  le  salut  (c'est  le  chapitre  capital),  l'âme,  le  péché,  la 
mort,  l'enfer;  et,  dans  la  partie  pratique,  l'indifiérence,  le  respect  humain, 
la  femme  forte,  la  conversion,  la  confession,  l'Eucharistie,  etc.  —  Le 
p.  Lefebvre  n'est  pas  de  ceux  qui  cherchent  des  théories  nouvelles  ou  tra* 
cent  des  tableaux  éblouissants.  Il  prêche,  —  car  tout  en  s'adressent  à  son 
lecteur  au  lieu  de  parler  à  une  assemblée  pieuse,  il  a  toujours  le  ton  de 
la  parole  apostolique,  —  il  prêche  les  bonnes  vieilles  vérités  sous  leur  forme 
authentique,  dans  les  termes  du  catéchisme.  Ce  qui  lui  donne  la  vie  et  la 
jeunesse,  c'est  l'accent  d'une  foi  active  et  ardente,  c'est  le  zèle  dévorant, 
c'est  la  charité  s'épanchant  d'elle-même  dans  toute  âme  en  souffrance,  c'est 
le  saisissement  toujours  plus  profond  des  fins  dernières,  méditées  dans  ce 
maître  livre  des  EaerHces  qui  a  fait  tant  de  saints  et  tant  d'apôtres.  J'ajou- 
terai plus  spécialement  encore  pour  le  P.  Lefebvre,  c'est  la  condescendance, 
la  noble  simplicité,  la  connaissance  expérimentale  des  conditions  actuelles 
de  la  vie  chrétienne  dans  le  monde,  le  don  de  tenir  l'attention  éveillée  par 
un  tour  saisissant,  par  un  texte  vivement  manié,  par  une  anecdote  frappante, 
par  tous  les  autres  moyens  que  fournissent  un  heureux  naturel  et  un  long 
exercice.  En  somme,  excellent  livre,  vrai  manuel  de  lectures  méditées,  qui 
convient  universellement  aux  esprits  d'une  culture  moyenne,  et  aux  chré- 
tiens ordinaires  du  temps  présent.  Léonce  Coutcbc. 

C«eB  Vrais  principes  de  l*Educatlon  chrétienne  rappelé» 
aux  Mafftrea  et  ausL  ffamlllea.  Dispœitione  requises  pour  en  faire 
^me  heureuse  application  et  devoirs  gui  en  découlent,  par  le  P.  A.  Monfat,  de 
la  Société  de  Marie.  Paris,  Bray  et  Retaux,  4875.  In-i2  de  viii-366  p.  -- 
Prix  :  3  fr. 
Le  p.  Monfat  expose  les  vrais  principes  de  l'éducation  chrétienne  avec 

l'amour  d'un  auteur  épris  de  son  siyet  et  l'autorité  d'un  homme  d'expérience 


—  443- 

qni  a  reçu  l'approbation  d'une  oongrégation  se  liyrant  ayec  succès  à  l'en- 
seignement. Il  destinait  d*abord  à  ses  seuls  confrères  son  livre,  qui  vise  plus 
spécialement  les  maîtres  ecclésiastiques,  et  que,  toutefois,  liront  et  médite- 
ront avec  fruit  les  maîtres  laïques  et  les  pères  de  famille.  D'abord,  il  les 
relève  à  leurs  yeux  en  leur  montrant  la  haute  dignité,  l'inappréciable  impor- 
tance de  leur  mission  ;  et  il  fait  ressortir  tous  les  avantages  qu'ils  y  trouvent 
pour  leur  propre  perfection  :  considération  d'une  haute  importance  et  à  bien 
faire  valoir  devant  tous  les  «  éducateurs,  »  car  elle  a  les  plus  graves  consé- 
quences pour  les  obligations  qui  en  déeoulent.  H  les  encourage  en  exposant 
dans  quelles  conditions  favorables  ils  se  trouvent  pour  arriver  à  leur  but.  Il 
y  a  beaucoup  à  prendre  pour  tout  le  monde,  dans  ce  qu'il  dit  des  conditions 
requises  des  «  éducateurs  9  et  des  devoirs  qui  leur  incombent.  D'un  côté, 
piété,  science  et  autorité  ;  de  l'autre,  dévouement  à  l'œuvre  entreprise  ; 
respect  et  obéissance  aux  supérieurs  ;  charité  envers  ses  collaborateurs  ; 
amour  respect  et  patience  pour  les  enfants.  Ces  chapitres  sont  pleins  de 
conseils  pratiques  excellents  dictés  par  une  grande  expérience,  par  un  esprit 
profondément  observateur,  par  un  amour  éclairé  pour  l'enfance,  en  un  mot, 
l'œuvre  d'un  saint  religieux.  Nous  ne  voyons  d'autre  reproche  à  adresser  à 
l'auteur  que  d'avoir  un  peu  trop  délayé  ses  pensées;  pour  être  plus  clair, 
il  est  plus  long  et  aussi  plus  difficile  à  lire.  Mais  nous  devons  le  louer 
d'avoir  enlevé  à  l'autorité,  en  la  définissant  bien,  le  caractère  haïssable 
qu'on  lui  attribue  trop  souvent,  parce  qu'elle  le  prend  quelquefois.  Il  a  bien 
raison  aussi  d'insister  sur  la  nécessité  du  travail,  tant  pour  acquérir  que 
pour  conserver  la  science.  Rien  ne  doit  inspirer  aux  «  éducateurs  »  une  trop 
profonde  horreur,  tant  pour  eux  que  pour  leurs  enfants,  contre  tous  les  pro- 
cédés si  facilement  admis  de  nos  jours,  qui  ne  peuvent  que  favoriser  la 
paresse.  R.  de  St. -M. 


■^•es  «léBultes  et  l*ai*mée.  Etude  sur  les  résultats  produits  dans 
l'offftée  par  ce  qu'on  est  convenu  d'appeler  Vinfluence  cléricale,  par  Albert 
DE  Badts  de  GuGNAC.  Paris,  Oimer,  1875,  in-8  de  66  p.  —  Prix  :  {  fr.  50. 

Cette  étude  est  tirée  d'un  travail  d'ensemble  sur  la  Compagnie  de  Jésus, 
auquel  l'auteur  travaille  en  ce  moment.  Elle  débute  par  ces  mots  :  u  Les 
grands  hommes  ont  été,  pour  la  plupart,  des  hommes  religieux,  »  qui  indi- 
quent suffisamment  dans  quel  esprit  et  à  quelle  intention  elle  a  été  conçue  et 
écrite.  —  C'est,  d'ailleurs,  une  vue  très-  générale  et  qui  comprend  trois  cha- 
pitres seulement,  où  sont  rappelés,  sans  aucun  ordre  chronologique  ni  mé- 
thode apparente,  les  grands  souvenirs  de  Lepante,  de  Sobieski,  des  Pères 
Parabère  et  de  Damas,  des  ambulances  pendant  la  guerre  de  1870-71,  du 
grand  Condé  et  du  maréchal  Bugeaud,  de  Saint-Âmaud  et  de  Don  Carlos,  du 
Père  de  Ravignan  et  des  zouaves  pontificaux,  de  Loigny  et  des  écoles  diri- 
gées à  Metz,  à  Paris,  à  Amiens,  etc.,  par  les  Pères  Jésuites  pour  pr4parer  les 
jeunes  gens  aux  écoles  spéciales  militaires  du  gouvernement.  Aux  catholiques 
convaincus  et  qui  suivent  le  mouvement  de  rénovation  religieuse  dont 
rÉcole  de  Saint-Cyr  oflre  aujourd'hui  un  si  admirable  ex  mple,  cette  bro- 
chure peut,  après  tout,  n'avoir  pas  grand  chose  à  apprendre  ;  mai^  nous  en 
croyons  néanmoins  la  diffusion  très-utile  pour  éclairer  les  ignorants  et  ou- 
vrir les  yeux  aux  aveugles  de  bonne  foi.  Sa  place  nous  parait  surtout  par- 
faitement indiquée  dans  toutes  les  biblio  hèques  de  régiments  et  dans  les 
cercles  militaires  qui  se  créent  de  tous  cètés,  à  la  faveur  de  la  nouvelle  loi, 
sous  la  direction  des  aumôniers.  F.  de  R. 


-  444  - 

E<eB  grands  btenAulteura  de  i*liuiiMiiilté,  par  M.  Adolphe  Hcard, 
Paris,  Berche  et  Tralin,  1875.  In-12  do  x-353  p.  —  Prix  :  3  fr. 

On  ne  saurait  trop  louer  Tinspiration  qu'a  eue  M.  Huard  de  composer  une 
galerie  de  médaillons,  dans  lesquels  sont  encadrés  les  portraits  des  prin- 
cipaux bienfaiteurs  de  l'humanité  :  il  est  bon  d*ayoir  toujours  leur  exemple 
sous  les  yeux  :  c'est  un  excellent  a  prix  d'encouragement  au  bien.  »  Les 
figures  sur  lesquelles  il  s*est  arrêté  sont  celles  de  saint  Vincent  de  Paul, 
du  petit  manteau  bleu^  de  la  sœur  Hosalie,  de  Monthyon,  du  B.  de  La  Salle, 
de  MM.  Marbeau  et  Taylor,  de  la  sœur  Marthe,  de  M*«  de  Lariboisière,  de  Tabbê 
de  l'Épée,  d*£ustache  le  bon  noir,  de  Gochin,  du  F.  Philippe,  du  duc  de 
Larochefoucauld-Liancourt,  d'Haûy,  du  P.  Claves,  de  Michel  Brezin,  de 
Gérando  de  Boulard  et  Benjamin  Delessert,  du  P.  de  Las  Cases  et  de  Fénelon. 
D  y  a  entre  tous  une  grande  variété  et  on  pourrait  ajouter  une  grande  dis- 
parité. Les  uns  ont  agi  par  vertu;  chez  les  autres,  il  y  eut  beaucoup  d'amour 
propre  et  d'ostentation  :  les  fondations  que  quelques-uns  ont  faites  valent 
mieux  qu'eux-mêmes.  C'est  ce  que  M.  Huard  ne  fait  pas  suffisamment  res- 
sortir, quoiqu'il  raconte  d'une  façon  intéressante  la  vie  de  ces  person- 
nages et  en  mette  bien  en  relief  le  côté  bienfaisant.  Ses  éloges  sont  trop 
emphatiques  et  ne  sont  pas  proportionnés  aux  actes;  le  style  manque  de 
simplicité  ;  les  réfiexions  ne  sont  pas  toujours  ni  justes  ni  heureuses.  Com- 
ment peut-on  se  contenter  de  dire  :  u  Survint  la  Révolution  du  10  août  1792, 
qui  appela  à  elle  tous  les  gens  de  bonne  volonté.  (44)?  »  Comment  un  écri- 
vain catholique  ne  parle-t-il  jamais  que  de  '«  bienfaisance  et  d'humanité.  » 

R.  DE  St-M. 


AleiKla  Glerc»  marin»  Jésuite  et  otage  de  la  Gommune» 
fusillé  &  la  Roquette  le  94  mal  1 8T1*  Simple  biographie  par 
le  R.  P.  Charles  Daniel,  de  la  compagnie  de  Jésus.  Paris,  Ainanel  et 
Balteneveck,  1875.  In-18  j.  de  ix-562  p.  —  Prix  :  4  fr. 

Les  otages  de  la  Commune  ont  été  comme  notre  rançon,  comme  des  vic- 
times d'expiation  destinées  à  arrêter  le  bras  terrible  de  la  justice  de  Dieu. 
Aussi  rien  n'est  plus  légitime  que  l'intérêt  que  l'on  porte  à  tout  ce  qui  nous 
parle  d'eux,  rien  n'est  plus  naturel  que  le  prix  attaché  à  tous  les  détails 
sur  des  vies  qui  seraient  passées  inaperçues  au  milieu  de  nous  sans  lenr  fin 
glorieuse.  C'est  une  des  raisons  qui  assurent  le  succès  au  livre  que  le  P.  Daniel 
a  consacré  au  P.  Alexis  Clerc,  un  des  cinq  justes  demandés  à  la  compagnie  de 
Jésus.  Il  en  a  élagué,  avec  juste  raison,  tout  ce  qui  n'aurait  servi  qu'à  satisfaire 
la  curiosité,  pour  ne  donner  que  ce  qui  peut  contribuer  au  bien  des  Âmes. 
Dans  son  chapitre  si  bien  intitulé  :  «  Le  P.  Clerc,  prisonnier  et  victime  pour 
l'amour  de  Jésus-Christ,  »  il  s'est  bien  gardé  de  refaire,  après  le  P.  de 
Pontlevoy,  les  actes  de  la  captivité  et  du  martyre  ;  il  s'est  borné  h  ajouter 
quelques  lettres  et  quelques  détails  sur  les  dispositions  du  martyr  et  ses  cu- 
rieux pressentiments.  Mais,  pour  tout  le  reste,  son  œuvre  est  neuve  et  ori- 
ginale et  nous  fait  connaître  un  P.  Clerc  tout  autre  que  le  soupçonnaient  la 
plupart  même  de  ceux  qui  avaient  été  en  relation  avec  lui.  Non  pas  que 
ce  ne  soit  toujours  la  même  nature  ouverte,  le  même  esprit  vif  et  enjoué, 
le  même  cœur  généreux  et  dévoué  ;  mais  combien  ignoraient  les  combats 
qu'il  eut  à  subir  pour  retourner  à  la  religion  de  sa  mère  et  se  consacrer  an 
service  de  Dieu  ! 

Alexis  Clerc,  privé  de  bonne  heure  de  sa  mère,  fut  élevé  dans  les  idées 
d'un  père  qui  admirait  Voltaire  et  lisait  le  Siècle^  et,  quoique  revenu  plus 
tard  de  ses  préjugés  contre  la  religion,  ne  se  consola  jamais  d'avoir  un  fils 


—  445  — 

jésuite.  Passant  par  les  mains  de  l'Université  et  de  TÉcole  polytechnique,  il  se 
confirma  dans  Tirréligion  ou  plutôt  rindiiférence,  et  y  sgouta,  pour  rendre 
les  chances  de  retour  plus  difficiles,  Tamour  des  plaisirs  et  la  carrière  mari- 
time, où  l'on  est  si  souvent  privé  de  secours  religieux.  Aussi  sa  conversion 
futrclle  un  long  et  laborieux  travail  que  nous  pouvons  étudier  sous  toutes 
ses  phases.  Nous  le  voyons  luttant,  résistant,  étudiant,  discutant  soit  pour 
s'éclairer,  soit  pour  essayer  do  ramener  son  père,  ses  amis,  ses  camarades. 
Une  fois  le  premier  pas  fait,  il  devient  bientôt  un  apôtre,  faisant  le  bien 
partout  où  ses  fonctions  l'appelaient,  et  entraînant  après  lui  des  camarades 
timides.  Toutes  ses  lettres  sont  pleines  des  considérations  les  plus  élevées, 
exprimées  avec  une  netteté  remarquable  et  touchant  un  peu  à  tous  les 
sqjets.  La  controverse  est  ce  qui  domine  et  on  y  trouvera  bien  des  argu- 
ments qui  pourront  être  utilement  servis  ;  mais  aussi  il  y  a  sur  les  choses 
de  ce  monde,  sur  la  politique,  des  aperçus  vraiment  remarquables  : 
qu'on  lise  ce  qu'il  disait  en  1848  du  suffrage  universel,  et,  plus  tard,  ses  juge- 
ments sur  l'Empire.  Appelons  aussi  l'attention  sur  l'intéressant  récit  de  ses 
voyages  au  long  cours,  surtout  de  son  voyage  à  l^rd  du  Cassini,  et  sur  tous 
les  détails  attachants  de  sa  vie  de  religieux  et  de  professeur.  Est-ce  oubli, 
est-ce  manque  de  documents?  Le  P.  Daniel  ne  dit  rien  de  sa  direction  d'une 
réunion  d'anciens  élèves  des  Pères  et  d'une  œuvre  de  patronage  à  Paris.  Il 
parle  plusieurs  fois  comme  vivant  encore,  du  P.  de  Cuers,  qui  quitta  aussi 
la  marine  pour  se  consacrer  à,  Dieu,  quoique  ce  saint  prêtre  ait  suivi  de 
très-près  le  P.  Clerc  dans  un  monde  meilleur.  René  de  Saint-Mauiiis. 


Xfa.   Fotssee,  notice  biographique^   par  Henri  Beâune.  2*  édition. 
Dijon,  Lamarche;  Paris,  Douniol,  1875.  In-18  j. 

L'historien  du  président  de  Brosses  et  du  père  Lacordaire,  l'ami  de  M.  de 
Montalembert,  le  courageux  et  infatigable  champion  de  la  liberté  de  l'ensei- 
gnement et  de  l'indépendance  de  l'Église  dans  l'État,  le  magistrat  intègre 
qui  menait  une  vie  de  bénédictin  et  d'ancien  parlementaire  au  milieu 
d'une  de  nos  cours  de  justice  modernes,  M.  Théophile  Foisset,  méritait  bien 
un  biographe,  n  en  a  trouvé  un,  magistrat  lui-même,  qui  avait  été  élevé 
à  son  école  et  avait  reçu  ses  enseignements.  M.  H.  Beaune  nous  a  donné 
une  biographie  pleine  d'intérêt,  à  laqueHe  nous  ne  saurions  reprocher 
qu'une  chose,  c'est  sa  sobriété  et  sa  concision  mêmes.  Mais  telle  qu'elle  est, 
on  peut  la  recommander  aux  lecteurs  du  Polybiblioriy  qui  y  trouveront  des 
détails  nouveaux  et  fort  curieux  sur  le  réveil  des  idées  catholiques  qui  a 
marqué  les  dernières  années  de  la  Restauration  et  les  premières  années  du 
Gouvernement  de  juillet.  M.  Foisset  a  pris,  en  effet,  une  part  très-active  à  ce 
mouvement.  Il  l'a  même  dirigé,  car  il  a  été  longtemps  l'inspirateur  caché 
du  Correspotidant,  auqu^  il  collabora  d'ailleurs  de  la  manière  la  plus 
brillante .  X. 

Lies  Pyrénées.   Paysages  et  esquisses,   par  le  comte    de  Perhochel. 
2«  édit.  Le  Mans,  typ.  Edm.  Monnoyer,  1875.  Gr.  in-18  de  184  p. 

Le  comte  de  Perrochel,  auquel  nous  devons  déjà  Une  semaine  en  Istrie,  a 
écrit,  d'une  plume  élégante  et  facile,  ses  impressions  de  voyage  aux 
Pyrénées.  Le  touriste  se  fait  poète,  dans  une  invocation  aux  monts  qu'il  a 
visités  qui  ouvre  le  volume  ;  il  se  fait  moraliste  à  plus  d'une  page  de  ce 
petit  livre,  et  il  nous  donne  lieu  d'espérer  qu'abordant  des  sujets  plus 
spéciaux  et  avec  plus  d'étendue,  il  offrira  bientôt  au  public  autre  chose 
que  ces  esquisses,  d'une  touche  si  délicate,  qui  révèlent  un  vrai  talent  de 
penseur  et  d'écrivain.  G.  de  B. 


-^  446  — 

Sioniet  et   im  Vendée,    par  Edmond  Stofflst.  Paris,  Pion,    i875. 

Gr.  in-iS  de  440  p.,  avec  une  grande  carte  spéciale.  —  Prix  :  4  fr. 

M.  Edm.  StofQet,  en  retraçant  les  exploits  de  celui  dont  il  porte  le  nom, 
n'a  pas  seulement  voulu  payer  un  juste  tribut  d'éloges  à  une  mémoire 
illustre  ;  il  a  cherché  &  faire  une  œuvre  sérieuse  de  critique  historique,  & 
démêler  dans  les  récits  des  historiens  la  part  du  vrai  et  du  faux,  à  réfuter 
des  erreurs  accréditées.  Nous  n'hésitons  pas  à  dire  qu'il  s'est  acquitté  de 
cette  tâche  avec  un  soin  consciencieux  et  avec  un  vrai  talent  d'écrivain. 
Son  livre  doit  être  rangé  parmi  ceux  qu'on  4evra  consulter  sur  les  guerres 
de  la  Vendée,  et  il  ofi&ira  en  même  temps  à  la  jeunesse  une  lecture 
attrayante.  Sans  en  accepter  toutes  les  conclusions,  —  il  y  a  des  procès  qui 
restent  longtemps  en  suspens  et  qu'il  est  difficile  de  résoudre  d'une  manière 
définitive,  —  nous  le  recommandons  à  nos  lecteurs*  E.  d'à. 


Mjbl  Serbie  et  la  erlse  orientale,  par  Emile  Collas.  Paris,  Charles 
Douniol,  1875.  Gr.  in-8,  de  24  p.  (Extrait  du  CorrespondtuU.) 

Sous  ce  titre  :  La  Serbie  et  la  crise  orientaie,  un  écrivain  plein  d'avenir, 
M.  Emile  Collas,  substitut  du  procureur  de  la  République  près  le  tribunal 
de  première  instance  de  Châtillon-sur-Seine,  publie  une  intéressante  étude 
sur  les  événements  qui  s'accomplissent  actuellement  dans  l'empire  ottoman 
et  qui  excitent  une  grande  agitation  au  sein  des  états  chrétiens,  tributaires 
ou  limitrophes  de  la  Turquie.  La  Serbie,  la  Roumanie,  le  Monténégro  peuvent 
être  entraînés  &  prendre  part  à  la  lutte  qui  se  poursuit  dans  les  mon- 
tagnes de  l'Herzégovine  ;  l'intervention  seule  de  la  Serbie  peut  même  amener 
une  solution  violente  et  prématurée  de  la  ques(ion  d'Orient,  solution  que  les 
grandes  puissances  redoutent,  mais  qu'elles  peu  vent  retarder  par  une  média- 
tion entre  les  Turcs  et  les  chrétiens  soulevés .  M.  Collas  examine  avec  soin 
les  causes  de  mésintelligence  qui  divisent  la  Serbie  et  la  Turquie  ;  il  nous 
montre  les  unes  dérivant  de  l'état  général  des  contrées  orientales,  du  passé 
historique  du  peuple  turc  et  du  peuple  serbe,  et  des  espérances  d'avenir  de 
la  Serbie,  et  les  autres  ayant  leur  origine  dans  des  faits  particuliers  et  des 
griefs  spéciaux;  tels  que  la  détention  du  Petit  Zwomik  et  l'opposition  sourde 
et  inique  du  gouvernement  ottoman  &  la  création  des  voies  ferrées  traver- 
sant la  principauté  serbe  et  reliant  Constantinople  et  Salonique  aux  chemins 
de  fer  de  l'empire  austro-hongrois.  M.  Collas  nous  fait  voir  ensuite  le  rôle 
que  la  Serbie  peut  jouer  dans  la  crise  qui  agite  en  ce  moment  le  monde 
oriental,  et  il  arrive,  par  d'habiles  considérations,  k  cette  conclusion  que  les 
provinces  révoltées  doivent  être  annexées  à  la  Serbie,  ou  partagées  entre  la 
Serbie  et  le  Monténégro.  C'est  le  démembrement  de  l'empire  ottoman,  c'est 
la  disparition  forcée  des  Turcs  des  pays  européens.  Cette  solution,  prévue  par 
les  esprits  politiques   les   plus  pratiques,  est  otposée  avec  beaucoup  de 
netteté  et  de  précision  par  le  savant  magistrat,  dans  la  brochure  que  nous 
venons  d'analyser.  A.  Albrieb. 


apôtre,  récî<  truandais  (imité  de  l'anglais).  Paris,  Àuteuil,  imprime- 
rie des  apprentis  catholiques,  1875.  In- 12  de  74  p. 

Pat  est  an  ouvrier  irlandais  catholique  qui  éclaire  et  convertit  un  de  se» 
camarades  vivant  dans  le  protestantisme.  11  discute  avec  lui  principalement 
sur  le  culte  de  la  Vierge,  la  présence  réelle,  la  foi  qui  est  un  don  de  Dieu, 
l'insuffisance  de  la  Bible  pour  éclairer  les  fidèles.  Ses  arguments  sont  clairs, 
simplement  exposés,  appuyés  sur  les  textes  évangéliques.  Si  on  admire  sa 
scienea,  on  est  encore  plus  touché  de  sa  charité  et  de  son  dévouement;  mais 


—  447  — 

nous  croyons   le  ton   général   un  peu  trop  mystique  pour  le  succès  de   la 
Bibliothéiiue  des  apprentis  catholiques  dont  ce  volume  fait  partie. 

R.  S. 


Ija  Grise  de  cent  ans*  Li*Bk116  lorrain»  Lie  lk»inmet  de  la  cité 
ehrétlenae*  par  Charles  Ghaaaux,  professeur  à  la  faculté  des  lettres  de 
Grenoble.  —  Grenoble,  Côte;  Paris,  Albonel,  1875.  In-18  de  103  p.  — 
Prix  :  i  fr. 

Les  trois  articles  qui  composent  ce  petit  volume  n*ont  de  conmiun  que 
leur  origine,  qui  explique  leur  même  caractère  religieux  et  patriotique,  et 
leurs  mêmes  qualités  de  style.  Le  premier  renferme,  sous  forme  de  dialogue 
entre  des  pères  jésuites  de  T  université  de  Pont'à-Mousson,des  considérations 
très-justes  et  très-élevées  sur  les  causes  de  la  Révolution  française  ;  le  second 
explique  les  malheurs  de  la  France  par  son  abandon  de  la  religion  ;  le  troi- 
sième est  une  excellente  apologie  des  ordres  contemplatifs.  R.  S. 


Notice  de*  tableauiK»  deaftine,  eatampea»  Utho^raphleat 
pbotographlea  et  «ciilpturea  exposéa  dans  les  aallea  du 
muaée  de  l*liôtel  de  Ville  d*Aotun,  par  Harold  de  Fontenay, 
conservateur  du  Musée.  Autun,  imp.  Michel  Dejussieu,  i875.  In-18  de  94  p. 
—  Prix  :  0  fr.  75. 

Les  tableaux,  dessins,  estampes,  lithographies,  photographies  et  sculp- 
tures exposés  dans  les  salles  du  musée  de  Thôtel  de  ville  d' Autun  sont  peu 
considérables.  Quelques  pièces  même  sont  d'une  mince  valeur  artistique 
et  ne  méritent  d'être  conservées  qu'en  raison  de  l'intérêt  qu'elles  présentent 
pour  l'histoire  locale.  On  trouve  cependant,  dans  cette  petite  mais  précieuse 
collection,  certaines  toiles  remarquables,  ainsi  :  Le  combat  de  Somah  et  La 
prise  de  la  tmir  Malakoffy  par  Horace  Verne t;  Le  portrait  de  Wille  par  Greuze  ; 
Les  deux  ermites,  un  Paysage  et  saint  Jérôme,  par  David  Teniers  ;  Le  portrait 
de  M.  le  général  Changarnier,  par  Arv  Scheffer,  etc.,  etc.  Le  catalogue  qui 
énumère  ces  objets  divers  est  fait  avec  beaucoup  de  coin  et  d'exactitude  ; 
les  dimensions  des  panneaux  et  des  toiles  sont  scrupuleusement  relatées  ;  les 
tableaux  sont  décrits  avec  une  rare  précision,  et  un  article  plus  ou  moins 
long  est  consacré  à  chaque  artiste.  On  reconnaît  bien  vite,  en  parcourant 
cette  notice,  que  celui  qui  a  écrit  cette  plaquette  est  un  ancien  ^ève  de 
l'École  des  chartes.  Nous  reprocherons  seulement  à  l'auteur  de  n'avoir  point, 
dans  son  travail,  suivi  la  division  par  écoles.  Pourquoi  avoir  adopté  un 
ordre  chronologique  basé  uniquement  sur  la  date  d'entrée  de  tableaux  dans 
nn  musée?  Quoi  qu'il  en  soit,  nous  appelons  l'attention  de  nos  lecteurs  sur 
cette  brochure,  et  nous  attendons  avec  impatience  l'étude  que  M.  Harold 
de  Fontenay  doit  bient6t  consacrer  aux  objets  antiques  conservés  à  l'hôtel 
de  ville  d'Autun.  A.  Albribb. 

Lia  Vie  de»  bola  et  du  déaert.  Récits  de  chasse  et  de  péche^  par 
B6NÉDICT- Henri  Râvoil,  avec  deux  histoires  inédites,  par  Alexandre 
Dumas  père.  Tours,  Alfred  Marne,  1874.  Gr.  in-8  de  237  p.  —  Prix  :  2fr.  50. 

Histoire»  de  chaase,  par  Bénédict-Henhi  Râvoil.  Paris,  Didier,  1875. 
Gr.  in-18  de  336  p.  —  Prix  :  3  fr. 

L'aimable  et  spirituel  conteur  auquel  on  doit  ces  deux  nouveaux  ouvrages 
est  bien  connu  de  nos  lecteurs,  et  la  jeunesse  lit  toigoors  avec  plaisir  ses 
tt  narrations  cynégétiqnes  »  qui  se  recommandent  par  nne  verve  intaris- 
sable et  par  une  exubérance  que  des  yeux  plus  expérimentés  qualifie- 


—  448  — 

raient  d*exces8ive.  Mais  le  proverbe  :  A  beau  mentir  qui  vient  de  loin  trouve 
ici  son  application.  Gomment  contredire  le  spirituel  écrivain?  Le  mieux 
est  de  le  croire  sur  parole  et  de  se  laisser  aller  au  charme  de  ses  récits. 

Dans  le  premier  des  ouvrages  que  nous  avons  à  signaler,  M.  B.  H.  Révoil 
nous  conduit  en  Norwége,  où  il  nous  fait  assister  à  une  chasse  à  l'ours  ; 
dans  rinde,  où  «  deux  Français  établis  à  Calcutta,  »  dont  il  a  eu  la  <c  bonne 
chance  de  feuilleter  les  notes,  »  racontent  la  chasse  aux  paons  ;  en  Amérique, 
où  le  voyageur  tue  des  bécasses,  des  porcs-épics,  des  gorilles,  etc., 
et  où  Ton  chasse  môme...  en  ballon;  en  Afrique,  où  l'on  rencontre  l'au- 
truche et  le  léopard  ;  à  la  Guadeloupe,  où  Ton  tue  des  diablotins.  Il  y  a  des 
chasses  moins  excentriques  et  moins  lointaines  :  celle  du  renard,  entre 
autres,  et  le  livre  se  ferme  sur  les  chasses  de  l'Inde.  —  Les  deux  histoires 
inédites  d'Alex.  Dumas  père  n'occupent  que  les  douze  dernières  pages;  elles 
sont  intitulées  :  La  Chasse  dans  le  nord  de  /'Europe,  et  Une  citasse  à  Vours 
en  Russie  ;  la  seconde  raconte  un  épisode  dont  le  comte  Melchior  de  Vogué 
fut  le  héros. 

—  La  pêche  à  la  loutre,  une  chasse  au  chamois^  une  chasse  à  l'antilope,  la 
chasse  aux  pumas,  une  chasse  sous  les  tropiques,  la  chasse  au  feu,  la  chasse 
aux  sangliers,  une  chasse  en  Perse,  la  chasse  k  l'oiseau,  un  chasseur  d'ours, 
une  chasse  dans  les  Ardennes,  une  chasse  dans  la  forêt  Noire,  la  chasse  aux 
>  bouquetins,  les  singes  de  Gibraltar,  tels  sont  les  «  histoires  de  chasse  »  qui  se 
pressent,  dans  le  second  ouvrage,  sous  la  plume  de  l'auteur.  Ne  lui  demandez 
pas,  plus  qu'ailleurs,  d'être  véridique;  il  s'inquiète  surtout  d'être  varié  et 
amusant,  et  réunir  cette  double  qualité,  en  racontant  ses  propres  aventures, 
est  souvent  difficile,  quelque  grand  chasseur  qu'on  ait  été.  Il  est  bien  permis 
de  faire  aux  autres  quelques  emprunts  et  surtout  de  recourir  à  cette  riche 
pourvoyeuse  qu'on  a  appelé  «la  folle  du  logis.»  M.  B.  H.  Révoil  ne  s'en  fait 
pas  faute.  Il  y  met  tant  d'habileté  et  d'entrain  que  ses  jeunes  lecteurs  ne  le 
lui  reprocheront  certes  pas.  .  L.  C. 

Eie  Eilvre  de»  «oupei*  ot  dea  potages,  contenant  plus  de  quatre  cents 
recettes  de  potages  français  et  étrangers,  par  Jdles  Gouffé.  Paris,  Hachette, 
1875.  Gr.  in-18  de  260  p.  —  Prix  :  1  fr.  25. 

M.  J.  Gouffé,  «  ancien  officier  de  bouche  du  Jockey  Club,  »  n'est  point  à  ses 
débuts  dans  la  carrière  d'écrivain.  Il  est  l'auteur  du  magnifique  Livre  de  cui- 
sine, édité  par  la  maison  Hachette  avec  un  luxe  princier,  et  des  livres  de 
Conserves  et  de  Pâtisserie.  Tous  ces  ouvrages  sont  accompagnés  de  vignettes  et 
de  planches  en  chromolithographie.  C'était  bon  pour  les  «  officiers  de  bouche,  » 
mais  non  pour  les  simples  cuisiniers.  Le  petit  volume  qui  vient  de  paraître 
sera  d'une  utilité  plus  pratique.  Il  est  divisé  en  trois  livres  :  potayes  gras, 
potages  maigres,  potages  étrangers,  et  est  complété  par  un  appendice  sur  quel- 
ques sauces  pour  potages.  Une  table  alphabétique  donne  tous  les  titres  de 
cette  riche  et  appétissante  nomenclature.  Z. 


VARIÉTÉS 


LES   PUBLICATIONS   DE   LA    CAMDEN   SOCIETY. 

Troisième  article  ^. 

LI.  The  pylgrymageof  Syr  Richard  Guylforde  to  the  Holy  Land,  A.  D.  4506, 
from  acopy  believed  to  bey  unique  from  the  press  of  Richard  Pynson.  Edited  bj 

(1)  Voir  tome  X,  p.  234  et  tome  XII,  p.  244. 


—  440  — 

sir  Henry  Ellis,  1851,  xvi-92  p.  —  Ce  n'est  pas  souvent  que  la  Camdcm 
Society  publie  des  réimpressions,  mais  le  volume  en  question  reproduit  une 
rareté  bibliographique  dont  un  seul  exemplaire  est  connu^  et  sir  Richard 
Henry  Ellis  fît  bien  de  violer  la  règle  générale  imposée  aux  membres  de 
la  société.  L*autcur  de  la  relation  dont  il  s'agit  ici  était,  selon  toute  proba- 
bilité, le  chapelain  de  sir  Richard  Guilford,  et  il  parait  avoir  emprunté  la 
plupart  des  descriptions  qu'il  nous  donne  à  une  sorte  de  guide  écrit  en 
latin,  et  fort  en  usage  parmi  les  pèlerins  de  la  fin  du  moyen  âge.  Ce  guide 
lui-même  semble  avoir  été  un  abrégé  du  grand  ouvrage  de  Bernard  de 
Breidenbach,  publié  pour  la  première  fois  à  Mayence,  en  1483. 

Ln.  Moneys  received  and  paid  for  secret  services  of  Charles  II,  and  James  II, 
from  ^Oth  of  match  1679,  to  25<^  ofDecember  1688.  Edited  from  a  ms  in  the 
possession  of  William  Selby  Lowndes,  esq.  by  John  Yonge  Akerman,  esq., 
x-240  p.  —  Quelque  temps  après  Tavénement  de  Guillaume  III,  un  certain 
Henry  Grey,  chargé  de  la  répartition  des  fonds  secrets  pendant  les  deux 
règnes  précédents,  eut  à  rendre  ses  comptes.  En  neuf  ans  et  neuf  mois,  il 
avait  reçu  la  somme  de  565,573  livres  sterling,  15  sh.  et  5  d.  3/4, 
sur  laquelle  il  lui  restait  une  balance  de  341  livres,  5  sh.  et  6  d.  1/2. 
Les  déboursés  se  rapportent:  1*  à  Tentretien  des  domaines  privés  delà 
couronne  ;  2<*  à  des  gratifications  accordées  comme  récompense  de  services 
rendus  par  certaines  personnes.  Rien  de  scandaleux,  rien  même  de  piquant 
à  noter  dans  ce  budget  supplémentaire,  si  on  peut  l'appeler  ainsi. 

LÏÏI.  Chronicle  ofihe  Grey  friars  of  London,  edited  by  John  Gough  Nichols, 
1852,  xxxv-108  p.  —  L'ouvrage  que  M.  Nichols  s'est  chargé  de  publier  appar- 
tient à  la  même  classe  que  les  compilations  déjà   décrites  sous  les  numé- 
ros XXVHI  et  XXXIV  (voir  t.   X,  p.  239,  et  t.  XI,  p.  245).  La  préface  donne 
rénumération  de  huit  autres  recueils  analogues,  y  compris  l'ouvrage   très- 
connu  de  Fabyan;  on  pourrait  y  ajouter  la  courte  chronique  des   règnes  de 
Henry  VU  et  Henry  VIII,  imprimée  dans  le  tome  quatrième  de   la  Camden 
Miscellany.  On  a  peine  à  comprendre  pourquoi  Stowe,  qui  pourtant  possédait 
le  manuscrit  original  de  cette  histoire,  en  a  fait  si  peu  d'usage  ;  et  surtout 
comment  il  se  fait  que   Strype  ne  la  cite  même  pas.  Jusqu'à  l'année  1502, 
elle  suit  pas  à  pas,  et  copie    presque,  un   autre  travail  intitulé  Amold's 
chronicle,  dont  M.  Douce  publia,  en  1814,  une  excellente  édition.  Â  partir 
de  1503,  l'auteur  anonyme  devient  plus  indépendant,   et  ses  remarques, 
portant  conmie  elles  le  font  sur  la  situation  religieuse  de  l'Angleterre  au 
seizième  siècle,  sont  pleines  d'intérêt.  Le  récit  s'arrête  en  1566.  Le  titre  du 
volume  vient  de  ce  qu'il  faisait  partie,  à  l'origine,  de  la  bibliothèque  des 
Frères  Gris  ou  franciscains  de  la  ville  de  Londres. 
LrV.  Promptorium  parvulorum  tomus  alter,  voir  n«  XXV. 
LV.   The  Camden  miscellany,  volume  the  second,  1863.  —  Voici  la  liste  des 
six  morceaux  publiés  dans  ce  volume  :  i,  Account  of  the  expenses  of  John  of 
Brabant,  and  Henry  and  Thomas  of  Lancaster,  A.  D.  1292-3,  edited  by  Joseph 
BcRT.   1853,  xvi-18  p.  —  Jean,  fils  du  duc  de  Brabant,  fut  fiancé  en  1278  à 
Marguerite,  fille  du  roi  Edouard  V* .  La  princesse  n'avait  alors  que  trois  ans. 
En  1284,  Jean,  âgé  de  quinze  ans,  vint  en  Angleterre,  et  y  résida  jusqu'en 
1294,  époque  de  la  mort  de  son  père.  Ses  compagnons  de  voyage,  en  1292 
et  en  1293,  Thomas  et  Henry  de  Lancaster,  tous  deux  neveux  du  roi  devin- 
rent successivement  comtes  de  Lancaster.  Le  document  imprimé  ici  est  une 
sorte  d'itinéraire  de  ces  trois  jeunes  gens  et  un  relevé  de  leurs  dépenses.  — 
2.  Household  expenses  of  the  Princess  Elizabeth,  during  her  résidence  at  Hatfield. 
October  1 , 1 551 ,  <o  1 0  September  30,  1 552.  Edited  by  viscount  Strangpord.  1 853, 
Novembre  1875.  T.  XIV,  29. 


—  450  — 

iv*48  p.  —  Cette  pièce,  déjà  décrite  par  plusieurs  antiquaires,  n'a  qu'un 
très-mince  intérêt.  —  3.  The  request  and  suite  of  a  true-hearted  Englishtnan^ 
written  by  William  Cholmley,  Londyner,  in  theyear  iK53.  Edited  by  W.  J. 
Tboms.  1855,  vi-20p.  — Traité  politique  fort  curieux,  sur  les  matières  de 
commerce,  principalement  celui  de  la  laine  et  des  draps.  M.  Fronde  le  cite  à 
diverses  reprises  dans  son  Histoire  d'Angleterre.  —  4.  The  discovery  of  the 
Jesuits*  Colkge  at  Clerkenwell  in  March  4627-28,  and  a  letttrfound  in  theùr 
house  (as  asseried),  direeted  to  the  father  Bêctor  at  Bruxelles,  Edited  bj  John 
GouGH  NicHOLs.  1852,  64  p.  —  Le  récit  de  la  découverte  du  collège  des 
jésuites  parait  avoir  été  écrit  par  le  secrétaire  d'État  sir  John  Coke.  Le 
manuscrit  original  se  trouve  aux  archives  du  royaume,  ainsi  que  les  pièces 
justificatives  d'après  lesquelles  il  fut  rédigé.  Quelques-unes  de  ces  pièces, 
un  instant  égarées,  ont  été  insérées  dans  le  tome  quatrième  de  la  Camden 
Miseelkmy.  Quant  à  la  lettre  dont  le  titre  fait  mention,  chacun  sait  aujourd'hui 
qu'il  faut  y  voir  tout  simplement  une  satire  politique,  composée  par  sir  John 
Maynard,  membre  du  Parlement,  On  l'imprima  d'abord  en  forme  de  pamphlet 
(1643)  ;  puis  le  fanatique  Prynne  et  l'antiquaire  Rnshworth  l'insérèrent  dans 
leurs  recueils;  c'était  un  canard  suivant  toute  l'acception  du  mot.  —  5. 
Trelawny  paperSf  edited  by  W.  D  Goopeb.  1853,  23  p.  —  6.  Autobiography  and 
anecdotes,  by  William  Taswell,  DD.  A.  D.  1651-1682.  Edited  by  G.  P.  Elliott, 
esq.,  40  p.  —  Documents  d'un  intérêt  tout  local,  et  qui  ne  méritaient  guère 
les  honneurs  de  l'impression. 

LVI.  Letters  and  popers  of  the  Vemey  famUly  down  to  the  end  of  the  year 
1639.  Printed  from  the  original  mes,  in  the  possession  of  sir  Harry  Vemey; 
edited  by  John  Bbcce,  esq.  1853.  xjv-308  p.,  plus  un  tableau  généalogique. 
—  Les  documents  publiés  dans  ce  volume  remontent  jusqu'au  règne 
d'Edouard  P',  mais  c'est  à  partir  du  dix-septième  siècle  surtout  qu'ils  nous 
offrent  de  l'intérêt.  L'annoUteur  leur  a  donné  pour  cadre  une  histoire  suivie 
de  la  famille  Yerney,  et  il  l'a  fait  avec  beaucoup  de  talent.  Parmi  les  points 
les  plus  dignes  d'attention,  je  citerai  les  suivants.  Pendant  les  régnes 
d'Henry  VI  et  d'Edouard  IV  :  l'adresse  singulière  qui  procura  au  lord  maire 
yorkiste,  sir  Ralph  Yerney,  pour  son  fils,  les  domaines  du  Laneastrien  sir 
Robert  \'Vlûttingham  ;  -^  Régne  ât  Henry  VU  :  la  vie  passablement  débauchée 
du  courtisan  sir  Ralph  Yerney,  chambellan  de  la  princesse  Marguerite,  et 
un  de  ses  gentilshommes  en  Ecosse  ;  —  Bégne  de  Marie  :  détails  sur  la  cons- 
piration de  Dudley  :  deux  des  Yerney  y  furent  compromis  ;  —  Bégne  de 
Jacques  P'  :  Le  voyage  du  prince  de  Galles  en  Espagne,  où  sir  Edmond 
Yerney  se  rendit  avec  lui  ;  récit  des  aventures  des  pirates  anglais  dans  la 
Méditerranée;  —  Bégne  de  Charles  I*'  :  emprunts  forcés,  affaire  de  Hampden, 
et  particularités  diverses  du  plus  grand  intérêt.  La  dernière  partie  du  vo- 
lume  se  rattache  surtout  à  l'expédition  envoyée,  en  1639,  contre  les  puritains 
d'Ecosse,  et  les  lettres  de  sir  Edmond  Yerney  en  donnent  un  récit  circons- 
tancié. 

LYU.  The  Ancren  Biwle  ;  a  treatise  on  the  rules  and  duties  of  monastic  life.  Edited 
and  translated  from  a  semi-saxon  ms.  of  the  trirteentcentury,  by  therev.  James 
MoRTON,  1853.  xxviii-480  p.  —  Ce  curieux  ouvrage  existe  en  anglo-saxon  et  en 
anglais  ;  on  en  connaît  plusieurs  manuscrits  que  M.  Morton  examine  dans  sa 
préface;  il  a  choisi  pour  guide  le  ms.  cottonien  (Néron,  A.  XIY),  conservé  an 
British  muséum,  et,  contrairement  à  l'opinion  reçue,  il  pense  que  le  texte  ori- 
ginal était,  non  pas  en  latin,  mais  en  anglo-saxon.  VAnaren  Riwle  ne  sau- 
rait être,  comme  on  se  l'est  quelquefois  imaginé,  l'ouvrage  de  Simon  de  Gand, 
évêque  de  Salisbury,  de  1297  à  1318;  le  dialecte   dans  lequel  il  est  écrit 


-  451  - 

révèle  une  date  plus  ancienne,  et  M.  Morton  indique  comme  auteur  probable 
Guillaume  Poore,  qui  occupa  le  siège  épiscopal  entre  i  21 7  et  1228  ;  ce  prélat 
était  natif  de  Tarrent,  dans  le  Dorsetshire,  et  il  adressa  aux  religieuses  de 
Tendroit  cette  espèce  d'exhortation  pastorale,  lorsqu'il  reconstruisit  et  em- 
bellit leur  abbaye.  Excellent  spécimen  du  dialecte  de  l'ouest  de  l'Angleterre 
au  treizième  siècle,  VAncren  Riwle  est  curieux  à  double  titre  :  comme 
tableau  de  la  vie  monastique  et  conmie  document  philologique. 

LVIU.  Letters  of  ihe  Lady  Brilliana  Rarley,  wife  of  sir  Robert  Earley,  of 
Brampion  BrycM.  With  introduction  and  notes,  by  T.  T.  Lewis.  1854,  lii-275  p. 

—  Lettres  touchantes,  écrites  d'un  style  ému  et  se  rapportant  aux  incidents 
de  la  vie  domestique.  Sir  Robert,  époux  de  Lady  Brilliana,  fut  un  des  mem- 
bres les  plus  actifs  du  Long-Parlement,  et  soutint  avec  vigueur  la  cause 
républicaine  dans  le  comté  deHereford.  Sa  femme  défendit  contre  les  roya- 
listes, en  1643,  le  château  de  Brampton  Bryan;  au  bout  de  trois  semaines 
de  résistance,  la  garnison  fut  obligée  de  se  rendre,  et  Lady  Brilliana  mourut 
trois  mois  après. 

LIX  et  LXII.  A  roll  of  the  housckold  expenses  of  Bichird  de  Swinfieldy  bishop 
of  Herefofdy  during  part  of  the  years  1289  and  1290.  Edited  by  Rev.  John 
Webb,  1854. — Vol.II.Abstracts,  illustrations,  glossary,  index,  1855.  Ensemble, 
ccxxxu-270  p.  —  Ce  qui  fait  la  valeur  de  ce  livre,  c'est  la  manière  savante 
dont  il  a  été  édité.  Le  résumé  et  l'introduction,  formant  un  commentaire 
perpétuel  sur  les  documents  réunis  par  M.  Webb,  contiennent  une  infinité 
de  détails  sur  la  vie  civile  et  religieuse  de  l'Angleterre  au  temps  d'Edouard  I«'. 
L'appendice,  de  plus  de  quarante  pages,  reproduit  plusieurs  documents 
intéressants  relatifs  à  l'église  cathédrale  d'Hereford,  et  à  la  canonisation  de 
révoque  Cantilupe. 

LX.  GrantSf  etc.,  from  the  crùwn  during  the  reignof  Edward  the  fifth,  fromthe 
original  docket-book,  Harleian  ms.  433,  and  two  $peechesforopening  Parliament^ 
by  John  Russel,  bishop  of  Lincoln,  Lord  Chancelier.  With  an  historical  introduc- 
tion, by  John  Gougb  Nichols.  1854,  lxiv-96  p.  —  Ce  volume  est  un  extrait  du 
ms.  Harleien,  n*  433,  codex  très-curieux,  contenant  la  minute  de  toutes  les 
décisions,  lettres,  ordonnances  transcrites  chaque  jour  par  les  commis  du 
roi  Richard  m.  La  partie  imprimée  ici  se  rapporte  aux  deux  mois  du  règne 
nominal  d'Edouard  V.  M.  Nichols  a  relevé,  dans  sa  préface,  une  faute  com- 
mise par  M.  Sharon  Turner  ;  cet  historien  s'était  imaginé  qu'un  parlement 
avait  été  réuni  sous  le  règne  si  court  d'Edouard  V,  et  que  le  duc  de  Glou- 
cester  avait  pris  le  titre  et  les  fonctions  de  protecteur,  en  vertu  d'une  auto- 
rité déléguée  par  ledit  parlement.  Le  fait  est  que  Richard  étant  devenu  pro- 
tecteur le  14  mai  1483,  le  Parlement  fut  convoqué  pour  le  25  juin,  et  c'est  à 
cette  occasion  que  le  discours  du  Lord  chancelier  fut  préparé,  et  non  pas 
prononcé  ;  car  le  Parlement,  ajourné  en  vertu  d'un  décret  de  supersedeas,  ne 
s'assembla  que  plus  tard.  Quant  aux  trois  speeches  de  l'évêque  Russell,  ce 
sont  des  morceaux  imparfaits,  des  projets  de  discours,  intéressants  comme 
spécimens  de  la  langue  anglaise  au  quinzième  siècle. 

LXI.  TheCamden  Miscellany,  wlumelll,  1855. —  Contient  quatre  articles  dont 
voici  la  description  sommaire  ;  I  •  Papers  relating  to  proceedings  in  the  county 
of  Kent.  A  D.  1642-1646;  edited  by  Richard  Almack,  esq.,  vu-68  p.  — 
Documents  authentiques  sur  les  menées  du  parti  révolutionnaire  dans  le 
comté  de  Kent.  —  2.  Ancien^  biographical  poems,  on  the  Duke  'of  Norfolk, 
vticotiRl  Ilerefordy  the  earl  of  Esseœ,  and  queen  Llizabeth,  Front  Gough's 
Norfolk  mes.  in  the  Bodleian  library.  Edited  by  J.   Payne  Gollieb.   26  p. 

—  Pièces  assez  amusantes  et  contenant  de  curieux  détails.  —  3.  A  Relatùm 


—  452  — 

of  some  abuses  tvhich  are  committed  against  tke  Common-Wealth  ;  together  with  a 
friendlie  reprehension  of  the  same.  Composed  especiallie  for  the  benefii  of  this 
eounty  of  Durhame,  December  the  xxvjth  i629,  by  a  porre  friend  and  Wel- 
wisherto  the  Common-Wealth.  Edited  by  Sir  F.  Madden,  th  iv-35  p.  —  Remar- 
ques intéressantes  sur  la  corruption  du  temps,  et  les  scandales  qui  s*in- 
troduisaient  de  toutes  parts.  L'auteur  arrange  en  quatre  divisions  les  abus 
dont  il  se  plaint,  i^  Dégâts  commis  dans  les  bois^'et  forêts:  2*  destructloD 
des  cbâteaux  et  forteresses;  3*  décadence  de  l'esprit  guerrier;  4* ivrognerie, 
usage  du  tabac,  extravagance  dans  le  costume.  —  4.  Inventories  of  tfie  War- 
drobes.  Plate,  Chapel  stuff,  etc.^  of  Henry  fiti  roy,  Duke  of  Richmond;  and  of 
the  Wardrobe  stuff  at  Baynard's  castle,  of  Katharine,  princess  dowager.  Edited, 
with  a  memoir,  and  letters  of  the  Duke  of  ï Richmond,  by  John  Gougt 
NiCHOLS,  c-55  p.  —  L'index  et  le  glossaire  explicatif  ajoutés  par  M.  Nichols, 
donnent  beaucoup  de  prix  à  cet  intéressant  volume  ;  la  notice  biographique 
est  enrichie  de  vingt  et  une  lettres  écrites  par  le  duc  de  Richmond  au  roi 
Henry  VIII,  au  cardinal  Wolsey  et  à  Cromwell. 

LXn.  Voir  plus  haut,  n*»  LIX. 

LXm.  Charles  1  in  4646.  Letters  of  king  Charles  the  fvrst  to  Queen  Henrietta 
Maria,  Edited  by  John  Brlxe,  d856,  xxxi-104  p.  —  Ces  soixante  et  onze 
lettres  paraissent  avoir  été  les  copies  faites  expressément  par  la  reine 
sur  les  originaux  écrits  en  chif&es.  Quelques-unes  ont  déjà  vu  le  jour. 
L'introduction  de  M.  Bruce,  composée  dans  un  esprit  défavorable  à  Charles  I*', 
ne  laisse  pas  que  d'être  très-digne  d'attention. 

LXrV.  An  English  chronicle  of  the  reigns  of  Richard  II,  Henry  IV,  Henry  V, 
and  Henry  71,  written  before  theyear  1471  ;  with  an  appendix,  containing  the  ÏBth 
and  i9th  years  of  Richard  II,  and  the  Parliament  at  Bury  Saint  Edmunds  2J5th 
Edward  VI;  and  supplementary  additions  frvm  the  Cotton  ms.  chronicle 
caUed  «  Euiogium.  »  Edited  by  the  Rev.  J.  S.  Davies,  1856.  —  Le  fond  de 
cet  ouvrage  est  la  chronique  de  Brut,  si  connue  en  Angleterre,  et  dont  un 
excellent  manuscrit,  jadis  entre  les  mains  des  archéologues  Stowe  et  Speed 
qui  l'annotèrent,  est  passé  depuis  dans  la  famille  du  précédent  éditeur. 
Les  extraits  réunis  par  M.  Davies  comblent  certaines  lacunes  de  l'ancien 
annaliste,  et  le  rectifient  çà  et  là. 

LXY.  The  Knights  Hospitaliers  in  England  :  being  the  report  of  Prior  PliUi 
de  Thame  to  the  grand-master  Elyan  de  Villanwa  for  A.  D.  1338.  Edited  by 
the  Rev.  L.  B.  Larking,  with  an  historical  introduction  by  J.  Mitchell 
Kemble,  1857,  lxxii-301  p.  —  Très-précieux  pour  l'histoire  des  chevaliers 
hospitaliers.  Le  manuscrit  original  fait  partie  de  la  bibliothèque  publique  de 
La  Valette. 

LXVI.  JHary  of  John  Rous,  incumbent  of  Santon  Downham,  Suffolk,  from 
1625  to  1642.  Edited  by  Mary  Anne  Everett  Green.  1856  xn-143,  p.  — 
Dans  ce  journal,  les  allusions  et  les  détails  relatifs  aux  événements  publics 
se  trouvent  mêlés  d'une  façon  très-piquante  à  des  poésies  satiriques  sou- 
vent écrites  avec  verve. 

LXVII.  Trevelyan  papers  prior  to  A.  D.  1558.  Edited  by  J.  Payne  Collier. 
1857,  ix-219  p.  —  Documents  de  toute  nature,  tirés  des  archives  de  la 
famille  Trevelyan,  et  importants  surtout  pour  l'histoire  des  règnes  d'Henry  VID 
et  d'Edouard  VI. 

LXVUI.  Journal  of  tlie  very  Rev.  Rowland  Davies,  Dean  of  Ross  [and  after- 
wards  Dean  of  Cork),  from  March  8,  1688-89,  to  September  29,  1690.  Edited 
with  notes,  and  an  appendix,  and  some  account  of  the  author  and  bis 
family,  by  Richard  Caulfield.  1857,  xiv-188p.  —Pendant  l'occupation  de 


-  453  - 

rtrlando  par  les  troupes  de  Jacques  II,  le  doyen  Davies  passa  quelque  temps 
en  Angleterre,  soit  à  Londres,  soit  à  Yarmouth  (comté  de  Norfolk),  tenant 
un  journal  de  ses  faits  et  gestes,  et  enregistrant  ce  qu'il  trouvait  digne  de 
remarque.  Plus  tard,  il  fit  la  campagne  d'Irlande  avec  les  troupes  de  Guil- 
laume m,  assistant  à  la  bataille  de  la  Boyne  et  au  siège  de  Limerick. 

LXIX.  The  Domesday  of  Saint  PauVs  of  ihe  year  MCCXXII;  or  regisirum  de 
visitaiione  Maneriorum  per  Rohertum  Decanum;  and  other  origineU  documents 
reîating  to  the  mancfè  and  ehwrches  belonging  to  the  Dean  and  chapter  of  Saint 
PauVs^  London,  in  the  twefth  and  thirteenth  centuries.  With  an  introduction, 
notes  and  illustrations,  by  William  Hâle  Hale,  archdeacon  of  London.  1858, 
XVII,  cxxxvii  et  211  p.  —  Le  titre  de  ce  livre  en  indique  suffisamment  la 
nature,  et  la  consciencieuse  préface  de  H.  l'archidiacre  Hale  n'omet  aucun 
point  d'importance  relatif  au  registre  terrier  de  l'église  cathédrale  de  Saint- 
Paul.  Tout  est  expliqué,  conmienté,  annoté. 

LXX.  Liber  famelicus  of  Sir  James  Whitelocke,  a  judge  of  the  court  of  King*s 
Benoh  in  the  reign  of  James  I  and  Charles  L  now  firstpublished  from  the  original 
ms.  Edited  by  John  Bruce.  1858,  XX- 131  p. — Sir  James  Whitelocke,  légiste 
assez  distingué,  et  auteur  de  plusieurs  ouvrages,  a  consigné,  dans  le  volume 
dont  je  viens  de  transcrire  le  titre,  quantité  d'anecdotes  et  de  remarques  sur 
le  barreau  et  la  magistrature  anglaise  des  premières  années  du  dix-sep- 
tième siècle;  c'est  une  lecture  amusante. 

LXXI.  Savile  correspondence.  Letters  to  and  from  Henry  Savile,  esq.  Envoy  at 
Paris,  and  Vice  Chamberlain  to  Charles  11  and  James  11,  including  letters  from 
his  brother  George,  marquess  of  Halifax.  Printed  from  a  ms.  belonging  to  his 
Grâce  the  Duke  of  Devonshire,  and  from  originals  in  Her  Majesty's  State  Paper 
office.  Edited  by  W.  D.  Gooper.  1858,  xxiv-316  p.  —  Gette  correspondance 
comprend  les  événements  depuis  1661  jusqu'en  1689,  et  a  toute  la  valeur 
qu'on  pouvait  attendre  de  lettres  écrites  par  des  personnages  aussi  haut 
placés  que  le  furent  Savile  et  son  frère,  Lord  Halifax.  Une  notice  biogra- 
phique sur  la  famille  et  un  arbre  généalogique  ont  été  ajoutés  par  M.  Goo- 
per. Impossible  de  citer  un  volume,  sous  tous  les  rapports,  plus  remar- 
quable parmi  les  publications  de  la  Camden  Society.  Gustave  Masson. 
(A  suivre,) 


II 

LES  PUBLICATOINS  REVOLUTIONNAIRBS  A  L'ÉTRANGBR. 

Les  membres  de  la  Gommune  qui  ont  trouvé  un  asile  dans  les  pays  voisins, 
leurs  adeptes  les  plus  fougueux,  les  apôtres  cosmopolites  du  socialisme  et  de 
l'anarchie  déploient  une  grande  activité  ;  ils  publient,  à  Londres,  en  Suisse, 
en  Belgique,  une  multitude  d'écrits  dans  lesquels  ils  déclarent  une  guerre 
acharnée  à  toute  idée  religieuse,  à  tout  principe  d'autorité.  Ces  émules  de 
Marat,  ces  copistes  de  Babœuf  n'épargnent  rien  pour  enflammer,  pour  égarer 
les  masses  populaires.  Interdites  en  France,  ces  prod  uctions  empoisonnées 
pénètrent  toutefois  clandestinement  en  assez  grand  nembre  ;  certaines  librai- 
ries de  Genève  et  de  Bruxelles  en  font  le  commerce,  et  nous  avons  sous  les 
yeux  un  catalogue  qui  ne  contient  pas  moins  de  433  ouvrages  diverses. 

Peut-être  ne  sera-t-il  pas  sans  intérêt  de  donner  les  titres  de  quelques- 
unes  de  ces  productions,  où  la  mauvaise  foi  et  l'impudence  sont  portées  aux 
plus  extrêmes  limites. 


—  484  — 

Nommons  d'abord  Eugène  Yermesch  et  ses  Incendiaireê,  poétie  (2*  édition, 
Londres,  I872,in-I6). 

La  préface  offre  les  lignes  suivantes  : 

«  Le  peuple  sait  vaincre,  mais  il  ne  sait  pas  profiter  de  la  victoire,  et 
c'est  pourquoi  j'ai  voulu  dire  une  fois  encore  ce  que  j'ai  si  souvent  répété 
ailleurs  : 

«  Hais  donne  donc  le  coup  de  boutoir  1  » 

Yermesch  a  été  le  rédacteur  en  chef  du  Qui  Vive  !  Orgarie  de  la  BémùcraUe 
universelle  (Londres,  1871,  60  numéros).  Cette  feuille  ultra-jacobine  fut  suivie 
du  Yermesch-Joumal  (Londres,  1871-72,  82  numéros),  auquel  succéda  rrJnùm 
démocratique  (Londres,  1872,  numéros  83  à  21  o  ;  le  dernier  numéro  est  du 
30  septembre).  Yermesch  s'étant  retiré  au  mois  de  juillet,  à  la  suite  de  dis- 
sentiments avec  ses  collaborateurs,  ce  journal  prit  une  allure  un  peu  plus 
modérée. 

Un  Russe,  révolutionnaire  cosmopolite,  Bakounine,  n'est  pas  le  moins  actif 
de  ces  écrivains  ;  en  septembre  1870,  il  courut  à  Lyon,  afin  d'y  établir  la 
Commune  révolutionnaire.  Après  l'insuccès  de  cette  tentative  (insuccès  qu'il 
attribue  à  Cluseret),  le  Moscovite  se  retira  en  Suisse,  et  il  fit  imprimer,  À 
Genève,  en  1871,  la  Bévolutiofi  sociale,  ou  la  Dictature  militaire.  Prenons-lui 
quatre  lignes  : 

«  La  bourgeoisie  se  montre  dure,  égoïste,  cupide,  étroite,  bête,  à  la  fois 
brutale  et  servile,  féroce  quand  elle  croit  pouvoir  l'être,  sans  beaucoup  de 
danger,  comme  dans  les  néfastes  journées  de  juin,  toujours  prosternée  de- 
vant l'autorité  et  la  force  publique  dont  elle  attend  son  salut,  et  ennemie  du 
peuple,  toujours  et  quand  même.  » 

Il  met  au  jour,  la  même  année  :  La  Théologie  politique  de  Mazzini  et  rin- 
temationale. 

Il  appelle  le  grand  agitateur  italien  :  a  l'une  des  plus  nobles  et  des  plus 
pures  individualités  de  notre  siècle,  »  mais  il  lui  reproche  de  graves  erreurs  : 
«  Le  culte  de  Dieu,  le  culte  de  l'autorité  divine  et  humaine,  fondé  néces- 
sairement sur  la  misère  des  peuples  ont  entraîné  Mazzini,  malgré,  lui  dans 
les  rangs  de  la  réaction.  Mazzini  nous  reproche  de  ne  pas  croire  en  Dieu  ; 
nous  lui  reprochons,  par  contre,  d'y  croire,  où  plutôt  nous  déplorons  qu'il  y 
croie  et  qu'il  soit  ainsi  forcé  de  se  ranger  contre  nous  avec  tous  les  ennemis 
de  l'émancipation  populaire.  » 

Yoilà  donc  Mazzini  lui-même  rangé  parmi  les  suppôts  de  la  réaction. 

Le  citoyen  Gambon,  montagnard  de  1848  et  membre  du  Comité  de  salut 
public  que  nomma  la  Commune,  veut  aussi  se  faire  entendre  ;  il  écrit  la 
Dernière  révolution,  réponse  à  l'Assemblée  de  Versailles. 

«  La  Révolution  trahie  par  la  bourgeoisie,  vaincue  par  l'étranger,  firappëe 
par  des  fils  égarés,  calomniée  par  le  prêtre  dans  40,000  tribunes,  condamnée 
et  exécutée  froidement  par  les  soldats  de  Yersailles,  exigeait  de  nous  une 
revanche.  Si  le  peuple  le  veut,  demain,  la  liberté  se  lèvera  radieuse  sans  une 
tache  au  front  et  triomphante  sur  tous  les  points  du  globe.  Pour  cela  plus 
d'impôt  ;  refusez  le  service  militaire.  » 

Une  Lettre  d'un  ouvrier  aux  membres  de  la  Commission  des  gràees,  imprimée 
à  Milan  en  1871,  a  pour  auteur  un  italien  qui  a  pris  pour  épigraphe  ces  deux 
vers  du  Pilori  de  Ch.  Bonnet  : 

Le  sceau  de  l'infamie  a  marqué  votre  front  ; 
Comme  ont  croulé  les  rois,  les  bourgeois  crouleront, 

La  Liquidation  sociale  Prophétie  (Londres,  1872)  est  l'œuvre  anonyme  d^un 
membre  de  V  Internationale  y  lequel  annonce  que  cette  société,  encore  incons* 
ciente  de  sa  force,  est  appelée  k  régénérer  le  monde. 


-  495  — 

Le  citoyen  Gh.  Bonnet,  dont  nous  venons  de  citer  le  PUori^  ajoute  à  ce  mot, 
comme  complément  de  ce  titre  :  VInvasionf  la  Commune,  Venaiîles  ;  bornons- 
nous  à  transcrire  quelques  vers  de  ce  Yolume,  imprimé  à  Genève,  en  4872  : 

Si  quelque  mot  est  dur,  qaelquefoii  un  peu  vert, 

II  faut  86  rappeler  que  nous  avons  souffert, 

Que  lorsque  nous  parlons  de  cette  ignoble  engeance, 

Cause  de  tons  les  maux  qui  pèsent  sur  la  France, 

A  ce  souvenir  seul  notre  cœur  est  aigri, 

Et  le  mot  de  vengeance  est  notre  premier  cri. 

La  Fotre  aux  parjures  (Londres,  in-32)  est  un  recueil  de  boniments  débités 
sur  les  tréteaux  de  la  foire  par  des  personnages  politiques  fort  connus  ;  c'est 
Jules  Favre  qui  s'avance  le  premier  : 

C'est  moi  qui  fais  les  boniments 
A  ravant-scène  de  la  baraque. 

G.  Marotteau,  le  rédacteur  en  chef  du  Père  Duchéne  de  la  Commune,  avait, 
avant  le  4  septembre,  subi  quatre  mois  de  prison  ;  il  se  réfugia  en  Belgique, 
et  il  entreprit  un  Père  Duchéne  qui  ne  dépassa  pas  le  premier  numéro,  la 
violence  du  style  ayant  paru  exorbitante,  même  k  Bruxelles  où  la  tolérance 
est  cependant  fort  grande  ;  ce  numéro,  introuvable  aujourd'hui,   débutait 

ainsi  : 

u  Oh  1  hisse  1  carguez  les  voiles  ! 

«  Je  reprends  la  trompette  sur  mon  brûlot,  le  Père  Duchéne. 

«  Ce  sera  un  pamphlet  furieux  ;  le  portrait  de  vos  soudars  et  le  signale- 
ment de  vos  juges .  » 

Le  citoyen  Jeanneret,  auteur  de  la  Commune  révoluiùmnaire  de  Parie  (Neu- 
chàtel,  1871,  in- 18),  explique  nettement  le  but  qu'il  se  propose.  «  Ce  qu'il 
faut  avant  tout,  c'est  venger  les  pauvres  frères  engloutis  dans  le  désastre, 
relever  leur  mémoire,  dire  leur  héroïsme  et  dévoiler  leurs  bourreaux.  » 

Le  BrétJiatrfî  dtt  p«ttp/c  (Luxembourg,  4871,  in-i8)  est  signé  des  initiales 
C.  B.;  l'auteur  déclare  s'être  proposé  «  de  soumettre  au  jugement  de  la 
raison  les  injustices  ou  plutôt  les  crimes  des  gouvernements  autoritaires;  » 
son  écrit  est  le  développement  de  ces  lignes  : 

«  Je  veux  démontrer  que  non-seulement  on  pourrait  se  passer  de  gouver- 
nement, qu'il  soit  Religion  ou  État,  mais  encore  que  l'un  et  l'autre  sont  nui- 
sibles à  la  marche  de  l'humanité  vers  le  bien  et  la  civilisation,  et  que  le  meil- 
leur est  de  s'en  débarrasser.  » 

Empruntons  quelques  lignes  au  petit  volume  daté  de  Londres,  1872,  les 
Charlatans  politiques.  Il  signor  Gambeita.  Portraits,  documents  inédits  : 

«  Ce  qui  manque  au  public,  c'est  un  livre  qui  Téclaire  sur  la  valeur 
réelle  de  tous  les  hommes  venant  se  poser  en  sauveurs  à  chaque  crise  sociale. 
Aussitôt  que  le  peuple  est  devenu  le  maître  de  ses  destinées,  il .  se  hâte  de 
se  débarrasser  de  son  pouvoir  en  mettant  à  sa  tète  des  charlatans  poli- 
tiques. 

u  Notre  livre  de  critique  politique,  économique  et  religieuse  a  pour  but 
de  percer  à  jour  l'odieuse  comédie  des  saltimbanques  célèbres  de  l'Europe 
qui  font  rouler  au  peuple  son  étemel  rocher  de  Sisyphe.  » 

Le  citoyen  Rocher  se  fait  remarquer  par  sa  fécondité  ;  nous  connaissons 
près  de  trente  pamphlets  sortis  de  sa  plume  et  publiés  en  i87i  et  i872.  Il 
professe  les  principes  de  l'athéisme  le  plus  outré  ;  il  ne  se  plait  que  dans  le 
blasphème;  il  aime  à  se  déguiser  sous  des  noms  qui  donnent  une  idée  de 
ses  tendances  :  Un  apostat,  un  hérétique,  un  flis  du  diable,  le  citoyen  Satan. 
Un  de  ces  écrits  est  dédié  à  Garibaldi,  fort  digne,  en  effet,  de  recevoir  de 
pareils  hommages! 


--  436  — 

Résignons-nous  à  transcrire  les  titres  de  quelques-unes  de  ces  immondes 
productions  :  Les  Assassins  de  la  France;  —Les  Tueurs  d'hommes;  —  Les  vérita- 
blés  Incendiaires  de  IParis;  —  Un  Assassinat  au  nom  de  Dieu;  —  La  Friponnerie 
des  évêques  et  des  prêtres  ;  —  Napoléon  III  chez  le  Diable  ;  —  Plus  de  bon  Dieu  ! 
—  Le  Charlatanisme  sacerdotal  ;  —  Les  Buveurs  de  sang  humain,  par  un  inva- 
lide du  travail,  etc.,  etc. 

On  peut  ranger  dans  cette  bibliothèque  communarde  et  révolutionnaire  : 

V Histoire  de  la  Commune  de  Paris  (Londres,  i871,  in-8  de  500  p.),  par 
P.  Vésinier,  secrétaire  de  la  Commune  ; 

Étude  sur  le  mouvement  communaliste  à  Paris,  en  1871,  par  G.  Lefrançais 
(Neuchâtel,1871); 

La  troisième  défaite  du  prolétariat  français,  par  B.  Malou  {Neuchatel,  i^liy 
in-18  de  540  p.); 

Les  huit  journées  de  mai  derrière  les  barricades,  par  Lissagaray  (Bruxelles, 
1871,in-16de324  p.); 

La  Vérité  sur  le  gouvernement  de  la  Défense  nationale,  la  Commune  et  les  Ver- 
sat/tois,  par  V...  d*Esbœufs  (Genève,  1871); 

Celui-ci  est  un  adversaire  de  la  Commune  contre  laquelle  il  plaide  la  cause 
du  Comité  central  :  «  La  Commune,  dit-il,  cherchant  une  force  en-dehors  de 
la  fédération,  cela  devait  la  perdre  en  soulevant  des  conflits  et  des  rivalités.  » 

Il  attaque  vivement  les  Polonais;  surtout  Dombrowski  ;  il  traite  d'insigne 
folie  la  nomination  de  Dclescluze  comme  délégué  civil  à  la  guerre. 

U  serait  injuste  d^oublier  la  Voix  du  peuple;  les  Rouges  et  les  Pâles,  par 
J.-B.  Clément.  Londres,  1871,  in-12. 

C'est  un  pamphlet  de  la  famille  du  Père  Duchéne,  mais  le  style  est  moins 
ordurier.  Donnons-en  une  citation  : 

«  Allons  donc,  misérables  !  Vous  êtes  larges  et  solides  comme  des  crics, 
bien  plantés  comme  les  chênes  ;  vous  n'avez  qu'à  vous  prendre  par  la  main 
un  beau  matin  de  colère,  et  tout  bonnement  à  danser  en  rond  autour  dû  ce 
qui  vous  gêne  pour  le  broyer  comme  un  œuf. 

«  Faut-il  donc  vous  aiguillonner,  vous  pousser  par  vos  flancs  creux,  vous 
montrer  votre  huche  sans  pain,  vos  enfants  étiques,  les  petits  des  autres  bien 
joufQus  pour  vous  faire  aller  de  l'avant  et  vous  forcer  à  marcher  vers  l'avenir 
qui  doit  vous  sauver?  » 

En  voici  assez,  trop  peut-être  ;  nous  aurons  d'ailleurs  l'occasion  de  revenir 
sur  cette  propagande  du  radicalisme  dont  le  venin,  propagé  avec  une  acti- 
vité incessante,  constitue  un  pétil  des  plus  graves.  B. 


III 

L'ORiaiNE  DES  GRANDS    SEMINAIRES.  • 

M.  Faillon,  Vie  de  M.  Olier  (quatrième  édition  1873),  a  relevé,  en  deux 
endroits  de  cet  ouvrage  érudit  (t.  I*',  p.  422  et  t.  III,  p.  36),  les  assertions 
de  M.  l'abbé  Maynard  {Saint  Vinceiit  de  Paul,  sa  vie,  son  temps,  t.  Il,  p.  163), 
et  de  Mgr  Jager  (Histoire  de  l'Église  catholique  en  France,  t.  XVI,  p.  552). 
assertions  relatives  à  l'établissement  des  grands  séminaires.  —  La  discas- 
sion,  très -courtoise  du  reste,  comme  il  convient  à  des  prêtres,  porte  sur 
ce  point  :  M.  Olier,  fondateur  de  Saint-Sulpice,  a-tril  organisé,  le  premier, 
un  grand  séminaire?  ou  bien,  faut-il  admettre  que  saint  Vincent  de  PauU 
a  précédé  son  vertueux  ami  dans  cette  nouvelle  voie? 

Nous  disons  nouvelle  voie.  Le  concile  de  Trente  (session  xxui*),  en  décré- 


—  457  — 

tant  la  formation  des  séminaires,  réglait  qu'on  y  admettrait  les  jeunes  gens 
dès  rage  de  douze  ans.  Saint  Charles  Borromée  s'était  hâté  d*oiganiser  sur 
cette  base  le  séminaire  de  Milan,  et  les  efforts  de  son  zèle  épiscopal  avaient 
été  couronnés  du  plus  beau  succès. 

Il  n*en  avait  pas  été  de  même  à  l'autre  côté  des  Alpes.  Les  séminaires, 
ouverts  en  France  conformément  au  système  préconisé  par  le  concile, 
n'avaient  guère  produit  d'heureux  résultats.  A  Bordeaux  et  ailleurs,  on 
avait  dû  procéder  à  la  fermeture  de  ces  maisons. 

Vers  1640,  les  plus  saints  prélats  et  ecclésiastiques  de  France  acceptent 
une  autre  méthode  pour  le  recrutement  du  clergé  séculier  :  on  n'admettra 
désormais  au  grand  séminaire  que  des  étudiants  ayant  achevé  leur  rhéto- 
rique au  moins,  si  pas  même  leur  philosophie,  pour  les  appliquer  immé- 
diatement à  l'étude  de  la  théologie  et  de  ses  diverses  branches. 

Nous  n'entendons  pas,  dans  une  simple  note,  trancher  la  question  débattue 
entre  d'honorables  érudits  et  proclamer  devant  tout  le  monde  que  M.  Fail- 
lon  a  raison  contre  M.  Mayuard  et  Mgr  Jager.  Nous  tenons  simplement  à 
dire  qu'en  Belgique,  on  était  arrivé  plus  tôt  au  même  résultat  que  la 
France. 

Le  concile  de  Trente  s'était  terminé  en  4563. 

Le  premier  concile  provincial,  tenu  à  Malines  en  1570,  décide  que  l'on 
mettra  immédiatement  la  main  à  l'œuvre  pour  l'érection  des   séminaires. 

L'année  précédente,  1569,  Corneille  Jansénius,  évoque  de  Gand,  qu'il  ne 
faut  pas  confondre  avec  son  homonyme,  titulaire  du  siège  d'Ypres,  avait 
fait  un  concordat  avec  les  hiéronymites  ou  frères  de  la  Vie  commune, 
pour  la  cession  de  leur  couvent,  qui  devenait  le  séminaire  diocésain. 

Dès  i595,  le  séminaire  de  l'archidiocèse  de  Malines  est  ouvert.  On  y 
trouve  des  humanistes  et  des  théologiens  réunis  dans  le  môme  enclos, 
avec  quartiers  séparés  toutefois.  Néanmoins  ce  système  ne  tarda  pas  &  offrir 
des  inconvénients.  Un  mémoire  étendu,  soumis  aux  évêques  qui  firent 
partie  du  concile  provincial  tenu  en  1607,  recommandait  de  n'admettre 
d'autres  jeunes  gens  que  ceux  qui  eussent  déjà  achevé  leur  rhétorique  au 
moins  et  dont  l'âge  permettra  d'espérer  que  quatre  ans  d'études  ou  cinq 
ans  au  plus  les  conduiraient  à  la  prêtrise. 

Les  Pères  du  concile  n'ont  pas  admis  dans  leurs  décrets  cette  idée  qui 
allait  devenir  féconde  en  fruits  de  salut.  Nous  soupçonnons  peutrêtre  la 
raison  de  leur  conduite.  En  vertu  d'une  bc^le  de  Sixte-Quint,  les  décrets 
d'un  synode  provincial  ne  peuvent  être  promulgués  et  mis  à  exécution, 
qu'après  avoir  été  révisés  à  Rome  par  la  Congrégation  du  concile.  Le  vœu 
du  mémoire  prémentionné,  pour  rentrer  complètement  dans  l'esprit  de  la 
loi^  n'en  était  pas  moins  contraire  à  la  lettre.  Le  concile  provincid  se  borna 
donc  à  statuer  que  des  synodes,  à  réunir  bientôt  dans  chaque  diocèse,  déter- 
mineraient la  manière  dont  on  satisferait  aux  dispositions  édictées  par  les 
Pères  réunis  à  Trente. 

Or,  que  voyons-nous?  La  pratique  donne  raison  au  mémoire. 

Le  synode  diocésain  de  Malines,  réuni  en  1 609,  n'admet  aux  frais  du  sémi- 
naire que  des  jeunes  gens  de  dix-huit  ans  accomplis.  Titre  XX,  art.  3.  Ce 
même  synode,  titre  XII,  art.  3,  affectait  à  la  dotation  du  séminaire  les  deux 
tiers  du  produit  global  du  laitage. 

Jean  Le  Mire,  originaire  d'une  famille  cambrésienne,  fonda  son  séminaire 
dans  sa  ville  épiscopale  d'Anvers,  en  1605.  Le  synode  diocésain,  tenu  en 
1610,  rappelle  dans  une  de  ses  dispositions  qu'on  forme  au  séminaire  des 
jeunes  gens  ayant  terminé  déjà  leurs  humanités  et  leur  philosophie  (Syno- 
dicon  Belgicum,  tome  m,  p.  158). 


—  458  — 

Van  der  Burch,  mort  archeTdque  de  Cambrai  en  4644,  fut  d'abord  érèque 
de  Gand.  Il  stipula,  dans  son  sjnode  de  1613,  qu'on  n'admettra  au  séminaire 
que  des  jeunes  gens  ayant  dopasse  leur  dix-huitième  année.  {Synodieon 
Belgicum,  tome  IV.  p.  101.) 

Ces  dates  incontestables  prouvent  que  les  idées  fécondes  de  M.  Olier  et 
de  saint  Vincent  de  Paul  avaient  reçu  leur  application  en  Belgique  trente 
ans  à  l'avance.  An.  Delvigne. 


CHRONIQUE 

NÉCROLOGIE.  —  Sîr  Charles  Wheatstone,  né  à  Glocester,  en  1802,  est 
mort,  de  passage  à  Paris,  le  19  octobre  1875;  il  appartenait  à  Hnstitut  depuis 
33  ans  et  était  devenu,  le  30  juin  1873,  un  des  huit  associés  étrangers  de 
l'Académie  des  sciences.  «  Wheatstone,  a  dit  M.  Tresca,  dans  le  discours  pro- 
noncé à  ses  obsèques,  était  professeur  à  King's  Collège,  lorsqu'il  fit  connaître 
successivement  ses  grandes  découvertes  :  la  stéréoscopie,  la  vitesse  de  l'élec- 
tricité, le  télégraphe  électrique,  trois  merveilles  auxquelles  il  a  su  donner 
une  grande  place  en  ce  monde  et  qui  l'ont  occupé  jusqu'à  ses  derniers  mo- 
ments. Dans  ses  recherches  sur  la  physiologie  de  la  vision,  qui  remontent  à 
1833,  mais  qui  n'ont  eu  leur  sanction  en  Angleterre  qu'en  1838,  et  trois  ans 
plus  tard  en  France,  Wheatstone  a  posé  les  principes  qui  ont  en  particulier 
permis  de  représenter  les  objets  géométriques  par  deux  figures  distinctes, 
qui  paraissent  se  confondre  pour  les  deux  yeux,  mais  qui  donnent  la  per- 
ception nette  et  précise  de  l'objet  lui-mî?me  en  relief,  Wheatstone  s'est,  pour 
ainsi  dire,  révélé  tout  d'un  coup  dans  sa  carrière  scientifique,  car  c'est  vers  le 
même  temps,  en  1834,  qu'il  a  publié  les  expériences  à  l'aide  desquelles  il 
était  parvenu  à  prouver  que  la  vitesse  de  Télectricité  est  de  même  ordre 
que  celle  de  la  lumière;  puis,  précisant. davantage  les  éléments  numériques 
de  cette  étonnante  vélocité,  qui  devait  l'occuper  sans  relâche,  il  indiquait 
pour  la  vitesse  de  l'électricité  l'énorme  chiffre  de  333,000  kilomètres  par 
seconde.  Sa  création  des  relais  était  comme  une  nouvelle  invention  du  télé- 
graphe lui-même,  puisqu'elle  en  agrandissait  indéfiniment  le  domaine  ;  il 
nous  communiquait  en  1869,  son  télégraphe  écrivant;  il  obtenait  par  son 
cryptographe  indéchifirable,  d%ne  remarquable  simplicité,  le  moyen  de  mo- 
difier à  son  gré  l'alphabet  et  de  rendre  ainsi  les  dépêches  secrètes.  On  Jui  doit 
l'appareil  de  résistance  connu  sous  le  nom  pont  de  Wheatstone,  pour  la  véri- 
fication des  diverses  causes  de  dérangement  dans  les  lignes.  » 

—  M.  Isidore-Alexandre-Augustin  Pils,  né  à  Paris,  le  19  juillet  1813,  est 
mort  à  Douarnez  (Finistère),  le  3  septembre  1875.  Elève  de  M.  Picot,  il  rem- 
porta, au  concours  de  1838,  le  grand  prix  de  Rome.  Sa  carrière  artistique» 
brillamment  remplie,  le  conduisit  à  l'Institut,  où  il  entra  le  7  octobre  1868 
en  remplacement  de  son  maître  Picot  ;  il  était  professeur  de  peinture  à 
l'École  des  beaux-arts. 

—  Nous  devons  un  souvenir  à  un  autre  arti  ste  de  grand  mérite,  qui  vient 
de  faire  la  fin  la  plus  édifiante,  après  de  longues  et  cruelles  souÂrances, 
chrétiennement  supportées.  Jean-Baptiste  Gabpeacx,  né  à  Valenciennes,  le 
14  mai  1827,  est  mort  à  Courbevoie,  le  13  octobre  1875,  dans  la  force  de  l'âge 
et  du  talent.  Ses  œuvres  peuvent  être  justement  critiquées  à  plus  d'un  point 
de  vue,  mais  il  est  impossible  de  ne  point  rendre  hommage  au  merveilleux 
talent  du  sculpteur  qui  eût  grandi  encore  si  Carpeaux  avait  vécu,  car  il  aurait 


—  4«d  — 

cherché  plas  haut  ses  inspirations  et  se  seraiifait  une  noQTelle  manière,  plus 
digne  de  son  génie. 

—  M.  JeanBaptiste-FirminMARBEAu,  est  mort  à  Saint-Cloud,  le  10  octobre; 
il  était  né  à  6rives-la-GailIarde,  le  18  mai  i798.  Elève  du  collège  de  Brives, 
où  il  fit  tontes  ses  études,  il  vint  faire  son  droit  à  Paris,  où  il  acquit  plus  tard 
une  charge  d^avoué.  Il  a  laissé  des  ouvrages  appréciés  sur  la  jurisprudence. 
Mais  son  véritable  titre  de  gloire,  c'est  la  fondation  des  crèches,  qui  rendent 
un  si  grand  service  à  l'humanité,  et  ce  n'est  pas  la  seule  œuvre  charitable 
dont  il  se  soit  occupé,  car  la  plus  grande  partie  de  sa  vie  a  été  consacrée  au 
soulagement  de  toutes  les  misères.  —  M.  Marbeau  a  publié  :  Traité  des  tran- 
sactionSf  d'après  les  principes  du  Code  civil  (1824,  in-8);  Réflexions  d^un  électeur 
sur  la  révolulûm  de  iS30({S20);  Politique  des  intérêts,  ou  essai  sur  les  moyens 
d'améliorer  le  sort  des  tracailleurs^  sans  nuire  aux  propriétaires  ;  de  concilifir 
V ordre  avec  la  liberté,  la  stabilité  avec  leprogrés,  par  un  travailleur  devenu  pro- 
priétaire (1834,  in-B)',  Etude  sur  V Économie  sociale  (1844,  in-8);  Des  crèches 
(1845,  in-1 8);  Du  paupérisme  en  France  et  des  moyens  d'y  remédier  (1 847);  De  Vin- 
digenceet  des  secovrs  (1850,  in-1 8).  —  M.  Marbeau  a  publié,  en  outre,  beaucoup 
de  mémoires,  rapport*?,  articles  de  Journaux  et  revues  sur  les  questions  d'éco- 
nomie charitable;  il  a  collaboré  à  la  Revue  d'Économie  chrétienne. 

—  M.  l'abbé  Jacques-Paul  Migne,  né  à  Saint-Flour,  le  24  octobre  1800, 
est  mort  à  Paris  le  24  octobre.  Il  avait  fait  ses  études  théologiques  dans  le 
diocèse  d'Orléans,  où  il  exerça  quelque  temps  le  ministère  sacerdotal.  Il 
vint  se  fixer  à  Paris  en  1833,  et  fonda  V  Univers,  dont  il  garda  la  propriété 
jusqu'en  1836,  et  dirigea  plus  tard  la  Vérité,  L'abbé  Migne  s'est  surtout  fait 
un  nom,  et  a  rendu  d'immenses  services  par  ses  publications  théologiques, 
sorties  de  l'imprimerie  catholique  qu'il  avait  établie  à  Montrouge.  Nous 
avons  donné  des  détails  sur  ce  grand  établissement  lorsqu'il  a  été  la  proie 
des  flammes,  en  1868.  Tout  le  monde  connaît  ses  immenses  collections  de 
Patrologie,  grecque  et  latine,  d'Encyclopédie  c4itholique,  de  Bibliothèque  des 
orateurs,  de  Cours  d'écriture  sainte,  etc.,  qui  ont  mis  à  la  portée  des  plus 
modestes  bourses  de  desservants  les  écrits  des  Pères,  des  grands  orateurs 
chrétiens,  et  une  série  de  dictionnaires  sur  toutes  les  sciences. 

—  M.  Pierre  Salomon  Ségalas  vient  de  mourir  au  château  de  la  Tour 
(Saône-et-Loire).  Il  était  né  à  Saint-Palais  (Basses-Pyrénées),  le  !•'  août  1792. 
Ses  goûts  le  portèrent  vers  l'étude  de  la  médecine  ;  il  fut  reçu  docteur 
en  1817,  et  devint  membre  de  l'Académie  de  médecine.  La  plupart  de  ses 
ouvrages  sont  relatifs  à  la  lithotritie  et  aux  maladies  qui  ont  pour  siège 
les  organes  qui  sont  soumis  à  cette  opération.  En-dehors  de  cela,  on  peut 
citer  des  Recherches  expérimentales  sur  r absorption  intestinale  (1822)  ;  Série 
â^ expériences  sur  divers  faits  de  physiologie  et  de  pathologie  (1823)  ;  Mémoires  sur 
les  altérations  du  sang, 

—  Mgr  Mathias-Gasimir  Woloczewski,  né  &  Nantray,  diocèse  de  Samogitie, 
le  26  décembre  1799,  docteur  en  théologie,  préconisé  le  28  septembre  1849 
(en  même  temps  que  Mgr  Pie,  évêque  de  Poitiers,  et  que  Mgr  Dupanloup, 
évêque  d'Orléans),  pour  l'évêché  de  Samogitie,  dont  la  résidence  est  à  Teloch 
(Russie),  est  mort  le  29  mai  1875,  à  Kowno  (Lithuanie).  Ce  prélat  a  publié, 
en  langue  lithuanienne,  une  traduction  de  Y  Imitation  de  Jésus-Christ  et  une 
nistoire  du  diocèse  de  Samogitie. 

—  M.  le  docteur  Paul  Lobain,  professeur  à  la  faculté  de  médecine  de 
Paris,  médecin  de  l'hospice  de  la  Pitié,  né  à  Paris  en  1827,  y  est  mort  subi- 
tement le  24  octobre  1875.  Il  avait  publié  :  La  Fièvre  puerpérale  chez  les  femmes, 
le  fœtus  et  le  nouveau-né  (1855,  in-4);  Annuaire  des  sciences  médicales  (1856, 


—  460  — 

in-18);  Le  Valbuminerief  thèse  présentée  aa  concours  pour  l'agrégation 
(1860,  in-8  avec  pi.);  Réforme  de  renseignement  médical  par  les  labcror 
foires.  —  Le  docteur  Lorain  avait,  en  outre,  revu  et  complété  le  Gidde  du 
médecin  praticien  de  F.  L.  J.  Valleix. 

—  M.  Jacques-Léandre  Geây,  dit  Philippe  Geay-Besse,  né  à  Pons  (Charente- 
Inférieure),  le  4  mars  1805,  est  mort  à  Saintes,  le  17  octobre  1875.  Marchand 
de  nouveautés  à  Saintes,  membre  du  tribunal  de  cette  ville  depuis  1834,  il 
a  été  quatre  fois  élu  président.  Membre  de  la  Commission  administrative  de 
rhospice,  du  bureau  de  bienfaisance,  de  Textinction  de  la  mendicité,  du  bureau 
d'administration  du  collège  ;  du  conseil  municipal,  depuis  1849  ;  chevalier  de 
la  Légion  d'honneur,  du  12  août  1870;  président  de  la  commission  municipale 
le  21  septeînbre  1870,  il  devint  peu  après  premier  adjoint.  Il  a  publié  : 
Brenard  de  Paliei^  dialogue  en  patois  saintongeais  (Saintes,  1870)  ;  une 
pièce  A  prepous  de  thiés  bavards,  dans  le  recueil  Pour  la  France  (Saintes,  1875. 
in-8)  ;  Le  concours  régional  de  Saintes  (Saintes,  1875,  in-8),  vers  en  patois 
saintongeais.  Il  a  écrit  d'autres  poésies  patoises  restées  inédites,  pleines 
de  bonhomie  et  de  sel.  Ses  funérailles  ont  été  faites  aux  frais  de  la 
commune. 

On  annonce  encore  la  mort:  de  M.  Raifaele  Gorgiulo,  archéologue  distin- 
gué, mort  à  Naples,  à  94  ans  ;  —  de  M.  Albert  Jacquemard,  rédacteur  de  la 
Gazette  des  Beaux-Arts  et  auteur  d'un  ouvrage  sur  la  Céramique,  faisant  partie 
de  la  Bibliothèque  des  Merveilles  de  la  librairie  Hachette  ;  —  de  M.  La  huppe, 
décédé  à  l'Ile  de  la  Réunion,  âgé  de  quatre-vingts  ans;  il  avait  été  fondateur 
du  premier  journal  de  cette  colonie  ;  —  du  comte  Alexis  Tolstoï,  auteur 
d'Yvan  le  Terrible^  mort  à  Saint-Pétersbourg;  —  de  M.  François  Dcccing, 
député  des  Hautes-Pyrénées,  ancien  rédacteur  de  VEstafette  et  de  VOpinion 
nationale,  fondateur  de  V  Universel,  mort  le  3  octobre  ;  —  de  M.  le  chanoine 
Pomabèdes,  doyen  du  chapitre  de  la  cathédrale  de  Montpellier,  mort  le 
22  août,  à  l'âge  de  76  ans,  auteur  de  plusieurs  ouvrages  de  piété  :  Manuel 
pour  la  confrérie  du  précieux  sang  ;  La  conduite  pour  la  Toussaint,  VocUxoe  des 
morts  et  la  dédicace  des  églises  ;  —  de  M.  Outhenin-Chalandre,  imprimeur- 
libraire,  à  Besançon,  mort  à  78  ans. 

Institut.  —  La  séance  annuelle  des  cinq  Académies  a  eu  lieu  le  25  oc- 
tobre 1875,  sous  la  présidence  de  M.  Lefuel,  président  de  l'Académie  des 
beaux-arts,  assisté  de  MM.  Patin,  Maury,  Fremy  et  Baudrillart,  délégués  des 
Académies  française,  des  inscriptions  et  belles-lettres,  des  sciences  et  des 
sciences  morales  et  politiques,  et  de  M.  le  vicomte  H.  Delaborde,  secrétaire 
perpétuel  de  l'Académie  des  beaux-arts,  secrétaire  actuel  du  bureau  de 
l'Institut.  —  Les  lectures  ont  été  faites  dans  l'ordre  suivant  :  Discours  du 
président  actuel  des  cinq  Académies  do  l'Institut,  proclamation  du  grand 
prix  biennal. —  Rapport  sur  le  concours  de  1875  pour  le  prix  fondé  par  M.  de 
Volney,  et  proclamation  du  prix; —  Les  Inscriptions  graffUes  du  corps  de  garde 
de  la  septième  cohorte  des  vigiles  (Rome),  par  M.  Desjardins,  de  l'Académie  des 
inscriptions  et  belles-lettres  ;  —  La  Maison,  par  M.  Xavier  Marmicr,  de  l'Aca- 
démie française  ;  —  Un  empereur  allemand  et  un  pape  au  moyen  âge,  Henri  IV 
et  Grégoire  VII,  par  M.  Zeller,  de  l'Académie  des  sciences  morales  et  politi- 
ques ;  —  Mission  de  Vile  Saint-Paul  pour  Vobservatioti  du  passage  de  Véntis,  par 
M.  Mouchez,  de  l'Académie  des  sciences. 

Le  prix  biennal  de  vingt  mille  francs,  attribué  à  l'œuvre  ou  à  la  décou* 
verte  la  plus  propre  à  honorer  ou  à  servir  le  pays,  a  été  décerné  à  M.  Paul 
Bert,  professeur  à  la  Sorbonne,  pour  son  travail  sur  l'iniluence  de  la  pression 
barométrique  sur  les  phénomènes  de  la  vie. 


—  461  — 

Le  prix  Volney,  de  1,500  francs,  pour  le  meilleur  ouvrage  de  pliilologie 
comparée,  a  été  décerné  à  M.  E.  Aymonier,  lieutenant  d'infanterie  de  marine, 
pour  son  Dictionnaire  françcUs-combodgien.  Un  prix  de  500  francs  a  été  donné,  à 
titre  d'encouragement,  &  M.  Aristide  Marre,  pour  son  Étude  compai*ée  des 
langiies  javanaise^  malgache  et  malaise. 

Académie  française.  —  L'Académie  française  a  renouvelé  son  bureau, 
pour  le  4«  trimestre  de  1875.  Elle  a  nommé  directeur  M.  le  duc  de  Noailles, 
et  chancelier,  M.  de  Sacy. 

—  L'Académie,  ayant  accepté  le  legs  qui  lui  a  été  fait  par  M.  Archon- 
Despeyrouse,  a  décidé  qu'un  prix  de  4,000  francs  serait  fondé  au  nom  du 
testateur  et  décerné  au  meilleur  ouvrage  de  philologie  parmi  ceux  qui  lui 
auront  été  adressés  dans  le  cours  d'une  année.  M.  le  secrétaire  perpétuel  a 
démontré,  dans  un  remarquable  discours,  l'utilité  de  cette  fondation. 

Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres.  —  Dans  sa  séance  du  22  octobre, 
l'Académie  des  inscriptions  a  adopté,  pour  le  prix  Bordin,*  le  siyet  suivant  : 
Étude  sur  les  grandes  chroniques  de  Saint-Denis  ;  et,  pour  le  prix  du  budget, 
VHistoire  de  la  civilisation  sous  les  Kalifcs. 

La  séance  publique  annuelle  de  l'Académie  a  eu  lieu,  le  4  novembre, 
à  deux  heures,  sous  la  présidence  de  M.  Alfred  Maury.  Après  un  discours 
du  président,  annonçant  les  prix  décernés  en  1875  et  les  sujets  de  prix 
proposés,  M.  Wallon,  secrétaire  perpétuel,  a  donné  lecture  d'une  notice 
historique  sur  la  vie  et  les  travaux  de  M.  Stanislas  Julien,  membre  de 
l'Académie.  —  Puis  M.  Léon  Renie  r  a  lu  un  travail  ayant  pour  objet  l'Ex- 
plication des  deux  inscriptions  antiques  relatives  aux  historiens  Velleius  Pater- 
culus  et  Arrien. 

Nous  avons  déjà  donné  l'indication  de  la  plupart  des  prix  décernés  par 
l'Académie.  Le  premier  prix  de  la  fondation  du  baronGoberta  été  décerné  à 
M.  Lecoy  de  la  Marche,  pour  ses  ouvrages  intitulés  :  i^le  Roi  René,  sa  vie,  son 
administration,  ses  travaux  artistiques  et  littéraires,  d'après  les  documents  inédits 
des  archives  de  France  et  d^Italie  ;  2^  Extraits  des  comptes  et  mémoriaux  du  roi 
René,  pour  servir  à  Vhistoire  des  arts  au  JV*  siècle,  publiés  d'après  les  origi- 
naux des  Archives  nationales.  —  Le  second  prix  a  été  décerné  à  M.  Gh.  Pail- 
lard, pour  ses  ouvrages  ayant  pour  titre  :  1®  Histoire  des  troubles  religieux 
de  Valenciennes;  2*  Considérations  sur  les  causes  générales  des  troubles  des  Pays- 
Bas  au  XV*  siècle. 

Le  prix  Bordin  a  été  décerné  à  M.  Emile  Chatelin. 

Le  prix  Stanislas  Julien  a  été  décerné  à  M.  James  Legge,  pour  son 
Recueil  des  classiques  chinois,  avec  traduction  et  commentaires  en  anglais. 

Académie  des  beaux- arts.  —  La  séance  publique  annuelle  de  l'Académie 
des  beaux-arts  a  eu  lieu  le  30  octobre,  sous  la  présidence  de  M.  Lcfuel. —  La 
séance  a  commencé  par  l'exécution  d'une  ouverture  composée  par  M.  Ser- 
pette, pensionnaire  de  l'Académie  de  France  &  Rome,  élève  de  M.  Ambroise 
Thomas.  Le  président  a  pris  ensuite  la  parole  et  a  prononcé  une  courte  allocu- 
tion. S'adressant  aux  lauréats  du  prix  de  Rome,  il  ne  leur  a  pas  caché  les 
rudes  épreuves  qui  les  attendent  dans  leur  carrière  artistique  ;  mais  il  leur 
a  montré  le  bel  avenir  que  le  travail  patient  et  opiniâtre  pouvait  leur  assurer. 
Il  a  fait  valoir  à  leurs  yeux  la  grandeur  de  la  mission  de  l'artiste  et  le  rôle 
patriotique  qu'il  pouvait  jouer.  Ensuite  a  eu  lieu  la  distribution  des  grands 
prix  de  peinture,  de  sculpture,  d'architecture,  de  gravure  en  médailles  et 
de  composition  musicale.  Après  la  distribution,  M.  le  vicomte  Henri  De- 
laborde,  secrétaire  perpétuel  de  l'Académie,  a  donné  lecture  de  l'éloge 
d'Auber.  La  séance  s'est  terminée  par  l'exécution   de   la   scène  lyrique, 


—  46SI  - 

Clyiemneslref  par  M.  Roger  Ballu,  qui  a  remporté  le  premier  grand  prix  de 
composition  musicale,  et  dont  Tanteor  est  M.  Wormser,  élève  de  M.  Bazin. 

Voici  la  liste  des  grands  prix  décernés  par  l'Académie  des  Beaux-Arts  : 

Peinture  :  Le  sujet  du  concours  donné  par  l'Académie  était  VArmonciatûm 
aux  bergers.  Le  premier  grand  prix  a  été  remporté  par  M.  Gomerre  (Léon- 
François),  élèye  de  M.  Gahanel.  —  Le  premier  second  grand  prix  a  été  rem- 
porté par  M.  Bastien-Lepage  (Jules),  élève  de  M.  Cabanel.  —  Le  deuxième 
second  grand  prli  a  été  remporté  par  M.  Bellanger  (Camille-Félix),  élève  de 
M.  Cabanel. 

Sculpture  :  Le  sujet  du  concours  donné  par  l'Académie  était  :  Homère, 
OGcompagné  de  eon  jeune  guide^  chante  ses  poésies  dans  une  %>iile  de  la  Grèce.  Le 
premier  grand  prix  a  été  remporté  par  M.  Hugues  (Dominique-Jean-Baptiste), 
élève  de  MM.  Dumont  et  Bonnassieux.  —  Le  premier  second  grand  prix  a  été 
remporté  par  M.  Perrin  (Mamert-Jacques),  élève  de  M.  Dumont.  Le  deuxième 
second  grand  prix  a  été  remporté  par  M.  Fagel  (Léon),  élève  de  M.  Cave- 
lier. 

Architecture  :  Le  progranmie  donné  par  l'Académie  était  :  Un  palais  de 
justice  peur  Paris,  Le  premier  grand  prix  a  été  remporté  par  M.  Paulin 
(Edmond-Jean-Baptiste),  élève  de  MM.  Paccard,  Vandoyer  et  Ginain.  —  Le 
premier  second  grand  prix  a  été  remporté  par  M.  Bréasson  (Jean),  élève  de 
MM.  Questel  et  Pascal.  —  Le  deuxième  second  grand  prix  a  été  remporté  par 
M.  Blondel  (Paul),  élève  de  M.  Daumet. 

Gravure  en  médailles  et  en  pierres  fines  :  Le  programme  donné  par  l'Aca- 
démie était:  Un  berger  cherchant  à  lire  l'inscription  gravée  nurun  des  rochers  du 
défilé  des  Thermopyles.  L'Académie  avait  décidé  que  ce  sujet  serait  reproduit 
en  creux  sur  l'acier.  La  tète  copiée  sur  pierre  fine  était  celle  d'une  Minerve 
d*Atbènes  faisant  partie  de  la  collection  dite  collection  Ingres,  conservée  à 
l'École  des  beaux-arts.  Le  grand  prix  a  été  rempoité  par  M.  Roty  (Louis- 
Oscar),  élève  de  MM.  Dumont  etPonscarme.  —  Le  second  grand  prix  a  été 
remporté  par  M.  Patey  (Henri-Auguste- Joies),  élève  de  MM.  Chaplin,  Jouffroy 
et  Chapu. 

Composition  musciaîe  :  Le  si^et  du  concours  était  une  cantate  à  trois  per- 
sonnages, intitulée  Clytemnestre.  Le  grand  prix  a  été  remporté  par  M.  Worm- 
ser  (André-Alphonse-Toussaint),  élève  de  M.  François  Bazin.  ^  Une  mention 
honorable  a  été  accordée  À  M.  Dutacq  (Amédée-Jean),  élève  de  M.  Reber. 

Bibliothèque  NATIONALE. — Par  décret  du  !•' novembre,  M.  Wescher  a 
été  nommé  conservateur  sous-directeur  adjoint  au  département  des  manus- 
crits de  la  Bibliothèque  nationale. 

Par  un  arrêté  du  4  novembre,  M.  Zotenberg  a  été  nommé  bibliothé- 
caire au  département  des  manuscrits  de  la  Bibliothèque  nationale. 

-—  Ecole  d'Athènes.  —  M.  Albert  Dumont,  docteur  es  lettres,  sous-directeur 
de  l'École  française  d'Athènes,  a  été  nommé  directeur  en  remplacement  de 
M.  Emile  Burnouf,  nommé  professeur  de  littérature  ancienne  à  la  faculté  des 
lettres  de  Bordeaux. 

—  Académie  de  la  religion  catholique.  —  L'association  littéraire,  scienti- 
fique et  religieuse,  qui  se  réunit  dans  le  palais  archiépiscopal  de  Westminster 
sous  le  nom  d'«  Académie  de  la  religion  catholique,  »  vient  de  reprendre 
ses  séances.  La  session  de  .1875-76  a  été  inaugurée  mardi  par  la  lecture 
d'un  remarquable  travail  de  S.  Ém.  le  cardinal-archevêque  intitulé  Inno- 
cent III  et  la  Grande-Charte.  Mgr  Manning,  après  avoir  prouvé  que  toutes 
les  libertés  garanties  par  la  Grande-Charte  se  trouvent  en  germe  dans  la 
charte  octroyée  par  Henri  ï*',  défend  le  Pape  Innocent  III  de  l'accusation 


—  463  — 

d'avoir  condamné  la  Grande -Charte.  Le  Pontife  a  déclaré  lui-même  explici- 
tement que  ce  qui  avait  motivé  sa  condamnation,  c'était  l'acte  de  rébellion 
des  barons  anglais  révoltés  contre  leur  suzerain,  vassal  du  Saint-Siège.  Mais 
Innocent  n'a  pas  prononcé  un  seul  mot  sur  le  contenu  de  la  Grande-Charte, 
dont  les  libertés,  au  contraire,  ont  été  confirmées  par  le  légat  du  Pape,  une 
année  après  la  promulgation. 

Congrès.  —  La  séance  solennelle  d'ouverture  de  la  session  provinciale  du 
Congrès  des  orientalistes  a  eu  lieu  le  18  octobre,  à  Saint-Étienne,  sous  la 
présidence  de  M.  de  Ravisi,  directeur  de  l'Athénée  oriental.  Le  Congrès  a 
duré  jusqu'au  2S. 

—  Une  réunion  de  savants  météorologistes  des  divers  départements  de 
l'Ouest  aura  lieu  à  Poitiers,  les  19,  21  et  22  novembre  prochain.  Tous 
les  départements  situés  entre  les  montagnes  du  Centre,  la  Dordogne, 
l'Océan  et  la  Loire,  y  seront  représentés,  ainsi  que  le  conseil  de  l'Obser- 
vatoire de  Paris.  On  cite,  parmi  les  météorologistes  qui  seront  présents  : 
M.  Belgrand,  inspecteur  général  des  ponts  et  chaussées;  M.  Renou,  Tha- 
bile  directeur  de  l'observatoire  du  parc  de  Saint-Maur;  M.  de  Touchem- 
bert,  président  de  la  Conmiission  météorologique  de  la  Vienne;  M.  de  la 
Goumerie,  pour  le  département  de  la  Loire-Inférieure;  M.  de  Tastes,  pour 
le  département  d'Indre-et-Loire  ;  MM.  Lespiault  et  Raulin,  pour  la  Gironde; 
M.  Le  Verrier,  pour  l'Observatoire  de  Paris,  etc.  ' 

Concours  et  prix.  —  Voici  le  résultat  du  concours  général  des  facultés 
de  droit  de  toute  la  France  :  1*'  prix  :  M.  Serre,  élève  de  la  faculté  de 
Paris,  âgé  de  vingt  ans;  2*  prix  :  M.  Châtel,  élève  de  la  faculté  de  Caen, 
âgé  de  vingt  ans  ;  Mentions  honorables  :  MM.  Jacquet,  élève  de  Dijon  ;  de 
Royer,  élève  de  Paris;  Bomenne,  élève  de  Poitiers  ;  Gaucher,  élève  de 
Bordeaux  ;  Gavet,  élève  de  Poitiers. 

—  Voici  les  quatre  sujets  mis  au  concours  de  1876,  par  la  Société  française  de 
tempérance,  A^odaiiim  contre  l'abus  des  boissons  alcooliques:  1*  Montrer 
quels  sont  les  rapports  entre  l'accroissement  du  nombre  des  cabarets  et  les 
changements  survenus  dans  la  nativité,  la  mortalité,  la  durée  de  la  vie 
moyenne,  la  criminalité^  la  fréquence  des  maladies  mentales,  les  suicides, 
le  nombre  des  exemptions  du  service  militaire  pour  faiblesse  de  constitu- 
tion ou  infirmités  ;  2^  Étude  comparée  des  législations  relatives  aux  débits 
de  boissons  dans  les  divers  Etats  de  l'Europe;  modifications  dont  la 
législation  française  serait  susceptible  ;  3®  Étudier  les  associations  de  con- 
sommation en  France,  les  causes  qui  en  ont  restreint  l'extension  et  leurs 
avantages  au  point  de  vue  de  la  tempérance;  4"  Déterminer  les  effets 
comparatifs  des  eaux-de-vie  et  des  liqueurs  dites  :  similaires  de  l'absinthe. 

Chaque  prix  est  de  1,000  francs.  Les  mémoires  doivent  être  adressés  au 
siège  de  la  Société,  rue  de  l'Université,  6. 

—  Prix  Saint-Seine.  —  Par  son  testament  du  3  octobre  1865,  M.  le  marquis 
de  SaintrSeine,  désireux  d'encourager  les  recherches  historiques  sur  la  Bour- 
gogne, a  fondé  un  prix  d'environ  mille  francs  destiné  à  récompenser,  tous 
les  cinq  ans,  le  meilleur  travail  qui  aura  paru  sur  cette  province;  et,  vou- 
lant donner  une  nouvelle  preuve  d'intérêt  à  la  Commission  des  antiquités 
dont  il  a  été  longtemps  un  membre  assidu,  il  l'a  chargée  de  juger  du 
mérite  des  concurrents.  Un  prix  de  mille  francs  sera  décerné  à  la  fin  de  la 
présente  année  à  l'auteur  du  meilleur  travail  sur  l'histoire  de  la  Bourgogne, 
qui  aura  été  publié  pendant  les  années  1868,  1869,  1870,  1871  et  1872. 
Tontes  les  branches  des  sciences  historiques  (topographie,  archéologie,  bio- 
graphie, histoire  générale  on  partiealierei  histoire  religieuse  ou  politique^ 


-  464  — 

littéraire  ou  économique)  peuvent  ôtre  traitées  dans  les  travaux  présentés, 
pourvu  que  la  Bourgogne  en  soit  l'objet. 

Lectures  faites  a  l'Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres.  —  Dans  la 
séance  du  1  «^  octobre,  M.  Tburot  a  continué  la  lecture  de  'son  introduction 
au  Recueil  des  historiens  occidentaux  des  croisades;  M.  Adrien  de  Longpérier  a 
fait  une  communication  au  sujet  de  la  récente  découverte,  faite  par 
M.  Ch.  Rœssler,  du  sarcophage  de  Guillaume  de  Ros,  abbé  de  Fécamp; 
M.  Ernest  Desjardins  a  continué  la  lecture  du  mémoire  de  M.  Ch.  Tissot 
sur  la  géographie  comparée  de  la  Mauritanie  tingitane;  M.  Germain,  doyen 
de  la  faculté  des  lettres  de  Montpellier,  a  continué  la  lecture  de  son  mé- 
moire sur  le  procureur  des  étudiants  do  l'ancienne  université  de  méde- 
cine de  Montpellier.  —  Dans  les  séances  du  8  et  du  22,  M.  Edmond 
le  Blant  a  communiqué  un  mémoire  sur  Polyeucte  et  le  zèle  téméraire. 
Dans  la  séance  du  8,  M.  Th.  H.  Martin  a  lu  un  mémoire  sur  les  hypothèses 
astronomiques  d'Heraclite  d'Éphèse,  lecture  qu'il  a  continuée  dans  la  séance 
du  16;  M.  Michel  Bréal  a  communiqué  quelques  articles  du  DicHonnaire 
d'étymologie  latine  qu'il  prépare,  avec  ses  élèves  de  l'École  pratique  des 
hautes  études.  —  Dans  la  séance  du  15,  M.  Ernest  Desjardins  a  fait  une 
communication  au  sujet  du  nouveau  fascicule  du  Corpus  inscriptionum  laUna- 
rum  de  l'académie  de  Berlin.  M.  Benloew,  doyen  de  la  faculté  des  lettres  de 
Dijon,  a  cx)mmuniqué  des  remarques  sur  l'ctymologie  des  éléments  étrangers 
qui  se  trouvent  dans  le  vocabulaire  grec.  —  Dans  la  séance  du  22,  M.  le 
Marquis  d'Hervey  de  Saint-Denis  a  lu  un  mémoire  relatif  à  l'identification 
avec  les  continents  américains  du  pays  de  Fou-Sang,  mentionné  par  divers 
auteurs  chinois  très-anciens.  —  Dans  la  séance  du  29,  M.  le  baron  de  Witte 
a  lu  une  notice  sur  le  dieu  tricéphale  des  monuments  gaulois  retrouvés  ré- 
cemment. 

Lectores  faites  a  l'Académie  des  sciences  morales  rt  politiques.  —  Dans  la 
séance  du  2  octobre,  M.  Edouard  Sayous  a  lu  un  mémoire  sur  les  relations 
de  la  France  avec  les  princes  de  la  Transylvanie  pendant  la  guerre  de 
Trente  ans  ;  M.  Ad.  Franck  a  lu  une  notice  sur  la  philosophie  de  M.  Ch.  de 
Rémusat.  M.  Ch.  Giraud  a  lu,  dans  les  séances  des  2,  9  et  du  16,  une  notice 
de  M.  Louis  Reybaud  sur  M.  Jules  Roget.  —  Dans  la  séance  du  9,  M.  Jules 
Aloùx,  professeur  de  philosophie  à  l'académie  de  Neuchatel,  a  continué  la  lec- 
ture de  son  mémoire  sur  la  métaphysique.  —  Dans  la  séance  du  19,  M.  Ro- 
dolphe Dareste,  avocat  au  Conseil  d'État,  a  lu  un  mémoire  sur  la  correspon- 
dance inédite  de  François  Hotman.  —  Dans  la  séance  du  23,  M.  0.  Gréard 
a  lu  des  fragments  d'un  mémoire  sur  l'enseignement  primaire  à  Paris  et 
M.  Ch.  Waddington  a  lu  l'introduction  d'un  mémoire  sur  Pyrrhon  et  le 
pyrrhonnisme. 

Les  Élèves  dfs  Frères.  —  Cinq  cents  élèves  ont  concouru  récemment  à 
Paris,  pour  les  bourses  d'externes  aux  écoles  municipales  supérieures  : 
deux  cent  trente  trois  des  écoles  laïques  et  deux  cent  soixante  douze  des 
écoles  des  Frères.  Après  les  premières  épreuves,  on  a  éliminé  deux  cent 
quatre-vingt  douze  candidats,  dont  cent  soixante-quatorze  des  écoles 
laïques  et  cent  dix-huit  des  écoles  congréganistes.  Sur  les  deux  cent 
treize  admis,  cent  cinquante-quatre  sont  des  élèves  des  Frères  et  cinquante- 
neuf  seulement  des  élèves  laïques.  Cent  quatre-vingt  cinq  bourses  ont  été  obte- 
nues ;  les  congréganistes  en  ont  eu  cent  trente-sept  et  les  laïques  quarante- 
huit.  Les  quatre  premiers  admis  sont  des  élèves  des  Frères;  dans  les 
vingt  premiers,  il  n'y  a  qu'un  seul  laïque.  Des  cinquante-cinq  premiers, 
quarante-six  sont  des  élèves  des  Frères.  Ajoutons  à  tout  cela  qu'à  Paris 


-  465  — 

les  Frères  n*ont  que  cinquante-neuf  écoles  coûtant  à  la  ville  700,000  francs, 
tandis  que  les  laïques,  qui  en  ont  soixante-dix-huit,  coûtent  1,300,000  francs. 
—  Ces  chififres  sont  éloquents.  {Vnivers,) 

Catalogue  des  monnaies  orientales  du  British  Muséum.  —  M.  Stanley  Lane 
Poole  vient  de  publier  le  premier  volume  du  Catalogue  des  monnaies  orien- 
tales du  British  Muséum,  M.  de  Longpérier,  en  offrant  ce  volume  à  l'Aca- 
démie des  inscriptions,  au  nom  de  Tauteur,  en  a  fait  un  grand  éloge;  il 
contient  les  monnaies  des  kalifes  d'Orient,  et  est  publié  isous  la  direction 
du  savant  M.  Reginald  Poole,  conservateur  en  chef  de  l'établissement  scien- 
tifique où  ces  monuments  sont  réunis.  La  collection  de  Londres  comprend 
690  monnaies  frappées  entre  les  années  77  et  644  de  l'hégire  (696  à  1246  de 
notre  ère).  On  y  trouve  les  noms  de  quatre-vingt-quatre  ateliers  monétaires. 
Des  index  de  noms  propres,  la  mention  des  pesées,  une  table  des  points 
et  marques  d'émissions  ;  de  bonnes  planches  autotypes  rendent  le  volume 
fort  utile  et  très-facile  à  consulter.  M.  Poole,  réservant  pour  un  autre  volume 
la  description  des  monnaies  primitives  de  l'islamisme,  portant  des  figures 
et  des  types  variés,  n'a  commencé  son  catalogue  qu'à  la  réforme  d'Abd-el- 
Malek  ben  Merouan. 

Les  UNivEr^iTÉs  catholiques.  —  Sur  plusieurs  points  de  la  France  les 
catholiques  se  disposent  à  user  largement  de  la  liberté  de  l'enseignement 
supérieur.  Nos  lecteurs  seront  bien  aise  de  trouver  ici  un  bref  aperçu  de  ce 
qui  se  prépare,  ou  de  ce  qui  est  déjà  réalisé,  à  cet  égard. 

Paris.  —  VUniversité  catliolique  de  Paris  est,  on  peut  le  dire,  déjà  fondée  : 
trois  facultés,  celles  de  droit,  des  lettres  et  des  sciences,  ouvriront  prochai- 
nement leurs  cours.  Les  déclarations  légales  ont  été  faites  dans  les  premiers 
jours  de  novembre,  les  cours  de  droit  conmienceront  le  mardi  16  novembre 
prochain.  Le  registre  des  inicriptions  est  ouvert  au  secrétariat  de  l'univer- 
sité, rue  d'Assas,  19,  depuis  le  2  novembre,  et  ne  sera  clos  que  le  20  du 
même  mois. 

La  composition  du  corps  professoral  de  la  faculté  de  droit  est  dès  à  pré- 
sent arrêtée.  Voici  les  noms  de  quelques-uns  des  professeurs  :  MM.  Connelly, 
conseiller  de  la  Cour  de  cassation  ;  Hallays-Dabot,  ^cien  avoué  au  Conseil 
d'État  et  à  la  Cour  de  cassation  ;  Alix,  avocat  à  la  Cour  d'appel  de  Paris  ;  De- 
lamarre^  avocat  à  la  Cour  d'appel  de  Paris  ;  Romain  de  Sèze,  avocat  à  la 
Cour  d'appel  de  Bordeaux;  Chobert,  agrégé  démissionnaire  de  la  faculté  de 
droit  de  Nancy  ;  Jamet,  avocat  à  la  Cour  d'appel  de  Gaen. 

Lille.  —  En  attendant  que  VUniversité  ccUholique  de  Lille  soit  régulière- 
ment constituée,  un  Institut  catJiolique  a  été  fondé,  et  son  personnel  est  presque 
entièrement  formé.  M.  le  chanoine  Hautcœur,  directeur  de  la  Revue  det 
Sciencfs  ecclésiastiques ^  prêtre  du  diocèse  d'Arras,  remplira  les  fonctions  de 
recteur.  —  M.  de  Yareilles  a  été  nommé  doyen  de  la  faculté  de  droit  —  Les 
inscriptions  sont  prises  à  partir  du  1*'  novembre,  en  l'hôtel  de  l'université, 
rue  Royale,  70. 

Lyon.  —  Une  faculté  de  droit  va  s'ouvrir  très-prochainement.  En  tête  de 
son  programme,  nous  lisons  la  déclaration  suivante  : 

u  La  faculté  catholique  de  droit  est  fondée,  sous  la  direction  de  l'autorité 
ecclésiastique,  pour  procurer  aux  jeunes  gens  qui  se  destinent  aux  études  ju- 
ridiques le  bienfait  d'un  enseignement  entièrement  chrétien.  La  soumission 
au  Saint-Siège  et  aux  évêques,  coomie  à  tous  les  enseignements  de  l'Église 
catholique,  apostolique  et  romaine,  est  sa  loi  fondamentale.  Aucun  profes- 
seur n'est  admis  dans  son  sein  s'il  n'a  d'avance  adhéré  à  ce  principe.  Pour 
l'étudiant,  le  seul  fait  de  la  signature  de  ses  inscriptions  équivaut,  s'il  est 
catholique,  à  la  déclaration  qu'il  se  soumet  à  l'enseignement  de  l'Eglise,  et. 
Novembres  1875.  T.  XIV,  30. 


—  466  — 

s*il  est  protestant  oa  Israélite,  qu'il  respectera  ce  même  enseignement.  Tons 
s'engagent  à  observer  les  règlements  de  TÉcole.  » 

Le  nombre  des  chaires  est  provisoirement  fixé  À  neuf,  voici  leur  liste  et 
les  noms  des  professeurs  : 

dernière  année,  —  Droit  romain.  Professeur,  M.  A.  Roux,  avocat  à  la 
Cour  d'appel  d'Aix,  docteur  en  droit,  lauréat  de  la  faculté  d'Aix.  —  Code  dvU. 
Professeur,  M.  A.  Glairal,  avocat  à  la  Couv  d'appel  de  Lyon,  docteur  en 
droit,  lauréat  de  la  faculté  de  Paris. 

Deuxième  année.  —  Droit  romain.  Professeur,  M.  A.  Flachat,  docteur 
en  droit.  —  Code  civU.  Professeur,  M.  G.  Jacquier,  avocat  à  la  Cour  d'appel 
de  Lyon,  docteur  en  droit,  lauréat  de  la  faculté  de  Paris.  —  Pt-océdiare  civile. 
Professeur,  M.  R.  Mouterde,  avocat  à  la  Cour  d'appel  de  Lyon,  docteur  en 
droit,  lauréat  de  la  faculté  de  Grenoble.  —  Droit  criminel.  Code  pénal.  Pro« 
fesseur,  M.  C.  de  la  Judie,  docteur  en  droit,  ancien  juge  d'instruction. 

Troisième  année.  —  Code  cxoil.  Professeur,  M.  A.  d'Hauthuille,  avocat  à 
la  Cour  d'appel  d'Aix,  docteur  en  droit,  lauréat  de  la  faculté-  d'Aix.  —  Droit 
administratif.  Professeur^  M.  de  Saint-Giron,  docteur  en  droit,  lauréat  de 
la  faculté  de  Toulouse.  —  Code  de  commercef  en  entier.  Professeur,  M.  0.  Bou- 
caud,  avocat  à  la  Cour  d'appel  de  Lyon,  docteur  en  droit,  lauréat  de  la 
faculté  de  Grenoble. 

Angers.  —  Une  faculté  de  droit  va  s'ouvrir  dans  cette  ville,  le  lundi  16  no- 
vembre, pour  conmiencer.  Le  recteur  de  la  future  université  sera  M.  le  cha* 
noine  théologal  Sauvé,  théologien  très-éminént,  que  Pie  IX  vient  de  nommer 
prélat  de  sa  maison.  Le  programme  des  cours  est  arrêté  déjà  et  vient  d'être 
afQché.  En  voici  la  liste  :  Cours  de  droit  naturel  (ce  cours  n'existe  pas  dans  les 
facultés  de  l'Etat)  :  il  sera  donné  par  M.  le  chanoine  Sauvé  ;  cours  de  droit 
civil  ;  cours  de  droit  romain  ;  cours  de  droit  criminel  ;  cours  de  procédure 
civile  ;  cours  de  droit  commercial  ;  cours  de  droit  administratif;  cours  de  droit 
canonique  ;  cours  de  droit  des  gens  ;  cours  d'histoire  du  droit  ;  cours  de  droit 
coutumier.  Les  professeurs  sont  :  MM.  Gavouyère,  doyen  de  la  faculté  de 
droit;  Henry  de  la  Bigne-Villeneuve ;  Aubry;  Hervé-Bazin;  du  Rieu  de 
Perrin  ;  Marsaguet  ;  Buston  ;  de  Richecour. 

TouLoasE.  —  Les  évoques  sufiQragants  de  l'archevêque  de  Toulouse  ont  ré- 
pondu à  son  appel  et  ont  cçaranti  pour  la  fondation  de  l'Université  libre  une 
somme  considérable.  Cette  université  sera  établie  à  l'hôtel  Saint-Jean,  vaste 
et  magnifique  bâtiment  habité  autrefois  par  les  chevaliers  hospitaliers  de 
Saint  Jean  de  Jérusalem.  Elle  comprendra  les  facultés  de  droit  et  de  méde- 
cine. Les  élèves  y  seront  internés.  Il  sera  créé  un  hospice  pour  les  études 
cliniques  de  son  enseignement  médical. 

Poitiers.  —  Une  faculté  de  théologie  est  canoniquement  instituée  à  Poitiers, 
en  vertu  d'un  bref  pontifical  de  fondation.  Elle  comprend  l'enseignement 
supérieur  du  dogme  (deux  chaires),  de  la  morale  (une  chaire),  d'écriture 
sainte  (une  chaire),  de  droit  canonique  (une  chaire),  d'histoire  ecclésiastique 
(une  chaire),  et  enfin  de  philosophie  (deux  chaires).  L'enseignement  est 
donné  en  latin,  par  des  professeurs  de  grand  mérite,  dont  plusieurs  ont 
enseigné  dans  d'autres  universités,  spécialement  au  collège  romain.  Déjà 
les  cours  sont  commencés,  dans  les  bâtiments  du  grand  séminaire,  et  les 
élèves  sont  nombreux  ;  plusieurs  ont  été  envoyés  par  des  évêques  étran- 
gers à  la  province  ecclésiastique. 

Les  ex-libris.  —  Nous  avons  sous  les  yeux  un  volume  (Les  Ex-Hbris  fran- 
çais depuis  leur  origine  jusqu'à  nos  jours  :  Nouvelle  édition,  revue,  très-aug- 
mentée  et  ornée  de  24  planches  ;  Paris,  P.  Rouquette,  1873,  gr.  in-8,  viu* 
79  pages,  tiré  à  350  exemplaires,  dont  i2  sur  papier  de  Chine)  qui  aborde 


—  467  — 

une  parcelle,  jnsqn*ici  inexplorée,  dn  vaste  champ  de  la  science  des  lirres  ; 
ce  genre  de  cx)llection,  aigourd'hui  k  la  mode,  est  l'objet  d'ardentes  recher- 
ches. Des  cabinets  se  sont  formés  en  ce  genre,  le  premier  en  date,  le  plus 
riche  de  tous,  est  celui  de  M.  Ernest  de  Hozière.  Empruntons  à  l'auteur  du 
Tolume  dont  il  s'agit  quelques  détails  de  nature  à  intéresser  les  biblio- 
philes. 

Pas  un  des  dictionnaires  de  la  langue  française  (pas  même  celui  de 
M.  Littré)  n'a  admis  le  terme  ex-libriSf  composé  de  deux  mots  latins,  mais 
l'usage  l'a  conservé  en  l'appliquant  aux  motifs  d'art,  blasons,  monogrammes, 
allégories,  emblèmes,  etc.^  gravés  en  relief  ou  en  creux,  et  fixés  sur  les 
gardes  ou  sur  le  titre  d'un  livre  en  signe  de  possession.  On  connaît  un  grand 
nombre  de  livres  allemands  et  une  certaine  quantité  d^ex^libris  italiens  dn 
seizième  siècle  ;  il  ne  s'en  rencontre  pas  de  français.  C'est  de  l'Allemagne 
que  Vex-HMs  est  venu  dans  notre  pays,  en  traversant  les  provinces  de  l'est  ; 
la  plus  ancienne  marque  intérieure  connue  en  France  est  celle  d'un  biblio- 
phile d'Autun  {Carolus  Albosius),  avec  la  date  de  1574  et  accompagnée,  selon 
l'usage  du  temps,  d'une  devise  :  Ex  labore  quies. 

De  1600  à  1650,  les  ex-libris  français  sont  bien  rares;  on  n'en  connaît 
guère  qu'une  trentaine,  mais  des  noms  distingués  figurent  sur  cette  liste  ; 
le  duc  d'Epernon,  les  frères  Sainte-Marthe,  François  Malherbe. 

De  1650  à  1700,  on  rencontre  André  Félibien,  historiographe  du  roy, 
l'archevêque  de  Rouen,  Ch.  M.  Le  Tellier,  etc.  Pendant  ce  demi-siècle, 
l'usage  de  la  marque  gravée,  collée  sur  la  garde  du  livre,  ne  se  généralise 
pas  ;  beaucoup  de  savants  y  résistaient  et  conservaient  leurs  préférences 
pour  la  marque  de  possession,  frappée  sur  plats  extérieurs  et  en  quelque 
sorte  nationale.  Tels  furent,  entre  autres,  deux  des  plus  grands  bibliophiles 
du  siècle,  Ménage  et  Huet,  l'évéque  d'Avranches.  On  sait  que  ce  dernier 
légua  ses  livres  aux  jésuites  de  la  maison  professe  de  Paris,  legs  de  grande 
valeur;  indépendamment  des  manuscrits,  8,312  volumes  et  un  grand 
nombre  d'auteurs  annotés  par  leur  savant  propriétaire. 

Au  dix-huitième  siècle,  les  bibliophiles  mettent  dans  leurs  ex-lihrii  une 
profusion  insensée  d'armoiries,  d'allégories,  d'emblômes,  et  même  de  rébus. 
Un  chirurgien,  le  sieur  Arrachart,  se  blasonne  de  sinople,  au  chevron  d'ar- 
gent, escaladé  de  deux  rats  de  sable  avec  le  char  de  même,  traîné  par  un 
cheval  marin.  Le  sieur  Odile  met  sur  la  garde  de  ses  volumes  un  crocodile 
avec  cette  devise  :  Terra  meUundus  et  undis.  Quelques  possesseurs  de  châteaux 
font  graver  les  vues  de  leurs  demeures  ;  des  marins  veulent  qu'on  retrace, 
sur  les  socles  où  reposent  leurs  armes,  des  actions  navales  où  ils  se  sont 
distingués.  Les  divers  styles  d'ornementation  du  dix-huitième  siècle  sont 
d'ailleurs  complètement  représentés,  dans  le  petit  art  de  Vex4ihriSy  par  de 
charmants  spécimens  ;  les  meilleurs,  les  plus  renommés  artistes  du  temps  se 
mirent  de  la  partie,  et,  comme  gens  pour  qui  leur  métier  n'avait  rien  d'in- 
digne et  qui  ne  pût  être  relevé  par  la  grâce  et  l'habileté,  Cochin,  Gravelot, 
Marinier,  Moreau  le  jeune  ont  tracé  des  ex-libris  d'une  fantaisie  et  d'un 
agrément  exquis.  Boucher  lui-même  a  condescendu  à  la  marque  de  biblio- 
thèque, mais  un  seul  des  trois  ex-libris  connus  qu'il  ait  dessinés  est  signé 
de  son  nom. 

Le  temps  n*est  pas,  pendant  la  première  république,  aux  marques  de 
propriété  des  livres;  quelques  ex-lihris  de  l'époque  offrent  le  niveau  égali- 
taire  ;  deux  conventionnels,  restés  fort  obscurs,  adoptent  le  bonnet  de  la 
liberté .  Le  blason  qui  faisait  le  mort  pendant  la  tourmente  révolutionnaire, 
renaît  avec  le  premier  Empire  ;  il  reparut  sur  les  livres  des  sénateurs  et  des 
grands  dignitaires  de  l'époque.  Pendant  la  Restauration,  pendant  le  règne 


—  468  — 

de  Louis  Philippe,  rien,  si  ce  n*est  des  marque^  héraldiques  sans  caractère 
et  sans  style  ;  les  artistes  de  l'école  romantique  n*ont  rien  laissé  en  ce  genre  ; 
il  faut  probablement  attribuer  au  spirituel  caricaturiste  Grandville,  la 
marque  de  la  bibliothèque  d'Alphonse  Karr;  la  guêpe,  bête  symbolique  de 
l'humoristique  écrivain,  en  train  de  couyrir  d'écriture  une  longue  paacarte. 

Constatons,  sous  le  second  Empire,  une  petite  renaissance  artistique  de 
Vex-libris,  due  à  celle  de  l'eau-forte  ;  des  artistes  connus  ont  pris  le  goût  de 
graver  pour  les  livres  de  leurs  amis,  littérateurs,  savants  ou  curieux,  des 
marques  de  possession  concordantes  avec  leurs  études,  leurs  goûts  on 
emblématiques  de  leurs  œuvres.  MM.  Bida,  Bracquemond,  Bouvenne, 
Flameng,  d'autres  encore,  ont  dessiné  les  €x4ibris  de  MM.  Champfleury, 
Asselineau,  Victor  Hugo,  Théophile  Gautier,  etc.  Nous  sommes  obligés  de 
passer  rapidement  sur  ce  qui  concerne  les  devises  adoptées  par  divers 
bibliophiles;  indiquons  seulement  celles  du  savant  de  Laulnaje  :  Rerum 
cognoseere  causas  ;  de  l'abbé  Morellet  :  Yeritas  cmnia  tinicU  ;  de  noi^^e  contem- 
porain, M.  Maurice  Toumeux  :  In  angulo  cum  libeiîo  ;  n'est-ce  pas  l'expression 
du  parfait  bonheur  de  la  vie  studieuse  et  modeste? 

Louis  XY  avait  un  ex-libris  d'une  simplicité  fort  peu  royale,  qui  ne  se 
rencontre  d'ailleurs  que  très-rarement,  et  le  blason  de  France,  d'azur  à 
trois  fleurs  de  lys  d'or,  décorait  les  livres  conservés  à  la  Bastille. 

Après  avoir  décrit  quelques  ex-lilms  singuliers,  ceux  de  Gueulette,  de 
Grimod  de  la  Reynière,  de  François  de  Neufchâteau  (ce  dernier  oSre  seize 
vers  à  la  suite  de  l'énumération  des  titres  de  ce  sénateur),  l'auteur  donne  la 
liste  des  petits-maitreSf  des  vignettîstes  qui,  au  dix-huitième  siècle,  ont 
gravé  des  ex-libriSy  et  il  dresse  une  liste  générale  (elle  comprend  328  noms) 
des  dessinateurs  et  graveurs  signataires  d*ex-libris  français;  la  plupart, 
d'ailleurs,  ne  sont  que  de  bons  ouvriers  en  gravure,  dépourvus  de  toute  célé- 
brité. 

En  définitive,  les  ex-UbriSj  recherchés  surtout  comme  pièces  bibliogra- 
phiques et  conune  images  de  décoiation  et  d'ornement,  offîrent  fréquem- 
ment un  intérêt  littéraire  et  biographique;  ils  méritent  donc  d'être  l'objet 
d'un  travail  spécial,  tel  que  celui  que  nous  signalons.  L'auteur  ne  s'est  pas 
nommé,  mais  il  n'est  pas  resté  inconnu,  et  nous  pouvons,  sans  indiscrétion» 
indiquer  M.  Poulet-Malassis. 

Les  amateurs  apprécieront  l'album  qui  reproduit  des  ex-libris  fort  inté- 
ressants ;  celui  de  M.  Victor  Hugo,  un  éclair  déchirant  des  ténèbres  ;  celui 
de  M.  Manet,  un  cippe  surmonté  d'une  tête  barbue;  au-dessus  et  au- 
dessous  deux  mots  latins  :  Manet  et  Manebit,  Nous  nous  en  tiendrons  à  ces 
exemples.  B. 

A  PROPOS  d'un  ouvrage  sur  la  Chouannerie  du  Maine  et  des  pats  adjacents. 
—  Ce  n'est  pas  sans  une  vraie  surprise  que  j'ai  lu  dans  un  des  derniers  numéros 
du  Polybiblion  (p.  132)  la  phrase  suivante:  «  Qu'est-ce  que  la  chouannerie, 
où  a-t-elle  pris  son  origine  ?  A-t-elle  pour  père,  comme  le  prétend  Duchemin 
Descepeaux,  repété  par  tous  les  autres  historiens,  un  a  contrebandier  gracié  par 
son  roi,  qui,  pour  son  coup  d'essai,  surprend  et  tue  dix-huit  hommes  sans 
défense  et  en  blesse  un  plus  grand  nombre?  »  La  surprise  que  j'ai  éprouvée 
a  dû  être  partagée  par  tous  ceux  qui  s'intéressent  aux  publications  sur  la 
Révolution,  et,  en  particulier,  par  tous  les  lecteurs  appartenant  au  Maine.  Cette 
phrase,  en  effet,  aurait  été  vraie  il  y  a  huit  ans;  mais,  depuis  1868,  elle  se 
trouve  contredite  par  des  preuves  péremptoires.  En  1868,  Dom  Piolin  pu- 
blia le  premier  volume  de  son  ouvrage  intitulé  :  l'Eglise  du  Maine  durant  la 
Révolution,  et,  à  la  page  374  et  suivantes,  il  raconte  les  mêmes  faits,  publie  les 
mêmes  documents,  et  présente  les  mêmes  points  de  vue  que  le  nouvel  histo- 


—  469  — 

rien  de  la  chouannerie.  Il  est  trop  tôt  ou  trop  tard  pour  venir  offirir  comme 
des  découTertes  des  faits  et  des  pièces  publiés  il  y  a  huit  ans.  —  G.  de  T. 
Tables  des  Bollandistks.  —  La  librairie  Victor  Palmé  vient  de  mettre  en 
vente  les  Tables  générales  des  Bollandistes  ou  dictionnaire  des  60  volumes  in-folio 
des  Aria  sanctorum,  contenant  :  1^  Une  Notice   ou  description  détaillée  de 
chacun  des  volumes  de  notre  édition  avec  indication  de  toutes  les  planches, 
figures,  etc.;  2^  Les  Éphémérides  des  dix  premiers  mois  de  Tannée,  c'est-à- 
dire  un  aperçu  succinct   des  travaux  qui  se  rapportent  à  chaque  jour  de 
Tannée.  On  voit  ainsi,  d'un  seul  coup  d'oeil,  l'importance  hagiologique  de 
chacun  des  saints  ou  de  chacun  des  groupes  de  martyrs  :  si  Ton  ne  possède  sur 
eux  qu'une  simple  notice;  s'ils  ont  donné  lieu  à  quelque  commentaire 
historique  ou  critique  ;  si   enfin  il  existe   des  ActeSy  Vies  authentiques  et 
autres  Pièces  qui  aient  été  jugés  dignes  d'être  publiés  ;  3*  Un  Index  alphabé- 
tique de  tous  les  Saints  et  Bienheureux  insérés  dans  les  60  volumes,  avec 
indication  précise   du  volume  et  de  la  page  où  il  commence  à  en  être 
question.  4*  Un  Catalogue,  que  Ton  a  tâché  de  rendre  aussi  complet  que 
possible,  des  Saints  et  des  Bienheureux  qui  paraissent  devoir  trouver  place, 
soit  dans  la  continuation,   soit  dans  les  divers  suppléments  de  l'œuvre  des 
Bollandistes.  5*  Un  Syllabus  assez  étendu  des  noms  et  choses  notables  con- 
tenus dans  les  préfaces,  exégèses,  traités  préliminaires,  etc.^  qui  enrichissent 
près  de  40  volumes  de  la  co^'eclion.  Le  volume,  ]a  page,  parioismême  la  sec- 
tion de  la  page  sont  indiqués.  Toutes  ces  tables  peuvent  servir  pour  les  édi- 
tions d'Anvers  et  de  Venise,  aussi  bien  que  pour  la  nouvelle  édition,  les  plus 
petites  d'C'érences  étant  notées  dans  les  manchettes  marginales.  Le  volume 
s'ouvre  par  220  pages  à'auctaria  ou  de  Notes  sur  quelques-uns  des  volumes 
du  mois  d'octobre.  Ces  auciariOj  publiés  par  les  nouveaux  Bollandistes  en 
trois  opuscules  distincts,  sont  ici  réunis  et  fondus  d'après  la  méthode  qui  a 
présidé  au   grand  ouvrage  des  Acta,  avec  accompagnement  des  six  tables 
d'usage.  Ce  volume  est  du  prix  de  75  francs. 

—  M.  V.  Regnault,  memb**e  de  l'Académie  des  sciences,  a  donné  à  la 
direction  des  musées  nationaux  un  nombre  considérable  d'études  peintes  ou 
dessinées  par  son  fils,  Heuri  Regnault,  ce  jeune  et  brillant  artiste  dont  la 
mort,  au  combat  de  Buzenval,  a  été  l'un  des  douloureux  épisodes  du  siège  de 
Paris. 

—  M.  Ed.  de  La  Barre  Duparcq,  dont  les  .travaux  historiques,  et  notam- 
ment ceux  qui  ont  trait  à  notre  histoire  militaire,  sont  bien  connus,  vient 
de  publier  une  Histoire  de  Charles  IX.  Dans  cet  ouvrage,  l'auteur  a  eu 
parUculièrement  en  vue  la  Saint-Barthélémy.  C'est  à  cet  événement  qu'il 
rapporte  tous  les  autres,  en  recherchant  les  causes  qui  l'ont  amené,  les  cir- 
constances qui  Ton  suivi. 

—  Un  archéologue  suédois,  M.  Caris  Landberg,  qui  explore  à  présent  les 
contrées  du  Liban,  vient  de  faire  deux  découvertes  d'une  certaine  impor- 
tance pour  l'histoire  fort  peu  connue  de  la  civilisation  phénicienne.  Il  a 
trouvé  l'ambre  jaune  &  Tétat  naturel,  dans  une  ancienne  mine  à  Djéba,  à 
quatre  heures  de  chemin  de  Sidon.  L'ambre  se  trouve  dans  une  couche  de 
marne.  Il  est  donc  prouvé  que  les  Phéniciens  exportaient  l'ambre  et 
n'allaient  pas,  comme  on  Ta  cru,  le  chercher  dans  d'autres  pays.  M.  Land- 
berg  a  également  trouvé,  dans  une  caverne  du  Liban,  de  grandes  masses 
de  scories  de  fer,  ce  qui  indique  que  les  Phéniciens  ont  travaillé  le  fer  chez  eux. 

—  Le  syndicat  des  libraires  classiques  sollicite  de  M.  Wallon  une  réforme 
qui  nous  semble  juste.  Il  demande  :  1°  Qu'an  livre  ne  puisse  être  interdit 
sans  que  l'auteur  ou  l'éditeur  soit  prévenu  et  entendu;  2®  Qu'un  ouvrage 
trouvé  répréhensible  soit  admis  à  correction  ;  Z^  Que,  dans  le  cas  où  une 


—  470  — 

interdiction  immédiate  serait  jugée  nécessaire,  Tinterdiction  pût  être  levée 
après  correction. 

—  VIndépendance  belge  annonce  que  M.  Picot,  archiviste  adjoint  da 
royaume,  a  fait  jeudi  dernier,  à  la  classe  des  beaux-arts  de  TAcadémie,  une 
communication  très-intéressante  pour  Thistoire  du  théâtre  musical  en  Bel- 
gique. Il  a  trouvé,  dans  le  riche  dépôt  dont  l'un  des  services  lui  est  confié, 
les  lettres  échangées  entre  Grétry  et  Vitzthumh,  maître  de  chapelle  duprince 
Charles  de  Loi^aine,  chef  d*orchestre  et  directeur  du  théâtre  de  Bruxelles.  Cette 
correspondance,  absolument  inédite,  révèle  des  particularités  fort  curieuses, 
non-seulement  pour  la  biographie  anecdotique  de  Grétrj,  mais  encore  rela- 
tivement aux  usages  dramatiques  et  aux  mœurs  de  la  société  bruxelloise  à 
la  fin  du  dix-huitième  siècle.  Elle  va  être  publiée  prochainement. 

—  Depuis  le  l*'  mai  1875,  parait,  à  Poitiers,  la,  Bévue  d'Aquitaine,  scientifique 
et  littéraire,  par  livraisons  de  3  feuilles  in-8  fort  bien  imprimées,  le  1"'  et  le 
15  de  chaque  mois  (prix  :  25  fr.).  Elle  publie  des  travaux  intéressants,  relatifs 
surtout  à  la  région.  Nommons  quelques-uns  des  collaborateurs  :  MM.  l'abbé 
Auberty  Louis  Àudiat,  de  Croy,  de  Curzon,  Délayant,  René  Rerviler,  de 
Lastie- Saint- Jal,  de  Longuemar,  Ménard,  de  Saint-Genis,  de  Touchimberty 
Richard,  etc..  La  Revue  d* Aquitaine  a  publié,  dans  ses  dernières  livraisons  : 
Aliénor  d^ Aquitaine  ;  Léon  Ogier  de  Gombaud,  poète  et  académicien  ;  Missions 
apostoliques  dans  l'Aquitaine  ;  La  bataille  de  Voulon,  en  507  ;  Controverses  reli- 
gieuses des  seizième  et  dix-septième  siècles;  Souvenirs  du  congrès  catholique  de 
Poitiers  ;  Boucher  et  son  époque  ;  M.  VUlemain  ;  Le  cardinal  de  Richelieu  et 
M.  de  Saint-Preuil  ;  Les  souterratna-refuges  ;  Le  salon  de  4875;  Le  drapeau  en 
France  ;  La  Roche-Posay  ;  Les  dolmens  d'Andillé,  etc. 

—  On  lity  dans  le  Soumal  officiel  :  «  La  librairie  Dentu  met  en  vente 
aujourd'hui  une  œuvre  historique  de  l'inférét  le  plus  élevé  :  Le  Ministère  de 
M,  de  Martignac,  par  M.  Ernest  Daudet^  dont  le  Journal  officiel  a  récemment 
publié  divers  fragments.  —  «  L'heure  Je  la  justice  a  sonné  pour  la  Restau- 
ration, dit  l'auteur  dans  la  préface  de  cet  ouvrage  ;  c'est  l'honneur  du  genre 
humain  que  cette  heure  vienne  toujours  pour  la  mémoire  des  victimes 
comme  pour  celle  des  coupables.  »  —  Nous  pourrions  ajouter  que  c'est  aussi 
l'honneur  des  écrivains  politiques  de  hâter  par  leurs  œuvres  la  venue  de 
cette  heure  de  justice.  C'est  à  cette  tâche  que  M.  Ernest  Daudet  s'tfst  em- 
ployé. Son  livre,  où  abondent  les  documents  inédits,  n'est  point  d'ailleurs 
une  œuvre  de  parti,  car,  s'il  est  des  hommes  desquels  on  peut  dire  qu'ils 
n'appartiennent  à  aucun  parti,  mais  qui  appartiennent  à  la  France,  M.  de 
Martignac  est  assurément  un  de  ces  hommes-là.  » 

Voici  le  titre  complet  de  l'ouvrage,  dont  les  fragments  insérés  au  Journal 
officiel  par  le  directeur  de  ce  journal,  ont  paru  sous  le  pseudonyme  de  Louis 
Retnaud  :  Le  Ministère  de  M.  de  Martignac,  sa  vie  politique  et  les  dernières 
années  de  la  Restauration,  d*après  des  publications*  récentes  et  des  documents 
inédits  (i  vol.  in-8). 

—  La  librairie  Auguste  Fontaine,  qui  a  publié  la  Bibliographie  moUéresque, 
dont  nous  avons  parlé,  annonce,  pour  le  10  novembre,  l'apparition  de  la 
Bibliographie  cornélienne  ou  description  raisonnée  de  toutes  les  éditions  des 
CEuvres  de  Pierre  Corneille,  des  imitatùms  ou  traductions  qui  en  ont  été  faites, 
et  des  ouvrages  relatifs  à  Corneille  et  à  ses  écrits,  par  M.  Emile  Picot;  avec  un 
portrait  de  Corneille  (de  l'édition  de  1644),  gravé  par  Michel  Lasne,  reproduit 
à  l'héliogravure  par  M.  Amand-Durand. 

Paraîtront  ensuite,  la  Bibliographie  raeinienne,  par  M.  Emile  Picot,  et 
la  Bibliographiela  Pontaùdenne,  par  M.  Paul  Lacroix  (bibliophile  Jacob),  conser* 
vateur  de  la  Bibliothèque  de  l'Arsenal. 


—  471  — 

—  La  librairie  Firmin  Oidot  vient  de  mettre  en  vente  un  important 
ouvrage  intitulé  :  La  guerre  de  Metz  en  1324,  poème  du  quatorzième  siècle, 
publié  pour  la  première  fois  par  M.  E.  de  Bouteillier,  ancien  député  de  Metz, 
suivi  d'études  critiques  sur  le  texte  par  F.  Bonnardot,  ancien  élève  peuàion- 
naire  de  TËcole  des  chartes,  et  précédé  d'une  préface  par  Léon  Gautier. 

—  La  même  librairie  publie  un  Dictionnaire  des  noms,  surnoms  et  pseu- 
donymes laHns  de  ^histoire  littéraire  du  moyen  âge  (1100  &  1530)  par  M.  Alfred 
Franklin,  bibliothécaire  à  la  Bibliothèque  Mazarine. 

—  La  bibliothèque  de  Thotel  Carnavalet  a  été  ouverte  le  30  octobre. 

—  Il  est  question  d'établir,  dans  uoe  dépeadance  de  l'Ëcole  de  droit,  une 
nouvelle  bibliothèque  qui  comptera  100,000  volumes. 

—  M.  l'abbé  Uaynard,  qui  vient  de  publier  la  Vie  de  M.  Crétineau-Joly,  va 
donaer  prochainement,  sous  le  titre  de  Rome  et  Vendée,  et  avec  une  introduc- 
tion, un  volume  de  morceaux  inédits  du  célèbre  écrivain. 

PcBUCATioNs  NOUVELLES.  —  Lcs  Éléments  raisonnes  de  la  religim,  par  Tabbé 
A.  YdU  Weddingen  (in-8,  Bruxelles,  imp.  G.  Lebrocqny).  —  La  Somme  du  caté- 
chisme, par  l'abbé  Regnaud.  T.  1«'  et  11  (in-12,  Palmé,  1876).  —  SaUmon  et 
VEcclésiaste,  par  l'abbé  A.  Notais  (2  vol.  gr.  in-8,  Benke  et  Tralin).  —  Du 
demi^kristiamsme,  par  l'abbé  Desgeorges  (in-lî,  Lyon,  Josserand,  1876).  ^ 
Le  Protestantisme,  courte  réponse  à  M.  de  Laveleye,  par  J.  Camauor  (in-12, 
Bruxelles,  Closson).  —  L'Appel  au  droit,  par  M.  Terrasson  de  Montleau  (in-8, 
Féchoz).  —  Nosjnaux^et  leurs  remèdes,  par  l'abbé  Ed.  de  Cazalès  (in-18,  Dou- 
niol,  1876).  —  Un  mot  sur  la  danse  adressé  aux  pères  et  aux  mères  de  fcmUles 
et  à  leurs  enfants,  par  l'abbé  J.  J.  Uyssen  (in-12«  Bruxelles,  Closson).  — Étude 
sur  le  caractère  et  les  conditions  constitutives  du  mariage,  par  Bedros  Th.  Cba- 
chian  (in-8,  imp.  Blot).  —  Avesta,  livre  sacré  des  sectateurs  de  Zoroastre,  trad. 
du  texte  par  C.  de  Harlaz.  T.  !•'  (Louvain,  Ch.  Peeters).  —  Le  Matérialisme 
politique  en  Angleterre,  par  Dupoîit  White  (in-8,  imp.  typ.  de  A.  Pougin),  — 
La  Presse  sous  le  régime  de  Vêtait  de  siège,  par  E.  Detourbet  (Lu-8,  A.  Marescq). 

—  Traité  sur  les  pompes  funèbres,  par  B.  Gaubert  (2  vol.  in-8,  Marseille, 
M.  Lebon).  —  Les  Écola  de  droit  en  Erancke-Comté  et  en  Bourgogne,  par  Ville* 
quez  (in-8,  Thorin).  —  Essai  critique  sur  la  philosophie  de  saint  Anselme  de 
Cantorbéry,  par  l'abbé  À.  Van  Weddingen  (in-8,  Bruxelles,  imp.  F.  Bayez). 

—  Considérations  sur  renseignement  obligatoire,  par  Mgr  de  Haerne  (Louvain, 
typ.  Ch.  Peeters).  —  La  divine  synthèse,  ou  f Exposé  au  double  point  de  vue 
apologétique  et  pratique  de  la  religion  révélée,  par  Mgr  Guilbert,  évéque  de  Gap 
(3  vol.  in-8,  Pion) .  — •  Saint  François  d^ Assise.  Providence  du  moyen  âge  par 
l'amour,  1182-1226,  par  le  bibliophile  Granger  de  D...  (in-8,  en  caractère 
elzévirien,  Plou).  ~  Entretiens  pratiques  à  Vusage  des  femmes  du  monde.  Reli- 
gion et  monde,  par  la  princesse  Carolyne  de  Sayn-Wittgenstein,  née  Iwanowska 
(in-18.  Pion).  —Le  cardinal  de  Bérulle  et  le  cardinal  de  Richelieu,  par  M.  l'abbé 
Houssaye,  du  clergé  de  Paris  (in-8  car..  Pion).  —  Chansons  nouvelles,  par 
Gustave  Nadaud  (in-18,  Pion).  —  L'Afrique  équatoriale.  Okanda,  Bangouens^ 
Osyéba,  par  M.  le  marquis  de  Compiègne  (gr.  in-8.  Pion).  —  Précis  de  la 
(guerre /Wnico-oi/emofide,  par  le  colonel  Fabre  (gr.  in-18  Pion).  —  L'unité 
dynamique,  par  F.  Mano  (in-12,  librairie  des  Mondes).  ^L'Opposition  sous  les 
Césars,  par  G.  Boissier  (in-8.  Hachette).  —  HisMre  politique  et  religieuse  de 
la  France,  par  l'abbé  P.  Mury  (nouv.  édit.  4  vol.  in-18,  Bray  et  Retaux).  — 
Essai  sur  le  rôle  politique  et  social  des  ducs  de  Bourgogne  dans  les  Pays-Bas,  par 
P.  Fredericq  (in-8,  Gand,  Ad.  Hoste).  —  Notes  de  Topino-Lebrun,  juré  au  tri- 
bunal révolutionnaire,  publiées  par  J.  F.  E.  Chardoiller  (in-8,  J.  Baudel).  — 
La  Crise  de  cent  ans.  L'Exilé  lorrain,  par  Charles  Charaux  (in-18,  Albanel  et 
Boltenweck).  —  Les  Souivenm  catholiques  de  la  Tour  de  Londres,  par  le  T.  R. 


—  472  — 

Rob.  Gooke,  trad.  de  H.  Greand  (ia-S,  Douaiol).  —  Mission  de  Cayenne  et  de 
la  Guyane  française  (in-12,  Douniol).  —  L'Ombre  de  la  mort,  par  M™«  Rattazzi 
(in-12,  Lib.  des  bibliophiles).  —  LArgénis  de  Bardai,  par  Alb.  Dupont  (in-8, 
Thorin).  —  Dictionnaire  historique  de  l'ancien  langage  français,  par  La  Curne 
de  Sainte-Palaye,  12*  fasc.  (in-4^  H.  Ghampion).  —  Pensées  et  sourires^  poésies 
par  L.  Ghalmeton  (iii-12,  Thorin). 

Publications  annoncées.  —  La  TS'odition  catholique  sur  rinfaillibilUé  ponh*- 
ficale  ou  la  définition  de  ce  dogme  devant  VÉcriture,  les  Pérès  et  l'histoire,  par 
Mgr  rarchevêque  de  Bourges,  t.  I*'.  —  Histoire  de  saint  François  de  Panle, 
fondateur  des  Minimes,  par  Mgr  Dabert,  évèque  de  Périgueux.  —  Étude  swr 
Jeanne  d'Arc  et  les  principaux  systèmes  qui  contestent  son  inspiration  surnaturelle 
et  son  orthodoxie,  par  le  comte  de  Bourbon-Ligaières.  —  Plaidoyers  de  Berryer, 
2*  série  de^  œuvres  (4  vol).  Visenot. 


QUESTIONS  ET  RÉPONSES. 


QUESTION. 

Peintre»  du  nom  de  De- 
quoy.  —  Pourrait-on  donner  quel- 
ques renseignements  sur  des  pein- 
tres nommés  Dequot?  —  Au  mu- 
sée de  Versailles,  le  portrait  de  la  mar- 
quise de  LouYois  (Anne  de  Souvré), 
daté  de  1695,  est  signé  :  Simon  Deqvoy, 
Nous  connaissons  aussi  deux  autres  fort 
bons  portraits  peints  en  Anjou,  au 
siècle  dernier  et  signés  :  Dequoy  Vesné, 
peintre  du  Boy,  1735.  —  L'histoire 
des  peintres  ne  fait  aucune  mention  de 
cette  dynastie  d'artistes  :  du  moins, 
jusqu'à  présent,  nos  recherches  à  ce 
sujet  ont  été  sans  résultat. 

A.  B. 

RÉPONSES. 

Une  histoire  manuscrite 
de  la  4*  croisade  (XIV,  383).  On  ne 
connaît  François  Rose  que  par  les  quel- 

gues  lignes  que  lui  ont  consacrées  La 
roix  du  Maine,  le  P.  Daire  [Histoire  de 
la  ville  d'Amiens,  i,  lî,  p.  177,  et  His- 
toire littéraire  de  la  ville  d'Amiens,  p. 
82  et  426.)  François  Rose,  natif  de 
Paris  et  originnire  d'Amiens,  fut 
successivement  chanoine  de  l'Eglise 
Saint-Nicolas,  puis  de  la  cathédrale, 
oCQcial,  grand  vicaire  de    l'évéque 


Geoffroi  de  la  Marthonîe  et  enfin 
doyen  du  chapitre,  à  partir  du  1 5 jan- 
vier 1S88.  Nommé  à  l'évéché  d'Or- 
léans, il  fut  assassiné  en  se  rendant 
dans  cette  ville  le  17  novembre  1597. 
Une  seule  de  ses  œuvres  a  été  impri- 
mée :  c'est  une  Ode  sur  la  mort  de 
Jean  Edouard  Dumonin  poète  et  philo- 
sophe, insérée  dans  les  Tombeaux  de 
Jean  de  Caurres,  1587,  in-12.  Quant  à 
son  principal  ouvrage,  resté  manus- 
crit, Histoire  de  la  conquête  de  Com- 
tantinople  par  Baudouin  IX,  comte  de 
Plandre,  en  1204,  ou  ignore  ce  qu'il 
est  devenu.  ï,  Corblst. 

Salnt-il.ndré  de»  A.rts  (XIV, 
384).  —  On  peut  être  persuadé,  aue 
Saint-André  des  Arcs  est  la  véritable 
orthographe,  et  qu'on  n'écrivait  pas  au- 
trement, il  y  a  quelques  années  en- 
core. 11  est  facile  de  s'en  assurer  enon- 
vrant  n'importe  quel  ouvrage,  quel 
almanach  antérieur  à  la  Révolution. 
Mais,  certainement,  les  fabricants 
d^arci  n'ont  rien  à  faire  ici  ;  il  s'agit 
d'arceaux,  d'arcs,  étymologie  bien 
naturelle  pour  le  nom  d'une  église. 
Il  faut  donc  lire  Saint-André  des  Atcs^ 
ou  des  Arcis,  Dans  mon  enfance,  une 
partie  de  la  rue  Saint-Martin,  qui 
avoisine  la  Seine,  s'appelait  rue  des 
Arçis,  à  cause  des  arcs  ou  arceaux 
qui  s'y  voyaient  autrefois. 

£.  C. 

Le  Gérant^  L.  Sandrst. 


SAINT-QDfiNTIK.  —    IMP.  JULBS  MOORBAU. 


POLYBIBLION 

REVUE  .  BIBLIOGRAPHIQUE   UNIVERSELLE 


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teaux  et  accompagné  d*une  carte  tirée  en  couleor.  Paris,  Hachette,  1875.  Gr. 
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historiquee  de  France^  par  l'abbé  B0URA88Ê,  président  de  la  Société  archéologique  de 
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telli, Marie  et  Sahib.  —  La  Toute  Petite ^ptir  J.  G(RARDIN.  Vol.  de  294  p.,  illustré  de 
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Angleterre,  ouvrage  imite  de  l'anglais  avec  l'autorisation  de  l'auteur,  par  J.  Levoisin. 
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tour  en  Norvège;  une  Promenade  dans  la  mer  Glaciale  (1871-1873),  par  Julbs  Lb- 
clercq.  Vol.  de  316  p.  ,  orné  de  12  sujets  sur  bois  gravés  d'après  le  dessin  de 
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membre  de  l'Institut.  Vol.  de  322  p.,  orné  de  62  gr.  d'après  les  dessins  de  Justin 

DÉCEMBRE  1875.  T.  XIV,  31. 


—  474  — 

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que^  le$  PlaideurBy  Britannictu^  Bérénice  et  Bajazet.  Nous  espérons  bien 
que  les  autres  tragédies  de  Racine  viendront  plus  tard.  Ce  beau  volume 
est  orné  d'un  portrait  et  de  vingt-trois  sujets  gravés  &  Teau-forte  par 
V.  Foulquier.  Jusqu'ici,  on  avait  cru  faire  très-bien  les  choses  endeman- 
dant  Hn  motif  de  gravure  à  une  pièce;  ici,  c'est  la  situation  principale 
de  chaque  acte  qui  a  donné  lieu  à  une  composition  exécutée  avec  le 
plus  grand  soin,  où  les  détails  de  costumes,  d'architecture  ont  été  étu- 
diés en  archéologue,  où  les  physionomies,  les  gestes  des  personnages 
s'accordent  parfaitement  avec  les  intentions  du  poëte.  Ce  volume, 
digne  de  Racine  et  de  M.  Alfred  Marne,  commence  par  une  notice  de 
M.  Poigoulat,  notice  courte^  précise,  écrite  avec  une  élégante  simpli- 
cité, et  faisant,  en  peu  de  pages,  admirer  le  poëte  et  oonnaitre  l'homme. 

<-«  Nous  m'avons  rien  à  dire  ici  de  VInsecte  de  M.  Michelet,  Tou- 
vrage  étant  suffisamment  connu  de  nos  lecteurs.  La  nouvelle  édition 
que  vient  de  publier  la  maison  Hachette,  est  un  chef-d'œuvre  de  luxe 
typographique,  et  se  recommande  à  l'attention  par  les  charmantes 
Illustrations  de  Giacomelli  qui  raccompagnent.  Plusieurs  de  ces  des- 
sins sont  de  véritables  petits  chefs-d'œuvre  ;  tous  se  distinguent  par 
le  charme  et  la  fraîcheur  de  la  composition,  la  finesse  des  détails,  la 
vérité  des  reproductions.  Il  n'est  pas  jusqu'aux  vignettes^  qui  ornent 
un  grand  nombre  de  pages,  qui  n'attestent  la  môme  exécution  soignée 
et  le  même  fini.  C'est  un  vrai  livre  d'amateur  et  d*artiste. 

—  La  troisième  année  du  Journal  de  la  jeunesse  ne  le  cède  en  rien 
aux  deux  précédentes.  C'est  toujours  la  même  richesse  d'illustrations, 
la  même  variété  de  rédaction,  le  même  charme  dans  le  choix  des 
si\iet8«  Voici  des  romans,  comme  les  Deux  Mères^  par  M**  Colomb;  le 
Jeune  Chef  de  famille,  par  M"«  Zénaïde  Fleuriot;  Tom  Broum^  imité  de 
l'anglais  par  M.  J.  Le  voisin;  la  Toute  petite,  par  M.  J.  Qirardin;  des 
voyages,  comme  les  Aventures  du  capitaine  Magon^  par  M.  Léon  Cahnn; 
A  travers  la  France,  par  divers  anteurs  ;  des  notes  historiques,  géogra* 


—  475  — 

phiqaes,  scientifiques  ;  des  légendes,  dés  caaseries,  des  biographies 
de  grands  personnages,  etc.,  etc.  Nous  constatons  toujours  avec  regret 
que  la  religion  ne  tient  pas  ici  une  assez  grande  place,  et  que  Thistoire 
est  aussi  trop  au  second  plan.  Ce  sont  là  des  améliorations  que  nous 
espérons  que  les  éditeurs  Tondront  réaliser  dans  les  fSssoioules  de  1876; 
cela  vaudra  mieux,  par  exemploi  que  la  Lettre  de  Jcnquet  à  ea  couêine 
sur  le  nonyel  Opéra. 

—  M.  Victor  Rendu,  inspecteur  général  de  l'agriculture,  déjà  connu 
par  de  nombreux  et  savants  travaux  d'agriculture  et  d'histoire  natu- 
relle, a  fait,  dans  son  livre  intitulé  les  Animaux  de  la  France^  une  revue 
générale  des  animaux  de  notre  pays.  Il  n'y  a  pas  compris  naturellement 
toutes  les  espèces  de  la  France,  oe  qui  aurait  été  un  travail  aussi  diffl* 
cile  à  réaliser  que  minutieux  et  fatigant  à  entreprendre  ;  mais,  dans 
un  cadre  restreint  et  sous  la  forme  de  simples  croquis,  M.  Rendu  a 
fait  figurer  ceux  des  animaux  de  notre  pays  qui  offrent  le  plus  dln- 
térét  par  leurs  mœurs.  Nous  trouvons,  de  plus,  dans  ce  travail,  des  dé- 
tails précieux  d'anatomie  et  de  physiologie,  des  renseignements  inté- 
ressants sur  l'instinct  et  Tintelligence  des  animaux.  M.  Victor  Rendu 
a  pris  pour  guide  la  classification  de  Cuvier.  Il  parle  donc  d^abord  des 
mammifères  et  des  oiseaux;  puis  des  reptiles,  des  poissons^  des  mollus- 
ques, des  articulés  et  des  zoophytes.  Son  ouvrage  est  fait  avec  tout  le 
soin  et  tonte  la  clarté  que  demandent  des  travaux  destinés  à  la  jeu- 
nesse, qui  y  peut  apprendre,  sans  s*en  douter  pour  ainsi  dire,  à  con- 
naître la  nature  et  les  êtres  qui  raniment.  Les  très-nombreuses  gra- 
vures qui  l'accompagnent  ajoutent  encore  à  son  prix. 

M.  Rendu  a  dédié  à  ses  enfanta  cette  dernière  œuvre  sortie  de  sa 
plume,  comme  il  le  dit  dans  les  vers  qui  ouvrent  son  livre.  Nous  espé- 
rons bien  que  le  savant  écrivain  est  loin  d'être  arrivé  au  terme  de  ses 
utiles  et  attrayantes  productions. 

-—  L'ouvrage  de  M.  Léon  Gahun,  les  Aventures  du  capitaine 
Magon,  au  une  exploration  phénicienne  mille  ans  avant  tère  chétienne^ 
est  une  conception  dans  le  genre  du  Voyage  du  jeune  Anaeharsis 
on  de  Rome  au  siècle  i Auguste^  mais  sous  forme  moins  savante 
et  par  conséquent  mieux  à  la  portée  de  la  jeunesse.  Le  capitaine 
Magon  est  un  Phénicien  d^  Sidon,  que  le  roi  de  Tyr,  Hiram, 
charge  d'aller  chercher  des  matériaux  précieux  pour  son  ami  et 
allié  le  roi  David.  Magon  recrute  des  matelots,  équipe  des  bâtiments,  et 
part.  Il  va  successivement  en  Egypte,  en  Crète,  où  il  a  à  lutter  contre 
lesPhothiens,  en  Sicile,  en  Italie,  et  arrive  enfin  à  Tarais.  Là,  il  charge 
ses  navires  de  lingots  d'argent;  puis,  sur  l'ordre  de  l'oracle  d'Hannon, 
qu'il  a  consulté  à  Utique,  il  franchit  le  détroit  de  Gadès,  remonte  vers 
le  nord,  relâche  en  Qaule  et  remonte  jusqu'à  l'embouchure  de  l'Elbe, 
dans  la  grande  île  de  Prendain.  Mais,  au  retour,  la  tempête  le  pousse 


—  iib  — 

vers  l'Afrique  ;  il  la  côtoie,  et,  toigourfi  cntrainé  par  un  vent  violent, 
il  double  le  cap  de  Bonne-Espérance,  et  unit  par  arriver  en  Arabie,  dans 
le  royaume  de  la  reine  de  Saba.  Après  quelques  péripéties  nouvelles 
sur  les  bords  de  TEuphrate,  il  rentre  à  Sidon  par  la  mer  Rouge  et  le 
canal  de  Pharaon.  Telle  est  la  trame  de  ce  récit,  auquel  se  mêlent  une 
foule  d'épisodes  dramatiques,  guerres,  trahisons,  tempêtes,  et  qui 
donne  aux  jeunes  lecteurs  de.très-curieuses  notions  sur  Tétat  des  con- 
naissances géographiques  chez  les  Phéniciens.  Ajoutons  qu^une  très- 
bonne  carte,  comme  sait  les  éditer  la  maison  Hachette,  aide  puissam- 
ment à  l'intelligence  du  texte. 

—  Le  livre  de  M.  Sachot  offre  tous  les  éléments  d'un  vojage  facile 
et  agréable,  puisque,  sans  quitter  ses  habitudes,  on  pourra,  sur  la  foi 
des  voyageurs  anglais  et  américains,  faire  connaissance  avec  celles 
de  peuples  peu  familiers  aux  jeunes  géographes  français.  Ce  n*est  pas 
à  cet  ouvrage  qu'on  reprochera  le  manque  d'exactitude  ;  peut-être 
même  j  en  a-t-il  trop.  Ou,  pour  mieux  dire,  tons  les  lecteurs  ne 
devront  pas  suivre  indifféremment  les  péripéties  de  la  route.  Sauf 
cette  restriction,  que  M.  Sachot  devra  comprendre  mieux  que  personne, 
son  travail  se  recommande  à  tous  les  titres.  Nous  avons  été  particu- 
lièrement heureux  d'j  rencontrer  un  hommage  à  la  sympathique  mé- 
moire de  Gustave  Lambert,  tombé  sous  les  balles  prussiennes  avant 
d'avoir  pu  accomplir  l'idée  ou  le  rêve  de  sa  vie,  qui  était  de  planter 
au  pôle  le  pavillon  de  la  France. 

—  Perdus  au  milieu  de  Paris,..  Que  les  jeunes  lecteurs  fassent 
attention  aux  graves  leçons  que  ce  livre  leur  présente  sous  une  forme 
aimable.  Trois  orphelins,  trois  amis,  sans  parents,  sans  famille,  quel- 
quefois même  sans  abri  ni  ressource,  finissent  par  se  tirer  d'affaire  :  la 
Providence,  qui  leur  tient  lieu  de  tout,  récompense  ainsi  leur  courage 
et  leur  probité.  L'un  d'eux,  fils  d'un  pauvre  arpenteur  de  village, 
quitte  tout  enfant  le  pays,  essaye  de  plusieurs  métiers,  puis  sent  sou- 
dain se  développer  en  lui  une  vocation  artistique,  à  laquelle  d^hen- 
reuses  circonstances  lui  permettent  de  répondre.  Ses  compagnons, 
restés  dans  une  situation  plus  modeste,  après  l'avoir  aidé  dans  la  mau- 
vaise fortune,  ne  lui  portent  pas  envie  :  chacun  est  heureux,  parce 
qu'il  sait  se  contenter  du  lot  que  le  bon  Dieu  lui  a  fait  en  ce  monde. 

—  M.  Blériot  a  eu  l'heureuse  pensée  de  publier  en  un  volume 
illustré  les  romans  qui  ont  fait  la  fortune  de  VOuvrter.  Déjà,  Tannée 
dernière,  il  avait  donné  la  Fille  du  Bandit.  Cette  année,  il  nous  offre 
les  Faucheurs  de  la  mort,  où  la  plume  si  patriotique  et  si  catholique  de 
M.  de  Lamothe  retrace  d'une  façon  saisissante  des  épisodes  de  la 
guerre  de  Pologne.  Nos  lecteurs  connaissent  cette  publication,  dont 
rédition  illustrée  est  seule  nouvelle,  et  qui  sera  lue  avec  le  plus  vif 
intérêt  dans  les  veillées  d'hiver. 


—  %11  — 

—  Les  Amuseurs  de  la  rue,  tel  est  le  titre  d*un  petit  volume  dû 
à  la  plume  de  M.  Augustin  Challamel,  avec  seize  compositions  de 
M.  Edouard  Debat-Ponsun.  Nous  passons  successivement  en  revue 
ces  types  dont  certains  sont  déjà  d'un  autre  âge  ou  tendent  à  dispa* 
raître,  à  savoir  Bobèche,  Oalimafrëe,  Polichinelle,  Paillasse,  Pierrot, 
Tescamoteur,  le  saltimbanque,  le  musicien  ambulant^  Guignol,  les 
hercules,  etc.  La  fantaisie  est  le  caractère  dominant  de  cette  publi- 
cation, rehaussée  par  le  «crayon  spirituel  qui  reproduit  fidèlement  les 
personnages  décrits  dans  le  texte. 

L'éminent  éditeur  de  Tours,  M.  Marne,  a  entrepris  une  nouvelle 
collection  illustrée,  format  in-4^.  Mettre  la  jeunesse  studieuse  au 
courant  des  découvertes  des  voyageurs  du  dix-neuvième  siècle,  dans 
un  livre  qui  peut  à  la  fois  plaire  aux  yeux  et  orner  Tesprit,  tel  est  le 
but  que  s'est  proposé  M.  Arthur  Mangin  dans  ses  Voyages  et  décou- 
vertes (toutre-mer  ;  il  n'a  point  entendu  faire  une  histoire  complète  des 
voyages  de  ce  siècle  ;  l'œuvre  eût  été  trop  considérable  et,  par  ces 
proportions  mêmes,  n'eut  point  répondu  aux  intentions  de  Tauteur;  il 
a  choisi,  parmi  les  relations  de  voyages  modernes,  celles  qui  lui 
paraissaient  les  plus  propres  à  intéresser  ses  jeunes  lecteurs;  et  il 
8*est  attaché,  comme  le  titre  même  du  volume  Tindique,  aux  seuls 
voyages  à^outre-mer.  Laissant  donc  de  côté  les  découvertes  de  Living- 
stone,  Speke,  Bakes,  dans  Tintérieur  de  l'Afrique,  il  a  pris  seule- 
ment les  explorations  des  marins.  Cest  par  un  Français,  le  capitaine 
Baudin,  chargé  par  le  premier  consul  d'une  mission  en  Australie,  et 
qui  mourut  dans  l'expédition,  que  s'ouvre  le  volume.  Puis  viennent 
l'intéressant  voyage  du  capitaine  Freycinet^  en  Océanie,  les  explora- 
tions de  l'illustre  Dumont-d'Urville,  celles  d'une  commission  anglaise 
aux  îles  Andaman,  le  voyage  de  circumnavigation  du  capitaine 
WuUerstof  XJstain,  les  deux  expéditions  de  John  Ross,  au  pôle 
arctique,  celle  du  capitaine  Back  à  la  recherche  de  John  Pross,  les 
voyages  d'Edouard  Parry,  les  expéditions  hardies  de  l'intrépide  John 
Franklin,  et  enfin  celles  du  docteur  Eane,  du  commandant  Maclure 
et  du  capitaine  Mac  Glintock,  à  la  recherche  du  vaillant  et  malheu- 
reux explorateur  du  pôle  nord.  Ajoutons-y  une  des  relations  les  plus 
curieuses,  la  plus  intéressante  peut-être,  celle  d'une  mission  au 
Chili  d'un  jeune  prêtre  italien,  Jean  Mastaï,  aujourd'hui  le  glorieux 
prisonnier  du  Vatican,  et  nous  aurons  donné  une  idée  des  récits  variés 
contenus  dans  ce  volume,  avec  lequel  on  peut  ainsi,  tout  en  restant 
au  coin  du  feu,  voyager  si  facilement  autour  du  monde,  et  dont  le 
succès,  d'ailleurs,  est  déjà  consacré  par  une  deuxième  édition. 

—  Un  livre  sur  l'Egypte,  par  le  temps  qui  court,  et  au  milieu  des 
préoccupations  diplomatiques  qu'a  fait  naître  la  récente  acquisition 
par  l'Angleterre  ded  actions  du  canal  de  Suez,  c'est  presque  une 


-  478- 

aotoaliië.  HAtoni-nous  de  dire  toatefoif  qae  le  volume  de  M.  Eugène 
Poitou  n'a  rien  de  politique.  Foroé^  dn  1857,  par  l'état  de  sa  aantë^ 
d'aller  chercher  un  climat  plus  doux  que  celui  de  la  France*  M.  Poitoa 
ne  s'est  arrêté  ni  aux  côtes  de  Provence,  ni  à  celles  d'Italie  ;  il  a 
poussé  jusqu'à  la  vieille  terre  des  Pharaons.  Un  voyage  d'Egypte, 
d'ailleurs,  n'est  pas  maintenant  chose  bien  difficile  :  u  le  Caire  n*est 
plus  qu'à  une  semaine  de  Paris.  »  Arrivé  à  Alexandrie,  M.  Poitou  n'a 
pas  tardé  à  quitter  cette  ville,  où  Ton  retrouve  encore  les  brumes  et 
les  pluies  du  Nord,  et  est  allé  chercher  au  Caire  le  vrai  .soleil  de 
l'Orient;  puis,  comme  la  plupart  des  voyageurs,  il  a  frété  une  ce  cange,  » 
et,  s'embarquant  sur  le  Nil,  a  remonté  le  fleuve  jusqu'à  Thèbes,  tra- 
versant ainsi  d'un  bout  à  l'autre  cette  Egypte  si  pleine  de  souvenirs 
et  si  pleine  de  rêves,  de  gloires  évanouies  et  de  misères  vivantes,  où 
le  passé  et  le  présent  se  heurtent  sans  cesse,  avec  des  contrastes  la 
plupart  du  temps  tristes,  souvent  ridicules;  où  les  inscriptions  gravées 
sur  la  statue  de  Memnon,  par  exemple,  débutent  par  celle  d'un  préfet 
de  TEmpire  romain  et  finissent  par  le  nom  plus  modeste  de  «  Jean- 
Pierre  Chouilloux,  soldat  de  la  21*  demi-brigade.  »  De  cette  excur- 
sion sur  le  Nil,  comme  de-  ce  séjour  au  Caire,  est  sorti  un  livre  plein 
d'intérêt  et  de  charme,  excellent  guide  pour  les  touristes,  très- 
instructif  pour  ceux  qu'efl'rayent  encore  les  huit  jours  qui  séparent  le 
Caire  de  Paris.  M.  Poitou  a  beaucoup  vu  et  a  bien  vu,  en  érudit  et  en 
artiste.  Nous  recommandons  aux  amateurs  de  pittoresque  une  très- 
attachante  description  d'une  promenade  à  Karnak  au  clair  de  lune, 
et  aux  amateurs  de  mystères  de  l'Orient,  le  très-curieux  récit  d'une 
visite  au  harem  du  vice-roi. 

—  C'est  surtout  dans  cette  sombre  et  froide  saison  que  la  pensée 
aime  à  se  transporter  sous  des  cieux  plus  riants;  aussi  avons-nous  fait 
un  bon  accueil  au  livre  de  M.  l'abbé  Rolland,  Promenades  en  Italie, 
L'auteur,  à  diverses  reprises,  a  visité  la  belle  contrée  dove  el  si  suona; 
il  la  connût  bien,  et,  après  tant  d'autres  descriptions,  on  lit  avec  plaisir 
les  pages  dans  lesquelles  il  décrit  les  sites  et  les  monuments  de  ce 
pays  privilégié.  Les  souvenirs  historiques  se  mêlent  d'une  manière 
intéressante  aux  notes  du  voyageur.  M.  Tabbé  Rolland  ne  parle  pas 
d'une  ville  importante  sans  faire  une  rapide  excursion  dans  son  passé. 
De  belles  et  nombreuses  gravures  ornent  ce  volume^  d'une  exécution 
typographique  fort  soignée. 

-—  M.  l'abbé  Bourassé,  le  savant  archéologue  dont  on  déplore  la 
perte,  avait  employé,  il  y  a  quelques  années,  les  quelques  moments  de 
loisir  dont  il  pouvait  disposer  à  faire,  aux  sanctuaires  les  plus  renom- 
més, un  pèlerinage  à  la  fois  pieux  et  scientifique  ;  mais,  en  même  temps» 
son  œil  exercé  s'arrêtait  sur  les  antiquités  gallo-romaines,  les  forte- 
resses féodales  du  moyen-àge,  les  maisons  gothiques,  les  ravissantes 


-  470  — 

oonvtruatioBs  de  la  renaiuanoe.  Nous  aromi  loi  les  page»  relatives  aux 
chàteaax  des  princes  qai  ont  goaverné  U  France  :  Résidences  des  rois 
mérovingienSi  Palais  de  la  Cité,  le  Louvrei  les  Talleries^  Versailles, 
Trianon»  le  Luxembourg*  le  Palais-Rojal,  Saint-Geràiain-en-Lajre) 
Fontfidnebleau^  Yincennes,  hauts  châteaux  et  environs  de  Paris;  puis 
Chambord,  LooheSiChinon,  Pau,  Azay,  AmboiSe,  Ghaumont^  Blois,  etc. 
C'est  une  revue  historique  en  même  temps  qu'archéologique  ;  mais* 
nous  regrettons  d'avoir  à  constater  que  l'auteur  n'est  point  tou- 
jours aussi  bon  historien  qu'archéologue  éclairé.  De  nombreuses  gra- 
vures placent  sous  les  jeux  du  lecteur  les  principales  résidences. 

—  Roàinson  Crusoé  est  le  livre  classique  de  l'enfance.  On  n'aura 
donc  jamais  trop  d'éditions  de  cet  attrayant  ouvrage,  qui  fera  long- 
temps le  bonheur  des  jeunes  générations.  En  voici  une,  illustrée  de 
nombreuses  gravures,  et  qui  se  recommande  à  la  fois  par  son  texte» 
revu  et  corrigé  avec  soin  et  par  son  prix  modéré. 

-^  Berthe  est  Théroïne  en  même  temps  que  l'arrière-petite-fille  de 
M*  Noiiradamui,  qui  se  console  par  l'étude  des  astres  de  ses  cha*> 
grins  de  famille*  Elle  a  été  abandonnée  par  son  père  et  élevée  par 
des  parents  éloignés  (  à  leur  mort,  son  arrière-grand-pére  la  prend 
chea  lui  pour  la  soustraire  à  un  subrogé  tuteur  détestable.  Elle  fait 
Tornement  de  son  triste  intérieur  ;  elle  le  rattache  à  la  vie  et  le 
ramène  à  la  religion  ;  mais,  en  même  temps,  elle  amène  beaucoup  de 
trouble  dans  le  ménage,  gouverné  par  une  femme  égoïste  et  d'un  carac- 
tère maussade.  Il  faut  voir  tout  ce  qu'eut  à  souffrir  cette  nature  vive, 
délicate,  ouverte,  aimante,  obligée  de  ^e  renfermer  en  elle-même. 
Elle  en  serait  morte,  si  l'affection  d'amis  précieux  n'était  venue 
consoler  son  cœur.  C'est  une  vie  pleine  d'incidents  variés,  peu  vrai- 
semblables ;  elle  se  termine  naturellement  par  un  mariage,  que  tout 
le  monde  n'approuvera  pas.  Il  dénote  une  étude  sérieuse  du  cœur 
humain;  les  épisodes  de  la  guerre  peignent  avec  une  cruelle  vérité  les 
impressions  de  ce  moment.  Ce  livre  nous  paraît  encore  plus  destiné 
aux  jeunes  femmes  qu'aux  jeunes  flUes.  Pourquoi  M"®  Fleuriot  n'a- 
t-elle  pas  plus  accentué  le  caractère  catholique  de  son  livre?  Est-il 
bon  de  parler  de  (c  patenôtres,  »  même  abonne  intention.  Nous  croyons 
peu  correct  de  dire  :  n  interrogea-t-il  ;  apostropha- t--il^  etc. 

—  Dans  les  Deux  Mère$  de  M"*  Colomb,  un  vieil  oncle  égoïste  et 
célibataire,  après  avoir  amassé  d'immenses  richesses  dans  les  Indes, 
revient  en  France,  pour  jouir  de  sa  fortune  et  se  procurer  les  douceurs 
de  la  famille  sans  en  subir  les  charges.  Il  a  deux  nièces  veuves, 
ayant  chacune  un  ûls.  Il  leur  fait  demander  laquelle  des  deux  veut  lui 
abandonner  son  fils,  qui  portera  son  nom  et  aura  tous  ces  biens,  et  en 
môme  temps  tenir  sa  maison.  Qui  le  croirait?  une  seule  accepte.  Elle 


—  480  — 

paye  cher  Tavenir  brillaDt  qu'elle  veut  assurer  à  son  fils,  par  rhumeur 
de  Toncle  à  héritage  qu*elle  doit  subir,  par  Tennui  et  le  poids  d'une 
vie  frivole,  par  les  tourments  que  lui  cause  le  beau  Robert.  Ce  pauvre 
garçon,  négligé  par  sa  mère,  ayant  à  sa  disposition  tout  l'argent  qu'il 
voulait,  devient  paresseux,  mauvais  siget,  dissipateur  ;  il  joue  ;  il 
mange  une  grande  partie  de  1^  fortune  de  son  oncle,  et  peu  s'en  faut 
qu'il  n'aille  jusqu'au  crime.  Ses  bons  instincts  le  retiennent,  mais  aussi 
son  cousin  Adrien,  pour  lequel  sa  mère  a  refusé  courageusement, 
malgré  sa  position  précaire,  la  séduisante  proposition  de  Toncle. 
Elle  craignait  pour  lui  les  séductions  de  la  richesse,  et  elle  ne  voulait 
pas  abandonner  ces  droits  de  mère  à  un  inconnu.  Ces  devoirs,  elles 
les  accomplit  avec  un  courage  admirable,  apprenant  pour  apprendre 
à  son  âls,  travaillant  pour  lui  jusqu'à  ruiner  sa  santé.  Elle  fut 
largement  récompensée.\Adrien  était  un  excellent  sujet,  répondant 
par  le  travail  et  le  succès  à  tous  les  soins  de  sa  mère,  plein  d'attache- 
ment, de  reconnaissance  et  de  dévouement  pour  elle  :  son  cœur  avait 
pris  toutes  les  qualités  de  celui  de  sa  mère  ;  il  était  aimé  et  estimé 
de  tout  le  monde.  Il  sera  la  ressource  même  des  parents  riches  qui 
l'avaient  d'abord  négligé,  et  qui  ne  devront  qu'à  lui  de  conserver  un 
peu  de  leur  fortune.  Ce  récit  est  très-attachant.  On  y  trouve  de  tou- 
chants épisodes,  et  les  illustrations  en  sont  ravissantes.  Mais  il  y  a  bien 
des  mots  qui  ne'sont  bons  que  pour  les  grandes  personnes.  Pourquoi 
faire  toujours  de  Paris  la  ressource  des  gens  sans  ressources  ?  Quelle 
triste  illusion  on  leur  prépare  !  Pourquoi  toutes  ces  citations  latines, 
l'intervention  de  Cupidon,  de  Vestris,  d'Orphée  aux  Enfers,  de 
Si  j'étais  roi  de  Béotie^  etc.?  Pourquoi  surtout  laisser  mourir  sans 
consolations  religieuses  cette  petite  Madelon,  qu'on  pourrait  bien 
appeler  une  sainte  ? 

-—  Fausse  route  de  M.  J.  Girardin,  comprend  trois  nouvelles,  où  l'on 
retrouve  toutes  les  qualités  qui  ont  déjà,  Tan  dernier^  fait  la  fortune 
des  Braves  gens  et  de  Nous  autres^  du  même  auteur.  M.  Girardin  écrit 
pour  les  enfants,  pour  les  collégiens  qui,  déjà  parvenus  à  Tâge  où  Ton 
peut  connaître  ses  défauts  et  prendre  de  bonnes  résolutions,  n'ont  pas 
encore  dépassé  celui  où  l'on  peut  facilement  s'en  corriger  avec  de  la 
bonne  volonté.  Il  excelle  dans  les  tableaux  de  genre  d'où  se  dégage  une 
leçon  morale.  Les  Souverirs  d'un  Poltron  indiquent  par  le  titre  même. 
qu'il  s'agit  des  malheurs  d'un  enfant  timide  et  craintif;  mais  peu  à  peu  il 
domine  sa  nature,  entre  à  Saint-Cyr,  devient  un  brillant  officier,  l'hon- 
neur et  l'orgueil  de  son  père,  après  qu'il  en  avait  été  presque  la  honte 
par  sa  poltronnerie.  La  Première  faute  est  l'histoire  d'un  autre  petit  gar- 
çon, entraîné  par  trois  mauvais  garnements  dans  une  série  d'aventures 
que  nous  ne  voulons  pas  déflorer  pour  le  lecteur  ;  mais  le  remords  le 
touche  enfin,  et  amène  un  courageux  aveu  qui  lui  rend  l'amour  de  sa 


—  48<  — 

mère  et  Testime  de  ses  connaissances.  Dans  les  Aveux  (fun  égoïste^ 
Tauteor  développe  un  peu  le  même  thème  de  défauts  heureusement 
corrigés  après  avoir  fait  souffrir,  non- seulement  les  enfants^  mais  leurs 
parents  et  amis.  Ce  qui  varie  dans  ces  nouvelles,  ce  sont  les  péripé- 
ties des  petits  drames,  la  peinture  des  caractères;  ce  qui  en  fait  le 
charme,  c'est  le  naturel  du  dialogue,  la  franche  gaîté  du  stjle  et  le 
bon  parfum  d*honnêteté  qui  s'en  exhale. 

—  La  Toute  petite^  de  M.  J.  Girardin,  est^  dès  le  berceau,  Tidole  de 
plusieurs  générations  de  parents,  sans  compterles  collatéraux.  Enfant 
gâtée,  elle  se  corrige  avec  Tâge;  jeune  fille,  elle  a  des  succès  dans  le 
monde.  A  son  bon  cœur,  à  son  excellent  naturel,  les  jeunes  lectrices 
se  reconnaîtront  peut-être  ;  il  est  également  probable  qu'à  chacun  de 
ses  petits  travers,  elles  nommeront  telle  personne  de  leur  connais- 
sance, tant  les  tableaux  sont  pris  sur  le  vif.  Nous  ne  voulons  pas  di- 
minuer l'intérêt  de  cette  charmante  nouvelle  en  disant  comment  elle 
finit.  Par  un  malheur?  Par  un  mariage  ?  On  le  verra.  Mais  à  coup  sûr, 
ce  n'est  pas  par  les  deux  à  la  fois,  quoiqu'il  arrive  souvent  que  les 
deux  ne  s'excluent  pas. 

—  Tom  Brown  est  le  fils  d'un  gentleman  former  qui,  après  avoir 
passé  ses  premières  années  à  la  campagne,  où  il  a  plus  exercé  ses 
muscles  que  son  esprit,  et  fait  ensuite  quelques  études  dans  une  école 
privée,  est  enfin  envoyé  à  la  grande  école  publique  de  Rugby.  Il  j 
mène  la  vie  de  collège,  telle  qu'on  la  comprend  en  Angleterre,  vie  si 
complètement  différente  de  celle  qu'on  mène  dans  nos  lycées  :  vie  en 
plein  air  et  en  pleine  liberté,  où  Técolier  fait  l'apprentissage  de  la 
responsabilité  personnelle,  et  où  les  exercices  du  corps  ont  une  part 
au  moins  égale,  sinon  supérieure,  à  celle  des  exercices  intellectuels. 
Quand  Tom  Brown  sort  de  Rugby,  je  ne  voudrais  pas  garantir  qu'il 
soit  bien  savant,  mais  il  est  très-robuste  et  très-adroit.  Quelles  belles 
parties  de  cricket  et  de  foat  bail  il  sait  faire^  et  quels  regards  d'envie  J^en 
ai  bien  peur,  les  écoliers  français  qui  liront  ce  livre  porteront  à  leur 
camarade  anglais  et  à  ses  jeux  si  libres  sur  les  vastes  pelouses  de 
Rugby,  tandis  qu'eux  sont  tenus  avec  une  si  sévère  discipline,  dans 
dos  cours  étroites,  entre  quatre  murs  noirs  ! 

Dans  le  Moyen  âge  et  ses  institutiom^  M.  Oscar  Havard,  rédacteur 
du  journal  le  Monde,  a  tenté  de  faire  un  tableau  complet  de  cette 
grande  époque  qui,  depuis  quelque  temps,  attire  si  vivement  l'atten- 
tion. L'Église,  l'organisation  gouvernementale,  l'organisation  judi- 
ciaire, l'organisation  militaire,  les  arts,  les  sciences,  la  littérature 
ont  fourni  à  l'auteur  les  principales  divisions  de  son  ouvrage,  qui  for- 
mera pour  les  jeunes  gens  un  utile  complément  à  tous  les  livres  d'his- 
toire. M.  Havard,  mettant  avec  tact  à  profit  les  travaux  des  écrivains 


—  4St- 

les  pltts  compétents,  a  composé  un  volame  instructif  et  intéressant.  Ce 
volume  ofTre^  toutefois,  quelque  lacunes  :  pourquoi  M.  Harard  con- 
sacre-t-il  un  chapitre  à  la  poésie  aUemanâCi  un  autre  chapitre  à  la 
poésie  anglaise,  et  ne  dit-il  rien  de  la  foule  de  poëtes  qui,  en  Espagne 
comme  en  Italie,  se  firent  les  imitateurs  des  troubadours  et  des  trou- 
vères ?  Il  y  avait  lieu  de  rapprocher  le  Poème  du  Cid  de  la  Chanson 
de  Roland,  et  un  regard  un  pou  attentif  jeté  au-delà  des  Pyrénées 
eût  empêché  l'auteur  de  dire  (p.  331)  qu'aprôs  la  France,  T Alle- 
magne fut  incontestablement  le  pays  où  la  poésie  compta  les  plus  nom- 
breux adeptes.  La  ressemblance  des  idiomes,  des  mœurs,  des  origines, 
devait  engager  M.  Havard  à  considérer  avec  plus  de  soin  ce  qui  se 
passait  chez  les  autres  nations  néo-latines,  qu'il  ^est  vraiment  bien 
difficile  de  séparer  les  unes  des  autres,  quand  on  étudie  le  moyen  âge. 
—  On  ne  connaît  guère,  en  général,  les  pays  du  nord.  Sauf  quel- 
ques voyageurs  intrépides,  comme  MM.  Ampère,  Marmier^  Léouzon 
le  Duc,  qui  ont  bravé  les  frimats  et  la  neige^  la  masse  des  touristes  se 
porte  de  préférence  vers  les  pays  de  la  lumière  et  du  soleil.  Et  pour- 
tant, s'il  faut  en  croire  M.  Jules  Leclercq,  c'est  un  beau  et  intéressant 
pays  que  la  Norwége  ;  ses  cjords  ont  un  aspect  imposait  et  étrange, 
ses  habitants  sont  honnêtes  et  hospitaliers.  On  y  trouve  des  rochers 
de  quatre  mille  pieds,  comme  le  Homelen^  des  montagnes  comme  le 
Romsdalshom^  des  cascades  comme  celles  de  Lillehammen,  bien  supé- 
rieures à  celles  du  Giessbach,  des  forêts  splendides,  des  chevaux  infa- 
tigables, et,  ce  qui  n'est  point  à  dédaigner,  au  retour  de  pareilles 
excursions,  de  bonnes  auberges,  non  pas  luxueuses,  mais  propres,  où 
Ton  fait  d'excellente  cuisine.  La  scène  change  bien  un  peu,  il  faut 
Tavouer,  quand  on  arrive  chez  les  Lapons,  pauvre  race  qui  vit  misé- 
rablement et  qui  périrait  sans  les  rennes.  Mais  cette  chétive  race 
elle-même  est  intéressante  à  étudier,  malgré  le  mépris  qu'affectent 
pour  elle  les  vrais  Norwégiens.  M.  Jules  Leclercq,  qui  Ta  vue  de  près, 
donne  sur  elle  de  curieux  détails.  Son  livre  tout  entier,  d'ailleurs,  est 
plein  de  renseignements  peu  connus,  et  nous  sommes  sûr  que  le  jeune 
public  auquel  il  s'adresse  le  lira  avec  plaisir  et  avec  fruit. 

La  Bibliothèque  d^s  merveilles,  publiée  par  la  maison  Hachette, 
s'est  enrichie  de  plusieurs  volumes  d'un  vrai  mérite,  dus  à  des  hommes 
spéciaux  et  fort  distingués.  Qui  mieux  que  M.  Ferdinand  de  Lasteyrie 
pouvait  parler  de  Vorfévrerie  ?  «  Devançant  presque  la  civilisation 
elle-même,  on  voit  cette  industrie,  dès  l'origine  des  sociétés,  con- 
tribuer également  aux  splendeurs  du  culte  et  à  celles  de  la  puissance 
humaine.  »  Le  savant  auteur  nous  initie  à  ses  commencements,  à  ses 
applications  diverses,  depuis  l'antiquité  égyptienne,  grecque,  étrusque, 
jusqu'à  à  nos  jours,  en  suivant  Tordre  chronologique,  et  en  parcoa- 


I  :• 


—  483  — 

rAnt  les  difMrentef  pontréM  deTBarope.  Qik  «tlà,  nous  renoontrons 
des  apprëoiations  historiques  qui  ne  seraient  pas  les  nôtres;  mais  nous 
defons  rendre  hommage  au  talent  et  à  la  compétence  de  Tauteur* 

—  Dans  son  lirre  sur  TAir,  M.  Moitessier,  professeur  à  la  faculté 
de  médecine  de  Montpellier,  analyse  les  différents  phénomènes  qui  se 
passent  dans  l'air,  les  gaz  qui  le  forment.  Il  commence  par  la  matéria- 
lité de  Tair,  dont  il  donne  de  nombreuses  preuves  ;  il  prouve  ensuite 
l'élasticité  de  Tair,  traite  de  la  vapeur  d'eau,  de  la  lumière  et  de  la 
chaleur  dans  l'atmosphère  ;  des  phénomènes  électriques  de  Tatmos- 
phére  et  du  son  dans  Tatmosphère.  Il  étudie  ensuite  la  constitution  chi- 
mique  de  Tair,  qu'il  analyse,  parle  de  Tacide  carbonique,  de  lacombus* 
tion  des  aliments  accidentels  et  des  poussières  de  Tatmosphère,  et  ter- 
mine en  montrant  Taction  de  l'air  sur  les  animaux  et  sur  les  végétaux. 
Cet  ouvrage,  qui  a  quatre-vingt-treize  gravures  sur  bois,  très-soignées, 
se  fait  remarquer  par  sa  clarté  et  par  son  érudition;  mais  nous  y 
avons  constaté  avec  regret  des  tendances  rationnalistes  fort  accusées. 

—  M.  Radau  a  consacré  un  autre  volume  au  magnétisme.  Il  parle 
d'abord  des  aimants,  de  leur  force  et  de  leur  action,  puis  du  magné- 
tisme terrestre,  des  cartes  magnétiques.  Ënfln  il  traite  de  Télectro- 
magnétisme,  dans  un  chapitre  où  il  passe  en  revue  les  actions  des 
courants,  les  électro-aimants,  Tinduction,  les  moteurs  électriques.  — 
Il  y  a  là  beaucoup  de  détails  techniques;  mais  la  clarté  de  Texposition 
et  les  nombreuses  planches  permettent  au  lecteur  de  suivre  avec 
intérêt,  les  notions  réunies  par  Fauteur,  auquel  on  devait  déjà,  dans 
la  mâme  collection,  un  ouvrage  sur  l'acoustique. 

Deux  autres  volumes  nouveaux  de  la  même  bibliothèque,  les  Tapis» 
séries  de  M.  A.  Gastel,  et  les  Voies  souterraines^  de  M.  Maxime 
Hélène,  ne  nous  sont  point  parvenus  à  temps,  pour  que  nous  puissions 
en  parler  plus  amplement. 

Nous  avons  sous  les  yeux  quatre  nouveaux  volumes  de  la  Biblio- 
thèque  rose,  —  Pauline  a  un  caractère  dominant.  Elle  semblait  née 
pour  le  commandement;  elle  est  servie  à  souhait  par  les  circons- 
tances qui  font  partir  sa  mère  pour  les  eaux^  la  laissant,  à  dix  ans,  à 
If.  tête  de  la  maison,  avec  son  père,  et  sous  la  garde  d*une  vieille 
domestique.  Elle  prend  plus  de  plaisir  à  ces  nouvelles  fonctions  qu'à 
ses  devoirs,  mais  elle  ne  réussit  pas  mieux.  Ne  voulant  écouter 
aucune  observation,  elle  commande  à  tort  à  travers;  elle  gaspille 
l'argent  en  provisions  de  ménage,  en  toilettes,  en  mobilier  ;  et,  à  la  fin, 
la  petite  maîtresse  de  maison^  comme  on  l'appelle  en  se  moquant  d'elle, 
s'ennuie  d'être  seule;  elle  tombe  malade.  La  reflexion  vient;  puis 
la  leçon  que  lui  donne  sa  mère,  et  dont  elle  doit  prendre  la  première 
part.  Elle  devient  une  jeune  fille  sérieuse,  toute  à  ses  devoirs,  et, 


—  484  — 

bientôt  après,  une  charmante  jeune  femme.  Blendes  petites  lectrices 
se  trouveront  quelques  traits  de  ressemblance  avec  Pauline.  H  faut 
tout  le  taleiit  de  M"*  Gouraud,  aidée  d'un  habile  dessinateur,  pour  faire 
oublier  Tinvraisemblance  de  la  situation. 

—  Les  espiègleries  d'un  petit  garçon  font  presque  tous  les  frais 
des  Vacances  d'un  grand-père,  de  M""  de  Stolz.  Le  grand-père  est  un 
riche  magistrat  qui  conduit  tous  les  siens,  pendant  le  beau  temps  des 
vacances,  dans  une  terre  quMl  vient  d'acheter  en  Bourgogne.  Georges 
sort  du  wagon,  pendant  que  le  train  marche  en  toute  vitesse  ;  il  a 
failli  faire  renverser  la  diligence  en  tirant  maladroitement  les  rênes 
des  chevaux;  il  saute  d'un  premier;  il  se  fait  mordre  par  un  écureuil  ; 
il  tombe  dans  l'eau,  etc.;  puis  il  a  mille  tours  pour  ses  cousines,  mais  il 
se  fait  tout  pardonner  par  son  bon  cœur.  C'est  la  seule  chose  que  les 
jeunes  lecteurs  devront  imiter  en  lui. 

—  Dans  Plus  tard,  ou  le  jeune  clief  de  famille ^  M'**  Zénaïde  Fieuriot 
a  mis  en  scène  une  famille  de  trois  enfants  qui  ont  perdu  leurs  parents 
et  sont  restés  sous  la  garde  d'une  belle-mère,  laquelle  meurt  à  son 
tour^  laissant  un  testament  en  faveur  des  enfants.  Ce  testament  est 
attaqué  par  les  Darbault,  parents  de  If*  Daubry,  qui  revendiquent  la 
succession.  De  là  procès.  Raoul  Daubry,  le  jeune  chef  de  famille,  y dk 
proposer  un  dernier  arrangement,  le  partage  de  la  fortune  de 
M''"  Daubry.  On  refuse.  Le  procès  va  commencer.  Raoul,  consterné, 
se  rend  chez  un  médecin  qui  a  soigné  sa  belle-mère,  et  qui  est  parent 
de  M.  et  M"**  Darbault.  Il  espère  obtenir  son  appui.  Le  procès  com- 
mence ;  il  est  conduit  lentement,  et  aboutit  à  la  dépossession  complète 
des  trois  orphelins.  La  famille  Daubry  parait  avoir  perdu  pour  jamais 
la  fortune  qui  lui  revenait  de  droit.  Mais  M"^'  Darbault  tombe  grave- 
ment malade;  une  opération  chirurgicale  devient  nécessaire.  On 
demande  le  docteur  Guerblier,  qui  se  fait  longtemps  prier,  et  n'ae- 
cepte  que  moyennant  cent  mille  francs^  dont  il  gratifie  la  famille 
Daubry. 

.  —  Nous  regrettons  de  ne  pouvoir  faire  autre  chose  que  de  signaler 
les  Dettes  de  Ben  Aissa,  par  M"*  Marie  Maréchal^  que  nous  n'avons  pas 
encore  sous  les  yeux. 

—  Terminons  en  annonçant  les  albums  nouveaux  dont  s'est  enrichi 
le  Magasin  des  petits  enfants,  publié  parla  maison  Hachette.  Voilà  des 
gravures,  enluminées  devant  lesquelles  les  babies  vont  se  pâmer  d'aise, 
et,  en  se  reportant  au  texte,  en  gros  caractères,  qui  les  accom- 
pagne, chacun  voudra  hâter  le  moment  où  les  yeux  ne  s'arrêteront 
pas  seulement  aux  images,  mais  s'assimileront  en  même  temps  le  déso- 
pilant  et  instructif  commentaire  qui  accompagne  les  Deux  mauvais 
plaisants,  Nos  passe-temps,  les  Amis  de  la  maison,  ou  les  merveilleuses 
histoires  d'Aladdin  et  du  Nain  jaune ,  Visemot. 


—  483  — 

THÉOLOGIE 

Das  Eieben  unsere  lleben  Herra  undl    Hell Andes  ^esue« 
CbrlstuB  und  «einer  Jun^lVaûIichen   Mutter  Maria,  zum 

Vnterricht  xmd  zur  Erbaung  im  Sinne  und  Geùte  des  ehrw,  P.  Martin  von 
Cachem  (La  vie  de  Notre  cher  Seigneur  et  Sauveur  Jésus-Christ  et  de  sa  virginale 
mère  Marie^  ouvrage  d^instruetion  et  cPédification,  d'après  le  P.  Martin  von 
Cochem)y  dargestellt  von  L.  C.  Bcsinghr,  RegeDs  des  bischûfl.  Seminar  in 
Solothnrn,  gew.  Pfarrer  in  Arlesheim.  Troisième  édition,  avec  une  intro- 
duction, par  S.  Grandeur  le  D' Cari  Joseph  Greith,  évéque  de  Saint-Gai],  et 
avec  les  approbations  de  son  Éminence  le  cardinal  Joseph  Othmar  von 
Rauscher,  prince-archevêque  de  Vienne,  de  son  Éminence  le  cardinal  Maxi- 
milien  von  Tarnoczy,  prince-archevêque  de  Salzsbourg  et  de  Leurs 
Grandeurs  les  archevêques  et  évêquesde  Munich-Frisingen,  Cologne, 
Breslau,  Brixen,  Leibach,  Seckau,  Majence,  Augsbourg,  Rottenbourg, 
Paderborn,  Trêves,  Eichstadt,  Ermlànd,  Munster,  Goire,  Bâie,  Saint-Gall, 
Cincinnati^  Cavington,  la  Crosse,  Fort  Wayne,  Marquette,  Milwaukee  et 
Savanah.  —  Einisedelm,  New  York  et  Cincinnati,  Cari  et  Nicolas  Benziger, 
«875.  In-4  de  xvi-lOSO  p.  —  Prix  :  15  fr. 

Ce  magnifique  ouvrage  est  une  véritable  Bible  de  famille,  imprimée 
en  beaux  caractères,  illustrée  de  deux  chromo-lithographies,  et  Je  plus 
de  cinq  cents  gravures  et  vignettes,  dans  le  texte  et  hors  texte,  em- 
pruntées en  partie  aux  plus  grands  maîtres.  Les  parents  qui  font  ap- 
prendre l'allemand  à  leurs  enfants  ne  peuvent  leur  donner  des  étrennes 
plus  belles  et  plus  utiles  que  cette  Vie  de  Notre-Seigneur.  Elle  comprend 
six  parties,  qui  en  font  un  livre  de  religion  complet.  La  première  est  la 
Préparation  générale  à  la  venue  de  Notre-Seigneur.  Elle  fait  con- 
naître Dieu  et  le  mystère  de  la  Sainte-Trinité,  la  création  et  la  chute 
des  anges,  l'Œuvre  des  six  jours^  dans  laquelle  tous  les  phénomènes 
de  la  terre  et  du  ciel  et  toutes  les  espèces  des  créatures  sont  décrites 
d*une  manière  très-intéressante,  la  chute  de  l'homme,  et,  en  un  mot, 
toute  Thistoire  sainte  jusqu'à  Hérode.  Après  un  chapitre  sur  Tempire 
romain  et  Tétat  du  monde  sous  le  gouvernement  d'Auguste,  l'auteur 
passe  à  la  seconde  partie  :  la  Préparation  immédiate  à  la  venue  de 
Notre-Seigneûr.  Elle  raconte  Thistoire  des  parents  de  la  sainte 
Yierge  et  de  Marie  elle-même,  jusqu'à  la  naissance  de  Jésus-Christ. 
La  troisième  partie  a  pour  objet  la  nativité,  l'enfance  et  la  jeunesse 
de  Notre-Seigneur.  Le  mystère, de  Noël  est  étudié  en  quelque  sorte 
sous  toutes  ses  faces,  avec  un  tel  amour,  quUl  semble  que  Fauteur  ne 
puisse  le  quitter.  Il  conduit  lentement  le  lecteur  à  Bethléem,  et  là  il 
lui  fait  considérer  successivement  Tétable,  la  crèche,  Tépoque,  Tannée, 
le  mois,  le  jour^Theure  de  la  nativité  ;  il  le  fait  assister  aux  hommages 
rendus  à  l'Enfant- Dieu  par  les  anges  dans  ciel,  par  les  bergers  sur 
la  terre,  par  les  justes  dans  les  limbes,  par  les  mages  et  par  l'enfer 
même;  enfin  par  les  chrétiens  dans  nos  églises  et  au  foyer  de  la 


—  486  — 

famille.  La  circonoision,   la  présentation  au    temple,   la  faite   en 
Egypte,  le  retour  en  Palettioe,  la  voyage  à  Jérusalem  à  Tâge  de 
douze  ans  et  la   mort    de    saint  Joseph  remplissent  le   reste   de 
cette  troisième  partie.  La  quatrième  partie  comprend  la  vie  pablique 
et  renseignement  de  Notre-Seigneur,  c^est-à-dire,  la  prédication  de 
saint  Jean-Baptiste  qui  en  est  la  préparation  immédiate  et  tooA  les 
actes  et  les  discours  du  Sauveur,ju8qu'à  sa  passion,  laquelle  forme^aveo 
sa  mort,  la  cinquième  partie.  La  sixième  partie  est  la  glorification  et  la 
vie  permanente  de  Jésus-Christ  dans  son  église.  Notre-Seigneur  est 
ressuscité,  et  il  ne  meurt  plus.  Les  missionnaires  l'ont  fait  connaître 
dans  l'univers  entier,  il  nous  instruit  toujours  par  ses  docteurs  et  ses 
pontifes,  11  est  représenté  par  le  pape,  il  vit  dans  nos  âmes  par  ses 
sacrements,  il  manifeste  ses  vertus  par  les  ordres  religieux  et  par  ses 
saints,  il  triomphe  des  persécutions  et  des  hérésies,  il  triomphera 
enfin  au  jugement  îlernier.  Cette  sixième    partie  est  un  résumé 
complet  de  théologie  et  an  abrégé  de  l'histoire  de  TEglise.  L'ouvrage 
se  termine  par  une  table  indiquant  les  lectures  qu'on  peut  faire  tous  les 
dimanches  et  joars  de  fêtes  de  l'année.  Il  est  plein  de  doctrine,  écrit 
avec  foi  et  avec  piété,  avec  simplicité  et  en  même  temps  avec  la  no- 
blesse qui  convient  au  scget,  de  telle  sorte  qu'il  est  à  la  porté  de  toutes 
les  intelligences.  La  première  et  la  sixième  parties  sont  entièrement 
neuves  :  les  autres  parties  sont  un  remaniement  complet  de  la  célèbre 
Vie  et  Passwn  de  JésuB-Christ  et  de  m  glorieuse  mère  Marie^  par  le 
religieux  franciscain  Martin  von  Gochem,  qui  la  commença,  il  j  a  deux- 
cents  ans,  en  1675.  Quelques  lecteurs  regretteront  peut-être  qu'on 
ait  admis  des  éléments  légendaires  dans  cette  Fie,  qui  aurait  gagné 
à  être  rigoureusement  historique;  mais  ils  reconnaîtront  du  moins, 
comme  Ta  dit  M**  Hefele,  que  les  légendes  acceptées  sont  très-poé- 
tiques et  ont  un  caractère  très-édifiant.  G.  K. 


divine  synthèse,  ou  Vexposé,  au  double  peint  de  vue  apologétique  et 
pratique  de  la  religion,  par  Mr  Guilbert,  évéqoe  de  Gap.  Paris,  Pion  et 
Douniol,  1875.  Trois  yoL  in-S  de  xiv-337,  296  et  282  p.—  Prix  :  18  fir. 

Il  Que  d'hommes  instruits,  très-savants  même,  dans  les  différentee 
branches  des  connaissances  humaines  en  droit,  en  médecine,  en  ma« 
thématiques,  en  littérature  et  qui  ne  savent^  en  matière  religieuse, 
que  ce  qu'ils  ont  appris  dans  leur  enfance  sur  les  genoux^de  leur 
mère,  quand  ils  ne  Font  pas  oublié  !..  Même  parmi  ceux  qui  sont  sin- 
cèrement attachés  à  la  religion  et  qui  la  pratiquent,  beaucoup  ne  la 
connaissent  qu'imparfaitement  et*  n'en  ont  souvent  que  des  idées 
inexactes  et  incomplètes.  Bien  peu  se  sont  rendu  compte  du  merveil* 
leux  enchaînement  de  ses  preuves  et  de  tout  ce  qu'il  7  a  de  divin  et  de 
futur  en  elle  (p.  ix).  *«  Ces  réflexions  si  judicieuses,  par  lesquelles 


—  4R7  — 

M"  révoque  de  Gap  ouvre  les  trois  précieux  volumes  que  nous  annon- 
çons, nous  font  pressentir  le  but  qu'il  s'est  proposé  en  les  écrivant.  Il 
s'agit  de  mettre  à  la  disposition  des  gens  du  monde,  qui  ignorent  les 
preuves  de  la  religion  ou  les  connaissent  mal,  un  exposé  oomplet  et 
substantiel  de  ces  preuves  ;  sans  doute,  on  a  beaucoup  écrit  à  ce  sujet, 
et  cependant,  a  plus  d'une  fois,  nous  dit  le  vénérable  auteur,  —  et  quel 
prêtre  un  peu  versé  dans  le  ministère  ne  le  répétera  après  lui^  — plus 
d'une  fois  nous  avons  été  fort  embarrassé  pour  indiquer  à  des  laïques 
sérieux,  comme  il  en  est  beaucoup,  qui  désirent  franchement  s'ins- 
truire de  la  religion»  un  livre  court  et  complet  pour  répondre  au 
besoin  actuel  des  intelligences,  n 

Ce  livre  court  et  complet,  M*'  l'évêque  de  Oap  a  entrepris  de  le 
faire,  et,  à  notre  avis,  il  a  pleinement  réussi.Son  livre  est  bien  véritable- 
ment une  «synthèse  »  de  toutes  les  vérités  que  Dieu  même  nous  a  ensei- 
gnées. Il  commence  par  présenter  toutes  les  preuves  du  fait  historique 
de  la  révélation  :  c'est  la  base  nécessaire  et  première  de  toute  apologie 
du  christianisme;  mais  ce  ne  serait  pas  assez,  on  le  voit  bien  tous  les 
jours,  quand  on  essaye  d'amener  une  âme  à  la  foi^  de  prouver  que  le 
fait  miraculeux  de  l'établissement  do  christianisme  est,  de  toutes  les 
choses  historiques,  la  mieux  établie  ;  on  n'aurait  pour  ainsi  dire  rien 
gagné  si  on  ne  montrait  encore  comment  toutes  les  promesses  que 
Jésus-Christ  a  faites  il  les  a  tenues^  comment  il  est  réellement,  dans 
l'ordre  pratique,  «  la  voie,  la  vérité,  et  la  vie.  » 

Le  seeond  volume  et  la  première  partie  du  troisième  sont  consacrés 
&  faire  voir  dans  la  doctrine  du  Père  étemel.  Dieu  et  homme  tout  en- 
semble,toutes  les  vérités  dont  l'homme  a  besoin  et  pour  cette  vie  et  pour 
l'autre  :  vérités  sur  Dieu,  sur  le  monde  sur  l'homme  individuel,  sur 
l'homme  en  société,sur  lemojende  conserver  et  de  développer  en  nous 
la  vie  divine,  M"'  Guilbert  montre^  en  effet,  comment  les  décou- 
Tertes  les  plus  modernes  de  la  science,  sur  la  constitution  du  monde 
physique,  par  exemple,  rentrent  tout  naturellement  et  sans  effort, 
loin  de  les  contredire,  dans  le  cadre  des  doctrines  révélées.  Ce  n'est 
pas  lui  qui  8*effrayera  de  Thypothèse,  si  vraisemblable,  de  la  vie  dans 
les  astres,  vie  douée  comme  la  nôtre  d'intelligence  et  de  volonté  et 
consacrée  à  la  gloire  de  Tunique  Créateur  (v.  2.  ii  p.  138  et  suiv).  Il 
ne  s^effraye  pas  davantage  des  prétendues  démonstrations  élevées 
contre  la  Bible,  au  nom  de  la  paléontologie  et  de  la  géologie,  et  il  fait 
bien  voir,  ce  que  trop  de  catholiques  ignorent,  que  les  affirmations  les 
plus  tranchantes  de  la  science  anti-chrétienne  ne  reposent  que  sur  des 
conjectures  et  des  hypothèses,  et  que  ces  hypothèses  fussent-elles 
prouvées  les  conclusions  qu'on  en  tire  contre  la  doctrine  catholique, 
seraient  encore  dénuées  de  fondement  sérieux. 

La  dernière  partie  de  Touvrage,  qui  est  de  beaucoup  la  plus  courte 


—  488  — 

et  qui  porte  le  titre  d'épilogue,  est,  pour  parler  comme  l'auteur, 
((  la  contre-épreuve  de  la  divine  synthèse  (m.  188).  »  C'est  une  revue 
rapide  et  une  réfutation  également  contre  des  cultes  prétendus  ré- 
vélés, depuis  le  polythéisme  jusqu'au  protestantisme,  et  des  doctrines 
physiques  anti-chrétiennes  qui  prétendent  aujourd'hui  supplanter 
toute  révélation  :  déisme,  panthéisme,  positivisme  et  matérialisme. 
Évidenunent  la  force  de  cette  réfutation^  quelque  nette  et  péremptoire 
qu'elle  soit,  est  principalement  dans  les  deux  premières  parties,  con- 
sacrées aux  preuves  et  au  développement  de  la  vérité  chrétienne  :  les 
erreurs  ici  tranchées  rapidement  étaient  déjà  réfutées  par  avance. 

Tel  est  ce  livre,  précieux  pour  les  laïques  désireux  de  s'instruire  de 
rensemhle  de  la  religion,  précieux  pour  les  prêtres  qui  ont  à  chaque 
instant  besoin  d'indiquer  un  résumé  solide  de  l'apologétique  à  ceux 
qui  les  interrogent.  L'ouvrage  de  M^  de  Gap  répond  à  merveille,  par 
sa  simplicité,  sa  clarté  et  sa  précision, au  but  qu'il  s'était  proposé. 
Quelque  court  que  soit  un  travail  qui  touche  à  toutes  les  preuves  de 
la  religion,  l'auteur  est  parfaitement  en  droit  d'inviter  son  lecteur  à 
conclure  avec  lui  en  ces  termes  :  > 

«  S'il  est  au  ciel  un  Dieu  qui  ne  soit  pas  indifférent  aux  intérêts  de 
la  vérité,  a-t-il  pu,  sans  pactiser  avec  l'erreur,  sans  se  rendre  lui- 
même  complice  des  mensonges,  laisser  s'établir  sur  des  bases  aussi 
solides  une  religion  qui  ne  serait  pas  la  véritable,  et  supposé  qu'il 
lui  ait  plu  d'imposer  à  l'homme  une  religion  positive  et  révélée,  est-il 
possible  d'exiger  de  lui  davantage  :  pouvait-il  l'entourer  de  plus  de 
lumière  et  lui  donner  plus  de  fécondité  (t.  III,  p.  209)  ?  » 

Oserons-nous,  en  terminant,  nous  plaindre  de  ce  que  le  vénérable 
auteur  ait  mis  en  trois  volumes  ce  qui,  manifestement,  tiendrait  dans 
un  seul  tome  un  peu  compact.  Cette  dernière  forme  seray>nous  l'espé- 
rons, adoptée  pour  les  éditions  subséquentes.  Les  livres  de  cette  nature 
ne  sauraient  être  d'un  format  trop  commode  et  trop  économique. 
Nous  souhaitons  à  ce  résumé  substantiel  le  plus  de  circulation  pos^ 
sible  ;  or,  pour  atteindre  un  tel  but,  rien  n'est  moins  indifférent  que  le 
format  et  le  bon  marché.  L.  Lescœur, 

' prêtre  de  rOratoire. 

JURISPRUDENCE 

Xraité  do  rextradltion,  suivi  d'un  recueil  de  docuimerUs  étrangers 
et  des  conventions  d'exinidition  conclues  par  la  France,  et  actuellement  en 
vigueur j  par  A.  Billot.  Paris,  Pion,  1875.  Gr.  in-8  de  582  p.—  Prix  :  7  fr.  50. 

L'extradition  est  l'acte  par  lequel  un  État  livre  un  individu  accusé 
ou  reconnu  coupable  d'une  infraction  commise  hors  de  son  territoire 
à  un  autre  État  qui  le  réclame  et  qui  est  compétent  pour  le  juger 
et  le  punir. 


—  489  — 

I  Sur  cette  définition,  l'auteur  se  base  pour  mettre  en  relief  les  trois 
éléments  dont  la  réunion  est  nécessaire  pour  qu'il  j  ait.  extradition  : 
d*abord  un  individu  accusé  ou  reconnu  coupable  d'une  infraction , 
ensuite  un  Etat  compétent  pour  le  juger  et  le  punir,  enfin  un  autre 
État  sur  le  territoire  duquel  Tindividu  réclamé  s'est  réfugié,  qui  a 
statué  sur  la  demande,  et  y  fait  droit. 

L'extradition,  en  tant  qu'on  Tenyisage  dans  son  sens  juridique,  est 
un  contrat:  de  là  l'examen  du  jurisconsulte,  en  fait  d'extradition,  doit 
surtout  porter  sur  la  nature  de  ce  contrat,  et  les  conditions  requises 
pour  sa  validité.  L'étude  de  ces  conditions  est  le  fonds  de  cette  inté- 
ressante étude  qui  embrasse  tous  les  aspects  de  ce  point  si  intéres« 
sant  de  notre  droit  international. 

Les  développements  qui  suivent  Texposé  des  principes  offrent  d'au- 
tant plus  d'intérêt,  que  le  droit  d'extradition  est  moderne,  et  que  le 
mot  même  est  nouveau  dans  la  langue  juridique.  Les  relations  de  la 
France  avec  les  puissances  étrangères,  ayant  pour  objet  spécial  l'extra- 
dition^ ne  sont  pas  antérieures  au  dix-huitième  siècle,  et  se  sont  sin- 
gulièrement développées  dans  les  trois  premiers  quarts  du  siècle 
actuel.  Il  est  intéressant  de  suivre  dans  leurs  développements  succes- 
sifs ses  minutieuses  garanties.  Après  cet  examen  historique,  et  par- 
fois politique,  nous  voyons  se  déterminer,  d'une  part,  les  personnes 
passibles  de  l'extradition^  de  l'autre,  les  actes  qui  peuvent  y  donner 
lieu,  enfin  sa  procédure  et  ses  effets. 

Ce  sont  là  autant  de  points  de  vue  qui  apparaissent  avec  une 
physionomie  marquée  d'un  véritable  cachet  de  nouveauté.  La  codifi- 
cation des  règles  de  l'extradition  est  un  sol  neuf,  en  quelque  sorte 
conquis  par  la  science  du  droit. 

Les  divers  aspects  de  cette  question  sont  tellement  approfondis 
dans'ces  pages,  les  documents  internationaux  sont  si  minutieusement 
recueillis,  que  l'auteur  peut  revendiquer  le  mérite  rare  d'avoir  recueilli 
le  «premier  des  documents  jusqu'ici  épars  et  sans  unité.  A  ce  titre,  ce 
livre  s'impose  à  l'attention  de  tous  ceux  qui  auront  désormais  à  s'oc- 
cuper de  l'extradition,  au  point  de  vue  de  la  justice  aussi  bien  que  de 
la  politique.  A.  de  Ricubcour. 


KMal  sur  les  Institution»  Judiciaire»  civile»  en  droit 
romain»  en  Vrance  et  en  Roumanie^  par  Vladksco  (Alexandre). 
Paris,  Larose,  1875.  Gr.  in-8  de  330  p. 

Après  une  étude  soigneuse  et  bien  raisonnée  sur  les  institutions 

civiles  de  l'ancienne  Rome  et  sur  celles  de  la  France^  M.  Vladesco 

aborde  l'histoire  de  ces  institutions  dans  son  pays  :  c'est/  pour  nous, 

la  partie  la  plus  intéressante  du  livre. 

Pendant  plus  de  cinq  siècîes,  dit-il,  le  pays  se  gouverna  d'après  les 

Décembre  1875.  T.  XV,  32. 


—  490  — 

principes  du  droit  romain,  oombinés  avec  certaines  règles  ou  coutumes 
empruntées  à  la  féodalité.  Les  pouvoirs  administratif  et  judipiaire 
étaient  confondus  et  exercés  par  le  même  fonctionnaire,  délégué  du 
prince.  Les  jugements  étaient  rendus  au  nom  du  prinoOf  lequel  nom^ 
malt  et  révoquait  à  son  gré  les  personnes  chargées  de  rendre  la  justice. 
Le  souverain  était  lui-même  le  premier  magistrat  du  pajs  et  le  seul 
qui  jugeât  en  dernier  ressort.  Il  n'y  a  là  rien  de  particulier  à  la  Rou- 
manie ;  mais  M.  Vladesco  si^ale  une  circonstance  qui  mérite  d*(^ppe- 
1er  l'attention,  et  voici  en  quels  termes  :  «  un  arrêt  rendu  en  dernier 
ressort  par  le  souverain  pouvait  être  attaqué  devant  le  prince  qui 
lui  succédait.  Celui-ci  renvoyait  la  chose  jugée  à  son  conseil  ;  le 
conseil  Texaminait  et  faisait  un  rapport  au  princOi  en  lui  den^andant 
soit  d'infirmer,  soit  de  maintenir  l'arrêt  déjà  prononcé  par  son  prédé- 
cesseur. Ce  second  arrêt  pouvait,  à  son  tour,  être  attaq^é  delamêm^ 
manière  que  le  premier  devant  u^  troisième  prince,  et  ce  n*eat  que 
Tarrêt  rendu  par  celui-ci  qui  donnait  au  jugement  un  caractère  défl^ 
nitif  et  inattaqué.  » 

J'indiquerai  aussi,  oonune  tout  à  fait  spécial  à  la  Roumanie,  Texis- 
tence  dans  la  capitale  de  la.  Valachie  d'un  tribunal,  composé  de  trois 
membres,  qui  jugeait  les  différends  entre  étrangers  et  indigènes.  Co 
tribunal  était  présidé  par...  le  ministre  des  affaires  étrangères.  Voilà 
une  organisation  qui  paraîtra  à  bien  des  gens  tout  à  fait  bizarre. 
C'était,  cependant,  très-sage  et  très-pratique.  Les  différends  avec  les 
étrangers  n'étaient  pas,  à  cette  époque,  très-nombreux;  mais,  alors 
comme  aigourd'hui,  ils  entraînaient  des  conflits  avec  la  cour  suzeraine 
et  avec  les  Etats  voisins.  La  situation  des  étrangers  était  réglée,  en 
grande  partie,  par  des  capitulations  ou  des  coutumes  internationales. 
Qui  était  plus  propre  que  le  ministre  des  affaires  étrangères  à  résoudre 
pacifiquement  de  telles  causes,  à  empêcher  qu'on  victimât  ceç  étran- 
gers, à  protéger  les  nationaux  contre  leurs  empiétements? 

Le  Règlement  organique  de  1832  a  intronisé  dans  les  principautés 
un  régime  mixte,  qui  a  été  remplacé  de  nos  jours  par  une  organisation 
analogue  à  celle  de  la  France.  La  justioe  laisse  encore  à  désirer  en 
Roumanie,  mais  elle  est  en  progrès.  A.  A. 


SCIENCES  ET  ARTS 

crUlcfue  sur  la  pbllosoplile  de  Mulnt  Aiiselaie  de 
Cantorbéry,  par  M.  Tabbé  Van  WEDDmeBN,  docteur  en  philosoptûe  et 
en  théologie,  aumônier  de  la  Cour.  Bruxelles,  F.  Hayez,  i875.  In-8  de 
vi-408  p. 

L'Académie  royale  de  Belgique  avait  inscrit  la  question  suivante 
dans  son  programme  de  concours  pour  Tannée  1874  :  •—  •<  Exposer 


—  49!  — 

aveo  détails  la  philosophie  de  saint  Anselme  de  Cantorbéry  ;  en  faire 
eonnattre  les  sources  et  en  montrer  Tinfluenoe  dans  l'histoire  des 
idées.  »  —  Un  jeune  docteur  de  Tuniverslté  catholique  de  Louvain, 
M.  Tabbé  Van  Weddingen,  a  reçu  le  prix  proposé  pour  le  meilleur 
travail  sur  cette  question,  et  la  publication  de  son  mémoire  justifie 
pleinement  Thonneur  que  lui  ont  décerné  les  juges  du  concours. 

La  dialectique  de  saint  Anselme,  —  ses  vues  sur  la  métaphysique 
générale  et  ndéologie,  —  sur  la  nature  de  la  substance  physique,  sur 
la  théodicée,  —  sur  les  rapports  de  la  philosophie  et  de  la  théologie, 
—  y  sont  exposées  et  discutées,  en  cinq  chapitres,  avec  Thistoire  des 
controverses  nombreuses  auxquelles  ces  doctrines  ont  donné  lieu  jus- 
qu'à nos  jours. 

Un  des  représentants  les  plus  distingués  de  la  philosophie  rationa- 
liste  dans  notre  pays,  M.  P.  Janet,  a  reconnu  et  déclaré  loyalement 
que  tous  les  écrits  publiés  jusqu'ici,  sur  la  philosophie  de  saint  An- 
selme, étaient,  non-seulement  résumés  avec  une  lucidité  pénétrante, 
mais  surpassés  par  cette  œuTre  d'un  jeune  prêtre^  dont  les  premiers 
succès  doivent  inspirer  aux  catholiques  une  vive  sympathie  et  les 
meilleures  espérances. 

M.  l'abbé  Yan  Weddingen  unit  évidemment,  dans  une  rare  mesure, 
l'ardeur  patiente  des  érudits  allemands,  avec  la  clarté  naturelle  des 
bons  écrivains  français.  Son  livre  révèle  les  aptitudes  les  plus  dési- 
rables pour  les  travaux  philosophiques  et  historiques.  Puisse-t-il 
avoir,  dans  notre  jeune  clergé,  non*8eulement  des  lecteurs,  mais  des 
émules  nombreux!  H.  bb  VALaoGBB, 

de  rOratoire. 

Influence  de  la  pression  de  l*alr  sur  la  vie  de  I*liomme,  — 

Climats  d'altitude  et  cUmats  de  montagne^  par  D.  Jouadanet,  docteur  en 
médecine,  chevalier  de  la  Légion  d*honneur.  Paris,  G.  Masson»  1875.  2voI. 
gr.  in-8  de  ui-390-425  p.  avec  37  gravures,  3  chromolithographies  et 
8  cartes  en  couleur.  —  Prix  :  30  fr. 

Tout  le  plan  général  de  Fauteur  est  indiqué  par  ces  mots  de  sa 
préface  :  «  J'ai  formé  le  dessein  d'étudier  les  effets  de  la  pression  de 
l'air  sur  la  vie  de  Thomme  et  sur  la  marche  des  maladies  dont  il  est 
atteint  le  plus  communément.  »  La  pression  de  Tair  pouvant  d'ailleurs 
être  appréciée  au  double  point  de  vue  de  Tobservation  et  de  la  phy- 
siologie expérimentale^  le  D' Jourdanet  ne  prétend  s'occuper  particu- 
lièrement dans  son  ouvrage  que  «  des  conditions  faites  à  l'habitant 
des  altitudes  par  une  atmosphère  raréfiée,  »  et  il  s'est  inspii^â  pour 
cela  d'un  principe  passé  pour  lui  à  l'état  d'axiome,  à  savoir  que  a  la 
vraie  nature  des  influences  extérieures  se  juge  bien  mieux  par  let 
maladies  qu'elles  causent  à  l'homme,  que  par  la  santé  dont  elles  le 
favorisent.  » 


—  492  — 

Il  semble  donc  que  nous  n'ayons  devant  les  yeux  qu'un  ouvrage  de 
pathologie  ;  mais  le  savant  auteur  est,  en  même  temps  qu'un  praticien 
distingué,  in  littérateur  et  un  écrivain,  un  philosophe  et  un  artiste 
non  moinâ  éminent,  et  c'est  pourquoi  son  livre  s'adresse,  non  pas  seu- 
lement à  un  groupe  de  lecteurs  techniques,  pour  ainsi  dire,  mais  à  la 
foule  de  tous  ceux  que  peuvent  intéresser  l'histoire^  les  sciences  na- 
turelles, les  voyages,  etc. 

Essayons,  malgré  notre  incompétence  professionnelle  sur  quelques 
parties  spéciales  de  ce  remarquable  ouvrage,  d'en  donner  une  idée  qui 
en  provoque  la  lecture  et  rétude;et,  pour  en  finir  tout  de  suite  avec  le 
côté  accessoire,  mais  néanmoins  très-soigné  de  cette  publication, 
constatons  qu'elle  est  splendidement  ornée  de  portraits,  de  gravures, 
de  cartes,  et  qu'elle  se  place  ainsi  au  rang  des  plus  beaux  ouvrages 
sortis  des  presses  consacrées  aux  livres  illustrés. 

La  nature  de  ce  recueil  et  l'espace  dont  nous  disposons  ne  nous 
permettent  d'ailleurs  de  présenter  ici    qu'un  résumé  très-succinct. 

L'ojivrage  comprend  cinq  parties  et  un  appendice.     « 

La  première  partie  est  consacrée  aux  études  barométriques  préli- 
minaires ;  l'histoire  des  premières  observations  et  expériences  sur  la 
pesanteur  de  l'air  depuis  Âristote  jusqu'à  Lavoisier,  en  passant  par 
Epicure,  Galilée,  Toricelli,  Pascal^  Otto  de  Ouericque,  Mariette  et 
Priestley,  en  occupe  le  premier  chapitre,  tandis  que  le  second  rap- 
porte les  observations  sur  la  température  des  hauts  niveaux  due  aux 
aéronautes  (art.  1*')  et  aux  ascensionnistes  (art.  2.),  et  en  déduit  les 
lois  générales  de  météorologie  et  d'hygrométrie.  L'auteur,  dans  le 
chapitre  m,  intitulé  les  Révolutions  de  Patmosphère  et  les  âges  baromé- 
triques^  étudie  la  température  et  la  pression  de  l'air  aux  âges  préhisto- 
riques et  aux  époques  modernes.  Sa  conclusion,  opposée  à  celle 
de  F.  Arago,  c'est  que  la  telnpéra^ure  s'est  élevée  sur  le  globe  de 
puis  les  temps  glaciaires. 

La  deuxième  partie,  qui  occupe  300  pages  du  premier  volume,  est 
fort  intéressante  et  instructive  ;  elle  traite  des  Climats  des  altitudes. 
C'est  la  synthèse  d'un  nombre  prodigieux  de  recherches  et  d'observa- 
tions dont  la  plupart  sont  dues  au  D'  Jourdanet  lui-même.  Après  les 
considérations  géographiques  du  premier  chapitre,  vient  l'exposition 
des  travaux  et  des  résultats  acquis  sur  les  altitudes  de  l'Asie  centrale, 
Himalaya,  Thibet  (chap.  ii),  de  l'Amérique  méridionale  (chap.  ni) 
et  du  Mexique  (chap.  iv).  Les  chapitres  v  et  vi  sont  consacrés  à 
l'exposé  des  expériences  du  D'  Bert  sur  l'origine,  les  variations  et  les 
effets  de  la  pression  barométrique.  Avec  le  chapitre  vu,  nous  rentrons 
dans  la  description  des  voyages,  ascensions,  expériences  diverses 
d'Ardoz,  du  jésuite  Acosta,  de  La  Condamine,  de  Saussure,  de  Hum- 
boldt,  de  Beaupland,  de  Boussingaiilt,  etc.,  etc...;  ce  chapitre  est  du 


-.  493  — 

plus  haat  intérêt  :  il  présente,  dans  un  dernier  article,  de  curieuses 
considérations  physiologiques  sur  le  mal  de  montagne,  sujet  continué» 
dans  le  chapitre  suivant,  lequel  s^étend  sur  les  difficultés  de  racclimata* 
tien  à  certaines  altitudes,  sur  la  respiration^  le  développement  du 
thorax,  la  circulation  du  sang  et  la  calorification  des  habitants  des 
hauts  niveaux.  Les  deux  chapitres  suivants  traitent  de  l'influence  de 
ces  hauts  niveaux,  jugée  par  les  statistiques  mexicaines,  fruits 
des  voyages  et  travaux  personnels  de  Fauteur. 

Le  deuxième  volume  comprend  lestrois  dernières  parties  et  l'appen- 
dice :  dans  la  troisième  partie,  le  D' Jourdanet  se  place  exclusivement 
sur  le  terrain  professionnel  et  étudie  les  influences  pathologiques  des 
altitudes  sur  diverses  maladies,  notamment  sur  Tanémie,  la  phthisie, 
la  fièvre  jaune  et  le  typhus,  les  maladies  de  l'enfance,  les  fièvres  in- 
flammatoires et  éruptives,  les  fièvres  paludéennes,  etc.  Un  intéressant 
chapitre  est  consacré  à  Victor  Jacquemont,  mort  comme  on  sait  des 
suites  d'une  longue  et  douloureuse  maladie  contractée  dans  les  alti- 
tudes. Après  avoir  étudié  dans  la  deuxième  partie  le  climat  des  alti- 
tudes, l'auteur  s'occupe^  dans  la  quatrième,  du  climat  des  montagnes 
et  de  son  influence  morale  et  physique  sur  les  habitants  (maladies 
.  chroniques,  scrofules,  goitres,  etc.).  De  nombreux  tableaux  statistiques 
résumant  les  observations  de  toute  espèce,  ajoutent  un  grand  intérêt 
à  cette  partie  du  travail  du  D'  Jourdanet,  qui  aboutit  à  cette  conclu- 
sion que  «  les  actions  favorables  de  la  montagne  sont  partout  évidentes 
chez  les  sujets  qui  viennent  de  la  plaine,  d  De  là,  l'utilité  d'une  étude 
sur  les  effets  des  transitions,  et  tel  est,  en  effet,  l'objet  de  la  cinquième 
partie.  L'action  des  transitions  barométriques  naturelles  une  fois 
constatée  par  l'observation  des  faits  physiologiques  et  pathologiques, 
ne  peut-on  en  tirer  un  parti  efflcace  pour  le  traitement  de  certaines 
affections  au  moyen  de  transitions  barométriques  artiflcielles  ?  C'est  ce 
que  l'auteur  appelle  l'aéroihérapie  ou  application  de  l'air  à  la  théra- 
peutique ;  il  y  consacre  un  dernier  chapitre  qui  n'est  d'ailleurs  qu'un 
rapide  exposé  des  principales  vérités  servant  de  bases  à  son  traité 
complet  d'aérothérapie,  actuellement  en  préparation. 

Dans  l'appendice,  l'auteur  présente  le  résumé  succinct  des  principaux 
effets  physiologiques  dus  aux  variations  dans  la  pression  de  l'air  sur 
Touïe,  la  peau,  la  respiration,  la  circulation,  la  digestion,  etc... 

Enfin  des  notes  et  documents  supplémentaires  offrent  au  lecteur  de 
fort  intéressants  mémoires  sur  divers  sujets,  tels  que  la  région  du  ty- 
phus à  Mexico,  les  infiuences  des  niveaux  en  Abyssinie,  à  la  Nouvelle 
Grenade  et  aux  Cordilières,  un  voyage  de  Laverrière  au  cratère  du 
Popocatepetl,  une  ascension  aérostatique  de  Crocé-Spinelli,  etc.,  etc. 

F.   DB   ROQUBFEUIL, 


—  494  - 

Principes  de  botaiftlque»  comprenant  l'anatomie,  Vorganographie  et  la 
physiologie  ^égétales^  avec  une  planche  lithographiée  et  un  atUu  naturel 
composé  de  seize  planches  renfermant  deux  cent  vingt-six  échantillons-types 
fournis  par  de%  plantes  diverses,  par  MM.  J.  Gourdon,  professeur  de  bota- 
nique à  rÉcole  nationale  vétérinaire  de  Toulouse,  et  Ch.  Focrcadr, 
naturaliste  à  Bagnères-de-Luchon  (Haute-Garonne).  Toulouse^  imp.Hébrail, 
Durand  et  Delpuech,  i875.  In-4  de  52  p.  et  i7  pi.  ;  rel.  en  toile,  renfermé 
dans  un  étui.  —  Prix  18  fr. 

Uonvrage  dont  nous  annonçons  la  publication  se  recommande  par 
la  nouveauté  du  plan  sur  lequel  il  a  été  conçu,  ainsi  que  par  son 
utilité  pratique.  Ayant  pour  but  de  faciliter  Tétude  d'une  science 
aussi  attrayante  en  elle-même  qu*intéressante  par  les  applications 
nombreuses  dont  elle  est  Tobjet,  il  se  distingue  de  tous  les  livres 
publiés  jusqu'à  ce  jour  sur  la  botanique  élémentaire,  par  ses  âgures, 
toutes  formées  par  des  plantes  ou  parties  de  plantes  en  nature, 
choisies  et  préparées  avec  le  plus  grand  soin,  collées  solidement  et 
de  manière  à  leur  conserver  leur  aspect  propre*  L'ouvrage  comprend 
deux  parties,  un  texte  et  un  atlas-album.  Le  texte,  ou  les  Principes  dé 
botanique j  que  les  auteurs  se  sont  attachés  à  rendre  accessible  à  tous, 
en  supprimant  beaucoup  de  théories,  de  détails  qui  surchargent,  sans 
utilité  immédiate,  la  mémoire  des  élèves,  comprend  :  VAnatomieXOrS^' 
nographie  et  la  Physiologie  végétales j  c'est-à-dire  toutes  les  définitions, 
ainsi  que  les  principes  généraux  de  la  botanique,  h* Atlas-Album  est 
composé  :  P  d'une  planche  lithographiée  représentant  les  organes 
élémentaires,  qui  ne  peuvent  être  observés  qu*au  microscope  ;  2*  de 
ieize  planches,  contenant  environ  deux  cent  cinquante  figures  en 
nature.  Les  pièces  qui  les  forment  portent  toutes  leur  nom,  ainsi  que 
celui  de  la  plante  qui  les  fournit,  de  telle  sorte  que  le  seul  examen 
de  l'atlas  peut  commencer  à  initier  à  la  botanique  le  lecteur  étranger  à 
ses  premiers  éléments;  et  cela,  d'autant  plus  aisément  que  les  types 
ont  été  choisis  et  groupés  de  façon  que  chaque  planche  puisse  donner 
Une  idée  nette,  bien  que  sommaire^  de  un  ou  plusieurs  organes 
déterminés.  Ainsi  se  trouve  réalisé,  pour  ce  qui  concerne  la  science 
botanique,  l'enseignement  par  la  vue  et  le  toucher,  dont  la  néceeiité 
est  si  généralement  reconnue  aiigourd'hui  pour  toutes  les  branches  de 
l'histoire  naturelle. 

Pour  répondre,  autant  qu'il  est  possible,  à  ce  besoin,  les  livres 
actuellement  publiés  sur  la  botanique  sont  tous  enrichis  de  nombreuses 
et  souvent  excellentes  figures  ;  mais  aussi  parfaites  qu'elles  puisaent 
être,  les  figures  dessinées  ne  donnent  jamais  une  idée  complète  des 
parties  représentées  ;  il  leur  manque  la  couleur,  la  forme  vraie,  le 
relief,  éléments  sans  lesquels  elles  ne  peuvent  laisser  une  impreseion 
exacte  et  durable.  L'ouvrage  de  MM.  Gourdon  et  Fourcade  a  préci- 
sément pour  but  de  suppléer  à  l'insuffisance  des  figures  ordinaires 


—  40B  — 

0OUB  060  dlTen  rapporiii  11  montre  au  lecteur,  tels  que  les  oflVe  la 
nature,  rensemble  des  organes  constitutifs  de  la  plante,  avec  les 
pricipales  variétés  qu'ils  peuvent  offrir.  Il  sera,  par  cela  seul,  utile 
surtout  aux  débutants,  pour  les  aider  dans  ces  premiers  pas  de  la 
science  toujours  les  plus  difficiles  à  franchir,  et  après  lesquels  l'étude, 
moins  aride,  a  toi\jourS  plus  d'attraits.  Telle  est  cette  publication, 
appelée  à  un  succès  certain  dans  ce  public  étendu  parmi  lequel  Tétude 
de  la  botanique  tend  de  plus  en  plus  à  se  répandre,  mais  qui  nous 
paraît  avoir  spécialement  sa  place  marquée  dans  les  Ijoées,  les 
institutions  particulières,  dans  la  généralité  des  établissements,  en 
un  mot,  où  sont  enseignées  les  sciences  naturelles.  E.  d'à. 


Mon  Jlardin.  Géologie.  —  Botanique   —  Histoire  naÉurelk,  —  Cuitute, 

par  Alfred  Svbk^  membre  de  la  Société  royale  d'Angleterre  et  de  la' Société 
d'horticulture.  Traduit  de  la  seconde  édition  anglaise,  par  Ed.  Barbier. 
Paris,  Germer-Baillière,  1873.  In-8  de  xvi-620  p.  —  Prix  MBfr. 

M.  Alfred  Smee  s'est  proposé,  dans  cet  ouvrage,  de  décrire  <  son 
jardin,  »  c'est-à-dire  les  plantes  les  plus  importantes  qui  y  poussent, 
leur  mode  de  culture,  en  un  mot,  tout  ce  qui  Se  rapporte  au  jardin* 
En  créant  son  jardin,  Fauteur  avait  deux  objets  en  vue  :  le  mojen  de 
continuer  des  études  commencées,  et  ia  production  de  fruits,  de 
légumes  et  de  fleurs  pour  sa  résidence  de  Londres.  Pour  écrire  ce 
travail  aussi  difficile  qu'attrajant,  M.  Smee  a  demandé  conseil 
à  des  savants  versés  dans  toutes  les  branches  de  la  science.  C'est 
ainsi  que  le  D^  Graj,  un  des  plus  célèbres  naturalistes  anglais,  Ta 
aidé  de  ses  lumières  pour  tout  ce  qui  concerne  les  coquillages  d'eau 
douce  et  les  coquillages  terrestres;  que  le  D'Oiinther  a  collaboré 
avec  lui  pour  les  questions  relatives  aux  poissons  d'eau  douce  ;  que 
M.  Woodward  s'est  mis  à  sa  disposition  pour  les  questions  géolo- 
giques. Sir  Henri  James  et  M.  Alfred  Tjlor,  ont  contribué  à  rendre 
sa  tâche  plus  facile  pour  certains  travaux  concernant  la  géologie. 
Le  D'  Hooker,  directeur  des  jardins  de  Kew,  lui  a  donné  une  grande 
quantité  de  plantes,  et  Ta  aidé  de  ses  conseils  relativement  à  plusieurs 
questions  de  botanique.  Enfin  le  D'  Bois-Duval  a  autorisé  M.  Smee  à 
copier  dans  son  admirable  ouvrage  les  figurés  dont  il  pouvait  avoir 
besoin,  de  même  que  MM.  Blakie  et  Gurtis.  Quelle  que  soit  l'as- 
sistance qui  ait  été  donnée  à  M.  Smee,  son  livre  n'aurait  jamais  été 
aussi  achevé  ni  aussi  intéressant  si  ses  mains  n'avaient  passé  par  là. 
Il  permet  à  tous,  en  effet,  d'apprendre  d'une  manière  agréable  et 
facile  les  principales  notions  de  botanique  et  d'agriculture. 

M.  Smee  donne  d'abord  la  situation  de  son  jardin  dont  il  fait  l'étude 
géologique;  il  enseigne  les  principes  du  jardinage  et  énumère  les  ins- 


•—  496  — 

truments  nécessaires  aux  travaux  de  ce  genre.  Il  parle  ensuite  de  ses 
divers  légumes,  de  ses  arbres  fruitiers,  de  ses  différentes  fleurs,  de  ses 
parterres  et  de  ses  arbres  forestiers.  Enfln  il  donne  un  aperçu  da 
règne  animal,  montre  les  désastres  causés  par  les  gelées  du  printemps» 
et  termine  en  parlant  des  jardins  des  différents  peuples.  Ce  bel 
ouvrage  contient  1,300  gravures  sur  bois  et  25  planches  bors  texte 
qui  en  rehaussent  encore  le  prix.  H.  db  B. 

Dictionnaire  des  termes  employé»  dan»  la  Construction 

et  concernant  la  connaissance  et  l'emploi  des  matériaux;  rouiillage  qui  sert  à 
leur  mise  en  ceuvre  ;  Vutilisation  de  ces  matériaux  dans  la  construction  des 
divers  genres  d'édifices  anciens  et  modernes  ;  la  législation  des  bàHmentSy  par 
Pierre  Chabat,  architecte,  professeur,  préparateur  du  cours  de  construc- 
tion civile  au  Conservatoire  des  arts  et  métiers.  Paris,  V«  A.  Morel,  1875. 
Grand  in-8  à  2  colonnes  de  i008  p.  avec  3,000  gravures  intercalées  dans 
le  texte.  —  Prix  :  60  fr. 
Ministère  dea  XravauiL  publics.  Ports  maritimes  de  la  France. 
Tome  P^  De  Dunkerque  à  Êtretat»  Paris,  Impr.  nat.,  1874.  Gr.  in-8  de 
656  p.  avec  un  atlas  in-folio. 

Les  dictionnaires  sont  à  la  mode  depuis  quelque  temps  :  ce  sont 
d'excellents  auxiliaires  lorsqu'ils  sont  bien  faits,  et  celui  que  nous  offre 
aigourd*hui  l'auteur  des  Fragments  d^ architecture  et  des  Bâtiments  de 
chemins  de  fer  doit  être,  sans  hésitation,  placé  dans  cette  catégorie. 
Depuis  que  Tinstruction  générale  est  devenue  encyclopédique^  non- 
seulement  pour  satisfaire  ce  besoin  de  l'esprit  qui  demande  à  con- 
naître tout  ce  qui  se  passe  à  ses  côtés,  mais  axissi  pour  arriver  à  ce  que 
chacun  puisse  gérer  par  lui-même  les  nombreux  intérêts  qui  s'agitent 
autour  de  lui,  l'art  de  bâtir,  et  plus  généralement  l'art  de  l'ingénieur, 
ne  sont  plus  restés  le  seul  domaine  des  spécialistes,  et  des  publications 
de  toute  sorte  en  ont  révélé  les  secrets  au  grand  jour.  Mais  on  n'avait 
pas  encore  de  répertoire  général,  commode  au  point  de  vue  des 
recherches,  abordable  à  tous  et  donnant,  à  coté  de  l'explication  des 
termes,  la  représentation  exacte  et  variée  de  l'objet  ou  de  la  forme 
décrits.  Gomment,  par  exemple,  saisir  la  nature  de  la  plupart  des 
outils  sans  la  représentation  figurée?  Il  n'y  avait,  dans  cet  ordre 
d'idées,  que  des  ouvrages  anciens,  à  des  prix  très-élevés,  ou  des 
ouvrages  spéciaux,  comme  le  magnifique  dictionnaire  consacré  par 
M.  VioUet  le  Duc  à  l'architecture  du  moyen  âge. 

C'est  sur  le  type  de  ce  splendide  monument  élevé  à  l'art  de  nos 
pères  que  M.  Chabat,  doué  d'une  remarquable  facilité  de  dessin  pers* 
pectif,  a  conçu  le  plan  de  son  dictionnaire  générai  des  termes  employés 
dans  la  construction.  Ce  mot  construction,  pris  dans  un  sens  restreint 
désigne  cette  partie  de  l'architecture  qui  a  pour  objet  Vexécution,  et 
c^est  à  ce  point  de  vue  principalement  que  l'auteur  s'est  placé,  mais 
en  faisant  en  même  temps  entrer  dans  son  cadre  tout  ce  qui,  de  près 


—  497  - 

OQ  de  loin,  se  rattaohe  à  la  constroction  en  prenant  ce  mot  dans  son 
acceptation  générale.  G*est  pourquoi  il  ne  traite  pas  seulement  deTétude 
des  matériaux  considérés  dans  leurs  qualités  et  dans  leur  mode  d'em- 
ploi, il  présente  aussi  les  applications  diverses  qui  en  ont  été  faites 
dans  l'art  de  bâtir  depuis  les  temps  anciens  jusqu'à  nos  jours.  Prenant, 
par  ezemplCy  les  principales  classes  d'édifices  élevés  par  les  différents 
peuples,  il  donne  une  description  succincte  de  leurs  dispositions  géné- 
rales, et  insiste  sur  la  nature  et  le  groupement  des  éléments  qui  les 
composent,  de  manière  à  mettre,  en  quelque  sorte,  sous  les  yeux  du 
lecteur  Thistoire  de  la  construction  et  les  progrès  qui  ont  été  accomplis 
depuis  Torigine  dans  cette  branche  de  Tarchitecture.  Les  articles  cha* 
piteau  et  fenêtre  nous  ont  paru,  sous  ce  rapport,  traités  d'une  manière 
tout  à  fait  supérieure  :  les  types  reproduits  sont  choisis  avec  goût,  les 
dessins  ont  du  relief,  nous  allions  même  dire  de  la  couleur. 

Si  nous  avons,  malgré  nos  trèS'Sincères  éloges,  quelque  reproche  à 
adresser  au  consciencieux  et  fort  érudit  auteur  de  ce  recueil,  et  c'est 
là  le  rôle  d^une  critique  impartiale  qui  cherche  toujours  le  parfait, 
quoiqu'il  soit  bien  rare  de  le  trouver  en  ce  monde,  nous  lui  demande- 
rons de  proportionner  davantage,  dans  une  seconde  édition,  l'étendue 
de  ses  articles  à  leur  importance.  Ainsi  le  chapiteau  et  la  fenêtre  que 
nous  citions  plus  haut  et  qui  sont  parfaits  en  leur  genre,  sont  trop 
étendus  relativement  à  Tarticle  clocher,  qui  n'a  pas  deux  colonnes.  Ail- 
leurs certains  chapitres  trés-étudiés  et  très- fouillés  dans  leur  première 
partie,  le  sont  moins  dans  la  seconde.  Prenons  par  exemple  le  mot 
Fbrme.  Tous  les  types  de  charpentes  en  bois  connus  y  sont  à  très-peu 
près  reproduits  et  discutés  :  mais,  pour  les  charpentes  en  fer  à  grande 
portée,  nous  n'y  voyons  que  le  type  français  à  laPolonceau  et  le  type 
à  croisillons^  et  il  n'y  est  point  parlé  des  types  anglais  et  américains 
qui  peuvent,  dans  certains  cas,  rendre  de  grands  services.  L'article 
BRIQUE  donne  tout  ce  qu'en  peut  rechercher  au  sujet  de  la  qualité,  de 
la  cuisson,  de  la  forme  et  de  l'emploi  de  cette  matière  si  essentielle  à 
la  construction  :  on  a  cependant  oublié  la  brique  grisée  qui,  seule,  peut 
résister  efficacement  à  l'action  des  eaux  maritimes.  L'article  bouée 
ne  dit  pas  que  leur  emploi  capital  est  celui  du  balisage  dos  côtes  et  du 
signalement  des  roches  à  fieur  d'eau.  L'article  chaussée  dit  qu'il  y  a 
trois  modes  principaux  de  revétemeht,  le  pavé,  l'empierrement  et 
le  bitume  ou  asphalte,  et  que  le  premier  de  ces  procédés  est  le  plus 
économique,  bien  que  fatigant  pour  les  chevaux  et  les  véhicules. 
Cela  demanderait  discussion  ;  c'est  beaucoup  trop  absolu,  car  ce  n'est 
vrai  que  pour  les  chaussées  à  très-grande  circulation.  Mais  encore 
une  fois,  nous  ne  voulons  pas  faire  à  l'auteur  de  querelles  d'Allemand  : 
ce  ne  sont  là  que  de  légères  critiques  de  détail,  qui  montrent  combien 
nous  estimons  son  œuvre,  puisque  nous  voudrions  voir  l'auteur  la  polir 


•—  496  — 

truments  nécessaires  aux  travaux  de  ce  genre.  Il  parle  ensuite  de  ses 
divers  légumes,  de  ses  arbres  fruitiers,  de  ses  différentes  fleurs,  de  ses 
parterres  et  de  ses  arbres  forestiers.  Enfin  il  donne  un  aperçu  du 
règne  animal,  montre  les  désastres  causés  par  les  gelées  du  printemps, 
et  termine  en  parlant  des  jardins  des  différents  peuples.  Ce  bel 
ouvrage  contient  1,300  gravures  sur  bois  et  25  planches  liors  texte 
qui  en  rehaussent  encore  le  prix.  H,  db  B. 

Dictionnaire  des  termes  employas  dnns  la  CU>nBtructlon 

et  concernant  la  œrmaissanee  et  remploi  des  matériaux;  Voutillage  qui  sert  à 
leur  mise  en  œuvre  ;  Vutilisation  de  ces  matériaux  dans  la  construction  des 
divers  genres  d'édifices  anciens  et  modernes  ;  la  législation  des  bâHmerUs,  par 
Pierre  Ghabat,  architecte,  professeur,  préparateur  du  cours  de  construc- 
tion civile  au  Conservatoire  des  arts  et  métiers.  Paris,  V«  A.  Morei,  1873. 
Grand  in-8  à  2  colonnes  de  1008  p.  avec  3,000  gravures  intercalées  dans 
le  texte.  —  Prix  :  60  fr. 
Ministère  dea  Travaux  publics.  Ports  maritimes  de  Ij  France. 
Tome  P^  De  Dunkerque  à  Êtretat.  Paris,  Impr.  nat.,  i874.  Gr.  in-8  de 
656  p.  avec  un  atlas  in-folio. 

Les  dictionnaires  sont  à  la  mode  depuis  quelque  temps  :  ce  sont 
d'excellents  auxiliaires  lorsqu'ils  sont  bien  faits,  et  celui  que  nous  offre 
atgourd'hui  l'auteur  des  Fragments  d'architecture  et  des  Bâtiments  de 
chemins  de  fer  doit  être,  sans  hésitation,  placé  dans  cette  catégorie. 
Depuis  que  Tinstruction  générale  est  devenue  encyclopédique,  non- 
seulement  pour  satisfaire  ce  besoin  de  l'esprit  qui  demande  à  con- 
naître tout  ce  qui  se  passe  à  ses  côtés,  mais  aussi  pour  arriver  à  ce  que 
chacun  puisse  gérer  par  lui-même  les  nombreux  intérêts  qui  s'agitent 
autour  de  lui,  l'art  de  bâtir,  et  plus  généralement  l'art  de  l'ingénieur, 
ne  sont  plus  restés  le  seul  domaine  des  spécialistes,  et  des  publications 
de  toute  sorte  en  ont  révélé  les  secrets  au  grand  jour.  Mais  on  n'avait 
pas  encore  de  répertoire  général,  commode  au  point  de  vue  des 
recherches,  abordable  à  tous  et  donnant,  à  coté  de  l'explication  des 
termes,  la  représentation  exacte  et  variée  de  l'objet  ou  de  la  forme 
décrits.  Comment,  par  exemple,  saisir  la  nature  de  la  plupart  des 
outils  sans  la  représentation  figurée?  Il  n'y  avait,  dans  cet  ordre 
d'idées,  que  des  ouvrages  anciens,  à  des  prix  très-élevés,  ou  des 
ouvrages  spéciaux,  comme  le  magnifique  dictionnaire  consacré  par 
M.  YioUet  le  Duc  à  l'architecture  du  moyen  âge. 

C'est  sur  le  type  de  ce  splendide  monument  élevé  à  l'art  de  nos 
pères  que  M.  Chabat,  doué  d'une  remarquable  facilité  de  dessin  pers- 
pectif, a  conçu  le  plan  de  son  dictionnaire  générsd  des  termes  employés 
dans  la  construction.  Ce  mot  construction,  pris  dans  un  sens  restreint 
désigne  cette  partie  de  l'architecture  qui  a  pour  objet  Vexécution,  et 
c'est  à  ce  point  de  vue  principalement  que  l'auteur  s'est  placé,  mais 
en  faisant  en  même  temps  entrer  dans  son  cadre  tout  ce  qui,  de  près 


—  497  - 

on  de  loin,  se  rattache  à  la  constrnction  en  prenant  ce  mot  dans  son 
acceptation  générale.  C^est  pourqnoi  il  ne  traite  pas  seulement  deTétude 
des  matériaux  considérés  dans  leurs  qualités  et  dans  leur  mode  d'em- 
ploi, il  présente  aussi  les  applicatious  diverses  qui  en  ont  été  faites 
dans  l'art  de  bâtir  depuis  les  temps  anciens  jusqu'à  nos  jours.  Prenant, 
par  exemple,  les  principales  classes  d'édifices  élevés  par  les  différents 
peuples,  il  donne  une  description  succincte  de  leurs  dispositions  géné-> 
raies,  et  insiste  sur  la  nature  et  le  groupement  des  éléments  qui  les 
composent,  de  manière  à  mettre,  en  quelque  sorte,  sous  les  yeux  du 
lecteur  Tbistoire  de  la  constmction  et  les  progrès  qui  ont  été  accomplis 
depuis  Torigine  dans  cette  branche  de  T architecture.  Les  articles  cha* 
piteau  et  fenêtre  nous  ont  paru,  sous  ce  rapport,  traités  d'une  manière 
tout  à  fait  supérieure  :  les  types  reproduits  sont  choisis  avec  goût,  les 
dessins  ont  du  relief,  nous  allions  même  dire  de  la  couleur. 

Si  nous  avons,  malgré  nos  très-sincères  éloges,  quelque  reproche  à 
adresser  au  conscieAcieux  et  fort  érudit  auteur  de  ce  recueil,  et  c'est 
là  le  rôle  d^une  critique  impartiale  qui  cherche  toujourâ  le  parfait, 
quoiqu'il  soit  bien  rare  de  le  trouver  en  ce  monde,  nous  lui  demande- 
rons de  proportionner  davantage,  daus  une  seconde  édition,  l'étendue 
de  ses  articles  à  leur  importance.  Ainsi  le  chapiteau  et  la  fenêtre  que 
nous  citions  plus  haut  et  qui  sout  parfaits  en  leur  genre,  sont  trop 
étendus  relativement  à  l'article  clocher,  qui  n'a  pas  deux  colonnes.Àil- 
leurs  certains  chapitres  très-étudiés  et  très-fouillés  dans  leur  première 
partie,  le  sont  moins  dans  la  seconde.  Prenons  par  exemple  le  mot 
Fbrmb.  Tous  les  types  de  charpentes  en  bois  connus  y  sont  à  très-peu 
près  reproduits  et  discutés  :  mais,  pour  les  char'p&ntes  en  fer  à  grande 
portée,  nous  n'y  voyons  que  le  type  français  à  laPolonceau  et  le  type 
à  croisillons^  et  il  n'y  est  point  parlé  des  types  anglais  et  américains 
qui  peuvent,  dans  certains  cas,  rendre  de  grands  services.  L'article 
BRiQUB  donne  tout  ce  qu'en  peut  rechercher  au  sujet  de  la  qualité,  de 
la  cuisson,  de  ia  forme  et  de  l'emploi  de  cette  matière  si  essentielle  à 
la  construction  :  on  a  cependant  oublié  la  brique  grésée  qui,  seule,  peut 
résister  efficacement  à  l'action  des  eaux  maritimes.  L'article  boubb 
ne  dit  pas  que  leur  emploi  capital  est  celui  du  balisage  des  côtes  et  du 
signalement  des  roches  à  fieur  d'eau.  L'article  chaussbb  dit  qu'il  y  a 
trois  modes  principaux  de  revêtemeht,  le  pavé,  l'empierrement  et 
le  bitume  ou  asphalte,  et  que  le  premier  de  ces  procédés  est  le  plus 
économique,  bien  que  fatigant  pour  les  chevaux  et  les  véhicules. 
Cela  demanderait  discussion  ;  c'est  beaucoup  trop  absolu,  car  ce  n'est 
vrai  que  pour  les  chaussées  à  très-grande  circulation.  Mais  encore 
une  fois,  nous  ne  voulons  pas  faire  à  l'auteur  de  querelles  d'Allemand  : 
ce  ne  sont  là  que  de  légères  critiques  de  détail,  qui  montrent  combien 
nous  estimons  son  œuvre,  puisque  nous  voudrions  voir  l'auteur  la  polir 


—  M8  — 

ad  unguem^  ce  qu'il  fera  bien  oertainement  pçur  uoe  édition  faiure  qoi 
ne  peut  tarder  à  paraître^  car  il  j  avait  une  lacune  réelle  à  oombler, 
et  il  serait  yraiment  trop-sëyère  de  demander  au  premier  jet  d*an 
ouvrage  aussi  utile  la  perfection  qu'il  atteindra  certainement  dans 
l'avenir.  Tel  qu'il  nous  est  présenté,  ce  dictionnaire  doit  non-seulement 
recevoir  les  encouragements  de  la  critique,  mais  encore  prendre  hau- 
tement sa  place  parmi  les  plus  utiles  publications  qui  aient,  depuis 
longtemps  paru,  sur  Tart  de  bâtir. 

-^  Nous  nous  étendrons  moins  longuement  sur  Timportante  série 
de  travaux  que  le  ministère  des  travaux  publics  a  récemment  entrepris 
sur  les  ports  maritimes  de  la  France  y  parce  qu'on  ne  peut  pas  la  juger 
encore  définitivement  :  mais  le  premier  volume  qui  comprend  toute  la 
région  maritime  située  entre  Dunkerque  et  Ëtretat  mérite  cependant 
une  mention  toute  spéciale.  C'est  en  1868  qu'une  décision  ministérielle 
a  ordonné  la  publication  d'un  Atlas  des  ports  maritimes  de  France  et  a 
chargé  une  commission  présidée  par  M.  Tinspecteur  général  Rejnaad 
d'arrôter  les  bases  et  de  diriger  Texécution  de  ce  travail.  L'ouvrage 
comprend  :  les  plans  de  tous  les  ports  —  des  cartes  à  la  fois  hjdrogri^ 
phiques  et  territoriales,  destinés  à  représenter  les  attérages  de  nos 
principaux  établissements  maritimes,  ainsi  que  leurs  moyens  de  com- 
munication avec  l'intérieur  du  pajs  —  des  notices  donnant  pour  chaque 
port  les  renseignements  les  plus  essentiels  sur  ses  abords^  ses  condi- 
tions nautiques,  son  développement  successif  et  son  état  actuel. 

La  notice  sur  le  port  et  la  rade  de  Dunkerque  a  été  rédigée  par 
M.  l'ingénieur  en  chef  Plocq»  dont  la  réputation,  comme  spécialité  des 
travaux  maritimes,  est  européenne  :  remontant  aux  origines  les  plas 
anciennes  du  port  de  Dunkerque,  M.  Plocq  en  étudie  toutes  les  trans- 
formations successives,  discute  tous  les  projets  présentés  pour  son 
amélioration  aux  différentes  époques  et  termine  par  la  situation  flo- 
rissante actuelle  &  laquelle  il  a  tant  contribué.  Outre  les  grandes 
feuilles  de  l'atlas,  un  grand  nombre  de  plans  et  de  flgures  intercalés 
dans  le  texte  permettant  de  suivre  plus  facilement  les  explications* 
Gravelines  a  été  étudié  d'une  façon  analogue  par  le  même  auteur  ; 
Calais,  par  M.  Aron  ;  Boulogne,  le  Portel  et  Ètaples,  par  M.  Yivenot  ; 
Le  Crotoy^  St- Valéry,  Abbeville  et  le  Bourdel,  par  M.  deoffroj;  ie 
Tréport,  Eu  et  Dieppe^j^Ar  M.Lavoinne  ;  St^Valery^en-Caux,  Fécamp, 
Y  fort  et  Étretat^  par  M.  Renaud.  A  la  suite  de  chaque  notice,  on  a 
placé  une  bibliographie  fort  complète  de  tous  les  ouvrages  déjà  pu- 
bliés sur  chaque  port. 

Cette  magnifique  publication,  qui  comprendra  un  grand  nombre  de 
volumes,  fait  le  plus  grand  honneur  au  président  de  la  commission 
M.  Rejnaud,  et  à  tous  ses  collaborateurs.  Rbnb  Kirvilks. 


-  490  — 

lj*Ai*t  et  la  GPlUque  en  Franoe*  par  Pibbrk  Pbtroz.  Paris,   Germer 

Baillière,  1875.  In-12  de  339  p.  —  Prix  :  3  fr.  50. 
A  Giiristlaii  Palnt^r  of  the  IVIneteenth  Century  Belngp  the 

WAte  of  Hlppolyte  Flandrin.  By  the  author  of^A  dominican  aiH^t  » 

«  Life  of  saint  Francis  de  Sales,  »  etc.,  eto.  London,  Rivingtons,  1875.  In-8 

de  244  p. 

On  sera  gaffisamment  renseigné  sur  Tesprit  et  la  portée  da  premier 
onvrage,  qnand  on  saura  qu'il  est  écrit  sous  l'inspiration  doctrinaire 
d'hommes  dont  le  nom  seul  vaut  un  système.  L* auteur  appartient  à 
Técole  positiviste  d*Auguste  Comte  et  de  M.  Littré,  et  il  revendique 
hautement  ce  patronage.  Son  livre,  fait  d'articles  publiés  dans  les 
fascicules  de  la  PAtïo«opAt>/)o«iVit;e^  sur  diverses  manifestations  et  œuvres 
de  l'école  contemporaine,  ne  présente  rien  de  particulièrement  sail- 
lant, si  ce  n'est  la  prétention  délibérée  de  transformer  Tart.  L*éorivain 
est  un  de  ces  révolutionnaires  qui  rêvent  pour  l'art  des  destinées  nou- 
velles, en  le  mettant  à  la  remorque  du  mouvement  positiviste  de  notre 
temps. 

a  C'est  à  chanter  les  prodiges  de  l'homme,  dit  le  maître  cité 
par  rélève,  sa  conquête  sur  la  nature,  les  merveilles  de  sa  sociabilité, 
que  le  vrai  génie  esthétique  trouvera  surtout  désormais  sous  l'active 
impulsion  de  Tesprit  positif,  une  source  féconde  d'inspirations  neuves 
et  puissantes,  susceptibles  d'une  popularité  qui  n'eut  jamais  d'équiva- 
lent, parce  qu'elles  seront  en  pleine  harmonie,  soit  avec  le  noble  ins- 
tinct de  notre  supériorité  fondamentale,  soit  avec  l'ensemble  de  nos 
convictions  rationnelles.  » 

Et  l'élève  complète  la  pensée  du  maître  en  disant  : 

a  L'art  doit  représenter  le  sentiment  général  de  la  société.  Or, 
la  société  étant  irrémissiblement  entraînée  vers  l'industrie  et  la 
démocratie,  l'art,  s'il  veut  vivre  et  progresser,  doit  être  industriel  et 
démocratique.  » 

Ces  citations  suffisent  à  faire  apprécier  tout  le  livre  ;  elles  sont 
ai^jourd'hui  le  mot  d'ordre  d'une  école  nombreuse,  qui  a  l'espérance 
de  rejeter,  dans  le  gouffre  du  passé,  d'absurdes  préjugés,  et  de  diriger 
Tavenir  dans  le  sens  de  ses  théories.  A  ce  point  de  vue,  elles  sont 
bonnes  à  connaître  et  on  doit  les  mettre  en  relief. 

Le  lecteur  n'a  pas  besoin  de  nos  indications  pour  juger  ces  proposi- 
tions audacieuses,  que  nous  n'avons  pas,  d'ailleurs,  mission  de  réfuter. 

L'art  et  le  positivisme,  le  beau  et  l'industrialisme,  l'idéal  et  la 
matière,  sont  des  termes  contradictoires  que  tout  l'effort  des  novateurs 
tentera  vainement  de  concilier.  Partant  d'un  point  de  départ  contrairOf 
ils  arrivent,  par  des  moyens  différents,  à  un  but  complètement  opposé. 
L'une  s'adresse  à  T&me  ;  l'autre  travaille  pour  le  corps  ;  le  premier  a 
pour  devoir  de  chercher  le  beau,  destiné  à  produire  le  bien;  le  second, 
fatalement  enchaîné  au  laid,  ne  peut  guère  produire  que  l'utile;  celui- 


—  500  — 

ci  vit  de  rayons  et  d'échappées  sur  le  monde  supérieur;  celui-là  ne  sort 
pas*  et  ne  saurait  sortir  du  monde  visible.  L'art  doit  nous  mener  en 
haut  :  l'industrie  nous  laisse  en  bas. 

Il  7  a  entre  Tart  et  Tindustrie  toute  la  distance  qui  sépare  Fesprit 
de  la  chair,  le  ciel  de  la  terre  et  Tidéal  de  la  réalité. 

Le  plus  sûr  moyen  de  stériliser  et  d'éteindre  Tart  est  de  le  subor- 
donner et  plier  àTindustrie,  qui  n'est  qu'une  comparse  dans  la  vie,  et 
doit,  garder  comme  on  Ta  dit,  vis-à-vis  de  l'art,  le  rdle  d'une  ser- 
vante à  l'égard  de  sa  maîtresse. 

Quant  à  la  démocratie,  qu'il  serait  également  trop  long  de  discuter 
à  ce  point  de  vue  spécial,  contentons-nous  de  rappeler  qu'en  abaissant 
par  son  essence  même,  le  niveau  général  des  esprits,  elle  tend  forcé- 
ment à  ravaler  et  compromettre  l'art. 

—  A  Christian  Painter  of  the  Nineteenth  Century,  benig  the  life  of  Bip- 
polyte  Flandrin  est  un  livre  conçu  dans  un  esprit  tout  opposé  et  rempli 
de  vues  excellentes.  Il  étudie  la  vie,  l'œuvre,  la  correspondance 
d'Hippolyte  Flandrin,  et  montre  sous  son  véritable  jour  la  foi,  la  piété, 
le  génie  de  ce  grand  peintre,  que  l'école  »ne  remplacera  point.  S'il 
n'apprend  rien  aux  lecteurs  français,  familiarisés  avec  les  figures  de 
l'art  contemporain,  ce  livre  peut  produire  d'utiles  résultats,  en  popu- 
larisant à  l'étranger  les  traits  principaux  d'un  artiste,  digne  à  jamais 
du  respect  et  de  l'admiration  de  tous  les  amatears  d'art  et  de  tous  les 
philosophes  chrétiens.  Dubosc  de  Pbsquidoux. 


Li'Art  en  il.l«ace-I^orralne,  par  RexNé  Ménard.  Paris,  libr.  de  rArt, 
3,  chaussée  d'Antin  et  Ch.  Delagrave,  i876.  Gr.  in-8  de  558  p.,.  avec 
52  palnches  et  3i7  grav.  intercal.  dans  le  texte.  —  Prix  :  2$  fr. 

Ce  livre  est  plus  émouvant  que  la  plupart  des  doléances,  trop  sou- 
vent déclamatoires,  faites  par  ceux  qui  veulent  formuler  les 
regrets  patriotiques  causés  dans  leurs  cœurs  par  la  perte  de  TAl- 
sace  et  d'une  partie  de  la  Lorraine.  M.  René  Ménard  a  eu  l'heureuse 
pensée  de  mettre  à  la  portée  de  tous  un  véritable  musée,  donnant 
une  idée  de  la  large  place  occupée  par  ces  deux  provinces  dans  Thi»* 
toire  de  l'art  français.  Pour  chacune  d'elles,  l'auteur  a  suivi  un  plan 
uniforme  :  d'abord  un  précis  de  l'histoire  de  l'art  depuis  les  premiers 
temps  du  moyen  âge  jusqu'au  dix-huitième  siècle  ;  ensuite  une  notice 
sur  chacun  des  artistes  alsaciens  et  lorrains  qui  appartiennent  à  notre 
époque  :  ceux  qui  ont  disparu,  de  même  que  ceux  dont  nous  pouvons 
serrer  la  main;  pour  la  plupart,  la  notice  est  accompagnée  d'un  spé- 
cimen de  leurs  œuvres  ;  enfin  un  choix  des  principaux  monuments 
civils  et  religieux.  —  Les  nombreuses  gravures  sur  bois  et  eaux-fortes 
sont  exécutées  avec  un  grand  soin;  quelques-unes  sont  dues  à  des 
artistes  dont  le  nom  figure  dans  l'ouvrage. 


—  301  — 

C'est  avec  une  orgueilleuse  douleur  que  Ton  feuillette  ce  beau  vo- 
lume. En  effet,  en  même  temps  que  le  lecteur  regarde  et  admire  tris- 
tement les  images  de  tant  de  belles  choses  aujourd'hui  reléguées  sur 
la  terre  étrangère  par  le  hasard  des  batailles,  il  ne  peut  s'empâcher 
de  penser  que,  dans  le  nord-est  du  vieux  sol  gaulois,  Tabsencede  l'in- 
âuence  française  marquera  un  long  arrêt  dans  le  domaine  de  l'art. 
Il  suffit  de  voir  ce  que  la  France  fit  à  Tart  alsacien  depuis  la  fin  du 
dix-septième  siècle.  D*ailleurs^  dans  la  liste  des  artistes  contemporains 
originaires  de  cette  province,  nous  en  voyons  plus  d'un,  aimé  du 
public,  qui  n*a  pas  hésité  à  quitter  son  pays  natal  envahi,  pour  venir 
sur  le  sol  de  la  mère  patrie. 

Une  grande  partie  de  la  Lorraine  nous  est  restée  ;  mais,  avec  le  pays 
messin,  nous  avons  subi  une  véritable  perte,  au  point  de  vue  artistique 
comme  au  point  de  vue  des  sciences  et  des  lettres  qui,  il  y  a  encore 
six  ans,  y  étaient  cultivées  avec  succès  ;  comme  en  Alsace,  et  pour 
les  mêmes  raisons,  ce  foyer  est  éteint;  il  n'existe  plus  qu'à  Nancy, 
jadis  rivale  de  Metz. 

Nous  recommandons  le  livre  de  M.  Ménard;  c'est  un  album  accom- 
pagné d*un  texte  sobre  et  concis,  qui  peut  prendre  place  sur  toutes  les 
tables.  A  la  différence  de  certains  beaux  volumes  illustrés,  nous  ne 
pensons  pas  que  les  yeux  de  personne  puissent  y  trouver  un  siget  sca- 
breux. Jbhan  db  Malmt. 


BELLES-LETTRES 

Aa«yrl«che  fttudlen.  Von  D'  Friedrich  Deutzsch,  Privatdacenten  an 
der  UniversUat  Leipzig.  Heft  L  Assyrische  Thiemamen  mit  vielen  Excursen 
und  einem  assyrischen  und  akkadischm  Glossar.  (Etudes  assyriennes.  Première 
partie.  Les  noms  des  animaux  en  assyrien^  suivis  de  plusieurs  appendices  et 
d'un  glossaire  assyrien  et  accadien.)  Leipzig,  Hinrichs,  i874.  In-S®  de  vui- 
i83  pages. 

L* Allemagne,  après  avoir  dédaigné  longtemps  l'assyriologie,  com- 
mence enfin  &  s'y  appliquer  avec  soin.  M.  Eberhard  Schrader  s'est 
placé  à  la  tête  du  mouvement  en  faveur  de  l'étude  des  antiques  débris 
de  la  vieille  littérature  de  Ninlve  et  de  Babylone,  et  il  a  publié  quel- 
ques travaux  remarquables,  que  le  Polybiblion  a  fait  connaître  à  ses 
lecteurs.  C'est  un  de  ses  élèves,  M.  Friedrich  Delitzsch,fils  du  célèbre 
exégète»  Franz  Delitzsch,  qui  a  publié,  à  la  fin  de  1874,  l'étude  sur  les 
noms  des  animaux  en  assyrien  que  nous  annonçons  ici.  Le  jeune  auteur 
a  compulsé  surtout  le  second  volume  des  Cuneiform  Inscriptions  of  wes- 
tern Aeia^'  publié  par  sir  Henry  Rawlinson,  et  y  a  trouvé,  dans  ses 
nombreux  syllabaires,  qu'on  pourraitappeleraussi  des  lexiques  fragmen- 
taires, plusieurs  listes  de  noms  d'animaux.  Il  s'attache  à  les  expliquer 


—  809.  — 

■» 

en  les  comparant  aux  noms  analogues  que  lui  préseotent  les  dietîon- 
naires  des  autres  langues  sémitiques.  Très-versé  déjà  dans  la  connais- 
sance des  idiomes  orientaux  et  fils  d'un  des  plus  savants  orientalistes 
d'Allemagne,  qu'il  a  sans  cesse  consulté,  il  a  fait  cette  comparaison 
avec  autant  de  science  que  de  succès.  Après  une  introduction  dans 
laquelle  il  expose  ce  que  sont  les  syllabaires  assyriens,  il  étudie  soc* 
cessiyement  les  noms  des  quadrupèdes^  les  noms  des  insectes, 
les  noms  des  poissons  et  les  noms  des  oiseaux.  Le  but  que  s^est 
proposé,  avant  tout,  M.  Friedrich  Delitzsch  est  un  but  linguis- 
tique et  lexicographique,  mais  son  travail  nUntéresse  pas  seulement 
les  philologues  en  général  et  les  sémitisants  en  particulier,  il  intéresse 
aussi  tous  ceux  qui  s'occupent  des  civilisations  antiques.  Il  nous  révèle 
en  effet  quelles  étaient  les  connaissances  des  Assyriens  et  des  Chai* 
déens  dans  cette  branche  de  Thistoire  naturelle  ;  il  nous  apprend,  non 
pas  seulement  combien  d'animaux  étaient  connus  de  ces  peuples,  en 
nous  en  offrant  une  riche  nomenclature,  mais  aussi  l'idée  qu'ils  s'en 
faisaient,  car  les  noms  de  ces  animaux  ne  sont  généralement  qu'un 
qualificatif  qui  peint  le  trait  saillant  de  leur  caractère,  tel  que  le  con- 
cevaient ceux  qui  les  désignaient  ainsi.  C'est  une  étude  très-curieuse 
que  celle  des  observations  de  mœurs  animales  faites  par  les  anciens 
habitants  des  bords  de  l'Euphrate  et  du  Tigre.  Le  loup  est  pour  eux 
((  un  chien  glouton^  a  le  chat  «  celui  qui  tend  des  embûches,  »  et  son 
nom  vient  de  la  racine  Satan,  d'où  les  Hébreux  ont  tiré  aussi  le  nom 
de  Satan.  Les  listes  des  syllabaires  assyriens  énumèrent  une  multitude 
d'espèces  de  chiens,  de  mouches,  de  sauterelles. 

Le  savant  prioatdocent  n'a  pu  découvrir  la  véritable  signification  de 
plusieurs  noms  d'animaux  ;  il  n'a  proposé  la  signification  de  quelques 
autres,  qu'avec  hésitation,  et  de  nouvelles  découvertes  dans  Tiaê- 
puisable  bibliothèque  assyrienne  d'Assurbanipal,  conservée  aijù^^^'^^^ 
au  Musée  britannique,  feront  reconnaître,  sansdoute,  plus  d'une  erreur 
dans  ses  Études,  mais  le  mérite  de  son  travail  n'en  restera  pas  moins 
très-grand.  Les  neuf  appendices  qui  terminent  le  volume  s'occupent 
de  sujets  divers,  parmi  lesquels  on  remarque  ceux  qui  traitent  de 
Faloês,  du  baume  et  dunard,  des  charges  militaires  et  civiles,  des  espèces 
d'armes,  des  diverses  parties  d'un  navire,  etc.  L'ouvrage  se  termine 
par  un  glossaire  complet  de  tous  les  mots  assyriens  et  aooadiens  qa'il 
renferme.  F.  G. 


Ca  Guerre  de  Metz  en  139419  poème  du  quatorzième  siècle^  publié  par 
£.  DE  Bouteilles,  suivi  d'études  critiques  sur  le  texte  par  F.  BoMNàDor,  et 
précédé  d'une  préface  par  Léon  Gautier.  Paris,  Firmin  Didot,  1875.  In-9 
de  xxv-512  p.  —  Prix  :  12  fr. 

Il  y  a,  dans  Paris,  bien  des  gens  —  et  même  panni  ceux  qui  soai 


—  503  — 

aases  lettrés  —  qui  font  de  singulières  confusions  géographiques.  On 
s'est  félicité  de  l'annexion  de  Nice  et  de  la  Savoie  ;  on  a  déploré  la 
perte  de  l'Alsace  et  de  la  Lorraine  ;  sis  ont  conclu  de  ces  alliances  de 
noms,  que  le  comté  de  Nice  touchait  à  la  Savoie  et  que  l'Alsace  for^ 
mait  avec  la  Lorraine  une  contrée  ayant  des  antécédents,  un  aspect 
un  caractère,  des  intérêts  communs.  Gomme  il  est  rare  qu'une  erreur 
arrive  seule,  comme 

Une  ohote  toujours  entraîne  une  autre  ohute, 

on  s'est  imaginé  aussi  que  Nice  parle  italien,  tandis  qu'elle  possède 
un  dialecte  local  très-voisin  du  provençal,  et  que,  cMnme  Strasbourg, 
Metz  parle  allemand,  ce  qu'elle  n'a  fait  à  aucune  époque.  Elle  a  tou- 
jours, ainsi  que  le  dit  M.  Léon  Oautier,  •  parlé  firançais  à  plein 
gosier.  »  C'est  à  Metz  qu'est  né,  cela  semble  du  moins  très-probable, 
l'auteur  de  V image  du  Monde,  un  de  nos  plus  vieux  poëmes.  C'est  le 
Pajs-Messin  qui  parait  avoir  produit  la  belle  geste  des  ZoA^rratiif,  et 
voici  un  livre  qui  nous  donne  un  curieux  échantillon  de  ce  qu'était  au 
quatorzième  siècle  la  langue  de  la  vieille  ville  libre.  Ce  livre  est  le 
récit  de  la  guerre  que,  l'an  1324,  le  roi  de  Bohême,  Jean  de  Luxem- 
bourg, fit  à  la  cité  de  Metz,  avec  le  concours  de  Baudouin^  archevêque 
de  Trêves,  de  Ferry  lY,  duc  de  Lorraine  et  d'Edouard  I**,  comte  de 
Bar.  De  mérite  littéraire,  cette  chronique  rimée  n'en  a  ni  plus,  ni 
moins  que  beaucoup  d'œuvres  du  même  genre  et  de  la  même  époque; 
on  peut  l'avouer,  car  elle  en  a  un  autre  indéniable,  elle  offre  un 
tableau  très-animé,  très-vrai,  très-vivant,  elle  nous  transporte  réelle- 
ment au  milieu  d'une  ville  du  quatorzième  siècle.  Sous  ce  rapport, 
elle  a  une  valeur  incontestable,  qu'augmentent  encore  tous  les  rensei- 
gnements d'espèces  diverses  dont  elle,  a  provoqué  l'intéressante  réu- 
nion. Il  y  a  tant  de  choses  et  d'excellentes  choses  dans  ce  beau 
volume,  que  nous  voulons  procéder  par  ordre  à  leur  indicatioAi  en 
regrettant  de  n'avoir  pas  assez  d'espace  pour  nous  arrêter  à  chacune 
d'elles  autant  que  nous  l'aurions  4^8iré  et  qu'il  le  faudrait. 

M.  de  Bonteiller  dédie  l'œuvre  à  laquelle  il  a  donné  taut  de  soins 
à  la  ville  de  Metz,  dont  il  fut  le  député.  Cette  dédicace  est  suivie  de 
quelques  lignes  où  l'auteur  paye  sa  dette  de  reconnaissance  aux  per- 
sonnes qui  Tout  aidé  dans  sa  publication.  11  passe  ensuite  là  plume  à 
M.  Léon  Gautier,  qui,  par  une  préface  très-chaudement  écrite, 
prépare  à  la  lecture  que  l'on  va  commencer.  Â  cette  préface 
succède  une  introduction  dans  laquelle  M.  de  Bouteiller  esquisse  une 
histoire  du  passé  de  Meta  et  entre  dans  tous  les  détails  de  la  guerre 
que  la  chronique  racontera.  Après  ces  nombreux  prolégomènes  on 
arrive  enfin  à  cette  chronique,  elle  est  composée  de  deux  cent  quatre- 
vingt-seize  stances  de  sept  vers  octosyllabiques  dont  M.  de  Bou- 
teiller a  parCaiieinent  fait  de  donner  une  traduction  en  regard  du 


—  504  — 

texte  qui  aurait  quelquefois  pu  embarrasser  le  lecteur,  traduction  qui 
n*a  pas  dû  être  la  partie  la  plus  facile  de  sa  tâche. 

Le  poëme  est  suivi  de  notes  fort  détaill<^es;  puis  viennent  diverses 
pièces  de  vers  se  rattachant  à  la  guerre  de  1324,  abruptes,  d'une  fac- 
ture populaire,  obscures  quelquefois,  et  dont  il  eût  été  mal  aisé  de 
comprendre  les  allusions  satiriques  sans  Tinielligent  commentaire 
dont  elles  sont  accompagnées.  Des  preuves  tirées  des  Archives  Natio- 
nales, des  archives  de  Metz,  de  Goblentz  et  de  Luxembourg,  complè- 
tent rintérét  historique  de  cette  publication.  Enfin,  le  livre  se  termine 
par  une  étude  critique  du  texte  ;  c'est  le  travail  très-important  d'an 
érudit  dont  la  compétence  en  pareille  matière  est  bien  connue  des 
philologues.  On  se  rappelle  le  mémoire  de  M.  Bonnardot  sur  les 
chartes  françaises  de  Lorraine  et  de  Metz  et  sa  notice  sur  un  texte 
de^Lokerraim, — N'oublions  pas  de  dire  encore  que  quatre  index, 
composés  avec  soin  facilitent  toutes  les  recherches  que  Ton  peut 
avoir  à  faijre  dans  ce  volume  si  bien  rempli. 

Pour  donner  Tidée  la  plus  favorable  de  Texécution  matérielle  de  ce 
beau  livre,  il  suffit  de  rappeler  qu'il  est  édité  par  la  librairie  Firmin 
Didot  ;  nous  ajouterons  cependant  que  des  manuscrits  appartenant  à 
la  bibliothèque  de  Metz,  que  de  vieux  édifices  de  cette  ville  ont 
fourni  à  deux  de  ses  enfants,  MM.  Bellevoje  et  Hurel,  tous  les  motifs 
d'encadrements,  de  vignettes,  de  culd-de-lampe,  dont  tant  de  pages 
ont  été  ornées  avec  autant  de  luxe  que  de  goût. 

Th.  db  Putmajorb. 


ÏÏjem  Conte»  de  Cbarles  Perrault.  —  Cotites  en  vers.  Histoires  ou 
contes  du  temps  passé  (Contes  de  ma  mère  Loye,)  Avec  deux  essais  sur  la  vie  et  les 
Œuvres  de  Perrault  et  sur  la  mythologie  dans  ses  contes,  des  notes  et  va- 
riantes et  une  notice  bibliographique^  par  André  Lbfèvre.  Paris,  Alph.  Le- 
merre,  1875.  In-16  de  lxxx-182  p.  —  Prix  :  2  £r.  50. 

Même  après  la  splendide  édition  des  Contes  de  Perrault,  due  aux 
soins  de  M.  Gh.  Giraud  (de  l'Institut),  qui  parut  chezLe  Glére,  en  1865 
(1vol.  in-8,  imprimé  par  Louis  Perrin),  il  restait  à  donner  de  ces  char- 
mants récits  une  édition  qui,  moins  luxueuse,  moins  coûteuse,  fût  plus 
portative^  plus  commode,  e4;  qui,  avec  un  texte  encore  plus  pur,  ren- 
fermât surtout  plus  d'éclaircissements.  A  ce  dernier  égard^  les  plus  diffi- 
ciles seront  satisfaits  :  M.  Lefévre  a  tout  dit  sur  la  vie  de  Perrault,  sur 
ses  œuvres  en  général,  sur  ses  contes  en  particulier,  ainsi  que  sur  les 
rapprochements  à  établir  entre  les  contes  de  Perrault  et  les  contes 
antérieurs  les  plus  célèbres  de  tous  les  pajs.  Pour  la  biographie  de 
Fauteur  de  Cendrillon  et  du  Petit  Poucet  divisée  en  sept  chapitres  (/eu- 
nesse  de  Charles  Perrault^  Perrault  commis  de  Colbert^  PerroMli  académie 
den^  Perrault  défenseur  des  modernes,  Conte  badin  attribué  à  Perremlt^ 
Engouement  pour  les  contes  de  fies  vers  1690,  Les  contH  de  Perrault  en 


—  ao8  — 

vers  et  en  prose),  M.  Lof ôvre  s'est  heureusement  servi  deg  Mémoires 
de  Tadversairo  de  Boileau.  Les  notes  et  variantes,  qui  manquent  à  l'édi- 
tion Giraud,  rendent  indispensable  la  nouvelle  édition  de  ces  contes 
qui  garderont  toujours  une  suave  fraîcheur  et,  si  je  puis  ainsi  dire, 
une  immortelle  jeunesse.  Enfin,  je  dois  une  menti  on  spéciale  à  la  biblio- 
graphie (p.  167-179)  qui,  on  s'en  aperçoit  bien  vite,  a  été  dressée  par 
un  homme  entre  les  mains  duquel  ont  passé  toutes  les  éditions  qu'il 
signale  avec  une  si  minutieuse  exactitude.  11  est  imprudent  d'appli- 
quer à  quelque  ouvrage  que  ce  soit  Téloge  immense  que  résume  le  mot 
définitif,  et  pourtant  je  n'hésiterais  pas  à  effacer  le  peut-être  dans  cette 
phrase  de  M.  Lefévre(p.  vi)  :  «  N'est-ilpas  naturel,  en  publiant  cette 
nouvelle  et  peut-être  définitive  édition  de  Peaud'Ane,  de  Cendrillon^ 
de  la  Belle  au  bois  donnant,  de  Barbe-Bleue^  n'est-il  pas  juste  de  placer 
en  tête  de  ces  contes  la  biographie  de  celui  qui  ne  vit  que  par  eux  ?  » 

T.  DB  L. 


•lacques  Créttneau-JToly,  sa  vie  politique,  religieuse  et  littéraire^ 
d'après  ses  mémoires,  sa  correspondance  et  autres  documents  inédits,  par 
M.  Tabbé  U.  Maynârd,  chanoine  de  Poitiers.  Paris,  Finnin-Didot  ;  Pton,  et 
Brayet  Retaux^  1875.  In-8  dexv-54i  p.,  avec  un  portrait  et  un  fac-similé. 
—  Prix  :7  fr.  50, 

La  mémoire  de  M.  Crétineau-Joly,  si  vivement  attaquée  durant  sa 
vie,  méritait  d'autant  plus  d'être  défendue,  qu'on  visait  moins  en 
lui  l'homme,  imparfait  comme  tous  les  hommes,  que  les  grandes 
causes  dont  il  était  devenu  un  des  plus  ardents  champions.  M.  l'abbé 
Majnard  est  venu  à  la  fois  venger  l'honneur  de  l'écrivain,  souvent 
accusé  de  vénalité,  affirmer  l'autorité  de  ses  ouvrages,  prétendait-on, 
écrits  sur  des  documents  imaginaires,  et,  nous  ne  craignons  pas  de  le  dire, 
s'il  a  rendu  service  à  la  famille  de  l'auteur,  la  monarchie  et  la  religion 
ne  lui  doivent  pas  moins  de  reconnaissance.  Attaché  à  M.  Crétineau- 
Joly  par  les  liens  d'une  étroite  amitié,  ayant  eu  avec  lui  des  rela- 
tions presque  quotidiennes,  muni  de  tous  les  papiers  et  documents 
qu'il  a  laissés,  personne  n'était  plus  capable  que  lui  de  faire  la  lumière  ; 
et  son  cœur  est  trop  haut  placé,  ses  convictions  sont  trop  vives  et  trop 
sérieuses  pour  qu'il  ait  jamais  tenté  de  plaider  pour  l'ami  contre  les 
principes.  11  ne  craint  pas  de  nous  le  montrer  rude  comme  un  vieux 
sanglier  (ainsi  qu'il  s'appelait  quelquefois),  vantard,  personnel,  s' at- 
tribuant le  mérite  de  découvertes  qui  n'en  étaient  pas,  batailleur, 
frappant  quelquefois  à  tort  et  à  travers,  un  moment  injuste  envers 
Pie  IX,  dépassant  souvent,  dans  la  polémique,  les  bornes  du  respect 
et  des  convenances.  Il  raconte  aussi  bien  les  erreurs  de  sa  jeunesse 
sous  la  soutane  qui  le  fit  entrer  dans  le  cabinet  du  duc  de  Laval, 
ambassadeur  à  Rome,  sans  l'empêcher  de  publier  des  volumes  de 
DÉCEMBRE  1875.  '  T.  XV,  33. 


—  506  — 

poésies  que  n'inspirait  pas  toujours  l'Écriture  sainte^qu'il  nous  retrace 
son  retour  sincère  et  complet  aux  pratiques  chrétiennes,  et  sa  mort 
édifiante  et  pleine  de  consolations.  Il  excuse  quelquefois,  jamais  il  ne 
cache  ni  n'atténue  la  vérité. 

Crétineau-Jolj  fut,  par-dessus  tout,  un  polémiste  anti-révolution- 
naire, et  comme  tel  monarchique  et  catholique.  Son  histoire  n'est 
guère  que  celle  de  ses  ouvrages,  des  négociations  qui  ont  amené 
leur  composition,  leur  publication,  des  discussions  qu'ils  ont  sou- 
levées. Après  quelques  détails,  où  ne  manquent  point  les  traits 
piquants,  sur  sa  jeunesse,  son  séjour  à  Rome,  ses  œuvres  poétiques, 
pour  la  plupart  heureusement  oubliées  aujourd'hui,  nous  arrivons  à 
Técrivain,  qui.fut  journaliste  avant  d'être  historien.  Ses  principales 
étapes  dans  cette  partie  de  sa  carrière  sont  à  Nantes,  dans  C Hermine^ 
au  moment  de  Taffaire  de  la  duchesse  de  Berrj  ;  dans  la  Gazette  du 
Dauphiné,  à  Grenoble  ;  puis  dans  le  Nord,  de  Bruxelles,  dont  la  créa- 
tion donna  lieu  à  de  longues  et  curieuses  négociations;  les  révélations 
les  plus  intéressantes  sont  relatives  à  Tenlèvement,  du  greffe  de 
Rennes,  d'un  dossier  compromettant  pour  les  légitimistes,  à  des  rela- 
tions avec  M.  Teste,  et  à  l'affaire  Didier,  à  Grenoble. 

Comme  historien  royaliste,  le  premier  et  le  plus  beau  titre  de  Créti- 
neau  est  son  Histoire  de  la  Vendée  militaire,  pour  laquelle  Tavaient  prédis- 
posé sa  qualité  de  chouan,  sa  connaissance  du  pays  et  les  documents  qu'il 
s'était  procurés  par  ses  relations  comme  journaliste  légitimiste  :  livre 
plein  de  révélations  et  de  faits  nouveaux,  quoique  ne  montrant  pas 
toujours  les  choses  sous  leur  vrai  jour  et  se  piquant  de  cette  impartia- 
lité qui  frappe  d'abord  sur  les  amis,  pour  pouvoir  ensuite  tomber  avec 
plus  de  liberté  sur  les  ennemis.  Viennent  ensuite  :  Y  Histoire  des  Traités 
de  1815,  qui  lui  fut  surtout  inspirée  par  la  reconnaissance  envers  le 
baron  Dudon  ;  t Histoire  de  l'orléanisme,  où  se  trouvent  mêlés  MM.  de 
la  Guéronnière  et  de  Persignj,  qui  ont  même  été  ses  élèves  dans 
Y  Europe  monarchique;  l'Histoire  des  trois  derniers  princes  de  la  maison 
de  Condé,  qui  est  comme  une  revanche  contre  l'Empire,  du  secours 
qu'il  lui  avait  donné  dans  son  précédent  ouvrage* 

Comme  historien  religieux,  Crétineau  fut  encore  entouré  de  plus 
d'intrigues,  attaqué  plus  violemment  et  plus  gêné  dans  ses  allures.  Il  faut 
lire  toutes  les  négociations  qu'exigea  l'Histoire  des  jésuites,  rédigée  sur  la 
demande  et  avec  les  documents  fournis  par  la  Société  de  Jésus  ;  les  polé- 
miques qu'elle  souleva  avec  le  malheureux  P.  Theiner,  avec  de  faux 
amis  ;  toutes  les  accusations  qu'elle  valut  à  l'auteur,  qui  se  brouilla  avec 
les  Pères,  pour  se  réconcilier  plus  tard  avec  eux.  Ce  fut  encore  pis  pour 
l'Histoire  des  sociétés  secrètes,  demandée  par  Grégoire  XVI,  approuvée 
par  Pie  IX,  parla  cour  de  Vienne,  À  laquelle  il  fallut  renoncer,  après 
de  nombreuses  recherches  dans  toutes  les  chancelleries^  partioulière- 


—  507  — 

ment  à  Rome  et  à  Viemie,  avec  le  concours  du  prince  de  Mettemich, 
et  qui  est  aujourd'hui  complètement  détruite  ;  mais  une  partie  a  passé 
dans  VBistoire  du  Sunderbund,  sili^juste  envers  Pie  IX,  et  dans  l'Église 
romaine  en  face  de  la  Révolution.  Qui  ne  se  souvient  de  la  tempête, 
non  encore  calmée,  que  souleva  la  publication  des  Mémoires  de 
Consalvi  et  leurs  révélations  écrasantes  sur  le  Concordat?  Rappeler 
tous  ces  ouvrages,  c'est  enumérer  les  titres  de  Grétineau-Joly  à  la  re- 
connaissance des  catholiques.  M.  l'abbé  Maynard  analyse  ces  ouvrages, 
en  fait  connaître  le  fort  et  le  faible,,  en  raconte  Torigine,  révèle  la 
source  des  documents  nouveaux  qui  ont  été  pour  beaucoup  dans  leur 
succès,  et  dévoile  toutes  les  intrigues  ourdies  contre,  Fauteur,  tant 
pour  Tentraver  que  pour  lui  ôter  tout  crédit  et  étouffer  sa  voix  ;  c'est 
un  piquant  chapitre  d'histoire  littéraire,  où  l'histoire  générale  a  aussi 
sa  part.  Nous  recommandons  surtout  la  partie  relative  au  Concordat. 
Si  nous  parlions  comme  simple  lecteur,  nous  dirions  à  l'auteur  que 
son  livre  nous  a  tellement  attaché  que  nous  ne  l'avons  quitté  qu'après 
l'avoir  terminé.  Mais^  comme  critique  et  en  pensant  au  public,  nous 
devons  avouer  que  M.  Tabbé  Maynard  se  complaît  trop  dans  la  publi- 
cation de  correspondances  et  de  documents^  s'attarde  dans  des  détails 
et  des  considérations  trop  développées  pour  expliquer  l'origine  de 
certains  ouvrages,  lès  intentions  et  les  vues  de  Crétineau- Joly  ; 
c'est  là  seulement  que  l'ami  se  trahit.      René  db    Saint-Mauris. 


HISTOIRE 


Voyage  au  pôle  IVord  des  navlrea  la  Hansa  et  la  Ger- 
manla»  rédigé,  d'après  les  relations  officielles  allemandes,  par  G.  Gour- 
DAULT.  Avec  3  cartes  et  80  grav.  Paris,  Hachette,  1875.  Gr.  in-8  de  432  p. 
—  Prix  :  iO  fr. 

Les  régions  dites  circumpolaires  ont  été,  dans  ces  dernières  années, 
le  théâtre  de  nombreuses  explorations  qui  ont  enrichi  de  quelques 
nouveaux  cantons  nos  cartes  géographiques.  Celle  dont  M.  J.  Gour- 
dault  offre  le  résumé  au  public  français  n'est  pas  la  moins  intéressante, 
bien  que  le  titre  du  présent  volume  n'en  soit  peut-être  pas  très-exac- 
tement choisi,  ^expédition  de  la  Bansa  et  de  la  Germania  avait  en 
effet  pour  mission  moins  de  chercher  à  atteindre  le  pôle,  qu'à  relever 
la  côte  orientale  du  Groenland ,  et  àpréparer,pour  ainsi  dire,  les  voies 
à  une  exploration  ultérieure.  Les  instructions  rédigées  par  le  célèbre 
et  infatigable  docteur  Petermann  furent  suivies  par  les  navigateurs 
autant  que  les  circonstances  le  permirent.  Us  atteignirent  la  banquise 
du  Groenland  entre  les  73  et  74*  de  latitude  ;  un  peu  plus  haut,  une  glace 
compacte  leur  ferma  bientôt  le  passage,  et,  après  avoir  hiverné  près 


—  508- 

d'une  année  dans  File  Pendulum^  la  Gertnania  regagna  rAllemagne 
sans  avoir  pu  s'élever  au-delà  de  75^  29\  Les  membres  de  Texpédîtion 
avaient  atteint  en  traîneau  le  77°.  —  On  sait  que,  dix  ans  auparavant, 
rAméricain  Hayes  avait  pu,  sur  la  côte  occidentale,  remonter  avec  £on 
navire  jusqu'au  82°  30*.  —  Les  résultats  scientifiques  de-  rexpédition 
compensèrent  largement  Timpossibilité  où  se  trouvèrent  les  hardis 
explorateurs  de  s'élever  plus  au  nord.  Des  collections  importantes  et 
considérables  d'histoire  naturelle  ont  été  recueillies,  ainsi  que  de 
nombreuses  observations  astronomiques  et  physiques,  et  la  côte 
orientale  du  Groenland  a  été  relevée  sur  une  étendue  d'un  degré  au 
moins  au-delà  du  point  extrême  antérieurement  reconnu. 

Presque  au  commencement  du  vojage,  dans  les  environs  de  l'ile 
Jean-Majen,  le  20  juillet  1869  (le  départ  avait  eu  lieu  le  16  juin  pré- 
cédent), par  suite  de  la  fausse  interprétation  d'un  signal  de  la 
Germania,  la  Bansa,  au  lieu  de  la  rallier,  s'était  énergiquement  portée 
vers  Touest,  et  ce  malentendu,  au  milieu  d'un  brouillard  boréal,  fut  la 
cause  de  la  séparation  des  deux  navires  dont  les  équipages  ne  se 
retrouvèrent  que  quatorze  mois  plus  tard.  L'histoire  de  celui  de  la 
Hansa,  pendant  ces  quatorze  mois,  forme  l'épisode  le  plus  émouvant  de 
la  campagne.  En  octobre,  la  glace  écrasa  le  navire  dont  on  ne  put 
sauver  qu'un  peu  de  bois  et  les  bordages.  Heureusement  qu'en  prévi- 
sion de  cette  catastrophe,  la  plus  grande  partie  des  provisions  avait 
été  transportée  sur  la  banquise.  Mais  bientôt  celle-ci  se  fendit,  et 
l'équipage  sa  trouva  sur  un  immense  îlot  de  glace  flottante,  à  la  dérive 
dans  l'Atlantique,  avec  trois  embarcations,  des  vivres  et  du  combus- 
tible, ce  qui  lui  permit  de  se  construire  une  hutte  en  briques  de  char- 
bon de  terre  et  d'envisager  sans  désespoir  sa  terrible  position.  Son 
installation  pour  un  long  hiver  polaire  était  donc  aussi  bien  organisée 
que  possible  ;  mais,  au  commencement  de  janvier,  au  milieu  d'une 
épouvantable  tempête,  Ttlot  de  glace  se  sépara  en  deux,  et  la  rupture 
eut  précisément  lieu  sous  la  hutte  I...  Personne  ne  périt,  les  embar- 
cations et  la  majeure  partie  des  provisions  se  trouvèrent  providen- 
tiellement sur  le  même  glaçon.  Celui-ci,  dérivant  vers  le  sud,  voyait 
tous  les  jours  sa  surface  diminuer  par  la  rupture  partielle  de  ses  bords. 
Plusieurs  hommes,  de  crainte  d'être  surpris  par  un  nouvel  accident, 
durent  coucher  dans  les  embarcations...  toujours  parées  d'ailleurs  à 
prendre  la  mer.  Enfin,  au  printemps,  ils  étaient  redescendus  jusqu'au 
61^  et  réussirent  alors,  à  l'aide  de  leurs  chaloupes,  à  aborder  la  côte 
sud-est  du  Groenland.  Us  avaient  ainsi  parcouru  plus  de  200  milles, 
et,  lorsqu'après  avoir,  avec  des  peines  infinies,  doublé  le  cap  FareweU, 
il  arrivèrent  à  Frédériksdal,  l'un  d'eux  était  devenu  fou!...  Ils 
n'avaient  pu  reconstruire  artificiellement  leur  glaçon  flottant  à  mesure 
qu'il  s'ébréchait,  comme  le  fantaisiste  J.  Verne  l'a  imaginé  dans  son 


—  809  — 

Pays  des  fourrures.  Il  est  même  j^evL  probable  que  Fidée  leur  en  soit 
venue  à  l'esprit.  Cet  épisode  n'en  reste  pas  moins  un  des  plus  dra- 
matiques de  l'histoire  des  naufrages,  et  c'est  dire  tout  l'intérêt  du 
nouveau  volume  dont  l'exécution  typographique  et  les  illustrations  ne 
laissent  d'ailleurs  rien  à  désirer  au  lecteur,  ainsi  qu'il  est  dans  les 
habitudes  de  la  maison  Hachette. 

Nous  serions  heureux  de  voir  Tauteur  du  Voyage  au  pôle  Nord^  qui 
a  tiré  si  bon  parti  des  relations  allemandes  officielles,  publiées  dans 
les  Mittheilungen  de  Petermann,  nous  donner  également  un  bon 
résumé  des  expéditions  du  Polaris  et  du  Tegethoff. 

F.   DB  ROQUBFBUIL. 


Oernler  Journal  du  Docteur  O.  KilvlngpBtone,  rdatant  ses  ex- 
plorations  et  découvertes  de  1866  à  i873,  suivi  du  récit  de  ses  derniers  moments^ 
rédigé  d'après  le  rapport  de  ses  fidèles  serviteurs,  Chouma  et  Souzi^  par  H. 
Waller,  membre  de  la  Société  générale  de  géographie  de  Londres,  ou- 
vrage traduit  de  Tanglais,  avec  rautorisation  des  éditeurs,  par  M.  H. 
LoREAu,  et  contenant  60  gravures  et  4  cartes.  Paris,  Hachette,  1875.  2  grand 
vol.  in-8  de  vin-394-4i6pages.  —  Prix  :  20  fir. 

Un  intérêt  douleureux  s^attache  désormais  au  nom  de  Livingstone. 
Aujourd'hui  que  toutes  les  circonstances  de  sa  mort  sont  connues,  on 
ne  sait  ce  qu'on  doit  admirer  le  plus  chez  ce  grand  homme,  auquel  on 
doit  de  si  importantes  découvertes^  la  science,  la  philanthropie,  la 
persévérance^  le  courage,  le  caractère,  la  foi,  la  résignation.  Nous 
avouons  avoir  été  particulièrement  ému,  en  parcourant  les  pages  de 
ce  dernier  journal,  de  la  profondeur  du  sentiment  religieux  dont  elles 
sont  pleines,  et  des  élévations  de  cette  intelligence  supérieure  vers 
Dieu,  créateur  et  rédempteur.  A  chaque  page,  pour  ainsi  dire,  on 
touche  du  doigt  la  grande  pensée  civilisatrice  de  l'abolition  de  Tes- 
clavage  qui  a  inspiré  tous  les  travaux  de  Livingstone,  et  à  laquelle^ 
dans  une  pensée  d'amour  de  Dieu  et  de  l'humanité,  il  a  consacré  sa 
vie,  écoulée  pour  un  bon  tiers  loin  des  siens,  loin  de  sa  patrie,  sous 
un  climat  meurtrier,au  milieu  de  toutes  les  vicissitudes,  de  toutes  les 
difficultés,  de  toutes  les  misères  imaginables.  L'énergie  de  cet 
homme  était  incomparable.Lorsque,  épuisé  de  privations  et  de  fatigues 
en  proie  à  des  fièvres  qui  le  minaient  depuis  deux  ans  sans  Tarrêter,  il 
fut  enfin  dans  l'impossibilité  de  continuer  ses  explorations,  ses  fidèles  ser- 
viteurs, réduits  à  le  porter  dans  une  espèce  de  palanquin,  s'arrêtè- 
rent un  jour  au  village  de  Schitannubo  de  Tllala,  Livingstone  n'était 
déjà  plus  qu'un  cadavre,  soutenu  seulement  encore  par  une  volonté  de 
fer.  Le  dernier  feuillet  de  son  journal  porte  la  date  du  27  avril  1873. 
Trois  jours  après,  les  souffrances  ayant  augmenté,  le  délire  s'empara  de 
lui  au  milieu  de  la  nuit;  il  appela  Sanzi,et,lui  ayant  demandé  de  l'eau. 


-  510  — 

le  renvoya.  Que  ee  paasa-^t^il  alors?  Livlngstone  eut  éyidemment  le 
sentiment  de  sa  fin  très-prochaine;  il  comprit  qae  l'agonie  allait  com- 
mencer, et  il  voulut,  par  un  suprême  effort,  conformer  sa  mort  à  sa 
vie  ;  il  voulut  que  son  dernier  soupir  fût  une  dernière  prière.  Une 
heure  après,  quand  Sanzi  entra  avec  quelques  autres,  le  lit  était 
vide...  Son  maître  s'était  levé...  Une  bougie,  collée  sur  la  table  par  sa 
propre  cire,  jetait  une  clarté  suffisante  poar  le  bien  voir.  À  genoux  et 
penché  en  avant,  Livingstone  avait  la  tête  dans  ses  mains,  qui 
étaient  croisées  sur  l'oreiller.  Ils  le  regardèrent  pendant  quelques 
instants,  et  ne  virent  aucun  signe  de  respiration.  Mathieu  (l'un  de  ces 
hommes)  lui  posa  doucement  le  doigt  sur  la  joue;  elle  était  froide: 
Livingstone  était  mort...»  On  sait  que  sa  dépouille  mortelle  fut  rame- 
née dans  sa  patrie,  et  repose  aujourd'hui  à  Westminster,  —  solennel 
et  dernier  hommage  rendu  par  T Angleterre  à  Tun  de  ses  plus  glorieux 
enfants. 

Ses  papiers  aussi,  ses  cartes,  ses  instruments  ont  été  recueillis  et 
conservés.  Livingstone  portait  constamment  sur  lui  un  carnet,  sur 
lequel  les  moindres  faits  et  observations  étaient  consignés  avec  soin  : 
quand,  un  jour,  tout  le  papier  blanc  des  carnets  fut  épuisé,  il  mit  en 
cahier  de  vielles  gazettes,  et  écrivit  sur  leurs  feuillets  jaunis  par  Thu- 
midité  africaine^  en  travers  de  l'impression.  Or,  par  un  bonheur  ines- 
péré, pas  une  de  ces  notes  quotidiennes  n'a  été  perdue;  le  récit  est 
complet,  depuis  le  jour  ou  Livingstone  quitta  Zanzibar,  en  mars  1866^ 
jusqu'au  27 avril  1873.  Le  déchiffrement  des  notes  écrites  sur  les  vieux 
journaux  a  pleinement  réussi^  et  tout  est  aujourd'hui  publié,  par  les 
soins  religieux  de  son  fidèle  et  savant  ami  M.  Waller  ;  tout...  sauf  la 
matière  strictement  scientifique  (observations  hygrométriques,  baromé- 
triques, hypsamétriques,  etc.  etc.),  réservée  pour  une  publication  spé- 
ciale. Dans  ce  journal,  toute  la  partie  qui  se  rapporte  au  séjour  de 
Stanley  près  de  Livingstone  est  traitée  avec  fort  peu  de  détails,  relati- 
vement. On  sent  que  le  docteur  comptait  sur  les  notes  de  son  inventeur, 
et  voulait  éviter  les  répétitions  et  économiser  ses  carnets.  En  effet, 
Stanley  a  publié  le  récit  très-complet  des  explorations  entreprises  en 
commun,  pendant  son  séjour  au  centre  de  l'Afrique.  Le  journal  de  Li- 
vingstone se  complète  ainsi  naturellement  et  heureusement. 

Quant  aux  cartes,  l'éditeur,  habitué  à  donner  plus  qu'il  ne  promet, 
en  a  joint  cinq  à  l'ouvrage,  au  lieu  de  quatre  annoncées.  Ces  cartes  sont 
fort  précieuses;  elles  reproduisent  avec  une  exactitude  scrupuleuse  les 
tracés  de  Livingstone  lui-même.  On  en  avait  vu  quelques  fac-similé  à 
l'exposition  de  géographie  de  l'année  dernière.  Les  tracés  originaux 
sont  rectifiés  par  les  notes  du  journal.  Ils  serviront,  à  leur  tour,  à  recti- 
fier les  cartes  géographiques  dressées  jusqu'ici,et  dans  lesquelles  le  lac 
Nyassa,  entre  autres,  a  une  forme  inexacte.  Rien,  on  le  voit,  n*a  été 


négligé  pour  rendre  cette  publication  yraiment  digne  du  grand  homme 
dont  elle  retrace  les  travaux  et  met  au  jour  les  documents. 

F.  ]>B  ROQUBFBUIL. 


lAmafllay  récit  d'toM  exploration  dans  V Afrique  eentrale^  pour  VabolUUm  de 
la  iraiie  des  noirs,  par  Sir  Sahubl  White  Baker.  Ouvrage  traduit  de  l'an* 
glaisy  avec  l'autorisation  de  Tauteur,  par  Hippolytb  Vatteuare,  et  conte- 
nant 56  gravures  et  deux  cartes.  Paris,  Hachette,  1873,  in-8  de  iv-460  p. 
--  Prix  :  10  fr. 

On  connaît  les  services  rendus  à  la  géographie  par  sir  Samuel 
Baker;  on  sait  que  c'est  lui  qui  a  découvert  un  des  deux  grands  réser- 
voirs que  traverse  le  Nil  avant  de  descendre  vers  la  Méditerranée,  le 
lac  Albert  Njanza.  Cette  fois,  c'est  moins  dans  Fintérét  de  la  science 
que  dans  l'intérêt  de  Thumanité  que  le  hardi  explorateur  a  entrepris 
Texpédition  dont  le  récit  est  contenu  dans  ce  volume.  Lé  i)as8in  du 
Nil  blanc  était  désolé  parles  traflcants  de  chair  humaine.  Cinquante 
mille  hommes  au  moins  étaient  enlevés  chaque  année  et  entraînés  en 
esclavage;  beaucoup  mouraient  en  route;  bien  d'autres  étaient  tués, 
et  ces  pays,  jadis  fertiles,  se  dépeuplaient  chaque  jour.  Le  vice-roi 
d'Egypte,  Ismaïl  Pacha,  résolut  de  mettre  un  terme  à  ces  brigandages  ; 
ilorganisa  une  expédition  et  en  confia  le  commandement  à  sir  Samuel 
Baker.  Une  armée  relativement  considérable,  seize   cent  quarante- 
cinq  hommes,  deux  batteries  d'artillerie,  une  flottille  de  neuf  vapeurs  et 
de  cinquante -cinq  voiliers  furent  placées  sous  ses  ordres.  Un  personnel 
anglais  de  onze  personnes  et  l'intrépide  lady  Baker  accompagnaient 
Tillustre  voyageur,  et  lui  rendirent  de  nombreux  et  dévoués  services. 
A  vrai  dire,  c'étaient  à  peu  près  les  seules  personnes  sur  lesquelles  il 
pût  tout  à  fait  compter,  car  l'armée  ne  le  suivait  qu'avec  une  certaine 
répugnance.  Le  but  de  l'expédition  était  éminemment  impopulaire  ; 
les  officiers  égyptiAis  et  les  gouverneurs  des  provinces,  qui  trouvaient 
leur  compte  dans  la  traite  des  noirs,  n'avaient  aucun  désir  de  la  faire 
cesser,  et,  en  dépit  des  ordres  formels  du  khédive,  se  prêtaient  de 
fort  mauvaise  grâce  à  une  entreprise  organisée  dans  ce  but.  C'est  à 
travers  tous  ces  obstacles  que  Samuel  Baker,  parti  de  Khartoum,  se 
dirigea,  à  travers  le  Kordofan  et  des  pays  innommés  encore,  vers  Gon- 
dokoro,  le  principal  siège  de  la  traite  des  noirs,  ayant  à  lutter  à  la 
fois  contre  les  hommes  et  contre  la   nature,  assailli  par  les  indi- 
gènes et  contrarié  par  les  traôcants,  combattant  sans  cesse,  déli- 
vrant les  esclaves  sur  sa  route  et  cherchant  à  établir  un  commerce 
régulier.  Arrivé  à  Qondokoro  le  15  avril  1871,  il  en  proclama  solen- 
nellement l'annexion  à  l'Egypte,  le  26  mai,  et,  en  même  temps^  par  un 
ordre  du  jour  adressé  à  ses  troupes,  il  déclarait  la  traite  abolie.  De 
Gondokoro,  baptisé  par  lui  Ismailia,  Baker  poursuivit  sa  route  vers 


-  512  — 

TÂlbert  Nyânza  et  dans  loB  pays  qui  bordent  le  l,ac  jusqn'à  POuganda, 
où  il  signa  un  traité  avec  le  roi  Mtésé.  Tels  furent  les  résultats  offi- 
ciels de  Texpédition  ;  mais  ces  résultats,  quant  à  Tabolition  de  la 
traite,  dureront-ils  ?  Ici,  Samuel  Baker  lui-même  n'ose  pas  Fespérer. 
Trop  d'intérêts  privés  sont  engagés  dans  cet  infâme  traûc,  et  il  est 
bien  à  craindre  que  les  bonnes  intentions  très-réelles  du  vice-roi  ne 
demeurent  longtemps  impuissaiïtes  en  face  de  la  mauvaise  volonté 
sourde  de  ses  sujets  et  de  ses  officiers.  M.  db  la  Rochbtbrie. 


EioiidreB,  par  Locis  Énault.  Illustré  de  174  gravures  sur  bois,  par  Gustave 
DoHÉ.  Paris,  Hachette  1876.  Gr.  in-4  de  434  p.  —Prix  :  50  fr. 

Londres  est,  à  coup  sûr,  la  ville  la  plus  difficile  à  décrire,  car  ce 
n'est  point  une  ville,  mais  la  réunion  de  vingt  villes,  ayant  chacune 
leur  aspect  différent,  leur  population,  leurs  mœurs.  M.  Louis  Énault 
n'a  pas  la  prétention  de  réaliser,  en  quelques  pages,  ce  qui  demande- 
rait des  volumes  ;  mais  il  a  beaucoup  vu,  il  a  bien  vu,  et  il  dit  à 
merveille  ce  qu'il  a  vu.  Nous  entrons  dans  Londres,  avec  lui,  par 
la  Tamise,  à  travers  la  foule  pressée  des  navires  de  toutes  les  nations  ; 
nous  visitons  la  cîté^  a  où  des  négociants  qui  n*ont  jamais  lu  que  leur 
grand  livre  trônent  au  fond  de  leurs  comptoirs  obscurs,  et  donnent 
des  lois  à  l'univers;  »  nous  parcourons  les  opulents  quartiers  du  West 
End  ;  les  districts  du  vice  et  de  l'ignorance,  où  le  policeman  ne  pénètre 
qu'à  l'aide  d'un  déguisement,  en  particulier  Whitechapel,  qui  com- 
prend huit  mille  maisons  <(  qu'habite  une  population,  hâve  et  flétrie, 
de  femmes  amaigries,  demi-nues,  et  d'enfants  blêmes  qui  se  vautrent 
dans  la  fange  avec  leurs  porcs.  »  Nous  voici  dans  ces  parcs  splendides, 
auxquels  il  ne  manque  qu'un  peu  plus  d'air  et  de  lumière  :  Saint-James, 
le  Green,  Hjde  Park,  Kensington,  Regent's  Park,  avec  son  Zoological 
Garden.  Le  cheval  tient  une  grande  place  dans  la  vie  anglaise  :  nous 
assistons  au  Derby,  et  c'est  à  coup  sûr  une  des  parties  les  mieux 
réussies  du  livre.  Après  le  Derby,  le  Boat  race  autre  événement 
important  de  Londres.  Puis  les  principaux  monuments  :  Saint*Paulf 
Westminster,  Saint-James,  Buckingham,  Guildhall,  Mansion  Home, 
Parliament  Hmse  ;  les  rues  de  Londres,  les  prisons,  les  tbé&tres, 
les  musées  et  collections,  les  clubs,  les  brasseries,  tout  passe  sous  nos 
jeux,  et  le  livre  se  ferme  sur  la  vie  de  Londres  pendant  ce  qu'on 
appelle  la  saison,  et  sur  ces  types  si  curieux  et  si  variés  qui  abon- 
dent dans  la  ville  cosmopolite. 

Que  dire  maintenant  des  splendides  illustrations  qui  se  rencontrent  à 
toutes  les  pages^et  où  le  crayon  de  Gustave  Doré  s'est  prodigué  avec  une 
richesse  et  une  variété  merveilleuses?  Peut-on  rien  voir  de  plus  charmant 
que  Dick  Whittington  écoutant  les  cloches  deHighgate  ?  ou  que  cette  com- 
position :  Des  voyageurs  iront  s'asseoir  aux  bords  de  la  Tamise  ?  Quoi  de 


—  5i3  — 

mieux  rëassi  que  oe  pêle-mêle  des  rues  de  Londres,  où  Tartiste  a  su 
déployer  toute  sa  verve?  Et  tous  ces  types  pris  sur  le  vif  ?  Et  ces 
scènes  populaires  ?  et  ces  tableaux  navrants  de  la  vie  ouvrière  ? 
Il  faut  ouvrir  ce  bel  ouvrage,  et  on  ne  le  quitte  plus  SQps  l'avoir 
feuilleté  tout  entier  et  sans  vouloir  7  revenir  encore.  C'est  à  coup  sûr 
un  des  plus  beaux  ornements  des  tables  de  nos  salons.        E.  d'A. 


Geschichte  der  quleti»tl«cheii  Mystlk  In  der  Katli«>^ 
llschen  KIrche  [Histoire  du  myticisme  quiétiste  dofis  VÊglise  caiholiqu/e), 
par  le  D'  Heppe,  Berlin,  1875.  In-8  de  xii-522  p. 

Le  titre  qu'on  vient  de  lire  promet  plus  que  ne  donne  l'ouvrage. 
Le  lecteur  s'attend  à  une  histoire  de  la  théologie  mystique  de 
rÉglise^  sujet  aussi  important  que  vaste  ;  au  lieu  de  cela,  il  trouve 
un  récit,  fort  détaillé  il  est  vrai^  de  le  vie  de  M'^*'  de  Guyon,  suivi 
d*un  exposé  de  ses  doctrines  et  d'une  analyse  de  ses  écrits.  —  Le 
reste  du  livre  n'est  qu'accessoire,  de  sorte  que  nous  n'avons  là  au 
fond  qu'un  chapitre  de  l'histoire  du  mysticisme  catholique,  et  nulle- 
ment son  histoire  entière.  L'auteur  avoue  lui-même  dans  la  préface 
que  son  intention  a  été  de  ne  donner  qu'une  vie  critique  de  cette 
femme  demeurée  célèbre,  mais  qu'à  mesure  qu'il  avançait  dans  ses 
recherches,  celles  surtout  qui  concernent  la  controverse  entre  Bossuet 
et  Fénelon,  il  dut  élargir  le  cadre  de  son  travail,  soumettre  à  la  cri- 
tique les  témoignages  souvent  opposés  des  écrivains  exposant  les 
mômes  faits  relatifs  au  quiétisme  catholique.  D'ailleurs,  il  se  trompe 
fort  en  prétendant  avoir  découvert  un  monde  nouveau,  aujourd'hui 
tombé  eu  oubli,  mais  fort  hanté,  autrefois,  par  des  âmes  adonnées  à  la 
perfection.  Les  gens  peu  versés  dans  la  science  sont  assez  sigets  à 
l'illusion  de  croire  faire  des  découvertes,  lorsqu'ils  ne  font  qu'ap- 
prendre des  vérités  qui  jusque-là  leur  étaient  inconnues.  Il  en  est 
de  même  de  notre  auteur.  La  manière  dont  il  parle  du  mysticisme 
catholique  montre  assez  qu'il  y  est  complètement  étranger,  qu'il  n'en 
a  pas  même  une  notion  juste  et  claire.  Aussi  les  conclusions  aux- 
quelles il  est  arrivé,  à  la  fin  de  ses  longues  recherches,  existent 
dans  son  imagination  bien  plus  qu'en  réalité.  Ainsi,  il  prétend  que 
la  hiérarchie  ecclésiastique,  l'Inquisition,  les  évêques  et  les  jésuites 
ont  fait  des  efforts  unanimes  pour  arrêter  le  progrès  du  mysticisme, 
pour  lui  ôter  tout  intérêt  et  le  supprimer.  Cependant  lui-même  cite, 
parmi  les  auteurs  mystiques,  des  écrivains  de  la  Compagnie  de  Jésus, 
Alvarez  de  Paz,  Alphonse  Rodriguez,  Surin,  auxquels  il  aurait  pu 
ajouter  bien  d'autres,  par  exemple,  le  P.  François  Arias  (1533- 
1605),  recommandé  par  saint  François  de  Sales  dans  son  Introduction 
à  la  vie  dévote,  et  auteur  d'un  grand  ouvrage  en  trois  volumes  inti- 
tulé de  l'Imitation  du  Christ  dont  l'infatigable  chevalier  Pierre  Marietti 


—  614  — 

▼ieat  de  donner  à  Tarin  ane  nouvelle  édlUon  italienne  en  nenf 
Yolomes  faisant  partie  de  sa  belle  coUeotion  arrivée  déjà  an  cent- 
yingt-flixième  volume.  C'est  là  une  des  nombreuses  contradictions  dans 
lesquelles  tombe  récrivain  allemand,  et  qui  étaient  inévitables  du  mo- 
ment où  il  s'est  placé  au  point  de  vue  anti-catholique.  Le  reproche 
d'inconséquence  flagrante  qu'il  adresse  à.  l'Église  retombe  de  tout  son 
poids  sur  lui-même. 

«  Désormais,  écrit-il,  il  est  clair  comme  le  jour,  que  le  quié- 
tisme  a  été  condamné  par  la  môme  autorité  ecclésiastique  qui,  un 
siècle  auparavant,  l'avait  approuvé,  sanctionné,  favorisé;  son  infailli- 
bilité a  trouvé,  dans  cette  contradiction  manifeste,  un  démenti  des  plus 
formels.  » 

Il  voit  même^  dans  la  condamnation  du  quiéti8me,un  véritable  crime 
que  l'Église  aurait  commis  envers  ceux  qu'elle  avait  auparavant  bénis  et 
dont  certains  précurseurs  ont  été  placés  par  elle  au  rang  des  saints. 
(Préf.  p.  V.)  Molinos,  M""  Gujon,  le  P.  Lacombe,  son  directeur,  se- 
raient, d'après  M.  Heppe,  tombés  victimes  de  l'arbitraire  de  rautocrate 
flrançais  Louis  XIY,  et  de  l'intérêt  personnel  de  quelques  hiérarques. 
On  ne  saurait  faire  preuve  d'une  plus  grande  confusion  d'idées  : 
mettre  sur  la  même  ligne  les  théories  chimériques  de  Molinos  et  la 
doctrine  ascétique  de  saint  Pierre  d'Alcantara,  les  rêveries  exaltéee 
à0  M"*  Gujon  et  la  sublime  spiritualité  de  sainte  Térèse,  n'esi^e 
pas  confondre  le  faux  mysticisme  avec  le  vrai,  n'est-ce  pas  ignorer 
en  quoi  consiste  la  véritable  question?  Du  point  de  vue  où  le  Dr  Heppe 
s'est  placé  pour  embrasser  l'ensemble  de  son  sujet,  il  ne  pouvait  pas  voir 
les  choses  autrement  :  ayant  fait  d'une  sainte  Térèse,  d'un  saint  Jean 
de  la  Croix  et  de  tant  d'autres  ascètes  éminents  autant  de  précurseurs 
quiétistes  de  Molinos  et  de  M''^  Guyon,  il  dut  naturellement  taxer  de 
contradiction  et  d'ii^justice  la  conduite  qu'a  tenue  l'Église  en  approu- 
vant la  spiritualité  des  uns  et  en  réprouvant  celle  des  autres. 

Voyons  maintenant  de  quoi  se  compose  cette  histoire  du  mysticisme 
quiétiste.  L'ouvrage  se  partage  en  huit  sections  dont  la  première 
sert  de  préliminaires  à  la  vie  de  M"*  Guyon  et  la  dernière,  véritable 
hors  -  d'œuvre ,  traite  du  mysticisme  dans  TEglise  évangélique. 
L'histoire  de  M"""  Guyon  remplit  le  reste  du  volume.  Quoique 
l'auteur  ait  pris  un  grand  soin  de  se  rendre  compte  de  toutes  les 
péripéties  par  lesquelles  à  passé  son  héroïne,  il  est  cependant 
douteux  que  le  public  français  y  trouve  du  nouveau,  même  dans 
le  récit  de  la  célèbre  controverse  de  Bossuet  avec  Fénelon,  qui  est 
traitée  d'ailleurs  avec  beaucoup  de  détails  (p.  378-448).  Tout  cela 
est  connu  depuis  longtemps  et  on  possède  sur  tout  cela  des  écrits  plus 
véridiques  que  ne  l'est  le  livre  du  docteur  allemand,  qui  déna- 
ture les  faits  les  plus  notoires  en  les  présentant  sous  un  faux  jour. 
Qu'on  en  juge  par  l'exemple  suivant  pris  entre  mille. 


—  815  — 

Tout  le  monde  admire  rhumiliiédont  Fénelon  donoa'nne  si  éclatante 
preuve  en  se  soumettant  au  décret  du  Pape  portant  la  condamnation 
de  son  livre  des  Maximes  des  Saints.  Quant  à  notre  auteur  d*Outre- 
Rhin,  il  met  en  doute  la  sincérité  de  cette  soumission.  «  Il  ne  faut  pas 
croire,  dit-il,  qu'en  se  soumettant  au  Pape,  Fénelon  ait  renoncé  au 
quiétisme  ou  Tait  considéré  comme  erroné.  Il  s'est  conduit,  dans  cette 
circonstance,  en  vrai  catholique :il  se  soumit  par  obéissance,  en  déclarant 
qu'il  déchargeait  sa  conscience  dans  celle  de  son  supérieur»  Il  laissa  faire 
l'autorité  ecclésiastique,  sans  en  assumer  la  responsabilité.  Quant  à  sa 
doctrine,  il  y  resta  fidèle  comme  par  le  passé,  puisqu'il  voyait,  dans  le 
décret  papal,  la  condamnation  non  de  sa  doctrine,  mais  seulement  du 
livre  qui  la  contenait  et  rendait  d'une  manière  imparfaite  (p.  441, note).» 
En  d'autres  termes,  Tarchevéque  de  Cambrai  aurait  agi^  d'après 
M.  Heppe,  en  vrai  janséniste,  ce  qui  est,  en  effet,  nouveau.  De  la 
même  manière.  M"'*'  Gujon  devient^  sous  sa  plume,  catholique  de 
nom,  mais  protestante  d'esprit  (p.  489),  bien  que  chacun  sache  qu'elle  est 
toiyours  restée  obéissante  à  l'Église  et  reconnut  ses  erreurs  qui  pro-* 
venaient  d'une  piété  exagérée  et  mal  éclairée  plutôt  que  de  la  mauvaise 
volonté  ou  de  l'orgueil.  Sous  une  meilleure  direction,  elle  aurait  pu 
devenir  une  sainte.  Il  s'est  même  trouvé  des  gens  qui  la  tinrent 
pour  une  sainte  de  premier  ordre  ;  entre  autres,  Dutoit-Membrini,  pas- 
teur protestant  de  Lozanne  et  un  des  plus  exaltés  de  ses  admirateurs,  qui 
alla  jusqu'à  affirmer  que  M"^'  Gujon  a  été  presque  égale  en  sainteté  à 
Marie  et  «  même  qu'elle  eût  pu  l'égaler  s'il  était  possible  qu'il  y  e&t  deux 
mères  de  C Homme-Dieu  (p.  517)  I 

L^auteur  raconte,  sur  ce  dernier  représentant  du  quiétisme  expirant, 
des  détails  fort  intéressants  et  qu'on  ne  trouverait  pas  ailleurs  peut- 
être.  Il  parle  aussi  de  M™*  Kriidner,  autre  admiratrice  de  M^* 
Gujon,  et  non  moins  célèbre  que  celle-ci;  mais  il  ne  le  fait  qu'en  pas- 
sant, et  renvoie  le  lecteur  au  travail  que  Charles  Ëynard  {Biographie 
der  Frau  von  KrOdener^  Paris,  1849,  2  vol.)  avait  consacré  à  la  mé- 
moire de  la  mystique  baronne. 

Comme  couronnement  du  mysticisme  protestant,  citons  avec  l'au- 
teur une  pauvre  victime  d'exaltation,  Marguerite  Péters,  qui  s'est 
fait  crucifier  (en  1SS3),  afin  de  mieux  ressembler  au  divin  Sauveur. 

Enfin,  quelle  est  la  morale  du  livre  que  nous  annonçons?  car  chaque 
livre  doit  en  avoir  une.  Si  je  ne  me  trompe,  l'écrivain  allemand  l'a 
formulée  à  la  fin  de  sa  préface.  En  partant  de  la  condamnation  des 
Maximes  des  Saints^  extorquée  au  pape  Innocent  XIII  par  Louis  XIY 
sous  peine  des  menaces,  M.  Heppe  conclut  que  TÉglise  d'alors  savait 
rendre  à  César  ce  qui  est  à  César  et  que  son  exemple  devrait  être  imité 
par  l'Eglise  allemande  d'aujourd'hui.  On  y  reconnaît  la  morale  du  pro- 
testantisme, aussi  rebelle  contre  toute   autorité  du  Saint-Siège,  que 


—  516  — 

servile  envers  les  puissances  temporelles.  Le  docte  historien  de 
M»*  Gujon  oublie  qu'entre  les  exigences  du  grand  roi  et  celles  du 
prince  de  Bismarck  —  il  j  a  un  abîme.  J.  M. 


Li*Hi«toire  de  Prance  depuis  le»  temps    le*  pla»  recula» 
Jusqu'en  1T80,  racontée  A  mes  petlta«enfenta,  par  M.  Gui- 
ZOT.  y*  volume.  Paris,  Hachette,  1875.  Gr.   in-8  de  iv-598  p.^  illustré  de 
nombreuses  gravures.  — *  Prix  :  18  fr. 

Ce  volume  termine  l'œuvre  historique  de  M.  Guizot.  La  mort  ne  lui 
a  pas  permis  d'y  mettre  la  dernière  main.  Ce  soin  revenait  de  droit  à 
la  piété  filiale  de  M''^  de  Witt^  qui  avait  aidé  son  père  dans  ses 
recherches  et  lui  avait  facilité  la  composition  de  son  ouvrage  par  des 
notes  prises  aux  leçons  données  à  ses  enfants.  Les  récits  ontto^jours  le 
même  charme  et  le  même  intérêt.Ils  portent  ici  sur  lesrègnesdeLouis  XV 
et  de  Louis  XVI,  sur  tous  les  événements  importante  qui  se  sont  pas- 
sés à  rinterieur  et  à  l'extérieur,  sur  la  triste  histoire  de  nos  colonies 
des  Indes  et  du  Canada,  sur  la  guerre  de  l'indépendance,  etc.  On  j 
trouve  des  tableaux  de  la  société  brillante  et  dévergondée  du  dix- hui- 
tième siècle  ;  un  chapitre  est  consacré  à  Thistoire  des  philosophes. 
L'administration  de  Law,  du  duc  de  Choiseul^  de  Necker,  la  prépara- 
tion des  États-Généraux  occupent  une  large  place  ;  ce  ne  sont  là,  bien 
entendu,  que  les  points  les  plus  saillants.'^ 

Il  pourrait  être  curieux  de  rechercher  quelle  peut  être  la  part  de 
M™*  de  Witt  dans  ce  livre  qu'elle  vient  d'achever.  Sa  collaboration 
se  trahit  par  quelques  expressions  comme  celles-ci  :  t  l'ardeur  mission- 
naire •  des  jésuites  (p.  146);  —  ce  le  sentiment  héréditaire  du  roi 
Louis  XVI  (p.  342)  ;  »  —  la  largeur  de  la  tolérance  philosophique  de 
Franklin  (p.  340)  ;  >  —  a  ,.,  protesta  le  conseil  suprême  (p.  2I2);> 
—  n...  insistait  Loms  XVI  (p.  310).  »  Mais  on  constate  surtout  ici 
Tabsence  complète  de  vues  générales,  de  considérations  théoriques, 
pouvant  servir  de  règles  pour  les  jugements  à  porter  sur  les  faits  et 
sur  les  hommes;  rhistoire  devient  purement  descriptive  et  perd  son 
caractère  de  moralité.  L^auteurpeut  alléguer  une  légitime  excuse  dans 
ses  scrupules  qui  Font  empêchée  de  mêler  ses  appréciations  personnelles 
à  celles  de  son  père.  Mais  le  fait  n'en  est  pas  moins  constant  et  regret- 
table. Pour  ne  citer  qu*un  exemple,  M.  Guizot  n'est  certainement  pas 
un  disciple  des  philosophes;  il  leur  adresse  plus  d*un  blâme  vigoureux; 
mais  les  portraits  qu'où  nous  donne  sont  composés  de  mille  traits  où  le 
bien  se  trouve  à  cAté  du  mal  et  que  rien  ne  relie  entre  eux  ;  c'est  au 
lecteur  à  composer  un  tableau  d'ensemble,  et  certainement  Fimpres- 
sion  générale  qui  reste  est  plus  avantageuse  que  défavorable  aux 
philosophes. 

Le  choix  des  gravures  n'est  pas  fait  avec  un  soin  assez  scrupuleux. 


—  317  — 

Parmi  plusieurs  sujets  d'illustrations  peu  heureux,  nous  pouvons  citer 
le  Régent  expirant,  sur  un  fauteuil^  entre  sa  maîtresse  et  un  verre  de 
vin  de  Champagne.  Les  convictions  religieuses  bien  connues  des  auteurs 
paraissent  s* accentuer  plus  fortement  dans  ce  volume  :  ce  n'est  point 
un  exemple  à  condamner;  mais,  ce  doit  être  un  avertissement  pour  les 
parents  et  pour  les  maîtres  catholiques  qui  mettent  parfois,  avec  une 
inconcevable  légèreté,  aux  mains  de  leurs  enfants,  des  livres  si  con- 
traires à  leurs  croyances.  Nous  y  trouvons,  et  ceci  est  à  blâmer,  des  insi- 
nuations qui  ne  sont  pas  dignes  de  la  gravité  de  Thistoire.  Ainsi,  deux 
mots  expliquent  la  participation  de  Massillon  au  sacre  de  Dubois  :  «  Mas- 
sillon,  timide  et  pauvre,  en  dépit  de  sa  pieuse  éloquence  (p.  42)...»  Plus 
loin,  il  suffit  aussi  de- deux  mots  pour  caractériser  le  ministère  du  car- 
dinal de  Pleury,  «  le  règne  d'un  vieillard  et  d'un  prêtre  (p.  59).»  Voici 
encore  un  mot  perfide,  qui  en  dit  plus  qu'il  n'est  long  :  Champlain^ 
<x  indulgent  pour  tous,  malgré  son  ardente  dévotion  (p.  147);»  et  il 
s'agit  d'un  calviniste.  Mais  ce  qui  nous  parait  inexpliquable,  c'est  cette 
déclaration,  à  propos  de  l'expulsion  des  jésuites .:  «  Le  principe  de  la 
liberté  religieuse,  si  longtemps  méconnu  et  qui  se  faisait  enfin  jour 
dans  les  esprits,  remportait  sa  première  et  sérieuse  victoire,  en  dépouil- 
lant à  leur  tour  les  jésuites  de  cette  liberté  dont  on  leur  faisait  payer 
les  longues  injures  (p.  199).  » 

Nous  aurions  aussi  à  reprendre  plus  d'une  appréciation  historique. 
Moins  sévère  que  nous  ne  le  serions  pour  les  vices  de  Louis  XV^  l'auteur 
a  peine  à  reconnaître  ce  qu'il  a  fait  de  bien.  On  peut  louer  le  duc  de 
Choiseul  ;  mais  il  y  a  une  certaine  exagération  à  dire  que  son  renvoi 
consomma  l'anéantissement  politique  de  Louis  XY  (p.  219).  Les  ser- 
vices rendus  par  Necker  n'auraient  pas  dû  empêcher  de  montrer  plus 
nettement  les  vices  de  son  administration. 

Rbnb  db  Sâint-Mauris. 


Jleanoe  d'Are»  par  H.  Wallon,  secrétaire  perpétuel  de  l'Académie  des 
inscriptions  et  belles-lettres.  Édition  illustrée  d'après  les  monuments  de 
Tart  depuis  le  quinzième  siècle  jusqu'à  nos  jours.  Paris,  librairie  de  Fir- 
min-Didot  et  C%  1876.  Gr.  in-8  de  vii-oo2  p.  —  Prix  :  25  fr.,  et  relié  dos 
chagrin,  tranches  dorées,   33  £r. 

Le  livre  de  M.  Wallon  est  assez  connu  pour  qu'il  soit  inutile  de  s'y 
arrêter  longuement.  Deux  éditions  in-8  ont  paru  d'abord  ;  puis^  au 
commencement  de  cette  année,  a  été  publiée  une  édition^  revue  et  cor- 
rigée, en  deux  volumes  in-12;  enfin,  voilà  une  quatrième  édition,  déga- 
gée de  l'appareil  d'érudition,  mais  avec  des  compléments  nouveaux  et 
entourée  de  tout  ce  que  peut  offrir  de  séductions  le  luxe  de  la  typogra- 
phie moderne, surtout  lorsqu'il  a  été  mis  en  œuvre  par  un  homme  d'in- 
telligence et  de  goût  comme  Thabile  directeur  de  la  librairie  Didot^ 


-  518  — 

M.  D-  Dumoulin.  La  juste  réputation  qui  s* est  attachée  aux  splendides 
publications  auxquelles  M.  Dumoulin  a  déjà  prodigué  ses  soins,  nous 
dit  assez  la  valeur  artistique  de  cette  Jeanne  d'Arc.  C'est  un  véri- 
table Musée,  où  tout  ce  qui  rappelle  notre  sainte  et  héroïque  pucelle  se 
trouve  réuni;  un  incomparable  monument  élevé  à  la  gloire  de  celle 
qui  fut  la  libératrice  de  la  France  et  qui  a  droit  à  un  culte  patriotique, 
en  attendant  la  décision  de  TÉglise  qui,  espérons-le,  nous  permettra 
de  l'honorer  publiquemenjb  d'un  culte  religieux. 

Ouvrons  ce  magnifique  volume  qui,  bien  que  tiré  à  7^500  exemplai- 
res, a  été  épuisé  avant  d'être  mis  en  vente  ;  il  en  faudra  un  nouveau 
tirage  pour  répondre  aux  demandes  qui  ne  pourront  obtenir  satisfac- 
tion avant  le  jour  de  l'an.  Voici  d'abord  les  compléments  du  texte  : 
1°  Des  éclaircissements  sur  les  armes  et  vêtements  militaires  au  temps 
de  la  Pucelle,  par  M.  Or.  Demaj;  2?  une  notice  sur  l'auteur  de  la  carte 
du  royaume  'de  France  pendant  la  mission  de  Jeanne,  carte  dressée 
par  M.  Aug.  Longnon,  travail  d'une  importance  capitale  pour  This- 
toire  du  quinzième  siècle  ;  !3^  une  note  sur  la  famille  de  Jeanne  d*Arc, 
par  M.  de  Bouteiller  ;  4»  une  étude  de  M.  Marins  Sepet,  intitulée  :  Jeanne 
d'Are  dans  les  lettres;  5^  Jeanne  <fArc  et  la  mustguCy  par  M.  Qustave 
Ghouquet  ;  6®  l'iconographie  de  Jeanne  d'Arc,  par  M.  Claudius  Laver- 
gne;7^  un /"ac-^imt/e  des  lettres  de  Jeanne,  et  8®  une  table  alphabétique 
des  matières.  Quand  à  Tillustration,  tout  a  été  fondé  sur  le  principe  de 
Texactitude  historique  ;  ce  sont  les  monuments  du  quinzième  siècle  qui 
ont  été  admis  à  fournir  la  principale  matière  de  tant  de  lithochromies 
et  de  tant  de  gravures  admirables;  on  a  consulté  cent  manuscrits,  on 
a  étudié  mille  miniatures.  A  toutes  les  peintures,  à  toutes  les  tapis- 
series, à  toutes  les  sculptures  du  temps,  on  a  demandé  quelque  trait 
nouveau  pour  peindre  plus  exactement  les  contemporains  et  l'époque 
de  la  Pucelle  ;  on  a  également  pris  soin  de  reproduire  les  lieux  illus- 
trés par  le  passage,  par  les  triomphes  et  par  les  épreuves  de  Jeanne. 
De  plus,  on  a  reproduit  les  plus  belles  œuvres  artistiques  dont  elle  a 
été  l'objet,  depuis  le  monument  élevé  sur  le  pont  d'Orléans  en  1458, 
jusqu'aux  tableaux  d'Ingres  et  de  Balze,  aux  statues  de  la  princesse 
Marie  et  de  Rude,  au  médaillon  de  Chapu. 

Voilà  une  publication  qui  datera  dans  les  annales  de  la  typographie 
et  qui  familiarisera  le  grand  public  avec  une  foule  de  notions  et  de 
détails  réservés  jusqu'ici  aux  seuls  érudits.  Encore  une  fois  donc, 
félicitations  et  remercîments  à  la  maison  d'où  est  sortie  cette  grande 
et  belle  œuv^re,  qui  vivra  autant  que  la  mémoire  de  celle  à  laquelle  elle 
est  consacrée.  G.  db  B. 


—  519  — 

Btude  sur  «feûane  (l'A.rc  et  les  principaux  systèmes  qui  contesteni  son 
inspiration  surnaturelle  et  son  ofthodoske^  par  le  comte  db  Bouhbon-Ligmèrbs. 
Paris,  librairie  de  la  Société  bibliographique,  1875.  In-8  de  v.337  p.  — 
Prix  :  5  fr. 

Jeanne  d'Aro  a- 1- elle  été  inspirée?  Jeanne  d'Arc  a-t-elle  été  ortho- 
doxe? Telles  sont  les  deux  questions  qu'après  MM.  Wallon,  de  Beau- 
court  et  de  Carné,  M.  le  comte  de  Bourbon-Lignières  vient  de  traiter 
à  son  tour.  C'est  une  gloire  si  nationale  et  si  pure  que  celle  de  l'hé- 
roïque Puoelleque  les  ennemis  de  TÉglise  n'ont  pas  touIu  en  laisser  le 
bénéfice  à  l'Église.  Tour  à  tour,  ils  ont  cherché  à  la  faire  passer  pour 
une  illuminée,  pour  une  hallucinée,  voire  pour  une  libre-penseuse. 
M.  de  Bourbon-Lignières  examine  successivement  tous  ces  systèmes, 
nés  de  la  mauvaise  foi  et  de  l'esprit  de  parti.  Glissant  rapidement  sur 
l'opinion  des  chroniqueurs  boorguignons  ou  anglais  qui  ont  prétendu 
faire  de  Jeanne  d'Arc  on  simple  instrument  des  seigneurs  ou  du  roi, 
opinion  absurde,  reprise  pourtant  de  nos  jours  par  Sismondi,  l'au- 
teur attaque  plus  sévèrement  et  serre  de  plus  près  les  diverses  théo- 
ries de  Lingard  et  de  MM.Villiaumé,  le  docteur  Calneii  et  surtout  Henri 
Martin.  Appuyé  sur  les  pièces  authentiques,  sur  les  faits  les  plus  incon- 
testés, il  démontre,  contre  M.Yilliaumé,  que  leiiimple  génie  ne  peut  pas 
expliquer  l'œuvre  de  la  Pucelle,  et  contre  Lingard  et  M.  H.  Martin 
qu'il  est  impossible  de  considérer  la  vaillante  libératrice  de  la  France 
comme  une  exaltée  ou  une  hallucinée.  Sa  réputation  est  claire,  nette 
et  précise;  on  sent  que  l'auteur  a  étudié  longuement  ces  questions  et 
qu'il  en  possède  à  fond  tous  les  détails. 

Jeanne  n'a  pas  été  moins  orthodoxe  ;  il  suffit  de  lire  attentivement 
les  deux  procès,  de  condamnation  et  de  réhabilitatioil,  pour  s'en  con- 
vaincre. Jeanne  n'a  jamais  été  l'apôtre  de  la  libre  pensée  qu'a  ima- 
giné le  scepticisme  de  M.  H.  Martin.  Toujours  et  partout,  elle  a  été 
une  bonne  et  fervente  catholique  ;  les  dépositions  des  témoins  sont 
unanimes  sur  ce  point,  depuis  Simon  Munier  jusqu'à  frère  Pasquerel. 
Quant  au  procès  de  condamnation,  M.  Wallon  a  déjà  démontré,  avec 
la  dernière  évidence,  que  les  règles  les  plus  élémentaires  de  la  jus- 
tice y  ont  été  violées.  M.  de  Bourbon-Lignières  n'a  pas  de  peine  à 
faire  justice  des  défenseurs  de  cette  étrange  procédure.  Les  théolo- 
giens du  temps,  comme  Théodore  de  Lelliis,  s'étaient  accordés  sur  ce 
point  avec  les  promoteurs  et  les  juges  du  procès  de  réhabilitation. 

Nous  regrettons  que  les  limites  étroites  de  cet  article  ne  nous  per- 
mettent pas  d'entrer  dans  le  détail  des  arguments  si  solidement  établis 
et  développés  d'une  façon  si  convaincante  par  M.  de  Bourbon-Ligniè- 
res dans  les  àfixa,  parties  de  son  livre.  On  les  trouvera  d'ailleurs  avec 
plus  d'intérêt  et  de  profit  dans  le  volume  lui-même.  Ajoutons  qu'au 
moment  où  s'instruit  le  procès  de  canonisation  de  la  Vierge  de  Dom- 


—  52e  — 

rcmy,  une  étude  comme  celle-là  a  un  intérêt  puissant  d^actualité,  et 
nous  ne  doutons  pas  qu'elle  ne  soit  appelée  à  concourir  efficacement 
au  succès  d'une  cause  si  chère  à  la  France. 

M.  DB  LA  ROCHETERIE. 


E<*KxpédItlon  du  duc  de  Gul«e  à  IVaplea*  Lettres  et  instructioHS 
diplomatiques  de  la  cour  de  France  (i^^l'i^iS).  Documents  inédits  publié:» 
avec  une  introduction  et  des  notes,  par  MM.  J.  Loiseleur  et  G.  Bagcenault 
DR  PucHEssE.  Paris.  Didier,  1875.  Gr.  in-8  de  lxxii-408  p.  —  Prix  :  10  fr. 

Les  documents  publiés  ici  se  composent  des  dépêches  échangées 
par  le  comte  de  Brienne,  qui  avait,  sous  Mazarin,  le  portefeuille  des 
relations  extérieures,  et  le  marquis  de  Fontenay-Mareuil/  notre 
ambassadeur  extraordinaire  près  la  cour  de  Rome.  On  croira  peut- 
être,  en  le  voyant  apparaître  au  moment  où  le  riche  dépôt  des  archives 
des  affaires  étrangères  vient  d'entr'ouvrir  ses  portes,  que  les  documents 
en  proviennent  ;  il  n*en  est  rien.  A  l'époque  du  règne  de  Louis  XI V, 
à  laquelle  elles  se  rapportent,  les  papiers  d^État  restaient  encore  aux 
mains  des  négociateurs.  Fontenay,  chose  bizarre  I  ne  garda  même  pas 
ces  documents  ;  ils  restèrent  aux  mains  de  son  secrétaire  André  Féli- 
bien,  <}ont  le  fils  entra  chez  les  bénédictins  d'Orléans.  Le  volume  con- 
tenant les  dépêches  passa  dans  la  bibliothèque  des  religieux,  et  plus 
tard  dans  celle  de  la  ville.  Le  bibliothécaire  actuel,  M.  Loiseleur,  en 
reconnut  rimportance,  et  les  signala,  en  1866,  au  comité  des  travaux 
historiques.Trois  ans  plus  tard,  la  société  historique  de  l'Orléanais 
décida  la  publication  des  documents,  et  obtint  à  cet  effet  du  ministère, 
en  4872,  un  crédit  qui  a  rendu  possible  l'impression  du  présent  volume. 

Rien  n'a  été  négligé  pour  le  rendre  digne  de  la  Société  sous  les 
auspices  de  laquelle  il  paraissait,  et  des  deux  érudits  qui  s'é- 
taient associés  pour  le  donner  au  public.  Il  est  précédé  d'une  vaste 
introduction  dans  laquelle  sont  exposés  les  faits  relatifs  à  cette  aven- 
tureuse expédition  du  duc  de  Guise  à  Naples,  entreprise  pour  un  si 
futile  motif,  et  qui  devait  finir  si  misérablement.  Quant  aux  pièces, 
elles  ont  été  données  m  extenso^  et  accompagnées  de  notes  nom- 
breuses, rédigées  par  M.  Baguenault  de  Puchesse,et  qui  offrent  d'au- 
tant plus  d'intérêt  qu'elles  visent  des  documents  conservés  au  dépôt 
des  affaires  étrangères.  Les  pièces  elles-mêmes  ont  été  grossies  d'un 
contingent  formé  par  M.  Chéruel,  le  savant  éditeur  des />/fres  cfe 
Mazarin,  auquel  toutes  les  feuilles  de  l'ouvrage  ont  été  conununiquées, 
et  qui  provient  d'un  manuscrit  retrouvé  à  la  bibliothèque  de  Chartres, 
contenant  la  suite  des  dépêches  que  renferme  le  manuscrit  d'Or- 
léans. Enfin,  le  volume  se  termine  par  une  analyse  sommaire  do 
chacune  des  dépêches,  par  ordre  chronologique,  et  par  une  table 
générale  alphabétique,  dressée  sur  le  plan  suivi  pour  le  premier 
volume  des  Lettres  de  Mazarin.  O.  de  B. 


—  521  — 

Une  nldce  de  Mazarln.  —  La  princesse  de  Conti,  dTaprés  sa  correspond 
danre  inédite^  par  Edouard  db  Barthélémy.  Paris,  Firmin-Didot^  1875.  Id-8 
de  vii-364  p.  —  Pri^^  :  8  fr. 

C'est  une  douce  et  pure  ligure  que  celle  d'Anne  Martinozzi,  prin- 
cesse de  Conti,  nièce  de  Mazarin,  mariée  à  seize  ans  à  un  jeune  prince 
libertin  et  usé  qui  ne  recherchait,  dans  cette  alliance,  que  la  protection 
du  tout  puissant  ministre,  et  qui,  comme  il  le  disait  lui-même,  épou- 
sait le  cardinal  et  non  la  femme,  ne  sachant  pas  un  mot  de  religion,  -* 
ce  qui  était  peu  édifiant  pour  la  pupille  d'un  prince  de  TËglise,  lancée 
sans  guide  dans  une  cour  où  la  galanterie  était  en  honneur.  Anne 
Martinozzi  aurait  pu,  à  Texemple  de  ses  cousines,  se  compromettre 
dans  des  aventures  légères.  Il  n'en  fut  rien  ;  quoique  courtisée  ua mo- 
ment par  le  roi  lui-même,  elle  resta  obstinément  fidèle  à  son  mari  ; 
elle  fit  plus  :  elle  aima  ardemment  ce  mari  qui  ne  Taimait  guère.  Ses 
lettres  inédites,  publiées  par  M.  de  Barthélémy  qui,  dans  ce  livre, 
laisse  le  plus  souvent  la  parole  à  son  héroïne,  ses  lettres  révèlent 
chez  elle  une  tendresse  un  peu  passionnée  et  un  dévouement  que  rien 
ne  rebutait.  Chose  étrange,  elle  se  convertit  même  par  affection  con- 
jugale. Après  une  vie  assez  agitée,  le  prinee  de  Conti,  tout  d*un  coup 
touché  de  la  grâce^  se  prit  à  mener  une  vie  des  plus  chrétiennes  et 
des  plus  édifiantes.  Comme  le  dit  Quy-Patin,  il  donna  le  bel  exemple 
((  d'un  prince  qui  se  met  en  état  d'amendement  avant  que  de  mourir.  » 
Anne  Martinozzi,  assez  mal  instruite  d*abord^  nous  Tavons  dit,  des 
choses  religieuses,  et  qui  même,  dans  les  premiers  temps  de  son  ma- 
riage, avait  voulu  étouffer  le  peu  de  foi  qu'il  y  avait  en  elle,  Anne 
Martinozzi  marcha  avec  la  plus  complète  abnégation  dans  la  voie 
tracée  par  son  mari,  ne  reculant  devant  aucun  sacrifice  et  aucune  aus- 
térité. Malheureusement,  l'instrument  de  cette  double  conversion  fut 
un  prélat  janséniste,  et  les  deux  époux  se  trouvèrent  par  là  entraînés, 
sans  s'en  douter  peut-être,  dans  le  parti  de  «  la  cabale,  b  Le  prince 
de  Conti,  longtemps  disciple  de  l'évêque  d'Aleth,  du  père  de  Ciron, 
de  l'abbé  de  la  Vergue,  rompit  bruyamment  avec  eux  avant  de  mou- 
rir; mais  la  princesse,  influencée  par  sa  belle  sœur^  la  duchesse  de 
Longueville,  leur  resta  fidèle  jusqu'à  la  fin  ;  elle  leur  prêta  souvent  à 
la  cour  un  appui  efficace.  Sa  vie,  d'ailleurs,  était  un  modèle  de  régu- 
larité et  de  ferveur.  Elle  se  réduisait  à  une  dépense  personnelle  très- 
modeste,  et,  pressée  par  le  désir  de  réparer  les  torts  qu'elle  et  les 
siens  avaient  pu  causer,  faisait,  sous  forme  de  restitution,  d'abon- 
dantes aumônes. Le  prince  de  Conti,  sous  Tempire  du  même  sentiment, 
avait  déjà  distribué^  en  Berry  surtout,  des  sommes  considérables;  la 
princesse  continua  ce  qu'avait  fait  son  mari.  Son  épitaphe  constate 
qu'elle  a  restitua  tous  les  biens  dont  l'origine  lui  était  suspecte,  jus- 
qu'à la  somme  de  huit  cent  mille  livres.  »  Aussi,  quand  elle  mourut 
Décembre  1875.  T.  XIV,  34. 


-  522  — 

subitement,  le  4  février  1672,  fùt-elle  uniTeraellement  pleurée  de  la 
cour,  de  la  ville  et  surtout  des  pauvres  ;  les  lettres  de  M"^*  de  Sëvigné 
et  les  mémoires  du  temps  portent  l'empreinte  de  ces  unanimes  re* 
grets. 

Une  telle  vie,  assurément,  méritait  mieux  que  les  quinze  lignes  que 
lui  a  consacrées  M.  Amédée  Renée,  dans  son  étude  sur  £«5  Mijetft  (fe 
Mazarin,  M.  E.  de  Barthélémy,  à  qui  l'histoire  doit  déjàtant  d'heureasee 
et  précieuses  découvertes,  a  pris  à  tâche  de  réparer  Toubli  de  M.  A. 
Renée.  Il  Ta  fait  dans  un  ouvrage  plein  dMntérét  et  de  recherches, 
qui  fait  connaître  et  aimer  son  héroïne.  Nous  eussions  souhaité  seule- 
ment qu'il  glissât  —  à  cause  même  de  la  nature  de  son  livre  et  du  genre 
de  lecteurs  auxquels  il  s'adresse  —  plus  légèrement  sur  certains  dé- 
tails; ce  serait  une  correction  facile  à  faire  dans  une  prochaine  édition. 

M.  DB  LA  ROOHBTERIB. 


Mtorla  délia  Republlea  dl  Vtrenze  di  Gino  Gapponi.  Fiorenee, 
G.  Barbera,  1875.  2  vol.  gr.  in-8  de  zxm-667  et  de  xix-632  p.  —  Prix  : 
20  fr. 

Ce  n'est  pas  la  première  fois  que  le  nom  de  Capponi  s'inscrit  sur  le 
titre  d'un  livre.  Deux  des  ancêtres  de  l'historien  ont,  au  moyen  âge, 
raconté,  dans  des  pages  recueillies  par  Muratori,  les  événements  aux* 
quels  ils  avaient  pris  une  si  grande  part;  ceux-ci,  et  beaucoup  d'autres 
des  aïeux  de  M.  Gino  Capponi,  ont  eu,  à  Florence,  les  rôles  les  plus 
importants,  et  contrebalancé  la  puissance  des  Médicis;  pour  le  nouvel 
histerien,  les  souvenirs  de  la  famille  se  mêlaient  aux  souvenirs  de  la 
patrie,  et  l'on  comprend  toute  l'ardeur,  tout  le  soin  que  M.  Gino  Cap- 
poni a  mis  à  la  composition  de  son  bel  ouvrage.  Il  n'a  reculé  devant 
aucune  recherche,  et  Ton  admire  plus  encore  tant  de  savoir  et  tant  de 
persévérance  lorsque  l'on  sait  que,  depuis  bien  des  années  déjà, le  noble 
auteur  est  privé  de  la  vue .  —  Deux  gros  volumes  sur  une  petite  répu- 
blique, il  7  a  là,  au  premier  abord,  de  quoi  effrayer  la  frivolité 
moderne  ;  mais  cette  république  fut  celle  de  Florence^  de  la  cité  dont 
les  annales  sont  pleines  de  péripéties  dramatiques,  des  actions  de  tant 
de  grands  hommes  ;  dont  la  constitution,  à  chaque  instant  remaniée,  peut 
offrir  tant  de  sujets  de  méditations  aux  politiques.  Ces  agitations,  ces 
bouleversements  qui  ont  été  si  profondément  examinés  par  Machiavel, 
ce  phénomène  d'une  ville  dont  l'importance  et  les  richesses  se  dévelop- 
pent au  milieu  de  tous  les  périls  de  Torganisation  la  plus  démocratique 
qui  ait  jamais  existé,  ces  alternatives  de  liberté  excessive  et  de  despo- 
tisme, la  grandeur  croissante  des  liédicis,  le  déclin  de  la  république, 
leur  élévation  finale,  toutes  ces  choses  ont  été  racontées  par  M.  Gino 
Capponi  avec  une  grande  science,  avec  un  jugement  net  et  sain,  dans 
un  bon  style.    Florence,  si  privilégiée,  malgré  tant  de  criseF,  eut 


• 

encore  cette  fortune  de  prodaire,  plus  qu'aucune  autre  contrée  de  la 
féconde  Italie,  les  grands  écrivains,  les  grands  artistes,  de  les  produire 
dans  les  conditions  qui  pouvaient  sembler  le  plus  défavorables  à 
l'épanouissement  de  toutes  les  œuvres  de  l'imagination.  M.  Gino  Cap- 
poni  ne  devait  pas  négliger  cette  éclatante  partie  de  son  vaste 
siget;  aussi  l'histoire  des  lettres,  Thistoire  des  arts,  se  méle-t-elle,  dans 
son  livre,  à  l'histoire  proprement  dite.  Il  jalà  d'excellentes  pages  sur 
la  formation  et  le  développement  de  cette  langue  toscane  qui  devait 
devenir  l'idiome  classique  de  toute  l'Italie  ;  il  y  a  là  de  beaux  portraits 
de  Dante,  de  Bbccace,  de  Machiavel,  de  Michel-Ange,  de  bien  d'autres 
hommes  illustres  encore.  M.  G.  Gapponi  ne  se  laisse  pas  influencer  par 
un  patriotisme  étroit  ;  il  veut  être  vrai  :  son  appréciation  de  Boccace 
nous  parait  tout  à  fait  juste.  Machiavel,  qui,  depuis  peu,  a  donné  lieu  à 
tant  d'études,  nous  semble  aussi  avoir  été  parfaitement  compris  par  le 
nouvel  historien.  Ces  espèces  de  haltes  dans  la  littérature,  dans  les 
arts,  reposent,  d'une  façon  très-heureuse,  Tattention  du  lecteur. 
M.  G.  Gapponi  a  suivi  d'un  regard  sympathique  les  destinées  de  Flo- 
rence au-delà  de  la  chute  de  la  fome  républicaine  ;  il  les  a  suivies 
jusqu'à  nos  jours.  Peut-être  j  a-t-il  un  peu  d'embarras,  un  embarras 
très-justifié,  dans  la  manière  dont,  après  avoir  parlé  du  sage  gouver- 
nementdes  derniers  grands-ducs  et  de  la  reconnaissance  qu'ils  avaient 
méritée,  il  montre  Florence  s'associant  au  mouvement  qui  doit  pro- 
duire l'unité  italienne.  Mais  le  marquis  Capponi  aime  trop  sa  patrie 
pour  oser  Taccuser  d'un  prompi  oubli  et  pour  se  rappeler  que  Dante 
l'appelait  Maier  parvi  amon's.  Nous  n'avons,  du  reste,  pas  à  nous  occu- 
per ici  des  questions  de  politique  contemporaine  ;  nous  devons  borner 
notre  tâche  à  signaler  Tapparition  d'un  livre  consciencieusement  écrit 
et  d'un  intérêt  assez  grand  pour  trouver  des  lecteurs  attentifs  bien 
loin  des  rives  de  l'Arno.  Th.  db  Putmaiore. 


La  BIbllotliéque  de«  écrivain*  de  la  CSoiiipa§^ate  de  J6aua 
et  le  P.  Au^asUn  de  Backer,  par  Vicroa  Van  Tricht,  de  la  Com- 
pagnie de  Jésus.  Avec  un  portrait  du  P.  de  Backer,  d'après  une  photogra- 
phie de  Walter  Damry.  Louvain,  Gh.  Fontejn  ;  Bruxelles,  Decq  et  Duhent  ; 
Paris,  Aug.  Ghio,  1876.  Gr.  in-8  de  298  p. 

Comme  Tindique  le  titre  que  l'on  vient  de  lire,  deux  sujets  sont 
traités  dans  l'ouvrage  du  P.  V.  Yan  Tricht  :  la  biographie  du  P.  Au- 
gustin de  Backer  et  l'histoire  de  la  Bibliothèque  cks  écrivains  de  la 
Compagnie  de  Jésus,  Ajoutons  que  l'on  trouve,  à  la  an  du  volume,  trois 
appendices,  un  sur  les  jésuites  qui  ont  cultivé  les  mathématiques, 
l'astronomie,  etc.;  un  autre  sur  le  sort  des  bibliothèques  de  la  Compa- 
gnie dans  les  Pajs-Bas;  un  autre,  enfin,  qui  renferme,  comme  spécimen, 
la  notice  sur  le  P.  Dominique  Bouhours,  extraite  de  la  Biflioihèque  des 


—  524  — 

écrivains  de  la  Compagnie  de  Jésus  (!•*  vol.  1869).  —  La  biographie 
du  P.  Augustin  de  Backer  est  excellente.  L*auteur  a  rempli  avec  zèle 
et  talent  une  tâche  douce  et  facile.  «  Je  ne  crois  pas,  »  dit-il  (p.  5), 
((  que  mon  amitié  trahisse  la  sincérité  que  je  veux  mettre  dans  ces 
pages.  Elle  se  trouve  à  Taise.  La  vie  du  P.  Augustin  de  Backer  est  une 
belle  et  sainte  vie.  L'amitié  peut  la  parcourir  sans  crainte  de  se  trou- 
ver aux  prises  avec  la  vérité.  Dévoué  sans  partage  à  la  science  et  aux 
âmes,  tout  le  temps  qu*il  ne  livrait  pas  à  l'une,  il  le  consacrait  aux 
autres.  »  Les  détails  que  nous  donne  le  P.  Van  Tricht  sur  (es  vertus 
et  sur  les  travaux  de  son  ami  ne  sont  pas  moins  attachants  qu'édi- 
fiants, et  chacun^  en  fermant  le  livre,  dira  que  le  saint  religieux,  que 
Tadmirable  travailleur  a  trouvé  le  biographe  qu'il  avait  mérité. 

Loin  de  moi  la  pensée  d'analyser  un  tel  livre  I  Je  rappellerai  seule- 
ment que  le  P.  Augustin  de  Backer  naquit  à  Anvers,  le  18  juillet 
1809,  qu'il  fut  quelque  temps  un  des  élèves  du  collège  deSaint-Achea], 
que  sa  vocation  de  bibliographe  s'annonça  de  bonne  heure,  qu'il  consa- 
cra, soit  dans  son  humble  cellule,  soit  dans  presque  toutes  lesvgrandes 
bibliothèques  de  la  Belgique,  de  la  France  et  de  Rome,  trente  années 
d'infatigables  recherches  aux  deux  éditions  de  son  inappréciable  re- 
cueil, et  que,  au  moment  de  sa  mort  (29  novembre  1873),  l'intrépide 
athlète  songeait  à  donner  une  nouvelle  édition  de  sa  Bibliographie  de 
l'Imitation  de  Jésus-Christ  et  à  préparer  un  ouvrage  de  longue  haleine, 
le  Catalogue  raisonné  de  la  bibliothèque  des  Bollandisles. 

Le  P.  Van  Tricht  ne  nous  fait  pas  moins  bien  connaître  \dk Bibliothèque 
des  écrivains  de  la  Compagnie  de  Jé^us,  que  celui  qui  fut  le  principal 
auteur  de  cet  imcomparable  monument.  Je  recommande  à  tous  ceux 
qui  aiment  la  bibliographie  et  l'histoire  littéraire  les  renseignements 
si  exacts  et  si  précieux  que  nous  fournissent  les  chapitres  net  m  sur  les 
prédécesseurs  et  sur  les  collaborateurs  du  P.  Augustin  de  Backer.  Re- 
prenant et  complétant  le  magistral  article  dont  un  des  plus  savants 
boUandistes  contemporains,  le  P.  Victor  de  Buck,  a  enrichi  les  Études 
religieuses  de  février  1870,  le  P.  Van  Tricht  indique  successivement, 
de  la  façon  la  plus  précise,  la  part  qui  revient,  dans  cette  œuvre  de 
géants,  commencée  depuis  trois  cents  ans  et  qui  va  être  achevée  cette 
année  même,  à  Ribadeneira,  à  d'Alegambe,  à  Southwell^  à  Buonanni, 
à  René  de  Toumemine,  à  Oudin,  à  Courtois,  à  Zaccaria,  à  Caballero, 
à  Beorchia,  à  Stoeger,  àBrown,  enfin  aux  deux  dévoués  autant  qu'ha- 
biles collaborateurs  du  P.  Augustin  de  Backer,  son  frère  le  P.  Alois 
de  Backer,  et  son  ami  le  P.  C.  Sommervogel,  que  nous  avons  le  bon- 
heur de  compter  au  nombre  des  rédacteurs  du  Polybiblion.  Il  était  im- 
possible de  mieux  raconter  la  longue  et  noble  histoire  du  recueil  dont 
({ le  prince  des  bibliographes  contemporains,  »  le  D'  Juliu?  Petzholdt^ 
peu  suspect  d'enthousiasme  pour  la  Compagnie  de  Jésus,  a  diverses  fois 


—  525  — 

proclamé  Timmense  mérite^  comme  le  rappelle  le  P. Van  Tricht  (pp.  8, 
102,  104,  etc.),  et  dont  il  a  dit  notamment  :  a  C'est  une  apologie  de 
l'ordre,  impartiale,  énergique  et  victorieuse.  »  T.  de  L, 

CaUUoso  ra^glonato  del  llbrl  dl  prima  ntampa  e  délie 
edlzlonl  aldine  e  rare  ealatentl  nella  biblloteca  nazionale 
dl  Palermo*  comp.  dal  sac.  A.  Pennino,  assistente  di  essa  biblioteca  e  pre- 
etduiodavnarelazvmedel  cav.  F.  Evola  bibl  Capo.  Palerme,  i875.In-8 
de  XLiii-376  p. 

OaaervazIonI  aulla  qulatloné  dol  prlmato  délia  stampa  tra 
Palenno  e  Measina  di  G.  Salvo-Cozzo.  Palerme,  1874.  Ia-8  dt 
39  p.  —Prix  :  2  fr. 

Nous  ne  voulons  pas  attendre  que  le  second  volume  de  cet  impor- 
tant catalogue  ait  paru  pour  dire  tous  le  bien  que  nous  pensons  d*un 
tel  ouvrage.  Il  est  fait  pour  intéresser  vivement  les  bibliophiles  par 
les  indications  données  avec  tant  de  compétence,  tant  de  clarté,  sur  un 
grand  nombre  d'éditions  rares^  dont  plusieurs  ont  été  inconnues  de 
Brunet.  Le  catalogue  débute  par  une  introduction  dans  laquelle  est 
racontée  la  naissance  de  la  bibliothèque  de  Palerme.  Avant  la  moitié 
du  dix-septième  siècle,  il  n'existait  pas  en  Sicile  de  bibliothèques  pu- 
bliques.La  première  collection  de  ce  genre  qui  fut  mise  à  la  disposition 
des  érudits  fut  celle  de  l'oratoire  de  Saint-Philippe  de  Néri,  ouverte 
seulement  quatre  heures  par  jour.  Remarquoris-le,  ce  sont  les  classes 
que  de  grossiers  préjugés  veulent  toujours  représenter  comme  hostiles 
aux  études  et  à  la  diffusion  des.lumières,  c'est  lo  clergé,  c*est  Taris- 
tocratie  qui,  à  Palerme,  ont  le  plus  favorisé  le  développement  et 
la  création  des  bibliothèques  publiques.  11  j  a  de  curieux  détails  dans 
cette  introduction,  de  curieux  détails  de  statistique  surtout,  sur  le 
nombre  des  lecteurs,  sur  les  catégories  d'ouvrages  le  plus  démandés, 
sur  Tactivité  d'esprit  qui  fait  que,  tandis  que  dans  le  nord  de  Tltalie  on 
se  contente  ordinairement  d'un  seul  livre,  on  en  demande,  à  Palerme, 
trois  à  la  fois.  L'introduction  se  termine  par  une  revue  rapide  des 
divers  manuscrits  et  des  éditions  les  plus  précieuses,  puis  vient  une 
étude,de  M.  S.  Cusa,  sur  un  manuscrit  arabe,  le  Livre  des  Palmes.  A  ce 
travail  succède  une  préface  où  il  est  rendu  compte  de  la  manière  dont 
a  été  compris  le  catalogue  qui  commence  ensuite  et  finit,  dans  ce 
premier  volume,  à  la  lettre  M.  Puisque  nous  parlons  manuscrits,  et 
livres,  saisissons  cette  occasion  pour  indiquer  une  brochure  reçue  il  j  à 
déjà  plusieurs  mois.  Son  auteur,  M.Salvo-Cozzo,  j  examine  quelle  ville, 
de  Palerme  ou  de  Messine,  eut  la  gloire  d'avoir  la  première  un  inapri- 
meur.  M.  Salvo-Cozzo  finit  par  se  prononcer  pour  Palerme.  La  ques- 
tion nous  intéresse  moins  que  si  nous  étions  né  dans  Y  Isola  di  fuoco^ 
mais  nous  reconnaissons  volontiers  que  l'auteur  à  fait  preuve  d'érudi- 
tion, d'esprit  et  d'une  verve  toute  méridionale.  Th.  P. 


—  82«  — 


BULLETIN 

IVotre  histoire  de»  orluliieiB^  19TO,  Dar  Gustave  Hcbaclt, 
docteur  es  lettres,  professeur  d'histoire  au  lycée  Louis-Ie -Grand.  Paris, 
Delagrave,  1876.  In- 12  de  ii-256  p.,  orné  de  cartes  géographiques  et  de 
nomhreuses  gravures.  —  Prix  :  2  fr. 

ILy  a  un  an  à  peine,  M.  Huhanlt  publiait  Notre  histoire  en  cent  pages,  un  char- 
mant et  excellent  petit  volume,  offrant  la  quintescence  de  l'histoire  de  France; 
trois  fortes  éditions  furent  enlevées  en  quelques  mois.  Mais,  malgré  tout  le 
talent  qui  avait  présidé  à  ce  tour  de  force,  cent  pages  pour  raconter  l'his- 
toire de  France,  c'était  trop  peu.  De  tous  côtés  se  sont  élevées  des  voix 
pour  dire  k  M.  Hubault  :  recommencez  ce  récit  attachant  de  nos  grandeurs 
et  de  nos  misères,  mais  moins  rapidement,  et  en  le  prolongeant  jusqu^à  nos 
jours.  Et  M.  Hubault  s'est  remis  à  l'œuvre.  Le  livre  qu'il  ofire  au  public 
aujourd'hui  a  les  qualités  du  précédent,  mais  il  est  plus  complet.  Ce  n'est 
point  un  abrégé  chronologique  ;  c'est  une  histoire  où,  sans  se  croire  obligé 
d'enregistrer  tous  les  événements,  l'auteur  met  en  relief  les  faits  impor- 
tants, les  noms  glorieux  ;  il  raconte,  il  juge,  il  intéresse,  il  instruit.  -^ 
Nous  aurions  voulu  pouvoir  faire  quelques  citations  mettant  en  relief  l'es- 
prit impartial,  sage  et  hautement  chrétien  de  l'auteur  ;  mais  nous  ne  crai- 
gnons pas  d'afGrmer  qu'aucun  livre  de  ce  genre  ne  peut  mieux  convenir  A 
la  jeunesse  et  aux  classes  populaires.  A.  de  M. 


Oloire»  du    Catholtclftme   an  dlat-neuvl^me  «lAcle.  Mqt  Du- 

pankupf  et  extrait  de  ses  (Buvres,  par  M.  l'abbé  M.  Dourlbns.  Arras,  Victor 
Brunel,  1875.  In-8  de  457  p.  —  Prix:  3  fr. 

C'est  une  excellente  idée  qu'a  conçue  M.  l'abbé  Dourlens  de  recueillir, 
dans  les  œuvres  de  nos  plus  illustres  écrivains  catholiques,  les  éléments  de 
biographies  d'autant  plus  fidèles  que  l'auteur  laisse  presque  toujours  la 
parole  à  ceux  dont  il  veut  nous  raconter  la  vie.  Aujourd'hui^  le  portrait  de 
M^  Dupanloup  vient  s'ajouter  à  cette  intéressante  ga'erie  où  Montalembert 
et  Louis  Yeuillot  avaient  déjà  leur  place.  C'est  une  vie  bien  remplie  que 
celle  de  l'évéque  d'Orléans  :  des  catéchismes  de  Saint-Sulpice,  où  Tabbé 
Dupanloup  s'était  déjà  fait  un  nom,  jusqu'aux  mémorables  discussions  sur 
la  liberté  de  l'enseignement  supérieur,  il  n'est  pas  un  événement  tant  soit  peu 
considérable  où  M*'  d'Orléans  n'ait  joué  un  rôle,  pas  une  discussion  dont  il 
n'ait  pris  sa  part,  pas  une  lutte  où  il  ne  se  soit  signalé.  M.  l'abbé  Dourlens 
nous  fait  successivement  assister  à  toutes  les  phases  de  cette  mémorable 
existence,  et,  %n  traçant  la  vie  de  fif  Dupanloup,  c'est  à  peu  près  l'histoire 
de  notre  temps  qu'il  nous  présente.  De  longs  extraits,  généralement  bien 
choisis,  nous  font  cotmaitre  l'écrivain  ;  des  analyses  exactes  de  toutes  ses 
œuvres,  à  peu  d'exceptions  près,  nous  mettent  à  môme  d'apprécier  cette  rie 
exiraordinairement  féconde.  E.  P. 


mme  dl  Liul^t  d*Bredln«  palermitano,  ora  per  la  prima  votta  stampatê 
per  cura  di  Salvatore  Salomone  Mahino,  socio  délia  Commissiane  de'  testi  di 
lingua.  Bologne,  Romagnoli,  1875.  In-18,  tiré  à  202  ex.,  dexxiv-64  p.  — 
Prix  :  3  fr 

La  collection  de  Romagnoli  est  bien  connue  des  bibliophiles;  elle  vient  de 


-  8J7  — 

s'augmenter  d'un  charmant  volume,  des  vers  d'un  poète  palermitain 
pour  lequel  l'oubli  était  une  injustice.  Cette  ii^ustice,  c'est  un  littérateure 
dont  il  a  été  plus  d'une  fois  parlé  dans  cette  revue,  M.  Salvatore  Salomone 
Marino,  qui  l*a  fait  cesser.  On  sait  que  M.  Marino  a  donné  un  bon  recueil  de 
chants  populaires;  on  se  rappelle  le  soin  avec  lequel  il  a  publié  la  belle 
légende  de  la  Princesse  de  Cartm.  Le  nouveau  volume  est  digne  des  œuvres 
qui  l'ont  précédé.  Critique  plein  de  tact,  M.  Marino  n'a  pas  cherché  à  sur- 
faire la  valeur  de  Luigi  d'Eredia.  Il  ne  le  représente  pas  comme  un  poète 
original  ;  il  reconnaît  en  lui  un  disciple  de  Pétrarque  et  ne  dissimule  pas 
certains  défauts  produits  par  une  imitation  trop  prolongée  ;  Luigi. d'Eredia 
n'est  pas  cependant  un  copiste  servile  de  l'amant  de  Laure,  et  il  eut  le 
mérite  de  ne  pas  se  faire  le  reflet  d*un  autre  poète,  son  ami,  dont  l'exemple 
fut  funeste  à  beaucoup  de  contemporains.  Il  sut  résister  à  la  tentation  de 
suivre  les  traces  de  l'auteur  de  VAdone^  du  chevalier  Marini,  si  fameux  pen- 
dant quelques  années.  Les  sonnets  de  Luigi  d'Eredia  sont  au  nombre  de 
trente-trois;  on  trouve  parmi  eux  une  plainte  de  la  Madeleine  repentante, 
une  cantùne  et  deux  capUoli  en  tercets  d'une  bonne  facture.  M.  Marino  a 
fait  suivre  ces  poésies  de  notes  intéressantes  et  judicieuses,  telles  enfin 
qu'on  devait  les  attendre  de  lui.  Ta.  P. 


Oéogpraphle  de  la  Prance*  accompagnée  de  notions  premières  sur  le 
globe  et  sur  les  cinq  parties  du  monde.  Suivie  d'un  vrécis  de  la  géographie 
de  la  Terre  sainte,  par  A.  Magin,  ancien  recteur  de  rAcadémie  de  Poitiers, 
avec  de  nombreuses  cartes.  Paris,  f'elagrave.  i875.  ïn-12  de  178  p.  — 
Prix  cartonné  :  90  cent. 

Il  était  difficile  de  mettre  plus  de  choses  en  moins  de  pages.  Ce  petit  vo- 
lume sera,  croyons-nous,  d'un  grand  secours  aux  maitrel  d'école  et  aux 
mères  de  famille  pour  commencer  les  enfants,  et  ceux-ci,  s'ils  le  possé- 
daient à  fond,  seraient  plus  iustruits  que  bien  des  grandes  personnes.  Les 
notions  sont  présentées  avec  ordre,  les  définitions  sont  courtes  et  précises  ; 
chaque  paragraphe  porte  un  numéro  correspondant  à  un  questionnaire  placé 
à  la  fin  du  chapitre.  I/idée  d'intercaler  des  cartes  dans  le  texte  est  excel- 
lente en  principe  :  malheureusement  l'exécution  ne  répond  pas  toujours  & 
l'intention.  —  pour  la  France,  la  division  géographique  par  bassins  est 
adoptée  concurremment  avec  la  division  par  départements.  Les  notions  de 
géographie  économique  sont  sufiisamment  développées.  —  Ce  petit  livre 
mérite  d'être  accueilli  avec  faveur.  F.  R. 


Prance  physique,  admlnlMtratlve,  mllIUiIre  et  écoiio- 
mlque,  par  L.  Oubkc^  sous-lieutenant  au  ii'  de  ligne.  Paris,  Dumaine, 
J875.  In-i2  de  280  p.  —  Prix  :  2  fr. 

Bon  ouvrage,  clair,  méthodique,  dédié  par  hauteur,  «  aux  élèves  des 
écoles  primaires,  des  écoles  communales  et  industrielles,  aux  sous-officiers 
candidats  à  l'épaulette.  »  Nous  croyons  qu'il  remplira  son  but.  La  France 
physique  est  traitée  par  bassins  ;  l'étude  des  frontières, présentée  au  point  de 
vue  militaire  est  précise.  La  France  administrative  comprend,  dans  ses  quatre 
premiers  chapitres,  un  très-bon  résumé  d'un  cours  de  droit  administratif. 
Les  quatre  chapitres  suivants  traitent  de  l'organisatian  financière,  judiciaire, 
universitaire  et  ecclésiastique.  La  troisième  partie,  France  militaire,  échappe 
un  peu  à  notre  compétence  ;  mais,  comme^  l'auteur  appartient  à  l'armée^ 
nous  ne  mettons  pas  en  doute  qu'il  ne  l'ait  aussi  heureusement  traitée  que  les 
autres  qui,  sauf  la  première,  lui  étaient  évidemment,  par  état,  moins  fami- 


—  528  — 

lières.  Quant  îi  la  France  économique^  il  y  a  là  une  trentaine  de  pages,  soit 
de  statistiques,  variables  avec  le  temps,  soit  de  notions  d'économie  politique, 
trop  succinctes  pour  qu'il  ne  nous  soit  pas  permis  de  désirer  que  Tauteur  en 
fasse  l'objet,  dans  un  prochain  travail,  d'une  étude  plus  complète  et  pins 
approfondie  ;  il  y  a  tout  à  gagner  à  ne  laisser  ici  aucun  point  dans 
l'ombre,  et  les  doctrines  économiques  ont  trop  d'importance,  aujourd'hui, 
pour  subir  ainsi  une  réduction  dans  leur  exposé,  qui  équivaut  presque  à 
une  mutilation. 

Quant  à  Vesprit  du  livre,  pour  un  passage  où  il  perce  dans  une  œuvre 
aussi  technique,  nous  sommes  obligés  de  faire  nos  réserves  formelles.  La 
liberté  de  conscience,  telle  que  l'auteur  la  définit  (p.  137,  organisation  ecclé- 
siastique), n'est  pas  «  un  droit  imprescriptible,  »  car  il  y  a  la  Vérité  et 
I'Erheor  ;  et  le  sentiment  propre  et  individuel  n'est  point  ici  le  juge 
compétent.  Il  existe  donc  un  droit  antérieur  et  supérieur,  celui  seul  de  la 
vérité,  c'est  celui-là  qu'aucune  «  loi  ne  saurait  nous  ravir,  » — l'État  n'a  pas 
le  droit  non  plus  (même  page)  de  «  modifier  ou  d'interdire  l'exercice  da 
culte  extérieur.  »  Ici  encore  il  y  a  un  droit  antérieur  et  supérieur  à  celui 
de  l'État.  —  Ce  n'est  pas  le  lieu  de  développer,  sur  ces  graves  questions,  les 
notions  exactes  et  les  principes  vrais;  si  l'auteur  eût  ouvert  un  catéchisme, 
il  eût  évité  de  déparer,  par  des  assertions  aussi  erronées,  un  ouvrage  qui 
témoigne  d'un  louable  amour  de  l'étude  et  qui  n'est  d'ailleurs  pas  sans 
mérite.  F.  R. 


l^'Ecole  delà  Réforme  sociale,  par  le  H.  P.  Ramièrb,  S.  J.  i"  par- 
tie :  La  méthode  de  l'École  et  les  mensonges  de  /a  Révolution,  —  2*  partie  : 
Les  ruines  de  la  révolution  et  les  conditions  de  la  'Réforme.  Tours,  Marne  ; 
Paris,  Dentut  1875.  2  br.  in-18  de  60  et  48  p.  —  Prix  de  chaque  bro- 
chure :  0  fr.  30. 

« 

Ei'Unlon  adoptée  comme  auxiliaire  par  les  institutions  fondées 
sur  le  Décalogue,  par  M.  Emh.  de  Gurzon.  Tours,  Mame  ;  Paris,  Dentu, 
1875.  1  br.  in-18  de  40  p.  —  Prix  :  0  fr.  30. 

Démasquer  les  mensonges  que  la  Révolution  cache  sous  les  mots  trom- 
peurs de  liberté,  d'égalité,  de  démocratie,  de  progrès,  de  civilisation  ;  cons- 
tater les  ruines  que  ces  déplorables  erreurs  ont  amenées  en  désorganisant 
la  famille,  Tatelier  et  la  commune  ;  réduire  enfin  le  symbole  de  la  révolu- 
tion à  cinq  articles  dont  la  répudiation  sera  le  premier  pas  dans  la  voie  du 
salut,  telle  est  la  triple  tâche  à  laquelle  le  R.  P.  Ramière  applique  la 
méthode  d'observation  créée  par  M.  Le  Play.  Il  estime  qu'en  employant 
cette  méthode  efficace,  l'École  de  la  réforme  sociale  sera  pour  l'Église  un 
auxiliaire  utile,  plus  utile  en  un  sens  que  si  elle  se  plaçait  sur  un  terrain 
exclusivement  catholique.  Aussi  compare-t-il  l'œuvre  de  l'École  <c  à  ces  tra- 
vaux de  préparation  évangélique  par  lesquels  les  anciens  Pères  s'efforçaient 
d'attirer  à  la  lumière  les  peuples  enfoncés  dans  les  ténèbres  de  l'idolâtrie.  » 
Comme  on  le  verra  dans  la  troisième  des  brochures  que  nous  signalons,  le 
R.  P.  Ramière  a  chaleureusement  renouvelé  ces  déclarations  dans  le  con- 
grès catholique  tenu,  sous  la  présidence  de  Wsv  l'évoque  de  Poitiers,  le  21 
août  dernier.  Il  a  provoqué  un  vœu  unanime  du  congrès,  engageant  les 
catholiques  à  unir  leurs  efforts  à  ceux  des  hommes  qui,  «  appuyés  sur 
l'étude  consciencieuse  des  faits,  démontrent  l'union  de  l'ordre  social  et  de 
la  religion.  >»  A.  D. 


—  5iO  — 

Deux  Incident»  de  la  question  oatliollqne  en  Angleterre, 

par  M**'  AuGUSTDs  Cravfn«  Paris,  Didier,  i875.  In-<2  de  U8  p.  —  Prix  : 

1  fr.  50. 
I^a  Tentatl-ve  anticathollque  en  Angleterre»  ou  l*opu»oule 

du  T.  H.  lUr  Gladstone,  membre  du  pariement  ;  observations  de 

Mr  François  Nardi  (traduction  française).  Montpellier,  i87o.  In-8  de  97  p. 

—  Prix  :  2  fr. 
l^e«  Souvenir»   catbollque»  de  la  Tour  de  Kiondres,  etc., 

par  le  très-révérend  R.  Gooke,  traduction  par  M.  Gréard.  Paris,  Douniol, 

4875.  In-8  de  64  p.—  Prix  :  i  fr. 

G*est  à  la  même  cause  que  ces  trois  opuscules  doivent  leur  origine;  les 
attaques  de  M.  Gladstone  contre  le  catholicisme  et  la  croisade  anticatholique 
que  le  chef  du  dernier  cabinet  libéral  cherche  à  organiser  contre  TÉglise  ont 
déjà  fourni,  à  une  multitude  d*auteurs,  Toccasion  de  défendre  ce  qui  est 
plus  qu'une  question  de  justice,  ce  qui  est,  avant  tout,  une  question  de  bon 
sens. 

M"'  Crdven  était,  mieux  que  personne,  préparée  à  élever  la  voix  en 
faveur  des  catholiques  anglais;  mieux  que  personne,  elle  pouvait  dire  à 
M.  Gladstone  qu'il  fait  fausse  route  ;  car  elle  n'avait  qu'à  lui  rappeler  un 
souvenir  gravé  encore  dans  sa  mémoire,  et  à  l'inviter  à  comparer  sa  conduite 
de  i850  à  celle  de  1875.  C'est  ce  qu'elle  a  fait,  en  publiant  à  nouveau,  avec 
l'article  paru  cette  année  dans  le  Correspondant j  les  pages  si  simples,  mais 
si  vraies  et  si  éloquentes,  qui  eurent  tant  de  succès  lors  de  la  célèbre  aggi^es- 
8%on  papale  de  i850. 

M"*  Craven  examine  le  débat  soulevé  par  M.  Gladstone  d*un  point  de 
vue*  tout  extérieur,  tandis  que  Ms'  Nardi  suit  son  adversaire  pas  à  pas  et 
croise  le  fer  de  plus  près.  Nous  n'avons  pas  évidemment  à  reconnaître  la 
solidité  de  la  réponse  de  Mc'  Nardi.  C'est  un  écrit  ferme  et  substantiel  que 
le  sien.  Peut-être,  cependant,  cût^l  été  possible,  dans  l'intérêt  de  la  vérité 
et  de  l'Église,  d'en  rendre  le  ton  moins  aggressif.  La  vérité  ne  perd  rien  de 
sa  force  à  employer  le  langage  bienveillant  de  la  charité  ;  et  souvent  elle 
gagne,  par  le  bon  procédé,  l'adversaire  que  ne  convaincraient  pas  les  bonnes 
raisons.  Du  reste,  il  est  possible  que  l'original  italien  soit  plus  doux  que  ne 
Test  la  traduction  française.  Nous  aimons  à  le  croire,  car  nous  savons  très- 
bien  que,  dans  la  langue  employée  par  Mr  Nardi,  il  est  passé  en  adage 
qu'un  traduttore  est  un  tradditore. 

Au  milieu  des  pénibles  souvenirs  qu'éveillent  les  deux  opuscules  de 
M**  Nardi  et  de  M*"*  Craven,  on  reporte  naturellement  sa  pensée  sur  les 
premiers  jours  de  la  réforme  anglicane.  Le  révérend  Père  Cooke  a  bien  fait 
de  replacer  sous  les  yeux  des  catholiques  anglais,  ces  deux  nobles  figures 
qui  ont  nom  Fisher  et  Thomas  Moore.  Quand  le  tocsin  de  la  persécution 
retentit  de  nouveau,  les  catholiques  d'Angleterre  ne  sauraient  mieux  faire 
que  d'étudier  l'histoire  de  leurs  martjrrs  :  ils  apprendront,  à  leur  exemple, 
à  savoir  souffrir  et,  s'il  le  fallait  encore,^  savoir  mourir. 

Comme  le  regard  se  repose  avec  plaisir  sur  ces  deux  vieillards,  blan- 
chis au  service  de  leur  souverain,  et  pour  lesquels  ce  prince  voluptueux  et 
apostat  ne  trouve  d'autre  récompense  que  la  hache  et  le  billot!  Avec 
quel  respect  religieux  on  relit  cette  méditation  sur  la  mort  que  le  noble 
évéque  de  Rochester  écrivait  pour  sa  sœur  au  moment  où  le  bourreau  venait 
déjà  frapper  à  sa  porte  !  Ces  pages,  il  faudrait  (es  reUre  souvent  ;  mais  il  faut 
surtout  que  les  Anglais  les  relisent  à  cette  heure.  —  Le  révérend  Père  Cooke 
a  bien  fait  d'évoquer  ce  glorieux  passé,  au  milieu  des  an^isses  de  la  lutte 
présente  ;  ce  sont  là  des  souvenirs  qui  consolent  et  qui  fortifient. 

P.  M. 


—  »80  - 

Salnto  Marle-lCAdelelae.  Eludes,  par  M.  l'abbé  Goulin.  Seconde  édi- 
tion. Paris  et  Tournai,  V«  Casterman,  1875.  In- 18  de  xxvn-264  p.  — 
Prix  :  \  fr.  2o. 

Ces  études  sur  sainte  Marie -Madeleine,  parues  pour  la  première  fois  en 
1862,  sont  un  commentaire  mystique,  en  un  style  qui  n'a  point  toujours 
assez  de  simplicité,  de  tous  les  actes  de  la  vie  de  cette  sainte.  Il  s'adresse 
plus  spécialement  aux  femmes.  M.  Tabbé  Goulin  suit  le  texte  des  évaogé* 
listes,  qu'il  explique  à  l'aide  des  interprètes  les  plus  autorisés.  Il  montre  en 
elle  le  modèle  de  la  pénitence  chrétienne  et  les  merveilles  opérées  dans  sod 
âme  par  la  grâce.  Il  suit,  dans  ses  pieuses  considérations,  l'ordre  des  éTéoe- 
ments.  Dans  son  introduction,  comme  aussi,  à  l'occasion,  dans  le  cours  de 
son  ouvrage,  il  défend  la  tradition  des  églises  de  Provence  et  soutient  l'ideo- 
tité  de  Marie,  sœur  de  Lazare,  avec  Marie-Madeleine,  la  pécheresse.  R. 


VARIÉTÉS 

LA  BOCléTÉ  OBOGRAPHIQUE  DB  RUSSIE  ET  SES  TRAVAUX. 

Il  est  peu  de  pays  dont  l'aspect  physique  présente  autant  de  contrastes 
que  l'empire  des  tzars.  On  y  trouve  à  la  fois  des  régions  polaires  et  des 
contrées  au  climat  d'Italie,  des  montagnes  dont  les  cimes  éternellement 
blanchies  se  perdent  dans  les  nues  et  des  plaines  immenses  de  tourbes, 
des  lacs  et  des  fleuves  gigantesques,  des  forêts  séculaires  et  des  steppes 
interminables,  une  variété  de  faune  et  de  flore  qui  n'a  d'égal  que  la 
diversité  des  degrés  de  civilisation  qu'occupent  les  peuples  incorporés 
dans  le  colosse  du  Nord.  La  science  géographique  y  a  donc  un  champ 
assez  vaste  à  cultiver  pour  qu'elle  ait  besoin  d'en  franchir  les  limites; 
surtout  si  l'on  considère  que  ses  investigations  datent  d'une  époque  relati- 
vement très-récente,  qu'elles  ont  pour  objet  non -seule  ment  l'étude  de  la 
terre,  mais  encore  celle  de  l'homme  qui  l'habite  et  des  rapports  de  dépen- 
dance qui  en  résultent  nécessairement  dans  le  développement  intellectoel 
et  moral  des  individus  comme  des  peuples  entiers. 

Aussi  la  société  géographique  de  Russie  embrasse-t-elle  à  la  fois  la 
géographie  descriptive,  l'ethnographie  et  la  statistique.  Nous  avons  déjà 
exposé  le  tableau  des  principaux  résultats  qu'elle  a  obtenus  dans  la  première 
et  la  principale  branche  de  ses  études.  —  Mais  il  ne  lui  suffit  point  de 
faire  conndtre  l'état  actuel  du  grand  empire,  même  considéré  au  triple 
point  de  vue  de  géographie,  de  statistique  et  d'ethnographie.  Pour  avoir  une 
notion  du  pays  la  plus  complète  possible,  elle  veut  en  connaître  le  passé, 
sous  peine  de  demeurer  au-dessous  de  la  science  moderne,auxyeux  de  laquelle 
la  géographie  et  l'histoire  doivent  être  inséparables  et  se  prêter  un  mutuel 
secours.  Ge  principe  hautement  proclamé  par  Garl  Ritter  et  pour  ainsi 
sanctionné  par  la  brillante  application  que  ce  coryphée  des  géographes 
modernes  en  a  faite  dans  son  Erdkundef  la  société  géographique  de  Saint- 
Pétersbourg  ne  l'a  jamais  perdu  de  vue.  Dès  l'ouverture  des  séances, 
M.  Lûtke,  alors  son  vice-président,  recommandait  aux  membres  de  la  Société 
l'étude  des  matériaux  déjà  existants  mais  enfouis  dans  les  différentes 
archives  du  pays  :  c'était  indiquer  indirectement  la  méthode  historique.  En 
outre,  le  Messager  de  la  Sociélé,  son  organe  périodique  depuis  1831,  eut,  dès  le 
commencement,une  section  affectée  à  la  géographie  historique  et  à  rhistoir* 
de  la  géographie.  La  même  pensée  fut  plus  d'une  fois  développée  et  motivée 


—  B3i  — 

dans  des  mémoires  présentés  à  ]a  sodété,  entre  antres  dans  ceux  de 
M.  Baer,  académicien,  intitulés,  l'un  :  Recherchée  ethnographiqueê^  Tanife  : 
De  VInfluence  de  la  ruUwre  phyeique  twr  les  relations  sociales  des  peuples 
et  sur  l'Histoire  de  l'humumité.  -Après  avoir  établi,  que  la  connaissance  des 
races  explique  Thistoire,  que  Thistoire  de  la  cinlisation  et  Tethno- 
graphie  ont  une  base  commune,  M.  Baer  cite,  à  l'appui  de  son  assertion, 
les  annales  de  Novgorod  et  le  Liwe  de  la  grande  carte  (dont  nous  parlerons 
plus  loin);  et  il  prouve  jusqu'à  l'évidence  ce  fait  que  les  historiens  récents 
voudraient  nier,  mais  qui  est  certain,  à  savoir  que  les  Russes  primitifs  ont 
exercé  la  marine,  qu'ils  ont  connu,  visité  et  possédé  les  bords  de  la  mer 
Glaciale  jusqu'à  Kola  et  au  delà  ;  qu'ils  ont  pénétré  dans  la  Terre^Nouvelle 
avant  les  Anglais  et  les  Hollandais,  lesquels  s'attribuent  l'honneur  de  la 
découverte,  sans  s'apercevoir  que  le  nom  russe  de  Novata-Zemblaf  qu'ils 
donnent  à  cette  lie,  témoigne  contre  eux.  Toutefois,  personne  n'a  mis  la 
nécessité  de  la  méthode  historique  en  relief  autant  que  M.  Nadejdine, 
premier  président  de  la  section  d'ethnographie  et  un  des  membres  les 
plus  éminents  de  la  Société.  Dans  son  remarquable  mémoire  sur  VEtude 
ethnographique  de  la  nation  russe,  rédigée  en  1846,  il  traçait  d'une  main  sûre 
le  vaste  plan  des  travaux  à  faire  et  qui  fut  adopté  plus  tard.  «  Entre 
l'ethnographie  et  la  géographie,  disait-il,  il  existe  une  liaison  intime  et  une 
réciprocité  constante;  si  l'histoire  est  déterminée  dans  ses  développements 
par  les  données  positives  que  lui  fournit  l'ethnographie,  celle-ci,  à  son  tour, 
se  guide  dans  sa  marche  progressive  par  des  souvenirs  historiques 
(p.  99). 

M.  Zablotski-Diesiatovski  en  disait  autant  de  la  statistique,  en  ajoutant 
c(  que  les  connaissances  fournies  par  elle  commencent  avec  les  annales  et 
les  documents  historiques  du  pays;  que,  sous  ce  rapport,  les  livres  de  recense- 
ment offrent  un  matériel  extrêmement  riche  pour  servir  à  l'histoire  de  la 
géographie  russe.  —  Les  données  sans  nombre  qui  y  sont  disséminées 
partout  ressembleraient  à  autant  de  pierres  de  couleur  diverse  qu'il  sufQt 
d'assortir  pour  en  composer  un  tableau  mosaïque  de  l'ancienne  Russie.  » 

Toutefois,  comme  les  limites  qui  séparent  la  géographie  et  l'ethnographie 
sont  difliciles  à  déterminer,  afin  d'éviter  des  répétitions,  qui,  autrement, 
seraient  inévitables,  nous  partagerons  les  travaux  ethnographiques  de  la 
Société  en  deux  catégories  dont  la  première  comprendra  les  recherches  sur 
les  anciens  monuments  indigènes  et  la  seconde  les  voyages  '. 

I.  Parmi  les  monuments  indigènes,  figurent  au  premier  rang  les  livres  de 
recensement  (pislsovyia  hnighi,  littéralement  :  livres  des  descripteurs),  et  le 
livre  de  la  grande  carte  dont  il  a  été  fait  mention  tout  à  l'heure.  Quelques 
détails  sont  ici  nécessaires  pour  la  plus  grande  intelligence  de  la  chose. 

Les  livres  des  descripteurs  ou  les  registres  des  opérations  cadastrales 
datent  de  très-loin.  La  propriété  foncière  étant  un  des  principaux  revenus 
de  l'état,  elle  a  été,  dès  le  onzième  siècle,  soumise  à  une  délimitation  exacte 
placée  sous  la  sauvegarde  des  lois.  Au  dire  de  Thistorien  Tatischtev,  le 
tzar  Jean  IV  ordonna,  en  1556,  l'arpentage  de  tout  le  pays,  en  donnant 
aux  employés  chargés  de  ce  travail  des  instructions  très-détaillées  avec  des 
principes  de  géométrie  pour  le  calcul  des  surfaces.  Toutes  les  terres  furent 
ainsi  mesurées,  décrites  et  distinguées  en  trois  catégories  différentes 
suivant  leur  qualité  '. 

1.  C'est  le  i)lan  qu^a  adopté  foa  Artémiev  dans  son  excellent  rapport  dont  nons 
avons  parlé  ailleurs,  et  qae  nous  ne  faisons  ici  que  résumer  d'une  manière  très- 
incomplète. 

2.  L^untté  de   la  mesure   territoriale,   dit    M.    Gérebstov,  était   une  dêuiatinê  ou 


—  532  — 

Les  registres  faits  du  temps  de  Jean  IV,  ayant  été  en  partie  perdus  lors 
des  troubles  de  l'interrègne  (16i2),  en  partie  brûlés  dans  un  grand  incendie, 
en  1616,  furent  rétablis  en  1627,  sous  le  règne  du  czar  Michel.  L'assiette  ca- 
dastrale de  rimpôt  dura  ainsi,  sans  modification,  jusqu'au  règne  de  Pierre  I^ 
qui  la  changea  en  capitation. 

L'Importance  des  registres  cadastraux  pour  Vandenne  géographie  de  Russie  a  été 
établie,  pour  la  première  fois,  dans  un  mémoire  portant  ce  titre  et  écrit  par 
Névoline.  L'examen  approfondi  qu'il  en  avait  fait  eut  pour  résultat  son  ouvrage 
capital  sur  les  régions  (piatinas)  de  Novgorod  au  quinzième  siècle,  qui  valat 
à  son  auteur  la  grande  médaille  Constantin  ^  ;  ce  travail  forme  le  huitième 
volume  des  Mémoires  de  la  Société  *.  Il  se  compose  de  six  cliapitres  dont  le 
premier  traite  des  sources  littéraires.  (Ce  sont  les  écrits  du  métropolitain 
Eugène,  de  Yazykov,  Belaïev,  etc.)  Le  deuxième  parle  de  l'origine  des  pùi- 
tinas  et  de  l'importance  de  cette  division,  au  point  de  vue  géographique  et 
administratif  ;  le  3®,  de  l'origine  des  pogosies  (subdivisions  des  piatinas)  et  de 
leur  importance  ;  le  4*,  de  la  subdivision  ultérieure  en  districts  (prisondy)  et 
stations  (stany).  Le  cinquième  chapitre  donne  la  liste  des  pogostes  et  la  déli- 
mitation de  diaque  piatina  ;  le  sixième  raconte  les  destinées  ultérieures  de 
cette  division.  Dans  des  appendices,  on  lit  de  longs  extraits  des  registres  dont 
le  texte  complet  forme  dix-huit  volumes.  Une  carte,  placée  à  la  fin,  «joute  ft 
la  valeur  de  l'ouvrage.  Au  déclin  du  quinzième  siècle  et  au  conunencement 
du  seizième,  la  république  de  Novgorod  avait  atteint  son  point  culminant  : 
voilà  pourquoi  l'auteur  a  choisi  cette  époque  de  préférence  à  toute  autre. 
Avant  Névoline,  on  ignorait  complètement  les  limites  des  piatinas  ;  son  livre 
résout  le  problème  en  même  temps  qu'il  fournit  le  meilleur  argument  en 
faveur  de  l'importance  des  registres  cadastraux,  et  un  excellent  modèle  à 
suivre  dans  l'analyse  des  autres  textes  analogues  dont  les  archives  du  minis- 
tère de  la  justice  conservent^  à  elles  seules,  environ  trois  mille,  relatifs  à  cent 
villes  diverses. 

Les  extraits  donnés  par  Névoline  dans  les  appendices  montrèrent  la  néces- 
sité de  publier  le  texte  même  des  livres  ;  elle  fut  reconnue  par  la  Société, 
d'accord  en  cela  avec  le  savant  auteur  du  livre.  Cependant  la  publication  en 
fut  sgournée,  parce  que  la  conmiission  archéographique  avait  déjà  décidé,  dix 
ans  auparavant,  d'en  faire  une  édition  intégrale,  mais  seulement  après  avoir 
terminé  l'impression  du  cycle  entier  des  annales  du  pays,  par  conséquent  en 
dernier  lieu  et  fort  tard.  Aujourd'hui  encore,  il  n'y  a  que  deux  volumes  de 
publiés  par  elle  *.  Toutefois,  les  labeurs  de  Névoline  ne  demeurèrent  pas 
inutiles.  L'idée  de  publier  le  texte  n'abandonna  jamais  la  Société  :  c'est  elle 
qui  fit  nattre  la  pensée  de  réunir  des  données  ethnographiques  sur  chaque 
localité  en  particulier.  Un  programme,  rédigé  dans  ce  but  par  Nadejdine  et 
Névoline,  les  Dioscurés  de  la  Société,  fut  répandu  à  sept  mille  exemplaires.  Des 
écrits  nombreux,  mandés  à  la  Société  de  tous  les  coins  de  l'empire,  répon- 
dirent à  l'appel  ;  ils  fournirent  la  matière  des  de^x  premiers  volumes  du 

centième  partie  d*ane  verste  carrée  ^à  pea  près  2  hectares  2^3^ .  Oq  comptait  deux 
tchet vertes  par  dessiatine,  et  T unité  d'imposition  s'appelait  une  $okha^  contenant 
400  dessiatines  de  terre  de  bonne  qualité»  tiOO  de  qualité  moyenne,  et  900  de  la  der- 
nière qualité.  De  cette  manière,  toute  la  Russie  fut  mesurée,  estimée  et  imposée  nar 
Mokha,  (De  là  les  registres  appelés  iochnoïê  pismo.'^  La  somme  d'imposition  par  toM« 
variait  suivant  les  besoins  de  l'État,  mais  l'unité  d'imposition  restait  tonjonrs  la 
même.  Gérebttov,  Rtsai  $ur  Vkistoir$  à»  la  civilisaiion  in  Rutii$,  l,  318. 

1.  Nommé  ainsi  en  honneur  du  grand->duc,  président  de  la  Société. 

2.  Opiatinakh  i  pogoitakh  Notgorodtkikh  v,  XVVekiâ,   1853.  In-8  de  XI 1-236  et  20t  p. 

3.  Lo  premier  pnrnt  on  IRjO    et  1p  rleuxième  on   1862.  sous  la  direction  de  M.  Siiv- 

VBÏtOV. 


—  533  — 

ReoàU  d* ethnographie  (1853-1854),  autre  conception  de  ces  deux  bénédictins 
russes  '. 

M.  Tsarski,  dont  le  uDin  est  resté  attaché  à  une  collection  célèbre  des  an- 
ciens manuscrit'!,  a  donné  les  Tables  des  registres  par  sokhas,  copiées  sur  un 
manuscrit  du  dix-septième  siècle,  et  auxquelles  M.  Bélalev  a  promis  d'ajouter 
un  commentaire,  lequel  est  encore  à  paraître.  L'académicien  Korkounov 
s'oflnt  également  à  élaborer  la  géogi*aphie  de  la  république  de  Pscot,  sur 
le  plan  qu'avait  adopté  Névoline;  malheureusement,  le  temps  lui  manqua 
d'achever  son  travail.  De  son  côté,  M.  Ivanov,  inspecteur  des  archives  au 
ministère  de  la  justice,  entreprit  et  mena  à  bout  la  description  des  registres 
cadastraux  qui  y  sont  conservés,  travail  fait  très-consciencieusement,  mais 
qui  resta  au  ministère,  la  Société  n'en  ayant  obtenu  que  les  sommaires  des 
registres.  Ajoutons  que  ce  travail  avait  été  inspiré  à  l'auteur  par  un  membre 
des  plus  ardents  de  la  Société,  V.  Milutine,  décédé  (en  1855)  à  l'âge  de  vingt- 
neuf  ans.  Doué  d'un  rare  talent  de  persuasion,  le  jeune  Milutine  le  mettait 
au  service  de  ses  idées  favorites,  pai^mi  lesquelles  comptait  la  publication  du 
cycle  entier  des  registres  cadastraux. 

Cependant  il  se  présenta  Ta  une  difflculté  venant  de  la  méthode  qu'on  a 
suivie  dans  cette  publication^  et  qui  différait  de  celle  de  la  commission  ar- 
chéographique. Fidèle  à  son  plan  primitif,  la  Commission  tenait  pour  la  re- 
production du  texte  intégral,  tandis  que  la  Société  géographique  se  bornait 
à  la  publication  des  extraits  d'après  un  plan  soigneusement  élaboré  par  feu 
Korkounov  et  vigoureusement  soutenu  par  M.  Kalatchov,  juriste  distin- 
gué et  «énateur.  Celui-ci  insista  sur  la  haute  importance  de  la  publication 
projetée,  et  en  fit  presque  un  devoir  de  conscience  à  la  Société.  Une  commis- 
sion fut  nommée  à  l'effet  d'étudier  la  question  et  prendre  une  déterinination 
défînitive.  Elle  constata  l'importance  de  la  publication  et  en  déclara  l'oppor- 
tunité, d'autant  plus  que  M.  Kalatchov  se  chargeait  lui-même  de  la  rédaction. La 
commission  archéographique,  ayant  reçu  communication  de  ces  résolutions, 
ne  fit  aucune  opposition  ;  toutefois  elle  déclina  l'offre  de  prendre  part  à  l'é- 
dition projetée,  et  se  borna  à  conseiller  qu'on  eût  soin  d'ajouter  au  texte  les 
caries  respectives.  Enfin,  en  1869,  un  plan  défmitif  fut  adopté,  et  xM.  Kalatchov 
se  mit  à  l'œuvre.  D'abord  il  exclut  du  progranmie  les  Livres  de  Novgorod, 
puisque  la  Commission  archéogi'aphique  en  publiait  déjà  le  texte  intégral.  Il 
partagea  les  registres  des  autres  villes  par  groupes  correspondant  à  leurs 
provinces  respectives,  et  forma  trois  séries  disposées  par  ordre  chronologique. 
La  première  de  ces  séries,  qui  est  la  plus  ancienne  (xvi«  siècle),  contient  dix 
provinces,  celle  de  Moscou  en  tète.  Y  a-t-il  déj&  quelque  chose  de  publié,  je 
ne  saurais  le  dire. 

Un  autre  monument  indigène,  c'est  le  texte  de  la  plus  ancienne  carte  de 
Moscovie,  ou  \e  Lwre  du  grand  tracé  (Knigha  Bolchomou-Tchertéjou).  Il  avait 
été  fait  par  ordre  du  tzar  Michel  (1627),  lors  de  la  nouvelle  délimitation  des 
terres  mentionnée  plus  haut,  et  certainement  d'après  un  tracé  plus  ancien. 
L'original  de  la  grande  carte  de  Moscovie  n'existe  plus,  au  moins  on  ne  Ta 
pas  découvert,  sauf  la  carte  do  Sibérie,  de  Rémézov.  Quant  au  texte  qui  l'ac- 
compagnait, il  s'est  conservé  en  plusieurs  copies. 

Il  se  passa  ici  un  fait  analogue  à  celui  qui  avait  eu  lieu  à  propos  des  re- 
gistres cadastraux  de  Novgorod.  Comme  ceux-ci  avaient  fourni  les  éléments 
à  la  carte  respective  des  piatinas,  de  même  la  grande  carte  de  Moscou  devait 
être  refaite  sur  le  texte  existant.  Le  travail  n'était  pas  facile  ;  il  fut  mis  au 
concours  plus  d'une  fois,  mais  sans  succès.  De  tous  les  ouvrages  présentés,  un 

1.  Il  est  à  noter  que  Nadejdine  et  Névolioe  étaient  fils  de  prêtres. 


—  »34  — 

seul  mérita  la  récompense  (petite  médaille),  celui  de  M.  OgorodnikoT.  H 
porte  le  titre  suivant  :  Le  Rivage  de  Moumian  et  de  Tersk  d'après  la  omidi 
eofte.  Ce  que  le  bel  ouvrap^e  de  Névoline  a  été  par  rapport  aax  pif ^sot^ia 
Knighif  celui  d'Ogorodnikov  Test  par  rapport  à  Bolschoi  teheri^;  bien  qa*il 
n'en  donne  qu'une  partie  minime  et  soit  peu  étendu  (d'une  centaine  de  pages 
environ),  ce  travail,  fait  sérieusement,  satisfait  les  exigences  de  la  eritique, 
et  n'aurait  qu'à  être  continué.  Sur  ces  entrefaites,  M.  Vladimir  Lamanski 
découvrit,  dans  les  archives  centrales  de  l'État,  quantité  de  cartes  an- 
ciennes,  et  promit  de  faire,  sur  la  cariogritphie  de  l'uncienne  Rusm,  un  travail 
spécial  qui  n'a  jamais  paru. 

En  même  temps,  un  autre  travail  qui  avait  coûté  à  son  auteur,  M.  Koa- 
klinski,  de  longues  recherches,  sans  obtenir  les  suffrages  de  la  commission, 
engagea  celle-ci  à  s'occuper  d'une  nouvelle  édition  du  texte  même  de  la 
grande  carte.  L'édition  de  183B,  due  aux  soins  de  Spasski  n'existait  plus,  et 
celle  de  1846  ne  tenait  pas  suffisamment  compte  des  variantes  asMi 
nombreuses  qu'offrent  les  diverses  copies.  La  rédaction  de  la  nouvelle  édition 
fut  confiée  à  M.  Kalatchov,  dont  tout  le  monde  connaît  la  compétence.  En 
attendant,  il  s'occupa  d'une  branche  de  documents  relatifs  aux  f^ronHim 
mUitaireê  de  Vancienne  Ruseie,  et  à  peine  exploités.  Nous  verrons  plas  loin  les 
premiers  fhiits  de  son  initiative. 

Voilà  un  tracé  général  des  principaux  travaux  de  la  Société,  dont  nous 
n'avons  pu  indiquer  ici  que  tes  grandes  lignes. 

Si,  maintenant,  de  généralités  nous  passons  aux  détails,  nons  tronveroos 
que  la  somme  des  travaux  partiels  sur  tel  ou  tel  point  de  la  géographie  lus* 
torique  ne  laisse  que  d'être  respectable.  Une  remarque  préalable  à  faire  c'est 
qu'ils  appartiennent  en  grande  majorité  au  régne  précédent  (1825-1853). 
La  raison  de  cette  particularité,  il  faut  la  chercher  dans  le  caractère  distinctif 
du  règne  actuel,  régne  des  réformes  sociales  de  première  importance,  qui  ont 
suscité  de  nouvelles  questions  dont  tout  le  monde  sollicitait  une  prompte 
solution.  L'intérêt  qu'offrait  tel  projet  d'une  nouvelle  ligne  ferrée  absorbait 
l'attention  générale,  et  faisait  négliger  les  recherches  umbratiles  sur  la 
géographie  ancienne.  Toutefois  elles  ne  furent  pas  abandonnées  entiè- 
rement, comme  nous  allons  en  donner  des  preuves  nombreuses. 

Ainsi,  le  professeur  Beiialev,  un  des  hommes  les  plus  versés  dans  la  oon- 
naissance  de  l'histoire  nationale,  a  publié  un  traité  fort  étendu  sar  le» 
Notions  géographiques  dans  Vandenne  Russie,  et  plusieurs  autres  de  moiodif 
importance.  Dans  les  trois  chapitres  qui  font  le  partage  de  son  travail,  il  dis- 
tingue autant  de  périodes  dont  la  première  est  conduite  du  neuvième  siècle 
au  douzième  ;  la  seconde  embrasse  les  deux  suivants,  et  la  troisième  tra- 
verse tout  le  quinzième.  Celui  qui  voudra  étudier  la  chronique  dite  de  Nes- 
tor trouvera,  dans  les  recherches  du  savant  auteur,  un  secours  précieux. 
Bélialev  prend  pour  point  de  départ  la  thèse  consistant  à  dire  qu'ancienoe- 
ment  les  traditions  historiques  se  conservaient  dans  la  mémoire  du  peuple 
russe,  en  même  temps  que  celles  de  géographie.  Le  peuple  écoutait  les  récit^ 
des  voyageurs  et  en  conservait  le  souvenir.  La  chronique  de  Nestor  est,  selOD 
lui,  remplie  de  données  géographiques  puisées  évidemment  aux  souvenirs 
populaires  de  ce  genre  ;  c'est  elle  qui  fournit  à  l'auteur  la  matière  de  U 
première  partie  de  son  livre,  fort  remarquable  pour  son  temps  (i Bol.) 

La  seconde  partie,  qui  est  plus  développée,  s'occupe  de  l'époque  des  pno- 
cipantés  apanagées  (douzième-quatorzième  siècles).  Chaque  principauté  vivait 
une  vie  à  part,  jouissait  d'une  pleine  autonomie  et  entretenait  dea  rap- 
ports directs  avec  les  peuples  voisins  Les  unes  d'entre  elles  gravitaient  vers 
l'occident,  d'autres  vers  l'orient  ou  le  nord.  Depuis  l'invasion  des  Mongols, 


cette  double  tendance  devint  plas  sensible.  La  Russie  orientale,  entièrement 
subjuguée  par  ies  Tartares,  se  familiarisait  avec  les  peuples  d'Asie,  tandis 
que  la  Russie  occidentale,  demeurée  étrangère  au  joug  mongol,  subit  Tin- 
iluence  des  voisins  occidentaux,  notanmient  des  Lithuaniens.  Novgorod,  ayant 
conservé  sa  liberté  politique,  colonisait  les  vastes  contrées  de  la  Russie  du 
nord,  et  continuait  ses  relations,  souvent  peu  amicales,  avec  ces  voisins  de 
l'ouest  et  du  midi,  les  Scandinaves,  les  Allemands  et  les  Lithuaniens.  L'en* 
semble  des  données  réunies  dans  le  second  chapitre  étant  disposé  non  par 
ordre  chronologique,  mais  suivant  la  disposition  territoriale,  prend  l'aspect 
d*une  géogi*aphie  systématique  des  principautés  apanagées.  La  description 
en  est  faite  à  l'aide  des  annales,  des  voyages  et  autres  documents  offlciels. 
La  principauté  de  Moscou  occupe  le  troisième  chapitre.  Conome  la  Lithuanie 
était  au  quinzième  siècle  le  jcentre  des  duchés  occidentaux,  de  même  Moscou 
rétait  à  l'égard  de  ceux  de  l'est.  Dès  le  quinzième  siècle,  les  grands-ducs  de 
Moscou  possédaient  déjà  des  eartes  de  Lithuanie,  et  probablement  aussi 
celles  des  autres  principautés  russes,  autant  d'éléments  qui  entrèrent  dans 
la  composition  de  la  gronde  carie  de  Moscovie.  L'analyse  du  testament  de 
Jean  III,  contenant  les  divisions  administratives  du  graud-duché  de  Moscou, 
et  la  description  des  terres  de  Novgorod,  faite  d'après  les  livres  de  recense- 
ment commencés  en  1492,  terminent  le  remarquable  ouvrage  de  Belialev, 
auquel  on  sera  obligé  de  recourir  encore  pendant  longtemps. 

Une  étude  analogue  de  M.  Ghermanov  expose  la  Colonisation  graduelle  de  la 
province  de  Voronége  par  les  odnodvortsys.  Pour  en  comprendre  l'importance,  il 
faut  avoir  une  notion  exacte  de  ces  derniers.  Dans  l'origine,  les  odnovortsys, 
c'est-à-dire  possesseurs  d*une  seule  maison  <,  étaient  des  hommes  libres  que 
l'appât  d'un  beau  terrain  engageait  à  s'établir  sur  les  frontières  de  la  Russie, 
par  habitations  isolées  mais  rapprochées  l'une  de  l'autre,  et  formant  ainsi 
une  ligne  de  vedettes  d'obî>ervation.  Plus  tard,  les  maisons  isolées  furent 
réunies  en  villages  plus  ou  moins  étendus  ;  mais  la  dénomination  d'odnodvor» 
tsys  fut  conservée  aux  colons. 

Les  immenses  plaines  qui  couvrent  la  partie  sud-est  de  la  Russie  étaient 
autrefois  sillonnées  par  des  populations  nomades  ;  on  les  appelait,  à  cause 
de  cela,  le  champ  sauvage  (dikolé  polé.)  Exposée  aux  incursions  perpétuelles 
des  hordes  asiatiques,  Moscou  se  vit  obligée  de  bonne  heure  de  pourvoir  à 
sa  sécurité  en  créant  le  service  des  frontières  militaires.  L'origine  en  remonte 
du-delà  du  quatorzième  siècle  ;  vers  la  fin  du  seizième,  tout  le  système  de 
défense  était  déjà  complet.  A  mesure  que  les  Russes  se  fortifiaient  sur  un 
point,  ils  se  transportaient  plus  loin,  empiétant  sur  le  champ  sauvage  et  recu- 
lant ainsi  les  limites  de  l'État. 

C'est  de  la  sorte  que,  dès  la  fin  du  seizième  siècle,  la  région  de  Voronége  a 
été  annexée  à  Moscou.  L'histoire  de  cette  annexion  graduelle  par  les  fronta- 
liers moscovites  fait  le  sujet  du  travail  de  M.  Ghermanov,  et,  quant  à  ce  point 
spécial,  elle  peut  servir  de  complément  aux  belles  études  de  Bélialev  qui  s'ar- 
rêtent précisément  au  seizième  siècle.  Les  résultats  obtenus  par  .l'auteur 
montrent  que  la  colonisation  s'avançait  dans  la  direction  sud -est,  établis- 
sant des  postes  sur  les  bords  des  fleuves  ;  qu'outre  les  frontaliers  t^odnovor- 
tsys^,  il  y  avait  aussi  plus  tard,  des  colons  volontaires,  qui  se  fixaient  même 
en-dehors  de  la  limite  fortifiée,  dans  la  Cftmpagne  où  ils  prenaient  du 
terrain  à  volonté.  On  peut  suivre  avec  l'auteur  la  marche  de  la  colonisation 
de  Voronége  et  Tordre  dans  lequel  ont  été  peuplés  les  douze  districts  actuels 
de  la  provincci  à  commencer  par  celui  de  Zadonsk  (i570). 

1.  Dca  moto  :  OdfM,  un  seul,  et  dtor,  mnifon. 


'.> 


—  536  — 

Le  nom  d'odnovnrtsys  a  été  donné  à  ces  colons  militaires,  par  Pierre  I***,  à 
qui  appartient  le  projet  des  lignes  militaires  de  l'Ukraine,  ainsi  que  la  plu- 
part des  institutions  russes  du  siècle  dernier.  Il  n'est  pas  inutile  de  rap- 
peler ici  ce  que  dit  de  ce  système  de  défense  le  général  Manstein,  dans  ses 
Mémoires.  «  Pierre  I"  en  avait  formé  le  projet  pour  empêcher  Tinyasion  des 
Tartares;  après  sa  mort,  Taffaire  en  est  restée  là  jusqu'en  i731,  qu'on  com- 
mença Toùvrage,  et  les  lignes  furent  achevées  en  1732  ;  mais  les  forts  ne  le 
furent  qu'en  4738.  La  droite  des  lignes  est  appuyée  au  Dnieper  et  la  gauche 
au  Donetz.  Elles  ont  plus  de  cent  lieues  de  France  de  long.  On  a  fait,  de  dis- 
tance en  distance,  des  forts,  dont  le  nombre  ne  monte  pourtant  qu*à  quinze 
en  tout  ;  ces  forts  ont  un  bon  parapet  de  terre  fraisé,  un  fossé  rempli  d^eau, 
un  glacis  et  la  contre-escarpe  palissadée.  Dans  les  intervalles  de  ces  forts 
il  y  a  encore  de  bonnes  redoutes  et  des  redans  tout  le  long  des  lignes.  Un 
corps  de  milices  de  20,000  dragons  est  commis  à  la  garde  de  ces  lignes... 
On  les  nomme,  en  russe,  odnodvortziy  c'est-à-dire  des  gens  qui  n'ont  qu^une 
seule  maism,  et  qui  labourent  eux-mêmes  les  terres.  Je  dirai,  en  parenthèse, 
que  ces  troupes  sont  les  plus  belles  qu'il  y  ait  dans  toutes  la  Russie.  —  U  est 
de  fait  que  2,000  Tartares  n'entreprendront  jaipais  d'attaquer  une  redouto 
gardée  par  50  hommes.  Toutefois,  ajoute  Manstein,  cela  n'empêche  pas  les 
Tartares  de  faire  des  incursions  en  Ukraine,  l'étendue  du  teiTain  étant  trop 
grande  pour  qu'elle  pût  être  exactement  gardée  (t.  I",  p.  146  et  147, 
édit.  1860).» 

Les  détails  qu'on  vient  de  lire  montrent  assez  l'importance  des  livres  rela- 
tifs à  ces  lignes  militaires  {zasietchnyïaknighi),  et  qu'on  conserve  dans  diverses 
archives  de  provinces.  Aussi,  M.  Kalatchov  proposa-t-il  d'en  publier  le  texte,  en 
s'offrant  de  faire  là-dessus  un  travail  analogue  à  celui  que  Névoline  avait  fait 
surle  texte  des  registres  cadastraux  de  Novgorod.  M.  Malnov,  secrétaire  à  la 
section  d'ethnographie,  fit  motion  de  mettre  immédiatement  à  profit  les  élé- 
ments consen'és  aux  archives  de  la  Société,  et,  ajoutant  l'exemple  à  la  parole»  il 
publia,  quelque  temps  après,  une  étude  fort  intéressante  sur  la  frontière  mûi- 
taire  dans  les  limites  du  gouvernement  actuel  de  Voronége,  fruit  des  observation, 
faites  sur  place  *.  C'est  l'endroit  de  mentionner  deux  autres  travaux  tout- 
à-fait  analogues,  la  description  de  La  ligne  militaire  d^au-delà  du  Kama,  par 
M.  Ivanine,  et  le  Département  de  YéletZj  par  M.  Stakhovitch.  Ajoutons-y  une 
série  des  monographies  sur  les  diverses  localités  et  les  tumuli,  telles  que  U 
Description  de  la  ville  de  Verkotoursk,  par  l'igoumène  Macaire,  atgourd'hui 
évêque  orthodoxe  d'Orel,  et  une  autre  sur  la  Voloste  (ou  district)  de  Théra- 
pont,  par  le  même  ;  trois  notices  de  M.  Abramov,  sur  les  villes  de  Tumène, 
d'Oustkamiénogorsk  et  de  Sémipalatinsk  ;  un  Aperçu  historique  sur  Novogro- 
dek,  en  Lithuanie,  depuis  sa  fondation  en  iii^,  jusqu'à  ta  findu  quatorzième siéete^ 
par  M.  Dmitriev;  un  autre,  sur  la  ville  de  Dédukhine  et  ses  alentours,  par 
par  M.  Pétoukhov;  puis  la  Forêt  Noire  et  ses  envii'ons,  dans  le  gouvernement 
de  Kherson,  par  M.  Ivaschtenkov  ;  la  Ville  de  Toropetz,  par  M.  Sémevski;  — 
les  Fleuves  du  gouvernement  de  Poltava^  par  M.  Markévitch  ;  les  Caries  du  Oon, 
publiées  à  Amsterdam,  au  conmiencement  du  siècle  dernier,  article  de 
M.  Poloudenski,  et  la  revue  de  l'ancienne  division  de  V Ukraine  par  régimênis 
et  sotniaSy  notice  de  Maximovitch.  M.  Sawaltov  en  publia  une  sur  VOrigiine  et 
la  pi  opagtùm  du  ehistianisme  à  Vologda^  l'autre  sur  V Établissement  de  VipareMe 
du  même  nom. 

1.  Elle  a  été  publiée  dans  le  numéro  7  de  la  Ruuie  ancienne  êi  modem»,  nouvelle 
revue  mensuelle  qui  se  publie  à  Saint-Pétersbourg,  sous  la  rédaction  de  M.  Behoa- 
binski. 


—  537  — 

Il  faut  citer  encore  la  notice  de  M.  NoToschatski  intitulée  :  Un  monument 
remarquable  d'orthodoxie  à  Krémenetz,  C'est  une  description  de  la  forteresse  de 
la  ville  vulgairement  appelée  le  château  de  la  reine  Bona,  que  Tauteur  fait 
dater  du  neuvième  siècle  sinon  du  treizième.  En  parlant  de  la  Volhynie,  où 
elle  se  trouve,  il  a  parfaitement  raison  de  dire  que  Vladimir,  prince  de 
Kiev  y  avait  introduit  le  catholicisme,  et  feu  Artémiev  en  lui  en  faisant  un 
reproche,  fut  cette  fois-ci  à  côté  de  la  vérité. 

Quant  au  tumuli^  je  ferai  grâce  au  lecteur  d'une  nouvelle  nomenclature, 
en  me  bornant  à  ne  citer  qu'un  seul  travail,  celui  de  M.'  Alabine,  intitulé  : 
Le  Tumulus  (TAnanie  découvert  près  de  la  ville  d'Elabougue,  dans  le  gou- 
vernement de  Viatka.  J'aurai  peut-être  l'occasion  d'y  revenir,  lorsqu'il  sera 
question  de  Tethnographie. 

Enfîn^  comme  couronnement,  il  faut  nommer  M.  Kostomarov,  membre 
actif  de  la  Société  et  auteur  d'un  mémoire  sur  VEistoire  russe  dans  ses  rap- 
ports avec  la  géographie  et  Vethnographie  S  dans  lequel  il  développa  la 
pensée,  que  le  but  des  connaissances  historiques  étant  la  vie  de  la  société 
humaine,  et  par  conséquent  aussi  de  la  nation,  Thistoire  russe  et  l'ethnogra- 
phie doivent  être  liées  intimement,  s'entr'aider  mutuellement  et  se  dévelop- 
per Tune  à  côté  de  l'autre  *. 

II.  Les  travaux  de  la  section  d'ethnographie  relatifs  aux  voyages  n'ont  pas 
tardé  à  lui  faire  sentir  la  nécessité  de  réunir  dans  une  synthèse  chrono- 
logique les  données  contenues  en  mille  écrits  divers,  imprimés  ou  non,  sur 
les  peuples  de  la  Russie  ancienne  et  moderne.  Quelque  difficile  que  paraisse 
une  pareille  csuvre,  des  essais  ont  été  tentés  et  ils  méritent  d'être  mention- 
nés. On  peut  les  partager  en  deux  catégories,  suivant  qu'il  s'agit  des  voyages 
des  Russes  dans  d'autres  pays  (surtout  l'Asie),  ou  des  étrangers  traitant  de 
la  Russie. 

Les  services  rendus  par  la  Société  à  la  science  géographique  de  l'Asie  sont 
incontestables;  nous  l'avons  établi  ailleurs  pour  ne  plus  y  revenir.  Il  nous 
suffira  ici  d'indiquer  la  marche  qu'elle  a  suivie  dans  ses  savantes  explora- 
tions. Dans  une  notice  intitulée  l'Asti  Centrale,  feu  Savéliev,  orientaliste 
éminent,  résumait  toutes  les  découvertes  qui  aient  été  faites  dans  ces  con- 
trées depuis  les  temps  les  plus  reculés  jusqu'à  notre  siècle,  ainsi  que  les 
relations  qui  ont  existé  entre  elles  et  la  Russie.  Malgré  sa  brièveté  et  la  date 
de  i847,  c'est  encore  ce  qu'il  y  a  de  plus  complet  sur  la  question. 

Un  autre  mémoire  également  remarquable  a  pour  titre:  Méritas  dePierrel^^ 
devant  la  géographie.  Le  docte  académicien  Baer,  son  auteur,  prouve  que 
l'expédition  de  Bering  a  été  faite  sur  l'indication  de  Pierre  I",  dont  le 
génie  avait  tout  prévu  et  tracé  d'avance  le  sillon  qu'il  fallait  suivre.  La 
Sibérie,  l'Asie-Centrale,  la  Perse,  la  Transcauc^sie,  toutes  les  contrées  que  les 
géographes  russes  de  nos  jours  se  sont  donné  la  mission  d'explorer,  il  en 
avait  fait  déjà  l'objet  de  ses  préoccupations.  Son  intention  a  été  de  mettre 
son  pays  en  relation  directe  avec  le  Turkestan  et  pénétrer  jusqu'aux  Indes. 
Assurément,  il  n'y  a  jamais  eu  de  souverain  qui  ait  tant  favorisé  les  pro- 
grès de  la  science  géographique  en  Russie,   ni  qui  ait  mieux  compris  les 

1.  Mémoirt»,  livre  11,  p.  92-113. 

2.  J'aarais  désiré  pouvoir  associer  an  nom  de  M.  Kostomarov  ceux  de  MM.  Bestonjev 
Rumine,  historien  également  eh  renom^  et  de  Zarayslovski,  archéologue  des  plus  dis- 
tingués ;  mais,  comnie  leurs  mémoires  ne  furent  point  insérés  dans  les  publications  de 
la  Société,  et  celui  de  M.  Bestoujev-Rumine  sur  la  Coloniêation  du  ptupU  grand' 
riutien  ne  ûgure  pas  même  dans  le  procès-verbal  de  la  séance  à  laquelle  il  avait  été 
lu,  je  me  bornerai  à  partap:er  à  C6  s^jet  les  regrets  du  rapporteur,  dont  on  ne 
saurait  asses  louer  la  profonde  érudition  unie  à  une  noble  indépendance  et  à  une 
rare  franchise. 

DÉCEMBRE  «875.  T.  XIV,  35. 


-  538  - 

intérêts  de  Tempire.  Aussi,  tandis  qne  les  Occidentaux  ignoraient  l'existence 
du  lac  Aral  et  indiquaient  sur  leurs  cartes  la  mer  Caspienne  d'après  les 
données  de  Ptolémée,  neiljes  de  quinze  cents  ans,  les  Russes  connaissaient 
et  la  topographie  d'Aral  et  U  direction  des  deux  fleures,  Amou-Daria  et 
Syr-Daria,  pour  ne  rien  dire  de  la  Caspienne  dont  Pierre  P',  lors  de  son 
séjour  à  Paris,  a,  de  sa  propre  main,  rectifié  la  carte. 

«  Quant  aux  Indes,  Pierre  n'en  abandonna  jamais  la  pensée.  Peu  de  temps 
avant  sa  mort,  il  se  proposait  encore  d'enyoyer  une  escadre  an  Bengal.  Après 
sa  mort,  la  flotte  russe  ne  repassa  plus  l'équateur  avant  quatre-vingts  ans. 
Sur  ces  entrefaites,  l'Angleterre  s'empara  du  Bengale  et  de  la  plus  grande 
partie  des  Indes.»  C'est  par  ces  paroles  que  se  termine  le  mémoire  de  M.  Baer 
qui  l'a  fait  publier  aussi  en  allemand,  à  l'occasion  dn  second  centenaire 
du  tsar  réformateur  ^ 

En  18i9,le  prince  Soltykov  a  édité  son  Voyage  dans  les  Indei.  Le  bulletin  de 
la  Société,  en  faisant  connaître  cette  splendide  publication,  rappelait  aux  lec- 
teurs que  les  Indes  avaient  été  visitées  par  les  Russes  dès  le  quinzième  siède, 
et,  à  cette  occasion,  il  citait  un  certain  Lébédev  qui  j  avait  séjourné  doue 
années  entières  (1786-1798)  et  a  fondé  un  théâtre  à  Calcutta.  Après  avoir  erré 
dans  le  monde  durant  trente  ans,  cet  homme  revint  en  Russie  où  il  monrot 
en  1820.  U  est  encore  un  autre  Russe,  nommé  Efrémov,  simple  sousK>fiicier, 
qui,  après  avoir  été  prisonnier  chez  les  Kirguises,  et  vendu  par  eux  au 
Bukhares,  s'évada  et  vint  à  Calcutta.  On  a  de  lui  des  mémoires  assez  courts, 
il  est  vrai,  mais  fort  curieux,  où  il  est  parlé  du  Turkestan  chinois,  dn  Thibet 
septentrional,  du  Kachemir  et  de  la  route  conduisant  de  là  à  Calcutta.  D 
fut  le  premier  des  Européens  qui  ait  donné  une  description  du  Samar- 
kand. 

Les  registres  cadastraux  dont  il  a  été  question  plus  haut  inspirèrent  à  la 
Société  la  pensée  de  faire  appel  à  toutes  les  bonnes  volontés  :  en  réponse  à  son 
programme,  on  lui  envoya  de  toute  part  des  documents,  des  notices  d*un  mérite 
inégal,  sans  doute,  mais  donnant  chacune  quelque  indication  utile.  La 
pensée  d'un  Becueil  d'éihnographie  se  présenta  alors  à  l'esprit  du  Nadejdine,le 
grand  promoteui*  des  études  ethnographiques.  Déjà  en  1837,  longtenips 
avant  la  création  de  la  Société  de  géographie,  il  avait  commencé  de  publier 
une  série  de  monographies  relatives  à  cette  science,  qui  portent  toute  l'em- 
preinte de  son  talent.  Ses  mérites  et  les  services  qu'il  a  rendus  à  la  science 
furent  dignement  appréciés  par  M.  Sreznevski,  son  successeur  dans  la  prési- 
dence de  la  section  ethnographique  et  son  collaborateur. 

Une  autre  idée  lumineuse  de  Nadejdine  fut  d'étudier  les  croyances,  les 
légendes  populaires  et  les  proverbes,  au  point  de  vue  de  la  géographie  et  de 
l'ethnographie,  —  source  demeurée  jusque-là  pour  ainsi  dire  intacte.  Il  l'a 
développée  dans  un  mémoire  qui  ne  fut  jamais  imprimé  et  trouva  bientôt 
des  imitateurs.  En  même  temps,  il  conçut  le  projet  de  réunir  en  un  senl 
corps  toutes  les  données  ethnographiques  sur  la  Russie  chez  les  divers  auteurs- 
H.  Sreznevski  fut  un  de  ceux  qui  l'ont  secondé  en  cela  le  plus  efOcaoement. 
Ainsi,  en  1851,  ii  publia  son  Essai  de  géographie  de  la  langue  russe,  contenant 
l'histoire  de  la  Russie  hongroise  ou  transcarpatienne  et  de  son  dialecte. 
Quelque  temps  après,  il  donna  un  aperçu  des  anciens  voyageurs  russes  en 
Asie,  à  partir  du  neuvième  siècle,  et  notamment  le  récit  d'Ibn-Khordadbeg, 
écrivain  arabe  (880),  sur  le  conmierce  des  Russes  en  Orient  ;  puis  le  voyage 
d'Athanase  Nikitine  en  Perse  et  aux  Indes  (1465-1472),  publié  avec  des  notes 

1.  Pn$r^ê  d99  groittn  Vêrâitntte  vm  dit  trwêftêrung  dêr  g$ogrùphiMehên  Kml^ii^* 
Baint-Pétenboarg,  t67i.  In-8  de  xv-200  p.,  ereo  deux  oartei. 


—  589  — 

critiques  dans  les  MénuHrêi  Bavants  dé  l'Académie  (1816,  vol.  H.),  et  qui  le  mit 
sur  les  traces  de  Glayigo,  voyageur  portugais,  lequel  avait  visité  Samarkand 
en  1404  où  il  dit  avoir  connu  des  Russes.  La  relation  de  Glavigo  a  été  longue- 
ment analysée  par  M'^*  Olga  Sreznevski  dans  le  Messager  russe  de  i874,  livrai- 
son de  juin. 

De  son  c6té,  M.  Popov  publia,  sous  le  titre  de  Relations  des  Russes  avec  le 
Khiva  et  la  Bukharie  sous  Pierre  i*',  Thistoire  des  deux  expéditions  faites  par 
ordre  de  ce  souverain,  Thne  dans  la  petite  Bukharie,  sous  la  conduite  du 
capitaine  Buchholz,  l'autre  du  prince  Bécovitch,  qui  furent  suivies  de  Tarn- 
bassade  de  Florio  Beneveni.  Le  journal  de  ce  dernier,  rédigé  en  italien,  est 
demeuré  jusque  là  inédit;  il  contient  cependant  des  renseignements  d'au- 
tant plus  intéressants  que  la  plupart  des  contrées  dont  il  parle  se  trouvent 
ai^ourd'bui  sous  la  domination  russe.  On  peut  mentionner  encore  un  tra- 
vail de  M.  Svenske,  très^tendu  et  trés-consciencieux,  quoiqu'il  se  rapporte 
à  une  époque  relativement  assez  récente  ;  c'est  la  Revue  des  principales  expé- 
dttkms  et  découvertes  géographiques  depuis  1838  à  1848. 

Cependant,  le  projet  grandiose  de  faire  une  édition  critique  de  tous  les 
voyageurs  resta  sans  exécution,  par  suite  de  la  perte  presque  simultanée  de 
ceux  qui  s'y  intéressaient  le  plus  nommément  de  Nadejdine  (1886)  et  Névo- 
line  (mort  en  1855).  Il  n'y  eut  que  des  travaux  partiels,  parmi  lesquels  nous 
citerons  seulement  :  Le  Voyage  de  KoÊmgféh  et  Delille  à  Bérézov,  fait  en  1740 
pour  observer  le  passage  de  Mercure  devant  le  seleil.  Joseph  Delille  était, 
comme  on  sait,  astronome  et  académicien.  Ce  voyage,  commenté  d'abord 
par  H.  Struve,  fut  ensuite  très-longuement  analysé  par  feu  Pékarski,  historien 
de  l'Académie,  qui  Ta  enrichi  de  plusieurs  autres  documents  conservés  aux 
archives  de  cet  institut.  Une  autre  notice,  de  M.  Petrov,  traite  de  Rdations  de 
la  Russie  avec  le  Khiva  et  la  Bukharie,  sous  le  régne  de  Fimpératrice  Anna  Iva- 
novna,  d'après  de  nouveaux  documents  trouvés  au  ministère  des  finances. 
Le  but  de  ces  relations  était  commercial.  Les  documents  contiennent  beau* 
coup  de  données  sur  la  topographie  des  pays  en  question.  Ils  abondent 
particulièrement  dans  le  journal  du  colonel  Harber,  qui  accompagnait  la 
earavane  de  1732.  Aussi,  fut-il  jugé  digne  d'être  édité  intégralement  en 
langue  russe . 

La  plupart  de  ces  travaux  ont  paru  soit  dans  le  B«ctitft/  ethnographique, 
publié  sous  la  direction  de  Nadejdine,  Kavéline,  Korkounov,  Kalatdiov,  et 
Stasov  *,  soit  dans  les  Mémoires  d*ethnographie  \  dont  la  rédaction  fut  confiée 
à  MM.  Lamanski,  Maikov,  Savellev,  0.  Miller  et  Hildebrandt. 

Nous  devons  y  ajouter  un  troisième  recueil  de  date  plus  récente  encore. 
Ce  sont  les  Travaux  de  Vexpédition  ethnographique  et  statistique  dans  les  pro- 
vinees  sud^uesi  de  la  Ruseie,  publiés  sous  la  rédaction  de  M.  Tchoubinski.  Ds 
forment  sept  gros  volumes  in»8,  dont  le  dernier,  imprimé  cette  année-d 
(in-8  de  vi«337  p.),  est  un  des  plus  intéressants.  U  est  divisé  en  deux  par* 
ties,  dont  la  première  (p.  1-212)  traite  de  la  population  juive  ;  dans  la  seconde 
il  est  question  des  Polonais,  de  lapolonisationdupays,  du  catholicisme  (lequel 
y  serait,  d'après  l'auteur,  plus  aristocratique  qu'en  Pologne  et  se  confondrait 
aveclepolonisme),  des  mœurs,  coûtâmes  et  croyances  des  Petits-Russiens,  des 
particularités  de  leur  littérature  et  leur  langue,  des  causes  principales  de 
l'antagonisme  qui  existe  entre  eux  et  les  Grands-Russes  ;  enfin  des  données 
•Catistiques  sur  les  catholiques  et  les  Polonais. 

Signalons  encore  le  premier  volnme,  où  Ton  traite  de  croyanoes  et  snpen- 

1.  t8&3-1864,  6  vol.  ia-8. 

2.  1867-1873,  5  voL  iii-8. 


-  o40  — 

titions  des  mêmes  populations,  ainsi  que  le  troisième  contenant  le  Calen- 
drier populaire  (p,  ii-486),  sujet  du  plus  haut  intérêt  et  qui  mériterait  une  ana- 
lyse plus  longue  que  ne  le  comporte  le  cadre  du  présent  aperçu.  Le 
cinquième  volume,  d'une  effrayante  épaisseur,  contient  les  chants  populaires 
ou  le  côté  profane  de  la  vie  populaire;  il  a  été  publié  par  M.  Kostomarov,  de 
même  que  le  précédent,  auquel  il  sert  de  complément.  Les  coutumes  jurii 
diques  font  le  sujet  du  sixième  volume  de  xvi-408  pages. 

Grâce  à  ces  travaux,  la  cartographie  ne  tarda  pas  à  recevoir  de  nouveaux 
développements.  Dès  1855,  M.  Kœppen  donna  sa  carte  ethnographique  de 
la  Russie  d'Europe,  en  quatre  feuilles,  sur  l'échelle  de  1/3,  150,000;  M.  Tial- 
kine  publia  celle  de  la  Pologne,  servant  de  complément  à  la  précédente. 
Une  carte  plus  récente  et  mieux  étudiée  de  la  Russie  européenne  est  due  à 
M.  Rittich^  si  connu  par  ses  travaux  sur  l'ethnographie  ;  il  a  préparé  aussi 
une  carte  ethnographique  du  Caucase  (encore  manuscrite),  sur  l'échelle  de 
1/840,000,  qui  fait  pendant  à  la  magnifique  carte  chromophotographiée  do 
Caucase  représentant  en  relief  le  système  orographique  de  l'Isthme  canca- 
sien,  dont  la  biangulation  avait  été  faite  sous  la  direction  du  général  Chodzko, 
Stébnitski,  Khanykov,  etc. 

Les  récits  des  étrangers  qui  ont  visité  la  Russie  contiennent  une  mine 
aussi  riche  qu'elle  est  inexplorée.  Recueillir  les  données  ethnographiques 
qu'ils  renferment,  les  coordonner  et  rendre  accessibles  au  public  russe,  rien, 
pai^ait-il,  n'est  plus  simple  que  cette  pensée;  mais  encore  faut-il  qo*elle 
n'ait  rien  de  vague,  qu'elle  soit  bien  déterminée  et  nettement  formulée.  La 
section  d'ethnographie  n'y  arriva  pas  d'un  coup.  Après  quelques  tâton- 
nements, elle  adopta  deux  programmes,  l'un  qui  proposait  de  réunir 
ense^nble  les  données  qui  afiQuaient  de  toute  part  sans  liaison  intime,  l'autre 
qui  concernait  les  allogéneSy  c'est-à-dire  les  races  différentes  des  Russes. 
Ce  dernier  a  été  rédigé  par  M.  Savélîev,  qui  le  fit  suivre  d'un  échantillon  de 
travail,  à  savoir  d'une  Desmption  de  la  Mardva  (Messager^  1.  l*%  scct.  i, 
p.  116).  Le  même  sujet  fut  traité  bien  plus  longuement  par  M.  Melnikov, 
spécialiste  en  renom,  bien  que  son  travail  ne  parût  que  bien  tard  (en  1867) 
et  fût  imprimé  non  dans  les  Mémoires  de  la  Société,  mais  dans  la  Reçut  de 
M.  Katkov  *. 

En  1850,  la  section  écoutait  la  lecture  du  même  Savéliev  sur  le  voyagr 
d'un  chevalier  flamand  dans  les  pays  baltiques,  Novgorod-la-^rande  et  Psco^ 
(en  1412-1414).  Ce  chevalier  s'appelait  Messire  GuDlibert  de  Lannoy,  cheva- 
lier de  la  Toison  d'Or,  seigneur  de  Saintes,  Willerval,  Tronchiennes,  Beau- 
mont  et  Wahenee.  Il  a  combattu  en  Angleterre,  en  Espagne  et  en  France, 
en  Prusse,  en  Pologne  et  en  Turquie;  il  a  servi  les  chevaliers  de  l'Ordre 
teutonique  et  tiré  l'épée  contre  «  ceux  de  Novgorod-la-Grande.  >»  Dans  son 
second  voyage,  Lannoy  traversa  la  Pologne,  la  Volhynie,  la  Podolie  et  U 
Bessarabie,  se  rendant  en  Grèce.  M.  Savéliev  s'offrit  d'en  préparer  une  édi- 
tion critique;  elle  est  encore  en  préparation. 

A  ce  propos,  le  rapporteur  fait  observer  que  le  même  sort  est  échu  &  plus 
d'un  écrit;  on  n'a  pas  mai*chandé  les  promesses,  mais  elles  ne  forent  point 
accomplies.  M.  Artémiev  signale  à  plusieurs  reprises  ce  zèle  plus  ardent 
que  durable,  et  il  a  le  rare  courage  d'appeler  les  prometteurs  par  leur  nom, 
en  les  invitant  de  tenir  la  parole  donnée. 

Cependant,  le  projet  de  publier  la  Bibliothèque  des  écrival/is  sur  la  Buuk 
faisait  son  chemin.  Plusieurs  membres  offrirent  leurs  services.  On  rédigea 
un  plan  à  suivre  dans  la  manière  de  publier  les  auteurs.  Bientôt  parut  le 

i.  Meuagtr  rmte,  t.  LXIX,  n*  5;  t.  LXXl,  n**  2-iO. 


—  541  — 

Voyage  de  La  Martiniére,  traduit  par  Kastorski  ;  Edrisi,  écrivain  arabe,  donné 
en  extraits  par  M.  Chopin  ;  la  Qermania  de  Tacite  et  lomandés^  sur  les  origines 
des  Qoths.  Les  commencements  promettaient  beaucoup  ;  la  suite  n'y  répondit 
pas;  à  partir  de  i859,  il  n'en  fut  ptus  question.  Le  travail  de  Kbvolson  sur 
les  Khazares,  les  Bonriates,  les  Bulgares,  les  Slaves  et  les  Russes,  d'après 
n)n-Dost,  auteur  arabe  du  dixième  siècle  >,  fait  une  heureuse  exception.  Il 
mérite  une  mention  spéciale.  A  la  traduction  russe,  le  docte  professeur  a 
joint  des  commentaires  remarquables  par  des  aperçus  nouveaux'  et  qui 
intéressent  à  un  haut  degré  l'ethnographie  russe.  Son  livre  fut  une  vraie 
révélation.  Parmi  les  nouvelles  vérités  qu'il  a  fait  acquérir  à  l'histoire,  il 
faut  placer  la  thèse  touchant  l'origine  des  Russes,  tant  débattue  dans  le 
pays.  Communément  on  fait  dériver  ce  nom  de  Scandinavie,  soit  qu'on 
suive  la  théorie  normande^  soit  la  théorie  slave,  M.  Khvolson,  s'appuyant  sur 
le  témoignage  des  écrivains  arabes  des  neuvième  et  dixième  siècles,  affirme 
que  le  mot  Busse  est  d'origine  purement  slave,  et  qu'il  avait  existé  bien 
avant  l'arrivée  des  Varègues;  autrement  il  n'aurait  pu  être  connu  des 
auteurs  arabes  écrivant  presque  immédiatement  après  l'arrivée  des  Varègues. 

Encore  un  coup,  si  le  projet  de  publier  les  écrivains  étrangers  demeura  en 
chemin,  au  moins  il  fournit  nue  nouvelle  preuve  que  la  méthode  historique 
avait  été  reconnue  pour  base  des  études  ethnographiques  :  ce  qui  est  déjà 
un  grand  pas  dans  la  voie  du  progrès. 

Les  pages  qu'on  vient  de  lire  n'offrent  qu'un  tableau  bien  imparfait  des 
travaux  de  la  Société  géographique  de  Russie  ;  mais,  malgré  les  lacunes 
qu'il  pourrait  avoir,  et  dont  quelques-nnes  ont  été  laissées  à  dessein  dans 
l'intérêt  de  la  brièveté,  il  ne  laisse  que  de  donner  une  idée  fort  avantageuse 
de  l'état  actuel  de  la  science  géographique  en  Russie.  Les  résultats  considé- 
rables qu'elle  a  déjà  obtenus,  dans  ui)  intervalle  de  temps  relativement  très- 
court,  permettent  d'en  présager  de  bien  plus  grands  dans  l'avenir.  Ce  qui 
donne  &  cette  attente  presque  un  caractère  de  certitude  morale,  c'est  le 
spectacle  de  l'union  qui  s'est  établie  entre  la  science  russe  et  celle  de  l'Occi- 
dent, et  dont  chacun  a  pu  être  témoin  lors  du  dernier  congrès  géogra- 
phique. Plus  la  Russie  se  rapprochera  du  foyer  de  la  science  et  de  la  civili- 
sation véritables  qui  n'est  pas  certes  en  Orient,  plus  aussi  elle  fera  de  pro- 
grès dans  l'une  et  l'autre;  plus  elle  sera  k  même  d'en  répandre  les  bienfaits 
sur  les  nombreuses  populations  de  toute  race  et  de  toute  langue  qui  la  com- 
posent, et  dont  plusieurs  sont  encore  assises  à  l'ombre  de  la  barbarie. 

J.  Martinov. 


CHRONIQUE 

NÉCROLOGIE.  —  M*'  Antoine -Charles  Cousseau,  ancien  évêque  d'Angoulême, 
né  à  Saint- Jouin-soQs-Chàtillon  (Deux*- Sèvres)  le  (7  août  1805,  est  mort 
le  13  octobre,  à  Poitiers,  où  il  s'était  retiré  depuis  deux  ans  et  demi,  après 
s'être  démis  de  la  charge  pastorale  dont  une  paralysie  progressive  ne  lui 
permettait  plus  de  porter  le  fardeau. —  Professeur  de  dogme,  puis  d'écriture 
sainte  au  grand  séminaire  de  Poitiers,  de  1829  à  1841,  supérieur  de  cet 
établissement  jusqu'en  1850,  année  où  it  fut  préconisé  pour  l'évêché  d'An- 
goulême, M.  l'abbé  Cousseau  se  fit  connaître  comme  théologien,  littérateur, 
philologue  et  antiquaire  par  des  mémoires  de  haute  érudition  sur  divers 

1.  Saint-Pétersbourg.  18A9.  In-B  de  vni-199  p. 


stgels  religieux,  mémoires  ôcrits  arec  un  ordre,  une  clarté,  une  pureté  de 
diction,  un  bonheur  d'expressions  dignes  des  meilleurs écriyains.  Hébralsant 
distingué,  familier  ayeo  les  littératures  des  classiques  et  des  Pérès  grect^ 
orientaux  et  latins,  maniant  les  langues  anciennes  et  l'italien  presque  avec 
la  même  facilité  que  le  français,  initié  par  leur  comparaison  à  Tétude  si  fé- 
conde de  l'origine  et  du  mécanisme  des  divers  idiomes,  il  sut  tovyoors, 
comme  Ta  si  bien  dit  son  panégyriste,  M.  Tabbé  Alexandre,  dans  son  orai- 
son funèbre,  employer  toutes  ses  connaissances  au  service  de  Dieu.  — 
Mf  Gousseau  n'a  pas  laissé  d'ouvrage  de  longue  haleine.  Depuis  plus  de 
quinze  années,  il  réunissait  les  matériaux  d'un  Anarcharsis  chrétien  au  qua- 
trième siècle,  et  il  en  avait  coordonné  et  arrêté  le  plan  lorsque  son  élévation 
à  l'épiscopat  et  les  devoirs  multiples  de  sa  charge  vinrent  lui  6ter  le  reste 
des  laborieux  loisirs  qui  lui  auraient  permis  de  mettre  en  œuvre  ces  ma- 
tériaux. 

Parmi  ses  travaux  imprimés,  citons  un  Mémoire  sur  l'état  des  lettres  en 
Aquitaine  au  sixiétne  siècle  analysé  dans  le  compte  rendu  du  Congrès  scien- 
tifique tenu  k  Poitiers  en  1834;  une  notice  sur  M.  André-Hubert  Fournet,  le 
saint  fondateur  de  la  congrégation  enseignante  des  Filles-de-ia- Croix,  Poi- 
tiers, Barbier,  1835;  des  mémoires  sur  V Auteur  du  te  deuh  ;  sur  V Église  N.-D, 
de  Lusignan  ;  sur  V  ancienne  liturgie  du  diocèse  de  Poitiers  et  les  monumerUs  qui 
nous  en  restent  ;  sur  le  plus  ancien  monastère  des  Gaules,  Liuugé,  le  monastère 
de  Saint-Martin  ;  sur  le  Cifpe  funéraire  et  Vinscription  de  l'aruspice  Sa6tmtf , 
insérés  dans  les  publications  de  la  Société  des  antiquaires  de  l'ouest  ; 
l'oraison  funèbre  de  M'r  Brumaud  de  Beauregard,  ancien  évoque  d'Orléans  ; 
puis  ses  instructions  pastorales  si  pleines  d'onction  et  de  doctrine,  et  enfin 
divers  discours  de  circonstance,  et  qui  ne  sont  pas  les  moindres  perles  de 
son  écrin  littéraire,  tels  que  ceux  qu'il  prononça  pour  la  translation  des 
restes  de  Guez  de  Balzac,  l'un  des  fondateurs  de  l'Académie  française  ;  à 
l'occasion  de  la  découverte  du  corps  et  de  l'anneau  d'un  de  ses  illustres 
prédécesseurs,  où  il  sut  tracer,  à  larges  traits,  le  tableau  des  gloires  et 
des  douleurs  de  l'église  d'Angoulême  ;  sa  bienveillante  allocution  lors  de 
l'inauguration  du  chemin  de  fer  des  Gharentes,  et  son  panégyrique  de  saint 
Martin,  prononcé  à  Ligugé  devant  les  Pères  du  concile  provincial  réuni  à 
Poitiers.  Sa  facilité  à  manier  la  langue  latine  lui  valut  le  laborieux  honneur 
d'être  toiyours  choisi  par  les  Pères  des  cinq  conciles  de  la  province  de  Bor- 
deaux auxquels  il  prit  part,  pour  la  révision  des  textes  de  leurs  actes,  de 
même  que  sa  connaissance  du  grec  et  de  l'hébreu  le  désigna,  avec  son  vé- 
nérable ami,  M''  l'archevêque  d'Alger,  pour  représenter  Ta  France  dans  la 
congrégation  des  affaires  d'Orient  au  concile  du  Vatican,  où  il  était  arrivé 
après  une  étude  approfondie  sous  toutes  les  faces  de  la  tradition  chrétienne, 
de  l'histoire  de  l'Église,  des  textes  comparés  des  Évangiles,  sur  la  grande 
question  que  ce  concile  devait  résoudre.  Elle  fut  résolue  dans  le  sens  con- 
traire aux  instructions  de  sa  jeunesse,  mais  dans  le  sens  conforme  4  la 
recherche  qu'il  avait  faite,  en  toute  sincérité,  de  la  vérité  dogmatique.  Aussi 
put  il  dire,  en  parlant  des  adversaires  de  l'infaillibilité,  paroles  qui  reste- 
ront dans  l'histoire  du  Concile  :  Quod  irufpportunum  dicebont  feoeruni  neoM- 
sarium, 

Uf  Gousseau,  par  le  charme  de  sa  conversation,  l'aménité  de  son  carac- 
tère, l'enjouement  et  l'égalité  de  son  humeur,  s'était  fait  de  nombreux  amia 
qui  lui  sont  restés  fidèles  et  que  lui-même  a  beaucoup  aimés  jusqu'à  son 
dernier  jour.  Avait-il  des  ennemis  ?  je  n'en  ai  pas  connus.  —  L.-D. 

—  Le  25  novembre  est  mort,  à  Paris,  M.  Edme-Jacques-Benolt  Rathebt, 
conservateur  sous-directeur  adjoint    à  la  Bibliothèque  nationale,  membre 


—  543  — 

du  comité  des  trayaux  historiques,  yice-président  de  la  société  de  This- 
toire  de  France,  chevalier  de  la  légion  d'honneur.  M.  Rathery  était  né  à  Paris, 
le  19  novembre  1807.  Il  suivit  d*abord  la  carrière  du  barreau  et  donna  de 
nombreux  articles  au  Droit  et  à  la  Gazette  des  Tribunaux.  Il  écrivit  ensuite 
dans  la  Revue  f^ntemporaine,  la  Revue  des  Deux-Mondes^  V Encyclopédie  des 
gens  du  mondes  le  Bulletin  du  BibliophUef  etc.  Une  Eistotre  des  États  généraux 
lui  valut  le  prix  proposé  par  V Académie  des  sciences  morales  et  politiques. 
Après  avoir  été  attadié  à  la  Bibliothèque  du  Louvre,  il  passa  en  1859,  à  la 
Bibliothèque  nationale  comme  conservateur  adjoint  et  montra  dans  ces  fonc- 
tions une  érudition  et  une  complaisance  dont  les  littérateurs  qui  ont  eu 
recours  à  lui  conserveront  un  reconnaissant  souvenir.  M.  Rathery  s'est  beau* 
coup  occupé  de  la  poésie  populaire.  Sur  un  rapport  de  M.  Fortoul,  un 
décret  du  président  de  la  République  ordonna,  en  1852,  la  publication  des 
chants  de  cette  espèce,  reeueillis  sur  tous  les  points  de  la  France.  Le  décret 
fut  malheureusement  rapporté,  mais  il  avait  provoqué  de  très-nombreux  en- 
vois au  Comité  de  la  langue.  M.  Rathery  pensait  à  les  utiliser  daps  un  vaste 
recueil,  et  Ton  doit  vivement  regretter  qull  n'ait  pu  réaliser  ce  projet.  Il 
a  fait  paraître  des  études  sur  la  poésie  populaire  française  dans  le  Moniteur 
(19  mars,  23  avril,  27  mai,  15  juin,  26  août  1853),  sur  la  poésie  populaire 
italienne  et  sur  la  poésie  populaire  anglaise,  dans  la  Reçue  des  Deux-Mondes 
(15  mai  1862  et  15  octobre  1863);  enfin  il  a  fait  paraître,  dans  le  Français 
(19  février,  5  et  9  mars  1874),  trois  curieux  articles  sur  les  chants  français 
du  Canada.  M.  Rathery  a  publié,  pour  la  société  de  l'histoire  de  France, 
les  Mémoires  de  d'Argenson^  et  a  donné  en  collaboration  avec  M.  Burgeaud, 
des  Marets,  une  bonne  édition  de  Rabelais.  -^  Th.  P. 

—  M.  Alexandre  Groza,  né  en  1807,  est  mort  d'un  coup  d'apoplexie,  aux 
environs  de  Berbytchev,  le  3  novembre  1875.  Il  fit  ses  études  à  l'université 
de  Yilna,  et  puis  à  celle  de  Dorpsat;  les  ayant  terminées,  il  se  fixa  à  la  cam- 
pagne, dans  une  terre  qui  lui  appartenait,  en  Podolie.  Il  fut  l'un  despo^^tes 
polonais  qui  puisaient  les  sujets  de  leurs  inspirations  dans  les  légendes  et  le 
passé  de  la  Ruthénie,  et  qu'on  désigne  sous  le  nom  de  poètes  de  l'Ukraine, 
n  publia  plusieurs  volumes  de  poésies,  un  drame  en  cinq  actes,  intitulé 
Ilrye,  un  mystère  Twirodonski,  plusieurs  nouvelles  en  prose,  etc.  Parmi  set 
poésies,  celles  intitulées  :  îe  ^Uxroste  de  Kaniw  et  les  Tombeaux  sont  le  plus 
estimées.  Profondément  religieux,  il  publia  encore,  en  185A,  un  Livre  de 
prières,  et,  dans  les  dernières  années  de  sa  vie,  un  Abéeédaite  destiné  fc 
faciliter  au  peuple  l'acquisition  des  premiers  rudiments  de  la  science. 

—  Le  9  novembre,  est  mort,  à  Paris,  M.  Léopold  Pannier,  archiviste- 
paléographe,  employé  à  la  Bibliothèque  nationale  et  auteur  de  divers  tra- 
vaux historiques  ou  philologiques.M.  Pannier  était  né  à  Paris,  le  15  avril  1842; 
il  avait  suivi  concurremment  les  cours  de  l'École  de  droit  et  de  l'École  des 
chartes,  puis  ceux  de  l'École  des  hantes-études.  Pourvu  du  brevet  d'archi- 
viste, le  1*'  février  1869,  il  appartenait  depuis  cette  époque  à  la  Bibliothè- 
que; ses  travaux  et  ses  aptitudes  scientifiques  l'avaient  fait  passer  du  dépar» 
teroent  des  imprimas  à  celui  des  manuscrits,  où  la  section  des  manuscrits 
français  et  celle  du  cabinet  des  titres  lui  furent  successivement  confiées. 
Tous  les  habitués  de  ce  département  de  la  Bibliothèque  conserveront  le  sou* 
venir  des  qualités  dont  M.  Pannier  faisait  preuve  dans  l'exercice  de  ses 
fonctions.  Quoique  M.  Pannier  soit  mort  très -jeune,  il  laisse  derrière 
lui  un  assez  grand  nombre  d'opuscules  pour  qu'on  puisse  apprécier 
l'utilité  de  ses  travaux.  Après  avoir  fourni  un  texte  important  du 
quatorzième  siècle  pour  l'édition  de  la  Chanson  de  saM  Alexis,  qui  a  valu 
à  M.  Gaston  Paris  le  premier  prix  Gobert,  en  1872,   il  obtint  an  concours 


—  o44  — 

suivant  des  Antiquités  nationales,  une  récompense  pour  son  Histoire  de  la 
noble  maison  de  Saint-Ouen,  Collaborateur  assidu  des  revues  d'énidîtion,  il 
a  fait  paraître,  dans  la  Bibliothèque  de  FÉcole  des  chartes  une  première 
partie  de  sa  thèse  d'archiviste  sur  Pierre  Bersuire,  traducteur  de  Tite-Live, 
et  un  Etat  des  inventaires  sommaires  des  diverses  archives  de  la  France,  tra- 
vail des  plus  complets  et  des  plus  recommandables  :  dans  la  collection  de 
la  Société  de  l'histoire  de  Paris,  une  étude  sur  les  Seigneurs  de  Méry-sur-Oise 
dans  le  journal  le  Temps,  plusieurs  Tariétés  historique;  dans  la  Aettie  rrî- 
tique,  un  Essai  de  restitution  du  manuscrit  de  Guillaume  CoUetet;  dans  la 
Revue  archéologique,  une  très-instructive  étude  sur  les  Joyaux  du  duc  de 
Guyenne,  Dernièrement,  il  venait  de  publier^  à  petit  nombre,  une  traduc- 
tion versifiée,  en  langage  moderne,  de  la  farce  du  quinzième  siècle,  le  Pâté 
et  la  Tarte;  c'était  le  premier  numéro  d'une  «  Bibliothèque  de  Jacques,  > 
qui  devait  familiariser  les  enfants  aVec  notre  littérature  du  moyen  âge. 
Enfin,  M.  Pannier  avait  presque  achevé  la  préparation,  ou  même  commencé 
l'impression  de  plusieurs  œuvres  importantes,  que  ses  amis^  nous  en  ayons 
l'espoir,  sauront  mener  à  bonne  fin.  Dans  le  nombre,  il  faut  citer  sa  thèse 
pour  l'École  des  hautes- études,  sur  les  Lapidaires  ;  le  Débat  des  fiérauts  de 
fronce  et  d'Angleterre,  pour  la  Société  des  anciens  textes  français,  dont  il 
avait  été  un  des  premiers  fondateurs  ;  le  premier  volume  des  Lettres  missives 
de  Louis  XI,  pour  la  Société  de  l'histoire  de  France,  etc. 

—   S.  Ex.   le  cardinal   Joseph-Otmar  Rauscber,  prince-archevêque  de 
Vienne,   conseiller  intime   impérial  et  royal,  membre  de  la  Chambre   des 
'  seigneurs,  né  à  Vienne  le  6  octobre,  est  mort  à  Vienne,  le  23  noTembre  ; 
il  avait  été  créé  cardinal  en  i855; 

Institut.  —  Académie  française.  —  L 'Académie  française  a  tenu,  le  jeudi 
19  novembre,  sa  séance  publique  annuelle. pour  la  proclamation  des  prix  de 
vertu  et  des  prix  de  littérature,  la  séance  a  été  présidée  par  M.  de  Vieil- 
Castel. 

Voici  les  prix  décernés  : 

Le  prix  de  poésie  a  été  décerné  k  M.  Emile  Guiard,  pour  sa  pièce  sur 
Livingstone. 

Prix  Moniyon  destinés  aux  ouvrages  les  plus  utiles  aux  moeurs.  L'Académie 
française  a  décerné  quatre  prix  de  2,000  francs  chacun  :  A  M.  Maurice  Croi- 
set,  professeur  au  lycée  de  Montpellier  pour  son  ouvrage  intitulé  :  Des  Idées 
morales  dans  l'éloquence  politiqm  de  Démosthénes  ;  à  M.  Gaston  Fengère,  pro- 
fesseur an  lycée  Gharlemagne,  pour  son  ouvrage  intitulé  :  Erasme',  étude tur 
sa  vie  et  ses  ouvrages;  à  M.  le  vicomte  d'Haussonville,  député  à  l'Assemblée 
nationale,  pour  son  ouvrage  intitulé  :  Les  Établissements  pénitentiaires  en 
France  et  aux  colonies  ;  à  M"*  Colomb,  pour  son  ouvrage  intitulé  :  Le  Fille  de 
Carilés. 

Quatre  prix  de  i,000  francs  chacun  :  à  M.  René  Vallery-Radot,  pour  son 
ouvrage  intitulé  :  Journal  d'un  volontaire  d'un  an  au  10*  de  ligne;  à  M.  Stahl, 
pour  son  ouvrage  intitulé  :  Eùtoire  d'un  âne  et  de  deux  jeunes  fUles;  à 
M.  Albéric  Second,  pour  son  ouvrage  intitulé  :  les  Demoiselles  du  Roncay;  à 
M.  Matobon,  pour  un  recueil  de  poésies  intitulé  :  Après  la  journée. 

Deux  prix  de  1,200  francs  chacun  : 

A  M.  Deltour,  inspecteur  de  l'Académie  de  Paris,  pour  son  ouvrage  inti- 
tulé :  Principes  de  composition  et  de  style  ;  A  M.  Gustave  Meriet,  professeur 
au  lycée  Louis-le-Grand,  pour  son  ouvrage  intitulé  :  Origines  de  la  littérature 
flrançaise  du  neuvième  au  d^-septiéme  siècle. 

L'Académie  a  décerné  le  grand  prix  de  la  fondation  Gobert  k  M.  Casimir 


—  843  — 

Gaillardin,  professeur  d*histoire  au  ]ycée  Louis- le-Grand,   pour  son  ouvrage 
intitulé  :  I!isi<nre  du  règne  de  Louis  XIV. 

Le  prix  Bordin  a  été  décerné  à  M.  Gustave  Desnoiresterres  pour  son 
ouvrage  intitulé  :  Voltaire  et  la  société  française  au  dix-huitième  siècle. 

Le  prix  Lambert  a  été  décerné  à  M.  Eman  Martin. 

Le  prix  de  la  fondation  Langlois  a  été  partagé  entre  M,  Pessonneaiix  pro- 
fesseur au  lycée  Henri  IV,  pour  sa  Traduction  en  prose  du  Théâtre  complet 
dEiuripidef  et  M.  Gustave  de  Wailly,  pour  sa  Traduction  en  vers  des  quatre 
premiers  livres  de  VÉnéide. 

Le  prix  {ialphen  a  été  attribué  à  M.  H.  Tivier,  professeur  à  la  faculté  des 
lettres  de  Besançon,  pour  son  ouvrage  intitulé  :  Histoire  de  la  littérature  dra- 
matique en  France  depuis  ses  ort^/tnes  jtisqu'au  Cid. 

Le  prix  Thérouanne  a  été  décamé  à  H.  Fustel  de  Goulanges,  pour  la  pre- 
mière partie  de  VEistoire  des  institutions  politiques  de  Vancienne  Frcuice. 

L'Académie  a  accordé  deux  médailles  de  1 ,000  francs  chacune  :  à  M.  Charles 
Yriarle,  pour  son  ouvrage  intitulé  :  la  Vie  d'un  patricien  de  Venise  au  sei- 
zième siècUt  et  à  M.  Petit  de  Julleville,  professeur  à  la  faculté  des  lettres  de 
Dijon,  pour  son  ouvrage  intitulé  :  Histoire  de  la  Grèce  sous  la  domination 
romaine. 

Prix  Marcelin  Guérin.  —  L'Académie  a  décerné  :  Un  prix  de  2,000  francs  à 
M.  Eugène  Loudun,  pour  son  ouvrage  intitulé  :  les  Précurseurs  de  la  Révolu- 
tion. Deux  prix  de  1,500  chacun  :  A  M.  Ferdinand  Delaunay,  pour  les  deux 
ouvrages  intitulés  :  Moines  et  Sibylles  dans  Vantiquité  judéo-grecque^  et  PhiUm 
d'Alexandrie.  A  M.  Albert  Du  Boys,  pour  son  ouvrage  intitulé  :  Histoire  du 
droit  criminel  de  la  France,  depuis  le  seizième  jusqu'au  dix-septième  siècle, 
comparé  avec  celui  de  Vltalie,  de  V Allemagne  et  de  l'Angleterre. 

Prix  fondé  en  1873,  par  un  membre  de  TAcadémie,  pour  être  décerné 
dans  l'intérêt  des  lettres. — L'Académie,  décernant  et*  prix  pour  la  première 
fois  cette  année,  a  attribué  une  somme  de  2,000  francs  à  M.  Alphonse  Karr, 
et  une  somme  de  1,500  francs  à  M.  Henry   Monnier. 

Après  la  proclamation  des  prix.  M.  Saint-René  Taillandier  a  lu  la  pièce  de 
vers  de  M.  Emile  Génard,  Livingstone,  qui  a,  comme  nous  l'avons  dit,  rem* 
porté  le  prix  de  poésie.  Cette  lecture  a  été  accueillie  du  public  par  de  vifs 
applaudissements.  Enfin,  la  séance  s'est  terminée  par  un  discours  fort  inté- 
ressant de  M.  le  baron  de  Vieil -Castel,  directeur,  sur  les  prix  de  vertu. 

Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres.  —  Dans  sa  séance  du  3  décembre, 
l'Académie  des  inscriptions  a  procédé  à  l'élection  d'un  membre,  en  remplace- 
ment de  M.  Brunet  de  Presle.  —  Le  nombre  des  votants  était  de  37. 
M.  Michel  Bréal  a  obtenu  19  suffrages  ;  M.  Edgard  Boutaric,  13  ;  M.  Barbier 
de  Meynard,  5.  —  M.  Bréal  a  été  proclamé  membre  de  l'Académie. 

Concours.  —  La  Société  nationale  d'Éducation,  de  Lyon,  avait  mis  au 
concours,  pour  l'année  1874,  la  question  suivante  :  •  De  la  nécessité  de  faire 
pénétrer,  dans  tous  les  rangs  de  la  société,  des  idées  saines  sur  l'éducation 
des  enfants,  et  des  moyens  d'atteindre  ce  but.  »  Vingt-huit  auteurs,  ont 
répondu  à  cet  appel.  M.  Aimé  Vingtrinier,  sous-bibliothécaire  de  la  ville, 
et  membre  de  la  Société  bibliographique,  a  été  chargé  de  faire  le  rapport 
sur  le  concours.  Il  a  pu  intituler  avec  raison  son  travail  V Éducation  répara- 
trice (Lyon,  Ralud,  in-8  de  43  p.),  car  il  fait  resssortir,  tant  par  les  analyses 
des  mémoires  couronnés,  que  par  ses  propres  réflexions,  la  nécessité  d'une 
forte  éducation  reposant  sur  la  foi  et  l'obéissance. 

—  La  section  littéraire  de  l'Institut  genevois  a  mis  au  concours  :  4®  prix 
de  cinq  cents  francs  pour  la  meilleure  «  reproduction  »  en  vers  fï*ançais  des 


—  »46  — 

quatre»  Balh  îes  allemandes  suivantes  :  Diê  Krmiiehe  des  Ihyht$  (Schiller)  ; 
2*  Klein  noland  (Uhland)  ;  3«  Dsr  g^itreHe  Eckirt  (Goethe)  ;  4»  Dos  Liëi  wm  bra- 
ven  Mann  (Bûrger).  Le  délai  fixé  est  le  1*'  mars  4876  ;  •—  2^  an  prix  de  doaxe 
cents  francs,  à  la  meilleure  «  étude  historique  sur  les  principaux  romanciers, 
et  le  roman  dans  la  Suisse  de  langue  française,  à  partir  de  la  nouvelle 
Hélolse  jusqu'au  moment  actuel.  »  —  Toutes  les  variétés  du  roman  et  de  la 
nouvelle  sont  comprises  dans  le  sujet.  —  Les  concurrents  sont  invités  à 
rester  plutôt  sobres  de  détails  biographiques  sur  les  auteurs^  et  à  éviter  les 
citations  trop  étendues  ;  ils  devront  développer  surtout  la  partie  la  plus 
neuve  de  leur  sujet  ;  c'est-à-dire  le  tableau  des  trente  ou  quarante  dernières 
années.  —  La  section  verrait  avec  plaisir  les  concurrents  s'élever,  en  ter- 
minant, à  des  considératious  d'ensemble,  par  exemple  sur  le  caractère  dis* 
tinctif  et  la  signification  sociale,  les  ressources  actuelles  et  l'avenir  possible 
de  ce  genre  littéraire  dans  notre  pajs. 

—  Lectures  faites  a  l'Académie  des  înscrtptions  et  bflles-lettres.  —  Dans 
la  séance  du  5  novembre,  M.  Wallon  a  communiqué  une  notice  sur  la  vie  et 
les  travaux  de  M.  Stanislas  Julien .  M .  Léon  Renier  a  lu  un  mémoire  sur 
deux  inscriptions  concernant  les  historiens  Adrien  et  Velleius  Paterculus.  — 
Dans  la  séance  du  12,  M.  de  Wailly  a  achevé  la  lecture  d'un  mémoire  sur 
la  langue  de  Reims  au  treizième  siècle.  —  M.  Edmond  le  Blant  a  fait  une 
communication  au  sujet  de  fragments  de  marbres  qui  viennent  d'être  décou- 
verts dans  le  tombeau  de  saint  Mariin,  à  Tours.  M.  Ernest  Desjardins  a  fait 
une  communication  sur  une  inscription  aux  déesses  mères.  M.  Léon  Heuzej 
a  commencé  la  lecture  d'une  étude  topographique  et  historique  sur  Dyrra- 
chium,  enÉpire,  lecture  continuée  dans  la  séance  du  19.  M.  Chodzkiéwiez  a 
communiq[ué  un  travail  sur  une  inscription  persépolitaine.  -^  Dans  la  séance 
du  19,  M.  de  Saulcy  a  lu  un  rapport  sur  la  mission  de  Victor  Guérin  dans  la 
Haute-Galilée. 

—  Lectures  faites  a  l'Académie  des  scirnces  morales  et  politiques.  —  Dans 
la  séance  du  13  novembre,  M.  le  docteur  Wines  a  communiqué  un  mémoire 
sur  le  mouvement  en  faveur  de  la  réforme  pénitentiaire  dans  les  États  civi- 
lisés, lu  au  congrès  international  de  Londres.  M.  Fustel  de  Coulanges  a  lu  un 
travail  sur  les  institutions  politiques  au  temps  de  Charlemagne.  —  Dans  la 
séance  du  20,  M.  Ch.  Waddington  a  lu  le  second  chapitre  de  son  mémoir» 
sur  Pjrrhon  et  le  pyrrhonisme,  consacré  aux  antécédents  du  pyrrhonisme  en 
Grèce. 

La  Société  de  géographie  de  Paris,  son  développement,  son  histoire.  — 
A  l'occasion  du  congrès  géographique,  il  a  été  publié  une  notice  retraçant 
l'historique  de  la  société  qui  a  tant  fait  pour  développer  en  France  le  goût 
des  études  géographiques,  et  qui  y  a  réussi,  puisque  le  nombre  des  mem- 
bres de  cette  société  s'accroît  tous  les  ans,  que  l'an  dernier  11874)  il  s'est 
augmenté  de  trois  cents  nouveaux  sociétaires,  et  qu'il  dépasse  actuellement' 
le  chiffi*e  de  mille.  C'est  la  France,  *-  on  ne  saurait  trop  le  redire,  —  qui  a, 
la  première,  fondé  une  société  de  géographie  proprement  dite.  Avant  la 
création  de  la  Société  de  géographie  de  Paris  (1821  >,  il  avait  été  fait,  il  est 
vrai,  en  divers  pays,  des  tentatives  pour  constituer  des^  associations  dans  le 
but  d'avancer  l'étude  de  la  terre.  C'est  ainsi  qu'en  1688  s'était  fondée  à 
Venise  une  société  de  cosmographie,  qui  prit  le  nom  de  société  des  Argo* 
nautes  ;  quelques  années  plus  tard,  une  association  de  même  genre  se  forma 
à  Nuremberg.  Plus  tard,  d'autres  sociétés  se  constituèrent,  mais  dans  ud 
but  plus  spécialement  commercial  ;  ces  associations  dirigèrent  surtout  leur 
attention  du  cMé  de  l'Afrique;  telles  furent  les  deux  sociétés  dites 


—  547  — 

Tune  fonnée  en  France,  l'autre  en  Angleterre.  Dès  i785,  on  jetait,  chei 
nous,  les  bases  d*nne  société  de  géographie  française,  conçue  à  un  point  de 
vue  plus  général  que  les  précédentes.  Ce  projet,  qu'on  a  des  raisons  d'attri- 
buer à  l'initiative  de  J.-N  Buache,  parait  avoir  été  soumis  à  l'un  des  minis* 
très  de  Tépoque,  soit  le  maréchal  de  Castries,  soit  le  baron  de  Breteuil, 
ministre  de  la  maison  du  roi,  soit  enfin  M.  de  Yergennes,  ministre  des 
afiiaires  intérieures.  On  ne  sait  ce  qui  advint  de  la  présentation  de  ce  projet; 
si  l'un  des  ministres  que  nous  venons  de  nommer  l'eût  recommandé  à 
Louis  XVI,  il  est  probable  que  ce  prince,  qui,  à  l'instar  de  Louis  XV,  s'iaté- 
ressait  aux  progrès  de  la  géographie,  n'eût  pas  manqué  de  favoriser  l'entre- 
prise; mais  il  peut  se  faire  aussi  que  les  événements  ultérieures  aient 
empêché  les  ministres  de  Louis  XV[  et  Louis  XVI  lui-même  de  s'en  occuper. 
Quoi  qu'il  en  soit,  ce  plan  a  été  retrouvé  et  publié  dans  le  Buliêtin  de  ia 
Société  de  Géographie  (2*  série,  t.  I",  p.  409).  L'auteur  du  projet  voulait 
surtout  remédier  à  l'un  des  vices  les  plus  fâcheux  qui  avaient  nui  jusqu'a- 
lors à  la  diffusion  des  connaissances  exactes  en  géographie,  savoir  le  défaut 
de  bonnes  cartes  et  la  multiplicité  deà  mauvaises.  Dans  les  idées  des  fonda- 
teurs, les  cartes  géographiques  devaient  être  plutôt  une  œuvre  collective 
qu'individuelle,  l'ouvrage  non  d'un  seul  artiste,  mais  d'une  réunion  de 
savants.  Ue  là,  l'opinion  qu'en  formant  une  société  d'artistes  et  de  savants 
qui  mettraient  leurs  travaux  en  commun,  on  parviendrait  promptement  à 
perfectionner  la  géographie,  et  à  faire  des  cartes  plus  exactes  et  meilleures, 
à  mesure  que  le  dépôt  de  la  société  s'augmenterait,  et  que  le  travail  et  les 
recherches  de  ses  membres  s'accumuleraient.  Malheureusement,  le  projet  de 
société  semble  avoir  été  abandonné,  sans  doute  à  cause  des  circonstances 
politiques.  D'autres  projets  de  même  nature  furent  conçus  à  l'époque  de 
la  Révolution.  On  signale,  entre  autres,  une  société  pour  les  découvertes  en 
Afrique,  qui  devait  se  former  avec  l'appui  du  gouvernement  ;  une  nouvelle 
société  s'établit  en  1802,  grftce  à  l'initiative  de  Langlès,  sous  le  titre  de 
Société  de  V Afrique  intérieure  et  de  découvertes, 

n  fallut  dix-neuf  ans  encore  et  surtout  les  bienfaits  d'une  longue  paix, 
pour  permettre  à  une  société  géographique  de  vivre  et  de  durer.  Ce  fut, 
comme  nous  l'avons  dit,  la  France  qui  prit  Tinitiative.  Le  19  juillet  1821,  une 
réunion  d'hommes  éminents  exprima  la  pensée  que  la  science  tirerait  avan- 
tage de  la  fondation  d'une  société  de  géographie.  Cinq  membres  de  la 
réunion:  MM.  Barbie  du  Bocage,  Jomard,  langlès,  Malte-Brun  et  Walckenaér 
furent  chargés  de  rédiger  un  règlement.  Le  1*^  octobre  suivant,  le  règlement 
était  soumis  k  une  commission  ;  adopté  le  1*'  novembre,  il  fut  publié  le  7  du 
même  mois  Appel  fut  fait  alors,  par  circulaire,  à  tous  les  amis  de  la  géo- 
graphie, qui  désireraient  devenir  membres. fondateurs  de  la  société  nouvelle, 
on  les  conviait  &  une  assemblée  devant  se  tenir  à  l'hôtel  de  ville  de  Paris, 
le  15  décembre.  L'appel  fut  entendu  :  deux  cent  dix-sept  personnes  se  pré- 
sentèrent et  se  firent  inscrire.  De  ce  jour,  le  société  de  géographie  se  trouvait 
définitivement  constituée.  Des  deux  cent  dix-sept  fondateurs  de  la  société,  il 
ne  reste  actuellement  qu'un  seul  membre,  M.  Vivien  de  Saint-Martin,  prési- 
dent honoraire  de  la  société,  et  qui  continue,  avec  une  ardeur  que  rien  ne 
ralentit,  ses  importants  travaux  géographiques. 

Les  fondateurs  de  la  première  société  de  géographie  qui  ait  existé  dans  le 
monde  comprirent  que  l'histoire,  l'ethnographie,  l'art  de  la  guerre  sur  terre 
et  sur  mer,  la  science  nautique,  les  sciences  naturelles,  un  grand  nombre 
d'autres  branches  des  connaissances  humaines,  enfin  l'industrie  et  le  com- 
merce reposent  sur  les  notions  précises  qu'on  peut  avoir  du  globe.  La  voie  à 
suivre  pour  marcher  au  but  était  donc  indiquée  :  provoquer  des  voyages  de 


—  5*8  — 

découvertes,  décerner  des  prix  aux  pins  méritants,  propager  le  goi\t  des 
études  géographiques,  enfin  publier  des  cartes  et  des  mémoires.  Cinquante- 
quatre  ans  se  sont  écoulés  depuis  cette  époque,  et  la  société  est  restée  fidèle 
au  principe  qui  a  présidé  à  sa  fondation  :  contribuer  de  tous  ses  efforts  aux 
progrès  des  sciences  géographiques.  Le  Bulleiin  mensuel  qu'elle  publie  depuis 
son  origine  forme  une  cx)llection  de  plus  de  cent  volumes,  véritables  archives 
de  la  géographie,  qui  relatent  outre  les  travaux  de  la  société,  le  mouvement 
des  découvertes  géographiques  sur  le  globe.  De  ce  recueil,  il  faut  rapprocher 
sept  volumes  de  Mémoires,  collection  qui  pourra  être  continuée  et  qui  com- 
prend, entre  autres  documents  précieux,  le  texte  français  original  des  voyages 
de  Marco  Polo,  d'après  un  manuscrit  de  la  Bibliothèque  nationale.  L'en- 
semble de  ces  publications  a  entraîné  une  dépense  de  plus  de  300,000  francs, 
chifQre  considérable,  eu  égard  au  modeste  budget  de  la  société,  qui  ne  dis- 
pose que  d'un  capital  de  65,000  francs,  et  qui  n'a  pour  se  suffire  à  elle-même, 
outre  le  revenu  du  capital  dont  nous  parlons^  que  le  montant  des  cotisations 
payées  par  ses  membres.  Malgré  ses  faibles  ressources,  la  société  a  trouvé 
moyen  dlnstituer,  dès  l'origine,  des  prix  destinés  à  récompenser  les  explo- 
rateurs qui  se  signalent  par  d'importantes  découvertes,  et  les  auteurs  de 
travaux  ou  de  recherches  utiles  au  développement  des  sciences  géogra- 
phiques. Plus  de  cent  prix  ou  médailles  d'encouragement  ont  été  ainsi 
distribués  par  elle.  Ce  n'est  pas  tout.  Un  fonds  dit  des  voyages,  fonds  modeste 
et  qui  malheureusement  est  presque  épuisé  à  l'heure  qu'il  est,  a  pu  être 
constitué,  grâce  à  un  grand  esprit  d'ordre  et  d'économie.  Cette  ressource 
précieuse  a  servi  à  encourager  nombre  de  nos  compatriotes  dans  des  enfre* 
prises  lointaines,  difficiles  et  périlleuses.  Il  serait  fort  à  désirer,  comme  le 
dit  la  notice,  que  ce  fonds  pût  être  reconstitué  sous  la  forme  d'un  capital 
assez  important  pour  rester  comme  une  fondation  dont  le  revenu  serait 
affecté  aux  voyages. 

Le  nombre  des  membres  sociétaires  était  au  3i  décembre  1874,  de  1,038. 
Un  curieux  tableau  graphique  tracé  par  M*  V.-A.  Malte-Brun,  nous  donne  le 
chiffre  du  personnel  de  la  société,  année  par  année  depuis  l'origine,  avec 
les  augmentations  ou  les  diminutions  que  ce  nombre  a  subies,  sous  Vin- 
fluence  des  événements  politiques  et  autres.  En  1822,  on  comptait  déjà 
279  membres  ;  en  1829,  le  nombre  était  de  305  ;  mais  en  1831,  il  tombe  à 
251  ;  en  1848,  il  n'est  plus  que  de  110,  nous  apprenons  même  par  la  notice, 
que  l'existence  de  la  société  fut  alors  sérieusement  menacée  ;  en  1850,  il 
n'est  encore  que  de  101  ;  en  1860,  il  revient  au  chiffre  primitif,  à  217  ;  à  la 
veille  de  la  guerre  de  1870,  il  était  de  645;  l'année  suivante^  on  ne 
compte  plus  que  600  membres  ;  mais  à  partir  de  ce  moment,  la  progres- 
sion est  constante  :  732  membres  en  1872;  831  en  1873  et  1,038  en  1874.  — 
En  relations  avec  tous  les  points  du  globe,  la  société  reçoit  une  foule  de 
publications  intéressantes;  la  bibliothèque  comprend  aujourd'hui  10,000 
volumes  ou  brochures  et  autant  de  cartes.  Il  faut  espérer  qu'il  en  sera 
publié  un  jour  ou  l'autre,  un  catalogue.  Dans  ces  derniei:s  temps,  la  société 
a  constitué  dans  son  sein  une  société  spéciale,  dite  de  géographie  commer- 
ciale, pour  favoriser  l'extension  de  nos  relations  commerciales  extérieures. 
Cette  société  qui  a  pour  organe  une  excellente  publication,  VExpliyrateur^ 
promet  de  rendre  à  la  science  et  au  commerce  de  très-utiles  services. 

Vulgarisation  des  cartes  géographiques.  —  On  sait  qu'à  l'une  des  der- 
nières séances  de  la  société  de  géographie  de  Paris  il  a  été  donné  commu- 
nication, par  l'intermédiaire  de  M.  le  ministre  des  affaires  étrangères,  d'une 
lettre  adressée  par  le  consul  de  France   à   Rio  de  Janeiro,  M.  Alfred  de 


—  349  — 

Valois  ;  lettre  dans  laquelle  il  était  fait  mention  de  ce  qui  a  lieu  au  Brésil, 
où  le  gouyernement  impose  aux  compagnies  de  chemins  de  fer  l'obligation 
d'afQcher  dans  les  gares  certains  renseignements  géographiques  relatifs  à  la 
localité,  à  la  province  et  au  territoire  entier  du  Brésil.  A  cette  occasion,  on 
a  exprimé  le  désir  qu'il  en  fût  fait  de  même  en  France,  ce  qui  serait  un 
excellent  moyen  d'y  propager  les  connaissances  géographiques. 

Or,  le  secrétaire  général  de  la  société  de  géographie  de  Paris,  dans  la 
dernière  séance  de  cette  société,  dont  l'Explorateur  d'aujourd'hui  nous 
apporte  le  cohnpte  rendu,  a  rappelé  que,  déjà,  la  même  idée  avait  été 
émise.  L'initiative  en  revient  donc  &  la  France,  et  notamment  à  la  société  de 
géographie  de  Lyon.  Le  président  de  cette  société,  M.  Louis  Desgrand,  avait 
adressé  à  la  société  géographique  de  Paris  une  proposition  tendant  à  unir 
les  efforts  des  deux  sociétés  pour  amener  les  compagnies  de  chemins  de  fer 
à  prendre  des  mesures  utiles  à  la  diffusion  de  la  géographie.  Il  s'agissait 
d'inscrire  dans  chaque  gare^  au-dessus,  à  côté  et  au-dessous  du  nom  de  la 
localité  desservie,  celui  du  département  dont  elle  fait  partie  ;  et  en  second 
lieu,  de  multiplier,  dans  les  mêmes  gares,  les  cartes  murales  dont  l'intro- 
duction^  en  certaines  stations^  a  déjà  eu  un  plein  succès. 

Ces  cartes,  répandues  partout,  ne  pouvaient  manquer  d'avoir,  sur  l'at- 
tention des  milliers  de  voyageurs  et  de  curieux  qui  y  passent,  un  effet  salu- 
taire. Le  principe  des  annonces  murales  est  fondé  sur  les  mêmes  bases.  La 
société  de  Lyon  proposait  donc  de  recourir  aux  cartes  de  papier  peint,  qui 
ont  déjà  été  entreprises  avec  des  résultats  satisfaisants,  et  bien  faits  pour 
encourager. 

En  conséquence,  il  y  a  lieu  d'espérer  que  l'exemple  donné  par  le  Brésil 
et  l'action  commune  des  sociétés  géographiques  de  Paris  et  de  Lyon  provo- 
queront des  mesures  favorables  à  l'enseignement  de  la  géographie,  et  que 
bientôt  les  voyageurs  trouveront  dans  les  gares  et  stations  tous  '  les  ren- 
seignements désirables  sur  la  topographie  et  même  un  peu  sur  l'histoire 
des  contrées  que  traversent  les  lignes  ferrées. 

Les  Universités  russes.  —  En  Russie,  le  ministre  de  l'instruction  publique, 
comte  Tolstoï,  a  institué  une  commission  composée  des  hommes  les  plus 
compétents^  qui  devront  examiner  l'état  actuel  des  universités  russes  et 
surtout  s'enquérir  de  ce  qui  leur  manque.  Trois  questions  surtout  ont  été 
soumises  aux  membres  de  la  commission  :  1*  Pourquoi  plus  de  cent  chaires 
sont-elles  innoccupées  I  —  2*  Quelles  sont  les  causes  de  la  diminution  crois- 
sante du  nombre  des  étudiants?  —  3°  Par  quels  moyens  s'opposer  avec 
succès  à  la  propagande  nihiliste  qui  fait  toigours  plus  de  progrès  parmi  la 
jeunesse  universitaire  ?  —  Pour  remplir  sa  mission  et  surtout  pour  pouvoir 
répondre  en  connaissance  de  cause  à  ces  trois  questions»  la  commission  a 
déjà  visité  toutes  les  universités  de  l'empire  ;  en  dernier  lieu,  elle  se  trou- 
vait à  Varsovie,  où  elle  a  assisté  presque  journellement  anx  cours,  ayant 
des  conférences  fréquentes  avec  le  recteur  et  les  autres  professeurs. 

Une  bibliographie  bistobique  de  le  Bactagne.  —  Dans  tine  brociiure  inti- 
tulée :  Esquisse  d'une  bibliothèque  historique  de  la  Bretagne  suivie  de  la  biblio- 
graphie de  quelques  publications  périodiquus  de  Lorient  et  de  Rennes  (Saint- 
Brieuc,  gr.  in-8  de  43  p.,  extr.  des  Mémoires  de  l'Association  bretonne  pour 
le  congrès  de  Vannes),  notre  excellent  collaborateur,  M.  R.  Kerviler  annonce 
qu'il  a  l'intention  de  préparer,  pour  la  Bretagne,  un  répertoire  dans  le  genre 
de  celui  que  le  P.  Lelong  a  publié  pour  la  France  entière,  et  il  a  déjà,  nous 
dit-il,  quatre  ou  cinq  mille  fiches  toutes  prêtes,  leur  nombre  s'accroissant 
tous  les  jours,  car  les  ressources  du  catalogue  de  la  riche  bibliothèque  de 


—  B50  — 

Nantes,  dont  le  sixième  et  dernier  volnme  vient  de  paraître,  sont  à  sa  dispo 
sition,  et  Tinfatigable  bibliothécaire,  M.  Emile  Péhant,  qui  a  consacré  près 
de  vingt  années  &  doter  la  Bretagne  de  ce  précieux  instrument  de  travail, 
lui  a  promis  son  concours  le  plus  actif.  Bientôt,  M.  Kerviler  nous  donnera 
quelques  chapitres  de  sa  future  bibliographie  historique  raisonnèe  de  sa 
province  natale,  et  nous  devons  tous  faire  des  vœux  pour  que  Touvrage  tout 
entier,  dont  le  plan  est  si  heureusement  conçu,  ne  tarde  ensuite  pas  trop  à 
paraître.  —  T.  de  L. 

Le  jour  des  moats  en  Sicile.  —  Elle  est  très-instéressante  la  brochure  que 
rinfatigable  Pitre  vient  de  publier  sous  ce  titre  :  Il  giorno  dei  morti  e  le 
strenne  dei  fanciulH  in  Sicilia,  mais  nous  aurions  dû  en  parler  aux  approches 
du  mois  de  novembre,  car  le  travail  du  jeune  savant  sicilien  a  été  inspiré 
par  le  jour  des  morts.  Chose  bien  bizarre,  ce  jour  si  triste  dans  no»  pays, 
ce  jour  qui,  même  à  Paris,  la  ville  des  oublis  et  des  frivolités,  cause  une 
lugubre  impression,  est  en  Sicile  une  fôte  joyeuse  pour  les  enfants.  Là,  les 
morts  remplacent  notre  Saint-Nicolas  ou  Tarbre  de  No^l.  Dans  la  nuit 
du  1"'  au  2  novembre,  ils  quittent  leur  froide  demeure,  mettent  au 
pillage  les  boutiques  de  conflseries  et  de  jouets,  et  apportent  dans  les 
familles  qu'ils  ont  quittées  des  présents  de  toutes  sortes,  récompense  de  la 
sagesse  de  l'année.  Ces  présents  sont  placés  dans  les  endroits  où  Ton  sup- 
pose qu'on  ira  le  moins  les  chercher.  L'enfanf  découvre  d'abord  des  objets 
insignifiants  oy  ridicules  ;  la  mère,  tout  en  souriant,  encourage  à  de  nou- 
velles perquisitions  :  «  Les  morts,  dit-elle,  n'auront  pas  voulu  oublier  un 
pauvre  petit  qui  les  a  priés  avec  tant  de  dévotion.  »  Enfin  Tenfant  radieux 
finit  par  trouver  les  cadeaux  qui  lui  sont  destinés,  H  cosi  di  morti,  disent  les 
Siciliens,  les  choses  des  morts.  —  Cet  usage  qui  nous  parait  si  bizarre  est 
répandu  dans  presque  toute  la  Sicile.  Dans  quelques  parties  de  cette  lie, 
cependant,  c'est  la  nuit  du  24  et  25  décembre  qui  remplace  celle  du  i" 
an  2  novembre^  et  alors  les  présents  sont  api>ortés  par  une  sorte  d'horrible 
sorcière,  rpii  pourtant  aime  les  enfants  et  qu'on  appelle  la  vieille  de 
Noël  :  fa  Vecehia  di  Natali.  Ailleurs,  enfin,  le  1*'  janvier  est  aussi  le  jour  des 
Strenne.  —  Th.  P. 

Le  Colosse  de  Rhodes  et  M.  Lâboulaye.  —  M.  Ed.  Laboulaye,  membre  de 
l'Assemblée  nationale  et  de  l'Académte  des  Inscriptions,  a  prononcé,  le 
samedi  6  novembre,  au  banquet  de  l'Union  franco-américaine,  à  l'hfttel  du 
Louvre,  un  discours  d'où  j'extrais  c«tto  phrase  :  «  La  statue  de  Hudépen- 
dance,  de  M.  Bartholdi,  aura  derrière  elle  trois  grandes  villes  :  New  York, 
Brooklyn  et  Ferdey  City,  (lette  statue  n'est  pas  trop  grande  devant  cette 
immensité.  Le  Colosse  de  Rhodes,  qui  noyait  passer  entre  ses  jœnbes  de 
petites  barques  assez  mal  pontées,  ne  serait  qu'un  jouet  d'enfant  auprès  de 
notre  statue.  »  En  regard  de  cette  assertion  de  l'honorable  orateur,  je 
demande  la  permission  de  placer  une  rectification  que  j'emprunte  ft  ane 
dissertation  intitulée  :  De  la  question  de  remplacement  de  Uxellodnnum  (Paris, 
1865,  gr.  in-8,  p.  iàii:  «  Ai-je  besoin  de  rappeler  que  ce  fut  Yigenère  qui, 
dans  une  note  de  sa  traduction  approximative  des  Tableaux  de  Philostrate, 
donna  avec  tant  ô!aplo9nb  au  cx)losse  de  Rhodes  cette  position  extaordinaire 
qu'il  garde  encore  de  nos  jours  dans  beaucoup  trop  de  livres,  comme  si  au 
lieu  d'avoir  été  imaginé  par  un  écrivain  du  seizième  siècle,  ce  grand  écart 
était  attesté  par  les  textes  anciens  les  plus  dignes  de  notre  confiance  ?  On 
s'étonne  moins  de  trouver  encore  de  nombreuses  dupes  d'une  aussi  auda- 
cieuse mystification,  quand  on  songe  que  le  grand  Letronne  lui-même  a  pu 
la  laisser  passer  dans  son  excellente  édition  de  VUistoùe  a^icieniie  de  RolUn.  » 
—  T.  de  L. 


—  551  — 

Li  DIT  DBS  Rccs  DE  PARIS.  —  Publié  pour  la  première  fois  par  le  savant 
abbé  Lebeuf,  qui  en  avait  découvert  le  manuscrit  à  Dijon,  en  4751  (Voir 
ffUtone  de  la  ville  et  du  diocèse  de  Paris,  1754,  t.  I*',  p.  563,  et  t.  IV,  p.  7  de 
l'édition  donnée  par  M.  Cocheris),  le  Dit  des  rues  de  Parts  a  reparu  dans 
buit  ou  neuf  ouvrages  divers  (Fabliaux  publiés  par  Méon,  i8i8,  p.  237; 
IHctiounaire  des  rues  de  Paris,  par  La  Tynna,  1816,  p.  lu;  Tableau  historique 
de  Parif,  par  de  Saint-Victor,  1822,  t.  I^^  p.  43i);  mais  M.  Mareuze  est  le 
premier  qui  ait  pris  la  peine  de  revoir  le  texte  sur  le  manuscrit  de  la 
Bibliothèque  nationale  (fonds  français  n^  24432),  et  cette  collation  a  fait 
disparaître  bien  des  erreurs  (Le  dit  des  rues  de  Paris  (1300)  par  Guillot  (de 
Paris)  avecpréface,  notes  H  glossaire,  1875,  in-16de  xxiv-91  p.,  tiré  à  360exempl. 
dont  2  sur  vélin  et  6  sur  pap.  de  Chine).  Jusqu'ici,  le  texte  n'avait  été  mis 
au  jour  que  d'une  façon  fort  incorrecte  ;  malgré  des  naïvetés  de  toute  espèce, 
il  offre  de  très-curieux  détails  qui  font  connaître  ce  qu'était  Paris  à  cette 
époque  dont  près  de  six  siècles  nous  séparent.  D'après  les  calculs  du  judi- 
cieuxGéraud,  la  capitale  comptait  alors,  y  compris  les  faubourgs,  200,000  habi- 
tants, et,  dans  l'enceinte  ressérée  de  la  ville,  la  population  était  extrême- 
ment entassée.  Ni  commerce,  ni  industrie,  si  ce  n'est  ce  qu'exigeaient  les 
besoins  indispensables  de  la  vie.  Ce  petit  poème,  qui  énumère  184  rues  par 
deçà  Grand  Pont,  fut  composé  de  1300  à  1310;  on  manque  d'informations 
sur  l'auteur  qui  ne  s'est  guère  préoccupé  que  de  la  rime,  modifiant  les  noms 
des  rues  quand  le  vers  l'exigeait;  il  n'est  pas  toujours  facile  de  se  recon- 
naître dans  ces  dénominations  de  voies  publiques  qui  ont  disparu  en  partie, 
ou  qui  portent  souvent  d'autres  noms  que  ceux  qui  leur  appartenaient  à 
l'époque  de  Philippe  le  Bel.  Le  nouvel  éditeur  rend,  à  cet  égard,  un  pré- 
cieux service  en  plaçant  au  bas  de  chaque  page  des  notes  fort  instructives 
qui  attestent  une  connaissance  très-étendue  de  la  topographie  parisienne, 
depuis  le  treizième  siècle  jusqu'aux  derniers  travaux  de  M.  Haussmann. 
C'est  une  lecture  fort  attachante  pour  toutes  les  personnes  qu'intéresse 
l'étude  de  ce  vieux  Paris  presque  entièrement  disparu.  Ajoutons  que  le  plan 
de  petite  dimension,  mais  très-net  et  très-clair,  ne  saurait  manquer  d'être 
consulté   avec  une    certaine  satisfaction. 

L'université  catholique  de  Kensington.  —  Le  collège  de  l'université  catho- 
lique de  Kensington  a  ouvert  ses  coun>  le  lundi  1  i  octobre,  par  une  messe 
solennelle  du  Saint-Esprit.  Après  ta  messe,  le  recteur  a  prononcé  un  dis- 
cours sur  la  loi  du  travail  appliqué  à  linteltiffence.  Voici  le  programme  des 
cours,  tel  qu'il  est  provisoirement  adopté  :  M.  le  recteur  :  Morale  chrétienne, 
les  Commandements  (2  leçons  par  semaine)  ;  —  M.  le  vice-recteur  :  Écri- 
ture sainte,  les  Actes  des  ap6tres  (2  leçons  par  semaine)  ;  —  M.  le  profes- 
seur de  théologie  naturelle  :  Des  rapport^  de  la  science  et  de  la  religion 
révélée  (2  leçons),  Des  phénomènes  physiologiques  (2  leçons)  ;  -  M.  le  pro- 
fesseur Palej  :  Langues  grecques  et  latines,  Antigone  de  Sophocle,  la  jDtvt- 
nation  de  Cicéron,  les  Géorgiques  de  Virgile,  le  livre  XXII  de  Tite-Live 
(leçons  quotidiennes)  ;  —  M.  le  professeur  Mivart  :  Histoire  naturelle,  zoo- 
logie et  anatomie  comparée  des  invertébrés  (44  leçons  dans  l'année),  ana- 
tomie  et  physiologie  de  l'homme  (22  leçons)  ;  —  M.  le  professeur  Barff  : 
Chimie,  démonstrations  et  expériences  (3  fois  par  semaine). 

L'AssociATioff  CATROUQUB.  —  Nous  sommes  heureux  de  pouvoir  annoncer, 
pour  le  15  décembre  4875,  l'apparition  d'un  nouveau  périodique  :  L'Asso- 
ciation eaihûHque,  Bévue  des  questions  sociales  et  ouvrières,  —  Organe  des 
hommes  qui,  depuis  quatre  ans,  d4ns  l'œuvre  des  cercles  catholiques  d'ou- 
vriers, ne  s'arrêtent  devant  aucun  sacrifice,  aucun  effort,  afin  de  faire  cesser 


—  o32  — 

l'antagonisme  des  classes  en  les  ramenant  à  la  connaissance  et  à  Taccom- 
plissementde  leurs  obligations  sociales,  cette  revue  deviendra  un  nouveau 
moyen  d'action  pour  propager  la  vérité  catholique  et  faire  reculer  la  révo- 
lution. Que  les  catholiques  la  comprennent  ainsi  :  qu'ils  la  lisent,  qu'ils  la 
fassent  lire  autour  d'eux.  Par  la  nature  et  la  valeur  de  ses  travaux,  nos 
adversaire  veiTont  si  ceux  qui  savent  organiser  des  pèlerinages  savant 
aussi  penser.  —  Le  prix  de  l'abonnement  est  de  20  francs  pour  un  an  et  de 
\2  francs  pour  six  mois.  On  s'abonne  à  Paris,  au  secrétariat  de  VCEuvre  des 
cercles  catholiques  d'ouorierSj  10,  rue  du  Bac,  et  aux  bureaux  du  PolybibHon. 

Annales  de  lâ  Normandie.  —  On  annonce  l'apparition  prochaine  d*une 
revue  mensuelle,  publiée  à  Rouen,  sous  ce  titre,  sous  la  direction  de 
M.  Michel  Hardy. 

'Les  Ordres  de  chevalerie.  —  M.  Jean  Gay  vient  de  publier,  sous  ce  titre  : 
lÀste  et  origine  de  tous  les  ordres  de  chevalerie  militaires  et  dvils  qui  oni  été 
institués  par  les  papes  et  par  les  princes  chrétiens  du  seizième  siècle^  par  P.  Daviti 
(publié  séparément  pour  la  première  fois,  par  les  soins  de  M.  Jean  Gay, 
membre  de  l'Institut  national  genevois,  Turin,  1876,  in-8  76  p.),  un  volume 
tiré  à  300  exemplaires.  L'avant-propos  fort  oonrt  de  l'éditeur  fait  connaitre 
que  ce  petit  travail  est  le  seul  qui  mérite  une  attention  spéciale  dans  nn 
très-volamineux  ouvrage,  devenu  rare  et  ne  comprenant  que  de  longues 
dissertations  historiques  {Les  estats,  empires  et  principautéz  du  monde.  Paris, 
1615,  in-fol.  de  1464  p.).  Daviti,  né  en  1573,  fut  un  écrivain  laborieux  dont 
les  productions  jouirent  de  quelque  vogue  :  ses  Travaux  sans  travail^  eurent 
au  moins  trois  éditions,  en  1602  et  en  1609;  il  consacra  cinq  volumes  in-folio 
à  une  Description  des  quatre  parties  du  monde,  qui  vit  le  jour  en  1637.  Il  y  a 
de  nombreux  renseignements  historiques  réunis  avec  soin  et  avec  exacti- 
tude dans  la  Liste  que  M.  Gay  a  eu  la  bonne  idée  de  retirer  du  gros  bou- 
quin où  elle  était  enfouie,  et  où  bien  peu  de  personnes  curieuses  auraient 
été  la  chercher.  C'est  un  service  rendu  à  des  études  qui  sont  aujourd'hui 
en  faveur. 

Catalogue  Bohy.  —  Nous  avons  sous  les  yeux  le  Catalogue  des  livres  rares 
et  précieux  composant  la  bibliothèque  de  J.  T.  Borp,  ancien  maire  de  Marseille. 
(Marseille,  E.  Camoin,  1875,  în-8, 31 1  p.).;Ce  catalogue  mérite  d'être  distingué 
parmi  les  nombreuses  publications  relatives  aux  livres  destinés  à  être  dis- 
persés par  les  enchères  publiques.  Il  renferme  2,376  numéros  relatifs  aux 
imprimés  et  87  manuscrits;  il  se  compose  de  deux  parties  distinctes  ;  l'une  se 
compose  de  bons  ouvrages  en  tout  genre,  parmi  lesquels  il  en  est  de  rares 
et  de  précieux,   entre  autres,  dans  l'ancienne  poésie  française  ;   l'autre, 
beaucoup  plus  étendue,  est  une  collection  spéciale   provençale  contenant 
une  foule  de  livres  et  d'opuscules  relatifs  à  la  Provence,    et  aux  honmies 
plus  ou  moins  célèbres  qui  appartiennent  à  cette  province.  Une  pareille 
réunion  est  le  résultat  de  recherches  persévérantes   pendant   de  longues 
années  et  d'un  zèle  infatigable;  il  serait  impossible  de  la  refaire  aujour- 
d'hui. Le  catalogue,  rédigé  en  détail  et  avec  beaucoup  de  soin,  indique  son- 
vent  sous  le  même 'numéro  un  grand  nombre  de  pièces  diverses  ;  il  dévoile 
des  anonymes  qu'on  chercherait  très-inutilement  dans  les  diverses  éditions 
du  Dictionnaire  de  Barbier;  il  sera  d'un  très-grand  secours  aux  bibliogra- 
phes qui  le  placeront  à  côté  des  catalogues  Coste  et  Taschereau  si  utiles 
pour  connaître  ce  qui  concerne  le  Lyonnais  et  la  Touraine.   On  observera 
parmi  tant  d'ouvrages  quelques  volumes  qui  n'avaient  été  signalés   nulle 
part  (voir  n*  1845).  La  collection  relative  à  Nostradamus,  (n»   1687  et  sui- 
vants), celle  de  cantiques  et  noéls  provençaux  n*'  1848-1927)  n'exbtent 


—  Îtô3  — 

certainement  nnlle  part  ailleurs  anssi  complètes.  M.  Bory  ne  se  contentait 
pas  d'ailleurs  de  réunir  des  liTres  ;  il  en  a  écrit  de  fort  estimables  relatifs 
aux  études  auxquelles  il  consacrait  tous  ses  loisirs  {Origines  de  Vimprimerie 
à  ManeQk;  De  la  Poésie  provençale  depuis  les  troubadours;  De  Vétat  de  la 
Umffue  ftançaise  d  Marseille  avant  la  fondation  de  racadémie  de  cette 
tdllej  etc.). 

Vieux  papiebs  et  vieux  souvenirs.  ^  Sous  le  titre  Vieux  papiers  et  vieux 
souoenirSf  1788;  Les  lettres  de  mon  orand-pére,  1789-1795  (Valendennes, 
imp.  G.  Giard  et  A.  Seulin,  1875,  in-18  j.  de  vni-173  p.),  un  anonyme,  que 
la  piété  filiale  trahit  à  chaque  page,  vient  de  publier  des  papiers  de  famille 
destinés  au  cercle  restreint  des  amis  et  des  parents.  Ils  mériteraient  cepen- 
dant de  le  franchir.  Ils  n'ont  point  Tinconvénient  de  toutes  ces  révélations 
intimes  qui  introduisent  le  public  dans  le  sanctuaire  de  la  famille,  et  ils 
donnent,  sur  les  mœurs  des  familles  parlementaires  de  province  et  sur  la 
Révolution,  des  traits  qui  serviront  aux  peintres  de  cette  époque.  L'auteur 
nous  introduit  dans  la  ville  de  Saint-Pol,  en  1788,  où  sa  famille  était  hono- 
rée des  principales  charges  de  la  magistrature  et  de  la  confiance  des 
seigneurs,  les  princes  de  Soubise.  Après  avoir  présenté  les  principaux 
membres  qui  la  composaient  alors,  il  cède  la  parole  aux  documents  dont  le 
principal  est  le  récit  fait  par  son  grand-père,  M.  Thellier  de  Poncheville,  de 
toutes  les  péripéties  de  sa  vie  pendant  la  Révolution.  Il  eut  le  dangereux  hon- 
neur de  lutter,  aux  élections  pour  les  États  généraux,  contre  Robespierre. 
C'était  un  titre  pour  monter  sur  i'échafaud  ;  s'il  échappa,  ce  ne  fut  pas  grâce 
à  l'indulgence  de  ses  ennemis,  car  il  fut  incarcéré,  s'évada,  fut  repris,  puis 
délivré,  condamné,  tiré  à  bout  portant,  etc.  Mais  sa  famille,  fidèle  comme 
lui  à  Dieu  et  au  roi,  paya  pour  lui  du  sang  de  treize  de  ses  membres. 

—  Le  Begistre  annuel  de  littérature  et  de  Bibliographie  pour  1875,  édité 
chez  Pockering,  par  M.  J.  P.  Beijeau,  est  en  préparation.  Il  contiendra  les 
additions  importantes  faites  aux  bibliothèques  publiques,  les  ventes  de 
livres,  manuscrits  et  autographes,  avec  les  prix  des  articles  principaux,  un 
catalogue  des  publications  bibliographiques  de  l'Angleterre  et  de  l'étranger, 
et  autres  informations. 

—  La  ville  de  Smyme  vient  de  commencer  l'installation  d'un  musée 
public  d'antiquités.  On  y  a  déjà  réuni  1,200  lampes,  vases,  sculptures,  etc., 
provenant,  en  grande  partie,  de  l'antique  Éphèse. 

—  Parmi  les  publications  de  la  Camden  Society  pour  1876,  on  annonce  le 
Siège  de  Rouen,  et  autres  documents  relatifs  au  règne  de  Henri  VI. 

—  Nous  empruntons  à  VAthenœum  l'indication  des  prix  qu'ont  atteint 
quelques  ouvrages,  dans  la  vente,  faite  récenmient  à  Londres,  de  la  der- 
nière portion  de  la  bibliothèque  de  J.  Dann  Gardner.  On  voit  que  la  valeur 
attribuée  aux  livres  anciens  est  loin  de  diminuer.  Le  Nouveau  Testament  de 
Coverdale,  imprimé  à  Paris,  par  Paul  Regnault,  en  1538,  a  été  vendu 
160  livres  sterling  (4,040  francs)  ;  la  première  édition  de  la  Vie  et  des  fables 
d^ Ésope t  imprimée  à  Uilan,  vers  1480,  38  livres  (958  francs)  ;  Normannorum 
historiœ  scriptores,  d'André  Duchesne,  1619,  grand  papier,  37  livres,  (933 
francs);  le  Myrouer  de  la  vie  humaine,  de  Roderigue  de  Zamora,  imprimé  à 
Lyon,  en  1462,  64  livres  (1616  franes)  ;  Théocrite,  imprimé  par  Aide,  en  1495, 
24  livres  (606  francs). 

—  L'imprimerie  de  l'université  de  Cambridge  va  bientôt  publier  une  édi- 
tion critique  de  l'ancienne  version  latine  du  conmientaire  de  Théodore  de 
Mopsueste  sur  les  épitres  de  saint  Paul.  Le  texte  sera  emprunté  au  manuscrit 
d'Amiens,  déjà  mis  à  contribution  par  le  cardinal  Pitra,  dans  le  Spidlegium 

Décembre  1875.  T.  XIV,  36. 


—  »64  — 

êoUmMntê^  «t  à  un  autre  manuicriti  rdcraunent  Aécoa^^rt  dans  la  ooltontion 

jiMrléienne  da  British  Muê9um, 

—  Il  parait  que  les  archives  de  Timprimerie  dirigée  par  ia  célèbre  Plântio 
à  AnTers,  au  seizième  siècle,  ont  été  conservées  jusqu'à  nos  jours,  et  l'oil 
croit  qu^elles  pourront  être  bientôt  communiquées  au  public.  En  effet,  la 
ville  d* Anvers  s'est  mise  en  rapports  avec  une  famille  qui  descend  direela- 
ment  des  Plantin,  et  des  négociations  ont  été  entamées  pour  Tachai  de 
cette  collection  importante.  Cell&<d  contient  plus  de  10,000  lettres  da 
tavftûts  dont  les  œuvres  ont  été  imprimées  dans  cette  omdnei  avec  les 
réponses  de  Plantin. 

-^  Un  choix  de  beaux  livres  français  vient  d*êtrô  vendu  à  l'hôtel  Drouoi, 
par  H*  HAurice  Delestre,  successeur  de  M.  Delbergue-Cormont,  et  M.  Adolphe 
L&bitte,  libraire.  —  Voici,  d'après  le  Journal  des  Débats,  le  prix  qu'ont  at- 
teint les  ouvrages  les  pins  rares  : 

Pkms  et  dessiis  nouveaux  de  jardinage,  du  sieur  Le  Bouteux,  dédiés  au  mar- 
quis de  Louvois.  Paris,  Langlois,  s.  d.,  in-folio  oblong.  Ce  volume  contient 
95  planches,  )>ar  Poillj  et  Porelle.  Vues  des  châteaux  de  France  et  de  leurs 
Jardins,  vendu  100  fr. —  Iconologie  par  figures,  on  traité  complet  des  allé- 
gories, emblèmes  et  ouvrages  utiles  aux  artistes,  aux  amateurs,  et  pouvant 
servir  à  l'éducation  des  jeunes  personnes,  par  MM.  Gravelot  et  Gochin.  A 
Paris,  ôhe*  Lattri,  graveur,  s.  d.,  4  vol.  in-8,  v.  rac,  fil.,  tr.  dor.,  250  francs. 
-—  Vuéê  des  belles  maisons  de  France,  par  Porelle.  Paris,  Langlois,  1680  ;  2 
vol.  in*4*  obi.,  v.  tr.  dor.,  223  planches  en  2  vol.',  exemplaire  colorié, 
160  francs.  —  Recueil  des  plans,  élévations  et  coupes  des  châteaux,  jardins  et 
déjfmdanoes  que  le  roy  de  Pologne  occupe  en  Lorraine,  par  Héré.  Paris,  s.  d. 
(l"*  partie)  46  planches  ;  Plans  et  élévation  de  la  place  Royale  de  Nancy,  1753  ; 
Recueil  des  ouvrages  en  serrurerie  que  Stanislas  le  Bienfaisant,  roi  de  Pologne,  a 
ftâê  poser  sur  la  place  Royale  de  Nancy,  composé  par  Jean  Lamour.  Nancy,  s. 
d.,  in^^olio.  Ensemble,  3  vol.  in-folio,  mar.  v.  fil.  dent.,  tr.  dor.  Exemplaire 
remboîté  dans  une  ancienne  reliure  aux  armes  de  Lorraine  ;  le  dernier  vo* 
inme  est  aux  armes  du  roi,  300  francs.  --  Les  CEmres  de  Pierre  de  Ronsard, 
gentilhomme  vendosmois,  prince  des  poètes  français.  A  Paris,  chez  Barthé- 
lémy Macé  et  chez  Nicolas  Bron,  1617  ;  front,  et  portrait  gravé,  10  t.  en  5 
vol.y  38tt  francs.  —  Rsynard,  (Èuvres  complètes.  Paris,  de  l'imprimerie  de 
Monsieur,  1790  ;  6  vol.  in*8,  mar.  bl.  û\.  tr.  dor.,  figures  de  Boul  ;  bel  exem* 
plaire,  259  francs.  •—  Œuvres  complètes  de  Crébillon.  Paris,  4775  :  3  vol.  gr. 
in-8,  mar.  v.  111.  dent.,  tr.  idor.  (Biziaux;.  Exemplaire  de  Grésy  ;  figures  de 
Marinier,  avant  et  avec  la  lettre,  399  francs.  ^  CÉUvres  «le  Aactne.  Paris,  1760, 

3  vol.  in-4;  mar.  r.  ûl.  tr.  dor.  Ancienne  reliure,  bel  exemplaire  aux  armes 
de  Mirabeau.  Bas  /torts  Quentin  Bauchard  ;  orné  de  figures  de  Sève,  500 
francs.  ^  Ractsie.  Œuvres.  Paris,  Pierre  Didot  Talné,  1801,  3  vol.  in-folio, 
pap.  vél.  mar.  v.  ûl,  dent.,  tr.  dor.  Bel  exemplaire  de  cette  splendide  édi- 
tion, tirée  k  250  exemplaires  et  ornée  de  57  planches.  Épreuve  avec  la  lettre 
grise,  355  francs.  —  Racine»  Œuvres,  avec  les  commentaires  de  Luneau  de 
Boi^ennain.  Paris,  1778,  7  vol.  in-8,  mar.,  fil.,  tr.  dor.  (ancienne  reliure). 
Bel  exemplaire  avec  les  figures  avant  la  lettre,  355  francs.  ~  Monument  da 
costume  physique  et  moral  de  la  fin  du  dix- huitième  siècle,  on  tableaux  de  la 
vie^  ornés  de  figures  dessinées  et  gravées  par  Moreau  le  jeune  (texte  par  Res- 
tif  de  la  Bretonne),  à  Newvied-sur-le-Rhin,  1789,  in-folio,  demi-reliure,  26 
planches,  555  francs.  —  Œuvres  de  Salomon  Qessner.  Paris,  Renonard,  1799, 

4  vol.  in-8,  mar.  rouge,  filet,  tranche  dorée  (Bozérian),  papier  vélin,  ûgorei 
de  Moreau  avant  la  lettre,  500  francs.  -*  Œuvres  de  Demaustier.  Paris,  Rs- 
nouard,  1809,  4  vol.  in-8.  mar.  bl.,  filet,  tranche  dorée  (Bozérian).  Exem* 


—  6BB  - 

plaire  en  grand  papier  Télin,  figures  de  Morean,  avant  la  lettre,  500  franea. 
—  Monifaueon.  Antiquités  expliquées,  représentées  en  figures.  Paris,  1719» 
10  vol.  in-folio,  1,760  francs. 

—  M.  Louis  de  Zoysa,  mudeliar,  conservateur  de  la  bibliothèque  et  chef 
traducteur  du  nouveau  gouvernement  de  Colombo,  a  fait,  de  temps  entempt^ 
des  rapports  sur  les  résullats  de  son  inspection  dans  les  diverses  bibliothè- 
ques des  monastères  bouddhistes  de  Ceylan.  Ces  rapports  ont  été  rendus 
publics;  ils  ont  confirmé  les  craintes  que  Ton  avait  de  la  destruction  totale 
de  la  plus  ancienne  littérature  singhalaise,  mais  ils  prouvent  que  le 
mudeliar  a  réussi  à  découvrir  d'importants  ouvrages  dont  Tezistence  avait 
été  jusqu'ici  inconnue. 

Parmi  ces  ouvrages,  les  suivants  sont  surtout  dignes  d'être  notés  :  Daladàfnir 
jàwaliya  et  DcUadà  strtto,  deux  vieux  livres  singhalais  sur  la  célèbre  relique  de 
la  Deut;  le  Kesâdhatu-vama^  ou  Histoire  du  cheveu^  manuscrit  qui  était  tout  k 
fait  inconnu.  Cet  ouvrage,  tel  qu'il  est  mentionné  dans  le  xxxix"  chapitre  du 
Mahàvansa,  traduit  par  M.  Rys  Davids,  pour  le  dernier  volume  du  Journal  of 
the  Bùyal  AhioHc  Society,  est  des  plus  intéressants  :  Le  Lalàta  dhàtuvansa^ 
dont  la  copie,  qui  est  dt  la  bibliothèque  de  Cambridge,  est  la  seule  copie 
connue. 

La  Bibliothèque  nationale  de  Paris  a,  sur  cet  ouvrage,  un  commentaire  en 
pàii.  La  Sàsana-Vensa,  ou  histoire  du  bouddhisme,  et  le  Ràjadhiràja-Vitàsini, 
Histoire  de  Bruma,  sont  tous  les  deux  des  ouvrages  en  pâli,  d'une  date  incon- 
nue, mais  on  pense  que,  de  même  que  ceux  qui  les  précèdent,  ils  contien- 
nent une  partie  historique  importante. 

Il  y  a  aussi  un  certain  nombre  d'ouvrages  bouddhistes  éthiques  et  méta- 
physiques, dont  un  des  plus  intéressants  est  un  ancien  commentaire  en  dia- 
lecte sur  le  Dkammapoda,  bien  connu  en  Europe  par  l'édition  qu'en  a  faite 
M.  Faùsboll  et  la  traduction  qu'en  ont  donnée  IfM.  Max  MûUer  et  Weber.  Il 
date  du  dixième  siècle  et  il  est  le  plus  ancien  ouvrage  singhalais  en  prose 
qui  existe  aujourd'hui. 

Le  plus  important  des  ouvragss  grammaticaux  est  le  Padhasâdhana-tikâ, 
très-ancien  commentaire  pâli  sur  la  plus  vieille  grammaire  de  cette  langue, 
celle  de  Kachchàyana,  dont  M.  Senart  a  dernièrement  publié  une  édition 
dans  le  Journal  asiatique.  Il  est  probable  que  les  plus  importants  manuscrits 
découverts  seront  copiés  ou  achetés  par  la  bibliothèque  de  Colombo,  dont 
l'importance  s'accroîtrait  grandement,  si  chaque  année  elle  dépensait  une 
petite  somme  pour  faire  des  copies  de  manuscrits,  qu'elle  enverrait  à  U 
Bibliothèque  nationale  de  Paris  et  à  celle  du  Bristish  Muséum  à  Londres. 

{Academy.) 

—  M.  Shore,  premier  fonctionnaire  de  l'institution  Hartley,  à  Sonthamp- 
ton,  a  découvert,  dans  une  collection  de  dessins  et  d'antiquités  de  l'époque 
de  Louis  XIV,  qui  appartient  à  ladite  institution,  une  tête  de  Madone.  Au 
revers  de  ce  dessin,  on  peut  lire  plusieurs  lignes  manuscrites  en  vieil  italien, 
et  le  nom  «Léonardo  Vinci)),  le  tout  en  caractères  anciens.  Cette  collection 
de  dessins  occupe  plus  de  cent  cadres.  Cinquante-deux  d'entre  eux  sont  des 
esquisses  concernant  les  fables  d'Ésope  ;  on  croit  que  ces  esquisses  sont  des 
originaux  ;  d'autres  sont  des  dessins  d'ornement,  du  temps  de  la  Renais- 
sance, des  études  de  figure  à  la  sanguine,  et  des  études  à  l'encre,  ébauches 
hardies  pour  peindre  des  ciels.  Ce  sont  vraisemblablement  les  œuvres  d'ar- 
tistes dont  les  noms  sont  inconnus,  et  l'on  croit  qu'ils  appartenaient  à  un 
médecin  français  qui  s'était  établi  à  Southampton,  il  y  a  cent  vingt  ans. 

{Academy.) 

—  Les  Femmes  hibliophiUSt  tel  est  le  titre  d'un  petit  volume  in- 18  qu'a 


—  556  — 

fait  imprimer  un  ami  de  la  science  des  livres,  M.  Jean  Gay,  auquel  on  doit 
déjà  un  catalogue  raisonné  des  ouvrages  relatifs  au  Jeu  des  échecs  (fort  utile 
même  après  le  livre  allemand  de  Anton  Schmid,  publié  à  Vienne),  et  qui 
a,  cette  année,  fait  paraître  une  Bibliographie  africaine,  qui  atteste  de  longues 
recherches.  Le  mince  volume  dont  il  est  question  ici  n*a  été  imprimé  qu'à 
50  exemptaires,  et  il  n'est  point  livré  au  commerce.  Ou  ne  peut  guère  Ten- 
vlsager  que  comme  un  essai,  renfermant  de  nombreuses  ioforoiations,  et  il 
serait  à  désirer  qu'il  fût  suivi  d'un  travail  plus  étendu  sur  ce  sujet  ;  quelques 
portraits  et  la  reproduction  des  arinoiries,  qui  font  arriver  certains  volumes 
à  des  prix  très-élevés,  semblent  de  nature  à  rehausser  vivement  l'attrait 
d'un  travail  qui  n'a  pas  encore  été  entrepris.  .Nous  avons  lieu  de  croire 
qu'utilisant  des  notes  laissées  par  Quérard  et  qui  lui  ont  été  communiquées, 
M.  Jean  Gay* mettra  sous  presse  des  recherches  sur  un  autre  point  curieux 
de  la  bibliographies,  à  savoir  les  imprimeries  particulières. 

—  La  maison  de  librairie  Longman,  fort  connue  en  Angleterre  depuis  près 
d'un  siècle,  annonce,  sous  le  titre  de  London  Séries  ofenglish  ctossîcs,  une 
collection  d'éditions  fort  soignées  et  à  bon  marché  des  meilleiTrs  ouvrages 
faisant  partie  des  diverses  branches  de  la  littérature  anglaise.  On  annonce 
notamment  les  Essays  de  Bacon,  un  choix  des  meilleurs  articles  du  Speetator 
et  du  Tatler,  les  œuvres  choisie»  de  Ghaucer,  le  Faustus  de  Marlowe  (drame 
remarquable,  dont  M.  François  Victor  Hugo  fils  a  publié  une  traduction  fran- 
çaise), les  Poems  de  Wordsworth,  etc.  M.  Fumival,  dont  l'activité  ne  se  dément 
pas^  annonce  un  recueil  choisi  d'extraits  de  livres  et  de  maniiscrits  du  hui- 
tième au  quinzième  siècle,  sous  le  titre  de  :  La  Fie  dans  Vancienne  Angleterre 
{LifeinancientEngland).l]a  travail  de  ce  genre,  relatif  à  la  France  et 
exécuté  par  un  écrivain  instruit  et  judicieux,  n'offrirait-il  pas  un  très-grand 
intérêt? 

—  Un  remarquable  ouvrage  d'archéologie  vient  d'être  publié  par  la 
Société  des  antiquaires  de  Newcastle-sur-Tyne,  sous  le  titre  de  LapÙarium 
septeniriondlef  ou  Description  des  monuments  de  la  domination  romaine  dans  k 
nord  de  V Angleterre, 

—  Chaque  État  de  l'Amérique  du  Nord  possède  une  société  historique, 
qui  publie  de  temps  à  autre  des  documents  sur  l'histoire  du  nouveau  con- 
tinent. Une  des  publications  les  plus  remarquables  en  ce  genre  est  la  Col' 
lection  des  documents  de  Vhistoire  de  la  Louisiane  et  de  la  Floride,  dont  la  seconde 
série  vient  de  paraître  à  New  York.  L'éditeur,  M.  Trench,  a  receveilli,  au  prix 
de  laborieuses  recherches,  en  France  et  en  Espagne,  les  matériaux  de  ce 
livre  aussi  intéressant  pour  les  nations  qui  ont  découvert  ces  provinces  que 
pour  celles  qui  les  habitent  aujourd'hui. 

—  Les  conservateurs  du  département  des  manuscrits  du  British  Muséum, 
non  contents  d'avoir  livré  à  l'impression  le  catalogue  des  manuscrits  acquis 
de  4854  à  1860,  poursuivent  activement  le  même  travail  jusqu'en  1875.  Les 
lecteurs  trouveront  donc  bientôt,  dans  cet  établissement  modèle,  les  cata- 
logues détaillés  de  tous  les  manuscrits  qui  le  composent,  tant  des  fonds 
anciens  que  des  acquisitions  récentes, 

—  On  annonce  la  publication  prochaine  du  IV*  et  dernier  tome  de  Ton- 
vrage  de  Max  Mûller  sur  la  science  du  langage,  lequel  porte  ce  titre  un 
peu  fantaisiste  :  Copeauo;  d^un  atelier  allemand. 

—  M.  Bayster  va  publier  la  traduction  en  langue  anglaise  du  savant  livre 
de  M.  François  Lenormant  sur  la  Magie  et  l'astrologie  chez  les  Chaldéens. 

—  Un  Anglais,  M.  i.  Bruyn  Andrew,  apporte  son  tribut  à  la  science  si 
étudiée  de  nos  jours  de  la  grammaire  comparée.  Il  a  choisi  une  langue  ou 
plutôt  un  patois  encore  peu  connu  des  savants,  celui  qui  se  parle  sur  les 


—  557  — 

côtes  de  la  Méditerranée,  de  Marseille  jusqu'à  Gênes.  Son  traité  sur  le 
Dialecte  menionnaU  comble  une  lacune  qui  existait  encore  dans  l'histoire  des 
idiomes  de  la  Provence. 

—  L'archéologie  préhistorique,  cette  science  si  neuve  encore  et  si  incer- 
taine, reçoit  de  nouvelles  lueurs  de  travaux  sérieux  entrepris  d,ans  toutes 
les  parties  du  monde.  Un  savant  américain,  M.  J.  G.  Southall,  vient  de 
publier  &  Philadelphie  un  livre  remarquable^  sous  ce  titre  :  L'origine  récente 
de  Vhomme  établie  Tpar  la  géologie  et  la  science  moderne  de  V archéologie  préhis- 
torique. L'auteur  y  fait  justice  des  théories  aventureuses  qui  reculent  l'exis- 
tence de  rhonmie  jusqu'à  des  centaines  de  milliers  d'années.  Voici  sa  con- 
clusion, qui  servira  à  faire  juger  l'esprit  et  les  tendances  de  l'écrivain  :  u  Si 
j'ai  réussi  à  établir  la  très-récente  origine  de  la  race  humaine,  le  résultat 
de  l'évidence  porte  plus  loin  que  les  hypothèses  de  l'archéologie  préhis- 
torique, il  s'attaque  à  la  doctrine  môme  de  M.  Darwin  ;  car  si,  comme  je  le 
soutiens,  l'homme  primitif  ne  remonte  pas  plus  haut  que  six  ou  huit  mille 
ans,  à  l'état  de  civilisation,  dans  les  régions  tempérées  de  l'Orient  (et  on  ne 
rencontre  aucune  trace  humaine  au  delà),  la  doctrine  de  l'évolution  du 
moins  en  ce  qui  concerne  l'homme,  est  définitivement  mise  à  néant.  » 

—  The  Athenœtwi  du  mois  d'octobre  renferme  une  curieuse  étude  sur  les 
mots  celtiques  ou  gaéliques  qui  se  trouvent  dans  Shakspeare  et  ses  contem- 
porains. L'auteur,  M.  Gh.  Mackay,  y  reconnaît  de  nombreux  restes  de  l'an- 
cienne langue,  conservés  au  seizième  siècle  dans  l'idiome  du  peuple,  auquel 
Shakspeare  faisait  de  larges  emprunts. 

—  On  vient  de  découvrir,  dans  les  archives  du  chapitre  de  Westminster, 
une  collection  de  documents  relatifs  à  l'histoire  des  Juifs  en  Angleterre  au 
treizième  siècle.  Ge  sont  en  grande  partie  des  contrats,  baux,  obligations 
entre  les  opulents  prêteurs  et  les  seigneurs  pauvres  de  l'époque;  on  y  trou- 
vera la  preuve  des  grandes  richesses  de  la  race  d'Israël,  qui  furent  la  cause 
de  son  expulsion  d'Angleterre  en  1290. 

PuBLiCAnoNs  NOUVELLES.  —  Lcs  Arts  graphiques  à  l'exposition  de  Vienne^  par 
Georges  Masson  (in-8,  G.  Masson).  ^  Précis  de  philosophie  chrétienne^  par 
l'abbé  Féchaux  (in-8,  Palmé).  —  Les  Remèdes  des  champs^  par  le  D'  Soffray 
(2  vol.  in-32.  Hachette).  •—  Fréds  d'hygiène  privée  et  sociale,  par  A.  Lacas- 
sagne  (in-12,  G.  Masson).  —  Trésor  généalogique  de  dom  VUkviellej  publié 
par  H.  et  Alph.  Passier  (T.  I",  i^  et  2*  p.  t.  H.  V*  p.  in-4,  Ghampion).  — 
liotice  biographique  sur  dom  VUleûielle,  par  A.  et  Alph.  Passier  (in-4,  Gham- 
pion). —  Mtzkheth  et  Ibérie,  notices  sur  la  Géorgie^  par  M.  de  Villeneuve  (in-i2, 
Douniol).  —  Pénelon,  directeur  de  oonsciencCy  par  A.  de  Grisy  (in-8,  Didier). — 
Le  Président  de  Brosses,  sa  vie  et  ses  ouvrages,  thèse,  par  M.  H.  Mamet  (in-8, 
Thorin).  —  Madame  en  Vendée,  par  H.  de  Grammey  (in-12.  Palmé).  —  Borne 
et  Vendée,  par  J.  Grétineau-Joly  (in-12,  Bray  et  Retaux).  —  Frédéric  U,  pAt/o- 
sophe,  par  G.  Rigollot  (in-8,  Thorin).—  Étude  sur  la  condition  des  lépreux  au 
moyen  âge,  par  L.  Guillouard  (in-12,  Thorin).  —  La  Bibliothèque  des  écrivains 
de  la  Compagnie  de  Jésus  et  le  P.  Aug.  de  Backer,  par  le  R.  P.  V.  Van  Tricht 
(in-8,  Louvain,  Gh.  Fonteyn).  —  Souvenirs  d'un  magistrat,  par  A.  L.  Martin 
(in-8,  Thorin).  —  Le  Scrutin  de  liste  et  le  scrutin  d'arrondissement  en  1840  et 
1869  (in-8,  J.  Baudry).  —  Le  Bâton  perdu,  par  Jean  Loyseau  (in-12,  Dillet). 
—  Elisabe^j  par  Dorothée  de  Boden  {jLU-ilt,  Bourguet  et  Galas). 

ViSENOT. 


-  5S8  - 


QUESTIONS  ET  RÉPONSES. 


QUESTIONS. 

Où  naquit  le  P.  Senault? 

— -Selon  le  Morériàe  1757,  Jean-Fran- 
cis Senault  naquit  &  Paris  en  1601. 
Selon  le  Dictionnaire  hisUnique  de 
dom  Ghaudon  (édition  de  1789), 
Téloquent  oratorien  naquit  à  Anvers 
en  1599.  D'après  Tabaraud  et  Verger, 
dans  la  Bibliographie  Michaud,  il  na- 

Suit  à  Anvers  en  1604  on  en  1599. 
n  écrivain  anonyme  (Nouvelle  Bio* 
draphie  générale)  le  fait  naître  en  1601 
h  AuverSy  près  Pontoise.  Enfin, 
M.  Ludovic  Lalanne,  dans  son  Dic- 
tionnaire historique  de  la  France  le  dit 
te  né  en  1701,  à  Anvers,  près  Pon- 
toise. »  Décidément  est-ce  à  Paris 
(en  1599?  en  1601?  en  1604?)  ou 
bien  à  Auvers-surOise  (aujourd'hui 
commune  de  l'arrondissement'  et  du 
canton  de  Pontoise),  que  vint  au 
monde  le  futur  supérieur  général  de 
rOratoire?  En  tous  cas,  il  faut  écar- 
ter du  débat  le  nom  d'Anvers  qui 
n'a  été  introduit  que  par  une  faute, 
d'impression  trop  fidèlement  reco- 
piée. T.  DE  L. 

Quel  eiit  l*autenr  des  Mé- 
moire* aecrets  ?  —  Il  vient  de 
paraître,  à  la  Librairie  des  biblio- 
philes, un  volume  intitulé  :  Mémoires 
secrets f  volume  formé  d'une  série  de 
lettres  écrites  par  un  magistrat  pa- 
risien, sous  la  monarchie  de  Juillet. 
Quel  est  ce  magistrat  qui  fut  avocat- 
général  et  conseiller  à  la  cour  royale 
et  qui  fut  appelé  par  l'éditeur  A.  de 
Mamaj.        un  curieux  de  province, 

Merlin  et  le*  tribunaux,  de 
la  Iteatauratlon.—  Dans  l'éloee 
historique  de  Merlin,  prononcé  à  la 
conférence  de  l'Ordre  des  avocats 
à  la  cour  de  Paris,  en  1840,  par 
M»  Auguste  Mathieu  (d'Avrei,  on  lit 
(p.  25  et  26)  :  »  Que  les  hommes  po- 
»  litiques  sont  aveugles  1  Pendant 
»  quelques  années  les  tribunaux  de 
»  la  Restauration  exilèrent  de  leur 
}>  enceinte  le  nom  et  l'autorité  du 
>)  grand  jurisconsulte,  et  l'Avocat  ne 
n  put  l'invoquer  sans  craindre  la  pa- 
„  rôle  sévère  du  magistrat,  comme  si 
„  la  science  eût  été  complice  du  ré- 


»  gicide  1  »  —  Y  a-t-il  quelle  chose 
de  vrai  dans  cette  allégation  ? 

B.  DK  FoUCBtUK. 


Sébastien     I^e     Clere.     -^ 

Existe -t-il  encore  à  Paris  ou  en  pro- 
vince quelque  parent  ou  allié  de  Sé- 
bastien Le  Clerc,  fameux  graveur 
sous  Louis  XrV?  L.  B. 


L.*Ordre  de  la  Vlaltatlon. 

—  Quels  sont  les  ouvrages  parus 
depuis  cinquante  ans,  sur  les  diffé- 
rentes fondations  de  couvents  de 
l'Ordre  de  la  Visitation  de  Sainte* 
Marie.  Cb.  dr  C. 


Chancelier  d'A^ues- 
•eau.  —  Pourrait-on  donner  quel- 
ques indications  sur  le  nombre  et  la 
valeur  des  ouvrages  (anciens  ou 
récents),  qui  ont  apprécié  l'œuvre  du 
chancelier  d'Aguesseau?  Existe-t-il 
quelque  monographie  remarquable 
sur  cet  intéressant  sujet?     A.  V. 

La  Conspiration  de»  I*oa- 
drea.  —  La  Conspiration  des  Pou- 
dres jgun  powder  plot),  oui  joue  un 
r61e  important  dans  l'histoire  da 
règne  de  Jacques  !•',  présente  bien 
des  points  obscurs;  elle  mériterait 
non  moins  jue  la  célèbre  Conjura- 
tion de  Venise,  d'être  l'objet  d'inves- 
tigations sérieuses  qui  présenteraient 
peut-être  les  choses  sous  un  tout 
autre  aspect  que  celui  adopté  par 
l'esprit  de  parti.  Quels  sont  les  ou- 
vrages les  plus  dignes  de  fol  qu'il 
faudrait  consulter  à  ce  siyet?  T.  C* 


RÉPONSES. 

Sur  un  paaaai^  ^u  ^our^ 
nal  de  l'Katolle  (XUI,  286).  — 
Le  savant  éditeur  des  Commentaires 
et  IjCttres  de  Biaise  de  Monluc,  dans 
ce  passade  d'une  lettre  qu'il  me  per- 
mettra ae  reproduire,  a  bien  voulu 
répondre  à  la  phrase  où  je  disais  : 
Saurait-on  quelque  chose  de  plus  sur 
cet  Abraham?  Les  renseignements 
de  M.  Alph.  de  Ruble  paraissent  d'au- 
tant plus  précieux,  (]u'ils  sont  tirés 
d'un  document  inédit  :  «  Vous  avez 
adressé  une  demande  aux  familiers 
du  seizième  siècle,  sur  le  sieur  Abra- 
ham, agent  du  parti  réformé,  pris 


—  559  — 

et  mit  à  mort  en  4575.  Je  ne  m*int6-  an  temee  dn  Ait  de  l'amiral,  et  qu'il 
resse  pas  moins  que  vous  aux  indi-  fut  employé  en  plnsleors  négocia- 
cations  que  vous  pourrez  obtenir,  lions,  notamment  dans  celles  qui 
Abraham  joue  un  certain  rôle  dans  précédèrent  rinrasion  dlemande  de 
les  Mémoires  de  la  Huguerie,  que  je  1576.  Abraham  est  nommé  trois  fois 
prépare  en  ce  moment.  Nous  y  voyons  avec  suite  dans  les  Mémoires  de  la 
qu'il  avait  été  secrétaire  de  Coligny,  Hugverie,  »  T.  de  L. 
qu'après  la  Saint-Barthélémy  il  resta 

Erratum.  —  Au  numéro  d'août,  p.  115,  liv.  15;  au  lieu  de  :  YOdyssée, 
lire  VIliade. 


TABLE   MÉTHODIQUE 

DES   OUVRAGES  ANALYSÉS 


THÉOLOGIE 

Écriture  iMJnte.  Cursus  Scripturs  sacrœ  (le  P.  Schoupjf^),    •    .    .  399 

Liltursle.  Année  liturgique  du  prédicateur  {Vabbé  J,  Orçmaj.    .    .    .  200 
Salnt«*Père«.  Dialogue   de  saint  Grégoire  le  Grand   (trad.  de  B, 

Cartier) 107 

Tbéologle  dognonatlque  et  morale,   Compeadium  theologis 

dogmaticœ  (Vabbé  Teissonnier) 29 

TheoïopsL  woraih  (S.  Alphonsi  de  Ligorio) 400 

De  Perfectionibus  moribusque  diyinis  {Le$iius) ,10.6 

La  divine  synthèse,  ou  Texposé  au  double  point  de  vue  apologéti- 
que et  pratique  de  la  religion  Ui£çir  GuUbert) 486 

Cours  abrégé  de  religion  {le  B,  P.  J.  Z.  Schouppe) 195 

L*Ai-t  d'enseigner  la  religion  (i'a56é  Jkfard'neQ 194 

Esposizione  popolare  délia  dottrina  cristiana  '^don  F.  Bosa)  .     .     .  403 
De   theoria   probabilitatis   dissertatio  theologica    (R.  0  Fr,  Jf.  A. 

Potion) 314 

De  la  théorie  du  probabilrsme.  Dissertation  théologique  (k  A.  P. 

Fr.M.A,  Potion) 314 

L'Homme  selon  la  science  et  la  foi  {le  P.  Didon) .  31$ 

Das  Lebcn  unsers  H.  Jesu  Christus  (L.  C.  Busitiger) 485 

Jésus-Christ  {Vabbé  Ch.  Place) 401 

Controverse.  Le  Régne  de  Jésus-Christ  et  la  question  sociale  {rahbé 

Joly) 204 

Réfutation  de  la  Christologie  de  M.  Albert  Reville  {Vabbé  J.  Troncy) .  402 
La  Question  protestante  jugée  par  le  bon  sens,  la  Bible  et  les  faits 

(G.  Brnnain) i08 

Petit  Catéchisme  protestant  et  catholique  raisonné  {Vabbé  J.Louche)  197 
Ascétisme,  Pensées  choisies  de  saint  François  de  Sales  (/.  Deiotn- 

court) 57 

Maximes  et  avis  spirituels  de  l'admirable  docteur  mystique  Jean  de 

h  Croix 840 


—  560  — 

.Belrailes  spirituelles  (du  P.  CJaudeds /a  CDJomMàiV).    .    .    ■     .     .  2X1 

L'Eraugile  proposé  à  ceux  qui  fouSreut 203 

Exercice  du  chemiu  de  la  Croix    (le  B.  P.  Mach) 209 

Miettes  èvangéliqued  {le  fl.  P.  Th.  hatUbimm) 206 

La  Hanae  du  prétro  {le  R.  P.  J.  Mach) 209 

L'OnisoD  mentale  ((«  A.  P.  PelUalol) 313 

Visites  à   Jésus-Hustie * 212 

Union  des  chrÉtiena  dans  le  cceur  de  Jésus 208 

Les  Œuvres  eucharistiques  (J.  floncAon) m 

La  Prvmière  Communion  {JHnwJ.  £'") 200 

LesQuestions  de  vie  et  de  mort  (le  R.  P.  A.   Lefebvn) 442 

t^onfèrences  aux  jeunes  ûlles  (fabbi  P.  Meehin) 197 

Hois  de  Marie  des  paroisses  et  des  familles  chrétiennes  (t'abbi  Ant. 

Ricard) 198 

Mois  de  Marie  de  rime  religieuse  (J'a&â6  P.  Demore) 1S9 

Les  Vertus  de  la  Hère  de  Dieu  (le  fi.  P.  Araai) 210 

MAlaunge*  tbéologlque*.  La  Vierge  Ma riu  et  la  femme  (Knu  Harû 

Elisabeth  Cmé 34 

Pailietles  d'or 214 

Tbâlogle  bétérodoxe.  Les  Conflits  de  la  science  et  de  lu  religion 

(/.  W.  Draper) 3J7 

JURISPRUDENCE 

Droit  prIvA.  Observations  pratiques  sur  l'application  de  difTérenla 

articles  du  code  pénal   [Ch.  Cotait) 233 

Des  Conséqueoces  juridiques  de  la  déconfiture  (E.  Pantiier)    .     .     .  2(6 

De  la  Propriété  et  de  ses  formes  primiliTes  (£.  de  Laveiye)  ...  319 
De  la  Division  de3  personnes  chez  les  Romains;  des  actes  de  l'état 

ciTil  (Pavai) 34» 

Commentaire  théorique  et  pratique  de  la  loi  du  10  déoembre  1874, 

sur  l'hypothèque  nuritme  (T.  JKorel) 398 

Essai  sur  la  Tente  commerciale  (£.  BiptrQ 391 

La  Faillite  d'après  le  droit  romain  (S.  Vavibtrg] 391 

Traité  surl'adultère  (V.  Sûffe] 390 

Les  Jeux  et  paris  derant  la  loi  (E.  Chevallier) 389 

De  la  séparation  de  corps  {Massol) 387 

La  Détinition  du  droit  {de  Saulkoilie) 387 

Le  Droit  en  matière  de  sépulture  (L.  Jloiu:} 31 

Droit  public.  Organisation  judiciaire  et  administrative  de  la  France 

et  de  la  Belgique  1814  à  1875  (£.FJour«)U) 2I5 

De  la  Personoalité  civile  du  diocèse  iCA.  de  flran^uevtHe)    ....  254 

De  l'accusation  publique  (£.  Eabre) 389 

Essai    sur   les  institutions  judiciaires  en   Roumanie  {Atexaàdre 

Vladeico) 489 

Droit  International.  Le  Code  de  commerce  mis   en  concordance 

avec  les  autres  législations  (L.  Ouiitn) 391 

Traité  de  l'ExtradiUon.    (A.  Billot) 488 

La  Faillite  dans  le  droit  international  privé  (G.  Carie)  traduction  de 

{E.  Duboii) 391 


—  561  — 

Cours  de  philosophie  (Th.  Bernard) 322 

Elementa  philosophie  (Pétri  Ant.  Corte) 404 

Principii  elemeotari  di   ûlosoiia  (Prof.  Testamenta) 404 

Thëodicée  (Am.  de  Margerie) 32 

Théo^céQ  (A.  H.  H.  Dupant) 293 

Apologie  de  la  thëodicée  du  dernier   concile  général  du  Vatican 

(Vabbé  Freynet) i44 

Examen  philosophico-theologicum  de  ontologismo  (A/6.  Lepidi)  .    .    291 

Ontologie  (A.  H.  H.  Dupont) 293 

Methodus  analjtico-syothetica  in  scientiis  metaphysicis  (Vabbé  P.  Jlf. 

Brin) 294 

Délia  conoscenza  iiUelUctuale,  Irad.  de  (?•  Matteo  Liberatoré)    .    .    295 

Deiruomo,  trad.  de  (P.  If.  Lt66ra<ore) 296 

La  Béte  (le  A.  P.  de  Bonnet) 325 

Physiologie  de  la  volonté  (A.  Herzen  trad.  du  Dr  Ch.  Letoumeau).    .    406 
Qusestiones  phiiosophicœ  cum  epistola  (rabbé  Sylv.  Mauro  R.  P.  M. 

Liberatoré^ 297 

Thésaurus  pbilosophorum  (leP,  Georg,Beeb)  recog.  P.  J.  M.Camoldi,    298 
Essai  critique  sur  ]a  philosophie  de  S.  Anselme  de  Cantorbér?  (abbé 

Van  Weddingen) 490 

La  Foi  et  la  Science  (Vabbé  Moigno) 359 

Origines  et  développemeot  du  positivisme  contemporain  (/.  B.  TiS' 

sandier) 144 

Le  Matérialisme  contemporain  (Paul  Janet) 324 

Polltl^nie.  Les  Leçons  de  l'histoire.  Le  Christianisme  et  la  libre-pen- 
sée (Ed.  Eaus) 217 

Les  Thèses  et  Thypothèse  (Jules  Camauer) 359 

Morale.  La  Loi  absolue  du  devoir  et  la  destinée  bumaine  (J.  Ham- 

basson) 109 

El  Matrimonio  (J.  Sanehet  de  Toea) 327 

Les  Dangers  du  mariage  et  les  dangers  de  la  famille  (de  Mantraut) .    252 

Le  Grime  et  la  Folie  (fl.  Jfatisd^) 411 

Pensées,  maximes,  et  boutades  (L.  de  Cambettes-Labour^e)    •    •    ,      63 

Œuvres  des  campagnes  (le  P.  Vandel) 143 

Apostolat  des  médecins  (N.  S.  B***) 145 

Education»  enseignement.  Les  vrais  principes  de  l'éducation 

chrétienne  rappelés  aux  maîtres  et  aux  lamilles  (le  P.  A.  Monfat),    442 
Principes  raisonnes  de  la  méthode  intellectuelle  appliquée  à  l'édu- 
cation maternelle  (J.  Dueket) «    .     •     .    360 

Instructions  et  conseils  adressés  aux  familles  chrétiennes  (Mgr  Mei- 

gnan) 252 

Conférences  sur  les  connaissances  les  plus  utiles  aux  habitants  de 

la  campagne  (Th.  Eomberg) 58 

Politique.  Restauration  de  la  science  politique  (Ch.  L.  deHaUer)  •  218 
Des  Conditions  de  gouvernement  en  France  (Ant.  Dubost) ....  219 
La  Constitution  de  l'Angleterre  (F.  Le  Play)  avec  coUab.  A.  DeUdre.    407 

Dieu  et  Patrie  (S.  Coran) 253 

Economie  •oclale.  Rénovation  sociale  basée    sur  les  lois  de  la 

nature  (Démétrius  Gouffared) ^ 

Lois  sociales  expliquées  par  le  bon  sens  (C.  BotUry) 

L'Ecole  de  la  réforme  sociale  (B.  P.  Ramière) 

Reàtez  au  village  (Eginhard) 

Congrès  de  Lyon  (C.  Rémont) 

Assemblée  des  Œuvres  catholiques  du  diocèse  de  SoissoP' 

Notre-Dame-de-Liesse,  les  10  et  11  mars  1873.    • 
Intempérance  et  Misère  (Jean  Lefort).    ....    * 
■nnance»,  Statistique»,  etc.  Principes  de  la  sc^ 

(R.GmjMlot) 

Recherches  sur  restimation  de  la  richesse  ^ 


France  et  en  Angleterre  (/«  due  d^Aym) Î55 

Les  Militaires  blessés  et  invalides  (U  cùmtedêRieneourt) 34 

IPhysIque  et  GIk1biI#».  La  théorie  des  atomes  dans  la  eoneeption 

générale  du  monde  (A.  Wurtz) 409 

Des  Forces  physico-chimiques  et  de  leur  iotenrention  dans  la  pro* 

duction  des  phénomènes  naturels  (BeogtiereO 225 

Influence  de  fa  pression  de  l'air  sur  la  yie  de  l'homme  (2).  Joiir- 

danet) 491 

La  Conservation  de  l'énergie  (B.  Stewart) 410 

L'Air  (A.  MoUessier) 483 

Le  Magnétisme  (A.  Badau) 483 

Carbonisation  des  bois  en  vases  clos  et  utilisation  des  produits  dé- 
rivés (C.  Vincent) 226 

Principes  de  géologie  transformiste  {Qmt,  IMflii) 227 

Rapport  succmct  sur   la  géologie  des  vallées  de  l'Athabaskau- 

Mackenzie  et  de  l'Anderson  (le  A.  P.  B.  Petitot) 328 

Traité  élémentaire  de  minéralogie  (£.  Ptsiint),  préface  de  (Des  CM- 

teaux) 329 

•  Principes  de  botanique  (/.  Gùurdon  et  Ch.  Fourcade) 494 

Mon  Jardin  (£.  Smee,  trad.  de  E.  Barbier) 495 

Les  Animaux  de  la  France  (7.  Aendtt) 475 

L'Insecte  (J.  Michekt) 474 

•clence»  médicale».  Dictionnaire  de  la  Santé  (J.  B.  Fùn8iaçpioe$),  lil 
Leçons  élémentaires  d'hygiène  faites  au   collège  de  Falaiee  (lé 

Dr  Deideux)  publ.  (L.  A.  Duehemin) 228 

BlaUi6inati<iue».  Histoire  des  mathématiques  (Ferd,  Hoefèr)     .    .412 

Le  Mètre  international  définitif  (W.  d0  Fom)ieU«) 149 

Cosmographie.  Le  Soleil  {le  P.  Secchi) 331 

Passage  de  Vénus  sur  le  soleil  (J.  P.  A.  Jlfadd(eii) 300 

Hydrographie  et  Navigation,  etc.  Traité  de  la  oonatmction 

des  ponts  et  viaducs  (A.  Morandàlre) 415 

Cours  de  navigation  intérieure  (H.  de  Lagrené) 415 

Ministère  des  Travaux  publics.  Ports  maritimes  de  la  France.    .    .  490 

Dictionnaire  des  termes  employés  dans  la  construction  (P.  Chabai).  494 

Les  Voies  souterraines  (Maxime  Hélène) 483 

Mélangea  aclentlflq'nea.  L'ancienne  jonction  de  l'Angleterre  à  la 

France  (Y.  Deemarets) 02 

Gonualasiincea  nanellea.    Le  Livre  des  soupes  et  des  potages 

(J.  Gouffé) 448 

Beaux- Arts.  La  Danse  macabre^  peinte  en  1425,  au  cimetière  des 

Innocents  (y.  Du/our) 113 

Corot  (H.  DumesmT) 229 

L'Art  et  la  Critique  en  France  (Pierre  Petroi) 499 

A  Cristian  Painter  (flînp.  Flandrin) 499 

Notice  des  tableaux,  dessins,  etc.,  exposés  dans  les  salles  dn  Musée 

de  rhôtel  de  ville  d'Autnn  (Harold  de  Fontenay) 447 

L'Art  en   Alsace-Lorraine  (Bené  Ménard) .  500 

L'Orfèvrerie  (Ferdinand  de  Lasteyrie) 40Î 

Les  Tapisseries  (A.  Castel) 483 

BELLES-LETTRES 

Philologie.  Grammar  and  Dictionaryof  the  Language  of  the  Hidatva 

(WashingUm  Matthews) 333 

Assyrische  Studien  (Dr  Fr.  DelUteh) 501 

Dictionnaire  et  grammaire  de  la  langue  des  Cris  (leB.P.  Alb.  La- 

comôe) 333 

Essai  de  graoi maire  vepse  ou  tchoude  du  Nord  (Ch*  de  Ujfah>y).    .  333 


—  668  - 

Ithétorique»  Bloqfaence.  FrajsiiDoiit.  ConMr^Doe»  choUiaa*  (A, 

Laurmt) W 

Poésie  anotenne.  L'Odyssée  d'Homôre  (Alexis  Pierrwi)    ....  114 

Poésie  du  moyen  A^e.  Œuvres  complètes  de  Riitebenf  (A.  Jv^ 

bifud) 240 

La  Chanson  de  RoUnd  {Léon  Gautier)    •    •    .    , 336 

Li  Rouman  de  Berte  aus  grans  pies,  par  Adenès  U  Rois  (Aug, 

Scheler) 230 

Baeves  de  Gommarchis,  par  Adenàs  U  Rois  (Aug.  Schêler),    .    .    »  230 
La  Guerre  de  Metz  en  1324  (£.  de  BouteiUer),  suivi  d'ét,  crit.  sur  le 

texte,  par  F.  Bonnardot,  préface  de  (X.  QaiiUier) 502 

Poésies  éançaises,  latines  et  grecques,  G.  Martin  Despois  (B.  De^ei- 
meris) ,338 

Publleatlon  de  l'ESarly  en^llol^  1*cïxt  ttcMslety .The  myroure 

of  oure  Ladye  (J.  H.  Blunt) ,307 

A  Treatise  on  the  Astrolabe  (Bev.  W.  A.  Sluai) ,308 

The  Gomplaynt  of  Scotlande  (J.  A.  If.  ifufTay/ ,  308 

Gursor  Mundi  (Rev.  A.  Moris) 313 

Poésie  moderne.  Le  Fabuliste  chrétien  (J.  M,  ViHefrainche)    ,    •  261 

Lacrymee  rerum  (L.  Pâté) 300 

Les  Mélodies  intimes  (L.  Pâté) «...  300 

Rêves  et  Devoirs  (Th.  Promont) 300 

Un  Chapitre  d'Art  poétique  (0.  Le  Vameeeur) 301 

Les  Champs  et  la  Mer  (J.  Breton) 301 

Fleurs  et  Chants  (Arbonne  Bastide) «  302 

L'Illusion  (H.  Cazalis) 302 

Le  Cahier  rouge  (Pr.  Ccppée) 302 

Idéal  et  nature  (Guy  de  Beaufori) 303 

Du  Cœur  aux  lèvres  (Perd,  Cartairade) .    •     •    •  303 

Les  Fleurs  sous  l'herbe  (Perd.  Cartaxradé)  ...••.*,,  303 

Le  Jour  et  la  Nuit  (Perd  Cartairade) ,303 

Les  Illusions  (E.  Pavin) 303 

Mes  Veillées  au  Paraclet  (le  baron  Ch.  Wak1ma0r)  ......  303 

Exaltations  (Ernest  Périgaud)       303 

Les  Feux  follets  (Ch.  Pitou) 303 

La  France  au  Tribunal  de  Dieu  (Vabbé  Démange). 304 

Les  Militantes  (Mme  A.  M.  Blanch£cotte) 304 

Sans  peur  et  sans  reproches  (ilfme  Panny  Bénoix  des  Vergnes)    •    .  304 

Saint  François-Xavier  (l'abbé  Pélix  Maleteste)  .,..,...  304 

Sonnets  et  poésies  (E.  Péhant) 305 

Velléda  (Louis  de  CombettesLabowelie) 305 

Les  Fantasmagories  (L.  Salles) , •  305 

In  extremis,  adjeux  au  dix-neuvième  siècle  (Ath.  Benenud)    .     •    »  305 

Panthéia  (Pélix  Henneguy) 305 

Premières  rimes  (Préd.  BataUle) 305 

Chants  du  Soldat  (Paul  Déroulédé) 303 

Nouveaux  Chants  du  Soldat  (Paul  Déroulédé) 305 

Almanach  du  Sonnet • •  146 

Poésie  étrangère.    1  Triomû  di  F,  Petraroo,  corretti  nel  testo  e 

riordinati  (C.  Pasqualiço) , 38 

Manuel  de  la  Revilla  Dudas  y  tristens  (D.  Banum  de  Campoaimor)  •  232 

Rime   di  Luigi  d'Ëredia. 526 

TbéAtre.  Les  Spectacles  forains  et  la  Comédie-Française  (J.  Bonnas- 

sies) 148 

Théâtre  de  Racine  illustré  par  Foulquier 474 

M.  Samson  et  ses  élèves  (E,  Legouvé) 260 

Dramas  liricos  (ArUonio  Amao) 260 

Conte»  populaire».  Contes  populaires  de  la  Grande-Bretagne 

(L.  Bruiyre) 115 


—  584  — 

Les  Contas  de  Otaries  Perranlt  (A.  Lefèm) 5M 

:o^i«n«  et  nouTâlle*.  La  TeuUlion  de  Saint  Antuiite  (GiotaM 

riaubtrl) « 

Anrëliaoules  Jaîbde  la  porte  Capène  (A.   ÛMinim) S 

Les   Gladiateurs  (C.    J.    WAyte-KetoiUe)    trad.  de   (C3L    Benmi 

Deronu} 8 

L'Aventora  d'ane  âme  en  peine  (Gilbai-Auguttin  Thûnjf)     ...  ft 

Les  Geatilsbommes  de  la  cuiller  {Ch.  BmX) 10 

La  Conspiration  de  Salcède  (£.  KlUaidet^ 10 

Le  Put  de  Hontchal  (AiA  'ItoIonJ) Il 

L'As  de  Cœur  (P.  du  Boitgabeg) 12 

Les  Hémoires  de  mon  oncle  (CA.  tfffManZl)  .    .    - 12 

Les  Hémoires  d'uoe  pétroleuse  (A.  Tiram) 13 

La  Conquête  de  Plassans  (E.  Zola) 13 

La  Tante  de  l'abbé  Mouret  (E.  Zoia) 13 

Mis  RoTel  (C.  Chtrbulin) 14 

Droit  au  but  (A.  Aehant) 15 


Le  Hanage  de  Tbècle  (J 

Dne  Femme  capricieuse  ,_      _.  _         ,    -     - 

L'Honneur  de  U  famille  (Urne  Xnifjt-Bueiiitie) 

Nancy  VaUier  (Mnte  Gagne) 17 

Une  Idylle  pendant  le  siège  (fr.  Coppie] ï? 

Benée  (Mme  Et.  Marcel) 18 

La  Famille  Honval  (£.  DaroOle] 18 

Blanche-Neige  (Mme  Cl.  de  Chandeneux) 18 

La  Main  de  velours  (Mlle  ù<d)rielle  d'Esthampei) 18 

Hiss  Hortimer,  trad.  de  (B.  de  Valbeau) 18 

Harie,  trad.  de  (Uouwn-Le-Duc) 19 

Un  Uariage  français  (Mme  Jerdaru)  trad.  de  (£.  W**')  .....  19 

Ha  Hère  et  moi 19 

Barnabe  (Ferd  Fabn) ■..,.' îO 

La  Villa-Vampire  (Poui  Vévat) ai 

La  Fontaine  aux  perles  (P.  Fémsi) 21 

La  Tresse  blonde  (fort,  du  Solsgobey) 22 

Un  Fruit  de  U  mer  Morte  (M.  £.  finiddon)  trad.  de  (Ch.  Bemard- 

Derotne) a 

Le  Jeune  Brown  (OrtmoUle  Murroj/)  trad.  de  (J.  Butler)    .    ,    .    .  2i 

Falayrac  (/.  Steeg) 23 

Une  Femme  gâaante  (E.  ûroi) 24 

Le  Chancellor   (J.  Verve) 4* 

Histoire  de  petite  ville  (Ch.  Deulfn) 24 

Le  Bal  du  diable  (Ch.  JVorrey) 25 

Les  Ames  en  peine  (Z.  Jformwr) 2S-36 

Les  Contes  comladins  (H.  de  la  Uadeleiae) 26 

Aventures  extraordinaires    d'un  homme  et  de  trois  femmes  (le 

prince  J.  Liibi-mmliii 27 

Le  Médaillon  (E.  DaMa) 27 

Une  Muse  (Alf.  Botaergeia) 27 

Cinq  Nouvelles  (Aif.  Swaergeid) 27 

La  Chambra  aux  histoires  (P.  FertiauU) 27 

L'Antre  des  mystères  (H.  Bolbuxy) 28 


—  565  — 

Le  La  Fontaine  en  action  (Hygm-Purcy) .58 

Ce  que  disent  les  champs  (Mme  la  baronne  de  Machau) 364 

Les  Aventures  de  Rohinson-^^rusoé  (Daniel  de  Foé) 478 

La  Vie  des  bois  et  du  désert  (JB.  ff.  Réwil)  (A.  DumaSf  père)    .    .    .  447 

Histoire  de  chasse  (fi.  H,  Révoil) 447 

Tonj  Brenner.  Récit  alsacien  (Mme  C.  Emst) .  392 

Trois  histoires  de  terre  et  de  mer  (A  Dûbarry) 393 

Les  Diamants  irlandais  (£.  Bowles) 394 

Goeurdoulx  (Aynié  Cécil) 395 

kène  (Et.  Marcel) * 395 

Petite  Sœur  (EL  Marcel) 396 

Mon  Sillon  [Mlle  Fkuriot) *..,....  396 

Abnégation  (Mme  Bovardân) * 397 

L'Institutrice  à  Berlin  (Mlle  M.  Maréchal) 397 

Le  Sire  de  Coucy  (F.  de  Servan) 397 

Berthilde  (Mlle  &.  (f  An?or) 397 

Victorius  (le  R.  P.  Gay,  S.  M.) 398 

Les  Châtelaines  du  Roussillon  (Mme  la  comtesse  de  la  Rochére)  .    .  398 

L'Anneau  du  meurtrier  {Gondry  du  Jardinet). 398 

La  Banque  du  Diable  (£t^.  de  jforpme) 399 

Pat,  apôtre  )  récit  irlandais 446 

Histoire  de  trois  orphelins  (Georges  Path) 476 

Les  Faucheurs  de  la  mort  (A.  de  Lamothe) -476 

M.  Nosti*adamus  (Mlle  Fkuriot) 479 

Deux  Mères  (Mfne  Colomb) 480 

Fausse  route  IJ.  Gtrardin) 480 

La  Toute-Petite  (J.   Girardin) 48i 

Tom  Brown  (J.  Levoisin) 481 

La  petite  Maltresse  de  Maison  (Mlle  Julie  Gouraud) 483 

Les  Vacances  d'un  grand-père  (Mme  de  Stolz) 484 

Plus  tard  (Zénaide  Fleuriot) 484 

La  Dette  de  Ben  Alssa  (Mlle  Marie  Maréchal) 484 

Les  Saintes  légendes  de  l'enfance  (fl.  de  Raroeul) 99 

Biblioteca  délia  gioventù  italiana i22 

Histoire  et  critique  littéraire.  Histoire  de  la  littérature  fran- 
çaise depuis  son  origine  jusqu'à  la  renaissance  (Ch.  Gidel)    .    .  37 

Maj]raerite  de  Suryille(£u(/.  Viï/edieu) 338 

Le  P.  Leieune,  sa  vie,  son  œuvre,  ses  sermons  {Vabbé  G.  Ressoux)  .  41 

Jacques  Grétineau-Joly  (Vdbbé  A.  Maynard) 505 

Crétineau-Joly  et  sps  livres  (le  P.  E.  Regnault) 63 

Aide  Manuce  et  l'hellénisme  à  Yeniâe  (Amb.  F.  Didot) 40 

Histoire  de  l'influence  de  la  langue  française  en  Allemagne  (J.  de 

Beglié) 146 

La  Langue  et  la  littérature  hindoustanies  de  1850  à  1869  (Garcia 

de  Tassy) 233 

Histoire  de  la  littérature  contemporaine  en  Italie,  sous  le  régime 

unitaire  (A.  Boua;) 118 

Eplvtolalre»  et  polyfpraphe».  Nouvelles  Lettres  de  Mme  Swet- 

chme  (le  marquis  de  La  Grange) il9 

Opère  di  Vincenzo  Mortillaro  marcheze  de  Villarena 421 

M^lan^ea  littéraire».    La  Conférence  entre  Luther  et  le  Diable 

(J.  lÀseux)    .    . 147 

Solilo^es  sceptiques  (La  JMb<Ae-2e-yayer| 147 

Portraits  d'histoire  morale  et  politique  du  temps  (Ch.  de  Mazade).  147 

Dernières  lettres  d'un  passant  (A.  de  Boissieu) 362 

Portraits  de  grandes  dames  (Imbert  de  Saint-Amand) 562 

Uoe  Belle  âme,  ou  les  Siromates  de  Jean   de  Rochevielle  (H. 

Calhiat) 119 

Etudes  politiques,  historiques  et  religieuses  (J.  de  Cacheleu)  .    .    .  143 

Quatre  conférences  (Juks  Pavre) 262 


—  566  — 

Les  Amuseurs  de  la  rue  {Auffustin  Chcdkaml) 477 

Les  Sensations  d'un  juré  (ff.  Babou)  «... 149 

La  Mort  et  la  Bibliographie  catholique  (J.  de  Chaignolks) ....  $1 
Itoman*  et  nouvelle».  Mémoires  d'une  forêt.  Fontainebleau  (J. 

LemlUns) 148 

La  Crise  de  cent  ans.  L'Exilé  lorrain.  Le  Sommet  de  la  dté  chré- 
tienne [Ch.  Choraux) 447 

Causeries  sur  tous  les  tons  (A.  Real) 59 

HISTOIRE 

Géoi^aphle  etvoyae^e*.  Nouvelle  géographie  universelle  (£.lte- 

dus) 441 

Histoire  résumée  de  la  géographie  en  Autriche,  depuis  1850  (A. 

Becker) 149 

Petite  carte  de  France  murale  {Ehrard) 151 

Géographie  de  la  France  (A.  Magin) 527 

France  physique,  administrative,  géographique   et  économique 

(L.  Dubee) 527 

Géographie  militaire  de  l'empire  d'Allemagne  (trad.  de  £•  X.  H. 

Ruhier) 124 

Voyage  au  pôle  Nord  des  navires  la  Eansa  et  la  Germania  (G. 

GovardauU) «507 

ImMiai  (Sir  Samu£l  White  Baker),  iraà.  de  {H.  Vattemare).    .    .    .  5ii 

Voyages  dans  le  nord  de  l'Europe  (Jules  Leclercq) 482 

Dernier  voyage  du  docteur  Livingstone    (H.   Waller)^  trad.  par 

(Mme  H.  Loreau) 509 

Un  Hiver  en  Egypte  (Eugène  Poitcu) 477 

Promenades  en  Italie  (l'abbé  Bolland) 478 

Londres  (L.  Enault) 512 

L'Espagne,  splendeurs  et  misères  (P.L.Imbert) 236 

Les  Pyrénées  (le  comte  de  Perroehel) 445 

Souvenirs  du  pays  de  sainte  Thérèse  (Vabbé  F.  X,  Plasse).    •    •    .  45 

L'Annam  et  le  Cambodge  (le  A.  P.  C.  £.  BcuUlevaux) 43 

L'Afrique  équatoriale,  Gabonnais,  Pahonins,  Gallois  (le  marquis  de 

Compiégne) « 262 

La  Souanétie  libre  (B.  Bemainlle) 339 

La  Sibérie  orientale  (Octave  Sachot) * 476 

Voyages  et  découvertes  d*Outre-Mer  (Arthur  Mangin) 477 

DUstolre  universelle.  Cours  d'histoire  générale  (F.  Oger)    ...  341 
Histoire  e«^cl6»la«tlque.  Histoire  de  l'Eglise  caih«>lique  (rabbé 

L.  Jaunay) 340 

Cours  de  Religion  (le  B.  P.  de  Boylesve) 142 

Histoire  de  rÉglise  catholique  en  France  T  ***  (Mgr  loger).    .    .    .  127 
Histoire  des  persécutions  de  l'Eglise,  jusqu'à  la  On  des  Antonins 

(B.  Aube) 125 

The  Nicene  and  Apostles'  Creeds  (C.  A.  Swainson) 422 

The  Athanasian  Creed  (6.  D,  W.  Ommanney) 423 

Le  Pseudo-Synode,  connu  dans  l'histoire  sous  le  nom  de  Brigan- 
dage d'Ephèse  (Vabbé  Martin) 241 

Discours  de  notre  très-saint  Père  le  Pape  Pie  W  (le  R.  P.  de 

Franciscis) 424 

Haslolofile.  La  Vie  des  Saints  (H.  de  Briancey) 98 

Les  Saintes  du  Paradis  (Mme  de  Sougé) 98 

Vies  des  Saints  de  l'atelier 98 

Saint  Joseph.  EtuJe  hist  'rique  sur  son  culte  (Vabbé  Luoat)    .    .    •  202 
Vie  de  saint  Joseph,  d'après  Anne-Catherine  Emmeridi  (Vabbé  C. 

V.Fi^uet) 99 

Vie  de  Saint  Joseph  (le  A.  P   Bouvy) 99 


—  567  — 

Sainte  Marie-Madeleine  (l'abbé  CwlM) 529 

Saint  Antoine  le  Grand  (Ch.  Hello) 100 

Vie  de  Saint  Germain  d'Auxerre  (l'abbé  C<mitanee)f  trad.  de  (P. 

GouilUmd).    . 101 

Histoire  de  saint  Beoiard  et  de  son  siècle  (le  A.  P.  Th.  RatUbmne).    101 

SantoTomas  de  Aquino  (^ZejandroPtdal  y  Mon) 242 

Etudes  sur  les  temps  primitifs  de  l'Ordre  de  Saint-Dominique  p.  III. 

(leR.  F.  Ant.  Danzas) 244* 

Sixième  centenaire.  Le  cardinal  saint  bonaventuref  évèque  d'Albano.    101 

Histoire  du  culte  de  Sainte  Philomène  (Louts  Pe<t<) 104 

La  Vie  admirable  de  notre  glorieux  père  S.  Pierre  Célestin  .    •    .    102 

Sainte  Jeanne-Françoise  Fremyot  de  Chantai,  t.  II 426 

Déposition  de  Sainte  Chantai  pour  la  canonisation  de  Saint  François 

de  Sales 103 

La  Vierge  des  campa^nes^  ou  Vie  de  la  B.  Oringa  (Vabbé  Henry).    .    102 

Vie  de  Sainte  Catherine  de  Ricci  (le  P.  Bayonne) 102 

Vie  de  la  Bienheureuse  Marguerite-Marie  (Vabbé  Doras)    ....    103 
La  Vie  admirable  du  Bienheureux  mendiant  et  pèlerin  BenoiUJoseph 

Labre  (L.  Aubineau) 103 

Ordres  religieux.  Vie  de  la  mère  Thérèse,  fondatrice  de  la  Miséri- 
corde de  Laval  (Vabbé  Le  Segretain  du  Patû) 104 

Vie  de  la  révérende  mère  Marie-Madeleine-Gipoulon  (l'abbé  G.  Pe- 

naud) 104 

Vie  de  la  révérende  mère  Sainte-Jérème 105 

Alexis  Clerc,  mariui  jésuite  et  otage  de  la  Commune,  fusillé  à  la 

Roquette^  le  24  mai  1871  (k  R.  P.  Ch.  Daniel) 444 

Vie  intime  d'un  Frère  des  Ecoles  chrétiennes  (l'abbé  Aug.  Carion).    361 
Marie  Guyard  et  les  ursulines  au  Canada  (J.  d'Estienne)    ....     359 
Histoire    de*  hérésies.    Geschichte  der    quietistichen    Mystik 

(le  Dr  Heppe) 503 

Histoire  de  la  franc-maçonnerie,  depuis  son  origine  jusqu'aux 

temps  présents  (Findel) 242 

Histoire  ancienne.    Dictionnaire  d'archéologie   égyptienne  (P. 

Pierret) 437 

Ancient  History  from  the  Monuments  (S.  Birch;  Georges  Smith; 

and  W.  S.  W.  Vam) 237 

Histoire  ancienne  des  peuples  de  TOricnt  (G.  Maspero) 237 

Dictionnaire  pratique  de  l'antiquité  (Patrice  Chaumére).    ....    240 
Histoire  du  moyen  Age.  Le  moyen  âge  et  ses  institutions  (Oscar 

Bavard) 481 

The  Map  of  Europe  by  treaty  (Edw,  Heriski) 433 

Questions  contemporaines.  La  Révolution  (G.  «ieJBemardt).    .    256 

.  Sécurité  et  liberté  de  la  France  (G.  de  Kérigant) 59 

Lettres  d'un  rural  (le  vioomte  de  Sarcus) 257 

1871-1875.  Au  jour  le  jour  (te  f?iar9Ut5  de  JBtenowrO 258 

A  Monsieur  Tout-le-Monde.  La  Comédie  du  radicalisme  (Ch,  2Ves- 

vaux  du  Fraval) 363 

La  Question  du  drapeau. 63 

Discours  prononcés  par  Ms'  Tévêque  d'Orléans  à  l'Assemblée  na- 
tionale  254 

Tableau  résumé  des  principaux  scrutins  de  l'Assemblée  nationale 

a.  J.  IV***) 258 

La  Prusse  et  la  France  devant  l'histoire 435 

Le  Procès  d*Aroim  (E.  Figurey  etD.  Corbier),  introd.  de  (J.  Valftey).    256 
Deux  incidents  de  la  question  catholique  en  Angleterre  (Mme  A, 

Craven) 528 

La  Tentati?e  anticatbolique  en  Angleterre  (Af^r  JVardt) 528 

Les  Souvenirs  catholiques  de  la  Tour  de  Lomirfs  (Rev.  R.  Cookê)^ 

frad.  car  (Gréard) 528 

Li  Question  dynastique  en  Espagne  {Apariêi  y  Gtgiorra)  •    .    •    •      62 


—  368  — 

La  Mission  de  Charles  Vil  (Vabbé  AM  Qaveau) 258 

A  bas  don  Carlos 364 

Question  espagnole.  Don  Carlos,  roi  légitime  (H.  Lemoine  et  Victor 

Gay 259 

La  Question  d'Orient 249 

La  Serbie  et  la  crise  orientale  (£.  Collas),    .    .    .- 446 

L'Herzégovine  (£.  de  Sainte-Marie) 259 

Pie  IX  et  les  études  classiques  (Mgr  Gaume) 361 

L'Armée  et  la  mission  de  la  France  en  Afrique  (Mgr  l'arehm)éque 

d'Alger) •    ...  207 

Les  Jésuites  et  l'armée  (Alb.  de  Badh  de  Cugnae) 443 

Voltaire,  ennemi  de  Dieu,  de  la  France  et  du  peuple 363 

La  Déportation  et  l'abandon  des  morts  (Léon  Pages) 363 

Histoire  de  Prcincse.  L*Histoire  de  France  depuis  les  temps  les  plus 

reculés  jusqu'en   1789,  racontée  à  mes  petits -enfants  (Quizot),  576 

Notre  histoire  des  origines  À  i  870  (6r.  ffu6auJ0 ^^ 

Hincmar  de  Reims  (Vabbé  Vidieu) 428 

Chronique  de  Robert  de  Thorigny,  abbé  de  Mont^aint-Michel  (L. 

Deliste) 46 

Saint  Louis  et  son  temps  (ff.  Wallon) 47 

Jeanne  d'Arc  (H.  WaWon) 517 

Etude  sur  Jeanne  d'Arc  (le  comte  de  Bourbon-Lignières] 518 

Rivalité  de  François  I*' et  de  Charle«-Quint(lfti7fia() 130 

Mémoires-Journaux  de  Pierre  de  l'EstoilIe,  T.  I«',  (G.BnmetyA.Cham» 
pollion,  E.  Halphen,  P.  Lacroix,  Ch.   Réad,  Tamitey  de  Larroque, 

Ed.  Tricotel) 429 

L'Expédition  du  duc  de  Guise  à  Naples  (J.  Loiselcur  et   (r.  Bagne- 

nault  de  Puchesse) 520 

Une  nièce  de  Mazarin  (E.  de  Barthélémy) 521 

Archives  de  la  Bastille,  règne  de  Louis  XIV  (JPV*.  Raioaisson)    ...  344 
La  Dauphine  Marie- Josèphe  de  Saxe,  mère  de  Louis  XVI  [le  P.  Emile 

Bégnault) 261 

Volaire  et  Rousseau  (Gr.  Vesnoiresterres) 49 

Le  Parlement,  la  Cour  et  la  Ville  pendant  le  procès  de   Robert- 
François  Damiens  (1757),.  Georges  de  Reylli) 345 

Ursprung  undReginn  der  ttevolutions-Kriege  (L  von  Aanft6).    .     .  4!'i0 
Bibuotbèjiue  des  Mémoires  relatifs  à  l'histoire  de  France  pendant  le 

dix-huitième  siècle  (de  Lescuré) 215 

Stofflet  et  la  Vendée  (Ed.  Stofflef) 446 

Les  Débris  de  Quiberon  (fiugf.  (ie  to  Goumene) 131 

La  Chouannerie  du  Maine  et  pays  adjacents  [Vabbé  Paulouin).     .    .  135 
Archives  révolutionnaires  du  département  de  la  Creuse  (1789-1794). 

(Louis  Daval) 346 

Napoléon  P'  et  le  roi  Louis  (Félix  Bocquain) 246 

Histoire  du  second  Empire,  T.   VI  (T.  Delord) 133 

La  Guerre  de  France  1870-1871,  [Ch.  de  Mazade) 347 

Histoire  diplomatique  de  la  guerre  franco-allemande  (A/6.  Sorel)  .  347 
Histoire  du  traité  de  Francfort  et  de  la  libération  du  territoire  fran- 
çais (jr.  Valfrey) 248 

La  Guerre  au  jour  le  jour^  1870-1871  (le  baron  A.  Bu  Casse)  ...  217 

Histoire  de  la  Défense  nationale  en  France  (Vabbé  A.  Deramecourt).  128 

Versailles  pendant  l'oocupalion  (£.  Delerot) 134 

Histoire  de»  province».  De  la  réunion  de  Lyon  à  la  France 

(Pierre  Bonassieux) 3(2 

Recherches  sur  les  Etats  de  Bretagne  (A.  Du  Bouetiez  de  Kerorguen).  352 
Histoire  étrangère.  Histoire  de  l'Angleterre  depuis  la  mort  de  la 

reine  Anne  jusqu'à  nos  jours  (H.  Beynald) 61 

Le  Règne  de  Marie-Thérèse  dans  les  Pays-Ba^  autrichiens  (G.  /.  Ch. 

Piot) 50 

Dix  ans  de  l'Histoire  d'Allemagne  (Saint-Bené  Taillandier).    ...  353 


—  569  — 

Histoire  de  l'Allemagne,  depuis  la  bataille  de  Sadowa  {Eug.  Véron),  150 

Délia  vita  privata  dei  Genovesi  (L.  T.  Belgrano) 436 

Histoire  de  Tabbave  dUautecombe  ea  Savoie  {CL  Blanchard).     .     .  350 

Storia  dtsUa  RepuDlica  di  Firenze  di  Gino  Gapponi 522 

La  Mutualité  des  Slaves  depuis  les  temps  les  plus  aucieos  jusqu'au 

dix-buitiôme  siècle  (J.  Fervolf) 334 

A  narrative  of  the  récent  Evenis  in  Ton  King  {H.  Cordier).    .    .    .  356 

Les  Drapeaux  français  {le  comte  H.  de  BouUU) 135 

HtîAtoIre  nobiliaire.  Armoriai  des  cardinaux,  arcbefêques  et  évê- 

ques  contempordiDs  de  France  (ff.  Tausin) 52 

Notes  prises  aux  archives  de  l'état  civil  de  Paris,  avenue  Victoria,  4, 

brûlées  le  24  n^ai  1871  {le  comte  de  Chaslelltix) «  437 

Archéoloiple.  Le  Trésor  de  Clairvaux  du  douzième  au  dix-huitième 

siècle  {l'abbé  Charles  Lalore) 439 

Notice  sur.  un  autel  antique  dédié  à  Jupiter  (Vabbé  Barges).  .  ...  438 
I^ouveaux  mélanges  d'archéologie,  d'histoire  et  de  littérature  sur  le 

moyen  âge.  T.  II  et  IIl  {les  R.  P<  Ch.  Cahier,  A .  Martin).  ...  439 
Rapport  sur  une  mission  archéologique  en  Algérie  (Ant.  Héron  de 

Villefosse) 357 

ll;6Iaii9e«  blittorlques.  Les  Châteaux  historiques  de  la   France 

{Vabbé  Bourassé) 478 

Scritti  minori  (P.  JB^Iero) 54 

Bloeri*aplKle.  Les  grands  hommes  de  la  France  {Ed.  Gœpp  et   H.  de 

Mannouryd'Ectot) 250 

Les  grands  bienfiedteurs  de  l'humanité  {Ad.  HtMird) 444 

Le  Parnasse  médical  français  ((e  D}*  A.  CA^reau) 439 

Gloires  du  catholicisme  du  dix-neuvième  siècle  :  Mgr  Dupanloup 

{Vabbé  Dourlens) 526 

Ma  Mère  {Mgr  de  Ségur) 262 

M.  Th.  Foisset  (ff.  Beame) 445 

Joseph  Sturge 259 

Les  Hommes  de  Texil  {Charles  Hugo) 440 

Bibliographie.  Notice  sur  un  manuscrit  mérovingiens  (L.  Delisle)    .  438 

Les  Papiers  de  Noailles  de  la  bibliothèque  du  Louvre  {Louis  Paris)  •  358 

Précis  de  l'histoire  de  la  bibliothèque  du  Roi  {Alf.  Franklin)    ...  53 

Les  Archives  de  Lyoa  (L.  Niepce) 54 

Catalogue  méthodique  de  la  bibliothèque   de  la  ville   de  Nantes 

{EmiUPéhant) 56 

Catalogo  dei  codici  petrarchescbi  délie  biblioteche  B  «rberina,   chi- 

glana,  Gorsiniana,  Vallicelliano  e  Vaticana  (£,  iVarducct)  -  >'  38 
Catalogo  ra^ionato  dei  libri  de  prima  stampa  e  délie  edizioni  aldine 

e  rare  existenti  nella  bibliotheca  nazlonale  di  Palermo  (A.   Pen- 

nino) 525 

Osservazioni  suUa  quistione  dei  primato  délia  stampa  tra  Palermo 

e  Messino  (Gr.  Salvo-^ozzo) 525 

Bibliografia  Siciliana  (GF.  M.  Miar) 444 

La  Bibliothèque  des  écrivains  de  la  Compagnie  de  Jésus  et  le 

P.  Aug.  deBacker(Jl.  P.   Van   Tricht) 523 


Décsmbeb  4875.  T.  XIV,  37. 


—  570  — 


TABLE  DES  AUTEURS 


ACHABD  (A.) 15 

Amezeuil  (G.  d') 28 

Aparisi  y  GnjlÂRRO 62 

A  RBOussE  Bastide 302 

ARi'As(le  R.  P.) 210 

ARNA0(Ant.)' 260 

AavoR  (Mile  G.  d') 397 

Assolant  (Alf.) 11 

Adbé  (B.) 125 

AuBERî  (l'abbé  A.) 143 

AUBINBAU(LJ 103 

Aten  (le  duc  d') 255 

B***  (N.  S.) 145 

Babou  (H.), 149 

Badts  de  Cugnac  (Alb.  de).  .  .  443 

Badbn  (Ad.) 28 

Bagubkault  de  Puchesse  (G.)  .  520 

Baker  (Sir  S.  White.) 511 

Ballacey  (H.) 28 

Barbier  (E.) 495 

BARGte  (l'abbé) i39 

Baroeul  (H.  de) 99 

Barthélémy  (E.  de) 521 

Bataille  (Fréd.) 305 

Bayonnb  (le  P.) 102 

Bbaofort  (Guy  de) 303 

Beadne  (H.) 445 

Becker  (A.) U9 

Becquerel 225 

Belgrano  (L.  t.) 436 

Bernard  (Th.) 322 

Bernard-Derome  (Cb.)  •   .   .8,  22 

Bernardi  (G.  de) 256 

Bernovillb  (R.) 339 

BEYLiÉ(J.de) «46 

BiBNCOuRT  (le  marquis  de).  .   .  258 

BlLI^DDEL  (E.) 10 

Bai.OT(A.) 488 

BiRCH  (S.) 237 

Blanchard  (Cl.) 350 

Blancbecotte  (Mme  A.  M.)    .   .  304 

Blanchon  (J.) 214 

Blunt(J.  H.) 307 

BoisGOBBY  (F.  du) 12,  22 

BoissiBU  (A.  de) 362 

BONNARDOT(F.) 502 

BONNASSIES  (J.)  .    .......     148 

BoNNAssiBox  (Pierre; 342 

Bonnet  (le  R.  P.  de) 325 

BONSERGENT  (Alf.) 27 

Bodillé  (lecomte  L.  de).  ...  135 

BociLLEVAUx (le  R.  P.  G.  E.).   .  43 

BouRAssÉ   (l'abbé) 478 

BouRBON-LiGNi&BES  (le  comle  de).  519 

Bourdon  (Mme  M.)  ....  15,  397 


BouTRiLLER  (E.  de) 302 

BouTRy(C.) W 

BoBVY  (le  R.  P.) 99 

BowLEs(E.) 394 

BoYLEsvE  (le  R.  p.  de) l*^ 

BRADDON(MiSsE.) 22 

Breton  (J.) 301 

Brin  (l'abbé  P.  M.) 294 

Bbueyrb  (L.) **5 

Brunet(G.) *29 

BUBT  (Cb.).   . *0 

Businger  (L.  G.) ^^ 

Butler  (J.) |2 

Cacbeleu  (J.  de) **3 

Cahier  (le  R.  P.  Ch.).  .  v.   .   .   .  439 

CAHDN(Léon) 475 

Calhiat(H.). «*• 

Camauer  (Jules) 359 

Campoahor  (D.  Ramon  de).   .   .  232 

Capponi  (G.) 522 

Carion  (l'abbé  Aug.) 361 

Carle  (G.) 391 

Carle  (Mme  E.) i6 

Cabon  (E.) 253 

Cartairade  (Ferd.) 303 

Cartier  (E.) *(n 

CASATi(Ch.) 253 

Castel(A.) 483 

Cayé  (Mme  Marie-Elisabeth)  .   .  211 

Cazalès{H.) 302 

CÉciL  (Aymé) 395 

Chabat(P.) 496 

Chaignolles  (J.  de) 61 

Challamel  (Augustin) 477 

Champollion  (A.) 429 

Chandeneux  (Mme  Cl.  de)  .  .  .  18 

Chabaux  (Ch.) 447 

Chastellux  (le  comte  de)  .   .  .  137 

Chauvière  (Patrice) 240 

Cberbuuez   (V.) .14 

CHERBAU(leD'  A.) 139 

Chbvablibr  (E.) 389 

CoLiJks  (E.) 446 

Colomb  (Mme) 479 

CoLOHBiÈRE  (R.  p.  Claude  de  la)  21 1 

Combettes-Labourelib  (L.  de)63,  305 

CoMPiÈGNE  (le  marquis  de) .   .   .  262 

Constance  (l'abbé) 108 

CooKB(Rey.  R.) 528 

CoppÉE  (Fr.) 17,  302 

CORBIER  (D.) 256 

Cordier  (H.) 350 

CoRNOLDi  (le  P.  J.  M.) 298 

CoRRioL  (l'abbé) 290 

CoRTE  (Petri-Ant.) 404 


CouuN  (Fabbé)   ....... 

Cbaven  (M»»  A  )....'..  . 

Daclîn  (E.) 

Daniel  (le  R.  P.  Gh.) 

Danzas  (le  R.  P.  Ant.)  .... 

Daras  (Fabbé) 

Delaire  (A.) 

Delerot  (E.) 

Delisle(L.) 46, 

Delitzsch  (le  D'  Fr.) 

Deloixcourt  (J.) 

Delord  (T.) 

D  EU  ange  (l'abbé) 

Dehors  (Fabbé  F.) 

DéNoix  DES  Vergnes  (Mme  Fanny) 
Deramecourt  (l'abbé  A.)-  •   .   • 

Déroulède  (Paul) .  \ 

Descieux  (le  D') 

Des  Gloizeaux. 

Desuarets  (N.) 

Desnoiresterres  (G.) 

Deulin  (Ch.) 

Dezeimeris  (R.) 

DiDON(le  P.) 

DiDOT  (Amb.  F.) 

DoLLFcs  (Gust.) 

Doryille  (L.) 

Dodrlens  (l'abbé) 

Draper  (J.  W.) 

Droz  (E.) 

DOBARRY(A.) 

DUBEC  (L.) 

Dubois  (E.) 

DuBOST  (Ant.) 

Du  BouETiEz  deKerorguen  (A.). 
DuGasse  (le  baron  A.).   .   .   . 

DUCHEMIN  (L.  A.) 

Dupour  (l'abbé  V.) 

Dumas  (A.)  père 

DUMESML  (H.) 

Dupont  (A.  H.  H.) 

DuvAL  (Louis) 

Eginharo 

Ebrard  

Ellero  (P.) 

Enault  (L.)  , 

Erkdia  (Luigi  d') 

Ernst  (Mme  G.)  ......   . 

EsTBAUPES  (Melle  G.  d')  .   .   .   . 

ESTIBNNE   (J.   d*) 

Fabre(E.) 

Fabre  (F.) 

Fath  (Georges) 

Favin(E.) 

Favue  (Jules) 

Fertiault  (F.) 

Féval(P.) 

Findei 

Flaubert  (G.) 


—  571  — 

529  Fleuriot  (Mlle  Z.).    396,  479,  484 

528     Flourens     (E.) 215 

27     FoB  (Diniel  de) 479 

444      FONSSAGRITES  (J.  B.) 111 

244  FoîrrENAY   (Harold    de)  .     .     .  447 

103     FoN VIELLE  (W.  de) 149 

407  Fouet  (l'abbé  C.  F.).  ...  99 

134   Fourcade  (Gh.) 494 

438  FRANcisas  (le  R.  P.  de)  .  .  .  424 

501   Franklin  (Alf.) 53 

57  Franqueville  (Gh.  de).  .  .  .  254 

133   Franz  (R.) 28 

304  Fbeynet  (l'abbé) 144 

199   Fromont  (Th.) 300 

304  Gagne  (Mme) 17 

128  Galeubebt  (le  comte  de).    .     .  2fi6 

305  Gabcin  de  Tasst 233 

228     Gaudillot    (R.) 223 

329      Gaunb  (Mgr) 361 

62     Gautier    (Léon) 336. 

49  Gaveau  (l'abbé  Abel).     ...  258 

24     GAY(le    R.   P.) 398 

328      Gay   (Victor) 259 

315     Gérando  (G.  de) 58 

40     GiDEL  (Ch.) 37 

227  GiRARDiN   J.) 480,  481 

18     Glasson  (E.) 386 

526  GoEPP    (Ed.) 250 

317  GoNDRY  DU  Jardinet    ....  398 

24  Goubarefp  (Démétrius)    .     .     .  253 

393      GouFFÉ    (J.) 448 

527  GouiLLouD    (le  P.) 101 

391  GouRAUD   (Mlle  Julie).     ...  483 

•il9      GOURDAULT    (G.) 507 

352      GouRDON  (J.) 494 

247  Gournbrie  (Eng.  de  la).    .    .  131 

228  Grand  (l'abbé  J.) 200 

113     Grâard 529 

447      Gbenville-Murray 22 

229  GucHET(J.) 360 

293     Guilbert  (Mgr) 486 

346     GuizoT 516 

145      HALLBR(Ch.  L.  de) 218 

151      Halphen  (E.) 429 

51      Haulleville     (de) 387 

512   HAUs(Ed.) 217 

526   Havard  (Oscar) 481 

392  Bélène  (Maxime) 483 

18     Hrlix)    (Ch.) 100 

259     Henneguy  (Félix) 305 

389     Henry  (l'abbé) 102 

5tO     HFJ>PK(leDr) 513 

476      Héricault  (Gh  d') 12 

303  Héron  DE  Vill&fosse  (Ant).   .   .  357 

262      Hertslet  (Edw) 433 

27   Herz£n(A.) 406 

21   Heylli  (G.  dO 345 

342   Hoefer  (Ferd.) 412 

6  Hohbeeg  (Th.) 58 


HUARD  (Ad.) 

HUBAULT  (G.) 

Hdgo  (Charles) 

Htgin-Forcy 

Imbbrt  (P.  L.) 

Jager  (Mgr) 

Janbt  (Paul) 

Jadnay  (l'abbé  L.) 

Jrnkins  (M"*)    . 

JoLT  (l'abbé) 

Joordan  (Â.).   . 

JOURDANET  (D.) 

Jdbinal  (A.) 

KÂEiGAirr  (G.  de) 

Rrafft-Bocaille  (Mme).   .   .   . 
Lacombe  (le  R.  P.  Alb.)  .... 

Lacroix  (P.) 

La  Grange  (le  marquis  de).  .   . 

Lagrené  (H.  de) 

Lalohe  (rabbé  Ch.) 

Lamothb  (A.  de) 

La  Mothe-le-Vayer 

Lastetrie  (Ferdinand  de^  .   .   . 

Latour  (le  R.  P.) 

Laurent  (A.) 

Lavkleyb  (E.  de) 

Leclercq  (Jules) 

Lefebvre  (le  R.  P,  A.)  .   .    .   . 

Lefèvrb  (A.) 

Lefort  (Jean) 

LSGOUVÉ  (E.) 

Lemoine  (H.) 

Léodzon-Lb-Duc 

LEpmi  (Âlb.) 

Le  Play  (F.) 256, 

Lescore  (de) 

Le  Segretain  du  Patis  (Pabbé). 

Lessius 

Letourneau  (D'  Ch:)  ..... 

Lbvallois  (J.) 

Le  Vavasseur  (G.) 

Levoisin  (J.) 

Liberatore  (le  R.  P.  M.).  295, 

297. 
LiGORi  (S.  Alph.  M.  de)  .   .   .   . 

LlSEUX  (J.) 

Loiseleur  (J.) 

LoREAU  (Mme  H.) 

Louche  (l'abbé  J.)  .....   . 

LuDOHiRSKi  (le  prince  J.).  .   .   . 

LucoT  (l'abbé) 

Mach  (le  R.  P.  J.) 

Mackau   (Mme  la  baronne  de) . 

Madden  (J.  P.  A.) 

Madeleine  (H.  de  la) 

Magin  (A.) 

Maleteste  (l'abbé  Félix).   .  .   . 

Mangin  (Arthur) 

annoury  d'Ectot  (H.  de)  .   .   . 


—  572  — 

444  Marcel  (Et.).   ...     18,    395,  396 

525  Maréchal  (Mlle  M.).   .   .    397,  484 

HO  Mabgerie(A.  de) 32 

58  Margerie  (Eug.  de) 399 

236  Marmier  (X  ) 25,  36 

127  Martin  (l'abbé). 241 

324  Martin  (le  R.  P.  A.i 439 

340  Martinet  (l'abbé) 194 

19  Maspero(G.) 237 

204  Mâssol 387 

385  Matthews  (Washington).   .    .   .  333 

491  Macdsley  (H.) 411 

420  Maure  (l'abbé  Sylv.) 297 

59  Maynard  (l'abbé  U.) 505 

16  Mazade  (Ch.  de) 147,  347 

333  Méchin  (l'abbé  F.) 197 

429  Meignan  (Mgr) 252 

119  Menard  (René) 500 

415  Miar(G.  m.) 141 

139  MlCHELET  (J.) *    .    .  474 

476  MiGNET 130 

147  MoiGNo  (l'abbé) 359 

482  MoiTESSiER  (A.) 483 

143  MoNFAT  (le  P.  A.) 442 

35  MoNTROui  (de) 252 

319  Morandière  (R.) 415 

482  MoREL  (T.). 392 

442  Mûris  (Rev.  R.) 313 

504  MuRRAY  (J.  A.  H) 308 

221  N***  (L.  J.) 268 

260  Nardi  (SLgr) 528 

259  Narducci  (E.) 38 

19  Narrey  (Ch.), 2b 

291  NiEPCE  (L.) 54 

407  Oger  (F.) 341 

245  Ommanney  (G.  D.  W.) 423 

104  OcDiN  (L.) 391 

106  Pages  (Léon).  .   .    : 363 

406  Pannier  (E.) 216 

148  Paris  (Louis) 358 

301  Pasqualigo  (C.) 38 

481  Paté  (L.) 300 

296,  Paulouin  (l'abbé) 132 

Payen 388 

400  Péhant  (Emile).  ...:..  56,  305 

147  Penaud  (l'abbé  G.) 104 

520  Pennino  (A.) .*  .  525 

b09  Périgaud  (E.) 303 

197  Perrocbel  (le  comte  de).  .   .   .  445 

27  Pervolp  [L). 354 

202  Petit  (Louis) 104 

209  Petitalot  (le  R.  P.) 213 

1364  Petitot  (le  R.  P.  E.) 328 

360  Petroz  (P.) 499 

26  PiDAL  Y   Mon  (Alejandro)  ...  242 

527  Pierret  (P.) 437 

304  Pierron  (Alex.) 114 

477  Pigurey  (E.) 256 

250  PioT  (G.  J.  Ch.) 80 


PlSANl  (E.) 

Pitou  (Ch.) 

Place  (l'abbé  Ch.) 

Pla^e  (rabbé  F.  X.)  .   .   .   .   . 

Poitou  (Eugène) 

PoTTON  (le  R.  P.  Fr.M.  A.).  •   . 

QniNTON  (A.) 

Radau  (a.) 

Rambosson  (J.) 

Ramière  (le  R.  P.) 

Ranke  (L.  von) 

Ratisbonne  (le  R.  P.  Th.) .  101 

Ravaisson  (Fr.) 

Read  (Ch.) 

RéAL(A.) 

Reclus  (E.) 

RssB  (le  P.  Georg) 

Regnault  (leP.  Ë.).   ...  63, 

RÉMONT  (C.) 

Renabd  (Am.) 

Rendu  (Victor) 

Renoux  l'abbé  G.) 

Révoil  (B.  h.) 

Retnald  (H.) 

RiANCEY  (H.  de) 

Ricard  (l'abljé  Ant.) 

Riencourt  (le  comte  de).  .   .   . 

Rjpebt(E.) 

RocHèRE  (M™*  la  comtesse  de  La) 

RocQUAiN  ^élix) 

Rolund  (l'abbé) 

Romain  (G.) .  . 

RONDEUET  (Ant.)  .    .  * 

RosA  (don  F.) 

Roux  (A.) 

Roux  (L.) 

RUBifeRE  (E.  X.  H.) 

Sacbot  (Octave) 

Saint-Amand  (Imbert  de)  .   .   . 

Sainte-Marie  (E.  de) 

Saint-Renâ  Taillandier.  .   .  . 

Salles  (L.) 

Salvo-Cozzo  (G.) 

Sancbezde  TocA  (J,) 

Sansevebino  G.) 

Sarcus  (le  vicomte  de)  ...   . 

SCHELBB  (Aug.) 

ScHOUPPE  (le  R.  P.  J.  X.).  495, 

Sbcchi  (le  P.) 

Ségalas  (Anals) 


—  573  — 

329  SéGUR  (Mgr  de) 262 

303  SeRVAN(F.  de) 397 

¥)i  SiEYE  (V.) 390 

45  SlGNOBIELLO  (N.) 290 

.477  SKEAT(Rev.  W.  A.) 308 

314  Smee  (A.) 495 

8  Smith  (Georges) 237 

483  SoREL(Alb.) 347 

109  SouGÉ  (Mme  de) 98 

528  Steeg  (J.) 23 

430  Stewabt  (R.) 410 

206  Stofflet  (Ed.) 446 

344  Stolz  (Mme  de) 484 

429  SwAiNsoN  (C.  A.) 422 

59  Tamizet  de  Larboque.  ....  429. 

421  Tausin  (H.)) 58 

298  Teissonnier  (l'abbé) 29 

261  TéRAM(A.) 13 

61  Testa  (le  Prof.) 404 

305  Thierry  (G.  A.) 9 

475  Tissandier  (J.B.) 144 

41  TissoT  (J.) 318 

447  Tresvaux  du  Fraval  (Cb.).   .   .  363 

61  TRicHT(leR.  P.  Van) 523 

98  Tricotel  (Ed.) 429 

198  TRONCY(rabbéJ.) 402 

34  UjFALVY(Ch.  de) 333 

391  Vainberg(S.) 319 

398  Valbeau  (E.  de) 18 

246  Valfret  (J.) 248,  256 

478  Vandel  (le  p.) 143 

108  Yattemare  (H.) 511 

60  Vaux  (W.  S.  W.) 237 

403  Verne  (J.) 24 

118  VÉRON(Eug.) 150 

31  Vidieu  (l'abbé) 428 

124  Villedieu  (Eug.) 338 

476  ViLLEFRANCHE  (J.  M.) 261 

362  Vincent  (C.) 226 

259  Vi0LEAu(H.) 57 

353  Vladesco  (Alexandre) 489 

305  W**'  (E.) 19 

525  Walckenabb  (le  baron  Ch.).  .  303 

327  Waller(H) 509 

290  Wallon  (H.) 47 

257  Weddtngen  (Fabbé  Van).  ...  490 

230  Wbyte-Melvillb  (C.  J.).  .  .  .  8 

399  WuRTz(A.) 409 

331  ZoLA(E) 13 

15 


—  ?74  — 


TABLE  DES  VARIETES 


Le  Moyen   âge   et  la  Renaissance,  à 

Sropos  d'une  publication  récente 
e  M.  Grayer,  par  M.  Adolphe 
d'Avril,  64. 

Notes  inédites  sur  Du  Gange,  par 
M.  Ph.  Tamizey  de  Larroque,  151. 

Bibliographie  raisonnée  de  l'Acadé- 
mie française,  par  M.  René  Kervi- 
1er,  154. 

.Le  Gongrès  international  de  géogra- 
phie, par  M.  A.  de  Marsy,  263. 


L'Orient  latin  à  l'Exposition  de  géo- 
graphie, par  M.  Moise  Schwab,  267. 

La  Société  géographique  de  Russie 
et  ses  travaux,  par  le  R.  P.  J.  Mar- 
tinov,  364,  530. 

Les  Publications  de  la  CcoTiden  So- 
ckiy,  par  M.  G.  Masson,  448. 

Les  Publications   révolutionnaires  à 


par 
456. 


TABLE  DE  LA  CHRONIQUE 


NÉCROLOGIE.  * —  Andersen  (H.  Ghr.), 
272.  —  AvENEL  (D.  L.  M.),  370.  — 
Barye  (A.  L.),  75.  —  Beaumont- 
Vasst  (le  vicomte  E.  F.  de),  163.— 
Belval  (L.  Gh.,  marquis  de),    74. 

—  Blanquet  (AJb.),  164. —  Bonnet 
(J.  F.  E.),  68.  —  Bourgogne,  74.— 
Breton  (F.  P.  H.  E.),  67.  —  Bru- 
net  DE  Presle  (Ch.  M.  Wl.),  371.— 
Gallon  (J.  P.),  74.  —  Carpeaux 
(J.  B.),  458.  —  CoLLOMB  (Ed.),  74. 
—Constant  (l'abbé  Alph.  L.),  69.— 

GOQUEREL    (A.  J.),     163.    —    GORNU 

(M»«),  70.  —  Cousseau  (Mgr),  541. 

—  Dechamps  (Ad.),  160.  —  Démar- 
quât (le  Dr  J.  N.),  74.  —  Deshayes 
(G.  P.),  74.  —  Dubois  (l'abbé  L.), 
71.  —Etienne,  272.  —  Geay  (J.  L., 
dit  Ph.  Geay-Besse),  460.  —  Gou- 
LHOT  DE  Saint-Germain  (A.  F.  de), 
69.  —  Grasset  (A.  J.  B.  E.),   272. 

—  Groza  (Alex.),  543.  —  Guipon 
(J.  J.),  70.  —  Jeancard  (Mgr  J.), 
162.  —  Kremer  (J.),  72.  —  La- 
brouste (P.  F.  H.),  69.  —  Lafond 
(E.  Ed.,  comte),  162.  —  Lesieur 
(A.  H.),  71.  —  LiBELT  (Ch.),  73.  — 
LoRAiN  (P.),  459.  —  BIallet  (Ch. 
A.),  68.  —  Marbbau  (J.-B.-F.),  459. 

—  Maroteau  (G.),  71.  —  Mathieu 
(S.  Em.  J.  M,  A.),  160.  —  Migne 
(l'abbé  J.-P.),  459.—  Moreau  (l'abbé 
J.  Ch.),  162.  —  Orsini  (l'abbé  M.), 
161.—  Paramelle  (l'abbé),  273.  — 
Pannier  (Léop.),  543.  —  Pas  (J. 
A.  Aug.),  458.  —  Pradier  (G.),  73. 


Preux  (Mgr  P.  J.  de),  162.  —  Proux 
(F.  L.  A  Le),  273.  —  Rathery  (E. 
J.  B.),  542. — Rauscher  (le  card.), 
544.  —  Rémusat  ^Ch.  F.  M  ,  comte 
de),  67.  —  RosENTHAL  (Le  Dr  D. 
Aug.),  68.  — Roussel  (Ad.),  70.  — 
Sartiges  d'Angles  (Icbaron  J.  de), 

69.  —  Ségalas  (P.  S.),  459.  — 
Thirlwall  (Connop.),  372.  —  Tou- 
R0UDE  (Alf.),  72.  —  Tross  (Gh.  Th. 
Edw.),  273.   —  ViLLOT  (M.  J.  F.), 

70.  —  Wheatstone  (Sir  Gh.),  458. 
—  WiLKONSKA  (M»«  p.) ,  73.  — 
WoLoczENSKi  (Mgr  M.  G.),  72, 459. 

Institut,  75,  164,  274,  460,  544. 

Faculté  des  lettres  de  Paris,  75,  166. 

Faculté  de  médecine,  75. 

Les  Universités  catholiques,  465. 

Les  Universités  russes,  549. 

Bibliothèque  nationale,  462. 

Musée  du  Louvre,  373. 

Ecole  d'Athènes,  462. 

Académie  de  la  religion  catholique, 
462. 

Congrès,  167,  275,  372,  463. 

Sociétés  savantes,  76,  170,  181,  275, 
279,  282,  283,  374,  546. 

Concours  et  prix,  166,275,  463,545. 

Lectures  faites  aux  Académies,  75, 
170,  277,  374,  464,  546. 

Collections  et  Bibliothèques  :  Bi- 
bliothèques scolaires.  279,  —  Etat 
des  Bibliothèques  de  Paris,  378. — 
Catalogue  des  monnaies  orien- 
tales du  British  Muséum  465. 

Revues,  Livres  Journaux,  27,  88, 89, 


—  575  — 


«84,  283,  378,  3«1,  469,  380.  — 
L'Association  catholique,  551.  — 
Annales  de  la  Normandie,  552. 
Mélanges  scientifiques  r  Des  mesures 
en  usage  au  moyen  âge,  172.  -=- 
De  la  vulgarisation  des  connais- 
sances géographiques ,  178.  — 
Notre  Géographie  provinciale,  279. 

—  L'astronomie  grec(^ue  et  ro- 
maine, 375.  —  Vulgarisation  des 
cartes  géographiques,  548. 

Mélanges  archéologiques  et  artisti- 
ques :  La  Gravure  française  au  dix- 
huitième  siècle,  79.  —  Collection 
de  pierres  gravées,  80.  —  Prix  des  * 
estampes  rares,  81.  —  L'Email- 
lerie  chez  les  Gaulois,  176.  —  Un 
coffret  du  douzième  siècle  décou- 
vert à  la  bibliothèque  de  Vannes, 
277.  —  La  vraie  croix  de  Baugé, 
281.  —  Le  Groupe  de  marbre  de 
Téglise  Notre-Dame,  à  Bruges,  280. 

—  Du  rôle  décoratif  de  la  pein- 
ture en  mosaïque,  377. 

Enseignement  :  Un  Recueil  de  bro- 
chures d'éducation  populaire,  179. 

—  VEductUûmy  journal  pédago- 
gique, 179.  —  Catalogue  de  livres 
anciens  et  modernes  de  la  librai- 
rie Aug.  Fontaine,  87. — Catalogue 
de  livres  par  ordre  alphabétique, 
88.  —  Les  Frères  des  Ecoles  chré- 
tiennes au  Congrès  de  géographie, 
277.  —  Les  Elèves  des  Frères, 
464. 

Mélanges  historiques  :  Quelques  dis- 
tractions du  dictionnaire  encyclo- 
pédique de  la  théoloffie  catho- 
lique, 76.  —  Diodore  ae  Sicile  et 
le  passage  de  la  mer  Rouge  par  les 
Hénreux.  78.  —  Etats  aïe  service 
de  la  maison  royale  de  Bourbon, 
180.  —  Les  Sciences  préhistoriques 
à  l'Institut,  181.  —  La  Nouvelle- 
Guinée  et  le  capitaine  Lawson,  278. 

—  Les  Antiquités  et  Chroniques  de 
la  ville  de  Dieppe.  281.  — Le  Co- 
losse de  Rhodes  et  M.  Laboulaye, 

550.  '^  Le  DU  des  rues  de  Paris, 

551,  — •  Les  Ordres  de  chevalerie, 


552.  —  Vieux  papiers  et  vieux  sou- 
venirs, 553. 
Mélanges  philologiques  et  litté- 
raires :  L'impromptu  de  l'hôtel  de 
Condé,  85.  —  La  production  litté- 
raire en  Allemagne  en  187^,  86. — 
Impression  du  Glossaire  de  Sainte- 
Palaye,  171.  —  Cours  historique 
de  langue  française,  172.  —  Les 
Clubs  philologi^es  en  Italie,  173. 

—  Fêtes  littéraires  de  Montpellier, 
175.  — La  langue  universelle,  179. 

—  Le  Glossaire  de  Le  Clerc  de 
Douy,  280.  —  Production  litté- 
raire en  Russie,  380. 

Mélanges  bibliographiques  :  L'His- 
toire de  César  de  Napoléon  RI  et 
M.  Pion,  177.  —  Un  Manuscrit  hé- 
breu de  916-917,  376.  —  Une  Im- 
primerie à  Boulak,  377.  —  Les  Ex- 
îibris,  466.  —  Une  bibliographie 
historique  de  la  Bretagne,  549.  — 
Catalogue  Bory,  552. 

Notes  diverses  :  Les  Français  à  l'é- 
tranger, 174.  — >  Le  Sint  ui  sunt  aut 
non  sint,  180.  —  Les  Journalistes 
et  l'Exposition  de  géographie,  183. 

—  La  Revue  des  Deux-Mcmdes  et  la 
statue  de  Memnon,  183.  —  Hono- 
raires payés  à  divers  auteurs,  282. 

—  Une  brochure  sur  les  Etats- 
Unis,  376.  —  A  propos  d'un  ou- 
vrage sur  la  Chouannerie  du  Maine 
et  des  pays  adjacents,  468.  —  Ta- 
bles   des  Bollandistes,  469.  —  Le 

'  jour  des  morts  en  Sicile,  550. 
Renseignements  divers: Abc  (Un por- 
trait de  Jeanne  d'),  176.  —  Cha- 
teaubriand (Inauguration  de  sa 
statue),  373.  —  La  Bruyère  (Une 
lettre  inédite  de),  380.  —  Manin 
(Une  biographie  die),  174.  —  Meis- 
soNNiER  (Un  petit  anachronisme 
de  M.),  378.  —  Santerre  (Les 
ordres  du  jour  de),  281.  —  Les 
Archives  privées  d'un  habitant  de 
Pompéi,  167.  —  Publications  nou- 
veUes.  92,  190,  287,  382,  471,  557. 

—  Pnolications  annoncées,  472.  — 
Ventes,  80,  82,  554. 


TABLE   DES    QUESTIONS    ET    REPONSES. 


Après  moi  le  déluge,  288. 
Bannières  des  corporations  d'arts  et 

métiers,  288,  384. 
Barbinais  (Parçon  de  la),    191,  288. 


Calendrier  équinoxial,  191. 
Cassien,  288. 

Chabannes  et  Charles  VH,  93. 
Chance  lier  d'Aguesseau,  552.